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153-20180326-ORA-01-01-BI
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CR 2018/10 (traduction)
CR 2018/10 (translation)
Lundi 26 mars 2018 à 10 heures
Monday 26 March 2018 at 10 a.m.
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Le PRESIDENT : Veuillez vous asseoir. L’audience est ouverte. La Cour se réunit ce matin
pour entendre le second tour de plaidoiries de la Bolivie. Je donne à present la parole à
M. Akhavan. Vous avez la parole.
M. AKHAVAN :
LES ACTES DONT L’ACCUMULATION DÉFINIT LE COMPORTEMENT DES PARTIES
I. Introduction
1. Monsieur le président, Madame la vice-présidente, Mesdames et Messieurs de la Cour,
sir Daniel s’est plaint la semaine dernière de ce que le Chili n’avait jamais entendu parler de la
théorie de «l’accumulation»1 avancée par la Bolivie. C’est là une assertion qui peut laisser
perplexe, étant donné que la Bolivie a constamment soutenu que les «actes successifs du
Chili … examinés dans leur contexte … [avaient] réitéré [son] engagement et entretenu … l’attente
légitime de la Bolivie»2. Cet engagement a pris naissance et a été maintes fois confirmé lors d’un
enchaînement d’épisodes qui se sont étalés sur plus de 130 ans. Certains, comme les échanges qui
ont eu lieu en 1926, 1950 et 1975, ont fait naître des accords internationaux. D’autres, dont les
déclarations unilatérales faites devant la Société des Nations ou l’OEA, ont créé des obligations
selon le principe retenu par la Cour dans les affaires des Essais nucléaires. D’autres encore, tels
que les représentations faites par le Chili à la Bolivie entre 1919 et 1929 sur ce qu’elle pouvait
attendre si elle le soutenait lors du plébiscite prévu sur le statut de Tacna et Arica peuvent
également être considérées comme donnant matière à l’invocation du principe de l’estoppel. Le
dernier épisode de cette accumulation d’actes révélateurs du comportement du Chili comprend
l’accord exprimé par lui en 2006 à l’ouverture de négociations concernant l’accès souverain. Le
ministre chilien des affaires étrangères a alors déclaré que son pays était «tout disposé» à entamer
ces négociations3. Il appartient à la Cour de répondre à la question de savoir si cette pratique
historique clairement établie a donné naissance à des droits et des obligations.
1 CR 2018/8, p. 28-29, par. 70 (Bethlehem).
2 MB, par. 337.
3 Ibid., annexe 132.
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II. L’effet décisif de la pratique historique
2. On peut affirmer qu’en l’occurrence, «le tout est plus grand que la somme de ses parties»,
autrement dit que cette accumulation d’actes produit par synergie un effet juridique. Ce qu’a dit la
Cour en l’affaire du Droit de passage est instructif à cet égard :
«se trouvant en présence d’une pratique clairement établie entre deux Etats et acceptée
par les Parties comme régissant leurs rapports, la Cour doit attribuer un effet décisif à
cette pratique en vue de déterminer leurs droits et obligations spécifiques. Une telle
pratique particulière doit l’emporter sur des règles générales éventuelles.»4
3. Ce que cela signifie est clair : même s’il n’y a pas un événement décisif — un moment
magique où l’obligation est créée — la pratique historique accumulée peut avoir un «effet décisif».
Quelle était la pratique historique acceptée par la Bolivie et le Chili comme régissant leurs
rapports ? Voici comment, en 1950, le ministre chilien des affaires étrangères a défini la politique
qu’il disait s’inscrire «dans le droit fil» de la tradition de son ministère : «Le Chili a indiqué en de
nombreuses occasions différentes, y compris pendant des sessions de la Société des Nations, qu’il
était disposé à prêter attention, dans le cadre de négociations directes avec la Bolivie, aux
propositions que cette dernière pourrait formuler, dans le but de satisfaire à son aspiration à obtenir
un accès souverain à l’océan Pacifique.»5
4. Là encore, le sens est parfaitement clair : le Chili se disait historiquement disposé à
négocier avec la Bolivie en vue de satisfaire à son aspiration à disposer de son propre débouché sur
la mer. C’est pour une bonne raison que le Chili a ainsi défini une politique qui s’inscrivait selon
lui dans «le droit fil» de sa tradition. En effet, dès la fin du XIXe siècle — la déclaration faite par le
Chili en 18796, la signature en 1884 de la convention d’armistice7 et la conclusion du traité de
18958 —, les parties étaient convenues que la Bolivie devait disposer de son propre accès souverain
à l’océan Pacifique. Le traité de 1904 prévoyait en son article II que «les territoires occupés par le
Chili en vertu de l’article II de la convention d’armistice de 1884 [étaient] reconnus comme
appartenant pleinement et à titre perpétuel au Chili». Cette disposition visait manifestement ce qui
avait été le Departamento Litoral de la Bolivie ; elle ne s’appliquait pas aux provinces péruviennes
4 Affaire du droit de passage sur territoire indien (Portugal c. Inde), fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1960, p. 44.
5 MB, annexe 66 ; CMC, annexe 145.
6 MB, vol. II, annexe 34 ; CR 2018/6, p. 13, par. 5 (Akhavan).
7 MB, par. 70 ; MB, vol. II, annexe 17 ; CR 2018/6, p. 13-14, par. 8 (Akhavan).
8 MB, par. 73 ; MB, vol. II, annexe 98 ; CR 2018/6, p. 13-14, par. 8 (Akhavan).
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de Tacna et Arica alors occupées et revendiquées par le Chili. En fait, l’annexe 378 de la duplique
du Chili montre qu’en 1904, le Chili avait proposé d’ajouter au traité un protocole complémentaire
par lequel la Bolivie se serait engagée à consentir des efforts «afin que les territoires de Tacna et
Arica soient définitivement incorporés au territoire chilien»9. Elle a rejeté le projet de protocole de
190410 parce qu’il l’aurait obligée à soutenir diplomatiquement le Chili sans pour autant avoir la
perspective d’un accès souverain à la mer, mais elle a accepté de négocier pour obtenir cet accès à
travers les deux provinces.
5. En 1910, le Chili a expliqué que la question du plébiscite sur le statut de Tacna et Arica
l’empêchait «pour le moment»11 de négocier ; en 1919, cependant, il s’est dit «disposé à n’épargner
aucun effort pour «veiller à ce que la Bolivie dispose de son propre accès à la mer, en lui cédant
une partie importante de la zone située au nord d’Arica … sous réserve du plébiscite prévu par le
traité d’Ancón»12. Le Chili proposait en outre ; «pour que ces buts puissent être atteints», que la
Bolivie se joigne à son action diplomatique «en vue de lui assurer un résultat favorable lors du
plébiscite prévu dans le territoire de Tacna et Arica»13.
6. La proposition de 1919 était identique à celle que le Chili avait faite en 1895 de «céder à
la Bolivie … Tacna et Arica, si le plébiscite lui [était] favorable, aux fins de quoi il n’épargner[ait]
aucun effort ; de concert avec la Bolivie»14. Dans l’acte de 1920, le Chili se déclarait de même
«disposé à veiller à ce que la Bolivie obtienne son propre accès à la mer, en lui cédant une partie
importante … de la zone située au nord d’Arica, sous réserve du plébiscite prévu par le traité
d’Ancón». Il précisait de nouveau que «pour que ces objectifs puissent être atteints», la Bolivie
apporterait au Chili son soutien diplomatique «en vue d’assurer que le plébiscite prévu sur le statut
du territoire de Tacna et Arica lui soit favorable». La Bolivie a répondu que le Chili, «en se
9 DC, annexe 378.
10 MB, annexe 184.
11 DC, annexe 381.
12 MB, annexe 19.
13 Ibid.
14 MB, annexe 17.
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montrant disposé à veiller à ce qu[’elle] ait son propre débouché sur la mer» se proposait
d’accomplir «un geste … d’équité propre à mettre fin à un odieux différend»15.
7. En 1921, devant la Société des Nations, le Chili a renouvelé à la Bolivie son assurance
qu’au lieu de tenter d’obtenir la révision du traité de 1904, elle pouvait «chercher satisfaction dans
des négociations directes»16. En 1923, il a confirmé à la Bolivie que «conformément aux
déclarations qu’il avait faites … devant la Société des Nations et aux déclarations … [de son]
président …, il restait disposé à prêter attention» à des propositions concernant la situation
d’enclavement de la Bolivie17, et informé celle-ci que «une fois réglée la situation de
Tacna-Arica », il « ser[ait] en mesure de [lui] céder un port ... moyennant compensation»18. En
1926, le Chili a confirmé au secrétaire d’Etat américain Kellogg que sous réserve du plébiscite, «le
Gouvernement chilien honorerait ses déclarations concernant l’examen des aspirations de la
Bolivie»19. En fait, le 11 avril 1926, l’ambassadeur des Etats-Unis à Santiago avait envoyé un
télégramme dont il ressortait que le secrétaire d’Etat Kellogg proposait au Chili et au Pérou une
«cession [de territoire] à la Bolivie, conformément aux assurances répétées qui lui avaient été
données publiquement depuis le début des tractations concernant le plébiscite … que son aspiration
à disposer d’un port sur la côte pacifique serait examinée avec bienveillance»20.
8. Comme la Cour ne saurait maintenant manquer de le savoir, en 1929, soit 50 ans après la
perte par la Bolivie de son territoire côtier, le Chili et le Pérou ont conclu un protocole
complémentaire envisageant expressément la cession d’Arica à la Bolivie. Telle a été la pratique
historique des Parties pendant la période cruciale de sa formation allant de 1879 à 1929.
9. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, il s’agit là de faits incontestés,
dont la plupart sont attestés par des documents reproduits dans les annexes de pièces auxquelles
Mme Parlett s’est référée dans sa plaidoirie de la semaine dernière. Ces documents illustrent la
formation et la cristallisation d’un compromis historique, d’une entente invariable formée par effet
15 DC, annexe 118.
16 Ibid., annexe 120.
17 Ibid., annexe 125.
18 Ibid., annexe 49.
19 Ibid., annexe 129.
20 REB, annexe 244.
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cumulatif sur la nécessité de mettre fin à la situation d’enclavement de la Bolivie en lui faisant
recouvrer son accès souverain à la mer au niveau de la frontière nord du Chili avec le Pérou, qu’il
restait à définir. Or, au mépris des abondantes preuves documentaires qui vous ont été présentées,
Mme Parlett a voulu vous faire croire que la Bolivie ne vous avait pas montré «un seul document»
venant étayer sa position. Il est clair qu’elle a usé là d’une tactique de déformation des faits. Pour
n’en prendre qu’un exemple, elle a allégué qu’à la suite de la signature du protocole
complémentaire de 1929, la Bolivie n’avait pas réagi «en faisant valoir que le Chili était soumis à
une obligation de négocier», et qu’au contraire elle avait tu «son aspiration à un accès souverain à
la mer et [n’était] sorti[e] de son silence qu’une fois les années 1940 déjà largement entamées »21.
Cela est tout simplement faux. Comme je l’ai expliqué lors du premier tour de plaidoiries, la
Bolivie a protesté immédiatement en faisant savoir clairement qu’elle «n’a[vait] à aucun moment
renoncé à son droit de voir sa souveraineté maritime rétablie»22. Le document pertinent est
reproduit à l’annexe 23 du mémoire. Vu cette tendance du Chili à présenter fallacieusement les
faits, nous nous permettons de vous inviter à n’accepter qu’avec la plus grande circonspection la
version qu’il vous en propose.
10. Je relève une autre manifestation de cette tendance, qui consiste pour le Chili à donner à
entendre que l’aspiration de la Bolivie à disposer de son propre port signifiait qu’elle attendait de
lui un «cadeau»23. Il ressort clairement des faits que cette aspiration de la Bolivie s’inscrivait dans
la perspective d’un compromis. Les intérêts poussant le Chili à promettre à la Bolivie de créer une
zone tampon avec le Pérou ont varié selon les époques24 ; il pouvait s’agir d’obtenir son soutien aux
fins du plébiscite25, de convaincre celle-ci de ne pas dénoncer le traité de 190426, d’éviter
l’isolement diplomatique27, ou tout simplement de mettre fin à un désaccord fondamental qui faisait
obstacle à des relations bilatérales harmonieuses. Même après le règlement en 1929 du statut de
21 CR 2018/8, p. 58-59 (Parlett).
22 CR 2018/6, p. 16, par. 17 (Akhavan) ; MB, annexe 23.
23 CR 2018/8, p. 22, par. 45 (Bethlehem).
24 MB, par. 6.
25 MB, par. 116 ; REB, par. 220 ; CR 2018/7, p. 41-42, par. 32-33 (Akhavan).
26 MB, par. 113-114 ; MB, annexe 160 ; CR 2018/7, p. 32-33, par. 3, et p. 41-42, par. 32-33 (Akhavan).
27 Charte de l’OEA, art. 2, al. a) ; CR 2018/7, p. 21, par. 14, et p. 21-22, par. 17-18 (Sander) ; OEA,
AG/RES. 426 (1979) ; CMC, annexe 250.
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Tacna et Arica, la question dite de la réintégration maritime a continué de tenir une place centrale
dans la pratique diplomatique des Parties, notamment en 1950, 1961, 1975, 1987, dans les années
1990 et en 2006 lors de l’épisode de l’ordre du jour en 13 points. Il est indéniable que tout cela
établit une pratique historique, dont ressort manifestement l’existence d’un engagement continu de
régler le différend qui faisait obstacle à la normalisation des relations diplomatiques entre les
Parties.
11. Il est vrai qu’à partir de 1987 environ, le Chili s’est mis à souffler le chaud et le froid,
essayant de temps à autre de se libérer de la promesse historique qu’il avait faite à la Bolivie.
Estimant peut-être qu’il était parvenu à ses fins, il ne voulait plus honorer ses engagements
antérieurs. Voici comment la Bolivie exposait la situation en 1987 devant l’Assemblée générale des
Nations Unies : «à plusieurs reprises, le Chili a offert de rétablir l’accès de la Bolivie à l’océan
Pacifique, mais il a toujours fini par manquer à ses engagements»28. En 1998, elle a déclaré devant
l’Assemblée générale, en des termes exprimant la même position qu’aujourd’hui, que le traité de
1904 n’avait pas «réglé le caractère enclavé de la Bolivie», en soulignant que «des accords
[avaient] été plusieurs fois conclus aux termes desquels le Chili acceptait de céder à la Bolivie une
zone permettant, en toute souveraineté, un accès à la côte»29.
12. Ces déclarations récentes exposent la situation telle qu’elle se présente réellement.
Lorsque le Chili s’est mis à employer un langage équivoque et à minimiser ou nier son
engagement, des accords avaient déjà été conclus «à maintes reprises». À cette époque, un siècle
après la guerre du Pacifique, il ne faisait plus aucun doute, pour reprendre les termes employés par
la Cour en l’affaire du Droit de passage, qu’il existait «une pratique clairement établie entre deux
Etats et acceptée par les Parties comme régissant leurs rapports»30. Le Chili n’avait pas le droit de
priver unilatéralement la Bolivie de ses droits ou de ses attentes légitimes. Selon sa jurisprudence,
«la Cour doit attribuer un effet décisif à cette pratique en vue de déterminer [les] droits et
28 Nations Unies, doc. A/42/662 (14 octobre 1987), p. 4.
29 Ibid., doc A/53/PV.22 (30 septembre 1998), p. 35-36.
30 Droit de passage sur territoire indien (fond), arrêt, C.I.J. Recueil 1960, p. 44.
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obligations spécifiques [des Parties]»31. J’espère, par cette partie de mon exposé, avoir répondu à la
question de sir Daniel qui mettait en doute l’existence d’une théorie de l’effet cumulatif.
III. L’effet contraignant des déclarations unilatérales du Chili
13. Au sujet de l’effet des déclarations unilatérales, je relève que M. Thouvenin n’a pas
répondu à l’argumentation que la Bolivie a tirée de la jurisprudence concernant les affaires des
Essais nucléaires. Il s’est borné à souligner ce qui suit : «contrairement à ce que suggère la Bolivie,
ce n’est pas à la légère qu’un Etat peut prétendre qu’un autre a unilatéralement tenu des propos qui
l’engagent juridiquement. L’exigence probatoire est très élevée»32. Il n’a tenu aucun compte de
l’analyse détaillée des faits se rapportant aux affaires des Essais nucléaires à laquelle s’était livrée
la Bolivie33. Nous invitons une fois encore la Cour à comparer la poignée d’arguments peu
concluants avancés par la France dans ces affaires aux nombreuses déclarations catégoriques par
lesquelles le Chili s’est montré disposé à négocier un accès souverain. Tout ce que la Bolivie
demande, c’est que lui soit accordé le même traitement judiciaire que celui illustré par les affaires
des Essais nucléaires.
IV. L’effet contraignant des attentes légitimes de la Bolivie
14. Je relève également qu’aucun des conseils du Chili n’a abordé l’analyse détaillée
présentée par la Bolivie de la sentence arbitrale rendue en l’affaire des Chagos, des travaux de la
CDI et de l’opinion individuelle du juge Fitzmaurice en l’affaire du Temple de Préah Vihéar,
analyse dont il ressort que l’estoppel ne requiert aucunement l’intention d’être juridiquement lié34.
Au sujet des faits, qui plus est, Mme Parlett a prétendu qu’ils n’apportaient «aucun élément de
preuve» qui vienne étayer l’invocation par la Bolivie du principe de l’estoppel, étant donné que
«ses propres documents de l’époque sembl[ai]ent indiquer que la Bolivie n’avait alors nullement
l’intention de coopérer avec le Chili aux fins du plébiscite prévu»35. Le lendemain, M. Juratowitch,
au sujet des événements qui se sont produits pendant les années 1990 et après, a souligné que
31 Droit de passage sur territoire indien (fond), arrêt, C.I.J. Recueil 1960, p. 44.
32 CR 2018/8, p. 50, par. 50 (Thouvenin).
33 CR 2018/7, p. 32-35, par. 4-11 (Akhavan).
34 Ibid., p. 40-41, par. 27-31 (Akhavan).
35 CR 2018/8, p. 53, par. 23 (Parlett).
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«même s’il peut être établi qu’une position a été exprimée, l’argument de l’estoppel est voué à
l’échec lorsqu’un Etat revient ultérieurement sur une position qu’il avait prise avant qu’un autre
Etat ne se fonde sur celle-ci, ce qui, comme l’a démontré hier Mme Parlett, ne s’est pas produit en
l’espèce»36. Cela est inexact, comme je vais le montrer.
15. La Bolivie se permet d’appeler l’attention de la Cour sur l’annexe 240 de sa réplique.
Y sont reproduites des notes échangées en 1925 et 1926 après que le Chili eût en 1919 et 1920
renouvelé à la Bolivie son assurance qu’il coopérerait à la concrétisation de ce qu’il appelait
lui-même ses «aspirations légitimes» à disposer de son propre port, en échange de son soutien aux
fins du plébiscite. La Bolivie, je le rappelle, a répondu en exprimant «son attente d’un droit futur
dépendant du plébiscite»37. Dans une note diplomatique en date du 27 mai 1925 adressée au Chili,
dont vous trouverez copie sous l’onglet 32 de votre dossier, la Bolivie, nonobstant sa neutralité à
l’égard du différend opposant le Chili au Pérou, écrivait ce qui suit :
«sachant que le président chilien et le ministère chilien des affaires étrangères … ont
plusieurs fois laissé entendre … à notre agent diplomatique à Santiago que le Chili
souhaitait obtenir le soutien de la Bolivie … aux fins du plébiscite [prévu] …, le
Gouvernement bolivien répond par la présente qu’il serait disposé à collaborer [avec le
Chili] en vue de son succès lors dudit plébiscite, à condition qu’il s’engage … à céder
à la Bolivie … [un port qui lui soit propre]»38.
16. Vous trouverez sous l’onglet no 33 de votre dossier la reproduction de la réponse du
Chili. Le 8 mars 1926, après s’être donné près d’un an pour réfléchir, il a répondu ce qui suit :
«Se référant au mémorandum confidentiel du ministre bolivien des affaires
étrangères en date du 27 mai 1925, l’envoyé spécial et ministre plénipotentiaire du
Chili, à ce dûment habilité par son gouvernement, déclare par la présente que le Chili
accepte le principe de la cession à la Bolivie d’un port sur la côte pacifique, selon un
plan ne prévoyant pas de compensation territoriale qui pourrait être étudié
ultérieurement.»39
17. Cet échange avait manifestement le caractère d’une offre suivie d’une acceptation, et
s’inscrivait dans le contexte de représentations faites à la Bolivie par le président et le ministre des
affaires étrangères chiliens à l’effet qu’en échange de son soutien diplomatique aux fins du
plébiscite, elle obtiendrait son propre port. C’était là une nouvelle illustration du compromis
36 CR 2018/9, p. 52-53, par. 38 (Juratowitch).
37 CMC, annexe 118.
38 REB, annexe 240.
39 Ibid.
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historique. À supposer même que le Chili n’ait pas eu l’intention de se lier juridiquement, quod
non, cet échange est la preuve patente que la Bolivie accordait foi aux représentations du Chili dans
l’attente de recouvrer son accès souverain à la mer. Autrement, pourquoi aurait-elle soutenu le
Chili lorsqu’il cherchait à annexer Tacna et Arica ? Monsieur le président, comme l’a rappelé le
conseil du Chili, «dans la diplomatie de haut niveau et en droit international, les mots ont leur
importance»40 ; or, selon ses propres mots, le Chili «accept[ait] ... la cession à la Bolivie d’un port
sur la côte pacifique».
V. La diplomatie et le droit international
18. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, il est clair que le
comportement qui ressort d’un tel enchaînement d’actes cohérents prouve sans l’ombre d’un doute
que la négociation de l’accès souverain de la Bolivie à la mer s’inscrivait dans une pratique
historique régissant pour l’essentiel ses rapports avec le Chili. De son aveu même, le Chili agissait
selon sa «politique traditionnelle». Comme l’a dit la Cour en l’affaire du Droit de passage, «[u]ne
telle pratique particulière doit l’emporter sur des règles générales éventuelles»41. On pourrait dire
qu’il s’agit là de la lex specialis de l’obligation générale de négocier dont a traité M. Lowe. Ce
point mérite d’être souligné, vu que le conseil du Chili a agité devant la Cour le spectre de divers
scénarios d’apocalypse pour le cas où elle statuerait en faveur de la Bolivie ; ce serait selon lui la
fin apocalyptique de la diplomatie telle que nous la connaissons.
19. M. Koh a affirmé que la position de la Bolivie plaçait le Chili devant «une alternative :
soit refuser de négocier, soit se déclarer disposé à dialoguer et contracter une obligation de
négocier juridiquement contraignante» ; il a ajouté : «s’il n’existait que ces deux voies, quel Etat
accepterait en réalité de s’asseoir avec un autre à la table des négociations ?»42 Uobaman, autre
conseil du Chili, a prétendu que selon la théorie de la Bolivie, le président des Etats-Unis
Barack Obama, rien qu’en se déclarant disposé à prendre part à des entretiens bilatéraux avec
l’Iran, aurait contracté l’obligation contraignante d’embrasser le président Rouhani comme s’il était
son meilleur ami. C’est là évidemment un exemple des absurdités auxquelles conduisent les
40 CR 2018/9, p. 62, par. 9 (Koh).
41 Droit de passage sur territoire indien, fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1960, p. 44.
42 CR 2018/9, p. 66, par. 19 (Koh).
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raisonnements hors contexte. Le pratique qui régit les relations entre la Bolivie et le Chili est très
particulière, voire unique : combien y a-t-il au monde d’Etats qui, ayant accepté de négocier un
accès souverain à la mer, ont persisté dans cette acceptation pendant plus d’un siècle ? Ce qu’a dit
le Chili de sa disposition à négocier doit être considéré à la lumière de ce contexte très spécifique ;
vue dans ce contexte, la demande très spécifique de la Bolivie n’ouvre pas une boîte de Pandore.
20. Nul ne conteste, comme l’a dit M. Koh, qu’entre tourner les talons et s’engager, «existe
ce vaste univers qui s’appelle la diplomatie»43. Cependant, nul ne doute non plus qu’en diplomatie,
il arrive qu’un Etat s’attende à être pris au mot lorsqu’il s’adresse à un autre Etat. M. Koh a très
justement insisté sur la souplesse que requiert la diplomatie, mais la prévisibilité et la confiance en
sont des éléments non moins nécessaires. C’est manifestement à juste raison que la Bolivie
revendique le droit de suivre la voie des négociations, dès lors qu’elle nourrit une attente légitime à
laquelle elle n’a jamais renoncé.
21. Selon le mot bien connu de Winston Churchill, «l’art de la diplomatie consiste à envoyer
votre interlocuteur au diable en des termes si choisis qu’il vous demande de lui indiquer le
chemin». Nous préférons quant à nous une conception moins cynique des relations entre Etats, où
les promesses et la bonne foi comptent et ne sont pas que des mots vides. La pratique historique de
la Bolivie et du Chili, qui se dégage clairement de l’accumulation des actes cohérents qu’ils ont
accomplis durant plus d’un siècle pour régler un différend bien précis ne peut pas être entièrement
dénuée de tout effet juridique. Il est impossible que l’obligation de négocier de bonne foi soit
dénuée de toute pertinence lorsqu’un problème qui a tenu et tient encore une place centrale dans les
relations bilatérales entre deux Etats n’est toujours pas résolu.
VI. Observation finale
22. Monsieur le président, sir Daniel a peint un tableau de cette pratique historique où l’on
voit la Bolivie frapper à la porte de son amical voisin, qui se montre toujours prêt à discuter avec
elle, pourvu qu’elle «n’en attend[e] rien»44, autrement dit prêt à converser de choses et d’autres
devant une tasse de thé. Permettez-moi de corriger ce tableau, pour y montrer la Bolivie frappant à
43 CR 2018/9, p. 66, par. 20 (Koh).
44 CR 2018/8, p. 21, par. 40 (Bethlehem).
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sa propre porte dans l’espoir que son voisin finira un jour par honorer sa promesse et viendra la
déverrouiller.
23. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, ainsi s’achève mon exposé.
Monsieur le président, je vous prie de bien vouloir maintenant appeler à la barre
M. Remiro Brotóns.
The PRESIDENT: Thank you. I now give the floor to Professor Remiro Brotóns. You have
the floor.
Mr. REMIRO BROTÓNS:
THE AGREEMENTS BETWEEN BOLIVIA AND CHILE AS SOURCES OF
THE OBLIGATION TO NEGOTIATE
I. Background
1. Mr. President, Members of the Court, neither God nor the Spanish monarchy bestowed on
the Republic of Chile the Pacific Coast from Punta Arenas to Arica. Chile took the northern part of
that coastline, from parallel 24", by force, in contravention of an existing treaty of limits: the kind
of treaty the sacrosanct nature of which Chile has invoked, since a defeated Bolivia was forced to
renounce its title to sovereignty in a new instrument that Bolivia condemns, but respects. Whether
on the grounds of historical reparation, for geopolitical or economic reasons, or in the spirit of good
neighbourliness, a string of statesmanlike Chilean politicians promised Bolivia’s representatives
that sovereign access to the sea, which war had wrested from them, would be returned through
negotiations, and they agreed with those representatives on the principle of those negotiations; they
did so before and after the conclusion of what is known as the 1904 Treaty of Peace and Amity.
They did so repeatedly, on various occasions, with democratic governments and with tyrants.
2. The other Party may well consider this presentation a caricature45. If it is, it is a caricature
in the true sense of the word, one which reveals the principal characteristics of a situation, allowing
them to be seen and identified at a glance. Bolivia is not the poor man next door relentlessly
hounding its wealthy neighbour with recurrent and capricious demands. Chile makes a mockery of
45 CR 2018/8, p. 40, para. 8, and pp. 44-45, para. 27 (Thouvenin).
23
- 13 -
the agreements when one of its counsel jokes about a scenario in which a Bolivian representative
knocks on the door of a Chilean diplomat to notify him of his wish to discuss sovereign access.
“Sure”, says the diplomat, “we would be happy to talk to you. You should have no expectations . . .
but we would be happy to talk to you”46. Need I remind you that the Agreement by Exchange of
Notes of 20 June 1950 was not reached in this way and that the Joint Declaration of Charaña was a
Chilean initiative?
3. Bolivia is an honourable neighbour, wounded and dispossessed by the tide of history. And
it has turned to the law — Law with a capital L — to bring an end to this painful dimension of its
neighbourly relations. Those who waged the war and made peace turned to the law, as did their
children, and their children’s children. That is why so many documents have been amassed. The
other Party claims that Bolivia is trying to “‘mass together’ everything it finds, to inundate the
Court with all kinds of information, so as to give an impression of density to an argument which
has none whatsoever”47.
4. Counsel for Chile regrets not having had the time to address the idea of an atmosphere of
treaties, which, he says, was “so poetically evoked” by yours truly who now has the honour of
addressing you, Members of the Court. Perhaps Chile’s Minister for Foreign Affairs will be more
amenable to this point? The truth is that acts and promises interact with agreements, to the extent
that they can be characterized as pre-agreements or informal agreements. Legal analysis often
allows alternative characterizations to be proposed for the same instrument. The Ihlen Declaration,
itself cited as an example of unconditional promise by the Permanent Court, was described as a
verbal agreement by one of its highly qualified Members48.
5. There would be no accumulation of documents were it not for the decades of broken
promises and agreements. Nor would we be debating the issue here, today. This accumulation is
proof of the dispute’s persistence and of the need to seise the Court in order to pave the way for it
to be settled. Chile claims numerous virtues, as its Agent legitimately stated in his presentation last
46 CR 2018/8, p. 31, paras. 39-40 (Bethlehem).
47 Ibid., p. 40, para. 8 (Thouvenin).
48 Legal Status of Eastern Greenland, Judgment, 1933, P.C.I.J., Series A/B, No. 53, dissenting opinion of
Judge Anzilotti, p. 91; for an informal agreement, see for example, A.D. McNair, The Law of Treaties, Oxford,
Clarendon Press, 1961, p. 10.
24
- 14 -
Thursday49. The time is thus ripe for it to act in line with those virtues, and to prove itself equal to
its commitments, which are assuredly moral and undeniably legal.
II. Language, form of the agreements and good faith
6. Mr. President, Members of the Court, with regard to the sources of legal obligations, the
attitude adopted by Chile in this case is a far cry from the jurisprudence and international practice,
which have enshrined the principle of non-formalism. Chile itself is quite familiar with this
principle, because not so long ago it argued fervently in its favour before this Court, referring at
length to the Court’s jurisprudence. In its dispute with Peru, to demonstrate that the 1952 Santiago
Declaration was a treaty, Chile mentioned several examples where an instrument was regarded as a
“treaty”, but was entitled a “declaration”. It added that “designation does not determine whether an
instrument is a treaty”. And that also included delimitation treaties: “A treaty effecting a boundary
delimitation can take whatever form the parties choose to give it.”50
7. However, it should be noted that, while the principle of non-formalism enshrines the
creation of legal obligations in any form, certain forms, such as treaties entitled treaties,
conventions, agreements, and exchanges of notes and letters signed by duly accredited
representatives of the State, give rise, in and of themselves, to the formation of obligations under
international law, regardless of the flexibility of the language used.
8. That said, beyond form, the creation of legal obligations depends on the intention of the
parties, objectively established through the text, context and circumstances surrounding its
adoption, which brings us back, first, to language.
9. According to Chile, no language is capable of giving rise to a legal obligation, other than
express and direct language. It appears that, for Chile, assuming a legal obligation means donning a
straitjacket and therefore there have to be compelling reasons for doing so. Chile suggests to the
Court that the language used in diplomatic relations is incompatible with the formation of legal
obligations. It is a fairly long road from there to the negation of international law, but it is heading
in the right direction. Better to feel free, at ease, in political and diplomatic exchanges, which are
49 CR 2018/8, pp. 14-15, paras. 2-4 (Grossman).
50 Maritime Dispute (Peru v. Chile), Counter-Memorial of Chile, 9 Mar. 2010, pp. 71-75, paras. 2.62-2.69;
CR 2012/30, pp. 23-25, paras. 11-18 (Dupuy).
25
- 15 -
conducted or abandoned depending on which way the wind is blowing. Giving one’s word and
having to honour it, is this something which exists only in a paradise lost?
10. According to Chile, none of the instruments relied on by Bolivia as a source of its legal
obligation satisfy the minimum standard required to produce that effect and, therefore, the
obligation to negotiate sovereign access to the Pacific Ocean for Bolivia never existed.
11. Bolivia, radically disagreeing with Chile, understands that diplomatic language is
perfectly compatible with the formation of rights and obligations. Diplomatic and legal language
are not blind to one another. On the contrary, there are very diplomatic formulations of legal
obligations, particularly sensitive ones, such as that with which we are now dealing; formulations
whose interpretation requires a sound knowledge of the context and circumstances in which the text
was adopted.
12. Faced with Chile’s attempts at word play, it is necessary to turn our attention to the
principle of good faith, expressly incorporated into interpretation, in the general rule codified in
Article 31.1 of the Vienna Convention on the Law of Treaties.
13. In a given context and under specific circumstances, the principle of good faith leaves its
mark on language.
14. It is no longer a question of Chile making inconsistent and isolated declarations, destined
to die like butterflies with the setting of the sun. On the contrary, Chile has expressed its
willingness to Bolivia on several occasions over the years, in various circumstances and through
different representatives. How can this not be seen as the expression of a legal commitment
guaranteed by national honour and the rule of law, proclaimed with such fervour by Chile’s Agent
in his presentation51, depicting the admirable image of a virtuous State?
15. It has been stated and emphasized in these proceedings that “[a]greeing to talk is not the
same as agreeing to be bound to talk”52. Attention has also been drawn to the “factual
circumstances and Chilean policy imperatives” that motivated each of the agreements reached with
Bolivia53. In fact, when parties agree to speak or negotiate, they actually do speak or negotiate. The
51 CR 2018/8, p. 14, para. 2 (Grossman).
52 Ibid., p. 28, para. 31 (Bethlehem) and pp. 43-44, paras. 22-26 (Thouvenin).
53 Ibid., p. 38, paras. 31-32 (Bethlehem).
26
- 16 -
obligation to do so is incurred by that very agreement. Everyone must behave in accordance with
what has been agreed, and must do so as a matter of good faith, reputation and honour. Regardless
of the reasons and circumstances which led to the agreement.
16. If one considers Chile’s actions in the light of the principle of good faith, and the respect
that Chile owes to itself, the other Party must reject the hypothesis that, for more than a century,
Chile’s highest authorities regarded the agreements and promises made to Bolivia as nothing more
than exercises in opportunism.
III. The Agreement by Exchange of Notes of 20 June 1950
17. Mr. President, Members of the Court, given that I have limited speaking time, I shall now
turn to the Agreement by Exchange of Notes of 20 June 1950. Chile attempts to discredit54 its legal
value by playing on the differences between the wording of Bolivia’s Note and that of Chile’s
Note, which, in Chile’s view, lead inexorably to the conclusion that no such Agreement exists.
18. Let us examine the two texts. Bolivia’s Note55 reads as follows: “formally enter into a
direct negotiation to satisfy the fundamental need of Bolivia to obtain its own and sovereign access
to the Pacific Ocean”. The terms of Chile’s Note56 are: “to formally enter into a direct negotiation
aimed at searching for a formula that could make it possible to give Bolivia its own and sovereign
access to the Pacific Ocean”. Chile proceeds to deconstruct the sentence57. Yet it is plain to anyone
with a modicum of common sense, even a lawyer, that the purpose of the direct negotiation that the
Parties agree to undertake is the same: to give Bolivia sovereign access to the Pacific Ocean. It is
worth pointing out that, in Bolivia’s Note, that access is described as a “fundamental need of
Bolivia”. Chile’s Note indicates that the negotiation is aimed at finding a formula to make that
sovereign access possible.
19. Then there is the point on “compensation”. Chile deliberately overlooks the fact that that
point, and the entire text of Chile’s Note, had been negotiated and agreed by the Parties. Moreover,
54 CR 2018/8, pp. 69-78, paras. 1-38 (Wordsworth).
55 Note from the Bolivian Ambassador to Chile, Alberto Ostria Gutiérrez, to the Minister for Foreign Affairs of
Chile, Horacio Walker Larraín, No. 529/21, 1 June 1950 (RB, Vol. II, Ann. 265, p. 269).
56 Note from the Minister for Foreign Affairs of Chile, Horacio Walker Larraín, to the Bolivian Ambassador to
Chile, Alberto Ostria Gutiérrez, No. 9, 20 June 1950 (RB, Vol. II, Ann. 266, p. 277).
57 CR 2018/8, p. 72, para. 17 (Wordsworth).
27
- 17 -
the fact that such compensation would be of a non-territorial nature had been suggested by the
Bolivian Ambassador, Ostria Gutiérrez, and accepted by Chile’s Minister for Foreign Affairs,
Walker Larraín58.
20. The purpose of Bolivia’s Note and that of Chile’s are therefore in perfect alignment: to
open a direct negotiation with the aim of giving Bolivia its own and sovereign access to the Pacific
Ocean. Their language is clear: they concern formally entering into a direct negotiation. As for
compensation, why should the Bolivian Ambassador object to the wording of a Note whose
language had been previously agreed? Including the references to compensation.
21. It should be noted that this Agreement by Exchange of Notes had been the subject of
lengthy negotiations and that the Parties were aware of its scope. The Note of 28 June 1948, which
you will find at tab 37 of the judges’ folder, reveals the extent of the progress made on the
negotiation of an agreement seeking to formalize a direct negotiation. It also explains why several
days later, President González Videla, beset by the internal difficulties which prompted the
negotiations to be put on hold, declared to the Bolivian Ambassador: “[w]hat has been verbally
agreed is as if it were already written”59; an authentic example of a verbal agreement. Ihlen
redivivus secundum Judge Anzilotti60.
22. Chile refuses to acknowledge the legal effects of any document provided by Bolivia.
Nonetheless, it seems rash to deny those effects in respect of this Exchange of Notes, which
formalizes a direct negotiation to give Bolivia access to the Pacific Ocean.
23. The Agreement entered into force on the same day that the Notes were exchanged, with
no requirement for any additional procedure. It is surprising that Chile should claim that Bolivia
violated its Constitution by failing to submit the Notes to its Congress for approval61. In the
practices of Bolivia and Chile no such formality is required for agreements in simplified form.
24. The agreed direct negotiation did not take place at that time because of the reaction of
public opinion in both countries, which left both governments facing flak from the opposition.
58 RB, Vol. II, Ann. 263, p. 251.
59 Ibid., Ann. 259, p. 209.
60 Legal Status of Eastern Greenland, Judgment, P.C.I.J., Series A/B, No. 53, dissenting opinion of Mr. Anzilotti,
p. 91.
61 CR 2018/9, p. 14, para. 41 (Wordsworth).
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- 18 -
Some criticized the idea of a portion of coastline and saltwater being exchanged for fresh water;
others voiced the same criticism in reverse. The rumour that the waters in question were, moreover,
those of Lake Titicaca, which are shared between Bolivia and Peru, caused concern in the Peruvian
Government. The net result was an understanding to defer the second phase of the Agreement 
namely its implementation  until the waters were calmer.
25. Chile’s counsel is now attempting to exploit the explanations given by the negotiators of
the Agreement of 20 June 1950 regarding its limited scope in order to discredit its legal effect62.
Nevertheless, the Notes and declarations of Chile’s President and Minister for Foreign Affairs, to
which the said counsel refers, show quite simply: (1) that the 1904 Treaty was expressly protected;
(2) that the Agreement to negotiate Bolivia’s sovereign access to the sea reflected Chile’s
consistent position and was nothing new; and (3) that nothing had yet been negotiated and that,
once it had, the resulting agreement would be submitted to the legislative chambers.
26. It is worth noting the terms in which the Chilean Minister for Foreign Affairs,
Horacio Walker Larraín, spoke, during a debate in the Chamber of Senators on 13 September 1950:
“This is not a new matter, but one that has been dragged along for a long time
and which Chile cannot and must not avoid with mere dilatory resources. We cannot
give a nation, or the whole of America, the impression that we are not willing to
implement in the practice what we publicly and repeatedly promised. Such a conduct
would oppose to our solid prestige as a nation and would run counter to the clarity,
frankness and loyalty with which we must address international affairs. For my part, I
refuse to disown these rules.”63
IV. The Trucco Memorandum of 10 July 1961
27. Mr. President, Members of the Court, I shall now refer briefly to the Trucco
Memorandum. We have been told64 that the Bolivian Minister for Foreign Affairs, Arze Quiroga,
did not intend to link the “port issue” with the dispute over the use of the waters of the Lauca
River. He regarded the port issue as a tripartite problem (which included Peru) that required serious
reflection, for which it was not the right time.
62 CR 2018/9, pp. 14-18, paras. 43-55 (Wordsworth).
63 RB, Vol. II, Ann. 276, pp. 401-40[3].
64 CR 2018/9, pp. 18-19, para. 57 (Wordsworth).
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28. We can regard that information, which originates from internal correspondence between
the Ambassador and Chile’s Minister for Foreign Affairs, as established, since Chile accepted the
Notes of the Bolivian Ambassador in Santiago. In fact, Ambassador Trucco did not merely read the
document that he had in his pocket, which contained explicit instructions from the Ministry of
Foreign Affairs, but he also gave it to the Bolivian Minister. If it was a document meant for his
own personal use, which was not likely to be of interest to the Bolivian Minister, why did he hand
it over to him?
29. What is certain is that the first paragraph of the Memorandum reproduces the fourth
paragraph of Chile’s Note of 20 June 1950 almost word for word, and that the second paragraph
expressly repeats the substantive part of that same Note. It was therefore Chile that put the
negotiation of Bolivia’s sovereign access to the Pacific Ocean back on the bilateral agenda and, in
accordance with the Agreement of 20 June 1950 and the Memorandum of 10 July 1961, Bolivia,
several months later, expressed its willingness to begin negotiations on those bases.
30. But Chile did not follow through. While in 1961 Chile wished to settle the serious
dispute over the use of the waters of the Lauca River by putting the negotiation of Bolivia’s
sovereign access to the sea on the table, in 1962 the Chilean Minister took the opposite view, and
the “problem of Bolivia’s landlocked status” did not exist for Chile, “since its limits with Bolivia
were established by international treaties in force”65. For Bolivia, the obligation to negotiate was no
longer in its formative phase, but rather in its implementation phase, pursuant to a commitment
reiterated by the Trucco Memorandum. The resumption of diplomatic relations, which had been
broken off as a result of another ongoing dispute, was made conditional, from that moment, on
beginning the negotiation on its sovereign access to the sea.
31. Chile highlights66 the letter of 29 May 1967 from Chile’s Minister for Foreign Affairs to
his Latin American colleagues, which sought to neutralize the letter sent several weeks earlier by
the President of Bolivia, René Barrientos, to the President of Uruguay, explaining why he would
not be attending the Punta del Este summit. According to Chile’s counsel, repeating what was
already stated in the written proceedings, “[i]f ever there was a communication that called for some
65 CR 2018/9, p. 19, para. 60 (Wordsworth).
66 Ibid., pp. 20-21, paras. 63-64 (Wordsworth).
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reaction . . . it was this”. Given the other Party’s insistence, I shall repeat what was already stated in
the Reply. The Parties, each in their own way, were explaining their respective divergent positions
to their Latin American colleagues. This was not bilateral correspondence, and there was no reason
for the Parties to continue raining down blows on each other until one of them fell unconscious,
vindicating the other. For the rest, the negotiations on sovereign access to the sea continued over
the course of the subsequent years.
V. The Joint Declaration of Charaña of 8 February 1975
32. Mr. President, Members of the Court, let us now turn finally to the Joint Declaration of
Charaña of 8 February 1975. This declaration has the legal force of a treaty. Its diplomatic
language cannot obscure its effects. Ratification is not necessary to establish its force. Respectable
members of the political opposition may have levelled all sorts of criticism against the Charaña
Declaration67, but the assessment of State representatives must surely carry more weight.
33. The main objective of Charaña was to open negotiations on Bolivia’s sovereign access to
the Pacific Ocean; those negotiations were indeed opened, once the bases for them were
established. However, the frustration of the so-called “Charaña process” did not mean the end of
that obligation, but a change in its scenario. The suggestion that the absence of diplomatic relations
makes it difficult to conclude legal agreements68 is belied by international practice and, of course,
by the practice of Bolivia and Chile in their neighbourly relations.
34. It would seem that the other Party is somehow trying to link the negotiation of an
agreement on Bolivia’s sovereign access to the sea to the exercise of power by non-democratic
governments in the two countries. It is evident that, in a democratic régime, it is very difficult to
conclude substantial or substantive agreements without significant social and political support.
However, political leaders should not just follow shifts in public opinion, but should guide it and
protect the public interest from sectarian trends which can derail long-term plans. In practice,
sovereign access to the sea for Bolivia has been supported by democratic governments and by
others that were not, in the same way that it has been torpedoed by democratic and non-democratic
67 CR 2018/9, p. 22, para. 2 (Wordsworth).
68 CR 2018/8, pp. 34-35, paras. 55-56 (Bethlehem).
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- 21 -
governments alike. It is to be noted that the Junta Militar which closed the door on negotiations
in 1987, is the same that undertook to take part in them in 1975.
35. One of Chile’s counsel69 tried to explain away the well-founded opinion expressed by
some Chilean professors on the Note of 19 December 1975, to which Bolivia has made extensive
reference70, by describing it as “tentative views on the subsequent guidelines expressed by
well-known Chileans who were then rather touchingly youthful academics”. The frank and
objective analysis of a document is apparently a youthful sin that can be remedied by maturity.
Maybe Chile’s counsel has read José Emilio Pacheco: acaso ¿ya somos todo aquello contra lo que
luchamos a los veinte años? Is it possible that we have become everything that we were fighting
against 20 years ago?71
VI. Conclusion
36. Mr. President, Members of the Court, what we contend before the Court is that, in
accordance with the rules of international law, Bolivia has an acquired right whereby Chile must
negotiate with it to make its sovereign access to the Pacific Ocean a reality.
37. Mr. President, Members of the Court, I thank you for your attention. Mr. President,
I would ask you to call my colleague Amy Sander to the Bar for the next part of Bolivia’s
presentation.
Le PRESIDENT : Merci. Je donne à présent la parole à Mme Amy Sander. Vous avez la
parole.
69 CR 2018/9, p. 27, para. 20 (Wordsworth).
70 CR 2018/7, pp. 28-29, paras. 47-49 (Remiro Brotóns).
71 José Emilio Pacheco, “Antiguos compañeros se reúnen”, La fábula del tiempo: antología poética, Mexico D.F.,
Ediciones Era, 2005, p. 99.
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Mme SANDER :
LES RÉSOLUTIONS DE L’OEA
Introduction
1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, le Chili se borne, pour toute
réponse, à reprendre le refrain de sa duplique, à savoir que les résolutions de l’OEA ne créent
absolument aucune obligation juridique72, et il va maintenant jusqu’à soutenir devant la Cour que
les résolutions de l’organe suprême de cette organisation sont dénuées de tout effet juridique73. Je
me propose de montrer qu’il ne saurait en être ainsi.
2. Je traiterai pour ce faire de trois points concernant l’argumentation du Chili sur cette
question :
a) Premièrement, j’examinerai un certain nombre de lacunes de la position du Chili sur l’effet
juridique des résolutions de l’OEA.
b) Deuxièmement, je redresserai le tableau présenté par le Chili quant à son degré de participation
à la rédaction des résolutions pertinentes de l’OEA et à la mesure dans laquelle il les a
acceptées.
c) Troisièmement, je m’intéresserai à la présentation des événements postérieurs à 1989, pour
réfuter en particulier l’affirmation assez surprenante du Chili selon laquelle l’OEA aurait cessé
depuis cette date de s’intéresser à la question qui est l’objet de la présente instance74.
Premier point : La position actuelle du Chili
3. Sur ce premier point, je relève d’abord que Mme Pinto, pour écarter les résolutions de
l’OEA comme étant dénuées de tout effet juridique, a fait grand cas d’une déclaration par laquelle
la Bolivie aurait reconnu que l’Assemblée générale de l’OEA, en se bornant à recommander aux
Etats concernés de négocier, avait agi en vertu du principe du respect de la souveraineté des Etats75.
Mme Pinto a affirmé que cette position quant à la valeur des résolutions « suffi[sait] à clore le
72 Voir par exemple CR 2018/9, p. 39, par. 2 a) (Pinto) ; DC, par. 7.2.
73 CR 2018/9, p. 46, par. 22 (Pinto).
74 Ibid., p. 40, par. 7 (Pinto).
75 Ibid., p. 41, par. 9 (Pinto), citant CMC, annexe 307, p. 2121.
33
- 23 -
débat»76. Or, loin de clore le débat, le Chili a montré ainsi qu’il voulait éluder la question qui en est
le coeur même.
4. Cette question cruciale est de savoir quelles sont les obligations qui incombent aux Etats
membres de l’OEA quant aux résolutions adoptées par son organe suprême. Je me suis exprimée
mardi sur deux points concernant cette question, pour justifier la position de la Bolivie selon
laquelle une résolution ne saurait être complètement dénuée de pertinence juridique, même si elle a
le caractère de recommandations.
L’obligation de prendre de bonne foi en considération les résolutions
5. Le premier point que j’ai examiné mardi était centré sur l’obligation d’agir de bonne foi
que prévoit expressément la Charte de l’OEA77. À ce sujet, Mme Pinto a rappelé l’observation du
juge Lauterpacht invoquée à propos de l’effet des résolutions de l’Assemblée générale des Nations
Unies, que j’avais moi-même citée78, mais elle l’a apparemment fait pour l’écarter, parlant d’une
«soi-disant» obligation79 de prendre de bonne foi en considération les résolutions. Le Chili nie-t-il
vraiment qu’un Etat membre de l’OEA auquel s’adresse une résolution de son Assemblée générale
dont la teneur le concerne directement soit tenu d’y répondre de bonne foi, selon les principes
énoncés dans la Charte de cette organisation, y compris en la prenant dûment en considération ?
L’obligation de régler les différends par des moyens pacifiques
6. Le second point sur lequel je me suis arrêtée mardi était quant à lui centré sur l’obligation
de régler les désaccords et différends internationaux par des moyens pacifiques, expressément
prévue aux articles 3 et 24 de la Charte de l’OEA80. En la présente affaire, l’organe suprême de
l’OEA, par une série de résolutions, a constaté l’existence d’un tel désaccord ou différend, et dit
qu’il devait être réglé par des négociations ayant pour but d’assurer à la Bolivie un accès souverain
à la mer81.
76 CR 2018/9, p. 42, par. 10 (Pinto).
77 CR 2018/7, p. 24-25, par. 25-26 (Sander).
78 CR 2018/9, p. 45, par. 18 (Pinto), renvoyant à CR 2018/7, p. 27, par. 27 (Sander).
79 CR 2018/9, p. 45, par. 18 (Pinto).
80 CR 2018/7, p. 25, par. 29-31 (Sander).
81 Ibid., p. 21, par. 15, et p. 22, par. 20 (Sander).
34
- 24 -
7. La réponse du Chili comprend deux volets.
8. Premièrement, il monte en épingle le fait que «les résolutions n’utilisent pas le terme
«différend» ou «controverse»»82. Bien que Sir Daniel m’ait reproché le fort degré d’abstraction83 de
mes références, je me suis en fait bornée à entrer dans le détail de citations directes de nombreuses
résolutions de l’OEA84. Or, par ces résolutions, l’OEA a effectivement et à maintes reprises constaté
qu’il y avait un problème en suspens, un différend appelant des négociations entre les Parties ; la
résolution de 1984 fait expressément mention des «difficultés qui ... sépar[ai]ent»85 la Bolivie et le
Chili, et d’autres résolutions répètent qu’il est nécessaire de trouver «une solution équitable»86 du
«problème»87 que constitue la «situation d’enclavement»88 de la Bolivie. L’Assemblée générale de
l’OEA a recommandé à répétition que la question de l’accès souverain de la Bolivie à la mer fasse
l’objet de négociations.
9. La résolution qui était en cause en l’affaire Nicaragua c. Etats-Unis d’Amérique que
M. Pinto a citée incidemment était bien évidemment rédigée en d’autres termes, et elle s’inscrivait
dans un contexte très différent de celui de la présente instance89. Dans les résolutions faisant partie
de la série en cause dans la présente affaire, une trentaine d’Etats membres de l’OEA ont
clairement reconnu l’existence entre deux membres de cette organisation d’un différend appelant
une solution90. C’est d’ailleurs ce que le Chili a lui-même dit dans une lettre en date du
15 décembre 1983 adressée par son ministre des affaires étrangères à son homologue colombien au
sujet de la résolution adoptée en 1983 par l’OEA ; je cite :
82 CR 2018/9, p. 44, par. 16 (Pinto).
83 CR 2018/8, p. 10-11, par. 8 (Bethlehem).
84 Notamment CR 2018/7, p. 21-23, par. 13-22, et p. 27, par. 37 (Sander).
85 OEA, AG/RES. 701 (1984), CMC, annexe 272.
86 OEA, AG/RES. 426 (1979), AG/RES. 481 (1980), AG/RES. 560 (1981), AG/RES. 602 (1982), AG/RES. 686
(1983), AG/RES. 701 (1984), AG/RES. 766 (1985), AG/RES. 873 (1987), AG/RES. 930 (1988).
87 Voir notamment OEA, AG/RES. 426 (1979), AG/RES. 560 (1981), AG/RES. 686 (1983), AG/RES. 701
(1984).
88 Voir notamment AG/RES. 426 (1979) et AG/RES. 989 (1989).
89 CR 2018/9, p. 49, par. 26 (Pinto), citant Activités militaires et paramilitaires sur le territoire du Nicaragua et
contre celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d’Amérique), fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1986, p. 132, par. 261.
90 Voir CR 2018/9, p. 44, par. 16 (Pinto).
35
- 25 -
«Comme cela figure expressément dans la résolution de l’OEA en question, ce
qu’il faut rechercher en priorité, c’est le rapprochement et la normalisation des
relations diplomatiques entre les deux pays ; ensuite nous pourrons nous pencher sur
les différends non réglés.»91
10. Deuxièmement, le Chili affirme que le règlement des différends entre Etats membres de
l’OEA ne relève pas de la compétence de l’Assemblée générale de cette organisation, mais de celle
de son Conseil permanent92. Or, l’article 54 de la Charte de l’OEA dispose expressément que
l’Assemblée est habilitée à «examiner toute question relative à la coexistence amicale des Etats
américains». Le fait que selon la Charte, le Conseil permanent «veille au maintien des relations
amicales entre les Etats membres et, à cette fin, les aide d’une manière effective à régler leurs
différends de façon pacifique»93 n’entame en rien la faculté conférée à l’Assemblée générale,
«autorité suprême» de l’OEA, de constater l’existence d’un différend, d’une question pendante
entre deux Etats membres qui appelle des négociations ; et c’est exactement ce qu’elle a fait en
adoptant ces résolutions.
Deuxième point : La participation du Chili à la rédaction de résolutions de l’OEA
et son acceptation de celles-ci
11. J’aborde maintenant le deuxième volet de la réponse du Chili. Ayant à l’esprit la
référence que j’avais faite lors du premier tour de plaidoiries à l’affaire du Trafic ferroviaire, dans
laquelle la Cour permanente de Justice internationale a reconnu qu’une recommandation adoptée
par un organe d’une organisation politique tendant à ce que deux Etats entament des négociations
pouvait donner naissance à une obligation de négocier lorsque les parties acceptaient cette
recommandation94, Mme Pinto a cherché à minimiser la portée de la participation du Chili à la
rédaction de résolutions de l’OEA et de son acceptation de celles-ci. Elle a dit à cet effet qu’un vote
par lever de mains95 ne suffisait pas à créer une obligation contraignante.
12. Cet argument, cependant, ne tient pas compte des documents versés au dossier auxquels
j’ai fait référence lors du premier tour de plaidoiries, dont il ressort clairement deux choses :
91 Par M. Miguel Alex Schweitzer, ministre chilien des affaires étrangères, REB, annexe 322 ; les italiques ne
sont pas dans l’original.
92 CR 2018/9, p. 44, par. 16 (Pinto).
93 Art. 84, cité dans CR 2018/9, p. 44, par. 16 (Pinto), note de bas de page no 130.
94 CR 2018/7, p. 28, par. 40-41 (Sander).
95 CR 2018/9, p. 46, par. 22 (Pinto).
36
- 26 -
a) Premièrement, que le Chili a participé pleinement à la rédaction de résolutions, et qu’il s’est
ensuite joint au consensus lors de leur adoption. Mme Pinto a tenté d’opérer une distinction
entre le comportement du Chili à l’égard desdites résolutions et celui de la Pologne et de la
Lithuanie considéré en l’affaire du Trafic ferroviaire, dont la CPJI avait conclu qu’il avait créé
une obligation contraignante de négocier, et elle a relevé pour ce faire que les deux Etats en
cause avaient «participé à l’adoption» de la résolution du Conseil de la Société des Nations96.
Or, en se joignant au consensus, le Chili a de même participé à l’adoption des résolutions dont
il est ici question. Dans le cas de la résolution de 1981, le représentant du Chili a déclaré ceci
devant l’Assemblée générale : «Je tiens à remercier tout spécialement … le représentant du
Costa Rica … de sa contribution judicieuse à la réconciliation de notre délégation soeur, celle
de la Bolivie, et de la délégation que j’ai l’honneur de diriger, ainsi qu’à la recherche d’une
entente qui porte maintenant ses fruits»97. En 1983, l’adoption de la résolution 686 a été
précédée d’une série de réunions tenues au siège de la présidence du Conseil permanent de
l’OEA, lors desquelles les principaux représentants de la Bolivie et du Chili ont pesé chaque
mot du projet de texte98. Le compte rendu de ces réunions figure sous l’onglet no 45 de votre
dossier de plaidoiries.
b) Deuxièmement, le Chili a expressément confirmé avoir accepté la résolution 686 de 1983. Et
selon sa propre argumentation, il considère que c’est l’acceptation par la Pologne et la
Lithuanie de la résolution en cause dans l’affaire du Trafic ferroviaire qui a créé l’obligation de
négocier conformément à celle-ci99. J’ai relevé lors du premier tour de plaidoiries que la réserve
exprimée par le Chili lors de l’adoption de la résolution de 1983 ne concernait que son
préambule100, et j’ai cité sa note interne où il était dit qu’il avait «accepté» la résolution101.
96 CR 2018/9, p. 47, par. 23 (Pinto).
97 Procès-verbal de la 4e séance de la commission générale de l’Assemblée générale de l’OEA, 7 décembre 1981,
CMC, annexe 255, p. 486.
98 Note en date du 16 février 1984 adressée au ministre bolivien des affaires étrangères par le représentant
permanent de la Bolivie auprès de l’ONU, REB, annexe 324.
99 DC, par. 7.12-7.13; CR 2018/9, p. 47 par. 23 (Pinto).
100 CR 2018/7, p. 28-29, par. 43 (Sander), citant procès-verbal de la 7e séance plénière de l’Assemblée générale
de l’OEA, 18 novembre 1985, CMC, annexe 265.
101 Projet de communiqué conjoint du Chili et de la Bolivie, 1986, DC, annexe 434 ; CR 2018/7, p. 28-29, par. 43
(Sander).
37
- 27 -
J’appelle maintenant votre attention sur la déclaration faite par le Chili en 1984 devant
l’Assemblée générale de l’OEA :
«L’an dernier, dans un esprit de compromis, le Chili s’est joint au consensus sur
le dispositif de la résolution 686 … Nous avons accepté d’adhérer au consensus sur le
dispositif, où l’Assemblée a demandé que soit engagé un processus de
rapprochement.»102
13. Mme Pinto a dit aussi qu’à supposer que le Chili ait exprimé son acceptation, celle-ci ne
pouvait porter que sur le processus de rapprochement103. Cependant, le dispositif de la résolution,
accepté par le Chili, comprenait une recommandation explicite, comme je l’ai montré en affichant
le texte lors du premier tour104, à l’effet que la Bolivie et le Chili devaient «entamer un processus
de rapprochement … axé sur l’établissement de relations normales propres à leur permettre de
surmonter les difficultés qui les sépar[ai]ent, et de trouver tout particulièrement une formule visant
à assurer à la Bolivie une passerelle territoriale et souveraine vers l’océan Pacifique»105. Le Chili ne
peut pas maintenant prétendre qu’il n’avait accepté que les premiers mots de ce passage du
dispositif de la résolution. Et il ne peut pas non plus nier que par son comportement, il a créé et
réaffirmé une obligation contraignante spécifique.
Troisième point : Que s’est-il passé après 1989 ?
«L’organisation régionale n’a donné aucun appui politique (et moins encore juridique) aux
aspirations boliviennes»
14. J’en arrive à mon troisième point, qui est le déroulement des événements à partir de
1990.
15. Malgré ce qu’allègue Mme Pinto, il reste, comme nous l’avons clairement montré, que
l’OEA, après avoir adopté en 1979 sa première résolution sur la question, en a ensuite adopté une
chaque année jusqu’à 1989106.
16. Mme Pinto a aussi prétendu que depuis 1989, l’OEA n’avait donné aucun appui politique
ou juridique aux aspirations maritimes de la Bolivie107. Elle allègue que l’OEA a même cessé de
102 Procès-verbal de la 3e séance de la commission générale de l’Assemblée générale de l’OEA, 15 novembre
1984, DC, annexe 432, p. 374 (les italiques ne sont pas dans l’original).
103 CR 2018/9, p. 48, par. 25 (Pinto).
104 CR 2018/7, p. 27, par. 37 c) (Sander).
105 OEA, AG/RES. 686 (1983).
106 CR 2018/9, p. 40, par. 7 (Pinto), faisant référence à CR 2018/7, p. 18, par. 3 (Sander).
38
- 28 -
s’exprimer sur le problème maritime, qu’elle s’est abstenue de toute reconnaissance de l’existence
d’un quelconque différend entre les deux Etats, et même de toute réaffirmation de l’intérêt de
l’hémisphère pour ce sujet108.
17. Cela est inexact, et m’inspire trois observations.
18. Premièrement, le simple fait que la question soit restée inscrite à l’ordre du jour de
l’Assemblée générale de l’OEA conformément à une disposition expresse de la résolution de 1989,
et qu’elle demeure aujourd’hui une question ouverte, montre que l’Assemblée n’a pas cessé de
reconnaître expressément qu’il existe un problème non résolu, un différend entre deux Etats
membres. De 1989 à la date à laquelle elle a porté la question devant la Cour, la Bolivie a
constamment veillé à ce que la question reste à l’ordre du jour de l’Assemblée. Celle-ci aurait pu à
tout moment décider, en modifiant les dispositions de sa résolution de 1989, que la question était
close, et de retirer à la Bolivie et au Chili leur droit de la remettre sur le tapis. Or, elle n’en a rien
fait, et c’est là un point important : le Chili tente de nier l’existence de tout différend, mais la
position prise là-dessus par l’OEA est nettement autre.
19. Deuxièmement, le secrétaire général de l’OEA a lui-même expressément réaffirmé que la
question de l’accès souverain de la Bolivie à la mer était d’intérêt hémisphérique, et qu’il fallait la
régler :
a) En 2006, M. José Miguel Insulza Salinas, secrétaire général de l’OEA et ancien ministre chilien
des affaires étrangères, a déclaré que «l’OEA consid[érait] depuis longtemps que cette question
(celle de la réintégration maritime) intéress[ait] le continent américain tout entier»109.
b) En 2010, il a déclaré qu’il [fallait] la question de l’accès de la Bolivie à la mer «finisse par être
réglée»110. Consciente de l’importance de ces déclarations, la Bolivie, en 2011, a dit devant
l’Assemblée qu’elle tenait «à remercier les Etats membres de l’OEA de la constance de leur
soutien et le secrétaire général José Miguel Insulza de sa déclaration de [2010] sur la nécessité
de régler la question de l’enclavement de la Bolivie», et à remercier aussi «les divers hauts
107 CR 2018/9, p. 41, par. 7 (Pinto).
108 Ibid.
109 El Diario, 21 avril 2006, MB, annexe 134.
110 Cooperativa, 29 novembre 2010, MB, annexe 141.
39
- 29 -
responsables et anciens hauts responsables chiliens qui [avaient] participé à la recherche d’une
solution, sans oublier, bien entendu le peuple chilien, qui [avait] montré sa grandeur en
soutenant la revendication légitimement exprimée par la Bolivie de disposer d’un débouché sur
la mer»111.
20. Troisièmement, il y a eu devant l’Assemblée générale de l’OEA des déclarations de
soutien d’autres Etats membres, dont voici quelques exemples :
a) En 1992, le Costa Rica a déclaré ceci : «Nous avons écouté avec une grande satisfaction les
déclarations de … la Bolivie et du Chili et avons conscience que ces deux pays frères, comme
cela devait inéluctablement arriver, se rapprochent de plus en plus, grâce à un dialogue direct et
des initiatives bilatérales ; ils ont évolué, surmont[ant] cette crise, ce problème qui est aussi un
problème américain»112.
b) En 1993, la République dominicaine a déclaré qu’elle soutenait «la position du Chili, selon
laquelle la question maritime bolivienne [devait] être réglée bilatéralement, et [qu’elle le
faisait] bien entendu dans l’espoir que la juste revendication de la Bolivie, pays frère, ser[ait]
satisfaite dans un avenir assez proche»113.
c) En 2006, le Pérou, tout en notant que toute négociation avait un caractère bilatéral, a déclaré
qu’il avait «écouté très attentivement l’exposé du ministre bolivien des affaires étrangères, avec
la compréhension et dans l’esprit positif et constructif que l’Etat péruvien a[vait] toujours
manifestés au sujet de la situation d’enclavement de la Bolivie»114.
Les prétendues «presque trente années de silence»
21. Le Chili cherche à tirer argument de ce que l’OEA n’a pas adopté de résolution sur la
question après 1989. Là-dessus trois observations :
111 Procès-verbal de la 4e séance plénière de l’Assemblée générale de l’OEA, 7 juin 2011, CMC, annexe 359,
p. 162.
112 Procès-verbal de la 2e séance de la commission générale de l’Assemblée générale de l’OEA, 19 mai 1992, DC,
annexe 437, p. 309.
113 Procès-verbal de la 3e séance de la commission générale, vingt-troisième session ordinaire de l’Assemblée
générale de l’OEA, 9 juin 1993, REB, annexe 338, p. 278.
114 Procès-verbal de la 4e séance plénière de la trente-sixième session ordinaire de l’Assemblée générale de
l’OEA, 6 juin 2006, REB, annexe 358, p. 206.
- 30 -
22. Premièrement, comme la Cour ne peut maintenant manquer de le savoir, l’Assemblée
générale, conformément à sa résolution de 1989, a maintenu la question à son ordre du jour jusqu’à
2013, année où la Bolivie a déposé sa requête.
23. Deuxièmement, après l’adoption de la résolution de 1989, la Bolivie a considéré d’abord
que s’ouvrait un nouveau chapitre d’un dialogue constructif. C’est ainsi qu’en 1990, elle a déclaré
ce qui suit devant l’Assemblée générale :
«Pendant la dernière session ordinaire de l’Assemblée générale de notre
organisation, une résolution a été adoptée pour permettre l’inscription de la question à
l’ordre du jour de toute session ultérieure de l’Assemblée … La Bolivie estime en
conséquence que cette décision marque l’achèvement d’une phase et le début d’une
autre durant laquelle les parties concernées, fidèles à l’esprit manifesté par l’OEA à
l’égard de cette question, parviendront par une collaboration constructive à trouver des
solutions. »115
24. Troisièmement, la Bolivie, ayant obtenu que soient adoptées 11 résolutions, dont trois par
consensus, s’y est ensuite constamment et expressément référée lors des sessions de l’Assemblée
générale. Lors de sa session de 2003, elle a déclaré ce qui suit :
«Quoi qu’il en soit, l’Assemblée générale a reconnu par onze résolutions que le
règlement de cette question intéressait l’hémisphère tout entier … Il n’est pas étonnant
qu’en 1983, le Chili soit allé jusqu’à se porter coauteur de la résolution. Il est
absolument inutile que de nouvelles résolutions soient adoptées, et c’est pourquoi
nous nous sommes cette fois abstenus d’en proposer une. Il ne faut pas oublier non
plus que … l’un des principaux objectifs que la Charte a assignés à notre organisation
est de «prévenir les causes possibles de difficultés et assurer le règlement pacifique
des différends qui surgissent entre les Etats membres». De plus, l’OEA est le lieu où
nous autres, pays les moins avancés, pouvons poser les problèmes qui s’avèrent
insolubles par la voie bilatérale»116.
Conclusion
25. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, je conclus en revenant à la
question qui est au coeur du débat sur les résolutions de l’OEA. Le Chili cherche à les écarter
comme étant dénuées de tout effet juridique. D’un côté, il affirmait pouvoir être membre de l’OEA,
pouvoir participer à la rédaction d’une résolution de cette organisation, pouvoir se joindre au
consensus par lequel elle est adoptée et pouvoir ensuite déclarer qu’il l’a acceptée, et de l’autre, il
115 Procès-verbal de la 2e séance de la commission générale de l’Assemblée générale de l’OEA, 6 juin 1990,
CMC, annexe 307, p. 305.
116 Procès-verbal de la 4e séance plénière de l’Assemblée générale de l’OEA, 8 juin 2004, CMC, annexe 332,
p. 163 ; les italiques ne sont pas dans l’original.
40
- 31 -
s’estime libre de ne pas tenir le moindre compte de cette résolution, et libre aussi de refuser
catégoriquement d’engager de quelconques pourparlers avec la Bolivie. La position de la Bolivie
reste qu’il ne peut pas en être ainsi.
26. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, vous souhaitez peut-être
maintenant faire une pause ; sinon, Monsieur le président, je vous prie de bien vouloir appeler à la
barre M. Forteau.
Le PRESIDENT : Je vous remercie. J’invite à présent M. Forteau à prendre la parole.
Mr. FORTEAU:
THE CONTINUOUS CHARACTER OF THE OBLIGATION TO NEGOTIATE
1. Mr. President, Members of the Court, my role this morning is to respond to Chile’s
arguments regarding the continuous character of the obligation to negotiate. I shall do so by
discussing five points in turn, and this should have me speaking until about 11.45 a.m., a bit later
than the usual time of the coffee break.
2. First, I shall begin by noting that, in the conclusion to his presentation on Friday,
Mr. Wordsworth devoted but a few very evasive lines to the régime of the obligation to
negotiate117. He did not dispute the legal elements I presented to the Court last week on this point.
It is thus unnecessary to say any more about them this morning.
3. Second, Chile continues to claim, against all reason, that Bolivia fabricated the obligation
to negotiate in 2013 and that this obligation had never been invoked in the past. Yet one need only
look back in time to understand that this allegation is absolutely unfounded.
4. Before seising this Court, Bolivia had invoked the commitments to negotiate on numerous
occasions, in particular in 1999, in 1993, and in 1992118 before the OAS, and in 1988119. And that
was not the first time, since the precedents had previously been recalled in 1979, just after the
failure of the Charaña negotiations.
117 CR 2018/9, p. 37, paras. 53-54 (Wordsworth).
118 CR 2018/7, pp. 55-56, (v) (Forteau).
119 CMC, Ann. 302, p. 2078.
41
- 32 -
5. In its Rejoinder, Chile contended that, when the 1979 draft resolution of the OAS was
being discussed, no mention or even suggestion of an obligation was made120. That is not true
because in 1979 Bolivia expressly referred to the commitments made in 1895, 1920, 1923, 1950,
1956, 1961 and 1975, describing them, as it had done before in 1988, with such explicit terms as
“offered”, “committed to” or “agreed to”121.
6. On Thursday, Professor Thouvenin became aware of the error Chile had made in its
Rejoinder and then advanced a new theory: indeed, he said, these precedents were invoked by
Bolivia in 1979, but Chile’s silence on being reminded of the precedents does not constitute
approval, since, in his words, “diplomats are well aware that they have no obligation to respond to
everything their counterparts say before the political organs of international organizations”122. This
explanation is unconvincing, and in fact it amounts to an admission.
7. I would note, however, that Chile did not remain silent in 1979. On the contrary, its
statements at the time actually confirmed the continuous character of Chile’s commitments. Indeed,
during the discussions of the 1979 OAS resolution, Chile stated that
“In the operative part [of the said resolution] there is a recommendation that the
States concerned with this problem open negotiations for the purpose of providing
Bolivia with a free and sovereign territorial connection to the Pacific Ocean. My
country has always been willing to negotiate with Bolivia”123.
8. Chile also recalled that it “has been willing to satisfy that aspiration”124 and that “once [an]
atmosphere [of respect] is re-established, only through dialogue, mutual comprehension and on the
basis of serious proposals, the path for a sovereign outlet to the sea could be opened to Bolivia”125.
9. Moreover, 1979 was not the first time the relevant precedents were recalled. I shall not
revisit the instances I mentioned last Tuesday which were not refuted by Chile126. I shall simply
note that Mr. Wordsworth admitted that, just after the 1950 Agreement was concluded, the Chilean
authorities themselves made several statements indicating that Chile would be “consistent with the
120 RC, para. 7.7 (a).
121 RC, Ann. 426, pp. 570-571.
122 CR 2018/8, pp. 49-50, para. 46 (Thouvenin).
123 CMC, Ann. 249, p. 1653 (emphasis added).
124 RB, Ann. 319, p. 929.
125 Ibid., p. 931.
126 CR 2018/7, p. 57, paras. 10-11 (Forteau).
42
- 33 -
diplomatic precedents recalled” in the Agreement127. Mr. Wordsworth took the view that this
referred only to “friendly, amiable dealings”128. But this is belied by the very words of the
September 1950 statement by Chile’s Minister for Foreign Affairs — words which
Mr. Wordsworth preferred not to mention129: according to Chile’s Minister for Foreign Affairs,
Chile’s intention was entirely clear when it signed the 1950 Agreement: to give effect to 30 years
of promises past130.
10. In addition to these past promises, if we look further back in time, there is the
1929 Supplementary Protocol concluded with Peru, which confirms that even then, Chile did in
fact have the firm intention to negotiate sovereign access to the sea. The 1929 Supplementary
Protocol is an extraordinary precedent (are there many examples of States that have concluded such
a treaty?), and its existence alone proves just how serious Chile’s intentions were, even at that time,
regarding negotiations on sovereign access to the sea.
11. Third, Mr. Wordsworth once again claimed that the failure of the Charaña negotiations in
itself proved that the negotiations had been taken as far as possible in 1978131. But he mostly just
repeated the arguments set out in Chile’s written pleadings, to which Bolivia responded in detail in
its Reply132. I shall thus make only a few brief comments on this point.
12. To begin with, Mr. Wordsworth failed to explain how his assertion that the negotiations
had been taken as far as possible in Charaña133 can be reconciled with the fact that the negotiations
were restarted after 1979.
13. He then did not deny that there had never been any definitive agreement on the question
of an exchange of territory. And he was careful not to refute the evidence put forward by Bolivia in
this connection, in particular in paragraphs 406, 407, 410 and 413 of the Reply.
127 CR 2018/9, pp. 16-17, paras. 49-51 (Wordsworth).
128 Ibid., pp. 17-18, para. 54 (Wordsworth).
129 Ibid., p. 18, paras. 55-56 (Wordsworth).
130 CR 2018/7, p. 60 (v) and (vi) (Forteau).
131 CR 2018/9, p. 37, paras. 52-54 (Wordsworth).
132 RB, Vol. I, paras. 379-438.
133 CR 2018/9, p. 37, para. 53 (Wordsworth).
43
- 34 -
14. Regarding the fact that the Joint Declaration of 1977 does not mention an exchange of
territory even though it reiterates the commitment to negotiate sovereign access, his response was
to assert that it was just a “wordy and unattractive declaration”134. But a careful reading of this
important declaration shows the opposite; its wording is perfectly explicit135.
15. Lastly, Mr. Wordsworth’s presentation of Bolivia and Chile’s reaction to Peru’s
proposals of November 1976 was equally hasty and truncated. Two omissions are of note here.
16. First, Mr. Wordsworth neglected to recall that Peru’s November 1976 proposal “created
a new scenario”, as former Chilean Minister for Foreign Affairs Heraldo Muñoz put it in 1986136.
This new scenario inevitably affected the overall balance of the negotiations137.
17. Second, as regards the reaction to Peru’s November 1976 proposals, Mr. Wordsworth
merely presented the Parties’ positions in November and December 1976138, while neglecting to
recall that subsequently Peru clearly showed itself willing to continue the negotiations on its
proposal. In particular, in September 1977 Peru mentioned that its proposal was not “a final and
definitive formula, but rather a basis for negotiations”139. Mr. Wordsworth also forgot to mention
that, in December 1977, the Bolivian President clearly criticized Chile for refusing to discuss
Peru’s proposal and reminded it that “Bolivia was expecting Chile to make subsequent efforts” to
reach an agreement140. In March 1978, Bolivia again complained about Chile’s inaction141, and it
was this inaction that led to the failure of the Charaña negotiations142.
18. Fourth, counsel for Chile have said not one word about the fact that the instruments and
statements relating to sovereign access to the sea frequently cross-reference each other in a way
that leaves no doubt as to the continuous character of Chile’s commitments to negotiate143.
134 CR 2018/9, p. 35, para. 45 (Wordsworth).
135 MB, Ann. 165, pp. 599-600.
136 RB, Vol. IV, Ann. 327, p. 143.
137 CR 2018/7, p. 66, para. 34 (Forteau).
138 CR 2018/9, pp. 33-34, paras. 38-42 (Wordsworth).
139 CMC, Ann. 230, pp. 1396-1397, paras. 145-148, and RB, paras. 420-421.
140 RB, Ann. 235, p. 1451, and RB, para. 431.
141 RB, Ann. 237, pp. 1469-1471, and RB, paras. 433-438.
142 RB, paras. 415-438.
143 CR 2018/7, pp. 59-61, paras. 17-18 (Forteau).
44
45
- 35 -
19. It is of particular note that, in his long commentary on the 1950 Agreement,
Mr. Wordsworth said very little144 about the fact that the Agreement refers to the relevant
“antecedents”, not just in the abstract but identifying them expressly. Mr. Wordsworth merely
alluded to the fact that, in the 1950 Agreement, Chile states that it would be “consistent” with the
position expressed in the past145. But the 1950 Agreement is more explicit than that: it includes an
express reference to the 1895 Treaty, the 1920 Act, Chile’s statements of 1922 and 1923, and the
1926 Memorandum. The intention thus manifested is fundamental. It proves that the
1950 commitment to negotiate is not, as counsel for Chile have claimed, an “episode [that] was
sui generis”146 or “a discrete event”147.
20. Chile itself expressly admitted as much in its Counter-Memorial. It spelled out in black
and white that the aim of the 1950 Agreement was “to stand by and give effect to those prior
statements of policy”148. And this is confirmed by other documents, such as the Chilean President’s
statement of May 1951149. The 1950 Agreement’s reference to the 1895 Treaty also confirms,
contrary to what Sir Daniel contended, that the 1904 Treaty did not draw a “decisive line” between
the period before 1904 and the period that followed150.
21. The only comment counsel for Chile made regarding the cross-references between
relevant instruments was that the 1975 Charaña Declaration itself does not contain any explicit
reference to the 1950 Agreement151. That may be true, but there was absolutely no need for one
and, in any event, the August 1971 draft cited by Mr. Wordsworth confirms that Bolivia’s
intention, with the Charaña Declaration, was indeed to revive the 1950 Agreement. The minutes of
the meeting of 14 April 1971 also attest to this152.
144 See CR 2018/8, p. 70, para. 7 (Wordsworth).
145 Ibid., p. 71, para. 14 (Wordsworth).
146 CR 2018/9, p. 71, para. 16 (Koh).
147 CR 2018/8, p. 72, para. 16 (Wordsworth).
148 CMC, para. 6.11 in fine.
149 See RB, pp. 100-101, para. 257.
150 CR 2018/8, p. 29, para. 35, and p. 30, para. 37 (Bethlehem).
151 CR 2018/9, pp. 24-25, paras. 11-13 (Wordsworth).
152 RB, Ann. 297, p. 667.
46
- 36 -
22. Fifth, Chile’s counsel employed a tactic which consisted in focusing only on certain
moments in the chronology and saying nothing about others in an attempt to press home the idea
that there was no continuity. The ploy is obvious, and Chile’s chronology is full of gaps.
23. To begin with, aside from a few general remarks on the OAS resolutions, Chile’s counsel
said not a word about the period between 1978 and 1986. And yet, as I mentioned last Tuesday,
during this period immediately after the failure of the Charaña talks, both States expressed their
intention to resume the discussions on sovereign access to the sea153.
24. In addition to the documents I cited last week on this point, I would now draw the
Court’s attention to two more statements by Chile which are quite compelling.
25. First, in 1983, Chile recalled that the negotiations on sovereign access to the sea were “a
matter for solution directly between Bolivia and Chile” and that “[a]ny negotiations of this type
must also be the result of a process . . . My country is and has always been willing to make a
contribution to the beginning of this process.”154
26. In December 1985, Chile made an equally important statement before the OAS  and I
would point out that making a statement before the OAS does not involve addressing some
abstract, discarnate entity, but rather a group of States which bear witness to the statements
officially made before them. In 1985, Chile reaffirmed that the question of sovereign access to the
sea required bilateral negotiations. And to better demonstrate the sincerity of Chile’s intentions
towards these negotiations aimed at resolving an ongoing problem, Chile made the following
statement [tab 47 of the judges’ folder]:
“I would like to say something very important to this Assembly. Chile has
demonstrated . . . that it is able to solve its problems through bilateral talks. [Chile is
referring here to the agreements recently concluded with Argentina and Peru, which
ended ‘unresolved problems’ dating back several decades.] Those problems that had
been debated for so many years were resolved directly with [these two countries]. So,
when I say that Chile knows how to solve its problems through bilateral talks, I say
this because Chile has shown it to be the case. We are not stalling or deceiving
anyone. We are stating a truth. Mr. President, my words represent my country’s
sincere attitude, a sincere attitude that has been plainly demonstrated, in the opinion of
this Assembly and the opinion of the entire world.”155
153 See CR 2018/7, pp. 67-70, paras. 36-40 (Forteau).
154 CMC, Ann. 264, p. 1765; emphasis added.
155 Ibid., Ann. 280, pp. 1853-1854.
47
- 37 -
27. In November 1986, Chile made a statement to the same effect:
“Chile has always made public its willingness to address matters with Bolivia
that are of common interests, including those related to Bolivia’s landlocked status. It
is important to note that it was at Chile’s initiative that discussions were initiated
between our countries in 1975, with a goal of giving Bolivia access to the Pacific.”156
28. Counsel for Chile also made no mention of the two resolutions adopted by the OAS
General Assembly in 1987 and 1988, which repeated its call for negotiations on sovereign access to
the sea to be resumed157. They also remained rather silent on the content of the speeches of the
Chilean and the Bolivian Ministers for Foreign Affairs of 21 April 1987, which recalled the
1975 Charaña commitment and called for the negotiations to be resumed158.
29. Chile’s counsel preferred to jump straight from 1978 to the period after 1987. But even
so, Chile’s presentation was both biased and selective. Mr. President, if you please, this might be a
good time for a coffee break.
The PRESIDENT: Thank you. I think it is an appropriate moment to take a 15-minute break.
The sitting is adjourned.
The Court adjourned from 11.40 a.m. to 11.55 a.m.
The PRESIDENT: Please be seated. The hearing is resumed, and I give the floor once again
to Professor Forteau. You may continue, Sir.
Mr. FORTEAU:
30. Thank you, Mr. President. As I was saying before the break, Chile’s presentation on the
period after 1987 was both biased and selective. First, Mr. Juratowitch asserted that Bolivia had
changed its position in its Reply in respect of the legal implications of Chile’s conduct after
1987159. That is not true. Bolivia’s position in its written pleadings is consistent; it is that from 1987
onwards, Chile’s position in respect of the promise to negotiate sovereign access to the sea was
ambiguous, and it is on the basis of that ambiguity on the part of Chile that Bolivia draws two
156 CMC, Ann. 284, p. 1914; emphasis added.
157 MB, paras. 193-196.
158 Ibid., Anns. 169 and 170.
159 CR 2018/9, pp. 54-55, paras. 12-15 (Juratowitch).
48
- 38 -
conclusions: first, that Chile did not comply fully with the obligation to negotiate and, second, that
it nonetheless once again manifested its intention to negotiate160.
31. Indeed, as I recalled on Tuesday, from 1987 onwards, Chile began to blow hot and cold
at the same time161. Mr. Juratowitch chose only to tell you about the cold162, and consequently
made two erroneous assertions. According to him, between 1987 and 2011, “Bolivia did not claim
that Chile was under a legal obligation to negotiate sovereign access to the Pacific Ocean”163 and
moreover “there were also no actual negotiations” on sovereign access to the sea164. That,
Mr. President, is not an accurate reflection of reality.
32. As early as 1988, Bolivia recalled the commitments made by Chile in 1920, 1950, 1961
and 1975, pointing out that “this valuable background confirms the desire to reach an agreement
between the parties”165. Furthermore, in 1992 Bolivia cited the precedents of 1950 and 1975166, and
in 1999 it recalled that the commitment to negotiate sovereign access to the sea “was formalized in
eight solemn occasions”167.
33. In June 2004, Bolivia in particular recalled before the OAS that the negotiating proposals
were to include sovereign access to the sea168, stating in that context that “the negotiations of 1950,
1975 and 1987 should be considered a starting point”169. The revelations made in 2011 by the
former Chilean President, Ricardo Lagos, on the content of the negotiations held at the beginning
of the 2000s, also confirm that sovereign access to the sea did indeed form part of the discussions
at that time170.
34. It was against that background that the 13-Point Agenda, which was agreed by the two
Parties, came into play. According to Chile’s counsel, the 13-Point Agenda did not concern
160 MB, paras. 198-219 and paras. 443 et seq.
161 CR 2018/7, pp. 70 et seq., paras. 41 et seq. (Forteau).
162 CR 2018/9, pp. 57-61, paras. 24-41 (Juratowitch).
163 Ibid., p. 53, para. 8 (Juratowitch).
164 Ibid., p. 54, para. 10 (Juratowitch).
165 CMC, Ann. 302, p. 2078.
166 RC, Ann. 437, p. 671.
167 RB, Ann. 345, p. 1207.
168 CMC, Ann. 332, p 2436.
169 Ibid., p. 2439. See also MB, Ann. 116.
170 See MB, Anns. 146 and 186.
49
- 39 -
sovereign access to the sea171. However, on that point, Mr. Juratowitch carefully avoided
addressing the documents that I cited on Tuesday, which establish that, in the context of that
Agenda, the expression “maritime issue” did indeed cover sovereign access to the sea172. He merely
contended that if the “maritime issue” did relate to sovereign access to the sea, the Parties would
have said so173. But the two Parties did say so.
35. Just one year after the adoption of the said Agenda, on 5 June 2007, Bolivia and Chile set
out their respective positions on the matter before the OAS General Assembly174. On that occasion,
Bolivia recalled that the maritime issue related to finding an “equitable solution through which
Bolivia obtains sovereign and useful access to the Pacific Ocean”175. In that context, Bolivia
indicated that a process of rapprochement had been effected between the two countries “to seek a
solution to our maritime claim” and that the issue in question had been included in the
13-Point Agenda, which Bolivia expressly characterized as an “agreement”176. Bolivia added 
you will find this document at tab 48 of the judges’ folder: “Since then, both countries have been
committed to building an environment of mutual trust with the objective and firm commitment to
arrive at a final solution to Bolivia’s landlocked condition.”177
36. Further on in its statement, Bolivia also declared that “the Bolivian people, together with
their Government, are determined to achieve a solution that will allow my country to have a full,
useful and sovereign access to the Pacific Ocean”178.
37. Chile’s statement, which immediately followed Bolivia’s, contained no hint of protest
against what had just been said in such explicit terms by the Bolivian Minister for Foreign Affairs.
On the contrary, this is how Chile replied, through its Minister for Foreign Affairs — the document
is at tab 49 of the judges’ folder:
171 CR 2018/8, p. 29, para. 34 (Bethlehem) and CR 2018/9, pp. 56-58, paras. 21-23 and 27 (Juratowitch).
172 See CR 2018/7, pp. [72-73], para. [48] (Forteau).
173 CR 2018/9, p. 59, para. 31 (Juratowitch).
174 RB, Ann. 361, p. 1413.
175 Ibid., p. 1417.
176 Ibid., p. 1419.
177 RB, Ann. 361, p. 1419.
178 Ibid., p. 1423.
50
- 40 -
“I have listened very carefully to the words of my dear friend,
David Choquehuanca, Minister of Foreign Affairs of the Republic of Bolivia. I would
like to briefly refer to a process in which we have been actors during the last year and
a half, a process of dialogue  I can say it from a personal point of view, and this is
certainly shared by all in my Government and, of course, by President Bachelet  a
process of constructive dialogue, in which, as David said a moment ago, an agenda
was defined without exclusions with thirteen points . . .
Of course we must recognize the obvious: that these processes are very complex
processes, with immediate progress in some areas. Other processes are slower. The
important thing is to maintain a good reciprocal spirit, persistence in the effort and
goodwill to achieve results.”179
38. Chile then referred to the fact — see tab 50 of the judges’ folder — that at the most
recent bilateral meeting between the two countries, “our Governments addressed the entirety of the
agreed agenda, composed of thirteen points”180, before concluding: “We thus ratify a path that
should lead us, once the pending problems are resolved, to a better quality of life for our
peoples.”181
39. In an interview given just after that session, on 24 June 2007, the Chilean Minister for
Foreign Affairs confirmed that “the sea for Bolivia” was indeed point 6 of the 13-Point Agenda182.
That statement was perfectly consistent with the Chilean Minister’s previous comments in April
2006183.
40. Not only did Mr. Juratowitch neglect to mention all of the above, but he also remained
silent about the negotiations which the two Parties held at the very end of the 2000s, which sought,
by adopting a gradual approach, to find a definitive solution to the maritime issue184. Unfortunately,
as we know, those negotiations were abruptly interrupted at the end of 2010185.
41. All this of course elucidates the question of why the matter was referred to this Court.
This Court was seised because it became apparent, in 2011, that Chile, having resumed the
negotiations in the context of the 13-Point Agenda, which could gradually have led to a definitive
agreement on the problem of Bolivia’s landlocked status, had suddenly decided to block the
179 RB, Ann. 361, p. 1425.
180 Ibid., p. 1427; emphasis added.
181 Ibid., p. 1429; emphasis added.
182 MB, para. 454 and Ann. 136.
183 MB, Ann. 132, and RC, Ann. 444.
184 See RB, paras. 463-465.
185 See CR 2018/7, p. 73, paras. 49-50 (Forteau).
51
- 41 -
negotiating process. That had nothing to do with the adoption, two years earlier, of the Bolivian
Constitution, as Mr. Juratowitch would have you believe186.
42. It also shows, contrary to what the latter asserts187, that the purpose of seising this Court
is indeed to resume the “recent dialogue” initiated in the context of the 13-Point Agenda, which
follows on from Chile’s numerous agreements and previous promises.
43. As for the precise date in 2011 when it became apparent that Chile was refusing to return
to the negotiating table, Bolivia explained in its written pleadings that Chile’s refusal to negotiate
sovereign access to the sea was clear in February 2011188, that it became even clearer in May 2011,
when the Chilean Defence Minister announced that Chile had armed forces posted to protect the
territorial integrity of the country189, and clearer still in November 2011, when Chile categorically
stated that it had no obligation at all to negotiate190.
44. And Chile remains uncompromising in its refusal to negotiate today.
Professor Thouvenin told you on Tuesday that if there were to be negotiations between the two
countries, they could at best enable them to “freely compare their views in order to see whether
they can find a mutually acceptable agreement, as long as they are convinced that such an outcome
is possible”191. However, even that ultra-minimalist definition of negotiations seems to be
unacceptable to Chile today, since it refuses to engage in discussion of any kind about sovereign
access to the sea.
45. Similarly, Professor Koh stated that between “two artificial choices — either walk away
or be bound — lies that vast realm we call diplomacy”192. But today Chile rejects even that, since it
now considers, as was evident from the mantra of the Agent of Chile and Sir Daniel on Thursday,
that the 1904 Treaty was “a definitive settlement of all issues of sovereignty”193. We are obviously
186 CR 2018/9, pp. 62-65, paras. 42-51 (Juratowitch).
187 Ibid., p. 63, para. 51 (a) (Juratowitch).
188 MB, para. 462.
189 Ibid., para. 463.
190 Ibid., para. 442.
191 CR 2018/8, p. 56, para. 72 (Thouvenin).
192 CR 2018/9, p. 72, para. 20 (Koh).
193 CR 2018/8, p. 33, para. 49 (Bethlehem); p. 15, paras. 5-6 (Agent).
52
- 42 -
a very long way, Mr. President, Members of the Court, from Chile’s century-old commitments and
promises to negotiate sovereign access to the sea “independently of the 1904 Treaty”194.
46. In conclusion, Mr. President, it will not have escaped the Court’s notice that part of
Chile’s strategy last week was to stress the lengthy duration of the negotiating process, which
began a century ago, to imply that that process gradually ran out of steam195. That brings us,
Mr. President, to the heart of the problem. We all know that negotiations to settle a pending issue
can become drawn out — and that is the case here — because of an imbalance of power between
the negotiators, since time works in favour of the one holding the key to the solution. However,
when promises to negotiate have been made and commitments to negotiate have been given, it is
unacceptable for the passing of time to dilute the commitments and militate in favour of the fait
accompli. It is precisely in a situation of this kind that it is crucial to recall that the obligation to
negotiate is binding, since in such a situation only international law is capable of maintaining a
minimum degree of balance and equality between the Parties to the negotiating process.
47. Mr. President, Members of the Court, I should like to thank you very much for your
attention. I would be grateful, Mr. President, if you would call Professor Vaughan Lowe to the
podium.
Le PRESIDENT : Je remercie M. Forteau. J’invite à présent M. Lowe à prendre la parole.
M. LOWE :
L’OBLIGATION DE NÉGOCIER EN DROIT INTERNATIONAL GÉNÉRAL
Introduction : Quel est le problème ?
1. Merci. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, une situation
d’enclavement a de multiples répercussions ; si l’on considère le seul plan économique, le
problème de la Bolivie est que son développement dépend  dépend absolument  de sa
possibilité d’importer et d’exporter des marchandises par des ports de la côte de l’océan Pacifique.
Comme notre agent l’a expliqué la semaine dernière, le régime établi par le traité de 1904, qui ne
couvre que le transit commercial, ne fonctionne pas ; à supposer même qu’il puisse être amélioré,
194 See, on that last point, CR 2018/6, pp. 41-45, paras. 36-50 (Chemillier-Gendreau).
195 See, for example, CR 2018/8, p. 69, para. 3 (Wordsworth).
53
- 43 -
son défaut d’accès souverain obligerait quand même la Bolivie à emprunter pour ses échanges
commerciaux une voie praticable à la discrétion du Chili.
2. Il y a plusieurs façons d’envisager la solution de ce problème. Le Chili n’a cessé de laisser
entendre que la Bolivie était hostile à toute solution autre qu’une cession de territoire sans
contrepartie, mais cela est inexact. Comme elle l’a clairement dit dans sa réponse à la question
posée en 2015 par M. le juge Owada, elle considère que les modalités et la teneur d’un arrangement
prévoyant un accès souverain sont des questions à régler par des négociations entre les Parties
qu’elle est prête à aborder sans idées préconçues.
3. Le progrès technologique a ouvert des possibilités qui naguère auraient été considérées
comme irréalistes. Les détails des nouvelles solutions possibles méritent l’attention des juristes, qui
devront exercer leur capacité d’anticipation. Ce qui compte, c’est que soit trouvé un moyen
pratique d’assurer à la Bolivie un accès souverain à la mer qui ne soit pas soumis au contrôle du
Chili.
4. La Bolivie et le Chili disposent de juristes, de techniciens et de politiciens habiles, et la
Bolivie ne doute pas de la possibilité de trouver une solution qui lui assure un accès souverain à la
mer dans le respect des intérêts vitaux des deux Etats.
5. Encore faut-il, pour parvenir à une telle solution, que des négociations aient lieu. Et c’est
là la question qui est à l’origine de la présente affaire. Si la Bolivie soulève la question devant
l’OEA ou les Nations Unies, le Chili affirme qu’elle est d’ordre bilatéral196 ; mais lorsque la
Bolivie veut l’aborder sous l’angle bilatéral, il affirme que tout a été réglé par le traité de 1904, et
qu’il ne reste donc rien à négocier.
6. Le Chili peut se permettre de jouer l’attentisme et de refuser tous pourparlers, dans
l’espoir peut-être que la Bolivie se lassera à la longue et finira par être contrainte de renoncer à
toute attente. Cependant, la persistance de ce problème, qui compromet le développement
économique de la Bolivie, ne peut qu’entraîner des tensions susceptibles, à terme, de mettre en
danger la paix et la sécurité.
196 Voir notamment le procès-verbal de la 3e séance de la commission générale de l’Assemblée générale de
l’OEA, 15 novembre 1984, DC, annexe 432, p. 370-371.
54
- 44 -
7. Dans une telle situation, le droit international est le seul recours de la Bolivie, et c’est
pourquoi ses représentants ont fait un demi-tour du monde pour venir défendre sa cause devant la
Cour. En pareilles circonstances, le droit international, la Cour, ont-ils quelque chose à dire, ou
préfèrent-ils se cantonner au rôle d’observateurs impuissants et désorientés ?
L’obligation générale qui incombe aux Etats
de chercher à régler les différends graves
8. On ne saurait en vouloir à un observateur des débats qui ont eu lieu la semaine dernière
d’avoir cru assister à une abstruse querelle de théologiens, avec d’un côté la Bolivie défendant ses
convictions, et de l’autre le Chili cherchant fébrilement à détecter les signes d’un raisonnement
spécieux ou hérétique. On pourrait aussi lui pardonner de se demander comment et par qui ces
doctes et habiles discussions pourraient être rattachés aux problèmes rencontrés par les gens qui
travaillent en Bolivie dans les usines et dans les champs, sur l’avenir desquels la décision de la
Cour aura durablement un impact considérable.
9. La position de la Bolivie est qu’en de telles circonstances, la voix du droit international se
fait effectivement entendre, et que le monde a dépassé le stade où les gouvernants voulaient
défendre les intérêts de leur pays et traiter les problèmes internationaux sans coopérer avec d’autres
Etats.
10. Comme nous l’avons expliqué la semaine dernière, la Bolivie considère que les
Nations Unies, dont la Cour est l’organe judiciaire principal, ont pour vocation première de
promouvoir la coopération internationale aux fins du règlement des problèmes internationaux197, et
qu’en vertu du droit international coutumier et de la Charte, les Etats Membres ont le devoir de
chercher activement à régler leurs différends internationaux de telle manière que la paix et la
sécurité internationales, ainsi que la justice, ne soient pas mises en danger198.
11. Ce devoir s’impose avec une clarté toute particulière en la présente affaire, où il existe
une longue série de comportements, de déclarations et d’accords qui tous appellent à régler un
problème grave par la voie de négociations visant un objectif convenu, qui consiste à trouver une
solution mettant définitivement fin à la situation d’enclavement de la Bolivie.
197 Charte des Nations Unies, art. premier, par. 3.
198 Ibid., art. 2, par. 3.
55
- 45 -
La portée et la teneur du devoir de régler les différends
12. Il est intéressant, encore que passablement déprimant, de constater que selon le Chili, la
Charte des Nations Unies n’exige pas des Etats qu’ils entretiennent des relations amicales et de bon
voisinage avec tous les Etats qui les entourent199. Cependant, le Chili ne peut qu’avoir
complètement tort de prétendre200 que le devoir de régler les différends internationaux énoncé au
paragraphe 3 de l’article 2 de la Charte ne vaut que pour les différends juridiques susceptibles de
relever de la juridiction de la Cour.
13. Le répertoire de la pratique des Nations Unies jette là-dessus un éclairage différent.
Parmi les nombreuses résolutions qui y sont citées au sujet de l’application du paragraphe 3 de
l’article 2 de la Charte201 figure la résolution 40/9 de l’Assemblée générale, dont le titre même
renferme un appel aux Etats Membres «à s’engager à régler les situations de tension et de conflit et
les différends existants par la voie politique, et à s’abstenir de recourir à la menace ou à l’emploi de
la force, et de toute intervention dans les affaires intérieures d’autres Etats». Il est clair que cet
appel ne vise pas seulement les «différends juridiques».
14. Dans l’avenir tel que le présente le Chili, toute communication internationale emporterait
une obligation juridique, si bien qu’aucun diplomate n’osera plus s’exprimer sans avoir sous la
main un juriste capable de le guider à travers ce qu’il appelle «les nombreuses étapes» qu’implique
«l’obligation complexe de négocier» que défend la Bolivie (je précise que ces étapes sont en fait au
nombre de quatre). Mais voyons de plus près ce que dit le Chili à ce sujet.
15. Quelles que soient les obligations de portée plus large qui puissent exister, la Bolivie a
limité son argumentation aux cas où un Etat fait à un autre des représentations sur une question
dont il estime qu’elle est pour lui d’importance vitale. Si le Chili pose la question de savoir si un
Etat est censé répondre à toutes les communications qu’il reçoit d’autres Etats sur des questions
que ceux-ci considèrent comme étant pour eux d’importance vitale, eh bien, notre réponse est
«oui» ; nous considérons effectivement qu’un Etat qui reçoit une lettre officielle d’un autre Etat
doit l’ouvrir, la lire, l’analyser et y répondre. Le Chili pense-t-il vraiment qu’il faille, sans l’avoir
ouverte, mettre la lettre de côté ou la jeter à la corbeille ?
199 CR 2018/8, p. 42, par. 18 (Thouvenin, citant Tomuschat).
200 Ibid., p. 41-42 (Thouvenin).
201 Voir <http://legal.un.org/repertory/art2/english/rep_supp7_vol1_art2_1_5.pdf&…;, par. 12.
56
- 46 -
16. La Bolivie considère aussi que lorsqu’une question est grave, elle mérite d’être examinée
sérieusement. Y aurait-il un autre choix ? Et si un Etat demande officiellement à un autre que des
rencontres aient lieu afin de discuter d’une question grave, qui porte sur un conflit d’intérêts ou de
politiques causant ou risquant de causer un problème ou d’entraîner un préjudice, eh bien, oui, nous
considérons que cet autre Etat doit rechercher le règlement de la question au lieu de la laisser
fermenter et dégénérer. Un Etat qui écrit à un autre pour lui demander de l’aider à retrouver l’un de
ses ressortissants qui a disparu s’attend à une réponse ; pourquoi n’en serait-il pas de même
lorsqu’il écrit pour proposer des remèdes à un problème qui non seulement nuit à l’ensemble de son
économie, mais compromet aussi la totalité de ses autres intérêts vitaux ?
17. Il est bon de se souvenir des affaires telles que celle relative à l’Île Clipperton202 où des
questions devaient être tranchées sur la foi de documents dont les diplomates étaient censés avoir
pris connaissance. Elles montrent que les diplomates qui n’ouvrent pas leur courrier ou n’y
répondent pas le font à leurs risques et périls.
18. Bien évidemment, les exigences sont moindres lorsqu’il s’agit d’une affaire de moindre
importance. On peut soit considérer que le vague du principe constitue un danger, soit y voir une
licence à faire preuve d’un peu de bon sens. En l’espèce, cependant, les déclarations répétées du
Chili aussi bien que les décisions de l’OEA montrent que la question est effectivement considérée
comme grave.
19. Le Chili prétend que considérer ainsi la question revient à prétendre que la Cour «a pour
mission de régler des crises diplomatiques complexes»203. Eh bien, non, il n’en est pas ainsi. La
Bolivie demande seulement à la Cour de déclarer que le Chili a l’obligation de négocier l’accès
souverain [de la Bolivie] à la mer, au vu du comportement de celui-ci au siècle dernier et compte
tenu d’un principe général de droit international applicable à tous les Etats, que reflète le
paragraphe 3 de l’article 2 de la Charte des Nations Unies.
20. Le Chili présente ce principe comme relevant d’une «toute nouvelle théorie qui se
passerait de preuve»204. S’il entend par là une règle de droit international général applicable à toutes
202 Nations Unies, Recueil des sentences arbitrales internationales (RSA), vol. II, p. 1108.
203 CR 2018/9, p. 67, par. 25 (Koh).
204 Ibid., p. 69, par. 28 (Koh).
- 47 -
les situations qu’elle vise sans qu’il soit nécessaire de prouver que les Etats concernés ont
expressément accepté son application au cas qui les concerne, il a raison. Cependant, cette
conception est loin d’être nouvelle et n’appelle nullement une nouvelle terminologie, vu que toutes
les règles de droit international général fonctionnent de cette façon.
21. Le Chili prétend craindre que l’obligation de négocier n’impose «à tout Etat partie de
continuer à négocier, même après avoir conclu un traité à grand-peine, afin de revenir sur des
ententes établies», et n’ait «plus généralement» pour effet «d’immiscer dans tous les dialogues
diplomatiques en cours de prétendues obligations juridiques contraignantes»205. Je ne m’attarderai
pas sur de telles hyperboles, préférant les laisser s’effondrer sous leur propre poids.
22. Mais, plus sérieusement, le Chili avance que «dans toutes les négociations diplomatiques
longues et difficiles, la théorie de la Bolivie donnerait à l’une des parties, sinon aux deux, le
pouvoir d’utiliser la Cour afin de contraindre l’autre à négocier jusqu’à ce qu’elle ait obtenu le
résultat escompté». Il s’agit peut-être là d’un vrai malentendu. La position de la Bolivie sur
l’application du droit international général est que lorsque deux Etats ont un différend sur la
manière  ou la nécessité  de régler un problème d’intérêt vital pour l’un d’eux dont la solution
dépend d’actes de l’autre, chacun des deux Etats a l’obligation de recevoir, examiner et discuter les
communications officielles que lui adresse l’autre Etat à ce sujet, et ce aussi longtemps que persiste
le problème grave, afin d’y rechercher une solution tenant compte des intérêts respectifs des deux
parties.
23. Il va de soi que nous ne prétendons pas que les discussions sur des propositions
immuables doivent se prolonger indéfiniment. Ce que nous voulons dire, c’est que si de nouvelles
propositions sont avancées ou si les circonstances qui faisaient obstacle à la viabilité de
propositions antérieures ont changé, ces propositions devraient effectivement être examinées ou
réexaminées. Peut-être vaudrait-il mieux prêter attention davantage au but visé par le règlement
d’un problème et aux moyens pratiques de faciliter la coopération entre Etats, et moins au potentiel
de telle ou telle théorie de la formation de l’obligation de négocier d’aboutir à une reductio ad
absurdum.
205 CR 2018/9, p. 68, par. 26 (Koh).
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- 48 -
Conclusion
24. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, la Bolivie considère que
lorsque deux Etats qui butent sur un désaccord sont incapables de résoudre un problème grave, le
droit international n’est pas muet. Il dit à tout le moins que les Etats doivent être disposés à
négocier d’éventuelles solutions du problème. Ils n’ont pas le droit de tourner le dos et de refuser
d’examiner la question. On ne peut que rester étonné et perplexe devant le mal que se donne le
Chili pour tenter d’établir qu’il a le droit de se comporter comme si la question de l’«accès
souverain» de la Bolivie à la mer n’existait pas, alors qu’il lui a si souvent, au fil des années, fait
miroiter la perspective d’une solution. Monsieur le président, me voici parvenu au terme de mon
exposé. Je vous remercie, ainsi que Mesdames et Messieurs les membres de la Cour, de votre
patiente attention, et vous prie de bien vouloir maintenant appeler à la barre Mme Chemillier-
Gendreau.
Le PRESIDENT: Je vous remercie. I now give the floor to Professor Monique
Chemillier-Gendreau. You have the floor, Madam.
Ms CHEMILLIER-GENDREAU: Thank you, Mr. President.
THE NATURE AND CONTENT OF THE OBLIGATION TO NEGOTIATE
BORNE BY CHILE
1. Mr. President, Members of the Court, Bolivia will shortly conclude its pleadings before
you. It will be obliged to note then that the history of its relations with Chile is clearly an
embarrassment to the latter. Our opponents have denied that the relations between these two
countries, since the end of the war between them, have been built on what I have called the two
pillars of peace. They have brushed aside this historical observation without even trying to contest
the facts on which I relied. Those facts are in the case file, and I shall not burden the Court by
needlessly repeating them now. Chile wishes to continue with a lopsided kind of peace, based on
the 1904 Treaty, without completing the remainder of the journey to which it has nevertheless
committed itself, in order to bring about genuine reconciliation between our two peoples.
2. That history must be taken into account, however. Apart from the general course of events
over the decades, it is in these hundred years of history that we find the evidence which forms the
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basis of the obligation to negotiate sovereign access to the sea that Bolivia is requesting Chile to
honour.
3. The method of sequencing, used by Chile to dissolve the undertakings given on so many
occasions, fails to achieve its goal. The key events combine with continual reminders to form a
whole which is indeed what my colleagues have just explained to the Court again: by its consistent
conduct over more than a century, Chile has undertaken to negotiate sovereign access to the sea for
Bolivia, and it cannot renounce that commitment today.
The conditions to which the obligation to negotiate is subject
under international law
4. The Court is therefore dealing with a situation to which it can apply its jurisprudence
regarding the obligation to negotiate, and refine it. And that jurisprudence does not lead in the
direction which Chile is asking the Court to take. Chile’s concept of negotiation is not a familiar
one in terms of law206: for our opponents, negotiation is dependent on the sovereign and
discretionary power of the State. Professor Thouvenin was clear in this respect: until the
negotiations are concluded, the negotiator retains complete freedom207. Anything is possible.
5. However, Bolivia is present here before you precisely because the Court has taken care to
point out, in other disputes, that negotiation can and must be subject to the law. It is that legal
framework which it will be for the Court to establish here. Because while negotiators have a degree
of scope for inventiveness, that is not the same as the complete freedom claimed by Chile.
The basic conditions
6. There is first a minimum set of conditions imposed on States. These basic conditions were
recalled last Monday. The Arbitral Tribunal in the Lac Lanoux case further clarified them in 1957:
compliance with the procedures laid down; taking into consideration the proposals or interests of
the other party; refraining from any unjustified breaking-off of the discussions; avoiding abnormal
206 RC, paras. 9.8-9.12.
207 CR 2018/8, p. 44, para. 25 (Thouvenin).
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- 50 -
delays208. By fulfilling these basic conditions, the parties meet the very least part of their
obligation: they behave as negotiators.
Respect for the objective defined by the parties
7. To this must be added, as Chile also acknowledges, that the obligation to negotiate arises
in a very wide range of situations. And the binary distinction between a simple obligation of means
and an obligation of result seems inadequate to clarify the nature and scope of the obligation to
negotiate209. Indeed, on most occasions, without being an obligation to conclude an agreement, the
obligation to negotiate is conditioned by the fact that the objective of the negotiations has been
defined. One of the main requirements for the negotiators is therefore not to call into question the
goal which they have assigned themselves.
8. With this question of the objective, we come to the very heart of the obligation to
negotiate. There is a great difference between general negotiations which States may open in order
to review various aspects of their relations, and targeted negotiations which two States initiate in
order to settle a question that is causing a problem between them and which they intend to resolve.
The former are non-conditioned negotiations; the latter, on the contrary, are conditioned.
9. To put it differently, we can gladly use the terminology coined by Professor Reuter in his
study of 1975210. He referred to the concept of a fixed obligation to negotiate. On those lines, the
Court determined in the Nuclear Tests case, in 1974, that the scope of negotiations is created in the
first instance by their purpose as agreed by the parties211. This is not denied by Chile, moreover212.
10. In the present case, the purpose of the negotiations has been defined many times and
without ambiguity. To take just one example, I shall quote the Exchange of Notes of 1950. This
sets out the goal of the negotiation with precision. Chile “is willing to formally enter into a direct
208 Award of 16 November 1957, United Nations, Reports of International Arbitral Awards, Vol. XII,
pp. 281-317.
209 See Hisashi Owada, “Pactum de contrahendo, pactum de negociando”, Max Planck Encyclopaedia of Public
International Law, Oxford University Press, 2015.
210 P. Reuter, “De l’obligation de négocier”, in Il processo internazionale, Studi in Onore di Gaetano Morelli,
Instituto di Diritto Internazionale e Straniero della Università di Milano, Vol. XIV, Milan, Giuffré, 1975, pp. 711-733.
211 Nuclear Tests (Australia v. France), Judgment, I.C.J. Reports 1974, pp. 269-270, para. 51.
212 RC, para. 2.39, and CR 2018/8, p. 54, para. 64 (Thouvenin).
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negotiation aimed at searching for a formula that could make it possible to give Bolivia its own and
sovereign access to the Pacific Ocean”213.
11. The scope of the negotiations is also determined by background elements peculiar to
each negotiation. Depending on the circumstances, the obligation to negotiate can take shape from
among a very wide range of possibilities. This is where the Court’s role assumes its importance,
according to the case at issue. It is for you to consider, in the particular case before you today, what
has been designated as the purpose of the negotiations, together with the background to them, and,
on that basis, to define the boundaries of this obligation to negotiate.
The necessary prospect of agreement
12. It is impossible to deny, in spite of Chile’s persistent attempts, that as from the end of the
war which tore them apart at the end of the 19th century, the two States have indeed shared the
intention of negotiating sovereign access to the sea for Bolivia, and that therein lies the principal
source of the obligation. In several of the episodes which have marked this long history, Chile has
committed itself deeply to the process of negotiation. The two Parties already embarked on this
course in 1926, then in 1950, and again in 1975. This is evidence of one of the acknowledged
features of the obligation to negotiate: one must negotiate with a view to reaching an agreement.
13. The Court confirmed this in its Judgment in the North Sea Continental Shelf case, by
finding that “the parties are under an obligation to enter into negotiations with a view to arriving at
an agreement”, as well as “an obligation so to conduct themselves that the negotiations are
meaningful”214. This is the prospect that Chile has abandoned by hardening its position vis-à-vis
Bolivia in 2011, and even more so before the Court in these proceedings. And it is to that objective
that Chile must now be led to return.
The role of good faith
14. But once the negotiations are reopened, it will still be necessary for them to be conducted
in good faith. Through its jurisprudence, the Court has made this a cardinal principle of
213 RB, Ann. 266; CMC, Ann. 144.
214 North Sea Continental Shelf (Federal Republic of Germany/Denmark), Judgment, I.C.J. Reports 1969, p. 47,
para. 85.
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international relations215. This honesty that the Court demands of the partners is expressed first in
the acknowledgment of undertakings given. It is not possible to have declared so often a
willingness to negotiate sovereign access to the sea for Bolivia, to have said it in a way that is
neither vague nor ambiguous, and to claim today that those words gave no commitment at all.
15. Honesty is also expressed in the way that tense negotiations are steered towards the
commonly accepted goal. This excludes discussions designed to prolong matters with no intention
of reaching a conclusion. It certainly rules out agreeing to enter into negotiations on a specific
subject while believing that one has an argument for never concluding that negotiation. However,
last Thursday before the Court, Sir Daniel displayed the casualness of Chile in this regard. He did
not hide the fact that Chile’s intention was to talk for the sake of talking, since the 1904 Treaty, in
its view, prevents these negotiations from being concluded216.
16. Good faith in negotiations also excludes playing on the simplified form of an undertaking
(an exchange of notes like that of 1950) in order to claim that no commitment had been given.
17. It is in the name of good faith that we are opposing the unexplained refusal to continue
the negotiations. That excludes breaking them off, as Chile did without reason in 2011. It is in the
name of good faith that we are opposing the unjustified erosion of the terms of those negotiations,
as on the part of Chile between its proposals of 1950 and those of 1975. It is in the name of good
faith that the unilateral acts of States commit them, without the possibility of going back on their
word afterwards, as the Court found in its jurisprudence of 1974. However, Chile attributes to the
precise words of its representatives only the value of informal conversations, thereby breaking the
pact of trust that should be the hallmark of international relations.
Justice as the end, law as the means
18. Mr. President, Members of the Court, the obligation that is borne by Chile is conditioned
by the goal which the Parties have set themselves, as well as by the general objective stated by the
Charter of the United Nations. According to the latter, international disputes must be settled by
peaceful means in such a manner that international peace and security, and justice, are not
215 Nuclear Tests (Australia v. France), Judgment, I.C.J. Reports 1974, p. 268, para. 46.
216 CR 2018/18, p. 31, para. 40 (Bethlehem).
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endangered217. Chile has pointed out that peace and international security are in no way at stake in
these proceedings between itself and Bolivia218. Indeed so, but that does not apply to justice. That
must remain the beacon which lights the way to the peaceful settlement of disputes. When that path
leads to proceedings here before you, justice must be the priority, that justice between States which
is heralded by the very name of the Court.
19. It is strange that Chile, which is at such pains to present itself as a model member of the
community of nations, should have such distaste for seeing the idea of justice enter this courtroom.
Perhaps it will consider suggesting to the United Nations that the institution you are representing
here should be renamed the “International Court of Law”, thereby banishing the word “justice”, of
which it seems to be afraid219.
20. However, justice lies precisely at the heart of what is before us here. Bolivia has set out
clearly before you the terms of the debate: it has been the victim of an injustice resulting from a
very unequal balance of power. Since then, that injustice has been engraved on the heart of every
Bolivian, and every Chilean knows why.
21. But while it is the duty of the Court to deliver justice, you have a precise and rigorous
tool at your disposal for doing so, namely the law. This does not allow you to remedy directly the
historical injustice done to Bolivia. Hence Bolivia is not asking that of you. The Court has also
shown, in its 2015 Judgment on the preliminary objections, its deep understanding of this situation,
since it distinguishes between, on the one hand, sovereign access to the Pacific Ocean, which is
Bolivia’s ultimate goal, and, on the other, the particular dispute that is before you, on the question
of whether Chile has the obligation to negotiate sovereign access to the sea for Bolivia, and, should
that obligation exist, whether Chile has breached it. Such is the dispute which has been brought
before the Court, that and no other.
22. Bolivia’s approach highlights the lack of symmetry between the conduct of the two
States. Chile took hold of all Bolivia’s coastline by means of war. Bolivia is seeking to rid its
people of the consequences of this injustice by means of law. Using peaceful means for the
217 Art. 2, para. 3.
218 RC, para. 2.7.
219 On the role of justice, see International Status of South West Africa, Advisory Opinion, I.C.J. Reports 1950,
dissenting opinion of Judge Alvarez, p. 176.
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settlement of disputes, it is seeking to oblige Chile, with the aid of your judgment, to return to the
negotiating table.
23. If this objective were achieved, the respective interests of the two States would once
again be at issue. It may not be inappropriate to recall that Chile’s interests were largely satisfied
with the military victory which allowed it to seize the entire Bolivian coastline, and that the most
fundamental interests of Bolivia were thus unsatisfied. However, it goes without saying that a
century later, the respective interests of the two States have changed. While Bolivia suffers
seriously from being landlocked, it has other assets at its disposal. What adjustment of their
respective interests will the negotiations between the two States have to result in when they
resume? That is a matter for the imagination and openness of the negotiators. Those of Bolivia will
be able to display both.
24. By requiring Chile to resume negotiations whilst likewise demonstrating a spirit of
openness, the Court will bring about a happy union between justice, as the end, and law, as the
means. It will play its part in the positive vision expressed by Paul Reuter in the study mentioned
earlier. He wrote: “Where, in a dispute, the court or tribunal guides the parties by leading them
towards the conclusion of an agreement, its work can be saluted as a great success for the judicial
institution, in keeping with its loftiest ideals.” [Translation by the Registry.]
Conclusion
25. It is in the hope of such a success that Bolivia has put itself in your hands. And in
conclusion, I shall mention some considerations relating to the psychological background to this
case. Because these cannot be totally disregarded by the Court: feelings have their place in the
relations between peoples and their leaders, as in those between individuals. Fears, suspicions,
mistrust and remorse can all become established. Since the War of the Pacific, Chile, its leaders
and its people have known that the brutal conquest of the whole of Bolivia’s coastline constituted
an injustice. Many Chilean statesmen expressed their intention of remedying that injustice. But
then, stage by stage, that goal has become more distant, mistrust has prevailed and tensions in
public opinion have risen, up to the point when, in 2011, Chile’s position was reversed.
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- 55 -
26. By leaving Bolivia landlocked, while recognizing that one day it would have to give it
back an outlet to the sea, Chile has taken on the role of jailer of a captive people. This situation,
which has been festering for a hundred years, has now turned into a ghost that is haunting Chile.
Through its attitude before the Court, Chile is trying to lay that ghost to rest by denial.
27. It will not succeed, because as the whole of the case file shows, Chile has created in the
heart of every Bolivian man and woman what are referred to in law as legitimate expectations. It is
for the Court to resolve this situation. By ruling that Chile is subject to the obligation to negotiate
with Bolivia with a view to giving it sovereign access to the Pacific Ocean, by specifying that those
negotiations must be conducted in good faith and in such a way as to be meaningful, you will
enable the tension between the two States to subside and the negotiations to be resumed calmly.
You will thus deliver Chile from the ghost that is haunting it and, by doing so, achieve your loftiest
ideal.
Mr. President, Members of the Court, thank you for your attention, and I would now ask you,
Mr. President, to give the floor to the Co-Agent of Bolivia, Ambassador Sacha Llorentty Soliz.
Thank you.
Le PRESIDENT : Je vous remercie, Mme Chemillier-Gendreau. J’appelle maintenant à la
barre le coagent de la Bolivie, S. Exc. M. Llorentty Soliz. Monsieur l’ambassadeur, vous avez la
parole.
M. LLORENTTY SOLIZ :
1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, c’est un très grand honneur
pour moi que de me trouver ici devant vous aujourd’hui pour représenter mon peuple et mon Etat.
2. Je commencerai par citer les propos que le président Evo Morales a tenus au cours de sa
très récente visite à Santiago du Chili : «[l]a géographie a fait de nous des voisins, nos peuples ont
fait de nous des frères et des soeurs et le destin nous rend inséparables»220.
3. Monsieur le président, depuis 139 ans, la Bolivie a toujours cherché à recouvrer un accès
souverain à l’océan Pacifique et son statut d’Etat maritime. Notre conscience collective à cet égard
220 Déclaration faite aux médias chiliens par S. Exc. Evo morales Ayma, ministère bolivien des affaires
étrangères, 11 mars 2018. http://www.cancilleria.gob.bo/webmre/discurso/2434.
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demeure vivace et immuable alors même que la Bolivie connaît en ce moment un processus de
transformations structurelles et, tout en réaffirmant son caractère plurinational, déploie des efforts
considérables pour surmonter, dans le cadre d’une démocratie pleine et entière, les défis auxquels
elle est confrontée.
4. Pourquoi une nation s’acharnerait-elle pendant plus d’un siècle à récupérer son accès à la
mer ? Pourquoi la force de cette aspiration à rejoindre de nouveau la côte Pacifique ne s’est-elle pas
éteinte avec les années ? Pourquoi les pays du continent américain ont-ils déclaré qu’il s’agissait là
d’une question présentant un intérêt permanent ?
5. La réponse à ces questions tient à plusieurs éléments, tels que les origines du problème, à
savoir une invasion militaire survenue en 1879 et obéissant à des intérêts étrangers qui ont voulu
s’emparer de nos ressources naturelles, nous amputant et nous privant de tout accès souverain à
l’océan Pacifique.
6. Pendant plus d’un siècle, le Chili a par ailleurs reconnu la nécessité de trouver une
solution à l’enclavement de la Bolivie, formulant maintes promesses, prenant des engagements et
acceptant de négocier avec elle un accès souverain à la mer. Si nous nous sommes tournés vers la
Cour, c’est parce que le Chili n’a pas respecté ces engagements.
7. Une autre raison tient aux graves préjudices économiques et commerciaux que nous cause
cette injustice. Pour n’en mentionner qu’un, entre 2013 et 2015, la Bolivie a été dans l’impossibilité
d’expédier ses marchandises pendant 143 jours en raison de grèves dans les ports chiliens et de
retards bureaucratiques221.
8. De surcroît, le Chili prive des abondantes ressources de l’océan et limite grandement notre
accès aux routes maritimes les plus dynamiques de notre siècle, à savoir celles du Pacifique.
9. Mais il y a encore d’autres raisons à notre détermination, des raisons bien plus profondes
et inaltérables.
10. Un lien sacré unit la Bolivie à la mer. Ce lien était gravé dans notre âme bien avant que
notre patrie ne devienne une nation indépendante.
221 Estudio sobre Impactos y Costos al Comercio Exterior boliviano relacionados a la Conflictividad Interna en
Países de Tránsito. Informe Final, Rosario Campos y Ricardo Rozemberg, Febrero 2017, p. 19.
https://www.aladi.org/nsfaladi/estudios.nsf/204F8AB8AC7A5E80325814E0069….
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11. La majorité des Boliviens et des Boliviennes sont des descendants de peuples
autochtones qui, selon la déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones «ont
subi des injustices historiques à cause, entre autres, de la colonisation et de la dépossession de leurs
terres, territoires et ressources»222.
12. Les peuples Tiwanaku, Charca, Uru, Aymara et Quechua ont vécu dans ces régions
pendant des siècles, et la relation qu’ils ont entretenue avec l’océan était indissociable du lien
intime qui les unissait à notre mère la Terre.
13. Même notre président, M. Morales, se souvient que, enfant, il marchait avec son père
pendant deux semaines, transportant du sel depuis les hauts plateaux jusqu’aux vallées fertiles en
échange de produits agricoles, tout comme ses ancêtres l’avaient fait depuis des temps
immémoriaux entre les montagnes et l’océan. La mer fait partie de notre âme.
14. Mesdames et Messieurs de la Cour, la Bolivie est la somme des différentes identités qui
constituent le creuset de notre nation. Elle a une identité andine, liée aux montagnes, une identité
amazonienne et une identité Chaco.
15. Mais la Bolivie a également une identité qui lui a été enlevée, une identité qu’elle n’a
jamais oubliée, liée pour toujours à la mer. Une identité côtière.
16. Tout cela explique pourquoi il est fondamental pour la Bolivie de mettre fin à
l’enclavement qui lui a été imposé.
17. Tant avant que depuis la création de la présente Cour, sur le plan bilatéral et multilatéral,
que ce soit devant la Société des Nations, l’ONU, l’OEA ou dans notre relation directe avec le
Chili, notre cause consistant à recouvrer un accès souverain à l’océan Pacifique n’a jamais faibli et
ne faiblira jamais.
18. Tout au long de la présente instance, la Bolivie a démontré que, par suite de la continuité
historique et de la nature contraignante de ses engagements, le Chili a l’obligation de négocier avec
elle un accès souverain à la mer.
222 Résolution A/RES/61/295, Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples
autochtones adoptée par l’Assemblée générale le 13 septembre 2007. https://documents-ddsny.
un.org/doc/UNDOC/GEN/N06/512/08/pdf/N0651208.pdf?OpenElement.
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19. La portée de notre demande a été clairement définie dans l’arrêt qu’a rendu la Cour le
24 septembre 2015223. Cette question n’est pas liée au traité de 1904 et elle est sans rapport avec
notre constitution. Il est étonnant que le Chili continue d’avancer ces arguments.
20. Monsieur le président, nous pensons fermement que l’histoire est de notre côté, que la
vérité est de notre côté, que la justice est de notre côté. Mais, par-dessus tout, notre demande est
rigoureusement fondée en droit international.
21. Notre génération a l’occasion unique de tenir la promesse longtemps repoussée de
délester les générations futures du poids du passé. Tel était le message du président Morales lors de
sa visite récente à Santiago du Chili, où il a déclaré ceci : «[j]e suis venu ici pour vous tendre la
main de la fraternité. Mettons-y toute notre énergie. Ce n’est pas impossible. Nous pouvons
surmonter nos divergences. Ecrivons ensemble, avec courage, la page la plus importante de
l’histoire commune du Chili et de la Bolivie.»224
22. Tournée vers l’avenir, la Bolivie est disposée à créer les conditions nécessaires pour
reprendre les relations diplomatiques avec le Chili.
23. La Bolivie est persuadée qu’il existe à ce problème des solutions pratiques et acceptables
par nos deux pays.
24. La Bolivie est prête à se mettre immédiatement au travail avec le Chili afin d’apporter
des propositions concrètes à la table des négociations.
25. La Bolivie entend créer une situation avantageuse pour les deux peuples.
26. Il suffit au Chili d’accepter cette offre de bonne foi et de tenir d’un bout à l’autre sa
promesse historique.
27. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, j’aurais pu vous lire quelque
extrait des milliers de poèmes et de chansons écrits sur la mer par des Boliviens ou des citoyens
d’autres pays frères pendant plus d’un siècle. J’aurais également pu vous répéter l’une des
nombreuses déclarations de soutien à notre cause émanant du pape Jean-Paul II ou du
223 Obligation de négocier un accès à l’océan Pacifique (Bolivie c. Chili), exception préliminaire, arrêt,
C.I.J. Recueil 2015 (II), p. 592.
224 Déclaration faite aux médias chiliens par S. Exc. Evo morales Ayma, ministère bolivien des affaires
étrangères, 11 mars 2018. http://www.cancilleria.gob.bo/webmre/discurso/2434.
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pape François, des secrétaires généraux de l’ONU et de l’OEA, des présidents et anciens président
de nombreux pays du monde entier, de prix Nobel de la paix et de dirigeants sociaux ou politiques.
28. Mais j’ai choisi de vous lire un extrait du poète chilien Vicente Huidobro, qui, en 1938, a
écrit ces mots comme s’il était là, aujourd’hui, dans cette grande salle de justice :
«Si nous, Chiliens, étions dans la situation du peuple bolivien, ne voudrions
nous pas avoir accès à la mer ? ...
Comme citoyen chilien et comme être humain, je crois et j’affirme que nous
devrions engager le dialogue avec la Bolivie dès que possible et que nos deux pays
doivent et peuvent, dans la générosité et la fraternité, résoudre ce problème majeur
pour la nation Bolivienne qu’est l’accès à la mer. Une nation ne saurait être asphyxiée
et il serait inhumain de le faire» … «L’accès à la mer pour la Bolivie [et ce sont là les
propres mots de Huidobro] est entre les mains du Chili. Il serait triste que celui-ci reste
sourd à l’appel de son voisin.»225
29. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, le président Evo Morales se
fait l’écho de l’appel des Boliviens lorsqu’il déclare, et je cite :
«Pour mon peuple, l’accès souverain à la mer a été et continue d’être la
rencontre avec l’infini, la rencontre avec tous les peuples du monde, avec toutes les
cultures qui habitent cette planète. Je parle au nom des millions d’enfants de mon pays
qui n’ont jamais senti les vagues s’enrouler sur leurs pieds, et des enfants à naître qui
ne méritent pas un destin enfermé entre des chaînes de montagnes.»
30. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, ainsi s’achève ma plaidoirie.
Je vous remercie de votre attention et vous prie de bien vouloir inviter l’agent de la Bolivie à
donner lecture de nos conclusions finales.
Le PRESIDENT : Je vous remercie. J’invite à présent l’agent de l’Etat plurinational de
Bolivie à donner lecture des conclusions finales de son pays. Monsieur l’agent, vous avez la parole.
M. RODRÍGUEZ VELTZÉ :
1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, ceci nous amène à la
conclusion des plaidoiries de la Bolivie, au cours desquelles vous ont été présentés les éléments de
preuve se rapportant au comportement des deux Etats au fil des années, ces derniers reconnaissant
qu’il existe entre eux un différend qui doit être réglé conformément à ce comportement constant et
aux engagements qu’ils ont pris. Nous avons souligné dans nos plaidoiries l’importance
225 Soutien international à la revendication maritime de la Bolivie, ministère des affaires étrangères de l’Etat
plurinational de Bolivie, 2015, p. 45.
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- 60 -
fondamentale du droit international et de l’obligation de négocier aux fins de régler le présent
différend. Notre demande est simple, et la Cour n’aurait jamais été saisie de cette affaire si le Chili
s’était conformé à son obligation de négocier au sujet de l’accès souverain de la Bolivie à la mer.
2. Les origines de ce différend remontent au 19e siècle, lorsque le Chili a reconnu les
conséquences de l’enclavement de la Bolivie, enclavement qui avait été causé par son invasion
militaire du littoral bolivien et ses propositions répétées de fournir au demandeur un accès à la mer,
ce qui a créé pour lui une obligation de négocier.
3. Aujourd’hui, au 21e siècle, les deux Etats disposent de nombreuses solutions innovantes et
pratiques pour résoudre ce problème qui fait obstacle à un avenir commun fondé sur la coopération.
4. L’argumentation que nous vous avons présentée n’est pas hostile au Chili ; elle répond au
contraire à un objectif d’amitié et d’intégration, car telle est notre véritable vocation, notre destinée
commune. Nous devrions être capables de reprendre les négociations et de mettre fin une fois pour
toutes à cette constante source de conflits entre nous.
5. Nous n’avons pas affaire à un différend insoluble. La solution qui y sera apportée ne
bouleversera pas l’ordre mondial ou les fondements de la diplomatie, de la politique ou des affaires
étrangères. Bien au contraire, elle démontrera que le droit international, les organisations
multilatérales et la justice internationale viennent appuyer la volonté des Parties pour parvenir à des
solutions équitables et durables. Comme je l’ai indiqué au tout début, la quasi-totalité de la nation
bolivienne a suivi chaque minute de ces audiences, et nous attendons tous que la Cour rende
justice.
6. Je tiens à remercier notre président, M. Evo Morales Ayma, les représentants de notre
Parlement, nos ministres, nos trois anciens présidents, nos anciens ministres des affaires étrangères,
les dirigeants de nos mouvements sociaux et autochtones, et tant d’autres de nos compatriotes. Leur
présence aura été la preuve incontestable de la portée historique de ces audiences.
7. Avant de donner lecture des conclusions finales de la Bolivie, je tiens aussi, au nom de
notre délégation toute entière, à remercier la Cour pour son attention et sa patience tout au long de
ces audiences. Je remercie également le greffier de la Cour, M. Philippe Couvreur, ainsi que
l’ensemble des services du Greffe, y compris les interprètes, pour leur courtoisie, leur efficacité et
leurs effort.
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8. Je saisis également l’occasion pour remercier tous les membres de la délégation
bolivienne du travail qu’ils ont accompli pour préparer et exposer l’argumentation de la Bolivie.
Enfin, je tiens à remercier la délégation chilienne conduite par M. le ministre Roberto Ampuero,
pour la courtoisie et la considération dont elle a fait preuve au cours de ces audiences.
Conclusions finales de la Bolivie
9. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, je vais maintenant donner
lecture des conclusions finales de la Bolivie.
10. La Bolivie prie la Cour de dire et juger que :
a) le Chili a l’obligation de négocier avec la Bolivie en vue de parvenir à un accord octroyant à
celle-ci un accès pleinement souverain à l’océan Pacifique ;
b) le Chili a manqué à cette obligation ; et
c) le Chili doit s’acquitter de ladite obligation de bonne foi, de manière prompte et formelle, dans
un délai raisonnable et de manière effective, afin d’octroyer à la Bolivie un accès pleinement
souverain à l’océan Pacifique.
11. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, je vous remercie de votre
attention. Ainsi s’achèvent les plaidoiries de la Bolivie.
Le PRESIDENT : Je remercie l’agent de la Bolivie. La Cour prend acte des conclusions dont
vous venez de donner lecture au nom de l’Etat plurinational de Bolivie. La Cour se réunira à
nouveau le mercredi 28 mars, de 10 heures à 13 heures, pour entendre le second tour de plaidoiries
de la République du Chili. L’audience est levée.
L’audience est levée à 13 heures.
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