Opinion dissidente de M. Gerald Fitzmaurice

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053-19710621-ADV-01-08-EN
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OPINION DISSIDENTE DE SIR GERALD FITZMAURICE

[Traduction]

[On trouvera au paragraphe 10 de la présente opinion
un résumé des principales conclusions età la fin, aprèsl'annexe,
une table synoptique.]

1. Véritablesproblèmesse posant en l'espèce

1. Quel que puisse êtremon respect pour les sentiments humanitaires
et pour le souci déclarédu bien-être des peuplesdu Scd-Ouest africain
qui inspirent si évidemmentl'avis consultatif de la Cour en cette affaire,
je ne puis, en tant que juriste, accepter l'argumentation sur laquelle il
repose. De plus, l'avisne me semblepas accorder une attention suffisante
aux aspects de la question qu'il importe réellement d'établir afin de
pouvoir conclure que le Mandat de l'Afrique du Sud pour le Sud-Ouest

africain est valablement révoqué.Une grande partie des développements
sur le fond (c'est-à-dire figurant dans la partie de l'avis qui ne traite pas
de questions formelles, préliminairesou incidentes) viseà démontrerque
les mandats de la Société des Nations ont survécuen tant qu'institutions
internationales à la dissolution de la Société - alors que ce qui est
réellement encause dans cette affaire estnon pas la survivance du Mandat
pour le Sud-Ouest africain mais sa prétendue révocation. Que l'Afrique
du Sud persiste ou non à contester la survivance du Mandat, ce qui est
certain c'est qu'elle conteste cette survivance en tant qu'obligation
envers les Nations Unies (c'est là le point essentiel), et qu'elle dénieaux
organes des Nations Unies toute compétenceou pouvoir de révoquerle

Mandat.
2. Quant à la conclusion de la Cour, qui consiste à affirmer que le
Mandat a été valablement révoqué e,lle repose presque exclusivement sur
deux postulats - ou plutôt, en dernière analyse, sur un seul. C'est à
dessein queje parle de postulats:pour le deuxième,qui est le plus radical
et qui, d'une manièreou d'une autre est véritablement sous-jacent à tout
l'avisde la Cour et en constitue toute la motivation, il est mêmeouverte-
ment admis que ce n'est pas la peine d'aller plus loin, la question étant

208évidente. Ces deuxpostulats sont: primo, qu'il y avait ou qu'il devait y
avoir un droit inhérent, appartenant aux Nations Unies, de révoquer
unilatéralement le mandat en cas de violation fondamentale de celui-ci
unilatéralement constatée; secundo, que de telles violations se sont
effectivementproduites. Etant donné qu'il estclair que ce prétendudroit

inhérentde révocation, à supposer qu'il existe, n'ajamais pu êtreinvoqué
si ce n'est à la suite de violations fondamentales (plusieurs passages de
l'avis reconnaissent expressémentque seule une violation substantielle
justifierait la révocation),il en découleque l'avisen général,ou du moins
sa conclusion principale, dépend de l'existence de ces violations. Et
comment l'avis traite-t-il cette question essentielle? - essentielle parce

que, si la thèse des violations fondamentales n'a pas de justification
suffisante en droit, tout l'avis s'écrouleforcément, demêmeque (mais pas
seulement pour cette raison) la résolution 2145 de 1966 par laquelle
l'Assembléegénérale aprétendurévoquerou déclarer terminéle Mandat
et qui reposait sur un postulat analogue '.
3. Les accusations de violation du Mandat rentrent sous deux chefs

principaux. La première porte sur le fait de ne pas avoir rempli à l'égard
desNations Uniesune obligation qui, dansla clausepertinente du Mandat
(art. 6), est décrite commeune obligation d'envoyer un rapport annuel
au Conseil de la Société des Nations ». Or, à la date critiqueà laquelle la
situation juridique doit être appréciée, c'est-à-direen octobre 1966,
époqueoù la résolution2145de l'Assembléegénérale visant à révoquerle

Mandatou à en déclarerla cessation a été adoptéel,'idéeque ne pas faire
rapport à l'Assembléegénéraledes Nations Unies pût constituer une
violation du Mandat - et à plus forte raison une violation fondamentale
-reposait essentiellementnon pas sur un arrêt 2, mais sur un avis consul-

Puisqu'il importe que le caractère et l'intention véritables de cette résolution
(qui n'est pas reproduite dans l'avis de la Cour) soient bien compris, en particulier
pour ce qui est du ton employé et des vrais motifs, je la reproduis in extenso
dans l'annexe à la présente opinion (section 3, p15).Elle ne contient guère de
ne pas faire trop long interdit toutefois de se livrer icilyse détailléele souci de
a) Au sujet de l'obligation de faire rapport, qui constitue un problème distinct
de celui de la survivance du Mandat en soi, les décisionsde la Cour de 1955, 1956
et 1962 n'ont fait que se référeravisconsultatif de 1950 sans ajouter de nouveaux
motifs. Dans son arrêt de 1962, rendu en la phase préliminaire (juridictionnelle)
des affaires intéressant ce qu'on appelait alors le Sud-Ouest africain (Ethiopie et
Libériac. Afrique du Sud), et dans laquelle le problème concernait non pas l'article
6 du Mandat mais son article 7, la Cour a purement et simplement repris à titre
d'obiterdicrum son propre avis de 1950 sur l'obligation de faire rapport et n'a pas
étudié davantagela question qui par suite repose éncore essentiellement sur l'avis de
1950. Ni dans la conclusion principale de l'arrêt de1962,ni dans son dispositif, que
l'on trouve à la page 347 du Recueil de le Cour pour 1962,la Cour ne s'est prononcée
sur ce point ni n'en a fait mention. Les avis consultatifs de 1955 et de 1956 sur la
Procédurede voteet l'Admissibilité del'audition depétitionnaires découlent également
deb)'Il n'est peut-être pas indifférentque le fait de ne pas avoir soumis des rapports
êl'Assemblée générale- auquel le présent avis de la Cour attache un si grand

209 NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 222

tatif donnépar la Cour en 1950lequel, n'étantque consultatif et s'adres-
santnonpas à l'Afrique du Sud mais à l'organisation des Nations Unies,
ne liait pas l'Afrique du Sud et qui, sur ce point particulier, a prêté à
maintes controverses, a suscité des prisesde position dissidentes impor-
tantes et a inspirépar la suite maintes critiques graves aux spécialistes.
On ne saurait y voir un fondement juridique adéquatpour l'exerciced'un

pouvoir de révocation unilatérale, celui-ci existerait-il. Il ne saurait y
avoir violation fondamentale de quelque chose dont on n'a jamais
établi - d'une manière contraignantepour l'entité qui estcensée y être
soumise - qu'il s'agit effectivementd'une obligation et qui en fait a
toujours donné et donne encore lieu à de véritables contestations juri-
diques. Que l'Afrique du Sud ait nié l'existencede l'obligation, c'est
évidemmentun autre problème mais ce n'est pas raison suffisante pour

établir au'elle l'ait violée.
4. Le deuxième chef d'accusation concerne le comportement, qualifié
de contraire c(au bien-être matérielet moral et au progrès social ))des
habitants du territoire sous Mandat et par suite à l'article 2 du Mandat.
A la date critiquedel'adoptiondelarésolution2145deI'Assembléegénérale,
cette accusation n'avait jamais donnélieu à une constatation judiciaire
quelconque et, dans la présente procédure,la Cour a expressément refusé
de l'examiner puisqu'ellea rejeté lademande de l'Afrique du Sud d'être

autorisée à présenter denouvelles preuves matérielles et desarguments
s'y rapportant. La justification de ce rejet serait que la pratique de
l'apartheidou développement séparéest de toute évidence~ré~judiciable
au bien-êtredes habitants du territoire sous Mandat et aue',l'existencede
cette pratique étant établiepar les dispositions législativeset réglemen-
taires du Mandataire, qui sont connues de tous, il n'est pas nécessaire
d'en administrer la preuve. C'est là un argument facile et quiépargne sans
aucun doute bien des efforts. Mais sied-il à un tribunal d'y recourir? Car

il est évident que le raisonnement est elliptique. Certes, l'authenticité
des lois et décretseux-mêmesn'a pas besoin d'être établie etpeut, comme
on dit dans les pays de common law, êtrejudiciairement enregistrée sans
qu'il soit besoin de preuve spécifique.Mais ilest manifeste que les déduc-
tions à tirer de ces textes quant aux effets qu'ils produiraient dans les
circonstances locales particulières de l'espècesont au moins sujettes à
examen; et il n'est guèrede systèmedéveloppé dedroit privé,s'il en est

un, dont les tribunaux refuseraient de s'y livrer, quelle que soit la

poids -ne soit pas (quoique sans doute viséimplicitement) expressémentmentionné
par la résolution2145 de l'Assemblée au nombre des motifs qui justifieraient la
cessation du Mandat. L'avis attache beaucoup plus d'importance à l'accession à
l'indépendance du territoire sous Mandat, considération qu'aucune méthode de
raisonnement ne saurait justifier en tant que motif juridiquement valable de révoca-
tionCertes, la Cour a disposéen 1965-1966 d'une abondante documentation écrite
et orale. Mais il nereste aujourd'hui que quatre desjuges qui la composaient alors
et de toute manière la Cour dans son ensemble ne s'est livréeà aucune étude collec-
tive de ces élémentsde preuve au cours de la présenteprocédure. NAMIBIE(S.-O. AFRICAIN) (OP. DISS. FITZMAURICE) 223

conclusion à laquelle ils aboutiraient en fin de compte. Pourtant, c'était
sur la question mêmedu prétendu effet évidemment nuisiblede sa poli-
tique d'apartheid dans le Sud-Ouest africain que le Mandataire voulait
fournir de nouvelles preuves matérielles. Ainsila Cour, tout en se préva-
lant de principes du droit des contrats pour chercher établirun pouvoir

de révocation unilatéralepour cause de violation fondamentale, n'ap-
plique pourtant pas les garanties correspondantes que le droit privé lui-
mêmeprévoit pour s'assurer qu'il y a bien eu violation. Ce n'est pas à
grand renfort de postulats qu'on peut faire cette vérification.
5. En conséquence,puisque tout I'avisconsultatif de la Courtourne en
dernière analyse autour de l'idéeque des violations fondamentales du
Mandat se sont produites, il faut constaterà regret que, dans lescircons-
tancesdécritesplus haut, cetteconclusion a été développée d'une manière
qui doit nécessairementcompromettre l'autorité de l'avis enraison d'un
examen insuffisant des prémissessur lesquelles il prétend se fonder.

6. Ce qui faisait à la vérité,ou à proprement parler aurait dû faire
l'objet essentiel de la présente procédure,ce n'étaient pasces questions
mais des problèmes de compétenceet de pouvoirs - car, à moins que la
compétence et le pouvoir nécessaires pour révoquer le Mandat de
l'Afrique du Sud appartiennent dûment aux organes des Nations Unies,
aucune infraction àce Mandat, pour grave qu'elle soit, ne pourrait avoir
pour résultaten droit de valider l'acte de révocationou de lui donner un
effetjuridique quelconque. C'est là qu'apparaît le caractère fallacieux du
raisonnement - procédant d'un autre postulat non démontré - sur
lequel repose tout l'avisde la Cour,àsavoir quela survivance du Mandat

supposait r~écessairementle rôle de surveillance de l'organisation des
Nations Unies.
7. Quant à la révocabilitéunilatérale,l'avispart d'une conception de la
position des divers mandataires de la Sociétédes Nations par rapport à
leurs mandats qui,à l'époquede la Sociétédes Nations, aurait étéconsi-
dérée commedénaturée etde toute façon inacceptable. Mon interpré-
tation de la situation se fonde, de manière orthodoxe, sur ce qui paraît
avoir étél'intention desprincipaux intéressés àI'époque.L'attitude de la
Cour, marquant l'aboutissement d'une philosophie différentequi m'est
étrangère,se fonde sur les intentions d'entités et d'organes nouveaux et
distincts quelque cinquante annéesplus tard. Ce n'est pas là un critère

juridiquement valable et ceux qui pensent recourir au processusjudiciaire
international à l'heure actuelle doivent tenir le plus grand compte de
l'explication de son attitude en ce genre de domaine que la Cour a écha-
faudéedans son avis.
8. Sur les deux points- celui de la compétence del'organisation des
Nations Unies en matière de surveillance et celui de la possibilité de
révocation unilatéraledu Mandat, les conclusions de la Cour soulèventd'énormes difficultésjuridiques que l'avis consuItatif contourne plutôt
qu'il n'y fait face et dont il paraît parfoisine conscient. Des considé-
rations tenant à l'opportunité ou à l'inopportunité de certains résultats
ou conséquencesn'offrentaucun fondement satisfaisant àdesconclusions
juridiques, comme le souligne mon collègueM. Gros, pas plus d'ailleurs
qu'une simplification aussi excessive du problème que celle qui consiste

à affirmer que l'Afrique du Sud administrait le territoire sous Mandat au
nom des Nations Unies, qui avaient de ce fait le droit de révoquer le
Mandat - manièrede voir qui, tranquillement, suppose résoluespresque
toutes les questions se posant en l'espèce. Là encore, dire que certains
résultats sont inacceptables parce que, si on lesacceptait, cela reviendrait
à admettre que des droits déterminés étaientpar nature imparfaits et
non exécutoires n'est pas convaincant en droit international car, au
stade actuel de son évolution, ce système présente précisément un tel
caractère dans une large mesure et, en attendant des transformations
pour l'instant non prévisibles,le conservera. Ce n'est pas en méconnais-

sant cette situation quel'on fera évoluerle droit.

9. Vu !e refus de la Cour de permettre la désignationd'un juge ad hoc
sud-africain malgréle caractère nettement contentieux de I'affaire (sur

ce point voir la section4 de I'annexe à la présente opinion), il est parti-
culièrement nécessaire d'exposer et d'analyser ces difficultés. Cette
nécessitéme fera pardonner !a longueur d'une opinion que la nature de
l'affaire ne permettrait de réduire qu'au risque de commettre d'impor-
tantes omissions.

2. Ordre et énoncé des conclusions principales

10. Mon argumentation principale est développéedans les quatre
sections A à D de la deuxièmepartie de la présente opinion (par. 11-124)
et un post-scriptum sur certains aspectspolitiques connexes de l'ensemble

du problème s'y ajoute (par. 125).Quant aux divers points préliminaires
qui se posaient, ils seront- du moins ceux d'entre eux que j'ai estimé
nécessaire d'examiner - traités dans l'annexe quisuit le paragraphe 125,
en mêmetemps qu'une ou deux autres questions qu'il est pluscommode
d'aborder à cet endroit. Sur le fond mêmede l'affaire, mesconclusions
principales, énoncéessans leurs motifs, sont les suivantes:

i) Mêmesi les divers mandats qui formaient le système des mandats
de la Société desNations ont survécu à la dissolution de cette institution
en 1946,I'Organisation des Nations Unies, qui n'étaitpas le successeur
endroitdelaSociété desNations, n'a étéchargéenailors ni ultérieurement
de la fonction de surveillance qui était précédemmentexercéepar le
Conseil de la Société desNations en tant que corollaire ou contrepartie
de l'obligation des mandataires de lui faire rapport. La relation deveil-lance ne prenait naissance que siun territoire sous mandat étaitplacésous
le régimede tutelle des Nations Unies (ce qui n'était pas obligatoire).
Aucun mandat (etpas seulement celui de l'Afrique du Sud) n'ajamais été,

comme tel, géréau nom des Nations Unies 4.
ii) L'obligation de faire rapport a survécuelle aussi à la dissolution de
la Société desNations, mais elle restait latentejusqu'à ce que des arran-
gements comparables à ceux qui existaient à l'époquede la Société des
Nations, acceptables pour le Mandataire, puissent être pris pour la
ranimer Elle ne s'estconvertie ni automatiquement ni autrement en une
obligation envers les Nations Unies, qui ait pu investir ces dernières
d'une fonction de surveillance. Le consentement du Mandataire à ce aui

aurait été en fait uneno~lationn'a jamais étédonné.
iii) Mêmesi l'Organisation des Nations Unies a étéeffectivement
chargéed'une fonction de surveillance sur les mandats non convertis en
tutelles, cette fonction, telle qu'elle étaitinitialement conçue dans le cadre
de la Société desNations, ne comprenait pas un pouvoir de révocation
unilatérale. Par suite, ce pouvoir ne peut avoir ététransmis à I'Organi-
sation des Nations Unies.
iv) Mêmesi le Conseil de la Sociétédes Nations avait possédéce

pouvoir, l'Assembléegénéraledes Nations Unies n'étaitpas compétente
pour l'exercer à cause des limitations constitutionnelles auxquelles son
action, en qualité d'organe des Nations Unies, était intrinsèquement
soumise, compte tenu à la fois de la structure de base et des termes
ex~rèsde la Charte.
v) Abstraction faite des dispositions expresses de certains articles de la
Charte qui ne sont pas pertinentes, les pouvoirs de l'Assembléegénérale
consistent seulement à discuter età recommander. L'Assembléene peut
pas plus obliger le Mandataire que le Conseil de la Société desNations ne

le pouvait.
vi) Compte tenu des conclusions i) à iii) ci-dessus, qui s'appliquenà
l'organisation des Nations Unies dans son ensemble, le Conseil de
sécuritén'avait pas, en ce qui concerne les mandats, d'autres pouvoirs ou
des pouvoirs plus larges que ceux de l'Assembléegénérale.Par suite, son
action ne pouvait pas, à ce titre, remplacer ou valider une action défec-

A l'exception du Sud-Ouest africain, les divers territoires sous masauf -
bien entendu ceux qui étaient ou sont devenus des Etats indépendants et souverains
- ont tousété placéssous tutelle des Nations Unies. L'opération ne s'est nullement
qui ait conservé son statut de Mandat. Toutefois, comme la Cour dit dans sonul
avis consultatif de950 sur le Statut intern~tional du Sud-Ouest afric(C.Z.J.
Recueil 1950, p. 144), les mandataires n'avaient aucunement l'obligation juridique
de placer les territoiressous mandat sous le régime detutelle.
11apparaît qu'aucun des mandataires n'a fait rapport aux Nations Unies dans
l'intervalle (quiu atteindre deux ans environ) précédantle moment où le territoire
sous mandat a étéconverti en territoire sous tutelle ou, dans certains cas, a accédé
àl'indépendance.tueuse de l'Assemblée.Le Conseil de sécurité n'avaitpas non plus le
pouvoir de révoquerle Mandat.
vii) Le Conseil de sécurité ne peut pas, sous le couvert du maintien de
la paix, aboutir valablement à un résultat dont le caractère véritable
consisterait à exercer les fonctions de surveillance à l'égarddes mandats.

viii) Mêmesi le Conseil de sécurité agit véritablemenp tour préserver
ou rétablirla paix ou la sécuritéi,l n'a pas, dans ce domaine, compétence
pour opérerdes changements définitifset permanents de droits territo-
riaux, qu'il s'agissede souveraineté ou d'administration; or un mandat
comporte nécessairement undroit territorial d'administration, sanslequel
il ne pourrait être géré.
ix) Les ((conséquencesjuridiques pour les Etats )des conciusions qui
précèdentsont :

- que le Mandat n'a pas étérévoqué valablement à l'initiative des
Nations Unies en 1966ou ultérieurementet qu'il subsiste encore;
- que le Mandataire reste tenu de remplir toutes les obligations du
Mandat, quelles qu'elles puissentêtre,qu'il n'a ledroit ni d'annexer le
territoire sous Mandat ni d'en modifierle statut de toute autre manière;
- mais que l'Organisation des Nations Unies n'a pas ce droit non

plus et que ses Etats Membres sont tenus de reconnaître et de respecter
cette situation tant qu'elle n'aura pas étémodifiéepar des voies légales.

Dans la deuxièmepartie de la présente opinion, qui va suivre, l'argu-
mentation sur laquelle ces conclusions s'appuient se répartira ainsi: sur
les conclusions i) et ii), section A, paragraphes 11-64; sur la conclusion
iii), section B,paragraphes 65-89; sur les conclusions iv)àviii), sectionC,
paragraphes 90-116;sur la conclusion ix),sectionD,paragraphes 117-L24.

Viendra ensuite le post-scriptum (par. 125). Les paragraphes et les
notes de l'annexe sont numérotés à part. NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 227

L>~RGANISATI OES NATIONU SNIES N'A JAMAIS ÉTÉ INVESTIE D'AUCUNE

FONCTION DE SURVEILLANCE CONCERNANT LES MANDATS EN TANT QUE TELS

1. Absence detoute successionjuridique del'Organisation
des Nations Uniesàla SociétédesNations

I1.En l'absence d'une règlegénéralede droit international qui ferait
intervenir un processus de succession automatique d'une entitécomme
l'Organisation des Nations Unies aux fonctions et activitésd'une entité
disparue comme la Société desNations, il n'y a que trois moyens par
lesquels l'ONU aurait pu, à la dissolution de la SdN, êtreinvestie des
pouvoirs de cette dernièretouchant les mandats en tant que tels:si des
dispositions avaient été prises spécialementcet effet; b) s'il y avait eu
d'une façon ou d'une autre succession implicite; si l'on pouvait établir

que le Mandataire, en l'occurrencel'Afrique du Sud, avait consentiàce
qui aurait étéune véritableovationquant àl'obligation de faire rapport,
en acceptant la surveillance d'une entiténouvelle et différente(l'ONU ou
l'un de sesorganes) et l'obligation de lui rendre compte.

12. A mon avis, I'ONU n'a accédé par aucun de ces trois moyens au
rôle de ladN en matièrede mandats; mais, en cequiconcerne lepremier,
il faut préciserd'embléeque la question dépassede beaucoup celle des
mandats. Il y a eu en fait un refus déliet généralm, otivépar des rai-
sons politiques et psychologiques, de consentir à quelque continuité

juridique ou politique que ce soitentre l'ONU et la (voir par.35 et 36
ci-après). Etant donné que les mandats étaient considéréscomme faisant
partie des activités politiques de la, il faut présumer qu'il n'y a pas
eu de prise en charge par I'ONU du système desmandats en tant que tel,
comme en témoignent amplement la création du régimeparallèle de la
tutelle des Nations Unies et lefait que lesmandataires ontinvités,mais
non obligés,à convertir leurs mandats en tutelles. 11sera cependant plus
commode d'examiner ces questions par la duite,en les replaçant dans leur
perspective historique, de mêmeque lepoint de savoir sil'Afrique du Sud,

en tant que Mandataire, a jamais consenti à ce que soient transférée.à
I'ONU les obligations lui incombant,à la date d'entréeen vigueur de la NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE)
228
Charte, envers la SdN, qui existait encore à l'époqueet devait d'ailleurs
survivrequelquetemps.

13. En attendant, j'en viensàla deuxièmedestrois possibilités évoquées
au paragraphequi précède :celled'unetransmission implicite àl'ONU des
fonctions de la SdN en matière de mandats et, en conséquence,d'un
transfert implicite à I'ONU des obligations que le Mandataire avait
auparavant envers la SdN. Il est facile de supposer que, puisque I'ONU
présentait certainesressemblances avecla SdN et pouvait êtreconsidérée
commeson successeur «naturel »,elleenétaitaussilesuccesseurjuridique;

or il n'en a pas étéainsi. Il n'est pas moins facile de supposer, comme la
Cour le fait à l'évidencedans son avis, pratiquement sans examen, que,
si - et parce que - les divers mandats ont survécu à la Sociétédes
Nations, il s'ensuit que I'ONU doit nécessairementet ipsofacto avoir
acquis le droit d'exercerun rôle de surveillancesur les mandats, bien que
cesderniersaientconstituéune institutionde la SdN et non pas de l'ONU
et qu'ils ne soient mentionnésdans la Charte que comme des territoires

susceptibles (mais sans idéed'obligation) d'êtreplacéssous la tutelle de
l'ONU. Le caractère spécieuxde ce raisonnement, ou plutôt de cette
présupposition, est évident. Mêmle'argument selon lequel I'ONU était
seule capabledejouer cerôle est, comme on leverra, erroné.

2. Absencede successionautomatique ou implicite

i) Origineet nature
de lafonction desurveillance

14. Le Conseil de la Société desNations (dont trois des principaux
mandataires étaient membres permanents) n'a jamais étélui-même
expressément investi eo nomine de ce que l'on a appelé la fonction de
surveillance relativeà la gestion des diversmandats 6.En outre, l'expres-
sion mêmede surveillancepeut induire en erreur vu qu'aux votes de la
SdN s'appliquait la règlede l'unanimité,y compris le suffrage de 1'Etat

Membre intéressé (c'est-à-direl,orsque lesmandats étaienten cause, celui
du mandataire). En réalité,la fonction dite de surveillance procédaitde
l'obligation pour les mandataires @',de présenterun rapport annuel au

6, 64, 6Le pluriel ou l'article indéfiniet le rnminuscule sont utilisés dans la
Mandat pour le Sud-Ouest africain ou de l'Afrique du Sud en tant que Mandataire,t du
faute de quoi on risqueraide fausser la perspective; en effet, sous réserve des
différencesentre mandats A,B etC telles qu'elles sont indiquées sommairement à
l'article 22, paragraphes 4, 5, et 6 du Pacte de la SdN et telles qu'elles résultent du
texte des diverses catégories de mandats, la situation sous lades angles qui
intéressent la présente affaire étaitla mêmepour tous les mandats et pour tous les
mandataires et n'était pas spéciale au Sud-Ouest africain. En particulier, aucun
des mandats ne conférait de fonction de surveillance spécifique au Conseil de la
SdN, et tous, à cet égard, se bornaient à stipuler l'obligation de faire rapport dans
des termesàpeu près équivalents.Conseil, par l'intermédiaire dela Commission permanente des mandats,
en quelqÜesorte comme conséquence,corollaire ou contrepartie de cette
obligation. C'est de cette façon et d'aucune autre qu'a pris naissance ce

qu'on aappelél'obligationdes mandataires de rendrecompte. Cepoint, qui
aune importance primordiale quand ils'agit d'évaluerlanature réelledela
fonction de surveillance telle qu'ellepouvait êtreexercéepar le Conseil de
la SdN et de décidersi elle comportait le pouvoir de révoquerle mandat
d'un mandataire 6b, est développédans la section B ci-après. Ce qui
importe ici, c'est que ce sont I'obligation de faire rapport et le devoir de
rendre compte qu'une obligation de cet ordre peut impliquer7 qui ont
donné naissance à la fonction spécifiquede surveillance, et non le con-
traire; et, incontestablement, la question de savoir qui ou quelle entité

était habilitéà surveiller se rattache et est surbordonnée à la question
préalable suivante: à qui ou à quelle entité les mandataires avaient-ils
I'obligation de faire rapport et, par voie de conséquence, de rendre
compte (bienquedetoute façon l'obligation de rendre compte n'impliquât
pas un contrôle- voir note 7).

ii) Distinction entre I'obligation defaire rapport
proprement dite et la question de savoir
quelle entitépeut enexiger l'exécution

15. 11s'ensuit que, pour déterminer quelle entitéa étéinvestie, le cas
échéant, dela fonction de surveillance aprèsla disparition de la SdN et de
son Conseil, il faut déterminer à quelle entitéles mandataires sont alors
éventuellement devenus obligésde faire rapport, à supposer qu'ils aient
continué à être soumisen tant que mandataires à une obligation quelcon-
que de faire rapport (voir par. 10,note 5). Plus précisément,pour répon-
dreen l'espèce à laquestion de savoir si1'ONUen particulier a été investie
d'une fonction de surveillance, il est nécessaired'établir si, pour tout
territoire sous mandat non placésous le régimede tutelle des Nations

Unies, le mandataire avait désormais I'obligation de faire rappbrt à un
organe de I'ONU, et notamment à l'Assembléegénéraleque la Cour
a jugédans son avis de 1950êtrel'organe le plus approprié à cet égard.
Le problème sous-jacent est de savoir si I'ONU pourrait revendiquer non
pas-simplement un droit de regard mais un droit exclusif, en ce sens que
I'obligationlui serait dueà elle età elle seuleà l'exclusion de toute autre
entité. Autrement dit: Primo, en supposant, comme on l'admet générale-

' Comme on le verra par la suite, l'obligation de faire rapport n'a dans le con-
texte des mandats aucunedes implications que peut avoir, par exemple, le fait de
dire queX... fait rapport à son supérieur Y..., ce qui suque X... reçoit ses
de laSdN et les mandataires, pas plus qu'entre les organes compétents de I'ONU etil
les Etats Membres qui administrendes territoires sous tutelle (voir par.104
ci-après, ainsi quenote 66, par. b et c).ments,que les divers mandats ont survécu à la dissolution de la SdN,

est-ce que l'obligation de faire rapport, c'est-à-dire la situation de respon-
sabilitéconsidéréeen quelque sorte dans l'abstrait, a survécu elle aussi
en tant qu'élémentdu mandat? Secundo, dans ces conditions, cette obli-
gation a-t-elle survécusous la forme d'une obligation de faire rapport et
de rendre compteou s'est-elletransforméeen une telle obligation non pas
simplement à l'égardd'un organe quelconque,mais de l'organe particulier
qu'étaitet qu'est demeuréel'Assembléegénéralede l'ONU?

iii) L'obligation defairerapport, si ellea survécu,
pouvaitêtreremplieautrement
qu'enfaisant rapport à un organe del'ONU

16. 11est évident que, si l'obligation de faire rapport a survécu à la
SdN, la présentation derapports à un organe de l'ONU, en particulier à
l'Assemblée générale n,'étaitpas le seul moyen possible de s'acquitter de
cette obligation; un organe de l'ONU, en tant que tel, n'était d'ailleurs
nullement indispensable comme destinataire, commentateur ou critique
de cesrapports. Il existaià l'époqueet il existe encore aujourd'hui plu-

sieurs organes internationaux qui sont par nature beaucoup plus proches
du Conseil de la SdN, ou tout au moins de l'ancienne Commission perma-
nente des mandats, que ne l'est l'Assembléegénéraleet auxquels tout
mandataire aurait pu s'arranger pour faire rapport s'il l'avait préféré,
en entretenant avec eux le type de dialogue qui s'étaitinstauré avec les
organes de la SdN. II est essentiel de rappeler icique l'absencede tout
pouvoir coercitif confiéà un tel organe n'auraiteu aucune incidencesur la

situation, car ni le Conseil de laSdN ni ['Assembléegénérale deN s ations
Unies n'avait untel pouvoir en la matière 9. Ou bien, si l'on n'avait pu
trouver aucun organe approprié disposé àjouer ce rôle, tout mandataire
aurait eu la faculté,en agissant éventuellementde concert avec d'autres,
d'encréer un, il'égardde qui lesengagements nécessaires eussentété pris,

En ce qui concerne cet aspect de l'affaire, l'argument de l'Afrique du Sud selon
lequel le Mandat est terminé estla fois indirect et soumis à certaines conditions.
entièrementà la dissolution de la SdN parce qu'il est alors devenu impossible deinte
s'en acquitter dela manière stipulée, mais aussique ce n'était pasun élémentessentiel
du Mandat qui pouvait subsister en dehors de celui-ci. En mêmetemps, elle affirme
que si l'obligation n'est pas séparable du Mandat lui-même,et en constitue un
aspect essentiel, alors son extinction entrl'extinction du Mandat tout entier.
Ce sont là les deux branches d'une alternative il n'y a pas contradiction entre
elles, comme l'avis dela Cour tendrait faire croire.
Cet argument, qui va à la racine mêmed'une grande partie de l'affaire, est
développéplus longuement dans la sectionB ci-après. D'après la procédure de la
SdN, les décisions du Conseil n'étaient pas obligatoires pour le mandataire, à
moins qu'il n'y consentit, au moins tacitement; quant aux résolutions de l'Assemblée
générale desNations Unies, sauf dans certains cas particuliers qui sont sans intérêt
sauf,à la rigueur, et encore pourrait-on en discuter, pour les Etats qui ont votéen
faveur de ces résolutions.les rapports ultérieurs et les commentaires à ces rapports étant rendus
publics 1°.

iv) II n'yapas eusurvivance de l'obligation
de,fairerapportsous.formed'obligationautomatique
envers un organe deI'ONU.
Dzfférencesfondamentales entre le Conseil de lSadN

et l'Assembléegénérale deN sations Unies
en tant qu'organes de surveillance
17. Aux finsdu présent raisonnement,il n'estpas nécessaired'exprimer

une opinion définitivesur lepoint de savoir siI'obligation defaire rapport
a ou n'a pas, dans l'abstrait ou en théorie,survécu à la dissolution de la
SdN, car de toute façon je n'estime pas qu'elle ait survécusous forme
d'une obligation automatique et fonctionnant par elle-mêmede faire
rapport spécifiquement à l'ONU, notamment à l'Assembléegénérale,et
d'en accepter la surveillance. L'hypothèseformulée inconsciemment(ou

délibérément? q)ui a obéréla question du Sud-Ouestafricain pendant tant
d'annéeset selon laquelle iln'.avait aucunedzfférencepourle Mandataire
entrefaire rapport au Conseil de la SdN ou à I'Assembléegénérale des
Nations Unies(ce qui permettait de demander pourquoi on ne ferait pas
rapport àcette dernière)est bien entendutout àfait illusoire,carla nature
de l'organe de surveillance aflecte la nature et le poids de l'obligation.

Etre de cet avis ne signifiepas nécessairementqu'on accepte l'argument
de l'Afrique du Sud selon lequel l'obligation de faire rapport était si
intimement liée à la nature de l'entité envers qui cette obligation existait
que, cette dernière disparue, elle devait s'éteindreentièrement ll. En
revanche j'admets qu'en aucun cas I'obligation de faire rapport à un
organe, le Conseil de la SdN, et d'accepter sa surveillance ne pouvait

êtretransformée automatiquement et ipsofacto sans le consentement du
mandataire (et mêmecontre sa volonté) en une obligation envers un
autre organe ayant par rapport au Conseil de la SdN une composition

rapportàpI'ONU; en revanche ils ont tous, à l'exception de l'Afrique du Sud, trans-
forméfinalement leurs mandats en tutelles.
l1 Pour plus de détails sur cette question, voir section D ci-après, par. 119-120.
La question est axéesur:

i) le point de savoir si, comme la Cour l'a jugé en 1950 (C.Z.J. Recueil 1950,
surveillance, tient une si grande place dans un mandat que, si ce dernier survit,
l'obligation survit aussi nécessairement, ou si, comme Read l'a estimé
(ibidp.,165), l'absence de présentation de rapports, etc., pouvait ((affaiblir le
Mandat »mais sans l'affecter autrement;
ii) l'effet, s'il s'agit d'une situation contractuelle ou quasi contractuelle, de la dis-
parition d'une des parties,en l'occurrence la
iii) dans une situation non contractuelle, le statut juridique d'unedispositionqui
ne peut plus êtreexécutéeconformément aux termes mêmesdans lesquels elle
est libellée, mais quen pourrait peut-être appliquer par un moyen équivalent.très différenteet un effectif beaucoup plus nombreux et fonctionnant

différemment,suivant des méthodes, desprocédures etdes règlesde vote
différenteset dans le contexte d'opinions, de doctrines et d'objectifs
totalement différentset par nature défavorables au mandataire 12.En
vérité,le fait mêmeque la surveillance d'un mandat aurait étédévolue à

un organe désapprouvant en principe que des mandats restent des
mandats, estimant dès l'abord, presque comme s'il s'était agi d'un
article de foi (j'y reviendrai'par la suite car c'est un point capital), que
tous les territoires sous mandat devaient êtreplacés sous son propre

régimede tutelle et ayant pour objectif principal dans toutes ses opéra-

l2 Le tableau suivant permettra de voir clairement cesdifférences:

l'Assemblée générale

VI. Composition de Experts agissant Représentants des
l'organe à titre personnel gouvernements
subsidiaire et non en tant que
représentants de
leur gouvernement

VII. Attitude et Favorable aux Défavorable aux
façon de voir de mandataires - non mandataires -très
l'organe de exagérément politisée
surveillance politisée

VIII. Objectif Bonne administration Accessionàdu
du territoire sous territoire
mandat l'indépendancele
plus vite possibletions, qu'il s'agissede territoires sous tutelle, de territoires sous mandat
ou des territoires non autonomes visésà l'articl73 de la Charte, de faire
naître le plus rapidement possible une sériede nouveaux Etats souverains
et indépendants - ce fait mêmeaurait suffi à créeret à perpétuer un
étatpermanent detension entre l'Assembléegénérale desNations Unies en
tantqu'organe desurveillanceettout mandataire tenudeluirendre compte.

Il n'en allait pas du tout ainsi sous le régimede la SociétédesNations.
18. Les mêmesconsidérations exactement valent pour tout comitéou
sous-comitéde l'Assembléegénérale quipouvait êtrecréé pour s'occuper
des mandats et qui, quelque tournure qu'on lui donnât pour qu'il res-
semble au Conseil ou à la Commission permanente desmandats de la SdN
(voir la proposition faite par l'Assembléegénéraledans sa résolution449
(V) du 13 décembre 1950), devait rester entièrement sous la coupe de
l'Assembléegénérale et reflétait sestendances et sesbuts. Cela a d'ailleurs
été uneévidencecriante dans lecas des comitésqui ont été ultérieurement
créés pour s'occuper du Sud-Ouest africain.

v) Conclusionsquant à l'idée
d'unesuccessionimplicite

19. Pour tous ces motifs, il me semble juridiquement impossible de
postuler que la métamorphose s'est produite automatiquement et à
défaut de consentement.Lefaire serait non seulement changerl'identitéde
l'organe habilità surveillerl'exécutionde l'obligationmais, en raisonmême
de ce changement,changerla nature de l'obligationelle aussi.tant donné

la différencede nature et de méthodesde cet organe, ce serait créer une
obligation nouvelle et plus lourde. Bien entendu, c'est, entre autres,à
cause de cette possibilité même qu'inle saurait y avoir de novation sans
que les intéresséy consentent. Je dois donc considérer qu'aucun change-
ment de ce genre ne s-estproduit spontanément et que par conséquent,
faute de consentement, l'ONU n'ajamais étéinvestie d'aucune fonction
de surveillance quelle qu'elle fût. Je vais maintenant développercet
argument, d'abord pour répondre à plusieurs objections qui ont étéou
qui pourraient être avancées etensuite pour tenir compte de certaines
considérationspositives et concrètes auxquelles on n'ajamais donnéleur
poids véritable mais quime paraissent décisives.

3. Arguments contraires concernant la thèsede la
succession implicite

a) Avis consultatifde la Cour duIl juillet 1950

20. Lors de la procédure consultative de 1950,entre l'argumentation
sud-africaine sur la question et les vues expriméespar la Cour, le paral-
lélismea étéfrappant mais l'orientation entièrement différente. Il en a
étéainsi à cause d'une confusion ou d'un télescopage,commis de part
et d'autre mais en sens différent, des deuxquestions distinctes déjà signalées:celle de la survivance de l'obligation de rendre compte en
tant que telle et celle de la forme de cette survivance, si survivance il y
avait. Partant du principe que l'obligation n'avait jamaisétéenvisagée
autrement que comme obligatiori envers le Conseil de la SdN et que par
suite elle ne pouvait, lors de la dissolution de la SdN et dela créationde
l'ONU, être automatiquement transforméeen obligation envers cette

dernière, l'Afriquedu Sud a fait valoir que, parce qu'il en étaitainsi, il
s'ensuivait que toute obligation de rendre compte avait disparu. Cette
déduction pouvait êtreassez naturelle, mais elle manquait évidemment
de rigueur et de nécessité logiquescar I'obligationpouvait survivre en
tant que telletout en restant momentanément à l'étatlatent.

21. L'argumentation de la Cour en 1950, pareillement elliptique,
débouchait dans une tout autre direction. Tenant pour assuré que
I'obligation de faire rapport était une partie essentielle du système des
mandats et devait survivre si le systèmelui-même survivait, la Cour en a
déduit que par suite l'obligation survivait comme obligation de faire
rapport spécifiquement à l'Assemblée générale deN sations Unies. Non

seulement cette dernière partie de l'argumentation était dépourvuede
rigueur et n'avait aucun caractère de nécessité,mais elle reposait sur
une idée évidemment fausse,celle-là mêmequi motiva les opinions
dissidentes- que j'approuve pour ma part - de sir Arnold McNair et
de M. Read. Manifestement, ce n'était pas, commela Cour l'a jugé en
pratique, parce que lesNations Unies étaienten quelque sorte disponibles

et avaient institué sous la forme du régimede tutelle quelque chose
d'assezvoisin du systèmedes mandats, que non seulement les territoires
sous tutelle mais encore les territoires sous mandat devaient en consé-
quenceêtresoumis à la surveillance de l'ONU. Là non plus, il n'y avait
pas d'enchaînement logique 13.Cela revenait à dire que, mêmesi (comme

la Cour l'a constaté plus loin dans le mêmeavis consultatif, C.I.J.
Recueil 1950, p. 138-140)les mandataires n'étaientpas tenus de placer
sous le ré"imede tutelle leurs territoires sous mandat. ils devaient Dour-
tant, qu'ils l'aient fait ou non, accepter de toute façon en pratique le
contrôle de l'ONU - ce qui n'avait aucun sens. La Cour en arrivait

l3Le passage ci-après de l'avis consultatif (C.Z.J. Recueil 1950, p. 136) fait très
clairement ressortir le télescopage entre, d'une part, la prémisse valable que
gation de rendre compte n'avait pas nécessairement disparu en principe avec la SdN
et, d'autre part, la déduction fausse que les mandataires étaient de ce fait néces-
sairement obligésderendre compteà1'ONU:
«On ne saurait admettre que l'obligation de se soumettre à surveillance
aurait disparu pour la simple raison que cet organe de contrôle a cessé d'exister
alors que les Nations Unies comptent un autre [un autre, assurément] organe
internationalhargé de fonctions analogues encore que non identique».(Les
italiques sont de nous.)
Le défaut de logique est évident. La Cour ne paraît pas avoir vu que le transfert
un organe nouveau et différent ne peut ni se faire de lui-mêmeni êtreprésumé
réalisé; etle présent avis consultatif de la Cour s'accommode de ce raisonnement
fallacieux.ainsi à désavouer sa propre conclusion suivant laquelle la tutelle était
facultative - et avait l'air de dire: ((Pile, je gagne; face, vous perdez »!
11n'est pas exagéré d'affirmer que l'absence de toute obligationjuridique

de mettre sous tutelle les territoires sous mandat supposait à fortiori
et comme conséquencenécessaire l'absencede toute obligation juridique
d'accepter la surveillance des Nations Unies sur les mandats, sinon la
deuxièmeproposition détruisait l'effetde la première.
22. Il est évidentquel'existencede l'ONU et sa ressemblance super-
ficielle avecla SdN n'ont en bonne logique rien à voir avec la survivance
de l'obligation de faire rapport, sauf dans la mesure où elles fournissent
un moyen commode, mais non obligatoire, de remplir cette obligation

si elle a effectivement survécu. C'estce qu'a dit M. Read en 1950.Ayant
constatéqu'il n'y avait pas eu, de la part du Mandataire, consentement
à l'exercicede la surveillance des Nations Unies et qu'en l'absence de ce
consentement la seule base possible de I'obligation en cause aurait été
((le fait pour les Nations Unies d'avoir succédé ))il poursuivait (C.I.J.
Recueil1950,p. 172) :

((Cette succession ne saurait reposer sur les dispositions de la
Charte, car ..aucune disposition de la Charte ne pourrait juridique-
ment affecter une institution fondée sur le Pacte ni porter atteinte
ou mettre fin aux droits et intérêtsdes Membres de la Société des
Nations qui ne sont pas membres des Nations Unies 14. Elle ne

pourrait reposer sur des référencesou des déductions tirées de la
nature de la Société desNations et de celle des Nations Unies, ou
d'une similitude quelconque danslesfonctions de ces organisations.
En l'absence de consentement exprès ou tacite de la Société des
Nations, des Nations Unies et de la Puissance mandataire cette
succession ne saurait être déduite par implication, en fait ou en
droit. Or, il n'y a pas eu de consentement de ce genre. )) (Les
italiques sont de nous.)

b) La Charte implique-t-elle une obligationde rendre

compte à la charge des mandataires?
i)Engénéral

23. La Charte ne mentionne pas spécifiquement lesterritoires sous
mandat sauf dans les deux articles (77et 80, par. 2) où elle y fait allusion,
en mêmetemps qu'à d'autres territoires, comme étant candidats au
régimede tutelle mais sans créer d'obligation à cet égard. Sur la sur-
veillance ou le devoir de rendre compte, pas un mot. La thèse selon
laquelle il faut interpréter la Charte comme si elle traitait en fait de ces
questions tient donc exclusivement à l'emploi du procédéqui consiste

l+ On avait oublié et on continue commodément d'oublier - ce que n'avait pas
faitM. Read - qu'à l'époqueoù la Charte est entrée en vigueur (octobre 1945)et
et jusqu'en avril946la Société desNations existait toujours. NAMIBIE(S.-O. AFRICAIN) (OP. DISS. FITZMAURICE) 236

à attribuer des conséquences implicites à deux dispositions, I'article 10
et l'article 80,paragraphe 1.Ce sont cestextes qu'il convientde considérer
maintenant.

iiA )rticle 10dela Charte

24. Pour que I'article 10 suffisepar lui-même,il serait nécessaire d'y
trouver non seulement l'attribution d'une compétence à l'Assemblée
généralepour exercer un rôle de surveillance par rapport aux mandats,
mais aussi une obligation pour les mandataires d'accepter cette surveil-

lance et de rendre compte à l'Assemblée.Comme I'article ne mentionne
pas les mandats nommément, il faudrait soutenir qu'en donnant à
l'Assembléegénérale lafacultéde discuter toutes questions ou affaires
[et de ((formuler sur ces questions ou affaires des recommandations D]
rentrant dans le cadre de la présenteCharte )),non seulement il lui confie

une fonction de surveillance à l'égard desmandats mais aussi il oblige
les mandataires à accepter qu'elletienne ce rôle età se considérer comme
devant lui rendre compte. Indépendamment du fait que la seule faculté
de ((discuter ...et de formuler des recommandations [non obligatoires] ))
ne saurait viser ou inclure un pouvoir aussi radical que celui de révoquer
unilatéralement un mandat, il est évident qu'unefaculté accordée à A

ne peut pas en elle-mêmeet par elle-mêmecréerautomatiquement et
ipsofacto une obligation pour B, mêmes'il s'agit d'un mêmeordre de
question 15.rabsence de lien logique est apparente et ce hiatus ne
saurait être comblé comme la Cour cherche à le faire 16.En outre,
puisque I'une des questions essentielles qui se posent est précisément

cellede savoir si lesterritoires sousmandat entant quetels - à distinguer
des territoires sous tutelle et des territoires précédemment sousmandat
placéssous tutelle - entrent «dans le cadre de la présente Charte )),
toute l'argumentation fondéesur l'article 10dela Charte tourne en rond
et estessentiellementtautologique.

25. L'article 10étaitet est encore une disposition qui, sansmentionner
expressément les mandats ni d'ailleurs rien de spécifique, embrasse
l'immense domaine qu'impliquent les mots ((toutes questions ou affaires

l5 Par exemple, la création d'un service chargé d'organiser des opérations de
rzcensement et de rassembler des renseignements cet effet n'oblige pas en soi la
population à coopérer. Outre l'obligation qu'elles imposent au service du recense-
ment, les lois prévoyant les recensements imposent une obligation distinctee
la population, celle de coopérer, sous peine de sanctions. S'il en était autrement,
cette dernière obligation n'existerait pas etla première serait par conséquent vaine.
l6 Comme en 1950, croyant découvrir dans I'article 10 une compétence de
l'Assembléepour surveiller, la Cour professe que l'obligation de rendre compte
l'Assembléedont le mandataire serait chargé découlerait a) de I'article 80 de la
Charte, b) d'une prétendue acceptation du devoir de rendre compte aux Nations
Unies que tous les mandataires seraient supposés avoir donnée en votant pour la
Ainsi qu'on le verra (par. 26-32 et 54-55 ci-après), l'obligation ne peut découler ni
de I'uneni de l'autre de cesdeux sources.rentrant dans le cadre de la présenteCharte ». Ces mots peuvent inclure
presque n'importe quoi 17. Et pourtant pourrait-on raisonnablement
soutenir que, à propos de tout sujet que l'Assembléepourrait croire bon

de discuter en invoquant cette disposition et qui pourrait à juste titre
êtreconsidéré commey étant englobé, lesautorités et organes de tous
les Etats Membres des Nations Unies seraient de ce seul fait tenus
d'envoyer des rapports à l'Assembléesur sa demande et d'accepter
qu'elle surveilleleurs activités?Poser la question, c'est en faire éclater

l'absurdité. Rien dans l'article 10 ne pourrait produire un tel effet en
dehors d'une stipulation expresse. Dèslors, sur quelles bases juridiques
une obligation de faire rapport et d'accepter la surveillance sur les man-
dats pourrait-elle êtretiréede cette disposition? C'est précisémenc tette

absence de nécessitélogique ou mêmede lien qui a motivé l'opinion
dissidente de lord McNair en 1950. Après avoir dit qu'il n'entrevoyait
pas le motif juridique permettant valablement de considérer l'ancien
Conseil de la SdN comme remplacépar I'ONU pour ce qui est des rap-
ports à lui faireet dela surveillance à exercer par lui, ce qui ((équivaudrait

à imposer ...une obligation nouvelle [au mandataire] et serait faire
Œuvre de législation judiciaire)), il poursuivait (C.I.J. Recueil 1950,
p. 162):

(En disant celaje n'oubliepas la compétenceque possède1'Assem-
blée...en vertu de l'article 10dela Charte, pour procéder à l'examen
du mandat ...et pour faire des recommandations au sujet de ce

Mandat; cette compétence toutefois ne dépend d'aucune théorie
de succession implicite mais bien des dispositions de la Charte. ))

En d'autres termes, mêmesi les dispositions de la Charte sufisaient à
fonder la compétencede l'Assemblée(uniquement celle de discuter et de
recommander), il faudrait encore démontrerqu'ellesfondent l'obligation
du mandataire, puisqu'il n'est pas question de pouvoir recourir à une
théorie de succession implicite 19,et, dans la mesure où l'on s'en remet

---
l7 Il suffit de jeter un coup d'Œil sur le préambule de la Charte et sur l'article
premier, ainsi que sur les dispositions des chapitresX etX, pour voir combien
la gamme des matières possibles est vaste, mêmesi on laisse decôtédessujets comme
le maintien dela paix et divers points de détail.
l8 «Nouvelle ))parce que, comme la SdN, de toute évidence, n'a pas cédé ses
droits de surveillance I'ONU (voir à ce sujet par. 42 ci-aprés), seuleune novatioli
aurait pu produire l'effet en faveur duquel la Cour s'est prononcée en 1950. Mais,
pour qu'il y ait eu novation, il aurait fallu le consentement du mandataire, que
lord McNair estimait ne pas avoir été donné.Parlant des diverses déclarations
faitesà l'époque pour le compte de l'Afrique du Sud, il a indiqué (C.Z.J. Recueil
1950, p. 161) qu'il n'y trouvait aucune ((preuve suffisa»tque le Mandataire «ait
ou bien accepté la succession, par implication, des*Nations Unies ...ou ...ait
contracté envers les Nations Unies une nouvelle obligation de faire revivre le
système de surveillance d'avant-guerre1).
l9 Lord McNair avait déjà soutenu (C.Z.J. Recueil 1950, p. 159) que c'était
qu'ily ait eu succession automatique de l'organisation des Nations Unies «auxe penser

225aux termes de l'article 10 à cette fin, il est évidentque rien ne peut leur
donner lepoids qu'on prétendainsileur attribuer.

iiij Article 80dela Charte

26. C'estlàuneautre disposition (dont letexteestreproduit ci-dessousz0)
à laquelle on a voulu prêterun effet excessif et déplacéet qui, elle non
plus, ne peut supporter le poids qu'on cherche à lui attribuer. (Il est vrai
queleparagraphe 2paraît reposer sur l'idéeque lesterritoires sousmandat

seraient placéssous le régimede tutelle - mais l'expressiond'une attente
ne créepas des obligations, comme la Cour l'a elle-mêmeconstaté,
précisément à propos de cette disposition (C.I.J. Recueil 1950,p. 140).)
Quant au paragraphe 1, il est clair que les changements qu'il exclut sont
ceux, et seulement ceux, qui pourraient résulter du chapitre XII de la
Charte consacré au régimede tutelle (((aucune disposition du présent

chapitre [XII] ne sera interprétée ...comme modifiant », etc.); or, comme
lord McNair l'a observé pertinemment en 1950, ((l'extinction de la
surveillance exercéepar la Société deN s ations etdel'article6du Mandat 21
n'est due à rien qui soit contenu dans le chapitre XII de la Charte, mais
à la dissolution de la Société des Nations en sorte qu'il est difficiled'aper-
cevoir la pertinence de cet article 1)(C.I.J. RecueiI 1950, p. 160). Il est

bien entendu possible de s'appuyer sur d'autres motifs pour soutenir
que le principe de la responsabilitéconcrétiséepar l'obligation de faire
rapport, bien qu'elle soit entréeen sommeil, n'estpas devenu caduc à la
dissolution de la SdN (par. 17et 20 ci-dessus). Ce qu'il n'estpas légitime
de soutenir, c'est que, si l'obligation étaitdevenue caduque - ainsi ou
d'une autre façon -, l'article 80a pu la préserverou la ranimer - car

ce que cette disposition a pu empêcherc'est uniquement une extinction
tenant aux effets du chapitre XII mais non l'extinction due à des causes
entièrement étrangères à cechapitre.

droits du Conseil de la Société desNations ...car dans la Charte ne figure aucune
disposition assurant [cette]succession.[que 1'1on aurait pu expressément conserver
..et conférer...aux Nations Unies ..mais cela n'a pas été fa..
20 L'article 80 de la Charteénonce:
«1. A l'exception de ce qui peut êtreconvenu dans les accords particuliers
de tutelle conclus conformément aux articles 77. 79 et 81 et olacant chaaue
territoire sous lerégimede tutelle, etjusqu'à ce que ces accordsté concfus,
aucune disposition du présent chapitre ne sera interprétée comme modifiant
directemeni ou indirectement en aucune manière les droits quelconques d'aucun
Etat ou d'aucun peuple ou les dispositions d'actes internationaux en vigueur
auxquels des Membres de l'organisation peuvent êtreparties.
2. 1,e paragraphe 1 du présent article ne doit pas êtreinterprété comme
motivant un retard ou un ajournement de la négociation et de la conclusion
d'accords destinésà placer sous le régimede tutelle des territoires sous mandat
ou d'autres territoires ainsi qu'il est prévul'article 77)1(Les italiques sont
de nous.)
21 L'article 6 du Mandat pour le Sud-Ouest africain est celui qui prescrit I'obliga-
tion de faire rapport. 27. Il serait moins légitime encore de soutenir que l'obligation de

faire rapport n'a pas seulement étépréservéesur le plan conceptuel mais
que, par quelque discrète alchimie, l'article 80 l'a effectivementconvertie
en obligation de faire rapport à un organe indéterminéde l'ONU.
L'impossibilitéd'attribuer ce dernier effetà l'article 80devient manifeste
quand on se rappelle que, à la date (24 octobre 1945) où la Charte, y
compris son article 80, est entrée en vigueur, la Société desNations
existait encore(et a continué à exister jusqu'en avril 194622)de sorte que
c'étaittoujours au Conseil de l*aSdN qu'il fallait faire rapport. Si donc
l'article 80a pu servir en quoi que ce soità prémunirl'obligation de faire

rapport des effets de causes de caducité étrangèresau chapitre XII, c'est
ainsi qu'il a dû le faire - c'est-à-dire en tant qu'obligation envers le
Conseil de la SdN; et il n'est pas de principe d'interprétation juridique
qui puisse, sans pouvoir s'appuyer sur rien d'autre qu'une disposition
comme I'article 80, faire qu'une obligation préservéesous cette forme
se transforme automatiquement et ipsofacto six mois plus tard en obli-
gation à l'égard d'une entitédrfférenteet dont iln'avaitpas étéquestion.
Si, pour citer l'article 80, les dispositions du chapitre XII ne doivent

pas être interprétée[s]comme modifiant les dispositions d'actes inter-
nationaux en vigueur ))ce sont les dispositions des mandats et de I'article
22 du Pacte de la SdN (encore en vigueur à l'époque)sur les rapports à
faire au Conseil (encore en existence à ce moment) qui ne devaient pas
êtremodifiées.Comment dèslors est-il possible d'interpréter l'article 80
non pas comme s'il préservait cette obligation, mais comme s'il créait
d'un coup de baguette magique une obligation nouvelle et différentede
faire rapport à un organe nouveau et très différent, l'Assemblée générale
des Nations Unies, ce qui ne pouvait laisser les mandataires indifférents?

28. Tout revient donc à ceci:iln'y a absolument rien dans l'article 80
qui autorise à faire comme s'il se lisait: ((La Société desNations est
toujours en vigueur mais, quand elle sera dissoute et à partir du moment
où elle le sera, tous les mandataires qui sont Membres de l'Organisation
des Nations Unies seront redevables à cette dernière de leurs obligations
relatives aux territoires sous mandat.»C'est bienentendu cela ou quelque
chose de ce genre (voir ce qu'en disait lord McNair, note 19 ci-dessus)
que la Charteaurait dû stipuler pour entraîner les résultatsqu'on a voulu

déduire de dispositions comme les articles 10 et 80 une fois qu'il est
devenu évideiltque le Sud-Ouest africain n'allait pas êtreplacé sousle
régimede tutelle de l'ONU. Maisla Charte ne dit rien de tel et cesarticles
ne peuvent ni séparémentni ensemble porter le poids d'une telle déduc-
tion.
29. Au sujet de l'article 80, la véritétient en une phrase: ou bien les
mandats, avec l'obligation de faire rapport qu'ils comportent, auraient

22 On savait bien en fait que la Société desNations serait dissoute mais il n'y
avait rien dans la Charte pouforcer les Membres des Nations Unies qui étaient
aussi Membres de la SdN à prendre le parti de la dissolution, encmoins à le
prendreà une date déterminée.de toute façon survécu à la dissolution de la SdN en vertu d'un principe

généralde droit ou, comme certains le soutiennent, en vertu du droit
des traités et l'article 80aurait étésuperflu à cette fin23; OU bien, si la
survivance devait dépendre de l'inclusion d'une disposition expresse
dans la Charte, l'article 80était sans effet utile, puisqu'il ne protégeait
que des causes éventuellesde caducitédécoulantdu chapitre XII, lequel

n'a pas entraînéla dissolution de la SdN. Il aurait donc fallu une dispo-
sition d'un tout autre caractère pour aboutir aux résultats qu'on prête
maintenant à l'article80.
30. On prétend que l'interprétationqui précèdeôte tout sens à l'article
80, car, affirme-t-on, il n'y a rien dans le chapitre XII de la Charte qui
puisse modifier ou compromettre des droits existants, etc. Serait-ce vrai

que cela ne constituerait pas un motif juridique valable d'introduire dans
I'article ce que 1'011ne saurait en aucune manièreprétendre y trouver,
à savoir la succession,opérantd'elle-mêmed , e l'ONU à des fonctions de
la SdN, la conversion automatique d'une obligation de rendre compte au
Conseil de la SdN (lequel existait encore au moment où l'article 80 est
entré en vigueur) en une obligation envers l'Assembléegénéraledes

Nations Unies. Cependant, de toute façon, l'argument ne tient pas.
L'article 80conserve tout son sens et tous ses effetsqui, pour ce qui con-
cerne les mandats, étaient d'empêcherque l'instauration du régimede
tutelle puisse êtreconsidéréecomme une excuse pour cesser de respecter
les obligations au titre des mandats, quelles qu'ellesfussent à l'origine et
à ce moment-là. Mais I'article80 n'indiquaitpas quellesétaientces obli-

gations,nisi ellesdemeuraienten vigueur.De plus, c'était seulement «direc-
tement ou indirectement ))(inandof itself- ces termes sont trop souvent
oubliés)que la mise en place du régimede tutelle ne devait pas affecter
les mandats. Si les mandats étaient devenus caducs pour quelque autre
cause valable, I'article 80 ne s'y opposait pas, et n'a jamais viséà s'y
opposer. En bref l'article 80 n'assurait pasla survivance obligatoire des

mandats, mais, dans l'éventualitéoù ils subsistaient pour d'autres motifs,
la créationdu systèmede tutelle ne pouvait pas êtreinvoquée commeles
faisant tomber en désuétude.

23 C'est bien ce que pensaitM. Joseph Nisot, ancien déléguéa,mbassadeur et
jurisconsulte belge dont la connaissance des Nations Unies remontela conférence
de San Francisco. Dans leSouth African Law Journal, vol. 68, IIIepartie, août 1951,
p.278-279, il écriva:t
«Le seul objet de l'article est d'empêcher d'interprétchapitre XII de la
Charte comme affectant ou modifiant en quoi que ce soit les droits des Etats
et des peuples tels qu'ils existent et tant que des accords de tutelle ne sont pas
conclus. Ces droits tirent leur existence juridique des instruments qui les ont
créés;ils restent valables pour autant que ces instruments sont eux-mêmes
toujours valables. S'ils sont maintenus, c'est en vertu de ces instruments et
non en vertu de i'article 80 qui se borne à prévoir que les droits des Etats et
des peuples - quels qu'ils puissent êtreet à quelque degré qu'il subsistent -
sont laissésintacts par le chapitre »[Traduction du Greffe.]
Voir les vues analogues de Manley Hudson, ancien membre de la Cour permanente, 31. L'argument tiré de la référence à l'article 80 que l'on trouve à

l'article 76 d) de la Charte vient aussi malà propos et tourne autour du
mêmepoint. Il n'est pas douteux que cette référence signifiaiqtue, dans la
mesure où des droits préférentiels, économiquesou autres, seraient
préservéspar application de l'article 80, il s'agirait là d'exceptions au
régime d'égalité de traitement prévu àl'article 76 d). Mais cela ne résol-
vait nullement la question de savoir quels étaient lesdroits depréférence
ainsi préservés. Il ne pouvait évidemment s'agirque de ceux qui étaient
préservésde l'extinction par application du chapitre XII de la Charte, et
non de ceux qui auraient pu s'éteindrepour d'autres motifs. L'on en

revient donc à l'argument précédent.
32. Si ni l'article 10 ni l'article 80, pris séparément,ne créent une
obligation de faire rapport à l'Assembléegénérale desNations Unies, il
est évident qu'ils nepeuvent pas non plus avoir cet effet conjointement.
C'est plutôt le contraire qui serait vrai: zéroplus zéroégale zéro.

c) Argument de la communautémondiale (ou «internationale)))
organisée

33. Cet argument, sur lequel on n'avait pas beaucoup insistéjusqu'à
présent et qui consiste essentiellement à postuler une continuité intrin-
sèqueentre la Société desNations et l'organisation des Nations Unies,
en tant qu'avatars différents d'une même idée directrice, a étéavancé
dans les affaires du Sud-Ouest africain (Ethiopie c. Afrique du Sud;
Libériu c.Afrique du Sud, 1960-1966).Il vise manifestement à donner une
explication éventuellement plausible à une conception qui n'a aucun
fondement dans le droit international positif. Elle n'en a pas parce que

ce qu'on appelle la communauté mondiale organiséen'est pas une entité
juridique distincte dotée d'une personnalitépropre et transcendant celle
des organisations internationales dans lesquel!es elle a pu s'incarnerà
telle ou telle époque. Du temps de la SdN il n'y avait pas la communauté
mondiale organisée, d'une part, et la SdN de l'autre. Tout ce qui existait,
c'étaitlaSdN, sans laquelle il n'y aurait pas eu de communauté mondiale
organisée.Par conséquent la notion d'une telle communauté comme
source résiduelledistincte et permanente ou comme réservoirde pouvoirs

et de fonctions qui seraient réabsorbées à la disparition de telle ou telle
organisation internationale pour être ensuite conféréa sutomatiquement
et sans arrangement spécial à une nouvelle organisation ou assuméspar
celle-ci, est tout fait illusoir24.

qui fut aussi délégà San Fransisco, dans I'American Journal of International Law,
vol.45,1951, p. 14.
24 Le droit internationalcontient d'ailleurs rien de comparable aux principes
de droit privéselon lesquels, par exemple, en l'absence d'héritiers les biens vacants
passentà I'Etat, au fisc, à la Couronne, etc., desorte que, s'il n'ya p»à ([héritage
proprement parler, il y a néanmoins succession en droit. De plus il ne s'agit pas eu
l'espèce d'un patrimoine mais de l'exercice d'une fonction et il n'existe aucun 34. Il est donc évident qu'enl'espècecette théorieest invoquéeen vue
de tourner après coup ce qui aurait constitué et constitue encore un
obstacle juridique insurmontable, à savoir l'absence de toute succession
juridique véritableentre la SdN et l'ONU. A défautd'unetelle succession,

l'argument dela «communautémondiale [ou «internationale ))organisée ))
apparaît sous son vrai jour comme un expédient:il est bien certain qu'au-
cun des Etats qui, comme mandataires, ont accepté l'obligation defaire
rapport au Conseil de la SdN n'aurait pu supposer un instant qu'il
souscrivait par là même à une obligation généralisée de rendre compte,

dans tous les temps à venir, à tout organisme qui pourrait êtreconsidéré,
à tel ou tel moment, comme représentant une communauté mondiale
organiséeaussi abstraite qu'hypothétique, et cela quelle quesoitla façon
dont cette collectivité polirrait être constituéeou fonctionner.

4. Rejet politique, aux Nations Unies,de toute continuité
avec la Sociétédes Nations

a) En générae lt enprincipe

i) Attitude àl'égard dela Société deN s ations

35. Nous avons étudiédans les paragraphes qui précèdentdiverses
théories tendant à prouver qu'il y avait eu succession implicite entre
l'Organisation des Nations Unies et la Sociétédes Nations en ce qui
concerne les mandats et nous avons montré que ces théories étaient
fallacieuses. Mais la vérité esqt ue ces théories ne tiennentaucun compte

de certains des faits les plus importants qui entourent la fondation de
l'ONU, car l'idéed'une reprise en charge des fonctions de la SdN, l'idée
de repartir d'où la SdN s'étaitinterrompue, a étéenvisagéeet, comme il
fallait s'y attendre, rejetée. Les Etats-Unis n'étaient jamais devenus
membre de la SdN pour des raisons que l'on n'avait pas oubliées 25.
L'URSS en avait été exclue en 1939.En revanche les puissances de l'Axe,

avec leurs régimes fascistesde l'époqueen avaient fait partie, etc. Politi-
quement la SdN avait mauvaise presse. Entre 1931 et 1939 elle n'avait
pas réussi à prévenir au moins trois conflits armés trèsgraves et elle

principe de droit international qui permette de dire que, lorsqu'une organisation
internationale vient disparaître, ses fonctions sont automatiquemendévolues à
une autre sans que des arrangements spéciaux aient étéprévus à cet effet. La situa-
tion a étécorrectement décritepar. Read en 1950 dans le passage de son opinion
citéau paragraphe22ci-dessus.
25 On sait que, si le président Wilson a bien étél'un des principaux architectes
du Pacte de laSdN - qui, au lieu de constituer un instrument distinct, a été incor-
poré officiellement au traité de Versailles parce qu'on croyait que les Etats-Unis
ratifieraient nécessairement le traitéet deviendraientto membre dela SdN -
le traité, bien que les Etats-Unis fussent l'une desipales Puissances alliéeseter
associées)au nom desquelles le traité était rédigé.Les Etats-Unis ont signé un
traitéde paix séparéavecl'Allemagne en921.avait été impuissante à empêcherla seconde guerre mondiale. Dans de
nombreux milieux, loin d'y voir une ((communautémondiale organisée I),

on la considérait comme une institution essentiellement européenne
assujettie à des influences «colonialistes ». C'est pourquoi I'on estimait
que I'ONU devait être conçuedans un esprit absolument nouveau. Sans
doute serait-il inévitable que I'ONU ressemble par certains côtés à la
SdN, mais il ne devait y avoir aucun lien officiel, aucune continuité
juridique. La SdN avait échoué etil ne fallait pas que l'ONU prît son
essor sous cette ombre chancelante.

36. Voilàpourqoui il n'estfait rigoureusement aucunemention de la
Sociétédes Nations dans la Charte. (Même à propos des mandats, pour-
tant connus généralementjusque-là comme ((mandats de la Société des
Nations I)la Charte ne dit mot de la SdN. A l'article 77, paragraphe 1,
et à l'article 80, paragraphe 2, qui sont les seules dispositions où il soit
fait étatdes mandats comme tels, on trouve les expressions ((territoires

actuellement sous mandat Iet ((territoires sous mandat II.C'est pourquoi
là encorela Charte a été mise en application sans que I'onait pris aupara-
vant la moindre mesure pour mettre fin aux activités dela SdN et indé-
pendamment du fait que celle-ci existait encore et continuait d'exister.
Il n'est doncpas exagéré de dire, sous une forme un peu triviale, que les
fondateurs de I'ONU ont tout fait pour éviterla souillure d'un contact
quelconque avec la SdN.

ii) RésolutionXIV de l'Assembléegénérale
en date du 12février1946
37. La mêmeattitude à l'égardd'une SdN presque considérée comme

une intouchable s'est de nouveau manifestéelorsque, une fois la Charte
en vigueur et l'ONU définitivementétablie,des mesures ont étéprises
pour liquider la SdN et reprendre ses avoirs matériels et financiers et
pour adopter une décision finaleau sujet de ses activités politiques et
techniques 26.C'esta cesfins qu'a été votéele 12février1946la résolution
XIV de l'Assemblée générale r, solution désormaisbien connue dont le

texte intégral, d'une lecturefort instructive, se trouve,à une omissionnon
pertinente près, reproduit in extenso aux pages 625-626du Recueil de la
Cour pour 1962. Les passages de cette résolution qui intéressentles
mandats (sansque cesderniers soient nommémentvisés)sont lessuivants:

26 Il y avait eu, bien entendu, un début de décisionen ce sens à la Commission
préparatoire des Nations Unies crééeaprès la conférencede San Francisco. Je me
permets de citer l'opinion dissidente commune rédigéepar sir Percy Spender et
moi-mêmelors de la phase de 1962 des affaires du Sud-Ouest africain (C.Z.J. Recueil
1962, p. 532), pour rappeler que, d'après les comptes rendus de la Commission et
en particulier ceux du comité7 (CPNU, p. 2-3 et 10-Il), «dans toute la manière
Unies ont manifestéune grande prudence et mêmeune certaine répugnance...toute
idéede ce qu'on pourrait appeler une reprise généraleou une absorption des fonc-
tions et des activitésdela Société desNations a été catégoriquementrej».ée (3. L'Assemblée générad léclare qu'en principeet sous réserve
des dispositions dela présente résolutionet de la Charte, I7Organisa-
tion est prête à assumer certaines fonctions et certains pouvoirs
précédemmentconfiés à la Sociétédes Nations, et elle adopte les

décisionsénoncéesci-dessous aux paragraphes A, B et C. ))

Les paragraphes A (Fonctions de secrétariat)et B (Fonctions et pouvoirs

de caractère techniqueet non politique) sont sans intérêtici mais le
paragraphe C, qui étaitcensés'appliquer notamment aux mandats, énon-
çait :

((C. Fonctions et pouvoirs résultant detraités,conventions, accords
et autres instruments internationauxde caractèrepolitique 27.
L'Assembléegénérale étudieraelle-mêmeou soumettra à l'organe
compétentdes Nations Unies toute demande émanantdes parties et
tendant à ce que l'organisation assume les fonctions ou pouvoirs

confiés à la Société desNations par des traités, conventions, accords
et autres instruments internationaux de caractère politique ...27a))

Commentant ce texte en 1950 (C.I.J. Recueil 1950, p. 172), M. Read,
dont je partage les vues, disait que le Mandat pour le Sud-Ouest africain
comportait «des fonctions et pouvoirs de caractère politique ))et qu'en
substance le paragraphe C prévoyait que l'Assembléegénérale serait
saisie d'une requête«tendant à ce que les Nations Unies exercent les

fonctions de la Société des Nations en matière derapports, de responsa-
bilitéset de contrôle sur le Mandat pour le Sud-Ouest africain ». Et de
poursuivre :

((Aucune requête dece genre n'a étéadressée et l'Assemblée
générale n'apas eu l'occasion d'agir envertu de la décision C.
L'existencemême decettedispositionexpresserendtoutefoisimpossible
de ,justz3er une successionpar voie de conséquence logique . (Les
italiques sont de nous.)

38. On ne peut pas dire non plus que la résolutionXIV de l'Assemblée
en date du 12février1946corresponde le moins du monde àune décision
hâtive ou insuffisamment réfléchie.Elle avait été soigneusementmise

au point à la Commission préparatoire et au sein de ses comitéset sous-
comitéset elle représentait l'aboutissement d'une politiquebien établie.
On en trouvera un bref historique aux pages 536-538de l'opinion dissi-
dente commune de 1962dont j'ai déjàparlé (voir note 26 ci-dessus) et
une relation plus complète aux pages 619 à 624 du mêmevolume du
Recueil. Quand la Commission préparatoire a examiné les projets

27,27aC'était bienentendu par l'intitulaautres instruments de caractèrpoli-
tique»que l'on visait lesmandats.
232établispar son comitéexécutifpour ce qui devait devenir la résolution
XIV, le mot transfert(des fonctionset activitésdela SociétédesNations),
qui n'apparaît plus nulle part dans la résolution, a fait l'objet d'objec-
tions préciseset a étéécartéparcequ'il paraissait établir une ((continuité
juridique qui enfait n'existeraitpa»(les italiques sontde nous) (Nations
Unies, doc. PC/LN/2, p. 2-3 et PC/LN/lO, p. 10-11).

b) En ce qui concerneles mandats en particulier

i) Politique établie tendant
à donner lapréférenca eu régime detutelle
et às'appuyersur cerégime
39. S'agissantdes mandats, jusqu'à troispropositions ont étformulées

à la Commission préparatoire en vue de créerce qui eût étéun régime
provisoire de mandats sous l'égide desNations Unies. Tout d'abord, le
comitéexécutifa recommandé la création d'un ((comitétemporaire de
tutelle»qui aurait exercécertaines fonctions pendant la période intéri-
mairejusqu'au moment où le régimede tutelle aurait fonctionné à plein
et qui se serait occupénotamment des ((questions quepourrait soulever le
transfert à l'organisation des Nations Unies de toutes fonctions et
responsabilités assumées jusqu'ici en vertu du régime des mandats ))
(pour les références,voir C.Z.J R ecueil 1962, notes au bas des pages
536-537).S'il y avait étédonné suite, cette proposition aurait abouti à
créer unesorte de régimeintérimaire des territoires sous mandat, appli-

cable soit jusqu'au moment où ces territoires auraient été placés sous
tutellesoit dansl'hypothèseoùilsne leseraientpas. Mais,à la Commission
préparatoire même, l'idée de créer un comité temporaire de tutelle a
suscité diversesobjections, principalement de la part de l'URSS et il
n'y a pas étédonnésuite. Enfaitla Commissiona formulé àl'intention de
l'Assembléegénéraleune recommandation toute différentecoqsistant à
envisager la conversion des mandats en tutelles. Cetterecommandation a
finalement pris la forme de la résolution XI de l'Assembléegénéraleen
date du 9 février1946,que j'examinerai plus loin.
40. Deux autres propositions formuléespar les Etats-Unis au comité
exécutif les 14 octobre et 4 décembre 1945 auraient étéplus efficaces

encore car, si elles avaient été adoptées,elles auraient très précisément
et expressément accompli ce que l'on prétend aujourd'hui avoir été
réalisépar voie de conséquenceimplicite, alors mêmeque cesdeux propo-
sitions n'ont pas eu de suite. A certaines différencesde rédactionprès, les
deux propositions avaient le même effetet on peut voir quelle en étaitla
nature dans le passage citéci-après, où il est recommandé de charger
notamment un comité temporaire de tutelle (Nations Unies, doc. PC/
EX/92/Add. 1)

«[d']exercerà la suite de la dissolution de la Société desNations et
de la Commission perinanente des mandats, les fonctions qu'assurait auparavant la Commission permanente des mandats en ce qui con-
cerne la réceptionet l'examen desrapports soumis par lesPuissances
mandataires sur les territoires sous mandat qui n'auraient pas été
placéssous le régimede tutelle en vertu d'accords de tutelle,jusqu'au
moment où le Conseil de tutelle sera constitué et remp4ira à son

tour une fonction analogue )).

Mais, après les avoir déposées, ladélégationdes Etats-Unis n'a plus rien
fait au sujet de ces propositions. En fait la Commission préparatoire a

recommandé et l'Assembléegénéralea adopté la résolution XI dont je
fais étatà la fin du paragraphe 39ci-dessus et dont lespassages pertinents
sont intégralementcitésdans C.I.J. Recueil 1962,page 624. Cette résolu-
tion s'adressait aux (Etats qui administrent des territoires en vertu d'un
mandat D,mais ellese bornait à accueillir avec satisfaction lesdéclarations
de ((certains» d'entre eux qui avaient manifestél'intention de placer des
territoires sous mandat sous le régimede tutelle et à inviter tous ces

Etats à négocier à cette fin des accords de tutelle conformémentà l'article
79 de la Charte: pas un mot sur ce qu'il fallait faire dans l'intervalle, pas
un mot sur la situation des territoires sous mandat pour lesquels, le cas
échéant, cette invitation n'étaitpas acceptée et n'allait pas l'être.Ce
point d'histoire confirme l'existence d'une politique délibéréc eonsistant
à ne rien dire des mandats en tant que tels.

ii) Résolutionfinale de la Société
des Nations du 18 avril 1946

41. C'est précisémenc tette attitude qui s'est manifestée chezles Mem-
bres de l'ONU qui étaientégalement Membres de la SdN lorsque, à ce
titre, ils ont assistéla dernière réunion de Genèveoù il devait être mis

finà l'activitéde la SdN. L'occasion se présentaitlà encore d'adopter des
décisions précisessur les mandats: exception faite du Japon qui était
nécessairementabsent, tous les mandataires étaientassemblés etallaient
se trouver liéspar les décisionséventuellementprises puisque, comme il
étaitde règle à la SdN, cesdécisionsdevaient êtreadoptées à l'unanimité.
Je reviendrai sur les détails de la résolution du 18 avril 1946 quand je
rechercherai si elle supposait que les mandataires s'engageaient à rendre
compte à l'organisation des Nations Unies pour leurs mandats en tant

que tels.11suffira ici de rappeler que cette résolution, après avoir reconnu
que la dissolution de la SdN (mett[ait] finà ses fonctions en ce qui
concerne les territoires sous mandat )),s'est contentéede noter que ((des
principes correspondant à ceux que déclarel'article 22du Pacte [étaient]
incorporés dans les chapitres XI, XII et XII1de la Charte des Nations
Unies », pour noter ensuite que les mandataires avaient ((expriméleur
intention »de continuer à administrer leurs mandats ((conformémentaux
obligations contenues »dans ceux-ci cjusqu'à ceque denouveaux arrange-

ments soient pris entre les Nations Unies et les divers [mandataires] ».Il s'agissait là encore d'une anticipation et d'une allusion au régimede
tutelle qui,conformément à la Charte, exigeaitla négociationd'accordsde

tutelle. Entre-temps, et s'agissant de tout mandat pour lequel il n'était
pas négociéd'accord de tutelle, on s'en remettait à l'application d'une
formule généraleet ambiguë, dont l'effet précis,que j'étudie plusloin,
n'ajamais cesséde prêter à controverse.

42. L'idéeque c'était unefois de plus au régimede tutelle que les
intéressés songeaient trouve sa confirmation dans le fait que le Comitéde

liquidation créé pour liquider les avoirs de la SdN a dit - en remettant à
l'ONU les archives de la section des mandats de la SdN, dans un rapport
dont le passage pertinent s'intitulait ((Activitésnon transférablesf ,onds et
services))(les italiques sont de nous), que ces archives ((donneraient des
indications précieuses à ceux qui seraient chargés de l'administration du
régime detutelle [et non du système des mandats] » (les italiques sont de
nous). Ce mêmeComitéde liquidation a déclaréen outre que ((lesystème

desmandatsinaugurépar la SdN avait ainsipris fin 1(SdN, doc. C.5.M.5.,
p. 20). Bref, comme l'a dit en 1950 lord McNair (C.I.J. Recueil 1950,
p. 161), en portant un jugement très pertinent sur la résolutiond'avril
1946,l'Assemblée

((reconnaissaitque les fonctions de la Sociétédes Nations avaient
pris fin; mais ellene seproposait pas deles transfërer ...aux Nations
Unies »(les italiques sont de nous) 28.

Après avoir ajouté qu'il ne voyait pas comment ((on peut interpréter
cette résolution commeayant crééune obligationjuridique ..deprésenter
des rapports annuels aux Nations Unies et de transférer à cette Organi-
sation la surveillance [exercéesur les mandats] », lord McNair concluait:
« tout au plus cette résolution pouvait-elle imposer ld eevoir de s'acquitter
des obligations ...qui nefont pas intervenir l'activitéde la Sociétédes
Nations »(les italiques sont de nous).

43. Deux autres éléments permettent par ailleurs de soutenir de façon
concluante qu'il n'a pas étéenvisagé à Genève de créerde système
intérimaire demandats.

a) Le ((projetchinois )).- Il y a tout d'abord le fait, qui doit dissiper
tous les doutes, qu'une résolutiond'un type tout différentavait été au-
paravant proposée mais qu'ilne lui avait pas été donnésuite. C'étaitla
proposition, radicalement différentede cellequi a étéfinalementadoptée,
que, dans les annales de l'ensemble des affairesrelatives au Sud-Ouest
africain, on appelle désormais d'après ses origines le ((projet chinois 1)
ou le ((projet Liang ». Cette proposition s'énonçait commemit:

28 En d'autres termes, et on ne le répétera jamais assez, il n'y eut pas cession,
de sorte que l'acceptation d'une partie nouvelle au mandat (l'organisation des
Nations Unies) àla suite d'une novation aurait exigéle consentement dixmandataire. «L'Assemblée,
Considérant que le Conseil de tutelle n'a pas encore étéconstitué
et que tous les territoires sous mandat de la Société desNations

n'ont pas encore ététransformés en territoires sous tutelle;
Considérant qu'il y aurait lieu, ajîn d'évitertoute interruption dans
la surveillancedu régime desmandats dans ces territoires, de trans-
,fier à l'Organisation des Nations Unies les fonçtions assumées à
cet égardpar la Société desNations [lesitaliques sont de nous];
Recommande que les Puissances mandataires ainsi que les Puis-
sances administrant des territoires sous Mandat ex-ennemi con-

tinuent à présenter aux Nations Unies des rapports annuels et ac-
ceptent que ces territoires soient inspectés par l'Organisation,
jusqu'au moment où le Conseil de tutelle aura été constitué. »

Cette proposition aurait appelédes amendements parce qu'elle contenait
certaines erreurs d'ordre technique, mais il sufit d'un coup d'ceilpour
voir que, sil'on en avait retenu la substance, elle aurait accompli précisé-
ment ce qu'on prétenddepuis lors, avec une constance si lassante, avoir
étéaccompli par la résolution qui a été adoptéeen fait le 18 avril 1946.
Cette (résolution chinoise ))aurait imposé aux mandataires au moins
I'obligation d'offrir d'accepter la surveillancede l'ONU et de s'y sou-

mettre effectivement, le cas échéant,tant que durerait ce que la proposi-
tion appelait une «interruption » relativement aux mandats. Quant à
savoir si l'ONU aurait ou non acceptéd'assumer cette fonction - car
ce n'est évidemmentpas une résolution de la SdN qui aurait pu l'y con-
traindre - la question est sans pertinence. Le fait certain est que, pour
une raison quelconque qui ne ressort pas du compterendu, la proposition
n'a pas été adoptée;les choses ne peuvent donc pas êtreen droit exacte-
ment les mêmesque si elle l'avait été.Si l'on avait besoin d'une preuve

supplémentaire, on pourrait la trouver dans le fait qu'à propos de la
résolutiondu 18avril 1946telle qu'elle a été adoptée, M. Liang lui-même
a rappelésontexte antérieur non adoptéet, aprèsavoir dit que les articles
de la Charte des Nations Unies sur la tutelle étaient fondés ((engrande
partie sur les principrs du système des mandats)), a ajouté ((mais les
fonctions pertinentes de la Société n'onp tas ététransmises automatique-
ment aux Nations Unies 1)(les italiques sont de nous). Par suite, a-t-il dit,

l'Assembléede la Société desNations (devrait prendre des mesures pour
assurer la continuité d'application desprincipes du systèmedesmandats )).
Mais en fait l'Assembléede la SdN comme l'Assembléegénéraledes "
Nations Unies a décidéde s'appuyer à cet effet sur la conversion (non
obligatoire) des mandats en tutelles, ou bien sur l'article 73 e) de la
Charte dont je vais maintenant traiter.

b) La référenca eu chapitreXI de la Chartedans la résolution du 18avril
1946. - Voici un second élément significatifqui montre quel a dû être
le cours des idées à Genève en avril 1946. La résolution du 18 avril
(par. 3 - voir ci-dessus par. 41) fait état non seulement des chapitres XII et XII1 de la Charte concernant le régimede tutelle, mais aussi du
chapitre XI visant les territoires non autonomes. L'explication en a été
donnéedans l'opinion dissidente commune de 1962 (C.I.J. Recueil 1962,
p. 541-545), où il est soulignéque la disposition essentielle du chapitre

XI, àsavoir l'article 73, reprend pratiquement mot pour mot l'article 22,
paragraphe 1, du Pacte de la SdN (les deux textes sont reproduits aux
fins de comparaison dans le même volumedu Recueil, p. 541, note 1).
La portéede cette référenceau chapitre XI de la Chartedans la résolution
de Genève, référence qui autrement serait sans objet, est qu'elle montre:
i) que les délégations,notamment celles des divers pays mandataires,
considéraient les territoires sous mandat comme relevant en tout état
de cause de la catégoriedes territoires non autonomes; ii) qu'à leur avis
la présentation de rapports conformément à l'article 73, alinéa e),
pouvait remplacer la mise sous tutelle des territoires sous mandat en ce
sens au moins que cela permettrait de combler le vide avant la mise sous

tutelle ou dans le cas oùil n'y aurait pas de mise sous tutelle. Cette dis-
position avait en outre un avantage: si elle imposait de transmettre des
rapports sous une forme moins contraignante que pour les territoires
sous mandat ou lesterritoires sous tutelle et si en outreil ne s'agissaitpas
véritablement de rendre compte (voir par. 59 ci-après), elleétait obliga-
toire pour les Etats Membres des Nations Unies administrant des terri-
toires non autonomes, alors que la Charte n'obligeait pas à placer les
territoires sous mandat ou autres sous le réuimede tutelle. Par consé-
quent, lorsqu'on soutient que l'intention ne pouvait pas être de laisser
subsister le «videII,la réponseest que c'estjustement là la façon dont il
devait être comblé;certains élémentsdonnent d'ailleurs à penser que
plusieurs délégations et/ou gouvernements l'entendaient bien ainsi (voir

C.I.J. Recueil 1962,p. 543-544).Mais il est tout aussi clair que l'intention
n'étaitpas de combler le vide en rendant les mandataires en tant que tels
res~onsables devant l'ONU: sinon. la solution évidente aurait été de
cr&r un régimeintérimaire concernant les mandats en tant que tels et
d'inviter l'ONU à en surveiller l'application. Cette solution a donc été
implicitement rejetéeet, si l'on veutexpliquer les choses, ou trouver une
échappatoire, en disant que les Nations Unies, décidées à obtenir la
transformation de tous les mandats en tutelles, n'auraient probablement
pas acceptél'invitation, cette explication se passe de commentaire et ne
peut que confirmer les vues exposées ici.

44. S'agissant de toutes ces tentatives tendant soit à combler l'écart
entre mandats et tutelles, soit à régulariser la situation des mandats
subsistants, l'avis de la Cour est que la non-adoption de ces diverses
propositions n'impliquait pas nécessairementle rejet de l'idéedont elles
procédaient. J'avais moi-mêmetoujours pensé que le cas tout à fait
classique du rejet implicite d'une proposition est celui où, une proposition
ayant étéexaminée,il ne lui a pas étédonné suite - étantentendu qu'en droit le motif du rejet est sans pertinence 29.Quand une idée présentée à
diverses reprises en termes presque identiques n'a pas étéretenue, seules
les raisons contraires les plus fortes, si tant est qu'elles existent, peuvent
faire tomber la présomption qu'il y a eu sinon rejet, du moins non-
acceptation délibéréeS .i l'on a présenté unesuggestioil qui n'a pas été

reprise dans une disposition expresse, la situation ne peut êtrela même
que siellel'avait été.Lorsqu'une sériede propositions allant pour l'essen-
tiel dans le même sensn'ont pas été retenues,les résolutions toutes dif-
férentes qui ont en définitive étéadoptées ne sauraient s'interpréter
comme ayant le même effetque les propositions non approuvées. Il n'est
guèrebesoin d'êtrejuriste pour se rendre à pareille logique.

c) Motifs expliquant l'attitude de l'organisation des Nations Unies

sur les mandats et importance decette attitude

45. Le fait que l'on ait avec tant de persistance évitéd'assumer toute
fonction en matière demandats - fût-ce à titre intérimaireou temporaire
- témoigne d'une volonté bien arrêtéede se désintéresserdans ce do-
maine de tout ce qui n'étaitpas conversion en tutelle. Un autre fait le
confirme: l'Assemblée générale deN s ations Unies s'est refusée dès le
départ, malgré les considérations exposées au paragraphe 43 b) ci-

dessus, à permettre que l'article 73 de la Charte soit interprété comme
ayant trait aux territoires sous mandat; saisie de rapports sur le Sud-
Ouest africain transmis à ce titre (voir par. 59 et 60 ci-dessous), elle a
tenu à les faire examiner par le Conseil de tutelle. Des épisodesisolés
n'auraient peut-êtrepas signifiégrand-chose, mais l'effet cumulé deces
élémentspris ensemble devient irrésistibleet ne permet qu'une conclu-
sion: l'ONU n'avait l'intention de prendre en charge aucune fonction

politique de la SdN en dehors d'arrangements spéciauxqui n'ont jamais
étéconclus et, en vertu de cette politique, elle ne voulait rien avoir à faire
avec les mandats comme tels. Cette attitude peut se comprendre. Tout
d'abord, du moment que la Charte ne prévoyaitrien pour la surveillance
des territoires sous mandat par l'ONU à moins qu'ils ne soient placés
sous tutelle, ce qui devait êtrenécessairement unacte volontaire et ne

pouvait êtreimposé, il n'y avait rien sur quoi l'organisation pût se
fonder en droit pour se prétendre habilitéeà surveiller les mandats qui
n'auraient pas été convertisen tutelles. La Charte n'instaurait à cette
fin aucun mécanisme distinct, de sorte qu'il aurait fallu tout spécialement
en créerun, dont la légalitéeût été contestable.Faire surveiller les terri-

29 Dans les conférences internationalesil arrive souvent que des propositions
n'aient aucune suite parceque leurs auteurs ont constaté qu'elles ne seraient pas
acceptées, ce qui se passe de commentaire. Ou encore il ne leur est pas donné suite
parce que, même si elles sont en elles-mêmes opportunes, elles susciteraient des
difficultés ou entraîneraient certaiinconvénients; mais en pareil cas unchoix
est fait et, en droit, on ne peut pas soutenir ensuite que la proposition a étéacceptée
clen réalit1ou qu'à tout le moins elle n'a pas été véritablement )rejetée. Ces
arguments sont d'ordre purementsubjectif: ne confondons pas droet psychologie.toires sous mandat par le Conseil de tutelle eût étéles traiter comme des
territoires sous tutelle, alors même qu'ils n'avaient as étéplacéssous le
régimede tutelle, ce à quoi rien n'obligeait. Aussi fallait-ilfaire porter
tous les efforts sur la transformation des mandats en tutelles.
46. En second lieu, il n'y a pas l'ombre d'un doute que, mis à part le
peu de disposition à reprendre des fonctions de la SdN, on répugnait

spécialement à assumer un rôle en matière de mandats parce qu'on
craignait, ce faisant, de tendreàperpétuerou de risquer de perpétuerle
système des mandats en encourageant les mandataires à s'en tenir au
statu quoet à ne pas se soumettre au régimede tutelle (voir C.I.J. Recueil
1962, p. 540-541).A ce sujet, un point à noter, encore qu'incident, est
que le régimede tutelle étaità certainségards plus contraignant pour les
mandataires que le système desmandats, en particulier pour ce qui con-
cerne la nature et la composition de l'organisme devant assister l'autorité
de surveillance. Dans le cas des mandats, c'étaitla Commission perma-

nente qui remplissait ce rôle et elleétaitcomposée d'expertsindépendants
particulièrement expérimentés, agissant à titre personnel et non pas en
tant que représentants gouvernementaux tenus par des instructions
officielles.Dans le régimede tutelle, ce serait le Conseil de tutelle qui
jouerait cerôle, c'est-à-direun organe politique composéde représentants
gouvernementaux agissant sur instructions 30.En tout état decause, on
estimait manifestement utile de ne donner aux mandataires aucun pré-
texte pour ne pas placer sous tutelle leurs territoires sous mandat, et un
tel prétexte leureût peut-êtreétéfourni si on leur avait offert comme
second choix la possibilitéde prolonger le systèmedesmandats. Il fallait

compter en outre avec un élément psychologique:la nécessité de ne pas
laisser entendre, fût-ce indirectement, que les territoires sous mandat
ne seraient peut-êtrepas tous placés sousle régime de tutelle,ce qu'on
risquait de faire en adoptant des dispositions expresses en vue de cette
éventualité.

d) Conclusionsrelatives aux efets juridiques de cette attitude
de l'Organisation des Nations Unies

47. Voilà donc comment s'explique l'attitude de l'organisation des
Nations Unies au sujet des mandats. Mais trouver l'explication d'un
phénomène,ce n'est pas en effacer le résultat,contrairement à ce que
l'avis consultatif de la Cour semble souvent laisser croire. Dire que, si
l'on trouve une explication satisfaisante du rejet de telle ou telle proposi-

tion, c'est comme si l'on démontrait que la proposition n'a pas été
véritablement rejetée,et qu'il convient doncde considérerladite proposi-
tion comme (véritablement )adoptéen'est pas de nature à accroître le
respect que peut inspirer le droit en tant que discipline.

30 Toutefois le Conseil de tutelle se composait pour moitiéde représentants des
puissances administrantes. 48. Ce qui en fait s'estpasséà l'ONU, pendant la période 1945-1946,
c'est que l'Assemblée généralp e,arfaitement consciente de la situation,
a fait unchoix. Ce choix étaitle suivant: pour I'ONU, la solution devait
êtrela tutelle, encore que cette tutelle ne fût pas obligatoire. On a donc
en fait refuséde s'occuper des mandats sous toute autre forme quelle
qu'elle fût. Dans ces conditions, il n'étaitplus possible enroit de faire
volte-face et de dire que, pour tel territoire sous mandat qui n'avait pas
étéplacésous le régimede tutelle, même siles Nations Unies n'avaient
pas reçu le droit d'en surveiller l'administration comme s'il s'agissait
d'un territoire sous tutelle, elles avaient néanmoinscelui d'en surveiller
l'administration à titre de territoire sous mandat. C'eût ététout simple-

ment un moyen indirect de rendre la tutelle obligatoire, alors qu'elle ne
l'étaitpas et n'a jamais étécensée l'êtreC. 'eût été promettreà celui qui
avait tiréla courte paille de prendre la longue aussi! Les deux situations
sont totalement inconciliables. Malgrédivers avertissements, on comptait
fermement - on espéraittout au moins - qu'en définitivetous les man-
dats seraient transformés en tutelles; mais ily avait un risque, celui de
voir cet espoir déçu,et il a fallu l'accepter. Il se trouve que cette attente
ou cet espoir ont été comblés saufdans le cas du Sud-Ouest africain.
Cet unique écheca peut-êtreété très irritant,voire exaspérant,mais il ne
saurait fournirsucun motifjuridique pour considérerque l'ONU détient
expost,facto, en ce qui concerne lesterritoires sous mandat, des pouvoirs
de surveillance qui n'étaientpas prévusdans la Charte (en dehors du
régimede tutelle) et que l'organisation a de propos délibéré refusé

d'exercer. En bref, dans le cas du Sud-Ouest africain, l'ONU a parié
sur lemauvais cheval, maisparier sur le mauvais cheval n'ajamais encore
paru une raison suffisantede faire recourir toute la course!
49. L'erreur fondamentale commise en 1945-1946a évidemmentété
soit de ne pas rendre obligatoire pour les Etats Membres des Nations
Unies la conversiondes mandats en tutelles, soit de ne pas créer expressé-
ment, à défaut, un régimetransitoire s'appliquant aux mandats non
transformés.Quand on a pris politiquement conscience de l'erreur com-
mise, il était juridiquement déjàtrop tard pour la réparer; ni l'une ni
l'autre des solutions susvisées n'ayant étéadoptée, parce qu'en fait
l'ONU a préféré s'en remettre au sort, il n'est plus guère possible au-
jourd'hui de faire pratiquement comme si l'une ou l'autre l'avait été.

En droit, on ne peut gagner sur les deux tableaux au-delà d'un certain
point. Ce n'est pas servir la cause du droit que de ne pas le reconnaître.

50. Si les considérations ci-dessus sont valables, I'ONU n'aurait pu
êtreinvestie d'un pouvoir de surveillanceen ce qui concerne les mandats
que d'une seule façon: par le consentement du mandataire intéressé.
Je me propose d'examiner à présentsi l'ont peut dire que l'Afrique du
Sud n'ajamais donnéce consentement. 5. Question del'acceptationde l'obligation de rendrecompte
et du rôle de surveillance de
l'organisation des Nations Unies

a) Principes généraux

i) Défautde baseréelle
de consentement

51. A strictement parler, la question du consentement peut êtreréglée
en une phrase: dèslors qu'il estclair qu'à l'époqueI'ONU n'avait accepté
et ne souhaitait assumer aucune fonction relativement aux mandats en
tant que tels etque son ob.jectifétaiten fait l'éliminationtotale du système
des mandats, il s'ensuit qu'il n'y avait pas lieu pour les mandataires de
consentir à quoi que ce soit se rapportant aux mandats, à moins d'être

disposés à entamer des négociatioilsen vue de conclure des accords de
tutelle, ce qu'ils n'étaientpas obligés defaire. Comme M. Read l'a dit
(C.I.J. Recueil 1950, p. 171)à propos d'événementssurvenus à une date
plus tardive encore (novembre 1946-mai 1948),on pouvait se demander
((sil'Assemblée généralé etait désireuseà aucun moment de souscrire à
un accord qui n'impliquait pas un accord de tutelle ))(les italiques sont
de nous). Dans ces conditions, il n'y avait aucune raison de consentir à
des arrangements impliquant l'exercicepar l'ONU d'une surveillance sur

les mandats en tant que tels. Il aurait fallu que le ((consentement )du
mandataire prît la forme d'une demande ou d'une démarche positive,
qui aurait immanquablement appeléla réplique, que, si le mandataire
désirait se soumettre à la surveillance de l'ONU ou était disposé à
l'accepter, il lui suffisait de négocierun accord detutelle.

ii) Ily a eunovation

52. Plusieurs allusions ont été faites à ce principe qui, je crois, n'a
jamais étéinvoquéen tant que tel au cours des précédentes procédures
devant la Cour, sauf implicitement par lord McNair et M. Read en 1950.
Comme nous l'avons vu aux paragraphes 41 et 42ci-dessus, la SdN avait
déclaré queses fonctions relatives aux mandats avaient (pris fin))et que

le système((inaugurépar la Société desNations 1)avait (ainsi pris fin».
Aucune fonction n'avait ététransmise à I'ONU au sujet des maiidats en
tant que tels; cela n'aurait d'ailleurs pu se faire sans le consentement des
mandataires, vu qu'une des parties aurait changé, ce qui supposait en
pratique une novation dans le caractère de l'obligation. Il est constant
en droit qu'une novation impliquant la reconnaissance d'une partie
nouvelle et différente n'estvalable que s'il y a consentement, et même
un consentement sans équivoque ni ambiguïté ou du moins manifesté

par des actes ou une conduite non équivoques. C'est par rapport à
cette exigence qu'il convient d'examiner la question du consentement.iii) Les((déclarationsd'intention ))et leureffetjuridique

53. Etant donné ce que j'ai dit au paragraphe précédentau sujet des
conditions qui auraient étérequises dans le contexte actuel pour faire la

preuve du consentement, je n'ai pas à examiner en détailles nombreuses
((déclarationsd'intention » qui ont été faitespar l'Afrique du Sud et
d'autres mandataires en 1945 et en 1946 pour manifester leur attitude
généralequant à l'avenir de leurs mandats et dont on a cherché à déduire
l'acceptation ou la reconnaissance d'une fonction conférée à l'ONU en
cequiconcerne lesmandats entant que tels-ceux du moins quin'avaient

pas étéremplacéspar des accords de tutelle -, car parmi ces idéclara-
tions d'intention)) il n'en est virtuellement aucune qui soit exempte
d'ambiguïté.Je faisdonc mienne la conclusion formuléepar lord McNair
en 1950(C.Z.J. Recueil1950,p. 161) :

(On trouve égalementde nombreuses déclarationsselon lesquelles
le Gouvernement de l'Union continuera à administrer le Territoire
((dans l'esprit du Mandat ))Ces déclarations sont, dans l'ensemble,
contradictoires et peu compatibles les unes avec les autres; je n'y

trouve aucune preuve suffisante, démontrant que le Gouvernement
de l'Union ait ou bien acceptéla succession, par implication, des
Nations Unies ...ou qu'[il]ait contracté ..une nouvelle obligation. »

J'irai cependant plus loin et je dirai que, considéréesdans leur ensemble
les déclarations faitesnon seulement au nom de l'Afrique du Sud mais
aussi au nom des autres mandataires (mentionnéesau paragraphe suivant
et reprises pour une bonne part dans C.Z.J. Recueil 1962, p. 616-639
passim) présentaient les caractéristiques communes suivantes: a) il
s'agissait de prises de position générales insuffisantespour établir un

engagement préciset n'y prétendant pas; b) à supposer que des engage-
ments aient été pris,ils consistaient à continuer à administrer des terri-
toires sous mandat conformément aux mandats, et administrer est
évidemmenttout autre chose que de présenter des rapports concernant
l'administration 31;c) aucune de cesdéclarations n'areconnu unefonction
en matière de mandats à l'ONU et n'a viséun engagement quelconque

envers cette organisation. J'en viens maintenant aux trois épisodesou
séries d'épisodesqui ont étéprincipalement invoqués comme indiquant
que l'Afrique du Sud s'était reconnu des responsabilités à l'égard des
Nations Unies, mais qui ne me semblent pas justifier cette conclusion.

31 Il y avait une ambiguïté intrinsèque dans toutes les phrases par lesquelles les
mandataires déclaraient qu'ils continueraient à observer les termes des accords de
mandat ou à respecter toutes les obligations qui y étaient prévues: en effet, aux
termes des mandats, l'obligation de faire rapport visait le Conseil de la SdN, lequel
a existéjusqu'au 18 avril 1946. Tout mandataire pouvait donc interpréter sa décla-
aucune possibilité d'exécutionsur la base du mandat lui-même.Ce qui est certain,
c'est qu'à l'époque personne, mandataire ou non, n'a interprétéces déclarations
comme des engagements formels de faire rapportl'Assembléegénérale desNations
Unies. b) Evénementsparticuliers

i) Réso/ution,fina/e de/aSociété
desNationsadoptéele 18avril 1946

54. Ce qui vient d'être énoncé aux pointa s), b) et c) du paragraphe
précédenta fortement marqué les débats de Genève ayant précédé
l'adoption de la résolution finale de la SdN en date du 18 avril 1946 z2,
dont on a abondamment invoquéles paragraphes 3 et 4 au cours des

affaires portées devant la Cour en 1950 et en 1962 et dans la présente
affaire. Les effets de cette,résolution ont dé,jàété étudiés (vop irar. 41-43
ci-dessus) sous l'angle connexe, mais distinct, de l'attitude des Etats
intéressésau choix entre le système des mandats et le régimede tutelle.

Ils'agitmaintenant de savoir si leparagraphe 4, qui est la clause pertinente
dans le présentcontexte, suppose une obligation à la charge des manda-
taires. Cette disposition, qui est devenue un classique de l'ambiguïté
(voir texte à la note 32), consiste essentiellement à décrireune situation.

Se bornant à 1noter »quelque chose, à savoir 1que [les mandataires] ...
ont expriméleur intention ))elle n'impose en soi aucune obligation, de
sorte qu'il s'agitde savoir quelles (intentions » ont étéexprimées etde
précisersi ces intentions équivalaient à des promesses formelles, dont le
contenu, à supposer qu'elles aient été faites, reste à déterminer. La

déclaration de l'Afrique du Sud est citéeau paragraphe suivant et l'on
trouvera un résuméde l'essentiel desdéclarations des autres mandataires
dans C.I.J. Recueil 1962, page 528, note 2. Leur caractère vague et
indéterminé saute auxyeux 33. Telles qu'elles sont résumées etdécrites

dans le paragraphe 4 de la résolution de la SdN du 18 avril 1946, les
intentions exprimées ne concernaient en rien l'acceptation de la sur-
veillance des Nations Unies. Elles étaient simplement d'c(administrer
[les territoires], en vue du bien-êtreet du développement des peuples
intéressés H. Le membre de phrase suivant: ((conformémentaux obliga-

tions contenues dans les divers mandats » entraîne immédiatement les
p. -
32Le texte de cette résolution est rein extensodans C.I.J.Recueil1962, p. 538-
539, note 1. 11est évident que seuls les paragraphes 3 et 4 sont pertinents ici. Le
libellé du paragraphe 3 est repris en substance au paragraphe 41 ci-dessus. Le
paragraphe 4 étaitrédigécommesuit:
4. Note que les Membres de la Société administrant actuellement des
territoires sous mandat ont exprimé leur intention de continuer à les admi-
nistrer, en vue du bien-être et du développement des peuples intéressés,con-
formément aux obligations contenues dans les divers mandats, jusqu'à ce que
de nouveaux arrangements soient pris entre les Nations Unies et les diverses
Puissances mandataires.11

33 Sur la question de savoir si, par suite de ces déclarations, les mandataires ont
étéconsidéréscomme ayant souscrit à un accord précis relatif aux mandats, un
point de détail qui mérite d'êtrenoté est que, si les divers accords conclus entre la
SdN et l'ONU pour le transfert de fonds, de locaux, d'archives, de bibliothèques,
etc., ont tous étéenregistrés en vertu de l'article02 de la Charte, rien n'a été
enregistréen ce qui concerne les mandats.équivoquessignaléesau paragraphe 53 et dans la note 31 ci-dessus. Ce
qu'il signifienécessairement - et c'était presque certainement le sens
que leur attribuaient les mandataires - ne va pas au-delà d'une obliga-
tion d'administrer lesterritoiresenvuedu bien-êtreet du développement ))
etc., car, comme nous avons déjàeu l'occasion de le noter, l'envoi de

rapports et l'acceptation d'une surveillance concernant l'administration
deterritoires necoïncident pas aveclanotion d'administration elle-même.
55. Ce n'est pas sur des fondations siprécaireset si incertaines, surtout
quand il s'agit de déclarations unilatérales, quel'on peut établir que des
engagements de caractère obligatoire ont été pris,d'autant plus que,
comme nous l'avons vu, l'engagement en cause aurait fait l'objet d'une
novation exigeant en droit un consentement dénué d'ambiguïté. Il est
donc intéressant de voir quelles ont étéles ccintentions exprimées » le 9
avril 1946 au nom de l'Afrique du Sud par son représentant à Genève

(SdN, JournalOjiciel, supplémentspécialno 194,p. 32-33).Ces intentions
étaient que, en attendant l'examen du désirmanifestépar l'Afrique du
Sud, sur la base des vŒux exprimés par les habitants, d'incorporer le
Sud--Ouest africain dans le territoire de l'Union (comme on disait à
l'époque),celle-cicontinueraitdans l'intervalle

((à administrer [le territoire] en se conformant scrupuleusementaux
obligations du Mandat, afin d'assurer le progrès, et de sauvegarder
les intérêtdse ses habitants, commeelle l'afait pendant lessix années
durant lesquellesla Commissiondes mandats n'apu se réunir.
La disparition des organes de la Sociétédes Nations qui s'occupent
du contrôle des mandats, à savoir, en premier lieu, la Commission
des mandats et le Conseil de la Sociétéempêcheraévidemmentde se
conformer entièrement àla lettre du Mandat. Le Gouvernement de
l'Union se fera cependant un devoir de considérer que la disparition

de la Société desNations ne diminue en rien les obligations qui
découlent du Mandat; il continuera à s'en acquitter en pleine
conscience et avec lejuste sentiment de ses responsabilités,jusqu'au
moment où d'autres arrangements auront étéconclusquant au statut
futur de ceterritoire.(Lesitaliques sont denous.)

Les amateurs de jeux de sociétépourraient passer une heure agréable à
essayer de déterminer exactement ce que cette déclaration, autre modèle
d'ambiguïté, signifie quant à l'acceptation par l'Afrique du Sud de la
surveillance de l'organisation des Nations Unies,car c'est cela que l'on
veut établir.Le passage cité enitaliques exclut clairement toute idéede ce
genre, puisqu'il laisse présagerle maintien d'une situation qui avait déjà
durésix annéesau cours desquelles aucun rapport n'avait été présenté,
faute d'organe actif de laSociété des Nations à qui adresser des rapports.

Le reste de la déclaration, et notamment l'expression «ne diminue en rien
les obligations qui découlent du Mandat »,implique précisément les
ambiguïtés et les incertitudes sur lesquelles j'ai déjà attiré l'attention
(note 31). Il me semble qu'il s'agit idd prototype de ce qui n'engage à rien en ce qui concerne la reconnaissance d'une responsabilité à l'égard
de I'ONU et, pour ma part, je n'arrive pas à y découvrir la moindre

indication d'une telle reconnaissance. Je me rends compte que, sur ce
point comme sur la plupart des autres, ma pensée etle raisonnement de la
Cour se situent sur des longueurs d'onde différentes.Voyant dans la
déclaration de l'Afrique du Sud une reconnaissance de la persistance
d'une obligation à l'égard despopulations du territoire sous Mandat, la

Cour fait alors un bond énorme dans son raisonnement: puisqu'une
obligation était reconnue dans cette mesure, l'obligation de faire rapport
à I'ONU l'était donc aussi. II tombe sous le sens que ce raisonnement est
dépourvu de toute rigueur logique. II suppose les mêmesellipses et

télescopages de deux questions distinctes qui caractérisaient déjà le
raisonnement de la Cour en 1950, comme je l'ai dit aux paragraphes
20-22 ci-dessus. Lorsque cette déclaration a étéfaite, personne n'aurait
pu la comprendre en ce sens, parce que chacun savait que la surveillance

de I'ONU devait s'exercer uniquement dans le cadre du régimede tutelle
et qu'il n'étaitpas obligatoire d'appliquer ce régimeaux territoires sous
mandat. Pour moi c'est un des élémentsles plus décisifs detoute l'affaire.

ii) Question de l'incorporation

du Sud-Ouest africain à I'A,frique du Sud

56. Un seul épisodepourrait être plausiblement interprété commeune
reconnaissance, non point d'une responsabilité à l'égard de I'ONU
dérivant directement du mandat (et, comme nous le verrons, l'Assemblée
généraleelle-même nel'a pas entendu ainsi), mais de l'existence, sur le
plan politique, de l'intérêtque I'ONU prenait à toutes les questions

présentant un aspect Icolonial »:c'est quand l'Afrique du Sud s'adressa à
l'ONU en novembre 1946en vue d'incorporer le Sud-Ouest africain dans
son propre territoire conformément aux vŒuxdes habitants qui avaient
été consultés. C'étaitun moyen commode d'obtenir qu'une telle incorpo-

ration soit reconnue sur le plan international 34.Ce dernier aspect de la
question, à savoir que ce qu'on cherchait à obtenir de I'ONU était la
reconnaissance internationale )),avait déjà été mentionnédans un autre
passage de la déclaration, citée au paragraphe précédent,qui avait été

présentéeau nom de l'Afrique du Sud à Genève à une date antérieure de
la mêmeannée: ilavait été annoncéalors que l'Afrique du Sud exposerait
à la prochaine session de l'Assemblée générale desNations Unies ((les
raisons pour lesquelles ilconviendrait d'accorder au Sud-Ouest africain
un statut aux termes duquel ce territoire serait reconnu internationalement

comme formant partie intégrante de l'Union [sud-africaine] ))(les italiques
sont de nous).
57. Ce n'était pas la première fois qu'on abordait la question. La

34 Ce ne serait évidemment pas le premier exemple historique d'une tentative
visant à obtenir la reconnaissance politique de l'incorporation d'un territoire, sans
qu'il y ait d'obligation àcet égard. NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 258

possibilitéd'incorporation avait déjà été très clairement évoquéedès le
II mai 1945dans la déclaration longue et détailléefaite par le représen-
tant de l'Afrique du Sud au comité 1114de la conférencede San Francisco.
Il y a tout lieu de croire 35 que cette déclaration se terminait par une
remarque suivant laquelle, si cette possibilité avait été mentionnée,
c'était

(afin que l'union sud-africaine nepuisse pasêtreconsidérép elus tard
comtneayant accepté quele Mandat continueou que le territoire soit
compris dans un systèmede tutelle quelconque établi par une nou-
velle organisation internationale» (les italiques sont de nous).

On voit qu'il était déjàévident à l'époqueque, si jamais il devait être
question de soumettre à l'ONU une proposition concrèted'incorporation,
ce serait là une initiative d'ordre politique prise de plein gréet non en
raison d'une obligation reconnue de rendre compte.

58. Cependant, lorsque la question a été évoquée à la Quatrième
Commission de l'Assembléegénéraledes Nations Unies en novembre
1/46 par le maréchal Smuts en personne, il est apparu que la réaction
probable de la commission serait d'insister pour que le territoire soit
mis sous tutelle. C'est pourquoi le maréchal Smuts a fait une nouvelle
déclaration,où ildisait notamment:

((Comme ancienne Puissance mandataire, le Gouvernement de
l'Union ne peut pas soumettre un accord de tutelle en opposition
avec les vŒuxclairement exprimésdes habitants. L'Assembléedoit
reconnaître que la réalisation des vŒux de la population est une

solution conforme à la Charte, et dictée aussi par l'intérêtdes
habitants eux-mêmes.Toutefois, l'Assembléen'est pas d'avis que les
vŒuxdes habitants doivent être suivis,le Gouvernement de l'Union
peut adopter d'autre voie que de s'en tenir à la déclaration qu'il a
faite devant la dernière Assemblée de la Sociétédes Nations, à
savoir qu'il continuera, comme jusqu'ici, à administrer le territoire
comme partie intégrante de l'Union, cela dans l'esprit desprincipes

énoncésdans le Mandat. 1)(Les italiques sont de nous.)

Deux choses sont à noter. Primo, l'orateur a qualifiél'Afrique du Sud

d'((ancien» mandataire. Peu importe qu'ilfût exact ou nonde dire qu'à ce
moment l'Afrique du Sud avait perdu la qualitéde Mandataire. Ce qu'il
faut retenir, c'est qu'une telle observation était toutà fait incompatible

35 La déclaration, dont les comptes rendus officiels de la conférence de San
Francisco ne contiennent qu'un résumé, estcitéen extenso au paragraphe 4 du
chapitreVI11de l'exposéécritprésentépar l'Afrique du Sud dans laprésenteinstance.
Le texte eta provenance de la dernière phrase, dont l'authenticité intrinsèquement
probable n'ajamais étécontestée,sont indiquésa note 1 de la page 9 de cet exposé
écrit.II est également fait mention de cette questionge 533, paragraphe 5, de
l'opinion dissidente commune de62.avec la reconnaissance d'une obligation de rendre compte de I'administra-
tion du Mandat en tant que tel. Secundo, lorsque à la fin de ce passage
l'orateur a indiqué l'intention de son gouvernement de continuer à
administrer le territoiredans l'esprit desprincipesstipulésdans le Mandat

(on aurait de la peine àtrouver une formule qui donne moins l'impression
de reconnaître une obligation), iln'a pas mentionnéet iln'envisageait
certainement pas la présentation de rapports du genre prévu par le
Mandat. En revanche, ila fait état d'une intention de soumettre des
rapports conformément aux dispositions de I'article 73 e) de la Charte
relatives aux territoires non autonomes (dispositions dont j'examinerai
les effets sous la rubrique suivante). II a dià ce su-jetque son gouverne-
ment communiquerait au Secrétaire général, ((conformément à l'article

73 e) de la Chartes et non point, notons-le, conformément à I'article 6
du Mandat, des rapports (à titre d'information» (expression tirée du
texte mêmede I'article 73 e)) etila conclu en ces termes:

(II n'y a rien dans les clauses pertinentes de la Charte, ni dans
l'esprit de ceux qui les ont rédigées ",qui soit de nature à appuyer
l'assertion que le Gouvernement de l'Union pourrait êtrecontraint à
conclure un accord de tutelle, mêmecontre ses propres vues et celles
des populations intéressées. )>

Or, quelle fut la réactionde l'Assemblée générale e,xpriméepar sa résolu-
tion 65 (I)? A-t-elle insistépour qu'on lui envoie des rapports et pour
qu'on se soumette àla surveillance prévue à l'article 6 du Mandat? Point
du tout: elle a recommandé que le Sud-Ouest africain soit placé sous le
régime detutelle. 11est évidentque l'Assembléegénéralen'envisageait pas
plus que le Mandataire lui-même qu'ellepût exercer des fonctions
relatives au territoire dans le cadre du système desmandats.

iii) Offre du Mandataire defournir
des renseignements du type prévupar I'article 73e)

59. Dans lecas du Sud-Ouestafricain, le Mandataire n'avait nullement
l'intention de négocier un accord de tutelle ni d'accepter que I'ONU
assure la surveillance du territoire en vertu du système des mandats; là
encore ce n'est pas l'aspect moral de l'attitude du Mandataire qui est
pertinent, mais le fait qu'elle démontrel'absence de consentement à toute
obligation de rendre compte à I'ONU. Rien ne saurait mieux confirmer
ce défautde consentement - ou l'absence de tout point d'accord - que
l'épisodequi a suivi, amorcépar une déclarationfaite au nom de l'Afrique
du Sud à la Quatrième Commission de l'Assembléegénéralele 27 sep-

tembre 1947au sujet de la proposition formuléepar l'Afrique du Sud dès
novembre 1946 (voir paragraphe précédent)et tendant à présenter des
renseignements du type requis par I'article 73 e) de la Charte pour les

3"Au nombre desquels se trouvait évidemment le maréchal lui-même,
247 territoires dit((non autonomes ». De tels renseignements, fournis pour
les colonies, protectorats, etc.,n'impliquent pas d'obligation de rendre
compte et ne constituent pas des I.rapports )au sens propre et technique

de ce mot. Le rapport pertinent de la Quatrième Commission en date du
27 octobre 1947résume ainsi ladéclarationdu représentant sud-africain:
((Son gouvernement présumait, a-t-il dit, que ce rapport [c'est-à-
dire les renseignements à transmettre] ne serait pas examinépar le

Conseil de tutelle et ne serait pas traitécomme si un accord de tutelle
avait été effectivemenctonclu. 11a expliquéen outre que, du fait de la
disparition de la Société desNations, le droit de présenter des.
pétitions n'existait plus; ce droit suppose en effet I'existence d'une
juridiction dont l'existence est subordonnée à celle d'un droit de
contrôle ou de surveillance; or, de l'avis de l'Union sud-africaine,
l'organisation des Nations Uniesn'estpas investie d'un droit decette
nature à l'égarddu Sud-Ouest africain. » (Les italiques sont de nous.)

Ce.qui était dit à propos des pétitions était applicable à fortiori aux
rapports du type prévupar l'article 6 du Mandat. Les mots en italiques
équivalent à une déclarationgénéralr eejetant lajuridiction de l'ONU.
60. De nouvelles offres d'envoi de renseignements au mêmetitré ont
étéformuléea su cours de la période1947-1948et un ou deux rapports ont
étéeffectivement communiqués. Mais des déclarations ont été constam-
ment faites au nom de l'Afrique du Sud pour indiquer clairement que ces
rapports étaientfournis de plein gré,sans que l'existenced'une obligation
fût reconnue. C'est ainsi qu'au cours d'une séanceplénière de l'Assemblée

généraletenue le le' novembre 1947le représentant de l'Afrique du Sud
a dit:
«le Gouvernement de l'Union sud-africaine a déclaréqu'il était prêt

à soumettre, pour information, à l'organisation des Nations Unies,
des rapports annuels. Cet engagement tient toujours. Bien que ces
rapports, s'ils sont acceptés,doivent êtreremis à l'organisation des
Nations Unies en partant de l'idée que celle-cni'estpas compétente
pour exercer un contrôle sur le territoiredont il s'agit, ils serviront
cependant à tenir l'organisation informéede la mêmefaçon qu'elle
l'est sur ce qui sepasse dans lesterritoires non autonomes, conformé-
ment àl'article 73 e) de laCharte.»(Lesitaliques sont de nous.)

Dans une lettre du 31 mai 1948, le Secrétaire général aexplicitement
rappelé quelle était dans son ensemble la position de l'Afrique du Sud
(Nations Unies, doc. T/175, 3juin 1948,p. 51-52):

«lorsqu'il [le Gouvernement de l'Afrique du Sud] transmet à l'Orga-
nisation des Nations Unies des renseignements sur le Sud-Ouest
africain, sous forme d'un rapport annuel ou sous toute autre forme,

il agit de son propre gréet aux seulesfins d'information. A plusieurs
reprises, il a indiqué clairement qu'le se considèrepascomme tenu de transmettre ces renseignements à l'organisation des Nations Unies,

mais que, en raison du grand intérêt porté à l'administration du
Territoire, et conformément à la pratique démocratique normale, il
est désireux et soucieux de porter à la connaissance du monde " les
faits et les chiffres dont il dispose ... Le Gouvernement de l'Union

désirerappeler qu'en offrant de présenter un rapportsur leSud-Ouest
africain pour l'information des Nations Unies, il s'est conformé aux
dispositions de l'article 73 e) de la Charte. Cet article demande que
soient communiqués au Secrétaire général ((des renseignements

statistiques et autres de nature technique ))et ne mentionne pas les
renseignements relatifs à des questions de politique. Dans ces
conditions, le Gouvernement de I'Union n'estime pas que des
renseignements relatifs à des questions de politique, particulièrement

de politique future, doivent figurer dans un rapport (ou dans un
supplément au rapport) qui ne saurait, par définition, constituer
qu'un exposéde données statistiques et de faits relatifs àI'administra-
tion du Territoire pendant une année civile. Néanmoins, soucieux

d'apporter une aide et une collaboration aussi grandes que possible,
il a, en la circonstance, répondu de façon complète aux questions
relatives à divers aspects de sa politique. Pourtant, il ne considère pas
que, ce faisant, ilcrée un précédent.En outre, du fait que le Gou-

vernement de I'Union répond à des questions d'ordre politique, il ne
faut pas conclure qu'il s'engageàpratiquer telle ou telle politique dans
l'avenir,ou àrendre àun degréquelconquedescomptes à l'organisation
des Nations Unies. A cet égard, le Gouvernement de I'Union a

constaté qu'on a parfois i~oulu déduire de son intention déclarée
d'administrer leTerritoire dans l'esprit du Mandat qu'il était disposéà
rendre des comptes sur le plan international. IIne peut accepter cette
interprétation et il désirerappeler, une fois deplus, que la Sociétédes

Nations, à la dernière session, tenue en ai~il 1946, s'est explicitement
abstenue de transfzrer ses.fonctions, en ce qui concerne les Mandats, à
l'organisation des Nations Unies 38» (Lesitaliques sont de nous.)

A ia Quatrième Commission de l'Assembléegénérale, ila été réitére én
novembre 1948(procès-verbaux officiels, 76' séance,p. 288) que

((leGouvernement de I'Union ne saurait admettre que le Conseil de
tutelle puisse utiliser le rapport à des fins autres que celles qui avaient

étéprévues. II est encore moins admissible que le Conseil de tutelle
puisse s'arroger le droit, ainsi qu'il le faitdans sa résolution, ((de se
prononcer sur la question de savoir si I'Union sud-africaines'acquitte

37 L'emploi d'expressions telles qucgrand intérêt1et(1porter à la connaissance
du monde 11confirme l'interprétation donnée au paragraphe 56 du fondement de la
position adoptée par l'Afrique du Sud a l'égard de l'ONU en ce qui concerne
l'incorporation du territoire.
38 Voir à ce sujet par. 42 ci-dessus et, dans le mêmesens, les déclarations faites
deux ans plus tard par lordNair et citéesdans le mêmeparagraphe. de façon adéquate de ses responsabilités, à elle imparties par les
termes du Mandat ..».On a invoquéce droit au sujet d'un territoire
qui n'est pas placé sousle régimede tutelle et qui ne fait pas l'objet
d'un accord de tutelle. La délégationde l'Union sud-africaine estime
que le Conseil de tutelle a outrepassé ses pouvoirs. » (Les italiques
sont denous.)

Mais, comme l'Assembléegénérale apersisté à traiter de ces rapportspar
l'intermédiairedu Conseil de tutelle, l'Afrique du Sud a cessépar lasuite
d'en envoyer. Il est bien évidentqu'il s'agissaitd'un véritable dialogue de
sourds entre ce qu'on peut appeler les cparties ».Mais il est non moins
évidenta) que l'Assembléegénérale refusait de consentir à quoi que ce
fût hors du cadre d'un accord de tutelle; b) que l'Afrique du Sud n'était
pas disposée àadmettre quoi que ce fût qui impliquât la reconnaissance
d'une obligation de rendre compte à l'ONU. Il n'y avait donc ni accord

niconsentement.

c) Conclusionsrelatives au consentement

61. Quoi qu'on puisse penser de l'attitude de l'Afrique du Sud d'un
point de vue plus large que celui du droit, on ne saurait avoir le moindre
doute quant à la signification qu'elle revêtaiten droit. A lire les déclara-
tions précitées, ilst impossible de soutenir qu'il soit intervenu, après la
dissolution de la Société desNations, une reconnaissance ou une accepta-
tion quelconque d'un devoir de rendre compte à l'organisation des
Nations Unies incombant au Mandataire. De fait, l'Afrique du Sud a
expressémentniél'existence d'un tel devoir. Par conséquent, dans une
situation où, pour les raisons indiquées aux paragraphes 51 et 52 ci-
dessus, une affirmation formelle de reconnaissance ou d'acceptation de

cette obligation aurait étnécessaire, onne constate en fait qu'une sériede
refus et de rejets catégoriques. Cela étant, toute tentative d'en affirmer
l'existencepar implication doit échouer à priori, car des déductions dece
genre ne sont admissibles que dans des situations relativement indétermi-
néesoù, s'iln'y a pas d'indications trèspositives pour, il n'yen a pas non
plus de trèsnettes contre. Mais, dans un cas comme celui-ci où lesindica-
tionscontre sont certaines, onne saurait seprononcerpour par simpleimpli-
cation. Pour qu'on puisse dire que l'Afrique du Sud a reconnu une
obligation de rendre compte, il faudrait que son comportement ne soit
pas autrement explicable. Or, l'attitude del'Afrique du Sud l'étaitparfai-
tement et fut maintes fois expliquée.

62. Une considération importante, relative à l'ordre juridique inter-
national, est en jeu. Si, dans des situations de ce genre, I'Etat qui a,
volontairement et pour des motifs de politique générale,porté une NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 263

question devant un organisme international, devait êtreconsidérécomme
ayant ainsi tacitement reconnu qu'il étaitbligéde le faire (comme on a
cherché à le soutenir, bieà tort,à propos du fait que le Royaume-Uni a
référéla question de la Palestine l'ONU en 1948),cela sonnerait le glas
de toute liberté d'action politique dans le cadre du droit et de toute
confiance entre les organisations internationales et les Etats qui en sont
membres.
63. 11 en va exactement de mêmepour les tentatives visant à découvrir
des engagements formels dans le textede simplesdéclarations depolitique
généraledu genre de celles que les mandataires ont faites à diverses

occasions. Il est clair qu'a l'époquede la formation de l'ONU et de la
dissolution de la SdN la question des mandats était d'intérêt général.
Il fallait bien qu'on en discute et que les mandataires fassent savoir d'une
façongénéralequelsétaientleurspoints de vue etleurs positions àce sujet.
De toute évidence,ilfallait prendre une décisionsur leur avenir.s ilest
non moins évident,sinon plus, que la conclusion à laquelle on a abouti
touchant l'avenirdesmandatsa été qu'ils devaientêtplacéssous lerégime
de tutelleet que I'ONU ne devait absolument pas s'en occuper etnant que
mandats. En d'autrestermes,lasurveillancedeI'ONU devait s'exercer dans
le cadre durégimede tutelle et non dans celuidu système des mandats.En
mêmetemps, la Charte n'imposait aux mandataires aucune obligation de
transformer leurs territoires sous mandat en territoires sous tutelle.Il
n'est donc plus juridiquement possible aujourd'hui (le Sud-Ouestafricain

n'ayant pas étéplacésous tutelle et aucune obligation de ce faire n'ayant
existé) d'affirmerque l'organisation des Nations Unies est néanmoins
habilitée à exercer une surveillance au titre des mandats. Le soutenir
serait recourir un procédéque je ne qualifierai pas mais qui est fort peu
recommandable dans toute techniquejuridique digne de ce nom.

6. Conclusiongénérale d e sectionA

64. Considérant, pour tous les motifs indiqués, que les Nations Unies
en tant qu'organisation (et il s'agit donc ici aussi bien de l'Assemblée
générale quedu Conseil de sécurité)n'ont jamais étéinvesties des pou-
voirs et fonctions du Conseil de l'ancienne Société desNations relative-
ment aux mandats par aucun des moyens possibles décritsau paragraphe

11 ci-dessus,je dois conclure que cette organisation n'avait pas compé-
tence pour révoquer le Mandat de l'Afrique du Sud, que leConseil de la
SdN ait eu lui-mêmece pouvoir ou non. Il importe néanmoins de se
demander si ce dernier possédait effectivement un tel pouvoir car, s'il ne
lepossédait pas,la question ne sepose pas, mêmesi I'ONU avait recueilli
la succession de laSdN. Partant, c'est cet aspect du problème queje vais
examiner. NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 264

A SUPPOSER QUE LES POUVOIRS DU CONSEIL DE LA SOCIÉTÉ DES NATIONS
AIENT ÉTÉ DÉVOLUS À L'ORGANISATIO DNS NATIONS UNIES,
ILS NE COMPRENAIENT PAS LE POUVOIR DE RÉVOQUER
IJNILATÉRALEMENT UN MANDAT

1. L'Organisation desNations Uniesn'est pas compétentepour exercer à
propos des mandats despouvoirs desurl~eillanceautres ouplus grands que
ceux que possédaitla Société des Nations

65. Si l'on part de l'hypothèse ou de ce qu'il faut bien appeler le
postulat que, contrairement à la conclusionà laquelle j'ai abouti dans

la section précédente (section A), l'ONU a effectivement hérité - ou
obtenu d'une autre façon - une fonction de surveillance sur les mandats
qui subsistaient comme tels, sans avoir ététransformés en tutelles des
Nations Unies, il faut se demander quelles étaientla nature et la portée
(ou le contenu) de cette fonction, telle qu'elle avait été ou auraittre
exercéepar le Conseil de la Sociétédes Nations, et cela à cause d'un

principe élémentairemais fondamental de droit. Dans la mesure in-
certaine où l'organisation des Nations Unies pourraitlégitimementexer-
cer des pouvoirs de surveillance, ce serait nécessairementdes pouvoirs
dérivésh,érités ou reprisdu Conseil de la Société desNations 39,et qui
ne pourraient dépasserceux qu'avait le Conseil, des pouvoirs dérivésne
pouvant êtreautres ni plus grands que ceux dont ils dérivent.l n'est pas

possible que laSdN ait léguéou dévoluquelque chose qu'elle ne possédait
pas elle-même; nemo dare potest quod ipsenon habet, ou (le corollaire)
nemo acciperepotest id quod ipse donator nunquam habuit.Ce principe
juridique incontestable a été reconnu et appliqué par la Cour en 1950,
et c'est sur lui qu'elle s'estfondéepour conclure (C.Z.J. Recueil 1950,
p. 138):

((Ledegréde surveillance à exercer par l'Assembléegénéralene
saurait donc dépasser celui qui 2 étéappliqué sous le régime des
Mandats et devrait être conforme,autant que possible, à la procé-
dure suivie en la matière par le Conseil de la Société desNations.)

Cette conclusion a étéformellement réaffirméepar la suite dans les
affaires concernant larocédure devote applicableaux questions touchant
lesrapportsetpétitionsrelatifsau Territoiredu Sud-Ouest africain et l'Ad-
missibilité del'auditionde pétitionnairespar le Comitédu Sud-Ouestafri-

39Il va sans dire que mêmesi, contrairement à la conclusion que j'ai formulée
comme ayant consentià tout exercice d'un pouvoir de surveillance par l'ONU, iléré
n'aurait pu en aucun cas consentir, ou être réputéavoir consenti,rcice de
pouvoirs plus étendus que ceux de la NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 265

cain (1955 et 1956); l'une et l'autre portaient sur le point de savoir si la
manière dont l'Assembléeentendait interpréter et exercer sa fonction de
surveillance à certains égards étaitconforme au principe ainsi formulé.
En outre, dans la deuxièmede ces affaires, la Cour a de nouveau énoncé

ce principe. Se référant à son avis initial de 1950,elle a dit (C.I.J. Recueil
1956, p. 27):

(Dans cet avis, la Cour ..a clairement énoncé queles obligations
du Mandataire étaientcelles qui prévalaient sousle régime desMan-

dats. Cesobligations ne pouvaient être accruesde manière àdépasser
celles auxquelles le Mandataire avait été sdumis sousle régime des
Mandats en vertu de l'article 22du Pacte et du Mandat sur le Sud-
Ouest africain. La Cour a donc déclaréque le degréde surveillance

à exercer par l'Assembléegénéralene saurait dépasser celui qui a
étéappliquésous le régime desMandats ...[et] que le degréde sur-
veillance devrait se conformer autant que possible à la procédure
suivie à cet égardpar le Conseil de la Sociétédes Nations. ))

66. Le bien-fondé de cette affirmation n'a jamais été contesté,et il
paraît en principe incontestable. II s'ensuit nécessairementque, si la
Société desNations n'avait aucun pouvoir de révocation unilatérale à
l'égard d'unmandat 40,l'organisation des Nations Unies ne pouvait pas
avoir héritéun tel pouvoir. Il s'ensuit égalementsur le plan de la procé-

dure-et c'est là une considération importante - que si, dans le système
des mandats tel qu'il étaitgérépar la Société desNations, l'organisme
de surveillance, à savoir le Conseil de la SdN, nepouvait lier le mandataire
sans son consentement, les organes des Nations Unies ne le pouvaient
pas non plus, que ce soit l'Assemblée générale olu e Conseil de sécurité.

Bref, quand bien mêmeon admettrait que l'Assembléegénérale, voire
le Conseil de sécurité,a tous les pouvoirs qu'elle est supposéeposséder
ou devoir posséder, il n'en resterait pas moins qu'en droit ces pouvoirs
ne sauraient avoir à l'égard desmandats 41 un effet autre ou plus grand
que ceux du Conseil de la SdN (et bien entendu, les pouvoirs des deux

organes sont aussi limitéspar la Charte,comme on le verra à la section
C ci-après).

40 L'articleGindéfin)I«un »,et non pas l'article défin«le1)mandat, est utilisé
icià dessein, car quel qu'ait étéle pouvoir de la SdN de révoquer un mandat, ce
pouvoir était le mêmepour tous les mandats, et ne valait pas seulement pour le
Sud-Ouest africain. Sil'on admettait que le Mandat pour le Sud-Ouest africain
pouvait êtrerévoqué unilatéralement,il faudrait supposer que les divers mandats de
l'Australie, de.la Belgique, de la France, du Japon, de la Nouvelle-Zélande et du
Royaume-Uni auraient pu l'être aussi.
41Ce que le Conseil de sécurité pourrait faire non pas au titre des mandats mais
au titre du maintien de la paix est examiné séparémentdans les paragraphes 110-116
ci-après.2. La Société des Nations n'avaitaucunpouvoir de révocation unilatérale,
exprèsou implicite

a) Présomption contre l'existence
d'untel pouvoir

67. L'argument qui permettrait de considérer que les mandats de la
Société des Nations étaient soumis à un pouvoir de révocation unilatérale

du Conseil de la SdN ne repose sur aucune disposition des mandats eux-
mêmes nidu Pacte. En fait, comme on le verra par la suite, ces derniers
impliquent exactement le contraire. Cet argument, comme on l'a déjà
signalé, estavancéet ne peut êtreavancéque dans l'hypothèsede viola-

tions fondamentales du mandat qui, s'il s'agissait d'un contrat de droit
privépar exemple,pourrait autoriser l'autre partie à leconsidérercomme
résolu 42.L'argument repose donc entièrement sur cette idéeque, dans
le cas d'institutions comme les mandats de la Société des Nations, il doit

exister un pouvoir inhérent de révocationen cas de violation fondamen-
tale, mêmesi ce pouvoir n'est pas spécifié en toutes lettres; en somme il
ne serait mêmepas besoin de le spécifier.C'est là en fait la thèsede la
Cour.

68. A l'appui de cette thèse, on établit un rapprochement avec les
contrats de droit privéet les traitéset accords internationaux ordinaires,
à propos desquels on peut dire qu'une violation fondamentale commise

par l'une des parties libèrel'autre de ses obligations 43 et qu'elle a ainsi
pour effet de mettre un terme au traité ou au contrat. L'analogie est
néanmoins trompeusesur cepoint particulier oùla situation contractuelle
est différentede la situation institutionnelle, de sorte que ce qui peut

êtrevrai dans un cas ne saurait êtretransposé et appliquépurement et

42 On notera l'emploi intentionnel de l'expressi1à le considérercomme résolu »
et non pas eà y mettre un terme >)Il y a entre ces deux expressions une importante
différence théorique.A proprement parler, tout ce que peut faire une partie qui
allègue des violations fondamentales de l'autre partie est de déclarer qu'elle ne se
considère plus tenue de continuerà remplir ses propres obligations en vertu du con-
trat, qu'elle considère comme n'existant plus. Mais autre chose est de savoir si le
contrat aeffectiwment et objectivement prifin ;e n'est pas une conséquence néces-
saire, et en tout état de cause elle ne saurait découler de la déclaration unilatérale
d'une partie, sinon il serait trop facile de se dégagerd'un contrat gênant.
43 La question se pose immédiatement de savoir qui serait l'autre partie dans le
cas des mandats et de quelles obligations cette autre partie pourrait prétendre se
libérerpour cause de violation commise par le mandataire. Dans un mandat, quelles
obligationsy a-t-il à part celles du mandataire? Comment et par qui serait constatée
l'existence de violations fondamentales de manière que cette constatation ait l'effet
d'un jugement (et non d'un avis) rendu par un tribunal compétent (et non pas par
un organe politique ordinaire)?simplement dans l'autre sans distorsions inadmissibles (voir notes 42 et

43).
69. Sans doute il existe ici une difficultédans la mesure où un régime
comme celuides mandats paraît relever àla fois du domaine institutionnel
et du domaine contractuel. Mais un minimum de logique s'impose. Si,sur
la base de principes contractuels, on estime que des violations fonda-
mentales justifient une révocation unilatérale,on doit admettre aussi

qu'en vertu des principes contractuels un nouveau cocontractant ne
peut êtreimposé à une partie à un contrat sans son consentement (no-
vation). Puisque en l'espèceI'unedes violations fondamentales alléguées 44
est ~récisémentla non-acce~tation évidente du nouveau cocontractant.
le rejet de toute obligation consistant à lui rendre compte (l'acceptation
d'un nouveau cocontractant étant par définition non obligatoire, d'après

lesprincipes contractuels), on voit que sur l'un des points essentiels tout
l'avisde la Cour repose sur un illogisme complet.
70. Si, pour échapper à ce dilemme, qui n'est pas le seul 45,on passe
au domaine institutionnel, on voit tout de suite que les entitésen cause
ne sont ni des particuliers ni des personnes morales de droit privé mais
des Etats souverains. Lorsqu'un Etat souverain est en cause et lorsqu'il

ne s'agit pas simplement de se prononcer sur la situation juridique, mais
d'écarter cet Etat d'un rôle administratif qui est effectivement le sien,
on ne saurait se fonder sur une théorie de pouvoirs implicites ou inhé-
rents. Il faut que ces pouvoirs s'expriment concrètement dans les instru-
ments pertinents, quels qu'ils soient. Si l'on tient vraiment à ce que la
mission d'un Etat souverain acceptant une charge telle qu'un mandat

soit révocablesur déclaration unilatérale d'une autre entité, quelle que
soit la volonté de I'Etat intéressé 46,il serait indispensable de stipuler ex-
pressémentcette possibilité.

71. Cela ne suffirait d'ailleurs pas, car il faudrait également prévoir
comment ce pouvoir serait exercé; en effet, il est bien évidentque, dès

son exercice, il se poserait une multitude de questions juridiques-et pra-
tiques exigeant uqe solution rapide, questions qui pourraient même révé-
ler des problèmes potentiellement plus graves que ceux que la révocation

44 Les violations ainsi alléguéesn'ont d'ailleurs pas étéprouvées comme il con-
vient- voir par. 2 à 5 au début de la présente opinion.
45 C'est ainsi que, d'après les principes ordinaires du droit des contrats et sous des
réservesqui ne sont pas pertinentes ici, la mort ou la disparition de I'une des parties
met normalement fin au contrat et dégage l'autre partie de toutes les obligations
qu'imposait encore le contrat, sauf celles qui étaient déjànéeset n'avaient pas été
exécutées. Dans le cas des mandats, il en aurait résultéque la dissolution de la
étédégagésde toutes autres obligations et qu'ils seraient restés comme occupants
dans le territoire, dont il n'aurait pas étépossible en pratique de les évincer.
46 Si l'on objecte qu'aucun Etat n'accepterait ces conditions debon gréou sciem-
ment, je ne peux qu'en tomber d'accord, mais cela ne fait que renforcer et mettre en
relief l'ensemble de mon argumentation. L'absurdité de l'idée même apparaît
immédiatement. NAMIBIE (S.-O. AFRICAIN) (OP. DISS. FITZMAURICE)
268
serait censéerésoudre. Laisser ces questions en suspens, s'en remettre au
jeu fortuit de principes ou de règles non exprimés, c'est se montrer

irresponsable, ce n'est pas ainsi qu'on agit. Si l'on avait envisagé véri-
tablement la possibilité d'un changement de mandataire, la méthode
normale eût étéde prévoir un réexamenaprès une période initiale ou à
intervalles fixes et cette formule mêmen'impliquerait aucun pouvoir
généralou illimitéde révocation, mais plutôt un processus méthodique
de revision périodique auquel le mandataire lui-mêmeparticiperait cer-
tainement

72. En conséquence, dans un système juridique auquel participent
des Etats indépendants et souverains et les grandes organisations inter-

nationales dont ilssont membres, il doit forcément y avoir une présomp-
tion naturelle contre l'existence d'un pouvoir aussi radical que celui
d'évincerunilatéralement un Etat d'une certaine situation ou de le priver
d'un certain statut ". Aucune déduction fondée surle caractère préten-
dument inhérent d'un droit ne pourrait suffireà faire tomber cette pré-
somption; seule une expression concrète sous une forme ou sous une
autre pourrait le faire, car ce qui est en cause ici ce n'est pas la simple
constatation que des obligations internationales ont été violées, c'est

quelque chose qui va beaucoup plus loin et qui suppose une action, ou
un projet d'action, ayant objectivement un caractère exécutif. C'est
comme si l'on déclarait que le roi de Ruritanie non seulement a ~!ioléles
obligations internationalede la Ruritanie mais aussi que, pour cette raison,
il n'est plus roi de RuritaniJe ne prétends pas que l'analogie soit exacte,
mais elle fera mieux comprendre mon argument qui est celui-ci: si,
lorsque le mandataire enfreint le mandat, on peut en conclure qu'il a
violé sesobligations internationales, on ne saurait par contre en déduire

qu'il cesse d'être mandataireou peut être déposép ,ar le décret d'une
autre autorité, à moins que les instruments pertinents ne le prévoientou
ne l'impliquent clairement. En l'occurrence, non seulement ce n'est pas
le cas, mais, comme on va le voir, les indications sont en sens contraire.

b) Indications positives démentant la notion de révocabilité et 1) fondées
sur les termes des instruments pertinents et sur certains principes d'inter-
prétation applicables

i) Caractère esseritiellement non absolu
du système des mandats
73. Cette question sera traitée plus à fond dans le cadre de l'examen

de la règle fondamentale de vote de la Société desNations qui, à part

+' Ce n'est pas à dire que les Etats souverains sont au-dessus du droit; mais le
droit tient compte du fait qu'il ne s'agit pas de particuliers ou de personnes morales
de droit prive.

256quelques exceptions ne s'appliquant pas au cas des mandats, prévoyait

l'unanimité des voix, y compris celle de la partie intéressée,donc du
mandataire en cause. J'évoque cettequestion ici, à titre d'introduction,
car elle constitue un élément essentiel à une bonne compréhension des
antécédents historiques:en effet, puisqu'en dernier ressort les manda-
taires ne pouvaient pas êtreliéspar les décisionsdu Conseil de la SdN,
sauf s'ilsles approuvaient ou du moins s'ilsy acquiesçaienttacitement ou

ne s'y opposaient pas 48,le systèmeétait forcément dépourvude tout
caractère absolu; et dans un tel systèmeil est manifestement chimérique
de parler d'un pouvoir de révocation unilatérale, carla validitéd'une
décisionde révocation aurait elle-mêmedépendu de l'assentiment du
mandataire 49.Elle n'aurait donc pas pu êtreunilatérale. Toute autre
conception recèle unecontradiction logique.

ii)Portée limitée de lp arétendue fonction
de surveillanceexercée parle Conseil
de la Sociétédes Nations

74. Comme il est indiqué au début de Ia présente opinion (par. 14
ci-dessus), aucune fonction de surveillance à l'égarddes mandats n'avait
été expressémentconférée au Conseid le la SdN ni à aucun autre organe
de la Société,et cela aussi bien dans l'acte de mandat qu'en vertu de
l'article22 du Pacte de la SdN, qui instituait le régimenouveau du

((systèmedes mandats ))et en précisait la nature avec force détails -
mais pas sur ce point particulier. Le rôle ou la fonction de surveillance
devait se dégager exclusivement - ou presque exclusivement - par voie
de déduction ou comme un corollaire de l'obligation qu'avait le man-
dataire d'envoyer des rapports annuels au Conseil. C'estdonc la nature
de cette obligation-Ià qu'il faut examiner pour préciser legenre et la

portée dela surveillance qu'on pouvait légitimementconsidérer comme
une conséquencede cette obligation.

Principe d'interprétation applicable

Lorsqu'un droit ou un pouvoir n'a pas fait l'objet d'une at-
tribution spécifiquemais n'existe que comme corollaire ou

48 En fait, à strictement parler, sans l'assentiment du mandataire aucune décision,
mandation (non obligatoire). Le mandataire pouvait cependant s'abstenir de voter.
49 Le principe nemo judex esse potest in sua propria causa ne peut évidemment
avoir pour effet de paralyser la règlede vote prévue dans les constitutions des orga-
nisations internationales; sinon, pour preun exemple évident,les cinq membres
permanents du Conseil de sécurité desNations Unies seraient empêchés d'exercer
leur veto pour toute question mettant ejeu leurs propres intérêts; or, l'une des
raisons pour lesquelles le droit de veto leur a étéaccordé était précisémentt
l'exception particulière prévuel'art. 27, par. 3, de la Chartevoir l'exception
analogue du Pacte de laSdN, par. 80 ci-dessous) de leur permettre de protéger ces
intérêts. contrepartie d'uneobligationcorrespondante, ledroitou lepou-
voir en question se définit nécessairemend t 'aprèsla nature de

cette obligation et sa portée est limitée à ce qui est nécessaire
pour maintenir cette corrélation.

75. Chacun des mandats (àune exception prèsqui n'estpas pertinente
ici50 et sous réservede légères divergences rédactionnelles) envisageait
de la mêmefaçon l'obligation de rendre compte. Pour citer le Mandat

pour le Sud-Ouest africain, celui-cistipulait (art. 6) que le Mandataire
devrait fournir au Conseil de la Société des Nations un rapport annuel
satisfaisant le Conseil 51 et contenant toute information intéressant le
territoire et indiquant les mesures prises pour assurer les engagements
pris ..)).Cette clause reprenait sous une forme plus détaillée l'article 22,

paragraphe 7, du Pacte, qui prévoyaitl'envoi au Conseil d'un rapport
annuel ((concernant les territoires dont [le Mandataire] a la charge ».La
seule autre disposition pertinente étaitl'article 22, paragraphe 9, relatif
à la création de ce qui devait devenir la Commission permanente des

mandats, ((chargéede recevoir et d'examiner les rapports annuels des
Mandataires et de donner au Conseil son avis sur toutes questions
relatives à l'exécution desmandats )).Ultérieurement, par arrangement
spécial,la Commission a pu également recevoiret examiner des pétitions

écrites des habitants des territoires sous mandat transmises par les
mandataires.

76. Il est donc clair que la seule véritable fonction spécifiquedu
Conseil étaitde ((recevoiret examiner ))ces rapports et ces pétitionspar
l'intermédiairede la Commission permanente des mandats. Le Conseil
pouvait exiger que les rapports lui donnent satisfaction, c'est-à-dire
qu'ils contiennent (toute information intéressant le territoire)) et in-

diquent (les mesures prises ))par le mandataire, etc. Il serait également
naturel de considérer que, comme corollaire, le Conseil pouvait com-
menter les rapports, indiquer au mandataire quelles mesures lui parais-
saient mauvaises ou insuffisantes, lui en suggérerd'autres, etc. (mais

en aucun cas aveceffetobligatoire, si le mandataire n'était pas d'accord).

50Celle de l'Irak, dont le cas a ététraité différemmen- voir opinion dissidente
commune, C.Z.J. Recueil 1962, p. 498, note 1.
51Les mots (satisfaisant le Consei»n'auraient pas pu se rapporter aux mesures
dont il était rendu compte, car le mandataire ne devait envoyer qu'un seul rapport
annuel et ne pouvait donc pas savoir, au moment où il présentait le rapport, si ces
mesures satisferaient le Conseil. D'autre part le mandataire, s'ilpouvait reconsidérer
les mesures qu'il avait prises, neevisait pas sonrapport. Le rapport avait précisé-
ment pour objet d'informer le Conseil de ces mesures; envisagécomme un moyen
d'information, le rapport ne pouvait être que esatisfaisan» du moment qu'il
contenait des renseignements complets et exacts sur les mesures prises, de façon que
le Conseil, ayant étésaisi de tous les faits, soitme,sur la base de ce rapport, de
faire savoir au mandataire s'il approuvait les mesures en question, ou de lui indiquer
les autres mesures ou les mesures complémentaires qu'il préconisait,Le Conseil pouvait exhorter, user de persuasion et mêmeimportuner;
mais il ne pouvait ni exiger ni contraindre - or, d'une obligation qui,
par son libellé, n'estrien de plus qu'une obligation d'envoyer des rap-
ports d'un type déterminé,il n'est pas possible de déduirel'obligation
supplémentaire et toute différented'agir selon les vŒux de l'autorité
qui reçoit les rapports. Cette dernière aurait dû êtreprévue à part; or il

est bien certain qu'aucun des mandataires n'a jamais entendu de cette
manière l'obligation defairerapport, et non moins certain que s'ill'avait
comprise ainsi, il n'y aurait jamais souscrit.
77. En d'autres termes, la fonction de surveillance, telle qu'elle était
envisagéeaux fins de la Société des Nations, était en réalité unefonction
très limitée - et sir Hersch Lauterpacht a reconnu qu'il en était en
principe ainsi dans l'affaire de larocédure devote, quand, à propos du
régimede tutelle instituépar les Nations Unies (mais évidemmentil en
va à fortiori de mêmepour les mandats), il a déclaré(C.I.J. Recueil
1955, p. 116):

«II n'y a ..pas d'obligationjuridique de lapart de l'autoritéadmi-
nistrante d'adopter ou d'abroger une mesure législativo eu adminis-
trative particulière, dans le but de donnereffet à une recommanda-
tion de l'Assembléegénérale.L'obligation juridique incombant à
l'autorité administrante est d'administrer le territoire sous Tutelle
conformément aux principes de la Charte et aux dispositions de
l'accord de Tutelle mais pas nécessairement suivant telle recomman-
dation particulière del'Assembléegénérale ou du Conseilde Tutelle. >)
(Les italiques sont de nous.)
*
* *
78. Tel était donc le caractère véritableet très limité dela fonction
de surveillance à laquelle l'Assembléegénéralea étésubrogée, si tant

est qu'elle ait pu recueillir par subrogation des fonctions quelconques
en ce qui concerne les mandats. Comme le terme l'implique, ii s'agissait
strictement d'un droit de surveillance1);ce n'était pas un droit de
contrôle - il ne supposait aucun pouvoir exécutifet, de toute évidence,
il n'aurait pu inclure un pouvoir de nature si foncièrement exécutive
que celui de révoquer. Entre une fonction de surveillance (mais non de
contrôle) et lepouvoir de révoquerun mandat et pour ainsi dire d'expulser
le mandataire - et de le faire unilatéralement sans le consentement de
ce dernier - il y a un abîme infranchissable. La différence(et elle est
énorme) n'est pas seulement de degré, elle est ausside nature. Voilà
donc une considération qui, en l'absence d'une disposition prévoyant

expressémentla révocation, interdit de conclure à l'existence implicite
d'un tel pouvoir et exclut mêmetoute idée derévocation,celle-cin'ayant
pas pu faire partie du rôle de surveillance très limitédévoluau Conseil
et ne pouvant donc entrer dans les attributions de l'Assemblée générale
des Nations Unies, à supposer que celle-ci possède des fonctions de
surveillance quelconques. NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN (O)P. DISS. FITZMAURICE) 272

iii) La règle devote du Conseil

de la Société des Nations

79. Ce qui précèdetrouve une confirmation plus que suffisante dans
le régime devote du Conseil, qui faisait l'objetde l'article 4, paragraphe
5, du Pacte, à rapprocher de l'article 5, paragraphe 1 (les textes sont

reproduits dans la note 52),dont l'effet,pour toutes les questions intéres-
sant les mandats, étaitde permettre aux mandataires, s'ils n'étaient déjà
membres du Conseil (et certains l'ont étéinvariablement), de participer
aux débatset d'y exercerun droit de vote qui pouvait jouer comme un

veto. Aucune exception n'était prévue dans l'éventualité d'une révocation
et l'on ne peut arguer du fait que les mandataires n'assistaient pas
toujours aux réunionsdu Conseil quand ils y étaient invitésou s'abs-

tenaient parfois de voter, ou que certains procédéspouvaient être
utilisésafin d'éviter uneconfrontation directe ectre eux et les autres
membres du Conseil, pour conclure qu'une telle exception existait.
Qu'on n'ait jamais enregistréun cas d'emploi effectifdu veto ne change

rien à la situation juridique et fait simplement ressortir que le système
fonctionnait bien, confié à des gens raisonnables.Cela n'empêchait nulle-
ment que les mandataires conservaient bel et bien le droit de participer
aux séanceset de prendre part au vote. Cette situation en ce qui concerne

les votes a été confirmép ear la Cour, non seulement dans son arrêt de
1966 mais aussi dans celuide 1962 (C.I.J. Recueil 1966, p. 44-45; et
C.I.J. Recueil 1962,p. 336-337) 53. Il est évident qu'unesituation qui se

52Article 4, paragraphe 5: fTout Membre de la Sociétéqui n'est pas représenté
au Conseil est invitéà y envoyer siégerun Représentant[les italiques sont de nous]
lorsqu'une question qui l'intéresseparticulièrement est portée devant le Conseil. ))
Article 5,paragraphe 1:IISauf disposition expressément contraire du présent Pacte
...les décisions ..du Conseil sont prises à l'unanimité des Membres de la Société
représentés àla réunion.1(Les italiques sont de nous.)
53Par exemple (p. 336-337):
(l'approbation exigeait l'unanimité de tous les représentants [au Conseil], y
compris celui du Mandataire qui, en vertu de l'article 4, paragraphe 5, du
Pacte, était habilitéà envoyer siéger un représentant pour prendre part à la
discussion et voterr.
Et encore (p. 337):

((En vertu de la règle de l'unanimité (art. 4 et 5 du Pacte), le Conseil ne
pouvait imposer ses vues au Mandataire. »
A prèmièrevue il peut paraître surprenantque la Cour, telle qu'elle était composée
en 1962, ait étési prompte à admettre, et mêmeà souligner, l'existence de cette
situation. Cela tient au fait qu'elle faisait de l'absence d'une «surveillance adminis-
trative))effective dans le système de la Société desNations l'une des raisons
qui permettaient de postuler l'existence d'une(surveillancejudiciaire))se traduisant
par le droit que posséderait tout Membre de IaSociétédesNations qui désapprouvait
la façon dont le mandat était géré d'en référer à l'ancienne Cour permanente et,
plus tard, à la Cour internationale de Justice instituée en vertu de la Charte des
Nations Unies. Il s'ensuit que, si le présent avisde la Cour (1971) est en tout point
conforme au genre de conclusion à laquelle la Cour était parvenue en 1962, il est
tout àfaitcontraire au raisonnement formulé en 1962,qui vient d'êtrerappelé, car 10-
giquement ceraisonnement doit aboutir au résultat indiquéà la fin du paragraphe 79.

260caractérisait par le fait que le Conseil de la Société desNations ne

pouvait pas imposer ses vues aux mandataires sans leur consentement
est difficilement conciliable avec une situation dans laquelle il aurait pu
révoquer unilatéralement leurs mandats sans leur consentement, et à
fortiori avec l'idéeque les Nations Unies posséderaient un tel pouvoir.

Principed'interprétation applicable

Quand une disposition [comme la règle de vote du Conseil
de la Société desNations] est libelléede manière à ne pouvoir
produirequ'un seuleffet,toute dérogation,pour êtreapplicable,
doitêtreexpressément prévue.

80. Il se trouve que ce principe d'interprétation est abondamment
illustréet les vues expriméesau paragraphe précédent revêtenlte carac-
tère d'une quasi-certitude, pour la raison que (bien qu'il ne s'agitpas
de mandats), le Pacte de la Société desNations prévoyait enfait expres-

sémentcertaines exceptions à la règlefondamentale de l'unanimité, entre
autres aux paragraphes 4, 6, 7 et 10 de l'article 15 et au paragraphe 4
de l'article 16, concernant le maintien de la paix 54.Cela montre que les
auteurs du Pacte étaient parfaitement conscients de l'existence de cer-

taines situations dans lesquelles c'eût étéune contradiction d'admettre
la partie intéressée à voter - et que des dispositions avaient étéprises
en conséquence.Ils ne semblent pas avoir penséque cela s'appliquait

54 On a soutenu que le pouvoir conféréau Conseil de la Société desNations par
l'article 16,paragraphe4, du Pacte, d'exclure un Membre qui aurait enfreint un des
engagements du Pacte (quoique à mon avis il doive s'agir uniquement des clauses
du Pacte relatives auaintien de lapaix - voir le paragraphe 1 du même article 16)
fournissait un moyen de révoquer un mandat. En effet, puisque selon l'article 16,
paragraphe 4, le vote positif de 1'Etat frappé d'exclusion n'étaitpas nécessairepour
l'adoption d'une résolution d'exclusion, un mandataire ayant faillises obligations
aurait pu d'abord êtreexclu et, parce qu'il aurait cesséd'être Membre dela Société
des Nations, on aurait pu ensuite révoquer son mandat sans se soucier de son avis.
Mais cette ingénieuse interprétation (qui implique peut-être certains problèmes
de fait dont il ne vaut pas la peine de se préoccuper ici) passeté dela question;
en effet s'il était impossible de se débarrasser d'un mandataire sans ces complica-
tions extrêmes, cela ne démontre-t-il pas de façon éclatante que la révocabilité,
inhérente ou non, n'existait simplement pas dans le cadre strict du Pacte ou des
mandats pour tout mandataire se trouvant dans la situation normale, c'est-à dire
encore Membre de la Société desNations? Le risque de perdre ses droits en cessant
d'être Membrede la Société desNations pouvait avoir en pratique un certain
effet de dissuasion, mais cela n'a rienà voir avec la définitionjuridique des droits
et obligations d'un Membre de la SdN en tant que tel.
Le mêmeprincipe exactement s'applique à propos d'un autre argument, tiré
du fait que, en vertu de l'article 26, le Pacte pouvait êtrendé(bien qu'unique-
ment par un vote comprenant les voix unanimes de tous les membres du Conseil
de la SdN). Ilest vrai que le Pacte pouvait êtreainsi amendé; mais il ne l'a pas été
en fait: c'est donc le Pactenamendéqui s'applique. On voit mal comment contrer
ce genre d'argument qui, juridiquement parlant, ne saurait être pris au sérieux,
sauf comme argument de désespoir.

261 au cas des mandats, et personne n'a d'ailleurs prétendu qu'il en fût
ainsi tout au long de l'activitéde la SdN en matièrede mandats. La seule

conclusion à en tirer est qu'on n'a jamais envisagéla possibilité de
mettre fin au mandat ou de changer d'administration, sauf au moyen
d'un accord conclu à cet effet.

iv) Circonstancesde l'époque
et rejetde la révocabilité

81. D'autre part, il ne s'agit nullement d'une simple omission com-
mise par mégarde. Les propositions antérieures relatives à un système
de mandats, notamment celles qui avaient été formuléep sar le président
Wilson au nom des Etats-Unis, prévoyaient la possibilitéde remplacer

un mandataire par un autre, ce qui, bien entendu (contrairement à ce
qu'implique I'avis de la Cour), ne pouvait êtreréalisé qu'enrévoquant
(ou revenait à révoquer)le mandat primitif. La possibilité de violations
même n'étaip tas négligéec,ar ces propositions Wilson prévoyaientaussi,
comme l'indique à juste titre I'avisde la Cour, le ((droit de faire appàl
la Société desNations pour qu'elle remédie à toute violation du mandat ».
Il est cependant inutile de s'engagerà la suite de I'avisde la Cour, dans
un débat sur la période précisependant laquelle l'idéede révocabilité

a été discutée et sur le contexte précisdans lequel elle l'a été- il n'y a
en effetaucun doute qu'ellea bien été discutée,soit sur la base de lapropo-
sition du président Wilson soit sur la base d'une autre proposition. La
preuve en est un élémenq t ue I'avisde la Cour ne mentionne pas, à savoir
que la notion de révocabilité inspiraitdes objections à tous les aspirants
aux mandats de la catégorieCet aux reprksentants des gouverriements qui
devaient se voir attribuer la plupart des mandats A et B - en particulier

a M. Simon pour la France et à M. Balfour (qui n'étaitpas encore lord
Balfour) pour la Grande-Bretagne, lesquels ont tous deux soulignéles
difficultés,économiques et autres, qui surgiraient si les mandataires
n'étaientpas complètement assurés de leurpossession 55.L'idée n'adonc
pas étéretenue et le texte définitif desmandats et de l'article22 du Pacte
n'en portait plus aucune trace. Il est donc, en droit, tout à fait impos-
sible de conclure à la persistance d'une sorte d'intention inexpriméede

prévoir un droit de révocation, car on aboutirait ainsi à la conclusion
curieuse, juridiquement parlant, qu'il n'importe aucunement qu'une
chose soit dite ou ne soit pas dite. Or l'exemple classique d'une pré-

55 AUXréunions du Conseil des Dix tenues le 28 janvier 1919 et à des dates
ultérieures. Voirreign Relations of the UnitedStates: TheParis Peace Conference,
vol. III, p. 747-768. C'est M. Balfour qui a souligné (p. 763-764) que si la situation
de laSdN avait fait l'objet d'un examen approfondi, il n'en étaitpas de mêmepour
celle des mandataires et que le système ne pouvait fonctionner que si la possession
de ces derniers était assurée.imon a insisté(p. 761) sur le fait que les manda-
taires ne seraient guère encouragésévelopper les territoires sous mandat si leur
avenir étaitincertain.somption irréfragable en faveur d'une intention donnée est précisément
le cas où une solution contraire a été proposée maisnon retenue. Les

mobiles en jeu sont sans pertinence juridique, mais en l'espèce ilsétaient
évidents 56.

Principed'interprétationapplicable

Quand une proposition déterminée a été examinée puis
rejetée,pour quelque raison que ce soit, il n'est pas possible
d'interpréter l'instrument ou la situation juridique à laquelle
cette proposition se rapportait comme si cette dernière avait

effectivement étéadoptée.

82. L'épisode évoquéau paragraphe précédent illustreet confirme
directement l'opinion exprimée aux paragraphes 70 à 72 ci-dessus.
Quand des hommes d'Etat tels que le président Wilson ont envisagéde
rendre les mandats révocables(ce qui n'était possible que dans la pers-

pective de violations éventuelles) ilsne se sont pas contentés de s'appuyer
sur un principe inhérent de révocabilité maisont fait une proposition
précise qui, eût-elle étéadoptée, aurait figurédans l'instrument ou les
instruments applicables, dont elle aurait formé l'un des articles. En
raison des objections formulées, l'idée n'acependant pas été retenueet
consacréepar les textes. Considérer que la situation se présenteexacte-

ment comme si elle l'avait été estdonc inadmissible et contraire à la
stabilitéet à l'objectivitéde l'ordre juridique international. Là encore,
on cherche à gagner sur les deux tableaux.

v)La clausede la
((partieintégrante 1)

83. L'article 22 du Pacte de la Société desNations faisait une dis-
tinction très nette entre les mandats C d'une part et les mandats A et B

d'autre part (en effet, le paragraphe 6 de cet article déclare que les ter-
ritoires sous mandat C «ne sauraient êtremieux administrésque sous les
lois du Mandataire, comme une partie intégrante de son territoire »),
et c'estpourquoi le texte des mandats C contient une disposition dans ce

56 Il serait difficile de montrer plus d'aplomb qu'on ne l'a fait dans la présente
procédure quand on a prétendu trouver dans les propos de. Simon, qui avait dit
que chaque mandat serait révocable et que sa continuité ne pourrait être garantie
que M. Simon combattait), la preuve qu'on avait d'abord voulu que les mandatsent Wilson
puissent prendre fin, mais qu'on n'avait pas donné suitette intention pour faire
montre de tact à l'égard desmandataires. Il est en effet parfaitement clair, d'après
les textes dont on dispose, que. Simon (et M. Balfour) s'élevaientcontre l'idée
que les mandats puissent êtrerévocables,non parce qu'ils voyaientun manque de
tact mais pour des raisons, économiques notamment, d'un caractère des plus con-
crets- à savoir que la France et la Grande-Bretagne tout autant que les mandataires
de la catégorie, n'étaientpas disposéesàaccepter des mandats dans ces conditions.sens (reproduite dans la note 57).Cette distinction n'a cependant pas été
maintenue de façon absolue, une clause analogue ayant étéen fin de
compte inséréedans les mandats B également - quoique cela ne soit
pas prévudans le Pacte. Mais cela n'infirme pas l'argument car, comme
nous l'avons vu sous la rubrique précédente(par. 81), la notion de révo-

cabilité avait étérejetée aussi bienpar les mandataires B que par les
mandataires C. Ce qu'il faut retenir, c'est que, dans son libellé,la clause
de la ((partie intégrante » se rapprochait beaucoup de la notion d'in-
corporation au territoire du mandataire - pour un peu, elle se serait
confondue avec elle. Evidemment, elle n'allait pas tout à fait jusque-là,
puisque précisémentl'un des objectifs du système des mandats était

d'éviter l'annexionou la cession de souveraineté sur le territoire sous
mandat. Elle créait cependant une situation totalement incompatible
avec la notion de révocabilité unilatérale, laquelleimpliquait qu'à une
date future on puisse revenir sur l'intégration administrativeet juridique
et éliminerla législationdu mandataire applicable dans le territoire en

confiant celui-ci àun autre mandataire qui l'administrerait comme partie
intégrantede sonterritoire et l'assujettiraià d'autre lois; et, bien entendu,
ce processus pouvait en théoriese répéterindéfiniment, le principede la
révocabilitédu mandat une fois admis.
84. Par conséquent, si aucune disposition des mandats n'excluait
positivement la révocabilité,la clause de la ((partie intégrante )figurant

dans les mandats B et C avait un résultat très voisin dans la pratique.
Il est symptomatique qu'aucune clause de ce genre ne figurait dans les
mandats de la catégorie A, considérés dès l'origine (Pacte a,rt. 22, par. 4)
comme applicables à des territoires dont 1'(e(xistence comme nations in-
dépendantes peutêtrereconnue provisoirement ».Assurémentla présence
de la clause de la ((partie intégrante »pour les mandats B et C n'excluait

en rien, pour les territoires en cause, la possibilité d'accéder pour finir à
l'autodétermination ou àl'indépendance commeil advint d'ailleurs pour
la plupart d'entre euxquelque quarante ans plus tard, avec le consente-
ment du mandataireintéressé; mais cela est une autre question. Ce que la
clause interdisait, c'était un changement intérimaire de régimeeffectué
sans le consentement du mandataire.

57 Dans le Mandat pour le Sud-Ouest africain cette disposition est libelleécomme
suit:

«Le Mandataire aura pleins pouvoirs d'administration et de législationsur le
législation du Mandataire comme partie intégrante de son territoire. Le Man-
dataire est en conséquenceautoriséappliquer aux régions soumisesau mandat
la législation de'Union de l'Afrique du Sud, sous réserve des modifications
nécessitéespar les conditions locales.

L'expression «faisant i'objet du Manda» qualifie et définit lemot «territ».re c) Contre-indications positives2) résultantdes circonstances
qui régnaient aumoment où le systèmedes mandats

a étéétabli
85. Comme on le sait, le système desmandats a représentéun com-

promis entre, d'une part, le désirdu président Wilson de placer sous
l'administration directe de la Société desNations tous les territoires
ex-ennemis situéshors d'~urope ou d'Asie mineure (et mêmequelques
territoires situésen Europe) et, d'autre part, le désirde certaines des
nations alliées (plusparticulièrement en ce qui concerne les futurs man-
dats C) d'obtenir que les territoires qu'elles avaient envahis et occupés

militairement pendant la guerre leur soient cédés Le facteur de la
((contiguïtégéographique au territoire du mandataire », expressément
mentionné à l'article 22, paragraphe 6, du Pacte, étaitbien entendu ap-
plicable spécialement,et mêmeuniquement, au Sud-Ouest africain et
avait sans aucun doute étéintroduit à son sujet. Le compromis dont je
viens de parler ne fut accepté qu'avecdifficultépar certains des manda-

taires intéresséset, pour ce qui est des mandats C, uniquement quand
l'assuranceeut été donnéequelesmandats correspondaient, aunom près, à
un titre de propriété 59.Que cette attitude ait étécontraire à l'éthique
actuelle (ellene l'était certainementpas à cellede l'époque) esjturidique-
ment hors de propos. Elle montre clairement quelles étaientles intentions
des parties et sur quelle base les mandats C ont étéacceptés.Bien sûr,

cela ne veut pas dire que les mandataires obtenaient la souveraineté, mais
celaveut dire que, pour les territoires contigus au leur ou trèsproches de
celui-ci60, ils n'auraient jamais acceptéun systèmedans lequel, selon le
bon plaisir du Conseil de la SdN, ils auraient pu êtreévincés par la suite
au profit d'une autre entité,éventuellement hostileou inamicale (ce que
l'on cherche précisément à faire aujourd'hui). Aucun Etat souverain à

l'époque - ou en faità toute autre époque - n'aurait acceptéd'adrninis-
trer un territoire dans ces conditions. Pour les mandataires, le droit de
veto au Conseil était une condition essentielle de l'acceptation du com-
promis et il ne fait aucun doute que, dans leur esprit, il s'appliquait à
toute question pouvant éventuellement entraîner un changement de
mandataire. C'est là un autre élémentqui réduit à néant l'idéed'un

pouvoir unilatéralde révocation.

58 Cette occupation, étant une occupation dtemps de guerre, n'avait pas le
caractère d'une annexion et son aboutissemefinal devait de toute façon attendre
le règlement de paix venir.
59 Voir la détlaration M. Lloyd George au premier ministre d'Australie et la
question deM. Hughes (Canada) rappeléespar Slonim dans Canadian Yearbook of
Internationdl Law, vol. VI, p. 135, citant S«Australia During the War»dans
The Oficial History of Australia in the War of 1914-18, XI, p. 784.
Sur la question géographique, voir la remarque très nette de M. Lloyd George
au président Wilson au sujet du Sud-Ouest africain, qui estpelb dans Lloyd
George, The Truth About the Peace Treaties, vol. 1, p. 114 et suiv. et p. 190-191. 3. Conclusiongénérale

86. Si l'on considère tous les facteurs examinésdans les paragraphes
précédents, forceest de conclure qu'aucune présomption ou implication
non expriméede révocabilitén'est applicable en l'espèceet qu'en tout

cas les plus fortes contre-indications écarteraient totalement toute pré-
somption ou implication de cet ordre.
87. Vérification de cette conclusion.- Un bon moyen de s'assurer du
bien-fondéde cette conclusion consiste à examiner ce qu'il estadvenu des
anciens territoires sous mandat placéssous la tutelle des Nations Unies.
L'Assemblée avait l'occasion d'introduire un pouvoir spécifique de
révocation unilatéraledans les divers accords de tutelle conclus en ap-

plication de l'article9 de la Charte. Mais cela n'a pas été fait,pour la
raison très simple que pas une des puissances administrantes n'aurait été
plus disposée à consentir à l'inclusion d'un tel pouvoir dans un accord de
tutelle qu'elle n'avaitétédisposée à y consentir en tant que mandataire à
l'époque de laSociété des Nations. La question qui sepose ici est exacte-
ment du mêmeordre (quoique se situant dans un contexte différent;mais
connexe) que celle qui est signaléeaux paragraphes 93 à 95 de l'arrêt
de la Cour rendu en 1366 61,où il est dit (C.I.J. Recueil 1966,p. 49) qu'il

y avait uncritère applicablepour déterminerl'intentionvéritable, à savoir:

((rechercher ce que les Etats qui étaientMembres de la Société des
Nations au moment de l'institution du système des Mandats ont
fait, lorsque, devenus Membres del'organisation des Nations Unies,
ils ont participéàl'établissementdu régimede tutelle destiné àrem-
placer le système desMandats. Or ...ils ont fait exactement la même
chose qu'auparavant.. . 11

C'est bien ce qui s'est passéen ce qui concerne la révocation. Non plus
qu'auparavant, aucune disposition n'a étéprévue à ce sujet. Est-ce vrai-
ment parce qu'on a estimé inutilesde tellesdispositions pour laraison que

tous les mandats et accords de tutelle internationaux étaient intrinsèque-
ment sujets à révocation unilatérale,que l'autorité administrantey con-
sente ou non? Ne serait-il pas plus raisonnable de supposer que celatenait
à ce qu'on n'a rien envisagéde semblable? Si l'on n'a rien envisagéde tel

Selon l'arrêtrendu par la Cour en 1966, les articles des mandats qui prévoient
une procédure obligatoire de règlement judiciaire ne s'appliquent qu'aux différends
concernant les clauses sur les intérêts économiques et autres intérêtisndividuels des
Membres de la Société desNations mais non les clauses relativesa gestion des
mandats eux-mêmes,matière confiée à la SdN agissant pour la collectivité de ses
tutelle portant sur d'anciens territoires sous mandat, la juridiction obligatoire n'est
prévue que dans les accords comportant des clauses du premier type et non dans
ceux qui ne contenaient que des clauses du second type. NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 279
dans le cas des territoires sous tutelle (qui étaient tous d'anciens terri-

toires sous mandat), c'est qu'on n'avait jamais rien envisagé,et encore
moins établi detel, pour les territoires sous mandat eux-mêmesen tant
que mandats. Les anciens mandataires ne faisaient que perpétuer à cet
égard le systèmeantérieur (et l'Assembléey a tacitement consentipar la
voiedesdiversaccordsde tutelle). Bien entendu ce systèmeantérieur s'ap-
pliquait et continue s'appliquer au territoire sous Mandat du Sud-Ouest
africain.

88. Dèslors que la conclusionàlaquelle on aboutit est que lesmandats
de la Société desNations n'auraient pu être unilatéralementrévoqués
par le Conseil de la Société ou, ce qui revient au même- que le con-

sentement du mandataire intéresséaurait étrequis pour tout changement
de mandataire ou pour l'extinction du mandat par accession du territoire
à l'autonomie ou à l'indépendance,et puisque l'organisation des Nations
Unies ne saurait en la matière avoir des pouvoirs plus étendus queceux
de laSdN, il s'ensuitque l'Assemblée généranlepouvait avoircompétence
pour révoquerle mandat de l'Afrique du Sud, mêmesi elle a étésubro-
géeau Conseil de la Société desNations dans son rôle de surveillance,
car ce rôle ne comprenait aucun pouvoir de révocation unilatérale.

89. D'autres arguments tirés dela Charte des Nations Unies elle-même
expliquent pourquoi les organes des Nations Unies n'étaientpas habilités
à révoquer le Mandat, quand bien mêmeils auraient eu par ailleurs la
compétencevoulue; ce sont ces arguments qui seront examinésdans la
section suivante (section).

LIMITES DE LA COMPÉTENCE ET DES POUVOIRS
QUE LES ORGANES DES NATIONS UNIES

TIENNENT DE LA CHARTE

90. Dans les deux grandes sections qui précèdentje fais valoir,rimo
(section A) que les Nations Unies, en tant qu'organisation, n'ont jamais
éténi chargéesd'une fonction de surveillance pour les mandats qui n'ont
pas été convertis volontairement en accords de tutelle ni subrogées à
l'ancienne Société desNations dans sa compétenceen matière de man-
dats; etsecundo(section B) que puisque en tout cas cette compétence ne

comprenait ni le pouvoir de révoquer unilatéralement un mandat ni
celui d'y mettre fin sans le consentement du mandataire intéressé, les
Nations Unies, mêmesi elles avaient été,en principe, subrogéesau rôlede la SdN à l'égard desmandats, ne seraient pas non plus compétentes

pour exercer un tel pouvoir. Mais, outre les limitations découlant ainsi
des règles généraled se droit, d'une part, et des dispositions des instru-
ments régissantla matière, d'autre part, il se pose aussi la question des
limitations imposées à la compétenceet à l'autoritédes organes des Na-
tions Unies par laconstitution de cette organisation telle qu'elle estétablie
par la Charte. Comme ces organes (en l'espècel'Assemblée générale et

le Conseil de sécurité)sont des créations dela Charte, ils sont nécessaire-
ment soumis à ces limitations et, jusqu'à preuve du contr,aire,ne peuvent
agir valablement que sur cette base.

I. Compétence etpouijoirsde I'Assembl&egénérale
en vertu de laCharte

91. Pour ce qui concerne l'Assembléeune importante question préli-
minaire se pose, celle de savoir si l'Assembléeétait compétente pour
s'ériger entribunal (ce qu'elle a fait) et pour se prononcer comme juge

en sa propre cause sur des accusations qu'elle avait elle-mêmeportées.
A mon avis elle ne l'étaitpas; et cela suffit, en soi, pour rendre la réso-
lution 2145, par laquelle l'Assembléea prétendu révoquer le ma'ndat
sur le Sud-Ouest africain, nulle et sans effet. Toutefois, .pour ne pas
rompre le fildu raisonnement, je traite de cette question dans la première
section de l'annexe à !a présenteopinion.

i) L'Assemblée n'a pas de compétencegénérale

pour prendre des mesures de caractère
exécutif
92. Si dans l'ancienne Société deN sations, les deux organes principaux
agissaient, sauf dans certains cas expressémentprévus, à l'unanimité,la

structure de base qui a étéadoptée lors de l'élaboration de la Chêïte
des Nations Unies repose sur un équilibre minutieux entre i?n organe
à composition restreinte - le Conseil de sécurité, agissantdans un
domaine relativement limitémais capable dans ce domaine de prendre
à certaines fins des décisionsobligatoires - et un organe plus nombreux,
l'Assemblée générale d,ont la compétence est plus vaste mais qui, en

général, n'a que des pouvoirs de discussion et de recommandation; cette
distinction est fondamentale. J'aborderai ultérieurement la question des
pouvoirs du Conseil de sécurité.Quant à l'Assemblée,la note ci-des-
--
62 La liste qui suit montre ceci: ou bien l'Assemblée généraledoit se bornerà
formuler des recommandations ou bien, là où elle peut faire plus, c'est en vertu d'un
pouvoir spécifiquequi lui est reconnu en termes exprès par une des dispositions de la
permettant de faire autre chose que des recommandations:insèque ou résiduel lui

a) Les pouvoirs qu'a l'Assembléegénéralede formuler des recommandations sont
exprimés comme suit:
[L'Assembléegénérale]
Article IO:epeut discuter..et ..formuler ..des recommandations »;
Article II. paragraphe : rpeut étudier...et...faire..des recommandations 11;sous donne une idée généraldee sespouvoirs. La liste qui yfigure(compte
tenu de la conception généralequi a inspiré la Charte) fait apparaître
une présomption irréfragableselon laquelle, sauf dans quelques cas (voir
alinéa d) de la liste) où des pouvoirs d'action ou d'exécutionIui sont

spécifiquement conférés, l'Assemblée ne possède d'aplr aèsharte aucun
pouvoir de cet ordre. En conséquence, quoi que l'Assembléepuisse
faire d'autre en dehors de ces pouvoirs spécifiques,et quels que soient

les termes de la résolution pertinente, la décision qu'elleprend ne peut
avoir que la valeur d'une recommandation. 11est à peine nécessaire
d'attirer l'attention sur le caractèrefallacieux de l'argument selon lequel
l'Assembléeaurait un pouvoir résiduellui permettant de prendre des

mesures d'exécutiondans toutes sortes de domaines parce qu'un pouvoir
spécifiquedans ce sens lui est reconnu par certains articles particuliers
(art. 4, 5, 6 et 17). C'estla déductioncontraire qui est exacte: lorsqu'un
pouvoir de ce genre n'estpas spécifiquementprévu,il n'existepas.

93. Il suit inéluctablementde ce qui précèdeque l'Assemblée générale
ne possède d'autres pouvoirs implicites que ceux qui sont mentionnés à
l'alinéae) de la note 62. Tous les pouvoirs de l'Assemblée, qu'ilssoient
exécutifsou qu'ils aient le caractère de recommandations, sont expres-

sément définid sans la Charte, et il n'y a pas de pouvoir résiduel. Evidem-
ment, il faut présumerque tout organisme a les pouvoirs qui lui sont
nécessairespour remplir les fonctions spécifiquesdont il est chargé.
C'est à cela que la Cour a songélorsque, dans l'affaire de la Réparation

des dommages subis au service desNations Unies (comte Bernadotte),
elle a affirméque l'organisation des Nations Unies

Article II, paragraphe 2: (peut discuter ...et ..faire ..des recommandations a;
Article II, paragraphe 3: «peut attirer I'attention...suri);
Article 12, paragraphe 1: «ne doit faire aucune recommandation ...à moins
[qu'on] ne le lui demande n;
Article 13: *provoque des études et fait des recommandations 1);
Article 14:fipeut recommander les mesures »;
Article 15: «reçoit et étudie [les rapport.].));
Article Id: ((remplit..les fonctions qui lui sont dévolues[en vertu des chapitres
XII et XIII de la Charte] »;
Article 105,paragraphe 3: «peut faire des recommandations ».

6) Ltien de la paix sont définis,au paragraphe 3, comme étant «soumis aux dispo--
sitions des articles1et 12 1(pour ces articles, voir plus haut).

c) Dans les chapitres XII etXIII de la Charte (tutelle), les seules dispositions qui
intéressentl'Assembléesont les suivantes:
L'article 85 qui dispose (sans préciser la nature des fonctions en question) que,
pour les zones non stratégiques, les fonctions de l'organisation des Nations
Unies 11en ce qui concerne les accords de tutelle » (les italiques sont de nous)

(y compris l'approbation des termes » de ces accords «sont exercéspar 1'Assem-
L'article 87, en vertu duquel l'Assembléepeut «examiner les rapports » («sou-

mis par l'autorité chargée de l'administration»); «recevoir des pétitions et les
examiner ))(ten consultation avec ladite autorité»); «faire procéder à des visites
269 ((doit êtreconsidérée commepossédant ces pouvoirs qui, s'ils ne

sont pas expressémenténoncésdans la Charte, sont, par une con-
séquence nécessairec ,onférés à l'Organisation en tant qu'essentiels
à l'exercicedes fonctions de celle-ci » (C.I.J. Recueil 1949, p. 182).

Cette proposition est acceptable si on la rattache et si on la limite à des
fonctions existantes et définies;mais ce serait tout autre chose de cher-

cher à en déduire,par implication, une extension de fonctions, comme ce
serait le cas si 1'011 estimait que l'Assembléea des pouvoirs non spécifiés
(à part ceux que prévoient les articles 4, 5, 6 et 17) lui permettant non
seulement de discuter et de recommander, mais de prendre des mesures

d'exécutionet des mesures ayant force obligatoire.
94. De même,alors que !a pratique d'une organisation ou d'un de
ses organes peut modifier la façon dont s'exerce l'une de ses fonctions

(comme c'est le cas notamment au Conseil de sécuritépour le veto,
qu'une sirnple abstention n'est pas censéefaire jouer) cette pratique ne
peut pas, en principe, modifier ou élargirla fonction elle-même.Sans

nier absolument qu'une ligne de conduite suivie de manière suffisam-
ment régulièreet prolongéepuisse donner naissance à un nouvel accord
tacite entraînant une modification, c'est la présomption contraire qui

joue, surtout dans le cas d'une organisation dont l'acte constitutif
prévoit son propre amendement et en spécifie lesmodalités. Il y a ici
une analogie étroiteavec le principe énoncépar la Cour en l'affaire du
Plateau continental de lamer du Nord (C.I.J. Recueil 1969, p. 25) selon

lequel, lorsqu'une convention prévoit expressémentla méthode à suivre

périodiques »dans les territoires sous tutel(1à des dates convenues avec [ladite
autorité]ilet (prendre ces dispositions et toutes autres conformémenîaux termes
des accords de tutell» (les italiques sont de nous).
Aucune de ces dispositions n'attribue à l'Assemblée des pouvoirs contrai-
gnants ou d'ordre exécutif,l'exception de ceux qui peuvent luiêtrespécifiquement

reconnus par les termes exprès des accords de tutelle. En fait, aucun de ces
accords ne lui confère de tels pouvoirs. (Voir note64 ci-après.)
d) En fin de compte, les seulesdispositions de la Charte qui confèrent àl'Assemblée
générale despouvoirs exécutifs ou quasi exécutifs sont les suivantes:
Les articles 4, 5 et 6, qui autorisent l'Assembléeà admettre un nouveauMembre,
à suspendre ou à exclure un Membre de l'organisation, dans chaque cas unique-
ment sur recommandation du Conseil de sécurité; et l'article 17, dont le para-
graphe 1 dispose que l'Assembléegénérale (examine et approuve >le budget de
l'Organisation, avec le corollaire (par. 2) que les dépensesde l'organisation sont
supportées par les Membres selon larépartition fixéepar l'.Assembléegénérale11.
Aux termes du paragraphe 3, l'Assemblée s examine et approuve 1)les arrange-
ments financiers passés avec les institutions spécialisées, mai((examine 1)leurs

budgets seulement (en vue de leur adresser des recommandations 1).
e) L'Assemblée possède évidemment les pouvoirs exécutifs d'ordre purement
interne et procédural sans lesquels un tel organisme ne pourrait pas fonctionner,
c'est-à-dire qu'elle peut élireson propre bureau, fixer les heures et dates de ses-
séances, établir son ordre du jour, constituer des commissions permanentes et
ad hoc, arrêter le statut du personnel, décider de convoquer des conférences
diplomatiques sous les auspices des Nations Unies, etc.

270pour accomplir un certain processus (en l'espèce lamanière de se lier

par la convention), il ne faut pas ((présumer à la légère1) que, cette
méthode prescrite n'ayant pas étéadoptée, le mêmerésultat ((n'en est
pas moins [acquis] d'une autre façon ».Si la Cour s'était inspirée dece
principe en la présente espèce63,elle aurait abouti à un résultat tout
différent,comme le montrent les sections A et B ci-dessus.

95. Pour transposer cela dans le domaine particulier des mandats,

il est clair que, de mêmeque l'Assembléen'a la faculténi d'accorder
l'indépendance souveraine à un territoire non autonome en vertu des
articles 73 et 74 de la Charte, ni de mettre finà un accord de tutelle sans
le consentement de l'autorité chargée de l'administration (voir les dis-
positions pertinentes des divers accords de tutelle conclus en application
de l'article79 de la Charte64),de même,étantdonnéle texte de la Charte,

l'Assembléen'a pas le droit de démettreun mandataire. Toute résolution
de l'Assembléeayant cet objet ne pourrait donc avoir que la valeur et
l'effetd'une recommandation non obligatoire. Le pouvoir de suspendre
ou d'exclure un Etat Membre (sur recommandation du Conseil de
sécurité)que les articles 5 et 6 de la Charte confèrent à l'Assemblée
permettrait évidemment à celui-ci de suspendre un mandataire ou de

l'exclurede l'Organisationmais ce droit ne peut pas êtreétendu envertu
d'une sorte de raisonnement par analogie à l'acte tout différent qui
consiste à révoquerle mandat du mandataire.

96. De tout cela on ne peut tirer qu'une seule conclusion, à savoir

qu'aux termes de la Charte elle-mêmel'Assembléegénérale n'apas com-
pétencepour mettre Jin Li une administration quelconques'exerçant sur
quelque territoire quece soit.

97. On pourrait toutefois soutenir que cela n'épuisepas la question, vu
qu'il serait possible qu'un organisme international tienne des pouvoirs
autres ou plus larges que les pouvoirs normaux d'une autre source ou de
l'extérieurpour une fin particulière - par exemple, aux termes d'un

63 Ce qui illustre fort bien (on pourrait citer beaucoup d'autres exemples) le
fait qu'en raison des constants changementsde composition dus au système de
renouvellement triennal prévuau Statut, la Cour ne se tient pas toujoursropre
jurisprudence.
6+ Les divers accords de tutelle traitent diversement de la question de la cessation
ou de la cessation éventuelle de la tutelle; il en résulteque l'Assembléene possèdeen
aucun cas de pouvoir unilatéral en cette matière. Par conséquent, si un accord de
tutelle ne peut pas prendrefin sans le consentement de l'autorité administrante,
mandat ne puisse pas prendre fin sans le consentement du mandataire?ble qu'un NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN (O) P.DISS.FITZMAURICE) 284

traité.S'ilen étaitainsi, pourquoi n'exercerait-ilpas cespouvoirs? Il nous
faut donc examiner maintenant cet argument.

ii) L'Assembléenepeut exercer lespouvoirs qui lui
sont conféréosu qu'elletient d'une autre
source ou del'extérieurque si elle reste
dans les limitese son rôle constitutionnel

tel qu'il résulte destructure de la Charte
98. Ii s'agitici de savoir s'ilestjuridiquement possiàlun organisme
comme l'Assembléegénérale, exerçanp trétendumentce que l'on pourrait
appeler pour la commoditédes pouvoirs ((externes », d'agir d'une façon
que sa constitution lui interdirait dans l'exerciceerne de ses fonctions
normales. Pour poser la question sous sa forme la plus concrète, ima-
ginons qu'un groupe d'Etats Membres des Nations Unies - appartenant

par exemple à une régionparticulière - concluent un traité en vertu
duquel ils conféreraientà l'Assemblée,par rapport à eux-mêmes etpour
leur région, exactementles mêmespouvoirs de maintien de la paix que
ceux que le Conseil de sécuritétient de la Charte à l'égard desEtats
Membres des Nations Unies dans leur ensemble. Pourrait-on alors
valablement soutenir que, sans doute, l'Assemblée outrepasserait
sûrement ces pouvoirs si elle procédaitainsi sur la base dea Charte, les
mesures étantprises en application de la Charte, mais qu'elle pourrait
néanmoinslefaire dans cecasparticulier car elleaurait reçu de l'extérieur
le pouvoir nécessaireà l'égard desEtats Membres dugroupe régionalen
question, en raison du traitéconclu par eux qui aurait confécepouvoir

à l'Assemblée?De fait c'estplus ou moins sur une théoriede ce genre que
ceux qui (disons-leà leur crédit)éprouvent quelquedifficultéà attribuer
à l'Assembléed'autres pouvoirs exécutifsque ceux des articles 4, 5, 6 et
17 de la Charte s'appuient pour soutenir que si, en vertu de la Charte,
l'Assemblée nepeut que discuter et recommander en ce qui concerne les
mandats, elle pourrait pourtant aller au-delà si elle tenait de la Société
des Nations les pouvoirs nécessaires.
99. Il faut se rendre compte que la question posée au paragraphe
précédent n'estpas purement académique. Elle estliéede près à des
situations qui se sont effectivementproduites dans l'histoire desNations

Unies. A certains moments la majoritédes Etats Membres a étémécon-
tente du fonctionnement du Conseil de sécurité,dont l'action était
paralyséepar l'attitude d'un ou de plusieurs membres permanents. Dans
ces circonstances, on a fait appelà l'Assemblée,laquelle a adopté des
résolutionscontenant des recommandations qui n'étaient pas à vrai dire
obligatoires, mais qui pouvaient êtreet ont été considéréesr la plupart
des Etats intéressés commeautorisant l'adoption de mesures qu'ils nese
seraient pas sentis justifiésprendre autrement. Si de telles situations
venaient àsereproduire et àseprolonger indéfiniment,il'n'yaurait qu'un
pas à franchir pour tenter de conférerà l'Assembléeun certain pouvoir
exécutif soitpar le procédé susmentionné soiptar un biais analogue. NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 285

100. Il se trouve que le principe de la question en cause est venu en
discussion à propos de l'affaire de la Procédure de vote applicable aux
questions touchantles rapports et pétitions relat(fs au territoire du Sud-
Ouest africain et qu'il a étérésolupar la Cour et par trois juges à titre
individuel, dans un sens contraire à la thèse considéréeici. C'est sir
Hersch Lauterpacht qui a donné la réponse négativela plus nette et,
bien qu'il sesoit exprimé à propos de la règlede vote, le principe était
exactement le même(C.Z.J. Recueil 1955, p. 109):

(1l'Assemblée ...ne pourrait s'engagerdans cette voie. Elle ne saurait
tourner une disposition apparemment impérative de la Charte en
acceptant la mission quelui confie un traité.S'ilen était autrement,

il serait possible de modifier, au moyen de traités extrinsèques, le
caractère de I'Orgaizisationdans un secteur importantdesonactivité. ))
(Les italiques sont de nous.)
Le passage en italiques s'applique toutà faità la situation qui se présen-

terait sil'onconsidéraitquel'Assembléepeut tenir d'unesourceextérieure
des fonctions de caractère exécutifdépassantles nécessités du rôle fon-
damental que lui réservela Charte et-qui consisteà étudier,discuter et
recommander. Mêmesi l'Assemblée ne s'écarte pas des dispositions de
la Charte quand elle s'occupe d'une façon ou d'une autre de territoires
sous mandat qui n'ont pas étéplacés sous tutelle,par exemple de ter-
ritoires qui peuvent êtreconsidérés en toutcas comme des teriitoires non
autonomes aux termes de l'article 73, elle ne peut toutefois que discuter
et recommander à leur égardet non pas édicter des mesures d'exécution.
101. En l'affaire de la Procédure devote, la Cour elle-mêmea partagé

la manière de penser de sir Hersch Lauterpacht. Vu l'opinion qu'elle
avait expriméedans son avis précédent(1950) selon laquelle le degréde
surveillance exercépar l'Assemblée ne devraitpas dépasser celui qu'exer-
çait le Conseil de la Sociétdes Nations et devrait êtreautant que possible
conforme à la procédure suivie par ce dernier (voir par. 65 ci-dessus),
ilest apparu que sil'Assembléeappliquait sa règlede vote normale - ma-
jorité simple ou majorité des deux tiers - dans l'exercicede sa surveil-
lance du mandat, elle ne se conformerait pas à la procédure du Conseil
de la SdN, qui étaitfondéesur la règlede l'unanimité, y compris le vote

du mandataire lui-même. De plus,il est évidentque cette dernière règle
(pIusfavorable au naandataire puisqu'ellerend plus difficilesdes décisions
qui iraientà l'encontre de sa façon de voir) impliquait en conséquence un
moindre degréde surveillance que ne le permettait la règle de vote de
l'Assemblée. Celaétant, la question s'est poséede savoir si, pour ne pas
outrepasser les pouvoirs qu'elle aurait acquis en vertu de l'instrument du
mandat et pour respecter la façon dont ces pouvoirs avaient étéexercés
par le Conseil de la SdN, l'Assembléepouvait suivre une règlede vote
différentede celle qui est prévuepar la Charte - en d'autres termes, sil'Assembléepouvait s'écarterde la Charte à cet égard 'j5La Cour a
donné à cette question une réponse fermement négatived ,ans les termes

suivants (C.I.J. Recueil1955, p. 75):
«La constitution d'un organe prévoitgénéralement le systèmd ee
vote par lequel cet organe arrive à ses décisions. Le système de vote

estlié à la composition et aux fonctions de cet organe. Il est l'une
des caractéristiquesdela constitution de l'organe. Prendre des déci-
sions à la majorité desdeux tiers ou à la majoritésimpleestl'un des
traits distinctifs de l'Assemblée générale t,ndis que la règle de
l'unanimité était l'un des traits distinctifs du Conseil de !a Société
des Nations. Ces deux systèmescaractérisentdes organes différents
et, sans un amendement constitutionnel, l'on ne peut substituer un

système à l'autre. Transposer à l'Assemblée généralle a règle de
l'unanimitédu Conseil de la Société desNations ...serait mécon-
naître une des caractéristiquesde l'Assembléegénérale .)

Cette opinion a étéendosséeindépendamment par MM. Basdevant,
Klaestad et Lauterpacht. M. Basdevant a déclaré(p. 82):

«La règlede la majoritédans l'article 18de la Charte et celle de
l'unanimitédans lePacte de la SociétédeN s ations sontautres choses
que des règlesde procédure;elles déterminent un caractèreessentiel
de l'organe considéré et de l'institution internationaleà laquelle il
se rattache.» (En ce qui concerne les vues de M. Klaestad, voir
par. 104 ci-aprèset alinéaa) de la note 66.)

102. Les critères ainsi énoncés Dar la Cour et tsar M. Basdevant
étaient, notons-le, formulésprécisémentdans le cadre du système des
mandats. 11est donc légitimede les appliquer au cas présent;et si on le
fait conformément auxdeux dernièresphrases du passage de l'avisde la

Courde 1955citéplus haut, il en résulteque «sans un amendement cons-
titutionnel, l'on ne peut substituer [à] un système » qui permet seule-
ment à l'Assembléede discuter et de recommander un ((autre)) sys-
tème qui lui permettrait en outre de prendre des mesures exécutiveset
oblïgatoires, et que considérerque l'Assembléeest dotée d'untel pouvoir
((seraitméconnaîtreune [de ses]caractéristiques » dans le systèmede la
Charte;

* * *
--
65 Laforme sous laquelle la question s'est poséeen l'affaProcédurede vote
était un peu différente, car il s'agissait de savoir non pas si l'Assembléepeut agir
d'une façon qui n'est pas prévue par la Charteis si ellpourraitagir ainsi au
cas où il en résulterait un régimede surveillance plus strict que celui dela Société des
Nations. Pourtant le point essentiel était le même: dans l'exercice de fonctions
qu'elle tient de l'extérieur,embléepeut-elle agir selon uautrerègle de vote
que celle que prévoitla Charteeut-elle, de toute manière, en respectant la Charte,
appliquer la règlede l'unanimitéqui étaitcelle de la Société desNations? NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 287
103. Il faut conclure que, mêmesi les pouvoirs de surveillance du
Conseil de la SdN étaient dévolusen principe à l'Assemblée,et com-

prenaient le droit de révoquer un mandat existant, ce droit ne pourrait
pas être exercéconstitutionnellement par l'Assemblée,car cela serait in-
compatible avec la conception fondamentale du rôle qui lui est réservé
dans le cadre général des Nations Unies.

iii) Facteurs confirmant
les conclusions précédentes

104. Dilemme de MM. Klaestad et Lauterpacht en 1'aflaii.ede la Pro-
cédure devote. - Ainsi que nous l'avons déjà mentionné,le problème
qui se posait dans l'affaire de laProcédure de vote tenaità ceci: comme il

est plus facile d'arriverà des décisions selon la règlede vote de 1'Assem-
bléegénéralequ'en suivant la procédure de la Société desNations où
s'appliquait la r8gle de l'unanimité, y compris le vote du mandataire,
celui-ci serait soumisde la part de l'Assemblée à un ((degréde surveillance
dépassant )Icelui qu'exerçait la SdN. Pourtant, selon la conclusion de la
Cour (voir plus haut par. 101), l'Assemblée nepeut pas déroger à sa
propre règlede vote sans enfreindre la Charte. La Cour a résoluce pro-

blèmeen considérant que si, dans l'exercicede sa fonction de surveillance,
l'Assembléene doit pas s'écarterdu mandat quant au fond, la procédure
par laquelle e!leremplitcettefonction doit êtrecelle que la Charte prévoit,
et en precisarit que le prononcé antérieur de la Cour (1950) selon lequel
le degréde surveillance ne doit pas êtreplus considérable qu'à l'époque
de la SdN concernait uniquement les questions de fond et non la pro-
cédure. Etant donné cependant que la règle de vote de l'Assembléeen-

traîne en principe un degréde surveillance supérieur à celui qu'exerçait
la Sociétédes Nations, puisqu'elle permettrait d'arriver à des décisions
sans l'accord du mandataire, cette conclusion de la Cour en l'affaire de
la Procédure de vote contient un net élémentde contradiction. C'est
pourquoi cette solution n'a pas satisfait MM. Klaestad et Lauterpacht
qui ont abouti à une conclusion différente et plus logique, évitant les
contradictions et qui vient confirmer de façon frappante l'opinion expri-
méeplus haut au sujet des limites que la Charte impose aux pouvoirs de

l'Assemblée.Ils ont fait observe1 que les décisions prisespar cet organe
en matière de surveillance du Mandat, n'ayant pas un caractèreinterne ou
procédural (voir la note 62ci-dessus,point e)), pouvaient seulement avoir
la valeur de recommandationset ne pouvaient donc en aucun cas avoir
force obligatoire à l'égarddu mandataire, sauf (c'est la condition mini-
mum) si celui-ci avait voté pour ces décisions 66.En conséquence la

66 a) Faisant une distinction entre les décisions de l'Assemblée de caractère
(interne1)et les autres, M. Kleastad (C.I.J. Recuei1l955, p. 88), a déclare qu'à
son aviscles recommandations ..touchant les rapports et les pétitions rela...s au
Sud-Ouest africain appartiennenà cette dernière catégor1)Il a ajouté:

275règlede la majoritédes deux tiers qui est celle de l'Assemblée,quoique

théoriquement plusrigoureuse pour le mandataire que celle de la Société
des Nations qui exigeait l'unanimité, y compris la voix du mandataire,
ne serait pas plus lourde en pratique, car le mandataire ne pourrait être

lié ni dans l'un ni dans l'autre cas sans son propre consentement. De
ia sorte, l'équilibreserait maintenu ou rétablientre le degr6 de surveil-
lance exercépar le Conseil de la SdN et celui qu'exercerait l'Assemblée
générale.

«Elles ne sont pas juridiquement obligatoires pour l'Union ...en tant que

Puissance mandataire. Le Gouvernement de1"Unionne peut êtrejuridiquement
tenu de se conformer à une recommandation que s'il l'a acceptéepar un vote
positif. A cet égard la situationjuridique est la mêmeque lorsque la surveiliance
étaitexercéepar la Sociétédes Nations. Seul un votepositifpeut donner naissance
à une obligation juridique liant l'Union sud-africaine» (Les italiques sont de
nous.)
b) M. Lauterpacht, pour illustrer sa manière de voir, s'est référé à la situation
existant en matière de tutelle, qu'il considère comme pertinente par rapport î celle
des mandats. Le passage en question mérite d'êtrecitéen entier et s'applique évi-
demment à fortiori au cas des mandats (loc. cit., p. 116):

1Telle est également,en principe, la position concernant les recommandations
de l'Assembléegénérale se ra~~ortant à I'administration des territoires sous
tutelle. Lesaccords de tutelleAne prévoient pas pour I'autorité administrante
l'obligation juridique de se conformer aux décisionsprises par les organes des
Nations Unies en matière de tutelle.Il n'y a doncpas d'obligation juridique de la
part de I'autorité administrante d'adopter ou d'abroger une mesure législativeou
administrative particulière, dans le but de donner effàtune recommandation de
l'Assemblée générale.L'obligation juridique incombant à l'autorité adminis-
trante est d'administrer le territoire sous tutelle conformément aux principes de
la Charte et aux dispositions de l'accord de tutelle, mais pas nécessairement
suivant telle recommandation particulière de l'Assembléegénéraleou du Conseil
de tutelle. 11en est ainsi à la fois en droit positif et en bon gouvernement.
C'est I'autorité administrante et non l'Assemblée généralequi est directement
responsable du bien-êtrede la population du territoire sous tutelle.n'y a pas de

garanties suffisantes d'opportunité et d'applicabilité dans une recommandation
particulière émanant d'un corps politique qui agit p.arfois sous la pression de
son travail, qui est parfois privé d'avis et d'informations spécialisés, etqui ne
peut toutefois prkvoir les conséquences d'une mesure donnée dans le cadre de
l'ensemble de la législation et de I'administration du territoire sous tutelle.
L'Assemblée générale a fait desrecommandations dans le domaine de la tutelle,
à maintes reprises, et comme une chose allant de soi. Prétendrequ'une recom-
mandation particulière est obligatoire, en ce sens qu'iy a obligation légale de
lui donner eff'et,est contraire non seulemenàla règlefondamentale que 1'Assem-
bléegénérale n'apas le pouvoir législatifet ne peut lier ses membres par des re-
commandations, mais encore, pour les raisons déjà indiquées,contraire à des
considérations inportantes de bon gouvernement et de bonne administration. 11
(Les italiques sont de nous.)
[[En fait, les Etats qui administrent les territoires sous tutelle ont souvent
affirmé leur droit de ne pas accepter les recommandations de l'Assemblée
généraleou du Conseil de tutelle approuvées par l'Assembléegénérale.Ce droit
n'a jamais étésérieusement contesté. Il y a de nombreux exemples de refus
catégorique de la part de I'autoritéadministrante de se conformer à une recom-

276 105. Cette conclusion est nécessairement juste, car si les décisionsde
l'Assemblée liaient lemandataire sans son consentement, alors que celles

de la SdN n'avaient pas cet effet, on lui imposerait une surveillance non
seulement plus stricte que celle qu'exerçait la SdN mais encore de nature
totalement dzfférente.En d'autres termes, s'il était hors de question que
le remplacement du Conseil de la SdN par l'Assembléegénéralese tra-
duise par une aggravation des obligations du mandataire, il étaitégale-

ment hors de question qu'il ait eu pour effet d'élargirles pouvoirs de
l'organe de surveillance, et, plus encore, de lui conférerun pouvoir que
l'ancien organe de surveillance n'avait jamais possédéou qu'il n'aurait
jamais pu exercer sauf d'une certaine façon et conformément àun certain
mode de scrutin. II s'ensuit qu'un tel pouvoir ne pouvait pas davantage
êtreexercépar l'Assemblée,notamment parce que celle-ci non plus ne

peut lier le mandataire et ne peut aller au-delà de simples recomman-
dations sans outrepasser les pouvoirs constitutionnels que lui attribue la
Charte. Par suite, mêmesi la résolution2145étaitvalide par ailleurs, elle
ne pourrait avoir d'autre effet ni d'autre portée que celle d'une recom-
mandation tendant à mettre fin à l'administration du mandataire, et n'y

mettrait pas fin effectivement. Je dois souligner en conclusion que cet
aspect extrêmementimportant de la question, résultant de la jurispru-
dence de la Cour elle-même, telle qu'elles'estexpriméeen 1955en l'affaire
de la Procédurede vote, est à présent totalement laissédecôtédans l'avis
de la Cour, qui n'en fait mêmepas mention - sans aucun doute
pour la raison suffisante qu'il n'y a à cela aucune réponse satisfaisante.

106. La réponsedonnéepar la Cour en 1950 à la question c) dans la
procédureconsuItativede l'époque. - La question poséetendait à déter-
miner qui avait compétence pour modifier le statut international du Sud-
Ouest africain, étant admis que l'Afrique du Sud ne pouvait agir uni-
latéralement. La Cour a répondu (C.I.J. Recueil 1950,p. 144)

((que l'Union sud-africaine agissant seule n'estpas compétentepour
modifier le statut international du territoire du Sud-Ouest africain,
et que la compétencepour déterminer et modifier ce statut inter-

mandation. ))[M. Lauterpacht cite ensuite (loc. cit., p. 17),avec références
a l'appui, une longue liste de cas d'espèce.]
c) De même,à propos des mandats, Lauterpacht affirme dans un passage qui
est des plus significatifs eu égard aux circonstances de l'affaire actuellec. cit.,
p. 121):
(Ce défaut d'appareil purement juridique, ainsi que le fait de s'en remettre à
l'autorité morale des conclusions et rapports de la Commission des mandats,
constituaient en fait les caractéristiques essentielles dela surveillance prévue par
le régime des mandats. L'opinion publique - et l'attitude adoptée en consé-
quence par les Puissances mandataires - ont étéinfluencées moins par les
résolutions formelles du Conseil et de'Assemblée[de la SdN] que par les rap-
ports de la Commission des mandats, véritable organe de surveillance ...Et
cependant la non-application ou la méconnaissance des recommandations, des
(Les italiques sont de nous.)mmission n'appelaient aucune sanction juridique)] national appartient à l'Unionsud-africaine agissant avecle consente-
ment des Nations Unies »(Les italiques sont de nous).

II est évident que,mêmesi le Mandat lui-mêmeavait subsistésous une
autre autorité, le changement d'autorité (notamment si l'autorité nou-
velle étaitI'Organisation des Nations Unies en tant que telle) aurait in-
dubitablement impliqué une modification du statut international du
territoire, non seulement du fait qu'une nouvelle administration aurait
remplacél'administration existante, mais encore du fait que la nouvelle
administration n'aurait pu êtreassujettie elle-même à une surveillance
quelconque, si ce n'étaitla sienne propre, et qu'elle aurait dû s'adresser

des rapports à elle-même (etquis custodiet ipsos custodes?) 67.Il résulte
donc de ce que la Cour a dit à propos de la modification du statut du
territoire que la compétencepour procéder à toute substitution de ce
genre(ou àtout autre changementdemandataire) appartiendrait «à l'Union
sud-africaineagissant avec leconsentement desNations Unies »-opinion
qui confèrel'initiativeà l'Afrique du Sud et exclut que l'Organisation des
Nations Unies agissant seule possède un droit propre de mettre fin au

mandat. Mêmesi l'on tient compte du fait que la question, à l''époque,
étaitde savoir si le mandatairepossédaitun pouvoir unilatéral de modi-
fication du statut du territoire, il est impossible de concilier les termes
utilisés avec l'idéeque la Cour aurait pu penser en 1950 que l'Organi-
sation des Nations Unies agissant seule, ou l'un quelconque de ses or-
ganes agissant seul, aurait eu ce pouvoir. Comme mon collègue hl.Gros
le rappelle, les deuxaspects de la question avaient étédébattusaucours de

la procédure.

iil) ConclusionquaMtaux pouvoirs
de l'Assemblée
107. Les considérations qui précèdent amènen t conclure que même
si l'Assembléea succédéau Conseil de la Société desNations dans son
rôle de surveillance, elle nepeut l'exercerque dans les limites de sa com-

pétenceen vertu de la Charte, c'est-à-dire sous f~rme de discussions ou
de recommandations. Cette situation ne laisse pas place à un pouvoir de
révocation du mandat, car elle est totalement incompatible avec ur. tel
pouvoir. Il s'ensuitque la résolution2145de l'Assemblée nepouvait avoir
qu'un effet de recommandation.

67 Même si l'Assembléavait «héritnla fonction de surveillance de la SdN, cette
fonction ne peut manifestement inclure l'administration, car il est de la nature même
de la surveillance qu'elle soit exercéepar un organismedcetl'autorité chargée
de l'administration. La notion de mandats administrés directement par lae-
mêmesans l'intermédiaire d'un mandataire, qui faisait partie des propositions
initiales présentéesersailles par le président Wilson, n'a pas été retenue et n'est
pas un élémentdu système des mandats de laSdN, que, nous dit-on, les Nations
Unies auraient hérité. 2. Compétenceet pouvoirs du Conseil de sécurité
en ce qui concerneles mandats

i) Caractère accessoire
des résoiutionsdu Conseilde sécurité

en la présente espèce
108. 11est proprement vain d'examiner quels seraient (le cas échéant)
les pouvoirs du Conseil de sécuritéau regard des mandats, puisque de
toute évidence le Conseiln'a jamais agi isolémentpour mettre fin au
Mandat de l'Afrique du Sud. Toutes ses résolutionsont étéadoptéespar
voie de conséquence, compte tenu de ce que l'Assembléeavait déjà

prétendu mettre fin au Mandat ou le déclarer((terminé ». Sans l'action
de l'Assemblée,les actes du Conseil de sécurité,qui s'efforçaient dans
une large mesure de mettre en Œuvre lesdéclarations de l'Assemblée,
n'auraient eu aucune raison d'être - et si la résolution2145de 1'Assem-
bléeétaitpar elle-mêmedépourvue devaliditéet d'effetjuridique, aucune
((confirmation » du Conseil de sécurité,si énergiquefût-elle, ne pouvait
ni la valider ni lui conférer cet effet, ni provoquer indépendamment la

révocationd'un mandat.
ii) Pour cequi est des mandats,

les pouvoirsdu Conseilne sont pas plus grands
que ceux de l'Assemblée
109. Les mots «en ce qui concerne les mandats » ont étéinsérésde
propos délibéré dans le titre de cette sous-section 2 parce qu'une nette
distinction s'imposeentre ce que le Conseil de sécurité peut faireà propos
des mandats et ce qu'il pourrait faire au seul autre titre auquel il soit à

mêmed'agir, celui du maintien de la paix. S'agissant desmandats, le
Conseil de sécuritén'a pas de pouvoirs plus larges que l'Assembléecar
(voir l'avisde 1950de la Cour, p. 137 68)ce sont les Nations Unies dans
leur ensemble qui ont - ou n'ont pas - héritéle rôle de la SdN relative-
ment aux mandats avec (s'ily a eu héritage)les pouvoirs qu'il comporte.
Ainsi, pour ce qui concerne un éventuelpouvoir de révocation,le Conseil
de sécurité est exactement dansla mêmesituation que l'Assembléequand
il s'agit par exemple de savoir si les Nations Unies ont une fonction de

surveillance quelconque et si, ayant cette fonction, le pouvoir de révo-
cation en fait partie; sous cette réserve d'ailleursqu'en 1950la Cour a
très expressément désigné l'Assemblée (loc. cit.) comme l'organe ap-
proprié pour exercer la fonction de surveillance dont elle a estiméque
les Nations Unies étaientchargées.11est donc douteux que le Conseil de
sécuritéait relativement aux mandats un rôle spécifiquequelconque,
analogue à celui qu'il possèdedans le cas des territoires stratégiques sous

A propos de la résolutiondu 18 avril 1946 quia dissout la Sociétédes Nations
(voir par. 41 et 42 ci-dessus), la Cour s'est expriméeen ces1Cette résolution
présuppose queles fonctions de surveillance exercéespar la Société des Nations
seraient reprisespar les Nations Un>(Les italiques sont de nous.) tutelle. Dans ces conditions, le Conseil de sécurité neserait compétent
pour entreprendre une actionintéressantun territoire sous mandat qu'aux
seulesfins du maintien de la paix.

iii) En ce qui concerneles mandats,despouvoirs
plus largesnepourraientêtre exercés
qu'en vuedu maintiende la paix

110. Quant à l'autre fondementpossible d'une intervention du Conseil
de sécuritéi,l est clair que cet organe ne peut pas êtreempêché d'exercer
ses fonctions normales en matière de maintien de la paix simplement
parce que la menace contre la paix, à supposer qu'elle existe, seraiten
rapport avec ces mandats - à conditiontoutefois que l'intervention ait

véritablementpour objet le maintien de la paix et ne vise pas à exercer
sur les mandats une surveillance déguisée. Ce que le Conseil de sécurité
n'a pas le droit de faire, souscouleur de maintenir la paix, c'estd'exercer
à propos de mandats des fonctions qui ne sauraient lui appartenir, ni en
tant qu'organe ayant un rôle qui lui est propre ni en tant qu'élément
faisant partie des Nations Unies. Il ne peut pas plus révoquer unmandat
sous prétextede maintien de la paix qu'il nepeut, sous ce couvert, or-
donner des transferts ou des cessionsde territoires.
111. Toutefois, d'après moi, les diverses résolutions pertinentes du
Conseil de sécurité, à en juger d'aprèsleur lettre même,ne prétendaient
pas se rattacher à la fonction de maintien de la paix. On y trouve en fait

un souci d'éviter soigneusement unerédaction quidissiperait par trop
les ambiguïtéssur ce point. Cela étant,ces résolutionsont l'effetindiqué
aux paragraphes 108et 109ci-dessus.Ellesne lient ni lemandataire ni les
autres Etats Membres des Nations Unies. Comme les résolutions de
l'Assemblée, elles nepouvaient avoir, dans le présent contexte,que la
valeur de recommandations.

iv) Etendueréelledespouvoirs du Conseilde sécurité relatifs
au maintiende lapaix en vertu de laCharte

112. Cette question est régie,du moins en ce qui concerne les termes
exprès de la Charte, par les paragraphes 1 et 2 de l'article 24, libellés
comme suit :
(1. Afin d'assurer l'actionrapide et efficacede l'organisation, ses

Membres confèrentau Conseilde sécurité la responsabilitéprincipale
du maintien de la paix et de la sécuritéinternationales et recon-
naissent qu'ens'acquittant desdevoirsque lui impose cette responsa-
bilité,le Conseil de sécurité agitn leur nom.
2. Dans l'accomplissement de ces devoirs, le Conseil de sécurité
agit conformément aux buts et principes des Nations Unies. Les
pouvoirs spécifiquea sccordésau Conseil desécurité pour luipermettre
d'accomplir lesdits devoirssont déjînisaux chapitres VI, VII, VIIIet
XII. .»(Les italiques sont de nous.) NAMIBIE (S.-O. AFRICAIN ()P.DISSF . ITZMAURICE) 293

Je ne puis pas me rallier à l'interprétation extrêmemenltarge que l'avis
de la Cour donne à cette disposition. Sans doute, elle ne limite pas les
casoù le Conseil de sécurité peut agir pour assurer le maintien de la paix
et de la sécurité,étant entendu que la menace invoquée nedoit êtreni

une simple fiction ni un prétexte.Mais cette disposition a pour effet de
circonscrire le genre de mesures que le Conseil peut prendre pour s'ac-
quitter des responsabilités qui lui incombent en vue du maintien de la
paix - en effet, le paragraphe 2 de l'article 24 dit expressémentque les
pouvoirs spécifiquesconférés à cette fin au Conseil de sécuritésont
définisaux chapitres indiqués (VI, VII, VI11et XII). Selon des règles
normales d'interprétation,cela signifie qu'en cequi concerne le maintien
de lapaix ces pouvoirs ne sont spécifién sulle part ailleurs et ne peuvent

s'exercer que conformément aux dispositions de ces chapitres. C'est
donc à celles-ciqu'il faut avoir recours si l'on veut déterminer quelssont
lespouvoirs spécifiquesconférés au Conseil de sécuritépour le maintien de
la paix,et notamment lepouvoir qu'ila de prendreune décision obligatoire.
Si l'on se réfèreàces chapitres, on constate que c'est seulementlorsque le
Conseil agit en application du chapitre VII, et peut-êtredans certains cas
en application du chapitre VIII, que ses résolutionsauront force obliga-
toire pour les Etats membres. Dans les autres cas, ellesn'auraient valeur

que de recommandations ou d'exhortations. (Les mesures visant le main-
tien de la paix prévuesau chapitre XII - concernant les territoires sous
tutelle présentant un caractère stratégique - ne me semblent pas vrai-
ment constituer un cas distinct, car il est difficilede voir pourquoi ces
mesures ne pourraient pas êtreprises aux termes des chapitres VI ou VII,
selon le cas.)
113. Ces limites s'appliquent également à l'effet de l'article 25de la
Charte, en raison dela clause ((conformément àla présenteCharte ». Sila
décision n'a pas un caractère obligatoire en vertu du chapitre ou de l'ar-

ticle pertinent de la Charte, l'article 25ne saurait lui conférercecaractère.
Sicet article avait pour effetautomatique de rendre obligatoires toutesles
décisionsdu Conseil de sécurité, lesmots ((conformément à la présente
Charte sseraient toutà fait superflus. Ilsn'ajouteraient rien au membre de
phrase qui précède - le seul autre que contienne l'articleet qu'ils visaient
manifestement àqualifier- (LesMembresde l'organisation conviennent
d'accepter et d'appliquer les décisionsdu Conseil de sécurité)).Ils ne
servent à quelque chose que si les décisionsdont il s'agit sont celles qui

sont dûment obligatoires (confo~mément àla rése entCe harte ».Sinon les
termes employésudansdes parties de la chart; comme le chapitre VI par
exemple, qui visent des fonctions de recommandation uniquement, con-
trediraient directement l'article 25ou seraient contredites par lui.
114. Puisque, en conséquence, laquestion de savoir si une résolution
donnéedu Conseil de sécurité a un effetobligatoire ou un effetde recom-
mandation doit forcémentêtredécidée, objectivementdans chaque cas
d'espèce,il en découleque le Conseil ne saurait, par le simple fait d'in-

voquerl'article 25 (comme il le fait par exemple dans sa résolution 269 du 12 août 1969)conférerun caractère obligatoire àune résolution qui
en serait dépourvu d'après les termes du chapitre ou de l'article de la
Charte en vertu duquel le Conseil aurait agi ou serait réputéavoir agi.

v) Mêmequand ils'agit vraiment
de maintien de lapaix, le Conseil
de sécuritén'estpas compétent
pour efectuer des changements définitifs
de souveraineté territoriale
ou de droitsd'administration

115. Ce n'estpas tout. Même quand ialgit en vertudu chapitre VI1de la
Charte le Conseil de sécurité n'ale pouvoir ni d'abroger ni de modifier
des droits territoriaux, qu'il s'agissede droits de souverainetéou de droits
d'administration. Mêmeune occupation du temps de guerre d'un pays
ou d'un territoire ne saurait conférer un tel pouvoir. Il faut attendre le
règlementde paix. C'est là un principe de droit international solidement
établis'ilen est - et le Conseil de sécuritéy cst tout aussi soumis (car les
Nations Unies sont elles-mêmes un sujetdu droit international) que
n'importe lequel des Etats Membres. Après avoir fait les constatations

qui s'imposent aux termes de l'article 39 de la Charte, le Conseil de
sécuritépourrait ordonner l'occupation d'un pays ou d'une partie d'un
territoireaux fins de rétablir lapaix et la sécurité mais il ne saurait, ce
faisant, ou dans le cadre de cette opération, abroger ou modifier des
droits territoriaux et le droit d'administrer un territoire sous mandat
est un droit territorial sans lequel le territoire ne pourrait êtregouverné,
ni le mandat appliqué. C'estpour maintenir la paix et nonpour modifier
l'ordre mondial que le Conseil de sécurité a étécréé.

116. Ces limitations aux pouvoirs du Conseil de sécuritésont néces-
saires caril n'est que trop facile de présenter une situation internationale

qui fait l'objet de vives controverses comme impliquant une menace
latente contre la paix et la sécurité, mêmsei elle est trop éloignéepour
paraître authentique. Sans ces limitations, les fonctions du Conseil de
sécuritépourraient être utilisées à des fins qui n'ont jamais été prévues
à l'origine et la présenteaffaire nous en fournit un excellent exemple: en
effet,non seulement le Conseil de sécuritén'a pas agi en vertu du chapitre
VI1 de la Charte (ce qu'il nepouvait manifestement pas faire encore
qu'il resteà voir par quels moyens et sur quels motifs on constatera la
condition nécessairede l'existence de menace contre la paix, de rupture
de la paix ou d'acte d'agression); non seulement il ii'existait aucune
menace contre la paix ou la sécuritéautre que celle qui pouvait êtresus-
citée artificiellementet comme prétexte à atteindre des objectifs inavoués,

mais encore l'opération tout entière, qui ne s'arrêterapas forcénient là,
avait pour objet d'abroger les droits d'administration territoriale du Mandataire aux fins d'assurer (non pas par la suite mais très bientôt) la
transformation du territoire sous mandat en un Etat souverain et indé-
pendant, celui de ((la Namibie 1)C'est ce qui est dit explicitement, non

seulement dans la résolution 2145 elle-même,mais aussi dans la résolu-
tion ultérieure2248 (S-V)adoptée en 1967par l'Assemblée,qui fixait le
mois de juin 1968 comme date du transfert envisagé 69;et c'est là par
excellence le genre d'objectif qui dépasse les compétences du Conseil
de sécurité (et plus forte raison de l'Assemblée)de sorte qu'en cherchant
à le favoriser il excèdeses pouvoirs.

1. Généralités

117. Vu les co~~clusionsqui précèdent,la réponse à la question posée
à la Cour dans la présente procédure sur les conséquencesjuridiques
pour les Etats de la présencecontinue de l'Afrique du Sud dans le terri-
toire sous mandat du Sud-Ouest africain, nonobstant la résolution 276
(1970)du Conseil de sécurité, est qu'iln'y a pas, à proprement parler, de
conséquencesjuridiques précisespour les Etats, la situation juridique

étant inchangée.Ni le Conseil de sécurité ni l'Assemblée généra nlont
compétencepour révoquerle Mandat de l'Afrique du Sud, de sorte que
lesdiversesrésolutionspar lesquellescesorganes ont prétendulerévoquer,
déclarer qu'ilavait pris fin ou confirmer qu'il était terminé, sont sans
exceptionaucune dépourvues d'effetjuridique. 11en résulteque le Mandat
subsiste etque l'Afrique du Sud est toujours Mandataire. Cette dernière
conclusion entraîne cependant certaines conséquencesjuridiques, tant pour
l'Afrique du Sud que pour les autres Etats.

2. Conséquences pour l'Afrique du Sud

118. Pour l'Afrique du Szrd,les conséquencessont qu'elle doit:
1) reconnaître que le Mandat a survécu à la dissolution de la Sociétédes

Nations - qu'il a un caractère international - et que par suite le
Sud-Ouest africain ne peut pas être unilatéralementincorporé dans le
territoire de la République;
2) remplir et exécuterintégralementtoutes les obligations découlant du
Mandat, queiles qu'elles soient.

119. Sur ce dernier point, j'ai déjà exposé lesraisons pour lesquelles
j'estime que, l'organisation des Nations Unies n'étant pas en droit le
successeur de la Société desNations. le Mandataire n'a pas, et n'a jamais

69Voir par. 15 de la section 3 de l'annexe ci-après.

283 eu, le devoir de lui faire rapport ni d'accepter sa surveillance, notamment
cellede l'Assemblée générale. Maic s,omme il a étésignalé précédemment
dans cette opinion (par. 17et 20), cela ne veut pas dire que I'obligation de
faire rapport ait entièrement disparu, et le fait est quel'Afrique du Sud
pourrait s'en acquitter de la façon indiquéeau paragraphe 16. Dans ces
conditions, la question se pose de savoir si le Mandataire est juridique-

ment tenu de prendre des mesures du genrede cellesqui s'ytrouvent men-
tionnées.La question n'est pas sans souleve~quelque doute. En 1950,la
Cour a considéré que I'obligation de fairerapport étaitunélémentessentiel
du Mandat. Au contraire M. Readpensaitqueson absencepourrait risquer
d'«affaiblir»le Mandat, mais que celui-cine s'entrouverait pas autrement
touché. Et encore, si l'on considère le Mandat comme un traité ou un
contrat, la disparition de l'une des parties aurait normalement pour
effet d'entraîner l'extinction totale du traité ou du contrat.
120. Quoi qu'il en soit, l'interprétation la plus fondéeme parait être
que I'obligation de faire rapport subsiste, bien qu'à l'étatlatent depuis
la dissolution de la Société desNations. et sans transformation aucune

en obligation envers l'organisation des Nations Unies. Cependant si elle
neconstitue pas un élémena tbsolument essentiel du Mandat, cette obliga-
tion n'en est pas moins un aspect suffisamment important pour que le
Mandataire soit tenu de !a faire renaître et de s'en acquitter par un autre
moyen 70si cela apparaît possible. En revanche, le Mandataire serait en
droit d'exiger: a) que le nouvel organe de surveillance ait un caractère et
une composition qu'il jugerait acceptables (sans qu'il puisse se montrer
à cet égard déraisonnable);b) que la nature et les incidences(quant au
degré de surveillance) de I'obligation de faire rapport soient celles qui
sont indiquéesaux paragraphes 76 à 78ci-dessus; et c) quz, de mêmequ'à
l'égarddu Conseil de la Société desNations, le Mandataire n'ait pas

l'obligation juridique d'appliquer les recommandations de l'organe de
surveillance, pas plus que les Etats qui administrent des territoires sous
tutelle ne sont obligésd'accepter les avis de l'Assemblée générald ees
Nations Unies en tant qu'organe de surveillance (voir ci-dessus, par. 77et
104et note 66).
121. En plus, ou plutôt àla place de la méthodequi précède,on pour-
rait considérercomme incombant à l'Afrique du Sud, cette fois sur la
base dela Charteet non plus du Mandat, qu'ellereprenne la transmission
de rapports en vertu de l'article 73, alinéae),de la Charte (sur ce point,
voir l'opinion dissidente commune de 1962, C.I.J.Recueil 1962,p. 541-548

et le paragraphe 43 6) ci-dessus), puisque le Sud-Ouest africain est sans
aucun doute un territoire non autonome. 11devrait néanmoins être
entendu que cette reprise se ferait à condition que les rapports ne soient
pas examinéspar le Conseil de tutelle, sauf si l'Afrique du Sud y consent.

i0 Par hypothèse cependant, ce ne serait pas à l'égarddes Nations Unies que le
Mandataire aurait ce devoir, sinon la mêmesituation se répéteraitsous une autre
forme. 3. Pour les autres Etats

122. Pour les uutres Etilts, les ((conséquencesjuridiques))du fait que
le Mandat de l'Afrique du Sud n'a pasétévalablementrévoque t subsiste
en droit sont qu'il leur incombe:

1) de reconnaître que l'organisation des Nations Unies n'est pas compé-
tente, non plus que le Mandataire, pour modifier unilatéralement le
statut du territoire sous mandat;
2) de respecter et d'observer le droit qu'a encore le Mandataire d'admi-
nistrer le territoire, tant qu'un changement n'a pas étéopérépar des
moyensjuridiquement valables.

123. Sur cette base, je n'ai pas à me demander quelles seiaient les
conséquencesjuridiques pour les Etats si la conception dont procède
l'avisde la Cour étaitjuste; de toute façon, comme les mesures indiquées
par la Cour paraissent s'appuyer surtout sur les résolutionsdu Conseil
de sécuritéqui n'ont pour moi d'autre effetqueceluide recommandations,
pour les raisons données auxparagraphes 112 à 114ci-dessus,je me ver-
rais dans l'obligation de contester que ces mesures aient véritablementle
caractère de ((conséquencesjuridiques »,mêmesi par ailleurs je souscri-
vais à l'avis. (Jepartage égalementles vues de mes collèguesMM. Gros,
Petrén, Onyeamaet Dillard sur la valeur de certaines de ces mesures.)

124. 11y a toutefois un autre aspect auquel j'attache de l'importance
et qui me paraît devoir êtresouligné. C'estd'ailleurs pour cela que, le
9 mars 1971,au cours de la procédure orale, j'ai poséune question au
représentant des Etats-Unis d'Amérique,qui présentait alorsson exposé
oral. Je ne puis faire mieux, me semble-t-il, que de citer le libellé de cette
question et la réponseécritequi est parvenue au Greffe de la Cour une
dizaine dejours plus tard, le 18 mars 1971 :

Question: Existe-t-il selon le Gouvernement des Etats-Unis
d'Amériqueune règle de droit international coutumier qui, d'une
manière générale, oblige leE stats à appliquer des sanctions contre

un Etat qui a agi ou qui agit illégalement - par exemple à rompre
les relations diplomatiques, consulaires et commerciales avec 1'Etat
fautif? Sinon, comment l'obligation d'agir ainsi s'imposerait-elle
aux Etats, autrement que comme un simple devoir moral ou simple
exercice d'une faculté,en tant qu'obligation juridique positive?
Réponse:De l'avisdes Etats-Unis, il n'existepas de règlede droit
international coutumier qui obligeles Etatsà appliquer des sanctions
contre un Etat qui a agi ou qui agit illégalement.Toutefois, en vertu
de la Charte des Nations Unies, le Conseilde sécuritéalepouvoir de
déciderque les Etats Membres doivent appliquer des sanctions NAMIBIE(S.-O. AFRICAIN) (OP. DISS. FITZMAURICE) 298

contre un Etat qui a certainscomportements illicites. Par exemple, si
le Conseil de sécuritéconstate qu'un acte illicite d'un Etat constitue
«une menace contre la paix ... une rupture de la paix ou ..un acte
d'agression »,il a le devoir, en vertu de l'article 39, de fa«des re-
commandations ou [décider]quelles mesuresseront prises conformé-

m.ent aux articles 41 et 42 pour maintenir ou rétablir la paix et la
sécuritéinternationales D.Quand le Conseil de sécuritéfait une telle
constatation et décideque les relations diplomatiques, consulaires et
coinmerciales doivent êtrerompues conformément à l'article41 de la
Charte, tous lesMembresdes Nations Unies ont ledevoird'appliquer
ces mesures.

Si la dernière partie de cette réponseveut dire que c'est, grosso modo,
uniquement quand des décisionssont adoptées en vertu du chapitre VI1
de la Charte, l'existenced'une (menâce contre la paix, d'une rupture de
paix ou d'un acte d'agression » ayant étépréalablement constatée,que
les Etats Membres auraient l'obligation juridique de prendre des mesures
po>itives,je ne peux que me ranger à cet avis.

125. Dansla dernièrepartie de sa déclaration,lePrésidentde la Cour a
présenté certaines observations qui,tout en étant liéesde près auxpro-
blèmesjuridiques en cause dans la présente affaire, ont un caractère
différent.Prenant exemplesur lui,je formulerai aussi quelquesremarques.
Pendant la période 1945-1946, l'Afrique du Sud aurait pu mettre les

Nations Unies devant le fait accompli, en incorporant le Sud-Ouest
africain à son territoire pour le transformer en une province comme celle
du Cap, comme le Natal, le Transvaal ou 1'Etat libre d'Orange. Si elle
l'avait fait, il n'yaurait eu aucun moyen sauflauerr.2de s'yopposer ou de
revenir sur la transformation effectuée.Faisant preuve de sagessemais en
se contraignant aussi de son point de vue à beaucoup de modération,
l'Afrique du Sud s'est abstenue de se comporter de la sorte. Mais si
l'c(incorporation))est une mesure que les Nations Unies estiment ne
jamai-s pouvoir accepter, il convient qu'il soit égalementet réciproque-

ment compris que la conversion du Sud-Ouest africain en un Etat de
Namibie souverain et indépendant (sauf si elle se produit sur une base
très différentede ce que l'on paraît actuellen~entenvisager) ne peut être
obtenue que par des moyens aux conséquences incalculables, qu'il est
inutile de préciser. Celaétant. lorsqu'onse trouve dans une situation où
il ne sertà rien de lancer une force irrésistiblecontre un objet immobile,
l'homme d'Etat doit chercher un modus vivendp indant qu'il en est
encore temps.

(SignéG ). G. FITZMAURICE.

286 1. L'Assembléegénérale deN s ations Unies est
incompétentepour agir comme tribunal

1. Quand, par sa résolution 2145 de 1966, 17Assembléegénéralea
prétendudéclarer terminéle Mandat de l'Afrique du Sud, au motif que
celle-ci aurait commis des violations fondamentales de ce Mandat, cette
déclaration représentant non pas simplement l'expression d'une opinion

mais un acte de nature exécutivequi devait avoir pour effet pratique de
mettre fin au Mandat ou de consacrer son extinction, et de rendre désor-
mais illégalel'administration du territoire sous Mandat par l'Afrique du
Sud, elle a émis desprononcés d'un caractère essentiellement juridique
qu'elle n'avait pas compétence pour formuler, faute d'êtreun organe
judiciaire et de n'avoir pas au préalable renvoyéla question àun organe
judiciaire.
2. 11n'y a rien d'inhabituel dans l'opinion exprimée ici.Au contraire,
elle représentel'étatde choses normal, à savoir que l'organe compétent
pour accomplir concrètement un acte dans le cad~ede ses responsabilités

exécutivesn'est pas l'organe compétent pour décider si les conditions
justifiant son accomplissement sont réunies.Danstous lesautres domaines,
une division similaire des fonctions est chose courante. Ainsi le pouvoir
législatif estseul compétentpour promulguer une loi, le pouvoir exécutif
ou l'administration seuls compétents pour l'appliquer ou la mettre en
vigueur, le pouvoir judiciaire seul compétentpour l'interpréteret décider
si son application ou sa mise en vigueur sont justifiéesdans un cas donné.
Dans le domaine des institutions, lajustification de l'acte accomplipar un
organe quelconque peut tenir à des considérations d'ordre politique ou

technique, ou à des considérations de comportement professionnel ou de
discipline, et, le cas échéant, l'organe ou institution politique, technique
ou professionnel intéressésera,en principe,habilité àfairelesconstatations
nécessaires. Mais lorsque la question dépend, et dépendexclusivement,
de considérations d'ordre juridique, un organe politique n'a pas lui-
mêmele pouvoir de procéder aux constatations juridiques qui doivent

l Le fait que certaines questions sont traitées dans la présente annexe ne veut
nullement dire que je les considère comme d'importance secondaire; bien au con-
traire, elles posent des problèmes qui, d'une certaineon, présentent la même
prééminenceque n'importe quel autre aspect de l'affaire. Mais si je les avais traitées
auparavant, à la place qui est véritablement la leur, j'aurais ralenti ou interrompu
le développement de l'argument principal, que je tenaisposer le premier.justifier son action, mêmes'ila compétencepour prendre les mesures qui
en découlent. Seul possèdece pouvoir un organe juridique compétent
pour procéder à cesconstatations.
3. Il faut ajouter qu'outre qu'elle constitue un excèsde pouvoir sur ce
point, l'action de l'Assembléea étéparfaitementarbitrairedans la mesure

où l'Assembléeétait à la foisjuge et partie au regard d'accusations qu'elle
avait poitéeselle-même,sans donner au ((défendeur ))aucun des moyens
et des garanties que comporte normalement le processus judiciaire.
4. On a affirméque l'aptitude de l'Assemblée à faire des constatations
de caractère juridique ressort du fait que l'article 6 de la Charte lui
confère le droit d'exclure, sur recommandation du Conseil de sécurité,
un Etat Membre ayant (cenfreint de manière persistante les principes

énoncésdans la ...Charte ».Cela signifieseulement que les auteurs de la
Charte ont conféré à l'Assemblée, en termes exprès, lepouvoir spécijque
dont il s'agit, sans précisersi ce pouvoir ne pouvait êtreexercéqu'une
fois les prétendues violations constatéespar un organejuridique compé-
tent. Déduire du pouvoir spécifiquement conféré par l'article6 que
l'Assembléeest censéetenir nécessairement de la Charte un pouvoir
générudle faire desconstatations juridiques, c'estnettement fallacieux.
5. La thèse selon laquellela résolution2145 n'a pas effectivement mis

finau Mandat de l'Afrique du Sud,mais s'estbornée ànoter que l'Afrique
du Sud y avait mis fin elle-même,en raison des violations commises par
elle, autrement dit la thèse selon laquellecette résolutionétait purement
déclaratoire et non pas exécutoire, n'est manifestementqu'un expédient
visant à éluderla difficulté;en effet, mêmesi elle n'est que déclaratoire,
la résolutionconstatait en réalitéque des violations du Mandat avaient
eu lieu, car à défautrien ne justifiait l'adoption d'une résolutionmême
simplement déclaratoire. En outre, c'est une doctrine étrange et inédite

que celle qui consiste à prétendre qu'en enfreignant une obligation on
peut mettre un terme à celle-ci,mais ceux qui cherchent un moyen facile
de se soustraire à un engagement embarrassant l'accueilleront certaine-
ment avecsatisfaction.
6. L'argument selon lequel l'Afrique du Sud elle-mêmeavait (dénoncé
le Mandat » dès 1946est lui aussi un expédient.L'attitude de l'Afrique
du Sud a été que, surle plan juridique, ou bien le Mandat étaità tel point
liéà la Société desNations qu'il ne pouvait survivre à la dissolution de

celle-cij ou bien que, s'il avait survécu,ce ne pouvait être sous la forme
que prétendaientles Nations Unies. Que ce point de vue ait été juridique-
ment fondéou non, cela n'équivalaitaucunement à une «dénonciation ))
du Mandat. Par hypothèse, nier l'existence d'uneobligationet la dénoncer
sont deuxchoses différentes 2. On ne peut pas non plus tirer légitimement
cette déduction du refus de faire rapport à l'Assembléegénéraleet

* C'est pourquoi la justification de la révocation du Mandat que la Cour découvre
dans l'article 60, paragraphe, de la convention de Vienne sur le droit des traités
(1969) est tout à fait hors de propos.
288 d'accepter sa surveillance, qui se fondait sur l'argument - tenu pour
justifiépar un fort courant d'opinion - qu'il n'existaitaucune obligation
juridique à cet effet. S'il n'enétait pasainsi, aucune partàeun différend
ne pourrait faire valoir ses moyens sans s'entendre dire que, ce faisant,
elle a «dénoncé ))ses obligations juridiques.

7. On a dit aussi que l'Assembléeavait «en vain » tenté d'obtenirde la
Cour lesconstatations nécessairesà la faveur de la procédure contentieuse
introduite par 1'Ethiopie et le Libéria (1960-1966).Mais cet argument
revient à: a) confirmer que, n'ayant pas obtenu l'arrêtqu'elle souhaitait
en 1966,l'Assembléeétaitfondée à se faire justice elle-même,ce qui ne
contribuerait d'ailleurs pas à rendre valable la résolution 2145; b) ad-
mettre que l'arrêtde 1966 a eu raison de voir dans les demandeurs des
agents desNations Unies et non pas, comme ilsleprétendaient,desparties

à une procédure contentieuse défendant un intérêp t ropre; et c) recon-
naître que, comme l'arrêt de1966 l'a nettement donné à entendre dans
ses paragraphes 46 à 48 (et surtout ce dernier), l'Assembléeen tant
qu'organe aurait normalement dû solliciter de la Cour un avis consul-
tatif sur la question des violations du Mandat, au regard de laquelle
l'objection tirée de l'intérêjturidique n'aurait pas été pertinente.La
Cour aurait encore pu lefaire, en 1967par exemple. On ne peut donc que
donner une fausse impression si l'on dit qu'en 1966l'Assembléen'avait
pas d'autre possibilitéque d'adopter la résolution2145 (XXI) sans avoir

au préalabledemandéun avisjuridique à cet égard.

8. Toutes ces prétenduesjustifications du pouvoir qu'aurait 1'Assem-
bléede faire des constatations juridiques, bien qu'elle ne soit pas elle-
mêmeun organe juridique compétent, et de les faire sans avoir à se
référerà un tel organe ou même à un groupe ad hoc de juristes (comme

c'étaitla pratique habituelle du Conseil de la SdN dans toutes les affaires
importantes) sont parfaitement illusoires. En définitiveil faut conclure
que l'action de l'Assembléea constituéun excèsde pouvoir et, par suite,
que la résolution 2145 était sans valeur juridique, abstraction faite des
autres raisons de droit qui empêchaientqu'elle mît finau Mandat de
l'Afrique du Sud.

2. Droitpour la Cour d'examiner lesprémisses
de toute demande d'avis consultatiJ'

9. Bien que la Cour se soit, jusqu'à un certain point, penchéesur la
question de la validitéet de l'effetde la résolution2145 de l'Assemblée NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN (O) PDISS.FITZMAURICE) 302

générale, ellen'a pas examiné commeil eût convenu la question du droit
qu'elle avait de le faire, étant donnéla façon dont la demande d'avis
consultatif était formuléedans la présenteaffaire. Or la question est si

importante pour la position et la fonction judiciaire de la Cour qu'il est
nécessairede l'étudierici.
IO.La Cour n'aurait pu légitimements'entenir à la lettre de la requête
et considérerque sa seule tâche en la présente instanceétaitd'indiquer
les conséquencesjuridiques pour les Etats de la présencecontinue de
l'Afrique du Sud au Sud-Ouest africain, en tenant pour acquise, sans
autre examen, la validité despostulats dont procède la requête - à

savoir qu'ila étévalablement mis fin au Mandatpour ce territoire et que
la présence sud-africaineest par conséquentillégale 3.La Cour ne peut
agir ainsi pour la raison simple mais suffisanteque la question de savoir
si le Mandat a juridiquement pris fin ou non est à la racine mêmede la
situation qui a conduit à la présentation de la requête.Si: en droit, le
Mandat est encore en vigueur, la question qui a étéposée à la Cour est
sans objet et il ne peut y être répondu;ou bien elle est purement hypo-

thétiqueet, dans ces conditions, il ne servirait ,àrien d'y répondre; la
situation,à un niveau différent, ressembleraitdonc à celle qui, dans
l'affairedu Camerounseptentrional (C.I.J. Recueil 1963,p. 15),a conduit
la Cour à dire qu'elle ne pouvait ccstatuer au fond sur la demande »,
notamment parce que les circonstances étaienttelles qu'elles rendaient
((toute décisionjudiciairesans objet »(ibid.,p. 38). Il a constamment été
soulignédans lesaffairesconsultativesantérieures - et celaa étconfirmé

égalementdans l'affaire contentieuse susvisée,où l'occasion s'estpré-
sentée d'examinerla pratique suivie en matière consultative - que sur
le plan consultatif comme au contentieux la Cour doit toujours agir
comme un tribunal (et non, par exemple, comme un simple groupe de
conseillersjuridiques); on a rappeléque le pouvoir conféré à la Cour
de rendre des avis consultatifs doit s'exercerdans le cadre de la fonction
judiciaire))(ibid.,p. 30)et que, pour reprendre l'unedesformules lesplus

souvent citées de la Cour permanente dans l'affaire du Statut de la
Carélie orientale,la Cour, «étant une Cour de Justice, ne peut pas se
départirdes règlesessentiellesqui dirigent sonactivitédetribunal, même
lorsqu'elle donne des avisconsultatifs » (C.P.J.I. sérieBno5, p. 29).
II. C'est tellement vrai qu'à l'origine on a eu tendance à mettre en
douteque lefait de donner cequi n'était qu'unavis,mêmesous uneforme
solennelle, comme c'est le cas, par exemple,pour les avis consultatifs de

la Cour, soitcompatible aveclafonctionjudiciaire 4.Tellen'aévidemment
La Cour ne saurait évidemment êtreliéeen quoi que ce soit par le fait que cer-
tains représentantsEtats Membres au Conseil de sécuritéont déclaréinterpréter
la requête ence sens et mêmene l'approuver qu'à cette condition. Ni les représen-
tants des Etats ni des organes comme le Conseil de sécurité lui-mêmen,'ont
tence pour dire à la Cour à quels éléments elle devra se limiteren vue de rendre un
avis juridique.
voir ~anley O. Hudson, The Permanent Court of International Justice,
1920-1942, p. 510 et 511.pas été l'opinionde la Cour; au contraire, pour citer un auteur qui fait
autoritéet a étéjugeà la Cour permanente :

«la Cour ...a conçu sa compétenceen matière consultative, comme
une fonction judiciaire et, dans J'exercice de cette compétence,
elle s'est tenue dans les limites propres l'action judiciaire. Elle a
agi non pas comme une ((académiede juristes)) mais comme une
«magistrature »responsable.» (Lesitaliques sont de nous.)

Les mots mis en italiques dans le passage quivient d'êtrecitécontiennent
la clédu problème. S'il plaît à un organe comme l'Assemblée générale
ou le Conseil de sécurité desNations Unies de renvoyer telle ou telle
question à un groupe d'experts juridiques, permaneht ou créépour
l'occasion, en le priant d'y répondreà partir de certains postulats précis
qu'ildoit tenir pour acquis,ilest parfaitementnormal quecegroupe agisse
en conséquence parce qu'il n'est pas un tribunal et n'exerce pas ou
n'essaiepas d'exercer unefonction judiciaire: il est certainement tenu de
respecter les instructions que l'organe intéressest habilitéàlui donner.

Mais la Cour, qui est elle-même l'un dessix principaux organes origi-
naires des Nations Unies et n'a pas un statut inférieuraux autres, n'est
tenue de recevoir d'instructions d'aucun d'entre eux, surtout sur la
manièredont elle doit considéreret interpréter ses fonctions de tribunal,
car elle est et doit toujours rester un tribunal, quels que soient la nature
et le contexte de la tâche particulièrei l'occupe. Siun groupe d'experts.
peut fort bien, se livrant à une sorte d'exercice technique, donner des
réponses en se fondant sur certaines hypothèses préétablies, indépen-
damment de leur validité, un tribunal ne peut agir ainsi: il est tenu
d'examiner soigneusement ce qu'on lui demande de faire et de juger si
cela serait compatible avec son statut et sa fonction de tribunal.

12. Cette faculté constitue en véritéle fondement du droit reconnu
de la Cour, qui découlede l'article 65, paragraphe 1, de son Statut et
est consacrépar sa jurisprudence, de refuser purement et simplement de
donner suite à une demande d'avis consultatif si elle estime, pour des
raisons suffisantes, qu'il ne serait ni séant ni opportun de le faire; or,
si la Cour peut purement et simplement refuser de donner suite, à
fortiori peut-elle et doit-elle insister pour entreprendre un examen
préliminaire despostulats dont procèdela demande, enparticulier quand
ces postulats sont, comme en la présente instance, telsque, s'ilsne sont
pas fondés,la question poséen'a pas de sens ou ne peut appeler qu'une
seule réponse. Autrement dit, le fait, pour un tribunal, de donner des

réponsesqui peuvent seulementavoir un sens et de la pertinence si une
situation juridique donnée est présumée exister,sans examiner si elle
existe (en droit), reviendrait simplementà se livrerà un intéressantjeu
de société, cequi n'est pas lerôle d'un tribunal. Dans la présenteaffaire,
si la Cour avait agi de la sorte, elle aurait non pas exercéune activité

Hudson, op. cit., p. 511.judiciaire, mais renoncé à sa véritable fonction en tant que tribunal et

elle se serait bel et bien comportée comme une ((académiede juristes ))
- pour reprendre la formule dujuge Hudson.

3. La Cour devait-elledonnersuite à la demande
d'avis consultatifenl'espèce?

13. Il ne fait pas de doute que 1% question posée à la Cour étaitune
questionjuridique à laquellela Cour avait le pouvoir de répondresi elle
le jugeait opportun, plus particulièrement si la question est considérée
(ce qu'elle doit être)comme ayant trait non seulement aux conséquences
juridiques de la résolution 2145 de l'Assembléegénérale, mais aussià la
validitémêmede cette résolution et à ses effets sur le Mandat pour le
Sud-Ouest africain.

14. En revanche, si la Cour avait considéréque la forme sous laquelle
la question lui était posée l'empêchaid te suivre une autre méthode que
celle qui consiste à traiter seulement des ((conséquences »,et excluait ou
visait à exclure tout examen par la Cour de la validitéet de l'effet de
l'acte dont ces conséquencessont censéesdécouler - la résolution 2145
de l'Assembléegénérale -, la Cour aurait eu un motif pour ne pas donner

suite à la requête;en effet,pour les raisons exposéesdans la section qui
précède, il est inacceptablequ'un organe qui formule une requêtesem-
blable cherche à limiter les facteurs dont la Cour, en tant que tribunal,
juge nécessairede tenir compte afin de répondre, ou àprescriresur quelle
base elle devra répondre. En outre, la Cour, n'étant pas formellement
obligéede donner suite à la requête(même sipar ailleurs il était approprié
qu'elle le fît), est nécessairement maîtresse, etseule maîtresse, de choisir

la base sur laquelle elle le fera, si elle décideeffectivement d'y donner
suite.
15. Sous réservede ce qui vient d'êtredit, je souscris à la conclusion
de la Cour suivant laquelle il convient de donner suite à la requêtemais
non à certains des motifs dont cette conclusion découle 6.Je le fais, bien
queje ne doute pas que la présenteprocédure soit une tentative d'utiliser
la Cour à des fins purement politiques, autrement dit comme un moyen

de parvenir à la transformation du territoire du Sud-Ouest africain en
un nouvel Etat indépendant et souverain, appelé ((Namibie JIsans se
soucier de ce que pourraient être les conséquencesdans la conjoncture
présente.Que ce soit là l'objectifressort avecune clartéparfaitedespara-

En particulier pour ce qui est de I'existence«dlitigea ou d'une ((question
juridique pendante»entre Etats- voir à ce propos la section 4 ci-après. Qu'un
litige, ou une question juridique, «pendant »ne constitue pas en soi un motif
qu'on peut reprocherà la Cour, c'est de ne pas avoir appliqué la procédure con- Ce
tentieuseà la présente instance consultative comme elle avait le pouvoir de le faire
(voir la section 4).graphes 1, 2 et 6 de la résolution 2145 elle-même,que je reproduis in
extenso ci-après:

((L'Assembléegénérale,
Réafirmant le droit inaliénabledu peuple du Sud-Ouest africain
àla liberté etàl'indépendanceconformément à la Charte des Na-

tions Unies, à la résolution 1514 (XV)de l'Assemblée générale e,
date du 14 décembre1960, et aux résolutions antérieures del'As-
sembléeconcernant le Territoire sous mandat du Sud-Ouest africain,
Rappelant l'avis consultatif de la Cour internationale de Justice
du Il juillec 1950,qui a étéacceptépar l'Assemblée .générad lans
sa résolution449A (V) du 13décembre1950,et les avis consultatifs
du 7juin 1955et du 1" juin 1956,ainsi que l'arrêtdu 21 décembre
1962,lesquels ont établique l'Afrique du Sud continue d'avoir des
obligations en vertu du Mandat qui lui a étéconfié le17 décembre
1920et que l'organisation des Nations Unies entant que successeur
de la Société desNations a des pouvoirs de contrôle sur le Sud-
Ouest africain,
Gravementpréoccupép ear la situation qui règnedans le Territoire
sousmandat et qui s'est gravement détériorée depuis l'arrêtde la

Cour internationale de Justice du 18juillet 1966,
Ayant étudiéIesrapports des divers comitésqui ont étécréés pour
exercer les fonctions de contrôle de l'organisation des Nations
Unies sur l'administration du Territoire sousandat du Sud-Ouest
africain,
Convaincue que l'administration du Territoire sous mandat par
l'Afriquedu Sud a étéassuréed'une manièrecontraire au Mandat, à
la Charte des Nations Unies eà la Déclarationuniverselle desdroits
de l'homme,
RéaBrmant sa résolution 2074 (XX) du 17 décembre 1965, no-
tamment le paragraphe 4 par lequel elle a condamné la politique
d'apartheid et de discrimination raciale pratiquée par le Gouverne-
ment sud-africain au Sud-Ouest africain comme constituant un
crime contre l'humanité,

Soulignantque leproblèmedu Sud-Ouest africain est une question
qui relèvedes dispositions de la résolution1514(XV)de l'Assemblée
générale,
Considéranq t uetous leseffortsfaitspar l'Organisation desNations
Unies pour amener le Gouvernement sud-africain à respecter ses
obligations en ce qui concerne l'administration du Territoire sous
mandat et à assurer le bien-êtreet la sécuritédes autochtones du
pays ont été inutiles,
Consciente des obligations de l'organisation des Nations Unies
vis-à-visu peuple du Sud-Ouest africain,
Notant avec une profonde inquiétudela situation explosive qui
existedans la régionméridionalede l'Afrique, Afirmant son droit de prendre des mesures appropriées à'cet
égard, y compris le droit de reprendre l'administration du Territoire
sous mandat,

1. Réafirme que les dispositions de la résolution 1514 (XV) de
l'Assemblée générasle ont pleinement applicables au peuple du Terri-
toire sous mandat du Sud-Ouest africain et que, par conséquent,le
peuple du Sud-Ouest africain a le droit inaliénable à l'autodéter-
mination, à la libertéetàl'indépendance,conformément àla Charte
des Nations Unies;

2. Réafirme en outre que le Sud-Ouest africain est un territoire
qui a un statut international et qu'il devra conserver ce statut jus-
qu'à ce qu'il accèdeà l'indépendance;
3. Déclareque l'Afrique du Sud a failli à ses obligations en ce qui
concerne l'administration du Territoire sous mandat, n'a pas assuré
le bien-êtremoral et matérielet la sécurité des autochtonesdu Sud-
Ouest africain et a, en fait, dénoncéle Mandat;

4. Décideque le Mandat confié à Sa Majesté britannique pour
êtreexercéen son nom par leGouvernement de l'Union sud-africaine
est donc terminé,que l'Afrique du Sud n'a aucun autre droit d'ad-

ministrer le Territoire et que désormaisle Sud-Ouest africain relève
directement de la responsabilité de l'organisation des Nations
Unies ;
5. Conclut que, dans ces conditions, l'organisation des Nations
Unies doit s'acquitter de cette responsabilitél'égarddu Sud-Ouest
africain;
6. Créeun Comitéspécialpour le Sud-Ouest africain - composé
de quatorze Etats Membres qui seront désignés par le Président de
l'Assemblée générale - chargéde recommander des dispositions
d'ordre pratique pour l'administration du Sud-Ouest africain, afin
de permettre au peuple du Territoire d'exercer son droit à I'auto-

détermination et d'accéderà l'indépendance,et de faire rapport à
l'Assembléegénéraleréunie ensession extraordinaire, aussi rapide-
ment que possible et, quoi qu'il advienne,au plus tard en avril 1967;
7.Invite le Gouvernement sud-africain à s'abstenir et à se désister
.immédiatement de toute action, constitutionnelle, administrative,
politique ou autre, qui de quelque manière que ce soit modifierait
ou tendrait à modifier le statut international actuel du Sud-Ouest
africai;
8. Appelle l'attention du Conseil de sécuritésur la présente
résolution;
9.Prie tous lesEtats de prêter sansréserveleur concours et d'aider

à l'exécutiondela présenterésolution;

10.Prie le Secrétaire générad le fournir toute l'assistance né- cessaire pour l'exécutiondela présenterésolution et pour mettre le

Comitéspécialpour le Sud-Ouest africain en mesure de s'acquitter
de satâche.
14-54'séance plénière,
27 octobre 1966. ))

Si le moindre doute était possible, il serait levépar les deux faits
suivants, survenus plus récemment, et qui constituent des preuves con-
cluantes:

a) La résolution 2248 (S-V) du 19 mai 1967, par laquelle l'Assemblée
générale aréaffirméla résolution 2145 et nomméun (Conseil pour le
Sud-Ouest africain », appelépar la suite « Conseil pour la Namibie »,
setermine sur cesmots :

« Décide que le Sud-Ouest africain deviendra indépendant
à une date qui sera fixéeconformément aux vŒux de la popula-
tion et que le Conseil fera tout en son pouvoir pour que le
Territoire accède àl'indépendanceau plus tard enjuin 1968. ))

b) Le 29janvier 1971,alors que l'affaire était déjàen instance devant la
Cour et que la procédure orale était entamée 7,le Conseil des Nations
sujet de la
Unies pour la Namibie a publié une déclaration au
proposition de l'Afrique du Sud d'organiser un plébiscite dans le
Sud-Ouest africain sous la surveillance conjointe de la Cour et du
Gouvernement de la République, déclaration qui se termine par ces
mots :

((En outre la question en jeu est celle de l'indépendance dela
Namibie et non celle de savoir si l'administration du Territoire
sera assuréepar le Gouvernement sud-africain ou par l'Organisa-
tion des Nations Unies. Dans cette affaire, les décisions des
Nations Unies visent à réaliser l'indépendance dela Namibie,

etnon pas à faire administrer le territoire par les Nations Unies,
sauf pendant une brève période detransition. » [Traduction du
Grefi. ]

16. Malgréces déclarations et ce qu'elles ont de révélateuret malgré
les antécédentsou les motifs politiques de la question posée à la Cour,
celle-ci a en soi un caractère essentiellement juridique. D'ailleurs, la
plupart des procédures consultatives ont en fait un arrière-plan politique.
Il pourrait difficilement en êtreautrement, comme la Cour l'a souligné
dans l'affaire de Certaines dépenses desNations Unies à propos des

interprétations de la Charte (C.I.J. Recueil 1962, p. 155, in$ne). Mais,

Une audience àhuis clos a ététenue le 27janvier 1971pour entendre la demande
publiques ont commencé ler8 février.signation d'un jugead hoc. Les audiences NAMIBIE (S.-O. AFRICAIN ()P. DISS.FITZMAURICE) 308
ainsi que la Cour l'a également signalédans cette affaire, faisant écho à

une opinion analogue expriméedans une affaire précédente8, cela ne
suffitpasà donner un caractèrepolitique à la questionposée à la Cour, et
c'est cela qui importe. Il semblerait donc que, pour qu'il soit justifiéde
refuser de répondre à une question, il faudrait que les antécédents poli-
tiques de cette question pèsent d'un poids tel que la question revête elle-
mêmeun caractère politique. Bien que, dans la présenteaffaire, on puisse
se demander si ce n'est pas un peu le cas9,les questions proprement dites

conservent un caractèrejuridique.

4. La questionde lanominationd'unjuge ad hoc
sud-africain

a) Les dispositions applicables duStutut

et du Règlement

17. La requêtepar laquellel'Afrique du Sud demandait àêtre autorisée
à désignerun juge ad hocdans la présenteaffaire a étérejetéepar la Cour,
par l'ordonnance du 29janvier 1971, à laquelle mes collèguesMM. Gros,
Petrén, ainsi que moi-même avons joint une déclaration commune

dissidente où nous nous réservionsle droit de donner les raisons de notre
attitude à un stade ultérieur.Amon avisce rejet étaitmal fondéendroit et
injustifiéen équitéet en simplejustice - car il étaitévident,et la Cour ne
pouvait le contester, que l'Afrique du Sud avait en cette affaire un intérêt
direct, distinct et concret protéger, quiétaittout différentpar sa nature
de l'intérêtgénéralet commun des autres Etats comme Membres des
Nations Unies. En bref, l'Afrique du Sud avait et étaitseule à avoir en

l'espèce le type d'intérêt quepossède un défendeur dans une action
contentieuse et elle aurait dû par conséquentse voir reconnaître le droit
de toute partie en cause devant la Cour: celui de nommer un juge ad hoc
pour siégeren l'affaire, conformément à l'article 31 du Statut, s'il n'ya
déjàparmi lesjuges titulaires un juge de sa nationalité 1°.

18. Le refus de la Cour a pris un relief particulier du fait du rejet

Voir par exemple l'affaire des Conditions de l'admission d'un Etat comme Membre
des Nations Unies(C.Z.J. Recueil 1947-1948, p. 61).
La présente affaire pourrait bien êtreconsidéréecomme se situant au moins
à la limite, car les arrière-plans politiques y sont particulièrement visibles. Pourtant
les deux principales questions en jeu, celles de savoir s'il a étévalablement mis fin
au Mandat et, dans l'affirmative, quelles sont les conséquencesjuridiques pour les
Etats, sont en elles-mêmes des questions de droit. Le doute tient façon dont
la requêteest formulée, car elle donneraitenser que la Cour ne doit répondre
qu'à la deuxième question, la première étant présumée réglée. C'essturtout cet
aspect qui donneà l'ensemble de la requête une coloration politique.
Bien entendu il n'y aurait pas eu d'objectionque soit désignéégalement un
parties faisant cause communecevoir également lesnotes 14 et 15ci-après.les autrespresque simultané,dans les trois ordonnancesen date du 26janvier 1971,
des objections soulevéespar l'Afrique du Sud quant à la régularité dela
participation de trois juges titulairesà la présente affaire- et c'est un
sujet sur lequel, s'agissant de la troisième de ces ordonnances, je tiens

m'associer aux vues expriméespar mon collègue M. Gros au début de
son opinion dissidente. Il faut conclure des explications données à ce
sujet dans l'avisde la Cour que, désormais,en dehors des termes littéraux
de I'article 17,paragraphe 2, du Statut, le fait d'avoir émêlé, mêm de
trèsprès, à ce qui constitue l'objet d'une affaire, ne peut empêcherunjuge
de siégerdans cette affaire à moins que sa conscience le pousse à se
déporter de lui-même.

19. Sur la question des juges ad hoc, la disposition directement perti-
nente est I'article 83du Règlement de la Cour, qui est ainsi libellé:

((Sil'avisconsultatif est demandéau sujet d'une questionjuridique
actuellement pendante entre deux ou plusieurs Etats, l'article 31 du
Statut est applicable, ainsi que les dispositions du présent Règlement
qui pourvoient à l'application de cet article1)

Si cette disposition était la seule applicable, il serait raisonnable d'en
déduirequ'unjuge ad hoc ne peut êtreautorisé que si l'affaire est du type
visé.En l'espèce,ilest évidentqu'une question juridique étaitenjeu, sinon
rien n'aurait permis à la Cour de donner suite à la requêtepour avis con-
sultatif (voir art.6, par. 1, de la Charte des Nations Unies et art. 65,
par. 1, du Statut de la Cour). Mais pouvait-on y voir une question (ac-
tuellement pendante entre deux ou plusieurs Etats »? J'exposerai plus
loin les raisons que j'ai de répondrepar l'affirmative. Cependant, pour

les besoins de mon principal argument en faveur de l'idée qu'ilaurait
fallu donner suite à la demande de l'Afrique du Sud, il ne m'est pas
nécessaire, à proprement parler, de déterminer si les questions juri-
diques en cause étaient((pendantes »et, dans l'affirmative,si ellesl'étaient
«actuellement »; si, l'étant«actuellement », elles I'étaient (entre deux
ou plusieurs Etats »et, dans ce cas, lesquels, et ainsi de suite; car, selon
moi, le problème n'est pas régi exclusivementpar les dispositions de
I'article 83 du Règlement, qui, à mon avis, n'épuisepas la question

du pouvoir que possèdela Cour d'autoriser la désignation d'unjuge ad
lzoc.

20. 11me semble que la thèse contraire repose sur une mauvaise
interprétation de l'intention et des effets véritables de l'article 83 con-
sidéréconjointement avec I'article 68 du Statut suivant lequel : «Dans l'exercicede ses attributions consultatives, la Cour s'inspi-
rera ...lldes dispositions du présent Statut qui s'appliquent en
matière contentieuse dans la mesure où elle les reconnaîtra appli-

cables )).

L'une deces dispositions, bien entendu, est l'article 31du Statut, de sorte
que l'article 68 du Règlement confère à la Cour le pouvoir général
d'appliquer ledit article et d'autoriser la désignationd'un juge ad hoc si
une demande est présentée à cet effet. De plus, les dispositions du Rè-
glement sont subordonnées à cellesdu Statut. LaCour nepouvantadopter
un Règlement incompatible avec son Statut, toute règle de procédure

contraire au Statut serait, par le fait même,dépourvuede validitéet le
Statut prévaudrait.
21. Je ne vois pas pour ma part qu'il y ait contradiction entre l'article
83 du Règlementde la Cour et l'article 68 de son Statut. Ces deux textes
traitent d'aspects différents.Le deuxième (l'article68 du Statut) malgré
une formulation presque impérative,donne en fait à la Cour une sorte de
pouvoir discrétionnaire luipermettant d'assimiler, en tout ou en partie,

les procéduresconsultatives à des affaires contentieuses. L'article 83 du
Règlement, lui, contient une sorte de directive que la Cour se donne à
elle-mêmequant à la manière dont elle doit exercer ce pouvoir discré-
tionnaire dans certaines circonstances bien définies.En vertu du Rè-
glement, la Cour doit autoriser la désignation d'un juge ad hoc si elle
constate que cescirconstances sont réunies. Mais cen'est nullement à dire
et, en rédigeant I'article83,la Cour n'ajamais voulu dire qu'ellerenonçait
au pouvoir discrétionnaire résiduel qu'elletient de I'article 68 du Statut
et que, désormais, elle nepouvait plus autoriser la désignationd'un juge

ad hocen dehors descirconstances prévues àl'article83deson Règlement.
Cet article ne visepas à spécifierla seule catégorie d'affairedans laquelle
la Cour peut agir ainsi; son objet est d'indiquer un type d'affaire dans
lequel elledoit agir ainsi et de faire en sorte que, là au moins, la Cour
exerce son pouvoir discrétionnaired'une façonpositive, en ce sens qu'elle
applique l'article 31du Statut. Cela n'empêcheaucunement qu'il puissey
avoir d'autres affaires que les affaires viséesl'article 83 du Règlement,

dans lesquellesla Cour, sansêtre obligéed'appliquer I'article31du Statut,
pourrait estimer pour une raison quelconque qu'elle doit néanmoins
appliquer cet article. Cette manièrede voir est confirméepar l'article 82,
paragraphe 1, du Règlement qui concerne l'application aux procédures
consultatives de toutes les dispositions relatives à la procédure con-
tentieuse et nonpas seulement de l'article31.Aprèsavoir reproduit, d'une
manière généralel,es termes de I'article 68 du Statut, l'article 82ajoute
qu'((à cet effet»(c'est-à-dire pour déterminer le domaine d'application

l1 L'expression omise est .en ou»,qui est sans aucun objet dans ce contexte,
car on chercherait vainement dans le Statut un autre paragraphe ou un autre articel
traitant de ce sujet que I'articlepléterait. NAMIBIE (S.-O. AFRICAIN) (OP. DISS. FITZMAURICE) 311

éventuelde la procédure contentieuse), la Cour recherche avant tout )I
((sila demande ...a trait ou non à une question juridique actuellement
pendante entre deux ou plusieurs Etats B.Bienévidemmentcetterédaction

fait de la notion de question juridique pendante le critère principal mais
non pas, c'est tout aussi évident, uncritère décisifen lui-même.

22. On a soutenu que, bien que cette analyse des rapports entre les
diverses dispositions applicables puisse être à d'autres égardscorrecte,
elle achoppe nécessairement sur les termes de l'article 31 lui-même,et

particulièrement sur ses deuxième et troisième paragraphes qui, a-t-on
prétendu, non seulement visent à l'évidencele cas de ((parties » à un
procès en cours, mais encore sont virtuellement inopérants en toute
autre circonstance, si bien qu'à tout prendre les exigencesde l'article 83
constituent un minimum et un sine qua non en l'absence duquel aucune
application de l'article 31 n'est possible.3'ai quelque difficulté à suivre
la logique de ce raisonnement mais, s'il ktait fondé, il irait assez loin, en
pratique, dans la voie qui consisterait à reprendre presque tout ce que

l'article83du Règlement est censéaccorder, de sorte que ses dispositions
seraient~arfaitement vides de sens - car mêmesil'affaire concerne.sans
doute possible, une question juridique actuellement pendante entre deux
ou plusieurs Etats, il est rare, en matière consultative, de rencontrer une
situation telle que l'article 31puisse s'appliquer intégralement, sansglose
ni adaptation. De fait, il est manifeste que lesdispositions du Statut et du
Règlement qui concernent les affaires contentieuses sont tout naturelle-
ment et inévitablement rédigéesdans la perspective d'un litige et de
parties à un litige. Il suit de là que ces dispositions ne peuvent manquer

d'être - et sonten fait- trufféesde passages et d'expressions qui ne sont
pas littéralement applicables aux affaires dans lesquelles il n'y a ni vrai
litige ni partie se trouvant techniquement dans la situation d'un plaideur
- en bref àla vaste majoritédes affaires consultatives. Aussi le pouvoir
que l'article 68 du Statut donne à la Cour de s'inspirer de la procédure
contentieuse serait-il réduit quasiment à rien dans la pratique, s'iln'était
réputéinclure celui d'y apporter les retouches et adaptations nécessaires
en matière consultative. Les mots (s'inspirera », en eux-mêmes,montrent

bien qu'on a envisagé qu'ilen serait ainsi.
23. Dans la présenteespèceen particulier, aucune difficultén'aurait pu
surgir, pour cette raison suffisante que, en dehors de l'Afrique du Sud,
aucun des autres Etats ayant présenté desexposés écrits ou oraux n'a
demandé la permission de désigner un juge ad hoc, et cela bien qu'ils
aient eu la possibilité dele faire12; de plus les représentants dequatre de

l2La Cour, normalement, ne fait rien pour provoquer la désignation d'un juge
ad hoc. La matière est purement facultative et ileu des affaires, mêmeconten-
tieuses, où aucun juged hoc n'a étédésigné, bienque l'une des parties ou les deux
parties n'aient pas eujuge de leur nationalité sur le siège. ces Etats ont effectivementassisté à l'audiencepréliminaire (àhuis clos 13)

qui a portésur ce sujet, mais aucun n'est intervenu pour s'opposer à la
requêteoupour présenterune requête analogue.Si elle avait étésaisie de
deux ou plusieurs requêtessemblables, en plus de celle de l'Afrique du
Sud, la Cour aurait eu à rechercher, en vertu de I'article 3,paragraphe 2,
de son Règlement,si les Etats intéresséso , u tel ou tel groupement de ces
Etats, ne comptant pas de juge de leur nationalité parmi les juges titu-

laires, faisaient ou non ((causecommune »14,auquel cas elle n'aurait pu
autoriser qu'un seuljuge par groupe d7Etats15,
24. L'avis de la Cour se réfère à l'ordonnance de la Cour permanente
rendue le 31 octobre 1935 en l'affaire de la Compatibilitéde certains
décrets-loisdantzikois avec la constitution de la Ville libre (C.P.J.I. série
AIB no65, ann. 1, p. 69-71). Or cette affaire n'offre aucune pertinence
au regard de la présente espèce;en effet, en 1935, aucune disposition

correspondant à l'actuel article 68 du Statut ne figurait dans le Statut en
vigueur. En fait, celui-ci ne contenait aucune disposition relative à la
compétence consultative, qui reposait entièrement sur l'article 14 du
Pacte de la Sociêté des Nations et le Règlementde la Cour. Il étaitdonc
inévitable que la Cour estimât n'avoir aucun pouvoir discrétionnaire
quant à la désignation d'un juge ad hoc, sauf si la question relevait

strictement des termes du Règlement.C'estpourquoi l'affaireconcernant
la Compatibilité de certains décrets-lod isantzikois ne constitue un précé-
dent nià l'appui dela thèse selon laquellela Cour n'a plus maintenant de
pouvoir discrétionnaire ni à l'appui du refus d'exercer cepouvoir (que
la Cour permanente, elle, ne pouvait pas exercer de toute manière
puisqu'ellene lepossédait pas).Lasituationétant par suitetrèsdifférente,
ilest évidentque si, en vertu de l'article 68 du Statut- qui l'emporte sur

le Règlement - la Cour peut (ce qui ne fait aucun doute) s'inspirer «des
dispositions du ...Statut qui s'appliquent en matière contentieuse » (y
compris donc de I'article 31), elle a forcémentle pouvoir discrétionnaire
d'autoriser la désignation d'unjuge adhoc, puisque c'estun des éléments
lesplus importantsde laprocédurecontentieuse.

l3 Voir I'article 46 du Statut. Le débat se déroule devant la Cour siégeant au
complet et dans la grande salle de justice comme s'il s'agissait d'une audience pu-
blique mais ni la presse ni le public ne sont admis. La décisionde siégerclos
malgré les instances pressantes de l'Afrique du Sud a étéselon moi erronée et mala-
visée(ainsi que la Cour'a implicitement admis par la suite en décidant de publier le
compte rendu inextenso de la séance).
l' Ceaui. en matièreconsultative. Deutêtrecom~riscommesienifiant aue lesintéres-
sésontdéspositions plus oumoins identiquessur principales~uestion~juridiquesen
cause. ToutEtat demandant ladésignationd'unjugeadhocqui aurait fait connaîtreson
intention departiciperaprocédureoralemaisn'aurait pas présentépréalablementd'
exuoséécritauraiDU être~ridefournir debrèvesindicationssur sesthèsesprinciuales.
phase orale (en dehors de l'Afrique du Sud) pourraientêtreconsidéréscommeou dans la
faisant cause commune,à l'exception de la France. mais il y a déjàun juge français
parmi les juges titulaires de la Cour. 25. A la lumièrede ces diverses considérations,il apparaît quela Cour
n'était nullement démuniedu pouvoir d'acquiescer à la requêtede
l'Afrique du Sud mais que, tout simplement, elle n'étaitpas disposée à
le faire. Sur ce point, je pense que la Cour a étédans l'erreur, d'autant
que la requête n'avait suscité aucune opposition ce qui, pour moi,
montre que les autres Etats participants reconnaissaient tacitement

l'aspect contentieux de l'affaire. La procédure,bien que consultative sur
le plan formel, a présentétoutes lescaractéristiquesd'un procèsquant au
fond des problèmes débattusJ6, à l'égalde l'affaire contentieuse entre
l'Afrique du Sud et certains autres Etats qui a pris fin il y a cinq ans et
dont la présenteinstance consultative n'est que la continuation sous une
forme différente. Aussi,mêmesi la Cour ne considéraitpas que l'affaire

relevait de l'article 83de son Règlement,defaçon à l'obliger depermettre
la désignation d'unjuge ad hoc, elle aurait dû exercer, pour aboutir au
mêmerésultat, sonpouvoir discrétionnairerésiduel.

b) L'existence d'un dzfférendou d'unequestion,iuridique
pendante entreEtats

26. Les vues qui précèdent reposent sur l'hypothèse que, pour déter-
miner si la Cour pouvait et devait faire droit à la requêtede l'Afrique du
Sud, il était inutile de décidersi l'affaire relevait strictement des termes
de l'article 83 du Règlement.Pour ma part, je considèreque c'est le cas
et que toute autre conclusion manquerait de réalismeet équivaudrait à
refuser délibérémend te voir la situation comme elle est. En effet, elle
reviendrait presque à assimiler la situation décrite par les mots ((une

questionjuridique actuellement pendante entre deux ou plusieurs Etats ))
qui figurent à l'article 83,à celle de deux ou plusieurs Etats s'opposant
dans un procès déjàentaméou sur lepoint del'être. J'ai déd jitque cette
interprétation réduirait pratiquement ànéantl'effetqu'on a voulu donner
à l'article 83, en limitant sa portée à des situations qui se présentent
rarement sous cetteforme préciseenmatièreconsultative.

27. Le nŒud du problème résidedans le mot ((pendante »; mais si
l'on prend ce terme dans l'acception normale qu'en donnent les diction-
naires 17,à savoir « non encore décidé a (remaining undecidedou not yet
decided), et cnon terminé » ou ((non encore tranché » (not terminated,
remainingunsettled), bref ((en souffrance »,il est évident qu'il existetoute
une sériede questionsjuridiques en jeu ouen contestation entre l'Afrique
du Sud d'unepartet plusieurs autresEtats d'autrepart,et qu'en cesensces

questions sont en souffrance et non résolues,dans la mesure où l'opinion

l6 En conséquence de quoi la Cour s'est trouvée obligéeen pratique, et d'une
manière virtuellement sans précédenten matière consultative, de laisser se dérouler
la procédure orale comme si un procès était en cours.
l7Définitions données, pour l'anglais, dans des éditions récentes du Chambers
Twentieth Century Dictionary et du nouveau Penguinnglish Dictionary.qu'une partie se fait de la manièrecorrecte de les résoudrediffèretotale-
ment de celledesautresparties. Peut-on concevoir en la matièrequestions
plus concrèteset plus fondamentalesque cellesquiconsistent par exemple
à déterminers'il a étémis fin légalementau Mandat pour l'Afrique du
Sud ou si ce mandat existe encore, si l'Afrique du Sud est déchuede ses
fonctions dans le Sud-Ouest africain ou si elle a encore quelque titre à

administier ce territoire, et si le fait qu'elle y maintient sa présence
constitueuneusurpation illégaleou bien l'exercicelégitimed'une autorité
constitutionnelle? Quelle situation pourrait être plus radicalement
litigieuse que celle où, suivant les réponses données à ces questions,
l'Afrique du Sud est invitée à quitter le territoire alors qu'elle-même
affirme son droit d'y rester, où l'on soutient d'un côtéque la résolution
2145 (1966)de l'Assembléegénéralea régléle problème, de l'autre que
cette résolution constituait un abus de pouvoir, qu'elle est dépourvue
d'effetjuridique et par conséquentqu'ellen'a rien résolu?En fait, l'affaire
répondexactement à la définitiondu différendque, suivant l'exemplede
mon ancien collègueM. Morelli, j'ai donnée dans mon opinion indivi-
duelle en l'affaireduCameroun septentrional(C.I.J. Recueil1963,p. 109),

oùj'ai dit quelacondition essentielleétait que:
((l'unedes Parties [ou les parties] formule ou ait formulé,àpropos
d'une action, d'une omission ou d'un comportement présentésou
passésde l'autre Partie, un grief, une prétentionou une protestation

que ladite Partie conteste, rejette ou dont elle déniela validité, soit
expressément,soit implicitement en persistant dans l'action, I'omis-
sion ou le comportement incriminés,ou bien en ne prenant pas la
mesure demandée, ou encore en n'accordant pas la réparation
souhaitée )).
Si cette définitionne décritpas la situation qui existe depuis longtemps

entrel'Organisation desNations Unies, ounombrede sesEtats Membres,
et l'Afriquedu Sud,je ne voispas cequi pourrait lefaire.

28. On dira peut-être que ces problèmes, bien que concrets et non
résolus et, par conséquent,((pendants »et «actuellement pendants »,au
sens naturel et ordinaire, ne sont pas, au sens premier qu'on a voulu
donner à ces mots, pendants ((entre deux ou plusieurs Etats », parce
qu'ils se posent d'une façon trop généraleentre l'Afrique du Sud d'une

part, et d'autre part l'Organisation des Nations Unies en tant qu'entité
ou un groupe de sesMembres, et non pas des Etats pris individuellement.
En d'autres circonstances les arguments en faveur de cette manière de
voir ne manqueraient peut-être pas. Mais la résolution par laquelle
l'Assembléegénéralea entendu mettre fin au Mandat a entraîné, et
c'étaitd'ailleurs bien l'un de ses buts, une situation dans laquelle plu- NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 315
sieurs Etats, s'appuyant précisémentsur cette résolution, ont pris des

mesures individuelles en dehors de l'Organisation des Nations Unies
dans leurs relations avec l'Afrique du Sud pour ce qui concerne le Sud-
Ouest africain - l'on trouve des détailsà ce sujet dans l'exposéfait par
le conseil de l'Afrique du Sud à l'audience préliminaire du 27 jan-vier
1971 la:
29. Il devrait suffir- et il suffira- de donner ici un seul exemple,
celui du problèmede l'application au Sud-Ouestafricain dela convention

internationale des télécommunications deMontreux (1965). Lorsqu'-
elle a adhéré à cette convention, l'Afrique du Sud en a donnénotification
en bonne et due forme, par écrit, et a fait savoir que la convention
s'appliquerait aussi au Sud-Ouest africain. A la suite de quoi plusieurs
Etats l9 ont adresséau secrétariatde 1'UITdescommunications officielles
qui allaient toutes dans le même sens, à savoir que précisémene tn raison

de la résolution 2145 de l'Assembléegénéraleq , ui était censéemettre fin
au Mandat, l'Afrique du Sud n'avait plus le droit d'administrer le Sud-
Ouest africain ni deparler en sonnom, et qu'en conséquencel'application
dela convention àceterritoireétait sans valeur et sans effet.En mai 1967,
le conseil d'administration de 1'UIT envoyait aux Etats membres une
circulaire sollicitant leur avis sur la question, et leur demandait s'il
à l'Afrique du Sud le droit de représenter leSud-Ouest
fallait retirer
africain. Le23mai 1967,l'Afrique du Sud a envoyé une réponse détaillée
et circonstanciée affirmant lemaintien de son droit de représenter le
Sud-Ouestafricain. Néanmoins, àla sessionsuivante delYUIT,lamajorité
s'estprononcéepour le ((retrait B.Voilà donc un différendévidentet con-
cret, non seulement entre l'Afrique du Sud etlamajoritédesmembres de
I'UITentantaue tels.maisaussiindividuellemententre1'Afriauedu Sud et

ceux des membres q;i ont pris l'initiative de souleverleprobfème.L'objet
de ce différend estde savoir si la convention de 1965 est ou n'est pas
applicable au Sud-Ouest africain; or ce différend,ou question juridique,
pour reprendre les termes de l'article 83 du Règlementde la Cour, non
seulement est actuellement pendant entre l'Afrique du Sud et ces Etats,
et continuera à l'être,mais il constitue une des«conséquencesjuridiques ))
possibles de laprétendueextinction du Mandat que la Cour pourrait avoir

à examinerdans laprésente affaire.

30. Pour toutes ces raisons, s'il étaitnécessairede démontrer, ce qui
a mon avis ne l'estpas, que la Cour n'a besoin d'aucun pouvoir résiduel

en dehors de ceux que lui confère l'article83du Règlementpour autoriser

l8C.R. (H.C.) (Rev.), p. 19 à 28.
l9Ces Etats sont les suivants, dans i'ordre de leur énumérationau compte rendu
République arabe unie, Union soviétique, R.S.S. d'Ukraine, R.S.S. de Biélorussie
et Pologne.la désignationd'un juge ad hoc sud-africain, je dirais que les conditions
spécifiéesdans cet article étaient pleinement remplies et que l'article
étaitapplicable, de sorte que la Cour aurait dû faire droità la requête,
comme d'ailleurs la justice et l'équitéauraient dû l'inciterle faire dans
l'exercice de son pouvoir discrétionnaire incontesté.En vérité,s'il y a
jamais eu une affaire consultative où il étaitjustifié d'autoriser la dési-
gnation d'unjuge adhoc,c'estbien celle-ci.

31. Les considérations qui précèdentcomportent deux conséquences
assez graves. La première est qu'en refusant l'autorisation de désigner
un juge ad hoc, la Cour a décidéen réalitéque l'affaire n'impliquait
aucun différend,préjugeant ainsile fond de plusieursquestions soulevées
par l'Afrique du Sud et qui dépendaient del'existenceou de l'inexistence
d'undifférend,alorsqu'aucune argumentation n'avait encoreétéprésentée
sur ces points qui n'ont été débattus qu'après lapublication de l'ordon-
nance par laquelle la Cour s'estprononcée. Il en estrésulté unesituation
telle que, dans la plupart des systèmesjuridiques nationaux, l'affaire
serait, en appel, renvoyéepour un nouveau jugement. De même,la Cour
s'est virtuellement interdit d'examiner toute question de fait; en effet,

il est difficiled'aborder des points de fait litigieux hors du cadre d'une
procédure contentieuse supposant que l'existence d'un différenda été
reconnue. Là encore la Cour a agi avant d'avoir entendu l'Afriquedu Sud
au sujet de la présentation de nouvelles preuves sur les faits, bien que
l'Afrique du Sud lui eût fait savoir par écrit,dèsle début, que ce com-
plément de preuvelui paraissait pertinent et important. La situation n'est
modifiée en rienpar le fait que, comme l'avis de la Cour le souligne
à juste titre, la question du juge ad hoc, intéressantla composition de la
Cour, doit êtrerégléeavant toute chose - bien que celaindique peut-être
un défautgrave du Règlementactuel. Il reste qu'ayant rejetéla demande
de désignationd'un juge ad hoc - précisémenp tour la raison qu'il n'y
avait ni différend niquestion juridique pendante (car si la Cour avait
penséle contraire, l'article3 du Règlementl'aurait obligée à consentir
à la demande) - la Cour se voyait désormaisempêchée en pratique, à

propos detoute question ultérieure,d'en venir àuneconclusion différente
quant à I'existenced'un litige ou d'une question pendante. Si la Cour,
sans rien préjuger, s'était bornéeà exercer son pouvoir discrétionnaire
en autorisant la désignation (commeelle aurait dû le faire de toute façon
d'aprèsmoi), aucune difficulténe seserait présentéepar la suite. Mais elle
aurait au moins dû, à cestade, permettre que la question soit pleinement
débattueau cours d'audiencespubliques normales.

32. La deuxième conséquence est que, si l'on y ajoute ce que mon
collègueM. Gros, dont je partage les vues, a fait observer à propos de
la dernièredes trois ordonnances de la Cour viséesau paragraphe 18dela présente annexe,le refus d'autoriser la désignationd'un juge ad hoc
créechez moi des inquiétudes àpropos desquelles il me suffira de dire
ici queje m'associeentièrementaux observations faites à la fin du para-
graphe 17del'opinion dissidentede M. Gros.

(Paraphé)G. F. TABLE SYNOPTIQUE

GRANDE SECTIONS

Paragraphes

PREMIÈRE PARTIE: Considérations introductives ....... 1-10
DEUXIÈME PARTIE :Fond ................. 11-123

SECTION A: Non-subrogation de l'organisation des Na-
tions Unies à la Société desNations dans ses
pouvoirs relatifs aux mandats. ...... 11-64
SECTION B: En tout cas le pouvoir de révocation uni-
latérale n'entrait pas dans les pouvoirs de
la SdN. ................ 65-89
SECTION C: Limites de la compétenceet despouvoirs que
les organes principaux des Nations Unies
tiennent de la Charte .......... 90-116
SECTION D: (Conséquencesjuridiques pour les Etats )) . 117-124
POST-SCRIPTUA Mu:tres conséquences. .......... 125

ANNEXEQ : uestions préliminaireset questions incidentes.. 1-32

PREMIÈRE PARTIE:Considérations introductives 1-10
.......
1. Véritables problèmesse posant en l'espèce ....... 1-9
2. Ordre et énoncédes conclusions principales ...... 10

DEUXIEM PARTIE :Fond ................. 11-125
SECTION A: Non-subrogation de l'organisation des Nations
Unies àla Sociétédes Nations dans sespouvoirs
relatifs aux mandats ............ 11-64

1. L'Organisation des Nations Unies n'est pas en droit le
successeur de .la Société desNations - Méthodes
possibles de successionpar voie d'accord, implicitement,
par voie de consentement (novation). ........ 11-13
2. Absence de succession automatique et implicite .... 14-19

i) La fonction de surveillance comme corollaire de
l'obligation de faire rappo........... 14 Paragraphes

ii) Distinction entre l'obligation de faire rapport propre-
ment dite et le droit d'exiger l'exécutionde cette
iii) L'obligation de faire rapport pouvait être remplie . .
autrement qu'en faisant rapport à un organe de
l'ONU . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
vi) L'obligation de faire rapport ne s'est pas automati-
quement transformée en un devoir envers 1'Assem-
bléegénérale desNations Unies, entité nouvelle et
différente.Indication des différences . . . . . . .
v) Conclusion concernant une succession implicite . .

3. Arguments contraires concernant cette conclusion. . .

a) Avis consultatif de la Cour du 11juillet 1950 . . .
b) Question des déductions que l'on prétend pouvoir
tirer de la Charte . . . . . . . . . . . . . . .
i) En général . . . . . . . . . . . . . . . . .
ii) Article 10 . . . . . . . . . . . . . . . . .
iii) Article 80 . . . . . . . . . . . . . . . . .
c) L'argument dela ((communautémondiale organisée 1)

4. Rejet politique, aux Nations Unies (en 1945-1946),de
toute continuitéavec la Société desNations . . . . .
a) En généralet en principe . . . . . . . . . . . .
i) Attitude à l'égardde la Sociétédes Nations . .
ii) RésolutionXIV de l'Assemblée générale ed nate
du 12février1946. . . . . . . . . . . . . .

b) En ce qui concerne les mandats en particulier . . .
i) Politique établie tendant à donner la préférence
au régimede tutelle et à s'appuyer sur ce régime.
ii) Résolution finale de la Sociétédes Nations sur
les mandats (18 avril 1946) . . . . . . . . . .
Le projet cchinois » . . . . . . . . . . . .
La référenceau chapitre XI de la Charte. . .
c) Motifs expliquant l'attitude des Nations Unies sur
les mandats - Importance de cette attitude . . . .
d) Conclusions relatives aux effets juridiques de cette
attitude. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

5. Question du consentement. Le Mandataire ne reconnaît
aucune obligation de rendre compte à l'organisation
des Nations Unies. . . . . . . . . . . . . . . . . Pari

a) Principes généraux . . . . . . . . . . . . . . .
i) Défautde base réellede consentement . . . .
ii) Il y a eu novation. . . . . . . . . . . . . .
iii) Effetjuridique des «déclarations d'intention ». .
b) Evénementsparticuliers. . . . . . . . . . . . .
i) Résolution finale de la Société desNations du
18avril 1946 . . . . . . . . . . . .. . . . .
ii) Question de l'incorporation du Sud-Ouest afri-
cain à l'Afrique du Sud . . . . . . . . . . .
iii) Offre du Mandataire de fournir des rapports en
vertu de l'article 73e) de la Charte . . . . . .
c) Conclusions relatives au consentement . . . . . .
6. Conclusion générale de la section A. Aucune fonction de
surveillance n'a jamais étédévolue à l'organisation des
Nations Unies . . . . . . . . . . . . . . . . . .
SECTION B: En tout cas, le pouvoir de révocationunilatérale
n'entrait pas dans les pouvoirs de la SdN. . . .

1.grands que ceux que possédait lauvoirSdNutr. . . pl.s. . .
2. La SdN n'avait aucunpouvoir de révocation unilatérale,
exprèsou implicite . . . . . . . . . . . . . . . .

a) Présomption contre l'existenced'un tel pouvoir . .
b) Itermes des instruments pertinents et des principes
admis d'interprétation . . . . . . . . . . . . .
i) Caractère essentiellement non absolu du système
des mandats . . . .. . . . . . . . . . . .
ii) Portéelimitéede la fonction de surveillanceexer-
céepar le Conseil de la Société desNations . .
iii) Règle de voteà la Société des Nations - Unani-
mité y compris le vote du mandataire . . . . .
iv) Examen contemporain et rejet de la notion de
révocabilité. . . . . . . . . . . . . . . . .
v) Clause du mandat concernant l'administration
comme (partie intégrante ). . . . . . . . . .
c) Indications positives contraires 2) résultant des cir-
constances qui régnaientau moment où le système
des mandats a étéétabli. . . . . . . . . . . . .
3. Conclusion généralede la section B. Les mandats
n'étaientpas censésêtreunilatéralement révocables. .
Vérificationde cette conclusion . . . . . . . . . . Paragraphes
SECTION C: Limites de la compétenceet des pouvoirs que les
organes des Nations Unies tiennent de la Charte 90-116

1.L'Assemblée général ............... 91-107
i) Ses pouvoirs n'ont pas en principe un caractère
exécutif- Ses résolutions sont de simples recom-
mandations non obligatoires. ..........
ii) Elle ne peut exercer les pouvoirs qu'elle tient d'une
autre source ou de l'extérieurque siellereste dans les
limites de la compétenceque la Charte lui confère .
iii) Facteurs confirmant ces conclusions .......

Opinions Klaestad-Lauterpacht dans l'affaire de
la Procédurede vote .............
Réponse donnéepar la Cour à la question c) dans
la procédureconsuItative de 1950 .......
iv) Conclusion quant aux pouvoirs de l'Assemblée. Elle
ne peut prendre que des recommandations dans le
domaine des mandats. Elle n'a pas compétencepour
procéder à une révocation. ...........
2. Le Conseil de sécurité ...............

i) Caractère accessoire des résolutions du Conseil de
sécurité en la présenteespèce ..........
ii) Le Conseil de sécuriténe possède pas de pouvoirs
autres ou plus grands que ceux de l'Assembléeen
matière demandats ..............
iii) Le Conseil de sécurité n'apas compétence pour
exercer des pouvoirs plus grands, sous le prétextedu
maintien de la paix, à moins qu'il n'existe une
menace véritablecontre la paix et la sécurité. ...
iv) Etendue réelle despouvoirs du Conseil de sécurité
relatifs au maintien de la paix en vertu de la Charte
- Effet des articles 24 et 25...........
v) Le Conseil de sécuriténe peut, mêmeaux fins du
maintien de la paix, effectuer des changements
touchant à la souverainetéterritoriale ouà des droits
d'administration territoriale...........

SECTION D: ((Conséquencesjuridiques pour les Etats)) ... 117-124
1. Généralités. ................... 117
2. Pour l'Afrique du Sud. .............. 118-121

3. Pour les autres Etats ............... 122-124

POST-SCRIPTUM :Autres conséquences. .......... 125 Paragraphes
ANNEXE Q:uestions préliminaires et questions incident... 1-32

1. L'Assembléedes Nations Unies est incompétente pour
agir comme tribunal. ................ 1-8
2. Droit pour la Cour d'examiner les prémissesde toute
demande d'avis consultatif. ............. 9-12
3. La Cour devrait-elle donner suite à la demande d'avis
consultatif en l'espèce?............... 13-16
4. La question de la nomination d'unjugead hocsud-africain 17-32

a) Les dispositions applicables du Statutet du Règlement 17-25

b) Question de savoir s'il existait un différe..... 26-32

Bilingual Content

DISSENTING OPINION OF
JUDGE SIR GERALD FITZMAURICE

[A summary of main conclusions
is given in paragraph 10 of this Opinion; and a synoptical table
of contents appears at the end, after the Annex.]

1. The real issues in thecase

1. Although 1 respect the humanitarian sentiments and the avowed
concern for the welfare of the peoples of SW. Africa which so clearly
underlie the Opinion of the Court in this case, 1cannot as a jurist accept
the reasoning on which it is based. Moreover, the Opinion seems to me
insufficiently directed tohose aspects of the matter which really require
to be established inorder to warrant the conclusion that South Africa's
mandate in respect of SW. Africa stands validly revoked. Much of the
substance of the Opinion (i.e., that part of it which does not deal with
formal, preliminary or incidental matters) istaken up with demonstrating
that League of Nations mandates,as an international institution, survived
the dissolution of the League-whereas what is really in issue in this case

is not the survival of the Mandate for SW. Africa but its purported
revocation. Whether or not South Africa still disputes the survival of the
Mandate, it certainly disputes its survival in the form of an obligation
owed to the UnitedNations (this is the basic issue in the case); and denies
that the organs of the United Nations have any competence or power
to revoke it.

2. As regards the Court's conclusion that the Mandate has been
validly revoked, this can be seen to rest almost exclusively on two
assumptions-or rather, in the final analysis, on one only.1 speak of
assumptions advisedly,-and indeed, concerning the second and more
far-reaching of the two (which in one form or another really underlies
and entirely motivates the whole Opinion of the Court), there is an
open admission that nothing more is needed-the matter being "self- OPINION DISSIDENTE DE SIR GERALD FITZMAURICE

[Traduction]

[On trouvera au paragraphe 10 de la présente opinion
un résumé des principales conclusions età la fin, aprèsl'annexe,
une table synoptique.]

1. Véritablesproblèmesse posant en l'espèce

1. Quel que puisse êtremon respect pour les sentiments humanitaires
et pour le souci déclarédu bien-être des peuplesdu Scd-Ouest africain
qui inspirent si évidemmentl'avis consultatif de la Cour en cette affaire,
je ne puis, en tant que juriste, accepter l'argumentation sur laquelle il
repose. De plus, l'avisne me semblepas accorder une attention suffisante
aux aspects de la question qu'il importe réellement d'établir afin de
pouvoir conclure que le Mandat de l'Afrique du Sud pour le Sud-Ouest

africain est valablement révoqué.Une grande partie des développements
sur le fond (c'est-à-dire figurant dans la partie de l'avis qui ne traite pas
de questions formelles, préliminairesou incidentes) viseà démontrerque
les mandats de la Société des Nations ont survécuen tant qu'institutions
internationales à la dissolution de la Société - alors que ce qui est
réellement encause dans cette affaire estnon pas la survivance du Mandat
pour le Sud-Ouest africain mais sa prétendue révocation. Que l'Afrique
du Sud persiste ou non à contester la survivance du Mandat, ce qui est
certain c'est qu'elle conteste cette survivance en tant qu'obligation
envers les Nations Unies (c'est là le point essentiel), et qu'elle dénieaux
organes des Nations Unies toute compétenceou pouvoir de révoquerle

Mandat.
2. Quant à la conclusion de la Cour, qui consiste à affirmer que le
Mandat a été valablement révoqué e,lle repose presque exclusivement sur
deux postulats - ou plutôt, en dernière analyse, sur un seul. C'est à
dessein queje parle de postulats:pour le deuxième,qui est le plus radical
et qui, d'une manièreou d'une autre est véritablement sous-jacent à tout
l'avisde la Cour et en constitue toute la motivation, il est mêmeouverte-
ment admis que ce n'est pas la peine d'aller plus loin, la question étant

208 evident". These two assumptions arefirst that there was, or there must
have been, an inherent right, vested in the United Nations, unilaterally to
revoketheMandatein the event offundamental breaches ofit (unilaterally
determined to exist),-and secondly, that there have in fact been such
breaches. Since it is clear that the supposed inherent right of revocation,

evenifit exists,could never be invoked excepf on a basis of fundamental
breaches (several passages in the Opinion specificallyrecognize that only
a material breach could justify revocation), it follows that the whole
Opinion, or at least its central conclusion, depends on the existence of
such breaches. How then does the Opinion deal with this essential

matter?-essential because, if there is insufficientjustification in law for
the assumption, the whole Opinion must fa11to the ground, as also
(though not onlyfor that reason) must theGeneral Assembly's Resolution
2145 of 1966 purporting to revoke, or declare the termination of the
Mandate, which was predicated on a similar assumption l.

3. The charges of breaches of the Mandate are of two main kinds. The
first relates to the failure to carry out, in relation to the UnitedNations an
obligation which, in the relevant provision of the Mandate itself (Article
6),is described as an obligation to make an annual report "to the Council
of the League of Nations". At the critical date however, at which the

legal situation has to be assessed, namely in October 1966 when the
Assembly'sresolution 2145purporting to revoke the Mandate, or declare
its termination, was adopted, the view that the failure to report to the
Assembly of the United Nations constituted a breach of it-let alone a
fundamental one-rested basically (not on a judgment but) on an

Advisory Opinion given by this Court in 1950which, being advisory only,

lSince it is important that the true character and purport of this Resolution-
(not reproduced in the Opinion of the Court)-should be understood, especially
as regards its tone and real motivation,1 set it out verbatim and in extenso in the
Annex hereto (section 3, paragraph 15). There is hardly a clause in it which is not
open to challenge on grounds of law or fact;-but considerations of space forbid
a detailed analysis of it on the present occasion.
(a)SOfar as the reporting obligation is concerned, which is a distinct issue
from that of the survival of the Mandatein se, the 1955, 1956 and 1962 pronounce-
ments of the Court merely referred to the 1950Opinion and added no new reasoning.
ln its 1962Judgment in the preliminary (jurisdictional) phase of the then SW. Africa
cases (Ethiopia and Liberia v. South Africa) in which the issue was not Article 6
but Article 7 of the Mandate, the Court, as an obiter dictum, sirnpiy recited with
approval the Court's 1950 Opinion about the rsporting obligation and did not
further deal with the matter, which therefore still rests essentially on the 1950
Judgment, both of which appear on p.si347 of the Court's 1962Volume of Reports,
is there any mention of or pronouncement on it. The 1955 and 1956 Opinions given
in the Voting Procedure and Righi of Petitions cases were equally consequential
upon and based on, the original 1950 Opinion.

(b) It is not without significance perhaps, that the failure to render reporto
the Assembly-so heavily relied on in the Opinion of the Court-isnot specificaily

209évidente. Ces deuxpostulats sont: primo, qu'il y avait ou qu'il devait y
avoir un droit inhérent, appartenant aux Nations Unies, de révoquer
unilatéralement le mandat en cas de violation fondamentale de celui-ci
unilatéralement constatée; secundo, que de telles violations se sont
effectivementproduites. Etant donné qu'il estclair que ce prétendudroit

inhérentde révocation, à supposer qu'il existe, n'ajamais pu êtreinvoqué
si ce n'est à la suite de violations fondamentales (plusieurs passages de
l'avis reconnaissent expressémentque seule une violation substantielle
justifierait la révocation),il en découleque l'avisen général,ou du moins
sa conclusion principale, dépend de l'existence de ces violations. Et
comment l'avis traite-t-il cette question essentielle? - essentielle parce

que, si la thèse des violations fondamentales n'a pas de justification
suffisante en droit, tout l'avis s'écrouleforcément, demêmeque (mais pas
seulement pour cette raison) la résolution 2145 de 1966 par laquelle
l'Assembléegénérale aprétendurévoquerou déclarer terminéle Mandat
et qui reposait sur un postulat analogue '.
3. Les accusations de violation du Mandat rentrent sous deux chefs

principaux. La première porte sur le fait de ne pas avoir rempli à l'égard
desNations Uniesune obligation qui, dansla clausepertinente du Mandat
(art. 6), est décrite commeune obligation d'envoyer un rapport annuel
au Conseil de la Société des Nations ». Or, à la date critiqueà laquelle la
situation juridique doit être appréciée, c'est-à-direen octobre 1966,
époqueoù la résolution2145de l'Assembléegénérale visant à révoquerle

Mandatou à en déclarerla cessation a été adoptéel,'idéeque ne pas faire
rapport à l'Assembléegénéraledes Nations Unies pût constituer une
violation du Mandat - et à plus forte raison une violation fondamentale
-reposait essentiellementnon pas sur un arrêt 2, mais sur un avis consul-

Puisqu'il importe que le caractère et l'intention véritables de cette résolution
(qui n'est pas reproduite dans l'avis de la Cour) soient bien compris, en particulier
pour ce qui est du ton employé et des vrais motifs, je la reproduis in extenso
dans l'annexe à la présente opinion (section 3, p15).Elle ne contient guère de
ne pas faire trop long interdit toutefois de se livrer icilyse détailléele souci de
a) Au sujet de l'obligation de faire rapport, qui constitue un problème distinct
de celui de la survivance du Mandat en soi, les décisionsde la Cour de 1955, 1956
et 1962 n'ont fait que se référeravisconsultatif de 1950 sans ajouter de nouveaux
motifs. Dans son arrêt de 1962, rendu en la phase préliminaire (juridictionnelle)
des affaires intéressant ce qu'on appelait alors le Sud-Ouest africain (Ethiopie et
Libériac. Afrique du Sud), et dans laquelle le problème concernait non pas l'article
6 du Mandat mais son article 7, la Cour a purement et simplement repris à titre
d'obiterdicrum son propre avis de 1950 sur l'obligation de faire rapport et n'a pas
étudié davantagela question qui par suite repose éncore essentiellement sur l'avis de
1950. Ni dans la conclusion principale de l'arrêt de1962,ni dans son dispositif, que
l'on trouve à la page 347 du Recueil de le Cour pour 1962,la Cour ne s'est prononcée
sur ce point ni n'en a fait mention. Les avis consultatifs de 1955 et de 1956 sur la
Procédurede voteet l'Admissibilité del'audition depétitionnaires découlent également
deb)'Il n'est peut-être pas indifférentque le fait de ne pas avoir soumis des rapports
êl'Assemblée générale- auquel le présent avis de la Cour attache un si grand

209 and rendered to the United Nations, not South Africa, was not binding
onthe latter and, as regards thisparticular matter, was highly controversial

in character, attracted important dissents, and was the subject of much
subsequent serious professional criticism. This could not be considered an
adequate basis in law for the exercise of a power of unilateral revocation,
even if such a power existed. There cannot be a fundamental breach of
something that has never-in a manner binding upon theentity supposed
to be subject toit-been established as being an obligation at all,-which
has indeed always been, as it still is, the subject of genuine legal contes-
tation. That South Africa denied the existence of the obligation is of

course quite a different matter, and in no way a sufficient ground for
predicating a breach of it.

4. The second category of charges relates to conduct, said to be
detrimental to "the material andmoral well-beingand the social progress"
of theinhabitants of themandated territory, and thus contrary to Article 2
of the Mandate. Thesechargeshadnever,ut the criticaldate of theadoption

of Assembly resolution 2145, been the subjectof anyjudicial determination
at al/,-and in the present proceedings the Court has specifically refused
to investigate them, having rejected the South African application to be
allowed to present further factual evidence and connected argument on
the matter. Thejustification forthis rejection is said to be that practices of
"apartheid", or separate development, are self-evidently detrimental to
the welfare of the inhabitants of the mandated territory, and that since
these practices are evidenced by laws and decrees of the Mandatory which

are matters of public record there is no need for any proof of them. This
f is an easy line to take, and clearly saves much trouble. But is it becoming
to a court of law?-for the ellipsis in the reasoning is manifest. Certainly
the authenticity of the laws and decrees themselves does not need to be
established, and can be regarded as a matter of which, to usethe common
law phrase, "judicial notice" would be taken without specificproof. But
the deductions to be drawn from such laws and decrees, as to the effecî
they would produce in the particular local circumstances, must obviously
be at leastopen to argument,-and there are few, if any, mature systems

of private law, the courts of which, whatever conclusions they might
ultimately come to, would refuse to hear it. Yet it was on the very

mentioned (though presumably intended to be implicitly covered) in Assembly
resolution 2145, amongst the reasons for purporting to terminate the Mandate.
territory, which could not by any process of reasoning be a valid legal ground of
unilateral revocation.

Much evidence both written and oral was of course laid before the Court in
the 1965-1966 proceedings. But only four judges out of those who then composed
the Court now remain,-and in any case the Court, as such, has not made any
collective study of that evidence at in the course of the present proceedings. NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 222

tatif donnépar la Cour en 1950lequel, n'étantque consultatif et s'adres-
santnonpas à l'Afrique du Sud mais à l'organisation des Nations Unies,
ne liait pas l'Afrique du Sud et qui, sur ce point particulier, a prêté à
maintes controverses, a suscité des prisesde position dissidentes impor-
tantes et a inspirépar la suite maintes critiques graves aux spécialistes.
On ne saurait y voir un fondement juridique adéquatpour l'exerciced'un

pouvoir de révocation unilatérale, celui-ci existerait-il. Il ne saurait y
avoir violation fondamentale de quelque chose dont on n'a jamais
établi - d'une manière contraignantepour l'entité qui estcensée y être
soumise - qu'il s'agit effectivementd'une obligation et qui en fait a
toujours donné et donne encore lieu à de véritables contestations juri-
diques. Que l'Afrique du Sud ait nié l'existencede l'obligation, c'est
évidemmentun autre problème mais ce n'est pas raison suffisante pour

établir au'elle l'ait violée.
4. Le deuxième chef d'accusation concerne le comportement, qualifié
de contraire c(au bien-être matérielet moral et au progrès social ))des
habitants du territoire sous Mandat et par suite à l'article 2 du Mandat.
A la date critiquedel'adoptiondelarésolution2145deI'Assembléegénérale,
cette accusation n'avait jamais donnélieu à une constatation judiciaire
quelconque et, dans la présente procédure,la Cour a expressément refusé
de l'examiner puisqu'ellea rejeté lademande de l'Afrique du Sud d'être

autorisée à présenter denouvelles preuves matérielles et desarguments
s'y rapportant. La justification de ce rejet serait que la pratique de
l'apartheidou développement séparéest de toute évidence~ré~judiciable
au bien-êtredes habitants du territoire sous Mandat et aue',l'existencede
cette pratique étant établiepar les dispositions législativeset réglemen-
taires du Mandataire, qui sont connues de tous, il n'est pas nécessaire
d'en administrer la preuve. C'est là un argument facile et quiépargne sans
aucun doute bien des efforts. Mais sied-il à un tribunal d'y recourir? Car

il est évident que le raisonnement est elliptique. Certes, l'authenticité
des lois et décretseux-mêmesn'a pas besoin d'être établie etpeut, comme
on dit dans les pays de common law, êtrejudiciairement enregistrée sans
qu'il soit besoin de preuve spécifique.Mais ilest manifeste que les déduc-
tions à tirer de ces textes quant aux effets qu'ils produiraient dans les
circonstances locales particulières de l'espècesont au moins sujettes à
examen; et il n'est guèrede systèmedéveloppé dedroit privé,s'il en est

un, dont les tribunaux refuseraient de s'y livrer, quelle que soit la

poids -ne soit pas (quoique sans doute viséimplicitement) expressémentmentionné
par la résolution2145 de l'Assemblée au nombre des motifs qui justifieraient la
cessation du Mandat. L'avis attache beaucoup plus d'importance à l'accession à
l'indépendance du territoire sous Mandat, considération qu'aucune méthode de
raisonnement ne saurait justifier en tant que motif juridiquement valable de révoca-
tionCertes, la Cour a disposéen 1965-1966 d'une abondante documentation écrite
et orale. Mais il nereste aujourd'hui que quatre desjuges qui la composaient alors
et de toute manière la Cour dans son ensemble ne s'est livréeà aucune étude collec-
tive de ces élémentsde preuve au cours de la présenteprocédure. question of the alleged self-evidently detrimental effect of its policies of
apartheid in SW. Africa, that the Mandatory wanted to adduce further
factual evidence. Thus the Court, while availing itself of principles of
contractual law when it is a question of seeking to establish a right of
unilateral revocation for fundamental breaches, fails to apply those
corresponding safeguards which private law itself institutes, directed to
ensuring that there have indeed beensuch breaches. It is not by postula-
tions that this can be done.

5. In consequence, since the whole Opinion of the Court turns, in the
final analysis, on the view that fundamental breaches of the Mandate
have occurred, it must (regrettably) be concluded that, in the circum-
stances above described, this finding has been reached on a basis that

must endanger itsauthority on account of failure to conduct any adequate
investigation into the ultimate foundation on which it professes to rest.

6. What, in truth, the present proceedings are or should properly
speaking, and primarily, be concerned with, is not any of this, but issues
of competence and powers,-for unless the necessary competence and
power to revoke South Africa's mandate duly resided in the organs of the
United Nations,-unless the Mandatory, upon the dissolution of the
League of Nations, became accountable to such an organ,-no infringe-
ments of the Mandate, however serious, could operate in law to validate
an act of revocation by the United Nations, or impart to it any legal
effect.Here the fallacy, based on yet another unsubstantiated assumption
underlying the whole Opinion of the Court, namely that the surYival of
the Mandate necessarily entailed the supervisory role of the United
Nations, becomes prominent.

7. ASto unilateral revocability itself, the Opinion proceeds according
to a conception of the position of the various League of Nations man-
datories, in relation to their mandates, which would have been considered
unrecognizable in the time of the League, and unacceptable if recognized.
My reading of the situation is based-in orthodox fashion-on what
appears to have been the intentions of those concerned at the time. The
Court's view, the outcome of a different, and to me alien philosophy, is
based on what has become theintentions of new and different entities and
organs fifty years later. This is not a legally valid criterion, and those
thinking of having recourse to the international judicial process at the
present time must pay close attention to the elaborate explanation of its
attitude on this kind of matter which the Court itselfgivesin its Opinion.

8. Under both heads,-the competence of the United Nations to
supervise, and the liability of the Mandate to (unilateral)vocation,-the

findings of the Court involve formidabIe legal difficulties which the NAMIBIE(S.-O. AFRICAIN) (OP. DISS. FITZMAURICE) 223

conclusion à laquelle ils aboutiraient en fin de compte. Pourtant, c'était
sur la question mêmedu prétendu effet évidemment nuisiblede sa poli-
tique d'apartheid dans le Sud-Ouest africain que le Mandataire voulait
fournir de nouvelles preuves matérielles. Ainsila Cour, tout en se préva-
lant de principes du droit des contrats pour chercher établirun pouvoir

de révocation unilatéralepour cause de violation fondamentale, n'ap-
plique pourtant pas les garanties correspondantes que le droit privé lui-
mêmeprévoit pour s'assurer qu'il y a bien eu violation. Ce n'est pas à
grand renfort de postulats qu'on peut faire cette vérification.
5. En conséquence,puisque tout I'avisconsultatif de la Courtourne en
dernière analyse autour de l'idéeque des violations fondamentales du
Mandat se sont produites, il faut constaterà regret que, dans lescircons-
tancesdécritesplus haut, cetteconclusion a été développée d'une manière
qui doit nécessairementcompromettre l'autorité de l'avis enraison d'un
examen insuffisant des prémissessur lesquelles il prétend se fonder.

6. Ce qui faisait à la vérité,ou à proprement parler aurait dû faire
l'objet essentiel de la présente procédure,ce n'étaient pasces questions
mais des problèmes de compétenceet de pouvoirs - car, à moins que la
compétence et le pouvoir nécessaires pour révoquer le Mandat de
l'Afrique du Sud appartiennent dûment aux organes des Nations Unies,
aucune infraction àce Mandat, pour grave qu'elle soit, ne pourrait avoir
pour résultaten droit de valider l'acte de révocationou de lui donner un
effetjuridique quelconque. C'est là qu'apparaît le caractère fallacieux du
raisonnement - procédant d'un autre postulat non démontré - sur
lequel repose tout l'avisde la Cour,àsavoir quela survivance du Mandat

supposait r~écessairementle rôle de surveillance de l'organisation des
Nations Unies.
7. Quant à la révocabilitéunilatérale,l'avispart d'une conception de la
position des divers mandataires de la Sociétédes Nations par rapport à
leurs mandats qui,à l'époquede la Sociétédes Nations, aurait étéconsi-
dérée commedénaturée etde toute façon inacceptable. Mon interpré-
tation de la situation se fonde, de manière orthodoxe, sur ce qui paraît
avoir étél'intention desprincipaux intéressés àI'époque.L'attitude de la
Cour, marquant l'aboutissement d'une philosophie différentequi m'est
étrangère,se fonde sur les intentions d'entités et d'organes nouveaux et
distincts quelque cinquante annéesplus tard. Ce n'est pas là un critère

juridiquement valable et ceux qui pensent recourir au processusjudiciaire
international à l'heure actuelle doivent tenir le plus grand compte de
l'explication de son attitude en ce genre de domaine que la Cour a écha-
faudéedans son avis.
8. Sur les deux points- celui de la compétence del'organisation des
Nations Unies en matière de surveillance et celui de la possibilité de
révocation unilatéraledu Mandat, les conclusions de la Cour soulèventOpinion turns rather than meets, and sometimes hardly seems to notice
at ail. Inferences based on the desirability or, as the case may be,the
undesirability, of certain results or consequences, do not, as my colleague
Judge Gros points out, form a satisfactory foundation for legal con-
clusions,-no more than would such an over-simplification of the issue
as that involved in the assertion that South Africa administered its
mandate on behalf of the United Nations which, therefore, had the right
to revoke it,-a viewwhich quietly begsvirtually everyquestion inthe case.
Here again, statements to the effect that certain results cannot be
accepted because this would be tantamount to admitting that given rights
were in their nature imperfect and unenforceable, do not carry conviction
as a matter of international law since, at the present stage of its develop-
ment, this is precisely what that system itself in large measure is, and
will, pending changes not at present foreseeable, continue to be. It is not

by ignoring this situation that the law will be advanced.

9. Given the Court's refusal to allow the appointment of a South

African judge au'hoc in the present case, in spite of its clearly very con-
tentious character (as to this, see section 4 of the Annex hereto), it is
especially necessary that the difficulties I refer toshould be stated, and
fully gone into. This must be my excuse for the length of an Opinion
which the nature of the case makes it impossible to reduce, except at the
risk of important omissions.

2. Arrangementandstatement of main conclusions

10. The substance of my view iscontained in the four sections A-D of
Part II hereof (paragraphs 11-124). A postscriptum on certain related
political aspects of the wholematter is added (paragraph 125).As regards
the various preliminary issues that have arisen, these-or such of them as
1 have felt it necessary to consider-are, together with one or two other
matters that can more conveniently be treated of there, dealt with in the
Annex that follows paragraph 125. On the substantive issues in the case

my principal conclusions, stated without their supporting reasoning, are
as follows:
(i) Although the various mandates comprising the League of Nations
mandates system survived the dissolution of that entity in 1946, neither
then nor subsequently did the United Nations, whichwasnot theLeague's
successorinlaw,become invested with the supervisory function previously
exercised by the Council of the League, asthe corollary or counterpart of
the mandatories' obligation to render reports to it. It was only if a

mandated territory was placed under the United Nations trusteeshipd'énormes difficultésjuridiques que l'avis consuItatif contourne plutôt
qu'il n'y fait face et dont il paraît parfoisine conscient. Des considé-
rations tenant à l'opportunité ou à l'inopportunité de certains résultats
ou conséquencesn'offrentaucun fondement satisfaisant àdesconclusions
juridiques, comme le souligne mon collègueM. Gros, pas plus d'ailleurs
qu'une simplification aussi excessive du problème que celle qui consiste

à affirmer que l'Afrique du Sud administrait le territoire sous Mandat au
nom des Nations Unies, qui avaient de ce fait le droit de révoquer le
Mandat - manièrede voir qui, tranquillement, suppose résoluespresque
toutes les questions se posant en l'espèce. Là encore, dire que certains
résultats sont inacceptables parce que, si on lesacceptait, cela reviendrait
à admettre que des droits déterminés étaientpar nature imparfaits et
non exécutoires n'est pas convaincant en droit international car, au
stade actuel de son évolution, ce système présente précisément un tel
caractère dans une large mesure et, en attendant des transformations
pour l'instant non prévisibles,le conservera. Ce n'est pas en méconnais-

sant cette situation quel'on fera évoluerle droit.

9. Vu !e refus de la Cour de permettre la désignationd'un juge ad hoc
sud-africain malgréle caractère nettement contentieux de I'affaire (sur

ce point voir la section4 de I'annexe à la présente opinion), il est parti-
culièrement nécessaire d'exposer et d'analyser ces difficultés. Cette
nécessitéme fera pardonner !a longueur d'une opinion que la nature de
l'affaire ne permettrait de réduire qu'au risque de commettre d'impor-
tantes omissions.

2. Ordre et énoncé des conclusions principales

10. Mon argumentation principale est développéedans les quatre
sections A à D de la deuxièmepartie de la présente opinion (par. 11-124)
et un post-scriptum sur certains aspectspolitiques connexes de l'ensemble

du problème s'y ajoute (par. 125).Quant aux divers points préliminaires
qui se posaient, ils seront- du moins ceux d'entre eux que j'ai estimé
nécessaire d'examiner - traités dans l'annexe quisuit le paragraphe 125,
en mêmetemps qu'une ou deux autres questions qu'il est pluscommode
d'aborder à cet endroit. Sur le fond mêmede l'affaire, mesconclusions
principales, énoncéessans leurs motifs, sont les suivantes:

i) Mêmesi les divers mandats qui formaient le système des mandats
de la Société desNations ont survécu à la dissolution de cette institution
en 1946,I'Organisation des Nations Unies, qui n'étaitpas le successeur
endroitdelaSociété desNations, n'a étéchargéenailors ni ultérieurement
de la fonction de surveillance qui était précédemmentexercéepar le
Conseil de la Société desNations en tant que corollaire ou contrepartie
de l'obligation des mandataires de lui faire rapport. La relation deveil- system (but there was no obligation to do this) that the supervisory
relationship arose. No mandates at al1(and not merely South Africa's)

wereever, as such, administered on behalf of the United Nations 4.

(ii) The reporting obligation also survived the dissolution of the
League, but became dormant until such time as arrangements for
reactivating it, comparable to those which existed under the League, and
acceptable to the Mandatory, could be made 5.It was not automatically

transformed into, nor ever became, an obligation owed to the United
Nations, such as to invest the latter with a supervisory function. The
Mandatory's consent to what would, in effect,have been a novationof the
obligation was never given.
(iii) Evenif the United Nations did become investedwith a supervisory
function in respect of mandates not converted into trusteeships, this
function, as it was originally conceived on a Eeague basis, did not

include any power of unilateral revocation. Consequently no such power
could have passed to the United Nations.

(iv) Even if such a power was possessed by the Council of the League,
the Assembly of.the United Nations was not competent to exercise it,
because of the constitutional limitations to which its action as a United

Nations organ was inherently subject having regard both to the basic
structure and specificlanguage of the Charter.

(v) Except as expressly provided in certain articles of the Charter not
material in the present context, the Assembly's powers are limited to
discussion and making recommendations. It cannot bind the Mandatory

any more than the Council of the League could do.

(vi) Having regard to conclusions (il-(iii) above, which relate to the
United Nations as a whole, the Security Council did not, on a mandatrs
basis, have any other or greater powers than the Assembly. Its action
could not therebre, on that basis, replace or validate defective Assembly

With the exception of SW. Africa, al1the various mandated territories-apart
of course from those that had become, or became, sovereign independent States-
were placed under United Nations trusteeship. This did not by any means take place
al1at onLe,-but eventually SW, Africa was the only one to retain mandated status.
However, as the Court found in its Advisory Opinion of 1950 concerning the
InternationalStatus of South West Africa (I.C.J. Reports 1950, at p. 144), the
mandatories were not under any legal obligation to place mandated territories under
the trusteeship system.
It appearsthatnone of the mandatories rendered reportsto the United Nations
in theinterval (which could be as much as about two years) before the mandated
territory was converted into a trust territory or, in some cases, became independent.lance ne prenait naissance que siun territoire sous mandat étaitplacésous
le régimede tutelle des Nations Unies (ce qui n'était pas obligatoire).
Aucun mandat (etpas seulement celui de l'Afrique du Sud) n'ajamais été,

comme tel, géréau nom des Nations Unies 4.
ii) L'obligation de faire rapport a survécuelle aussi à la dissolution de
la Société desNations, mais elle restait latentejusqu'à ce que des arran-
gements comparables à ceux qui existaient à l'époquede la Société des
Nations, acceptables pour le Mandataire, puissent être pris pour la
ranimer Elle ne s'estconvertie ni automatiquement ni autrement en une
obligation envers les Nations Unies, qui ait pu investir ces dernières
d'une fonction de surveillance. Le consentement du Mandataire à ce aui

aurait été en fait uneno~lationn'a jamais étédonné.
iii) Mêmesi l'Organisation des Nations Unies a étéeffectivement
chargéed'une fonction de surveillance sur les mandats non convertis en
tutelles, cette fonction, telle qu'elle étaitinitialement conçue dans le cadre
de la Société desNations, ne comprenait pas un pouvoir de révocation
unilatérale. Par suite, ce pouvoir ne peut avoir ététransmis à I'Organi-
sation des Nations Unies.
iv) Mêmesi le Conseil de la Sociétédes Nations avait possédéce

pouvoir, l'Assembléegénéraledes Nations Unies n'étaitpas compétente
pour l'exercer à cause des limitations constitutionnelles auxquelles son
action, en qualité d'organe des Nations Unies, était intrinsèquement
soumise, compte tenu à la fois de la structure de base et des termes
ex~rèsde la Charte.
v) Abstraction faite des dispositions expresses de certains articles de la
Charte qui ne sont pas pertinentes, les pouvoirs de l'Assembléegénérale
consistent seulement à discuter età recommander. L'Assembléene peut
pas plus obliger le Mandataire que le Conseil de la Société desNations ne

le pouvait.
vi) Compte tenu des conclusions i) à iii) ci-dessus, qui s'appliquenà
l'organisation des Nations Unies dans son ensemble, le Conseil de
sécuritén'avait pas, en ce qui concerne les mandats, d'autres pouvoirs ou
des pouvoirs plus larges que ceux de l'Assembléegénérale.Par suite, son
action ne pouvait pas, à ce titre, remplacer ou valider une action défec-

A l'exception du Sud-Ouest africain, les divers territoires sous masauf -
bien entendu ceux qui étaient ou sont devenus des Etats indépendants et souverains
- ont tousété placéssous tutelle des Nations Unies. L'opération ne s'est nullement
qui ait conservé son statut de Mandat. Toutefois, comme la Cour dit dans sonul
avis consultatif de950 sur le Statut intern~tional du Sud-Ouest afric(C.Z.J.
Recueil 1950, p. 144), les mandataires n'avaient aucunement l'obligation juridique
de placer les territoiressous mandat sous le régime detutelle.
11apparaît qu'aucun des mandataires n'a fait rapport aux Nations Unies dans
l'intervalle (quiu atteindre deux ans environ) précédantle moment où le territoire
sous mandat a étéconverti en territoire sous tutelle ou, dans certains cas, a accédé
àl'indépendance.action. The Security Council equally had no power to revoke the Man-
date.

(vii) The Security Council cannot, in the guise of peace-keeping,
validly bring about a result the true character of which consists of the
exercise of a purported supervisory function relative to mandates.
(viii) Even where the Security Council is acting genuinely for the
preservation or restoration of peace and security, it has no competence as
part ofthat process to effectdefinitiveand permanent changes in territorial
rights, whether of soverzignty or administration,-and a mandate
involves, necessarily, a territorial right of administration, without which
it could not be operated.
(ix) The "Legal consequences for States" of the foregoing conclusions
are that the Mandate was not validly revoked by Uriited Nations
action in 1966 or thereafter, and still subsists;-thatthe Mandatory is
still subject to al1the obligations of the Mandate, whatever these may be
and has no right to annex the mandated territory or otherwise unilaterally
alter its status;-but that nor has the United Nations,-and that its
meniber States are bound to recognize and respect this position unless and

until it is changed by lawfulmeans.

In Part II of this opinion, which comes next, the reasoning in support

of these conclusions is distributed in the following way: as to conclusions
(i) and (ii), in Section A, paragraphs 11-64; as to conclusion (iii), in,
Section B, paragraphs 65-89; as to conclusions (iv)-(viii), in Section C,
paragraphs 90-116; and as to conclusion (ix), in Section D, paragraphs
117-124. The postscriptum (paragraph 125) follows. The Annex is
separately paragraphed and footnoted.tueuse de l'Assemblée.Le Conseil de sécurité n'avaitpas non plus le
pouvoir de révoquerle Mandat.
vii) Le Conseil de sécurité ne peut pas, sous le couvert du maintien de
la paix, aboutir valablement à un résultat dont le caractère véritable
consisterait à exercer les fonctions de surveillance à l'égarddes mandats.

viii) Mêmesi le Conseil de sécurité agit véritablemenp tour préserver
ou rétablirla paix ou la sécuritéi,l n'a pas, dans ce domaine, compétence
pour opérerdes changements définitifset permanents de droits territo-
riaux, qu'il s'agissede souveraineté ou d'administration; or un mandat
comporte nécessairement undroit territorial d'administration, sanslequel
il ne pourrait être géré.
ix) Les ((conséquencesjuridiques pour les Etats )des conciusions qui
précèdentsont :

- que le Mandat n'a pas étérévoqué valablement à l'initiative des
Nations Unies en 1966ou ultérieurementet qu'il subsiste encore;
- que le Mandataire reste tenu de remplir toutes les obligations du
Mandat, quelles qu'elles puissentêtre,qu'il n'a ledroit ni d'annexer le
territoire sous Mandat ni d'en modifierle statut de toute autre manière;
- mais que l'Organisation des Nations Unies n'a pas ce droit non

plus et que ses Etats Membres sont tenus de reconnaître et de respecter
cette situation tant qu'elle n'aura pas étémodifiéepar des voies légales.

Dans la deuxièmepartie de la présente opinion, qui va suivre, l'argu-
mentation sur laquelle ces conclusions s'appuient se répartira ainsi: sur
les conclusions i) et ii), section A, paragraphes 11-64; sur la conclusion
iii), section B,paragraphes 65-89; sur les conclusions iv)àviii), sectionC,
paragraphes 90-116;sur la conclusion ix),sectionD,paragraphes 117-L24.

Viendra ensuite le post-scriptum (par. 125). Les paragraphes et les
notes de l'annexe sont numérotés à part. NAMIBIA (s.w. AFRICA DISS. OP. FITZMAURICE)

1. Absence of any legal successorshipas between the United
Nations and the League of Nations

11. There being no general rule of international law which would in-
volve a process of automatic successorship on the part of such an entity
as the United Nations to the functions and activities of a former entity
such as the League of Nations, there are only three ways in which the
United Nations could, upon the dissolution of the League, have becoine
invested with the latter's powers in respect of mandates as such: namely,
(a) if specific arrangement to that effect had been made,-(b) if such a
succession must be implied in some way,-or (c) if the mandatory con-

cerned-in this case South Africa-could be shown to have consented to
what would in effect have been a novation of the reporting obligation, in
the sense of agreeing to accept the supervision of, and to be accountable
to, a new and different entity, the United Nations, or some particular
organ of it.
12. It is my view that the United Nations did not in any of these three
ways become clothed with the mantle of the League in respect of man-
dates;-but as regards the first of them, it is necessary to make it clear at
the outset that the matter went far beyond the field of mandates. There
was in fact a deliberate,general, politically and psychologically motivated,
rejection of any legal or political continuity at al1 between the United
Nations and the League (seeparagraphs 35 and 36 below). Sincemandates

were regarded as one of the League's political activities, this raises a
presumption that there was not any takeover by the United Nations of the
League mandates system as such,-a view fully borne out by the creation
of the parallel United Nations trusteeship system, and the fact that the
mandatories were invited to convert their mandates into trusteeships,
though without obligation to do so. These matters will however more
conveniently be considered later, in their historical context;-and the
same applies to the question of whether South Africa, as Mandatory,
ever consented to the transfer to the United Nations of obligations which, NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 227

L>~RGANISATI OES NATIONU SNIES N'A JAMAIS ÉTÉ INVESTIE D'AUCUNE

FONCTION DE SURVEILLANCE CONCERNANT LES MANDATS EN TANT QUE TELS

1. Absence detoute successionjuridique del'Organisation
des Nations Uniesàla SociétédesNations

I1.En l'absence d'une règlegénéralede droit international qui ferait
intervenir un processus de succession automatique d'une entitécomme
l'Organisation des Nations Unies aux fonctions et activitésd'une entité
disparue comme la Société desNations, il n'y a que trois moyens par
lesquels l'ONU aurait pu, à la dissolution de la SdN, êtreinvestie des
pouvoirs de cette dernièretouchant les mandats en tant que tels:si des
dispositions avaient été prises spécialementcet effet; b) s'il y avait eu
d'une façon ou d'une autre succession implicite; si l'on pouvait établir

que le Mandataire, en l'occurrencel'Afrique du Sud, avait consentiàce
qui aurait étéune véritableovationquant àl'obligation de faire rapport,
en acceptant la surveillance d'une entiténouvelle et différente(l'ONU ou
l'un de sesorganes) et l'obligation de lui rendre compte.

12. A mon avis, I'ONU n'a accédé par aucun de ces trois moyens au
rôle de ladN en matièrede mandats; mais, en cequiconcerne lepremier,
il faut préciserd'embléeque la question dépassede beaucoup celle des
mandats. Il y a eu en fait un refus déliet généralm, otivépar des rai-
sons politiques et psychologiques, de consentir à quelque continuité

juridique ou politique que ce soitentre l'ONU et la (voir par.35 et 36
ci-après). Etant donné que les mandats étaient considéréscomme faisant
partie des activités politiques de la, il faut présumer qu'il n'y a pas
eu de prise en charge par I'ONU du système desmandats en tant que tel,
comme en témoignent amplement la création du régimeparallèle de la
tutelle des Nations Unies et lefait que lesmandataires ontinvités,mais
non obligés,à convertir leurs mandats en tutelles. 11sera cependant plus
commode d'examiner ces questions par la duite,en les replaçant dans leur
perspective historique, de mêmeque lepoint de savoir sil'Afrique du Sud,

en tant que Mandataire, a jamais consenti à ce que soient transférée.à
I'ONU les obligations lui incombant,à la date d'entréeen vigueur de laat thedate ofthe entry into force of the Charter, were owedto the League

whichwas then still in existence, and remained so for some time after.
13. Meanwhile 1turn to the second of the three possibilities mentioned
in the preceding paragraph,-namely that there was an impliedsuccession
by the United Nations to League functions in respect of mandates, and
correspondingly an implied transfer to the United Nations of the obliga-
tions owed by the Mandatory to the League. It is easy to assume that

because the United Nations had certain resemblances to the League and
might have been regarded as its "natural" successor, therefore it was the
legal successor;-but this was notthe case. It is no lesseasyto assume, as
the Opinion of the Court clearly does-virtually without arguing the
point-that if,and because,the various mandates survivedthe dissolution
of the League, therefore the United Nations must necessarily and ipso
facto have become entitled to exercise a supervisory role in respect of

them, although they were a League, not a United Nations institution,
and are mentioned in the Charter only as territories that can, but do
not have to be, placed under United Nations trusteeship. The fallacy
in this kind of reasoning-or rather, presupposition, is evident. Eventhe
argument that only the United Nations couldplay such a part is, as will
be seen, erroneous.

2. No automatic or impliedsuccession

(i) Origin and nature of
thesupervisoryfunction
14. The Council of the League of Nations (of which three of the prin-

cipal mandatories were permanent members) was never itself in terms
invested eo nomine with what has become known as the supervisory
function relative to the conduct of the various mandates 6.The veryterm
"supervisory" is moreover misleading in the light of the League voting
rule of unanimity including the vote of the member State affected,-that
is to Say,when mandates were in question, the mandatory. The so-called

supervisory function was in reality predicated upon and derivedfromthe
obligation of the mandatories 6ato furnish an annual report to the Coun-

6,6a, 6The plural, or the indefinite article, and small letter "mm is used in the
present opinion whenever the contextdoes not require the sense to be confined to
the Mandate for SW. Africa or South Africa as Mandatory. Failure to do this
must result in a distortion of perspective;-fosubject to the differences between
"A", "B" and "C" mandates, as adumbrated in paragraphs 4, 5 and 6 of Article 22
of the League Covenant, and as resulting froq the texts of the various categories
of mandates, the position in most of the connections with which this cases con-
cerned was the same for al1 the mandates and mandatories-not peculiar to SW.
Africa. In particular, none of the mandates conferred any specificsupervisory func-
tion on the League Council, and none went further in this respect than to include
the reporting obligation in substantiathe same terrns. NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE)
228
Charte, envers la SdN, qui existait encore à l'époqueet devait d'ailleurs
survivrequelquetemps.

13. En attendant, j'en viensàla deuxièmedestrois possibilités évoquées
au paragraphequi précède :celled'unetransmission implicite àl'ONU des
fonctions de la SdN en matière de mandats et, en conséquence,d'un
transfert implicite à I'ONU des obligations que le Mandataire avait
auparavant envers la SdN. Il est facile de supposer que, puisque I'ONU
présentait certainesressemblances avecla SdN et pouvait êtreconsidérée
commeson successeur «naturel »,elleenétaitaussilesuccesseurjuridique;

or il n'en a pas étéainsi. Il n'est pas moins facile de supposer, comme la
Cour le fait à l'évidencedans son avis, pratiquement sans examen, que,
si - et parce que - les divers mandats ont survécu à la Sociétédes
Nations, il s'ensuit que I'ONU doit nécessairementet ipsofacto avoir
acquis le droit d'exercerun rôle de surveillancesur les mandats, bien que
cesderniersaientconstituéune institutionde la SdN et non pas de l'ONU
et qu'ils ne soient mentionnésdans la Charte que comme des territoires

susceptibles (mais sans idéed'obligation) d'êtreplacéssous la tutelle de
l'ONU. Le caractère spécieuxde ce raisonnement, ou plutôt de cette
présupposition, est évident. Mêmle'argument selon lequel I'ONU était
seule capabledejouer cerôle est, comme on leverra, erroné.

2. Absencede successionautomatique ou implicite

i) Origineet nature
de lafonction desurveillance

14. Le Conseil de la Société desNations (dont trois des principaux
mandataires étaient membres permanents) n'a jamais étélui-même
expressément investi eo nomine de ce que l'on a appelé la fonction de
surveillance relativeà la gestion des diversmandats 6.En outre, l'expres-
sion mêmede surveillancepeut induire en erreur vu qu'aux votes de la
SdN s'appliquait la règlede l'unanimité,y compris le suffrage de 1'Etat

Membre intéressé (c'est-à-direl,orsque lesmandats étaienten cause, celui
du mandataire). En réalité,la fonction dite de surveillance procédaitde
l'obligation pour les mandataires @',de présenterun rapport annuel au

6, 64, 6Le pluriel ou l'article indéfiniet le rnminuscule sont utilisés dans la
Mandat pour le Sud-Ouest africain ou de l'Afrique du Sud en tant que Mandataire,t du
faute de quoi on risqueraide fausser la perspective; en effet, sous réserve des
différencesentre mandats A,B etC telles qu'elles sont indiquées sommairement à
l'article 22, paragraphes 4, 5, et 6 du Pacte de la SdN et telles qu'elles résultent du
texte des diverses catégories de mandats, la situation sous lades angles qui
intéressent la présente affaire étaitla mêmepour tous les mandats et pour tous les
mandataires et n'était pas spéciale au Sud-Ouest africain. En particulier, aucun
des mandats ne conférait de fonction de surveillance spécifique au Conseil de la
SdN, et tous, à cet égard, se bornaient à stipuler l'obligation de faire rapport dans
des termesàpeu près équivalents.cil, through the then Permanent Mandate Commission,-as a sort of
inference, corollary or counterpart of that obligation. It was in that way
and no other that what has been called the accountability of the manda-
tories arose. This point, which is of primary importance when it comes to

determining what was the real nature of the supervisory function as
exercisable by the League Council, and whether it included the power to
revoke a mandatory's 6bmandate, is developed in full in Section B below.
Its relevance here is that it was this reporting obligation, and such "ac-
countability" as an obligation of that order may imply 7,that gave rise
to the speciJic function of supervision, not vice versa;-and what is
incontestably clear is that the whole question of who, or what entity, was
entitled to supervise, was bound up with and depended on the prior
question of who, or what entity, mandatories were obliged to report to

and, to that extent, become accountable to (but accountability did not in
any event-see footnote 7-imply control).

(ii) Distinction betweenthe reportingobligation

in se and,the questionof what entity can
claimperformance of it

15. It follows that in order to determine what entity, if any, became
invested with the supervisory function after the disappearance of the
League and its Council, it is necessary to ascertain what entity, if any,
the mandatories then became obliged to report to, if they continued to be
subject as mandatories to the reporting obligation at all-(see footnote
5, paragraph 10 above). More specifically,in the context of the present
case, in order to answer the questionwhether the UnitedNations, in parti-
cular, became invested with any supervisory function, it will be necessary
to determine whether, in respect of any mandated territory not placed

under the United Nations trusteeship system, the mandatory concerned
became obliged to report to some organ of the United Nations (and
notably to its General Assembly, found by the Court in its 1950Opinion
to be the most appropriate such organ for the purpose). The underlying
issue is whether the United Nations could claim not merely a right to be
reported to, but an exclusive right, in the sense that the obligation arose
in relation to it and it alone, and no other entity. In different terms:Jirst,

AS will be seen later, reporting in the context of mandates had none of the
implications that are involved when, for instance, it ishat "X" reports to "Y"
(a superior), which implies that "X" takes his orders from "Y". This was iiot the
as between the cornpetent organs of the United Nations and rnernber States ad-s
rninistering trust territories (see below, paragraphs 77 and 104,and also footnote 66,
paragraphs (b) and (c)).Conseil, par l'intermédiaire dela Commission permanente des mandats,
en quelqÜesorte comme conséquence,corollaire ou contrepartie de cette
obligation. C'est de cette façon et d'aucune autre qu'a pris naissance ce

qu'on aappelél'obligationdes mandataires de rendrecompte. Cepoint, qui
aune importance primordiale quand ils'agit d'évaluerlanature réelledela
fonction de surveillance telle qu'ellepouvait êtreexercéepar le Conseil de
la SdN et de décidersi elle comportait le pouvoir de révoquerle mandat
d'un mandataire 6b, est développédans la section B ci-après. Ce qui
importe ici, c'est que ce sont I'obligation de faire rapport et le devoir de
rendre compte qu'une obligation de cet ordre peut impliquer7 qui ont
donné naissance à la fonction spécifiquede surveillance, et non le con-
traire; et, incontestablement, la question de savoir qui ou quelle entité

était habilitéà surveiller se rattache et est surbordonnée à la question
préalable suivante: à qui ou à quelle entité les mandataires avaient-ils
I'obligation de faire rapport et, par voie de conséquence, de rendre
compte (bienquedetoute façon l'obligation de rendre compte n'impliquât
pas un contrôle- voir note 7).

ii) Distinction entre I'obligation defaire rapport
proprement dite et la question de savoir
quelle entitépeut enexiger l'exécution

15. 11s'ensuit que, pour déterminer quelle entitéa étéinvestie, le cas
échéant, dela fonction de surveillance aprèsla disparition de la SdN et de
son Conseil, il faut déterminer à quelle entitéles mandataires sont alors
éventuellement devenus obligésde faire rapport, à supposer qu'ils aient
continué à être soumisen tant que mandataires à une obligation quelcon-
que de faire rapport (voir par. 10,note 5). Plus précisément,pour répon-
dreen l'espèce à laquestion de savoir si1'ONUen particulier a été investie
d'une fonction de surveillance, il est nécessaired'établir si, pour tout
territoire sous mandat non placésous le régimede tutelle des Nations

Unies, le mandataire avait désormais I'obligation de faire rappbrt à un
organe de I'ONU, et notamment à l'Assembléegénéraleque la Cour
a jugédans son avis de 1950êtrel'organe le plus approprié à cet égard.
Le problème sous-jacent est de savoir si I'ONU pourrait revendiquer non
pas-simplement un droit de regard mais un droit exclusif, en ce sens que
I'obligationlui serait dueà elle età elle seuleà l'exclusion de toute autre
entité. Autrement dit: Primo, en supposant, comme on l'admet générale-

' Comme on le verra par la suite, l'obligation de faire rapport n'a dans le con-
texte des mandats aucunedes implications que peut avoir, par exemple, le fait de
dire queX... fait rapport à son supérieur Y..., ce qui suque X... reçoit ses
de laSdN et les mandataires, pas plus qu'entre les organes compétents de I'ONU etil
les Etats Membres qui administrendes territoires sous tutelle (voir par.104
ci-après, ainsi quenote 66, par. b et c).given, as is generally accepted that the various mandates survived the
dissolution of the League, then did the reporting obligation, the situation
of accountability considered in the abstract so to speak, equally survive
that dissolution as part of the concept of mandates;-and secondly, if so,
did it survive in the form of, or become converted into, an obligation to
report, to be accountable not just to some organ, but to that particular
organ which was and is the Assembly of the United Nations?

(iii) The reporting obligation, ifit survived,
was capableof implementationotherwise
than by reporting to a UnitedNations organ

16. It is of course evident that if a reporting obligation survived the
dissolution of the League, the furnishing of reports to an organ of the
United Nations, in particular the General Assembly, was not the only
possible way in wl~ichthat obligation could be discharged; nor was a
United Nations organ, specificallyas such, in any way indispensable as a

recipient, and commentator on or critic of such reports. There were at the
time, and thire are now, several international bodies in existence, much
more comparable in character to the League Council, or at least to the
former Permanent Mandates Commission, than the United Nations
Assembly, to which any mandatory preferring that course could have
arranged to report, and with which it could have carried on the sort of
dialogue that was carried on with the League organs;-and here it is

of primary importance to beur in mind that the absenceof any compulsory
powers vestedin such a body wouldhave had no bearing onthe situation,
since neither the League Council nor theAssembly of the United Nations
had any such powers in this matter 9. Alternatively, if no appropriate
body could be found willing to act, it would have been open to any
mandatory, perhaps acting in conjunction with others, to set one up,

SOfar as this aspect of the subject is concerned, the South African contention
that the Mandate is at an end is both conditioned and indirect. It is maintained on
the one hand that the reporting obligation lapsed in its entirety on the dissolution
of the League because it then became impossible to perform it according to its actual
t.erms,-but also that it was riot an essential part of the Mandate which could
severable-ifhit isan essential part of the Mandate-thenits lapse entails the lapse-
of the Mandate as a whole. These are alternative positions and there is no contra-
diction between them as the Opinion of the Court seeks toclaim.
This point, which goes to the root of much of the case, is more fully developed
in Section B below. According to League procedure the Council's decisions were
not binding on the mandatory concerned unless the latter concurred in them, at
least tacitly; while the resolutions of the United Nations Assembly-except in
certain specific cases notaterial in this context-onlyhave the status of recom-
mendations and have no binding effect except, at most (and even that is open to
argument) for those who have affirmatively voted in favour of them.ments,que les divers mandats ont survécu à la dissolution de la SdN,

est-ce que l'obligation de faire rapport, c'est-à-dire la situation de respon-
sabilitéconsidéréeen quelque sorte dans l'abstrait, a survécu elle aussi
en tant qu'élémentdu mandat? Secundo, dans ces conditions, cette obli-
gation a-t-elle survécusous la forme d'une obligation de faire rapport et
de rendre compteou s'est-elletransforméeen une telle obligation non pas
simplement à l'égardd'un organe quelconque,mais de l'organe particulier
qu'étaitet qu'est demeuréel'Assembléegénéralede l'ONU?

iii) L'obligation defairerapport, si ellea survécu,
pouvaitêtreremplieautrement
qu'enfaisant rapport à un organe del'ONU

16. 11est évident que, si l'obligation de faire rapport a survécu à la
SdN, la présentation derapports à un organe de l'ONU, en particulier à
l'Assemblée générale n,'étaitpas le seul moyen possible de s'acquitter de
cette obligation; un organe de l'ONU, en tant que tel, n'était d'ailleurs
nullement indispensable comme destinataire, commentateur ou critique
de cesrapports. Il existaià l'époqueet il existe encore aujourd'hui plu-

sieurs organes internationaux qui sont par nature beaucoup plus proches
du Conseil de la SdN, ou tout au moins de l'ancienne Commission perma-
nente des mandats, que ne l'est l'Assembléegénéraleet auxquels tout
mandataire aurait pu s'arranger pour faire rapport s'il l'avait préféré,
en entretenant avec eux le type de dialogue qui s'étaitinstauré avec les
organes de la SdN. II est essentiel de rappeler icique l'absencede tout
pouvoir coercitif confiéà un tel organe n'auraiteu aucune incidencesur la

situation, car ni le Conseil de laSdN ni ['Assembléegénérale deN s ations
Unies n'avait untel pouvoir en la matière 9. Ou bien, si l'on n'avait pu
trouver aucun organe approprié disposé àjouer ce rôle, tout mandataire
aurait eu la faculté,en agissant éventuellementde concert avec d'autres,
d'encréer un, il'égardde qui lesengagements nécessaires eussentété pris,

En ce qui concerne cet aspect de l'affaire, l'argument de l'Afrique du Sud selon
lequel le Mandat est terminé estla fois indirect et soumis à certaines conditions.
entièrementà la dissolution de la SdN parce qu'il est alors devenu impossible deinte
s'en acquitter dela manière stipulée, mais aussique ce n'était pasun élémentessentiel
du Mandat qui pouvait subsister en dehors de celui-ci. En mêmetemps, elle affirme
que si l'obligation n'est pas séparable du Mandat lui-même,et en constitue un
aspect essentiel, alors son extinction entrl'extinction du Mandat tout entier.
Ce sont là les deux branches d'une alternative il n'y a pas contradiction entre
elles, comme l'avis dela Cour tendrait faire croire.
Cet argument, qui va à la racine mêmed'une grande partie de l'affaire, est
développéplus longuement dans la sectionB ci-après. D'après la procédure de la
SdN, les décisions du Conseil n'étaient pas obligatoires pour le mandataire, à
moins qu'il n'y consentit, au moins tacitement; quant aux résolutions de l'Assemblée
générale desNations Unies, sauf dans certains cas particuliers qui sont sans intérêt
sauf,à la rigueur, et encore pourrait-on en discuter, pour les Etats qui ont votéen
faveur de ces résolutions.231 NAMIBIA (s.w. AFRICA DISS. OP. FITZMAURICE)

to which the necessary reporting undertakings would be given,-the
ensuing reports, and comments thereon, being made public Io.

(iv) There was no survivalof the reporting
obligation intheform of an automatic
obligation to report toa UnitedNations

organ-Basic dzferences between the
League Council andthe United Nations
Assembly as a supervisorybody

17. For present purposes it is unnecessary to express any final view as
to whether the reporting obligation did or did not, in the abstract, or as a
concept, survive the dissolution of the League, because in any event 1do
not consider that it survived in the form of an automatic self-operating
obligation to report to and accept the supervision, specifically, of the

United Nations, and in particular of its General Assembly. The uncon-
sciousassumption (or has it been deliberate?) which has dogged the SW.
Africa question for so many years, that it was al1the same thing for a
mandatory whether it reported to the League Councilor to the United
Nations Assembly, so why should it not do so, is of course quite illusory,
because the character of the supervisory organafects the character and

weight of the obligation. Taking this view does not necessarily mean
accepting the South African contention thatthe reporting obligation was
so intimately bound up with the character of the entity to be reported
to that, upon the extinction of that entity, it must lapse entirely But 1
do accept the view that in no circumstances couId an obligation to
report to and accept supervision at the hands of one organ-the League

Council-become converted automatically and ipsofacto, and without
the consent of the mandatory (indeed against its will), into an obligation
relative to another organ, very differently composed, huge in numbers
compared with the League Council, functioning differently, by different
methods and procedures, on the basis of a different voting rule, and

'O In fact, none of the mandatories did this,-nodid any of ihem report to the
United Nations,-but, apart frorn South Africa, they did eventually convert their
mandates into trusteeships.
l1 See further as to this in Section D below, paragraphs 119-120. The matter
turns on:
(i) whether, as the Court found in 1950 (I.C.J. Reports 1950, pp. 136-137), the
reporting obligation, in so far as it irnplied supervision, was so important a part
of a mandate that if the latter survived, the former must-or whether, as
Judge Read thought (ibid., p. 165), the absence of reporting, etc., rnight
"weaken the mandate" but not otherwise affect it;
(ii) the effect, if the situation is a contractual or quasi-contractual one, of the
extinction of one of the parties,-this case of the League of Nations; and
(iii) if the situation is not of that kind, the status of a provision that can no
longer be carried out according to its actual terms butan perhaps be im-
plemented in some equivalent way.les rapports ultérieurs et les commentaires à ces rapports étant rendus
publics 1°.

iv) II n'yapas eusurvivance de l'obligation
de,fairerapportsous.formed'obligationautomatique
envers un organe deI'ONU.
Dzfférencesfondamentales entre le Conseil de lSadN

et l'Assembléegénérale deN sations Unies
en tant qu'organes de surveillance
17. Aux finsdu présent raisonnement,il n'estpas nécessaired'exprimer

une opinion définitivesur lepoint de savoir siI'obligation defaire rapport
a ou n'a pas, dans l'abstrait ou en théorie,survécu à la dissolution de la
SdN, car de toute façon je n'estime pas qu'elle ait survécusous forme
d'une obligation automatique et fonctionnant par elle-mêmede faire
rapport spécifiquement à l'ONU, notamment à l'Assembléegénérale,et
d'en accepter la surveillance. L'hypothèseformulée inconsciemment(ou

délibérément? q)ui a obéréla question du Sud-Ouestafricain pendant tant
d'annéeset selon laquelle iln'.avait aucunedzfférencepourle Mandataire
entrefaire rapport au Conseil de la SdN ou à I'Assembléegénérale des
Nations Unies(ce qui permettait de demander pourquoi on ne ferait pas
rapport àcette dernière)est bien entendutout àfait illusoire,carla nature
de l'organe de surveillance aflecte la nature et le poids de l'obligation.

Etre de cet avis ne signifiepas nécessairementqu'on accepte l'argument
de l'Afrique du Sud selon lequel l'obligation de faire rapport était si
intimement liée à la nature de l'entité envers qui cette obligation existait
que, cette dernière disparue, elle devait s'éteindreentièrement ll. En
revanche j'admets qu'en aucun cas I'obligation de faire rapport à un
organe, le Conseil de la SdN, et d'accepter sa surveillance ne pouvait

êtretransformée automatiquement et ipsofacto sans le consentement du
mandataire (et mêmecontre sa volonté) en une obligation envers un
autre organe ayant par rapport au Conseil de la SdN une composition

rapportàpI'ONU; en revanche ils ont tous, à l'exception de l'Afrique du Sud, trans-
forméfinalement leurs mandats en tutelles.
l1 Pour plus de détails sur cette question, voir section D ci-après, par. 119-120.
La question est axéesur:

i) le point de savoir si, comme la Cour l'a jugé en 1950 (C.Z.J. Recueil 1950,
surveillance, tient une si grande place dans un mandat que, si ce dernier survit,
l'obligation survit aussi nécessairement, ou si, comme Read l'a estimé
(ibidp.,165), l'absence de présentation de rapports, etc., pouvait ((affaiblir le
Mandat »mais sans l'affecter autrement;
ii) l'effet, s'il s'agit d'une situation contractuelle ou quasi contractuelle, de la dis-
parition d'une des parties,en l'occurrence la
iii) dans une situation non contractuelle, le statut juridique d'unedispositionqui
ne peut plus êtreexécutéeconformément aux termes mêmesdans lesquels elle
est libellée, mais quen pourrait peut-être appliquer par un moyen équivalent.against the background of a totally different climate of opinion, philo-
sophy and aim, unsympathetic by nature to the mandatory 12.Indeed the

very fact that the supervision of a mandatewould have become exercisable
by an organ which disapproved in principle of mandates that remained
mandates, and held it from the start almost as an article of faith (this will

be reverted to later, for it is a cardinal point) that al1mandated territories
shoiild be placed under its own trusteeship system,-and whose primary
aim moreover, in al1its dealings whether with trust territories, manda-
ted territories, or non-self-governing territories under Article 73 of the

Charter, was to cal1into existence as speedily as possible a series of new

l2The following table makes this clear:

1. International League of Nations. United Nations.
0rganization:-

II. Report receiving League Council. General Assembly.
or supervisory
body:-

III. Numbers of Small (varied through Potentially unlimited.
same:- 9-11-13) and included 50160even in 1946-
the then permanent now 130-140 and still
members of which three growing.
were mandatories.

IV. Voting rule:- Unanimity, including Two-thirds majority ;
vote of Mandatory. sometimes possibly a
bare majority.
V. Advisory sub- Permanent Mandates Trusteeship Council;
organ :- Commission. Committee of the
Assembly; or

"subsidiary organ"
set up under Art. 22
of the Charter.

VI. Composition of Experts acting in Representatives of
sub-organ :- their personal capacity, governments.
not as representatives
of governments.

VII. Attitude and Sympathetic to the Unsympathetic to
approach of super- mandatories-not mandatories,-
visory body :- over-political. highly political.

VIII. Aim:- Good administration Earliest possible
of the mandated bringing about of
territory. the independence
of the territory.très différenteet un effectif beaucoup plus nombreux et fonctionnant

différemment,suivant des méthodes, desprocédures etdes règlesde vote
différenteset dans le contexte d'opinions, de doctrines et d'objectifs
totalement différentset par nature défavorables au mandataire 12.En
vérité,le fait mêmeque la surveillance d'un mandat aurait étédévolue à

un organe désapprouvant en principe que des mandats restent des
mandats, estimant dès l'abord, presque comme s'il s'était agi d'un
article de foi (j'y reviendrai'par la suite car c'est un point capital), que
tous les territoires sous mandat devaient êtreplacés sous son propre

régimede tutelle et ayant pour objectif principal dans toutes ses opéra-

l2 Le tableau suivant permettra de voir clairement cesdifférences:

l'Assemblée générale

VI. Composition de Experts agissant Représentants des
l'organe à titre personnel gouvernements
subsidiaire et non en tant que
représentants de
leur gouvernement

VII. Attitude et Favorable aux Défavorable aux
façon de voir de mandataires - non mandataires -très
l'organe de exagérément politisée
surveillance politisée

VIII. Objectif Bonne administration Accessionàdu
du territoire sous territoire
mandat l'indépendancele
plus vite possible sovereign independent States;-al1 this alone would have been sufficient
to create, and perpetuate, apermanent state of tension betweenthe United

Nations Assembly as a supervisory organ and any mandatory held ac-
countable to it. None of this existed under the régime ofthe League.

18. Exactly the same considerations apply to any Committee or sub-
Committee of the Assemblywhich might be set up to deal with mandates,
and which, howeverit n~ightbe dressed up to look like the former League
Council or Permanent Mandates Commission (see the proposa1 made in
Assembly resolution 449 (V) of 13 December 1950)would remain fully
under the Assembly'scontrol, and reflectits tendencies and aims. Indeed
this has been only too self-evidentlythe case as regardsthose Cornmittees
that have been (at later stages) set up with reference to the SW. Africa
question.

(v) Conclusionas to implied
succession

19. For these reasons it seems to me to be juridically impossible to
postulate such a metamorphosis as taking place automatically or unless
by consent. To do so wouIdnot merely be to change the indentity of the
organ entitled to supervise the implementation of the obligation but, by
reasonof this change, to change also the nature of the obligation itself:
Given the different character and methods of that organ, it would be to
create a new and more onerous obligation (it is of course, inter alia, pre-
cisely because of the possibility of this, that novations require consent).

1 must therefore hold that no such transformation ever took place of
itself so that, if consent was lacking, the United Nations never became
invested with any supervisory function at all. This view will now be
developed, first by way of answer to various counter-arguments that have
been or may be advanced,-secondly on the basis of certain positive and
concreteconsiderations which have never been giventheir true weight, but
are to my mind decisive.

3. Counter-contentionsas to
implied succession

(a) The Advisory Opinion of the Courtof II JuIy 1950

20. In the 1950advisory proceedings there was a striking, though quite
differently orientated parallelism between the South African arguments
on this matter and the views expressed by the Court, due to a mutual but
divergently directed confusion or telescoping of the two separate ques-
tions already noticed, of the survival of the reporting obligation assuch,tions, qu'il s'agissede territoires sous tutelle, de territoires sous mandat
ou des territoires non autonomes visésà l'articl73 de la Charte, de faire
naître le plus rapidement possible une sériede nouveaux Etats souverains
et indépendants - ce fait mêmeaurait suffi à créeret à perpétuer un
étatpermanent detension entre l'Assembléegénérale desNations Unies en
tantqu'organe desurveillanceettout mandataire tenudeluirendre compte.

Il n'en allait pas du tout ainsi sous le régimede la SociétédesNations.
18. Les mêmesconsidérations exactement valent pour tout comitéou
sous-comitéde l'Assembléegénérale quipouvait êtrecréé pour s'occuper
des mandats et qui, quelque tournure qu'on lui donnât pour qu'il res-
semble au Conseil ou à la Commission permanente desmandats de la SdN
(voir la proposition faite par l'Assembléegénéraledans sa résolution449
(V) du 13 décembre 1950), devait rester entièrement sous la coupe de
l'Assembléegénérale et reflétait sestendances et sesbuts. Cela a d'ailleurs
été uneévidencecriante dans lecas des comitésqui ont été ultérieurement
créés pour s'occuper du Sud-Ouest africain.

v) Conclusionsquant à l'idée
d'unesuccessionimplicite

19. Pour tous ces motifs, il me semble juridiquement impossible de
postuler que la métamorphose s'est produite automatiquement et à
défaut de consentement.Lefaire serait non seulement changerl'identitéde
l'organe habilità surveillerl'exécutionde l'obligationmais, en raisonmême
de ce changement,changerla nature de l'obligationelle aussi.tant donné

la différencede nature et de méthodesde cet organe, ce serait créer une
obligation nouvelle et plus lourde. Bien entendu, c'est, entre autres,à
cause de cette possibilité même qu'inle saurait y avoir de novation sans
que les intéresséy consentent. Je dois donc considérer qu'aucun change-
ment de ce genre ne s-estproduit spontanément et que par conséquent,
faute de consentement, l'ONU n'ajamais étéinvestie d'aucune fonction
de surveillance quelle qu'elle fût. Je vais maintenant développercet
argument, d'abord pour répondre à plusieurs objections qui ont étéou
qui pourraient être avancées etensuite pour tenir compte de certaines
considérationspositives et concrètes auxquelles on n'ajamais donnéleur
poids véritable mais quime paraissent décisives.

3. Arguments contraires concernant la thèsede la
succession implicite

a) Avis consultatifde la Cour duIl juillet 1950

20. Lors de la procédure consultative de 1950,entre l'argumentation
sud-africaine sur la question et les vues expriméespar la Cour, le paral-
lélismea étéfrappant mais l'orientation entièrement différente. Il en a
étéainsi à cause d'une confusion ou d'un télescopage,commis de part
et d'autre mais en sens différent, des deuxquestions distinctes déjàand the form of its survival, if survival there was. Contending that this
obligation had never been contemplated except as an obligation relative
to the Council of the League, and could not therefore, upon the disso-

lution of the latter and the establishment of the United Nations, become
automatically transformed into an obligation owed to that Organization,
South Africa argued that becausethis was so, therefore al1obligations of
accountability had disappeared. This deduction may have been natural,
but clearly lacked logical rigour and necessity,-for the obligationas such
could survive, even though becoming dormant for the time being.

21. The same process of ellipsis, though with quite another outcome,
characterized the reasoning ofthe Court in 1950.Holding that the reporting
obligation was an essential part of the mandates system, and must survive
if the system itself survived, the Court went on to hold that therefore it
survived as an obligation to report specifically to the Assembly of the
United Nations. This last leg of the argument not only lacked al1logical

rigour and necessity but involved an obvious fallacy,-which was the
reason for the dissenting views expressed by Judges Sir Arnold McNair
(as he then was) and Read-dissenting views with which 1 agree. It ob-
viously could not follow, as the Court in effect found, that because the
United Nations happened to be there, so to speak, and, in the shape of
the trusteeship system, had set up something rather similar to the man-
dates system, therefore not merely trusteeships but mandates also were

subject to United Nations supervision. This again was a nonsequitur 13.
It was tantamount to saying that although (as the Court found later in
the same Opinion-Z.C.J. Reports 1950, pp. 138-140)mandatories were
not obliged to place their mandated territories under trusteeship, yet for
al1practical purposes they had to accept United Nations supervision just
the same whether or not they had placed the territories under trusteeship.
This does not make sense.The result was that in effectthe Court cancelled

out its own finding that trusteeship was not obligatory-and made it a
case of "Heads 1win: tails you lose"! It is not too much to say that the

l3 The following passage fromthe Court's Opinion (Z.C.J. Reports 1950, p. 136)
exhibits very graphically the telescoping of the (valid) premiss that accountability
in principle had not necessarily disappeared with the League, with the (invalid)
accountable to the United Nations:ereby necessarily obliged to hold themselves

"It cannot be admitted that the obligation to submit to supervision had
disappeared merely because the supervisory organhas ceased to exist, when
similar, though not identical supervisoryctions"-(myioitalics).performing

Thenonsequitur is clearly apparent.The Court didnot seemto seethatthetransition
taken place;-andfethe present Opinion of the Court compounds the fallacy. have signalées:celle de la survivance de l'obligation de rendre compte en
tant que telle et celle de la forme de cette survivance, si survivance il y
avait. Partant du principe que l'obligation n'avait jamaisétéenvisagée
autrement que comme obligatiori envers le Conseil de la SdN et que par
suite elle ne pouvait, lors de la dissolution de la SdN et dela créationde
l'ONU, être automatiquement transforméeen obligation envers cette

dernière, l'Afriquedu Sud a fait valoir que, parce qu'il en étaitainsi, il
s'ensuivait que toute obligation de rendre compte avait disparu. Cette
déduction pouvait êtreassez naturelle, mais elle manquait évidemment
de rigueur et de nécessité logiquescar I'obligationpouvait survivre en
tant que telletout en restant momentanément à l'étatlatent.

21. L'argumentation de la Cour en 1950, pareillement elliptique,
débouchait dans une tout autre direction. Tenant pour assuré que
I'obligation de faire rapport était une partie essentielle du système des
mandats et devait survivre si le systèmelui-même survivait, la Cour en a
déduit que par suite l'obligation survivait comme obligation de faire
rapport spécifiquement à l'Assemblée générale deN sations Unies. Non

seulement cette dernière partie de l'argumentation était dépourvuede
rigueur et n'avait aucun caractère de nécessité,mais elle reposait sur
une idée évidemment fausse,celle-là mêmequi motiva les opinions
dissidentes- que j'approuve pour ma part - de sir Arnold McNair et
de M. Read. Manifestement, ce n'était pas, commela Cour l'a jugé en
pratique, parce que lesNations Unies étaienten quelque sorte disponibles

et avaient institué sous la forme du régimede tutelle quelque chose
d'assezvoisin du systèmedes mandats, que non seulement les territoires
sous tutelle mais encore les territoires sous mandat devaient en consé-
quenceêtresoumis à la surveillance de l'ONU. Là non plus, il n'y avait
pas d'enchaînement logique 13.Cela revenait à dire que, mêmesi (comme

la Cour l'a constaté plus loin dans le mêmeavis consultatif, C.I.J.
Recueil 1950, p. 138-140)les mandataires n'étaientpas tenus de placer
sous le ré"imede tutelle leurs territoires sous mandat. ils devaient Dour-
tant, qu'ils l'aient fait ou non, accepter de toute façon en pratique le
contrôle de l'ONU - ce qui n'avait aucun sens. La Cour en arrivait

l3Le passage ci-après de l'avis consultatif (C.Z.J. Recueil 1950, p. 136) fait très
clairement ressortir le télescopage entre, d'une part, la prémisse valable que
gation de rendre compte n'avait pas nécessairement disparu en principe avec la SdN
et, d'autre part, la déduction fausse que les mandataires étaient de ce fait néces-
sairement obligésderendre compteà1'ONU:
«On ne saurait admettre que l'obligation de se soumettre à surveillance
aurait disparu pour la simple raison que cet organe de contrôle a cessé d'exister
alors que les Nations Unies comptent un autre [un autre, assurément] organe
internationalhargé de fonctions analogues encore que non identique».(Les
italiques sont de nous.)
Le défaut de logique est évident. La Cour ne paraît pas avoir vu que le transfert
un organe nouveau et différent ne peut ni se faire de lui-mêmeni êtreprésumé
réalisé; etle présent avis consultatif de la Cour s'accommode de ce raisonnement
fallacieux.absence of any legal obligation to place mandated territories under
trusteeship implied afortiori, as a necessarydeduction,the absence of any
legal obligation to accept United Nations supervision in respect of
mandates, or the one would be defeated by the other.

22. Clearly the existence of the United Nations, and its superficial
resemblances to the League, had absolutely nothing to do in logic with
the survival of the reporting obligation, except in so far as it provided a

convenient (but not obligatory) method of discharging that obligation if
it did survive. This was Judge Read's view in 1950. Having found that
there had been no consent on the part of the Mandatory to the exerciseof
United Nations supervision, in the absence of which the only possible
basis forsuch an obligation would be "succession bythe United Nations",
he continued (I.C.J. Reports 1950,p. 172):

"Such a succession could not be based upon the provisions of the
Charter, because ...no provisions of the Charter could legally
affect an institution founded upon the Covenant or impair or
extinguish [the] Legal rights and interests of those Members of the
League which are not members of the United Nations14.Ttcould not
be based on implications or inferences drawn from the nature of the
League and the United Nations orfrom any similarity in thefunctions

of the organizations. Such a succession could not be implied, either
in fact or in law, in the absence of consent, express or implied by the
League, the United Nationsandthe Mandatory Power. There was no
such consentM-(my italics).

(b) Did the Charter imply accountability
obligationsfor mandatories?

(i) In general
23. The Charter makes no specificmention of mandated territories at
all, except in the two Articles(77, and 80, paragraph 2) where it refers to
them, along with other types of territories, as candidates for being placed
under trusteeship but without creating any obligation in that regard. Tt
says nothing at al1either about supervision or accountability. The con-

tention that the Charter is to be read as if in fact it did so,is therefore
founded entirely on a process of implication,-a process sought to be

l4 It was and is conveniently forgotten-thounot by Judge Read-that at the
time when the Charter came into force (October1945), and until April 1946, the
League was still in being.

223ainsi à désavouer sa propre conclusion suivant laquelle la tutelle était
facultative - et avait l'air de dire: ((Pile, je gagne; face, vous perdez »!
11n'est pas exagéré d'affirmer que l'absence de toute obligationjuridique

de mettre sous tutelle les territoires sous mandat supposait à fortiori
et comme conséquencenécessaire l'absencede toute obligation juridique
d'accepter la surveillance des Nations Unies sur les mandats, sinon la
deuxièmeproposition détruisait l'effetde la première.
22. Il est évidentquel'existencede l'ONU et sa ressemblance super-
ficielle avecla SdN n'ont en bonne logique rien à voir avec la survivance
de l'obligation de faire rapport, sauf dans la mesure où elles fournissent
un moyen commode, mais non obligatoire, de remplir cette obligation

si elle a effectivement survécu. C'estce qu'a dit M. Read en 1950.Ayant
constatéqu'il n'y avait pas eu, de la part du Mandataire, consentement
à l'exercicede la surveillance des Nations Unies et qu'en l'absence de ce
consentement la seule base possible de I'obligation en cause aurait été
((le fait pour les Nations Unies d'avoir succédé ))il poursuivait (C.I.J.
Recueil1950,p. 172) :

((Cette succession ne saurait reposer sur les dispositions de la
Charte, car ..aucune disposition de la Charte ne pourrait juridique-
ment affecter une institution fondée sur le Pacte ni porter atteinte
ou mettre fin aux droits et intérêtsdes Membres de la Société des
Nations qui ne sont pas membres des Nations Unies 14. Elle ne

pourrait reposer sur des référencesou des déductions tirées de la
nature de la Société desNations et de celle des Nations Unies, ou
d'une similitude quelconque danslesfonctions de ces organisations.
En l'absence de consentement exprès ou tacite de la Société des
Nations, des Nations Unies et de la Puissance mandataire cette
succession ne saurait être déduite par implication, en fait ou en
droit. Or, il n'y a pas eu de consentement de ce genre. )) (Les
italiques sont de nous.)

b) La Charte implique-t-elle une obligationde rendre

compte à la charge des mandataires?
i)Engénéral

23. La Charte ne mentionne pas spécifiquement lesterritoires sous
mandat sauf dans les deux articles (77et 80, par. 2) où elle y fait allusion,
en mêmetemps qu'à d'autres territoires, comme étant candidats au
régimede tutelle mais sans créer d'obligation à cet égard. Sur la sur-
veillance ou le devoir de rendre compte, pas un mot. La thèse selon
laquelle il faut interpréter la Charte comme si elle traitait en fait de ces
questions tient donc exclusivement à l'emploi du procédéqui consiste

l+ On avait oublié et on continue commodément d'oublier - ce que n'avait pas
faitM. Read - qu'à l'époqueoù la Charte est entrée en vigueur (octobre 1945)et
et jusqu'en avril946la Société desNations existait toujours.founded on two particular provisions, Articles 10, and 80, paragraph 1.
These must now be considered.

(ii) Article IOof the Charter
24. For Article 10to sufficein itself, it would be necessary to find in it

not only a competence conferred on the Assembly to exercise a super-
visory role in respect of mandates, but also an obligation for mandatories
to accept that supervision and be accountable to the Assembly. Sincethe
Article makes no mention of mandates as such, the argument would have
to be that the faculty given to the Assembly by that provision "to discuss

[and 'make recommendations ... as to'] any questions or any matters
within the scope of the present Charter", not only invested the Assembly
with a supervisory function in respect of mandates, but also obliged
mandatories to accept the Assembly in that role and regard themselves as
accountable to it. Quite apart from the fact that a faculty merely to
"discuss ... and ... make [non-binding] recommendations" could not

possibly extend to or include so drastic a power as a right unilaterally to
revoke a mandate, it is evident that afaculty conferred on "A" cannot, in
and of itself-even in relation to the same subject-matter-automatically
and ipso facto create gn obligation for "B" 15. The non sequitur-the
absence of any nexusisapparent, and the gap cannot be bridged in the way
the Court seeks to do (see footnote 16below). Furthermore, since one of

the basic questions at issue is, precisely, whether mandates as such-as
opposed to trusteeships and mandated territories placed under trusteeship
-are "within the scope of the Charter", the whole argument founded on
Article 10 of the Charter is essentially circular and question-begging.

25. Article 10 was, and is, a provision which, without in terms men-
tioning mandates, or indeed anything specificat all, ranges over the vast
fieldimplied by the words "any questions or any matters within the scope

l5 For instance the setîing up of an authority empowered to conduct and collect
information in view of aensus, does not of itself oblige the population to CO-operate.
Census laws, in addition to the obligation imposed on the census authority, impose
a separate obligation on al1members of the population to CO-operate,with penalties
for any default. Otherwise the latter obligation would notexist,-and the former
would in consequence be vain.
l6 As in 1950, the Court, while finding in Article IO the competence of the
Assemblv to suvervise. ~rofesses to find the obligation of th* mandatory to be
accountable to ihe ~siembl~ (a) in Article'80 ofthe Charter, (b) in an alleged
recognition of accountability to the United Nations, supposed' 'have been given
by ail the mandatories when they voted in favour of the finalL- Igue of P 'ions
resolution on mandates of 18 April 1946. As will be seen (paragraphs 26-32 and
54-55 below) such an obligation cannot be derived from either source. NAMIBIE(S.-O. AFRICAIN) (OP. DISS. FITZMAURICE) 236

à attribuer des conséquences implicites à deux dispositions, I'article 10
et l'article 80,paragraphe 1.Ce sont cestextes qu'il convientde considérer
maintenant.

iiA )rticle 10dela Charte

24. Pour que I'article 10 suffisepar lui-même,il serait nécessaire d'y
trouver non seulement l'attribution d'une compétence à l'Assemblée
généralepour exercer un rôle de surveillance par rapport aux mandats,
mais aussi une obligation pour les mandataires d'accepter cette surveil-

lance et de rendre compte à l'Assemblée.Comme I'article ne mentionne
pas les mandats nommément, il faudrait soutenir qu'en donnant à
l'Assembléegénérale lafacultéde discuter toutes questions ou affaires
[et de ((formuler sur ces questions ou affaires des recommandations D]
rentrant dans le cadre de la présenteCharte )),non seulement il lui confie

une fonction de surveillance à l'égard desmandats mais aussi il oblige
les mandataires à accepter qu'elletienne ce rôle età se considérer comme
devant lui rendre compte. Indépendamment du fait que la seule faculté
de ((discuter ...et de formuler des recommandations [non obligatoires] ))
ne saurait viser ou inclure un pouvoir aussi radical que celui de révoquer
unilatéralement un mandat, il est évident qu'unefaculté accordée à A

ne peut pas en elle-mêmeet par elle-mêmecréerautomatiquement et
ipsofacto une obligation pour B, mêmes'il s'agit d'un mêmeordre de
question 15.rabsence de lien logique est apparente et ce hiatus ne
saurait être comblé comme la Cour cherche à le faire 16.En outre,
puisque I'une des questions essentielles qui se posent est précisément

cellede savoir si lesterritoires sousmandat entant quetels - à distinguer
des territoires sous tutelle et des territoires précédemment sousmandat
placéssous tutelle - entrent «dans le cadre de la présente Charte )),
toute l'argumentation fondéesur l'article 10dela Charte tourne en rond
et estessentiellementtautologique.

25. L'article 10étaitet est encore une disposition qui, sansmentionner
expressément les mandats ni d'ailleurs rien de spécifique, embrasse
l'immense domaine qu'impliquent les mots ((toutes questions ou affaires

l5 Par exemple, la création d'un service chargé d'organiser des opérations de
rzcensement et de rassembler des renseignements cet effet n'oblige pas en soi la
population à coopérer. Outre l'obligation qu'elles imposent au service du recense-
ment, les lois prévoyant les recensements imposent une obligation distinctee
la population, celle de coopérer, sous peine de sanctions. S'il en était autrement,
cette dernière obligation n'existerait pas etla première serait par conséquent vaine.
l6 Comme en 1950, croyant découvrir dans I'article 10 une compétence de
l'Assembléepour surveiller, la Cour professe que l'obligation de rendre compte
l'Assembléedont le mandataire serait chargé découlerait a) de I'article 80 de la
Charte, b) d'une prétendue acceptation du devoir de rendre compte aux Nations
Unies que tous les mandataires seraient supposés avoir donnée en votant pour la
Ainsi qu'on le verra (par. 26-32 et 54-55 ci-après), l'obligation ne peut découler ni
de I'uneni de l'autre de cesdeux sources.of the present Charter". This could cover almost anything 17.Yet could it
reasonably be contended that in relation to anything the Assembly might
choose to discuss under thisprovision, and which could fairly be regarded
as included in it, authorities and bodies in al1member States of the United
Nations thereby, and without anythingmore, would become obliged at the
request of the Assembly to submit reports to it, and accept its supervision

concerning their activities? The question has only to be put, for its
absurdity to be manifest. Nothing short of express words in Article 10
could produce such an effect. Upon what juridical basis therefore, can an
obligation to report and accept supervision in respect of mandates be
predicated upon this provision? It was precisely this absence of logical
necessity, or even connexion, that motivated Lord McNair7s dissent in
1950.After saying that he could not find any legalground upon which the

former League Council could be regarded as being replaced by the
United Nations for the purpose of being reported to and exercising
supervision, which"would amount to imposing a new obligation l8upon
the [mandatory] and would be a piece ofjudicial legislation", he continued
(I.C.J. Reports 1950,p. 162) :

"In saying this, 1 do not overlook the competence of the.. .
Assembly ... under Article 10of theCharter,to discuss the Mandate

... and to makerecommendations concerning it, but that competence
depends not on any theory of implied succession but upon the
provisions of the Charter."

In other words, even if the provisions of the Charter might be sufficient
to found the competence of the Assembly-(even so, only to discuss and
recommend)-they must also be shown to establish the obligation of the
mandatory, since no theory of implied succession could be prayed in
aid lg;-and in so far as it is sought to rely on the terms of Article 10for

I7 It suffices to look at the Preamble to the Charter, and Article 1 and the pro-
visions of ChaptersIX and X, in order to see how great the range is, even omitting
things like peace-keeping and sundry miscellanea.
l8 "New" because, since the League clearly had not assigned its supervisory
rights to the United Nations (see further as to this, paragraph2 below), only a
novation could have produced the effect that the Court found in favour of in 1950.
But a novation would have required the mandatory's consent, which Lord McNair
did not think had been given. Speaking of the various contemporary statements
made on behalf of South Africa, he said (Z.C.J. Reports 1950, p. 161) that he did
not find in them "adequate evidence" that the mandatory had "either assented to
an,implied succession by the United Nations..,or. ..entered into a new obligation
towards [it] to revive the pre-war system of supervision".

"pure inference" [i.e., in the context a mere supposition] "there [had] been ana
automatic succession by the United Nations to the rights and functions of therentrant dans le cadre de la présenteCharte ». Ces mots peuvent inclure
presque n'importe quoi 17. Et pourtant pourrait-on raisonnablement
soutenir que, à propos de tout sujet que l'Assembléepourrait croire bon

de discuter en invoquant cette disposition et qui pourrait à juste titre
êtreconsidéré commey étant englobé, lesautorités et organes de tous
les Etats Membres des Nations Unies seraient de ce seul fait tenus
d'envoyer des rapports à l'Assembléesur sa demande et d'accepter
qu'elle surveilleleurs activités?Poser la question, c'est en faire éclater

l'absurdité. Rien dans l'article 10 ne pourrait produire un tel effet en
dehors d'une stipulation expresse. Dèslors, sur quelles bases juridiques
une obligation de faire rapport et d'accepter la surveillance sur les man-
dats pourrait-elle êtretiréede cette disposition? C'est précisémenc tette

absence de nécessitélogique ou mêmede lien qui a motivé l'opinion
dissidente de lord McNair en 1950. Après avoir dit qu'il n'entrevoyait
pas le motif juridique permettant valablement de considérer l'ancien
Conseil de la SdN comme remplacépar I'ONU pour ce qui est des rap-
ports à lui faireet dela surveillance à exercer par lui, ce qui ((équivaudrait

à imposer ...une obligation nouvelle [au mandataire] et serait faire
Œuvre de législation judiciaire)), il poursuivait (C.I.J. Recueil 1950,
p. 162):

(En disant celaje n'oubliepas la compétenceque possède1'Assem-
blée...en vertu de l'article 10dela Charte, pour procéder à l'examen
du mandat ...et pour faire des recommandations au sujet de ce

Mandat; cette compétence toutefois ne dépend d'aucune théorie
de succession implicite mais bien des dispositions de la Charte. ))

En d'autres termes, mêmesi les dispositions de la Charte sufisaient à
fonder la compétencede l'Assemblée(uniquement celle de discuter et de
recommander), il faudrait encore démontrerqu'ellesfondent l'obligation
du mandataire, puisqu'il n'est pas question de pouvoir recourir à une
théorie de succession implicite 19,et, dans la mesure où l'on s'en remet

---
l7 Il suffit de jeter un coup d'Œil sur le préambule de la Charte et sur l'article
premier, ainsi que sur les dispositions des chapitresX etX, pour voir combien
la gamme des matières possibles est vaste, mêmesi on laisse decôtédessujets comme
le maintien dela paix et divers points de détail.
l8 «Nouvelle ))parce que, comme la SdN, de toute évidence, n'a pas cédé ses
droits de surveillance I'ONU (voir à ce sujet par. 42 ci-aprés), seuleune novatioli
aurait pu produire l'effet en faveur duquel la Cour s'est prononcée en 1950. Mais,
pour qu'il y ait eu novation, il aurait fallu le consentement du mandataire, que
lord McNair estimait ne pas avoir été donné.Parlant des diverses déclarations
faitesà l'époque pour le compte de l'Afrique du Sud, il a indiqué (C.Z.J. Recueil
1950, p. 161) qu'il n'y trouvait aucune ((preuve suffisa»tque le Mandataire «ait
ou bien accepté la succession, par implication, des*Nations Unies ...ou ...ait
contracté envers les Nations Unies une nouvelle obligation de faire revivre le
système de surveillance d'avant-guerre1).
l9 Lord McNair avait déjà soutenu (C.Z.J. Recueil 1950, p. 159) que c'était
qu'ily ait eu succession automatique de l'organisation des Nations Unies «auxe penser

225this purpose, it is clear that they will not bear the weight that would
thereby be put upon them.

(iii)Article 80 of the Charter
26. This isanother provision (its terms are set out below 20)to which it

has been sought to give an exaggerated and misplaced effect,and which
equally cannot bear the weight thus put upon it. (It istruethat the second
paragraph manifests an expectation that mandated territories would be
placed under the trusteeship system,-but expressions of expectation do
not create obligations, as the Courtfound in 1950,specificallyin relation
to this provision-I.C.J. Reports 1950,p. 140).)As for the firstparagraph,
the changes which it rules out are clearly those, and only those, that
might result from Chapter XII (the trusteeship chapter) of the Charter

("nothing in this Chapter [Le., XII] shall be construed .. .to alter. ..
etc.),-and, as Lord McNair pertinently observed in 1950,"the cause of
the lapse of the supervision of the League and of Article 6 of the Man-
datez1isnot anything contained in Chapter XII of the Charter, but is the
dissolution of the League, sothat it is difficultto seethe relevance of this
Article". It isofcoursepossibleto hold onothergrounds that the principle
of accountability, as expressed in the form of the reporting obligation,

though becoming dormant, did not lapse with the dissolution of the
League (paragraphs 17and 20 above). What cannot legitimately be held
is that if it did so lapse-or would otherwise have done so-it was
preserved or revived by reason of Article 80,-for that provision's sole
fieldofpreservation wasfrom extinction due to the effectsof ChapterXII,
not from extinction resulting from the operation of causes lying wholly
outside that Chapter.

Council of the League in this respect; ... as the Charter contained no provision
for [such] a succession...[which] could have been expressly preserved and vested
in the United Nations .. ,but this was not done".
20 Article 80 of the Charter reads as follows:
"1. Except as may be agreed upon in individual trusteeship agreements,
made under Articles 77, 79 and 81, placing each territory under the trusteeship
system, and untilsuch agreements have been concluded, nothing in rhisChapter
shall be construed in or of itself to alter in any manner the rights whatsoever
of any States or any peoples or the terms of existing international instruments
italics).Members of the United Nations may respectively be parties-(my
2. Paragraph 1 of this Article shall not be interpreted as giving grounds for
delay or postponement of the negotiationtand conclusion of agreements for
placing mandated and other territoriesunder the trusteeship system as provided
for in Article77."

Z1 Article 6 of the Mandate forSW. Africa embodies the reporting obligation.aux termes de l'article 10 à cette fin, il est évidentque rien ne peut leur
donner lepoids qu'on prétendainsileur attribuer.

iiij Article 80dela Charte

26. C'estlàuneautre disposition (dont letexteestreproduit ci-dessousz0)
à laquelle on a voulu prêterun effet excessif et déplacéet qui, elle non
plus, ne peut supporter le poids qu'on cherche à lui attribuer. (Il est vrai
queleparagraphe 2paraît reposer sur l'idéeque lesterritoires sousmandat

seraient placéssous le régimede tutelle - mais l'expressiond'une attente
ne créepas des obligations, comme la Cour l'a elle-mêmeconstaté,
précisément à propos de cette disposition (C.I.J. Recueil 1950,p. 140).)
Quant au paragraphe 1, il est clair que les changements qu'il exclut sont
ceux, et seulement ceux, qui pourraient résulter du chapitre XII de la
Charte consacré au régimede tutelle (((aucune disposition du présent

chapitre [XII] ne sera interprétée ...comme modifiant », etc.); or, comme
lord McNair l'a observé pertinemment en 1950, ((l'extinction de la
surveillance exercéepar la Société deN s ations etdel'article6du Mandat 21
n'est due à rien qui soit contenu dans le chapitre XII de la Charte, mais
à la dissolution de la Société des Nations en sorte qu'il est difficiled'aper-
cevoir la pertinence de cet article 1)(C.I.J. RecueiI 1950, p. 160). Il est

bien entendu possible de s'appuyer sur d'autres motifs pour soutenir
que le principe de la responsabilitéconcrétiséepar l'obligation de faire
rapport, bien qu'elle soit entréeen sommeil, n'estpas devenu caduc à la
dissolution de la SdN (par. 17et 20 ci-dessus). Ce qu'il n'estpas légitime
de soutenir, c'est que, si l'obligation étaitdevenue caduque - ainsi ou
d'une autre façon -, l'article 80a pu la préserverou la ranimer - car

ce que cette disposition a pu empêcherc'est uniquement une extinction
tenant aux effets du chapitre XII mais non l'extinction due à des causes
entièrement étrangères à cechapitre.

droits du Conseil de la Société desNations ...car dans la Charte ne figure aucune
disposition assurant [cette]succession.[que 1'1on aurait pu expressément conserver
..et conférer...aux Nations Unies ..mais cela n'a pas été fa..
20 L'article 80 de la Charteénonce:
«1. A l'exception de ce qui peut êtreconvenu dans les accords particuliers
de tutelle conclus conformément aux articles 77. 79 et 81 et olacant chaaue
territoire sous lerégimede tutelle, etjusqu'à ce que ces accordsté concfus,
aucune disposition du présent chapitre ne sera interprétée comme modifiant
directemeni ou indirectement en aucune manière les droits quelconques d'aucun
Etat ou d'aucun peuple ou les dispositions d'actes internationaux en vigueur
auxquels des Membres de l'organisation peuvent êtreparties.
2. 1,e paragraphe 1 du présent article ne doit pas êtreinterprété comme
motivant un retard ou un ajournement de la négociation et de la conclusion
d'accords destinésà placer sous le régimede tutelle des territoires sous mandat
ou d'autres territoires ainsi qu'il est prévul'article 77)1(Les italiques sont
de nous.)
21 L'article 6 du Mandat pour le Sud-Ouest africain est celui qui prescrit I'obliga-
tion de faire rapport. 27. Still less can it be legitimate to hold that the reporting obligation
was not only preserved as a concept, but became, by some sort of silent
alchemy, actually convertedby Article 80 into an obligation to report to
an (unspecified) organ of the United Nations. The impossibility of
attributing this last effectto Article 80 becomes manifest if it be recalled
that at the date (24 October 1945)when the Charter, including Article 80,

came into force, theLeague of Nations wasstill inexistence(and continued
so to be until 18 April 194QZ2,so that the reporting obligation was still
owed to the Council of the League. If therefore Article 80 could have
operated at al1to save this obligation from causes of lapse lying outside
Chapter XII of the Charter, it is in that form that it must have preserved
it-i.e.,as an obligation in relation to the League Counci1;-and there is
no known principle of legal construction that could, simply on the basis
of a provision such as Article 80, cause an obligation preserved in that
form, to become automatically and ipsofacto converted six months later
into an obligation relative tu a drfferent entity of which no mention had

been made. If, to cite Article 80, Chapter XII was not to be "construed"
as altering, "the terms of existing international instruments", then what
was not to be altered were those provisions of the mandates and of
Aiticle 22 of the League Covenant (then still in force) for reporting to the
League Council (then still in being). How then is it possible to read
Article 80, not as preserving that obligation but (as if at the wave of the
magician's wand) creating a new and different obligation to report to a
new and very different kind of organ-the United Nations Assembly?-a
change which could not have been a matter of indifference to the man-
datories.

28. It cornes to this therefore, that there is absolutely nothing in
Article 80to enable it to be read as if it said "The League is still in being,
but if and when it becomes extinct, al1mandatoriei who are Members of
the United Nations will thereupon owe to the latter Organization their
obligations in respect of mandated territories". That of course (see per
Lord McNair in footnote 19 above) is precisely what (or something like
it) the Charter ought to have stated, in order to bring about the results
which-(once it had become clear that SW. Africa was not going to be
placed under the United Nations trusteeship system)-it was then
attempted to deduce from such provisions as Articles 10 and 80. But the
Charter said no such thing, and these Articles, neither singly nor together,

will bear the weight of such a deduction.

29. The truth about Article 80 can in fact be stated in one sentence:
either the mandates, with their reporting obligations, would in any event

22 Although it was known defacto that the League would be dissolved, there was
also Members of the League to take this step, still less to take it by any particular
date.

227 27. Il serait moins légitime encore de soutenir que l'obligation de

faire rapport n'a pas seulement étépréservéesur le plan conceptuel mais
que, par quelque discrète alchimie, l'article 80 l'a effectivementconvertie
en obligation de faire rapport à un organe indéterminéde l'ONU.
L'impossibilitéd'attribuer ce dernier effetà l'article 80devient manifeste
quand on se rappelle que, à la date (24 octobre 1945) où la Charte, y
compris son article 80, est entrée en vigueur, la Société desNations
existait encore(et a continué à exister jusqu'en avril 194622)de sorte que
c'étaittoujours au Conseil de l*aSdN qu'il fallait faire rapport. Si donc
l'article 80a pu servir en quoi que ce soità prémunirl'obligation de faire

rapport des effets de causes de caducité étrangèresau chapitre XII, c'est
ainsi qu'il a dû le faire - c'est-à-dire en tant qu'obligation envers le
Conseil de la SdN; et il n'est pas de principe d'interprétation juridique
qui puisse, sans pouvoir s'appuyer sur rien d'autre qu'une disposition
comme I'article 80, faire qu'une obligation préservéesous cette forme
se transforme automatiquement et ipsofacto six mois plus tard en obli-
gation à l'égard d'une entitédrfférenteet dont iln'avaitpas étéquestion.
Si, pour citer l'article 80, les dispositions du chapitre XII ne doivent

pas être interprétée[s]comme modifiant les dispositions d'actes inter-
nationaux en vigueur ))ce sont les dispositions des mandats et de I'article
22 du Pacte de la SdN (encore en vigueur à l'époque)sur les rapports à
faire au Conseil (encore en existence à ce moment) qui ne devaient pas
êtremodifiées.Comment dèslors est-il possible d'interpréter l'article 80
non pas comme s'il préservait cette obligation, mais comme s'il créait
d'un coup de baguette magique une obligation nouvelle et différentede
faire rapport à un organe nouveau et très différent, l'Assemblée générale
des Nations Unies, ce qui ne pouvait laisser les mandataires indifférents?

28. Tout revient donc à ceci:iln'y a absolument rien dans l'article 80
qui autorise à faire comme s'il se lisait: ((La Société desNations est
toujours en vigueur mais, quand elle sera dissoute et à partir du moment
où elle le sera, tous les mandataires qui sont Membres de l'Organisation
des Nations Unies seront redevables à cette dernière de leurs obligations
relatives aux territoires sous mandat.»C'est bienentendu cela ou quelque
chose de ce genre (voir ce qu'en disait lord McNair, note 19 ci-dessus)
que la Charteaurait dû stipuler pour entraîner les résultatsqu'on a voulu

déduire de dispositions comme les articles 10 et 80 une fois qu'il est
devenu évideiltque le Sud-Ouest africain n'allait pas êtreplacé sousle
régimede tutelle de l'ONU. Maisla Charte ne dit rien de tel et cesarticles
ne peuvent ni séparémentni ensemble porter le poids d'une telle déduc-
tion.
29. Au sujet de l'article 80, la véritétient en une phrase: ou bien les
mandats, avec l'obligation de faire rapport qu'ils comportent, auraient

22 On savait bien en fait que la Société desNations serait dissoute mais il n'y
avait rien dans la Charte pouforcer les Membres des Nations Unies qui étaient
aussi Membres de la SdN à prendre le parti de la dissolution, encmoins à le
prendreà une date déterminée.have survived the dissolution of the League on a basis of general legal
principle or, as some contend, of treaty law, and there would have been
no need of Article 80 for that particular purpose 23;-0r else, if survival

had to depend on the insertion of an express provision in the Charter,
Article 80 was not effectua1for the purpose-guarding as it did only
against possible causes of lapse arising out of Chapter XII itself, which
was not the cause of the dissolution of the League. In consequence, quite
a different type of provision would have been required in order to produce
the results now claimed for Article 80.
30. It is argued that the foregoing interpretation deprives Article 80

of al1meaning, since (so it is contended) there is nothing in Chapter XII
of the Charter that couldalter or impair existing rights, etc. Even if this
were the case, it would not be a valid juridical reason for reading into
this provision what on any view is not there, namely a self-operating
United Nations successorship to League functions,-the automatic
cokversion of an obligation of accountability to the League Council (still
extant when Article 80 came into force) into an obligation towards the
Assembly of the United Nations. But in any event this argument is not

correct. Article 80 remains fully meaningfu1,-and its intended meaning
and effect, so far as mandates were concerned, was to guard against the
possibility that the setting-up of the trusteeship system might be regarded
as an excusefornot continuing to observe mandates obligations, whatever
these were. and continued to be. But it did not define whatthesewere.or
say whether they continued to be. Furthermore it was only "in and of
itself" (words al1 too frequently overlooked) that the creation of the

trusteeship system was not to affect mandates. But if these lapsed from
some other (valid) cause, Article 80 did not, and was never intended to
operate to prevent it. In short, Article 80did not causethem to survive,-
but if they did (otherwise) survive, then the setting-up of the trusteeship
system could not be invoked as rendering them obsolete.

23 This was the view taken by Ambassador Joseph Nisot, the former Belgian
delegate and jurisconsult whose knowledge of the United Nations dates from the
Part III (August 1951), pp. 278-279, he said:uth African Law Journal, Vol. 68,

"The only purpose of the Article is to prevent Chapter XII of the Charter
from being construed as in any manner affecting oraltering the rights whatso-
ever of States and peoples, as they stand pending the conclusion of trusteeship
created them; they remainrvalid in so far as the latter are themselves still valid.
If they are maintained, it is by virtue of those instruments, not by virtue of
Article 80, which confines itself to providing that the rights of States and
peoples-whatever they may be and to whatever extent may subsist-are left
untouched by Chapter XII."
For a similar view by a former judge of the Permanent Court (also a delegate atde toute façon survécu à la dissolution de la SdN en vertu d'un principe

généralde droit ou, comme certains le soutiennent, en vertu du droit
des traités et l'article 80aurait étésuperflu à cette fin23; OU bien, si la
survivance devait dépendre de l'inclusion d'une disposition expresse
dans la Charte, l'article 80était sans effet utile, puisqu'il ne protégeait
que des causes éventuellesde caducitédécoulantdu chapitre XII, lequel

n'a pas entraînéla dissolution de la SdN. Il aurait donc fallu une dispo-
sition d'un tout autre caractère pour aboutir aux résultats qu'on prête
maintenant à l'article80.
30. On prétend que l'interprétationqui précèdeôte tout sens à l'article
80, car, affirme-t-on, il n'y a rien dans le chapitre XII de la Charte qui
puisse modifier ou compromettre des droits existants, etc. Serait-ce vrai

que cela ne constituerait pas un motif juridique valable d'introduire dans
I'article ce que 1'011ne saurait en aucune manièreprétendre y trouver,
à savoir la succession,opérantd'elle-mêmed , e l'ONU à des fonctions de
la SdN, la conversion automatique d'une obligation de rendre compte au
Conseil de la SdN (lequel existait encore au moment où l'article 80 est
entré en vigueur) en une obligation envers l'Assembléegénéraledes

Nations Unies. Cependant, de toute façon, l'argument ne tient pas.
L'article 80conserve tout son sens et tous ses effetsqui, pour ce qui con-
cerne les mandats, étaient d'empêcherque l'instauration du régimede
tutelle puisse êtreconsidéréecomme une excuse pour cesser de respecter
les obligations au titre des mandats, quelles qu'ellesfussent à l'origine et
à ce moment-là. Mais I'article80 n'indiquaitpas quellesétaientces obli-

gations,nisi ellesdemeuraienten vigueur.De plus, c'était seulement «direc-
tement ou indirectement ))(inandof itself- ces termes sont trop souvent
oubliés)que la mise en place du régimede tutelle ne devait pas affecter
les mandats. Si les mandats étaient devenus caducs pour quelque autre
cause valable, I'article 80 ne s'y opposait pas, et n'a jamais viséà s'y
opposer. En bref l'article 80 n'assurait pasla survivance obligatoire des

mandats, mais, dans l'éventualitéoù ils subsistaient pour d'autres motifs,
la créationdu systèmede tutelle ne pouvait pas êtreinvoquée commeles
faisant tomber en désuétude.

23 C'est bien ce que pensaitM. Joseph Nisot, ancien déléguéa,mbassadeur et
jurisconsulte belge dont la connaissance des Nations Unies remontela conférence
de San Francisco. Dans leSouth African Law Journal, vol. 68, IIIepartie, août 1951,
p.278-279, il écriva:t
«Le seul objet de l'article est d'empêcher d'interprétchapitre XII de la
Charte comme affectant ou modifiant en quoi que ce soit les droits des Etats
et des peuples tels qu'ils existent et tant que des accords de tutelle ne sont pas
conclus. Ces droits tirent leur existence juridique des instruments qui les ont
créés;ils restent valables pour autant que ces instruments sont eux-mêmes
toujours valables. S'ils sont maintenus, c'est en vertu de ces instruments et
non en vertu de i'article 80 qui se borne à prévoir que les droits des Etats et
des peuples - quels qu'ils puissent êtreet à quelque degré qu'il subsistent -
sont laissésintacts par le chapitre »[Traduction du Greffe.]
Voir les vues analogues de Manley Hudson, ancien membre de la Cour permanente, 31. The argument founded upon the reference to Article 80 contained
in Article 76 (d) of the Charter is equally misplaced and turns in the same
circle. Without doubt the effect of this reference was that in sofur as any
preferential economic or other rights were preserved by reason of Article
80, they forrned exceptions to the régimeof equal treatment provided for

by Article 76 (d). But this left it completely open what preferential rights
were thus preserved. They were of course only those preserved from
extinction because of the operation of Chapter XII of the Charter, not
those that might be extinguished from other causes. The point is exactly
the same as before.

32. If neither Article 10nor 80, taken singly, created an obligation to
report to the United Nations Assembly, it is evident that, taken together,

they cannot do so either. If anything, the reverse isthe effect,-two blanks
only create a bigger blank.

(c) The Organized World(or "International")
Community Argument

33. This argument, not previously prominent, the essenceof which isto

postulate an inherent continuity between the League of Nations and the
United Nations, as being only different expressions of the sarneoverriding
idea, emerged in the course of the South West Africa cases (Ethiopiaand
Liberia v.South Africa, 1960-1966).It is obviously directed to supplying
a possibly plausible foundation for something that has no basis in con-
crete international law. It has no such basis because the so-called organ-
izedworld community isnot a separate juridical entity with a personality
over and above, and distinct from, the particular international organi-

zations in which the idea of it may from time to find actual expression.
In the days of the League there was not (a) the organized world commu-
nity, (b) the League. There was simply the League, apart from which no
oruanizedworld communitv would have existed. The notion therefore
of such a community as a sort of permanent separate residual source or
repository of powers and functions, which are re-absorbed on the ex-
tinction of one international organization, and then automatically and
wit.hout special arrangement, given out to, or taken over by a new one,

is quite illusory 24.

San Francisco) see Manley Hudson in American Journal of International Law,
Vol. 45 (1951), at p. 14.
24 Nor does international law know anything comparable to such principles of
private law as those for instance which, in the event of a failure of al1heirs to given
~ro~ert~, cause it to pass as bona vacantia to the State, the fisc, the Crown, etc.;
so that although there is no "inheritance" asuch, there is a successorship in law.
Moreover, what is in question in the present case is not property but the exercise 31. L'argument tiré de la référence à l'article 80 que l'on trouve à

l'article 76 d) de la Charte vient aussi malà propos et tourne autour du
mêmepoint. Il n'est pas douteux que cette référence signifiaiqtue, dans la
mesure où des droits préférentiels, économiquesou autres, seraient
préservéspar application de l'article 80, il s'agirait là d'exceptions au
régime d'égalité de traitement prévu àl'article 76 d). Mais cela ne résol-
vait nullement la question de savoir quels étaient lesdroits depréférence
ainsi préservés. Il ne pouvait évidemment s'agirque de ceux qui étaient
préservésde l'extinction par application du chapitre XII de la Charte, et
non de ceux qui auraient pu s'éteindrepour d'autres motifs. L'on en

revient donc à l'argument précédent.
32. Si ni l'article 10 ni l'article 80, pris séparément,ne créent une
obligation de faire rapport à l'Assembléegénérale desNations Unies, il
est évident qu'ils nepeuvent pas non plus avoir cet effet conjointement.
C'est plutôt le contraire qui serait vrai: zéroplus zéroégale zéro.

c) Argument de la communautémondiale (ou «internationale)))
organisée

33. Cet argument, sur lequel on n'avait pas beaucoup insistéjusqu'à
présent et qui consiste essentiellement à postuler une continuité intrin-
sèqueentre la Société desNations et l'organisation des Nations Unies,
en tant qu'avatars différents d'une même idée directrice, a étéavancé
dans les affaires du Sud-Ouest africain (Ethiopie c. Afrique du Sud;
Libériu c.Afrique du Sud, 1960-1966).Il vise manifestement à donner une
explication éventuellement plausible à une conception qui n'a aucun
fondement dans le droit international positif. Elle n'en a pas parce que

ce qu'on appelle la communauté mondiale organiséen'est pas une entité
juridique distincte dotée d'une personnalitépropre et transcendant celle
des organisations internationales dans lesquel!es elle a pu s'incarnerà
telle ou telle époque. Du temps de la SdN il n'y avait pas la communauté
mondiale organisée, d'une part, et la SdN de l'autre. Tout ce qui existait,
c'étaitlaSdN, sans laquelle il n'y aurait pas eu de communauté mondiale
organisée.Par conséquent la notion d'une telle communauté comme
source résiduelledistincte et permanente ou comme réservoirde pouvoirs

et de fonctions qui seraient réabsorbées à la disparition de telle ou telle
organisation internationale pour être ensuite conféréa sutomatiquement
et sans arrangement spécial à une nouvelle organisation ou assuméspar
celle-ci, est tout fait illusoir24.

qui fut aussi délégà San Fransisco, dans I'American Journal of International Law,
vol.45,1951, p. 14.
24 Le droit internationalcontient d'ailleurs rien de comparable aux principes
de droit privéselon lesquels, par exemple, en l'absence d'héritiers les biens vacants
passentà I'Etat, au fisc, à la Couronne, etc., desorte que, s'il n'ya p»à ([héritage
proprement parler, il y a néanmoins succession en droit. De plus il ne s'agit pas eu
l'espèce d'un patrimoine mais de l'exercice d'une fonction et il n'existe aucun 34. It is evident therefore that, in the instant case, this theory is put
forward witha viewto circumventing, expost facto, what would otherwise

be-what is-an insuperable juridical obstacle,-namely the lack of any
true successorship in law betweenthe League of Nations and the United
Nations. In the absence of such successorship, the "organized world [or
'international'] community" argument can be seen for what it is-an
expedient;-for it is quite certain that none of the States that, as man-
datories, assumed obligations to report to the League Council could for

onemoment have supposed that theywere therebyassuminganopen-ended
obligation to report for al1time to whatever organ should be deemed,
at any given moment, to represent a notional and hypothetical organized
world community, and regardless of how such a community might be
constituted or might function.

4. Political rejection inthe UnitedNations of any

continuity with the Leagueof Nations

(a) Zngeneral and in principle

(i) Attitude towardstheLeague
35. In the foregoing sub-sections various theories of implied succes-

sion as between the United Nations and the League in the field of man-
dates have been considered and shown to be fallacious. The real truth is
howe~er,that they al1 fly in the face of some of the most important facts
concerning the founding of the United Nations;-for the idea of taking
over from the League, of re-starting where it left off, was considered and
rejected-expectedly so. The United States had never been a member of
the League for reasons that were still remembered 25.The Soviet Union

had been expelled in 1939.The "Axis" Powers, on the other hand, under
their then fascist régimes,hadbeen members, and so on. The League had
a bad name politically. It had failed in the period 1931-1939to prevent at
least three very serious outbreaks of hostilities, and it had of course
been powerlessto prevent World War II. It was regarded in many quar-
ters as something which-so far from being an "organised world com-

of a function, and there is no principle of international law which would make it
possible to say that, if an international organizabecomes extinct, its functions
automatically pass to another without special arrangements to that effect. The
position was correctly stated by Judge Read in 1950, in the passage quoted in
paragraph 22 above.
25 It will be recalled that although President Wilson was one of the principal
architects of the LeagueCovenant,-and although the Covenant, instead of being
a separate instrument had been made formally part of the Treaty of Versailles in
the belief that the United States must ratify the latter, and thereby automatically
become a member of the League,-this expectation was defeated by the action
the United States was one of the "PrincipalraAllied and Associated Powers" int that
whose name it was made. A separate Peace Treaty with Germany was concluded
by the United States in 1921. 34. Il est donc évident qu'enl'espècecette théorieest invoquéeen vue
de tourner après coup ce qui aurait constitué et constitue encore un
obstacle juridique insurmontable, à savoir l'absence de toute succession
juridique véritableentre la SdN et l'ONU. A défautd'unetelle succession,

l'argument dela «communautémondiale [ou «internationale ))organisée ))
apparaît sous son vrai jour comme un expédient:il est bien certain qu'au-
cun des Etats qui, comme mandataires, ont accepté l'obligation defaire
rapport au Conseil de la SdN n'aurait pu supposer un instant qu'il
souscrivait par là même à une obligation généralisée de rendre compte,

dans tous les temps à venir, à tout organisme qui pourrait êtreconsidéré,
à tel ou tel moment, comme représentant une communauté mondiale
organiséeaussi abstraite qu'hypothétique, et cela quelle quesoitla façon
dont cette collectivité polirrait être constituéeou fonctionner.

4. Rejet politique, aux Nations Unies,de toute continuité
avec la Sociétédes Nations

a) En générae lt enprincipe

i) Attitude àl'égard dela Société deN s ations

35. Nous avons étudiédans les paragraphes qui précèdentdiverses
théories tendant à prouver qu'il y avait eu succession implicite entre
l'Organisation des Nations Unies et la Sociétédes Nations en ce qui
concerne les mandats et nous avons montré que ces théories étaient
fallacieuses. Mais la vérité esqt ue ces théories ne tiennentaucun compte

de certains des faits les plus importants qui entourent la fondation de
l'ONU, car l'idéed'une reprise en charge des fonctions de la SdN, l'idée
de repartir d'où la SdN s'étaitinterrompue, a étéenvisagéeet, comme il
fallait s'y attendre, rejetée. Les Etats-Unis n'étaient jamais devenus
membre de la SdN pour des raisons que l'on n'avait pas oubliées 25.
L'URSS en avait été exclue en 1939.En revanche les puissances de l'Axe,

avec leurs régimes fascistesde l'époqueen avaient fait partie, etc. Politi-
quement la SdN avait mauvaise presse. Entre 1931 et 1939 elle n'avait
pas réussi à prévenir au moins trois conflits armés trèsgraves et elle

principe de droit international qui permette de dire que, lorsqu'une organisation
internationale vient disparaître, ses fonctions sont automatiquemendévolues à
une autre sans que des arrangements spéciaux aient étéprévus à cet effet. La situa-
tion a étécorrectement décritepar. Read en 1950 dans le passage de son opinion
citéau paragraphe22ci-dessus.
25 On sait que, si le président Wilson a bien étél'un des principaux architectes
du Pacte de laSdN - qui, au lieu de constituer un instrument distinct, a été incor-
poré officiellement au traité de Versailles parce qu'on croyait que les Etats-Unis
ratifieraient nécessairement le traitéet deviendraientto membre dela SdN -
le traité, bien que les Etats-Unis fussent l'une desipales Puissances alliéeseter
associées)au nom desquelles le traité était rédigé.Les Etats-Unis ont signé un
traitéde paix séparéavecl'Allemagne en921.munity7'-was a paramountly European institution dominated by "colo-
nialist" influences.The United Nations, so it was felt, must represent an
entirely fresh initiative. Although it could hardly fail in certain ways to
resemblethe League, theremust be no forma1link, nojuridical continuity.
The League had failed and the United Nations must not start under the
shadow of a failure.

36. This is why absolutely no mention of the League is to befound in
any part of the Charter. (Even in connection with mandates, formerly
generallyknown as "League ofNations mandates", the Charter makes no
mention of the League. In Article 77, paragraph 1,and Article 80, para-
graph 2-the only provisions in which mandates as such are mentioned-
they are referred to as "territories now held under mandate" and "man-

dated ... territories".) This again is why the Charter was brought into
force without any prior action to wind up the League, and regardless of
the fact that it was still, and continued to be, in existence. It is not too
much to say therefore that, in colloquial terms, the founders of the United
Nations bent over backwards to avoid the supposed taint of any League
connexion.

(ii) Assembly Resolution XIV
of 12 February 1946

37. The same attitude of regarding the League as a quasi-untouchable
was kept up when, after the Charter had come into force and the United
Nations was definitelyestablished, action was taken to put an end to the
League and take over its physical and financial assets,-and to reach a
final decision regarding its political and technical activities 26. This was
done by the now well-known General Assembly Resolution XIV of 12

February 1946,the whole text of which will repay study and will, with
one (non-pertinent) omission, be found set out verbatim on pages 625-626
of the 1962volume of the Court's Reports. The parts relevant to man-
dates (though not mentioning them by name) were as follows:

26 A start had of course been made in the Preparatory Commission of the United
Nations set up after the San Francisco Conference. To cite the joint dissenting
West Africn cases (Z.C.J. Reports 1962, p. 532), the Summary Records of theth
Commission, in particularUNPC Committee 7, pp. 2-3 and 10-11, indicated that
"the whole approach of the United Nations to the question of the activities of the
League of Nations was one of great caution and indeed of reluctance ...there
was a definite rejection of any idea ... a general take-over or absorption of
League functions and activities".avait été impuissante à empêcherla seconde guerre mondiale. Dans de
nombreux milieux, loin d'y voir une ((communautémondiale organisée I),

on la considérait comme une institution essentiellement européenne
assujettie à des influences «colonialistes ». C'est pourquoi I'on estimait
que I'ONU devait être conçuedans un esprit absolument nouveau. Sans
doute serait-il inévitable que I'ONU ressemble par certains côtés à la
SdN, mais il ne devait y avoir aucun lien officiel, aucune continuité
juridique. La SdN avait échoué etil ne fallait pas que l'ONU prît son
essor sous cette ombre chancelante.

36. Voilàpourqoui il n'estfait rigoureusement aucunemention de la
Sociétédes Nations dans la Charte. (Même à propos des mandats, pour-
tant connus généralementjusque-là comme ((mandats de la Société des
Nations I)la Charte ne dit mot de la SdN. A l'article 77, paragraphe 1,
et à l'article 80, paragraphe 2, qui sont les seules dispositions où il soit
fait étatdes mandats comme tels, on trouve les expressions ((territoires

actuellement sous mandat Iet ((territoires sous mandat II.C'est pourquoi
là encorela Charte a été mise en application sans que I'onait pris aupara-
vant la moindre mesure pour mettre fin aux activités dela SdN et indé-
pendamment du fait que celle-ci existait encore et continuait d'exister.
Il n'est doncpas exagéré de dire, sous une forme un peu triviale, que les
fondateurs de I'ONU ont tout fait pour éviterla souillure d'un contact
quelconque avec la SdN.

ii) RésolutionXIV de l'Assembléegénérale
en date du 12février1946
37. La mêmeattitude à l'égardd'une SdN presque considérée comme

une intouchable s'est de nouveau manifestéelorsque, une fois la Charte
en vigueur et l'ONU définitivementétablie,des mesures ont étéprises
pour liquider la SdN et reprendre ses avoirs matériels et financiers et
pour adopter une décision finaleau sujet de ses activités politiques et
techniques 26.C'esta cesfins qu'a été votéele 12février1946la résolution
XIV de l'Assemblée générale r, solution désormaisbien connue dont le

texte intégral, d'une lecturefort instructive, se trouve,à une omissionnon
pertinente près, reproduit in extenso aux pages 625-626du Recueil de la
Cour pour 1962. Les passages de cette résolution qui intéressentles
mandats (sansque cesderniers soient nommémentvisés)sont lessuivants:

26 Il y avait eu, bien entendu, un début de décisionen ce sens à la Commission
préparatoire des Nations Unies crééeaprès la conférencede San Francisco. Je me
permets de citer l'opinion dissidente commune rédigéepar sir Percy Spender et
moi-mêmelors de la phase de 1962 des affaires du Sud-Ouest africain (C.Z.J. Recueil
1962, p. 532), pour rappeler que, d'après les comptes rendus de la Commission et
en particulier ceux du comité7 (CPNU, p. 2-3 et 10-Il), «dans toute la manière
Unies ont manifestéune grande prudence et mêmeune certaine répugnance...toute
idéede ce qu'on pourrait appeler une reprise généraleou une absorption des fonc-
tions et des activitésdela Société desNations a été catégoriquementrej».ée "3. The General Assemblv declares that the United Nations is
willing in principle, and subject to the provisions of this resolution
and of the Charter of the United Nations, to assume the exerciseof
certain functions and powers previously entrusted to the League of

Nations and adopts the following decisions set forth in A, B and C
below."
Decisions A ("Functions pertaining to a secretariat") and B ("Functions

and powers of a technical and non-political character") are irrelevant in
the present connexion; but decision C, under which the question of man-
dates was regarded as coming, read as follows:
"C. Functions and Powersunder Treaties, International Conventions,

Agreements and other Instruments Having a Political Character 27.
The General Assembly will itself examine, or will submit to the
appropriate organ of the United Nations, any request from the
parties that the United Nations should assume the exercise of func-
tions or powers entrusted to the League of Nations by treaties, inter-
national conventions, agreements and other instruments having a
political character 27a."

Commenting on this in 1950(I.C.J. Reports 1950, p. 172),Judge Read,
whose views 1share, said, speaking of the Mandate for SW. Africa, that
it involved "functions and powers of a political character" and that in
substance decision C provided that the General Assembly would examine
a request "that the United Nations should assume League functions as
regards report, accountability and supervision over the South-West Afri-

can Mandate". He then continued:

"No such request has been forthcoming, and the General As-
sembly has not had occasion to act under decision C. The very exis-

tenceof this expressprovision, however,makes it impossibleto justify
succession based upon implication "-(my italics).

38. Nor was the Assembly's Resolution XIV of 12 February 1946in

any way the outcome of a hasty or insufficiently considered decision.
It had been carefully worked out in the Preparatory Commission, and
its committees and sub-committees, and it represented the culmination
of a settled policy. The story is summarized on pages 536-538of the 1962
joint dissenting Opinion already referred to (footnote 26 above) and a
fuller version is given at pages 619-624of the same volume of the Court's
Reports. In the discussion in the Preparatory Commission of the drafts
prepared by its Executive Committee, of what eventually became Reso-

27,27aIt was of course under the head of "Other instruments having a political
character" that mandates were deemed to come.

232 (3. L'Assemblée générad léclare qu'en principeet sous réserve
des dispositions dela présente résolutionet de la Charte, I7Organisa-
tion est prête à assumer certaines fonctions et certains pouvoirs
précédemmentconfiés à la Sociétédes Nations, et elle adopte les

décisionsénoncéesci-dessous aux paragraphes A, B et C. ))

Les paragraphes A (Fonctions de secrétariat)et B (Fonctions et pouvoirs

de caractère techniqueet non politique) sont sans intérêtici mais le
paragraphe C, qui étaitcensés'appliquer notamment aux mandats, énon-
çait :

((C. Fonctions et pouvoirs résultant detraités,conventions, accords
et autres instruments internationauxde caractèrepolitique 27.
L'Assembléegénérale étudieraelle-mêmeou soumettra à l'organe
compétentdes Nations Unies toute demande émanantdes parties et
tendant à ce que l'organisation assume les fonctions ou pouvoirs

confiés à la Société desNations par des traités, conventions, accords
et autres instruments internationaux de caractère politique ...27a))

Commentant ce texte en 1950 (C.I.J. Recueil 1950, p. 172), M. Read,
dont je partage les vues, disait que le Mandat pour le Sud-Ouest africain
comportait «des fonctions et pouvoirs de caractère politique ))et qu'en
substance le paragraphe C prévoyait que l'Assembléegénérale serait
saisie d'une requête«tendant à ce que les Nations Unies exercent les

fonctions de la Société des Nations en matière derapports, de responsa-
bilitéset de contrôle sur le Mandat pour le Sud-Ouest africain ». Et de
poursuivre :

((Aucune requête dece genre n'a étéadressée et l'Assemblée
générale n'apas eu l'occasion d'agir envertu de la décision C.
L'existencemême decettedispositionexpresserendtoutefoisimpossible
de ,justz3er une successionpar voie de conséquence logique . (Les
italiques sont de nous.)

38. On ne peut pas dire non plus que la résolutionXIV de l'Assemblée
en date du 12février1946corresponde le moins du monde àune décision
hâtive ou insuffisamment réfléchie.Elle avait été soigneusementmise

au point à la Commission préparatoire et au sein de ses comitéset sous-
comitéset elle représentait l'aboutissement d'une politiquebien établie.
On en trouvera un bref historique aux pages 536-538de l'opinion dissi-
dente commune de 1962dont j'ai déjàparlé (voir note 26 ci-dessus) et
une relation plus complète aux pages 619 à 624 du mêmevolume du
Recueil. Quand la Commission préparatoire a examiné les projets

27,27aC'était bienentendu par l'intitulaautres instruments de caractèrpoli-
tique»que l'on visait lesmandats.
232lution XIV, the use of the word "transfer" [of League functions and
activities], which nowhere appears in that resolution, was specifically
objected to, and dropped, on the ground that it would seem to apply a
"legal continuity that would notinfact existW-my italics-(see UN
docts. PC/LN/2, pp. 2-3, and PC/LN/IO, pp. 10-11).

(b) Inparticular as regards mandates

(i) Settled policy ofpreference
for and relianceuponthe

trusteeshipsystem
39. Asregards mandates, no fewer than three proposals were made in
thePreparatory Commission for the setting up of what would have been
an interim régimefor mandates under the United Nations. In the first
place the Executive Committee recommended the creation of a "Tem-
poraïy Trusteeship Committee" to deal with various interim matters
until the trusteeship system was fully working, and amongst them "any
matters that might arise with regard to the transfer to the United Nations

of any functions and responsibilities hitherto exercisedunder the Man-
dates SystemM-(references will be found in the footnotes to pp. 536
and 537 of t$e Z.C.J. Reports 1962). Had this proposa1 been proceeded
with, it would have resulted in the creation of some sort of interim régime
in respect of mandates, pending their being placed, or ifthey were not
placed, under trusteeship. But in the Preparatory Commission itself, the
idea of a temporary trusteeship committee met with various objections,
mainly from the Soviet Union, and was not proceeded with. Instead, the
Commission made quite a different kind of recommendation to the
General Assembly, looking to the conversion of the mandates into trus-
teeships. This recommendation eventually emerged as Assembly Reso-
lution XI of 9 February 1946, which will be considered in a moment.

40. Even more effective would have been the two United States pro-
posals made in the Executive Committee on 14October and 4 December

ï945 respectively, which, had they been adopted, would have done pre-
cisely and expressly what it is now claimed was (by implication) done,
even though these proposals were not proceeded with. Subject to differen-
ces of wording they were to the same effect, and their character can be
seen from the following passage recommending that one of the functions
of a temporary trusteeship committee should be (UN doct. PC/EX/
92/Add. 1) :

". ..to undertake, following the dissolution of the League of Na-
tions and of the Permanent Mandates Commission, the functionsétablispar son comitéexécutifpour ce qui devait devenir la résolution
XIV, le mot transfert(des fonctionset activitésdela SociétédesNations),
qui n'apparaît plus nulle part dans la résolution, a fait l'objet d'objec-
tions préciseset a étéécartéparcequ'il paraissait établir une ((continuité
juridique qui enfait n'existeraitpa»(les italiques sontde nous) (Nations
Unies, doc. PC/LN/2, p. 2-3 et PC/LN/lO, p. 10-11).

b) En ce qui concerneles mandats en particulier

i) Politique établie tendant
à donner lapréférenca eu régime detutelle
et às'appuyersur cerégime
39. S'agissantdes mandats, jusqu'à troispropositions ont étformulées

à la Commission préparatoire en vue de créerce qui eût étéun régime
provisoire de mandats sous l'égide desNations Unies. Tout d'abord, le
comitéexécutifa recommandé la création d'un ((comitétemporaire de
tutelle»qui aurait exercécertaines fonctions pendant la période intéri-
mairejusqu'au moment où le régimede tutelle aurait fonctionné à plein
et qui se serait occupénotamment des ((questions quepourrait soulever le
transfert à l'organisation des Nations Unies de toutes fonctions et
responsabilités assumées jusqu'ici en vertu du régime des mandats ))
(pour les références,voir C.Z.J R ecueil 1962, notes au bas des pages
536-537).S'il y avait étédonné suite, cette proposition aurait abouti à
créer unesorte de régimeintérimaire des territoires sous mandat, appli-

cable soit jusqu'au moment où ces territoires auraient été placés sous
tutellesoit dansl'hypothèseoùilsne leseraientpas. Mais,à la Commission
préparatoire même, l'idée de créer un comité temporaire de tutelle a
suscité diversesobjections, principalement de la part de l'URSS et il
n'y a pas étédonnésuite. Enfaitla Commissiona formulé àl'intention de
l'Assembléegénéraleune recommandation toute différentecoqsistant à
envisager la conversion des mandats en tutelles. Cetterecommandation a
finalement pris la forme de la résolution XI de l'Assembléegénéraleen
date du 9 février1946,que j'examinerai plus loin.
40. Deux autres propositions formuléespar les Etats-Unis au comité
exécutif les 14 octobre et 4 décembre 1945 auraient étéplus efficaces

encore car, si elles avaient été adoptées,elles auraient très précisément
et expressément accompli ce que l'on prétend aujourd'hui avoir été
réalisépar voie de conséquenceimplicite, alors mêmeque cesdeux propo-
sitions n'ont pas eu de suite. A certaines différencesde rédactionprès, les
deux propositions avaient le même effetet on peut voir quelle en étaitla
nature dans le passage citéci-après, où il est recommandé de charger
notamment un comité temporaire de tutelle (Nations Unies, doc. PC/
EX/92/Add. 1)

«[d']exercerà la suite de la dissolution de la Société desNations et
de la Commission perinanente des mandats, les fonctions qu'assurait previously performed by the Mandates Commission in connection
with receiving and examining reports submitted by Mandatory
Powers with respect to such territories under mandate as have not
been placed under the trusteeship system by means of trusteeship
agreements, and until such time as the Trusteeship Council is
established, whereupon the Council will perform a similar func-
tion".

But after tabling these proposals the United States delegation did not
further proceed with them. Instead, the Preparatory Commission recom-
mended, and the Assembly adopted, Resolution XI mentioned at the end
of the preceding numbered paragraph above. The full text of the relevant
parts of this Resolution will be found on page 624of Z.C.J.Reports 1962.
It was addressed to "States administering territories now held under man-
date"; but al1it did was to welcome the declarations made by "certain"
of them as to placing mandated territories under trusteeship, and to
"invite" al1of then to negotiate trusteeship agreements for that purpose
under Article 79 of the Charter;-not a word about the interim posi-
tion,-not a word about the situation regarding any mandated terri-
tories in respect ofwhichthis invitation was not, and continued not to be,
accepted. This piece of history confirms the existence of a settled policy
of avoidance of mandates as such.

(ii) ThefinalLeagueofNations

Resolution of18 April 1946
41. Precisely the same attitude characterized the behaviour of those
Members of the United Nations who were also Members of the League
when, in their latter capacity, they attended the final Geneva meeting for
the winding up of the League. Here again was an opportunity of doing
something definite about mandates,-for (with the exception of Japan,
necessarily absent) al1the mandatories were present, and would be bound

by any decisions taken,-since, according to the League voting rule,
these had to be taken by unanimity. The terms of the resulting Resolution
of 18 April 1946will be considered in greater detail later, in connexion
with the question whether they implied for the mandatories any under-
takingof accountability to the UnitedNationsin respect oftheir mandates
as such. Sufficeit for present purposes to Saythat after recognizingthat,
on the dissolution of the League, the latter's "functions with respect to
Mandated Territories will come to an end", the Resolution merely noted
that "Chapters XI, XII and XII1 of the Charter of the United Nations
embody principles corresponding to those declared in Article 22 of the
Covenant ofthe LeagueH,-and then wentonto takenote ofthe "expressed
intentions" of the mandatories to continue to administer their mandates
"in accordance with the obligations contained" in them, "until other
arrangements have been agreed between the United Nations and the auparavant la Commission permanente des mandats en ce qui con-
cerne la réceptionet l'examen desrapports soumis par lesPuissances
mandataires sur les territoires sous mandat qui n'auraient pas été
placéssous le régimede tutelle en vertu d'accords de tutelle,jusqu'au
moment où le Conseil de tutelle sera constitué et remp4ira à son

tour une fonction analogue )).

Mais, après les avoir déposées, ladélégationdes Etats-Unis n'a plus rien
fait au sujet de ces propositions. En fait la Commission préparatoire a

recommandé et l'Assembléegénéralea adopté la résolution XI dont je
fais étatà la fin du paragraphe 39ci-dessus et dont lespassages pertinents
sont intégralementcitésdans C.I.J. Recueil 1962,page 624. Cette résolu-
tion s'adressait aux (Etats qui administrent des territoires en vertu d'un
mandat D,mais ellese bornait à accueillir avec satisfaction lesdéclarations
de ((certains» d'entre eux qui avaient manifestél'intention de placer des
territoires sous mandat sous le régimede tutelle et à inviter tous ces

Etats à négocier à cette fin des accords de tutelle conformémentà l'article
79 de la Charte: pas un mot sur ce qu'il fallait faire dans l'intervalle, pas
un mot sur la situation des territoires sous mandat pour lesquels, le cas
échéant, cette invitation n'étaitpas acceptée et n'allait pas l'être.Ce
point d'histoire confirme l'existence d'une politique délibéréc eonsistant
à ne rien dire des mandats en tant que tels.

ii) Résolutionfinale de la Société
des Nations du 18 avril 1946

41. C'est précisémenc tette attitude qui s'est manifestée chezles Mem-
bres de l'ONU qui étaientégalement Membres de la SdN lorsque, à ce
titre, ils ont assistéla dernière réunion de Genèveoù il devait être mis

finà l'activitéde la SdN. L'occasion se présentaitlà encore d'adopter des
décisions précisessur les mandats: exception faite du Japon qui était
nécessairementabsent, tous les mandataires étaientassemblés etallaient
se trouver liéspar les décisionséventuellementprises puisque, comme il
étaitde règle à la SdN, cesdécisionsdevaient êtreadoptées à l'unanimité.
Je reviendrai sur les détails de la résolution du 18 avril 1946 quand je
rechercherai si elle supposait que les mandataires s'engageaient à rendre
compte à l'organisation des Nations Unies pour leurs mandats en tant

que tels.11suffira ici de rappeler que cette résolution, après avoir reconnu
que la dissolution de la SdN (mett[ait] finà ses fonctions en ce qui
concerne les territoires sous mandat )),s'est contentéede noter que ((des
principes correspondant à ceux que déclarel'article 22du Pacte [étaient]
incorporés dans les chapitres XI, XII et XII1de la Charte des Nations
Unies », pour noter ensuite que les mandataires avaient ((expriméleur
intention »de continuer à administrer leurs mandats ((conformémentaux
obligations contenues »dans ceux-ci cjusqu'à ceque denouveaux arrange-

ments soient pris entre les Nations Unies et les divers [mandataires] ». respective [mandatories]" ;-again an allusion to, and a looking towards,
the trusteeship system which, under the Charter, required the negotiation
of trusteeship agreements. The interim position, and the position concern-
ing any mandates in respect of which no trusteeship agreements were
negotiated, was thus left to the operation of an ambiguous general
formula, the precise effect of which (to be considered later) has been in

dispute ever since.
42. The view that it was once more the trusteeship system that those
concerned had in mind is borne out by the fact that the Board of Liqui-
dation set up by the League Assembly to dispose of the League's assets-
in handing over the archives of the League's mandates section to the
United Nations-said in a report, the relevant part of which was entitled
"Non-Transferable Activities, Funds and Services"-(my italics), that
these archives "should afford valuable guidance to those concerned with
the administration of the trusteeship [not the mandates] system"-my
italics). It then also declared that "the mandates system inaugurated by
the League has thus been brought to a close" (L. of N. doc. C.5.M.5.,
p. 20).In short, as Lord McNair said in 1950(Z.C.J.Reports 1950,p. 161),
in a verypertinent verdict on the April1946 resolution, it

". .. recognized that the functions of the League had come to an end;
but it did not purport to transfer them .. .to the United Nations"
(myitalics) 28.

After adding that he did not see how this resolution could "be construed
as having created a legal obligation ... to make annual reports to the
United Nations and to transfer to that Organization . ..the supervision
of [the mandates]" he concluded that: "At the most, it could impose an
obligation to perform those obligations ... which did not involve the
activity of theLeague3'-(my italics).

43. There were however two further circumstances which suggest

conclusively that no interim mandates régime was contemplated at
Geneva-
(a) The "Chinese" draft-In the first place (and what must resolve al1
doubts) is the fact that quite a different type of resolution had previouslq
been proposed but not proceeded with. Thiswaswhat has become known

in the annals of the SW. Africa complex of cases as the "Chinese" or
"Liang" draft, from its source of origination, and it was in complete
contrast to what was eventually adopted. It ran as follows:

28 In other words there was (it cannot too often be repeated) no assignment, so
that the acceptance of aewparty to the Mandate (the United Nations) by way of
novation needed the Mandatory's consent.Il s'agissait là encore d'une anticipation et d'une allusion au régimede
tutelle qui,conformément à la Charte, exigeaitla négociationd'accordsde

tutelle. Entre-temps, et s'agissant de tout mandat pour lequel il n'était
pas négociéd'accord de tutelle, on s'en remettait à l'application d'une
formule généraleet ambiguë, dont l'effet précis,que j'étudie plusloin,
n'ajamais cesséde prêter à controverse.

42. L'idéeque c'était unefois de plus au régimede tutelle que les
intéressés songeaient trouve sa confirmation dans le fait que le Comitéde

liquidation créé pour liquider les avoirs de la SdN a dit - en remettant à
l'ONU les archives de la section des mandats de la SdN, dans un rapport
dont le passage pertinent s'intitulait ((Activitésnon transférablesf ,onds et
services))(les italiques sont de nous), que ces archives ((donneraient des
indications précieuses à ceux qui seraient chargés de l'administration du
régime detutelle [et non du système des mandats] » (les italiques sont de
nous). Ce mêmeComitéde liquidation a déclaréen outre que ((lesystème

desmandatsinaugurépar la SdN avait ainsipris fin 1(SdN, doc. C.5.M.5.,
p. 20). Bref, comme l'a dit en 1950 lord McNair (C.I.J. Recueil 1950,
p. 161), en portant un jugement très pertinent sur la résolutiond'avril
1946,l'Assemblée

((reconnaissaitque les fonctions de la Sociétédes Nations avaient
pris fin; mais ellene seproposait pas deles transfërer ...aux Nations
Unies »(les italiques sont de nous) 28.

Après avoir ajouté qu'il ne voyait pas comment ((on peut interpréter
cette résolution commeayant crééune obligationjuridique ..deprésenter
des rapports annuels aux Nations Unies et de transférer à cette Organi-
sation la surveillance [exercéesur les mandats] », lord McNair concluait:
« tout au plus cette résolution pouvait-elle imposer ld eevoir de s'acquitter
des obligations ...qui nefont pas intervenir l'activitéde la Sociétédes
Nations »(les italiques sont de nous).

43. Deux autres éléments permettent par ailleurs de soutenir de façon
concluante qu'il n'a pas étéenvisagé à Genève de créerde système
intérimaire demandats.

a) Le ((projetchinois )).- Il y a tout d'abord le fait, qui doit dissiper
tous les doutes, qu'une résolutiond'un type tout différentavait été au-
paravant proposée mais qu'ilne lui avait pas été donnésuite. C'étaitla
proposition, radicalement différentede cellequi a étéfinalementadoptée,
que, dans les annales de l'ensemble des affairesrelatives au Sud-Ouest
africain, on appelle désormais d'après ses origines le ((projet chinois 1)
ou le ((projet Liang ». Cette proposition s'énonçait commemit:

28 En d'autres termes, et on ne le répétera jamais assez, il n'y eut pas cession,
de sorte que l'acceptation d'une partie nouvelle au mandat (l'organisation des
Nations Unies) àla suite d'une novation aurait exigéle consentement dixmandataire. 248 NAMIBIA (s.w. AFRICA (DISS. OP. FITZMAURICE)
"The Assembly,

Considering that the Trusteeship Council has not yet been
constituted and that al1mandated territories under the League have
not been transferred into trusteeship territories;
Considering that the League's function of supervising mandated
territories should be transferred to the United Nations, in order to
avoid a period of inter-regnum inthe supervisionof the mandatory
régimein these territories;-(my italics),
Reconzrnendsthat the mandatory powers as well as those adminis-
tering ex-enemy mandated territories shall continue to submit
annual reports to the United Nations and to submit to inspection

by the sameuntil the TrusteeshipCouncilshallhavebeenconstituted."

Although this proposa1 would have required amendment on account of
certain technical errors and defects, it needs but a glance to see that, had

the substance of it been adopted, it would have done precisely what has
since so continually and tediously been claimed as having been done by
the Resolution actually adopted on 18April 1946.It would have imposed
upon the mandatories an obligation at least to seek United Nations
supervision and submit to it, if forthcoming, during what the proposa1
termed the "period of inter-regnum" in respect of mandates. Whether
the United Nations would have accepted the suggested function-and
naturally no resolution of the League could have compelled it to do so-
is beside the point. The inescapable fact remains that, for whatever
reason (and that reason does not appear upon the record) the proposa1

was not adopted; and matters cannot therefore, in law, be exactly the
same as if it had been. If any further proof were needed it could be found
in the fact that Dr. Liang himself, in speaking on the Resolution of 18
April 1946,as actually adopted, recalled his earlier (non-adopted) draft,
and. after statiug. that the truste es hi^articles of the United Nations
Charter were "based largely upon the principles of the mandates system",
added "but thefunctions ofthe League inthat respectwerenot transferred
automatically to the United Nationsw-(my italics). Therefore, he said,
the Assembly of the League should "take steps to secure the continued
application of [those]principles". Butin fact the Assembly of the League,
like the Assembly of the United Nations, decided to rely forthat purpose

on the (non-obligatory) conversion of mandates into trusteeships, or
elseon Article 73 (e) of the Charter to which 1nowcome.

(b) The reference to Chapter XI of the Charter in the Resolution of 18
April 1946-This is the second significant circumstance showing how
minds were working at Geneva in April 1946.The Resolution of 18April
(paragraph 3-see ante paragraph 41) referred not only to Chapters XII «L'Assemblée,
Considérant que le Conseil de tutelle n'a pas encore étéconstitué
et que tous les territoires sous mandat de la Société desNations

n'ont pas encore ététransformés en territoires sous tutelle;
Considérant qu'il y aurait lieu, ajîn d'évitertoute interruption dans
la surveillancedu régime desmandats dans ces territoires, de trans-
,fier à l'Organisation des Nations Unies les fonçtions assumées à
cet égardpar la Société desNations [lesitaliques sont de nous];
Recommande que les Puissances mandataires ainsi que les Puis-
sances administrant des territoires sous Mandat ex-ennemi con-

tinuent à présenter aux Nations Unies des rapports annuels et ac-
ceptent que ces territoires soient inspectés par l'Organisation,
jusqu'au moment où le Conseil de tutelle aura été constitué. »

Cette proposition aurait appelédes amendements parce qu'elle contenait
certaines erreurs d'ordre technique, mais il sufit d'un coup d'ceilpour
voir que, sil'on en avait retenu la substance, elle aurait accompli précisé-
ment ce qu'on prétenddepuis lors, avec une constance si lassante, avoir
étéaccompli par la résolution qui a été adoptéeen fait le 18 avril 1946.
Cette (résolution chinoise ))aurait imposé aux mandataires au moins
I'obligation d'offrir d'accepter la surveillancede l'ONU et de s'y sou-

mettre effectivement, le cas échéant,tant que durerait ce que la proposi-
tion appelait une «interruption » relativement aux mandats. Quant à
savoir si l'ONU aurait ou non acceptéd'assumer cette fonction - car
ce n'est évidemmentpas une résolution de la SdN qui aurait pu l'y con-
traindre - la question est sans pertinence. Le fait certain est que, pour
une raison quelconque qui ne ressort pas du compterendu, la proposition
n'a pas été adoptée;les choses ne peuvent donc pas êtreen droit exacte-
ment les mêmesque si elle l'avait été.Si l'on avait besoin d'une preuve

supplémentaire, on pourrait la trouver dans le fait qu'à propos de la
résolutiondu 18avril 1946telle qu'elle a été adoptée, M. Liang lui-même
a rappelésontexte antérieur non adoptéet, aprèsavoir dit que les articles
de la Charte des Nations Unies sur la tutelle étaient fondés ((engrande
partie sur les principrs du système des mandats)), a ajouté ((mais les
fonctions pertinentes de la Société n'onp tas ététransmises automatique-
ment aux Nations Unies 1)(les italiques sont de nous). Par suite, a-t-il dit,

l'Assembléede la Société desNations (devrait prendre des mesures pour
assurer la continuité d'application desprincipes du systèmedesmandats )).
Mais en fait l'Assembléede la SdN comme l'Assembléegénéraledes "
Nations Unies a décidéde s'appuyer à cet effet sur la conversion (non
obligatoire) des mandats en tutelles, ou bien sur l'article 73 e) de la
Charte dont je vais maintenant traiter.

b) La référenca eu chapitreXI de la Chartedans la résolution du 18avril
1946. - Voici un second élément significatifqui montre quel a dû être
le cours des idées à Genève en avril 1946. La résolution du 18 avril
(par. 3 - voir ci-dessus par. 41) fait état non seulement des chapitresand XII1 of the Charter (trusteeships) but also to Chapter XI (non-self-
governingterritories). Thereasons for thiswere giveninthejoint dissenting
Opinion of 1962,at pages 541-545of the 1962volume of Reports, where
attention was drawn to the virtuaI reproduction in the principal provision
of Chapter XI (Article 73) of the language of Article 22, paragraph 1,

of the League Covenant (both texts were set out for comparison in foot-
note 1 on p. 541 of that Opinion). The significance of the reference to
Chapter XI in the Geneva Resolution-a referencethat would otherwise
have had no object-is as showing (i) that the delegates, including the
various mandatories, regarded mandated territories as being in any event
in the non-self-governingclass, and (ii)that they regarded reporting under
paragraph (e) of Article 73 as an alternative to the placing of mandated
territoriesunder trusteeship, at least ithe sense of being something that
would fiIlin the gap before the latter occurreci,or ifdidnot occurat all.
Furthermore, it had this advantage, that although it involved a less
stringent form of reporting than specifically mandates or trusteeship
rep~rting, and one moreover that did not involve actual accountability
as such (see paragraph 59 below), it was obligatory for member States
of the United Nations administering non-self-governing territories,-
whereas the Charter created no obligation to place mandated or other
territories under the trusteeship system. If therefore it be contended that
there could not have been an intention to leave the "gap" totally un-
filled, the answer is that this is how it was intended to be fil1ed;-and

there is evidence that several delegates and/or governments understood
the matter in that sense (see I.C.J. Reports 1962, pp. 543-544). But
equally clear it is that the gap was not intended to be filled on the basis
that mandatories would, as mandatories, become accountable to the
United Nations,-for if that had been the intention, the obvious course
would have been followed ofsetting up an interim régimespecificallyfor
mandates as such, and inviting the United Nations to supervise it. There
was therefore an implicit rejection of that course,-and if itis sought to
explain matters (or explain them away) on the ground that the United
Nations, being intent on the conversion of al1mandates into trusteeships,
would probably not have accepted the invitation, then surely this is an
explanation that speaks for itself and can only confirm the view here put
forward.

*
* *
44. In relation to al1these various attempts to bridge the gap between
mandates and trusteeships, or alternatively to place continuing mandates
on a more regular footing, the claim made in the Opinion of the Court

is that their non-adoption did not necessarily imply a rejection of the
underlying idea contained in them. 1 myself had always thought that
the absolutely classic case of implied rejection was when a proposal
had been considered and not proceeded with-it being, as a matter of
237 XII et XII1 de la Charte concernant le régimede tutelle, mais aussi du
chapitre XI visant les territoires non autonomes. L'explication en a été
donnéedans l'opinion dissidente commune de 1962 (C.I.J. Recueil 1962,
p. 541-545), où il est soulignéque la disposition essentielle du chapitre

XI, àsavoir l'article 73, reprend pratiquement mot pour mot l'article 22,
paragraphe 1, du Pacte de la SdN (les deux textes sont reproduits aux
fins de comparaison dans le même volumedu Recueil, p. 541, note 1).
La portéede cette référenceau chapitre XI de la Chartedans la résolution
de Genève, référence qui autrement serait sans objet, est qu'elle montre:
i) que les délégations,notamment celles des divers pays mandataires,
considéraient les territoires sous mandat comme relevant en tout état
de cause de la catégoriedes territoires non autonomes; ii) qu'à leur avis
la présentation de rapports conformément à l'article 73, alinéa e),
pouvait remplacer la mise sous tutelle des territoires sous mandat en ce
sens au moins que cela permettrait de combler le vide avant la mise sous

tutelle ou dans le cas oùil n'y aurait pas de mise sous tutelle. Cette dis-
position avait en outre un avantage: si elle imposait de transmettre des
rapports sous une forme moins contraignante que pour les territoires
sous mandat ou lesterritoires sous tutelle et si en outreil ne s'agissaitpas
véritablement de rendre compte (voir par. 59 ci-après), elleétait obliga-
toire pour les Etats Membres des Nations Unies administrant des terri-
toires non autonomes, alors que la Charte n'obligeait pas à placer les
territoires sous mandat ou autres sous le réuimede tutelle. Par consé-
quent, lorsqu'on soutient que l'intention ne pouvait pas être de laisser
subsister le «videII,la réponseest que c'estjustement là la façon dont il
devait être comblé;certains élémentsdonnent d'ailleurs à penser que
plusieurs délégations et/ou gouvernements l'entendaient bien ainsi (voir

C.I.J. Recueil 1962,p. 543-544).Mais il est tout aussi clair que l'intention
n'étaitpas de combler le vide en rendant les mandataires en tant que tels
res~onsables devant l'ONU: sinon. la solution évidente aurait été de
cr&r un régimeintérimaire concernant les mandats en tant que tels et
d'inviter l'ONU à en surveiller l'application. Cette solution a donc été
implicitement rejetéeet, si l'on veutexpliquer les choses, ou trouver une
échappatoire, en disant que les Nations Unies, décidées à obtenir la
transformation de tous les mandats en tutelles, n'auraient probablement
pas acceptél'invitation, cette explication se passe de commentaire et ne
peut que confirmer les vues exposées ici.

44. S'agissant de toutes ces tentatives tendant soit à combler l'écart
entre mandats et tutelles, soit à régulariser la situation des mandats
subsistants, l'avis de la Cour est que la non-adoption de ces diverses
propositions n'impliquait pas nécessairementle rejet de l'idéedont elles
procédaient. J'avais moi-mêmetoujours pensé que le cas tout à fait
classique du rejet implicite d'une proposition est celui où, une proposition
ayant étéexaminée,il ne lui a pas étédonné suite - étantentendu qu'enlaw, quite irrelevant why 2g. When an idea has been put forward, in

much the same terms, on several different successive occasions, but
not taken up, only the strongest possible contra-indications (if any there
could be) would sufficeto rebut the presumption-if not of rejection-at
least of deliberate non-acceptation. If something is suggested but not
provided for, the situation cannot be the same as if it had been. If there is
a series of proposals substantially in the same sense, none of which is
adopted, the quite different resolutions that eventually were adopted

cannot be interpreted as having the same effect as those that were not.
Even a non-jurist can hardly fail to admit the logic of these propositions.

(c) Reasons for and signijîcance of the United Nations
attitude on mandates

45. These persistent avoidances of any assumption of functions regard-
ing mandates-even on an interim or temporary basis-are clear evidence
of a settled policy of disinterest in anything to do with them that did not
take the form of their conversion into trusteeships. This is borne out

by an additionalfactor, namely that in spite of the considerations set out
in paragraph 43 (b) above, the United Nations Assembly was, from the
start, unwilling to allow that Article 73 of the Charter could be regarded
as relating to mandated territories and, when it did receive reports about
SW. Africa transmitted on that basis (see paragraphs 59 aqd 60 below),
insisted on dealing with themthroughthe Trusteeship Council.Individual
episodes, occurring in isolation, might not have meant very much, but

the cumulative effectof them, taken as a whole, is overwhelming, and can
leadto onlyoneconclusion; namely that the United Nations did not intend
to take over any political function from the League except by special
arrangements that were never made,-and that, as part of this policy,
it did not want to become involved with mandates as such. This attitude
was in fact understandable. In the first dace. since the Charter made no
express provision for the supervision of mandated territories by the

United Nations, except if they were converted into trusteeships, which
must be a voluntary act and could not be compelled, there was no legal
basis upon which the Organization could claim to be entitled to supervise
mandates not so converted. No separate machinery for doing so was
instituted by the Charter, so that this would have had td be created
adhoc-withdoubtfül legality.To supervisemandates throughthe Trustee-

their originators realize that they would not be agreed to,-andethis of coursese
speaks for itself. Alternatively, they are often not proceeded withcause, even
though desirable in themselves, they would involve difficulties, or entail certain
corresponding disadvantages;-but in that event a choice is made, and as a matter
of law it cannot afterwards be claimed that "in reality" the prcposal wasaccepted,
or that at least it was not "truly" rejected.ch pleas are of a purely subjective
character,-and psychology is not law, droit le motif du rejet est sans pertinence 29.Quand une idée présentée à
diverses reprises en termes presque identiques n'a pas étéretenue, seules
les raisons contraires les plus fortes, si tant est qu'elles existent, peuvent
faire tomber la présomption qu'il y a eu sinon rejet, du moins non-
acceptation délibéréeS .i l'on a présenté unesuggestioil qui n'a pas été

reprise dans une disposition expresse, la situation ne peut êtrela même
que siellel'avait été.Lorsqu'une sériede propositions allant pour l'essen-
tiel dans le même sensn'ont pas été retenues,les résolutions toutes dif-
férentes qui ont en définitive étéadoptées ne sauraient s'interpréter
comme ayant le même effetque les propositions non approuvées. Il n'est
guèrebesoin d'êtrejuriste pour se rendre à pareille logique.

c) Motifs expliquant l'attitude de l'organisation des Nations Unies

sur les mandats et importance decette attitude

45. Le fait que l'on ait avec tant de persistance évitéd'assumer toute
fonction en matière demandats - fût-ce à titre intérimaireou temporaire
- témoigne d'une volonté bien arrêtéede se désintéresserdans ce do-
maine de tout ce qui n'étaitpas conversion en tutelle. Un autre fait le
confirme: l'Assemblée générale deN s ations Unies s'est refusée dès le
départ, malgré les considérations exposées au paragraphe 43 b) ci-

dessus, à permettre que l'article 73 de la Charte soit interprété comme
ayant trait aux territoires sous mandat; saisie de rapports sur le Sud-
Ouest africain transmis à ce titre (voir par. 59 et 60 ci-dessous), elle a
tenu à les faire examiner par le Conseil de tutelle. Des épisodesisolés
n'auraient peut-êtrepas signifiégrand-chose, mais l'effet cumulé deces
élémentspris ensemble devient irrésistibleet ne permet qu'une conclu-
sion: l'ONU n'avait l'intention de prendre en charge aucune fonction

politique de la SdN en dehors d'arrangements spéciauxqui n'ont jamais
étéconclus et, en vertu de cette politique, elle ne voulait rien avoir à faire
avec les mandats comme tels. Cette attitude peut se comprendre. Tout
d'abord, du moment que la Charte ne prévoyaitrien pour la surveillance
des territoires sous mandat par l'ONU à moins qu'ils ne soient placés
sous tutelle, ce qui devait êtrenécessairement unacte volontaire et ne

pouvait êtreimposé, il n'y avait rien sur quoi l'organisation pût se
fonder en droit pour se prétendre habilitéeà surveiller les mandats qui
n'auraient pas été convertisen tutelles. La Charte n'instaurait à cette
fin aucun mécanisme distinct, de sorte qu'il aurait fallu tout spécialement
en créerun, dont la légalitéeût été contestable.Faire surveiller les terri-

29 Dans les conférences internationalesil arrive souvent que des propositions
n'aient aucune suite parceque leurs auteurs ont constaté qu'elles ne seraient pas
acceptées, ce qui se passe de commentaire. Ou encore il ne leur est pas donné suite
parce que, même si elles sont en elles-mêmes opportunes, elles susciteraient des
difficultés ou entraîneraient certaiinconvénients; mais en pareil cas unchoix
est fait et, en droit, on ne peut pas soutenir ensuite que la proposition a étéacceptée
clen réalit1ou qu'à tout le moins elle n'a pas été véritablement )rejetée. Ces
arguments sont d'ordre purementsubjectif: ne confondons pas droet psychologie.ship Council would have been tantamount to treating them as trust terri-
tories although they had not been placed under trusteeship, and did not
have to be. In consequence, al1efforts had to be concentrated on endea-
vouring to bring the various mandates into the trusteeship system.
46. Secondly, there cannot be any shadow of doubt that (apart from
the general unwillingness to take over League functions) the reason for
the reluctance to assume any role relative to mandates was the fear that
to do so would or might tend to perpetuate the mandates system by
acting as an inducement to mandatories to maintain the status quo and
refrain from submitting tothe trusteeship system (see I.C.J. Reports 1962,
pp. 540-541).In this connexion a point to note=though only an incidental
one-is that the latter system was in certain respects more onerous for

the mandatories than the mandates system-in particular as regards the
character and composition of the body that would be advising the super-
visory authority. In the case of mandates, this was the Permanent Man-
dates Commission, which was made up of independent experts of great
experience in such matters, acting in their persona1 capacity, not as
representatives of their governments, and not acting under officia1
instructions. In the case of the trusteeship system it was to be the Trustee-
ship Council, a political body consisting of representatives of govern-
ments acting under instructions 30.Be that as it may, it was evidently
thought desirable to refrain from giving mandatories any excuse for not
transferring their mandated territories to the trusteeship system, such as
they might well have considered themselves to have had, if an alternative

in the shape of an ad hoc continuation of the mandates system had been
afforded them. There was in addition the psychological factor of avoiding
any suggestion, even indirect, that, possibly, not al1mandated territories
would be transferred to trusteeship, such as might have been conveyed
by making provision for that eventuality.

(d) Conclusionas to the legalefects ofthis attitude

47. Such then were the reasons for the United Nations attitude about
mandates. But to establish the reasons for something is not to cancel out
the result,astheopinion of the Court often seemsto betrying to maintain.
Reliance on the proposition that, to find a satisfactory explanation of
why a proposa1 was not adopted, is equivalent to demonstrating that it
was not really rejected;-and so it must be treated as if it had "really"
been adopted, cannot enhance respect for law as a discipline.

30 This of course was mitigated by the fact that half the members of the Trustee-
ship Council had to consist of representatives of administering Powers.toires sous mandat par le Conseil de tutelle eût étéles traiter comme des
territoires sous tutelle, alors même qu'ils n'avaient as étéplacéssous le
régimede tutelle, ce à quoi rien n'obligeait. Aussi fallait-ilfaire porter
tous les efforts sur la transformation des mandats en tutelles.
46. En second lieu, il n'y a pas l'ombre d'un doute que, mis à part le
peu de disposition à reprendre des fonctions de la SdN, on répugnait

spécialement à assumer un rôle en matière de mandats parce qu'on
craignait, ce faisant, de tendreàperpétuerou de risquer de perpétuerle
système des mandats en encourageant les mandataires à s'en tenir au
statu quoet à ne pas se soumettre au régimede tutelle (voir C.I.J. Recueil
1962, p. 540-541).A ce sujet, un point à noter, encore qu'incident, est
que le régimede tutelle étaità certainségards plus contraignant pour les
mandataires que le système desmandats, en particulier pour ce qui con-
cerne la nature et la composition de l'organisme devant assister l'autorité
de surveillance. Dans le cas des mandats, c'étaitla Commission perma-

nente qui remplissait ce rôle et elleétaitcomposée d'expertsindépendants
particulièrement expérimentés, agissant à titre personnel et non pas en
tant que représentants gouvernementaux tenus par des instructions
officielles.Dans le régimede tutelle, ce serait le Conseil de tutelle qui
jouerait cerôle, c'est-à-direun organe politique composéde représentants
gouvernementaux agissant sur instructions 30.En tout état decause, on
estimait manifestement utile de ne donner aux mandataires aucun pré-
texte pour ne pas placer sous tutelle leurs territoires sous mandat, et un
tel prétexte leureût peut-êtreétéfourni si on leur avait offert comme
second choix la possibilitéde prolonger le systèmedesmandats. Il fallait

compter en outre avec un élément psychologique:la nécessité de ne pas
laisser entendre, fût-ce indirectement, que les territoires sous mandat
ne seraient peut-êtrepas tous placés sousle régime de tutelle,ce qu'on
risquait de faire en adoptant des dispositions expresses en vue de cette
éventualité.

d) Conclusionsrelatives aux efets juridiques de cette attitude
de l'Organisation des Nations Unies

47. Voilà donc comment s'explique l'attitude de l'organisation des
Nations Unies au sujet des mandats. Mais trouver l'explication d'un
phénomène,ce n'est pas en effacer le résultat,contrairement à ce que
l'avis consultatif de la Cour semble souvent laisser croire. Dire que, si
l'on trouve une explication satisfaisante du rejet de telle ou telle proposi-

tion, c'est comme si l'on démontrait que la proposition n'a pas été
véritablement rejetée,et qu'il convient doncde considérerladite proposi-
tion comme (véritablement )adoptéen'est pas de nature à accroître le
respect que peut inspirer le droit en tant que discipline.

30 Toutefois le Conseil de tutelle se composait pour moitiéde représentants des
puissances administrantes. 48.What in actual fact did occur in the United Nations, in the period
194511946 , as that the Assembly, in full awareness of the situation,
made an election-or choice. The election, the choice, was this: it was,
sofar as the United Nations was concerned, to be "trusteeship" (though
not obligatory trusteeship). The taking over of mandates on any other
basis was, in effect, rejected. That being so, it was not thereafter legally
possible to turn round and say, as regards any mandated territory not
placed under trusteeship, that although the United Nations had not
been giventhe right to supervise the administration of the territory as a
trust territory, it neverthelesshad the right to superviseit as a mandated
territory. Thiswould simplybean indirect wayofin effect making trustee-

ship compulsory, which it was not, and was never intended to be. It
would be like allowing the man who draws the short straw to take the
long one also! There is an unbridgeable inconsistency between the two
positions.Despite various warnings, there was anexpectation-or hope-
that, in the end, trusteeship forl1mandates would come about; but the
risk that it might not do so had to be accepted. In the event thispecta-
tion or hope was realized except in the case of SW. Africa. The failure
in this one case may have beenvery annoying or even exasperating,-but
it could not afford juridical ground for deeming the United Nations ex
postfacto to be possessed of supervisoryfunctions in respect ofmandated
terntories which were not provided for in the Charter (outside the
trusteeship system), and which the Organization deliberately, and of set
purpose, refused to assume. In short, so far as SW. Africa was concerned,
the United Nations backed the wrong herse,-but backing the wrong
horse has never hitherto been regarded as a reason for running the race

over again!
49. The basic mistake in 194511946 was of course the failure either to
make the conversion of mandates into trusteeships obligatory for
Members of the United Nations, or else expressly to set up an interim
régimefor non-converted mandates. But by the time political awareness
of this mistake was fully registered, it was already legally too 1ate;-
neither of these things having been done (because in effect the United
Nations had preferred to trust to luck) it is hardly possible now to treat
the situation virtually as if one of them had been. Thereis surely a limit
to which the law can admit a process of "having it both ways". The
cause oflaw isnot servedby failingto recognizethat limit.

50. If the foregoing considerations are valid, it results that there is one
and only one way in which the United Nations could have become
invested with any supervisoryfunction in respect of mandates, and that
is by the consent of the mandatory concerned. Whether this was ever
givenbySouth Africa willnow beconsidered. 48. Ce qui en fait s'estpasséà l'ONU, pendant la période 1945-1946,
c'est que l'Assemblée généralp e,arfaitement consciente de la situation,
a fait unchoix. Ce choix étaitle suivant: pour I'ONU, la solution devait
êtrela tutelle, encore que cette tutelle ne fût pas obligatoire. On a donc
en fait refuséde s'occuper des mandats sous toute autre forme quelle
qu'elle fût. Dans ces conditions, il n'étaitplus possible enroit de faire
volte-face et de dire que, pour tel territoire sous mandat qui n'avait pas
étéplacésous le régimede tutelle, même siles Nations Unies n'avaient
pas reçu le droit d'en surveiller l'administration comme s'il s'agissait
d'un territoire sous tutelle, elles avaient néanmoinscelui d'en surveiller
l'administration à titre de territoire sous mandat. C'eût ététout simple-

ment un moyen indirect de rendre la tutelle obligatoire, alors qu'elle ne
l'étaitpas et n'a jamais étécensée l'êtreC. 'eût été promettreà celui qui
avait tiréla courte paille de prendre la longue aussi! Les deux situations
sont totalement inconciliables. Malgrédivers avertissements, on comptait
fermement - on espéraittout au moins - qu'en définitivetous les man-
dats seraient transformés en tutelles; mais ily avait un risque, celui de
voir cet espoir déçu,et il a fallu l'accepter. Il se trouve que cette attente
ou cet espoir ont été comblés saufdans le cas du Sud-Ouest africain.
Cet unique écheca peut-êtreété très irritant,voire exaspérant,mais il ne
saurait fournirsucun motifjuridique pour considérerque l'ONU détient
expost,facto, en ce qui concerne lesterritoires sous mandat, des pouvoirs
de surveillance qui n'étaientpas prévusdans la Charte (en dehors du
régimede tutelle) et que l'organisation a de propos délibéré refusé

d'exercer. En bref, dans le cas du Sud-Ouest africain, l'ONU a parié
sur lemauvais cheval, maisparier sur le mauvais cheval n'ajamais encore
paru une raison suffisantede faire recourir toute la course!
49. L'erreur fondamentale commise en 1945-1946a évidemmentété
soit de ne pas rendre obligatoire pour les Etats Membres des Nations
Unies la conversiondes mandats en tutelles, soit de ne pas créer expressé-
ment, à défaut, un régimetransitoire s'appliquant aux mandats non
transformés.Quand on a pris politiquement conscience de l'erreur com-
mise, il était juridiquement déjàtrop tard pour la réparer; ni l'une ni
l'autre des solutions susvisées n'ayant étéadoptée, parce qu'en fait
l'ONU a préféré s'en remettre au sort, il n'est plus guère possible au-
jourd'hui de faire pratiquement comme si l'une ou l'autre l'avait été.

En droit, on ne peut gagner sur les deux tableaux au-delà d'un certain
point. Ce n'est pas servir la cause du droit que de ne pas le reconnaître.

50. Si les considérations ci-dessus sont valables, I'ONU n'aurait pu
êtreinvestie d'un pouvoir de surveillanceen ce qui concerne les mandats
que d'une seule façon: par le consentement du mandataire intéressé.
Je me propose d'examiner à présentsi l'ont peut dire que l'Afrique du
Sud n'ajamais donnéce consentement. 5. The issue of consentto accountability
and UnitedNations supervision

(a) Generalprinciples

(i) Absence of any true basis
of consensus

51. The question of consent can strictly speaking be disposed of in one
sentence,-for, once it is clear that at the time, the United Nations was
not accepting, was not wanting to assume any function in respect of
mandates as such, was in fact aiming at the total disappearance of the
mandates system,-it follows that there was nothing for the mandatories
to consent to in respect of mandates, unless they were willing to start
negotiations for the conclusion of trusteeship agreements,whichthey were
not obliged to do. As Judge Read said (in I.C.J. Reports 1950, p. 171)
speaking of events atan evenlater date (November 1946-May1948),itwas
doubtful "whether the General Assembly was willing, ut any stage [my
italics], to agree to any arrangement that did not involve a trusteeship
agreement .. .".In these circumstances there was no basis of consensus
for any arrangement involving United Nations supervision of mandates

as mandates.It would have been necessary for the mandatory's "consent"
to have taken the form of a positive petition or plea, which would
unquestionably have received the answer that if the mandatory wanted,
or was prepared to accept, Unitea Nations supervision, al1it had to do
was to negotiate a trusteeship agreement.

(ii) A Novation wasinvolved

52. Several references have been made to this principle, which 1
believe has not, as such, been invoked in the previous proceedings before
the Court except (implicitly) by Lord McNair and Judge Read in 1950.
As has been seen in paragraphs 41 and 42 above, the League declared its
functions with respect to mandates to be "at an end" andthat the system
"inaugurated by the League" had been "brought to a close". There was
no assignment in favour of the United Nations of mandates as such,-nor
could there have been without the consent of themandatories, for what
would have been involved was a new and different party and therefore,
in effect, something in the nature of novation of the obligation. It is well
established in law that a novation which involves the acceptance of a new
and different party, needs consent in order to be good as such;-and,
moreover, consent unequivocably and unambiguously expressed, or at
least evidenced by unequivocal acts or conduct. It is in the light of this
requirement that the question of consent must be viewed. 5. Question del'acceptationde l'obligation de rendrecompte
et du rôle de surveillance de
l'organisation des Nations Unies

a) Principes généraux

i) Défautde baseréelle
de consentement

51. A strictement parler, la question du consentement peut êtreréglée
en une phrase: dèslors qu'il estclair qu'à l'époqueI'ONU n'avait accepté
et ne souhaitait assumer aucune fonction relativement aux mandats en
tant que tels etque son ob.jectifétaiten fait l'éliminationtotale du système
des mandats, il s'ensuit qu'il n'y avait pas lieu pour les mandataires de
consentir à quoi que ce soit se rapportant aux mandats, à moins d'être

disposés à entamer des négociatioilsen vue de conclure des accords de
tutelle, ce qu'ils n'étaientpas obligés defaire. Comme M. Read l'a dit
(C.I.J. Recueil 1950, p. 171)à propos d'événementssurvenus à une date
plus tardive encore (novembre 1946-mai 1948),on pouvait se demander
((sil'Assemblée généralé etait désireuseà aucun moment de souscrire à
un accord qui n'impliquait pas un accord de tutelle ))(les italiques sont
de nous). Dans ces conditions, il n'y avait aucune raison de consentir à
des arrangements impliquant l'exercicepar l'ONU d'une surveillance sur

les mandats en tant que tels. Il aurait fallu que le ((consentement )du
mandataire prît la forme d'une demande ou d'une démarche positive,
qui aurait immanquablement appeléla réplique, que, si le mandataire
désirait se soumettre à la surveillance de l'ONU ou était disposé à
l'accepter, il lui suffisait de négocierun accord detutelle.

ii) Ily a eunovation

52. Plusieurs allusions ont été faites à ce principe qui, je crois, n'a
jamais étéinvoquéen tant que tel au cours des précédentes procédures
devant la Cour, sauf implicitement par lord McNair et M. Read en 1950.
Comme nous l'avons vu aux paragraphes 41 et 42ci-dessus, la SdN avait
déclaré queses fonctions relatives aux mandats avaient (pris fin))et que

le système((inaugurépar la Société desNations 1)avait (ainsi pris fin».
Aucune fonction n'avait ététransmise à I'ONU au sujet des maiidats en
tant que tels; cela n'aurait d'ailleurs pu se faire sans le consentement des
mandataires, vu qu'une des parties aurait changé, ce qui supposait en
pratique une novation dans le caractère de l'obligation. Il est constant
en droit qu'une novation impliquant la reconnaissance d'une partie
nouvelle et différente n'estvalable que s'il y a consentement, et même
un consentement sans équivoque ni ambiguïté ou du moins manifesté

par des actes ou une conduite non équivoques. C'est par rapport à
cette exigence qu'il convient d'examiner la question du consentement. (iii) "Statementsof Intention" and theirlegal eflect

53. Given what has been said in the preceding paragraph concerning
what would be needed in the present context in order to afford adequate
evidence of consent, there is no need here to consider in detail themany
so-called statements of intention made on behalf of South Africa and
other mandatories in 1945and 1946,indicative of their general attitude as

to thefuture of their mandates, from which implications have been sought
to be drawn in the sense of an acceptance or recognition of a United
Nations function in respect of mandates as such-i.e., mandates not
converted into trusteeships,-for hardly any of them is free from am-
biguity. 1 therefore agree with Lord McNair's verdict in 1950 (I.C.J.
Reports 1950, p. 161)that there were "also many statements to the effect
that the Union Government will continue to administer the Territory
'in the spirit of the Mandate'. These statements are in the aggregate con-

tradictory and inconsistent;" and, he continued, he did not "find in them
adequate evidence that the Union Government has either assented to an
implied succession by the United Nations ... or has entered into a new
obligation. . .".1 would however go further, and Say that the various
statements made, not only on behalf of South Africa but on behalf of
the other mandatories (see next paragraph), taken broadly in the mass
(many of them are given at various places from pp. 616-639of the 1962
volume of the Court's Reports) show the following common character-

istics: (a) they are statements of general attitude, insufficient, and not
purporting, to convey any definite undertaking; (b) if there was any
undertaking, it was to continue to administer the mandated territories
concerned in accordance with the mandates,-and the administration of
a mandate is of course a separate thing from reporting about that pro-
cess 31;and (c) they none of them implied any recognition of the exis-
tence of a United Nations function relative to mandates, or any under-
takings towards that Organization. 1shall now consider the three episodes

or complexes of episodes that have chieflybeen relied on as indicative of
South African recognition of accountability to the United Nations
but which, in my view, do not justify that conclusion.

said that they would continue to observe the mandates according to their terms,s
or to observeal1the obligations of the mandates; because so far as the reporting
obligation was concerned, this was,under the mandates, an obligation to report
to the LeagueCouncil, still in being up to 18 April 1946. Up to that date therefore,
any mandatory was entitled to interpret its declaratiothat sense, and after that
date to interpret it as being no longer possible of execution on the basis of the
mandate itself. What isuite certain is that, at the time, no one, whether mandatory
or not, readhese declarations as involving an undertaking then and there to report
to the Assembly of the United Nations.iii) Les((déclarationsd'intention ))et leureffetjuridique

53. Etant donné ce que j'ai dit au paragraphe précédentau sujet des
conditions qui auraient étérequises dans le contexte actuel pour faire la

preuve du consentement, je n'ai pas à examiner en détailles nombreuses
((déclarationsd'intention » qui ont été faitespar l'Afrique du Sud et
d'autres mandataires en 1945 et en 1946 pour manifester leur attitude
généralequant à l'avenir de leurs mandats et dont on a cherché à déduire
l'acceptation ou la reconnaissance d'une fonction conférée à l'ONU en
cequiconcerne lesmandats entant que tels-ceux du moins quin'avaient

pas étéremplacéspar des accords de tutelle -, car parmi ces idéclara-
tions d'intention)) il n'en est virtuellement aucune qui soit exempte
d'ambiguïté.Je faisdonc mienne la conclusion formuléepar lord McNair
en 1950(C.Z.J. Recueil1950,p. 161) :

(On trouve égalementde nombreuses déclarationsselon lesquelles
le Gouvernement de l'Union continuera à administrer le Territoire
((dans l'esprit du Mandat ))Ces déclarations sont, dans l'ensemble,
contradictoires et peu compatibles les unes avec les autres; je n'y

trouve aucune preuve suffisante, démontrant que le Gouvernement
de l'Union ait ou bien acceptéla succession, par implication, des
Nations Unies ...ou qu'[il]ait contracté ..une nouvelle obligation. »

J'irai cependant plus loin et je dirai que, considéréesdans leur ensemble
les déclarations faitesnon seulement au nom de l'Afrique du Sud mais
aussi au nom des autres mandataires (mentionnéesau paragraphe suivant
et reprises pour une bonne part dans C.Z.J. Recueil 1962, p. 616-639
passim) présentaient les caractéristiques communes suivantes: a) il
s'agissait de prises de position générales insuffisantespour établir un

engagement préciset n'y prétendant pas; b) à supposer que des engage-
ments aient été pris,ils consistaient à continuer à administrer des terri-
toires sous mandat conformément aux mandats, et administrer est
évidemmenttout autre chose que de présenter des rapports concernant
l'administration 31;c) aucune de cesdéclarations n'areconnu unefonction
en matière de mandats à l'ONU et n'a viséun engagement quelconque

envers cette organisation. J'en viens maintenant aux trois épisodesou
séries d'épisodesqui ont étéprincipalement invoqués comme indiquant
que l'Afrique du Sud s'était reconnu des responsabilités à l'égard des
Nations Unies, mais qui ne me semblent pas justifier cette conclusion.

31 Il y avait une ambiguïté intrinsèque dans toutes les phrases par lesquelles les
mandataires déclaraient qu'ils continueraient à observer les termes des accords de
mandat ou à respecter toutes les obligations qui y étaient prévues: en effet, aux
termes des mandats, l'obligation de faire rapport visait le Conseil de la SdN, lequel
a existéjusqu'au 18 avril 1946. Tout mandataire pouvait donc interpréter sa décla-
aucune possibilité d'exécutionsur la base du mandat lui-même.Ce qui est certain,
c'est qu'à l'époque personne, mandataire ou non, n'a interprétéces déclarations
comme des engagements formels de faire rapportl'Assembléegénérale desNations
Unies. (b) Particular Episodes

(i) Thejînal Leagueof Nations
Resolutionof 18 April 1946

54. Features (a), (6) and (c), as set out in the preceding paragraph,
strongly characterized the Geneva proceedings ending in the final League
of Nations Resolution of 18 April 194632,on paragraphs 3 and 4 of
which such heavy reliance was placed both in the 1950and 1962proceed-

ings before the Court, and again now. Tts effect has already been con-
sidered (paragraphs 41-43 above) in the related but separate context
of the attitude of the States concerned on the question "mandates or
trusteeships?" The question now is what if any undertakings for man-
datories were implied by its paragraph 4 which is the operative one in the

present connexion. This classic of ambiguity (text in footnote 32) consists
essentially of a recital describing a situation. Since it merely "takes note"
of something-namely the "expressed intentions of the [mandatories]",
it does not of itself impose any obligations, so that the question is what
these "expressed intentions" themselves were, and whether they amounted
to binding undertakings, and if so to what effect. The statement made on

behalf on South Africa is quoted in the next succeeding paragraph, and
a summary of the key phrases used by the other mandatories will be
found in footnote 2 on page 528 of the 1962 volume of the Court's
Reports. Their vague and indeterminate character is immediately ap-
parent 33.AS summed up and described in paragraph 4 of the League
resolution of 18 April 1946, the intentions expressed had nothing to do

with the acceptance of United Nations supervision. They were, simply,
"to administer [the territories] for the well-being and development of the
peoples concerned". The further words "in accordame with the obliga-
tions contained in the respective mandates" at once involve the ambi-
guities to which attention has been drawn in paragraph 53and footnote 31

above. These words need mean, and were almost certainly intended by

32 The full text of this resolution is given in footnote 1 on pp. 538-539 of the
and24 are relevant in the present context. The terms of paragraph 3 have in effect
been cited in paragraph41 above. Paragraph 4 was as follows:

"4. Takes note of the expressed intentions of the members of the League
now administering territoriesunder mandate to continue to administer them
for the well-being and development of the peoples concerned in accordance
with the obligations contained ithe respective mandates until other arrange-
ments have been agreed between the United Nations and the respective man-
datory powers."
33 On the question whether, in consequence ofthis, the mandatories were regarded
as having entered into any definite agreement about the mandates, a detail worth
noting is that whereas thearious arrangements made between the League and the
United Nations for the transfer of funds, buildings, archives, library, etc., were
al1registered under Article 102 of the Charter, nothing was registered in respect of
mandates. b) Evénementsparticuliers

i) Réso/ution,fina/e de/aSociété
desNationsadoptéele 18avril 1946

54. Ce qui vient d'être énoncé aux pointa s), b) et c) du paragraphe
précédenta fortement marqué les débats de Genève ayant précédé
l'adoption de la résolution finale de la SdN en date du 18 avril 1946 z2,
dont on a abondamment invoquéles paragraphes 3 et 4 au cours des

affaires portées devant la Cour en 1950 et en 1962 et dans la présente
affaire. Les effets de cette,résolution ont dé,jàété étudiés (vop irar. 41-43
ci-dessus) sous l'angle connexe, mais distinct, de l'attitude des Etats
intéressésau choix entre le système des mandats et le régimede tutelle.

Ils'agitmaintenant de savoir si leparagraphe 4, qui est la clause pertinente
dans le présentcontexte, suppose une obligation à la charge des manda-
taires. Cette disposition, qui est devenue un classique de l'ambiguïté
(voir texte à la note 32), consiste essentiellement à décrireune situation.

Se bornant à 1noter »quelque chose, à savoir 1que [les mandataires] ...
ont expriméleur intention ))elle n'impose en soi aucune obligation, de
sorte qu'il s'agitde savoir quelles (intentions » ont étéexprimées etde
précisersi ces intentions équivalaient à des promesses formelles, dont le
contenu, à supposer qu'elles aient été faites, reste à déterminer. La

déclaration de l'Afrique du Sud est citéeau paragraphe suivant et l'on
trouvera un résuméde l'essentiel desdéclarations des autres mandataires
dans C.I.J. Recueil 1962, page 528, note 2. Leur caractère vague et
indéterminé saute auxyeux 33. Telles qu'elles sont résumées etdécrites

dans le paragraphe 4 de la résolution de la SdN du 18 avril 1946, les
intentions exprimées ne concernaient en rien l'acceptation de la sur-
veillance des Nations Unies. Elles étaient simplement d'c(administrer
[les territoires], en vue du bien-êtreet du développement des peuples
intéressés H. Le membre de phrase suivant: ((conformémentaux obliga-

tions contenues dans les divers mandats » entraîne immédiatement les
p. -
32Le texte de cette résolution est rein extensodans C.I.J.Recueil1962, p. 538-
539, note 1. 11est évident que seuls les paragraphes 3 et 4 sont pertinents ici. Le
libellé du paragraphe 3 est repris en substance au paragraphe 41 ci-dessus. Le
paragraphe 4 étaitrédigécommesuit:
4. Note que les Membres de la Société administrant actuellement des
territoires sous mandat ont exprimé leur intention de continuer à les admi-
nistrer, en vue du bien-être et du développement des peuples intéressés,con-
formément aux obligations contenues dans les divers mandats, jusqu'à ce que
de nouveaux arrangements soient pris entre les Nations Unies et les diverses
Puissances mandataires.11

33 Sur la question de savoir si, par suite de ces déclarations, les mandataires ont
étéconsidéréscomme ayant souscrit à un accord précis relatif aux mandats, un
point de détail qui mérite d'êtrenoté est que, si les divers accords conclus entre la
SdN et l'ONU pour le transfert de fonds, de locaux, d'archives, de bibliothèques,
etc., ont tous étéenregistrés en vertu de l'article02 de la Charte, rien n'a été
enregistréen ce qui concerne les mandats.the mandatories to specify, no more than the obligations relative to
administering "for the well-being and development . . .",etc.,-for,
as has already been noticed, reporting and supervision is about admini-

stration, not administration itself.

55. It is not upon flimsy and dubious foundations of this kind that
binding undertakings (especially when dependent on unilateral declara-
tions) can be predicated, more particularly where, as has beeen seen, a
novation of an undertaking is involved, needing, in law, unambiguous
consent. It is therefore instructive to see what, on this occasion, the
"expressed intentions" of South Africa were, as stated by its delegate
at Geneva on 9 April 1946 (League of Nations Oficial Journal, Special
Supplement, No. 194,pp. 32-33). These were that, pending consideration
of the South African desire, on the basis of the expressed wishes of the
population, to incorporate SW. Africa in the territory of the Union (as
itthen was),thelatter would in the meantime-

". ..continue to administer the territory scrupulously in accordance
with the obligationsof the mandate,for the advancement andpromo-
tion of the interests of the inhabitants, asshe has done during thepast
six years when meetings of the Mandates Commission could not be
held.
The disappearance of [the] organs of the League concerned with
the supervision of mandates, primarily the Mandates Commission

and the League Council, will necessarily preclude complete com-
pliance with the letter of the mandate. The Union Government will
nevertheless regard the dissolution of the League as in no way dimi-
nishing its obligations under the mandate, which it will continue to
discharge with ... full and proper appreciation of its responsibilities
until such time as other arrangements are agreed upon concerning
the future status of the territoryW-(my italics).

For those who enjoy parlour games, an interesting hour could be spent
in trying to decide exactly what this statement, equally a classic of ambi-
guity, amounted to as regards any South African acceptance of United
Nations supervision,-for that, of course, is the point. The italicized
passage clearly excludes the idea,-presaging as it does the continuation
of a situation that had alreadv lasted six ve,rs. ,n which no re~orts had
been rendered, because therewas no active League authority ;O which
they could be rendered. The remainder of the statement, and in particular
the phrase "as in no way diminishing its obligations under the mandate",
involves precisely those ambiguities and uncertainties to which attention
has already been drawn (footnote 31). To me it seems the very prototype
of the non-committal, sofar as concerns any recognition of accountabilityéquivoquessignaléesau paragraphe 53 et dans la note 31 ci-dessus. Ce
qu'il signifienécessairement - et c'était presque certainement le sens
que leur attribuaient les mandataires - ne va pas au-delà d'une obliga-
tion d'administrer lesterritoiresenvuedu bien-êtreet du développement ))
etc., car, comme nous avons déjàeu l'occasion de le noter, l'envoi de

rapports et l'acceptation d'une surveillance concernant l'administration
deterritoires necoïncident pas aveclanotion d'administration elle-même.
55. Ce n'est pas sur des fondations siprécaireset si incertaines, surtout
quand il s'agit de déclarations unilatérales, quel'on peut établir que des
engagements de caractère obligatoire ont été pris,d'autant plus que,
comme nous l'avons vu, l'engagement en cause aurait fait l'objet d'une
novation exigeant en droit un consentement dénué d'ambiguïté. Il est
donc intéressant de voir quelles ont étéles ccintentions exprimées » le 9
avril 1946 au nom de l'Afrique du Sud par son représentant à Genève

(SdN, JournalOjiciel, supplémentspécialno 194,p. 32-33).Ces intentions
étaient que, en attendant l'examen du désirmanifestépar l'Afrique du
Sud, sur la base des vŒux exprimés par les habitants, d'incorporer le
Sud--Ouest africain dans le territoire de l'Union (comme on disait à
l'époque),celle-cicontinueraitdans l'intervalle

((à administrer [le territoire] en se conformant scrupuleusementaux
obligations du Mandat, afin d'assurer le progrès, et de sauvegarder
les intérêtdse ses habitants, commeelle l'afait pendant lessix années
durant lesquellesla Commissiondes mandats n'apu se réunir.
La disparition des organes de la Sociétédes Nations qui s'occupent
du contrôle des mandats, à savoir, en premier lieu, la Commission
des mandats et le Conseil de la Sociétéempêcheraévidemmentde se
conformer entièrement àla lettre du Mandat. Le Gouvernement de
l'Union se fera cependant un devoir de considérer que la disparition

de la Société desNations ne diminue en rien les obligations qui
découlent du Mandat; il continuera à s'en acquitter en pleine
conscience et avec lejuste sentiment de ses responsabilités,jusqu'au
moment où d'autres arrangements auront étéconclusquant au statut
futur de ceterritoire.(Lesitaliques sont denous.)

Les amateurs de jeux de sociétépourraient passer une heure agréable à
essayer de déterminer exactement ce que cette déclaration, autre modèle
d'ambiguïté, signifie quant à l'acceptation par l'Afrique du Sud de la
surveillance de l'organisation des Nations Unies,car c'est cela que l'on
veut établir.Le passage cité enitaliques exclut clairement toute idéede ce
genre, puisqu'il laisse présagerle maintien d'une situation qui avait déjà
durésix annéesau cours desquelles aucun rapport n'avait été présenté,
faute d'organe actif de laSociété des Nations à qui adresser des rapports.

Le reste de la déclaration, et notamment l'expression «ne diminue en rien
les obligations qui découlent du Mandat »,implique précisément les
ambiguïtés et les incertitudes sur lesquelles j'ai déjà attiré l'attention
(note 31). Il me semble qu'il s'agit idd prototype de ce qui n'engage à257 NAMIBIA (s.w. AFRICA) (DISS. OP. FITZMAURICE)

to the United Nations, and 1am unable to find in it any indication what-
ever of such recognition. 1 realize that on this matter, as on most others
my view and the reasoning of the Court are operating on different wave-
lengths. Seeing in the South kfrican statement a recognition of the exis-
tence of a continuing obligation towards the peoples of the mandated
territory-the reasoning of the Court then makes the great leap;-

because there was that degree of recognition there was also, and therefore
a recognition of accountability to the United Nations. The lack of al1
rigour in this reasoning is evident. Tt involves exactly the same ellipses
and telescopings of two distinct questions that characterizec!the reasoning
of the Court in 1950, as already discussed in paragraphs 20-22 above.
Nobody can have taken this declaration in that sense at the 'Lime,because
everybody knew that United Nations supervision was to be exercised
solely through the trusteeship system, and that there was no obligation to
bring mandated territories within that system. This, to me, is one of the

most decisive points in the whole case.

(if) Question of the incorporation
of SW. Africa as part of South Africa itself

56. The approach made by South Africa to the United Nations in
November 1946for the incorporation in its own territory of SW. Africa
on the basis of the expressed wishes of the inhabitants who had been
consulted, constitutes the only episode which can plausibly be represented
as a recognition-not indeed of accountability to the United Nations on
a specifically mandates basis (nor, as will be seeii, was it taken by the
Assembly in that sense)-but of the existence, on a political basis, of a

United Nations interest in matters having a "colonial" aspect. Tt was
also a convenient way of obtainingalarge measure ofgeneralinternational
recognition for such an incorporation 34.This last aspect of the matter-
that what was being sought through the United Nations was "interna-
tional" recognition-had already been mentioned in another part of the
statement cited in the preceding paragraph above, made on behalf of
South Africa at Geneva earlier in the year, in which it was announced
that at the next session of the United Nations Assembly there would be

formulated "the case for according South West Africa a status under
which it would be internationally recognized as an integral part of the
Union [of South Africa1"-my italics.

57. This was not the first mention of the matter. The possibility of

34 This would of course be far frorn being the first historical example of seeking
a political recognition of the incorporatiof territory without therbeing any
obligation to do so. rien en ce qui concerne la reconnaissance d'une responsabilité à l'égard
de I'ONU et, pour ma part, je n'arrive pas à y découvrir la moindre

indication d'une telle reconnaissance. Je me rends compte que, sur ce
point comme sur la plupart des autres, ma pensée etle raisonnement de la
Cour se situent sur des longueurs d'onde différentes.Voyant dans la
déclaration de l'Afrique du Sud une reconnaissance de la persistance
d'une obligation à l'égard despopulations du territoire sous Mandat, la

Cour fait alors un bond énorme dans son raisonnement: puisqu'une
obligation était reconnue dans cette mesure, l'obligation de faire rapport
à I'ONU l'était donc aussi. II tombe sous le sens que ce raisonnement est
dépourvu de toute rigueur logique. II suppose les mêmesellipses et

télescopages de deux questions distinctes qui caractérisaient déjà le
raisonnement de la Cour en 1950, comme je l'ai dit aux paragraphes
20-22 ci-dessus. Lorsque cette déclaration a étéfaite, personne n'aurait
pu la comprendre en ce sens, parce que chacun savait que la surveillance

de I'ONU devait s'exercer uniquement dans le cadre du régimede tutelle
et qu'il n'étaitpas obligatoire d'appliquer ce régimeaux territoires sous
mandat. Pour moi c'est un des élémentsles plus décisifs detoute l'affaire.

ii) Question de l'incorporation

du Sud-Ouest africain à I'A,frique du Sud

56. Un seul épisodepourrait être plausiblement interprété commeune
reconnaissance, non point d'une responsabilité à l'égard de I'ONU
dérivant directement du mandat (et, comme nous le verrons, l'Assemblée
généraleelle-même nel'a pas entendu ainsi), mais de l'existence, sur le
plan politique, de l'intérêtque I'ONU prenait à toutes les questions

présentant un aspect Icolonial »:c'est quand l'Afrique du Sud s'adressa à
l'ONU en novembre 1946en vue d'incorporer le Sud-Ouest africain dans
son propre territoire conformément aux vŒuxdes habitants qui avaient
été consultés. C'étaitun moyen commode d'obtenir qu'une telle incorpo-

ration soit reconnue sur le plan international 34.Ce dernier aspect de la
question, à savoir que ce qu'on cherchait à obtenir de I'ONU était la
reconnaissance internationale )),avait déjà été mentionnédans un autre
passage de la déclaration, citée au paragraphe précédent,qui avait été

présentéeau nom de l'Afrique du Sud à Genève à une date antérieure de
la mêmeannée: ilavait été annoncéalors que l'Afrique du Sud exposerait
à la prochaine session de l'Assemblée générale desNations Unies ((les
raisons pour lesquelles ilconviendrait d'accorder au Sud-Ouest africain
un statut aux termes duquel ce territoire serait reconnu internationalement

comme formant partie intégrante de l'Union [sud-africaine] ))(les italiques
sont de nous).
57. Ce n'était pas la première fois qu'on abordait la question. La

34 Ce ne serait évidemment pas le premier exemple historique d'une tentative
visant à obtenir la reconnaissance politique de l'incorporation d'un territoire, sans
qu'il y ait d'obligation àcet égard.incorporation had been foreshadowed in the most explicit terms as far
back as 11 May 1945in the long and detailed statement then made by the
representative of South Africa in Committee 1114of the San Francisco
Conference, which there is every reason to believe 35ended with a remark
to the effect that thematter was being mentioned-

". ..so that South Africa may not rtfterwardsbe held to have acqui-
esced in the continuance of' theMandate or the inclusion of the terri-
tory in any form of trusteeship under the new International Organi-
sation"---(my italics).

From this, it was already clear that any definite approach to the United
Nation son incorporation, if and when made, would be a political one,
on a voluntary basis, not in recognition of accountability.

58. When however the matter was raised in the Fourth Committee of
the United Nations Assembly in November 1946 by Field-Marshal
Smuts in person, it became clear that the probable reaction of the
Committee would be a demand that the territory should be placed
under trusteeship. Accordingly Field-Marshal Smuts later made a
further statemeni in the course of which he said that:

"It would not be possible for the Union Government as aformer
mandatory to submit a trusteeship agreement in conflict with the
clearly expressed wishes of the inhabitants. The Assembly should
recognize that the implementation of the wishes of the population
was the course prescribed by the Charter and dictated by the interests
of the inhabitants themselves. If, however, the Assembly did not
agree that the clear wishes ofthe inhabitants should be implemented,

the Union Government could take no other course than to abide by
the declaration it had made to the last Assembly of the League of
Nations to the effect that it would continue to administer the
territory as heretofore as an integral part of the Union, and to do so
in the spirit of the principles laid down in the mandatem-(my
italics).

Two things may be noted about this statement: First the speaker referred
to South Africa as a "former" mandatory. Whether or not it was correct
to speak of South Africa as not still being a mandatory is not the point.
The point is that such a remark is quite inconsistent with any recognition

35 The full text of this statement, which was only given summarily in the San
written pleading in the present case. The text and provenance of the final observation,
the inherently probable authenticitof which hasnever been challenged, appears
in footnote1 on page 9 of that pleading. The matter is also referred to in paragraph
(5) on page 533 of the joint dissenting Opinion of 1962. NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 258

possibilitéd'incorporation avait déjà été très clairement évoquéedès le
II mai 1945dans la déclaration longue et détailléefaite par le représen-
tant de l'Afrique du Sud au comité 1114de la conférencede San Francisco.
Il y a tout lieu de croire 35 que cette déclaration se terminait par une
remarque suivant laquelle, si cette possibilité avait été mentionnée,
c'était

(afin que l'union sud-africaine nepuisse pasêtreconsidérép elus tard
comtneayant accepté quele Mandat continueou que le territoire soit
compris dans un systèmede tutelle quelconque établi par une nou-
velle organisation internationale» (les italiques sont de nous).

On voit qu'il était déjàévident à l'époqueque, si jamais il devait être
question de soumettre à l'ONU une proposition concrèted'incorporation,
ce serait là une initiative d'ordre politique prise de plein gréet non en
raison d'une obligation reconnue de rendre compte.

58. Cependant, lorsque la question a été évoquée à la Quatrième
Commission de l'Assembléegénéraledes Nations Unies en novembre
1/46 par le maréchal Smuts en personne, il est apparu que la réaction
probable de la commission serait d'insister pour que le territoire soit
mis sous tutelle. C'est pourquoi le maréchal Smuts a fait une nouvelle
déclaration,où ildisait notamment:

((Comme ancienne Puissance mandataire, le Gouvernement de
l'Union ne peut pas soumettre un accord de tutelle en opposition
avec les vŒuxclairement exprimésdes habitants. L'Assembléedoit
reconnaître que la réalisation des vŒux de la population est une

solution conforme à la Charte, et dictée aussi par l'intérêtdes
habitants eux-mêmes.Toutefois, l'Assembléen'est pas d'avis que les
vŒuxdes habitants doivent être suivis,le Gouvernement de l'Union
peut adopter d'autre voie que de s'en tenir à la déclaration qu'il a
faite devant la dernière Assemblée de la Sociétédes Nations, à
savoir qu'il continuera, comme jusqu'ici, à administrer le territoire
comme partie intégrante de l'Union, cela dans l'esprit desprincipes

énoncésdans le Mandat. 1)(Les italiques sont de nous.)

Deux choses sont à noter. Primo, l'orateur a qualifiél'Afrique du Sud

d'((ancien» mandataire. Peu importe qu'ilfût exact ou nonde dire qu'à ce
moment l'Afrique du Sud avait perdu la qualitéde Mandataire. Ce qu'il
faut retenir, c'est qu'une telle observation était toutà fait incompatible

35 La déclaration, dont les comptes rendus officiels de la conférence de San
Francisco ne contiennent qu'un résumé, estcitéen extenso au paragraphe 4 du
chapitreVI11de l'exposéécritprésentépar l'Afrique du Sud dans laprésenteinstance.
Le texte eta provenance de la dernière phrase, dont l'authenticité intrinsèquement
probable n'ajamais étécontestée,sont indiquésa note 1 de la page 9 de cet exposé
écrit.II est également fait mention de cette questionge 533, paragraphe 5, de
l'opinion dissidente commune de62.of accountability in respect of the mandate. Secondly, when at the end of
this passage, the speaker stated his Government's intention to continue to
administer the territory "in the spirit" of the "principles" laid down in the
Mandate-(and it would be difficult to find a phraselessrecognizatory of
obligation)-he did not mention, and was clearly not intending to
include reporting of the kind indicated in the Mandate. Instead, he went
on to state an intention to report on the non-self-governing territory
basis of Article 73 (e) of the Charter (the effect of which will be con-
sidered in the next succeeding subsection); and what he said was that his
Government would "in accordance with" (not, be it noted, Article 6 of
the Mandate, but) "Article 73, paragraph (e), of the Charter" transmit
reports to the Secretary-General "for information purposes",-this lasl
phrase being the language of Article 73 (e) itself. He then concluded by

saying that there was-

". ..nothing in the relevant clauses of the Charter, nor was it in the
minds of those who drafted these clausesx; to support the contention
that the Union Government could be compelled to enter into a

trusteeship agreement even against its own view or those of the
people concerned".
And what was the reaction of the Assembly in its ensuing resolution 65
(I)?-was it to demand the submission of reports and the acceptance of
supervision under Article 6 of the Mandate? Not at ail,-it was to
recommend that SW. Africa be placed under the trusteeship system.

Clearly, no more than the Mandatory was the Assembly contemplating
the exercise of any functions in respect of the territory on a mandates
basis.

(iii) The Mandatory's offer tofirnish
Article 73 (e) type information

59. In the case of SW. Africa the Mandatory had no intention either
of negotiating a trusteeship agreement or of submitting to United Nations
supervision of the territory on a mandates basis;-and here again, it is
not the ethics of this attitude that constitutes the relevant point, but the
evidence it affords of lack of consent to any accountability to the United
Nations. Nothing could make this-or the absence of al1common ground
-clearer than the next episode, starting with the statement made on
behalf of South Africa in the Fourth Committee of the Assembly, on
27 September 1947, relative to the South African proposal, originally
made in November 1946 (see previous paragraph), to transmit infor-
mation of the same type as was required by Article 73 (e) of the Charter
in respect of so-called "non-self-governing territories". Such information,

3b Arnongst whom of course was the Field-Marshal himself.avec la reconnaissance d'une obligation de rendre compte de I'administra-
tion du Mandat en tant que tel. Secundo, lorsque à la fin de ce passage
l'orateur a indiqué l'intention de son gouvernement de continuer à
administrer le territoiredans l'esprit desprincipesstipulésdans le Mandat

(on aurait de la peine àtrouver une formule qui donne moins l'impression
de reconnaître une obligation), iln'a pas mentionnéet iln'envisageait
certainement pas la présentation de rapports du genre prévu par le
Mandat. En revanche, ila fait état d'une intention de soumettre des
rapports conformément aux dispositions de I'article 73 e) de la Charte
relatives aux territoires non autonomes (dispositions dont j'examinerai
les effets sous la rubrique suivante). II a dià ce su-jetque son gouverne-
ment communiquerait au Secrétaire général, ((conformément à l'article

73 e) de la Chartes et non point, notons-le, conformément à I'article 6
du Mandat, des rapports (à titre d'information» (expression tirée du
texte mêmede I'article 73 e)) etila conclu en ces termes:

(II n'y a rien dans les clauses pertinentes de la Charte, ni dans
l'esprit de ceux qui les ont rédigées ",qui soit de nature à appuyer
l'assertion que le Gouvernement de l'Union pourrait êtrecontraint à
conclure un accord de tutelle, mêmecontre ses propres vues et celles
des populations intéressées. )>

Or, quelle fut la réactionde l'Assemblée générale e,xpriméepar sa résolu-
tion 65 (I)? A-t-elle insistépour qu'on lui envoie des rapports et pour
qu'on se soumette àla surveillance prévue à l'article 6 du Mandat? Point
du tout: elle a recommandé que le Sud-Ouest africain soit placé sous le
régime detutelle. 11est évidentque l'Assembléegénéralen'envisageait pas
plus que le Mandataire lui-même qu'ellepût exercer des fonctions
relatives au territoire dans le cadre du système desmandats.

iii) Offre du Mandataire defournir
des renseignements du type prévupar I'article 73e)

59. Dans lecas du Sud-Ouestafricain, le Mandataire n'avait nullement
l'intention de négocier un accord de tutelle ni d'accepter que I'ONU
assure la surveillance du territoire en vertu du système des mandats; là
encore ce n'est pas l'aspect moral de l'attitude du Mandataire qui est
pertinent, mais le fait qu'elle démontrel'absence de consentement à toute
obligation de rendre compte à I'ONU. Rien ne saurait mieux confirmer
ce défautde consentement - ou l'absence de tout point d'accord - que
l'épisodequi a suivi, amorcépar une déclarationfaite au nom de l'Afrique
du Sud à la Quatrième Commission de l'Assembléegénéralele 27 sep-

tembre 1947au sujet de la proposition formuléepar l'Afrique du Sud dès
novembre 1946 (voir paragraphe précédent)et tendant à présenter des
renseignements du type requis par I'article 73 e) de la Charte pour les

3"Au nombre desquels se trouvait évidemment le maréchal lui-même,
247given about colonies, protectorates, etc., does not imply accountability,
and is not in the forma1 and technical sense "reporting". The Report of
the Fourth Committee on this occasion (dated 27 October 1947)describes
the statement of the South African representative as follows:

"lt was the assumption of his Government, he said, that the
report [i.e., the information to be transmitted] would not be con-

sidered by the Trusteeship Council and would not be dealt with as if
a trusteeship agreement had in fact been concluded. He further
explained that as the League of Nations had ceased to exist, the
right to submit petitions could no longer be exercised, since that
right presupposes ajurisdiction which would only exist wherethere is
a right of control and supervision, and in the view of the Union of
South Africa no suchjurisdiction was vestedin the United Nations with
regard toSouth West AfricaW-(my italics).

What was said of petitions was afortiori applicable in respect of reports
of the kind contemplated by Article 6 of the Mandate. The italicized
words constituted a general denial of United Nations jurisdiction.
60. There were further offers to furnish information on the same basis
in the period 194711948,and one or two reports were actually transmit-
ted. But al1along the line statements were made on behalf of South Africa
indicating clearly that this was done voluntarily and without admission of
obligation. Thus at a Plenary Meeting of the Assembly on 1 November
1947the representative of South Africa said that:

". ..the Union of South Africa has expressed its readiness to submit
annual reports for the information of the United Nations. That
undertaking stands. Although these reports, if accepted, will be
rendered on the basis that the United Nations has no supervisory
jurisdiction in respectof this territory they will serve to keep the
United Nations informed in much the same way as they will be kept

informed in relation to Non-Self-Governing Territories under
Article 73 (e) of the Charterw-(my italics).

And in a letter of 31 May 1948to the Secretary-General an explicit re-
statement was given of the whole South African position as follows
(UN doct., T/175, 3 June 1948,pp. 51-52):

". ..the transmission to the United Nations for information on
South West Africa, in the form of an annual report or any other
form, is on a voluntary basisana'isfor purposes of information only.
They [the Government] have onseveral occasionsmade it clear that
they recogniseno obligation totransmit this informationto the United territoires dit((non autonomes ». De tels renseignements, fournis pour
les colonies, protectorats, etc.,n'impliquent pas d'obligation de rendre
compte et ne constituent pas des I.rapports )au sens propre et technique

de ce mot. Le rapport pertinent de la Quatrième Commission en date du
27 octobre 1947résume ainsi ladéclarationdu représentant sud-africain:
((Son gouvernement présumait, a-t-il dit, que ce rapport [c'est-à-
dire les renseignements à transmettre] ne serait pas examinépar le

Conseil de tutelle et ne serait pas traitécomme si un accord de tutelle
avait été effectivemenctonclu. 11a expliquéen outre que, du fait de la
disparition de la Société desNations, le droit de présenter des.
pétitions n'existait plus; ce droit suppose en effet I'existence d'une
juridiction dont l'existence est subordonnée à celle d'un droit de
contrôle ou de surveillance; or, de l'avis de l'Union sud-africaine,
l'organisation des Nations Uniesn'estpas investie d'un droit decette
nature à l'égarddu Sud-Ouest africain. » (Les italiques sont de nous.)

Ce.qui était dit à propos des pétitions était applicable à fortiori aux
rapports du type prévupar l'article 6 du Mandat. Les mots en italiques
équivalent à une déclarationgénéralr eejetant lajuridiction de l'ONU.
60. De nouvelles offres d'envoi de renseignements au mêmetitré ont
étéformuléea su cours de la période1947-1948et un ou deux rapports ont
étéeffectivement communiqués. Mais des déclarations ont été constam-
ment faites au nom de l'Afrique du Sud pour indiquer clairement que ces
rapports étaientfournis de plein gré,sans que l'existenced'une obligation
fût reconnue. C'est ainsi qu'au cours d'une séanceplénière de l'Assemblée

généraletenue le le' novembre 1947le représentant de l'Afrique du Sud
a dit:
«le Gouvernement de l'Union sud-africaine a déclaréqu'il était prêt

à soumettre, pour information, à l'organisation des Nations Unies,
des rapports annuels. Cet engagement tient toujours. Bien que ces
rapports, s'ils sont acceptés,doivent êtreremis à l'organisation des
Nations Unies en partant de l'idée que celle-cni'estpas compétente
pour exercer un contrôle sur le territoiredont il s'agit, ils serviront
cependant à tenir l'organisation informéede la mêmefaçon qu'elle
l'est sur ce qui sepasse dans lesterritoires non autonomes, conformé-
ment àl'article 73 e) de laCharte.»(Lesitaliques sont de nous.)

Dans une lettre du 31 mai 1948, le Secrétaire général aexplicitement
rappelé quelle était dans son ensemble la position de l'Afrique du Sud
(Nations Unies, doc. T/175, 3juin 1948,p. 51-52):

«lorsqu'il [le Gouvernement de l'Afrique du Sud] transmet à l'Orga-
nisation des Nations Unies des renseignements sur le Sud-Ouest
africain, sous forme d'un rapport annuel ou sous toute autre forme,

il agit de son propre gréet aux seulesfins d'information. A plusieurs
reprises, il a indiqué clairement qu'le se considèrepascomme tenu Nations, but in view of the wide-spreadinterest in the administration
of the Territory, and in accordance withnormal democraticpractice,
they are willing and anxious to make available to the ~orld~~such
facts and figures as are readily at their disposal. ..The Union
Government desire to recall that in offering to submit a report on

South West Africa for the information of the United Nations, they
did so on the basis of the provisions of Article 73 (e) of the Charter.
This Article calls for 'statistical andother information of a technical
nature' and makes no reference to information on questions of
policy. In these circumstances the Union Government do not
consider that information on matters of policy, particularly future
policy, should be included in a report (or in any supplement to the
report) which isintended to be a factual and statistical account of the
administration of the Territory over the period of a calendar year.
Nevertheless, the Union Government are anxious to be as helpful

and as CO-operativeas possible and have, therefore, on this occasion
replied in full to the questions dealing withvarious aspects of policy.
The Union Government do not, however, regard this as creating a
precedent. Furthermore, the rendering of replies on policy should
not be construed as a commitment as to future policy or as imilying
any measureof accountability to the United Nationson thepart of the
Union Government.In this connexion the Union Government have
noted that their declared intention to administer the Territory in the
spirit of the mandate hasbeen construed insomequartersasimplyinga
measure of international accountabilitv.This construction the Union
~overnment cannot accept and they would again recall that the

League ofNations at itsJinal sessionin April 1946,explicitly refrained
from transferring its functions in respect of mandates to the United
Nations" 38-(my italics).

And then again in the Fourth Committee of the Assembly in November
1948 (Official Record of the 76th Meeting, p. 288), it was stated that:
'-'..the Union could not admit the right ofthe Trusteeship Council

to use the report for purposes for which it had not been intended:
still less could the Trusteeship Council assume for itself the power
claimed in its resolution, i.e., 'to determine whether the Union of
South Africa is adequately discharging its responsibilities under the

97 The use of such expressions as "wide-spread interest" and "make available
to the world" confirms the viewaken in paragraph 56 above as to the basis of the
South African approach to the United Nations on the subject of incorporation.

theRsame sense two years later, as there quoted.Lord McNair's pronouncement in de transmettre ces renseignements à l'organisation des Nations Unies,

mais que, en raison du grand intérêt porté à l'administration du
Territoire, et conformément à la pratique démocratique normale, il
est désireux et soucieux de porter à la connaissance du monde " les
faits et les chiffres dont il dispose ... Le Gouvernement de l'Union

désirerappeler qu'en offrant de présenter un rapportsur leSud-Ouest
africain pour l'information des Nations Unies, il s'est conformé aux
dispositions de l'article 73 e) de la Charte. Cet article demande que
soient communiqués au Secrétaire général ((des renseignements

statistiques et autres de nature technique ))et ne mentionne pas les
renseignements relatifs à des questions de politique. Dans ces
conditions, le Gouvernement de I'Union n'estime pas que des
renseignements relatifs à des questions de politique, particulièrement

de politique future, doivent figurer dans un rapport (ou dans un
supplément au rapport) qui ne saurait, par définition, constituer
qu'un exposéde données statistiques et de faits relatifs àI'administra-
tion du Territoire pendant une année civile. Néanmoins, soucieux

d'apporter une aide et une collaboration aussi grandes que possible,
il a, en la circonstance, répondu de façon complète aux questions
relatives à divers aspects de sa politique. Pourtant, il ne considère pas
que, ce faisant, ilcrée un précédent.En outre, du fait que le Gou-

vernement de I'Union répond à des questions d'ordre politique, il ne
faut pas conclure qu'il s'engageàpratiquer telle ou telle politique dans
l'avenir,ou àrendre àun degréquelconquedescomptes à l'organisation
des Nations Unies. A cet égard, le Gouvernement de I'Union a

constaté qu'on a parfois i~oulu déduire de son intention déclarée
d'administrer leTerritoire dans l'esprit du Mandat qu'il était disposéà
rendre des comptes sur le plan international. IIne peut accepter cette
interprétation et il désirerappeler, une fois deplus, que la Sociétédes

Nations, à la dernière session, tenue en ai~il 1946, s'est explicitement
abstenue de transfzrer ses.fonctions, en ce qui concerne les Mandats, à
l'organisation des Nations Unies 38» (Lesitaliques sont de nous.)

A ia Quatrième Commission de l'Assembléegénérale, ila été réitére én
novembre 1948(procès-verbaux officiels, 76' séance,p. 288) que

((leGouvernement de I'Union ne saurait admettre que le Conseil de
tutelle puisse utiliser le rapport à des fins autres que celles qui avaient

étéprévues. II est encore moins admissible que le Conseil de tutelle
puisse s'arroger le droit, ainsi qu'il le faitdans sa résolution, ((de se
prononcer sur la question de savoir si I'Union sud-africaines'acquitte

37 L'emploi d'expressions telles qucgrand intérêt1et(1porter à la connaissance
du monde 11confirme l'interprétation donnée au paragraphe 56 du fondement de la
position adoptée par l'Afrique du Sud a l'égard de l'ONU en ce qui concerne
l'incorporation du territoire.
38 Voir à ce sujet par. 42 ci-dessus et, dans le mêmesens, les déclarations faites
deux ans plus tard par lordNair et citéesdans le mêmeparagraphe.262 NAMIBIA (s.w. AFRICA) (DISS. OP. FITZMAURICE)

terms of the mandate. ..'Furthermore, that power was claimed in
respect of a territory which was not a trust territory and in respect of
which no trusteeship agreement existed.TheSouth African delegation
considered that in so doing the Council had exceeded its powersW-
(my italics).

Since however the Assembly persisted in dealing with the reports through

the Trusteeship Council, they were subsequently discontinued. It is of
course evident that the "parties", so to speak, were cornpletely at logger-
heads. But no less clear is it (a) that the Assernbly would agree to
nothing, except on a trusteeship basis, and (6) that South Africa would
agree to nothing that involved recognition of an obligation of accounta-
bility to the United Nations. In consequence there was no agreement, no
consent.

(c)Conclusionsas to consent

61. Whatever may be thought of the South African attitude from a
wider standpoint than that of law, there can surely be no doubt as to
what, in law, the character of that attitude was. In the face of the state-
ments above set-out, it is impossible to contend that there was any

recognition, or acceptance, of accountability to the United Nations as a
dujy arising for the Mandatory upon the dissolution of the League.
There was in fact an express rejection of it. Consequently, in a situation
in which, for the reasons given in paragraphs 51 and 52 above, nothing
short of positive expressions of recognition or acceptance would have
sufficed, there were in fact repeated positive denials and rejections. This
being so, al1attempts to impIyit must fail in principle on apriori grounds;
for implications are valid only in situations of relative indeterminacy
where, if there are no very positive indications "for", there are also no
very positive ones "against". Where however, as here, there are positive
indications "against", mere implications "for" cannot prevail. Recog-
nition of accountability could be attributable to South Africa only on
the basis of conduct not otherwise explicable. In fact, it was both other-
wise explicable, and repeatedly explained.

62. An important point of international legal order is here involved.
If, whenever in situations of this kind a State voluntarily, and for
reasons of policy, brings some matter before an international body, it is de façon adéquate de ses responsabilités, à elle imparties par les
termes du Mandat ..».On a invoquéce droit au sujet d'un territoire
qui n'est pas placé sousle régimede tutelle et qui ne fait pas l'objet
d'un accord de tutelle. La délégationde l'Union sud-africaine estime
que le Conseil de tutelle a outrepassé ses pouvoirs. » (Les italiques
sont denous.)

Mais, comme l'Assembléegénérale apersisté à traiter de ces rapportspar
l'intermédiairedu Conseil de tutelle, l'Afrique du Sud a cessépar lasuite
d'en envoyer. Il est bien évidentqu'il s'agissaitd'un véritable dialogue de
sourds entre ce qu'on peut appeler les cparties ».Mais il est non moins
évidenta) que l'Assembléegénérale refusait de consentir à quoi que ce
fût hors du cadre d'un accord de tutelle; b) que l'Afrique du Sud n'était
pas disposée àadmettre quoi que ce fût qui impliquât la reconnaissance
d'une obligation de rendre compte à l'ONU. Il n'y avait donc ni accord

niconsentement.

c) Conclusionsrelatives au consentement

61. Quoi qu'on puisse penser de l'attitude de l'Afrique du Sud d'un
point de vue plus large que celui du droit, on ne saurait avoir le moindre
doute quant à la signification qu'elle revêtaiten droit. A lire les déclara-
tions précitées, ilst impossible de soutenir qu'il soit intervenu, après la
dissolution de la Société desNations, une reconnaissance ou une accepta-
tion quelconque d'un devoir de rendre compte à l'organisation des
Nations Unies incombant au Mandataire. De fait, l'Afrique du Sud a
expressémentniél'existence d'un tel devoir. Par conséquent, dans une
situation où, pour les raisons indiquées aux paragraphes 51 et 52 ci-
dessus, une affirmation formelle de reconnaissance ou d'acceptation de

cette obligation aurait étnécessaire, onne constate en fait qu'une sériede
refus et de rejets catégoriques. Cela étant, toute tentative d'en affirmer
l'existencepar implication doit échouer à priori, car des déductions dece
genre ne sont admissibles que dans des situations relativement indétermi-
néesoù, s'iln'y a pas d'indications trèspositives pour, il n'yen a pas non
plus de trèsnettes contre. Mais, dans un cas comme celui-ci où lesindica-
tionscontre sont certaines, onne saurait seprononcerpour par simpleimpli-
cation. Pour qu'on puisse dire que l'Afrique du Sud a reconnu une
obligation de rendre compte, il faudrait que son comportement ne soit
pas autrement explicable. Or, l'attitude del'Afrique du Sud l'étaitparfai-
tement et fut maintes fois expliquée.

62. Une considération importante, relative à l'ordre juridique inter-
national, est en jeu. Si, dans des situations de ce genre, I'Etat qui a,
volontairement et pour des motifs de politique générale,porté unethereby to be heldto have tacitly admitted an obligationto do so (as it has
quite erroneously been sought to maintain in connexion with the United
Kingdom's reference ofthe Palestine question to the United Nations in
1948), then there must be an end of al1 freedom of political action,
within the law, and of al1confidence between international organizations
and their member States.

63. Exactly the same is applicable to attempts to read binding under-
takings into the language of what are really only statements of policy, as

the declarations made at one time or another by the various mandatories
essentially were. Clearly in the formative period of the United Nations
and the dissolution of the League, the question of mandates was a matter
of general interest. They were bound to be discussed,-the mandatories
werebound to make known in ageneral waywhattheir viewsand attitudes
were. Clearly some conclusion had to be reached about their future.
But equallyclearly,fnot more so, is thefact that the conclusionreachedas
to their future was that they ought to be placed under the trusteeship
system, and that the United Nationsshozlldnot have anything todo with
[hem as mandates. In other words United Nations supervision was to be
exercised through the trusteeship notthe mandates system. At the sgme
time no legal obligation was created under the Charter for mandatories
to convert their mandates into trusteeships.Therefore it isnot nowlegally

possible (SW. Africa not having been placed under trusteeship and there
having been no legal obligation so to place it) to contend that the United
Nations is entitled none the less to exercise supervision on a mandates
basis. Such a contention constitutes a prime example of a process to
which 1 will not give a name, but which should not form part of any
self-respecting legaltechnique.

6. General conclusionon Section A

64. Since for al1these reasons the United Nations as an Organization
(includingtherefore both the General Assemblyand the Security Council)
never became invested with the powers and functions of the Council of
the former League in respect of mandates, in any of the possible ways

indicated in paragraph Il above, 1must hold that it was incompetent to
revoke South Africa's mandate, irrespective of whether the League
Council itselfwould have had that power. Ttis nevertheless material to
enquire whether the latter did have it,-for if not, then cadit quaestio
even if the United Nations had inherited. To this part of the subject 1
now accordingly turn. NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 263

question devant un organisme international, devait êtreconsidérécomme
ayant ainsi tacitement reconnu qu'il étaitbligéde le faire (comme on a
cherché à le soutenir, bieà tort,à propos du fait que le Royaume-Uni a
référéla question de la Palestine l'ONU en 1948),cela sonnerait le glas
de toute liberté d'action politique dans le cadre du droit et de toute
confiance entre les organisations internationales et les Etats qui en sont
membres.
63. 11 en va exactement de mêmepour les tentatives visant à découvrir
des engagements formels dans le textede simplesdéclarations depolitique
généraledu genre de celles que les mandataires ont faites à diverses

occasions. Il est clair qu'a l'époquede la formation de l'ONU et de la
dissolution de la SdN la question des mandats était d'intérêt général.
Il fallait bien qu'on en discute et que les mandataires fassent savoir d'une
façongénéralequelsétaientleurspoints de vue etleurs positions àce sujet.
De toute évidence,ilfallait prendre une décisionsur leur avenir.s ilest
non moins évident,sinon plus, que la conclusion à laquelle on a abouti
touchant l'avenirdesmandatsa été qu'ils devaientêtplacéssous lerégime
de tutelleet que I'ONU ne devait absolument pas s'en occuper etnant que
mandats. En d'autrestermes,lasurveillancedeI'ONU devait s'exercer dans
le cadre durégimede tutelle et non dans celuidu système des mandats.En
mêmetemps, la Charte n'imposait aux mandataires aucune obligation de
transformer leurs territoires sous mandat en territoires sous tutelle.Il
n'est donc plus juridiquement possible aujourd'hui (le Sud-Ouestafricain

n'ayant pas étéplacésous tutelle et aucune obligation de ce faire n'ayant
existé) d'affirmerque l'organisation des Nations Unies est néanmoins
habilitée à exercer une surveillance au titre des mandats. Le soutenir
serait recourir un procédéque je ne qualifierai pas mais qui est fort peu
recommandable dans toute techniquejuridique digne de ce nom.

6. Conclusiongénérale d e sectionA

64. Considérant, pour tous les motifs indiqués, que les Nations Unies
en tant qu'organisation (et il s'agit donc ici aussi bien de l'Assemblée
générale quedu Conseil de sécurité)n'ont jamais étéinvesties des pou-
voirs et fonctions du Conseil de l'ancienne Société desNations relative-
ment aux mandats par aucun des moyens possibles décritsau paragraphe

11 ci-dessus,je dois conclure que cette organisation n'avait pas compé-
tence pour révoquer le Mandat de l'Afrique du Sud, que leConseil de la
SdN ait eu lui-mêmece pouvoir ou non. Il importe néanmoins de se
demander si ce dernier possédait effectivement un tel pouvoir car, s'il ne
lepossédait pas,la question ne sepose pas, mêmesi I'ONU avait recueilli
la succession de laSdN. Partant, c'est cet aspect du problème queje vais
examiner. EVEN IF THEUNITEDNATIONS BECAMIE NVESTE DITH THE
POWERS OF THE FORMER COUNCIL OF THE LEAGUE OF
NATIONS ,HESE DID NOT INCLUDE ANY POWER

OF UNILATERAR LEVOCP.TIO OF A MANDATE

1.Lack of competence of the United Nations to
exercise any other or greater supervisory
powers in respect of mandateshan were
possessed by the League of Nations

65. On the assumption-or postulate as it really has to be-that,
contrary to the conclusion reached in the preceding section (Section A),
the United Nations did inherit-ordid otherwise become investedwith-
a supervisory function in respect of those mandates which remained
mandates and were not converted into United Nations trusteeships;-it

then becomes necessary to enquire what was the nature and scope (or
content) of that function, as it was exercised, or exercisable, by the
Council of the League of Nations.Such an enquiry is rendered necessary
because of an elementary yet fundamental principle of law. Tnso far as
(if atl]) the United Nations could legitimately exercise any supervisory
powers, these were perforce derived powers-powers inherited or taken
over from the League Council j9.They could not therefore exceed those

of the Counci1,-for derivedpowers cannot be other or greater than those
they derive from. There could not have been transferred or passed on
from the League what the League itself did not have,-for nemo dare
potest quodipse non habet, or (the corollary) nemo acciperepotest id quod
ipse donator nunquam habuit. This incontestable legal principle was
recognized and applied by the Court in 1950, and was the basis of its

finding(1.C.J. Reports1950,at p. 138)that:

"The degree of supervision to beexercised bytheGeneral Assembly
should not therefore exceed that which appliednder the Mandates
System, and should conform as far as possible to the procedure

followed in this respect by the Council of the League of Nations."
This finding was specifically affirmed in theer Voting Procedure and
Oral Petitions cases (1955 and 1956), both of which indeed turned on
whether the way in which the Assembly was proposing or wanting to

interpret and conduct its supervisory rolen certain respects, would be

39It goes without saying that even if, contrary to the conclusion reached in the
previous section, South Africa consented or deerned to have consented, to
any exercise of supervisory powby the United Nations, it never in any
more extensive powers than those of the League. consented, to the exercise of NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 264

A SUPPOSER QUE LES POUVOIRS DU CONSEIL DE LA SOCIÉTÉ DES NATIONS
AIENT ÉTÉ DÉVOLUS À L'ORGANISATIO DNS NATIONS UNIES,
ILS NE COMPRENAIENT PAS LE POUVOIR DE RÉVOQUER
IJNILATÉRALEMENT UN MANDAT

1. L'Organisation desNations Uniesn'est pas compétentepour exercer à
propos des mandats despouvoirs desurl~eillanceautres ouplus grands que
ceux que possédaitla Société des Nations

65. Si l'on part de l'hypothèse ou de ce qu'il faut bien appeler le
postulat que, contrairement à la conclusionà laquelle j'ai abouti dans

la section précédente (section A), l'ONU a effectivement hérité - ou
obtenu d'une autre façon - une fonction de surveillance sur les mandats
qui subsistaient comme tels, sans avoir ététransformés en tutelles des
Nations Unies, il faut se demander quelles étaientla nature et la portée
(ou le contenu) de cette fonction, telle qu'elle avait été ou auraittre
exercéepar le Conseil de la Sociétédes Nations, et cela à cause d'un

principe élémentairemais fondamental de droit. Dans la mesure in-
certaine où l'organisation des Nations Unies pourraitlégitimementexer-
cer des pouvoirs de surveillance, ce serait nécessairementdes pouvoirs
dérivésh,érités ou reprisdu Conseil de la Société desNations 39,et qui
ne pourraient dépasserceux qu'avait le Conseil, des pouvoirs dérivésne
pouvant êtreautres ni plus grands que ceux dont ils dérivent.l n'est pas

possible que laSdN ait léguéou dévoluquelque chose qu'elle ne possédait
pas elle-même; nemo dare potest quod ipsenon habet, ou (le corollaire)
nemo acciperepotest id quod ipse donator nunquam habuit.Ce principe
juridique incontestable a été reconnu et appliqué par la Cour en 1950,
et c'est sur lui qu'elle s'estfondéepour conclure (C.Z.J. Recueil 1950,
p. 138):

((Ledegréde surveillance à exercer par l'Assembléegénéralene
saurait donc dépasser celui qui 2 étéappliqué sous le régime des
Mandats et devrait être conforme,autant que possible, à la procé-
dure suivie en la matière par le Conseil de la Société desNations.)

Cette conclusion a étéformellement réaffirméepar la suite dans les
affaires concernant larocédure devote applicableaux questions touchant
lesrapportsetpétitionsrelatifsau Territoiredu Sud-Ouest africain et l'Ad-
missibilité del'auditionde pétitionnairespar le Comitédu Sud-Ouestafri-

39Il va sans dire que mêmesi, contrairement à la conclusion que j'ai formulée
comme ayant consentià tout exercice d'un pouvoir de surveillance par l'ONU, iléré
n'aurait pu en aucun cas consentir, ou être réputéavoir consenti,rcice de
pouvoirs plus étendus que ceux de la 265 NAMIBIA (s.w. AFRICA()DISS . P.FITZMAURICE)

consistent with the principle thus enunciated. Furthermore, inthe second
of these cases the Court gave renewed expression to the principle.
Referring to its original (1950) Opinion, it said (I.C.J. Reports 1956,

at p. 27:

"In that Opinion the Court. . .made it clear that the obligations
of the Mandatory were those which obtained under the Mandates
System. Those obligations could not be extended beyocd those to

which the Mandatory had been subject by virtue of the provisions
of Article 22 of the Covenant and of the Mandate for South West
Africa under the Mandates System. The Court stated therefore that
the degree of supervision to be exercised by the General Assembly
should not exceed that which applied under the Mandates System
[andthat] the degree of supervision shouldconform asfar as possible
to the procedure followed by the Council of the League ..."

66. The correctness of this view has never been challenged, and seems
on principle unchallengeable. It follows inevitably therefore that if the
League possessed no power of unilateral revocation of a mandate 40the
United Nations could not have become subrogated to any such power.
It equally follows onthe procedural side-(and here there is an important
connexion)-that if,under the mandates system as conducted by the

League, the position was that the supervisory body, the League Council,
could not bind a mandatory without its consent, then neither could the
organs of the United Nations do so, whether it was the General Assembly
or the Security Council that was purporting so to act. In short, let the
Assembly-or for that matter the Security Council-be deemed to have
al1the powers it might be thought that either organ has, or should have,-
these still could not, in law, be exercisedin the field of mandates 41to any

other or greater effect than the League Council could have done. (Both
organs are of course also subject to Charter limitations on their powers
which willbe considered in main SectionC below.)

40 The "indefinite" article-"a" not "the" mandate is here employed of set
purpose,-for whatever the positionwas as regards the League's powers of revoking
a mandate, it was the same for al1mandates, not merely that for SW. Africa. The
view that the latter could unilaterally be revokedls that the various Australian,
Belgian, French, Japanese, New Zealand and United Kingdom mandates equally
could be.

What the Secitrity Council might be able to do not on a mandates but on a
peace-keeping basis is considered separately in paragraphs0-116 below. NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 265

cain (1955 et 1956); l'une et l'autre portaient sur le point de savoir si la
manière dont l'Assembléeentendait interpréter et exercer sa fonction de
surveillance à certains égards étaitconforme au principe ainsi formulé.
En outre, dans la deuxièmede ces affaires, la Cour a de nouveau énoncé

ce principe. Se référant à son avis initial de 1950,elle a dit (C.I.J. Recueil
1956, p. 27):

(Dans cet avis, la Cour ..a clairement énoncé queles obligations
du Mandataire étaientcelles qui prévalaient sousle régime desMan-

dats. Cesobligations ne pouvaient être accruesde manière àdépasser
celles auxquelles le Mandataire avait été sdumis sousle régime des
Mandats en vertu de l'article 22du Pacte et du Mandat sur le Sud-
Ouest africain. La Cour a donc déclaréque le degréde surveillance

à exercer par l'Assembléegénéralene saurait dépasser celui qui a
étéappliquésous le régime desMandats ...[et] que le degréde sur-
veillance devrait se conformer autant que possible à la procédure
suivie à cet égardpar le Conseil de la Sociétédes Nations. ))

66. Le bien-fondé de cette affirmation n'a jamais été contesté,et il
paraît en principe incontestable. II s'ensuit nécessairementque, si la
Société desNations n'avait aucun pouvoir de révocation unilatérale à
l'égard d'unmandat 40,l'organisation des Nations Unies ne pouvait pas
avoir héritéun tel pouvoir. Il s'ensuit égalementsur le plan de la procé-

dure-et c'est là une considération importante - que si, dans le système
des mandats tel qu'il étaitgérépar la Société desNations, l'organisme
de surveillance, à savoir le Conseil de la SdN, nepouvait lier le mandataire
sans son consentement, les organes des Nations Unies ne le pouvaient
pas non plus, que ce soit l'Assemblée générale olu e Conseil de sécurité.

Bref, quand bien mêmeon admettrait que l'Assembléegénérale, voire
le Conseil de sécurité,a tous les pouvoirs qu'elle est supposéeposséder
ou devoir posséder, il n'en resterait pas moins qu'en droit ces pouvoirs
ne sauraient avoir à l'égard desmandats 41 un effet autre ou plus grand
que ceux du Conseil de la SdN (et bien entendu, les pouvoirs des deux

organes sont aussi limitéspar la Charte,comme on le verra à la section
C ci-après).

40 L'articleGindéfin)I«un »,et non pas l'article défin«le1)mandat, est utilisé
icià dessein, car quel qu'ait étéle pouvoir de la SdN de révoquer un mandat, ce
pouvoir était le mêmepour tous les mandats, et ne valait pas seulement pour le
Sud-Ouest africain. Sil'on admettait que le Mandat pour le Sud-Ouest africain
pouvait êtrerévoqué unilatéralement,il faudrait supposer que les divers mandats de
l'Australie, de.la Belgique, de la France, du Japon, de la Nouvelle-Zélande et du
Royaume-Uni auraient pu l'être aussi.
41Ce que le Conseil de sécurité pourrait faire non pas au titre des mandats mais
au titre du maintien de la paix est examiné séparémentdans les paragraphes 110-116
ci-après. 2. The League had nopower of unilateral
revocation,express or implied

(a) Presumption againstrhe existence
of'such a power

67. The case for deeming League of Nations mandates to have been
subject to a power of unilateral revocation by the Council of the League
does not rest on any provision of the mandates themselves, or of the
League Covenant. (These indeed, as will be seen presently, imply the
exact opposite.) The claim is one which, as noted earlier, is and can only

be advanced on the assumption of fundamental breaches of the mandate
concerned, such as, if the case were one of a private law contract for
instance, could justify the other party in treating it as terminated 42.The
claim therefore rests entirely on the contention that, in the case of in-
stitutions such as the League mandates were, there must exist an inherent

power of revocability inthe event of fundamental breach, even if no such
power is expressed;-that indeed there is no need to express it. This is in
fact the Court's thesis.

68. In support of this view, comparisons are drawn with the position in
regard to private law contracts and ordinary international treaties and
agreements, as to which it may be said that fundamental breaches by
one party will release the other from its own obligations 43,and thus,

in effect, put an end to the treaty or contract. The analogy is however
misleading on this particular question, where the contractual situation is
different from the institutional,-so that what may be true in the one case

42 Note the intentional use of the phrase "in treating it as terrninated" and not
"in putting an end to it". There is an important conceptual difference. Strictly
speaking, al1 that one party alleging fundarnental breaches by the other can do, is
to declare that it no longer considers itself bound to continue performingitsown
part of the contract, which it will regard as terrninated. But whether the contract
follow (certainly not from the unilateral declaration of that party)-there wouldessarily
be an al1too easy way out of inconvenient contracts.

43 The question at once arises who or what would, in the case of mandates, be
the other party, and what would be its obligations from which it could claim release
because of the rnandatory's breaches? In the case of a mandate what obligations
are there otherthan the mandatory's? How and by whom is the existence of fun-
darnental breaches to be established with the effect that would attach to ajudgment
(not opinion) of a cornpetent court of law (not a laypolitical organ)?2. La Société des Nations n'avaitaucunpouvoir de révocation unilatérale,
exprèsou implicite

a) Présomption contre l'existence
d'untel pouvoir

67. L'argument qui permettrait de considérer que les mandats de la
Société des Nations étaient soumis à un pouvoir de révocation unilatérale

du Conseil de la SdN ne repose sur aucune disposition des mandats eux-
mêmes nidu Pacte. En fait, comme on le verra par la suite, ces derniers
impliquent exactement le contraire. Cet argument, comme on l'a déjà
signalé, estavancéet ne peut êtreavancéque dans l'hypothèsede viola-

tions fondamentales du mandat qui, s'il s'agissait d'un contrat de droit
privépar exemple,pourrait autoriser l'autre partie à leconsidérercomme
résolu 42.L'argument repose donc entièrement sur cette idéeque, dans
le cas d'institutions comme les mandats de la Société des Nations, il doit

exister un pouvoir inhérent de révocationen cas de violation fondamen-
tale, mêmesi ce pouvoir n'est pas spécifié en toutes lettres; en somme il
ne serait mêmepas besoin de le spécifier.C'est là en fait la thèsede la
Cour.

68. A l'appui de cette thèse, on établit un rapprochement avec les
contrats de droit privéet les traitéset accords internationaux ordinaires,
à propos desquels on peut dire qu'une violation fondamentale commise

par l'une des parties libèrel'autre de ses obligations 43 et qu'elle a ainsi
pour effet de mettre un terme au traité ou au contrat. L'analogie est
néanmoins trompeusesur cepoint particulier oùla situation contractuelle
est différentede la situation institutionnelle, de sorte que ce qui peut

êtrevrai dans un cas ne saurait êtretransposé et appliquépurement et

42 On notera l'emploi intentionnel de l'expressi1à le considérercomme résolu »
et non pas eà y mettre un terme >)Il y a entre ces deux expressions une importante
différence théorique.A proprement parler, tout ce que peut faire une partie qui
allègue des violations fondamentales de l'autre partie est de déclarer qu'elle ne se
considère plus tenue de continuerà remplir ses propres obligations en vertu du con-
trat, qu'elle considère comme n'existant plus. Mais autre chose est de savoir si le
contrat aeffectiwment et objectivement prifin ;e n'est pas une conséquence néces-
saire, et en tout état de cause elle ne saurait découler de la déclaration unilatérale
d'une partie, sinon il serait trop facile de se dégagerd'un contrat gênant.
43 La question se pose immédiatement de savoir qui serait l'autre partie dans le
cas des mandats et de quelles obligations cette autre partie pourrait prétendre se
libérerpour cause de violation commise par le mandataire. Dans un mandat, quelles
obligationsy a-t-il à part celles du mandataire? Comment et par qui serait constatée
l'existence de violations fondamentales de manière que cette constatation ait l'effet
d'un jugement (et non d'un avis) rendu par un tribunal compétent (et non pas par
un organe politique ordinaire)?cannot simply be translated and applied to the other without inadmissible
distortions (seefootnotes 42 and 43).

69. There isnodoubt a genuine difficultyhere, inasmuch asa régimelike
that of the mandates svstem seems to have a foot both in the institutional
and thecontractual fieid.But it isnecessaryto adhere to at least aminimum
of consistency. If, on the basis of contractual principles, fundamental
breaches justify unilateral revocation, then equally is it the case that

contractual principles require that a new party to a contract cannot be
imposed on an existing one without the latter's consent (novation).
Since in the present case one of the alleged fundamental breaches 44 is
precisely the evident non-acceptance of this new party, and of any duty of
accountability to it (such an acceptance being ex hypothesi, on contractual
principles, not obligatory), a total inconsistency is revealed as lying at the

root of the whole Opinion of the Court in one of its most essentialaspects.

70. If, inorder to escape this dilemma-and it is not the only one 45-
a shift is made into the international institutional field, what is at once
apparent is that the entities involved are not private persons or corporate
entities, but sovereign States. Where a sovereign State is concerned, and

where also it is not merely a question of pronouncing onthe legalposition,
but of ousting that State from an administrative role which it is physically
in the exercise of, it is not possible to rely on any theory of implied or
inherent powers. It would be necessary that these should have been given
concrete expression in whatever are 'chegoverning instruments. 1f it is
really desired or intended, in the case of a sovereign State accepting a

mission in the nature of a mandate, to make the assignment revocable
upon the unilateral pronouncement of another entity, irrespective of
the will of the State concerned 46,it would be essential to make express
provision forthe exerciseof such a power.
71. Nor would that be al1,-for provision would also need to be made

as to how it was to be exercised,-since clearly, upon its exercise a host
of legal and practical questions would at once arise, requiring speedy
solution, and possibly demonstrating the existence of potential problems
more serious than those supposed to be solved by the revocation. To

44 Alleged breaches that have not in any event been properly established-see
paragraphs 2-5 at the start of the present Opinion.
45 For instance, according to ordinary contractual principles, and subject to
qualifications not here relevant, the death or extinction of one of the parties to a
contract normally puts an end to it and releases the other party from any further
obligations except such as have already accrued due but remain undischarged.
Applied to mandates this would have meant their termination upon the extinction
datories, who would have remained in a situation of physical occupation from which
they could not in practice have been dislodged.
46 If it be objected that no State would willingly or knowingly accept such
conditions, 1 can only agree,-but this in fact reinforceand points up the whole
of my argument. The obvious absurdity of the whole idea at once emerges.simplement dans l'autre sans distorsions inadmissibles (voir notes 42 et

43).
69. Sans doute il existe ici une difficultédans la mesure où un régime
comme celuides mandats paraît relever àla fois du domaine institutionnel
et du domaine contractuel. Mais un minimum de logique s'impose. Si,sur
la base de principes contractuels, on estime que des violations fonda-
mentales justifient une révocation unilatérale,on doit admettre aussi

qu'en vertu des principes contractuels un nouveau cocontractant ne
peut êtreimposé à une partie à un contrat sans son consentement (no-
vation). Puisque en l'espèceI'unedes violations fondamentales alléguées 44
est ~récisémentla non-acce~tation évidente du nouveau cocontractant.
le rejet de toute obligation consistant à lui rendre compte (l'acceptation
d'un nouveau cocontractant étant par définition non obligatoire, d'après

lesprincipes contractuels), on voit que sur l'un des points essentiels tout
l'avisde la Cour repose sur un illogisme complet.
70. Si, pour échapper à ce dilemme, qui n'est pas le seul 45,on passe
au domaine institutionnel, on voit tout de suite que les entitésen cause
ne sont ni des particuliers ni des personnes morales de droit privé mais
des Etats souverains. Lorsqu'un Etat souverain est en cause et lorsqu'il

ne s'agit pas simplement de se prononcer sur la situation juridique, mais
d'écarter cet Etat d'un rôle administratif qui est effectivement le sien,
on ne saurait se fonder sur une théorie de pouvoirs implicites ou inhé-
rents. Il faut que ces pouvoirs s'expriment concrètement dans les instru-
ments pertinents, quels qu'ils soient. Si l'on tient vraiment à ce que la
mission d'un Etat souverain acceptant une charge telle qu'un mandat

soit révocablesur déclaration unilatérale d'une autre entité, quelle que
soit la volonté de I'Etat intéressé 46,il serait indispensable de stipuler ex-
pressémentcette possibilité.

71. Cela ne suffirait d'ailleurs pas, car il faudrait également prévoir
comment ce pouvoir serait exercé; en effet, il est bien évidentque, dès

son exercice, il se poserait une multitude de questions juridiques-et pra-
tiques exigeant uqe solution rapide, questions qui pourraient même révé-
ler des problèmes potentiellement plus graves que ceux que la révocation

44 Les violations ainsi alléguéesn'ont d'ailleurs pas étéprouvées comme il con-
vient- voir par. 2 à 5 au début de la présente opinion.
45 C'est ainsi que, d'après les principes ordinaires du droit des contrats et sous des
réservesqui ne sont pas pertinentes ici, la mort ou la disparition de I'une des parties
met normalement fin au contrat et dégage l'autre partie de toutes les obligations
qu'imposait encore le contrat, sauf celles qui étaient déjànéeset n'avaient pas été
exécutées. Dans le cas des mandats, il en aurait résultéque la dissolution de la
étédégagésde toutes autres obligations et qu'ils seraient restés comme occupants
dans le territoire, dont il n'aurait pas étépossible en pratique de les évincer.
46 Si l'on objecte qu'aucun Etat n'accepterait ces conditions debon gréou sciem-
ment, je ne peux qu'en tomber d'accord, mais cela ne fait que renforcer et mettre en
relief l'ensemble de mon argumentation. L'absurdité de l'idée même apparaît
immédiatement.268 NAMIBIA (s.w. AFRICA) (DISS. OP. FITZMAURICE)

leave such matters in the air-to depend on the chance operation of
unexpressed principles or rules-is an irresponsible course, and not the
way things are done. If the possibility of changes of manaatory had
really been contemplated, the normal method would have been to provide
for a review after an initial period of years, or at stated intervals,-and
even this would not imply any general or unconstrained power of revoca-
tion, but rather an ordered process of periodical re-examination in which
the mandatory itself would certainly participate.

72. In consequence, within a jurisprudential system involving sove-
reign independent States and the major international organizations whose
membership they make up, there must be a natural presumption against
the existence of any such drasticthingasa power of unilaterally displacing
a State from a position or status which it holds 47.NO implication based
on supposed inherency of right-but only concrete expression in some
form-could sufficeto overcomethispresumption,-fio siwquaettion
here is not a simple finding that international obligations are considered
to have been infringed, but something going much further and involving
action-or purported action-of an executive character on the objective

plane. It is as if the King of Ruritania were declared not only to be in
breach oj'Ruritania's international obligationsbut also, on that account,
be no longer King of Ruritania. The analogy is not claimed to be exact,
but it will serve to make the point,-namely that infringements of a
mandate might cause the mandatory concerned to be in breach of its
international obligations but could not cause it thereby to cease to be
the mandatory or become liable to be deposed as such, at the fiat of some
other authority, unless the governing instruments so provided or clearly
implied. In the present case they not only do not do so but, as will be
seen, indicate thecontrary.

(b) Positive indications negativingthe notion of revocabi1ity:-
(1) based on theterms of the relevant instruments
and certain applicable principles ofinterpretation

(i) Essentially non-peremptory
character of themandatessystem

73. This point will be more fully dealt with in connexion with the basic
voting rule of the League which, with certain exceptions not applicable

47 It is not that sovereign States are above the law, but that the law itseif takes
account of the fact that they are notvate citizens or private law entities.

256 NAMIBIE (S.-O. AFRICAIN) (OP. DISS. FITZMAURICE)
268
serait censéerésoudre. Laisser ces questions en suspens, s'en remettre au
jeu fortuit de principes ou de règles non exprimés, c'est se montrer

irresponsable, ce n'est pas ainsi qu'on agit. Si l'on avait envisagé véri-
tablement la possibilité d'un changement de mandataire, la méthode
normale eût étéde prévoir un réexamenaprès une période initiale ou à
intervalles fixes et cette formule mêmen'impliquerait aucun pouvoir
généralou illimitéde révocation, mais plutôt un processus méthodique
de revision périodique auquel le mandataire lui-mêmeparticiperait cer-
tainement

72. En conséquence, dans un système juridique auquel participent
des Etats indépendants et souverains et les grandes organisations inter-

nationales dont ilssont membres, il doit forcément y avoir une présomp-
tion naturelle contre l'existence d'un pouvoir aussi radical que celui
d'évincerunilatéralement un Etat d'une certaine situation ou de le priver
d'un certain statut ". Aucune déduction fondée surle caractère préten-
dument inhérent d'un droit ne pourrait suffireà faire tomber cette pré-
somption; seule une expression concrète sous une forme ou sous une
autre pourrait le faire, car ce qui est en cause ici ce n'est pas la simple
constatation que des obligations internationales ont été violées, c'est

quelque chose qui va beaucoup plus loin et qui suppose une action, ou
un projet d'action, ayant objectivement un caractère exécutif. C'est
comme si l'on déclarait que le roi de Ruritanie non seulement a ~!ioléles
obligations internationalede la Ruritanie mais aussi que, pour cette raison,
il n'est plus roi de RuritaniJe ne prétends pas que l'analogie soit exacte,
mais elle fera mieux comprendre mon argument qui est celui-ci: si,
lorsque le mandataire enfreint le mandat, on peut en conclure qu'il a
violé sesobligations internationales, on ne saurait par contre en déduire

qu'il cesse d'être mandataireou peut être déposép ,ar le décret d'une
autre autorité, à moins que les instruments pertinents ne le prévoientou
ne l'impliquent clairement. En l'occurrence, non seulement ce n'est pas
le cas, mais, comme on va le voir, les indications sont en sens contraire.

b) Indications positives démentant la notion de révocabilité et 1) fondées
sur les termes des instruments pertinents et sur certains principes d'inter-
prétation applicables

i) Caractère esseritiellement non absolu
du système des mandats
73. Cette question sera traitée plus à fond dans le cadre de l'examen

de la règle fondamentale de vote de la Société desNations qui, à part

+' Ce n'est pas à dire que les Etats souverains sont au-dessus du droit; mais le
droit tient compte du fait qu'il ne s'agit pas de particuliers ou de personnes morales
de droit prive.

256in the case of mandates, was that of unanimity including the vote of the
interested Party, and therefore of themandatory concerned. It ismention-
ed here by way of introduction as being an essential piece of background

knowledge,-for since it was the case that mandatories could not in the
last resort become bound by the decisions of the League Council unless
they agreed with them, or at least tacitly acquiescedin, or did not oppose
them 48,the system was necessarily non-peremptory in character;-and
in relation to such a systemthere isobviously an element oftotal unreality

in speaking of a power of unilateral revocation,-for any decision to
revoke would itself, in order to be valid, have required the concurrence
of the mandatory 49.Tt could not therefore have been unilateral. Any
other viewinvolvesan inherent logicalcontradiction.

(ii) Limited scope of theso-called
supervisoryfunction as
exercisedby theLeague Council

74. As wasmentioned early in this Opinion (paragraph 14above), no
supervisory role in respect of mandates was, in terms,conferred upon the
League Council, or any other organ of the League, either by the relevant
mandate itself or byArticle 22of the League Covenant, which established

the mandates systemas a régime,and indicated its character in consider-
able detail-but not in this particular respect. The supervisory role or
function was left to emerge entirely-or virtually so-as a kind of
deduction from, or corollary ofthe obligation ofthe mandatory concerned
to furnish annual reports to the Council. It is therefore to the character

of that obligation to which regard must be had in order to establish
what kind and scope of supervision could legitimately be inferred as
flowingfrom it.

Applicable principleof interpretation

Where a right or power has not been the subject ofa specific

grant,but exists onlyasthe corollary or counterpart of a corres-

48 In fact, strictly speaking, there could not, without the concurrence of the
mandatory, be a decision as such: there could only be something in the nature of
a (non-binding) recommendation. But the mandatory could refrain from exercising
its vote.
49 The principle nemo iudex essepotest in sua propria causa clearly cannot apply
so as to defeat the voting rules laid down in the constitutions of international
0rganizations;-or else, to take an obvious example, the five permanent Members
of the United Nations Security Council would be unable to exercise their "veto"
in regard to any matter involving their own interests;-whereasone of the objects
of giving them the veto was, precisely (apart from the specific exception contained
in Article27, paragraph 3, of the Charter, as also the analogous one in the League
Covenant-see paragraph 80 below), to enable them to protect those interests.quelques exceptions ne s'appliquant pas au cas des mandats, prévoyait

l'unanimité des voix, y compris celle de la partie intéressée,donc du
mandataire en cause. J'évoque cettequestion ici, à titre d'introduction,
car elle constitue un élément essentiel à une bonne compréhension des
antécédents historiques:en effet, puisqu'en dernier ressort les manda-
taires ne pouvaient pas êtreliéspar les décisionsdu Conseil de la SdN,
sauf s'ilsles approuvaient ou du moins s'ilsy acquiesçaienttacitement ou

ne s'y opposaient pas 48,le systèmeétait forcément dépourvude tout
caractère absolu; et dans un tel systèmeil est manifestement chimérique
de parler d'un pouvoir de révocation unilatérale, carla validitéd'une
décisionde révocation aurait elle-mêmedépendu de l'assentiment du
mandataire 49.Elle n'aurait donc pas pu êtreunilatérale. Toute autre
conception recèle unecontradiction logique.

ii)Portée limitée de lp arétendue fonction
de surveillanceexercée parle Conseil
de la Sociétédes Nations

74. Comme il est indiqué au début de Ia présente opinion (par. 14
ci-dessus), aucune fonction de surveillance à l'égarddes mandats n'avait
été expressémentconférée au Conseid le la SdN ni à aucun autre organe
de la Société,et cela aussi bien dans l'acte de mandat qu'en vertu de
l'article22 du Pacte de la SdN, qui instituait le régimenouveau du

((systèmedes mandats ))et en précisait la nature avec force détails -
mais pas sur ce point particulier. Le rôle ou la fonction de surveillance
devait se dégager exclusivement - ou presque exclusivement - par voie
de déduction ou comme un corollaire de l'obligation qu'avait le man-
dataire d'envoyer des rapports annuels au Conseil. C'estdonc la nature
de cette obligation-Ià qu'il faut examiner pour préciser legenre et la

portée dela surveillance qu'on pouvait légitimementconsidérer comme
une conséquencede cette obligation.

Principe d'interprétation applicable

Lorsqu'un droit ou un pouvoir n'a pas fait l'objet d'une at-
tribution spécifiquemais n'existe que comme corollaire ou

48 En fait, à strictement parler, sans l'assentiment du mandataire aucune décision,
mandation (non obligatoire). Le mandataire pouvait cependant s'abstenir de voter.
49 Le principe nemo judex esse potest in sua propria causa ne peut évidemment
avoir pour effet de paralyser la règlede vote prévue dans les constitutions des orga-
nisations internationales; sinon, pour preun exemple évident,les cinq membres
permanents du Conseil de sécurité desNations Unies seraient empêchés d'exercer
leur veto pour toute question mettant ejeu leurs propres intérêts; or, l'une des
raisons pour lesquelles le droit de veto leur a étéaccordé était précisémentt
l'exception particulière prévuel'art. 27, par. 3, de la Chartevoir l'exception
analogue du Pacte de laSdN, par. 80 ci-dessous) de leur permettre de protéger ces
intérêts. 270 NAMIBIA (S. W. AFRICA) (DISS . P.FITZMAURICE)

ponding obligation, this right or power is necessarily defined
by the nature of the obligation in question, and limited in its

scope to what is required to give due effect to such correlation.

75. All the various mandates (with one exception not here pertinent 50,

and subject to minor differences of language) dealt with the reporting
obligation in the same way. Citing that for SW. Africa, it was provided
(Article 6) that the Mandatory was to render to the Council ofthe League
"an annual report to the satisfaction of the Council " containing full
information with regard to the territory and indicating the measures
taken to carry out the obligations assumed.. .". This was a reflection
and expansion of paragraph 7 of Article 22 of the Covenant, which

provided for an annual report to the Council "in reference to the territory
committed to [the Mandatory's] charge". The only other relevant clause
was paragraph 9 of Article 22, which provided for the setting up of
what became the Permanent Mandates Commission, "to receive and
examine the annual reports of the Mandatories and to advise the Council
on al1 matters relating to the observance of the mandates". Later, by
special arrangement, written petitions from the inhabitants of the

mandated territories, forwarded through the mandatories, could also be
received and examined.

76. It is clear therefore that the sole real specific function of the
Council was (via the Permanent Mandates Commission) to "receive and

examine" these reports and petitions. The Council could require that the
reports should be to its satisfaction, namely "contain full information"
about the mandated territory, and "indicate the measures taken" by the
mandatory, etc. It would also be a natural corollary that the Council could
comment on these reports, indicate to the mandatory what measures it
thought wrong or inadequate, suggest other measures, etc.,-but in no
case with any binding effect unless the mandatory agreed. The Council
could exhort, seek to persuade and even importune; but it could not

5U That of Iraq, which was differently handled-see joint dissenting Opinion,
I.C.J. Reports 1962, p. 498, n. 1.
sures reported on, for the rnandatoryonly had to render one annual report, and could
not know, at the reporting stage, whatview the Council would take as to those
rneasures. Nor did the rnandatory subsequentlyrevise its report, though it rnight
revise its rneasures. The object of the report was, precisely, to inforrn the Council
about these;-and, consideredas a piece of reporting, the report was necessarily
satisfactory if it contained full andate information as to what was being done,
so that the Council, having thus been put in possession of al1 the facts, would, on
the basis of the report, be able to indicate to the rnandatory whether it approved
of the rneasures concerned or what other or additional measures it advocated. contrepartie d'uneobligationcorrespondante, ledroitou lepou-
voir en question se définit nécessairemend t 'aprèsla nature de

cette obligation et sa portée est limitée à ce qui est nécessaire
pour maintenir cette corrélation.

75. Chacun des mandats (àune exception prèsqui n'estpas pertinente
ici50 et sous réservede légères divergences rédactionnelles) envisageait
de la mêmefaçon l'obligation de rendre compte. Pour citer le Mandat

pour le Sud-Ouest africain, celui-cistipulait (art. 6) que le Mandataire
devrait fournir au Conseil de la Société des Nations un rapport annuel
satisfaisant le Conseil 51 et contenant toute information intéressant le
territoire et indiquant les mesures prises pour assurer les engagements
pris ..)).Cette clause reprenait sous une forme plus détaillée l'article 22,

paragraphe 7, du Pacte, qui prévoyaitl'envoi au Conseil d'un rapport
annuel ((concernant les territoires dont [le Mandataire] a la charge ».La
seule autre disposition pertinente étaitl'article 22, paragraphe 9, relatif
à la création de ce qui devait devenir la Commission permanente des

mandats, ((chargéede recevoir et d'examiner les rapports annuels des
Mandataires et de donner au Conseil son avis sur toutes questions
relatives à l'exécution desmandats )).Ultérieurement, par arrangement
spécial,la Commission a pu également recevoiret examiner des pétitions

écrites des habitants des territoires sous mandat transmises par les
mandataires.

76. Il est donc clair que la seule véritable fonction spécifiquedu
Conseil étaitde ((recevoiret examiner ))ces rapports et ces pétitionspar
l'intermédiairede la Commission permanente des mandats. Le Conseil
pouvait exiger que les rapports lui donnent satisfaction, c'est-à-dire
qu'ils contiennent (toute information intéressant le territoire)) et in-

diquent (les mesures prises ))par le mandataire, etc. Il serait également
naturel de considérer que, comme corollaire, le Conseil pouvait com-
menter les rapports, indiquer au mandataire quelles mesures lui parais-
saient mauvaises ou insuffisantes, lui en suggérerd'autres, etc. (mais

en aucun cas aveceffetobligatoire, si le mandataire n'était pas d'accord).

50Celle de l'Irak, dont le cas a ététraité différemmen- voir opinion dissidente
commune, C.Z.J. Recueil 1962, p. 498, note 1.
51Les mots (satisfaisant le Consei»n'auraient pas pu se rapporter aux mesures
dont il était rendu compte, car le mandataire ne devait envoyer qu'un seul rapport
annuel et ne pouvait donc pas savoir, au moment où il présentait le rapport, si ces
mesures satisferaient le Conseil. D'autre part le mandataire, s'ilpouvait reconsidérer
les mesures qu'il avait prises, neevisait pas sonrapport. Le rapport avait précisé-
ment pour objet d'informer le Conseil de ces mesures; envisagécomme un moyen
d'information, le rapport ne pouvait être que esatisfaisan» du moment qu'il
contenait des renseignements complets et exacts sur les mesures prises, de façon que
le Conseil, ayant étésaisi de tous les faits, soitme,sur la base de ce rapport, de
faire savoir au mandataire s'il approuvait les mesures en question, ou de lui indiquer
les autres mesures ou les mesures complémentaires qu'il préconisait,require or compe1,-and it is not possible, from an obligation which, on
its language, is no more than an obligation to render reports of a specified
kind, to derivea furtherand quite differentobligation to actin accordance
with the wishes of the authority reported to. This would need to be
separately provided for, and it is quite certain that none of the various
mandatories ever understood the reporting obligation in any such sense
as that, and equally certain that they never would have undertaken it if
they had.

77. In other words, the supervisory function, as it was contemplated
for League purposes, was really a very limited one-a view the principle
of which wasendorsed by SirHersch Lauterpacht in the VotingProcedure
case when, speaking of United Nations trusteeships (but of course the
same thing applies a.fortiori to the case of mandates) he said this (I.C.J.
Reports 19.55,p. 116) :

". .. there is no legal obligation, onthe part of the Administering
Authority, to giveeJfectto a recommendationof the GeneralAssembly
to adopt or depart from a particular course of 1egislation.or any
particular administrative measure.The legal obligation resting upon
the Administering Authority is to administer the Trust Territory
in accordance with the principles of the Charter and the provisions
of the Trusteeship Agreement, but not necessarily in accordance with
any specific recommendation of the General Assembly or of the
Trusteeship Counci1"-(my italics).
*
* *
78. Such then was the real and quite limited nature of the supervisory
function to which the General Assembly became subrogated, if it became
subrogated to any function at al1in respect of mandates. It was, as the
term implies, strictly a right of "supervision"; it was not a right of
control-it did not comprise any executive power;-and therefore clearly
could not have conlprised a power of so essentially executivea character
as that of revocation. Between a function of supervision (but not of
control) and a power to reroke a mandate and, so to speak, evict the
mandatory-and to do this uniiaterally without the latter's consent-
there exists a gulf so wide as to be unbridgeable. It would involvea power
different not only (and greatly) in degree, but in kind. This is a considera-

tion which, in the absence of express provision for revocation, makes it
impossible to inlply such a power,-and indeed excludesthe whole notion
of it, as being something that could not have fallen within the League
Council's very limited supervisory role,and accordingly cannot faIlwithin
that of the United Nations Assembly-assuming the latter to have any
supervisory role.Le Conseil pouvait exhorter, user de persuasion et mêmeimportuner;
mais il ne pouvait ni exiger ni contraindre - or, d'une obligation qui,
par son libellé, n'estrien de plus qu'une obligation d'envoyer des rap-
ports d'un type déterminé,il n'est pas possible de déduirel'obligation
supplémentaire et toute différented'agir selon les vŒux de l'autorité
qui reçoit les rapports. Cette dernière aurait dû êtreprévue à part; or il

est bien certain qu'aucun des mandataires n'a jamais entendu de cette
manière l'obligation defairerapport, et non moins certain que s'ill'avait
comprise ainsi, il n'y aurait jamais souscrit.
77. En d'autres termes, la fonction de surveillance, telle qu'elle était
envisagéeaux fins de la Société des Nations, était en réalité unefonction
très limitée - et sir Hersch Lauterpacht a reconnu qu'il en était en
principe ainsi dans l'affaire de larocédure devote, quand, à propos du
régimede tutelle instituépar les Nations Unies (mais évidemmentil en
va à fortiori de mêmepour les mandats), il a déclaré(C.I.J. Recueil
1955, p. 116):

«II n'y a ..pas d'obligationjuridique de lapart de l'autoritéadmi-
nistrante d'adopter ou d'abroger une mesure législativo eu adminis-
trative particulière, dans le but de donnereffet à une recommanda-
tion de l'Assembléegénérale.L'obligation juridique incombant à
l'autorité administrante est d'administrer le territoire sous Tutelle
conformément aux principes de la Charte et aux dispositions de
l'accord de Tutelle mais pas nécessairement suivant telle recomman-
dation particulière del'Assembléegénérale ou du Conseilde Tutelle. >)
(Les italiques sont de nous.)
*
* *
78. Tel était donc le caractère véritableet très limité dela fonction
de surveillance à laquelle l'Assembléegénéralea étésubrogée, si tant

est qu'elle ait pu recueillir par subrogation des fonctions quelconques
en ce qui concerne les mandats. Comme le terme l'implique, ii s'agissait
strictement d'un droit de surveillance1);ce n'était pas un droit de
contrôle - il ne supposait aucun pouvoir exécutifet, de toute évidence,
il n'aurait pu inclure un pouvoir de nature si foncièrement exécutive
que celui de révoquer. Entre une fonction de surveillance (mais non de
contrôle) et lepouvoir de révoquerun mandat et pour ainsi dire d'expulser
le mandataire - et de le faire unilatéralement sans le consentement de
ce dernier - il y a un abîme infranchissable. La différence(et elle est
énorme) n'est pas seulement de degré, elle est ausside nature. Voilà
donc une considération qui, en l'absence d'une disposition prévoyant

expressémentla révocation, interdit de conclure à l'existence implicite
d'un tel pouvoir et exclut mêmetoute idée derévocation,celle-cin'ayant
pas pu faire partie du rôle de surveillance très limitédévoluau Conseil
et ne pouvant donc entrer dans les attributions de l'Assemblée générale
des Nations Unies, à supposer que celle-ci possède des fonctions de
surveillance quelconques.272 NAMIBIA (s.w. AFRICA()DISS .P. FITZMAURICE)

(iii) TheLeague Council's
voting rule

79. The viewsjust expressed are more than confirmed by the League
Council's voting rule, as embodied in paragraph 5 of Article 4 of the
Covenant in combination with paragraph 1 of Article 5 (texts in foot-
note 52). The efTect,in the case of a!! matters involving mandates, was
to enable the mandatories, if not already members of the Council (as

several invariably were), to attend if they wished, and to exercisea vote
which might operate as a veto. No exception was provided for the pos-
sibility of a revocation, and no such exception can be implied from the
fact that mandatories did not always attend the Council when invited
to do so, or might abstain on the vote, or that certain devicesmight be
employed on occasion to avoid direct confrontations between them and

the other members of the Council. Thefact that there may be no recorded
case of the actuai use of this veto does not alter the legal position,-it
merely shows how well the system worked in the hands of reasonable
people. None of this however can alter the fact that mandatories always
had the right to attend and exercise their votes. The existence of this

voting situation was confirmed by the Court not only in its Judgment
of 1966 but also in that of 1962 (I.C.J. Reports 1966, pp. 44-45; and
I.G.J. Reports 1962,pp. 336-337) 53.It is obvious that a situation in which
the League Council could not impose its viewson the mandatories with-
out their consent, is with difficulty reconcilable with one in which it

52Article 4, paragraph 5: "Any Member of the League not represented on the
Council shall be invited to send aepresentative to sit as a member [italics mine] at
any meeting of the Council during the consideration of matters specially affecting
the interests of that Member of the League."
Article 5, paragraph I: "Except where otherwise expressly provided in this Cove-
nant .. .decisions at any meeting of the...Counzil shall require the agreement of
al1the Members of the League represented ut the meeting"-(italicsmine).
53 e.g. (pp. 336-337):
"... approval meant the unanimous agreement of al1the representatives [at the
Council meeting] including that of the Mandatory who, under Article 4, para-
graph 5, of the Covenant, was entitled to send a representative to such a meeting
to take part in the discussion and to vote".
And again (p. 337):
"Under the unanimity rule (Articles 4 and 5 of the Covenant), the Council
couid not impose its own view on the Mandatory."

It may seem surprising at first sight that the Court, in its 1962composition, was so
that it was basing itself in the absence of effective"administrative supervision" in the
League system as one ground for postulating the existence ofjudicial supervision"
in the form of a right, on the part of any Member of the League dissatisfied with the
conduct of a mandate, to have recourse to the former Permanant Court and, since
then, to the International Court of Justice as set up under the United Nations
Charter. Itfollows that althoughthe present (1971) Opinion of the Court is wholly in
line with the type ofonclusionreached by the Court in 1962, it is wholly at variance
with the 1962 reasoningjust described; for that reasoning must, in logic, lead to the
result indicatedabove at the end of paragraph 79.

260 NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN (O)P. DISS. FITZMAURICE) 272

iii) La règle devote du Conseil

de la Société des Nations

79. Ce qui précèdetrouve une confirmation plus que suffisante dans
le régime devote du Conseil, qui faisait l'objetde l'article 4, paragraphe
5, du Pacte, à rapprocher de l'article 5, paragraphe 1 (les textes sont

reproduits dans la note 52),dont l'effet,pour toutes les questions intéres-
sant les mandats, étaitde permettre aux mandataires, s'ils n'étaient déjà
membres du Conseil (et certains l'ont étéinvariablement), de participer
aux débatset d'y exercerun droit de vote qui pouvait jouer comme un

veto. Aucune exception n'était prévue dans l'éventualité d'une révocation
et l'on ne peut arguer du fait que les mandataires n'assistaient pas
toujours aux réunionsdu Conseil quand ils y étaient invitésou s'abs-

tenaient parfois de voter, ou que certains procédéspouvaient être
utilisésafin d'éviter uneconfrontation directe ectre eux et les autres
membres du Conseil, pour conclure qu'une telle exception existait.
Qu'on n'ait jamais enregistréun cas d'emploi effectifdu veto ne change

rien à la situation juridique et fait simplement ressortir que le système
fonctionnait bien, confié à des gens raisonnables.Cela n'empêchait nulle-
ment que les mandataires conservaient bel et bien le droit de participer
aux séanceset de prendre part au vote. Cette situation en ce qui concerne

les votes a été confirmép ear la Cour, non seulement dans son arrêt de
1966 mais aussi dans celuide 1962 (C.I.J. Recueil 1966, p. 44-45; et
C.I.J. Recueil 1962,p. 336-337) 53. Il est évident qu'unesituation qui se

52Article 4, paragraphe 5: fTout Membre de la Sociétéqui n'est pas représenté
au Conseil est invitéà y envoyer siégerun Représentant[les italiques sont de nous]
lorsqu'une question qui l'intéresseparticulièrement est portée devant le Conseil. ))
Article 5,paragraphe 1:IISauf disposition expressément contraire du présent Pacte
...les décisions ..du Conseil sont prises à l'unanimité des Membres de la Société
représentés àla réunion.1(Les italiques sont de nous.)
53Par exemple (p. 336-337):
(l'approbation exigeait l'unanimité de tous les représentants [au Conseil], y
compris celui du Mandataire qui, en vertu de l'article 4, paragraphe 5, du
Pacte, était habilitéà envoyer siéger un représentant pour prendre part à la
discussion et voterr.
Et encore (p. 337):

((En vertu de la règle de l'unanimité (art. 4 et 5 du Pacte), le Conseil ne
pouvait imposer ses vues au Mandataire. »
A prèmièrevue il peut paraître surprenantque la Cour, telle qu'elle était composée
en 1962, ait étési prompte à admettre, et mêmeà souligner, l'existence de cette
situation. Cela tient au fait qu'elle faisait de l'absence d'une «surveillance adminis-
trative))effective dans le système de la Société desNations l'une des raisons
qui permettaient de postuler l'existence d'une(surveillancejudiciaire))se traduisant
par le droit que posséderait tout Membre de IaSociétédesNations qui désapprouvait
la façon dont le mandat était géré d'en référer à l'ancienne Cour permanente et,
plus tard, à la Cour internationale de Justice instituée en vertu de la Charte des
Nations Unies. Il s'ensuit que, si le présent avisde la Cour (1971) est en tout point
conforme au genre de conclusion à laquelle la Cour était parvenue en 1962, il est
tout àfaitcontraire au raisonnement formulé en 1962,qui vient d'êtrerappelé, car 10-
giquement ceraisonnement doit aboutir au résultat indiquéà la fin du paragraphe 79.

260could unilaterally revoke their mandates without their consent;-and
therefore, a fortiori, with the idea that the United Nations possessed
such a power.

ApplicablePrincipleof Interpretation

Where a provision [such asthe League Council'svoting rule]
isso worded thatit can only haveone effect,any intended excep-

tions, in order to be operative, must be stated in terms.

80. This principle of interpretation is, as it happens, well illustrated,
and the viewexpressedin the preceding paragraph is given the character

of a virtual certainty, by the fact that (though not in the sphere of
mandates) the League Covenant did specifically provide for certain excep-
tions to the basic League unanimity rule,-namely, in particular under
paragraphs 4, 6, 7 and IOof Article 15, and paragraph 4 of Article 16,

dealing with matters of peace-keeping 5" This serves to show that those
who framed the Covenant fully realized that there were sonle situations
in which to admit the vote of the interested party would be self-defeating
-and these they provided for. They do not seem to have thought so in

the case of mandates, nor was such a suggestion evermade in the course

54 It has been contended that the power given to the League Council by paragraph
4 of Article 16 of the Covenant to expel a Covenant-breaking member State(though
in my opinion relating only to the peace-keeping undertakings of the Covenant-see
paragraph 1 of this same Article 16) afforded a way by which a mandate could be
revoked. Since, according to the express terms of paragraph 4 of Article 16, the
concurring vote of the expelled State was not requisite for an expulsion order, a
had ceased to be a Member of the League, alddecision to revoke its mandate could beit
taken without it.
This ingenious contention however (about which there may be factual doubts not
worth troubling about here) misses the real point;-for if it would not have been
possible to get rid of a mandatory without going to these elaborate lengths, what
better demonstration could there be that revocability, whether on a basis of in-
herency or otherwise, simply did not exist within the four corners of the Covenant
or the mandates, in respect of any mandatory in the normal situation ofstill being a
Member of the League? That a mandatory might lose its rights if it ceased to be a
Member could in practice act as a deterrent, but has no bearing on theuridical issue
of what its rights and liabilities were a Member.

Exactly the same principle applies in regard to another contention based on the
circumstance that, under Article 26, the Covenant could be amended (though only
by a vote that had to include the unanimous vote of al1the rnembers of the League
Council). True, the Covenant could thus be amended;-but in fact it was not amend-
ed: therefore it is the unamended Covenant that governs. It is difficult to know how
to deal with this type of argument which, juridically, cannot be taken seriously,
except as a clutching at straws.caractérisait par le fait que le Conseil de la Société desNations ne

pouvait pas imposer ses vues aux mandataires sans leur consentement
est difficilement conciliable avec une situation dans laquelle il aurait pu
révoquer unilatéralement leurs mandats sans leur consentement, et à
fortiori avec l'idéeque les Nations Unies posséderaient un tel pouvoir.

Principed'interprétation applicable

Quand une disposition [comme la règle de vote du Conseil
de la Société desNations] est libelléede manière à ne pouvoir
produirequ'un seuleffet,toute dérogation,pour êtreapplicable,
doitêtreexpressément prévue.

80. Il se trouve que ce principe d'interprétation est abondamment
illustréet les vues expriméesau paragraphe précédent revêtenlte carac-
tère d'une quasi-certitude, pour la raison que (bien qu'il ne s'agitpas
de mandats), le Pacte de la Société desNations prévoyait enfait expres-

sémentcertaines exceptions à la règlefondamentale de l'unanimité, entre
autres aux paragraphes 4, 6, 7 et 10 de l'article 15 et au paragraphe 4
de l'article 16, concernant le maintien de la paix 54.Cela montre que les
auteurs du Pacte étaient parfaitement conscients de l'existence de cer-

taines situations dans lesquelles c'eût étéune contradiction d'admettre
la partie intéressée à voter - et que des dispositions avaient étéprises
en conséquence.Ils ne semblent pas avoir penséque cela s'appliquait

54 On a soutenu que le pouvoir conféréau Conseil de la Société desNations par
l'article 16,paragraphe4, du Pacte, d'exclure un Membre qui aurait enfreint un des
engagements du Pacte (quoique à mon avis il doive s'agir uniquement des clauses
du Pacte relatives auaintien de lapaix - voir le paragraphe 1 du même article 16)
fournissait un moyen de révoquer un mandat. En effet, puisque selon l'article 16,
paragraphe 4, le vote positif de 1'Etat frappé d'exclusion n'étaitpas nécessairepour
l'adoption d'une résolution d'exclusion, un mandataire ayant faillises obligations
aurait pu d'abord êtreexclu et, parce qu'il aurait cesséd'être Membre dela Société
des Nations, on aurait pu ensuite révoquer son mandat sans se soucier de son avis.
Mais cette ingénieuse interprétation (qui implique peut-être certains problèmes
de fait dont il ne vaut pas la peine de se préoccuper ici) passeté dela question;
en effet s'il était impossible de se débarrasser d'un mandataire sans ces complica-
tions extrêmes, cela ne démontre-t-il pas de façon éclatante que la révocabilité,
inhérente ou non, n'existait simplement pas dans le cadre strict du Pacte ou des
mandats pour tout mandataire se trouvant dans la situation normale, c'est-à dire
encore Membre de la Société desNations? Le risque de perdre ses droits en cessant
d'être Membrede la Société desNations pouvait avoir en pratique un certain
effet de dissuasion, mais cela n'a rienà voir avec la définitionjuridique des droits
et obligations d'un Membre de la SdN en tant que tel.
Le mêmeprincipe exactement s'applique à propos d'un autre argument, tiré
du fait que, en vertu de l'article 26, le Pacte pouvait êtrendé(bien qu'unique-
ment par un vote comprenant les voix unanimes de tous les membres du Conseil
de la SdN). Ilest vrai que le Pacte pouvait êtreainsi amendé; mais il ne l'a pas été
en fait: c'est donc le Pactenamendéqui s'applique. On voit mal comment contrer
ce genre d'argument qui, juridiquement parlant, ne saurait être pris au sérieux,
sauf comme argument de désespoir.

261of the League's dealings with mandates. it can only be concluded that
terminations or changes of administration were never contemplated,
except on a basis of agreement.

(iv) Co~ztemporaneous consideration and
rejectionof the idea of revocability

81. Nor was it in any way a question of a mere oversight. Earlier
proposals for a mandates system, in particular as put forward by Presi-
dent Wilson on behalf of the United States, did contain provision for
the replacement of mandatories, or for the substitution of another
mandatory,-and these things (contrary to what is implied in the Opinion
of the Court) could of course only be done by revoking (or they would
amount to a revocation of) the original mandate. Even the possibility of

breaches was not overlooked, for the Wilson proposals also provided,
as is correctly.stated in the Opinion of the Court, for a "right to appeal
to the League for the redress or correction of any breach of the mandate".
There can however be no point in following the Opinion of the Court
into a debate as to the precise period and the precise context in which
the idea of revocability was discussed,-because what is beyond doubt
is that, whether on the basis of President Wilson's proposal, or of some
other proposal, it was discussed. The proof of this is something of
which the Court's Opinion makes no mention, namely that objections

were entertained to the notion of revocability by al1the eventual holders
of "C" mandates, and by the representatives of governments destined to
hold most of the "A7' and "B" mandates-in particular by M. Simon
on behalf of France and Mr. Balfour (as he then was) on behalf of
Great Britain, both of whom pointed out the difficulties, economic and
other, that would arise if mandatories did not have complete security
of tenure 55.The idea was accordingly not proceeded with, and the final

text of the mandates, and of Article 22 of the Covenant, contained no
mention of it. This makes it quite impossible in law to infer that there
nevertheless remained some sort of unexpressed intention that a right
of revocation should exist, for this would lead to the curious legal pro-
position that it makes no difference whether a thing is expressed or not.
Yet the classic instance of the creation of an irrebuttable presumption

55 At the meetings of the Council of Ten on 24-28January 1919,and subsequently.
See Foreign Relations of the United States: The Paris Peace Conference, Vol. III,
pp. 747-768. It was Mr. Balfour who pointed out (pp. 763-764) that although plenty
of consideration had been given to the League aspect of theter, very little had
been given to the position of the mandatories, and that the system could only work
if the latter had security of tenure.mon pointed out (p. 761) that mandatories
would have little inducement to develop the mandated territories if their future was
uncertain. au cas des mandats, et personne n'a d'ailleurs prétendu qu'il en fût
ainsi tout au long de l'activitéde la SdN en matièrede mandats. La seule

conclusion à en tirer est qu'on n'a jamais envisagéla possibilité de
mettre fin au mandat ou de changer d'administration, sauf au moyen
d'un accord conclu à cet effet.

iv) Circonstancesde l'époque
et rejetde la révocabilité

81. D'autre part, il ne s'agit nullement d'une simple omission com-
mise par mégarde. Les propositions antérieures relatives à un système
de mandats, notamment celles qui avaient été formuléep sar le président
Wilson au nom des Etats-Unis, prévoyaient la possibilitéde remplacer

un mandataire par un autre, ce qui, bien entendu (contrairement à ce
qu'implique I'avis de la Cour), ne pouvait êtreréalisé qu'enrévoquant
(ou revenait à révoquer)le mandat primitif. La possibilité de violations
même n'étaip tas négligéec,ar ces propositions Wilson prévoyaientaussi,
comme l'indique à juste titre I'avisde la Cour, le ((droit de faire appàl
la Société desNations pour qu'elle remédie à toute violation du mandat ».
Il est cependant inutile de s'engagerà la suite de I'avisde la Cour, dans
un débat sur la période précisependant laquelle l'idéede révocabilité

a été discutée et sur le contexte précisdans lequel elle l'a été- il n'y a
en effetaucun doute qu'ellea bien été discutée,soit sur la base de lapropo-
sition du président Wilson soit sur la base d'une autre proposition. La
preuve en est un élémenq t ue I'avisde la Cour ne mentionne pas, à savoir
que la notion de révocabilité inspiraitdes objections à tous les aspirants
aux mandats de la catégorieCet aux reprksentants des gouverriements qui
devaient se voir attribuer la plupart des mandats A et B - en particulier

a M. Simon pour la France et à M. Balfour (qui n'étaitpas encore lord
Balfour) pour la Grande-Bretagne, lesquels ont tous deux soulignéles
difficultés,économiques et autres, qui surgiraient si les mandataires
n'étaientpas complètement assurés de leurpossession 55.L'idée n'adonc
pas étéretenue et le texte définitif desmandats et de l'article22 du Pacte
n'en portait plus aucune trace. Il est donc, en droit, tout à fait impos-
sible de conclure à la persistance d'une sorte d'intention inexpriméede

prévoir un droit de révocation, car on aboutirait ainsi à la conclusion
curieuse, juridiquement parlant, qu'il n'importe aucunement qu'une
chose soit dite ou ne soit pas dite. Or l'exemple classique d'une pré-

55 AUXréunions du Conseil des Dix tenues le 28 janvier 1919 et à des dates
ultérieures. Voirreign Relations of the UnitedStates: TheParis Peace Conference,
vol. III, p. 747-768. C'est M. Balfour qui a souligné (p. 763-764) que si la situation
de laSdN avait fait l'objet d'un examen approfondi, il n'en étaitpas de mêmepour
celle des mandataires et que le système ne pouvait fonctionner que si la possession
de ces derniers était assurée.imon a insisté(p. 761) sur le fait que les manda-
taires ne seraient guère encouragésévelopper les territoires sous mandat si leur
avenir étaitincertain.275 NAMIBIA (s.w. AFRICA()DISS .P. FITZMAURICE)

in favour of a given intention is, precisely, where a different course has
been proposed but not followed. The motives involved are juridically

quite irrelevant, but were in this case clear5h.

ApplicablePrincipleof Interpretation

Where a particular proposal has been consideredbut rejected,
for whatever reason, it is not possible to interpret the instru-
ment or juridical situation to which the proposal related as if
the latter had in fact been adopted.

82. The episodedescribedin the precedingparagraph directlyillustrates
and confirms the view expressed in paragraphs 70-72 above. When
Statesmen such as President Wilson thought of making mandates revo-
cable (which could only be in a context of possible breaches) they were
no1content to rely on any inherent principle of revocability but made a
definite proposa1 which, had it been adopted, would have figured as

an article in the eventual governing instrument, or instruments. Since
however the idea met with specificobjections, it was not proceeded with
and does not so figure. Therefore to treat the situation as being exactly
the same as if it nevertheless did, is inadmissible and contrary to the
stability and objectivityof the internationallegalorder. Again,the process
of having it both ways is evident.

(v)The"integral
portion" clause

83. Article 22 of the League Covenant drew a clear distinction between
the "C" mandated territories and the other ("A" and "B") territories,
inasmuch as in its paragraph 6 it described the former as being territories
that could "be best administered under the laws of the Mandatory as
integral portions of its territorym,-and a clause to that effect figured

56 For sheer audacity, it would be hard to equal the attempts made in the course of
the present proceedings to represent M. Simon's statement to the effect that every
mandate would be revocable and there could be no guarantee of its continuance
(which of course would have been the case on the basis of the earlier idM. which
Simon was contesting), as affording evidence of an intention that mandates should be
revocable; and that this was only not proceeded with because of a desire to be
"tactful" towards the mandatories,-althougit is perfectly clear on the face of the
not on grounds of its want of tact, but for economic and other reasons of a highly
concrete character,-i.eFrance and Great Britain, no less than t"C" manda-
tories, were not prepared to accept mandates on such a basis.somption irréfragable en faveur d'une intention donnée est précisément
le cas où une solution contraire a été proposée maisnon retenue. Les

mobiles en jeu sont sans pertinence juridique, mais en l'espèce ilsétaient
évidents 56.

Principed'interprétationapplicable

Quand une proposition déterminée a été examinée puis
rejetée,pour quelque raison que ce soit, il n'est pas possible
d'interpréter l'instrument ou la situation juridique à laquelle
cette proposition se rapportait comme si cette dernière avait

effectivement étéadoptée.

82. L'épisode évoquéau paragraphe précédent illustreet confirme
directement l'opinion exprimée aux paragraphes 70 à 72 ci-dessus.
Quand des hommes d'Etat tels que le président Wilson ont envisagéde
rendre les mandats révocables(ce qui n'était possible que dans la pers-

pective de violations éventuelles) ilsne se sont pas contentés de s'appuyer
sur un principe inhérent de révocabilité maisont fait une proposition
précise qui, eût-elle étéadoptée, aurait figurédans l'instrument ou les
instruments applicables, dont elle aurait formé l'un des articles. En
raison des objections formulées, l'idée n'acependant pas été retenueet
consacréepar les textes. Considérer que la situation se présenteexacte-

ment comme si elle l'avait été estdonc inadmissible et contraire à la
stabilitéet à l'objectivitéde l'ordre juridique international. Là encore,
on cherche à gagner sur les deux tableaux.

v)La clausede la
((partieintégrante 1)

83. L'article 22 du Pacte de la Société desNations faisait une dis-
tinction très nette entre les mandats C d'une part et les mandats A et B

d'autre part (en effet, le paragraphe 6 de cet article déclare que les ter-
ritoires sous mandat C «ne sauraient êtremieux administrésque sous les
lois du Mandataire, comme une partie intégrante de son territoire »),
et c'estpourquoi le texte des mandats C contient une disposition dans ce

56 Il serait difficile de montrer plus d'aplomb qu'on ne l'a fait dans la présente
procédure quand on a prétendu trouver dans les propos de. Simon, qui avait dit
que chaque mandat serait révocable et que sa continuité ne pourrait être garantie
que M. Simon combattait), la preuve qu'on avait d'abord voulu que les mandatsent Wilson
puissent prendre fin, mais qu'on n'avait pas donné suitette intention pour faire
montre de tact à l'égard desmandataires. Il est en effet parfaitement clair, d'après
les textes dont on dispose, que. Simon (et M. Balfour) s'élevaientcontre l'idée
que les mandats puissent êtrerévocables,non parce qu'ils voyaientun manque de
tact mais pour des raisons, économiques notamment, d'un caractère des plus con-
crets- à savoir que la France et la Grande-Bretagne tout autant que les mandataires
de la catégorie, n'étaientpas disposéesàaccepter des mandats dans ces conditions. 276 NAMIBIA (s.w. AFRICA()DISS .P. FITZMAURICE)

in the "C" mandates accordingly (text in footnote 57). This distinction
was not, however, fully maintained; for a similar clause eventually
appeared in the "B" mandates as wel1,-though without warrant for
this in the Covenant. But this does not invalidate the point to be made
because, as has been seen in the previous sub-section (paragraph 81j, the

notion of revocability was as inacceptable to the "B" as to the "C"
mandatories. The point involved is that the "integral portion" clause
came very close in its wording to the language of incorporation-indeed
it onlyjust missed it. It did notmount to that of course, for annexation
or cession in sovereignty of the mandated territory was something which
it was one of the aims of the mandates system to avoid. But this clause
did create a situation that was utterly irreconcilable with unilateral
revocability,-with the idea that at somefuturedatethe existing adminis-

trative and legal integrations, and applicable laws of the mandatory
concerned, could be displaced by the handing over of the territory to
another mandatory, to be then administered as an integral portion of its
territory and subjected to another set of 1aws;-and of course this
process could in theory be repeated indefinitely, if the revocability in
principle of mandates once came to be admitted.

84. In consequence, although the mandates did not contain any

provision affirmatively ruiing out revocability, the "integral portion" I
clause in the"B"and "C" mandates had in practice much the same effect.
Significantly, no such clause figured in any of the "A" mandates which
were, fromthe start (paragraph 4 of Article 22 of the Covenant), regarded
as relating to territories whose "existence as independent nations can be
provisionally recognized". Naturally the insertion of the "integral
portion" clause in the "B" and "C" mandates did not in any way preclude
the eventual attainment of self-government or independence by the terri-

tories concerned, as indeed happened with most of them some forty
years later,-with the consent of the mandatory concerned; but that is
another matter. What it did preclude was any interim change of régime
withoutthe consent ofthe mandatory.

57 In the Mandate for SW. Africa that provision read as follows:

"The Mandatory shall have full power of administration and legislation over
the territory subject to the present Mandate as anral portion of the Union
of South Africa, and may apply the laws of the Union of South Africa to the
territory, subject toch local modifications as circumstances may require."

The phrase "subject to the present Mandate" of course qualifies and describes the
word "territory".
264sens (reproduite dans la note 57).Cette distinction n'a cependant pas été
maintenue de façon absolue, une clause analogue ayant étéen fin de
compte inséréedans les mandats B également - quoique cela ne soit
pas prévudans le Pacte. Mais cela n'infirme pas l'argument car, comme
nous l'avons vu sous la rubrique précédente(par. 81), la notion de révo-

cabilité avait étérejetée aussi bienpar les mandataires B que par les
mandataires C. Ce qu'il faut retenir, c'est que, dans son libellé,la clause
de la ((partie intégrante » se rapprochait beaucoup de la notion d'in-
corporation au territoire du mandataire - pour un peu, elle se serait
confondue avec elle. Evidemment, elle n'allait pas tout à fait jusque-là,
puisque précisémentl'un des objectifs du système des mandats était

d'éviter l'annexionou la cession de souveraineté sur le territoire sous
mandat. Elle créait cependant une situation totalement incompatible
avec la notion de révocabilité unilatérale, laquelleimpliquait qu'à une
date future on puisse revenir sur l'intégration administrativeet juridique
et éliminerla législationdu mandataire applicable dans le territoire en

confiant celui-ci àun autre mandataire qui l'administrerait comme partie
intégrantede sonterritoire et l'assujettiraià d'autre lois; et, bien entendu,
ce processus pouvait en théoriese répéterindéfiniment, le principede la
révocabilitédu mandat une fois admis.
84. Par conséquent, si aucune disposition des mandats n'excluait
positivement la révocabilité,la clause de la ((partie intégrante )figurant

dans les mandats B et C avait un résultat très voisin dans la pratique.
Il est symptomatique qu'aucune clause de ce genre ne figurait dans les
mandats de la catégorie A, considérés dès l'origine (Pacte a,rt. 22, par. 4)
comme applicables à des territoires dont 1'(e(xistence comme nations in-
dépendantes peutêtrereconnue provisoirement ».Assurémentla présence
de la clause de la ((partie intégrante »pour les mandats B et C n'excluait

en rien, pour les territoires en cause, la possibilité d'accéder pour finir à
l'autodétermination ou àl'indépendance commeil advint d'ailleurs pour
la plupart d'entre euxquelque quarante ans plus tard, avec le consente-
ment du mandataireintéressé; mais cela est une autre question. Ce que la
clause interdisait, c'était un changement intérimaire de régimeeffectué
sans le consentement du mandataire.

57 Dans le Mandat pour le Sud-Ouest africain cette disposition est libelleécomme
suit:

«Le Mandataire aura pleins pouvoirs d'administration et de législationsur le
législation du Mandataire comme partie intégrante de son territoire. Le Man-
dataire est en conséquenceautoriséappliquer aux régions soumisesau mandat
la législation de'Union de l'Afrique du Sud, sous réserve des modifications
nécessitéespar les conditions locales.

L'expression «faisant i'objet du Manda» qualifie et définit lemot «territ».re (c)Positive contra-indications:-(2) based on
the circumstancesprevailingwhen the
mandatessystem was established

85. As is well knows, the mandates system represented a compromise
between, on the one hand, PreFdent Wilson's desire to place al1 ex-
enemy territory outside Europe or Asia Minor (and even some in
Europe) under direct League of Nations administration,-and, on the

other hand, the desire of some of the Allied nations (more particularly
as regards the eventual "C" mandates) to obtain a cession to themselves
of these territories, which their forces had overrun and occupied during
the war 58.The factor of "geographical contiguity to the territory of the
Mandatory", specificallymentioned in paragraph 6 of Article 22 of the
Covenant, was of course especially (indeed uniquely) applicable to the

case of SW. Africa, and had unquestionably been introduced with that
case in mind. The compromise just referred to was accepted only with
difficultyby some ofthe mandatories and, inthe case ofthe "C" mandates
only after assurances that the mandates would give them ownership in
al1but name 59.Whether this attitude was unethical according to present-
day standards (it certainly was not so then) isjuridically beside the point.
It clearly indicates what the intentionsof the parties were, and upon what

basis the "C" mandates were accepted. This does not of course mean
that the mandatories obtained sovereignty. But it does mean that they
could never, in the case of these territories contiguous to or very near
their own 60, have been willing to accept a system according to which,
at the will of the Council of the League, they might at some future date
find ti.,emselvesdisplaced in favour of another entity-possibly a hostile

or unfriendly one-(as isindeed preciselythe intention now). No sovereign
State at that time-or indeed at any other time-would have accepted
the administration of a territory on such terms. To the mandatories,
their right of veto in the Council was an essential condition of their
acceptance of this compromise,-and that they viewed it as extending to
any question involving a possible change in the identity of the mandatory
is beyond al1 possible doubt. Here once more is a consideration that

completely negativesthe idea of unilateral revocability.

58 Such occupation, being a war-time one, was not in the nature of annexation,
and its ultimateutcorne had in any case to await the eventual peace settlement.
59 See Mr. Lloyd George's statement to the Prime Minister of Australia, and the
question put by Mr. Hughes of Canada, as given by Sloniminanadidn Yearbook of
International Law,Vol. VI, p. 135, citing Scott, "AustraliDuring the War" in
The Oficial History of Australia in the War of 1914-18, XI, p. 784.
60 On the geographical question, see the very forthright remarks made about SW.
Africa by Mr. Lloyd George to President Wilson as recorded in the former'sThe
Truth About the Peace Treaties, Vol. 1,pp. 114etseq and 190-191. c) Contre-indications positives2) résultantdes circonstances
qui régnaient aumoment où le systèmedes mandats

a étéétabli
85. Comme on le sait, le système desmandats a représentéun com-

promis entre, d'une part, le désirdu président Wilson de placer sous
l'administration directe de la Société desNations tous les territoires
ex-ennemis situéshors d'~urope ou d'Asie mineure (et mêmequelques
territoires situésen Europe) et, d'autre part, le désirde certaines des
nations alliées (plusparticulièrement en ce qui concerne les futurs man-
dats C) d'obtenir que les territoires qu'elles avaient envahis et occupés

militairement pendant la guerre leur soient cédés Le facteur de la
((contiguïtégéographique au territoire du mandataire », expressément
mentionné à l'article 22, paragraphe 6, du Pacte, étaitbien entendu ap-
plicable spécialement,et mêmeuniquement, au Sud-Ouest africain et
avait sans aucun doute étéintroduit à son sujet. Le compromis dont je
viens de parler ne fut accepté qu'avecdifficultépar certains des manda-

taires intéresséset, pour ce qui est des mandats C, uniquement quand
l'assuranceeut été donnéequelesmandats correspondaient, aunom près, à
un titre de propriété 59.Que cette attitude ait étécontraire à l'éthique
actuelle (ellene l'était certainementpas à cellede l'époque) esjturidique-
ment hors de propos. Elle montre clairement quelles étaientles intentions
des parties et sur quelle base les mandats C ont étéacceptés.Bien sûr,

cela ne veut pas dire que les mandataires obtenaient la souveraineté, mais
celaveut dire que, pour les territoires contigus au leur ou trèsproches de
celui-ci60, ils n'auraient jamais acceptéun systèmedans lequel, selon le
bon plaisir du Conseil de la SdN, ils auraient pu êtreévincés par la suite
au profit d'une autre entité,éventuellement hostileou inamicale (ce que
l'on cherche précisément à faire aujourd'hui). Aucun Etat souverain à

l'époque - ou en faità toute autre époque - n'aurait acceptéd'adrninis-
trer un territoire dans ces conditions. Pour les mandataires, le droit de
veto au Conseil était une condition essentielle de l'acceptation du com-
promis et il ne fait aucun doute que, dans leur esprit, il s'appliquait à
toute question pouvant éventuellement entraîner un changement de
mandataire. C'est là un autre élémentqui réduit à néant l'idéed'un

pouvoir unilatéralde révocation.

58 Cette occupation, étant une occupation dtemps de guerre, n'avait pas le
caractère d'une annexion et son aboutissemefinal devait de toute façon attendre
le règlement de paix venir.
59 Voir la détlaration M. Lloyd George au premier ministre d'Australie et la
question deM. Hughes (Canada) rappeléespar Slonim dans Canadian Yearbook of
Internationdl Law, vol. VI, p. 135, citant S«Australia During the War»dans
The Oficial History of Australia in the War of 1914-18, XI, p. 784.
Sur la question géographique, voir la remarque très nette de M. Lloyd George
au président Wilson au sujet du Sud-Ouest africain, qui estpelb dans Lloyd
George, The Truth About the Peace Treaties, vol. 1, p. 114 et suiv. et p. 190-191. 3. General conclusion

86. Taking these various factors together, as they have been stated in
the preceding paragraphs, the conclusion must be that no presumptions

or unexpressed implications of revocability are applicable in the present
case, and that in any event they would be overwhelmingly negatived by
the strongest possible contra-indications.
87. Test of this conclusion-a good test of this conclusion is to enquire
what happened as regards those former mandated territories that were
eventually placed under the United Nations trusteeship system. Here was
an opportunity forthe Assembly to introduce an express power of unila-
teral revocation into the various trusteeship agreements entered into
under Article 79 of the Charter. This however was not done, for one
very simple reason, namely that not a single administering authority, in
respect of any single trusteeship, would have been prepared to agree to
the inclusion of such a power-any more than, as a mandatory, it had
been prepared to agree to it in the time of the League. The point involved

is of exactly the same order (though in a different but selated context 61)as
that to which attention was drawn in paragraphs 93-95 of the 1966
Judgment of the Court 'jlwhere is was stated (I.C.J. Reports 1966,p. 49)
that there was one test that could be applied in order to ascertain what
had really been intended, namely,

". .. by enquiring what the States who were members of the League
when the mandates system was instituted did when, as Members of
the United Nations, they joined in setting up the trusteeship system
that was to replace the mandates system. In effect ... they did
exactly the same as had been done before .. .".

And so it was over revocation. No more than before was any provision
forit made. 1sit really to ascribe this to a belief that it was not necessary
because al1 international mandates and trusts were inherently subject
to unilateral revocation, irrespective of the consent of the administering
authority?-or would it be more reasonable to suppose that it was because
no such thing was intended? If no such thing was intended in the case of
the trust territories(al1of them formerly mandated territories), this was

61 The 1966 Judgment of the Court found that the compulsory adjudication
articles of the mandates only applied to disputes concerning clauses about the
economic and other individual interests of members of the League, and not to
clauses concerning the conduct of the mandates themselves, which was a matter
vested collectively in the League as an entity. This vjew was confirmedby the fact
sory adjudication article figuredonly in those trusteeships whichincluded clauses
of the formerkind, butnot in those which wereconfinedto the lattertype of clause. 3. Conclusiongénérale

86. Si l'on considère tous les facteurs examinésdans les paragraphes
précédents, forceest de conclure qu'aucune présomption ou implication
non expriméede révocabilitén'est applicable en l'espèceet qu'en tout

cas les plus fortes contre-indications écarteraient totalement toute pré-
somption ou implication de cet ordre.
87. Vérification de cette conclusion.- Un bon moyen de s'assurer du
bien-fondéde cette conclusion consiste à examiner ce qu'il estadvenu des
anciens territoires sous mandat placéssous la tutelle des Nations Unies.
L'Assemblée avait l'occasion d'introduire un pouvoir spécifique de
révocation unilatéraledans les divers accords de tutelle conclus en ap-

plication de l'article9 de la Charte. Mais cela n'a pas été fait,pour la
raison très simple que pas une des puissances administrantes n'aurait été
plus disposée à consentir à l'inclusion d'un tel pouvoir dans un accord de
tutelle qu'elle n'avaitétédisposée à y consentir en tant que mandataire à
l'époque de laSociété des Nations. La question qui sepose ici est exacte-
ment du mêmeordre (quoique se situant dans un contexte différent;mais
connexe) que celle qui est signaléeaux paragraphes 93 à 95 de l'arrêt
de la Cour rendu en 1366 61,où il est dit (C.I.J. Recueil 1966,p. 49) qu'il

y avait uncritère applicablepour déterminerl'intentionvéritable, à savoir:

((rechercher ce que les Etats qui étaientMembres de la Société des
Nations au moment de l'institution du système des Mandats ont
fait, lorsque, devenus Membres del'organisation des Nations Unies,
ils ont participéàl'établissementdu régimede tutelle destiné àrem-
placer le système desMandats. Or ...ils ont fait exactement la même
chose qu'auparavant.. . 11

C'est bien ce qui s'est passéen ce qui concerne la révocation. Non plus
qu'auparavant, aucune disposition n'a étéprévue à ce sujet. Est-ce vrai-
ment parce qu'on a estimé inutilesde tellesdispositions pour laraison que

tous les mandats et accords de tutelle internationaux étaient intrinsèque-
ment sujets à révocation unilatérale,que l'autorité administrantey con-
sente ou non? Ne serait-il pas plus raisonnable de supposer que celatenait
à ce qu'on n'a rien envisagéde semblable? Si l'on n'a rien envisagéde tel

Selon l'arrêtrendu par la Cour en 1966, les articles des mandats qui prévoient
une procédure obligatoire de règlement judiciaire ne s'appliquent qu'aux différends
concernant les clauses sur les intérêts économiques et autres intérêtisndividuels des
Membres de la Société desNations mais non les clauses relativesa gestion des
mandats eux-mêmes,matière confiée à la SdN agissant pour la collectivité de ses
tutelle portant sur d'anciens territoires sous mandat, la juridiction obligatoire n'est
prévue que dans les accords comportant des clauses du premier type et non dans
ceux qui ne contenaient que des clauses du second type. 279 NAMIBIA (s.w. AFRICA) (DISS.OP. FITZMAURICE)
because no such thing had been intended, or had ever been instituted, in
the case of the mandated territories themselves, as mandates.The former
mandatories were simply perpetuating in this respect the same system as

before (and theAssembly tacitly agreed tothisunderthe varioustrusteeship
ugreements). This previous system of course applied, and continues to
apply, to themandated territory of SW. Afrjca.

88. Since the conclusion reached is that League of Nations mandates
would not have been subject to unilateral revocation by the Council of
the League or-what comes to the same thing-that the concurrence of
the mandatory concerned would have been required for any change of
mandatory, or for the termination of the mandate on a basis of self-
government or independence;-and since the United Nations cannot
have any greater powers in the matter than had the League, it follows
that the Assembly can have had no competence to revoke South Africa's
mandate, even if it had become subrogated to the League Council's

supervisory role-for that role did not comprise any power of unilateral
revocation.

89. Thereare however other reasons, resulting from the United Nations
Charter itself, why the organs of the United Nations had no competence
to revoke the Mandate, whether or not they would otherwise havehad it;
and these will now be considered in the next main section (SectionC).

90. In the two preceding main sectionsithas been held,first (SectionA)
that the United Nations as an Organization never became invested with
any.supervisory function in respect of mandates not voluntarily converted
into trusteeships, and never became subrogated to the sphere of compe-
tence ofthe former League ofNations in respect ofmandates; and secondly
(Section B) that since in any event that competence did not include any
power of unilateral revocation of a mandate, or of terminating it without
the consent of the mandatory concerned, the United Nations would
equally have had no competence to exercise such a power even if it had, NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 279
dans le cas des territoires sous tutelle (qui étaient tous d'anciens terri-

toires sous mandat), c'est qu'on n'avait jamais rien envisagé,et encore
moins établi detel, pour les territoires sous mandat eux-mêmesen tant
que mandats. Les anciens mandataires ne faisaient que perpétuer à cet
égard le systèmeantérieur (et l'Assembléey a tacitement consentipar la
voiedesdiversaccordsde tutelle). Bien entendu ce systèmeantérieur s'ap-
pliquait et continue s'appliquer au territoire sous Mandat du Sud-Ouest
africain.

88. Dèslors que la conclusionàlaquelle on aboutit est que lesmandats
de la Société desNations n'auraient pu être unilatéralementrévoqués
par le Conseil de la Société ou, ce qui revient au même- que le con-

sentement du mandataire intéresséaurait étrequis pour tout changement
de mandataire ou pour l'extinction du mandat par accession du territoire
à l'autonomie ou à l'indépendance,et puisque l'organisation des Nations
Unies ne saurait en la matière avoir des pouvoirs plus étendus queceux
de laSdN, il s'ensuitque l'Assemblée généranlepouvait avoircompétence
pour révoquerle mandat de l'Afrique du Sud, mêmesi elle a étésubro-
géeau Conseil de la Société desNations dans son rôle de surveillance,
car ce rôle ne comprenait aucun pouvoir de révocation unilatérale.

89. D'autres arguments tirés dela Charte des Nations Unies elle-même
expliquent pourquoi les organes des Nations Unies n'étaientpas habilités
à révoquer le Mandat, quand bien mêmeils auraient eu par ailleurs la
compétencevoulue; ce sont ces arguments qui seront examinésdans la
section suivante (section).

LIMITES DE LA COMPÉTENCE ET DES POUVOIRS
QUE LES ORGANES DES NATIONS UNIES

TIENNENT DE LA CHARTE

90. Dans les deux grandes sections qui précèdentje fais valoir,rimo
(section A) que les Nations Unies, en tant qu'organisation, n'ont jamais
éténi chargéesd'une fonction de surveillance pour les mandats qui n'ont
pas été convertis volontairement en accords de tutelle ni subrogées à
l'ancienne Société desNations dans sa compétenceen matière de man-
dats; etsecundo(section B) que puisque en tout cas cette compétence ne

comprenait ni le pouvoir de révoquer unilatéralement un mandat ni
celui d'y mettre fin sans le consentement du mandataire intéressé, les
Nations Unies, mêmesi elles avaient été,en principe, subrogéesau rôle 280 NAMIBIA (s.w. AFRICA )DISS. OP.FITZMAURICE)

in principle, become subrogated to the role of the League in respect of
mandates. But in addition to the limitations thus arising, both from
general rules of law and from the provisions of the relevant governing

instruments, there is also the question of the limitations imposed upon
the competence and sphere of authority of the organs of the United
Nations by the constitution of the latter, as embodied in its Charter.
Since these organs (in the present context the General Assembly and the
Security Council) are the creations of the Charter, they are necessarily
subject to such limitations, and can prima facie, take validaction only
upon rhat basis.

1. Cornpetence andPowers of the General Assernbly
underthe Charter

91. So far as the Assembly is concerned, there arises at the outset an
important preliminary question, namely whether it was competent to
act as (in effect)a court of law to pronounce, asjudge in its own cause, on
charges in respect of which it was itself the complainant. In my opinion

it was not; and this sufficesin itself to render Resolution 2145,by which
the Assembly purported to revoke the Mandate for SW. Africa, invalid
and inoperative. However, in order not to break the thread of the present
argument, 1deal with the matter in the first section of the Annex to this
Opinion.

(i) The Assernblylacks anygeneral
competence to take action of
an executive character

92. In contrast with theformer League of Nations, in which both main
bodies, except in certain specified cases, acted by unanimity, the basic
structure adopted in the drafting of the United Nations Charter consisted
in the establishment of a careful balance between a small organ-the
Security Council, acting within a comparatively limited field, but able,
in that field, to take binding decisions for certainpurposes;-and a larger
organ, the General Assembly, with a wide field of competence, but in
general, only empowered éodiscuss and recommend;-this distinction

being fundamental.The powers of the Security Council will be considered
at a later stage..Asto the Assembly,the list appended belowin footnote 62
indicates the general character of what it was empowered to do. From
a The list shows that the Assembly is either limited to making recommendations,
or that where itcan do more, it is as a result of a specific power conferred by the
express terms of some provision of the Charter. In other words the Assembly has no
inherent or residual power to do morehan recommend.

(a) The recommendatory functions are described as fol1ows:-

[The General Assembly]
Article IO: "may discuss...and .. .make recommendations";
Article 11, paragraph!: "may consider. ..and. ..make recommendations";de la SdN à l'égard desmandats, ne seraient pas non plus compétentes

pour exercer un tel pouvoir. Mais, outre les limitations découlant ainsi
des règles généraled se droit, d'une part, et des dispositions des instru-
ments régissantla matière, d'autre part, il se pose aussi la question des
limitations imposées à la compétenceet à l'autoritédes organes des Na-
tions Unies par laconstitution de cette organisation telle qu'elle estétablie
par la Charte. Comme ces organes (en l'espècel'Assemblée générale et

le Conseil de sécurité)sont des créations dela Charte, ils sont nécessaire-
ment soumis à ces limitations et, jusqu'à preuve du contr,aire,ne peuvent
agir valablement que sur cette base.

I. Compétence etpouijoirsde I'Assembl&egénérale
en vertu de laCharte

91. Pour ce qui concerne l'Assembléeune importante question préli-
minaire se pose, celle de savoir si l'Assembléeétait compétente pour
s'ériger entribunal (ce qu'elle a fait) et pour se prononcer comme juge

en sa propre cause sur des accusations qu'elle avait elle-mêmeportées.
A mon avis elle ne l'étaitpas; et cela suffit, en soi, pour rendre la réso-
lution 2145, par laquelle l'Assembléea prétendu révoquer le ma'ndat
sur le Sud-Ouest africain, nulle et sans effet. Toutefois, .pour ne pas
rompre le fildu raisonnement, je traite de cette question dans la première
section de l'annexe à !a présenteopinion.

i) L'Assemblée n'a pas de compétencegénérale

pour prendre des mesures de caractère
exécutif
92. Si dans l'ancienne Société deN sations, les deux organes principaux
agissaient, sauf dans certains cas expressémentprévus, à l'unanimité,la

structure de base qui a étéadoptée lors de l'élaboration de la Chêïte
des Nations Unies repose sur un équilibre minutieux entre i?n organe
à composition restreinte - le Conseil de sécurité, agissantdans un
domaine relativement limitémais capable dans ce domaine de prendre
à certaines fins des décisionsobligatoires - et un organe plus nombreux,
l'Assemblée générale d,ont la compétence est plus vaste mais qui, en

général, n'a que des pouvoirs de discussion et de recommandation; cette
distinction est fondamentale. J'aborderai ultérieurement la question des
pouvoirs du Conseil de sécurité.Quant à l'Assemblée,la note ci-des-
--
62 La liste qui suit montre ceci: ou bien l'Assemblée généraledoit se bornerà
formuler des recommandations ou bien, là où elle peut faire plus, c'est en vertu d'un
pouvoir spécifiquequi lui est reconnu en termes exprès par une des dispositions de la
permettant de faire autre chose que des recommandations:insèque ou résiduel lui

a) Les pouvoirs qu'a l'Assembléegénéralede formuler des recommandations sont
exprimés comme suit:
[L'Assembléegénérale]
Article IO:epeut discuter..et ..formuler ..des recommandations »;
Article II. paragraphe : rpeut étudier...et...faire..des recommandations 11;what this list reveals (seenagainst the wholeconceptual background of the
Charter), there arises an irrebuttable presumption that except in the few
cases (see section (d) of the list) in which executive or operative powers

are specifically conferred on the Assembly, it does not, so far as the
Charter is concerned, have them. In consequence, anything else it does
outside those specificpowers, whatever it may be and however the relevant
resolution is worded, can only operate as a recommendation. It should
hardly be necessary to point out the fallacy of an argument which would
attribute to the Assembly a residual power to take executive action at

large, because it has a speciJicpower so to do under certain particular
articles (4, 5, 6 and 17). On the contrary, the correct inference is the
reverse one-that where no such power has been specifically given, it
does not exist.

93. It follows ineluctably from the above, that the Assembly has no

implied powers except such as are mentioned in (e) of footnote 62. Al1
its powers, whether they be executive or only recornmendatory, are
precisely formulated in the Charter and there is no residuum. Naturally
any organ must be deemed to have the powers necessary to enable it to
perform the specificfunctions it is invested with. This is what the Court
had in mind when, in the Injuries to United Nations Servants (Count

Bernadotte) case (I.C.J. Reports 1949, p. 182), it said that the United
Nations :

Article II, paragraph 3:"may cal1c... attention. ..ton ;recommendations" ;
Article 12, paragraph 1: "shall not make any recommendation .. .unless [so
requested]";
Article 13: "shall initiate studies and make recommendations";
Article 14: "may recommend measures";
Article 15: "shall receive and consider [reports]";
Article 16: "shall perforrn such function...as are assigned to it [by Chapters
XII and XIII of the Charter]";
Article 105, paragraph 3: "may make recommendations".
(b) The peace-keeping functions conferred upon the Assembly by Article 35 are, by
its third paragraph, specifically stated to beubject to the provisions of Ar-
ticles1 and 12" (as to which, see above).

(c) Aprovisions which refer to the Assembly are:ter (trusteeships), the only

Article 85, which (without any indication of what the functions in question
are) provides that the non-strategic area functions of the United Nations
"with regard totrusteeship agreements" (italics added) "including the approval
of the terms of" such agreements, "shall be exercised by the. . .Assembly".
Article 87, under which the Assembly may "consider reports" ("submitted
by the administering authority"); "accept petitions and examine them" ("in
consultation with [that] authority"); "provide for periodic visits" to trustsous donne une idée généraldee sespouvoirs. La liste qui yfigure(compte
tenu de la conception généralequi a inspiré la Charte) fait apparaître
une présomption irréfragableselon laquelle, sauf dans quelques cas (voir
alinéa d) de la liste) où des pouvoirs d'action ou d'exécutionIui sont

spécifiquement conférés, l'Assemblée ne possède d'aplr aèsharte aucun
pouvoir de cet ordre. En conséquence, quoi que l'Assembléepuisse
faire d'autre en dehors de ces pouvoirs spécifiques,et quels que soient

les termes de la résolution pertinente, la décision qu'elleprend ne peut
avoir que la valeur d'une recommandation. 11est à peine nécessaire
d'attirer l'attention sur le caractèrefallacieux de l'argument selon lequel
l'Assembléeaurait un pouvoir résiduellui permettant de prendre des

mesures d'exécutiondans toutes sortes de domaines parce qu'un pouvoir
spécifiquedans ce sens lui est reconnu par certains articles particuliers
(art. 4, 5, 6 et 17). C'estla déductioncontraire qui est exacte: lorsqu'un
pouvoir de ce genre n'estpas spécifiquementprévu,il n'existepas.

93. Il suit inéluctablementde ce qui précèdeque l'Assemblée générale
ne possède d'autres pouvoirs implicites que ceux qui sont mentionnés à
l'alinéae) de la note 62. Tous les pouvoirs de l'Assemblée, qu'ilssoient
exécutifsou qu'ils aient le caractère de recommandations, sont expres-

sément définid sans la Charte, et il n'y a pas de pouvoir résiduel. Evidem-
ment, il faut présumerque tout organisme a les pouvoirs qui lui sont
nécessairespour remplir les fonctions spécifiquesdont il est chargé.
C'est à cela que la Cour a songélorsque, dans l'affaire de la Réparation

des dommages subis au service desNations Unies (comte Bernadotte),
elle a affirméque l'organisation des Nations Unies

Article II, paragraphe 2: (peut discuter ...et ..faire ..des recommandations a;
Article II, paragraphe 3: «peut attirer I'attention...suri);
Article 12, paragraphe 1: «ne doit faire aucune recommandation ...à moins
[qu'on] ne le lui demande n;
Article 13: *provoque des études et fait des recommandations 1);
Article 14:fipeut recommander les mesures »;
Article 15: «reçoit et étudie [les rapport.].));
Article Id: ((remplit..les fonctions qui lui sont dévolues[en vertu des chapitres
XII et XIII de la Charte] »;
Article 105,paragraphe 3: «peut faire des recommandations ».

6) Ltien de la paix sont définis,au paragraphe 3, comme étant «soumis aux dispo--
sitions des articles1et 12 1(pour ces articles, voir plus haut).

c) Dans les chapitres XII etXIII de la Charte (tutelle), les seules dispositions qui
intéressentl'Assembléesont les suivantes:
L'article 85 qui dispose (sans préciser la nature des fonctions en question) que,
pour les zones non stratégiques, les fonctions de l'organisation des Nations
Unies 11en ce qui concerne les accords de tutelle » (les italiques sont de nous)

(y compris l'approbation des termes » de ces accords «sont exercéspar 1'Assem-
L'article 87, en vertu duquel l'Assembléepeut «examiner les rapports » («sou-

mis par l'autorité chargée de l'administration»); «recevoir des pétitions et les
examiner ))(ten consultation avec ladite autorité»); «faire procéder à des visites
269 NAMIBIA (s.w. AFWICA () ISS. P.FITZMAURICE)
282
". . .must be deemed to have those powers which, though not ex-

pressly provided in the Charter, are conferred upon it by necessary
implication as being essential to the performance of its duties".

This isacceptable if it isread as being related and confined to existing and
specified duties; but it would be quite another matter, by a process of

implication, to seek to bring about an extension of functions, such as
would result for the Assembly if it were deemed (outside of Articles 4,
5, 6 and 17) to have a non-specified power, not only to discuss and
recommend, but to take executive action, and to bind.

94. In the same way, whereas the practice of an organization, or of a

particular organ of it, can modify the manner of exercise of one of its
functions (as for instance in the case of the veto in the Security Council
which is not deemed to be invoived by a mere abstention), such practice
cannot, in principle, modify or add to the function itself. Without in
any absolute sense denying that, through a sufficiently steady and long-
continued course of conduct, a new tacit agreement may arise having a

modificatory effect, the presumption is against it,-especially in the case
of an organization whose constituent instrument provides for its own
amendment, and prescribes with some particularity what the means of
effecting this are to be. There is a close analogy here with the principle
enunciated by the Court in the North Sea Continental Shelfcase (I.C.J.
Reports 1969, p. 25) that when a convention has in terms provided for a

territories ("at times agreed upon with the [same] authorityand "take these
and other actions in conformity with the terms of the trusteeship agreements"
(italics added).
None of this invests the Assembly with any binding or executive powers
of the trusteeship agreements. These did not in fact any of them do so (see foot-
note 64 below).
(d) In the result, the only provisionsof the Charter which confer executive or
quasi-executive powers on the Assenlbly are:

Articles 4, 5 and 6, which enable the Assembly to admit a new Member, or
suspend or expel an existing one,-ineach case only upon the recommendation
bly is to "consider and approve" the budget of the Organization,h twith then-
corollary (paragraph2) that the expenses of the Organization are to be borne by
the Members "as apportioned by the Assembly". Under paragraph 3, the Assem-
bly is to "consider and approve" financial arrangements with the specialized
agencies, but is only to "examine" their budgets "with a view tomaking re-
commendations" to them.
(e) The Assembly naturaily has those purely domestic, internal, and procedural
executive powers without which such a body could not function. e.g., to elect
its own officers; fix the dates and times of its meetings; determineagenda;
appoint standingcommittees and ad hoc ones; establish staff regulations; decide
to hold a diplomatic conference under United Nations auspices, etc., etc. ((doit êtreconsidérée commepossédant ces pouvoirs qui, s'ils ne

sont pas expressémenténoncésdans la Charte, sont, par une con-
séquence nécessairec ,onférés à l'Organisation en tant qu'essentiels
à l'exercicedes fonctions de celle-ci » (C.I.J. Recueil 1949, p. 182).

Cette proposition est acceptable si on la rattache et si on la limite à des
fonctions existantes et définies;mais ce serait tout autre chose de cher-

cher à en déduire,par implication, une extension de fonctions, comme ce
serait le cas si 1'011 estimait que l'Assembléea des pouvoirs non spécifiés
(à part ceux que prévoient les articles 4, 5, 6 et 17) lui permettant non
seulement de discuter et de recommander, mais de prendre des mesures

d'exécutionet des mesures ayant force obligatoire.
94. De même,alors que !a pratique d'une organisation ou d'un de
ses organes peut modifier la façon dont s'exerce l'une de ses fonctions

(comme c'est le cas notamment au Conseil de sécuritépour le veto,
qu'une sirnple abstention n'est pas censéefaire jouer) cette pratique ne
peut pas, en principe, modifier ou élargirla fonction elle-même.Sans

nier absolument qu'une ligne de conduite suivie de manière suffisam-
ment régulièreet prolongéepuisse donner naissance à un nouvel accord
tacite entraînant une modification, c'est la présomption contraire qui

joue, surtout dans le cas d'une organisation dont l'acte constitutif
prévoit son propre amendement et en spécifie lesmodalités. Il y a ici
une analogie étroiteavec le principe énoncépar la Cour en l'affaire du
Plateau continental de lamer du Nord (C.I.J. Recueil 1969, p. 25) selon

lequel, lorsqu'une convention prévoit expressémentla méthode à suivre

périodiques »dans les territoires sous tutel(1à des dates convenues avec [ladite
autorité]ilet (prendre ces dispositions et toutes autres conformémenîaux termes
des accords de tutell» (les italiques sont de nous).
Aucune de ces dispositions n'attribue à l'Assemblée des pouvoirs contrai-
gnants ou d'ordre exécutif,l'exception de ceux qui peuvent luiêtrespécifiquement

reconnus par les termes exprès des accords de tutelle. En fait, aucun de ces
accords ne lui confère de tels pouvoirs. (Voir note64 ci-après.)
d) En fin de compte, les seulesdispositions de la Charte qui confèrent àl'Assemblée
générale despouvoirs exécutifs ou quasi exécutifs sont les suivantes:
Les articles 4, 5 et 6, qui autorisent l'Assembléeà admettre un nouveauMembre,
à suspendre ou à exclure un Membre de l'organisation, dans chaque cas unique-
ment sur recommandation du Conseil de sécurité; et l'article 17, dont le para-
graphe 1 dispose que l'Assembléegénérale (examine et approuve >le budget de
l'Organisation, avec le corollaire (par. 2) que les dépensesde l'organisation sont
supportées par les Membres selon larépartition fixéepar l'.Assembléegénérale11.
Aux termes du paragraphe 3, l'Assemblée s examine et approuve 1)les arrange-
ments financiers passés avec les institutions spécialisées, mai((examine 1)leurs

budgets seulement (en vue de leur adresser des recommandations 1).
e) L'Assemblée possède évidemment les pouvoirs exécutifs d'ordre purement
interne et procédural sans lesquels un tel organisme ne pourrait pas fonctionner,
c'est-à-dire qu'elle peut élireson propre bureau, fixer les heures et dates de ses-
séances, établir son ordre du jour, constituer des commissions permanentes et
ad hoc, arrêter le statut du personnel, décider de convoquer des conférences
diplomatiques sous les auspices des Nations Unies, etc.

270 particular method whereby some process is to be carried out (in that
case it was the method of becoming bound by the convention), it was
"not lightly to be presumed that", although this method had not been
followed, the same result had "nevertheless somehow [been achieved]in
another way"-a principle which,had it been applied by the Court in the

present case 63,would have led to a totally different outcome, as can be
seen from Sections A and B above.
95. Translating this into theparticular fieldof mandates, it is clearthat,
just as the Assembly would have no power to make a grant of sovereign
independence to a non-self-governing territory under Articles 73 and 74
of the Charter, nor to terminate a trusteeship without the consent of the
administering authority (see relevant clauses of the various trusteeship
agreements made under Article 79 of the Charter 64),-~~ equally, given

the actual language of the Charter, does the Assembly have no power to
evict a mandatory. Any resolution of the Assemblypurporting to do that
could therefore only have the status of, and operate as, a non-binding
recommendation. The power given to the Assembly by Articles 5 and 6
of the Charter to suspend or expel a member State (upon the recommen-
dation of the Security Council) would of course enable it to suspend or
expel a mandatory from its membership of the United Nations; but this

cannot be extended on a sort of analogical basis to the quite different
act of purporting to revoke the mandatory's mandate.

96. From al1of this, only one conclusion is possible, namely that so
far as the terms of the Charter itself are concerned, the Assembly has no

power to terminate any kind of administration overany kind of territory.

97. It may however be contended that the matter does not end there,
for it may be possible for powers other or greater than its normal ones
to be conferred upon an international organ aliundeor ab extra, for some

particular purpose-e.g., under a treaty,-and if so, why should it not

63 This affords an excellent illustration (and many more could be given) of the
system of triennial elections created by itste, the Court does not always adherethe
to its own jurisprudence.
64 The various trusteeship agreements deal differently with the question of the
termination, or possible termination of the trust, but the effect is that in no case
the Assembly possess any unilateral power in the matter. If therefore no trusteeship
can be terminated without the consent, given in one formor another, of the admini-
stering powers, why should it be so unthinkable that a mandate shouid not be termi-
nable without the consentof the mandatory?pour accomplir un certain processus (en l'espèce lamanière de se lier

par la convention), il ne faut pas ((présumer à la légère1) que, cette
méthode prescrite n'ayant pas étéadoptée, le mêmerésultat ((n'en est
pas moins [acquis] d'une autre façon ».Si la Cour s'était inspirée dece
principe en la présente espèce63,elle aurait abouti à un résultat tout
différent,comme le montrent les sections A et B ci-dessus.

95. Pour transposer cela dans le domaine particulier des mandats,

il est clair que, de mêmeque l'Assembléen'a la faculténi d'accorder
l'indépendance souveraine à un territoire non autonome en vertu des
articles 73 et 74 de la Charte, ni de mettre finà un accord de tutelle sans
le consentement de l'autorité chargée de l'administration (voir les dis-
positions pertinentes des divers accords de tutelle conclus en application
de l'article79 de la Charte64),de même,étantdonnéle texte de la Charte,

l'Assembléen'a pas le droit de démettreun mandataire. Toute résolution
de l'Assembléeayant cet objet ne pourrait donc avoir que la valeur et
l'effetd'une recommandation non obligatoire. Le pouvoir de suspendre
ou d'exclure un Etat Membre (sur recommandation du Conseil de
sécurité)que les articles 5 et 6 de la Charte confèrent à l'Assemblée
permettrait évidemment à celui-ci de suspendre un mandataire ou de

l'exclurede l'Organisationmais ce droit ne peut pas êtreétendu envertu
d'une sorte de raisonnement par analogie à l'acte tout différent qui
consiste à révoquerle mandat du mandataire.

96. De tout cela on ne peut tirer qu'une seule conclusion, à savoir

qu'aux termes de la Charte elle-mêmel'Assembléegénérale n'apas com-
pétencepour mettre Jin Li une administration quelconques'exerçant sur
quelque territoire quece soit.

97. On pourrait toutefois soutenir que cela n'épuisepas la question, vu
qu'il serait possible qu'un organisme international tienne des pouvoirs
autres ou plus larges que les pouvoirs normaux d'une autre source ou de
l'extérieurpour une fin particulière - par exemple, aux termes d'un

63 Ce qui illustre fort bien (on pourrait citer beaucoup d'autres exemples) le
fait qu'en raison des constants changementsde composition dus au système de
renouvellement triennal prévuau Statut, la Cour ne se tient pas toujoursropre
jurisprudence.
6+ Les divers accords de tutelle traitent diversement de la question de la cessation
ou de la cessation éventuelle de la tutelle; il en résulteque l'Assembléene possèdeen
aucun cas de pouvoir unilatéral en cette matière. Par conséquent, si un accord de
tutelle ne peut pas prendrefin sans le consentement de l'autorité administrante,
mandat ne puisse pas prendre fin sans le consentement du mandataire?ble qu'un 284 NAMIBIA (s.w. AFRICA) (DISS .P. FITZMAURICE)

exercise them? This contention must now be considered.

(ii) The Assembly can only exercisepowers
conferredupon it or derived aliunde
or ab extra provided it keeps ~vithin
the limits of its constitutionalrole
under the structure of the Charter

98. The question here is whether it is legally possible for a body such
as the Assembly, in the purported exercise of what may conveniently be
called "extra-mural" powers, to act in a manner in which, in the intra-
mural exercise of its normal functions, it would be precluded by its
constitution from doing. To put the matter in its most graphic form,
suppose for instance a group of member States of the United Nations-
in a particular region perhaps-entered into a treaty under which they
conferred on the Assembly, in relation to themselves and forthat region,
exactly those peace-keeping powers which, under the Charter,the Security
Council is empowered to take as regards the member States of the United
Nations collectively. Could it then validly be argued that although it
would be ultra vires for the Assembly so to act under the Charter, if

Charter action were involved, nevertheless it could in this particular
case do so because it had acquired, aliunde,the necessary power vis-à-vis
the particular States members of the regional group concerned, byreason
of the treaty concluded between them investing the Assembly with such
power? It is in fact approximately upon the basis of a theory such as this
one, that those who (to their credit) feel some difficulty in attributing
executive powers to the Assembly, outside those specified in Articles
4, 5, 6 and 17of the Charter, rely in contending that, although under the
Charter the Assembly could not do more than discuss and recommend in
the field of mandates, yet it could go further tnan this if it had derived
from the League of Nations the power to do so.

99. It should be realized that the question asked in the preceding

paragraph is not merely an academic one: it iscloselyrelated to situations
that have actually arisen in the history of the United Nations. There have
been times when the majority of the member States have been dissatisfied
with the functioning of the Security Council, whose action had become
paralyzed owing to the attitude of one or more of the Permanent Mem-
bers. In these circumstances recourse was had to the Assembly, which
adopted resolutions containing recommendations that were not, indeed,
binding but which could be, and were by most of the States concerned,
regarded as authorizing them to adopt courses they might not otherwise
have felt justified in following. Ifch situations were to arise again and
continue persistently, it could be but a step from that to attempts to
invest the Assembly with a measure of executive power by the process

already described, or something analogous to it.
272 NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN (O) P.DISS.FITZMAURICE) 284

traité.S'ilen étaitainsi, pourquoi n'exercerait-ilpas cespouvoirs? Il nous
faut donc examiner maintenant cet argument.

ii) L'Assembléenepeut exercer lespouvoirs qui lui
sont conféréosu qu'elletient d'une autre
source ou del'extérieurque si elle reste
dans les limitese son rôle constitutionnel

tel qu'il résulte destructure de la Charte
98. Ii s'agitici de savoir s'ilestjuridiquement possiàlun organisme
comme l'Assembléegénérale, exerçanp trétendumentce que l'on pourrait
appeler pour la commoditédes pouvoirs ((externes », d'agir d'une façon
que sa constitution lui interdirait dans l'exerciceerne de ses fonctions
normales. Pour poser la question sous sa forme la plus concrète, ima-
ginons qu'un groupe d'Etats Membres des Nations Unies - appartenant

par exemple à une régionparticulière - concluent un traité en vertu
duquel ils conféreraientà l'Assemblée,par rapport à eux-mêmes etpour
leur région, exactementles mêmespouvoirs de maintien de la paix que
ceux que le Conseil de sécuritétient de la Charte à l'égard desEtats
Membres des Nations Unies dans leur ensemble. Pourrait-on alors
valablement soutenir que, sans doute, l'Assemblée outrepasserait
sûrement ces pouvoirs si elle procédaitainsi sur la base dea Charte, les
mesures étantprises en application de la Charte, mais qu'elle pourrait
néanmoinslefaire dans cecasparticulier car elleaurait reçu de l'extérieur
le pouvoir nécessaireà l'égard desEtats Membres dugroupe régionalen
question, en raison du traitéconclu par eux qui aurait confécepouvoir

à l'Assemblée?De fait c'estplus ou moins sur une théoriede ce genre que
ceux qui (disons-leà leur crédit)éprouvent quelquedifficultéà attribuer
à l'Assembléed'autres pouvoirs exécutifsque ceux des articles 4, 5, 6 et
17 de la Charte s'appuient pour soutenir que si, en vertu de la Charte,
l'Assemblée nepeut que discuter et recommander en ce qui concerne les
mandats, elle pourrait pourtant aller au-delà si elle tenait de la Société
des Nations les pouvoirs nécessaires.
99. Il faut se rendre compte que la question posée au paragraphe
précédent n'estpas purement académique. Elle estliéede près à des
situations qui se sont effectivementproduites dans l'histoire desNations

Unies. A certains moments la majoritédes Etats Membres a étémécon-
tente du fonctionnement du Conseil de sécurité,dont l'action était
paralyséepar l'attitude d'un ou de plusieurs membres permanents. Dans
ces circonstances, on a fait appelà l'Assemblée,laquelle a adopté des
résolutionscontenant des recommandations qui n'étaient pas à vrai dire
obligatoires, mais qui pouvaient êtreet ont été considéréesr la plupart
des Etats intéressés commeautorisant l'adoption de mesures qu'ils nese
seraient pas sentis justifiésprendre autrement. Si de telles situations
venaient àsereproduire et àseprolonger indéfiniment,il'n'yaurait qu'un
pas à franchir pour tenter de conférerà l'Assembléeun certain pouvoir
exécutif soitpar le procédé susmentionné soiptar un biais analogue.285 NAMIBIA (s.w. AFRICA()DISS . P.FITZMAURICE)

100. It so happens that the principle of the question under discussion
arose in the VotingProcedurecase, and was dealt with both by the Court
and by three individual judges in a sense adverse to the contention now
being considered. It was Sir Hersch Lauterpacht who gave the most
direct general negative; and though he was speaking with reference to
the question of the voting rule, the principle involved was exactly the
same (I.C.J. Reports 1955,at p. 109):

6'
. ..the. .. Assembly cannot act in that way. It cannol override a
seemingly mandatory provision of the Charter by the device of
acceptinga task conferredby a treaty. It might otherwise bepossible
to alter, throughextraneous treaties,the character ofthe Organization
in an important aspect of its activity"-(my italics).

The passage italicised is preciselyapplicab:e to the situation that would
arise if the Assembly were deemed able to accept, ab extru, functions
of an executive character going beyond its basic Charter role of con-
sideration, discussion and recommendation. Even if it may not be out-
side the scope of the Charter for the Assembly to deal in some form with
mandated territories not placed under trusteeship-e.g., as being, at the
least, non-self-governing territories within the meaning of Article 73-
it can only deal with them by way of discussion and recommendation,

not executive action.

101. Inthe VotingProcedurecase, the Court itself was of the same way
of thinking as Sir Hersch. Having regard to the view expressed in its
earlier (1950)Opinion to the effect that the degree of supervision in the
Assembly should not exceed that of the League Council, and should as
far as possible follow the latter's procedure (see paragraph 65 above),
it became evident that if the Assembly applied its usual majority, or
two-thirds majority, voting rule in the course of its supervision of the
mandate, it would not be conforming to the procedure of the League
Council, which was based on a unanimity rule, including even the vote
of ths:mandatory. Moreover, it was clear that the latter rule (being more
favourable to the mandatory by making decisions adverse to its views

harder to arrive at) involved in consequence a lesser degree of supervision
than the Assembly's voting rule would do. This being so, the question
arose whether the Assembly, in order to remain within the limits of
the powers derived by it from or through the instrument of mandate,
as those powers had been exercisedby the League Council, could proceed
according to a voting rule which was not that provided for by the NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 285

100. Il se trouve que le principe de la question en cause est venu en
discussion à propos de l'affaire de la Procédure de vote applicable aux
questions touchantles rapports et pétitions relat(fs au territoire du Sud-
Ouest africain et qu'il a étérésolupar la Cour et par trois juges à titre
individuel, dans un sens contraire à la thèse considéréeici. C'est sir
Hersch Lauterpacht qui a donné la réponse négativela plus nette et,
bien qu'il sesoit exprimé à propos de la règlede vote, le principe était
exactement le même(C.Z.J. Recueil 1955, p. 109):

(1l'Assemblée ...ne pourrait s'engagerdans cette voie. Elle ne saurait
tourner une disposition apparemment impérative de la Charte en
acceptant la mission quelui confie un traité.S'ilen était autrement,

il serait possible de modifier, au moyen de traités extrinsèques, le
caractère de I'Orgaizisationdans un secteur importantdesonactivité. ))
(Les italiques sont de nous.)
Le passage en italiques s'applique toutà faità la situation qui se présen-

terait sil'onconsidéraitquel'Assembléepeut tenir d'unesourceextérieure
des fonctions de caractère exécutifdépassantles nécessités du rôle fon-
damental que lui réservela Charte et-qui consisteà étudier,discuter et
recommander. Mêmesi l'Assemblée ne s'écarte pas des dispositions de
la Charte quand elle s'occupe d'une façon ou d'une autre de territoires
sous mandat qui n'ont pas étéplacés sous tutelle,par exemple de ter-
ritoires qui peuvent êtreconsidérés en toutcas comme des teriitoires non
autonomes aux termes de l'article 73, elle ne peut toutefois que discuter
et recommander à leur égardet non pas édicter des mesures d'exécution.
101. En l'affaire de la Procédure devote, la Cour elle-mêmea partagé

la manière de penser de sir Hersch Lauterpacht. Vu l'opinion qu'elle
avait expriméedans son avis précédent(1950) selon laquelle le degréde
surveillance exercépar l'Assemblée ne devraitpas dépasser celui qu'exer-
çait le Conseil de la Sociétdes Nations et devrait êtreautant que possible
conforme à la procédure suivie par ce dernier (voir par. 65 ci-dessus),
ilest apparu que sil'Assembléeappliquait sa règlede vote normale - ma-
jorité simple ou majorité des deux tiers - dans l'exercicede sa surveil-
lance du mandat, elle ne se conformerait pas à la procédure du Conseil
de la SdN, qui étaitfondéesur la règlede l'unanimité, y compris le vote

du mandataire lui-même. De plus,il est évidentque cette dernière règle
(pIusfavorable au naandataire puisqu'ellerend plus difficilesdes décisions
qui iraientà l'encontre de sa façon de voir) impliquait en conséquence un
moindre degréde surveillance que ne le permettait la règle de vote de
l'Assemblée. Celaétant, la question s'est poséede savoir si, pour ne pas
outrepasser les pouvoirs qu'elle aurait acquis en vertu de l'instrument du
mandat et pour respecter la façon dont ces pouvoirs avaient étéexercés
par le Conseil de la SdN, l'Assembléepouvait suivre une règlede vote
différentede celle qui est prévuepar la Charte - en d'autres termes, si 286 NAMIBIA (s.w. AFRICA()DISS .P. FITZMAURICE)

Charter-in short could depart from the Charter in this respect 65.The
Court answered this question by a decided negative in the foliowing
terms (I.C.J. Reports 1955, at p. 75) :

"The constitution of an organ usually prescribes the method of
voting by which the organ arrives at its decisions. The voting system
is related to the composition and functions of the organ. It forms
one of the characteristics of the constitution of the organ. Taking
decisions by a two-thirds majority vote or by a simple majority vote
is one of the distinguishing features of the General Assembly, while
the unanimity rule was one of the distinguishing features of the
Council of the League of Nations. These two systems are charac-

teristic of different organs, and one system cannot be substituted for
another without constitutional amendment. To transplant upon the
General Assembly the unanimity rule of the Council of the League
... would amount to a disregard of one of the characteristics of
the . . Assembly."

This viewwas independently concurred in by Judges Basdevant, Klaestad
and Lauterpacht.Judge Basdevant said (at p. 82):
"The majority rule laid down by Article 18of the Charter and the

unanimity rule prescribed by the Covenant of the League of Nations
are something other than rules of procedure: they determine an
essential characteristic of the organs in question and of their garent
international institutions." (For Judge Klaestad's view see para-
graph 104below and paragraph (a) offootnote 66.)

102. The criteria thus enunciated by the Court and by Judge Basdevant
were, be it noted, formulated precisely in the context of the mandates
system. It is therefore legitimate to apply them to the present case; and
if this isone in terms of the last two sentences of the foregoing quotation
from the 1955Opinion of the Court, the result is that there "cannot ...
without constitutional amendment" "be substituted" for a systern which
only allows the Assembly to discuss and recommend, "another" system
which would allow it, in addition, to take executive and peremptory

action,-and that, to deem the Assembly to be invested with such a power
"would amount to a disregard of one of [its] characteristics" within the
system of the Charter.

65 The forrn in ufhich the question arose in the Voting Procedure case was a little
not provided for by the Charter, but whether ituld do so if this would involve a
more stringent supervisory régimehan that of the League's system. But the under-
lying point was the same-i.e.could the Assembly, in the exercise of ab extra func-
tions, act by means ofadifferent voting rule from that provided by the Charter-
could it in any event, consistently with the Charter, apply the League unanimity
rule?l'Assembléepouvait s'écarterde la Charte à cet égard 'j5La Cour a
donné à cette question une réponse fermement négatived ,ans les termes

suivants (C.I.J. Recueil1955, p. 75):
«La constitution d'un organe prévoitgénéralement le systèmd ee
vote par lequel cet organe arrive à ses décisions. Le système de vote

estlié à la composition et aux fonctions de cet organe. Il est l'une
des caractéristiquesdela constitution de l'organe. Prendre des déci-
sions à la majorité desdeux tiers ou à la majoritésimpleestl'un des
traits distinctifs de l'Assemblée générale t,ndis que la règle de
l'unanimité était l'un des traits distinctifs du Conseil de !a Société
des Nations. Ces deux systèmescaractérisentdes organes différents
et, sans un amendement constitutionnel, l'on ne peut substituer un

système à l'autre. Transposer à l'Assemblée généralle a règle de
l'unanimitédu Conseil de la Société desNations ...serait mécon-
naître une des caractéristiquesde l'Assembléegénérale .)

Cette opinion a étéendosséeindépendamment par MM. Basdevant,
Klaestad et Lauterpacht. M. Basdevant a déclaré(p. 82):

«La règlede la majoritédans l'article 18de la Charte et celle de
l'unanimitédans lePacte de la SociétédeN s ations sontautres choses
que des règlesde procédure;elles déterminent un caractèreessentiel
de l'organe considéré et de l'institution internationaleà laquelle il
se rattache.» (En ce qui concerne les vues de M. Klaestad, voir
par. 104 ci-aprèset alinéaa) de la note 66.)

102. Les critères ainsi énoncés Dar la Cour et tsar M. Basdevant
étaient, notons-le, formulésprécisémentdans le cadre du système des
mandats. 11est donc légitimede les appliquer au cas présent;et si on le
fait conformément auxdeux dernièresphrases du passage de l'avisde la

Courde 1955citéplus haut, il en résulteque «sans un amendement cons-
titutionnel, l'on ne peut substituer [à] un système » qui permet seule-
ment à l'Assembléede discuter et de recommander un ((autre)) sys-
tème qui lui permettrait en outre de prendre des mesures exécutiveset
oblïgatoires, et que considérerque l'Assembléeest dotée d'untel pouvoir
((seraitméconnaîtreune [de ses]caractéristiques » dans le systèmede la
Charte;

* * *
--
65 Laforme sous laquelle la question s'est poséeen l'affaProcédurede vote
était un peu différente, car il s'agissait de savoir non pas si l'Assembléepeut agir
d'une façon qui n'est pas prévue par la Charteis si ellpourraitagir ainsi au
cas où il en résulterait un régimede surveillance plus strict que celui dela Société des
Nations. Pourtant le point essentiel était le même: dans l'exercice de fonctions
qu'elle tient de l'extérieur,embléepeut-elle agir selon uautrerègle de vote
que celle que prévoitla Charteeut-elle, de toute manière, en respectant la Charte,
appliquer la règlede l'unanimitéqui étaitcelle de la Société desNations? 103.It must be concluded that even if the League Council's super-
visory powers had in principle passed to the Assembly, and had included
the right to revoke an existing mandate, such a right could not, con-
stitutionally, be exercised by the Assembly, since this would be incon-

sistent with the basic philosophy of its role within the general structure
ofthe United Nations.

(iii) Elements conjîrmingthe
aboveconclusions

104.Dilemma of Judges Klaestad and Lauterpachtin the VotingProce-
dure case-The problem in the Voting Procedure case was that, as has
already been mentioned, the fact that decisions could be more easily
arrived at under the Assembly's voting rule than under the League's
rule of unanimity including the vote of the mandatory, involved for the
latter a "greater degree of supervision" than the League's. Yet, as the
Court found (see anie, paragraph 101), the Assembly could not, con-
formably with the Charter, depart from its own voting rule. The Court

solved this problem by holding that although, in the exercise of its super-
visory function, the Assembly must not depart from the substance of the
mandate, the procedure by which it carried out that function must be
the procedure provided for by the Charter; and that the Court's previous
(1950) pronouncement, indicating that the degree of supervision must
not be greater than the League's, wasintended to apply only to matters
of substance, not procedure. Given that the Assembly's voting rule did
however, in principle, involve a greater degree of supervision than the
League rule, by making it possible for decisions to be arrived at without
the concurrence of the mandatory, this pronouncement of the Court in

the Voting Procedure case involved a distinct element of inconsistency.
That solution accordinglydid not satisfyJudgesKlaestad and Lauterpacht
who arrived at a different and more logical one, avoiding contradictions
and, at the same time, operating to confirm in a very striking manner the
views expressed above as to the limits imposed by the Charter on the
powers of the Assembly. They pointed out that the decisions reached by
that organ in the course of supervising the mandate, not being in the
nature of domestic, internal or procedural decisions (seehead (e) in note
62above) couldonly operateas recommendations,and could not therefore

in any case be binding on the mandatory unless it had at least voted in
favour of them 66.Hence the Assembly'stwo-thirds rule, though theore-
tically more burdensome for the mandatory than the League's rule of
unanimity including the mandatory's vote, would not in practice be so,

66 (a) Distinguishing between the "domestic" or "internal",and the non-do-
mestic categories of Assembly decisions, Judge Klaestad (Z.C.J. Repor1955, at
p.88)stated that in his opinion "recommendation.. .concerning reports and peti-
tions relating to..South West Africa belong... to the last mentioned caiegory".
He continued: NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 287
103. Il faut conclure que, mêmesi les pouvoirs de surveillance du
Conseil de la SdN étaient dévolusen principe à l'Assemblée,et com-

prenaient le droit de révoquer un mandat existant, ce droit ne pourrait
pas être exercéconstitutionnellement par l'Assemblée,car cela serait in-
compatible avec la conception fondamentale du rôle qui lui est réservé
dans le cadre général des Nations Unies.

iii) Facteurs confirmant
les conclusions précédentes

104. Dilemme de MM. Klaestad et Lauterpacht en 1'aflaii.ede la Pro-
cédure devote. - Ainsi que nous l'avons déjà mentionné,le problème
qui se posait dans l'affaire de laProcédure de vote tenaità ceci: comme il

est plus facile d'arriverà des décisions selon la règlede vote de 1'Assem-
bléegénéralequ'en suivant la procédure de la Société desNations où
s'appliquait la r8gle de l'unanimité, y compris le vote du mandataire,
celui-ci serait soumisde la part de l'Assemblée à un ((degréde surveillance
dépassant )Icelui qu'exerçait la SdN. Pourtant, selon la conclusion de la
Cour (voir plus haut par. 101), l'Assemblée nepeut pas déroger à sa
propre règlede vote sans enfreindre la Charte. La Cour a résoluce pro-

blèmeen considérant que si, dans l'exercicede sa fonction de surveillance,
l'Assembléene doit pas s'écarterdu mandat quant au fond, la procédure
par laquelle e!leremplitcettefonction doit êtrecelle que la Charte prévoit,
et en precisarit que le prononcé antérieur de la Cour (1950) selon lequel
le degréde surveillance ne doit pas êtreplus considérable qu'à l'époque
de la SdN concernait uniquement les questions de fond et non la pro-
cédure. Etant donné cependant que la règle de vote de l'Assembléeen-

traîne en principe un degréde surveillance supérieur à celui qu'exerçait
la Sociétédes Nations, puisqu'elle permettrait d'arriver à des décisions
sans l'accord du mandataire, cette conclusion de la Cour en l'affaire de
la Procédure de vote contient un net élémentde contradiction. C'est
pourquoi cette solution n'a pas satisfait MM. Klaestad et Lauterpacht
qui ont abouti à une conclusion différente et plus logique, évitant les
contradictions et qui vient confirmer de façon frappante l'opinion expri-
méeplus haut au sujet des limites que la Charte impose aux pouvoirs de

l'Assemblée.Ils ont fait observe1 que les décisions prisespar cet organe
en matière de surveillance du Mandat, n'ayant pas un caractèreinterne ou
procédural (voir la note 62ci-dessus,point e)), pouvaient seulement avoir
la valeur de recommandationset ne pouvaient donc en aucun cas avoir
force obligatoire à l'égarddu mandataire, sauf (c'est la condition mini-
mum) si celui-ci avait voté pour ces décisions 66.En conséquence la

66 a) Faisant une distinction entre les décisions de l'Assemblée de caractère
(interne1)et les autres, M. Kleastad (C.I.J. Recuei1l955, p. 88), a déclare qu'à
son aviscles recommandations ..touchant les rapports et les pétitions rela...s au
Sud-Ouest africain appartiennenà cette dernière catégor1)Il a ajouté:

275288 NAMIBIA (s.w. AFRICA) (DISS. OP. FITZMAURICE)

since in neither case could the mandatory be bound without its own

concurrence. In this way the balance between the weight of the League
Council's supervision and that of the Assembly would be maintained or
restored.

"They arenot legally binding on the Union. ..in its capacity as Mandatory

Power. Only if the Union Government by a concurrent vote hasgiven its consent
to the recommendation can that Government become legally bound to comply
with it. In that respect the legal situation is thee as it was under the super-
vision of the League. Only a concurrent vote can create a binding legal obligation
for the Unionof South AfricaM-(my italics).

(6) Judge Lauterpacht illustraied his view by reference to the trusteeship posi-
tion, which he regarded as relevant to that of mandates. The passage in question
is so striking as to be worth quoting in extenso,-and it is of course applicable a
fortiori to the case of mandates (loc. cit., at p. 116):

"This, in principle, is also the position with respect to the recomnendations
of the General Assembly in relation to the administration of trust territories.
The Trusteeship Agreements do not provide for a legal obligation of the Admi-
nistering Authority to comply with the decisions of the organs of the U~ited
Nations in the matter of trusteeship. Thus rhere is no legal obligation, on the
part of the Administering Authority to give effeci to a recommendation of the
General Assembly to adopt or depart from a particular course of legislation or
any parficular administrative measure. The legal obligation resting upon the
AdministeringAuthority is to administer the Trust Territory in accordance with
the principles of the Charter and the provisions of the Tr-usteeshi Agreement,
but not necessarily in accordance with any specific recommendation of the General
Assembly or of the Trusteeship Council. This is so as a matter both of existing law
and of sound principles of government. The Administering Authority, not the
General Assembly, bears the direct responsibility for the welfare of the population
of the Trust Territory. There is no sufficient guarantee of the timeliness and
practicability of a particular recommendation made by a body acting occasion-
ally amidst a pressure of business, at times deprived of expert advice and infor-

mation, and not always able to foresee the consequences of a particular measure
in relation to the totality of legislation and administration of the trust territory.
Recommendations in the sphere of trusteeship have been made by the General
Assembly frequently and as a matter of course. To suggest that any such parti-
cular recommendation is binding in the sense that there is a legal obligation to put
it into effect is to run counter not only to the paramount rule that the General
Assembly has no legal power to legislate or bind ifs Members by way of recom-
mendations, but, for reasons stated, also to cogent considerations of good
government and administration"-(my italics).

"In fact States administering Trust Territories have often asserted their
right not to accept recommendations of the General Assembly or of the Trustee-
ship Council as approved by the General Assembly. That right has never been
seriouslychallenged. There are numerous examples of express refusal on the part
of the Administering Authority to comply with a recommendation." [Follow-règlede la majoritédes deux tiers qui est celle de l'Assemblée,quoique

théoriquement plusrigoureuse pour le mandataire que celle de la Société
des Nations qui exigeait l'unanimité, y compris la voix du mandataire,
ne serait pas plus lourde en pratique, car le mandataire ne pourrait être

lié ni dans l'un ni dans l'autre cas sans son propre consentement. De
ia sorte, l'équilibreserait maintenu ou rétablientre le degr6 de surveil-
lance exercépar le Conseil de la SdN et celui qu'exercerait l'Assemblée
générale.

«Elles ne sont pas juridiquement obligatoires pour l'Union ...en tant que

Puissance mandataire. Le Gouvernement de1"Unionne peut êtrejuridiquement
tenu de se conformer à une recommandation que s'il l'a acceptéepar un vote
positif. A cet égard la situationjuridique est la mêmeque lorsque la surveiliance
étaitexercéepar la Sociétédes Nations. Seul un votepositifpeut donner naissance
à une obligation juridique liant l'Union sud-africaine» (Les italiques sont de
nous.)
b) M. Lauterpacht, pour illustrer sa manière de voir, s'est référé à la situation
existant en matière de tutelle, qu'il considère comme pertinente par rapport î celle
des mandats. Le passage en question mérite d'êtrecitéen entier et s'applique évi-
demment à fortiori au cas des mandats (loc. cit., p. 116):

1Telle est également,en principe, la position concernant les recommandations
de l'Assembléegénérale se ra~~ortant à I'administration des territoires sous
tutelle. Lesaccords de tutelleAne prévoient pas pour I'autorité administrante
l'obligation juridique de se conformer aux décisionsprises par les organes des
Nations Unies en matière de tutelle.Il n'y a doncpas d'obligation juridique de la
part de I'autorité administrante d'adopter ou d'abroger une mesure législativeou
administrative particulière, dans le but de donner effàtune recommandation de
l'Assemblée générale.L'obligation juridique incombant à l'autorité adminis-
trante est d'administrer le territoire sous tutelle conformément aux principes de
la Charte et aux dispositions de l'accord de tutelle, mais pas nécessairement
suivant telle recommandation particulière de l'Assembléegénéraleou du Conseil
de tutelle. 11en est ainsi à la fois en droit positif et en bon gouvernement.
C'est I'autorité administrante et non l'Assemblée généralequi est directement
responsable du bien-êtrede la population du territoire sous tutelle.n'y a pas de

garanties suffisantes d'opportunité et d'applicabilité dans une recommandation
particulière émanant d'un corps politique qui agit p.arfois sous la pression de
son travail, qui est parfois privé d'avis et d'informations spécialisés, etqui ne
peut toutefois prkvoir les conséquences d'une mesure donnée dans le cadre de
l'ensemble de la législation et de I'administration du territoire sous tutelle.
L'Assemblée générale a fait desrecommandations dans le domaine de la tutelle,
à maintes reprises, et comme une chose allant de soi. Prétendrequ'une recom-
mandation particulière est obligatoire, en ce sens qu'iy a obligation légale de
lui donner eff'et,est contraire non seulemenàla règlefondamentale que 1'Assem-
bléegénérale n'apas le pouvoir législatifet ne peut lier ses membres par des re-
commandations, mais encore, pour les raisons déjà indiquées,contraire à des
considérations inportantes de bon gouvernement et de bonne administration. 11
(Les italiques sont de nous.)
[[En fait, les Etats qui administrent les territoires sous tutelle ont souvent
affirmé leur droit de ne pas accepter les recommandations de l'Assemblée
généraleou du Conseil de tutelle approuvées par l'Assembléegénérale.Ce droit
n'a jamais étésérieusement contesté. Il y a de nombreux exemples de refus
catégorique de la part de I'autoritéadministrante de se conformer à une recom-

276 105.This conclusion could not be other than correct:-for itfhe As-
sembly's decisions bound the mandatory without the iatter's consent,
whereas the League'sdid not, there would be imposed a degree of super-
vision not only far heavier, but dzrering totally in kind from that of the

League. To put the matter in another way, if the substitution of the
Assembly for the League Council could not be allowed to operate so as
to increase the Mandatory's obligations, it correspondingly could not
be allowed to operate to increase the supervisory organ's powers, still
less to give it a power that the former supervisory organ never had, or
could never have exercised exceptin a certain way and by a certain kind
of vote. It follows that such a power could not be exercised by the
Assembly either, especially since the latter equally cannot bind the

mandatory and cannot go beyond recommendations without exceeding
its constitutional Charter powers. In consequence, Resolution 2145,
even if it were otherwise valid, could not have any higher status or
effect than, or operate except as, a recommendationthat South Africa's
administration should terminate, and not as an actual termination of it.
I have to point out in concliision that the whole of this rnost important
aspect of the rnatter, resulting from the Court's own jurisprudence as it
was enunciated in the 1955 VotingProcedure case, is now completely

ignored, and not even mentioned, in the present Opinion of the Court;-
for the sufficient reason no doubt that there is no satisfactory answer
that can be given to it.

106.The answergiven by the Court in 1950 to the question lettered (c)
put to it in thethen advisoryproceedings-This question asked where the
competence to modify the international status of SW. Africa lay, upon
the assumption that it did not lie with South Africa acting unilaterally.

TheCourt replied (I.C.J. Reports 1950,at p. 144) :
".. .that the Union of South Africa acting alone has not the
competence to modify the international status of the territory of

South West Africa, and that the competence to determine and

ing upon this (loc. cit., pp. 116-117)Judge Lauterpacht cited, with references, a
long list of specificinstances.]
(c) With regard to mandates equally, in a passage of quite particular significance
in the circumstances of the present case, Hersch Lauterpacht said (loc. cit., at
p. 121):
"This absence of a purely legal machinery and the reliance upon the moral
fact the essential feature of the supervision of the Mandates system. Public
opinion-and the resulting attitude of the Mandatory Powers-werinfluenced
not so much by the formal resolutions of the Council and Assembly [of the
League] as by the reports of the Mandates Commission which was thetrue organ
of supervision... yet no legal sanction was attached to non-compliance with or
disregard of the recornmendations,thepes and the regrets of the Conrmission"-
(my italics). 105. Cette conclusion est nécessairement juste, car si les décisionsde
l'Assemblée liaient lemandataire sans son consentement, alors que celles

de la SdN n'avaient pas cet effet, on lui imposerait une surveillance non
seulement plus stricte que celle qu'exerçait la SdN mais encore de nature
totalement dzfférente.En d'autres termes, s'il était hors de question que
le remplacement du Conseil de la SdN par l'Assembléegénéralese tra-
duise par une aggravation des obligations du mandataire, il étaitégale-

ment hors de question qu'il ait eu pour effet d'élargirles pouvoirs de
l'organe de surveillance, et, plus encore, de lui conférerun pouvoir que
l'ancien organe de surveillance n'avait jamais possédéou qu'il n'aurait
jamais pu exercer sauf d'une certaine façon et conformément àun certain
mode de scrutin. II s'ensuit qu'un tel pouvoir ne pouvait pas davantage
êtreexercépar l'Assemblée,notamment parce que celle-ci non plus ne

peut lier le mandataire et ne peut aller au-delà de simples recomman-
dations sans outrepasser les pouvoirs constitutionnels que lui attribue la
Charte. Par suite, mêmesi la résolution2145étaitvalide par ailleurs, elle
ne pourrait avoir d'autre effet ni d'autre portée que celle d'une recom-
mandation tendant à mettre fin à l'administration du mandataire, et n'y

mettrait pas fin effectivement. Je dois souligner en conclusion que cet
aspect extrêmementimportant de la question, résultant de la jurispru-
dence de la Cour elle-même, telle qu'elles'estexpriméeen 1955en l'affaire
de la Procédurede vote, est à présent totalement laissédecôtédans l'avis
de la Cour, qui n'en fait mêmepas mention - sans aucun doute
pour la raison suffisante qu'il n'y a à cela aucune réponse satisfaisante.

106. La réponsedonnéepar la Cour en 1950 à la question c) dans la
procédureconsuItativede l'époque. - La question poséetendait à déter-
miner qui avait compétence pour modifier le statut international du Sud-
Ouest africain, étant admis que l'Afrique du Sud ne pouvait agir uni-
latéralement. La Cour a répondu (C.I.J. Recueil 1950,p. 144)

((que l'Union sud-africaine agissant seule n'estpas compétentepour
modifier le statut international du territoire du Sud-Ouest africain,
et que la compétencepour déterminer et modifier ce statut inter-

mandation. ))[M. Lauterpacht cite ensuite (loc. cit., p. 17),avec références
a l'appui, une longue liste de cas d'espèce.]
c) De même,à propos des mandats, Lauterpacht affirme dans un passage qui
est des plus significatifs eu égard aux circonstances de l'affaire actuellec. cit.,
p. 121):
(Ce défaut d'appareil purement juridique, ainsi que le fait de s'en remettre à
l'autorité morale des conclusions et rapports de la Commission des mandats,
constituaient en fait les caractéristiques essentielles dela surveillance prévue par
le régime des mandats. L'opinion publique - et l'attitude adoptée en consé-
quence par les Puissances mandataires - ont étéinfluencées moins par les
résolutions formelles du Conseil et de'Assemblée[de la SdN] que par les rap-
ports de la Commission des mandats, véritable organe de surveillance ...Et
cependant la non-application ou la méconnaissance des recommandations, des
(Les italiques sont de nous.)mmission n'appelaient aucune sanction juridique)] NAMIBIA (s.W. AFRICA) (DISS. OP. FITZMAURICE)
290
modify the international status of the Territory sests with the Uniorz
of South Africa acting withthe consent of the UnitedNationsw-(my

italics).
It is clear that evenif theMandate itselfpersisted under another authority
the change of authority (particularly if the new one was the United

Nations as such) would unquestionably involve a modification of the
international status of the territory, not only by substituting a new
administration for the existing one, but by substituting one which could
not itself be subjected to any supervision at all, except its own, and which
would have to render reports to itself (and so-quis custodiet ipsos
custodes?) 67It therefore follows from what the Court said about modifv-
ing the status of the territory, that the competence to effectany substitu-

tion of this kind (or any other change of mandatory) would rest "with
the Union of South Africa acting with the consent ofthe United Nations",
-which view invests South Africa with the initiative, and negatives the
existence of any independent right of termination resident in the United
Nations acting alone. Even allowing for the fact that the issue at that
time was whether the mandatory hadany unilateral power of modification
it is impossible to reconcile the phraseology employed with the idea that

the Court in 1950could have thought the United Nations, or any organ
of ie,acting alone,had such a power. As my colleague Judge Gros points
out, both aspects of the matter had been raised in the course of the
proceedings.

(iv) Conclusionas to thepowers
of theAsserrïbly

107.The foregoing considerations lead to the conclusion that even if
the Assembly inherited a supervisory role from the League Council, it
could exerciseit only within the limits of itscompetence under the Charter
namely by way of discussion and recommendation. Such a situation has
no room for, and is entirely incompatible with any power to revoke a

mandate. In consequence, Assembly Resolution 2145 could have effect
ocly as a recommendation.

67 Even if the Assembly had "inherited" the supervisory function from the League,
this function manifestly cannot include administration,-fthe essence of super-
vision is its exercise by aarate body, not being the administering authority. The
idea of mandates administered directby the League itself without a mandatory as
intermediary, which formed part of President Wilson's original proposals at Ver-
sailles, was not adopted, and formed no part of theague mandates system which
itis claimed that the United Nations inherited. national appartient à l'Unionsud-africaine agissant avecle consente-
ment des Nations Unies »(Les italiques sont de nous).

II est évident que,mêmesi le Mandat lui-mêmeavait subsistésous une
autre autorité, le changement d'autorité (notamment si l'autorité nou-
velle étaitI'Organisation des Nations Unies en tant que telle) aurait in-
dubitablement impliqué une modification du statut international du
territoire, non seulement du fait qu'une nouvelle administration aurait
remplacél'administration existante, mais encore du fait que la nouvelle
administration n'aurait pu êtreassujettie elle-même à une surveillance
quelconque, si ce n'étaitla sienne propre, et qu'elle aurait dû s'adresser

des rapports à elle-même (etquis custodiet ipsos custodes?) 67.Il résulte
donc de ce que la Cour a dit à propos de la modification du statut du
territoire que la compétencepour procéder à toute substitution de ce
genre(ou àtout autre changementdemandataire) appartiendrait «à l'Union
sud-africaineagissant avec leconsentement desNations Unies »-opinion
qui confèrel'initiativeà l'Afrique du Sud et exclut que l'Organisation des
Nations Unies agissant seule possède un droit propre de mettre fin au

mandat. Mêmesi l'on tient compte du fait que la question, à l''époque,
étaitde savoir si le mandatairepossédaitun pouvoir unilatéral de modi-
fication du statut du territoire, il est impossible de concilier les termes
utilisés avec l'idéeque la Cour aurait pu penser en 1950 que l'Organi-
sation des Nations Unies agissant seule, ou l'un quelconque de ses or-
ganes agissant seul, aurait eu ce pouvoir. Comme mon collègue hl.Gros
le rappelle, les deuxaspects de la question avaient étédébattusaucours de

la procédure.

iil) ConclusionquaMtaux pouvoirs
de l'Assemblée
107. Les considérations qui précèdent amènen t conclure que même
si l'Assembléea succédéau Conseil de la Société desNations dans son
rôle de surveillance, elle nepeut l'exercerque dans les limites de sa com-

pétenceen vertu de la Charte, c'est-à-dire sous f~rme de discussions ou
de recommandations. Cette situation ne laisse pas place à un pouvoir de
révocation du mandat, car elle est totalement incompatible avec ur. tel
pouvoir. Il s'ensuitque la résolution2145de l'Assemblée nepouvait avoir
qu'un effet de recommandation.

67 Même si l'Assembléavait «héritnla fonction de surveillance de la SdN, cette
fonction ne peut manifestement inclure l'administration, car il est de la nature même
de la surveillance qu'elle soit exercéepar un organismedcetl'autorité chargée
de l'administration. La notion de mandats administrés directement par lae-
mêmesans l'intermédiaire d'un mandataire, qui faisait partie des propositions
initiales présentéesersailles par le président Wilson, n'a pas été retenue et n'est
pas un élémentdu système des mandats de laSdN, que, nous dit-on, les Nations
Unies auraient hérité. 2. Cornpetenceundpowers of the Security Council
relative to mandates

(i) Consequential characterof the
Security Council'sresolutions
in thepresent case
108.It is strictly superfluous to consider what (if any) were the
Security Council's powers in relation to mandates, because it is quite

clear that the Council never took any independent action to terminate
South Africa'smandate. Al1its resolutions wereconsequential,proceeding
on the basis of a supposed termination already effected or declared by
the Assembly. Without the Assembly's act, the acts of the Security
Council, which were largely in the nature of a sort of attempted enforce-
ment of what the Assembly had declared, would have lacked al1raison
d'être;-while on the other hand, if the Assembly's resolution 2145
lacked in se validity and legal effect, no amount of "confirmation" by
the SecurityCouncilcould validate itorlenditsucheffect,orindependently
bring aboutthe revocation of a mandate.

(ii) Ona mandatesbasis,thepowers
of theSecurity Councilareno

greater thantheAssembly's
109.The words "relative to mandates" have been inserted of set
purpose in the title to this subsection,-because it is necessary to dis-
tinguish clearly between what the Security Council can doon a mandates
basis and what it might be able to do on the only other possible basis on
which it could act, namely a peace-keeping basis. On a mandates basis
the Security CounciI has no greater powers than the Assembly,-for
(seethe 1950Opinion of the Court at p. 137) it was the United Nations

as a whole which inherited-or did not inherit-the role of the League
of Nations in respect of mandates, together with (if it did) such powers
as were comprised in that role. Consequently, as regards any power of
revocation, the Security Council stands on exactly the same footingasthe
Assembly in respect of such questions as whether the United Nations
has any supervisory function at al1 and, if so, whether it includes any
power of revocation ;-subject however to this one qualification, namely
that in 1950 the Court very definitely (loc. cit.) indicated the Assembly
as the appropriateorgan to exercisethe supervisory function it found the
United Nations to be invested with. It must therefore be questioned

whether the Security Council has any specific role whatever in respect
of mandates as such, similar to that which it has in respect of strategic
68 Speaking of the final League winding-up resolution of 18 April 1946(see para-
graphs 41 and 42 above) the Court said "This resolution pre-supposes that the
supervisory functions exercised by the League would beken over by the United
Nations"-(my italics). 2. Compétenceet pouvoirs du Conseil de sécurité
en ce qui concerneles mandats

i) Caractère accessoire
des résoiutionsdu Conseilde sécurité

en la présente espèce
108. 11est proprement vain d'examiner quels seraient (le cas échéant)
les pouvoirs du Conseil de sécuritéau regard des mandats, puisque de
toute évidence le Conseiln'a jamais agi isolémentpour mettre fin au
Mandat de l'Afrique du Sud. Toutes ses résolutionsont étéadoptéespar
voie de conséquence, compte tenu de ce que l'Assembléeavait déjà

prétendu mettre fin au Mandat ou le déclarer((terminé ». Sans l'action
de l'Assemblée,les actes du Conseil de sécurité,qui s'efforçaient dans
une large mesure de mettre en Œuvre lesdéclarations de l'Assemblée,
n'auraient eu aucune raison d'être - et si la résolution2145de 1'Assem-
bléeétaitpar elle-mêmedépourvue devaliditéet d'effetjuridique, aucune
((confirmation » du Conseil de sécurité,si énergiquefût-elle, ne pouvait
ni la valider ni lui conférer cet effet, ni provoquer indépendamment la

révocationd'un mandat.
ii) Pour cequi est des mandats,

les pouvoirsdu Conseilne sont pas plus grands
que ceux de l'Assemblée
109. Les mots «en ce qui concerne les mandats » ont étéinsérésde
propos délibéré dans le titre de cette sous-section 2 parce qu'une nette
distinction s'imposeentre ce que le Conseil de sécurité peut faireà propos
des mandats et ce qu'il pourrait faire au seul autre titre auquel il soit à

mêmed'agir, celui du maintien de la paix. S'agissant desmandats, le
Conseil de sécuritén'a pas de pouvoirs plus larges que l'Assembléecar
(voir l'avisde 1950de la Cour, p. 137 68)ce sont les Nations Unies dans
leur ensemble qui ont - ou n'ont pas - héritéle rôle de la SdN relative-
ment aux mandats avec (s'ily a eu héritage)les pouvoirs qu'il comporte.
Ainsi, pour ce qui concerne un éventuelpouvoir de révocation,le Conseil
de sécurité est exactement dansla mêmesituation que l'Assembléequand
il s'agit par exemple de savoir si les Nations Unies ont une fonction de

surveillance quelconque et si, ayant cette fonction, le pouvoir de révo-
cation en fait partie; sous cette réserve d'ailleursqu'en 1950la Cour a
très expressément désigné l'Assemblée (loc. cit.) comme l'organe ap-
proprié pour exercer la fonction de surveillance dont elle a estiméque
les Nations Unies étaientchargées.11est donc douteux que le Conseil de
sécuritéait relativement aux mandats un rôle spécifiquequelconque,
analogue à celui qu'il possèdedans le cas des territoires stratégiques sous

A propos de la résolutiondu 18 avril 1946 quia dissout la Sociétédes Nations
(voir par. 41 et 42 ci-dessus), la Cour s'est expriméeen ces1Cette résolution
présuppose queles fonctions de surveillance exercéespar la Société des Nations
seraient reprisespar les Nations Un>(Les italiques sont de nous.) 292 NAMIBIA (s.w. AFRICA()DISS .P. FITZMAURICE)

trusteeships. If this is so, it would be solely for peace-keeping purposes
that the Security Council would be competent to take action in respect
of a mandate.

(iii) WiderpowersintheJieldof
mandates exercisable onlo yn
apeace-keepingbasis

110. As regards the alternative basis of Security Council intervention,
clearly that organ cannot be precluded from exercising its normalpeace-
keeping functions merely because the threat to the peace, if there isone,
has arisen in a mandates context,-provided the intervention has a
genuinely peace-keepingaim and is not a disguised exercisein mandates
supervision. What the Security Council cannot properly do is, in the
guiseof peace-keeping,to exercisefunctions inrespect ofmandates, where
those functions do not properly belong to it either as a self-contained
organ or as part of the United Nations as a whole. It cannot, in the guise
of peace-keeping revoke a mandate any more than it can, in the guise of
peace-keeping order transfers or cessionsofterritory.

111. However, in my opinion, the various Security Council resolutions
involved did not, on their language, purport to be in the exercise of the
peace-keepingfunction.There isin fact somethinglikea careful avoidance
of phraseology that would be too unambiguous in this respect.That being
so, their effectwas as indicated in paragraphs 108-109above. They were
not binding on the Mandatory or on other member States of the United
Nations. Like those of the Assembly they could only have a recommen-
datory effectin the present context.

(iv) Proper scope ofthe Security Council's
peace-keeping powers undertheCharter

112.This matter, sofar astheactual terms oftheCharterare concerned
is governed byparagraphs 1and 2 of Article 24 which read as follows :

"1. In order to ensure prompt and effectiveaction by the United
Nations, its Members confer on the Security Council primary

responsibilityfor the maintenance of international peace and security
and agree that in carrying out its duties under this responsibility
the SecurityCouncilacts on their behalf.
2. In discharging these duties the Security Council shall act in
accordance with the purposes and principles of the United Nations.
The specijîc powers granted to the Security Councilfor the discharge
of these duties are laiddownin Chapters VI, VII, VIII and XIIw-
(my italics). tutelle. Dans ces conditions, le Conseil de sécurité neserait compétent
pour entreprendre une actionintéressantun territoire sous mandat qu'aux
seulesfins du maintien de la paix.

iii) En ce qui concerneles mandats,despouvoirs
plus largesnepourraientêtre exercés
qu'en vuedu maintiende la paix

110. Quant à l'autre fondementpossible d'une intervention du Conseil
de sécuritéi,l est clair que cet organe ne peut pas êtreempêché d'exercer
ses fonctions normales en matière de maintien de la paix simplement
parce que la menace contre la paix, à supposer qu'elle existe, seraiten
rapport avec ces mandats - à conditiontoutefois que l'intervention ait

véritablementpour objet le maintien de la paix et ne vise pas à exercer
sur les mandats une surveillance déguisée. Ce que le Conseil de sécurité
n'a pas le droit de faire, souscouleur de maintenir la paix, c'estd'exercer
à propos de mandats des fonctions qui ne sauraient lui appartenir, ni en
tant qu'organe ayant un rôle qui lui est propre ni en tant qu'élément
faisant partie des Nations Unies. Il ne peut pas plus révoquer unmandat
sous prétextede maintien de la paix qu'il nepeut, sous ce couvert, or-
donner des transferts ou des cessionsde territoires.
111. Toutefois, d'après moi, les diverses résolutions pertinentes du
Conseil de sécurité, à en juger d'aprèsleur lettre même,ne prétendaient
pas se rattacher à la fonction de maintien de la paix. On y trouve en fait

un souci d'éviter soigneusement unerédaction quidissiperait par trop
les ambiguïtéssur ce point. Cela étant,ces résolutionsont l'effetindiqué
aux paragraphes 108et 109ci-dessus.Ellesne lient ni lemandataire ni les
autres Etats Membres des Nations Unies. Comme les résolutions de
l'Assemblée, elles nepouvaient avoir, dans le présent contexte,que la
valeur de recommandations.

iv) Etendueréelledespouvoirs du Conseilde sécurité relatifs
au maintiende lapaix en vertu de laCharte

112. Cette question est régie,du moins en ce qui concerne les termes
exprès de la Charte, par les paragraphes 1 et 2 de l'article 24, libellés
comme suit :
(1. Afin d'assurer l'actionrapide et efficacede l'organisation, ses

Membres confèrentau Conseilde sécurité la responsabilitéprincipale
du maintien de la paix et de la sécuritéinternationales et recon-
naissent qu'ens'acquittant desdevoirsque lui impose cette responsa-
bilité,le Conseil de sécurité agitn leur nom.
2. Dans l'accomplissement de ces devoirs, le Conseil de sécurité
agit conformément aux buts et principes des Nations Unies. Les
pouvoirs spécifiquea sccordésau Conseil desécurité pour luipermettre
d'accomplir lesdits devoirssont déjînisaux chapitres VI, VII, VIIIet
XII. .»(Les italiques sont de nous.)I am unable to agree with the extremely wide interpretation which the
Opinion of the Court places on this provision. No doubt it does not
limit theoccasionson which the Security Council can act in the preserva-
tion of peace and security, provided the threat said to be involved is not
a mere figment or pretext. What it does do is to limit the type of action
the Council can take in the discharge of itspeace-keepingresponsibilities,
-for the second paragraph of Article 24 states in terms that the specijîc
powers granted to the Security Council for these purposes are laid down
in the indicated Chapters (VI, VII, VI11and XII). According to normal

canons of interpretation this means that so far as peace-keeping is
concerned, they are not to be found anywhere else, and are exercisable
only as those Chapters allow. It is therefore to them that recourse must
be had in order to ascertain what the specijîc peace-keeping powers of
the Security Council are, including the power to bind. If this is done, it
willbe found that only whenthe Council is acting under Chapter VII, or
possiblyin certain casesunder Chapter VIII, willitsresolutions be binding
on member States. In other cases their effectwould be recommendatory
or hortatory only. (Peace-keeping action under Chapter XII-strategic
trusteeships-does not really seem to me to be a separate case, since
it is difficult to see how it could fail to iake the form of action under
Chapters VI or VI1asthe casemight be.)

113.These limitations apply equally to the effect of Article 25 of the
Charter, by reason of the proviso "in accordance with the present
Charter". If, under the relevant chapter or article of the Charter, the
decision is not binding, Article 25cannot make it so. If the effect ofthat
Article were automatically to make al1decisions of the Security Council
binding, then the words "in accordance with the present Charter"
would be quite superfluous. They would add nothing to the preceding
and only other phrase in the Article, namely "The Members of the
United Nations agree to accept and carry out the decisions of the
Security Council", which they are clearly intended to qualify. They
effectively do so only if the decisions referred to are those which are
duly binding "in accordance with the present Charter". Otherwise the
language used in such parts of the Charter as Chapter VI for instance,
indicative of recommendatory functions only, would be in direct contra-
diction with Article25-or'Artic1e 25withthem.
114.Since,in consequence, the question whether any given resolution

of the Security Council is binding or merely recommendatory in effect,
must be a matter for objective determination in each individual case,
itfollows that the Council cannot, merely by invoking Article 25 (as it
does for instance in its Resolution 269 of 12 August 1969) impart NAMIBIE (S.-O. AFRICAIN ()P.DISSF . ITZMAURICE) 293

Je ne puis pas me rallier à l'interprétation extrêmemenltarge que l'avis
de la Cour donne à cette disposition. Sans doute, elle ne limite pas les
casoù le Conseil de sécurité peut agir pour assurer le maintien de la paix
et de la sécurité,étant entendu que la menace invoquée nedoit êtreni

une simple fiction ni un prétexte.Mais cette disposition a pour effet de
circonscrire le genre de mesures que le Conseil peut prendre pour s'ac-
quitter des responsabilités qui lui incombent en vue du maintien de la
paix - en effet, le paragraphe 2 de l'article 24 dit expressémentque les
pouvoirs spécifiquesconférés à cette fin au Conseil de sécuritésont
définisaux chapitres indiqués (VI, VII, VI11et XII). Selon des règles
normales d'interprétation,cela signifie qu'en cequi concerne le maintien
de lapaix ces pouvoirs ne sont spécifién sulle part ailleurs et ne peuvent

s'exercer que conformément aux dispositions de ces chapitres. C'est
donc à celles-ciqu'il faut avoir recours si l'on veut déterminer quelssont
lespouvoirs spécifiquesconférés au Conseil de sécuritépour le maintien de
la paix,et notamment lepouvoir qu'ila de prendreune décision obligatoire.
Si l'on se réfèreàces chapitres, on constate que c'est seulementlorsque le
Conseil agit en application du chapitre VII, et peut-êtredans certains cas
en application du chapitre VIII, que ses résolutionsauront force obliga-
toire pour les Etats membres. Dans les autres cas, ellesn'auraient valeur

que de recommandations ou d'exhortations. (Les mesures visant le main-
tien de la paix prévuesau chapitre XII - concernant les territoires sous
tutelle présentant un caractère stratégique - ne me semblent pas vrai-
ment constituer un cas distinct, car il est difficilede voir pourquoi ces
mesures ne pourraient pas êtreprises aux termes des chapitres VI ou VII,
selon le cas.)
113. Ces limites s'appliquent également à l'effet de l'article 25de la
Charte, en raison dela clause ((conformément àla présenteCharte ». Sila
décision n'a pas un caractère obligatoire en vertu du chapitre ou de l'ar-

ticle pertinent de la Charte, l'article 25ne saurait lui conférercecaractère.
Sicet article avait pour effetautomatique de rendre obligatoires toutesles
décisionsdu Conseil de sécurité, lesmots ((conformément à la présente
Charte sseraient toutà fait superflus. Ilsn'ajouteraient rien au membre de
phrase qui précède - le seul autre que contienne l'articleet qu'ils visaient
manifestement àqualifier- (LesMembresde l'organisation conviennent
d'accepter et d'appliquer les décisionsdu Conseil de sécurité)).Ils ne
servent à quelque chose que si les décisionsdont il s'agit sont celles qui

sont dûment obligatoires (confo~mément àla rése entCe harte ».Sinon les
termes employésudansdes parties de la chart; comme le chapitre VI par
exemple, qui visent des fonctions de recommandation uniquement, con-
trediraient directement l'article 25ou seraient contredites par lui.
114. Puisque, en conséquence, laquestion de savoir si une résolution
donnéedu Conseil de sécurité a un effetobligatoire ou un effetde recom-
mandation doit forcémentêtredécidée, objectivementdans chaque cas
d'espèce,il en découleque le Conseil ne saurait, par le simple fait d'in-

voquerl'article 25 (comme il le fait par exemple dans sa résolution 269 294 NAMIBIA (s.w. AFRICA()DISS .P. FITZMAURICE)

obligatory character to a resolution which would not otherwise possess
it according to the terms of the chapter or article of the Charter on the
basis of whichthe Council is,or must be deemedto be, acting.

(v) TheSecurity Councilisnot
competent,evenfor genuine
peace-keepingpurposes,to
eflectdejinitivechangesin
territorial sovereigntyor
administrativerights
115.There is more. Even whenacting under Chapter VI1of the Charter

itself, the Security Council has no power to abrogate or alter territorial
rights, whether of sovereignty or administration. Even a war-time oc-
cupation of a country or territory cannot operate to do that. It must
await the peace settlement. This is a principle of international law that
is as well-established as any therecan be,-and the Security Council is as
much subject to it (for the United Nations is itself a subject of inter-
national law) as any of its individual member States are. The Security
Council might, after making the necessary determinations under Article
39 of the Charter, order the occupation of a country or piece of territory
in order to restorepeace andsecurity, but it could not thereby, or as part
of that operation, abrogate or alter territorial rights;-and the right to
administer a mandated territory is a territorial right without which the
territory could not be governed or the mandate be operated. It was to

keep the peace, not to change the world order, that the Security Council
wasset up.

116.These limitations on the powers of the Security Council are
necessary because of the al1too great ease with which any acutely contro-
versial international situation can be represented as involving a latent
threat to peace and security, even where it is really too remote genuinely
to constitute one. Without these limitations, the functions of the Security
Council could be used for purposes never originally intended,-and the

present case is a very good illustration of this: for not only was the
Security Council not acting under Chapter VI1 of the Charter (whichit
obviously could not do-though it remains to beseenby what means and
upon what grounds the necessary threat to, or breach of the peace, or act
of aggression will be determined to exist);-not only was there no threat
to peace and security other than such asmight be artificiallycreated as a
pretext for the realization of ulterior purposes,-but the whole operation,
which will not necessarily end there, had as its object the abrogation of
the Mandatory's rights of territorial administration, in order to secure
(not eventually but very soon) the transformation of the mandated terri- du 12 août 1969)conférerun caractère obligatoire àune résolution qui
en serait dépourvu d'après les termes du chapitre ou de l'article de la
Charte en vertu duquel le Conseil aurait agi ou serait réputéavoir agi.

v) Mêmequand ils'agit vraiment
de maintien de lapaix, le Conseil
de sécuritén'estpas compétent
pour efectuer des changements définitifs
de souveraineté territoriale
ou de droitsd'administration

115. Ce n'estpas tout. Même quand ialgit en vertudu chapitre VI1de la
Charte le Conseil de sécurité n'ale pouvoir ni d'abroger ni de modifier
des droits territoriaux, qu'il s'agissede droits de souverainetéou de droits
d'administration. Mêmeune occupation du temps de guerre d'un pays
ou d'un territoire ne saurait conférer un tel pouvoir. Il faut attendre le
règlementde paix. C'est là un principe de droit international solidement
établis'ilen est - et le Conseil de sécuritéy cst tout aussi soumis (car les
Nations Unies sont elles-mêmes un sujetdu droit international) que
n'importe lequel des Etats Membres. Après avoir fait les constatations

qui s'imposent aux termes de l'article 39 de la Charte, le Conseil de
sécuritépourrait ordonner l'occupation d'un pays ou d'une partie d'un
territoireaux fins de rétablir lapaix et la sécurité mais il ne saurait, ce
faisant, ou dans le cadre de cette opération, abroger ou modifier des
droits territoriaux et le droit d'administrer un territoire sous mandat
est un droit territorial sans lequel le territoire ne pourrait êtregouverné,
ni le mandat appliqué. C'estpour maintenir la paix et nonpour modifier
l'ordre mondial que le Conseil de sécurité a étécréé.

116. Ces limitations aux pouvoirs du Conseil de sécuritésont néces-
saires caril n'est que trop facile de présenter une situation internationale

qui fait l'objet de vives controverses comme impliquant une menace
latente contre la paix et la sécurité, mêmsei elle est trop éloignéepour
paraître authentique. Sans ces limitations, les fonctions du Conseil de
sécuritépourraient être utilisées à des fins qui n'ont jamais été prévues
à l'origine et la présenteaffaire nous en fournit un excellent exemple: en
effet,non seulement le Conseil de sécuritén'a pas agi en vertu du chapitre
VI1 de la Charte (ce qu'il nepouvait manifestement pas faire encore
qu'il resteà voir par quels moyens et sur quels motifs on constatera la
condition nécessairede l'existence de menace contre la paix, de rupture
de la paix ou d'acte d'agression); non seulement il ii'existait aucune
menace contre la paix ou la sécuritéautre que celle qui pouvait êtresus-
citée artificiellementet comme prétexte à atteindre des objectifs inavoués,

mais encore l'opération tout entière, qui ne s'arrêterapas forcénient là,
avait pour objet d'abroger les droits d'administration territoriale du295 NAMIBIA (s.w. AFRICA()DISS O.P.FITZMAURICE)

tory into, and its emergence as, the sovereign independent State of
"Namibia". This iswhat isdeclared in terms, not onlyin Resolution 2145
itself, but alsointhe subsequentAssemblyResolution 2248 (S-V)of 1967,
specifyingJune 1968as the intended date of transfer 69,-and this is par
excellencethe type of purpose, in promoting which, the Security Council
(and a fortiori the Assembly) exceeds its competence, and so acts ultra
vires.

117. On the basis of the foregoing conclusions, the answer to the
question put to the Court in the present proceedings, as to what are the

legal consequences for States of the continuédpresence of South Africa
in the mandated territory of SW. Africa, despite Security Council
resolution 276 of 1970 is, strictly, that there are no specificlegal conse-
quences for States, for there has been no change in the legal position.
Sinceneither the Security Council nor the Assembly has any competence
to revoke South Africa's Mandate,the various resolutions of these organs
purporting to do so, or to declare it to be at an end, or to confirm its
termination, are one and al1devoid of legal effect.The result is that the
Mandate still subsists, and that South Africa is still the Mandatory.
However, from this last conclusion there do follow certain legal conse-

quences both for South Africa and for other States.

2. Consequencesfor South Africa

118. For South Africathere is an obligation

(1) to recognizethat the Mandate survivedthe dissolution of the League,
~that it has an international character,-and that in consequence
SW. Africa cannot unilaterally be incorporated in the territory of the
Republic;
(2) to perform and execute in full al1 the obligations of the Mandate,
whatever these may be.

119. With regard to this last requirement, 1 have given my reasons
for thinking that, the United Nations not being the successor in law to
the League of Nations, the Mandatory is not, and never became subject

69 See further inthe Annex, paragraph1insection 3.

283 Mandataire aux fins d'assurer (non pas par la suite mais très bientôt) la
transformation du territoire sous mandat en un Etat souverain et indé-
pendant, celui de ((la Namibie 1)C'est ce qui est dit explicitement, non

seulement dans la résolution 2145 elle-même,mais aussi dans la résolu-
tion ultérieure2248 (S-V)adoptée en 1967par l'Assemblée,qui fixait le
mois de juin 1968 comme date du transfert envisagé 69;et c'est là par
excellence le genre d'objectif qui dépasse les compétences du Conseil
de sécurité (et plus forte raison de l'Assemblée)de sorte qu'en cherchant
à le favoriser il excèdeses pouvoirs.

1. Généralités

117. Vu les co~~clusionsqui précèdent,la réponse à la question posée
à la Cour dans la présente procédure sur les conséquencesjuridiques
pour les Etats de la présencecontinue de l'Afrique du Sud dans le terri-
toire sous mandat du Sud-Ouest africain, nonobstant la résolution 276
(1970)du Conseil de sécurité, est qu'iln'y a pas, à proprement parler, de
conséquencesjuridiques précisespour les Etats, la situation juridique

étant inchangée.Ni le Conseil de sécurité ni l'Assemblée généra nlont
compétencepour révoquerle Mandat de l'Afrique du Sud, de sorte que
lesdiversesrésolutionspar lesquellescesorganes ont prétendulerévoquer,
déclarer qu'ilavait pris fin ou confirmer qu'il était terminé, sont sans
exceptionaucune dépourvues d'effetjuridique. 11en résulteque le Mandat
subsiste etque l'Afrique du Sud est toujours Mandataire. Cette dernière
conclusion entraîne cependant certaines conséquencesjuridiques, tant pour
l'Afrique du Sud que pour les autres Etats.

2. Conséquences pour l'Afrique du Sud

118. Pour l'Afrique du Szrd,les conséquencessont qu'elle doit:
1) reconnaître que le Mandat a survécu à la dissolution de la Sociétédes

Nations - qu'il a un caractère international - et que par suite le
Sud-Ouest africain ne peut pas être unilatéralementincorporé dans le
territoire de la République;
2) remplir et exécuterintégralementtoutes les obligations découlant du
Mandat, queiles qu'elles soient.

119. Sur ce dernier point, j'ai déjà exposé lesraisons pour lesquelles
j'estime que, l'organisation des Nations Unies n'étant pas en droit le
successeur de la Société desNations. le Mandataire n'a pas, et n'a jamais

69Voir par. 15 de la section 3 de l'annexe ci-après.

283 to any duty to report to it, or accept its supervision, particularly as
regards the Assembly. But as was pointed out earlier in this Opinion
(paragraphs 17 and 20), it does not follow that the reporting obligation
has lapsed entirely; and it is the fact that it could be carried out by the
alternative means indicated in paragraph 16. This being so, the question
arises whether the Mandatory has a legal duty to take some such steps
as were there indicated. The matter is not free from doubt. The Court
in 1950 considered the reporting obligation to be an essential part of
the Mandate. Judge Read on the other hand thought that although its

absence might "weaken" the Mandate, the latter would not otherwise
be affected. Again if the Mandate is viewed as a treaty or contract, the
normal effect ofthe extinction of one of the parties would be to bring the
treaty or contract to an end entirely.

120. However, the better viewseemsto be that the reporting obligation
survived, though becoming dormant upon the dissolution of the keague,
and certainly not transformed into an obligation relative to the United
Nations. Nevertheless, if not an absolutely essential element, it is a
sufficientlyimportant part of the Mandate to place the Mandatory under
an obligation to revive and carry it out, if it is at al1possible to do so, by
some other means 'O.But the Mandatory would have the right to insist
(a) on the new supervisory body being acceptable to it in character and

composition-(such acceptance not to be unreasonably withheld),-(b)
on the nature and implications (as to degree of supervision) of the repor-
ting obligation being as they are indicated to be in paragraphs 76-78
above,-and (c) that, just as with the League Council, the Mandatory
would be under no legal obligation to carry out the recommendations
of the supervisory body, no more than States adrninistering trust terri-
tories are obliged to accept the views of the United Nations Assembly as
supervisory organ-(see supra, paragraphs 77 and 104 and footnote 66)

121. A further, or rather alternative, course that could be considered

incumbent on South Africa, though as a consequence of the Charter
not the Mandate, would be to resume the rendering of reports under
Article 73 (e) of the Charter (see as to this the joint dissenting Opinion
of 1962, I.C.J. Reports 1962, pp. 541-548and paragraph 43 (b) above),
seeing that on any view SW. Africa is a non-self-governing territory.
This resumption must however be on the understanding that the reports
are not dealt with by the Trusteeship Council unless South Africa so
agrees.

Ex hypothesi however, it would not be to the United Nations that the Manda-
tion in anotherform.sible for doing this, or there would merely be the same situa- eu, le devoir de lui faire rapport ni d'accepter sa surveillance, notamment
cellede l'Assemblée générale. Maic s,omme il a étésignalé précédemment
dans cette opinion (par. 17et 20), cela ne veut pas dire que I'obligation de
faire rapport ait entièrement disparu, et le fait est quel'Afrique du Sud
pourrait s'en acquitter de la façon indiquéeau paragraphe 16. Dans ces
conditions, la question se pose de savoir si le Mandataire est juridique-

ment tenu de prendre des mesures du genrede cellesqui s'ytrouvent men-
tionnées.La question n'est pas sans souleve~quelque doute. En 1950,la
Cour a considéré que I'obligation de fairerapport étaitunélémentessentiel
du Mandat. Au contraire M. Readpensaitqueson absencepourrait risquer
d'«affaiblir»le Mandat, mais que celui-cine s'entrouverait pas autrement
touché. Et encore, si l'on considère le Mandat comme un traité ou un
contrat, la disparition de l'une des parties aurait normalement pour
effet d'entraîner l'extinction totale du traité ou du contrat.
120. Quoi qu'il en soit, l'interprétation la plus fondéeme parait être
que I'obligation de faire rapport subsiste, bien qu'à l'étatlatent depuis
la dissolution de la Société desNations. et sans transformation aucune

en obligation envers l'organisation des Nations Unies. Cependant si elle
neconstitue pas un élémena tbsolument essentiel du Mandat, cette obliga-
tion n'en est pas moins un aspect suffisamment important pour que le
Mandataire soit tenu de !a faire renaître et de s'en acquitter par un autre
moyen 70si cela apparaît possible. En revanche, le Mandataire serait en
droit d'exiger: a) que le nouvel organe de surveillance ait un caractère et
une composition qu'il jugerait acceptables (sans qu'il puisse se montrer
à cet égard déraisonnable);b) que la nature et les incidences(quant au
degré de surveillance) de I'obligation de faire rapport soient celles qui
sont indiquéesaux paragraphes 76 à 78ci-dessus; et c) quz, de mêmequ'à
l'égarddu Conseil de la Société desNations, le Mandataire n'ait pas

l'obligation juridique d'appliquer les recommandations de l'organe de
surveillance, pas plus que les Etats qui administrent des territoires sous
tutelle ne sont obligésd'accepter les avis de l'Assemblée générald ees
Nations Unies en tant qu'organe de surveillance (voir ci-dessus, par. 77et
104et note 66).
121. En plus, ou plutôt àla place de la méthodequi précède,on pour-
rait considérercomme incombant à l'Afrique du Sud, cette fois sur la
base dela Charteet non plus du Mandat, qu'ellereprenne la transmission
de rapports en vertu de l'article 73, alinéae),de la Charte (sur ce point,
voir l'opinion dissidente commune de 1962, C.I.J.Recueil 1962,p. 541-548

et le paragraphe 43 6) ci-dessus), puisque le Sud-Ouest africain est sans
aucun doute un territoire non autonome. 11devrait néanmoins être
entendu que cette reprise se ferait à condition que les rapports ne soient
pas examinéspar le Conseil de tutelle, sauf si l'Afrique du Sud y consent.

i0 Par hypothèse cependant, ce ne serait pas à l'égarddes Nations Unies que le
Mandataire aurait ce devoir, sinon la mêmesituation se répéteraitsous une autre
forme. 3. For other States

122. For other States the "legal consequences" of the fact that South
Africa's Mandate has not been validly revoked, and still subsists in
law are:

(1) to recognize that the United Nations is not, any more than the
Mandatory, competent unilaterally to change the status of the
mandated territory;
(2) to respect andabide by the Mandatory's continuedright to administer
the territory, unless and until any change is brought about by lawful
means.

123. On the foregoing basis it becomes unecessary for me to consider
what the legal consequences for States would be if the view taken in the
Opinion of the Court werecorrect; although, sincethe measures indicated

by the Court seem to be based mostly on resolutions of the Security
Council that-for the reasons given in paragraphs 112-114 above-1
would regard as having only a recommendatory effect,1would be obliged
to question the claim of these measures to be in the proper nature of
"legal consequences", even if 1 otherwise agreed with that Opinion.
(1 also share the vjews of my colleagues Judges Gros, Petrén, Onyeama
and Dillard as to the standing of certain of these measures.)
124. There is however another aspect of the matter to which 1 attach
importance and which 1 think needs stressing. It was for this reason,
that, on 9 March 1971, during the oral proceedings (see Record, C.R.
71/19, p. 23),1put a question to Counsel for the United States ofAmerica,
then addressing the Court. 1 do not think 1 can do better than cite this
question and the written answer to it, as received inthe Registry of the
Court some ten days later (18 March 1971):

Question:In the opinion of the United States Government is there

any rule of customary international law which, in general, obliges
States to apply sanctions against a State which has acted, or is
acting, illegally-such as cutting off diplomatic, consular and com-
mercial relations with the tortfeasor State? If not, in what manner
would States become compelled so to act-not merely by way of
moral duty or in the exercise of a faculty, but as atter of positive
legal obligations?
Reply: It is the opinion of the United States that there is no rule
of customary international law imposing on a State a duty to apply
sanctions against the State which has acted, or is acting, illegally.
However, under the Charter of the United Nations, the Security
Council has the power to decide that member States should apply 3. Pour les autres Etats

122. Pour les uutres Etilts, les ((conséquencesjuridiques))du fait que
le Mandat de l'Afrique du Sud n'a pasétévalablementrévoque t subsiste
en droit sont qu'il leur incombe:

1) de reconnaître que l'organisation des Nations Unies n'est pas compé-
tente, non plus que le Mandataire, pour modifier unilatéralement le
statut du territoire sous mandat;
2) de respecter et d'observer le droit qu'a encore le Mandataire d'admi-
nistrer le territoire, tant qu'un changement n'a pas étéopérépar des
moyensjuridiquement valables.

123. Sur cette base, je n'ai pas à me demander quelles seiaient les
conséquencesjuridiques pour les Etats si la conception dont procède
l'avisde la Cour étaitjuste; de toute façon, comme les mesures indiquées
par la Cour paraissent s'appuyer surtout sur les résolutionsdu Conseil
de sécuritéqui n'ont pour moi d'autre effetqueceluide recommandations,
pour les raisons données auxparagraphes 112 à 114ci-dessus,je me ver-
rais dans l'obligation de contester que ces mesures aient véritablementle
caractère de ((conséquencesjuridiques »,mêmesi par ailleurs je souscri-
vais à l'avis. (Jepartage égalementles vues de mes collèguesMM. Gros,
Petrén, Onyeamaet Dillard sur la valeur de certaines de ces mesures.)

124. 11y a toutefois un autre aspect auquel j'attache de l'importance
et qui me paraît devoir êtresouligné. C'estd'ailleurs pour cela que, le
9 mars 1971,au cours de la procédure orale, j'ai poséune question au
représentant des Etats-Unis d'Amérique,qui présentait alorsson exposé
oral. Je ne puis faire mieux, me semble-t-il, que de citer le libellé de cette
question et la réponseécritequi est parvenue au Greffe de la Cour une
dizaine dejours plus tard, le 18 mars 1971 :

Question: Existe-t-il selon le Gouvernement des Etats-Unis
d'Amériqueune règle de droit international coutumier qui, d'une
manière générale, oblige leE stats à appliquer des sanctions contre

un Etat qui a agi ou qui agit illégalement - par exemple à rompre
les relations diplomatiques, consulaires et commerciales avec 1'Etat
fautif? Sinon, comment l'obligation d'agir ainsi s'imposerait-elle
aux Etats, autrement que comme un simple devoir moral ou simple
exercice d'une faculté,en tant qu'obligation juridique positive?
Réponse:De l'avisdes Etats-Unis, il n'existepas de règlede droit
international coutumier qui obligeles Etatsà appliquer des sanctions
contre un Etat qui a agi ou qui agit illégalement.Toutefois, en vertu
de la Charte des Nations Unies, le Conseilde sécuritéalepouvoir de
déciderque les Etats Membres doivent appliquer des sanctions298 NAMIBIA (s.w. AFRICA) (DISS. OP. FITZMAURICE)

sanctions against the State which acts in certain illegal ways. Thus,
shouid the Security Council determine that an illegal act by a State
constitutes "a threat to the peace, breach of the peace, or act of
aggression", it would have a duty under Article 39 to "make recom-
mendations, or decide what measures shall be taken in accordance
with Articles 41 and 42, to maintain or restore international peace
and security". Whenever the Security Council makes such a de-
termination and decides that diplomatic, consular and commercial
relations shall beut offin accordance with Article 41 of the Charter,
al1 Members of the United Nations have the duty to apply such

measures.
If the latter part of this reply is intended to indicate that it is broadly
speaking only in consequence of decisions taken under Chapter WI of
the Charter, after a prior determination of the existence of a "threat to
the peace, breach of the peace or act of aggression", that a legal duty for
member States would arise to take specificmeasures, 1can only agree.

125. In the latter part of hiseparate declaration, the President of the
Court has made certain observations which, though closely related to
the legal issues involved in this case, have a different character.king
my cue from him, 1should like to do the same. In the period 194511946,
South Africa could have confronted the United Nations with a fait
accompliby incorporating SW. Africain its own territory, as a component
province on a par with Cape province, Natal, the Transvaal and the

Orange Free State. Mad this been done, there would have been no way
in which it could have been prevented, or subsequently undone, short of
war. Wisely however, though at the same time exercising considerable
restraint from its own point of view, South Africa refrained from doing
this. If however "incorporation" is something which the United Nations
believes it couldnever accept, there should equally be a reciprocal and
corresponding realization of the fact that the conversion of SW. Africa
into the sovereign independent State of Namibia (unless it were on a
very different basis from anything now apparently contemplated) could
only be brought about by means the consequences of which would be
incalculable, and which do not need to be specified. Clearly therefore,
in a situation in which nouseful purpose can be served by launching the

irresistible force against the immovable object, statesmanship should
seek a modus vivendi-while there is yet time.

(Signed) G. G. FITZMAURICE. NAMIBIE(S.-O. AFRICAIN) (OP. DISS. FITZMAURICE) 298

contre un Etat qui a certainscomportements illicites. Par exemple, si
le Conseil de sécuritéconstate qu'un acte illicite d'un Etat constitue
«une menace contre la paix ... une rupture de la paix ou ..un acte
d'agression »,il a le devoir, en vertu de l'article 39, de fa«des re-
commandations ou [décider]quelles mesuresseront prises conformé-

m.ent aux articles 41 et 42 pour maintenir ou rétablir la paix et la
sécuritéinternationales D.Quand le Conseil de sécuritéfait une telle
constatation et décideque les relations diplomatiques, consulaires et
coinmerciales doivent êtrerompues conformément à l'article41 de la
Charte, tous lesMembresdes Nations Unies ont ledevoird'appliquer
ces mesures.

Si la dernière partie de cette réponseveut dire que c'est, grosso modo,
uniquement quand des décisionssont adoptées en vertu du chapitre VI1
de la Charte, l'existenced'une (menâce contre la paix, d'une rupture de
paix ou d'un acte d'agression » ayant étépréalablement constatée,que
les Etats Membres auraient l'obligation juridique de prendre des mesures
po>itives,je ne peux que me ranger à cet avis.

125. Dansla dernièrepartie de sa déclaration,lePrésidentde la Cour a
présenté certaines observations qui,tout en étant liéesde près auxpro-
blèmesjuridiques en cause dans la présente affaire, ont un caractère
différent.Prenant exemplesur lui,je formulerai aussi quelquesremarques.
Pendant la période 1945-1946, l'Afrique du Sud aurait pu mettre les

Nations Unies devant le fait accompli, en incorporant le Sud-Ouest
africain à son territoire pour le transformer en une province comme celle
du Cap, comme le Natal, le Transvaal ou 1'Etat libre d'Orange. Si elle
l'avait fait, il n'yaurait eu aucun moyen sauflauerr.2de s'yopposer ou de
revenir sur la transformation effectuée.Faisant preuve de sagessemais en
se contraignant aussi de son point de vue à beaucoup de modération,
l'Afrique du Sud s'est abstenue de se comporter de la sorte. Mais si
l'c(incorporation))est une mesure que les Nations Unies estiment ne
jamai-s pouvoir accepter, il convient qu'il soit égalementet réciproque-

ment compris que la conversion du Sud-Ouest africain en un Etat de
Namibie souverain et indépendant (sauf si elle se produit sur une base
très différentede ce que l'on paraît actuellen~entenvisager) ne peut être
obtenue que par des moyens aux conséquences incalculables, qu'il est
inutile de préciser. Celaétant. lorsqu'onse trouve dans une situation où
il ne sertà rien de lancer une force irrésistiblecontre un objet immobile,
l'homme d'Etat doit chercher un modus vivendp indant qu'il en est
encore temps.

(SignéG ). G. FITZMAURICE.

286 PRELIMINAR AND INCIDENTAM LATTERS

1. Incompetenceof the UnitedNations
Assembly tuact as acourtof law

1. When, by its Resolution 2145 of 1966,the Assembly purported to

declare the termination of South Africa's mandate, onthe basis of alleged
fundamental breaches of it, and to declare this not merely as a matter of
opinion but as an executive act having the intended operational effect of
bringing the Mandate to an end-or registering its termination-and of
rendering any further administration of the mandated territory by South
Africa illega1,-it was making pronouncements of an essentiallyjuridical
character which the Assembly, not being ajudicial organ, and not having
previously referred the matter to any such organ, was not competent to

make.

2. There is nothing unusual in the viewhere expressed. On the contrary
it represents the normal state of affairs, which that the organ conipetent
to perform an act, in the executive sense, is not the organ competent to
decide whether the conditions justifying its performance are present. In
al1other fieldsa separation of functions is the rule. Thus the legislature is
alone competent to enact a law,-the executive or administration alone

competent to apply or enforce it,-the judiciary alone competent to
interpret it and decide whether its application or enforcement isjustified
in the particular case. In the institutional field, the justification for the
act of some organ or body may turn upon considerations of a political or
technical character, or of professional conduct or discipline, and if so,the
political, technical or professional organ or body concerned will, in
principle, be competent to make the necessary determinations. But where
the matter turns, and turns exclusively, on considerations of a legal

character, a political organ, even if it is competent to take any resulting
action, is not itself competent to make the necessary legaldeterminations
on which thejustification forsuch actionmust rest. This can only be done
by a legal organ competent to make such determinations.

l Relegation to this Annex does not in any way involve thatthe matters dealt with
in it are regarded as of secondary importance;-quithe reverse-theyinvolve
issues as salient in their way as any in the case. But to have deaIt with them at
the earlier stage to which theyly belong would have held up or interrupted the
development of the main argument which1 wished to put first. 1. L'Assembléegénérale deN s ations Unies est
incompétentepour agir comme tribunal

1. Quand, par sa résolution 2145 de 1966, 17Assembléegénéralea
prétendudéclarer terminéle Mandat de l'Afrique du Sud, au motif que
celle-ci aurait commis des violations fondamentales de ce Mandat, cette
déclaration représentant non pas simplement l'expression d'une opinion

mais un acte de nature exécutivequi devait avoir pour effet pratique de
mettre fin au Mandat ou de consacrer son extinction, et de rendre désor-
mais illégalel'administration du territoire sous Mandat par l'Afrique du
Sud, elle a émis desprononcés d'un caractère essentiellement juridique
qu'elle n'avait pas compétence pour formuler, faute d'êtreun organe
judiciaire et de n'avoir pas au préalable renvoyéla question àun organe
judiciaire.
2. 11n'y a rien d'inhabituel dans l'opinion exprimée ici.Au contraire,
elle représentel'étatde choses normal, à savoir que l'organe compétent
pour accomplir concrètement un acte dans le cad~ede ses responsabilités

exécutivesn'est pas l'organe compétent pour décider si les conditions
justifiant son accomplissement sont réunies.Danstous lesautres domaines,
une division similaire des fonctions est chose courante. Ainsi le pouvoir
législatif estseul compétentpour promulguer une loi, le pouvoir exécutif
ou l'administration seuls compétents pour l'appliquer ou la mettre en
vigueur, le pouvoir judiciaire seul compétentpour l'interpréteret décider
si son application ou sa mise en vigueur sont justifiéesdans un cas donné.
Dans le domaine des institutions, lajustification de l'acte accomplipar un
organe quelconque peut tenir à des considérations d'ordre politique ou

technique, ou à des considérations de comportement professionnel ou de
discipline, et, le cas échéant, l'organe ou institution politique, technique
ou professionnel intéressésera,en principe,habilité àfairelesconstatations
nécessaires. Mais lorsque la question dépend, et dépendexclusivement,
de considérations d'ordre juridique, un organe politique n'a pas lui-
mêmele pouvoir de procéder aux constatations juridiques qui doivent

l Le fait que certaines questions sont traitées dans la présente annexe ne veut
nullement dire que je les considère comme d'importance secondaire; bien au con-
traire, elles posent des problèmes qui, d'une certaineon, présentent la même
prééminenceque n'importe quel autre aspect de l'affaire. Mais si je les avais traitées
auparavant, à la place qui est véritablement la leur, j'aurais ralenti ou interrompu
le développement de l'argument principal, que je tenaisposer le premier. 3. It must be added that besides being ultra vires under this head, the
Assembly's action was arbitrary and high-handed, inasmuch as it acted
as judge in its own cause relative to charges in respect of which it was
itself the complainant, and without affording to the "defendant" any of

the facilities or safeguards that are a normal part of thejudicial process.
4. Tthas been contended that the cornpetence of the Assembly to make
determinations of a legal character is shown by the fact that Article 6
of the Charter confers upon it the right (upon the recommendation of the
Security Council) to expel a member State "which has persistently
violated the principles contained in ... the Charter". This however
merely means that the framers of the Charter did confer this particular
specific power on the Assembly, in express terms, without indicating
whether or not it was one that should only be exercised after a prior
determination of the alleged violations by a competent juridical organ.
To argue from the power thus specificallyconferred by Article 6, that the
Assembly must therefore be deemed to possess a generalpower under the

Charter to make legal determinations, is clearlyfallacious.
5. The contention that Resolution 2145 did not actually terminate
South Africa's mandate, but merely registered its termination by South
Africa itself,through its breaches of it,e., that theResolutionwas merely
declaratory not executive, is clearly nothing but an expedient directed to
avoiding the difficu1ty;-for even as onlqr declaratory, the resolution
amounted to a finding that there had been breaches of the Mandate,-
otherwise there would have been no basis even for a declaratory resolu-
tion. It is moreover a strange and novel juridical doctrine that, by
infringing an obligation, the latter can be brought to an end,-but
doubtless a welcome one to those who are looking foran easy way out of
an inconvenient undertaking.

6. No less of an expedient is the plea that South Africa had itself
"disavowed the Mandate" ever since 1946. South Africa's attitude has
always been that, as a matter of law, either theMandate was so bound
up with the League of Nations that it could not survive the latter's
dissolution, orelse, that if it did, it did not survive in the form claimed in
the United Nations. Whether this view was correct or not it was in no
sense equivalent to a "disavowal" of the Mandate. To deny the existence
of an obligation is ex hypothesinot the same as to repudiate it 2.Nor can
anysuchdeduction legitimately be drawn from the failure to render reports
to, and accept the supervision of the Assembly, based as this was on the

For this reason the justification for the revocation of the Mandate which the
Court finds in Article3,paragraph 3 (a), of the 1969 Vienna Convention on the
Law of Treatiesis quite misplaced.
288justifier son action, mêmes'ila compétencepour prendre les mesures qui
en découlent. Seul possèdece pouvoir un organe juridique compétent
pour procéder à cesconstatations.
3. Il faut ajouter qu'outre qu'elle constitue un excèsde pouvoir sur ce
point, l'action de l'Assembléea étéparfaitementarbitrairedans la mesure

où l'Assembléeétait à la foisjuge et partie au regard d'accusations qu'elle
avait poitéeselle-même,sans donner au ((défendeur ))aucun des moyens
et des garanties que comporte normalement le processus judiciaire.
4. On a affirméque l'aptitude de l'Assemblée à faire des constatations
de caractère juridique ressort du fait que l'article 6 de la Charte lui
confère le droit d'exclure, sur recommandation du Conseil de sécurité,
un Etat Membre ayant (cenfreint de manière persistante les principes

énoncésdans la ...Charte ».Cela signifieseulement que les auteurs de la
Charte ont conféré à l'Assemblée, en termes exprès, lepouvoir spécijque
dont il s'agit, sans précisersi ce pouvoir ne pouvait êtreexercéqu'une
fois les prétendues violations constatéespar un organejuridique compé-
tent. Déduire du pouvoir spécifiquement conféré par l'article6 que
l'Assembléeest censéetenir nécessairement de la Charte un pouvoir
générudle faire desconstatations juridiques, c'estnettement fallacieux.
5. La thèse selon laquellela résolution2145 n'a pas effectivement mis

finau Mandat de l'Afrique du Sud,mais s'estbornée ànoter que l'Afrique
du Sud y avait mis fin elle-même,en raison des violations commises par
elle, autrement dit la thèse selon laquellecette résolutionétait purement
déclaratoire et non pas exécutoire, n'est manifestementqu'un expédient
visant à éluderla difficulté;en effet, mêmesi elle n'est que déclaratoire,
la résolutionconstatait en réalitéque des violations du Mandat avaient
eu lieu, car à défautrien ne justifiait l'adoption d'une résolutionmême
simplement déclaratoire. En outre, c'est une doctrine étrange et inédite

que celle qui consiste à prétendre qu'en enfreignant une obligation on
peut mettre un terme à celle-ci,mais ceux qui cherchent un moyen facile
de se soustraire à un engagement embarrassant l'accueilleront certaine-
ment avecsatisfaction.
6. L'argument selon lequel l'Afrique du Sud elle-mêmeavait (dénoncé
le Mandat » dès 1946est lui aussi un expédient.L'attitude de l'Afrique
du Sud a été que, surle plan juridique, ou bien le Mandat étaità tel point
liéà la Société desNations qu'il ne pouvait survivre à la dissolution de

celle-cij ou bien que, s'il avait survécu,ce ne pouvait être sous la forme
que prétendaientles Nations Unies. Que ce point de vue ait été juridique-
ment fondéou non, cela n'équivalaitaucunement à une «dénonciation ))
du Mandat. Par hypothèse, nier l'existence d'uneobligationet la dénoncer
sont deuxchoses différentes 2. On ne peut pas non plus tirer légitimement
cette déduction du refus de faire rapport à l'Assembléegénéraleet

* C'est pourquoi la justification de la révocation du Mandat que la Cour découvre
dans l'article 60, paragraphe, de la convention de Vienne sur le droit des traités
(1969) est tout à fait hors de propos.
288contention (considered correct by an important body of professional
opinion) that no legal obligation to that effectexisted. If this werenot so,
no party to a disputecould argueits casewithout being told that, by doing
so, it had "disavowed" itsobligations.

7. It has also been argued that the Assembly had "vainly" tried to
obtainthe necessaryfindingsfromthe Court via the contentious proceed-
ings brought by Ethiopia and Liberia in the period 1960-1966.But this
would be tantamount (a) to sayingthat because the Assernblydid not get
thejudgment it wanted in 1966,it was therefore justified in taking the law
into its own hands, which, however, would in no way serve to validate
Resolution2145;-(b) to admitting that the 1966Judgment was right in
seeingthe then Applicants inthe light of agents oftheUnitedNations and
not, as they represented themselvesto be, litigants in contentious proceed-
ings sustaining an interest of their own;-and (c) recognizing that, as was
strongly hinted in paragraphs 46-48 (especially the latter) of the 1966
Judgment, the correct course would have been for the Assembly as an
organ to have asked the Court for an advisory opinion on the question of
breaches of the Mandate, in relation to which the objection as to legal
interest would not have been relevant. It was still open to the Court to

do this, for instance in 1967. It cannot therefore do other than give a
wrong impression if it is said that the Assernbly in 1966 had no other
course open to it but to adopt Resolution 2145without having previously
sought legal advice on this basis.

8. These various purported justifications for the Assembly making
legal determinations, though not itself a competent legal organ, and
without any reference to such an organ, or even to an ad hoc body of
jurists (such as was the settled practice of the League Council in al1
important cases),are clearlyillusory. In the result, the conclusion must be
that the Assembly's act was ultra vires and hence that Resolution 2145
was invalid, evenifithad not been otherwiseineffectiveinlawto terminate
South Africa's mandate.

2. The Court'sright tu examine the assumptions
underlyingany Request for an Advisory Opinion

9. Although the Court has to some extent gone into the question of the
validity and effect of Assembly Resolution 2145, it has not adequately d'accepter sa surveillance, qui se fondait sur l'argument - tenu pour
justifiépar un fort courant d'opinion - qu'il n'existaitaucune obligation
juridique à cet effet. S'il n'enétait pasainsi, aucune partàeun différend
ne pourrait faire valoir ses moyens sans s'entendre dire que, ce faisant,
elle a «dénoncé ))ses obligations juridiques.

7. On a dit aussi que l'Assembléeavait «en vain » tenté d'obtenirde la
Cour lesconstatations nécessairesà la faveur de la procédure contentieuse
introduite par 1'Ethiopie et le Libéria (1960-1966).Mais cet argument
revient à: a) confirmer que, n'ayant pas obtenu l'arrêtqu'elle souhaitait
en 1966,l'Assembléeétaitfondée à se faire justice elle-même,ce qui ne
contribuerait d'ailleurs pas à rendre valable la résolution 2145; b) ad-
mettre que l'arrêtde 1966 a eu raison de voir dans les demandeurs des
agents desNations Unies et non pas, comme ilsleprétendaient,desparties

à une procédure contentieuse défendant un intérêp t ropre; et c) recon-
naître que, comme l'arrêt de1966 l'a nettement donné à entendre dans
ses paragraphes 46 à 48 (et surtout ce dernier), l'Assembléeen tant
qu'organe aurait normalement dû solliciter de la Cour un avis consul-
tatif sur la question des violations du Mandat, au regard de laquelle
l'objection tirée de l'intérêjturidique n'aurait pas été pertinente.La
Cour aurait encore pu lefaire, en 1967par exemple. On ne peut donc que
donner une fausse impression si l'on dit qu'en 1966l'Assembléen'avait
pas d'autre possibilitéque d'adopter la résolution2145 (XXI) sans avoir

au préalabledemandéun avisjuridique à cet égard.

8. Toutes ces prétenduesjustifications du pouvoir qu'aurait 1'Assem-
bléede faire des constatations juridiques, bien qu'elle ne soit pas elle-
mêmeun organe juridique compétent, et de les faire sans avoir à se
référerà un tel organe ou même à un groupe ad hoc de juristes (comme

c'étaitla pratique habituelle du Conseil de la SdN dans toutes les affaires
importantes) sont parfaitement illusoires. En définitiveil faut conclure
que l'action de l'Assembléea constituéun excèsde pouvoir et, par suite,
que la résolution 2145 était sans valeur juridique, abstraction faite des
autres raisons de droit qui empêchaientqu'elle mît finau Mandat de
l'Afrique du Sud.

2. Droitpour la Cour d'examiner lesprémisses
de toute demande d'avis consultatiJ'

9. Bien que la Cour se soit, jusqu'à un certain point, penchéesur la
question de la validitéet de l'effetde la résolution2145 de l'Assemblée examined the question of its right to do so having regard to the way in
which the Request for an Advisory Opinion in the present case was
worded. The matter is however so important for the whole status and
judicial function of the Court that it becomes necessary to consider it.

10. The Court could not properly have based itself on the literal
wording of the Request, in order to regard its task in the present proceed-
i,igs as being confined solely to indicating what, on the assumptions
contained in the Request, and without any prior examination of their
validity, arethe legal consequences for States of South Africa's continued
presence in SW. Africa,-those assumptions being that the Mandate
for that territory had been lawfully terminated and hence that this
presence was illegal 3.TheCourt cannot do sofor the simple but sufficient
reason that the question whether the Mandate is or is not legally atan end

goes to the root of the whole situation that has led to the Request being
made. If the Mandate is still, as a matter of law, in existence, then the
question put to the Court simply does not arise and no answer could be
given. Alternatively the question would be a purely hypothetical one, an
answer to which would, in those circumstances, serve no purpose, so that
the situation would, on a different level, resemble that which, in the
Northern Cameroons case (I.C.J. Reports 1963, p. 15), caused the Court
to hold (at p. 38) that it could not "adjudicate upon the merits of the
claim" because inter alia, the circumstances were such as would "render

any adjudication devoid of pur~ose". It has constantly been emphasized
in past advisory cases-(and this was also confirmed in the contentious
case just mentioned, in which occasion arose to consider the advisory
practice)-that in advisory, no less than in contentious proceedings, the
Court must stillact as a court of law (and not, for instance,asa merebody
of legal advisers),-that "the Court's authority to give advisory opinions
must be exercised as a judicial function '(ibid., at p. 30),-and that, to
use the wording of one of the most quoted dicta of the Permanent Court
in the Eastern Carelia case, P.C.I.T., Series B, No. 5 (1923)at page 29, the

Court "being a Court of Justice, [it] cannot, even in giving advisory
opinions, depart from the essentid rules guiding [its]activity as a Court".

II. So much isthis the casethat the original tendency in the past was to
question whether the mere giving of advice,even in solemn form such as
by means of an advisory opinion of the Court, was compatible with the
judicial function at al1 4.TheCourt has not of course taken this viewbut,

The fact that certain representativesof rnernberStates in the Security Council
said that theyunderstood the Request in this sense, and even that they only agreed
to it on that basis, cannot of course in any way bind the Court. Neither represen-
tence to restrict the Court as to what it shall take account of in delivering a legal
opinion.
+See the discussion in Manley O. Hudson, ThePerrnanevt Court of International
Justice, 1920-1942, pp. 510-511. NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN (O) PDISS.FITZMAURICE) 302

générale, ellen'a pas examiné commeil eût convenu la question du droit
qu'elle avait de le faire, étant donnéla façon dont la demande d'avis
consultatif était formuléedans la présenteaffaire. Or la question est si

importante pour la position et la fonction judiciaire de la Cour qu'il est
nécessairede l'étudierici.
IO.La Cour n'aurait pu légitimements'entenir à la lettre de la requête
et considérerque sa seule tâche en la présente instanceétaitd'indiquer
les conséquencesjuridiques pour les Etats de la présencecontinue de
l'Afrique du Sud au Sud-Ouest africain, en tenant pour acquise, sans
autre examen, la validité despostulats dont procède la requête - à

savoir qu'ila étévalablement mis fin au Mandatpour ce territoire et que
la présence sud-africaineest par conséquentillégale 3.La Cour ne peut
agir ainsi pour la raison simple mais suffisanteque la question de savoir
si le Mandat a juridiquement pris fin ou non est à la racine mêmede la
situation qui a conduit à la présentation de la requête.Si: en droit, le
Mandat est encore en vigueur, la question qui a étéposée à la Cour est
sans objet et il ne peut y être répondu;ou bien elle est purement hypo-

thétiqueet, dans ces conditions, il ne servirait ,àrien d'y répondre; la
situation,à un niveau différent, ressembleraitdonc à celle qui, dans
l'affairedu Camerounseptentrional (C.I.J. Recueil 1963,p. 15),a conduit
la Cour à dire qu'elle ne pouvait ccstatuer au fond sur la demande »,
notamment parce que les circonstances étaienttelles qu'elles rendaient
((toute décisionjudiciairesans objet »(ibid.,p. 38). Il a constamment été
soulignédans lesaffairesconsultativesantérieures - et celaa étconfirmé

égalementdans l'affaire contentieuse susvisée,où l'occasion s'estpré-
sentée d'examinerla pratique suivie en matière consultative - que sur
le plan consultatif comme au contentieux la Cour doit toujours agir
comme un tribunal (et non, par exemple, comme un simple groupe de
conseillersjuridiques); on a rappeléque le pouvoir conféré à la Cour
de rendre des avis consultatifs doit s'exercerdans le cadre de la fonction
judiciaire))(ibid.,p. 30)et que, pour reprendre l'unedesformules lesplus

souvent citées de la Cour permanente dans l'affaire du Statut de la
Carélie orientale,la Cour, «étant une Cour de Justice, ne peut pas se
départirdes règlesessentiellesqui dirigent sonactivitédetribunal, même
lorsqu'elle donne des avisconsultatifs » (C.P.J.I. sérieBno5, p. 29).
II. C'est tellement vrai qu'à l'origine on a eu tendance à mettre en
douteque lefait de donner cequi n'était qu'unavis,mêmesous uneforme
solennelle, comme c'est le cas, par exemple,pour les avis consultatifs de

la Cour, soitcompatible aveclafonctionjudiciaire 4.Tellen'aévidemment
La Cour ne saurait évidemment êtreliéeen quoi que ce soit par le fait que cer-
tains représentantsEtats Membres au Conseil de sécuritéont déclaréinterpréter
la requête ence sens et mêmene l'approuver qu'à cette condition. Ni les représen-
tants des Etats ni des organes comme le Conseil de sécurité lui-mêmen,'ont
tence pour dire à la Cour à quels éléments elle devra se limiteren vue de rendre un
avis juridique.
voir ~anley O. Hudson, The Permanent Court of International Justice,
1920-1942, p. 510 et 511. 303 NAMIBIA (s.w. AFRICA) (DISS. OP. FITZMAURICE)

to cite a veryhigh authority and formerjudge ofthe Permanent Court 5:

". .. the Court ... has conceived of its advisory jurisdiction as a
judicial function, and in its exercise of this jurisdiction it has kept
within the iimits wtich characterize judicial action. It has acted not
as an 'academyof jurists' but as a responsible 'magistrature"'-(my
italics).

The words italicized in the passage just quoted contain the key to the
question. If an organ such as the General Assembly or Seciirity Council
of the United Nations likes to refer some question to a body of legal
experts, whether a standing one or set up ad hocfor the purpose, which
that body is instructed to answer on the basis of certain specifiedassump-
tions that are to be taken as read, it will be acting perfectly properly if it
proceeds accordingly, because it is not a court of law and is not dis-
charging or attempting to discharge any judicial function: it is indeed
bognd by its instructions, which the organ concerned is entitled to giveit.
But the Court, which is itself one of the sixBoriginalmain organs of the
United Nations, and not inferior in status to the others, is not bound to

take instruction fromany ofthem, in particular as to how it isto viewand
interpret its tasks as a court of law, which it is and must always remain,
whatever the nature and context of the task concerned;-and whereas a
body of experts may well, as a sort of technical exercise, give answers on
the basis ofcertain underlying assumptions irrespective oftheir validityor
otherwise, a court cannot act in this way: it is bound to look carefully
at what it is being asked to do, and to consider whether the doing of it
would be compatible with itsstatus and function as a court.

12. This faculty constitutes in truth the foundation of the admitted
right of the Court, derivingfrom the language of Article 05,paragraph 1,
of its Statute, and consecrated in its jurisprudence, to refuse entirely to
comply with a request for an advisory opinion if it thinks that, for

sufficientreasons, it would be improper or inadvisable for it to do so;-
and if the Court can thus refuse entirely, a fortiori can it, and rnust it,
insist on undertaking a preliminary examination of the assumptions on
whichany request isbased, particularly where, asin the present case, those
assumptions are of such a character that, unless they are well-founded,
the question asked has no meaning or could admit of only one reply.
Othenvise put, for a court to give answers that canonlyhave significance
and relevance if a certain legalsituation is presumed to exist, but without
enquiring whether it does (in law) exist, amounts to no more than
indulging in an interesting parlour game, which is not what courts of law
are for. In the present case, if the Court had lent itself to such a course,
it would not have been engaging in a judicial activity,-it would have to

Hudson, op. cit., p. 511.
29 1pas été l'opinionde la Cour; au contraire, pour citer un auteur qui fait
autoritéet a étéjugeà la Cour permanente :

«la Cour ...a conçu sa compétenceen matière consultative, comme
une fonction judiciaire et, dans J'exercice de cette compétence,
elle s'est tenue dans les limites propres l'action judiciaire. Elle a
agi non pas comme une ((académiede juristes)) mais comme une
«magistrature »responsable.» (Lesitaliques sont de nous.)

Les mots mis en italiques dans le passage quivient d'êtrecitécontiennent
la clédu problème. S'il plaît à un organe comme l'Assemblée générale
ou le Conseil de sécurité desNations Unies de renvoyer telle ou telle
question à un groupe d'experts juridiques, permaneht ou créépour
l'occasion, en le priant d'y répondreà partir de certains postulats précis
qu'ildoit tenir pour acquis,ilest parfaitementnormal quecegroupe agisse
en conséquence parce qu'il n'est pas un tribunal et n'exerce pas ou
n'essaiepas d'exercer unefonction judiciaire: il est certainement tenu de
respecter les instructions que l'organe intéressest habilitéàlui donner.

Mais la Cour, qui est elle-même l'un dessix principaux organes origi-
naires des Nations Unies et n'a pas un statut inférieuraux autres, n'est
tenue de recevoir d'instructions d'aucun d'entre eux, surtout sur la
manièredont elle doit considéreret interpréter ses fonctions de tribunal,
car elle est et doit toujours rester un tribunal, quels que soient la nature
et le contexte de la tâche particulièrei l'occupe. Siun groupe d'experts.
peut fort bien, se livrant à une sorte d'exercice technique, donner des
réponses en se fondant sur certaines hypothèses préétablies, indépen-
damment de leur validité, un tribunal ne peut agir ainsi: il est tenu
d'examiner soigneusement ce qu'on lui demande de faire et de juger si
cela serait compatible avec son statut et sa fonction de tribunal.

12. Cette faculté constitue en véritéle fondement du droit reconnu
de la Cour, qui découlede l'article 65, paragraphe 1, de son Statut et
est consacrépar sa jurisprudence, de refuser purement et simplement de
donner suite à une demande d'avis consultatif si elle estime, pour des
raisons suffisantes, qu'il ne serait ni séant ni opportun de le faire; or,
si la Cour peut purement et simplement refuser de donner suite, à
fortiori peut-elle et doit-elle insister pour entreprendre un examen
préliminaire despostulats dont procèdela demande, enparticulier quand
ces postulats sont, comme en la présente instance, telsque, s'ilsne sont
pas fondés,la question poséen'a pas de sens ou ne peut appeler qu'une
seule réponse. Autrement dit, le fait, pour un tribunal, de donner des

réponsesqui peuvent seulementavoir un sens et de la pertinence si une
situation juridique donnée est présumée exister,sans examiner si elle
existe (en droit), reviendrait simplementà se livrerà un intéressantjeu
de société, cequi n'est pas lerôle d'un tribunal. Dans la présenteaffaire,
si la Cour avait agi de la sorte, elle aurait non pas exercéune activité

Hudson, op. cit., p. 511.abnegate itstrue function as a court-of-law and would indeed have acted
as if, inthe words used by Judge Hudson, it were "an academy ofjurists".

3. Shouldthe Courthavecomplied
withthe Requestin this case

13. There can be no doubt that the question put to the Court was a
legal one, such as it had the power to answer if it considered it proper to
do so,-more especially if (as it must be) the question is regarded as
relating not only to the legal consequencesof the General Assembly
Resolution 2145 but also to the validity of that Resolution itself, and its
effectupon the Mandate for South West Africa.

14. On the other hand, had the Court considered that the form of the
question addressed to it precluded it from following any but the first
course (i.e., dealing with the "consequences" alone), and excluded, or was

intended to exclude, any consideration by it of the validity and effect of
the act from which those consequences are supposed to flow-i.e.,
Assembly Resolution 2145-then this would have been a ground for
declining to comply with the Request since, for the reasons given in the
preceding section of this Annex, it is unacceptable for any organ making
such a request to seek to limit the factors which the Court, as a court of
law, considers it necessary to take into account in complying with it,
or to prescribe the basis upon which the question contained in it must
be answered. A further element is that the Court, not being formally

obliged to comply with the Request at al1(even though it might otherwise
be right for itto do so),is necessarilythe master, and the on14master, of
the basis upon which it will do so, if in fact itcides to comply.
15. Subjectto what has just been said, 1agree with the conclusion ofthe
Court that it should comply with the Request, though not with some of
the reasoning on which that conclusion is based 'j1 take this view even
though 1have no doubtthat the present proceedings represent an attempt
to use the Court for a purely political end, namely as a step towards the
setting up of the territory of South West Africa as a new sovereign

independent State, to be called "Namibia", irrespective of what the con-
sequences of this might be at the present juncture. This aim is made
perfectly clear by operative paragraphs 1, 2 and 6 of Resolution 2145

In particular as regards the question of the existence in this case of a "dispute"
or "legal question pending" between States-ato which see section below. But
the "pendency" of a dispute or legal question is notse a ground on which the
Court must refuse to give an advisory opinion to the requesting organ. Where the
Court was to blame, was in not applying the contentious procedure to the present
advisory proceedings, as it had the power to do-(agsee section below).judiciaire, mais renoncé à sa véritable fonction en tant que tribunal et

elle se serait bel et bien comportée comme une ((académiede juristes ))
- pour reprendre la formule dujuge Hudson.

3. La Cour devait-elledonnersuite à la demande
d'avis consultatifenl'espèce?

13. Il ne fait pas de doute que 1% question posée à la Cour étaitune
questionjuridique à laquellela Cour avait le pouvoir de répondresi elle
le jugeait opportun, plus particulièrement si la question est considérée
(ce qu'elle doit être)comme ayant trait non seulement aux conséquences
juridiques de la résolution 2145 de l'Assembléegénérale, mais aussià la
validitémêmede cette résolution et à ses effets sur le Mandat pour le
Sud-Ouest africain.

14. En revanche, si la Cour avait considéréque la forme sous laquelle
la question lui était posée l'empêchaid te suivre une autre méthode que
celle qui consiste à traiter seulement des ((conséquences »,et excluait ou
visait à exclure tout examen par la Cour de la validitéet de l'effet de
l'acte dont ces conséquencessont censéesdécouler - la résolution 2145
de l'Assembléegénérale -, la Cour aurait eu un motif pour ne pas donner

suite à la requête;en effet,pour les raisons exposéesdans la section qui
précède, il est inacceptablequ'un organe qui formule une requêtesem-
blable cherche à limiter les facteurs dont la Cour, en tant que tribunal,
juge nécessairede tenir compte afin de répondre, ou àprescriresur quelle
base elle devra répondre. En outre, la Cour, n'étant pas formellement
obligéede donner suite à la requête(même sipar ailleurs il était approprié
qu'elle le fît), est nécessairement maîtresse, etseule maîtresse, de choisir

la base sur laquelle elle le fera, si elle décideeffectivement d'y donner
suite.
15. Sous réservede ce qui vient d'êtredit, je souscris à la conclusion
de la Cour suivant laquelle il convient de donner suite à la requêtemais
non à certains des motifs dont cette conclusion découle 6.Je le fais, bien
queje ne doute pas que la présenteprocédure soit une tentative d'utiliser
la Cour à des fins purement politiques, autrement dit comme un moyen

de parvenir à la transformation du territoire du Sud-Ouest africain en
un nouvel Etat indépendant et souverain, appelé ((Namibie JIsans se
soucier de ce que pourraient être les conséquencesdans la conjoncture
présente.Que ce soit là l'objectifressort avecune clartéparfaitedespara-

En particulier pour ce qui est de I'existence«dlitigea ou d'une ((question
juridique pendante»entre Etats- voir à ce propos la section 4 ci-après. Qu'un
litige, ou une question juridique, «pendant »ne constitue pas en soi un motif
qu'on peut reprocherà la Cour, c'est de ne pas avoir appliqué la procédure con- Ce
tentieuseà la présente instance consultative comme elle avait le pouvoir de le faire
(voir la section 4).itself, which is reproduced here in extenso

'The GeneralAssembly,

Reafirming the inalienable right of the people of South West
Africa to freedom and independence in accordance with the Charter
of the United Nations, General Assembly resolution 1514 (XV) of
14 December 1960and earlier Assembly resolutions concerning the
Mandated Territory of South West Africa,
Recalling the .advisory opinion of the International Court of
Justice of 11 July 1950, accepted by the General Assembly in its
resolution 449 4 (V)of 13December 1950,and the advisory opinions
of 7June 1955and 1June 1956as wellas thejudgement of 21Decem-
ber 1962,which have established thefact that South Afriça continues
to have obligations under the Mandate which was entrusted to it
on 17 December 1920and that the United Nations as the successor
to the League of Nations has supervisory powers in respect of South
West Africa,

Gravely concerned at the situation in the Mandated Territory,
which has seriously deteriorated following the judgement of the
International Court of Justice of 18July 1966,
Having studied the reports of the various cornmittees which had
been established to exercise the supervisory functions of the United
Nations over the administration of the Mandated Territory of South
West Africa,
Convinced that the administration of the Mandated Teiritory by
South Africa has been conducted in a manner contrary to the
Mandate, the Charter of the United Nations and the Universal
Declaration of Human Rights,
Reafirming its resolution 2074 (XX) of 17 December 1965, in
particular paragraph 4 thereof which condemned the policies of
apartheid and racial discrimination practised by the Government of
South Africa in South West Africa as constituting a crime against

humanity,
Emphasizing that the problem of South West Africa is an issue
falling within the terms of General Assembly resolution 1524(XV),

Consideringthat al1the efforts of the United Nations to induce
the Government of South Africa to fulfil its obligations in respect
of the administration of the Mandated Territory and to ensure the
well-being and security of the indigenous inhabitants have been of
no avail,
Mindful of the obligations of the United Nations towards the
people of South West Africa,
Noting withdeep concernthe explosivesituation which existsin the
southern region of Africa,graphes 1, 2 et 6 de la résolution 2145 elle-même,que je reproduis in
extenso ci-après:

((L'Assembléegénérale,
Réafirmant le droit inaliénabledu peuple du Sud-Ouest africain
àla liberté etàl'indépendanceconformément à la Charte des Na-

tions Unies, à la résolution 1514 (XV)de l'Assemblée générale e,
date du 14 décembre1960, et aux résolutions antérieures del'As-
sembléeconcernant le Territoire sous mandat du Sud-Ouest africain,
Rappelant l'avis consultatif de la Cour internationale de Justice
du Il juillec 1950,qui a étéacceptépar l'Assemblée .générad lans
sa résolution449A (V) du 13décembre1950,et les avis consultatifs
du 7juin 1955et du 1" juin 1956,ainsi que l'arrêtdu 21 décembre
1962,lesquels ont établique l'Afrique du Sud continue d'avoir des
obligations en vertu du Mandat qui lui a étéconfié le17 décembre
1920et que l'organisation des Nations Unies entant que successeur
de la Société desNations a des pouvoirs de contrôle sur le Sud-
Ouest africain,
Gravementpréoccupép ear la situation qui règnedans le Territoire
sousmandat et qui s'est gravement détériorée depuis l'arrêtde la

Cour internationale de Justice du 18juillet 1966,
Ayant étudiéIesrapports des divers comitésqui ont étécréés pour
exercer les fonctions de contrôle de l'organisation des Nations
Unies sur l'administration du Territoire sousandat du Sud-Ouest
africain,
Convaincue que l'administration du Territoire sous mandat par
l'Afriquedu Sud a étéassuréed'une manièrecontraire au Mandat, à
la Charte des Nations Unies eà la Déclarationuniverselle desdroits
de l'homme,
RéaBrmant sa résolution 2074 (XX) du 17 décembre 1965, no-
tamment le paragraphe 4 par lequel elle a condamné la politique
d'apartheid et de discrimination raciale pratiquée par le Gouverne-
ment sud-africain au Sud-Ouest africain comme constituant un
crime contre l'humanité,

Soulignantque leproblèmedu Sud-Ouest africain est une question
qui relèvedes dispositions de la résolution1514(XV)de l'Assemblée
générale,
Considéranq t uetous leseffortsfaitspar l'Organisation desNations
Unies pour amener le Gouvernement sud-africain à respecter ses
obligations en ce qui concerne l'administration du Territoire sous
mandat et à assurer le bien-êtreet la sécuritédes autochtones du
pays ont été inutiles,
Consciente des obligations de l'organisation des Nations Unies
vis-à-visu peuple du Sud-Ouest africain,
Notant avec une profonde inquiétudela situation explosive qui
existedans la régionméridionalede l'Afrique, Afirmingitsright to take appropriate action in the matter, includ-
ing the right to revert to itself the administration of the Mandated
Territory,
1. Reafirms that the provisions of General Assembly resolution
1514(XV)are fully applicable to the people of the Mandated Terri-
tory of South West Africa and that, therefore, the people of South

West Africa have the inalienable right to self-determination, free-
dom and independence in accordance with the Charter of the United
Nations ;
2. Reafirmsfurther that South West Africa is a ferritory having
international status and that it shall maintain this status until it
achieves independence ;
3. Declares that South Africa has failed to fulfil its obligations
in respect of the administration of the Mandated Territory and to
ensure the moral and material well-being and security of the indi-
genous inhabitants of South West Africa and has, in fact, disavowed
the Mandate;
4. Decidesthat the Mandate conferred upon HisBritannic Majesty
to be exercised on his behalf by the Government of the Union of
South Africa is therefore terminated, that South Africa has no other
right to administer the Territory and that henceforth South West

Africa comes under the direct responsibility of the United Nations;

5. Resolvesthat in these circumstances the United Nations must
discharge those responsibilities with respect to South West Africa;

6. Establishesan Ad Hoc Committee for South West Africa-
composed of fourteen Member States to be designated by the Pre-
sident of the General Assembly-to recommend practical means by
which South WestAfrica should be administered, so as to enable the
people of the Territory to exercisethe right of self-determination and
to achieveindependence, and to report to the General Assembly at a
special session as soon as possible and in any event not later than
April 1967;
7. Calls upon the Government of South Africa forthwith to
refrain and desist from any action, constitutional, administrative,
political or otherwise, which will in any manner whatsoever alter or

tend to alter the present international status of South West Africa;

8. Calls the attentionof the Security Council to the present reso-
lution;
9. Requestsal1States to extend their whole-hearted CO-operation
and to render assistance in the implementation of the present
resolution;
10. Requests the Secretary-General to provide al1the assistance Afirmant son droit de prendre des mesures appropriées à'cet
égard, y compris le droit de reprendre l'administration du Territoire
sous mandat,

1. Réafirme que les dispositions de la résolution 1514 (XV) de
l'Assemblée générasle ont pleinement applicables au peuple du Terri-
toire sous mandat du Sud-Ouest africain et que, par conséquent,le
peuple du Sud-Ouest africain a le droit inaliénable à l'autodéter-
mination, à la libertéetàl'indépendance,conformément àla Charte
des Nations Unies;

2. Réafirme en outre que le Sud-Ouest africain est un territoire
qui a un statut international et qu'il devra conserver ce statut jus-
qu'à ce qu'il accèdeà l'indépendance;
3. Déclareque l'Afrique du Sud a failli à ses obligations en ce qui
concerne l'administration du Territoire sous mandat, n'a pas assuré
le bien-êtremoral et matérielet la sécurité des autochtonesdu Sud-
Ouest africain et a, en fait, dénoncéle Mandat;

4. Décideque le Mandat confié à Sa Majesté britannique pour
êtreexercéen son nom par leGouvernement de l'Union sud-africaine
est donc terminé,que l'Afrique du Sud n'a aucun autre droit d'ad-

ministrer le Territoire et que désormaisle Sud-Ouest africain relève
directement de la responsabilité de l'organisation des Nations
Unies ;
5. Conclut que, dans ces conditions, l'organisation des Nations
Unies doit s'acquitter de cette responsabilitél'égarddu Sud-Ouest
africain;
6. Créeun Comitéspécialpour le Sud-Ouest africain - composé
de quatorze Etats Membres qui seront désignés par le Président de
l'Assemblée générale - chargéde recommander des dispositions
d'ordre pratique pour l'administration du Sud-Ouest africain, afin
de permettre au peuple du Territoire d'exercer son droit à I'auto-

détermination et d'accéderà l'indépendance,et de faire rapport à
l'Assembléegénéraleréunie ensession extraordinaire, aussi rapide-
ment que possible et, quoi qu'il advienne,au plus tard en avril 1967;
7.Invite le Gouvernement sud-africain à s'abstenir et à se désister
.immédiatement de toute action, constitutionnelle, administrative,
politique ou autre, qui de quelque manière que ce soit modifierait
ou tendrait à modifier le statut international actuel du Sud-Ouest
africai;
8. Appelle l'attention du Conseil de sécuritésur la présente
résolution;
9.Prie tous lesEtats de prêter sansréserveleur concours et d'aider

à l'exécutiondela présenterésolution;

10.Prie le Secrétaire générad le fournir toute l'assistance né- necessary to implement the present resolution and to enable the Ad
Hoc Committee for South West Africa to perform its duties.

1454thplenary meeting,
27 October 1966."

If there could be any doubt it would be resolved by the two following
more recent and conclusive pieces of evidence :

(a) General Assembly Resolution 2248 (S-V)of 19 May 1967,after re-
affirmingResolution 2145and appointing a "Council for South West
Africa" which later became known as the "Council for Namibia",
ended as follows:

"Decides that South West Africa shall become independent
on a date to be fixedin accordance with the wishes of the people
andthat the Council shall do al1in its power to enable indepen-
dence to be attained by June 1968."

(b) On 29 January 1971,when the whole matter was already subjudice
before the Court and the oral proceedings had actually started 7,the
United Nations "Council for Namibia" issued a statement com-
menting on the South African proposal for holding a plebiscite in
SW.Africa under the joint supervision of the Court and the Govern-
ment of the Republic, and finishing as foilows:

"Furthermore, the issue at stake is the independence of
Namibia, and not whether the Government of South Africa or
the United Nations should administer the Territory. The United
Nations decisions in this matter are aimed at achieving the
independence of Namibia, and not its administration by the
United Nations, except for a brief transitional period."

16. Despite the revealing character of these statements, and despite its
obvious political background and motivation, the question put to the
Court is, in itself, essentially a legal one. Moreover, in fact, most advisory
proceedings have a political background. It could hardly be otherwise,

as the Court pointed out in the Certain Expenses case with reference to
interpretations of the Charter (I.C.J. Reports 1962, p. 155, inJine). But
as the Court equally pointed out in that case (echoing a similar dictum

for the appointment of a judged hoc. The public hearings started on February 8.st

295 cessaire pour l'exécutiondela présenterésolution et pour mettre le

Comitéspécialpour le Sud-Ouest africain en mesure de s'acquitter
de satâche.
14-54'séance plénière,
27 octobre 1966. ))

Si le moindre doute était possible, il serait levépar les deux faits
suivants, survenus plus récemment, et qui constituent des preuves con-
cluantes:

a) La résolution 2248 (S-V) du 19 mai 1967, par laquelle l'Assemblée
générale aréaffirméla résolution 2145 et nomméun (Conseil pour le
Sud-Ouest africain », appelépar la suite « Conseil pour la Namibie »,
setermine sur cesmots :

« Décide que le Sud-Ouest africain deviendra indépendant
à une date qui sera fixéeconformément aux vŒux de la popula-
tion et que le Conseil fera tout en son pouvoir pour que le
Territoire accède àl'indépendanceau plus tard enjuin 1968. ))

b) Le 29janvier 1971,alors que l'affaire était déjàen instance devant la
Cour et que la procédure orale était entamée 7,le Conseil des Nations
sujet de la
Unies pour la Namibie a publié une déclaration au
proposition de l'Afrique du Sud d'organiser un plébiscite dans le
Sud-Ouest africain sous la surveillance conjointe de la Cour et du
Gouvernement de la République, déclaration qui se termine par ces
mots :

((En outre la question en jeu est celle de l'indépendance dela
Namibie et non celle de savoir si l'administration du Territoire
sera assuréepar le Gouvernement sud-africain ou par l'Organisa-
tion des Nations Unies. Dans cette affaire, les décisions des
Nations Unies visent à réaliser l'indépendance dela Namibie,

etnon pas à faire administrer le territoire par les Nations Unies,
sauf pendant une brève période detransition. » [Traduction du
Grefi. ]

16. Malgréces déclarations et ce qu'elles ont de révélateuret malgré
les antécédentsou les motifs politiques de la question posée à la Cour,
celle-ci a en soi un caractère essentiellement juridique. D'ailleurs, la
plupart des procédures consultatives ont en fait un arrière-plan politique.
Il pourrait difficilement en êtreautrement, comme la Cour l'a souligné
dans l'affaire de Certaines dépenses desNations Unies à propos des

interprétations de la Charte (C.I.J. Recueil 1962, p. 155, in$ne). Mais,

Une audience àhuis clos a ététenue le 27janvier 1971pour entendre la demande
publiques ont commencé ler8 février.signation d'un jugead hoc. Les audiences made on a previous occasion such a background does not of itself
impart a political character to the questionthe Court is asked to answer,

and this is the important consideration. It would seem therefore that the
political background of a question would onlyjustify a refusal to answer
where this background loomed so large as to impart a political character
to the question also. In spite of doubts as to whether something of the
kind has not occurred in the present case 9, the legal character of the
questions themselves remains.

4. The questionof the appointment ofa
South Africanjudge ad hoc

(a) The relevant provisions ofthe

Court'sStatutr otidRules

- 17. The Court's rejection of the South.African request to be allowed
to appoint a judge ad hoc in the present case was embodied in the Order
of the Court of 29 January 1971to which my colleagues Judges Gros,
Petrénand 1 appended ajoint dissentingdeclaration resetving Ourright to

givereasons for this at a later stage.In myopinionthis rejection waswrong
in law, and also unjustified as a matter of equity and fair dealing,-for it
was obvious, and could not indeed be denied by the Court, that South
Africa had a direct, distinctive and concrete special interest to protect in
this case, quite different in kind from the general and comrnon interest
that other States had as Members of the United Nations. In short, South

Africa had, and was alone in having, precisely the sametype of interest
in the whole matter that a litigant defendant has,-and should therefore
have been granted the same right that any litigant before the Court
possesses,namely that, ifthere isnot alreadya judge ofits own nationality
amongst the regular judges of the Court, it can, under Article 31 of the
Statute of the Court,appoint a judge ad hoc to sitfor the purposes of the
case 1°.

18. The Court's refusa1to allow this was thrown into particular relief

1947/1948,at p. 61). the first Admissions of New Members case (Z.C.J. Reports
The present case might well be regarded as being at the least a borderline one,
for the political nature of the background is unusually prominent. Yet the two main
questions involved, namely whether the Mandate has been validly terrninated or
not and, if it has, what are the legal consequences for States, are in themselves
questions of law. The doubt arises from the way in which the requestis framed,
suggesting that the Courts to answer the second question only, and postulating the
first as already settled. Itabove al1 this which irnparts a political twist to the
whole Request.
l0 There would naturally have been no objection to the appointment also of one
judge ad hocto represent the comrnon interest of what was in effect "the other side",
-and see further notes 14 and15below. NAMIBIE (S.-O. AFRICAIN ()P. DISS.FITZMAURICE) 308
ainsi que la Cour l'a également signalédans cette affaire, faisant écho à

une opinion analogue expriméedans une affaire précédente8, cela ne
suffitpasà donner un caractèrepolitique à la questionposée à la Cour, et
c'est cela qui importe. Il semblerait donc que, pour qu'il soit justifiéde
refuser de répondre à une question, il faudrait que les antécédents poli-
tiques de cette question pèsent d'un poids tel que la question revête elle-
mêmeun caractère politique. Bien que, dans la présenteaffaire, on puisse
se demander si ce n'est pas un peu le cas9,les questions proprement dites

conservent un caractèrejuridique.

4. La questionde lanominationd'unjuge ad hoc
sud-africain

a) Les dispositions applicables duStutut

et du Règlement

17. La requêtepar laquellel'Afrique du Sud demandait àêtre autorisée
à désignerun juge ad hocdans la présenteaffaire a étérejetéepar la Cour,
par l'ordonnance du 29janvier 1971, à laquelle mes collèguesMM. Gros,
Petrén, ainsi que moi-même avons joint une déclaration commune

dissidente où nous nous réservionsle droit de donner les raisons de notre
attitude à un stade ultérieur.Amon avisce rejet étaitmal fondéendroit et
injustifiéen équitéet en simplejustice - car il étaitévident,et la Cour ne
pouvait le contester, que l'Afrique du Sud avait en cette affaire un intérêt
direct, distinct et concret protéger, quiétaittout différentpar sa nature
de l'intérêtgénéralet commun des autres Etats comme Membres des
Nations Unies. En bref, l'Afrique du Sud avait et étaitseule à avoir en

l'espèce le type d'intérêt quepossède un défendeur dans une action
contentieuse et elle aurait dû par conséquentse voir reconnaître le droit
de toute partie en cause devant la Cour: celui de nommer un juge ad hoc
pour siégeren l'affaire, conformément à l'article 31 du Statut, s'il n'ya
déjàparmi lesjuges titulaires un juge de sa nationalité 1°.

18. Le refus de la Cour a pris un relief particulier du fait du rejet

Voir par exemple l'affaire des Conditions de l'admission d'un Etat comme Membre
des Nations Unies(C.Z.J. Recueil 1947-1948, p. 61).
La présente affaire pourrait bien êtreconsidéréecomme se situant au moins
à la limite, car les arrière-plans politiques y sont particulièrement visibles. Pourtant
les deux principales questions en jeu, celles de savoir s'il a étévalablement mis fin
au Mandat et, dans l'affirmative, quelles sont les conséquencesjuridiques pour les
Etats, sont en elles-mêmes des questions de droit. Le doute tient façon dont
la requêteest formulée, car elle donneraitenser que la Cour ne doit répondre
qu'à la deuxième question, la première étant présumée réglée. C'essturtout cet
aspect qui donneà l'ensemble de la requête une coloration politique.
Bien entendu il n'y aurait pas eu d'objectionque soit désignéégalement un
parties faisant cause communecevoir également lesnotes 14 et 15ci-après.les autresby the almost simultaneous rejection, in the three Orders of the Court
dated 26 January 1971, of the South African challenge concerning the
propriety of three regular judges of the Court sitting in the case,-a
matter on which, as to the third of these Orders, 1wish to associate my-
selfwith the views expressed in the early part of his dissenting opinion in
the present case by my colleague Judge Gros. In the Iight of the explana-
tions as to this, given in the Opinion of the Court, it has now to be
concluded that, outside the literal terms of Article 17, paragraph 2, of

the Statute, no previous connexion with the subject-matter of a case,
however close, can prevent a judge from sitting, unless he himself elects
as amatter of conscience not to do so.

19. On the question of a judge ad hoc, the immediately relevant pro-
vision is Article 83 of the Court'sRules, which reads as follows:

"If the advisory opinion is requested upon a legal question aclu-
ally pending between two or more States, Article 31 of the Statute
shall apply, as also the provisions of these Rules concerning the
application of that Article."
If this provision was the only relevant one, it would be a reasonable
inference from it that a judge ad hoc could not be allowed unless the
case had the character specified. In the present one it was obvious that

a legal question was involved,-or the Court would have lacked al1power
to comply with the Request for an advisory opinion (see Article 96,
paragraph 1, of the United Nations Charter and Article 65,paragraph 1,
of the Court's Statute). But could it be said to be a question "actually
pending between two or more States"? I shall give my reasons later on for
thinking that it was of this kind. But for the purposes of my principal
ground for holding that the South African request should have been
allowed, it is not strictly necessary for me to determine whether the
legal questions concerned were "pending"; and if pending, "actually
pending"; and if actuallypending, then actuallypending "between two or
more States", and if so which ones, etc., etc.;-for in my viewthe matter
is not exclusivelygoverned by the provisions of Article 83 of the Rules,
which I consider do not exhaust the Court's power to allow the appoint-
ment of a judge adhoc.

20. The contrary view is based on a misreading of the true intention
and effect of Rule 83 when considered in relation to Article 68 of the
Statute which reids as follows:presque simultané,dans les trois ordonnancesen date du 26janvier 1971,
des objections soulevéespar l'Afrique du Sud quant à la régularité dela
participation de trois juges titulairesà la présente affaire- et c'est un
sujet sur lequel, s'agissant de la troisième de ces ordonnances, je tiens

m'associer aux vues expriméespar mon collègue M. Gros au début de
son opinion dissidente. Il faut conclure des explications données à ce
sujet dans l'avisde la Cour que, désormais,en dehors des termes littéraux
de I'article 17,paragraphe 2, du Statut, le fait d'avoir émêlé, mêm de
trèsprès, à ce qui constitue l'objet d'une affaire, ne peut empêcherunjuge
de siégerdans cette affaire à moins que sa conscience le pousse à se
déporter de lui-même.

19. Sur la question des juges ad hoc, la disposition directement perti-
nente est I'article 83du Règlement de la Cour, qui est ainsi libellé:

((Sil'avisconsultatif est demandéau sujet d'une questionjuridique
actuellement pendante entre deux ou plusieurs Etats, l'article 31 du
Statut est applicable, ainsi que les dispositions du présent Règlement
qui pourvoient à l'application de cet article1)

Si cette disposition était la seule applicable, il serait raisonnable d'en
déduirequ'unjuge ad hoc ne peut êtreautorisé que si l'affaire est du type
visé.En l'espèce,ilest évidentqu'une question juridique étaitenjeu, sinon
rien n'aurait permis à la Cour de donner suite à la requêtepour avis con-
sultatif (voir art.6, par. 1, de la Charte des Nations Unies et art. 65,
par. 1, du Statut de la Cour). Mais pouvait-on y voir une question (ac-
tuellement pendante entre deux ou plusieurs Etats »? J'exposerai plus
loin les raisons que j'ai de répondrepar l'affirmative. Cependant, pour

les besoins de mon principal argument en faveur de l'idée qu'ilaurait
fallu donner suite à la demande de l'Afrique du Sud, il ne m'est pas
nécessaire, à proprement parler, de déterminer si les questions juri-
diques en cause étaient((pendantes »et, dans l'affirmative,si ellesl'étaient
«actuellement »; si, l'étant«actuellement », elles I'étaient (entre deux
ou plusieurs Etats »et, dans ce cas, lesquels, et ainsi de suite; car, selon
moi, le problème n'est pas régi exclusivementpar les dispositions de
I'article 83 du Règlement, qui, à mon avis, n'épuisepas la question

du pouvoir que possèdela Cour d'autoriser la désignation d'unjuge ad
lzoc.

20. 11me semble que la thèse contraire repose sur une mauvaise
interprétation de l'intention et des effets véritables de l'article 83 con-
sidéréconjointement avec I'article 68 du Statut suivant lequel : "In the exercise of its advisory functions, the Court shall ... be
guided by the provisions of the present statute which apply in con-
fentious cases to the extent to which it recognizes them to be appli-
cable."

This provision ofcourse coversArticle 31ofthe Statute, and hence confers
on the Court a general power to apply that Article by allowing the
appointment of a judge ad hoc if requested. Furthermore, the provisions
of the Rules are subordinated to those of the Statute. The Court has no

power to make Rules that conflict with its Statute: hence any rule that
did so conflict would bepro tant0 invalid, and the Statute would prevail.

21. However, 1 can see no conflict between Rule 83 and Article 6%
of the Statute. They deal with different aspects of the matter. The latter
(Article 68), despite its quasi-mandatory form, confers what is in effect
a power or discretion on the Court to assimilate requests for advisory
opinions to contentious cases, either in whole or in part. Rule 83 on the
other hand contains what amounts to a direction by the Court to itself
as to how it is to exercisethis discretion in certain specifiedcircumstances.
If those circumstances are found to obtain, then the Rule obliges the

Court to allow the appointment of a judge ad hoc. But this in no way
means, nor was ever intended to mean, that bymaking Rule 83the Court
parted with the residual discretion it has under Article 68 of the Statute,
and that in no other circumstances than those specified in Rule 83 could
the Court allow such an appointment. The object of the Rule was not
to specify the only class of case in which the Court could so act, but to
indicate the oneclass in which it mustdo so, and to ensure that, at least in
the type of case contemplated in the Rule, the Court's discretion should
be exercised in a positive way, in the sense of applying Article 31 of the
Statute. This was entirely without prejudice to the possibility that there
might be other cases than those indicated in the Rule, as to which the
Court might feel that, though not obliged to apply Article 31, it ought
nevertheless for one reason or another to do so. This view is borne out

by the language of Article 82, paragraph 1, of the Rules, which relates to
the application in advisory proceedings of any of the contentious pro-
cedure provisions, not merely those of Article 31.After recapitulating the
general language of Article 68, it goes on to Saythat "for this purpose"
(i.e., in order to determine the sphere of application-if any-of the con-
tentious procedure), the Court is "above all" to consider "whether the
request ... relates to a legal question actually pending between two or

l1 The omitted word is "further", which is quite otiose in the context since there
is no other paragraph, or article of thete dealing with the matter to which this
one could be "further".
298 «Dans l'exercicede ses attributions consultatives, la Cour s'inspi-
rera ...lldes dispositions du présent Statut qui s'appliquent en
matière contentieuse dans la mesure où elle les reconnaîtra appli-

cables )).

L'une deces dispositions, bien entendu, est l'article 31du Statut, de sorte
que l'article 68 du Règlement confère à la Cour le pouvoir général
d'appliquer ledit article et d'autoriser la désignationd'un juge ad hoc si
une demande est présentée à cet effet. De plus, les dispositions du Rè-
glement sont subordonnées à cellesdu Statut. LaCour nepouvantadopter
un Règlement incompatible avec son Statut, toute règle de procédure

contraire au Statut serait, par le fait même,dépourvuede validitéet le
Statut prévaudrait.
21. Je ne vois pas pour ma part qu'il y ait contradiction entre l'article
83 du Règlementde la Cour et l'article 68 de son Statut. Ces deux textes
traitent d'aspects différents.Le deuxième (l'article68 du Statut) malgré
une formulation presque impérative,donne en fait à la Cour une sorte de
pouvoir discrétionnaire luipermettant d'assimiler, en tout ou en partie,

les procéduresconsultatives à des affaires contentieuses. L'article 83 du
Règlement, lui, contient une sorte de directive que la Cour se donne à
elle-mêmequant à la manière dont elle doit exercer ce pouvoir discré-
tionnaire dans certaines circonstances bien définies.En vertu du Rè-
glement, la Cour doit autoriser la désignation d'un juge ad hoc si elle
constate que cescirconstances sont réunies. Mais cen'est nullement à dire
et, en rédigeant I'article83,la Cour n'ajamais voulu dire qu'ellerenonçait
au pouvoir discrétionnaire résiduel qu'elletient de I'article 68 du Statut
et que, désormais, elle nepouvait plus autoriser la désignationd'un juge

ad hocen dehors descirconstances prévues àl'article83deson Règlement.
Cet article ne visepas à spécifierla seule catégorie d'affairedans laquelle
la Cour peut agir ainsi; son objet est d'indiquer un type d'affaire dans
lequel elledoit agir ainsi et de faire en sorte que, là au moins, la Cour
exerce son pouvoir discrétionnaired'une façonpositive, en ce sens qu'elle
applique l'article 31du Statut. Cela n'empêcheaucunement qu'il puissey
avoir d'autres affaires que les affaires viséesl'article 83 du Règlement,

dans lesquellesla Cour, sansêtre obligéed'appliquer I'article31du Statut,
pourrait estimer pour une raison quelconque qu'elle doit néanmoins
appliquer cet article. Cette manièrede voir est confirméepar l'article 82,
paragraphe 1, du Règlement qui concerne l'application aux procédures
consultatives de toutes les dispositions relatives à la procédure con-
tentieuse et nonpas seulement de l'article31.Aprèsavoir reproduit, d'une
manière généralel,es termes de I'article 68 du Statut, l'article 82ajoute
qu'((à cet effet»(c'est-à-dire pour déterminer le domaine d'application

l1 L'expression omise est .en ou»,qui est sans aucun objet dans ce contexte,
car on chercherait vainement dans le Statut un autre paragraphe ou un autre articel
traitant de ce sujet que I'articlepléterait. more States". This wording clearly makes the test of legal pendency a
primary, but equally clearly not a conclusive factor.

22. It has been contended that although the foregoing description of
the relationship between the various provisions concerned might other-
wise be correct, it must nevertheless break down on the actual wording
of Article 31 itself, particularly its second and third paragraphs. which,

it has been claimed, not only clearly contemplate the case of "parties"
to an actual litigation but are virtually incapable of functioning in any
other circumstances, so that at the very least the requirements of Rule
83 constitute a minimum and sine qua non, in the absence of which no
application of Article 31 is possible. 1 have difficulty in following the
logic of this view which, if it were correct, would go far in practice to
clawing back almost everything supposed to have been conferred by
Rule 83, and rendering that provision a piece of useless verbiage,-for
even where the case is indubitably one of a legal question actually

pending between two or more States, it would berare-in advisory pro-
ceedings to find a situation such that Article 31 could be applied to it
integrally as that provision stands, and without gloss or adaptation. It
is in fact manifest that the provisions of the Statute and Rules concern-
ing contentious cases were quite naturally and inevitably drafted with
litigations and parties to litigations in mind. Hence these provisions are
bound to be-as they are-full of passages and expressions that are not
literally applicable to cases where there is no actual litigation and no
parties technically in the posture of litigants,-in short to the vast

majority of the cases in which there are advisory proceedings. Con-
sequently the power given to the Court by Article 68 of the Statute to
be guided by the contentious procedure would be largely nullified in
practice unless it were deemed-to include a power to adapt and tailor
this procedure to the advisory situation. The very words "shall be guided
by" indicate that such a process is contemplated.

23. In the present case in particular, no difficulty could have arisen,
for the sufficient reason that, apart from South Africa, no other State

presenting written or oral statements asked to be allowed to appoint
a judge ad hoc, although they in fact had the opportunity of doing so 12,
-and moreover representatives of four such States actually attended

matter is entirely facultative, and there have been cases where, even in a litigation,
and although neither ornone of the parties had a judge of its nationality on the
Court, no designationof a judge ad hoc has been made. NAMIBIE (S.-O. AFRICAIN) (OP. DISS. FITZMAURICE) 311

éventuelde la procédure contentieuse), la Cour recherche avant tout )I
((sila demande ...a trait ou non à une question juridique actuellement
pendante entre deux ou plusieurs Etats B.Bienévidemmentcetterédaction

fait de la notion de question juridique pendante le critère principal mais
non pas, c'est tout aussi évident, uncritère décisifen lui-même.

22. On a soutenu que, bien que cette analyse des rapports entre les
diverses dispositions applicables puisse être à d'autres égardscorrecte,
elle achoppe nécessairement sur les termes de l'article 31 lui-même,et

particulièrement sur ses deuxième et troisième paragraphes qui, a-t-on
prétendu, non seulement visent à l'évidencele cas de ((parties » à un
procès en cours, mais encore sont virtuellement inopérants en toute
autre circonstance, si bien qu'à tout prendre les exigencesde l'article 83
constituent un minimum et un sine qua non en l'absence duquel aucune
application de l'article 31 n'est possible.3'ai quelque difficulté à suivre
la logique de ce raisonnement mais, s'il ktait fondé, il irait assez loin, en
pratique, dans la voie qui consisterait à reprendre presque tout ce que

l'article83du Règlement est censéaccorder, de sorte que ses dispositions
seraient~arfaitement vides de sens - car mêmesil'affaire concerne.sans
doute possible, une question juridique actuellement pendante entre deux
ou plusieurs Etats, il est rare, en matière consultative, de rencontrer une
situation telle que l'article 31puisse s'appliquer intégralement, sansglose
ni adaptation. De fait, il est manifeste que lesdispositions du Statut et du
Règlement qui concernent les affaires contentieuses sont tout naturelle-
ment et inévitablement rédigéesdans la perspective d'un litige et de
parties à un litige. Il suit de là que ces dispositions ne peuvent manquer

d'être - et sonten fait- trufféesde passages et d'expressions qui ne sont
pas littéralement applicables aux affaires dans lesquelles il n'y a ni vrai
litige ni partie se trouvant techniquement dans la situation d'un plaideur
- en bref àla vaste majoritédes affaires consultatives. Aussi le pouvoir
que l'article 68 du Statut donne à la Cour de s'inspirer de la procédure
contentieuse serait-il réduit quasiment à rien dans la pratique, s'iln'était
réputéinclure celui d'y apporter les retouches et adaptations nécessaires
en matière consultative. Les mots (s'inspirera », en eux-mêmes,montrent

bien qu'on a envisagé qu'ilen serait ainsi.
23. Dans la présenteespèceen particulier, aucune difficultén'aurait pu
surgir, pour cette raison suffisante que, en dehors de l'Afrique du Sud,
aucun des autres Etats ayant présenté desexposés écrits ou oraux n'a
demandé la permission de désigner un juge ad hoc, et cela bien qu'ils
aient eu la possibilité dele faire12; de plus les représentants dequatre de

l2La Cour, normalement, ne fait rien pour provoquer la désignation d'un juge
ad hoc. La matière est purement facultative et ileu des affaires, mêmeconten-
tieuses, où aucun juged hoc n'a étédésigné, bienque l'une des parties ou les deux
parties n'aient pas eujuge de leur nationalité sur le siège. the separate and preliminary oral hearing held (in camera 13) on this

matter, but none of them intervened either to oppose the application
or to make a similar one. Had any two or more such applications been
received, in addition to South Africa's, the Court would have had to
consider, under Article 3, paragraph 2, of its Rules, whether the States
concerned, or any group of them, not already comprising between them

a judge of the nationality of one of them amongst the regular judges of
the Court, were "in the same interest" 14, in which event only one ad
hocjudge peu such group could have been allowed 15.
24. Reference is made in the Opinion of the Court to the Permanent
Court's Order of 31 October 1935in the Danzig Legislative Decrees case
(Annex 1to Series AIB, No. 65, at pp. 69-71).That case however has no

relevance to the present one; for in 1935no provision corresponding to
what is now Article 68 of the Statute figured in the Statute as it then
stood. The latter, in fact, contained no provisions at al1 about the ad-
visory jurisdiction, which rested entirely on Article 14 of the Covenant
of the League and the Court's own Rules. It was therefore inevitable that
the Court should feel it had no discretion as to the appointment of a

judge ad hoc unless the matter fell strictly within the terms of those
Rules. Hence the Legislative Decrees case constitutes no precedent,
either for the view that the Court lacks a discretion now, or for a refusa1
to exercise that discretion (which the Permanent Court, not then having
one, could not in any event have exercised). The situation being in
consequence quite different, it becomes evident that if, under Article 68,

of the Statute-which takes precedence of the Rules, there is (as is
unquestionably the case) a discretion to "be guided by the provisions
of the .. . Statute which apply in contentious cases" (including therefore
Article 31) there must be a discretion to allow the appointment of a
judge ad hoc-one of the most important parts of the contentious process.

No (manifestly non-existent) doctrine of the Court's inability to regulate
its own composition could operate to prevent this.

l3 See Article 46 of the Statute. The hearing takes place before the full Court and
in the main Court-room as if for a public sitting, but press and public are excluded.
The decision to sit in private despite South Africa's strong representations to the
contrary, was in my viewmistaken and unwise (as was indeed subsequently impliedly
admitted by the decision to publish the verbatim record of the sitting).

l4Which, in advisory proceedings could be read as meaning the adoption of
broadly the same view on the main legal questions involved. Any State asking to
appoint a judge ad hoc, which had signified its intention to take part in the oral
proceedings, but had not previously presented any written statement, could have
been requested to furnish a brief indication of its principal views or contentions.
or the oral stage of the proceedings (apart from South Africa), could bed to beritten
in thesame (legal) interest, except France,-butthere was already a French judge
among the regular judges of the Court. ces Etats ont effectivementassisté à l'audiencepréliminaire (àhuis clos 13)

qui a portésur ce sujet, mais aucun n'est intervenu pour s'opposer à la
requêteoupour présenterune requête analogue.Si elle avait étésaisie de
deux ou plusieurs requêtessemblables, en plus de celle de l'Afrique du
Sud, la Cour aurait eu à rechercher, en vertu de I'article 3,paragraphe 2,
de son Règlement,si les Etats intéresséso , u tel ou tel groupement de ces
Etats, ne comptant pas de juge de leur nationalité parmi les juges titu-

laires, faisaient ou non ((causecommune »14,auquel cas elle n'aurait pu
autoriser qu'un seuljuge par groupe d7Etats15,
24. L'avis de la Cour se réfère à l'ordonnance de la Cour permanente
rendue le 31 octobre 1935 en l'affaire de la Compatibilitéde certains
décrets-loisdantzikois avec la constitution de la Ville libre (C.P.J.I. série
AIB no65, ann. 1, p. 69-71). Or cette affaire n'offre aucune pertinence
au regard de la présente espèce;en effet, en 1935, aucune disposition

correspondant à l'actuel article 68 du Statut ne figurait dans le Statut en
vigueur. En fait, celui-ci ne contenait aucune disposition relative à la
compétence consultative, qui reposait entièrement sur l'article 14 du
Pacte de la Sociêté des Nations et le Règlementde la Cour. Il étaitdonc
inévitable que la Cour estimât n'avoir aucun pouvoir discrétionnaire
quant à la désignation d'un juge ad hoc, sauf si la question relevait

strictement des termes du Règlement.C'estpourquoi l'affaireconcernant
la Compatibilité de certains décrets-lod isantzikois ne constitue un précé-
dent nià l'appui dela thèse selon laquellela Cour n'a plus maintenant de
pouvoir discrétionnaire ni à l'appui du refus d'exercer cepouvoir (que
la Cour permanente, elle, ne pouvait pas exercer de toute manière
puisqu'ellene lepossédait pas).Lasituationétant par suitetrèsdifférente,
ilest évidentque si, en vertu de l'article 68 du Statut- qui l'emporte sur

le Règlement - la Cour peut (ce qui ne fait aucun doute) s'inspirer «des
dispositions du ...Statut qui s'appliquent en matière contentieuse » (y
compris donc de I'article 31), elle a forcémentle pouvoir discrétionnaire
d'autoriser la désignation d'unjuge adhoc, puisque c'estun des éléments
lesplus importantsde laprocédurecontentieuse.

l3 Voir I'article 46 du Statut. Le débat se déroule devant la Cour siégeant au
complet et dans la grande salle de justice comme s'il s'agissait d'une audience pu-
blique mais ni la presse ni le public ne sont admis. La décisionde siégerclos
malgré les instances pressantes de l'Afrique du Sud a étéselon moi erronée et mala-
visée(ainsi que la Cour'a implicitement admis par la suite en décidant de publier le
compte rendu inextenso de la séance).
l' Ceaui. en matièreconsultative. Deutêtrecom~riscommesienifiant aue lesintéres-
sésontdéspositions plus oumoins identiquessur principales~uestion~juridiquesen
cause. ToutEtat demandant ladésignationd'unjugeadhocqui aurait fait connaîtreson
intention departiciperaprocédureoralemaisn'aurait pas présentépréalablementd'
exuoséécritauraiDU être~ridefournir debrèvesindicationssur sesthèsesprinciuales.
phase orale (en dehors de l'Afrique du Sud) pourraientêtreconsidéréscommeou dans la
faisant cause commune,à l'exception de la France. mais il y a déjàun juge français
parmi les juges titulaires de la Cour. 25. In the light of these various considerations, it is clear that the
Court in no way lacked the power to grant the South African request,
but was simply unwilling to do so. In this 1 think the Court was not
justified, particularly in view of the fact that the request was unopposed
which, to my mind, indicated a tacit recognition by the other intervening

States of the contentious features of the case. The present proceedings,
though advisory in form, had al1the characteristics of a contentious case
as to the substance of the issues involved 16, no less than had the actual
litigation between South Africa and certain other States which terminated
five years ago, and of which these advisory proceedings have been but
a continuation in a different form. Even if, therefore, the Court did not
consider the matter to come under Article 83 of its Rules, in such a way

as to oblige it to allow a judge ad hoc to be appointed, it should have
exercisrd its residual discretionary powers to the same effect.

(b)The existence of a dispute or legal question
pending between States

26. The above expression of viewhas proceeded upon the assumption

that, in order to determine whether the Court could grant the South
African request, and should do so, it was unnecessary to decide whether
the casefellwithin the strictterms of Rule 83.In fact, however, I consider
that it does, and that any other conclpsion is unrealistic and can only
be reached by a closingof the eyes to the true position. It really involves
something that gets very near to equating the words "a legal question
actually pending between two or more States" in Rule 83, with circum-
stances in which two or more States are in a condition of actual or

immediately impending litigation. But, as I have already pointed out,
such an interpretation would virtually nullify the intended effect of
Rule 83 by restricting its scope to situations that seldom take that
precise form in advisory proceedings.
27. The nub of the whole difficulty lies in the word "pending"; but
if this is taken on its normal dictionary acceptation l7 of "remaining
undecided" or "not yet decided", and "not terminated" or "remaining

unsettled",-or in short "still outstandingn,-then it is evident that there
is a whole series of legal questions in issue (or in dispute) between South
Africa on the one hand and a number of other States, and that these
questions are, in this sense, outstanding and unresolved, inasmuch as
the view held on one side as to their correct solution differs in toto

l6 In consequence of which the Court found itself obliged in practice, and in a
manner virtually unprecedented inprevious advisory proceedings,to conduct the
oral hearing asif a litigation were in progress.
l7 As given in up-to-date publicatiosuch as Chambers Twentieth Century Dic-
tionary and the New Penguin English Dictionary. 25. A la lumièrede ces diverses considérations,il apparaît quela Cour
n'était nullement démuniedu pouvoir d'acquiescer à la requêtede
l'Afrique du Sud mais que, tout simplement, elle n'étaitpas disposée à
le faire. Sur ce point, je pense que la Cour a étédans l'erreur, d'autant
que la requête n'avait suscité aucune opposition ce qui, pour moi,
montre que les autres Etats participants reconnaissaient tacitement

l'aspect contentieux de l'affaire. La procédure,bien que consultative sur
le plan formel, a présentétoutes lescaractéristiquesd'un procèsquant au
fond des problèmes débattusJ6, à l'égalde l'affaire contentieuse entre
l'Afrique du Sud et certains autres Etats qui a pris fin il y a cinq ans et
dont la présenteinstance consultative n'est que la continuation sous une
forme différente. Aussi,mêmesi la Cour ne considéraitpas que l'affaire

relevait de l'article 83de son Règlement,defaçon à l'obliger depermettre
la désignation d'unjuge ad hoc, elle aurait dû exercer, pour aboutir au
mêmerésultat, sonpouvoir discrétionnairerésiduel.

b) L'existence d'un dzfférendou d'unequestion,iuridique
pendante entreEtats

26. Les vues qui précèdent reposent sur l'hypothèse que, pour déter-
miner si la Cour pouvait et devait faire droit à la requêtede l'Afrique du
Sud, il était inutile de décidersi l'affaire relevait strictement des termes
de l'article 83 du Règlement.Pour ma part, je considèreque c'est le cas
et que toute autre conclusion manquerait de réalismeet équivaudrait à
refuser délibérémend te voir la situation comme elle est. En effet, elle
reviendrait presque à assimiler la situation décrite par les mots ((une

questionjuridique actuellement pendante entre deux ou plusieurs Etats ))
qui figurent à l'article 83,à celle de deux ou plusieurs Etats s'opposant
dans un procès déjàentaméou sur lepoint del'être. J'ai déd jitque cette
interprétation réduirait pratiquement ànéantl'effetqu'on a voulu donner
à l'article 83, en limitant sa portée à des situations qui se présentent
rarement sous cetteforme préciseenmatièreconsultative.

27. Le nŒud du problème résidedans le mot ((pendante »; mais si
l'on prend ce terme dans l'acception normale qu'en donnent les diction-
naires 17,à savoir « non encore décidé a (remaining undecidedou not yet
decided), et cnon terminé » ou ((non encore tranché » (not terminated,
remainingunsettled), bref ((en souffrance »,il est évident qu'il existetoute
une sériede questionsjuridiques en jeu ouen contestation entre l'Afrique
du Sud d'unepartet plusieurs autresEtats d'autrepart,et qu'en cesensces

questions sont en souffrance et non résolues,dans la mesure où l'opinion

l6 En conséquence de quoi la Cour s'est trouvée obligéeen pratique, et d'une
manière virtuellement sans précédenten matière consultative, de laisser se dérouler
la procédure orale comme si un procès était en cours.
l7Définitions données, pour l'anglais, dans des éditions récentes du Chambers
Twentieth Century Dictionary et du nouveau Penguinnglish Dictionary. from that taken on the other. Would it be possible for instance to find

a more concrete and fundamental issue of this kind than one which
turns on whether the Mandate for SW. Africa has been legallyterminated
or is still in existence; whether South Africa is functus ojîcio in SW.
Africa or is still entitled to administer that territory, and whether South
Africa's continued presence there is ar illegal usurpation or is in the
legitimate exerciseùf a constitutional authority? It would surely be dif-
ficult to think of a more sharply controversial situation than one in
which, depending on the answers to be given to these questions, South
Africa is on the one side being called upon to quit the territory, while
she herself asserts her right to remain there,-in which it is maintained
on the one side that the whole matt.er has been settled by the General
Assembly resolution 2145 of 1966,and on the other that this resolution
was ultra viresand devoid of legal effect,-and therefore settled nothing.
The case in fact falls exactly within the definition of a dispute which,
following my former colleague Judge Morelli, 1 gave in rny separate

opinion in the Northern Cameroonscase (I.C.J. Reports 1963, at p. 109),
when 1said that the essential requirement was that:

". .. the one party [or parties] should be making, or should have
made, a complaint, claim or protest about an act, omission or
course of conduct, present or past of the other party, which the
latter refutes, rejects or denies the validity of, either expressly, or

else implicitly by persisting in the acts, omissions or conduct com-
plained of, or by failing to take the action, or make the reparation,
demanded".

If this does not describe the situation as it has long existed, and now
exists, between the United Nations or many of its member States, and
South Africa, 1 do not know what does.

28. Nevertheless it may be suggested that these issues, concrete and
unresolved as they are, and hence, in the natural and ordinary sense,
"pending" and "actually pending", are not, within the primarily intended
meaning of the words, pending "between two or more States", because
they lie too much at large between South Africa and either the United
Nations as an entity, or a group of its Members rather than as individual
States. In other circumstances there might be a good deal to be said in
favour of this view. But the Assembly resolution purporting to terminate
the Mandate has led to a situationin which, as it was one of its objects,
this resolution is being made the basis of individualaction taken outside
the United Nations by a number of States in their relations with Southqu'une partie se fait de la manièrecorrecte de les résoudrediffèretotale-
ment de celledesautresparties. Peut-on concevoir en la matièrequestions
plus concrèteset plus fondamentalesque cellesquiconsistent par exemple
à déterminers'il a étémis fin légalementau Mandat pour l'Afrique du
Sud ou si ce mandat existe encore, si l'Afrique du Sud est déchuede ses
fonctions dans le Sud-Ouest africain ou si elle a encore quelque titre à

administier ce territoire, et si le fait qu'elle y maintient sa présence
constitueuneusurpation illégaleou bien l'exercicelégitimed'une autorité
constitutionnelle? Quelle situation pourrait être plus radicalement
litigieuse que celle où, suivant les réponses données à ces questions,
l'Afrique du Sud est invitée à quitter le territoire alors qu'elle-même
affirme son droit d'y rester, où l'on soutient d'un côtéque la résolution
2145 (1966)de l'Assembléegénéralea régléle problème, de l'autre que
cette résolution constituait un abus de pouvoir, qu'elle est dépourvue
d'effetjuridique et par conséquentqu'ellen'a rien résolu?En fait, l'affaire
répondexactement à la définitiondu différendque, suivant l'exemplede
mon ancien collègueM. Morelli, j'ai donnée dans mon opinion indivi-
duelle en l'affaireduCameroun septentrional(C.I.J. Recueil1963,p. 109),

oùj'ai dit quelacondition essentielleétait que:
((l'unedes Parties [ou les parties] formule ou ait formulé,àpropos
d'une action, d'une omission ou d'un comportement présentésou
passésde l'autre Partie, un grief, une prétentionou une protestation

que ladite Partie conteste, rejette ou dont elle déniela validité, soit
expressément,soit implicitement en persistant dans l'action, I'omis-
sion ou le comportement incriminés,ou bien en ne prenant pas la
mesure demandée, ou encore en n'accordant pas la réparation
souhaitée )).
Si cette définitionne décritpas la situation qui existe depuis longtemps

entrel'Organisation desNations Unies, ounombrede sesEtats Membres,
et l'Afriquedu Sud,je ne voispas cequi pourrait lefaire.

28. On dira peut-être que ces problèmes, bien que concrets et non
résolus et, par conséquent,((pendants »et «actuellement pendants »,au
sens naturel et ordinaire, ne sont pas, au sens premier qu'on a voulu
donner à ces mots, pendants ((entre deux ou plusieurs Etats », parce
qu'ils se posent d'une façon trop généraleentre l'Afrique du Sud d'une

part, et d'autre part l'Organisation des Nations Unies en tant qu'entité
ou un groupe de sesMembres, et non pas des Etats pris individuellement.
En d'autres circonstances les arguments en faveur de cette manière de
voir ne manqueraient peut-être pas. Mais la résolution par laquelle
l'Assembléegénéralea entendu mettre fin au Mandat a entraîné, et
c'étaitd'ailleurs bien l'un de ses buts, une situation dans laquelle plu-Africaover SW. Africa, as described in some detail by Counsel for South
Africa at the preliminary oral hearing held on 27 January 1971 la.

29. One example must (but will) suffice-namely the situation which
has arisen over the application to South West Africa of the 1965Mon-
treux International Telecommunication Convention. When becoming
a party to this Convention, South Africa gave notice in proper form
applying itto SW.Africa also. Thereupon a number of States l9addressed
officialcommunications to the Secretariat of the International Telecom-

munication Union, which were al1to the same effect, namely that pre-
cisely by reason of Assembly resolution 2145 purporting to terminate
the Mandate, South Africa no longer had the right to administer or
speak for SW. Africa, and that, in consequence, the application of the
Convention to that territory was invalid and of no effect. The Adminis-
trative Council of the Union then, in May 1967,circularized the member
States with a request for their views on the matter, which was put to

them in the form whether South Africa's right to represent SW. Africa
"should be withdrawn". To this South Africa, on 23 May 1967, sent a
full and reasoned reply affirming its continuing right to represent SW.
Africa. Nevertheless at the next session of the Union a majority voted
in favour of the "withdrawal". There now in consequence exists a clear-
cut and concrete dispute, not only between South Africa and a majority
of the members of the Union as such, but also individually between
South Africa and those specific members who injtiated and raised the

issue in the first place. The subject-matter of this dispute is whether or
not the 1965 Convention is or is not applicable to SW. Africa;-and
this dispute. or legal question (to use the language of Rule 83), not only
is actually pending between South Africa and those States, and continues
so to be, but also constituted one of the alieged possible "legal conse-
quences" of the purported termination of the Mandate which the Court
might have to considerin thepresent proceedings.

30. For these reasons, were it necessary to hold (as in my view it is
not) that the Court had no residual power outside Rule 83 to allow the
appointment of a South African judge ad hoc, 1 should take the view

l8 Typescript of verbatim record, C.R(H.C.) 7111 (Rev.), pp. 19-28.
l9 These were, in the order named in the record (see preceding note), the Federal
Republic of Cameroon, Yugoslavia, Tanzania, United Arab Republic, Soviet Union,
Ukrainian S.S.R., Byelorussian S.S.R. and Poland. NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.DISS.FITZMAURICE) 315
sieurs Etats, s'appuyant précisémentsur cette résolution, ont pris des

mesures individuelles en dehors de l'Organisation des Nations Unies
dans leurs relations avec l'Afrique du Sud pour ce qui concerne le Sud-
Ouest africain - l'on trouve des détailsà ce sujet dans l'exposéfait par
le conseil de l'Afrique du Sud à l'audience préliminaire du 27 jan-vier
1971 la:
29. Il devrait suffir- et il suffira- de donner ici un seul exemple,
celui du problèmede l'application au Sud-Ouestafricain dela convention

internationale des télécommunications deMontreux (1965). Lorsqu'-
elle a adhéré à cette convention, l'Afrique du Sud en a donnénotification
en bonne et due forme, par écrit, et a fait savoir que la convention
s'appliquerait aussi au Sud-Ouest africain. A la suite de quoi plusieurs
Etats l9 ont adresséau secrétariatde 1'UITdescommunications officielles
qui allaient toutes dans le même sens, à savoir que précisémene tn raison

de la résolution 2145 de l'Assembléegénéraleq , ui était censéemettre fin
au Mandat, l'Afrique du Sud n'avait plus le droit d'administrer le Sud-
Ouest africain ni deparler en sonnom, et qu'en conséquencel'application
dela convention àceterritoireétait sans valeur et sans effet.En mai 1967,
le conseil d'administration de 1'UIT envoyait aux Etats membres une
circulaire sollicitant leur avis sur la question, et leur demandait s'il
à l'Afrique du Sud le droit de représenter leSud-Ouest
fallait retirer
africain. Le23mai 1967,l'Afrique du Sud a envoyé une réponse détaillée
et circonstanciée affirmant lemaintien de son droit de représenter le
Sud-Ouestafricain. Néanmoins, àla sessionsuivante delYUIT,lamajorité
s'estprononcéepour le ((retrait B.Voilà donc un différendévidentet con-
cret, non seulement entre l'Afrique du Sud etlamajoritédesmembres de
I'UITentantaue tels.maisaussiindividuellemententre1'Afriauedu Sud et

ceux des membres q;i ont pris l'initiative de souleverleprobfème.L'objet
de ce différend estde savoir si la convention de 1965 est ou n'est pas
applicable au Sud-Ouest africain; or ce différend,ou question juridique,
pour reprendre les termes de l'article 83 du Règlementde la Cour, non
seulement est actuellement pendant entre l'Afrique du Sud et ces Etats,
et continuera à l'être,mais il constitue une des«conséquencesjuridiques ))
possibles de laprétendueextinction du Mandat que la Cour pourrait avoir

à examinerdans laprésente affaire.

30. Pour toutes ces raisons, s'il étaitnécessairede démontrer, ce qui
a mon avis ne l'estpas, que la Cour n'a besoin d'aucun pouvoir résiduel

en dehors de ceux que lui confère l'article83du Règlementpour autoriser

l8C.R. (H.C.) (Rev.), p. 19 à 28.
l9Ces Etats sont les suivants, dans i'ordre de leur énumérationau compte rendu
République arabe unie, Union soviétique, R.S.S. d'Ukraine, R.S.S. de Biélorussie
et Pologne.that the conditions specified in the Rule were fully satisfied and that it
was applicable so as to oblige the Court to grant the request, as justice
and equity in any event cailed for, in the exercise of its undoubted dis-
cretionary power. In fact, if everthere was a casefor allowingtheappoint-
ment of a judge ad hoc in advisory proceedings, that case was this one.

31. On the basis of the foregoing views two somewhat serious con-
sequenceswould ensue. The first is that, in refusing to allow the appoint-
ment of a judge ad hoc, the Court in effect decided that the proceedings
did not involve any dispute, and thus prejudged the substance of a
number of issues raised by South Africa which turned on the existence

or otherwise of a dispute,-although no argument had yet been heard
on these issues, nor was until after the Order embodying the Court's
decision on the matter had been issued. Thiscreated a situation in which,
in most national legal systems, the case would, on appeal, have been
sent back for a re-trial. Similarlv the Court virtuallv ~recluded itself
from going into any question oi fact; for disputed &es of fact are
difficult todeal with except on the basis of a contentious procedure
involving recognition of the existence of a dispute. This again was in
advance of having heard the South African argument on the question
of the admission of further factual evidence,-although the Court was,
from the start, under written notice of the South African view that such
further evidencewas relevant and im~ortant. These viewsarenot affected
bythe fact that, as the Opinion ofthe Court correctly observes, a decision
on the question of a judge ad hoc, being a matter of the composition
of the Court, had to be taken in advance of everything else,-although
this situation may well point to a somewhat serious flaw in the present

Rules. It cannot however affectthe fact that, having rejected the request
for the appointment of a judge ad hoc-and on the very ground that
there was no dispute or legal question pending (for if the Court had
thought there was, Rule 83would have obliged it to grant the request)-
the Court was thenceforward precluded in practice, in connexion with
anything arising later in the case, from coming to a different conclusion
as to the existence of a dispute or legal question pending. Hadthe Court,
without prejudging these matters, simply exercised its discretion in the
sense of allowing the appointment (as in my view it should in any case
have done), no difficulty would have arisen. But it should at least, and
ut that stage, have heard full argument on the question, in the course
of ordinary public hearings.
32. Secondly, the failure to allow the appointment of a judge ad hoc,
coupled with the views expressed by my colleague Judge Gros, which
1 share, concerning the third of the three Orders of the Court referredla désignationd'un juge ad hoc sud-africain, je dirais que les conditions
spécifiéesdans cet article étaient pleinement remplies et que l'article
étaitapplicable, de sorte que la Cour aurait dû faire droità la requête,
comme d'ailleurs la justice et l'équitéauraient dû l'inciterle faire dans
l'exercice de son pouvoir discrétionnaire incontesté.En vérité,s'il y a
jamais eu une affaire consultative où il étaitjustifié d'autoriser la dési-
gnation d'unjuge adhoc,c'estbien celle-ci.

31. Les considérations qui précèdentcomportent deux conséquences
assez graves. La première est qu'en refusant l'autorisation de désigner
un juge ad hoc, la Cour a décidéen réalitéque l'affaire n'impliquait
aucun différend,préjugeant ainsile fond de plusieursquestions soulevées
par l'Afrique du Sud et qui dépendaient del'existenceou de l'inexistence
d'undifférend,alorsqu'aucune argumentation n'avait encoreétéprésentée
sur ces points qui n'ont été débattus qu'après lapublication de l'ordon-
nance par laquelle la Cour s'estprononcée. Il en estrésulté unesituation
telle que, dans la plupart des systèmesjuridiques nationaux, l'affaire
serait, en appel, renvoyéepour un nouveau jugement. De même,la Cour
s'est virtuellement interdit d'examiner toute question de fait; en effet,

il est difficiled'aborder des points de fait litigieux hors du cadre d'une
procédure contentieuse supposant que l'existence d'un différenda été
reconnue. Là encore la Cour a agi avant d'avoir entendu l'Afriquedu Sud
au sujet de la présentation de nouvelles preuves sur les faits, bien que
l'Afrique du Sud lui eût fait savoir par écrit,dèsle début, que ce com-
plément de preuvelui paraissait pertinent et important. La situation n'est
modifiée en rienpar le fait que, comme l'avis de la Cour le souligne
à juste titre, la question du juge ad hoc, intéressantla composition de la
Cour, doit êtrerégléeavant toute chose - bien que celaindique peut-être
un défautgrave du Règlementactuel. Il reste qu'ayant rejetéla demande
de désignationd'un juge ad hoc - précisémenp tour la raison qu'il n'y
avait ni différend niquestion juridique pendante (car si la Cour avait
penséle contraire, l'article3 du Règlementl'aurait obligée à consentir
à la demande) - la Cour se voyait désormaisempêchée en pratique, à

propos detoute question ultérieure,d'en venir àuneconclusion différente
quant à I'existenced'un litige ou d'une question pendante. Si la Cour,
sans rien préjuger, s'était bornéeà exercer son pouvoir discrétionnaire
en autorisant la désignation (commeelle aurait dû le faire de toute façon
d'aprèsmoi), aucune difficulténe seserait présentéepar la suite. Mais elle
aurait au moins dû, à cestade, permettre que la question soit pleinement
débattueau cours d'audiencespubliques normales.

32. La deuxième conséquence est que, si l'on y ajoute ce que mon
collègueM. Gros, dont je partage les vues, a fait observer à propos de
la dernièredes trois ordonnances de la Cour viséesau paragraphe 18de317 NAMIBIA (s.w.AFRICA) (DISS. OP. FITZMAURICE)
to in paragraph 18of this Annex, arouses in me a number of misgivings,
as to which it will suffice here to Say that 1 associate myself entirely

with what is stated at the end of paragraph17of Judge Gros' Opinion.

(Initialled) G.F.la présente annexe,le refus d'autoriser la désignationd'un juge ad hoc
créechez moi des inquiétudes àpropos desquelles il me suffira de dire
ici queje m'associeentièrementaux observations faites à la fin du para-
graphe 17del'opinion dissidentede M. Gros.

(Paraphé)G. F. Paragraphs
PART1: Introductory Considerations ........... 1-10
PARTII: Substance ................... 11-123

SECTION A: Non-subrogation of the United Nations to
the powers of the League of Nations in
respect of Mandates ........... 11-64
SECTION B : In any case the powers of the League did not
include any power of unilateral revocation 65-89

SECTION C: Charter limitations on the competence and
powers of the Principal United Nations
Organs ................. 90-116
SECTION D: "The legal consequences for States" .... 117-124
POSTSCRIPTUM : Other consequences ........... 125

ANNEXP : reliminary and Incidental Matters. ........ 1-32

PART1: Introductory considerations ............ 1-10

1. The real issues in the case............. 1-9
2. Arrangement, and statement of principal conclusions . . 10
PARTII :Substance ................... 11-125

SECTION A: Non-subrogation of the United Nütions to the
powers of the League of Nations in zespect of
Mandates ................. 11-64
1. United Nations not the successorin law of the League-
Possible methods of succession: by arrangement, by
implication, by consent (novation). ......... 11-13

2. Absence of any automatic succession by implication . 14-19

(i) The supervisory function as the corollary of the
obligation to report.............. 14
306 TABLE SYNOPTIQUE

GRANDE SECTIONS

Paragraphes

PREMIÈRE PARTIE: Considérations introductives ....... 1-10
DEUXIÈME PARTIE :Fond ................. 11-123

SECTION A: Non-subrogation de l'organisation des Na-
tions Unies à la Société desNations dans ses
pouvoirs relatifs aux mandats. ...... 11-64
SECTION B: En tout cas le pouvoir de révocation uni-
latérale n'entrait pas dans les pouvoirs de
la SdN. ................ 65-89
SECTION C: Limites de la compétenceet despouvoirs que
les organes principaux des Nations Unies
tiennent de la Charte .......... 90-116
SECTION D: (Conséquencesjuridiques pour les Etats )) . 117-124
POST-SCRIPTUA Mu:tres conséquences. .......... 125

ANNEXEQ : uestions préliminaireset questions incidentes.. 1-32

PREMIÈRE PARTIE:Considérations introductives 1-10
.......
1. Véritables problèmesse posant en l'espèce ....... 1-9
2. Ordre et énoncédes conclusions principales ...... 10

DEUXIEM PARTIE :Fond ................. 11-125
SECTION A: Non-subrogation de l'organisation des Nations
Unies àla Sociétédes Nations dans sespouvoirs
relatifs aux mandats ............ 11-64

1. L'Organisation des Nations Unies n'est pas en droit le
successeur de .la Société desNations - Méthodes
possibles de successionpar voie d'accord, implicitement,
par voie de consentement (novation). ........ 11-13
2. Absence de succession automatique et implicite .... 14-19

i) La fonction de surveillance comme corollaire de
l'obligation de faire rappo........... 14 Paragraphs

(ii) Distinction between the reporting obligation in se
and the right to claim performance of it . . . . . 15

(iii) Reportin2 obligation capable of implementation
otherwise than by reporting to an organ of the
United Nations . . . . . . . . . . . . . . . . 16
(iv) No automatic conversion of thereporting obligation
into a duty owed to the Assembly of the IJnited
Nations, a new and different entity-Statement of
differences . . . . . . . .'. . . . . . . . . . 17-18
(v) Conclusion as to implied succession . . . . . . . 19
3. Arguments in opposition to this conclusion . . . . . 20-34

(a) The Court's Opinion of 11July 1950 . . . . . . 21-22
(b) Question of implications said to be derivable from
the Charter. . . . . . . . . . . . . . . . . . 23-32
(i) In general . . . . . . . . . . . . . . . . 23
(ii) ArticleIO . . . . . . . . . . . . . . . . 24-25
(iii) Article 80 . . . . . . . . . . . . . . . . 26-32

(c) The "organized world community" argument. . . 33-34
4. Political rejection in the United Nations (1945-1946)of
any continuity with the League of Nations . . . . . . 35-50

(a) In general and in principle . . . . . . . . . . . 35-38
(i) Attitude toward the League. . . . . . . . . 35-36
(ii) Assembly resolution XIV of 12 February 1946 37-38

(b) In particular as regards mandates . . . . . . . . 39-44

(i) Settled policy of preference for, and reliance on,
the trusteeship system . . . . . . . . . . . 39-40
(ii) The final League resolution on mandates
(18 Apri1 1946) . . . . . . . . . . . . . . 41-44
The "Chinese" draft . . . . . . . . . . . 43(a)
The reference to Chapter XI of the Charter 43(b)
(c) Reasons for the United Nations attitude on man-
dates-its significance . . . . . . . . . . . . . 45-46
(d) Conclusion as to the legal effects of this attitude . 47-50

5. The issue of consent-No recognition by the Mandatory
of any accountability to the United Nations . . . . . 51-64 Paragraphes

ii) Distinction entre l'obligation de faire rapport propre-
ment dite et le droit d'exiger l'exécutionde cette
iii) L'obligation de faire rapport pouvait être remplie . .
autrement qu'en faisant rapport à un organe de
l'ONU . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
vi) L'obligation de faire rapport ne s'est pas automati-
quement transformée en un devoir envers 1'Assem-
bléegénérale desNations Unies, entité nouvelle et
différente.Indication des différences . . . . . . .
v) Conclusion concernant une succession implicite . .

3. Arguments contraires concernant cette conclusion. . .

a) Avis consultatif de la Cour du 11juillet 1950 . . .
b) Question des déductions que l'on prétend pouvoir
tirer de la Charte . . . . . . . . . . . . . . .
i) En général . . . . . . . . . . . . . . . . .
ii) Article 10 . . . . . . . . . . . . . . . . .
iii) Article 80 . . . . . . . . . . . . . . . . .
c) L'argument dela ((communautémondiale organisée 1)

4. Rejet politique, aux Nations Unies (en 1945-1946),de
toute continuitéavec la Société desNations . . . . .
a) En généralet en principe . . . . . . . . . . . .
i) Attitude à l'égardde la Sociétédes Nations . .
ii) RésolutionXIV de l'Assemblée générale ed nate
du 12février1946. . . . . . . . . . . . . .

b) En ce qui concerne les mandats en particulier . . .
i) Politique établie tendant à donner la préférence
au régimede tutelle et à s'appuyer sur ce régime.
ii) Résolution finale de la Sociétédes Nations sur
les mandats (18 avril 1946) . . . . . . . . . .
Le projet cchinois » . . . . . . . . . . . .
La référenceau chapitre XI de la Charte. . .
c) Motifs expliquant l'attitude des Nations Unies sur
les mandats - Importance de cette attitude . . . .
d) Conclusions relatives aux effets juridiques de cette
attitude. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

5. Question du consentement. Le Mandataire ne reconnaît
aucune obligation de rendre compte à l'organisation
des Nations Unies. . . . . . . . . . . . . . . . . NAhfIBIA (s.w. AFRICA (DISS. OP.FITZMAURICE)
Paragraphs

(a) General principles. . . . . . . . . . . .
(i) Absence of any basis of consensus . . . . . .
(ii) A novation was involved . . . . . . . . . .
(iii) Legal effect of "Statements of Intention". . .
(b) Particular episodes . . . . . . . . . . . . . .
(i) The final League of Nations resolution of
Il April 1946 . . . . . . . . . . . . . . .
(ii) The question of the incorporation of SW.Africa
as part of South Africa itself . . . . . . . .
(iii) The Mandatory's offer to render reports under
Article 73 (e) of the Charter . . . . . . . .
(c) Conclusions as to consent . . . . . . . . . . .

6. General conclusion on Section A. No supervisory
function ever became vested in the United Nations . . 64

SECTION B: In any case the powers of the League did not
include any power of unilateral revocation . . . 65-89

1. The United Nations could not exercise any other or
greater powers than had been possessed by the League 65-66
2. The League had no power of unilateral revocation of a
mandate, either express or implied . . . . . . . . . 67-85
(a) Presumption against the existence of such a power 67-72
(b) Positive contra-indications:-(1) basedon the terms
of the relevant instruments and received principles
of interpretation. . . . . . . . . . . . . . . . 73-84
(i) Essentially non-peremptory character of the
mandates system . . . . . . . . . . . . . 73
(ii) Limited scope of the supervisory function as
exercised by the League Council. . . . . . . 74-78
(iii) The League'svoting rule of unanimity including
the vote of the mandatory . . . . . . . . . 79-80
(iv)Contemporaneous consideration and rejection
of notion of revocability . . . . . . . . . . 81-82
(v) The administration as an "integral portion"
clause of the mandate . . . . . . . . . . . 83-84
(c) Positive contra-indications :-(2) based on the
circumstances prevailing when the mandates system
was established . . . . . . . . . . . . . . . . 85

3. General conclusion on Section B. The mandates were
not intended to be unilaterally revocable. . . . . . . 86-89
Test of this conclusion . . . . . . . . . . . . . 87 Pari

a) Principes généraux . . . . . . . . . . . . . . .
i) Défautde base réellede consentement . . . .
ii) Il y a eu novation. . . . . . . . . . . . . .
iii) Effetjuridique des «déclarations d'intention ». .
b) Evénementsparticuliers. . . . . . . . . . . . .
i) Résolution finale de la Société desNations du
18avril 1946 . . . . . . . . . . . .. . . . .
ii) Question de l'incorporation du Sud-Ouest afri-
cain à l'Afrique du Sud . . . . . . . . . . .
iii) Offre du Mandataire de fournir des rapports en
vertu de l'article 73e) de la Charte . . . . . .
c) Conclusions relatives au consentement . . . . . .
6. Conclusion générale de la section A. Aucune fonction de
surveillance n'a jamais étédévolue à l'organisation des
Nations Unies . . . . . . . . . . . . . . . . . .
SECTION B: En tout cas, le pouvoir de révocationunilatérale
n'entrait pas dans les pouvoirs de la SdN. . . .

1.grands que ceux que possédait lauvoirSdNutr. . . pl.s. . .
2. La SdN n'avait aucunpouvoir de révocation unilatérale,
exprèsou implicite . . . . . . . . . . . . . . . .

a) Présomption contre l'existenced'un tel pouvoir . .
b) Itermes des instruments pertinents et des principes
admis d'interprétation . . . . . . . . . . . . .
i) Caractère essentiellement non absolu du système
des mandats . . . .. . . . . . . . . . . .
ii) Portéelimitéede la fonction de surveillanceexer-
céepar le Conseil de la Société desNations . .
iii) Règle de voteà la Société des Nations - Unani-
mité y compris le vote du mandataire . . . . .
iv) Examen contemporain et rejet de la notion de
révocabilité. . . . . . . . . . . . . . . . .
v) Clause du mandat concernant l'administration
comme (partie intégrante ). . . . . . . . . .
c) Indications positives contraires 2) résultant des cir-
constances qui régnaientau moment où le système
des mandats a étéétabli. . . . . . . . . . . . .
3. Conclusion généralede la section B. Les mandats
n'étaientpas censésêtreunilatéralement révocables. .
Vérificationde cette conclusion . . . . . . . . . . Paragraphs

SECTION C: Charter limitations on the competence and
powers of the Principal United Nations Organs 90-116
1. In the case of the Assembly ............ 91-107
(i) Absence in principle of executive powers-Non-
binding and purely recommendatory character of
its resolutions ................ 92-96
(ii) Powersacquired ab extra or aliundeonly exercisable

within th...................embly's Charter com-
petence 97-103
(iii) Factors confirming these conclusions...... 104-106
The Klaestad-Lauterpacht views in the Voting
Procedurecase ............... 104-105
The Court's answer to question (c) in the 1950
advisory proceedings. ............ 106
(iv) Conclusion as to the powers of the Assembly-It
cannot in the field of mandates do more than make
recommendations-It has no competence to revoke 107

2. In the case of the Security Council......... 108-116
(i) Consequential character of the Security Council's
resolutions in the present case ......... 108
(ii) The Security Councildoes not possess any other or
greater powers than the Assembly in the field of
mandates as such ............... 109
(iii) No competence to exercise greater powers in the
guise of peace-keeping, unless there is a genuine
threat to peace and security. .......... 110-111

(iv) Proper scope of the Security Council's peace-
keeping functions under the Charter-Effect of
Articles 24 and 25. .............. 112-114
(v) The Security Council cannot, even for peace-
keeping purposes, effect changes in territorial
sovereignty or rights of territorial administration 115-116

SECTION D :"The legal consequences for States" ..... 117-124

1. In general .................... 117
2. For South Africa ................. 118-121
3. For other States ................. 122-124

POSTSCRIPTUM :Other consequences ........... 125 Paragraphes
SECTION C: Limites de la compétenceet des pouvoirs que les
organes des Nations Unies tiennent de la Charte 90-116

1.L'Assemblée général ............... 91-107
i) Ses pouvoirs n'ont pas en principe un caractère
exécutif- Ses résolutions sont de simples recom-
mandations non obligatoires. ..........
ii) Elle ne peut exercer les pouvoirs qu'elle tient d'une
autre source ou de l'extérieurque siellereste dans les
limites de la compétenceque la Charte lui confère .
iii) Facteurs confirmant ces conclusions .......

Opinions Klaestad-Lauterpacht dans l'affaire de
la Procédurede vote .............
Réponse donnéepar la Cour à la question c) dans
la procédureconsuItative de 1950 .......
iv) Conclusion quant aux pouvoirs de l'Assemblée. Elle
ne peut prendre que des recommandations dans le
domaine des mandats. Elle n'a pas compétencepour
procéder à une révocation. ...........
2. Le Conseil de sécurité ...............

i) Caractère accessoire des résolutions du Conseil de
sécurité en la présenteespèce ..........
ii) Le Conseil de sécuriténe possède pas de pouvoirs
autres ou plus grands que ceux de l'Assembléeen
matière demandats ..............
iii) Le Conseil de sécurité n'apas compétence pour
exercer des pouvoirs plus grands, sous le prétextedu
maintien de la paix, à moins qu'il n'existe une
menace véritablecontre la paix et la sécurité. ...
iv) Etendue réelle despouvoirs du Conseil de sécurité
relatifs au maintien de la paix en vertu de la Charte
- Effet des articles 24 et 25...........
v) Le Conseil de sécuriténe peut, mêmeaux fins du
maintien de la paix, effectuer des changements
touchant à la souverainetéterritoriale ouà des droits
d'administration territoriale...........

SECTION D: ((Conséquencesjuridiques pour les Etats)) ... 117-124
1. Généralités. ................... 117
2. Pour l'Afrique du Sud. .............. 118-121

3. Pour les autres Etats ............... 122-124

POST-SCRIPTUM :Autres conséquences. .......... 125322 NAMIBIA (s.w.AFRICA) (DISS. OP. FITZMAURICE)
Paragraphs

ANNEXP : reliminary and incidental matters ......... 1-32

1. Incornpetence of the United Nations Assembly to act as a
court of law .................... 1-8
2. The Court's right to examine the assumptions underlying
any Request for an Advisory Opinion ......... 9-12
3. Should the Court have refused to comply with the Request
in the present case? ................. 13-16
4. The question of the appointment of a South African judge
ad hoc. ...................... 17-32
(a) The relevant provisions of the Court's Statute and
Rules ..................... 17-25
(b) The question of whether there was a dispute .... 26-32 Paragraphes
ANNEXE Q:uestions préliminaires et questions incident... 1-32

1. L'Assembléedes Nations Unies est incompétente pour
agir comme tribunal. ................ 1-8
2. Droit pour la Cour d'examiner les prémissesde toute
demande d'avis consultatif. ............. 9-12
3. La Cour devrait-elle donner suite à la demande d'avis
consultatif en l'espèce?............... 13-16
4. La question de la nomination d'unjugead hocsud-africain 17-32

a) Les dispositions applicables du Statutet du Règlement 17-25

b) Question de savoir s'il existait un différe..... 26-32

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Document Long Title

Opinion dissidente de M. Gerald Fitzmaurice

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