Opinion dissidente de M. Weeramantry (traduction)

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088-19920414-ORD-01-07-EN
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OPINION DISSIDENTE DE M. WEERAMANTRY

[Traduction]

Commelerequiert l'article 74,paragraphe 1,du Règlementde la Cour,
priorité a étédonnée à la présentedemande en indication de mesures
conservatoiressurtoutes lesautresaffairespendantes. Lesplaidoiries ont
été achevéesle 28mars 1992.Troisjours plus tard, alors que l'affaire en
étaitau stade des délibérationsl,e Conseil de sécuria adoptéla résolu-
tion 748(1992).La résolution748(1992)portait sur des questionsimpor-
tantes alors en suspens devant la Cour et l'incidence de cette résolution
sur les questions dont la Cour est saisiecompte parmi les points de droit
discutésdans la présente opinion.
Sansdéterminerde façon catégorique quelest l'effetjuridique de cette

résolution,dont la Libyecontestelavalidité,nous devons,au stade actuel
delaprocédure, quiatrait à l'indicationdemesuresconservatoires,partir
du principe qu'elle estvalable. L'article 25 de la Charte des Nations
Unies, qui oblige les Membres de l'organisation àaccepter et appliquer
les décisionsdu Conseil, doit donc être considéré p,rima facie, comme
applicable à cette résolution. En arrivantà de telles conclusions, je
m'associeauxopinions delamajoritédelaCour mais,avectout lerespect
queje dois à celle-ci,je ne peux souscriàel'opinion que cetterésolution
rend inappropriée l'indication de mesures conservatoires. Les raisons
d'envisagerainsi l'affaire sont exposéesdans la présente opinion dissi-
dente. Elle traite d'importantes questions de droit qui ont été débattues
assezen détail devantnous et dont laportéedépassel'affaire en causeau
point de semblermériterun examenquelque peu développé.
Je limiterai mes observations à deux questions qui ont fait l'objet

d'argumentations assez longues devant nous, celle de la compétence et
celle des rapports entre la Cour et le Conseil de sécur. esfaits essen-
tiels et les principales thèses des Parties sont exposésassez clairement
dans l'ordonnance de la Cour pour queje n'aiepas à lesrépéterici.

L'article14,paragraphe 1,delaconventiondeMontréalestlabase dela
compétencequ'ala Cour de connaître dela requête. Il stipule un délaide
sixmoisàcompterdelademande d'arbitragependant lequel,silesparties
ne parviennent pas à semettre d'accord sur l'organisationde l'arbitrage,
l'une quelconqued'entreellespeut soumettreundifférend à laCourinter-
nationale.
Lesdéfendeurs ont soutenu quelesconditionspréalablesde la compé-

tence dela Cour n'ontpas été rempliesf,aisantvaloir qu'il n'existepasde«différend»au sensdel'article 14,paragraphe 1,etque,detoutemanière,
le délaide six moisstipulén'estpas expiré.
A ce stadede la procédure,il ne convientpas d'attribuer un sensétroit
ou restrictif au terme «différend». Il me semble établi,à première vue,
qu'il existeun différendsubstantielentrelesParties,carla Libyesefonde
surlarèglededroitinternational coutumier aut dedereautjudicarecomme
étantle principe directeur qui l'habiliteàjuger ses propres citoyens en
l'absencedetraitéd'extradition,tandis queledéfendeurréclame laremise

des deux suspects. La Libye déclarequ'elle lesjugera et elle a invité le
défendeuràenvoyer des représentants et des hommesde loi observerle
procès, arguantqu'elles'acquitte ainsides obligationsdont elle esttenue
envertu du traité.Ledéfendeurexigequelessuspectssoientjugésdevant
sespropres tribunaux. LaLibyefaitvaloirque sondroitinterne luiinterdit
delivrer sescitoyenspour qu'ilssoientjugésailleurset que laréclamation
du défendeurconstitueun empiétementsursasouveraineté.Ledéfendeur
nie qu'ily aitlà une excusevalable pour ne pas livrer lesintéressés.Tout
celamesembleconstituerun différendtoutaumoinsprimafacie,etdonc à
satisfaireà l'une des conditions préalablesde l'article 14,paragraphe 1.
L'autre allégationdu défendeur, qui a plusde poids, est que la lettre
dans laquellela Libyeamentionné l'arbitragepour lapremièrefoisporte
la date du 18janvier et que la présente instance a étéintroduite l3 ars,
bien avant que sixmois ne se fussent écoulés. Il soutient donc que l'une

desconditionspréalables essentiellespour demander àla Cour d'exercer
sa compétencen'a pas été remplieT . ellepeut effectivementêtre la situa-
tion en droit.
Il y a pourtant une autre façon de voir qui est plausible et assurément
défendable.C'est que, quand une partie a indiqué d'avance qu'elle ne
s'estimera pas tenue par la médiationou la négociation et insistepour
faire respecter une période d'attenteà titre de condition préalablepour
porter l'affaire devantla Cour internationale, elle risque de déjouer les
buts d'une telleclause.Il ressort du dossier qui nous a étéprésentéue le
Royaume-Unia déclaréau Conseil de sécurité :

La lettre en date du 18janvier concernant une demande d'arbi-
trage au titre de l'article 14de la convention de Montréaln'estpas
pertinente dans le cas dont est saisi leConseil. Le Conseil n'estpas,
selon les termes de l'article 14de la convention de Montréal, saisi
d'un différend entre deux parties contractantesou plus concernant
l'interprétationou l'application de la convention de Montréal.»
(WPV.3033,p. 104.)

Il y a eu aussi le fait qu'au lieude rechercher un arbitrage conformé-
ment à la convention de Montréal,le Gouvernement britannique, avec
celuides Etats-Unis,a publié le27novembre 1991une déclaration selon
laquelle le Gouvernement libyen devait livrertoutes les personnes accu-
séesdu crime.
La question de droit dont nous sommes saisis estla suivante :si, dans
une affairehypothétique,l'une despartiesrefusedenégocier,cettemême CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971 (OP. DISS. WEERAMANTRY) 52

partie peut-elle insister pour subordonner à l'écoulementdu délaide
sixmoisla facultédeporter l'affaire devant laCour? Unetelleinsistance
nemanquerait pas de dresserun obstaclesurlavoied'unepartiequi cher-
cherait àobtenir satisfactiondevant la Cour. La disposition dont il s'agit
peut êtrealorsinterprétée ecnesensquetoute partiea lafacultéderecou-
rirà d'autres procéduresque la conciliation pendant ce délaide sixmois.
Interpréter ainsiune telle disposition risquerait fort d'allerencontre
desbuts et principes qui l'inspirent, comme M. Ago l'adéclaréde façon
convaincante dans son opinion individuelle lors de la phase des excep-

tions préliminairesen l'affaire desActivités militaires etparamilitaireasu
Nicaragua etcontrecelui-ci:
«je suisconvaincu quelerecourspréalable à desnégociationsdiplo-

matiques ne peut pas constituer une exigence absolue à remplir,
même lorsqu'ilestévidentque l'état desrelationsentre lesparties est
tel qu'il estillusoire de s'attendrece que de telles négociations
aboutissent àun résultatpositif et qu'il serait injustifiéde retarder
par cebiaisl'ouverture d'une procédure arbitraleoujudiciairequand
la possibilitédu recours celle-cia étéprévu» e(C.I.J. Recueil1984,
p. 515-516,par. 4).

Le principe général énoncé dancse passage peut être formulé plus
nettementencoredanslecasd'un délaid'attente spécifié,telquceeluiqui
est stipulé dans la conventionde Montréal. L'onpeut raisonnablement
soutenir qu'il neserà rien depermettre àunepartiequia refuséla conci-
liation d'invoquer,pour demander lerejetd'une requête,l'inexécutiod ne
procédures qu'elle a elle-mêmerejetées.L'on mettrait ainsi celle-ci,
pendantun certaintemps, à l'abridetouteprocéduredeconciliationetde

toute procédure judiciaire en la laissant libre de poursuivre d'autres
procéduresnon conciliatoires,tandisque lapartie adverseresterait tenue
d'attendre, sans assistanceni recours.
Une telle lecture de l'article s'accorde aussi avecles principes d'inter-
prétation quisoulignentquelesdispositions d'untraité doiventêtreinter-
prétéesde manière à ne pas priver d'effetson objet et son but. Sans un
examenplus approfondi, on ne saurait conclurequel'un ou l'autrede ces
points de vue doit l'emporter. Ila beaucoup àdire en faveur de l'un et
de l'autre et, dans la situation actuelle, nous pouvons seulement retenir
que le point de vue selon lequel le délaide six mois de l'article 14,para-
graphe 1,ne constitue pas une interdiction absolue est au moins défen-
dable.

Lesconsidérantsdel'ordonnance delaCourdans lesaffairesdes Essais
nucléairesrenforcentaussicetteattitude provisoire àl'égardde la compé-
tence :

«13. Considérant que, lorsqu'elleest saisie d'une demande en
indication de mesures conservatoires,la Cour n'a pas besoin, avant
d'indiquer ces mesures, de s'assurer de façon concluante de sa
compétencequant au fond de l'affaire,mais qu'elle nedoit cepen- dant pas indiquer de telles mesures si lesdispositions invoquéespar
le demandeur ne se présentent pascomme constituant,prima facie,
une base sur laquellela compétencede la Cour pourrait êtrefondée;
.............................
17. Considérantque les éléments soumis à la Cour l'amènent à
conclure, au stade actuel de la procédure,que les dispositionsinvo-

quéespar le demandeur se présentent comme constituant, prima
facie, une base sur laquelle la compétencede la Cour pourrait être
fondée; et qu'en conséquence laCour se propose d'examiner la
demande en indication de mesures conservatoiresprésentéepar le
demandeur »(C.I.J. Recueil1973,p. 101et 102).

Appliquantle même raisonnement,je dirais quelescirconstancesinvo-
quéespar ledemandeur seprésententcomme constituant,prima facie,une
base sur laquellela compétencede la Cour pourrait êtrefondée.
Au cas où il apparaîtrait, après la question de ces mesures conserva-
toires, lors d'une phase ultérieure oude la procéduresur le fond, que la
Cour n'estpas compétente,lesmesuresconservatoirescesseraient immé-
diatement de produire effet.
Une fois admisecetteconclusion en ce qui concerne la compétencede
la Cour envertu del'article 14dela conventionde Montréal,laprincipale
questionquiseposeensuite est celledesavoirsilesrésolutions731(1992)
et 748(1992)du Conseil de sécurité font obstacleà l'examende l'affaire
par la Cour. Cette question est examinéedans la section suivante de la
présente opinion.

Lapertinencedesquestionsportéesdevantla Cour

Plus peut-être qu'aucune autredans le passé,la présente affaire a
soulevécertainesquestions quine manquent ni d'importance ni d'intérêt
à propos des fonctions respectives de la Cour et du Conseil de sécurité.
Ces questions se sont posées sans ambagesdevant la Cour, lors des plai-
doiries orales, dans le contexte de la résolution731 (1992).La relation
entre cesdeux organesa revêtuplus d'importance encoreaprèsla clôture
des audiences,avecl'adoption de la résolution748(1992).
Lesdeux Parties qui comparaissent devant nous ont soulevéexpressé-
ment des questions relatives aux rapports entre la Cour et le Conseil de
sécurité.
LeconseildelaLibye,M.Suy,aditavecinsistance quelarésolution731
(1992) «fait fi de toute la procédure des règlementsjuridiques et paci-
fiques des différends prévuedans la convention de Montréal» et que la
Libye est donc fondéeà soumettre à la Cour internationale les aspects

juridiques de la question que le Conseil de sécuriténégligés(audience
publique du 26mars 1992(matin),CR92/2, p.61).Ilasoutenu encore que
le droit de la Libye d'exercer sa compétence en matière pénalesur ses CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 54

propres ressortissants estun droit fondamental issude la souverainetéde
l'Etat,un droit qui ne souffrepas de dérogation.
Leconseildu Royaume-Uniadéclaréc ,equiconstituaitl'une desprin-
cipalesallégationsdu Royaume-Uni,que :

«la requête libyenne, bien qu'elle prétende interdiau Royaume-
Unideprendre des mesurescontrela Libye,tenden réalité às'ingérer
dans l'exercice,par le Conseil de sécurité, des fonctions et préroga-
tives qu'iltient de laCharte des Nations Uniesaudiencepublique
du 26mars 1992(après-midi),CR 92/3, p. 10).

Le Royaume-Unia soulignéque,même si les compétencesdu Conseil de
sécuritéetdelaCourinternationale sontparallèles,lesquestionsd'appré-
ciationpolitique relèventdu seulConseil de sécurit(ibid.,p. 72).
Ilyavait làune invitation,présentéesanséquivoqu elaCour, à exami-
ner laquestiondes rapports entrela Cour etleConseil de sécuritdans le
contexte de la résolution731 (1992). Il convient de noter que la Cour
n'avait pas devant ellela résolution748 (1992)lors des plaidoiries, mais
celle-ci a revêtupar la suite encore plus d'importance que la résolu-
tion 731(1992).
Pour apprécierune demande en indication de mesures conservatoires
dans le contexte de la résolution731(1992)et des argumentsdéveloppés
devantnous,la Cour devaitnécessairementexaminerla question de droit
consistantà savoir quelle était,le cas échéant, l'incidesur sa compé-
tence de ladécisionprisepar leConseilde sécuritédans sarésolution731

(1992).Des considérationssemblabless'appliquent maintenant à la réso-
lution 748 (1992).
Les rapports entre le Conseil de sécuritéet la Cour, ainsi fermement
enracinésdans les exposésjuridiques présentés à la Cour, appellent un
certain examen préliminaire,de la manièrequi convient à une demande
demesuresconservatoires.Iln'estpasnécessairede statuerde façon défi-
nitive sur cesquestions importantes au stade des mesuresconservatoires
et,àl'évidenceo, nnetente pas icidelefaire.Ils'agitplutôt d'esquisserles
contoursgénéraux du problèmeafin dereplacerlademande enindication
de mesuresconservatoiresdans la perspective du régimejuridique établi
par la Charte des Nations Unies. L'analyse présentée sous les intitulés
suivantsdela discussionestessentielle,car elleestdirectementenrapport
avecla demande enindication demesuresconservatoiresdont laCour est
maintenant saisieetaveclesmoyensinvoquésensenscontraire surlabase

de la structure organisationnelledes Nations Unies.
11n'ensemblequeplus important de formuler de tellesconsidérations
étantdonnéqu'ellesn'ont jamais eujusqu'iciune actualitéaussidirecteet
immédiatedans lajurisprudence dela Cour etquelaCour aeul'avantage
d'entendre présentercesquestionspar deséquipesdespécialistesdu droit
international très éminentset expérimentés.
De plus, la Cour, entant qu'organe judiciaire saisid'une demande en
indication de mesures conservatoires, était l'instanceappropriée pour
examinerl'incidencejuridique de la résolution731(1992)du Conseil desécuritésur ses décisions. On soutenait d'unepart que le fait que le
Conseil de sécurité était saisdie la question empêchait laCour de faire
droità cettedemande,tandis que,d'autrepart,larésolutionétaitcritiquée
pour ne pas tenir compte de certaines considérations d'ordre juridique
que le Conseil de sécurité était censémenttenu d'envisager. C'étaientlà
par excellence des questions de droit que la Cour devait immanquable-
mentanalyseravant derechercher s'ilfallaitindiquer desmesuresconser-
vatoires.

Observationsgénérales

Créép sar lamême Chartepour remplirencommun lesbuts etprincipes
des Nations Unies, le Conseil de sécuritéet la Cour sont complémen-
taires, et chacun remplitle rôle particulier qui lui est assignépar l'instru-
ment commun qui leur a donnénaissance. Tous deux doivent la même
loyautéau mêmeinstrument qui est source de leurspouvoirs et qui pres-
crit leurs buts. Comme les branches de 1'Etaten droit interne, telles que
l'exécutif etljeudiciaire, ilsremplissentleur missionpour lebiencommun
du systèmeplus vastedont ilsfont partie.
Dans lesystèmedesNations Unies,lasphèredecompétencedechacun
de cesorganesestdéfiniepar la Charte,tout commedans l'ordre national
elle peut être définiepar la constitution. Toutefois,à la différencede
nombreux systèmesnationaux dans lesquelslejudiciaire peut exercer un
contrôle sur lesactes de l'exécutifen soumettant cesactes aux critèresde
la légalitéconstitutionnelle, ans le systèmedes Nations Unies, la Cour
internationale de Justice n'est pas investie du pouvoir de contrôle ou

d'appel souventdévoluauxjuridictionslesplusélevéea suseind'un cadre
national (voirl'avisconsultatifrendu par la Courinternationale deJustice
dans l'affaire des Conséquencesjuridiquep sour les Etats de la présence
continuedel'AfriqueduSudenNamibie (Sud-Ouestafricain)nonobstan lt
résolution276(1970)du ConseildesécuritéC ,.I.J.Recueil1971,p. 16).En
mêmetemps, la Cour est l'organe judiciaire principal des Nations Unies
ayant pour tâche, entre autres, de régler,conformémentau droit interna-
tional, les différendsqui lui sont soumis(articledu Statut de la Cour).
Ilyalieuderemarqueraussi une différenceimportante entrelepartage
des pouvoirs dans les systèmesnationaux et la répartition des pouvoirs
entre les organes principaux des Nations Unies, puisqu'il n'existe pas,
entre lesorganismesetinstitutionsdesNations Unies, lemême rigoureux
principe deséparation despouvoirsqueceluiquel'on trouveparfoisdans
les systèmesnationaux. Comme la Cour l'a remarquédans l'affaire des

Activités militaireet paramilitairesau Nicaragua etcontre celui-ci,les
notions internes de séparation des pouvoirs «ne s'appliquent pas aux
relations entre institutions internationales chargées de réglerdes diffé-
rends» (C.I.J.Recueil1984,p. 433, par. 92). Il n'existepas non plus de
structuration hiérarchique des organes des Nations Unies (Rosenne, fie
Law and Practiceof theInternational CourtofJustice,2eéd.rev., p. 70),
chaque organeprincipal étantpar interpares(ibid.,p. 71). CONVENTION DEMONTRÉALDE 1971 (OP. DISS. WEERAMANTRY) 56

En tant qu'organe judiciaire, la Cour a périodiquement pour tâche
d'examineretdejuger sousl'angle strictementjuridique desquestionsqui
peuvent en même temps fairel'objet d'unedécisionde caractèreexécutif

ou politique émanantd'un autre organeprincipal des Nations Unies. La
Cour, de par sa nature et sa constitution, applique au cas dont elle est
saisie lesnotions, les critères et les méthodesde la procédure judiciaire,
que les autres organes des Nations Unies ne sont naturellement pas
obligés d'appliquer.Les notions qu'elle utilise sont des notions juridi-
ques,lecritèrequ'elleapplique estceluidelalégalité,estesméthodessont
celles de l'administration des preuves au sensjuridique. Ses critères de
validité etles fondements de ses décisionsne sont naturellementpas les
mêmesque ceux qui s'appliqueraient devant un organe politique ou
exécutifdes Nations Unies.
Toutefois, tous ces organes, quels qu'ils soient, ont ceci en commun
qu'ilsexercentpareillementleur autoritéenvertu de laCharte et confor-
mément à ses dispositions. Il ne saurait jamais vraiment être question
d'une opposition entre un organe et un autre, mais plutôt d'une soumis-

sioncommune detous lesorganes à laCharte. L'interprétation desdispo-
sitions de la Charte est essentiellement une question de droit, et des
questions de droit de ce genre peuvent, quand les circonstances s'y
prêtent, êtreportées devantC laour pour qu'ellelestranche par une déci-
siondejustice. Lorsqu'ilenestainsi,la Cour agitentantque gardienne de
la Charte et du droit international car, sur la scène internationale, il
n'existepas d'organe plusélevé qui soitchargéde fonctionsjudiciaires et
de statuer sur des questions d'interprétation et d'application du droit
international. AncréeàlaCharte enparticulier etdansle droit internatio-
nal engénéral,la Cour connaît desquestionsjuridiques quisont légitime-
ment portées devant elle;le fait que sa décisionjudiciaire, fondéesur le
droit, puisse avoir des conséquencespolitiquesn'estpas un élément qui
doive l'empêcherde remplir sa fonction en vertu de la Charte des

Nations Unies et du Statut de la Cour.
Pour la Cour, régler lesdifférendset les autres questions qui lui sont
régulièrementsoumisesen statuant conformémentau droit international
tel qu'elle l'applique et l'interprète constitue sa fonction judiciaireet sa
raison d'être. ans sonanalysedes rapports entrelesprincipaux organes,
M.Rosenne conclut que ce qui setrouve au cŒurde cesrapports est que
«la volontéde l'organistion estmanifestéepar lesactions de cesorganes
dans lesdomaines de compétencedesquelssetrouve une question parti-
culière»(Rosenne,op. cit.p.69).Cequirelèvedelafonctionjudiciaire est
le domaine de compétencepropre de la Cour. S'ilarrive que ces consé-
quences politiques résultent d'une décisionjudiciaire, celan'est pas de
nature à la soustraire àcettesphèrede compétence.Desorte que, aussi :

((tandisque latâche de la Cour estlimitéeàexercerdesfonctions de

caractèrejuridique, son pouvoir d'action et de décisionn'estsoumis
àaucune limitation découlantdu fait que le différend quiest porté
devant ellepourrait aussi entrer dans le domaine de compétencede CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 57

quelque autre organe. Silemaintien de la paix et de la sécuritéinter-
nationales estconsidérécommela fonctionprimordialedel'organi-
sation des Nations Unies dans son ensemble (y compris la Cour),la
Charte neconfèrepas decompétenceexclusive àun organeprincipal
unique. Même lefait que le Conseil de sécurité aau premier chef la
responsabilitédu maintien delapaix etdela sécuritéinternationales
en vertu de l'article 24 de la Charte ne suffit pasui donner une
compétenceexclusive sur ces questions ...Il n'existe donc aucune
autoritéexpresse dans la Charte ou dans le Statut pour fonder la

proposition de M.Alvarezau sujet del'affairede lYAnglo-IranianOil
Co.lorsqu'il avanceque,siune affairesoumise àlaCour vientmena-
cerlapaix du monde, le Conseil de sécuritépeut s'ensaisir etmettre
finà la compétencede la Cour.»(Rosenne, op.cit.,p. 73.)

Il est intéressantde relever que cette citation développel'idéeselon
laquelle la Cour peut examiner une question qui est de la compétence
d'un autre organe même lorsque cette questionest inscrite à l'ordre du
jour de ce dernier (ibid.,note 1).
Il découlede la nature différentede ces deux organes qu'il existede
nombreuxfacteursqui relèventd'une décisionpolitiqueetdontun organe
politique peut s'occuper et s'occuperamais dont un organejudiciaire ne
peut s'occuper et ne s'occuperait pas. Il convient, dans ce contexte, de
citerla remarque de Kelsen:

«LeConseildesécurité etl'Assemblée généraled,anslamesureoù
ilssont,euxaussi,compétentspour réglerdesdifférends,ne sontque
des organes quasi judiciaires de l'organisation des Nations Unies.
Tel est le cas mêmesi l'on accepte l'interprétation selon laquelle
les recommandations faites par le Conseil de sécuritpour le règle-
ment de différendsen vertu des articles 31, 38 ou 39 sont, comme
les décisionsdu Conseil prises en vertu de l'article 25, obligatoires
pour les parties. Le Conseil de sécurité, ainsi qu'onl'a fait remar-

quer, n'est pas un organe judiciaire, car ses membres ne sont
pas indépendants. » (Hans Kelsen, TheLaw of the UnitedNations,
1950,p. 476-477.)

L'autonomiedela Cour

Dans l'affaire du Plateau continentalde la mer Egée,M. Tarazi a fait
observerce qui suit:

«Eneffet,s'ilestvraietcertain quelaCour estun organejudiciaire
indépendant ..iln'enestpas moinsvraiqu'elle faitpartie intégrante
des Nations Unies...
Celaétant,laprésenteCour,touten maintenant son indépendance
ne doit pas négliger de prendre en considération cette vérité

première, àsavoirqu'elle faitpartie intégrantede l'ONU. La Charte dont la genèsehistorique marque une étapenouvelle dans l'histoire
offredesdifférencesessentiellespar rapport aux dispositions de son
devancier, le Pacte de la SdN. Ces différences étaient dueà une

situation nouvellelaquelle ont fait face les Etats et lespeuples en
raison des suites de la seconde guerre mondiale et des développe-
ments qui l'ont précédéoeu enont précipitle déclenchement.
Il n'est pas nécessaireici de passer en revue ces différences. On
pourrait pourtant secontenterd'affirmer qu'en vertude la Charte le
Conseil de sécurité assume une responsabilité essentieen vue du
maintien de lapaix et dela sécurit. a Cour devrait collaborer,siles
circonstancesl'exigent,àcette Œuvrefondamentale. »(C.Z .Jcueil
1976,opinion individuelle, p. 33 (les italiques sont de moi), àitée
l'audience publique du 27mars 1992,CR 92/4, p. 69-70.)

Cet exposé queM. Tarazi fait du rôle de la Cour dégage clairement
certainsprincipes essentiel:

1) La Cour est un organe indépendant de l'Organisation des Nations
Uniesetdoitconserversonindépendance.
2) LaCourestun organejudiciaire.
3) LaCourfaitpartie intégrantedel'organisation desNations Unies.
4) En vertu de la Charte, le Conseil de sécurité assula responsabilité
essentielledumaintiendelapaixet delasécurité.
5) La Cour devrait collaborer avecle Conseil de sécuriàéla réalisation
decettemissionsilescirconstancesl'exigent.

Il ressort clairement de l'examen de ces principes que la Cour doàt
tout moment conserver son indépendance dans l'accomplissement des
fonctions que la Charte lui confie entant qu'organe judiciaire principal
des Nations Unies. Il est clair aussi que, dans bien des cas, le fait de
s'acquitterde cesfonctionsindépendantesconduira laCour àun résultat
qui seraenparfaite harmonie avec lesconclusionsdu Conseil de sécurité.
Mais ilne découlenullementde cespropositions que la Cour, lorsqu'elle
est régulièrementsaisie d'un différendjuridique, doive coopérer aveec
Conseil de sécuritéjusqu'au poindte cesserd'exercersonjugement indé-
pendant surlesquestions dedroitdont elleestlégitimentsaisie.M.Tarazi
avaità cŒurde prévoir cette possibilité;il a mis soigneusement l'accent

sur l'indépendancede la Cour et a nuancéla formule, la collaboration
étant souhaitable«si les circonstances l'exigent». Lejuge de la question
de savoir si les circonstances l'exigent estassurément laCour, exerçant
sonjugement entoute indépendance.
De plus, il y a lieu de relever que, s'agissantde la Cour, on ne trouve
aucune disposition du genre de l'article 12de laCharte qui stipule qu'en
ce qui concerne l'Assembléegénérale,tant que le Conseil de sécurité
remplit,à l'égardd'un différend ou d'une situation quelconque,lesfonc-
tions qui lui sont attribuéespar la Charte, l'Assembléegénérale doit
faireaucune recommandation surcedifférendou cettesituation » àmoins que le Conseil de sécurité nele lui demande. Dans le mécanismede la
Charte, la Cour internationale de Justice ne doit pas être limitde la
mêmefaçon dans son action.
Nul ne peut contesterque, lorsque le Conseil de sécurité examineune
situation ayantdesincidencesdirectessurl'affaire portéedevantla Cour,
celle-cidoit examinersisesdécisionsrisqueraient d'entrer enconflitavec
les mesuresque le Conseil de sécurita prises ou envisagede prendre et,
lorsque les circonstanceslepermettent, doit chercher renforcer l'action
du Conseil.
II en est certainement ainsi, mais l'action du Conseil de sécuritén'est

que l'une des circonstancesque la Cour doit prendre en considérationet
cela ne met nullement un point finalàla question. Puisque la Cour et le
Conseil de sécuritépeuventexercerrégulièrementleursfonctionsrespec-
tives en ce qui concerne une situation ou un différend international,
chacun doit, dans l'exercice du pouvoir qui lui est indubitablement
conféré,exercee rntoute indépendance sonjugement conformément à la
Charte. Il s'ensuit qu'iln'yaura pas toujours de totale coïncidence dans
leurappréciationd'unesituationdonnée.Spécialementlorsqueintervien-
nent desquestionsd'interprétation juridique, laCourtendra tout naturel-
,lement à protégerjalousement son indépendancedejugement, faute de
quoi ellemanquerait aux préceptesde la Charte.

Exercicecoordonné despouvoirs

Dans lepassé,ils'esteffectivementtrouvé descasoùla mêmequestion
a dû être examinéeà la fois par le Conseil de sécuriet par la Cour. On
peut mentionner les affaires suivantes, tant la compétencede la Cour
que celledu Conseildesécurité ont étéinvoquée dsansune seuleetmême
affaire Plateau continentalde la mer Egée, mesurecsonservatoires(C.Z.J.
Recueil1976,p. 3); Personneldiplomatique etconsulairedes Etats-Unis à
Téhéran, mesurecsonservatoires(C.I.J. Recueil 1979, p. 7), et Activités
militairesetparamilitairesauNicaragua etcontre celui-ci, esuresconser-
vatoires(C.ZJ.. Recueil84,p. 169).
Toutefois, dans toutes ces affaires, la Cour et le Conseil étaientsaisis
par lamême partie, celle-cicherchantobtenir decesorganesdifférentsle
remèdeapproprié à lanature etàlafonction dechacun d'eux.En d'autres
termes,la partie quilesavaitsaisischerchaàtlesutiliserdefaçoncomplé-
mentaire.

En l'espèce,la Cour etleConseilont étéapprochép sar lesdeuxparties
que le différend oppose, chacune faisant valoir des moyens correspon-
dant àsa propre position. Et c'est cette situation qui donne une impor-
tance particulièrà la présente affaire.
Il y a lieu de relever, dans la dernière des trois affaires citées, le
commentairefait par laCouren réponse àl'argumentation desEtats-Unis
selon laquelle ellene devait pas accepter de connaître de la demandedu
Nicaragua parce que la demande de mesures conservatoires était iden-
tique aux demandesque cetEtat avaitformuléesetqui avaient été rejetées CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 60

par leConseil de sécurité. a Cour afaitobserverque lefaitqu'une ques-

tionsoitsoumiseau Conseildesécurité nedoitpas empêcherlaCour d'en
connaître, les deux procédures pouvant êtremenéesparallèlement(Acti-
vitésmilitaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, C.I.J.
Recueil1984,p.433,par. 93).
Dans l'affaire relativeau PersonneldiplomatiqueetconsulairedesEtats-
Unis à Téhéran l, Cour a notéque :

ailne sembleêtrevenu à l'esprit d'aucun membredu Conseil qu'ily
eût ou pût y avoir rien d'irrégulier dansl'exercicesimultanépar la
Cour et par le Conseil de sécuritde leurs fonctions respectives.Le
fait n'est d'ailleurs pas surprenant. (C.I.J. Recueil 1980, p. 21,
par. 40.)

Le rôle de la Cour a été défindie façon plus claire encore lorsque la
Cour a observé :
«Alors que l'article 12 de la Charte interdit expressément à
l'Assembléegénéralede faire une recommandation au sujet d'un

différend oud'une situation à l'égard desquelsle Conseil remplit
sesfonctions,ni la Charte ni leStatutn'apportent derestrictionsem-
blableà l'exercicedes fonctions de la Cour. Les raisons en sont évi-
dentes: c'està la Cour, organe judiciaire principal des Nations
Unies,qu'ilappartientde résoudretoute questionjuridique pouvant
opposer des partiesà un différend;et la résolutionde ces questions
juridiques par la Cour peut jouer un rôle important et parfois
déterminantdansle règlementpacifique du différend. » (Ibid.,p. 22,
par. 40; voir aussi Activitésmilitairesetparamilitaires au Nicaragua
etcontrecelui-ci,C.I.J.Recueil1984,p. 433-434,par. 93.)

Lespouvoirs du Conseildesécurité

Ce qui nous est dit des pouvoirs que le Conseil de sécurité aexercés
lorsqu'il aadoptéla résolution731(1992)appelle un bref examen de ces
pouvoirs d'un point devue strictementjuridique.
La plénitude des pouvoirsque la Charte des Nations Unies confère

au Conseil de sécurité couvre des secteurs d'action internationale très
divers.
Envertudel'article24,leConseilalaresponsabilitéprincipaledu main-
tien delapaix etdela sécuritéinternationaleetilestmandatépar tous les
EtatsMembrespour agirenleurnom àcetégard.Auxtermesdel'article25,
tous les Membresconviennentd'accepter et d'appliquer sesdécisions.
Le chapitre VIconfie au Conseil des pouvoirs et des responsabilitésà
l'égarddu règlement des différends,et le chapitre VI1 lui donne des
pouvoirstrèsparticuliers dèslorsqu'ilconstatel'existenced'une menace
contrelapaix,d'une rupture delapaix oud'un acted'agression. Unetelle
constatation relèveentièrementde son appréciation.

Pourinterprétercesdispositions,ilfauttenircompte enmême temps del'article 103dela Charte,qui dispose qu'encasde conflitentre lesobliga-
tions des Membresdes Nations Unies en vertu de la Charte et leurs obli-
gations en vertu de tout autre accord international lespremièresprévau-
dront.Puisquelesdécisionsdu Conseildesécurité doiventêtreacceptée est
appliquéespartouslesEtatsMembres,l'article103confèreauxobligations
ainsi crééelsa priorité surles obligationsdécoulant de tout autreaccord.
Tout celareprésentevraimentun pouvoir énormeetledroit internatio-

nal, tel qu'il estincorporé dans laCharte, oblige tous les Etats recon-
naître ce pouvoir età agir conformément aux directivesqui en émanent.
Est-ceà dire que le Conseil de sécuritexerce ses diversesattributions
sansaucune limitation,oubien est-iltenu d'agirdansun cadrecirconscrit
par un ensemblede normes ou de principes ?
L'article24lui-mêmesignaleimmédiatemenlt'existenced'untel cadre
lorsqu'ildispose,danssonparagraphe 2,que,dans l'accomplissementdes
obligationsqueluiimpose leparagraphe 1 du mêmearticle,leConseilde
sécurité«agit conformément aux butset principes des Nations Unies ».
L'obligation est impérativeet les limites sont clairement marquées.Le
préambule de la Charte souligne notamment que les peuples des

Nations Unies sont résolusà créer les conditions nécessairesau respect
des obligations néesdes traitéset autres sources du droit international.
Il est dàtl'article 1,paragraphe 1,de la Charte que l'un des buts des
Nations Unies estde
((réaliser,par des moyens pacifiques, conformément aux principes
delajustice etdu droitinternational,l'ajustement ou lerèglementde

différends oude situations, de caractère international, susceptibles
de mener à unerupture de la paix».

Les travauxpréparatoires

Laréalité etl'importance de ceslimitesressortent destravaux prépara-
toires de la Charte. Ceux-ci montrent que les préoccupations évoquées
ci-dessusfiguraientbienparmi lesconsidérationsquiontabouti à l'adop-
tion, sous leur forme actuelle, des articles qui confèrent ses pouvoirs au
Conseil de sécurité.
Lors de la conférencedes NationsUnies sur l'organisation internatio-

nale (San Francisco),au comité2 de la commissionIII, qui examinait les
projets de dispositions de la Charte concernant le Conseil de sécuritél,e
19 mai 1945,la Belgique - anticipant, en quelque sorte, le problème
mêmequi estsoulevémaintenantpar l'argumentde la Libyeselonlequel
larésolution73 1(1992)du Conseildesécurité porte atteintà descompo-
santes essentiellesde la souveraineté- a présentéun projet d'amende-
ment.
Pour citer leprocès-verbalde la commission :

«Le délégué de la Belgiquedéclareque si,commecelaparaît être
le cas, le droit pour le Conseil de sécuritéde ((recommander)) im-
plique la possibilité qu'un Membrede l'organisation soit obligé CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 62

d'abandonner un droitgarantipositivementpar ledroitinternational
comme étant un droit essentiel d'Etat indépendant, la délégation
belgeinsistepour présentersonamendementaucomité.Lebut decet
amendement estd'accorder àun Etat qui estpartià un différend,et

qui estime qu'une recommandation du Conseil de sécuritéporte
atteinteàsesdroits essentiels,ledroit deréclamerun avisconsultatif
de la Cour internationale de Justice sur ce point: si la Cour estime
que ces droits sont violésou menacés,le Conseil de sécurité sera
invitéà examiner la questionà nouveau ou àsoumettre le différend
pour décisionà l'Assembléegénérale. Cet amendementn'a, en
aucune façon, pour but de restreindre les pouvoirs légitimesdu
Conseil de sécurité.
11serait, cependant, opportun de renforcer la base juridique des
décisionsdu Conseil de sécurité.» (Documentsde la conférence des
Nations Uniessur l'organisationinternationale,San Francisco, 1945,
vol.XII, p. 52-53.)

Ledélégué de l'Union des Républiques socialistessoviétiques, pposé
àcet amendement, a déclaré :«Il ne devrait exister dans l'esprit des délé-
guésaucundoutesur lesintentions du Conseil de sécurité de neporter en
aucune façon atteinte aux droits d'un Etat souverain. (Ibid.,p. 53.)En
outre :

«Le déléguédes Etats-Unis soulignel'importance de la prescrip-
tion en vertu de laquelle l'action du Conseil de sécuri, n cas de
différend constituantune menacepour lapaix, aura lieu«en confor-
mitéavec les buts et principes de l'organisation)).se reporte au
paragraphe 1du chapitre 1modifiépar lesgouvernementsinvitants,
quistipule que l'undesbuts del'organisation estde réaliserlerègle-
ment des différendspar des moyens pacifiques «en tenant dûment
comptedesprincipes de lajustice et du droit international(doc.2,
G/29, p. 1).Il n'interprète pas,pour sapart, lespropositions comme
empêchantun Etat quelconque defaireappelentout temps àlaCour
internationale de Justice pour toute question qui pourrait normale-
ment être soumise àcettedernière. Dansl'ensemble, ilne pense pas
qu'ily ait intéràtaccepter l'amendement belge, notamment parce

qu'il estconvaincuqueleConseildesécurité esttenu d'agir conformé-
ment aux principes de lajustice et du droit international. » (Ibid.)
Ledélégué de la France, tout en considérant avecbeaucoup de sympa-
thie les idées contenues dans l'amendementbelge, a exprimé des doutes
sur sonefficacitéetaditque lesous-comitéderédaction«devrait s'effor-
cer d'introduire dans le texte les garanties les plus complètes que le
Conseil de sécurité accomplira sa tâche conformémena tu droit et la
justice»(ibid.,p. 54).
Le délégué de la Colombie a appuyé chaleureusement l'amendement

belge.
Le 22 mai 1945,le délégué du Royaume-Uni a déclaré qu'à son avis
l'adoption de l'amendement belge nuirait aux chances de succès de CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY6)3

l'organisation.Il a fait valoir que la procédure proposéepar l'amende-
ment entraînerait un retard dans des circonstances où la promptitude
d'action du Conseil de sécurité était extrêmement souhaitabl(e Docu-
mentsde la conférence des Nations Uniessur l'organisation internationale,

San Francisco, 1945,vol.XII, p. 68).
Le délégué de l'Afrique du Sud a soutenu le même pointde vue, en
soulignantl'importance del'actedefoiqu'accomplissaientlespetitsEtats
en acceptant le paragraphe 4 (ibid.,p. 69). Le délégude la République
socialiste soviétiquede Biélorussiea lui aussi combattu l'amendement
belge (ibid.).
Ledélégué delaBelgiquea demandéalorsune réponseplusprécise àla
question qu'ilavait déjà posée,àsavoir si leterme «recommander», au
chapitre VIII, section A, du projet (correspondant au chapitre1de la
Charte des Nations Unies), comportait des obligations pour des Etats
partiesà un litigeou s'ilsignifiaitseulement que le Conseiloffrait un avis
pouvant ou non êtreaccepté (ibid.).
Le délégué des Etats-Uniss'est déclaré d'accord avec celuidu
Royaume-Uni et a préciséqu'il avait voulu montrer clairement que la

section A n'envisageait aucune mesure de contrainte ou de sanction
(ibid.).
Ledélégué de la Belgiquea déclaréalorsque,puisqu'il étaitclairement
entendu qu'une recommandation faitepar leConseilsous la sectionA du
chapitre VI11n'entraînait aucun effet obligatoire, il acceptait de retirer
l'amendement de son pays. Le Présidenta acceptéceretrait (ibid.).

Un débatanalogue a eu lieu en mêmetemps au seind'un autre comité
de la commission III (le comité qui s'occupait de l'organisationet de la
procédure).Le24mai 1945,ledélégué dela Norvègeadéclaré cequisuit:

«Le Conseil de sécurité a étiénvesti de pouvoirs énormes etles
propositions deDumbarton Oaksont fixépeude limites àleurexer-
cice. Leschapitres sur lesbuts et lesprincipes ne contiennent pas de
telles règles, l'exception du principe de l'égalitésouveraine des
Etats.l[ledélégué dela Norvège]estimequ'on devraitformulerune
règlefondamentale de conduite qui servirait de frein au Conseil de
sécuritéedtegarantiecontrelapratique par celui-cid'une((politique
de compensation)). Quels que soient les sacrifices que le Conseil de
sécurité pourraitexiger d'une nation, ilse devraient pas êtrede
nature àdiminuer la confiance de cette nation dans son avenir.))
(Documents de la conférencedes Nations Unies sur l'organisation
internationale,San Francisco, 1945,vol.XI, p. 385.)

Je cite leprocès-verba:
«Le représentant du Royaume-Uni s'oppose à l'amendement
norvégien;il fait remarquer que son but est déjà atteintpar lesprin-
cipes amendésdu chapitre 1,qui stipulent que l'organisation doit
«réaliserpardesmoyenspacifiques et en tenantcomptedesprincipes

delajustice etdudroitinternational,l'ajustementou lerèglement..D, CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY6)4

etc.A son avis, l'amendement norvégien nefournit pas un moyen
désirablede réglerla question; il estimeen effetinopportun de limi-
ter l'actiondu Conseil,ainsiqu'on lepropose enfait,lorsque celui-ci
agit contre une nation violant le droit.»(Documentsde la conférence
des Nations Uniessur l'organisation internationale,an Francisco,
1945,vol.XI, p. 385).

L'amendementnorvégiena été rejetéau motifque desrevisionsappor-
tées enmêmetemps aux chapitres liminaires de la Charte feraient réfé-
rence à des normes telles que le droit international et la justice.
(Ruth B.Russell,A Histolyof the UnitedNationsCharter:TheRole ofthe
UnitedStates 1940-1945,1958,p. 665.)
Cesdébats rappellent utilementdans quelsenslespouvoirs du Conseil
ont été compriset acceptés lors de la rédaction de la Charte des
Nations Unies. Lespouvoirs du Conseilsont subordonnés aux articles 1

et 2 et en particulier aux garanties de conformité avecledroit internatio-
nal qui setrouvent dans cesarticles.
Ilimporte deconsidéreraussilagenèsedel'article 1,quidéfinitlesbuts
et lesprincipes des Nations Unies.
Les propositions de Dumbarton Oaks énonçaientces buts dans les
termessuivants :

«1. Maintenir la paix et la sécurité internationalesàecette fin
prendre desmesures collectivesefficacesenvuede préveniretélimi-
ner les dangers qui menacent la paix, réprimerles actes d'agression
ou autres atteintes portéeàla paix, et préparer ouréaliserpar des
moyens pacifiques le règlement des différends internationaux qui
risquent d'entraîner la rupture de la paix.
2. Développerles relations amicalesentre les nations et prendre
toutes autres mesurespropresà consoliderla paix du monde.
3. Réaliserune coopération internationale envuede résoudreles
problèmeshumanitairesinternationaux telsque ceuxd'ordre écono-
mique et social.
4. Coordonner et centraliser les efforts des nations en vue de

parvenirà cesfins communes.»(Ibid.,p. 1019.)
Onremarquera quelesmots conformémentauxprincipesdelajustice
et du droitinternational »quifigurent dans la Charte ne setrouvaientpas
dans ces propositions. Si ce membre de phrase a étéajoutéau projet de
Dumbarton Oaks ce fut, en grande partie, pour apaiser les craintes qui

avaient été expriméea su sujet des énormes pouvoirs dont jouirait le
Conseil de sécurité.Comme RuthRusselll'adit dans son traitésur l'his-
toire de la Charte:
((Cependant, àcommencerpar lesChinois à Dumbarton Oaks,de
nombreuses délégationsseplaignirent de ceque lespropositions ne
semblaient,àcet égard, faire aucune place aux normesde lajustice

ou du droit international.San Francisco, par conséquent, confor-
mément à l'accord intervenuàDumbarton Oaks, les quatre grands ont adoptéofficiellementl'amendement chinois tendant àpréciser
que le règlementpacifique des différends devait être réalisé «en
prenant dûment en considérationles principes de la justice et du
droit international.Op.cit.,p. 656.)

La genèsede la Charte des Nations Unies confirme donc que la pléni-
tude despouvoirs du Conseildesécuritéaétéclairementlimité paer lefait
que ces pouvoirs doivent êtreexercésconformémentaux principes bien
établisdu droitinternational. Il estvraique cettelimitationdoitêtreinter-
prétée defaçonrestrictiveetnevaut quepour lesprincipes etobjectifsqui
figurent au chapitre1de la Charte :
«LeSecrétairegénéraldesNations Unies d,ansune déclarationdu

10janvier 1947,a rappelé ce principe en ces termes: «les seules
restrictions sont lesprincipes et lesbuts fondamentaux qui figurent
au chapitre le'de la Charte. » (Cot et Pellet, La Charte des Nations
Unies, éd.,1991,p. 462-463.)
La restriction n'enexistepas moins et elleconstitue un principe de droit
importantpour l'interprétationde la Charte des Nations Unies.

Il faut tenir compte de cettenette limitation pour interpréterI'obliga-
tion qui s'imposeà la Cour, entant que l'un des organes principaux des
Nations Unies, de((coopérer àla réalisationdesfinsdel'organisation et
des'efforcerdedonner effetauxdécisionsdesautres organesprincipaux,
et de ne pas produire de résultats qui les rendraient inopérantes))
(1.S.Rosenne, TheLawand PracticeoftheIntemational Court,p. 70).

LeschapitresVIet VI1dela Charte
A lalumièredecesobservationsrelatives àlanaturede toute résolution
adoptéepar leConseildesécurité autitre du chapitre VI,ilestclairqu'une

telle résolutionn'impose pas d'obligation contraignante. Les fonctions
exercéespar leConseildesécurité autitredu chapitre VIontfaitl'objetde
la remarque suivante de sirGerald Fitzmaurice :
«dans le cadre de ce chapitre, ces fonctions n'ont pas de caractère
coercitif.Correctementinterprétéese,llesn'autorisent probablement

pas le Conseilàfaireplus que des recommandationsenvue du règle-
ment d'un différend quelconque. »(Fitzmaurice, «The Foundations
ofthe Authority of International Lawand the Problems of Enforce-
ment», Modem LawReview,1958,vol. 19,p. 5; les italiques sont de
moi.)

Cette conclusion découle à la fois des travaux préparatoires de la
Charte,du texte même de celle-cietdu libellédela résolution. Parconsé-
quent, lefait que leConseil de sécuriaitadoptéla résolution731(1992)
n'empêchait pas la Cour d'examiner la requête qui lui était adressée.

De surcroît,quellesqu'aient pu êtrelesmesures prévuespar la résolu-
tion, il fallait,envertu de l'article24,paragraphe 2,de la Charte, qu'elles CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971 (OP. DISSWEERAMANTRY6)6

fussent conformes au droit international. Il n'appartientàpcette Cour
deréformerune résolutiondu Conseildesécuritém , aisilestdela compé-
tencedelaCour, etc'estmêmesafonction essentielle,de statuersurtoute
questiondont elleestrégulièremens taisieconformémentaudroitinterna-
tional. Par conséquent,la Cour devra dire quel est le droit qui est appli-

cable en l'espèce et elle n'apas'écarter decette voie par l'effetd'une
résolutionadoptée envertudu chapitre VI.
Cependant, dès lors que l'on entre dans le champ d'application du
chapitreVII, leschosessontbiendifférentes,carlorsqu'ils'agitdeconsta-
ter l'existenced'une menace contre la paix, d'une rupture de la paix ou
d'un acted'agression,leConseiljouit d'une totale liberté d'appréciation.
Il semble que c'estle Conseil, et lui seul,qui estjuge de l'existenced'un
état dechoses qui entraîne la mise en application du chapitre VII. Cette
décisionest prise par-le. Conseil de sécurité en faisant intervenir son
propre jugement etdans l'exercicedu pouvoirtotalementdiscrétionnaire
qui lui est conférpar l'article39.Une foisque le Conseil s'estprononcé
sur cepoint,laporte estouverteaux diversesdécisionsqu'ilpeut prendre
envertu de ce chapitre.
Ainsi,une questionquifait l'objetd'unedécisionvalabledu Conseilde

sécurité en vertudu chapitre VI1n'estpas,prima facie, de celles dont la
Cour puisse valablementconnaître.

Lu résolution731(1992)

Dans sa résolution731(1992),le Conseil de sécurité se déclargerave-
ment préoccupé par leterrorismeinternational et les agissementsillicites
dirigéscontre l'aviationcivileinternationale. réaffirmesesrésolutions
antérieuresdemandantàtous les Etats de coopérerpour empêchertoute
ingérencedans lesliaisonsaériennescivilesettouslesactesdeterrorisme;
etilrappelle qu'ilacondamnéladestructionduvolPan Am103etqueson
présidenta appelétousles Etats àapporter leur aide afin que lesrespon-
sablesde cet acte criminelsoientarrêtésejtugés.
Danscetterésolution,leConseildéplorevivementlefaitque leGouver-
nementlibyenn'aitpasrépondueffectivementauxdemandes,antérieure-

mentprésentées par lesGouvernements dela France,du Royaume-Uni et
des Etats-Unis, de coopérerpleinementpour l'établissementdes respon-
sabilitésdans les actes terroristes concernant les vols 103de la Pan
et772del'UTA.Ildemandeinstammentauxautorités libyennesd'appor-
ter immédiatementune réponse complèteet effective àces demandes,et
décidede restersaisi de la question.
La résolution ne contient aucune décisionadresséeà d'autres parties,
maisseulementladécision derestersaiside la question ».Ellen'indique
pas davantage,par sestermes, commeiladvient d'habitudedans lesréso-
lutionsadoptéesenvertu du chapitreVII, qu'elleait étéadoptée envertu
du chapitre VII.Il doit donc être clairquela résolution731(1992),celle
que la Cour avaitàprendre en considérationau moment des plaidoiries,
ne faisait nullement obstacleà l'examen, par la Cour, des questions CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971 (OP. DISSWEERAMANTRY) 67

portées devantelle. Les observations et exhortations de la résolution ne
présentaientpasun caractèreobligatoireen droit.

La résolution748(1992)
Il est clair, en revanche, que la résolution748(1992)a éadoptée en
vertu du chapitreVI1etelleledéclareentermesexprès.Ala différencede

la résolution731(1992),ellecontient une sériede décisionsadressées au
Gouvernement libyen et àtous les Etats.
L'article 25 de la Charte, aux termes duquel tous les Membres de
l'organisation conviennent d'accepter et d'appliquer toutes les décisions
du Conseil de sécuritéconformément à la Charte, impose àtous lesEtats
l'obligationjuridiquement contraignante de se conformer aux décisions
du Conseil de sécurité. L'articl25 est renforcépar l'article 103,si bien
quemême encasdeconflitaveclesobligationsissuesdetout autreaccord,
les obligationsen vertu de l'article25prévaudront.
Sansprendreparti defaçon définitivesurcettequestion au stadeactuel,
celuidesmesuresconservatoires,j'estimequelarésolution748(1992)doit
être considérée comme obligatoirp eour la Libye, comme pour tous les
pays,envertu del'article25delaCharte desNations Uniesetque,d'après
l'article 103,lesobligationsqu'elle définit doiventprévalsur cellesqui

découlentdetout autre accordinternational. Plusprécisément,cela signi-
fie quela Libyeestprimafacieliéepar lesdispositions de cetterésolution,
même si ellesentrent en conflitavec lesdroitsqu'elle invoqueenvertu de
la convention de Montréal.Acetégardj,e suisd'accord avecleraisonne-
ment de la majoritéde la Cour.
Cependant, je le dirai avec respect, il n'en résulte pas nécessairement
quelecaractèreobligatoiredelarésolution748(1992)rende inappropriée
uneindicationdemesuresconservatoiresparlaCour.J'arrive àcetteconclu-
sion àl'issued'un examenattentif de toutes lesdispositions de la résolu-
tion 748(1992). Lapossibilité subsisteapparemmentpour la Cour,tout en
respectantpleinementlarésolution748(1992)danssonintégralitéd ,edéfi-
nirpropriomotuune mesureappropriéequi nesoitaucunement en conflit
aveclarésolution748(1992)ou avecl'article25oul'article103delaCharte.
Il ressort de l'analyse de la résolution748 (1992)que le Conseil s'y

déclaregravementpréoccupé de ceque leGouvernementlibyen n'aitpas
encore donnéuneréponse complèteeteffectiveauxdemandes dela réso-
lution 731(1992)etqu'ellecontientd'énergiquescondamnationsduterro-
rismeinternational. Danscetterésolution,leConseilconstate,envertu de
l'article39delaCharte,l'existenced'une menacecontrelapaix etlasécu-
rité internationaleset décidede prendre certaines mesures en vertu de
l'article41delaCharte. Ala date du 15avril 1992,touslesEtats sonttenus
d'adopter certaines mesures indiquéesdans la résolution. Ces mesures
incluentdessanctionsdiplomatiques etd'autres sanctionsdediverstypes
en matièrede trafic aérien et d'armements. Toutesces mesures sont au
nombre de cellesprévuespar l'article41,qui traite des mesures n'impli-
quant pas l'emploide la force, et le Conseil n'estpas allé au-delàde cet
article. CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISSWEERAMANTRY6)8

La conventiondeMontréal

L'article 14,paragraphe 1,de la convention de Montréalest rédigéen
termes impératifset exige que tout différend concernantl'interprétation

ou l'applicationdelaconventionsoitsoumis àl'arbitrage conformément à
sesdispositions.L'article,on lerelève,nementionne pasque l'interpréta-
tion, mais la dépasseet pénètredans le domaine de la manièredont le
traitéest ou devraitêtre appliqué.
La convention de Montréal faitpartie d'une réaction internationale
concertée devantle problèmedu terrorisme, qui revêt,depuis quelques
dizainesd'années, l'importance d'un problème internationad le premier
plan. Plusieursconventionsdistinctesexprimentlaréponseréfléchie dela
communauté internationale au terrorisme international et plusieurs
d'entreellesincluent desdispositionssemblables àcellesde l'article 14,y
compris la facultéde saisirla Cour internationale en dernier ressort.
Il afalluenvirontrente annéesd'efforts internationauxpour assembler

l'édificedecetteréactioninternationale,sionremonte àla convention de
Tokyo de 1963relativeaux infractionssurvenant àbord des aéronefs.La
plupart de ces conventions ont été ratifiésar plus de cent Etats. Selon
l'étudedel'UNITAR, TheUnitedNationsand theMaintenanceofInterna-
tionalPeace and Security,1987(voir p. 418),à l'époque oùcelle-cia été
rédigéec,enttrente-deux Etatsétaientpartiesà la conventionrelativeaux
infractions età certains autres actes survenant à bord des aéronefs
(convention de Tokyo de 1969);centvingt-septEtats étaient partiesà la
conventionpour larépressiondelacaptureillicited'aéronefs (convention
de La Haye de 1971);etcentvingt-huitEtats étaient partiesà la conven-
tion pour la répressiond'actes illicitesdirigéscontrela sécude l'avia-

tion civile(convention de Montréalde 1973).
Parmilesconventionsquicomprennent une clauseprévoyantlafaculté
desaisirla Cour lorsqueledifférendentrelesparties ne peut êtrréglépar
voie de négociation,on peut citer la convention de 1963relative aux
infractions età certains autres actes survenant à bord des aéronefs
(convention de Tokyo),article 24; la convention de 1971pour la répres-
siondelacapture illicited'aéronefs (conventiondeLaHaye),article 12;la
convention de 1973sur la prévention et la répression des infractions
contre lespersonnesjouissant d'uneprotection internationale, y compris
lesagentsdiplomatiques(convention deNewYork),article 13 ;laconven-
tion internationale de 1979contre la prise d'otages,article 16.

En réalité,ce systèmeremonte, dans la pratique internationale, au
temps de la Société desNations: alors, la convention de 1937pour la
préventionetlarépressiondu terrorismeprévoyait àsonarticle 20queles
différends relatifs l'interprétation oà l'application de la convention
qui ne pourraient être résoluspar la voie diplomatique seraient portés
devant la Cour permanente de Justice internationale (voir Richard B.
Lillich, Transnational Terrorism: Conventionsand Commentary, 1982,
p. 175).
De très nombreuxprécédents internationaux invitentdonc àtraiter decesinfractions dans le cadred'un systèmemultilatéralordonnéde négo-
ciations et,en définitive,de règlementjudiciaire.
LaCour, en saqualitéd'organejudiciaire quiapplique ledroitinterna-

tional, ne saurait manquer de relever, à ce stade de son examen, que la
résolution73 1(1992)du Conseil de sécuriténe mentionne pasla conven-
tion de Montréal, nile systèmeconventionnel multilatéral édifié pour
s'opposerau terrorisme international.
Un autre aspect de la convention de Montréalest qu'elle neporte pas
atteinte au principe de droit international coutumier aut dedereaut judi-
care.Toutefois, chaque Etat contractant, s'iln'extrade pas l'auteur pré-
sumé d'une infraction, a l'obligation rigoureusede soumettre l'affaire à
ses autorités compétentespour l'exercicede l'action pénale (art.7). Le
principe aut dedereautjudicareestun aspectimportant delasouveraineté
de 1'Etatsur sesressortissants etle caractèrebien établide ceprincipe en

droit international coutumierressort clairement de l'exposé suivant :
L'emploi trèsrépandude la formule (poursuivre ou extrader »,
qu'ellefigure expressémentdans le texte, qu'elle soit expriméepar
l'obligation d'extrader, ou qu'elle soit sous-entendue dans l'obli-
gation d'exercer des poursuites ou de qualifier l'acte d'infraction,

ainsi que le nombre des signataires de ces nombreuses conventions
attestent de l'existence de ce principe généraldu jus cogens.~
(M. Cherif Bassiouni, International Extradition :UnitedStates Law
and Practice,1987,p. 22.)
De même qu'elle ne mentionne pas la convention de Montréal,la réso-
lution 731(1992)netient pas davantagecompte de ceprincipe bien établi

du droit international.

Conclusion

Cette affaire très difficile, qui résulted'un incident si révoltantpour
la communauté mondiale etqui fait l'objet d'une condamnation si uni-
verselle, doit êtreabordéesous des points de vue aussi nombreux que
possible.
M. Lachs, dans l'affaire de la Mer Egée,a commenté ences termes la
complémentaritéde toutes les instances auxquelles les Etats peuvent
recourir:

«Le caractère souvent inhabituel des problèmes que doivent
affronter les Etats de nosjours obligeàutiliserleplus d'instruments
età se réserver leplus de voiespossible pour résoudre les questions
complexes et souvent multidimensionnelles qui se posent. D (C.I.J.
Recueil1978,opinion individuelle, p. 52.)

Dans cecontexte,ilainsistésur lerôledelaCouren tant qu'institutionau
servicedu règlementpacifique des différends.En l'espèce,un appel a été
adressé à la Cour pour qu'elle exerce ses fonctions dans le cadre d'en-
semble du systèmedes Nations Unies, afin d'ouvrir une autre voie de CONVENTION DE MONTRB DEL1971 (OP. DISS. WEERAMANTRY) 70

règlement.M. Lachs a mis le doigt sur l'un des rôles principaux que
peut jouer la Cour lorsqu'ila déclar: Ainsipeut-on espérer empêcher
un différenddes'aggraveretdedégénére ernconflit.C.I.J.Recueil1978,
p. 52.)
On discerne dans ce passage le rôle que la Courpeut jouer en l'occur-
rence. Elle est saisie d'un différend,elle estima facie compétente,il
s'instaureune situationd'escaladedetensions etl'une desparties sollicite
sesbons officesafin depréserverlesdroitsqu'elle invoquejusqu'à ceque
la Courait statuéà leur sujet de façon définitive.

La Cour ne se mettra pas dans une situation de conflit avec le Conseil
de sécurité lorsque cet organe a déjexercé sespouvoirs d'une manière
qui impose des obligationsà tous les Membresde l'organisation des Na-
tions Unies. Toutefois, dans les domaines auxquels ne s'appliquent pas
les décisions obligatoires prisespar le Conseil en vertu du chapitre VII,
la Cour est libre d'user de son influence et de son autorité pour servir
les fins de la paix internationale, dont elle sepréoccupeautant quetout
autre organe des Nations Unies. Promouvoir la paix et la sauvegarder,
ce n'est pas là la réserve exclusived'un seul organe, mais le but com-
mun de tous. La Cour a le pouvoir de rendre une ordonnance proprio
motu etn'estpas obligéede s'entenir auxtermesdans lesquelsl'auteur de
la demande a exercéson recours. Rien n'empêche laCour de tenter
d'atteindrecebut commundelapaixenprenant desmesuresqui,selonles

termes de M. Lachs,laissent espérer empêcheu rn différendde s'aggra-
ver etde dégénéreren conflit».
Unjuge illustreafait observerjadisque lesloisnegardent pas lesilence
au milieu du fracas des armes.A notre époque, nous avons aussibesoin
d'affirmerquelesloisnesontpas privéesdu pouvoird'empêcher lefracas
des armes. Tout l'édificedu droit de l'organisation des Nations Unies
s'appuie sur la notion de la paix et de la prévention des conflits.S'ily a
lieu, si le risque d'un conflit menace des droits contestés devant elle,la
Cour n'estpas privéedu pouvoir d'indiquer des mesures conservatoires
pour sauvegardercesdroitsen empêchantl'escalade du différendetpeut-
êtrele recours à la force. Cela relèverait entièrementde sa mission et
s'accorderait en totalité avecles buts et principes de l'organisation des
Nations Unies et du droit international. Particulièrement en périodesde
tensions, alors que les signaux de danger lancent partout des éclairs,la
Cour, semble-t-il,devraitréagirde façon positiveen prenant lesmesures

qui relèventde sacompétence.SilaCour acompétencepour protégerdes
droits qui font l'objet d'une action en suspe-s et cela esà mon avis
indubitable - une ordonnance interdisant de porter atteinte àces droits
par un conflitdoitaussi releverde sacompétence.Sil'on veutque ledroit
international sedéveloppeetservelacausedelapaixcommeilestcenséle
faire, la Cour ne peut se dérober devantune telle responsabilitéquand
l'occasionde l'assumerseprésente.
J'indiqueraisproprio motu des mesures conservatoires à l'égarddes
deux Parties pour empêcherl'aggravation ou l'extensiondu différendqui
pourrait résulterde l'emploide la force par l'uneou l'autre d'entreelles.De telles mesuresn'entreraient en conflit avecaucune décisionadoptée
par leConseilde sécuritéenvertu du chapitre VII,niavecaucune obliga-
tion issue de l'article, ni avec le principe qui sous-tend l'article 103.
Ainsi,la voie qui mèneau règlementpacifique du différend pouvait-elle
être sauvegardéeavant que les Parties ne setrouvent sur des chemins où
elles seront engagées sans retour. Une telle décision seraitfondée sur
l'article41 du Statut de la Cour, ainsi que sur les articles 73,74 et 75du
Règlement.

(Signé Christopher Gregory WEERAMANTRY.

Bilingual Content

DISSENTING OPINION OF JUDGE WEERAMANTRY

This application for provisional measures was, as required by
Article 74 (1) of theRules of Court, given priority over al1other cases
pending before the Court. The oral submissions were concluded on
28 March 1992. Three days later, when the case was at the stage of deli-
berations, resolution 748 (1992) was adopted by the Security Council.
Resolution 748 (1992)covered matters of importance which were sub

judicebefore the Courtand the impact ofthat resolution uponthe matters
before the Court is among the legal questions discussed in this opinion.
Without determiningdefinitively the legaleffect ofthat resolution, the
validity of which is disputed by Libya, we must at the present stage of
provisional measures act upon the basis of its validity. Article 25 of the
United Nations Charter, requiring Members of the United Nations to
accept and carry out decisions of the Council, must then be regarded as
prima facieapplicable to that resolution. In reaching these conclusions, 1
agreewiththe viewsofthe majority ofthe Court but 1respectfullydissent
fromtheviewthatthat resolution renders itinappropriateforthe Court to
issue provisional measures. The reasons for this view are set out in this
dissentingopinion. It deals with important questions oflawcanvassedat
somelengthbefore us which are of a significancereaching so far beyond
the immediate case as, in my opinion, to merit some extended examina-
tion.

Two matters argued at some lengthbefore us, to which 1shall confine
my observations, are the question of jurisdiction and the relationship
betweenthis Courtand the SecurityCouncil.Themain assertions offact

and thebasiccontentions ofthe Partiesaresufficientlysetoutinthe Order
ofthe Courtand 1need not recapitulate them here.

Article 14 (1) of the Montreal Convention is the foundation of the
Court's jurisdictionto entertain thisapplication. It stipulates a six-month
period from thedate of request for arbitration withinwhich if parties are
unable to agree on the organization of the arbitration, any one of them
may refera dispute to the International Court.

The Respondents have contended that the pre-conditions to the juris-
diction ofthis Court have not been satisfied inasmuch asthere isno "dis- OPINION DISSIDENTE DE M. WEERAMANTRY

[Traduction]

Commelerequiert l'article 74,paragraphe 1,du Règlementde la Cour,
priorité a étédonnée à la présentedemande en indication de mesures
conservatoiressurtoutes lesautresaffairespendantes. Lesplaidoiries ont
été achevéesle 28mars 1992.Troisjours plus tard, alors que l'affaire en
étaitau stade des délibérationsl,e Conseil de sécuria adoptéla résolu-
tion 748(1992).La résolution748(1992)portait sur des questionsimpor-
tantes alors en suspens devant la Cour et l'incidence de cette résolution
sur les questions dont la Cour est saisiecompte parmi les points de droit
discutésdans la présente opinion.
Sansdéterminerde façon catégorique quelest l'effetjuridique de cette

résolution,dont la Libyecontestelavalidité,nous devons,au stade actuel
delaprocédure, quiatrait à l'indicationdemesuresconservatoires,partir
du principe qu'elle estvalable. L'article 25 de la Charte des Nations
Unies, qui oblige les Membres de l'organisation àaccepter et appliquer
les décisionsdu Conseil, doit donc être considéré p,rima facie, comme
applicable à cette résolution. En arrivantà de telles conclusions, je
m'associeauxopinions delamajoritédelaCour mais,avectout lerespect
queje dois à celle-ci,je ne peux souscriàel'opinion que cetterésolution
rend inappropriée l'indication de mesures conservatoires. Les raisons
d'envisagerainsi l'affaire sont exposéesdans la présente opinion dissi-
dente. Elle traite d'importantes questions de droit qui ont été débattues
assezen détail devantnous et dont laportéedépassel'affaire en causeau
point de semblermériterun examenquelque peu développé.
Je limiterai mes observations à deux questions qui ont fait l'objet

d'argumentations assez longues devant nous, celle de la compétence et
celle des rapports entre la Cour et le Conseil de sécur. esfaits essen-
tiels et les principales thèses des Parties sont exposésassez clairement
dans l'ordonnance de la Cour pour queje n'aiepas à lesrépéterici.

L'article14,paragraphe 1,delaconventiondeMontréalestlabase dela
compétencequ'ala Cour de connaître dela requête. Il stipule un délaide
sixmoisàcompterdelademande d'arbitragependant lequel,silesparties
ne parviennent pas à semettre d'accord sur l'organisationde l'arbitrage,
l'une quelconqued'entreellespeut soumettreundifférend à laCourinter-
nationale.
Lesdéfendeurs ont soutenu quelesconditionspréalablesde la compé-

tence dela Cour n'ontpas été rempliesf,aisantvaloir qu'il n'existepasdepute" withinthemeaning ofArticle 14(1)and that, inanyevent,the stipu-
lated six-month period has not elapsed.
At the present stage ofproceedings it isinappropriate to givea narrow
or restrictivemeaning to the word "dispute". 1am satisfied prima facie
that there is a substantial dispute between the Parties, for Libya relieson
the ruleofcustomaryinternational law,aut dedereautjudicare, asthe gov-
erningprinciple whichentitlesittotryitsowncitizensinthe absenceofan
extradition treaty, while the Respondent demands the surrender of the
two suspects. Libya declares that it will tg them and has invited the
Respondent to send its officials and lawyersto observethe trial, arguing

thatit isthus satisfyingits obligations under the Treaty.The Respondent
demands that the suspectsbe tried in its own courts. Libya contends that
itsdomesticlawforbidsthesurrender ofitscitizensfortrial elsewhereand
that the Respondent's demand is an infringement of its sovereignty.The
Respondent denies that this is a valid excuse for not surrendering them.
Al1of this in my view amounts prima facie at any rate to a dispute, thus
satisfyingone ofthe prerequisites ofArticle 14(1).

The Respondent's further contention,which is a more substantial one,
is that the letter in which Libya first mentioned arbitration was dated
18January and thiscasewasinstituted on3March,wellbefore sixmonths
had elapsed. It contends therefore that an essential prerequisite to the
invocationofthe Court'sjurisdiction hasnotbeensatisfied.Thismaywell
be a correctstatement ofthe legalposition.

Atthe sametime,there isanother viewthat isplausible and iscertainly
arguable. That is,that where a party has in anticipation indicated that it
willnot consider itselfbound by mediation or negotiation, the insistence
by that party on a waiting period specified as a prerequisite before the
matter is taken to the International Court could defeat the purposes of
such aprovision. Material has beenplaced before us to the effectthatthe
United Kingdom had stated to the SecurityCouncil :

"The letter dated 18January concerning a request for arbitration
under Article 14of the Montreal Convention is not relevant to the
issue before the Council. The Council is not, in the words of Ar-
ticle 14of the Montreal Convention, dealing witha dispute between
two or more Contracting Parties concerning the interpretation or
application ofthe Montreal Convention." (WPV.3033,p. 104.)

There was also the circumstance that, instead of seeking arbitration
under the Montreal Convention, the BritishGovernment,along withthat
of the United States,issued a statement on 27 November 1991declaring
thatthe Government of Libya must surrender al1those charged with the
crime.
The question of lawbefore us is this:if,in a hypothetical case,a party
refusesnegotiation, cansuchparty insistonthe six-monthperiod ofdelay«différend»au sensdel'article 14,paragraphe 1,etque,detoutemanière,
le délaide six moisstipulén'estpas expiré.
A ce stadede la procédure,il ne convientpas d'attribuer un sensétroit
ou restrictif au terme «différend». Il me semble établi,à première vue,
qu'il existeun différendsubstantielentrelesParties,carla Libyesefonde
surlarèglededroitinternational coutumier aut dedereautjudicarecomme
étantle principe directeur qui l'habiliteàjuger ses propres citoyens en
l'absencedetraitéd'extradition,tandis queledéfendeurréclame laremise

des deux suspects. La Libye déclarequ'elle lesjugera et elle a invité le
défendeuràenvoyer des représentants et des hommesde loi observerle
procès, arguantqu'elles'acquitte ainsides obligationsdont elle esttenue
envertu du traité.Ledéfendeurexigequelessuspectssoientjugésdevant
sespropres tribunaux. LaLibyefaitvaloirque sondroitinterne luiinterdit
delivrer sescitoyenspour qu'ilssoientjugésailleurset que laréclamation
du défendeurconstitueun empiétementsursasouveraineté.Ledéfendeur
nie qu'ily aitlà une excusevalable pour ne pas livrer lesintéressés.Tout
celamesembleconstituerun différendtoutaumoinsprimafacie,etdonc à
satisfaireà l'une des conditions préalablesde l'article 14,paragraphe 1.
L'autre allégationdu défendeur, qui a plusde poids, est que la lettre
dans laquellela Libyeamentionné l'arbitragepour lapremièrefoisporte
la date du 18janvier et que la présente instance a étéintroduite l3 ars,
bien avant que sixmois ne se fussent écoulés. Il soutient donc que l'une

desconditionspréalables essentiellespour demander àla Cour d'exercer
sa compétencen'a pas été remplieT . ellepeut effectivementêtre la situa-
tion en droit.
Il y a pourtant une autre façon de voir qui est plausible et assurément
défendable.C'est que, quand une partie a indiqué d'avance qu'elle ne
s'estimera pas tenue par la médiationou la négociation et insistepour
faire respecter une période d'attenteà titre de condition préalablepour
porter l'affaire devantla Cour internationale, elle risque de déjouer les
buts d'une telleclause.Il ressort du dossier qui nous a étéprésentéue le
Royaume-Unia déclaréau Conseil de sécurité :

La lettre en date du 18janvier concernant une demande d'arbi-
trage au titre de l'article 14de la convention de Montréaln'estpas
pertinente dans le cas dont est saisi leConseil. Le Conseil n'estpas,
selon les termes de l'article 14de la convention de Montréal, saisi
d'un différend entre deux parties contractantesou plus concernant
l'interprétationou l'application de la convention de Montréal.»
(WPV.3033,p. 104.)

Il y a eu aussi le fait qu'au lieude rechercher un arbitrage conformé-
ment à la convention de Montréal,le Gouvernement britannique, avec
celuides Etats-Unis,a publié le27novembre 1991une déclaration selon
laquelle le Gouvernement libyen devait livrertoutes les personnes accu-
séesdu crime.
La question de droit dont nous sommes saisis estla suivante :si, dans
une affairehypothétique,l'une despartiesrefusedenégocier,cettemêmebefore the matter isbrought to this Court? Such insistence can wellbe a
roadblock in the path of a party seeking relieffrom this Court. The pro-
vision can then be construed to mean that a party is free to use other
methods than conciliation during thissix-monthperiod. Sucha construc-
tion could well be a negation of the purposes and principles of such a
provision, as was cogently stated by Judge Ago in his separate opinion
in the PreliminaryObjectionsphase of the case concerning Militaryand
Paramilitaty Activitiesinandagainst Nicaragua :

"1am in fact convinced that prior resort to diplomatic negotiations
cannot constitute an absolute requirement,to be satisfiedevenwhen
the hopelessness of expecting any negotiations to succeed is clear
from the state of relations between the parties, and thereis no war-
rant for using it as a ground for delaying the opening of arbitral or
judicial proceedings when provision for recourse to them exists."
(I.C.J. Reports1984,pp. 515-516,para. 4.)

Thegeneralprinciple set outinthat passage canbeevenmorepointedly
formulated in the context of a specified waiting period such as is stipu-
lated in the Montreal Convention. It can be plausiblyargued that there is
no purpose in allowing aparty who has repudiated conciliation to argue
forthe rejection ofan application ongrounds ofitsnon-compliance with
procedures whichithasitselfrejected.Aperiod offreedomfrom concilia-
tory and judicial processeswould thus be givento theparty repudiating,
leavingitat liberty topursue other non-conciliatoryprocedures, while its

opponent is required to stand by without help orremedy.

Sucha construction ofthe Articlefitsalsowithintheories ofinterpreta-
tion which emphasizethat treaty provisions mustbe sointerpreted as not
to render nugatorytheir object and purpose. One cannot without further
consideration conclude whether one or the other view should prevail.
Theyboth have much to be said for them and we are in a situation where
we can only saythat the viewthat the six-monthperiod in Article 14(1)
does not constitute an absolute prohibition is at least an arguable one.

Therecitalsinthe Court'sOrder inthe NuclearTestscasesalsobearout
thisprovisional approach tojurisdiction :

"13. Whereas on a request for provisional measures the Court
need not,before indicatingthem,finally satisfyitselfthat ithas juris-
diction on the merits of the case, and yet ought not to indicate such
measures unless the provisions invoked by the Applicant appear, CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971 (OP. DISS. WEERAMANTRY) 52

partie peut-elle insister pour subordonner à l'écoulementdu délaide
sixmoisla facultédeporter l'affaire devant laCour? Unetelleinsistance
nemanquerait pas de dresserun obstaclesurlavoied'unepartiequi cher-
cherait àobtenir satisfactiondevant la Cour. La disposition dont il s'agit
peut êtrealorsinterprétée ecnesensquetoute partiea lafacultéderecou-
rirà d'autres procéduresque la conciliation pendant ce délaide sixmois.
Interpréter ainsiune telle disposition risquerait fort d'allerencontre
desbuts et principes qui l'inspirent, comme M. Ago l'adéclaréde façon
convaincante dans son opinion individuelle lors de la phase des excep-

tions préliminairesen l'affaire desActivités militaires etparamilitaireasu
Nicaragua etcontrecelui-ci:
«je suisconvaincu quelerecourspréalable à desnégociationsdiplo-

matiques ne peut pas constituer une exigence absolue à remplir,
même lorsqu'ilestévidentque l'état desrelationsentre lesparties est
tel qu'il estillusoire de s'attendrece que de telles négociations
aboutissent àun résultatpositif et qu'il serait injustifiéde retarder
par cebiaisl'ouverture d'une procédure arbitraleoujudiciairequand
la possibilitédu recours celle-cia étéprévu» e(C.I.J. Recueil1984,
p. 515-516,par. 4).

Le principe général énoncé dancse passage peut être formulé plus
nettementencoredanslecasd'un délaid'attente spécifié,telquceeluiqui
est stipulé dans la conventionde Montréal. L'onpeut raisonnablement
soutenir qu'il neserà rien depermettre àunepartiequia refuséla conci-
liation d'invoquer,pour demander lerejetd'une requête,l'inexécutiod ne
procédures qu'elle a elle-mêmerejetées.L'on mettrait ainsi celle-ci,
pendantun certaintemps, à l'abridetouteprocéduredeconciliationetde

toute procédure judiciaire en la laissant libre de poursuivre d'autres
procéduresnon conciliatoires,tandisque lapartie adverseresterait tenue
d'attendre, sans assistanceni recours.
Une telle lecture de l'article s'accorde aussi avecles principes d'inter-
prétation quisoulignentquelesdispositions d'untraité doiventêtreinter-
prétéesde manière à ne pas priver d'effetson objet et son but. Sans un
examenplus approfondi, on ne saurait conclurequel'un ou l'autrede ces
points de vue doit l'emporter. Ila beaucoup àdire en faveur de l'un et
de l'autre et, dans la situation actuelle, nous pouvons seulement retenir
que le point de vue selon lequel le délaide six mois de l'article 14,para-
graphe 1,ne constitue pas une interdiction absolue est au moins défen-
dable.

Lesconsidérantsdel'ordonnance delaCourdans lesaffairesdes Essais
nucléairesrenforcentaussicetteattitude provisoire àl'égardde la compé-
tence :

«13. Considérant que, lorsqu'elleest saisie d'une demande en
indication de mesures conservatoires,la Cour n'a pas besoin, avant
d'indiquer ces mesures, de s'assurer de façon concluante de sa
compétencequant au fond de l'affaire,mais qu'elle nedoit cepen- prima facie,to afford a basis on which thejurisdiction ofthe Court
mightbe founded;

.............................

17. Whereas the material submitted to the Court leads it to the
conclusion, at the present stage of the proceedings, that the provi-
sionsinvoked bythe Applicant appear,prima facie,to afford a basis
on which the jurisdiction of the Court might be founded; and
whereas the Court will accordinglyproceed to examine the Appli-
cant'srequest forthe indication of interim measures of protection;"
(Z.C.J.Reports1973,pp. 101, 102).

Applyingthis reasoning, 1would hold that the circumstancesinvoked
bythe Applicant appear,prima facie,to afford a basis on whichthe juris-
diction ofthe Court mightbe founded.
If,afterthe issueofuchprovisionalmeasures,it appears atalaterstage
oratthe stageofconsideration ofthe meritsthatthe Court hasno jurisdic-
tion, then the provisional measures would immediately cease to have
effect.
Granted this conclusion in regard to the Court's jurisdiction under
Article 14ofthe Montreal Convention,thenextmajorquestion iswhether
SecurityCouncil resolutions 731(1992)and 748(1992)present obstacles
to the Court's consideration of this matter. This question receives atten-
tion in the next section ofthis opinion.

B. THECOURT AND THE SECURITC YOUNCIL

Relevanceto theMattersbefore theCourt

This case has raised as perhaps no case has done in the past, certain
questions of importance and interest concerningthe respectivefunctions
of this Court and the Security Council. These matters arose squarely
beforethe Court atthe stageoforalsubmissionsinconsequence ofresolu-
tion 731(1992).Thisrelationshiphasassumed evenmoreimportance sub-
sequent to the close of the oral argument, with the adoption of resolu-
tion 748(1992).
Issues relativeto the relationship between the Court and the Security
Council werespecificallyraised by both Partiesbefore us.

CounselforLibya,ProfessorSuy,urgedthat resolution731(1992)"flies

in the face of the whole of the procedure for the peaceful settlement of
disputesprovided for in the Montreal Convention" and hence that Libya
was entitled to submit to the International Court the legal aspects of the
question which wereneglected by the SecurityCouncil (PublicSitting of
26 March 1992(morning), CR 92/2, p. 61). He argued further that the
right ofLibyato exerciseitscriminaljurisdiction overits ownsubjectsisa dant pas indiquer de telles mesures si lesdispositions invoquéespar
le demandeur ne se présentent pascomme constituant,prima facie,
une base sur laquellela compétencede la Cour pourrait êtrefondée;
.............................
17. Considérantque les éléments soumis à la Cour l'amènent à
conclure, au stade actuel de la procédure,que les dispositionsinvo-

quéespar le demandeur se présentent comme constituant, prima
facie, une base sur laquelle la compétencede la Cour pourrait être
fondée; et qu'en conséquence laCour se propose d'examiner la
demande en indication de mesures conservatoiresprésentéepar le
demandeur »(C.I.J. Recueil1973,p. 101et 102).

Appliquantle même raisonnement,je dirais quelescirconstancesinvo-
quéespar ledemandeur seprésententcomme constituant,prima facie,une
base sur laquellela compétencede la Cour pourrait êtrefondée.
Au cas où il apparaîtrait, après la question de ces mesures conserva-
toires, lors d'une phase ultérieure oude la procéduresur le fond, que la
Cour n'estpas compétente,lesmesuresconservatoirescesseraient immé-
diatement de produire effet.
Une fois admisecetteconclusion en ce qui concerne la compétencede
la Cour envertu del'article 14dela conventionde Montréal,laprincipale
questionquiseposeensuite est celledesavoirsilesrésolutions731(1992)
et 748(1992)du Conseil de sécurité font obstacleà l'examende l'affaire
par la Cour. Cette question est examinéedans la section suivante de la
présente opinion.

Lapertinencedesquestionsportéesdevantla Cour

Plus peut-être qu'aucune autredans le passé,la présente affaire a
soulevécertainesquestions quine manquent ni d'importance ni d'intérêt
à propos des fonctions respectives de la Cour et du Conseil de sécurité.
Ces questions se sont posées sans ambagesdevant la Cour, lors des plai-
doiries orales, dans le contexte de la résolution731 (1992).La relation
entre cesdeux organesa revêtuplus d'importance encoreaprèsla clôture
des audiences,avecl'adoption de la résolution748(1992).
Lesdeux Parties qui comparaissent devant nous ont soulevéexpressé-
ment des questions relatives aux rapports entre la Cour et le Conseil de
sécurité.
LeconseildelaLibye,M.Suy,aditavecinsistance quelarésolution731
(1992) «fait fi de toute la procédure des règlementsjuridiques et paci-
fiques des différends prévuedans la convention de Montréal» et que la
Libye est donc fondéeà soumettre à la Cour internationale les aspects

juridiques de la question que le Conseil de sécuriténégligés(audience
publique du 26mars 1992(matin),CR92/2, p.61).Ilasoutenu encore que
le droit de la Libye d'exercer sa compétence en matière pénalesur sesfundamental right derivedfromthe sovereigntyofthe State,a right which
cannotbe derogatedfrom.
Counsel for the United Kingdom stated, as one of the United King-
dom'sthreeprincipal contentions, that :

"Libya's Applicati~n, while purporting to enjoin action by the
United Kingdom against Libya,isin factdirectedat interfering with
the exercisebythe SecurityCouncil of itsfunctions and prerogatives
under the United Nations Charter" (PublicSitting of26March 1992
(afternoon), CR 92/3, p. 10).

The United Kingdom stressed that, though the jurisdictions of Security
Council and the International Court are parallel, matters of political
appreciationare forthe SecurityCouncil alone (ibid.,p. 72).
Here, unequivocally presented to the Court, was an invitation to
addressthe issueoftherelationshipbetweenCourtand Councilinthe con-
text of resolution 731(1992).Resolution 748(1992),be it noted, was not
beforethe Court at the stage of argumentbut later assumed even greater
importance than resolution 731(1992).

Inconsideringanapplicationforprovisionalmeasures inthe contextof
resolution 731(1992)and inthe context ofthe argumentsaddressed to us,
the Court was under the necessity of considering the legal issue of the
impact, if any,upon the Court's jurisdiction ofthe action of the Security

Council in adopting resolution 731 (1992).Similar considerations now
apply to resolution 748 (1992).

The relationship between the Security Council and the Court, thus
firmly embedded within the legal arguments addressed to the Court,
requires somepreliminaryconsideration, inthemanner appropriate to an
application forprovisional relief. Definitivefindings on these important
matters are not necessary at the stage of provisional measures and, of
course,arenot attempted here. What issoughtrather isto outlinethe gen-
eralcontours of the problem sothat the application forprovisional mea-
surescanbe seenagainstthe legalbackgroundprovided bythe Charter of
the United Nations.Theanalysisin the ensuingsubheads of discussionis
essentialas being directlyrelevanttothe applicationforprovisional mea-
sures which is now beforethe Court and to the objections raised thereto
on thebasis of the organizationalstructure of the United Nations.

It seemsal1the more important to setthem down having regard tothe
fact thatthese considerations have never before in the jurisprudence of
the Court arisen inthisdirect and immediatewayand havingregardtothe
advantagetheCourt has had of apresentationbefore it on these issuesby
teams of extremelyeminent and experiencedinternational lawyers.
The Court as a judicial body seised of an application for provisional
measures was moreover the appropriate forum for examiningthe legal
impactonitsdeterminations, ofSecurityCouncilresolution 73 1(1992).It CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 54

propres ressortissants estun droit fondamental issude la souverainetéde
l'Etat,un droit qui ne souffrepas de dérogation.
Leconseildu Royaume-Uniadéclaréc ,equiconstituaitl'une desprin-
cipalesallégationsdu Royaume-Uni,que :

«la requête libyenne, bien qu'elle prétende interdiau Royaume-
Unideprendre des mesurescontrela Libye,tenden réalité às'ingérer
dans l'exercice,par le Conseil de sécurité, des fonctions et préroga-
tives qu'iltient de laCharte des Nations Uniesaudiencepublique
du 26mars 1992(après-midi),CR 92/3, p. 10).

Le Royaume-Unia soulignéque,même si les compétencesdu Conseil de
sécuritéetdelaCourinternationale sontparallèles,lesquestionsd'appré-
ciationpolitique relèventdu seulConseil de sécurit(ibid.,p. 72).
Ilyavait làune invitation,présentéesanséquivoqu elaCour, à exami-
ner laquestiondes rapports entrela Cour etleConseil de sécuritdans le
contexte de la résolution731 (1992). Il convient de noter que la Cour
n'avait pas devant ellela résolution748 (1992)lors des plaidoiries, mais
celle-ci a revêtupar la suite encore plus d'importance que la résolu-
tion 731(1992).
Pour apprécierune demande en indication de mesures conservatoires
dans le contexte de la résolution731(1992)et des argumentsdéveloppés
devantnous,la Cour devaitnécessairementexaminerla question de droit
consistantà savoir quelle était,le cas échéant, l'incidesur sa compé-
tence de ladécisionprisepar leConseilde sécuritédans sarésolution731

(1992).Des considérationssemblabless'appliquent maintenant à la réso-
lution 748 (1992).
Les rapports entre le Conseil de sécuritéet la Cour, ainsi fermement
enracinésdans les exposésjuridiques présentés à la Cour, appellent un
certain examen préliminaire,de la manièrequi convient à une demande
demesuresconservatoires.Iln'estpasnécessairede statuerde façon défi-
nitive sur cesquestions importantes au stade des mesuresconservatoires
et,àl'évidenceo, nnetente pas icidelefaire.Ils'agitplutôt d'esquisserles
contoursgénéraux du problèmeafin dereplacerlademande enindication
de mesuresconservatoiresdans la perspective du régimejuridique établi
par la Charte des Nations Unies. L'analyse présentée sous les intitulés
suivantsdela discussionestessentielle,car elleestdirectementenrapport
avecla demande enindication demesuresconservatoiresdont laCour est
maintenant saisieetaveclesmoyensinvoquésensenscontraire surlabase

de la structure organisationnelledes Nations Unies.
11n'ensemblequeplus important de formuler de tellesconsidérations
étantdonnéqu'ellesn'ont jamais eujusqu'iciune actualitéaussidirecteet
immédiatedans lajurisprudence dela Cour etquelaCour aeul'avantage
d'entendre présentercesquestionspar deséquipesdespécialistesdu droit
international très éminentset expérimentés.
De plus, la Cour, entant qu'organe judiciaire saisid'une demande en
indication de mesures conservatoires, était l'instanceappropriée pour
examinerl'incidencejuridique de la résolution731(1992)du Conseil de55 1971 MONTREALCONVENTION (DISSO.P.WEERAMANTRY)

was contended, on the one hand, that the fact of the Security Council
being seised of the matter prevented the Court from granting the relief
sought,while,ontheother hand,that resolutionwasimpugnedas neglect-
ingcertain legalconsiderations whichthe SecurityCouncil was allegedly
bound to consider. These werepre-eminentlyquestions of lawwhich the
Court wasbound to examineasaprerequisite to considering whetherpro-
visionalmeasureswereto be issued.

General Observations

Created by the same Charter to fulfil in common the Purposes and
Principles of the United Nations,the SecurityCouncil and the Court are
complementaryto eachother,eachperformingthe special role allottedto

it by their commoninstrument of creation. Both owe loyalty alike to the
same instrument which provides their authority and prescribes their
goals.Aswith the greatbranches of government within a domesticjuris-
diction suchasthe executiveand thejudiciary,theyperformtheir mission
forthe commonbenefit of the greater systemof which they are a part.
In the United Nations system,the sphere ofeach ofthese bodies islaid
downinthe Charter,as withina domesticjurisdiction itmaybelaiddown
in a constitution. However, unlike in many domestic systems where the
judicial arm may sit in reviewoverthe actions of the executiveam, sub-
jecting those acts to the test of legality under the Constitution, in the
United Nations system the International Court of Justice is not vested
with the reviewor appellatejurisdiction often givento the highest courts
within a domesticframework (see AdvisoryOpinion ofthe International
Court in LegalConsequences for States oftheContinuedPresenceofSouth
Africa inNamibia (South WestAfrica) notwithstanding Security Council

Resolution276(1970),Z.C.J.Reports1971,p. 16).Atthe sametime,itisthe
principaljudicial organ ofthe UnitedNations,charged withthetask, inter
alia,ofdecidingin accordance withinternational law such disputesasare
submittedto it (Art.38 ofthe Statute ofthe Court).

An important difference must also be noted between the division of
powers in municipal systemsand the distribution of powers between the
principal organs ofthe United Nations,forthere isnot amongthe United
Nations organizations the same strict principle of separation of powers
one sometimesfinds in municipal systems.Asthis Court observed in the
case concerning the Militaïy and Paramilitary Activitiesin and against
Nicaragua, municipal law concepts of separation of powers "are not
applicable to the relationsamonginternational institutionsforthe settle-
ment of disputes" (I.C.J. Reports 1984,p. 433,para. 92). Nor is there a

hierarchicalarrangement of the organs of the United Nations (Rosenne,
TheLaw and Practiceof the International Court of Justice,2nd rev. ed.,
p. 70),and eachprincipal organ ispar interpares (ibid.,p.1).sécuritésur ses décisions. On soutenait d'unepart que le fait que le
Conseil de sécurité était saisdie la question empêchait laCour de faire
droità cettedemande,tandis que,d'autrepart,larésolutionétaitcritiquée
pour ne pas tenir compte de certaines considérations d'ordre juridique
que le Conseil de sécurité était censémenttenu d'envisager. C'étaientlà
par excellence des questions de droit que la Cour devait immanquable-
mentanalyseravant derechercher s'ilfallaitindiquer desmesuresconser-
vatoires.

Observationsgénérales

Créép sar lamême Chartepour remplirencommun lesbuts etprincipes
des Nations Unies, le Conseil de sécuritéet la Cour sont complémen-
taires, et chacun remplitle rôle particulier qui lui est assignépar l'instru-
ment commun qui leur a donnénaissance. Tous deux doivent la même
loyautéau mêmeinstrument qui est source de leurspouvoirs et qui pres-
crit leurs buts. Comme les branches de 1'Etaten droit interne, telles que
l'exécutif etljeudiciaire, ilsremplissentleur missionpour lebiencommun
du systèmeplus vastedont ilsfont partie.
Dans lesystèmedesNations Unies,lasphèredecompétencedechacun
de cesorganesestdéfiniepar la Charte,tout commedans l'ordre national
elle peut être définiepar la constitution. Toutefois,à la différencede
nombreux systèmesnationaux dans lesquelslejudiciaire peut exercer un
contrôle sur lesactes de l'exécutifen soumettant cesactes aux critèresde
la légalitéconstitutionnelle, ans le systèmedes Nations Unies, la Cour
internationale de Justice n'est pas investie du pouvoir de contrôle ou

d'appel souventdévoluauxjuridictionslesplusélevéea suseind'un cadre
national (voirl'avisconsultatifrendu par la Courinternationale deJustice
dans l'affaire des Conséquencesjuridiquep sour les Etats de la présence
continuedel'AfriqueduSudenNamibie (Sud-Ouestafricain)nonobstan lt
résolution276(1970)du ConseildesécuritéC ,.I.J.Recueil1971,p. 16).En
mêmetemps, la Cour est l'organe judiciaire principal des Nations Unies
ayant pour tâche, entre autres, de régler,conformémentau droit interna-
tional, les différendsqui lui sont soumis(articledu Statut de la Cour).
Ilyalieuderemarqueraussi une différenceimportante entrelepartage
des pouvoirs dans les systèmesnationaux et la répartition des pouvoirs
entre les organes principaux des Nations Unies, puisqu'il n'existe pas,
entre lesorganismesetinstitutionsdesNations Unies, lemême rigoureux
principe deséparation despouvoirsqueceluiquel'on trouveparfoisdans
les systèmesnationaux. Comme la Cour l'a remarquédans l'affaire des

Activités militaireet paramilitairesau Nicaragua etcontre celui-ci,les
notions internes de séparation des pouvoirs «ne s'appliquent pas aux
relations entre institutions internationales chargées de réglerdes diffé-
rends» (C.I.J.Recueil1984,p. 433, par. 92). Il n'existepas non plus de
structuration hiérarchique des organes des Nations Unies (Rosenne, fie
Law and Practiceof theInternational CourtofJustice,2eéd.rev., p. 70),
chaque organeprincipal étantpar interpares(ibid.,p. 71).56 1971 MONTREALCONVENTION (DISS O.P. WEERAMANTRY)

As a judicial organ, it will be the Court's duty from time to time to
examine and determinefrom a strictly legalpoint of viewmatters which
mayatthe sametimebethe subject ofdeterminationfrom an executiveor
politicalpoint of viewby another principal organ ofthe United Nations.
The Court by virtue of its nature and constitution applies to the matter

before it the concepts,the criteria and the methodology of the judicial
process which other organs of the United Nations are naturally not
obliged to do. The concepts it uses arejuridical concepts,its criteria are
standards of legality,itsmethod isthat of legalproof. Its tests of validity
and the bases of itsdecisions are naturally notthesame asthey wouldbe
beforeapolitical or executiveorgan ofthe United Nations.

Yet thismuch they have in common - that al1organs alike exercise
theirauthority under and interms oftheCharter. Therecan nevertmly be
a question of opposition of one organ to another but rather a common
subjection of al1organstothe Charter. Theinterpretation of Charter pro-
visions is primarily a matter of law, and such questions of law may in
appropriate circumstances comebeforethe Court forjudicial determina-
tion. Whenthis does occur,the Court actsasguardian ofthe Charter and

ofinternational lawfor,inthe international arena,there isno higherbody
chargedwithjudicialfunctions and withthedetermination ofquestionsof
interpretation and application of international law. Anchored to the
Charter in particular and to international law in general,the Court con-
siderssuchlegalmattersasareproperlybroughtbefore itand thefactthat
itsjudicial decisionbased upon the lawmayhave politicalconsequences
is not a factor that woulddeflect it from discharging its duties under the
Charter ofthe United Nations and the Statute ofthe Court.

The judicial function in resolving disputes and other matters duly
referred to it and in deciding in accordance with international law as
applied and interpreted by the Court is the Court's function and very
raisond'êtreD . r. Rosenne'sanalysisofthe relationship between the prin-

cipal organs concludes that what lies at the heart of their relationship is
that "the will of the Organization is made manifest by the actions of
those organs within whose sphere of competence a particular matter
lies" (Rosenne, op. cit., p. 69). What pertains to the judicial function
is the proper sphere of competence of the Court. The circumstance that
political results flow from a judicial decision is not one that takes it
out ofthat sphere of competence.So also :

"whilethe Court's taskislimitedto functions of a legalcharacter, its
power ofactionand decisionissubjecttono limitationderivingfrom
thefactthat thedisputebefore itmightalsobewithinthe competence
of some other organ. If the maintenance of international peace and CONVENTION DEMONTRÉALDE 1971 (OP. DISS. WEERAMANTRY) 56

En tant qu'organe judiciaire, la Cour a périodiquement pour tâche
d'examineretdejuger sousl'angle strictementjuridique desquestionsqui
peuvent en même temps fairel'objet d'unedécisionde caractèreexécutif

ou politique émanantd'un autre organeprincipal des Nations Unies. La
Cour, de par sa nature et sa constitution, applique au cas dont elle est
saisie lesnotions, les critères et les méthodesde la procédure judiciaire,
que les autres organes des Nations Unies ne sont naturellement pas
obligés d'appliquer.Les notions qu'elle utilise sont des notions juridi-
ques,lecritèrequ'elleapplique estceluidelalégalité,estesméthodessont
celles de l'administration des preuves au sensjuridique. Ses critères de
validité etles fondements de ses décisionsne sont naturellementpas les
mêmesque ceux qui s'appliqueraient devant un organe politique ou
exécutifdes Nations Unies.
Toutefois, tous ces organes, quels qu'ils soient, ont ceci en commun
qu'ilsexercentpareillementleur autoritéenvertu de laCharte et confor-
mément à ses dispositions. Il ne saurait jamais vraiment être question
d'une opposition entre un organe et un autre, mais plutôt d'une soumis-

sioncommune detous lesorganes à laCharte. L'interprétation desdispo-
sitions de la Charte est essentiellement une question de droit, et des
questions de droit de ce genre peuvent, quand les circonstances s'y
prêtent, êtreportées devantC laour pour qu'ellelestranche par une déci-
siondejustice. Lorsqu'ilenestainsi,la Cour agitentantque gardienne de
la Charte et du droit international car, sur la scène internationale, il
n'existepas d'organe plusélevé qui soitchargéde fonctionsjudiciaires et
de statuer sur des questions d'interprétation et d'application du droit
international. AncréeàlaCharte enparticulier etdansle droit internatio-
nal engénéral,la Cour connaît desquestionsjuridiques quisont légitime-
ment portées devant elle;le fait que sa décisionjudiciaire, fondéesur le
droit, puisse avoir des conséquencespolitiquesn'estpas un élément qui
doive l'empêcherde remplir sa fonction en vertu de la Charte des

Nations Unies et du Statut de la Cour.
Pour la Cour, régler lesdifférendset les autres questions qui lui sont
régulièrementsoumisesen statuant conformémentau droit international
tel qu'elle l'applique et l'interprète constitue sa fonction judiciaireet sa
raison d'être. ans sonanalysedes rapports entrelesprincipaux organes,
M.Rosenne conclut que ce qui setrouve au cŒurde cesrapports est que
«la volontéde l'organistion estmanifestéepar lesactions de cesorganes
dans lesdomaines de compétencedesquelssetrouve une question parti-
culière»(Rosenne,op. cit.p.69).Cequirelèvedelafonctionjudiciaire est
le domaine de compétencepropre de la Cour. S'ilarrive que ces consé-
quences politiques résultent d'une décisionjudiciaire, celan'est pas de
nature à la soustraire àcettesphèrede compétence.Desorte que, aussi :

((tandisque latâche de la Cour estlimitéeàexercerdesfonctions de

caractèrejuridique, son pouvoir d'action et de décisionn'estsoumis
àaucune limitation découlantdu fait que le différend quiest porté
devant ellepourrait aussi entrer dans le domaine de compétencede57 1971 MONTREALCONVENTION (DISS O.P.WEERAMANTRY)

securitybe regarded as the major function ofthe United Nations as
a whole (including the Court), the Charter confers no exclusive
competence upon any one principal organ. Even the fact that the
SecurityCouncil has primary responsibility for the maintenance of
international peace and security under Article 24 of the Charter is
not sufficientto giveit exclusivecompetenceover these matters. ...
There isthus no expressauthorityintheCharter or inthe Statute for
the proposition advanced by Judge Alvarezin the Anglo-Iranian Oil
Co.case to the effect that, if a case submitted to the Court should
constitute a threat to world peace, the Security Council may seise
itselfofthe caseand thereby put an end to the Court's jurisdiction."
(Rosenne, op.cit.,p. 73.)

Itisinterestingto notethat thiscitation extendsthe proposition thatthe
Court may consideramatterwithinthecompetenceofanother organeven

to the casewherea matterisonthe agenda ofanother organ (ibid.,note 1).

It follows from the different nature of the two organs that there are
many factors relevant to a politicaldecision which a political organ can
and would take notice of, but which a judicial organ cannot and would
not. It isappositein this context to cite Kelsen'sobservation:

"The SecurityCouncil and theGeneral Assembly,in sofarasthey,
too, arecompetentto settledisputes,are onlyquasi-judicialorgansof
the United Nations. This istrue evenifthe interpretation isaccepted
that recommendations made by the Security Council for the settle-
ment of disputes under Articles 31,38 or 39 are, as decisions of the
Councilinaccordance withArticle 25,binding uponthe parties.The
SecurityCouncil, as pointed out, is not ajudicial organ because its
membersare not independent." (Hans Kelsen, TheLawofthe United
Nations, 1950,pp. 476-477.)

TheCourt'sAutonomy

In the Aegean Sea ContinentalShelfcase, Judge Taraziobserved :

"For it is true and certain that the Court is an independent and
judicial organ ...it is no less true that it is an integral part of the
United Nations ...
That being so, the present Court, while maintaining its indepeu-
dence, should not fail to take into consideration this basic truth,
namelythat it isan integralpart ofthe United Nations. The Charter, CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 57

quelque autre organe. Silemaintien de la paix et de la sécuritéinter-
nationales estconsidérécommela fonctionprimordialedel'organi-
sation des Nations Unies dans son ensemble (y compris la Cour),la
Charte neconfèrepas decompétenceexclusive àun organeprincipal
unique. Même lefait que le Conseil de sécurité aau premier chef la
responsabilitédu maintien delapaix etdela sécuritéinternationales
en vertu de l'article 24 de la Charte ne suffit pasui donner une
compétenceexclusive sur ces questions ...Il n'existe donc aucune
autoritéexpresse dans la Charte ou dans le Statut pour fonder la

proposition de M.Alvarezau sujet del'affairede lYAnglo-IranianOil
Co.lorsqu'il avanceque,siune affairesoumise àlaCour vientmena-
cerlapaix du monde, le Conseil de sécuritépeut s'ensaisir etmettre
finà la compétencede la Cour.»(Rosenne, op.cit.,p. 73.)

Il est intéressantde relever que cette citation développel'idéeselon
laquelle la Cour peut examiner une question qui est de la compétence
d'un autre organe même lorsque cette questionest inscrite à l'ordre du
jour de ce dernier (ibid.,note 1).
Il découlede la nature différentede ces deux organes qu'il existede
nombreuxfacteursqui relèventd'une décisionpolitiqueetdontun organe
politique peut s'occuper et s'occuperamais dont un organejudiciaire ne
peut s'occuper et ne s'occuperait pas. Il convient, dans ce contexte, de
citerla remarque de Kelsen:

«LeConseildesécurité etl'Assemblée généraled,anslamesureoù
ilssont,euxaussi,compétentspour réglerdesdifférends,ne sontque
des organes quasi judiciaires de l'organisation des Nations Unies.
Tel est le cas mêmesi l'on accepte l'interprétation selon laquelle
les recommandations faites par le Conseil de sécuritpour le règle-
ment de différendsen vertu des articles 31, 38 ou 39 sont, comme
les décisionsdu Conseil prises en vertu de l'article 25, obligatoires
pour les parties. Le Conseil de sécurité, ainsi qu'onl'a fait remar-

quer, n'est pas un organe judiciaire, car ses membres ne sont
pas indépendants. » (Hans Kelsen, TheLaw of the UnitedNations,
1950,p. 476-477.)

L'autonomiedela Cour

Dans l'affaire du Plateau continentalde la mer Egée,M. Tarazi a fait
observerce qui suit:

«Eneffet,s'ilestvraietcertain quelaCour estun organejudiciaire
indépendant ..iln'enestpas moinsvraiqu'elle faitpartie intégrante
des Nations Unies...
Celaétant,laprésenteCour,touten maintenant son indépendance
ne doit pas négliger de prendre en considération cette vérité

première, àsavoirqu'elle faitpartie intégrantede l'ONU. La Charte 58 1971 MONTREAL CONVENTION (DISS O.P.WEERAMANTRY)

whose genesismarked a new stagein the course of history,features
some essential differences in comparison with the provisions of its
predecessor, the Covenant of the League of Nations. Those differ-
encesweredue to the new situation which Statesand peoples had to
faceon account ofthe consequencesofthe SecondWorldWar and of
the developmentswhich preceded ortriggered its outbreak.
There is no necessityhere to consider these differences in detail.
One may content oneself with the affirmation that, by virtue of the

Charter, the SecurityCouncilbears an essentialresponsibilityforthe
maintenance of peace and security.The Court, ifthe circumstances
so require,oughtto collaboratein the accomplishment ofthis funda-
mental mission." (I.C.J. Reports 1976, separate opinion, p. 33
(emphasisadded), cited in PublicSittingof27March 1992,CR 92/4,
pp. 69-70.)

This exposition by Judge Tarazi of the role of the Court sets out with
claritycertain centralprinciples:

(1) TheCourt isanindependent organ ofthe United Nations and should
maintain itsindependence.
(2) TheCourt isajudicial organ.
(3) TheCourt isanintegralpart ofthe United Nations.
(4) Under the Charter, the SecurityCouncilbears essentialresponsibility
forthemaintenance ofpeaceand security.
(5) The Court ought to collaborate with the Security Council in the
accomplishmentofthismissionifcircumstancessorequire.

It isclearfroma consideration oftheserequisitesthatthe Court mustat
al1timespreserve itsindependence inperforming the functions whichthe
Charter has committed to it as the United Nations' principal judicial
organ. It is clear also that in many an instance the performance of those
independent functions willlead theCourtto a result in total consonance
with the conclusions of the SecurityCouncil. But it by no means follows
from these propositions that the Court when properly seised of a legal
dispute should CO-operatewith the Security Council to the extent of
desisting from exercising its independent judgment on matters of law
properlybeforeit.JudgeTarazi wasanxiousto provide forthispossibility
by the carefulinsertion ofthe stresson the Court's independence and the

proviso referringto the desirabilityofcollaboration "ifthe circumstances
so require". The judge of the question whether the circumstances so
require is surely the Court in the exercise of its independent judgment.

It is to be noted, moreover, that, in the case of the Court, there is no
provisionsimilarto &ticle 12ofthe Charter whichprovides, in regardto
the General Assembly,that, while the Security Council is exercising in
respectofanydispute orsituation the functionsassignedto itbytheChar-
ter, the General Assembly "shall not make any recommendation with
regard to that dispute or situation" unless the Security Council so dont la genèsehistorique marque une étapenouvelle dans l'histoire
offredesdifférencesessentiellespar rapport aux dispositions de son
devancier, le Pacte de la SdN. Ces différences étaient dueà une

situation nouvellelaquelle ont fait face les Etats et lespeuples en
raison des suites de la seconde guerre mondiale et des développe-
ments qui l'ont précédéoeu enont précipitle déclenchement.
Il n'est pas nécessaireici de passer en revue ces différences. On
pourrait pourtant secontenterd'affirmer qu'en vertude la Charte le
Conseil de sécurité assume une responsabilité essentieen vue du
maintien de lapaix et dela sécurit. a Cour devrait collaborer,siles
circonstancesl'exigent,àcette Œuvrefondamentale. »(C.Z .Jcueil
1976,opinion individuelle, p. 33 (les italiques sont de moi), àitée
l'audience publique du 27mars 1992,CR 92/4, p. 69-70.)

Cet exposé queM. Tarazi fait du rôle de la Cour dégage clairement
certainsprincipes essentiel:

1) La Cour est un organe indépendant de l'Organisation des Nations
Uniesetdoitconserversonindépendance.
2) LaCourestun organejudiciaire.
3) LaCourfaitpartie intégrantedel'organisation desNations Unies.
4) En vertu de la Charte, le Conseil de sécurité assula responsabilité
essentielledumaintiendelapaixet delasécurité.
5) La Cour devrait collaborer avecle Conseil de sécuriàéla réalisation
decettemissionsilescirconstancesl'exigent.

Il ressort clairement de l'examen de ces principes que la Cour doàt
tout moment conserver son indépendance dans l'accomplissement des
fonctions que la Charte lui confie entant qu'organe judiciaire principal
des Nations Unies. Il est clair aussi que, dans bien des cas, le fait de
s'acquitterde cesfonctionsindépendantesconduira laCour àun résultat
qui seraenparfaite harmonie avec lesconclusionsdu Conseil de sécurité.
Mais ilne découlenullementde cespropositions que la Cour, lorsqu'elle
est régulièrementsaisie d'un différendjuridique, doive coopérer aveec
Conseil de sécuritéjusqu'au poindte cesserd'exercersonjugement indé-
pendant surlesquestions dedroitdont elleestlégitimentsaisie.M.Tarazi
avaità cŒurde prévoir cette possibilité;il a mis soigneusement l'accent

sur l'indépendancede la Cour et a nuancéla formule, la collaboration
étant souhaitable«si les circonstances l'exigent». Lejuge de la question
de savoir si les circonstances l'exigent estassurément laCour, exerçant
sonjugement entoute indépendance.
De plus, il y a lieu de relever que, s'agissantde la Cour, on ne trouve
aucune disposition du genre de l'article 12de laCharte qui stipule qu'en
ce qui concerne l'Assembléegénérale,tant que le Conseil de sécurité
remplit,à l'égardd'un différend ou d'une situation quelconque,lesfonc-
tions qui lui sont attribuéespar la Charte, l'Assembléegénérale doit
faireaucune recommandation surcedifférendou cettesituation » àmoins 59 1971 MONTREALCONVENTION (DISS .P. WEERAMANTRY)

requests. It is part of the scheme of the Charter that the International
Court isnot similarlyrestrained.

Theproposition isunexceptionable that where the SecurityCouncil is

addressing a situation with direct implications for the matter brought
before the Court, the Court should examine whether its actions would
conflictwiththe actionsthatthe SecurityCouncilhas taken orisconsider-
ing and, where the circumstances permit, should seek to reinforce the
actions ofthe Council.
This is undoubtedly so, but the fact of SecurityCouncil action is only
one ofthe circumstancesthe Court would take into account and is by no
meansconclusive.Sincethe Courtand the SecurityCouncil mayproperly
exercisetheir respectivefunctions with regard to an international dispute
or situation, each must in the exercise of the undoubted authority con-
ferred on it exercise its independent judgment in accordance with the
Charter. It follows that their assessment of a given situation will not
always be in complete coincidence. Especially where matters of legal
interpretation are involved,the Court willnaturally zealouslypreserveits

independence ofjudgment, fortodo any lesswould not be a proper com-
pliance with the requirements ofthe Charter.

Co-ordinateExerciseofPowers

There have indeed been prior instances where the same matter has
come up for consideration before both the Security Council and the
Court. Mention may be made in this connection of the following cases
where the jurisdiction of both the Court and the Security Council was
invoked in one and the same matter: Aegean Sea ContinentalShelJ;
InterimProtection(I.C.J.Reports1976,p. 3); UnitedStatesDiplomatieand
ConsularStaffinTehran,ProvisionaM l easures(I.C.J.Reports 1979,p. 7);
Military and Paramilitary Activitieisnand against Nicaragua,Provisional

Measures (1.C.J.Reports1984,p. 169).
In al1these cases,however,the Courtand the Councilwereapproached
by the sameparty, seekingbefore these different organs the relief appro-
priate to the nature and function of each. In other words the party
approaching these organs was seeking to use them in a complementary
manner.
Inthepresent case,the Courtand the Councilhavebeen approached by
opposite parties to the dispute, each claiming a form of relief consistent
with its ownposition. It isthissituation whichgivesspecialimportance to
the current case.
It is of relevanceto note, inthe last ofthe three casescited,the Court's
observation made in response to the United States' argument that the
Court should not consider Nicaragua's requestbecause that request for
interim measures was identical with its requests which were rejected by

the Security Council. The Court observed that the fact that a matter is que le Conseil de sécurité nele lui demande. Dans le mécanismede la
Charte, la Cour internationale de Justice ne doit pas être limitde la
mêmefaçon dans son action.
Nul ne peut contesterque, lorsque le Conseil de sécurité examineune
situation ayantdesincidencesdirectessurl'affaire portéedevantla Cour,
celle-cidoit examinersisesdécisionsrisqueraient d'entrer enconflitavec
les mesuresque le Conseil de sécurita prises ou envisagede prendre et,
lorsque les circonstanceslepermettent, doit chercher renforcer l'action
du Conseil.
II en est certainement ainsi, mais l'action du Conseil de sécuritén'est

que l'une des circonstancesque la Cour doit prendre en considérationet
cela ne met nullement un point finalàla question. Puisque la Cour et le
Conseil de sécuritépeuventexercerrégulièrementleursfonctionsrespec-
tives en ce qui concerne une situation ou un différend international,
chacun doit, dans l'exercice du pouvoir qui lui est indubitablement
conféré,exercee rntoute indépendance sonjugement conformément à la
Charte. Il s'ensuit qu'iln'yaura pas toujours de totale coïncidence dans
leurappréciationd'unesituationdonnée.Spécialementlorsqueintervien-
nent desquestionsd'interprétation juridique, laCourtendra tout naturel-
,lement à protégerjalousement son indépendancedejugement, faute de
quoi ellemanquerait aux préceptesde la Charte.

Exercicecoordonné despouvoirs

Dans lepassé,ils'esteffectivementtrouvé descasoùla mêmequestion
a dû être examinéeà la fois par le Conseil de sécuriet par la Cour. On
peut mentionner les affaires suivantes, tant la compétencede la Cour
que celledu Conseildesécurité ont étéinvoquée dsansune seuleetmême
affaire Plateau continentalde la mer Egée, mesurecsonservatoires(C.Z.J.
Recueil1976,p. 3); Personneldiplomatique etconsulairedes Etats-Unis à
Téhéran, mesurecsonservatoires(C.I.J. Recueil 1979, p. 7), et Activités
militairesetparamilitairesauNicaragua etcontre celui-ci, esuresconser-
vatoires(C.ZJ.. Recueil84,p. 169).
Toutefois, dans toutes ces affaires, la Cour et le Conseil étaientsaisis
par lamême partie, celle-cicherchantobtenir decesorganesdifférentsle
remèdeapproprié à lanature etàlafonction dechacun d'eux.En d'autres
termes,la partie quilesavaitsaisischerchaàtlesutiliserdefaçoncomplé-
mentaire.

En l'espèce,la Cour etleConseilont étéapprochép sar lesdeuxparties
que le différend oppose, chacune faisant valoir des moyens correspon-
dant àsa propre position. Et c'est cette situation qui donne une impor-
tance particulièrà la présente affaire.
Il y a lieu de relever, dans la dernière des trois affaires citées, le
commentairefait par laCouren réponse àl'argumentation desEtats-Unis
selon laquelle ellene devait pas accepter de connaître de la demandedu
Nicaragua parce que la demande de mesures conservatoires était iden-
tique aux demandesque cetEtat avaitformuléesetqui avaient été rejetées60 1971 MONTREALCONVENTION (DISS .P. WEERAMANTRY)

beforethe SecurityCouncilshouldnotprevent itfrombeingdealt withby

theCourtandthat bothproceedingscouldbepursued paripassu (Military
and ParamilitaryActivitiesin and against Nicaragua, I.C.J. Reports 1984,
p. 433,para. 93).

In the UnitedStates Diplomaticand ConsularStaff in Tehrancase,the
Court observedthat :
"it doesnot seemto haveoccurredto anymemberofthe Councilthat

there wasorcould be anythingirregularinthe simultaneous exercise
of their respectivefunctions by the Court and the SecurityCouncil.
Nor isthereinthisanycausefor surprise." (I.C.J. Reports1980, p.21,
para. 40.)
The role ofthe Court wasmade evenclearerwhenthe Court observed:

"Whereas Article 12of the Charter expresslyforbidsthe General
Assemblyto make any recommendation with regard to a dispute or
situation while the Security Council is exercising its functions in
respect of that dispute or situation, no such restriction is placed on
thefunctioning ofthe Court byanyprovisionofeitherthe Charteror
the Statute ofthe Court. Thereasonsare clear.It isforthe Court, the
principal judicial organ of the United Nations, to resolve any legal
questionsthat maybeinissuebetweenparties to the dispute;and the
resolution of suchlegalquestionsbythe Court maybe an important,

and sometimesdecisive,factorinpromotingthepeacefulsettlementof
the dispute." (Ibid., p. 22, para. 40; see also Military andramili-
taryActivitiesin and against Nicaragua,I.C.J. Reports1984,pp. 433-
434,para. 93.)

ThePowersoftheSecurityCouncil
The submissionbefore us relating to the exerciseof SecurityCouncil

powers in adoptingresolution 731 (1992)callsfor a brief examination of
those powers froma strictly legalpoint of view.
The plenitude ofpowerswith whichthe Charter ofthe United Nations
investsthe SecurityCouncil straddles a wide variety of areas of interna-
tional action.
It is charged under Article 24 with the primary responsibilityfor the
maintenance of internationalpeace and security and has amandatefrom
al1Member Statesto act on their behalf in this regard. ByArticle 25, al1
Members agreeto accept and carry out its decisions.
Chapter VI entrusts it with powers and responsibilities in regard to
settlementofdisputes, and Chapter VI1givesitveryspecialpowerswhen
it determinesthe existenceof anythreat to the peace,breach ofthe peace
or act of aggression. Such determination is a matter entirely within its
discretion.
With these provisions should be read Article 103of the Charter which CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 60

par leConseil de sécurité. a Cour afaitobserverque lefaitqu'une ques-

tionsoitsoumiseau Conseildesécurité nedoitpas empêcherlaCour d'en
connaître, les deux procédures pouvant êtremenéesparallèlement(Acti-
vitésmilitaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, C.I.J.
Recueil1984,p.433,par. 93).
Dans l'affaire relativeau PersonneldiplomatiqueetconsulairedesEtats-
Unis à Téhéran l, Cour a notéque :

ailne sembleêtrevenu à l'esprit d'aucun membredu Conseil qu'ily
eût ou pût y avoir rien d'irrégulier dansl'exercicesimultanépar la
Cour et par le Conseil de sécuritde leurs fonctions respectives.Le
fait n'est d'ailleurs pas surprenant. (C.I.J. Recueil 1980, p. 21,
par. 40.)

Le rôle de la Cour a été défindie façon plus claire encore lorsque la
Cour a observé :
«Alors que l'article 12 de la Charte interdit expressément à
l'Assembléegénéralede faire une recommandation au sujet d'un

différend oud'une situation à l'égard desquelsle Conseil remplit
sesfonctions,ni la Charte ni leStatutn'apportent derestrictionsem-
blableà l'exercicedes fonctions de la Cour. Les raisons en sont évi-
dentes: c'està la Cour, organe judiciaire principal des Nations
Unies,qu'ilappartientde résoudretoute questionjuridique pouvant
opposer des partiesà un différend;et la résolutionde ces questions
juridiques par la Cour peut jouer un rôle important et parfois
déterminantdansle règlementpacifique du différend. » (Ibid.,p. 22,
par. 40; voir aussi Activitésmilitairesetparamilitaires au Nicaragua
etcontrecelui-ci,C.I.J.Recueil1984,p. 433-434,par. 93.)

Lespouvoirs du Conseildesécurité

Ce qui nous est dit des pouvoirs que le Conseil de sécurité aexercés
lorsqu'il aadoptéla résolution731(1992)appelle un bref examen de ces
pouvoirs d'un point devue strictementjuridique.
La plénitude des pouvoirsque la Charte des Nations Unies confère

au Conseil de sécurité couvre des secteurs d'action internationale très
divers.
Envertudel'article24,leConseilalaresponsabilitéprincipaledu main-
tien delapaix etdela sécuritéinternationaleetilestmandatépar tous les
EtatsMembrespour agirenleurnom àcetégard.Auxtermesdel'article25,
tous les Membresconviennentd'accepter et d'appliquer sesdécisions.
Le chapitre VIconfie au Conseil des pouvoirs et des responsabilitésà
l'égarddu règlement des différends,et le chapitre VI1 lui donne des
pouvoirstrèsparticuliers dèslorsqu'ilconstatel'existenced'une menace
contrelapaix,d'une rupture delapaix oud'un acted'agression. Unetelle
constatation relèveentièrementde son appréciation.

Pourinterprétercesdispositions,ilfauttenircompte enmême temps deStatesthat in the eventof a conflictbetween the obligations of the Mem-
bers ofthe United Nations under theCharter and their obligationsunder
any international agreement, their obligations under the Charter shall
prevail. Seeingthat Security Council decisions are to be accepted and
carried out by al1Member States, the obligations thus created are given
priority by Article 103overobligations under any other agreement.
Al1this amounts to enormous power indeed and international law as
embodiedintheCharter requires al1Statesto recognizethispowerand act

according to the directionsissuingfrom it.
But does this mean that the SecurityCouncil discharges itsvariegated
functions free of al1limitations, or isthere a circumscribingboundary of
noms orprinciples withinwhichitsresponsibilitiesaretobedischarged?
Article 24itselfoffersus an immediatesignpost to such a circumscrib-
ingboundary when itprovides inArticle 24(2)that the SecurityCouncil,
in dischargingitsduties under Article24(l), "shallactin accordance with
the Purposes and Principles of the United Nations". The duty is impera-
tiveand the limitsarecategoricallystated.ThePreamble stressesinteralia
the determination ofthe peoples ofthe United Nations to establishcondi-
tions under which respect for the obligations arising from treaties and
other sources ofinternational law can be maintained.
Article1(1)setsout asone ofthe Purposes ofthe United Nations that it
is

"to bring about by peaceful means, and in conformitywiththe prin-
ciples of justice and international law, adjustment or settlement of
international disputes or situations which might lead to a breach of
the peace".

Travaux Préparatoires
That such limitations are real and important appears when one con-
siders the travauxpréparatoirelseading to the adoption of the Charter.

Theyareherereferred to forthe purpose ofshowingthat the concernsout-
lined above were indeed a factor leading to the adoption in its present
form ofthe articlesgivingthe SecurityCouncil its powers.
In Cornmittee 2 of Commission III which was dealing, at the United
Nations Conference on International Organization, San Francisco, with
the draft provisions of the Charter relating to the Security Council, on
19May 1945,Belgium - as if in anticipation of the very problem now
presented by the Libyan argument that the Security Council resolu-
tion 731(1992)infringed on essentials of Statesovereignty - presented a
proposed amendment to the draft.

To quote fromthe Commissionrecords :

"The DelegateofBelgiumstatedthat if,asappeared to bethe case,
the power of the SecurityCouncil to 'recommend'('recommander')
involvedthe possibilitythat a Member ofthe Organizationmightbel'article 103dela Charte,qui dispose qu'encasde conflitentre lesobliga-
tions des Membresdes Nations Unies en vertu de la Charte et leurs obli-
gations en vertu de tout autre accord international lespremièresprévau-
dront.Puisquelesdécisionsdu Conseildesécurité doiventêtreacceptée est
appliquéespartouslesEtatsMembres,l'article103confèreauxobligations
ainsi crééelsa priorité surles obligationsdécoulant de tout autreaccord.
Tout celareprésentevraimentun pouvoir énormeetledroit internatio-

nal, tel qu'il estincorporé dans laCharte, oblige tous les Etats recon-
naître ce pouvoir età agir conformément aux directivesqui en émanent.
Est-ceà dire que le Conseil de sécuritexerce ses diversesattributions
sansaucune limitation,oubien est-iltenu d'agirdansun cadrecirconscrit
par un ensemblede normes ou de principes ?
L'article24lui-mêmesignaleimmédiatemenlt'existenced'untel cadre
lorsqu'ildispose,danssonparagraphe 2,que,dans l'accomplissementdes
obligationsqueluiimpose leparagraphe 1 du mêmearticle,leConseilde
sécurité«agit conformément aux butset principes des Nations Unies ».
L'obligation est impérativeet les limites sont clairement marquées.Le
préambule de la Charte souligne notamment que les peuples des

Nations Unies sont résolusà créer les conditions nécessairesau respect
des obligations néesdes traitéset autres sources du droit international.
Il est dàtl'article 1,paragraphe 1,de la Charte que l'un des buts des
Nations Unies estde
((réaliser,par des moyens pacifiques, conformément aux principes
delajustice etdu droitinternational,l'ajustement ou lerèglementde

différends oude situations, de caractère international, susceptibles
de mener à unerupture de la paix».

Les travauxpréparatoires

Laréalité etl'importance de ceslimitesressortent destravaux prépara-
toires de la Charte. Ceux-ci montrent que les préoccupations évoquées
ci-dessusfiguraientbienparmi lesconsidérationsquiontabouti à l'adop-
tion, sous leur forme actuelle, des articles qui confèrent ses pouvoirs au
Conseil de sécurité.
Lors de la conférencedes NationsUnies sur l'organisation internatio-

nale (San Francisco),au comité2 de la commissionIII, qui examinait les
projets de dispositions de la Charte concernant le Conseil de sécuritél,e
19 mai 1945,la Belgique - anticipant, en quelque sorte, le problème
mêmequi estsoulevémaintenantpar l'argumentde la Libyeselonlequel
larésolution73 1(1992)du Conseildesécurité porte atteintà descompo-
santes essentiellesde la souveraineté- a présentéun projet d'amende-
ment.
Pour citer leprocès-verbalde la commission :

«Le délégué de la Belgiquedéclareque si,commecelaparaît être
le cas, le droit pour le Conseil de sécuritéde ((recommander)) im-
plique la possibilité qu'un Membrede l'organisation soit obligé62 1971MONTREAL CONVENTION (DISS O.P.WEERAMANTRY)

obligedtoabandon a rightgrantedto itbypositiveinternational law
as an essentialright of statehood,the Delegation of Belgiumwished

formallyto presentitsamendment to the Committee.The purpose of
the amendment was, in case a party to a dispute considered that a
recommendation of the SecurityCouncil infringed on its essential
rights,to allowthe state to request an advisory opinion on the ques-
tion by the International Court of Justice. If the Court founduch
rightstobeinfringed orthreatened, then the SecurityCouncil would
berequiredeither to reconsiderthe question orto referthe dispute to
the General Assemblyfor adecision. It wasnot in any sensethe pur-
pose ofthisamendment to limitthe legitimatepowersofthe Security
Council. It would, however,be desirable to strengthenthe juridical
basis of the decisions of the Security Council." (Documentsof the
UnitedNations Conferenceon International Organization,San Fran-
cisco, 1945,Vol.XII, pp. 48-49.)

The Delegate of the Union of Soviet Socialist Republics opposed the
amendment stating: "There should be no question in the minds of any
Delegatesthat the SecurityCouncil mightwishin anywayto infringethe
rights of a sovereignstate" (ibid.,p. 49).Moreover:

"The Delegateofthe United Statesemphasizedthe importance of
the requirement that the action of the Security Council in dealing
witha dispute involvingathreat to thepeacebe taken 'inaccordance
withthe purposes and principles ofthe Organization'.He referredto
Chapter 1,paragraph 1,asamended bythe sponsoring governments,
which Statesthat one of the purposes ofthe Organization isto bring
about the peaceful settlement of disputes 'withdue regard for prin-
ciplesofjustice and international law'(Doc.2,G/29, p. 1).Hedidnot
interpretthe Proposalsaspreventinganystatefromappealing to the
International Court ofJusticeatany time on any matter whichmight
properly go before the Court. On the whole,he did notconsider the
acceptance of the BelgianAmendment advisable, particularly since
hebelievedthatthe SecurityCouncil wasboundtoact in accordance
withthe principles ofjustice and international law." (Zbid.)

The DelegateofFrance, whileviewingwithgreatsympathythe ideasin
the Belgian amendment, expressed doubt about its efficiency and sug-
gested that the sub-committee on drafting "should endeavor to givethe
most completeguaranteespossiblethat the SecurityCouncilaccomplish
itstask according to law and justice" (ibid.,p..

The Delegate of Colombia expressed his warm support of the Belgian
amendment.
On 22 May 1945,the Delegate of the United Kingdom stated that he

thought the adoption of the Belgianamendmentwould be prejudicialto CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 62

d'abandonner un droitgarantipositivementpar ledroitinternational
comme étant un droit essentiel d'Etat indépendant, la délégation
belgeinsistepour présentersonamendementaucomité.Lebut decet
amendement estd'accorder àun Etat qui estpartià un différend,et

qui estime qu'une recommandation du Conseil de sécuritéporte
atteinteàsesdroits essentiels,ledroit deréclamerun avisconsultatif
de la Cour internationale de Justice sur ce point: si la Cour estime
que ces droits sont violésou menacés,le Conseil de sécurité sera
invitéà examiner la questionà nouveau ou àsoumettre le différend
pour décisionà l'Assembléegénérale. Cet amendementn'a, en
aucune façon, pour but de restreindre les pouvoirs légitimesdu
Conseil de sécurité.
11serait, cependant, opportun de renforcer la base juridique des
décisionsdu Conseil de sécurité.» (Documentsde la conférence des
Nations Uniessur l'organisationinternationale,San Francisco, 1945,
vol.XII, p. 52-53.)

Ledélégué de l'Union des Républiques socialistessoviétiques, pposé
àcet amendement, a déclaré :«Il ne devrait exister dans l'esprit des délé-
guésaucundoutesur lesintentions du Conseil de sécurité de neporter en
aucune façon atteinte aux droits d'un Etat souverain. (Ibid.,p. 53.)En
outre :

«Le déléguédes Etats-Unis soulignel'importance de la prescrip-
tion en vertu de laquelle l'action du Conseil de sécuri, n cas de
différend constituantune menacepour lapaix, aura lieu«en confor-
mitéavec les buts et principes de l'organisation)).se reporte au
paragraphe 1du chapitre 1modifiépar lesgouvernementsinvitants,
quistipule que l'undesbuts del'organisation estde réaliserlerègle-
ment des différendspar des moyens pacifiques «en tenant dûment
comptedesprincipes de lajustice et du droit international(doc.2,
G/29, p. 1).Il n'interprète pas,pour sapart, lespropositions comme
empêchantun Etat quelconque defaireappelentout temps àlaCour
internationale de Justice pour toute question qui pourrait normale-
ment être soumise àcettedernière. Dansl'ensemble, ilne pense pas
qu'ily ait intéràtaccepter l'amendement belge, notamment parce

qu'il estconvaincuqueleConseildesécurité esttenu d'agir conformé-
ment aux principes de lajustice et du droit international. » (Ibid.)
Ledélégué de la France, tout en considérant avecbeaucoup de sympa-
thie les idées contenues dans l'amendementbelge, a exprimé des doutes
sur sonefficacitéetaditque lesous-comitéderédaction«devrait s'effor-
cer d'introduire dans le texte les garanties les plus complètes que le
Conseil de sécurité accomplira sa tâche conformémena tu droit et la
justice»(ibid.,p. 54).
Le délégué de la Colombie a appuyé chaleureusement l'amendement

belge.
Le 22 mai 1945,le délégué du Royaume-Uni a déclaré qu'à son avis
l'adoption de l'amendement belge nuirait aux chances de succès dethe success of the Organization. He submitted that the procedures pro-
posed bythe amendmentwouldcausedelayatatimewhenprompt action
by the Security Council was most desirable (Documentsof the United
Nations Conferenceon International Organization,San Francisco, 1945,
Vol.XII, p. 65).
TheDelegate of South Africa supported thisposition,emphasizing the
importance ofthe act of faith the smallStates weremaking inthe accept-
ance ofparagraph 4(ibid.,p. 66).The Delegate ofthe ByelorussianSoviet
SocialistRepublicalso opposedthe Belgianamendment (ibid.).

The Delegate of Belgiumthen requested a more precise answer to his
previouslyposed questionas to whether the term "recommend" in Chap-
ter VIII, Section A, of the draft (corresponding to Chapter VI1 of the
United Nations Charter) entailed obligations for States,parties to a dis-
pute, orwhetheritmeant only that the Council wasoffering advicewhich

might ormight not be accepted (ibid.).
The Delegate ofthe United Statesexpressedagreement with the views
ofthe Delegateofthe United Kingdom and saidhe had intended to make
it clear that in Section A no compulsion or enforcement was envisaged
(ibid.).
The Delegate of Belgiumstated that since it now was clearly under-
stood that a recommendation made by the Council under Section A of
Chapter VI11did notpossessobligatory effect,he wishedto withdrawthe
Belgian amendment. The withdrawal was accepted by the Chairman
(ibid.).
In another committeeof Commission III (theCommittee dealing with
Structures and Procedures) similar discussions were taking place at the
sametime. The Delegate for Nonvay observedon 24May 1945 :

"The SecurityCouncil wasvestedwithenormous powersand little
restraint was placed upon their exercise by the Dumbarton Oaks
Proposals. Thechapters on Purposes and Principlesoffered no such
rules,withthe exception ofthe principle ofthe sovereignequality of
States.He felt that a basic rule of conduct must be formulated as a
restraint onthe SecurityCouncil and asaguarantee that itwouldnot
resorttoa'politiquedecompensation'.Whateversacrificesthe Secu-
rity Council mightrequire of a nation should not be ofsuch anature
astoimpair the confidence ofthat nationinitsfuture." (Documentsof
the United Nations Conferenceon International Organization, San
Francisco, 1945,Vol.XI, p. 378.)

1quote fromthe record:
"The Representativeofthe United Kingdom,inopposingthe Nor-
wegian amendment,pointed outthat itspurpose was already served
by the amended principles in Chapter 1,where it wasstipulated that
the Organizationwasto 'bringabout bypeaceful means,and withdue
regardfor principlesofjustice and international law, adjustment or CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY6)3

l'organisation.Il a fait valoir que la procédure proposéepar l'amende-
ment entraînerait un retard dans des circonstances où la promptitude
d'action du Conseil de sécurité était extrêmement souhaitabl(e Docu-
mentsde la conférence des Nations Uniessur l'organisation internationale,

San Francisco, 1945,vol.XII, p. 68).
Le délégué de l'Afrique du Sud a soutenu le même pointde vue, en
soulignantl'importance del'actedefoiqu'accomplissaientlespetitsEtats
en acceptant le paragraphe 4 (ibid.,p. 69). Le délégude la République
socialiste soviétiquede Biélorussiea lui aussi combattu l'amendement
belge (ibid.).
Ledélégué delaBelgiquea demandéalorsune réponseplusprécise àla
question qu'ilavait déjà posée,àsavoir si leterme «recommander», au
chapitre VIII, section A, du projet (correspondant au chapitre1de la
Charte des Nations Unies), comportait des obligations pour des Etats
partiesà un litigeou s'ilsignifiaitseulement que le Conseiloffrait un avis
pouvant ou non êtreaccepté (ibid.).
Le délégué des Etats-Uniss'est déclaré d'accord avec celuidu
Royaume-Uni et a préciséqu'il avait voulu montrer clairement que la

section A n'envisageait aucune mesure de contrainte ou de sanction
(ibid.).
Ledélégué de la Belgiquea déclaréalorsque,puisqu'il étaitclairement
entendu qu'une recommandation faitepar leConseilsous la sectionA du
chapitre VI11n'entraînait aucun effet obligatoire, il acceptait de retirer
l'amendement de son pays. Le Présidenta acceptéceretrait (ibid.).

Un débatanalogue a eu lieu en mêmetemps au seind'un autre comité
de la commission III (le comité qui s'occupait de l'organisationet de la
procédure).Le24mai 1945,ledélégué dela Norvègeadéclaré cequisuit:

«Le Conseil de sécurité a étiénvesti de pouvoirs énormes etles
propositions deDumbarton Oaksont fixépeude limites àleurexer-
cice. Leschapitres sur lesbuts et lesprincipes ne contiennent pas de
telles règles, l'exception du principe de l'égalitésouveraine des
Etats.l[ledélégué dela Norvège]estimequ'on devraitformulerune
règlefondamentale de conduite qui servirait de frein au Conseil de
sécuritéedtegarantiecontrelapratique par celui-cid'une((politique
de compensation)). Quels que soient les sacrifices que le Conseil de
sécurité pourraitexiger d'une nation, ilse devraient pas êtrede
nature àdiminuer la confiance de cette nation dans son avenir.))
(Documents de la conférencedes Nations Unies sur l'organisation
internationale,San Francisco, 1945,vol.XI, p. 385.)

Je cite leprocès-verba:
«Le représentant du Royaume-Uni s'oppose à l'amendement
norvégien;il fait remarquer que son but est déjà atteintpar lesprin-
cipes amendésdu chapitre 1,qui stipulent que l'organisation doit
«réaliserpardesmoyenspacifiques et en tenantcomptedesprincipes

delajustice etdudroitinternational,l'ajustementou lerèglement..D, settlement . ..' etc. In his opinion, the Nonvegian amendment
was not a desirable way ofstatingthe case because he considered it
inadvisable to limit the Council in its actions, as was in effectro-
posed, when it was dealing with a lawbreaker." (Documentsof the
UnitedNationsConferenceonInternational Organization, San Fran-
cisco, 1945,Vol.XI, p. 378.)

The Nonvegian amendment was rejected on the ground that the con-
current revisions of the introductory chapters would provide for such
standards as international law and justice (Ruth B. Russell,A Historyof
theUnitedNationsCharter:TheRoleofthe UnitedStates 1940-1945,1958,
p. 665).
Thesediscussionsareusefulreminders ofthe senseinwhichthe powers
ofthe Council wereunderstood and adopted in the drafting ofthe United
Nations Charter. Thepowers ofthe Councilaresubject to Articles 1and 2
and, inparticular, to the guaranteesthey provide ofconformitywithinter-
national law.
It is important to note also the genesis of Article 1which sets out the
Purposes and Principles ofthe United Nations.
TheDumbarton Oaks Proposals setout these Purposes as follows :

" 1. To maintain internationalpeace and security ;andto that end
to take effectivecollectivemeasuresforthe prevention and removal
of threats to the peace and the suppression of acts of aggression or
other breaches of the peace, and to bring about by peaceful means
adjustment orsettlementofinternationaldisputes whichmayleadto
abreach ofthe peace;
2. To developfriendlyrelations among nations and to take other
appropriate measures to strengthen universal peace;
3. Toachieveinternationalcooperationin the solution ofinterna-
tional economic,social and other humanitarian problems; and

4. To afforda center for harmonizingthe actions of nations in the
achievement of these common ends." (Zbid.,p. 1019.)
It willbe noticed that the phrase "in conformitywith principles ofjus-
ticeand international law" which appears inthe Charter was absentfrom
theseproposals.Theaddition ofthisphrasetothe Dumbarton Oaksdraft
was due in no small measure to the fears expressed regardingthe enor-
mous powers that would be enjoyed by the Security Council. As
Ruth Russell observesin hertreatise on the history ofthe Charter:

"Beginning with the Chinese at Dumbarton Oaks, however,
numerouscomplaints wereheard that the Proposalsapparently pro-
videdfornostandards ofjustice orofinternational lawinconnection
with thispurpose. At San Francisco,therefore, in accordance with
the agreement made at Dumbarton Oaks, the Big Four officially CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY6)4

etc.A son avis, l'amendement norvégien nefournit pas un moyen
désirablede réglerla question; il estimeen effetinopportun de limi-
ter l'actiondu Conseil,ainsiqu'on lepropose enfait,lorsque celui-ci
agit contre une nation violant le droit.»(Documentsde la conférence
des Nations Uniessur l'organisation internationale,an Francisco,
1945,vol.XI, p. 385).

L'amendementnorvégiena été rejetéau motifque desrevisionsappor-
tées enmêmetemps aux chapitres liminaires de la Charte feraient réfé-
rence à des normes telles que le droit international et la justice.
(Ruth B.Russell,A Histolyof the UnitedNationsCharter:TheRole ofthe
UnitedStates 1940-1945,1958,p. 665.)
Cesdébats rappellent utilementdans quelsenslespouvoirs du Conseil
ont été compriset acceptés lors de la rédaction de la Charte des
Nations Unies. Lespouvoirs du Conseilsont subordonnés aux articles 1

et 2 et en particulier aux garanties de conformité avecledroit internatio-
nal qui setrouvent dans cesarticles.
Ilimporte deconsidéreraussilagenèsedel'article 1,quidéfinitlesbuts
et lesprincipes des Nations Unies.
Les propositions de Dumbarton Oaks énonçaientces buts dans les
termessuivants :

«1. Maintenir la paix et la sécurité internationalesàecette fin
prendre desmesures collectivesefficacesenvuede préveniretélimi-
ner les dangers qui menacent la paix, réprimerles actes d'agression
ou autres atteintes portéeàla paix, et préparer ouréaliserpar des
moyens pacifiques le règlement des différends internationaux qui
risquent d'entraîner la rupture de la paix.
2. Développerles relations amicalesentre les nations et prendre
toutes autres mesurespropresà consoliderla paix du monde.
3. Réaliserune coopération internationale envuede résoudreles
problèmeshumanitairesinternationaux telsque ceuxd'ordre écono-
mique et social.
4. Coordonner et centraliser les efforts des nations en vue de

parvenirà cesfins communes.»(Ibid.,p. 1019.)
Onremarquera quelesmots conformémentauxprincipesdelajustice
et du droitinternational »quifigurent dans la Charte ne setrouvaientpas
dans ces propositions. Si ce membre de phrase a étéajoutéau projet de
Dumbarton Oaks ce fut, en grande partie, pour apaiser les craintes qui

avaient été expriméea su sujet des énormes pouvoirs dont jouirait le
Conseil de sécurité.Comme RuthRusselll'adit dans son traitésur l'his-
toire de la Charte:
((Cependant, àcommencerpar lesChinois à Dumbarton Oaks,de
nombreuses délégationsseplaignirent de ceque lespropositions ne
semblaient,àcet égard, faire aucune place aux normesde lajustice

ou du droit international.San Francisco, par conséquent, confor-
mément à l'accord intervenuàDumbarton Oaks, les quatre grands65 1971 MONTREAL CONVENTION (DISS . P.WEERAMANTRY)

adopted the Chinese amendment to add that peaceful settlement of
disputes must be brought about 'with due regard for principles of
justice and international law'." (Op.cit.,p. 656.)

The history of the United Nations Charter thus corroborates the view
that a clearlimitation on the plenitude ofthe SecurityCouncil's powers is
that those powers must be exercised in accordance with the well-estab-
lished principles of international law. It is true this limitation must be
restrictively interpreted and isconfined only to the principles and objects
which appear in Chapter 1of the Charter:

"Le SecrétairegénéraldesNationsUnies, dans une déclarationdu
10janvier 1947,a rappeléce principe en ces termes: 'lesseulesres-
trictions sont les principes et les buts fondamentaux qui figurent au
chapitre le'de la Charte'." (Cot and Pellet, La Charte des Nations
Unies,2nd ed., 1991,pp. 462-463.)

The restrictionneverthelessexists and constitutes an important principle
of law in the interpretation of the United Nations Charter.
Theobligation oftheCourt, asone ofthe principal organs ofthe United
Nations, to "CO-operatein the attainment ofthe aims ofthe Organization
and strive to give effect to the decisions of other principal organs, and
not achieve results which would render them nugatory" (1. S. Rosenne,
TheLaw and Practice of the International Court,p. 70) should be read in
the light of this clearlimitation.

Chapters VIand VIIof the Charter

In the light of these observations regarding the nature of a Security
Councilresolution under Chapter VI,itbecomesclear that such a resolu-
tion does not impose a binding obligation. As Sir Gerald Fitzmaurice
observed of SecurityCouncil functions under Chapter VI :

"under this Chapter, these functions are not of an enforcement char-
acter. It is doubtful whether, on a proper reading of these functions,
they enable the Councilto do more than make recommendationswith
a viewto the settlement of any dispute." (Fitzmaurice, "TheFounda-
tions of the Authority of International Law and the Problems of
Enforcement", 1958,19Modern Law Review,p. 1,at p. 5; emphasis
added.)

The travauxpréparatoires of the Charter, the Charter itself and the
wording of the resolution al1point to this conclusion. Consequently the
fact that resolution 731(1992)had been adopted by the SecurityCouncil
was not an impediment to the consideration by the Court of the applica-
tion made to it.
Moreover, whatever the resolution purported to do was required by
Article 24(2)oftheCharter to be in accordance with international law. It ont adoptéofficiellementl'amendement chinois tendant àpréciser
que le règlementpacifique des différends devait être réalisé «en
prenant dûment en considérationles principes de la justice et du
droit international.Op.cit.,p. 656.)

La genèsede la Charte des Nations Unies confirme donc que la pléni-
tude despouvoirs du Conseildesécuritéaétéclairementlimité paer lefait
que ces pouvoirs doivent êtreexercésconformémentaux principes bien
établisdu droitinternational. Il estvraique cettelimitationdoitêtreinter-
prétée defaçonrestrictiveetnevaut quepour lesprincipes etobjectifsqui
figurent au chapitre1de la Charte :
«LeSecrétairegénéraldesNations Unies d,ansune déclarationdu

10janvier 1947,a rappelé ce principe en ces termes: «les seules
restrictions sont lesprincipes et lesbuts fondamentaux qui figurent
au chapitre le'de la Charte. » (Cot et Pellet, La Charte des Nations
Unies, éd.,1991,p. 462-463.)
La restriction n'enexistepas moins et elleconstitue un principe de droit
importantpour l'interprétationde la Charte des Nations Unies.

Il faut tenir compte de cettenette limitation pour interpréterI'obliga-
tion qui s'imposeà la Cour, entant que l'un des organes principaux des
Nations Unies, de((coopérer àla réalisationdesfinsdel'organisation et
des'efforcerdedonner effetauxdécisionsdesautres organesprincipaux,
et de ne pas produire de résultats qui les rendraient inopérantes))
(1.S.Rosenne, TheLawand PracticeoftheIntemational Court,p. 70).

LeschapitresVIet VI1dela Charte
A lalumièredecesobservationsrelatives àlanaturede toute résolution
adoptéepar leConseildesécurité autitre du chapitre VI,ilestclairqu'une

telle résolutionn'impose pas d'obligation contraignante. Les fonctions
exercéespar leConseildesécurité autitredu chapitre VIontfaitl'objetde
la remarque suivante de sirGerald Fitzmaurice :
«dans le cadre de ce chapitre, ces fonctions n'ont pas de caractère
coercitif.Correctementinterprétéese,llesn'autorisent probablement

pas le Conseilàfaireplus que des recommandationsenvue du règle-
ment d'un différend quelconque. »(Fitzmaurice, «The Foundations
ofthe Authority of International Lawand the Problems of Enforce-
ment», Modem LawReview,1958,vol. 19,p. 5; les italiques sont de
moi.)

Cette conclusion découle à la fois des travaux préparatoires de la
Charte,du texte même de celle-cietdu libellédela résolution. Parconsé-
quent, lefait que leConseil de sécuriaitadoptéla résolution731(1992)
n'empêchait pas la Cour d'examiner la requête qui lui était adressée.

De surcroît,quellesqu'aient pu êtrelesmesures prévuespar la résolu-
tion, il fallait,envertu de l'article24,paragraphe 2,de la Charte, qu'ellesis not for this Court to sitin reviewon a given resolution of the Security
Council but it is within the competence of the Court and indeed its very
function to determine any matters properlybrought before it in accord-
ancewithinternational law.Consequently,the Court will determinewhat

the lawisthat isapplicable.tothe caseinhandand would notbe deflected
fromthis course by a resolutionunder Chapter VI.

However,onceweenterthe sphere ofChapter VII,the mattertakeson a
different complexion, for the determination under Article 39of the exis-
tence ofanythreat to thepeace, breach ofthepeace oract ofaggression,is
oneentirely withinthe discretion ofthe Council. It would appear that the
Council and no other is the judge of the existence of the state of affairs
which brings Chapter VI1into operation. That decision is taken by the
SecurityCouncil initsownjudgment and inthe exerciseofthe full discre-
tion givento itbyArticle39.Oncetaken,the door isopened to thevarious
decisionsthe Council maymake under that Chapter.

Thus, any matter which is the subject of a valid SecurityCouncil deci-
sionunder Chapter VI1doesnotappear,prima facie,tobeonewithwhich
the Court can properly deal.

Resolution731(1992)

Resolution 731 (1992)expresses the Security Council's deep concem
with international terrorism and the illegal activities directed against
intemational civilaviation.It reaffirms previous resolutions callingupon
al1Statesto CO-operatein preventinginterference with civilairtravel and
al1actsofterrorism, recallsitscondemnation ofthedestruction ofPan Am
flight 103and the President'scal1on al1Statesto assist in apprehension
and prosecution of those responsibleforthis criminal act.

Theresolution stronglydeplored the factthat the Libyan Government
had not responded effectivelyto earlier requests made by the Govem-

ments of France, the United Kingdom, and the United States to co-
operate fullyinestablishingresponsibilityfortheterroristacts involvedin
the two air disasters involving Panm flight 103and UTA flight 772.It
urged the LibyanGovernment immediatelyto provide afull and effective
response to those requests, and decided to remain seised of the matter.

Thereisno decisioninthe resolutionaddressed to otherpartiesbut only
a decision "to remain seizedofthe matter". Nor isthereanyindication on
the face of the resolution,as there usually is in resolutions under Chap-
ter VII, indicating that the resolution has been adopted under Chap-
ter VII. It willbe cleartherefore that resolution 731(1992)whichwasthe
resolutionbeforethe Court atthe hearing ofthe oralargumentdidnot in
any way bar the consideration by the Court of the mattersbefore it. The CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971 (OP. DISSWEERAMANTRY6)6

fussent conformes au droit international. Il n'appartientàpcette Cour
deréformerune résolutiondu Conseildesécuritém , aisilestdela compé-
tencedelaCour, etc'estmêmesafonction essentielle,de statuersurtoute
questiondont elleestrégulièremens taisieconformémentaudroitinterna-
tional. Par conséquent,la Cour devra dire quel est le droit qui est appli-

cable en l'espèce et elle n'apas'écarter decette voie par l'effetd'une
résolutionadoptée envertudu chapitre VI.
Cependant, dès lors que l'on entre dans le champ d'application du
chapitreVII, leschosessontbiendifférentes,carlorsqu'ils'agitdeconsta-
ter l'existenced'une menace contre la paix, d'une rupture de la paix ou
d'un acted'agression,leConseiljouit d'une totale liberté d'appréciation.
Il semble que c'estle Conseil, et lui seul,qui estjuge de l'existenced'un
état dechoses qui entraîne la mise en application du chapitre VII. Cette
décisionest prise par-le. Conseil de sécurité en faisant intervenir son
propre jugement etdans l'exercicedu pouvoirtotalementdiscrétionnaire
qui lui est conférpar l'article39.Une foisque le Conseil s'estprononcé
sur cepoint,laporte estouverteaux diversesdécisionsqu'ilpeut prendre
envertu de ce chapitre.
Ainsi,une questionquifait l'objetd'unedécisionvalabledu Conseilde

sécurité en vertudu chapitre VI1n'estpas,prima facie, de celles dont la
Cour puisse valablementconnaître.

Lu résolution731(1992)

Dans sa résolution731(1992),le Conseil de sécurité se déclargerave-
ment préoccupé par leterrorismeinternational et les agissementsillicites
dirigéscontre l'aviationcivileinternationale. réaffirmesesrésolutions
antérieuresdemandantàtous les Etats de coopérerpour empêchertoute
ingérencedans lesliaisonsaériennescivilesettouslesactesdeterrorisme;
etilrappelle qu'ilacondamnéladestructionduvolPan Am103etqueson
présidenta appelétousles Etats àapporter leur aide afin que lesrespon-
sablesde cet acte criminelsoientarrêtésejtugés.
Danscetterésolution,leConseildéplorevivementlefaitque leGouver-
nementlibyenn'aitpasrépondueffectivementauxdemandes,antérieure-

mentprésentées par lesGouvernements dela France,du Royaume-Uni et
des Etats-Unis, de coopérerpleinementpour l'établissementdes respon-
sabilitésdans les actes terroristes concernant les vols 103de la Pan
et772del'UTA.Ildemandeinstammentauxautorités libyennesd'appor-
ter immédiatementune réponse complèteet effective àces demandes,et
décidede restersaisi de la question.
La résolution ne contient aucune décisionadresséeà d'autres parties,
maisseulementladécision derestersaiside la question ».Ellen'indique
pas davantage,par sestermes, commeiladvient d'habitudedans lesréso-
lutionsadoptéesenvertu du chapitreVII, qu'elleait étéadoptée envertu
du chapitre VII.Il doit donc être clairquela résolution731(1992),celle
que la Cour avaitàprendre en considérationau moment des plaidoiries,
ne faisait nullement obstacleà l'examen, par la Cour, des questions67 1971 MONTREALCONVENTION (DISS. OP. WEERAMANTRY)

observations and exhortations it contained were not of a legallybinding
nature.

Resolution748(1992)
Resolution 748(1992),by wayof contrast, is clearlya resolution under
Chapter VI1and sayssoon itsface.Thatresolutioncontains, unlike reso-
lution 731(1992),a series of decisions addressed to the Libyan Govem-
ment and to al1States.
Article 25 of the Charter, under which al1Members of the United
Nationsagree to acceptand carryout al1decisionsofthe SecurityCouncil
in accordance with the Charter imposes a binding legal obligation on al1

Statesof compliance with decisionsof the SecurityCouncil. Article 25is
reinforcedbyArticle 103sothat eveninthe eventofa conflictwithobliga-
tions under any other agreement,the obligations under Article 25 shall
prevail.
Without expressingdefinitiveviewsonthe matter atthisstage ofprovi-
sionalmeasures, 1take the viewthat resolution 748(1992)mustbetreated
asbinding on Libyaason al1countries intermsofArticle25ofthe United
Nations Charter and that, in terms of Article 103,the obligations it lays
down prevail over the obligations flowing from any other international
agreement.In specificterms,this meansthat Libyais,prima facie,bound
by the provisions of that resolution even if they should conflict with the
rights Libya claimsunder the Montreal Convention. In this respect, 1am
in agreementwiththe view ofthe majority ofthe Court.

However,in myrespectful view,it does not necessarily followthat the

binding nature of resolution 748 (1992) renders it inappropriate for the
Court to indicateprovisional measures. 1arrive at this conclusionafter a
careful perusal of al1the provisions of resolution 748(1992).There still
seemstobe room,whilepreservingfullrespectforresolution 748(1992)in
al1its integrity, for the Court to frame an appropriate measure proprio
motu which in no way contradicts resolution 748 (1992), Article 25 or
Article 103ofthe Charter.
An analysis of resolution 748(1992)shows that it expresses deep con-
cemwiththefailure ofthe LibyanGovernmentto provide afulland effec-
tive response to the request in resolution 73(1992)and contains strong
condemnations ofinternational terrorism. It determines,under Article39
oftheCharter,the existenceofathreattointernationalpeace and security
and decides to take certain actions under Article 41 of the Charter. Al1
Statesare required on 15April 1992to adopt certain measures set out in
the resolution. These measures include diplornatic sanctions and other

sanctions of various sorts relating to aircraft and weapons. They are al1
measures under Article 41 which deals with measures not involvingthe
use of force, andthe Councilhas not moved beyond that Article. CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971 (OP. DISSWEERAMANTRY) 67

portées devantelle. Les observations et exhortations de la résolution ne
présentaientpasun caractèreobligatoireen droit.

La résolution748(1992)
Il est clair, en revanche, que la résolution748(1992)a éadoptée en
vertu du chapitreVI1etelleledéclareentermesexprès.Ala différencede

la résolution731(1992),ellecontient une sériede décisionsadressées au
Gouvernement libyen et àtous les Etats.
L'article 25 de la Charte, aux termes duquel tous les Membres de
l'organisation conviennent d'accepter et d'appliquer toutes les décisions
du Conseil de sécuritéconformément à la Charte, impose àtous lesEtats
l'obligationjuridiquement contraignante de se conformer aux décisions
du Conseil de sécurité. L'articl25 est renforcépar l'article 103,si bien
quemême encasdeconflitaveclesobligationsissuesdetout autreaccord,
les obligationsen vertu de l'article25prévaudront.
Sansprendreparti defaçon définitivesurcettequestion au stadeactuel,
celuidesmesuresconservatoires,j'estimequelarésolution748(1992)doit
être considérée comme obligatoirp eour la Libye, comme pour tous les
pays,envertu del'article25delaCharte desNations Uniesetque,d'après
l'article 103,lesobligationsqu'elle définit doiventprévalsur cellesqui

découlentdetout autre accordinternational. Plusprécisément,cela signi-
fie quela Libyeestprimafacieliéepar lesdispositions de cetterésolution,
même si ellesentrent en conflitavec lesdroitsqu'elle invoqueenvertu de
la convention de Montréal.Acetégardj,e suisd'accord avecleraisonne-
ment de la majoritéde la Cour.
Cependant, je le dirai avec respect, il n'en résulte pas nécessairement
quelecaractèreobligatoiredelarésolution748(1992)rende inappropriée
uneindicationdemesuresconservatoiresparlaCour.J'arrive àcetteconclu-
sion àl'issued'un examenattentif de toutes lesdispositions de la résolu-
tion 748(1992). Lapossibilité subsisteapparemmentpour la Cour,tout en
respectantpleinementlarésolution748(1992)danssonintégralitéd ,edéfi-
nirpropriomotuune mesureappropriéequi nesoitaucunement en conflit
aveclarésolution748(1992)ou avecl'article25oul'article103delaCharte.
Il ressort de l'analyse de la résolution748 (1992)que le Conseil s'y

déclaregravementpréoccupé de ceque leGouvernementlibyen n'aitpas
encore donnéuneréponse complèteeteffectiveauxdemandes dela réso-
lution 731(1992)etqu'ellecontientd'énergiquescondamnationsduterro-
rismeinternational. Danscetterésolution,leConseilconstate,envertu de
l'article39delaCharte,l'existenced'une menacecontrelapaix etlasécu-
rité internationaleset décidede prendre certaines mesures en vertu de
l'article41delaCharte. Ala date du 15avril 1992,touslesEtats sonttenus
d'adopter certaines mesures indiquéesdans la résolution. Ces mesures
incluentdessanctionsdiplomatiques etd'autres sanctionsdediverstypes
en matièrede trafic aérien et d'armements. Toutesces mesures sont au
nombre de cellesprévuespar l'article41,qui traite des mesures n'impli-
quant pas l'emploide la force, et le Conseil n'estpas allé au-delàde cet
article.68 1971 MONTREALCONVENTION (DISSO.P.WEERAMANTRY)

TheMontrealConvention

Article 14 (1) of the Montreal Convention is drafted in imperative
terms,requiringanydisputeconcerningthe interpretationor applicationof
the Conventiontobesubmitted to arbitrationaccordingtoits terms.Itwill
be noted that the section refers not merelyto interpretation but goes fur-
ther into the area of the manner in which that treaty is applied or to be
applied.
The Montreal Convention ispart ofaconcertedinternationalresponse
to the problem of terrorism, which has assumed importance in recent

decades as a major international problem. Severalseparate conventions
representthe international community'sconsideredresponse to interna-
tional terrorism and several of them embody provisions similarto those
contained in Article 14,with eventualresort to the International Court.

Ithastaken aroundthirtyyears ofmultilateraleffort to put togetherthis
structure of international response, if oneoes back to the 1963Tokyo
Convention on Offences Committed on Board Aircraft. Most of these
conventionshavebeenratified byoveronehundred States.TheUNITAR
study, TheUnitedNationsand theMaintenanceofInternationalPeaceand
Security, 1987 (see p. 418), notes that, as at the time of that study,
132nations wereparties to the Conventionon Offencesand Certain Acts
Committed on Board Aircraft (1969 Tokyo Convention); 127 nations
wereparties tothe Conventionfor the Suppression ofUnlawfulSeizureof
Aircraft (1971Hague Convention); and 128nations were parties to the

Conventionfor the Suppression of Unlawful Acts Against the Safety of
CivilianAviation(1973 Montreal Convention).

Among the Conventions that contain a clause providing for resort to
thisCourt wherethe dispute betweenpartiescannot besettledby negotia-
tion are the Convention on Offences and Certain Other Acts Committed
onBoardAircraft 1963(TokyoConvention) - Article24;theConvention
onthe Suppression of Unlawful SeizureofAircraft 1971(HagueConven-
tion)- Article 12;the Convention on the Prevention and Punishment of
Crimes Against InternationallyProtected Persons,IncludingDiplomatic
Agents 1973(New York Convention) - Article 13; the International
Convention Againstthe Taking of Hostages 1979 - Article 16.

Indeed, this patterncan be traced back in international practiceto the

days ofthe Leagueof Nations when the 1937Conventionforthe Preven-
tion and Punishment ofTerrorism,by Article20,referreddisputes on the
interpretation orapplication oftheConvention whichcouldnot besolved
by diplomatic meansto the PermanentCourt ofInternationalJustice (see
Richard B. Lillich, TransnationalTerrorism:Conventionsand Commen-
tary,1982,p. 175).

Thereisthus a vastbody ofinternational support fordealing withsuch

69 CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISSWEERAMANTRY6)8

La conventiondeMontréal

L'article 14,paragraphe 1,de la convention de Montréalest rédigéen
termes impératifset exige que tout différend concernantl'interprétation

ou l'applicationdelaconventionsoitsoumis àl'arbitrage conformément à
sesdispositions.L'article,on lerelève,nementionne pasque l'interpréta-
tion, mais la dépasseet pénètredans le domaine de la manièredont le
traitéest ou devraitêtre appliqué.
La convention de Montréal faitpartie d'une réaction internationale
concertée devantle problèmedu terrorisme, qui revêt,depuis quelques
dizainesd'années, l'importance d'un problème internationad le premier
plan. Plusieursconventionsdistinctesexprimentlaréponseréfléchie dela
communauté internationale au terrorisme international et plusieurs
d'entreellesincluent desdispositionssemblables àcellesde l'article 14,y
compris la facultéde saisirla Cour internationale en dernier ressort.
Il afalluenvirontrente annéesd'efforts internationauxpour assembler

l'édificedecetteréactioninternationale,sionremonte àla convention de
Tokyo de 1963relativeaux infractionssurvenant àbord des aéronefs.La
plupart de ces conventions ont été ratifiésar plus de cent Etats. Selon
l'étudedel'UNITAR, TheUnitedNationsand theMaintenanceofInterna-
tionalPeace and Security,1987(voir p. 418),à l'époque oùcelle-cia été
rédigéec,enttrente-deux Etatsétaientpartiesà la conventionrelativeaux
infractions età certains autres actes survenant à bord des aéronefs
(convention de Tokyo de 1969);centvingt-septEtats étaient partiesà la
conventionpour larépressiondelacaptureillicited'aéronefs (convention
de La Haye de 1971);etcentvingt-huitEtats étaient partiesà la conven-
tion pour la répressiond'actes illicitesdirigéscontrela sécude l'avia-

tion civile(convention de Montréalde 1973).
Parmilesconventionsquicomprennent une clauseprévoyantlafaculté
desaisirla Cour lorsqueledifférendentrelesparties ne peut êtrréglépar
voie de négociation,on peut citer la convention de 1963relative aux
infractions età certains autres actes survenant à bord des aéronefs
(convention de Tokyo),article 24; la convention de 1971pour la répres-
siondelacapture illicited'aéronefs (conventiondeLaHaye),article 12;la
convention de 1973sur la prévention et la répression des infractions
contre lespersonnesjouissant d'uneprotection internationale, y compris
lesagentsdiplomatiques(convention deNewYork),article 13 ;laconven-
tion internationale de 1979contre la prise d'otages,article 16.

En réalité,ce systèmeremonte, dans la pratique internationale, au
temps de la Société desNations: alors, la convention de 1937pour la
préventionetlarépressiondu terrorismeprévoyait àsonarticle 20queles
différends relatifs l'interprétation oà l'application de la convention
qui ne pourraient être résoluspar la voie diplomatique seraient portés
devant la Cour permanente de Justice internationale (voir Richard B.
Lillich, Transnational Terrorism: Conventionsand Commentary, 1982,
p. 175).
De très nombreuxprécédents internationaux invitentdonc àtraiter deoffenceswithin an ordered multilateral structure of negotiation and ulti-

matejudicial settlement.
The Court asajudicial body administeringinternational lawcannot at
this stage ofits enquiriesfailto note that SecurityCouncilresolution 731
(1992)makes no mention of the Montreal Convention or of the multi-
lateral treaty structurebuilt up to counter international terrorism.

Another aspect ofthe Montreal Convention isthat it does not interfere
with the principle of customaryinternational law aut dedereautjudicare.
Each Contracting State ishoweverplaced under astrictobligation,where
itdoes not extradite an allegedoffender, to submitthe caseto the compe-
tent authorities for prosecution (Art. 7).The principle aut dedereautjudi-
careisan important facetofaState'ssovereigntyoveritsnationals and the
well-establishednature ofthisprinciple in customaryinternational lawis
evidentfrom the followingdescription :

"The widespread use ofthe formula'prosecuteor extradite' either
specificallystated,explicitlystated in a duty to extradite, or implicit
inthe dutyto prosecute orcriminalize,and thenumber ofsignatories
to these numerous conventions, attests to the existing general jus
cogensprinciple." (M. Cherif Bassiouni, International Extradition:
UnitedStates Lawand Practice,1987,p. 22.)

Aswithitsfailureto considerthe Montreal Convention,soalso resolu-
tion 731(1992)failsto considerthis well-establishedprinciple ofinterna-
tional law.

Conclusion

This very difficult case, arising from an incident so revolting to the
globalcommunityand so universallycondemned,needs to be approached
from as many anglesas possible.

Judge Lachs,intheAegeanSeacase,remarked onthe complementarity
of al1thefora to which Statesmay resort :

"The frequently unorthodox nature of the problems facing States
today requires as many tools to be used and as many avenuesto be
opened as possible, in order to resolve the intricate and frequently
multi-dimensional issues involved." (I.C.J. Reports 1978, separate
opinion, p. 52.)

He stressed in this context the role of the Court as an institution serving
the peacefulresolution ofdisputes. Inthepresentcase,anappeal hasbeen
addressed to this Courtto use its functionsin the overallUnited Nations
scheme, for the purpose of opening up another avenue towards settle-cesinfractions dans le cadred'un systèmemultilatéralordonnéde négo-
ciations et,en définitive,de règlementjudiciaire.
LaCour, en saqualitéd'organejudiciaire quiapplique ledroitinterna-

tional, ne saurait manquer de relever, à ce stade de son examen, que la
résolution73 1(1992)du Conseil de sécuriténe mentionne pasla conven-
tion de Montréal, nile systèmeconventionnel multilatéral édifié pour
s'opposerau terrorisme international.
Un autre aspect de la convention de Montréalest qu'elle neporte pas
atteinte au principe de droit international coutumier aut dedereaut judi-
care.Toutefois, chaque Etat contractant, s'iln'extrade pas l'auteur pré-
sumé d'une infraction, a l'obligation rigoureusede soumettre l'affaire à
ses autorités compétentespour l'exercicede l'action pénale (art.7). Le
principe aut dedereautjudicareestun aspectimportant delasouveraineté
de 1'Etatsur sesressortissants etle caractèrebien établide ceprincipe en

droit international coutumierressort clairement de l'exposé suivant :
L'emploi trèsrépandude la formule (poursuivre ou extrader »,
qu'ellefigure expressémentdans le texte, qu'elle soit expriméepar
l'obligation d'extrader, ou qu'elle soit sous-entendue dans l'obli-
gation d'exercer des poursuites ou de qualifier l'acte d'infraction,

ainsi que le nombre des signataires de ces nombreuses conventions
attestent de l'existence de ce principe généraldu jus cogens.~
(M. Cherif Bassiouni, International Extradition :UnitedStates Law
and Practice,1987,p. 22.)
De même qu'elle ne mentionne pas la convention de Montréal,la réso-
lution 731(1992)netient pas davantagecompte de ceprincipe bien établi

du droit international.

Conclusion

Cette affaire très difficile, qui résulted'un incident si révoltantpour
la communauté mondiale etqui fait l'objet d'une condamnation si uni-
verselle, doit êtreabordéesous des points de vue aussi nombreux que
possible.
M. Lachs, dans l'affaire de la Mer Egée,a commenté ences termes la
complémentaritéde toutes les instances auxquelles les Etats peuvent
recourir:

«Le caractère souvent inhabituel des problèmes que doivent
affronter les Etats de nosjours obligeàutiliserleplus d'instruments
età se réserver leplus de voiespossible pour résoudre les questions
complexes et souvent multidimensionnelles qui se posent. D (C.I.J.
Recueil1978,opinion individuelle, p. 52.)

Dans cecontexte,ilainsistésur lerôledelaCouren tant qu'institutionau
servicedu règlementpacifique des différends.En l'espèce,un appel a été
adressé à la Cour pour qu'elle exerce ses fonctions dans le cadre d'en-
semble du systèmedes Nations Unies, afin d'ouvrir une autre voie de 70 1971 MONTREALCONVENTION (DISS O.P.WEERAMANTRY)

ment.Judge Lachsput hisfingerupon one oftheprincipal rolesthe Court
may play when he said, "In this way it may be possible to prevent the
aggravation of a dispute,its degenerationinto a conflict."Z.C.J.Reports
1978,p. 52.)
Oneseesinthis passage a keyto the rolethe Court can play inthis mat-
ter. It is seised of a dispute,it possesses prima faciejurisdiction, a situa-
tion of escalatingtensions is developingand the Court's good offices are
soughtbyone Party with aviewto preserving suchrights asit claimsuntil
their final determination bythe Court.
This Court will not place itself in a position of confrontation with the
SecurityCouncil where that organ has already exercised its powers in a

manner which places obligationsupon al1United Nations Members. But
in areasnot coveredbyitsbinding decisionsunder Chapter VII,the Court
is free to use itsinfluence and authority to servetheurposes of interna-
tionalpeace inwhichithas as much an interest asanyorgan ofthe United
Nations.Thefurtherance and preservation of peace are not the exclusive
preserveofoneorganbutthe commongoal ofall.The Court has powerto
make an orderpropriomotuand isnot limited tothe terms in whichrelief
hasbeensought bythepetitioner.There isnoimpediment whichprevents
the Court from pursuing that common goal of peace by taking action
which in Judge Lachs'words maymake it "possible to preventthe aggra-
vation of a dispute, its degenerationinto conflict".

Agreatjudge onceobservedthatthe lawsarenot silentamidstthe clash

ofarms.Inour ageweneedalsoto assertthat the lawsarenot powerlessto
preventthe clash of arms. The entire law of the United Nations has been
built up around the notion of peace and the prevention of conflict. The
Court,in an appropriate case,wherepossibleconflictthreatensrightsthat
arebeinglitigatedbefore it,isnot powerlessto issueprovisional measures
conserving those rightsbyrestraining an escalation ofthe dispute and the
possible resort to force.hat would be entirelywithin itsmandate and in
total conformity with thePurposes and Principles of the United Nations
and international law.Particularlywhensituationsare tense,with danger
signalsflashingal1around, itseemsthatthis Court should makeapositive
responsewith suchmeasuresasare within itsjurisdiction. Ifthe conserva-
tion of rights which are subjudice comes within the jurisdiction of the
Court, as 1have no doubt it does, an order restraining damage to those
rightsthrough conflict must also lie within that province. If international

lawisto growand servethe cause of peace as it ismeant to do,the Court
cannot avoid that responsibilityin an appropriate case.

1wouldindicateprovisional measurespropriomotuagainstboth Parties
preventing such aggravationor extension ofthe dispute as mightresult in
the use of force by either or both Parties.uch measures do not conflict CONVENTION DE MONTRB DEL1971 (OP. DISS. WEERAMANTRY) 70

règlement.M. Lachs a mis le doigt sur l'un des rôles principaux que
peut jouer la Cour lorsqu'ila déclar: Ainsipeut-on espérer empêcher
un différenddes'aggraveretdedégénére ernconflit.C.I.J.Recueil1978,
p. 52.)
On discerne dans ce passage le rôle que la Courpeut jouer en l'occur-
rence. Elle est saisie d'un différend,elle estima facie compétente,il
s'instaureune situationd'escaladedetensions etl'une desparties sollicite
sesbons officesafin depréserverlesdroitsqu'elle invoquejusqu'à ceque
la Courait statuéà leur sujet de façon définitive.

La Cour ne se mettra pas dans une situation de conflit avec le Conseil
de sécurité lorsque cet organe a déjexercé sespouvoirs d'une manière
qui impose des obligationsà tous les Membresde l'organisation des Na-
tions Unies. Toutefois, dans les domaines auxquels ne s'appliquent pas
les décisions obligatoires prisespar le Conseil en vertu du chapitre VII,
la Cour est libre d'user de son influence et de son autorité pour servir
les fins de la paix internationale, dont elle sepréoccupeautant quetout
autre organe des Nations Unies. Promouvoir la paix et la sauvegarder,
ce n'est pas là la réserve exclusived'un seul organe, mais le but com-
mun de tous. La Cour a le pouvoir de rendre une ordonnance proprio
motu etn'estpas obligéede s'entenir auxtermesdans lesquelsl'auteur de
la demande a exercéson recours. Rien n'empêche laCour de tenter
d'atteindrecebut commundelapaixenprenant desmesuresqui,selonles

termes de M. Lachs,laissent espérer empêcheu rn différendde s'aggra-
ver etde dégénéreren conflit».
Unjuge illustreafait observerjadisque lesloisnegardent pas lesilence
au milieu du fracas des armes.A notre époque, nous avons aussibesoin
d'affirmerquelesloisnesontpas privéesdu pouvoird'empêcher lefracas
des armes. Tout l'édificedu droit de l'organisation des Nations Unies
s'appuie sur la notion de la paix et de la prévention des conflits.S'ily a
lieu, si le risque d'un conflit menace des droits contestés devant elle,la
Cour n'estpas privéedu pouvoir d'indiquer des mesures conservatoires
pour sauvegardercesdroitsen empêchantl'escalade du différendetpeut-
êtrele recours à la force. Cela relèverait entièrementde sa mission et
s'accorderait en totalité avecles buts et principes de l'organisation des
Nations Unies et du droit international. Particulièrement en périodesde
tensions, alors que les signaux de danger lancent partout des éclairs,la
Cour, semble-t-il,devraitréagirde façon positiveen prenant lesmesures

qui relèventde sacompétence.SilaCour acompétencepour protégerdes
droits qui font l'objet d'une action en suspe-s et cela esà mon avis
indubitable - une ordonnance interdisant de porter atteinte àces droits
par un conflitdoitaussi releverde sacompétence.Sil'on veutque ledroit
international sedéveloppeetservelacausedelapaixcommeilestcenséle
faire, la Cour ne peut se dérober devantune telle responsabilitéquand
l'occasionde l'assumerseprésente.
J'indiqueraisproprio motu des mesures conservatoires à l'égarddes
deux Parties pour empêcherl'aggravation ou l'extensiondu différendqui
pourrait résulterde l'emploide la force par l'uneou l'autre d'entreelles.with any decisionthe SecurityCouncilhas made under Chapter VII,nor
withanyobligationarising under Article25,nor withthe principle under-
lying Article 103.The way towards a peaceful resolution of the dispute

may thus be preserved before the Parties find themselves on paths from
which there may be no return. This action is based on Article 41 of the
Statute ofthe Court and Articles73,74 and 75ofthe Rules of Court.

(Signed)Christopher Gregory WEERAMANTRY.De telles mesuresn'entreraient en conflit avecaucune décisionadoptée
par leConseilde sécuritéenvertu du chapitre VII,niavecaucune obliga-
tion issue de l'article, ni avec le principe qui sous-tend l'article 103.
Ainsi,la voie qui mèneau règlementpacifique du différend pouvait-elle
être sauvegardéeavant que les Parties ne setrouvent sur des chemins où
elles seront engagées sans retour. Une telle décision seraitfondée sur
l'article41 du Statut de la Cour, ainsi que sur les articles 73,74 et 75du
Règlement.

(Signé Christopher Gregory WEERAMANTRY.

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Opinion dissidente de M. Weeramantry (traduction)

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