Volume II

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153-20170321-WRI-01-01-EN
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Note: Cette traduction a été établie par le Greffe à des fins internes et n’a aucun caractère officiel
14936
COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
AFFAIRE RELATIVE À L’OBLIGATION DE NÉGOCIER UN ACCÈS
À L’OCÉAN PACIFIQUE
(BOLIVIE c. CHILI)
RÉPLIQUE DU GOUVERNEMENT DE L’ÉTAT PLURINATIONAL
DE BOLIVIE
VOLUME 2
(Annexes 234-277)
21 MARS 2017
[Traduction du Greffe]
TABLE DES MATIÈRES
ANNEXE

TITRE SOURCE Page
234 Circulaire en date du 25 janvier 1901
adressée aux légations de la Bolivie à
l’étranger par le ministère bolivien des
affaires étrangères [extrait]
Ministère bolivien des affaires
étrangères, «Rapport du ministre
bolivien des affaires étrangères au
Congrès ordinaire de 1901»
(1902), p. 97-101
1
235 Télégramme no 723.2515/503 en date du
6 octobre 1919 adressé au secrétaire d’Etat
par M. Goold, chargé d’affaires des
Etats-Unis d’Amérique en Bolivie
Département d’Etat des Etats-
Unis d’Amérique, Papers
relating to the Foreign Relations
of the United States (1919),
volume I, p. 160.
5
236 Note en date du 20 décembre 1921
adressée à M. Ernesto Barros Jarpa,
ministre chilien des affaires étrangères, par
M. Alberto Gutiérrez, ministre bolivien des
affaires étrangères
Service d’information du
ministère chilien des affaires
étrangères, Le Chili et
l’aspiration de la Bolivie à
disposer d’un port dans le
Pacifique (1922), p. 135-138
6
237 Note no 1725 en date du 21 décembre 1921
adressée à M. Macario Pinilla, ministre
plénipotentiaire de Bolivie au Chili, par
M. Ernesto Barros Jarpa, ministre chilien
des affaires étrangères
Archives du ministère bolivien
des affaires étrangères
8
238 Service d’information du ministère des
affaires étrangères du Chili, Le Chili et
l’aspiration de la Bolivie à disposer d’un
port dans le Pacifique (1922), p. 155-157
[extrait]
10
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
242 Télégramme no 723.2515/1952 en date du
20 février 1926 adressé à M. Frank B.
Kellogg, secrétaire d’Etat américain, par
M. W. Miller Collier, ambassadeur des
Etats-Unis d’Amérique au Chili
Département d’Etat des
Etats-Unis d’Amérique,
Papers relating to the Foreign
Relations of the United States,
1926, volume I, p. 306-308
12
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
247 Procès-verbal de la réunion des
plénipotentiaires du Pérou et du Chili tenue
le 4 juin 1926 sous les bons offices de
M. Frank B. Kellogg, secrétaire d’Etat
américain
Département d’Etat des
Etats-Unis d’Amérique, Papers
relating to the Foreign Relations
of the United States, 1926,
volume I, p. 462-465
15
248 Télégramme no 723.2515/2415 en date du
9 juin 1926 adressé à M. W. Miller Collier,
ambassadeur des Etats-Unis d’Amérique
au Chili, par M. Frank B. Kellogg,
secrétaire d’Etat américain
Département d’Etat des Etats-
Unis d’Amérique, Papers
relating to the Foreign Relations
of the United States, 1926,
volume I, p. 475 et 476
19
- ii -
249 Note no 169 en date du 11 juin 1936,
adressée à M. Enrique Baldivieso, ministre
bolivien des affaires étrangères, par
M. Alberto Ostria Gutiérrez, ministre
plénipotentiaire de la Bolivie à Lima
Archives du ministère bolivien
des affaires étrangères
21
250 Traité de paix, d’amitié et de limites entre
la Bolivie et le Paraguay, signé à
Buenos Aires le 21 juillet 1938
(ratifications échangées le 29 août 1938)
www.latinamericanstudies.org/
paraguay/chaco-treaty.pdf
23
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
268 Note n° 646/433 en date du 13 juillet 1950
adressée à M. Pedro Zilveti Arce, ministre
bolivien des affaires étrangères, par
M. Alberto Ostria Gutiérrez, ambassadeur
de Bolivie au Chili
Archives du ministère bolivien
des affaires étrangères
30
269 ««Il a uniquement été convenu d’entamer
un dialogue avec la Bolivie ; Arica restera
toujours libre», déclare
M. González Videla», revue VEA (Chili),
19 juillet 1950
Revue VEA (Chili) 31
270 ««Le Chili est disposé à étudier
l’aspiration de la Bolivie sur la base de
compensations réciproques», affirme le
ministre des affaires étrangères», revue
VEA, 19 juillet 1950
Revue VEA (Chili) 33
271 Déclarations faites à la presse par
M. Alberto Ostria Gutiérrez, ambassadeur
de Bolivie à Santiago, le 30 août 1950
Ministère bolivien des affaires
étrangères, bulletin
d’information, n° 21 (juilletdécembre
1950), p. 14-20
35
272 Note en date du 1er septembre 1950
adressée au département américain du
Foreign Office par l’ambassade
britannique à La Paz
Archives du ministère des affaires
étrangères et du Commonwealth
du Royaume-Uni de
Grande-Bretagne et d’Irlande du
Nord
40
273 Note nº 832/505 en date du 4 septembre
1950 adressée à M. Pedro Zilveti Arce,
ministre bolivien des affaires étrangères,
par M. Jorge de la Barra, chargé d’affaires
de la Bolivie au Chili
Archives du ministère bolivien
des affaires étrangères
41
274 «Le ministre des affaires étrangères
maintient les déclarations faites concernant
la Bolivie», La Nación (Chili),
5 septembre 1950
Journal La Nación (Chili) 48
275 Note nº 844/513 en date du 9 septembre
1950 adressée à M. Pedro Zilveti Arce,
ministre bolivien des affaires étrangères,
par M. Alberto Ostria Gutiérrez,
ambassadeur de Bolivie au Chili
Archives du ministère bolivien
des affaires étrangères
50
- iii -
276 «Ne nous laissons pas diviser par des partis
politiques pour régler nos affaires
étrangères», El Imparcial (Chili),
13 septembre 1950
Journal El Imparcial (Chili) 52
277 «L’ambassadeur Ostria s’est exprimé à
La Paz sur le problème portuaire chilénobolivien
», El Diario Ilustrado (Chili),
6 janvier 1951
Journal El Diario Ilustrado
(Chili)
63
___________
ANNEXE 234
CIRCULAIRE EN DATE DU 25 JANVIER 1901 ADRESSÉE AUX LÉGATIONS DE LA BOLIVIE À
L’ÉTRANGER PAR LE MINISTÈRE BOLIVIEN DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
[EXTRAIT]
Ministère bolivien des affaires étrangères, «Rapport du ministre bolivien
des affaires étrangères au Congrès ordinaire de 1901» (1902),
p. 97 à 101
CHILI
Ministère des affaires étrangères
Circulaire à l’intention des légations de la Bolivie à l’étranger
La Paz, le 25 janvier 1901
Lorsque j’ai pris mes fonctions au ministère des affaires étrangères, l’un de mes premiers
devoirs à titre de ministre a été la douloureuse, cela est un fait, mais néanmoins inévitable tâche de
rectifier diverses considérations et affirmations contenues dans la circulaire en date du
30 septembre adressée par le ministère chilien des affaires étrangères à son corps diplomatique à
l’étranger.
Les déclarations sévères qu’elle contient, pour expliquer simplement la portée réelle de la
note adressée à notre gouvernement par M. König, ministre plénipotentiaire du Chili, révèlent
malheureusement, non seulement l’objectif naturel et légitime du Gouvernement chilien, qui est de
justifier la ligne de conduite qu’il a adoptée dans ses relations avec le Pérou et la Bolivie, mais
aussi une méconnaissance totale des droits de ces pays sur les territoires occupés aujourd’hui par le
Chili. Plus étrange encore, alors que ces deux pays mènent actuellement des négociations visant à
un rapprochement et à la conclusion d’un accord de paix définitif entre eux, l’on peut également
percevoir dans cette circulaire la tendance marquée à attribuer à la politique bolivienne une certaine
vanité odieuse quant au respect de ses engagements ainsi qu’une aspiration indue et tenace à
posséder ce qui ne lui revient aucunement.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Les différentes accusations que j’ai abordées ici font référence à des faits survenus avant la
guerre de 1879, mais qui sont intimement et significativement liés à notre politique actuelle, ce qui
explique que je doive en tenir compte.
Il est reproché à la Bolivie et au Pérou d’entraver la noble intention du Gouvernement chilien
de réconcilier et de satisfaire pleinement les aspirations et les intérêts des deux peuples afin
d’assurer la réalisation d’une paix définitive entre les trois pays. Dans cet esprit, l’accusation
suivante est formulée :
«Alors que, grâce à nos longues années d’efforts et à des sacrifices très durs, le
dénouement semblait proche, nous avons vu se dresser un obstacle imprévu, et avons
été placés dans une situation sans issue. Le Pérou a refusé de discuter du protocole
plébiscitaire avant que nous ayons conclu avec la Bolivie un traité de paix qui
exclurait tout droit fortuit à la possession de Tacna et d’Arica ; et la Bolivie a, quant à
elle, reporté les négociations sur le traité de paix jusqu’à ce que nous soyons parvenus
- 2 -
à un accord sur le protocole plébiscitaire avec le Pérou et que nous ayons organisé ce
plébiscite.»
Il est incompréhensible que la Bolivie puisse se voir attribuer, dans les négociations de paix
susmentionnées et toujours en cours, un rôle qui soit à ce point différent de celui qu’elle a
réellement été en mesure de jouer et si opposé aux objectifs qu’elle a poursuivis avec abnégation et
détermination.
S’il est souvent difficile de faire la lumière sur des événements passés et obscurcis par le
temps écoulé, rien n’est plus facile, en revanche, que de clarifier les faits contemporains, en
particulier lorsqu’ils viennent de se dérouler sous nos yeux.
Dans le cas présent, pour établir sans conteste qui doit être tenu responsable du fait qu’il n’a
pas été possible jusqu’à présent de parvenir à un accord de paix définitif, il suffit de rappeler les
actions diplomatiques entreprises par les deux pays, illustrées par les différents pactes conclus au
cours de la dernière période et par les efforts déployés pour mettre ces pactes en oeuvre.
Une fois la convention d’armistice signée, avec tout ce qu’elle comptait de conditions
contraignantes imposées à la Bolivie, il était naturel que cette dernière cherche à s’en libérer, en lui
substituant un traité de paix définitif, même s’il lui fallait pour cela se résigner à accepter des
sacrifices douloureux.
Toutefois, il était également naturel que le Chili aspire à consolider la souveraineté qu’il
entendait exercer sur les territoires qu’il avait temporairement occupés.
Après une tentative de règlement infructueuse et au lendemain de la guerre civile qui avait
éclaté au Chili, une déclaration de belligérance, âprement exigée par ses partisans, a été produite, et
avec elle vint le rapprochement des relations entre le Gouvernement bolivien et le triomphant
Gouvernement chilien.
On pouvait alors s’attendre à ce qu’un traité favorable à la Bolivie voie le jour, mais ce fut
loin d’être le cas.
Le protocole du 19 mai 1891 a été élaboré par le ministre chilien, M. Juan Gonzalo Matta.
En dépit de ses conditions très lourdes et désavantageuses, et bien qu’il ait complétement écarté
l’idée d’un port pour la Bolivie, ce protocole a été approuvé par le Congrès bolivien qui, après une
forte résistance en son sein, a recommandé au gouvernement de prendre des mesures pour
l’améliorer autant que possible.
Quand le tour du Chili fut venu, le traité s’est trouvé paralysé.
Peu de temps après, le Gouvernement chilien a lui-même relancé la recherche d’un traité de
paix définitif, permettant, autant que faire se peut, de concilier les intérêts des deux pays.
La Bolivie a pleinement soutenu cet objectif et chargé son plénipotentiaire à Santiago de
s’atteler à le négocier.
Après une série de rencontres sérieuses, deux traités ont été conclus, le 18 mai 1895 : un
traité de paix et d’amitié, et un accord de cession territoriale.
Le premier instrument a reconnu la souveraineté absolue et perpétuelle du Chili sur le
territoire qu’il gouvernait en application de la convention d’armistice ; dans le second, le Chili
s’engageait à céder à la Bolivie les territoires de Tacna et d’Arica si, par suite du plébiscite ou de
négociations directes, ceux-ci lui revenaient. Le Chili s’est engagé à déployer tous les efforts
nécessaires à cette fin.
- 3 -
De plus, si le Chili ne parvenait pas à obtenir les territoires de Tacna et d’Arica, il
s’engageait à céder à la Bolivie Vítor ou une rade équivalente, ainsi que la somme de 5 millions de
pesos.
Par ces instruments, les deux gouvernements ont reconnu que l’obtention d’un port,
maintenant considérée dans la circulaire comme une obsession tenace et injustifiée, constituait pour
la Bolivie une aspiration naturelle et juste à obtenir au moins une bande de territoire qui lui
permette d’accéder à la mer, en échange de tout le territoire côtier qu’elle cédait, la Bolivie
n’exigeant qu’un seul port contre la cession de quatre ports et de sept criques situés sur son littoral.
Deux protocoles complémentaires ont été conclus par la suite : l’un relatif à la liquidation
des dettes, signé à Santiago le 28 mai de cette même année ; et l’autre relatif à la portée des
obligations convenues dans les traités du 18 mai, signé à Sucre le 9 décembre de cette année-là.
Ce dernier a été conclu afin de consigner par écrit que les traités de paix et de cession
territoriale formaient un tout indivisible contenant des obligations réciproques ; et que le port que le
Chili était tenu de céder à la Bolivie, dans le cas où il ne parviendrait pas à obtenir Tacna et Arica,
devait satisfaire pleinement aux besoins actuels et futurs de la Bolivie en matière de commerce et
d’industrie.
Etant donné que la portée de la condition susmentionnée semblait toujours vague et
indéterminée pour le Gouvernement du Chili, les deux pays sont convenus de la clarifier, et un
dernier protocole explicatif a été conclu et signé à Santiago le 30 avril 1896.
Tous ces pactes ont été approuvés par le Congrès de Bolivie, sans exception. Le Chili, en
revanche, a seulement approuvé les deux instruments principaux, mettant en attente l’approbation
législative des protocoles du 9 décembre 1895 et du 30 avril 1896, et empêchant ainsi la conclusion
définitive des négociations ; tout cela en dépit du fait que ces protocoles avaient été largement
débattus et déjà approuvés par le Conseil d’Etat de cette République.
Le texte de l’approbation législative du Congrès de Bolivie est reproduit ci-après :
«Mariano Baptista
Président constitutionnel de la République de Bolivie.
Le Congrès national ayant approuvé la loi suivante :
Le Congrès national
Décrète :
Article unique : Les deux traités de paix et de cession territoriale, conclus dans
la ville de Santiago le 18 mai de cette année, et les protocoles complémentaires — le
premier en date du 28 du même mois et le second daté de ce jour —, les trois premiers
signés par les plénipotentiaires respectifs, M. Heriberto Gutierrez et M. Luis Barros
Borgoño, et le dernier signé dans ladite capitale par le ministre bolivien des affaires
étrangères, M. Emeterio Cano, et le ministre plénipotentiaire du Chili,
M. Juan Gonzalo Matta, sont par la présente approuvés comme un tout indivisible
contenant des obligations réciproques.
Informe le pouvoir exécutif des mesures constitutionnelles [qui doivent être
prises à cette fin].
- 4 -
Salle d’audience — Sucre, le 9 décembre 1895 — Severo Fernández Alonso
􀁿 Federico Zuazo — Gil Antonio Peña, sénateur secrétaire — Fanor G. Romero,
secrétaire adjoint— Adolfo Trigo Achá, secrétaire adjoint.
Par conséquent, je promulgue cette loi afin qu’elle puisse être considérée
comme une loi de la République et respectée en tant que telle.
Siège du gouvernement à Sucre, le 10 décembre 1895 􀁿 M. Baptista 􀁿
M. Emeterio Cano.»
Cette transcription montre que la Bolivie s’est dûment acquittée de l’obligation qui lui était
faite d’adopter les dispositions convenues, et que c’est le Gouvernement du Chili qui, en hésitant
constamment, a retardé leur mise en oeuvre définitive, son congrès n’ayant toujours pas approuvé
les protocoles explicatifs susmentionnés.
La Bolivie, cependant, a persisté dans son intention de respecter les dispositions prévues et a
chargé sa légation au Chili de continuer à suivre les étapes devant mener à l’approbation des
protocoles susmentionnés.
Malgré tous les efforts déployés, notre chancellerie a été informée, par télégramme reçu
le 22 de ce mois, que le Sénat du Chili avait, à la demande du pouvoir exécutif, décidé à sa dernière
session de restituer à la Bolivie les protocoles encore en sa possession, afin d’obtenir la solution
qu’il désirait, sur des bases différentes de celles proposées et approuvées précédemment.
Qui pourra encore affirmer que c’est la Bolivie qui a retardé l’avènement d’une paix
définitive avec le Chili ?
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
___________
- 5 -
ANNEXE 235
TÉLÉGRAMME NO 723.2515/503 EN DATE DU 6 OCTOBRE 1919 ADRESSÉ AU
SECRÉTAIRE D’ETAT PAR M. GOOLD, CHARGÉ D’AFFAIRES DES
ETATS-UNIS D’AMÉRIQUE EN BOLIVIE
Département d’Etat des Etats-Unis d’Amérique, Papers relating to the
Foreign Relations of the United States (1919), volume I, p. 160
Département d’Etat
Documents relatifs aux relations étrangères des Etats-Unis d’Amérique
1919
(en deux volumes)
Volume I
723.2515/503 : Télégramme
Le chargé d’affaires en Bolivie (Goold) au secrétaire d’Etat
La Paz, 6 octobre 1919, 11 heures
[Reçu à 12 h 54.]
Le ministre chilien affirme que le Chili a officiellement promis un port à la Bolivie, cette
cession devant être réalisée dès que le différend qui oppose le Chili au Pérou aura été résolu. Il ne
précise pas quel port a été offert. Ce port n’est certainement pas Arica, mais il s’agit probablement
d’une bande côtière située au nord d’Arica, où un port pourrait être possible.
GOOLD.
___________
- 6 -
ANNEXE 236
NOTE EN DATE DU 20 DÉCEMBRE 1921 ADRESSÉE À M. ERNESTO BARROS JARPA,
MINISTRE CHILIEN DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES, PAR M. ALBERTO GUTIÉRREZ,
MINISTRE BOLIVIEN DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
Service d’information du ministère chilien des affaires étrangères,
Le Chili et l’aspiration de la Bolivie à disposer d’un port
dans le Pacifique (1922), p. 135-138
LA BOLIVIE ET LES NÉGOCIATIONS BARROS JARPA-SALÓMON
La Paz, les 20 et 21 décembre 1921
Votre Excellence, ministre des affaires étrangères, Santiago.
Monsieur le ministre :
Le treizième jour de ce mois, le chargé d’affaires du Chili a été heureux de communiquer à
ce ministère la teneur de la proposition transmise par son gouvernement à celui du Pérou, afin de
trancher définitivement par voie de plébiscite, qui se tiendrait sur les bases proposées ou discutées
entre les deux gouvernements en 1912, la question de la nationalité des provinces de Tacna et
d’Arica. Le 16, il a demandé au soussigné quelles seraient les idées de ce gouvernement sur la
proposition précitée. Le soussigné n’a pas hésité à exprimer au représentant du Chili que, même s’il
était heureux de constater qu’il était possible de régler les questions qui ont altéré les bonnes
relations entre son pays et le Pérou, il ne pensait pas que la procédure indiquée par le
Gouvernement chilien donnerait les résultats escomptés. Toutefois, le soussigné a ajouté que cela
pourrait être l’occasion de recourir à des initiatives plus efficaces pour contribuer à résoudre la
question du Pacifique dans un cadre large et juste en vue d’instaurer une paix définitive sur le
continent.
Hier, le chargé d’affaires du Pérou a transmis une note à ce ministère, contenant le
télégramme de réponse que son gouvernement avait adressé à celui du Chili. Dans cette réponse, le
Gouvernement péruvien s’excuse de ne pas accepter la procédure plébiscitaire à laquelle il était
invité, et propose de soumettre la question du Pacifique Sud, dans son intégralité, à un arbitrage qui
serait initié ou convenu sous les auspices du Gouvernement des Etats-Unis d’Amérique.
Mon gouvernement a examiné attentivement les deux communications en raison de l’intérêt
qu’il porte à la situation d’enclavement de la Bolivie dans la question du Pacifique, dont la
résolution possible lui impose une attitude déterminée et lui donne le droit incontestable
d’intervenir en la matière.
La question de la nationalité de Tacna et d’Arica n’est pas la seule qui persiste à la suite de la
guerre du Pacifique et des traités signés en conséquence. Le problème est multiple et ses différents
aspects présentent des liens étroits dont le règlement des uns ne peut que provoquer l’aggravation
des autres.
Le conflit de 1879 a pris fin avec la conclusion de pactes qui n’ont fait que traduire la
situation belliqueuse de l’époque, mais qui ont semé dans l’esprit et les intérêts des peuples vaincus
le germe de bouleversements qui ne pouvaient être que la source d’un malaise international
constant.
- 7 -
La paix du continent sud-américain impose de fonder les relations entre ces peuples sur les
principes de justice et de réparation, seule base possible pour obtenir des accords pacifiques et
durables.
La Bolivie n’ignore pas les obligations imposées par les traités publics ; toutefois, il ne s’agit
pas seulement d’examiner si celles-ci ont été pleinement respectées par les parties contractantes,
mais également de déterminer si ces obligations peuvent être maintenues alors qu’elles ont entraîné
l’annulation même d’éléments essentiels de la vie internationale et de la souveraineté nationale de
l’une des parties concernées.
Convaincue d’être en droit de réclamer réparation pour la privation injuste des dons que la
nature lui avait faits et avec lesquels elle avait entamé sa vie indépendante, la Bolivie s’est tournée
vers les nations civilisées pour soumettre sa mutilation internationale à leur étude.
L’article 19 du traité de Versailles, inspiré par les besoins et les doctrines de son époque, a
expressément reconnu que ce genre de situations pouvait se produire et se produisait, et a par
conséquent indiqué les procédures appropriées pour y remédier. La demande bolivienne présentée
en septembre dernier devant l’assemblée de la Société des Nations servait cet objectif.
Le Gouvernement du Pérou, dans sa réponse à l’invitation de la chancellerie de Santiago, a
déclaré, pour des raisons qui lui sont propres et dont l’examen ne correspond pas à celui de la
Bolivie, qu’il refusait le plébiscite, proposant à la place de recourir à un arbitrage qui, organisé sous
les auspices du Gouvernement des Etats-Unis, permettrait de résoudre dans son ensemble la
question du Pacifique.
Le différend relatif au port du Pacifique étant posé ainsi, mon gouvernement ne peut rester
silencieux et déclare, en toute indépendance, qu’il accepterait volontiers que la question du
Pacifique, dont le règlement doit tenir compte des droits et des intérêts de la Bolivie, soit tranchée
au moyen d’une procédure essentiellement juridique, telle que celle de l’arbitrage, qui apporterait
certainement une ère de paix et de bien-être aux nations qui décideraient de soumettre leurs
désaccords à ce moyen civilisé de régler les conflits internationaux.
En outre, puisqu’il est aisé de prévoir que les Gouvernements du Pérou et du Chili ne
parviendront pas à s’entendre à cette fin, mon gouvernement propose d’organiser une conférence
internationale composée des représentants des nations directement concernées par cette grave
question du Pacifique et des autres nations voisines ou amies du continent.
Le Gouvernement bolivien reconnaît que les Gouvernements du Chili et du Pérou ont
démontré leur amour de la paix et leur esprit de conciliation en envisageant une solution juridique,
et souhaite profiter de cette opportunité pour faire entendre leurs points de vue et ses droits dans la
résolution de la question du Pacifique.
A cette occasion, j’ai l’honneur, Monsieur le ministre, de présenter à Votre Excellence
l’expression de ma très haute considération.
Le ministre des affaires étrangères,
A. GUTIÉRREZ.
___________
- 8 -
ANNEXE 237
NOTE NO 1725 EN DATE DU 21 DÉCEMBRE 1921 ADRESSÉE À M. MACARIO PINILLA, MINISTRE
PLÉNIPOTENTIAIRE DE BOLIVIE AU CHILI, PAR M. ERNESTO BARROS JARPA, MINISTRE
CHILIEN DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
Archives du ministère bolivien des affaires étrangères
République du Chili
Ministère des affaires étrangères
Santiago, le 21 décembre 1921
Section diplomatique
No 1725
A S. Exc. M. Macario Pinilla,
envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de la Bolivie au Chili 􀁿 Santiago.
Monsieur le ministre,
S. Exc. M. Alberto Gutiérrez, ministre bolivien des affaires étrangères, a envoyé au
soussigné une communication télégraphique directe, pour laquelle ma réponse ne pouvait pas, selon
moi, exclure Votre Excellence, qui est le plus haut représentant de la Bolivie au Chili en sa qualité
d’envoyé extraordinaire et de ministre plénipotentiaire.
Cette communication exprime le souhait que, compte tenu de la controverse diplomatique
dans laquelle le Chili et le Pérou se trouvent actuellement engagés, les droits et les intérêts de la
Bolivie soient pris en considération dans la question du Pacifique en ce qui concerne les solutions
suggérées par S. Exc. le ministre bolivien des affaires étrangères, qui seraient selon lui adéquates et
appropriées.
En réponse, je tiens à signifier à Votre Excellence que la négociation en cours entre les
Gouvernements du Chili et du Pérou découle d’un traité international signé entre ces deux pays et
dans lequel la Bolivie n’est ni intervenue ni n’intervient directement ou indirectement.
Tous les actes de la Bolivie visant à intervenir dans ce différend constituent une ingérence
qui est contraire aux usages diplomatiques et qui entame les bonnes relations entre nos deux pays.
La négociation engagée avec le Gouvernement péruvien a pour objectif de satisfaire à
l’article 3 du traité de 1883, pour ce qui n’a pas encore été mis en oeuvre. Avec la Bolivie, la
situation est entièrement différente : l’armistice de 1884 a laissé place au traité de paix et d’amitié
de 1904, signé au nom de la Bolivie par S. Exc. M. Alberto Gutiérrez, actuel ministre des affaires
étrangères. Ce traité a établi les conditions de justice et d’équité satisfaisantes pour les deux pays,
et permis d’étoffer les moyens de communication qui existaient à l’époque entre la Bolivie et la
côte, le Chili prenant à sa charge la construction de la voie ferrée entre Arica et La Paz, dont la
moitié doit être transférée à la Bolivie dans un proche avenir, sans frais pour ce pays. De cette
façon, la Bolivie a été reliée à la mer par trois chemins de fer : ceux d’Arica et d’Antofagasta au
Chili, et celui de Mollendo au Pérou.
Il convient de souligner que le traité en question a été appliqué et respecté sans qu’aucune
controverse ne soit jamais soulevée au sujet de sa mise en oeuvre ou de son interprétation.
- 9 -
Le Gouvernement de Votre Excellence a néanmoins été publiquement et solennellement
invité à Genève, puis à La Paz et à Santiago, à faire part directement au Chili de ses aspirations
quant à l’obtention d’un port sur le Pacifique.
Mais par une note datée du 16 novembre, Votre Excellence m’a informé du fait qu’elle avait
reçu «des instructions pour déclarer que la mission de Votre Excellence n’incluait, pour l’instant,
aucune proposition ou initiative sur les aspirations de la Bolivie à obtenir un port dans l’océan
Pacifique».
Les précédents que je viens de rappeler me conduisent à informer Votre Excellence que mon
gouvernement se considère dispensé d’examiner les propositions contenues dans la note
télégraphiée à laquelle je réponds. Je prie Votre Excellence de transmettre cette réponse à votre
gouvernement, et je suis particulièrement honoré de saisir cette occasion pour renouveler à
Votre Excellence l’assurance de ma plus haute et respectueuse considération.
(Signé) Ernesto BARROS.
___________
- 10 -
ANNEXE 238
SERVICE D’INFORMATION DU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DU CHILI, LE CHILI ET
L’ASPIRATION DE LA BOLIVIE À DISPOSER D’UN PORT DANS LE PACIFIQUE (1922), P. 155-157
[EXTRAIT]
Mémorandum du Gouvernement uruguayen
Le Gouvernement de l’Uruguay, en réponse à une demande de la Bolivie, a chargé ses
ministres à Santiago et à Lima d’échanger des idées avec les ministères des affaires étrangères des
deux pays concernant la possibilité d’éloigner de l’environnement américain l’incertitude que la
persistance de cette question pourrait faire peser sur la paix et la tranquillité de ces nations à
l’avenir.
Le ministre uruguayen, M. Martínez Thedy, exécutant les instructions du ministère des
affaires étrangères de son pays, s’est entretenu avec le ministre des affaires étrangères sur cette
question, afin de l’informer d’un mémorandum que le ministère uruguayen des affaires étrangères
venait d’envoyer au Gouvernement de La Paz concernant les problèmes que ce pays a soulevés
devant divers gouvernements d’Amérique du Sud au sujet de ses aspirations maritimes.
Ce mémorandum, qui est le fruit de conversations tenues entre M. Martínez Thedy et
M. Barros Jarpa, est formulé comme suit :
«Conformément à ce qui a été promis, le ministère uruguayen des affaires
étrangères a envoyé un mot amical à la chancellerie du Chili indiquant qu’il serait
bénéfique pour l’harmonie américaine de ne laisser subsister aucun motif de futurs
différends, qui se présenteront s’il n’est pas recherché, dans un esprit d’intérêt
réciproque et de cordialité, une solution à la question que la Bolivie soulève avec
insistance.
Nous sommes en mesure d’affirmer que la situation est appréciée de la même
manière au Chili, et que l’opinion qui prévaut est que la Bolivie ne devrait pas
soulever cette question devant des sociétés qui sont étrangères à la souveraineté du
Chili.
Le Chili est d’avis que, étant donné la nature juridique de la question devant
être examinée lors de la réunion de Washington, il n’y a pas lieu d’aborder ce point
avec le Pérou à cette occasion, mais réaffirme qu’il est disposé, en l’espèce, à
envisager des solutions directement avec la Bolivie. Le Chili fait observer qu’il a
toujours considéré cette question avec intérêt et dans un esprit d’amitié.
Notre impression est que la Bolivie ne perdra rien en tentant de résoudre ce
problème directement avec le Chili, et qu’elle peut au contraire saisir cette occasion
d’utiliser la bonne volonté maintes fois exprimée par le Gouvernement chilien à son
égard.
Les précédents dans cette affaire montrent que la présentation de la
revendication bolivienne devant divers pays et différentes juridictions a suscité le
mécontentement au Chili et risque de contrecarrer les tentatives faites pour régler ce
problème par le biais de négociations directes.
Il n’est peut-être pas approprié, pour trouver une solution, d’invoquer des
raisons strictement juridiques, en lieu et place de faire appel à la solidarité et à
l’harmonie continentales.»
- 11 -
Lorsque le ministre des affaires étrangères, M. Barros Jarpa, a été interviewé, il a fait les
déclarations suivantes à la presse concernant le mémorandum transcrit ci-dessus :
«Dès que je suis rentré de mon voyage à Tacna, j’ai reçu la visite du ministre
uruguayen, qui m’a informé de toutes les démarches entreprises par son gouvernement
pour soutenir activement les souhaits de la Bolivie, dans l’optique de participer aux
conférences entre le Chili et le Pérou à Washington.
J’ai dit à M. Martínez Thedy que le Gouvernement chilien n’était pas enclin à
accepter des exigences ou des insinuations relatives à ses problèmes extérieurs, mais
que, pour autant, il était très désireux d’échanger des idées à leur sujet et de faire
connaître ses points de vue.
Etant d’accord sur ce point, M. Martínez Thedy a écouté mon exposé exhaustif
et franc sur la position de notre pays face aux aspirations boliviennes.
J’ai également fait part à l’éminent diplomate uruguayen de l’idée qu’il serait
très intéressant pour les pays d’Amérique d’essayer de persuader la Bolivie que la voie
qu’elle a empruntée n’apportera aucune résolution favorable pour ses intérêts, mais
que, par contre, la Bolivie a bon espoir, au vu de la bonne volonté du Chili, qu’il sera
satisfait à ses aspirations, tant qu’elle veillera à maintenir à cet effet un esprit de
cordialité, d’amitié et de concessions réciproques.
C’est dans ce contexte que le mémorandum du Gouvernement uruguayen a été
remis au Gouvernement bolivien, mémorandum qui vaut encore une fois au premier
de ces pays la gratitude de notre peuple pour avoir endossé le rôle de porte-parole
autorisé et éloquent de notre thèse, et pour avoir ajouté des recommandations qui,
inspirées par un grand esprit d’harmonie continentale et une compréhension parfaite
du problème, apportent une justification historique pour notre pays.»
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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- 12 -
ANNEXE 242
TÉLÉGRAMME NO 723.2515/1952 EN DATE DU 20 FÉVRIER 1926 ADRESSÉ À
M. FRANK B. KELLOGG, SECRÉTAIRE D’ETAT AMÉRICAIN,
PAR M. W. MILLER COLLIER, AMBASSADEUR DES
ETATS-UNIS D’AMÉRIQUE AU CHILI
Département d’Etat des Etats-Unis d’Amérique, Papers relating to the Foreign
Relations of the United States, 1926, volume I, p. 306-308
Documents relatifs aux relations étrangères des Etats-Unis, 1926
(en deux volumes)
Volume I
723.2515/1952 : Télégramme
L’ambassadeur au Chili (M. Collier) au secrétaire d’Etat
[Paraphrase]
SANTIAGO, le 20 février 1926, à 15 heures
[Reçu le 21 février, à 12 h 25[1]]
23. Après que le ministre des affaires étrangères m’a remis son mémorandum la nuit
dernière, il a entamé une conversation et fait plusieurs déclarations qui, selon lui, ne devaient en
aucune façon être considérées comme limitant ou qualifiant, voire interprétant, son mémorandum
officiel acceptant nos bons offices. Il a dit que, puisque je lui avais donné une idée du sentiment du
Gouvernement américain sur la gravité de la situation en raison des obstacles à un plébiscite
honnête, il estimait devoir me faire part des vues du Gouvernement chilien, ainsi que des siennes,
et en particulier me donner une idée de ce qu’il pensait être la concession maximale que le
gouvernement pouvait obtenir du Congrès chilien.
Le ministre a déclaré que l’offre de bons offices était intervenue au moment où la situation
plébiscitaire était considérée par tous les Chiliens qui en avaient une connaissance exacte comme la
plus favorable au Chili ; que le Chili avait donné les garanties irrévocables qui avaient été exigées
et réduit sa présence militaire et policière dans la province afin de se conformer aux souhaits de la
commission, et qu’il maintenait à l’heure actuelle un degré d’ordre aussi raisonnable que celui
auquel il était possible de s’attendre dans les affaires humaines ; que la demande d’adoption de la
loi électorale, formulée par le Chili, avait été enfin respectée ; que les conditions requises pour les
votants avaient été déterminées ; et que le Chili allait gagner par une majorité d’au moins un ou
deux mille suffrages. Il pensait que le Gouvernement américain devait prendre ces faits en
considération à l’heure d’exercer ses bons offices.
Je crois à la sincérité de la déclaration du ministre concernant la confiance chilienne. Quand
M. Mathieu était à Washington, il doutait que le Chili puisse remporter le plébiscite mais, depuis sa
visite à Arica, il en est convaincu. Cette confiance est générale mais pas universelle.
M. Mathieu a également déclaré que le traité de 1904 entre la Bolivie et le Chili[2] avait créé
certaines obligations pour le Chili envers la Bolivie ainsi que des droits en ce qui concerne le port
[1] Télégramme comportant quatre parties.
[2] Relations étrangères, 1907, p. 104
- 13 -
d’Arica et le chemin de fer Arica-La Paz ; et que la grande majorité de la population et la quasitotalité
des entreprises et des industries d’Arica étant chiliennes, le gouvernement pensait que le
Congrès du Chili ne consentirait pas à renoncer à la province d’Arica à ce stade, mais serait prêt à
céder toute la province de Tacna au Pérou. Il a dit que le gouvernement estimait que le plus
important pour le Chili était toutefois d’obtenir l’amitié bolivienne, et que, dès l’acquisition d’un
titre définitif sur Arica, le Chili négocierait avec la Bolivie en vue de doter cette dernière d’un port
mais qu’une compensation serait nécessaire pour cela, laissant entendre que des concessions
commerciales seraient satisfaisantes.
J’ai expliqué à M. Mathieu que je n’avais pas pour instruction de votre part de lui poser des
questions et qu’il ne devait pas non plus déduire de l’une quelconque d’entre elles que vous
recherchiez des informations ou que ces questions étaient indicatives d’un plan ou d’une idée que
vous envisagiez ; puis je lui ai demandé s’il pensait qu’il serait sage de tenter de régler la question
du Pacifique maintenant, y compris les aspirations boliviennes. M. Mathieu a répondu que cela
pourrait compliquer les choses. Il a dit que votre offre de bons offices concernait seulement les
difficultés entre le Pérou et le Chili, et qu’il pensait que limiter la question de cette manière serait
mieux, en laissant la question bolivienne pour des négociations ultérieures entre ce pays et le Chili.
J’ai demandé si le Chili était disposé à donner à la Bolivie une bande de 5 kilomètres de
large des deux côtés de la voie ferrée, le Pérou devant faire de même. M. Mathieu a répondu que
cela lui semblait possible, mais il ne m’a pas donné l’impression d’avoir étudié très attentivement
la question. Il a affirmé plus d’une fois au cours de notre conversation que le Chili accepterait
n’importe quel arrangement à condition de conserver la province d’Arica.
J’ai le sentiment que le Chili veut utiliser Arica à des fins de négociation et souhaite
ardemment un arrangement avec la Bolivie, mais qu’il serait capable d’exiger un lourd tribut pour
cela ou d’imposer des conditions que la Bolivie ne sera pas disposée à accepter. Si la question est
reportée et laissée à des négociations directes, celles-ci seront longues et susceptibles de ne pas être
couronnées de succès, un résultat qui serait inquiétant pour l’harmonie sud-américaine et qui
créerait une nouvelle situation délicate. Si le Pérou et le Chili peuvent néanmoins être amenés à
consentir à une partition du territoire concerné, comme suggéré par M. Mathieu, cet arrangement
serait conforme aux majorités raciales dans chacune des deux provinces et pourrait épargner à
chaque nation la mortification d’une défaite complète.
Ce résultat constituerait un grand pas en avant et nous pourrions nous permettre ensuite de
remettre la question bolivienne à plus tard, en particulier s’il doit être difficile d’obtenir du Chili
qu’il s’entende avec la Bolivie ainsi qu’avec le Pérou à l’heure actuelle.
Je suppose que le Chili cédera davantage que ce que M. Mathieu a indiqué dans sa
conversation hier avec moi. Il est même possible que le Chili puisse être persuadé de régler la
question bolivienne maintenant, voire de consentir à l’indépendance de l’ensemble du territoire
concerné et à ce qu’il soit déclaré neutre, comme M. Edwards l’a suggéré. Il a été rapporté que
l’ancien président Alessandri soutiendrait cette solution si le plébiscite ne peut pas avoir lieu ; mais
M. Mathieu prévoit certaines difficultés et une importante opposition au sein du Congrès.
Si le Chili croit vraiment que la commission plébiscitaire va déclarer le plébiscite
irréalisable, en en rendant le Chili responsable, il cédera naturellement beaucoup de choses ; mais il
faut veiller à ce qu’aucune déclaration formelle ou écrite ne soit faite au Chili indiquant que la
commission est susceptible de prendre une telle décision si nous voulons que le Chili accepte toute
autre proposition que nous pourrions vouloir faire à ce moment-là, car une telle proposition serait
interprétée comme une menace et, quel que soit le risque encouru par le Chili, le gouvernement
rejetterait probablement toute nouvelle proposition et contesterait sans ambages toute critique qui
serait formulée par la commission.
- 14 -
Lorsque j’ai présenté votre mémorandum à M. Mathieu, je lui ai parlé de façon tranchée des
conditions dans la province. Il a été très impressionné, et je crois que mes déclarations ont
influencé la décision du gouvernement d’accepter nos bons offices, mais, hier soir, il m’a dit qu’il
n’aurait pas osé rapporter au gouvernement que j’avais tenu ces propos officiellement, car cela
aurait suscité de la colère et provoqué le rejet de votre offre.
Par ailleurs, M. Mathieu a fait quelques références hier à l’interdépendance économique de
Tacna et d’Arica ; il a également évoqué le fait que le Chili avait réalisé des travaux publics utiles à
l’une ou l’autre des provinces et, possiblement, dans certains cas, aux deux provinces. Il a estimé
que le président devait tenir compte des dépenses engagées par le Chili à ces fins lorsqu’il
exercerait ses bons offices ; il a également laissé entendre que le Chili pourrait demander le
réexamen de prêts et de dettes consentis aux gouvernements péruviens et qui remontent tous, me
semble-t-il, à la période de la guerre du Pacifique ou relèvent des efforts déployés par les Chiliens
pour maintenir les gouvernements péruviens au pouvoir après l’occupation chilienne de Lima.
M. Mathieu n’a toutefois pas beaucoup insisté sur les points soulevés au dernier paragraphe.
Il m’a répété hier qu’il se heurtait continuellement à une forte opposition au sein du conseil.
COLLIER.
___________
- 15 -
ANNEXE 247
PROCÈS-VERBAL DE LA RÉUNION DES PLÉNIPOTENTIAIRES DU PÉROU ET DU CHILI
TENUE LE 4 JUIN 1926 SOUS LES BONS OFFICES DE M. FRANK B. KELLOGG,
SECRÉTAIRE D’ETAT AMÉRICAIN
Département d’Etat des Etats-Unis d’Amérique, Papers relating to the Foreign
Relations of the United States, 1926, volume I, p. 462-465
Documents relatifs aux relations étrangères des Etats-Unis, 1926,
(en deux volumes),
Volume I
[Extrait]
Le secrétaire d’Etat a ouvert la réunion tenue dans le cadre des négociations sur Tacna et
Arica à 10 h 30, le 4 juin. Toutes les personnes ayant assisté aux réunions précédentes étaient
présentes, de même que M. Wade Ellis, conseiller du Pérou.
Le secrétaire d’Etat a déclaré que les négociations ne pouvaient pas avancer si ses
propositions faisaient chaque fois l’objet d’un rejet catégorique par une partie puis par l’autre. Il a
indiqué qu’il allait suggérer une base de discussion pour voir si les parties pouvaient envisager
d’accepter cette proposition en l’état ou dans une version modifiée, précisant cependant que cela ne
signifiait pas pour autant qu’il retirait les propositions déjà formulées ; ses propositions précédentes
restaient valables si les parties décidaient de les accepter par la suite. Le secrétaire d’Etat a ensuite
lu sa proposition, ainsi libellée :
«Le secrétaire d’Etat a l’honneur de se référer à la proposition qu’il a faite aux
plénipotentiaires du Pérou et du Chili, le 15 avril 1926, qui se lit comme suit :
«Le secrétaire d’Etat a l’honneur de suggérer que, dans l’intérêt de la paix
internationale et d’un rapprochement cordial entre les parties, celles-ci étudient
l’opportunité d’un sacrifice mutuel partagé, par lequel :
1) le territoire de Tacna et d’Arica serait déclaré neutre, en tant qu’Etat indépendant
ou placé sous le protectorat des Etats d’Amérique du Sud, comme il sera convenu,
ou
2) les provinces de Tacna et d’Arica seraient transférées (en échange du partage
d’une indemnisation équitable et selon des arrangements économiques appropriés,
à convenir par la suite) à un Etat d’Amérique du Sud non partie aux présentes
négociations.
Etant donné qu’aucune des parties n’est prête à céder le territoire en question à
l’autre, et que la proposition de partager le territoire entre elles a été rejetée, la
solution restante pour régler cette controverse historique semble résider dans l’une des
suggestions formulées ci-avant, en l’état ou modifiée si cela est jugé souhaitable.»
Sans retirer les propositions qu’il a déjà faites, le secrétaire désire maintenant
suggérer aux plénipotentiaires des deux gouvernements concernés, à titre de
proposition supplémentaire, la modification suivante de la deuxième partie de cette
proposition :
- 16 -
«Que les deux gouvernements acceptent, dans leur principe, comme base de
règlement de leurs divergences relatives aux provinces de Tacna et d’Arica, tous les
détails devant être examinés au cours des négociations qui s’ensuivront :
a) la délimitation d’un couloir s’étendant de la frontière bolivienne à l’océan
Pacifique, ledit couloir devant être transféré à la Bolivie en échange du partage
d’une indemnisation équitable et selon les arrangements économiques et les
modalités et conditions qui pourront être convenus entre le Chili et le Pérou.
b) que tout le territoire de la zone contestée situé au nord de la limite septentrionale
du couloir ainsi délimité fasse et devienne partie intégrante du Pérou.
c) que tout le territoire de la zone contestée situé au sud de la limite méridionale du
couloir ainsi délimité fasse et devienne partie intégrante du Chili.
d) que les dispositions territoriales susmentionnées soient mises en oeuvre en tenant
dûment compte, d’une part, du principe de la juste indemnisation pour les
améliorations publiques apportées, et, d’autre part, de toute autre question pour
laquelle une indemnisation pourra être considérée appropriée ou nécessaire.
e) qu’aucun gouvernement non partie aux présentes négociations ne puisse être
autorisé à y participer, sauf accord entre le Pérou et le Chili.»»
L’ambassadeur du Pérou a déclaré que la formule proposée était acceptable. Le Pérou, a-t-il
indiqué, souhaitait faciliter les bons offices et parvenir à un règlement satisfaisant pour son pays et
pour le Chili, afin de mettre fin à une situation qui était tout aussi pénible pour les deux parties. Le
Pérou a jugé cette proposition acceptable, estimant qu’elle ouvrait la voie à des discussions qui
devraient permettre de parvenir à un règlement.
L’ambassadeur du Chili a déclaré qu’il souhaitait que le secrétaire fasse une proposition plus
concrète, qui ne soit pas formulée en des termes si généraux, les parties ne sachant pas ce qu’elles
cèdent à la Bolivie, ni quelles sont les limites du territoire ainsi cédé et ce qui leur revient
respectivement. Bien que les détails soient réservés pour des négociations ultérieures, il a souhaité
savoir ce que le terme «couloir» désigne 􀁿 ce qui n’est pas un détail 􀁿, ce que le secrétaire d’Etat
entend par là et que signifie ce terme pour la Bolivie ? En effet, il serait inutile pour le Pérou et le
Chili de s’entendre si la Bolivie n’est pas d’accord. Le Chili, a-t-il dit, ne peut pas accepter la
proposition sous sa forme actuelle, car elle manque de précision et de clarté ; elle est vague.
Le secrétaire d’Etat a déclaré qu’il avait évidemment conscience que si un couloir devait être
transféré dans le cadre d’une entente avec la Bolivie, un arrangement devait être recherché et
défini. La suggestion du secrétaire d’Etat constituait simplement une base de discussion. Celui-ci a
dit espérer que les deux parties accepteraient de l’étudier et indiqueraient en quoi elles étaient
disposées à diviser le territoire et à faire un couloir. Le secrétaire d’Etat a répété qu’il était
impossible d’aboutir à quoi que ce soit avec des rejets, et il a demandé si les parties pouvaient faire
une suggestion ou une déclaration sur ce qu’elles acceptaient de faire afin que les négociations
puissent se poursuivre. Il a ensuite demandé à l’ambassadeur du Pérou s’il avait des suggestions à
faire.
L’ambassadeur du Pérou a répondu par la négative. Il a déclaré que le Pérou avait accepté la
proposition du secrétaire d’Etat puisque, selon celui-ci, il s’agissait d’une proposition de principe et
non d’une proposition détaillée. L’ambassadeur n’était pas disposé à discuter des détails, mais il
acceptait la proposition sur le principe. Il a estimé que la déclaration du secrétaire d’Etat ouvrait la
voie à des négociations.
- 17 -
L’ambassadeur du Chili a répondu qu’il n’avait aucune suggestion à faire. Selon lui, les avis
pouvaient diverger sur la meilleure façon de parvenir à un règlement. Une vague suggestion de
couloir cédé à la Bolivie, dont les limites n’étaient pas définies, ne constituait pas, selon lui, la
bonne façon de parvenir à un règlement. Le Chili espérait que le secrétaire d’Etat formulerait une
proposition plus précise après la réunion.
Le secrétaire d’Etat a répondu qu’il le ferait s’il savait ce que le Chili et le Pérou étaient
disposés à accepter, mais qu’il était inutile de proposer une partition ou un couloir s’il n’avait
aucune idée de ce qui pourrait être convenu. S’agissant de la Bolivie, le secrétaire d’Etat a déclaré
avoir clairement indiqué que, sauf si les deux parties décidaient d’inclure ce pays, il n’aborderait
pas ce point avec elle. Pour en discuter, il fallait d’abord que le Chili et le Pérou s’entendent sur ce
point.
Le secrétaire d’Etat a déclaré que, si chaque partie lui disait ce qu’elle était définitivement
prête à envisager, il présenterait alors une proposition plus détaillée.
L’ambassadeur du Chili a déclaré que, dans l’ordre logique des choses, puisque le Pérou
avait accepté dans son principe la suggestion du secrétaire d’Etat, c’était à ce pays qu’il revenait de
s’exprimer.
L’ambassadeur du Pérou a répondu que, pour ce faire, il était nécessaire que le Chili accepte
lui aussi la proposition du secrétaire d’Etat afin de disposer d’un point de départ pour la discussion.
Il a ajouté qu’il estimait que les propositions devaient émaner des deux pays et non d’un seul.
Le secrétaire d’Etat a déclaré qu’il considérait que cette réponse portait davantage sur la
forme que sur le fond. Selon lui, le Chili n’avait pas rejeté l’idée d’un couloir mais souhaitait
obtenir plus de détails à ce sujet. Le secrétaire d’Etat a demandé si les deux pays accepteraient de
lui soumettre leurs vues détaillées sur un couloir, sur la partie qui devait revenir au Pérou et sur
celle prévue pour le Chili, etc. Il pourrait alors faire de son mieux pour tenter de rapprocher les
positions des deux parties.
L’ambassadeur du Chili a déclaré qu’il enverrait un câble à son gouvernement au sujet de la
situation et informerait le secrétaire d’Etat dès que possible de la position définitive de son
gouvernement à cet égard. L’ambassadeur du Pérou a fait la même réponse.
Le secrétaire d’Etat a ensuite demandé si les deux parties souhaitaient qu’il poursuive ses
bons offices. L’ambassadeur du Pérou a répondu par l’affirmative et déclaré qu’il déploierait
personnellement tous les efforts possibles pour arriver à une solution satisfaisante. L’ambassadeur
du Chili a fait la même réponse.
Le secrétaire d’Etat a ensuite déclaré que les négociations duraient depuis plus de deux mois
et que l’organisation du plébiscite était également en cours. Si quelque chose devait être fait à
Washington, il fallait le faire bientôt. Une réunion avait été convoquée à Arica pour 16 heures
samedi après-midi. Le secrétaire ne savait pas si une décision définitive devait être prise à ce
moment-là. Il comprenait que, conformément aux règles, la question pouvait être éludée si elle
rencontrait une opposition. Il a toutefois tenu à exhorter les deux parties à essayer de s’entendre. Il
a précisé qu’il ne ressortait pas de ses conversations privées avec les deux ambassadeurs que les
positions respectives étaient très éloignées l’une de l’autre, et formé le voeu de parvenir à un
accord.
- 18 -
Le secrétaire d’Etat a ensuite demandé si les parties avaient des suggestions quant à la
prochaine réunion et si le lendemain, le samedi 5 juin, pouvait convenir. L’ambassadeur du Chili a
déclaré que ce jour était impossible, car il n’aurait pas le temps de recevoir une réponse à son câble.
L’ambassadeur du Pérou a été du même avis. Le secrétaire d’Etat a proposé le lundi matin, et
l’ambassadeur du Pérou, le lundi après-midi à 15 h 30, ce que l’ambassadeur du Chili a accepté. La
réunion a été ajournée jusqu’au lundi 7 juin à 15 h 30.
Francis WHITE[3].
___________
[3] Chef de la division des affaires latino-américaines.
- 19 -
ANNEXE 248
TÉLÉGRAMME NO 723.2515/2415 EN DATE DU 9 JUIN 1926 ADRESSÉ À M. W. MILLER COLLIER,
AMBASSADEUR DES ETATS-UNIS D’AMÉRIQUE AU CHILI, PAR M. FRANK B. KELLOGG,
SECRÉTAIRE D’ETAT AMÉRICAIN
Département d’Etat des Etats-Unis d’Amérique, Papers relating to the Foreign
Relations of the United States, 1926, volume I, p. 475 et 476
Documents relatifs aux relations étrangères des Etats-Unis, 1926
(en deux volumes)
Volume I
723.2515/2415 :Télégramme
Le secrétaire d’Etat à l’ambassadeur au Chili (M. Collier)
[Paraphrase]
Washington, le 9 juin 1926, 18 heures
107. Depuis que votre no 201, en date du 8 juin, 13 heures, a été reçu, je me suis entretenu
avec l’ambassadeur Cruchaga et j’ai également eu une réunion avec les plénipotentiaires ce matin.
Hier en fin d’après-midi, M. Cruchaga m’a présenté les propositions concrètes du Chili fondées sur
les conclusions dégagées à la réunion tenue à Santiago et, ce matin, ces mêmes propositions ont été
avancées à la réunion des plénipotentiaires.
Dans ses propositions, le Chili a réitéré sa préférence pour l’exécution de la décision
arbitrale ; il a ensuite exprimé son consentement pour diviser le territoire concerné, l’actuel
département de Tacna devant aller au Pérou et l’actuel département d’Arica devant aller au Chili ;
la troisième proposition est celle d’un couloir bolivien de 4 kilomètres de large s’étendant de la
frontière bolivienne jusqu’au village de Palos sur l’océan Pacifique, ce couloir devant suivre la
démarcation actuelle entre les départements de Tacna et d’Arica de sorte que la moitié du couloir se
trouve de chaque côté de cette démarcation. Une condition est ajoutée selon laquelle ce couloir ne
doit à aucun moment se trouver à moins de 10 kilomètres de la ligne de chemin de fer
Arica-La Paz. L’ambassadeur Velarde n’a fait aucune réponse sauf pour dire qu’il soumettrait ces
propositions au Gouvernement péruvien. La séance a été ajournée jusqu’à la prochaine convocation
du secrétaire d’Etat.
M. Lassiter a les pleins pouvoirs pour gérer la situation à sa discrétion à la réunion de la
commission plébiscitaire cet après-midi ; je ne doute pas qu’il donnera au commissaire chilien la
possibilité de consentir à un nouveau report, mais, si ce dernier insiste pour forcer les choses, alors
le sort du plébiscite en sera jeté et décidé en ce qui concerne la commission.
Je vous saurais gré de bien vouloir transmettre tout renseignement supplémentaire que vous
pourriez obtenir au sujet des conclusions dégagées à la réunion des notables à Santiago lundi. Je
serais particulièrement intéressé de savoir si ces conclusions ont été influencées par les
représentations ou les recommandations qui ont été faites d’ici par M. Alessandri. Il devrait être
entendu, à cet égard, que la conversation que M. Alessandri a eue avec moi vendredi dernier était à
sa demande, transmise par l’intermédiaire de l’ambassadeur Cruchaga. Je vous ai rapporté la teneur
- 20 -
de l’entrevue dans mon no 105 en date du 1er juin à 11 heures. Si M. Alessandri a fait des
recommandations basées sur sa conversation avec moi, celles-ci ne peuvent d’aucune manière
concevable avoir encouragé le Gouvernement chilien à prendre les décisions auxquelles il est
parvenu lundi, sauf par déformation délibérée des faits. Je n’ai pas encouragé de la moindre
manière l’idée que si les négociations échouaient et si le Chili insistait sur le plébiscite, celui-ci
devrait avoir lieu ; la teneur de mes propos était exactement le contraire.
KELLOGG.
___________
- 21 -
ANNEXE 249
NOTE NO 169 EN DATE DU 11 JUIN 1936, ADRESSÉE À M. ENRIQUE BALDIVIESO,
MINISTRE BOLIVIEN DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES, PAR M. ALBERTO OSTRIA
GUTIÉRREZ, MINISTRE PLÉNIPOTENTIAIRE DE LA BOLIVIE À LIMA
Archives du ministère bolivien des affaires étrangères
Délégation bolivienne
Lima, le 11 juin 1936
No 169
Confidentiel
Objet : Instructions confidentielles en date du 25 avril
A M. Enrique Baldivieso,
ministre des affaires étrangères, La Paz
Monsieur le ministre,
En ce qui concerne ma note no 152, en date du 26 du mois passé, et mon télégramme no 96,
en date du 4 de ce mois, je respecte par la présente l’obligation qui m’est faite de vous informer
que, à la suite d’un long exposé oral, j’ai remis au ministre des affaires étrangères, M. Alberto
Ulloa, les bases ou points — dont je joins copie —d’un plan de rapprochement entre la Bolivie et
le Pérou, selon les instructions que j’avais reçues de cette chancellerie (note no 67, en date du
25 avril, confirmée par le câble no 1028, en date du 25 mai 1936).
Le ministre des affaires étrangères a accueilli ledit plan avec un vif intérêt et s’est engagé à
l’étudier et, après concertation avec le président de la République, à soumettre un projet — qui aura
déjà été validé — contenant tous les points proposés sous la forme d’un accord.
Dès le début, toutefois, M. Ulloa a émis des réserves concernant le paragraphe 1, relatif au
consentement du Pérou, lequel est une condition requise à l’article premier du protocole
complémentaire du 3 juin 1929.
Le ministre péruvien des affaires étrangères m’a informé, à cette occasion et lors d’une
conversation ultérieure, que la déclaration prévue constituerait, sur le fond, une coercition morale
envers le Chili qui serait susceptible de créer, tant pour le Pérou que pour la Bolivie, une situation
diplomatique tendue avec ce pays. Il a ajouté que, pour cette raison, le Pérou ne pouvait pas,
publiquement ou confidentiellement, se prononcer à cet égard. Enfin, il a dit que, selon lui, il était
inconcevable qu’un gouvernement péruvien puisse s’opposer à la cession d’Arica si le Chili et la
Bolivie parvenaient à s’entendre.
La réponse donnée par M. Ulloa est donc résumée comme suit : le Pérou ne peut pas donner
maintenant son consentement, requis aux termes de l’article premier du protocole complémentaire
du 3 juin 1929, mais il le donnera quand la Bolivie et le Chili seront parvenus à un accord.
Les observations que j’ai faites à ce sujet sont restées vaines, bien que j’eusse d’abord
expliqué que tout consentement donné par le Pérou serait conditionné à une entente préalable,
amicale et loyale, avec le Chili.
Au fond, il ne fait aucun doute que le Pérou, compte tenu de l’entente — principalement
commerciale — à laquelle il est parvenu avec le Chili, ne souhaite pas que ce dernier ait un motif
quelconque de méfiance, même infondé, envers sa ligne de conduite vis-à-vis des aspirations
portuaires boliviennes, et qu’il désire également, dans le même temps, préserver son droit de tierce
- 22 -
opposition —symbolique jusqu’à présent — sur Arica pour être partie à un futur accord entre la
Bolivie et le Chili.
En ce qui concerne les autres points — en particulier, le libre transit —, M. Ulloa m’a fait
part de sa volonté la plus ferme, qu’il a finalement décrite en ces termes :
«Je me considérerais comme un piètre ministre des affaires étrangères si je ne
parviens pas à conclure un accord avec vous, aussi complet que possible, qui
garantisse un rapprochement important et définitif entre le Pérou et la Bolivie.»
Dès que M. Ulloa m’aura transmis le projet qu’il a promis, je le soumettrai immédiatement à
votre examen, afin que vous puissiez me donner les instructions appropriées.
Je saisis cette occasion pour vous renouveler l’assurance de ma considération la plus haute et
la plus distinguée.
[Signature]
1) Déclaration
La Bolivie déclare par la présente qu’elle ne détient, et n’entend obtenir, aucun droit sur le
territoire situé au sud du Pérou qui a été déjà reconnu et délimité en application des traités en
vigueur entre les deux pays.
En conséquence, la Bolivie confirme officiellement qu’elle n’entend pas et ne demandera pas
qu’il soit satisfait à son aspiration nationale à obtenir son propre accès à l’océan Pacifique par l’une
quelconque des portions de la côte sud du Pérou, dont elle s’engage à toujours résolument respecter
la souveraineté territoriale.
Le Pérou déclare pour sa part par la présente qu’il ne détient et n’entend détenir aucun droit
sur le territoire bolivien qui a déjà été reconnu et délimité en application des traités en vigueur entre
les deux pays.
Dans le même temps, le Pérou déclare par la présente, en ce qui concerne l’article premier du
protocole complémentaire au traité de Lima du 3 juin 1929, conclu entre le Pérou et le Chili, qu’il
ne s’oppose pas à la satisfaction de l’aspiration portuaire de la Bolivie, ni, par conséquent, à ce que
le Chili cède éventuellement à l’avenir à la Bolivie, à la suite d’un accord amical, loyal et
réciproque, la totalité ou une partie du territoire qui, en application du traité du 3 juin 1929, relève
de la souveraineté chilienne.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
___________
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ANNEXE 250
TRAITÉ DE PAIX, D’AMITIÉ ET DE LIMITES ENTRE LA BOLIVIE ET LE PARAGUAY,
SIGNÉ À BUENOS AIRES LE 21 JUILLET 1938 (RATIFICATIONS ÉCHANGÉES
LE 29 AOÛT 1938)
www.latinamericanstudies.org/paraguay/chaco-treaty.pdf
REPORTS OF INTERNATIONAL
ARBITRAL AWARDS
RECUEIL DES SENTENCES
ARBITRALES
Affaire du Chaco (Bolivie, Paraguay)
10 octobre 1938
VOLUME III pp. 1817-1825
NATIONS UNIES - UNITED NATIONS
Copyright (c) 2006

- 30 -
ANNEXE 268
NOTE NO 646/433 EN DATE DU 13 JUILLET 1950 ADRESSÉE À M. PEDRO ZILVETI ARCE,
MINISTRE BOLIVIEN DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
PAR M. ALBERTO OSTRIA GUTIÉRREZ,
AMBASSADEUR DE BOLIVIE AU CHILI
Archives du ministère bolivien des affaires étrangères
Ambassade de Bolivie Copie
Santiago, le 13 juillet 1950
Confidentiel
No 646/433
Objet : Négociations portuaires
Annexe : Copie d’une note (envoyée par valise diplomatique)
A M. Pedro Zilveti Arce,
ministre des affaires étrangères et du culte, La Paz.
Monsieur le ministre,
J’ai l’honneur de communiquer, par valise diplomatique, copie de la note adressée au
ministre chilien des affaires étrangères, qui ouvre la première étape formelle des négociations
relatives au port, afin que cette copie soit soigneusement conservée dans le département des traités
internationaux, avec la réponse envoyée par le ministre chilien des affaires étrangères,
M. Horacio Walker Larraín. La copie originale de cette dernière a déjà été envoyée par valise
diplomatique, ainsi que ma note no 635/424, le 7 de ce mois.
Je vous renouvelle les assurances de ma considération la plus distinguée.
[Signature]
___________
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ANNEXE 269
«IL A UNIQUEMENT ÉTÉ CONVENU D’ENTAMER UN DIALOGUE AVEC LA BOLIVIE ;
ARICA RESTERA TOUJOURS LIBRE», DÉCLARE M. GONZÁLEZ VIDELA
REVUE VEA (CHILI), 19 JUILLET 1950
Revue Vea (Chili)
González Videla déclare : «Il a uniquement été convenu d’entamer un dialogue
avec la Bolivie ; Arica restera toujours libre»
«Le gouvernement n’a pris aucune décision concernant cette question. Je n’ai jamais refusé
de discuter de l’aspiration de la Bolivie à avoir un port», a ajouté le président dans cette interview
exclusive accordée à notre revue.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
􀁿 Nous avons sollicité cette interview, Votre Excellence — avons-nous dit —, pour obtenir des
informations de première main sur la nouvelle diffusée selon laquelle notre pays aurait décidé
de céder à nos frères boliviens un port au nord…
Le président a immédiatement répondu :
􀁿 Il convient de clarifier les choses. Le gouvernement n’a pris aucune décision à ce sujet. La
seule chose de vraie est que, dans le respect de la tradition du ministère chilien des affaires
étrangères, et en accord avec mon profond esprit américaniste, je n’ai jamais refusé de discuter
de l’aspiration de la Bolivie à avoir un port. C’est ce que j’ai déclaré à San Francisco, au nom
du Gouvernement chilien, quand je l’ai représenté à cette conférence. Le président de la
Bolivie, M. Hertzog, m’a rappelé cette promesse dès ma prise de fonction en 1946, et j’ai
répondu au chef d’Etat bolivien, conformément à une règle à laquelle le ministère des affaires
étrangères de la République n’a jamais dérogé, que j’étais d’accord pour amorcer le dialogue
sur la question proposée. Il n’y a rien d’autre à ce jour.»
Deux conditions irrévocables
Il est en effet de mon devoir d’informer le peuple que je suis disposé à engager ces
discussions à deux conditions irrévocables :
1. Que le dialogue visé ne porte pas sur la revision des traités, car, à cet égard, nous n’avons aucun
problème à résoudre avec la Bolivie. Les traités conclus ont été respectés en temps utile et font
aujourd’hui partie de l’Histoire. Il n’y a donc aucune place pour une revision d’aucune sorte.
C’est ce que j’ai déclaré en tant que représentant à San Francisco, et tous les Chiliens peuvent
se rappeler que notre délégation a amplement remporté la bataille contre la revision des traités.
Le préambule de la Charte des Nations Unies est libellé ainsi : «Nous, peuples des
Nations Unies, résolus à créer les conditions nécessaires au maintien de la justice et du respect
des obligations nées des traités et autres sources du droit international.»
En conséquence — M. González Videla a ajouté —, le ton du dialogue avec la Bolivie ne
pourra être que celui d’une démarche amiable et amicale basée sur des compensations pour le
Chili.
- 32 -
2. La seconde grande condition est que toutes les conférences et réunions susceptibles d’avoir lieu
dans le cadre de l’examen du problème de l’enclavement de la Bolivie doivent obtenir le
consentement préalable du Pérou, car c’est ce qui est prévu dans le protocole complémentaire
au traité entre le Chili et le Pérou signé à Lima le 3 juin 1929.
Enfin, je déclare que, en tant que président de la République, j’éviterai de mentionner le port
d’Arica dans toutes les conversations qui pourraient résulter du dialogue sur cette question. Quoi
qu’il en soit, tout ce qui a été dit est prématuré, dans la mesure où nous ne savons pas quelles
propositions seront faites par le Gouvernement bolivien, ce dernier étant celui qui doit engager le
dialogue…
Conversation avec M. Truman
􀁿 Pourtant — avons-nous dit —, vous avez évoqué cette question avec M. Truman…
􀁿 Nous avons abordé ce sujet indirectement. Et pour une raison évidente. Nous avons passé en
revue la situation latino-américaine dans toute son étendue, et lorsque j’ai abordé la question de
l’aspiration de la Bolivie, j’ai insisté, devant le chef de l’Etat, sur le fait que nous n’avions
aucune question territoriale pendante avec l’un quelconque de nos frères limitrophes. En outre,
j’ai dit au président Truman que, en ce qui concerne l’aspiration de la Bolivie à un port, j’étais
disposé, avec mon esprit américaniste et surtout suivant la règle traditionnellement fixée par le
ministère chilien des affaires étrangères, à dialoguer amicalement avec le Gouvernement
bolivien… Il n’y a rien d’autre à ce jour. Tout ce qui pourrait être ajouté est faux. Comme vous
pouvez vous en rendre compte, il manque le plus important, à savoir l’ouverture de ce
dialogue.
Informations erronées
􀁿 Cependant — avons-nous ajouté —, la presse a publié des informations…
􀁿 En effet, il a été fait mention d’une bande de 32 kilomètres, même si notre littoral au nord
d’Arica s’étend sur à peine 10 kilomètres. Le reste appartient au territoire péruvien. Comme
vous pouvez le voir, la presse affirme beaucoup de choses qui se démentent d’elles-mêmes.
Par ailleurs, j’ai abordé cette question dans mon message adressé au Congrès en mai de cette
année. Il y a un paragraphe, se référant à ma rencontre avec M. Truman, qui se lit comme suit :
«Ma visite a non seulement eu des retombées positives sur les relations entre
deux nations guidées par un engagement démocratique identique et par des institutions
républicaines similaires, mais elle renforce également nos relations avec nos pays
frères d’Amérique.»
___________
- 33 -
ANNEXE 270
««LE CHILI EST DISPOSÉ À ÉTUDIER L’ASPIRATION DE LA BOLIVIE SUR LA BASE DE
COMPENSATIONS RÉCIPROQUES», AFFIRME LE MINISTRE
DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES», REVUE VEA (CHILI),
19 JUILLET 1950
Revue Vea (Chili)
Le ministre des affaires étrangères affirme : «Le Chili est disposé à étudier l’aspiration de la
Bolivie sur la base de compensations réciproques»
«Ce qui a été dit concernant le port remonte à longtemps. Cela figure dans un livre paru il y a
plus de vingt ans, quand Tacna se trouvait encore sous la souveraineté chilienne. Il n’y a eu aucune
avancée depuis lors, à l’exception de l’accord prévoyant d’engager des conversations», a affirmé le
ministre Walker.
Immédiatement après avoir parlé avec le président de la République, nous avons été reçus en
audience spéciale par le ministre des affaires étrangères, M. Horacio Walker Larraín. Le ministre
nous a invité à prendre un siège, tout en fumant une cigarette. Il s’agit de la même personne qui a
siégé au Sénat avec vigueur et talent, et qui nous reçoit maintenant et échange avec nous.
􀁿 Le président m’a informé de votre venue, a dit M. Walker.
􀁿 Effectivement, Monsieur le ministre, nous voulions obtenir, de la personne à la tête du
ministère des affaires étrangères, plus de détails concernant la nouvelle qui, exacte ou non, a
fait le tour du continent en soulevant une vague d’espoir.
􀁿 Eh bien, je vais répéter ce que le chef de l’Etat vous a probablement déjà dit — a répondu le
ministre des affaires étrangères. Il n’y a rien d’officiel ni de concret concernant les prétendues
informations selon lesquelles le Chili cédera à la Bolivie un port dans le nord. Je précise que,
le ministère des affaires étrangères a invariablement déclaré que, même s’il est vrai que nous
n’avons aucun problème pendant avec la Bolivie, nous sommes disposés à mener des
discussions amicales concernant le port auquel elle aspire. Ce ne sont pas mes propres mots —
a ajouté M. Walker. Il s’agit là des déclarations faites par l’ensemble de mes prédécesseurs, à
savoir, MM. Luis Izquierdo, Jorge Matte, M. le président Alessandri et M. Agustín Edwards.
La position chilienne a toujours été plus ou moins la suivante : «Le Chili refuse que l’aspiration
de la Bolivie à obtenir un port sur le Pacifique soit portée devant des congrès ou conférences
internationales, mais il est disposé à examiner, dans le cadre de négociations directes et
amicales avec cet Etat, la possibilité de satisfaire son aspiration moyennant des
compensations.» Cela a toujours été l’essence de la politique menée par notre ministère des
affaires étrangères. Il pourrait y avoir des erreurs dans la lettre, mais c’est son esprit.
􀁿 Nous pensons que certains progrès, au moins, ont été réalisés depuis ces années — avons-nous
affirmé.
􀁿 Oui. Nous avons accepté d’engager des discussions. Mais rien de plus. Notre ministère des
affaires étrangères n’a reçu aucune proposition de la Bolivie sur cette question. Quand une
proposition sera présentée, nous l’étudierons, et nous pourrions la refuser, l’accepter, la
modifier, etc. Rien ne peut être dit sur des événements qui ne se sont pas encore déroulés.
􀁿 Il a été fait mention, toutefois, d’un couloir bolivien au nord d’Arica.
- 34 -
􀁿 Oui, mais cela a été mentionné à l’extérieur de ce bureau, à titre non officiel. Je crois
comprendre que vous faites référence à une étude réalisée par l’ingénieur Luis Lagarrigue il y a
une vingtaine d’années. Mais, comme vous pouvez le voir, il s’agit simplement d’opinions
individuelles. Il me semble qu’il existe même un livre sur l’irrigation du nord à l’aide des eaux
du [lac] Titicaca. Mais ce n’est pas une déclaration officielle du gouvernement.
Pardonnez-moi d’insister, mais il n’y a rien à révéler sur cette question. En outre, toute solution
que l’on pourra tenter à l’avenir avec le Gouvernement de La Paz est sous réserve du
consentement du Pérou, auquel nous sommes liés par le traité de 1929.
___________
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ANNEXE 271
DÉCLARATIONS FAITES À LA PRESSE PAR M. ALBERTO OSTRIA GUTIÉRREZ,
AMBASSADEUR DE BOLIVIE À SANTIAGO, LE 30 AOÛT 1950
Ministère bolivien des affaires étrangères, bulletin d’information, n° 21
(juillet-décembre 1950), p. 14-20
Déclarations faites à la presse par M. Alberto Ostria Gutiérrez, ambassadeur de Bolivie à
Santiago
La vérité concernant les négociations portuaires avec le Chili
Précédents. 􀁿 Notes signées par l’ambassadeur de Bolivie et par le ministre chilien des affaires
étrangères. 􀁿 Conclusions.
Mutilée de quatre côtés, la Bolivie a une sensibilité internationale justifiée par la plus dure
des expériences : le malheur.
C’est pourquoi il est naturel que la question portuaire suscite l’agitation, l’inquiétude voire la
peur, avivées par l’imagination, car il s’agit à la fois du chapitre le plus douloureux de l’histoire de
la Bolivie et de son idéal le plus sacré.
Toutefois, qu’elles soient calmes ou virulentes, les voix boliviennes qui se font entendre sur
la question du port méritent le respect — d’autant plus si elles émanent de personnalités
honorables — car, dans le fond, ces voix ne font que traduire un fervent amour pour la patrie.
Il n’en reste pas moins, toutefois, que la vérité doit être dite, clairement et de manière bien
informée, afin que la nation puisse apprécier [sa situation] en se fondant sur cette vérité et non sur
des rumeurs. L’explication donnée ci-dessous par le négociateur bolivien au Chili sert cet objectif.
Précédents
Depuis que la Bolivie a perdu sa façade maritime, à la suite de sa défaite dans la guerre de
1879, elle réclame sans relâche son propre accès souverain à l’océan Pacifique. Voilà comment les
plénipotentiaires Salinas et Boeto avaient déjà abordé ce problème lorsqu’ils ont entamé les
négociations de la convention d’armistice en 1884, et comment, immuablement, tous les
représentants diplomatiques boliviens au Chili ont procédé depuis lors et jusqu’à l’heure actuelle,
avec des termes différents et des moyens divers, mais en conservant toujours le même idéal.
Après la signature du traité de 1904, seulement trois voies s’ouvraient devant la Bolivie pour
atteindre son objectif : porter la question devant des organisations et des conférences
internationales ; reviser ce traité ; organiser des négociations directes.
Après la première guerre en Europe, qui a abouti à la victoire du droit sur la force, l’illusion
de la justice internationale a émergé en Bolivie, comme dans le monde entier, et, interprétant l’état
d’esprit de l’ensemble du pays, le Gouvernement bolivien a soulevé la question de sa réintégration
maritime devant la Société des Nations. Par la suite, les représentants boliviens ont défendu la
légitimité de notre cause à diverses conférences panaméricaines. Toutefois, comme on le sait,
aucun résultat concret n’a été obtenu et la demande bolivienne présentée à [la conférence de]
Genève a dû être retirée le 21 septembre 1921. Tant qu’aucune cour de justice internationale à
- 36 -
juridiction ou arbitrage obligatoire n’était acceptée par toutes les nations du monde, l’on pouvait
s’attendre à peu de choses dans ce domaine. La première voie était donc fermée !
Deux ans plus tard, en 1923, le Gouvernement bolivien a proposé directement au
Gouvernement chilien «la revision du traité du 20 octobre 1904, afin d’ouvrir la porte à une
nouvelle situation internationale qui permette à la Bolivie de vivre en pleine possession de sa
souveraineté, avec son propre accès à la mer». A cela, le Gouvernement chilien a répondu que,
«conformément à l’attitude qu’il a[vait] adoptée en toutes occasions, le Chili insist[ait] sur le fait
qu’il ne pouvait pas accepter, même sur le principe, la revision d’un traité qui a[vait] été conclu
librement par les deux pays» mais que,
«animé du plus grand esprit de conciliation et d’équité, [il] demeur[ait] attentif aux
propositions du Gouvernement [bolivien] en vue de conclure un nouveau pacte qui
tienne compte de la situation de la Bolivie sans modifier le traité de paix ni rompre la
continuité territoriale du Chili».
La deuxième voie s’est donc fermée le 12 février de cette année-là, quand le représentant
diplomatique de la Bolivie, M. Ricardo Jaimes Freyre, a mis fin à son mandat. De surcroît, le 3 juin
1929, le Chili et le Pérou ont réglé la question de Tacna et d’Arica, c’est-à-dire le dernier chapitre
de la guerre du Pacifique, et apporté à cette question, qui était tripartite, une solution bipartite,
excluant avec colère la tierce partie qu’est la Bolivie.
Que faire dans une telle situation ? Ne restait-il plus que la résignation et l’immobilisme ?
Ou, maintenant que ces voies étaient fermées, fallait-il tenter la seule restante qui n’avait pas
encore été close ? Sans aucun doute, la seule voie qui n’avait pas été empruntée devait être tentée,
en l’occurrence celle des négociations directes, ne serait-ce que pour permettre à la nation de savoir
à quoi elle devrait s’en tenir si elle échouait dans cette voie.
Voilà, précisément, la politique suivie par le ministère bolivien des affaires étrangères après
la guerre du Chaco, et telle que matérialisée dans un mémorandum que l’ambassadeur aux
Etats-Unis, M. Luis Fernando Guachalla, a présenté au secrétaire d’Etat américain,
M. Cordell Hull, le 15 septembre 1943, afin qu’il puisse à son tour le porter à la connaissance du
ministre chilien des affaires étrangères, M. Joaquín Fernández, qui était à Washington. Ce
mémorandum, rédigé sur la base de déclarations faites à La Paz par le sous-secrétaire des affaires
étrangères, M. Humberto Palza, était libellé dans les termes suivants :
«Le Gouvernement des Etats-Unis a été informé par le président de la Bolivie et
son ministre des affaires étrangères, à l’occasion des pourparlers qui se sont tenus à la
Maison Blanche le 5 mai dernier, de la position de son gouvernement face à la
situation d’enclavement de la Bolivie. Cette position peut se résumer comme suit :
1. La Bolivie, fidèle à sa tradition de respect des pactes internationaux, ne conteste
pas la légalité de la souveraineté territoriale que le Chili exerce sur la côte
Pacifique, conformément aux traités publics conclus.
2. Cependant, la Bolivie maintient ses aspirations légitimes à un accès souverain à
l’océan Pacifique à travers le territoire qui appartient au Chili, aspirations qu’elle
soutient pour des raisons politiques, économiques et de justice internationale.
3. La Bolivie encourage une entente directe avec le Chili sur des bases qui soient
bénéfiques aux deux pays et qui tiennent compte de leurs plus grands intérêts, et ne
souhaite aucunement perturber l’harmonie continentale en recherchant un accès
souverain à la mer.»
- 37 -
Suivant ce raisonnement, des conversations ont eu lieu entre le Gouvernement du président
Aguirre Cerda et celui du président Ríos, conversations qui se sont accélérées lorsque
M. Aniceto Solares, membre du gouvernement et ministre bolivien des affaires étrangères, a assisté
à la cérémonie d’investiture du président Gabriel González Videla et quand il a fait part au nouveau
dirigeant chilien, à une réunion tenue le 8 novembre 1946, de la nécessité de résoudre le problème
portuaire bolivien, ce qui a été accueilli avec franchise et noblesse.
Cette voie de négociations directes a ensuite été suivie par le président Hertzog puis par le
président Urriolagoitia, tous deux inspirés par la volonté explicite de la nation bolivienne.
Il est vrai que, lors de l’élection présidentielle du 5 janvier 1947, sans aucun doute la plus
libre dans l’histoire de la Bolivie, les deux candidats avaient inclus dans le volet international de
leurs programmes des négociations directes pour résoudre la question du port. «Une politique
d’entente directe comme moyen de résoudre notre problème portuaire, pour permettre à la Bolivie
d’accéder librement à la mer», avait proposé M. Enrique Hertzog. «Réintégration maritime de la
République, par des voies pacifiques et des négociations directes», avait promis, pour sa part,
M. Luis Fernando Guachalla.
Le peuple bolivien a réparti son soutien entre les deux candidats, qui ont recueilli plus de
quatre-vingt-six mille voix par lesquelles il a approuvé ces programmes concordants.
On pourrait dire que le système politique qui venait d’être renversé par la révolution du
21 juillet 1946 avait été exclu, mais la vérité est que le régime déchu s’était déjà prononcé en
faveur de négociations directes quand, dans ses instructions envoyées à l’ambassade de Bolivie au
Chili, durant le mandat du lieutenant-colonel Villarroel, la chancellerie avait déclaré ce qui suit, le
24 décembre 1944 : «Il ne reste pas d’autre voie que d’arriver à un arrangement direct avec le Chili
pour rechercher une solution à brève échéance à la question du port.»
La nation s’était ainsi prononcée à l’unanimité — de la manière dont procèdent toutes les
démocraties, c’est-à-dire par la voix des partis politiques et le vote des citoyens en faveur de
négociations directes avec le Chili. Par conséquent, en poursuivant cette politique après le 5 janvier
1947, le Gouvernement constitutionnel de la Bolivie a interprété fidèlement la volonté du peuple,
qui est une condition sine qua non à toute politique internationale légitime.
Résultat préliminaire
Logiquement, en procédant de manière ordonnée, la première chose à faire était d’officialiser
les négociations directes ; c’est-à-dire que la Bolivie devait indiquer au Chili qu’il était nécessaire
de satisfaire, par une entente amicale, son besoin fondamental d’obtenir un débouché souverain sur
l’océan Pacifique qui lui soit propre.
D’autre part, il était essentiel que le Gouvernement chilien accepte d’officialiser cette
négociation directe visant à résoudre le problème de l’enclavement de la Bolivie.
C’est ce qui a été fait et obtenu par l’échange de notes entre les Gouvernements de la Bolivie
et du Chili en juin de cette année. Ces notes n’ont pas été publiées plus tôt parce que les deux
gouvernements avaient convenu de ne pas le faire, sauf décision commune contraire, décision qui
n’a été prise que la veille de mon départ pour Santiago. Ces notes sont publiées aujourd’hui dans le
communiqué du ministère des affaires étrangères.
- 38 -
Importance des notes
L’importance de ces notes ressort de leur libellé même et peut aisément être résumée à partir
de leurs paragraphes principaux, à savoir : 1) dans sa note, la Bolivie propose «que les
Gouvernements de la Bolivie et du Chili entament officiellement des négociations directes en vue
de satisfaire ce besoin fondamental que représente pour la Bolivie un accès souverain à l’océan
Pacifique» ; 2) dans sa note, le Chili accepte d’«entamer officiellement des négociations directes en
vue de trouver la formule qui permettra à la Bolivie de se voir octroyer un accès souverain à
l’océan Pacifique».
En outre, il convient de souligner deux aspects fondamentaux de cet accord préliminaire :
a) l’exclusion expresse faite dans la note chilienne de toute compensation territoriale de la part de
la Bolivie ; b) l’assurance que le Gouvernement chilien s’engage, en temps utile, «à consulter celui
du Pérou, conformément aux traités conclus avec cet Etat».
Rien d’autre n’a été convenu
C’est tout ce qui a été convenu entre la Bolivie et le Chili. Rien de plus que ce qui a été
consigné dans ces notes. Et tout ce qui est imaginé, dit ou propagé par la presse, des écrivains ou
des commentateurs, et qui s’écarte de ces documents, ne correspond pas à la vérité.
C’est pourquoi le ministre chilien des affaires étrangères, M. Horacio Walker Larraín, en se
référant à l’article paru dans une revue de Santiago — qui a suscité toutes sortes de
commentaires — a confirmé dans une déclaration officielle que le Gouvernement chilien «est
disposé à engager le dialogue avec la Bolivie concernant le problème portuaire bolivien», tout en
affirmant catégoriquement que «l’article auquel il est fait allusion présuppose et énumère les
raisons d’un accord qui n’a pas été formulé et qui, par conséquent, n’a fait l’objet d’aucune
discussion».
Naturellement, au cours des trois dernières années, certains aspects du problème fondamental
qui affecte notre pays ont été examinés et les Gouvernements de la Bolivie et du Chili ont échangé
des idées. Qui plus est, le président du Chili lui-même, M. Gabriel González Videla, a examiné
avec le président des Etats-Unis, M. Harry Truman, la question du port bolivien, qui revêt une
importance pour tout le continent. Mais, hormis les notes signées, pas une seule étape
supplémentaire n’a été franchie par les deux gouvernements.
Conclusions
1. Les Gouvernements de la Bolivie et du Chili ont seulement entamé une phase préliminaire, en
officialisant des négociations directes pour résoudre le problème portuaire bolivien.
2. Aucun accord territorial n’a été conclu pour résoudre ce problème, mais toute compensation de
cette nature par la Bolivie, qui a déjà fait le plus grand des sacrifices en cédant son littoral après
sa défaite dans la guerre du Pacifique, a été exclue d’emblée.
3. Rien, absolument rien, n’a été convenu en ce qui concerne les lacs boliviens, et donc pas une
seule goutte d’eau n’a été engagée dans un quelconque arrangement.
4. Toute solution à laquelle les parties pourraient aboutir en ce qui concerne le problème portuaire
bolivien, et qui les amènerait à l’étape territoriale, devra être fondée sur une entente loyale entre
la Bolivie, le Chili et le Pérou, attendu en particulier que ces deux derniers pays — et pas la
Bolivie — sont liés par le protocole complémentaire du 3 juin 1929, par lequel ils sont
convenus que les Gouvernements du Chili et du Pérou «ne pourr[aient], sans accord préalable
- 39 -
entre eux, céder à une tierce puissance la totalité ou une partie des territoires … placés sous leur
souveraineté respective».
Vision pour l’avenir
Maintenant que cette explication a été donnée, je crois que le peuple bolivien doit faire
preuve de réalisme : ne pas attaquer le Chili, parce que ce dernier accepte officiellement de
rechercher une «formule qui permettrait à la Bolivie de se voir accorder un accès souverain à
l’océan Pacifique», en se plaçant ainsi sur le terrain de la compréhension et de la justice ; ni poser
le problème par rapport au Pérou comme cela a été fait en [18]80, en faisant fi de trois faits
historiques survenus après cette époque, à savoir : le traité d’Ancón (par lequel le Pérou a cédé la
province de Tarapaca, ce qui signifie que la perte du littoral bolivien situé au sud de cette province
devenait inévitable pour donner au territoire chilien une continuité territoriale) ; le rejet de la
proposition de M. Kellogg de céder Tacna et Arica à la Bolivie (proposition qui avait été acceptée
sur le principe par le Chili) ; et le traité de 1929 entre le Pérou et le Chili, avec son protocole
complémentaire.
Au lieu de regarder uniquement vers le passé, je pense que les trois pays frères doivent
s’entendre en se tournant vers l’avenir, en cherchant à se compléter mutuellement, «non pas dans le
sens de l’unité politique— tel que conseillé par M. Daniel Sánchez Bustamante — mais dans le
sens de l’effort, de la coopération commerciale et de l’assistance, pour faire de cette grande partie
du monde, de Tumbes à Magellan et depuis le Madeira et le Paraguay jusqu’au Pacifique, l’un des
pôles de production, d’industries et de richesse les plus actifs et les plus performants».
Par ailleurs, je considère qu’une injustice scandaleuse est commise au plan interne lorsqu’il
est supposé que le Gouvernement constitutionnel de la Bolivie est capable d’utiliser le problème du
port à des fins de politique intérieure. Je ne décèle cette iniquité dans aucun des gouvernements de
ma patrie, et même le gouvernement que j’ai le plus combattu — celui du lieutenant-colonel
Villarroel — n’aurait pas pu avoir un dessein aussi malsain. Au contraire, si la situation s’était
présentée, je lui aurais loyalement tendu la main, dans le seul intérêt de la Bolivie.
Cette génération a un devoir : celui de tenter de résoudre, dans un climat de paix et de bonne
entente avec ses voisins, le problème fondamental qui affecte notre pays. Elle ne peut pas se
contenter de croiser les bras et d’attendre confiante que la Bolivie avance — freinée justement par
son enclavement — en oubliant que les autres pays progressent au même rythme voire plus
rapidement. Les grandes solutions trouvées dans l’Histoire ne sont pas le fruit de l’inertie, mais de
la volonté des peuples tendue vers un idéal. Et cet idéal, l’idéal d’un port, perdurera aussi
longtemps que vivra la nation tant qu’il ne sera pas réalisé.
La Paz, le 30 août 1950.
(Signé) Alberto OSTRIA GUTIÉRREZ.
___________
- 40 -
ANNEXE 272
NOTE EN DATE DU 1ER SEPTEMBRE 1950 ADRESSÉE AU DÉPARTEMENT AMÉRICAIN DU
FOREIGN OFFICE PAR L’AMBASSADE BRITANNIQUE À LA PAZ
Archives du ministère des affaires étrangères et du Commonwealth du
Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord
Courrier par voie aérienne
Ambassade du Royaume-Uni, La Paz
Réf. : 8/42/50
Département américain,
Foreign Office
Londres SW1
Le 1er septembre 1950
En référence à l’envoi de l’ambassadeur no 100 en date du 16 août, nous écrivons pour vous
informer que le texte d’un échange de notes entre le Gouvernement chilien et l’ambassadeur de
Bolivie à Santiago a été publié dans la presse bolivienne le 31 août, montrant que le premier s’est
officiellement engagé à entamer des négociations directes avec la Bolivie pour trouver un moyen
de satisfaire aux aspirations de celle-ci relatives au «Pacifique».
2. Nous supposons que la chancellerie à Santiago vous communiquera ces deux documents,
car ils devaient être publiés là-bas le 31 août, selon la Bolivie. Le seul point d’intérêt dans la note
chilienne, hormis l’engagement susmentionné, est leur déclaration que le Chili entend consulter le
Pérou en la matière, conformément à l’obligation que lui imposent les traités concernés.
3. Nous transmettons une copie de cette lettre à Lima, Santiago et Buenos Aires.
Votre dévoué, à la Chancellerie.
P.S. Les notes échangées portent les dates des 1er et 20 juin de cette année, respectivement.
___________
- 41 -
ANNEXE 273
NOTE Nº 832/505 EN DATE DU 4 SEPTEMBRE 1950 ADRESSÉE À M. PEDRO ZILVETI ARCE,
MINISTRE BOLIVIEN DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES, PAR M. JORGE DE LA BARRA,
CHARGÉ D’AFFAIRES DE LA BOLIVIE AU CHILI
Archives du ministère bolivien des affaires étrangères
Ambassade de Bolivie Copie
Santiago, le 4 septembre 1950
No 832/505
Objet : Négociations portuaires
Annexes : Coupures de presse (envoyées par avion)
A M. Pedro Zilveti Arce,
Ministre des affaires étrangères et du culte
La Paz, Bolivie
Monsieur le ministre,
A 17 h 35, le 30 août dernier, j’ai reçu votre télégramme no 124, qui est rédigé en ces termes :
«124. — Comme convenu avec le ministre chilien des affaires étrangères, les
notes que nous remettrons ce soir à 19 heures seront publiées demain, jeudi 31.
Informez le ministère des affaires étrangères de toute urgence. (Signé par) Zilveti
Arce.»
Immédiatement après, je me suis entretenu avec le sous-secrétaire des affaires étrangères,
M. Manuel Trucco, qui m’a dit qu’il n’était pas possible de publier les notes à l’heure actuelle «par
manque de temps», et qui m’a prié d’envoyer immédiatement un câble au ministère bolivien des
affaires étrangères pour retarder leur remise d’une journée.
En conséquence, à 18 heures ce jour-là, je vous ai envoyé le télégramme suivant :
«213. Votre 124. Le ministère des affaires étrangères demande que la remise se
fasse demain jeudi 31 à la même heure, au lieu de ce soir, car il est impossible de le
faire aujourd’hui. J’attends votre réponse immédiate. (Signé par) Ambassade de
Bolivie.»
Ne recevant pas de réponse, dans la nuit, j’ai essayé de m’entretenir avec M. Trucco pour
l’en informer, en vain.
Entre-temps, le même jour à 21 h 30, M. Gaston Wilson, fonctionnaire du ministère chilien
des affaires étrangères, a remis à M. José Maza, président de la commission des affaires étrangères,
une note du ministre Walker, accompagnée d’une copie des notes échangées en juin dernier entre
l’ambassadeur de Bolivie, M. Alberto Ostria Gutiérrez, et le ministre chilien des affaires
étrangères.
- 42 -
Dans sa communication, M. Walker Larraín a dit à M. Maza, au sujet desdites notes :
«Mon désir et l’intérêt du gouvernement étaient d’informer cette honorable
commission des documents concernés, dans la mesure où ils corroborent et confirment
les déclarations faites par le soussigné selon lesquelles l’initiative d’entamer des
démarches était venue de La Paz et que le Gouvernement chilien s’en est tenu,
conformément à la tradition de notre ministère des affaires étrangères, à exprimer sa
bonne disposition à engager le dialogue avec le Gouvernement bolivien. Il n’a pas été
possible, toutefois, de procéder de la sorte, car l’engagement avait été pris de garder
les communications secrètes jusqu’à ce que, d’un commun accord, les deux
gouvernements décident de les faire connaître.»
Le lendemain, jeudi 31, les quotidiens de Santiago ont publié une longue synthèse des
déclarations faites à La Paz par l’ambassadeur Ostria, qui incluait la principale partie des notes
échangées entre les deux gouvernements.
A midi, le ministère des affaires étrangères a remis à la presse le texte de la note envoyée par
le ministre Walker au président de la commission des affaires étrangères du Sénat avec les annexes
afférentes, qui ont été publiés dans les journaux du soir.
Dans le même temps, M. Walker a fait une déclaration publique dans laquelle il a indiqué ce
qui suit :
«Les notes que j’ai échangées avec l’ambassadeur de Bolivie en juin dernier
confirment dans leur intégralité les déclarations que j’ai faites devant les commissions
des affaires étrangères du Sénat et de la Chambre des députés et à la presse.
Plusieurs personnalités avaient alors affirmé avec insistance que l’initiative
d’ouvrir des négociations avec la Bolivie avait été prise par notre ministère des
affaires étrangères.
Pour ma part, j’ai maintenu exactement le contraire, mais je n’ai pas pu étayer
mon démenti avec les documents qui sont maintenant publiés, car l’engagement avait
été pris de ne pas le faire jusqu’à ce qu’un accord en ce sens ait été conclu par les deux
gouvernements, accord qui vient d’être dégagé. Conformément à cet accord, les notes
paraîtront simultanément à Santiago et à La Paz. Elles montrent que, comme je l’ai
maintes fois dit à la presse, le Chili reste fidèle à sa politique traditionnelle et est par
conséquent disposé à entamer une négociation directe visant à trouver la formule qui
permettrait à la Bolivie d’avoir un accès à l’océan Pacifique et au Chili d’obtenir des
«compensations» qui ne soient pas de nature territoriale et qui tiennent effectivement
compte de ses intérêts.»
Après cela, le ministre a verbalement fait part aux organes de presse de son mécontentement
quant à la façon dont le journal El Diario Ilustrado avait présenté l’information relative aux
déclarations faites par l’ambassadeur Ostria à La Paz. Selon le journal El Imparcial, le ministre des
affaires étrangères a dit qu’il déplorait l’attitude adoptée par le journal susmentionné, en ce qu’elle
«démontrait une fois de plus que cet organe négligeait les notions les plus élémentaires de la
déontologie journalistique avec ses attaques systématiques et souvent calomnieuses contre celui qui
parle maintenant».
«Avec une telle façon d’agir, il est fait fi de l’essence même de l’esprit chrétien
qui a guidé les fondateurs de ce quotidien. De fait, il suffit de lire les informations
présentées par El Diario Ilustrado pour constater que le titre est absolument
malhonnête, car celles-ci ne disent nulle part que je donne un port à la Bolivie, mais
seulement que, conformément à la politique traditionnelle du ministère chilien des
- 43 -
affaires étrangères, ce dernier est disposé, une fois de plus, à étudier une formule qui,
en échange d’une compensation avantageuse pour le Chili, permettrait de satisfaire
l’aspiration du pays frère à avoir son propre accès à l’océan Pacifique.»
«Je ne veux pas penser que l’attitude du journal El Diario Ilustrado a quelque
chose à voir avec la nouvelle publiée dans la presse selon laquelle mon parti a annoncé
ma candidature au siège de sénateur pour Santiago.»
Pour ma part, je suis allé voir le ministre des affaires étrangères pour l’informer que le soussecrétaire
Trucco avait été averti la veille que les notes allaient être publiées. Le ministre, qui m’a
reçu sans délai, a dit qu’il était entièrement d’accord avec l’attitude adoptée par la Bolivie, qui
respectait ce qui avait été convenu entre l’ambassadeur Ostria et lui. Il m’a toutefois laissé entendre
que ses instructions concernant l’envoi aussi rapide que possible des notes à la commission
diplomatique du Sénat n’avaient pas été respectées.
A cet égard, j’ai clairement dit au ministre que le fait que les notes n’avaient pas été publiées
de manière simultanée n’était ni de la faute du ministère bolivien des affaires étrangères ni de celle
de cette ambassade.
Dans l’après-midi du jeudi 31, à 17 heures, la commission présidée par le sénateur Maza a
été convoquée pour prendre connaissance de la communication du ministre des affaires étrangères.
M. Maza a informé le ministre des affaires étrangères Walker du déroulement de cette réunion dans
la note de réponse qu’il lui a envoyée, note qui explique comment ont été reçues les notes
échangées entre les Gouvernements de la Bolivie et du Chili ainsi que le caractère confidentiel de
la convocation faite aux membres de la commission.
«J’ai été étonné d’apprendre — a dit M. Maza dans sa note — ce matin, après la
convocation en question, que la presse rapportait une déclaration faite à La Paz par
l’ambassadeur Ostria Gutiérrez, actuellement en congé dans son pays, et qui détaille la
teneur des notes échangées.»
«Plus tard, alors que la commission des affaires étrangères était réunie
aujourd’hui à 17 heures, en séance secrète, pour prendre officiellement connaissance
du document confidentiel de Votre Excellence, l’un des sénateurs présents a dit qu’un
journal du soir publiait l’intégralité dudit document et des notes auquel il se
rapportait.»
«Dans ces circonstances, la commission, à l’unanimité de ses membres, à
savoir, les honorables sénateurs Ulises Correa, Angel Faivovich, Sergio Fernandez,
Raul Marin et le soussigné, est convenue que je devais vous informer de son
mécontentement face à cette situation, ainsi que du fait que le ministre, dans ses
déclarations aux réunions secrètes de la commission tenues les 25 juillet et 1er août
cette année, avait déclaré qu’aucune communication officielle n’avait été échangée
avec le Gouvernement bolivien — alors que les notes en date des 1er et 20 juin que
Votre Excellence vient de porter à mon attention avaient déjà été échangées.»
«Aussi, je me dois de vous informer que la commission a décidé de porter à la
connaissance du Sénat l’original de votre note confidentielle en date du 30 de ce mois,
les copies des notes échangées entre l’ambassadeur de Bolivie et Votre Excellence
ainsi que les procès-verbaux originaux des séances secrètes de la commission qui ont
porté sur cette question. Que Dieu garde Votre Excellence. (Signé par) José Maza,
président ; Enrique Ortúzar Escobar, secrétaire.»
- 44 -
Dans le même temps, le sénateur Maza a remis une copie des éléments susmentionnés (cités
dans le dernier paragraphe de sa note) au Sénat «afin qu’il prenne la décision qu’il jugera
appropriée».
De cette façon, la voie a été ouverte pour présenter une «accusation constitutionnelle» contre
le ministre Walker Larraín, procédure que les parlementaires du parti libéral, auquel M. Maza
appartient, sont déterminés à engager. En effet, le député Osvaldo García Burr a déclaré à la presse
qu’il réunissait les dix signatures nécessaires pour ouvrir le débat parlementaire à ce sujet. Ladite
accusation est fondée sur le fait que le ministre des affaires étrangères Walker Larraín aurait nié,
devant les commissions des affaires étrangères du Sénat et de la Chambre des députés, l’existence
des notes signées par les deux gouvernements «au titre desquelles le Chili céderait une partie de
son territoire national à la Bolivie, sans demander de compensations territoriales en retour», selon
les termes employés par le député Osvaldo García Burr.
Cette accusation est motivée par des questions de politique intérieure, dans la mesure où il
avait été annoncé que, afin de pourvoir le siège du Sénat pour Santiago, laissé vacant suite au décès
de M. Arturo Alessandri, M. Walker serait le candidat du gouvernement, avec les voix du parti
conservateur (social-chrétien) auquel il appartient et celles du parti radical.
A ce sujet, j’ai été informé par des sources hautement officielles que le gouvernement a
renoncé à soutenir la candidature de M. Walker du fait que les partis d’opposition en profiteraient
pour proposer un référendum sur la politique internationale du gouvernement et pour soumettre à
l’approbation des votants les négociations portuaires avec la Bolivie, la non-reconnaissance des
Gouvernements espagnol et vénézuélien ainsi que l’attitude adoptée par ce gouvernement vis-à-vis
de son homologue argentin. Cette proposition semble trop dangereuse dans les hautes sphères du
gouvernement, qui souhaitent en outre que M. Walker Larraín continue à assumer les fonctions de
ministre des affaires étrangères pour poursuivre les négociations portuaires avec la Bolivie.
En réalité, les élections n’ont pas encore été convoquées et le sort de la candidature de
M. Walker Larraín est lié aux suites qui seront données à l’accusation parlementaire
susmentionnée.
Pour clarifier la situation, le ministre des affaires étrangères a envoyé une réplique au
sénateur Maza, expliquant ce qui suit :
«Santiago. Le 1er septembre 1950. Monsieur le président, j’ai reçu la note que
vous avez transmise hier en réponse à celle que j’avais envoyée la veille et qui avait
pour objet de remettre à la commission que vous présidez les copies des notes
échangées en juin dernier entre l’ambassadeur de Bolivie et le soussigné.
Vous formulez différentes observations fondées sur le fait que, bien que ma
note porte la mention «confidentiel», les notes qui avaient conduit à sa rédaction
avaient été publiées le lendemain.
En fait, il n’y avait aucune raison d’y apposer cette mention, qui a échappé à
mon attention quand j’ai signé ma note, car cette dernière montrait qu’il s’agissait de
transcrire des communications qui n’étaient plus secrètes puisque les Gouvernements
de Bolivie et du Chili étaient convenus de les «faire connaître».
Le fait que tous les documents provenant des archives confidentielles se voient
apposer une mention de cette nature, conformément à la pratique en vigueur au
ministère, permet facilement de comprendre ce qui s’est passé.
Vous avez également exprimé le mécontentement de la commission concernant
le fait que le soussigné aurait dit devant celle-ci qu’aucune communication n’avait été
- 45 -
échangée avec le Gouvernement bolivien, alors que les notes que j’ai fait publier
existaient bel et bien. Il semblerait que cela a été consigné dans les procès-verbaux de
la commission, laquelle, selon Votre Excellence, a décidé d’en informer le Sénat.
Au vu de cette information, j’ai prié le secrétaire de la commission des affaires
étrangères de me montrer les procès-verbaux en question. Le secrétaire m’a répondu
qu’ils ne se trouvaient pas au secrétariat et qu’ils étaient probablement en votre
possession. J’ai alors prié qu’on vous les demande, et on m’a ensuite informé que vous
aviez dit qu’ils étaient en possession du sénateur Sergio Fernandez, qui n’était pas à
Santiago.
Comme on le sait, les séances des commissions ne donnent pas lieu à des
procès-verbaux. Si, dans ce cas précis, l’intention était de faire une exception, il aurait
alors fallu que la commission approuve les procès-verbaux commandés, ce qu’elle n’a
pas fait, et les porte à ma connaissance, afin de respecter une obligation élémentaire.
Mais je n’ai pas besoin de lire ces prétendus procès-verbaux, qui n’ont pas été portés à
ma connaissance, pour rejeter énergiquement l’accusation portée contre moi dans la
note à laquelle je réplique par la présente. Je n’ai jamais nié l’existence d’un
document.
Par voie de presse et devant les commissions des deux chambres, j’ai dit et
répété que j’avais accepté d’engager des négociations avec la Bolivie, et c’est
précisément ce qui est consigné dans les notes qui ont été publiées. Avec la même
insistance, j’ai déclaré qu’aucune proposition, verbale ou écrite, n’avait été avancée
par le Gouvernement bolivien sur le fond de l’affaire, ce qui concorde avec les
déclarations faites à La Paz par l’ambassadeur Ostria Gutiérrez.
La principale accusation qui a été portée contre moi en public et en privé était
que le Gouvernement chilien avait pris l’initiative d’ouvrir des négociations. Je
n’aurais pas pu trouver de preuve plus appropriée pour réfuter cette accusation que de
publier les notes échangées. Je ne l’ai pas fait, cependant, parce qu’un devoir m’a
empêché de le faire : l’engagement pris par les deux ministères des affaires étrangères
de ne pas publier ces documents sans un accord mutuel préalable en ce sens.
Ainsi, j’ai tenu parole, même si mon intérêt personnel me suggérait le contraire.
Ma conscience me dit que je ne pouvais pas agir autrement.»
Pour sa part, le sénateur Maza a déclaré ce qui suit à la presse, au sujet de la note du ministre
des affaires étrangères mentionnée ci-avant :
«Les commissions n’ont pas pour habitude de dresser des procès-verbaux, car
ceux-ci sont remplacés par des rapports ; mais puisque aucun rapport ne devait être
établi en l’espèce et que l’affaire présentait un intérêt des plus grands, j’ai demandé au
secrétaire de dresser les procès-verbaux des séances que la commission avait tenues.
Ces procès-verbaux ont été rédigés par lui et signés par moi.
Le ministre attache la plus grande importance au fait que l’initiative a été prise
par la Bolivie, comme il l’a toujours soutenu. En temps voulu, le pays à l’origine de
cette initiative sera clairement identifié, quand tous les éléments auront été
minutieusement examinés, car la date d’une note n’est pas la preuve irréfutable d’une
initiative.
Mais cela n’est pas le plus important dans ce débat ; ce qui importe est
l’existence de négociations qui ont été révélées maintenant avec la publication des
- 46 -
notes qui avaient été signées plusieurs mois avant la première séance de la
commission.
Le ministre n’a rien à se reprocher, car il a respecté l’engagement pris par les
deux ministères des affaires étrangères de ne pas publier ces documents sans un
accord préalable et mutuel à cette fin. Toutefois, les précédents du Sénat ont
uniformément établi que rien ne doit lui être caché ; et, à l’époque où le Sénat
disposait d’un pouvoir réglementaire, il a adopté des votes de censure sur cette base
qui ont provoqué des crises ministérielles.»
En vous envoyant, Monsieur le ministre, les coupures de journaux concernées et en vous
priant de transmettre ces informations à S. Exc. le président de la République, permettez-moi de
vous renouveler l’assurance de ma considération la plus haute et la plus distinguée.
[Signature]
[Avec le sceau du chargé d’affaires par intérim.]
Journal La Nación, le 2 septembre 1950
«Je n’ai jamais nié l’existence d’un document», assure le ministre des affaires étrangères
[Coupure de journal jointe à la note nº 832/505.]
Le ministre des affaires étrangères, M. Horacio Walker Larraín, a répondu hier au président
de la commission des affaires étrangères du Sénat, M. José Maza, en déclarant : «Je n’ai jamais nié
l’existence d’un document.» M. Walker «rejette énergiquement» l’accusation faite par cette
commission selon laquelle il aurait déclaré devant elle «qu’aucune communication n’avait été
échangée avec le Gouvernement bolivien, alors que les notes que j’ai fait publier existaient bel et
bien».
La note du ministre des affaires étrangères Walker au sénateur Maza est rédigée en ces
termes :
«Monsieur le président, j’ai reçu la note que vous avez transmise hier en
réponse à celle que j’avais envoyée la veille et qui avait pour objet de remettre à la
commission que vous présidez les copies des notes échangées en juin dernier entre
l’ambassadeur de Bolivie et le soussigné.
Vous formulez différentes observations fondées sur le fait que, bien que ma
note porte la mention «confidentiel», les notes qui avaient conduit à sa rédaction
avaient été publiées le lendemain.
En fait, il n’y avait aucune raison d’y apposer cette mention, qui a échappé à
mon attention quand j’ai signé ma note, car cette dernière montrait qu’il s’agissait de
transcrire des communications qui n’étaient plus secrètes puisque les Gouvernements
de Bolivie et du Chili étaient convenus de les «faire connaître».
Le fait que tous les documents provenant des archives confidentielles se voient
apposer une mention de cette nature, conformément à la pratique en vigueur au
ministère, permet facilement de comprendre ce qui s’est passé.
Vous avez également exprimé le mécontentement de la commission concernant
le fait que le soussigné aurait dit devant celle-ci qu’aucune communication n’avait été
échangée avec le Gouvernement bolivien, alors que les notes que j’ai fait publier
- 47 -
existaient bel et bien. Il semblerait que cela a été consigné dans les procès-verbaux de
la commission, laquelle, selon Votre Excellence, a décidé d’en informer le Sénat.
Au vu de cette information, j’ai prié le secrétaire de la commission des affaires
étrangères de me montrer les procès-verbaux en question. Le secrétaire m’a répondu
qu’ils ne se trouvaient pas au secrétariat et qu’ils étaient probablement en votre
possession. J’ai alors prié qu’on vous les demande, et on m’a ensuite informé que vous
aviez dit qu’ils étaient en possession du sénateur Sergio Fernandez, qui n’était pas à
Santiago.
Comme on le sait, les séances des commissions ne donnent pas lieu à des
procès-verbaux. Si, dans ce cas précis, l’intention était de faire une exception, il aurait
alors fallu que la commission approuve les procès-verbaux commandés, ce qu’elle n’a
pas fait, et les porte à ma connaissance, afin de respecter une obligation élémentaire.
Mais je n’ai pas besoin de lire ces prétendus procès-verbaux, qui n’ont pas été portés à
ma connaissance, pour rejeter énergiquement l’accusation portée contre moi dans la
note à laquelle je réplique par la présente. Je n’ai jamais nié l’existence d’un
document.
Par voie de presse et devant les commissions des deux chambres, j’ai dit et
répété que j’avais accepté d’ouvrir des négociations avec la Bolivie, ce que les notes
qui ont été publiées disent précisément. Avec la même insistance, j’ai déclaré
qu’aucune proposition, verbale ou écrite, n’avait été avancée par le Gouvernement
bolivien sur le fond de l’affaire, ce qui concorde avec les déclarations faites à La Paz
par l’ambassadeur Ostria Gutiérrez.
La principale accusation qui a été portée contre moi en public et en privé était
que le Gouvernement chilien avait pris l’initiative d’ouvrir des négociations. Je
n’aurais pas pu trouver de preuve plus appropriée pour réfuter cette accusation que de
publier les notes échangées. Je ne l’ai pas fait, cependant, parce qu’un devoir m’a
empêché de le faire : l’engagement pris par les deux ministères des affaires étrangères
de ne pas publier ces documents sans un accord mutuel préalable en ce sens.
Ainsi, j’ai tenu parole, même si mon intérêt personnel me suggérait le contraire.
Ma conscience me dit que je ne pouvais pas agir autrement.
Dieu vous garde.
(Signé) Horacio WALKER LARRAÍN.»
___________
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ANNEXE 274
«LE MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES MAINTIENT LES DÉCLARATIONS FAITES
CONCERNANT LA BOLIVIE», LA NACIÓN (CHILI), 5 SEPTEMBRE 1950
Journal La Nación (Chili)
Le ministre des affaires étrangères, M. Horacio Walker Larraín, nous a remis la déclaration
suivante la nuit dernière :
«Dans la presse du 1er de ce mois a été publiée une note émanant du président
de la commission des affaires étrangères du Sénat, qui a confirmé ce que j’avais
déclaré dans les réunions secrètes tenues par ladite commission les 25 juillet et 1er août
derniers, à savoir qu’«aucune communication officielle n’a été échangée avec le
Gouvernement bolivien», etc. Les procès-verbaux de cette commission font également
référence à la même question.
Le lendemain, j’ai déclaré :
«[J]e n’ai pas besoin de lire ces prétendus procès-verbaux, qui
n’ont pas été portés à ma connaissance, pour rejeter énergiquement
l’accusation portée contre moi dans la note à laquelle je réplique par la
présente. Je n’ai jamais nié l’existence d’un document.»
Maintenant, après avoir pris connaissance de ces procès-verbaux, je suis en
mesure d’affirmer qu’ils ne montrent pas que j’ai déclaré qu’aucune communication
officielle n’avait été échangée avec le Gouvernement bolivien, comme cela a été
affirmé dans la note susmentionnée.
Je maintiens donc le démenti catégorique que j’ai fait à la presse et, étant donné
que les sénateurs et les députés ont le droit de prendre connaissance desdits
procès-verbaux, je les invite par la présente à le faire.
*
Je vais maintenant aborder une question d’une autre nature. Dans les journaux
parus dimanche dernier figure une lettre envoyée par mon cher ami
M. Germán Riesco, rectifiant un article publié dans un magazine et d’autres versions
qui ont été portées à sa connaissance concernant le rôle qu’il a joué en tant que
ministre dans l’affaire bolivienne.
Je n’avais pas eu vent des informations publiées dans ledit magazine, selon
lesquelles M. Riesco aurait «initié les négociations relatives au couloir». Si j’avais su
cela, je me serais empressé de publier le présent démenti, ce que je fais maintenant
avec le plus grand plaisir.
A ma connaissance, ni M. Riesco ni le soussigné ou l’un de mes prédécesseurs
n’ont pris des initiatives concernant l’aspiration de la Bolivie à obtenir un port. Et,
comme je l’ai dit par voie de presse, ce pays n’a d’ailleurs soumis aucune proposition
concrète sur la question.
- 49 -
J’ai consenti à l’ouverture de négociations dans les termes qui figurent dans la
note que j’ai fait publier, en accord avec la position traditionnelle du ministère chilien
des affaires étrangères, ce que M. Riesco a ensuite confirmé très clairement dans la
presse comme suit : «Les relations cordiales entre le Chili et la Bolivie, et le fait que le
Chili n’a jamais refusé de discuter directement avec la Bolivie de la question de son
enclavement, rendent superflue, voire préjudiciable, l’intervention de tiers officieux.»
Le fait que M. Riesco, comme certains de mes prédécesseurs, se soit entretenu à
maintes reprises avec le représentant diplomatique de la Bolivie sur l’ouverture de
négociations ne veut pas dire qu’il a entamé des pourparlers sur des solutions précises.
Je dois ajouter que les projets de notes envoyés par l’ambassade de Bolivie et le
ministre relativement à l’ouverture de négociations sont archivés au ministère des
affaires étrangères, où l’on m’a même informé que la plus récente note avait été
rédigée par M. Riesco en personne. D’après les vérifications que j’ai pu faire
aujourd’hui, il se révèle qu’elles ont été rédigées par son prédécesseur.
En ce qui me concerne, cet aspect est sans importance, car la seule chose que
j’entends prouver est qu’il ne s’agit pas d’une démarche entamée lorsque j’ai exercé
les fonctions de ministre des affaires étrangères, mais qu’elle avait été initiée plus tôt.
Et ceci est consigné dans des documents [précis].»
___________
- 50 -
ANNEXE 275
NOTE Nº 844/513 EN DATE DU 9 SEPTEMBRE 1950 ADRESSÉE À M. PEDRO ZILVETI ARCE,
MINISTRE BOLIVIEN DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES, PAR M. ALBERTO OSTRIA GUTIÉRREZ,
AMBASSADEUR DE BOLIVIE AU CHILI
Archives du ministère bolivien des affaires étrangères
Ambassade de Bolivie Copie confidentielle
Santiago, le 9 septembre 1950
No 844-513
Objet : Négociations portuaires
A M. Pedro Zilveti
Ministre des affaires étrangères
La Paz, Bolivie
Monsieur le ministre,
Le lendemain de mon retour de La Paz, je me suis rendu auprès du ministre des affaires
étrangères, M. Horacio Walker Larraín, comme je vous en avais informé dans mon câble
confidentiel no 221 en date du 6 de ce mois.
Le ministre s’est évidemment montré très reconnaissant de ce que nous ayons assorti les
notes, lors de leur publication, d’un bref commentaire expliquant que les deux gouvernements
étaient convenus de les rendre publiques simultanément.
La vérité est que, en procédant ainsi, nous avons contribué à rétablir la situation politique
difficile dans laquelle se trouvait M. Walker Larraín — un des hommes politiques les plus éminents
au Chili —, puisque la note bolivienne n’a jamais été secrète ni remise sous condition. Le sceau
«confidentiel» avait uniquement été apposé sur la réponse du Chili.
Selon M. Walker Larraín, la crise provoquée ici par la publication des notes répond à des
fins politiques, à savoir la volonté de faire échouer sa candidature au siège de Santiago au Sénat,
laissé vacant par M. Arturo Alessandri.
«Ce pourrait être la première fois que des affaires internationales sont utilisées au Chili
comme une arme de politique interne», a déclaré M. Walker Larraín, ajoutant : «Je suis déterminé à
déjouer cette manoeuvre et, pour cela, je livrerai une explication à la nation à la radio et par voie de
presse.»
S’agissant des négociations proprement dites, il s’est dit favorable à une période d’attente.
Le lendemain, c’est-à-dire le 7, je me suis entretenu avec le président de la République,
comme je vous l’ai dit dans mon câble confidentiel no 222.
M. González Videla s’est montré reconnaissant, tout comme le ministre des affaires
étrangères, de notre attitude loyale et a également salué les déclarations publiques que j’ai faites à
La Paz concernant l’historique et le résultat préliminaire des négociations. Il a ajouté qu’il
s’efforcerait de trouver une occasion de nous rendre la pareille auprès de l’opinion publique
chilienne, qui avait été égarée en raison d’intérêts politiques internes.
- 51 -
A ce sujet, j’ai appris que M. Walker Larraín avait demandé [à son gouvernement] de
renoncer à sa candidature au Sénat, de manière à ne pas soumettre les affaires internationales à des
contingences électorales.
«Je préfère que le gouvernement compte un sénateur de moins et que cela ne porte pas
gravement préjudice aux négociations avec la Bolivie», m’a déclaré M. González Videla.
Pour ma part, je lui ai expliqué la position adoptée par le Gouvernement bolivien selon
laquelle, pour qu’un pas en avant puisse être fait après la signature des notes, il est essentiel que le
Gouvernement chilien vérifie tout d’abord s’il existe ou non un port approprié au nord d’Arica
pouvant être utilisé à des fins commerciales ; en attendant, il n’est pas possible de faire avancer les
négociations, cet aspect étant, comme je l’ai signalé en d’autres occasions, fondamental.
M. González Videla a reconnu que la condition susmentionnée était justifiée et insisté sur le
fait que la marine chilienne avait réalisé des études qui avaient donné des résultats positifs ; il m’a
cependant demandé d’aborder à nouveau ce point avec le ministre des affaires étrangères.
Se référant ensuite à l’inquiétude suscitée en Bolivie par la possibilité d’utiliser les eaux du
lac Titicaca — point qui est à l’initiative exclusive de M. González Videla et au sujet duquel la
Bolivie n’a pris aucun engagement, même hypothétique, comme le ministère des affaires étrangères
en est bien conscient —, il m’a déclaré, confirmant ainsi ce qu’il m’avait dit avant mon voyage à
La Paz, qu’il n’avait jamais été question d’utiliser ces eaux pour des travaux d’irrigation dans le
nord du Chili, puisque cette région disposait de courants souterrains, mais pour produire de
l’électricité pour le Pérou, la Bolivie et le Chili, si ces trois pays parvenaient à un accord sur ce
sujet, les ruissellements d’eau pouvant être dirigés vers Sorata, comme démontré par exemple dans
les études réalisées à sa demande par la société Ho[ch]schild.
En outre, il a souligné qu’un tel projet pouvait seulement être mis en oeuvre avec le concours
des Etats-Unis et que cela avait été précisément le point de vue du président Truman dans les
conversations qui avaient eu lieu à Washington.
Avant de prendre congé, je lui ai fait savoir — conformément à ce que S. Exc. le président
de la République et vous-même m’aviez chargé de faire — que le Gouvernement bolivien avait
l’intention d’exposer sa position sur le problème portuaire bolivien au Gouvernement des
Etats-Unis d’Amérique et de confirmer au sujet de son aspect essentiel, à savoir les négociations
directes, la position que vous avez déjà présentée au président Truman.
Veuillez agréer, etc.
[Signature]
___________
- 52 -
ANNEXE 276
«NE NOUS LAISSONS PAS DIVISER PAR DES PARTIS POLITIQUES POUR RÉGLER NOS
AFFAIRES ÉTRANGÈRES», EL IMPARCIAL (CHILI), 13 SEPTEMBRE 1950
Journal El Imparcial (Chili)
«Car nous pourrions causer un préjudice irréparable pour le destin de la République», a
déclaré avec force et brio le ministre des affaires étrangères, M. Walker, devant la Chambre, en
réponse aux attaques de l’opposition sur l’affaire bolivienne. «La ligne internationale du
gouvernement actuel n’a pas été rompue, ni celle suivie par les gouvernements précédents.» Voici
l’explication donnée par le ministre des affaires étrangères.
«Ces jours-ci, notre capitale a été le témoin d’une campagne alarmiste et stridente lancée par
des représentants d’organes de presse et de stations de radio influencés par certains éléments de
l’opposition.
Des efforts particuliers ont été déployés pour déformer la nature et les objectifs de la
démarche diplomatique préliminaire entamée sur la question bolivienne, et les supputations les plus
absurdes ont été formulées à cet égard, jusqu’au point d’envoyer des informations à Arica selon
lesquelles le Gouvernement chilien aurait décidé de céder ce port, en dépit de mon démenti public
énergique face à une information aussi absurde et malveillante.
En outre, on a voulu faire oublier que, pour être valide et avoir force exécutoire, tout ce qui
est convenu entre les ministères des affaires étrangères doit être soumis à l’approbation du Congrès
national, qui est libre de l’approuver ou de le rejeter et qui a d’ailleurs exercé cette compétence à
diverses reprises sans provoquer d’interruptions dans nos relations étrangères.
Quand, en 1895, un gouvernement chilien a conclu un traité en application duquel le Chili
devait céder Tacna et Arica à la Bolivie — si ces provinces devaient passer sous la souveraineté
chilienne à la suite du plébiscite —, ceux qui gouvernaient alors notre pays n’ont pas essuyé les
injures qui sont actuellement proférées. Pour sa part, le Congrès national a rempli son devoir en
refusant de ratifier cet étrange traité.
Dans la situation actuelle, en revanche, la presse est allée jusqu’à annoncer une accusation
constitutionnelle contre le ministre qui s’exprime devant vous, pour le simple fait d’avoir accepté
d’ouvrir des négociations diplomatiques.
Il existe dans cette campagne des circonstances qui définissent sa nature et ses objectifs et
qui expliquent que, dans un pays au sentiment patriotique aussi profond que le nôtre, et également à
l’esprit critique si affûté, elle n’ait pas produit les résultats escomptés.
Et le résultat recherché n’était autre que de rejeter sur le ministre qui s’exprime devant vous
toute la responsabilité des actions entreprises par le gouvernement et par l’ensemble des ministères.
Parmi les nombreuses autres assertions inexactes, un quotidien de Santiago se distingue en
ce qu’il a informé l’opinion publique, à sa une, sur huit colonnes et en lettres capitales, que
«Walker a offert un port à la Bolivie sans compensations territoriales».
Peu importe que ce titre ne corresponde pas à l’information télégraphique qui le suivait,
laquelle ne faisait aucune mention de ladite offre ; peu importe que ce titre soit un mensonge
flagrant ; peu importe qu’un ministre ne constitue pas, à lui seul, un ministère ou le gouvernement ;
ce qui importait, c’était qu’il avait récemment été désigné candidat du parti conservateur au siège
de sénateur vacant pour Santiago.
- 53 -
Dans le même ordre d’idées, il faut souligner tous les efforts déployés pour présenter l’actuel
ministre comme étant en contradiction absolue avec tous ses prédécesseurs.
Le président de la République, chargé par la Constitution de diriger les affaires étrangères,
aurait toléré, impassible, que chacun de ses ministres agisse au gré de ses caprices personnels ; que
l’un suive une ligne de politique internationale, tandis que l’autre en suive une autre ; et que, dans
le ministère le plus dévoué à l’action de l’Etat, tous auraient fait fi des objectifs initialement fixés et
mis en oeuvre par un président qui s’est distingué par les efforts personnels qu’il a déployés dans
toutes les activités qui concernent l’administration publique.
Ces couleuvres sont trop grosses pour que l’opinion nationale puisse les avaler.
La ligne de politique internationale fixée par le gouvernement actuel n’a pas été rompue dans
le cas bolivien, ni même celle des gouvernements précédents. Nous verrons plus loin que la seule
chose faite a été d’appliquer avec honnêteté et franchise une thèse traditionnelle de notre ministère
des affaires étrangères. Ce qui a été rompu, cependant, est la tradition honorable du Chili de ne pas
utiliser les affaires internationales comme armes de politique interne ou électorale.
Accusations sans fondement concernant la procédure suivie
La plupart des attaques et des expressions injurieuses qui m’ont visé ne concernent pas
l’attitude adoptée par le gouvernement en acceptant d’ouvrir des conversations diplomatiques avec
la Bolivie, sinon sur la forme ou à la procédure employée.
Ces attaques ont cherché à donner l’impression que les commissions des affaires étrangères
des deux Chambres ne savaient pas, avant que les notes ne soient publiées d’un commun accord
entre les Gouvernements du Chili et de la Bolivie, que le gouvernement avait décidé de consentir à
entamer des négociations. Selon mes détracteurs, j’aurais caché que notre ministère des affaires
étrangères avait pris cette décision.
Pour ma part, je souhaite que le président de la Chambre et les comités des différents partis
politiques lisent les procès-verbaux et leurs versions sténographiques établis par la commission des
affaires étrangères, car ils leur permettront de vérifier ce que je vais maintenant affirmer :
l’accusation susmentionnée est absolument fausse.
Qui plus est, non seulement les deux commissions du Congrès étaient au courant des
négociations avec la Bolivie concernant l’aspiration portuaire de ce pays, mais tout le pays en avait
également eu connaissance dans la mesure où j’ai déclaré ce qui suit à la presse, le 11 juillet :
«Le Chili a indiqué à plusieurs reprises, y compris pendant des sessions de la
Société des Nations, qu’il était disposé à prêter attention, dans le cadre de négociations
directes avec la Bolivie, aux propositions que cette dernière pourrait formuler, dans le
but de satisfaire à son aspiration d’obtenir un accès souverain à l’océan Pacifique.
Cette politique de notre ministère ne réduit en rien les droits que les traités en vigueur
reconnaissent au Chili. Le gouvernement actuel s’inscrit dans le droit fil des
antécédents diplomatiques qui ont été rappelés et, partant, est prêt à engager avec la
Bolivie des discussions sur le problème en cause.»
Cette déclaration publique contient la substance de la note adressée à l’ambassadeur de
Bolivie, que j’ai rendu publique le 31 du mois dernier. De fait, la note et la déclaration font toutes
deux référence à la politique traditionnellement suivie par notre ministère des affaires étrangères ; il
y est déclaré que le gouvernement actuel continuera d’appliquer cette politique et qu’il est, par
conséquent, prêt à entamer des négociations pour étudier l’aspiration de la Bolivie à disposer d’un
port. La note est encore plus explicite que la déclaration faite à la presse, en ce qu’elle précise qu’il
- 54 -
conviendra également d’étudier des compensations, non territoriales, qui tiendront pleinement
compte des intérêts du Chili. La note qui a causé un tel tollé ne contient donc, dans le fond, rien
que la nation ne savait déjà — comme mon cher ami M. Cañas Flores, président de la commission
des affaires étrangères, l’a expliqué à juste titre dans son discours éloquent.
Il y a encore autre chose. Ladite commission s’était réunie précisément pour discuter de mon
annonce publique, selon laquelle le gouvernement entendait ouvrir des négociations avec la
Bolivie, et elle a consacré trois séances à cette question. Et des observations quasi identiques à
celles faites maintenant avaient alors été formulées à ce sujet dans les journaux, à la radio et dans
des discours parlementaires.
Plusieurs députés ont cru utile d’apporter à ce débat public de fréquentes références à ce qui
a été discuté dans les séances secrètes de la commission des affaires étrangères, mais l’exactitude
de ces allusions a été négligée.
Je pensais que lorsqu’une question était abordée en séance secrète de la commission, avec
l’accord de cette dernière, le débat de la Chambre devait être de la même nature. L’honorable Sénat
partage ce point de vue s’agissant de la question internationale qui nous intéresse maintenant.
Mais, à supposer que je me trompe, les références répétées qui ont été faites aux séances de
la commission m’empêchent de garder le silence sur cette question, car je n’accepte pas d’être
placé dans une position qui m’empêche de me défendre.
Si l’on veut dire que je n’ai pas transmis à la commission les notes échangées avec
l’ambassade de Bolivie, alors cette affirmation est exacte. Nous verrons pourquoi j’ai agi ainsi.
Mais si l’on veut dire — comme cela a été affirmé —que je n’ai pas informé la commission que le
gouvernement entendait ouvrir des négociations avec la Bolivie concernant son aspiration
portuaire, alors cela est entièrement faux.
J’affirme catégoriquement — et j’accepterais volontiers la procédure de corroboration que
j’ai proposée au début de mon discours — que j’ai émis devant la commission, entre autres, les
concepts suivants :
«Il existe, comme je l’ai dit à la presse, l’intention d’écouter les propositions de
la Bolivie.»
«Le Gouvernement chilien est disposé, comme les gouvernements précédents
l’ont été, à entendre les propositions de la Bolivie, à ouvrir des négociations pour
entendre les aspirations de la Bolivie concernant les différents moyens qui pourraient
exister pour satisfaire ces aspirations.»
Et j’ai répété que «le Gouvernement chilien ne refuse pas d’entamer des négociations avec la
Bolivie, car c’est la seule façon d’écouter un pays pour entendre les propositions qu’il pourrait
faire». «La seule chose que j’ai acceptée», ai-je ajouté, «est d’entamer des conversations ou des
négociations, comme vous voudrez les appeler, pour écouter les aspirations de la Bolivie, étudier
ces aspirations et voir s’il est judicieux ou non de les accepter.»
Mais il y a autre chose, Monsieur le président. Parmi les députés qui ont pris part à ce débat,
en contestant l’attitude du gouvernement, certains ont expressément déclaré devant la commission
que le premier fait qui avait été établi au sein de celle-ci était que le Gouvernement chilien avait
accepté lesdites négociations.
Si tel est le cas, comment peut-on affirmer que la commission n’a pas été informée des
événements ?
- 55 -
Les rectificatifs que j’ai apportés concernant ce qui a été discuté au sein de la commission
constituent la meilleure réponse que je puisse donner à ces accusations, non seulement exagérées
mais également injurieuses, qui ont été formulées dans cette chambre. Tous les députés pourront
confirmer, en se fondant sur les procès-verbaux concernés, qui n’a pas dit la vérité.
Il a également été établi que, s’il est vrai que les membres de la commission ne connaissaient
pas le libellé des notes échangées avec le représentant bolivien, ils connaissaient toutefois leur
teneur et leur objet clair et précis.
Prérogatives du président de la République
Le pouvoir exécutif n’est-il pas autorisé à choisir le moment opportun pour informer une
commission parlementaire des composantes d’une démarche diplomatique pendant la période qui
précède la conclusion d’un traité international ?
Je réponds par l’affirmative. Et c’est de cette prérogative dont il s’agit en l’espèce, et de rien
d’autre.
Nous savons que les pouvoirs publics disposent de compétences exclusives et de
compétences communes ou partagées, conformément à notre constitution.
Un des exemples les plus typiques d’attributions spéciales conférées au président de la
République est celle consacrée au point no 16 de l’article 72 de la Constitution, aux termes duquel :
«entretenir des relations politiques avec les puissances étrangères, recevoir leurs
agents, reconnaître leurs consuls, conduire des négociations, prendre des dispositions
préliminaires, conclure et signer tous les traités, accords et autres conventions de paix,
d’alliance, d’armistice, de neutralité ou de commerce font partie des attributions
particulières du président de la République. Avant leur ratification, les traités doivent
être soumis à l’approbation du Congrès. Les discussions et délibérations sur ces
questions doivent rester secrètes si le président de la République l’exige.»
En conséquence, c’est exclusivement au président de la République qu’il revient de conduire
des négociations, de prendre des dispositions préliminaires et de conclure et de signer les traités,
quelle que soit leur nature. Et le Congrès est chargé d’approuver ou de rejeter ces traités.
En outre, l’article 4.0 de notre constitution établit un principe élémentaire de droit public en
prévoyant qu’
«aucune entité judiciaire, aucune personne ou aucun groupe de personnes ne peut
s’arroger— même dans des circonstances extraordinaires — d’autres pouvoirs ou
droits que ceux qui leur sont expressément conférés par la loi. Tout acte qui va à
l’encontre de cet article est nul et non avenu.»
Nous sommes donc face à un précepte prohibitif. Et non seulement il n’existe aucune
disposition «expresse» de la Constitution qui autorise l’honorable Chambre des députés à
méconnaître — même dans des circonstances extraordinaires — les compétences du gouvernement
susmentionnées, mais il existe également un précepte «explicite» qui confère ces compétences au
président de la République à titre exclusif.
Je préfère céder la parole à ce sujet à M. Miguel Cruchaga Tocornal, éminent parlementaire,
auteur de traités et ministre des affaires étrangères.
- 56 -
En 1933, le Sénat lui a remis une note l’informant que plusieurs sénateurs demandaient que
les copies des accords publics et confidentiels conclus aux conférences tenues à Mendoza soient
envoyées à cet organe.
Le ministre Cruchaga a refusé d’envoyer ces copies, en faisant notamment valoir les
arguments suivants :
«Le point no 16 de l’article 72 de notre constitution prévoit qu’entretenir des
relations politiques avec les puissances étrangères, conduire des négociations, prendre
des dispositions préliminaires, etc., sont les attributions spéciales du président de la
République. Nous avons toujours compris, même à l’époque du régime parlementaire,
que cette prérogative n’autorisait pas le Congrès à intervenir dans les négociations
pendantes. En outre, il s’agit d’un principe qui a non seulement été consacré par la
pratique, mais qui est également diffusé par les auteurs de traités ; et cela se comprend
clairement en lisant les travaux publiés par les commentateurs de notre constitution.
Le contrôle parlementaire peut uniquement s’exercer lorsque les négociations sont
parvenues à leur terme et que, par conséquent, elles ne risquent pas d’être entravées
par la communication de leurs antécédents.»
Après que cette question a été transmise à la commission constitution, législation et justice,
j’ai été chargé d’en faire rapport, épaulé par des sénateurs de divers partis politiques, en
l’occurrence MM. Nicolas Marambio, Alvaro Santa Maria, Raul Puga et Aurelio Meza. Après
avoir rappelé les compétences exclusives du président de la République, que j’ai mentionnées cidessus,
ce rapport disait que,
«[p]endant la période des négociations, dont la responsabilité repose entièrement sur le
pouvoir exécutif, sans que celui-ci ait l’obligation de rendre compte à toute autorité ou
personne de la tournure ou de l’orientation qu’il entend leur donner, le gouvernement
peut — s’il le juge utile pour faciliter l’accord ou pour toute autre raison — maintenir
la plus stricte confidentialité non seulement à l’égard de l’opinion publique du pays en
général, mais également à l’égard des autres branches de l’Etat qui n’interviennent
pas dans la genèse de ces pactes.
Dès lors que le pouvoir exécutif aura décidé de soumettre au Congrès le texte
convenu, le Congrès et tous ses membres auront le droit d’être informés en détail de la
négociation et de ses conséquences possibles, ainsi que le droit d’exiger que tous les
antécédents qu’ils jugeront nécessaires à leur examen soient portés à leur
connaissance, et ils pourront refuser leur approbation s’ils considèrent que l’affaire n’a
pas été dûment clarifiée faute d’éléments d’appréciation nécessaires.»
Résumant ses observations, la commission a proposé le projet d’accord suivant :
«Le Sénat déclare que le fait qu’il ne soit pas doté de pouvoirs de contrôle ne lui
ôte pas le droit de prendre connaissance de la documentation relative aux affaires de
l’Etat en demandant les antécédents de l’espèce pour exercer ses diverses fonctions
constitutionnelles, pour autant que, ce faisant, il n’empiète pas sur les attributions
spéciales conférées au président de la République, notamment sur celles de négocier,
conclure et signer les traités.»
Au cours du débat auquel cette question a donné lieu, il a également été dit que : «Aucun
pays du monde ne publie les détails d’un traité tant que celui-ci est dans sa période de gestation.»
L’honorable Sénat a approuvé, avec très peu de votes contre, le rapport de la commission.
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Aujourd’hui, en tant que ministre, je maintiens ce que j’ai dit il y a dix-sept ans en tant que
membre rapporteur d’une commission du Sénat, et ce que j’ai déjà soutenu à d’autres occasions,
quand mon parti a intégré le gouvernement et quand il faisait partie de l’opposition.
*
Il ressort de ce que je viens d’expliquer que j’avais parfaitement le droit de ne pas remettre à
la commission des affaires étrangères de la Chambre les notes confidentielles échangées avec
l’ambassade de Bolivie, notes que j’ai envoyées à cette même commission le 30 du mois passé et
que j’ai fait publier dans la presse le jour suivant.
Il a été dit dans certains journaux, à la radio et même par des parlementaires, que j’aurais nié
l’existence de ces notes devant les commissions de l’honorable Sénat et de la Chambre. Cette
affirmation est absolument fausse et, pour la réfuter, je les invite à lire les procès-verbaux et leurs
versions sténographiques relatifs à ces notes.
Dans le fond, les notes ne contiennent rien d’autre que ce que j’ai transmis dans mes
déclarations à la presse et, en particulier, dans les informations que j’ai données devant les
commissions des deux Chambres, lesquelles établissent, comme je l’ai dit plus haut, que l’intention
était d’ouvrir des négociations avec la Bolivie concernant son aspiration portuaire, avec des
compensations qui tiendraient pleinement compte des intérêts de notre pays.
Puisque tel était le cas, quel inconvénient cela pouvait-il me poser, même si je n’étais
nullement tenu de le faire, de porter à la connaissance de la commission, que j’ai toujours
considérée avec la plus grande déférence dans les brefs contacts que j’ai eus avec elle, des
documents qui ne contenaient pratiquement rien de nouveau ?
Il n’existait qu’un seul obstacle majeur pour tout homme d’honneur : les ministères des
affaires étrangères du Chili et de la Bolivie s’étaient engagés à ne pas communiquer ces notes avant
que tous deux ne conviennent de le faire en même temps, à une date qu’ils fixeraient.
A la veille du voyage que l’ambassadeur de Bolivie au Chili a entrepris dans son pays
d’origine, il a été convenu de publier les notes le 31 du mois passé, à savoir quand ce diplomate
serait déjà à La Paz.
Etant donné que leur publication devait se faire d’un commun accord, j’aurais pu exercer une
certaine influence pour essayer de la retarder, car j’étais bien conscient de la réaction que mes
déclarations publiques avaient provoqué chez certains représentants de l’opposition et je
comprenais la manière dont certains médias pouvaient exploiter cette situation à l’occasion de
l’élection du sénateur pour Santiago. Mais il ne m’a jamais traversé l’esprit d’utiliser ma position
de ministre pour en tirer des avantages politiques, parce que je suis convaincu que ce type
d’intérêts ne doit pas interférer avec les affaires internationales.
La veille de la date fixée pour publier les notes, j’ai pensé que ce serait faire preuve de
déférence que de les envoyer à la commission des affaires étrangères du Sénat et à celle de la
Chambre des députés — qui avaient manifesté un intérêt particulier pour cette question — avant de
les remettre à la presse, et c’est exactement ce que j’ai fait.
Qui plus est, je n’ai pas voulu que les notes soient publiées le 31 au matin pour donner le
temps auxdites commissions, si elles le souhaitaient, de les lire avant que le public n’en prenne
connaissance, ce que la commission de l’honorable Sénat a fait. C’est pourquoi les notes ont été
publiées dans l’après-midi ce jour-là.
- 58 -
Des journaux et des stations de radio ont affirmé que l’ambassadeur de Bolivie avait publié
les notes avant le moment convenu.
Cette accusation est encore infondée et arbitraire. S. Exc. M. Ostria Gutiérrez et son
ministère des affaires étrangères ont respecté à la lettre l’engagement pris. La marche que j’ai jugée
bon de suivre peut être critiquée de toutes les manières souhaitées, mais nul n’a le droit de porter
des accusations fantaisistes contre un diplomate qui a agi avec la rectitude et la noblesse qui ont
caractérisé l’accomplissement de sa mission au Chili et qui ne sont pas incompatibles, d’ailleurs,
avec la diligence dont il a fait preuve — conformément à son devoir — pour servir les intérêts de
son pays.
L’honorable M. Undurraga a déclaré devant l’honorable Chambre que, sans
M. Ostria Gutiérrez, les députés n’auraient toujours pas eu connaissance des notes en question.
Malheureusement, ce député a oublié que j’avais remis ces documents aux commissions des
affaires étrangères des deux Chambres la veille de la date fixée pour les publier, et qu’il était donc
impossible qu’ils ne parviennent pas à la connaissance des députés.
Cette affirmation m’attribue par ailleurs une maladresse extrême et hors du commun, car elle
présuppose que, sachant que le ministère bolivien des affaires étrangères allait publier les notes et
que celles-ci seraient donc connues au Chili, j’aurais moi-même cherché à m’exposer, sans aucune
raison, à de sévères critiques pour avoir continué à maintenir une confidentialité inutile et
inexplicable.
Monsieur le président, je suis conscient d’avoir accordé une importance excessive aux
accusations portées contre moi à l’intérieur et à l’extérieur de cette chambre concernant la marche
suivie. Je suis conscient que, pour ceux qui me connaissent et jugent sans passion ma modeste mais
longue et intense représentation publique, les démentis détaillés que j’ai apportés sont inutiles voire
fastidieux. Mais, quand on examine l’atmosphère politique dans laquelle nous vivons ; quand on
écoute heure après heure les émissions de radio qui distillent leur venin et dénaturent toutes les
intentions saines, qu’elles soient erronées ou non ; quand on lit les journaux qui falsifient sans
vergogne et avec animosité les informations pour tenter de saborder un seul homme, il n’est tout
simplement pas possible de se limiter à des réfutations générales.
Je dois m’excuser auprès de l’honorable Chambre pour m’être appesanti aussi longuement
sur une question de forme, mais je tiens néanmoins à ajouter quelques brèves observations de
même nature avant de me tourner vers des aspects d’intérêt général.
J’ai signalé le motif qui m’a empêché de remettre à la commission des notes qui ne
modifiaient pas une situation bien connue.
Je vais maintenant donner avec franchise une raison de plus.
Même à supposer que ma conception du respect de la parole donnée soit différente, même à
supposer que les engagements pris vis-à-vis d’un gouvernement étranger ne concernent pas les
parlementaires, aurais-je pu agir autrement, alors que je sais que les choses dites en séances
secrètes ne restent pas secrètes ? N’ai-je pas lu dans la presse la transcription, quoique déformée,
d’un échange que j’avais eu avec un député à la Chambre ? N’avons-nous pas tous lu toutes sortes
de versions sur ce qui est dit dans ces séances ? N’ai-je pas moi-même dû rectifier certaines de ces
versions ?
Je n’ai pas besoin d’insister sur ce point, car plusieurs députés ont reconnu ce dont je parle.
- 59 -
Peu de temps avant la publication des notes controversées, S. Exc. le président de la Bolivie
a minutieusement détaillé devant le Congrès bolivien la politique suivie par son pays sur la
question du port et ses relations avec notre gouvernement, sans dire un seul mot sur les
communications qui avaient été échangées entre les deux ministères des affaires étrangères,
respectant ainsi la confidentialité temporaire qui avait été convenue.
Un député aurait-il voulu que je présente au monde extérieur le triste spectacle d’un homme
manquant à la parole donnée, en contraste flagrant avec l’attitude du chef de l’Etat bolivien ?
Pour ma part, je rejette cette possibilité avec la ferme conviction d’avoir préservé le décorum
et la solennité de mon pays et des charges qui m’incombent.
Nouveaux rectificatifs
L’honorable M. Merino a affirmé dans son discours que le ministre qui vous parle n’a même
pas mentionné à la commission des affaires étrangères la discussion qui avait eu lieu entre
S. Exc. M. González Videla et le président Truman.
J’ai été frappé par cette affirmation venant d’un député de la qualité de M. Lira, étant donné
qu’il a lui-même assisté aux réunions de cette commission et que le premier procès-verbal établi à
ces occasions montre que j’ai non seulement mentionné l’entrevue en question mais que j’ai
également expliqué en quoi elle avait consisté.
L’honorable M. Bulnes a remis à la presse un discours contenant des concepts injurieux
envers la Bolivie, ce que je ne peux pas laisser passer sans protestation officielle.
La Bolivie est une nation amie et soeur avec laquelle notre pays entretient des relations très
cordiales, et je ne comprends pas le but recherché en tentant ainsi de perturber ces relations au
moyen d’expressions incompatibles avec les responsabilités incombant à tout parlementaire.
S. Exc. M. Urriolagoitia a été élu président à l’issue d’une élection populaire et a su défendre
la stabilité des institutions de son pays contre les éléments totalitaires, comme le communisme et
autres, qui ont tenté à plusieurs reprises de troubler l’ordre public pour imposer des formes de
gouvernement que notre pays rejette.
Thèse traditionnelle du Chili face au problème bolivien
Notre ministère des affaires étrangères a toujours soutenu et maintient aujourd’hui le
principe de droit international selon lequel les traités ne peuvent pas être revisés.
Conformément à cette règle, notre ministère des affaires étrangères s’est opposé
énergiquement aux tentatives faites par la Bolivie en conférences internationales de reviser le traité
de 1904, qui a mis fin aux différends nés de la guerre de 1879.
Dans la note que j’ai adressée à l’ambassadeur de Bolivie en date du 20 juin, la même ligne
de conduite est rappelée.
Nos représentants ont brillamment soutenu cette thèse à la conférence de la Société des
Nations. Ils se sont opposés à la revision du traité avec de solides arguments de nature juridique et
de tout ordre, et ils ont également déclaré ce qui suit par la voix de notre éminent représentant des
affaires étrangères, M. Agustín Edwards, en 1921 :
- 60 -
«La Bolivie peut chercher à obtenir satisfaction par des négociations directes
acceptées d’un commun accord. Le Chili n’a jamais fermé cette porte, et je suis en
mesure de déclarer que rien ne nous serait plus agréable que d’explorer directement
avec la Bolivie les meilleurs moyens d’aider à son développement. C’est son amitié
que nous voulons ; notre ardent désir est qu’elle soit heureuse et prospère. C’est aussi
notre intérêt, puisqu’elle est notre voisine et que sa prospérité ne peut que servir la
nôtre.»
Cette déclaration a ainsi fixé la ligne politique de notre ministère des affaires étrangères,
laquelle sera ensuite confirmée par divers gouvernements.
Cela est corroboré par les déclarations —que je n’ai pas besoin de lire car tout le monde les
connaît — faites par le président Alessandri dans son discours adressé au Congrès en 1922 et par
les ministres des affaires étrangères MM. Luis Izquierdo et Jorge Matte. Ce dernier a ainsi déclaré
que «le Gouvernement chilien n’a[vait] pas renoncé à l’idée d’octroyer une bande de territoire et un
port à l’Etat bolivien», et accepté d’examiner la proposition sur le principe.
Des députés et l’éditorialiste d’un journal sérieux d’opposition ont affirmé que les
déclarations faites par le Gouvernement chilien à ce sujet sont toutes antérieures au traité de 1929
conclu avec le Pérou.
Cette affirmation est inexacte. Sans remonter plus loin, le ministre des affaires étrangères,
M. Germán Riesco, se référant à une déclaration du président Perón favorable à l’aspiration de la
Bolivie, a réaffirmé ce qui suit par voie de presse le 1er janvier de l’année dernière :
«Les relations cordiales entre le Chili et la Bolivie, et le fait que le Chili n’a
jamais refusé de discuter directement avec la Bolivie de la question de son
enclavement, rendent superflue, voire préjudiciable, l’intervention de tiers officieux.»
C’est-à-dire que M. Riesco a confirmé le concept que le Chili ne s’oppose pas à écouter la
Bolivie dans le cadre de négociations directes, tout comme cela avait été déclaré devant la Société
des Nations et à d’autres occasions avant cela.
La note que j’ai envoyée à l’ambassadeur de Bolivie en juin dernier n’est, en conséquence,
que l’application de la thèse traditionnellement suivie par le ministère chilien des affaires
étrangères.
Ainsi, je n’ai ni inventé ni initié une politique. Je l’ai simplement appliquée avec honnêteté
et franchise, comme il sied à la solennité de l’action du ministère chilien des affaires étrangères.
Quelqu’un aurait-il voulu que les déclarations réitérées de notre gouvernement selon lesquelles le
Chili était prêt à écouter les propositions de la Bolivie concernant son aspiration portuaire ne soient
bonnes que pour le papier, mais qu’une fois engagés sur le terrain pratique nous disions à la
Bolivie : «Nous refusons catégoriquement d’écouter vos propositions» ?
En ce qui me concerne, pour le prestige de notre pays, je rejette résolument cette possibilité.
Et comment un pays peut-il faire entendre sa voix dans le domaine diplomatique ? En se
penchant sur la question et en entamant des conversations à ce sujet. Le mot «négociation» ne
signifie rien d’autre que cela ; et il est pratique courante d’ouvrir des négociations au moyen d’un
échange de mémorandums ou de notes, comme cela s’est produit en l’espèce.
Le problème est étudié sous tous ses angles dans de telles conversations, de même que les
points de vue des parties et les compensations qui pourraient avoir lieu.
- 61 -
Les compensations proposées pourraient ne pas convenir au Chili, comme ce fut le cas avec
d’autres pays, mais on ne pouvait pas faire une chose : briser les promesses réitérées d’écouter la
Bolivie, qui demandait à être entendue directement et amicalement depuis de nombreuses années,
comme le montrent les archives du ministère des affaires étrangères.
Il ne s’agit pas d’un nouveau problème, mais d’un problème qui perdure depuis longtemps et
que le Chili ne peut pas et ne doit pas éluder par de simples moyens dilatoires. Nous ne pouvons
pas donner à une nation soeur, ni à l’Amérique, l’impression que nous ne sommes pas disposés à
mettre en oeuvre dans la pratique ce que nous avons promis publiquement et à maintes reprises. Un
tel comportement ne correspondrait pas à notre solide prestige en tant que nation et serait contraire
à la clarté, à la franchise et à la loyauté avec lesquelles nous devons aborder les affaires
internationales. Pour ma part, je refuse de m’écarter de ces règles.
L’honorable M. Bulnes a dit qu’«accorder à Arica le statut de port franc ou octroyer à la
Bolivie certains droits, ou tout autre sujet analogue, pourrait avoir été évoqué [dans ces
négociations], mais pas forcément de céder à la Bolivie un accès souverain à l’océan Pacifique,
comme cela est maintenant envisagé». Cela supposerait une modification radicale de la politique du
gouvernement.
Cependant, nous avons déjà vu que les déclarations réitérées du Gouvernement chilien
portaient précisément et résolument sur un accès souverain à l’océan Pacifique, accès que la
Bolivie a réclamé devant des congrès internationaux et dans les démarches directes qu’elle
entreprend continuellement auprès du ministère chilien des affaires étrangères.
Alors, d’où vient l’accusation et l’argument selon lesquels nous pourrions maintenant
réorienter cette conversation pour discuter d’autres questions ? L’affirmation que la politique du
gouvernement a subi une «modification radicale» est-elle fondée sur ce type d’observations ?
Permettez-moi de le répéter une fois de plus, notre politique étrangère n’a fait l’objet
d’aucune modification [en ce qui concerne la Bolivie] : il y a seulement eu une application sincère,
franche et honnête de cette politique, sans craindre les attaques qui pourraient résulter de cette
attitude, quelles que soient leurs motivations.
Pour ne pas fatiguer cette honorable chambre, je ne vais pas répondre aux observations de
l’honorable M. Bulnes sur le projet d’irrigation dont il a parlé, et selon lequel il serait nécessaire de
construire une canalisation qui s’étendrait sur plus des trois quarts de la longueur du Chili. Ce qui
aurait intéressé cette honorable chambre était de savoir si notre gouvernement avait déjà envisagé
ce projet, car je ne vois sinon aucune raison de le mentionner.
Je ne vais pas non plus examiner la théorie de ce député selon laquelle «si le nord du pays
était converti en terres agricoles, le climat de cette région changerait complétement, entraînant des
pluies qui causeraient la perte de notre richesse en salpêtre». Cette théorie va à l’encontre des
principes scientifiques. Même à supposer que des forêts soient plantées, cela ne provoquerait pas de
pluies. C’est la mer, et non la forêt, qui entraîne des précipitations, comme démontré par
l’expérience de divers pays.
En tout état de cause, il est prématuré de parler de projets consistant à utiliser l’énergie
électrique pour recueillir des eaux souterraines et favoriser l’industrie ou autres, car nous avons
seulement accepté d’entamer des discussions avec la Bolivie et n’avons encore reçu aucune
proposition supposant l’examen de compensations qu’accepterait le Chili.
D’autres aspects intéressants justifient l’attitude de notre ministère des affaires étrangères, à
l’origine de ce débat, mais je considère que ceux-ci doivent être discutés en séance secrète.
- 62 -
Pour conclure mes observations, j’invite tous les députés à élever le débat concernant nos
affaires internationales sur le terrain de la sérénité, afin de mobiliser l’intelligence et les efforts des
hommes représentatifs de tous les secteurs dans la recherche d’une orientation nationale. Laissons
nos divergences politiques dans la sphère à laquelle elles appartiennent. Ne nous laissons pas
diviser par des partis politiques pour régler nos affaires étrangères, car nous pourrions causer un
préjudice irréparable pour le destin de la République.
Et, pour solutionner ces problèmes, ne regardons pas uniquement les actions menées à
l’heure actuelle, mais unissons-nous pour examiner les perspectives d’avenir susceptibles de
découler de notre action diplomatique.
Inspirons-nous d’un idéal de vraie fraternité américaine en recherchant, non pas la politique
suivie par d’autres pays ou l’isolement au sein du continent, mais une large union de tous les Etats
qui le composent afin de permettre à ces pays, ainsi unis, de contribuer efficacement à défendre la
civilisation chrétienne menacée.»
___________
- 63 -
ANNEXE 277
«L’AMBASSADEUR OSTRIA S’EST EXPRIMÉ À LA PAZ SUR LE PROBLÈME PORTUAIRE
CHILÉNO-BOLIVIEN», EL DIARIO ILUSTRADO (CHILI), 6 JANVIER 1951
Journal El Diario Ilustrado (Chili)
El Diario Ilustrado, 6 janvier 1951.
Les deux pays ont expliqué leurs positions. La première étape vers une solution s’est ouverte
en parallèle. Interview accordée à l’agence United Press et à la presse de La Paz.
La Paz, 5. (UP) — Interviewé par l’agence United Press et les quotidiens locaux,
l’ambassadeur de Bolivie au Chili, M. Alberto Ostria Gutiérrez, a rappelé qu’en juin le Chili et la
Bolivie avaient échangé des notes sur la question du port et que la Bolivie avait proposé
d’organiser des négociations directes pour obtenir un accès à la mer sur des bases qui tiendraient
compte de leurs intérêts réciproques.
Le Chili a répondu que le gouvernement était prêt à entamer officiellement des négociations
directes destinées à trouver une formule qui permettrait de donner à la Bolivie un accès à la mer et
au Chili d’obtenir des compensations qui ne soient pas de nature territoriale.
M. Ostria Gutiérrez a déclaré :
«La question portuaire a par là même été posée de manière loyale par la Bolivie,
et reconnue par le Chili, ouvrant ainsi une première étape de très grande importance
qui exclut tout type de compensations territoriales de la part de la Bolivie, qui a déjà
consenti au plus grand des sacrifices avec la perte de son littoral en conséquence de la
guerre du Pacifique.»
M. Ostria Gutiérrez a ajouté :
«Une courte pause a suivi l’échange de notes, mais il ne faut pas en conclure
que les négociations ont été suspendues, un échange de vues étant toujours en cours
avec le Gouvernement chilien, qui demeure fidèle à la position favorable qu’il a
officiellement exprimée dans la note de juin 1950.
Il est logique que les négociations internationales prennent du temps : elles
doivent surmonter des étapes successives avant d’arriver à leur terme. C’est également
le cas du problème portuaire bolivien.»
Il a ensuite réfuté l’allégation selon laquelle la Bolivie pourrait céder les eaux du lac Titicaca
en échange d’une zone portuaire et dit : «C’est tout simplement fantaisiste.»
Il a déclaré que le Chili avait confirmé la présence de courants d’eau souterrains dans la
pampa de Tamarugal, et que des émanations de vapeur d’eau avaient été découvertes dans la région
montagneuse de Tatio, près de San Pedro, sur la ligne de chemin de fer qui relie Antofagasta à la
Bolivie, vapeur avec laquelle il serait possible de fournir de l’électricité au nord du Chili et à
certaines régions de Bolivie. «En outre, il n’aurait pas été possible d’engager les eaux du lac
Titicaca sans le consentement préalable du Pérou, qui a souveraineté sur le lac majeur.»
M. Ostria Gutiérrez a expliqué que la suppression de la «taxe sur le chiffre d’affaires» qui
pesait sur les personnes et les marchandises depuis 1938, en application du traité de 1904 et des
conventions de 1912 et 1937, avait récemment été obtenue.
- 64 -
«Le président, M. González Videla, et le ministre des affaires étrangères,
M. Horacio Walker Larraín, m’ont annoncé qu’une solution à cette question favorable
à la thèse bolivienne avait été trouvée, laquelle permettra de libérer le commerce
bolivien du paiement de 5 millions de pesos chiliens.»
Il a indiqué qu’un accord permettait aux Chiliens de voyager en Bolivie avec un simple saufconduit
et que la possibilité d’accorder ce même droit aux Boliviens désireux de se rendre au Chili
était maintenant à l’étude, droit qui s’appliquait uniquement à la zone Chica.
M. Ostria Gutiérrez a expliqué que le Chili avait consolidé ses bases économiques à force de
discipline et de sacrifices de la part des contribuables.
«La multiplication des industries, le développement de l’agriculture, les grandes
centrales électriques et la nouvelle aciérie de Huachipato transforment rapidement
l’économie chilienne.»
Au sujet de la politique internationale de la Bolivie, M. Ostria Gutiérrez a déclaré :
«Trois choses fondamentales doivent s’imposer urgemment en Bolivie :
premièrement, la fin des complots, afin de permettre au gouvernement de déclarer une
amnistie générale ; deuxièmement, des élections générales entièrement libres ; et,
troisièmement, que le résultat de ces élections soit respecté.»
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Volume II

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