Réponses communes de la Malaisie et de la République du Zimbabwe aux questions posées par les juges

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Annexe à ANW95/30 et UNAN95/60

1. Question posée par M. Koroma le 1er novembre 1995

Premier volet de la question La résolution WHA46.40 a-t-elle été
adoptée régulièrement ?

Réponse :

Oui. Le paragraphe 2 de l'article 96 de la Charte des Nations Unies
prévoit que les institutions spécialisées ont le droit de demander à la
Cour des avis consultatifs, sur autorisation de l'Assemblée générale.

Cette autorisation est stipulée au paragraphe 2 de l'article X de
l'accord entre l'Organisation des Nations Unies et l'Organisation
mondiale de la Santé.

La résolution WHA46.40 a été adoptée conformément à l'article 76 de

la Constitution de l'OMS et aux articles 50 à 70 («Conduite des débats
aux séances plénières») et 71 à 84 («Vote aux séances plénières») du
règlement intérieur de l'Assemblée mondiale de la Santé. L'article 73
dispose que «sauf stipulation contraire du présent règlement» - condition
qui ne s'applique pas à la résolution en question - «les décisions

sont prises à la majorité des membres présents et votants».

Il serait peut-être utile de retracer brièvement l'historique de
l'adoption de la résolution WHA46.40. Le projet de résolution fut

présenté à la commission B lors de la quarante-sixième Assemblée mondiale
de la Santé (mai 1993) au titre du point 33 de l'ordre du jour intitulé
«Effets des armes nucléaires sur la santé et l'environnement» et fit
l'objet d'un débat qui dura trois jours. Pour le compte rendu du débat,
voir le document WHA46/1993/Rec./3.

A l'issue du débat, il fut procédé à une série de vo4es de
procédure :

- une proposition de la Zambie visant à demander un vote au scrutin
secret est adoptée par 43 voix contre 36, avec 5 abstentions;

une proposition présentée par les Etats-Unis d'Amérique tendant à ce
qu'il soit décidé que le projet de résolution ne relève pas de la

compétence de l'OMS est rejetée par 62 voix contre 38, avec
3 abstentions;

une proposition présentée par les Etats-Unis d'Amérique visant à
modifier le projet de résolution de manière à remercier le Secrétaire

général de son rapport et à supprimer la mention de la demande d'avis
consultatif est rejetée par 60 voix contre 33, avec 5 abstentions;

- une proposition présentée par les Etats-Unis d'Amérique demandant que

le projet de résolution soit adopté à la majorité des deux tiers au
motif qu'il porte sur une question importante est rejetée par 61 voix
contre 31, avec 2 abstentions; - 2 -

- la commission B adopte le projet de résolution par 73 voix contre 31,
avec 6 abstentions.

Après le renvoi du projet de résolution en plénière, une proposition
de la Zambie tendant à ce que le texte fasse l'objet d'un vote au

bulletin secret est adoptée par 75 voix contre 33, avec 5 abstentions; la
résolution elle-même est adoptée par 73 voix.contre 40, avec 10
abstentions.

Tant à la commission qu'en plénière, M. Piel, conseiller juridique de.
l'OMS, a rapp~lé aux délégués qu'«il appartient en dernier ressort à
l'Assemblée mondiale de la Santé de déterminer l'étendue de sa
compétence, y compris sa compétence pour poser la question» [traduction
du Greffe}.

Second volet de la question :

Si tel est le cas, tout Etat qui était alors membre de l'OMS peut-il
contester la compétence de l'Organisation mondiale de la Santé pour
demander à la Cour de rendre un avis consultatif sur la question énoncée
dans cette résolution ?

Réponse :

L'article 75 -de-la Constitution de 1 '0MS-dispose que toute-question--····

ou différend concernant l'interprétation ou l'application de cette
constitution, qui n'aura pas été réglé par voie de négociation ou par
l'Assemblée mondiale de la Santé, sera déféré par les parties à la Cour
internationale de Justice conformément au Statut de ladite Cour, à moins
que les parties intéressées ne conviennent d'un autre mode de règlement.

L'article 75 ne précise pas les modalités selon lesquelles une
question de ce genre «sera déférée». Il existe cependant un précédent
qui s'applique directement aux affaires qui nous occupent : il s'agit de

la question de l'Interprétation de l'accord du 25 mars 1951 entre l'OMS
et l'Egypte (C.I.J. Recueil 1980, p. 67). Des points de vue opposés
avaient été émis quant à l'applicabilité des clauses de négociation et de
préavis énoncées dans la section 37 de l'accord au transfert du bureau
régional de l'OMS d'Alexandrie. Pour résoudre la controverse,

l'Assemblée mondiale de la Santé adopta une résolution par laquelle elle
renvoya la qu-e·stion à-1:-a·-cour internat·ional-e··de-.:rusti-ce ·-pour·-avis
consultatif, lequel fut dûment.rendu.

En l'espèce, les Etats hostiles à la résolution WHA 46.40 auraient pu

présenter un projet de résolution dans le mêmesens, pour demander un
avis consultatif sur la question de savoir si la résolution WHA 46.40
relevait de la compétence de l'OMS; mais ils ne l'ont pas fait. C'est
pourquoi ils ne devraient probablement pas pouvoir maintenant contester

la résolution WHA 46.40, ni le vote antérieur par lequel il avait été
déclaré que le projet de résolution relevait de la compétence de l'OMS,
pas plus qu'ils ne devraient pouvoir contester ou ignorer toute autre
résolution adoptée régulièrement par l'Assemblée mondiale de la Santé. - 3 -

Additif. On ne voit pas très bien si, dans le premier volet de sa
question, M. Koroma se réfère uniquement à la régularité de la procédure
qui a présidé à l'adoption de la résolution WHA46.40, telle qu'elle a

été évoquée ci-dessus, ou s'il se réfère aussi à la régularité du texte
au fond, c'est-à-dire à la compétence de l'OMS. Dans ce dernier cas,
l'attention de la Cour est respectueusement appelée sur l'exposé écrit II
soumis par le Gouvernement de la République de Nauru à l'appui de la

requête pour avis consultatif présentée par l'Organisation mondiale de la
Santé (exposé écrit, septembre 1994) et sur son additif.

2. Question posée par M. Shi le lu novembre 1995

Question :

Le préambule de la résolution 49/75K, adoptée par l'Assemblée
générale le 15 décembre 1994 et par laquelle l'Assemblée générale demande
à la Cour de rendre un avis consultatif sur la licéité de la menace et de
l'emploi d'armes nucléaires, est libellé comme suit :

«Se félicitant de la résolution 46/40 de l'Assemblée de
l'Organisation mondiale de la Santé, en date du 14 mai 1993,
dans laquelle l'Organisation demande à la Cour internationale de
Justice de donner un avis consultatif sur la question de savoir

si l'utilisation d'armes nucléaires par un Etat au cours d'une
guerre ou d'un autre conflit armé constituerait une violation de
ses obligations au regard du droit international, y compris la
Constitution de l'Organisation mondiale de la Santé.»

Et je demande :

«Quelles sont, le cas échéant, les conséquences juridiques
de ce paragraphe du préambule en ce qui concerne la compétence

de l'OMS pour demander à la Cour de rendre un avis consultatif
sur la question qui a été posée à la Cour ?»

Réponse :

Aux termes du paragraphe 2 de l'article 96 de la Charte des
Nations Unies, les institutions spécialisées ont le droit de demander à
la Cour des avis consultatifs sur autorisation de l'Assemblée générale.

L'OMS dispose d'uae autm:::isa-ti-on -générale-à .cet---e-:&fet,.-endvertu du
paragraphe 2 de l'article X de l'accord entre l'Organisation des
Nations Unies et l'Organisation mondiale de la Santé.

En principe, chaque organisation est compétente pour décider de sa

compétence pour demander un avis consultatif et, en l'espèce, l'Assemblée
mondiale de la Santé a adopté une résolution distincte confirmant sa
compétence avant d'adopter la résolution WHA46.40. Quoi qu'il en soit,
en «se félicitant» de la résolution WHA46.40, l'Assemblée générale, en

tant que source d'où l'OMS tient son pouvoir de demander des avis
consultatifs, a confirmé et valorisé la décision par laquelle l'Assemblée
mondiale de la Santé s'est déclarée compétente. - 4 -

3. Question posée par M. Schwebel, Vice-Président, le 2 novembre 1995

Question :

La France soutient ... qu'il est «indiscutable» que sa politique de
dissuasion nucléaire a contribué, depuis presque un demi-siècle, au
maintien de la paix et de la stabilité dans le monde. Si cela est le

cas, quelles en sont les preuves ?

Réponse :

Il est aussi difficile d'«établir» que la dissuasion a préservé la
paix - ou d'ailleurs n'a pas préservé la paix - que de prouver que les
fantômes existent, ou n'existent pas. L'unique fait qui puisse être
prouvé est que depuis près d'un demi-siècle, les grandes puissances

nucléaires n'ont pas été en guerre l'une contre l'autre. Mais elles ont
été en guerre contre d'autres pays et connu des guerres intestines. Par
exemple, le Royaume-Uni contre l'Argentine; la Chine contre le Viet-Nam;
les Etats-Unis d'Amérique contre la Corée du Nord, la Chine, le Viet-Nam,

la Grenade, le Panama et l'Iraq; l'Union soviétique contre l'Afghanistan;
la Fédération de Russie en Tchétchénie et en d'autres parties de son
territoire; Israël (puissance nucléaire réputée mais non déclarée) contre
plusieurs de ses voisins.

La pièce jointe A donne la liste de 150 guerres transfrontières et
civiles-qui- ont·· éclaté--au--cours--de-la--période-comprise--entre--1-945--et -1992 ·
et qui ont fait plus de 14 millions de morts parmi la population civile
et près de 8 millions de morts parmi les militaires 1 • On ne saurait

prétendre qu'il s'agit là d'un bilan de paix et de stabilité. En fait,
on est allé jusqu'à dire que les armes nucléaires laissaient le champ
libre aux guerres classiques.

Mises à part les guerres classiques qui ont été effectivement livrées

et dont plusieurs mettaient en jeu des affidés des superpuissances
nucléaires et ont été à juste titre qualifiées de «guerres par
procuration», le monde a été à plusieurs reprises au bord d'une guerre
nucléaire. Dans l'appendice à son ouvrage célèbre In Retrospect,

Robert McNamara, ancien secrétaire à la défense des Etats-Unis, développe
avec éloquence et faits à l'appui la thèse selon laquelle :

«l'expérience de la crise des missiles à Cuba en 1962 - et, en

particulier;-·ce-que--·1:-'on--a- appris --récemment--à ce...-suj·et ·-- montre
à l'évidence que tant que nous et les autres grandes puissances
posséderons de vastes stocks d'armes nucléaires, nous courrons
le risque de les voir utilisées» 2•

1Ruth Sivard, World Military and Social Expenditures, 1993, p. 21.

2
Robert McNamara, In Retrospect, p. 338. - 5 -

Ce qui amène M. McNamara à conclure que «dans toute 1-a mesure du
possible ... , nous devrions revenir à un monde exempt d'armes
nucléaires» 3•

L'argument selon lequel la dissuasion nucléaire apporte la stabilité

repose sur l'hypothèse 1) que les gouvernements agissent rationnellement;
2) qu'aucun gouvernement, agissant rationnellement, ne prendrait une
décision susceptible de déclencher des représailles nucléaires; et
3) qu'aucune guerre nucléaire ne serait probablement déclenchée à moins

qu'il ne s'agisse d'un choix délibéré. Ces hypothèses sont toutes trois
erronées :

1) Les gouvernements, à l'instar des individus, peuvent être soumis à

des impératifs psychologiques ou idéologiques susceptibles de l'emporter
sur les intérêts à long terme de leurs pays. L'attaque du Japon contre
Pearl Harbor, dont on était sûr qu'elle amènerait les Etats-Unis à entrer
en guerre contre le Japon, est souvent citée comme exemple de cette

irrationalité.

2) Pour le comité interarmes des chefs d'état-major des Etats-Unis,
on «ne saurait exclure la possibilité qu'un adversaire puisse être prêt à

prendre le risque d'une destruction ou de pertes disproportionnées en
suivant une ligne de conduite fondée sur une nécessité qu'il perçoit,
rationnellement ou tout à fait objectivement» 4 •

3) Il est fort possible qu'une arme nucléaire soit tirée
accidentellement, du fait par exemple de la défaillance d'un ordinateur
ou d'un ~auvais décodage de ses instructions, ou encore d'une méprise
causée par l'existence de systèmes de commandement et de contrôle

complexes. Une étude de ces systèmes aux Etats-Unis a été réalisée il y
a peu, qui conclut : «des pratiques de dissuasion provocatrices et
risquées, allant du ciblage stratégique au tir sur préavis à la
délégation préalable ont été mises au point sans qu'une surveillance
5
étroite ait été prévue» • La déposition faite au mois d'août dernier
devant une commission du Sénat des Etats-Unis par Bruce Blair, de la
Brookings Institution, ancien officier de l'armée de l'air et directeur
de projet à l'Office of Technology Assessment du Congrès des Etats-Unis

d'Amérique, renferme une analyse encore plus terrifiante du système russe
de déclenchement de l'arme nucléaire, qui est de plus en plus instable
(voir pièce jointe C) .

C'est pourquoi, «la dissuasion nucléaire ne résout rien en soi, si ce
n'est qu'elle tend à une poursuite de l'escalade, à une première frappe à
titre préventif ,--ou à--une-guerre ·-accident 6.-ll- -~ >----· -

3
Ibid., voir pièce jointe B.

4Le président du comité interarmes des chefs d'état-major, Doctrine for
Joint Nuclear Operations, US Department of the Army, 1993.

5The Bulletin of the Atomic Scientists, novembre/décembre 1995, p. 41.

6Kennedy, «A Critique of United States Nuclear Deterrence Theory»,

Brooklyn Journal of International Law, vol. 9, p. 66, 1983. - 6 -

Enfin, il est à noter que l'avantage offert par la dissuasion, quoi

qu'on en pense, est sans rapport avec les questions posées à la Cour. Si
la menace et l'emploi d'armes nucléaires sont illicites en soi, nulle
théorie de la dissuasion ne saurait les légitimer. Et mêmeau cas où une
telle légitimation serait possible, elle ne pourrait se fonder que sur un

scénario qui garantirait totalement et inconditionnellement le
non-recours à jamais aux armes nucléaires. Point n'est besoin d'ajouter
que pareil scénario ne saurait être sérieusement envisagé ni défendu dans
le monde dans lequel nous vivons.

4. Questions posées par M. Schwebel, Vice-Président, le
3 novembre 1995

Question

«Lorsqu'au paragraphe 23 de son exposé écrit relatif à la

question posée par l'Assemblée générale, le Mexique soutient, en
ce qui concerne l'interprétation du traité sur la
non-prolifération des armes nucléaires, que le traité envisage
la possession d'armes nucléaires comme une situation
«temporaire» faut-il comprendre que les armes nucléaires peuvent

être maintenues dans les arsenaux des cinq puissances nucléaires
jusqu'à la ~éalisatio du désarmement général et complet sous un
contrôle international efficace ?»
---- --------

Réponse

Non, l'emploi du mot «temporaire» signifie qu'en fait, les arsenaux
des cinq Etats dotés d'armes nucléaires déclarés contiendront des armes

nucléaires jusqu'à ce que celles-ci soient éliminées conformément à
l'obligation de négocier le «désarmement nucléaire» énoncée à
l'article VI du TNP. Cette obligation s'applique, qu'un traité de
désarmement général et complet ait été ou non conclu, en exécution de
l'obligation de négocier pareil traité énoncée dans la seconde partie

dudit article VI. Cette thèse découle du libellé mêmede l'article VI,
conçu comme suit :

«Chacune des parties au traité s'engage à poursuivre de
bonne foi des négociations sur des mesures efficaces relatives à

la cessati·on-ùe ·-la-course ··aux-·armements -nucléaires· .à·-une ,date
rapprochée et au désarmement nucléaire, et sur un traité dé
désarmement général et complet sous un contrôle international
strict et efficace.»

La première partie de cette disposition porte sur les négociations à
conduire sur des mesures efficaces destinées à mettre fin à la course aux
armements, c'est-à-dire à arrêter la mise au point d'armes nucléaires,
par exemple au moyen de la conclusion d'un traité d'interdiction complète

des essais nucléaires, et à parvenir au désarmement nucléaire,
c'est-à-dire à l'élimination des armes nucléaires. La seconde partie de
la disposition, séparée de la première par une virgule et introduite par - 7 -

une seconde préposition «sur», a trait aux négociations à mener sur un

traité de désarmement général et complet. Il existe donc : ~) une
obligation de négocier de bonne foi des mesures efficaces relatives à la
cessation de la course aux armements nucléaires et au désarmement
nucléaire, et 2) une obligation de négocier de bonne foi un traité de

désarmement général et complet. L'obligation de négocier le désarmement
nucléaire et l'obligation de négocier le désarmement général sont, à
l'évidence, distinctes.

Cette interprétation a été donnée par les Etats-Unis d'Amérique
lorsqu'ils ont présenté, conjointement avec l'Union -soviétique, le texte
du projet d'article VI, lequel a finalement été adopté avec un amendement
mineur. Le ~8 janvier ~986, le représentant des Etats-Unis d'Amérique,

Adrian S. Fisher, a expliqué que l'article VI constituait une
«affirmation solennelle de la responsabilité des Etats dotés de l'arme
nucléaire de rechercher des mesures efficaces en ce qui concerne la
cessation de la course aux armements nucléaires et le désarmement».
M. Fisher a ajouté - et ce sont là des propos d'une importance cruciale -

«De plus, cette disposition [article VI] n'assujettit pas la négociation
de telles mesures à la condition qu'elles soient incluses dans le cadre
d'un traité sur le désarmement général et complet.» (ENDC/PV.357.)

Ainsi que George Bunn, un des principaux négociateurs du TNP, l'a
expliqué, la pratique des parties après la conclusion du TNP confirme
cette interprétation (voir George Bunn, «Extending the Non-Proliferation
Treaty: Legal Questions Faced by the Parties in ~995», American Society
of International Law, Issue Papers on World Conferences No. 2, ~994,

p. ~9-26 (voir pièce jointe~ pour les pages pertinentes)). Le TNP a été
signé le ~er juillet ~968. Plus tard au cours de cet été-là, l'Union
soviétique, les Etats-Unis et d'autres pays présents à la conférence de
Genève ont donné un sens à l'article VI en convenant d'une liste de

mesures qui pourraient y être débattues sous un titre repris directement
du libellé de l'article VI : «mesures efficaces relatives à la cessation
de la course aux armements nucléaires à une date rapprochée et au
désarmement nucléaire». Au titre des mesures énumérées f.iguraient

«la cessation des essais, le non-recours aux armes nucléaires,
la cessation de la production de matières fissiles destinées à
la fabrication d'armes, la cessation de la fabrication d'armes
et la réduction et l'élimination ultérieure des stocks d'armes

nucléaires, la création de zones exemptes d'armes nucléaires,
etc.» [traduction du Greffe].

Cet ensemble de-me-sures ·"const·ituait -i-·premier --point·::de-.- .d~: ourdre

et ne comprenait pas la question d'un désarmement général et complet
- question qui faisait l'objet du quatrième point de l'ordre du jour
(voir rapport du comité des dix-huit puissances sur le désarmement à
l'Assemblée générale des Nations Unies et à la commission du désarmement

du 28 août ~968, ENDC/236). C'est ainsi que, selon l'interprétation
convenue du programme contenu implicitement à l'article VI, telle qu'elle
a été donnée juste après la signature du traité, les négociations sur
l'élimination des arsenaux nucléaires pouvaient se tenir dans le cadre du
«désarmement nucléaire» sans qu'il soit fait mention de la réalisation du

désarmement général. - 8 -

La séparation de l'obligation de négocier le désarmement nucléaire et
de l'obligation de négocier le désarmement général a été maintenue tout
au long des vingt-cinq années qui se sont écoulées depuis l'entrée en
vigueur du TNP en 1970, ainsi qu'en témoigne l'attitude des parties au
traité ·lors de la session extraordinaire de l'Assemblée générale des

Nations Unies consacrée au désarmement en 1978, dont les participants ont
reconnu que le programme concernant le désarmement nucléaire était
distinct de celui concernant les autres types de désarmement. Les
priorités en matière de désarmement à travers le monde sont énumérées au
paragraphe 45 du document final de la session extraordinaire, dans

l'ordre ci-après : armes nucléaires, puis autres armes de destruction
massive, puis armes classiques. Par ailleurs, les mesures à prendre à
propos de chacune de ces priorités sont analysées séparément aux
paragraphes 43 à 112 du programme d'action. Cette distinction entre le

désarmement nucléaire et le désarmement général a été réaffirmée en 1985
par la conférence des parties chargée de l'examen du. traité sur la
non-prolifération des armes nucléaires. Comme George Bunn le rappelle
(op. cit., p. 23), la déclaration finale de la conférence de 1985, en
renvoyant aux conclusions de la session extraordinaire de l'Assemblée

générale de 1978,

«montre que les parties au TNP conviennent de ce que l'objectif
de l'option zéro en matière d'armes nucléaires n'a pas à être
poursuivi uniquement dans le contexte du désarmement général et

complet. Dans la recommandation qu'ils ont faite à propos de
l'article VI, en 1985, les Etats parties au TNP ont repris, en
les approuvant, les conclusions de la session extraordinaire de
-1'-Assemblée générale de -19-7-8--consacrée au -désa~memenÈ ·en--------- ·
convenant par là qu'un «programme étalé» conduisant à

l'option zéro relevait de l'obligation contenue à l'article VI
relative au «désarmement nucléaire» et non uniquement de celle
relative au désarmement général et complet.» [Traduction du
Greffe.]

Cette année, le 6 avril 1995, peu après la conférence des parties au
traité sur la non-prolifération des armes nucléaires chargée d'examiner
le traité et la question de sa prorogation, la France, la Russie, le
Royaume-Uni et les Etats-Unis d'Amérique ont fait une déclaration à

propos du TNP à la conférence du désarmement, qui contient le
paragraphe suivant : «Nous réaffirmons solennellement notre engagement,
énoncé à l'article VI, de poursuivre de bonne foi des négociations sur
des mesures effectives relativement au désarmement nucléaire, qui demeure

notre objectif ultime.» [Traduction du Greffe.] Il n'est établi ni dans
ce paragraphe ·ni-ail±eurs··"dans--·la- déclaration--de-relati-on ··entre la
réalisation du désarmement nucléaire et la réalisation·du désarmement
général (CD/1308, 7 avril 1995 (voir pièce jointe 2)).

Enfin, dans les principes et objectifs de la non-prolifération et du
désarmement nucléaires adoptés par la conférence de 1995 des parties au
traité sur la non-prolifération des armes nucléaires chargée d'examiner
le traité et la question de sa prorogation, la distinction est maintenue
entre le désarmement nucléaire et le désarmement général

(NPT/CONF.1995/32 (partI), p. 9-12 (voir pièce jointe 3)). Par exemple,
on peut lire au paragraphe 3 de ce texte que «les Etats dotés d'armes
nucléaires réaffirment, comme indiqué à l'article VI, qu'ils sont résolus - 9 -

à poursuivre de bonne foi des négociations sur des mesures efficaces

relatives au désarmement nucléaire». Il n'est nullement fait mention,
dans ce paragraphe, de désarmement général. Dans le cadre d'un
«programme d'action» dont la réalisation «est importante pour donner
pleinement effet aux dispositions de l'article VI», le paragraphe 4
énonce la mesure suivante :

«La volonté des Etats dotés d'armes nucléaires d'aller
systématiquement et progressivement de l'avant afin de réduire
les armes nucléaires dans leur ensemble, puis de les éliminer,

et la volonté de tous les Etats d'Œuvrer pour le·désarmement
général et complet sous un contrôle international strict et
efficace.»

Ce libellé illustre la séparation entre le désarmement nucléaire et le

désarmement général établie à l'article VI du TNP et confirmée par
l'historique des négociations et la pratique et les déclarations
subséquentes des Etats parties.

Prétendre que le désarmement_nucléaire est tributaire du désarmement

classique, c'est effacer la démarcation que la conscience de l'humanité a
tracée entre les armes classiques et les armes de destruction massive.
C'est traiter avec dérision l'obligation de parvenir à l'élimination des
armes nucléaires - les pires des armes de destruction massive - dans la
mesure où cela revient à faire dépendre l'exécution de cette obligation

d'un processus pour lequel le monde n'est pas encore prêt, à savoir le
désarmement classique complet. Contrairement à ce qui est le cas pour
les armes classiques, l'élimination des armes de destruction massive, y
compris les armes nucléaires, fait sur le plan international, depuis des

décennies, l'objet de propositions sérieuses, de négociations et de
conventions, dont le protocole de Genève de 1925 concernant la
prohibition d'emploi, à la guerre, de gaz asphyxiants, toxiques ou
similaires et de moyens bactériologiques, la proposition
Acheson-Lilienthal de la fin des années quarante tendant à mettre en

place un organisme international chargé de contrôler l'ensemble des
matières nucléaires susceptibles d'être utilisées pour la fabrication
d'armes et les conventions sur les armes biologiques et chimiques
conclues ces dernières années. Aussi terrifiant que cela puisse paraître

pour certains champions de la paix ou aussi commode que cela puisse
paraître pour d'autres en tant que prétexte pour éviter la réduction et
l'élimination des armes nucléaires, il n'existe pas nécessairement de
relation entre le désarmement nucléaire et le désarmement général
complet, et d'ailleurs aucune relation de la sorte ne doit être établie

car cela reviendrait -à-réduire à ·néant···les· perspecti"Ves ··d·• limination des
armes nucléaires dans un délai raisonnable.

Question

«Lorsqu'au paragraphe 26 de son exposé écrit le Mexique
note que les obligations touchant le désarmement nucléaire
restent «valables indéfiniment tant qu'elles n'auront pas été

pleinement accomplies», faut-il entendre par là que jusqu'à - 10 -

l'abolition des armes nucléaires, la possession, la menace et
l'emploi d'armes nucléaires dans certaines circonstances peuvent
ne pas être interdits ?»

Réponse :

Les présentes requêtes pour avis consultatif soumises à la Cour ne
concernent pas explicitement la possession d'armes nucléaires. Pour ce

qui est de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires, rien dans le
traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) ne soustrait
de quelque manière que ce soit les Etats dotés d'armes nucléaires parties
au traité à l'obligation de respecter les règles et principes du droit
des conflits armés, du droit de l'environnement, des droits de l'homme,

de la Charte des Nations Unies et des principes d'humanité qui consacrent
l'illicéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires en toute
circonstance. Qui plus est, la mention faite au préambule du TNP des
«dévastations qu'une guerre nucléaire ferait subir à l'humanité entière»
et l'obligation de négocier de bonne foi le désarmement nucléaire posée à

l'article VI sont tout à fait compatibles avec l'illicéité de la menace
ou de l'emploi d'armes nucléaires, voire l'étaient.

Au cas où la Cour souhaiterait se pencher sur la question de la
licéité de la possession d'armes nucléaires, il est à noter que le TNP

reconnaît le fait que les arsenaux des Etats dotés d'armes nucléaires
parties au traité continueront de contenir des armes nucléaires tant que
ces armes n'auront pas été éliminées conformément à l'obligation énoncée
à l'article VI-du--trai-té et- aux--aut.res--r-ègles-- et;~principes~du-dr --i-­ t.--
international. Il reste que rien dans le traité ne permet de tenir ce

fait pour quelque prétention à faire valoir ou pour un droit. Bien au
contraire, le traité n'admet la possession d'armes nucléaires dans
l'attente de leur élimination que d'une façon indirecte, en définissant
un Etat doté d'armes nucléaires comme étant un Etat qui a fabriqué et a

fait exploser une arme nucléaire avant le 1er janvier 1967 (art. IX,
par. 3) et en imposant certaines obligations à ces Etats, par exemple
celle de ne transférer «à qui que ce soit» des armes nucléaires (art. I).
En revanche, l'interdiction de la possession d'armes nucléaires par les
Etats parties qui ne répondent pas à la définition d'un Etat doté d'armes

nucléaires, énoncée directement et expressément à l'article II, constitue
une règle qui consacre l'illicéité de la possession d'armes nucléaires et
qui est applicable à la grande majorité des Etats. Compte tenu de
l'illicéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires et de
l'obligation touchant le désarmement nucléaire, visée à !•.article VI,

applicable --aux--Etats--dotés· ·d·•-armes nucléaires,··· J:·•·±llicé±té --de la
possession d'armes nucléaires est, semble-t-il, devenue une règle
universelle, encore que des Etats qui possèdent des armes nucléaires ne
s'y soient toujours pas encore conformés. - ~~ -

Question posée par M. Schwebel, Vice-Président, le 3 novembre 1995

Question :

Au paragraphe 45 de son exposé, le Mexique soutient que la

résolution 984 (~995) du Conseil de sécurité et l'intention des Etats
parties au traité sur la non-prolifération «reconnaissent implicitement
l'illicéité de la menace et de l'emploi des armes nucléaires» contre un
Etat non doté lui-même de ces armes et la déclaration mexicaine poursuit
en ces termes : «Si cette menace ou cet emploi avait été licite, il eût

été bien sûr inutile de donner des assurances de sécurité négatives pour
protéger les Etats non dotés d'armes nucléaires.» Pourquoi cette
phrase ? Les Etats renoncent-ils à des possibilités d'action uniquement
parce qu'elles sont illicites ?

Réponse :

Non, en règle générale, les Etats ne renoncent pas à des possibilités

d'action uniquement parce qu'elles sont illicites. Il reste que maints
traités, et peut-être la majorité des traités, par lesquels des Etats
s'imposent des restrictions à eux-mêmes et s'imposent mutuellement des
restrictions reposent sur des principes généraux de droit et les
confirment ou les codifient. La conclusion de pactes de non-agression,

par exemple, était monnaie courante dans les relations internationales
bien après que l'illicéité de l'agression eut été consacrée dans le droit
coutumier.

C'est dans ce sens que la déclaration du Mexique devrait être

interprétée, autrement dit : «Il existe une règle coutumière qui consacre
l'illicéité de l'emploi et de la menace de l'emploi des armes nucléaires;
son respect est garanti par les assurances de sécurité négatives.»

Question posée par M. Schwebel, Vice-Président, le 6 novembre 1995

Question :

Le distingué représentant de la République islamique d'Iran a avancé
l'argument selon lequel les résolutions de l'Assemblée générale déclarant
que l'utilisation-· d •armes-nucléaires ···constitue· une vio-lation de la Charte

des Nations Unies et un crime contre l'humanité sont une interprétation
de la Charte des Nations Unies faisant autorité.

Si la déclaration de l'Assemblée générale relative aux principes du

droit international touchant les relations amicales et la coopération
entre les Etats également invoquée par l'Iran avait été adoptée, non
comme elle l'a été par consensus et sans qu'un seul membre s'y oppose,
mais par un vote dans lequel quelque vingt Etats, y compris des membres
permanents du Conseil de sécurité, auraient voté contre ou se seraient

abstenus en contestant que la déclaration touchant les relations amicales
constituait une interprétation de la Charte faisant autorité, ladite - 12 -

déclaration pourrait-elle être considérée comme une interprétation de la

Charte faisant autorité ? Dans la négative, comment les résolutions qui
sont citées concernant les armes nucléaires peuvent-elles être
considérées de cette manière ?

Réponse :

Dans son exposé oral devant la Cour, l'Iran a fait valoir ce qui
suit.

Bien que les résolutions de l'Assemblée générale soient d'habitude
perçues comme ayant un caractère de recommandation, il est évident que
les déclarations ayant pour but d'interpréter les dispositions de la

Charte, ainsi que celles qui servent à énoncer des principes de droit
international, ne constituent pas de simples recommandations.

La résolution 1653 adoptée par l'Assemblée générale en 1961 mérite
particulièrement d'être mentionnée ici. Le paragraphe 1 A) de cette

résolution déclare que l'emploi des armes nucléaires et thermonucléaires
est contraire à l'esprit, à la lettre et au but des Nations Unies et
qu'elle constitue, à ce titre, une violation directe de la Charte des
Nations Unies. De toute évidence, cette affirmation est également plus
qu'une simple recommandation, car elle repose sur les dispositions de la

Charte (compte rendu non corrigé de l'audience du 6 novembre 1995,
p. 26-27; trad. fr., p. 13). L'Iran a déclaré en outre à propos de
l'existence d'une opinio juris que les résolutions de l'Assemblée
générale «de toute évidence ... reflètent le fait~que les gouvernements-­
tiennent le recours aux armes nucléaires en aversion» (ibid., p. 45;

trad. fr., p. 33).

Pour l'Iran donc, les résolutions de l'Assemblée générale sont,
semble-t-il, plus que de simples recommandations et devraient jouer un

grand rôle dans l'interprétation de la Charte et la détermination du
droit coutumier. Cette position est inattaquable. Le fait que les Etats
dotés d'armes nucléaires et leurs alliés proches aient voté contre les
résolutions de l'Assemblée générale ou se soient abstenus lors de leur
vote et continuent à posséder des armes nucléaires et à déclarer que

celles-ci peuvent être utilisées n'est pas un argument concluant.

Il est à noter à cet égard que, s'il est vrai que 20 voix contre
peuvent être considérées comme un chiffre élevé, nombre de résolutions

par lesquelles l'Assemblée générale a qualifié l'emploi d'armes
nucléaires de ·-crime contre· l'trumanité ;- de violation de "ia Charte des
Nations Unies et/ou de violation du droit international ont·été :adoptées
par une majorité que l'on pourrait qualifier d'écrasante : par exemple 72
contre 4 (résolution 2936 de 1972), 103 contre 18 (résolution 33/71B de

1978), 112 contre 16 (résolution 34/83C de 1979), 113 contre 19
(résolution 35/152D de 1980), 121 contre 19 (résolution 36/92 de 1981),
117 contre 17 (résolution 37/100C de 1982), 95 contre 19 (résolution
38/75 de 1983), 128 contre 17 (résolution 39/63H de 1984), 126 contre 17
(résolution 40/151F de 1985), 132 contre 17 (résolution 41/60F de 1986),

135 contre 17 (résolution 42/39C de 1987), 133 contre 17 - 13 -

(résolution 43/76E de 1988), 134 contre 17 (résolution 44/117C de 1989),
125 contre 17 (résolution 45/59B de 1990), 122 contre 16

(résolution 46/37B de 1991), 126 contre 21 (résolution 47/53C de 1993) et
120 contre 23 (résolution 48/76B de 1993) .

De même, s'il est vrai que la répétition en soi ne saurait donner
naissance à une norme contraignante, ainsi que la France l'a fait

observer dans son exposé oral, une répétition constante s'étendant sur
une longue période porte certainement. «La répétition répond à
l'affirmation selon laquelle une résolution ne reflète qu'une majorité
temporaire qui peut rapidement changer.» (Sloan, United Nations General

Assembly Resolutions in Our Changing World, 1991, p. 112.)

Le fait qu'un petit nombre d'Etats adoptent un comportement illicite
ne saurait constituer une négation du droit. Ainsi que la Cour l'a
déclaré dans l'affaire du Nicaragua,

«La Cour ne pense pas que, pour qu'une règle soit
coutumièrement établie, la pratique correspondante doive être
rigoureusement conforme à cette règle.» (Nicaragua c.
Etats-Unis d'Amérique, C.I.J. Recueil 2986, par. 186.)

«Une règle coutumière peut naître nonobstant l'opposition
d'un Etat, voire peut-être d'un petit nombre d'Etats, à
condition d'atteindre par ailleurs le degré de généralité
nécessaire.» (Waldeck, General Course on Public International

law, p. 87.)

Dans le cas des armes nucléaires, le degré de généralité nécessaire est
atteint en ce qui concerne le non-recours à ces armes depuis 1945,

l'engagement de ne pas les utiliser pris dans le cadre des assurances de
sécurité négatives et de la création de zones exemptes d'armes
nucléaires, l'interdiction de leur possession pour la grande majorité des
Etats, telle qu'elle est énoncée dans le traité sur la non-prolifération
des armes nucléaires, et le fait que depuis plus de trente ans, une forte

majorité d'Etats déclarent que leur emploi est illicite. En out~e,
s'agissant de questions qui présentent un intérêt crucial pour
l'humanité, se dissocier de l'élaboration d'une norme et ne pas la
respecter dans la pratique ne saurait empêcher l'avènement d'une règle
coutumière ou d'une interprétation acceptée de la Charte.

Comme M. Schachter l'a fait observer :

«Il·· sera-it ·u.ti·le·, dans· ·de nombreux ·cas; ·de·..déterminer si la

pratique des Et-ats, avant et après l'adoption de la résolution,
s'éloigne de la norme établie au point de la priver de toute
valeur en tant que coutume ou interprétation convenue. Le
faire, autrement dit déterminer si une pratique incompatible

porte atteinte à un principe affirmé, peut amener à établir
entre les règles des distinctions fondées sur des jugements de
valeur quant à leur portée. Par exemple, une règle jugée
essentielle pour la paix (comme le principe de non-ingérence) ou
une règle exprimant un principe moral fondamental

universellement admis (par exemple l'interdiction de la torture)
conserveraient toute leur valeur malgré une pratique contraire. - 1.4 -

En revanche, une règle touchant la délimitation de la
juridiction ou les droits des Etats dans des zones situées

au-delà du territoire national (par exemple les déclarations sur
l'exploitation des fonds marins ou sur l'espace
extra-atmosphérique) ne devrait probablement pas être réputée
valable au cas où le comportement des Etats irait massivement à

son encontre.» (International Law in Theory and Practice,
RCADI, t. 1.78 (1.982-V), p. 1.21..)

Peu contesteront que la règle en jeu en l'espèce entre dans la première
des catégories déterminées par M. Schachter.

L'Afrique du Sud offre un exemple d'un Etat non consentant qui
n'était pas exonéré du respect d'une règle coutumière : elle s'était
dissociée avec constance de la règle interdisant la discrimination

raciale alors que celle-ci était en voie d'élaboration et après qu'elle
eut été universellement acceptée.

Quand une règle donnée énoncée dans une ser~e de résolutions
acquiert-elle force obligatoire ? C'est là une question à laquelle il

est difficile de répondre avec précision. Dans le cas qui nous occupe,
nous pensons que le seuil normatif a été franchi depuis longtemps. Nous
renvoyons aussi la Cour à l'exposé oral fait au nom du Samoa par
M. Clark, le 1.3 novembre 1.995.

Enfin, à part la question de l'existence d'une règle coutumière
s'appliquant expressément aux armes nucléaires, il est à noter que les
politiques de certains Etats do_tés_d' armes nucléaires n'affectent _e_n_
aucune manière la validité des règles et principes généraux du droit
humanitaire, du droit relatif aux droits de l'homme et du droit de

l'environnement, lesquels, comme il a été démontré, interdisent la menace
ou l'emploi d'armes nucléaires.

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Réponses communes de la Malaisie et de la République du Zimbabwe aux questions posées par les juges

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