Contre-mémoire soumis par le Gouvernement de la République populaire d'Albanie

Document Number
1493
Document Type
Date of the Document

4. - CONTRE-M~MOIKE SOUMIS

Y-4R LE GOUt7ERNZ:MENT DE I,A REPUBLIQUE
POPULAIRE II'ALBANIE

11j JUIH 19481

Première part:e
QUESTION x0 I DU CO~~PRO?~IIS

A. - Les faits.
B. - En tirciit.
C. - Conclusicins.

A. - Les faits.
B. - En droit.

C. - Conclusions.
Troisièmpnutie:
Assrx-i<s

T. - Le I;ouvoriinaii:~it clc 1:)Képiihliilile populairt: d'Alb:~iiic
ariürrir:A In Coiir lc! prrEscnt Mtsirioirere..ipc&tivcil-iinLoi-itre-
Xernoirc dails l';iff;i.iredite ciu DCtroii dc Cnrfciii,conforrri8rnciit
à l'O~doni-iiiil~eclti la Cuiir cii dntc du 26 i.iia1948. 1711cffct,
cctmnsc l'ordonriance [le la Cour lc notc parrrii ses corlsiddl;ints,
c'est le çoiiiproiilis coriclu entre Ic Gciiivernciiicnt dc llAlh:inie
et Ir:Co~lvcnieinciit di1 Koyaiiirie-Ti~iiIr:25 iri;ir5 .~ij4S n [nit
dEsormais la base sur laquelle In Cour devra connaitre de ladite

affaire et énonce les questions que les I'arties sont convenues de
soumettre à sa décision 11.
De l'opinion du Gouvernement albanais, la conclusion du com-
promis précitéen date du 25 mars 1948 étzit lc seul moyen.propre
pur donner satisfaction à 1;i.RCsolution du Conseil de Sécuritk
cn date du g avril1947 . a Résolution ayant prévu que les Partiez
soumettent l'affaire à la Cour conformément aux dispositions
de soli Statut, il était nécessaire de notifier clla Courun coinpro-
mis établi entre les Parties, conforrnérnent à l'article@ du Statut de la Cour. Toutefois, contrairement A de tcllcs dispo-
sitions de la Résolution du 9 avril x947, le Gouvernerilent du
' Royaume-Uni a porte l'affaire devant la Cour par une rcquéte uni-
latéral~. Le Goriverncmerit a1b;in;iis s'est vu obligé de s'opposer
à ce que l'une des Partics soumctte le différend devant la Cour
seille et contrairement aux dispositions de son Statut. Le com-
promis conclu par les Parties le 25 mars 1945 leur a pcrinis de
porter l'affaire devaiit l:t Cour cnscmble et conforrnérncnt ail
Statut de la Cour. Le comprorriis se trouve ainsi ((établi à la
siijte de la Résolution du Conseil de Sécuritédu g avril 1947 ~t,

coinme il est dit expressément dans son texte.
2. - En insistant siir la nécessité desoumettre le différend
5 la Cour par la voie di1 compromis à conclure avec le Gouver-
nement du Royaume-Uni, Ic Gouvernement de la République
po,puiaire d'Albanie avait niisçi en vue la nécessitéque les deux
Parties déterminciit l'objet du différend au sens de la Résolu-

tion du Conscil de Sécuritédu g avril 1947. S'opposant ?tInrequête
unilaterde soumise par le Gouvernement du Koyaiimc-Uni A la
Colir le 13 mai 1947, Ic Gouvcrncment albanais s'opposait aussi
à ~:equ'une seule.des Parties determine l'objet du différend. Le
coinpromis ne reproduit donc pas la demande contenue dans
ladite requête britannique du 13mai 1947 ,ais soumet 5 la.Cour,
aux fins de son jugement, les deux questions suivriiitcs :
1) L'Albanie est-elle respo~isable, selon le droit international,
des explosions qui ont eu lieu le 22 octobre 1946 dans les eaux

albanaises, et des dominages et pertes humaines qui en seraient
suivis, ety a-t-il le cas cle réparation5 donner ?
2) Le Royaume-Uni a-t-il violé, selon le droit international,
la souveraineté de la Képiiblique populaire d'Albanie pnr les
actions de la marine de guerre britannique dans les eniix alba-
naises le22 octobre 1946et les12 et 13 novembre 1946 ct y a-t-il
lieu à donner satisfaction ? »

:!.- Ces deux questions cnsen~ble que les Parties sont conve:
nues de soumettre A la décision de la Cour peuvent seulement
répondre au présent différend, comme il s'est formé depuis 1946
entre les Gouvernements albanais et britannique, et embrassent
tout son objet.
151 effet, ce n'est pas di1 Gouvernement albanais et de sa res-
poiisabilité prétendue qu'il s'agissait d'abord et priiicip. ,1ernent
dans la présente affaire. C'est le Gouvernement albanais qui,
dès octobre 1946, s'est plaint le premier auprés du Gouvernement
britannique de ses procéclés dans les eaux territoriales albanaises,
et le premier il s'est EW obligéde porter ses protestations auprks

de I'Organisation des Nations Unies. Ces complaintes du Gouver-
nernent albanais contre le Gouvernement britannique portaient
sur des points déterminés,Toutefois, malgré toute l'insistance du
Go~ivemement albanais, on n'a pas donné à ces plaintes les suitesméritées. Par contre, lorsqiic plus tard le Gouvcrneincnt britan-
nique souleva- la question dc la responsabilité du Gouvernèmerit
albanais pour l'incident surverlu l22 octobrc 1946, sa plainte fut
admise devant le Co~iseiIde Sécurité. La prétendue resyonsa-
bilité du Gouvernement albanais a été traitéecomme une question
touchant le maintien de la paix et de la sécurité,et celaà la suite
de pures allégations et hypothèses forinulées par le Goin-ert~c-
ment britannique sans aucune basc diins lcs faits. Un prochs
d'atmosphère politique a étéainsi instruit contre lc Couveriie-
ment albanais, devant Ie forum mondial.
A la différence du procedé du Gouveriiemciit britariiiiquc, les
plaintes du Gouvemement albanais se fondaient sur des faits

précis susceptibies d'êtrefermement établis 'sur Ia base du droit
et que le Gouvernement albanais n soulevés avant quc le Gou-
vernement du Royaume-Uni yrésentst ses prétentions.
Le Gouvernement albanais se doit à son insistance que lcdit
compromis en date du 2j inars 1948 a établi Ics véritables posi-
tions des deux Partics au différend en lcs mettant ~ioiiseulement
sur ie pied de parfaite égalité devant In Cour, mais offrant enfin
au Gouvemement albanais l'occasion de défendre ses droits lésés
par Ic Gouvernement britannique.

4..- En ce qui concerne la procédure suivre, les Parties
audit compromis se sont remises à la Cour, cii égard au com-
promis, « de prendre conforinément au Statut et au 'Règlement
de la Cour, et après avoir consulté les agents des Yartics, les

dispositions qii'ellcjiigerri appropriees pur In procédure 5
suivre 1)L'Ordonnance dc: Irt Gour du 26 mars 1948 ayant pris
en considération qu'à la date du II!octobre 1947, lc Gouvcr-
nement du Royaume-Uni avait déposi: un Mémoire, contenant
un exposé et des conclusioiis, relatif à l'incident siirvciiule
22 octobre 1946, et après avoir consu1t.éles agepts dcs Fartics,
a fixéle Ij juin 1948 comme le délai pour la présentation dii
Contre-Mémoire du Goiiverncmelit albanais.
Eu égard à ces circonstanccç, le présent Mémoirc: respecti-
vement Contre-Mémoirc du Gouvernement albanais, soumis à
la Cour dans le délai prescrit comme sa première pièce de la
procédure écrite dans l'affaire présente ct dont la base est désor-
mais le compromis du 2j mars 1948, est appelé à soumettre à

la Cour d'une part la réponse du Gouverncmeiit albanais au
Mémoire du Gouvernement britanniqui: du II!octobre 1947, ct
d'autre part l'exposé et les conclusions du ,Gouvernenie~it albanais
concernant la question visée au compromis du z~ mars 1948
SOUS no 2. .
Conformément à cet état de choses, le préscnt Mémoire respec-
tivement Contre-Mémoire du Gouvernement albanais traite sépa-
rément la question no r dudit compromis et sa question no 2,
tenant compte, en ce qui concerne la première question, de ladispositioii de l'articl42, paragraphe 2, du Règlement de la
Cour et, en ce qui concerne Ia question no 2, de la dispositiori
de l'articl42, paragraphe I,dc ce Règlement.

5. - Le présent Mémoire respectivement Contre-Mémoire'du
Gouvernement albanais est soumis à la Cour sous réserve de tous
les autres moyens ulterieurs, preuves et piècàsl'appuià produire
par le Gouvernement albanais conforménlent au Statut et au
Règlement de la Cour. Pour autant que le présent Mémoire
respectivement Contre-Mémoire se réfère aux faits et aux points
de droit alIéguéspar le Gouvernement britannique par rapport
à In question Iet 9 ln qucstion2 du compromis du 25 mars 1948,
réserve expresse est faite en'cc qui concerne ces faits et ces points

de droit qui ne sont ;idiniset reconnus que pour autant qu'ils
sont admis et reconnus dans le présent Mémoire respectivement
Cantre-Mémoire, expressément. Tous les faits ct les points de
droit contenus dans le Mémoire britannique non cxpressémeiit:
reconnus par le présent Mémoirerespcctivement Contre-Mémoire,
sont à considérer comme repoussés et rejetés de $ln?zopar le
Gouvernement de ln République populaire d'Albanie.

Prelnidrepartie.

QUESTION No I DU COYPRO3IIS

I.'AI,BASIEEST-ELLE RESPONSABLE, SELOS LE DROIT INTERNATIONAL,
IIES EXPLOSIONS QUI ONT EU LIEU LE 22 OCTOBRE 1946 DANS LES
ICAUS ALBAXAISES ET DES DOMMAGES ET PERTES HUMAIVES QUI EN
SERAIEKT SUIVIS, ET Y A-T-IL LE CAS DE HEPARATI OKDOSENER ?

Ln prcinière question di1 compromis contient la portée

p:u- le Gouvernement du Royaume-Uni contrc le Gouvernernent
(le la Rgpublique populaire d'Albanie en la présente affaire. A
l'appui de cette irnputatio~i, le Gouvernement britannique, dans
son Mémoire du rcloctobre 1947 , résente une séried'arguments
qui, à l'analyse, résultent comme info~idés.La plainte tout
entière n'apporte aucune preuve valable et elle estinspirée d'une
liostilité manifeste envers l'Albanie.

A, - LES FAITS

Le canal nord de Corfou.
(Ad paragraphes j, 73 du Mémoire britaiinique.)

6. - Les eaux du détroit naturel connu sous le nom de canal
nord de Corfou sont bornées au nord et à l'est par le littoral
albanais et au sud et i l'ouest par le littoral nord-est de l'île de

Corfou.
3dispositioii de l'articl42, paragraphe 2, du Règlement de la
Cour et, en ce qui concerne Ia question no 2, de la dispositiori
de l'articl42, paragraphe I,dc ce Règlement.

5. - Le présent Mémoire respectivement Contre-Mémoire'du
Gouvernement albanais est soumis à la Cour sous réserve de tous
les autres moyens ulterieurs, preuves et piècàsl'appuià produire
par le Gouvernement albanais conforménlent au Statut et au
Règlement de la Cour. Pour autant que le présent Mémoire
respectivement Contre-Mémoire se réfère aux faits et aux points
de droit alIéguéspar le Gouvernement britannique par rapport
à In question Iet 9 ln qucstion2 du compromis du 25 mars 1948,
réserve expresse est faite en'cc qui concerne ces faits et ces points

de droit qui ne sont ;idiniset reconnus que pour autant qu'ils
sont admis et reconnus dans le présent Mémoire respectivement
Cantre-Mémoire, expressément. Tous les faits ct les points de
droit contenus dans le Mémoire britannique non cxpressémeiit:
reconnus par le présent Mémoirerespcctivement Contre-Mémoire,
sont à considérer comme repoussés et rejetés de $ln?zopar le
Gouvernement de ln République populaire d'Albanie.

Prelnidrepartie.

QUESTION No I DU COYPRO3IIS

I.'AI,BASIEEST-ELLE RESPONSABLE, SELOS LE DROIT INTERNATIONAL,
IIES EXPLOSIONS QUI ONT EU LIEU LE 22 OCTOBRE 1946 DANS LES
ICAUS ALBAXAISES ET DES DOMMAGES ET PERTES HUMAIVES QUI EN
SERAIEKT SUIVIS, ET Y A-T-IL LE CAS DE HEPARATI OKDOSENER ?

Ln prcinière question di1 compromis contient la portée

p:u- le Gouvernement du Royaume-Uni contrc le Gouvernernent
(le la Rgpublique populaire d'Albanie en la présente affaire. A
l'appui de cette irnputatio~i, le Gouvernement britannique, dans
son Mémoire du rcloctobre 1947 , résente une séried'arguments
qui, à l'analyse, résultent comme info~idés.La plainte tout
entière n'apporte aucune preuve valable et elle estinspirée d'une
liostilité manifeste envers l'Albanie.

A, - LES FAITS

Le canal nord de Corfou.
(Ad paragraphes j, 73 du Mémoire britaiinique.)

6. - Les eaux du détroit naturel connu sous le nom de canal
nord de Corfou sont bornées au nord et à l'est par le littoral
albanais et au sud et i l'ouest par le littoral nord-est de l'île de

Corfou.
3 Le canal nord de Corfou, a part les eaux territoriales, com-
prend également des eaux intérieures comme, par exemple, du
côté albanais, la baie de Saranda.

Le canal de Corfou est un détroit latéral naturel reliant deux
libres espaces maritimes de la mer Ionienne. Ce d6troit naturel
n'est nullement une voie importante de communication entre
ces Caux. Le canal de Corfou n'est qu'une voie latérale d'impor-
tance fort secondaire dans cette partie adjacente à la Méditer-
ranée et, par sa position géographique, éloignée cles 'grands
courants de communication méditerran6ens. Le caractère latéral
et secondaire de cette voie ressort en oiitre par Ic fait que les
mêmes espaces maritimes qui commuiiiquent par le canal nord
à l'est de I'ile de Corfou, peuvent non seidement êtrcreliés aussi
par les eaux à l'ouest de l'île, mais leur communication par cette
dernière route est en effet plus courte et se fait dans des iners
libres et larges. Dans ces conditions, le détroit naturel de Corfou
ne peut avoir qu'une fonction secondairt? et locale par rapport
à la liberté des mers et la rapidité des communications. L'im-
portance limitée de la navigation et du trafic maritime qui I'em-
pruntent en est la preuve. Depuis In création des moyens de
transport modernes aucune grande routc maritime de la Medi-

terranée, ni les paquebots, ni les bateaux marchands, ne passent
par le Détroit de Corfou ;c'est pour les besoi~isplus inodestes
du trafic côtier et pour relier l'Adriatiqut: sud-est avec yrincipa-
lerncnt les ports de Saranda et de Corfou qu'est utilise ce détroit
naturel. Ce sont les barques, les bateaux légers desservant les
ports locaux du littoral qui font essentiellement usage de cette
route. Contrairement à la &alité, le Mémoirebritannique élargit
intentionnellement et exagère l'importance de la route passant
par Ie Détroit de Corfou en la considérant comme une Nroute
normale et directe reliant les mers ouvertes s'étendant au nord-
est, nord et nord-ouest, etles mers s'étendant nu sud-est de l'île
de Corfou ii. Les navires se rendant du talon d'Italie ou de
l'Adriatique nord en Grèce et à fortiori dans In partie est de la
Méditerranée, ne traverstmt pas le ]>étroit de Corfciu. Encore
depuis l'année 1945 ,ans les conditions maritimes difficiles d'aprés
guerre, il n'y a pas de bateaux d'un tonnage 6levéqui auraient
emprunté cette voie latérale. Le représentant britannique au
Conseil de Sécuritéreconnaît que icla cîrtede l'Adriatique se

prêtedonc particuli4rement au cabotage en raison de la géographie
physique de l'arrière-pays, qui est fertile mais montagneux et
dispose de moyens de communications insuffisants n (Mémoire
britannique, annexe 23, p. 213). Bien qu'il prétende que le trafic
y est intense, il nc présente comme moyenne mensuelle de ce
trafic que 6 vedettes à moteur et 15caïques.
Si des bâtiments de guerre britanniques ou grecs traversent le
canal de Corfou depuis la fin de la guerre, In raison de choisir
cette route n'est pas une simple question i3eniivigntion générale, 11!Iautre but stisceptible de provoquer des incidents contrc
l'hlbanic entrc en ligne de compte.

7. - Le détroit naturel sccondairc qu'est Ie canal nord dc
Corfou ne saurait donc être rangé parmi ces détroits dont la
position géograghique exceptionnelle a déterminé au cours dl:
l'.histoire leur rôle important pour relier directement les grands
espaces maritimes, et servir ainsi de route maritime internatio-
l-iale. La prétention contraire du Gouvernement britannique lie
peut pas être maintenue en face des faits: d'un tonnage net
d'environ viiigt inillions de tonnes qui a passé dans I'année 1934
claiis les ports principaux de l'Adriatique tels que Trieste, Venise,
R.ijeka, Dubrovnik, Split et SuSak, la pIus grande partic est
passée A ttravcrs Otrante, et à travers le canal de Corfou est
passée une quantité minime, principnlenient des bateaux de
cabotage (voiliers et voiliers à moteur) et de petitc navigation.
Ceci est également confirmé par tous les manuels maritimes
tels par exemple iklediterranea~zPilot (vol. III, &dition VII, 1946,
pp. 40 et 41) , ortola~zodel 11fediievrané0,Segelhandbz~ch ffiv rias
il:litlelmeer,airisi que par les autres manuels qui, dans les instruc-
tions relativesà l'entrée dans la Néditerranée soit des ports de
la partie occidentale, soit de la partie sud de la Méditerranée

oii finalement du Levant et dc la iner Égée (et ceux-ci mêmeen
ciisd'utilisation du chenal de Corinthe), recommandent le passage
travers Otrante à I'ouest de l'île de Corfou, c'est-à-dire entre
le cap Santa Maria di Leuca et l'ile de Fano.
Il résulte clairement de ces données que le canal de Corfou
n'est point uiie artère maritime iiltematioiiale de première im-
portance (an inter.rzationalhighway) cornine l'affirme le Gouverne-
n-lent britannique dans son Mémoire a la page 21 (pafiie II -
Les faits, paragraphe 5). Le Gouvernement albanais soutient quc
ce canal n'est qu'un passage ordinaire d'importance piirement
lclcalepour les ports les plus proches grecs et albanais dc cette
rkgion.

S.- A part les facteurs ci-dessus mentionnés sur le carac-
tére local et le trafic réduit du Détroit de Corfou, ilconvient
d'ajouter l'état précaire des ports ct des moyens de transport
n-iaritime albanais. Ayant une longue frontière rnaritimc ct dis-
posant de quelques ports et rndcs comme Sarandn, l'Albanie,
toutefois, ii'a jamais possédéjusqu'h présent une marine mar-
chande et d'autant moins une marine de guerre. Ayant étédes
siècles entiers sous la domination turque, l'Albanie n'a jamais
pu développer une marine propre. Ainsi le peuple albanais n'était
pas à mème de tirer un meilleur parti de sa mer et de ses
richesses. 11 n'existe sur Ie littoral et les lacs albanais que des
barques pour la pèche et Iemouvernerit local, iiullement désignées
pour un trafic côtier plus distancé. Ceci vaut pour toute la côte . albanaise, de Shkodra (Scutari) jusqu'au port de Saranda. Les
ports albanais étaient desservis priticiyaleinent et d'une façon
plus ou inoiiis regulière par quelques lignes Btrangères de petite
navigation.
L'état précaire der- porta alba~iaiç s'c:st trouvé exceptionnel-
lement aggravi: i ln fin de la guerreà ln suite dcs boiiibardements
et des dévastations allernnnds. Ni les Italiens ~ii les ,Uemarids
n'ont laissé dans :tucun de ces ports des riavires, des installations
et du matériel qui pouvaient servir à 1'AIbanie. Le Gouvernement

albanais a étéobligéde procéder dès I'annéc 1945 ,ar ses propres
ressources limitees, à la réparatioii sornin:iirc des ports et de
leurs iristallationsen particulier à Durres (Durazzo) et Vlora
(Valona) pour les rendre uiiliçables autant que possible.
Tel est l'état de choses mêmeen octobre 1946 : l'Albanie ne
possède aucune marine de guerre et l'organisation nécessaire en
armes et en Iiornmes. Il n'existe aucun vriisseriu de guerre albanais
de n'importe quel type, d'autant moins ilne flotte alba~iaise. Le

contre-torpilleur albanais mentionné par le représentalit du
Gouvernenient d'Athènes dans sa lettre no 678 (lu xo mars 1947 '
(annexe 1) ndrcçs&e au Secrdtaire g6nér:i.ldes Nations Unies est
une pure i~ivcrition ; 5 cette époque il n'y a aucun contre-tor-
pilleur albanais comme il n'y a rion plris aucun sous-marin, ni
en généralaucun autre navire de guerre qui serait en possession
ou a la disposition du Cou\~ernement nlbii~iais. Sur tout le littoral
albanais, Ies autorités aiba~iaises ne disposerit que de queIques
vedettes et canots à moteur. Le pays est parcillernent dépounw
d'autres engins navals et installations spéciales dans ses ports.
C'est esscntiellcrnent l'armée de terre qui pourvoit à ln sécurith
et à Ia défense des. ports et des eaux albanaises. La navigation
albanaise claille cana1 nord de Corfou est, cominc il est d'ailleurs
sur toute la &te, d'importance locale et limitée au niou\-ement

côtier dans les eaux alban:~ises.
g. - Il corivicnt d'ajouter à cet Stat de choses le fait que le
détroit naturel qu'est Ie canal nord de Corfou constitue une
frontière d'État entre l'Albanie et In Grèce. Ceci revêt une irn-

portance particulière du fait que le Gouveniement d'Athènes se
considkre en état de guerre avec l'iubariie.
En relation avec ce qui précède,le passage des navires étrangers
et en premier Iieu de b3rtiments de guerre par ce détroit, en
d'autres ternies la question de la liberté de pass:Lge,est liénéces-
sairement pour l'Albanie avec Ie problème de la sécuritédu pays.
Les États se trouvant au cours de l'histoire devant un tel
problème de sécurité, n'ont jamais manqué dc prendre des me-
sures appropriées. Il serait, certes, étrange si le Gouvernement
albanais n'était pas préocci~pé d'en faire autant. Toutefois, même
. à cet eg~ird, il faut noter que, dans les conditions actuelles, l'Albanie, en tarit quc Puissance maritime, ne dispose pas des
nioyens nécessaires de défense maritime.
Dans ces circonstanccç, à savoir d'une part l'état précaire des
ports et le manque (le moyens de défenseappropriés, et de l'autre
la tension politique esistant 9 la frontière g-réco-albanaise?icause
de I'attiti~de hostilc du Cou\-crnernent d'Athéncs, Ics marines de
guerre grecque et britannique ont créédes incidents dan. les
eaux territoriales :~lbniiniseç et violé la souveraineté cle l'État
a Ibanaiç.

Le chenal navigable dans le canal de Corfou.
(Ad paragraphes 6, 7, 73 du Mémoire britannique.)

IO. - La navigation n'est aucunement difficile par lc canal
nord, les eaus étant partout profondes (eiiviron 60 mètres) et

basses seulement par qiielques endroits du littoral. Pour traverser
ces eaux, la riavig:itian de toute sorte emprunte donc depuis
toujours la ligne par lc injlieu du canal comme étant la route
la pltis courte.
D'après le Mémoirc britannique, Ia guerre dc 1940-1g45 a
arrêtéla navigation par Ic canal nord étant donné que de nom-
breuses inines ont étéposées dans le canal ainsi que dans les
espaces adjacents par les Italiens et par les Allemands. Toutefois,
16:sPuissances de l'Axe auraient établi et maintenu iin chenal
nettoyé fpour permettre ln navigation par le canal. Ce chenal
iinlo-allemand aurait été,par la cirite, nettoyé par les dragueurs
britanniques et serait représenté comme ((chenal déminé du
nord de Corfou » sur Ics cartes anneses j et 7 du Mémoire
(cf. par. G du JIémoire),

D'après le Rléinoirc (par. 7 ,i,)fine), (le chenal déminé du
nord de Corfou n existé et a étéutilisé pour les bcsoins de la
navigation depuis environ le mois de juin 1940, ainsi que le
siivait bien lc Gouvernement albanais, à toutes les époques per-
tinentes de l'année 1946 11.
II. - Le hlémoirc iie préseiitc aucune preuve 9 l'appui de

son affirmation que le chenal navigable existait depuis juin 1940 ;
la carte allemnnde (voir annexe 2 du Mémoire)ne cor~tientaucune
i~idication quant au prétendu chenal, si ce n'est rine ligne passant
à travers le canal et qui ne prouve rien. D'ailleurs, la carte n'est
pas datée, et rien ne prouve qu'elle est authentique. Elle ne
garantit nullement que les .4llemands n'ont pas niis de nouvelles
niines dans le canal nord avant d'êtreobligés de se retirer.
La valeur de cette carte est encore moindre si 1'011tient compte
du fait que des preuves existent sur l'opposition entre les positions
des champs de mines réels et les positions des champs de mines
iriscritssur les cartes alleniandes. Ainsi, il a ététrciuve dans les
e:iiix territorialesyoiigoslaves un grand nombre de champs demines qui n'ont pas été iiiscrits sur Ies cartes alleti~andcs, ce
qui prouve clairement qu'à l'occasion de leur retraite, les Allc-
mands posaient des champs de mines clandestins. Exemples :
I) dans la Boka Kotorska A la position de hleliii-Tivat ila été
dragué quarante-deux mines magnétiques mouillées qui n'étaient.
pas indiquées sur les cartes alleniandes; 2) de mème, sur la côte
ouest de l'île de Krk à partir de Glavotok jusqu'à la baie de
Janja se trouvent toujours reposant surle fond des tnincs magiiéto-
acoustiques tout près de la côte et qui pourtarit iic sont pas
inscrites sur les cartes (voir annexe 14).
De même, des mines de profondeur ou des mines flottantes
ont ététrouvées mêmeaux endroits où personne ne supposait
qu'elles pouvaient se trouver, ou même aux endroits dans la
proximité desquels il n'y a pas eu de champs de mines. Ceci
peut êtreprouvé par les données suivantes :
I)Dans le chenal de Fareziiia, entre les positions 45"IO'55" X.

- 14"15' 18" E. et 45" IO' 4.4"X. - 14" 16' oz" E., on a
trouvé douze mines alors que la plus proche rangée de mines
se trout~it au nord et au sud à r mille marin de distance de
cette ligne.
2) Dans le golfe de Rasa les mines n'ont pas étéposéesdevniit
le môle à charbon mais entre la baie de Salamica et le cap Fru-
mcnto à ~,j mille marin au sud-est.

12. - D'autre part, l'annexe z (carte allemniide) du hfé~noire
britannique présente le tracé du prétendu chenal déminé yui
aurait étéétabIi par Ics Puissances de l'Axe. Le Gouveriieii~cnt
albanais conteste l'existence de ce chenal parce qu'il n'nnaiicurie
connaissance et le Gouvernement britannique lui-méme rie porte
aucune preuve à l'appui. En outre, des discordances frappantes
existent entre les annexes 5 et 7 du Mémoire britaniiique qui
prétendent présenter le mêmechenal : alors que l'annexe5 montre
les lignes 18/32 et 18/34 en ligne droite de Butrinto 3.l'extrême

pointe est de Corfou vers le nord-ouest, dans l'annexe 7 et dans
toutes les autres cartes aiinexées au Mémoire britanriiqiie et
établies parla suite, cette route a étédétoiim6e vcrs la baie et
le port de Saranda, de sorte que le chenal d'une largeur d'un
mille marin touche par sa partie est 1s pointe Denta au sud de
Saranda.
Le prétendu passage A travers lechenal nettoyé par les Alle-
~nands diffère dans une certaine mesure des passages inscrits
dans les annexes britanniques 5 et 7. Le prétendu passage alle-
rnand (annexe britannique z) iie touche point la pointe Denta.
En tout. cas ce chenal n'est pas identique à celui de l'annexe 7,
car le chenal allemand prétendu déminé tourne \.ers le nord plus
au sud (entre poiiite Denta et Saint-Georges) qiie celui de
l'annexe 7. 13. - Contrairement à la prétention britannique, le Gouver-
nement albanais affirme qu'il n'a jamais eu coniiaissance que. le
prétendu chenal déminédu nord de Corfou ait existé et ait été
utilisé depuis juin 1940. Le Gouvernement albanais n'existait
pas en 1940 et ilne possède pas d'informations directes, prove-
nant de ses propres sources, au sujet de mines posées le long
de son littoral, de leur ddminage ainsi que du chenal qui aurait
étéfrayé dans les eaux albanaises.
Les propres moyens techniques manquent à l'Albanie pour
explorer les champs de mines autour de son littoral et d'autre
part son gouvernement n'avait pas d'occasion i s'assurer de
documents ou de personnes susceptibles de lui fournir des infor-
niations. La navigation albanaise étant dans l'état qui vient
dJ6tre décrit plus haut (voir par. 8), ne permettait pas à son

gouvernement de suivre de plus près les conditions dans les eaux
autour du littoral albanais. D'ailleurs, les barques, les caïques,
It:s canots à moteur albanais n'étant pas d'un tonnage élevé et
à tirant d'eau plus profond, continuaient à se mouvoir aux diffé-
rents secteurs dulittoralà Durres, àValona, à Himara, à Saranda,
sans qu'il y ait eu d'accidents.
Le Gouvernement albanais a le droit de considkrer et consi-
dère comme des actes illicites tous les dragages que la marine
britannique aurait effectues à diverses époques dans les eaux
tt:rritoriales albanaises sans avoir demandé et obtenu son consen-
tement.
En plus de toutes ces raisons et ces circonstances, le Gou-
vernement albanais n'a pas été admis à l'organisation inter-
nationale de nettoyngc des eaux, il a été privé du droit de parti-
cipation à ses travaux (voir par. 21-27).

14.- C'est seulement en janvier1946et à la suite de demandes
rtiitéréesque le Gouvernement albanais a étépour la première
fois informe des voies considéréesnavigables dans ses eaux. Le
clief de la Mission militaire britannique à Tirana, le général
Hodgson, lui a remis le 25 janvier 1946 deux cartes Médriet une
carte « Giilf of Kotor to Corfu a,où Je chenal navigable au nord
de Corfou de la baie de Vlora et des parages de Durres est tracé
en couleur verte. De ces documents il est question plus loin.

Les dragages de mines en 1944-1945,
(Ad parag~nplies II, 12 du Mémoirebritannique.)

Ij. - Suivant le Mémoire britannique, les régions suivantes
des eaux territoriales albanaises auraient étudéminéesou explo-
r6es )Ipar les dragueurs britanniques :
I) canal nord de Corfou (octobre 1944, janvier et février1945 )

2) .baie de Valona (novembre 1944 )
3) abords de Durazzo (décembre 1944,mars 1945). Le Memoire -io,te « rii l'Albanie ni aucu-e -utre Puissance --
ne fit objection à ces opérations 11.

Le Goiivemement albanais non seulement n'a pas étiiinformé,
mais en fait n'a rien su de tous ces différents dragages. Il a eu
connaissance seulement de celui effectué dans les parages. de
Durres en mars 1945. Ce dragage seul fut effectué avec sa
connaissance et son consentement et aussi avec sa participation.
La Mission militaire britannique en Albanie a dernandt5 en mars
1945 à l'État-~ajor généralde I'arméenationale albanaise l'auto-
risation pour ledit dragage, ce qui lui a étéaccordé. Le capitaine
de marine Avdi Mati, chargé de la défense côtière, a assisté à

cette opération. Relativement à ce dragage il est exact de dire
que non seulement i(aucune objection n'a été élevée'ni par
l'Albanie ni par aucune autre Puissance », mais que ce dragage
a étédûment effectud avec le consentement de 1'Aibaxiie.
C'est grâce i 1s présence de son representant lors de ces opé-
rations dans les parages de Durrcs que le Gouvernement albanais
a pris connaissance de la (lécouverte d'une mine magnétique à
cette occasion par les forct:~britanniques (voir annexe 2).

16. - Quant à tous les autres dragages ou explorations allégués
par le Mémoirebritannique, ils ont étéeffectuésà l'insu complet
du Gouvernement albanais. L'Albanie n'a pas ét&informee de
ces dragages ou explorations et de leurs résultats ni au préalabIe

ni après. En ce qui conceriie plus particulièrement les dragages
ou explorations qui auraient et15entrepris cn février et mars
1945 dans le canal nord de Corfou, c'est-à-dire après la libération
de l'Albanie, c'est seulement lors des débats devant Ze Conseil
de Sécurité et par le Mémoire du 1.roctobre que le (-ouverne-
ment albanais en a étéinformé. Etant ainsi tenu à l'écart et
dans l'ignorance complétc de ces opérations, le Gouvernement
albanais n'a pu ni s'en rendre compte ni les contrôler et ne peut

que les dénoncer comme des actes illicites. Il est bcin de noter,
en outre, qu'iI y a des incertitudes évidentes concernant les
dragages ou explorations alléguéspar le Mémoire britannique.
17. - Dans sa note verbale adressée à la légation d'>Albanie

à Belgrade le IO novembre 1946 (Mémoire;p. 26, et annexe 6,
document IV), le Gouvernement britannique parle des ((premiers
nettoyages faits par des navires britanniques en octobre 1944
et en février 1945 iidans les détroits de Corfou. D'au!re part,
dans sa note du 9 décembre 1946 ainsi que dans sa requête du
13 mai 1947, le Gouvernement britannique ne parle, en ce qui
concerne le canal de Corfou, que d'octobre 1944. Les dragueurs
britanniques auraient dragué ou elcploré: ((les parages de Du-

razzo : décembre 194-mars 1945, baie de Valona : décembre 1944,
canal nord de Corfou : octobre 1944 1).
Ce n'est pas pour la première fois qu'une pareille incertitude
concernant le dragage qui aurait étéfait en février 1945 dansle canal nord de Corfou, apparait dans les décIarationsbritanniques.
Le membre soviétique du Comité Medzoii, lors de la lecture
du procès-verbal de la gmeséance, i(relève certaines inexacti-
tudes de caractkre tcch~liquc qu'il serait clésirable de rectifier,
sii.rlo:rI) Paragraphe 94. - Au cours clc la réunion extraordi-
naire du Coinité, le 28 octobre 1946, le Coiiî, Lanib a dit que
le détroit avait étédragué par les forces iinvnles britanniques
au début de Ig4j etA la fin de 1944, c'est pourquoi j'ai demandé
quand exactement le dktruit avait étédéminé,avant ou après
la fin de la guerre. (Paragraphe 103.) Dans lc procès-verbal, il
est dit seulement que le détroit a étédé~niné en 191~4 ).(Procès-

verbal de la Tome séance du Comité hledzon du IO décembre
1946.) En vérité,aucune explication n'a suivi cette observation.
IS. - Si certains de ces dragages ou explorations sontdouteux,
il reste en outreà établir quelles ophrations ont été desdragages
et quelles autres des explorations. La note britannique précitée
du IO ~iovembrc 1946 mentionne des nettoyages, mais la note

britannique du g décembre 1946 ct la requete du 13 mai 1947,
ainsi que le Mémoire, parlent indistinctement des actions de
dragages ou d'explorations, sans préciser dans quel cas il y a
eu dragage et dans quel autre exploration. La cluestion peut
sans dode al-oir son importance s'il s'agit d'apprécier les résultats
de ces deus actions différentes.
En fait, jusqu'i présent, personne d'autre que le Comman-
dement britannique n'a connaissance des rapports concernant
ces travaux clc dragage ou d'exploration entrepris par ses forces :
si tard qu'en iiovembrc 1946, ((12. Commander Semitko demande
s'il serait possible d'avoir connaissance,' lors de la prochaine
réunion, des deus rapports afférents ail déminage de la zone
clont il s'agit et qui a eu lieu e1944 ,tde cclui qui a étéopéré
récemment. 13. Le Président indique que cela sera. fait. 11infor-
rnera le membre britannique du Comité qu'il devra avoir ces

rapports lors de la prochaine réunion. II(Procès-verbal de la
dance urgente du Comité Medzon du 16 novembre 1946, par.
112 et 13.) Toutefois, le membre britannique du Comité n'a pas
produit les rapports en question ni lors de la prochaine réunion
rii plus tard, et il paraitque depuis il n'a plus étéquestion de
ces rapports. Ainsi le Gouvernement britannique estdonc jusqu'à
présent seul et esclusif juge des rkultats des dragages ou explo-
rations entrepris par ses forces dans les eaux albanaises en rg#-
1945. Les informations et les opinions qu'il donneet qu'il professe
:L cet égard, n'ont pu ètre contrôlées ni par le gouvernement
riverain directement intéressé,à savoir le Gouvernement albanais,
~ii par l'organisation internationale cornpetente de déminage.

19.- Après la libération du pays, lc Gouvernement albanais
s'est adresséà plusieurs reprisesà la Mission militaire britannique
11Tirana pour lui clemander des informations sur les possibilitésde iiavigation dans les eaux côtières albanaises, sur Ies zones
minées et les routes sûres nienant vers les ports d'Albanie.
C'est à la suite de ces demandes que le zj janvier 1946 Ie
général Hodgson,chef de la Mission militaire britannique à Tirana,
a remis au Gouverneinent albanais une lettre accompagnée de
deux cartes Médri avec brochures et une carte intitulée Gulf of
Kotor to Corfu n.
Sur les cartes Médri remises par le général Hodgson sont
marqués des champs de iniiies en deux zones de danger: zone
no 17 se trouvant entièrement le long du littoral albanais et
s'etendant du nord de Durres jusquJau sud de VaIona couvrant
ces deux ports ; l'autre zone de danger, no 18 u, descend des
eaux albanaises au nord du port de Sarqnda pour s'étendre vers
le sud dans les eaux grecques jusqu'à l'Egée.A travers ces deux
zones de danger, trois routes navigables sont représentées sur
les cartes: route no 1711 menant vers Durres, route no 1712

menant à Vlora et route 18/53et 18/54 menant en ce qui concerne
les eaux albanaises au nord de Corfou Ie long du littoral albanais
vers Vlora (Valons). La dernière route a reçu depuis dans les
éditions Médri subséquentes les numéros 18/32 et 18/34.
Les chenaux nettoyés à travers ces champs de mines sont
tracés, en couIcnr verte, sur la carte intitulé B Gulf of Kotor
to Corfu JI.Et la lettre dri généralHodgsori accompagnant ces
documents fait obsenrcr : ((The green Iines on the Chart show
stvept channels. C-in-C Med. takes no responsibilitp for the
accuracy of this chart aiid any Albanian vessels using the infor-
mation given i~iit do so at their own risk. )i(Annexe 3.)
La lettre du 25 janvier 1946 du généralHodgson a fait ainsi
remarquer 711012proprtciau Gouvernement albanais qua, malgré
le nettoyage,déjà effectué, les voies sur la mer ne peuvent pas
êtreconsidéréescomme étant sClreset que les bateaux y navi-
guent à leurs risques et perils.

20. - Il ressort donc cla.iremeiit.de cequi a &tédit plus haut
que rien n'est certain en ce qui concerne ces prétendus dragages

dans les eaux albanaises et spécialement dans Ia partie nord du
canal de Corfou. Non seulement le Gouvernement britannique
ne donne pas de dates précises et ne présente pas les rapports
y relatifs, mais il résulte de la lettre du général Hodgson que,.
mêmesi l'on suppose que vraiment des dragages ont été effectués,
les résultats obtenus ne donnent aucune garantie pour 1s riavi-
gation. C'est pourquoi, en prévision d'incidents qui pourraient
avoir lieu dansJ'arrenirles autorités britanniques, qui pi-étendaient
avoir effectué elles-mè~nesles divers dragages et e?rpIorations,
se déchargent d'avance dc toute responsabilité.L'Organisation internationale pour le nettoyage des mines des eaux
européennes et l'Albanie.

(Ad paragraphes 8-10 du ~érnoire britannique.)

La constit.zrlionde l'Organisation, ses principes.
21. - A Ia fin des hostilités, en mai 1945 u,ne ([Organisation
Internationale pour le nettoyage des mines des eaux europé-
ennes )i fut instituée en vertu d'un accord conclu entre les Gou-

vernements de 1'U. R. S.S., des Etats-Unis, du Royaume-Uni et
de la France.
Le Mémoire décrit les buts et les fonctions du Comité inter-
national central de déminage (Intevna-ianaECcntraE Clearance
Board) différemment de l'accord du 22 novembre 1945 (voir
Mémoire,annexe 3, p. 54), qui les a définis et stipulés dans son
texte. On cherche en vain dans l'accord la plupart des textes se
rapportant aux buts prétendus du Comité international central
que le Mémoire(par, 8, ad i, liftera e, ad ii) y voit c définisdans
un accord écrit daté du zz novembre ». D'autre part, le Comité
iriternational central n'est pas toute l'organisation comme le

prétend le Mémoire britannique, il n'est qu'une partie, quoique
d'une autorité particulihre, de l'organisation intcrnritionale pour
le nettoyage des eaux européennes (International Orga~iization for
the Clearance of Mines in European Waters). Le Mémoireomet de
mentionner les fonctions de l'organisation qui sont expressément
prévues dans ledit accord'et sont d'importance essentielle pour soli
rx:uvre. Il y a lieu de noter particulièremeilt les dispositions sui-
vantes de l'accord du 22 novembre 1945 :
a) LL'Organiçationest crééeen vue i(de répondre aux besoins
de toutes les Puissances maritimes intéressées )dans ((toutes les
eaux européennes avec le mêmesoin et la mêmerapidité )).
6) Toutes les mers européennes sont diviséesen quatre zones, et

pour cliacune d'elles est créé un comité zona1 responsable devant
le Comitéinternational central. Celui-ci est composé des représen-
tants des quatre grandes Puissances (U.R.S.S., France, Royaume-
Uni, U. S. A.), et présidk par un officier naval br~tannique.
c) Un comité de In zone méditerranéennepour le iiettoyage des
niines (ilfetlilerranean %[ne Mine ClearanceBrard) fut créé pour la
zone méditerranéenne s'étendant de Ia ligne cap Saiiit-Vincent -
cap Blanco jusqu'aux eauxterritoriales de la Turquie qui en étaient
exclues.
d) Le comitézoiial est appelé à diviser la zone en sous-zones,«dont
lt: déminage sera confié aux Puissances côtières intéresséesainsi
qu'à d'autres Puissances navales .... (par. 2dc l'accord). ((Chaque

I'uissance se chargera du déminage de ses propres eaux côtières ))
(par. 12 de l'accord).
e) II incombe à chaque comité zona], entre autres, d'ccattribuer
les forces dc dé~ninrigea,ffectéesàla zone par le Comitécentral, auxPiiissances représe~itéex su sein du cornit6 de zone qui ne disposent
pas de forces de déminage sufisantes pour leur permettre de net- *
toyer le secteur dont elles sont responsablcs 1)(par. 7 de l'accord).
f)Le comité zona1 peut toujours réajuster les limites des sous-
zones dans sa zone si cela devient nécessaire ;le Coinitécentral peut
en faire autant en ce qui concerne les litnites des zones.

22. - L'organisation était visiblement créée pour que tous les
États maritimes des eaux européennes collaborent et s'entraident

en vue du nettoyage rapide de leurs eaux des mines. Dans ce but,
l'Organisation peut allouer les moyens techniques liécessairesà
ceux de ses ycrnbres qui en manquent.
Tous les htats maritimes européens devant être mcmbres de
l'Organisation, il est tout naturel que chaque Puissance entreprenne
le nettoyage dc scs propres eaux. Une telle règle répond aussi à
l'article 5 de la Convention VI11 cleLa Haye de 1907 relative à la
pose de niincs sous-marines automatiques de contact, qui a stipulé
que ((chaque Puissance devra procéder dans le pliis bref délai à

l'enlèvement des mines qui se trouvent daris ses eaux N.
En effet, on ne voit pas comment d'autres États pourraient se
substituer clnns les eaux territoriales à lJÊtat q.i p.ss<de le droit
dc rouvcraincté.

La prntiqzle rieI'Orga~zisafion;Zn non-acigrtissio? te 1'Albn~ie.

23. - D'après les dispositions de l'accord du 22 novembre 1943,
la participation de l'Albanie, pays littoral de la Méditerranée,à
l'organisation internationale de déminage, esttout indiquée ;tou-
tefois l'Albanie a ététenue à dessein à l'écart. D'après l'article 9
de l'accorcl :tcte Comité de la zone méditemanéenncse composera
des déléguéd se la France, de la Grèce,de 1'U.R. S. S.,du IZoyaume-
Uni, des États-unis et de la Yougoslavie, souç la présidence d'un
officier naval britannique. Iles représentants de l'Allemagne et de
l'Italie seraiciit iiivités,lorsque le ComitéIc jugera utile, à assister
aux séances afin de fournir des renscigncments et de recevoir des

directives. L1Ggypte, le Portugal, l'Espagne et la Turquie seront
invités à envoyer des obsemateurs aux comités. sAinsi, parmi tous
les nombreux pays riverains de la Méditerranée,y compris tous
les pays neutres, dont les eaux territoriales étaient minées,l'Albanie
n'est pas représentéeau Comitéméditem:~nécn.
L'argument britannique selon Iequel I'Aibanie n'a pas étéadmise
à l'organisation parce qu'elle ne possédait pasde dragueurs de mines
est infondé et sans valeur. Il est mêmeen contradiction avec les
dispositions de l'article 12 stipulant expressément que « chaque
Puissance se chargera du déminage de ses propres eaux côtières et

en outre d'un secteur de haute mer airoisinant, proportionnellement
aux forces de déminage riolit elle dispose ou qui ont étérnises à sa
disposition 1). D'autres pays, telle l'Égypte, ne possédant non plus de dra-
gueurs de mines, ont étéadmis à l'Organisation. De ~nêmlea Tur-
quie, dont les eaux territoriales sont excliies de la jiiridiction du
Cornite Medzon (annexe n de l'accord), a 4té appelce i en faire
partie. Sices pays ont étéreçus comme observateiirs, c'est à cause
dt: leur non-participation à la guerre ou de leur neutralité et non
parce qu'ils n'avaient pas de dragueurs de inines. Les discussions

subséquentes dans le Comité inéditerranéen ont confirmé que la
possession de dragueurs de mines n'était nori plus pour l'Albanie
la vraie condition sine qua nom D'après lcs membres britannique
et grec l'Albanie n'&tait pas admise à l'organisation parce que
((l'une des raisons était que l'Albanie ne possédait pas de dra-
pleurs de mines 1).(Comm. Hannah, procbs-verbal du Comité
méditerranéen di1 IO décembre 1946,par. 8.) Il y avait donc d'au-
tres raisons pour ces membres du Comité.L'iirgument a étédiscuté
par le représentantde I'U. R.S.S. au Cornite central, le xqnovembre
1946, ainsi :((Chaque pays doit déminer ses propres eaux territo-
riales.Si un pays n'en a pas les moyens, le Comitéles lui fournit.

Si l'Albanie ne dispose pas de moyens suffisants, cela tierit à ce
qu'elle n'a pas étéreprésentée,jusqu'à l'heure actuelle, au sein du
. Comité méditerranéen où est mêmerepresenté un ancien pays
erinemi. ))(Procès-verbal de Ia 31~~ séance du Comité central
du 14 novembre 1946, par.337.) Aussi, après l'iricident survenu le
zz octobre à deux contre-torpilleurs britaiiniques dans les eaux
albanaises, la circonstanceque l'Albanie ne possèdepas de dragueurs
di: mines ne jouaitplus aucun rôle afin que les membres du Comité
méditerranéen acceptassent ((la suggestioii qu'on demande au
Comitécentral clcprendre une décisionsur le point de savoir si le
Gouvernemerit albanais est prêt à assumer ln responsabilité de la

zone 17 du Comité 1).(Procès-verbal de la rom@ séancedu Comité
Mkdzon du IO décembre 1946, par. S in fine.) Cette proposition
demandant à l'Albanie de se charger du nettoyage de ses eaux
autour de Durres et de Vlora n'a pas réuni I'unanirniténécessaire
seulement pour la raison que les membres soviétique et yougo-
slave du Comitéinsistèrent que l'Albanie soit invitde à se charger
du nettoyage de toutes ses eaux et non seulement de la zone 17.
Cela prouve qu'i cette époquele Comiténe considérait pas que
le manque de dragueurs de mines soit une raison valable pour
empêcherl'hlbaiiie rie participer a ses travaiix.

24. - La participation de l'Albanie à l'Organisation de démi-

nage répondant seulement à l'accord du 22 novembre 1945, les
mesures prises par le Comité central et le Comité niéditerranéen
concernant les eaux albanaises confirmerit l'opinion de la Confé-
rence de La Haye de 1907 :i(toute autre solution serait dificileà
appliquer ...1).
Dés sa première séance,le j novembre 1945, le Cornitéméditer-
raden Medzon s'est trouvé obligéde décider sur In faqon de pro-céderà l'égarddes deux zones de danger no 17 et no18 a. Ne comp-
tant pas l'Albanie parmi ses membres, le Comitépouvait envisager
seulement deux solutioiis :soità demander &l'Albanie son concours
ad hoctoujours quand le besoin se ferait sentir, soià procéderdans
les eaux albanaisessans se préoccuper de Ia souveraineté de I'Alba-
nie. Il n'est pas difficilede croireque, en cc:qui concerne la première
solution, divers membres di1Comitétels les membres britannique
et grec ne la voulaient pas;en ce qui concerne la deuxikme solution
le Comiténe pouvait pas la prendre. Le rSsultat cn était que toute
action concernant le nettoyage des eaux albanxiscs se trouvait
paralysée.
Ainsi, plutôt que de reconnaître à l'hllianie ses droits sur toutes
ses eaux, certains délégués et particulièrement le délégrrébritan-
nique ont préféré paralyser les travaux de l'organisation et mettre

celle-cidans un état de carence relativement à la zone 17.
En ce qui concerne la zone de danger no ISa se composant d'eaux
grecques et albanaises, le Comitéméditerranéenadécidél,e 5 novem-
bre 1945 ,uc la Grèceserait responsable poiir1enettoy;~gede toutes
ses eaux. Ainsi, ce ne serait pas l'Albanie qui devrait pourvoir au
nettoyage cle ses propres eaux territoriales et même intérieures,
mais ce serait un autreÉtat qui opérerait clans son domaine mari-
time. Le résultat de cette décision du Cornit6 méditerranéen,
dérogeantà la souverainetéde 1'Etat albanais,est le mêmeque celui
concernant la zone de danger no 17, c'est-i-dire que mémeles eaux
albanaises dans la zone de danger no 18 a n'ont pas été draguées
par l'organisation internationale de déminage jusqu'à aujourd'hui.

2j. - Ainsi ignorée et tenue A l'écart des activités de l'Orga-
nisation de déminage, l'Albanie a étéégalement tenue dans l'igno-
rance de tous lestravaiix et de tous les renseignements fournis par
le Bureau central international de renseignements et par le Service
international des itinéraireset des inforniations.
Contrairement A l'affirmation britannique, la Gouvernement
albanais ou toute autre autorité albanaise, pendant la période octo-
bre 1945-octobre 1946, n'a reçu aucune communication directe
provenant soit c!u Comitk rnbditcrranéen soit desdits Services inter-
nationaux contenant des informatioris au sujet des eaux minees et
des voies navigables. Entre autres, elle n'ont pas requ non plus les
trente copies qui auraient étéadressées chaque niois durant les

mêmespériodesau ministère des Travaux publics à Tirana.
Avant la lettre du généralHodgson mentionnée ci-haut, le
Gouvernement albanais ne fut donc jamais informé par l'Orga-
nisation internationale de déminage du prétendu Chenal navi-
gable dans lc canal nord et des travaux dc déminage effectues
dans cette région.
26. - La non-admission intentionnelle et non fondée de
l'Albanie à l'organisation internationale de nettoyage cies mines
et qui est à la base de l'état de choses peu satisfaiçarit qui vient cl'Ctre décrit, a étédepuis trouvée non jiistifiée par différents
intmbres du Comité méditerranéen lui-même, te1 le représentant
de l'W.R. S.S..qui trouve que {(leComitédelazone méditerranéenne
itcommis une erreur quand, lors de sa première réunion, il a
inclu les eaux territoriales albanaises (eaux d'une Puissance
souveraine) dans la zone grecque de responsabilité nationale ;
jusqu'à présent le Comité n'a pas rectifiéson erreur ))(séancedu

Comité méditerranéen du 18 mars 1947, procès-verbal no 61,
no 3, p. 63) et que (<la décisionprise à l'origine d'inclure les eaux
territorialesalbanaises dans une zone, relativement à laquelie
la responsabilité était confiéeà une autre Puissance, n'était pas
correcte, l'Albanie n'étant pris représentée à la réunion ». (Procès-
verbal de la riiance du Medzon du 4 février 1947 par. no 16.)
:L'attitude du. Gouvernement britannique envers l'Albanie à
In suite des incidents des 15 mai et 22 octobre 1946 a ernpèché
que les deux comitésde l'organisation internationale de déminage

réparent l'injustice commise à l'égard de l'Albanie. C'est le pré-
sident britannique du Comité central qui déclare immédiatement
aprésl'incident du 22 octobre 1946 : i(selon le point de vue bri-
taiinique, il n'est pas question pour le moment d'inviter l'Albanie
à envoyer un observateur ii.(Cap. Nichols, président du Comité
central, dans la 31"c séance les 31 octobre, I" et j novembre
rgii6, par. 320.) Ce n'est pas pour la première fois que le pré-
sident britannique du Medzon également trouve toujours des
prditextes pour s'opposer à l'admission de l'Albanie : ainsi, à la

séaiicedu 2 juillet1946 du Comité méditerranéen, ccle président
a dit que le président du Comité central avait demandé si le
membre grec accueillerait favorablement un membre albanais.
Le membre grec a répondu qu'il voudrait demander des instruc-
tions à ce sujet à son Gouvernement » (7me séancedu Medzon,
p. SI, date z juillet 1946) ; et à la mêmeséance le mêmepré-
sident du Comité Medzon ajoute que u le commandcint en chef
naval allié n'était pas en ce moment favorable à l'invitation d'un
membre albanais au Comité. Il était d'avis que le Comité pour-
rait accepter toute information disponible concernant les plans

et les besoins de dragage albanais ri(par. 22). (Voir annexe 4.)
Airisi, par une façon de procéder bien étrange, les délégués britan-
niques prétendent faire dépendre l'invitation de l'Albanie au
bureau méditerranéen de l'attitude du Gouvernement grec et du
commandant naval en chef britannique en Méditerranée ; un tel
argument est complètement dénué de fondement puisque la
compétence du commandant naval en chef se limite seulement
aux opérations de dragage clans les eaux territoriales des pays
ex-ennemis et non de l'Albanie.

En ce qui concerne la proposition du Comité méditerranéen
de charger I'Albanie. du nettoyage de ses eaux, le président
britannique du Comité méditerranéen a dit : (cComme le Conseil
de Séc~irité réuni en ce moment ç'occuy~ede l'affaire relative auxmines de Corfou dans son cnçernble, il ne parait pas possible de
débattre la question jusqu'à ce que les 'Vations Unies aient réglé
le différend. i) (Procès-verbal de la séance du Coiiiit6 medi-
terranéen du 4 février 1947 'par. 14.)

27. - De l'analyse des faits prdcités et de la lecture des procès-
verbaux du Coinité ccritrnl et du Comité Medzoii de l'Organisation
internationaIe de déminage, iI résulte qiie l'Albanie, salis aucune
raison fondce, n étépriv4e de ln possibilité de procbder aiix
opérations de dragage dans scs eaus territoriales, i:t de veiller
à la skcurité de In n;ivigntion en général et spécinlerneiit clans
le canal de Corfou. Sur l'iiisistance des membres britniiiiiclue et
grec de l'organisation dc déniinage, des décisions injustes ont
6té prises au détriment des droits et des intérêts clc 1'Albaiiie

en tant qu'État souvcrnin, riverain de la Méditerranéc.

Les conditions dans le canal nord 194j-1946.
(Ari paragraphe 13 du Mémoire britannique.)

28. - Le tableau qiie le Mémoire (par. 13)donnc clu mouve-
ment maritime passant par le prétendu chenal dans lc canal nord
et qui aurait duré (icil fait jusqu'à mai rgqG )i,simplifit: trop
les choses. Les con(litions prévalant au chenal iiord jusrlu'xu
mois de mai 1946:LUI-aicntpu être au point dc vue britririnique
telles que le Mémoire les tii:crit: ((.... des navires dc toutes sort-es
empruntèrent le chcnal s:iris opposition de la Grèce ou dt: l'Al-
banie et sans rencontrer dcs mines i).Cependant le Gouvernenient
albanais a fait coiinaitrc en temps utile que déji dans cette
période dans le canal de Corfou a~iient lieu des iiicidents d'ordre

divers, qui ne pouvaient pas iie pas exercer une répercussion
aussi sur la sécurité de la navigation dans le canal ilorcl.
Dans cet ordre d'idées il est nécesçaire de meritionner les diffi-
cultés éprouvées par l'Albanie depuis 1943 dansscs relations
avec la Grèce. Les 1-iséeçterritoriales du Gouveriiernent d'hthèiies
sur l'Albanie du Sucl poiirsuivies depuis longtemps et ouver-
tement et officiclIcii~cnt proclamées dès l'année 1944,ont ciitraîné
des coups de main clans les régions convoitées. Le Gouvernement
d'Athènes ;i appuyé ses revendications territori;ilescontri: l'Al-
banie par des actes provoc:ateurs ct contraires au droit. En outre,
le Gouvernement d'Athknes se considère en état clc guerrt: avec
l'Albanie. Ainsi le premier ministre et ministre des Affaires étran-

gères d'Athènes Constantin Tsalclaris tléclaraità la Coiifércnce
de la Pais à Paris : ((L'état de guerre entre nous et l'illbrinie
doit trouver son dénouement naturel et juste par l'attribution
de l'Épire du Korcl à la Grècc » (CP-P-6, y. IO). A la niême
époque, le 28 aout 1946, le déléguegrec Dendrarnis, s'opposant
à l'admission de l'Albanie à l'O,N. U., s'espritna de cette façon
devant le Conseil de Sécurité: « Mon pays, qui, ii~ênic après- COKTRE-~IEJIO IKE GOUVERNEL~ENT AI-HANAIS (15 VI 38) 41)

l'élimination de toutcs les forces de l'Axe, est encore avec l'Albanie,
tr:chniquemeilt parlant, en état de guerre, demande au Coriseil
de Sécuritéque l'Albanie ne soit pas admise au sein des Nations
Unies....Et cet état continuera tant qu'lin traité de paix ne sera
pas signé entre la Grèce et l'Albanie. 11 (S-P-V. jj.) Aiiisi, dès
l'année 1944 des iiicidents de frontière ont étécrééspar les Grecs
dans le sud de l'Albanie. (Voir annexe 16.) A part les autres com-
niunications antérieures, le 12 septenibrc 1946, leGouvernement
albanais a eiivoyé au Secrétaire général de l'organisation des
Nations Unies une liste des incidents survenus à la fro~itière
albano-grecque jusqu'à cette époque.
Les missions étrangères à Tirana ont 6té informées de ces
incidents ainsi quc d'un certain nombre d'autres incidents sur-

venus à la frontière niaritime de l'hlbariie du Sud. La note alba-
naize du 21 mai 1946 (Mémoire britannique, annexe 6, doc. III,
p. 67) a récapitulé à l'intention du Gouvernement britannique
certains de ces incidents maritimes ayant eu lieu entre le 17 avril
1945 et le 30avril 1946, en donnant en rnémetemps une description
gbnérale des conditions d'inskcurité que de tels incidents ne
peuvent manquer de provoquer dans la région. Depuis, plusieurs
autres cas de violations ont eu lieu de la part des navires grecs.
dans Ies eaux albanaises. Une autre liste de pareils incidents a été
remise ,au Secretaire généraldes Nations Unies le 12 avril 1947
parle représentant albanais (vair annexe 6).

29, - Ces difficiiltés auxqueIles Ic Gouvernement albanais
devait faire face ont étéconfirmées par le Gouvernement d'Athènes
lui-même :Le rzprcsentant permanent de la Grèceprésdes Nations
IJtiiea adressé le IO ninrs 1947 la lettreno678 (voir annexe I) au
ClccrétairegénéralclesNations Unies pour lui communiquer, d'ordre

dc son Gouvernement, ses viles sur les allégations - comme la
lettre s'exprime - faites par le représentant de l'Albanie devant
le Conseil de Sécurite. La lettre conteste, d'une part, les faits comme
le Gouvernement albanais les a fait connaître et, d'autre part,
indique six cas d'incidents qui auraient été causéspar lespostes
côtiers albanais.
a) Dans 53première partie, la lettre dit : «En juillet 1945, des
corvettes grecques basées i Corfou ont simplement exécuté des
exercices de tir dans le canal au nord de Corfou, zone libre inter-

riationala.))II est évident que les eaux que la lettre nomme C'hart-
nel North of CorJu in!ernafi;na!ly free sont: les eaux albanaiseset
que les corvettes eri question pouvaient procéder à leur exercice
cle tir seulement dans le chenal, celui-ci étant prétendu comme la
seule partie navigable dans ces eaux.
D'autre part il faut reconnaitre que le Gouvernement d'Athènes
rie poursuit pas toujours la thèse concernant la zone inle,na-
iicnally f~eejusqu'aux dernières conséquences. Le Gouvernement
albanais s'étant plaint du séjour de toute une escadre grecque

4 (six vaisseaux de guerre) dans lesdites eaux le27 octobre 1945, ce
fait n'a pas étécontesté. Quoiqu'iI s'agissiiit encore une fois de la
zone iwter4zalionallylrec, Je Goiivernemeiit d'Athènes a répondu.
cette fois-ci comme suit :« (3) A partir du 27 octobre 1945, date.

mentionnée ci-dessus, le ministère grec de la Marine a donné des
ordres interdisant même le simple passage de navires de guerre
grecs par le canal. Le but de ces ordres était d'éviter toute possi-
bilité de malentendu. i)
Ainsi, mêmeun État riverain reconnaît dans le canal un 6tat
de neutralisation. Mais, si le Gouvernement d'Athènes a acceptk
ce nzodus vivendi,il n'a pas respectéIa paroledonnée (voirannexe I)..
b) Les thèses si libéralesque professe le Gouvernement d'Athènes
en ce qui concerne la nature des eaux territoriales albanaises, ne.

l'empêchentpas de se montrer rigoureux s'il s'agit de ses propres.
eaux. Toujours suivant la. lettre précitée : cLc 7 décembre 1946,.
à 21 h. 15,un destroyer albanais rt pénétrédans les eaux territo-.
riales grecques en compagnie de deux navires à moteur qui se sont.
approchés jusqu'à I.jûû mètres de Cassiopi. Ayant essuyéle feu
des postes grecs, ils se sont retirés en direction de l'Albanie. ».
Cette prétention du Gouvernement d'Athènes n'est qu'une pure-
calomnie car, comme il a étédit plus haut, l'Albanie ne possède.
aucun destroyer.
Pas besoin mêmeque les bateaux albanais passent par les eaux
territoriales grecques pour que le Gouvernement d'Athènes se
préoccupe de leurs mouvements :dJapr&sla lettre du 24 avril 1947-
du représentant permanent de Grèce, suivant la lettre prbcitée du.
IO mars 1947, déjà le fait que la vedette du port de Sarands se

mouvait dans les eaux territoriales albanaises, est considérépar le
Gouvernement d'Athènes comme un incident qu'il est necessaire
de porter à la connaissance des Nations Unies. Ainsi : iiDans
I'aprhs-midi du z avril 1947, on a aperçu une unit& garde-c6tière.
faisant route de Santi-Quaranta à Tetranissia et retour ; en outre,
le soir du 4 avril1947 u,ne ruiitégarde-côtière de Santi-Quriranta
a naviguétout près des eaux territoriales grecques et est rt:tourn&
à Srinti-Quaranta. 1)

30. - L'incident qui est survenu le 15 mai 1946 aux croiseurs.
britanniques Orion et Szlperb dans les eaux albanaises du canal
nord n'est donc nuIlernent ni le premier incident ni uri incident-
isolé qui se serait passédans ces eaux jusqu'à cette date. Cet inci-.
dent est premier et isoléseulement dans ce sens que c'estle pre-
mier qui a étécausédans les eaux albanaises par les navires bri-.
tanniques. En affirmant que iien fait jusqu'au mois de mai 1946
des navires de toutes sortes empruntèrent le chenal sans opposi-
tion de la Grèceou de l'Albanie M,le Mémoire(par. 13)fait abstrac--
tion d'une façon trop arbitraire de tous les incidents survenus

dans lecanal nord avant le 15 mai 1946 et qui ne touchaient pas
les bateaux britanniques. Pourtant le représentant britannique Iiii-mêmeen parlant du trafic dans le canal iiord reconnait que
irce trafic aurait d'ailleurs étéplus intense sans la regrettable
situation politicluequi règne dans les régions frontalières de
l'.Albanie et de la Grèce1)(voir annexe 23 brit., p.213).Pour voir

clair dans l'incident survenu aux riauires britanniques le 15 mai
1947 ,l est donc nkcessaire de connaître autant que possible toutes
les circonstances dans lesquelles un tel incident s'est produit.
Ainsi bien avant le 15mai dans le canal nord dc Corfou il existait
un état de tension causé par la Grèce et qui n'était nullement
fax-orableà la navigation dans ce canal. Parmi les divers genres de
bateaux qui passaient par les eaux albanaises il y en avait qui,
nec ou sans drapeaux, venaient y effectuer des coups de main
piratesques et des violations de la souveraineté nationale de
l'Albanie.

L'incident du 15 mai 1946.
(rld paragrnplic.14, paragraphes 88, 89 du Mémoirebritannique,
annexe 6, doc. I-VI.)

31. - L'exposé de l'incident du 15 mai 1946présentédans le
Mémoirebritannique ne répondpas àla réalité.En fait, à la date du
15 mai 1946 à 8 h.30,en plein jour, deus navires de guerre incon-
nus, sans battre pavillon, naviguaient dans leseaux territoriales
albanaises, venant du nord, en direction de la baie de Saranda.
Au moment où ils SC trouvaient près des rivages de la baie de
Limioni ils changèrent brusquement de route et pénétrèrentdans
les eaux intdrieures albanaises vers lport de Sarandn. Les gardes-
cijtes albanais leur firent signe de s'éloignermais en vain puisque
les navires de guerre n'ont pas répondu aux signes conventionnels
eE ont poursuivi leur chemin en direction de Saranda de sorte que
les gardes albanais furent obligésde tirer quelques coups de sernon-

ci:. Les navircs dc guerre arborèrent alors leur pavillon et furent
reconnus comme des navires britanniques (voir annexe no5).
Ainsi que le Gouvernement albanais l'a fait connaître par ses.
notes du 21 rnai 1946 et du 19 juin 1946, l'incident du 15 mai eut
lieu et futcausd daiisdes circonstances déterminées mentionnées
plus haut et dont lc Gouvernement britannique avait une entière
ci~nnaissance.Déjà le 29 juille1945 le généralHodgson, dans un
rapport secret, disait entre autre:((Nous avons requ confirmation
de l'incident reporté dans le rapport politique de laM. M. B. na g
. du 27 juillet, appendicA, annexe I,et causépar cleiixnavires grecs
qui, approchés de Saranda, ont tiré des coups de fusil sur la côte
albanaise. Les incidents pareils à ceux survenus paraissent être
causés par des él&mcntsgrecs irresponsables ou peut-être par des
Albanais ayant désert6les rangs de l'armée iintionrile albanaise et
trouvé refuge en Grèce. )i[Annexe II.)

32. - L'incident du ïj mai 1946 fut provoqué par les navires
britanniques eux-mêmes. L'acte des deus navircs de guerrebritanniques qui, saris battre pavillon et sans répondre aux
avertissements des gardes-côtes albanais, avanqaient démoiistra-
tivement dans les eaux intérieures albanaises vers le port de
Saranda, ne peut ètre qualifié autrement que coinmc un acte de
violation prémédite.
La déclaration du représi:ntarit britannique au Conseil de SCcu-

rité selon laquelle les navires britanniques se trouvaient A une
distance de 5.000 yards est fausse. Leur position était d''environ
800 mètrzs du littoral et niêmejusqu'à 200 de la cote quaiid ils
passèrent en face du nionastére de Saint-Georges,
D'autre part, la position des navires britanniques désigne<sur
la carte à l'annexe 7 du Mémoire,lorsqu'ils furent l'objet dutir de
la batterie, est absolument inexacte. Les navires se trouvaient en
réalité à presque 800 mètres des rives de Limioni, donc approxi-
mativement à 2 milles marins de la position indiquée dans le Mé-
moire britannique. De même,la batterie qui a tiré contre les deux

croiseurs ne se trouvait pas ill'endroit marqué sur la carte britan-
nique (annexe 21) au sud du port de Saranda, mais au contraire à
l'ouest du port sur la colline de Lirnioni (voir annexes nc5 j et 131,
L'incident est éclairépar l'échange de notes qui eut lieu etitre
le Gouvernement albanais et le Gouvernement britannique du
18 mai 1946 au z août 1946 (voir annexe 6 britaiinique).

33. - Le Gouverncineiit albanais n considérél'incident comme
a un incident regrettable ...causé dans les circonstances ci-dessus

mentionnées >i.Par contre, le Gouvernement britannique mécon-
naît les droits légitimes cle l'Albanie et, par sa note du z août,
déclare que ((le Gouveniemeiit de Sa Majesté nc reconnaît à la
Puissance territoriale intéressée aucun droit d'exiger I'ncconi-
plissement de conditiotis avant d'autoriser l'entrée dans les eaux
territoriales. Dans cescirconstances, le Goiivernernent de Sa R1:ijesté
ne saurait considérer cointne satisfaisante la réponse que lc
Gouverrlernent albanais ;ifaite à sa dernière communication et il
ne saurait admettre que Ics navires britanniques passaiit à travers
le détroit de Corfou dussent clonncr notification au préalalile de leur

passage aux autorités a1ban:iises n,et il finit par une menacc directe
disant :((En outre, le Gouvcnie~nerit albailais prendta ~iote que
si des batterics côtières alb;~naises ouvrent le feu à I'averiir sur les
navires de Sa Majesté passant par le Ilétroit de Corfou, ces vais-
seaux rendront le feu. 11(Mhoirc britannique, annexe 6 ;note du
2 août.)
Le Gouvernement britannique essaie d'appuyer cette yréten-
tion pour le moins infondée sur Ie principe du passage inoffensif
et sur l'idée que le canal nord de Corfou est une grande ((route de

trafic maritime international 1)En fait, comme il est démontré
amplement dans le premier chapitre du présent Contre-Ménioire,
le canai nord de Corfou n'est qu'une \-oie de trafic latérale d'im-
portance secondaire et liniitée. Quant au principe di1 passage inoffensif, le Goul-erncinent britannique lui-même reconnaît, bien
qu'en passant, l'existence (d'un droit particulier de cette nature
qui doit, cn toiit cas, et vii le passage à travers Ic détroit, être
sf:rictenierit limitén (Mémoircbritannique, par. 88).

34. - Le Gouvernenient albanais a déclaré reconnaître et
i~:specter le principe di1 prissagc innocent, rnais il ne peut tolber
que l'on se serve des eaux intérieures albanaises du port de Saranda
dans le but de porter atteinte à la sécuritéet à la souverainete de
iJJi?tat.
En réalité,le Gouvernement albanais, à la suite des provoca-
tions réitérées des navires grecs et d'autres navires inconnus, a

demandé, par la notification du 17 mai 1946de l'ptat-~ajor général
de l'armée nationale, afin d'éviter des incidents regrettables, que .
les navires étrangers ne pénètrent pas dans ses ports sans un
ai-ertissement préalable ou sans son autorisation.
La demande du Gouvernement albanais non seulement ne peut
êrre considéréecomme une violation di1principe du passage inof-
fc:nsif mais au contraire, vu les circonstances déterminées dans
lesquelles elle' étéfaite, elle serà la juste application de ce prin-
cipe, aide à la coilcilintion de ce principe avec celui de la sécurité
ci:dc la souveraineté dc l'gtat. Cette demande du Gouvernement
albanais est encore confirmke par les dispositioi~s de l'article 3 du

projet de convention de In Conférencede La Haye en 1930,
Mais le principe du passage inoffensif considbrédans son véritable
si:ns,reconnu et respecté par le Gouvernement albanais, n'a rien
A voir avec les p:issages provocateurs et rncnaçarits des navires de
guerre britanniques c:t en aucune inanihre il ne peut senrir pour
appuyer la plainte du Gouvernement britannique contre l'Albanie.

3j. - L'échange de vues entre Ie Gouvernement albanais et
le Gouvememcnt britannique dont les élérncntsessentiels vien-
nent d'êtreexposésdémontre que mêmele Gouvernement britan-
nique ne considérait un seul instant les coups tirés lc15 mai par la
batterie albanaise commc dirigés sur ses deux croiscurs en tant
que britanniques. Après avoir reçu l'explication du Gouvernement
al.banais du 21 mai 1946,le Gouvernement britannique s'en prencl
au commandant de la batterie albanaise comme incompétent
(Mémoirebritannique, annexe6, document IV, par. 5).
Présenter l'incident du 15 inai 1946 comme un ((malentendii

regrettable envers Ies bateaux de la Grande-Bretagne ii(cf. note
albanaise du 21 mai 1946) estsans doute la seule manière de voir
rependant à la véritéhistorique. Le Gouvernement albanais n'avait
aucun intérêt à faire tirer sur les vaisseaux de guerre britanniques
oii sur tout autre navire étranger. Entre le Gouvernement de
l'Albanie et le Royaume-Uni, justement en mai 1946, les relations
diplomatiques normales étaient sur le point d'êtreétablies.
Aussi le Gouvernement albanais s'est-il efforcé d'exposer l'inci-
di:nt du 15 mai tel q11'iétait survenu et ill'a considérécommeregrettable. Dans Iri réponse à la protestation britannique, le
Gouvernement albanais a donnétoutes les explications nécessaires :

tout en protestant qu'il n'y avait aucune intention de sa part
d'attaquer les navires britanniques, ilexprimait meme l'espoir
que ((l'incident de Saranda ne doit pas êtreconsidkrécornnie uri
obstacle pour l'échange cles représentants diplomatiques et le
reriforcement davantage de l'amitié qui existe entrc Ies deux
pays il.(Mémoirebritannique, annexe 6, docunlcnt III, in fi?$e.)
La deuxième note du Gouvernement nlbariais en date du
19 juin 1946 est irispirCedes iaemes sentiments.
A cette bonne volonté persistante du Gouvernernent albanais,
le Gouvernement britannique a répondu par la menace contenue
dans la note du 2 août. D'un simple incident regrettable dii au

mépris des régiesles plus élémentairesdu trafic maritime et de la
souveraineté territoriale de l'État de la part des navires de guerre
britaruiiques, leGouvernemeiit britannique a tir6 prétexte pour cn
faire une question politique.
Ainsi, à la suite de l'incident du Ij mai xg46, il n'a plus été
question de rétablissement de relations diplomatiques entre les
deux pays. En outre, le Gouvernement britannique n'a pas omis
une seule occüsion d'exercer son influence au détrimend tes inté-
rêts albanais, partout où l'occasion s'est prdsentée. Ainsi, entre
autres, la participation de l'Albanie à la Commission Medzon s'est
trouvée obstinément entravée par le Gouvernement britan~iiqiie.

« L'explication était trks simple, la question se trouvant souniise
à.l'examen du Cornite au inoment oh l'on a tir6 sur dcs navires
britanniques ;l'examen de la question albanaise n'a pas alors été
poursuivi. J)(Captaiii NichoIs, d'après les procès-serbaux de la
3zmcséance du Comitécentral du 14 novembre 1946, par. 337.)

36. - Depuis l'incident survenu le 22 octobre aus contre-
torpilleurs Sauvtarea ct Volage, le Gouvernement britannique
essaie de se servir de l'incident du Ij mai comme d'un moyen indi-
rect pour soutenir que le Gouvernement albanais est responsable
de l'accident du 22 octobre. Pour une telle fin, bien entendu, l'inci-

dent du rg mai doit maintenant être interprété tout autrement
qu'auparavant. Ainsi aujourd'hui, d'après le Mémoire : ((di1 fait
que le premier avis qu'ait requ le Gouvernement du Kojrnume-Uni
d'une prétention alléguéeà restreindre le passage fut l'attaque
outrageuse de l'Orion et du Superb, le Ij mai 1946 1).Encore :
« En fait, cette erreur sur les droits généraux d'un État, selon le
droit international, est Ia seule explicationque l'on puisse imaginer
de l'attaque de d'Orionet du Setflerb,le 15 mai, ainsi que tle la com-
plicité albanaise quant à l'établisseinent d'un nouveau champ de
mines non signalé dans un chenal déminé, utilisépar les navires
étrangers. >)

La raison suffisante pour expliquer le « malentendu regrettable >)
du 15 mai 1946 n'est donc plus l'incomp6teiice de l'autorité locale. COSTRE-~IÉJIOIRE DU COUVERSEMEKT ALBANAIS (j VI 48)
5 j
Les coups prétendus en direction des deux croiseurs auraient été,
d'après la manihre de voir actuelle du Gouvernement britannique,
tirés par le Gouvernement albanais lui-même. Iln'est plus possible
que le pavillon britannique des croiseurs aurait été, à regret, iden-
tifiécrtrop tard )i.Aujourd'hui, the only expEalzation serait une
politique erronéepoursuivie par le Gouve~nement albknais.

37. - Contrairement à cette explication donnée par le Mémoire
britannique, le Gouvernement albanais est convaincu qu'en réalité
l'incidentdu 15 mai révèlequela violation des eaux albanaises par

lesnavires de guerre britarlniques le 15 mai 1946 n'est pas un fait
accidentel et isolé,mais il se rattache à toute cette politique hostile
.de la Grande-Bretagne contre l'Albanie et sous cet angle il est
inséparable des incidents du zz octobre et des rz et 13 novembre
1946-
Tel est le sens réelde l'incident du 15 mai ; c'est la première de
7;~sériedes provocations de la marine de guerre britannique contre
la sécuritéet la souveraineté de l'État albanais.

Faits imaginaires entre le15 mai et le 13 novembre 1946.

(Ad paragraphes 24, 26 du Mémoirebritannique.)

38. - A l'appui de sa plainte, le Gouvernement britannique
invoque, à part l'incident du 15 mai, un nombre de circonstances
cilmme preuves indirectes telles que la vigilance (ispéciale nexer-
ciie par les gardes-côtes albanais, l'interruption du trafic de la
ligne yougoslave et l'hydrolant américain du 14 novembre 1946.
Le Gouvernement britannique suppose que c'est dans cette période
pr.4cédan.tle 22 octobre 1946, qu'un champ de miiies près de
Saranda aurait étéposépar le Gouvernement albanais ou avec sa

connivence ou sa connaissance.
Toutes ces ailégations ainsi invoquées ne sont que des construc-
tionsimaginaires et, quant leur valeur de présomption, elIcsseront
discutées plus loin.En tant que fait,le Gouvernemcnt albanais est
en mesure de nier catégoriqucrnent leur existence. Le Gouverne~~ient
albanais n'a jamais faitposer des mines dans les eaux de Saranda ou
ailleurs aprèsle 15 mai 1946, ni avant cette date, et il n'a jamaieu
connaissance d'une telle action. Aucun service de vigilance ((sp6-
cialc in'a étéorganisépar lui ni avant ni aprésle 15 mai 1946,dans
la régionde Saranda. Il ne s'est passérien d'imprévu avec la ligne
maritime commerciale yougoslave après le 24 septembre 1946
et aucun navire américain n'a rep6rédes mines près de Dune le
14 novembre 1946.

39. - Le Gouvernement albanais base sa politique sur des
principes de paix et de collaboration internationale et déclare
fc~rmellement que ni da~is ln période en question ni aucune autre
f(:lis,il n'a fait usage de mines. II n'avait mêmepas de mines à sadisposition; de mêmequ'il inanquait des services techniques néces-
saires pour les manier. Des mines n'ont pas étéabandonnées en
.4lbanie par l'arméeitalienne ou allemande ;aucun dépôt de inines
n'a ététrouvé dans les ports ou ailleurs sur le territoire albanais.

Aiicunc mine n'a étélivrée ailGouvernement albanais de l'étranger.

40. - En ce qui concerne les mesures supposées d'une vigilance
i(spéciale n qu'aurait priscs le Gouvernemeiit albanais après le
15 mai 1946, le IIérnoirc se base sur la phrase suivante pronoiicée
par le représentant du Goilvernement albanais devant le Conseil

cle Sécurité :« A la suite des provocations successives tle navires
grec5 le Gouvernement albanais avait pris des mesures de vigilance
contre de nouvelles violations de la souveraineté de l'litat alba-
riaisii(Mémoirebritannique,annexe 23, p.223). Le Mémoire(par. 33)
considère cette déclaratioii du représentant du Gouvernement

aIbanais comme « admission par l'illbanie d'une vigilance spéciale
exercée par elle sur ses côtes et les eaux adjacentes 11et dans ses
conclusions (par. 96, no z,12'1e.), il se rkclame des{(mesures spéciales
de vigilance prises par le Gouvernement albanais durant les six
mois qui précédèrent les incidents ii, c'est-à-dire l'incident du

22 octobre 1946.
Or, le terme i(vigihnce spéciale iin'est même pas inentionné
dans la déclaration du représentant albanais. Le Conseil de Sécu-
rité, par cette déclaration du représentant albanais, a étéinformé
que des mesures de sécuritéont kt6prises pour parer 2 de nouvelles
vjolations du territoire albarlais ;il n'a pas 6témentionné en quoi
ces mesures consistaient. Sûrement, il ne s'ensuit .pas ipso facto
qu'il s'agit en l'occurrence d'une vigilance spéciale 1).
En présence des incidents continuels survenus dans la région

de Saranda, il va de soi que les autorités albanaises compétentes
consacreraient leur attention à la sécurité de la région. Toutefois,
des mesures ((spéciales 11n'ont pas étéprises. La carte des défenses
albanaises le long du canal nord (Mémoirebritannique, annexe 7)
faite illégalement par les services britanniques eux-mêmr:s, le
22 octobre 1946, ne peut pas servir de preuve, selon l'allégation du
Gouvernement britannique que des mesures de vigilance spéciale
ont étéprises le long de la côte. Mêmesi on se fic a la tarte britan-

nique, les ouvrages et armes qui y figurent sont des pIus normaux et
en nombre restreint. La vigilance exercéedans la régionde Saranda
n'avait en 1946 absolument rien de spécial. Il n'y avait pas de
services appropriés, des ouvrages, des instruments qui rendraient
possible une vigilance i(spéciale iiL'uniclue moyen de locomotion
sur mer à la disposition des autorités albanaises surtoutes ,les eaux
de Saranda était un canot àmoteur. II serait évidemment fantastique
de parler d'une vigilance spéciale dans de telles conditions, même si
les gardes exerçaient leur surveilIance jour et nuit, surveillance qui

serait limitée d'ailleurs aux simples sens huniains. COSTRE-JIÉJIOIREI)U GOUYERSEJIEST =lLHr\XAIS (1j V1 48) j7

Quant au préteiidii tir contre le remorqireur Tnnns(&Iémoire,
par. 24) le 29 octobre 1946, ainsi que contre uiic goélette Ie6 juin
1946, ceci est ilne piire invention qui ne correspond pas du tout à
In réalité.
La vigilance ilormale de l'Albanie le long cle ses côtes n'est que
l'exercicc cl'iinclroit lEgitimc internationalementreconnu, pratiqué
par tous les États et liéStroitemcnt à la sécuritt5du pays. Ceci est
encore plus néccssnircpour l'Albanie, qrii iiepossédepas une flotte
garde-côtière.

41. - Il n'y a certainemcnt aucun rapport entre la vigilance
normale de l'gtnt albanais et la prétention britannique relative
à la découverte des mines près de la côte albanaise.
En efiet, mêmesi on a décoilvert à la date du 13 novembre 1946
lt: pretendu champ de mines près de la côte albanaise, ce fait n'at-
teste aucunenient que les autorités alba~iaiscs devraient avoir

connaissance du mo~ijllageou dc l'existence de ces mines.
Les mines peuvent êtreposéestrès facilement près de 1s côte par
des navires étrangers cn échappant à la vigiIancc des gardes-côtes.
De telles opcrations sont régulièrement. effectuées durant la
nuit. Si l'on tient compte de ce que, depuis le 22 octobre jusqu'au
12 novembre, les nuits ont-étésombres avec de la tempête et de la
pluie, que les gardes-côtes ne disposent pas d'appareils spéciaux
tels que rt2flecteurs pour contrôler la mer pendant la nuit, que
l'Albanie est pri\.ée de navires spéciaux pou\.ant effectuer un tel
service, on ne peut pas exclure la pore des mines ciela part de tiers
à L'insudes gardes. Il faut prendre en considération à la fois que le
niouillage des mines peut êtreeffectuéaussi dans un très court laps

de temps. Par cxernplc, un bateau avançant à une vitesse de rq
niilles à l'heure, peut poser très facilement vingt-deux mines en
cinq minutes, lcs mines étant posées à un intcn.rille clIOO mèrres.
C:etemps peut 2trc encore plus coïrrt s'il y a deux ou plusieurs
n.avires pose-miiies.
Il serait en plus absurde d'affirmer que le bruit de la pose d'une
mine devrait être entendu par les gardes-cotes ; tout ceci d'ailleurs
est développéplus loin.

42. - L'accord maritime conclu le IO octobre 1946entre 1'Alba-
nie et la Yougoslavie a étémentionné par le représentant britan-
iiique devant le Conseil de Sécuritédans un ordre d'idées suggestif
suivant :((1.eIO septembre 1946, la Yoiigoslavie et l'Albanie ont
conclu un accord maritime prévoyant, entre autres, l'institution
d'un service de navigation régulier entre les ports de mer yougo-
slaves et albanais, :illant de Zadar, au nord, à Saranda, au sud. Cet
accord ayant étéconclu, on pouvait s'attendre à ce qii'il fût mis à

exécution ; pourtant, d'après les informations reçues par mon
Gouvernement, la dernière escale qu'un navire ait faite à Saranda
remonte au 24 septembre. r (Mémoire britannique, annexe 23,
p. 215.) Or, l'article 3 de l'accord stip:<(Le point de départ tie la ligne
institutée par le présent arrangement sera le point y_ougoslave
le plus septentrional. Elle suivra l'itinéraire Zadar- Sibenik -
Dubrovnik - Zelenika - Saint-Jean dc Medua - Durazzo -
Valona et aura comme point termillus jacîrltntif le port albanais
de Santi-Quarniits. » (Annexe g.)
A la lumière de ce texte, il est évident que les faits co~icernnnt
le prétwdu arrêt de la ligrie maritime cn question se sont passés
tout autremciit de ce que le Gouvernement britannique s'imagine.
Il n'était nullement prkvu, en vertu de l'accord lui-même,que les
bateaux de la ligrlcfaçsent escale au port de Sarniicrégulièrement.
En outre, l'allégation britannique est entièrement contraire A
la réalité,mêmeaprès le 24 septembre, les bateaux yougoslaves ont

continu6 à faire escaleà Saranda.
43. - En ce qui concerne l'hydrolant américain diffusé le14 no-
vembre 1946 ,elon lequel les navires a~riéricainsauraient repéré
des mines flottantes dans les eaux de Durazzo, c'est Ià une siinple
calomnie du Gouvernement américain contre l'hlbaiiic le jour du
retrait définitif de la mission américaine en Albanie et en vue
d'appuyer la violation des eaux albanaises perpétrce par la marine
britannique le jour préc6di:iit.
Toute la prétention du Gouvernement britannique affirmée

dans le paraeaphe 24 du 3fémoire n'est donc qu'un rassemble-
ment et une séried'allégations imaginaires ct sans valeur qui ne
peuvent pas donner mêmeune apparence dc probabilité à l'accusa-
tion principale britannique et qui ii'ont aucun rapport avec celle-ci.

L'incident du 22 octobre 1946.
{Ad paragraphes 14-18 di1 Mémoirehritaiiiiique, 92-96, n" 5.)

44. - C'était toute une escadre de bâtiments de guerre britan-
niques, coniposéede quatre unités dont deux croiseurs, qui entra
le 22 octobre vers 12 Iienres dans les eaiis albanaises au sud du
canal nord de Corfou pour les quitter vers ini~iuit en rebroussant
chemin. Cette escadre dc guerre entra dans leseaux albanaises sans
aucun préavis ou information quelcorlque donnée au préalable aux
autorités albanaises, bien que le Gouveriiement britannique, ainsi
que d'autres gouvernements, dès le mois de mai 1946, eût pris
connaissance de la coinmunication de 1'Etat-Major général de
l'armée nationale albanaise, selon laquelle les navires étrangers
(ine devaient pas naviguer dans les eaux territoriales albanaises
sans notification et sans la permission du Gouvernement albanais n.
(Mémoirebritannique, nnizexe 23, S/3oo, p. 314.)
Ce passage de l'escadre britannique est en contradiction avec la
déclaration du représentant britannique nu Conseil de Sdcurite
selon laquelle, à la suite de l'incident 15 mai, les navires britan-
niques ((recure~it ordre exprès de ne pas rentrer en empruntant la partie nord du détroit, mêmesi c'était la route la pIuscommode,
alin de parer à toute possibilité de nouvel incident tant que les
espritsne seraient pas calmés B(voir annexe britannique 23, p.217).

45. - Ainsi, le Gouvernement britannique a délibérément
oinis d'informer au préalable le Gouvernement albanais du passage
di:son escadre par Ics eaux albanaises le 22 octobre 1946, n'ais 9
la. suite de l'accident survenu ce jour aprEs midi à ses coritre-
trirpilleurs Saumnrez ct Volage, il aftirme que le Gouvernement
albanais devait le savoir à temps. Le Mémoire (par. 92) fait sup-
poser que le programme de la croisière entreprise par l'escadre

britannique &tait connu du Gouvernement albannis. D'après ses
conclusions (par. 96no j),leGouvernement albanais ou sesagents ont
omis de mettre l'escadre en garde contre le champ de mines bien que
sachant que les navires de Sa Majestéallaient passer par le chenal
d6rninédu nord de Corfou. Dans un tel ordre d'idées, le président
britannique du Comité central, Captain Nichols, a encore affirmé
d'une façon particulièrement positive : le 22 octobre 1946,après
que le Gouvernement grcc comme le Gouvernement albanais
eurent étéavisés bien j.temps que des navires britanniques pas-
sttraient par le canal dans la direction du nord, dcux des contre-
torpilleursont heurté des mines ))(séance du Comité ccrltral du

3.1octobre 1946, par. 316, no 7).
Or, toutes ces affirmations et conjectures ne répondent pas aus
faits. Ni le Gouvernement albanais ni ses autorités localcs n'étaient
informés au préalable du passage de l'escadre britannique par ses
eaux le 22 octobre et n'en avaient aucune connaissance. La décla-
nition de l'officier naval britannique, président du Comité central
iriternational, était fausse. Le Gouvernement albanais non seule-
nient n'était pas informe du passage de l'escadre britannique dans
le canal nord de Corfou le 2s octobre 1946 ien temps voulu 11mais il
ne l'était point di1 tout. Cet état de choses nc saurait êtretrouvé
surprenant après I:inote britaiinique du 2 aoîit1946. Ce qui est
siirprenant, c'est que lc reprdsentant du Gouvernement britani~ique
dans le comité international compétent où il était chargé d'une

n:sponsabilité particulière, ait pi1donner au comité cette informa-
tjon fausse. Naturellement, à cet instant, l'information était bien
susceptible d'exercer son petit effet sur les membres du Comité
central. Cette méthode du Captain Nichols est b retenir. On verra
qu'elle a étéemyloyec encore dans la suite par d'autres représen-
tants de l'Amirauté britannique.

46. - Contrairement à ce qu'affirme le Gouvernement britan-
nique dans le paragraphe 15 du Mémoire au sujet du passage
innocent et de i(Ia formation normale de passage i)de l'escadre
britannique, le 22 octobre quatre navires de guerre britanniques
ont pénétré dans leseaux territoriales albanaises et dans les eaux
iiitérieures jusqu'd une distance de 1.500 m. du port dc Saraiida.
Les navires ont étéapcrçiis pour la premiére fois vers 13 heuresau sud du cap Long, Ie temps, étant nuageux, ne permettait pas
de les apercevoir plus loin. La côte de Corfou était mêmedifficile-
ment visible. Les navires i5taient chargés de troupes ct armés de

canons pointés en direction de la côte ; ils avançaient cri formation
.de combat : au cap Long, en formation de losange, les deux croi-
seurs étant l'un en téte et l'autre en arrière ; à partir du monastère
Saint-Georges, ils adoptent une formation parallèle, lcs deux
croiseurs étant chacun i gauche des contre-torpilleurs, et seule-
ment à partir de la pointe Denta les navires changent de nouveau

leur formation et avancent en ligne de fiIe d'unc fai;o~ialternée,
chaque croiseur suivi d'un contre-torpilleur (annexe 7). Contraire-
ment à I'affrrmatioii britannique (par. Ij du Mémoire),.l'escadre
de guerre à partir de la pointe Denta ne naviguait pliis dans le
prétendu chenal déminé, mais bien en dehors de celui-ci ,dans les
eaux intérieures de la baie cle Saranda. (Voir annexe no 12.)
A la lumière de ces faits, on ne peut pas prétendre que lc 22 octo-

bre il s'agissait d'un passage innocent, mais au contraire d'un pas-
sage de caractère ofiensif. Le Gouvernemi:nt britannique lui-même
avoue que ((les équipages étaient aux pustes de combat ,)et que
((l'appel aux postes de combat est simplement la manifestation
d'un état d'alerte défensive 1)(cf. annexe britannique 23, p. 2x7)
et le co~nmandant et chef britannique l'amiral Willis, dans un com-
muniqué diffusé par l'agence Reuter en date du 26 octobre 1946
(voir annexe 8), ((les navires de guerre britanniques &aient prêts

à faire feu ».Ccs faits confirment la menace contenue dans Ia note
du 2 août x946, qui déclarait :i(Si des batteries côtières ;ilbanaises
ouvrent Ie feu a l'avenir sur les navires de Sa Majesté passant par
le Ilétroit de Corfou, ces vaisseaux rendrcint Ie feu. >i(Voir annexe
britannique 6,p. 72.)

47. - Lcs navires britanniques n'ont pas suivi une route nor-
male et directe, et mêmeils n'ont pas suivi l'itinéraire tracé sur la
carte de l'annexe 7 ;ils ont longéde très près la. côte albanaise et,
à partir de la pointe Denta, ils ont pénétrédans Ics eaux intérieures

de Saranda jusqu'à 1,500 mètres du port, changeant ensuite de
direction vers le cap Baladlia.
Il est en outre important de relever que, à l'insu et sans le
consentement du Gouvcrneinent albanais et 'en contradiction avec
ce qui a étéexposé par son représentant devant le Conseil de Sécu-
rité, Ie Gouvernement britannique a continuellement modifié les
lignes Médriconnues 18/32 i:t18/34 en les rapprochant continuelIe-
ment de la côte albanaise.
En considérant que I'escadre britannique a étéaperçue au cap
Long à 13heures et que 1't:xplosion du Saumarez a eu Iieu vers

rg heures en face du cap Baladha, l'affirmation britannique que les
navires avançaient à IO nwuds à l'heure par la route i-iormale et
directe, est fausse parce qu'il ne faut pas deux heures pour effec- tuer un pareil trajet, et cela prouvc qu'entre temps ils se ivraiait
à des manŒuvres et à des activités illicites d'espionnage.
48. - Vers xj heures, lorsque les navires de têtese trolivaient en

face de Raiadha, à une distance de r.ooo m. environ de la côte, une
explosion eut lieu à bord du sccorid navire et I'on vit s'en échapper
di: 1;~fumée. La vedette du port de Saranda avec l'oficier du port
sortit et s'approcha d'un des bfitinients britanniques pour s'cnqué-
rir de ce que l'escadre voulait daiis leeaux albanaises et aussi pour
prêter aide s'il y avait lieu. Aucurlc réponse ne fut donnée par
IJt5quipageà l'officier albanais et la vedette est rentrée au port sans
avoir obtenu aucune explication concernant l'escadre et sesmouve-
ments. (Voir annexe no 7.)
i
49.-La photographie du navire Sazrrtinrez,qui, selon le Mémoire,
serait prise trente secondes après l'explosion, est caractéristique
pour lemanque de véracitédes affirmations et des documents fabri-
qiléspar les Anglais. On voit sur cette photo, a part le Snztmarez,
deuxautres navires et quelques petites chaloupes ayant des marins
à bord. Vu le fait que le il8azirilitisse trouvait quelques centaines
di: mètres devant le Saztnznrezet que le troisième navire, selon les

affirmations anglaises, était à deux milles derrièrele Sazir~zarei,est
évidcnt que trente secondes après l'explosion les trois navires ne
pouvaient pas se trouver au mêmeendroit, étant donné que le pre-
mier s'éloignait vers le nord-ouest tandis que le .troisième devait
mettre de douze à quinze niinutcs pour arriver à cet endroit. Et
encore on se demande comment le Snzr~itnveza pu, trente secondes
après l'explosion, se photograpiiier soi-meme de côte. II est clair
qiie la photographie du Saî~ntnrezn'a pas étéprise trente secondes
al?rèsl'explosion et qu'elle ne prouve pas qu'il s'agit des navires
prétendûment endommagb le 22 octobre.

50. - A part la mission de la vedette du port décrite plus haut,
lors du séjour de l'escadre de guerre britannique dans les eaux
albanaises le 22 octobre 1946, les autorités côtières albanaises se
sont bornées à observer ce qui se pass:~it 5 leur proximité, jusqu'à
la tombée de la nuit.
Conformément a cet état des faits, Ia note britannique du

9 décembre 1946 a constaté correctement : <A cette occnsion lcs
b;ittcries albanaises n'ont pas ouvert lc feu. II(Voir par. 12 de la
note.) C'est seulement plus tard, lc 18 février 1947 ,ue le repré-
sentant britannique devant le Conseil dc Sécuritéa déclaré : rA
h. 45, les navires de tête enteiidircnt deux rafales de mitrail-
leuse venant de Iacôte albanaise. a
jI. - Quant à la deuxième explosion qui aurait eu lieu à bord

du Volage, les autorités côtièr2s albanaises l'ignorent complète-
ment et n'ont entendu que la première explosion. Il importe dc
noter en outre que ni le Mémoire riil'annexe n'indiquent de façon
précise si cette prétendue esplosio~i a eu lieu al-ant ou après62 COKTRE-~~É~IOIRE DU GOUVERSE>IEST ALBANAIS (15 VI 48)
l'arrivée du Volageauprès du Slazrniarez, et cc que le Volage a fait

pendant ce temps.
52. - Le Gouvernement albanais ignore totaleincnt l'origine
de l'explosion ainsi que la nature et lagravité des prétendus pertes

humaines et dommages subis par les navires britanniques. Le Gou-
vernement albanais n'en a eu connaissaiice que par les notes du
Gouvernement britannique.
53. - Si, d'après l'allégation britannique, l'explosion du22 OC-

tobre serait survenue dans iin chenal déminéet ouvei-t à la navi-
gation, les incidents qui ont eulieu après la fin des hostilités et qui
continuent encore à se produire aujourd'hui dans des zones librcs
et cdraguées,suffisentlargenient à donner une explication. En effet,
des centaines de navires naviguant sur les routes de trafic inter-
national et déclaréescotnnie étant sûres pour la navigltion, ont
subi des incidents sans pourtant qu'aucun des pays riverains de
ces eaux ait étéconsidérécd~nmeresponsable.
Le journal Lloyd'sindique toujours un grand nombre d'incidents
pareils (voir annexe 15) et entre autres surtout le cas du navire
américain Cmsiotis Hzrdso?aqui, mêmeaprès l'incidentet malgré
toutes les précautions prises par quatre dragireurs passant devant

lui, heurta une seconde mine et enfin fut coulé.
Devant de tels faits incontestables, si les navires britanniques
naviguaient le 22 octobre dans le chenal, ce qui estcoiitestépar le
Gouvernement albanais, il n'y a rien d'étonnant s'il leur arrive
un incident et encore quand le commandant en chcf en Méditer-
ranéene prend aucune responsabilit6 de la sécuritéde la naviga tlon
dans cette zone. (Voir Iettre Hodgsori, annexe 3.)
Dans lc cas concret, d si l'explosion du 22 octobre est due à
des mines, ainsi que le prCtend le Gouvernement britannique, à
plus forte raison un incident peut se produirc puisqu'il faut bien
avoir en vue que l'escadre britannique naviguait en dehors du chenal
c'est-à-dire dans une zone quin'était pas draguéeet qui ne présente
aucunc sécurité pour la navigation. L'escadre britannique s'est
exposéepar ce fait mênieà tous les risrlues,

Le Gouvernement albanais rejette formellement l'allégation
britannique selon Iaquelle l'incident du22 octobre 1946est survenu
dans les eaux comprises entre leslimites du prétendu chenal déminé.

Les discussions diplomatiques entre Ie22 octobre
et le 12 novembre 1046.
(rltiparagraphes 19-21 du Mémoirebritaiinique.)

54. - A la suite de l'incident du 22 octobre 1946, le Gouver-
nement britannique fut très rapide à se décider et ila manifesté
sa décisionsans tarder.C'est déjàle 26octobre 1946 que l'ambassade britannique à Belgrade a notifié à la légation l'Albanie à Belgrade
d'une faqon laconique que ((les autorités de déminagebritanniques
procéderont bientôt au nettoyage du chenal 1)La note ne cherche
nullement l'accord avec le Gouvernement albanais pour rine telle
action britannique dans les eaux albanaises. Elle se borne & faire
connaitre ce que Ic Gouvernement britannique entend faire et qu'il
agira de son propre chef. La note britannique du 26 octobre ne ren-
fermemêmepas la moindre référenceàl'organisation internationale
de déminage compétente.
:Le hlémoirc essaie d'expliquer et de justifier cette décision du
Gouvernement britannique de la façon suivante :

~iIl était de nécessitéurgente d'établir Ia cause des explosions
et, au cas où cclles-ci auraient été provoquées par des mines, de
découvrir de quelles mines il s'agissait. 1)(Cf. paragraphe 19 du
Mémoire britannique.) Toutefois, rien n'ernpéchait d'atteindre le
mEme but d'accord avec qui de droit, c'est-à-dire avec le Gouverne-
ment albanais et ladite Organisation internationale.
Les déclarations du Captain Nichols, président du Comité cen-
tral, jettent de la lumièrc sur les vrais motifs de la note britannique
du 26 octobre 1946. Le Captaiii Nichols a ouvert la séance spéciale
du Comité le 31octobre 1946 convoquéspécialement pour délibé-
rer sur l'incident du22 octobre, en donnant un résuméde la situa-

tion résultant du faitque deux contre-torpilleurs auraient étéminés.
Ce résumécontient déjàplusieurs chefs d'accusation contre lJillba-
nie. L'Albanie, a dit le Captain NichoIs, est dûment tenue au courant
par les envois des cartes Médrique le chenal est ((une voie inter-
nationale >],toutefois, en mai 1946, les batteries ciitièresalbanaises
ont tiré sur les croiseurs britanniques, et maintenant cleux contre-
torpilleurs SC trouvent minés après que Ics Gouvernements grec
et albanais ont étéamplenlent informés du passage vers le nord
de la force navale britannique. Le Foreign Office a déjà informé
les Gouvernements grec et albanais de l'intention de procéder au
nouveau nettoyage du chenal nord de Corfou :((Des navires bri-

tanniques ont étéendommagés et l'on'eçtime que les Britanniques
doivent procéder à un nouveau dragage. a (Procès-verbal de la
31"e séance du Comité central du 31 octobre 1946, par. 316114.)
La majeure partie de ce résuméqui d'ailleurs, sur les points impor-
tants, ne répond pas aux faits (voir plus haut par. 45), aurait été
sans doute inutile si le Gouvernement britannique, en tâchant de
trouver la cause des explosions sunrenues, n'avait pas déjà jeté
ses soupçons sur le Gouvernement albanais. La discussion, suivant
Ie résumédu Captnin Nichols, a fait ressortir ces soupqons britan-
niques très nettement. Le membre sovietiquc du Comitéa soulevé
la rtécessitéde chercher d'abord I'accord du Gouvernement albanais.
((Le Captain Shandabylov estime qu'il incombe au Gouvernement

britannique d'adresser une demande à l'Albanie. Le Captain
Nic.ho1ssouligne que ce sont les Britanniques qui ont subi l'offense.
On a tiré sur des navires britanniques et des navires britanniquesont heurté des n-iines. Er1 tant que victimes, ce ne sont pas les 13ri-
tanniques qui présenteront la deniande. ii(Mémoirebritannique,
annexe j, paragraphe 321.) 11est évidcnt que, dans la pensée du
Captain Nichols, l'incident du 22 octobre 1946 est liéavec l'incident
du 15 mai 1946, la personne qtii cst responsabIe des mirics du
22 octobre 1946, ne peut êtrequc celle qiti a tirésur les navires bri-
tanniques le 15 mai 1946. Cette rnariièrc dc voir du Captain NichoIs

concernant l'incident survenu ails navires le 22 octobre 1946, doit
être bien imputée au Gouvernenient britannique lui-même. Le
président britannique di1 Comité central, alkant qu'il ce prononçât
de ladite façon, a dîi prendre contact avec s,on Gouvernelnc~lt, son
ComitésiEgeant d'ailIeurs à Loiidres.
En annonçant au Gouvernement albanais le a6 octobrc que
c les drag-tieurs britanniques procéderont bientôt au nettoyage du
chenal pi,le Gouvernement britannique veut donc délibérément
agir unilatéralement et seiil dans les eaux albanaises, parce clii'il
ne veut pas être gênedans Ia recherche des prétendiles prcu\-cs
contre l'Albanie.

Les résoltltionsdes coi7titésde diminage.

55. -- Dans le Comité cciitral et dans Ic Comité aiéditenanécti
il y avait des membres qiii n'avaient pas de pensée préjudicicllc
contre l'Albanie en ce qui concerne ln responsabilité pour l'incident'
du 22 octobre, et qui ne se prêtaient pas à disposer des clroits de
I',41bariiesur ses eaus sans l'accord préalable avec le Gouverncmeiit
albanais.
C'est le Comité méditerranéen qui s'est occupé le premier de
l'incident du 22 octobrc 1946. Le Comité discutait le 2s octobre
1946, d'une part, la nature des riiincs qui auraient pu êtrela causc
de I'nccidcnt, et, d'autre pirt,((les rncsures,qui doivent étrc priscs

pour prCvcrzir le retoiir d'un évéticmentaussi malheureux ii(pro-
cès-verbal de la séance, paragraphe 93). Les membres se rcrldaient
compte qii ilsera nécessaiie de deni:iiider le concours de l'Albanie
pour pouvoir procéder au nouveau nettoyage des eaux du canal
nord de Corfou et, ne pouv;int pas savoir combien de tcmps dure-
raient les négociations ce propos, prenaient en considération le
nettoyage d'un nouveau chenal menant à Corfou par la zoiie de
danger classée OB Y530. La résoIution adoptée par tous les rnernbres
présents demanda donc au Comité central ((d'inviter le Gouvernc-
ment albailais à approulver le déminage des parties des routes Médri
18/32 ct 18/34, qui passent àtravers ses e:ius territoriales ii(annexe

britannique 15, paragraphe 138). Eii outre, le Comité décida de
cornmciicer le nettoyage rieOBY au nord de lJîIede Corfou. Lc
Comité central discutait le 31 octobre ,1946 cette propositioii du
Cornite méditerranéen. Le représentant soviétique a fait observer,
entre autres, que ((les eaus territoriales des pays qui ne sont pas
parties à l'accord international relatif au déminage après la guerre,
échappent à la compéteiice de 1;idite Organisation 11(annexe bri-tannique 15, paragraphe 318/a), et finalement pour cette raison il
s'est prononcé contre la proposition du Comité méditerranéen.
Les autres membres du Comitépenchaientpour s'adresser à 1'Alba-
nie au sens de ln résolutiot~du Comitd méditerranéenet au nom du
Comitécentral. Ne pouvant semettre d'accord sur la question posée
par la résolutioiidu Comité méditerranéen, ilss'efforçaient, suivant:

leur présiderit, dc i(s'entendre sur la ligne de conduite iiet, le
~l!rnovembre 1946, ont adopté la rkçolution suivante proposée
par le président : (<i)Le Comitécentral estime que le détroit du
nord de Corfou devrait êtredéminéà nouveau lorsqii'il se présen-
tera une occasiorz favorable. - .ii )e Comité central n'est pas en
mesure actuellement d'exprimer une autre opinion sur ce point,
qui échappe à la compétence du Comité. 1) (Procès-verbal de In
31" séance du Cornite central du 31 octobre 1946, continuée le

13r et le 5 novembre 1946, paragraphe 326.)
j6. - Avant de voter pour cette résolution, le membre sovié-
tique du Comité s'est assuré si les conditions formant « l'occasion
faxarable )) comprenaient aussi le consentement albanais. (iLe

cap. Shandabylov ....rappelle qu'il n'est pas l'auteur des résolu-
tions précitéeset qu'il les avait acceptées seulement après avoir
entendu l'explication du cap. de v. Nichols, savoir que par l'expres-
sion ((lorsqu'il se préçentera une occasion favorable »,on entendait
également l'assentiment de l'Albanie. i)(Procès-verbal de la 33rne
dance du Comitécentral du 19 novembre 1946, paragraphe 3j0.)
Le Comité a enregistré la déclaration de son président dont il
est question ici, ainsi :« le cap. Nichols répondant au cap. Shanda-

bylov admet que l'expression ttoccasion favorable 1)signifie que
toutes les conditions soient généralement acceptables, y compris
I'absence d'objection de la part de l'Albanie i).(Procès-verbal de
1;i31mc séancedu Cornite du 31 octobre 1946, paragraphe 326.)

j7. - A la suite de l'incident du 22 octobre 1946, le Gouver-
nement albanais, le zg octobre 1946, a protesté auprès du Secré-
taire généraldes Nations Unies, iien le priant d'attirer l'attention
à ce sujet de l'rissembléegénéraledes Nations Unies qui était en
session II.
En protestant contre les procédésdu Gouvernement britannique
dans ses eaux, le Gouvernement albanais n'a pas donnéen même

temps son consentement à des procédésnouveaux sans le concours
des autorités albanaises. Sa note de. protestation du 31 octobre
adressée au Gouvernement britannique contre Ics violations des
eaux albanaises de la part des navires de guerre lc 22 octobre 1946
s'élèvecontre de pareils procédésarbitraires.
La réponsedu Gouvernement britannique du ro novembre 1946
se réfèreexpressement à la note albanaise du 31 octobre, mais
l'ignorant en fait elle notifie brutalement que « des navires britan-

.5 niques effectueront le 12 novembre un nettoyage des détroits )i.

Toutefois, cette deuxième note britannique en la matikre donne
quelques explications qui sont les suivantes :le nettoyage suivra
les décisionsunanimes prises le IC~novembre par le Comitécentral
de déminage; les zones qui seront nettoyées sont marquées sur
les cartesdu Comitécentral qui se trouvent déjàaux mains du Gou-
vernement albanais ; aucun navire ne sera stationné diin5 les eaux
albanaises ;le nettoyage sera fait de la même façonque le nettoyage
fait par des navires britanniquesen octobre 1944 et en févrie1945
auxquels le Gouvernement albanais, d'après le Gouvernement
britannique, n'a pas objecté. l

j8.- 11 suffit de comparer ces conditions indiquées dans la
note britannique du IO novembre avec les faits respectifs pour se
rendrecompte que chacune de ces raisons a étépurement ot,simple-
ment controuvée. En effetIa démarchebritannique était un p~océdé
de caractère essentiellement arbitraire et unilatéral parce qu'il
n'y avait pas en ce moment une décision du Comité central de
déminage autorisant le Gouvernement britannique à nettoyer
tout seul les eaux territoriales albanaises dans le canal nord de
Corfou, et il est vraiment cynique d'affirmer que le Gouverneinent
albanais n'avait pas fait d'objections pour l'esdragages d'octobre

1944 et de février1945 ,ont il n'avait eu nullement connaissance.
En ce qui concerne la mention concernant le non-stationnement
des navires britanniques dans les eaux albanaises, le navire-amiral
de l'escadre britannique lui-même, pourne citer qu'un exemple, a
stationné toute la journée du 13 novembre: 1946 dans les eaux
albanaises.
La note britannique du IO novembre est parvenue à la {onnais-
sance du Gouvernement albanais quelques he-es seulement avant
le commencement des opérations en question, mais, méme il la
dernière heure, le Gouveriiement albanais a fait un suprêrneeffort
pour empêcherIa nouvelle violation de ses eaux, en proposant au
Gouvernement britannique la formation d'une commissio~ mixte
qui déterminerait le chenal de navigation A nettoyer dans le canal
nord. En mêmetemps, le Gouvernement albanais a de nouveau

protesté contre chaque nettoyage entrepris sans son conse~ltement,
mais le Gouvernement britannique, au mépris des droits léiitimes
de l'Albanie, a rejeté la proposition albanaise, et préparait déjà
une imputation odieuse contre l'Albanie.

L'incident,des 12-13 novembre '1946.
(Ad paragraphes 22-23-26 du ~émoir; britannique.)

59.- Les événements qui se passèrent les 12-13 novembre
dans les eaux territoriales et intérieures albanaises du Détroit de
Corfou sont exposésplus loin dans le présent Contre-Mémoiresous
l'angle de la responsabilité du Gouvernement du Royaume-Uni COSTRE-JIÉJIOIR DEU GOUVERNEXENT -4LBAN.41S (15 VI 48) G7

pour l'invasion desdites eaux par les forces navales de guerre
britanniques. La question d'une telle responsabilité est celle que
pose l'action des forces britanniques des 12-13 novembre rg46
dans les eaux albanaises.
Dans cette partie du Contre-Mdmoire, lesdits événements ne
sont suivis que pour autant que le Memoire britannique s'y réfère
par rapport aux explosions survenues le 22 octobre 1946, en vue
d'établir la conncxitb entre les mines qui seraient la cause de ces

explosions et les mines que la marine britannique aurait découvertes
dans les memes eaux les 12-13 novembre 1946.
60. - N'ayant pas participé à cette action, le Gouvernement
albanais ne possède pas de sources propres pour connaître tout

ce qui s'est passé dans ses eaux les 12-13 novembre 1946, si ce
ri'est ce qui a pu êtreobservéde la côte. Toiitefoià,cette occasion
ce ne sont pas seulement les rapports oficiels di1 Gouvernement
britannique produits pour la première fois ail Conseil de Sécurité
qui relatent les événements.En prévision très précisedes décou-
vertes ((extraordinaires 1)que son action va amener, le Gouver-
nement britannique n pris visiblement des soins peu normaux a
ce que son procédé soitvérifié par des personnes independantes et
expertes en matière de mines. Les membres américains et français
du Medzon ont étéinvités à prendre part aux opérations des
12-13 novembre 1946comme observateurs, tandis que les membres

soviétique, yougoslave et grec ne l'ont pas été.L'importance que
lc Gouvernement britannique attachait à leur présence démontre
éloquemment que leur absence aurait compromis toute entreprise
pourtant de grande envergure. Des opérations d'une importante
force navale étaient prevues pour êtrecommencéesle 12 novembre
à 6 h. 30, mais ont étéretardées parce que les observateurs améri-
cains et français ne sont pas arrivés le II novembre comme ils
étaient attendus. 11 était important de recueillir aitleas!. un
observateur ; suivant les instructions, aucun navire nc devait
s'approcher à moins dc zo milles de la côte albanaise jusqu'à ce
cju'au moins un observateur 6tr:inger fût présent ii.Lc capitaine
de frégate Mestre de la marine française enfin arriva. Aussitôt

qu'atterri sur le pont du porte-avions Ocean à 12 h. 30 le
1.2 novembre 1946, l'ordre de commencer les opérations fut lancé. '
En fait un plan d'opérations minutieusement préparéavait été
établi par la marine de guerre britannique, qui avait envoyédans
le secteur, non seulement des dragueurs de mines, pour le prétendu
dragage du chenal, mais une véritable flotte de guerre se compo-
sant de croiseurs, de porte-avions et de sous-marins munis de tout
ci: qui était nécessaireà une opération de guerre de grand style.
(Voir annexe britannique 17 : Rapport du contre-amiral Kinahan.)

61. - A la fin cies opérations des 12 et x3novembre, la flotte
britannique opérant dans le secteur présenta des rapports des
commandants des unités. Ces rapports ne peuvent êtreconsidérésen aucune manière comme arguments valables i l'appui de la
thèse du Gouvernement britannique, étant donné qu'ils émanent
tousde la partie intéressée.En mêmetemps, s'efforçant de légaliser
tout ce qui était utile pour les besoins de la cause, on a appel&
d'urgence, comme il 3.étémentioiiiié pliis haut, un oficier de la
marine française, le capitaine Mestre, qui n'avait aucune qualité
officielle pourassister aux opér :tions.
Les rapports du capitaine Mestre, étant: pleins de coiltradictions

tant en eux-mêmcsqu'avec ceux des commnndants de la flottille
britannique, perdent toute valeur et révèlent clairement lc but
de toute l'entreprise de la marine de guerre britannique les 12 et
13novembre dans les eaux albanaises. Li:Gouvernemelit albanais
n'a eu aucune notification ni de l'organisation internationale ni
du Gouvernement français, avec lequel il est en relations régulières,
que le capitaine Mestre participerait ces opérations.

62. - De l'analyse détaillée qui sera faite ci-dessous de 'tous
les rapports, temoins et hypothèses en matière de rnines tirées
par le Gouvernement britannique de l'opération du r3 novembre,
on est porté 2 douter de la véracitédes faits ct d'autant plus de
la découvcrte d'un préteniiu champ de mines. Il est iiitéressant
de noter dès maintenant que, d'après le rapport du conimandant
Whitford (annexe britannique 17) en date du 14 ~iovcinbre, (tout
le personnel a étéaverti qu'il ne doit faire aucune allusion aux
opérations, sinon pour ilire qu'on a effectuéune opération normale

de deminage et que des mines ont étédétachée ), et puis le rapport
du com~nandant ajoute : (iBien que j'aie confiance que cet ordre
sera loyaleinent obéi, je désire attirer I'xttention sur lefait que
les circonstances qui ont accompagné le détache~nent des mines
sont bien connues de tous les oniciers et gradés des forces de démi-
nage y compris Icfaitque les mines ont étédétachéesdans un chenal
international et que la pose de ces mines reinontait évidemment à
une époquc rdcente. 1)
En se référant à ces deuxparagraphes du comniandaiit Whitford,
q:i a pris part aux opérations, il ressort nettenicilt que des.instruc-
fions ont étédonnéesde ne faire aucune nIlusion aux opérations
sinon pour dire qu'on a effectuéune operation nor~nale et que des

mines ont été détachées n,c'est-à-dire de dissimuler délibérén~ent
la réalite de l'opération, car si vraiment il s'agissait cl'unc opéra-
tion normale, point n'était besoin d'avertir le personnel.
A part cet ordre donné à tout le personnel, les officiers et les
gradés connaissaient encore certaines ((circonstances qui ont
accompagne l'opération net qui n'étaient pas connues par tout le
personnel.

63. - Le commandant Whitford avoue donc dans son post-
scriptum que l'opération n'a pas éténormale, et que des actes
secrets illégaux ont ét6 commis durant cette opératioii à l'insu
d'une partie du personnel, et, malgré la confiance qu'il professe àl'égard desofficiers et des gradés, il lais~e échapper son doute en
a-vertissant les autorités supérieures.
Un autre fait gui mérite l'attention est Ic message émanant du
commandement en chef britannique le 12 novembre et qui parle

de (la possibilité qu'il se trouve des rnines dans un rayon de 15 km.
près de In côte albanaise il(Voir annexe britannique 17, rapport
Whitford.)
Si on ajoute à ces faits l'affirmation du représentant anglais
qui, devant le ComitéMedzon le 25 octobre déjà,préjuge la nature
des mines devant êtrerécupéréesà l'avenir, en considérant que
les navires ont étéendommagés par des mines de contact, les
contradictions frappantes des rapports des commandants britan-
niques et du capitaine Mestre, la précipitation du Gouvernement

britannique à effectuer le dragage des eaux territoriales albanaises
sans l'autorisation du Comitécentral dc déminage et sans l'appro-
bation du Gouvernement albanais, les forces participant à l'opdrri-
tion i(Retnil iion est en droit de conclure que cette opération
de dragage avait un caractère tout spécial. Les faits se déroulant
ci3jour étaient suivis et observéspar tous les participants, le capi-
taine Mestre non excepté, à la lumière de l'hypothèse qu'on procé-
dait à la découverte d'un prétendu champ de inines secrètement
n.iouilléréceinment et formuler ainsi contre l'Albanie une fausse
j~nputation.

64. - II ressort de tous les rapports que l'aspect extérieur des
rriines coupccs n éténoté avec un intérêtparticulier. D'autre part,
Irtmanière cle faire les observations était bien diffdrente par Ies
différentespersonnes. L'amiral commaridar~t l'opérationn'a examine
aucune mine lui-même. Le commaiidant Whitford observait, sans
qu'il indique leur nombre, du bord du dragueur M7e.lfare((des
rriines passant présdu Welfare 1)C'est le capitaine Mestre seul qui,
en compagnie du lieutenant Phillips, M. D. O., a examiné huit
rriinesder netif mines coupées au cours des deux premières passes.

Le rapport Whitford contient seiil des indications [....] qui
concerne la position précise. En outre, nulle part ne se trouve
rrientionne de quelle façon ont étédésignés lespoints de ces posi-
tions.
Le rapport Kinahan note, nu sujet clc la première mine coupée
et remorquée :LCorfou, et en se référant au lieutenant Phillips,
que cette mine avait rune enveloppe propre et ne portant pas de
végétation soiis-marine ): les huit inines suivantes ((ont toutes
étésignalées comme étant d'un type analogue et selon toute appi-
rt:nce, récemment posées )).

D'après le rapport- ll'hitford, toutes les inines ((apparaissaient
entièrement neuves et l'on n'a observé sur aucune d'elles des
bernicles [ou] de la végétationmarine. On poiivait nettement aper-
cevoir la peinture rouge, les antennes des mines qui passaient près
du WeZfave et je puis personnellemerit cittester que toutes les minesconservaieiit pratiquement en état de fraîcheur leur couche dc
peinture noire r ; en ce qui concerne les pièces du mécaiiisme de
la première mine r6cup6~6e,ces pièces, d'après le commandant
Whitford, ((ne sont que légèrementrouilléeset le câble d'amarrage

est encore couvert de graisse en excellent état. Nulle part sur la
mine on ne trouve à Itext&r'ieurde trace de végétatioiirnaririe ou
de bernicles. La plaque du inéwnisme, à l'origine, portait uric très
légèrecouche de vase jaune. »
D'après le premier rapport Mestre, ((aucune trace ci'oxyclation,
ni de coquillages, ni d'herbes n'apparaissait sur elles. J'ai eu entre
les mains plusieurs pièces provenant de la premièrc mine qui n dté
désarméepar le M. D. Oficer : le détonateur, la charge primaire,

les antennes avaient tous l'apparence de pièces neuves. 1)D'après
le deuxième rapport hlestrt:, ((les marques peintes sur les mines
étaient encore tr&s visibles 1).
Le rapport de l'Institut de l'Amirauté sur l'examen de l'une des
mines prétendûment découvertes le 13novembre 1946 dans le canal
de Corfou dit entre autres :((La mine était en bon état, àl'extérieur
et à l'intérieur; beaucoup de peinture subsistait sur I'cnveloppe
sphérique et l'on ne constat;lit que de légèrestraces de végétation

sous-marine sur lc mécanisme. Un numéro de série D. S. 261 était
visible sur l'hémisphère supérielir de l'enveloppe. Peint : 'origine
en rouge, le numéro avait étérepeint récemment en blanc. i~
Le Mémoiredu Gouverncnierit du Royaume-Uni, driiis son parn-
graphe 23, en parlant de mines prétendilment découvertes le
13 novembre, a fait la description suivante : (iLes mines ne portaient
aucune trace de végétation sous-marine ; la peinture était fraîche,
les câbles de mouillage étaient encore couverts de graisse, aucune

rouille n'apparaissait sur le mécanisme et les antennes des mines
se dévissaient facilement. ))

65. - C'est s'appuyant sur ces faits que le Gouvernement britan-
nique conclut que les mines étaient récemment posées,mais exami-
nésentre eux ces faits ont des discordances notables :
a) Seul le commandant IVhitford parle de la peinture fraîche
de la mine et mentionne sa couleur noire, tandis que le capitaine

Mestre dit seulement que les ((marques peintes sur lesmines étaient
encore très visibles D,sans parler ni de la peinture ni de la coiileur,
et R. P. Common, di: l'Institut de l'Amirauté, dit sitnylemcnt
u beaucoup de peinture siibçistait sur l'enveloppe spliérique )i,
sans parler ni .de l'état [le fraîcheur ni de la couleur noire de la
mine, se limitant à remarquer que i<le numéro avait dtérepeint
récemment en blanc II.
b) Tandis que le Mémoire allègue qu'« aucune rouille nJappa-
raissait surle mécanisme iet Rlestreaffirme qu'il n'y avait « aucune

trace d'oxydation I),le commandant lliitford dit que tous les
articles du mécanismede la mine qui se trouvait au bord du lVel/are
« ne sont que légèrement rouillés B. De rnème que le Mémoire,le commandant Jhitford et le capi-
taine Mestre affirment que sur aucune mine il n'y avait de végé-
tation marine, ni d'herbe ou de coquillage, mais R. P. Cornmon
déclare que, sur le mécanisme, il y avait de légèrestraces devégé-
tation sous-marine.

66. - L'aspect extérieur des mines sur lequel les experts britaii-
niques se fondent pour conclure que les mines avaient étéposécs
peu dc temps avant l'incident du 22 octobre 1946 n'est pas un
critére solide.Les experts savent parfaitement d'ailIeurs que l'aspect
exterieur des mines qui sont restées pour une longue période en
mer dépend des conditions spécifiquesdu lieu où elles se trouvent

el: du matériel dont les mines sont constituéesou mêmedu genre
de la peinture qui les recouvre. Dans des conditions favorables et
siirtout dans des endroits aux courants forts et si les mines sont
couvertes d'une peinture speciale, comme c'est le cas des mines
allemandes, leur aspect extérieur a la possibilité de rester inchangé
pour une longue période. Les experts soviétiques, grâce à leur
expdrience personnelle, nous fournissent de nombreux exemples '
eii ce sens :l'ingknieur soviétique le lieutenant-colonel Lebedskoï,
d;ins un articIe publié dans le journal ~'gtoile rouge, selon Tass
du 17 mai 1947 d,it qu'au cours du démontage des mines de genres
divers les spécialistes soviétiques ont constaté que l'aspect des
mines allemandes était bien meilleur que celui des mines des autres
l?tats et qu'en généralelles se couvraient très peu d'algues marines.
Au mois de juin 1943, cet auteur eut l'occasion de prendre part
pt:rsonnellement au démontage d'une mine allemande trouvée sur
la rive de la mer Noire. La mine avait un aspect tellement frais
qu'il était impossible d'en tirer une conclusion quelconque sur la

durée du temps qu'elle était restke sousl'eau. C'est seulement bien
plus tard qu'on put établir au moyen de documents allemands
trouvés ultérieurement que la mine en question était restée sous
I'cau presque deux ans, sans avoir subi aucune détérioration, bien
qiie la mer Noire se distingue par la quantité exceptionnellement
grande des micro-organismes.

G7.- De sorte que, vu les observations discordantes du rapport
britannique et les raisons susmentionnées, l'aspect extérieur des
mines ne peut pas être pris comme base pour fonder la conclusion
alléguée par le Mémoire britannique que les pritendues mines
étaient récemment mouillées.
Ceci est également confirmé par le fait que pour les mines qu'on
pi'étend avoir trouvées en mer le 13novembre 1946, le commaIl-
dant de la Vme flottille des dragueurs de mines dit qu'elles ontété
mouillées depuis une période dc deux mois au plus, tandis que le
capitaine Mestre et mêmele représentant britannique au Conseil

de Sécurité font mention d'une période ne dépassant pas six mois.
Si une telle logique est permise on pourrait faire également l'hypo-thèse que les mines pourraient se trouver dans l'eau depuis vingt-
quatre heures ou'depuis vingt-quatre mois.

68. - Le Mémoire britannique affirme que les rniiies qu'on
aurait découvertes étaient identifiées comme étant du type GY,
alors que les rapports des commandants britanniques et du capi-
taine Mestre sont également sur ce point en contradiction entre
eux et en eux-mêmes. Ainsi le rapport du commandant de la Vme
flottille dit que d'abord on avait cru que les mines étaient du type
GR mais qu'un examen sévèrepermit de les identifier comme des

mines du type GY. De même le commandant Mestre, dans son
deuxième rapport en date du 23 novembre 1946, dit que les inines
étaient du type GY avec un explosif de 600 livres, ce qui contredit
le premier rapport en date du 16 novembre, où il est fait'mention
que les mines étaient du type GR avec un explosif de go livres.
Comment peut-on commettre une telle! erreur, surtout lors-
qu'elle est due à des experts compétents en inatière de mines, tels
l'officier anglais et l'officier français, et spécialement. lorsque les
deux types de mines présentent des différences sensibles et faciles
à distinguer ? Dans son rapport le commandant Whitford précise

que ((deux mines spéciniens ont étérécupérées,chacune d'elle a
étérespectivement détachée au cours des premier et deuxième
tours. Les mines ont été récupéréespar le lieutenant Phillips,
R. N. V. R., sur leB.Y.M.S. 2075 avec I'aid? des embarcations des
croiseurs et du Xanpztra. Le lieutenant Phillips a, de l'une des
embarcations, personnellement assuré. la récupération. L'officier
de la marine française, observateur, qui a lui-mèine examiné de '
près les deux mines, a entièrement partagé l'opinion énoncéeau
paragraphe S ci-dessus. Les deux mines spéEimens ont étéremor-
quées par le canot à moteiir du Ran9uî.a au sud du détroit jusquJà

une petite baie au large du port San Stefano sur la côte de Corfou
où les mines ont étérendues inoffensives et démontéespar le lieute-
nant Phillips. Les mines ont étéensuite amenées par le B.Y.M.S.
2075 au port de Corfou oii elles ont étéembarquéessur le Skipjnck. 1)

69. - De cette déclaration il ressort :I) Deux mines spécimens
ont étérécupéréessur le B.Y.M.S. 2075 avec l'aide des embarca-
tions. 2) Les deux mines se trouvant ainsi sur le B.Y.M.S. ont
été examinées par le capitaine Mestre. 3) Le capitaine Mestre a
donc vu les deux mines qui étaient sur le B.Y.M.S. 2075 et non
seulement une comme il le prétend dans son premier rapport du
16 novembre 1946. 4) L'affirmation du capitaine Mestre dans le
rapport du 23 novembre qu'il ((avait examiné les mines iorsqu'elles
étaient à l'eau 1)est démentie par la déclaration précédente Whit-
ford que les mines ont étéembarquées sul' le B.Y.M.S. 2075 où

le capitaine Mestre se trouvait.
70. - Dans le paragraphe 8 mentionné; ci-dessus, il 'est dit :
(iOn pensait d'abord que les mines étaierit du type GR, maislorsqu'on les a examinées de près par la suite, on a pu constater
qu'elles appartenaient au tdvpe GY modifié. Toutes paraissaient
entièrement neuves et l'on n'a observé sur aucune mine cles ber-
niclesOLIde la végétationmarine. On pouvait rietternent apercevoir
la peinture rouge sur les antennes des mines qui passaient près
du CYeEfaueet je puis personnellemcilt attester que toutes les mines
conservaient, pratiquement en état (le fraîcheur, leur couche de
peinture noire. Selon mon avis et celui clu lieutenant Phillips,
R. N. V.R., officier chargé de disposer des mines, aucunedes mines
ne pouvait avoir séjournédans I'eau pendant plus de deux mois. n
Le rapport Whitford a étésigné le 14 novembre, tandis que le
premier rapport Mestre a étédaté le 16 novembre 1946. Dans ce
cas, d'après l'affirmation de Whitford, <(l'officier de la maririe
française a entièrement partagé l'opinion enoncéeau paragraphe 8
cidessus »,c'est-à-dire que dans le rapport daté du 14 novembre

1i:capitaine Mcstre et les commandants britanniques étaient d'avis
qu'il s'agissait de mines GY. Alors pourquoi le capitaine Blestrc,
1416 novembre, change-t-il d'avis sur le type des mines, déclarant
qu'elles étaient du type GR, pour y revenir le 23 novembre 1946
et dire qu'il s'agissait de mineGY ?

71. - De l'autre côté, le rapport du capitaine Nestre, que le
Gouvernement britannique essaie de prdsenter comme impartial
et officiel, ne peut rendre valides les rapports des forces navales
ilritanniques qui ont effectué le déminage le 13 novembre parce
que Ic capitaine Mcstre, comme il a étédit plus haut, n'ayant pas
étédélégué par une décisiondu Cornite de la Méditerranée, ne peut
ktre considérécomme un observateur officielimpartial.
Le capitaine hlestra pris part à l'invasion des eaux territoriales
a.1banaiscsdu 12 et du 13 novembre, et il l'a fait de son plein gré
sans l'autorisation du Comité méditerranéen. Sa participation à
ilne action contraire au droit lie peut être considéréeque comme
clontraire au droit. Ses affirmations n'ont aucune valeur juridique,
c:aril n'était pas un spectateur objectif désignépar un forum inter-
national qui aurait étéautoriséà l'envoyer en qualité de spectateur.

13ien au contraire, le capitaine Mestre est complice d'une action
contraire au droit commise aux dépensde Ia République populaire
d'Albanie. M&me si lecapitaine Mestre avait obtenu de la part du
Comité méditerrariéen une permission de participer à l'invasion
cles12 el 13 novembre, le Gouvernenicnt albanais ne pourrait pris
considérer cette participationcomme légitime, le Comitéméditer-
ranéen n'etaiit pas un organe autorisé A disposer légalement des
eaus territoriales albanaises. II ne rentre pas dans la compétence
(lu Comité méditerranéen d'envoyerdes témoinsou des experts en
yue d'établir n'importe quels faits dans les eaus territoriales d'un
Etat souverain sans le consentement de celui-ci.
Le capitaine Mestre devait connaître le statut de l'Organisa-
rion de déminage et devait savoir qiic l'opération à laquelle il étaitinvité à participer n'étaitpas aiitorisée par cette organisation ;en
outre, quand il dit: (Les mesures les plus rigoureuses ont Cté prises .
pour que l'opération ne puisse à aucun moment êtrcconsidérée
comme une provocation aux yeux de la population albanaise >)il
apparait clairement qu'il savait que celle-ci n'était pas unc opéra-
tion normale de déminage, qu'elle était une opération tle caractère
spécialet hostile envers Ia République populaire d'Albanie.
En outre, son rapport n'est pas complet et préciset présente des
contradictions tant dans son contenu qu'avec le rapport du com-
mandant britannique de la Timeflottille, dont quelques parties ont
étémentionnées plus haut.

Les lactinedu rapport.

72. - Le rapport du capitaine Mestre ne fournit pas de façoti
complète tous les éléments à partir desquels on peut déterminer
quelle zone du canal a éténettoyée età quel endroit ont et4 trouvécs
les mines, mais il s'exprime d'une façon vague en disant que les
mines ont ététrouvées ((dans l'ancien chenal dragué ou dans soi1
voisinage immédiat n.De mème, il n'indique pas quelles opérations
ont étéeffectuées exactement dans la journée du 12 novembre.

Le capitaine Mestre dit seulement qu'à 20 heures il monta A bord
du dragueur de mines B.Y.M.S. 2075 qui devait prendre part le
lendemain au déminage du canal et, à part les dragueurs de mines
et lesunitésauxiliaires, il ne fait pas mention de tous les autres navi-
res de guerre :croiseurs, porte-avions ct sous-marins, qui assistè-
rent au déminage. D'autre part, le capitaine Mestre dans son rap-
portdecrit de façon détaillée divers faits pour mettre en évidence
que l'opération de dragage ne pouvait étre consicléréeeii aucirnc
façon comme une provocatiori à l'égard de la.population albanaise,
ou bien il parle d'une barque albanaise qui n étévue à proximit6 dc
l'endroit où était effectuéel'opérstiorialors que tout ceci ne présente
pas d'importance concernant le but de 1'opt':ratide dragage.

73. - A part les contradictions déjà mentionnées entre les
rapports du commandant Mestre et ceux des commandants~britan-
niques, il en existe encore d'autres parmi lesquelles on peut citer
les suivantes : le commandant Whitford prétend que, au cours dc
la deuxième passe, furent détachéeshuit mines et au cours de la
troisième douze mines, tandis que le capitaine Mestre clécIareque,
dans la première passe, ont étédécouvertes sept mines et dans la

deuxième treize.
Cependant, Ie rapport du commandaiit en chef britannique,
adressé au Comitéméditerranéen et qui figure au procès-verbal de
la réunion du 16 novembre 1946, précise qu'on a effectuéquatre
dragages au lieu de trois : durant le premier aucune mine ne fut
trouvée, au cours du deuxiltme on en trouva deux, au cours du
troisiéme huit et au cours du quatrième douze mines, tandis que
le contre-amiral Kinahan, dans iin message daté du 18 novembre COSTRE-JIÉMOIREDU GOüVERSE3IEFT ALBASAIS (~j VI 48) 75

etadressé au commandement en chef, dit que dans le premier tour
aucune mine ne fut trouvée et que dans lc deuxième on en trouva
une qui fut récupérée.
II résuite du rapport du commandant de la Vmt!flottille que des
vingt-deux mines trouvées, l'une a expioséau cours du dragage,
deux furent coulées,deux furent récupérées et dix-sept furent lais-
sdes sur les flots, tandis que du rapport du capitaine Mestre il
resulte qu'une minc a explosé au cours du dragage, deus furent
rdcupérées,une fut coulée et les autres laissées flottantes. Donc,
selon le capitaine Mestre, une mine seulement fut couléetaridis que
Whitford parle de deux mines couléeset 'le commandant en chef

de cinq mines. A noter encore que le contre-amiral Kinahan, dans .
son rapport du 14 novembre, parle de quatorze ~ni~iesflottantes
laissées dans le secteur.
II ressort clairement que le rapport artificiel et contradictoire
du capitaine hlestre peut êtreexpliqué seulement par le fait que
la tâche du capitaine Mestre était de légaliserpar sa présence en
tant qu'ccobservateur ii toute la machination britannique ; en
fait, après le prétendu dragage, lc capitaine hiestre, qui prétend
a:jsister aux opérations afin de rendre navigable le cheiina,notifié
à la Commission Medzon que Ia route était orivertc, bien que, cri
réalité,rien n'était fait dans ce sens.
Dans le rapport du commandant de laVm flottille il cst dit qu'un
caiqiie albanais qui avait arbork uii pavillon blanc ail-clessous clu
pavillon albanais s'approcha des rnines coupées,tandis que dans
le rapport du comnlandant Mestre il est dit que la barque alba-

naise avait arboré seulement le pavillon albanais et est passée
à une grande distance des dragueurs de mines sans jamais
s'approcher à une distance moindre de 3.000-4.000 métres.

74. - Ces rapports donc ne prouvent pas que les 12 ct 13
novembre 1946 ait ététrouvé un champ de mines du type GY
comme le pretend le Gouvernement britannique. Mais du rapport
irisme du commandement britannique il ressort que dans les opéra-
tions des 12 et 13novembre il n'y apas eu seulement dcs dragueurs
de mines, mais qu'il y a eu aussi une flotte de guerre comprenant
vingt-six navires de guerre parmi lesqiiels quatorze unités de
combat. Il ressort également du rapport que la flotte britannique
a effectuédes observations, des actes de repérage et des explora-
tions minutieuses en relevant les positions des défensesalbanaises

de la côte, commettant ainsi des actes illicites au dktriment de la
s6curité de la République populaire d'Albanie.
De tels actes montrent clairement que le Gouverriement bri-
t:innique, sous le couvert d'un prétendu dragage dans les eaux
albanaises, essayait de créerdes preuves à l'appui de l'imputation
qu'il avait prémeditéecontre l'Albanie et en mênletemps d'mer-
cer une pression politique surcepays au moyen d'une partie iiiîprir-
tante de sa flotte de gucrre. 7j. - Si vraimerit avant le 13 novembre 1946 quelqu'un avait
posé des mines, ce qui représenterait une nouvelle 1-iolation des
eaux territoriales albanaises, cela étdaccompli àl'insu du Gouver-
nement de la RépuMique populaire d'Albanie ; l'allégation du
Mémoire britannique, à savoir que les gnrdcs albanais devaient
avoir remarqué l'action de minage, est sans aucun fondement.
Dans l'histoire des guerres maritimes nous avons de nombreux
cas de mouillagcs clandestins de mines, de barrages de mines devant
les ports et les zones cnneniis. Dc même,des barrages de mines
ont étéclandestinement posésdevant les ports et les zones ennemis
au cours de la deusième guerre mondiale, soit par la marine sovié-
tique au moyen d'unités à torpilles, soit par des forces britanniques
dans la Manche. Le fait est connu que les autorités britanniques
posaient des mines le long des côtes-françajses et norvégienneç et
que très souvent clles ont réussi à le faire saiiç êtreaperçues des
cardes-côtes.
" Si nous prciions eii considération ces données et si nous avons

à l'esprit que la Ilanche était soumise à un contrôle des plus skvères
au moyen d'appareils des plus modernes et de toute une série
de postes d'obsenration, et que la Grande-Bretagne a, malgré ce
contrôle ct cette vigilance spéciale, réussA mouiller des rriinesclan-
destinemerit, nous constatons que dans le canal de Corfou un mouil-
lage dc mines est beaucoup plus simple et facile. Si l'on tient compte
du fait que l'Albanie manque de tous ces moyens et dispositifs, il
serait clair que, malgré la sun~ciliancedes gardcs, ipeut seproduire
qu'une tierce Puissance pose dcs mines dans les eaux albanaises
sans qu'on s'en aperçoive, et surtout dans des conditions atmos-
phériques favorables à une action pareille.
76. - 11 est inexact de dire que le bruit des mines tombant
dans l'eau devait pouvoir être entendu. Un tel argument est
dénu6de tout fondement, car il est très difficile, incertain, et dans

la plupart des cas impossible, d'apercevoir par les simples sens
humains iinc opération de pose de mines.
De même,une opération de mouillage, qui est trés simple et
peut être exécutée nu moyen de n'importe quellc sorte de navire
sans iin outillage spécial, peut 2tre effectuée sans être entendue,
si ,enplus des conditions atmosphériques favorables (vent, temps
couvert, faible visibilité) les moteurs des navires sont munis d'ap
pareils assourdisseurs. D'ailleurs, le dispositifpour le mouillage
de mines-cst très simple, et pour mouiller vingt-deus mines à des
intervalles de IOO métres,il suffit d'un lapsde temps de cinq minutes
pour un seul navire allant a une vitesse de 14 milles à l'heure. En'
plus, dans des opérations de ce genre, peuvent êtreemployés des
sous-marins navigua~lt à la surface et inunis d'électro-moteurs.
Presque toutes les marines i~npadantes possèdent des sous-marins
semblables, y compris la marine grecque, Les sous-marins britan-
niques du rnodSle <T I),coinme par exemple l'cn~$lnret Tadiwy,
qui ont pris part à ln prétendue opération dc déminage les 12 et 1:;novembre et qui ont assisté à toute l'opération, peuvent embar-
quer à leur arrière-pont de dix à douze miries. 11faut al-oir présent
à l'esprit, comme on le verra par la suite, que les bateaux grecs
penétrèrent àplusieurs reprises dans leseaux territorialcsalbanaises,
provoquarit des incidents, de même des b:itc:iux britanniques
croisaient le 12 novembre dans cet espace maritime jusque tard
dans la nuit. Il pouvait arriver facilement qii'un cle ces bateaux
ait poséun certain nombre de mines aux endroits où l'on prétend
qii'elles ont étéretrouvées le lendemain.

77. - Eu égard j.tout ce qui précède, on est fondé d'arriver
ailx conclusions suil-antes :ou bien ces prétendues mines ont été
posées par les Allemands en retraite ou bien elles ont étéposées
par une tierce Puissance dans le dessein de nuire à l'Albanie, ou
bien toute l'affairen étémontée par une unité britannique dans
le but de nuire au prestige de l'Albanie et pour assurer la répara-
tion du dommage niatériel et la condarnnatiori morale et politique
dt: I'dlbanie pour l'incident du 22 octobre.
Il serait interessant à ce propos de rapprocher cette hypothèse
avec les instructions du commandant Whitford, mentionnées au
dtSbut de ce chapitre.
Ceci est renforcé nussi par le fait que, les navires britanniques

n'ont pas effectuéle prétendu nettoyage le 12 novembre, comme il
a étécoiii~iiuriiquépar la riote du Gouverriement britannique en
date du IO novembre.
78. - A ln question qui lui a étéposée devant le Conseil de
Sticurité, le reprbsentant britannique a répondu en disant qu'à la
date du 12 novembre 1946,les navires britanniques orit procédéau
dragage des eaux, à l'ouest du cap Kicphsli afin de permettre aux
navires de disposer de la place nécessairepour virer durant l'opéra-
tion de dragage. (Voir doc. S/3oo, p. 25l, du Conseil de Sécurité.)

Du point de vue technique, il n'était pas nécessaire de procéder
d'abord au nettoyage de la partie de la mer se trouvant près du
cap Kiephali pour assurer Iesmouvements de manŒuvre des navires,
puisque le cap Kiephali est à une distance de plus de 3 milles du
champ de mines prétendu découvert, et pour avoir la place néces-
saire au virage des iiavires on ne procède jamais au nettoyage
d'un endroit se trouvant bien loin du champ de mines qu'on se
propose de nettoyer.
Cette unique justificationbritannique est donc sans valeur.
En manquant d'effectuer lenettoyagele rz novembre 1946 ,omme
il l'avait notifié d'avance, le Gouvernement britannique tente de
cûuwir des opérations douteuses, et ceci renforce l'opinion qu'à
cette date les navires britanniques ont effectue d'autres actes et
précisémentdes actes auxquels le commandant Whitford conseille

ailpersonnel de ne pas faire allusion. Ce point de vue est renforce
encore davantage par les circonstances genérales dans lesquelles
iroir p. 3di1volume 1. ont étéeffectuéesles opér;itions ; malgré les justes protestations
et propositions du Gouvernement albanais et bien que le Comité
central international de déminage subordonne le nettoyage du
canal à l'assentiment de l'Albanie, malgré la proposition faite par
l'Albanie pour former dans ces circonstances une Commission
mixte, malgr6 la décisionde date antérieure du Comitéde la zone
méditerranéenned'après laqiielle la Grèceét-it chargéede nettoyer
ces eaux, le Gouvernement britannique, faisant preuve d'insistance
et d'une hnte injustifiéeen improvisant clestémoins et en:mettant
en mouvement un nombre considérable de navires de guerre, s'est
efforcépar tous les moyens et de toutes lcs manièrcs de mettre a
exécutionson plan préméditéen vuc de produire de fausses preuves

à l'appui de sa plainte contre le Gouvernement albanais.
En fait, le Gouvcmement britanniqut: non seulement n'a pas
produit des preuves contre l'Albanie, mais il a commis une provo-
cation sans précédentet,criminelle contre la sécurité,l'indépendance
et la souvernincté de 1'Etat etdu peuple albanais.

79. - Lc soir du 13 1101,-embre1946, le Gouvernen-ierit britan-
nique était éviderriment d'avis que la question que d'après lui ((il
était de nécessitéiirgentc!d'établir ia éterésoluepar la prétendue
découverte du champ de mines. Aussi ne se préoccupt:-t-il plus de
cette i(nécessaire tâche d'humanité »,c'est-à-dire du nettoyage
du chenal de Corfou, bien que le Mémoire encoreessaie de justifier
l'action de la marine de guerre britannique du 13 iiovembre par
de telles considdrations.

80. - La conclusion du Mémoire selon laquelle (par. 26) les
mines qui auraient le 22 octobre des dommages aux deux
contre-torpilleurs britanniques faisaient partie des mines préten-
dûment découvertes Ies 12-14 novembre, est tirée ex ?ailrido,
parce que de tous les soi-disant faits et des circonstances exposées
dans le Mémoire,il est absolument impossible de tirer des conclu-
sions pareilles,Le Gouvernement britannique avance une telle idée
de corrélation sans meme essayer d'argumenter. En fait, il n'y a
aucune preuve matérielle sur la nature réelle des explosions du
22 octobre 1946 ou des mines qui en auraient Btéla cause.,D'autre
part, il n'y a aucune preuve qu'un champ de mines ait étédécouvert
le 12-13 novembre 1946, et mêmesi on suppose pour un moment

qu'un tel champ de mines fut découvert, rien ne prouve qu'il
existe un lien logique entre ce prétendu champ et l'explosion du
22 octobre 1946, comme il n'existe aucun rapport entre l'incident
du 22 octobre 1946 et le Gouvernement albanais.
.
Les débatsdu Conseil de Sécurité.
(Ad paragraphes 28-62 du Mémoirebritannique.)

81.- Le Gouvernement britzinnique dans son Mémoire(par. 28-
62) expose, selon son point clevue, les débats qui se sont déroulés aii Conseil de Sécuritéa la suite de sa plainte du ro janvier 1947
contre l'Albanie. Par cet exposé,il s'efforcede rassembler des argu-
ments en faveur de sa thèse non fondéeet injuste.
En réalité,des débats du Conseil de Sécurité il ressort que :
I) L'incident du 22 octobre 1946 n'a aucun rapport avec ln
responsabilite de l'Albanie.
2) L'affirmation selon laquelle l'attitude de l'Albanie dans l'inci-
dent des contre-torpilleurs britanniques qui auraient été endomma-
géspar des mines dans le Détroit de Corfou constitue ou pourrait
constituer une menace à la paix est dénuéede tout fondement.
3) La plainte contre l'Albanie n'est pas fondée.
4).En dépit de ses droits légitimes et de ses intérêtsen tant

qu'Etat souverain, l'Albanie a étéprivéede la possibilité de veiller
à la sécuritéde Ia navigation dans ses eaux territoriales, et les
actions de la marine de guerre britannique dans les eaux albanaises
constituent des atteintes A la souveraineté de la République popu-
laire d'Albanie.
.Durant lesdiscussions qui sesont dérouléesau Conseilde Sécurité,
certains Membres ont mis en évidence le caractère absurde de
l'accusation britannique, puisque le seul fait d'un incident sunrenu
dans les eaux albanaises ne peut engager la responsabilité de
l'Albanie. On a cité le cas du navire français Compiègn eyant
heurté une mine à Dieppe, dans le chenal dragué par la
marine britannique, ainsi que le cas du navire hollandais Chrislia?&
Htcygelzs ayant rencontré une mine dans le chenal près de l'île

Walcheren dont le nettoyage incombait à la Belgique. Dans ces
deux cas, aucune accusation n'a étéélevéecontre la France ou Ia
Belgique pour (icrime contre l'humanité ».D'autres exemples ont
étédonnés concernant les accidents de navires qui ont heurté des
mines dans des chenaux déjà déminésdes eaux européennes.
Néanmoins, aucun des pays qui ont procédéau dragage de ces
chenaux, ou dans les eaux desquels des accidents ont eu lieu, n'a
étéaccusé d'aucune culpabilité. C'est seulement contre la Répu-
blique populaire d'Albanie qu'on parle de « crime contre I'huma-
nit8 n pour un incident pareil, et ceci pour des fins politiques
d6terminées.
Il a étémis également en évidence que l'incident du cana1 de
Cor.fou et l'attitude prise par le Gouverncmcnt albanais à la suite

de cet incident ne constituent pas une menace à la paix et a la
sécurité.En montant cette affaire et en la portant au sein de l'Or@-.
nisiition des Nations Unies, le Gouvernement britannique avait
poursuivi des buts prémédités.
A cet égard, le représentant polonais s'exprime catégoriquement :
((Ce différend ne comporte aucune rnenace contre la paix. »
(hlf':moirebritannique, annexe 23, p. 256.)
En ce qui concerne les preuves sur lesquelles le Gouvernement
brit:annique appuie son accusation contre l'Albanie, si l'on analyse
lesiiiscours des Membres du Conseil de SCcurité,il ressortclairementque tous reconnaissent, de façon directe ou indirecte, que cette
accusation s'appuie non sur des preuves mais sur des probabilités
et des suppositions fantaisistes du Gouvernement britannique.
La façon mêmedont le représentant britannique formule l'accu-
sation contre l'Albanie, dans laquelle il est dit avec incertitude que
l'Albanie a pu êtreou riutcur, ou complice, ou a eu connaissance
de la pose des inines, montre que le Gouveriiement Iiritaniiirliie
ne sait comment, ou ne peut, préciser son accusation contre l'hlba-

nie parce que les élémentsprobants pour concrétiser cette accusa-
tion lui font défaut. Dans ses discours au Conseil de Sécurité,le
représentant britannique s'exprime par des soupçons qui le portent
A croire à la culpabilité de l'Albanie.
Il dit notamment :
((....toutes ccs mines sc trouleaient dans les eaiis albaiîniscs, i
quelque 300 yards seulenient de Ia côte. En conséclui:nce, c'est
sur ce pays quc tornbeiit les premiers soupçons. )(MErnoircbritari-
nique, annexe 23, 11. 286.)
A la question posée & la Sous-Commission il répond :
((.... Lorsque les mines furent trouvées tout près cle la c8te de

l'Albanie ct qu'il fut Stabli qu'elles n'étaient immergées.que depuis
six mois au plus, les soupçons i)se portèrent sur le Gouvernemerit
albanais. 1)(Rlémoircbritannique, annexe 23, doc. S/3oo, p. 326.1
Le représentant soviétique dit catégoriquement (r qu'il n'existe
absolumeiit aucune preuve et quc les accusations se contredisent u
(p.2j6). Plus loin il poursuit : u Les accusations portées par le Gou-
vernement du Royaume-Uni contre l'ldbanie ne sont pas prouvees
et ne peuvent pas l'ètre. C'est pourquoi, en dépit de toutes les
tentatives faites pour grossir l'affaire'et pour faire-dubruit autour
d'elle, au Conseil de Sécurité,dans la presse, etc., ces accusations
sont sans fondement ....i

Le Conseil de Sécurité,clans l'impossibilité de prendre une déci-
sion par manque de preuves, à la date du 27 février 1947 créa
une Sous-Commissioii de trois membres (<pour examiner tous les
témoignages dont on dispose ..,et de faire un rapport au Conseil
de Sécurité ....sur les faits de la cause tels qu'ils ressortiront de
ces témoignages D. (Memoire britannique, annexe 23, S/3oo,p. 312.)
La Sous-Commission n'a pu rapporter aucun fait favorable A la
thèse britannique pour la simple raison qu'il n'en existait pas,
ce qui causa le m6coiitentcment du représentant britannique :
« Le rapport de Ia Sous-Cornmission n'éclaire guère la situation, il
faut bien l'avouer I)dit-il.Et plus loin il s'exclame :(( Je ne vous

cacherai pas que le rapport m'a déçu. r (Mémoire britannique,
annexc 23, p. 301.)Toutefois, le représentant britannique se
voit obligé de reconnaitre que la Sous-Commission ne pouvait
sc prononcer sur la culpabilité de l'Albanie : « ....le rapport ne
présente aucune conclusion. 11n'émet pas d'avis sur le point de
savoir si un champ de mines non signalé a étéposédans le Détroit
de Corfou moins dc sis mois avant l'incident, ni sur la question dcsavoir si un ch am^de mines a étéDOS ^ar le Gouvernement alba-
nais ou de connivence avec lui, ou CIsa connaissance. Cette carence
n'a rien de très surprenant : en effet, si la Sous-Commission n'était
pas convaincue de l'existence d'un champde mines, il lui était diffi-
cile de décider qui pouvait êtrecoupable. 1)(Mémoirebritannique,.

annexe 23, p. 301.)
D'autres Membres du conSei1ont reconnu le non-fondéde l'accu-
sation britannique : le représentant polonais souligne que [(.... le
Conseil ne peut accepter qu'une accusation fondéesur une preuve
fcirmelle. Il ne suffitpas qu'on ne puisse pas prouver que l'accusa-
tion n'est pas justifiée :il faut la preuve formelle que cette accu-
sation est justifiée. Tel est le principe que notre délégation défend
et continuera de défendre. Nous admettons évidemment que l'on
peut considérer certaines preuves indirectes, mais ,seulement lors-

qu'aucune autre explication n'est possible:
« Comme je l'ai indiqué auparavant, j'estime qu'il n'y a aucune
preuve que le champ de mines, s'il a jamais existé, ait étémouillé
soit par le Gouvernement albanais, soit de connivence avec lui.
J'irai mêmejusqu'à dire qu'on iienous a soumis aucune preuve
formelle que le champ de mines, s'il a jamais existé, ait étéposé
au su du Gouvernement albanais. » (Conseil de Séciirité,Procès-
vt?vbaux oficiels,zme Année, no 29, p. 598 '.)

Si des membres de la Sous-Commission se sont efforcésd'appuyer
la thèse britannique en admettant qu'un champ de mines a été
niouillé de connivence avec le Gouvernement albanais, cela ils
l'ont fait en qualité de représentants, mais non en leur qualité de
membres de la Sous-Commission. Ils ont probablement dû juger
que la parole d'un représentant est plus libre et qu'elle ne doit
pas êtreinfluencéepar des questions d'équitéet de justice.
Le représentant syrien, après avoir rappelé qu'on n'avait pas

eu satisfaction sur les questions qu'il avait posées au représentant
britannique, conclut que l'accusation britannique contre l'Albanie
n'est pas fondéesur des preuves. (i D'après un principe juridique
d'ordre général,on ne peut imposer aucunepeine, aucune respoiisa-
bilité, aucune condamnation en se fondant sur des possibilités
ou des probabilités. Il faut qu'il y ait certitude. Il existe un autre
principe selon Iequel le moindre doute empêchela condamnation.
Si ce doute existe, nous ne pouvons infliger aucune peine ni établir
aucune responsabilitk .... Or, des doutes existent -dans mon esprit,

ils existent certainement. Mais il n'existe pas de preuves ; il y
a seulement des possibilités, tout au plus des probabilités. »
(SIP. V.122, 25 mars 1947, p. 51 =.)
II a également mis en évidence le Inanque de valeur probatoire
de certaines ailégations britanniques : ((Nous pourrions tout de
mêmeavoir des détails plus précis, dit-iI, sur la deuxième opéra-
tion de dragage effectuéepar les Allies en octobre rg&. 11

' Voir p.360 du vol. 1.
8 B 3 366 r n n.
6 82 COSTRE-~~É~IOIREDU GOUVERSEMEST ALBANAIS (15 VI 4s)

En ce qui concerne le capitaine Mestrc, le représentant syrien.
dit simplement :<iLa présence de l'officier français est d'ailleurs
contestée quant à son bien-fondé ;car on rie nous dit pas en quelle-
qualité il a pris partà ces opérations, Le capitaine Mestre était-il~
désignépar l'organisation centrale de di:rninage ? Tout cela est

extrêmement nébuleux. 1) (S/PV.IZZ, pp. 47-50 l, 2j mars 1947,)'
Le reprksentant soviétique a mis particuliErement en évidence
les actions illbgales des navires de guerre britanniques et la viola-.
tion de la souveraineté de l'ftat albanais qui en est résultée.
i(A revoir ainsi l'historique de la question, dit-il, et les faits
qui s'y rapportent, on se rend compte qu'on a systématiquement.
ignorél'Albanie en prenant les décisions concernant le dragage et
en organisant toute cette opération. Cela a eu pour résultat que.

sous prétexte de draguer les mines, les navires de guerre etrangers
en ont pris àleur aise dans les eaux albanaises du Détroit de Corfou,
et par leurs opérations ont violéà plusieurs reprises la souveraineté.
des eaux et des ports albanais. iiPlus loin il ajoute :<<Vis-à-vis
de l'Albanie, elles [les autorités britanniques] oiit non seulement:
manqué totalement de correction, mais se sont mêmelivrées à une
violation grossière et systematique de la souveraineté de ce pays. ».
(Mémoirebritannique, annexe 23, pp. 249-250.)

Le représentant du Gouvernement albanais asouligne àplusieurs
reprises que les actes de la marine de guerre britannique #étaient:
des violations préméditéesde la souverainetk de l'État albanais :
«:Le Gouvernement albanais considérait ces incidents comme des
actes de provocation et de violation flagrante de la souveraineté.
et de l'intégrité nationales de l'Albanie clela part des navires de.
guerre britanniques. » (Mémoirebritannique, annexe 23, p.221.)
(iCe qu'il ne faut pas perdre de vue, c'est que lorsque les navires.

de guerre britanniques oiit navipé dans les eaux albanaises à des.
fins de provocations et d'intimidation, la souveraineté de l'Albanie.
a été atteinte. Le Gouvernement britannique, en niant cet acte.
illégal, cherche à rejeter la responsabilitd sur le Gouvemement
albanais, qui ne respecterait pas les lois internati~nnlcs.~ii (Mé-.
moire britannique, annexe 23, p. 260.) (<Lt:s faits et les arGments
montrent que non seulement l'accusation britannique ne peut pas.
tenir debout,mais ils prouvent aussi trèsclairement la responsabilité.
du Gouvernement britannique dans des actes illégauxet arbitraires

effectués envers l'Albanie. n (S/PV. 121, 21 mars 1947 , .'3~.)
Ainsi le Gouvemement albanais n'a jamais cesséde mettre en
évidence et de rtipéter dès le début de cette affaire le sens exact:
des actions de la marine de guerre britannique, que ces actes
contraires au droit étaient perpétrésdans le but de violation Aa-
grante de la souveraineté de l'Albanie et de créerdes provocations.
Certains Membres du Conseil se sont efforcés,malgré lJabsence-
totale de preuves, A.appuyer la th6se britannique. Cependant, en.

Voir p.365 du vol.1.
u r 339 m n D. observant de près leur fason d'argumenter ainsi que le contenu de
leurs arguments, on se rend facilement compte du non-fondé de
Ieur thèse. La façon mêmede s'exprimer prouve beaucoup dans
ce sens. Ils ont dit par exemple qu'iI « semblerait a que personne
d'autre que l'Albanie n'aurait pu poser 1csmines. On a également
dit qu'il était difficiled'admettre que quiconque autre que l'Albanie '
ait pu poser les mineç. Il y a lieu de relever les mots : il semble, il
parait, il serait difficile, pour se rendre compte de leurs convictions
et des finspoursuivies par leursdiscours.
Les points de vue exprimés devant le Conseil de Sécuritépar les
Parties intéresséesainsi que par les différents Membres du Conseil

ont mis en évidence que l'accusation britannique contre l'Albanie
n'était fondée que sur des suppositions et des probabilités, sur
des arguments confus et sans aucun fondement.-
Bien qu'elle n'eût aucun rapport avec lc maintien de la paix et
de la sécuritéinternationales, cette affairc a étéportée devant le
Conseil de Sécuritépour des considérations d'ordre
Le Conseil de SCcurités'est trouvé, faute de preuves, dans l'im-
possibilité de décider de la culpabilité de l'Albanie. Le rejet du
projet de résolution présentépar le représentant britannique en
est -une confirmation.-

B. - ES DROIT

Le mouillage de mines en temps de paix.
(Ad paragraphes 63-73 du Mémoire.)

82. - Le Gouvernement britannique cherche à rendre un État
responsable des mineç rnouilI6es d'après lui entre le 15 mai et le
22 octobre 1946 dans les eaux albanaises sans être notifiées. En
procédant d'établir une telle responsabilité, le Mémoirese pose en
premier lieu la question si et comment le droit international règle
le mouillage de mines en temps de paix. Il trouve qu'employer les
mines en temps de paix est entièrement illégal d'après les règles
du droit international qui, d'une part, seraient baséessur un principe

généralet élémentaire,et, d'autre part, résulteraient de la Conven-
tion no VI11 de La Haye de 1907, Cette convention, de caractère
déclaratoire, en stipuIant des limitations au droit de mouiller des
niines cn temps dc guerre, a précise les seuls cas ou l'emploi des
niines est permis. Les belligérants doivent signaler les régions
rendues daiigereuses aussitôtque les exigences militaires le permet-
tront ; une Puissance neutre doit notifier d'avance lesrégions de
ses côtes où seraient mouilléesdes miries automatiques de contact.
83. - Ladite Convention VI11 contient aussi des dispositions
concernant l'enlèvement des mines après la guerre. Passant en
revue la Convention, le Mémoire n'a pas pu ne pas mentionner

son article j.Mais le Mémoirene consacre pas trop d'attention à
cet article, et c'est seulement d'une façon voiléeque son paragraphe65 fait allusion à la disposition suivante de l'article 5 : t(Chaque
Puissance devra procéderdans le plus bref délaipossiblt: à l'enlève-
ment des mines qui se trouvent dans ses propres eaux: )IDans
tout son texte le Mémoirerevient ericore seulement une fois à cette
disposition de l'article j de la Convention (par. 70 Zn fie).
En vertu de son article j, la Convention impose à chaque Etat,
d'une part,le devoir d'enlever les mines se trouvant a la fin de la

guerre dans ses eaux ; d'autre part, elle réserve en mêmetemps
à chaque État sa compétence exclusive A cet effet.
Ces dispositions de l'article 5 précitésont d'importance pour
l'affaire présente. II a étéexposéplus haut (par. 23, 24, zg) que le
Gouvernement britannique a empéché le Gouvemement albanais
de remplir son devoir d'après l'article j de la Convention VI11
précitée, s'opposantà son admission à l'Organisation internationale
de déminage ; d'autre part, le Gou\-ernement britannique a lésé
la compétence exclusive réservéeau Gouvemement albanais par
ledit articlej, et cela contre la volonté expresse du Gouvernement
albanais, comme il est exposéplus loin (par. 144).

83. - Le Gouvernenient albanais n'a pas notifié son adhQioii
à ladite Convention VI11 de La Haye au sens de son article IO,
mais il a déclaré,sans autre, en mars 1947 ,ors des débats devant
le Conscil de Sécurité, ((qu'il respectait la Conventioii et qu'à
l'instar des autres Puissances il restait fidèle à la Con~~ention 11.
(Mémoire, annexe 23, Rapport de la Sous-Cornmissio~i S/goo,
appendice II, p. 320.C)ette adhésion non formelle du Gouvernemeiit
albanais à la Convention peut êtretrouvge conforme à son carac-
tére déclaratoire. Sa portée n'est pas limitée aux preçcriptions
expresses de la Convention relative à l'emploi approprié des mines
en temps de guerre, niais comporte la reconnaissaiice de la défense

généralede mouiller dcs mines en dehors des cas prévus et réglés
par ladite Conveiition. Le Goilvernement albanais se trouve donc
d'accord avec tous ces autres ktats considérant la pose des mines
en temps de paix comme délit international entraînant la respon-
sabilité de l'gtat conformément au droit internation,al.
Animé de ces convictions, le Gouvernement albanais se trouve
aussi en principe d'accord avec le point de vue soulignC par le
Mémoire que ce delit est particulièrement grave s'il est coi~imis
sur une route habituelle au commerce, maritime ;tout en laissant
à la technique juridique à voir s'il y a lieu de qualifier le' délit si
aggravé par une dénomination spéciale.

En ce qui concerne la notification préalable des min& mouil-
lées,ilne peut pas êtrepossible, ainsi que le fait le Mémoire(par,
72, lit.b),d'invoquer formellement ici, dans un cas en temps de
paix, ladite Convention VI11 qui prévoit une telle notification
préalable en temps de guerre pour Ia Puissance neutre. I)'ailleurs,
il semble bien rdpondre à la pensée du Mémoirequ'en temps de
paix, lJI?,tatn'a pas h poser de mines du tout.. S'il signale leur posedlavance, dimlinuera probablemerit sa respnsabilité, mais il ne fait
pas de différence s'ilsc réclairieou non de ladite Convention VIII.
En ce qui concerne le Gouverneinent albanais, la question ne
:je posait pas pour Iiii s'il devait notifier les mines mouilli2es eu
2gard ou non à la Convention VI11 précitée,car aucune question
ne se présentait pour lui à cet Ggard, le Gouvernement aIbanais
n'ayant ni mouillé lesniines ni pnrticipé à leur mouillage et n'ayant
non plus eu aucune coiinnissnncc de mines. Seul le Gouvernement

'britannique aurait pris, selon ses dires, connaissance dcs mines
qui auraient étémouilléesdans le canal de Corfou ; s'il avait une
telle connaissance, c'était à lui d'en donner notification.
S5. - Dans le but de mettre particulièrement en relief qu'il
s'agissait dans l'affaire présente d'un crime contre l'humanité, lc
Mémoirea étéamené à exagérer l'importance des détroits naturels
dc Corfou, etaux points de vue économiqueet juridique. Le Gouver-
nement albanais n'est pas à meme de 1csuivre à cet égard.D'autre

part, le mouillage de mines après In cessation des hostilités serait
toujours un grave délit international, mêmesi le canal nord de
Corfou n'est pas une route ordinaire pour la navigation interna-
tionale, mais au contraire une route secondaire d'intbrêt local,
ct comme teIle ne pouvant pas prétendre au statut d'un détroit
au point de vue juridique.

La responsabilitéalléguéedu Gouvernementalbanais.
(Ad. paragraplies 72, 92-94, 96, no 2, du Némoire.)

86. - D'après les deux règles qu'énoncele Mémoire (par. 73,
lit,n et lit. b), le délit international dont il s'agit est commis par
1'Etat qui mouille les mines lui-même,ainsi que par tout autre
État avec lequel les mines sont mouill6es de connivence. Toutefois,
cn suivant le Mémoiredans son texte eiitier, on se rend compte
qu'il distingue une autre responsabilité, bien que celle-cine soitpas
les deux règles indiquées dans son paragraphe 72.
incluse dans
Cette autre responsabilité est fondéesur le fait d'avoir une certaine
connaissance des mines. En effet, le Mémoire mentionne : « au
SU du Gouvernement albartais etde connivence avec ce Gouverne-
ment ))(par.26 Iit. b; « avec la connivence ou au si1de ce Gouver-
nement » (par. 76, in finepar. 92) ;(lesditschamps de mines posés
soit par le Gouvernement albanais soit avec la connivence ou au
si1 de ce Gouvernement » (par. 96,no 2,par. 92) ;((toute complicité
.ou toute connaissance de l'existence clesdites mines » (par. 74).
La connaissance de mines peut être acquise de différentes
manières. Le Mémoiresemble parfois avoir en vue la connaissance
de l'action même de mouiller des mines : «champ de mines posé

au su du Gouvernement albanais a {cf.par. 96, no 2).Par ailleurs,
le Mémoiresemble n'avoir en vrie que la connaissance du résultat
déji acquis, ((1'Albanieconnaissait l'existence du champ de mines 1)
(cf.gnr. 94). Les conséquences semblent ne pas êtreles mèmes.Dans le premier cas, on sait que les mines vont êtreposéesou sont
en train d'êtreposéesdans les eaux, et on connaît donc plus ou
moins de circonstances où, quand, comment, par qui, les mines
vont êtreposées.Dans le deuxième cas, on ne sait de ces circons-
tances que le fait que des mines se trouvent mouilléesdans rm
certain endroit, Dans le premier cas, il y a peut-être une possi-
bilité d'empêcher l'action.Dans le deuxième cas, on ne peut faire
rien d'autre que de faire disparaître Ie danger provenant du fait
accompli.

87. - Le Mémoire semble avoir en premier lieu en Vue une
responsabilité du Gouveme~nent albanais qui serait encourue
purement et simplement par sa connaissance d'un champ. de
inines : La responsabilité de l'Albanie naît, en premier lieu, d'une

compIicité directe quant à l'existence du champ de mines, com-
plicité résultant du fait qu'elle connaissait l'existence de ce champ
de mines, que d'ailleurs ledit champ de mines eût été pos'éeffec-
tivement par l'Albanie ou de connivence avec elle ; en second lieu,
du fait d'avoir omis - omission volontaire, selon le Gouverne-
ment britannique - de remplir le devoir international impératif
qui lui incombait de signaler l'existence de ce dangereux champ
de mines ;en troisième Iieu, du fait que les. autorités albanaises
ont omis d'avertir les nab~iresde Sa Majesté du danger auquel ils
s'exposaient Iorsqu'elles les ont vus s'approcher du champ de mines.
(Mémoire britannique, par. N.) D'après ce texte, la responsabi-
lité du Gouvernement albanais est crééepar le fait qu'ayant pris
connaissance des mines dans ses eaux, ilne les a pas fait connaître
à la navigation : «En tant que Puissance territoriale, l'Albanie est

responsable de tout champ de mines qui se trouve, à sa connais-
sance, dans ses eaux territoriales ainsi que des conséquences
de ce fait. Si les circonstances étaient telles qu'il n'était pas en
son pouvoir de faire cesser la situation dangereuse crééede ce chef,
il &taitde son devoir d'envoyer immédiatenient des avertissements,
soit aux gouvernements, soit à tous les navires appelés vraisem-
blablement à utiliser la route maritime internationale, soit aux
uns et aux autres -avertissements quileur auraient permis d'éviter
le danger. JI(Mémoirebritannique, par. 92.) L'Albanie n'ap,as pris
de telles mesures. C'est donc sur un tel (fait d'avoir permis l'exis-
tence du champ de mines ....sans le signaler a (par. 96, n" 6), sur
un tel passif et omissif acquiescement du Gouvernement albanais
quant à l'existence d'un chanip de mines dangereux et non signalé,
dans un chenal que l'on savait être utilisé par les navires britan-

niques 1)(Mémoirebritannique, par. 93), que repose (une cornpli-
cité directe ri (Mémoire britannique, par. 94) du Gouvernement
albanais dans l'affaire.
Cette responsabilité se trouve singulièrement aggravde, voire
transformée, si 1'Etat ayant connaissance des mines se trouvant
dans ses eaux ne les signale pas mêmeau moment du danger immi--nent que ces mines font courir aux navires les approchant. Les
.a.utoritésalbanaises auraient eu l22 octobre 1946 toujours trente

minutes pour mettre les navires britanniques en garde. (iDans
cesconditions, le fait de permettre aux naviresde sediriger directe-
ment vers un champ de mines, dont l'existence - le Gouverne-
ment du Royaume-Uni estime que cela est bien établi - était
connue des autorités albanaises, constituait un acte équivalent en
.droit placer les mines sur la route des navires, dans l'intention de
les détruire, indépendamment du fait que cet acte &tait contraire
aux principes établispar la Convention deLa Haye susmentionnée,
~elativement à la notification des champs de mines. ib(Mémoire
britannique, par. 92.)

88. - Si telle était la thèse du Gouvernement britannique,
il lui suffirait de prouver que le Gouvernement albanais aurait
acquis avant le 22 octobre 1g4G la connaissance de la présencedes
rnines dans ses eaux sans les signaler. C'est à quoi seul le Mémoire
s'emploie.11laisse. de côtéla question si le Gouvernement albanais
avait poséles mines lui-mêmeou avait participé à leur mouillage.
Néanmoins, de mêmequ'auparavant la note du 9 décembre 1946
et le representant britannique devant le Conseil de Sécurité,le
Mémoire ne cesse d'affirmer que le Gouvernement albanais est
responsable d'avoir mouil16 les mines ou d'avoir participé à leur
mouillage, et il nese limite pas i soutenir que le Gouvernement
albanais a su la présence des mines, Toutefois, ces divers chefs
tl'accusation ainsi cumulésne sont qu'une clauseda styleLeMémoire
n'indique pas un seul fait permettant de conclure que le Gouverile-
ment albanais aurait mouillé les mines lui-mêmeou aurait parti-
cipé à une telle action entreprise par un tiers et n'entreprend même
aucun effort dans ce sens. C'est seulement de la connaissance des

mines dont il aurait fait usage que le Mémoireaccuse le Gouverne-
ment albanais. Et c'est exclusivement à une telle connaissance
:tllégu6eque se limitent les moyens soumis par le Gouvernement
britannique à titre de preuve, ces prétendues preuves étant en
mêmetemp les seules dont il s'agirait dans toute l'affaire.

Les preuves britanniques de la prétendueconnaissance albanaisedu
champ de mines.
(Ad paragraphe 96, no2, lit. e, paragraphe 24 du Mkmoire.)

89. - L'issue dans l'affaire présente dépenddonc de la question
si le Gouvernement albanais connaissait ou non le champ de mines
qui se serait trouvé avant le 22 octobre 1946 dans ses eaux du
canal nard. D'après le Mémoire, ce serait l'unique question que
pose la première partie du compromis. Les conclusions du Gouver-
nement britannique affirment l'existence d'un tel champ de mines
et elles affirment en outre qu'cril était impossible que des mines
aient étéposées dans une si grande mesure et si près de la côte sans que Ies autorités côtières albanaises les aient vu oii :entendu
poser. Les mesures particulieres de vigilance, prises par le Gouver-
nement albanais durant les six mois qui précédèrentl'accident

survenu aux navires de Sa Majesté - mesures adrnises par le
Gouvernement albanais -, excluent en outre la possibilité que
ledit champ de mines ait étéposésans la connaissance dulGouver-
nement albanais. 11(Mémoirebritannique, par. 96, no 2, lit. e.) Le
nombre des mines et leur proximité du littoral albanais ainsi que
la vigilance spéciale qu'auraient exercée Ies autorités albanciises,

font l'objet d'une description sur quelques points pIus détaillésse
trouvant dans le paragraphe 24 du Mémoire.:
Tels étant les faits sur la base desquels on serait ((irrésistible-
ment amené à conclure iique les mines étaient (rtout au,moins ))
connues du Gouvernement albanais (cf. par; 76 du Mémoire), il
est prima jacis évident qii'sucun de ces fiits ne constitue une
preuve directe. Le Gouvernement britannique ne dispose d'aucune

preuve de cette nature. Il n'est pas à mêmede soumettre aucun
document qui prouverait sans autre que le Gouvernement au les
autorités albanais auraient eu connaissance des mines en ques-
tion. Il reste donc à voir s'il est permis de tirer des faits dont le
Gouvernement britannique se réclame,des conclusions susfeptibles
d'établir le fait prétendu (( sans aucun doute plausible oii moral n,
conformément aux règles des preuves indirectes. « Je ne suis pas

en mesure de citer ici destémoins oculaires de l'opération. Toutefois,
certaines circonstances font apparaître d'une manière décisive la
responsabilité de l'Albanie. a (Mémoire britannique, annexe 23,
r. 21dIII
Les circonstances ci-dessiis.indiquées ne sont pas les seules que
le Gouvernement britannique soumette à l'aGpuide son accusation.

11y en a d'autres dont il est question plus loin (voir par. 93 et
'suivants). Mais de toutes ces circonsta~ices, Ies concliisions du
Couvemenlent britannique ont sélectionnécelles qui à son avis
seraient les plus susceptibles de prouver la responsabilité du Gou-
J vernement albanais. Leur force probante se;baserait au fond sur
l'expérience courante que de manipuler des lourds objets cause
nécessairement du bruit ;les personnes àproximité entendent, sinon

qu'elles voient en mêmetenips. La question qui se pose en ,premier
lieu est donc si les mines avaient pu êtremouillées à leur;endroit.
((sans que les autorités côtières albanaises les aient vu ou entendu
poser i).
,4 la question principale ainsi résumée,le Gouvernement Albanais
répond categoriquement qu'il n'y avait personne du côté Ilbanais
qui aurait vu ou entendu les mines en question au cas où celles-ci

auraient étémouilléespar qui que ce soit dans ses eaux avant le
22 octobre 1946 ou à une autre époqueaprès la fin des hostilités.
Cette déclaration est conforme àl'étatdes faits ainsi que le Gouver-
nement albanais les connaît.
I go. - Il s'expliqued'une façon naturelle que les mines en ques-
tion, au cas où elles seraient mouillées,n'ont éténi vues ni enten-
dues par aucune personne albanaise :
a) Des personnes qui se seraient décidéesde mouiller des mines
dans les eaux albanaises auraient pu procéderpar une nuit sombre
et dans des co~iditions atmosphériques rendant difficile toute
observation des rives. Des conditions atmosphériques pareilles
prévalaient par exemple pendant les trois semaines avant le
13 novembre 1946.

Dans des conditions pareilles, toute obsen~ation des rives alba-
naises aurait étélimitée à la possibilité d'ouïr du bruit du large.
b) Lesdites personnes auraientpu disposer des moyens techniques
leur permettant d'entreprendre l'opération de mouillage sans être
vues ni entendues. Ainsi ces personnes auraient pu employer des
sous-marins. Par ce procédé,des mines auraient pu étremouillées
sans que leur mouillage soit vu ou entendu. Des .sous-marins
construits pour une' telIe opération sont employés par exemple
dans la marine britannique, dans la marine grecque. Parmi les
unités britanniques participant à l'opération entreprise dans les
eaux albanaises les 12-13 novembre 1946, ily avait deux de ces
sous-marins.
S'il s'agissaide navires de surface qui auraient procbdé audit
rriouillage de mines, ces navires ont pu êtreaménagésde façon A
éviter le bruit ou à l'amortir sensiblement. La pratique montre

que par exemple le bruit de la mine qu'on laisse tomber dans
l'eau peut être réduit à un degré considérable si l'on plonge dans
l'eau les rails sur lesquels on fait glisserles mines. Le bruit du moteur
peut êtreréduit en ralentissant son fonctionnement et les bateaux
à électro~moteurs naviguent sans faire aucun bruit.
Les moyens techniques des sous-marins et des navires de surface .
permettent aussi d'effectuer Ie mouillage des mines dans un laps
de temps très court. Deux douzaines de mines peuvent êtreposées
par ,exemple dans quelques minutes seulement.
c)L'expérienceacquise déjà dans la guerre de 1914-1918, confir-
niée etdéveloppéetrès largement dans la guerre de 19391945,
rriontre que des mines ont étéposéespar des belligérants en posses-
sion des moyens techniques appropriés à Ia proximité immédiate
des rives et jusquedans les ports ennemis. C'est ainsi que la marine
britannique s procédé par exemple dans les eaux norvégiennes et
françaises occupéespar l'ennemi, de mêmeque la marine allemande
a réussi à en faire autant. Des navires de surface, des sous-marins,
des avions ont étéemployés, les conditions atmosphériques et la
nuit servant de couverture.
Mouiller des mines dans les eaux albanaises sans être aperçu,
ni vu, ni ouï, n'était quel'application de cesprocédéspour quiconque
aurait disposédes moyens techniques nécessaireset se'serait décidé
d'en faire usage en l'occurrence.' d) D'agrès le Mémoire lui-même, lesprëtenducs mines ne se
trouvaient pas à une telle proximité des rives albanaises pour que
la conciusion s'impose qu'on aurait necessairement entendu le
bruit de leur inanipulatioil ou de leur immersion dans 'l'eau au
cas où il y avait du bruit. D'après le Mémoire,il s'agirait Gevingt-
deux mines. De ce nombre, il y a,suivant le Mémoire(carte consti-
tuant annexe g),.seulcmcnt une mine qui se serait troiiv6e amarrée
à la distance allant jusqu'à environ 700 mètres de la rive albanaise.
Une telle distance rend impossible de se rendre compte de la pose
des mines sans moyens techniques spéciaux. Cette mine au sud de
la pointe Denta se serait trouv6e loin de la baie de Saranda à

l'endroit désert, et oh, suivant l'annexe no 7 du hlémtiii-e ,1 n'y
avait pas de gardes côtiers albanais. Toutes les autres 'mines se
trouvent, suivant la carte citée, plus loindu littoral albanais la,
plupart à la distance d'environ 1,500 à j.000 mktres. A une telle
distance, il n'aurait pas étépossible aux autorités albanaises
d'entendre du bruit, d'autant moins de les voir mêmes'il n'y avait
pas les circonstances déjà mentionnées et gtii excluent .une telle
possibilité ou la rendent trks limitée.
e) Le nombre des mines (vingt-deux niines) dont il s'agirait en
l'occurrence ne rend nullenient nécessaire que le bruit de :lYimmer-
sion de ces mines aurait dû êtreperçu des rives albanaises. Les
mines en question auraient étédispersées sur l'espace conçidérable
d'une longueur de trois milles marins. Dans ces conditions, même
si quelques bruits auraient pu être perçus aux rives, il n'était

nullement nécessairequeces bruits éveillassent l'attention, et encore
moins la curiosité quant à leur cause possible.

91. - Le nombre des niines qui se seraient trouvées avant le
13novembre 1946 dans les eaux albanaises de Sarandci, lep proxi-
mitédesrivesalbanaises, neprouvent doncnullement qiieleurmouil~
lage ait dû êtreaperçu. Les conclusions du .Gouvernement britan-
nique soulignent donc, en plus, la vigilance ((spéciale ))qui aurait
étéorganisée les six mois avant le 22 octobre 1946 dans la région
par le Gouvernement albanais. Si le mouillage des miries avait
pu échapper à l'attention des personnes aux rives, il n'a$irait pas
pu échapper2~ la ((vigilance spéciale iorganiséejuste pour observer.
Le service de sécurité exi:rcé par le Go~ivefnement alba?ais dans
la région du canal nord di: Corfou a étéexposé plus haut. (Voir

partie II, par. 8,40.) AUXfils de se rendre compte de la force pro-
bante de l'argument avancé par le Gouvernement britannique,
par rapport à la prétendue vigilance speciale, il y a lieu de tirer
desdits faits exposés plus haut les conclusions suivantes :
a) vu les moyens techniques dont disposait le serviceide sécu-
rite albanais dans la regioii du canal nord, ce service était essen-
tiellement limité quant S l'observation de ce qui se passe sur la
mer ainsi qu'au-dessous et au-dessus des eaux, à l'emploi des yeux
et des oreilles, à la vue et à l'ouïe. Il se trou'vait donc particulière- ment limité de se rendre compte de l'état des choses sur les eaux
pendant 1snuit, notamment pendant des nuits sombres, orageuses,
dans la pluie et le vent, au bruit des lames ;
6) en organisant ledit service, le Gouvernement albanais ne
prenait pas en considération un cas spécial commc celui allégué
par le Gouvernement britannique dans son accusation. Suivant
l'e-xpérience,c'étaient des incursions dans les eaux albanaises des
bateaux soit grecs soit inconnus qui s'avançaient pour créer des
incidents, tirer sur les rares barques albanaises, s'approcher et
tirer sur le littoral, le cas échéanty descendre des agents de diver-

sion et des espions. Le service de sécuritéalbanais disposait des
hommes'et des armes nécessairespour parer aux incidents pareils.
Mais il n'était pas préoccupéde l'hypotlièse que les eaux albanaises
pourraient être violéesd'un façon si spéciale et en mêmetemps
exi:eptionneIle, h l'aide des moyens qu'exige le mouillage clandestin
de:; mines, et, y eût-il pensé, il ne disposait ni du matériel ni des
services nécessaires. La fonction du service de sécurité étant
foridamentalement d'un ordre limité, il en ressort qu'il n'était pas
d'avance préparé Lts'attendre aux mines et prêtà les prévoir ;
(:) en ce qui concerne la ligne maritime marchande yougoslax-e,

les bateaux desservant cette ligne ont mouille plus ou moins régu-
lièrement dans ce port selon les nécessitésdu transport, le port de
Saranda n'étant considéréd'après l'arrangement albano-yougo-
slave que comme un port facultatif. Toutefois, ce fait est étranger
à l'affaire présente ;
rl) les traits essentiels dudit service de sécuritéalbanais ressortent
avec une évidenceparticulière dans le fait que ce service ne dispo- ,
sait d'aucun moyen de locomotioii nautique. Limité quant 3 la
perception des faits sur mer à ses sens (a l'exception des jumelles),
il était immobile quantaux eaux. Non seulement la défensecontre
un danger découvert, mais sa perception mème, maintes fois,étaient
rendues difficiles ;

t:)lesmoyens techniques ne sont d'ailleursjamais que des moyens
auxiliaires des êtres humains. C'est par des hommes qu'uii te1 ser-
vice, comme celui dont il s'agit en l'occurrence, est fait eripremier
licii. Or, on contredirait l'expérience généraleen supposant que
même la meilleure vigilance est toujours omniprésente et omni-
sciente. Il suffit dserappeler àcet égardla dernièreguerremondiale,
pendant laquelle de grandes forces navales ont pu échapper a la
vigilance serrée des forces côtières et munies des moyens les plus
modernes ;
j) les faits prétendus que soumet le Gouvernement britannique
à l'appui de ladite ttvigilancc spéciale IIalléguéepar lui, nc chan-

ge~iten rien ce qui vient d'êtredit Ace sujet.
Ide Gouvernement britannique (Mémoire,par. 24) ne parle de
13 1~vigilance spéciale )qu'à la suite de certaines paroles du repré-
sentant du Gouvernement albanais (levant le Conseil de Sécurité.
11'a été exposé plus haut qu'une telle interprétation cherchetendancieusement dans cesparoles ce qu'elles n'ont jamais contenu.
Après, le seul argument britannique qui reste veut déduire la pré-
tendue ((.vigilance spéciale » du fait qu'il y avait des incidents
dans le canal nord de Ccirfou où les postes côtiers albanais sont
intervenus. Toutefois, rn&melcs cas où cesqpostes seraient cn effet
intervenus ne prouvent rien pour d'autres cas.
En résumant les points qui précèdent, les coiiclusions i tirer
desfaits se rapportant au service de sécuritéalbanaisdans Ia région
du canal nord sont qu'il ~i'yavait pas du tout un sentice de vigi-

lance spéciale >iDes personnes disposant des moyens techniques
appropriés auraient pu mouiller les mines dans les eaux en question
sans ètre vues, encore inoins entendues. Cette conclusion's'impose
beaucoup plus nécessaire~nentque toute hypothèse contraire.
92. - La conclusion est d'importance capitale pour l'affaire

présente. Les seuls moyens de preuve que le Gouvcrnenieiit britan-
nique était à mêmede soumettre dans ses conclusioiis devant la
Cour à l'appui de la responsabilité albanaise par lui prétendue se
trouvent dépourvus d'aucune force probante. Le maximum que
le Gouvernement britannique s pu se décider d'entreprendre à
démontrer, à: savoir que les autorités côtiéres albanaises auraient
dû voir ou entendre le prétendu mouillage de mines, ou qu'elles
auraient eu connaissance (le l'existence des mines, n'est pas prouvé
et démontré. Il n'y a pas d'autres moyens de preuve que le Gouver-
nement britannique aurait soumis pour prouver que les autorités
albanaises nécessaireinenf. ont dû voir ou entendre.

D'autres preuves indirectes britanniques.
(Ad parag aplies 77, Sg, 93 du 3Iémo:t-e.)

93. - En' l'absence des moyens de preuve se rapportant à la

connaissance alléguéedu Gouvernement albanais des mines niouil-
Iées,le Mémoireest obligéde faire appel à diverses autres circons-
tances, n'ayant rien à faire avec la connaissance prétendue du
Gouvernement albanais, pour les interpréter comme d'autres
moyens indirects qui indiqueraient la complicité albanaise dans
le mouillage des mines. Les conclusions elles-mêmesnc proposent
aucune de ces circonstances comme preuve d'une complicité alba-
naise, c'est le Mémoireseul qui les indique comme telles : ((Dans
le présent cas, les preuves indirectes se composent des preuves
nccumuIées,fournies par diverses circonstances et qui toutes poin-
tent dans la mêmedirection, u (Mémoire britannique, par. 77.)

Dans un tel ordre d'idées, le Mémoire indique donc comme
<(particulièrement significatif pour la question de la complicité
albanais eque le Gouvernement albanais n'a pas soulevé de
protestation contre la violation de sa souveraineté, qui serait
résultée du mouillage d'un champ de mines à son insu et sans son
consentement dans les eaiis territoriales, et qu'il n'a pas demandéqu'une action si illégalefasse l'objet d'une enquêtc, (rce qui aurait
ét6la réaction naturelle d'une partie innocente ))(Mémoirebritan-
nique, par. 77). Même lerepresentant albanais devant le Conseil
de Sécurite n'aurait pas semblé très préoccupéde I'cxistence du
ch;imp de mines en question (Mémoirebritannique, par. 77, 93).
Dans le mêmeordre d'idées,l'opposition du Gouvernement alba-
nais à la décision arbitraire du Gouvernement britannique de

procéder seul au dragage du 13 novembre 1946 est interprétée
comme une preuve que le Gouvernement albanais n'était pas dési-
reuxde voir proc4dcr à ilne enquêtesur les mines (Mémoirebritan-
nique, par. 21, 93; annexe britannique 23, pp. 215-216). Lemobile
de la cpmplicitéalbanaise serait révélé par l'attitude généralement
hostile du Gouvernement albanais envers la Grande-Bretagne :
ctQue se passc-t-il alors ? Des mines sont mouill6es mystérieuse-
mt:nt et à point nommé, à des endroits choisis pour permettre au
Gouvernement albanais de mettre sa politique en Œuvre. a (Annexe
britannique 23, pp. 241-242 ; Mémoire britannique, par. 93.)Le
mobile politique de ce mouillage de mines, déterminepar l'attitude .

politique hostile envers la Grande-Bretagne en général,nc serait
pas le seul. Le Mémoire indique même les opinions juridiques
erronées du Gouvernement albanais comme preuve de la complicité
allmnaise dans ledit mouillage de mines. « En fait, cette erreur sur
les droits générauxd'un Ztat, selon le droit international, est la
seule explication que I'onpuisse imaginer del'attaquede l'Orionet
du Strperb, le Ij mai, ainsi que de la complicité albanaise quant -
2 I'établissenient d'un nouveau champ de mines non signalédans
un chenal déminé, utilisépar des navires étrangers. e (Mémoire
britannique, par. 89.)
Toutes ces circonstances seraient des preuves établissant la
complicité albanaise dans le champ de mines prbtendu d'une façon

tri:s sûre. Elles concourraient ensemble pour établir non seulement
le fait de la complicité, mais détermineraient de plus près son
degré, à savoir qu'il s'agit du doizss. Le Mémoireformule une telle
((grave conclusion iiainsi :(t,,,la pose de mines ou tout au moins
l'acquiescement du Gouvernement albanais quant ?i l'existence .
d'un champ de mines dangereux et non signalé, dans un chenal
que l'on savait 6tre utilisé ou sur le point d'ètre utilisé par les
na.vires britanniques.. .Ir. (hfémoire britannique, par. 93.)

94. - Si 1'011procède à examiner de près la force probante
desdites circonstances par rapport à la complicité albanaise pré-
tendue, il semble bien nécessaire d'admettre au moins, mêmeen

partant du point de vue britannique, que chacune de ces circons-
tances se prête encore à d'autres explications et interprétations
qiie celles füitespar le Gouvernement britannique. Que le Gouver-
nement albanais soit complice dans le champ de mines prétendu
n'est nullement c(la seule explication que I'on puisse imaginer »
(Mémoirebritannique, par. 89) desditcs circunstances. Ces circons- 94 COXTRE-~\IÉ>IOIRE DU G0CVERNEMEZ;T .4LBAN.+IS (15 Vi 48)

tances, prises séparémentou ensemble, n'ont nullement uune force
irrésistible qui ne peut co~idiiirequ'à une seule conclusioii I)((qui
toutes pointent dans la mêmeclirectioii 1)(Mémoirebritannique,
P"'. 77).
Elles admettent sùrement encore une autre explication que la
prétendue complicité albanaise. Le Gouvernement albanais n'avait

aucune connaissance du champ de mines en question, et encore
:tujourdJhui il en sait seulement ce qu'allègue le Gouvernement
britannique à cet égard. Dans ces conditions, la question d'une
protestation albanaise ne pouvait pas se poser. En apprenant
l'existence du champ de mines par les allégations du Gouvernement
britannique, le Gouvernement albanais apprit en même'temps
l'imputation odieuse britannique dirigée contre lui : et depuis,

ayant à se défendre contre cette imputation, le Gouvernement
albanais s'est empressé de sa part qu'on fasse la lumière et toute
la lumière. Son représentant devant le Conseil de Sécurité à
New-York était légitimement préoccupépar sa tâche, à savoir,
dc réfuterl'imputatioii britannique. L'opposition du Gouvernement
albanais à l'action britaniliqiic, culminant le 13 novembre 1946,
était dirigée contre la prétention inadmissible à ce que le Gou-
vernement britannique dispose des eaux albanaises sans l'Albanie
et contrairement à la décisioliriu Comitéinternational compétent.
D'autres pays que l'Albanie se sont trouvés au cours de l'histoire
-
en désaccord politique avec le Gouvernement britannique et ont
eu cux aussi à défendre Iciirs eaux contre ses prétentio~is,fondées.
sur des opinions juridiques exilgéréesou erronées :il lie s'ensuit
pas clu'ilssoient responsables de tout accident ,qui frappe sur leurs,
eaux les vies et les biens britanniques. Seulement a $osterioriet
pour les besoins de la préseiite affaire, le Gouvernement britan-
nique charge le Gouvernenient albanais de l'incident du 15 mai
comme étant l'auteur directement responsable et qui l'aurait voulu.
L'analyse de chacune des circonstances agxquelles le Gouverne-
ment britannique attribue la valeur d'une preuve indirecte pour
la prétendue complicité du Gouvernement albanais démontre
donc que la pensée,soit de participer au mouillage des mines, soit
de cacher et faire disparaitre que telle participation était entière-
ment absente dans l'attitude que le Gouvernement albanais a

manifestée dans ces circonstances. Tolites ces prétendues preuves
ne touchent pas l'enjeu de l'affaire présente.

95. - 11vient d'êtredit quc de toutes les Ipreuves accuniulées
fournies par diverscs circonstances et qui toutes pointent dans la
même direction »,les conclusions ne proposent qu'une seule cir-
constance - la vigilancc spéciale albanaise exercée à proximite
du prétendu champ de mines - comme preuve de la cornplicite
albanaise alléguée.Ce n'est que dans son argumentation que le
Memoire emploie d'autres circoiistances en guise de telles Iprcuves; mais sans les proposer formellement comme preuves dans ses
conclusions.
IIy a en plus d'autres circonstances que mêmele Mémoiredans
soi1 argumcntstion ne qualifie pas comme czimulative evidence.
Toutcfois, cesdivcrscs circonstances dont même leMémoire ne se
réclama pas dans son argumentation comme de preuves indirectes,
rnhitent, si brièvement que ce soit, d'étre examinées. Tout en
n'etant pas traitées et proposées comme preuves, ces diverses

circonstanccs sont toutefois, suivant l'intention bien visible du
Gouvernement britannique, arrangées de façon à étayer pour leur
part l'exposédes faits ctdes points de droit dans le sens voulu par
le Mémoire etfaciliter ainsi la construction d'autres circonstances
comme czrm.nZaiiveeuidence.

96. - En arrangeant ainsi les faits d'après Ia règle Osnlziapre-
sumzifiturrite ac solemnii!& esse acta,le Mémoirearrive àconstruire
un tableau factice des procédésbritanniques comme suit :
IIToute action britannique serait strictement conforme au droit. »
(Tout d'abord les mouvements de nos escadres ne sont plus secrets

aujourd'hui » (le représentant britannique devant le Conseil de
Sécurité, I.c.,p. 217). Les navires de guerre procèdent toujours, le
15 mai et le 22 octobre 46, au passage auquel le régime juridique
de:; eaux territoriales étrangères et le regime spécial relatif aux
détroits les autorisent. Si la marine de guerre britannique se rend le
12-13 novembre 1946 dans les eaux albanaises du canal nord de
Corfou, c'étaiten premier lieu <(eu égarclaux recommandations du
Comité de déminage compétent ))(Mémoirebritannique, par. 21)
et sous la direction du commandant en chef allié en Méditer-
rariée (Mémoirebritannique, par. 22).11est vrai que l'Albanie ne
fait pas partie du Comitéinternational ;mais c'est parce qu'ellene .
possède pas de dragueurs de mines (Mémoirebritannique, par. 2).

D';iilleurs, aucune objection n'a étéélevce ni par l'Albanie ni
par une autre Puissance aux dragages antérieurs (Mémoire britan-
nique, par. II).Se trouvant dans les eaux albanaises, les bâtiments
de guerre se comportent plus que correctement. Ils ne procèdent
qu'en ligne de file et seulement dans le but de traverser directement
les eaux dont il s'agit, et ils arborent leur pavillon. Ils ne répondent
pas au tir de la côte qui les surprend (15 mai 1946), et s'ils se
trouvent aux postes de combat le 22 octobre 1946, ce n'est qu'une
pure mesure de défen'seet de précaution. Excepté le 13 novembre
1946, il n'y avait jamais eudes survols de la régionpar des avions
britanniques. La marine de guerre britannique ne poursuit que
des taches humanitaires et pour le bénéficede tous (Mémoire

britannique, par. 21) ;ou elle rentre d'une croisière dans les ports
de pays amis « conformément à une tradition en honneur pendant
bien desannées du temps de paix » (Mérnoirebritannique, par. 15).
Si les armes sont employées à la proximité des,rives albanaises
(13 novémbre 1,9461,ce n'est que pour éliminer les dangers aussi« pour les maisons et les propriétésdu littiiral ii(rapport IVhitford) ;
d'ailleurs, toutes les mesures sont prises pour ne pas troubler la
susceptibilité albanaise. On lie se fie pas à ses propres lumières
en ce qui concerne Ies mesures peut-être délicates ;l'observateur
apparemment neutre mais bien du choix britanriiqiie est invité
spécialement pour juger (cpt. Mestre), on ne fait rien sans sa
présence.D'ailleurs, la marine de guerre britannique possède clans
toutes ces choses une grrinde expérience. Des rapports officiels, des

photographies faites à l'instant mème d'un événemeilt,des cartes
avec des mesures exactes, ainsi que toute autre documentation
peuvent toujours êtreproduits. .
Par contraste à ces actions britanniques, toujours préteildiinicnt
correctes et animées d'intentions irréprochables, la manière de
procéder du Gouverneinent albanais et des autorités apparait dans
le Mémoirejusqu'aux moindres circonstances dans un tableau peu
sympathiquc. 11n'est point nécessaire de mentionrler eiicorc zinc
fois que, d'après lc Mérnoireet d'autres exposés britatrrtiqiics, le

Gouvernement albanais est toujours plein d'hostilité envers la
Grande-Bretagne, jamais soucieux du droit, attaquant les bateaux
sur une route internationale, etc. Mais toute une sériedc moindres
circonstances complète ce tableau. Le 22 octobre 1946, quaticl lc
contre-torpilleur Sazu~iarea :t étéendommagé, ((une vedette alba-
naise battant pavillon blanc ....resta dans les parages pendant
vingt à trente minutes et, je regrette de Ie dire, sans offrir aucune
assistance, puis elle regagna le port. La seule remarque que j'ai à
faire sur cet incident cst qrfcmon Gouvernement ne comprend pas

l'emploi du pavillon blanc qui,dans tous les pays du monde, Inarque
une trêvedans les hostilités. 1) (Mémoirebritannique, annexe 23,
p. 209.) Le 13novembre 1946, la vedette réapparaît dans les rap-
ports britanniques ; ((un homme à bord paraissait manier une
arme à feu i)Sur un autre plan, le Gouvernement albanais n'accepte
l'invitation qui lui est adresséepar le Conseil de Sécuritéde parti-
ciper à la discussiori du différendqu'«aprSsquelque délai 11(Mémoire
britannique, par. 30)) et son représentant n'arriva, d'après le Gou-
vernement britannique, qri'aprèsde nouveaux retards injustifi6s.
Son exposé contient <(un certain nombre d'allégations, cntiére-

ment dénuéesde fondement a. (Mémoire britannique, par. 32.)
Un Gouvernement iiinocent aurait agi en l'occurrence autrement.
« J'aurais pensé que, si II: Gouvernement albanais ignorait en
toute sincéritéle mouiHage de mines, et était innocent en cette
affaire, il aurait opposC un démenti à l'accusation don? il était
l'objet en l'appuyant de toutes les preuves qu'il aurait pu rassern-
bler, au lieu de formuler des contre-accusations et de donner B
entendre que ses actes étaient justifiés. J'ajoute qu'il aurait mieux
fait ressortir son innocence s'il nous avait aidé à redraguer le che-

nal. ii(Mémoirebritannique,. annexe 23, p. zr j.)
97, - De telles circonstances et d'autres pareilles jpparais-
sent dans le Mémoire et dans d'autres exposés britanniques se COSTRE-~IÉMOIK DU GOUVERNEJIEST ALBAXAIS (15 VI 43) 97

rapportant à l'affaire présente, et qui composent des tableaux
factices, ainsi qu'il vient d'êtredit, dans deux buts opposés. Le
but poursuivi par un tel arrangement des circondances d'ordre
des plus divers est de créerla présomption que tout est correct et
en bon ordre du côté britannique et juste le coiitrnire du côté
albanais..

Il suffit d'examincr tant soit peu une à une ces circonstances
pc~urdiscerner aisément comment leur arrangement intentionnel
va à l'encontre de ce qui s'cst passe effectivement. Soumise à
l'cxamen critique, unc tcIle méthode du Mémoireprovoque néces-
sairement Terfsiiltat contraire à celui que s'est proposé leGouver-
neinent britannique. Et il devient évident que toutes les circons-
tances alléguéesde I'affnire,aussitôt qu'examinées scrupuleusement
et dans un esprit critique, sont loin de pouvoir servir l'acc~isation
britannique à titre de preuves, n'étant susceptibles à prouver
eri quoi que ce soit la prétendue connaissance du Gouvernement
albanais de l'existence des mines en question, voire que le Gouver-
nement albanais lui-inêmeles aurait mouillées ou aurait participé
A une telle action.

Prétendus « corpora delicti .» et leurs questions.

(Aliparagraphe 26,lit. a, paragraphe96,no 1,du Mémoire.)

98. - A la suite de ce qui précède, laquestion de la respoiisa-
bilité alléguéedu Gouvernement albanais pour des mines qui
seraient découvertes le 3r novembre 1946 doit être considérée
close. Le Gouvernement albanais n'avait aucune connaissance des
rriines en question ;Ic Gouvernement britannique ne dispose d'au-
cune preuve à cet égard.
Cet état de choses conforme aux faits et au droit en ce qui
concerne la prétendue responsabilité du Gouvernement albanais,
n'empêchepas, toutefois, d'examiner encore, à titre subsidiaire,
s'il p avait vraiment des corflora delicta'dans l'affaire présente.

En d'autres mots, la question se pose quelle est la force probante
des diverses circonstances se rbf6rant aux prétendues mines dra-
guées le 13 novembre 1946, que le Gouvernement britannique
invoque et dont il a conclu:((Les mines qui causèrent le 22octobre
des dommages et pertes aux navires britanniques, faisaient partie
d'un champ de mines automatiques de contact amarrées, inten-
tionnellement mouiIlCespeu de temps avant l'incident qui se pro-
duisit, surla route maritime internationale qui avait été,pour la
dernière fois en février 1945, draguée et constatée exempte de
mines et qui, depuis cette date, avait Ctéfréquemment utilisée
aux fins deIa navigation maritime. j)(Mémoirebritaniiique, par. 26,
lit, a.)
Cette conclusion du Gouvernement britannique demande à être
examinée à la lumiére des circonstances qui ont étérapportées

7 dans les rapports précitésdii contre-amiral H. R. G. Kiriahan, du
commandant Q. F. ll'hitford, de l'artilleur intérimaireE. Powning,

du capitaine de frégate R. Mestre, et du surintendant de l'Institut
de l'Amirauté. Il a étédit plus haut que ces rapports sont les seules
sources concernaiit les événements précitésdu 12-13 novembre
1946 en ce qui concerne les mines.

99. - Quant à l'unc de ces sources, c'est-à-dire le r:~pportciu
capitaine Mcstrc, il a étèremarqué (par. 71) que le capitaine Mestre
n'avait aucune qualité tant soit peu officielle pour prendre part
aux opérations britanniques du 12-13 novembre 1946. En ce qui

concerne scs rapports, ils contiennent déjà prima faciedes'erreurs,
des contradictions, des lacunes les plus surprenantes. 11 y a seule-
ment un chiffre qui lui est commun avec les rapports hritariiiiques,
savoir qu'il y avait vingt-cleus inines coupees. Mais le capitaine
Mestre répète cechiffre simpleincnt après les officiers britanniques :
il n'a pas vu lui-mêmeles vingt-deux mines, ni ne les a contrôlées.
C'est aussi d'après <iouï-dire 11qu'il affirme que dis-huit mines
ont étélaissées dri~isl'eau non coulées ; que sept mines ont été
coupées lors de Ia deuxième passe et treize lors de la troisième.

Il diffère cl'ailleurs, sur tous ces points, des rapports Kiiiithan,
Whitf---.-
(iLes huit mines que j'ai vues personnellement 6t.nierit ccllcs
draguées à la prcniicre et a I:ideuxième passe. iiMais (l'après le
rapport H. Powning, il aiirait vu huit mines de la deuxième passe.
et d'après le rapport Kinahan du Ij novembre 1946 aussiila mine
de la première passe, donc neuf mines en tout. (Alternativement,
Ie capitaine Mestre aurait vu seulement hriit mines de la deuxième
passe, maisdans ce cas-ci il n'aurait pas vu la mine de la première
passe. Cf. sur ce point plus loin.)

Il y a lieu de souligner les points suivants dans les rapports
du capitaine hlestre :
a) Les huit ~ninesqu'il aurait vues d'après lui-mème le 13 novem-
bre 1946, n'auraient pas étédu type GR comme il a étécertifie le
16 novembre 1946, mais du type GY - comme il le croit, cette
fois-ci,((sans aucun doute possible >)- à Malte le 23 novembre
1946-
Il s'est trompéainsi ensemble avec le lieiltenant Philljps, l'expert
britannique en matière clcmines, présent le 13 novembrc 1946.

D'après le rapport Powning, le capitaine Mestre et le lieutenant
Phillips ont examiné eiisemble daris l'eau huit mines di:la deu-
xième passe. S'il en &tait ainsi, ces deux spécialistes auraient
confondu huit fois ensemble des mines contenant 600 lhs. rl'cx-
plosif avec des mines qui n'en contiennent que go lbs.
Cette erreur commise FIT des officiers experts mérite l'attention:
en effet, la mine GR a un diamètre de Soo-goo mm., tandis que la
mine G1' a un diamètre de 1.120-1 130 mm., et en plus il y a une
différence frappante de construction :la mine GY a une sorte de ceinture passant par son milieu et Ia ,partageant en deux hémis-
phères, ses deux plaques d'ouverture se trouvent en haut de I'hérnis-
phère supérieur comme sur la mine GR, tandis que la mine GR ne
porte point de ceinture et elle a encore une plaque ci'ouverture dans
la partie inférieure, de sorte que lorsque la mine se trouve dans
l'eau on ne l'aperçoit pas. 11r6sulte de ces diverses différences
qu'un expert sérieux regardant ces inines de près rie peut pas se
triimper sur leur type.
b) Le capitaine Mestre a écrit encore le 16 novembre 1946 ail
président du ComitCméditerranéen que le « chenal de Corfou peut
dorénavant être considérécomme ouvert à la navigation de sur-
face B.Les officiers responsables britanniques ont formulé déjà le
74 novembre l'opinion contraire, vu que le prétendu dragage des

eaux du canal nord aurait étéabandonné le 13 novembre 1946,
avant sa fin. II est ainsi intéressant de faire remarquer que les
résultats du dragage alléguésont appréciéstout Afait clifférernment
par les persoiines chilrgées dudit dragage et par celui auquel on
attribue la qualité d'observateur neutre.
c) En ce qui concerne le trait saillant du prftendu dragage effec-
tué le 13 novembre 1946, savoir le mouillage siipposé récent des
m-ines prétcndûment coupées ce jour - le rapport du capitaine
Blestre du 16 novembre 1946 passe entièrement sous silence et de
#lano la circonstance si importante qu'est 1s couleur des mines
coupées. Mêmeà Malte, en faisant observer que les marques
peintes sur les mines étaient encore très visibles riil omet de dire
quelle couleur avaient les mines ou ces marques et quel était leur
état. Toutefois, une telle circonstance a bien de l'importance en

l'occurrence. Mêmesi, d'après l'expérience scientifique, la couleur
des mines n'est pas un critère solide pour apprécier la durée de
l'immersion d'une mine dans l'eau, il reste toujours que l'état de
In couleur, si celle-ci était noire, ne devait pas Echapper à l'obser-
vation du capitaine Mcstre.
En résumé,vu le caractère entièrement non officiel du capitaine
Ilestre en tant qu'observateur, vu les contradictions, les lacunes
et les erreurs de ses rapports, dues à la tendance prérnéditéeavec
laquelle ils ont étéprésentés,son témoignage ne saurait posséder
aucune qualitê pour être admis.par la Cour comme ayant force
probante.

IOO. - Le rapport du H. R. G. Kinahan du 14 novembre 1946,
quoique rédige par le commandant qui a connaissarice de toute
l'opération, ne donne pas des précisions et cles détails concernant

cette opération. Il rncntionne seulement ((quelque quatorze mines
flottantes »,(1iin miiiimum de douze autres mines il.
Sur de tels points et d'autres (le nombre des mines coulées),
Ics rapports W,iitforti contiennent d'autres chiffres et plus précis.
II a étédéji remarqué plus haut que Ie Commander IVhitford,
pour autant qu'il se prononce dans ses rapports personnellement,s'appuie sur des observations qu'il n'a pas faites autrement que du
bord du Welfare. C'est donc à une certaine distance des mines qu'il
forme I'opiiiion qu'« aucune de ces ~nirics n'a pu Gtre mouillée
avant deux mois )IC'est seulement pour les pièces de mécanisme
de la première mine - N qui sc trouve in:iiriteririilà bord du
H. M. S. Welfave i- que son opinion devient plus précise. Parini
les meinbres clilpersonnt:l britannique, c'est donc seul le lieutenant

Phillips, R. N. V. R., l'officier chargédes mines, qui avait I'occa-
sion d'examiner 5 partir d'environ midi du 13 tzovenibre 1946,
un certain nombre de mines et deux des mines tout près.
11a étéd6jà csposé qu'en exaininant lesdites neuf mines, dont
deux de près, le lieutenant Phillips tire une conclusion erronée sur
un point aussi important que celui du type des mines.
En résumé,il est évident que le 13 novembre 1946, du côté

britannique également et non seulenlent de la part du capitaine
Mestre, ont étéformuléesdes conclu~ions fausses, reposant sur des
observatioiis ne correspondaiit pas aux faits. Il y avait ce jour
évidemmeiit trop de désirs et de perisécs(zuishfztlihinking) dans
les eaux du canal nord de Corfou.

101, - La critiquc des rapports britariniques s'applique notam-
ment aussi à l'aspect extérieur des mines. Non seulement le capi-
taine Mestre, mais aussi les officiers britanniques, commandant
Whitford, lieuteliant Phillips, formentleur opinion en cequi concerne
la courte duréeprobable de la présenceclesmines dans l'eau, d'après
l'aspect estérieur des ~ninescomme il leur apparaît. ((Toutes appa-

raissent entièrement neuves ....Leur coiiverture en couleur noire
étantpratiquement dans un étatde fraîcheur. Seulement légèrement
rouillées et le crible d'amarrage est encore coiivert de graisse et
en excellent état iletc. (cf. les rapports Whitford).
Or, il y a lieu de noter que l'Institut technique des mines de
l'Amirauté britannique ayant, paraît-il, examiné l'une des deux
mines préservéesle 12 novembre 1946, n'a tiré de son examen
aucune des conclusions si sensationneIles que les rapportsKinahan,
Whitford, Mestre, orit fornmléessans tarder. Lc rapport du surin-
tendant de l'Institut de l'Amirauté contient essentieIlement :
« La mine était en bon état, à l'extérieur età l'intérieur, beaucoup
de peinture subsistait sur l'enveloppe sphérique et l'on ne consta-
tait que de légèrestraces de végétactonsous-mariiie sur lemécanisme.
Un numéro de série D. S. 161 était visil~lesur l'hémisphère supé-

rieur de l'enveloppe. Peint à l'origine eri rouge, le numéroavait été
repeint récemment en blanc : chacurie des sept antennes de plomb
portait près du bout un anneau de peinture rouge ...La mine a
été identifiée comme apparteiiant nu type alIe~nand GY.. ..
Aucune caractéristique présentarit un intérêtparticulier n'a été
observée dalis la mine ou ses accessoires.u R. P. Comrnon, E. O.
(Mémoirebritannique, annexe 20, p. 171.) Il semble, d'après ce rapport fait en jaiir-ier 1947 ,u'ily avait
Urie seule partie trouvée comme « 'récente »sur la mine, à savoir
la peinture blanche cie la marque cie la inine. (A cet égard, il y a
licu de faire obscnrer que le rapport Mestre du 23 novembre 1946
ornet ce point, tout en faisant remarquer que Ics ([marques peintes
sur les mines étaient encore très \visiblesII.)Par ailleurs, il est *
curieux de remarquer que sur aucune des mines photographiées

nt: sont inscrites les marques en blanc dont ni le capitaine
Mestre iiiles experts britanniques nc font aucrinc meiition dans
leurs rapports, et c'est seulement en janvier 1947, à propos de la
iniiie ex;tminée par l'Institut de llAinirauté, qu'on en parle pour
la première fois à ce sujet.
Ln ilote pr6citée tle l'Institut technique de l'Amirauté britan-
nique compétent présente donc un tableau de la mine en question
qiie les clcscriptions des rapports et britanniques et du capitaine
Mestre rédigésnu lendemaiii du 13 novembre 1946, quand « toutes
:y)ptaissaient entièrement neuves IID'autre part, on comprend

que c'étaieiit seulement les descriptions de telle sorte qui pou- .
\-;lient permettre au représentant britannique devant le Conseil de
StScuritéd'affirmer que « cette découverte donne à l'incident un
aspect sérieux et sinistre ». (Mémoire britannique, annexe 23,
p. zrx.)
-413 différeiicedes affirmations pareilles, il est certain que même
celles des inines du 13 novembre 1946 qui paraissaient neuves ou
r6ccnimcnt mouillées, ont pu êtreirnrnergées un temps prolongé
sans perdre l'aspect neuf. Ainsi lcs ckaîiies de la rriinte rempées
d'huile ont pu rester dans l'eau en très bon étatilritemps bien long,
étant dotin6 la résistance de la rnatihrc grilsse dont on sesert pour
iiiie telle fin.

11 aurait fallu examiner les prétciidues niincs ciécouvcrtes le
I;! novembre 1946, et leur état tout d'abord, par des procédés
appropriés tecliniqucs. Toutefois, il ii'cst que trop évident que
pour des raisoiis tout à fait d'autrc ordre, il n'y avait aucune ques-
tion d'uii tel examen technique.

La cause (lesex#losioszs del22 octobre1946.

102. - D'après l'analyse des seules sources relatives aus ~nines
di1 13 novembre 1946, savoir les rapports britanniques et du capi-
taine Mestre, la question reste entièremciit irrésolue si les mines
alléguéesprovenaient d'un champ de mines récemment mouillé.
1;orce est de prendre en considération d'rititres hypothèses.
Comme telle, la question se pose s'il ne porivait pas s'agir dans
Ie canal norcl des a~~cienschamps de mil-tesallemands.

103. - Le Gouvernement britannique s'oppose à une telle
hypothèse, inais en ne s'appuyant encore iiiiefois que sur des
pl-obnbilités ct hypothèses. L'ennemi nl:iuniit pas mouillé dans
le canal nord (lue des mines dont on aurait acquis ex post pleine102 COSTRE->IÉ>IOIRE DU (;OUVERSEAIEST AI.BANAIS (j VI 48) '

connaissance :les dragages effectuéspar la marine britannique en
19&-194j auraient cnlevé toutes les mines. Lcs navires passaient
par les eaux en question depuis Ig4j sans accident.
Ces points ont été tous élucidésdans ce Contre-Mémoire : la
carte allemande des mines dans le canal nord de Corfou produite

par le Mémoire (Mémoirebritannique, annexc 2) et les résultats
inconnus des explorations et des dragages qui auraient êté effectués
en 1944-1945, ne peuvent pas exclure d'une façon s'imposant
comme nécessaire,que des inines ne se trouvaient plus, depuis 1945,
dans le canal nord de Corfou. C'étaiten jiinvicr 1946 que le général
Hodgson a averti le Gouvernement albanais des risques 2 prendre.
En ce qui concerne la navigation ayant eu lieu sans accident dans
le canal nord depuis 1945. il faut prendre en ligne de compte l'expé-
rience générale concernant les accidents dus aux mines après la
fin des hostilités. Les mines apparaissent après des mois et des
années aux endroits les plus inattendus sur les routes maritimes

internationales draguées t:tredraguées, déclarées officiellement ,
ouvertes à la navigation et où des centaines de bateaux passaient
auparavant sans rencontrer de mines.
Quant Sl'incident du 22 octobre, la qucstioii se pose tout autre-
ment, étant donné que l'escadre britannique, procédant ce jour-là
à un passage de caractère provoquant, naviguait dans les eaux
albanaises hors du chenal qui aurait étéd6miiié après la fin des
hostilités. Il a étéindiquéplus haut que Ic contrc-torpilleur précité
se trouvait au moment de l'explosion alléguéea l'est du chenal
dans les eaux intérieures albanaises. Les navires de l'escadre n'ont
pas observé ainsi 13 route de navigatio mnenant p3r le prétendu

chenal, et si vraiment ils ont heurtédes mines, ils pouvaient naturcl-
lernent s'exposer à tel danger dans une zone qui n'était pas sùre
pour la, navigation.
105. - Ainsi, rien n'est établi en ce qui concerne la cause de
l'incident survenu au contrc-torpilleur Snwnznrezlc 22 octobre 1946.

II est absolument impossible d'élucider la cause de cet incident
par rapport avec le prétendu champ dc mines rillégué ptr le Gouver-
nement du Royaume-Urii comme établi Ie 12 et 13 novembre, et
il n'y a noil plus aucune relation entre l'incident et Iriresponsabi-
lité du Gouvernement albanais.

106. - En résumant les observations précfdentes concernant
lesdits rapports britanniques, il semble bien iiéccssaircde conclure
aussi à leur égard que ces rapports ne siiffisent pas non plus pour
établir la réalitédes faits qu'ils prétendent relater. Apart le rapport
du capitaine Mestre, il faut retenir qu'ils sont rédigéspar des agents
munis d'iiistructions particulières et confidentielles d'un caractère
spécial (voir plus haut, par. 62). Cette circonstance que ce sont en
I'occiirrence des rapports soumis par la partie intéressée entre
nécessairement en ligne de compte s'il s'agit d'apprécier leur force
probante. Le faitest que les mines alléguées du 13 novembre 1946 ont été
prétendues non seulement découvertes par les persoIines au service

dt:la Grande-Bretagne, mais encore comine gardées et à Ia posses:
sion exclusive de ce Gourernemen t.
Mêmele capitaine Mestre, qui a étéprésentécomme un observa-
teur neutre et qui aurait vù et examiné les inincs en question, n'a
pris aucune mesure afin d'assurer l'identification de ces mines
pour dJévcntuelIes expertises ultérieures. Ainsi, in mine prétendue
G:Rpar le capitaine Mestre devient, après avoir étépendant dix
jours entre les mains de la partie intéressée,une mine du type GY.
Le Gouverneinent britannique ne peut pas prétendre avoir
produit des preuves que seulc une enquêteimpartiale et objective
menéepardes personnes tierces et indépendantes pourrait établir.

La tentative de s'assurer une preuve pareille avec le concours du
capitaine Mestre a nécessairement échoué. .
Il mérite d'êtrerelevé que le Gouvernement britannique a omis
de SC senair en l'occurrence des règles du droit internationa1 codi-
fiées et facilitantl'éclaircissement des questions de fait par un
examen impartial et consciencieux à entreprendre par une commis-
sion internationale d'enquête. Des conventions respectives sont
toutefois bien connues du Gouvernement britannique. Le Gouver-
nement aIbanais lui-mêmea facilité au Gouvernement britannique
a procéder par une telle méthode, de toute évidence inseule indi-
quée, à élucider les circonstances des faits età assurer 1'étabIisse-
ment dcs prcuves et d'un état de fait qu'on peut invoquer incori-

te:;tablenientdevant une juridiction internationale.
Il aurait suffi que le Gouvernement britannique prenne en
considération la proposition du Gouverncmeiit :ilbanais en date
du II riovembre 1946tendant à créer une coinmission mixte. La
base p était jetée pour que les deus Gout~erricrncnts procèdent
dJ;rccord. Le Gouvernement albanais est convaincu que le rejet
d'une telle propositiona étéfait par Ie Gouvernement britannique
pour qu'il ait les mains libresà « s'assurer Ics prcuves à son gré 1).
Mais Ics preuves ainsi obtenues doivent être déjà przirta facie
considérées coinine suspectes et inadinissihlcs et même soumises à
la règle frazis otili~icorrzunpit.

C. - CONCLUSIONS POUR LA QUESTIONNo I

107 - Le Gouvernement de la République populaire d'Albanie
demande à la Cour qu'il lui plaise de dire et juger :

1. Que le Gouvernement albanais ii'ajamais mouillé des mines
ou deschamps de inities dans ses eaux, ni participé ?ileur mouillage,
ni n'en a jr~rnais pris connaissance. Ncitnrnrnent le Gouvernement
alt>aiiais ii'a ni mouilIé des mines ou dcs champs dc mines dont la
pri5sencedans les eaux albanaises entre le 15mai 1946et le22 octobrc
1946 est rtIléguCepar le Gouveri~einent britailnique, ni participé àIO4 COSTRE-IIÉJIOIREDU GOUVERNE3IEXT .4LB:\SAIS (15 VI 48)

leur mouillage, et il n'a eu non plus aucune connaissniicc d'uii tel
mouillage prétendu, ni pendant que celui-ci aurait eu lieii, ni riprès.
. A l'appui de cette demande, le Gouvernement a1bün:iis soumet:
les faits suivaiits:
I) Ni le nombre des mines alléguéesni leurposition topographique

à proximité desrivesalbanaises ne rendraient jamais nécessaire que
leur mouillage soit vu ou entendu par les autorités côtiéres alba-
naises, tout en prenant en considération n'importe quel moyen
de leur mouillage. En outre, les mesures de sécuritéprises par le
Gouvernement alba~iais n'excluent pas non plus la possibilité que
les mines précitées, quelleque soit la manière de leur mouillage,
auraient &témouilléessans que les autorités albanaist:~ l'observent
et en prennent connaissance.
.Les faitsà l'appui sont indiqués plus haut, paragraphes 41,7j,

76, 90-93.
2) Des mesures d'uiie vigilance spéciale n'ont pas étéprises par
le Gouvernement albariais ni au cours des six mois précédant
le 22 octobre 1946, iii avant ou après, et le Gouvernement albariais
n'a jamais admis avoir pris de telles mesures.
Les faitsà l'appui sont indiquésplus haut, paragraphes 3S,40, gr.
3) Le Gouvernement albanais n'a jamais étéen possession de
mines et les mines alléguéeslui sont entièrement inconnues. Aussi
le Gouvernement albanais n'avait jamais à sa disposition les

moyens et services techniques nécessaires pour manier des mines.
Les faitsà l'appui sont indiqués plu. haut, paragraphes 5, 39 ;
II. Que le Gouvernement albanais, ne possédant aucune connais-
sance des ~tiinesalléguées,n'était pas en état, et aucune obligation
ne lui incombait :
a).de ~nettrc en garde contre les mines l'escadre britannique
quand elle entra et naviguait dans les eaux albarlaises lc22 octobre

1946 ;
b) de signaler ln présence des mines dans ses eaux territoriales
ni à la navigation ni aux gouvernements, en prenant pour base
d'une telle notification soit les principes générauxeri la. rt-iotièrc,
soit la Convention VI11 de La Haye 1907 ;
c) de prendre en considératiori particiiliére, par rapportailxpré-
tendues mines, Ia route oii passait la navigation par le cari:il ~ior;
ri)et il nc pouvait ainsi violer, du fait desdites mines prétendues,
le droit de passage inoffensif, et en généralengager sa respunsnbilité
en quoi que ce soit et commettre aucun délit international.
Les faits soumis àl'appui sont indiquésplus haut, paragraphes 13,
41. 54;

III. Que les allégations britanniques se rapportant aux niines
dans le canal nord de Corfou, notamment quant à la duréede leur
présencedans Ieseaux, Ieursnombre, t-vpcs,dislocation,enlèvement,
n'établissent aucune preuve à la charge du Gouvernement albanais. A l'appui de cette deinande, le Goilvernement rilbaiiais soiiinet
les faits suivants:

I) La carte aliemande sans date soumise Ala Cour par le Gouver-
riement britannique (Mémojrcbritannique, annexe 2) nc constitue
aucune preuve que d'autres inines n'ont pas été mouillées par
l'ennemi.
Lcs faitsà l'appui soiit iridiqucs plus haut, paragraphes II, 12,
t:t annexe 14.
z) Lcs résultats de dragages qui auraient étéentrepris dans le
canal nord de Corfou, par les forces navales britrinniques en 1944-
194j, sont restés inconnus.
Les faits àl'appui soiit indiquésplus haut, paragraphes 13,15-18.

3) Le chef de la mission militaire britannique à Tirana, en
donnant la première iilformation des routes navigables darisl'Adria-
tique au Gouverneinent albanais le 25 janvier 1946, l'a mis en
inéme temps en garde contre les risques et périls de iiavigation
continuant sur ces routes.
Les faitsà l'appui sont indiqués plus haut, paragraphes 19, 20.
4) Les rapports du Rear-Admiral H. R, G, Kinahan, Coni-
inander Q. Y. Ihitford, 'remporary Gunner E. Powning, capitaine

ile frégate R. hlestrc nc permettent d'établir aucune conclusion à
la charge du Gouvernement albanais, et d'autrepart ils contiennent
cles contradictions, lacunes, erreurs,etadmettent plusieurs hypo-
thèses possibles, notamment en ce qui concernc la clurée de la
présence de certaines mines dans l'eau, leur état, leurs type,
position, nombre.
Les faits à l'appui sont indiqués plus haut, paragraphes 62-70,
99-102 ;

IV. Qu'aucune relation entre les incidents alléguésqui seraient
surveiius le 22 octobre 1946 aiix contre-torpilleurs Snuîilarez et
IioEageet la respo~isabilitédu Gouvernement albanais n'cst établie
et par conséquent que le Gouvernement albanaisn'est pas rcspon-
sable envers le Gouvernement: britannique des explosions qui
auraient eu lieu cc jour dans les eaux albanaises et des dommages
et pertes humaines qui en seraient suivis.
A l'appui de cette demande, leGouvernement albanais se réfère
aux faits indiqués plus haut à l'appui des demandes précitéessous
1, II, III, et soumet en outre notamment que les deux contre-
torpilleurs précités Snzlnzerez et Volnge ont navigué le 22 octobre
1946 en dehors du chcnal indiqué cléminé.

Les faits à l'appui sont indiqués paragraphes 52, j3, Iûj, et
annexe 12 ;
Y. Que les conclusions du Gouvernement britannique sont à
rejeter, étant contraires soit aux points de droit, soit et aux faits
et aux points de droit. Notamment sont à rejeter les conclusions
contenues dans lcpayagraphe 96,no 2, na j,du Mémoirebritannique, vu les faits indiqués ci-dessi~spar rapporaux conclusionsformulées
sous 1, II,111,IV;
VI. Que, vu le caractère odieux de l'accusation que le Gouver-
nement britannique a soulevéecontre le Gouvernement albanais,

le Gouvernement britannique présente au Gouvernement albanais
des excuses en bonne et duc forme et donne satisfaction.

Derrxièrnepartie.

LE ROYAUJIE US1 A-T-ILP~OLÉ SELOS LE DROIT IXTERXATIOSAI.
LA SOUVERAISETÉ DE LA REPUBLIQU POPULAIRE D'AILBANIIS
PAR LES ACTIOSS DE LA JIARIXE DE GUERRE BRITANNIQUE DANS
LES EAUX ALBAKAISES LE 22 OCTOBRE 1946 ET LES 12 ET 13

h'OlrEJIBRE1946, ET T A-T-IL LIEU A DOKKEK SATISFACTION ?

A. - FAITS

$ Observations préliminaires.
La deuxième question du compromis concerne la plainte du
Gouvernement de la Répiibligue populaire d'Albanie portée contre

le Gouvernement du Royaume-Uni relativement aux actions dc
la marine de guerre britannique dans les tsaux nlbaiiaises clu canal
nord de Corfou le 22 octobre 1946 et lerz i:t 13 iiovembre1946,qui
sont des actes contraires ni1 droit iriternationaleri vigueur et
constituent des vioIations reit6rées de lsouveraineté clel'Albanie.
Dès que ces violations sont parvenues i sa coririaiss;tnce, le

Gouvernement albanais 21 pi.otesti. auprhs du Secrétaire gériéral
des Nations Unies en le priant dc soumettre ln question à 1'Asscm-
bléegénérale,qui était rilors en session.
Eri ce qui concerne Ies faitsrapportant SI'incicleritdu22octo-
bre 1946, le Gouvernement albanais a protesté auprès clcl'organi-
sation des Nations Unies le zg octobrc et auprésclu Gouvernement
du Royaume-Uni le 31 octobre 1946. En ce qui concerne les tictions

de la marine de guerre britannique dans les eaux albanaises le12et
13novembre 1946, le Gouvernenient albanais s'est élevéd'avance
contre l'intention du Gouvernement du Royaume-Uni d'agir dans
ses eaux sans son consentement, ainsi qu'en témoignent les notes
du 31octobre et du II novembre 1946adresséesau Gouvernemertt
britannique et la protestation du 12 novembre 1946 adressee à
l'organisation des Nations Unies. Durarit l'invasion des eaux

albanaises par la marine de guerre britannique, le Gouvernement
albanais a protesté dc nouveau le 13 novembre 1946 auprès des
Nations Unies.
Ainsi, fidèleà sa politique de paix, le Gouvernement albanais
a eu recours aux moyens pacifiques pour mettre fin à ces actes
illicites. II soutient devant Cour contre le Royaume-Uni que les
actions de la marine de guerre britaniiiqile Ie 22 octobre 1946 et vu les faits indiqués ci-dessi~spar rapporaux conclusionsformulées
sous 1, II,111,IV;
VI. Que, vu le caractère odieux de l'accusation que le Gouver-
nement britannique a soulevéecontre le Gouvernement albanais,

le Gouvernement britannique présente au Gouvernement albanais
des excuses en bonne et duc forme et donne satisfaction.

Derrxièrnepartie.

LE ROYAUJIE US1 A-T-ILP~OLÉ SELOS LE DROIT IXTERXATIOSAI.
LA SOUVERAISETÉ DE LA REPUBLIQU POPULAIRE D'AILBANIIS
PAR LES ACTIOSS DE LA JIARIXE DE GUERRE BRITANNIQUE DANS
LES EAUX ALBAKAISES LE 22 OCTOBRE 1946 ET LES 12 ET 13

h'OlrEJIBRE1946, ET T A-T-IL LIEU A DOKKEK SATISFACTION ?

A. - FAITS

$ Observations préliminaires.
La deuxième question du compromis concerne la plainte du
Gouvernement de la Répiibligue populaire d'Albanie portée contre

le Gouvernement du Royaume-Uni relativement aux actions dc
la marine de guerre britannique dans les tsaux nlbaiiaises clu canal
nord de Corfou le 22 octobre 1946 et lerz i:t 13 iiovembre1946,qui
sont des actes contraires ni1 droit iriternationaleri vigueur et
constituent des vioIations reit6rées de lsouveraineté clel'Albanie.
Dès que ces violations sont parvenues i sa coririaiss;tnce, le

Gouvernement albanais 21 pi.otesti. auprhs du Secrétaire gériéral
des Nations Unies en le priant dc soumettre ln question à 1'Asscm-
bléegénérale,qui était rilors en session.
Eri ce qui concerne Ies faitsrapportant SI'incicleritdu22octo-
bre 1946, le Gouvernement albanais a protesté auprès clcl'organi-
sation des Nations Unies le zg octobrc et auprésclu Gouvernement
du Royaume-Uni le 31 octobre 1946. En ce qui concerne les tictions

de la marine de guerre britannique dans les eaux albanaises le12et
13novembre 1946, le Gouvernenient albanais s'est élevéd'avance
contre l'intention du Gouvernement du Royaume-Uni d'agir dans
ses eaux sans son consentement, ainsi qu'en témoignent les notes
du 31octobre et du II novembre 1946adresséesau Gouvernemertt
britannique et la protestation du 12 novembre 1946 adressee à
l'organisation des Nations Unies. Durarit l'invasion des eaux

albanaises par la marine de guerre britannique, le Gouvernement
albanais a protesté dc nouveau le 13 novembre 1946 auprès des
Nations Unies.
Ainsi, fidèleà sa politique de paix, le Gouvernement albanais
a eu recours aux moyens pacifiques pour mettre fin à ces actes
illicites. II soutient devant Cour contre le Royaume-Uni que les
actions de la marine de guerre britaniiiqile Ie 22 octobre 1946 et 1t:12 ct 13novembre 1946 daris les eaux territoriales et intérieures
albanaises constituent une violation de In souveraineté de la
Képubliqile populaire d'Albanie et du droit international.
En abusant du droit dc passage inoffensif, les liavires de guerre
britanniques ont pénétre aux dates ci-haut mentionnées sans
préavis ni permission, non seulelnent dans les eaux territoriales
niais méme dans les eaus intérieures albariaiscs eii formation de
combat, en état d'alerte et portant des soldats. Ilsj7 ont séjourne,
effectué des actes d'cspioiinage et de provocations armées et ont
empèchéles autorités albanaises d'exercer leur pouvoir souverain

dans la baie de Sarandn, accomplissant ainsi un passage nettement
offensif.

109. - Les actions liostiles effectuéespar les navires de guerre
britanniques dans les eaux albanaises du canal riord de Corfou
font partie de l'attitude politique généraleadoptee par le Gouver-
nement britannique à l'égardde la Républiquc populaire d'Albanie.
Aussi bien dans le passé qu'à présent, la Grande-Bretagne a
toujours poursuivi une politique inamicale à l'égard del'Albanie.
C.eciressort de façon encore plus accentuée à la 1umiCredes événe-
ments survenus depuis ladernière guerre.
Le peuple albanais s'est jeté dès le premier jour de l'agression
de l'Italie fasciste, Ic 7 avril 1939, dans une guerre sans réserve

contre les occupants fascistes italiens et allcrnatids, et ildevint
une force combattaiite active au sein di1 bloc antifasciste contre
l'ennemi commun.
La guerre du peuple albanais avait un caractère antifasciste
et démocratique progressif. Les missions militaires britanniques
qui étaient venues en Albanie comme missions alliées de liaison
auprès de l'Arméedc libération nationale albanaise, au lieu d'aider
de toutes leurs forces et de faire connaître l'xpre lutte de notre
arméc comme il était cle leur devoir, se sont efforc6esde l'entraver
en sabotant l'aide alliCc dorinke sous forme de rares fournitures
et en collaborant ouvertement avec Ies organisations traîtresses
Eialli Kombëtar et Legaliteti, avec le gouverriement quiçling de
Tirana ainsi qu'avec l'occupant lui-même, comme c'est le cas du
commandant Neal i Shkodra.

Le Gouvernement britannique, durant ln guerre, par I'inter-
iiiédiaire du commandement allié de la Méditerranée, s'efforçait
airisi d'affaibli13 gucrrc de libération nationale de notre peuple,
de briser son unité politique et d'empêcherln victoire des forces
dérnocrntiques du pays.
Le commandant allié de la Méditerrailéc menaçait, par un
ultimatum adressé au colonel-généralEnver Hoxha, d'interrompre
l'envoi des fournitures à l'Armée de libération nationale dans Ic
cas où les forces de celle-ci auraient attaqué les bandes collabora-
tionnistes. Cet ultimatum ct d'autres du mêmegenre furent repous-
séspar le colonel-généralEn\-er Hosha, et tous les plans hostilesdu Gouvcrnemcnt britannique furent anéintis par la 'victoire
complète de l'Armée de libération ~iationale sur l'envahisscur
allemand et ~ar l'instauration de la démocratie populairi: en Albanie.
Après la Iibé~ation, l'attitude hostile du Gouvernement britan-
nique envers la République populaire d'Albanie se manifesta par
des tentatives diverses d'immixtion clans les affaires interieures
de l'Albanie dans le but de renverser le pouvoir populaire et de
démembrer et faire disparaître 1'Etat albanais souveraiil :et indé-
pendant.
En 1945, il tente de faire débarquer dek forces miliiaires en
Albanie sous le couvert du ~FfilitaryLiaiso l,quel avait soi-disant
pour mission d'aider économiquement l'Albanie jiisqu'à l'arrivée
de 1'U. N. R. R. A.
La Mission militaire britannique en Albanie a ouvertement
jouéle rôle d'une agence d'espio~~nage,de sabotage et de complots :
ainsi quecela a étéillustré devant les tribunaux du peup!e, après

la libération du pays, elle s'est efforcCede rassembler et d'qrganiser
les criminels de guerre, les ennemis du peuple et les adversaires
du régime dans des groupi:s de terroristes et d'agents saboteurs
et de diversion afin de ren7rerser par la forcéle pouvoir populaire
et de préparer le terrain pour un débarquement des Anglo-hméri-
cains en Albanie.
Le Gouvernement britannique s'est efforcéd'imposer cies condi-
tions au Gouvernement démocratique albanais lorscles élections
du z décembre 1945 polir l'Assemblée cc~nstituante de l'Albanie,
et sous différents prétextes,S tirer en longueur et à entraver, sans
aucune raison et de façon systématique, l'établissement des rela-
tions diplomatiques entre les deux pays.
11a pris sous sa protection les criminels de guerre et les cdllabora-
tionniçtes albanais qui se sont réfugiéseri Italie ct dans les zones
occidentales de l'Allemagne et de l'Autriche, et, malgré 1e.ideman-
des du Gouvernement albanais, il a refusé de les lui livrer et a
continué de les aider dans leur activité hostile contre 1:Albanie

et contre la paix.
C'est avec un cynisme manifeste que le Goui.ernerneil< britan-
nique a tâché de méconnaître la guerre, les sacrifices et la contri-
bution du peuple albanais aux côtés de tous les peuples alliés
contre le fascisme. Dans toutes les coiiférences inteni4tionales
il s'est opposé obstinément aux droits de ['Albanie ;il a étécontre
l'admission de l'Albanie i 1'0. N. U., à 1'U.y. R. R. A., à la Con-
férence de la Paix à Paris ; ila coinbattu nos droits dans 1.eTraité
de paix avec l'Itali; à la Conférence dc Moscoudu Conseil des
ministres des Affaires étrangères il s'estdéclarécontre l'invitation
de l'Albanie Iors de l'élaboration dri Traitéde paix avec 1'Allemagne.
Le Gouvernement britannique :tdéfeiidu et appuyé ouverte-
ment les prétentions absurdes grecques contre l'Albanie 2 la Con-
férence de Paris etau Conseil de Sécuritéde l'O. N. U. Le comman-
dant des troupes anglaises en Grèce, Ie généralScobie, s'adressant à 11arm6emoiiarcho-fasciste grecque prèsdes frontières de I'Albanie
eil1945 , promis quc les troupes anglaises ne quitteront pas la
Gréce u avant de voir les revendications grecques entièrement
satisfaites1).
Ainsi les troupes d'occupation britanniques eii Grèce appuient
et inspirent les prétentions du Gouvernement d'Athènes contre
l'intégritéde l'Albanie.

110, - A la lumière de l'attitude conséquente ct Iiostile du
Gouvernement du Royaume-Uni contre la République populaire
d'Albanie, les incidents du canal de Corfou apparaissent cornme
des violatioiis préméditées contre la souveraineté et ln sécurité
de l'Albanie. Les provocations de la flotte de guerre britannique
dans les eaux albanaises, les survols du territoire albanais de la
part des avions anglais ainsi que les provocations arméeset ininter-
rompues des monarcho-fascistes par voie de terre, de nier et de
l'air contre notre pays, constituent un tout iiidivisible et aiit créé

un état de tension h In frontière sud de l'hlbanie.
Cet état de tension est dû à la politique agressive du Gouverne-
nient d'Athènes, qui se considère en état de guerre avec l'Albanie
et qui a des revendicntioris territoriales absurdes contre notre pays.
A la Conférencede 1:iPaix à.Paris, le premier ministre et ministre
des Affaires étrangères de Grèce, Tsaldaris, déclare: « L'état de
guerre entre nous et l'Albanie,cloit trouver son dénouement naturel
et juste par l'attribution de lJEpire du Nordàla Grèce))(CP-Plen.6.
- p. IO).Il est illustré par les innombrables provocations armees
grecques que Ie Gouvernement albanais n'a pas manqué de faire
connaître aux Nations Unies et aux représentations étrangères à
Tirana.
Entre le mois de novembre 1944 et le 31 mars 1948, les forces
armées di1 Gouverriemcnt d'hthèiies ont effectué558provocations

armées contre la République populaire d'Albanie, rép 'zrles comnie
suit :
Provocations par voie de terre
Provocations par les airs 317
Provocations par mer 196
45
(Voir annexe IG : a) Actes agressifs du ~oubemement monar-
cho-fasciste grec contre l'Albanie, Tirana, 1947 ; b) Provocations

de guerre du Gouvernement monarcho-fasciste grec contre l'hlbanie,
Tirana, 1948.)
Des provocations continues avaient lieu également dans les
eaux territoriales albanaises dans le canal nord .de Corfou. C'est
dans ces conditions que survint le premier incident britannique
dans les eaux albaiiaises. Le 15 mai 1946, deux navires de guerre
ii-iconnus naviguaient venant du nord-ouest dans Ies eaux territo-
riales albanaises le long du littoral vers la baie de Saranda. Lorsque
les deux navires se trouvèrent en face de Limioni, ils changèrent II0 CONTRE-JI~LIOIRE JIU GOUVERNEMENT ALRANAIS (15 VI 48)

brusquement de direction et pénétrèrentdans les eaux intérieures
vers le port de Saranda, passant à 800 mètres de la colline de
Limioni. Les forces côti2res albanaises, après avoir vaincment
signaléaux navires de s'éloigner,tirèrent quelques coups dcsemonce
dans leur direction, sans la moindre intention de les atteindre. A
ce moment seulement, les navires inconnus hissèrent leur pavillon
et furent identifiés comme appartenant à la flotte britannique.
Afin d'éviter tout incident regrettable, les navires britanniques
devaient arborer leur pavillon et répondre a& signaux dt:sigardes-
côtes albanais, en particulier lorsque cesnavires, comme lc déclare
le Gouvernement du Royaume-Uni lui-même,pour le cas du Ijmai,
n'avaient pas d'intentions hostiles ou provocatrices.
Le Gouvernement albanais a considéré cet incident 'comme

regrettable, bien que les tleux navires de guerre britanniques,
pénétrant brusquement dans les eaux intérieures albanaises de
Isbaie de Saranda, sans battre pavillon et sans réprondre aux
signaux conventionnels des autorités côtières albanaises, aient
effectué un passage offensif, contraire arix règles interriationales
et portant atteinte à In soi~verainetéde 1'Etat albanais. ,

Passles eauxnalbanaises led22 octobrei1946.ans ,

Passage saas prémis etperntission.

III. - L'échange de notes entre les Gouvernements albanais
et britannique qui suivit l'incident du 15 mai 1946 ne lais'saitpas
de doutes que le Gouvernement albanais d'emandait aux bâtiments
de guerre étrangers de donner préavis de leur passage par les eaux
albanaises dans le canal nord de Corfou, de mêmeque par les Caux
albanaises en général. Déjà la communication du chef de 1'Etat-
Major en date du 17 mai 1946 dont il a étéfait mention plus haut
(par.44) a réglementé le passage des bâtiments de guerre par les
eaux albanaises de la même façon, n'en eqeptant pas les eaux
albanaises dans le canal nord.
Le Gouvernement albanais a pris cette mesure en prenant en
considération les conditions qui étaient crééesdans le canal nord
de Corfou à la suite des provocations grecques réitérées, et inspiré
par le souci derégler et faciliter la navigation d'ailleurs très réduite

dans ces eaux territoriales et afin de prévenir tout acte riuisib1eà
la sécurité de l'État. Par contre, le Gouvernement Ilritannique,
passant outre aux droits de l'Albanie, sous prétexte (i'pser du
droit de passagç inoffensif, a refusé nettement « que Ies (navires
britanniaIes *assant à travers le Détroit de Corfou dussent donner
notification préalable de leur passage aux autorités aIbaiiaises 11,
.et, sans répondre à l'esprit de compréhension du Gouvemement
albanais, a fini par une menace ouverte et brutale disant que Ie
Gouvernenient albanais prendra note ((que si des batteries ;côtières albanaises ouvrent le feu a I'aveiiir sur les navires de Sa Majesté
passant par le Détroit de Corfou, seç vaisseaux rendront le feu ir
(cf. note britannique, 2 août 1946).
Le caractère ultimatif et menaçant de cette note était uii aver-
tissement d'atteinte aux droits de l'Albanie et inettait celle-ci
pratiquement dans I'impossibilité de se défendre dans les cas
justifiés.

1x2. - Le 22 octobre 1946 à 13 heures, une escadrc cle quatre
ria.vires de guerre britanniques - deux croiseurs et deus contre- '
torpilleurs- venant dc Corfou pénétrasans préavis non seulement
dans les eaux territoriales mais aussi dans les eaux intérieures
albanaises, longeant de très près la côte et adoptant des formations

diverses de combat. A partir de la pointe Denta, l'escadre pénétra
dans les eaux intéricures albanaises de la baie de Saranda en ligne
de file et se dirigeant vers le port, s'approchant jusqu'I.500 mètres
de celui-ci pour changer ensuite de direction vers le nord-ouest.
Les navires étaient armés et chargés de soldats. Vers Ij heures,
lorsque les deux premiers navires se trouvaient cn face du cap
Baladha, à une distance de I km. de celui-ci, une explosion se fit
entendre à bord du second navire, et l'on vit de la fumée s'enéchap-
per. Tandis que les deux croiseurs poursuivaient leur route vers
le nord-ouest (cap Kieph:ili) pour croiser dans nos eaux territoriales
vis-à-vis de Kakomé et Borshi, Ie quatrième navire, après avoir
effectué divers mouve~nents, s'approcha du premier contre-tor-
pilleur. Déjà le canot à moteur du port de Saranda, où avait pris
place l'officier du port, s'était approchédes navires pour demander

ce qu'ils faisaient dans leseaux intérieures albailaisesets'ilsavaient
besoin d'aide, mais l'équipage britannique, contrairement aux
règles de droit maritime généralement reconnues, ne donna aucune
explication et ne daigna même pas .+pondre. Entre temps un
officier de l'équipage photographiait le canot à moteur albanais.
Les deux navires, après de nombreux mouvements dans 13baie de
Saranda, s'approchant jusqu'g 500 mètres de la terre ferme de la
colline de Limioni, s'en allèrent vers Corfou. Lc lendemain, le
23 octobre 1946 au matin, des avions trimoteurs britanniques
ont survolé sans autorisation ni préavis le secteur compris entre
lc col de Muzina et le village de Radat ; le mêmejour, au-dessus
du port de Saranda, deux autres avions britanniques ont volé a
trois reprises différentesà très basse altitude (voir annexe 7).

-Aucunpréavis ou information concernant ce passage de l'escadre
britannique n'a été doniié au Gouvernement albanais ou aux
autorités albanaises ni avant ce jour ni après. Pour des raisons
particulieres et venant ex post, le Gouvernement britannique,
après le 22 octobre, aurait préféré pouvoiraffirmer que le Gouver-
nement albanais connaissait d'avance le passage de cette escadre.
Aiilsi s'est exprimé le capitaine NichoIs, président britannique du
Comité central de déminage, et dans le mêmesens essaie d'argu-menter le Mémoire. 11a étéexposé plus Iiaut qu'il n'en était rien
(voir par. 45).
En pénétrant lion seulement dans les eaux territoriaIes alba-
naises mais aussi dans les eaux intérieures (bhie de Saranda) sans
préavis, etrcfusant de donner les explicntioiis cl'usrigcaux auto-

rités côtières albanaises, l'escadre britarinicl~Ic 22 octobre 1946
a agi en contradiction avec la régleineritatioti du passage dans
les eaux albanaises que le Gouverilcrncrit albatiziis c1-it:ant cluJÉtat
riverain a fait e.xpressémcnt conriaitre au Gouvernemciit britan-
nique. Il est exposé plus loin que, selon le droit intcrniitional en
vigueur, il appartenait bien au Gouvcr~iemciit albanais dc procéder
ainsi qu'il l'a fait et que, partant, le pass;igc de l'escadre de guerre
britannique daiis les eau': albanaises l22 octobre 1946, sans avoir
donné le préavis requis aux aiitorités albanaises, ne peut pas se
réclamer du droit international mais aii contraire \viole ccliii-ci
dans l'institution du passage inoffensif.

113. - Le passage de l'escadre britannique dans les eaux
territoriales aussi bien qu'intérieures albanaises du canal nord

le 22 octobre 1946 a atéfait d'une façon et dans des cirt:onstances
montrant non scu1ernen.t iiicomplet manque d'égards c'nversles
autorités territoriales albanaises et de leurs prescriptions de la
part du Gouvernemeiit britannique, m:iis encore la volonté de
rendre une telle attitude bien évidente.
Ce n'&ait pas un navire de guerre isolii, ou une escadre dont les
unités seraient entrées dans les eaux étrangères successivement
et dans l'ordre divisé, naviguant en ligne de file,coinrne c'estla
règle coutumière, mais toute une escaclre, à savoir qiiatre vais-
seaux de guerre dont deus croiseurs, qui pénétra, sans préavis,
en formation de combat et séjourna clans les eaus intérieures
albanaises. Toutefois, il est contiu du Gouvernement britannique
qu'en ce qui concerne le règlement de l'entrée, du passage et du

séjour des bâtitnentç de guerre dans les eaux territoriales et
particulièrement dans lcs eaux intérieures étrangères,leur nombre,
leur puissance ont, suivant la pratique générale,un<:importance
particulière. Surtout le séjour de 1'esi:adre dc guerre dans les
eaux intérieures (baie de Saranda), même s'il était dû à une
force majeure, ii'exclut pas l'obligation pour l'équipage de donner
aux autorités côtières les explications demandées.
Lcs agissements de l'escadre de guerre le. 22 octobre 194G dans
les eaux intérieures albanaises, venant après la note ultimative
du z août 1946, marquent la volonté du Gouveriiement britan-
nique d'user comme bon lui semble des eaus albanaises, et ceci
contrairement à tout droit et eii dépit de l'oppoçitioii légitime du
Gouvernement albanais.

114. - Ln manière de se comporter dc l'équipage de l'escadre
répondait bien à une telle attitude. L'ordre ((aux stations ia étélancé lors de l'entrée de l'escadre dans les eaux albanaises. Selon
le représentant britannique devant le Conseil de Sécurité(annexe
britannique 23, p. 217) et selon le Mémoirebritannique (par. ~j),
les canons des navires n'étaient pas pointés vers le littoral albanais,
a:que nous contestons d'ailleurs. Toutefois, mêmesi l'on accepte
l'aftirrnation britannique, le pointage des canons n'exigeant dans

les circonstances qtie quelques secondes, l'escadre etait bien eii
état d'engager I'actioii immédiatement. Ce qui est expressément
déclarépar le co~nrnandant en chef de la Méditerranée, l'amiral
M7illis(annexe 8).
Rien ne justifiait de prendre de telles mesures de force com-
niinatoires mêmesi l'on veut les qualifier ex posl comme a jovm
of defensive alert (le représentant britannique, annexe 23, p. 217).
Depuis l'incident du ïj mai 1946, le Gouvemement albanais a
donnéau Gouvernement britannique toutes les explications vouIues
concernant cet incident, et aucun autre ne s'es produit depuis.
Si, toutefois, le Gouvernement britannique continuait de se méfier

et prSférait, malgré l'attitude juste et sincère du Gouvemement
albanais, prendre en ligne de compte des hypothéses si extra-
vagantes comme celles dont l'état d'alerte sur ses navires de guerre
le 22 octobre 1946 fait montre, - il est absurde de prétendre pro-
céder à un passage inoffensif. Des mesures pareilles seraient d'ail-
leurs, suivant l'expérience générale, susceptiblesde provoquer des
réactions justement contraires à celles qu'on professe vouloir.
iine escadre dc guerre puissante chargée de soldats, alertés en
dtat d'action et prêts à ouvrir le feu, dans Ies eaux intérieures, à
quelques centaines de mètres du littoral dont elle se méfiepubli-
quement, ne sc présente certainement pas à l'État riverain comme

une flottepaisibleet simplement usant du droit de passage dénommé
« inoffensifiiou t[innocent iiLe danger potentiel imminent qu'une
puissante force navale représente nécessairement dans des circons-
tances pareilles s'impose aux esprits et peut provoquer des mesures
extrêmes.
Effectué dans cle telles conditions, le passage de l'escadre bri-
tannique le 22 octobre 1946 dans Ies eaux albanaises ne peut être
qualifié que de provocant et offensif.

115. - Le passage de l'escadre de guerre britannique dans les
eaux albanaises prend un caractère exceptionriellement offensif
du fait de Ia presence de troupes sur ces navires. Jointe à l'im-

portance des navires composant l'escadre, à Ia façon de procéder
cB formation de combat de ces navires dans les eaux territoriales
albanaises, aux manŒuvres effectuées dans les eaux intérieures
<leSaranda, à l'état d'action des équipages sur les navires, la pré-
sence des troupes prend une importance particulièrement menaçante
portant une atteinte grave à la souveraineté de l'Albanie et inter-
riationalement punissable. Ni la pratique, ni la doctrine ne recon-
riaissent aux navires de guerre le droit de passer en temps de paix
Schargés de troupes dans Ics eaux intérieures' d'un pays étranger,
à.rnoins que par une permission expresse de celui-ci.

116. - L'escadre sJattencl:iit en vain le22 octobre h l'incident
prévu. « A cette occasion, les batteries albanaises n'ont pas ouvert
le feu mais une unité de la marine albanaisesapparut i(voir nota
britannique, par. 12, g décembre 1946) O.r, la sortie du port de

l'unique canot A moteur existant au service des autorités alba-
naises du port de Saranda ne manque pts d'être considéréepar
l'équipage britannique cornnie un fait qui mérite d'êtresi&alé.
Le zs octobre 1946 vers 15 heures, quand une funiée sortant
d'un des bàtiments de guerre britanniques et suivant une détona-
tion a étéobservée du littoral, la vedette faisant acte d'autorité,
qui, selon le droitinternationalappartient aux autorités, sJ:ipprucha
des bâtiments britanniques pour s'enquérir de ce que l'escadre
faisait dans les eaux intérieures et prêter l'aide s'il y avait licu.
-4ucune réponsene fut donnéepar les bâtiments, et elle a dû'rentrer
au port.

La lredette a ététraitée par les batiments de guerrebritanniques.
avec un manque de formes et <l'égardsles plus élémentaires.L'immu-
nitédu bàtiment de guerre àl'étranger ne donne pas le droit d'igno-
rer les autorités locales etêmede refuser l'entrée en contact avec
elles. Le caractère officiel de la vedette ainsi que de l'officier ne
pouvait pas être méconnu. Ceci est confirmé encore par les
rapports del'amiral commandant les opérations de l'escadre britan-
nique dans les eaux albanaises le 12-13 novembre 1946, qui men-
tionnent la vedette comme « l'embarcation de l'officier du port
vue le 22 octobre ii(Mémoire, p. 157, rapport Kinahan, par. 12).
Malgréce fait, la vedette a étéempêchéed'accomplir sa mission

officiellet d'exercer son autorité dans le cadre de la souveraineté
de l'gtat riverain.
-4 part la vaine mission de la vedette, l'attitude des autorités
ainsi que de toute autre personne albanaise, était le 22 octobre
1946entièrement pacifique. Les autorités se sont bornées à observer,
autant qu'il leur était possible, cc qui se passait à leur proximité,
jusqu'à la tombée de Ia nuit.
Conformément à cet état des faits, la note britannique du
g décembre 1946 a constaté correctement : ((A cette occasi,on, lcs
batteries albanaises n'ont pas ouvert le feu. i)(Voir par. 12 de la
--t...
C'est seulement plus tard, le 18février 1947, que le reprssentant

britannique devant le Conseil de Sécurité a déclaré: a A 14 h. 45,
les navires de têteentendirent deux rafales de mitr;~illeuse venant
de la côte albanaise ii(voir annexe britannique 23, p. 208). Le
Mémoire répète cette affirniation fausse déméntie par le Gouver-
nement britannique lui-mème dans sa note du 9 décembre 1946- Actes d'es$ionrznge.

117. - Le membre britannique di1 Conseil de Sécurité, au
cours de sa ro7me séance tenue lc 18 février 1947, a l'appui de la
plainte britannique contre I'Albnnie, a soumis entre autres une
carte noinmée par lui-même pi&ce no VIII. Cette carte se trouve
reproduite dans les procès-verbaux ofiiciels du Conseil dc Sécurit6
(I>euxièn~e Année, Supplénieiit no 6, annexe 15, exhibit VIII),
i:t aétésoumise àla Cour comnie nnnexc no 21 du Mémoirebritan-

iiique du rCroctobre 1947.
Cette carte est munie du titre : ((Track of H.M. Ships Oriom
and Szqberb on passage throi~gh Corfu Channel 15th May, 1946,
and Albanian clefences, etc., ovcrlooking Bay of Porto Edda
(Sriranda). ))
Sur cette carte sont portées diverses indications et signes d'ordre
iriilitaire de la baie de Sarandn. Sur les rives de la baie, I droite
ct à gauche du port de Sarandcl, diverses positions sont marquées
par des signes techniques et espliquées dans une légende sp6ci;tle
cornine des positions de postes tle mitrailleuses, des canons anti-
.a.ériens, des blockhatis munis d'armes d'infanterie, des canons à
tir inoyeil et léger, des positions non occupées et des positions

:i.bandonnées, des voies de communication, etc. Toutes ces posi-
tions et objets d'ordre militaire rcpresentent, d'après la carte, Ics
clbfenscs albanaises autour de Saranda.
Le membre britannique du Conseil de Securité a soumis cette
carte en voulant attirer (il'attention du Conseil sur le réseau des
clbfenses compliquées et gardécs avec soin que l'Albanie a établi
tout le long du littoral » (Conseil de Sécurité, Procès-verbatlx
oflicieis,Deuxième Année, no 15, p. 300 l).
Il arrive sans doute rarement en matière d'espionnage militaire
qu'on puisse reconnaître avec une telle exactitude non seulement
les résultats des actes d'espionnage mais aussi les auteurs et la

façon dont ils ont procédé,comme c'est le cas présent.
Le représentant du Gouvemcment du Royaume-Uni a confirmé
:linsi d'une faqon qui ne saurait pas faire dc doute que l'escadre
britannique a procédéIe 22 octobre 1946 dans les eaux albanaises
hien autrement qu'~ à un passage innocent, par la route normale
etdirecte et à un lieu fixépour rencontrer d'autres navires britan-
i.iiqucsen haute mer au nord-ouest dc Corfou 1(par. Ijdi1hlémoire).
lacs navires de guerre britanniclues, pendant leur passage et leur
séjour prolongé dans Ics eaux interieures albanaises, ont observé
le système des défenses albanaises dans la baie de Saranda et ses
diverses installations. Les observations ont éténotées et conser-

\Téespour être portées à la connaissance des autorités navales
kaitaiiniques. La carte oh leurs observatioiis sont marquées démon-
tre non seulement la façon experte dont on a dû procéder, mais
--le trahit aussi l'effort qu'il a fallu déployer pour arriver a des
a Voir p.214 du vol. 1.connaissances si miiiuticuses. Les diverses installations militaires
marquées avec une telle précisian et avec nombre de détails sur la

carte, étant par leur destiniition de nature secrète, n'étaient pas
visibles au simple Œil inêrneà une courte distance, et pour les
discerner et les rcconiiaître à une distance au moins de quelques
centaines de mètres, les navires de guerre britanniqur:~ devaient
nécessairement se servir d'instruments spéciaux. L'observation
des installations militaires albanaises a donc dû êtrebien inten-
tionnelle.
Le représentant britannique a dit que les positions dc défense
de Saranda ont étérelevées par les équipi.gesdes navires en perdi-

tion. Sur la m6me carte sont marquées Cgalement des positions
de défensede la côte de Butrinto. Ce qui prouve que les eqllipages
britanniques ont accompli des actes d'espionnage avant d'être
en (iperdition JI,c'est-à-dire avant llexpIosion et al-ant l'arrivée
dans la baie de Saranda.
Encore reste-t-il à savoir s'il était vraiment possible, même
par des observateurs experts et pourvus des inciIleurs instruments,
de reconnaître le 22 octobre ,1946les défenses albanniscs se trou-
vant sur des collines qui surmontent la baie de Saranda. Soils ce
.
rapport il semble nécessaire de rappeler les survols le 23 octohre
1946 de la région de Saranda par les kvioiis mentionnés plus haut
(par. IIZ), qui auraient effectuédes observations et complétéainsi
celles de l'équipage.
Quoi qu'il en soit, la décIaration du représentant britannique
prononcée devant le Conseil de Sécuritéest formelle :((Les dé-
fenses dc Saraiida ont étéobservées par les équipages des contre-
torpilleurs en perdition, qui, le 22 octobre 1946, furent déportés
près du rivage. i,C'étaient donc i?tco?tcreloles équipages des

contre-torpilleurs Saz4nzarezet Volage qui, lors de leur passage
prétendu innocent dans les eaux albanaises, sc sont livrés a l'ob-
servation des défensesmilitaires du territoire albanais pour fournir
les renseigrienieiits recueiIlis à leur Gouverrieme~it qui en fait
usage.
Ces observations ont été effectuées pendant l'arrêt prolongé
dans la baie de Saranda. Elles démontrent qu'à bord des navires
il avait des observateurs chargésde la tâchedéterminée clerelever
les défensescôtières et que c'état 1; une intentioii nette de l'escadre

britannique.
Les navires britanniques ont ainsi accompli des actes d'espjon-
nage contraires au droit et préjudiciables à la sécuritéde I'Etat
albanais.

L'invasion des eaux albanaises par la marine de guerre
britannique les 12-13 novembre 1946.
Les faits des 72-13 novembre1946.
118. - Les op6rations effectuéespar la inarine de guerre bri-
tannique le 12 et le 13 novembre rg46 dans'les eaux territoriales idbanaises du canal nord dc Corfou ainsi que dans les eaux inté-
rieures de la baie de Saranda constituent une violation flagrante
de la souveraineté et de la sécuritédc l'Albanie ainsi que du droit
international, Le Gouvernement :ilbanais développa tous ses

efforts en vue de prévenir une telle violation, mais malgré ses
protestations vigoureuses et justifiées et inalgré sa juste proposi-
.lion de créer une commission mixte avec la participation de
L'Albanieafin de fixer Ies zones à déminer, la marine de guerre
britannique commença les opérations, passant ainsi outre à la
volonté expresse du Gouvernement albanais et ignorant con~plète-
ment l'organisation internationale de déminage.
*En ce qui concerne le Gouvernement albanais, sa connaissance
des actes commis les 12-13novembre 1946 dans ses eaux par la
flotte de guerre britannique restait forcément incomplète parce
que sa participation à l'opération ii étéexclue et directement
empêchée par le Gouvernement et la flotte de guerfe britanniques.
Les autorités et les gardes-côtes albanais ont pu observer les
actions déployéespar Ia force navale britannique seulement de

la terre ferme. Lcs opérations de la flotte britannique et de ses
nombreuses unités leur restaient à maints égards inconnues ou
incompréhensibles. Les navires, des grands croiseurs aux contre-
torpilleiiret à des vedettes, se mouvaient dans les eaux albanaises
en grrind nombre et dans diverses directions les deux jours du
rz et13 novembre 1946. Les avions de la flotte survolaient depuis
le inatin jusqu'au soir la scène. Le crépitement des armes de plu-
sieurs sortes se faisait entendre.
En effet, Ic 12 novembre 1946 au inatin un grand nombre dc
navires de guerre battant pavillon britannique naviguaient le
long du littoral albanais en face du cap ICie~haii.Dans l'après-midi,
vers 14 heures, certains de ces navires, dont des croiseurs, divisés
en groupes et en formation de combat, se sont approchés près de
notre c6tc en croisant le long du secteiir Karabunin-cap Kiephali.
Cinq des navires en formations diverses naviguaient vers le sud-

est jusqu'à Butrinto ;ilsrebroussèrentensuite chemin pour rejoindre
le groupe des navires du cap Kiephali. Les navires ont croisédans
nos eaux jusque tard dans la nuit et sc sont éloignésen direction
de l'ouest.
Le lendemain 13 novembre, des groupes de navires de guerre
britanniques avançant en formation de combat, se sont approchés
dc notre littoral entreHimara et cap Kiephali. Vers IOheures, un
autre groupe de cinq navires britanniques, armés de canons avec
l'équipage aux postes de combat, est venu du canal sud de Corfou
et, longeant notre côte en direction nord-oiiest, a rejoint premier
groupe. .4 partir de IO h. 40, des groupes de navires ont continué à
effectuer diversmouvements endirection sud-est-nord-ouest ettirant
des coups dc fusil et de mitrailleuse dans l'eau et en l'air. Quelques
coups ont porté vers la côte albanaise. Entre temps un groupe

de quatre navires de guerre (croiseiirs, torpilleurs) stationnait enformation de combat e1.iface de Kakomé et Saranda, tandis qu'uii
autre groupe de sept navires avait pris position en face de Borshi.
Dans l'après-midi, à 13 heures, des canots 'à moteur et d'autres
navires britanniques se sont approchés du port de Saranda Jusqu'à

300-500 mètres. Le canot à moteur albanais du port, apnt un
officier à bord, sortit pour s'informer de près de cequi se passait
dans les eauxde Saranda et demander des explications des actions
de la flotte britanniaue.Ila étéI'obiet du tir des nitra il leuses
navires britanniques.
Le mêmejour, des avions britanniques oilt survolé les navires
opérant dans nos eaux territoriales et interieures.
C'est ainsi que s'est passée l'invasion des eaux territoriales
et intérieures albanaises les 12 et 13 noxrembre 1946 de fa part
de la marine de guerre britannique (voir annexe IO).

1x9. - Les événements des rx et 13 novembre 1946 sont
exposésaussi par divers documents britanniques. Ainsi, le Mémoire
britannique du xer octobre 1947 contient @amment dans son
annexe no 17 le rapport du contre-amiral H. R. G. ICi~iahan et
une connaissance des procédésdes forces navales britanniques
sous son commandement. A l'exception des rapports du comman-
dant Whitford contenus parmi ses annexes et soumis au Conseil
de Sécurité, lerapport du contre-amiral H. R. G. Kinahanln'était
pas auparavant connu du Gouvernement albanais. Les sources
officieIles britanniques ont ét6 complétées par les rapports du
capitaine de frégate Mestre, dont il a étéquestion d6jà plus haut,
De l'examen des événementsdes 12 et 13 novembre il ressort
clairement que la marine de guerre britannique a statioriné dans
les eaux territoriales aussi bien qu'intérieures albanaises, (qu'elle
y a effectué des actes de provocation armés et d'espionnage, et
qu'elle a empêchéles autorités albanaises dlexercer leur pouvoir
souverain expressément reconnu par le droit interriational mari-

time, dans la baie de Saranda.
120. - Selon le Méinoire, I'invasion et les opérations des
navires de guerre britanniques dans les eaux territoriales et inté-
rieures albanaises ont étéexecutées les 12 et 13novembre 1946
sous les ordres du cont--amiral H. R. G. Kinahan, comrnandant
la première escadre des croiseurs, et d'après le plan dénommé
<(Operation Retail )iqu'il aurait préparélui-mêmedèsle 30octo-
bre 1946 et complétéle 7 novembre 1946. -4 part une flotte propre
de dragueurs de mines avec des vaisseaux auxiliaires compos6e

de douze unités, le contre-amiral H. R. G. Kinahan,avait sous ses
ordres sur la place des opérations «des forces de cour-erture JI
(composéesde huit navires, cuirassés, contre-torpilleurs, le:porte-
avion Ocean), deux sous-marins, des services medicaux spéciale-
ment prévus, etc. En outre, six unités de la flotte britannique,
comprenant entre autres u11 navire-hôpital et un porte-avions,
étaient sous les ordres de l'amiral et à .sa disposition dans lesparages de Corfou. Le contre-amiral H. R. G. Kinahan avait son
~~avilloiihiscéle12 novembre sur le croiseur ilfaziritizu, le 13novem-
bre sur le croiseurt. Bride's Bay (voir annexe r7,rapp. Kinahnn).
Les opérations prévues commencèrent aussitôt que l'obser-

vateur Ctranger, le capitaine de frégate Mestre, eut joint la flotte
'britannique à 12 h 33, le12 novembre 1946 ...CcIlc-ci s'approchait
(les lieux de l'opération de l'ouest du cap Kiephali. L'opération
aurait étéconsacrée, le reste de la journéc du 12 novembre, a
nettoyer prés du cap Kiephali un chenal d'approche vers la rpute
Medri 18/3 4le lendemain matin, le 13 novembre 1946 ,es forces
chargées de I'op6ration auraient pris position au sud-ouest du cap
Kiephali, dans le chenaI d'approche préparé pour elles le jour pré-
cédent, à l'exception du porte-avions Ocetlnopérant l'ouest de
l'ile Fano etA l'exception du bâtiment amiral Si. Bride's Bay. Ce
croiseur s'est rendu le matin 13 novembre 1946 en suivant les dra-
,gueurs dans ln route Medri et a pris position ((exactement au
sud-est du cap Kiephali 1).
(iLe St. Bride's Bay était le quartier général, avec à bord des

détachements F. O. B. pour lescroiseurs et des détachements de
liaison aérienne pour les avions. ))
Le Gouvenlement britannique, dans son Mémoire aussi bien
que devant le Conseil de Sécurité,a soutenu que l'unique inten-
tion des opérations des 12 et 13 novembre était de nettoyer le
yrétendu chenal de Corfou. Cependant, tous les faits déroulés
i:t tes documents produits par le Gouvernement britannique lui-
inéme démontrent que les 12-13novcmbre la marine de guerrc
britannique a effectué nu moyen d'une opération de grand style
iine invasion typique et préparée d'avance des eaux territoriales
r:tintérieures albnririiçe:
En effet, l'opératio~ictRetail i)a étépréparéeininutieusement
dès Ie 30 octobre, c'est-à-dire bien avant la prétendue autorisation
ilu Comité central dc déminage. A cette opération ont participé

ilon seulement le nombre nécessaire de dragueurs de mines mais
toute une véritabIe flotte de guerrc présentée comme force de
(:ouverture d'un caractère spécial soit par le noiiibre, soit par le
type des unités qui la composaient. La flotte de guerre britan-
iiique a pénétrédans les eaux albanaises par groupes successifs
t:n formation de cornbat venant de directions diverses, du nord-
ouest et du sud du canal nord de Corfou. En même temps, des
avions de combat accoinyagnaient les mouvements de la flotte
dans les eaux intérieures albanaises.
Pendant cette invasion inattendue et non provoquee quia duré
deux jours, ont et6 commis divers actes illicites qui aggravent la
violation de la souveraineté de l'Albanie etdu droit international
<Jela part dc ln marine de guerre britannique.
La flotte de guerre britannique, contrairemeiit à tout droit

reconnu, a stationné dans les eaux albanaises. Ainsi, l13 novembre
un premier groupe de quatre navires de guerre a stationné, immo-bile et en formation de combat, dans le secteur Kakorné-S;ii-anda
face ces deus points, tandis qu'un autre groupe de sept iiavires
de guerre avait pris position eii face de Borshi au nord de Kakomé.
En outre, le croiseur St. Bride' Bay, centre des opérations, a
séjounléet stationné pendant tout le jour du 13 novembre dans
les eaux territoriales albanaises, tandis que lesagueiirs de iiiines
et les navires auxiliiiires se mouvaient dans ces eaux dans tous
les sens jusqu'à la tombée de la nuit.

121. - Non seulement les eaux albanaises étaient ainsi enva-
hies, mais aussi l'espace aérien au-dessus. Les avions de 1:i force
navale britannique étaient actifs toute la journée du 13 novembre .
1946. D'après l'amiral commandant l'opération, i(1'Oceana lâché
à 7 h, 45 deux avions de reconnaissance et quatre avions de chasse,

armés d'R.P.; il a contiiiué à le faire pendant toute la journée P.
(Mémoirebritannique, annexe 17,p. 157 , ar:8.)
Ces deux avions éclaireurs et quatre avions de coinbat survo-
laient les eaux du détroit et la haie de Saranda. Leiirs vols ont
ét6observés aussi par les postes albailais du secteur de Sar:inda.

122. - Les navires britanniques durant l'invasion ont fait
usage de fusils et de mitrailleuses sous prétexte de tirer sur les
mines, en fait dans un but d'intimidation et de provocatioii. Le
tir des armes est avouépar les Britanniques eux-mêmes :((On n'a
utilisé que des armes à feu depetit calibre et des fusils rayés anti-
tanks, et il a étédonnéordre aux navires intéressésde ne pas tirer
dans la direction de la côte.u (Rapport Whitford du 14 novembre,
annexe 17,p. 152.)
L'amiral commandant les opérations avoue qu'un prétendu ordre
de nepas tirer cn direction de la côte a étédonnépar lui seulement
vers 13 h. 45, c'est-à-dire après que les dragueurs auraient exécute
leur troisiéme passe. (Rapport Kinahan du rq novembre 1946,
Mémoire, p. 157.)
Dans les opérations de la marine de guerre britannique les 12 et
13novembre, il est à remarquer aussi que si les préteridiies mines
Gk' ont étélaissées flottantes, les eaux albanaises soiit devenues
moins sûres étant donné que Ies mines GY une fois flottantes sont

plus dangereuses. Le Gouvernement britannique, qui prétendait
remplir cette tâche hurnanitaire dont parle le hlémoire, a, au
contraire, exposé ln navigation cle plus grands risques et en est
responsablc.
123. - L'officier du port. de Saranda s'est décidéà sortir avec
le canot du port vers 13 heures pour connaître de plus près l'acti-
vité de la flotte britannique dans les eaux albanaises. Ainsi que

le 22 octobre précédent, la vedette était munie d'un pavillon
albanais. La vedette faillit êtreatteintepardes projectiles tombant
autour d'elle. Devant ces signes hidents d'hostilité, il ne restait
à la vedette que de retourner pour rentrer dans le porc, oyant été ainsi empêchéed'exercer son autorit6 dans la baie de Saranda.
Ainsi que tous les rapports britanniques le confirment, Ia vedette
a étédès son apparition près du port de Saranda vers 13 heures
soumise & une observation sévère.Aussitôt que le navire britan-
nique VnZlayse trouva à sa proximité, il s'empressa de rapporter

(ithat a man in the boat appeared to be manning a fire-armn
(hIémoire britannique, rapport Whitford du 20 novembre, Mine-
sleeping report no z). Depuis, Iri vedette est considéréecomme
armée, « Le canot &tait armé ))(Mémoire britannique, rapport
Kinahan du 14novembre 1946, par. 12) .a flotte étaitbien décidée
di: ne pas permettre que le canot interfdre avec ses opérations,
et dès que le canot à moteur se mit en direction des navires, les
mesures furent prises :<(J'ai en consequcncc signaléau B.ET.PII.S.
2075 l'ordre de prendre des mesures pour prévenir toute interven-
tion dans les opérations auxquelles se livrait l'officier chargé de
la dispersion des mines, mais en spécifiant que l'on ne devait faire
usage de la force que si cela s'avérait absolument essentiel. »
(Mémoire britannique, rapport IVhitford du 14 novembre 1946,
par. 12, annexe 17, pp. xj3-154.) Les navires ont constaté que la

vi:dette exposée à leurs propres projectiles a étéobligéede s'éIoi-
giier: KOn croit que celle-ci a modifiésa route, pourse diriger vers
le nord Ctpeu près au moment où l'une des embarcations a ouvert
le feii sur une mine. ii(Rapport IVhitford, 1,c., annexe 17, pIj4.)
.Ainsi, la vedette albanaise du port a étéempéch6epar la force
di:s armes d'exercer son droit le plcis légitime dc souveraineté
d;ins la baie de Saranda.
124. - D'autre part, la flotte britannique opérant le 13 novem-
bre 1945 dans les eaux albanaises a demandé et rendu possible
.
que, en dehors de ses propres effectifs, un etranger procède dans
les eaux albanaises à des actes illégaux. L'activité du capitaine
de frégate Mestre au cours des journées 12-13 novembre 1946 est
décrite par lui-mêmedans les rapports britanniques. Le capitaine
Mestrc n'était pas àmêmede se prévaloir d'aucun caractère officiel.
En effet, il n'était pas le représentant autorisé de .l'Organisation
de déminage, il n'était pas non plus un observateur neutre, parce
que, pour avoir un tel caractère, il devait êtredésignépar l'accord
des deux parties. Le Gouvernement albanais n'a mêmepas été
informe qu'il prendrait part à cette opération.
Ainsi, ne possédant aucun mandat officiel,ilne pouvait se trouver
dans les eaux albanaises qu'en qualité d'une personne privée et
agir comme une personne officielle seulement dans la mesure où
le Gouvernement britannique lui attribunit.un tel caractère. Natu-
ri!llement, il était dans l'intérêtdu Gouvernement britannique de
.
traiter le capitaine Mestre à l'occasion de sa mission volontaire
des 12-13 novembre 1946 comme one personne officielle et dont
les actes feraient, autorité.
Ainsi, une tierce personne étrangère, dont la présence même
était non autcrisée et illégale, a pu, le 13 novembre, déployerune certaine activité dans les eaux albaiiaises, tandis que les auto-
rités compétentes de l'État souverain eii ont étéempêchées.

125. - L'observatio~isévèredont la vedette du port de Saranda
était l'objet n'était pasexceptionnelle. Les navires britanniques,
pendant toute la journée du x3novembre 1946 ont tenu sous leur
observation incessante et systématique tous les mouvements du
port et toute la côte. Tous les rapports britnnniqucs précitésfont
mention d'ci observations faites des positions de la côte, etc. r
(Mémoire britannique, rapport llThitford, 20 novembre 1946,

par. 4). L'amiral commandant les opérations donnait son atten-
tion personnelle àce qui pourrait se passer sur les rives albanaises :
« Des observateurs spéciaux, dktachds par les croiseurs, étaient
portés sur quelques-uns des dragueurs afin de me tenir bien informé
à ce sujet.))(Mémoirebritannique, rapport Kinahan, 14 novembre
1946 ,ar. 12.) Les appréciations de portée militaire étaient faites
immédiatement dès qu'un mouvement était observésur les rives :
« 11semble donc que l'armée albanaise occupait, dissimulée, ses
positions de bataille et se préparait à repousser une invasion. rj
(Mémoirebritannique, rapport Whitford, E. c.)
De m&me que l'escadre du 22 octobre, le 13 novembre 1946 les
navires de guerre britanniques ont effectuédes actes d'espionnage
eii faisant les relevés des défenses côtières albanaises, ce qui

démontre un intérét particulier du Gciuveriiement britannique,
et qui n'a rien à voir avec le passage inoffensif.

Les suites diplomatiqueset autres des événements
des 12-13 novembre 1946.

Les profestatio~rdu Goua~wie??len alba-rtais.

126. - Lc Gouvernement albanais 3 appris les événements
qui se déroulèrent les12-13 novcmbrc 1946 dans ses eaux au cours
de la journée,etil a réagi immédiatement. Ilaprotesté le jour même
par la voie télégraphiqiie près le Secrétairegénéraldes Nations
Unies. Rgférencc fut faite de la protestation précédente du
II novembre élevée coiiti.el'intention du C;ouvernerncnt britannique
de procéder arbitrairement au dragage des eaux albanaises.
La protcstatioi~ du Gouvernement albanais près les Nations
Unies du 13 novembre 1946 porte temoignage comment les événe-
ments des 12 et13 novembre 1946 se présentaient ces jours aux
autorités albanaises qui les absenraient du littoral. 11était com-
plètement étranger à ces autorités de penser qu'il s'agirait de
mines ou de champ de mines et quelles aiiraient étéles découvertes

auxquelles la marine de guerre britannique aurait procédé.Une
telle question était entièrement inconnue aux autorités albanaises
le jour du 13 novembre 1946. La protcstatioii albanaise de ce jour
près les Nations Unies por1.econtre la violation de la souveraineté
de l'État par 1s marine de guerre britannique qui avait envahi les eaux intérieures nlbnriniscs avec unc grande force armée. Le

Gouvernement albanais iidemandé aux Xations Uiiies ((de juger
cet acte du Gouvernement b~itannique et de donner l'ordre de
retrait immédiat des navires de guerre et des dragueurs de mines
britanniques, mouillés dans nos ports et nos eaux territoriales ii.
Aucune suite n'a ét6donnée à cette protestation fondéeet solen-
nelle du Gouvernement: albanais.
Toutefois, le Gouvernement albanais s'est adressé de nouveau
le 27 novembre 1946 au Secr6taire généraldes Natioiis Uiiies pour
ajouter à sa protcstation précitée du 13 novembre quelques nou-

veaux faitsdont il va êticquestion ci-après, i savoir que, en procé-
dant à son expédition daiis les eaux albanaises des 12-13 novembre
1946, le Gouvernement britannique a délibér6nie1it abusé entre
autres de l'autorité de l'orga~iisation internationalede déminage.
,4ucune suite n'a étédonnée non plus à cette communication
du Gouvernement albanilis.

Ln note britanaique du g décenlbre1946, son caractèreet sessuites.

127. - Le but poursuivi par le Gouvernement britannique par
1'e:çpédition de sa marine de guerre dans les eaux albanaises les
12-13 novembre 1946 trouva son expression dans la note du
g décembre 1946 adressiic au Gouvernement de la République
populaire d'Albanie.
La note a étéreproduite tout entiére dails la requcte du Gouver-
nement britannique introductive d'instance devant la Cour le
13 mai 1946. Aussi le Mémoire du IP~ octobre 1946 s'appuie essen-
tiellement sur les faits et les points de droit que la note du
9 décembre 1946contient déjà.Le contenu de 1s note du g décembre
1946, reproduit et élargi par le Mémoire, a été déjà soumis à

1'e:cnmendans le présent Mémoirerespectivement Contre-Mémoire
du Gouvernement alba~~l~is,et le non-fondé des allégations de la
note, leur futilité ainsi que le caractère odieux de l'imputation
qu'y trouve sa base, ont ettélargement démontrés.
11reste à souligrrer le caractère menaqant et ultimntif de cette
note. Déjà lors de l'échange de vues suivant l'incident du Ij mai
1946, les notes du Gouvernement britannique ne laissaientpas au
Gouvcrnernent albanais d'autre choix que d'accepter purement et
simplement les demandes du Gouvernement britannique ;il ~i'y
était pas question de s'entendre comme il sied entre États souve-
rains et pacifiques pour réglerle différend survenu. La note britan-
nique clug décembre 1946 sc présente de la mêmefaçon, et son
cal-actère ultimatif n'est que plus strict et plus prononcé. La

réponse satisfaisante que le Gouvernement britannique demaiide
de recevoir immédiatement lie signifie riend'autre que le Gouver-
nement albanais doit se déclarer coupable d'avoir fait intention-
nellement usage de mines en temps de paix pour causer ce dommage
aux navires de guerre britanniques et la perte de vies humaines.Le délaide quinze jours est fixépour que le Gouvernerncnt albanais

s'exécutesans faute et sans autre façon.
Le Gouvernement albanais a repoussé énergigiiement toutes
les accusations contenues dans la note susmentioiiiiée comme
dénuéesde tout fondement et blessantes pour les aspirations et
les sentiments pacifiques du peuple albanais et de son Gouverne-
inent, Tout en .déclarant qu'il respectc les dispositioils du droit
international en matière de navigation na ri tir nei,l affirmait qu'il
considérait les actions de la marine de guerre britannique dans
les eaux albanaises le ij.mai, le 22 octobre et les12-13 novembre

1946 comme des actes dirigés contre la souveraineté tlc la Répu-
blique populaire d'Albanie.
Poursuivsnr son plan prémeditédc faire de ccs violatiriris rkitérées
de la souveraineté albanaise une accusation politique contre la
République populaire d'Albanie, le C;ouverncmcnt britannique
porta l'affaire devant le Conseilde Sécuritésous lc prétcxtc absurde
que l'incident du 22 octobre 1946 constituait une menace contre
13 paix de la part de l'Albanie.
Ainsi, les actionsu 22 octobre 1946 et l'invasion des eaux alba-
naises les 12-13 novembre 1946commises par la marine de guerre

britannique se trouvèrent devant le Conseil de Sécurité comme
Urie affaire menaçant la paix et la sécuritéclu rnonde,et dont le
Gouvernement albanais serait responsable !

'
Les tentatives britanniques de justification de l'action
des 12-13 novembre 19-46.

12s. - La flotte de guerre britannique a agi dans Ies eaux nlba-

n:~ises uniquement sur les ordres de son Gouvernement:, ainsi qu'il
vient cl'êtrdit. Tout titre légalfaisant défaut pour justifier l'action,
le Gouvernement britannique a cherch6 à se couvrir clemére
l'autorité cic l'organisation internationale de déminage. Déjà la
note adressée au Gouvernement albanais le xo novembre 1946
disait textuellement : ((Des navires britanniques effectueront le
12 novembre un nettoyage des détroits, Un tel nettoyage suivra
les décisions unanimes prises le ICIno\.embre par 1;iCominission
centrale de nettoyage des mines, qui a décidéque lesdétroitsdoivent
êtredéminésde nouveau. »

Le lendemain des opérations des 12 et 13 novémbre, le
14 novembre 1946, la presse de Londres apporta la nouvelle que
((la flotte britannique procéda à des oliérations de nettoyage des
mines dans les eaux nord de Corfou avec l'autorisation et sous Ies
aiispices du Comité international central pour le nettoyage des
mines ».
Il serait dificile d'expliquer l'origine d'une nouvelle inventée
cle toutes pièces, concernant le Comité international central de
déminage, qui, siégeant à Londres, était à la disposition de lapresse, si la nouvelle ~i'avait pas tiré ses origines des sources offi-

cielles du Gouvernement britannique lui-même.Ainsi, presque de
mêmeque la fausse nouvelle, le président britannique du Nedzon,,
Caytain Blackburn, a tâché de persuader.son Comité que l'action
de 'son Gouvernement dans lcs eaux albanaises a étéexécutée
d'accord avec le Comité central. Aussi cette fausse nouvelle n'a-
t-elle jamais étédémentie par le Gouvemement britannique ni
pal- la presse britannique elle-même.Encore en 1947, le membre
britannique au Conseil de Sécuritén'a pas hésitk d'affirmer que
l'action unilatérale de son pays dans les eaux albanaises les 12-13
novembre 1946 a étéentreprise « sur la base de la décision ))du

Cornit6 international central, que cette action « donnait suitc à
la décision prise par un organisme international » (voir annexe
britannique no 23, p. 210). Encore le Mémoirebritannique main-
tient aujourd'hui devant la Cour 1,'essencede la fausse nouvelle,
bien que dans une version prudemment atténuée: Eu égard aux
recommandations du Comitéde déminagecompétent ,.,. le Gouver-
neinerzt de Sa Majesté décida de faire procéder au dragage, ii
(Mémoire britannique, par. 21.)
Ainsi, au lendemain de son action dans les eaux albanaises Ies
12-13novembre 1946 jusqu'à aujourd'hui, le Gouvemement britan-

nique tâche de faire croire que l'invasion est couverte par la déci-
sion du Comité international central, comme ill'avait affirmé
d'a.vancepar'la note du IO novembre et répété parla fausse nouvelle
du 14 novembre rg46.

rz9. - Le Comitécentral ir~ternational ne pouvait pas accepter
une telleinterprétation qui était contraire à la réalitéet constituait
une violation fiagrante du droit international. En effet, il n'y avait
que quinze jours qu'il avait passéla résolution que le chenal nord
de Corfou devait: êtredéminé à la première ((occasion favorable ii.

Il a étéexpressément entendu ce jour, ainsi que le procès-verbal
de la séancedu 31 octobre 1946 cn porte témoignage, que : l'ex-
pri:ssion ((occasion favorable ))signifie que toutes les conditions
soient généralement acceptables, y compris l'absence d'objection
de lapart de l'Albanie 1)(déclaration du Captain Nichols, président
du Comité, le 31 octobre 1946, annexe britannique no 15) . ussi
la tentative manifestée par la fausse nouvelle du 14 novembre 1946
a ét15repoussée par to;s les membres du Comité, qui trouvaient
que « le Comitécentral avait étémis dans une position embarras
sante ir(déclaration du membre américain, 14 novembre 1946).

Le Comitéa étéconvoqué en séanceaussitôt, quoique la suivante
n'(:fit étéprévue que pour le 8 décembre 1946. Tous les quatre
rnt:mbres du Comité,le président de nationalité britannique inclus,
ont étéunanimes que les nouvelles répandues par la presse sont
inc:orrectes(iet qu'il y a lieu de les rectifier pub1iqueme;lt ilEn
ce qui concerne l'action des autorités navales britanniques, le
membre russe a considéréque par Icurs actions ces autorités ontviolé l'accord concernant le nettoyage cles mines. A cet égard, Io
membre américain a estime que In Grande-Bretagne peut faire cc
qu'il lui plaît en dehors du Comitéet cc clu'ellefait ne coiicerric pas
ce dernier. Le capitaine dc vaisseau Nichols approuve cc point dc
vue et fait remarquer. qu'il s'agit 1Ad'iinc question qiii concerne
les gouvernements intéressés et non Ic Comité central. iiLe Coinit6
a adopté à l'unanimité la note suivante :(<A propos de la rdcente
nouvelle de presse concernant le déminage du canal du nord de

Corfou par des dragueurs britanniques, le Comité central constate
que le dragage dont il s'agit, dans les eaux territoriales albanaises,
n'a pas étéeffectuépar son orclrc ni sous ses auspices. 1%(Procès-
verbal dc 1s3Zme séancedu Comité central du 14 novembre 1946.
- j70ir annexe britannique rj, pp. 106-109.)
11a étéen outre agréésur la proposition du membre américain
de faire publier la note dans la presse. Toutefois, le Cornité est
revenu sur cette décision sur la demancie de son auteur lui-même
à la séance suivante du 19novembre. Par la suite, le membre
soviCtiquc a fait le g décembre 1946 au Comité Ta déclaration
suivante :iiPar décisionunaninie, prise lors dc sa 3zmeréunion, àla
date du 14 novembre 1946,le Comitécentral avait décidéde publier
dans la presse un communiqué ayant pour object dc déinentir que
les opérations de dragage, faites par des dragueurs anglais dans

Ies eaux territoriales albanaises du détroit du nord de Corfou,
eussent étéeffectuéessur la base cl'une décisiondu Comitécentral.
La décision du Comitécentralrelative au communiqué a été exécutée
en ce qui concerne 1'U.R. S. S.et le texte du démenti proposépar
le président du Comité et approuvé par les membres de ce dernier
a &tépublié dans la presse soviétique ...I>(Procès-verbal de la
34rn sé:ance du Comité central du 27 novembre 1946, annexe 15,
par. 366.)

130. - Cette méthode du Gouvcrncirient britannique d'altérer
la véritépour justifier son adion illégaleest poursiiivic également
devant le Comité Medzon :Le président britannique du Comité
central internationala informéle président britannique du Medzon
le 7 novembre 1946 dc l'importante résolution du. Comité inter-

national central prise le 31 octobre 1946, mais le président du
Medzon en a présentéle 16 novembre 1946 un tableau tout diffé-
rent, qui se rapprochait beaiicoiip dc la nouvellc de presse britan-
nique du 14 novembre 1946 :((lac Capt:iin Blackburri a expliquC
lors de la seance urgente ))du Afcdzon convoquée ce jour-là
que ...le Gouvernement albanais a également étéiriformd de la
décision uiiaxiime, adoptée par lc Comiti::central de déminage, et
selon laqueIle I'intérêtde la navigation internationalc exige que le
chenal déliniitésur les cartes hledri 18/32 et18/34 soit à nouveau
déminésans retard, de manière analogue à ce qui s'est passé lorsde
l'operation primitil-e, e1944. Il était donc clair que les opérations
de déminage auraient lieu dans lcs eaux albanaises. IJ(Aniiexe britannique Ij,p. 127.) i...Répondant au membre russe du Comité,
le président indique que le déminage a étéeffectue sur l'avis du
Comitécentral; le Gouvernement albanais a étéinformé. » (Procès-

verbal de l'urgente séance du Comitécentral Medzondu 16novembre
19~16p ,ar. II,annexe Ij,p. 130.)
llurant les séaiicessuivantes du Comité Medzon, les alléga tlons
pr6citécs de son président ont étésoumises par ses membres à la
critique qu'elles méritaient. Mais aussi le Comité central motz~
proprio s'in ocèupa. Lors de l'examen du procès-verbal de la séance

urgente du Cornite Medzon du 16 novembre 1946, ((le capitaine
Nii:hols signale que Ie second sous-alinéa du paragraphe I et Ic
paragraphe II contiennent desinexactitudes. Il a donc jugé oppor-
turi d'écrireau présidcnt du ComitéMedzon. 11(Annexe britannique
15, p. 117.) En effet, le président du Comité central a écrit au
président du Medzon le 20 janvier 1947 :((....Je ne puis concilier

lailéclaration qui figure au sous-alinéa 2 du no I du procès-verbal
avcic les résolutioiis effectivement adoptées par le Comité central
au coiirs de la 31mesession (et non pas 3zm@réunion),resolutions qui
voiis ont ététransmises par ma lettre du 7 novembre dernier. )I
(Annexe britannique 15, p. 118.) Et il n'a pas manqué aussi de
conseiller au président du ComitéMedzon r de reviser les procès-
\-erbaux de la séanceurgente tenue le 16 novembre »(procès-verbal
de la 35mcséancedu Comitécentral du 29 janvier 1946 annexe 1).
D'autre part, le capitaine Nichols n'étaitpas àmêmede renseigner

le membre soviétique du Comité central qui demandait ((si le
capitaine Xjcliols connaît les instructions sur la base desquelIes
le président di1ComitéMedzon a donnéaux membres de son Comité
des informations erronéesau sujetde la décisiondu Comitécentral >).
(Arinexebritannique 15,p. 117.)(Procès-verbal précit éu 29janvier
1946, par. 384-1
Ide président du Comité Medzon n'a pas fait reviser le procès-
verbal dc l'urgente seance du 16 novembre. Toutefois, il a été
obligéau cours de la séancedu Medzon du IO décembre 1946de
rétracter ses allégations incorrectes du 16 novembre 1946, Il a dû

reconnaître, ainsi que l'a demandéle membre américaindu Comité,
que ce n'était pas ((le commandant en chef alliéqui aurait décidé
de l'action du 13 novembre 1946 dans les eaux albanaises, mais le
conimandant en chef britannique 13.
I,e président s'estlimitéàdéfendrcle ComitéMedzon, et, se réfé-
rant a sa résolution du 28 octobre 1946: I(Lé Comité a agi d'une
manière strictement légale, en invitant le Comitécentral àdeman-
der l'approbation du Gouvernement albanais ; aucun renseigne-
ment ii'a étéfourni au président sur cequi s'estpasséàLondres ....
Le Comité de la zone méditerranéenne n'est pas responsable de

l'ordre donné de procéder à un nouveau déminage de la route. ))
(Procès-verbaI de la ~ome séancedu ComitéMedzondu IOdécembre
1946, par. 2, annexe britannique Ij, p. 136.) Ainsi, ne pouvant plus couvrir l'action ,de son Gouvernement
par l'autorité de l'Organisation internationale de iiettoyage des
mines, le président du Medzon s'est vu bien obligéde dirt: :c Quant
au caractère illicite du déminage, le mieux serait que le Gouver-
nement albanais traitât cette question avec le Gouvernement
britannique, et c'est indubitablement cequ'il est en traiide faire.»

(Procès-verbal précité di1 IO décembre ~gqG, par, 21, annexe
britannique 15, p. ~36.)
Le Gouvernement britannique, se reconnaissant coupable d'un
flagrant délit international portant atteint? à la sécurité et aux
droits d'un État souverain, cherche à trouver refuge derrière'
1,'Organisation internationale de déminage. A cette fin les repré-
sentants britanniques dans les Cornites de déminagese sont efforcés
de couvrir ces actions illégales, qui non seulement sont contraires
au droit international niais sont en mème temps une violation dc
l'Accord de l'organisation.
Les tentatives de la presse britannique ainsi que celles :desclifié-

rents représentants du Gouvernement britannique ont conlplètement
échoué.L'acte illicite et brutal qu'est la violation des eaux alba-
naises par la marine de guerre britannique n'a pu êtrejustifié en
aucune manière, et le président britannique du Comité Medzon
s'est vu obligéde revenir sur sa première déclaration et ~:e?onnaître
par suite ((l'illégalitéde l'acte 1).

B. - EN DROIT I

Le passage des bâtiments de gueire étrangers par les eaux
territoriales. ,

(Ad paragraphes 82-84, 88-90 du Mémoire.)

131. - L'incident du xj mai 1946 a étél'occasion dont le Gou-
vernement britannique s'est immédiatement scrvi pour réclamer
du Gouvernement albanais de reconnaître sans autre le droit de
passage libre de ses bàtimcnts de guerre par les eaux albanaises.
i( Ils'agit en premier lieu de la règle habituelle prévoyant le droit
de passage innocent à travers les eaux territoriales.» (Les instruc-
tions britanniques du 21 mai 1946, Mémoire,p. 69, annexe 6, First
Incident, doc. IV, par. 2.)La thèse est affirméeau cours de l'affaire

avec insistance que le passage par les eaux, territoriales étrangères
des bâtiments de guerre sur le mêmepied. que celui des bateaux
marchands ccest pleinement d'accord yec les règles établies du
droit international et ln pratique des Etats civilisés 1).(Mémoire
britannique, par. 82-88.) Le Memoire souligne qu'ccil est. contraire
à la pratique des Gtats civilisés et au droit international » de
donner ou de demander normalement notification di1 passage des
navires de guerre par les eaux territoriales. (Mémoirebritannique,.
par. 88.) Le droit de passage des bâtiments de guerre: serait sifermement établi qu'il y aurait seulement Ia Bulgarie et Ia Lettonie
qui refusèrent de l'adopter (Mémoire britannique, annexe 23,
P 219)-
Toutefois, le déleguébritannique à la Conference de La Haye
de 1930 a traité l'entrée et le passage des bâtiments de .guerre
étrangers dans les eaux territoriales tout différemment de son
Gouvernement. Il les a traités non comme un droit, mais (dépen-
dant de la comitas gentiuren t de ln courtoisie inter~iationaIe i).
Le déleguébritannique a suivi à cet égard le délégué des Étatç-

Unis, qui a déclarétout court : ((Le droit de passage inoffensif,
en tant que droit, ne s'étend pas aux bstirnents de guerre. ii
a é éta tiverain a bien le droit d'exiger une autorisatiori préalable,
si bon lui semble. )iAussi le projet adopté par la Deuxième Com-
mission (Eaux territoriales) de la Conférence de 1930 sépare le
passage des bâtiments de guerre par lamer territoriale du passage
de tous les autres navires par les mêmes eaux. C'est seulement
a en règle générale iique I(l'État riverain n'empêchera pas le
passage inoffensif des bâtiments de guerre étrangers dans sa mer

territoriale, et n'exigera pas une notification ou autorisation pré,-
I;ible.L'État riverain a le droit de régIcrIes conditions de ce pas-
sage. )(Art. 12 du projet, publication Société desNations C. 361.
M. 145/B. 1930. V, pp. 63, 59, 2x6.) La formule est depuis com-
mentée dans un ouvrage savant, par le déléguéde France à la
<:onferencc de 1930 dc la façon suivante : ((Le passage des bâti-
ments de guerre étrangers dans la mer territoriale n'est pas un
droit mais une toléraiice. C'est l'opinion qui semble préférable.
Elle est davantage de nature à protéger certains Etats contre les

abus auxquels ils pourraient ètre exposésdu fait de voisins turbu-
lents ou indiscrets. )i(G. Gidel, Le Droit i~tternatiP oz?talldcela
Mer, III,p. 284.)
C'est donc en contradiction avec ces textes et ces opinions
ainsi qu'avec un grand nombre d'auteurs qui abondent dans le
même sens que le Mémoire britannique entend la pratique des
IStats permettant en généralaux bitiments de guerre sans autre
tle passer par les eaux territoriales, comme l'exercice d'un droit
strict.

132. - A la lumière de telles opinions fondamentales, le Mémoire
regarde nqtamment le passage des bâtiments de guerre par le
canal nord de Corfou comme iin droit intangible et absolu. « Sous
aucun prétexte le passage des riavires de guerre à travers uiitel
ctétroitne devait donner lieu à intervention i)(Mémoirebritannique,
par. 83). Le Mémoirese réclame ici des observations du rapporteur
de la Commission de la Conférencede La Haye de 1930 précitée

contenues dans son rapport et se trouvant parmi dkutreç obser-
vations (ad art. 12 précité): ((Le passage ne peut êtreentravé
sous aucun prétexte en ce qui concerne les navires de guerre dans
les détroits entre deux parties de la haute mer servant a la naviga-
tion internationale. ii(Op. cil.,Sociétédes Nations, 1. c., p. 217.)
9 Ces observations concernant le passage par certains détroits ne
sont nullement un des articles élaboréscomme projet par ladite

Commission (cf. autrement Mémoire, par. 83-88). Elles ne sont
qu'une note explicative. Mêmesi l'article 12 précitéétait signé
par les Etats et entré en vigueur, ce ne serait pas le cas pour les
observations. La Deuxième Commission de la Conférencede 1g3e
ne touchait d'ailleurs au cours de ces travaGx le régime juridique
des détroits que passim, et des opinions diverses se faisaient jour.
Les observations précit6i:s ont étéinséréesdans le rapport à la
fin mêmedes travaux de la Commission, dans un esprit de trans-
action et sans qu'une discussion du sujet tant soit peu approfondie
ait eu lieu.Encore le délégué de l'Italie a fait insérerdans le procès-
verbal de la séance son opinion que l'article 12 précitéest aussi

la règle généralepour les détroits.
Les observations dudit rapport s'appuyaient sur les travaux
d'une sous-commission de la Conférence. Celle-ci se préoccupait
d'assurer le passage non dans tous les détroits naturels' formés.
par des eaux salées, mais seulement ((entre deux parties en la
haute mer qui forment des routes ordinaires pour la navigation
internationale n. La sous-commiçsion prenait en considération
que <(Ies eaux des détroits sont, pour autant qufiI ne s'agit pas de
haute mer, des eaux territoriales )I,et que, partantkle passage des
navires de guerre pourrait être empêchépar 1'Etat territorial
mêmedans les détroits d'une grande importance pour la naviga-

tion internationale. (O$. cit.,Sociétédes Nations, p. 20S.)
La règle exprimée par lesdites observations n'est donc dans
l'esprit de ses auteurs mêmesnullement une règle généralepour
les détroits naturels qui relient deux mers libres, mais elle est
limitée expressément à de tels détroits qui !(fornient des routes
ordinaires pour la navigation internationale ». Une telle limita-
tion de la règIeproposée senible bien répondre au point de ,vue du
droit international général. ((It being universally recognized that
not al1 waters covered by the geographical conceptioii of;straits
shall enjoy this peculiar legal position, the qyestion is, neld, what
test should be applied to reach a conclusion in this rt:speCt. As.
to this, it would seem that the degree of importance of tfie part-

icular strait to the international sea commerce, taken in its broadest
sense, covering the passage of both mercaiitile ships and warships,
must be the decisive. factor. How extensive and how .deeply
rooted this interest should be, cannot be cletermined by any hard.
and fast rule, but is a question of fact, depending upon such facts.
as, f.i., the number of ships passing through the strait, tl-~eirtotal
tonnage, the aggregate value of their cargoes, the average size.
of the ships and especially ~vhether they are distributed afnong a
greater or srnalier nurnber of nations-al1 of %?hichseem to give
good guidance, no single factor, however, being decisive :altogether-
it does not seem possible to reach any corhprehensive formula
beyond saying that only thovc straits that are of sorne, not quite
l iriconsiderable, importance to the international sea commerce,
ciijoy the peculiar Iegal position accorded to straits. ))(E. Bruel,
I7ztevncatio~ n raits, 1947, Vol. 1, p. 42.)
Ainsi, avant de décider sur le passage des b3timents de guerre

pir le détroit, il faut d'abord voir de quel détroit il s'agit, si le
d~Stroiten l'occurrence cst le détroit par où mène i(Ia route ordi-
naire de la navigation internationale 1).
Il n'y pas de règles généralespour le passa* des bâtiments de
guerre par les détroits tout court. C'est dans un tel sens qu'il a été
dit à la Conférencede La Haye en 1930 : ((On ne pourrait envisager
une règle générale ; en effet, tout détroit ayant une grande impor-
t:i.~lcesu point de vue de la navigation inondiale doit faire l'objet
d'une réglementation très précise ))(le délégué de l'I.talie,ofi.cil.,
Sociétédes Nations, p. 115). Il paraît qu'une telle opinion a notam-

ment toujours été celle du Gouvernement du Royaume-Uni.
L'auteur qui a étudiéplus particulièrement certains ((views of the
Government in the United Kingdom upon matters of international
law il,s'exprime à cet égard : I(Somc i~iters have endeavoured
to work out thcoretical rules appIicable to al1 salt-water straits.
13ut the number of such straits which are both narrow enough to
raise questions of sovereignty and so situnted as to be of practical
iniportance,is very smnll. Each of these has its own history and
ckiaracteristics, so that it is really impossible to find the common

material necessary for a valid generalization. The Govemment
of Great Britain has never adopted any particular doctrine upon
the question of strnits in general, but has allowed its judgment
to be guided by the considerations of hiçtory, geography, and
pcilicy appropriatc to each particular watenvay, ))(H. A. Smith,
Gj.entBritain alzd the Law of iïrutions, Vol. II. p. 255.)
Un tel état dc choscs a étéexprimé dernièrement aussi de la
façon suivante : ((....the legal status of straits is stilI far from
having reached a stste of development, still less a state of clarity,

mhich rnay be said to correspond to thc function in the international
cornmunity of these important waters .... an adaptation of the legal
evolution to the social evolution is greatly wanted. This develop-
ment must for the time being, in view of the present international
'situation, proceed through the practice of the individual strait
States, not by means of the codificatioii of the pertinent rules into
a general straits convention .... (E. Bruel, O*. cit., p.205.)

133. - 11semble bien que, tout en selimi tant à certainsdétroits,
Icçdites observations du rapporteur de 1930 exprimaient encore
plutôt un étatde choses delegefere?tdaque l'etat de droit en vigueur.
(rIn tirne of peace, the situation before the \var was this ....that
the right of passage of merchant vesçels in international straits
w;is certain, and wnrships were supposed to have the same right
-although not with the sarne degree of certainty. In this latter
regard the Statesattitude at the Hague Conference of 1930 seems
to have created grcnter certainty. i)(E. Bruel, op. cit., p. 202.) Ainsi le droitdc passage clesbàtiments dc guerre, limitéà certains
détroits de caractère particulier, n'est pas recoiinu d'une façon
certaine mêmcaprès la Conférence de Ln Haye.

134. - Il a étéexposri:plus haut (par. 6) que le canal nord de
Corfou n'est pas ((une route ordinaire pour la navigation inter-
nationale )).
Lc régimejuridique de ce détroit ne torribe donc pas sous l'empire

de la règle formulée par lesdites observations à la Conférence de
La Haye de 1930Ce n'est pas pour un tel détroit que les observa-
tions auraient exprimé l'importance d'assurer en teinps de paix
a dans toutes les circonstances » le passage des bâtiments de
guerre. Le régime juriclique des eaux dans le canal nord de Corfou
n'est que le régime généralde la mer territoriale.

13j, - C'est donc sous l'angle d'un tel régime que la question
se pose si le Gouvernenient albanais était dans son droit quand
il a exigé la notification préalable du passage des bâtiments de

guerre étrangers en vue de son autorisation à accorder.
Le Mémoire (par. 82) affirme que a l'Albanie elle-même n'a
jamais publié de règlements restreignant la navigation dans les
eaux territoriales 1)Toutefois, le représentant britannique devant
le Conseil de Sécuritéa confirme que son Gouvernement a reçu
le 29 mai 1946 par f.élégrammele texte de la note suivante que
le représentant des Etat-Unis avait reçu du chef d'État-Major
albanais : « Nous sommes informés que des navires de guerre et des

navires marchands étrangers pénètrent clans lcs eaux territoriales
albanaises sans que nos autorités en aient étéavisées ou qu'elles
aient donne leur autorisation à cet effet. Veuillez faire connaitrc
à vos autorités que ces navires ne doivent pas entrer cla~isles eaux
territoriales albanaises sans que notre Gouvernement en ait été
avisé au préalable et qu'il ait accordé sa permission. Nous vous
prions en méme temps de bien vouloir en iiiformer également
les autorités britanniques ct grecques. ilEn outre, dans sa note
du 19 juin 1946, au cours de l'éclia~igedes points de vue sui-
vant l'incident du 15 mai 1946, le Gouvernement albanais a fait
connaître au Gouvernement britannique que lesbateaux sedirigeant

vers le littoral albanais ont à remplir les formalités nécessaires et
obtenir les permis des autorités albanaises. Le Gouvernement
britannique a refusé, dans sa note du 2 août 1946, d'accepter a
avoir à remplir de telles conditions parce que, d'après lui, 1'Etat
riverain n'a pas le droit de les poser pour le passage par ses eaux
dans un détroit. A la lumière de ces faits, il semble bien que la
question n'est pas de savoir si le Gouvernement albanais a régle-
menté réstridivement le passage des navires de guerre par ses
eaux, mais il s'agit de savoir si le Gouvcrnement albanais, l'ayant
fait, était dans son droit. En répondant i cette double thèse, on doit souligner :
' ro la réglementation est faite par les notifications aux États

irrtéressés5 la navigation dans les eaux albanaises ;
zo LeGouvernement albanais a étéfondé en droit de faire une
telle réglementation vu les circonstances exceptionnelles et notoire-
irient connues des provocations constantes contre la côte albanaise ;
la situation est encore plus aggravée par la prétention du Gouver-
nement d'Athènes qu'un état de guerre existe.

Or, I'articIe12 précitédu projet de la Conférence de La Haye
de 1930 admet l'autorisation ou notification p.alable pour le
passage des bAtiments de guerre par les eaux territoriales (argu-
nient a co*zlrarioex ((en règle,générale»). Lors de la discussion,
l'opinion s'est fait jour que((1'Etat riverain a bien le droit d'exiger
I'autorisation préalable si bon lui semble 11(ledélégué de s . S.A.) ;
qu'cc en effet,il est évident que l'Etat riverain se réserve le droit
de restreindrc ou d'iiiterclire l'admission des navires de guerre
etrangers dans les Caux territoriales en cas de circonstances excep-
tionnelles a (le deléguéneerlandais) ;qu'« il se peut en effet qu'il
y ait des cas spéciaux pour lesquels une notification antérieure

soit nécessairc pour des raisons de sûreté a (le déléguédanois.
Op. cit.,Sociétédes Nations, pp. 61, 65, 171, etc.).
De tels points de vue rkpondent A la pratique suivie par les
Etats généralement, comme elle est bien connue du Gouvernement
britannique. Tout en insistant sur le droit de passage libre des
bàtiments de guerre par les eaux territoriales et notamment par
11:détroit, en l'occurrence par le canal nord de Corfou, le Mémoire
lui-même (par. 88) admet « a particular right to restrict or forbid
the passage of forcign ships through its territorialwaters ....11,
et il admet uii tcl droit exceptionnel mêmecn ce qui concerne le
détroit, bien qu'uii tel droit[(doit, vu le clroit de passage à travers
les détroits, êtrestrictement limité ....D.

A la lumière d'une tellc pratique des Ctats. manifestée aussi à
la Conférence de La Haye de 1930 et cn l'occurrcnce aussi par le
Mémoirelui-même,il semble êtrehors de doute que le Gouverne-
ment albanais a étéfondé en droit de réglementer le passage des
bâtiments de guerre étrangers par ses eaux. En le faisant, il était
bien fondé de se réclamer des circonstances exceptionnelles, et par
ailleurs notoires, dcs provocations constantes contre le territoire
albanais et aussi la frontière maritime albanaise, et dont la gravité
etait rehaussée par 1s prétention du Gouvernement d'Athènes
qu'un état de guerre existe.
Le Gouvernement albanais s'est empresse de faire connaître
au Gouvernenient britannique dans sa note du 21 mai 1946 les

circonstaiices dc fait l'amenant à demander la notification préalable
aux navires empruntant, en droit de passage, ses eaux.
Le Mémoire (par. 88) ne conteste pas ces circonstances, dont
le droit de juger de l'existence appartenait d'ailleiirs bien auGouvernement albanais, et ne conteste lion plus (le$lano l'usage
de ses droits' que le Gouvernement albanais n fait en soumettant
ledit passage à la notification préalable. Toutefois, le Mémoire
affirme alors quele Gouvemement a1bana.i~n'a pas agi en i'occur-
rence bona fide.Le Gouvernement albanais n'aurait pas pris des
mesures en question par rapport aux circonstances (le fait dont
il se réclamait, mai((d'aprésla croyaiice erronéequ'il était justifié
en touttemps à regarder la simplenavigation d'un navire etranger,
de guerre ou de commerce, dans les eaux territoriales albanaises,
comme une violation de sa souveraineté, à moins d'autorisation
spéciale, et à s'y opposer en oumant les hostilités 1).(Mérnoire
britannique, par. 85,)
Le Gouvemement albanais oppose à une telle supposition son
démenti formel. 11 n'a point eu l'intention d'interférer avec le
passage par ses eaux desnavires procédant d'une façon inoffensive.
Son représentant devant le Conseil cle Sécurite l'a déclaréd'une
façon catégorique. Ce qui importait en 1946 au Gouvernement
albanais, c'était d'une part de se défendre contre des incidents

provoqués soit du côtégrec soit de la part d'inconnus etde veiller
à cet égard notamment au passage des navires armés, et d'autre
partd'éviter des incidents que pourrait susciter le passage des
bâtiments de guerre, dans des conditions généralesactuelIes. En
fait, le passage des navires marchands dc toute sorte et de toute
nationalite non suspects n'a étéinterfé par les autoritéalbanaises
ni avant le 15 mai 1946, ni aprks. D1apr+s les d4clarations faites
par le représentant britannique devant le Conseil dc Sécurité
(Mémoirebritannique, annexe 23, p. zr3), le trafic du canal nord
de Corfou n'aurait comportéaprès le15 mai 1946que deux caïques
par semaine. Même s'il en &tait ainsi, le passage dc cesnavires
ainsi que de tous les autres, à cette époqueet depuis, pas lcs eaux
albanaises, n'a pas étéinterféré par les autorités albanaises. Et
certainement, s'il y avait des navires inarchands britaiiniques
passant par le nord, ils n'ont éprouvéaucune difficulté.
La demande de notification préalable du passage par lés eaux
albanaises, formulée en 1946 par le Gouvernement aItianais et
communiquée au Gouvernement britannique, se rapportait clonc,

suivant l'intention et la pratique du Gouvernement albanais, aux
bâtiments de guerre étrangers. Il est évidentqu'à.cet égardaucune
question de bonn fidedu Gouvernement albanais ne peut se poser.
Le Gouvernement albanais a été,en vertu des régles du droit
international, bien dans son droit de demander une telle notifica-
tion, et les bâtiments de guerre rie se conforrnaiit pas à cette
demande du Gouvernement albanais ne pouvaient se reclamer du
droit de passage libre par les eaux albanaises. Le passage offensif de I'escadrede guerre britannique
par les eaux aibanaises le22 octobre 1946.
(Ad paragraphes 85-87, go lit.b, du Mémoire.)

136. - Suivant toutes les déclarations prdcédentcs du Gouver-
nement britannique, le Mémoirc soutient à son tour bien haut:
que le passage de I'cscadre brittinnique paries eaux albanaises du
canal nord de Corfou le 22octobre 1946était innocent. ((Le passage
des navires de Sa Majcsté était un passage normal A travers une
route maritime internationale et comme tel innocent n (Mémoire
britannique, par. 87).((A l'appui de cette allégation on n'a produit
et l'on ne peut produire aucune preuve ni aucun témoignage i)
{par. 85, 87).((Le Gouvernement du Royaume-Uni répètesolen-
nellement que le passage des navires de Sa Majesté était inno-
cent n (par. 91).

Or, toutes ces allégations et prétentions du Gouvernement
britannique ne résistent pas il l'examen des faits pertinents, et des
conclusions contraires s'imposent.
r37 - 11 a étéexposé plus haut (par. 45) que le passage de
toute une escadre ayant pénétrél'après-midi du 22 octobre r946

dans les eaux aIbanaises du canal nord n'était pas notifié au préa-
lable au Gouvernement albanais par les autorités britanniques,
et qu'en effet ce Gouvernement n'en avait aucune connaissance.
1Jn tel passage - dont l'importance était bien rehaussée du fait
qu'il s'agissait de quatre navires de guerreà Ia fois- ne répondait
donc pas au règlement d'un tel passage que le Gouvernement
albanais a fait dûment connaître dès le mois de mai 1946 au Gou-
\vernement britannique. Les autorités albanaises étaient bien, dès
l'après-midi du 22 octobre, justifiées enconsidérant le passage de
l'escadre dans les eaux albaiiaises comme exercé en dehors du droit
de libre passage. En effet, aussi les bâtiments de guerre ((doivent,
dans la mer territoriale, respecter leslois et règlements locaux ....

par l'inobservation dc ccs règlements, le droit dc libre passage
prend fin )(art.13 du projet adopté par la Deuxième Commission
clela Conférence de Lü Haye de 1940 ,$. cil.Soci6t4 des Nations,
I' 217).
138. - Dans ces conditions, le Gouvernement albanais aurait

agi conformément à ses droits d'après le droit international s'il
avait exigé que l'escadre demande la permission de procéder au
passage par les eaux territoriales albanaises. L'article12 du projet
de La Haye de 1930 précité,et qui est de caractére déclaratoire
des principes respectifs, prévoit :((En cas d'inobservation des
règles de 1'Etat riverain par le navire de guerre de passage dans
la mer teiritoriale, et fautepar ce navire de tenir compte de l'invita-
tion qui lui serait adressée de s'y conformer, la sortie du navire
hors de la mer territori;lle peut ètre exigéepar l'État riverain. u Toutefois, ledit jour du 22 octobre 1946, le Gouvernement
albanais et ses autoritésnt étémis dans l'impossibilitéde procéder
ainsi et d'exercer leurs légitimes droits. Les autorités albanaises
étaient mises devant le refus net britannique de les respecter et
de se conformer à l'ordre public albanais qu'elles représentaient.
La vedette de l'autorité côtière albanaise qui se dirigea vers
15 h. 30 vers les navires de guerre pour s'informer sur les motifs
de la violation des eaux albanaises commise par leur passage
sans permission, pro'c6da à tous les égards correctenient, son
caractère officiel ne faisant pasde doute, comme il a été exposé
plus haut. Néanmoins, avec un manque d'égards élémentaires,
il n'a mêmepas étédonné une réponse et la mission de la vedette
était complètement ignoréepar les navires de guerre.

En présence de cet état tie choses, et vu le caractère illicite du
passage de l'escadre, les autorités albanaises ont étéplacéesdevant
Ia question de savoir comment faire respecter les règles alban;iises,
l'autorité de 1'Etat territorial. Nécessairement, ici la grande force
puissamment armée de l'escadre, son attitude visibleinent niena-
çante et toute prête à engager l'action, ses intentions inconnues
et incertaines, entraient pour les autorités albanaises en ligne de
compte. 11 ne leur aurait mêmepas étépossible de comniuniquer
aux navires la demande dc sortir deseaux albanaises, l'escadre
se refusant d'entrer en contact avecelles.Ainsi, en plus du passage
illicitee l'escadre dans les eaux albanaises, les autorités albanaises
ont étéplacées devant I'impossibilité de procéder confo~mément
aux règIes albanaises et de les faire respecter.

139. - Il ressort des faits exposésplus haut (par. 47 et 117)
que les équipages des contre-torpilleurs Saunznrezet T70/agen'ont
pas manqué, tout en se trouvant en détresse, de profiter lc22 octo-
bre 1946 clc leur proximité des rives albanaises pour se livrer i
observer et espionner les dkfenses albanaises autour de la bnic de
Saranda. Les deux contre-torpilleurs en question faisaient partie
de l'escadre, et c'est sous les ordres de l'amiral cor~lmandant
l'escadreque les équipages se livraient iiladite activité pour le
compte du Gouvernement britannique qui s'en est servi.
Par laditeactivité,I'escadre a violéet les prescriptions albanaises
concernant la défensede l'État et la proti:ction d'objets militaires
et le droit international.
En ce qui concerne le droit international, le rapport précitde
la Conférencede La Haye de 1930 obsenre qu'« on a jugé superflu
d'insérer une stipulation indiquant que les bâtiments de guerre
doivent, dans la mer territoriale, respecter les lois et réglenlents
locaux r (op.cit.,Sociétédes Nations, p. 217) .'est parce que le

projet de ladite Commissioi~ énonce des règles généralesa l'égard
de tous les navires, les navires de guerre y compris, qu'il déclare
qu'icun passage n'est, pas inoffensif lorsque le navire utilisla
mer territoriale d'un Etat riverain aux lins d'accomplir un acte
portant atteinte à la sécuritéà l'ordre ou aux intérêtsfiscaux decet 1;tat ii(art. 3, al.2,dudit projet, op. cil. Sociétédes Nations,

1).Il est évident que des règles pareilles s'imposent czfortiori au

plssnge des bâtiments de guerre. Des actes incompatibles avec le
respect cle la souveraineté ou de la séciiritéde l'ktat riverain,
aiixquels les forces navales étraiigères sc livrcrnicnt, ccaltèrent
pi.ofondémcrit le caractère de passage ; il peut y avoir encore
passage au sens matériel du mot :il n'y a à coup sûr plus passage
riiisens juridique et, en tout cas, il n'y :t plus passage inoffensif w

(Ci G.idcl, op. cd., .286). Aussi dcs actes pareils engagent la
responsabilité de I1&at des forces naides étrangères,,u meme si
uile réglementation formelle n'a pas étéétablie par 1'Etat riverain
à l'effet d'interdire aux bâtiments de guerre en passage de se livrer
à des actes incompatibles avec le respect d~:la souveraineté ou de
la sécuritédc 1'Etat riverain (sondages répétés,relevés de côtes,
rnanŒul-res navales, exercices de tir, cséciition dc sentences capi-
tales ii,etc. (G. Gidel, 1. c.).

140. - Outre ce qui précède, il ressort dcs faits exposésplus
hitut (par, 46) qu'aussitôt entrées dans les eaux albanaises, les
unités dc l'escadre britannique s'y livrcnt i des ~noiivements de
iiiancruvre. Elles ne procédaient pas eii ligne de filedès leur entrée,
mais en d'autres formations, et changeaient les formations dans

les eaux albanaises. Ces mouvements prenaient nécessairement
I'nsycct d1aut:!nt plus menaçant qiie les éqiiipagcs se trouvaient
en état d'alcrte et que les navires étaient chargés de troupes. En
outrc, les navires ont quitté au cours de lcur passage le chenal
navigable pour naviguer dans les eaux intérierires albanaises se
trouvant à l'est du chenal.
'Toutes ces circonstances s'ajoutc~it, c~i l'aggravant singuliè-
rement, au fait que les navires de l'escnclre iicSC trouvaient pas,
le.22 octobre 1946, cn passage libre comme il vient d'êtredit.
Le passage de l'escadre britannique effectuédans les eaux alba-

naises dans de telles circonstances illustre d'une façon plus que
frappante Ia maxime prononcee àl'adresse de la Grande-Bretagne :
((Warships may not pass without consent into this zone, because
they threateri i, (Elihu Root, North Atlantic Coast Fislzerzes
Ar&lrution, II, Proceedings, p. 2007) .t lc commeritaire américain
rrJcent ajoute : « There is, therefore, no reason for freedom of
irinocerit passage of vessels of \var. Iiurthermore, the passage of
vessels of n9ar near the shores of foreign States and the presence
without prior notice of vessels of war in marginal seas might give
rise to misunderstanding even lvlvlicn they ;ire in transit.1)parvard

Law School, Research 2% 1wteî.nationnl Law,xgzgy ,. 295.)
L'esczidre britannique entrait et naviguait le 22 octobre 1946
dans les eaux territoriales albanaises sans l'autorisation requise
du Gouvernement albanais, et, en plus, elle cst entréeet naviguait
dans les eaux intérieures albanaises, et elle n':i pas reculé devantle fait de lPser les r2gles fondamentales du droit internatiorial de
la mer par des actes défendusmê~iie lors cl'upassage de b$timents
de guerre libre ct licite et procéda~àtun passage nettement offensif.

L'invasion di^territoiralbanais par la ,marine de guore
britannique les12 et 13 novembre 1946. I
(Ad paragraphe 21 du Mémoire.)

141. - Les opérations entreprises par la marine de
britannique dans les eaux aIbanaises les xz!et 13novernbre 1946
sont passees entièrement sous silence daris la partie III (TheLaw)

du Mémoire.Toutefois, dans saprotestation àpartirdu rz novembre
1946 et devant le Conseil de Sécuritéen février 1947 ,e[Gouver-
nement albanais a accusé le Gouvernenient du Royaume-Uni à
propos des faits des 12 et 13 novembre,rg46 qu'il ((a vioIéd'une
manière flagrante la souveraineté de 1'Etat albanais et tputes les
règles du droit international i)(Mémoirebritannique, annexe 23,
p. 226), et a refusé d'attribuer une importance quelconque à des
faits alléguéspar la Grande-Bretagne à la suite de cette violation
(la note albanaise du 2x décembre 1946). Malgré ces accus at'ons
albanaises réitérées et énergiques, le Mémoire n'entreprend pas,
mêmede loin, de justifier en droit l'action de la flotte britannique

dans les eaux albanaises les 12 et 13 novembre 1946.
Ce peu de pIace consacré par le Mémoire,au séjour de ,la flotte
britannique dans les eaux albanaises les 12 et 13novernbre 1946
contraste avec les longues explications cor-icernant l'incident du
22 octobre 1946. C'est seulement dans son exposé des faits que le
Mémoire présente l'invasion des 12 et 13 novembre 1946 comme
une opération de dragage d'un ((necessary humanitarian task ....
of international benefit »,et explique la décisiondu Gouvernement
britannique de procéder à ce dragage d'une part en considération
de ce bénéficeet d'autre part eu égard auk récomman~lations du
Comité de nettoyage de mines compétent.,

142. - Cesseules justifications de l'actiondes 12et 13 novembre
1946 avancées par le Gouvernement britannique confinnent que
l'action manquait d'aucun titre légal, et que le Gouvernerneilt
britannique a peine à en construire. En ce qui concerne la recom-
mandation de procéder au dragage du Comité international corn-

pétent, il a étéexposéplus haut (par. j6-58 et 128-130) 14peu de
succès qui a suivi l'audacieuse tentative du Gouvernement britan-
nique d'abuser publiquemelit de I'autorisation du Comité.pour en
couvrir son action unilatérale. En ce qui concerne le prétendu
mandat humanitaire et de bénéficeinternational, il est; évident
que le droit international ne reconnaît pas'même à une grande
Puissance, le pouvoir dc s'attribuer unilatéralement des mandats
prétendus pareils pour e11va.hr un autrc Etat. Certes, il ne saurait
échapper au Gouverriement britannique qu'il lui manque aucune
I base légale pour entreprendre dans la mer territoriale étrangère
l'action d'une pareille envergure comme l'est l'invasion des rz et
1:;novembre 1946. S'il est décidé néanmoinsde l'entreprendre,
c'était uniquement, saisissant comme prétexte l'incident du22 octo-
bre 1946, afin de rejeter sur l'Albanie 1s responsabilité de cet
incident et de produire des preuves inexistantes pour préparer
une imputation déjà préméditéed , es raisons d'importance pnrticu-
1ii:respour le Gouvernement britannique en étant les mobiles.
La responsabilité du Gouvernement britannique de la viola-
tion de la souveraineté albanaise commise Ies 12 et 13novembre
1946 doit.être.jugéeplus sévèrementque jamais.

143. - Le trait saillandes événements des 12 et 13 novembre
1946 était que jiisquc dans la nuit du 13 novembre toutc une
partie du territoire albanais formée par les eaux de sa mer ter-

ritoriale et intérieure dans le canal nord de Corfou était dklibé-
rément et entièrement occupéeet dominéepar la marine de guerre
britannique. Ses unitésont pénétré dans ces eaux contre la volonté
expresse du Gouvernement albanais, i cet égard connue d'avance
et mêmetrois fois de suite expressément et solennellement mani-
festée.Les forces navales britanniques étaient puissamment arinées
et étaient décidéesde se servir de leur force arméepour ne permettre
aucune interférence avec Ieurs actions. En prenant à cette fin
toutes lesmesures de précaution, elles procédaient de même comme
si elles se trou~~aienen territoire ennemi en temps de guerre. En
s'appuyant ainsi sur leur puissance maintes fois supérieure aux
défensesalbanaises, ces unités de la marine de guerre britannique
oiit occupé les eaux territoriaIeet intérieures albanaises du canal
nclrcl ettoute ladite journée des manceuvres miIitaires de toutes
sortes ont &téexécutéespar ces unités, cloiit une partie stationnait
toutc la journée clans Ies eaux albanaises. L'officier naval britan-
nique commandant: l'action exerçait dans ces eaux pendant toute

la journ6e le pouvoir suprême. L'ordre public albanais, ses règles
et leur application par les autorités albanaises ont étémis en mème
temps ipso /aclo entièrement de côte, rendus impuissants et leurs
manifestations exclues de toutecette partie dcla mer occupée.Toute
activité déployéepar Ia force arméenavale britannique était déter-
minéepar son officier commandant agissant sous l'ordre formel de
son Gouvernement ct ignorant complètement la souveraineté et
l'ordre public albanais. Aucune cornmuiiicstion avec les autorités
albanaises n'a étéc11erchci.L.'unique autorité albanaise qui voulait
se rendre près de l'endroit occupépar la tnarine britannique s'est
trouvée en danger et a étéempêchéedans sa mission. Diverses
armes étaient employées par la inarine britannique pendant la
journée, six avions de la flotte survolaient le secteur. Les obser-
vations de toutc la zone occupée ainsi que d'autres parties du
littoral albanais étaient poursuivies, et notamment celles inté-
ressant les défenseset la s6curitC albannises. Des rnanŒuvres militaires de toutes sortes, le statichnernerit
d'une escadre entière ont eu lieu dans les eaux albanaiscs.1
D'après ce que les cornniandants de la. marine britannique pré-
tendent dans leurs rapports, des mines GY ont étélaissées flot-
tantes à la surface de cette partie de la mer. Or, les mines GY
devenant cncore plus dangereuses après leur dfcoupage, les opéra-
tions de la marine de guerre britannique dans les eaux albanaises
n'auraient servi qu'à augmenter davantage le danger pour la navi-
gation, et,decettefaçon, l'escüdre deIa marine de guerrt: britannique
s'est rendue coupable, au moins envers l'Albanie, de ce que le

Gouvernement britannique a appeléun « crime contre l'hvmanité II.
Tel était l'état de choses cians les eaux albanaises du c$nal nord
de Corfou les IZet 13novembre 1946. L'entrée, le séjour,les diverses
activités des forces navales britanniques effectuées ces jours clans
les conditions décrites signifiaient que ces forces arméesétraiigères
se sont emparées dc force lesdits jours d'une partie du territoire
albanais, savoir d'une partie de la mer territoriale et intérieure
albanaise et de l'espace atmosphérique au-dessus et autour. Elles y
ont exercé pour certaines fins hostiles ail Gouvernement :slbanais
leur pouvoir sans aucun tigard h l'ordre et ses autorités, et en
mettant ces riiitorités dans l'état d'impuissance.
En se tenant au projet précité dc la Conférence de ~s Haye
de 1930, il ÿ a lieu de définir toutes ces actio~is de la marine de
guerre britannique et leur ensemble et chacune d'elles séparément

comme un délit international commis en vioLation du territviret de
la souveraineté albanais. En effet, au sens des articlesI et z dudit
projet, les eaux albanaises, ainsi que l'espace atn-iosphériqiie au-
dessus, sont compris dans le territoire de lJEtat albanais auquel
seul appartient d'cxercei- sa souveraineté sur cette zone.

144, - A part la vio1;ition du droit international corn~nise
dans ses règles les plus élémentairespar la marine de guerie britan-
nique, ainsi qu'il vient d'êtredit, une partie de son action 'déployée
les 12 et 13 novembre ~gqtia violé en mêmetemps la Convention
no VI11 de La Haye de ,1907sur un point déterminé.
Le Mémoire et ses annexes contiennent des rapports circons-
tanciés concernant les opérations de dragage auxquelles procé-

dait les 12 et 13 novembrt: 1946 la flotte,des dragueurs faisant
partie des forces de la marine de guelTe britannique occupant
ledit jour les eaux albanaises.
Or, d'après L'articlj de la Convention VI11 de La Haye de 1907,
chaque Puissance devra procéder dans le plus bref délai à l'enlé-
vement des mines qui se trouvent dans ses eaux ». Cette disposi-
tion ne fixe pas seulement un devoir international lequel les Gtats
parties à la Convention s'engagent à accomplir. Elle assure aussi
à chacun de ces États dans les eaux duquel! se trouvent des mines
automatiques de contact amarrées Ia compétence excIusive de
procéder à leur nettoyage. La double facc de cette disposition dudit article j se trouve
clairement exposée par le rapport 'du Comité compétent de la
Conférence de La Haye de 1907 (Acteset Docir~>zeni t.,III, p. 397,
annexes A)..Le rapport dit au sujet de l'article 3, lequel au moment
de la rédaction du rapport portait le no 8 :

((La disposition de l'article 8 a sa source dnns le projet de la
dl5légatioribritannique ii; la proyositiori a étérépétéedans les
amendements présentés par la délégation d'hllemagnc. Dans la
proposition britannique, qui ne prévoyait pas le cas de poser des
mines cn clehors des eaux côtièrcs, il n'&ait naturellement ques-

tion que des mines placées dans ces limites : l'arriendelnent néer-
lailciais, partant de l'idée d'une réglemciitation de la pose des
mines aussi par les neutres, prévoyait égiilement la mênieobliga-
tion pour ces derniers. La proposition allemaiide étendait l'obli-
gation pour les mines placées en vertu de l'article 5, j. savoir,
dans la sphère immédiate des belligérants, en dehors des limites
énoncees dans les articles 2-4.
(Au rcste les dispositions de l'article Ss'ccpliquent d'elles-mêmes:
il est naturel qu'on ait recours à urie notification mutuelle, par les
belligérants, des mines que chacun d'eux a placéesdevant les côtes

de l'autre, afin de permettre que chaque Etat cherche seul dans ses
propres eaux ; toute autre solution serait difficile à appliquer au
niomcnt oii une guerre vient de se terminer. Aussi l'idéeque les
belIig6rnnts eussent à enlever aussi les mines que chacun d'eux a
pIacécs clevzint Ies côtes de l'autre a étéécartdeen vue des dangers
de coiîflits nouveaux qu'elle pourriiit comporter. i)

C'était donc le Gouvernement du Royaume-Uni qui, en sage pré-
vision, prenait en 1907 en corisidération ((des dangers de conflits
i.iouveaus 11 que comporterait I'enltivement des mines par un
I?tat dans les eaux territoriales d'un autrc. ],a solution des dangers
prévus cst :((chaque État cherche seul dnns ses propres eaux 11,
car ((toute autre solution serait difficile à appl-.uer au moment
où une guerre vient de se terminer )).
Au sens de l'article j dc la Convention VI11de La Haye de 1907,
1,:sdragueurs britanniques avaient donc à chercher des mines dans

les eaux britanniques propres, sauf accord et consentement exprès
en ce qui concerne les eaux territoriales d'autres Etats. Lesdits
dragueurs n'avaient pas à chercher des mines dans les eaux alba-
~iaiscsainsi qu'ils oiit fait le12 et le 13novembre 1946, et en procé-
dant ainsi, malgré la volontécontraire du Gouvernement albanais,
11:Gouvernement britannique a viol6 entre autres la disposition
expresse (le l'article j de la Convention VI11 dont lui-mêmcest
l'auteur. iq. - Le Gouvernement de lx ~épubii~ue popul;iile dJAl-
banie demande qu'il plaise à la Cour de dire etjuger :
1.- Que lors du passagc de l'escadre de la marine de guerre
britannique composée.des croiseurs lMaz~rztiusct Lc~tnrIeret des

contre-torpilleurs Saun~arezet Volage dans les eaux territoriales
et intérieures albanaises le 22 octobre 1946, l'ordre pul~lic et les
droits souverains de 1'Etilt albanais ont étéviolés et que, partant,
ce passage. n'était pas inoffensif.
A I'appui de cette demailde, le Gouvernement albanais' soumet
les faits suivants :

1) Lesdits navires de guerre britaiînihues sont entrés ledit
jour dans les eaux territoriales et mêmeintérieures albanaises
du canal nord de Corfou sans avoir donné au Gouvernement
albanais préavis de ce passage ct sansavoir demandé e.fobtenu
son autorisation.
A l'appui de ce fait, Ie Goiivernement albanais soumet lès points
suivants :

a) le détroit naturel connu comme cana' nord de corfou rie
reliant pas deux hautes niers par une route ordinaire de navigation
internationale, les eaux territoriales alba.naises dans le ?anal de
Corfou sont sonmises au régimegén&ra le la mer territoriale ;
b) le Gouvernement albanais ayant pris,. en vue du maintien
de sa sécuritéet de l'ordre, la décision de demander aux navires
étrangers un préavis de leur passage dans les eaux albanaises aux
fins de son autorisation à accorder, le Gouverriement britannique en
a été dûment avisé le 29 mai 1946 ;
c) ladite décision du Gouvernement albanais était conforme au
droit international en ce qui concernait les. bâtiments cie guerre

étrangers ;
d) lors du passage par Ia mer territoriale, le; navires de guerre
ne respectant pas l'ordre public, les lois et règlements en vigueur de
l*État territorial, perdent le droit du passa.gelibre.
Les faits et les points de droit à l'appui des faits indiq4és sous
I) sont.exposésdans les paragaplies 6,33, 34, LIT, 114-1. 161-140.

2) Lors dudit passage non autorisé :et offensif, llescadre
britannique refusa de répondre à l'autorité albana.ise com-
pétente et l'a mise dans l'impossibilité' de procéder confor-
mément aux lois et règlements albanais.;
A l'appui de ce fait, le Gouvernement albanais sourriet que :

a) conformément aux règles du droit international attestées
dernièrement par la Conférencede La Haye de 1930, le passage des
bâtiments de guerre dans la nier territoriale étrangère perd le droit dii passage libre en ne respectant pas l'ordre public de l'État
riverain etles autorités l'appliquant ;
b) refusant la communication à l'autorité albanaise, l'escadre
usait des menaces, vu Ic nombre et la puissance des b5timents

de guerre composant l'escadre, son attitude menaçante, l'état
d'alerte, et le caractèrefcnsif du passage.
Les faits et les points de droit à l'appui du fait sous 2) sont
indiqués dans les paragraphes 112, 113, 119, 123, 138-140.
3) Pendant son séjour prolongé dans les eaux albanaises,
l'escadre $est livrée à l'observation et à l'espionnage des

défensesmilitaires et de sécurité albanaises.
A l'appui de ce fait, le Gouvernement albanais soumet que :
a) observer les défenses militaires et de sécurité albanaises,
notamment aux fins de communiquer les renseignements obtenus
à une Piiissance étrangère,est défendu en Albanie, comme c'est la
règlegénéraledans tous les pzys ;

b) les renseignements obtenus le 22 octobre 1946 ont étécom-
muniqués par l'escadre à son Gouvernement, qui en a fait usage
devant le Conseil de Sécurité;
c) un bàtiment de guerre dans 1s mer territoriale étrangère perd
le droit du passage libre en ne respectant pas la sécuritéde l'État
riverain.
Les faits et les points dc droit a l'appui du fait sous 3) sont
indiqués dans les paragraphes 117, 119, 139 ;

11.- Que vingt-six bâtiments de la marine de guerre britannique
ont violéles 12 et 13 novembre Ia souveraineté albanaise lui appar-
teriant aussi sur sa mer tcrritorialc et les eaux intérieures dans le
canal nord de Corfou en occupant lesdits jours, à l'aide de violence,
la mer territoriale albanaise et en excluant les aiitorités et l'ordre
publicalbanais et en procédant, selon lesdécisionsdu Gouvernement
britannique et sous le commandement de son officier, à diverses
activités défendues ou noii autorisées par les lois et règlements
alfianais et contraires aussià l'article5 de la Convcntion VI11 de
La Haye de 1907.
-4l'appui de cette demande, le Gouvernement albanais soumet
les faits et les points de droit suivan:s

I) Les bâtiments de guerre précités sont entrés auxdits
jours dans la mer territoriale albanaisau canal nord de Corfou
contre la volonté expresse du Gouvernement albanais et sans
aucun titre légal.
X l'appui de ce faitIc Gouvernement albanais soumet les points

suivants :
a) le Gouvernement britannique ayant communiquéle 26 octobre
et le IO novembre x946 au Gouvernement albanais son intention
de procéder au dragage des eaux albanaises, Ic GSuvernementalbanais s'est espressément défendu les 31 octobre et II novembre
contre toute entrée des batirnents de guerre dans ses eaux, tout

en donnant en principe son consentement audit dragage, s'il était
exécuté légalement ;
b) le Comité interiiational centrrtl pour le déminage a cl6cidé
le I~~novembre 1946 de pc(3c6der au dragage des eaux au momeiit
favorable du canal nord cle Corfou, étarit expressénieiit' enteridu
que l'accord au préalable avec le Gouvernement albailais rentrc
~armi les conditions du nioment favorabltz :
c) cette condition espressémeiit entendue était bien connue du
Gouvernement britannique, non sciileine~it pour des raisons résiil-
tant des règles du droit international en généralet de I'articlc j
de la Convention VI11 de La Haye de 1907en particulier, mais
aussi et surtoutpar le fait que c'est son représentant audit Comité
international, étant en mhne temps le président du Comité,qui a

confirméet déclaréla iiécessitt5dc l'accord préalable a\-ec l'Albrt;iic
d) l'article5 de la Conventioii VI11 dc La Haye de 1907 ccori-
nue en vigueur non seulement par lc Gouvernement a1ba;iais mais
aussi par lc Gouverncmciit britannique, réserve cxpresçénicnt à.
chaque Etat riverai11 le droit de draguer ses proprcs eaux ;
e) le Gouvernement britannique invoque à tort les motifs d'ordre
humanitaire et diutilit6 générale à l'appui de son action, dc tcls
motifs étant dépourvus de portée juridique, et le Gouverneineiit
britannique ayant eu toute latitiidc dc les faire réaliser d'accord
avec le Gouvernement albanais par le Comité internatioiial com-
pétent.

Les faits et les points de droit i l'appui du fait sous I) sont
indiqués plus haut, parzigrapheç 54, 58, 83, 126, 130, 142, 144..
2) Lesdits bstiments de gucrrc britanniques sont entrés
dans les eaux territoriales nlhniiaiscs S l'aide des armes, prêts
à user de violence, poilr y exercer .lesdiverses activités clont
il est question plus lciiil sous 3, 4,j et 6, et: avec l'intcritioii
de chercher de préteridus corfiora delicti contre Ie Gouverne-
ment albanais.

A l'appui de ce fait, Ie Gouvernement albanais soumet les faits
suivants :
a) les dragueurs britanniques étniciit les12 et 13 iiovcinbre1946
accompagnés d'une puissante force armée composée notaininent
de neuf croiseurs, en état d'alerte pour user dc la violencc dans le
but d'éliminer toute opposition et obstacle. à leurs agissements ;
b) toutes les mesures el: précaiitioris Ctaient dans cé but prises

d'avance, ainsi que tout le plan pour cette action des ~iavircs de
guerre britanniques fut iliinutieusernciitpréparé;
c) le nettoyage desditei; eaux albanaises des mines ne servait
que de prétexte pour construire une accusation odieuse contre lc
Gouvernement albanais. Ce but considéré atteint, le nettoyage
fut abandonné et les eaux laissées déclaréesnon ouvertcs pour lnnavigation. Toutefois, si vraiment des mines GY ont été laissées
flotter à la surface de l'eade cettepartie du canal nord de Corfou,
comme il est prétendu dans les rapports des commandants de la
niarine de guerre britannique, de telles mines devenant plus dange-
reuses lorsqu'elles sont découpées,le Gouvernement britannique
s'est rendu coupable, au moiiis envers l'Albanie, de ce qu'il appelle
lui-mêmeun ((crime contre I'hurnanité il.
Les faits à l'appui du fait sous 2)sont iiidiquésplus haut, para-
graphes Go, 73, 79, 118, 120-122, annexe 12.

3) Les activités exercées par lesdits batiments de guerre
britanniques dans les eaux albanaises étaient toutes contraires
à l'ordre public, les lois et les règlements de l'Albanie, et
violaient ça sécurité.

Les faits suivants à l'appui de ce fait sont indiquéspar le Gouver-
nement .albaiiais:
a) lesdits navires de guerre usaient lesdites eaux pour y séjourner
et naviguer dans toutes les directions et jamais en passage pour
les traverser ;
b) une partie des batiments de guerre, notamment le bâtiment
cominandant du jour. Ie croiseur St. Bride's Bay, stationnait dans
les eaux ;

c) des armes étaient cn action. Six avions armés des bâtiments
de guerre étaient toute la journée employés;
d) une partie de ces bâtiments de guerre procédait, sous prétexte
d'explorer et draguer les eaux sans aucune permission et contre
la défense expresse préalable du Gouvernement albanais, à des
actes illicites de caractèrem litaire;
e) l'occasioii et les moyens étaient fournis même à un ressor-
tissant d'une tierce Puissance de procéder à des actes illicites.
Les faitset les points de droit à l'appui du fait sou3) sont indi-
qués plus haut, par;~grnphcs 71, 118, 120, rzr, 124, 143.

4) L'autorite albanaise compétente fut par la violence
empêchée de proceder dans ses eaux. Les autorités albanaises
furent mises dans I'impossibilité de proceder conformément
aus lois et règles aIbanaises.

Les faits et les points de droit à l'appui du fait sous 4) sont
indiqués plus haut, paragraphes 123, 143,
5) Les bâtiments de guerre précités se livraient toute la
journée à l'observation et à l'espionnage systématique de

tout le littoral et des mouvements sur ce littoral.
Les faits et les points de droit l'appui sont indiqués plus haut,
paragraphes 122, 123, 125.

6) Procédant le 13 novembre 1946 au prétendu dragage
contre la volontédu Gouvernement albanais, le Gouvernement
IO britannique a agi aussi contrairement à l'article 5 de la Con-
veiition VI11de La Haye de 1907.

Les faits et les points dt: droit à l'appui de ce fait sont dails
ce Contre-Mérnoire, paragraphe Sj ;

III. - Que, vu Ies conclusioris qui précèdent, les conclusio~isdu
Mémoire sont à rejeter, étant contraires aux faits et non conformes
au droit ;

IV. - Que, vu les circonstances exposées, le ouv verne ment

britannique a violé les droits du Gouvernement albanais selon les
règles du droit international et par conséquent doit au Gouver-
nement albanais des excust:s et satisfaction.'

Le 15 juin 1948.

L'Agent du Gouvernement de la Réptiblique
populaire d'Albanie :

(Signé) KAHREMA N LI-I.

LISTE DES ANNEXES.

Annexe 1. Lettre adressée au Secrétaire génbral des Nations unie' par le
représentant de la Gréceen date du IO mars 1947.
Annexe 2. Déclaration du capitaine Avdi Mati.
3, Lettre du chef de la RLission militaire britannique en Albanie en
Annexe date du 25 janvier 1940, adresséeà l'État-Major de l'arméeqlbanaise.

Annese 4. Séance du Comité Rredzon tenue le z juiliet 1946.
Annexe 5. Kapport sur l'incidentdu 15 mai rg46.
Annexe 6. Lettre du représentarit tle l'Albanie adresske au Secrétaireg8néraI
des Nations Unies en date du 12 avril 1947.

Annexe 7. Rapport sur l'incident du 22 octobre 1946. I
Annexe 8. Communiqué de l'Agence Reuter du 26 octobre 1946. ;
Annexe g. Article 3 de l'Arrangement albano-yougoslave en date du IO sep-
tembre 1946.

Annexe IO. Rapport sur les événements des 12 et 131novembre 1946.
Annexe II. Rapport du général Hodgson en date du 29 juillet 1945 stir les
provocations grecques. I
Annexe ri?.Carte indiquant la pansage de l'escadre de guerre britannique le
22 octobre 1946.
Annexe 13. Carte du littoral albanais de Saranda et de ses environs. '

Annexe 14. Rapport du commandement de la Marine yougoslave sur Icschamps
de mines allemands.
Annexe 15. Liste d'incidents de navires ayant heurté des mines,pu,bliée par
Lloyd's r.
Annexe 16. a) Actes agressifs du Gouvernement monarcho-fasciste grec contre
l'Albanie.

b) Provocations de guerre (lu Gouvernement monarchn-fascistc grec
contre l'Albanie+ britannique a agi aussi contrairement à l'article 5 de la Con-
veiition VI11de La Haye de 1907.

Les faits et les points dt: droit à l'appui de ce fait sont dails
ce Contre-Mérnoire, paragraphe Sj ;

III. - Que, vu Ies conclusioris qui précèdent, les conclusio~isdu
Mémoire sont à rejeter, étant contraires aux faits et non conformes
au droit ;

IV. - Que, vu les circonstances exposées, le ouv verne ment

britannique a violé les droits du Gouvernement albanais selon les
règles du droit international et par conséquent doit au Gouver-
nement albanais des excust:s et satisfaction.'

Le 15 juin 1948.

L'Agent du Gouvernement de la Réptiblique
populaire d'Albanie :

(Signé) KAHREMA N LI-I.

LISTE DES ANNEXES.

Annexe 1. Lettre adressée au Secrétaire génbral des Nations unie' par le
représentant de la Gréceen date du IO mars 1947.
Annexe 2. Déclaration du capitaine Avdi Mati.
3, Lettre du chef de la RLission militaire britannique en Albanie en
Annexe date du 25 janvier 1940, adresséeà l'État-Major de l'arméeqlbanaise.

Annese 4. Séance du Comité Rredzon tenue le z juiliet 1946.
Annexe 5. Kapport sur l'incidentdu 15 mai rg46.
Annexe 6. Lettre du représentarit tle l'Albanie adresske au Secrétaireg8néraI
des Nations Unies en date du 12 avril 1947.

Annexe 7. Rapport sur l'incident du 22 octobre 1946. I
Annexe 8. Communiqué de l'Agence Reuter du 26 octobre 1946. ;
Annexe g. Article 3 de l'Arrangement albano-yougoslave en date du IO sep-
tembre 1946.

Annexe IO. Rapport sur les événements des 12 et 131novembre 1946.
Annexe II. Rapport du général Hodgson en date du 29 juillet 1945 stir les
provocations grecques. I
Annexe ri?.Carte indiquant la pansage de l'escadre de guerre britannique le
22 octobre 1946.
Annexe 13. Carte du littoral albanais de Saranda et de ses environs. '

Annexe 14. Rapport du commandement de la Marine yougoslave sur Icschamps
de mines allemands.
Annexe 15. Liste d'incidents de navires ayant heurté des mines,pu,bliée par
Lloyd's r.
Annexe 16. a) Actes agressifs du Gouvernement monarcho-fasciste grec contre
l'Albanie.

b) Provocations de guerre (lu Gouvernement monarchn-fascistc grec
contre l'Albanie+

Document file FR
Document
Document Long Title

Contre-mémoire soumis par le Gouvernement de la République populaire d'Albanie

Links