Opinion dissidente de M. le juge Bhandari

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OPINION DISSIDENTE DE M. LE JUGE BHANDARI
[Traduction]
Objet et but de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques (1961) et application de celle-ci en l’espèce — Lacunes du critère selon lequel une objection de l’Etat accréditaire pourrait empêcher un bien d’acquérir le statut diplomatique — Importance de garder à l’esprit la disposition relative au consentement mutuel figurant à l’article 2 de la convention de Vienne  Nécessité de concilier les intérêts des Etats accréditant et accréditaire et de tenir dûment compte de l’intérêt de la fonction — Pertinence des principes fondamentaux de l’égalité souveraine, du développement de relations amicales et du maintien de la paix et de la sécurité internationales qui sont mis en avant dans le préambule — Une fois effectivement utilisé aux fins de la mission, un bien doit se voir garantir l’inviolabilité.
A. Introduction
1. Je ne puis malheureusement me rallier à la conclusion de la majorité selon laquelle l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris n’aurait jamais acquis le statut de «locaux de la mission», de sorte que la République française (ci-après la «France») n’aurait pas manqué aux obligations qui lui incombent au titre de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques de 1961 (ci-après la «convention de Vienne» ou la «convention»). Je suis d’avis que l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris avait acquis le statut de locaux de la mission au 27 juillet 2012 et pouvait donc, à compter de cette date, bénéficier du régime d’inviolabilité garanti par la convention de Vienne. Je m’attacherai ici à expliquer mes réserves quant à ce qui semble être la conclusion de la Cour au paragraphe 74 de l’arrêt, à savoir qu’une objection d’un Etat accréditaire qui serait communiquée en temps voulu et n’aurait de caractère ni arbitraire, ni discriminatoire empêcherait un bien donné d’acquérir le statut de «locaux de la mission» au sens de l’alinéa i) de l’article premier de la convention. Ce critère amène inexorablement à conclure qu’un bien ne pourrait jamais acquérir le statut diplomatique sans le consentement de l’Etat accréditaire. Or l’existence d’un tel critère ou de ses éventuelles incidences n’est nullement étayée par les travaux préparatoires, par les travaux de la Commission du droit international (ci-après la «CDI»), par le texte de la convention de Vienne ni par l’objet et le but mêmes de cette dernière.
2. Selon moi, la convention de Vienne, interprétée conformément aux règles coutumières d’interprétation des traités, ne permet pas d’aboutir à la conclusion tirée au paragraphe 118 de l’arrêt. Je préciserai ici ma pensée quant à la façon dont un instrument juridique régissant l’établissement et le maintien de relations amicales entre des Etats souverains égaux devrait être interprété afin de concilier les intérêts des Parties.
3. La question au coeur de l’affaire était celle de savoir si l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris avait acquis le statut juridique de locaux de la mission et était, de ce fait, inviolable au titre de la convention de Vienne à l’époque des actes accomplis par la France. Je souhaite également saisir la présente occasion pour donner mon opinion sur les «conditions et moment» auxquels un bien peut être qualifié de «locaux de la mission» au sens de l’alinéa i) de l’article premier de la convention de Vienne et jouir des protections prévues à l’article 22.
4. Je rappelle que, si son article 2 dispose que l’établissement de relations diplomatiques se fait par consentement mutuel, la convention de Vienne ne formule cependant aucune obligation expresse d’obtenir le consentement de l’Etat accréditaire pour l’établissement des «locaux de la mission». L’alinéa e) du paragraphe 1 de son article 3 dispose en outre que «[l]es fonctions d’une
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mission diplomatique consistent … à : [p]romouvoir des relations amicales … entre l’Etat accréditant et l’Etat accréditaire». On peut inférer de ces dispositions, lues conjointement avec l’objet et le but de la convention tels qu’ils ressortent de son préambule et de son texte dans son ensemble, que cet instrument ne sous-entend nullement qu’une objection à la désignation puisse empêcher un bien d’acquérir le statut de locaux de la mission, indépendamment de la question de savoir si cette objection a été communiquée en temps voulu et si elle revêt un caractère non arbitraire ou non discriminatoire.
5. Ainsi qu’il sera exposé plus en détail ci-dessous, il convient d’interpréter l’alinéa i) de l’article premier de la convention de Vienne comme signifiant que le statut de «locaux de la mission» dépend, d’une part, de la notification par l’Etat accréditant de son intention d’utiliser les locaux concernés aux fins de la mission et, d’autre part, de l’utilisation effective desdits locaux à ces fins.
B. Contexte historique de la convention de Vienne
6. Les relations et immunités diplomatiques sont solidement ancrées dans l’histoire et étaient déjà au coeur des relations internationales bien avant la création de l’Organisation des Nations Unies ou même de la Société des Nations.
Les relations diplomatiques et les privilèges avant la convention de Vienne
7. Le caractère sacré des ambassadeurs était reconnu dans la pratique et les écrits anciens. A l’époque romaine, la République avait exigé et obtenu le respect de l’inviolabilité des «Fetiales», ces prêtres qui menaient des négociations diplomatiques1. Hugo Grotius, dans Le droit de la guerre et de la paix, déclara : «II y a deux maximes du droit des gens touchant les ambassadeurs, sur lesquelles on raisonne communément comme sur des règles constantes : l’une, qu’il faut recevoir les ambassadeurs ; l’autre, qu’on ne doit leur faire aucun mal2». Oppenheim et Sir Lauterpacht qualifièrent les privilèges dont jouissaient les ambassadeurs de «sacro-saints3». Pour donner effet à pareils privilèges, après la paix de Westphalie (1648), l’usage consistant à établir des missions diplomatiques permanentes tendit à se généraliser4. Par la suite, le congrès de Vienne en 18155 et le protocole de la conférence du 21 novembre 1818 (Aix-la-Chapelle)6 codifièrent certaines pratiques concernant les agents diplomatiques.
8. L’Institut de droit international publia son Règlement sur les immunités diplomatiques en 1895 et une résolution sur Les immunités diplomatiques en 1929. Dans le Règlement sur les immunités diplomatiques (1895), le terme «inviolabilité» fut employé pour rendre compte de l’obligation de «protéger, par des pénalités spécialement rigoureuses, contre toute offense, injure ou
1 Relations et immunités diplomatiques  mémoire préparé par le Secrétariat, Annuaire de la Commission du droit international, 1956, vol. II, p. 135, par. 18.
2 H. Grotius, Le droit de la guerre et de la paix, livre II, chap. XVIII [Traduction : Annuaire de la Commission du droit international, 1956, vol. II, p. 135, par. 18].
3 L. Oppenheim, International Law: A Treatise, vol. I : Peace, 7e éd., H. Lauterpacht (sous la dir. de) (New York, Toronto, Longmans, Green and Co, 1948), p. 687-688 [Traduction : Annuaire de la Commission du droit international, 1956, vol. II, p. 135-136, par. 19].
4 Relations et immunités diplomatiques  mémoire préparé par le Secrétariat, Annuaire de la Commission du droit international, 1956, vol. II, p. 135-136, par. 19.
5 Ibid., p. 136, par. 22 : Annexe XVII, Règlement sur le rang entre les agents diplomatiques, Congrès de Vienne, 19 mars 1815.
6 Le texte de ce protocole est reproduit dans C. Calvo, Le droit international théorique et pratique, 5e éd., Paris, Arthur Rousseau, 1896, vol. III, p. 184.
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violence de la part des habitants du pays». Le terme «extraterritorialité», utilisé dans le même instrument, visait à englober l’obligation de s’abstenir d’avoir recours à des mesures répressives
7. Cela conduisit à la conclusion de plusieurs traités bilatéraux accordant des privilèges sur une base de réciprocité8. La sixième conférence internationale américaine, tenue en 1928, aboutit à l’adoption, à La Havane, de la convention relative aux fonctionnaires diplomatiques, qui régissait les privilèges et immunités diplomatiques9. En 1932, la Harvard Research School publia un projet de convention sur les privilèges et immunités diplomatiques10. Il convient de souligner que, dans ces pratiques et instruments antérieurs, il n’était pas question du consentement obligatoire de l’Etat accréditaire ou de son objection à la désignation des locaux de la mission ; on y décèle plutôt une préférence pour la notion de consentement mutuel et de privilèges réciproques en matière de relations et privilèges diplomatiques. Il s’ensuit que l’objection d’un Etat accréditaire à la désignation de locaux de la mission ne cadre pas avec un régime qui prévoit le consentement mutuel et des privilèges réciproques.
9. En 1952, dans un climat politique de grogne résultant de violations de la coutume diplomatique par l’Union soviétique, la Yougoslavie présenta un projet de résolution dans lequel elle priait l’Assemblée générale des Nations Unies (ci-après l’«Assemblée générale») de demander à la CDI de donner priorité à la codification des relations et immunités diplomatiques11. Le droit diplomatique fut l’un des 14 premiers thèmes choisis aux fins de codification, et les travaux de la CDI aboutirent finalement à l’adoption de la convention de Vienne12.
Le fondement de la fonction diplomatique et la théorie de l’intérêt de la fonction dans les travaux de la CDI en 1957
10. Au cours des discussions engagées à la CDI en 1957, il fut avancé qu’il serait utile de faire figurer au projet d’articles le «fondement même de la fonction diplomatique»13. Bien que les membres de la CDI eussent avancé des points de vue divergents quant à la valeur respective des diverses théories touchant la fonction diplomatique14, ces dernières furent incorporées au projet d’articles et au commentaire de 1958. Selon la théorie de l’«extraterritorialité», les «locaux de la mission constituent une sorte de prolongement du territoire de l’Etat accréditant … [L]a théorie du «caractère représentatif» … fonde ces privilèges et immunités sur l’idée que la mission diplomatique personnifie l’Etat accréditant» ; la théorie de «l’intérêt de la fonction» justifie quant à elle les privilèges et immunités comme étant nécessaires pour que la mission puisse s’acquitter de ses fonctions15. La CDI déclara en outre s’être inspirée de la troisième théorie, celle de l’intérêt de la
7 E. Denza, «Diplomatic Privileges and Immunities», Grant and Barker (sous la dir. de), The Harvard Research in International Law: Contemporary Analysis and Appraisal, W.S. Hein & Co, Buffalo, New York, 2007, p. 162-163.
8 Relations et immunités diplomatiques  mémoire préparé par le Secrétariat, Annuaire de la Commission du droit international, 1956, vol. II, p. 135-136, par. 19.
9 Adoptée le 20 février 1928 ; Société des Nations, Recueil des traités, vol. 155, p. 259.
10 The American Journal of International Law (AJIL), vol. 26, no 1, 1932, Supp. : Research in International Law, p. 15-192.
11 Demande à la Commission du droit international de donner priorité à la codification de la question : «Relations et immunités diplomatiques» (1952) ; résolution 685 (VII) adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies.
12 R. van Alebeek, «Diplomatic Immunity», Max Planck Encyclopedia of Public International Law, vol. 5, 2012, p. 98.
13 AJIL, vol. 26, no 1, 1932, Supp.: Research in International Law, p. 15-192, vol. I, p. 2, par. 10 (Fitzmaurice) [Traduction : Comptes rendus analytiques de la neuvième session (383e séance), Annuaire de la Commission du droit international, 1957, vol. I, p. 2, par. 10 (Fitzmaurice)].
14 Ibid., p. 2-3, par. 10-13.
15 Projet d’articles relatifs aux relations et immunités diplomatiques et son commentaire, Annuaire de la Commission du droit international, 1958, vol. II, p. 98.
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fonction, pour résoudre les problèmes au sujet desquels la pratique ne fournissait pas d’indications précises, tout en gardant à l’esprit le caractère représentatif du chef de la mission et de la mission elle-même
16. Sir Gerald Fitzmaurice, en particulier, dans son commentaire, sembla pencher en faveur de la théorie de l’intérêt de la fonction au motif qu’«il [serait] impossible à un agent diplomatique de s’acquitter de ses fonctions s’il n’a[vait] pas certaines immunités et certains privilèges17».
11. Faisant la synthèse de la théorie de l’intérêt de la fonction, la conférence des Nations Unies sur les relations et immunités diplomatiques (1961) rédigea le préambule de la convention de Vienne sur la base d’une proposition qui indiquait fort utilement que les privilèges et immunités diplomatiques avaient pour but «d’assurer l’accomplissement efficace des fonctions des missions diplomatiques18». Je suis d’avis que le fondement de la fonction diplomatique, comme ces théories le montrent, donne des indications importantes sur l’interprétation de la convention de Vienne.
12. Le contexte historique présenté ci-dessus fait clairement apparaître qu’aucune règle de droit international coutumier préalablement établie ne requiert ni ne semble permettre que l’Etat accréditaire s’oppose à la désignation des «locaux de la mission». Au contraire, l’objectif même du régime de privilèges et d’immunités fait primer l’accomplissement efficace des fonctions des missions diplomatiques. Partant, j’estime que le régime concernant l’établissement des «locaux de la mission» prévu dans la convention de Vienne devrait être interprété de sorte à offrir une grande latitude, le but étant de faciliter l’accomplissement efficace des fonctions des missions diplomatiques. Considérer que la convention autorise les objections n’irait pas dans le sens d’une telle facilitation.
C. Objet et but de la convention de Vienne
13. Le 18 avril 1961, la conférence des Nations Unies sur les relations et immunités diplomatiques adopta la convention de Vienne sur les relations diplomatiques, laquelle entra en vigueur le 24 avril 196419. Dans le préambule de la convention, les parties signataires indiquèrent «qu’une convention internationale sur les relations, privilèges et immunités diplomatiques contribuerait à favoriser les relations d’amitié entre les pays, quelle que [fût] la diversité de leurs régimes constitutionnels et sociaux», et «que le but desdits privilèges et immunités [était] non pas d’avantager des individus mais d’assurer l’accomplissement efficace des fonctions des missions diplomatiques en tant que représentants des Etats».
14. Les objectifs de la convention de Vienne reflètent les valeurs mêmes de l’Organisation des Nations Unies. La convention bénéficia d’un intérêt accru, à l’époque de sa rédaction, pour les principes que sont la coopération internationale, l’égalité des Etats, la coexistence pacifique et le développement de relations amicales20. Dans une proposition présentée à la conférence de Vienne en 1961 pour le préambule, la Hongrie souligna que «des différences de système constitutionnel,
16 Projet d’articles relatifs aux relations et immunités diplomatiques et son commentaire, Annuaire de la Commission du droit international, 1958, vol. II, p. 98.
17 Comptes rendus analytiques de la neuvième session (383e séance), Annuaire de la Commission du droit international, 1957, vol. I, p. 2, par. 10 (Fitzmaurice).
18 Nations Unies, Documents officiels de la Conférence des Nations Unies sur les relations et immunités diplomatiques, vol. II, doc. A/CONF.20/C.1/L.1 à L.332.
19 Nations Unies, Recueil des traités, vol. 500, p. 95.
20 S. Duquet & J. Wouters, «Diplomatic and Consular Relations», The Oxford Handbook of United Nations Treaties, Simon Chesterman, David M. Malone, Santiago Villalpando (sous la dir. de), Oxford, Oxford University Press (OUP), 2019, p. 567.
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juridique et social ne sauraient empêcher l’établissement et le maintien de relations diplomatiques
21». Ces intentions sont clairement exposées dans le préambule. A la même époque, la convention est également venue cristalliser les principes de souveraineté, de non-intervention et de compétence territoriale22. Elle est donc axée sur deux séries de considérations qui, conjointement, visent à faciliter l’accomplissement efficace des fonctions des missions diplomatiques23. Afin de mettre ces principes en avant, les rédacteurs, au deuxième alinéa du préambule de la convention, se déclarèrent «[c]onscients des buts et des principes de la Charte des Nations Unies concernant l’égalité souveraine des Etats, le maintien de la paix et de la sécurité internationales et le développement de relations amicales entre les nations». J’examinerai chacun de ces principes tour à tour.
15. Le principe de l’égalité souveraine, conformément à l’article 5 du projet de déclaration des droits et des devoirs des Etats élaboré par la CDI (1949), s’entend essentiellement comme visant à assurer aux Etats un droit à l’égalité juridique24. En droit international contemporain, l’égalité souveraine dénote l’exclusion de toute supériorité juridique d’un Etat sur un autre, tout en rendant compte du rôle plus important que la communauté internationale doit jouer par rapport à tous ses membres. Tous les Etats sont donc égaux dans leurs droits, leurs devoirs et leur appartenance à la communauté internationale, indépendamment de leurs différences économiques, sociales, politiques ou autres25.
16. La volonté de favoriser des relations amicales a été réaffirmée par l’Assemblée générale en 1970 lorsqu’elle a adopté la résolution 2625 (XXV), intitulée «Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les Etats conformément à la Charte des Nations Unies26». Cette résolution rend compte du droit international coutumier et a été maintes fois invoquée par la Cour27. Son texte met l’accent sur les principes que sont la bonne foi, l’égalité souveraine des Etats, le devoir de coopérer, la non-intervention et le règlement pacifique
21 Nations Unies, Documents officiels de la Conférence des Nations Unies sur les relations et immunités diplomatiques, vol. II, doc. A/CONF.20/C.1/L.148.
22 S. Duquet & J. Wouters, «Diplomatic and Consular Relations», The Oxford Handbook of United Nations Treaties, S. Chesterman, D. M. Malone, S. Villalpando (sous la dir. de), Oxford, OUP, 2019, p. 568.
23 Comme indiqué également dans la proposition présentée par cinq puissances, à savoir la Birmanie, Ceylan, l’Inde, l’Indonésie et la République arabe unie, sur laquelle repose le préambule. Voir Nations Unies, Documents officiels de la Conférence des Nations Unies sur les relations et immunités diplomatiques, vol. II, p. 52, doc. A/CONF.20/C.1/L.329.
24 L’article 5 du projet de déclaration des droits et des devoirs des Etats et commentaires (1949) se lit comme suit :
«Tout Etat a droit à l’égalité juridique avec les autres Etats.
Ce texte est tiré de l’article 6 du projet du Panama. De l’avis de la majorité de la Commission, il exprime le sens du terme «égalité souveraine» employé à l’Article 2 (1) de la Charte des Nations Unies, tel qu’il a été interprété à la Conférence de San Francisco en 1945.»
25 B. Fassbender, «Purposes and Principles, Article 2(1)», The Charter of the United Nations: A Commentary, vol. I (3e éd.), B. Simma, D.-E. Khan, G. Nolte, A. Paulus, N. Wessendorf (sous la dir. de), Oxford, OUP, 2012, p. 149 et 153-154.
26 Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les Etats conformément à la Charte des Nations Unies (1970), résolution 2625 (XXV) adoptée par l’Assemblée générale.
27 Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d’Amérique), fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1986, p. 99, 101, 102-103, 106-107 et 133, par. 188, 191, 193, 202, 264 ; Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt, C.I.J. Recueil 2005, p. 226 et 268, par. 162 et 300 ; Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif, C.I.J. Recueil 2004 (I), p. 171, par. 87 ; Licéité de l’utilisation des armes nucléaires par un Etat dans un conflit armé, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1996 (I), p. 264, par. 102.
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des différends internationaux aux fins du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Cette intention ressort également des travaux préparatoires de la résolution
28.
17. En interprétant l’objet et le but de la convention de Vienne, je dois accorder une attention particulière à la dimension préventive et corrective des relations diplomatiques. Le «maintien de la paix et de la sécurité internationales» évoqué par le préambule peut être obtenu au moyen de la prévention des conflits et du règlement pacifique des différends29. La Cour a confirmé cette approche dans l’affaire relative au Personnel diplomatique et consulaire des Etats-Unis à Téhéran (Etats-Unis d’Amérique c. Iran) (mesures conservatoires, ordonnance du 15 décembre 1979, C.I.J. Recueil 1979, p. 19, par. 39), dans laquelle elle a déclaré ceci :
«l’institution de la diplomatie, avec les privilèges et immunités qui s’y rattachent, a résisté à l’épreuve des siècles et s’est avérée un instrument essentiel de coopération efficace dans la communauté internationale, qui permet aux Etats, nonobstant les différences de leurs systèmes constitutionnels et sociaux, de parvenir à la compréhension mutuelle et de résoudre leurs divergences par des moyens pacifiques».
18. Outre l’objet et le but décrits jusqu’à présent, les relations diplomatiques exigent le développement d’une coopération plus dynamique entre les Etats30. Dans un domaine où règnent les échanges réciproques, la convention de Vienne offre un cadre aux Etats afin qu’ils agissent sur un pied d’égalité. Elle leur donne un moyen de protéger leurs intérêts, ceux de leurs ressortissants et entreprises à l’étranger, et donc d’engranger les bénéfices découlant de l’échange de représentants. Des avantages mutuels facilitent le respect mutuel de notions telles que les immunités, l’inviolabilité et les privilèges des diplomates au titre du droit diplomatique. Les Etats Membres de l’Organisation des Nations Unies avaient demandé la consécration de ces intérêts et avantages mutuels, qui sont consignés dans la convention de Vienne31.
19. La Cour, lorsqu’il lui est demandé de régler des différends entre Etats concernant l’interprétation du droit diplomatique, doit donc prêter dûment attention à ces alinéas essentiels du préambule relatifs à l’égalité souveraine, à la coexistence pacifique et au développement de relations amicales, et ce, en vue de garantir l’accomplissement efficace des fonctions des missions diplomatiques. Une telle approche engendrerait davantage de cohérence dans le domaine des privilèges et immunités diplomatiques. A mon sens, une lecture de la convention permettant une objection unilatérale à la désignation des «locaux de la mission» nuirait aux principes fondamentaux énoncés dans cet instrument, mettant ainsi en péril le subtil équilibre exprimé par l’objet et le but du traité. En outre, une telle objection, qu’elle soit ou non appréciée à l’aune de facteurs tels que la communication en temps voulu et le caractère non arbitraire, ne favoriserait pas des relations amicales mais constituerait une atteinte à la souveraineté. En pareilles circonstances, le pouvoir discrétionnaire ainsi conféré à l’Etat accréditaire ne semblerait pas pouvoir donner lieu à un exercice de bonne foi, mais risquerait de favoriser la notion de supériorité juridique d’un Etat sur un autre.
28 Nations Unies, Documents officiels de l’Assemblée générale, 19e session, doc. A/5746 ; 21e session, doc. A/6230 ; 22e session, doc. A/6799 ; 23e session, doc. A/7326 ; 24e session, supplément no 19, doc. A/7619 ; 25e session, supplément no 18, doc. A/8018.
29 S. Duquet & J. Wouters, «Diplomatic and Consular Relations», The Oxford Handbook of United Nations Treaties, S. Chesterman, D. M. Malone, S. Villalpando (sous la dir. de), Oxford, OUP, 2019, p. 567.
30 Le Pacte de la Société des Nations (Paris, 28 juin 1919) encourageait uniquement à «entretenir au grand jour des relations internationales fondées sur la justice et l’honneur».
31 S. Duquet & J. Wouters, «Diplomatic and Consular Relations», The Oxford Handbook of United Nations Treaties, S. Chesterman, D. M. Malone, S. Villalpando (sous la dir. de), Oxford, OUP, 2019, p. 568.
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D. Le consentement mutuel visé à l’article 2 de la convention de Vienne
20. Un aspect qui est au coeur même du présent exposé de mon opinion est que la convention de Vienne prévoit clairement que l’établissement des relations diplomatiques entre Etats a lieu par consentement mutuel. S’agissant des relations diplomatiques de manière générale et de l’établissement des relations et missions diplomatiques en particulier, l’article 2 dispose en effet que «[l]’établissement de relations diplomatiques entre Etats et l’envoi de missions diplomatiques permanentes se font par consentement mutuel».
21. Le sens ordinaire de l’article 2 indique donc que le consentement mutuel est requis pour l’établissement de relations diplomatiques. La CDI a déclaré en 1957, dans son commentaire du projet d’article premier (futur article 2) de la convention de Vienne, qu’elle «constat[ait] ici la pratique généralement suivie par les Etats»32. Par la suite, en 1958, la CDI, se référant à l’article 2, a expliqué ce qui suit :
«Dans la doctrine on parle souvent d’un «droit de légation» dont jouirait chaque Etat souverain. L’interdépendance des nations et l’intérêt de développer des relations amicales entre elles, qui est l’un des buts de l’Organisation des Nations Unies, nécessitent l’établissement de relations diplomatiques entre elles. Toutefois, comme le droit de légation ne peut être exercé sans l’accord des parties, la Commission n’a pas cru devoir en faire mention dans le texte du projet.33»
Et la CDI d’ajouter :
«[l]a forme la plus perfectionnée pour maintenir des relations diplomatiques entre deux Etats consiste pour chacun d’eux à établir une mission diplomatique permanente (ambassade ou légation), sur le territoire de l’autre, mais rien n’empêche deux Etats de convenir d’autres méthodes pour leurs relations diplomatiques, par exemple de décider de les assurer par l’intermédiaire de leurs missions dans un Etat tiers34».
22. Hormis cette disposition relative au consentement mutuel, la convention de Vienne n’exige nullement le consentement de l’Etat accréditaire pour que soient établis les locaux de la mission. Un critère permettant une objection unilatérale à la désignation des locaux de la mission, que cette objection soit ou non considérée comme raisonnable, ne reflèterait pas le consentement mutuel ou l’agrément entre les parties auxquels la convention et la CDI subordonnent l’établissement de relations diplomatiques. Il est donc raisonnable d’avancer que le fait de permettre une objection à la désignation aurait inévitablement pour conséquence d’accorder au consentement de l’Etat accréditaire un rôle important dans l’établissement des «locaux de la mission», ce qui ne rend pas compte de l’idée selon laquelle le droit de légation ne peut être exercé sans l’accord des deux parties.
E. Arguments des Parties
23. Le principal argument de la Guinée équatoriale était qu’en procédant à des perquisitions et à des saisies au 42 avenue Foch à Paris puis à la saisie pénale immobilière du bâtiment, la France avait porté atteinte à l’inviolabilité de ses locaux diplomatiques. La Guinée équatoriale a rappelé que, en vertu de la règle de l’inviolabilité,
32 Projet d’articles relatifs aux relations et immunités diplomatiques et son commentaire, Annuaire de la Commission du droit international, 1957, vol. II, p. 149.
33 Ibid., 1958, vol. II, p. 93.
34 Ibid.
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«la police, les huissiers de justice, les inspecteurs de sécurité, etc. ne peuvent pénétrer à l’intérieur des locaux sans le consentement du chef de la mission. Les locaux de la mission ne peuvent faire l’objet d’aucune perquisition ou contrôle. Toute notification d’actes de justice ne peut se faire à l’adresse des locaux de la mission, mais uniquement par les canaux diplomatiques.»35
24. D’après la Guinée équatoriale, l’article 22 de la convention de Vienne faisait naître une obligation absolue qui ne souffrait aucune exception36. La Guinée équatoriale a soutenu que, «[m]ême lorsqu’il y a[vait] un soupçon que les locaux de la mission seraient utilisés de manière incompatible avec les fonctions de la mission, ils n[’étaient] pas pour autant susceptibles d’immixtion de la part des agents de l’Etat accréditaire37». Elle a énuméré les multiples occasions où les autorités françaises s’étaient introduites sans le consentement du chef de mission dans l’immeuble du 42 avenue Foch à Paris pour y réaliser des perquisitions38.
25. La Guinée équatoriale a fait valoir qu’«[u]n immeuble tout juste acquis par l’Etat accréditant, lorsque celui-ci le destine, comme en l’espèce, à servir de locaux de sa mission diplomatique, bénéficie de l’inviolabilité au même titre qu’un immeuble effectivement occupé à cette fin39». Selon elle, le consentement de l’Etat accréditaire est indifférent pour déterminer le moment où commence l’inviolabilité de certains locaux 40, et telle serait l’interprétation correcte de l’alinéa i) de l’article premier de la convention de Vienne41. La Guinée équatoriale a également affirmé que la convention de Vienne créait une présomption de validité lorsqu’un Etat accréditant invoquait le caractère diplomatique de certains locaux 42, et a soutenu que son interprétation découlait du sens ordinaire des termes de la convention, de ses travaux préparatoires et d’une pratique répandue des Etats43. La Guinée équatoriale a aussi fait état d’une pratique de longue date entre la France et elle-même, selon laquelle la notification de l’intention d’utiliser un immeuble aux fins de la mission diplomatique suffisait pour que cet immeuble acquît le statut diplomatique44.
26. Toujours selon la Guinée équatoriale, l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris a acquis le statut de «locaux de la mission» le 4 octobre 2011, jour où elle en a donné notification à la France en ces termes :
«[L]’Ambassade dispose depuis plusieurs années d’un immeuble situé au 42 Avenue Foch, Paris XVIe[,] qu’elle utilise pour l’accomplissement des fonctions de sa Mission Diplomatique sans qu’elle ne l’ait formalisé expressément auprès de vos services jusqu’à ce jour. Dans la mesure où il s’agit des locaux de la Mission Diplomatique, conformément à l’article premier de la Convention de Vienne du 18 avril 1961 sur les [relations] diplomatiques, la République de Guinée équatoriale souhaite
35 Mémoire de la Guinée équatoriale (MGE), par. 8.7.
36 Ibid., par. 8.8. Voir aussi CR 2020/1, p. 15, par. 2 (Wood) ; CR 2020/3, p. 10, par. 6 (Wood).
37 MGE, par. 8.10.
38 Ibid., par. 8.14 et 8.17-8.19.
39 Ibid., par. 8.15-8.16. Voir aussi CR 2020/1, p. 35, par. 21 (Kamto).
40 MGE, par. 8.26 et 8.34. Voir aussi CR 2020/1, p. 36-39, par. 24-35 (Kamto).
41 Réplique de la Guinée équatoriale (RGE), par. 2.47.
42 Ibid., par. 2.14.
43 Ibid., par. 2.3 ; MGE, par. 8.42-8.45.
44 RGE, par. 2.32.
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vous informer officiellement afin que l’Etat français, conformément à l’article 22 de ladite Convention, assure la protection de ces locaux.»
45
27. La Guinée équatoriale a en outre déclaré que, à cette date, l’immeuble du 42 avenue Foch à Paris n’appartenait plus à M. Teodoro Nguema Obiang Mangue puisque, le 15 septembre 2011, elle était devenue actionnaire majoritaire des sociétés propriétaires dudit immeuble46. Elle a également déclaré qu’elle avait décidé de déménager son ambassade avant même de devenir propriétaire des locaux47. La Guinée équatoriale a conclu que les perquisitions menées au 42 avenue Foch à Paris du 14 au 23 février 2012 et le 19 juillet 2012 étaient illicites48 en ce qu’elles portaient atteinte à l’inviolabilité à laquelle les «locaux de [s]a mission» avaient droit49.
28. C’est toutefois le 27 juillet 2012 que la Guinée équatoriale a fait savoir que le «déménagement effectif» des services de son ambassade au 42 avenue Foch à Paris avait eu lieu et qu’elle utilisait l’immeuble pour «l’accomplissement des fonctions de sa mission diplomatique50». La France en a reçu notification en ces termes :
«L’Ambassade de la République de Guinée équatoriale présente ses compliments au Ministère des Affaires Etrangères et Européennes  Direction Général[e] du Protocole, Sous-Direction des Privilèges et Immunités Diplomatiques, et a l’honneur de lui communiquer que les services de l’Ambassade sont, à partir de vendredi 27 juillet 2012, installés à l’adresse sise : 42 Avenue Foch, Paris 16ème, immeuble qu’elle utilise désormais pour l’accomplissement des fonctions de sa Mission Diplomatique en France.51»
29. Le principal argument de la France était qu’aux dates des perquisitions dont la Guinée équatoriale tirait grief, l’immeuble du 42 avenue Foch à Paris n’avait pas le statut de «locaux de la mission» au sens de la convention de Vienne et n’était par conséquent pas inviolable en vertu de l’article 22 de cette convention. Selon la France, un immeuble ne peut bénéficier du statut de local diplomatique que si, d’une part, elle ne s’est pas, en tant qu’Etat accréditaire, opposée de manière expresse à ce qu’il soit considéré comme faisant partie de la mission diplomatique et si, d’autre part, il est affecté de manière effective à des fins diplomatiques52.
30. La France a admis que la convention de Vienne ne fournissait aucune précision sur la procédure à suivre pour faire reconnaître l’inviolabilité des «locaux de la mission»53. Elle a cependant
45 Voir MGE, annexe 33. Voir aussi ibid., par. 8.46 ; RGE, par. 1.41 ; CR 2020/1, p. 43, par. 47 (Kamto). En tout Etat de cause, la Guinée équatoriale déclare que M. Obiang, en sa qualité de propriétaire de l’immeuble du 42 avenue Foch à Paris, permettait l’utilisation dudit immeuble à des fins diplomatiques même pendant les années antérieures à 2011. Voir RGE, par. 1.2.
46 MGE, par. 8.31.
47 RGE, par. 1.25.
48 MGE, par. 8.20 ; RGE, par. 2.51.
49 MGE, par. 8.22-8.25.
50 Ibid., par. 8.48. Voir aussi CR 2020/1, p. 12, par. 6 (Nvono Nca) ; GEF 2020/33, p. 6.
51 Voir MGE, annexe 47.
52 Contre-mémoire de la France (CMF), par. 3.3.
53 CMF, par. 3.8.
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contesté l’argument que la Guinée équatoriale tirait de l’article 12 de la convention
54 : selon elle, le fait que l’obligation du consentement exprès figure seulement à l’article 12 ne pouvait signifier que le consentement n’était pas nécessaire pour établir une mission diplomatique dans une capitale55. La France a également relevé que la question de la propriété du 42 avenue Foch à Paris était sans rapport avec la jouissance par ces locaux de l’inviolabilité garantie par la convention de Vienne56, une position selon elle étayée par le libellé des articles premier, alinéa i), et 22 de la convention57. Elle a encore soutenu que la thèse déclarative de la Guinée équatoriale n’était pas corroborée par la pratique des Etats58.
31. La France a affirmé qu’un bâtiment ne pouvait constituer les «locaux de la mission» que s’il était effectivement utilisé en tant que tel59, et a renvoyé aux travaux préparatoires de la convention de Vienne60 ainsi qu’à la pratique de l’Allemagne, du Canada, des Etats-Unis et du Royaume-Uni61 pour étayer sa thèse. Elle a souligné que le 42 avenue Foch à Paris «n’était affecté à aucune activité diplomatique effective lorsqu’il a[vait] fait l’objet de mesures de perquisition entre le 28 septembre 2011 et le 23 février 2012, pas plus qu’il ne l’était lorsque la saisie pénale immobilière a[vait] été diligentée le 19 juillet 201262». Elle a en outre rappelé que la Guinée équatoriale avait concédé que le 42 avenue Foch à Paris avait acquis le statut diplomatique le 4 octobre 2011 et qu’en conséquence les perquisitions réalisées avant cette date ne pouvaient engager la responsabilité de la France63. La défenderesse a indiqué que le 27 juillet 2012 était, au plus tôt, la date à laquelle on pouvait considérer que les «locaux de la mission» avaient été effectivement transférés au 42 avenue Foch à Paris64. Il n’y avait donc pas eu, selon elle, atteinte à l’inviolabilité desdits locaux à la date à laquelle la saisie pénale immobilière du 42 avenue Foch à Paris avait été ordonnée, de sorte que sa responsabilité internationale n’était pas engagée.
32. Les arguments avancés par la Guinée équatoriale et la France montrent que celles-ci font du régime d’inviolabilité prévu par la convention de Vienne des interprétations fort éloignées qui vont de «l’intention d’utiliser» au «consentement exprès». Je suis d’avis que le sens ordinaire des termes de l’alinéa i) de l’article premier de la convention de Vienne, interprétés à la lumière de l’objet et du but de celle-ci, constitue un critère clair aux fins de la désignation des «locaux de la mission».
F. Interprétation de l’alinéa i) de l’article premier de la convention de Vienne
33. L’alinéa i) de l’article premier de la convention de Vienne dispose ce qui suit :
54 L’article 12 exige le consentement exprès de l’Etat accréditaire pour l’établissement de bureaux faisant partie de la mission dans d’autres localités que la capitale dudit Etat.
55 CMF, par. 3.15.
56 Duplique de la France (DF), par. 2.5.
57 Ibid., par. 2.17.
58 CMF, par. 3.16-3.23. Voir aussi DF, par. 2.25-2.26 ; CR 2020/2, p. 31-32, par. 19-21 (Bodeau-Livinec). La France se fonde sur les règles et pratiques de l’Afrique du Sud, de l’Allemagne, de l’Australie, du Brésil, du Canada, de l’Espagne, de la Norvège, des Pays-Bas, de la République tchèque, de la Suisse et de la Turquie.
59 CMF, par. 3.24. Voir aussi CR 2020/2, p. 35, par. 29 (Bodeau-Livinec).
60 Ibid., par. 3.26-3.31.
61 Ibid., par. 3.32-3.42.
62 Ibid., par. 3.54.
63 DF, par. 2.39. Voir aussi CR 2020/2, p. 39, par. 4 (Grange).
64 CMF, par. 3.57 (la France renvoie à l’annexe 47 du mémoire de la Guinée équatoriale). Voir aussi CR 2020/2, p. 43, par. 22 (Grange).
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«Aux fins de la présente Convention, les expressions suivantes s’entendent comme il est précisé ci-dessous :
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
i) L’expression «locaux de la mission» s’entend des bâtiments ou des parties de bâtiments et du terrain attenant qui, quel qu’en soit le propriétaire, sont utilisés aux fins de la mission, y compris la résidence du chef de la mission.»
Aux termes de l’article 22 de la convention,
«1. Les locaux de la mission sont inviolables. Il n’est pas permis aux agents de l’Etat accréditaire d’y pénétrer, sauf avec le consentement du chef de la mission.
2. L’Etat accréditaire a l’obligation spéciale de prendre toutes mesures appropriées afin d’empêcher que les locaux de la mission ne soient envahis ou endommagés, la paix de la mission troublée ou sa dignité amoindrie.
3. Les locaux de la mission, leur ameublement et les autres objets qui s’y trouvent, ainsi que les moyens de transport de la mission, ne peuvent faire l’objet d’aucune perquisition, réquisition, saisie ou mesure d’exécution.»
34. Les dispositions de l’article 22 ne définissent pas les termes «locaux de la mission», mais elles renvoient implicitement à la définition qui est donnée à l’alinéa i) de l’article premier. L’article 22 crée donc un régime d’inviolabilité applicable aux locaux qui entrent dans la catégorie des «locaux de la mission», tels que définis à l’alinéa i) de l’article premier.
35. Les dispositions de la convention de Vienne doivent être interprétées selon les règles coutumières d’interprétation des traités consacrées aux articles 31 et 32 de la convention de Vienne sur le droit des traités (ci-après la «CVDT») 65. Aux termes du paragraphe 1 de l’article 31 de celle-ci, «[u]n traité doit être interprété de bonne foi suivant le sens ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son objet et de son but».
36. Lorsque l’interprétation donnée conformément à l’article 31 de la CVDT laisse le sens ambigu ou obscur ou conduit à un résultat manifestement absurde ou déraisonnable, l’article 32 dispose qu’«[i]l peut être fait appel à des moyens complémentaires d’interprétation, et notamment aux travaux préparatoires et aux circonstances dans lesquelles le traité a été conclu».
37. Le sens ordinaire des termes de l’alinéa i) de l’article premier et de l’article 22 de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques n’indique pas précisément quand des locaux donnés deviennent «locaux de la mission» et commencent donc à jouir du régime d’inviolabilité. Toutefois, l’alinéa i) de l’article premier semble fournir quelques indications utiles. Premièrement, selon cette disposition, la qualification de locaux donnés en tant que «locaux de la mission» est indépendante de la propriété desdits locaux, ce qui donne à penser que les arguments des Parties concernant la propriété du 42 avenue Foch à Paris n’étaient pas pertinents pour la décision de la Cour en l’espèce. Dans certains cas, un Etat accréditant peut acquérir des locaux de sa mission diplomatique par la location ou autrement, et l’accès à la propriété peut ne pas être possible pour tous
65 Nations Unies, Recueil des traités, vol. 1155, p. 331. Voir Question de la délimitation du plateau continental entre le Nicaragua et la Colombie au-delà de 200 milles marins de la côte nicaraguayenne (Nicaragua c. Colombie), exceptions préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 2016 (I), p. 116, par. 33.
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les Etats
66. Partant, la question de la propriété des locaux n’est pas pertinente pour déterminer le statut de l’immeuble. Deuxièmement, toujours selon l’alinéa i) de l’article premier, les «locaux de la mission» sont des locaux qui sont «utilisés aux fins de la mission». On notera que cette disposition emploie le terme «utilisés», ce qui laisse entendre qu’un critère d’utilisation effective doit être appliqué pour définir les «locaux de la mission» ; si les rédacteurs de la convention de Vienne avaient voulu retenir l’utilisation prévue comme critère définissant les «locaux de la mission», ils auraient employé l’expression «destinés à être utilisés» à l’alinéa i).
38. C’est l’utilisation ultérieure des locaux «aux fins de la mission» qui détermine le statut diplomatique de ces derniers. L’expression «utilisés aux fins de la mission» doit être interprétée dans le contexte de la liste «non exhaustive» des fonctions diplomatiques dressée au paragraphe 1 de l’article 3 de la convention de Vienne. Au cours des travaux de la CDI, il a été indiqué que la définition des fonctions diplomatiques devait «être explicative [et que] les Etats d[evaient] pouvoir s’y référer pour savoir en quoi consist[ai]ent, à l’[époque considérée], les fonctions diplomatiques»67. Partant, la pratique suivie s’agissant de savoir quels locaux sont considérés comme étant «utilisés aux fins de la mission» pourrait permettre d’apprécier le moment à partir duquel des locaux donnés peuvent être qualifiés de mission diplomatique. Une telle pratique peut fournir de précieuses indications pour déterminer les éléments d’interprétation des termes «utilisés aux fins de la mission», puisqu’il est affirmé dans le préambule de la convention de Vienne que «les règles du droit international coutumier doivent continuer à régir les questions qui n’ont pas été expressément réglées dans les dispositions» de ladite convention.
39. Le sens ordinaire des termes de l’alinéa i) de l’article premier de la convention de Vienne semble donc indiquer que le statut de «locaux de la mission» doit être établi par application d’un critère exigeant une «utilisation effective» «aux fins de la mission».
40. S’agissant de la question de savoir si la convention de Vienne permet qu’il soit fait objection à la désignation de locaux de la mission, les termes de l’alinéa i) de l’article premier, pris dans leur sens ordinaire, ne font pas référence à un tel critère et ne précisent pas non plus si quelque autre forme de consentement de la part de l’Etat accréditaire est nécessaire pour cette désignation. J’estime que le contexte de cette disposition ainsi que l’objet et le but de la convention de Vienne fournissent davantage d’indications sur ce point.
41. Le contexte de l’alinéa i) de l’article premier aide à déterminer le moment à partir duquel, selon la convention de Vienne, des locaux acquièrent le statut diplomatique.
42. Aux termes du paragraphe 1 de l’article 4 de la convention, «[l]’Etat accréditant doit s’assurer que la personne qu’il envisage d’accréditer comme chef de la mission auprès de l’Etat accréditaire a reçu l’agrément de cet Etat» ; le paragraphe 2 du même article précise que «[l]’Etat accréditaire n’est pas tenu de donner à l’Etat accréditant les raisons d’un refus d’agrément». Le paragraphe 1 de l’article 5 dispose ensuite que l’Etat accréditant peut, «après due notification aux Etats accréditaires intéressés», accréditer un chef de mission ou affecter un membre du personnel diplomatique auprès de plusieurs Etats, et ce, «à moins que l’un des Etats accréditaires ne s’y oppose expressément». L’accréditation de la même personne en qualité de chef de mission par plusieurs
66 E. Denza, Diplomatic Law: Commentary on the Vienna Convention on Diplomatic Relations, 4e éd., Oxford, OUP, 2016, p. 16.
67 Comptes rendus analytiques de la neuvième session (393e séance), Annuaire de la Commission du droit international, 1957, vol. I, p. 53, par. 64.
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Etats, prévue à l’article 6, est également subordonnée à l’absence d’opposition expresse de l’Etat accréditaire.
43. Une lecture contextuelle de l’alinéa i) de l’article premier de la convention de Vienne semble indiquer qu’il n’existe pas de condition similaire d’objection ou de consentement exprès de l’Etat accréditaire pour ce qui est de l’établissement des «locaux de la mission». Il s’ensuit que l’on ne saurait conclure à l’existence d’une telle condition sur la base d’une lecture contextuelle de l’alinéa i) de l’article premier. S’ils avaient voulu inclure la possibilité pour l’Etat accréditaire de s’opposer à l’établissement de locaux diplomatiques, les rédacteurs l’auraient fait expressément, comme ils l’ont fait pour l’accréditation des chefs de mission. En l’absence d’une condition expresse, et tout en tenant dûment compte de la nécessité de concilier les intérêts des Etats accréditant et accréditaire, on pourrait déduire que la définition des «locaux de la mission» devrait à tout le moins nécessiter, outre l’utilisation effective, une notification de l’Etat accréditant à l’Etat accréditaire de l’utilisation d’un immeuble donné à des fins diplomatiques.
44. L’objet et le but de la convention de Vienne peuvent se déduire du préambule et du texte dans son ensemble. Le deuxième alinéa du préambule fait mention «des buts et des principes de la Charte des Nations Unies concernant l’égalité souveraine des Etats, le maintien de la paix et de la sécurité internationales et le développement de relations amicales entre les nations». Le troisième alinéa indique «qu’une convention internationale sur les relations, privilèges et immunités diplomatiques … contribuera[] à favoriser les relations d’amitié entre les pays, quelle que soit la diversité de leurs régimes constitutionnels et sociaux». Et le quatrième alinéa dit que «le but desdits privilèges et immunités est non pas d’avantager des individus mais d’assurer l’accomplissement efficace des fonctions des missions diplomatiques en tant que représentants des Etats».
45. L’article 3 de la convention de Vienne expose les fonctions d’une mission diplomatique, lesquelles comprennent le fait de représenter l’Etat accréditant auprès de l’Etat accréditaire, de protéger sur le territoire de ce dernier les intérêts des ressortissants de l’Etat accréditant et de négocier avec le gouvernement de l’Etat accréditaire.
46. Les articles 4 à 19 de la convention de Vienne régissent des questions liées au personnel d’une mission diplomatique, telles que la nomination du chef de la mission, l’agrément de l’Etat accréditaire, l’accréditation auprès de cet Etat et les questions de préséance. Les articles 20 à 25 concernent les droits et obligations des Etats accréditant et accréditaire à l’égard des locaux de la mission diplomatique. Les articles 26 à 47 traitent des privilèges et immunités des agents diplomatiques et de leurs familles ainsi que des archives et de la correspondance diplomatiques.
47. Le préambule et la structure de la convention de Vienne, ainsi que les fonctions des missions diplomatiques énoncées en son article 3, indiquent que ladite convention vise à faciliter l’établissement et le maintien de relations diplomatiques entre les Etats, à favoriser des relations amicales et à faire en sorte que l’égalité souveraine des Etats soit dûment respectée.
48. Compte tenu de ce qui précède, retenir l’utilisation prévue des locaux comme critère d’acquisition du statut diplomatique pourrait engendrer une situation trop nébuleuse pour l’Etat accréditaire. Si les dispositions de la convention de Vienne relatives à l’établissement d’une mission diplomatique ne semblent pas restreindre le choix des Etats accréditants quant au lieu et à la date d’établissement de ladite mission, on peut raisonnablement penser que cette convention accorde à l’Etat accréditaire les moyens de savoir, avec un degré suffisant de certitude, si des locaux donnés
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jouissent ou non du statut diplomatique. Le critère de l’utilisation effective pourrait constituer un tel moyen, et non celui de l’utilisation prévue.
49. L’objet et le but de la convention de Vienne semblent également entraîner une autre conséquence. A mon sens, il serait contraire à l’objet et au but de ladite convention de permettre à un Etat accréditant d’établir les «locaux de [s]a mission» sur le territoire de l’Etat accréditaire sans que ce dernier puisse savoir, avec un degré suffisant de certitude, quels locaux ont effectivement un caractère diplomatique et jouissent donc de l’inviolabilité prévue à l’article 22 de la convention. Une incertitude des Etats accréditaires quant à la localisation des «locaux de la mission» ne paraît guère propice à l’établissement et au maintien de relations diplomatiques avec les Etats accréditants. L’objet et le but de la convention de Vienne donnent donc à penser que, dans l’intérêt de la certitude, un Etat accréditant doit au minimum notifier à l’Etat accréditaire que tels ou tels locaux seront utilisés aux fins de sa mission diplomatique.
50. Pour étayer leurs arguments respectifs, les Parties ont évoqué plusieurs exemples de pratique étatique dans l’application de la convention de Vienne. Etant donné que la Cour avait principalement ici une tâche d’interprétation à accomplir, c’était dans le cadre des règles d’interprétation des traités qu’elle devait apprécier la pertinence et le poids de cette pratique. Le paragraphe 3 de l’article 31 de la CVDT dispose qu’«[i]l sera tenu compte, en même temps que du contexte[,] … [d]e toute pratique ultérieurement suivie dans l’application du traité par laquelle est établi l’accord des parties à l’égard de l’interprétation du traité». Cependant, pour qu’une pratique ultérieure ait valeur d’«interprétation authentique», il faut que cette pratique et l’interprétation qu’elle traduit aient recueilli l’assentiment tacite des parties de manière générale ; telle est l’approche retenue par la CDI dans ses travaux sur le droit des traités68 et sur la pratique ultérieure dans le contexte de l’interprétation des traités69.
51. Cela dit, la CDI a confirmé en 2018, dans son projet de conclusions sur la pratique ultérieure70, qu’une pratique étatique insuffisante pour constituer une «pratique ultérieurement suivie» pouvait quand même constituer un moyen complémentaire d’interprétation au sens de l’article 32 de la CVDT. En effet, selon la CDI, «la pratique ultérieurement suivie dans l’application du traité, qui n’établit pas l’accord de toutes les parties au traité mais seulement celui d’une ou de plusieurs parties, peut être utilisée comme un moyen complémentaire d’interprétation»71. Ainsi, si l’application des moyens d’interprétation prévus à l’article 31 de la CVDT devait laisser le sens de l’alinéa i) de l’article premier «ambigu ou obscur» ou conduire à «un résultat … manifestement absurde ou déraisonnable», on pouvait recourir, parallèlement aux travaux préparatoires, aux exemples de pratique mentionnés par les Parties comme moyen complémentaire d’interprétation.
52. Si les deux Parties ont renvoyé à la pratique ultérieurement suivie par certains Etats dans l’application de la convention de Vienne, cette pratique ne me semble toutefois pas être suffisamment uniforme pour privilégier telle ou telle interprétation de l’alinéa i) de l’article premier. Je parviens à la même conclusion s’agissant de la pratique de la Guinée équatoriale et de la France entre elles ; j’ajouterai qu’il ne me paraît guère approprié de s’appuyer sur la pratique des Parties entre elles pour interpréter un traité multilatéral. La Cour, dans l’affaire du Plateau continental de la mer du Nord
68 Sixième rapport sur le droit des traités, par Sir Humphrey Waldock, rapporteur spécial, Annuaire de la Commission du droit international, 1966, vol. II, p. 107, par. 18.
69 Projet de conclusions concernant les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités et commentaires y relatifs, Nations Unies, Rapport de la Commission du droit international sur les travaux de sa soixante-dixième session, 17 août 2018, doc. A/73/10, p. 13.
70 Ibid., p. 21, par. 8.
71 Ibid., p. 21, par. 9.
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(République fédérale d’Allemagne/Danemark) (République fédérale d’Allemagne/Pays-Bas) (arrêt, C.I.J. Recueil 1969, p. 43, par. 74), a également déclaré qu’il convenait que «la pratique des Etats, y compris ceux qui [étaient] particulièrement intéressés, [eût] été fréquente et pratiquement uniforme dans le sens de la disposition invoquée».
53. Je suis d’avis que l’application à l’alinéa i) de l’article premier de la convention de Vienne des moyens d’interprétation visés à l’article 31 de la CVDT n’en laisse pas le sens ambigu ou obscur ni ne conduit à un résultat manifestement absurde ou déraisonnable. Par conséquent, point n’est besoin de recourir aux moyens complémentaires d’interprétation prévus à l’article 32 de la CVDT72. Néanmoins, j’examinerai les travaux préparatoires de la convention de Vienne, qui confirment et corroborent l’interprétation découlant de l’application de la règle générale d’interprétation contenue à l’article 31 de la CVDT.
54. Au cours des travaux qui ont abouti à l’adoption en 1961 de la convention de Vienne, un membre de la CDI a déclaré que la question du moment à partir duquel des locaux bénéficieraient de l’inviolabilité était «très épineuse»73. Parmi les diverses observations formulées par les membres de la CDI, on notera celles-ci : «les locaux jouissent de l’inviolabilité à dater du moment où ils sont mis à la disposition de la mission» et «[i]l est hors de doute que [l’inviolabilité] commence au moment même où les locaux sont mis à la disposition de la mission»74. Il a en outre été dit ce qui suit :
«[q]uant au moment où commence cette inviolabilité … l’Etat accréditant a coutume de notifier à l’Etat accréditaire que certains locaux seront désormais destinés à être le siège de sa mission. L’inviolabilité peut donc commencer à la date où cette notification parvient à l’Etat accréditaire, même si le chef de la mission arrive beaucoup plus tard».75
55. Aucun membre n’a estimé que le consentement préalable de l’Etat ou quelque autre forme d’agrément était nécessaire pour que l’inviolabilité s’applique aux locaux de la mission diplomatique.
56. Dans son commentaire du projet d’articles en 1958, la CDI ne s’est pas étendue sur la définition des «locaux de la mission»76 et a seulement dit, s’agissant du projet d’article 20 (futur article 22 de la convention de Vienne), que «[l]es locaux de la mission compre[nai]ent les immeubles ou les parties d’immeubles utilisés pour les besoins de la mission, qu’ils [fussent] la propriété de l’Etat accréditant ou d’un tiers agissant pour son compte ou qu’ils [fussent] loués77».
57. La CDI semble avoir fait implicitement référence à un critère d’utilisation effective en employant l’expression «utilisés pour les besoins de la mission», ce qui confirme l’interprétation du sens ordinaire de l’alinéa i) de l’article premier proposée dans le présent exposé de mon opinion.
72 Application de la convention internationale pour la répression du financement du terrorisme et de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Ukraine c. Fédération de Russie), exceptions préliminaires, arrêt, C.I.J Recueil 2019 (II), p. 600, par. 112.
73 Comptes rendus analytiques de la neuvième session (394e séance), Annuaire de la Commission du droit international, 1957, vol. I, p. 56, par. 17 (Bartos).
74 Ibid., p. 56, par. 19 (Fitzmaurice). Voir aussi ibid., p. 56, par. 24 (Spiropoulos).
75 Ibid., p. 56 et 57, par. 25 (Ago).
76 Projet d’articles relatifs aux relations et immunités diplomatiques et son commentaire, Annuaire de la Commission du droit international, 1958, vol. II, p. 92.
77 Ibid., p. 98, par. 2.
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58. Bien que les travaux préparatoires ne semblent pas particulièrement aider à définir le moment à partir duquel des locaux acquièrent le statut diplomatique, le commentaire qui évoque la pratique de notification à l’Etat accréditaire donne à penser que, dans l’esprit des membres de la CDI, cette notification constituait le degré de communication nécessaire avec l’Etat accréditaire pour l’obtention du statut de «locaux de la mission». Cela pourrait aussi contribuer à démontrer que les membres de la Commission pensaient peut-être que cette notification était requise en droit international ou dans le cadre de la pratique diplomatique. Par conséquent, cette lecture des travaux préparatoires de la convention de Vienne confirme l’interprétation que j’ai proposée par l’application de l’article 31 de la CVDT.
G. Conclusion sur l’interprétation de l’alinéa i) de l’article premier
59. Premièrement, le sens ordinaire de l’alinéa i) de l’article premier de la convention de Vienne indique que «les locaux de la mission» sont définis selon le critère de l’utilisation effective, et non de l’utilisation prévue, par l’Etat accréditant. Cette interprétation semble être étayée par l’objet et le but de la convention.
Deuxièmement, si la convention de Vienne est muette quant aux moyens par lesquels l’Etat accréditaire est censé apprendre que des locaux donnés doivent être qualifiés de «locaux de la mission» au sens de l’alinéa i) de l’article premier, l’objet et le but de la convention ainsi que le contexte de cette disposition donnent à penser que l’Etat accréditant doit d’une manière ou d’une autre notifier à l’Etat accréditaire son utilisation ou son intention d’utiliser des locaux à des fins diplomatiques.
60. Il s’ensuit que les locaux choisis par l’Etat accréditant acquièrent le statut de «locaux de la mission», et donc le bénéfice du régime d’inviolabilité prévu à l’article 22 de la convention de Vienne, dès lors que deux conditions cumulatives sont remplies : premièrement, l’Etat accréditaire doit recevoir notification de l’utilisation ou de l’intention d’utiliser de tels locaux à des fins diplomatiques ; et, deuxièmement, ces locaux doivent être effectivement utilisés à des fins diplomatiques par l’Etat accréditant. La première condition à elle seule ne semble pas suffisante pour déterminer l’acquisition du statut diplomatique. Si la notification par l’Etat accréditant était la seule condition pour que des locaux donnés acquièrent le statut de «locaux de la mission», il pourrait manifestement y avoir des abus de la part des Etats accréditants. Par conséquent, je m’inscris respectueusement en faux contre la décision de la Cour qui semble faire abstraction de la condition du consentement mutuel et des principes consacrés dans le préambule de la convention de Vienne.
H. Application de la convention de Vienne aux faits de l’espèce
61. Il n’existait pas de désaccord entre les Parties quant aux faits de l’espèce, y compris s’agissant de la chronologie des événements pertinents aux fins de la demande de la Guinée équatoriale concernant l’immeuble du 42 avenue Foch à Paris.
Les actes de la France jusqu’au 27 juillet 2012
62. C’est par sa note verbale du 4 octobre 2011 que la Guinée équatoriale a notifié pour la première fois à la France que l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris serait utilisé comme «locaux de la mission»78. Il semble en conséquence que tout acte accompli par la France relativement à cet
78 MGE, annexe 33.
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immeuble avant le 4 octobre 2011 ne puisse constituer de la part de celle-ci un manquement à ses obligations envers la Guinée équatoriale au titre de la convention de Vienne.
63. Cependant, j’estime que la notification de la Guinée équatoriale, par sa note verbale du 4 octobre 2011, de son intention d’utiliser l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris comme son ambassade n’était pas suffisante pour conférer à cet immeuble le statut de «locaux de la mission». En plus d’adresser une notification à la France, la Guinée équatoriale devait aussi montrer qu’elle utilisait effectivement l’édifice comme son ambassade. Dans ses écritures, elle n’a jamais prétendu que ses services diplomatiques avaient été transférés au 42 avenue Foch à Paris avant le 27 juillet 2012, date à laquelle elle a adressé à la France une note verbale indiquant que «les services de l’Ambassade s[eraient], à partir de vendredi 27 juillet 2012, installés à l’adresse sise : 42 Avenue FOCH, Paris 16ème, immeuble qu’elle utilise[rait] désormais pour l’accomplissement des fonctions de sa Mission Diplomatique en France»79. Cette chronologie ne montre pas que les services diplomatiques de la demanderesse aient été transférés au 42 avenue Foch à Paris avant le 27 juillet 201280. Par conséquent, l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris n’était pas effectivement utilisé comme ambassade de la Guinée équatoriale avant le 27 juillet 2012.
64. J’avance dès lors que le 27 juillet 2012 est la date à laquelle étaient satisfaites les deux conditions à remplir pour que l’immeuble du 42 avenue Foch à Paris pût être qualifié de «locaux de la mission». Il s’ensuit que cet immeuble pouvait être considéré comme «locaux de la mission» de la Guinée équatoriale à compter de cette date et, par suite, bénéficier du régime d’inviolabilité prévu à l’article 22 de la convention de Vienne.
65. Après le 27 juillet 2012, les autorités françaises n’ont ni pénétré ni réalisé aucune perquisition dans l’immeuble du 42 avenue Foch à Paris, pas plus qu’elles n’ont saisi de biens mobiliers à l’intérieur. J’estime donc qu’aucun acte accompli par la France à l’égard du 42 avenue Foch à Paris avant le 27 juillet 2012 ne pouvait constituer de la part de celle-ci un manquement à ses obligations envers la Guinée équatoriale au titre de la convention de Vienne.
66. Cela étant, la France ne semble toujours pas reconnaître, à ce jour, l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris comme les «locaux de la mission» de la Guinée équatoriale. C’est ce qui ressort d’une déclaration faite par un conseil de la France à l’audience du 18 février 2020  je cite : «[l]’immeuble du 42 avenue Foch [à Paris] n’a donc jamais eu de statut diplomatique et n’est pas couvert par le régime d’inviolabilité de l’article 22 de la convention81».
I. «Utilisés aux fins de la mission»
67. La Guinée équatoriale déclarait dans son mémoire que le déménagement au 42 avenue Foch à Paris de tous les services de son ambassade était effectivement intervenu en 201282 et qu’elle n’avait depuis lors cessé d’utiliser officiellement cet immeuble comme son ambassade en France. Il convient de noter que des agents français se sont rendus dans l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris pour obtenir des visas d’entrée en Guinée équatoriale83.
79 MGE, annexe 47.
80 Ibid., chronologie (p. 185-196).
81 CR 2020/2, p. 34, par. 25 (Bodeau-Livinec).
82 MGE, par. 8.48.
83 Ibid., par. 2.13.
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68. Dans une note verbale datée du 12 mai 2016, la Guinée équatoriale a réaffirmé ses droits dans les termes suivants84 :
«L’Ambassade saisit cette occasion pour rappeler que, depuis octobre 2011, l’immeuble situé à Paris 16ème 42 avenue Foch est occupé de manière effective par la mission diplomatique de la République de Guinée Equatoriale en France ; que c’est d’ailleurs à cette adresse que les membres du gouvernement français présentent leur demande de visa d’entrée en Guinée Equatoriale, comme la Secrétaire d’Etat chargée du Développement et de la Francophonie qui y a effectué une visite officielle du 8 au 9 février 2015 ; que c’est à la même adresse qu’une unité des forces de l’ordre s’était rendue le 13 octobre 2015 pour y assurer la protection de la mission diplomatique lors d’une manifestation des membres de l’opposition équato-guinéenne en France.
L’Ambassade fait observer que la contradiction ainsi relevée, entre la position du Ministère et le comportement du gouvernement français quant à la nature juridique de l’immeuble situé à Paris XVIème 42 avenue Foch, ne saurait se faire au détriment de la République de Guinée Equatoriale.»85
69. Dès lors que les locaux de la mission doivent s’entendre des «bâtiments … qui, quel qu’en soit le propriétaire, sont utilisés aux fins de la mission…», les locaux effectivement utilisés, tels qu’ils le sont clairement dans les circonstances présentes et comme il a été démontré aux paragraphes 65 et 66 ci-dessus, doivent bénéficier du statut diplomatique. Par conséquent, le refus persistant de la France, après le 27 juillet 2012, de reconnaître l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris comme locaux de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale peut sembler injustifiable.
J. Observations quant à l’arrêt de la Cour
70. Compte tenu de ce qui précède, je m’inscris respectueusement en faux contre les conclusions auxquelles la majorité est parvenue dans l’arrêt. Je tiens à saisir cette occasion pour formuler les observations suivantes sur cette décision.
71. Tout d’abord, la seule notification par l’Etat accréditant aux fins de la désignation d’un bien donné comme locaux de la mission ouvre manifestement la voie à des abus (arrêt, paragraphe 67). Cela étant, l’objection unilatérale d’un Etat accréditaire au choix des locaux de la mission, qu’elle soit ou non appréciée à l’aune de facteurs tels que la communication en temps voulu et le caractère non arbitraire, ne traduit pas la conciliation d’intérêts qu’exige la convention de Vienne. S’agissant de relations entre Etats souverains égaux, il semblerait erroné de considérer que l’Etat accréditant n’a pas d’autre solution que de se plier aux souhaits de l’Etat accréditaire. Une objection unilatérale de l’Etat accréditaire ayant pour effet d’empêcher d’office l’acquisition du statut diplomatique risquerait d’entraîner un déséquilibre, au détriment de l’Etat accréditant. Ainsi, la conséquence logique des vues de la majorité est que l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris n’acquerra jamais le statut de locaux de la mission diplomatique. Il reste pourtant évident que les locaux ont de fait été utilisés depuis le 27 juillet 2012 aux fins de la mission au sens de l’alinéa i) de l’article premier de la convention de Vienne. Partant, la conséquence qui découle du présent arrêt  à savoir qu’un régime fixant les conditions de l’établissement de relations amicales entre des Etats souverains égaux aurait pour effet d’empêcher définitivement un bien donné d’acquérir le statut diplomatique pour cause d’objection  semble reposer sur une prémisse erronée.
84 MGE, annexe 51.
85 Ibid.
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72. La Guinée équatoriale affirme que, entre le 4 octobre 2011 et le 27 juillet 2012, elle était occupée à organiser le déménagement des services de son ambassade dans l’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris. Si la demanderesse n’a pas fait valoir que le déménagement de tous les services de l’ambassade était intervenu avant le 27 juillet 2012, il ressort toutefois de la note verbale du 27 juillet 2012 que l’utilisation prévue correspondait à l’utilisation effective à cette date. Des demandes de visa ont été présentées à cette adresse par des membres du Gouvernement français, et une unité des forces de police a été envoyée pour protéger la mission diplomatique pendant une manifestation. Dans ces circonstances, la conclusion selon laquelle les locaux n’ont jamais acquis le statut diplomatique revient à considérer que, alors que trois des cinq étapes requises avaient été achevées, un réexamen de la situation a été refusé lorsque les deux étapes restantes ont été accomplies, et ce, malgré l’absence de délai de prescription. Il apparaît que les autorités françaises n’ont nullement tenté par la suite de confirmer l’utilisation effective ou d’évaluer les démarches entreprises qui démontrent pareille utilisation. A mes yeux, il semblerait contraire aux objectifs de la convention de Vienne que les Etats accréditaires jouissent du pouvoir de décider unilatéralement des locaux que chaque Etat accréditant est habilité à utiliser, d’allouer des locaux à un Etat accréditant plutôt qu’à un autre ou, comme dans le cas présent, de refuser de reconnaître le statut diplomatique de locaux utilisés effectivement par un Etat accréditant en tant que locaux de sa mission diplomatique.
73. Une objection à la désignation permettrait à l’Etat accréditaire de disposer d’un pouvoir discrétionnaire tiré de la convention de Vienne. Cet Etat pourrait à tout moment refuser d’accorder le statut diplomatique, et, même si ce refus n’était ni arbitraire ni discriminatoire, il serait susceptible de donner lieu à des différends entre Etats accréditaires et accréditants au sujet d’objections à la désignation de locaux diplomatiques, ce qui pourrait compromettre le maintien de relations diplomatiques entre les Etats. En outre, pareille interprétation favorisant l’Etat accréditaire en lui conférant un pouvoir discrétionnaire quant à la désignation des locaux de la mission est difficilement compatible avec le principe de l’égalité souveraine des Etats. Il convient aussi de noter que la convention de Vienne ne semble pas envisager de mécanismes de réparation en cas de différend à cet égard. Du reste, même à supposer que de tels différends puissent être réglés par arbitrage ou toute autre forme de règlement, cela ne change rien au fait qu’une telle situation n’est guère propice à l’existence de relations amicales entre les Etats concernés. La Cour ne devrait pas se dérober à son devoir de se prononcer sur un régime qui exige la conciliation d’intérêts.
74. Il est vrai que la convention de Vienne impose certaines obligations aux Etats accréditaires ; néanmoins, elle le fait en vue de protéger les intérêts des ressortissants de l’Etat accréditant sur le territoire de l’Etat accréditaire et de prévoir des cas où un Etat accréditant aurait besoin de négocier avec le gouvernement de l’Etat accréditaire. Compte tenu de l’importance attachée aux droits de ce dernier et de la facilitation de leur exercice aux fins de l’égalité souveraine et de la conciliation d’intérêts, il semble inapproprié de considérer, comme dans l’arrêt, que la convention impose de lourdes obligations à l’Etat accréditaire. Je ne puis donc me rallier au raisonnement exposé au paragraphe 66 de l’arrêt.
75. Aux paragraphes 64 et 65 de l’arrêt, les immunités accordées au «personnel diplomatique et [a]u personnel de la mission» sont comparées à celles des «locaux de la mission» et il est dit que, selon l’article 9 de la convention, un Etat accréditaire n’est pas tenu d’accorder indéfiniment, contre son gré, des privilèges et immunités diplomatiques à une personne. Le recours à pareille analogie pour conclure que l’Etat accréditaire peut unilatéralement s’opposer à l’établissement de locaux de la mission est déraisonnable. La différence entre les deux régimes est évidente, eu égard à la nature même des fonctions incombant respectivement à la mission diplomatique et au personnel diplomatique ou de la mission.
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76. Les procédures pénales en cours ne devaient influer ni sur la question au coeur du différend, ni sur le raisonnement de la Cour. Lorsqu’elle s’est prononcée sur la question de savoir si l’objection de la France à la désignation par la Guinée équatoriale de l’immeuble comme locaux de la mission avait un caractère arbitraire et discriminatoire, la Cour a largement tenu compte des procédures pénales pendantes à ce jour contre M. Teodoro Nguema Obiang Mangue pour motiver sa décision selon laquelle les perquisitions et saisies opérées étaient justifiées et l’objection à ladite désignation était raisonnable et non arbitraire (paragraphes 107 à 110). Il est expliqué dans l’arrêt, au paragraphe 107, que «la conclusion de la France, à savoir que le bâtiment relevait du domaine privé, n’était pas dépourvue de fondement». La décision d’attacher un poids important à des informations issues de procédures pénales en cours me semble difficile à suivre et ne saurait présider au raisonnement sur une question strictement limitée à l’interprétation et à l’application des garanties prévues par la convention de Vienne en matière d’inviolabilité.
77. Avant de conclure, il me faut  sauf tout le respect que j’ai pour l’arrêt de la Cour  revenir un instant sur les critères de l’«objection» et de la communication «en temps voulu», que la Cour semble développer dans sa jurisprudence. Je suis d’avis, à la lecture de l’arrêt dans son ensemble, que les sources sur lesquelles la Cour s’est appuyée, plus précisément la jurisprudence évoquée au paragraphe 73 de l’arrêt, n’auraient de force probante qu’appliquées spécifiquement aux fins de la présente espèce. J’estime à regret que ces précédents — comme l’indique du reste l’arrêt lui-même — reposent au mieux sur le principe de bonne foi, dans le sillage d’autres décisions de la Cour, et qu’ils n’aident pas réellement à apprécier les critères de l’«objection» et de la communication «en temps voulu» que la Cour entend établir. Bien que la Cour cherche à apprécier la bonne foi conjointement avec les critères susmentionnés, je suis en désaccord avec son interprétation. En fait, si l’argument de la bonne foi pouvait être avancé, comme dans ce paragraphe, dans le contexte d’une objection, ce serait pour soutenir qu’une objection à la reconnaissance de l’existence de locaux d’une mission constituerait un acte de mauvaise foi et donc une atteinte à la souveraineté d’un Etat partie à la convention de Vienne, ce qui ne serait manifestement pas compatible avec l’objet et le but de cet instrument, pour les raisons exposées ci-dessus.
K. Conclusion
78. L’immeuble sis au 42 avenue Foch à Paris avait acquis le statut de locaux de la mission diplomatique de la Guinée équatoriale au 27 juillet 2012, soit à la date de son utilisation effective. Je considère donc que le régime d’inviolabilité prévu à l’article 22 de la convention de Vienne s’appliquait à ces locaux à compter de cette date. La question soumise à la Cour était d’une importance fondamentale dans la mesure où elle avait de vastes conséquences sur le droit relatif aux privilèges et immunités diplomatiques — un ensemble de règles fondé sur l’objectif du maintien et du développement de relations amicales entre les nations, quelle que soit la diversité de leurs régimes constitutionnels et sociaux. En l’absence d’une disposition expresse à cet égard, je suis d’avis que les critères de la notification et de l’utilisation effective tendent à refléter la nécessité d’un consentement mutuel plutôt qu’ils n’autorisent une objection à la désignation d’un bien donné comme «locaux de la mission». Je rappelle en conclusion que le but de la convention est d’«assurer l’accomplissement efficace des fonctions des missions diplomatiques en tant que représentants des Etats».
(Signé) Dalveer BHANDARI.
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Opinion dissidente de M. le juge Bhandari

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