CR 95/8
Cour internationale International Court
de Justice of Justice
LA HAYE THE HAGUE
ANNEE 1995
Audience publique
tenue le mardi 7 février 1995, à 10 heures, au Palais de la Paix,
sous la présidence de M. Bedjaoui, Président
en l'affaire relative au Timor oriental
(Portugal c. Australie)
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COMPTE RENDU
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YEAR 1995
Public sitting
held on Tuesday 7 February 1995, at 10 a.m., at the Peace Palace,
President Bedjaoui presiding
in the case concerning East Timor
(Portugal v. Australia)
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VERBATIM RECORD
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- 2 -
Présents : M. Bedjaoui, Président
M. Schwebel, Vice-Président
M. Oda
Sir Robert Jennings
MM. Guillaume
Shahabuddeen
Aguilar Mawdsley
Weeramantry
Ranjeva
Herczegh
Shi
Fleischhauer
Koroma
Vereshchetin, juges
Sir Ninian Stephen
M. Skubiszewski, juges ad hoc
M. Valencia-Ospina, Greffier
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Present: President Bedjaoui
Vice-President Schwebel
Judges Oda
Sir Robert Jennings
Guillaume
Shahabuddeen
Aguilar Mawdsley
Weeramantry
Ranjeva
Herczegh
Shi
Fleischhauer
Koroma
Vereshchetin
Judges ad hoc Sir Ninian Stephen
Skubiszewski
Registrar Valencia-Ospina
- 4 -
Le Gouvernement de la République portugaise est représenté par :
S. Exc. M. António Cascais, ambassadeur de la République portugaise
auprès du Gouvernement de S. M. la Reine des Pays-Bas,
comme agent;
M. José Manuel Servulo Correia, professeur à la faculté de droit de
l'Université de Lisbonne et avocat au barreau du Portugal,
M. Miguel Galvão Teles, avocat au barreau du Portugal,
comme coagents, conseils et avocats;
M. Pierre-Marie Dupuy, professeur à l'Université Panthéon-Assas
(Paris II) et directeur de l'Institut des hautes études
internationales de Paris,
Mme Rosalyn Higgins, Q.C., professeur de droit international à
l'Université de Londres,
comme conseils et avocats;
M. Rui Quartin Santos, ministre plénipotentiaire, ministère des
affaires étrangères,
M. Francisco Ribeiro Telles, premier secrétaire d'ambassade,
ministère des affaires étrangères,
comme conseillers;
M. Richard Meese, avocat, associé du cabinet Frere Cholmeley, Paris,
M. Paulo Canelas de Castro, assistant à la faculté de droit de
l'Université de Coimbra,
Mme Luisa Duarte, assistante à la faculté de droit de l'Université de
Lisbonne,
M. Paulo Otero, assistant à la faculté de droit de l'Université de
Lisbonne,
M. Iain Scobbie, Lecturer in Law à la faculté de droit de
l'Université de Dundee, Ecosse,
Mlle Sasha Stepan, Squire, Sanders & Dempsey, Counsellors at Law,
Prague,
comme conseils;
M. Fernando Figueirinhas, premier secrétaire de l'ambassade de la
République portugaise à La Haye,
comme secrétaire.
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The Government of the Portuguese Republic is represented by:
H. E. António Cascais, Ambassador of the Portuguese Republic to the
Government of H.M. The Queen of the Netherlands,
as Agent;
Mr. José Manuel Servulo Correia, Professor in the Faculty of Law of
the University of Lisbon and Member of the Portuguese Bar,
Mr. Miguel Galvão Teles, Member of the Portuguese Bar,
as Co-Agents, Counsel and Advocates;
Mr. Pierre-Marie Dupuy, Professor at the University of Paris II
(Panthéon-Assas) and Director of the Institut des hautes études
internationales of Paris,
Mrs. Rosalyn Higgins, Q.C., Professor of International Law at the
University of London,
as Counsel and Advocates;
Mr. Rui Quartin Santos, Minister Plenipotentiary, Ministry of Foreign
Affairs,
Mr. Francisco Ribeiro Telles, First Embassy Secretary, Ministry of
Foreign Affairs,
as Advisers;
Mr. Paulo Canelas de Castro, Assistant in the Faculty of Law of the
University of Coimbra,
Mrs. Luisa Duarte, Assistant in the Faculty of Law of the University
of Lisbon,
Mr. Paulo Otero, Assistant in the Faculty of Law of the University of
Lisbon,
Mr. Iain Scobbie, Lecturer in Law in the Faculty of Law of the
University of Dundee, Scotland,
Miss Sasha Stepan, Squire, Sanders & Dempsey, Counsellors at Law,
Prague,
as Counsel;
Mr. Fernando Figueirinhas, First Secretary of the Portuguese Embassy in The Hague,
as Secretary.
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Le Gouvernement du Commonwealth d'Australie est représenté par :
M. Gavan Griffith, Q.C., Solicitor-General d'Australie,
comme agent et conseil;
S. Exc. M. Michael Tate, ambassadeur d'Australie aux Pays-Bas et
ancien ministre de la justice,
M. Henry Burmester, conseiller principal en droit international,
bureau du droit international, services de l'Attorney-General
d'Australie,
comme coagents et conseils;
M. Derek W. Bowett, Q.C., professeur émérite, ancien titulaire de la
chaire Whewell à l'Université de Cambridge,
M. James Crawford, titulaire de la chaire Whewell de droit
international à l'Université de Cambridge,
M. Alain Pellet, professeur de droit international à l'Université de
Paris X-Nanterre et à l'Institut d'études politiques de Paris,
M. Christopher Staker, conseiller auprès du Solicitor-General
d'Australie,
comme conseils;
M. Christopher Lamb, conseiller juridique au département des affaires
étrangères et du commerce extérieur d'Australie,
Mme Cate Steains, deuxième secrétaire à l'ambassade d'Australie aux
Pays-Bas,
M. Jean-Marc Thouvenin, maître de conférences à l'Université du Maine
et à l'Institut d'études politiques de Paris,
comme conseillers.
- 7 -
The Government of Australia is represented by:
Mr. Gavan Griffith, Q.C., Solicitor-General of Australia,
as Agent and Counsel;
H.E. Mr. Michael Tate, Ambassador of Australia to the Netherlands and
former Minister of Justice,
Mr. Henry Burmester, Principal International Law Counsel, Office of
International Law, Attorney-General's Department,
as Co-Agents and Counsel;
Mr. Derek W. Bowett, Q.C., Whewell Professor emeritus, University of
Cambridge,
Mr. James Crawford, Whewell Professor of International Law,
University of Cambridge,
Mr. Alain Pellet, Professor of International Law, University of Paris X-Nanterre
and Institute of Political Studies, Paris,
Mr. Christopher Staker, Counsel assisting the Solicitor-General of
Australia,
as Counsel;
Mr. Christopher Lamb, Legal Adviser, Australian Department of Foreign
Affairs and Trade,
Ms. Cate Steains, Second Secretary, Australian Embassy in the
Netherlands
Mr. Jean-Marc Thouvenin, Head Lecturer, University of Maine and
Institute of Political Studies, Paris,
as Advisers.
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Le PRESIDENT : Veuillez vous asseoir, je vous prie. J'appelle à la barre le professeur Pellet
pour poursuivre le cours de sa plaidoire commencée hier.
M. PELLET : Merci, Monsieur le Président.
LA LICEITE DES CONDUITES DE L'AUSTRALIE -
L'ABSENCE DE l'INDONESIE (II)
Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
1. J'ai essayé de montrer, hier, dans quel esprit l'Australie souhaite que vous évitiez de vous
prononcer sur la requête introduite par le Portugal. Si vous m'autorisez à me résumer, je dirais qu'il
y a à cela deux raisons essentielles :
- d'une part, l'Australie est attachée au règlement juridictionnel des différends internationaux qui s'y
prêtent; mais elle est attachée aussi au principe du consentement à la juridiction (au moins aussi
longtemps qu'un consensus en faveur de la compétence universelle et obligatoire de la Cour n'aura
pas été atteint); et elle estime que ce forum ne doit pas être détourné à des fins qui ne sont pas les
siennes; Etat souverain, l'Indonésie a choisi de ne pas accepter la clause facultative; c'est son
affaire;
- d'autre part, l'Australie entend ne pas être utilisée comme
un bouc-émissaire dont la principale fonction serait d'apaiser la mauvaise conscience du Portugal
qui, faute de pouvoir s'en prendre à l'Indonésie, s'attaque à un Etat qui, vraiment, comme je l'ai dit
hier, n'en peut mais et dont la prétendue responsabilité, forgée de toutes pièces pour les besoins de
la cause, ne pourrait, de toute manière, qu'être consécutive, dérivée, de celle de l'Indonésie.
Ces deux raisons, qui sont déterminantes, sont suffisantes, pour que l'Australie vous demande
de bien vouloir préserver ses droits et rappeler le Portugal à ses devoirs, les devoirs que lui imposent
les résolutions des Nations Unies dont il fait si grand cas - celui «de coopérer pleinement avec
l'Organisation des Nations Unies en vue de garantir au peuple du Timor oriental le plein exercice de
son droit à l'autodétermination» (résolution 36/50 de l'Assemblée générale, 24 novembre 1981) et
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celui de se prêter de bonne foi aux consultations que l'Assemblée générale a prié le Secrétaire général
d'initier «avec toutes les parties directement intéressées, en vue de parvenir à un règlement global du
problème» (résolution 37/30, 23 novembre 1982). Les parties directement intéressées, Monsieur le
Président, ce sont le Portugal, «les représentants du peuple du Timor oriental» (dont il est distinct),
et l'Indonésie. C'est le bon moyen de régler le problème; le seul légitime; le seul conforme au droit.
2. Votre Statut, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, donne d'ailleurs toutes les
garanties nécessaires aux Etats qu'ils ne seront pas jugés contre leur gré et votre jurisprudence en a
toujours tiré des conséquences logiques et équilibrées. «Rien que [votre] compétence, mais toute
[votre] compétence» comme on l'a dit (CR 95/6, p. 18).
La décision prise dans l'affaire de l'Or monétaire en 1954 est l'une des illustrations les plus
convaincantes de ce principe de bon sens.
Affronté à cette jurisprudence, le Portugal me fait un peu penser à un papillon devant une vitre
obstinément fermée : il cherche désespérément une issue pour échapper aux conséquences, pourtant
inéluctables, du «principe de l'Or monétaire». Je l'ai dit hier :
- il «fabrique» une affaire artificielle en des termes d'une abstraction sans précédent devant la Cour
mondiale;
- il s'abrite derrière des décisions fictives des Nations Unies; et
- il introduit des distinctions, totalement «non opérationnelles» en l'espèce, entre droits et
obligations erga omnes et erga singulum.
L'abstraction d'abord.
a) Le Portugal formule des questions artificielles en des termes abstraits
3. L'Australie, comme d'ailleurs bien d'autres Etats, a reconnu la présence de l'Indonésie au
Timor oriental et accepté d'en tirer les conséquences juridiques. On aurait pu s'attendre à ce que le
Portugal, qui prétend, lui aussi, exercer des droits souverains sur ce territoire, en fasse grief à la
Partie australienne et voie dans cette reconnaissance un fait internationalement illicite engageant sa
responsabilité.
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Le Portugal s'en est abstenu lorsque l'Australie a pris cette décision et, en apparence, il ne
s'engage pas, devant la Cour, dans cette voie qui est trop évidemment bouchée. Elle se heurte en
effet à des difficultés touchant au fond - il n'est pas évident qu'il existe, en droit international, une
obligation de non-reconnaissance - et, si un tel devoir existe dans certaines circonstances, il n'est pas
évident que les conditions en soient réunies en l'espèce. Mais à ces problèmes de substance s'ajoute
un obstacle procédural, sans aucun doute dirimant : pour démontrer que l'Australie aurait violé cette
obligation, le Portugal devrait, bien sûr, établir que la situation reconnue par elle, est de celles qui,
en vertu du droit des gens, ne seraient pas susceptibles de reconnaissance, car elles résultent du
recours à la force. Ceci implique, inévitablement, que la Cour devrait se prononcer sur les droits de
l'Indonésie, partie absente à l'instance; et, pour paraphraser l'arrêt de la Cour dans l'affaire de l'Or
monétaire, «Examiner au fond de telles questions serait trancher un différend entre» le Portugal et
l'Indonésie.
«La Cour ne peut trancher ce différend sans le consentement de [l'Indonésie]...
En l'espèce, les intérêts juridiques de [l'Indonésie] seraient non seulement touchés par
une décision, mais constitueraient l'objet même de ladite décision» (C.I.J. Recueil 1954,
p. 32),
puisqu'aussi bien c'est la situation qu'elle a créée - elle, Indonésie - sa présence à Timor - d'elle,
Indonésie - qui est l'objet même de la reconnaissance contestée.
4. Conscient de ce que l'impasse est totale, le Portugal tente de se placer sur un terrain qu'il dit
être «autre».
«[P]eu importe, juridiquement, de savoir ce qui a été reconnu, écrit-il dans son
mémoire, peu importe de savoir si la reconnaissance joue en faveur de l'incorporation
du Timor oriental dans l'Etat X, Y ou Z ou de toute autre chose. Ce qui compte, ce
n'est pas tant ce que l'Australie reconnaît que ce qu'elle ne reconnaît pas, c'est-à-dire la
qualité du territoire du Timor oriental comme non autonome et les conséquences de
droit qui y sont attachées.» (Mémoire, p. 220-221, par. 8.25, et CR 95/2, p. 66.)
Dans sa réplique et en plaidoirie, le Portugal théorise cela. L'obligation qu'il
«accuse l'Australie d'avoir violée et qui est en cause, c'est l'obligation de traiter un
territoire non autonome et sa puissance administrante comme tels, c'est un devoir de
non-méconnaissance et non pas un devoir de non-reconnaissance» (réplique, p. 166,
par. 6.16; italiques dans le texte).
5. Me Galvão Teles a expliqué très clairement ce que signifie, selon le Portugal, ce devoir de
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«non-méconnaissance» qui se traduirait ici, d'une part, par «le devoir de ne pas traiter le territoire du
Timor oriental comme s'il n'était pas un territoire non autonome» et, d'autre part, par «le devoir de ne
pas traiter le Portugal comme s'il n'était pas la puissance administrante du territoire»; «méconnaître»,
ajoute-t-il, c'est, en anglais, «to disregard» (CR 95/2, p. 58).
D'accord. Prenons ceci comme point de départ - mais en ayant bien à l'esprit que ce n'est
qu'un point de départ. Il ne suffit évidemment pas que le Portugal allègue quelque chose pour que
cela devienne une vérité juridique; il ne suffit pas, comme le dit le Portugal avec quelque arrogance,
qu'il «accuse» l'Australie d'avoir «méconnu» ces soi-disant statuts «objectifs» «pour que la Cour soit
à même de se prononcer au fond» (CR 95/5, p. 53). S'il en allait ainsi, c'est le principe rappelé dans
l'affaire de l'Or monétaire et dans de nombreux arrêts ultérieurs qui se trouverait remis en cause :
dans cet arrêt, la Cour ne s'est pas fondée sur une théorie de l'apparence; elle a considéré qu'elle ne
pouvait pas se prononcer sur les demandes italiennes parce que, pour le faire, elle aurait dû déclarer,
préalablement, l'Albanie responsable et non pas, bien sûr, parce que l'Italie avait pris sur ce point
telle et telle position - elle en avait d'ailleurs changé !
Le problème n'est donc pas de savoir ce que le Portugal allègue, mais, bien plutôt, de
déterminer si, pour répondre à ces allégations, la Cour peut éviter de se prononcer sur les intérêts
juridiques de l'Indonésie. C'est d'ailleurs bien parce que la question se pose en ces termes que les
problèmes de compétence et de fond sont si inextricablement liés dans cette affaire. Et c'est
évidemment ce qui a conduit l'Australie, sagement je crois, à ne pas demander que ses exceptions
préliminaires soient examinées séparément du fond de l'affaire.
6. Ceci étant, il me semble, Monsieur le Président, que le Portugal lui-même s'y perd un peu et
ne sait plus très bien où il en est entre reconnaissance, non-reconnaissance, méconnaissance, nonméconnaissance,
etc. Dans sa réplique, tout en affirmant fortement que l'Australie aurait manqué à
un devoir de «non-méconnaissance», il n'en estime pas moins que
«[l]'attitude australienne présente deux faces - l'une affirmative : reconnaissance de
l'annexion du Timor oriental par l'Indonésie - l'autre négative : non-reconnaissance du
Timor oriental comme territoire non autonome et du Portugal comme sa Puissance
administrante» (réplique du Portugal, p. 165, par. 6.15; italiques dans le texte).
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Voilà qui est très classique : selon la Partie portugaise, l'Australie s'est rendue responsable de deux
manquements au droit international, qu'elle présente d'ailleurs elle-même comme liés; elle a reconnu
les droits souverains de l'Indonésie à Timor et, de ce fait, elle ne reconnaîtrait pas le Timor oriental
en tant que territoire non autonome, non plus que le Portugal comme sa puissance administrante.
Nous sommes sur le terrain, solide, de la reconnaissance et de la non-reconnaissance (ou de la
méconnaissance).
Ici, le Portugal écarte «l'attitude affirmative», la reconnaissance : «Aux fins de l'espèce, écritil,
c'est le côté négatif qui importe» (réplique du Portugal, p. 165, par. 6.15). «Le côté négatif»,
donc la non-reconnaissance.
Revirement à 180° lors des plaidoiries orales puisque, dès la première audience tenue par la
Cour dans cette affaire, lundi dernier, l'un des coagents du Portugal est venu affirmer à cette barre :
«C'est cependant sur les propositions positives du Portugal que la Cour est appelée à se prononcer.»
(CR 95/2, p. 60; les italiques sont de nous.) Quelles «propositions positives» ? Essentiellement
celle-ci : en reconnaissant de jure l'Indonésie - ce qui s'est traduit par la négociation, la conclusion et
l'application du traité australo-indonésien de 1989 - l'Australie aurait «méconnu» les droits du peuple
du Timor oriental et ceux qui lui appartiendraient à lui, Portugal, en tant que puissance
administrante.
Ces contradictions internes témoignent sans doute d'un certain désarroi mais, à vrai dire, elles
ne présentent pas une grande importance : reconnaissance («positive») ou non-reconnaissance
(«négative») cela revient au même, en tout cas en ce qui concerne notre problème. La nonreconnaissance
(ou la méconnaissance) d'une part et la reconnaissance d'autre part sont
indissociablement liées; l'une n'est que la conséquence, et ne peut être déduite, que de l'autre «par
nécessité logique absolue» comme le Portugal aime à le répéter.
7. Il ne m'appartient pas de traiter la question quant au fond. Je dois simplement montrer que
la distinction que tente de faire le Portugal entre la reconnaissance de la présence indonésienne et la
méconnaissance des droits que lui-même tiendrait de sa qualité de puissance administrante, est
irrecevable. Non seulement il s'agit des deux faces de la même médaille - la présentation portugaise
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est d'ailleurs en ce sens - mais encore, mais surtout, le Portugal ne pourrait établir l'illicéité de la
seconde (la «méconnaissance») que s'il parvient à montrer que la première (la reconnaissance) est
illicite. Sur ce terrain, la Cour ne saurait le suivre car la question de la licéité ou de l'illicéité de la
reconnaissance l'obligerait à se prononcer sur le comportement de l'Indonésie. Or, conformément à
votre jurisprudence, rappelée hier par le professeur Crawford,
«Statuer sur la responsabilité internationale de l'[Indonésie] sans son
consentement serait agir à l'encontre d'un principe de droit international bien établi et
incorporé dans le Statut, à savoir que la Cour ne peut exercer sa juridiction à l'égard
d'un Etat si ce n'est avec le consentement de ce dernier.» (Or monétaire pris à Rome en
1943, C.I.J. Recueil 1954, p. 32; voir aussi Certaines terres à phosphates à Nauru,
C.I.J. Recueil 1992, p. 258.)
8. Avant de développer brièvement ceci, il me paraît cependant nécessaire d'apporter une
précision, sur laquelle le professeur Crawford et M. Staker reviendront plus en détail.
Les affirmations portugaises sont inexactes en ce qui concerne l'objet même de la
reconnaissance qui est reprochée à la Partie australienne. En effet, contrairement à ce que prétend le
Portugal, l'Australie ne s'est jamais prononcée, ni expressément, ni implicitement, sur le statut du
territoire du Timor oriental et, surtout, elle n'a jamais contesté que le peuple de ce territoire ait le
droit à disposer de lui-même. Au contraire, la reconnaissance qui est reprochée à l'Australie n'a été
donnée que parallèlement à celle, tout aussi claire, du droit du peuple du Timor oriental à
l'autodétermination, qui se trouve ainsi pleinement reconnu.
9. Le seul problème plausible est donc celui-ci : en ne reconnaissant pas que son éventuelle
qualité de puissance administrante donne au Portugal un droit exclusif de contracter des engagements
internationaux au nom du peuple et du territoire du Timor oriental, l'Australie a-t-elle violé une
obligation internationale lui incombant ?
Indépendamment du fond, je crois fermement que le problème de la méconnaissance
(proposition négative) est insoluble pour le Portugal - et par la Cour - sans que soit préalablement
tranchée la question de la validité de la reconnaissance (proposition positive) de la présence
indonésienne. Et, bien sûr, si la Cour doit se prononcer sur cette validité, elle sera, nécessairement,
obligée de se placer sur le seul terrain sur lequel cette validité pourrait être contestée, celui de la
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licéité de la présence de l'Indonésie au Timor oriental. Ce n'est que si l'Indonésie — pas le Portugal,
pas l'Australie : l'Indonésie — ne peut se prévaloir d'aucun droit au Timor oriental que le Portugal
est fondé à se plaindre de la reconnaissance australienne.
D'ailleurs, pour établir ces prétendus manquements au droit international, le Portugal est en
effet obligé de se contredire lui-même et de reconnaître, avec d'ailleurs une certaine honnêteté, une
certaine ingénuité, que l'illicéité qui serait à la base de la responsabilité de l'Australie trouve ellemême
son fondement dans ... la reconnaissance des droits de l'Indonésie. Ceci est tout à fait frappant
dans les passages clés de sa démonstration sur ce point - mais de sa démonstration au fond.
10. J'ai été extrêmement frappé, en écoutant les conseils du Portugal présenter la thèse de ce
pays, la semaine dernière, de constater l'extraordinaire dédoublement de la personnalité dont ils
paraissent souffrir : lorsqu'ils plaident la compétence de la Cour, ils soutiennent une thèse
entièrement différente et bien plus abstraite que celle qu'ils avancent lorsqu'ils abordent le fond; ceci
est vrai pour Me Galvão Teles; ceci est vrai pour le professeur Dupuy. Dans leurs plaidoiries sur la
compétence ils se livrent, l'un et l'autre, à un exercice totalement abstrait qui repose sur un credo
presque mystique consistant à dire en substance : «peu importent les faits, Timor est un territoire non
autonome et le Portugal est son seul représentant légitime au plan international, en tant qu'il est sa
puissance administrante; nous - nous Portugal - demandons à la Cour de le constater». En revanche,
lorsqu'ils plaident le fond, le discours de nos amis est complètement différent; car il leur faut bien
montrer en quoi et pourquoi l'Australie a violé les droits ainsi proclamés; alors, l'Indonésie envahit le
devant de la scène car, bien sûr, la responsabilité de l'Australie, si elle existe, ne peut avoir aucune
espèce d'autonomie par rapport à celle, originaire, de l'Indonésie.
Cette schizophrénie judiciaire n'est pas de mise. Le Portugal ne peut pas présenter son affaire
d'une certaine manière en vue de contourner les obstacles préliminaires qui se dressent sur sa route,
et modifier ensuite totalement sa problématique lorsqu'il raisonne sur le fond; il ne peut pas «mettre
de côté» l'Indonésie pour établir la compétence de la Cour, et la réintroduire lorsqu'il aborde le fond
des choses.
Or, et nous allons le voir, c'est très exactement ce qu'il fait.
- 15 -
11. Abordant la question - centrale pour sa thèse - de «la méconnaissance par l'Australie de la
qualité du Timor oriental comme territoire non autonome et de celle du Portugal comme sa puissance
administrante», celui-ci écrit dans sa réplique :
«Trois points de fait sont fondamentaux :
a) dès février 1979, l'Australie reconnaît de jure une annexion du Timor oriental par
l'Indonésie;
b) selon le Gouvernement australien, cette reconnaissance fut impliquée par le début
même des négociations concernant le «Timor Gap», en vertu de la nature de cellesci;
c) ce fut sur la base d'une telle reconnaissance, et en exécution de celle-ci, que
l'Australie non seulement conduisit et conduit toujours les négociations avec
l'Indonésie, mais encore a conclu l'«accord», adopté les lois internes indiquées au
paragraphe 6.02 ci-dessus et a commencé l'exploration du plateau continental dans
le «Timor Gap».» (Réplique du Portugal, p. 160, par. 6.08.)
Et même analyse la semaine dernière, dans la bouche du professeur Servulo Correia : «The
negotiations concerning the Timor Gap, initiated with the de jure recognition by Australia of the
annexation of East Timor...» (CR 95/2, p. 33; les italiques sont de nous).
Ainsi, de l'aveu du Portugal lui-même, le point de départ du raisonnement n'est pas la
«méconnaissance» de ses droits, mais bien la reconnaissance de ceux de l'Indonésie. Sans doute, ne
présente-t-il ceci que comme un «point de fait», mais celui-ci n'a de pertinence juridique que si ce fait
est illicite car, en soi, la reconnaissance d'une situation territoriale n'est évidemment pas de nature à
engager la responsabilité de son auteur, contrairement à ce que se sont ingéniés à faire croire les
savants, mais adroits, conseils du Portugal en fin de plaidoirie la semaine dernière.
12. Du reste, aussitôt après avoir énoncé ces «faits» fondamentaux, le Portugal souligne que
«[l]'essentiel - je lis bien : «l'essentiel» - pour l'affaire sub judice consiste en ce que
reconnaître de jure l'annexion d'un territoire non autonome par un Etat signifie, par
nécessité logique absolue, ne plus reconnaître ce territoire comme un territoire non
autonome»" (ibid, p. 162, par. 6.11; italiques dans le texte).
Il reprend d'ailleurs cette phrase, mot pour mot, quatre paragraphes plus loin (p. 165, par. 6.15) et
Me Galvão Teles l'a reprise à son tour lundi dernier à cette barre (CR 95/2, p. 59). C'est qu'elle est,
en effet, importante cette phrase, car elle montre que la non reconnaissance - ou la méconnaissance -
des droits supposés du Portugal est constituée exclusivement par la reconnaissance des droits
- 16 -
indonésiens. Et cette reconnaissance est, bien sûr, tenue pour illicite, faute de quoi la responsabilité
australienne ne saurait être engagée. Il n'y a pas d'autre cause juridique à cette responsabilité; et le
Portugal, en effet, n'en invoque aucune autre.
13. Tel est d'ailleurs le temps suivant du raisonnement portugais :
«la reconnaissance de jure d'une annexion ou, plus exactement, la non-reconnaissance
du Portugal comme la puissance administrante du Timor oriental et de celui-ci comme
territoire non autonome remplissent une fonction constitutive, celle de fondement même
de l'illicéité» (réplique du Portugal, p. 166, par. 6.16; italiques dans le texte).
Soit dit par parenthèse, je ne crois pas qu'il soit «plus exact» de parler de
non-reconnaissance des droits de l'un que de reconnaissance des droits de l'autre : je crois que c'est,
tout simplement, la même chose - en tout cas, ceci confirme que, pour le Portugal lui-même, les deux
aspects, reconnaissance de la présence indonésienne et méconnaissance des droits du Portugal, sont
équivalents et indissociables.
14. Il est vrai que, jusqu'à présent, on ne trouve pas, sous la plume du Portugal, la
dénonciation expresse de l'illicéité du comportement indonésien. Ceci ne résulte que de la glose que
j'ai faite des citations dont j'ai donné lecture. Il n'en reste pas moins que le raisonnement portugais
s'effondre si cette illicéité n'est pas postulée. Elle est nécessaire, faute de quoi l'illicéité imputée à
l'Australie qui n'est, de l'aveu même du Portugal, que consécutive, disparaît à son tour. Ce n'est pas
en escamotant un chaînon nécessaire d'un raisonnement qu'on en fait disparaître la nécessité.
Devant votre haute juridiction, Messieurs les juges, on ne peut se borner à postuler. Il faut
prouver. Le Portugal s'y résigne - ou s'y essaie - dans la section suivante de sa réplique, et dans la
phase suivante de ses plaidoiries au fond, dans lesquelles il allègue que «l'Australie ne peut pas
s'appuyer sur le droit international de la reconnaissance» (p. 170-183). Il y indique clairement
pourquoi la reconnaissance australienne est, à ses yeux, illicite :
- parce que «[l]e Timor oriental est occupé par l'Indonésie à la suite d'une action militaire que les
Nations Unies ont déplorée» (réplique du Portugal, p. 172, par. 6.29);
- parce que, selon la résolution 2625 (XXV) de l'Assemblée générale, «nulle acquisition territoriale
obtenue par la menace ou l'emploi de la force ne sera reconnue comme légale» (ibid);
- 17 -
- parce que ce principe «est confirmé par la pratique» (p. 172, par. 6.30);
et
- parce que
«[l]a doctrine de la non-reconnaissance a été développée dans le contexte de l'emploi illicite de
la force [et parce que] ce principe est dirigé contre la reconnaissance de situations ou d'actes
incompatibles avec "the most basic principles of international law», dont un exemple notoire
fut l'agression» (p. 176, par. 6.37).
Ce sont, bien sûr, les conduites de l'Indonésie - pas de l'Australie - qui sont visées par ces
allégations, sur le bien-fondé desquelles je ne puis, dès lors, que m'abstenir de prendre parti. Du
reste, comme je l'ai dit hier, le Portugal reconnaît expressément que «[l]'Australie, quant à elle, n'est
évidemment l'auteur d'aucun acte de violence directe contre le peuple du Timor oriental» (p. 219,
par. 7.32), contrairement à l'Indonésie qui a (c'est toujours le Portugal qui parle) «envahi par la
force» son territoire et conduit contre lui une «répression systématique» (p. 218-219, par. 7.31; voir
aussi CR 95/5, p. 70).
Et le Portugal de conclure qu'en reconnaissant «de jure l'annexion du Timor oriental à
l'Indonésie», c'est-à-dire «en méconnaissant le statut du Timor oriental et l'identité de sa puissance
administrante» - toujours cette indissociabilité du «couple» reconnaissance-méconnaissance - donc
en faisant conjointement ces deux choses, l'Australie a commencé des actes illicites qu'il lui impute à
charge.
«C'est ainsi, conclut-il, et pas autrement, que l'Australie a engagé sa
responsabilité à l'égard du peuple du Timor oriental et du Portugal.» (P. 219,
par. 7.32; voir aussi CR 95/2, p. 33.)
15. Monsieur le Président, ce long rappel de la position portugaise, fondé exclusivement sur
des citations, a été un peu fastidieux et je vous prie de bien vouloir m'en excuser. Mais il m'a paru
utile de montrer que toute la démonstration de l'Etat requérant repose sur l'illicéité de la conduite de
l'Indonésie; c'est de cette illicéité affirmée que dépend la responsabilité de l'Australie qu'il vous
demande de sanctionner. Elle n'en est, elle n'en peut être, que la conséquence :
1
er temps : l'Indonésie a envahi par la force le territoire du Timor oriental;
- 18 -
2
e
temps : cette conduite est illicite;
3
e
temps : elle ne peut pas être reconnue;
4
e
temps : une reconnaissance entraîne donc la responsabilité de son auteur;
5
e
temps : et elle l'oblige à réparer à l'égard du «véritable» souverain territorial, en l'espèce le
Portugal.
A ce stade, je le répète, peu importe le fond. Ce peut être exact, ce peut être faux. Mais ce
qui est certain, c'est que le Portugal, pas davantage que votre haute juridiction, ne peut se prononcer
sur la responsabilité de l'Australie sans avoir, pré-a-la-ble-ment, pris position sur celle de
l'Indonésie. Préalablement, et, à cet égard, comme mon ami James Crawford l'a dit hier, la présente
affaire est clairement distincte de celle que vous avez tranchée par votre arrêt du 26 juin 1992, dans
lequel vous avez écarté la thèse de l'Australie car, dans cette espèce,
«la détermination de la responsabilité de la Nouvelle-Zélande ou du Royaume-Uni
[n'était] pas une condition préalable à la détermination de la responsabilité de
l'Australie, seul objet de la demande de Nauru» (C.I.J. Recueil 1992, p. 261).
La situation présente est toute différente : la conduite australienne ne serait illicite que si celle
de l'Indonésie l'était. Ceci, Monsieur le Président, Messieurs les juges, le principe, fondamental, du
consentement à votre juridiction vous interdit de le déterminer.
16. Cela aussi, le Portugal le sait bien et, conscient de la faiblesse de la théorie, par trop
artificielle, de la «non-méconnaissance», il tente de s'abriter derrière des décisions fictives des
Nations Unies. Et ce sera mon deuxième point.
b) Le Portugal tente de s'abriter derrière des décisions fictives des
Nations Unies
17. Selon le Portugal, ce pays ne demande pas à la Cour de constater «de novo» que
l'Indonésie a manqué à ses obligations internationales. «All that is required, a dit le professeur
Rosalyn Higgins, is to read the resolutions that have already determined these things» (CR 95/5,
p. 14; voir aussi CR 95/2, p. 55 ou 95/5, p. 57). Pour reprendre les propres termes de Me Galvão
Teles,
«de l'avis du Portugal, il n'est pas nécessaire que la Cour juge ex novo sur le point de
savoir si le peuple du Timor oriental bénéficie toujours du droit à disposer de lui même
- 19 -
et si le Portugal est toujours la puissance administrante du territoire. [Ces questions]
ont été tranchées par les organes compétents des Nations Unies. De l'avis du Portugal,
la Cour n'a pas à y revenir et il suffira d'en prendre acte.» (CR 95/5, p. 59; voir aussi
réplique, par. 6.43, p. 180.)
En d'autres termes, l'Etat requérant demande à la Cour de considérer l'illicéité des conduites
indonésiennes comme un fait acquis, ou, pour reprendre ses propres termes, d'admettre,
«que le caractère non autonome du territoire du Timor oriental et la qualité du Portugal
comme sa puissance administrante se trouvant établie, de façon obligatoire par le
Conseil de sécurité et par l'Assemblée générale, constituent des données, aussi bien
pour tous les Etats Membres (donc notamment pour l'Australie) que pour la Cour qui
est elle-même un organe des Nations Unies» (ibid., par. 7.08, p. 204; italiques dans le
texte);
de ces prétendues «données», la Cour n'aurait, toujours selon le Portugal, «qu'à prendre acte».
Indépendamment du fait que les résolutions du Conseil de sécurité et de l'Assemblée générale
ne disent pas du tout ce que le Portugal voudrait qu'elles disent et n'ont aucunement la portée dont il
les crédite, comme le professeur Bowett le montrera demain, cet argument, qui constitue
l'indissociable complément de sa théorie de la "non-méconnaissance", se heurte, lui aussi, à une série
d'objections absolument dirimantes.
18. Liminairement, une remarque s'impose :
L'insistance mise par le Portugal sur cet argument selon lequel les faits internationalement
illicites qu'il impute à l'Indonésie seraient des «données», des «givens», s'imposant à la Cour, et sur
lequel il revient à satiété tant dans ses écritures qu'en plaidoirie, trahit son embarras. Ceci montre
qu'il est parfaitement conscient, qu'a contrario, si la Cour, pour se prononcer sur ses demandes, doit
examiner de novo ou ex novo ce qu'il considère comme des «données»; si les manquements au droit
international dont il accuse l'Indonésie et dont il postule qu'ils privent sa présence au Timor oriental
de toute base juridique ne s'imposent pas comme des faits mais doivent être établis devant la Cour
puis par elle; alors, la requête est irrecevable car, du fait de l'absence de l'Indonésie, ces
appréciations sont précisément de celles auxquelles votre haute juridiction ne peut pas se livrer.
C'est sans aucun doute le cas, Monsieur le Président.
19. Il convient tout d'abord d'observer que le Portugal tente, en vain, de poser le problème en
termes «factuels». Il demande à la Cour de considérer, sur la base des résolutions du Conseil de
- 20 -
sécurité et de l'Assemblée générale, «l'invasion» de l'Indonésie «comme un fait juridique» (réplique
du Portugal, p. 148, par. 5.61). Et le Portugal ne parvient pas à dissimuler complètement cette
vérité d'évidence. Il reconnaît que les résolutions sur lesquelles il s'appuie sont des «qualifications et
constatations déterminatives» (mémoire du Portugal, p. 193, par. 6.64; les italiques sont de moi)
constitutives non pas de la réalité «tout court» mais de «réalités juridiques» (réplique du Portugal, p.
182, par. 6.47) et que «le point de départ de [sa] requête est une situation de droit» (CR 95/2, p. 55).
L'idée même de règlement judiciaire serait vide de sens si la Cour devait prendre pour argent
comptant ce que l'une des Parties à un différend lui présente non seulement comme des «données»
mais comme des «données juridiques» quand bien même elles émaneraient du Conseil de Sécurité
car, comme on l'a rappelé tout récemment,
«il serait absurde de reconnaître aux Etats la liberté de saisir la Cour, en plus du
Conseil, si la Cour devait s'incliner devant lui. Quel sens aurait la saisine
concurrente de la Cour si le Conseil devait hiérarchiquement la tenir en échec»
(Mohammed Bedjaoui, Nouvel ordre mondial et contrôle de la légalité des actes du
Conseil de sécurité, Bruylant, Bruxelles, 1994, p. 81, italiques dans le texte; voir
aussi, p. 88).
Ainsi que la Cour elle-même l'a relevé dans l'affaire des Activités militaires, «le Conseil de sécurité a
des attributions politiques, la Cour exerce des fonctions judiciaires. Les deux organes peuvent donc
s'acquitter de leurs fonctions distinctes mais complémentaires à propos des mêmes événements»
(C.I.J. Recueil 1984, p. 435). Votre haute juridiction ne s'acquitterait pas des siennes si elle devait
tenir pour juridiquement intangibles des qualifications données par le Conseil dans l'exercice de ses
attributions - de ses «attributions politiques». Dans ses ordonnances du 14 avril 1992 rendues dans
les affaires de Lockerbie, la Cour s'est du reste réservée de revenir, lorsqu'elle examinerait le fond de
l'affaire, sur la portée et l'effet juridique de la résolution 748 (1993) du Conseil de sécurité (C.I.J.
Recueil 1992, p. 15 et 126) et la plupart des opinions, individuelles ou dissidentes, jointes à l'arrêt
vont souvent plus clairement encore, dans ce sens.
En prétendant interdire à la Cour de porter ses propres appréciations, juridiques, sur la
situation en cause, en présentant les résolutions du Conseil comme des vérités juridiques
incontestables devant et par la Cour, le Portugal voudrait priver celle-ci de l'exercice de pouvoirs qui
- 21 -
sont inhérents à ses fonctions judiciaires. Il ne le peut évidemment pas et, dans l'exercice de ses
fonctions, la Cour doit, nécessairement, s'interroger sur la validité et la portée des résolutions du
Conseil comme de l'Assemblée générale; ce faisant, elle sera conduite soit à faire siennes les vues de
ces organes politiques, soit à les infirmer, en se fondant sur sa propre appréciation de la situation;
mais, dans les deux cas, les intérêts juridiques de l'Indonésie «seraient non seulement touchés par une
décision, mais constitueraient l'objet même de ladite décision» (C.I.J. Recueil 1954, p. 32).
20. Un prononcé judiciaire sur ce point serait d'autant plus inéluctable que, quoiqu'en aie le
Portugal, le véritable différend qui oppose les Parties porte précisément sur la qualification juridique
qu'il convient de donner à la présence de l'Indonésie au Timor oriental. Pour le Portugal, elle résulte
d'une invasion armée, ce qui entraînerait l'illicéité de la reconnaissance. Pour l'Australie, on peut
regretter cette situation mais elle est effective et, en cette matière comme en toute autre, le temps a
fait son oeuvre; et sur la base de ce raisonnement, elle estime qu'elle pouvait reconnaître la présence
indonésienne. A l'appui de leur thèse respective, les deux Parties invoquent les résolutions des
Nations Unies et le professeur Bowett va montrer que les divergences de vues en ce qui concerne leur
signification et leur portée juridiques sont réelles et profondes. On voit mal dans ces conditions,
comment la Cour, «dont la mission est de régler conformément au droit international les différends
qui lui sont soumis», pourrait s'acquitter de ses fonctions judiciaires en tenant pour une «donnée»
l'interprétation du seul Portugal. Ce faisant, elle ne réglerait pas le différend qui lui est soumis et, en
tout état de cause, elle porterait, implicitement mais nécessairement, un jugement sur les intérêts
juridiques directs d'un Etat tiers à l'instance.
21. Que les résolutions sur lesquelles s'opposent les Parties soient pertinentes pour trancher le
différend que le Portugal à soumis à la Cour, cela ne fait aucun doute. Mais qu'elles puissent, à elles
seules, tenir lieu de solution, c'est une toute autre affaire.
L'Australie ne dit évidemment pas que les résolutions invoquées par le Portugal ne sont
d'aucun secours pour qualifier la situation juridique qui nous intéresse; elles sont pertinentes; elles
sont même l'un des éléments importants d'appréciation à prendre en considération; mais elles ne
sauraient tenir lieu de décisions judiciaires.
- 22 -
Faut-il rappeler, par exemple, que dans l'affaire de la Namibie, dont le Portugal fait si grand
cas (CR 95/4, p. 27-28), la Cour s'est fondée d'une part sur sa propre appréciation des faits et,
d'autre part, sur les résolutions de l'Assemblée générale et du Conseil de sécurité, mais en précisant
bien que la situation avait été valablement déclarée illégale - «valablement», ceci est une
appréciation propre de la Cour (Namibie (Sud-Ouest africain), C.I.J. Recueil 1971, p. 57). Il en va
de même ici : pour qualifier la situation créée par l'Indonésie, la Cour devrait, bien sûr, tenir le plus
grand compte des positions prises par les organes des Nations Unies mais, aussi importantes soientelles,
ce ne serait que des éléments qui ne la dispenseraient nullement de procéder elle-même à sa
propre qualification juridique, dans le cadre de ses fonctions judiciaires.
D'autant plus, Monsieur le Président, que le Portugal fait fausse route dans l'utilisation qu'il
fait de ce que l'on pourrait appeler «l'autorité de chose décidée». D'une part, comme la res judicata,
le principe ne saurait s'appliquer qu'aux Etats en litige et dans l'affaire qui les oppose; or les
résolutions invoquées par le Portugal portent sur le différend qui oppose le Portugal à l'Indonésie,
pas à l'Australie, ce qui entraîne leur inopposabilité à ce dernier pays quand bien même il se serait
agi de «décisions» - caractère dont, comme l'expliquera le professeur Bowett, elles sont, en tout état
de cause, dépourvues... A ce premier point de vue, ce ne sont pas des «données» dans la présente
affaire. Si, pour prendre un exemple, une décision, tranchant un litige entre A et B, établit que A
n'est pas propriétaire de tel bien, cette décision ne s'impose pas automatiquement comme une donnée
à l'égard de C, qui est toujours libre de faire valoir à l'égard de A comme de B de nouveaux
arguments. La res decisa ne saurait avoir des effets plus étendus et absolus que la res judicata ! Et
le Portugal s'est montré suffisamment anxieux, la semaine dernière, de voir reconnaître le caractère
relatif de la chose jugée (voir CR 95/5, p. 53 ou 63; CR 95/6, p. 12 ou 24, etc.) pour pouvoir
difficilement contester ceci...
22. D'autre part, le raisonnement du Portugal escamote complètement le facteur temps. Même
si l'on admettait que le Conseil de sécurité ou l'Assemblée générale avaient pu décider la
qualification juridique de certains faits et situations en 1975, la Cour ne se trouverait pas, pour
autant, dispensée d'apprécier la valeur de cette prétendue «donnée» vingt ans plus tard. Pour
- 23 -
reprendre notre exemple, il se peut parfaitement que A ne soit pas le propriétaire légitime du bien
contesté en 1975 et qu'il le soit devenu en 1989 ou en 1995. Même les «données» évoluent...
Il en est d'autant plus certainement ainsi que, comme l'Australie le montrera plus en détail
lorsqu'elle abordera le fond de l'affaire, la situation qui a considérablement évolué depuis 1975 s'était
profondément transformée en 1989 à la date de la signature de l'accord australo-indonésien. Selon
certains Etats, les plus proches voisins de l'Indonésie, les plus directement concernés, la population
du Timor oriental a exercé son droit à disposer d'elle-même après 1975. Selon d'autres Etats, les
Etats-Unis notamment, on ne peut parler d'autodétermination, mais ils reconnaissent que le contrôle
de l'Indonésie sur ce territoire est effectif et permanent, ce qui, bien sûr, a des conséquences
juridiques majeures. Nombre d'autres Etats - au moins vingt - ont signé avec l'Indonésie des traités
qui impliquent de leur part la reconnaissance du fait que le Timor oriental est indonésien. Surtout, le
Conseil de sécurité ne s'est plus prononcé sur la question depuis 1976 et l'Assemblée générale depuis
1982.
Monsieur le Président, les résolutions des Nations Unies peuvent difficilement être tenues pour
indéfiniment valides à l'image d'une loi adoptée par un parlement national (et je ne suis même pas sûr
qu'une loi nationale le soit). Il en est ainsi a fortiori si les résolutions s'appliquent à des situations
particulières elles-mêmes évolutives et changeantes. S'il en allait autrement, on s'expliquerait mal
l'adoption répétitive constante, souvent dans les mêmes termes, de résolutions portant sur le même
sujet. Or, je le répète, dans notre affaire, plus de résolution du Conseil depuis dix-neuf ans, plus non
plus de l'Assemblée générale depuis treize ans... Quoi qu'en aie pu dire le professeur Higgins, ce
n'est pas un problème d'ordre du jour (CR 96/5 p. 20) : la pratique est clairement contraire et si un
reproche doit être adressé à l'Assemblée des Nations Unies c'est certainement plus de répéter à l'infini
les même litanies que de chercher à faire des économies de papier !
Je sais bien que, selon le Portugal, tout ce qui a pu se passer - ou ne pas se passer - depuis
1975 n'a pas modifié la situation juridique. L'Australie soutient le contraire. Peu importe en ce qui
concerne le point qui nous occupe. Le fait est que la Cour ne pourrait trancher le différend qui lui
est soumis sans examiner préalablement les arguments de l'une et l'autre Parties et quelle que soit sa
- 24 -
décision, celle-ci affecterait nécessairement les intérêts juridiques de l'Indonésie, dont la
responsabilité se trouverait, de ce fait, établie ou écartée et ceci à titre préalable.
23. Il y a autre chose, Monsieur le Président.
Mercredi dernier, le professeur Rosalyn Higgins a exposé, avec conviction et brio, la thèse du
Portugal en ce qui concerne la signification et la portée des résolutions des Nations Unies. Le
professeur Bowett lui répondra après-demain. Il y a cependant un élément de son analyse, et un
élément crucial, qui intéresse au plus haut point mon propos. Je souhaiterais le citer in extenso :
«The resolutions are clear. They require all United Nations members to respect
East Timor's right to self-determination and entitlement to its resources; to co-operate
in the achivement of that end; necessarily to deal with the Administering Authority
recognized by the United Nations; and to desist from dealing with Indonesia or any
other State as if it had sovereignty over East Timor and an entitlement to dispose of its
resources. Australia's failure to find these requirements in the terms of the resolutions
reminds one perhaps of the biblical proverb: «There are none so blind as those who do
not wish to see.»» (CR 95/4, p. 29.)
Je ne crois pas que nous soyons aveugles; mais il me semble que mon amie et adversaire fait
preuve, pour sa part, d'une certaine myopie. Les résolutions en question disent, en effet, que les
membres des Nations Unies doivent respecter les droits du peuple timorais - et l'Australie en est
d'accord. Il est probablement exact aussi que si un Etat ne respecte pas cette obligation, sa
responsabilité internationale pourrait se trouver engagée. Mais, entre ces deux propositions, il y a
une solution de continuité, un non sequitur, patents : indépendamment de la question de savoir à
l'égard de qui la responsabilité de l'Australie pourrait se trouver engagée, le Portugal ne nous dit pas,
concrètement, pourquoi elle le serait; quel fait internationalement illicite de l'Australie la
constituerait.
Mme Higgins tente de dissimuler le chaînon manquant par les deux propositions
intermédiaires : l'obligation de passer des traités avec le Portugal et de s'abstenir de le faire avec
l'Indonésie. Mais c'est un tour de passe-passe : les résolutions ne disent rien de tel; ceci ne fait
évidemment pas partie des «données» qu'invoque le Portugal; au mieux, ce sont des déductions
hardies qui, assurément, ne sauraient s'imposer à la Cour en tant que «faits», datums, givens. Il faut
aller plus loin; il faut, une fois encore, déchirer le voile des apparences dans lequel le Portugal tente
- 25 -
d'enfermer la Cour : quand bien même ces obligations existeraient en dehors de son imagination,
encore faudrait-il établir pourquoi et en quoi l'Australie les aurait violées et ce ne pourrait être que
parce qu'elle a traité avec l'Indonésie - l'Indonésie ce grand absent, l'Indonésie que, d'ailleurs, le
professeur Higgins a expressément mentionnée dans le passage que j'ai cité - peut-être par lapsus - à
moins que ce ne soit par honnêteté intellectuelle, ce que j'aurais plutôt tendance à penser...
24. Monsieur le Président, la première fonction d'une juridiction est de dire le droit sur la base
des faits qui lui sont présentés. Elle ne peut pas considérer comme des «données» des positions
politiques prises par des organes politiques dans un contexte entièrement différent et qui, en tout état
de cause, ne portaient pas sur le différend qui lui est soumis. En prétendant empêcher la Cour de se
prononcer sur le bien-fondé et la portée de ces soi-disant «données», le Portugal tente à la fois de
convaincre la Cour de se reconnaître compétente et de la dissuader de s'acquitter de ses fonctions
judiciaires. C'est beaucoup lui demander à la fois. Il ne peut être suivi sur ce terrain, pas davantage
qu'il peut l'être lorsqu'il introduit des distinctions, artificielles et «non opérationnelles» en l'espèce,
entre droits erga omnes et droits erga singulum.
Et ce sera mon troisième point.
c) Le Portugal introduit des distinctions, artificielles et
"non-opérationnelles" en l'espèce, entre obligations
et droits erga omnes et obligations et droits erga singulum
25. Monsieur le Président, le Portugal sait que le voile de la «non-méconnaissance» ne peut
dissimuler la nudité de l'argument fondé en fait sur la reconnaissance de la présence indonésienne. Il
est bien conscient que les résolutions des Nations Unies, pour respectables qu'elles soient, ne sont
pas des «données» irréfragables devant l'«organe judiciaire principal» de l'Organisation, mais des
éléments d'appréciation. Mais il croit avoir trouvé l'atout-maître, la «botte», dans une distinction
entre droits erga omnes et droits erga singulum - il dit : «erga singulos» ... Mais il ne suffit pas de
dire «sésame» ... pour que votre prétoire s'ouvre; la clé est ailleurs : elle est dans le principe du
consentement à la juridiction avec lequel la théorie des droits erga omnes n'a aucune espèce de
rapport. Même si elle est fort artificielle, cette distinction est, sans doute, intéressante en elle-même,
mais elle n'est absolument pas «opérationnelle» en la présente occurrence.
- 26 -
26. Dans sa réplique - car, si j'ai bien lu, il ne dit rien de tel dans le mémoire - le Portugal
allègue que «les qualités juridiques et les droits [qu'il] fait valoir en l'espèce sont des qualités et des
droits erga omnes» (réplique du Portugal, p. 204, par. 7.07, p. 206, titre C) et c'est, nous a dit Me
Galvão Teles, ce qui expliquerait «l'autonomie suffisante» du différend entre l'Australie et le
Portugal par rapport à celui qui oppose ce dernier à l'Indonésie (CR 95/2, p. 62). J'avoue mal
comprendre pourquoi et les «explications» données sur ce point dans la répplique n'ont fait
qu'accroître ma perplexité :
De manière un peu obscure - c'est une litote -, le Portugal explique :
«de par la nature même du droit erga omnes, chacun est, isolément, tenu de le
respecter. Par conséquent, celui qui prétend être le titulaire d'un droit erga omnes peut
le faire valoir contre quiconque le dénie ou le conteste, le met en cause ou le viole, ce
qui est en l'occurrence le cas de l'Australie. La contestation ou la violation du droit erga
omnes par un Etat déterminé individualise ce dernier parmi tous les obligés et justifie le
titulaire de ce droit de lui en demander le respect. Quiconque aurait, selon le
demandeur, agi ainsi est partie suffisante. Le demandeur peut adresser la demande
contre plusieurs personnes, s'il a un intérêt légitime et s'il le veut. On se trouve dans le
domaine de la liberté que possède le demandeur de choisir le ou les défendeurs. De par
la nature même du droit erga omnes, l'autorité de chose jugée par rapport à quiconque
le dénie ou le conteste, le met en cause ou le viole, est utile et a du sens,
indépendamment de l'autorité de chose jugée par rapport à d'autres.» (Réplique du
Portugal, p. 208, par. 7.14.)
Ce n'est pas vraiment limpide - mais enfin on pouvait penser que le Portugal faisait, sans le
citer, référence au célèbre dictum de la Cour dans son arrêt de 1970 rendu dans l'affaire de la
Barcelona Traction, selon lequel une «distinction essentielle» doit
«être établie entre les obligations des Etats envers la communauté internationale dans
son ensemble et celles qui naissent vis-à-vis d'un autre Etat dans le cadre de la
protection diplomatique. Par leur nature même, les premières concernent tous les Etats.
Vu l'importance des droits en cause, tous les Etats peuvent être considérés comme ayant
un intérêt juridique à ce que ces droits soient protégés; les obligations dont il s'agit sont
des obligations erga omnes.» (C.I.J. Recueil 1970, p. 32.)
La Cour parlait d'obligations; le Portugal, lui, parle de droits erga omnes.
Il semble attacher une certaine importance à la distinction puisque par la voix de Me Galvão
Teles, il insiste : ce sont là «des droits, pas des obligations, il s'agit de droits» (CR 95/5, p. 51).
Certes, certes ... mais je ne vois toujours pas ce que cela change à la problématique : qu'il s'agisse de
droits ou d'obligations la distinction n'a aucun impact sur la compétence de la Cour.
- 27 -
27. De la position prise par cette dernière en 1970, il résulte que tout Etat pourrait introduire
une requête contre un autre Etat responsable, par exemple d'un acte d'agression ou du crime de
génocide - à condition, bien sûr, qu'existe, entre les parties, un lien de juridiction.
Car, et c'est là surtout que le bât blesse, la théorie des obligations (ou des droits) erga omnes
n'a strictement rien à voir avec la règle du consentement à la juridiction, telle qu'elle est posée dans le
Statut et que la Cour n'a assurément pas entendu remettre en cause en 1970. Tout ce que la Cour a
voulu dire - elle l'a, d'ailleurs, dit fort clairement - est que tous les membres de la communauté
internationale ont intérêt à ce que certaines règles d'importance essentielle soient respectées. La
notion d'«Etat lésé» au sens de l'article 5 de la deuxième partie du projet d'articles de la Commission
du droit international sur la responsabilité des Etats, s'en trouve sans doute étendue d'autant; mais
rien de plus. Du reste, et au surplus, cet intérêt que tous les membres de la communauté
internationale peuvent avoir au respect de tels droits ou obligations n'a pas non plus d'effet sur le
locus standi devant la Cour; c'est, de toute façon, un autre problème.
Si la distinction entre recevabilité et compétence a un sens, c'est certainement l'une des rares
hypothèses où elle trouve à s'appliquer : l'invocation de la violation d'une obligation ou d'un droit
erga omnes pourrait peut-être, dans certains cas, justifier la recevabilité d'une requête; encore
faudrait-il que la Cour soit compétente et elle ne l'est pas pour se prononcer sur les intérêts juridiques
d'une partie qui n'est pas présente à l'instance.
On voit mal en quoi le glissement de la notion d'obligations à celle de droits erga omnes
modifierait les choses à cet égard. Le Statut est ce qu'il est. Peut-être serait-il bon de le modifier et
l'article 69 le permet. Mais aussi longtemps qu'un amendement, qui serait à vrai dire d'immense
portée, ne sera pas intervenu dans le sens de la juridiction universelle de la Cour, force est d'accepter
comme on l'a dit «la rude réalité du consentement des Etats» à sa compétence; il y a là une «limite
structurelle» à sa juridiction (M. Bedjaoui, op.cit., p. 121).
28. La nature, prétendument "erga omnes" des droits et qualités dont se prévaut le Portugal ne
saurait donc remettre en cause le principe cardinal du consentement à la juridiction, dont la règle
appliquée par la Cour dans l'affaire de l'Or monétaire est une illustration.
- 28 -
Du reste, l'arrêt du 15 juin 1954 ne comporte pas le moindre passage, la moindre allusion, qui
pourrait laisser entendre que ce principe est limité aux différends portant sur des droits erga
singulum. On peut même se demander si le sort réservé à la seconde demande de l'Italie dans cette
affaire, n'indique pas, au contraire, que la Cour estimait que, déjà, les droits de l'Albanie étaient erga
omnes. En effet, après avoir constaté qu'«à la différence de la première», cette seconde demande
«pourrait paraître concerner uniquement l'Italie et le Royaume-Uni» (C.I.J. Recueil 1954, p. 33), la
Cour a estimé qu'elle devait également s'abstenir de se prononcer sur celle-ci afin de préserver les
droits de l'Albanie.
Quoi qu'il en soit, par la suite, dans aucune des affaires ultérieures dans lesquelles le problème
de l'application du principe de l'Or monétaire se posait, la Cour n'a écarté l'argument en se fondant
sur la nature erga omnes des obligations ou des droits prétendument violés. Or,
1) ces affaires sont postérieures au dictum de la Cour de 1970;
et,
2) elles mettaient en cause certains droits ou obligations erga omnes. Ainsi, l'affaire des Activités
militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis
d'Amérique) portait, entre autres, sur l'obligation de ne pas utiliser la force contre l'intégrité
territoriale d'un autre Etat, une obligation erga omnes s'il en est - qui se traduisait par un droit
du Nicaragua, erga omnes lui aussi. De même, dans l'affaire relative à Certaines terres à
phosphates à Nauru (Nauru c. Australie), Nauru invoquait, comme le Portugal aujourd'hui,
une violation du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et du principe de la souveraineté
permanente sur les ressources naturelles. Or, ni l'arrêt de 1984, ni celui de 1992, ni les
opinions individuelles ou dissidentes qui y sont jointes - et elles sont pourtant fort
argumentées ! - ne donnent à penser que quiconque ait imaginé que le principe du
consentement à la juridiction peut être battu en brèche au prétexte, évidemment fallacieux, que
des règles erga omnes, voire des normes impératives, étaient en cause. Les deux concepts se
situent dans des plans totalement différents. La Cour a, bien sûr, le devoir impérieux de faire
respecter ces règles et ces normes, mais elle ne peut le faire que si sa compétence est établie.
- 29 -
29. Bien entendu, «Les droits erga omnes sont des droits opposables à tous et à chacun.» (CR
95/5, p. 52.) Mais, encore une fois, l'obstacle à la compétence de la Cour n'est pas là. Il tient,
comme je l'ai montré tout à l'heure, en ce que, pour établir que l'Australie aurait violé ces droits, le
Portugal doit montrer - et s'efforce en effet de montrer - à titre préalable, que l'Indonésie les a, ellemême
violés.
Dans l'affaire que le Portugal vous a soumise, la compétence de la Cour est d'autant moins
établie que - et on revient toujours à cela - si un Etat a violé les droits erga omnes invoqués, ce n'est
pas l'Australie. En tout cas, si la responsabilité de ce pays pouvait être mise en cause, ce ne pourrait
être que parce qu'il a reconnu une situation illicite créée par un Etat tiers. Mais pour qu'il en soit
ainsi, il est absolument nécessaire, indispensable, inéluctable, que la Cour s'assure que cette situation
est illicite; or cela elle ne peut le faire, sauf à se prononcer sur les intérêts juridiques de l'Indonésie.
Cette «relation de dépendance» (C.I.J. Recueil 1954, p. 33) exclut que la responsabilité éventuelle de
l'Australie soit «originaire» comme le prétend le Portugal (réplique du Portugal, p. 25, par. 2.20).
30. L'Australie pense être claire, Monsieur le Président. Elle ne dit pas que, si
responsabilité il y a, elle ne peut être qu'une responsabilité conjointe avec l'Indonésie. Elle affirme
que sa propre responsabilité éventuelle ne peut être démontrée que si celle de l'Indonésie l'est et elle
constate que lorsqu'il plaide sur le fond, c'est en effet ainsi que procède le Portugal :
1
er temps : l'Australie a «méconnu» les droits du Portugal - que ceux-ci soient erga omnes peu
importe, elle les aurait méconnus; pourquoi ?
2
e
temps : parce qu'elle a reconnu ceux de l'Indonésie - pourquoi est-ce illicite ?
3
e
temps : parce que l'Indonésie n'a pas de droits.
Si cette troisième proposition n'est pas exacte, tout l'édifice s'écroule; or le Portugal ne peut
pas démontrer le bien-fondé de cette troisième proposition.
31. Il nous a semblé que, lors des audiences de la semaine dernière, le Portugal amorçait une
retraite sur une autre position qui consisterait à plaider la complicité. Deux faits semblent
l'annoncer : d'abord les insinuations, inattendues et passablement déplaisantes, selon lesquelles
l'Australie aurait encouragé l'Indonésie à s'emparer du Timor oriental en 1974 et que l'agent et le
- 30 -
coagent de l'Australie ont, je crois, suffisamment réfutées quant au fond; ensuite la construction
juridique échafaudée par le professeur Dupuy, sur la base de l'article 27 de la première partie du
projet d'articles de la Commission du droit international sur la responsabilité des Etats.
Oh, je le reconnais bien volontiers : pour l'instant, il ne s'agit que d'une virtualité et, le conseil
du Portugal l'a bien dit, pour l'instant, l'Australie «n'est accusée d'aucune complicité» (CR 95/5,
p. 74); dont acte. Ce n'est pas une accusation, c'est une insinuation. L'argument n'en est pas moins
utilisé : s'il s'agissait de complicité - toujours la stratégie des «si» qu'affectionne le Portugal - le
principe de l'Or monétaire ne pourrait jouer. Ce n'est pas exact et, par prudence, je préfère tout de
suite indiquer pourquoi.
Il n'est d'ailleurs pas besoin de longues explications car l'article 27 parle de lui-même :
«L'aide ou l'assistance d'un Etat à un autre Etat, s'il est établi qu'elle est prêtée
pour la perpétration d'un fait internationalement illicite réalisé par ce dernier, constitue
elle aussi un fait internationalement illicite, même si, prise isolément, cette aide ou
assistance ne constituait pas la violation d'une obligation internationale.» (Les italiques
sont de nous.)
Les choses sont claires : l'illicéité du comportement du complice (qui, par lui-même, peut être
tout à fait licite) découle, résulte, est la conséquence, de la responsabilité originaire. Et le juge Ago,
qui était alors rapporteur spécial de la Commission l'expliquait on ne peut plus clairement lorsqu'il a
introduit cette disposition, dans son septième rapport, en 1978 :
«L'élément qui caractérise cette hypothèse est précisément le lien existant entre le
comportement concrètement adopté par un Etat [l'Etat complice] et le fait commis par
un autre Etat et dont l'illicéité serait par contre établie.» (Annuaire de la Commission
du droit international, 1978:II, première partie, p. 49-50, par. 52 — italiques
ajoutées).
Dès lors, quand bien même, pour les besoins de la discussion, on estimerait que, par les
comportements qui lui sont reprochés, l'Australie se serait rendue complice de l'Indonésie - ce que,
pour l'instant, le Portugal lui-même exclut -, sa responsabilité ne serait que consécutive et dérivée et
elle ne pourrait être mise en oeuvre que si, préalablement, celle, originaire, de l'Indonésie, pouvait
être établie. Elle ne le peut pas, Messieurs de la Cour; pas devant vous; pas dans l'état actuel du
droit international. Et, bien sûr, cela vaut, a fortiori, si l'Australie ne peut être accusée de
complicité, mais exclusivement d'avoir reconnu la situation créée par la seule Indonésie.
- 31 -
32. Monsieur le Président, avant d'en terminer pour ce matin, il est peut-être utile que je
récapitule les différents points que je pense avoir établis :
1) Il se peut qu'il existe une distinction entre obligations erga omnes et obligations erga
singulum, ou entre droits erga omnes et droits erga singulum; mais cette distinction ne
présente aucune pertinence en l'espèce, elle est sans incidence sur la compétence de la Cour,
ou, plutôt, son incompétence, pour connaître de la présente affaire.
2) Comme le professeur Bowett le montrera, ni le Conseil de sécurité, ni l'Assemblée générale,
n'ont pris de décisions qui soient opposables à l'Australie. Mais, quand bien même cela serait,
il ne saurait s'agir de «données» et le Portugal ne peut pas, par ce biais, priver la Cour de son
droit, plus même : de son devoir, d'exercer pleinement sa fonction judiciaire, et de s'assurer
que c'est bien lui et non l'Indonésie, qui exerce des droits souverains au Timor oriental. Cela
n'a rien d'impossible en soi, mais pour ce faire, la Cour devrait non seulement se prononcer
sur les intérêts juridiques de l'Indonésie, elle devrait même trancher le différend pendant entre
ce dernier pays et le Portugal, le seul différend réel en vérité.
car,
3) la présente affaire est totalement artificielle, comme il est totalement artificiel de reprocher à
l'Australie d'avoir «méconnu» les droits que le Portugal tiendrait de sa qualité de puissance
administrante quand, en réalité, c'est la reconnaissance de la présence indonésienne qui est en
cause. Mais, bien sûr, pour que cette reconnaissance puisse entraîner la responsabilité de
l'Australie, il faut, ici encore, que la Cour se prononce sur la nature juridique, la licéité ou
l'illicéité, de cette présence, c'est-à-dire qu'elle se prononce très directement, sur la
responsabilité éventuelle de l'Indonésie, dont celle de l'Australie ne pourrait être que la
conséquence. Le principe du consentement à votre juridiction l'exclut.
33. Sur deux points, Monsieur le Président, Messieurs les juges, le Portugal a raison.
En premier lieu, comme il le proclame, «à faits illicites distincts, responsabilités distinctes»
(réplique du Portugal, p. 219, par. 7.33 et CR 95/5, p. 73); «à chacun sa responsabilité» (ibid,
p. 224, par. 7.43 et CR 95/5, p. 66)... Mais justement, il n'est que trop apparent, hélas, que le
- 32 -
Portugal impute à l'Australie des responsabilités qui ne sont pas les siennes. Je soupçonne d'ailleurs
que la Partie portugaise a, sur les problèmes que j'ai abordés, des sentiments mêlés. Bien sûr, au plan
strictement juridique et procédural, il lui faut maintenir que ce qu'elle reproche à l'Australie ne
découle pas du comportement de l'Indonésie et n'a, avec celui-ci, aucune espèce de rapport. Mais,
d'un autre côté, il est clair que c'est ce pays que le Portugal cherche à atteindre et il y a fort à parier
que si, par impossible, vous vous prononciez sur le fond et lui donniez raison, il s'en prévaudrait
dans son combat contre l'Indonésie. Mais, Monsieur le Président, les intentions fussent-elles les plus
louables, ne suffisent pas; la fin ne justifie pas tous les moyens; et le Portugal ne peut utiliser
l'Australie comme une épée portée contre la cuirasse indonésienne, pas davantage qu'il ne peut, au
prétexte d'une respectable, même si un peu tardive, indignation, vous inviter à négliger une régle
fondamentale, la plus importante de votre Statut.
En second lieu, le Portugal a aussi raison d'estimer que «[l]e différend que la Cour doit
trancher est celui que le Portugal lui a soumis, pas un autre» (réplique du Portugal, p. 11, par. 2.01)
et que sa portée est définie par ses conclusions. Or, comme le professeur Crawford va le montrer
dans un instant, ces conclusions se ramènent à une seule : l'accord australo-indonésien n'est pas
valide - pardon; sa négociation, sa conclusion et sa mise en oeuvre ne seraient pas licites ! Prise sous
cet angle, la thèse du Portugal fait apparaître, plus crûment encore si c'est possible, que vous ne
pouvez vous prononcer sur la prétendue responsabilité de l'Australie sans trancher, préalablement, la
question de la responsabilité de l'Indonésie.
34. Un mot encore, Monsieur le Président : que nos contradicteurs ne viennent pas nous dire
que nous déformons leurs écrits ou leurs paroles. On peut solliciter les faits; il est plus difficile de
truquer les chiffres - et je souhaite, Messieurs les juges, en livrer quelques-uns à votre réflexion.
Ces statistiques portent sur l'utilisation du mot «Indonésie» ou «indonésien» dans les
plaidoiries, orales ou écrites, du Portugal. Ce mot tabou on le trouve
- soixante-sept fois dans le mémoire; ceci est significatif puisque cela veut dire qu'il apparaît en
moyenne toutes les trois pages environ;
- on le trouve deux cent soixante-cinq fois dans la réplique, la moyenne passant tout de même à une
- 33 -
fois par page;
- et l'inflation continue avec les plaidoiries orales où on le retrouve trois cent quinze fois - trois cent
quinze fois, cela veut dire qu'il a été prononcé, toujours en moyenne, soixante-trois fois par
session ou vingt-trois fois par heure... Et je vous fais grâce des mentions indirectes comme «l'Etat
tiers» ou «un Etat», qui alourdiraient encore le bilan.
Je dois dire que l'exercice de recensement auquel nous nous sommes livrés est un peu
fastidieux et nous vous prions de bien vouloir nous accorder une marge d'erreur de plus ou moins
2%; mais je vous garantis l'ordre de grandeur et tiens même à votre disposition, Monsieur le
Président, un décompte conseil par conseil, si vous le voulez.
Je concède aussi volontiers que l'on ne peut pas tirer de ces chiffres des conclusions
«scientifiques». Ils laissent tout de même rêveur : si le comportement de l'Indonésie était à ce point
indifférent à la solution du litige, serait-il légitime que l'Etat requérant mentionne ce pays six cent
quarante-sept fois en plaidoirie ? De deux choses l'une : ou bien cela est superflu et le procédé
montre que le Portugal utilise le forum de la Cour dans le seul but de s'adresser, par-dessus elle, à
l'opinion publique pour régler ses comptes avec l'Indonésie; ou bien c'est utile - mais cela montre
aussi à quel point celle-ci est, décidément, une partie nécessaire... Nécessaire et absente !
Monsieur le Président, Messieurs de la Cour, je vous remercie de votre patience et je vous
prie, Monsieur le Président, de bien vouloir donner la parole au professeur Crawford à moins que
vous ne décrétiez la pause. Je vous remercie, Monsieur le Président.
Le PRESIDENT : Je vous remercie, Monsieur le professeur. La Cour observera quinze
minutes de pause à présent.
L'audience est suspendue de 11 h 20 à 11 h 50.
- 43 -
The PRESIDENT: Please be seated. I give the floor to Professor Crawford.
Mr. CRAWFORD:
PORTUGAL'S ATTACK ON THE TREATY AS A GROUND OF INADMISSIBILITY
Mr. President, Members of the Court.
A. Introduction
1. In my opening speech on the inadmissibility of the present case, I emphasized that
Portugal's complaint related to "the negotiation and conclusion by Australia with a third State of an
agreement relating to the exploration and exploitation of the continental shelf in the area of the
'Timor Gap'", and to the subsequent steps to implement that agreement (Portuguese Application,
para 2; CR/2, p. 53, Galvão Teles; CR 95/7, pp. 66-67). This was not difficult to demonstrate: it
was only necessary to quote the relevant paragraphs of the Portuguese Application and the operative
paragraphs of its Submissions as reaffirmed last week. Portugal's complaint relates to the
negotiation, conclusion and initial implementation of the Treaty of 1989 with Indonesia.
2. Despite this, Portugal asserts throughout its written pleadings that it does not challenge the
validity of the Treaty as such, only the fact that Australia has concluded it. For example, in its
Memorial Portugal states that "the present proceedings do not concern the question of the validity of
the 'Agreement'" (PM, para. 3.06), and it goes on to draw a distinction between "validity" and
"lawfulness", or licéité in a number of languages.
- 44 -
3. Similarly in its Reply it states that:
"Nowhere, either in the Application or in the Memorial, does Portugal request the
Court to declare the 'Agreement' invalid. The Portuguese Republic does not state that
the 'Agreement' is valid, nor that it is invalid; the question of its validity is quite simply
outside the scope of these proceedings. The subject of the dispute is entirely
different..." (PR, para. 2.15; see also PR, paras. 2.11, 7.19.)
4. And a number of statements were made last week to similar effect. Professor Dupuy, for
example, insisted that:
"l'objet du litige n'est pas un traité. C'est une conduite unilatérale d'un Etat consistant à
ouvrir des négotiations, à les poursuivre, et à les faire aboutir avec un autre Etat, en
méconnaissance des droits du peuple du Timor et de ceux de sa puissance
administrante." (CR 95/6, p. 22; see also, e.g., CR 95/6, p. 38, Galvão Teles.)
In short, Portugal has consistently denied that this case concerns the validity of the Treaty. And
consistency, as any French schoolchild will tell you in between games of le chat perché, is a virtue.
5. Thus at one level of the case, the question is rather straightforward: whether this distinction
between Australia's conduct in entering into the Treaty and the validity of the Treaty as such can be
sustained, and if not, whether this affects the admissibility of Portugal's case under the Monetary
Gold principle. It is this question - the admissibility of a case directed at the negotiation, conclusion
and implementation of a Treaty which nonetheless the Applicant State purports not to challenge, or
to make "l'objet du litige" - which I must now address.
- 45 -
B. The Issue of the Validity or Otherwise of the Treaty: The Consistency
of the Portuguese Position
Mr. President, Members of the Court.
6. If consistency is a virtue, it is one purchased at the price of variety. One hears from time to
time complaints from former members of this Court about the tendency of counsel to repeat the same
thing endlessly. It must be very tiring, but on the other hand it does have the virtue that one knows
where one is, perhaps only too well. On the other hand it is unsettling to have to meet at the same
time a number of different and mutually conflicting claims. For example last week we were told that
Australia had connived at the Indonesian invasion and its genocidal acts as part of a deliberate policy
aiming at the conclusion of the 1989 Treaty (see e.g., CR 95/2, pp. 28-30). Professor Dupuy later
assured us that this was not the case; no allegation of complicity was made (CR 95/5, p. 70). But
unfortunately the allegation had been made; no doubt some further clarification or, conceivably, a
third version, may be offered next week.
7. And this inconsistency directly affects the part of the Portuguese case it is now my
obligation to deal with, that is to say, the distinction between the conclusion of the Treaty (which is
attacked) and its validity (which is not attacked). There are a number of conflicting sources here.
8. The first such conflicting source is Portugal speaking in what - if the Court will forgive me
- I will call the real world. I do not mean to say that the Court is not part of the real world, merely
that this case bears only a remote relationship to that world, and it is Portugal which is responsible
for the formulation of the case. The case could so easily have been brought in a way which directly
challenged Indonesia over East Timor, for example by way of an advisory opinion. Or Portugal
could have sought, at any time, from the General Assembly or Security Council a statement or
declaration of the illegality of Indonesian presence and a consequent recommendation or even
requirement of non-recognition. As in Namibia, the Court would without difficulty have drawn the
necessary conclusions. But Portugal chose instead to take advantage of the optional clause system to
attack a third State.
9. By contrast, when in the real world Portugal sought to complain about the process of
- 46 -
negotiation with a view to conclusion of the Treaty, it did not complain about Australia's conduct but
about Indonesia's, and it did not make the distinction between lawfulness and validity. In a letter of
9 November 1988 to the Chairman of the Committee of 24, Portugal said:
"the Government of Indonesia lacks the legitimacy to undertake commitments regarding
a territory which it occupied illegally ... and which is under the responsibility of
Portugal in its capacity as Administering Power" (A/AC.109/981; PM, Annex III.17).
In the real world it is Indonesia which is complained of, and in terms which clearly entail the
invalidity of any commitments made, because Indonesia lacked capacity to make them. An illegal
occupant cannot enter into agreements for the exploitation of the natural resources of a territory
illegally occupied. But Portugal did nothing to bring its complaint before the Security Council or the
General Assembly. All it did was write a letter to the Chairman of the Committee of 24,
complaining that Indonesia lacked the legitimate capacity to make this Treaty.
10. And in the real world the fact is that the Portuguese complaint about Indonesia was met
with ... silence. So Portugal comes to this Court to complain about ... Australia. And now it does
not, it says, challenge the validity of the Treaty.
11. But - and this is the second source of doubt about Portugal's position - its not challenging
the validity of the Treaty takes a curious typographical form. The word "Accord" appears —
unfortunately I haven't had time to count the number of times — throughout the Portuguese written
pleadings in inverted commas. Thus Portugal says that it does not "request the Court to declare the
'Agreement' invalid" (PR, para. 2.15). So far as typography can make it that statement is on its face
untrue. It is a curious way of not challenging the validity of a Treaty to put it in inverted commas
throughout, yet this is what Portugal consistently does. I note, however, that Portugal cannot quite
face up in its Submissions to this fact, where alone in all of the written pleadings the inverted
commas are not used - after all Portugal does not formally ask the Court actually to declare the
Treaty invalid, or even to put it in inverted commas! But the question is not one of form.
12. The third source of doubt about Portugal's position derives from what was said by some of
its counsel last week. It is true that certain counsel - Professor Dupuy, for example - held to the line.
According to him, no issue of jus cogens arose, it was a matter for the Court to decide whether it
- 47 -
was opportun for the Court to deal with that issue (CR 95/3, p 33). All was cautiousness and
indirection.
13. Professor Higgins would have none of that. With her, all was vigour and directness. The
position was perfectly clear:
"Self-determination [she said] is a norm of jus cogens, which knows of no statute
of limitations and which falls exactly into the category of events to which the principle
of ex injuria jus non oritur applies, thus rendering legally irrelevant any effectivités."
(CR 95/5, p. 26.)
And by the same token, thus rendering legally invalid any treaty.
14. The point is a serious one. In its written arguments, Portugal clearly refrains from
challenging the terms of the Treaty. It proceeds on the basis that such a treaty could have been
concluded by it as Administering Power - even if the treaty made no express provision for any
benefits to flow to the people of East Timor. According to its written pleadings, it was not the terms
of the Treaty which mattered to Portugal but the fact that the Treaty was made with a State other
than Portugal.
15. The position now is less clear. The Treaty is described as a plunder of the natural
resources of East Timor (CR 95/2, pp. 37, 38, 45, Correia). Portugal now categorically denies that
it would have contemplated entering into such a treaty on these terms as the State responsible for
administering East Timor (CR 95/2, p. 33, Correia). Australia's conduct of entering into the Treaty
is roundly categorized as a breach of jus cogens (CR 95/5, p. 26, Higgins).
16. Faced with these different voices, it seems best to consider first what the position would be
on the assumption - last week, partly substantiated - that Portugal's case does involve a direct and
avowed attack on the Treaty. Would such an attack, by a third party to the Treaty such as Portugal,
raise Monetary Gold problems? It is only if the answer is yes that it is necessary to consider the
various indirections and equivocations employed by Portugal in its written pleadings and by others of
its counsel in the first oral phase to avoid challenging the Treaty. If the high road taken by
Professor Higgins leads direct to a successful assault on the Treaty, then the Court can bypass
Professor Dupuy's long and winding road to its back door with a certain sense of relief.
- 48 -
17. Unfortunately, Mr. President, Members of the Court, that sense of relief is bound to be
short-lived. Because, whatever consistency there may or may not have been between counsel for
Portugal on such matters as whether it is alleging Australian complicity with Indonesia in 1975, or
on the need to refer to the jus cogens status of self-determination, or on the extent of the continental
shelf that could not possibly appertain to Australia, there was complete consistency on one point.
Portugal consistently denies that this case has anything to do with the illegality or otherwise of
Indonesia's use of force. It rests its case exclusively on self-determination and associated principles.
18. Now this position is of significance for a number of different reasons. I will revert to it
tomorrow so far as it bears on the relationship between recognition and self-determination. It is also
central to the issues of judicial propriety in this case, as will be pointed out. But the point at present
is simply this.
19. If Portugal had relied on Indonesia's use of force, this would have involved intolerable
conflict with the Monetary Gold principle. If the reason for Australia's illegality was the unlawful
use of force by Indonesia, it would on any view first be necessary to determine that that use of force
was unlawful, and that that unlawfulness continued to be an operative factor in 1989. Portugal
obviously accepts that and so it simply chooses to set the issue on one side (see PR, paras. 2.19,
2.20, 5.79, 6.30, 7.28, 9.02; CR 95/2, pp. 57, 68, Galvão Teles; CR 95/5, pp. 68 and 70, Dupuy).
Thus although I have compared Professor Higgins's approach to the Treaty issue with a cavalry
attack over a hill, she may be thought to have mounted a steed with less than the potentially available
number of legs. What might have given the appearance of a charge turns out to be a limp - and this
for implicit but evident reasons of admissibility.
C. The Application of Monetary Gold to an Attack on the Validity of the Treaty
Mr. President, Members of the Court:
20. Despite this difficulty, it is useful to look at the case on the assumption that Professor
Higgins is right and that the validity of the Treaty is impugned. And doing this does have one
important advantage. It corresponds to the reality of the matter. The truth is that the validity of the
- 49 -
Treaty is directly impugned. Portugal's deep reluctance in its written pleadings to acknowledge this
is testimony to the fatal procedural difficulty that such a challenge involves.
21. My first point then is a simple one. Given the nature of the illegality relied on, its basis in
the Charter, its erga omnes character, its possible jus cogens character, it cannot be the case that
only one State entered into this Treaty unlawfully. Moreover, this is a bilateral Treaty. An attack
on these grounds on the participation of one State in a bilateral treaty is at the same time, by logical
necessity, an attack on the Treaty as such. And an attack on the Treaty as such is an attack on the
right of Indonesia to be a party to the negotiations, to enter into the Treaty, to have it performed.
There is no question here of implications, or of possible consequences. If the Treaty is invalid, then
the determination that it is invalid is itself, by logical necessity, a determination that Indonesia has
not a certain right or power. There is no question here, as I showed yesterday there was in Nauru, of
the third party possibly having a separate defence, of the third party being able to rely on separate
arguments which the Court does not need to decide (see CR 97/7, pp. 70-71, with references to the
earlier pleadings). In the present context, there is no room for the idea of relative invalidity, or of
non-opposability. If the Treaty is invalid, Indonesia's rights are ipso jure affected. The link is "not
purely temporal but also logical" (I.C.J. Reports 1992, p. 261, para. 55).
22. Moreover, if the Treaty is invalid on this ground, it is because it is unlawful. It is not as a
general matter unlawful to perform an invalid act; administrators often perform invalid acts, acts
lacking a certain legal effect, without committing illegalities, let alone being suspected of crimes.
But in the realm of jus cogens, treaties are void because they are materially unlawful; unlawful in
the most fundamental way.
23. This leads to a second point. Portugal asserts that it does not challenge the right of
Indonesia to conclude the Treaty. But how otherwise could it challenge Australia's right?
Australia's sovereignty over its coast opposite to East Timor is unchallenged. Its legal interest in the
area in question cannot be denied. Under normal circumstances a third State is entitled to rely on the
State controlling a given territory to represent that territory, that is, to decide whether any given
transaction is or is not in the interests of the territory and people concerned. There is no independent
- 50 -
obligation on a third State to investigate this issue, and this is the case even in the context of
non-self-governing territories. The fact is that States administering such territories have frequently
concluded arrangements relating to their natural resources, including maritime delimitation
agreements, and it has not been suggested that these agreements are unlawful, in particular in
proceedings brought against the other party to them. The world is littered with colonial boundaries
preserved under the uti possidetis principle; apparently, according to Portugal, these boundaries are
imprescriptibly invalid if they trench on rights a colonial people arguably had before they were
concluded. The Court might like to ask itself whether it would have made a difference in the
Libya/Chad case (I.C.J. Reports 1994, p. 5) if the 1955 Treaty had been made between Italy and
France before Libya's independence? The answer must be that it would not have made a difference -
yet that the two situations are different in principle is the implication of Portugal's argument now.
24. Nor does the principle of uti possidetis apply only to boundaries concluded before 1945,
when the principle of self-determination made its first and admittedly hesitant appearance as a
principle of general international law in Articles 1 and 55 of the Charter. The Tribunal in GuineaBissau/Senegal
conceded the capacity of a colonial power to make maritime boundary agreements
on behalf of a Chapter XI territory, provided the level of resistance to that power had not reached a
certain point (see (1989) 83 ILR 1, paras. 49-50). Mr. Burmester will return to that issue later.
25. The Portuguese argument necessarily assumes that a third State is under an independent
responsibility, apparently identical in principle to that imposed on an administering State, to
safeguard the rights of the dependent people in question. There is no shred of evidence for that
proposition. If the third party was itself administering a Chapter XI territory, so that the agreement
was between two States, both of them administering such a territory, there would be a curious
combination of conflicts of interest; each State would be under an obligation to safeguard the rights
of the people of the other party, which might be thought to disqualify both of them from negotiating
at all!
26. The fact is that Australia never assumed "responsibilities for the administration of" East
Timor under Chapter XI of the Charter. It is worth pointing out that Chapter XI of the Charter is
- 51 -
entitled "Declaration regarding Non-Self-Governing Territories", and it is a Declaration, of course a
legal Declaration, which States having or assuming those responsibilities are taken to make in
becoming Members. In terms it says nothing at all about the responsibility of other States, and
although Australia does not deny that other States do have responsibilities of a general character,
there is no basis at all in the Charter or in the subsequent development of general international law
for equating the position of third States to the responsibilities of a State administering a Chapter XI
territory. There may be a minimum common responsibility; but in principle the responsibilities are
highly differentiated.
27. But on the other hand Australia certainly had rights and responsibilities for the
government of its own territory and the preservation of its own natural resources. Prima facie it had
the right to enter into an agreement relating to maritime resources bona fide claimed by it.
28. Now, in order to displace that presumption, Portugal has to show that the circumstances in
1989, when the Treaty was concluded, were such that its conclusion was an unlawful act for
Australia, and it has to do so without any reliance on the unlawful conduct or legal incapacity of
Indonesia, without any requirement that the Court make a finding to that effect. But if, by 1989,
Indonesia's presence in East Timor was not unlawful, then Australia could rely on Indonesia to
represent the people of East Timor in the normal way, and this is entirely unaffected by the continued
existence of a right of self-determination of the East Timorese people or by the classification of East
Timor as a non-self-governing territory. Thus in order to show that Australia's conduct was
unlawful, it is necessary to attack the legality of Indonesia's presence, its legal right, power or
capacity to represent the territory and in particular to conclude the 1989 Treaty.
29. In particular, in order to decide in favour of Portugal's claims, it is necessary to determine:
(1) that Indonesia's control over and administration of East Timor in 1989 was unlawful; and
(2) that in consequence Indonesia had no right, power or capacity to conclude the 1989 Treaty.
In both respects this directly triggers the Monetary Gold principle, the principle of
inadmissibility.
30. I refer to and, the Court will be pleased to hear, will not repeat, my analysis yesterday of
- 52 -
the relevant case-law (CR 95/7, pp 69-73). Professor Dupuy said that the fact of treaty-making
between A and C might be an unlawful act by A against B (CR 95/6, p. 21), and this may be
accepted. But it does not avoid inadmissibility under the Monetary Gold principle, as it was
explained by the Court in Nauru. That principle applies if, in order to determine whether A's
conduct is unlawful against B, it is necessary to make a finding against C. And that is the case here.
31. The point can be clearly seen from Mr. Galvão Teles' reliance on the 1916 decision of the
Central American Court of Justice in the case of Costa Rica v. Nicaragua ((1917) 11 AJIL 201).
"Un précédent utile", he described it (CR 95/6, p. 37). In that case, Nicaragua had agreed not to
make a treaty of a particular character with any third State, but it subsequently did make an
agreement of such a character with the United States. The United States, for its part, was entirely
free to make that agreement. The Court was able to determine that the making of the agreement by
Nicaragua with the United States was an unlawful act by Nicaragua vis-à-vis Costa Rica, but it
rightly refused to determine the validity of the agreement with the United States, on the ground that it
had no jurisdiction over the latter. The case is of course entirely distinguishable from the present
one: all that it was necessary for the Court to do there was to determine a fact - that Nicaragua had
made a certain agreement - one of a kind which it had expressly agreed with Costa Rica not to make.
The only thing the Court had to do vis-à-vis a third State was to make a factual determination, and
this in relation to a matter where there was no inference whatever of wrongdoing, illegality or
responsibility on the part of the third State, the United States. In fact, from the United States point
of view entering into the treaty with Nicaragua was a perfectly lawful act.
32. By contrast in the present case, Australia as a coastal State was prima facie entitled to
enter into a treaty in relation to continental shelf resources claimed by it, and there was (as Professor
Bowett will show) no authoritative United Nations resolution which removed or curtailed that right -
indeed, there was no United Nations resolution to that effect even of a recommendatory character. In
those circumstances, Portugal cannot rebut the presumption of validity, cannot show that Australia
was not entitled to make the Treaty, without first showing Indonesia's lack of entitlement. By the
same token the Court will have to make findings on that matter. And those findings, which would be
- 53 -
made under a norm binding all States emanating from the Charter and having special and specific
reference to States actually controlling a self-determination territory, those findings would inevitably,
logically, entail the invalidity of the Treaty itself.
33. The same point may be made in relation to the "plundering" of natural resources (cf. CR
95/2, pp. 37, 38, 45, Correia). One cannot plunder one's own resources, and the Court has no power
in these proceedings to determine who, as between Australia and Indonesia, two claimant States, the
resources belong to - any more than it had the capacity to determine who, as between Italy and
Albania, was entitled to the resources at stake in that case. Nor is it in any better position to
determine as between Portugal and Indonesia, two claimant States, who is entitled to the resources.
The absence of Indonesia is in each case fatal.
34. Counsel for Portugal made considerable play with the tripoint cases, where the Court was
prepared to determine a maritime or land boundary line between States parties to a case,
notwithstanding that the terminal point of that line might be a tripoint, affecting the territory of a
third State not a party to the case (see CR 95/6, pp. 10, 15-16, 18-19, 25-6, Dupuy; id., 36-9,
Galvão Teles). But in none of those cases was it necessary to determine the legal rights or status, the
legal capacity or lack of capacity, the illegal presence or occupation of the third State. It was simply
that the line determined by the Court by reference to legal considerations arising between the parties
was assumed to meet with the boundary of the third State at a particular point. The fixing of that
point was not opposable to the third State; its location was merely an implication of the decision.
Whether the tripoint was in truth located at that point remained to be determined, by negotiation or in
proceedings to which the third State was a party.
35. The same is true of the Nicaraguan intervention in the Land, Island and Maritime
Frontier Dispute case (I.C.J. Reports 1990, p. 92). The Court rejected Nicaragua's argument based
on Monetary Gold, not because of the size of the gulf (CR 95/6, p. 25, Dupuy) - a consideration it
may have regarded as de minimis - but because the issue it had to decide did not require it to make
any finding as to the legal rights, responsibility or status of Nicaragua, but was a mere implication.
36. The point underlying these territorial and boundary cases is essentially this. The Court
- 54 -
can deal with boundaries on a bilateral basis by virtue of the inherent non-opposability of any
boundary line or point to any third State. If it could not do so it would have to refrain from deciding
such cases altogether, whenever the potential interests of the third State might be involved or,
alternatively, to set aside areas of potential conflict, at the risk of unduly benefiting third States.
37. But the position is different with a bilateral treaty. This is not the case of A having
promised B not to enter into a treaty with C. It is a case of A and C - Australia and Indonesia -
being under a general obligation - according to Professor Higgins, an obligation having a jus cogens
character - not to enter into a treaty at all. A decision that A acted unlawfully in such a case is a
decision that the treaty is unlawful and invalid. It cannot be the case that an obligation is
imprescriptible on the grounds of jus cogens but does not have the effect of invalidating a treaty
which conflicts with it. There is no logical space for "mere unlawfulness" not entailing invalidity.
There is no logical space for a Treaty between A and C which is invalid so far as A is concerned but
not so far as C is concerned.
38. Finally, Mr. President, I should mention a point made twice by Professor Dupuy. He
argued that this case was even weaker than Nauru, from the point of view of admissibility. His
reason was that:
"En la présente affaire, il n'existe en effet aucun lien équivalant à l'accord de
tutelle qui liait ... les trois Etats ... à l'égard de Nauru. On ne peut pas placer sur
le même pied l'accord de tutelle dans l'affaire de Nauru et l'accord de 1989... [L]'accord
de tutelle constituait un lien conventionnel opposable aux tiers, car pris dans le cadre du
droit des Nations Unies..." (CR 95/6, p. 21-22.)
39. At one level, at least, one can agree with this. The treaty link between the three States
constituting the Administering Authority of Nauru finds no analogy in the present case. Neither
under the 1989 Treaty nor otherwise had Australia accepted responsibilities for the administration of
East Timor, and it was not in a specific relationship of trust to the people of East Timor. Moreover
at the general level, there is a major difference of principle between the legal status and territorial
rights of the State administering a Chapter XI territory
- a non-self-governing-territory - and the administering authority of a trust territory, a point I will
return to tomorrow. On these issues Professor Dupuy is plainly right, although his colleagues, who
- 55 -
sought to assimilate Chapter XI territories to trust territories for all purposes, may not agree.
40. Leaving to one side this further internal disagreement among counsel for Portugal,
however, there are two mysteries associated with Professor Dupuy's statement so far as it pertains to
admissibility. The first is that there is a conventional link between the two States here which is
equivalent to the conventional link between the three States associated with Nauru. It is the 1989
Treaty. And the second is that I do not understand how, as between the two States here and the three
States in Nauru, the 1989 Treaty provided a weaker basis for the application of Monetary Gold than
did the Trusteeship Agreement. Unlike the situation with the Trusteeship Agreement, which
combined the principle of trusteeship with an arrangement for the management of Nauruan
resources, the present situation requires Portugal to invoke a general principle of law against two
States neither of whom has explicitly accepted a trusteeship obligation, and moreover the Court
is concerned with proceedings against a State which has never been responsible, in any measure at
all, for the administration of the relevant territory. How that weakens the application of the
Monetary Gold principle in the present case it is difficult to understand.
Summary
Mr. President,
41. It may be helpful if I summarise the conclusions so far reached. According to this Court's
decision in Nauru, a case is inadmissible under the Monetary Gold principle if a "finding in respect
of [the] legal situation [of a third State] will be needed as a basis for the Court's decision" on the
Applicant's claims (I.C.J. Reports 1992, p. 261, para. 55). Such a finding is required if it is "a
prerequisite for the determination", or if the determination between the parties is "not purely
temporal but also logical" (ibid). For the reasons I have given, both these requirements are met in
the present case. Portugal's case inevitably and directly involves an attack on the validity of the
Treaty, a logically and legally inseparable aspect of the case Portugal presents. Moreover the
necessary basis for Portugal's case is a finding as to Indonesia's illegal presence, lack of legal
capacity, legal responsibility - in short, its "legal situation". For these reasons, this attack by
- 56 -
Portugal, is in substance and in truth an attack on the Treaty as such. As such, it attracts the
Monetary Gold principle, and the case is inadmissible.
D. Avoiding Monetary Gold by "Not Challenging" the 1989 Treaty:
The Portuguese Counter-Arguments
42. How does Portugal escape this straightforward, one is inclined to say elementary,
conclusion? The answer - I hope this may not be thought too harsh a criticism - is by a series of
evasions, equivocations and subtle distinctions.
43. Mr. President, there is an English popular song, the first line of which - I will not attempt
to sing it - is "I danced with the man who danced with the girl who danced with the Prince of Wales".
It is to be spoken or sung by a woman, which is yet another reason, but not the most important, why
I will not sing it. "I danced with the man who danced with the girl who danced with the Prince of
Wales" - that masterpiece of indirection, of not saying what you mean, pales alongside the
Portuguese counter-arguments on this point, if one follows the written pleadings
and Professor Dupuy's long and winding way.
44. Let me catalogue these counter-arguments - I could count four of them. The first relies on
the distinction between validity and what Portugal calls "licéité". The second asserts that the Court
is not called on to resolve a conflict of norms, but can stop its reasoning, as it were, halfway, leaving
the rest to the Respondent State. The third counter-argument suggests that the Court does not need
to rely on the jus cogens character of the relevant norms, but can stop short at a declaration of
invalidity. The fourth is the argument that the relevant issues of legality have already been
authoritatively decided on by the General Assembly and the Security Council and can be taken as
given, as données, in the present case.
45. I must say something about each of these four counter-arguments, and following Professor
Pellet's good example, I will do so as far as possible using Portugal's own words. On the other hand
in what follows I will be forced to disregard those elements in the Portuguese oral argument that are
inconsistent with the main argument it presented; I have already shown that those direct arguments
about the invalidity of the Treaty lead directly to the conclusion that the case is inadmissible. The
- 57 -
question now is whether Portugal can by some means avoid that conclusion, and the subtlety and
multiplicity of its attempts to do so suggest that if it cannot do so, this is only because it is
impossible. One infers that Professor Higgins may have come to the same conclusion, and decided
there was nothing to be lost by the mode of direct assault, by riding straight over the hill to take the
castle by storm. Unfortunately, under instructions, she is riding over the wrong hill!
(1) The first Portuguese counter-argument: the distinction between validity and legality
(licéité) as applied to the present case
46. The first Portuguese counter-argument relies on the distinction between validity and
lawfulness (licéité) as applied to the present case. As I have mentioned, Portugal seeks to avoid
challenging the Treaty by arguing that its concern is only with the lawfulness, not with the validity of
the Treaty (see CR 95/6, pp. 32-33).
47. Mr. President, there is no doubt a jurisprudential distinction between validity and
lawfulness. But applying that distinction to the present case it is quite clear that what Portugal is
insisting on is precisely that the "Agreement" be determined to be invalid. Of course it refrains from
saying so in so many words, out of a recognition - no less telling for being implicit - that if this Court
were to pronounce on the validity of the Treaty, it would necessarily pronounce on the rights of a
third State and would therefore violate both Article 59 of the Statute and the conditions of its
functioning as a judicial organ.
48. But in substance and in truth the Portuguese argument impugns the validity of the Treaty.
A party cannot avoid the necessary consequences of its arguments merely by not asking for certain
relief. In Monetary Gold, Italy did not actually seek an order from the Court that Albania was
internationally responsible (see I.C.J. Reports 1954, p. 4, p. 22). That was quite obviously an order
which the Court would not make in proceedings to which Albania was not a party. But these are
questions of substance, not of form, and certainly not of the form of the Court's order. In Monetary
Gold the Court declined to decide a case where, as a necessary prerequisite to the decision, the legal
rights or responsibilities of a third State had to be determined or found. As Judge Shahabuddeen put
it in the Nauru case, the question now is whether it would be "tantamount to [a judicial]
- 58 -
determination in the very real sense in which the Court was asked to determine the responsibility of
Albania?" (see I.C.J. Reports 1992, p. 296; CR 95/7, p. 71). In other words, one must ask what are
the necessary elements in the Court's reasoning, as a matter of legal substance. And one way to
answer that question is to look at the operative points of disagreement between the parties, the points
on which the Court is asked to rule.
49. Now the Parties do not disagree about a number of matters in relation to this Treaty. For
example, they agree that the Treaty is not opposable to Portugal; as to Portugal it is res inter alios
acta. Similarly it is common ground that the Treaty would not be opposable to an independent
East Timor.
50. There is more difficulty about the question whether Portugal as the State administering
East Timor before 1975 could have entered into this Treaty with Australia without infringing the
right of self-determination of the people of East Timor. In its written pleadings Portugal certainly
seems to have thought that it could have done so, but in its oral argument it asserted roundly that it
would not have done so (CR 95/2, p. 33, Correia), a view it was able to hold with the greater
certainty because the issue is entirely hypothetical. But as I have noted, there is no doubt in State
practice that the State actually administering a Chapter XI territory has the authority to conclude
boundary agreements and other agreements affecting the resources of that territory. So the better
view is undoubtedly that which Portugal appeared to accept in its written pleadings, viz. that it could
licitly have entered into this Treaty with Australia. If that had happened, it would have been a
matter for the State administering the territory, and not for Australia, to decide what happened to any
proceeds resulting from exploration and exploitation of continental shelf resources.
51. What the Parties do disagree about is reduced to one point, whether Australia may
lawfully negotiate, conclude and implement this Treaty with Indonesia. Australia does not claim the
right to have done so with, say, Western Samoa or Ecuador or Poland (all of which are States other
than Portugal). The question whether it could have done so with those three States can fairly be
regarded as abstract even by the standards of this extraordinarily abstract case. The point has
already been made by Professor Pellet: Portugal cannot at the same time pretend that the 1989
- 59 -
Treaty is a "fact" and ignore all the facts associated with the Treaty, quite apart from his point that a
treaty, anyway, is not a fact but a norm, or a set of norms (CR 95/7, p. 78, Pellet). Thus the proper
way to express the disagreement is to ask whether Australia could lawfully negotiate, conclude and
implement this Treaty with Indonesia in 1989. And in the context of the present case, that is a
disagreement about validity.
52. The point is that if the Treaty is valid, Australia may lawfully implement it. International
law is not a system of contradictions. If international law enjoins Australia from performing a
treaty, this can only be because the treaty is or has become invalid (or if the difficulty is temporary,
has become inoperative for the relevant period). If a treaty is valid then the States parties to it are
entitled, as well as obliged, to give effect to it. Pacta sunt servanda is a norm of general
international law. No doubt an act of State A, which is required conduct under a bilateral treaty
with State B, might give State C cause for complaint. But Portugal's complaint here is not based on
any bilateral ground; it invokes what it describes as a title valid erga omnes, one equally binding on
State B - in this context, Indonesia. If - as Portugal alleges - neither Indonesia nor Australia is free
to ignore Portugal's title, then how do they become free to do so when acting under a bilateral treaty?
If, by reason of a general rule of international law, having the status of a rule erga omnes, A may
not lawfully do something, and for exactly the same reason, B may not lawfully do the same thing,
how can they agree between themselves to do that thing? Any such agreement would be unlawful
and invalid - invalid in the sense of not producing the requisite legal effect.
53. Moreover, Portugal is not merely seeking an account of any profits that might
speculatively be made by Australia from what Portugal accepts to be a legally valid exploitation of
areas pertaining to East Timor. Far from it. It denies - and rightly denies - that the Court can
determine which areas of the Timor Gap pertain to Australia or to whichever State has sovereignty
over East Timor. What it is seeking is, in effect, an injunction against Australia preventing it from
giving effect to the Treaty. It requires - to quote paragraph 32 of the Application - that Australia
"should cease from infringing the relevant international norms", and it particularizes that by saying
that Australia should have no further dealings with Indonesia in relation to the boundary in the
- 60 -
Timor Gap (Application, para. 34 (5) (a)), and should refrain from any act of exploration or
exploitation of the continental shelf or any exercise of jurisdiction there, without Portugal's consent
(Application, para. 34 (5) (a)) - these being the key things which the 1989 Treaty requires or permits
Australia to do. Portugal does not simply ask that Australia not enter into further treaties of this
kind - though it does ask that. Nor does it ask that the 1989 Treaty be lawfully terminated - in fact it
has no termination clause. What Portugal seeks is an order of the Court that Australia should not
implement the 1989 Treaty, and it asks this by reference to "the higher principles of the selfdetermination
of peoples and the integrity and unity of non-self-governing territories" (Application,
para. 29 (a)). But to enjoin a State from implementing a treaty is something the Court could only do
if the treaty were invalid or inoperative. The Court cannot require a State not to implement a treaty
with a third State merely on the grounds that the treaty should not have been entered into. It
probably cannot order a State not to implement a treaty with a third State in any circumstances at
all, in the absence of a binding Security Council resolution. However that may be, what is perfectly
clear is that it cannot order a State not to perform a valid treaty with a third State, and Portugal
concedes that the Court cannot determine whether the 1989 Treaty is valid or not.
54. In denying that it challenges the validity of the Treaty, Portugal has to adopt an extremely
abstract conception of validity. It repeats over and over again that it does not challenge the validity
of the "Accord" but merely the conduct of Australia (see e.g., PR, para. 7.58, and see above,
paras. 2-4 for further references). But the validity of a treaty is nothing other than the bundle of
legal rights, powers and duties which are an inseparable part of negotiating, concluding and
implementing an agreement. It is not a figment in some heaven of juristic concepts. An agreement
illegally negotiated, concluded and executed is nothing other than an invalid agreement - at least
where, as Portugal insists, the illegality is not bilateral but erga omnes. A treaty is an agreed set of
norms under international law. A treaty incapable of operating in the normative sphere of
international law, incapable of producing any of its intended legal effects, is an invalid treaty.
55. The point may be tested in another way. Assume that Australia had not made a formal
treaty but a modus vivendi, an informal agreement, as to the extent of its continental shelf in the
- 61 -
disputed area. Confronted, let us say, with Indonesian drilling activities, Australia must have been
entitled to assert its own rights, and let us assume that this assertion was accepted by the other side.
On what basis could such an arrangement have been challenged by Portugal? Australia could not
have been required to retreat backwards across its continental shelf to avoid contact with a State
other than Portugal. But Portugal denies that Australia could enter into a treaty to the same effect.
The only difference between the two situations is that in one there is a treaty. And yet Professor
Dupuy manages to say that "l'objet du litige n'est pas un traité" (CR 95/6, p. 22).
56. For these reasons it is clear that Portugal does in truth ask the Court to pronounce on the
licitness of Indonesian occupation and control, and thus, by a logically necessary chain of reasoning,
on the validity of the Treaty made by Indonesia, despite its protestations to the contrary (cf. PR, para
2.20). And it is clear why it must do so. If Portugal does not ask the Court to pronounce on the
licitness or otherwise of the Indonesian occupation or control, then the Court must proceed on the
presumption that the occupation or control is licit. There is a presumption that States are free to act
unless prohibited from doing so by international law. If the Indonesian occupation was licit in 1989
then Australia was entitled to enter into the Treaty. A State must be entitled to enter into a bilateral
treaty about its continental shelf with a State lawfully occupying territory. And conversely, if
Indonesian presence in 1989 was unlawful or illicit, then - given the assumptions of Portugal's own
argument - the Treaty must be invalid.
(2) The second Portuguese counter-Argument: the Court should not seek to resolve a conflict of
norms
57. The second Portuguese counter-argument might be called the argument about the sounds
of silence. Portugal argues that it is a matter for Australia to draw the necessary or appropriate
conclusions from a judgment of the Court, and that the Court is not required to determine matters
which will have a direct legal effect on Indonesia. Portugal says:
"If the Court were to find that, by the negotiation, conclusion and incipient
execution of the 'Agreement', Australia had violated the rights of the people of East
Timor, Australia would have to draw its own conclusions as to the action that it should
take. In that regard, Portugal does not ask the Court to resolve any conflict of
obligations." (PR, para. 9.37; see also para. 7.23.)
- 62 -
58. By conflict of obligations Portugal is of course referring to the conflict of obligations it
expects Australia may be under, if the Court upholds the Portuguese claims. It says, Australia will
have "to draw its own conclusions" from the Court's judgment. And this is not an isolated example
of its appeal to the sounds of silence. Elsewhere in its pleadings Portugal states:
"Même s'il est évident que l'article 103 de la Charte impose la primauté des
obligations de l'Australie vis-à-vis du peuple du Timor oriental et du Portugal sur toutes
obligations découlant de tout autre accord, le Portugal, en tout cas, n'a pas demandé à
la Cour de déclarer cette primauté." (PR, para. 2.17.)
59. And this point was elaborated on by Mr. Galvão Teles, at length, last week (CR 95/6, pp.
29-40).
60. In effect, Portugal tells the Court to suppress part of its reasoning, not to draw a necessary
conclusion. Australia is to do so instead, unaided by the Court. But - I speak of course
hypothetically - what would happen if Australia drew what Portugal regarded as an incorrect
conclusion from the Court's judgment? Portugal could of course ask the Court under Article 60 of
the Statute to interpret its judgment so as to make it clear what the Court meant but was not allowed
to say. If such an interpretation directly infringed upon the rights or status of a third State, in the
Monetary Gold sense, this would only be because the original judgment did so.
61. Mr. President, the philosopher Ludwig Wittgenstein once said "Whereof one may not
speak, thereof one must remain silent." He was thinking of God, actually, rather than the Monetary
Gold case, but one might paraphrase the Court's Judgment in Monetary Gold in similar vein:
"Whereof the Court may not speak, thereof it may not deliver judgment." That, fortunately or
unfortunately, is the position of the Court here.
(3) The third Portuguese counter-argument: the Court should ignore the jus cogens character
of the applicable norms
62. The third Portuguese counter-argument suggests that the Court should be reticent in yet
another way - it might be called the argument about keeping jus cogens in the closet. In its written
pleadings, Portugal consistently declines to rely on the principle of self-determination as a matter of
jus cogens. It says:
"The Republic of Portugal, for its part ... considers that there is a strong
presumption, in contemporary international law, in favour of the peremptory character
- 63 -
of the rule of respect for the principle of the right of peoples. It nevertheless also
considers that the Court is, in any case, the best judge of the desirability [opportunité]
of applying that designation. In any case, in Portugal's opinion, it is not essential for
the settlement of the present dispute to give judicial recognition to the imperative
character of the principle of equal rights and self-determination of peoples." (PR,
para. 4.71.)
63. As I have already shown, Professor Dupuy kept to this strategy; jus cogens was left
firmly in the closet, although he gave a clear intimation that it was there! (See CR 95/3, p. 34,
Dupuy.) Professor Higgins, by contrast, let it out of the closet, in no uncertain terms (CR 95/5,
p. 26, Higgins), and I have already shown the consequences of doing so. In this part of the argument
I am proceeding on the basis that Professor Dupuy's strategy is the authorized version of Portugal's
case.
64. The Court will recall that Portugal also disclaims reliance on the prohibition on the use of
force in international relations - a norm of jus cogens if ever there was one (see above, paras. 17-19,
with references to Portugal's pleadings) - it may be Mr. President that there is only one.
65. The reason for this reticence is obvious. To invoke norms of jus cogens would
necessarily, according to Portugal's own argument on the merits, mean invoking the invalidity of the
Treaty. A treaty which is inconsistent with a norm of jus cogens is void: this is what Article 53 of
the Vienna Convention on the Law of Treaties says. Yet Portugal insists that it does not invoke that
invalidity. It appears to think it can determine by stipulation in advance, unilaterally, the extent to
which the Court can rely on particular arguments, irrespective of their actual status in international
law. By declining to rely on particular norms, either at all - in the case of the use of force - or to
their full extent - in the case of self-determination -, it believes it can avoid the logically and legally
necessary consequences of the determinations or findings it asks the Court to make. As is its
constant practice, the Court will look at the legal substance, which is a claim predicated, and
necessarily predicated, on the invalidity of the Treaty.
(4) The fourth Portuguese counter-argument: the reliance on United Nations données
66. Mr. President, I can be briefer with the fourth argument, the datum argument, which
Professor Pellet has already mentioned in the context of Portugal's "conduct" arguments. Portugal
- 64 -
argues that the status of Portugal, and the lack of status of Indonesia, is a donnée, a datum, a
reliable basis on which the Court can rest without any need for any finding on its part. I adopt what
Professor Pellet has said on this point - I have long since given up trying to improve on any of
Professor Pellet's pronouncements. But one point needs to be made. There is here, as to the Treaty,
no donnée, no datum. There is nothing which leads, without further findings by the Court, to the
conclusion that the entry into the Treaty by Australia was unlawful in 1989. The various resolutions
- which say nothing at all about treaty-making, or non-recognition by third States, or the illegality of
Indonesia's presence - ceased in 1982. They certainly do not constitute a finding, or a donnée, in
relation to the entry into the Treaty in 1989. A great deal of independent legal reasoning is required
before one gets from the resolutions to the result - Professor Higgins sought in a subtle way to
engage in that reasoning without appearing to do so, thereby demonstrating the very point. I will
return to the substance of what she said at the level of the merits. But if there was a donnée or a
datum pertaining to the conclusion of the Treaty in 1989, a great deal of what she said is irrelevant.
E. Conclusions
67. Mr. President, Members of the Court, for the reasons I have given, Australia argues that
the Court should dismiss the Portuguese Application as inadmissible, on the ground that the Court
cannot deal with the legality of Australia's conduct in entering into, concluding and implementing the
Treaty without first, as a logical prerequisite, determining the legal issues of the legality of
Indonesia's presence in East Timor, its status and capacity to conclude the Treaty on behalf of East
Timor and the validity of the Treaty itself. These issues - any one of which would be enough to
attract the Monetary Gold principle - constitute the very subject-matter of the case presented by
Portugal in its Application and elaborated on in its written and oral pleadings. In the absence of the
State whose status, capacity and rights are thus impugned, the case brought by Portugal is
inadmissible.
68. Mr. President, Members of the Court, I would now ask you to call on my colleague, Mr.
Burmester, who will take up the issue of Portugal's standing in relation to these proceedings. Thank
you Mr. President.
- 65 -
The PRESIDENT: Thank you very much, Professor Crawford. Now I call Mr. Burmester to
the bar for the remaining time before one o'clock.
Mr. BURMESTER:
Absence of standing of Portugal
Mr. President, Members of the Court.
It is an honour for me to appear before this Court once again, and to again be part of the
Australian team, as I have been in the two previous cases in which Australia has been a party before
this Court.
It is now my responsibility to turn to address the question of the standing of Portugal to bring
its particular claims in this case against Australia. I do this with some sadness, as this part of
Australia's argument was to have been presented by Professor Jiménez de Aréchaga. I hope that my
presentation, which has had the benefit of ideas provided by Professor Jiménez de Aréchaga, can
serve as a modest tribute to his memory.
Mr. President, the presentations by Professors Pellet and Crawford you have just heard
demonstrated the artificiality of Portugal's case. This is relevant also when one comes to consider
the issue of standing. Professor Correia last Friday set out the various orders sought from this Court
which he said Portugal has a legal interest to obtain (CR 95/6, pp. 42-43). Central to Portugal's
claim is what it says is a distinct legal dispute concerning the continental shelf of the Timor Gap.
But Portugal also seeks from this Court a broader declaratory judgment about the rights of the
people of East Timor to self-determination and Portugal's status of Administering Power. Each of
its claims depends, however, for purposes of standing solely and wholly on Portugal's status as
Administering Power. It disowns any reliance on its membership of the United Nations in order to
obtain standing to bring an action in the nature of an actio popularis (PR, p. 208, para. 8.15).
Portugal insists it has standing because its own rights as such are affected, as an independent State
"vested" with the powers of administration of East Timor, and as a State entitled internationally to
represent the people of East Timor and act on their behalf (PR, p. 208, para. 8.17; CR 95/6, p. 56).
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Issues related to standing are inevitably connected with issues of substance. A later
presentation will consider in greater detail the status of Portugal as Administering Power. This, as I
said, is critical to the issue of standing in this case. For present purposes, however, I will consider
the claim to standing more generally. This will demonstrate that Portugal has no more legal right to
bring this particular case than any other displaced colonial power would have a right to represent the
people of a colony that had rebelled and rejected the authority of that power. An examination of the
Portuguese claims to standing leads, we say, to a rejection of the right of Portugal to bring these
proceedings. And the application therefore is inadmissible.
Before examining the claims, it may be useful if, with your permission Mr. President, I briefly
remind the Court of the legal principles governing standing. Portugal acknowledges the need to
show a sufficient legal interest. It conveniently did not remind the Court of the significance of this
requirement. This I shall briefly do.
The concept of standing
The concept of ius standi before the International Court of Justice was defined by this Court,
in precise terms, in the Barcelona Traction case. In that case the Court had to decide on a
preliminary objection filed by Spain, to the effect that the Belgian Government "is without capacity
in the present case ... since the company does not possess Belgian nationality [and] international law
does not recognize any diplomatic protection of shareholders".
In order to decide this question, the Court began by saying that:
"it is the existence or absence of a right, belonging to Belgium and recognized as
such by international law, which is decisive for the problem of Belgium's capacity"
(I.C.J. Reports 1970, p. 33, para. 36; (emphasis added)).
The Court in that case found that Belgium could show no legal injury - no violation of the rights of
any Belgian shareholders, but only that they had suffered economic repercussions from the
bankruptcy of the Canadian company. The Court said: "not a mere interest affected, but solely a
right infringed involves responsibility" (Ibid., para.46). In other words, a State may have interests in
a matter but that itself will not suffice to confer standing. And this is a matter to which I will return.
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The Court also decided in Barcelona Traction:
"Since no ius standi before the Court has been established, it is not for the Court
in its judgment to pronounce upon any other aspect of the case" (I.C.J. Reports, 1970,
p. 51, para. 102).
Thus, the Court not only applied in express terms the concept of ius standi, but also described this
requirement as a "prerequisite", which prevented the Court from pronouncing "upon any other aspect
of the case" (I.C.J. Reports 1970, p. 51, para. 102). And this, of course, is characteristic of
objections attacking the admissibility of an Application, as the present one does.
Already in its first judgment, the Permanent Court of International Justice, in the Wimbledon
case, had recognized the preliminary character of an objection against the capacity or standing of an
applicant, and the relation of this concept with the existence of a legally protected right. In that case
it found standing on the basis of the express provisions of Article 386 of the relevant Treaty which it
considered demonstrated the necessary right. In the South West Africa cases, the Court dealt with
standing by reference to a determination as to whether the provisions of the Mandate conferred the
necessary legal right in third States to ensure the observance by the Mandatory of its obligations
both towards the inhabitants of the Mandated territory, and towards the League of Nations and its
Members (I.C.J. Reports 1962, p. 343).
In this case, Portugal does not seek to base its standing on any particular treaty provision, as
in the South West Africa and Wimbledon cases. This is not a case, as in the South West Africa
cases, alleging a failure by an Administering Authority to discharge its responsibilities.
Mr. President, there is one issue I should mention at this point. Portugal regularly makes its
argument by reference to its status as an Administering Authority - often spelt with two capital As.
It switches between Administering Power and Administering Authority as if they were
interchangeable (see CR 95/6, pp. 43-45). But they are not. The Charter in Article 81 specifically
recognizes a State administering a trusteeship as an Administering Authority. That was what South
Africa was under the Mandate. It was what Australia was in relation to Nauru. The powers and
duties of such a State are defined by an agreement approved by the United Nations (ARej.,
para. 196). There is no such agreement here. Portugal can rely on nothing other than its status as an
- 68 -
independent State.
In this case, Portugal accepts the need to show a "capacity to act" against Australia (PR,
p. 199, para. 8.02) and it seeks to establish specific legal rights of its own or those of the people of
East Timor whom it says it has a capacity to represent. I turn then to show that the necessary legal
capacity does not exist. And in accordance with the jurisprudence just outlined, failure to establish
this capacity must be fatal to Portugal's case.
Let me deal first with the Power to conclude treaties. This is important as Portugal now
directly attacks the 1989 Treaty.
Where a State challenges a treaty concerning maritime resources, one would normally expect
this to be because the State concerned asserted that it had the capacity to deal with those resources.
But what is the position here? Portugal itself does not claim that its own sovereign rights have been
infringed (PR, p. 87, para. 4.57, PM, p. 29, para. 3.08, and p. 114, para. 5.41). Rather it says -
1. Portugal represents the East Timorese;
2. the resources belong to the East Timorese;
3. therefore only Portugal can negotiate in relation to those resources.
But look at the other side of the coin, i.e., duties not rights.
Assume an agreement with Portugal, then -
1. the East Timorese are in no position to fulfil obligations under such an agreement;
2. Portugal itself is in no position to fulfil any obligations under the agreement, given its complete
absence of any territorial or governmental authority over East Timor of any kind or extent.
Therefore, lacking capacity to fulfil obligations in good faith under a Treaty, Portugal has no
capacity to conclude such a treaty.
Portugal does not respond to this argument by establishing its capacity. Instead, it says
Australia has not sought to negotiate with Portugal, so how is the lack of capacity established (CR
95/6, p. 54)? But it is for Portugal to establish its capacity, not Australia. And in relation to the
power to conclude treaties it has not done so.
If it cannot make a treaty as a coastal State, what capacity does Portugal have to complain of
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the conclusion by other coastal States of such a treaty? On what other basis does Portugal rely to
give it "capacity" and standing as against Australia?
Portugal's contention to have rights vis-à-vis Australia which confer the required "standing"
rests on two legs. The Reply describes these as two parallel sources of rights (PR, p. 199, para.
8.02). These grounds were repeated last Friday in the pleading by Professor Correia (CR 95/6,
pp. 44-54). So, what are they?
First, the alleged violation by Australia of Portugal's own rights and powers belonging to it in
its own behalf - but as Administering Power not as sovereign over East Timor; and
Second, the alleged violation by Australia of the rights of the people of East Timor, whom
Portugal says it has the legal power and duty to represent internationally (see also Application,
para. 14).
I. The Alleged Rights of Portugal Itself
I turn first to the alleged rights of Portugal itself.
Based on the fact that some, though not all, relevant United Nations resolutions refer to
Portugal as Administering Power, Portugal contends that it has the right to exercise in relation to
East Timor all the functions inherent in its capacity as a State subject of international law. This,
includes, it says, the right to bring proceedings. At the same time it acknowledges that the powers of
an Administering Power are "functional, limited, shared and subject to control" (PR, p. 200,
para. 8.03; CR 95/4, p. 10).
But this is to beg the question. Australia does not deny that Portugal as a State can bring
proceedings before this Court. The question is whether it has an adequate legal interest in the
subject matter of those proceedings. To establish this Portugal does no more than constantly repeat
that it is the Administering Power - a bit like a cracked record.
It is not sufficient in this regard to establish that the case involves a contentious issue - an
actual controversy. Reliance by Professor Correia on the Northern Cameroons case (CR 95/6, p.
48) is misplaced. That case concerns judicial propriety and not the requirements for a legal interest.
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As to Portugal's capacity to participate in the search for a solution to the East Timor question,
the United Nations, as you heard yesterday, treats Portugal as no more than a concerned Party -
equivalent in this respect to Indonesia and the representatives of the people of East Timor. It would
be very surprising if from this alone Portugal could assert rights to bring legal proceedings relating
to the territory and its resources. As I reminded the Court, a "mere interest" does not confer legal
capacity to bring particular proceedings. In this case, Portugal's role as an interested or directly
concerned Party is only for purposes of resolution of the dispute in co-operation with the
United Nations. It is not for the purpose of bringing these proceedings.
The issue in this case, therefore, is whether Portugal's status as Administering Power gives it
the capacity to bring proceedings relating to resources of a territory over which it has no
governmental control and no territorial presence whatsoever. The precise status and capacities of an
Administering Power, closely linked to the merits, as I have said, are examined in Australia's
Rejoinder and the issue will also be dealt with further in later oral submissions by Mr. Staker.
At this time, I am only concerned with the issue of standing. And the question therefore is,
does Portugal possess any functional rights as Administering Power, that are not otherwise limited or
subject to control, that would authorize these proceedings? In the oral proceedings,
Professor Correia referred to the designation of Administering Powers as being to ensure such States
clearly had attendant obligations (CR 95/3, p. 65). But to have standing, Portugal must point to
rights which it possesses. And as Professor Correia also acknowledged "what counts here is the
material contents of the legal status, much more than the names given to that status" (CR 95/3,
p. 65). When one examines the material contents of the rights which Portugal says it possesses, and
which it says consequently give it standing for the purposes of its claims against Australia, one finds
no support whatever for its contentions. Portugal asserts that its original and inherent authority as a
State subject of international law is sufficient. Portugal says there is no need for a functional
limitation, given Portugal's wish to defend the people of East Timor. Nevertheless it acknowledges
that the powers of an Administering Power may become limited "in view of their function" (CR 95/6,
p. 46). But having made this acknowledgment Portugal responds only in a negative way:
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- there was no reason for any limitation of its powers;
- the competent organs of the United Nations had issued no prohibition against bringing these
proceedings.
Again, Mr. President, Portugal seeks to escape from its responsibility of actually establishing
the legal rights which it says provide it with standing. It appears to think that a desire to act on its
part is sufficient. But it is not.
Let me remind the Court of certain key facts:
1. Portugal has no territorial or administrative control of the territory of East Timor;
2. Portugal's authority was rejected by the people of East Timor in 1974 and 1975, when the civil
war broke out;
3. Portugal itself abandoned the mainland in August 1975. It was not forced out by Indonesia. It
left the island of Atauro precipitately, without any attempt to defend the territory or its people;
4. the General Assembly has designated others as the legitimate representatives of the
East Timorese people.
Mr. Griffith yesterday demonstrated these facts. Portugal's more recently found commitment
to the people of East Timor cannot remove the legal effect of these facts. And they are significant
when the question of standing is raised.
I remind the Court of the Guinea Bissau/Senegal Arbitration. That decision will be referred to
in more detail in later presentations. It clearly establishes that an Administering Power can lose the
capacity to conclude treaties on behalf of a territory once a national liberation movement has
effectively, and by taking up an armed struggle, asserted their right to independence. That clearly
was the situation in East Timor.
Portugal seeks to avoid this uncomfortable conclusion by stressing the duties and rights
incumbent on Administering Powers. Portugal contends that these duties do not depend on a case by
case granting of specific powers by the United Nations. Perhaps not. But they must depend on a
case by case examination of the circumstances in which a State continues to be called an
Administering Power.
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Mr. President, that would be a convenient place for me to stop.
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The PRESIDENT: Thank you very much, Mr. Burmester for having interrupted your
statement. The Court will resume these hearings tomorrow morning at 10 a.m. The meeting is over.
The Court rose at 1 p.m.
__________
Audience publique tenue le mardi 7 février 1995, à 10 heures, au Palais de la Paix, sous la présidence de M. Bedjaoui, président