Opinion individuelle de M. Owada (traduction)

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131-20040709-ADV-01-07-EN
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OPINION INDIVIDUELLE DE M. LE JUGE OWADA

[Traduction]

La Courpeut examiner proprio motii, si besoin est, la question de I'opportu-
nitéjudiciairede l'exercice de sa compétence dans uneprocédureconsultative-
L'existence cE'unciifléri-ndbilatéràl'arrière-plande l'objet de la requête, sans

,fuire obstaclù 1'exerc.icepar la Cour de sa compétence, est en.soiunfacteur
pertinent que celle-ci dbit prendre en compte pour déterminer la réponsùdon-
ner ù la requête.sansaller,jusqu'ùstatuer sur le règlement du dzflérendpropre-
mcxt dit entre lesparties- En abordant la question de l'opportunitéjudiciaire,
la Cour aurait dû .s'int~rrogernon seulement sur lepoint de .ravoir.s'illui,fullait
ou non cionnt~rsuiteù lu dernande d'avi.~conszrltatif;mais aussi sur la manière
ciontelle auraità exercer sa compétencepour assurer une bonne administration
cielujustice dans une uffaire manij'bsternentliàeun différend bilatéral,ce qui
soulèvenotamment lu c/ue.~tionde la dksignation d'unjugead hoc - Une bonne
udministration tle la jinsticc. impou'etraiter équitablement les positionscles
deux parties concernéesquant ù l'appréciationdes,faits et des points de d-oif
La <.ondamnationdu cycle tragique de vio1ence.sperpétréessans a'iscrinîination
de part et (t'autre contre une populutiorz civile innocente doit tenir une large
place dans 1'avi.sclcllu Cour.

1. Je souscris aux conclusions énoncéesdans l'avis consultatif de la
Cour, tant sur les qluestions préliminaires (compétenceet opportunité
judiciaire) que sur la plupart des points relevant du fond. Néanmoins,
non seulement je n'adopte pas entièrement certainsarguments développés
dans l'avis, mais j'émetsde sérieuses réservessur la manière dont la Cour

a procédé enl'espèce.J'admets qu'il était dans une large mesure inévi-
table qu'elleprocède commeelle l'afait sous l'effet descirconstances assez
extraordinaires et sirigulièresde la cause, dont elle ne peut toujours être
tenue pour responsable, mais j'estime devoir préciserma position en fai-
sant ressortir certains des aspects problématiques de la manière dont la

Cour a procédédans la présenteespèce.

2. Pour formuler !sesconclusions sur les questions préliminaires de la
compétence etde l'opportunité judiciaire de l'exercicede celle-ci, la Cour
s'est essentiellement fgndéesur les exposésdes participants à la procédure
écriteet à la procédure orale. Elle dit quelles raisons l'avaient amenée

ces conclusions aux paragraphes 24 à 67 de l'avis. En tant que telles, ces
raisons ne m'inspirent aucune objection majeure. J'estime toutefoisque la
Cour doit examiner la question dc la compétenceet, en particulier celle
de I'opportunité judiciaire, proprio motu au besoin, pour apprécier non
seulement si elle est fondée en droit à exercer sa compétence en tant
qu'organe judiciaire dans le contexte précisde l'espèce,mais aussi en quoi ÉDIFICATION D'UN MUR (OP.IND.OWADA) 26 1

il est opportun pour elle de le faire du point de vue de la politique judi-
ciaire. C'est dire, au moins de mon point de vue, qu'elle sera amenée à
s'arrêter longuementsur tous les aspects propres aux circonstances par-
ticulièresde la cause, en allant au besoin au-delà des arguments avancés
par les participants En l'espèce, l'un de ces aspects à examiner de

près correspond aux incidences de l'existence d'un différend bilatéral à
l'arrière-plan de la demande d'avis consultatif.
3. Le Statut originel de la Cour permanente de Justice internationale
ne comportait aucune disposition expressémentconsacrée à la compé-
tence consultative. Seul le Pacte de la Société desNations, en son ar-
ticle14,stipulait que (([laCour] donnera[it] aussi des avis consultatifs sur
tout différend ou tout point, dont la saisira[it] le Conseil ou I'Assem-
blée)).Ce fut cette disposition qui constitua finalement le fondenlent juri-
dique de I'exerciced'une fonction consultative par la Cour permanente de
Justice internationale.
4. Si, dans 17intenl.iondes pèresfondateurs de la Société desNations,
l'objet de cette disposition ne semble pas avoir ététout à fait clair ni
homogène, l'un despoints qui ressort clairement de l'histoire lkgislative
du Pacte est que la finalitéde la fonction consultative de la Cour perma-

nente a consisté dèsle début à faciliter a la Société desNations le règle-
ment pacifique de diifférendsconcrets portés devant son Conseil, en par-
ticulier dans lecont~axtedes procédures viséesaux articles 12 à 16 du
Pacte '.
5. Lorsque, en 19;!2,peu après la création dela Cour permanente, fut
élaboréle règlementde cette dernière, quatre articles (les articles 7174)
furent dévolus àla procédure consultative.Ceux-ciconsacraient le((carac-
tère judiciaire)) de cette fonction de la Cour et laissaient prévoir que
serait ultérieurement poussée plus loin l'assimilationde la procédure
consultative à la wrocédurecontentieuse2. En effet. le Comité dela Cour
permanente de Justiice internationale, constitué le 2 septembre 1927,
déclaraitdans son rapport:

K Le Statut ne mentionne pas les avis consultatifs, mais laisseà la
Cour le soin de réglerentièrement sa procédureen cette matière. La
Cour, dans I'exercicede ses pouvoirs, a délibérémenett intentionnel-
lement assimilé la procédure consultative à la procédure conten-
tieuse; et les résultats obtenus ont abondamment justifiécette atti-
tude. Le prestige dont peut jouir la Cour actuellement en tant que

tribunal judiciaire est dans une large mesure dû à l'importance de
son activitéconsultative età la façon judiciaire dont elle a régcette
activité.En réalité, lorsqu'en faiitl se trouve des parties en présence,
iln'ya qu'une différencepurement nominale entre lesaffaires conten-
tieuses et les affaires consultatives. La différence principale réside

'Voir, en particulier, Michla Pomerance, The Advi.~or.yFunction of the Internutionul
Co'Ihidp,. 14.eugue und U.N. Eru.ras1,973, p. 9. EDIFICATION D'UN MUR (OP. IND. OWADA) 262

dans la façon dont l'affaire est introduite devant la Cour, et même
cette différence peut virtuellement disparaître, comme ce fut le cas
dans l'affaire des décrets de naturalisation en Tunisie. De la sorte,
l'opinion selon laquelle les avis consultatifs n'ont pas force obliga-
toire est plutôt théorique que réelle.» (C.P.J.1. sérieE n" 4, p. 72.)

6. Dans l'affaire du Stutut (le lu Curélieorientule (C.P.J.I. série B
no 5), tel fut précisémentle motif principal invoqué par la Cour perma-
nente lorsqu'elle refusa d'exercer sa compétence et de donner I'avis
consultatif qui lui était demandé. La question précisesoumise à la Cour
était alors de savoir si

«[l]es articles 10et 11 du traité de paix entre la Finlande et la Russie
[de 19201, ainsi que la déclaration y annexée de la délégationrusse

concernant 1'aui.onomie de la Carélie orientale, [constituaient] des
engagements d'ordre international obligeant la Russie vis-à-vis de la
Finlande à I'e~é~cutiod nes dispositions y contenues)) (ihid, p. 6).

En d'autres termes, la requêtes'inscrivait dans le cadre d'un différend
entre la Finlande et la Russie sur ce point et c'était la question que la
Finlande avait demandé à la Société desNations d'examiner. Le Conseil,
dans sa résolution, se déclara ((disposé,s'il y [avait] à ce sujet accord
entre les deux partie:; intéressées,à examiner la question en vue de trou-
ver une solution satisfaisante)) (ihid., p. 23). C'est toutefois en raison des

circonstances dans lesquelles le Gouvernement russe avait rejeté l'invita-
tion du Gouvernement estonien a consentir «à soumettre la question à
l'examen du Conseil sur la base de l'article 17 du Pacte)) (ibid., p.24), et
après que le Gouvernement finlandais eut de nouveau porté l'affaire
devant le Conseil, qiue celui-ci décida de demander I'avis consultatif en
question.
7. Dans ce contexte, la Cour permanente devait ainsi précisersa posi-

tion :
((11y a eu des divergences d'opinion sur le point de savoir si des
questions pour avis consultatif, pour autant qu'elles se réfèrentà des

points de fait acituellement en litige entre deux nations, devraient être
soumises à la Cour sans le consentement des parties. Il n'est pus
besoin, dans le cus actuel, d'upprofondir ce point. » (C.P.J.1. sérieB
no 5, p. 27; les italiques sont de moi.)

Ayant éclaircice point, la Cour permanente poursuivit

«Il résulte de ce qui précèdeque I'avis demandé à la Cour porte
sur un différend1actuellement néentre la Finlande et la Russie. Lu
Russie n'étuntpus Membre de lu Sociétédes Nutions, il s'ugit d'un
cas prévu ù l'article 17 du Pacte ... les Membres de la Société des
Nations ... ayant acceptéle Pacte ... se trouvent sous l'obligation qui
résulte desdispositions du Pacte concernant le règlement pacifique des différendsiriternationaux. Il en est autrement pour les Etats non
Membres: ils ne sont pas liéspar le Pacte. La soumission d'un dqfé-
rend, qu'ilsauraient avec un Etat Membre de la Société desNations,
aux métlzodesd,zrèglementprévuespur le Pacte, ne saurait résulter
que de leur consentement. Or. le consentement de la Russie n'a
jamais été donnlé» . (C.P.J.I. sérieB no5, p. 27-28; les italiques sont
de moi.')

Il ressort de ce passage que la principale raison pour laquelle la Cour per-
manente refusa d'exercer sa compétencedans l'affaire de la Carélie orien-
tale ne résidaitpas tant dans l'existenced'un différendentre lesparties au

sujet de l'objet de la requête, maisplutôt dans le fait que l'une desparties
au différendavait refuséde donner son consentement a ce que ce diffé-
rend fût soumis «aux méthodesde règlement prévuespar le Pacte)).
8. Lorsque la Cour internationale de Justice fut instituéeen tant que
continuatrice de la Cour permanente de Justice internationale et qu'elle
fut intégréeau systèinedes Nations Unies pour constituer l'organe judi-
ciaire principal de l'Ch-ganisation,aucun changement radical concernant
ses fonctions ou sa constitution A cet égardne fut apporté au nouveau

Statut de la Cour. Dlepuis,la Cour s'acquitte de sa fonction consultative
-- fonction secondaire, certes, mais importante - selon la ligne tra-
céepar sa devancière, la Cour permanente de Justice internationale, à
l'époquede la Sociéié desNations.
9. A la lumière d<:cet historique de la jurisprudence qui s'est consti-
tuéedepuis la créationde la Cour internationale de Justice sur les ques-
tions relatives à sa compétence dans les procédures consultatives et a

l'opportunitépour elled'exercer cette compétence,j'estime que la Cour a
raison de conclure en l'espèceque l'existenced'un différendd'ordre bila-
téralne doit pas l'empêcherde rendre l'avis consultatif demandé.

10. Si l'existenced'un différendbilatéralne doit donc pas lui interdire
d'exercer sa compétence dans les procédures consultatives au nom de
l'opportunité judiciaire, j'estime toutefois que la Cour doit tenir compte
de l'existence éventuielled'un différend bilatéralpour apprécierjusqu'à

quel point elle doit exercer sa compétencedans ces procédures consulta-
tives et de quelle manièreelledoit le faire. A cet égard,je considère que la
Cour a établi trop facilement une analogie entre la présente demande
d'avis et les précédents enla matière, tout particulièrement le précédent

Le Pacte disposà l'article 17ce qui suit:
«En cas de différendentre deux Etats, dont un seulement est Membre de la Société
ou dont aucun n'enIâit partie, I'Etat ou les Etats éàla Sociétésont invitàs
se soumettre aux obligations qui s'impoàeses Membres aux fins de règlement du
différend,aux conditionsstiméesjustes par le Conseil. Si cette invitation est accep-
tée,les dispositions des articles16 s'appliquent sous réservedes modifications
jugées nécessairespar le Conseil.» ÉDII'ICATION D'UN MUR (OP. IND. OWADA)
264

concernant les Conséquencesjuridiques pour les Etats de la présence
continue de I'Ajrique du Sud en Numihie (Sud-Oue.st africain) nonobstunt
lu résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité.Etant donné la com-
plexitéde la préseniteespèce, il n'est pas totalement justifié à mon sens
d'appliquer automaitiquement à la situation actuelle les principes tirés de

précédents.
11. S'agissant de l'affaire de la Namibie en particulier, l'élément liti-
gieux sur lequel se fondait la demande d'avis consultatif était constitué
par «les conséquencesjuridiques ..de la présence continue de l'Afrique
du Sud en Namibie ...nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de
sécurité)).En dépitde similitudes dans le libellé, larequête concernant la
Namibie et celle dont est aujourd'hui saisie la Cour reposent sur des

bases totalement différentes. Dans le cas de la Namibie, la Cour était
priéede donner un avis concernant la signification juridique des mesures
prises par l'organisation des Nations Unies lorsqu'elle avait mis fin au
mandat de l'Afrique du Sud sur le Sud-Ouest africain et leur incidence
juridique sur le statut de l'Afrique du Sud dans ce territoire. Si contro-
verse juridique ou différend il y avait, c'était précisémententre l'organi-
sation des Nations Unies et 1'Etat concerné. En revanche, dans la pré-

sente espèce, l'élément litigieux est unesituation résultant de mesures
prises par Israël vis-à-vis de la Palestine, mesures qui concernent le terri-
toire palestinien occupé. IIest indéniable qu'il y a en l'espèce unecontro-
verse juridique sous-jacente ou un différend sous-jacent entre les parties
directement concernées par cette situation, et que, parallèlement, comme
la Cour le dit fort justement, le problème se situe aussi entre l7Organisa-

tion des Nations Unies et Israël puisque l'intérêtjuridique de I'Organisa-
tion est légitimement en cause.
12. Cela ne veut naturellement pas dire que la Cour doive pour cette
raison refuser d'exercer sa compétence en l'espèce. Cela signifie en re-
vanche que l'on doit examiner la question de l'opportunité judiciaire en
tenant compte de cette réalité et euégard à la jurisprudence issue d'af-
faires plus pertinentes. Le cas qui me semble se rapprocher le plus de la

présente espèce estizeluide la demande d'avis consultatif concernant le
Sahara occidental, en ce sens qu'il y avait manifestement la, à l'état sous-
jacent, une controversejuridique ou un différend entre les parties concer-
nées.Toutefois, la Cour n'a pas mêmelà un précédenttotalement ana-
logue dont elle puisse s'inspirer pour se prononcer en I'espéce.Dans l'avis
relatif au Suhuru occidentul. la Cour avait déclaré:

((L'Assembléegénérale n'a pus eu pour but de porter devant la
Cour, sous la forme d'une requêtepour avis consultatif, un différend
ou une controv~rrsejuridique, afin d'exercer plus tard, sur la base de
l'avis rendu par la Cour, ses pouvoirs et ses fonctions en vue de
régler pacifiquement ce différend ou cette controverse. L'objet de la
requêteest tout autre: il s'agit d'obtenir de la Cour un uvis consul-
tatif que I'Ass~?mblée généraleestime utile pour pouvoir exercer

coninic.il convit.nt sclfonction.^relutives ri lu décolonisation du ter- ÉDIFICATION D'UN MUR (OP. IND. OWADA) 265

ritoire.)) (Avis consultatif; C.I.J. Recueil 19p. 26 et 27, par. 39;
les italiques sont de moi.)

En la présente espèise,l'Assemblée générale semble plutôt s'être placée
dans le premier de ces cas de figure.

13. Face à ce qui constitue incontestablement, à l'arrière-plan de la
demande d'avis, une controverse juridique ou un différend entre les

parties concernées, je tiens à dire que, dans ces conditions, le critère
déterminant, quand la Cour doit établirsi l'opportunitéjudiciaire l'incite
à exercer sa compétence - compétence qu'elle a sans aucun doute -,
doit consister non pas à rechercher si la requêteest liée à l'existence
concrèted'une contr'overseou d'un différend,mais à rechercher si «accep-
ter de répondre aurait pour effet de tourner le principe selon lequel un
Etut n'est pas tenu de soumettre i4ndcfkrend au règlerîzentjudiciaire s'il
n'est pus consentant)) (Suhuru occidental, uvis consultatif; C.I.J. Recueil
1975, p. 25, par. 33; les italiques sont de moi). Autrement dit, en dernière
analyse, le critèredéterminant de I'opportunitéjudiciaire doit êtrepour la

Cour de s'assurer que répondre sousla forme d'un avis consultatif relatif
à l'objet de la requê1.ne revient pasà statuer sur l'objet mêmedu diffé-
rend bilatéral qui existe incontestablementà l'heure actuelle entre Israël
et la Palestine.
14. Le raisonnement que je viens de suivre m'amèneaux deux conclu-
sions suivantes. Premièrement, le fait que l'espèceportée devant elle se
rattache aussi à un différend bilatéral nedoit pas empêcherla Cour
d'exercer sa compét.ence.Deuxièmement, ce fait n'en doit pas moins
infléchir l'ensemblede la procédure suivie par la Cour en l'espèce; en
d'autres termes, daris cette procédure consultative, la Cour doit avant

tout s'attacher à prksenter, certes, les conclusions en droit qu'elle aura
objectivement tirées, mais dans la stricte mesure du nécessaire et d'une
manière qui soit utilià l'organe qui l'a saisià,savoir l'Assemblée géné-
rale, permettantà celui-ci de s'acquitter de ses fonctions relativemeAla
situation qui est à l'origine de la demande, et s'abstenir de statuer sur
l'objet du différend entre les parties concernées.
15. Il convient de rappeler que, mêmelorsqu'elle a par le passé décidé
d'exercer sa fonction consultative, la Cour internationale de Justice a
régulièrement estimé devoir rester fidèle«aux exigences de son caractère

judiciaire)). Ainsi, dans l'affaire Sahuru occidental, a-t-elle déclaré:
((L'article 65, paragraphe 1, du Statut qui confère à la Cour le
pouvoir de donner des avis consultatifs est permissif et le pouvoir
qu'il lui attribue ainsi a un caractère discrétionnaDans l'exercice
de ce pouvoir discrétionnaire, lu Cour internutionale de Justice,de

mêmeque la Cour permanente de Justice internationale, a toujours
suivi le principe selon lequel, en tant que corps dudiciaire, elle doit
rester jïdèle aux exigences de son curuct6re judiciaire, nlême
1or.squ'ellerend ilesavis consultatifS. »(Avis consultatiJ; C.1.J. Recueil
1975, p. 21, par. 23; les italiques sont de moi.) 16. L'une des exigences qui incombe ainsi à la Cour en tant qu'organe
judiciaire est qu'elle doit, lors de la procédure consultative, se montrer
constamment équitable dans l'administration de la justice, face aux posi-
tions et intérêtsdivergents des parties intéressées. En d'autres termes, il
m'apparaît devoir êtiresoulignéque le pouvoir discrétionnaire de la Cour

en matière consultative ne se limite pasa la question de savoir si elle doit
ou non répondre à une demande d'avis, mais doit aussi s'exercer à l'égard
de questions de procédure4. Cette exigence revêtici une importance par-
ticulière, mêmesi j'a~iconclu pour ma part qu'il était opportun pour la
Cour d'exercer sa compétence en l'espèce, puisque nous avons plus haut
retenu comme incontestable l'existence d'une controverse juridique ou
d'un différend concret sous-jacent.

17. L'article 68di1 Statut de la Cour dispose que, «dans l'exercice de
ses attributions consultatives, la Cour s'inspirera en outre des disposi-
tions du présent Statut qui s'appliquent en matière contentieuse, dans la
mesure où elle les reconnaîtra applicables)). Le Règlement de la Cour,
dans sa quatrième partie (aux articles 102à 109),précisecette disposition
du Statut. Particulièrement pertinent dans le présentcontexte est le para-
graphe 3 de l'article 102, selon lequel

«[s]i l'avis consiiltatif est demandé au sujet d'une question juridique
actuellen~ent pendante entre deux ou plusieurs Etats, l'article 31 du

Statut est applicable, ainsi que les dispositions du présent Règlement
qui pourvoient Al'application de cet article)).

18. Dans l'affaire de laNumibie. I'Afriaue du Sud avait demandé aue
fût désigné un juge~ldhoc qui siégeraiten I'espéceconformément iicette
disposition. Bien que la Cour eût décidéde rejeter cette demande dans
son ordonnance du 29 janvier 1971 (Conséquencesjuridiques pour les
Etats de lu présencecontinue de l'Aj?ique du Sud en Namibie (Sud-Ouest
africain) nonobstunic la rksolution 276 (1970) du Conseil de skcurité,

C.I.J. Recueil 1971, p. 12), des opinions dissidentes bien argumentées
furent présentéessur ce point (ibid, p. 308; p. 324). Dans l'affaire du
Sahura occidental. en revanche. la Cour adowta une autre ~osition. En
réponse au Maroc (qui demandait la désignation d'un juge ud lzoc en
application de l'article 89 du Règlement (soit l'actuel article 102),la Cour
décida que le Maroc avait effectivement le droit de désigner un juge ad
hoc (mais rejeta la requête symétriqueémanant de la Mauritanie) (C. I.J.

Recueil 1975, p. 6).
19. La procédure de désignation d'un juge ad hoc est enclenchéepar la
demande d'un Etat dléclarantque «la demande d'avis consultatif a trait ...
a une question juridique actuellement pendante entre deux ou plusieurs
Etats)) (Règlement de la Cour, art. 102). A mon sens, a la lumière des
précédents cités plushaut, Israël, compte tenu de sa position particulière
dans la présente espèce,aurait étéfondéà demander la désignation d'un

Michla Pomeranceop. cil..281.juge ud hoc. Pour une raison qui lui est propre, Israël n'a pas choisi de
procéder ainsi. L'eiit-il fait, l'obligation fondamentale faite à la Cour

d'assurer l'équitédans l'administration de la justice aurait constituépour
elle une tâche infiniment plus lourde. Il va sans dire en effet qu'une telle
démarche aurait compliqué la situation, I'autre partie au différend, la
Palestine, n'étant pasune entité reconnue commeun Etat aux finsdu Sta-
tut de la Cour. Qu'advient-il lorsque l'une des parties directement inté-
resséesest habilitée a choisir un jugeud lzocalors que l'autre ne l'estpas?
On peut se demander si I'administration de la justice est alors parfaite-
ment équitable. Certes, mon propos n'est pas d'apporter ma propre
conclusion à ce problème qui pour êtreinsoluble est aussi hypothétique;
je tiens néanmoins à faire observer que cet élémentconstitue l'un des
aspects importants de l'espèce,qui aurait pu êtrepris en compte par la
Cour pour appréciers'ilétaitopportun, sur le plan judiciaire, d'exercer sa

compétenceet, dans l'affirmative, jusqu'à quel point, vu lescirconstances
excevtionnelles de la^cause.
20. Quoi qu'il en soit, le principe est établi que,mêmedans une pro-
cédure contentieuse, l'absencede l'une desparties est en soi sans effet sur
la compétencequ'a la Cour de statuer (Statut de la Cour, art. 53), mais
que, en tant qu'organe judiciaire, celle-ci doit demeurer équitable dans
I'administration de la justice. Ainsi, concernant l'établissementdu droit
applicable, la Cour, dans les affaires relatives la Compétenceen mutière
de pêcheries, a dit ceci

«La Cour, eri tant qu'organe judiciaire international, [est]censée
constater le droit international et, dans une affaire relevant de I'ar-
ticle 53 du Stat~itcomme dans toute autre, est donc tenue de prendre
en considération de sa propre initiative toutes les règles de droit
international quiiseraient pertinentes pour le règlementdu différend.
La Cour ayant pour fonction de déterminer et d'appliquer le droit
dans les circon:;tances de chaque espèce, la charge d'établir ou de
prouver les règlesde droit international ne saurait être imposée à
l'une ou l'autre Partie, car le droit ressortit au domaine de la

connaissance judiciaire de la Cour. » (Fond urrtt, C.1.J. Recueil
1974, p. 181,par. 18.)
Touchant la question des faits à établir,dans l'affaire relative auxActi-
vitésmilitaires et purumilituires uu Nicuruguu et contre celui-ci (Nicuru-
guu c. Etut.s-Unis clAmkrique) la Cour a déclaré :

«en principe la Cour n'est pas tenue de se limiter aux élémentsque
lui soumettent formellement les parties (voir Emprunts hré.silien.s,
C.P.J. 1.sérieA no'20 et 21, p. 124; Essuis nucléaires,C.I.J. Recueil
1974, p. 263 et 264, par. 31 et 32))(Fond, arrêt,C.1. J. Recueil 1986,
p. 25, par. 30),

pour ensuite préciser :
«La Cour doit donc rechercher un certain équilibre. D'un côtéelle
a avantage à connaître les vues des deux parties, quelle que soit la ÉDI~ICATION D'UN MUR (OP. IND. OWADA) 268

manière dont ces vues s'expriment. De plus, ainsi qu'elle l'a souligné
en 1974, en cas d'absence de l'une des parties «il incombe tout par-

ticulièrement à la Cour de s'assurer qu'elle est bien en possession de
tous les faits disponibles)) (Es.sais nucléaires, C.I.J. Recueil 1974,
p. 263, par. 31; p. 468, par. 32). D'un autre côtéla Cour doit souli-
gner que le principe de l'égalité desparties au différend reste pour
elle fondamental. ))(C. I.J.Recueil 1986, p. 25 et 26, par. 31.)

21. Ce principe cardinal devrait s'appliquer en matière consultative
tout comme il s'applique en matière contentieuse. On pourrait même
faire valoir qu'il est applicable à fortiori aux procédures consultatives,

puisque, dans une procédure consultative, à la différence de ce qui se
passe en matière contentieuse, l'on ne peut dire, en tout cas au sens juri-
dique, que (<l'absentperd ... la possibilitéde combattre les allégations de
fait de son adversaire)) (Activités militaires et pararîzilitaires uu Nicuru-
gua et contre celui-cl (Nic~uraguac. Etats-Unis d'Am~rique), jbnd, urrt;t,
C.I.J. Recueil 1986, p. 25, par. 30). Dans une procédure consultative,

aucun Etat, pour intéressé qu'ilsoit, n'est dans l'obligation de compa-
raître devant la Cour Dour défendre sa ~osition.
22. En ce qui concerne cet élément, c'est-à-direles faits et les informa-
tions se rapportant i~la présente espèce,il n'est pas douteux, comme elle
le dit dans l'avis, que

«la Cour a à sa disposition le rapport du Secrétaire général,ainsi
qu'un dossier vcllumineux soumis par celui-ci à la Cour, qui contient
des informations détailléesnon seulement quant au tracé du mur
mais aussi uuant aux conséauences humanitaires et socio-écono-

miques de celui-ci sur la population palestinienne)) (avis consultatif,
par. 57).
Effectivement, les informations sont abondantes, en particulier sur les

incidences humanitaires et socio-économiques de l'édification du mur.
L'authenticité et la fiabilitéde ces informations ne font aucun doute. Ce
qui semble faire défaut toutefois, ce sont des informations expliquant le
point de vue israélien, en particulier la question de savoir pourquoi et
comment l'édificationdu mur telle qu'elle est planifiéeet menée à bien

dans la pratique est nécessaire et fondée.
23. A mon avis, il y a bien défaut d'information de ce côté-là,mêmesi
la Cour affirme que

<<l'exposé écritdl'lsraël, bien que se limitant aux questions de com-
pétence et d'opportunité judiciaire, comporte des observations
concernant d'autres sujets, y compris les préoccupations d'Israël en
matière de sécurité,et est accompagné d'annexes correspondantes))
(avis consultatif, par. 57).

En fait, mon observation semble corroborée par ce qui est dit dans l'avis
lui-mêmede l'argument présentépar Israël à ce sujet. Israël a fait valoir
que le seul objectif di: l'édificationdu mur était de lui permettre de com-battre efficacement les attaques terroristes lancéesdepuis la Cisjordanie
ou, pour reprendre les termes utilisésdans le rapport du Secrétairegéné-

ral, d'«enrayer les infiltrations en Israëlpartir du centre et du nord de
la Cisjordanie)) (avis consultatif, par.80). Toutefois, la Cour, au para-
graphe 137 de l'avis, déclare simplementque, «uu vu du dossier, [elle]
n'estpus CO~VU~~CUP que la poursuite des objectifs de sécuritéavancéspar
Israël nécessitait l'atloption du tracéchoisi pour le mur» (les italiques
sont de moi). II me semble clair qu'ici laCour admet en fait qu'Israël n'a
pas présenté d'éléments très détailslu érsce point et qu'elle s'abstient de
procéder a une réfutation des arguments d'Israël iipartir des informa-
tions que celui-ciaumit présentéessur le mêmepoint. Au paragraphe 140
de l'avis, la Cour se Fondesimplement sur le «dossier>)pour dire qu'elle
n'est pas convaincue que «la construction du mur selon le tracé retenu
étaitle seul moyen de protéger les intérêts d'Israëlcontre le périldont il
s'est prévalupour justifier cette construction)).
24. Mon propos ri'est pas, en soulevant cette question, de contester
l'exactitude factuelle de ces affirmations ni de remettre en cause les

conclusions auxquell<:sla Cour est parvenue en s'appuyant sur les docu-
ments et lespiècesdont elledisposait. En fait,il semblerait raisonnable de
conclure, tout bien considéré, queles répercussions politiques, sociales,
économiques et humanitaires de la construction du mur, telles que la
preuve en a étéabondamment rapportée au cours de la procédure, sont
telles que cette construction constitue une violation des obligations inter-
nationales mises à la char"e d'Israël Dar divers instruments internatio-
naux auxquels celui-ci est partie. En outre, ces répercussionssont telles
que je suis prêt à reconnaître qu'aucun motif tiré d'«impératifs mili-
taires)), mêmeétayépar des faits démontrés,ne saurait efbcer I'illicéité
de cette action, au nom du strict principe de proportionnalité.

25. Toutefois, telle n'est pas la question. Ce qui est essentiel ici, c'est
que les extraits de l'avis que j'ai cités ci-dessusétayent mon argument
selon lequel la Cour,une fois prise sa décision d'exercersa compétenceen
l'espèce, devaitveiller avec le plus grand soin non seulement à garantir

l'équité elt'impartialitédu résultat,mais aussi à rendre cet effort visible
tout au long de la procédure, quelle que soit finalement l'issue de la
cause.
26. La question soumise a la Cour aux fins d'un avis consultatif était
expressémentcelle des (<conséquences[en droit] de l'édificationdu mur
qu'Israël ...est en train de construire)) (résolution AIES-10lL.16 de
l'Assembléegénérale).Elle portait exclusivement sur cette action particu-
lièred'Israël. Inutile de rappeler, toutefois, que l'édificationde ce mur par
Israël n'est pas unphknomèneisoléde tout contexte; elle fait partie, une
partie extrêmementimportante, il faut le reconnaître, du contexte général
dans lequel s'inscrit la longue histoire de la paix au Moyen-Orient.
27. Bien entendu, cela ne change rien au fait que la demande d'avis
consultatif porte sur une question déterminéeet que la Cour doit traiter
cette question et cette question uniquement, sans étendre son examen acelle, plus large, de la paix au Moyen-Orient, notamment à ce qui touche
au «statut permanent)) des territoires dont il s'agit. Néanmoins, si l'on
veut établir une vérité objectiveau sujet de la question particulière de
l'édificationdu mur dans son contexte généralet faire en sorte que justice
soit rendue de façoni équitable - puisqu'il existe à l'arrière-plan un dif-
férendentre les parlies directement intéressées -, il est, me semble-t-il,

d'une importance capitale que la Cour examine la question précisequi lui
a été posée,sans jarriais oublier la situation d'ensemble qui forme la toile
de fond de l'édificationdu mur.

28. Une prémissenon contestée de la paix au Moyen-Orient a toujours

étéque celle-ci devait reposer sur le double principe d'un «[r]etrait des
forces arméesisraéliennesdes territoires occupéslors du conflit [de 19671))
et d'une

(([clessation de routes assertions de belligérance ou de tous états de
belligérance [ainsique du] respect et [de la] reconnaissance de la sou-
veraineté, de l'intégritéterritoriale et de l'indépendance politique de
chaque Etat de la régionet de leur droit de vivre en paix à l'intérieur
de frontières sûres et reconnues à l'abri de menaces ou d'actes de

force».
La résolution 242 (1967) du Conseil de sécuritéa expressément consacré

ces deux principes. La «feuille de route)) adoptée par le Conseil de sécu-
rité dans sa résolution 1515 (2003) constitue un schéma directeur qui
indique la marche itsuivre sur la base des deux principes en question.
29. Si la Cour a conclu que la construction du mur était contraire à
cette marche à suivrlc parce qu'elle ferait obstacle à ces deux principes,

particulièrement en raison de la règlecoutumière de «l'inadmissibilité de
l'acquisition de territoire par la guerre)) (avis consultatif, par. 117), elle
doit le dire. En même temps,elle doit rappeler à l'Assembléegénéraleque
cette marche à suivre a étédéfiniedans le contexte des deux principes
jumeaux qui, si l'on veut qu'une paix s'instaure au Moyen-Orient,
doivent êtremis en o:uvre parallèlement.

30. Comme rappelé plus haut, Israël a fait valoir que le mur avait pour
seul objet de lui permettre de lutter efficacement contre des attaques ter-
roristes menées depuis la Cisjordanie. En réponse, la Cour s'est bornée à
déclarer que,

((au vu du dossier, [elle]n'[était] pasconvaincue que la construction
du mur selon le itracéretenu étaitle seul moyen de protéger les inté-

rêts d'Israëlcontre le périldont il [s'était] prévalupour justifier cette
construction >)(avis consultatif, par. 140).

Il est parfaitement compréhensible que, l'argument n'ayant pas été déve-
loppé dans le dossier et l'information faisant défaut à ce sujet, la Cour
n'ait pas trouvé d'aui.re façon de réagir face iicette situation. L'on peutégalementaccepter que l'argument d'Israël, mêmesi sa véracitéétait éta-
blie du point de vue des motifs auxquels ce dernier obéit,ne suffisepas
justifier la construction du mur telle que celle-cia été conçueet menéà
bien dans la pratique. Comme la Cour l'a montréde façon trèsconvain-

cante, la construction du mur n'en constituerait pas moins une violation
des obligations incombant à Israël, notamment au titre du règlement de
La Haye concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre et de la
quatrième convention de Genève relative à la protection des personnes
civiles en temps de guerre, sauf à ce que des arguments suffisamment
puissants excluent I'illicéide l'acte. Mais l'important est que la Cour
aurait pu,proprio motu, tenter une recherche approfondie pour détermi-
ner la validitéde cet argument en fait comme en droit, et présenterune
image objective de la construction du mur dans son intégralité, surla
base de laquelle il eiit été possibled'apprécierle bien-fondéde la thèse
d'Israël.
31. Il me paraît imiportant que soit évoquédans ce contexte le fait que,

de part et d'autre,des actes de violence sont pratiqués sans discrimina-
tion contre les populations civiles. Sans chercherdéterminerla relation
de cause à effet entre les actes tragiques de violence réciproque commis
par chacune des parties nià savoir si les attaques qualifiéesde terroristes
qui sont lancéespar les Palestiniens sous forme d'attentats-suicides diri-
géscontre la population civile israéliennedoivent, pour condamnables
qu'ellessoient, êtreconsidéréescomme suffisant à justifier la construction
du mur, il est incontestable, mon sens, que ce cycle tragique d'actes de
violence perpétrés sans discriminationdes deux côtés à l'encontre de la
population civile innocente des deux parties doit êtrecondamnéet rejeté
comme totalement iriacceptable. II est vrai que cet élémentn'entre pas
véritablementdans le cadre de la question précise posée à la Cour, mais
j'estime tout simplement normal que la Cour lui accorde une large place

dans son avis quand elle s'interroge sur l'édificationdu mur. Ce point
revêt àmon sens une importance particulière, car la Cour doit aborder le
sujet àexaminer en recherchant un certain équilibre.

(Signe) Hisashi OWADA.

Bilingual Content

SEPARATE OPINION OF JUDGE OWADA

The issue of'judicial propriety in exercising jurisdiction in udvisory proceed-
ing.7i.7afactor to be exarnined by the Court proprio motu, if'nc~ces.sa~ - Rele-
vance of'the existence qfu hiluteral dispute in the subject-mutter of the request
us such is not to he a hurfor the Court in c~xercisinjurisu'iction,but nonetheless
ufuctor to he considered in determining kow the Court should deal ivith the suh-
ject-mutter of the request without impinging upon the problem qfreguluting the
very dispute hetiveen the parties- The Court should Izuveapproached the issue,
of exercising judicial propriety, not simply in relution to the question a.s to
ivhether it should conzply nviththe request for un udvisory opinion, but al.~oin
relution to the question as to how if ~IzouIdc~xercise,jurisdiction with a ~*ic.tv

ensuring ,fairnes.s in the udmini.stration of justice in a case lvhiclz clearly i.s
reluted to u bilateral dispute, including the issue uf uppointing ajudge ad hoc -
Considerution of'fuirness inthe administrution qf'justice requires equituble
treutment of the positions of'both sides involved in the suhject-mutter in terms qf'
the assessment both offucts und oJ'luiz1inilolved - Condemnation of the tragic
circleoJ i'di.~criminutenmtual violenceperpetruted by both sides against inno-
cent ciiiliun population .should he an importunt segment of'the Opiniotz of the
Court.

1. 1concur with the conclusions of the Opinion of the Court both on

the preliminary issues (jurisdiction and judicial propriety) and on most
of the points belonging to the merits of the substantive issues involved.
Nevertheless, not only have 1 some disagreements on certain specific
points in the Opinion, but 1 have some serious reservations about the

way the Court has proceeded in this case. While 1 acknowledge that
the way in which the Court has proceeded with the present case has to a
large extent been made inevitable under the somewhat extraordinary and
unique circumstances of the case that are not always attributable to
the responsibility of the Court, 1 feel it incumbent upon me to make

my position clear, by pointing to some of the problematic aspects of the
way in which the Court has proceeded in the present case.
2. The Court has reached its conclusions on the preliminary issues on
jurisdiction and on judicial propriety of exercising this jurisdiction pri-
marily on the basis of the statements put forward by the participants in

the course of its written and oral proceedings. The reasons for the Court
to arrive at these conclusions are set out in paragraphs 24-67. These, as
such, raise no major disagreement on my part. However, 1 believe that
the issue of jurisdiction and especially the issue of judicial propriety is a
matter that the Court should examine, proprio motu if necessary, in order

to ensure that it is not only riglzt as a matter of law but also proper as a
matter of judicial policy for the Court as a judicial body to exercisejuris- OPINION INDIVIDUELLE DE M. LE JUGE OWADA

[Traduction]

La Courpeut examiner proprio motii, si besoin est, la question de I'opportu-
nitéjudiciairede l'exercice de sa compétence dans uneprocédureconsultative-
L'existence cE'unciifléri-ndbilatéràl'arrière-plande l'objet de la requête, sans

,fuire obstaclù 1'exerc.icepar la Cour de sa compétence, est en.soiunfacteur
pertinent que celle-ci dbit prendre en compte pour déterminer la réponsùdon-
ner ù la requête.sansaller,jusqu'ùstatuer sur le règlement du dzflérendpropre-
mcxt dit entre lesparties- En abordant la question de l'opportunitéjudiciaire,
la Cour aurait dû .s'int~rrogernon seulement sur lepoint de .ravoir.s'illui,fullait
ou non cionnt~rsuiteù lu dernande d'avi.~conszrltatif;mais aussi sur la manière
ciontelle auraità exercer sa compétencepour assurer une bonne administration
cielujustice dans une uffaire manij'bsternentliàeun différend bilatéral,ce qui
soulèvenotamment lu c/ue.~tionde la dksignation d'unjugead hoc - Une bonne
udministration tle la jinsticc. impou'etraiter équitablement les positionscles
deux parties concernéesquant ù l'appréciationdes,faits et des points de d-oif
La <.ondamnationdu cycle tragique de vio1ence.sperpétréessans a'iscrinîination
de part et (t'autre contre une populutiorz civile innocente doit tenir une large
place dans 1'avi.sclcllu Cour.

1. Je souscris aux conclusions énoncéesdans l'avis consultatif de la
Cour, tant sur les qluestions préliminaires (compétenceet opportunité
judiciaire) que sur la plupart des points relevant du fond. Néanmoins,
non seulement je n'adopte pas entièrement certainsarguments développés
dans l'avis, mais j'émetsde sérieuses réservessur la manière dont la Cour

a procédé enl'espèce.J'admets qu'il était dans une large mesure inévi-
table qu'elleprocède commeelle l'afait sous l'effet descirconstances assez
extraordinaires et sirigulièresde la cause, dont elle ne peut toujours être
tenue pour responsable, mais j'estime devoir préciserma position en fai-
sant ressortir certains des aspects problématiques de la manière dont la

Cour a procédédans la présenteespèce.

2. Pour formuler !sesconclusions sur les questions préliminaires de la
compétence etde l'opportunité judiciaire de l'exercicede celle-ci, la Cour
s'est essentiellement fgndéesur les exposésdes participants à la procédure
écriteet à la procédure orale. Elle dit quelles raisons l'avaient amenée

ces conclusions aux paragraphes 24 à 67 de l'avis. En tant que telles, ces
raisons ne m'inspirent aucune objection majeure. J'estime toutefoisque la
Cour doit examiner la question dc la compétenceet, en particulier celle
de I'opportunité judiciaire, proprio motu au besoin, pour apprécier non
seulement si elle est fondée en droit à exercer sa compétence en tant
qu'organe judiciaire dans le contexte précisde l'espèce,mais aussi en quoidiction in the concrete context of the case. This means, at least to my
mind, that the Court would be required to engage in an in-depth scrutiny
of al1aspects of the particular circumstances of the present case relevant
to the consideration of the case, if necessary going beyond what has been
argued by the participants. One of such aspects of the present case is the

implication of the existence of a bilateral dispute in the subject-matter of
the request for an advisory opinion.
3. The original Statute of the Permanent Court of International Jus-
tice contained no express provisions relating to advisory jurisdiction.
Only the Covenant of the League of Nations, in its Article 14, stipulated
that "[tlhe Court may also give an advisory opinion upon any dispute or
question referred to it by the Council or by the Assembly". It was this
provision that came to form the legal basis for the exercise of advisory
function by the Permanent Court of International Justice.

4. While the purport of this provision according to the intention of the
founding fathers of the League does not appear to have been entirely
clear nor unified, one of the points that clearly emerge from the legisla-
tive history of the Covenant is that the purpose of the advisory function

of the Permanent Court consisted from the beginning in aiding the
League in the peaceful settlement of a concrete dispute before the Coun-
cil of the League, in particular in the context of the procedures provided
for in Articles 12to 16 of the Covenant '.
5. When the Rules of Court were drafted in 1922following the estab-
lishment of the Permanent Court, four articles (71-74) were consecrated
to advisory procedure. They affirmed the "judicial character" of the advi-
sory function of the new Court and paved the way for the later fuller
assimilation of advisory to contentious procedure2. Indeed, the Report of
the Cornmittee [of the Permanent Court of International Justice],
appointed on 2 September 1927,stated as follows:

"The Statute does not mention advisory opinions, but leaves to
the Court the entire regulation of its procedure in the matter. The
Court, in the exercise of this power, deliberately and advisedly
assimilated its advisory procedure to its contentious procedure; and
the results have abundantly justified its action. Such prestige as the

Court to-day enjoys as a judicial tribunal is largely due to the
amount of its advisory business and the judicial way in which it has
dealt with such business. In reality, where there are . ..contending
parties, the difference between contentious cases and advisory cases
is only nominal. The main difference is the way in which the case
comes before the Court, and even this difference may virtually dis-

' See, in particular, Michla Pomerance, TArivisory Futzction qj' tlie Internutionul
CourIhid,p. 14.ugur und U.N. Erus, 1973, p. 9. ÉDIFICATION D'UN MUR (OP.IND.OWADA) 26 1

il est opportun pour elle de le faire du point de vue de la politique judi-
ciaire. C'est dire, au moins de mon point de vue, qu'elle sera amenée à
s'arrêter longuementsur tous les aspects propres aux circonstances par-
ticulièresde la cause, en allant au besoin au-delà des arguments avancés
par les participants En l'espèce, l'un de ces aspects à examiner de

près correspond aux incidences de l'existence d'un différend bilatéral à
l'arrière-plan de la demande d'avis consultatif.
3. Le Statut originel de la Cour permanente de Justice internationale
ne comportait aucune disposition expressémentconsacrée à la compé-
tence consultative. Seul le Pacte de la Société desNations, en son ar-
ticle14,stipulait que (([laCour] donnera[it] aussi des avis consultatifs sur
tout différend ou tout point, dont la saisira[it] le Conseil ou I'Assem-
blée)).Ce fut cette disposition qui constitua finalement le fondenlent juri-
dique de I'exerciced'une fonction consultative par la Cour permanente de
Justice internationale.
4. Si, dans 17intenl.iondes pèresfondateurs de la Société desNations,
l'objet de cette disposition ne semble pas avoir ététout à fait clair ni
homogène, l'un despoints qui ressort clairement de l'histoire lkgislative
du Pacte est que la finalitéde la fonction consultative de la Cour perma-

nente a consisté dèsle début à faciliter a la Société desNations le règle-
ment pacifique de diifférendsconcrets portés devant son Conseil, en par-
ticulier dans lecont~axtedes procédures viséesaux articles 12 à 16 du
Pacte '.
5. Lorsque, en 19;!2,peu après la création dela Cour permanente, fut
élaboréle règlementde cette dernière, quatre articles (les articles 7174)
furent dévolus àla procédure consultative.Ceux-ciconsacraient le((carac-
tère judiciaire)) de cette fonction de la Cour et laissaient prévoir que
serait ultérieurement poussée plus loin l'assimilationde la procédure
consultative à la wrocédurecontentieuse2. En effet. le Comité dela Cour
permanente de Justiice internationale, constitué le 2 septembre 1927,
déclaraitdans son rapport:

K Le Statut ne mentionne pas les avis consultatifs, mais laisseà la
Cour le soin de réglerentièrement sa procédureen cette matière. La
Cour, dans I'exercicede ses pouvoirs, a délibérémenett intentionnel-
lement assimilé la procédure consultative à la procédure conten-
tieuse; et les résultats obtenus ont abondamment justifiécette atti-
tude. Le prestige dont peut jouir la Cour actuellement en tant que

tribunal judiciaire est dans une large mesure dû à l'importance de
son activitéconsultative età la façon judiciaire dont elle a régcette
activité.En réalité, lorsqu'en faiitl se trouve des parties en présence,
iln'ya qu'une différencepurement nominale entre lesaffaires conten-
tieuses et les affaires consultatives. La différence principale réside

'Voir, en particulier, Michla Pomerance, The Advi.~or.yFunction of the Internutionul
Co'Ihidp,. 14.eugue und U.N. Eru.ras1,973, p. 9. appear, as it did in the Tunisian case. So the view that advisory
opinions are not binding is more theoretical than real." (P. C.I.J.,

Series E, No. 4, p. 76.)

6. In fact, when the Permanent Court declined to exercisejurisdiction
to give a requested advisory opinion in the Status of Eastern Careliu case
(P.C. I.J., Series B, No. 5), the main rationale of this decision lay pre-

cisely on this point. The specificissue referred to the Court was whether

"Articles 10and 11of the Treaty of Peace between Finland and Rus-
sia [of 19201and the annexed Declaration of the Russian Delegation
regarding the autonomy of Eastern Carelia, constitute engagements

of an international character which place Russia under an obligation
to Finland asto the carrying out of the provisions contained therein"
(ibid, p. 6).
In other words, it arose in the context of a dispute between Finland and
Russia involving this issue - a matter which Finland asked the League
of Nations to take up. The Council in its resolution expressed its "will-

ing[ness]to consider the question with a view to arriving at a satisfactory
solution if the two parties concerned agree" (ibid, p. 23). 1t was, how-
ever, due to the circumstances where the Russian Government declined
the request from the Estonian Government for it to "consent to submit
the question to the Council in conformity with Article 17 of the Cov-
enant" (ibid.,p. 24) and where the Finnish Government again brought
the matter before the Council, that the Council decided to request the
advisory opinion in question.

7. Against this background, the Permanent Court stated as follows to
clarify its position:

"There has been some discussion as to whether questions for an
advisory opinion, if they relate to matters which form the subject of
a pending dispute between nations, should be put to the Court with-
out the consent of the parties. It isunnecessary in thepresent case to
deal ivith this topic." (P.C.I.J., Series B, No. 5, p. 27; emphasis
added.)

After making this point clear, the Permanent Court continued as fol-
lows :

"It follows from the above that the opinion which the Court has
been requested to give bears on an actual dispute between Finland
and Russia. As Russia i.5not Mc~nzherof the League ($Nations, the
case is one under Article 17 ofthe Covenant . . . the Members of the
League . . .having accepted the Covenant, are under the obligation
resulting from the provisions of this part dealing with the pacifie EDIFICATION D'UN MUR (OP. IND. OWADA) 262

dans la façon dont l'affaire est introduite devant la Cour, et même
cette différence peut virtuellement disparaître, comme ce fut le cas
dans l'affaire des décrets de naturalisation en Tunisie. De la sorte,
l'opinion selon laquelle les avis consultatifs n'ont pas force obliga-
toire est plutôt théorique que réelle.» (C.P.J.1. sérieE n" 4, p. 72.)

6. Dans l'affaire du Stutut (le lu Curélieorientule (C.P.J.I. série B
no 5), tel fut précisémentle motif principal invoqué par la Cour perma-
nente lorsqu'elle refusa d'exercer sa compétence et de donner I'avis
consultatif qui lui était demandé. La question précisesoumise à la Cour
était alors de savoir si

«[l]es articles 10et 11 du traité de paix entre la Finlande et la Russie
[de 19201, ainsi que la déclaration y annexée de la délégationrusse

concernant 1'aui.onomie de la Carélie orientale, [constituaient] des
engagements d'ordre international obligeant la Russie vis-à-vis de la
Finlande à I'e~é~cutiod nes dispositions y contenues)) (ihid, p. 6).

En d'autres termes, la requêtes'inscrivait dans le cadre d'un différend
entre la Finlande et la Russie sur ce point et c'était la question que la
Finlande avait demandé à la Société desNations d'examiner. Le Conseil,
dans sa résolution, se déclara ((disposé,s'il y [avait] à ce sujet accord
entre les deux partie:; intéressées,à examiner la question en vue de trou-
ver une solution satisfaisante)) (ihid., p. 23). C'est toutefois en raison des

circonstances dans lesquelles le Gouvernement russe avait rejeté l'invita-
tion du Gouvernement estonien a consentir «à soumettre la question à
l'examen du Conseil sur la base de l'article 17 du Pacte)) (ibid., p.24), et
après que le Gouvernement finlandais eut de nouveau porté l'affaire
devant le Conseil, qiue celui-ci décida de demander I'avis consultatif en
question.
7. Dans ce contexte, la Cour permanente devait ainsi précisersa posi-

tion :
((11y a eu des divergences d'opinion sur le point de savoir si des
questions pour avis consultatif, pour autant qu'elles se réfèrentà des

points de fait acituellement en litige entre deux nations, devraient être
soumises à la Cour sans le consentement des parties. Il n'est pus
besoin, dans le cus actuel, d'upprofondir ce point. » (C.P.J.1. sérieB
no 5, p. 27; les italiques sont de moi.)

Ayant éclaircice point, la Cour permanente poursuivit

«Il résulte de ce qui précèdeque I'avis demandé à la Cour porte
sur un différend1actuellement néentre la Finlande et la Russie. Lu
Russie n'étuntpus Membre de lu Sociétédes Nutions, il s'ugit d'un
cas prévu ù l'article 17 du Pacte ... les Membres de la Société des
Nations ... ayant acceptéle Pacte ... se trouvent sous l'obligation qui
résulte desdispositions du Pacte concernant le règlement pacifique settlement of international disputes. As concerns States not members
of the League, the situation is quite different; they are not bound by
the Covenant. The submission, therqfi~re, of a dispute between them

and a Member of the League for solution according to the method.~
provided for in the Covenunt, could take place only hy virtue of their
consent. Such consent, however, has never been given by Russia."
(P.C.I. J.,Series B, No. 5, pp. 27-28; emphasis added.)'.

It is clear from this passage that the main rationale of the Permanent
Court in declining the exercise of jurisdiction in the Eastern Curelia case
was not the existence of a dispute relating to the subject-matter of the

request between the parties, but rather the fact that one of the parties
to the dispute did not give its consent to a "solution according to the
methods provided for in the Covenant".
8. When the International Court of Justice was reconstituted as the

institutional successor to the Permanent Court of International Justice,
and incorporated into the United Nations system as its principal judicial
organ, no drastic change was introduced in the new Statute of the Inter-
national Court of Justice relating to its functions or to its constitution in
this respect. Sincethen, the advisory function of the Court, as the secondary

but important function of the Court, has been exercised by the Court in
line with the course laid down by its predecessor, the Permanent Court of
International Justice, in the days of the League as described above.
9. Given this background, and in light of the case law accumulated in
the course of years since the establishment of the International Court of

Justice on the questions of jurisdiction of the Court in advisory proceed-
ings and of propriety of its exercise, it is my view that the Court is right
in its conclusion in the present case that the existence of a dispute on a
bilateral basis should not be a bar to the Court in giving the advisory
opinion requested.

10. While the existence of a bilateral dispute thus should not exclude
the Court from exercisingjurisdiction in advisory proceedings as a matter
of judicial propriety, however, it is my view that the existence of a bilat-
eral dispute should be a factor to be taken into account by the Court in

determining the extent to which, and the manner in which, the Court
should exercisejurisdiction in such advisory proceedings. In this respect,
1am of the view that the Court has drawn too facile an analogy between
the present case and the past cases of advisory opinion and especially the

Article 17of the Covenant provides:

"In the event of a dispute between a Member of the League and a State which is
not a Member of the League, or between States not Members of the League, the
State or States not Members of the League shall be invited to accept the obligations
of membership in the Leagne for therposes of such dispute, upon such conditions
as the Council may deem just. If such invitation is accepted, the provisions of
Articles 12 to 16 inclusivehall be applied with such modifications as may be
deemed necessary by the Council." des différendsiriternationaux. Il en est autrement pour les Etats non
Membres: ils ne sont pas liéspar le Pacte. La soumission d'un dqfé-
rend, qu'ilsauraient avec un Etat Membre de la Société desNations,
aux métlzodesd,zrèglementprévuespur le Pacte, ne saurait résulter
que de leur consentement. Or. le consentement de la Russie n'a
jamais été donnlé» . (C.P.J.I. sérieB no5, p. 27-28; les italiques sont
de moi.')

Il ressort de ce passage que la principale raison pour laquelle la Cour per-
manente refusa d'exercer sa compétencedans l'affaire de la Carélie orien-
tale ne résidaitpas tant dans l'existenced'un différendentre lesparties au

sujet de l'objet de la requête, maisplutôt dans le fait que l'une desparties
au différendavait refuséde donner son consentement a ce que ce diffé-
rend fût soumis «aux méthodesde règlement prévuespar le Pacte)).
8. Lorsque la Cour internationale de Justice fut instituéeen tant que
continuatrice de la Cour permanente de Justice internationale et qu'elle
fut intégréeau systèinedes Nations Unies pour constituer l'organe judi-
ciaire principal de l'Ch-ganisation,aucun changement radical concernant
ses fonctions ou sa constitution A cet égardne fut apporté au nouveau

Statut de la Cour. Dlepuis,la Cour s'acquitte de sa fonction consultative
-- fonction secondaire, certes, mais importante - selon la ligne tra-
céepar sa devancière, la Cour permanente de Justice internationale, à
l'époquede la Sociéié desNations.
9. A la lumière d<:cet historique de la jurisprudence qui s'est consti-
tuéedepuis la créationde la Cour internationale de Justice sur les ques-
tions relatives à sa compétence dans les procédures consultatives et a

l'opportunitépour elled'exercer cette compétence,j'estime que la Cour a
raison de conclure en l'espèceque l'existenced'un différendd'ordre bila-
téralne doit pas l'empêcherde rendre l'avis consultatif demandé.

10. Si l'existenced'un différendbilatéralne doit donc pas lui interdire
d'exercer sa compétence dans les procédures consultatives au nom de
l'opportunité judiciaire, j'estime toutefois que la Cour doit tenir compte
de l'existence éventuielled'un différend bilatéralpour apprécierjusqu'à

quel point elle doit exercer sa compétencedans ces procédures consulta-
tives et de quelle manièreelledoit le faire. A cet égard,je considère que la
Cour a établi trop facilement une analogie entre la présente demande
d'avis et les précédents enla matière, tout particulièrement le précédent

Le Pacte disposà l'article 17ce qui suit:
«En cas de différendentre deux Etats, dont un seulement est Membre de la Société
ou dont aucun n'enIâit partie, I'Etat ou les Etats éàla Sociétésont invitàs
se soumettre aux obligations qui s'impoàeses Membres aux fins de règlement du
différend,aux conditionsstiméesjustes par le Conseil. Si cette invitation est accep-
tée,les dispositions des articles16 s'appliquent sous réservedes modifications
jugées nécessairespar le Conseil.»case concerning Legal Consequencesfor States oJ the Continued Presence
of South Africa in Namihia (South West Africa) notivithstanding Secu-
rity Council Resolution 276 (19701, Advisory Opinion. Given the intrica-
cies of the present case, 1 submit that this approach of applying the
principles drawn from the past precedents automatically to the present
situation is not quite warranted.
11. Especially in the Namibiu case, the point in issue that formed the
basis for the request for an advisory opinion was the "legal
consequences . . of the continued presence of South Africa in Namibia . . .
notwithstanding Security Council resolution 276 (1970)". In spite of the
similarity in language in the formulation of the request, the basis for this
request was very different from the present one. In the Numibia case, the
Court was asked to give an opinion on the legal significance ofthe action

taken by the United Nations in terminating the South African Mandate
over South West Africa and its legal impact upon the status of South
Africa in that territory. If there was a legal controversy or a dispute, it
was precisely the one between the United Nations and the State con-
cerned. By contrast, what is in issue in the present situation centres on a
situation created by the action of Israel vis-i-vis Palestine in relation to
the Occupied Palestinian Territory. It is undeniable that there is in this
case an underlying legal controversy or a dispute between the parties
directly involved in this situation, while at the same time, as the Court
correctly points out, it concerns a matter between the United Nations
and Israel since the legal interest of the United Nations is legitimately
involved.

12. This of course is not to sav that the Court should decline for this
reason the exercise ofjurisdiction in the present case. Itdoes mean, how-
ever, that the question of judicial propriety should be examined taking

into account this reality, and on the basis of the jurisprudence in more
pertinent cases. 1 believe the closest to the present case probably is the
Western Suhuru, Advisory Opinion, case, in the sense th& there was in
that case clearly an underlying legal controversy or a dispute between the
parties involved. However, even that case does not offer a completely
analogous precedent, from which the Court can draw its conclusion. In
the Western Sulzuru case, the Court stated:

"The object of the General Assembly has not been to bring before
the Court, by way of a request for advisory opinion, a dispute or
legal controversy, in order that it may later, on the basis of the
Court's opinion, exercise its powers and functions for the peaceful
settlement of that dispute or controversy. The object of the request
is an entirely different one: to obtain from the Court urz opinion
which the General Assemhly deetns of assistance to it,fir the proper
exercise of its jiinctions concerning tlze decolonizutionof the terri- ÉDII'ICATION D'UN MUR (OP. IND. OWADA)
264

concernant les Conséquencesjuridiques pour les Etats de la présence
continue de I'Ajrique du Sud en Numihie (Sud-Oue.st africain) nonobstunt
lu résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité.Etant donné la com-
plexitéde la préseniteespèce, il n'est pas totalement justifié à mon sens
d'appliquer automaitiquement à la situation actuelle les principes tirés de

précédents.
11. S'agissant de l'affaire de la Namibie en particulier, l'élément liti-
gieux sur lequel se fondait la demande d'avis consultatif était constitué
par «les conséquencesjuridiques ..de la présence continue de l'Afrique
du Sud en Namibie ...nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de
sécurité)).En dépitde similitudes dans le libellé, larequête concernant la
Namibie et celle dont est aujourd'hui saisie la Cour reposent sur des

bases totalement différentes. Dans le cas de la Namibie, la Cour était
priéede donner un avis concernant la signification juridique des mesures
prises par l'organisation des Nations Unies lorsqu'elle avait mis fin au
mandat de l'Afrique du Sud sur le Sud-Ouest africain et leur incidence
juridique sur le statut de l'Afrique du Sud dans ce territoire. Si contro-
verse juridique ou différend il y avait, c'était précisémententre l'organi-
sation des Nations Unies et 1'Etat concerné. En revanche, dans la pré-

sente espèce, l'élément litigieux est unesituation résultant de mesures
prises par Israël vis-à-vis de la Palestine, mesures qui concernent le terri-
toire palestinien occupé. IIest indéniable qu'il y a en l'espèce unecontro-
verse juridique sous-jacente ou un différend sous-jacent entre les parties
directement concernées par cette situation, et que, parallèlement, comme
la Cour le dit fort justement, le problème se situe aussi entre l7Organisa-

tion des Nations Unies et Israël puisque l'intérêtjuridique de I'Organisa-
tion est légitimement en cause.
12. Cela ne veut naturellement pas dire que la Cour doive pour cette
raison refuser d'exercer sa compétence en l'espèce. Cela signifie en re-
vanche que l'on doit examiner la question de l'opportunité judiciaire en
tenant compte de cette réalité et euégard à la jurisprudence issue d'af-
faires plus pertinentes. Le cas qui me semble se rapprocher le plus de la

présente espèce estizeluide la demande d'avis consultatif concernant le
Sahara occidental, en ce sens qu'il y avait manifestement la, à l'état sous-
jacent, une controversejuridique ou un différend entre les parties concer-
nées.Toutefois, la Cour n'a pas mêmelà un précédenttotalement ana-
logue dont elle puisse s'inspirer pour se prononcer en I'espéce.Dans l'avis
relatif au Suhuru occidentul. la Cour avait déclaré:

((L'Assembléegénérale n'a pus eu pour but de porter devant la
Cour, sous la forme d'une requêtepour avis consultatif, un différend
ou une controv~rrsejuridique, afin d'exercer plus tard, sur la base de
l'avis rendu par la Cour, ses pouvoirs et ses fonctions en vue de
régler pacifiquement ce différend ou cette controverse. L'objet de la
requêteest tout autre: il s'agit d'obtenir de la Cour un uvis consul-
tatif que I'Ass~?mblée généraleestime utile pour pouvoir exercer

coninic.il convit.nt sclfonction.^relutives ri lu décolonisation du ter- tory." (Advisory Opinion, I. C.J. Reports 1975, pp. 26-27, para. 39;
emphasis added.)

In the present case, the presumed objective of the General Assembly in
requesting an advisory opinion would not seem to be the latter so much
as the former in the two examples given in this passage.
13. Thus, acknowledging the fact that in the present case there is this
undeniable aspect of an underlying legalcontroversy or a dispute between
the parties involved, and keeping this aspect clearly in mind, 1 wish to
state that the critical test for judicial propriety in exercisingjurisdiction
of the Court, which it undoubtedly has, should lie, not in whether the
request is related to a concrete legal controversy or dispute in existence,
but in whether "to givea reply would have the qflect of civcumventing the
principle that a State is not obliged to al1oi.vits disputes to be submirted to
judicial settlement i.vithoutits consent" (Wrstern Suhara, Advisory Opin-

ion, 1.C.J. Reports 1975, p. 25, para. 33; emphasis added). To put it dif-
ferently, the critical criterion for judicial propriety in the final analysis
should lie in the Court seeing to it that giving a reply in the form of an
advisory opinion on the subject-matter of the request should not be tan-
tamount to adjudicating on the very subject-matter of the underlying
concrete bilateral dispute that currently undoubtedly existsbetween Israel
and Palestine.
14. The reasoning that 1have offered above leads me to the following
two conclusions. First, the fact that the present case contains an aspect
of addressing a bilateral dispute should not prevent the Court from exer-
cising its competence. Second, however, this fact should have certain
important bearing on the whole proceedings that the Court is to conduct
in the present case, in thesensethat the Court in the present advisory pro-
ceedings should focus its task on offering its objective findings of law

to the extent necessary and useful to the requesting organ, the General
Assembly, in carrying out its functions relating to this question, rather
than adjudicating on the subject-matter of the dispute between the
parties concerned.

15. It should be recalled that, even when deciding to exercise its advi-
sory function, this Court has consistently maintained the position that it
should remain faithful to "the requirements of its judicial character".
Thus in the Western Sahara case the Court declared:

"Article 65, paragraph 1, of the Statute, which establishes the
power of the Court to give an advisory opinion, is permissive and,
under it, that power is of a discretionary character. In exercising this
discretion, the International Court of Justice, like the Permanent
Court of International Justice, has ulways been guided by the
principle that, us a judicial body, it is bound to remain faithful to
the requirements of its judicial character even in giving advisory
opinions." (Adijisory Opinion, I. C.J. Reports 1975, p. 21, para. 23 ;
emphasis added.) ÉDIFICATION D'UN MUR (OP. IND. OWADA) 265

ritoire.)) (Avis consultatif; C.I.J. Recueil 19p. 26 et 27, par. 39;
les italiques sont de moi.)

En la présente espèise,l'Assemblée générale semble plutôt s'être placée
dans le premier de ces cas de figure.

13. Face à ce qui constitue incontestablement, à l'arrière-plan de la
demande d'avis, une controverse juridique ou un différend entre les

parties concernées, je tiens à dire que, dans ces conditions, le critère
déterminant, quand la Cour doit établirsi l'opportunitéjudiciaire l'incite
à exercer sa compétence - compétence qu'elle a sans aucun doute -,
doit consister non pas à rechercher si la requêteest liée à l'existence
concrèted'une contr'overseou d'un différend,mais à rechercher si «accep-
ter de répondre aurait pour effet de tourner le principe selon lequel un
Etut n'est pas tenu de soumettre i4ndcfkrend au règlerîzentjudiciaire s'il
n'est pus consentant)) (Suhuru occidental, uvis consultatif; C.I.J. Recueil
1975, p. 25, par. 33; les italiques sont de moi). Autrement dit, en dernière
analyse, le critèredéterminant de I'opportunitéjudiciaire doit êtrepour la

Cour de s'assurer que répondre sousla forme d'un avis consultatif relatif
à l'objet de la requê1.ne revient pasà statuer sur l'objet mêmedu diffé-
rend bilatéral qui existe incontestablementà l'heure actuelle entre Israël
et la Palestine.
14. Le raisonnement que je viens de suivre m'amèneaux deux conclu-
sions suivantes. Premièrement, le fait que l'espèceportée devant elle se
rattache aussi à un différend bilatéral nedoit pas empêcherla Cour
d'exercer sa compét.ence.Deuxièmement, ce fait n'en doit pas moins
infléchir l'ensemblede la procédure suivie par la Cour en l'espèce; en
d'autres termes, daris cette procédure consultative, la Cour doit avant

tout s'attacher à prksenter, certes, les conclusions en droit qu'elle aura
objectivement tirées, mais dans la stricte mesure du nécessaire et d'une
manière qui soit utilià l'organe qui l'a saisià,savoir l'Assemblée géné-
rale, permettantà celui-ci de s'acquitter de ses fonctions relativemeAla
situation qui est à l'origine de la demande, et s'abstenir de statuer sur
l'objet du différend entre les parties concernées.
15. Il convient de rappeler que, mêmelorsqu'elle a par le passé décidé
d'exercer sa fonction consultative, la Cour internationale de Justice a
régulièrement estimé devoir rester fidèle«aux exigences de son caractère

judiciaire)). Ainsi, dans l'affaire Sahuru occidental, a-t-elle déclaré:
((L'article 65, paragraphe 1, du Statut qui confère à la Cour le
pouvoir de donner des avis consultatifs est permissif et le pouvoir
qu'il lui attribue ainsi a un caractère discrétionnaDans l'exercice
de ce pouvoir discrétionnaire, lu Cour internutionale de Justice,de

mêmeque la Cour permanente de Justice internationale, a toujours
suivi le principe selon lequel, en tant que corps dudiciaire, elle doit
rester jïdèle aux exigences de son curuct6re judiciaire, nlême
1or.squ'ellerend ilesavis consultatifS. »(Avis consultatiJ; C.1.J. Recueil
1975, p. 21, par. 23; les italiques sont de moi.) CONSTRUCTION OF A WALL (SEP.OP. OWADA)
266

16. One of such requiretnents for the Court as a judicial body is the
maintenance of fairness in its administration of justice in the advisory
procedure in the midst of divergent positions and interests among the
interested parties. To put it differently, it must be underlined that the

Court's discretion in advisory matters isnot limited to the question of
whether to comply with a request. It also embraces questions of advisory
procedure4This requirement acquires a special importance in the present
case, as we accept the undeniable fact as developed above that the present
case does relate to an underlying concrete legal controversy or a dispute,
despite my own conclusion that it is proper for the Court to exercise its

jurisdiction in the present case.

17. Article 68 of the Statute of the Court prescribes that "[iln the exer-
cise of its advisory functions the Court shall further be guided by the pro-
visions of the present Statute which apply in contentious cases to the

extent to which it recognizes them to be applicable". The Rules of Court
in Part IV (Arts. 102-109) elaborates this provision of the Statute.
Particularly relevant in this context is Article 102, paragraph 3 of which
provides that

"When an advisory opinion is requested upon a legal question
actually pending between two or more States, Article 31 of the
Statute shall apply, as also the provision of these Rules concerning

the application of that Article."

18. In the Nanzibia case, South Africa made an application for the
appointment of a judge ad lîoc to sit in the proceedings in accordance
with this provision. Although the Court in its Order of 29 January 1971
decided to reject this application (Legal Consequenees for States of
the Continued Presence of Soutlî Africu in Nunzibiu (South West Africa)
notwithstanding Security Council Resolution 276 (1970), I.C.J. Reports

1971, p. 12), it was met with well-argued dissenting views on this point
(ibid, p. 308; p. 324). By contrast, in the Western Suharu case the Court
took a different position. In response to a request by Morocco for the
appointment of a judge ad hoc in accordance with Article 89 (Le., present
Article 102) of the Rules of Court, the Court found that Morocco was
entitled to choose a judge ad lîoc in the proceedings (a similar request by

Mauritania on the other hand was rejected) (I.C. J. Reports 1975, p. 6).

19. The procedure for the appointment of a judge ad hoc is set in
motion by the application of a State which claims that "the request for
the advisory opinion relates to a legal question actually pending between

two or more States" (Rules of Court, Art. 102). It is my view that in light
of the precedents noted above, Israel in its special position in the present
case would have been justified in making an application to choose ajudge

Michla Pomerance,op.cit.p.281

134 16. L'une des exigences qui incombe ainsi à la Cour en tant qu'organe
judiciaire est qu'elle doit, lors de la procédure consultative, se montrer
constamment équitable dans l'administration de la justice, face aux posi-
tions et intérêtsdivergents des parties intéressées. En d'autres termes, il
m'apparaît devoir êtiresoulignéque le pouvoir discrétionnaire de la Cour

en matière consultative ne se limite pasa la question de savoir si elle doit
ou non répondre à une demande d'avis, mais doit aussi s'exercer à l'égard
de questions de procédure4. Cette exigence revêtici une importance par-
ticulière, mêmesi j'a~iconclu pour ma part qu'il était opportun pour la
Cour d'exercer sa compétence en l'espèce, puisque nous avons plus haut
retenu comme incontestable l'existence d'une controverse juridique ou
d'un différend concret sous-jacent.

17. L'article 68di1 Statut de la Cour dispose que, «dans l'exercice de
ses attributions consultatives, la Cour s'inspirera en outre des disposi-
tions du présent Statut qui s'appliquent en matière contentieuse, dans la
mesure où elle les reconnaîtra applicables)). Le Règlement de la Cour,
dans sa quatrième partie (aux articles 102à 109),précisecette disposition
du Statut. Particulièrement pertinent dans le présentcontexte est le para-
graphe 3 de l'article 102, selon lequel

«[s]i l'avis consiiltatif est demandé au sujet d'une question juridique
actuellen~ent pendante entre deux ou plusieurs Etats, l'article 31 du

Statut est applicable, ainsi que les dispositions du présent Règlement
qui pourvoient Al'application de cet article)).

18. Dans l'affaire de laNumibie. I'Afriaue du Sud avait demandé aue
fût désigné un juge~ldhoc qui siégeraiten I'espéceconformément iicette
disposition. Bien que la Cour eût décidéde rejeter cette demande dans
son ordonnance du 29 janvier 1971 (Conséquencesjuridiques pour les
Etats de lu présencecontinue de l'Aj?ique du Sud en Namibie (Sud-Ouest
africain) nonobstunic la rksolution 276 (1970) du Conseil de skcurité,

C.I.J. Recueil 1971, p. 12), des opinions dissidentes bien argumentées
furent présentéessur ce point (ibid, p. 308; p. 324). Dans l'affaire du
Sahura occidental. en revanche. la Cour adowta une autre ~osition. En
réponse au Maroc (qui demandait la désignation d'un juge ud lzoc en
application de l'article 89 du Règlement (soit l'actuel article 102),la Cour
décida que le Maroc avait effectivement le droit de désigner un juge ad
hoc (mais rejeta la requête symétriqueémanant de la Mauritanie) (C. I.J.

Recueil 1975, p. 6).
19. La procédure de désignation d'un juge ad hoc est enclenchéepar la
demande d'un Etat dléclarantque «la demande d'avis consultatif a trait ...
a une question juridique actuellement pendante entre deux ou plusieurs
Etats)) (Règlement de la Cour, art. 102). A mon sens, a la lumière des
précédents cités plushaut, Israël, compte tenu de sa position particulière
dans la présente espèce,aurait étéfondéà demander la désignation d'un

Michla Pomeranceop. cil..281.267 CONSTRUCTION OF A WALL (SEP.OP.OWADA)

ad Izoc. For whatever reason, Israel did not choose this course of action.
If it had done so, the task of the Court in maintaining the essential
requirement for fairness in the administration ofjustice would have been
greatly enhanced. It goes without saying that such a course of action
would have complicated the situation, due to the fact that the other party
to this dispute, Palestine, is an entity which is not recognized as a State
for the purpose of the Statute of the Court. What would happen then if

one of the parties directly interested is in a position of appointing ajudge
ad hoc, while the other is not. Fairness in the administration of justice
could be questioned from this angle. While 1 do not propose to offer my
own conclusion to this intractable but hypothetical problem, what 1wish
to point out is that this factor is one of the important aspects of the
present case that could have been considered by the Court in deciding on
the question ofjudicial propriety of whether, and if so how far, the Court
should exercise its jurisdiction in the unique circumstances of this case.

20. Be that as it may, it is established that even in contentious pro-
ceedings the absence of one of the parties in itself does not deprive the

Court of its jurisdiction to proceed (Statute of the Court, Art. 53), but
that the Court has to maintain its fairness in the administration ofjustice
as a court of justice. Thus, in relation to the question of the law to be
proved and applied, the Court stated in the cases concerning Fisheries
Jurisdiction as follows :
"The Court . . .as an international judicial organ, is deemed to
take judicial notice of international law and is therefore required in

a case fallingunder Article 53 of the Statute, as in any other case, to
consider on its own initiative al1 rules of international law which
may be relevant to the settlement of the dispute. It being the duty of
the Court itself to ascertain and apply the relevant law in the given
circumstances of the case, the burden of establishing or proving rules
of international law cannot be imposed upon any of the Parties, for
the law lies within the judicial knowledge of the Court." (Merits,
Judgment, 1. C. J. Reports 1974, p. 181, para. 18.)

In relation to the question of the facts to be clarified, the Court in the
case concerning Military and Paramilitary Activities in and against Nica-
ragua (Nicaragua V. United States of America) stated that:
"in principle [it]is not bound to confine its consideration to the

material formally submitted to it by the parties (cf. Bruzilian Loans,
P.C. 1J., Series A, No. 20121,p. 124; Nuclear Tests, 1. C.J. Reports
1974, pp. 263-264,paras. 31, 32)" (Merits, Judgment, I.C.J. Reports
1986, p. 25, para. 30).
It went on to state as follows:

"The Court has thus to strike a balance. On the one hand, it is
valuable for the Court to know the viewsof both parties in whateverjuge ud hoc. Pour une raison qui lui est propre, Israël n'a pas choisi de
procéder ainsi. L'eiit-il fait, l'obligation fondamentale faite à la Cour

d'assurer l'équitédans l'administration de la justice aurait constituépour
elle une tâche infiniment plus lourde. Il va sans dire en effet qu'une telle
démarche aurait compliqué la situation, I'autre partie au différend, la
Palestine, n'étant pasune entité reconnue commeun Etat aux finsdu Sta-
tut de la Cour. Qu'advient-il lorsque l'une des parties directement inté-
resséesest habilitée a choisir un jugeud lzocalors que l'autre ne l'estpas?
On peut se demander si I'administration de la justice est alors parfaite-
ment équitable. Certes, mon propos n'est pas d'apporter ma propre
conclusion à ce problème qui pour êtreinsoluble est aussi hypothétique;
je tiens néanmoins à faire observer que cet élémentconstitue l'un des
aspects importants de l'espèce,qui aurait pu êtrepris en compte par la
Cour pour appréciers'ilétaitopportun, sur le plan judiciaire, d'exercer sa

compétenceet, dans l'affirmative, jusqu'à quel point, vu lescirconstances
excevtionnelles de la^cause.
20. Quoi qu'il en soit, le principe est établi que,mêmedans une pro-
cédure contentieuse, l'absencede l'une desparties est en soi sans effet sur
la compétencequ'a la Cour de statuer (Statut de la Cour, art. 53), mais
que, en tant qu'organe judiciaire, celle-ci doit demeurer équitable dans
I'administration de la justice. Ainsi, concernant l'établissementdu droit
applicable, la Cour, dans les affaires relatives la Compétenceen mutière
de pêcheries, a dit ceci

«La Cour, eri tant qu'organe judiciaire international, [est]censée
constater le droit international et, dans une affaire relevant de I'ar-
ticle 53 du Stat~itcomme dans toute autre, est donc tenue de prendre
en considération de sa propre initiative toutes les règles de droit
international quiiseraient pertinentes pour le règlementdu différend.
La Cour ayant pour fonction de déterminer et d'appliquer le droit
dans les circon:;tances de chaque espèce, la charge d'établir ou de
prouver les règlesde droit international ne saurait être imposée à
l'une ou l'autre Partie, car le droit ressortit au domaine de la

connaissance judiciaire de la Cour. » (Fond urrtt, C.1.J. Recueil
1974, p. 181,par. 18.)
Touchant la question des faits à établir,dans l'affaire relative auxActi-
vitésmilitaires et purumilituires uu Nicuruguu et contre celui-ci (Nicuru-
guu c. Etut.s-Unis clAmkrique) la Cour a déclaré :

«en principe la Cour n'est pas tenue de se limiter aux élémentsque
lui soumettent formellement les parties (voir Emprunts hré.silien.s,
C.P.J. 1.sérieA no'20 et 21, p. 124; Essuis nucléaires,C.I.J. Recueil
1974, p. 263 et 264, par. 31 et 32))(Fond, arrêt,C.1. J. Recueil 1986,
p. 25, par. 30),

pour ensuite préciser :
«La Cour doit donc rechercher un certain équilibre. D'un côtéelle
a avantage à connaître les vues des deux parties, quelle que soit la form those views may have been expressed. Further, as the Court
noted in 1974, where one party is not appearing 'it is especially
incumbent upon the Court to satisfy itself that it is in possession of
al1 the available facts' (Nucleur Tests, I.C.J. Reports 1974, p. 263,

para. 31; p. 468, para. 32.). On the other hand, the Court has to
emphasize that the equality of the parties to the dispute must remain
the basic principle for the Court." (I.C.J. Reports 1986, pp. 25-26,
para. 31 .)

21. This principle governing the basic position of the Court should be
applicable to advisory proceedings as it is applicable to contentious pro-
ceedings. Indeed, it may even be arguable that this principle is applicable
ufortiori to advisory proceedings, in the sense that in advisory proceed-
ings as distinct from contentious proceedings it cannot be said, at any

rate in the legal sense, that "[tlhe absent part.. . forfeits the opportunity
to counter the factual allegations of its opponent" (Militury und Pum-
i?îilituryActivities iizund uguinst Nicurugua (Nicuruguu v. United States
qf'ilmericu), Merits, Judgment, I.C.J. Reports 1986, p. 25, para. 30). In
advisory proceedings no State, however interested a party it may be, is
under the obligation to appear before the Court to present its case.
22. On this point of facts and information relating to the present case,

it is undoubtedly true, as the present Opinion States, that

"the Court has at its disposal the report of the Secretary-General, as

well as a voluminous dossier submitted by him to the Court, com-
prising not only detailed information on the route of the wall
but also on its humanitarian and socio-economic impact on the
Palestinian population" (Advisory Opinion, para. 57).

Indeed, there is ample material, in particular, about the humanitarian
and socio-economic impacts of the construction of the wall. Their authen-
ticity and reliability are not in doubt. What seems to be wanting, how-
ever, is the material explaining the Israeli side of the picture, especially in

the context of why and how the construction of the wall as it is actually
planned and implemented is necessary and appropriate.

23. This, to my mind, would seem to be the case, in spite of the
Court's assertion that

"Israel's Written Statement, although limited to issues of jurisdiction
and propriety, contained observations on other matters, including
Israel's concerns in terms of security, and was accompanied by cor-
responding annexes" (Advisory Opinion, para. 57).

In fact my point would seem to be corroborated by what the present
Opinion itself acknowledges in relation to the argument of Israel on this
issue. Israel has argued that the wall's sole purpose is to enable it effec- ÉDI~ICATION D'UN MUR (OP. IND. OWADA) 268

manière dont ces vues s'expriment. De plus, ainsi qu'elle l'a souligné
en 1974, en cas d'absence de l'une des parties «il incombe tout par-

ticulièrement à la Cour de s'assurer qu'elle est bien en possession de
tous les faits disponibles)) (Es.sais nucléaires, C.I.J. Recueil 1974,
p. 263, par. 31; p. 468, par. 32). D'un autre côtéla Cour doit souli-
gner que le principe de l'égalité desparties au différend reste pour
elle fondamental. ))(C. I.J.Recueil 1986, p. 25 et 26, par. 31.)

21. Ce principe cardinal devrait s'appliquer en matière consultative
tout comme il s'applique en matière contentieuse. On pourrait même
faire valoir qu'il est applicable à fortiori aux procédures consultatives,

puisque, dans une procédure consultative, à la différence de ce qui se
passe en matière contentieuse, l'on ne peut dire, en tout cas au sens juri-
dique, que (<l'absentperd ... la possibilitéde combattre les allégations de
fait de son adversaire)) (Activités militaires et pararîzilitaires uu Nicuru-
gua et contre celui-cl (Nic~uraguac. Etats-Unis d'Am~rique), jbnd, urrt;t,
C.I.J. Recueil 1986, p. 25, par. 30). Dans une procédure consultative,

aucun Etat, pour intéressé qu'ilsoit, n'est dans l'obligation de compa-
raître devant la Cour Dour défendre sa ~osition.
22. En ce qui concerne cet élément, c'est-à-direles faits et les informa-
tions se rapportant i~la présente espèce,il n'est pas douteux, comme elle
le dit dans l'avis, que

«la Cour a à sa disposition le rapport du Secrétaire général,ainsi
qu'un dossier vcllumineux soumis par celui-ci à la Cour, qui contient
des informations détailléesnon seulement quant au tracé du mur
mais aussi uuant aux conséauences humanitaires et socio-écono-

miques de celui-ci sur la population palestinienne)) (avis consultatif,
par. 57).
Effectivement, les informations sont abondantes, en particulier sur les

incidences humanitaires et socio-économiques de l'édification du mur.
L'authenticité et la fiabilitéde ces informations ne font aucun doute. Ce
qui semble faire défaut toutefois, ce sont des informations expliquant le
point de vue israélien, en particulier la question de savoir pourquoi et
comment l'édificationdu mur telle qu'elle est planifiéeet menée à bien

dans la pratique est nécessaire et fondée.
23. A mon avis, il y a bien défaut d'information de ce côté-là,mêmesi
la Cour affirme que

<<l'exposé écritdl'lsraël, bien que se limitant aux questions de com-
pétence et d'opportunité judiciaire, comporte des observations
concernant d'autres sujets, y compris les préoccupations d'Israël en
matière de sécurité,et est accompagné d'annexes correspondantes))
(avis consultatif, par. 57).

En fait, mon observation semble corroborée par ce qui est dit dans l'avis
lui-mêmede l'argument présentépar Israël à ce sujet. Israël a fait valoir
que le seul objectif di: l'édificationdu mur était de lui permettre de com-tively to combat terrorist attacks launched fromthe West Bank, or as the
report of the Secretary-General puts it, "to halt infiltration into Israel
from the central and northern West Bank" (Advisory Opinion, para. 80).
However, the Court, in paragraph 137of the Opinion, simply states that
'tfrom the material available to it, [it] isnot convinced that the specific
course Israel has chosen for the wall was necessary to attain its security
objectives" (emphasis added). It seems clear to me that here the Court is
in effect admitting the fact that elaborate material on this point from the
Israeliside is not available, rather than engaging in a rebuttal of the argu-
ments of Israel on the basis of the material that might have been made
available by Israel on this point. Again in paragraph 140 of the Opinion,
the Court bases itself simply on "the material before it" to express ifslack
oj conviction that "the construction of the wall along the route chosen

was the only means to safeguard the interests of Israel against the peril
which it has invoked as justification for that construction".
24. In raising this point, it is not my purpose to dispute the factual
accuracy of these assertions, or to question the conclusions arrived at on
the basis of the documents and the material available to the Court. In
fact it would seem reasonable to conclude on balance that the political,
social, economic and humanitarian impacts of the construction of the
wall, as substantiated by ample evidence supplied and documented in the
course of the present proceedings, is such that the construction of the
wall would constitute a violation of international obligations under vari-
ous international instruments to which Israel is a Party. Furthermore,
these impacts are so overwhelming that 1am ready to accept that no jus-
tification based on the "military exigencies", evenif fortified by substan-
tiated facts, could conceivably constitute a valid basis for precluding the
wrongfulness of the act on the basis of the stringent conditions of pro-
portionality.
25. However, that is not the point. What is crucial is that the above
samples of quotations from the present Opinion testify to my point that
the Court, once deciding to exercisejurisdiction in this case, should be

extremely careful not only in ensuring the objective fairness in the result,
but in seeing to it that the Court is seen to maintain fairness throughout
the proceedings, whatever the final conclusion that we come to may be in
the end.
26. The question put to the Court for its advisory opinion is the spe-
cificquestion of "the legal consequences arising from the construction of
the wall being built by Israel" (General Assembly resolution AIES-101
L.16). It concerns only that specific act of Israel. Needless to say, how-
ever, the Israeli construction of the wall has not come about in a vacuum;
itis a part, albeit an extremely important part, of the whole picture of the
situation surrounding the peace in the Middle East with its long history.

27. Naturally, this does not alter the fact that the request for an advi-
sory opinion is focused on a specificquestion and that the Court should
treat this question, and this question only, without expanding the scopebattre efficacement les attaques terroristes lancéesdepuis la Cisjordanie
ou, pour reprendre les termes utilisésdans le rapport du Secrétairegéné-

ral, d'«enrayer les infiltrations en Israëlpartir du centre et du nord de
la Cisjordanie)) (avis consultatif, par.80). Toutefois, la Cour, au para-
graphe 137 de l'avis, déclare simplementque, «uu vu du dossier, [elle]
n'estpus CO~VU~~CUP que la poursuite des objectifs de sécuritéavancéspar
Israël nécessitait l'atloption du tracéchoisi pour le mur» (les italiques
sont de moi). II me semble clair qu'ici laCour admet en fait qu'Israël n'a
pas présenté d'éléments très détailslu érsce point et qu'elle s'abstient de
procéder a une réfutation des arguments d'Israël iipartir des informa-
tions que celui-ciaumit présentéessur le mêmepoint. Au paragraphe 140
de l'avis, la Cour se Fondesimplement sur le «dossier>)pour dire qu'elle
n'est pas convaincue que «la construction du mur selon le tracé retenu
étaitle seul moyen de protéger les intérêts d'Israëlcontre le périldont il
s'est prévalupour justifier cette construction)).
24. Mon propos ri'est pas, en soulevant cette question, de contester
l'exactitude factuelle de ces affirmations ni de remettre en cause les

conclusions auxquell<:sla Cour est parvenue en s'appuyant sur les docu-
ments et lespiècesdont elledisposait. En fait,il semblerait raisonnable de
conclure, tout bien considéré, queles répercussions politiques, sociales,
économiques et humanitaires de la construction du mur, telles que la
preuve en a étéabondamment rapportée au cours de la procédure, sont
telles que cette construction constitue une violation des obligations inter-
nationales mises à la char"e d'Israël Dar divers instruments internatio-
naux auxquels celui-ci est partie. En outre, ces répercussionssont telles
que je suis prêt à reconnaître qu'aucun motif tiré d'«impératifs mili-
taires)), mêmeétayépar des faits démontrés,ne saurait efbcer I'illicéité
de cette action, au nom du strict principe de proportionnalité.

25. Toutefois, telle n'est pas la question. Ce qui est essentiel ici, c'est
que les extraits de l'avis que j'ai cités ci-dessusétayent mon argument
selon lequel la Cour,une fois prise sa décision d'exercersa compétenceen
l'espèce, devaitveiller avec le plus grand soin non seulement à garantir

l'équité elt'impartialitédu résultat,mais aussi à rendre cet effort visible
tout au long de la procédure, quelle que soit finalement l'issue de la
cause.
26. La question soumise a la Cour aux fins d'un avis consultatif était
expressémentcelle des (<conséquences[en droit] de l'édificationdu mur
qu'Israël ...est en train de construire)) (résolution AIES-10lL.16 de
l'Assembléegénérale).Elle portait exclusivement sur cette action particu-
lièred'Israël. Inutile de rappeler, toutefois, que l'édificationde ce mur par
Israël n'est pas unphknomèneisoléde tout contexte; elle fait partie, une
partie extrêmementimportante, il faut le reconnaître, du contexte général
dans lequel s'inscrit la longue histoire de la paix au Moyen-Orient.
27. Bien entendu, cela ne change rien au fait que la demande d'avis
consultatif porte sur une question déterminéeet que la Cour doit traiter
cette question et cette question uniquement, sans étendre son examen aof its enquiry into the bigger question relating to the peace in the Middle
East, including issues relating to the "permanent status" of the territories

involved. Nevertheless, from the viewpoint of getting to an objective
truth concerning the specificquestion of the construction of the wall in its
complete picture and of ensuring fairness in the administration of justice
in this case which involves the element of a dispute between parties
directly involved, it seems of cardinal importance that the Court examine
this specificquestion assigned to the Court, keeping in balance the overall

picture which has formed the entire background of the construction of
the wall.
28. It has always been an undisputed premise of the peace in the
Middle East that the twin principles of "[wlithdrawal of Israel armed
forces from territories occupied in the [1967]conflict" and

"[tlermination of al1claims or states of belligerency and respect for
and acknowledgement of the sovereignty, territorial integrity and

political independence of every State in the area and their right to
live in peace within secure and recognized boundaries free from
threats or acts of force"

have to form the basis of the peace. Security Council resolution 242 (1967)
has consecrated these principles in so many words. The "Roadmap",
endorsed by Security Council resolution 1515 (2003), is a blueprint for
proceeding on the basis of these principles.

29. If the Court found that the construction of the wall would go
counter to this principle by impeding and prejudicing the realization of
the principles, especially in the context of the customary rule of "the
inadmissibility of the acquisition of territory by war" (Advisory Opinion,
para. 117), it should state this. At the same time, the Court should
remind the General Assembly that this was a principle couched in the

context of the twin set of principles, both of which would have to be
realized, at any rate in the context of a peace in the Middle East, side by
side with each other.
30. As observed above, lsrael has argued that the wall's sole purpose is
to enable it effectively to combat terrorist attacks launched from the
West Bank. In response to this, the Court has confined itself to stating

that
"In the light of the material before it, the Court is not convinced
that the construction of the wall along the route chosen was the only

means to safeguard the interests of Israel against the peril which
it has invoked as justification for that construction." (Advisory
Opinion, para. 140.)

It is certainly understood that the material available has not included an
elaboration on this point, and that in the absence of such material the
Court has found no other way for responding to this situation. Itmaycelle, plus large, de la paix au Moyen-Orient, notamment à ce qui touche
au «statut permanent)) des territoires dont il s'agit. Néanmoins, si l'on
veut établir une vérité objectiveau sujet de la question particulière de
l'édificationdu mur dans son contexte généralet faire en sorte que justice
soit rendue de façoni équitable - puisqu'il existe à l'arrière-plan un dif-
férendentre les parlies directement intéressées -, il est, me semble-t-il,

d'une importance capitale que la Cour examine la question précisequi lui
a été posée,sans jarriais oublier la situation d'ensemble qui forme la toile
de fond de l'édificationdu mur.

28. Une prémissenon contestée de la paix au Moyen-Orient a toujours

étéque celle-ci devait reposer sur le double principe d'un «[r]etrait des
forces arméesisraéliennesdes territoires occupéslors du conflit [de 19671))
et d'une

(([clessation de routes assertions de belligérance ou de tous états de
belligérance [ainsique du] respect et [de la] reconnaissance de la sou-
veraineté, de l'intégritéterritoriale et de l'indépendance politique de
chaque Etat de la régionet de leur droit de vivre en paix à l'intérieur
de frontières sûres et reconnues à l'abri de menaces ou d'actes de

force».
La résolution 242 (1967) du Conseil de sécuritéa expressément consacré

ces deux principes. La «feuille de route)) adoptée par le Conseil de sécu-
rité dans sa résolution 1515 (2003) constitue un schéma directeur qui
indique la marche itsuivre sur la base des deux principes en question.
29. Si la Cour a conclu que la construction du mur était contraire à
cette marche à suivrlc parce qu'elle ferait obstacle à ces deux principes,

particulièrement en raison de la règlecoutumière de «l'inadmissibilité de
l'acquisition de territoire par la guerre)) (avis consultatif, par. 117), elle
doit le dire. En même temps,elle doit rappeler à l'Assembléegénéraleque
cette marche à suivre a étédéfiniedans le contexte des deux principes
jumeaux qui, si l'on veut qu'une paix s'instaure au Moyen-Orient,
doivent êtremis en o:uvre parallèlement.

30. Comme rappelé plus haut, Israël a fait valoir que le mur avait pour
seul objet de lui permettre de lutter efficacement contre des attaques ter-
roristes menées depuis la Cisjordanie. En réponse, la Cour s'est bornée à
déclarer que,

((au vu du dossier, [elle]n'[était] pasconvaincue que la construction
du mur selon le itracéretenu étaitle seul moyen de protéger les inté-

rêts d'Israëlcontre le périldont il [s'était] prévalupour justifier cette
construction >)(avis consultatif, par. 140).

Il est parfaitement compréhensible que, l'argument n'ayant pas été déve-
loppé dans le dossier et l'information faisant défaut à ce sujet, la Cour
n'ait pas trouvé d'aui.re façon de réagir face iicette situation. L'on peutalso be accepted that this argument of Israel, even if acknowledged as
true as far asthe Israeli motives wereconcerned, would not be a sufficient
ground for justifying the construction of the wall as it has actually been

drawn up and implemented. As the Court has demonstrated with a high
degree of persuasiveness, the construction of the wall would still consti-
tute a breach of Israel's obligations,inter uliu,under the Hague Regula-
tions Respecting the Laws and Customs of War on Land and the Fourth
Geneva Convention relative to the Protection of Civilian Persons in Time
of War, unless cogent justifications are advanced for precluding the
wrongfulness of this act. But the important point is that an in-depth
effort could have been made by the Court, proprio motu, to ascertain the
validity of this argument on the basis of facts and law, and to present an
objective picture surrounding the construction of the wall in its entirety,
on the basis of which to assess the merits of the contention of Israel.

31. It is to my mind important in this context that the issue of mutual
resort to indiscriminate violence against civilian population should be
looked at. Without going into the question of what is the causal relation-
ship between the tragic acts of mutual violence resorted to by each of the

parties and the question of whether the so-called terrorist attacks by
Palestinian suicide bombers against the Israeli civilian population should
be blamed as constituting a good enough ground for justifying the con-
struction of the wall, 1 believe it is beyond dispute that this tragic circle
of indiscriminate violenceperpetrated by both sidesagainst innocent civil-
ian population of each other is to be condemned and rejected as totally
unacceptable. While it is true that this isnot an issue expressly referred to
as part of the specificquestion put to the Court, 1believe it should only
be natural that this factor be underlined as an important segment of the
Opinion of the Court in dealing with the issue of the construction of the
wall. This point to my mind is of particular relevance from the viewpoint
that the Court should approach the subject-matter in a balanced way.

(Signed) Hisashi OWADA.égalementaccepter que l'argument d'Israël, mêmesi sa véracitéétait éta-
blie du point de vue des motifs auxquels ce dernier obéit,ne suffisepas
justifier la construction du mur telle que celle-cia été conçueet menéà
bien dans la pratique. Comme la Cour l'a montréde façon trèsconvain-

cante, la construction du mur n'en constituerait pas moins une violation
des obligations incombant à Israël, notamment au titre du règlement de
La Haye concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre et de la
quatrième convention de Genève relative à la protection des personnes
civiles en temps de guerre, sauf à ce que des arguments suffisamment
puissants excluent I'illicéide l'acte. Mais l'important est que la Cour
aurait pu,proprio motu, tenter une recherche approfondie pour détermi-
ner la validitéde cet argument en fait comme en droit, et présenterune
image objective de la construction du mur dans son intégralité, surla
base de laquelle il eiit été possibled'apprécierle bien-fondéde la thèse
d'Israël.
31. Il me paraît imiportant que soit évoquédans ce contexte le fait que,

de part et d'autre,des actes de violence sont pratiqués sans discrimina-
tion contre les populations civiles. Sans chercherdéterminerla relation
de cause à effet entre les actes tragiques de violence réciproque commis
par chacune des parties nià savoir si les attaques qualifiéesde terroristes
qui sont lancéespar les Palestiniens sous forme d'attentats-suicides diri-
géscontre la population civile israéliennedoivent, pour condamnables
qu'ellessoient, êtreconsidéréescomme suffisant à justifier la construction
du mur, il est incontestable, mon sens, que ce cycle tragique d'actes de
violence perpétrés sans discriminationdes deux côtés à l'encontre de la
population civile innocente des deux parties doit êtrecondamnéet rejeté
comme totalement iriacceptable. II est vrai que cet élémentn'entre pas
véritablementdans le cadre de la question précise posée à la Cour, mais
j'estime tout simplement normal que la Cour lui accorde une large place

dans son avis quand elle s'interroge sur l'édificationdu mur. Ce point
revêt àmon sens une importance particulière, car la Cour doit aborder le
sujet àexaminer en recherchant un certain équilibre.

(Signe) Hisashi OWADA.

Document file FR
Document Long Title

Opinion individuelle de M. Owada (traduction)

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