Réponses de la République de Serbie aux questions posées par MM. les juges Koroma, Bennouna et Cançado Trindade au terme de la procédure orale (traduction)

Document Number
17896
Document Type
Date of the Document
Document File
Document

Réponses de la République de Serbie aux questions posées aux participants à la procédure
orale par MM. les juges Koroma, Bennouna et Cançado Trindade

1. Q UESTION POSÉE PAR M. LE JUGE K OROMA

La question se lit comme suit :

«Il a été affirmé que le droit internatio nal n’interdit pas qu’un territoire fasse
sécession d’un Etat souverain. Les participan ts à la présente procédure pourraient-ils
indiquer à la Cour quels sont, selon eux, les éventuels principes et règles de droit

international qui autoriseraient, en dehors d’un contexte colonial, un territoire à faire
sécession d’un Etat souverain sans le consentement de ce dernier?» (CR2009/33,

p. 23.)

1.1. En droit international contemporain, la sécession hors contexte colonial constitue un
mode très exceptionnel de création d’Etats. Il ressort de la pratique que, depuis la création de
l’Organisation des Nations Unies, dans tous les cas de sécession réussie ayant abouti à la naissance

d’un nouvel Etat, l’Etat souverain avait donné so n consentement, soit de façon plus ou moins
concomitante à la tentative de sécession (comme dans le cas des Etats baltes et de l’Erythrée) , soit 1
2
après celle-ci (comme dans le cas du Bengladesh) . Comme chacun sait, à l’exception du cas
particulier des Etats baltes, les républiques de l’ Union soviétique ont obtenu leur indépendance par
voie d’accord entre les parties concernées, et la dissolution de la République fédérative socialiste

de Yougoslavie a été considérée par la communauté internationale comme un cas de dissolution de
l’Etat prédécesseur et non de sécession . Dans d’autres cas, la séparation a résulté d’un processus

interne dans le cadre duquel l’Etat parent et l’une de ses entités étaient convenus de la4séparation de
cette dernière (comme dans le cas de la séparation de Singapour de la Malaisie ou de la séparation
du Monténégro de la Communauté étatique de Serb ie-et-Monténégro); ils sont parfois considérés
5
comme des cas de dévolution .

1.2. La réponse à la question posée est double. Premièrement, il n’existe, en droit
international, aucune règle spécifique autorisant un territoire à faire sécession sans le consentement

de l’Etat souverain. Au cours de l’instance, il a notamment été démontré que la do6trine de la
«sécession à titre de remède» n’était pas une règle du droit international . Pour que leurs
arguments soient cohérents du point de vue de la logique, les par ticipants qui soutiennent que le

droit international serait «neutre» en matière de sécession le reconnaissent nécessairement de

1 Les Etats baltes ont en effet réaffirmé leur indépendance en août1991 et l’Unisoviétique l’a reconnue le
6septembre1991. L’Ethiopie a accepté la tenue d’un référendum qui a abouti à l’indépendance de l’Erythrée
le 4 mai 1993 (voir Commission des réclamations entre l’Erythrée et l’Ethiopie, sentence partielle (mauvais traitements

des populations civiles (réclamations del’Erythrée), 17 décembre 2004, disponible sur le site internet de la Cour
permanente d’arbitrage à l’adresse http ://www.pca-cpa.org/showpage.asp?pag_id=1151, par.7). Ce dernier cas peut
également être vu comme un cas de dévolution.
2
Le Pakistan a accepté la sécession du Bengladesh le 2 février 1974.
3
Pour l’Union soviétique, voir l’accord établissant la Communauté des Etats in dépendants (os92), 31ILM143,
et le protocole d’Alma Ata en date du 21 décembre 1991, (1992) 31 ILM 147. Pour la RFSY, voir les avis n 1 et 8 de la
conférence sur la Yougoslavie, commissi on d’arbitrage, 29novembre1991, 92 ILR162 et 4juillet1992, 92 ILR 194,
respectivement; et les résolutions du Conseil de sécurité757 (1992), 777 (1992) et 1326 (2000), ainsi que la
résolution 55/12 de l’Assemblée générale.
4
Souveraineté sur Pedra Branca/Pulau Batu Puteh, Middle Rocks et Sout h Ledge (Malaisie/Singapour), arrêt
du 23 mai 2008, par. 29 et 185.
5 e
J. Crawford, The Creation of States in International Law (2 éd., 2006), p. 330.
6
CR2009/24 (Kohen, Serbie), p.80-83, par.11-16; CR2009/29 (Xue, Chine), p.34-36, par.19-26;
CR2009/30 (Gevorgian, Fédération de Russie), p.43-44, pa r. 19-22 ; CR 2009/30 (Escobar Hernández, Espagne),
p. 17-19, par. 37-44. - 2 -

manière implicite. Deuxièmement, dans certaines situations tout à fait exceptionnelles, la sécession
peut être autorisée dans le respect des règles et principes généraux applicables du droit

international.

1.3. La pratique internationale n’offre qu’un nombre très limité d’exemples de telles
situations. Le premier d’entre eux se présente lorsque des entités se séparent d’un Etat, à condition

qu’elles aient antérieurement été incorporées de manière illicite à l’Etat en question pour une
certaine durée. Tel était, par exemple, le point de vue qui prévalait en ce qui concerne la situation
des Etats baltes lorsque ceux-ci ont commencé à dé clarer leur indépendance en1990/1991. Un

deuxième exemple se présente lorsqu’un territoire a ét é intégré à un Etat en vertu d’une résolution
des NationsUnies sous certaines conditions, et lorsque ces conditions n’ont, par la suite, pas été

respectées, ce qui justifie que l’entité inco rporée fasse sécession de l’Etat avec l’appui des
Nations Unies. Ainsi de l’Erythrée : c’est un organe des Nations Unies (l’Assemblée
générale) ⎯ qui avait le pouvoir de décider du sort de ce territoire (en vertu de l’article 23 du traité
7
de paix de 1947 conclu avec l’Italie ) — qui a décidé d’intégrer l’Erythrée à l’Ethiopie à condition
qu’elle demeure autonome au sein d’un Etat fédéré 8 . Après une longue période—qui a duré

plusieurs décennies — au cours de laquelle il n’ a pas été satisfait aux conditions énoncées dans la
résolution 390 (V) de l’Assemblée générale, les Nations Unies ont participé au processus final qui a
abouti à la tenue d’un référendum par lequel la population érythréenne a opté pour l’indépendance.

1n.4. troisième cas de figure dans lequel le droit international peut autoriser la sécession

est celui où cette possibilité est prévue par la c onstitution de l’Etat parent pour certaines de ses
entités. Tel est actuellement le cas de l’Ethiopie , de l’Ouzbékistan 10 et de Saint-Kitts-et-Nevis . 11

Il peut également arriver que des accords internes prévoient la possibilité d’une séparation, comme
dans le cas du Soudan , et par le passé, de l’Union sovi étique vis-à-vis de ses républiques , de la 13
RFSY vis-à-vis de ses six nations constitutives 14 et de la Communauté étatique de

7
Voir Différend territorial (Jamahiriya arabe libyenne/Tchad), arrêt, C.I.J. Recueil 1994, p. 19, par. 34.
8
Résolution 390 (V) de l’Assemblée générale, dont l’ar ticle premier dispose que «[l]’Erythrée constituera une
entité autonome, fédérée avec l’Ethiopie sous la souveraineté de la couronne d’Ethiopie».
9Art. 47 de la constitution de l’Ethiopie, disponible en angl ais sur le site Internet du parlement de la République

fédérale démocratique d’Ethiopie à l’adresse http://www.ethiopar.net Le paragraphe2 de l’article47 dispose que «Les
nations, nationalités et peuples des Etats énumérés au paragraphe 1 du présent article ont le droit de créer à tout moment
leur propre Etat». Ce droit peut être exercé conformément aux procédures énoncées au paragraphe 3 de l’article 47.
10
L’article 74 de la constitution de l’Ouzbékistan dispose que «[l]a république du Karakalpakstan a le droit de se
séparer de la République d’Ouzbékistan si le peuple du Karakalpakstan en exprime le souhait par voie de référendum»,
disponible à l’adresse http://www.umid.uz/Main/Uzbekistan/Constitution/constitution.html.
11 o
L’article 113 de la Constitution de la Fédération de Saint-Kitts-et-Nevis de 1983, 1983 n 881, disponible sur le
site Internet du cabinet du premier ministre de Saint-Kitts-et-Nevis à l’ adresse http://www.cuopm.com . Cet article
dispose que «[l]e parlement de l’île de Nevis peut décider que l’île de Ne vis cesse d’être fédérée à l’île de
Saint-Christophe et que, par conséquent, la présente constitution ne produira plus se s effets dans l’île de Nevis.» Cela
doit être accompli dans le respect d’autres dispositions de l’article 113.

12Protocole de Machakos en date du 20juillet2002, ch ap.premier sur l’accord de paix globale entre le
Gouvernement du Soudan et le mouve ment/armée populaire de libération du Soudan du 9janvier2005. Voir
l’arbitrageAbyei, sentence finale du 22juillet2009 , disponible sur le site de la Cour permanente d’arbitrage à l’adresse

suivante : http://www.pca-cpa.org/showpage.asp?pag_id=1306, p. 244, par. 706.
13L’article 72 de la constitution de 1977 de l’URSS dispose que «Chaque république de l’Union a le droit de faire

librement sécession de l’URSS.»
14Le principe fondamental I de la Constitution de la RFSY de1974 stipulait que «[l] es nations de Yougoslavie,
sur la base du droit de chaque nation à l’autodéterminationy compris le droit de sécession...» (exposé écrit (EE) de la

Serbie, annexe 52). Ainsi que la Serbie l’a déjà indiqué lors de la procédure écrite, les Albanais du Kosovo n’étaient pas
une nation constitutive de la RFSY (EE de la Serbie, p. 72-76, par.173-187). Dès lors, les provinces autonomes du
Kosovo et de la Voïvodine n’avaient pas, en vertu de la constitution de 1974, le droit de faire sécession. - 3 -

15
Serbie-et-Monténégro vis-à- vis des deux entités constitutives . La reconnaissance, au niveau
national, du fait qu’une entité cons titutive peut, d’un point de vue juridique, se séparer de l’Etat ne
relève pas exclusivement du droit interne. Le droit international doit tenir compte de ce

que certaines législations nationales reconnaissent à des entités constitutives de l’Etat la
possibilité de faire sécession ou d’exercer leur dr oit à l’autodétermination externe. Dans le
cas ⎯hypothétique— où de telles dispositions cons titutionnelles reconnaissant le droit de faire

sécession ne seraient pas respectées par l’Etat en question, la sécession pourrait être acceptée au
niveau international en vertu de l’application du droit à l’autodé termination aux entités qui avaient
initialement été reconnues par l’Etat souverain lui-même comme jouissant d’un tel droit, droit qui a

un effet international.

1.5. Il apparaît clairement que la déclaration unilatérale d’indépe ndance des institutions
provisoires d’administration autonome du Kosovo ne correspond à aucune des circonstances
exceptionnelles susmentionnées. Bien au contraire, ainsi que cela a été démontré au cours de

l’instance, il s’agit d’un cas de non-conformité au droit international.

2. Q UESTION POSÉE PAR M. LE JUGE B ENNOUNA

La question se lit comme suit :

«Est-ce que les auteurs de la décl aration unilatérale d’indépendance des
institutions provisoires d’administration autonome du Kosovo ont fait auparavant
campagne, lors de l’élection de novembre2007 de l’assemblée des institutions

provisoires d’administration autonome du Kosovo, sur la base de leur volonté de
déclarer unilatéralement, une fois élus, l’ indépendance du Kosovo, ou bien ont-ils, au
moins, présenté à leurs électeurs la décl aration unilatérale d’indépendance du Kosovo

comme l’une des alternatives de leur action future ?» (CR 2009/33, p. 24.)

2.1. En réponse à la question de M.le juge Bennouna, la Serbie re lève tout d’abord que
l’élection de l’Assemblée du Kosovo s’est tenue le 17 novembre 2007, à la suite d’une décision du
représentant spécial du Secrétaire général pour le Ko sovo en date du 31 août 2007. La décision de

tenir des élections a été annoncée après une renc ontre entre le représentant spécial et les
représentants des Albanais du Kosovo dans le cadre des négociations relatives au statut, rencontre
au cours de laquelle il avait été convenu que le processu s relatif au statut était la «priorité absolue»

et que «la condition posée à la tenue d’élections était que les partis p16itiques s’abstiennent de tout
acte qui puisse porter préjudice au processus relatif au statut final» .

17
2.2. Les élections, auxquelles seulem ent 42,8% des électeurs ont participé , se sont
déroulées sous la surveillance de la mission d’observation des élections du Conseil de l’Europe («la
mission d’observation»), invitée par la MINUK à piloter une opération d’observation internationale
18
indépendante du processus électoral . Un compte rendu détaillé des élections du mois de

15
Article 60 de la charte constitutionnelle de la Communauté étatique de Serbie-et-Monténégro (EE de la Serbie,
annexe 58).
16Voir «SRSG announces elections da te for Kosovo», communiqué de pr esse de la MINUK, 31août2007,

UNMIK/PR/1692, disponible en anglai s à l’adress:ehttp://www.unmikon line.org/DPI/PressRelease.nsf/0/
2494F176CFDFB541C1257348005BAD33/$FILE/pr1692.pdf.
17Voir le rapport du Secrétaire général sur la Mission in térimaire d’administration des Nations Unies au Kosovo,
document Nations Unies S/2007/768 (3 janvier 2008), par. 3.

18Mission d’observation des élections du conseil de l’EuropeV au Kosovo (MOECEV), rapport final,
28 mars 2008, par. 1, disponible à l’adresse : http://www.coe.int/t/dc/press/news/CEEOM_kosovo_%20FR.pdf - 4 -

19
novembre 2007 figure dans les rapports de la missi on d’observation et des observateurs du
congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe (qui ont également participé à la
mission d’observation).

2.3. Dans sa partie pertinente aux fins de la question posée par M.le jugeBennouna, le

rapport des observateurs électoraux du congrès se lit comme suit :

«9. … Les entités politiques se sont effo rcées d’atteindre la population par le

biais de la télévision et de la presse écrite. La campagne s’est particulièrement
intéressée à des questions politiques, plutôt qu’à des personnalités politiques ou à la

grande question du statut futur de la province ⎯qui n’a finalement pas pesé trop
lourdement sur la campagne.

10. La campagne des élections locales a principalement porté sur les questions
telles que l’eau, l’électricité, la constructi on illicite, l’infrastructure et l’emploi. La
campagne des élections législatives a repris ces idées mais s’est aussi intéressée aux

questions de la santé, de l’éducation, de la corruption et des autoroutes.

Les partis politiques ont signé un mémorandum d’accord le 5 octobre 2007 pour

maintenir la «question du statut» en dehors du débat électoral, et cette initiative s’est
avérée très efficace. Contrairement aux campagnes précédentes, on a vu peu de

drapeaux albanais à l’image de l’aigle à deux têtes flotter dans la ville. On peut en
déduire que le réalisme de la campagne se mblait refléter les préoccupations du peuple
kosovar.» 20

2.4. Ce compte rendu est confirmé par le rapport final de la mission d’observation des

élections :

«Comme souhaité [par] la communauté internationale, la campagne politique a

porté en grande partie sur des questions liées à l’emploi, l’éducation, l’éc21omie, la
santé et à la vie locale, et beaucoup moins sur le statut du Kosovo.»

2.5. Les éléments ci-dessus attestent que les élections du mois de novembre2007
devaient, dès le départ, être dissociées autant que possible du processus

relatif au statut final et, en particulier, ne devaient pas l’entraver. Les dirigeants
des partis politiques du Kosovo l’avaient accepté lors de leur rencontre
avec le représentant spécial du Secrétaire général en date du 31 août 2007 . 22

19
Voir ibid. et élections municipales et législatives au Kosovo (Ser bie) observées les 17novembre
et8décembre2007, exposé des motifs, commission permanente, congrès des pouvoirs locaux et régionaux,
doc. CG (14)34REP, 31 janvier 2008, disponible à l’adresse https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?Ref=CG(14)34
REP&Language=lanFrench&Ver=original&Site=COE&BackColorInternet=DBDCF2&BackColorIntranet=FDC864&Ba
ckColorLogged=FDC864.

20Elections municipales et de l’assemblée du Kosovo (Serbie) observées les 17novembre et8décembre2007,
supra note 19, par. 9-10.

21Mission d’observation des élections du conseil del’Europe V au Kovoso (MOECE V), rapport final, supra
note 18, par.106.
22
Voir le communiqué de presse de la MINUK intitu lé «SRSG announces elections date for Kosovo»,
31 août 2007, supra note16, et le rapport du Secrétaire général sur la mission d’admini stration intérimaire des
Nations Unies au Kosovo, Nations Unies, doc. S/2007/582 (28 septembre 2007), par. 4. - 5 -

En signant le mémorandum d’accord du 5octobre2007 23, ils s’étaient en outre engagés à

«maintenir la «question du statut» en dehors du débat électoral».

3. QUESTION POSÉE PAR M. LE JUGE C ANÇADO TRINDADE

La question se lit comme suit :

«La résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité fait référence, à l’alinéa a) de

son paragraphe 11, à «l’i nstauration au Kosovo d’une autonomie et d’une
auto-administration substa ntielles», compte pleinement tenu des accords de
Rambouillet. De votre point de vue, que faut-il entendre par ce renvoi aux accords de

Rambouillet? Celui-ci a-t-il une incidence sur les questions d’autodétermination, de
sécession ou les deux? Dans l’affirmative, à quelles conditions un peuple devrait-il
satisfaire pour pouvoir prétendre au statut d’Etat, dans le cadre du régime juridique
établi par la résolution 1244 (1999) du Conse il de sécurité? Et quelles sont, en droit

international général, les conditions factuell es devant au préalable être remplies, pour
constituer un «peuple», et pouvoir prétendre à la qualité d’Etat ?» (CR 2009/33, p. 24.)

A. Sens du renvoi figurant au paragraphe 11 a) de la résolution 1244 (1999) du Conseil de
sécurité faisant référence à une autonomie et une auto-administration substantielles
au Kosovo compte pleinement tenu des accords de Rambouillet

I. Contenu du paragraphe 11 a)

3.1. Le paragraphe11 a) de la résolution1244(1999) du Conseil de sécurité des
Nations Unies dispose que :

« Le Conseil de sécurité,

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

11. Décide que les principales responsabilités de la présence internationale

civile seront les suivantes :

a) faciliter, en attendant un règlement dé finitif, l’instauration au Kosovo d’une

autonomie et d’une auto-administration s ubstantielles, compte pleinement tenu
de l’annexe 2 et des accords de Rambouillet (S/1999/648)».

3.2. Le Conseil de sécurité avait donc chargé la présence civile internationale, à savoir la
MINUK, de promouvoir une autonomie et une auto-a dministration substantielles au Kosovo. Ce
faisant, la MINUK devait «tenir pleinement compte» (outre l’annexe 2 de la résolution 1244 (1999)
du Conseil de sécurité) des accords de Rambouillet.

23Voir élections municipales de l’assemblée du Kosovo (Serbie), observées les 17 novembre et 8 décembre 2007,

supra note 19, par. 10. - 6 -

3.3. Il convient tout d’abord de relever que, comme la Serbie l’a déjà démontré dans ses
écritures , les notions d’autonomie et d’auto-administration substantielles figurant au

paragraphe 11 a) de la résolution1244(1999) ne sont, et ne sauraient être, synonymes
d’indépendance.

3.4. Deuxièmement, étant donné qu’aucun règlemen t définitif au sens de la
résolution 1244 (1999) du Conseil de sécur ité en général, et de son paragraphe 11 a) en particulier,
25
n’a été trouvé à ce jour , le paragraphe 11 a) de la résolution1244(1999) du Conseil de sécurité
demeure applicable et continue de régir le statut juridique du Kosovo.

II. Sens du renvoi

3.5. En ce qui concerne le renvoi aux accords de Rambouillet figurant au paragraphe 11 a), il
convient de relever qu’il revêt un caractère limité puisqu’il impose simple ment à la MINUK de

tenir pleinement compte des accords de Rambouillet afin de faciliter une autonomie et une
auto-administration substantielles au Kosovo. Le paragraphe 11 a) de la résolution 1244 (1999) du
Conseil de sécurité ne rend donc pas lesdits accords contraignants en tant que tels, ni vis-à-vis de la

MINUK ni vis-à-vis des parties.

3.6. A cet égard, il convient également de mentionner, en passant, qu’une condition similaire
figure au paragraphe11 e) de la résolution1244(1999), lequel prévoit que la présence
internationale doit faciliter «un processus politique visant à déterminer le statut futur du Kosovo, en
26
tenant compte des accords de Rambouillet.»

3.7. Comparé au paragraphe 11 a) («compte pleinement tenu»), le libellé du paragraphe 11 e)
(«en tenant compte») apporte une limite supplémentaire à la pertinence des accords de Rambouillet
en vue d’un accord négocié sur le statut final du Kosovo.

3.8. Il convient également de noter à cet égard que les accords de Rambouillet prévoient
27
simplement un mécanisme permettant de parvenir à un accord sur le statut final , et non un
règlement final en tant que tel. Aux termes de ce mécanisme, la volonté du peuple n’est qu’un
facteur parmi quatre d’égale importance, les trois autres étant : les vues des autorités compétentes,

les efforts de chacune des parties relativement à la mise en Œuvre de l’accord, et les principes
figurant dans l’acte final d’Helsinki.

24Voir EE de la Serbie, par. 728 et suiv., 732 et suiv. ; observations écrites (OE) de la Serbie, par. 433.
25
Voir EE de la Serbie, par. 750 et suiv., 913 et suiv. ; OE de la Serbie, par. 436 et suiv.
26
Les italiques sont de nous.
27La disposition pertinente prévoit que :

«Trois ans après l’entrée en vigueur du présent accord, une réunion internationale
sera convoquée pour définir un mécanisme destiné à un règlemen t définitif pour le
Kosovo, sur la base de la volonté du peuple,des opinions des autorités concernées, des

efforts de chaque Partie relatifs à la mise en Œuvre du présent accord, et de l’acte final
d’Helsinki, ainsi que pour réaliser une évalua tion d’ensemble de la mise en Œuvre du
présent accord et d’examiner les propositions de mesures complémentaires formulées par
les Parties.» (Chap.8, art.I3) des accords de Rambouillet: accord intérimaire pour la
paix et l’autonomie au Kosovo, voir NationsUnies, doc. S/1999/648 (7juin1999),
annexe (dossier n 30) ; les italiques sont de nous.) - 7 -

3.9. Le paragraphe 11 a) de la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité dispose, quant à
lui, que la présence civile internationale devait tenir pleinement compte, lors de la mise en place du
système d’auto-administration au Kosovo garantissant une autonomi e substantielle au sein de la

RFY/Serbie, d’un projet détaillé d’organisation institutionnelle du régime d’autonomie pour le
Kosovo, tel que prévu par lesdits accords . 28

3.10. En 2001, la MINUK, en tant que présence civile internationale visée par la
résolution1244 (1999), a ainsi mis en Œuvre le paragraphe 11 a) de la résolution 1244 (1999) du

Conseil de sécurité en adoptant le cadre constitutionnel pour un gouvernement autonome
provisoire .9

3.11. C’est ce cadre constitutionnel qui réglem ente et limite l’éte ndue des compétences que
peuvent exercer les institutions provisoires d’ administration autonome au Kosovo conformément

au paragraphe 11 a) de la résolution 1244 (1999) du Conse il de sécurité et, par là même, met en
place l’autonomie substantielle requise.

B. L’incidence du renvoi aux accords de Rambouillet sur les questions
d’autodétermination et de sécession

3.12. En indiquant que les accords de Rambouille t devaient être pleinement pris en compte
lors de la mise en place d’une autonomie et d’une auto-administration substantielles au Kosovo, le

Conseil de sécurité a, pour l’essentiel, reconnu que le degré d’autonomie et d’auto-administration
conféré au Kosovo dans ce projet d’accord permettait de sauvegarder les droits de sa population (et,
partant, l’exercice par elle de son droit à l’autodétermination interne au sein de la RFY/Serbie),

tout en préservant l’intégrité territoriale de la RFY/Serbie.

3.13. Le Conseil de sécurité a donc soigne usement veillé à assurer un équilibre entre les
intérêts de l’Etat territorial, d’une part, et ceux de la population albanaise du Kosovo, de l’autre.

3.14. En renvoyant au paragraphe 11 a) de sa résolution aux accords de Rambouillet, en tant
que texte de référence en ce qui concerne le degré d’autonomie et d’ auto-administration du

Kosovo, le Conseil de sécurité a également exclu la sécession, et en particulier la «sécession à titre
de remède», des solutions possibles à la crise du Kosovo, puisqu’il considérait que le modèle
d’autonomie prévu par les accords de Rambouillet offrait une garantie suffisante à la population du

Kosovo.

3.15. Il convient en outre de noter que les accords de Rambouillet ont soigneusement évité
toute référence à un «peuple du Kosovo» ou à un «pe
uple kosovar», utilisant, tout au long du texte,
l’expression «population du Kosovo» . C’est donc délibérément que les auteurs n’ont pas assimilé

la «population du Kosovo» à la notion de «peupl e», telle que celle-ci est entendue en droit
international général.

28En ce qui concerne le régime autonome prévu dans le s accords de Rambouillet, voir en particulier l’article

premier de la Constitution du Kosovo qui y est proposée.
29MINUK/REG/2001/9 du 15 mai 2001.

30Voir les accords de Rambouillet, supra note 27: cadre, art.II,6; chap.I, art.II, n°1, lb i) et ii), n 3 ;
chap. II, art. VI, n lit. a ii). - 8 -

C. Les conditions pour pouvoir prétendre au statut d’Etat dans le cadre du régime juridique
établi par la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité

3.16. Comme cela a été indiqué ci-dessus, les ac cords de Rambouillet ne se réfèrent pas à la
population du Kosovo en tant que peuple disposant d’un droit à l’autodétermination, pas davantage

qu’ils ne font état d’un quelconque droit à l’autodétermination, et encore moins à la sécession, de la
population du Kosovo.

3.17. Les Albanais du Kosovo avaient d’aille urs expressément proposé que figure, dans les
accords de Rambouillet, une référence au dro it du «peuple du Kosovo à exercer le droit à
31
l’autodétermination». Cette proposition n’a cependant pas été acceptée .

3.18. De même, il n’a jamais été convenu, lors des négociations de Rambouillet, que
l’expression «volonté du peuple» ⎯ même prise isolément et non comme l’un des quatre facteurs
d’importance égale ⎯ équivalait à un droit de sécession.

3.19. Seule la délégation des Albanais du Kosovo a, pendant les négociations,

unilatéralement indiqué qu’elle estimait que la clause relative à la «volonté du peuple» incluait le
droit de procéder à un référendum 32. Cette délégation estimait cependant elle-même que le résultat

d’un tel référendum ne pourrait qu’être examiné pa r une conférence internationale qui se tiendrait
conformément aux accords de Rambouillet, mais qu’il ne déterminerait pas, en tant que tel, le statut
futur du Kosovo.

3.20. En outre, seule la délégation des Etat s-Unis d’Amérique a indiqué qu’elle était

disposée à accorder certaines assurances bilatérales précisant que l’expression «volonté du peuple»
faisait bien référence à un droit de la population du Kosovo de manifester sa volonté relativement
au statut futur du territoire .3

3.21. A l’inverse, le ministre français des a ffaires étrangères, M. H ubert Védrine, l’un des

initiateurs de la conférence de Rambouillet, a confirmé que les accords «n’avaient pas retenu
l’organisation d’un référendum au Kosovo à l’issue de la période de transition, comme l’avaient
demandé les Kosovars, mais seulement une clause de rendez-vous afin de prendre en compte les
34
souhaits de la population» .

31
Voir la déclaration de la délégation du Ko sovo sur la nouvelle proposition pour un règlement du
18 février 1999, reproduite dans M. Weller, The Crisis in Kosovo 1989-1999 (1999), p. 444-445.
32
Lettre en date du 23février1999 adressée au secrétaire d’Etat américain, Mme Albright, par la délégation du
Kosovo, reproduite dans Weller, ibid., p. 471.
33
Voir M. Weller, «The Rambouillet conference on Kosovo», International Affairs 1999, p.211 et suiv. (232).
Voir également la conférence de presse tenue par le Secrétaire d’Etat Madeleine Albright, à Rambouillet le
23 février 1999 : «un certain nombre de fact eurs seront pris en considération par la réunion quant au statut permanent du
Kosovo, notamment l’opinion du peuple. Et les kosovars interprètent cela, leur interprétation de cela est qu’il s’agira
d’un référendum» (M. Weller, The Crisis in Kosovo 1989-1999 (1999), p.472-474, p.473 [traduction du Greffe] ; les
italiques sont de nous).

34Voir Assemblée nationale, commission des Affaires ét rangères, compte rendu n°31, 13avril1999 (séance de
17 heures), disponible à l’adresse http:/www.assemblee-nationale.fr/11/cr-cafe/98-99/c989931.asp - 9 -

3.22. Dans sa résolution 1244 (1999), le Conseil de sécurité ne fait pas non plus référence à
un «peuple du Kosovo» ou à un «peuple kosovar», en net contraste avec sa pratique dans d’autres

cas, comme lorsqu’il35, pour ne citer qu’un exemple, fait explicitement référence au «East
Timorese people» .

3.23. Il apparaît donc clairement que le Conse il de sécurité ne considérait pas la population
du Kosovo comme un peuple pouvant prétendre exercer un droit à l’autodétermination externe et

encore moins, partant, comme disposant d’un droit de sécession.

3.24. Cela a été confirmé au lendemain de l’adoption de la résolution 1244 (1999) du Conseil
de sécurité, lorsque le ministre français des affair es étrangères, M.Hubert Védrine, a de nouveau
déclaré: «ni les accords de Ra mbouillet, ni aucun autre texte ne prévoient de référendum sur
36
l’indépendance» .

3.25. Le régime juridique établi par la r ésolution1244 (1999) du Conseil de sécurité ne
permettait donc nullement à un «peuple» particulier de prétendre au statut d’Etat, à moins que cela
n’ait été convenu par les deux parties dans le cadre du processus politique relatif au statut futur du

Kosovo et ce, avec l’aval du Conseil de sécurité.

D. «Quelles sont, en droit international général, les conditions factuelles devant au préalable

être remplies, pour constituer un «peuple», et pouvoir prétendre à
la qualité d’Etat ?»

3.26. Le droit international a établi des critères précis permettant de définir ce qu’est un
«peuple» considéré comme pouvant prétendre à exercer le droit à l’autodétermination, ainsi que des

mécanismes clairs aux fins de l’exercice de ce droit, faute de quoi n’importe quel groupe aurait pu
se définir lui-même comme un «peuple» et revendiquer l’exercice du droit international à la
sécession d’avec un Etat indépendant, ce qui aurait considérablement déstabilisé l’ordre juridique

et politique international.

3.27. Le champ d’application des normes juri diques relatives à l’autodétermination a été
clairement identifié par la pratique et la doctrin e juridiques internationales. Pour l’essentiel, il est
admis que le principe d’autodétermination extern e en tant qu’il confère des droits en droit
37
international s’applique en ce qui concerne les territoires sous mandat et sous tutelle , les

35
Résolution1246 (1999) du Conseil de sécurité, dispositifpar.1 [Note du Greffe : la version française de la
résolution donne : «la population du Timor oriental…»].
36
Voir Aosemblée nationale, commission de la défense nationale et des forces armées,
compte rendu n 33, 22juin1999 (séance de 18h30); disponible à l’adresse: http://www.assemblée-nationale.fr/
11/cr-cdef/98-99/c9899038.asp.
37
Voir l’article 22 du Pacte de la Société des Nations. Voir également Statut international du Sud-Ouest africain,
avis consultatif, C.I.J.Recueil1950 , p.128, 132; Conséquences juridiques pour les Etats de la présence continue de
l’Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité, avis
consultatif, C.I.J. Recueil 1971, p. 16, 28-29 ; Certaines terres à phosphates à Nauru (N auru c.Australie), exceptions
préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 1992, p.240, 256-257eFrontière terrestre et maritime entre le Cameroun et le
Nigéria (Cameroun c. Nigéria; Guinée équatoriale (intervenant)), arrêt, C.I.J. Recueil 2002, p. 303, 409. - 10 -

38
territoires coloniaux des a39iens empires européens et, dans une certaine mesure, les situations
d’occupation étrangère . L’unité territoriale par rapport à laquelle peut s’exercer un droit à
l’autodétermination a ainsi été identifiée. Le principe d’autodétermination s’applique également en

tant que principe des droits de l’homme au sein d’Etats indépendants et ce, sous la forme du droit à
l’autodétermination interne 40. Ce principe ne saurait donc manifestement pas être considéré
comme une règle générale légitimant la sécession d’ Etats indépendants et ne confère pas non plus

de quelconques droits à la sécession à des groupes, entités
ou peuples au sein d’Etats indépendants.

3.28. Le droit international a spécifiquement identifié d’autres groupes, tels que les minorités
et les peuples indigènes, jouissant de certains droits en vertu du droit international (soit en tant que
groupes, soit à titre individuel). De tels droits sont cependant strictement limités à l’Etat souverain

en question, et il est explicitement prévu qu’ils ne peuvent être interprétés d’une manière qui serait
en contradiction avec le principe supérieur d’intégrité territoriale. Ainsi, la déclaration de 1992 des
NationsUnies des droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques,

religieuses et linguistiques dispose, en son article premier, que les Etats «protègent l’existence et
l’identité nationale ou ethnique, culturelle, religieuse et linguistique des minorités, sur leurs

territoires respectifs» (les italiques sont de nous), et se conclu t par le paragraphe4 de l’article8,
qui indique expressément que :

«Aucune des dispositions de la présente déclaration ne peut être interprétée

comme autorisant une quelconque activité contraire aux buts et principes des
NationsUnies, y compris à l’égalité souveraine, à l’intégrité territoriale et à
41
l’indépendance politique des Etats» .

3.29. En outre, la déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples indigènes de 2007

reconnaît expressément le droit à l’autodétermination de ces peuples (art. premier et 3) et indique,
au paragraphe 1 de l’article 46, que :

«Aucune disposition de la présente déclar ation ne peut être interprétée comme
impliquant pour un Etat, un peuple, un groupement ou un individu un droit

quelconque de se livrer à une activité ou d’accomplir un acte contraire à la Charte des
Nations Unies, ni considérée comme autorisant ou encourageant aucun acte ayant pour
effet de détruire ou d’amoindrir, totalement ou partiellement, l’intégrité territoriale ou
42
l’unité politique d’un Etat souverain et indépendant.»

3.30. La question de la définition du terme «peuple» a été examinée dans l’affaire du Sahara

occidental, dans laquelle la Cour a déclaré que :

«La validité du principe d’autodéterm ination, défini comme répondant à la

nécessité de respecter la volonté librement exprimée des peuples, n’est pas diminuée
par le fait que dans certai ns cas l’Assemblée générale n’a pas cru devoir exiger la

38
Voir Conséquences juridiques pour les Etats de la prés ence continue de l’Afrique du Sud en Namibie
(Sud-Ouest africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Cons eil de sécurité, avis cons ultatif, C.I.J. Recueil 1971,
p. 16, 31 ; et Sahara occidental, avis cons ultatif, C.I.J. Recueil 1975, p.12, 31-33. Voir égalemenConséquences
juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif du 9juillet2004 ,
C.I.J. Recueil 2004, p. 136, 172 et Renvoi relatif à la sécession du Québec, [1998] 2 RCS 217, par. 132.
39
Voir, notamment, en ce qui concerne la Palestine, Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le
territoire palestinien occupé, avis consultatif du 9 juillet 2004, C.I.J. Recueil 2004, p. 136, 182-183.
40
Voir l’affaire de la Renvoi relatif à la sécession du Québec, [1998] 2 RCS 217, par. 126.
41Résolution 47/135 de l’Assemblée générale.

42Résolution 61/295 de l’Assemblée générale. - 11 -

consultation des habitants de tel ou tel territo ire. Ces exceptions s’expliquent soit par

la considération qu’une certaine population ne constituait pas un «peuple» pouvant
prétendre à disposer de lui-même, soit pa r la conviction qu’une consultation eût été
sans nécessité aucune, en raison de circonstances spéciales» . 43

3.31. Il ressort de cette importante déclaration de la Cour qu’une définition particulière du
terme «peuple» aux fins de la reconnaissance du droit à l’autodétermination s’est dégagée et que,

pour déterminer si un groupe donné ⎯ qui se proclame ainsi ⎯ constitue ou non un «peuple» aux
fins du droit à l’autodétermination en droit in ternational, il doit être reconnu comme tel par
l’organisation internationale compétente. L’Organisation des Nations Unies a, par conséquent, mis

au point une méthode permettant d’identifier le s territoires concern44 et d’énoncer des formes
spécifiques d’application du principe du droit à l’autodétermination . Un «peuple» qui ne serait
pas identifié comme tel et ne serait donc pas considéré comme une unité pouvant prétendre à

l’autodétermination aux fins de l’exercice plein et entier de ce droit pourrait, partant, jouir des
droits de l’homme en vigueur dans le cadre de la configuration te rritoriale de l’Etat indépendant
concerné en tant qu’expression de ce qui est généralement appelé le droit à l’autodétermination

interne.

3.32. Les seuls cas faisant exception à la présente analyse sont ceux dans lesquels le droit de

sécession de «peuples» particuliers est prévu par la constitution de l’Etat dans lequel ils vivent.
Des exemples en sont donnés au paragraphe1.4. ci -dessus. Il ressort toutefois clairement que tel
n’est pas le cas en ce qui concerne la situation du Kosovo au sein de la Serbie.

Belgrade, le 21 décembre 2009.

Le Chef de l’équipe juridique

de la République de Serbie,

(Signé) Saša O BRADOVIĆ .

___________

43
Sahara occidental, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1975, p. 33, par. 59.
44Voir, par exemple, les résolutions 9 (I), 66 (I), 1541 (XVI) et 1654 (XVI) de l’Assemblée générale.

Document file FR
Document
Document Long Title

Réponses de la République de Serbie aux questions posées par MM. les juges Koroma, Bennouna et Cançado Trindade au terme de la procédure orale (traduction)

Links