Résumé de l'arrêt du 30 juin 1995

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6951
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Number (Press Release, Order, etc)
1995/2
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Résumés des arrêts, avis coDocument non officielnces de la Cour
internationale de Justice

AFFAIREREiLATI'VA EUTIMORORIENTAL

(PBEITUGAE C. AUSTRALIE)

Dans son arrêt surl'affaire du Timor oriental pl.~ortu30janvier et le 16février1995.L'arrêtreproduitensuite
galc.Australie)laCour, parquatorze voixcontre:deux, les conclusions finales qui ont étéprésentées parles
a dit qu'elle ne saurait,n l'esee, exercer la compé- deux Parties pendant laprocédureorale.
tence à elle conféréeparles déclarationsfaitespar les Exposédesfaits (par. 11il 18)
Parties confonmémentau paragraphe 2de l'aitick:36de
son Statut pour statuer sur lediffgrendportétfevantelle La Cour résumeensuite brièvementl'histoire des re-
par la requêtede la Républiqueportugaise. lations du Portugal et de l'Indonésie avec leTemtoire
Ont votepour : M. Bedjaoui,présidentM; .Schwebel, du Timor oriental, puis un certain nombre de résolu-
vice-président;M.Oda, sir Robert Jennings, IMM. Guil- tions du Conseil de sécuritet de l'Assembléegénérale
laume, Shahabuddeen, iiguilar, Mawdsley, Ranjeva, concernant la question du Timor oriental. Elle fait état
Herczegh, Shi, F!eischhtruer, Koroma, Vereshchetin, kgalementdes négociationsentre l'Australie et l'lndo-
juges, sir Ninian Stephen,juge ad hoc. nésieayant abouti au Traitédu 11décembre1989qui
créeune "zone de coopération. ..dans un secteursitué
Ont voté contre : M. Weeramantry, juge; M. Sku- entre la province indonésienne du Timor oriental et
biszewski,juge ad hoc. l'Australieseptentrionale*'.
Résumé des th2scises Parties(par. 19et 20)

La Cour résumeles thèsesdechacunedesParties.
MM. Oda, Shahubuddeen, Ranjeva et Vereshc:hetin, L'exceptionaustralienneselon laquelleil n'existerait
juges, ontjoint àl'mêtles exposésdeleur opinioilindi- pas véritablementde différendentre les Parties
viduelle. (par.21et 22)
M. Weeramantry, juge, et M. Skubiszewski,juge ad
hoc,ont joint àI'mêtles exposésde leur opiiniondissi- Puis,laCour examinel'exceptionde l'Australieselon
dente, dont des résumks:;ontjoints en annexe au pr%- laquelle il n'existerait pas véritablementde différend
sent communiqué. entre l'Australieet lePortugal.L'Australie soutientque
l'affaire tellequeprésentépar lePortugal est artificiel-
lement limitéeà la question de la licéitédu compor-
tement de l'Australie et que le véritable défendeurest
Qualitks(par. 1à 10) I'lndonésie,et non l'Australie.Elleexpose qu'ellea été
assignéeenlieu et place de l'Indonésie.L'Australie fait
Dans son arrêt,la Cotir rappelle que, le 22 février observer àce sujet que le Portugal et elle-mêont ac-
1991, lePortugal a déposéune requêteinrxodiictive ceptélajuridictionobligatoiredelaCour conformément
d'instance contre l'Australie au sujet de "certain:;agis-n'est pas lecasde l'Indonésie.son Statut, maisquetel
sements & 1'Australiese rapportantauTimor oritatai".
Selon la requ6k, l'Australie aurait, par son comlprte- La Cour déclareil cet égardqu'a~x fins de vérifier
ment, "méconnii. ..l'obligationde respecter las devoirs l'existenced'un différendd'ordrejuridique enl'espke,
et les compétences[du Pcirtugalen tant que] puissance il est sans importance de déterminer si le "différend
administrante [du Timor oriental]. ..et...le dnit du véritable"oppose le Portugalà l'Indonésie plutôtqu'à
peuple du Timor oriental àdisposer de lui-m15me et les 'l'Australie.A tort ouaison, lePortugal a formulédes
droits y attenants". Enoris6quence,d'apr&slarequête, griefs en fait et en droBtl'encontre de l'Australie et
l'Australie aurait "engagésa responsabilité internatio- celle-ci lssrejetés.Du fait de ce rejet, il existe un dif-
nale, tantil l'égarddu piiple du Timor oriental que du :&end d'ordrejuridique.
Portugal". Pour fonderla compétencede la Cour, la re- .C'exceptioaustralienneselon laquellelarequête obli-
quêtefait référenceaux déclarationspar lescluellesles gerait laCour dseprononcersurlesdroitset obliga-
deux Etats ont acceptéhljuridiction obligatoirz de la tionsde l'lndonésie(par.23 à35)
Cour ainsi qu'il estrkvu ;m paragraphe 2de l'article36
de son Statut. Dans son c:onthe-rnérnoire1,'A.ustraliea La Cour fait ensuiteporter son examen sur I'excep-
soulevédes questions re1:ativesà la compétencede la tion principale de l'Australie, selon laquelle la requête
Cour et il la recevabilitéde la requête.Au cours d'une ciuPortugal obligerait la Cour il se prononcer sur les
réunionque le Président de la Cour a tenue:avcx les tiroitsetobligationsdel'lndonésie.L'Australie soutient
Parties, celles-ci sont convenues que ces questions que ''~ompétenceconféréeà la Cour par les déclara-
étaient inextricablement liéesau fond et qu'e1le:sde ti0.i~faites par les Parties conformément au paragra-
vaient en conséquenceêtretranchéesdans le:caclrede phe 2 de l'article 36 du Statut neermettrait pas à la
l'examende l'affaireau fond. La procaure écriteayant Cour destatuer si,pour cefaire, elleétaitdans9obliga-
pris finenjuillet 1993,des audiences ont euieueritrele riondese prononcer sur lalicéitdel'entréeet du rnain-tien de l'Indonésieau Timor oriental, sur la validitédu naîtreà l'Indonésieaucune autorité à l'égarddu Ti-
Traitéde1989entre l'Australieet l'Indoiiésie,ou sur les mor oriental et de ne traiter, en ce qui concerne ce der-
droits et obligations de l'Indonésieaux termes dudit nier, qu'avec le Portugal. Le Portugal prétendque ces
Traité,mêmesi laCour n'avait pas àdéciderde la vali- résolutionsconstitueraient des "données" sur le con-
ditédecelui-ci. A l'appui de sa thèse, l'Australieinvo- tenu desquelles la Cour n'aurait passtatuer de novo.
que l'arrêtde la Cour dans l'affaire de l'Or monétaire La Cour prend note du fait que pour les deux Parties
pris àRome en 1943.Le Portugal convient que la Cour leTemtoire du Timor oriental demeure un temtoire
ne pourraitconnaîtrede sa requêtesicel!lscil'obligeait non autonome et son peuple a le droit à disposer de
à statuer sur l'une de ces questions. Mais les Parties lui-inêmeet du fait que la mention explicite, dans plu-
sonten désaccordsur lepoint de savoir d laCour a àse sieurs résolutions susmentionnées,du Portugal comme
prononcer sur l'une de ces questions aux fins de tran- "puiissance administrante" n'est pas contestée entre
cher le différendquilui a étésoumis. elle:;.Cependant, la Cour constate qu'ilne peut êtredé-
Le Portugal fait valoir premièrementque sa requête duit du seul fait qu'un certain nombre de résolutions
porte exclusivement sur la conduite objcztive de 1'Aus- de 1"Assemblée générale et du Conseil de sécuritémen-
tralie consistant à avoir négociéc,onclii et commencé tionnent le Portugal comme puissance administrante
d'exécuter le Traitéde 1989avec lYIn~donése t que du Timor oriental que celles-ci ont entendu établir la
cette questionest parfaitementdétachabledetoute ques- charge des Etats tiers une obligation de traiterclusi-
tion relativeà la licéitdu comportement de 1'Indoné- verrientavec lePortugal pour ce qui est du plateau con-
Sie. tinental du Timororiental. Sans préjudicedelaquestion
de savoir si les résolutionsl'examen pourraient avoir
Après avoir examinéattentivement l'argumentation un c:aractèreobligatoire,laCour estime en conséquence
du Portugal tendant B dissocier le comportement de qu'ellesne sauraient êtreconsidérées comme des "don-
l'Australie de celui de l'Indonésie,la Cour parvientla née:~c"onstituant une base suffisantepour trancher le
conclusionqu'il neluiest pas possible de:porter unjuge- diffisrendqui oppose les Parties.
ment surle comportement de l'Australie:sans examiner
d'abord les raisons pour lesquelles1'Indlonésine'aurait Il découlede cequi précèdeque la Cour devrait né-
pas pu licitement conclure le Traitéde 1989alorsque le cessairement statuer sur la licéitédu comportement
Portugal aurait pu le faire; l'objet mêmede la décision de l'Indonésie préalablement à toute décisionsur l'af-
de la Cour serait nécessairement de déterminer si, finriation du Portugal selon laquelle l'Australie a violé
compte tenu des circonstances dans lesquelles 1'Indo- l'obligation quilui incombait de respecter la qualitéde
nésieest entréeet s'est maintenue au 'Timororiental, puir;sanceadministrante du Portugal, le statut de tem-
elle pouvait ou non acquérir le pouvoirde conclure au toinenon autonome du Timor oriental ainsi que le droit
nom de celui-cidestraitésportant sur les ressourcesde du :peupledu Temtoire à l'autodéterminationet à la
son plateau continental. La Cour ne saurait rendre une souverainetépermanente sur ses richesses et ses res-
telle décisionen l'absence du consentement de 1'Indo- sources natufelles. Les droits et obligations de 1'Indo-
nésie. nésiieconstitueraient des lors l'objet mêmed'un tel ar-
La Cour rejette l'argument additionnc:lavancépar le rêt, renduen l'absence du consentement de cet Etat.
Portugal selon lequel les droits que l'Australie aurait Un arrêtde cette nature irait d'uectement à l'encontre
violésétaientopposables erga omnes et selon lequel, du "principe de droit international bien établiet incor-
par conséquent, le Portugal pouvait exiger de 1'Aus- por6dans leStatut, àsavoir que laCour ne peut exercer
tralie, prise individuellement, le respect de ces droits, sajuridiction àl'égardd'un Etat sice n'est aveclecon-
qu'un autre Etat ait ou non adoptéun comportement senitementdece dernier" (Ormonétairepris hRome en
illiciteanalogue. 194.3,C.Z.J.Recueil 1954,p. 32).
Coriclusions(par. 36et 37)
La Cour consid&requ'iln'y arien àredire àl'affm-
tion du Portugal selon laquelle le droii:des peuples à L,aCour constate en conséquence qu'ellen'a pas à
disposer d'eux-mêmes, telqu'il s'est dt5velopp6à par- se pencher sur les autres exceptions de l'Australie et
tirde la Charte et de la pratique de l'organisation des qu'ellenesaurait seprononcer surlesdemandes du Por-
Nations Unies, est un droit opposable t?rgaomnes. Le tugiilaufond,quellequesoit l'importancedes questions
principe du droit des peuples àdisposerd'eux-mêmesa queces demandessoulèventet des règlesdedroitinter-
étéreconnu par la Chartedes Nations Unies et dans la national qu'ellesmettent enjeu.
jurisprudence de la Cour; il s'agità d'un des principes L,aCour rappelle en tout état decause qu'elle a pris
essentiels du droit international conteniporain. Toute- note, dans l'arrêt,1ifait que pour les deux Parties le
fois,laCour estimequel'opposabilité er;gaomnesd'une Territoire du Timor oriental demeure un temtoire non
norme et la règledu consentement àlajuridiction sont autonome et son peuple a le droit à disposer de lui-
deux choses différentes.Quelle que soit la nature des mêine.
obligations invoquées,la Cour ne saurait statuersur la
licéitédu comportement d'un Etat lorsque ladécisionà
prendre impliqueune appréciationde la licéité du com-
portement d'un autre Etat qui n'est pas partie à l'ins-
tance. Opinionindividuellede M. Oda

La Cour examinealors un autre argurrientduPortugal M. Oda, to'i: en estimant que la requêtedu Portugal
qui, fait-elleobserver,repose sur le postulatque les ré devait êtrercJetéedu fait que la Cour n'est pas com-
solutionsde l'organisation des Nations Unies,et en par- pétentepour en connaître, estime que cette décision
ticulier celles du Conseil de sécuritépeuvent êtrelues n'aurait pas dQêtremotivée, commeelle l'est dansl'ar-
comme imposant aux Etats l'obligation de ne recon- rêtde la Cour, par l'absence du consentement de l'In-donésiemais au seul motif que le Portugal n'avait pas récent ou considèrent à l'heure actuelle le Portugal
qualité pour agir. comme un Etat présentau Timor oriental, ou soutien-
Après avoir examin6 la plainte du Pori:ugal,M. Oda draient que lePortugal puisse, àce titre, revendiquer des
conclut quecedernier "a inal définile différeriddans sa droitssur leplateau continental au largedu Timororien-
requête;il semble en effet avoir méconnula différence tal". 11s'ensuit que le Portugal n'a pas qualitépour agir
entre, d'une part. l'opposabilité à un aiitre Etat des en tant qu'Etat demandeur en cette instancerelative au
droits et devoirs du Portugal coinme puissa~iceadmi- plateau continental qui s'étend versle sud dans la mer
nistrante ou des droits du peuple du Timor oriental et. de Timor à partir de la côte du Timor oriental dans le
d'autre part, la question fo~zdalnel~talede savoir si le "Tinior Gap".
Portugal est bicn 1'Etat ayant qualité pour faire valoir Opirlionirzdi~~ihrellee M. S/~uhaOuddeen

ces droits et devoirs". 11fait observer en outre que le Dans son opinion individuelle, M. Shahabuddeen a
droit du peuple du Timor oriental à disposer de lui- fait observer que l'arrêtdemandépar le Portugal n'en-
mêmeainsi que les droits y attenants n'ont pas étécon- traînerait pas seulement la détermination d'une ques-
testésparl'Australie et ne sauraient,detoute façon, être tion touchant la responsabilité internationale d'un Etat
mis en question dans la présenteaffaire. SeloriM. Oda, absent, mais encore la détermination de ses droits en
la présenteaffaire a traitirrziqzrenzeratu titre sur le pla- vertu d'un traitéauquel ilestpartie ainsi que la détermi-
teau continental que le Portugal prétend posséderen nation de la validitédudit Traitélui-mêiiie.
tant qu'Etat côtier.
M. Oda relèveensuiteque,dans le secteur du "Timor Opinion individzrellede M. Rorrjei~a
Monsieur Ranjeva approuve pleinement la Cour lors-
Gap", I7Ai~stralien'a pas fait valoir de r,eveadication qu'ellerappelle que ledroitdes peuples à disposer d'eux-
nouvelle à i'égardd'une zone de fonds narins qui em- mêmesest un des principes essentiels du droit interna-
piéteraitsur le secteurd'un Etat ou du peuple du Terri-
toire du Tinior oriental et qu'elle n'aquis,nicl'unEtat, tional contemporain ayantlecaractère d'un droit absolu
ni de ce peuple aucune autre zone de fond:, ma.rins.Les opposable erga onlrzeset fait droit àla première excep-
plateaux continentaux de l'Australie et de 1'Etatqui lui tion de l'Australie selon laquelle la requêtedu Portugal
fait face se chevauchent vers le milieu du "Timor Gap" l'obligerait à se prononcer sur les droits et les obliga-
et l'Australie devait négocierla question clece chevau- tions de l'Indonésie.Selon M. Ranjeva. les droits et ob-
chement avec 1'Etat c6tier lui faisant face sur l'autre ligations de l'Indonésie dontil s'agit concernent la libé-
rive de la nier de Timor.ce qu'elle a effectivenientfait. ration de l'Australie de ses obligations vis-à-vis'Indo-
nésieet laprivation de l'Indonésiedu bénéfice des effets
Dans la présenteaffaire, la question esse:ntielleest de du principepacta sulztsen~ailduqu'elleest en droit d'es-
savoir si c'est le Portlrgal ou I'hdorz~sie qui, en tant compter du Traitéde Timor Gap de 1989dont la validité
qu'Etat faisant face à I',$ustralie. pouvait renvendiquer n'a pas été contestéeL . e caractère consensuel de laju-
dcs droits sur le plateau continental daris le "Timor ridiction internationale interdit à la Cour de statuer sur
Gap". les intérêtjsuridiques d'un Etat qui n'a pas expriméde
Si l'on récapituleIcs iivénements quisesont produits manièreévidenteson consentement àla conipétenceju-
s'a~issant de !adélimitationdu plateaü continei~taldans ridictionnelle.

leszoiies pertinentes, on constateque, depuis lesannées D'après l'analyse de la jurispnidence de 1'01.monk-
70, l'Indonésiea revendiqué le statut d'Etat côtier re- taire que M. Ranjeva expose dans son opinion indivi-
présentant le Tinior oriental et,cetitre, a nkgociéavec duelle. une décisionpréalable a.u sens où on l'entend
l'Australie. Si le Pol-tugalentendait revendiquer aussi le dans l'arrêt de 1954 s'impose lorsque cette décision
titrc corl-espondant sur le plateau contineiital,ilaurait préalablea pour objet dcs droits subjectifs; il exprime
pu et dû s'en prendre non pas à l'Australie:mzis àl'In- des réserves quant à la transposition decette règledans
donésie.Tant qu'il n'a pas étéétablique lePon:ugala le l'hypothèseoù ladécisionpréalableporte sur une ques-
statut d'Etat côtier titulaire des droits coirespondants tion de droit objectif opposable ergs ormes. La ques-
sur le platcau contineiital, aucune question relativc aux tion méritaitdes explicationscoiiiplénientaires mainte-
forids niarins du "Timor Gap" ne saurait faire !'objet nant que lejus cogens relèvede l'ordre du droit positif.
d'un differerid entre le F'ortugalet l'Australie. Si ce sta-
tut avait étéétabli:ietraitéquel'Australie a conclu avec Enfin, M. Ranjeva fait étatdeplusieurs questionsres-
l'Indonésieaurait cei-raifiementétnul etlionavenu d'em- téesouvertes et sans réponsecompte tenu du choix nié-
blée.Il n'y adoncpas lieu quel'arrêt s'appuie(selon le thodique de la Cour telles que la possibi!itéd'une inter-
précédentde 1'01-monérairu)surle principe du consen- prétationlimitantledomaine deconipétence i-utiorzjitr-i
tement requis de la tierce partie à la juritiiction de la de la Cour aux seuls contentieux de droits subjectifs, la
Cour. définitionde la notion des tiers qui relèvent de la caté-
gone résiduelleextérieure au cercle des Parties. Pour
Ile l'avis de M. Oda. l'examen des faits qui se scnt M. Ranjeva,relèvede la "responsabilitC scieiitifique" de
succédés niotitreaussi qlie "mêmesi l'intervention niili- la Cour la définition du cadre du développerncnt du
taire de l'Indonésieau Tiniororiental et I'iritégrationde droitinternational.
celui-cià I'Iiidonésieau riiilieudes années soixante-dix
n'ont pas Citéapproiivtks par l'organisztion des Nations
Unies. il ii'y a eu aucune raison de considkrer que, de- Dans son opinion individuelle, M. Vereshchetin af-
p~is la fin des années soixante-dix et jusclu'à ce jour, firme que, puisque le droit du peuple du Timor orientai
le Portugal reste investi des droits et des sesponsabili- à l'autodétermination est au cceurde toute l'affaire.La
tésd'iine puissanceadniinistrante à l'égarddu territoire Cour aurait dû disposerd'élémentsdepreuve fiables in-
non autonotiie du Timor oriental. Dans la conimunauté diquant dans quelle mesure larequêtebénéficiaid t el'ap-
internationale, peu d'Etaïs ont considérédans le passé pui de ce peuple. La Cour avait d'autant plus besoin dedisposer de ces élémentsde preuve que laPartieadverse :'ans que ce peuple ou son reprzsentant autorisé aient
a cherché à réfuter les allégationsselon lesquelles elle ;té consultés suscite de graves doutes quant à la com-
aurait méconnu les droits et les intérêtsdu peuple du patibilitédecesactesavec les droits du peuple du Tiiiior
Timor oriental.ainsi quelesdroits du Portugal résultant oriental et les obligations de l'Australie. La Cour aurait
de son statut de puissance administrante. Or ni les piè- pi1déterminersi des griefs avaient étévalablement for-
ces et leurs annexes ni les plaidoiries et les réponses muléscontre l'Australie en raison de ces agissements
n'ont fourni à la Cources élémentsde preuve. sansavoir à statuer en ce qui concerne l'Indonésie.
La Charte des Nations Unies n'impose pas expres- Dans son opinion, l'auteur reconnaît que lePortuçal a
sément aux puissances administrantes l'obligation de qualitépour introduire la requêteen tant que puissance
consulter le peuple d'un territoire non autonome lors-
que la question en cause l'intéresse directement; mais administrante du Timor oriental reconnue par les Na-
tions Unies. Une puissance administrante qui continue
del'avis de M. Vereshchetin lajurispmtience de laCour d'êtrereconnue comme telle ne perd pas son statut et
montrequecette obligation existe en droit international. ses responsabilitésdu simplefait qu'elle a perdu lecon-
au présent stade de son développement.,et dans lecadre trijle physique sur le territoire,car pareille proposition
actuel du processus de décolonisation.Il n'est possible irait à l'encontre du système prévu par la Charte des
de se dispenser de cette obligation que dans descas ex- Nations Unies pour la protection des territoires non au-
ceptionnels, dont on ne saurait prétendre qu'ils s'ap- tonomes.
pliquent en l'espèce.
L'absence de preuves quant aux vu~rsdu peuple du 0pi:ziortdissiderztede M. Skubisze~z?ski
Timor oriental au nom duquel la requêtea étédéposée Selon M. Skubiszewski, la Cour est compétente en
est l'une des raisons principales qui empêchentla Cour l'espèce et les demandes du Portugal sont recevables.
de connaître du différend.
Les critères de l'opportunité judiciaire sont également
Opiniorzdissidente de M. Weeranzantv respectés.La Cour peut statuer sur le fond.
Dans son opinion dissidente, M. Weeramantry sous- En particulier,à supposer mêmeque la Cour s'estime
critàla décisionde la Cour de rejeter l'exception selon incompétentepour se prononcersurtoutequestion con-
laquelle il n'existerait pas dedifférendvéritableentre cernant le Traitérelatif au "Timor Gap", elle pourrait
l'Australie et le Portugal. 11partage aussi l'avis de la statuer sur la première conclusion du Portugal, c'est-à-
Courlorsqu'elle souligne l'importance cluprincipe d'au-
todétermination,dans laquelle elle voiit"l'un des prin- diiresur le statut du Timor oriental,sur l'applicabilité au
peuple de ce temtoire du principe de l'autodétermina-
cipesessentiels du droit international contemporain". tion et de certains autres principes fondamentaux du
Toutefois, il ne pense pas, comme 1.amajoritéde la droit international et sur la qualitédu Portugal en tant
Cour, que celle-ci n'a pas compétence:en l'espèce au qu.epuissance administrante. Il en est ainsi parceque la
motif qu'une décision contre 1'Austrillie entraînerait première conclusion peut êtredissociéedes autres qui
une décision concernant les droits de l'Indonésie, un concernentexclusivementles questions spécifiquesque
Etat tiers ne participantpas àl'instance. soulèvele Traité.Il est vrai que la Cour se réfèreau sta-
tuitdu temtoire et à l'autodéterminationet, à cet égard.
Dans son opinion, l'auteur analyse la décisionprise M.Skubiszewski estd'accord avec laCour (ill'est aussi
en l'affaire de l'Or morzétrrireet la jurisprudence anté- pour ce qui est du rejet par la Cour de l'exception aus-
rieure et postérieure en la matière et conclut que, eu tralienne selon laquelle il n'existe pas de différendentre
égardaux faits de la cause, la décisionconcernant l'Or les Parties). MaisM. Skubiszewski estime que la Cour
monétaire n'est pas pertinentecar la Cour peut statuer aurait dû examiner ces questions de façon plus appro-
sur l'affaire dont elle est saisie entièrement sur la base fondie (car il y a certains points obscurs) et inclure le
des obligations et des agissements de la seuleAustralie, résultat decet examen dans ledispositif. En s'abstenant
sansavoir àstatuersur lecomportementdel'Indonésie. de le faire, la Cour a adoptéun point de vue étroit desa
Un principe essentiel de la responsabilité de 1'Etat en fonction.
droit international est qu'un Etat est individuellement
responsabledesesactes,tout à fait indépendammentde La règle de l'Or rnonétaire n'exclut pas la compé-
la participation d'un autre Etat dans lesdits actes. teiice de la Cour en l'espèce. La condition préalable
pour quecette règlesoit applicable fait ici défaut pour
Les agissements de 1'Etat défendeur, qui a négocié. se prononcer sur toutes les conclusions du Portugal, la
conclu et commencél'exécutiondu Traitésurle"Timor Cour n'a pas besoin de statuer sur les pouvoirs, les
Gap" et pris des mesures législativesinternes en vue de droits et les devoirs de l'Indonésie, quels qu'ils soient.
son application, sont donc justiciables sur la base du Dans la présenteinstance, la Cour a adoptéune inter-
comportement unilatéral dudit Etat. prktation extensivede la règlede 1'01.nzortétaireet cette
Les droits à l'autodétermination et à la souveraineté
permanente sur les ressources naturelles sont desdroits interprétation est en contradictionavec sa pratique an-
erga omlzes appartenant au peuple du Timor oriental térieure. Elle a étéau-delà du champs d'application de
et créent, par conséquent, un devoircorrespondantde l'Or rnonétaire.
tous les Etats,y compris le défendeur, d.ereconnaîtreet La Cour peut statuer sur la licéitéde certains actes

de respecter ces droits. Le fait d'être partieà un traité unilatérauxde l'Australie qui ont aboutiàla conclusion
qui reconnaît que le Timor oriental (dont le statut de du Traité.Une décisionrelative à ces actes n'implique
territoire non autonome a étéreconnu par le défendeur aucun jugement sur l'Indonésie ni aucune conclusion
et par les Nations Unies) a étéincorporédans un autre su.rla validitédu Traité(conclusionqui n'est pas de la
Etat, qui porte sur l'Exploitation d'une précieuse res- compétence de la Cour). Le comportement de 1'Aus-
source non renouvelable du peuple du Timor oriental tra.liepeut êtreappréciéà la lumière du droit des Na-
pour une période initiale de 40 ans et qui a étéconclu tions Unies et des résolutions de l'organisation. Unetelle appréciation n'entraîne aucun jugement sur les ac- a étCmise en doute par l'Australie; la Cour aurait dû
tivitésde l'Indonésie. éluciderce point.Elle a bien compétencepour le faire.

Le Portugal a en l'espèce qualitépour iigirdevant la Mêmesi l'arrêt dela Courétaitconfom~eau droit (ce
Cour au nom du Timororiental etfairerespecter sa qua- qu'il n'est pas), la fonction de la Cour ne saurait être
litéde puissanceadministrante. ramenéeau respect de la conformitéjuridique. Si cela
Lorsque l'on examine et définit le statut actuel du étaitlecas, laCour limiteraitsa fonction aux dépendsde
Territoire (c'est-à-dire après son annexion piu 1'Indo- la justice et de la règle statutaire fondamentale selon
nésie)la règlede la non-reconnaissance est pertinente. laquelle elle est "l'organejudiciaire principal de'Orga-
Dans lecas du Timororiental. lareconnaisçanc!edel'an- nisation des Nations Unies". Ce point de vue restrictif
nexion va à l'encontre du principe de l'antodktermina- se reflète dans l'arrêt cequi est une cause de préoccu-
tion. La qualitéde puis:sanceadministrante du Portugal pation.

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Résumé de l'arrêt du 30 juin 1995

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