Opinion individuelle de M. Parra-Aranguren (traduction)

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121-20001208-ORD-01-04-EN
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121-20001208-ORD-01-00-EN
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OPINION INDIVIDUELLE DE M. PARRA-ARANGUREN

[Traduction]

Bases de juridiction invoqu&esa l'originepur le Congo - Noui~eautitre de
compi.tence invoquélors du second tour de plaidoirie- Objectionsoulevéepar
la Belgique - Précédenis de la Cour en lamatière- Nouvelle positionadoptée
pur la Cour - Motifi donnésne pouvant êtreaccueilli.^ - Conclu.~ion.

1. Bien qu'ayant votéen faveur du dispositif de l'ordonnance, j'estime

devoir formuler les observations suivantes.
2. Dans sa requête, laRépublique démocratique du Congo invoque,
pour fonder la compél.encede la Cour, le fait que «la Belgique a accepté
lajuridiction de la Cour et, [qu']en tant que de besoin, la présente requête
vaut acceptation de cette juridiction par la République démocratique du

Congo » (ordonnance, par. 2).
3. La République démocratique du Congo, dans sa demande en indi-
cation de mesures conservatoires, n'a invoquéaucuneautre base de com-
pétence.

4. A l'audience du 22 novembre 2000, lors de son second tour de plai-
doiries, la République démocratique du Congo a indiqué que:

Primu fucie, Ilacompétence de la Cour ne peut êtrecontestée.
Elle découle clairement des déclarations facultatives de reconnais-
sance de la juridiction obligatoire de la Cour faites par le Royaume

de Belgique et la République démocratique du Congo, respective-
ment le 3 avril 1958et le 8 février1989, et qui se trouvent en annexe
de cette intervention. Et qui, apparemment, sont sans réserve.))
(Ordonnance, par. 42.)

5. Le 23 novembre 2000, la Belgique s'est opposée«à ce qu'un chef de
compétence soit invoqué au stade du second tour de plaidoiries)), en
s'appuyant pour cela sur lajurisprudence de la Cour (ordonnance, par. 45,
62).
6. Comme la Belgique l'a rappelé, la Cour a déclaréle 2 juin 1999:

((42. Considérant que la Yougoslavie, après le dépôtde sa requête,
a en outre invoqué, pour fonder la compétence de la Cour en
l'espèce, l'article 4 de la convention de conciliation, de règlement
judiciaire et d'arbitrage entre la Belgique et le Royaume de Yougo-
slavie, signée a Belgrade le 23 mars 1930; que le ((complément a la

requête))de la Yougoslavie, dans lequel celle-ci s'est prévalue de
cette nouvelle base de juridiction, a été soumisà la Cour lors du
second tour de plaidoiries (voir paragraphe 14 ci-dessus); et que la MANDAT D'ARRET (OP. [ND. PARRA-ARANGUREN) 212

Yougoslavie n'a pas fourni d'explication sur les raisons qui l'avaient
amenée à déposerce document à ce stade de la procédure;
43. Considérant que la Belgique, se référantau paragraphe 2 de

l'article 38 du Règlement, expose ce qui suit:
((11s'en déduit clairement qu'il est inadmissible, comme en
I'espèce,de compléter,sur un point essentiel, l'argumentation rela-
tive à la compétenceprima fucie de [la] Cour, par un nouveau
moyen proposé in extremis. D'ailleurs, l'on peut se demander
pourquoi la République fédéralede Yougoslavie, qui est censée

connaître les traités auxquels elle prétend aujourd'hui avoir suc-
cédé, n'apas cri1devoir, comme l'exigeaient le principe de bonne
administration de la justice et l'article 38 précité,formuler ce
moyen au stade de l'introduction de sa requête));

et qu'elle prie dès lors la Cour, «en ordre principal, d'écarter ce
moyen des débats):);considérantque la Belgique soutient «[e]n ordre

subsidiaire))«que la convention de 1930donne compétence,non à
[la] Cour, mais à la Cour permanente de Justice internationale)), et
qu'elle fait valoir que l'article 37 est inopérant en I'espèce;et consi-
dérantque la Belgiquesoutient «[e]n ordre tout à fuit subsidiaire...
qu'aux termes de [la]convention [de 19301le recours à la Cour per-
manente de Justice internationale est subsidiaire)) et qu'elle observe
que la Yougoslavie ((n'apas épuiséles voies procédurales préalables
dont seul l'épuisementpeut donner lieu à une saisine de la Cour per-
manente de justice internationale));
44. Considérant que l'invocation par une partie d'une nouvelle
base de juridiction au stade du second tour de plaidoiries sur une
demande en indication de mesures conservatoires est sans précédent

dans la pratique de la Cour; qu'une démarche aussi tardive,
lorsqu'elle n'est pas acceptéepar l'autre partie, met gravement en
pérille principe dlucontradictoire et la bonne administration de la
justice; et que,par suite, la Cour ne saurait, aux finsde décidersielle
peut ou non indiquer des mesuresconservatoires dans lecas d'espèce,
prendre en considération le nouveau chef de compétence dont la
Yougoslavie a entendu se prévaloir le 12 mai 1999.)) (Lickité de
l'emploi de la for.ce( Yougoslavie c. Belgique), mesures conserva-
toires,ordonnance du 2juin 1999, C.I.J. Recueil /999, pp. 138-139,
par.42-44.)

7. Dans une autre ordonnance, rendue ce mêmejour, le 2juin 1999, la
Cour a confirméqu'elle ne saurait prendre en considération le nouveau
titre de compétenceinvoquélors du second tour de plaidoiries. Ellea dit:

((42. Considérantque la Yougoslavie, aprèsledépôtde sa requête,
a en outre invoqué, pour fonder la compétence de la Cour en
l'espèce,l'article 4 du traitéde règlement judiciaire, d'arbitrage et de conciliation entre les Pays-Bas et le Royaume de Yougoslavie, signé
à La Haye le 11 mars 1931; que le ((complément à la requête)) dela
Yougoslavie, dans lequel celle-ci s'est prévaluede cette nouvelle base
de juridiction, aété soumis à la Cour lors du second tour de plai-

doiries (voir paragraphe 14 ci-dessus); que la Yougoslavie n'a pas
fourni d'explication sur les raisons qui l'avaient amenéeà déposerce
document à ce stade de la procédure; et qu'elle fait valoir que, même
si la procédure prévueà l'article 4 du traité de 1931n'a pas été stric-
tement suivie. «la Cour. comme sa devancière. la Cour Dermanente
de Justice internationale, a toujours appliquk le suivant
lequel il ne faut piis pénaliser le demandeur qui a commis dans un

acte de procédure une erreur qu'il peut facilement réparer));
43. Considérant que les Pays-Bas font objection à la présentation
tardive par la Yougoslavie de ce chef de compétence; qu'ils sou-
tiennent que le traitéde règlement judiciaire, d'arbitrage et de conci-
liation du11 mars 193 1n'est plus en vigueur entre les Pays-Bas et la
Yougoslavie; que les Pays-Bas font observer qu'ils ne sont pas partie

à la convention cle Vienne de 1978 sur la succession d'Etats en
matière de traitéset que, contrairement à ce qu'il en est pour un cer-
tain nombre d'autres traités bilatéraux conclus avec l'ancienne Répu-
blique fédérativesocialiste de Yougoslavie, il n'a pas été passé
d'accord provisoire sur le maintien en vigueur du traité de 1931 ;et
que les Pays-Bas font en outre valoir que la Yougoslavie n'a pas res-

pectéles prescriptions de procédure indiquées à l'article 4 du traité,
notamment le préavisd'un mois;
44. Considérant que l'invocation par une partie d'une nouvelle
base de juridiction au stade du second tour de plaidoiries sur une
demande en indication de mesures conservatoires est sans précé-
dent dans la pratique de la Cour; qu'une démarche aussi tardive,

lorsqu'elle n'est pas acceptée par l'autre partie, met gravement en
pérille principe du contradictoire et la bonne administration de la
justice; et que, par suite, la Cour ne saurait, aux fins de décider si
elle peut ou non indiquer des mesures conservatoires dans le cas
d'espèce, prendre en considération le nouveau chef de compétence
dont la Yougos1;ivie a entendu se prévaloir le 12 mai 1999.))
(Licéitéde l'emploi de laforce ( Yougosluvir c.Pujls-Bus), mesures

conservatoires, orrlonnunce du 2 juin 1999; C.I.J. Recueil 1999,
pp. 556-557, par. 42-44.)

8. Nonobstant lesdécisionssusmentionnées, la Couradopte en l'espèce
une position différente etsoutient que I'invocation par le Congo, lors du
second tour de plaidoiries, des déclarations d'acceptation de la juridiction

obligatoire de la Cour ne sauraient avoir été de nature à mettre grave-
ment en pérille principe du contradictoire et la bonne administration de
la justice (ordonnance, par. 63-64).
9. A l'appui de sa nouvelle position, la Cour rappelle d'abord qu'aux
termes du paragraphe 2 de l'article 38 de son Règlement «la requête MANDAT D'ARRÈT (OP.IND.PARRA-ARANGUREN) 214

indique autant que possible les moyens de droit sur lesquels le deman-
deur prétend fonder la compétencede la Cour» (les italiques sont de la
Cour). Toutefois, d'après moi, le motif avancé n'est pas satisfaisant, car
cette disposition était en vigueur en juin 1999 et n'a pas empêché la
Cour de parvenir à une conclusion différentedans les affaires précédem-

ment évoquées.
10. En deuxième lieu, il est dit au paragraphe 63 de l'ordonnance
((qu'il appartient en tout état de cause à la Cour de rechercher dans
chaque cas si elle a compétence)>;mais, à mon avis, cette tâche, conférée
à la Cour, diffère de celle qui consiste à rechercher elle-même d'éven-
tuels chefs de compétence que les parties n'ont pas invoqués.
11. Troisièmement, la Cour affirme que les déclarations au titre de la
clause facultative faites par la Belgique et la République démocratiquedu
Congo sont ((connues tant de la Cour que des Parties)), attendu qu'elles

ont étédûment déposéesauprès du Secrétaire générad le l'organisation
des Nations Unies, lequel en a transmis copieà la Cour ainsi qu'à tous les
Etats parties au statut et que ces déclarations ont étéreproduites dans
I'Annuuire de la Cour. 11n'empêchequ'à mon avis, ni la possibilité
d'avoir connaissance des déclarations des Parties, ni leur reproduction
dans l'Annuaire de la Cour n'ont pour résultat de faire desdites déclara-
tions des élémentsde la requêtedéposéepar la Républiquedémocratique
du Congo contre la Belgique.
12. Enfin, la Cour fait observer que:

((compte tenu de la présentation adoptée dans la requêteet des
conclusions présentéespar le Congo, la Belgique ne pouvait pas ne
pas s'attendre à cf: que les déclarations faites par les deux Parties
entrent en ligne de compte pour fonder la compétence de la Cour en
l'espèce»(ordonnance, par. 63) ;

la Belgique a dèslors étéen mesure de concevoir et de faire valoir toute
argumentation qu'elle eût estiméappropriée à cet égard; et que, partant,
la Belgique n'a pas étéléséepar le fait que la République démocratique
du Congo ait invoqué sa déclaration d'acceptation de la juridiction obli-

gatoire de la Cour au second tour de plaidoiries. A mon avis, de telles
considérations ne doivent êtreprises que comme l'énoncéde vŒuxpieux,
nullement étayéspar le dossie;.
13. Au demeurant, la République démocratique du Congo a fondéla
compétence de la Cour sur sa déclaration d'acceptation de la juridiction
obligatoire de la Cour dans trois requêtes distinctes déposéeasu Greffe le
23 juin 1999 (affaires relatives aux Actiilités arméessur le territoire du
Congo (République dc;moc.ratiquedu Congo c. Ougundu) (République
dc;li.nio~~rutdieCongo c.Burundi) (RL;publiqurd6mocratique du Congo
L..R~rcindu)).Elle n'a pas procédéen l'espècede la mêmemanière et n'a

pas expliquépourquoi elle n'a invoquésa déclaration au titre de la clause
facultative pour fonder la compétence de la Cour que lors du second tour
de plaidoiries. Par conséquent,j'estime que la Cour ne peut pas prendre
en considération cet élkment. MANDAT D'ARRET (OP. IND.PARRA-ARANGUREN) 215

14. Pour toutes ces raisons, je crois que la Cour ne saurait tenir
compte du fait que la République démocratique du Congo ait invoqué sa
propre déclaration d'acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour
au second tour de plaidoiries en tant que nouveau fondement de la com-
pétencede la Cour.

(SignP) Gonzalo PARRA-ARANGUREN.

Bilingual Content

SEPARATE OPINION OF JUDGE PARRA-ARANGUREN

The grounds ofjuri.rdiction originully adi~ancedhy the Congo - The neiv title
ofjurisdiction invoked in the second round of oral argument - The objection
ma& by Belgium - The precedents of' the Court on the rnatter - The neir
position udopted hy thc Court - The rcasons given cannot be upheld - Conclu-
sion

1. Notwithstanding my vote for the operative part of the Order, 1 feel
it necessary to make the following points.
2. In its Application, the Democratic Republic of the Congo relies, as

basis for the Court's jurisdiction, on the fact that "Belgium has accepted
thejurisdiction of the Court and, in so far as may be required, the present
Application signifies acceptance of that jurisdiction by the Democratic
Republic of the Congo" (Order, para. 2).
3. The Democratic Republic of the Congo did not indicate any addi-
tional basis of jurisdiction in its request for provisional measures.

4. At the hearing of 22 November 2000, in its second round of oral
argument, the Democratic Republic of the Congo contended that

"Prima facie, the Court's jurisdiction cannot be contested. It
derives clearly from the optional declarations recognizing as com-
pulsory the jurisdiction of the Court made by the Kingdom of Bel-

gium and the Democratic Republic of the Congo on 3 April 1958
and 8 February 1989, respectively, which are appended to this
statement and which appear to contain no reservation." (Order,
para. 41).

5. On 23 November 2000, Belgium objected "to the invocation
of a basis of jurisdiction . . .in the second round of oral arguments",
and supported its contention citing jurisprudence of the Court (Order,

paras. 45, 62).
6. As recalled by Belgium, the Court stated on 2 June 1999:

"42. Whereas after it had filed its Application Yugoslavia further
invoked, as a basis for the Court's jurisdiction in this case, Article 4
of the Convention of Conciliation, Judicial Settlement and Arbitra-
tion, between Belgiumand the Kingdom of Yugoslavia, signedin Bel-
grade on 25 March 1930; whereas Yugoslavia's 'Supplement to the

Application', in which itinvoked this new basis of jurisdiction, was
presented to the Court in the second round of oral argument (see
paragraph 14above); and whereas Yugoslavia gave no explanation OPINION INDIVIDUELLE DE M. PARRA-ARANGUREN

[Traduction]

Bases de juridiction invoqu&esa l'originepur le Congo - Noui~eautitre de
compi.tence invoquélors du second tour de plaidoirie- Objectionsoulevéepar
la Belgique - Précédenis de la Cour en lamatière- Nouvelle positionadoptée
pur la Cour - Motifi donnésne pouvant êtreaccueilli.^ - Conclu.~ion.

1. Bien qu'ayant votéen faveur du dispositif de l'ordonnance, j'estime

devoir formuler les observations suivantes.
2. Dans sa requête, laRépublique démocratique du Congo invoque,
pour fonder la compél.encede la Cour, le fait que «la Belgique a accepté
lajuridiction de la Cour et, [qu']en tant que de besoin, la présente requête
vaut acceptation de cette juridiction par la République démocratique du

Congo » (ordonnance, par. 2).
3. La République démocratique du Congo, dans sa demande en indi-
cation de mesures conservatoires, n'a invoquéaucuneautre base de com-
pétence.

4. A l'audience du 22 novembre 2000, lors de son second tour de plai-
doiries, la République démocratique du Congo a indiqué que:

Primu fucie, Ilacompétence de la Cour ne peut êtrecontestée.
Elle découle clairement des déclarations facultatives de reconnais-
sance de la juridiction obligatoire de la Cour faites par le Royaume

de Belgique et la République démocratique du Congo, respective-
ment le 3 avril 1958et le 8 février1989, et qui se trouvent en annexe
de cette intervention. Et qui, apparemment, sont sans réserve.))
(Ordonnance, par. 42.)

5. Le 23 novembre 2000, la Belgique s'est opposée«à ce qu'un chef de
compétence soit invoqué au stade du second tour de plaidoiries)), en
s'appuyant pour cela sur lajurisprudence de la Cour (ordonnance, par. 45,
62).
6. Comme la Belgique l'a rappelé, la Cour a déclaréle 2 juin 1999:

((42. Considérant que la Yougoslavie, après le dépôtde sa requête,
a en outre invoqué, pour fonder la compétence de la Cour en
l'espèce, l'article 4 de la convention de conciliation, de règlement
judiciaire et d'arbitrage entre la Belgique et le Royaume de Yougo-
slavie, signée a Belgrade le 23 mars 1930; que le ((complément a la

requête))de la Yougoslavie, dans lequel celle-ci s'est prévalue de
cette nouvelle base de juridiction, a été soumisà la Cour lors du
second tour de plaidoiries (voir paragraphe 14 ci-dessus); et que la of its reasons for filing this document at this stage of the proceed-
ings ;
43. Whereas Belgium, referring to Article 38, paragraph 2, of the
Rules of Court, argues as follows:

'It follows clearly that it is unacceptable, as in this case, to
introduce a new ground in extremis supplementing an essential
point in the arguments on the prima facie jurisdiction of the
Court. Moreover, we may ask ourselves why the Federal Repub-
lic of Yugoslavia, which is deemed to be aware of the treaties to
which it claims now to have succeeded, thought it unnecessary,
contrary to the requirement of the principle of the sound admin-
istration of justice and of the provisions of Article 38 which
1have just cited, to include this ground when filing its Applica-
tion';

and whereas Belgium accordingly asks the Court, 'primarily, to
strike this ground from the proceedings'; whereas Belgiumcontends
'in the alternative''that the Convention of 1930confers jurisdiction
not on [the]Court, but on the Permanent Court of International Jus-
tice', and whereas it contends that Article 37 of the Statute is with-
out effect here; and whereas BelgiumStates 'in thefurther alternative
. . that, under the terms of [the]Convention [of 19301,recourse to the
Permanent Court of International Justice is a subsidiary remedy',
and whereas it points out that Yugoslavia 'has failed to exhaust the
preliminary procedures whose exhaustion is a necessary condition
for seisin of the Permanent Court of International Justice';

44. Whereas the invocation by a party of a new basis of jurisdic-
tion in the second round of oral argument on a request for the indi-
cation of provisional measures has never before occurred in the
Court's practice; whereas such action at this late stage, when it is not
accepted by the other party, seriously jeopardizes the principle of
procedural fairness and the sound administration of justice;
and whereas in consequence the Court cannot, for the purpose of
deciding whether it may or may not indicate provisional measures
in the present case, take into consideration the new title of jurisdic-
tion which Yugoslavia sought to invoke on 12May 1999." (Legality
of Useof Force ( Yugosluviu v. Belgium), Provisional Measures, Order
of 2 June 1999, I.C.J. Reports 1999, pp. 138-139, paras. 42-44.)

7. In a different Order, rendered on the same day, 2 June 1999, the
Court confirmed that it could not take into consideration the new title of
jurisdiction advanced in the second round of oral pleadings. There it was
stated :

"42. Whereas after it had filed its Application Yugoslavia further
invoked, as basis for the Court's jurisdiction in this case, Article4 of
the Treaty of Judicial Settlement, Arbitration and Conciliation MANDAT D'ARRET (OP. [ND. PARRA-ARANGUREN) 212

Yougoslavie n'a pas fourni d'explication sur les raisons qui l'avaient
amenée à déposerce document à ce stade de la procédure;
43. Considérant que la Belgique, se référantau paragraphe 2 de

l'article 38 du Règlement, expose ce qui suit:
((11s'en déduit clairement qu'il est inadmissible, comme en
I'espèce,de compléter,sur un point essentiel, l'argumentation rela-
tive à la compétenceprima fucie de [la] Cour, par un nouveau
moyen proposé in extremis. D'ailleurs, l'on peut se demander
pourquoi la République fédéralede Yougoslavie, qui est censée

connaître les traités auxquels elle prétend aujourd'hui avoir suc-
cédé, n'apas cri1devoir, comme l'exigeaient le principe de bonne
administration de la justice et l'article 38 précité,formuler ce
moyen au stade de l'introduction de sa requête));

et qu'elle prie dès lors la Cour, «en ordre principal, d'écarter ce
moyen des débats):);considérantque la Belgique soutient «[e]n ordre

subsidiaire))«que la convention de 1930donne compétence,non à
[la] Cour, mais à la Cour permanente de Justice internationale)), et
qu'elle fait valoir que l'article 37 est inopérant en I'espèce;et consi-
dérantque la Belgiquesoutient «[e]n ordre tout à fuit subsidiaire...
qu'aux termes de [la]convention [de 19301le recours à la Cour per-
manente de Justice internationale est subsidiaire)) et qu'elle observe
que la Yougoslavie ((n'apas épuiséles voies procédurales préalables
dont seul l'épuisementpeut donner lieu à une saisine de la Cour per-
manente de justice internationale));
44. Considérant que l'invocation par une partie d'une nouvelle
base de juridiction au stade du second tour de plaidoiries sur une
demande en indication de mesures conservatoires est sans précédent

dans la pratique de la Cour; qu'une démarche aussi tardive,
lorsqu'elle n'est pas acceptéepar l'autre partie, met gravement en
pérille principe dlucontradictoire et la bonne administration de la
justice; et que,par suite, la Cour ne saurait, aux finsde décidersielle
peut ou non indiquer des mesuresconservatoires dans lecas d'espèce,
prendre en considération le nouveau chef de compétence dont la
Yougoslavie a entendu se prévaloir le 12 mai 1999.)) (Lickité de
l'emploi de la for.ce( Yougoslavie c. Belgique), mesures conserva-
toires,ordonnance du 2juin 1999, C.I.J. Recueil /999, pp. 138-139,
par.42-44.)

7. Dans une autre ordonnance, rendue ce mêmejour, le 2juin 1999, la
Cour a confirméqu'elle ne saurait prendre en considération le nouveau
titre de compétenceinvoquélors du second tour de plaidoiries. Ellea dit:

((42. Considérantque la Yougoslavie, aprèsledépôtde sa requête,
a en outre invoqué, pour fonder la compétence de la Cour en
l'espèce,l'article 4 du traitéde règlement judiciaire, d'arbitrage et de between the Netherlands and the Kingdom of Yugoslavia, signed in
The Hague on 11March 1931 ;whereas Yugoslavia's 'Supplement to
the Application', in which it invoked this new basis of jurisdiction,
was presented to the Court in the second round of oral argument
(see paragraph 14 above); whereas Yugoslavia gave no explanation
of its reasons for filing this document at this stage of theproceed-

ings; and whereas Yugoslavia argues that, although the procedure
provided for in Article 4 of the 1931Treaty has not been strictly fol-
lowed, 'the Court, like its predecessor, the Permanent Court of
International Justice, has alwayshad recourse to the principleccord-
ing to which it should not penalize a defect in a procedural act which
the Applicant could easily remedy';
43. Whereas the Netherlands objects to the late presentation by
Yugoslavia of this basis of jurisdiction; whereas the Netherlands
argues that the Treaty of Judicial Settlement, Arbitration and
Conciliation of 11 March 1931 is no longer in force between the
Netherlands and Yugoslavia; whereas the Netherlands observes
that it is not a party to the 1978 Vienna Convention on the Suc-
cession of States in respect of Treaties and that, in contrast with a
number of other bilateral treaties concluded with the former Socialist
Federal Republic of Yugoslavia, no provisional mutual agreement

has been reached on the continued validity of the 1931 Treaty;
whereas the Netherlands further argues that Yugoslavia has not
complied with the procedural requirements of Article 4 oftheTreaty,
in particular the period of notice of one month;
44. Whereas the invocation by a party of a new basis of jurisdic-
tion in the second round of oral argument on a request for the indi-
cation of provisional measures has never occurred in the Court's
practice; whereas such action at this late stage, when it is not
accepted by the other party, seriously jeopardizes the principle of
procedural fairness and the sound administration of justice;
and whereas in consequence the Court cannot, for the purpose of
deciding whether it may or may not indicate provisional measures
in the present case, take into consideration the new title of juris-
diction which Yugoslavia sought to invoke on 12May 1999." (Legal-

ity of Use of' Force (Y~lgoslaviu v. Netherlands), Provisional
Measurcs, Order of 2 June 1999, I.C.J. Reports 1999, pp. 556-557,
paras. 42-44.)

8. Notwithstanding the above-mentioned decisions, the Court adopts
a different position in the present case and maintains that the invocation
by Congo of the optional clause declarations in the second round of oral
argument was not likely seriously to jeopardize the principle of pro-
cedural fairness and the sound administration of justice (Order,
paras. 63-64).
9. As first argument in support of its new position, the Court recalls
that Article 38, paragraph 2, of the Rules of Court requires that "[tlhe conciliation entre les Pays-Bas et le Royaume de Yougoslavie, signé
à La Haye le 11 mars 1931; que le ((complément à la requête)) dela
Yougoslavie, dans lequel celle-ci s'est prévaluede cette nouvelle base
de juridiction, aété soumis à la Cour lors du second tour de plai-

doiries (voir paragraphe 14 ci-dessus); que la Yougoslavie n'a pas
fourni d'explication sur les raisons qui l'avaient amenéeà déposerce
document à ce stade de la procédure; et qu'elle fait valoir que, même
si la procédure prévueà l'article 4 du traité de 1931n'a pas été stric-
tement suivie. «la Cour. comme sa devancière. la Cour Dermanente
de Justice internationale, a toujours appliquk le suivant
lequel il ne faut piis pénaliser le demandeur qui a commis dans un

acte de procédure une erreur qu'il peut facilement réparer));
43. Considérant que les Pays-Bas font objection à la présentation
tardive par la Yougoslavie de ce chef de compétence; qu'ils sou-
tiennent que le traitéde règlement judiciaire, d'arbitrage et de conci-
liation du11 mars 193 1n'est plus en vigueur entre les Pays-Bas et la
Yougoslavie; que les Pays-Bas font observer qu'ils ne sont pas partie

à la convention cle Vienne de 1978 sur la succession d'Etats en
matière de traitéset que, contrairement à ce qu'il en est pour un cer-
tain nombre d'autres traités bilatéraux conclus avec l'ancienne Répu-
blique fédérativesocialiste de Yougoslavie, il n'a pas été passé
d'accord provisoire sur le maintien en vigueur du traité de 1931 ;et
que les Pays-Bas font en outre valoir que la Yougoslavie n'a pas res-

pectéles prescriptions de procédure indiquées à l'article 4 du traité,
notamment le préavisd'un mois;
44. Considérant que l'invocation par une partie d'une nouvelle
base de juridiction au stade du second tour de plaidoiries sur une
demande en indication de mesures conservatoires est sans précé-
dent dans la pratique de la Cour; qu'une démarche aussi tardive,

lorsqu'elle n'est pas acceptée par l'autre partie, met gravement en
pérille principe du contradictoire et la bonne administration de la
justice; et que, par suite, la Cour ne saurait, aux fins de décider si
elle peut ou non indiquer des mesures conservatoires dans le cas
d'espèce, prendre en considération le nouveau chef de compétence
dont la Yougos1;ivie a entendu se prévaloir le 12 mai 1999.))
(Licéitéde l'emploi de laforce ( Yougosluvir c.Pujls-Bus), mesures

conservatoires, orrlonnunce du 2 juin 1999; C.I.J. Recueil 1999,
pp. 556-557, par. 42-44.)

8. Nonobstant lesdécisionssusmentionnées, la Couradopte en l'espèce
une position différente etsoutient que I'invocation par le Congo, lors du
second tour de plaidoiries, des déclarations d'acceptation de la juridiction

obligatoire de la Cour ne sauraient avoir été de nature à mettre grave-
ment en pérille principe du contradictoire et la bonne administration de
la justice (ordonnance, par. 63-64).
9. A l'appui de sa nouvelle position, la Cour rappelle d'abord qu'aux
termes du paragraphe 2 de l'article 38 de son Règlement «la requêteapplication shall specify,asfur as possible the legal grounds upon which
the jurisdiction of the Court is said to be based" (emphasis added by the
Court). However, in my opinion, this is not a good reason, because that
paragraph was in force in June 1999 and it did not prevent the Court
from reaching a different conclusion in the above-mentioned cases.

10. Secondly, paragraph 63 of the Order states that "it is in any event
for the Court to ascertain in each case whether it has jurisdiction"; but,
in my opinion, this task of the Court is different from making researches

of its own to discover possible grounds of jurisdiction not indicated by
the parties.
11. In the third place, the Court maintains that the optional clause
declarations made by Belgium and the Democratic Republic of the
Congo are "within the knowledge both of the Court and of the Parties",
because they were duly deposited with the Secretary-General of the
United Nations, who transmitted copies thereof to the Court and to al1
the States parties, and because they are reproduced in the Yearbook of
the Court. However, in my opinion, neither possible knowledge of the
optional clause declarations made by the Parties nor their reproduction
in the Yearhook of the Court incorporate them as part of the Application
filed by the Democratic Republic of the Congo against Belgium.

12. Finally, the Court states that,

"having regard to the terms in which the Application was formu-
lated and to the submissions presented by the Congo, Belgiumcould
readily expect that the declarations made by the two Parties would
be taken into consideration as basis for the jurisdiction of the Court
in the present case" (Order, para. 63);

that Belgiumwas in a position to prepare and put forward any such argu-
ment as it thought fitin this regard; and that therefore Belgium was not
prejudiced by the fact that the Democratic Republic of theCongo invoked
itsoptional clause declarations in the second round of oral argument. In
my opinion, these statements may only be considered wishful thinking
not supported by the records.

13. Moreover, the Democratic Republic of the Congo indicated its

optional clause declaration as a ground for the jurisdiction of the Court
in three separate Applications filed by it in the Registry on 23 June 1999
(cases concerning Armed Activities on the Territory of the Congo (Demo-
cratic Republic of the Congo v. Ugunda), (Democratic Republic of the
Congo v. Burundi) and (Democratic Republic of the Congo v.Rwanda)).
The Democratic Republic of the Congo did not proceed in the same way
in the present case and has given no explanation for indicating its
optional clause declaration as a ground for the jurisdiction of the Court
in the second round of oral argument. Therefore, in my opinion, it can-
not be taken into account by the Court. MANDAT D'ARRÈT (OP.IND.PARRA-ARANGUREN) 214

indique autant que possible les moyens de droit sur lesquels le deman-
deur prétend fonder la compétencede la Cour» (les italiques sont de la
Cour). Toutefois, d'après moi, le motif avancé n'est pas satisfaisant, car
cette disposition était en vigueur en juin 1999 et n'a pas empêché la
Cour de parvenir à une conclusion différentedans les affaires précédem-

ment évoquées.
10. En deuxième lieu, il est dit au paragraphe 63 de l'ordonnance
((qu'il appartient en tout état de cause à la Cour de rechercher dans
chaque cas si elle a compétence)>;mais, à mon avis, cette tâche, conférée
à la Cour, diffère de celle qui consiste à rechercher elle-même d'éven-
tuels chefs de compétence que les parties n'ont pas invoqués.
11. Troisièmement, la Cour affirme que les déclarations au titre de la
clause facultative faites par la Belgique et la République démocratiquedu
Congo sont ((connues tant de la Cour que des Parties)), attendu qu'elles

ont étédûment déposéesauprès du Secrétaire générad le l'organisation
des Nations Unies, lequel en a transmis copieà la Cour ainsi qu'à tous les
Etats parties au statut et que ces déclarations ont étéreproduites dans
I'Annuuire de la Cour. 11n'empêchequ'à mon avis, ni la possibilité
d'avoir connaissance des déclarations des Parties, ni leur reproduction
dans l'Annuaire de la Cour n'ont pour résultat de faire desdites déclara-
tions des élémentsde la requêtedéposéepar la Républiquedémocratique
du Congo contre la Belgique.
12. Enfin, la Cour fait observer que:

((compte tenu de la présentation adoptée dans la requêteet des
conclusions présentéespar le Congo, la Belgique ne pouvait pas ne
pas s'attendre à cf: que les déclarations faites par les deux Parties
entrent en ligne de compte pour fonder la compétence de la Cour en
l'espèce»(ordonnance, par. 63) ;

la Belgique a dèslors étéen mesure de concevoir et de faire valoir toute
argumentation qu'elle eût estiméappropriée à cet égard; et que, partant,
la Belgique n'a pas étéléséepar le fait que la République démocratique
du Congo ait invoqué sa déclaration d'acceptation de la juridiction obli-

gatoire de la Cour au second tour de plaidoiries. A mon avis, de telles
considérations ne doivent êtreprises que comme l'énoncéde vŒuxpieux,
nullement étayéspar le dossie;.
13. Au demeurant, la République démocratique du Congo a fondéla
compétence de la Cour sur sa déclaration d'acceptation de la juridiction
obligatoire de la Cour dans trois requêtes distinctes déposéeasu Greffe le
23 juin 1999 (affaires relatives aux Actiilités arméessur le territoire du
Congo (République dc;moc.ratiquedu Congo c. Ougundu) (République
dc;li.nio~~rutdieCongo c.Burundi) (RL;publiqurd6mocratique du Congo
L..R~rcindu)).Elle n'a pas procédéen l'espècede la mêmemanière et n'a

pas expliquépourquoi elle n'a invoquésa déclaration au titre de la clause
facultative pour fonder la compétence de la Cour que lors du second tour
de plaidoiries. Par conséquent,j'estime que la Cour ne peut pas prendre
en considération cet élkment. 14. For al1the above reasons, in my opinion the Court cannot take

into consideration the invocation made by the Democratic Republic of
the Congo of its own optional clause declaration in the second round of
oral argument as a new title to support the jurisdiction of the Court.

(Signed) Gonzalo PARRA-ARANGUREN. MANDAT D'ARRET (OP. IND.PARRA-ARANGUREN) 215

14. Pour toutes ces raisons, je crois que la Cour ne saurait tenir
compte du fait que la République démocratique du Congo ait invoqué sa
propre déclaration d'acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour
au second tour de plaidoiries en tant que nouveau fondement de la com-
pétencede la Cour.

(SignP) Gonzalo PARRA-ARANGUREN.

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Opinion individuelle de M. Parra-Aranguren (traduction)

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