Exposé écrit du Royaume d'Arabie Saoudite [traduction]

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EXPOSE ECRIT DU ROYAUME D’ARABIE SAOUDITE

Le 30 janvier 2004

[Traduction]

I. INTRODUCTION ET RESUME

1. Le présent exposé écrit est déposé conformé ment à l’ordonnance de la Cour en date du
19décembre2003. Dans cette ordonnance, la Cour a autorisé le dépôt d’exposés écrits visant à
fournir des informations sur la question que l’Assemblée générale de l’Organisation des
1
Nations Unies a posée à la Cour dans sa requête pour avis consultatif du 8 décembre 2003 . Cette
question est la suivante :

«Quelles sont en droit les conséquences de l’édification du mur qu’Israël,
puissance occupante, est en train de construire dans le Territoire palestinien occupé, y
compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem-Est, selon ce qui est exposé dans

le rapport du Secrétaire général, compte tenu des règles et des principes de droit
international, notamment la quatrième convention de Genève de1949, et les
résolutions consacrées à la question par le Conseil de sécurité et l’Assemblée

générale ?»

2. Le Royaume d’Arabie saoudite estime que l’occupation par Israël du Territoire palestinien

occupé y compris l’intérieur de Jérusalem et son pourtour est illic ite, que les colonies israéliennes
situées en territoire palestinien sont illicites, que le mur de séparation destiné à permettre
l’annexion de facto du territoire sur lequel ces colonies sont situées et des terres contiguës reliant

ces colonies au territoire d’Israël est illicite et que les mesures prises par la puissance occupante
pour réaliser cette annexion illicite produisent de graves conséquences sur le plan humanitaire,
qu’elles sont par conséquent illicites et constituent de graves violations du droit humanitaire défini
2
par la quatrième convention de Genève de 1949 .

3. En outre, le Royaume d’Arabie saoudite estime également que le mur de séparation n’est

pas une réponse nécessaire et proportionnelle au terrorisme, qu’il représente manifestement un rejet
de la feuille de route ainsi que des autres actions menées pour trouver une solution pacifique faisant
coexister deux Etats en harmonie et que, par consé quent, il constitue une violation des résolutions
os
du Conseil de sécurité des Nations Unies n 1515 (2003), 1397 (2002), 338 (1973) et 242 (1967) et
engage la responsabilité internationale de la puissance occupante.

4. Dans cet esprit, le Royaume d’Arabie saoudite estime qu’en réponse à la question posée
par l’Assemblée générale la Cour doit déclarer que le mur de séparation est illicite et que, par suite,

les conséquences juridiques de son édification sont notamment les suivantes :

1Résolution A/RES/ES-10/14 (2003) de l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies.

2Quatrième convention de Genève relative à la pr otection des personnes civiles en temps de guerre,
Nations Unies, Recueil des traités , vol7.5, p2.87, entrée en vigueu r le 2octob1950 (ci-après la
«quatrième convention de Genève de 1949»). - 2 -

i) le mur de séparation étant illicite, il fautmettre fin à son édification et détruire ce qui

existe;

ii) le mur de séparation étant illicite, les Pal estiniens dont la propriété a été confisquée ou qui
ont souffert d’autres dommages d’ordre économique ont droit à la restitution de leurs biens

et droit à réparation pour les dommages subis;

iii) le mur de séparation et les mesures y relatives prises par la puissance occupante qui
empiètent sur les droits de la population civ ile protégée de Palestine constituent de graves

violations du droit humanitaire;

iv) le mur de séparation est un acte de mauva ise foi émanant d’une partie à une négociation

mandatée par des résolutions du Conseil de sécurité des NationsUnies, acte qui voue à
l’échec les objectifs de ces résolutions et qui, par conséquent, ne doit pas exercer la
moindre influence sur lesdites négociations ni sur la relation juridique entre ces parties;

v) le mur de séparation ne décharge pas la puissance occupante des obligations lui incombant
au titre de la quatrième convention de Genève de 1949 envers la population civile protégée
de Palestine sur tout le Territoire palestinie n occupé, y compris à l’intérieur de Jérusalem

et sur son pourtour; et

vi)le mur de séparation vise à empêcher le peuple palestinien d’exercer son droit à
l’autodétermination et constitue par conséque nt une violation grave, par la puissance

occupante, d’une obligation incombant à cette dernière au titre d’une norme impérative de
droit international général, laquelle impose à tous les Etats de coopérer pour faire cesser la
violation, de ne pas reconnaître de caractère lic ite à la situation ainsi créée et de ne pas

accorder d’aide à la puissance occupante à cet égard.

II. LA COUR EST COMPETENTE POUR RENDRE UN AVIS CONSULTATIF COMME

L ’A DEMANDE L ’A SSEMBLEE GENERALE ET IL N EXISTE PAS DE MOTIF
DECISIF LA CONTRAIGNANT DE S ABSTENIR

3
5. Dans l’affaire relative aux Armes nucléaires il a été présenté un certain nombre
d’arguments sur les raisons pour lesquelles la Cour ne devait pas rendre d’ avis consultatif dans
cette affaire. La Cour a analysé ces arguments aux paragraphes 10 à 19 de son avis consultatif,
estimé qu’elle était compétente pour rendre un avis sur la question posée par l’Assemblée générale

et qu’il n’existait pas de raisons décisives l’obligeant à s’abstenir. Il en va de même en l’espèce.

6. En l’espèce, la Cour a compétence pour rendre l’avis demandé. L’organe qui sollicite cet
avis est l’Assemblée générale, laquelle est habilitée pa r le paragraphe 1 de l’article 96 de la Charte
des NationsUnies, à demander «un avis consulta tif sur toute question juridique». La question
posée est manifestement juridique puisque la Cour est priée de dire quelles sont à son avis les

conséquences en droit d’actions menées par une puissance occupante compte tenu des principes et
des règles de droit international, notamment de la quatrième convention de Genève de 1949, et des
résolutions consacrées à la question par le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale.

3Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1996 (ci-après l’«affaire

relative aux Armes nucléaires»). - 3 -

7. En outre, il n’y a pas de raison décisive pour que la Cour ne rende pas l’avis demandé. La
question est claire, les sources du droit sont clairement définies et les faits, tels qu’ils sont exposés
4
dans le rapport du Secrétaire gé néral en date du 24novembre2003 , le sont également. Par
conséquent, le mandat n’est ni imprécis ni abstra it. De plus, alors que certains vont peut-être
soutenir que rendre un avis sur cette question ris que d’être préjudiciable aux négociations, la

majorité d’Etats qui ont adopté la résolution ont l’opinion opposée. La Cour s’est trouvée face à
une thèse similaire dans l’affaire relative aux Armes nucléaires mais n’a pas estimé devoir
considérer qu’il y avait là une raison décisive l’obligeant à l’abstention. Il en va de même en

l’espèce.

8. Ainsi que la Cour l’a fait ob server dans l’affaire relative aux Armes nucléaires, «[a]ucun
refus, fondé sur le pouvoir discrétionnaire de la Cour, de donner suite à une demande d’avis
consultatif n’a été enregistré dans l’histoire de la présente Cour…» 5. L’affaire du Statut de la
6
Carélie orientale , qui constitue la seule instance dans la quelle la Cour permanente de Justice
internationale a refusé d’accéder à une demande d’avis consultatif, n’est pas pertinente en l’espèce.
En effet, dans cette affaire-là, la Cour permanente a refusé de rendre un avis consultatif parce qu’il

lui était demandé de résoudre une question de fait qui constituait l’essentiel d’un différend
opposant en réalité deux Etats dont l’un n’était pas membre de la Société des Nations et refusait de
participer à la procédure devant la Cour . La présente situation est toute autre. Les faits sont clairs

et la demande vise non à trancher un différend factuel opposant deux Etats, mais à recevoir un avis
juridique susceptible de guider les NationsUn ies. Les Membres de l’Organisation des

Nations Unies sont liés par l’article 96 de la Ch arte qui habilite l’Assemblée générale à demander
un avis consultatif sur toute question juridique.

III. L E MUR DE SEPARATION EST ILLICITE

A. L’occupation du Territoire palestinien occupé, y compris l’intérieur de Jérusalem et son
pourtour, résulte d’un emploi illicite de la force et est par conséquent illicite

9. En1947 l’Organisation des NationsUnies a proposé de partager la Palestine, alors sous
mandat, en deuxEtats, un Etat arabe et un Etat juif , la ville de Jérusalem de vant être placée sous
8
régime international . Avant que le plan de partage ait pu être mis à exécution, Israël s’est
proclamé Etat d’Israël et s’est agrandi pour o ccuper une grande partie du territoire qu’il était
projeté d’intégrer à l’Etat arabe palestinien ainsi qu’une grande partie de Jérusalem. Il y eut donc

la guerre. En1949, un armistice a été déclaré et une ligne a été tracée, appelée la Ligne verte,
séparant Israël du territoire palestinien. La Ligne verte était bien moins favorable au territoire

palestinien que ce qui avait été prévu par l’Organisation des Nations Unies en 1947.

4 Rapport du Secrétaire général des Nations Unies établi en application de la résolution ES-10/13 de l’Assemblée
générale, NationsUnies, doc.A/ES- 10/248, le 24novembre2003 (ci-après le «rapport du Secrétaire général du
24 novembre 2003»).

5 Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1996, p. 235, par. 14.
6 o
C.P.J.I série B n 5, 1923.
7 Ibid., p. 27-29.

8 Résolution 181 (II) (1947) de l’Assemblée générale. - 4 -

10. En 1967, Israël a pris l’initiative d’une guerre et est devenu la puissance occupante sur ce
qui est maintenant appelé le Territoire palestinien occupé, y compris l’intérieur de Jérusalem et son
pourtour.

11. L’ouverture des hostilités par Israël en1967 n’ était pas justifiée en droit et violait le

paragraphe 4 de l’article 2 de la Charte des Nations Unies. Is raël a occupé le Territoire palestinien
en ayant recours à la force de manière illicite. En outre, depuis lors, la puissance occupante
s’abstient d’assumer les responsabilit és qui lui incombaient au lendemain de sa victoire, et elle ne
respecte notamment pas, sur le territoire qu’elle occupe, les obligations qu’impose le droit

international humanitaire en ce qui concerne la population civile palestinienne protégée. Depuis
trente-septans elle occupe le Territoire palestin ien, ne cessant de confisquer des biens privés et
d’imposer des politiques soumettant à de dures épreuves économiques et sociales la population

civile palestinienne protégée, en violation manifeste du droit international.

B. Les colonies israéliennes implantées sur le Territoire palestinien occupé y compris à
l’intérieur de Jérusalem et sur son pourtour sont illicites

12. Après avoir occupé militairement des terr es palestiniennes en1967, Israël a mis en
oeuvre un programme d’incitation, de soutien et de protection des colonies israéliennes sur le
Territoire palestinien occupé, y compris à l’ intérieur de Jérusalem et sur son pourtour . A chaque
étape de ce programme, des terres palestiniennes ont été confisquées, des ressources palestiniennes

ont été détruites. A chacune de ces étapes, la puissance occupante a violé les responsabilités lui
incombant au titre de la quatrième convention de Genève de 1949, puisqu’à chaque étape, il a été
porté atteinte aux droits de la population civile protégée de Pal estine et qu’il y eut finalement
10
annexion de fait de vastes pans de territoire .

13. Les griefs que nourrit la population pal estinienne contre la puissance occupante sont
nombreux, mais il ne doit faire aucun doute pour quiconque que ce programme d’incitation, de
soutien et de protection des colonies israéliennes sur le Territoire palestinien occupé, y compris à

l’intérieur de Jérusalem et sur son pourtour, ex écuté délibérément par ladite puissance est l’un des
tout premiers griefs.

14. La communauté internationale l’a reconnu à maintes reprises. Le Conseil de sécurité a
dit des colonies israéliennes qu’elles étaient illic ites et a considéré qu’elles constituaient une
violation flagrante de la quatrième convention de Genève de 1949 et que les mesures prises par la

puissance occupante pour modifier le caractère géographique, la compos ition démographique, la
structure institutionnelle ou le statut juridique du Territoire palestinien occupé, y compris à

9 Voir le rapport de la commission du Conseil de sécuriétablie en application de la résolution446 (1979) du
Conseil, Nations Unies, doc. S/13679, par. 45-51, le 4 décembre 1979; le rapport de la commission du Conseil de sécurité
établie en application de la résolution446 (1979) du Co nseil, NationsUnies, doc. S/13450, par.220-228, le
12 juillet 1979.

10Voir la résolution 465 (1980) du Conseil de sécurité des Nations Unies; la résolution 476 (1980) du Conseil de
sécurité des NationsUnies; la résolution56/61 (2001) de l’Assemblée générale des Nati onsUnies; le rapport du
rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme, M. John Dugard, sur la situation des droits de l’homme dans
les territoires palestiniens occupés par Israël depuis1967soumis conformément à la résolution1993/2A de la
Commission, NationsUnies, do c. E/CN.4/2004/6, par. 41, 8 septembre 2003 (ci-après le «rapport du rapporteur spécial
en date du 8 septembre 2003»). - 5 -

11
l’intérieur de Jérusalem et sur son po urtour, n’ont aucune validité en droit . Depuis plus de
trente ans, l’Assemblée générale adopte régulièrement des résolutions en rappelant que ces colonies
sont illicites et font obstacle à la paix et au développement économique et social 1, et elle
13
condamne expressément les activités de peuplement à Jérusalem .

C. Le mur de séparation est une annexion de territoire de fait par
la puissance occupante et il est illicite

15. Dans son rapport en date du 24novembre 2003, le Secrétaire général indique des faits
pertinents auxquels il n’y a rien à ajouter aux fins du présent exposé écrit. Il est dit au
paragraphe 8 :

«D’après le tracé indiqué sur la carte officielle, y compris les barrières avancées
et Jérusalem-Est, environ 975kilomètres ca rrés (soit 16,6% de la superficie de la

Cisjordanie) seront situés entre la barrière et la Ligne verte. Environ
237000Palestiniens vivent dans cette z one, 17000en Cisjordanie et 220000 à
Jérusalem-Est.»

Il est aussi dit dans le rapport: «Si la barri ère est intégralement construite comme prévu
160000autres Palestiniens vivront dans des enclaves, c’est-à-dire dans des zones où les

agglomérations et les terrains s ont presque totalement encerclés.» Voilà dans quelle situation se
trouve le peuple palestinien. Au sujet des coloni es de peuplement israéliennes, il est dit dans le
rapport: «Le tracé projeté incorpore près de 320000colons dont 178000 à Jérusalem-Est

occupée.» Les faits sont donc clairs. Les Pal estiniens perdent près de 17% du territoire de la
Cisjordanie, il est porté atteinte aux biens de 237 000 Palestiniens et 160 000 autres Palestiniens se
retrouvent dans des enclaves, alors que 320000 colo ns israéliens implantés dans des colonies de

peuplement illicites situées en Territoire palestinie n occupé, y compris à l’intérieur et sur le
pourtour de Jérusalem, sont englobés géographiquement dans le territoire d’Israël.

16. Le mur de séparation participe d’un ensemb le de violations générales et systématiques
des résolutions 242 (1967) et 338 (1973) du Conseil de sécurité des Nations Unies, qui demandent

le retrait de la puissance occupante. Toutefois, malgré les condamnations et l’opposition de la
communauté internationale, la puissance occupa nte entreprend de s’étendre sur une partie
supplémentaire de territoire et de s’y maintenir par la force, nonobstant le paragraphe4 de

l’article2 de la Charte des NationsUnies. Au mépris absolu du droit international, la puissance
occupante continue tout simplement de suivre le modèle adopté pour Jérusalem-Est 14 et les
15
hauteurs du Golan .

11Voir la résolution 446 (1979) du Conseil de sécurité des Nations Unies; la résolution 452 (1979) du Conseil de
sécurité des NationsUnies; la résolution465 (1980) du Cons eil de sécurité des NationsUnies; la résolution471 (1980)
du Conseil de sécurité des NationsUn ies; la résolution476 (1980) du Conseil de sécurité des NationsUnies; la
résolution 478 (1980) du Conseil de sécurité des Nations Unies.

12Parmi ces résolutions figurent: la résolution2851 (1971) de l’Assemblée générale des NationsUnies; la
résolution31/106 (A, C) (1976) de l’Assemblée générale de s NationsUnies; la résolution35/122 (B, C) (1980) de
l’Assemblée générale de s NationsUnies; la résolution37/222 (1982) de l’Assemblée générale des NationsUnies; la

résolution44/48 (A, C) (1989) de l’Assemblée générale des NationsUnies; la résolution46/162 (1991) de l’Assemblée
générale des NationsUnies; la résolution51/133 (1996) de l’Assemblée généra le des NationsUnies; la résolution52/66
(1998) de l’Assemblée générale des NationsUnies; la résolution55/132 (2001) de l’Assemblée générale des
Nations Unies.
13
RésolutionES-10/2 (1997) de l’Assemblée générale des NationsUnies; résolutionES-10/3 (1997) de
l’Assemblée générale des Nations Unies; résolution ES-10/4 (1997) de l’Assemblée générale des Nations Unies.
14Résolution 478 (1980) du Conseil de sécurité des Nations Unies.

15Résolution 497 (1981) du Conseil de sécurité des Nations Unies. - 6 -

17. Le mur de séparation a été largement condamné au sein de la communauté internationale.
Les Etats qui se sont abstenus lorsqu’a été mi se aux voix la résolution ES-10/14 de l’Assemblée
générale qui sollicite cet avis consultatif ont eux-mêmes quasi universellement condamné le mur de

séparation. Par ailleurs, le président des Et ats-Unis lui-même a exprimé publiquement ses
inquiétudes et son opposition : «Vous m’interrogez sur la barrière. J’ai déjà dit que la barrière est
un problème dans la mesure où elle ri sque de faire obstacle à la création d’un Etat palestinien. Il y

a une différence entre la sécurité et l’acquisition de territoire. Et nous avons bien précisé notre
position sur cette question.» 16 [Traduction du Greffe.] Malgré cette condamnation accablante, la
puissance occupante poursuit l’édification du mur de séparation, et justifie sa conduite en

expliquant que c’est une riposte au terrorisme, et elle refuse d’applique r le droit international
humanitaire à son occupation du Territoire palestin ien occupé, y compris à l’intérieur et sur le

pourtour de Jérusalem. Vu l’ampleur du projet et vu le type d’actions menées depuis toujours par
la puissance occupante, il est bien difficile de croire, comme elle le prétend, que le mur de
séparation n’est qu’une mesure provisoire.

18. Il ressort clairement du règlement de La Haye 17de 1907 comme de la

quatrième convention de Genève de1949 que la puissance occupante est généralement tenue de
respecter et de protéger la propriété privée. L’ article 46 du règlement de La Haye de 1907 énonce
cette proposition simple : «La proprié té privée ne peut pas être conf isquée.» De même, il est dit à

l’article 53 de la quatrième convention de Genève de 1949 : «Il est interdit à la puissance occupante
de détruire des biens mobiliers ou immobiliers, appartenant individuellement ou collectivement à
des personnes privées…sauf dans les cas où ces destructions seraient rendues absolument

nécessaires par les opérations militaires.» Comme il est expliqué ci-après, on ne saurait prétexter
que le mur est une nécessité absolue. De plus , en tout état de cause, il s’agit, non pas d’une
opération militaire au sens de la quatrième convention de Genève de1949, mais d’une mesure de

sécurité disproportionnée. La puissance occupant e manque donc régulièrement à ces obligations
élémentaires et nie qu’elles soient applicables à sa conduite. Cette négation est contraire à la
déclaration de la conférence de hautes parties c ontractantes à la quatrième convention de Genève
18
de 1949 du 5 décembre 2001 , qui dispose notamment que: «[L]es Hautes Parties contractantes
participantes ont réaffirmé que la quatrième conve ntion de Genève était applicable au Territoire
palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est.»

D. Le mur de séparation impose des souffrances injustifiées à la population civile protégée

de Palestine et est donc illicite

19. Le rapport rédigé le 8septembre2003 pa r le rapporteur spécial de la Commission des

droits de l’homme donne un compte rendu factuel des graves incidences que le mur de séparation a
actuellement sur la population civile de Palestine . La situation est grave et elle empire de jour en
jour. La Banque mondiale a conclu en2002 que la fermeture des limites internes et externes du

Territoire palestinien occupé, y compris à l’intéri eur et sur le pourtour de Jérusalem, constitue la
cause la plus directe de la crise économique qui sévit en Palestine . Le mur de séparation exacerbe

16
Président GeorgeW.Bush, observations formulées lo rs d’une conférence de presse à la Maison-Blanche
(28 octobre 2003), disponible à l’adresse : http://www.whitehouse.gov/news/releases/2003/10/20031028-2.html.
17Quatrième convention de LaHaye, convention concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre et ses
e
annexes: règlement concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre, Recueil des traités, Martens, 3 vol. 3,
p. 461, entrée en vigueur le 26 janvier 1910 (ci-après le «règlement de La Haye de 1907»).
18Déclaration de la conférence de hautes parties contra ctantes à la quatrième conv ention de Genève (Genève,
5décembre2001, disponible à l’adre sse : http ://www.eda.admin.ch/eda/e/home/foreign/hupol/4gc/docum2.Par.0006.

UpFile.pdf.
19Rapport du rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme, 8 septembre 2003, par. 17.

20Voir Quinze mois , «Intifada», Closures and Palestinian Eco nomic Crisis, An Assessment, World Bank,
18 Mar. 2002 [Fermetures et crise économique palestinienne, Banque mondiale, 18 mars 2002]. - 7 -

le problème. Les Palestiniens qui se trouvent entr e le mur de séparation et la Ligne verte sont

coupés de leur terre et de leur lieu de travail. En outre, le mur de séparation enclave des villes et
des villages palestiniens, empêchant les déplace ments que la population doit effectuer pour vaquer
à ses occupations normales :

«Chaque jour, des milliers de Palestiniens doivent franchir ces points de
passage pour se rendre à leur travail, à l’école, à l’hôpital ou pour rendre visite à leurs
amis et aux membres de leur famille. Chaque jour, ils sont contraints d’y perdre des

heures.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Les récits de grossièretés, d’humiliations et de brutalités subies à ces postes de
contrôle ne se comptent plus. Les ambula nces sont souvent retardées et il arrive que
des femmes y accouchent.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Empêchés d’aller au travail, d’acheter de la nourriture, de se rendre dans les
écoles et les hôpitaux ou d’inhumer leurs défunts, [les Palestiniens] sont confinés chez
eux… » 21

Les postes de contrôle de la puissance occupante, selon les termes du rapporteur spécial,
constituent «une manière d’institutionnaliser l’humiliation infligée au peuple palestinien» . 22

20. La description par le rapporteur spécial d es effets du mur de séparation sur la situation
humanitaire montre clairement que le mur consti tue une violation flagrante de la quatrième
convention de Genève de 1949, dont l’article 27 dispose :

«Les personnes protégées ont droit, en toutes circonstances, au respect de leur
personne, de leur honneur, de leurs droits familiaux, de leurs convictions et pratiques

religieuses, de leurs habitudes et de leurs coutumes. Elles seront traitées, en tout
temps, avec humanité et protégées notamment contre tout acte de violence ou
d’intimidation, contre les insultes et la curiosité publique.»

En outre, il est dit à l’article 32 :

«Les Hautes Parties contractantes s’in terdisent expressément toute mesure de

nature à causer soit des souffrances physi ques, soit l’extermination des personnes
protégées en leur pouvoir. Cette interdiction vise…toutes…brutalités, qu’elles
soient le fait d’agents civils ou d’agents militaires.»

21. Le mur de séparation impose des souffrances et des épreuves qui affectent
indifféremment la population civile et les combattants. Or, la déclaration des hautes parties

contractantes à la quatrième c onvention de Genève de1949 du 5 décembre 2001 fait clairement
obligation à la puissance occupante d’établir des distinctions de cette nature :

21
Rapport du rapporteur spécial, 8 septembre 2003, par. 17.
22Ibid. - 8 -

«Les Hautes Parties contractantes particip antes appellent les parties au conflit à

assurer le respect et la protection de la popul ation civile et des biens civils, et à opérer
en tous temps une distinction entre la population civile et les combattants ainsi
qu’entre les biens civils et les objectifs militaires. Elles appellent aussi les parties à
s’abstenir de toutes brutalités ou violences contre la population civile, qu’elles soient

le fait d’agents civils ou d’agents militair es, et à s’abstenir d’ exposer la population
civile aux opérations militaires.» 23

22. De surcroît, le mur de séparation, en constituant une punition collective qui frappe tous
les Palestiniens et ne fait aucune distinction en tre la population civile dans son ensemble et ceux
qui commettent des actes d’hostilité, représente une violation flagrante du règlement de LaHaye

de 1907 et de la quatrième convention de Genève de 1949.

Aux termes de l’article33 de la quatriè me convention de Genè ve de 1949 : «Aucune
personne protégée ne peut être punie pour une infraction qu’elle n’a pas commise personnellement.

Les peines collectives, de même que toute mesure d’intimidation ou de terrorisme, sont interdites.»
De même, aux termes de l’article 50 du règlement de La Haye de 1907 : «Aucune peine collective,
pécuniaire ou autre, ne pourra être édictée contre les populations à raison de faits individuels dont

elles ne pourraient être considérées comme solidairement responsables.»

E. Le mur de séparation voue à l’échec les négociations imposées par les résolutions

pertinentes du Conseil de sécurité des Nations Unies et empêchera
le peuple palestinien d’exercer le droit à l’autodétermination

23. L’édification du mur de séparation va au-d elà de l’annexion illicite de territoire par la

puissance occupante qui inflige des épreuves injustifiées à une population protégée. C’est un effort
délibéré visant à faire échec à la volonté expresse de la communauté internationale de voir deux
Etats vivre côte à côte en harmonie. Le mur de séparation, s’il doit perdurer, va exacerber les

différences entre les parties, accroître le flot des réfugiés et rendre on ne peut plus incertaine la
création d’un Etat palestinien viable.

24. De plus, garantir la souveraineté, l’inté grité territoriale et l’indépendance politique de
chacun des Etats de la région ainsi que le droit de son peuple à vivre à l’intérieur de frontières sûres
et reconnues constitue un objectif défini de longue date par l’Organisation des NationsUnies 24.

Cet objectif consiste en particulier pour le peuple palestinien à exercer son droit à
l’autodétermination relativement à son propre territoire. Le mur de séparation, s’il doit perdurer,
réduira à néant les efforts déployés par la communa uté internationale pour atteindre cet objectif.
Le mur de séparation de la puissance occupante rédui ra le Territoire palestinien occupé, y compris

à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem, à quelques enclaves totalement encerclées et isolées les
unes des autres, ce qui fera obstacle à la création d’un Etat viable.

25. Le mur de séparation est un acte de mauvaise foi commis par une partie à une
négociation qui veut renforcer sa position et atténuer les chances d’aboutir à une solution négociée.
Ce mur va modifier considérablement les car actéristiques du Territoire palestinien occupé, y

23
Déclaration de la conférence de hautes parties contra ctantes à la quatrième conv ention de Genève (Genève,
5 décembre 2001), disponible à l’adresse : http ://www.eda.admin.ch/eda/e/home/foreign/hupol/4gc/docum2.Par.0006.
UpFile/pdf.
24
Voir la résolution 242 (1967) du Conseil de sécurité des Nations Unies. - 9 -

compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jéru salem, lesquelles seront conformes aux vues d’une
seule des parties aux négociations, et celles-ci ne pourront plus produire de résultat mutuellement
acceptable.

IV. L E MOYEN DE DEFENSE INVOQUE PAR LA PUISSANCE OCCUPANTE SELON LEQUEL LE MUR
DE SEPARATION CONSTITUE UNE PROTECTION NECESSAIRE CONTRE LE TERRORISME

NE JUSTIFIE PAS EN DROIT SES ACTIONS ILLICITES

A. Observations générales

26. Le terrorisme est un fléau international qui suscite des préoccupations légitimes en
matière de sécurité. Il existe cependant des limite s à ce qui peut être fait au nom de la sécurité aux
dépens des droits de l’homme et d’autres obligations internationales.

B. Les obligations de la puissance occupante

27. Les droits et les devoirs de toute puissance occupante sont régis par le droit international.
En qualité d’autorité administrative, la puissan ce occupante doit prendre toutes les mesures
nécessaires pour garantir l’ordre et la sécurité publics 25. Comme son autorité n’est que transitoire

par définition, la puissance occupante doit mettre ces mesures en Œuvre en respectant les régimes
administratif, économique, juridique existants et le mode de vie en général de la communauté
occupée . Par conséquent, une puissance occupante a d es obligations morales et juridiques envers

la population protégée vivant sur le territoire qu’e lle occupe. La puissance occupante présente sur
le Territoire palestinien occupé, y compris à l’inté rieur de Jérusalem et sur son pourtour, n’assume
en aucune façon ces responsabilités.

C. Le mur de séparation n’est pas une nécessité militaire

28. Sur le plan du droit international human itaire, le mur de séparation n’est pas une
nécessité militaire qui décharge la puissance occ upante de ses obligations envers la population

civile protégée vivant en Territoire palestinien o ccupé, y compris à l’intérieur de Jérusalem et sur
son pourtour. Le mur de séparation ne répond pas au critère de nécess ité en droit international, ni
du point de vue général, ni du point de vue des impératifs militaires.

29. Le projet d’articles de la Commission du droit international sur la responsabilité des Etats
énonce les critères applicables permettant de déterm iner si l’argument de la nécessité peut servir à
27
justifier un fait illicite . L’article 25 dispose :

«1. L’Etat ne peut invoquer l’état de nécessité comme cause d’exclusion de

l’illicéité d’un fait non conforme à l’une de ses obligations internationales que si ce
fait :

a) constitue pour l’Etat le seul moyen de pr otéger un intérêt essentiel contre un péril

grave et imminent; et

25
Article 43 du règlement de La Haye de 1907.
26Lord McNair, Legal Effects of War, 1966, p. 370.

27Projet d’articles sur la responsabilité de l’Etat pour fait internationalement illicite, rapport de la Commission du
droit international à sa cinquanttroisième session, NationsUnies,Documents officiels de l’Assemblée générale,
cinquante-sixième session, supplément n o10, p.43, doc.A/56/10 (2001) (ci-après le «projet d’articles sur la
responsabilité des Etats»). - 10 -

b) ne porte pas gravement atteinte à un in térêt essentiel de l’Etat ou des Etats à
l’égard desquels l’obligation existe…

2. En tout cas, l’état de nécessité ne peut être invoqué par l’Etat comme cause
d’exclusion de l’illicéité;

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

b) si l’Etat a contribué à la survenance de cette situation.»

30. Le sens ainsi attribué à l’«état de nécessité» en droit international réfute clairement tous
les arguments, quels qu’ils soient, de la puissance occupante selon lesquels le mur de séparation est
nécessaire et justifie ainsi ses faits illicites. Le mur de séparation porte manifestement atteinte aux

droits du peuple palestinien et constitue un obstacle sur la voie de la paix et de l’autodétermination.
En outre, la puissance occupante ne peut en aucun cas invoquer l’état de nécessité pour justifier son
occupation du Territoire palestinien, y compris à l’in térieur de Jérusalem et sur son pourtour; et les

colonies qu’elle a établies de manière illicite da ns ces zones ont manifestement «contribué à la
survenance de cette situation». Cette interpréta tion générale du sens de l’«état de nécessité» en
droit international est parfaitement applicable en droit humanitaire lequel prévoit l’état de
«nécessité militaire».

D. Le mur de séparation est une mesure de sécurité disproportionnée et l’article 51
de la Charte n’est pas applicable

31. La puissance occupante a indiqué, en prenan t la parole devant l’Assemblée générale, que
ses actions étaient justifiées par l’article51 de la Charte des NationsUnies. Or, l’article51 n’est
pas applicable. Des actes de terrorisme isolés ne peuvent pas être assimilés à une agression armée

justifiant des mesures de légitime défense au-del à des frontières nationales. En outre, le droit
international dispose clairement que, même qua nd la légitime défense peut se justifier, les
obligations imposées par le droit international hum anitaire demeurent. Comme l’a indiqué la Cour

dans l’avis consultatif qu’elle a rendu en l’affaire relative aux Armes nucléaires, les règles du droit
international humanitaire constituent des «princ ipes intransgressibles du droit international
coutumier» .28

32. En outre, en tant que mesure de sécurité, le mur de séparation est loin d’être une réponse
nécessaire et proportionnée. Le mur de sépar ation se trouve très à l’intérieur du Territoire
palestinien. Il n’est pas construit le long de la Ligne verte. Il est conçu de manière à situer une

fraction importante et toujours plus étendue de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est du côté israélien
du mur. De plus, le mur est conçu pour assurer une contiguïté géographique entre le territoire
d’Israël et ses colonies illicites du Territoire pa lestinien occupé, y compris à l’intérieur de
Jérusalem et sur son pourtour, et pour faciliter davantage encore l’expansion de ces colonies

illicites à travers des violations répétées et de plus en plus fréquentes de l’obligation  définie à
l’article49 de la quatrième convention de Genève de1949  de ne pas procéder au «transfert
d’une partie de sa propre population civile dans le territoire occupé par elle».

33. S’il n’y a pas d’agression armée au sens de la Charte des NationsUnies qui justifie
l’invocation par la puissance occupante de la légitime défense au titre de l’article 51, il est instructif

d’apprécier dans quelles conditions il y aurait ré ponse nécessaire et proportionnée comme la Cour

28
Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, C.I.J. Recueil 1996, p. 257, par. 79. - 11 -

l’a fait récemment dans des affaires où la légitim e défense a été invoquée. Comme l’a déclaré la
Cour dans l’affaire des Plates-formes pétrolières en reprenant les termes de l’avis consultatif rendu
en l’affaire relative aux Armes nucléaires , «[l]a soumission de l’exercice du droit de légitime

défense aux c29ditions de nécess ité ou de proportionnalité est un e règle du droit international
coutumier» . Dans l’affaire Nicaragua, la Cour a déclaré que «la lé gitime défense ne justifierait
que des mesures proportionnées à l’agression arm ée subie, et nécessaires pour y riposter…» 3. Le

mur de séparation ne remplit pas ces conditions.

34. Le mur de séparation ne fait pas de distin ction entre les terroristes et la population civile

de la Palestine. C’est une réponse tout à fait di sproportionnée au terrorisme. Dans l’affaire des
Plates-formes pétrolières (République isla mique d’Iran c.Etats-Unis d’Amérique) , la Cour a
déclaré à cet égard «ne [pas pouvoir] faire abstraction de l’ampleur de l’ensemble de l’opération» . 31

Pour ce qui est du terme «nécessaire», le mur de séparation est loin d’être l’unique mesure qui
pourrait réduire le risque de terro risme; une mesure évidente à prendre par la puissance occupante

consisterait à respecter les résolutions pertinentes des NationsUnies retirer ses colonies du
Territoire palestinien occupé, y compris à l’intérieur de Jérusalem et sur son pourtour  et à mener
la négociation de bonne foi.

E. Le mur de séparation constitue une grave infraction au droit humanitaire

35. Comme nous l’avons montré, la confisca tion de biens privés par la puissance occupante
est illicite en droit humanitaire et, d’après l’analy se ci-dessus, elle ne saurait se justifier par l’état
de nécessité. En outre, la confiscation de bien s privés s’est opérée sans possibilité de recours

juridique véritable et de manière arbitraire. Quand elles sont commises par une puissance
occupante de telles actions constituent une «grave violation» de la quatrième convention de Genève
de1949 dont l’article147 dispose: «Les infracti ons graves…sont celles qui comportent l’un ou

l’autre des actes suivants:…la destruction et l’appropriation de biens non justifiées par des
nécessités militaires et exécutées sur une grande échelle de façon illicite et arbitraire.»

36. Il n’y a aucun recours juridique vérita ble contre les confiscations parce que, comme
l’indique le rapport du Secrétaire général du 24 n ovembre 2003, elles «prennent généralement effet

le jour où elles sont signées et sont valables même lorsqu’elles ne sont pas signifiées
personnellement aux propriétaires des biens» 32. Les confiscations sont arbitraires parce que la
puissance occupante y procède sans tenir compte de leur incidence sur le plan humanitaire.

37. Les obligations incombant aux hautes partie s contractantes à la quatrième convention de

Genève en cas d’«infraction grave» sont énoncées à l’article146. Cet article leur prescrit
l’obligation de prendre des mesures législatives pour fixer des sanctions pénales à appliquer aux

29
Affaire des Plates-formes pétrolières, arrêt du 6 novembre 2003, par. 76, (ci-après l’«affaire des Plates-formes
pétrolières»).
30
Affaire des Activités militaires et paramilitair es au Nicaragua et contre cel ui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis
d’Amérique), arrêt, C.I.J. Recueil 1986, p. 94, par. 176.
31
Affaire des Plates-formes pétrolières (République islamique d’Iran c. Etats-Unis d’Amérique), 2003, par. 77.
32Rapport du Secrétaire général du 24 novembre 2003, par. 17. - 12 -

personnes ayant commis, ou ayant donné l’ordre de commettre, une «infraction grave», et de les
déférer devant leurs propres tribunaux ou deva nt ceux d’autres Etats. Lesdites obligations

incombent donc aux centquatre-vingt-onzeEtats pa rties à la quatrième convention de Genève
de 1949, y compris Israël.

V. C ONCLUSION :VOICI QUELLES SONT LES CONSEQUENCES JURIDIQUES
DU MUR DE SEPARATION

38. Le mur de séparation constitue un fait internationalement illicite de la puissance
33
occupante, engageant ainsi la responsab 34lité internationale de cette dernière . Il a dans ces
conditions des conséquences juridiques . La première obligation est de mettre fin au fait
internationalement illicite 35, de ne pas le répéter 36, et d’en assurer la réparation intégrale 37. La
38
réparation comprend la restitut39n , laquel40 exige, en l’espèce, la destruction du mur de
séparation, l’indemnisation et la satisfaction .

39. Par suite :

 le mur de séparation étant illicite, il doit être mis fin à sa construction;

 le mur de séparation étant illicite, il doit être détruit;

 le mur de séparation étant illicite, les biens confisqués doivent être restitués;

 le mur de séparation étant illicite, le préjudice économique subi à ce jour en raison de sa

construction donne lieu à indemnisation;

 le mur étant une «infraction grave» au droit humanitaire, les Etats parties à la quatrième

convention de Genève sont tenus de prendre des mesures au titre de l’article 146;

 le mur de séparation est un acte de mauvaise foi commis par une partie à une négociation
prescrite par des résolutions des NationsUn ies et vouant à l’échec les objectifs de ces

résolutions. Il ne peut lui être accordé aucun poids dans les négociations ni dans la relation
juridique entre les parties;

 le mur de séparation ne décharge pas la puissan ce occupante des obligations lui incombant en
vertu de la quatrième convention de Genève de 1949; et

33Projet d’articles sur la responsabilité des Etats, art. I.

34Ibid., art. 28.

35Ibid., art. 29 et 30.
36
Ibid., art. 30 b).
37
Ibid., art. 31.
38Ibid., art. 35.

39Ibid., art. 36.

40Ibid., art. 37. - 13 -

 le mur de séparation vise à faire échec au droit à l’autodétermination du peuple palestinien et
constitue donc, de la part de la puissance occ upante, une grave infraction à une obligation
répondant à une norme impérative du droit intern ational général, laque lle impose à tous les

Etats de coopérer pour mettre fin à la violation, pour ne pas reconnaître de caractère licite à la
situation ainsi créée et pour ne pas porter la moindre assistance à la puissance occupante à cet
égard.

*

* *

40. Le Royaume d’Arabie saoudite soumet respectueusement le présent exposé à la Cour
internationale de Justice à titre d’information, afin d’aider la Cour à rendre un avis consultatif sur la

question posée par l’Assemblée générale.

___________

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Exposé écrit du Royaume d'Arabie Saoudite [traduction]

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