Exposé écrit de l'Allemagne

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169-20180115-WRI-01-00-EN
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Note: Cette traduction a été établie par le Greffe à des fins internes et n’a aucun caractère officiel
15060
COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
EFFETS JURIDIQUES DE LA SÉPARATION
DE L’ARCHIPEL DES CHAGOS DE MAURICE EN 1965
(REQUÊTE POUR AVIS CONSULTATIF)
EXPOSÉ ÉCRIT
DE L’ALLEMAGNE
15 janvier 2018
[Traduction du Greffe]
CHAPITRE 1
INTRODUCTION
1. Le présent exposé écrit est déposé conformément à l’ordonnance de la Cour du 14 juillet
2017 concernant la demande d’avis consultatif présentée par l’Assemblée générale des
Nations Unies dans sa résolution 71/292 du 22 juin 2017. (Voir annexe 1).
2. Le chapitre introductif qui suit est consacré à une brève analyse de l’origine de cette
demande et permettra de mettre en évidence des informations pertinentes quant à ses termes et à sa
portée. Y seront également esquissées les grandes lignes du présent exposé écrit.
A. ORIGINE DE LA REQUÊTE
3. La demande d’avis consultatif actuellement pendante devant la Cour trouve son origine
dans la lutte de Maurice pour l’indépendance. Colonie britannique depuis 1810, Maurice a accédé à
l’indépendance en 1968. Depuis, le statut en droit international de l’archipel des Chagos qui, durant
la période coloniale, appartenait à Maurice, oppose la République au Royaume-Uni.
4. Maurice et la question du statut de l’archipel des Chagos en droit international ont fait
l’objet de plusieurs résolutions de l’Assemblée générale. Sur la base de sa résolution 1514 (XV),
celle-ci a, dans ses résolutions 2066 (XX), 2232 (XXI) et 2357 (XXII), traité spécifiquement de la
question de l’archipel dans le contexte du processus de décolonisation.
5. En dépit de ces résolutions, les deux Etats, le Royaume-Uni et Maurice, ne se sont
toujours pas mis d’accord sur une solution concernant le statut juridique international futur de
l’archipel des Chagos.
6. En 2016 déjà, une demande d’avis consultatif avait été déposée auprès de l’Assemblée
générale et devait être présentée à la Cour. La décision de solliciter cet avis avait cependant été
reportée en raison de négociations alors en cours entre les deux Etats (voir Nations Unies,
doc. A/71/142).
7. Le 22 juin 2017, le Congo a introduit, pour le compte du groupe des Etats d’Afrique, le
projet de résolution A/71/L.73 de l’Assemblée générale. Celui-ci avait vocation à mettre en oeuvre
une initiative mauricienne.
8. Il convient de souligner, à cet égard, ainsi que l’a confirmé la Cour dans son avis
consultatif sur la «conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance
relative au Kosovo», que l’intention sous-jacente de l’Etat qui propose un projet de résolution
visant à demander à la Cour de rendre pareil avis constitue un facteur particulièrement important de
la détermination du contenu, du sens et de la portée de cette demande. (Voir Conformité au droit
international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo, avis consultatif,
C.I.J. Recueil 2010 (II), p. 424, par. 53).
9. En l’espèce, avant même que l’Assemblée générale ne soit formellement saisie du projet
de résolution, le représentant permanent de Maurice avait clairement indiqué dans une lettre en date
- 2 -
du 30 mai 2017 adressée au représentant permanent de l’Allemagne (voir annexe 2) que l’avis
consultatif qui serait demandé par l’Assemblée générale «contribu[erait] aux travaux de [celle-ci]
dans l’exercice des pouvoirs et des fonctions qui lui ont été délégués en vertu des chapitres XI à
XIII de la Charte des Nations Unies» (ibid., par. 3 ; les italiques sont de nous).
10. L’Allemagne croit savoir que des lettres quasiment identiques ont été envoyées par
Maurice à tous les autres Etats Membres de l’Organisation des Nations Unies. En même temps, les
autorités mauriciennes lui ont également remis un aide-mémoire (voir annexe 3) dans lequel elles
soulignaient que l’unique justification de l’avis consultatif envisagé résidait dans le fait que «[d]e
par son mandat, l’Assemblée générale [était] directement concernée par cette question» (ibid., p. 7,
par. 12).
11. Cette position est également celle qu’a adoptée le représentant mauricien au cours du
débat de l’Assemblée générale qui a précédé l’adoption de la résolution 71/292. Il y décrivait à
nouveau le projet de résolution comme relevant de l’exercice des compétences de l’Assemblée.
Ainsi qu’il l’expliquait alors :
«[p]ar conséquent, sachant que rien ne laisse entrevoir la fin de la colonisation de
Maurice, c’est à l’Assemblée générale qu’il incombe toujours d’agir. Il serait bon
qu[’elle] s’acquitte de cette fonction sur la base de l’avis de la Cour internationale de
Justice. Un avis consultatif contribuerait sans doute grandement aux travaux de
l’Assemblée générale et lui permettrait de s’acquitter de ses fonctions en vertu des
Chapitres XI à XIII de la Charte des Nations Unies.»
(Déclaration de Maurice, Nations Unies, doc. A/71/PV.88, p. 7 ; les italiques sont de nous).
12. Dans sa déclaration, le représentant du Congo, qui proposait formellement le projet de
résolution au nom du groupe des Etats d’Afrique, indiquait également clairement, et confirmait
ainsi, que la demande d’avis avait pour but d’aider l’Assemblée générale à exercer ses compétences
en vertu de la Charte des Nations Unies. Pour reprendre les termes du représentant du Congo :
«[c]omme chacun le sait, le droit à l’autodétermination et l’achèvement du processus
de décolonisation continuent d’être une préoccupation centrale de l’Organisation des
Nations Unies dans son ensemble. C’est pourquoi nous sommes fermement
convaincus que l’Organisation tirerait parti des orientations de l’organe judiciaire
principal des Nations Unies … Un avis consultatif de la Cour internationale de Justice
pourrait aider l’Assemblée générale dans ses travaux et contribuerait à la promotion de
la primauté du droit international.»
(Déclaration du Congo au nom du groupe des Etats d’Afrique, Nations Unies, doc. A/71/PV.88,
p. 6 ; les italiques sont de nous).
13. C’est à la lumière de ces déclarations, ainsi que de la position de Maurice quant à la
fonction limitée de l’avis consultatif qui serait rendu, que l’Assemblée générale a décidé, à sa
majorité, de soumettre la demande actuellement pendante devant la Cour. Elle l’a fait dans le but de
s’éclairer sur les modalités d’exercice de ses propres compétences en vertu de la Charte, et non
dans celui d’aborder d’autres aspects, bilatéraux par nature, de la situation générale.
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B. L’ORDONNANCE DE LA COUR DU 14 JUILLET 2017
14. Le texte de la résolution adoptée par l’Assemblée générale a, par la suite, été transmis à
la Cour sous le couvert d’une lettre du Secrétaire général des Nations Unies en date du 23 juin
2017. Le 28 juin 2017, le greffier a notifié la requête pour avis consultatif à tous les Etats admis à
ester devant la Cour.
15. Par son ordonnance du 14 juillet 2017, la Cour a alors décidé que l’Organisation des
Nations Unies et ses Etats Membres étaient susceptibles de fournir des renseignements sur la
question soumise à la Cour. Elle a fixé au 30 janvier 2018 la date d’expiration du délai dans lequel
des exposés écrits pouvaient lui être présentés et au 16 avril 2018 celle de la présentation
d’observations écrites sur les autres exposés écrits.
16. Conformément à cette ordonnance, l’Allemagne soumet respectueusement à la Cour le
présent exposé écrit afin d’informer celle-ci de la position allemande concernant la demande dont
elle est saisie, en particulier sa portée et son contenu.
17. Il convient néanmoins de souligner que, dans cet exposé écrit, l’Allemagne ne prend pas
position sur le fond de la requête, et n’avance donc pas de réponse sur fond des questions sur
lesquelles la Cour est appelée à se prononcer. Elle se borne à traiter des multiples questions, tout
aussi fondamentales, qui se posent quant à la portée précise de la demande de l’Assemblée générale
et aux modalités souhaitables de son interprétation par la Cour.
18. L’Allemagne est ici attentive à la fonction judiciaire qui est celle de la Cour, organe
judiciaire principal de l’ONU, lorsqu’elle connaît d’une demande d’avis consultatif en vertu de
l’article 96 de la Charte des Nations Unies.
19. Par ailleurs, l’Allemagne se réserve respectueusement le droit de présenter des
observations écrites sur les exposés écrits d’autres Etats Membres de l’Organisation, comme
envisagé dans l’ordonnance susmentionnée, en particulier en relation avec des questions qui ne sont
pas encore évoquées ici.
C. TERMES DE LA REQUÊTE
20. Dans sa résolution 71/292, l’Assemblée générale a décidé, conformément à l’article 96
de la Charte des Nations Unies, de demander à la Cour, en vertu de l’article 65 de son Statut, un
avis consultatif sur les deux questions suivantes :
a) «Le processus de décolonisation a-t-il été validement mené à bien lorsque Maurice
a obtenu son indépendance en 1968, à la suite de la séparation de l’archipel des
Chagos de son territoire et au regard du droit international, notamment des
obligations évoquées dans les résolutions de l’Assemblée générale 1514 (XV) du
14 décembre 1960, 2066 (XX) du 16 décembre 1965, 2232 (XXI) du 20 décembre
1966 et 2357 (XXII) du 19 décembre 1967 ?» ;
b) «Quelles sont les conséquences en droit international, y compris au regard des
obligations évoquées dans les résolutions susmentionnées, du maintien de
l’archipel des Chagos sous l’administration du Royaume-Uni de Grande-Bretagne
et d’Irlande du Nord, notamment en ce qui concerne l’impossibilité dans laquelle
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se trouve Maurice d’y mener un programme de réinstallation pour ses nationaux,
en particulier ceux d’origine chagossienne ?».
D. ORGANISATION DE L’EXPOSÉ ÉCRIT DE L’ALLEMAGNE
21. L’exposé écrit de l’Allemagne compte six chapitres.
22. Le chapitre 2, qui suit celui-ci, est consacré à des questions plus larges, qui ont trait à
l’exercice de la compétence de la Cour en général et aux procédures consultatives en particulier.
L’Allemagne abordera ces aspects en ayant pleinement connaissance de la jurisprudence de la Cour
concernant le pouvoir discrétionnaire de celle-ci en matière d’exercice de sa compétence
consultative.
23. Dans ce contexte, l’Allemagne prie la Cour de s’attacher, dans son avis consultatif, à
éclairer l’Assemblée générale sur le rôle de cette dernière en matière de décolonisation.
24. Le chapitre 3 traite de questions plus techniques et plus spécifiques touchant aux rapports
entre la Cour et l’organe à l’origine de la demande. Nous y verrons notamment que l’action de
l’Assemblée générale et celle de la Cour s’inscrivent dans le cadre de la notion de «coopération
fonctionnelle». L’analyse menée plaide en faveur de l’idée selon laquelle les demandes d’avis
consultatif émanant de l’Assemblée générale visent à faire progresser les travaux de l’organe
demandeur et non à trancher des différends bilatéraux.
25. Le chapitre 4 porte sur la question de la compétence générale qu’a la Cour pour
interpréter les demandes d’avis consultatif dont elle est saisie. Nous y verrons qu’elle a, de manière
répétée, usé de son pouvoir interprétatif pour déterminer la portée et le sens exacts d’une demande.
26. Le chapitre 5 aborde les conséquences de ces conclusions aux regards des questions
figurant dans la résolution 71/292 de l’Assemblée générale, actuellement pendantes devant la Cour.
27. Le chapitre 6 contient un résumé sommaire des arguments de l’Allemagne, ainsi que ses
conclusions en l’espèce.
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CHAPITRE 2
REMARQUES GÉNÉRALES
28. L’Allemagne a toujours été, et demeure, extrêmement favorable au règlement judiciaire
des différends internationaux en général, et par la Cour en particulier. Elle compte parmi les
73 Etats qui ont présenté des déclarations en vertu du paragraphe 2 de l’article 36 du Statut de la
Cour. Elle a également fréquemment comparu devant la Cour en qualité de demandeur (voir affaire
de la Compétence en matière de pêcheries (République fédérale d’Allemagne c. Islande), C.I.J.
Recueil 1972, p. 30 ; affaire LaGrand (Allemagne c. Etats-Unis d’Amérique), C.I.J. Recueil 2001,
p. 466 ; affaire relative aux Immunités juridictionnelles de l’Etat (Allemagne c. Italie ; Grèce
(intervenant)), C.I.J. Recueil 2012 (I), p. 99) aussi bien que de défendeur (voir affaire relative à la
Licéité de l’emploi de la force (Serbie-et-Monténégro c. Allemagne), exceptions préliminaires,
arrêt, C.I.J. Recueil 2004, p. 720 ; affaire relative à Certains biens (Liechtenstein c. Allemagne),
exceptions préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 2005 (I), p. 6), ainsi que dans des affaires portées
devant la Cour à la suite d’un compromis (voir affaire du Plateau continental de la mer du Nord
(République fédérale d’Allemagne/Pays-Bas ; affaire du Plateau continental de la mer du Nord
(République fédérale d’Allemagne/Danemark), arrêt, C.I.J. Recueil 1969, p. 3).
29. L’Allemagne a comparu devant la Cour avant même de devenir membre de
l’Organisation des Nations Unies. Elle a également présenté régulièrement des exposés dans le
cadre de procédures consultatives dont était saisie la Cour. (voir Licéité de la menace ou de
l’emploi d’armes nucléaires, lettre du 20 juin 1995 de l’ambassadeur de la République fédérale
d’Allemagne, accompagnée de l’exposé écrit du Gouvernement de la République fédérale
d’Allemagne ; Licéité de l’utilisation des armes nucléaires par un Etat dans un conflit armé,
exposé écrit du Gouvernement de la République fédérale d’Allemagne (20 septembre 1994) ;
Différend relatif à l’immunité de juridiction d’un rapporteur spécial de la Commission des droits
de l’homme, exposé écrit du Gouvernement de la République fédérale d’Allemagne (5 octobre
1998) ; Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé,
lettre du 29 janvier 2004 de l’ambassadeur de la République fédérale d’Allemagne aux Pays-Bas,
accompagnée de l’exposé du Gouvernement de la République fédérale d’Allemagne (30 janvier
2004) ; Conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au
Kosovo, exposé écrit de l’Allemagne (17 avril 2009)).
30. C’est dans le contexte de ce soutien au travail de la Cour et à son rôle au sein du système
juridique international que l’Allemagne souhaite faire part de son inquiétude quant à la manière
dont cette procédure pourrait être interprétée, c’est-à-dire, comme ayant pour objet de connaître
d’un différend bilatéral et d’en juger.
31. L’Allemagne n’en reconnaît pas moins le rôle des Nations Unies, et plus particulièrement
celui de l’Assemblée générale, dans le processus de décolonisation. Elle salue l’action de cette
dernière dans ce domaine et notamment son apport au développement du droit international en la
matière. Au fil des ans, ses travaux ont joué un rôle clef en encourageant le processus historique de
décolonisation et en contribuant à en faire une réalité.
32. La question se pose toutefois de savoir si l’Assemblée générale a voulu, par voie de
demande d’avis consultatif, saisir la Cour d’une requête de large portée dont l’objet même est un
différend bilatéral persistant entre deux Etats Membres de l’Organisation des Nations Unies. Ainsi
qu’il ressortira d’un examen plus approfondi, il est impossible de présumer que tel était son but
lorsqu’elle a présenté la demande qui figure dans la résolution 71/292 du 22 juin 2017.
- 6 -
33. Ces préoccupations concernant la portée de la demande, dont une interprétation
excessivement large n’est pas souhaitable, sont encore plus pertinentes pour les deux raisons
suivantes, qui se renforcent mutuellement.
34. Tout d’abord, la Cour ne peut trancher dans un cadre contentieux le différend bilatéral
formant la toile de fond de la demande d’avis consultatif parce que l’exercice de sa compétence à
cet égard est régi par le principe prépondérant de consentement. (Voir notamment, concernant ce
principe fondamental, affaire de Certaines terres à phosphates à Nauru (Nauru c. Australie),
exceptions préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 1992, p. 260, par. 53 ; affaire des Activités armées
sur le territoire du Congo (nouvelle requête : 2002) (République démocratique du Congo
c. Rwanda), compétence et recevabilité, arrêt, C.I.J. Recueil 2006, p. 36, par. 88 ; affaire relative à
l’Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Croatie
c. Serbie), exceptions préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 2008, p. 423, par. 33 ; affaire relative à
l’Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de
discrimination raciale (Géorgie c. Fédération de Russie), exceptions préliminaires, arrêt, C.I.J.
Recueil 2011 (I), p. 124-126, par. 131).
35. Ensuite, Maurice avait déjà tenté d’obtenir que les questions bilatérales sous-jacentes à la
présente demande d’avis consultatif de l’Assemblée générale soient réglées par voie d’arbitrage
conformément à l’annexe VII de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer (CNUDM).
(voir Cour permanente d’arbitrage, Différend concernant l’Aire marine protégée en relation avec
l’archipel des Chagos, sentence du 18 mars 2015).
36. Néanmoins, ainsi que confirmé par cette décision, ni la Cour ni aucune autre juridiction
internationale n’est à ce jour compétente pour connaître du différend bilatéral qui oppose Maurice
au Royaume-Uni sur le statut juridique de l’archipel des Chagos.
37. La crainte qu’une interprétation excessivement large d’une demande puisse conduire à
ignorer le principe de consentement et qu’elle ne modifie l’équilibre entre la compétence
contentieuse de la Cour, d’une part, et sa compétence consultative, d’autre part, a également été
exprimée, encore que de manière indirecte, dès 1951, dans l’avis consultatif de la Cour sur les
Réserves à la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide.
38. Dans celui-ci, la Cour confirmait que le fait qu’elle soit compétente pour connaître de
l’affaire sur une base contentieuse ne lui interdisait nullement d’exercer également sa compétence
consultative. Ainsi qu’elle l’écrivait :
«[l]’existence d’une procédure de règlement des différends, telle que celle qui est
prévue à l’article IX, n’est en soi aucunement exclusive d’une procédure consultative,
l’article 96 de la Charte accordant en termes généraux à l’Assemblée générale et au
Conseil de sécurité la faculté de demander à la Cour internationale de Justice un avis
consultatif».
(Réserves à la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, avis
consultatif, C.I.J. Recueil 1951, p. 20).
39. Cependant, lorsque l’inverse est vrai, comme en l’espèce, que la Cour n’est
manifestement pas compétente ratione materiae en matière contentieuse, et que l’affaire ne peut
être portée devant aucune autre juridiction internationale dans le cadre d’une procédure de
- 7 -
règlement des différends, il est impossible de présumer que l’intention de l’Assemblée générale
était de contourner ces limites, même si elle les connaissait.
40. Il y a lieu au contraire de supposer que son unique objectif était de demander à la Cour
de l’informer des paramètres juridiques de ses propres actions futures. S’il en était autrement, la
haute juridiction courrait le risque de se voir saisie d’un nombre considérable de demandes d’avis
consultatif dont le but réel serait d’obtenir une décision sur des questions juridiques pendantes entre
deux Etats.
41. En fait, si la Cour devait ne pas limiter de la sorte sa compétence consultative et ne pas
interpréter de manière restrictive la demande dont elle est saisie, elle pourrait à l’avenir être
confrontée à des situations dans lesquelles, après avoir d’abord été saisie d’une affaire dans un
cadre contentieux et s’être déclarée incompétente pour en connaître sur la base de l’article 36 de
son Statut, elle verrait revenir devant elle la même question sous la forme d’une demande d’avis
consultatif présentée par l’Assemblée générale ou le Conseil de sécurité en vertu de l’article 96 de
la Charte des Nations Unies.
42. La comparaison de l’article 96 et de la troisième phrase de l’article 14 du Pacte de la
Société des Nations plaide également en faveur d’une interprétation prudente de la compétence
consultative de la Cour. A la différence de l’article 96 de la Charte, le Pacte prévoyait en effet
que : «[la Cour permanente de Justice internationale] donnera[it] aussi des avis consultatifs sur tout
différend … dont la saisira[it] le Conseil ou l’Assemblée [de la Société des Nations]» ; les italiques
sont de nous.
43. A l’inverse du Pacte de la SDN, l’article 96 de la Charte des Nations Unies n’évoque pas
les différends, mais «toute question juridique». Il s’agit là d’une modification délibérée des termes
de cette disposition dont il est aisé de déduire que, dans le système de la Charte, un différend
bilatéral ne saurait faire l’objet d’une demande d’avis consultatif.
44. Parallèlement à cela, l’Allemagne soutient que l’Assemblée générale a un intérêt légitime
à demander des avis consultatifs à la Cour, dans la mesure où la réponse de cette dernière est
pertinente pour les travaux de l’organe requérant, et dès lors qu’une telle réponse comporte un
conseil juridique pour ce dernier ou pour tout autre organe ayant soumis une question à la Cour.
(Voir, par exemple, Conditions de l’admission d’un Etat comme Membre des Nations Unies
(article 4 de la Charte), avis consultatif, C.I.J. Recueil 1948, p. 61 ; Réparation des dommages
subis au service des Nations Unies, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1948, p. 174 ; Compétence de
l’Assemblée générale pour l’admission d’un Etat aux Nations Unies, avis consultatif, C.I.J.
Recueil 1950, p. 6 ; Interprétation des traités de paix conclus avec la Bulgarie, la Hongrie et la
Roumanie, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1950, p. 72 ; Certaines dépenses des Nations Unies
(article 17, paragraphe 2, de la Charte), avis consultatif, C.I.J. Recueil 1962, p. 155 ; Réserves à la
convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, avis consultatif, C.I.J.
Recueil 1951, p. 19 ; Conséquences juridiques pour les Etats de la présence continue de l’Afrique
du Sud en Namibie (Sud-Ouest africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de
sécurité, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1971, p. 24, par. 32 ; Sahara occidental, avis consultatif,
C.I.J. Recueil 1975, p. 26-27, par. 39-40 ; Applicabilité de la section 22 de l’article VI de la
convention sur les privilèges et immunités des Nations Unies, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1989,
p. 187, par. 28 ; Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, avis consultatif,
C.I.J. Recueil 1996 (I), p. 232-233, par. 11-12 ; Conséquences juridiques de l’édification d’un mur
dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif, C.I.J. Recueil 2004, p. 145, par. 16-17 ;
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Conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo,
avis consultatif, C.I.J. Recueil 2010 (II), p. 413-414, par. 21-24).
45. Tel est particulièrement le cas en matière de décolonisation, une question qui est au coeur
du travail de l’Organisation depuis sa création.
46. Et de fait, l’Assemblée générale fait également référence, dans la demande en l’espèce, à
«sa résolution 65/118 du 10 décembre 2010 sur le cinquantième anniversaire de la
déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux» dans
laquelle elle avait rappelé qu’elle considérait «qu’il incomb[ait] à l’Organisation de
continuer à oeuvrer activement pour la décolonisation» ; les italiques sont de nous.
47. C’est à la lumière de ces réflexions fondamentales que la Cour devrait aborder l’examen
de la présente demande d’avis consultatif.
48. Si l’Allemagne reconnaît sans ambiguïté que la Cour peut, en tant qu’organe judiciaire
principal des Nations Unies, rendre l’avis qui lui est demandé, elle soutient également
respectueusement qu’il conviendrait que l’exercice de sa fonction consultative porte sur les
questions qui sont nécessaires et pertinentes pour que l’Assemblée générale puisse exercer ses
propres compétences dans le domaine de la décolonisation.
49. Telle est la perspective dans laquelle s’inscrit le chapitre suivant du présent exposé écrit,
consacré aux rapports entre l’organe dont émane la demande (dans ce cas l’Assemblée générale) et
la Cour.
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CHAPITRE 3
RELATION ENTRE L’ORGANE DEMANDEUR ET LA COUR
DANS LES PROCÉDURES CONSULTATIVES
50. Dès l’époque de la Cour permanente de Justice internationale, d’éminents auteurs tels
que M. Hudson ont confirmé que la Cour avait pour rôle, dans sa mission consultative, de «faciliter
le travail du Conseil de la Société des Nations». (M. Hudson, The Permanent Court of
International Justice 1920-1942 (1943), p. 523).
51. Cette interprétation de la fonction des procédures consultatives a été consacrée par l’avis
la Cour dans l’affaire dite de Mossoul. (Interprétation de l’article 3‚ paragraphe 2‚ du traité de
Lausanne (frontière entre la Turquie et l’Irak), avis consultatif, C.P.J.I., série B n° 12).
52. Il avait été demandé à la Cour permanente de Justice internationale de communiquer à
l’organe demandeur, en l’occurrence le Conseil de la Société des Nations, un avis relatif à
l’exercice par ce dernier des pouvoirs dont il disposait (ibid.).
53. Parce que le Conseil lui demandait de l’éclairer quant à l’exercice de ses propres
compétences, la Cour permanente a considéré que les limites juridictionnelles énoncées par elle
dans la procédure concernant la Carélie orientale (Statut de la Carélie orientale, avis consultatif,
C.P.J.I., série B no 5, p. 29) ne s’appliquaient pas.
54. Ce point a été confirmé par B. v. Stauffenberg, qui écrivait en 1934, dans son
commentaire du Statut de la Cour permanente faisant autorité :
«[l]’affaire de Mossoul (avis n° 12 ; 1925) offrait une certaine analogie avec l’affaire
de la Carélie orientale … La Cour estima cependant que les circonstances étaient
nettement différentes, étant donné que la question posée à la Cour en l’espèce visait
non point le fond de l’affaire mais la compétence du Conseil [de la Société des
Nations], lequel … pouvait solliciter sur des points de droit l’avis de la Cour».
(B. v. Stauffenberg, Statut et Règlement de la Cour Permanente de Justice Internationale).
(Eléments d’interprétation (1934), p. 458 ; les italiques sont de nous).
55. Avec la création de la Cour internationale de Justice en tant qu’organe judiciaire
principal des Nations Unies et partie intégrante du système général de la Charte, ce rôle, de même
que la fonction des avis consultatifs rendus par la Cour au «service» de l’instance demanderesse, a
encore été renforcé.
56. Analysant la compétence actuelle de la Cour en matière consultative, d’éminents auteurs
ont, de manière similaire, mis en exergue cette fonction des avis consultatifs.
57. Ainsi que l’a écrit K. Keith : «l’objet de la procédure est de conseiller l’organe
demandeur … quant à la conduite à adopter par lui». (K. Keith, The Extent of the Advisory
Jurisdiction of the International Court of Justice (1971), p. 125).
- 10 -
58. Ce point de vue a, par la suite, été repris par C. Espósito, qui a expliqué que «le rôle d’un
avis consultatif [était] de «guider les Nations Unies dans leur action»». (C. Espósito, La
Jurisdicción Consultativa de la Corte Internacional de Justicia (1996), p. 6).
59. Plus récemment, mais toujours dans le même esprit, M. Aljaghoub affirmait que : «[l]a
fonction consultative [avait] été principalement conçue pour aider les organes de l’ONU à
s’acquitter de leurs fonctions et les guider dans leur action future» (M. Aljaghoub, The Advisory
Function of the International Court of Justice 1946-2005 (2006), p. 240).
60. R. Kolb a également dépeint le rôle de la Cour en matière consultative comme «une
espèce de fonction constitutionnelle» (R. Kolb, La Cour internationale de Justice (2013), p. 1057),
ajoutant qu’elle «éclair[e] et … éclairci[t] des questions juridiques qui se posent dans le cadre de
l’activité des organes onusiens … pour en faciliter l’action» (R. Kolb, La Cour internationale de
Justice (2013), p. 1058 ; les italiques sont de nous).
61. La Cour elle-même a, en maintes occasions, confirmé cette interprétation de sa propre
fonction consultative, notant que son rôle consistait à appuyer et à faciliter les travaux des organes
des Nations Unies en général, et de l’organe demandeur en particulier.
62. La Cour ne manquera pas de se souvenir que «[son] avis est donné … non aux Etats,
mais à l’organe habilité pour le lui demander» (Interprétation des traités de paix conclus avec la
Bulgarie, la Hongrie et la Roumanie, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1950, p. 71).
63. Une demande d’avis consultatif vise donc à obtenir l’orientation, le service et le soutien
de la Cour, ainsi que l’a déjà expliqué celle-ci en relation avec les Réserves à la convention pour la
prévention et la répression du crime de génocide, puisqu’elle a estimé que «[l]’objet de
la … demande d’avis [était] d’éclairer les Nations Unies dans leur action propre» (Réserves à la
convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, avis consultatif, C.I.J.
Recueil 1951, p. 19 ; les italiques sont de nous).
64. La Cour a formulé la même idée, en termes plus généraux, dans son avis sur la
convention sur les privilèges et immunités. Elle a conclu que :
«[l]a compétence qu’a la Cour en vertu de l’article 96 de la Charte et de l’article 65 du
Statut pour donner des avis consultatifs sur des questions juridiques permet[tait] à des
entités des Nations Unies de demander conseil à la Cour afin de mener leurs activités
conformément au droit».
(Applicabilité de la section 22 de l’article VI de la convention sur les privilèges et immunités des
Nations Unies, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1989, p. 188, par. 31 ; les italiques sont de nous).
65. Cette approche fonctionnelle a été réaffirmée dans l’avis sur le Kosovo, où la Cour a
indiqué que «la compétence consultative a[vait] pour finalité de permettre aux organes de
l’Organisation des Nations Unies et à d’autres institutions autorisées d’obtenir des avis de la Cour
qui les aider[aient] dans l’exercice futur de leurs fonctions» (Conformité au droit international de
la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo, avis consultatif, C.I.J.
Recueil 2010 (II), p. 421).
- 11 -
66. C’est à cette fin et dans ce cadre seulement qu’a été établie la compétence consultative de
la Cour.
67. Cette interprétation de l’objet et du but des demandes d’avis consultatif a aussi été
reprise par d’autres juridictions internationales, parmi lesquelles le Tribunal international du droit
de la mer. Ce dernier a, par exemple, précisé que son avis consultatif «n’[était] donné qu’à la
CSRP, qui le consid[érait] souhaitable «pour s’éclairer dans [son] action propre» … L’objet de la
demande de la CSRP [était] d’obtenir des indications susceptibles de guider son action.» (Tribunal
international du droit de la mer, demande d’avis consultatif soumise par la commission sousrégionale
des pêches, avis consultatif, 2 avril 2015, TIDM Recueil 2015, p. 26, par. 6.)
68. Le Tribunal poursuivait en soulignant qu’il formulait des avis en étant «conscient du fait
que, en répondant aux questions posées, il assistera[it] la CSRP dans l’exercice de ses activités»
(ibid., par. 77 (les italiques sont de nous ; note de bas de page omise)).
69. Pour ce qui est de la Cour elle-même, l’interprétation de sa fonction consultative est en
outre étayée par certaines considérations générales en matière de «coopération fonctionnelle» (voir,
de manière générale, concernant cette notion, V. Gowlland-Debbas, «Charte des Nations Unies,
art. 7, note marginale 27 et suiv.», dans A. Zimmermann et al. (dir. publ.), The Statute of the
International Court of Justice  A Commentary (2e éd., 2012), p. 101-102)) entre les principaux
organes des Nations Unies créés en application de l’article 7 de la Charte.
70. Celui-ci dresse une liste exhaustive des organes principaux de l’Organisation sans
distinction hiérarchique. Il établit donc clairement que tous se trouvent sur un solide pied d’égalité.
Néanmoins, dans la mesure où tous les organes ont l’obligation de tendre vers les buts des
Nations Unies, et de les atteindre, ils sont tenus de coopérer et d’agir loyalement les uns envers les
autres pour assurer, dans la mesure du possible, le bon fonctionnement et l’efficacité de
l’Organisation dans son ensemble.
71. En conséquence, pour reprendre les propos d’un éminent commentateur concernant
spécifiquement l’exercice par la Cour de sa compétence, «[l]a fonction de la Cour doit donc [être]
considérée comme relevant de l’assistance aux organes des Nations Unies dans le but de les aider à
accomplir leurs tâches» (voir Gowlland-Debbas, ibid., note marginale 27, p. 101).
72. C’est cette fonction globale de sa compétence consultative, c’est-à-dire le fait qu’elle ait
vocation à permettre à l’organe demandeur d’exercer ses compétences propres conformément au
droit international, qui doit également guider la Cour en l’espèce dans son interprétation de la
demande de l’Assemblée générale.
73. Ainsi que la Cour l’a confirmé dans sa jurisprudence constante, cette fonction de la
procédure consultative a pour corollaire le pouvoir que possède la haute juridiction d’interpréter les
demandes d’avis consultatif qui lui sont adressées. En effet, nous verrons que la Cour est
pleinement en mesure d’interpréter la demande qui lui est présentée afin de préserver son rôle et sa
fonction judiciaire, comme indiqué plus haut.
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CHAPITRE 4
POUVOIR DE LA COUR EN MATIÈRE D’INTERPRÉTATION DE LA DEMANDE
74. La Cour permanente de Justice internationale et la Cour actuelle ont réaffirmé maintes
fois le pouvoir qui était le leur, dans l’exercice de leur fonction judiciaire, d’interpréter les
questions qui leur étaient adressées pour avis consultatif et, le cas échéant, d’en limiter la portée.
75. Dès 1923, la Cour permanente a affirmé qu’elle avait le pouvoir de définir précisément le
périmètre de la demande d’avis qui lui était soumise en écrivant : «il importe d’indiquer dès à
présent dans quelles circonstances l’avis consultatif de la Cour a été demandé sur la question
mentionnée dans la requête reproduite ci-dessus, et quelle est la portée exacte de cette question»
(affaire de Jaworzina (frontière polono-tchécoslovaque), avis consultatif, C.P.J.I., série B n° 8,
p. 16 ; les italiques sont de nous).
76. Dans son avis consultatif sur l’Interprétation de l’accord gréco-turc du 1er décembre
1926 (protocole final‚ article IV), avis consultatif, C.P.J.I., série B n° 16), la Cour a franchi un pas
important en ce qu’elle a laissé de côté les questions pour lesquelles elle estimait qu’il lui était
impossible de présumer que l’organe demandeur attendait d’elle une réponse. Elle a agi de la sorte
même lorsqu’il était difficile de discerner l’intention de celui-ci.
77. Dès ce moment-là, la Cour a souligné qu’il lui incombait de rechercher et de cerner la
«véritable question» qui lui était posée, tout en écartant les aspects bilatéraux contestés sortant du
périmètre défini par elle. Elle l’explique ainsi :
«[l]a Cour … considère que, ladite lettre ne définissant pas d’une manière exacte la
question sur laquelle son opinion est sollicitée, il est indispensable qu’elle dégage et
formule en termes précis cette question, afin, notamment, d’éviter de se prononcer sur
des points de droit au sujet desquels le Conseil ou la Commission n’ont pas eu
l’intention d’obtenir son avis …
C’est en exprimant de cette manière la question visée par la lettre … et dans le
cadre de cette formule, que la Cour donnera suite à la demande d’avis qui lui a été
présentée. Il s’ensuit que, pour autant que les points débattus par les Gouvernements
intéressés dépasseraient le cadre de la question ainsi libellée, la Cour ne saurait s’en
occuper.»
(Ibid., p. 14-16 ; les italiques sont de nous).
78. La Cour actuelle a continué à raisonner de la sorte. Dès 1950, dans son avis consultatif
sur le Statut international du Sud-Ouest africain, elle a conclu qu’elle était même en position
d’ignorer complètement l’une des questions qui lui étaient posées par l’Assemblée générale,
considérant qu’il n’était «pas nécessaire de considérer cette question générale séparément» (Statut
international du Sud-Ouest africain, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1950, p. 131), et s’est donc
attachée sans retard à examiner les questions restantes (ibid.).
79. Dès 1956, la Cour a estimé qu’elle avait le pouvoir de «déterminer le sens qu[’elle]
attach[ait] à la question qui lui [était] soumise pour avis» (Admissibilité de l’audition de
pétitionnaires par le Comité du Sud-Ouest africain, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1956, p. 25).
- 13 -
80. Elle a, en conséquence, limité le sens de l’expression «accorder des audiences à des
pétitionnaires», telle qu’employée dans la demande soumise par l’Assemblée générale, aux seules
personnes ayant présenté des pétitions écrites au comité concerné conformément au règlement
applicable (ibid.).
81. De manière générale, ainsi que l’a expliqué la Cour dans son avis de 1962 sur Certaines
dépenses : «[o]n ne doit pas supposer que l’Assemblée générale ait … entendu lier ou gêner la
Cour dans l’exercice de ses fonctions judiciaires» (Certaines dépenses des Nations Unies
(article 17, paragraphe 2, de la Charte), avis consultatif, C.I.J. Recueil 1962, p. 157 ; Conformité
au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo, avis
consultatif, C.I.J. Recueil 2010 (II), p. 425, par. 54).
82. La Cour a donc réitéré en 1980 la position adoptée par la Cour permanente selon laquelle
elle avait le pouvoir d’ignorer une formulation particulière pour rechercher la «véritable question
juridique» posée par l’organe demandeur (voir Interprétation de l’accord du 25 mars 1951 entre
l’OMS et l’Egypte, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1980, p. 88, par. 35), qui doit alors «être
considéré[e] comme la question juridique à elle soumise par la requête» (ibid.). Elle s’est
prononcée en ce sens «pour rester fidèle aux exigences de son caractère judiciaire dans l’exercice
de sa compétence consultative» (ibid.), et il lui incombait donc de «rechercher quelles [étaient]
véritablement les questions juridiques que soul[evaient] les demandes formulées dans une requête»
(ibid. (références omises)).
83. Peu après, en 1982, la Cour a franchi un nouveau pas en concluant qu’il était même
possible qu’elle ait l’obligation, pour être à même d’exercer sa compétence consultative, de cerner
la véritable question qui lui était posée. Ainsi qu’elle l’a déclaré sans équivoque, elle devait «en
[venir] … à la question sur laquelle il lui [était] demandé de donner un avis consultatif» (Demande
de réformation du jugement no 273 du Tribunal administratif des Nations Unies, avis consultatif,
C.I.J. Recueil 1982, p. 348, par. 46) pour déterminer «si, compte tenu de sa rédaction, elle
[pouvait] à bon droit y répondre» (ibid. ; les italiques sont de nous).
84. La Cour a, en particulier, estimé qu’elle avait l’obligation de déterminer si «telle qu’elle
se présent[ait], [la question] correspond[ait] vraiment aux intentions qui animaient [l’organe
demandeur] quand celui-ci a saisi la Cour» (ibid.).
85. Ce point a été réitéré en 1987, lorsqu’elle a jugé que
«[l]orsqu’elle examine quelles sont «véritablement les questions» soulevées, la Cour
doit naturellement tenir compte aussi des intentions de l’organe demandeur telles
qu’elles se dégagent des comptes rendus des débats dont elle dispose et qui ont
conduit à la décision de demander l’avis».
(Demande de réformation du jugement no 333 du Tribunal administratif des Nations Unies, avis
consultatif, C.I.J. Recueil 1987, p. 42).
86. Cette attitude s’inscrit dans le droit fil des conclusions antérieures de la Cour dans son
avis sur la Procédure de vote applicable aux questions touchant les rapports et pétitions relatifs au
Territoire du Sud-Ouest africain, à l’occasion duquel elle avait déjà affirmé qu’elle avait, pour
expliquer le besoin de consulter la version française de la requête, le devoir d’établir l’intention de
l’organe demandeur, car «[l]a version française paraît exprimer avec plus de précision l’intention
- 14 -
de l’Assemblée générale quand elle a présenté la question à la Cour pour avis», avis consultatif,
C.I.J. Recueil 1955, p. 72).
87. Résumant et confirmant à nouveau sa jurisprudence globale, la Cour a réaffirmé, en
2004, qu’elle pouvait être «amenée à élargir, interpréter, voire reformuler les questions qui lui
étaient posées» (Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien
occupé, avis consultatif, C.I.J. Recueil 2004, p. 153, par. 38 (références omises)).
88. Plus récemment, la Cour est allée encore plus loin. Après avoir rappelé que, par le passé,
«elle s’[était] écartée du libellé de la question qui lui était posée» (Conformité au droit
international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo, avis consultatif,
C.I.J. Recueil 2010 (II), p. 423, par. 50), elle a confirmé que même lorsque «la question posée par
l’Assemblée générale [était] clairement formulée» (ibid., par. 51 ; les italiques sont de nous) et était
«circonscrite et précise», elle n’en avait pas moins le pouvoir de reformuler la question proprement
dite, une telle reformulation aurait une incidence sur le résultat même de la demande.
89. Ainsi, a-t-elle conclu, dans son avis consultatif sur la Conformité au droit international
de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo, que la question qui lui était
posée, c’est-à-dire, «[l]a déclaration unilatérale d’indépendance des institutions provisoires
d’administration autonome du Kosovo [est-elle conforme au droit international ?]» (Ibid., par. 52,
les italiques sont dans l’original), devait être reformulée, nonobstant le fait que cette reformulation
par elle de la question de l’Assemblée générale constituait «un point qui pou[vait] avoir une
incidence sur la réponse à la question de la conformité au droit international de cette déclaration»
(ibid.).
90. En fait, prétendre que la haute juridiction n’a pas le pouvoir de reformuler la question et
que la formulation d’une question donnée est le fruit d’une décision définitive de l’Assemblée
générale «serait incompatible avec le bon exercice de [l]a fonction judiciaire [de la Cour]» (ibid.).
91. De ce fait, en l’absence d’indication contraire dépourvue d’ambiguïté, il est impossible
de présumer que l’organe demandeur souhaitait exclure ou limiter le pouvoir de la Cour de
reformuler la question qui lui était adressée. En d’autres termes, à moins que l’Assemblée générale
n’en ait expressément disposé autrement, nul ne saurait supposer qu’elle entendait restreindre le
pouvoir des juges, établi sans équivoque par leur jurisprudence constante, d’interpréter une
demande d’avis consultatif. (Voir ibid., par. 53).
92. La jurisprudence de la Cour démontre donc que celle-ci a constamment estimé qu’elle
possédait le pouvoir d’interpréter, voire de reformuler, les questions qui lui étaient posées en vertu
de l’article 96 de la Charte des Nations Unies, et qu’elle a, de surcroît, effectivement usé de ce
pouvoir en maintes occasions.
93. Elle a, ainsi, fait en sorte que les questions émanant de l’organe demandeur relèvent
effectivement de la compétence de ce dernier, pour éviter d’être amenée à se prononcer sur des
aspects de nature à la conduire à empiéter sur les droits d’Etats tiers, ou même sur sa propre
compétence. Ainsi que l’a écrit à juste titre un auteur, c’est donc «[l]’interprétation de la question
choisie par la Cour … [qui] détermine …] le type de conseil donné à l’instance politique
concernée» (M. Pomerance, The Advisory Function of the International Court in the League and
U.N. Eras (1973), p. 278).
- 15 -
94. La Cour est donc maintenant appelée à interpréter la demande d’avis consultatif pendante
devant elle. À cette fin, il conviendrait qu’ainsi qu’elle l’a fait par le passé, elle pèse avec soin les
intérêts de l’organe demandeur, en l’espèce, l’Assemblée générale, en liaison avec la présentation
de toute question juridique nécessaire pour lui permettre d’exercer ses propres fonctions, tout en
protégeant les droits de ceux qui sont affectés par les procédures respectives.
- 16 -
CHAPITRE 5
CONSÉQUENCES POUR LA PRÉSENTE DEMANDE
95. L’Allemagne allègue respectueusement qu’en l’espèce, il découle de ce qui précède que
la Cour doit interpréter scrupuleusement la question juridique qui lui est posée. Cette interprétation
doit être effectuée dans la mesure et de la manière requises par la fonction même de cette
procédure, mais aussi dans le but de protéger la position de la Cour en tant qu’organe judiciaire
principal des Nations Unies.
96. Cette interprétation a pour toile de fond les compétences de l’organe demandeur en
relation avec la question sous-jacente à la demande. Le but et le sens de cette procédure sont donc
d’éclairer l’Assemblée générale sur les mesures ultérieures qu’elle pourrait envisager de prendre
d’office.
97. Depuis l’avis de 1950 sur le Statut international du Sud-Ouest africain, les questions de
décolonisation constituent un pan important de la jurisprudence de la Cour (Statut international du
Sud-Ouest africain, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1950, p. 128).
98. Il est toutefois révélateur que, dès 1950, la Cour ait, dans cet avis, ignoré la première
question qui lui était posée concernant le statut juridique international de la région alors appelée
Sud-Ouest africain. Elle a, à la place, fait porter son analyse sur les diverses questions particulières
relatives aux rapports entre la puissance mandataire, d’un côté, et la Société des Nations et
l’Organisation des Nations Unies, de l’autre (ibid., p. 131).
99. Dans le même sens, la demande d’avis consultatif sur la procédure de vote au sein de
l’Assemblée générale en relation avec des questions relatives au Territoire du Sud-Ouest
africain/namibien était également intrinsèquement liée aux travaux des Nations Unies elles-mêmes.
(Procédure de vote applicable aux questions touchant les rapports et pétitions relatifs au territoire
du Sud-Ouest africain, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1955, p. 67).
100. L’avis consultatif sur l’Admissibilité de l’audition de pétitionnaires par le Comité du
Sud-Ouest africain (avis consultatif du 1er juin 1956, C.I.J. Recueil 1956, p. 23) (également une
demande d’avis touchant à une question de décolonisation) avait trait à la question du droit du
Comité du Sud-Ouest africain, créé par l’Assemblée générale, à entendre des pétitionnaires sur des
questions concernant le Territoire du Sud-Ouest africain. La Cour a conclu que tel était le cas
lorsque pareille mesure était nécessaire au maintien d’une supervision internationale effective sur le
territoire sous mandat. L’objet de la demande était le périmètre des compétences de l’Assemblée
générale et non les questions bilatérales.
101. Il est, bien sûr, exact que la portée de l’avis de la Cour sur les Conséquences juridiques
pour les Etats de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest africain)
nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité était plus large, et qu’il abordait
également plus généralement la question des conséquences juridiques.
102. Il convient cependant de souligner que, dans ce cas (à la différence de l’affaire en
cours), le Conseil de sécurité avait expressément demandé à la Cour de se prononcer sur les
conséquences juridiques pour les Etats de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie.
- 17 -
Elle ne l’a fait, cependant, que dans le but d’éclairer les Etats Membres sur les modalités de mise
en oeuvre des décisions pertinentes d’organes des Nations Unies.
103. Il est, en outre, utile de souligner que, s’agissant d’un ancien territoire sous mandat,
l’ONU avait une responsabilité directe et immédiate à l’égard de la Namibie. Une fois encore,
donc, l’avis consultatif demandé avait un rapport direct avec l’exercice des compétences de
l’Organisation, et était donc limité à ces questions.
104. En outre, l’organe demandeur, en l’occurrence le Conseil de sécurité, avait en diverses
occasions décrit l’occupation du territoire namibien par l’Afrique du sud comme «une atteinte
agressive à l’autorité de l’Organisation des Nations Unies» (voir résolution 269 (1960) du Conseil
de sécurité, paragraphe 3 du préambule), et avait déjà appelé les Etats Membres à prendre des
mesures spécifiques en relation avec la présence sud-africaine en Namibie. (Voir, par exemple,
résolutions 276 (1970) et 283 (1970) du Conseil de sécurité).
105. Ce rapport étroit et intrinsèque entre le statut juridique du territoire namibien et
l’exercice, par les Nations Unies, de leurs propres compétences, était déjà devenu manifeste lors du
débat au Conseil de sécurité qui avait précédé l’adoption de la résolution demandant l’avis de la
Cour. Au cours de celui-ci, l’Espagne, entre autres pays, avait déclaré qu’elle «s’attend[ait] à ce
que cette nouvelle action du Conseil de sécurité contribue de manière décisive … au respect des
décisions de l’Organisation en vertu de sa responsabilité spéciale à l’égard du territoire namibien»
(S/PV.1550, p. 12, par. 117 ; les italiques sont de nous).
106. Cette mise en contexte montre que si, à la différence de la requête en l’espèce, la
demande du Conseil de sécurité concernant la Namibie était formulée de manière large, elle ne s’en
rapportait pas moins intrinsèquement à l’exercice par l’organe demandeur de ses compétences en
vertu de la Charte des Nations Unies. Cette situation peut également s’expliquer par l’existence, à
ce moment-là, de liens particuliers entre les Nations Unies et l’ancien territoire sous mandat du
Sud-Ouest africain/namibien.
107. Dans le cas de l’affaire du Sahara occidental, la Cour a confirmé sans équivoque que
l’avis consultatif n’avait pas pour objet de trancher un différend bilatéral. La demande et l’avis y
afférent étaient uniquement destinés à fournir des conseils en matière juridique dans la mesure où
une telle consultation était nécessaire à l’organe demandeur, en l’occurrence, l’Assemblée générale,
pour lui permettre d’exercer les pouvoirs qui lui étaient conférés par la Charte. Ainsi que
l’écrivirent alors clairement les juges :
«[l]’Assemblée générale n’a pas eu pour but de porter devant la Cour, sous la forme
d’une requête pour avis consultatif, un différend ou une controverse juridique, afin
d’exercer plus tard, sur la base de l’avis rendu par la Cour, ses pouvoirs et ses
fonctions en vue de régler pacifiquement ce différend ou cette controverse. L’objet de
la requête est tout autre : il s’agit d’obtenir de la Cour un avis consultatif que
l’Assemblée générale estime utile pour pouvoir exercer comme il convient ses
fonctions relatives à la décolonisation du territoire.»
(Sahara occidental, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1975, p. 26-27, par. 39 ; les italiques sont de
nous).
108. Une fois encore, la Cour considérait que son rôle en matière consultative consistait
exclusivement à assister l’organe demandeur, et non à régler des différends bilatéraux, même s’ils
- 18 -
étaient liés à l’exercice par l’Assemblée générale de ses pouvoirs en vertu de la Charte des
Nations Unies.
109. À première vue, l’avis de 2004 de la Cour dans l’affaire des Conséquences juridiques
de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé pourrait paraître excéder le domaine
défini par ces paramètres limités. Il est notoire que les juges ont estimé qu’il ne leur avait pas
seulement été demandé de traiter des conséquences juridiques, pour les Nations Unies elles-mêmes,
de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, mais aussi pour Israël et des Etats
tiers.
110. Une analyse plus approfondie montre toutefois que cette conclusion est imputable à la
fois au contenu précis de la demande et, dans ce cas également, à la situation juridique particulière
du territoire concerné.
111. Il convient notamment de souligner premièrement que l’Assemblée générale avait, dans
sa demande, inclus une référence spécifique à la convention de Genève relative à la protection des
personnes civiles en temps de guerre (ci-après dénommée la «quatrième convention de Genève»).
Cette mention impliquait que l’organe demandeur voulait aussi faire spécifiquement référence aux
obligations d’Etats tiers en vertu de l’article premier de la quatrième convention de Genève que la
Cour a alors également évoqué dans son avis (Conséquences juridiques de l’édification d’un mur
dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif, C.I.J. Recueil 2004, p. 172 et 183 et
suivantes, par. 89 et 120 et suiv.).
112. L’Assemblée générale avait ainsi (à la différence de la présente requête) spécifiquement
demandé à la Cour de l’éclairer en outre sur les obligations juridiques incombant à la fois à Israël et
aux Etats tiers.
113. Deuxièmement, comme la Namibie autrefois, le territoire palestinien occupé constitue
une question directement et spécifiquement pertinente pour les Nations Unies, relevant de leur
responsabilité quasiment depuis la naissance de l’Organisation. Ce point a été systématiquement
confirmé par les décisions des organes politiques depuis l’adoption de la résolution 184 (1948) de
l’Assemblée générale. Ainsi que l’a expliqué la Cour elle-même dans son avis consultatif de 2004 :
«[l]a responsabilité de l’Organisation à cet égard trouve également son origine dans le
mandat et dans la résolution relative au plan de partage de la Palestine ... Cette
responsabilité a été décrite par l’Assemblée générale comme «une responsabilité
permanente à assumer en ce qui concerne la question de Palestine jusqu’à ce qu’elle
soit réglée sous tous ses aspects de manière satisfaisante et dans le respect de la
légitimité internationale» (résolution 57/107 de l’Assemblée générale, en date du
3 décembre 2002). Dans le cadre institutionnel de l’Organisation, cette responsabilité
s’est concrétisée par l’adoption de nombreuses résolutions du Conseil de sécurité et de
l’Assemblée générale, ainsi que par la création de plusieurs organes subsidiaires
spécifiquement établis pour oeuvrer à la réalisation des droits inaliénables du peuple
palestinien.»
(Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis
consultatif, C.I.J. Recueil 2004, p. 159, par. 49).
114. De ce fait, comme dans le cas de la Namibie, la responsabilité de l’Organisation et de
ses organes à l’égard du territoire palestinien englobe non seulement l’exercice de leurs propres
- 19 -
fonctions stricto sensu, mais inclut également les mesures prises tant par Israël que par des Etats
tiers.
115. Ces deux raisons cumulées ont conduit la Cour à adopter une interprétation et une
approche larges de la question alors posée par l’Assemblée générale concernant les conséquences
juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé. Cette interprétation
englobante était toutefois justifiée par les spécificités de la situation, qui n’est en rien comparable à
celle ayant trait à l’archipel des Chagos.
116. Néanmoins, même dans la configuration unique que présente la Palestine, le lien
nécessaire entre les fonctions de l’Assemblée générale, pour lesquelles celle-ci sollicitait un avis de
la Cour, et l’interprétation de cette demande, avait déjà été souligné lors du débat qui, au sein de
l’organe demandeur, avait précédé l’adoption de la résolution. Ainsi, et pour ne prendre qu’un seul
exemple, la République de Singapour avait déclaré, à cette occasion, que nonobstant la situation
particulière et unique de la Palestine à l’égard des Nations Unies : «[l]’objet de la demande d’avis
adressée à la Cour internationale de Justice devait être de contribuer aux travaux de l’Assemblée
générale, ou de les faciliter» (voir déclaration de Singapour, A/ES-10/PV. 23, p. 22).
117. Ce point a trouvé un écho dans l’opinion individuelle de M. le juge Owada qui, tout en
convenant avec la Cour que celle-ci pouvait rendre l’avis qui lui était demandé (position qui est
également celle de l’Allemagne en l’espèce), soutenait à juste titre que «[l]a Cour [devait] tenir
compte de l’existence éventuelle d’un différend bilatéral pour apprécier jusqu’à quel point elle
[devait] exercer sa compétence dans ces procédures consultatives et de quelle manière elle [devait]
le faire» (Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé,
avis consultatif, C.I.J. Recueil 2004, opinion individuelle de M. le juge Owada, ibid., p. 263,
par. 10).
118. Enfin, l’avis récent le plus pertinent pour une juste appréciation de la portée de la
demande actuelle est celui de 2010 rendu par la Cour sur la Conformité au droit international de la
déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo.
119. Les juges ont, dans celui-ci, souligné notamment que lorsque l’organe demandeur
souhaite que la Cour l’éclaire sur un très large ensemble de questions, il doit en faire expressément
la demande. (Conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance
relative au Kosovo, avis consultatif, C.I.J. Recueil 2010 (II), p. 423-424, par. 51).
120. En d’autres termes, ainsi que le sous-entendait la Cour dans ses précédents avis, il ne
convient pas de présumer que l’Assemblée générale souhaite obtenir des réponses à des questions
juridiques à moins qu’elle n’y fasse spécifiquement référence dans sa demande, ni que pareilles
réponses soient pertinentes pour ses travaux. Dans son avis sur la déclaration unilatérale
d’indépendance relative au Kosovo, la haute juridiction a donc confirmé, en faisant référence à ses
avis sur la Namibie et le mur, que lorsqu’un organe demandeur voulait obtenir une réponse à une
question particulière, il devait avoir «formulé [sa] question de sorte que cet aspect soit
expressément indiqué» (Conformité au droit international de la déclaration unilatérale
d’indépendance relative au Kosovo, avis consultatif, C.I.J. Recueil 2010 (II), p. 424, par. 51 (les
italiques sont de nous ; les références ont été omises)).
121. Il convient de rappeler que la requête en l’espèce ne comporte aucune référence aux
conséquences juridiques pour les Etats, ce qui cadre parfaitement avec la genèse de sa rédaction
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telle que rappelée plus haut. Elle répond également aux intentions sous-jacentes de ses principaux
soutiens qui n’étaient intéressés que par les conséquences, d’un point de vue pratique, des
conclusions de la Cour pour les travaux de l’Assemblée générale. À la différence de précédentes
demandes, celle en l’espèce a un caractère relativement limité et une portée réduite.
122. En résumé, le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale ont tous deux demandé des
avis consultatifs, notamment en relation avec des questions territoriales et de décolonisation, mais
aussi de manière plus générale, dans le but d’obtenir des conseils juridiques concernant des aspects
relevant du spectre normal de leurs compétences propres.
123. Lorsque, dans des cas exceptionnels, ces demandes incluaient également des questions
ayant trait, plus généralement, aux conséquences juridiques potentielles pour des Etats, les organes
demandeurs les ont incluses explicitement, et ils ne l’ont fait que dans la mesure où les
Nations Unies avaient une responsabilité particulière à l’égard du territoire en question.
124. L’Assemblée générale étant, cela va de soi, au fait de la jurisprudence de la Cour telle
que décrite précédemment, nul ne saurait présumer qu’elle voulait, en l’espèce, demander à la
haute juridiction (et qu’elle l’en aurait effectivement prié) de lui donner une réponse complète
concernant le statut du territoire en question et les conséquences juridiques pour les Etats de
mesures prises en liaison avec celui-ci. Si tel avait été le cas, elle l’aurait dit (et aurait dû le dire)
clairement. Elle a cependant choisi de ne pas formuler une telle demande. Au lieu de cela, pour
reprendre les mots mêmes des soutiens déjà cités, elle a seulement souhaité être éclairée sur les
modalités d’exercice de ses propres compétences en vertu des chapitres XI et XIII de la Charte des
Nations Unies, sans demander à la Cour de lui répondre quant à de possibles conséquences
juridiques pour des Etats.
125. De même, cette approche de la requête ne doit pas être interprétée comme tendant à
limiter les pouvoirs de l’Assemblée générale en vertu de l’article 96 de la Charte. Bien au contraire,
seule une interprétation stricte de la question soumise par elle à la Cour est compatible avec le
principe de coopération fonctionnelle qui sous-tend l’article 7 du texte fondamental, et qui, parce
qu’il s’agit d’une notion prépondérante, doit également s’appliquer à l’interprétation de l’article 96.
126. Qui plus est, l’Assemblée générale ne peut qu’avoir eu à l’esprit une telle interprétation
stricte de la question lorsqu’elle a présenté sa demande à la Cour, ainsi qu’en atteste l’historique de
la rédaction de sa résolution.
127. Ainsi, comme l’avait déjà précisé le juge Owada dans l’opinion citée plus haut, la
question de savoir si certains aspects d’une situation portée devant la Cour font également partie
d’un différend bilatéral, ne saurait être examinée par elle dans le seul contexte de la recevabilité de
la requête en tant que telle.
128. C’est lors de l’interprétation de la ou des questions qui leur sont posées que les juges
doivent se demander si le différend sous-jacent est par nature bilatéral, et si tel est le cas, dans
quelle mesure.
129. Le juge Owada a soutenu à bon escient que «répondre sous la forme d’un avis
consultatif relatif à l’objet de la requête ne revient pas à statuer sur l’objet même du différend
bilatéral qui existe» (Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire
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palestinien occupé, C.I.J. Recueil 2004, opinion individuelle de M. le juge Owada, ibid., p. 263,
par. 13) entre deux Etats. Il en a logiquement conclu que
«ce fait n’en [devait] pas moins infléchir l’ensemble de la procédure suivie par la
Cour en l’espèce ; en d’autres termes, … la Cour doit avant tout s’attacher à présenter,
certes, les conclusions en droit qu’elle aura objectivement tirées, mais dans la stricte
mesure du nécessaire et d’une manière qui soit utile à l’organe qui l’a saisie, à savoir
l’Assemblée générale, permettant à celui-ci de s’acquitter de ses fonctions
relativement à la situation qui est à l’origine de la demande, et s’abstenir de statuer
sur l’objet du différend entre les parties concernées».
(Ibid., par. 14 ; les italiques sont de nous).
130. L’Allemagne soutient respectueusement que ces considérations devraient, à plus forte
raison, être prises en compte par la Cour lors de l’interprétation par elle de la demande actuelle,
dans la mesure où, à la différence de la Palestine ou de la Namibie, les Nations Unies n’ont pas,
envers le territoire concerné en l’espèce, de responsabilité particulière au-delà de celle, générale,
de l’Organisation en ce qui concerne les questions de décolonisation.
131. En interprétant strictement la demande, c’est-à-dire, en la limitant aux questions
pertinentes pour l’Assemblée générale dans le contexte du processus global de décolonisation, la
Cour doit prendre en compte les termes mêmes de la requête qui, ainsi qu’indiqué plus haut, fait
spécifiquement référence à la nécessité pour les Nations Unies d’«oeuvrer activement pour la
décolonisation» en relation avec l’archipel des Chagos.
132. Il convient également de rappeler que le texte de la demande ne fait pas référence aux
conséquences susceptibles, pour des Etats, de la poursuite de l’administration de l’archipel des
Chagos par le Royaume-Uni.
133. Ainsi que la Cour permanente de Justice internationale l’a jadis déclaré dans son avis
consultatif sur l’Echange des populations grecques et turques, si «l[’Assemblée générale] … avait
aussi désiré connaître l’avis de la Cour sur ce point, … [elle] n’aurait pas manqué de le dire
expressément. C’est pourquoi la Cour ne se considère pas comme étant saisie de cette question»
(voir, mutatis mutandis, Echange des populations grecques et turques (convention VI de Lausanne,
30 janvier 1923, article 2), avis consultatif, série B n° 10, p. 17 ; les italiques sont de nous).
134. Il serait donc souhaitable que la Cour prenne en compte, en accord avec sa
jurisprudence antérieure, l’intention des Etats qui ont soutenu la requête. Ainsi qu’indiqué
précédemment, ces pays, et notamment la République de Maurice elle-même, qui est la nation la
plus intéressée à cet égard, ont eux-mêmes confirmé que la seule intention de l’Assemblée générale
était, en présentant cette demande, de s’informer des paramètres juridiques nécessaires pour
orienter ses travaux.
135. Ce n’est qu’ainsi que la Cour peut inscrire son action dans la continuité de sa propre
jurisprudence et notamment l’accorder avec le principe, énoncé par elle dans l’affaire du Sahara
occidental, selon lequel sa compétence consultative n’est pas destinée à lui permettre de trancher
un conflit ou un différend juridique sur la base d’une demande d’avis. La fonction de la procédure
consultative est de donner à l’organe demandeur la possibilité d’obtenir de la haute juridiction un
avis de nature à l’aider à exercer ses fonctions de manière adéquate. En l’espèce, l’avis consultatif
de la Cour aiderait l’Assemblée générale dans son action en relation avec le processus de
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décolonisation de l’archipel des Chagos dans l’hypothèse où les juges considéreraient que la
décolonisation de Maurice n’a pas encore été menée à bien de manière valide. (Voir, mutatis
mutandis, Sahara occidental, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1975, p. 26-27, par. 39).
136. En interprétant ainsi la demande, la Cour tiendrait compte du fait que ni elle, ni aucune
autre juridiction judiciaire ou arbitrale n’est compétente pour connaître d’une affaire contentieuse
sur le fond.
137. La nécessité de limiter le périmètre de l’avis consultatif aux aspects de la situation
générale pertinents pour l’Assemblée générale, plutôt que de juger le différend bilatéral sous-jacent
dans son ensemble, ne découle cependant pas uniquement du principe de consentement qui soustend
l’exercice de la compétence de la Cour.
138. Une telle interprétation trouve également sa justification dans la manière dont une
demande d’avis consultatif est plaidée devant la Cour, ce qui diffère de la procédure contentieuse.
Sans ignorer la pratique de la haute juridiction dans les procédures consultatives consistant à
permettre aux Etats les plus concernés de présenter leur point de vue de manière plus complète à
l’audience, seules les parties à une affaire contentieuse peuvent présenter une argumentation
complète, tant sur la compétence que sur le fond.
139. En dépit des efforts des juges pour entendre les Etats concernés dans le cadre des
procédures consultatives, il leur est impossible, du simple fait du nombre de participants, de
garantir pleinement et de manière adéquate un droit à être entendu et à argumenter dans un tel
contexte. Pour éviter une situation dans laquelle une affaire pourrait être jugée non seulement
contre la volonté d’Etats défendeurs, mais aussi avec des garanties et droits procéduraux restreints,
la Cour doit limiter les avis qui lui sont demandés aux questions qui intéressent directement
l’organe demandeur, en l’occurrence l’Assemblée générale, et qui sont également pertinentes pour
l’exercice par celui-ci de ses propres compétences.
140. Il est donc allégué que, pour cette raison supplémentaire également, l’intention de
l’Assemblée générale ne pouvait être de solliciter un avis portant sur les questions plus larges liées
à la requête, dans la mesure où il en résulterait une situation dans laquelle les droits procéduraux
des Etats les plus concernés par la demande, telle que ressortant d’une interprétation plus large,
seraient sensiblement plus limités que si la Cour avait été compétente pour connaître de l’affaire
dans un cadre contentieux.
141. En résumé, si l’Allemagne considère que toutes les questions devant être abordées pour
permettre à l’Assemblée générale d’effectuer les tâches qui lui incombent en relation avec le
processus de décolonisation sont incluses dans la demande, les aspects bilatéraux de celle-ci ne
devraient pas être examinés.
142. Il conviendrait donc que la Cour s’abstienne de connaître de ces aspects pour éviter de
trancher un différend bilatéral, dans la mesure où il ne saurait être présumé que l’organe demandeur
a, en violation du principe de coopération fonctionnelle avec la haute juridiction qui sous-tend
l’article 7 de la Charte des Nations Unies, souhaité porter le litige devant le juge au moyen d’une
demande d’avis consultatif.
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143. Dans l’hypothèse où la Cour se déclarerait compétente pour connaître de la demande, et
où elle considérerait en outre que la décolonisation du territoire en question n’a pas encore été
validement menée à bien (point sur lequel l’Allemagne ne prend pas position), elle devrait se
borner à étudier les conséquences juridiques, pour les Nations Unies en général et l’Assemblée
générale en particulier, susceptibles de découler de la poursuite de l’administration du territoire en
question par le Royaume-Uni.
144. La Cour pourrait alors fournir des conseils juridiques quant à la manière dont
l’Assemblée générale et, le cas échéant, son Comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui
concerne l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples
coloniaux (également appelé Comité spécial de la décolonisation, dit «Comité spécial des
Vingt-Quatre»), devraient traiter la situation.
145. De même, elle ne devrait pas prendre en compte les conséquences juridiques
susceptibles d’en résulter pour les Etats, y compris les Etats tiers.
146. De la sorte, elle éviterait de prendre position sur les aspects de la situation générale qui
concernent uniquement le règlement d’un différend opposant les Etats directement concernés,
c’est-à-dire le Royaume-Uni et Maurice. Il serait souhaitable qu’elle ne s’attache qu’aux
conséquences juridiques susceptibles d’en résulter pour les Nations Unies en général, et
l’Assemblée générale en particulier ou, plus spécifiquement, son Comité spécial de la
décolonisation.
147. Enfin, la Cour devrait également s’abstenir de s’interroger sur les remèdes éventuels qui
pourraient faire suite à des violations du droit international susceptibles d’avoir été commises par
les Etats impliqués, en particulier concernant la question de la réinstallation des Chagossiens. Une
fois encore, nul ne saurait présumer que l’Assemblée générale les avait à l’esprit lorsque, en tant
qu’organe désireux d’obtenir conseil quant à ses travaux futurs, elle a sollicité le présent avis. La
raison en est que ce dernier aspect se rapporte lui aussi à un différend bilatéral entre Maurice et le
Royaume-Uni, alors que l’Assemblée générale avait uniquement à l’esprit les conséquences
éventuelles pour son action ultérieure dans le cadre des chapitres XI et XIII de la Charte
des Nations Unies.
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CHAPITRE 6
RÉSUMÉ DES ARGUMENTS ET CONCLUSIONS
A. RÉSUMÉ DES ARGUMENTS DE L’ALLEMAGNE
148. En bref, le plein soutien de l’Allemagne au processus de décolonisation demeure intact.
Elle ne s’en sent pourtant pas moins l’obligation de faire valoir un certain nombre de points
concernant la procédure consultative dont est actuellement saisie la Cour.
149. Son intervention est dictée par le souci de préserver les compétences et le rôle
spécifiques des divers organes des Nations Unies, en l’occurrence l’Assemblée générale et la Cour
elle-même.
150. L’Assemblée générale a, en maintes occasions, joué un rôle prépondérant dans le
processus de décolonisation. Un avis juridique de la haute juridiction pourrait donc constituer une
aide dans le cadre des processus de décolonisation demeurés inachevés, et plus particulièrement
celui de l’archipel des Chagos, mais aussi en relation avec les conséquences susceptibles d’en
résulter pour l’Assemblée elle-même.
151. Certains aspects des questions présentées à la Cour pourraient toutefois, s’ils étaient
interprétés trop libéralement, toucher à des domaines qui ne concernent que les deux Etats
impliqués, soit Maurice et le Royaume-Uni, ou le cas échéant, des Etats tiers. Consciente de ce
risque, l’Allemagne estime que l’interprétation d’une demande d’avis consultatif ne devrait pas
permettre de contourner le principe fondamental qui veut que la compétence de la haute juridiction
repose sur le consentement des deux Etats.
152. Ainsi qu’expliqué, la Cour a, en maintes occasions, usé de son pouvoir pour interpréter,
préciser et reformuler les demandes d’avis consultatif, dans le but de cerner la véritable question
posée et l’intention de l’organe dont elle émane.
153. L’Allemagne soutient donc qu’il convient de présumer que l’Assemblée générale
n’entendait pas placer la Cour dans une situation où elle aurait à juger d’un différend bilatéral, mais
qu’au contraire, elle ne souhaitait obtenir de celle-ci que des réponses qui lui étaient nécessaires
pour remplir ses missions en relation avec un processus de décolonisation, dans l’hypothèse où
celui-ci serait considéré comme inachevé.
154. La haute juridiction devrait donc considérer que la question dont elle est saisie ne
concerne que les aspects touchant à l’action des Nations Unies, et plus particulièrement, de
l’Assemblée générale en tant qu’organe demandeur.
B. CONCLUSIONS
155. Pour les motifs énoncés dans le présent exposé écrit, l’Allemagne soutient
respectueusement :
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i) que la Cour est compétente pour connaître de la demande d’avis consultatif contenue dans
la résolution A/71/L.73 de l’Assemblée générale, et qu’elle peut rendre l’avis qui lui est
demandé ;
ii) que la Cour doit, conformément à l’intention sous-jacente de l’Assemblée générale, limiter
son avis consultatif aux aspects de la requête pertinents pour l’organe demandeur afin que
celui-ci puisse exercer ses compétences en relation avec les questions de décolonisation ;
iii) que la Cour ne devrait, en conséquence, pas répondre
a) à la question ayant trait aux conséquences juridiques susceptibles de résulter pour les Etats, y
compris les Etats tiers, d’une décision rendue par la Cour en relation avec la question de savoir
si la décolonisation de Maurice a été ou non validement menée à bien ;
b) à la question des remèdes éventuels qui pourraient faire suite à de possibles violations du droit
international, en particulier en relation avec la question de la réinstallation des Chagossiens.
Berlin, le 15 janvier 2018.
L’ambassadeur,
conseiller juridique,
ministère des affaires étrangères de la
République fédérale d’Allemagne,
(Signé) Michael KOCH.
___________

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Exposé écrit de l'Allemagne

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