Opinion individuelle de M. Azevedo

Document Number
008-19500330-ADV-01-01-EN
Parent Document Number
008-19500330-ADV-01-00-EN
Document File
Bilingual Document File

OPINIONIXDIVIDUELLE DE M.AZEVEDO

T. Ne pouvant concilier dans mon esprit des notions de nature
différente et qui pourtant ont étésoumises à un seul et niêmevote
- savoir : le point préliminaire touchant le pouvoir de la Cour de
répondre à la demande d'avis et la solution même à donner aux

questions posées -, j'ai éprouvédes difficultés à rne prononcer.
Sans doute j'aurais préférévoir la Cour s'abstenir de répondre ;
ce point préjudiciel n'ayant pas été retenu, je ne m'en considère
pas moins comme tenu de me prononcer sur la matière desdites
questions et je le fais sans aucune hésitation en plein accord avec
l'avis.

Mais je ne peux renoncer à expliquer les motifs qui, selon moi,
auraient conduit la Cour à l'abstention, étant donnéquela demande
porte sur une situation concrète et nettement décrite. Lors de
l'avis sur l'admission de nouveaux Membres, j'avais déjàmanifesté,
dans une opinion séparée, le désirde voir toujours présenter sous

une forme abstraite l'objet de l'avis consultqtif (C. 1.J. Recueil
1947-194 pp,73-75). Mais le relief que prend le problème dans le
cas présent rend nécessairesde plus amples développements.

2.-Autenlps de la Société desXations, la pratique a accentué
une tendance à assimiler la fonction consultative de la Cour
permanente à son activité contentieuse.

Malgrécette tendance, l'or1est venu à constater une profonde
différenceentre les avis portant sur un simpl« point »ou «question »
et les avis liéà un « différend»déjà existant ;dans le premier cas,
ils'agissait seulement de l'examen d'un aspect purement juridique
sur lequel de simples informateurs, dont le rôle était très restreint,
donnaient des éclaircissements préalables, tandis que, dans le
second cas, la Cour était saisie d'un véritable litige.

Si, du point de vue formel, la nature de tous les avis est la même
- simple relation entre la Cour et l'organe demandeur -, l'avis
rendu sur un point est, du point de vue juridique, autre que l'avis
rendu sur un « différend1)C'est ce qu'a noté hTegulesco(«L'évolu-

tion de la procédure des avis consultatifs », Recueil des Cours,
v. 57, P. 9).80 OPINION INDIVIDUELLE DE M. XZEVEDO

Hanzmarskjold remarquait aussi :
(Il s'ensuit, sans doute possible, qu'ilserait contraireà la pensée
des auteurs du Pacte de voir dans la disposition dont il s'agit le
moyen d'introduire dans le Pacte, d'une façon détournée,l'idée
de juridiction obligatoire qui, de propos délibérée ,n avait été
écartée.Mais ils'ensuit aussi que, selon les auteurs du Pacte, l'acti-
vité consultative de la Cour devait êtreune fonction dont l'exercice
serait entouré de toutes les garanties judiciaires. ))(Jzcridiction
internationale - ((In memoriam », 1938, p. 284.)

Pour bien marquer ces positions, la Cour permanente a dû se
réserver d'examiner sa compétence mêmed'office, en donnant une
application générale à la règle de l'article 36, n. 6, du Statut, ainsi
que la recevabilité de la demande ;avec cette conséquenceon arrivait
qu'en cas de différend, les Etats intéressésse voyaient assurer 1%
qualité de parties, a17ecune plus grande liberté d'action.

3. En somme, le problème du consentement des parties se posait
dans le cas d'avis sur un différend ))actuellement né.

Certes, l'on savait bien que leseffets de la chose jugéene découlent
pas de simples avis, mais, en tout cas, cette constatation ne suffit
pas pour refuser à un avis toutes les consPquences o oral es,inhé-
rentes à la dignité de l'organe qui le rend, et même juridiques.

Il est nécessaire de signaler, en passant, que le phénoinène de
la chose jugée n'a pas en droit international la mêmeimportance
qu'en droit interne, où l'exécution forcée est assurée par l'État.
Au contraire, les décisionsinternationales ont en généralun caractère
déclaratif, et c'est récemment seulement qu'on s'est engagé sur la
voie des sanctions indirectes appliquées par un tiers organe. Reste
l'aspect négatif, celui qui interdit le renouvellement d'une requête

par l'exceptio rei judicatcz, d'ailleurs d'une application tout aussi
rare dans le domaine international.
Hammarskj6ld, après avoir étudié la question, a constaté que les
explications juridiques que l'on s'est efforcéde trouver ne changent
rien à la réalitédes choses, savoir qu'une certaine force obligatoire,
distincte de la force de la chose jugée, était attachée aux avis de
l'ancienne Cour (op. cit., pp. 289-291).

Dans le rapport d'un comité composé des juges Loder, Moore et

Anzilotti, accompagnant la disposition du Règlement de la Cour
qui est devenue l'actuel article 83, se trouve une séried'affirmations
qui aboutissent aux conclusions suivantes :
((En réalité,lorsqu'en fait il se trouve des parties en présence,
il y a une différencepurement nominale entre les affaires conten-
tieuses et les affaires consultatives. De la sorte, l'opinion selon
laquelle les avis consultatifs n'ont pas force obligatoire est plutôt
théoriqueque réelle. )(C.P. J. I., SérieE, no4, 1927,p. 68.)

198 I OPINION INDIVIDUELLE DE M. AZEVEDO

4. Le besoin de satisfaire à cette sorte de postulat - la nécessité
du consentement des parties - était tellement pressant que la
Cour a cherché une occasion pour l'affirmer. Et elle en a trouvé
lors de l'avis sur la Carélie orientale, le 23 juillet 1923, voulant,
selon toute probabilité, éviter une fois pour toutes que se repro-

duisent des demandes de ce genre par lesquelles le Conseil pourrait
lui transférer indirectement la solution de litiges déjà nés.
La Cour a dit alors avec une justesse incomparable que :
(Répondre à la question équivaudrait en substance à trancher
un différendentre les parties. La Cour, étantune Cour de Justice,
ne peut se départir des règlesessentielles qui dirigent son activité
de tribunal, mêmelorsqu'elle donne des avis consultatifs. »

Et cela après avoir bien constaté que :
((La Cour se rend compte qu'elle n'est pas invitée à trancher
un différend, mais à donner un avis consultatif. ))(C. P. J. I.,
SérieB, no 5, p. 28.)
11est certainement fait allusion dans cet avis à une autre raison
péremptoire touchant l'impossibilité d'une enquête sur les faits,

à la suite d'un refus formel de la part d'un des gouvernements en
conflit. Il s'agissait là d'un motif qui eût dispenséde justifier autre-
ment l'absence d'une réponse ; il a dû cependant céder la place
principale à une raison qui eût bien pu êtresimplement énoncée
obiterdictum. La Cour permanente a estimé pouvoir braver toutes
les convenances judiciaires pour mettre en relief ce qu'elle
considérait comme essentiel.

5. On a encore prétendu que la Cour avait abandonné cette
position radicale, lors de l'avis rendu le 21 novembre 1925 dans
l'affaire de Mossoul ; le fait n'est pas exact, car l'exigence du
consentement peut fort bien se concilier avec une grande flexi-
bilité dans la constatation de ce fait même,par l'application du
principe du forum prorogatum.
Dans l'affaire de la Carélie,la Cour avait déjà indiquéa contrario
sensu que le consentement pourrait parvenir en tout temps
(C. P. J. I., SérieB, no 5, p. 28) ;or, dans l'affaire de Mossoul, la

Turquie, nonobstant son opposition devant le Conseil, n'a pas
présentéun refus en présence de la Cour, comme la Russie l'avait
fait d'une manière réitérée ;elle a, au contraire, donné très nette-
ment son assentiment tacite.
On voit par les termes du télégramme où elle avait exprimé ses
réserves que la Turquie n'a nullement contesté la compétence de
la Cour en dehors de celle du Conseil, elle s'est bornée à considérer
qu'ayant déjà exposéson point de vue, elle pouvait se dispenser de
présenter des exposés écrits ou oraux, simples pièces de procédure.
(C. P. J. I., SérieB, no 12, p. 8.)

6. Le moment est venu où a étéenvisagée la participation des
États-unis d'Amérique au Statut de la Cour permanente, et on
2082. OPINION INDIVIDUELLE DE M. AZEVEDO
connaît la réserve essentielle apportée par le Sénat américain, le
27 janvier 1926, à l'adhésion au Protocole de signature de 1920 :

K De plus, la Cour ne pourra, sans le consentement des États-
Unis, donner suite à aucune demande d'avis cqnsultatif au sujet
d'un différendou d'une question à laquelle les Etats-Unis sont ou
déclarentêtreintéressés. »

L'aspect principal qui se dégage des longues et pénibles négocia-
tions qui se sont déroulées à cette époque a été lasublimation de
Z'arrê dte principe rendu dans le cas de la Carélieorientale ; celui-ci
a mêmeété investid'un caractère comreritionnel à la suite du vote
unanime du Conseil et de l'Assembléegénérale,car on a jugé bien
nécessaire de lui attribuer une marque d'immutabilité afin de
prévenir des changements de jurisprudence, non seulenlent à

l'égard des avis touchant des différends où l'Union américaine serait
partie, mais dans tous les cas, y compris de simples questions, où
elle aurait déclaré avoir un intérêtquelconque.

7. Il y a lieil d'examiner maintenant si ce r6gime a étémodifié
par l'adoption de la Charte de San-Francisco.

Les propositions de Duml!arton Oaks attribuaient au nouveau
Conseil de Sécuritéla faculté de demander des avis, non plus sur
des différcnds )), mais seulement sur des (qiiestions )>d'ordre
juridique se rattachant à d'autres ((différends ))(legalquestions

connectedwith others dis#u!es) - chapitre VIII, section A, no 6.
On n'y confondait pas le moyen et la fin, le contenant et le contenu,
la partie et le tout.
En définitive, on a préféré une formule générale, celie de l'actuel
article 96 de la Charte, niais sans rétablir la mention conjuguée des
((points ))et ((différends ))qui avait soulevé tant de protestations
et crkétant de difficultés.La simplecomparaison des textes duPacte
et de la Charte permet de saisir immédiatement la restriction
apportée à la fonction consultative de la Cour.

8. Certes, la Cour, désignée comme organe principal et ainsi

plus dans l'engrenage de l'O. N. U., doit faire de son mieux pour
collaborer avec les autres organes en vue d'atteindre les buts et
principes visés.

Mais il y a des limites dont aucune cour judiciaire ne peut se
départir, même dails l'exercice d'une activité consultative, qu'on
lui a d'ailleurs attribuée à titre subsidiaire. Ainsi, l'absence de
consentement constituera sans doute un no.i?$ossumus que la Cour

sera obligéede prononcer mêmesi elle ne le fait que d'une maniére
exceptionnelle.83 OPINION INDIVIDUELLE DE M. AZEVEDO

9. Constater qu'aucun texte ne restreint la facultéou l'obligation
de donner des avis ne suffit pas pour conclure qiie l'accord des
Puissances directement intéressées n'est pas exigé. Ce serait un
procédétrop simpliste d'interprétation ; il aurait pu être adopté
plus facilement par rapport à l'ancien article 14, où les((différends ))

étaient exactement prévus, et c'est pourtant la solution contraire
qui a iriorrlphé.

Aujourd'hui, aucune mention n'est faite des ((différends o.Dès
le premier texte, l'on se réfèreseulement à des ((questions ))juri-
diques ; il n'a pas mêmeéténécessairede changer en anglais le niot
pestions, tandis que dans la version française le mot (questions »
a été substitué aumot (points »,ce qui est d'ailleurs sans aucune

conséquence.
Donc, la raison maîtresse qui avait permis d'annuler un des
termes du Pacte - le refus de se servir de la fonction consultative
pour trancher un véritable litige en l'absence de la volonté des
parties intéressées - subsiste avec beaucoup de force, car c'est
le seul moyen d'éviter un détournement de cette fonction.

IO. Un ensemble de circonstances concourt encore à éviter
l'abandon d'une conclusion si fermement acquise dans le régime
antérieur.
Tout d'abord, il faut constater que ni les vŒux et appels venus
de toutes les parties du monde ni l'action de la doctrine juridique
n'ont réussi à faire prévaloir la juridiction obligatoire de la Cour,
en dépit de nombreuses propositions présentées à San-Francisco.

Les débats parlementaires que la ratification de la Charte a
soulevésdans plusieurs pays confirment cette constatation. On peut
rappeler, par exemple, que les réserves mises par le Sénat des
États-unis à l'acceptation de la clause dite facultative ne s'écartent
pas au fond de l'attitude prise par lui en 1926, démontrant ainsi
une préoccupation constante vis-à-vis des excès possibles dans ce
domaine.

Il est aussi intéressant de rappeler un précédent denotre Cour.
11s'agissait d'une recommandation du Conseil de Sécurité,armé
des puissants moyens de contrainte et institué mandataire de tous
les États Membres en ce qui concerne la sécuritéet la paix mon-
diales. Bien que la majorité de la Cour ait estimé inutile d'apprécier
la valeur de cette recommandation, tout'en ayant constaté le
consentement de la partie traduite devant elle, sept juges, dans
une opinion commune, ont éprouvé le besoin d'expliquer leur

opposition formelle à la doctrine soutenue devant la Cour par
une des parties. Ils l'ont fait dans les termes suivants :
4il ne nous paraît pas possible d'admettre une interprétation
selon laquelle cet article [art. 36, no 31 aurait introduit, sans le
dire, d'une manière en quelque sorte subreptice, un nouveau cas
de juridiction obligatoire))(C. 1. J. Recueil 1947-1948,p. 32).84 OPINION INDIVIDUELLE DE M. AZEVEDO
II. Le droit de demander des avis a pris une grande extension
en 1945, mais cela concourt à prouver justement l'impossibilité
d'admettre l'existence d'un succédanéde la juridiction obligatoire.

En dehors de toute exigence d'unanimité de voix ou mêmed'un
quorum qualifié, on a conféréle pouvoir de demander des avis à
n'importe quel organe de l'O.N. U. et aux institutions spécialisées,
recevant à un moment quelconque de l'Assembléegénéraleune
autorisation à cet effet (art. 96, n2),tandis qu'antérieurement il
fallait un examen d'espèce pour que l'Assemblée transmît la
demande d'avis.
On pourrait bien imaginer à quel état d'anarchie conduirait
l'examen par la Cour de (différends »actuellement nés èntre des
États, Membres ou non de 1'0. N. U., à la demande de tous ces
organes et institutions, sans aucune précaution en ce qui concerne
le consentement préalable des Etats intéressés ;pour évaluer les
effets d'un tel élémentperturbateur, il suffit de parcourir les rela-
tions publiées dans les Annuaires de la Cour, d'où il ressort que
déjà une vingtaine d'institutions se sont vu conférer la faculté
pleine ou limitée de demander à la Cour des avis consultatifs sur

des questions juridiques qui se poseraient dans le cadre de leurs
activités.
12. Ce n'est pas le moment d'apprécier quel est le concept actuel
de souveraineté, mais sans aucun doute il estde jztrconditoprésup-
posésous la fomle indirecte d'égalité souveraineet peut êtrerenforcé
par le texte de la Charte concernant la compétence exclusive des
États, surtout si on compare ce texte avec celui qui auparavant

touchait aux affaires dites de nature domestique.
De toute façon, on doit constater que ce fameux concept est à
la base de l'exigence de la conditiointervolentepour toute activiti:
internationale d'ordre arbitral ou judiciaire.
Maisla souveraineté a une sensibilitételle que mêmeun jugement
d'ordre moral, un simple avis, peuvent l'atteindre ; et il serait
tout à fait inopportun de la livrer sans aucune protection aux
caprices d'une simple majorité au sein de n'importe quelle agence,
autoriséeà demander un avis exactement dans les memes termesque
l'Assembléegénéraleou le Conseil de Sécurité.

13. Ainsi, une fois disparu l'obstacle que constituait l'artic14
et pour éviterdes dangers, qu'on avait tout de mêmeécartés grâce
à une sage interprétation de ce texte maladroit, il faudrait diriger
l'activité de la Cour vers un terrain neutre, les questions juridi-
ques seraient isolées des faits ou au moins des circonstances les
pius proches qui leur ont donné naissance.

Un travail d'abstraction peut toujours se faire aisément, et
toutes les peines que l'on se donne à ce propos seraient bien récom-85 OPINION INDIVIDUELLE DE M. AZEVEDO
pensées par le souci d'épargner des ennuis inutiles à des États
souverains.
Dans l'opinion précitée, j'avais déji souligné la préoccupation

très explicable pour le juge d'isoler les points dogmatiques afin
d'éloignerla Cour des ((différends »peut-être existants ; d'une part
celle-ci resteraità l'écart de questions brûlantes saris sortir de son
domaine d'activité, d'autre part les organes qui auraient demandé
l'avis seraient plus à l'aise pour prendre n'importe quelle décision
d'espèce sans avoir à se demander si le tribunal serait froissépar
une telle conduite (C.1.J. Recueil 1947-1948, p. 74).

C'est ce souci qui a inspiré la Cour dans cet avis, rédigéavec

un remarquable esprit de finesse de manière à dégagerle caractère
abstrait des questions posées, nonobstant quelques consideranda
du préambule du questionnaire où il est fait allusion à une certaine
situation (vol. cit., p. 61), circonstance qui a permis par contre le
développement des opinions dissidentes (vol. cit., pp. 94 et 107).

Sans doute, on peut découvrir à la base de tout avis abstrait
une certaine situation touchée d'une manihre indirecte ou lointaine,
car, en dehors d'une attitude factice de pure curiosité,iy a toujours
un fait sous chaque question. Mais on doit écarter une recherche

trop profonde et rigoureuse dans ce sens, non pas par un vain désir
d'en venir à des situations purement artificielles, mais pour mieux
servir la fonction consultative en en réduisant les inconvénients.

Ilserait encore permis d'insister sur le fait que la distinction
entre question abstraite et concrète,établiedèslerapport Ln$radelle,
de 1920, est aujourd'hui dégagéede la confusion apportée par une
autre notion déjà abandonnée,cellede la constatation de la naissance
antérieure d'un litige.
La Cour doit donc tâcher de maintenir la ligne qu'elle a suivie

dans les avis déjà rendus, 9 savoir, répondre à des questions de
caractère gknéral,sans considération de personne ou d'gtat.

14. -4 la même occasion, j'ai pu constater que le Règlement
de la nouvelle Cour, au lieu de faciliter cette saine pratique, a pris
un chemin tout à fait opposé,en s'efforçant de maintenir le système
caduc, c'est-à-dire, la distinction dangereuse entre « question » et
« différend» (vol. cit., p. 73).
Comme il aurait étéimpossible de conserver le terme « différend»,

déjà disparu, le Règlement a transféréau mot « question » la clause
« actuellement née » (modifiéeen (actuellement pendante »), qui,
d'ailleurs. ne s'ajustait nullement à «point »ou «question »,mais
seulement à « différend ».
Donc, on a conservé une hypothèse anormale qui, dès l'affaire
de la Carélie orientale, se trouvait dans un chapitre déjà clos,

2486 OPINION INDIVIDUELLE DE M. AZEVEDO

savoir, un avis rendu contre le gré d'une partie dans un conflit
dûment constaté.

La conséquence, d'ailleurs facilement prévisible, a étéqu'on
n'a pas pu appliquer une seule fois le texte du Règlement qui a
maintenu la base mêmede l'épineuse distinction :

«elle [la Cour] recherche avant tout si la demande d'avis a trait
à une question juridique actuellement pendante entre deux ou
plusieursEtats »(article82,par. 1, infine).

Plusieurs avis ont déjà étédemandés et la Cour n'a pas encore
fait une telle constatation préalable, qui permettrait de donner en
toute impartialité aux Etats la qualité soit de parties soit de simples
informateurs. Dans le cas présent, certaines parties veulent par
exemple êtreconsidérées comme des informateurs, contrairement
à la nature mêmede leur position dans l'affaire.

15. Pour ce qui est de la désignation d'un juge ad hoc, on pourrait
rappeler que la Cour permanente a fini par l'accepter, sous
la pression de l'ancien article 14. Mais une fois celui-ci disparu,
il aurait fallu aussi supprimer l'article 83 du Règlement, car
une telle faculté ne se concilie nullement avec les seuls avis
théoriques ou abstraits que la Cour devra maintenant donner
sur des « questions )) juridiques. Il va de soi que, si un Etat

accepte de voir son cdifférend » tranché par un simple avis, la
procédure consultative perd sa propre nature pour revêtir celle
d'une procédure sur compromis, l'article 31 du Statut devenant
aussi de toute façon applicable ; il s'agirait alors du fameux carbi-
trage consultatif » introduit par l'affaire des décrets de nationalité
en Tunisie et au Maroc (C. P. J. I.,Série B, no 4, p. 8).

Le Règlement contient donc des textes qui dépassent les limites
fixées par le Statut et dont la suppression s'impose pour éviter des
confusions, surtout de la part des très nombreux organes qui
peuvent demander des avis. II faudra, au contraire, orienter ces
organes dans le libellé des questions, en tenant celles-ci le plus

possible à l'écartdes faits pour que l'on puisse aboutirà une solution
facile et rapide des affaires exigeant une élucidation préalable des
points juridiques.

16. En l'espèce, on constate de prime abord l'extrême sim-

plicité des questions, tout au moins de celles qui maintenant font
l'objet del'attention de la Cour ; si on les envisageait sous une forme
abstraite, on s'étonnerait même qu'ellesaient étéposées.

Mais la demande ne se borne pas à transmettre indirectement à
la Cour et contre le gréde quelques-unes des parties un litige entre87 OPINION INDIVIDUELLE DE M. AZEVEDO

des États Membres et des États non membres; on prétend encore
attribuer à l'avis un effet matériel indéniable.
17.En effet, la résolution de l'Assembléeprévoit que, dans le
cas d'une réponse affirmative de la Cour aux deux premières ques-
tions, un délai de grâce commencerait à courir automatiquement
pour permettre aux Puissances récalcitrantes de se racheter du
retard où elles étaient tombées,rappelant ainsi un cas d'emendatio
morcz.
L'avis de la Cour aura donc une exécution sui generis qui res-
semble à un interdit ou à un writ et équivaut pratiquement à une

sommation adressée auxdites Puissances, sans mêmeattendre que
l'organe qui a fait la demande connaisse la réponse de la Cour et
délibère à cet égard.
Partant, cet avis produirait des effets plus frappants que beau-
coup de décisionsdans le domainecontentieux. Il y aurait en somme
une sanction suspendue comme une sorte d'astreinte sur la tête
des Etats qui s'opposent à l'application des traités. Eà la fin on
pourrait constater l'inutilitéde cette mise en demeure si, par
exemple, la Cour venait à répondre négativement aux autres
questions qui constituent la fin de la chaîne.
On ne serait pas fondé à établir une différence essentielle entre
l'appréciation d'une conduite passéeet l'indication d'une conduite
pour l'avenir. Gr, formuler un jugement sur la conduite qu'un
État pourrait avoir à l'avenir ne diffère pas d'un examen de

sa conduite passée. De toute manière, ce serait porter atteinte à
l'indépendance des États que de faire intervenir la Cour pour
donner plus de prestige à cette action comminataire.
Constater que l'Assemblée généralea sans doute étéinspirée
par les intentions les meilleures ne suffirait pas à passer outreà
ces obstacles.
18. On a objecté que, dans le cas présent, il n'y aurait pas un
Kdifférend D.Mais certains États ont soutenu que les obligations
assumées en vertu d'un traité avaient étéaccomplies, tandis que
d'autres États l'ont nié,chaque groupe d'États invoquant contra-

dictoirement différents textes des mêmes traités. Donc, il est
incontestable qu'il y a un litige à trancher, ne serait-ce que pour
indiquer la méthode à adopter pour le résoudre, ce qui pénètre
déjà dans le domaine du contentieux.
Affirmer l'existence d'un différenddans le cas présent, c'est déjà
commencer à juger et donc à se reconnaître compétent.

Peu importe qu'il ne s'agisse pas de la querelle principale, car
ily aura toujours des questions préliminaires nettement dégagées
et qui seraient dans le domaine contentieux susceptibles d'une
décision autonome.

19. L'analogie avec le cas de la Caréliedevient ainsi frappante,
parce que, là aussi, ce qui était en cause n'était pas le fond du
2688 OPINION INDIVIDUELLE DE M. AZEVEDO

différend mais une question préliminaire qui, tout en affectant
nécessairement l'examen et le règlement final, ne préjugeait pas à
proprement parler le fond du différend, comme on l'a remarqué à
l'époque.
On a pu aussi constater une situation pareille dans l'avis
concernant les décrets promulgués en Tunisie et au Xaroc, où la
préférencede la Cour à propos d'une question préliminaire, quoique
marquant une position-clef, n'a pas empêchéensuite le règlement
direct de l'affaire.
Dans le cas présent, la position est exactement la même,car
la seule décisionsur la méthode à suivre constitue néanmoins un
point-pivot, qui peut exercer une influence considérable sur l'orien-
tation à donner à l'examen de l'affaire et sur son règlement,
surtout en ce qui concerne l'appréciation du caractère national

ou international de la question concernant les droits de l'homme.
20. J'arrive à ma conclusion sur l'obstacle auquel, à mon avis,
se heurte la Cour et qui devait l'obliger à déduire qu'elle est dans
l'obligation de s'abstenir de répondre.
Tout comme en 192.3 i, faut tenir compte, en premier lieu, du
fait que la Cour ne peut renoncer aux règlesfondamentales du droit
international dans le dessein de favoriser une action oblique aux
fins de trancher un différend actuellement né par le moyen d'une
demande d'avis.
On peut admettre beaucoiip de souplesse dans la recherche du

consentement des parties, mais il est impossible de s'en dispenser
totalement, lorsqu'on est en face d'un conflit pendant. De même,
on peut aller dans le sens d'une raisonnable collaboration avec les
autres organes de l'O.N. U. jusqu'à donner des avis qui, tout en
conservant une forme abstraite, peuvent pourtant être reconnus,
après quelques efforts d'investigation, comme liés plus ou moins
indirectement à certains conflits;mais on ne peut pas examiner des
avis relatifsà des différends clairement indiqués ou visés soit dans
l'énoncé desquestions, soit même dans le préambule qui précède
en général les questions.
Somme toute, il faut dresser un mur entre l'activité contentieuse
et la fonction consultative ; celle-ci doit être rapprochée de
préférencede l'action impersonnelle, qui est par exemple celle du
ministère public, lorsqu'il agit dans l'intérêtexclusif de la loi.
En abandonnant ces précautions élémentaires, onpasserait outre
au refus péremptoire de toute règle de juridiction obligatoire.

On doit se résigner à attendre pour voir la Cour régulièrement
chargée de cette tâche, qui, un jour, sera sûrement la sienne. Mais
l'abstention dans le cas d'espèceconstituerait un motif de plus pour
convaincre les Puissances associéesqu'il faut arriver aussitôt que
possible à ce résultat tant désiré.

(Signé)PHILADELPHO AZEVEDO.

Bilingual Content

OPINIONIXDIVIDUELLE DE M.AZEVEDO

T. Ne pouvant concilier dans mon esprit des notions de nature
différente et qui pourtant ont étésoumises à un seul et niêmevote
- savoir : le point préliminaire touchant le pouvoir de la Cour de
répondre à la demande d'avis et la solution même à donner aux

questions posées -, j'ai éprouvédes difficultés à rne prononcer.
Sans doute j'aurais préférévoir la Cour s'abstenir de répondre ;
ce point préjudiciel n'ayant pas été retenu, je ne m'en considère
pas moins comme tenu de me prononcer sur la matière desdites
questions et je le fais sans aucune hésitation en plein accord avec
l'avis.

Mais je ne peux renoncer à expliquer les motifs qui, selon moi,
auraient conduit la Cour à l'abstention, étant donnéquela demande
porte sur une situation concrète et nettement décrite. Lors de
l'avis sur l'admission de nouveaux Membres, j'avais déjàmanifesté,
dans une opinion séparée, le désirde voir toujours présenter sous

une forme abstraite l'objet de l'avis consultqtif (C. 1.J. Recueil
1947-194 pp,73-75). Mais le relief que prend le problème dans le
cas présent rend nécessairesde plus amples développements.

2.-Autenlps de la Société desXations, la pratique a accentué
une tendance à assimiler la fonction consultative de la Cour
permanente à son activité contentieuse.

Malgrécette tendance, l'or1est venu à constater une profonde
différenceentre les avis portant sur un simpl« point »ou «question »
et les avis liéà un « différend»déjà existant ;dans le premier cas,
ils'agissait seulement de l'examen d'un aspect purement juridique
sur lequel de simples informateurs, dont le rôle était très restreint,
donnaient des éclaircissements préalables, tandis que, dans le
second cas, la Cour était saisie d'un véritable litige.

Si, du point de vue formel, la nature de tous les avis est la même
- simple relation entre la Cour et l'organe demandeur -, l'avis
rendu sur un point est, du point de vue juridique, autre que l'avis
rendu sur un « différend1)C'est ce qu'a noté hTegulesco(«L'évolu-

tion de la procédure des avis consultatifs », Recueil des Cours,
v. 57, P. 9). SEPARATE OPINION BY JUDGE AZEVEDO

[Translation]
I. Being unable to reconcile in my mind the notions which,
though of a differing character, have been decided by one and
the same vote, namely the preliminary point regarding the Court's
capacity to comply with the Request for an Opinion and the
answer which the Court should give to the questions put to it,
1 have found some difficulty in expressing my view. True, 1

would have preferred that the Court should have abstained from
answering the question ; as however that preliminary proposition
did not find acceptance, 1 feel ncne the less obliged to state my
opinion on the subject of the aforesaid questions, and 1 find no
difficulty in giving it entirely in the same sense as the Opinion
of the Court.
1 cannot, however, refrain from explaining the reasons which,
in my view, should have led the Court to abstain from answering
the Request, seeing that the latter relates to a definite and
clearly specified situation. In the Advisory Opinion concerning
the Admission of new Members, 1 had already expressed, in my
separate Opinion, my view that the subject of an advisory opinion
should always be stated in an abstract form (C.I.J. Reports
1947-1948, pp. 73-75). But the prorninence which the problem
has assumed in the present case obliges me to explain my position
in fuller detail.

2. In the days of the League of Nations, there was a tendency,
which was accentuated by practice, to assimilate the advisory
function of the Pernianent Court with its function in contentious
cases.
In spite of this tendency, it came to be recognized that there
was a profound difference between opinions directed to a simple
"point" or a "question" and opinions relating to an already
existing "dispute" ; in the former type of case, the Court was
only concerned with a purely legal aspect of some question on
which mere "informateurs", whose rôle was strictly limited, gave
some preliminary explanations, whereas in the latter instance

the Court was dealing with a genuine dispute.
Although, from a forma1 standpoint, the nature of al1 advisory
opinions is the same-a simple relation between the Court and
the requesting organization-an opinion delivered in respect of
a "point" is, from a juridical standpoint, different from an opinion
delivered in regard to a "dispute". That situation was noted
by Negulesco ("L'évolution de la procédure des avis consultatifs",
in Recueil des Cours, V. 57, p. 9).
1880 OPINION INDIVIDUELLE DE M. XZEVEDO

Hanzmarskjold remarquait aussi :
(Il s'ensuit, sans doute possible, qu'ilserait contraireà la pensée
des auteurs du Pacte de voir dans la disposition dont il s'agit le
moyen d'introduire dans le Pacte, d'une façon détournée,l'idée
de juridiction obligatoire qui, de propos délibérée ,n avait été
écartée.Mais ils'ensuit aussi que, selon les auteurs du Pacte, l'acti-
vité consultative de la Cour devait êtreune fonction dont l'exercice
serait entouré de toutes les garanties judiciaires. ))(Jzcridiction
internationale - ((In memoriam », 1938, p. 284.)

Pour bien marquer ces positions, la Cour permanente a dû se
réserver d'examiner sa compétence mêmed'office, en donnant une
application générale à la règle de l'article 36, n. 6, du Statut, ainsi
que la recevabilité de la demande ;avec cette conséquenceon arrivait
qu'en cas de différend, les Etats intéressésse voyaient assurer 1%
qualité de parties, a17ecune plus grande liberté d'action.

3. En somme, le problème du consentement des parties se posait
dans le cas d'avis sur un différend ))actuellement né.

Certes, l'on savait bien que leseffets de la chose jugéene découlent
pas de simples avis, mais, en tout cas, cette constatation ne suffit
pas pour refuser à un avis toutes les consPquences o oral es,inhé-
rentes à la dignité de l'organe qui le rend, et même juridiques.

Il est nécessaire de signaler, en passant, que le phénoinène de
la chose jugée n'a pas en droit international la mêmeimportance
qu'en droit interne, où l'exécution forcée est assurée par l'État.
Au contraire, les décisionsinternationales ont en généralun caractère
déclaratif, et c'est récemment seulement qu'on s'est engagé sur la
voie des sanctions indirectes appliquées par un tiers organe. Reste
l'aspect négatif, celui qui interdit le renouvellement d'une requête

par l'exceptio rei judicatcz, d'ailleurs d'une application tout aussi
rare dans le domaine international.
Hammarskj6ld, après avoir étudié la question, a constaté que les
explications juridiques que l'on s'est efforcéde trouver ne changent
rien à la réalitédes choses, savoir qu'une certaine force obligatoire,
distincte de la force de la chose jugée, était attachée aux avis de
l'ancienne Cour (op. cit., pp. 289-291).

Dans le rapport d'un comité composé des juges Loder, Moore et

Anzilotti, accompagnant la disposition du Règlement de la Cour
qui est devenue l'actuel article 83, se trouve une séried'affirmations
qui aboutissent aux conclusions suivantes :
((En réalité,lorsqu'en fait il se trouve des parties en présence,
il y a une différencepurement nominale entre les affaires conten-
tieuses et les affaires consultatives. De la sorte, l'opinion selon
laquelle les avis consultatifs n'ont pas force obligatoire est plutôt
théoriqueque réelle. )(C.P. J. I., SérieE, no4, 1927,p. 68.)

19 SEPAKATE OPIXION RY JUDGE AZEVEDO 80

Hammarskjold also wrote :
"It follows,without any possibledoubt, that it would be contrary
to the intention of the authors of the Covenant to regard the clause
in question as a means of introducing into the Covenant, by a
circuitous route, the idea of compulsory jurisdiction which had
been deliberately excluded from it. But it is also clear that, in the
view of the authors of the Covenant, the advisory function of the
Court should be one whose exercise should be surrounded by al1
the necessary judicial safeguards." (Juridiction internationale-
"In memoriam", 1938, p. 284:)
In order to make that position secure, the Permanent Court
had to claim the power of spontaneously examining its jurisdiction,
by giving a general application to Article 36, paragraph 6, of
the Statute, and also of examining the receivability of the request.
As a result, the States concerned obtained the standing of parties,
with an increased freedom of action.

'3, The problem of the consent of the parties arose in regard
to advisory opinions relating to a "dispute" mhich was already
in existence.
True, it was generally recognized that an ordinary advisory
opinion did not produce the effects of the res judicata; nevertheless,
that fact is not sufficient to deprive an advisory opinion of al1
the moral consequences which are inherent iq the dignity of

the organ delivering the opinion, or even of its legal consequences.
It is necessary to point out, incidentally, that the phenomenon
of the res judicata has not the saine importance in international
law as it has in municipal law, where the judgment is enforceable
by the State. On the contrary, international judgments are
usiially declaratory, and it is only in recent times thqt the idea
of indirect sanctions applied by a third organ has been entertained.
There remains the negative aspect of the question, the rule which
lorbids the renewal of a request on the ground of exceptioret judi-
tata, though it has been rarely applied in the international sphere.
Hammarskjold, after an exhaustive study of this aspect of the
question, observed that the legal explanations, which it has been
sought to elaborate,have in no way modified the reality of the facts,
namely that there was a certain compelling force, distinct from the
force of the res judicata, attaching to the opinions of the old Court

(op. cit., pp. 289-291).
In the report of a committee, composed of Judges Loder, Moore
and Anzilotti, which accompanied the clause in the Rules of Court
that now constitutes Article 83, we find a series of affirmations lead-
ing up to the following conclusions :
"In reality, where there are in fact contending parties, the
difference between contentious cases and advisory cases is only
nominal ...So that the view that advisory opinions are not binding
is more theoretical than real." (P.C.I.J., Series E, No. 4, 1927,
p. 76, English text.)8 I OPINION INDIVIDUELLE DE M. AZEVEDO

4. Le besoin de satisfaire à cette sorte de postulat - la nécessité
du consentement des parties - était tellement pressant que la
Cour a cherché une occasion pour l'affirmer. Et elle en a trouvé
lors de l'avis sur la Carélie orientale, le 23 juillet 1923, voulant,
selon toute probabilité, éviter une fois pour toutes que se repro-

duisent des demandes de ce genre par lesquelles le Conseil pourrait
lui transférer indirectement la solution de litiges déjà nés.
La Cour a dit alors avec une justesse incomparable que :
(Répondre à la question équivaudrait en substance à trancher
un différendentre les parties. La Cour, étantune Cour de Justice,
ne peut se départir des règlesessentielles qui dirigent son activité
de tribunal, mêmelorsqu'elle donne des avis consultatifs. »

Et cela après avoir bien constaté que :
((La Cour se rend compte qu'elle n'est pas invitée à trancher
un différend, mais à donner un avis consultatif. ))(C. P. J. I.,
SérieB, no 5, p. 28.)
11est certainement fait allusion dans cet avis à une autre raison
péremptoire touchant l'impossibilité d'une enquête sur les faits,

à la suite d'un refus formel de la part d'un des gouvernements en
conflit. Il s'agissait là d'un motif qui eût dispenséde justifier autre-
ment l'absence d'une réponse ; il a dû cependant céder la place
principale à une raison qui eût bien pu êtresimplement énoncée
obiterdictum. La Cour permanente a estimé pouvoir braver toutes
les convenances judiciaires pour mettre en relief ce qu'elle
considérait comme essentiel.

5. On a encore prétendu que la Cour avait abandonné cette
position radicale, lors de l'avis rendu le 21 novembre 1925 dans
l'affaire de Mossoul ; le fait n'est pas exact, car l'exigence du
consentement peut fort bien se concilier avec une grande flexi-
bilité dans la constatation de ce fait même,par l'application du
principe du forum prorogatum.
Dans l'affaire de la Carélie,la Cour avait déjà indiquéa contrario
sensu que le consentement pourrait parvenir en tout temps
(C. P. J. I., SérieB, no 5, p. 28) ;or, dans l'affaire de Mossoul, la

Turquie, nonobstant son opposition devant le Conseil, n'a pas
présentéun refus en présence de la Cour, comme la Russie l'avait
fait d'une manière réitérée ;elle a, au contraire, donné très nette-
ment son assentiment tacite.
On voit par les termes du télégramme où elle avait exprimé ses
réserves que la Turquie n'a nullement contesté la compétence de
la Cour en dehors de celle du Conseil, elle s'est bornée à considérer
qu'ayant déjà exposéson point de vue, elle pouvait se dispenser de
présenter des exposés écrits ou oraux, simples pièces de procédure.
(C. P. J. I., SérieB, no 12, p. 8.)

6. Le moment est venu où a étéenvisagée la participation des
États-unis d'Amérique au Statut de la Cour permanente, et on
20 SEPARATE OPINION BY JUDGE AZEVEDO 81

4. The importance of affirming this postulate-the necessity of
the consent of the parties-was so pressing that the Court looked
for an opportunity of doing so. It found it in connexion with the
case of Eastern Carelia, on July 23rd, 1923, being desirous, most
probably, of preventing, once for all, the recurrence of requests of
this kind, by which the Council might charge it, indirectly, with the
settlement of disputes already pending.
The Court declared with incomparable justice :
"Answering the question would be substantially equivalent to
deciding the dispute between the parties. The Court,beinga Court
of Justice, cannot, even in giving advisory opinions, depart from
the essentialrules guiding its activity as a Court."

And it made that statement after having declared that :
"The Courtis aware ofthe factthat it is not requested to decide
a dispute, but to give an advisory opinion." (P.C.I.J., SeriesB,
No. 55, p. 28.)
It is true that mention was made in that Advisory Opinion of
another compelling reason, namely the impossibility of investigat-
ing the facts owing to the definite refusal of one of the governments
engaged in the dispute. That was a reason which might have made
it unnecessai-y to give other grounds in justification of a refusa1to
answer. Yet that reason had to yield precedence to another which

might quite well have been simply mentioned as obiterdictum. The
Permanent Court thought it right to disregard al1judicial conven-
tions so as to give prominence to the reason which it regarded as
essential.
5. Ithas also been contended that the Court departed from that
radical position in its Advisory Opinion of November z~st, 1925, in
the Mosul case ;the allegation is incorrect, for the rule requiring
the consent of the parties is quite compatible with a certain degree
of flexibility in the ascertainment of that fact, in virtue of the
principle of the forum prorogatum.
In the case of Eastern Carelia, the Court had already indicated

a contrariosensu that çonsent might be given at any time (P.C.I. J.,
Series B, No. 5, p. 28) ; in the Mosul case, Turkey, in spite of the
objections she had signified to the Council, did not meet the Court
with a refusal but, on the contrary, gave an unmistakable tacit
assent.

It is evident by the wording of the telegram in which Turkey
made her reservations that she in no way disputed the competence
of the Court, as distinct from that of the Council ; she merely con-
tended that, having stated her point of view, she did not find it
necessary to present written or oral statements, which are merely
documents of the procedure. (P.C.I.J., Series B, No. 12, p. 8.)

6. The time came when the desirability of obtaining the accession
of the United States to the Statute of the Permanent Court was
2O82. OPINION INDIVIDUELLE DE M. AZEVEDO
connaît la réserve essentielle apportée par le Sénat américain, le
27 janvier 1926, à l'adhésion au Protocole de signature de 1920 :

K De plus, la Cour ne pourra, sans le consentement des États-
Unis, donner suite à aucune demande d'avis cqnsultatif au sujet
d'un différendou d'une question à laquelle les Etats-Unis sont ou
déclarentêtreintéressés. »

L'aspect principal qui se dégage des longues et pénibles négocia-
tions qui se sont déroulées à cette époque a été lasublimation de
Z'arrê dte principe rendu dans le cas de la Carélieorientale ; celui-ci
a mêmeété investid'un caractère comreritionnel à la suite du vote
unanime du Conseil et de l'Assembléegénérale,car on a jugé bien
nécessaire de lui attribuer une marque d'immutabilité afin de
prévenir des changements de jurisprudence, non seulenlent à

l'égard des avis touchant des différends où l'Union américaine serait
partie, mais dans tous les cas, y compris de simples questions, où
elle aurait déclaré avoir un intérêtquelconque.

7. Il y a lieil d'examiner maintenant si ce r6gime a étémodifié
par l'adoption de la Charte de San-Francisco.

Les propositions de Duml!arton Oaks attribuaient au nouveau
Conseil de Sécuritéla faculté de demander des avis, non plus sur
des différcnds )), mais seulement sur des (qiiestions )>d'ordre
juridique se rattachant à d'autres ((différends ))(legalquestions

connectedwith others dis#u!es) - chapitre VIII, section A, no 6.
On n'y confondait pas le moyen et la fin, le contenant et le contenu,
la partie et le tout.
En définitive, on a préféré une formule générale, celie de l'actuel
article 96 de la Charte, niais sans rétablir la mention conjuguée des
((points ))et ((différends ))qui avait soulevé tant de protestations
et crkétant de difficultés.La simplecomparaison des textes duPacte
et de la Charte permet de saisir immédiatement la restriction
apportée à la fonction consultative de la Cour.

8. Certes, la Cour, désignée comme organe principal et ainsi

plus dans l'engrenage de l'O. N. U., doit faire de son mieux pour
collaborer avec les autres organes en vue d'atteindre les buts et
principes visés.

Mais il y a des limites dont aucune cour judiciaire ne peut se
départir, même dails l'exercice d'une activité consultative, qu'on
lui a d'ailleurs attribuée à titre subsidiaire. Ainsi, l'absence de
consentement constituera sans doute un no.i?$ossumus que la Cour

sera obligéede prononcer mêmesi elle ne le fait que d'une maniére
exceptionnelle. SEPARATE OPINION BY JUDGE AZEVEDO 82
recognized ; we al1remember the essential reservation adopted by
the American Senate on January 27th, 1926, as a condition for
adherence to the Protocol of Signature of 1920 :

"Nor shall it [the Court] without the consent of the United
States entertain any request for an advisory opinion touching any
dispute or question in which the United States haç or claims an
interest."
The feature that chiefly strikes one in the long and laborious

negotiations which took place at that time is the exaltation of
the Court's (lecision on the point oi prirzciplein the Eastern Carelia
case ;that decision was even invested with a conventional character
as a consequence of a unanimous vote by the C,ouncilancl-4ssembly,
for it was thought desirable to give it the hall-mark of immuta-
bility in order to forestall any change of jurisprudence, not only
in regard to opinions touching disputes to which the United
States might Fe a party, but in regard to al1 cases, including
ordinary questions, in which that country claimed to have an
interest.

7. It must now be considered whether the above-mentioned
régime has been modified by the adoption of the Charter of
San Francisco.
The proposals put fonvard at Dumbarton Oaks endowed the
new Security Council with power to ask for opinions, no longer
on "disputes", but only in regard to legal "questions" connected
with other "disputes" (Chapter: VIII, Section A, No. 6). Thus,
they did not confuse the means and the end, the container and

its content, the whole and the part.

Finally, preference was given to a general formula, that of
the present Article 96 of the Charter, though care was taken
not to reintroduce the cognate terms "points" and "disputes",
which had evoked so many protests and created such difficulties.
A mere comparison of the texts of the Covenant and the Charter
suffice at once to reveal the restrictions which were placed on
the Court's advisory function.

8. It is true that the Court, which has tjeen raised to the status
of a principal organ and thus more closely geared into the
mechanisrn of the U.N.O., must do its utmost to CO-operatewith
the other organs with a view to attaining the aims and principles
that have been set forth.
But there are certain limits which a judicial court may not
overstep, even in the exercise of an advisory function assigned to
it as a subsidiary activity. For instance, the absence of consent
without doubt constitutes a non possum.ti.swhich the Court will

be obliged to declare, if only as 'an exceptional step.83 OPINION INDIVIDUELLE DE M. AZEVEDO

9. Constater qu'aucun texte ne restreint la facultéou l'obligation
de donner des avis ne suffit pas pour conclure qiie l'accord des
Puissances directement intéressées n'est pas exigé. Ce serait un
procédétrop simpliste d'interprétation ; il aurait pu être adopté
plus facilement par rapport à l'ancien article 14, où les((différends ))

étaient exactement prévus, et c'est pourtant la solution contraire
qui a iriorrlphé.

Aujourd'hui, aucune mention n'est faite des ((différends o.Dès
le premier texte, l'on se réfèreseulement à des ((questions ))juri-
diques ; il n'a pas mêmeéténécessairede changer en anglais le niot
pestions, tandis que dans la version française le mot (questions »
a été substitué aumot (points »,ce qui est d'ailleurs sans aucune

conséquence.
Donc, la raison maîtresse qui avait permis d'annuler un des
termes du Pacte - le refus de se servir de la fonction consultative
pour trancher un véritable litige en l'absence de la volonté des
parties intéressées - subsiste avec beaucoup de force, car c'est
le seul moyen d'éviter un détournement de cette fonction.

IO. Un ensemble de circonstances concourt encore à éviter
l'abandon d'une conclusion si fermement acquise dans le régime
antérieur.
Tout d'abord, il faut constater que ni les vŒux et appels venus
de toutes les parties du monde ni l'action de la doctrine juridique
n'ont réussi à faire prévaloir la juridiction obligatoire de la Cour,
en dépit de nombreuses propositions présentées à San-Francisco.

Les débats parlementaires que la ratification de la Charte a
soulevésdans plusieurs pays confirment cette constatation. On peut
rappeler, par exemple, que les réserves mises par le Sénat des
États-unis à l'acceptation de la clause dite facultative ne s'écartent
pas au fond de l'attitude prise par lui en 1926, démontrant ainsi
une préoccupation constante vis-à-vis des excès possibles dans ce
domaine.

Il est aussi intéressant de rappeler un précédent denotre Cour.
11s'agissait d'une recommandation du Conseil de Sécurité,armé
des puissants moyens de contrainte et institué mandataire de tous
les États Membres en ce qui concerne la sécuritéet la paix mon-
diales. Bien que la majorité de la Cour ait estimé inutile d'apprécier
la valeur de cette recommandation, tout'en ayant constaté le
consentement de la partie traduite devant elle, sept juges, dans
une opinion commune, ont éprouvé le besoin d'expliquer leur

opposition formelle à la doctrine soutenue devant la Cour par
une des parties. Ils l'ont fait dans les termes suivants :
4il ne nous paraît pas possible d'admettre une interprétation
selon laquelle cet article [art. 36, no 31 aurait introduit, sans le
dire, d'une manière en quelque sorte subreptice, un nouveau cas
de juridiction obligatoire))(C. 1. J. Recueil 1947-1948,p. 32). SEPARATE OPINION BY JUDGE AZEVEDO 83

9. The recognition that there is no clause restricting the right
or duty of giving advisory opinions is not sufficient ground for
concluding that the consent of the States directly concerned is
not required. That would be an over-simplified interpretation,
though it miglit have been more easily relied upon in connexion
with the former Article 14 of the Covenant, which explicitly
referred to "disputes" ; but in fact, it was the opposite solution
wliich prevailed.
To-day, we are no longer concerned with "disputes". Beginning
with the very first draft, we find no mention of anything but
legal "questions". It has not even been found necessary to change

the word "questions" in the English text, though in the French
L Ision the word "questions" has had to be substituted for
+oints"-an alteration without any significance.
Accordingly, the compelling reason which had led to the abolition
of one of the clauses of the Covenant-i.e. the refusal to make
use of the advisory function to decide a genuine dispute at law
over the heads of the parties concemed-continues to retain its
force, for its the only means of avoiding a misuse of that function.

IO. There are a number of circurnstances which combine to
forbid the abandonment of a conclusion so firmly established
under the former régime.
To begin with, it must be recognized that neither the resolutions
and appeals emanating from al1 parts of the world nor the efforts
of learned jurists were successful in establishing this compulsory
jurisdiction of the Court, in spite of the numerous proposals
put forward at San Francisco.
The parliamentary debates occasioned in different countries by
the ratification of the Charter confirm that conclusion. It may be
pointed out, for example, that the conditions attached by the
United States Senate to the acceptance of the so-caiied Optional

Clause do not deviate in substance from the Senate's attitude in
1926; they are evidence of a continuing anxiety in regard to
possible excesses in this sphere.
It is also appropriate to cite a precedent of Our own Court. It
concerned a recommendation by the Security Council, a body which
is equipped with powerfd means of enforcement and appointed
as mandatory of all the Member States in matters relating to secur-
ity and world peace. Although the majority of the Court saw no
reason for discussing the value of this recommendation, for they
considered that the party before them had given its consent, seven
of the judges found it necessary, in a joint Opinion, to express their
definite opposition to a doctrinemaintained before the Court by one
of the parties. They did so in the following terms :

"it appears impossible for us to accept;an interpretation accord-
ing to which this article [Art. 36, No. 31, without explicitly
saying so, has introduced more or Iess surreptitiously a new case
of compulsory jurisdiction" (I.C.J. Reports 1947-1948,p. 32).
2284 OPINION INDIVIDUELLE DE M. AZEVEDO
II. Le droit de demander des avis a pris une grande extension
en 1945, mais cela concourt à prouver justement l'impossibilité
d'admettre l'existence d'un succédanéde la juridiction obligatoire.

En dehors de toute exigence d'unanimité de voix ou mêmed'un
quorum qualifié, on a conféréle pouvoir de demander des avis à
n'importe quel organe de l'O.N. U. et aux institutions spécialisées,
recevant à un moment quelconque de l'Assembléegénéraleune
autorisation à cet effet (art. 96, n2),tandis qu'antérieurement il
fallait un examen d'espèce pour que l'Assemblée transmît la
demande d'avis.
On pourrait bien imaginer à quel état d'anarchie conduirait
l'examen par la Cour de (différends »actuellement nés èntre des
États, Membres ou non de 1'0. N. U., à la demande de tous ces
organes et institutions, sans aucune précaution en ce qui concerne
le consentement préalable des Etats intéressés ;pour évaluer les
effets d'un tel élémentperturbateur, il suffit de parcourir les rela-
tions publiées dans les Annuaires de la Cour, d'où il ressort que
déjà une vingtaine d'institutions se sont vu conférer la faculté
pleine ou limitée de demander à la Cour des avis consultatifs sur

des questions juridiques qui se poseraient dans le cadre de leurs
activités.
12. Ce n'est pas le moment d'apprécier quel est le concept actuel
de souveraineté, mais sans aucun doute il estde jztrconditoprésup-
posésous la fomle indirecte d'égalité souveraineet peut êtrerenforcé
par le texte de la Charte concernant la compétence exclusive des
États, surtout si on compare ce texte avec celui qui auparavant

touchait aux affaires dites de nature domestique.
De toute façon, on doit constater que ce fameux concept est à
la base de l'exigence de la conditiointervolentepour toute activiti:
internationale d'ordre arbitral ou judiciaire.
Maisla souveraineté a une sensibilitételle que mêmeun jugement
d'ordre moral, un simple avis, peuvent l'atteindre ; et il serait
tout à fait inopportun de la livrer sans aucune protection aux
caprices d'une simple majorité au sein de n'importe quelle agence,
autoriséeà demander un avis exactement dans les memes termesque
l'Assembléegénéraleou le Conseil de Sécurité.

13. Ainsi, une fois disparu l'obstacle que constituait l'artic14
et pour éviterdes dangers, qu'on avait tout de mêmeécartés grâce
à une sage interprétation de ce texte maladroit, il faudrait diriger
l'activité de la Cour vers un terrain neutre, les questions juridi-
ques seraient isolées des faits ou au moins des circonstances les
pius proches qui leur ont donné naissance.

Un travail d'abstraction peut toujours se faire aisément, et
toutes les peines que l'on se donne à ce propos seraient bien récom- SEPARATE OPINION BY JUDGE AZEVEDO 84
II. The right of requesting opinions assumed a considerable

extension in 1945, but that fact is merely additional evidence of the
impossibility of admitting the existence of a substitute form of com-
pulsory jurisdiction.
Without even requiring a unanimous vote, or even the existence
of a proper quorum, the right to request opinions has been assigned
to almost any organ of the U.N.O. and to the specialized agencies
which may at any time be authorized by the General Assembly to
make such a request (Art. 96, para. 2),whereas formerly an exam-
ination of the particular case was requisite before the Assembly
could transmit the Request.
One can imagine the anarchy which would ensue if the Court had
to examine "disputes" actually pending between States-whether
Members or non-members of the U.N.0.-at the request of any or
al1of these organs or agencies without any assurances being required

as to the previous consent of the Stâtes concemed ;to realize the
possible effects of such a mischievous arrangement, it suffices to
read the reports in the Yearbooks of the Court where it appears
that nearly a score of institutions have been endowed with a full or
limited right to ask the Court foradvisory opinions onlegal questions
arising in their field of activity.

12. This is not the time to examine what should be our concept
of sovereignty at the present day, but no doubt it is implied de jure
conditoin the indirect form of sovereign equality, and it is perhaps
strengthened by the clause in the Charter concerning the exclusive
cornpetence of States, especially if we compare that clause with the
one which formerly dealt with so-called domestic questions.
At any rate, itmust be recognized that this well-known concep-
tion underlies the requirement of inter volentes, as a condition for
any intemational activities in the arbitral or judicial spheres.
But sovereignty is so highly sensitive a conception that even a
judgment of a moral sort, or a simple opinion, may offend it ; and
it would be very unwise- to leave that conception, without any
protection, at the mercy of the caprice of a simple majority in any
agency which might happen to be authorized to ask for an advisory
opinion, in precisely thesame terms, asare applicable to the General

Assembly or the Security Council.
13. Accordingly, now that the obstacle represented bjr Article 14
has been eliminated, it is necessary, in order to avoid a recurrence
of the dangers which had, as a fact, been removed by a judicious
interpretation of that badly-drawn text, to guide the activities of
the Court on to a neutral ground, where legal issues can be isolated

from the facts, or at any rate from the more irnmediate circum-
stances to which they owe their origin.
It is always easier to work in the abstract, and any difficulties
which we encounter in doing so will be amply recompensed by the85 OPINION INDIVIDUELLE DE M. AZEVEDO
pensées par le souci d'épargner des ennuis inutiles à des États
souverains.
Dans l'opinion précitée, j'avais déji souligné la préoccupation

très explicable pour le juge d'isoler les points dogmatiques afin
d'éloignerla Cour des ((différends »peut-être existants ; d'une part
celle-ci resteraità l'écart de questions brûlantes saris sortir de son
domaine d'activité, d'autre part les organes qui auraient demandé
l'avis seraient plus à l'aise pour prendre n'importe quelle décision
d'espèce sans avoir à se demander si le tribunal serait froissépar
une telle conduite (C.1.J. Recueil 1947-1948, p. 74).

C'est ce souci qui a inspiré la Cour dans cet avis, rédigéavec

un remarquable esprit de finesse de manière à dégagerle caractère
abstrait des questions posées, nonobstant quelques consideranda
du préambule du questionnaire où il est fait allusion à une certaine
situation (vol. cit., p. 61), circonstance qui a permis par contre le
développement des opinions dissidentes (vol. cit., pp. 94 et 107).

Sans doute, on peut découvrir à la base de tout avis abstrait
une certaine situation touchée d'une manihre indirecte ou lointaine,
car, en dehors d'une attitude factice de pure curiosité,iy a toujours
un fait sous chaque question. Mais on doit écarter une recherche

trop profonde et rigoureuse dans ce sens, non pas par un vain désir
d'en venir à des situations purement artificielles, mais pour mieux
servir la fonction consultative en en réduisant les inconvénients.

Ilserait encore permis d'insister sur le fait que la distinction
entre question abstraite et concrète,établiedèslerapport Ln$radelle,
de 1920, est aujourd'hui dégagéede la confusion apportée par une
autre notion déjà abandonnée,cellede la constatation de la naissance
antérieure d'un litige.
La Cour doit donc tâcher de maintenir la ligne qu'elle a suivie

dans les avis déjà rendus, 9 savoir, répondre à des questions de
caractère gknéral,sans considération de personne ou d'gtat.

14. -4 la même occasion, j'ai pu constater que le Règlement
de la nouvelle Cour, au lieu de faciliter cette saine pratique, a pris
un chemin tout à fait opposé,en s'efforçant de maintenir le système
caduc, c'est-à-dire, la distinction dangereuse entre « question » et
« différend» (vol. cit., p. 73).
Comme il aurait étéimpossible de conserver le terme « différend»,

déjà disparu, le Règlement a transféréau mot « question » la clause
« actuellement née » (modifiéeen (actuellement pendante »), qui,
d'ailleurs. ne s'ajustait nullement à «point »ou «question »,mais
seulement à « différend ».
Donc, on a conservé une hypothèse anormale qui, dès l'affaire
de la Carélie orientale, se trouvait dans un chapitre déjà clos,

24 SEPARATE OPINION RY JUDGE AZEVEDO 8 5

knowledge that sovereign States are thus being protected from
needless annoyance.
In discussing the Opinion referred to above, 1 emphasized the
obvious importance for the Court of isolating points of doctrine in
order to remove "disputes", which might be pending, from its
purview. On the one hand, the Court would be kept aloof from
inflammable matters without straying from its proper field of
activity, and, on the other hand, the organs which had requested
it for opinions would find it easier to adopt whatever decisionswere
called for in a given case without fearing that the Court might feel
slighted by such action (I.C.J. Refiorts 1947-1948, p. 74).
It was this consideration which inspired the Court in the wording
of that Advisory Opinion, which was drawn up with remarkable
ski11so as to emphasize the abstract character of the questions put

to the Court, although some of the consideranda in the preamble
contained allusions to a specific situation(vol.cit.p. 61), a circum-
stance which, on the other hand, gave scope for the elaboration of
dissenting opinions (vol.cit.pp. 94 and 107).
No doubt it is always possible to discern at the base of any
abstract opinion a specific situation which is alluded to remotely or
indirectly ;for, apart from any factitious attitude of mere curiosity,
there is always a fact underlying any question. But it is necessary
to refrain from too deep or too searching an effort for its discovery,
not from a vain desire to create purely artificial situations, but to
promote the usefulness of the advisory function by reducing the
difficulties.
We should constantly bear in mind that the distinction between
abstract and concrete questions, established in Lapradelle's report
as early as 1920, remains immune from the confusion introduced
by another discarded notion, that of the recognition of a dispute of

earlier origin.
The Court must endeavour to adhere to the course that it has
followed in its previous advisory opinions, that is, it should answer
questions of a general character without respect of persons or of
States.

14. In this connexion, 1have observed that the Rules of the new
Court, far from facilitating this soundpractice, havetaken a directly
opposite course, and endeavour to maintain an obsolete system,
represented by the dangerous distinction between a "question" and
a "dispute" (vol. cit.p. 73).
As it would have been inadmissible to retain the word "dispute"
which had already disappeared, the Rules of Court have attached
the word "existing" (now modified to read "actually pending") to
the word "question", though that term was appropriate neither to

"point" nor to "question", but only to "dispute".
In consequence, we have returned to the untenable hypothesis
which had become a closed chapter ever since the case of Eastern
2486 OPINION INDIVIDUELLE DE M. AZEVEDO

savoir, un avis rendu contre le gré d'une partie dans un conflit
dûment constaté.

La conséquence, d'ailleurs facilement prévisible, a étéqu'on
n'a pas pu appliquer une seule fois le texte du Règlement qui a
maintenu la base mêmede l'épineuse distinction :

«elle [la Cour] recherche avant tout si la demande d'avis a trait
à une question juridique actuellement pendante entre deux ou
plusieursEtats »(article82,par. 1, infine).

Plusieurs avis ont déjà étédemandés et la Cour n'a pas encore
fait une telle constatation préalable, qui permettrait de donner en
toute impartialité aux Etats la qualité soit de parties soit de simples
informateurs. Dans le cas présent, certaines parties veulent par
exemple êtreconsidérées comme des informateurs, contrairement
à la nature mêmede leur position dans l'affaire.

15. Pour ce qui est de la désignation d'un juge ad hoc, on pourrait
rappeler que la Cour permanente a fini par l'accepter, sous
la pression de l'ancien article 14. Mais une fois celui-ci disparu,
il aurait fallu aussi supprimer l'article 83 du Règlement, car
une telle faculté ne se concilie nullement avec les seuls avis
théoriques ou abstraits que la Cour devra maintenant donner
sur des « questions )) juridiques. Il va de soi que, si un Etat

accepte de voir son cdifférend » tranché par un simple avis, la
procédure consultative perd sa propre nature pour revêtir celle
d'une procédure sur compromis, l'article 31 du Statut devenant
aussi de toute façon applicable ; il s'agirait alors du fameux carbi-
trage consultatif » introduit par l'affaire des décrets de nationalité
en Tunisie et au Maroc (C. P. J. I.,Série B, no 4, p. 8).

Le Règlement contient donc des textes qui dépassent les limites
fixées par le Statut et dont la suppression s'impose pour éviter des
confusions, surtout de la part des très nombreux organes qui
peuvent demander des avis. II faudra, au contraire, orienter ces
organes dans le libellé des questions, en tenant celles-ci le plus

possible à l'écartdes faits pour que l'on puisse aboutirà une solution
facile et rapide des affaires exigeant une élucidation préalable des
points juridiques.

16. En l'espèce, on constate de prime abord l'extrême sim-

plicité des questions, tout au moins de celles qui maintenant font
l'objet del'attention de la Cour ; si on les envisageait sous une forme
abstraite, on s'étonnerait même qu'ellesaient étéposées.

Mais la demande ne se borne pas à transmettre indirectement à
la Cour et contre le gréde quelques-unes des parties un litige entre SEPARATE OPINION BY JUDGE AZEVEDO 86
Carelia, 1 mean the hypothesis that an opinion niay be delivered

against the will of a parts to a dispute that has been found to
be pending.
The result, as it was easy to foresee, has been that it was found
impossible ever to apply the text of the Rules which have retained
the actual basis of this unfortilnate distinction :
"it [the Court] shall above all consider whether the request for
the advisory opinion relates toa legal question actually pending
between two or more States" (Article 82,para. 1,infine).

Several opinions have zlready been requested, but the Court
has not yet enunciated any preliminary rule which would rnake
it possible to decide, with complete impartiality, whether the
States were appearing as parties or merely as ordinary "informers".
In the present case for instance, some of the parties have asked
to be considered simply as "informateurs", a claim which is incon-
sistent with the very nature of their positions in the case.

15. In regard to the appointment of a jiidge ad hoc, it may
be mentioned that the Permanent Court finally accepted that
arrangement, under the influence of the former Article 14. But,
when that article had disappeared, it woulcl have been logical
also to abolish Article 83 of the Rules, for such a right is quite
inconsistent with theoretical or abstract opinions-the only
kind of opinions which the Court should now give upon legal
"questions". Naturally, if a State agreed to have its "dispute"
settled by a mere opinion, the advisory procedure would lose its
true nature and would assume that of procedure by Special
Agreement, thus rendering Article 31 of the Statute also applicable.
In that way we should come back to the celebrated "advisory
arbitration" which was introduced in the case of the Nationality

Decrees in Tunis and Morocco (P.C.I. J.,Series B, No. -4,p. 8).
The Rules of Court contain clauses which overstép the limits
fixed by the Statute and which should be abolished in order to
avoid confusion Seing caused, especially to the numerous organs
which are entitled to request opinions. We shoiild, on the con-
trary, offer guidance to these organs in the formulation of their
requests which should, as far as possible, be silent regarding
the facts, with a view to promoting the rapid and easy decision
of cases in which there are legal points to be elucidated, in the
first place.

16. In the present case, one is stmck immediately by the
extreme siniplicity of the questions asked, at any rate of those
with which the Court is now concerned; if one regarded them
as abstract points, one would be amazed at their having been
asked.
But the request is not content with indirectly transmitting
a dispute betn-een Member States and States which are not87 OPINION INDIVIDUELLE DE M. AZEVEDO

des États Membres et des États non membres; on prétend encore
attribuer à l'avis un effet matériel indéniable.
17.En effet, la résolution de l'Assembléeprévoit que, dans le
cas d'une réponse affirmative de la Cour aux deux premières ques-
tions, un délai de grâce commencerait à courir automatiquement
pour permettre aux Puissances récalcitrantes de se racheter du
retard où elles étaient tombées,rappelant ainsi un cas d'emendatio
morcz.
L'avis de la Cour aura donc une exécution sui generis qui res-
semble à un interdit ou à un writ et équivaut pratiquement à une

sommation adressée auxdites Puissances, sans mêmeattendre que
l'organe qui a fait la demande connaisse la réponse de la Cour et
délibère à cet égard.
Partant, cet avis produirait des effets plus frappants que beau-
coup de décisionsdans le domainecontentieux. Il y aurait en somme
une sanction suspendue comme une sorte d'astreinte sur la tête
des Etats qui s'opposent à l'application des traités. Eà la fin on
pourrait constater l'inutilitéde cette mise en demeure si, par
exemple, la Cour venait à répondre négativement aux autres
questions qui constituent la fin de la chaîne.
On ne serait pas fondé à établir une différence essentielle entre
l'appréciation d'une conduite passéeet l'indication d'une conduite
pour l'avenir. Gr, formuler un jugement sur la conduite qu'un
État pourrait avoir à l'avenir ne diffère pas d'un examen de

sa conduite passée. De toute manière, ce serait porter atteinte à
l'indépendance des États que de faire intervenir la Cour pour
donner plus de prestige à cette action comminataire.
Constater que l'Assemblée généralea sans doute étéinspirée
par les intentions les meilleures ne suffirait pas à passer outreà
ces obstacles.
18. On a objecté que, dans le cas présent, il n'y aurait pas un
Kdifférend D.Mais certains États ont soutenu que les obligations
assumées en vertu d'un traité avaient étéaccomplies, tandis que
d'autres États l'ont nié,chaque groupe d'États invoquant contra-

dictoirement différents textes des mêmes traités. Donc, il est
incontestable qu'il y a un litige à trancher, ne serait-ce que pour
indiquer la méthode à adopter pour le résoudre, ce qui pénètre
déjà dans le domaine du contentieux.
Affirmer l'existence d'un différenddans le cas présent, c'est déjà
commencer à juger et donc à se reconnaître compétent.

Peu importe qu'il ne s'agisse pas de la querelle principale, car
ily aura toujours des questions préliminaires nettement dégagées
et qui seraient dans le domaine contentieux susceptibles d'une
décision autonome.

19. L'analogie avec le cas de la Caréliedevient ainsi frappante,
parce que, là aussi, ce qui était en cause n'était pas le fond du
26 SEPARATE OPINION BY JUDGE AZEVEDO 87

members to the Court, against the will of some of the parties. It goes
further and attempts to attribute niaterial effects to the opinion.
17.Thus, the Assembly lays down that, if the Court replies
in .the affirmative to the first two Questions, a period of grace
will automatically begin to run so as to allow the recalcitrant
States to make good the tinïe they had lost, as in a case of

emendafio mora.

The Court's opinion will thus possess an enforceability sui
generis somewhat in the nature of an interdict or a writ. It is
tantamount to a summons which is addressed to the above-
mentioned States without even waiting till the requesting organ
has received the Court's opinion and deliberated on it.
This Opinion will therefore produce more impressive effects
than niany judgments in contentious cases. There will be a sanction,
resembling a daily fine, suspended over the heads of the States
which are opposing the application of the Treaties. -4nd, finally,
the uselessness of this forma1 summons will be apparent if, for
example, the Court replies in the negative to the other questions
which constitute the last links in the chain.
There is no ground for differentiating between an opinion on

a State's behaviour in the past and a ruling as to what it should
be in the future. To give a ruling on the future behaviour of a State
is not different from expressing an opinion on its conduct in the
past. In any case, it would be an infringement of the independence
of States to make use of the Court in order to give impressiveness
to thisminatory action.
Our recognition of the excellent intentions which no doubt
inspired the General Assembly would not justify us in ignoring
such obstacles.
18. It has been contended that in the present case there is no

"dispute". But some States have maintained that the obligations
assumed under a Treaty have been discharged, whereas other States
have denied it, and each group of States is relying, against one
another, on different clauses of the same Treaties. It is therefore
unquestionable that there is a dispute requiring either settlement
or an indication of the method of settlement, and that bnngs the
matter into the sphere of contentious cases.
To affirm the existence of a disputein the present caseis to begin
to adjudicate upon it, and therefore to recognize the competence of
the Court.
It matters little that the question at issue is not the main dispute,
for there are sure to be preliminary questions which will emerge
clearly and which, as contentious matters, will be susceptible of
separate adjudication.

19. The analogy with the case of Eastern Carelia is thus very
stnking, for there again the issue was not the merits of the dispute,
2688 OPINION INDIVIDUELLE DE M. AZEVEDO

différend mais une question préliminaire qui, tout en affectant
nécessairement l'examen et le règlement final, ne préjugeait pas à
proprement parler le fond du différend, comme on l'a remarqué à
l'époque.
On a pu aussi constater une situation pareille dans l'avis
concernant les décrets promulgués en Tunisie et au Xaroc, où la
préférencede la Cour à propos d'une question préliminaire, quoique
marquant une position-clef, n'a pas empêchéensuite le règlement
direct de l'affaire.
Dans le cas présent, la position est exactement la même,car
la seule décisionsur la méthode à suivre constitue néanmoins un
point-pivot, qui peut exercer une influence considérable sur l'orien-
tation à donner à l'examen de l'affaire et sur son règlement,
surtout en ce qui concerne l'appréciation du caractère national

ou international de la question concernant les droits de l'homme.
20. J'arrive à ma conclusion sur l'obstacle auquel, à mon avis,
se heurte la Cour et qui devait l'obliger à déduire qu'elle est dans
l'obligation de s'abstenir de répondre.
Tout comme en 192.3 i, faut tenir compte, en premier lieu, du
fait que la Cour ne peut renoncer aux règlesfondamentales du droit
international dans le dessein de favoriser une action oblique aux
fins de trancher un différend actuellement né par le moyen d'une
demande d'avis.
On peut admettre beaucoiip de souplesse dans la recherche du

consentement des parties, mais il est impossible de s'en dispenser
totalement, lorsqu'on est en face d'un conflit pendant. De même,
on peut aller dans le sens d'une raisonnable collaboration avec les
autres organes de l'O.N. U. jusqu'à donner des avis qui, tout en
conservant une forme abstraite, peuvent pourtant être reconnus,
après quelques efforts d'investigation, comme liés plus ou moins
indirectement à certains conflits;mais on ne peut pas examiner des
avis relatifsà des différends clairement indiqués ou visés soit dans
l'énoncé desquestions, soit même dans le préambule qui précède
en général les questions.
Somme toute, il faut dresser un mur entre l'activité contentieuse
et la fonction consultative ; celle-ci doit être rapprochée de
préférencede l'action impersonnelle, qui est par exemple celle du
ministère public, lorsqu'il agit dans l'intérêtexclusif de la loi.
En abandonnant ces précautions élémentaires, onpasserait outre
au refus péremptoire de toute règle de juridiction obligatoire.

On doit se résigner à attendre pour voir la Cour régulièrement
chargée de cette tâche, qui, un jour, sera sûrement la sienne. Mais
l'abstention dans le cas d'espèceconstituerait un motif de plus pour
convaincre les Puissances associéesqu'il faut arriver aussitôt que
possible à ce résultat tant désiré.

(Signé)PHILADELPHO AZEVEDO. SEPARATE OPIXIOS BY JUDGE AZEVEDO 88

but a preliminary question which, while necessarily affecting the
examination of the case and the final settlement, did not, strictly
speaking, as was pointed out at the time, prejudge the substance
of the dispute.
A similar situation was observed in the advisory case concerning
the decrees promulgated in Tunis and Morocco ;in that case the
preference expressed by the Court in connexion with a question-

which, though preliminary, was of a pivotal character-did not
prevent the subsequent direct settlement of the case.
In the present case, we have precisely the same situation ;for a
decision as to the method to be adopted constitutes by itself a
pivota1 point, and will exercise considerable influence on the course
to be followed in examining and settling the case, especially as
regards the determination of the national or international character
of the question concerning human rights.
20. 1 now come to my conclusion in regard to the obstacle with

which the Court is confronted and which should lead it to conclude
that it must abstain from giving an answer.
As was the case in 1923, the point which must primarily be borne
in mind is that the Court cannot abandon the fundamental rules
of international law in order to favour an indirect action designed
fo settle a dispute actually pending by way of a Request for an
Advisory Opinion.
A large measure of flexibility is admissible in seeking the consent
of the parties ;but this consent cannot be dispensed with altogether
when the Court is confronted with a dispute actually pending.
Similarly, one may acknowledge the duty of reasonable co-opera-
tion with the other organs of the United Nations and go so far as to

give opinions which, though couched in abstract terms, may be seen
on 'closer inspection to be more or less indirectly connécted with
specific disputes; but that would not justify the delivery of opinions
relating to disputes which are explicitly indicated or mentioned
either in the text of the questions or in the preamble which usually
precedes the questions.
To sum. up, we must build a wall between the contentious and
the advisory functions. The latter should preferzbly bear a resem-
blance to the impersonal action of a Public Prosecutor when he is
acting solely in the interests of the law.
To abandon these elementary precautions would be to ignore the
decisive refusa1 of the States to accept any rule of co~ilpulsory

jurisdiction.
Ive must be content to wait until the Court is regularly entrusted
with that duty u~hich,no doubt, it will some day have to discharge.
But Ourabstention in the present case would provide an additional
nieans of convincing the Associated Powers of the need of the
earliest possible attainment of so desirable a result.

(Signed) PHILADELPHO AZEVEDO .

Document file FR
Document Long Title

Opinion individuelle de M. Azevedo

Links