Non corrigé
Uncorrected
CR 2011/14
Cour internationale International Court
de Justice of Justice
LAAYE THAEGUE
ANNÉE 2011
Audience publique
tenue le lundi 30 mai 2011, à 16 heures, au Palais de la Paix,
sous la présidence de M. Owada, président,
en l’affaire relative à la Demande en interprétation de l’arrêt du 15 juin 1962
en l’affaire du Temple de Préah Vihéar (Cambodge c. Thaïlande)
(Cambodge c. Thaïlande)
________________
COMPTE RENDU
________________
YEAR 2011
Public sitting
held on Monday 30 May 2011, at 4 p.m., at the Peace Palace,
President Owada presiding,
in the case concerning the Request for Interpretation of the Judgment of 15 June 1962
in the Case concerning the Temple of Preah Vihear (Cambodia v. Thailand)
(Cambodia v. Thailand)
____________________
VERBATIM RECORD
____________________ - 2 -
Présents : M. Owada,président
vicepra,ident
KoMroMa.
Al-Khasawneh
Simma
Abraham
Keith
Bennouna
Skotnikov
Crinçade
Yusuf
Greenwood
XuMe mes
Dojnogshue,
GuMilMu.me
jugesCot, ad hoc
Cgefferr,
⎯⎯⎯⎯⎯⎯ - 3 -
Present: Presiewtada
Vice-Presdenkta
Judges Koroma
Al-Khasawneh
Simma
Abraham
Keith
Bennouna
Skotnikov
Cançado Trindade
Yusuf
Greenwood
Xue
Donoghue
Judges ad hoc Guillaume
Cot
Registrar Couvreur
⎯⎯⎯⎯⎯⎯ - 4 -
Le Gouvernement du Royaume du Cambodge est représenté par :
S. Exc. M. Hor Namhong, vice-premier ministre et ministre des affaires étrangères et de la
coopération internationale,
comme agent ;
S. Exc. M. Var Kimhong, ministre d’Etat,
comme agent adjoint ;
S. Exc. M. Long Visalo, secrétaire d’Etat au ministère des affaires étrangères et de la coopération
internationale,
S. Exc. M. Hem Saem, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire du Royaume du Cambodge
auprès du Royaume des Pays-Bas,
M. Sarun Rithea, assistant du vice-premier ministre,
M. Hoy Pichravuth, assistant du vice-premier ministre,
comme conseillers ;
M. Jean-Marc Sorel, professeur de droit international à l’Université Paris I (Panthéon-Sorbonne),
sirFranklin Berman, K.C.M.G., Q.C., membre du barreau d’Angleterre, membre de la Cour
permanente d’arbitrage, professeur invité de droi t international à l’Université d’Oxford et à
l’Université de Cape Town,
M. Rodman R. Bundy, avocat à la cour d’appel de Paris, membre du barreau de New York, cabinet
Eversheds LLP (Paris),
comme conseils ;
M. Guillaume Le Floch, professeur à l’Université de Rennes 1,
Mme Amal Alamuddin, membre des barreaux d’Angleterre et de New York,
Mme Ivrea Degeaive. - 5 -
The Government of the Kingdom of Cambodia is represented by:
H.E. Mr. Hor Namhong, Deputy Prime Minister and Minister for Foreign Affairs and International
Co-operation,
as Agent;
H.E. Mr. Var Kimhong, Minister of State,
as Deputy Agent;
H.E.Mr.LongVisalo, Secretary of State at the Ministry of Foreign Affairs and International
Co-operation,
H.E. Mr. Hem Saem, Ambassador Extraordinary and Plenipotentiary of the Kingdom of Cambodia
to the Kingdom of the Netherlands,
Mr. Sarun Rithea, Assistant to the Deputy Prime Minister,
Mr. Hoy Pichravuth, Assistant to the Deputy Prime Minister,
as Advisers;
MrJ.ean-Marcorel, Professor of Internatio nal Law at the University of PariIs
(Panthéon-Sorbonne),
Sir Franklin Berman, K.C.M.G., Q.C., member of the English Bar, member of the Permanent Court
of Arbitration, Visiting Professor of Internationa l Law at Oxford University and the University
of Cape Town,
Mr. Rodman R. Bundy, avocat à la cour d’appel de Paris , member of the NewYork Bar,
Eversheds LLP, Paris,
as Counsel;
Mr. Guillaume Le Floch, Professor at the University of Rennes 1,
Ms Amal Alamuddin, member of the English and the New York Bars,
Ms Ivrea Degeaive. - 6 -
Le Gouvernement du Royaume de Thaïlande est représenté par :
S. Exc. M. Virachai Plasai, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire du Royaume de
Thaïlande auprès du Royaume des Pays-Bas,
comme agent ;
M. Ittiporn Boonpracong, directeur général du départ ement des traités et d es affaires juridiques du
ministère des affaires étrangères,
comme agent adjoint ;
S. Exc. M. Kasit Piromya, ministre des affaires étrangères ;
M.Chavanond Intarakomalyasut, secrétaire auprès du ministre des affaires étrangères, ministère
des affaires étrangères,
S.Exc.M.Asda Jayanama, conseiller auprès du mi nistère des affaires étrangères, président de la
commission mixte thaïlando-cambodgienne sur la dé marcation de la frontière terrestre (partie
thaïlandaise), envoyé spécial de la Thaïlande chargé des questions relatives au Temple de
Phra Viharn,
M. Theerakun Niyom, secrétaire permanent du ministère des affaires étrangères,
M. Thani Thongphakdi, directeur général du département de l’information du ministère des affaires
étrangères,
le général Nopphadon Chotsiri, directeur général du service géographique royal thaïlandais,
quartier général des forces armées du Royaume de Thaïlande,
M.ChukiertRatanachaichan, secrétaire général adjoint du bureau du conseil d’Etat, cabinet du
premier ministre,
M. Chatri Archjananan, directeur de la division des affaires juridiques au département des traités et
des affaires juridiques du ministère des affaires étrangères,
MmeWasanaHonboonheum, directrice de la division des frontières au départ ement des traités et
des affaires juridiques du ministère des affaires étrangères,
comme conseillers ;
M.JamesCrawford, S.C., F.B.A., professeur de droit international à l’Université de Cambridge,
titulaire de la chaire Whewell, membre de l’Institut de droit international, avocat,
M.Donald McRae, professeur à l’Université d’O ttawa, titulaire de la chaire Hyman Soloway,
membre de la Commission du droit international, membre du barreau de l’Ontario, - 7 -
The Government of the Kingdom of Thailand is represented by:
H.E.Mr.VirachaiPlasai, Ambassador Extraordinary and Plenipotentiary of the Kingdom of
Thailand to the Netherlands,
as Agent;
Mr. Ittiporn Boonpracong, Director-General, Department of Treaties and Legal Affairs, Ministry of
Foreign Affairs,
as Deputy Agent;
H.E. Mr. Kasit Piromya, Minister for Foreign Affairs;
Mr.Chavanond Intarakomalyasut, Secretary to th e Minister for Foreign Affairs, Ministry of
Foreign Affairs,
H.EM. r. sdaJayanama, Adviser to the Mini stry of Foreign Affairs, Chairman of the
Thai-Cambodian Joint Commission on Demarca tion for Land Boundary (Thai side), Special
Envoy of Thailand on Matters concerning the Temple of Phra Viharn,
Mr. Theerakun Niyom, Permanent Secretary, Ministry of Foreign Affairs,
Mr. Thani Thongphakdi, Director-General, Department of Information, Ministry of Foreign
Affairs,
Lieutenant-General Nopphadon Chotsiri, Director-G eneral, Royal Thai Survey Department, Royal
Thai Armed Force Headquarters,
Mr. Chukiert Ratanachaichan, Deputy-Secretary-General, Office of the Council of State, Office of
the Prime Minister,
Mr.ChatriArchjananan, Director, Legal Affairs Division, Department of Treaties and Legal
Affairs, Ministry of Foreign Affairs,
MsWasanaHonboonheum, Director, Boundary Division, Department of Treaties and Legal
Affairs, Ministry of Foreign Affairs,
as Advisers;
Mr.JamesCrawford, S.C., F.B.A., Whewell Professor of International Law, University of
Cambridge, Member of the Institut de droit international, Barrister,
Mr. Donald McRae, Hyman Soloway Professor, University of Ottawa, Member of the International
Law Commission, Member of the Ontario Bar, - 8 -
M.Alain Pellet, professeur à l’Université Paris Ou est, Nanterre-La Défense, membre et ancien
président de la Commission du droit internatio nal, membre associé de l’Institut de droit
international,
MmeAlina Miron, chercheur au Centre de droit international de Nanterre (CEDIN), Université
Paris Ouest, Nanterre-La Défense,
M.Thomas Grant, membre du barreau de NewYork , maître de recherche au Lauterpacht Centre
for International Law de l’Université de Cambridge,
comme conseils. - 9 -
Mr.AlainPellet, Professor at the University ParisOuest, Nanterre-La Défense, Member and
former Chairman of the International Law Co mmission, associate member of the Institut de
droit international,
MsAlinaMiron, Researcher, Centre for International Law (CEDIN), University ParisOuest,
Nanterre-La Défense,
Mr. Thomas Grant, Member of the New York Bar, Senior Research Associate, Lauterpacht Centre
for International Law, University of Cambridge,
as Counsel. - 10 -
The PRESIDENT: Please be seated. The s itting is now open and the Court meets this
afternoon to hear the first round of oral observations on behalf of the Kingdom of Thailand.
I now give the floor to His Excellency Mr.VirachaiPlasai, Agent of Thailand.
Your Excellency, please.
M. PLASAI :
INTRODUCTION
1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, c’est un grand honneur et un
vrai privilège pour moi de représenter mon pays devant vous en qualité d’agent du Royaume de
Thaïlande. D’abord, parce que c’est la première fois depuis près de cinquante ans qu’un agent
thaïlandais se présente devant ce tte prestigieuse instance. Mais surtout, c’est parce que pour mon
pays, la Cour incarne deux valeurs fondamentales qui constituent la pierre angulaire même de notre
politique étrangère, c’est-à-dire la justice et la paix.
La Thaïlande accepte la décision de 1962 malgré son caractère controversé et malgré le
ressentiment dans la nation
[Début de la projection 1.]
2. A propos de justice, permettez-moi de souligner dès à présent que la Thaïlande, en bon
membre de l’Organisation des Nations Unies, accepte l’arrêt rendu par la Cour le 15 juin 1962 dans
le cas concernant le Temple de Préah Vihéar (que nous appelons Phra Viharn), et elle a obtempéré
à la décision de la Cour depuis 1962. En effet, dès le 3 juillet 1962, par un communiqué officiel, le
Gouvernement royal thaïlandais annonça sa décision de se conformer à l’arrêt. Le 6 juillet 1962, le
ministre des affaires étrangères thaïlandais écriv it au Secrétaire général de l’Organisation des
NationsUnies pour l’informer de cette décision. Le passage pertinent de la lettre apparaît
maintenant illustré sur l’écran. Je cite: «as a member of the UnitedNations, His Majesty’s
Government will honour the obligations incumbent upon it under the said decision in fulfilment of
1
its undertaking under Article 94 of the Charter» .
1Voir dossier des juges, document n 2. - 11 -
Cette communication a été diffusée à tous les membres de l’ONU, y compris le Cambodge, le
o 2
12 juillet 1962. Elle est reproduite à l’onglet n 3 du dossier des juges .
[Fin de la projection 1.]
3. La Thaïlande accepte l’arrêt du 15 juin 1962, malgré son caractère controversé. L’arrêt a
fait couler beaucoup d’encre depuis1962, et la doc trine critique ne manque pas. Toutefois, la
Thaïlande accepte l’arrêt, malgré le fait que le temple est un sym bole historique et culturel très
important pour sa population. C’est pour cela que la décision de la Cour a causé en Thaïlande
consternation et ressentiment dans toutes les couches sociales, au point de devenir, pour certains,
un traumatisme national qui se manifeste encore aujourd’hui de diverses manières.
Le sens et la portée que la Thaïlande donne à l’ arrêt du 15 juin 2011, et l’exécution de l’arrêt
par la Thaïlande
4. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, la Thaïlande est donc
aujourd’hui ici présente, non pour contester l’arrêt de1962, mais plutôt pour montrer à la Cour
qu’elle a depuis 1962 exécuté l’arrêt de bonne foi et complètement.
5. Au demeurant, nous prenons note que la requête du Cambodge dans la présente affaire
prétend ne concerner que le deuxièm e point du dispositif de l’arrêt relatif au retrait des éléments
des forces thaïlandaises «installées dans le temp le ou dans ses environs situés en territoire
cambodgien», et par conséquent je me concentrerai sur ce point.
6. Permettez-moi de rappeler que l’affaire qui a donné lieu à l’arrêt de1962 ne portait pas
sur la délimitation de la frontière entre les deux pays, qui, par conséquent, ne relevait pas de la
compétence de la Cour et ne peut dès lors être res judicata en vertu de l’arrêt de 1962.
7. Déjà, dans son arrêt du 26mai1961 sur les exceptions préliminaires soulevées par la
Thaïlande, la Cour avait déclaré qu’«[i]l s’agit là d’un différend portant sur la souveraineté
territoriale» (Temple de Préah Vihéar (Cambodge c.T haïlande), exceptions préliminaires, arrêt,
C.I.J. Recueil 1961, p. 22.)
Dans l’arrêt du 15juin1962 portant sur le fond, la Cour a confirmé cette déclaration et, en
3
conséquence, le dispositif de l’arrêt ne comporte aucune mention de la frontière .
2 o
Voir dossier des juges, document n 3.
3Affaire du Temple de Préah Vihéar (Cambodge c. Thaïlande), fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1962, p. 14 et 36-37. - 12 -
8. Le Cambodge a par ailleurs formellement accepté l’interprétation thaïlandaise selon
laquelle la frontière dans la région du temple de PhraViharn n’est pas res judicata selon l’arrêt
de1962, et doit être donc déterminée conjointemen t par les deux pays conformément au droit
international. Le 14 juin 2000, le Cambodge et la Thaïlande ont conclu un mémorandum d’accord
sur la démarcation de la frontière terrestre entre les deux pays. Les articlesIV1) etV du
mémorandum prévoient que les travaux de démarcation porteront sur toute l’étendue de la frontière
terrestre commune ⎯«the entire stretch of the common land boundary» en anglais, la langue du
4
texte faisant foi en cas d’interprétations divergentes . La région du temple de PhraViharn y est
bien entendu incluse. Il convient de relever que le mémorandum ne c ontient aucune mention
expresse de l’arrêt de 1962.
9. Dès juillet1962, l’exécution de l’arrêt par la Thaïlande fut complète. Un conseil des
ministres réuni le 10 juillet détermina l’étendue de l’emprise du temple aux fins de l’exécution de
l’arrêt. En conséquence, en application du deuxième point du dispositif, le 15juillet1962 les
troupes thaïlandaises se sont retirées de la zone en question à la satisfaction du Cambodge. L’on
doit admettre que l’expression «le temple ou…ses environs» visait la zone où les éléments des
forces thaïlandaises étaient présents en 1962. Le professeur Alain Pellet reviendra plus tard sur ce
point.
10. Le 19 juillet, des travaux commencèrent pour ériger une clôture en fil de fer barbelé et un
panneau marquant la limite de la zone du temple, conformément à la ligne qui avait été retenue par
le conseil des ministres du 10 juillet aux fins de l’ex écution de l’arrêt de 1962. Vers le 5 août, les
travaux furent terminés.
[Début de la projection 2.] 5
11. Voici le panneau marquant la limite des «environs» du temple. Il se lit ainsi : «From this
point lies the vicinity of the Temple of PhraViharn.» L’escalier Naga du nord est bien visible à
o
quelques mètres du panneau. La photo se trouve également à l’onglet n 5 du dossier des juges.
6
[Fin de la projection 2 ⎯ Début de la projection 3 .]
4 o
Voir dossier des juges, document n 4.
5 Voir dossier des juges, document n 5.
6 Voir dossier des juges, document n 6. - 13 -
12. Et voici la clôture en fil de fer barbelé. La photo se trouve également à l’onglet n o 6 du
dossier des juges.
[Fin de la projection 3.]
13. Plus tard au cours de la présente procédure en interprétation, la Thaïlande démontrera
que, contrairement à ce qu’il affirme dans sa re quête, le Cambodge a accepté la façon dont la
Thaïlande a appliqué l’arrêt de1962. Le Cambodge n’a commencé à contester cette application
que très récemment, de la manière et pour des raisons que j’évoquerai plus tard dans ma plaidoirie.
Le contexte historique, politiqueet économique : la Thaïlande a fait tout son possible pour
vivre en paix avec le Cambodge
14. Monsieur le président, Mesdames et Messieu rs les juges, je me tourne maintenant vers
l’autre valeur fondamentale de la politique étrangère thaïlandaise que j’ ai citée plus tôt, c’est-à-dire
la paix. Et je tiens à affirmer avec force ici que c’est un souhait c onstant de la Thaïlande de vivre
en harmonie avec le Cambodge et les pays voisins. E lle a tant investi, dans tous les sens du terme,
dans ses relations avec le Cambodge ces dernières déce nnies. Elle n’a aucune raison de lui faire la
guerre et ne le veut nullement.
15. La Thaïlande reconnut l’Etat cambodgien dès 1950, quatre ans avant son indépendance.
Pendant les trois décennies qui suivirent, la Tha ïlande fit tous ses efforts pour maintenir de bonnes
relations avec le Cambodge, et, même après la prise du pouvoir par les Khmers rouges en1975,
malgré la grande différence dans les régimes respectifs des deux pays. Entre1979 et1991, la
Thaïlande travailla activement aux côtés des membres originaires de l’Association des nations de
l’Asie du Sud-Est 7 ⎯ ou ANASE ⎯ pour forger une action commune de la communauté
internationale visant à mettre fin à l’occupation ét rangère et à la guerre civile qui ravageait le
Cambodge ⎯ un effort qui culmina dans l’accord de Paris de 1991 qui a finalement ramené paix et
stabilité au pays.
16. Depuis 1999, la Thaïlande et les autres membres de l’ANASE ont accepté le Cambodge
au sein de la famille. La Thaïlande est convaincue en particulier que les pays de l’Asie du Sud-Est
e
doivent prospérer ensemble, s’ils veul ent réussir à relever les défis du XXI siècle. Pour assurer
7Brunéi, Indonésie, Malaisie, Philippines, Singapour et Thaïlande. - 14 -
une harmonieuse intégration des nouveaux membres, la Thaïlande a préconisé avec succès dans les
années2000 un processus d’accélération de l’intégrati on tenant compte des différents niveaux de
développement des membres. Le résultat, la charte de l’ANASE, en vigueur depuis le
15 décembre 2008, est bien là avec un but de réaliser la communauté ANASE en 2015.
17. Parallèlement, appliquant une politique dite de «Prosper thy neighbour», la Thaïlande a
développé depuis les années 1990 tout un programme de coopération avec le Cambodge sur le plan
bilatéral et trilatéral, ou dans des sous-groupe ments régionaux tels que le programme de la
sous-région du Grand Mékong avec le concours de la banque asiatique de développement, la
coopération du triangle d’émeraude, ou encore la stratégie de coopération de l’Ayeyawady-Chao
Phraya-Mékong ou l’ACMECS. Les inves tissements thaïlandais au Cambodge depuis
deux décennies ont pris une ampleur sans précédent. Coopération et investissement ont continué 8
même après l’émeute an ti-thaïlandaise à PhnomPenh en janvier2003, au cours de laquelle des
entreprises thaïlandaises ainsi que l’ambassade royale de Thaïlande furent détruites et pillées.
18. Le mémorandum d’accord du 14juin2000 su r la démarcation de la frontière terrestre
constitue un pas important dans le processus de rapprochement entre les deux pays. Par cet
instrument, la Thaïlande affirme sa volonté rée lle de développer un rapport de confiance avec le
Cambodge, laissant derrière elle les problèmes du passé. Des progrès importants ont été réalisés,
alors même que, pour la Thaïlande, les travaux de dé marcation de frontière sont soumis à un strict
contrôle parlementaire imposé par la Constitution.
19. Cette politique de coopé ration régionale s’inscrit dans le cadre d’une longue et
traditionnelle diplomatie thaïlandaise qui est av ant tout une diplomatie pacifiste. La
Thaïlande ⎯ou le Siam, nom sous lequel mon pays était connu à l’époque ⎯ est sortie de la
e
période de colonisation du XIX siècle relativement indemne, en ayant conservé sa pleine
indépendance et son entière souveraineté, quoique réduit en superficie par un certain nombre de
cessions de territoire au profit des puissances coloniales voisines ⎯l’une de ces cessions étant
d’ailleurs à l’origine de l’affaire qui a donné lieu à l’arrêt de la Cour de 1962. C’est l’emploi de sa
diplomatie et des moyens pacifiques ⎯non la force ⎯ qui a permis au Siam de préserver son
8Voir dossier des juges, document n 7. - 15 -
indépendance. Le Siam était présent à la première et la deuxième conférence de paix de La Haye
en1899 et1907. Il est parmi les premiers pa ys à devenir membre de la Société des nations
en 1920, puis de l’ONU en 1946.
20. Tout au long de son histoire moderne, la Thaïlande n’a employé la force que d’une façon
qui est strictement conforme à ses obligations et aux normes internationales, c’est-à-dire en
situation de légitime défense ou au service de la communauté internationale dans le cadre
d’opérations de maintien de la paix. Depuis 1950, elle a participé à 21 opérations de maintien de la
paix de l’ONU ou autorisées par l’ONU, répartie s sur cinqcontinents, y compris au Cambodge
entre 1991 et 1993 9.
21. En aucune manière, la Thaïlande n’en tend soudainement rompre avec cette tradition
pacifiste, pilier de sa politique étrangère. Cert ainement pas pour les obscures raisons esquissées
dans la requête cambodgienne. Certainement pas contre notre voisin le Cambodge, auquel nous ne
souhaitons que paix, prospérité et démocratie. Et certainement pas à ce moment crucial de
l’histoire, quand l’intégration sociale, économique et culturelle de l’ANASE commence à porter ses
fruits, effaçant les traces des décennies de méfiance et d’affrontements idéologiques.
Les incidents armés de février à mai 2011 : violation du jus ad bellum et du jus in bello par le
Cambodge ; légitime défense de la Thaïlande
10
[Début de la projection 4.]
22. Pourtant, entre le4 et le 7février dernier, des incidents armés, initiés par les forces
armées cambodgiennes, ont eu lieu dans plusieur s endroits sur la frontière ou en territoire
thaïlandais situés dans un rayon d’environ 10kilo mètres autour du temple de PhraViharn. Ces
endroits sont illustrés sur l’écran.
11
[Fin de la projection 4 ⎯ Début de la projection 5.]
23. Entre le 22 avril et le 3 mai dernier, de nouveaux incidents armés, toujours initiés par les
forces armées cambodgiennes, ont eu lieu dans plusieurs endroits près du temple de Ta Kwai et des
9 o
Voir dossier des juges, document n 8.
10Ibid., document n 9.
11Ibid., document n 10. - 16 -
temples de TaMuen, situés en territoire tha ïlandais à environ 150kilomètres du temple de
Phra Viharn. Les endroits attaqués sont illustrés sur l’écr
an.
24. Il s’agit quasi exclusivement de lieux éloignés du temple de PhraViharn et qui n’ont
aucun lien avec l’arrêt de 1962. En revanche le nombre des incidents et l’éloignement des endroits
où ils se sont produits montrent que l’accord des Parties sur la démarcation de leur frontière
commune est loin d’être acquis. C’est à la commission mixte des frontières établie par le
mémorandum d’accord de 2000 qu’il appartient de résoudre ces problèmes.
[Fin de la projection 5.]
25. Monsieur le président, Mesdames et Messi eurs les juges, dans tous ces incidents, il
s’agissait d’attaques par les forces cambodgiennes, non provoquées par la Thaïlande, qui
constituent une violation flagrante et délibérée du jus ad bellum. Elles ont causé des morts et des
blessés parmi les forces armées et la population ci vile thaïlandaises, ainsi que des dommages aux
propriétés sur le territoire de la Thaïlande. D es dizaines de milliers d’habitants de la région
frontière ont été déplacés. Dans tous ces incide nts, les forces armées thaïlandaises ont réagi avec
retenue et proportionnalité, exerçant dûment le droit à la légitime défense du Royaume de
Thaïlande conformément au droit international.
26. Au cours de ces incidents, les forc es armées cambodgiennes ont commis des actes qui
constituent des violations délibérées, répétées et continues du jus in bello.
12
[Début de la projection 6.]
Des armes lourdes ont été déployées autour du temple, et des opérations militaires ont été
menées depuis le temple de Phra Viharn.
13
[Fin de la projection 6 ⎯ début de la projection 7.]
Des unités armées ont été stationnées dans le temple de Phra Viharn.
Ces actes constituent des violations flagrantes de l’article4 de la convention de LaHaye
pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé du 14mai1954, à laquelle le
14
Cambodge est partie depuis 1962 .
12 o
Voir dossier des juges, document n 11.
13Voir dossier des juges, document n 12.
14La Thaïlande est partie à la convention depuis 1958. - 17 -
15
[Fin de la projection 7 ⎯ Début de la projection 8.]
27. Au cours de ces incidents, les forces armées cambodgiennes ont délibérément attaqué des
cibles civiles en territoire thaïlandais.
Telle que cette école à Poumsarol dans la province de SiSaket, située à plus de
trois kilomètres de la frontière.
[Fin de la projection 8 ⎯ Début de la projection 9.] 16
Ou encore cette fabrique de fil de soie au village de Kabcheung, province Surin, détruite
le26avril dernier par des missiles BM-21 cambodgiens. Il convient de noter que cette fabrique
participait à un programme de coopération avec le Cambodge et avait déjà formé deux promotions
d’agriculteurs cambodgiens de la province Udornmeechai dans l’élevage du ver à soie.
[Fin de la projection 9.]
28. Les incidents armés de février et avril-mai apparaissent comme prémédités et
synchronisés avec une campagne médiatique, politique et diplomatique bien menée. Un examen
minutieux de la chronologie des événements, qui a été établie et incluse dans le dossier des juges à
l’onglet n o 15 , s’avère utile.
29. Un aspect particulièrement intéressan t de cette chronologie, comme l’agence de
presse Reuters l’a relevé 18, est le fait que la requête cambodgi enne, qui est datée du 20 avril 2011,
mentionne déjà au paragraphe 34 les incidents ar més du 22 et du 26 avril. Certes, le Cambodge a
par la suite demandé à la Cour de bien voul oir regarder sa requête comme étant datée du
28avril2011. Mais fiction juridique mise à part, la réalité est indéniable: la requête a été datée
le 20 avril 2011 à la main, c’est-à-dire quarante-huit heures avant les incidents armés invoqués qui
ont été ajoutés ex post. Ceci donne à penser, sans beaucoup de risque de se tromper, que le
Cambodge a, dans un premier temps, préparé sa requ ête en interprétation ; puis, l’ayant bouclée, il
a réalisé combien la demande en indication de mesures conservatoires était sans fondement ⎯ il a
alors déclenché des incidents donnant un semblant de sentiment d’urgence et de gravité.
15 o
Voir dossier des juges, document n 13.
16Voir dossier des juges, document n 14.
17Voir dossier des juges, document n 15.
18 o
Voir dossier des juges, document n 16. - 18 -
30. Il convient également de noter que le 14 février2011, le Conseil de sécurité s’est réuni
et, après avoir entendu les deux pays, n’a pas retenu la demande du Cambodge que le Conseil
renvoie l’affaire à la Cour internationale de Jus tice pour une interprétation de l’arrêt par le biais
d’une demande d’avis consultatif sur le fondement de l’article 96 1) de la Charte de l’ONU. Avec
le soutien du Conseil de sécurité, les ministres des affaires étrangères de l’ANASE, réunis
le22février2011, ont fait appel a ux deux pays de continuer leurs né gociations bilatérales, et ont
accueilli avec satisfaction l’invitation faite par les deux pays à l’Indonésie, président de l’ANASE,
d’envoyer des observateurs sur le terrain. Contrairement à ce que le Cambodge prétend dans sa
lettre du 22mai2011 à la Cour, la Thaïlande a depuis le début participé de bonne foi aux
négociations en cours sur le déploiement des obser vateurs indonésiens, qui a fait de remarquables
progrès ces dernières semaines. Entre le 7mars et le 14mai, le ministre des affaires étrangères
thaïlandais a écrit huitlettres à son homologue indon ésien à ce sujet. Le texte du mandat des
observateurs a été adopté par les troispays dès le début du mois de mai. Le 9mai, les trois
ministres des affaires étrangères se sont mis d’ accord sur un «paquet» de solutions pour sa mise en
Œuvre, qui prévoit l’envoi par l’In donésie d’une équipe pilote sur le terrain, et une réunion de la
commission mixte d’affaires frontalières, la «GBC». L’envoi éventuel des observateurs
indonésiens se fera en fonction des résultats de cette réunion de la GBC sur la question de la
démilitarisation du temple de PhraViharn et des constructions cambodgiennes réalisées en
territoire thaïlandais en violation du mémorandum d’accord de 2000 et de l’arrêt de 1962.
Le Cambodge a désespérément besoin d’espace en territoire thaïlandais comme zone tampon
indispensable pour une inscription réussie du temple sur la liste du patrimoine mondial
31. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, comme je l’ai indiqué au début
de ma présentation, depuis 1962, l’application de l’ arrêt n’a suscité aucun problème en particulier.
Sa mise en Œuvre sur le terrain a été parfaiteme nt respectée par le Cambodge jusqu’à récemment
quand plusieurs changements sont intervenus.
32. En mai 2003, le temple a été ouvert au public qui y accédait désormais par la pente
du côté thaïlandais. Les 31 mai et 1 jui2003, un conseil des ministres conjoint
thaïlando-cambodgien a décidé d’établir un com ité ministériel mixte pour un développement
conjoint du site ; le ministre des affaires étrangères thaïlandais et un ministre d’état cambodgien en - 19 -
étaient les coprésidents. Le comité s’est ré uni pour la première et seule fois à Bangkok
le25mars2004 pour discuter d’une possibilité d’in scrire le temple sur la liste du patrimoine
mondial de l’Unesco par une nomination conjoint e, conformément à la politique touristique
commune de «Deux royaumes, une destination» . Deux sous-comités mixtes ont été établis,
chargés, respectivement, de la restauration et préservation du temple, et de la planification du
développement conjoint du site. Ces projets mené s en commun montrent bien que la Thaïlande est
prête à tourner la page de l’arrêt de 1962, et pa rtir sur de nouvelles bases dans ses relations avec le
Cambodge.
[Début de la projection 10.] 19
33. Ce climat de coopération et de fraternité s’est avéré de courte durée. En2004, le
Cambodge, sans consulter la Thaïlande, a unilatéralement proposé le temple pour inscription sur la
liste de patrimoine mondial. Le Gouvernement thaïlandais n’a appris cette décision que par
l’intermédiaire de l’Unesco au début de2005. Le 13avril2006, le Cambodge a promulgué un
décret royal délimitant la «zone du temple» dite «zone centrale», illustrée par un «schéma directeur
pour le zonage de PréahVihéar», qui paraît main tenant sur l’écran. Ladite zone marquée en
rouge-brun empiète sur le territoire thaïlandais sur près de 5 kilomètres carrés. Après avoir échoué
dans ses tentatives répétées de négocier une solution mutuelleme nt acceptable avec le Cambodge,
le Gouvernement thaïlandais a, le 17 mai 2007, fo rmellement fait objection au décret, au «schéma
directeur», et à la proposition d’inscription du Cambodge et a réservé les droits de la Thaïlande à
l’égard de la frontière. Le co mité du patrimoine mondial a été informé de cette objection. Les
négociations se sont poursuivies, et la Thaïlande, conformément à sa politique de bon voisinage et
par égard pour la solidarité au sein de l’ANASE, a finalement décidé de donner son soutien à la
proposition cambodgienne lors de la trente et unième session du comité du patrimoine mondial en
juillet 2007 2.
[Fin de la projection 10.]
34. Malgré les nombreux gestes de bonne volonté de la part de la Thaïlande, sur le terrain,
les autorités cambodgiennes ont accéléré dès le débu t des années2000 la mise en Œuvre de leur
19 o
Voir dossier des juges, document n 17.
20Voir dossier des juges, document n 18. - 20 -
politique délibérée d’empiétement progressif sur le territoire thaïlandais au-delà de la ligne dite du
conseil des ministres de 1962, réalisant des constructions telles que :
[Début de la projection 11.]
⎯ Une route depuis le bas de la falaise en territoire cambodgien.
[Fin de la projection 11 ⎯ début de la projection 12.]
⎯ Ou un temple bouddhiste.
21
[Fin de la projection 12 ⎯ début de la projection 13.]
La population civile cambodgienne a été encour agée à s’installer dans la zone autour du
temple en territoire thaïlandais, comme cela est illustré sur l’écran.
35. Toutes ces activités sont en violation flag rante de la souveraineté et de l’intégrité
territoriale thaïlandaises, ainsi que de l’artic leV du mémorandum d’accord de2000. Le but
apparent est de créer un fait accompli d’occupatio n cambodgienne sur cette partie du territoire
thaïlandais. Cet empiétement progressif a par ailleurs créé de très graves problèmes d’ordre
sanitaire et environnemental. Il s’est poursuivi au mépris total des lois et règlements thaïlandais,
puisque le promontoire de Phra Vi harn fait partie d’un parc natio nal thaïlandais où aucune activité
de colonisation n’est permise. Face à ces actes délibérés, la Thaïlande a réagi avec fermeté.
Depuis2004, huit protestations formelles ont été faites au Cambodge au niveau diplomatique, et
des centaines au niveau local. En même temps, les forces armées thaïlandaises, par souci de bon
voisinage, ont exercé la plus grande retenue dans leurs opérations visant à préserver la souveraineté
et l’intégrité territoriale du Royaume.
[Fin de la projection 13.]
36. C’est bien avec le soutien de la Thaïlande que le temple a été inscrit sur la liste du
patrimoine mondial, cette inscription étant assortie d’une obligation pour le Cambodge de
soumettre «un plan de gestion complet», comprenant «une carte finalisée», à l’approbation
ultérieure du comité du patrimoine mondial 22. Très évidemment, la Thaïlande n’a pas pu accepter
de plan de gestion qui empiète sur ses droits te rritoriaux. Ceci explique que, près de trois ans
après, le Cambodge n’a toujours pas obtenu cette approbation.
21 o
Voir dossier des juges, document n 19.
22Voir dossier des juges, document n 20. - 21 -
37. La partie du territoire thaïlandais revendiquée par le Cambodge est indispensable pour
une inscription complète et réussie du temple de Ph raViharn sur la liste du patrimoine mondial.
Les deux pays en sont conscients, et c’est la raison pour laquelle la Thaïlande avait proposé à
plusieurs reprises une inscription conjointe, que le Cambodge a maintes fois refusée. Cette offre
tient toujours, de même que la bonne volonté de la Thaïlande pour poursuivre des négociations
bilatérales pour la démarcation de la frontiè re dans le secteur du temple conformément au
mémorandum d’accord de 2000.
Plan des interventions des orateurs suivants
38. J’ai maintenant l’honneur de vous prier, Monsieur le président, de bien vouloir inviter
nos conseils à prendre la parole sur des points particuliers en réponse de la requête en indication de
mesures conservatoires du Cambodge. Tout d’ab ord M. le professeur Alain Pellet abordera la
question du champ et de la portée du présent différend à la lumière du droit applicable en matière
d’interprétation d’un arrêt de la Cour. Ensuite , M. le professeur James Crawford évoquera la
question de la compétence de la Cour dans les rec ours en interprétation et en indication de mesures
conservatoires. Finalement, M.leprofesseurD onaldMcRae discutera du bien-fondé et de la
teneur des mesures conservatoires demandées par le Cambodge.
39. Avant de vous remercier pour votre attention, Mesdames et Messieurs les juges, je tiens à
préciser qu’étant donné les délais qui ont été fixés pour ces audiences, nous ne prétendons pas
répondre complètement aux plaidoiries de ce matin. Nous compléterons nos réponses demain
après-midi. En particulier, nous montrerons à la Cour que le tableau du grand méchant loup qui
guette le petit agneau que le Cambodge essaie de pei ndre est tout à fait faux. La Thaïlande a trop
bien connu la situation de l’agneau pendant le XIX esiècle. C’est son souha it le plus sincère que
e
personne, y compris le Cambodge, ne subisse le même sort au XXI siècle.
Je vous remercie, Monsieur le président.
The PRESIDENT: I thank Your Excellency Mr. Virachai Plasai, the Agent of Thailand, for
the presentation of the position of Thailand. I now invite ProfessorAlainPellet to make his
presentation. - 22 -
Mr. PELLET: Thank you very much, Mr. President.
L IMITATION DE L ’OBJET DU DIFFÉREND DANS UNE AFFAIRE EN INTERPRÉTATION
1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, depuis l’indépendance du
Cambodge (et même avant) la Thaïlande a déployé tous les efforts possibles pour entretenir avec
son voisin des relations cordiales de bon voisinage ⎯ même si, ce matin nos amis de l’autre côté
de la barre ont voulu la faire passer pour le «grand méchant loup». Cela n’empêche
malheureusement pas qu’il y a des différends de toutes sortes entre les deux Etats qui se présentent
aujourd’hui devant vous. Des différends, certes, ma is aucun n’a trait à l’interprétation de l’arrêt
que vous avez rendu en 1962 à propos du Temple de Préah Vihéar (que les Thaïlandais ⎯ l’agent
vient de le rappeler ⎯ appellent «Phra Viharn»); aucun de ces différends n’est, si j’ose dire
«interprétable».
2. Or, Monsieur le président, même si certains le regrettent, la Cour de céans n’est pas une
juridiction de droit commun ayant compétence pour se prononcer sur n’importe quel différend
opposant deux ou plusieurs Etats. Sa compétence est étroitement circonscrite par son Statut et
limitée aux différends que les Etats en litige ont c onsenti à lui soumettre expressément ou, si j’ose
dire «incidemment», c’est-à-dire , dans le cadre d’une procédure incidente ou subséquente, qui se
greffe sur l’affaire au principal (même si, s’agissan t d’une requête en interprétation, il s’agit bien
d’une affaire distincte). Il n’en reste pas moin s que la compétence de la Cour pour en connaître
doit être appréciée à l’aune de l’affaire qui a donné lieu à l’arrêt à interpréter.
3. Lorsque la Cour est saisie d’une telle demande en interprétation, elle doit s’assurer :
1) qu’il existe bien une contestation entre les Parties ; et
2) que cette contestation concerne effectivement le sens et la portée de l’arrêt «définitif et sans
recours» sur lequel porte la demande en interprétation. Et j’ai noté en écoutant
23
sirFranklinBerman ce matin qu’il en était d’accord bien qu’il semble soutenir que «tout ce
qui importe est que les parties «aient mani festé des opinions opposées»» («hold …opposite
24
views») , ce qui n’est pas tout à fait exact car : «29. C’est à la Cour elle-même qu’il appartient
23
Par. 16.
24Par. 18, citant C.P.J.I., série A n° 13, p. 11. - 23 -
de déterminer s’il existe effectivement une contestation (voir Interprétation des arrêts n 7 et 8
o o
(usine de Chorzów), arrêt n 11, 1927, C.P.J.I. sérieA n 13, p.12).» ( Demande en
interprétation de l’arrêt du 31mars2004 en l’affaire Avena et autres ressortissants mexicains
(Mexique E c.tats-Unis d’Amérique) (Mexique Ec.tats-Unis d’Amérique), arrêt ,
C.I.J. Recueil 2009, p. 13, par. 29.) Ces exigences sont posées par l’article 60 du Statut et ont
été précisées par la jurisprudence de la Cour.
4. Il en résulte en particulier que :
1) les éclaircissements demandés à l’occasion d’une requête en interprétation ne peuvent porter
que sur ce qui a été décidé avec l’autorité de la chose jugée ⎯ c’est-à-dire sur le dispositif de
l’arrêt ;
2) il doit exister une véritable contestation à cet égard entre les Parties ;
3) les motifs ne peuvent faire l’objet d’une in terprétation que s’ils sont nécessaires eux-mêmes
pour interpréter le sens du ou des points du dispositif contesté ; et
4) last but not least , la demande en interprétation ne doit pas être un prétexte pour remettre en
cause la chose jugée.
Je vais brièvement reprendre chacun de ces points et montrer que la demande du Cambodge ne
répond à aucune de ces conditions.
a) La demande en interprétation doit porter sur le dispositif
Pre5. ière ⎯ et indiscutable ⎯ proposition, donc, Monsieur le président: la demande en
interprétation doit porter (et ne peut porter que) su r le dispositif de l’arrêt sur lequel elle porte.
C’est ce que vous avez rappelé dans votre ordo nnance du 16juillet2008 concernant l’affaire
Avena, dans laquelle vous avez cité votre ferme et constante jurisprudence antérieure :
«63. Considérant que, dans le cadre d’une procédure en interprétation, la Cour
est appelée à éclaircir le sens et la portée de ce qui a été décidé avec force obligatoire
dans un arrêt.» ( Demande d’interprétation de l’arrêt du 20novembre1950 en
l’affaire du droit d’asile (Colombie/Pérou), arrêt, C.I.J.Recueil1950 , p. 402 ;
Demande en revision et en interprétation de l’arrêt du 24 février 1982 en l’affaire du
Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya arabe libyenne) (Tunisie c.Jamahiriya arabe
libyenne), arrêt, C.I.J. Recueil 1985 , p.223, par. 56.) (Demande en interprétation de
l’arrêt du 31mars2004 en l’affaire Avena et autres ressortissants mexicains
(Mexique c.Etats-Unis d’Amérique) (Mexique c.Etats-Unis d’Amérique), mesures
conservatoires, ordonnance du 16 juillet 2008, C.I.J. Recueil 2008, p. 328, par. 63.) - 24 -
Ceci est dans la droite ligne de ce qu’avait d écidé la Cour permanente dès1927 à propos de la
demande en interprétation des arrêts n os7 et 8 rendus dans l’affaire de l’Usine de Chorzów :
«Il semble tout naturel de penser que c’est afin de permettre à la Cour de
préciser au besoin ce qui a été déci dé avec force obligatoire dans un arrêt , que la
deuxième phrase de l’article60 a été introduite, et qu’en revanche, une demande qui
n’a pas ce but ne rentre pas dans le cadre de cette disposition». ( Interprétation des
arrêts n 7 et8 (usine de Chorzów), arrêt n o 11, 1927, C.P.J.I. sérieA n o13, p. 11 ;
les italiques sont de nous.)
o
[Projection n 1 : dispositif de l’arrêt de 1962 (F. et E.).]
6. Il faut donc se tourner vers le dispositif de l’arrêt de 1962 25. Il est projeté à l’écran (et
o
figure aussi sous l’onglet n 21 de votre dossier). Il comporte trois points que je vais reprendre en
commençant par les deux derniers.
7. Ils imposent à la Thaïlande des obligations ponctuelles et instantanées: de retirer ses
forces armées du temple ou de ses environs dans la mesure où ces forces sont situées «en territoire
cambodgien» (ce qui implique, je le remarque en passant, qu’il y a aussi des «environs du temple»
qui sont situés eux en territoire thaïlandais) ; le point 3 du dispositif impose aussi à la Thaïlande de
restituer au Cambodge les objets qui auraient pu être enlevés du temple ou de la zone du temple
ainsi définie par les autorités thaïlandaises. Ces deux obligations ont été respectées par la
Thaïlande ; elles relèvent du passé et ne sauraient donner lieu à un arrêt en interprétation.
8. Est-il nécessaire de rappeler votre célèbre jurisprudence, la jurisprudence Cameroun
septentrionale selon laquelle :
«La fonction de la Cour est de dire le dr oit, mais elle ne peut rendre des arrêts
qu’à l’occasion de cas concrets dans lesquels il existe, au moment du jugement [1962
ou 2011], un litige réel impliquant un conflit d’intérêts juridiques entre les parties.
L’arrêt de la Cour doit avoir des conséquences pratiques en ce sens qu’il doit pouvoir
affecter les droits ou obligations juridiques existants des parties, dissipant ainsi toute
incertitude dans leurs relations juridiques. En l’espèce, aucun arrêt rendu au fond [sur
l’interprétation] ne pourrait répondre à ce s conditions essentielles de la fonction
judiciaire.» ( Cameroun septentrional (Cameroun c.Royaume-Uni), exceptions 26
préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 1963, p. 33-34 ; les italiques sont de nous.)
25Temple de Préah Vihéar (Cambodge c. Thaïlande), fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1962, p. 36-37.
26Voir aussi Essais nucléaires (Australie. rance), requête à fin d’intervention, ordonnance du
20 décembre 1974, C.I.J. Recueil 1974, p. 271-272, par. 57-59 ; Essais nucléaires (Nouvelle-Zélande c. France), requête
à fin d’intervention, ordonnance du 20 décembre 1974, C.I.J. Recueil 1974, p. 476-477, par. 58-62. - 25 -
9. Il s’agit en quelque sorte d’une question qui doit être réglée préalablement à toute autre
question, même préliminaire ⎯ conformément à l’analyse de ce type de problème faite par la Cour
dans les affaires des Essais nucléaires et il s’agit d’une question qui se pose, bien sûr, prima facie.
10. Or, dans la présente affaire, il va de soi qu’«au moment du jugement», comme
aujourd’hui d’ailleurs (en 1962 comme en 2011), il n’ existera (et il n’existe) aucun «litige réel»
entre les Parties pour ce qui est de l’exécution des points2 et3 du dispositif, et que l’arrêt en
interprétation que le Cambodge prétend obtenir ne pourrait en aucune manière «affecter les droits
et obligations juridiques existants des parties» tels qu’ils découlent de l’arrêt de 1962, ni dissiper
«ainsi toute incertitude dans leurs relations juridiques». L’arrêt du 15juin1962 ayant été
complètement exécuté à cet égard, l’interprétati on de ces deux éléments du dispositif ne pourrait
avoir aucun effet concret. Elle n’entre pas dans l’exercice de vos fonctions judiciaires.
11. L’Etat demandeur tente de tourner la diffi culté en transformant l’obligation instantanée
27
résultant pour la Thaïlande du paragraphe 2 du dispositif en une obligation continue . A vrai dire,
il suffit de lire le texte de ce paragraphe pour se convaincre que c’est bien d’une obligation
immédiate et instantanée qu’il s’agit: des élém ents des forces thaïlandaises étaient présents, au
moment de l’arrêt, dans le temple et les envi rons situés en territoire cambodgien; la Thaïlande
était ⎯et c’est bien l’imparfait qui vient spontanément à l’esprit ⎯tenue de les retirer. Elle l’a
fait et le Cambodge s’est montré satisfait durant une quarantaine d’années ⎯ et même
28
jusqu’en2008 d’après ce qui nous a été dit ce matin ⎯de ce retrait sur des positions très
clairement et ouvertement marquées sur le terrain comme l’ambassadeurPlasai l’a montré tout à
l’heure. Du reste, le demandeur concède expressis verbis que «rien ne laissait présager, jusqu’à
une période récente, que la Thaïlande interpré terait cet arrêt d’une manière qui diverge de
29
l’interprétation que le Cambodge en a toujours faite » . Quel aveu, Monsieur le président! En
tout cas, prenons note: «jusqu’à une période récente», les deux Parties avaient la même
interprétation de l’arrêt ⎯le Cambodge considérait donc que la Thaïlande s’était acquittée de
toutes ses obligations en vertu de l’arrêt, notamment des points 2 et 3 du dispositif.
27
Voir les paragraphes5, dernier tiret 37, 44 et45 de la demande en interprétation. Voir aussi la plaidoirie de
sir Franklin Berman, 30 mai 2005, par. 17 et 19.
28
M. Hor Namhong, p. 1 et 2 ; sir Franklin Berman, par. 14 ; M. Sorel, par. 6.
29Requête, par. 25 ; les italiques sont de nous. - 26 -
o o
[Fin de la projection n 1 – projection n 2 : reprendre la projection VP : «Beyond this point lies the
vicinity of the Temple of Phra Viharn».]
12. Certes, Monsieur le président, si peu après avoir retiré ses forces sur les positions
acceptées par les deux Parties, la Thaïlande les av ait réinstallées dans le temple ou ses environs
situés en territoire cambodgien, un problème se serait posé. Mais, elle ne les a pas réinstallées
⎯ et le Cambodge ne le prétend pas. Sans doute, par des formules emberlificotées que l’on trouve
30
ici et là dans sa requête en interprétation et qui ont été reprises ce matin dans ses plaidoiries, le
Cambodge tente-t-il de faire accroire que les Parties sont en désaccord sur l’interprétation de l’arrêt
acceptée sur le terrain durant plus de quarante ans ; mais le demandeur n’allègue nulle part que la
Thaïlande n’aurait pas retiré, dès1962, les éléments de ses forces armées ou de police ou autres
gardes ou gardiens conformément au point 2 du disp ositif. Du reste, l’allèguerait-il qu’il s’agirait,
31
malgré ses dénégations et celles de sir Franck Berman, d’une requête non pas en interprétation
mais en exécution; or comme vous l’avez rappelé récemment, «l’article60 du Statut [qui est la
seule base de compétence invoquée dans la présen te affaire] ne...permet pas [à la Cour] de
connaître de violations éventuelles de l’arrêt d ont elle est priée de donner une interprétation»
(Demande en interprétation de l’arrêt du 31mars2004 en l’affaire Avena et autres ressortissants
mexicains (Mexique c.Etats-Unis d’Amérique) (Mexique c.Etats-Unis d’Amérique), arrêt ,
C.I.J. Recueil 2009, p. 20, par. 56). Et le faire par ce biais près de cinquante ans après le prononcé
de l’arrêt et son exécution est plus incongru encore !
[Fin de la projection 2 – reprise de la projection 1 (1 bi).]
13. Par conséquent, Monsieur le président, si problème d’interprétation il devait y avoir, il ne
pourrait concerner que le premier poi nt du dispositif: «le temple de Préah Vihéar est situé en
territoire relevant de la souveraineté du Cambodge». Il l’est ⎯et, comme le reconnaît le
Cambodge ⎯ et je cite sa requête : «la Thaïlande ne conteste pas la souveraineté du Cambodge sur
le temple» 32.
bis
[Fin de la projection 1 .
30
Voir notamment les paragra phes précités et, par exemples, les paragraphe s 24 ou 38 de la requête. Voir aussi
le paragraphe 1 de la demande en indication de mesures conservatoires.
31 Voir requête, par. 31.
32 Requête, par. 25. - 27 -
b) Il doit exister une véritable contestation entre les Parties sur la signification du dispositif
14. Du même coup, Mesdames et Messieurs de la Cour, la seconde c ondition qui résulte tant
des termes de l’article60 du Statut que de votre jurisprudence, n’est pas davantage remplie: il
n’existe entre les Parties aucune contestation r éelle sur la signification de votre arrêt de 1962
⎯ étant rappelé qu’«une contestation («dispute» dans la version anglaise) au sens de l’article 60 du
Statut, [doit être] comprise comme une divergence d’ opinion entre les parties quant au sens et à la
portée d’un arrêt rendu par la Cour» ( Demande en interprétation de l’arrêt du 31mars2004 en
l’affaire Avena et autres ressortissants mexicain s (Mexique c.Etats-Unis d’Amérique) (Mexique
c.tats-Unis d’Amérique), mesures con servatoires, ordonnance du 1j6 uilet008,
C.I.J. Recueil 2008, p. 325, par. 53).
15. Si divergence il y avait ⎯ quod non ⎯ concernant la mise en Œuvre des deux derniers
paragraphes du dispositif, il s’agirait ⎯ comme je l’ai déjà relevé ⎯ d’un problème d’exécution et
non d’interprétation ; quant au premier point : même si, dans un très bref laps de temps suivant le
prononcé de l’arrêt, la Thaïlande s’est élevée cont re une décision qu’elle tenait pour injuste, elle a
bien vite reconnu, conformément au principe res judicata reflété dans l’article 59 du Statut, que le
temple est situé en territoire cambodgien, comme vient de le rappeler l’agent thaïlandais. Les
Parties sont donc d’accord sur ce point et il n’existe entre elles aucune «contestation» sur le sens et
la portée de cet élément central du dispositif de l’arrêt
. Or,
«[a]insi qu’il ressort clairement de la jurisprudence constante de la Cour, la
recevabilité d’une demande en interprétation est subordonnée à l’existence d’une
contestation (Demande d’interprétation de l’arrêt du 20novembre1950 en l’affaire
du droit d’asile (Col ombie/Pérou), arrêt, C.I.J.Recueil1950 , p.402; Demande en
revision et en interprétation de l’arrêt du 24février1982 en l’affaire du Plateau
continental (Tunisie/Jamahiriya arabe libyenne) (Tunisie cJ .amahiriya arabe
libyenne), arrêt, C.I.J.Recueil1985 , p. 216-217, par. 44 ; voir aussi Demande en
interprétation de l’arrêt du 11juin1998 en l’affaire de la Frontière terrestre et
maritime entre le Cameroun et le Nigé ria (Cameroun c.Nigéria), exceptions
préliminaires (Nigéria c.Cameroun), arrêt, C.I.J.Recueil1999(I) , p.36, par.12)»
(Demande en interprétation de l’arrêt du 31mars2004 en l’affaire Avena et autres
ressortissants mexicains (Mexique c.Etats-Unis d’Amérique) (Mexique c.Etats-Unis
d’Amérique), arrêt, C.I.J. Recueil 2009, p. 10-11, par. 21).
33
Le Cambodge lui-même a d’ailleurs cité ce dictum dans sa requête .
16. Pas de «contestation», pas de compétence, Monsieur le président. Et, comme le
professeur Crawford le montrera dans quelques inst ants, cette incompétence manifeste de la Cour
33
Requête, p. 8, par. 21. - 28 -
pour se prononcer sur la requête du Cambodge en interprétation entraîne son incompétence
prima facie pour indiquer les mesures conservatoires demandées.
c) Les motifs ne peuvent faire l’objet d’une in terprétation que s’ils sont nécessaires pour
interpréter le sens du ou des points de dispositif contesté
17. Le Cambodge en est évidemment conscien t et c’est pourquoi il s’emploie à déplacer le
différend du dispositif vers les motifs de l’arrêt :
«1) Selon le Cambodge, l’arrêt se base su r l’existence préalable d’une frontière
internationale déterminée et reconnue entre les deux Etats.
2) Selon le Cambodge, cette frontière est défi nie par la carte à laquelle se réfère la
Cour à la page 21 de son arrêt [je le sou ligne au passage: le dispositif lui figure
aux pages 36 et 37], carte qui permet à la Cour de constater que la souveraineté du
Cambodge sur le temple est une consé quence directe et34utomatique de la
souveraineté sur le territoire sur lequel se trouve le temple.»
Encore une formule alambiquée dont le Cambodge a le secret ⎯et dont il a doublement besoin
pour tenter, d’une part, de justifier sa demande en indication de mesures conservatoires et, d’autre
part, de transformer l’objet de l’arrêt de 1962, qu i porte sur la souveraineté sur le temple, en une
décision sur le tracé de la frontière.
18. Mais traduisons en langage normal l’amphigouri dans lequel se réf ugie le demandeur. Il
nous dit ceci: 1)la Cour a décidé que le temple est situé en territoire cambodgien ⎯ pas de
problème, c’est ce qu’elle a décidé ; 2) pour ce faire, elle s’est fondée sur la «carte de l’annexe I»
⎯ c’est, en effet, l’un des arguments qu’elle a retenus ; et 3) il s’en déduit que la frontière entre les
deux pays résulte de cette carte.
19. La Thaïlande, Monsieur le président, n’a aucun problème pour admettre l’exactitude des
deux premières affirmations du Ca mbodge: pour décider que le temple se trouvait en territoire
relevant de la souveraineté du Cambodge la Cour s’est fondée ⎯ notamment ⎯ sur la carte dite
«de l’annexe I». Pour autant, la Thaïlande ne sau rait admettre que, de cette constatation, on glisse
à l’affirmation selon laquelle cela vaudrait fixation de la frontière entre les deux pays. Inversant
l’ordre logique des choses, le Cambodge demande à la Cour d’interpréter les motifs de son arrêt
de 1962 à la lumière de son dispositif. Il y a là une confusion tout à fait fâcheuse entre les motifs et
le dispositif d’une décision (distinction qui recouvre largement celle qui existe entre les arguments
34
Requête, par. 5. - 29 -
et les conclusions d’une partie), confusion contre laquelle votre haute juridiction a souvent mis en
garde 35. Du même coup, le Cambodge tente d’élargir la portée du principe de l’autorité de la chose
jugée, ce qui apparaît d’autant plus saugrenu que le dispositif peut être acquis avec les voix de
juges qui ne sont pas forcément en accord avec les motifs retenus dans l’arrêt. Il s’agit, Monsieur
le président, d’un dévoiement complet du recours en interprétation dont l’objet est d’éclaircir le
sens de ce qui a été décidé dans le dispositif ⎯éventuellement, c’est-à-dire lorsque cela est
nécessaire pour cause d’obscurité du dispositif, à la lumière des motifs qui en sont inséparables,
mais certainement pas d’élucider la signification des motifs en fonction du dispositif !
20. Les motifs ne se prêtent pas à une interpréta tion en eux-mêmes. Il ne peut y être fait
appel que s’ils peuvent contribuer à éclairer le sen s du dispositif. Comme l’avait déjà souligné la
Cour permanente dans l’affaire du Service postal polonais à Dantzig.
[Projection n o 3 – Par. 45 de la requête.]
21. Et c’est pourtant à cette alchimie que vous invite le demandeur ⎯ à transformer le plomb
de la motivation en or de la décision. Il veut vous convaincre d’interpréter les motifs de l’arrêt
de 1962, dans le vain espoir que l’emprise de la res judicata pourrait s’y étendre :
«Etant donné «que le temple de Préah Vihéar est situé en territoire relevant de la
souveraineté du Cambodge» (point1 du dispositif), ce qui est la conséquence
juridique du fait que le temple est situé du côté cambodgien de la frontière telle
qu’elle fut reconnue par la Cour dans son arrêt [⎯ La Cour n’a pas reconnu ceci sous
cette forme générale ⎯mais peu importe pour l’instant ⎯ ce qui importe, c’est que
l’on «remonte», du dispositif aux motifs ⎯]et sur la base des faits et arguments
juridiques développés ci-dessus, le Cambodge prie respectueusement la Cour de dire
et juger que :
L’obligation pour la Thaïlande de «retirer tous les éléments de forces armées ou
de police ou autres gardes ou gardiens qu’elle a installés dans le temple ou dans ses
environs situés en territoire cambodgien» (point2 du dispositif) est une conséquence
particulière de l’obligation générale et continue de respecter l’intégrité du territoire du
Cambodge, territoire délimité dans la région du Temple et ses environs par la ligne de
36
la carte de l’annexe 1 sur laquelle l’arrêt de la Cour est basé.»
35Voir par exemple Pêcheries (Royaume-Uni c.Norvèg e), arrêt, C.I.J.Recueil1951 , p.126; Minquiers et
Ecréhous (France/Royaume-Uni), arrêt, C.I.J.Recueil1953 , p. 52 ; Nottebohm (Liechtenstein c. Guatemala), deuxième
phase, arrêt, C.I.J.Recueil1955, p.16 ; Essais nucléaires (Australie cFrance), arrêt, C.I.J.Recueil1974, p.262,
par. 29 ; Essais nucléaires (Nouvelle-Zélande c. France), arrêt, C.I.J. Recueil 1974, p. 466, par. 29.
36Requête, par. 45 ; les italiques sont de nous. - 30 -
37
Sir Franklin et le professeur Sorel ont procédé de même ce matin . Toujours l’alchimie: le
Cambodge ne vous demande p as d’éclaircir le sens ⎯ parfaitement clair ⎯ du dispositif en vous
reportant aux motifs retenus par la majorité des juges, mais bien d’interpréter l’un de ces motifs à
partir du dispositif, en espérant que la force obligatoire de celui-ci rejaillira sur celui-là.
[Fin de la projection 3.]
22. Monsieur le président, on ne peut pas mettre ainsi un arrêt sens dessus-dessous; et,
encore une fois, il n’y a aucun désaccord entre les Pa rties sur le sens qu’il convient de donner au
dispositif, et le motif sur lequel s’appuie le Cambodge n’est nullement nécessaire pour interpréter
le dispositif de l’arrêt. Quelle qu’en soit la raison, celui-ci se suffit à lui-même : le temple est situé
en territoire relevant de la souveraineté du Cambodge.
d) Une réinvention de l’objet du différend de 1962 ?
23. En réalité, Monsieur le président, la requête cambodgienne, présentée comme étant «en
interprétation», poursuit un seul objectif ⎯ que j’ai déjà souligné : fair e décider par la Cour que la
frontière ⎯ toute la frontière ⎯ entre les deux pays résulte de la carte de l’annexe I. Ce n’est pas
dit dans ces termes mêmes ⎯ nos amis de l’autre côté de la barre sont trop fins juristes pour ne pas
avoir aperçu le piège qui les guette et qu’ils ont eux-mêmes posé. Mais ils n’y échappent pas : «il
était» écrivent-ils, «logiquement impossible pour la Cour de se prononcer de cette manière sans la
reconnaissance de sa part, à l’aide d’instruments juridiques, de l’existence d’une frontière entre le
38
Cambodge et la Thaïlande» ; ou, plus loin: «En1962, la Cour n’établit en aucune manière une
autre frontière que celle qui existait déjà selon la carte de l’annexeI.» 39 Et sir Franklin ce matin
même: «the line on the map represents the frontie r line, and the Court must have regard to the
40
frontier line for the purpose of deciding the sovereignty over the Temple» . Du reste, les incidents
dont se prévaut l’Etat requérant pour demander à la Cour l’indication de mesures conservatoires se
sont produits non pas seulement (et certainement pas essentiellement) dans les environs du temple
37
Sir Franklin Berman, par. 4, 17, 19 et 20 ; M. Sorel, par. 7.
38
Requête, par. 39.
39Requête, par. 42.
40Plaidoirie du 30 mai 2011, par. 4. - 31 -
⎯ que ces environs soient situés en territoire cambodgien ou thaïlandais ⎯ ils ont eu lieu tout au
41
long de la frontière en des endroits souvent très éloignés du temple .
24. Ce faisant, le Cambodge tente d’obtenir de la Cour en 2011 ce qu’elle lui a clairement et
expressément refusé il y a cinquanteans. Les prot estations indignées de sir Franklin n’y peuvent
rien changer 42.
o
[Projection n 4 : Une réinvention de l’objet du différend de 1962 ?]
25. Dès le premier paragraphe de son arrêt de 1962, la Cour définit l’objet du différend qu’il
lui appartenait de trancher en se référant à son arrêt de1961 par leque l elle avait reconnu sa
compétence. Elle rappelle qu’elle y avait
«décrit dans les termes suivants l’objet du différend :
«Dans la présente affaire, le Ca mbodge invoque la violation par la
Thaïlande de la souveraineté terr itoriale du Cambodge sur la région du
temple de Préah Vihéar et ses environs. La Thaïlande répond en
affirmant que ce territoire est situé du côté thaïlandais de la frontière
commune entre les deux pays et qu ’il relève de la souveraineté
thaïlandaise. Il s’agit là d’un différend portant sur la souveraineté
territoriale.»» (Temple de Préah Vihéar (Cambodge c. Thaïlande), fond,
arrêt, C.I.J. Recueil 1962, p. 14 ; les italiques sont de nous.)
26. Et la Cour y revient en «enfonçant le clou» dans les paragraphes conclusifs de son arrêt :
«Se référant finalement aux conclusions présentées à la fin de la procédure
orale, la Cour, pour les raisons indiquées au début du présent arrêt, constate que les
première et deuxième conclusions du Cambodge priant la Cour de se prononcer sur le
statut juridique de la carte de l’annexe 1 et sur la ligne fron tière dans la région
contestée ne peuvent être retenues que dans la mesure où elles énoncent des motifs et
non des demandes à retenir dans le dispositif de l’arrêt. » (Ibid., p.36; les italiques
sont de nous.)
A2i7.i, délibérément, la Cour a refusé de se prononcer, dans le dispositif de son arrêt sur
les conclusions mêmes que le Cambodge lui avait soumises en ce qui concerne tant «le statut
juridique de l’annexeI» que «la ligne frontière dans la région contestée» ⎯les points mêmes sur
lesquels portent la requête en interprétation qu’il a introduite le 20 ou le 28 avril dernier.
[Fin de la projection 4.]
28. «En somme», pour reprendre les termes de votre arrêt de1950 sur la demande
d’interprétation dans l’affaire du Droit d’asile,
41
Requête, par. 34 in fine, demande en indication de mesures conservatoires, par. 2.
42Par. 20. - 32 -
«la question n’a pas été tranchée [et délibérément, expressément, volontairement, pas]
par l’arrêt initial de la Cour et ne peut d ès lors lui être soumise dans le cadre d’une
demande en interprétation en vertu de l’article 60 du Statut ( Demande d’interprétation
de l’arrêt du 20 novembre 1950 en l’affaire du droit d’asile (Colombie/Pérou), arrêt,
C.I.J. Recueil 1950, p.402)» (Demande en interprétation de l’arrêt du 31mars2004
en l’affaire Avena et autres ressortissants mexicains (Mexique cE . tats-Unis
d’Amériq43) (Mexique c.Etats-Unis d’Amérique), arrêt , C.I.J. Recueil 2009, p.18,
par. 44) .
29. Loin de constituer une véritable demande en interprétation de l’arrê t du 15 juin 1962, la
requête du Cambodge est une sorte d’appel contre la décision de la Cour de ne pas faire droit à
deux de ses demandes. Ce faisant, l’Etat demandeur remet en cause l’autorité de la chose jugée et
invente un différend imaginaire d’interprétation qui n’entre évidemment pas dans les prévisions de
l’article 60 du Statut.
30. Je vous remercie, Mesdames et Messieurs les juges, de votre attention renouvelée. Si
vous le voulez bien, Monsieur le président, le pr ofesseur Crawford tirera les conclusions de ces
constatations en ce qui concerne la présente instance ⎯ malgré l’exceptionnelle «francité» de cette
enceinte aujourd’hui, je crains qu’il nous prive de ses talents linguistiques et qu’il le fasse en
anglais ! Je vous remercie, Monsieur le président.
The PRESIDENT: Thank you Professor Alain Pellet for your presentation. I now invite to
the floor Professor James Crawford.
CMRr. WFORD:
Issues of jurisdiction and provisional measures
Thank you, Mr. President, Members of the Court, I shall do my best to avoid breaking into
French. Mr. President, Members of the Court, it is an honour to appear before you on behalf of the
Kingdom of Thailand in this unusual Application on this unusual Request for interpretation. It is,
you might think, a somewhat awkward confecti on of the backward-looking Article60 of the
Statute and the forward-looking Article 41, all predicated on a decision 50 years old next year.
43Voir aussi, notamment: Interprétation des arrêts7 et8 (usine de Chorzów), arrêt n11, 1927, C.P.J.I.
série A n 13, p. 21 ; Demande en interprétation de l’arrêt du 11juin1998 en l’affaire deFrontière terrestre et
maritime entre le Cameroun et le Nigéria (Cameroun c. Nigéria), exceptions préliminaires (Nigéria c. Cameroun), arrêt,
C.I.J. Recueil 1999 (I), p. 36, par. 12. ou p. 38-39, par. 16. - 33 -
1. Even in the long history of the law of natio ns, 50years is a considerable time. The last
two judges who participated in the Temple case died in 1989 ⎯ Judge Morelli on his 89th birthday,
Judge Bustamante just after his 94th. Yet Cam bodia would have the Court speak in a continuous
44
present, prescribing the withdrawal of forces whose members were not born at the time , enjoining
activities which, if they have occurred at all, began long after the time 45. On the slender
jurisdictional basis of Article60, Cambodia woul d have your jurisdiction of1962 preserved in
aspic, maintained unchanged across decades, no doubt across centuries. For if the principle in this
case is allowed, where will it stop? Once jurisdiction over the Temple, always jurisdiction over the
Temple ⎯ jurisdiction under the guise of interpretation. And not only jurisdiction over the Temple
or the territory on which it stands ⎯ Cambodia asserts jurisdiction over the whole boundary shown
on the AnnexI map. All this on the basis of a decision which, as ProfessorPellet just showed,
explicitly limits itself to the Temple.
2. Now that point is especially significant when it comes to provisional measures. The
urgency in such a case must relate to the point of disputed interpretation, not the boundary as such.
And so too, with respect to irreparable harm and the other conditions for an indication of
provisional measures: they, too, must relate to the point of disputed interpretation. You do not
have jurisdiction over the boundary as such, even pr ima facie. Your jurisdiction is limited to the
interpretation of what the Court actually decided in1962. The fact that there is tension along a
boundary, with incidents occurring, does not give you jurisdiction to order provisional measures
along the boundary. In 1962 you didn’t decide on a boundary; you decided the Temple was in
Cambodia. But that is not now in dispute.
3. The point is this, a party does not establish the basis for provisional measures by showing
that other disputed rights, outside your jurisdiction, have given rise to an urgent situation or a risk
of harm. As you said in response to the Request for the indication of provisional measures by the
Democratic Republic of the Congo in 2002:
“once the Court has established the existence of [prima facie] jurisdiction, it should
not however indicate measures for the protection of any disputed rights other than
those which might ultimately form the basis of a judgment in the exercise of that
44
Request for Indication of Provisional Measures, p. 2, para 8, first subparagraph.
4Ibid., second subparagraph. - 34 -
jurisdiction” (case concerning Armed Activities on the Territory of the Congo (New
Application:2002) (Democratic Republic of the Congo v. Rwanda), Provisional
Measures, Order of 10July2002, I.C.J. Reports 2002 , p.241, para.58, citing
Application of the Convention on the Prevention and Punishment of the Crime of
Genocide (Bosnia and Herzegovina v. Yugoslavia), Provisional Measures, Order of
8 April 1993, I.C.J. Reports 1993, p. 19, para. 35).
So the question of provisional measures depends directly on the character and scope of jurisdiction
you are exercising. It does not suffice to say that some matter of urgency and some risk of
irreparable harm exist. It is necessary to show that you have prima facie jurisdiction over a
question of disputed rights and that it is incidental to that jurisdiction to indicate provisional
measures in circumstances where you would otherwise do so.
4. This leads to an examination of the only basis for jurisdiction in the present Request.
Cambodia makes its Request under Article60 46. But Article60 has a special, strictly auxiliary
character: jurisdiction is limited to the interpretation of the disputed rights which the earlier
Judgment actually determined with the effect of res judicata. From this two consequences flow.
5. First, the jurisdiction concerns only the question of interpretation. It is as if whatever you
conclude that your predecessors may have meant in 1962 is substituted for what they actually said.
And that is all. Once the Court gave Judgment in 1962, the case was over. The Court did not
retain jurisdiction to supervise the parties’ subsequent compliance with its Judgment. Thailand did
not renew its optional clause declaration, which lapsed in May1960 47. The Court no longer had
jurisdiction to hear any new application by Ca mbodia complaining that Thailand had not complied
with its Judgment. The Court in 1962 did not reserve to itself ⎯ as it appears to have done in 1974
in the Nuclear Test cases ⎯ jurisdiction to engage in an “examination of the situation” ( Nuclear
Tests (Australia v. France), Judgment, I.C.J. Reports 1974 , p.272, para.60; (New Zealand v.
France), Judgment, I.C.J. Reports 1974 , p.477, para.63). All the Court had was jurisdiction to
revise, which expired in 1972; and jurisdiction to interpret. Apart from that, the Court was
functus officio. Anything more was for the Security Council under Article 94.
6. The second consequence is this. Your jurisdiction to order provisional measures must
relate to the point of interpretation. So it is central to th at jurisdiction, to be clear as to what
precisely were the disputed rights determined by the Judgment of 1962.
46
Request of 28 April 2011, p. 1, para. 1.
4Temple of Preah Vihear (Cambodia v. Thailand), Preliminary Objections, Judgment, I.C.J. Reports 1961, p. 24. - 35 -
The subject-matter of the Judgment of 15 June 1962
7. Professor Pellet has mentioned that Cam bodia in 1962 attempted to add certain new
submissions to its claim ⎯ the submissions numbered “1” and “2” in its Final Submissions. Those
would have extended the dispute beyond its original subject-matter as specified in the Application.
The Court rejected the new submissions. It said, “the subject of the dispute submitted to the Court
is confined to a difference of view about sove reignty over the region of the Temple of Preah
Vihear” (I.C.J Reports 1962 , p.14). Accordingly, when it came time to set out its dispositif, the
Court referred to those Submissions and said that they were not admissible:
“Cambodia’s first and second Submissions... can be entertained only to the extent
that they give expression to grounds, and not as claims to be dealt with in the
operative provisions of th[is] Judgment ” ( I.C.J. Reports 1962, p.36; emphasis
added).
In other words the Court explicitly excluded fro m adjudication the first and second of Cambodia’s
Final Submissions. The dispute was to settle the question, and only the question, to which State a
particular cultural property, the Temple, pertained.
8. It is indicative of the narrow scope of the 1962 Judgment that the Court placed
considerable stress on certain acts connected only with the Temple itself and having no bearing at
all on any other territory. There was the exchange of Notes concerning the Temple keepers. They
were not hillside farmers. Nor were they frontie r keepers. They were not border guards. They
were guardians placed in the Temple, and it was their direct connection to the Temple and the
48
Parties’ attitude toward them which made their evidence material .
9. Then there was the visit of Prince Damrong in 1930 49. Judge Fitzmaurice called it “by far
the most significant incident in this part of the case” (separate opinion of Judge Fitzmaurice, I.C.J.
Reports 1962, p. 60). It is a remarkable aspect of Cambodia’s Request for interpretation that it fails
to mention one of the most remarkable aspects of the Court’s reasoning in 1962. This was the
incident to which the Court fam ously attributed legal effects 5. I do not suggest that every
schoolboy knows about the Prince’s visit, but certainly every second year undergraduate does. The
Court said:
48Judgment, I.C.J. Reports 1962, pp. 31-32.
49
Ibid., pp. 30-31.
50See, e.g., Malcolm N. Shaw, International Law 6th ed. (Cambridge, 2008), p. 518. - 36 -
“The Prince could not possibly have failed to see the implications of a reception
of this character... It demanded a reac tion. Thailand did nothing. Furthermore,
when Prince Damrong on his return to Ba ngkok sent the French Resident some
photographs of the occasion, he used language which seems to admit that France,
through her Resident, had acted as the host country.”
That is the new type of estoppel ⎯ a State establishes its claim because the other State took some
photographs ⎯ estoppel by photograph. The Court, “[l]ooking at the incident [of the Prince’s
visit] as a whole”, went on to say: “it appears to have amounted to a tacit recognition by Siam of
the sovereignty of Cambodia... over Preah Vihear” ( Judgment, I.C.J. Reports 1962 , p. 30;
emphasis added).
10. The point is this. It was the Temple wh ich the Prince visited and to which the various
signs of French sovereignty pertained. The Prin ce was not there on a frontier inspection as a Thai
Government official; he was there in an at least partially private capacity as an archaeologist
interested in a historic site51. The photos taken were of the Temple precincts. The bands, the flags
and the speeches were in the Temple premises. The Marseillaise rang over the pediments. The
Court’s less than princely treatment of Prince Damrong’s visit was precisely focused on the
Temple, and the Temple was the limit of the Ju dgment of 1962. The purpose of the present
Request for interpretation is literally to open the case to new territory. It is a request beyond the
scope of Article 60.
11. Mr.President, Members of the Court, there are further serious difficulties with
Cambodia’s Request for provisional measures. You ha ve been clear that, in any such request, the
Applicant must establish urgency 52 and the risk of irreparable harm 53. Cambodia in the present
proceedings has established neither. But as I have said already, it is not enough that there be
urgency and irreparable harm in the abstract. They must be in respect of a disputed right or rights
which “might ultimately form the basis of a judgm ent in the exercise of [your] jurisdiction”. You
have been clear that those rights must display two characteristics, if they are “ultimately [to] form
the basis of a judgment”. First, as you said in the Request in the Costa Rica-Nicaragua Border
Area dispute “the Court must be concerned to preserve by such measures the rights which may
51
See dissenting opinion of Judge Wellington Koo, I.C.J. Reports 1962, pp. 89-90, para. 32.
5See, e.g., Questions relating to the Obligatto Prosecute or Extradite (Belgium v. Senegal), Provisional
Measures, Order of 28 May 2009, I.C.J. Reports 2009, para. 62.
5See, e.g., Application of the Convention on the Prevention and Punishment of the Crime of Genocide (Bosnia
and Herzegovina v. Yugoslavia), Provisional Measures, Order of 8 April 1993, I.C.J. Reports 1993, p. 19, para. 34. - 37 -
subsequently be adjudged by the Court to belong to either party... therefore, the Court may
exercise this power only if it is satisfied that the rights asserted by a party are at least plausible”
(Certain Activities carried out by Nicaragua in the Border Area (Costa Rica v Nicaragua), Request
for the Indication of Provisional Measures, Order of 8March2011, para.53, citing Questions
relating to the Obligation to Prosecute or Extradite (Belgium v. Senegal), Provisional Measures,
Order of 28 May 2009, I.C.J. Reports 2009, paras. 56-57).
And “a link must exist between the rights which fo rm the subject of the proceedings before the
Court on the merits of the case and the provisional measures being sought” ( ibid., para. 54, citing
Questions relating to the Obligation to Prosecute or Extradite (Belgium v. Senegal), Provisional
Measures, Order of 28May2009, I.C.J.Reports2009 , para.56). Now these two requirements
present difficulties for Cambodia. First, there is no link between the rights Cambodia might have
under Article60 to obtain an interpretation and the provisional measures Cambodia now seeks.
Second, the rights which Cambodia asserts the provisional measures would protect in the
framework of Article 60 are not even plausible. Let me deal with these two points in turn.
The absence of a link
12. First, the absence of a line. Professor So rel accepted that he had to show a sufficient
link54. He then mentioned a series of factors ⎯ recent tragic events, Thailand’s preference for
resolving border disputes by negotiation, the UN ESCO subscription, the alleged armed aggression
of Thailand since2008, the Thai letter of 21Ju ly2008, the construction of the pagoda and its
subsequent involvement in the hostilities, all of which he said evidenced the link. But none of
these facts, even if they were proved, would b ear any relationship to the interpretation of the
1962 Judgment. I will come back to new facts in a moment.
Implausible character of the rights whose protection is being sought
13. I turn to the question of implausibility. Cambodia in making the present Request seeks
to adjudicate a series of incidents taking place acros s a long range of the Thai-Cambodian frontier.
They are incidents arising, as I have said, in recent years or months ⎯ nearly half a century after
54
CR 2011/13, pp. 38-42, paras. 4-9 (Sorel). - 38 -
your Judgment. They are in places 100km from th e Temple. On no fathomable construction of
the 1962 Judgment did the Court decide anything ab out such incidents or the localities where they
occurred. Yet Cambodia seeks to subject them to th e seisin of the Court. Seeks, in effect, the
determination of our responsibility for those incide nts. For what other reason would it refer in
55
paragraph 33 of the Request to an incident of 15 October 2008 ; or for its letter to the Registrar of
4 May 2011, in which it communicated allegations concerning incidents between the armed forces
56
of Cambodia and Thailand at distant points along the frontier in April and May this year .
14. Cambodia’s present application for an interp retation has nothing to do with these rights.
Cambodia has no plausible right, under Article60, to obtain an interpretation in respect of those
incidents. The areas Cambodia now disputes ha ve no plausible connection to the Judgment of
1962.
15. It is important to recall in this connec tion that, when determining whether an asserted
right is plausible for this purpose, you have c onducted a “careful examination of the evidence and
arguments presented by the Parties” (Certain Activities Carried out by Nicaragua in the Border
Area (Costa Rica v. Nicaragua), Request for the Indication of Provisional Measures, Order of
8 March 2011, para. 58). For example, when you considered Costa Rica’s request for indication of
provisional measures earlier this year, the reques ting party had set out substantial evidence in
57
respect of sovereignty over the Isla Portillos . Cambodia has not met that standard in the present
proceedings. And, yet, it is Cambodia which is constrained in a way that Costa Rica was not: any
right, if Cambodia is plausibly to assert it, must be a right to interpretation under Article 60. there
is no other right that can be adjudicated here.
16. In sum, the rights which Cambodia says urgently require provisional measures under
Article 41 are rights concerning places remote from the subject-matter of the 1962 Decision. There
is one allusion to a right to prevent “damages to the Temple” itself ⎯ a passing reference in the
55
Request of 28 April 2011, p. 12, para. 33.
56Letter of HOR Namhong, Agent of the Kingdom of Cambodi a, addressed to Mr. Philippe Couvreur, Registrar
of the Court, dated 4 May 2011.
57See Certain Activities Carried out by Nicaragua in the Border Area (Costa Rica v. Nicaragua), Request for the
Indication of Provisional Measures, Order of 8 March 2011, para. 58; Request for the Indication of Provisional Measures
submitted by the Republic of Costa Rica, 18 November 2010, paras. 10-14. - 39 -
58
Request ⎯ but Cambodia offers hardly any evidence in support of it. And what little evidence it
adduces presents still further problems in light of your Article 60 jurisprudence. Your predecessor,
the Permanent court was clear that, “when giving an interpretation”, the Court “refrains from any
examination of the facts other than those which it has considered in the judgment under
interpretation, and consequently all facts subsequent to that judgment” (Interpretation of Judgments
Nos.7 and8 (Factory at Chorzów), Judgment No.11, 1927, P.C.I.J., SeriesA, No.13 , p. 21).
Cambodia ignores this, presents the Court with a flood of allegations, highly prejudicial,
concerning events long after the Judgment of 1962 and manifestly outside the limits of Article 60.
17. Mr.President, Members of the Court, this is no mere procedural incident. It is a
fundamental limit on the exercise of interpretation. Interpretati on relates to the time of the
interpretation itself. Article 60 is a provision in two parts. Its first, and logically main part, affirms
that the judgment of the Court “is final and without appeal”. That is a statement of the principle of
res judicata. The jurisdiction to render an interpretation is a special jurisdiction, independent of the
consent of the parties at the time the request for an interpretation is made. That is why “all facts
subsequent to [the original] judgment” are outside the scope of an Article 60 request. If a putative
right can be addressed only by reference to factual evidence outside the scope of your jurisdiction,
then it is not a plausible right for purposes of the request for provisional measures.
18. But new facts are at the heart of Cam bodia’s Request. The Requ est stresses the steps
which Cambodia says it has taken to deal with its differences through bilateral processes, steps
which Cambodia alleges failed as a result of Thai conduct 59. The transactions within UNESCO 60.
61
the work of the Joint Boundary Commission , the wide-ranging frontier incidents. None of these
existed in 1962. They are all new.
19. The new facts are there, not just to devel op a point of interpretation, they are inseparable
from the Request for provisional measures. Immedi ately after referring to the text of Article60
Cambodia says:
58Request for Indication of Provisional Measures, p. 2, para. 6.
59
Request of 28 April 2011, pp. 4-5, para. 13.
60Ibid., pp. 6-7, paras. 14-15, 17.
61Ibid., pp. 5-7, para. 16. - 40 -
“Si le Cambodge revient vers la Co ur à propos de l’arrêt qu’elle a rendu
le15juin1962, c’est parce que…rien ne laissait présager, jusqu’à une période
récente, que la Thaïlande interpréterait cet arrêt d’une manière qui diverge de
l’interprétation que le Cambodge en a toujours faite.” 62
And, you will understand why I do no t want to break into French. This expresses Cambodia’s
theory of the identity and scope of the difference which has led to the return to the Court for an
interpretation. According to Cambodia, there w as “nothing” to show a difference until recently.
What filled that gap? What replaced the “not hing”? The answer is the recent events which
demonstrate the existence of the dispute. Bu t interpretation of a judgment is available under
Article60 when the problem of interpretation exists in the operative part of the judgment.
Article60 is not a vehicle for scrutinizing the conduct of a party after the judgment. It is not a
perpetual mandate to the Court to enforce its boun dary delimitations years after the event. The
Request for provisional measures is inseparable fro m Cambodia’s précis of modern events in the
border regions. Cambodia refers in the Request, for example, to “serious incidents” for which
63
“Thailand carries whole responsibility” . These are not incidents adjudicated in 1962, nor could
they have been. They are the incidents relating to the recent difficulties on the border. The specific
provisional measures sought, which ProfessorMcRae will address, are directed to those recent
events.
20. This morning SirFranklinBerman trie d to exempt Cambodia from the requirement of
establishing plausibility by arguing that “by definition the rights in question have been settled . . .
64
by a binding Judgment of the Court” . But that is precisely what is in issue and SirFranklin’s
argument was entirely circular. As we have s hown, the Court did not decide, as part of its
dispositif, that the Annex I map line constituted the bounda ry. What it did decide was that that
claim was irrecevable, inadmissible. Moreover, by contrast, in the recent Costa Rica case,
Nicaragua did not deny that there was prima facie jurisdiction. And that jurisdiction, if it exists,
was substantive and not ancillary.
62Ibid., para. 27.
63
Request for Indication of Provisional Measures, p. 1, para. 4.
64CR 2011/13, p. 30, para. 13 (Berman). - 41 -
Irreparable harm
21. I should say a word now about irrepara ble harm, which ProfessorSorel discussed in
some detail 65.
22. The first point to make is that in these border incidents there have been casualties on both
sides, including significant civilian casualties on the Th ai side. According to our information, the
total number of Thai deaths caused by armed incidents along the boundary since July2008 is
fourteen, and the total number of injuries in th e same period is over150. These Thai casualties
have occurred in a variety of locations, includi ng places well inside Thailand and places which are
not the subject of any countervailing claims. Of course, Mr.President, all such casualties are
regrettable, deeply so. This applies equally on bo th sides. But it should not be allowed to obscure
the fact that this is a request for interpretation. The only consequence ⎯ assuming for the sake of
argument that Cambodia would succeed entirely in having the Court adopt its interpretation ⎯
would be that the Judgment of 1962 would be read in a certain way. The Court will not acquire by
virtue of Article 60 any power to enforce such a j udgment or to deal frontally with the claims and
counterclaims that always accompany border incide nts. It is sufficient to say in response to
ProfessorSorel that the only rights at stake here are the rights to interpretation of a judgment in
circumstances where the different views about th e judgment have been known for a considerable
time.
Cambodia’s request to enforce the 1962 Judgment
23. Mr.President, Members of the Court, as I have said there is no plausible right under
Article60 to request enforcement of a judgment of the Court. But, that is, in substance what
Cambodia does. It seeks an interpretation, and I quote ⎯ this is from paragraph 28 of the Request:
66
“so as to surmount the obstacle which is presented” .
What “obstacle” does Cambodia mean? It mean s an “obstacle to the implementation of the
judgment” which has been presented by “difficulties arising ⎯ regardless of when ⎯ which
jeopardize respect for an obligation flowing from the judgment” ⎯ another quotation from the
same source. But that is not what the Statute sa ys. According to the Statute, in the event the
65
Ibid., pp. 42-45, paras. 11-14 (Sorel).
6Request of 28 April 2011, p. 11, para. 28. - 42 -
meaning or scope of a judgment is in dispute, the Court shall “construe it”. It does not say that the
Court shall remove obstacles to which a Party’s later conduct may have given rise. Cambodia
dutifully incorporates the words on the sense or meaning of the Judgment but it ignores their
meaning. In particular, it ignores the limitation explicit in them. Article 60 does not exist to assure
respect for judgments. It is not a mechanism of enforcement.
24. To be clear, Thailand has at all times respected the obligations flowing from the
Judgment of 1962. But in any event an allegation th at it has not done so is manifestly inadmissible
in these proceedings. Thailand’s conduct since 1962 is not subject to the Court’s jurisdiction under
Article60. Interpretation is not the mechanism for alleging that a State has failed to meet an
obligation to adhere to a judgment of the Court. The Court is being clear that it does not address
“difficulties arising” after the judgment or “obstacles” to putting it into effect. Article 60 “does not
allow it to consider possible violations of the Judgment which it is called upon to interpret”. That
is a quotation from Avena (Request for Interpretation of the Judgment of 31March2004 in the
Case concerning Avena and Other Mexican Nationals (Mexico v. United States of America)
(Mexico v. United States of America), Judgment, I.C.J. Reports 2009, p. 20, para. 56). It is crucial
to be clear here what Cambodia is referring to when it refers to “difficulties arising” and to
“obstacles”. It is referring to the litany of a llegations which are made in respect of Thailand’s
conduct in recent years and months. In a case wher e the only jurisdiction is that under Article 60,
the only right “which may subsequently be adjudged by the Court...” ( Questions relating to the
Obligation to Prosecute or Extradite (Belgium v. Senegal) , Provisional Measures, Order of
28 May 2009, paras. 56-57) is the right to obtain an interpretation of the Judgment which the Court
had previously adopted. Rights in respect of other matters, are not, in the required sense, plausible
rights.
Conclusions
25. Mr.President, Members of the Court, let me summarize my conclusions in four
propositions.
⎯ Proposition 1. Jurisdiction under Article60 depends on two fundamental distinctions. First,
there is the distinction between what is said in the dispositif or is indispensably connected to it, - 43 -
and the general course of reasoning of the Court. The former is included in Article60, the
latter is excluded. Second, there is the dis tinction between interpretation of an existing
judgment ⎯ interpretation in the narrow sense ⎯ and the exercise of a new substantive
jurisdiction between the parties. The former is included in Article 60, the latter is excluded.
⎯ Proposition 2. Cambodia’s Request upon a Request ignores both distinctions, and does not
therefore pass the test of plausibility/plausibilité in either its English or its French meaning.
There is not even prima facie jurisdiction to consider the Request.
⎯ Proposition 3. As to the first of the distinctions, the Court in 1962 made no decision as to the
delimitation of the frontier. It was not allocati ng territory at large between the two States. It
was settling, and said it was settling, a specific dispute concerning a noteworthy artefact of
regional culture ⎯ an artefact that even a prince might visit ⎯ the Temple. It is absolutely
critical that Cambodia explicitly asked the Cour t to incorporate the map line as a binding and
operative decision, to incor porate it explicitly into the dispositif. The Court explicitly refused
even to consider the point. The Court’s refusal is decisive. It is not reasoning of a merely
ancillary or supporting character. It is a determination defining the compass of the operative
67
part of the decision. Cambodia, in its Request, tells you what it asked for in 1959 ; and what
68
it got in 1962 . But it does not say what else it asked for, and it does not say what it did not
get. Cambodia now seeks through interpretation to get what the Court decided definitively not
to give.
⎯ Proposition 4. As to the second distinction ⎯ the distinction between the interpretation and
the exercise of a new substantive jurisdiction ⎯ Cambodia seeks the latter ⎯ most notably in
its request for Provisional Measures ⎯ and not the former. This can be tested in several ways.
For example, one might ask whether by a pro cess of interpretation one can translate the
AnnexI line into a line on the ground. The answer is no. That is true that the line certainly
places the Temple ⎯ which, as anyone who has visited the site will immediately recognize, on
the Thai side of the watershed ⎯ in Cambodia. But because it does not follow the
watershed ⎯ as required by the 1904 Treaty ⎯, to trace the map line on the ground would
67
Request of 28 April 2011, p. 3, para. 9.
6Ibid., pp. 3-4, para. 10. - 44 -
require an act of reconstruction based on materi als most of which are not in the record and
many of which probably do not exist ⎯ which is to say, again, that the Judgment does not
delimit a boundary. To take another example, one might ask whether new facts had to be taken
into account to justify the provisional measures. If the provisional measures are not ancillary
to the interpretation of the Judgment, but are sought for reasons extraneous to a mere
jurisdiction to interpret ⎯ in particular, in an attempt to seek enforcement of the decision
against Thailand. Then they are inadmissible. Interpretation is an act in principle referable to
the date of the Judgment. On the other hand, what Cambodia seeks is a measure of
enforcement in future, and that would require a new substantive exercise of jurisdiction as
between the Parties.
26. Mr.President, Members of the Court, in the light of what I have said, it is evident that
Cambodia’s request upon a request faces an insuperable dilemma. Either the issue of interpretation
raised by Cambodia concerns the Judgment of 1962 and its interpretation as at that time ⎯ in
which case it is not urgent ⎯ or it concerns recent events along the boundary ⎯ events largely
disconnected and distant from the Temple itself ⎯ in which case this is an attempt at enforcement
which goes well beyond your limited jurisdiction to in terpret under Article60. There is no third
possibility. The backward-looking interpretative jurisdiction under Article60 simply does not
overlap with the forward-looking provisional me asures jurisdiction under Article 41, and certainly
not, Mr. President, after 50 years.
Mr.President, Members of the Court, thank you for your attention. May I ask you,
Mr. President, to call on Professor McRae.
The PRESIDENT: I thank you, Professor Crawford, for your presentation. Now I am going
to invite Professor McRae to make his presentation.
Mr. McRAE:
The measures requested
1. Thank you, Mr. President. Mr. President, Members of the Court, it is a great honour for
me to address this Court and to present arguments to you on behalf of the Kingdom of Thailand. - 45 -
2. It falls to me to address the provisional measures actually requested by Cambodia and to
show why, even if the Court were to have prima facie jurisdiction, which as my colleagues have
demonstrated is not the case, these measures could not be ordered.
3. Mr. President, Cambodia has requested three interim measures of protection. Let me
remind you of them: first, the immediate and unconditional withdrawal of Thai forces from those
parts of Cambodian territory that are within the area of the Temple of Phra Viharn; second, the
prohibition of any Thai military activity within the area of the Temple of Phra Viharn; and third,
that Thailand abstains from any act that would prejudice the interests of Cambodia or aggravate the
dispute in the matter before the Court.
4. Now, there are three principal reasons why the Court should not order these measures.
First, the measures are not related to the Re quest for interpretation before the Court.
ProfessorCrawford has already addr essed certain aspects of this link with you. I will add some
additional comments.
Secondly, the requirement of urgency is not met.
And third, the measures requested are essentially a request for the Court to decide precisely
what is at issue in the Request for interpretation.
5. I shall address each of these reasons in turn.
1. The lack of a relationship between the measures requested and the subject-matter of the
dispute
6. Mr. President, Members of the Court, as Professor Crawford has pointed out a prerequisite
to ordering provisional measures is that there must be a link “between the provisional measures
requested and the rights which are the subject of th e proceedings before the Court as to the merits
of the case”. That was what you said in Questions relating to the Obligation to Prosecute or
Extradite (Belgium v. Senegal) in the provisional measures Order of 28 May 2009, (para. 56). And
I do not think that the point of principle is an i ssue. But, when one tu rns to Cambodia’s Request
for an interpretation of the 1962 Judgment, the l ack of a link between the measures requested and
the subject-matter of the dispute becomes obvious.
7. To start with, as Professor Pellet has explai ned, Cambodia has failed to identify a dispute
over the 1962 Judgment that could be a subject of interpretation. And, this taints Cambodia’s claim - 46 -
for provisional measures; it creates an obvious disconnect between the dispute over interpretation
and the measures it requests.
8. The dispute in Cambodia’s view is about the boundary between Thailand and Cambodia
which it believes was determined by the Court in the 1962 Judgment on the basis of what is
referred to there as the “AnnexI map”. As a consequence, Cambodia now claims that the
Judgment imposed on Thailand an obligation to withdraw its troops from the whole area defined by
the AnnexI line. In the words of the Request for interpretation to the Court, Thailand has an
obligation (para. 45) “de respecter l’intégrité du territoire du Cambodge, territoire délimité dans la
région du Temple et ses environs pa r la ligne de la carte de l’annexe1 sur laquelle l’arrêt de la
Cour est basé”.
9. As Professor Pellet has pointed out, the Cambodian Request does not constitute an
admissible request for the interpretation of the 1 962 Judgment. Rather, Cambodia seeks to resolve
a matter not decided by the Court in 1962 ⎯ that is, where the boundary beyond the Temple should
be located ⎯ a matter I should say for which Thailand and Cambodia have already established a
bilateral process for its resolution.
10. Yet, while Cambodia’s Request for interpretation is about the line on the Annex I map,
its Request for provisional measures does not men tion the AnnexI map. This raises an initial
question about the Cambodian Request. Does it rela te to sovereignty over the Temple, in which
case no interpretation is needed, or does it relate to the boundary, which Cambodia claims to be
that of the Annex I map, a question not decided by the Court in 1962?
11. If it is a request relating to the Temple itself, then there is no question of interpretation
and no basis for provisional measures. If it is a request for interpretation of the status of the
Annex I line, then as Professor Pellet has shown, it is not an interpretation of the “meaning or scope
of the Judgment”. Equally, there is no basis for an order of provisional measures.
12. The Cambodian Request is further unrelated to the subject-matter of the dispute because
it is based on facts and events outside of the area of the dispute, as defined by Cambodia, incidents
occurring in areas far from the Temple, and well outside the area encompassed by the Annex I line.
13. In its Request for provisional measures, Cambodia states - 47 -
“Depuis le 22avril2011, de graves inci dents se sont produits dans la zone du
Temple de Préah Vihéar, lieu de la demande en interprétation formulée récemment par
le Cambodge, ainsi qu’à plusieurs endroits le long de cette frontière entre les deux
Etats . . .” (Para. 2.)
But, in its Request for interpretation, Cambodia refers to the incidents of 22-26April as taking
place “dans d’autres endroits le long de la frontiè re entre les deux Etats” (para. 34), thus not only
far from the Temple, but beyond the area encompassed by the Annex I line. The events to which
Cambodia mainly refers in its Request for provisi onal measures took place at the Temples of Ta
Muen and Ta Kwai, which as the Agent has shown are simply nowhere near the Temple of Phra
Viharn (judges’ folder, tab 10). [Screen]
14. In a communication to the Registrar dated 4 May 2011 (judges’ folder, tab23),
Cambodia drew attention to incidents that took place between April 28 and May 3 in the region of
the Temples of Ta Muen and Ta Kwai. The Ca mbodian communication linked these incidents to
its Request for provisional measures. But such incidents cannot be related to the Request for
interpretation of the Judgment of 1962 lodged by Cambodia. Ta Kwai ⎯ as you see on the map ⎯
is 147 km from the Temple of Phra Viharn. Ta Muen is 158 km away. These Temples were not in
issue in the 1962proceedings. There is no mention of them in the 1962Judgment or in the
pleadings. As a result, the events of 28April-3May, at Ta Muen and Ta Kwai Temples can
provide no basis for ordering provisional measures. They simply have nothing to do with any
question of interpretation that is within the jurisdiction of the Court. [End screen]
15. So far I have focused on the first two Cam bodian Requests, which quite artificially refer
to “the area of the Temple” which we know Cam bodia defines by reference to the AnnexI map
line. The third Request for provisional measures does not refer to the “area of the Temple” and
thus does not make this indirect reference to th e AnnexI line. But, presumably a request that
“Thailand abstains from any act that would prejudice the interests of Cambodia or aggravate the
dispute in the matter before the Court” is s upposed to be limited to the area of the Temple as
defined in Cambodia’s Request for interpretation, and thus it too implicates the AnnexI line? If
this is so, then it suffers from the same problems as the first two Requests, one and two. That is, it
applies to a matter that does not constitute an in terpretation of the 1962 Judgment, and it is based
on facts that are not related to any question of interpretation over which the Court could have
jurisdiction. - 48 -
16. With respect to the last part of the third provisional measure request that Thailand not
“aggravate the dispute in the matter before the Court” , the measure is directed to one party when if
it were to have any legitimacy it would have to be directed to both parties.
17. The object, Mr. President, of provisional measures is not to take sides in the dispute, to
give one party an advantage over th e other. As the Court said in Congo v. France, “the power of
the Court to indicate provisional measures under Article 41 of the Statute of the Court has as its
object to preserve the respective rights of the parties pending the decision of the Court...”
(Certain Criminal Proceedings in France (Republic of the Congo v. France), Provisional
Measures, Order of 17 June 2003, I.C.J. Reports 2003 , p. 107). This cannot be done if the Court
assumes facts and makes assumptions about the actions of one party while ignoring the actions of
the other.
18. And, of course, the Court has never been prep ared to do such a thing in the past. It has
effected a degree of mutuality in what it expects of the parties. This is clearly evident in cases
where provisional measures have been awarded wher e the parties have engaged in armed conflict.
In referring to both Nigeria v. Cameroon 69and Georgia v. Russia , both cases where the claim for
provisional measures had arisen out of armed conflict between the parties, the Court made an order
in respect of both parties, not just one.
19. Moreover, the situation on the ground in this case is not as Cambodia paints it to be.
Cambodia appears to feel free to increase its military and civilian presence, to build structures and
build roads. The Agent showed you earlier what Cambodia has been doing. It is Cambodia’s
actions of continuing to enhance its presence beyond the Temple of Phra Viharn that is bringing
instability to the area and aggravating the differences between the parties.
20. But even if a request were to be worded in respect of both parties, it could not be ordered
71
as a self-standing measure. As the Court pointed out in the Pulp Mills case , in the absence of
conditions for ordering a substa ntive provisional measure it would not order a non-aggravation
69
Land and Maritime Boundary between Cameroon and Nigeria (Cameroon v. Nigeria), Provisional Measures,
Order of 15 March 1996, I.C.J. Reports 1996 (I), p. 13.
70Application of the International Convention on the Elimination of all Forms of Racial Discrimination
(Georgia v. Russian Federation), Provisional Measures, Order of 15 October 2008, I.C.J. Reports 2008, p. 353.
71Pulp Mills on the River Uruguay (Argentina v. Uruguay), Provisional Measures , Order of 23January2007,
I.C.J. Reports 2007 (I), p. 16, para. 50. - 49 -
measure alone, even if addressed to both parties. Similarly in Costa Rica v. Nicaragua , the Court
noted ⎯ and here I am referring to what was said in paragraphs 62 and 83 ⎯ that the
non-aggravation measure being sought was compleme ntary to specific interim measures ordered,
and the Court awarded the measure solely on that complementary basis.
21. In sum then, Cambodia’s Request for provisional measures does not meet the
requirement of a necessary link “between the rights which form the subject of the proceedings
before the Court on the merits of the case and the provisional measures being sought”. It is
formulated in relation to a matter that ca nnot be the subject of an interpretation ⎯ the status of the
Annex I map ⎯ and it is based on factual allegations that are outside of the area to which the
Request for interpretation is based, or provide no basis for the Court to alter the position on the
ground in favour of one party. On these grounds alone, Mr. President, the Request, as formulated
by Cambodia, must be rejected.
2. The Request does not meet the requirement of urgency
22. Mr. President, Members of the Court, the second objection to Cambodia’s Request is that
it fails to meet the test of urgency. It is well established that the Court may only order provisional
measures when there is urgency. And the test for urgency has frequently been stated by this Court
as whether “there is a real and imminent risk that irreparable prejudice may be caused to the rights
in dispute before the Court has given its final decision”. That is how you put it in Questions
relating to the Obligation to Prosecute or Extradite (Belgium v. Senegal) (Provisional Measures,
Order of 28 May 2009, para. 62).
23. The requirement of urgency involves firs t a requirement of the likelihood of irreparable
prejudice to rights and secondly of imminence; there must be a real likelihood or threat that
irreparable prejudice will occur to rights that are the subject-matter of the dispute. As the Court
said in the Avena case “the power of the Court to indicate provisional measures will be exercised
only if there is urgency in the sense that action prejudicial to the rights of either party is likely to be
taken before the Court has given its final decision” ( Request for Interpretation of the Judgment of
31March2004 in the Case concerning Avena and Other Mexican Nationals (Mexico v. United
7Certain Activities Carried out by Nicagua in the Border Area (Costa Rica v. Nicaragua), Provisional
Measures, Order of 8 March 2011, paras. 62 and 83. - 50 -
States of America) (Mexico v. United States of America), Provisional Measures, Order of
16 July 2008, I.C.J. Reports 2008, p. 311, para. 66; emphasis added).
24. The “final decision” in this case is an in terpretation of a judgment. Article41 of the
Statute speaks of preserving the respective rights of e ither party. In a case of interpretation it can
only be in exceptional circumstances where there could be any urgency in protecting rights. And
certainly it could not be in a case like this. How can a State come to the Court and claim that there
is an “urgent” need to protect rights in respect of a matter of interpretation when it has waited
almost 50years since the Judgment was handed down to request that interpretation? There is a
complete air of unreality about this. If the Court were to order provisional measures in such a case,
there could be no end to States concocting disputes over the interpretation of past judgments in
order to get an order of provisional measures.
25. Mr. President, my colleagues have pointed out that a request for interpretation cannot be
used as a backdoor method for seeking enforcement of a judgment. Equally a request for
interpretation cannot be used as a backdoor means for claiming provisional measures.
26. But when we turn to the factual basi s on which Cambodia seeks to support its claim for
provisional measures it is clear that Cambodia has simply not established ⎯ indeed it really has not
claimed ⎯ that there is any urgency or imminence with respect to the rights in what it refers to as
the “area of the Temple”. Yet, the only basis for a claim for provisional measures can be that there
is a risk of irreparable prejudice in respect of the rights that are the subject-matter of the dispute
before the Court. And that is just not so here.
27. Let me highlight the relevant facts that have already been set out by the Agent.
28. The conclusion of the 2000 MOU, which you find in your folder at tab 4, heralded a new
development in Thai-Cambodian relations in respect of their boundary because it provided the
mechanism and the opportunity for the resolution of the boundaries between the parties, including
the boundary beyond the Temple of Phra Viharn. As early as July 1962, Thailand had withdrawn
its troops from the “Temple, or its vicinity on Cambodian territory” as required under the
1962Judgment. But, after the conclusion of the MOU of 2000, and particularly after 2004,
notwithstanding the obligation under ArticleV of the MOU that the “authorities of either
Government or their agents shall not carry out any work resulting in changes of environment of the - 51 -
frontier zone, except that which is carried out by the Joint Technical Sub-Commission”, Cambodia
nonetheless increased its activities in localities beyo nd the Temple including relocating individuals
into the area, and constructing roads. And as the Agent has pointed out, these actions were
protested by Thailand.
29. And then in 2005, Thailand learned that Cambodia had applied unilaterally to have the
Temple of Phra Viharn listed as a World Herita ge site. In 2004, Tha iland had discussed with
Cambodia the possibility of a joint request to UNESCO, but Cambodia’s unilateral action was a
clear indication that it was using the World Heritage inscription as a means to assert sovereignty
beyond the Temple in what is clearly a disputed area. Cambodia’s continued build-up of military
forces and equipment in the Temple itself and in th e disputed area has led to the confrontations we
have heard about, initiated by Cambodia including the use of armed force. As the Agent has
pointed out, Thailand was forced to respond in self defence to unprovoked attacks.
30. What does Cambodia rely on then to justify the urgency of the situation? It did not refer
in its Request for provisional measures to the in cidents of February 2011, even though it discusses
them in its Request for interpretation and mentione d them briefly today. Instead, the Request for
provisional measures focused on clashes in the pe riod 22-26 April, which Cambodia claims were,
and again I quote from paragraph 2 “dans la zone du Temple de Préah Vihéar, lieu de la demande
en interprétation formulée récemment par le Camb odge, ainsi qu’à plusieur s endroits le long de
cette frontière entre les deux Etats”. And it a dded to this the information provided after the
Request for provisional measures was filed of in cidents in the period 28April-3May. And
Counsel for Cambodia this morning freely linked the incidents of April-May 2011 with the Temple
without indicating precisely where they occurred. But if you look carefully at the evidence
provided by Cambodia, what you see is that th e clashes of April-May 2011 occurred almost
exclusively near the Ta Muen and Ta Kwai Temp les, well beyond any area that could be related to
the 1962 Judgment.
31. In its letter of 22 May 2011 to the Registrar of the Court listing the diplomatic Notes sent
by Cambodia to Thailand, Cambodia listed two Notes, Nos. 744 and 748, which were said to refer
to alleged Thai attacks in the areas of the Temples of Ta Muen, Ta Kwai and Phra Viharn on
26 April 2011, and you will find those Notes in your judges’ folder at tab 24. In fact only one of - 52 -
those Notes, No. 744, refers to an incident in the locality of Pra Viharn ⎯ a 20-minute exchange of
fire by the two sides more than 2km from the Te mple of Pra Viharn. That is the only link that
Cambodia can make between the events of April and May 2011 and the Temple of Pra Viharn. All
of the other incidents took place almost 150km away from the Temple, and outside the area to
which the question of interpretation relates.
32. Let me compare this with more recent cases where provisional measures have been
claimed. In Nigeria v. Cameroon a request for provisional measures was made on
10February1996 in respect of incidents that ha d occurred on 3February1996, some seven days
earlier. In Georgia v. Russia the request for provisional measures was made by Georgia on
14 August 2008 in respect of events that had commenced on 8 August 2008, some six days earlier.
In both cases there had been very recent conflicts and the immediate possibility of conflict
continuing with further loss of life. In Costa Rica v. Nicaragua, the request for provisional
measures was filed in respect of events that were continuing at the time that the request was filed,
and that was so in the Avena case as well.
33. By contrast, the only incidents that Cambodia can rely on for the purposes of a
provisional measure are incidents that occurred in February 2011, almost three months before the
request for provisional measures was made, a single instance on 26April2011 of a 20-minute
exchange of fire without any reported casualties, or events that occurred well beyond the area to
which the request for interpretation relates. N one of these provides a basis for the ordering of
provisional measures or compares in any way with the examples Professor Sorel cited this morning
of instances where provisional measures have been ordered.
34. By no standard can it be said that there is an “imminent” risk of irreparable harm to
rights in the area of the Temple of Phra Viharn. There is no urgency. The Thai situation on the
ground in that area continues as it has been for a number of years and there is no evidence that
rights will be prejudiced in respect of the matter before the Court that would justify a measure
requiring the withdrawal of Thai troops from what is a disputed area. As in the Pulp Mills case ⎯
and I am referring to what was said in paragraph 42 ⎯ even if it were shown that there is a risk of
prejudice to Cambodia in this case, it certainly is not “imminent”. - 53 -
35. There is, Mr.President, a further reason why Cambodia’s request cannot be seen as a
matter of urgency. The matter is already bei ng regulated through other processes. What Cambodia
omitted from its discussion in its request for provis ional measures of the events of 22April2011
and following, is the recent agreement between Th ailand and Cambodia to resolve the issues with
the appropriate engagement of Indonesia as the ch air of ASEAN. Counsel for Cambodia did talk
about that today but in a partial and rather misl eading way. The package of solutions, referred to
by the Agent earlier, include a timeline for the development of terms of reference for an Indonesian
Observers Team, meetings of the General Boundary Commission, or GBC, and the Joint Boundary
Commission, JBC, and the implementation of the Indonesian Observers Team mission.
36. Cambodia’s communication with the Court on 21 May 2011, which sought to create the
impression that Thailand was not responding to requests on the creation of an Indonesian Observers
team, omitted to refer to more recent events than 8May. Cambodia’s letter was, of course,
answered by the Agent for Thailand in his letter to the Court on 26 May 2011.
37. But these developments, which involve th e agreement of Cambodia on a way forward,
stand in stark contrast with statements made in Cambodia’s request for interpretation. At
paragraph17 Cambodia states, “il n'y aurait au cune perspective de parvenir à une solution
mutuellement acceptée dans le cadre de négociati ons bilatérales”. Yet, on 9May2011, that
agreement provides precisely for the resolution of the issues in respect of the boundary through the
work of the GBC and the JBC. Equally, when Ca mbodia states at paragraph 20 of the Request for
interpretation, “Mais, en dépit de trois réunions de la ‘Joint Boundary Commission’ de novembre
2008 à avril 2009, le processus initié par le MoU est resté dans l'impasse” it equally ignores what it
had already agreed to. Continuing the work of the JBC was precisely what Cambodia agreed to in
the 9 May 2011 Agreement.
38. Moreover, I should point out that Cambodia’s accusation in paragraph 34 of its Request
for interpretation that Thailand has somehow de layed the JBC process because it required that
agreed minutes of the JBC meeting be placed before Parliament, an accusation repeated by counsel
for Cambodia today, is completely disingenuous. Cambodia has been fully aware of Thailand’s
constitutional requirement for a parliamentary ap proval process for agreements and Cambodia has
also been aware that since 1 May of this year that process in respect of the JBC minutes has been - 54 -
completed, since it was advised of that by diploma tic Note of that day. The process is not blocked,
as we heard earlier today.
39. Mr. President, Cambodia cannot claim, “there is a real and imminent risk that irreparable
prejudice may be caused to the rights in dispute before the Court has given its final decision”, when
in fact the very matters that it cl aims constitute a situation of urgency are the subject of an agreed
process for their resolution. Even if the 22Ap ril2011 and the days following incidents were
relevant to the Request for provisional measures, although I have pointed out that they are not, the
creation of an Indonesian Observers Team to help monitor the military situation between the two
countries in the border area, and the restarting of the JBC process, undermine any claim that the
provisional measures requested by Cambodia meet the test for urgency.
3. The measures requested are essentially an in vitation to the Court to decide precisely what
is at issue in the request for interpretation
40. Mr. President, Members of the Court, I now turn to my third and final argument, the third
ground on which the Cambodian Request for provisional measures must fail in that it is no more
than a thinly-disguised attempt to achieve th rough provisional measures what it is requesting
through an interpretation of the 1962 Judgment. And this, of course, it cannot do.
41. It is well established in the ju risprudence of the Court since the Chorzów Factory case 73
that a State cannot achieve through a request for provisional measures a decision on the merits of
the matter before it. It cannot by means of a provisional measures order obtain a form of
preliminary judgment on the matter in dispute. For that reason, the Court has always taken the
view that in granting provisional measures it mu st avoid prejudging the outcome of the case and
74
that is said in paragraphs 29 and 30 in the Burkina Faso v. Mali case .
42. Yet, that again, is a fundamental problem in this case. Thailand withdrew from “the
Temple, or its vicinity on Cambodian territory” in accordance with point two of the dispositif of the
1962 Judgment. Thailand is simply not there.
73Factory at Chorzów, Order of 21 November 1927, P.C.I.J., Series A, No. 12 .
74Frontier Dispute (Burkina Faso/Republic of Mali), Provisional Measures, Order of
10 January 1986, I.C.J. Reports 1986, p. 3. - 55 -
43. Thus, if orders are to be made in the terms requested by Cambodia, we have to have a
resolution of Cambodia’s fanciful claim that in addition to determining that the Temple of
Phra Viharn is subject to the sovereignty of Cambodia, the Court also settled the boundary between
Thailand and Cambodia beyond what is, using the words of point two of the dispositif, “the
Temple, or its vicinity on Cambodian territory”. And we cannot know this until the Court,
assuming that it were to find that it has jurisdiction to do so, quod non, has dealt with Cambodia’s
request for the interpretation of the 1962 Judgment.
44. What Cambodia is doing, then, with its request for the first two provisional measures, is
seeking to obtain a preliminary ruling on the merits of its extravagant claim that the Court has
decided as res judicata that the AnnexI map line constitutes the boundary between the two
countries. And by seeking to have Thailand withdraw its troops from a disputed area, Cambodia is
seeking to change the situation on the ground.
45. Mr. President, we have about a minute left so I hope we will not exc
eed the time
allocated. But, it is clear that a request for pr ovisional measures that changes the situation on the
ground in an area that is disputed involves once ag ain prejudging the outcome of that dispute. As
the Court said in Burkina Faso v. Mali, it is not empowered at the stage of provisional measures “to
modify the situation which prevailed before th e armed actions leading to the filing of the…
requests” ⎯ that quote is taken from paragraph29. And in Costa Rica v. Nicaragua, in
paragraph 85, the Court made clear that it was or dering provisional measures that did not impinge
on the merits of the dispute, leaving the parties ope n to argue the merits at a later stage. To do
what Cambodia requests in this case would preci sely prejudge the merits and would thus run
counter to the legitimate exercise of the power to award provisional measures.
46. Cambodia’s request for provisional measures, in the terms that it has put forward,
constitutes nothing more than an attempt to obtain by way of provisional measures what it is
seeking to obtain through its claim for the interp retation of the 1962Judgment. On that ground,
too, Cambodia’s request must be rejected.
47. Mr. President, Members of the Court that concludes the argument for Thailand this
afternoon. I thank you for your attention. - 56 -
The PRESIDENT: I thank ProfessorDonald McRae for his presentation. Now this last
statement concludes this afternoon’s hearing. The Parties will be heard again in oral reply
tomorrow. Cambodia will take the floor tomorro w morning at 10.30a.m. and Thailand in the
afternoon at 5.00p.m. Each of the Parties will have a maximum of one hour for its Reply. The
Court now rises.
The Court rose at 6.00 p.m.
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Audience publique tenue le lundi 30 mai 2011, à 16 heures, au Palais de la Paix, sous la présidence de M. Owada, président, en l'affaire relative à la Demande en interprétation de l'arrêt du 15 juin 1962 en l'affaire du Temple de Préah Vihéar (Cambodge c. Thaïlande) (Cambodge c. Thaïlande)