Le Costa Rica introduit une instance contre le Nicaragua et demande à la Cour d'indiquer des mesures conservatoires

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2010/38
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COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

Palais de la Paix, Carnegieplein 2, 2517 KJ La Haye, Pays-Bas
Tél : +31 (0)70 302 2323 Télécopie : +31 (0)70 364 9928
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Communiqué de presse
Non officiel

o
N 2010/38
Le 19 novembre 2010

Le Costa Rica introduit une instance contre le Nicaragua et demande à la Cour

d’indiquer des mesures conservatoires

LA HAYE, le 19 novembre 2010. Le 18 novembre 2010 en fin de journée, la République du
CostaRica a introduit une instance contre la République du Nicaragua à raison d’une prétendue

«incursion en territoire costa-ricien de l’armée ni caraguayenne, qui occupe et utilise une partie de
celui-ci, ainsi que de violations par le Nicaragua d’obligations lui incombant envers le Costa Rica»
en vertu d’un certain nombre de conventions et de traités internationaux.

Dans sa requête, le Costa Rica affirme que,

«[e]n envoyant des contingents de ses formes armées en territoire costa-ricien et en y
faisant établir des campements militaires, le Nicaragua agit en violation flagrante non

seulement du régime frontalier établi entre les deux Etats, mais aussi des grands
principes fondateurs des Nations Unies, à savoir le principe de l’intégrité territoriale et
l’interdiction du recours à la menace ou à l’emploi de la force contre tout Etat, tels
qu’affirmés au paragraphe4 de l’article2 de la Charte, et auxquels les Parties ont

réaffirmé leur adhésion aux articles premier, 19 et 29 de la charte de l’
Organisation
des Etats américains».

Le Costa Rica accuse le Nicaragua d’avoir, à l’occasion de deux incidents distincts, occupé
son sol dans le cadre de la construction d’un canal à travers le territoire costa-ricien, entre le fleuve

San Juan et la lagune de los Portillos (également connue sous le nom de «lagon de Harbor Head»),
et de certaines activités connexes de dragage menées dans le San Juan.

Le Costa Rica déclare que les

«travaux de dragage actuels et prévus, ains i que la construction du canal, altèreront
gravement le débit des eaux alimentant le Colorado, fleuve costa-ricien, et causeront
d’autres dommages à son territoire, nota mment aux zones humides et aux réserves

nationales de flore et de faune sauvages de la région».

Le demandeur affirme que le Nicaragua a reje té tous les appels au retrait de ses forces
armées du territoire occupé et refusé toute forme de négociation. Il déclare en outre que le
Nicaragua entend ne pas se conformer à la résolu tion adoptée le 12novembre 2010 par le conseil

permanent de l’organisation des Etats américains, qui appelle, en particulier, au retrait des forces
armées nicaraguayennes de la région frontalière, en demandant d’éviter la présence de forces
armées ou de sécurité dans cette zone, où une telle présence pourrait créer des tensions, en vue de
favoriser un climat propice au dialogue entre les deux nations.

Le Costa Rica prie en conséquence la Cour
«de dire et juger que le Nicaragua viole ses obligations internationa
les … à raison de

son incursion en territoire costa-ricien et de l’occupation d’une partie de celui-ci, des - 2 -

graves dommages causés à ses forêts pl uviales et zones humides protégées, des
dommages qu’il entend causer au Colorado, à ses zones humides et à ses écosystèmes

protégés, ainsi que des activités de dragage et de percement d’un canal qu’il mène
actuellement dans le SanJuan. En particulie r, le CostaRica prie la Cour de dire et
juger que, par son comportement, le Nicaragua a violé :

a) le territoire de la République du Costa Ri ca, tel qu’il a été convenu et délimité par
le traité de limites de1858, la senten ce Cleveland ainsi que les première et

deuxième sentences Alexander ;
b) les principes fondamentaux de l’intégrité territoriale et de l’interdiction de l’emploi

de la force consacrés par la Charte des Nations Unies et la charte de l’Organisation
des Etats américains ;

c) l’obligation faite au Nicaragua en vertu de l’article IX du tra ité de limites de 1858
de ne pas utiliser le San Juan pour perpétrer des actes hostiles ;

d) l’obligation de ne pas causer de dommages au territoire costa-ricien ;

e) l’obligation de ne pas dévier artificielleme nt le San Juan de son cours naturel sans
le consentement du Costa Rica ;

f) l’obligation de ne pas interdire la naviga tion de ressortissants costa-riciens sur le
San Juan ;

g) l’obligation de ne pas mener d’opérations de dragage dans le SanJuan si ces
activités ont un effet dommageable pour le territoire costa-ricien (y compris le

Colorado), conformément à la sentence Cleveland de 1888 ;
h) les obligations découlant de la convention de Ramsar sur les zones humides ;

i) l’obligation de ne pas aggraver ou étendre le différend, que ce soit
par des actes
visant le CostaRica, et consistant nota mment à étendre la portion de territoire

costa-ricien envahie et occupée, ou par l’adoption de toute autre mesure ou la
conduite d’activités qui porteraient atteinte à l’intégrité territoriale du CostaRica
en violation du droit international.»

La Cour est également priée de déterminer l es réparations dues par le Nicaragua à raison, en
particulier, de toute mesure du type de celles qui sont mentionnées au paragraphe ci-dessus.

Pour fonder la compétence de la Cour, le de mandeur invoque le paragraphe 1 de l’article 36

du Statut de la Cour en application de l’article XXXI du traité américain de règlement pacifique
du30avril1948 («Pacte de Bogotá»), ainsi que les déclarations d’acceptation formulées par
le CostaRica le 20février973 et par le Nicaragua le 24septembre 1929 (modifiée

le 23 octobre 2001), conformément au paragraphe 2 de l’article 36 du Statut.

Ce même 18 novembre 2010, le Costa Rica a en outre déposé une demande en indication de
mesures conservatoires, dans laquelle il rappelle que «[l]es mesures conservatoires indiquées en
application de l’article 41 du Statut de la Cour ont pour objet de sauvegarder les droits de chacune

des Parties en attendant que la Cour rende sa décision au fond» et précise que

«l’objet du différend et de la présente demande en indication de mesures
conservatoires est constitué par les droits du Costa Rica à la souveraineté, à l’intégrité
territoriale et à la non-ingérence dans les droits qui sont les siens sur le fleuve
San Juan, ses terres et ses zones naturelles protégées, ainsi que par ses droits relatifs à

l’intégrité et au débit du Colorado».

Le CostaRica y indique également que la protection de ses droits revêt un réel caractère
d’urgence. Il fait observer que - 3 -

«les forces armées nicaraguayennes continuent d’être présentes sur l’île de Portillos,
en violation des droits souverains du CostaRica, [que] le Nicaragua continue de

causer des dommages au territoire costa -ricien, menaçant gravement les zones
humides et forêts de ce territoire qui jouissent d’une protection internationale, [et
qu’il] poursuit également ses activités de drag age du San Juan, au risque de causer de
nouveaux dommages au territoire costa-ricien, notamment au Colorado».

Le Costa Rica soutient en outre que «[l]a présence continue de forces armées nicaraguayennes sur
le territoire du Costa Rica contribue à créer une situation politique marquée par une hostilité et une
tension extrêmes, faisant planer la menace d’un co nflit armé sur l’instance devant la Cour». Il

ajoute que le Nicaragua «ne saurait être autorisé à continuer à faire dévier ainsi le SanJuan en
territoire costa-ricien, en vue de mettre le CostaRica et la Cour devant un fait accompli». Le
Costa Rica conclut sa demande en déclarant que

«[s]i la Cour n’indique pas de mesures conser vatoires, le risque est réel que les actes
préjudiciables aux droits du Costa Rica se poursuivent, altérant gravement la situation

sur le terrain avant que la Cour n’ait tranché de manière définitive les questions qui lui
sont soumises».

En conséquence, le Costa Rica «prie respectueus ement la Cour, dans l’attente de la décision

qu’elle rendra sur le fond de l’affaire, d’ordonne r d’urgence les mesures c onservatoires suivantes,
de sorte à remédier à la violation à ce jour conti nue de son intégrité territoriale et à empêcher que
de nouveaux dommages irréparables ne soient causés à son territoire :

1) retrait immédiat et inconditionnel de toutes l es forces nicaraguayennes des parties du territoire
costa-ricien envahies et occupées de manière illicite ;

2) cessation immédiate du percement d’un canal en territoire costa-ricien ;

3) cessation immédiate de l’abattage d’arbres et de l’enlèvement de végétation et de terre en
territoire costa-ricien, notamment dans les zones humides et les forêts ;

4) cessation immédiate du déversement de sédiments en territoire costa-ricien ;

5) suspension, par le Nicaragua, du programme continu de dragage mis en Œuvre par celui-ci en
vue d’occuper et d’inonder le territoire costa-ri cien et de causer des dommages à celui-ci ainsi
qu’en vue de porter gravement préjudice à la na vigation sur le Colorado ou de la perturber,

suspension requise pour donner plein effet à la sente nce Cleveland dans l’attente de la décision
sur le fond du présent différend ;

6) obligation faite au Nicaragua de s’abstenir de toute autre action qui soit de nature à porter
préjudice aux droits du Costa Rica ou à aggraver ou étendre le différend porté devant la Cour.

___________

Le texte de la requête introductive d’inst ance et celui de la demande en indication
de mesures conservatoires seront prochainement di sponibles sur le site Internet de la Cour

(www.icj-cij.org).

___________

Département de l’information :

M. Andreï Poskakoukhine, premier secrétaire dela Cour, chef du département (+31 (0)70 302 2336)

M. Boris Heim, attaché d’information (+31 (0)70 302 2337)
Mme Joanne Moore, attachée d’information adjointe (+31 (0)70 302 2394)
Mme Genoveva Madurga, assistanteadministrative (+31 (0)70 302 2396)

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