Opinion dissidente de M. Gros

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058-19730622-ORD-01-06-EN
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058-19730622-ORD-01-00-EN
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OPINION DISSIDENTE DE M. GROS

La déclaration d'acceptationde la juridiction de la Cour faite par le
Gouvernement français le 20 mai 1966 exclut de cette juridiction:
«...[les] différendsconcernant des activitésse rapportantà la défense
nationale)). Dans une communication faite à la Cour le 16mai 1973par
le Gouvernement français cette réservea étéformellement invoquée.La

limite fixéepar ce gouvernement àson acceptation a étéconsidéréepar
l'ordonnance comme ne créant pasun empêchement àl'exercicedu pou-
voir de la Cour d'accorder des mesures conservatoiresen application de
l'article 41 du Statut, la Cour estimant que le titre invoquépar le deman-
deur pour fonder la compétencede la Cour, l'Acte gknéralde 1928,
semblait suffisant,rima facie,a la fois pour justifier provisoirement sa
compétence etpour écarter l'applicationde la réservede 1966dans la
phase des mesures conservatoires, sans préjuger sa décision ultérieure
sur ces questions. Je n'ai donc riendire sur la substance des problèmes
de juridiction et de recevabilitépuisque toutes questions sans exception
concernant le pouvoir de la Cour de se saisir de l'affaire telle qu'ellea
étéprésentée dans la requêtede l'Australie sont renvoyéesla prochaine
phase de la procédure,instituéedans le dispositif de l'ordonnance.

Mais la décisionde la Cour indiquant des mesures conservatoires
constitue une application que je n'ai pu approuver de deux articles du
Statut de la Cour, les articles 53 et 41, et il convient donc que je donne
les raisons de mon dissentiment successivementsur ces deux points qui
sont relatifs la seule phase des mesures conservatoires.

Lorsque la Cour fut saisie le 9 mai 1973de la requête introductive
d'instance indiquant la Républiquefrançaise comme défendeur,signi-
fication fut faite le mêmejour au Gouvernement de la République
française qui répondit le 16 mai 1973par un document contestant for-
mellement la compétencede la Cour et concluant à ce que l'affaire soit
rayéedu rôle. Il s'agit d'un document de vingt pages qui constitue une

réponseaux communications de la Cour. La Cour, avant la première
audience, a examinécomme dans toute affaire la question de la commu-
nication au public des documents relatifsà l'instance, selon l'article48
du Règlement;dans une lettre à la Cour du 19mai 1973l'agent du de-
mandeur a fait d'expresses réserves à la communication du document
français du16mai 1973et «de tout autre document émanantdu Gouver-
nement français qui ne serait pas conforme aux procéduresrégulièresdela Cour)). Le conseil du Gouvernement de l'Australie, à la première
audience, le 21 mai 1973,a déclaré:

«Ni la Cour ni l'Australie ne doivent êtreobligées d'examiner les
arguments invoquéspar une partie, quand celle-ciles présente,non
pas à la barre, mais de façon irrégulièreou extra-judiciaire. Selon
nous, il faut s'entenir strictement au principe selon lequellesparties
doivent présenterleur argumentation régulièrementdevant la Cour;
si elles s'abstiennent de comparaître, la Cour ne doit prendre en

considérationaucunedéclarationqu'ellesviendraient à faireen dehors
de sesprocéduresétablies.Cette règlea été entout temps essentielle
pour maintenir l'intégritéde la procédure judiciaire à tous les
niveaux. Nous sommes persuadésque la Cour fera clairement savoir
qu'ellene tiendra compte d'aucune déclarationde ce genre.»
Et à la date de la présenteordonnance, le document français n'a tou-
jours pas été communiqué au public, alors que la requête australienne

et les comptes rendus des plaidoiries de l'Australie le furentpartir du
21 mai 1973.
Le fondement d'une telle attitude ne peut se trouver que dans une
certaine interprétation de l'article 53 du Statut ou de la procédurede la
Cour dans les matières préliminaires.
L'article53 du Statut de la Cour traite de la situation des Etats qui
contestent la juridiction de la Cour par un défautde comparaître ou de
conclure. Le défautest un acte reconnu dans la procédurede la Cour,
traitépar un article qui est contenu dans le chapitreI du Statut intitulé
«Procédure» et c'est en vain qu'on chercherait dans les intentions des
auteurs du Statut la volontéde pénaliser 1'Etatqui fait défaut.La thèse
contraire a étéplaidéesans l'appui d'aucune autoritéet doit êtreécartée.
Certes le défaut d'unEtat ne doit pas porter préjudice l'action intentée
par un autre Etat et le défautne peut interrompre le cours de la justice.

Mais le défaut est réglementépar l'article 53 qui décidede ses consé-
quences et, devant un défautconstaté,il faut appliquer cet article. Or
c'estce que la Cour n'a pas fait; l'ordonnance relève,dans le paragraphe
11, un défaut de comparaître, mais tient compte des conclusions du
document adressé àla Cour par leGouvernement français pour demander
la radiation de l'affairedu rôle. Or s'ily a conclusions du gouvernement
citécomme défendeurdans l'affaire,il n'y a pas défautde conclure. En
ne se prononçant ni dans un sens ni dans l'autre, et en renvoyantà une
date ultérieuresa décisionsur les conclusions du Gouvernement français
la Cour donne une interprétationde l'article 53 qui me paraît erronée.

Ce n'est pas là un problème mineuret je regrette que la Cour l'ait

renvoyé à une phase ultérieure.En indiquant à l'ouverture de la première
audience que la demande de radiation de l'affairefaite par le Gouverne-
ment français, dont «il a étédûment pris acte)), serait examinée«lemoment venu)), le Présidentne réglaitqu'un problème immédiat mais
l'ordonnance a reporté encore l'échéanceE . t cette remise implique que
la Cour estime possible de traiter le Gouvernement français à la fois
comme partie à l'instance principale (cf.paragraphes 32et 33de l'ordon-
nance et la fixation'un délaipour un contre-mémoirefrançais)etcomme
en défaut dans la phase actuelle puisqu'on constate aux paragraphes
11et 34 son défautde comparaître. Mais si le Gouvernement français a
fait défaut et indiqué formellement son intentionde rester en dehors de
l'instance principale, d'une manière qui ne laisse placeà aucun doute,
ilfallait appliquer l'articleui prévoitleseffetsdu défaut,etcelaimmé-
diatement.
11ne me paraît pas conforme aux règlesde la procédure d'écarter
provisoirement l'application de l'article3 dans la présenteaffaire pour

la raison qu'il s'agitd'une phase de mesuresconservatoires. Dèsle début,
une erreur d'interprétation estinsi commise sur I'article53. Il est inutile
de rappeler lajurisprudence constante de la Cour quant à l'interprétation
de son propre Statut; ((C'està la Cour elle-même etnon pas aux Parties
qu'ilappartient de veiller l'intégritde la fonctionjudiciaire dela Cour»
(Cameroun septentrional,C.I.J. Recueil1963,p. 29).Il appartenait doncà
la Cour de décider,selon sespropres motifs, si son Statut et son Règle-
ment prévoientdes formalités indispensablespour que des conclusions
présentéesautrement soient tenues pour irrecevables et si, dans cette
hypothèse, l'article53 devait être appliquéà un double défaut, absence
et défautde conclure. Rien de cela ne fut fait et le statut du document
français demeure incertain. Contesté formellement par le demandeur
dans son existence même,la décisionsur ses conclusions renvoyée à
plus tard, il est impossiblede déduirede l'ordonnance si cedocument est

ou non une piècedu dossier dont il devait être tenu compte, à l'égaldes
observations du demandeur. Car, si le Statut et le Règlement n'interdi-
sent pas de «conclure» de la manièrechoisiedans cette affaire, le docu-
ment français aurait dû êtrereçu comme observations du défendeur;
et dans le cas inverse, rejeté,et l'articleppliqué commeil le fut dans
l'arrêtdu 2 février1973(Compétenceen matière de pêcheries (Royaume-
Unic. Islande), C.I.J. Recueil1972,paragraphe 12).

Le renvoi par la Cour de l'application des effets de l'article 53 aux
phases ultérieuresde l'affaire estdonc une décision implicitede refus
d'application de l'article3 à une phase de mesures conservatoires. C'est
une thèsequi mériteexamen. En bref, cette thèse estque le défautn'au-
rait pas nécessairement lesmêmesconséquences selon lesphases d'une

affaire et que, si l'article prévoitbien certains effets dans son para-
graphe 2, ces effets pourraient être écarlsrsqu'il s'agitd'une demande
de mesures conservatoires, malgré l'intentionmanifeste de 1'Etatabsent
du procès.
On pouvait aussi soutenir que l'article3n'ouvre de droit àfairecons-tater le défaut qu'à la partie intéresséeà le faire, mais que la Cour ne
peut y procéder proprio motu. Il suffira de dire que, même s'ilen était
ainsi, ce qui n'estpas le cas selon moi, en l'espècele demandeura implici-

tement invoqué l'article 53 dans les conditions ci-dessusrappeléesen se
référant aux dispositionsapplicables du Statut et du Règlement.Mais le
Gouvernementfrançais a fait savoir dans une lettre du 21 mai 1973qu'il
n'était«pas partie àcette affaire)); il semble difficilede ne pas voir dans
ses déclarations du 16mai et du 21 mai une volonté formellede défaut.
La Cour ne pouvait ignorer à la foislespositions prises par le demandeur
et par 1'Etat absent, alors qu'elles coïncidaient pour lui faire constater
un défaut de comparaître.

Il faudrait ajouter qu'il y aurait une sorte d'abus de la procédure à
vouloir utiliser un défaut de comparaître comme une violation des règles
de procédure entraînant la perte du droit d'être entendu par la Cour,en
créant une pénalité quele Statut lui-mêmeinterdit formellement dans
l'article53 dont l'effet principal est que, le défaut constaté, la Cour
«doit s'assurer non seulement qu'elle a compétence aux termes desarti-
cles 36 et 37, mais que les conclusions sont fondéesen fait et en droit)).
11est insolitede soutenir une chose et son contraire; devant le défaut de

comparaître, en repoussant toute décisionsur les effetsde ce-défaut,la
Cour a permis une certaine rupture de l'égalité nécessaie rntre les Etats
devant lejuge.
La juridiction de la Cour est limitéed'une part aux Etats qui l'ont
acceptée, d'autre part aux obligations formellement consenties. Juge
d'attribution, la Cour doit veiller avant tout à ne pas outrepasser la
compétencequ'elle tient de son Statut et de l'acceptation volontaire de
sa juridiction par des Etats, chacun de ceux-ci déterminant librement
l'étenduede lajuridiction reconnue à la Cour.
Un Etat est ou n'est pas soumis au juge. S'il ne l'est pas, il ne peut
être traitécomme une «partie» à un litige qui ne serait pas justiciable.
La position prise par la Cour est qu'un Etat qui se tient pour étranger à
une affaire, qui fait défautet affirmeson déclinatoirede la juridiction de
la Cour ne peut obtenir de la Cour qu'une remise àplus tard de l'examen
de son droit. Ce n'est pas ce que dit l'article 53. Le défautde comparaître
est un moyen reconnu dans la procédure de la Cour pour contester la
juridiction et ce serait créerune obligationnon prévuedans le Statut que
d'obliger un Etat à défendre sa prétention d'une autre manière que le

défaut. Il a étésoutenu que la seule manièrede contester la juridiction
de la Cour est d'utiliser l'exception préliminaire.La manière dont les
Etats contestentla compétencede la Cour ne leur est pas imposéepar un
formalismeinconnu dans la procédure dela Cour; lorsqu'ilsestimentque
cette compétence estinexistante, ils peuvent choisir de rester en dehors
de ce qui, selon eux, est un faux différend.L'article 53 en est la preuve,
et la Cour doit alors s'assurerde sa propre compétenceet de la réalitédu
différendqu'on lui soumet. Certes un Etat qui fait défautcourt un risque,
celui de ne pas fourniràla Cour tous leséléments possiblespour l'appré- 119 ESSAIS NUCLÉAIRES (OP. DISS.GROS)

ciation de sa demande de rejet d'une instance. Mais c'est un risque qu'il
est seul maître de prendre et de comparer à celui qui résulterait pour lui
d'une atteinte prolongéependant une procédure à laquelle il ne veut pas

prendre part à propos d'une affaire qu'il estime entièrement endehors de
la compétencedujuge. Certainesindications données à propos de l'ordon-
nance du 22juin 1973montrent que la possibilitéde remises successives
n'est pas exclue.

La Cour permanente de Justice internationale avait déjàmis en garde
contre l'idéequ'une requêtesuffità créerun litigejusticiable: «La compé-
tence de la Cour ne saurait dépendre seulement de la manière dont la
requêteestformulée)) (C.P.J.I. sérieA no6,p. 15).

Si, commeje le pense, le défautprévu à l'article 53n'est pas sanctionné
en soi, il devient évidentque les raisons de ce défaut,lorsqu'elles ont été
formuléesclairement, doivent être examinéespar la Cour de façon com-

plète et surtout qu'il faut les accepter ou les rejeter formellement et sans
délai. L'idéeque le défautn'est pas opposable àla Cour et au demandeur
parce qu'il s'agit d'une demande de mesures conservatoires me parait
donc manquer de pertinence.

En premier lieu personne ne conteste «le lien qui doit exister, en vertu
de l'article 61, paragraphe 1 [aujourd'hui article 66, paragraphe 11,du
Règlement, entre une demande en indication de mesures conservatoires
et la requête initiale;))Compétenceen matière de pêcheries(Royaume-
Unic.Islande), ordonnance du 17août 1972,paragraphe 12).Unedemande
de mesures provisoires est donc une phase particulière maisnon pas indé-
pendante de la requêteinitiale; il n'y a pas de magie des mots et il est
impossible de croire qu'on puisse écarterdes problèmes de compétence,

de recevabilitéet de réalitéde la requête principale en indiquant simple-
ment que ces points essentiels pour le juge d'attribution qu'est la Cour
ne sont tenus pour acquis que provisoirement, prima facie, sans qu'ils
soient préjugés. C'estdans chaque affaire, en fonction des problèmes
juridictionnels au sens le plus large, des circonstances et«du droit de
chacun» (article 41- c'est moi qui souligne) qu'il convient de décider
s'il est possible d'indiquer des mesures conservatoires et il faut que les
formules employéescorrespondent aux réalités.

Telle n'est pas l'analyse du pouvoir institué dans l'article 41 du Statut
qui a été faitedans la présenteinstance. La Cour,par le renvoi de la dé-
cision sur leseffetsdu défaut, aadoptéune thèsed'indépendancecomplète
de la demande de mesures conservatoires par rapport à l'affaire objet de
la requête.

Il est inutile de se référàrcertains systèmesjuridiques internes qui
connaîtraient une telle indépendance car la Cour a ses propres règlesde
procédureet doit les appliquer dans son systèmejuridictionnel tel qu'il a
été établisur la base d'une juridiction acceptéevolontairement, en fonc-tion d'une certaine sociétéinternationale. C'est un fait de la vie inter-
nationale que le recours aujuge n'estpas obligatoire; la Cour doit veiller

à ce qu'une telle obligation ne soit pas introduite par lebiais de demandes
de mesures conservatoires, à l'égardd'Etats dont la conviction visibleet
proclaméeest qu'ils n'ont accepté aucun lien avec la Cour, soit de façon
générales ,oit dans une matière déterminée.

S'il s'agissaitd'un Etat dont le défautfût dûà une absence totale de
juridiction de la Cour, soit fautede clausejuridictionnelle valable,soit en
raison du caractère irrecevable de la demande principale, la décisionim-
médiate d'incompétencevis-à-vis de la requête introductive d'instance
elle-mêmeserait prise sans délai;la décisionde la Cour dans la présente
affaire est que, malgrél'affirmation qu'une matière a étéformellement
exclue de la compétencede la Cour et que 1'Etatauteur de cette affirma-
tion se considère comme en dehors de la juridiction de la Cour pour
tout ce qui se rapporte à cette matière, il est possible d'indiquer des
mesures conservatoires sans préjugerle droit de cet Etat.

Dans lejugement que la Courdoit porter surtoute demande de mesures
provisoires l'urgence n'estpas une considérationdominante et exclusive;
il faut rechercher entre les deux notions de juridiction et d'urgence un
équilibrequi varie avec les donnéesde chaque affaire. Si la juridiction
est évidenteet l'urgence aussi,il n'y a aucune difficultémais c'est une
hypothèseexceptionnelle. Lorsque la juridiction n'est pas évidente, qu'il
y ait urgence ou non, la Cour doit prendre le temps nécessairepour un
examen des problèmes posésqui soit de nature àentraîner sa conviction,
ce qu'elle pouvait faire sans délai exagérédans la présente affaire à
l'égardde diverses objectionsà son pouvoir dejuger l'affaire tellequ'elle
est décritedans larequêteprincipale.
Il n'y a pas de présomption de compétencede la Cour en faveur du
demandeur, ni de présomption d'incompétence en faveurdu défendeur;

ilya un droit de chacun àun examenutile et sérieuxdesathèse.

Un Etat n'a pas à attendre deux ans ou davantage avant que la Cour
vérifiesa prétentior, qu'il n'existe pas de différend justiciable,car dans
ce cas il n'y a rien débattre; l'autre Etat auteur de la demande dont la
réalitéest contestée a évidemment un droit égal à faire reconnaître
l'existencedu différend qu'il invoque.Mais l'égalitentre cesprétentions
est rompue si, par le biais de l'urgence alléguee l'indication de mesures
conservatoires, une présomption joue en faveurdu demandeur sans vérifi-
cation sérieusepar le juge de l'objection. On a plaidéde la part du de-
mandeur que lesargumentations surtous cesproblèmes seraientexposées
ultérieurement;cela seul,en soi, estla négationde la prétentionde l'autre
Etat d'êtreimmédiatementmis hors d'un litige inexistant selonlui. Ainsi,
pour maintenir l'égalitéentre les parties, dans un cas où des objections
relativesà la contexture du différend lui-mêmseont élevéesl,e traitement121 ESSAISNUCLÉAIRES (OP. DISS.GROS)

prioritaire de ces objections est une nécessité.Dans leur opinion dissi-
dente commune sir Arnold McNair et MM. Basdevant, Klaestad et
Read écrivaientsur la question de l'obligation d'arbitrage:

((Rien dans la déclaration de 1926n'indiquant une intention de
tenir pour suffisantesdes considérationsprimafacie, nous estimons,
sur la base du principe ci-dessusrappeléet de l'application qui en a

étéconstammentfaite, que le Royaume-Uni ne peut êtredéclaré tenu
d'accepter laprocédure d'arbitragepar application de la déclaration
de 1926que s'ilest établid'une manière qui satisfassela conviction
de la Cour que le différend relatif à la validitéde la réclamation
Ambatielos rentre dans la catégoriede ceux pour lesquels le Royau-
me-Uni a consenti à l'arbitrage par la déclarationde 1926.~(Amba-
tielos,fond: obligationd'arbitrage, C.I.J. Recueil1953,p. 29.)

M. Winiarski a pris position aussi en faveur de la prioritéde certaines
questions de recevabilitépar rapport aux questions de compétence(avis
concernant Certaines dépensesdes Nations Unies, C.I.J. Recueil 1962,
p. 449).De mêmed ,ans une opinion individuellede sirGerald Fitzmaurice:

((11est cependant d'autres exceptions n'ayant pas le caractère
d'exceptionsà la compétencedelaCour qui peuvent et, à strictement
parler, doivent êtreexaminées préalablement à toute question de
compétence. Ainsi, une exceptiond'après laquelle la requêten'a
pas révéléqu'il existait véritablement un différeentre les parties
doit êtrediscutéeavantla compétence,car, s'iln'ya pas de différend,
il n'y a rienpropos de quoi laCour puisseenvisagersa compétence
ou son incompétence. C'estpour cette raison qu'une telle exception
concernerait plutôt la recevabilitéque la compétence.»

«Dans le domaine généraldu droit international, il n'ya rien qui
corresponde aux procédures applicablesdanslaplupart des systèmes
juridiques nationaux et oùl'on prévoit l'élimination relativementtôt
au cours de l'instance, avant que le tribunal soit appelérancher,
des demandes considérées comme inacceptablesou ne pouvant être
examinéespour un motif a priori. Etant donné l'absence d'un «fil-
trage» analogue dans le domaine juridictionnel où la Cour se meut,

on doit considérerle droit de prendre des mesures semblables, pour
des motifs semblables, comme entrant dans les pouvoirs inhérents
oudansla compétencedelaCouren tant que tribunal international.))
(Cameroun septentrional, C..J. Recueil 1963,p. 105, 106-107.)

C'est cet ensemble de questions de compétenceet de recevabilitéqui
ont étérenvoyéespar la Cour à la prochaine phase; il appartiendraalors
à la Cour, et alors seulement, de déciderdans son arrêtle sort de ces
questions. Ilya désormaisunecertaine tendance à considérerque les ordonnances
du 17août 1972sur les pêcheriesont en quelque sorte consolidéle droit
en matièrede mesures conservatoires. Mais chaque cas doit êtreexaminé
selon ses mériteset, comme le dit l'article 41, selon ((lescirconstances)).
Or le cas de l'Islande étaitentièrementdifférentquant aux circonstances.
La Cour s'étaitrendu compte de l'existence de sa propre compétence,
l'urgenceétaitadmise, la réalitéet la définition précide l'objet du diffé-
rend n'étaientpas contestées;enfin le droit des Etats demandeurs qui fut
sauvegardépar les ordonnances était reconnu comme un droit actuelle-

ment exercétandis que la prétention de l'Islande étaitune modification
du droit existant. Il suffitd'énumérercespoints pour voir que la situation
est entièrement différenteaujourd'hui; pour le dernier point c'est même
une situation inverse puisque les demandeurs se fondent sur une préten-
tion à la modification du droit positif actuel en demandantà la Cour de
reconnaître l'existenced'une règleinterdisant ledépassementd'un seuilde
pollution atomique.
*

C'est en présence d'unetelle situation que la Cour s'est trouvéepour
appliquer I'article 41du Statut dans la présenteaffaire. Les objections
quisétaientfaites ou pouvaient l'êtreà la compétence dela Cour et à la
recevabilitéde lademande ont un caractèreprioritaireabsolu. L'article41
ne donne pas à la Cour un pouvoir discrétionnaire mais une compétence
liéepar les conditions établiesdans ce texte; il faut que «les circonstances
l'exigent))et que les mesures soient nécessairespour conserver le «droit
de chacun)), ce qui recouvre le même examendu fàit et du droit que
l'article 53, paragraphe 2, imposeà la Cour, en plus de cette obligation

généralepour tout juge, y compris le juge de référéd ,e s'assurer de sa
propre compétence;c'est ceque rappelle l'article 36, paragraphe 6. Or,
l'examendu fait et du droit qui est la condition de toute décisionsur des
mesures conservatoires ne peut êtresystématiquementremis à plus tard
avecl'indication que lepouvoir de la Cour fondésur l'article41 du Statut
((présupposequ'un préjudiceirréparablene doit pas êtrecauséaux droits
en litige devant le juge et qu'aucune initiative concernant les questions
litigieuses ne doit anticiper sur l'arrêtde la Cour» (ordonnance, para-
graphe 20).C'estrésoudrepar une simpleaffirmationleproblèmede l'exis-
tence des «circonstances» auxquelles se réfèrel'article 41. L'article41
oblige la Cour à rechercher si les circonstances exigent qu'elle utilisele
pouvoir d'indiquer des mesures et elle ne peut l'exercer, même si les cir-
constances l'exigent, que si sa décision peut sauvegarder le droit de
chacun ...mais si1'Etatcitéen défenseinvoque l'absencetotale de pouvoir
dela Cour et s'il n'ya pas véritablement d'objet dela demande, où serait
le droità conserver?

Ce qui a étédit plus haut sur le caractère absolument prioritaire de

certaines objections montre qu'il est impossibled'échapper à la nécessitéde trancher de teles objections avant d'indiquer des mesures conserva-
toires; s'il n'ya pas de droit, il n'y a rien conserver. Si la demande
manque d'objet, la requêteprincipale tombe, et avec elle la demande de
mesures conservatoires. L'objection estd'un caractère si fondamental

quant aux bases mêmesde la juridiction de la Cour qu'il me semble être
un abus de mots de dire qu'un droit à agir dans de telles circonstances
pourrait existerprima facie.
Lorsque laCour déclare surla base de l'article41 qu'une décisionindi-
quant des mesures conservatoires ne préjuge nila juridiction ni le fond,
ce n'est pas une constatation destinée rassurer les Etats sur le caractère
temporaire et aléatoirede cette décision;c'estl'affirmation que l'examen
del'affairepar la Cour selonlescritèresdel'article41du Statut lui permet,
dans les circonstances de cette affaire, de penser que sa décision nepeut
pas, effectivement, préjugersa juridiction ni la qualitépour agir. 11ne
s'agit pas d'une sortede formule rituelle, mais de la garantie que la Cour
est satisfaite que l'article a étécorrectement interprété et appliqué à
une certaine affaire. Mais si une indication de mesures conservatoires
préjuge en réalitlajuridiction ou l'existenced'undroità agir,la Cour n'a
pas le pouvoir de déciderces mesuresparce que lesconditions poséespar
l'article 41 du Statut ne seraient pas respectées. Cesconditions n'ayant
pas étéremplies dans la présente affaire ily a un excèsde pouvoir dans

l'application de l'article 41 par l'ordonnance du22juin 1973indiquant
des mesures conservatoires. *

Dans la présenteaffaire, sur un point de grande importance, la Cour a
passéoutre à l'une des conditions d'acceptation d'une demandede mesu-
res conservatoires. Dans l'affairedel'Usinede Chorzow,la Cour perma-
nente de Justice internationale a refuséd'indiquer des mesures conserva-
toires parce que la demande tendait à obtenir un jugement provisionnel
adjugeant une partie des conclusionsde la requêteet que, par conséquent,
«la demande ...ne rentre pas dans les termes des dispositions du Statut
etdu Règlement))(C.P.J.I. sérieA no12,p. 10).Il s'agitbien d'une condi-
tion de portéegénéralepour l'interprétationde l'article 41 du Statut de
la Cour permanente de Justice internationale qui était identique à I'ar-
ticle 41 actuel, et de la reconnaissance d'une exigencede la procédureen
matièredejuridiction incidente. 11serait eneffetcontrairela natured'une
procédure incidente,par définition, qu'ellepermette de régler le litige
dont ellen'estqu'un élément accessoire.

La comparaison de la demande principale (requête,paragraphe 50,
conclusions du demandeur) et de la demande de mesures provisoires
(demande, paragraphes 3-4 et 74) montre qu'il s'agissait bien d'une de-
mande dejugement provisionnel. La demande de mesures conservatoires
devait donc êtrerejetéepour ce motif également.

(Signé)André GROS.

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OPINION DISSIDENTE DE M. GROS

La déclaration d'acceptationde la juridiction de la Cour faite par le
Gouvernement français le 20 mai 1966 exclut de cette juridiction:
«...[les] différendsconcernant des activitésse rapportantà la défense
nationale)). Dans une communication faite à la Cour le 16mai 1973par
le Gouvernement français cette réservea étéformellement invoquée.La

limite fixéepar ce gouvernement àson acceptation a étéconsidéréepar
l'ordonnance comme ne créant pasun empêchement àl'exercicedu pou-
voir de la Cour d'accorder des mesures conservatoiresen application de
l'article 41 du Statut, la Cour estimant que le titre invoquépar le deman-
deur pour fonder la compétencede la Cour, l'Acte gknéralde 1928,
semblait suffisant,rima facie,a la fois pour justifier provisoirement sa
compétence etpour écarter l'applicationde la réservede 1966dans la
phase des mesures conservatoires, sans préjuger sa décision ultérieure
sur ces questions. Je n'ai donc riendire sur la substance des problèmes
de juridiction et de recevabilitépuisque toutes questions sans exception
concernant le pouvoir de la Cour de se saisir de l'affaire telle qu'ellea
étéprésentée dans la requêtede l'Australie sont renvoyéesla prochaine
phase de la procédure,instituéedans le dispositif de l'ordonnance.

Mais la décisionde la Cour indiquant des mesures conservatoires
constitue une application que je n'ai pu approuver de deux articles du
Statut de la Cour, les articles 53 et 41, et il convient donc que je donne
les raisons de mon dissentiment successivementsur ces deux points qui
sont relatifs la seule phase des mesures conservatoires.

Lorsque la Cour fut saisie le 9 mai 1973de la requête introductive
d'instance indiquant la Républiquefrançaise comme défendeur,signi-
fication fut faite le mêmejour au Gouvernement de la République
française qui répondit le 16 mai 1973par un document contestant for-
mellement la compétencede la Cour et concluant à ce que l'affaire soit
rayéedu rôle. Il s'agit d'un document de vingt pages qui constitue une

réponseaux communications de la Cour. La Cour, avant la première
audience, a examinécomme dans toute affaire la question de la commu-
nication au public des documents relatifsà l'instance, selon l'article48
du Règlement;dans une lettre à la Cour du 19mai 1973l'agent du de-
mandeur a fait d'expresses réserves à la communication du document
français du16mai 1973et «de tout autre document émanantdu Gouver-
nement français qui ne serait pas conforme aux procéduresrégulièresde DlSSENTlNG OPINION OF JUDGE GROS

[Translationj

The declaration of acceptance of the Court's jurisdiction made by the
French Government on 20 May 1966 excludes from that jurisdiction:
". .disputesconcerningactivitiesconnected with national defence." In a
communication macle to the Court on 16 May 1973 by the French
Government that reservation was formally invoked. The bounds placed
by that Government on its acceptance have been deemed by the Order
not to create an impediment to the exercise of the Court's power to grant
provisional measure:; in application of Article 41 of thetatute, since the
Court considered that the title invoked by the Applicant to founà the
jurisdiction of the Court, namely the General Act of 1928, seemed
sufficient, prima facie, both to justify its competenceovisionally and to
rule out the application of the 1966reservation in the interim measures
phase, without prejudging its later decision on these questions. 1 have
therefore nothing to Sayon the substance of the problems of jurisdiction
and admissibility,siriceevery question, without exception, concerning the
Court's power to take jurisdiction in the case as presented in the Appli-
cation of Australia, has beendeferred to the next phase of the proceedings,
instituted in the operative part of therder.
But the decision of the Court indicating provisional measures consti-

tutes an application which 1cannot approve of two Articles ofthe Statute
of the Court, Articles 53 and 41, and it is therefore proper that 1should
give the reasons for my dissent, successively on these two points which
relate to the one phase of provisional measures.
*
* *

When the Court was seised on 9 May 1973of the Application institu-
ting proceedings and indicating the French Republic as respondent, the
fact was signified on the same day to the Government of the French
Republic, which replied on 16 May 1973 by a document formally con-
testing the jurisdiction of the Court and submitting that the case should
be removed from the list. This was a document of 20 pages which con-
stitutes a reply to the communications of the Court. The Court, before
the first hearing, examined as in every case the question of the communi-
cation to the public of the documents in the proceedings, in accordance
with Article 48of the Rules of Court; in a letter to the Courtdated 19May
1973the Agent of the Applicant made express reservations to the com-
munication of the French document of 16 May 1973and "any further
documents from the:Government of France that do not accord with thela Cour)). Le conseil du Gouvernement de l'Australie, à la première
audience, le 21 mai 1973,a déclaré:

«Ni la Cour ni l'Australie ne doivent êtreobligées d'examiner les
arguments invoquéspar une partie, quand celle-ciles présente,non
pas à la barre, mais de façon irrégulièreou extra-judiciaire. Selon
nous, il faut s'entenir strictement au principe selon lequellesparties
doivent présenterleur argumentation régulièrementdevant la Cour;
si elles s'abstiennent de comparaître, la Cour ne doit prendre en

considérationaucunedéclarationqu'ellesviendraient à faireen dehors
de sesprocéduresétablies.Cette règlea été entout temps essentielle
pour maintenir l'intégritéde la procédure judiciaire à tous les
niveaux. Nous sommes persuadésque la Cour fera clairement savoir
qu'ellene tiendra compte d'aucune déclarationde ce genre.»
Et à la date de la présenteordonnance, le document français n'a tou-
jours pas été communiqué au public, alors que la requête australienne

et les comptes rendus des plaidoiries de l'Australie le furentpartir du
21 mai 1973.
Le fondement d'une telle attitude ne peut se trouver que dans une
certaine interprétation de l'article 53 du Statut ou de la procédurede la
Cour dans les matières préliminaires.
L'article53 du Statut de la Cour traite de la situation des Etats qui
contestent la juridiction de la Cour par un défautde comparaître ou de
conclure. Le défautest un acte reconnu dans la procédurede la Cour,
traitépar un article qui est contenu dans le chapitreI du Statut intitulé
«Procédure» et c'est en vain qu'on chercherait dans les intentions des
auteurs du Statut la volontéde pénaliser 1'Etatqui fait défaut.La thèse
contraire a étéplaidéesans l'appui d'aucune autoritéet doit êtreécartée.
Certes le défaut d'unEtat ne doit pas porter préjudice l'action intentée
par un autre Etat et le défautne peut interrompre le cours de la justice.

Mais le défaut est réglementépar l'article 53 qui décidede ses consé-
quences et, devant un défautconstaté,il faut appliquer cet article. Or
c'estce que la Cour n'a pas fait; l'ordonnance relève,dans le paragraphe
11, un défaut de comparaître, mais tient compte des conclusions du
document adressé àla Cour par leGouvernement français pour demander
la radiation de l'affairedu rôle. Or s'ily a conclusions du gouvernement
citécomme défendeurdans l'affaire,il n'y a pas défautde conclure. En
ne se prononçant ni dans un sens ni dans l'autre, et en renvoyantà une
date ultérieuresa décisionsur les conclusions du Gouvernement français
la Cour donne une interprétationde l'article 53 qui me paraît erronée.

Ce n'est pas là un problème mineuret je regrette que la Cour l'ait

renvoyé à une phase ultérieure.En indiquant à l'ouverture de la première
audience que la demande de radiation de l'affairefaite par le Gouverne-
ment français, dont «il a étédûment pris acte)), serait examinée«leregular procedures of the Court". On 21 May 1973,at the first hearing,
counsel for the Government of Australia stated :
"Neither the Clourt nor Australia should have to deal with con-
tentions advancetl by a party if not made in Court but irregularly or
outside the Courit.We submit that strict adherence should be had to
the requirements that parties must put their case regularlybefore the
Court and that, if theyfail to appear, then the Court should not take
notice of any sta.tement they may make outside the framework of

the Court's established process. This rule has been a fundamental
one throughout the ages for maintaining the integrity of the judicial
process at every level.We trust that the Court willmake clear that it
will not take such statements into account."

And still, on the date of the present Order, the French document has
not been communicated to the public, whereasthe Australian Application
and the records of the oral arguments of Australia were made public as
from 21 May 1973.

The foundation f0.r such an attitude can only be found in a certain
interpretation of Article 53of theStatute or of the procedure of the Court
in preliminary matters.
Article 53 of the Statute of the Court deals with the situation of States
wliich contest the jurisdiction of the Court by failing to appear or to
present submissions. Such deliberate non-participation is an act recog-
nized in the procedure of the Court, being dealt with by an Article which
is contained in Chapter III of the Statute, entitled "Procedure", and
nowhere in the intentions of the authors of the Statute would one be able
to find any willto perializethe State which does not appear. The contrary
proposition has been pleaded without the support of any authority and
should be dismissed. (Certainly,the absence of a State ought not to preju-
dice the action instituted by another State, and may not be allowed to
interrupt the course of justice. But non-appearance is regulated by
Article 53, which lays down what its consequences must be and, when
non-appearance isnoted, that Article must be applied.But that iswhatthe
Court did not do; the Order notes failure to appear, in paragraph 11,but
takes into account the submissions of the document addressed to the

Court by the French Government for the purpose of requesting that the
case be removed from the list. Now, if there exist submissions of the
Government cited as respondent in the case, there is no default for want
of submissions. Bypronouncing neither in one sensenor in the other, and
by deferring to a later date its decision on the submissions of the French
Government, the Court is giving an interpretation of Article 53 which 1
find erroneous.
That is not a minor problem and 1regret that the Court should have
deferred it to a later phase. By indicating at the opening of the first
hearingthat the French Government's request forthe removal of the case
from the Iist, which Iiad "been duly noted", would be dealt with "in duemoment venu)), le Présidentne réglaitqu'un problème immédiat mais
l'ordonnance a reporté encore l'échéanceE . t cette remise implique que
la Cour estime possible de traiter le Gouvernement français à la fois
comme partie à l'instance principale (cf.paragraphes 32et 33de l'ordon-
nance et la fixation'un délaipour un contre-mémoirefrançais)etcomme
en défaut dans la phase actuelle puisqu'on constate aux paragraphes
11et 34 son défautde comparaître. Mais si le Gouvernement français a
fait défaut et indiqué formellement son intentionde rester en dehors de
l'instance principale, d'une manière qui ne laisse placeà aucun doute,
ilfallait appliquer l'articleui prévoitleseffetsdu défaut,etcelaimmé-
diatement.
11ne me paraît pas conforme aux règlesde la procédure d'écarter
provisoirement l'application de l'article3 dans la présenteaffaire pour

la raison qu'il s'agitd'une phase de mesuresconservatoires. Dèsle début,
une erreur d'interprétation estinsi commise sur I'article53. Il est inutile
de rappeler lajurisprudence constante de la Cour quant à l'interprétation
de son propre Statut; ((C'està la Cour elle-même etnon pas aux Parties
qu'ilappartient de veiller l'intégritde la fonctionjudiciaire dela Cour»
(Cameroun septentrional,C.I.J. Recueil1963,p. 29).Il appartenait doncà
la Cour de décider,selon sespropres motifs, si son Statut et son Règle-
ment prévoientdes formalités indispensablespour que des conclusions
présentéesautrement soient tenues pour irrecevables et si, dans cette
hypothèse, l'article53 devait être appliquéà un double défaut, absence
et défautde conclure. Rien de cela ne fut fait et le statut du document
français demeure incertain. Contesté formellement par le demandeur
dans son existence même,la décisionsur ses conclusions renvoyée à
plus tard, il est impossiblede déduirede l'ordonnance si cedocument est

ou non une piècedu dossier dont il devait être tenu compte, à l'égaldes
observations du demandeur. Car, si le Statut et le Règlement n'interdi-
sent pas de «conclure» de la manièrechoisiedans cette affaire, le docu-
ment français aurait dû êtrereçu comme observations du défendeur;
et dans le cas inverse, rejeté,et l'articleppliqué commeil le fut dans
l'arrêtdu 2 février1973(Compétenceen matière de pêcheries (Royaume-
Unic. Islande), C.I.J. Recueil1972,paragraphe 12).

Le renvoi par la Cour de l'application des effets de l'article 53 aux
phases ultérieuresde l'affaire estdonc une décision implicitede refus
d'application de l'article3 à une phase de mesures conservatoires. C'est
une thèsequi mériteexamen. En bref, cette thèse estque le défautn'au-
rait pas nécessairement lesmêmesconséquences selon lesphases d'une

affaire et que, si l'article prévoitbien certains effets dans son para-
graphe 2, ces effets pourraient être écarlsrsqu'il s'agitd'une demande
de mesures conservatoires, malgré l'intentionmanifeste de 1'Etatabsent
du procès.
On pouvait aussi soutenir que l'article3n'ouvre de droit àfairecons- NLJCLEAR TESTS(DISS. OP. GROS) 117

course", the President was only settling an immediate problem, but the
Order has postponed the moment of decision still further. And that

postponement implies that the Court considers it possible to treat the
French Government both as a party to the main proceedings (cf. paras.
32and 33 ofthe Order and the fixingofa time-limitfor a French Counter-
Memorial) and as beinl: in default in the present phase, because itsfailure
to appear isnoted in pa.ragraphs 11and 34. Butif the French Government
has failed to appear and formally indicated itsintention to remain outside
the main proceedings, in a way which leaves no room for doubt, it was
necessary to apply Article 53, which laysdown the effectsof default, and
to apply it immediately.
It does not seem to imeto be in accordance with the rules of procedure
to suspend the application of Article 53 provisionally in the present case
on the ground that this is an interim measures phase. Thus right from the
outset an error in interpretation has been made with regard to Article 53.
1 need not recall the consistent jurisprudence of the Court as to the
interpretation of its Stiitute: "The Court itself, and not the parties, must
be the guardian of the Court's judicial integrity" (Northern Cameroons,
Judgment, I.C.J. Reports 1963, p. 29). it was therefore for the Court to

decide, on the basis ofits own reasons, whether its Statute and Rules lay
down formalities which are indispensable, so that submissions made in
any other way are to be treated as inadmissible, and whether, on that
hypothesis, Article 53 should be applied to a twofold default, absence
from the proceedings and failure to make submissions. Nothing of the
kind was done, and the:status of the French document remains uncertain.
Objection to it, on the:level of its very existence, has been taken by the
Applicant, the decisionon the submissionsmade init has been postponed;
it is impossible todedilce from the Order whether this document is or is
not a pleading in the c,asewhich should have been taken into account on
a footing of equality ~viththe observations of the Applicant. For if the
Statute and Rules of Court donot forbid the making of "submissions" in
the waywhichwas selectedin this case,the French document should have
been admitted asthe olbservationsof the respondent; and on the opposite
assumption, it should have been rejected, and Article 53applied asit was

intheJudgment of2 February 1973(FisheriesJurisdiction(United Kingdom
v. Iceland), J~risdicti~onof the Court, Judgment, I.C.J. Reports 1973,
para. 12).
The Court's postponement of the application of the effects ofArticle 53
until the later stages of the case is thus an implicit decision to refuse to
apply Article 53 to an interim measures phase. This is a position which
merits examination. Shortly expressed, the argument is that default does
not necessarily have the same consequences in al1phases of a case, and
that whileArticle 53d'oes,in paragraph 2, lay down certain effects,those
effectsmay be set aside when dealing with a request for interim measures
of protection, despite ithemanifest intention of the State which is absent
from the proceedings.
It could also be ma.intained that while Article 53 provides the partytater le défaut qu'à la partie intéresséeà le faire, mais que la Cour ne
peut y procéder proprio motu. Il suffira de dire que, même s'ilen était
ainsi, ce qui n'estpas le cas selon moi, en l'espècele demandeura implici-

tement invoqué l'article 53 dans les conditions ci-dessusrappeléesen se
référant aux dispositionsapplicables du Statut et du Règlement.Mais le
Gouvernementfrançais a fait savoir dans une lettre du 21 mai 1973qu'il
n'était«pas partie àcette affaire)); il semble difficilede ne pas voir dans
ses déclarations du 16mai et du 21 mai une volonté formellede défaut.
La Cour ne pouvait ignorer à la foislespositions prises par le demandeur
et par 1'Etat absent, alors qu'elles coïncidaient pour lui faire constater
un défaut de comparaître.

Il faudrait ajouter qu'il y aurait une sorte d'abus de la procédure à
vouloir utiliser un défaut de comparaître comme une violation des règles
de procédure entraînant la perte du droit d'être entendu par la Cour,en
créant une pénalité quele Statut lui-mêmeinterdit formellement dans
l'article53 dont l'effet principal est que, le défaut constaté, la Cour
«doit s'assurer non seulement qu'elle a compétence aux termes desarti-
cles 36 et 37, mais que les conclusions sont fondéesen fait et en droit)).
11est insolitede soutenir une chose et son contraire; devant le défaut de

comparaître, en repoussant toute décisionsur les effetsde ce-défaut,la
Cour a permis une certaine rupture de l'égalité nécessaie rntre les Etats
devant lejuge.
La juridiction de la Cour est limitéed'une part aux Etats qui l'ont
acceptée, d'autre part aux obligations formellement consenties. Juge
d'attribution, la Cour doit veiller avant tout à ne pas outrepasser la
compétencequ'elle tient de son Statut et de l'acceptation volontaire de
sa juridiction par des Etats, chacun de ceux-ci déterminant librement
l'étenduede lajuridiction reconnue à la Cour.
Un Etat est ou n'est pas soumis au juge. S'il ne l'est pas, il ne peut
être traitécomme une «partie» à un litige qui ne serait pas justiciable.
La position prise par la Cour est qu'un Etat qui se tient pour étranger à
une affaire, qui fait défautet affirmeson déclinatoirede la juridiction de
la Cour ne peut obtenir de la Cour qu'une remise àplus tard de l'examen
de son droit. Ce n'est pas ce que dit l'article 53. Le défautde comparaître
est un moyen reconnu dans la procédure de la Cour pour contester la
juridiction et ce serait créerune obligationnon prévuedans le Statut que
d'obliger un Etat à défendre sa prétention d'une autre manière que le

défaut. Il a étésoutenu que la seule manièrede contester la juridiction
de la Cour est d'utiliser l'exception préliminaire.La manière dont les
Etats contestentla compétencede la Cour ne leur est pas imposéepar un
formalismeinconnu dans la procédure dela Cour; lorsqu'ilsestimentque
cette compétence estinexistante, ils peuvent choisir de rester en dehors
de ce qui, selon eux, est un faux différend.L'article 53 en est la preuve,
et la Cour doit alors s'assurerde sa propre compétenceet de la réalitédu
différendqu'on lui soumet. Certes un Etat qui fait défautcourt un risque,
celui de ne pas fourniràla Cour tous leséléments possiblespour l'appré-interested in note being taken of default with the right to have that done,
it does not do more.,and the Court cannot take note of it proprio motu.
It willbe sufficientto observe in this respect that even ifthis were so, which
in my view it is ncit, the Applicant has in the present case implicitly
invoked Article 53 in the circumstances mentioned above, by making
reference to the app;licableprovisions of the Statute and Rules of Court.
But the French Government has indicated in a letter of 21 May 1973that

it is "not a party to this case"; it would appear difficult not to see in its
statements of 16 and 21 May a forma1 intention to fail to appear. The
Court surely could not overlook both the position taken up by the
Applicant and that of the absent State, when they were at one in seeking
that it take note of a failure to appear.
It should be added that it would be a sort of abuse of procedure to seek
to make use of a failure to appear as a breach of the rules of procedure
incurringthe loss of the right to be heard by the Court, and thus create a
penalty which the Statute itself formally forbids in Article 53, the main
effect of which is that, when a failure to appear has been noted, the Court
"must ... satisfy itself,not only that ithasjurisdiction in accordance with
Articles 36and 37,but also that the claim iswellfounded infact and law".
It is not usual to advance at one and the same time an argument and its
opposite; faced with a failure to appear, the Court, by postponing any
decision on the effects of the failure to appear, has aliowed some in-
fringement of the equality which States must enjoy before a court.
The jurisdiction of the Court is limited on the one hand to the States
which have acceptecl it, and on the other to commitments freely entered
into. As a court of specificjurisdiction, the Court must above ail take
care not to exceed the competence it derives fromits Statute and from the
voluntary acceptance of its jurisdiction by States, each of which freely
determines the scope of the jurisdiction it confers upon the Court.

A State either is or is not subject to a tribunal. If it is not, it cannot be
treated as a "party" to a dispute, which would be non-justiciable. The
position which the Court has taken is that a State which regards itself as
not concerned in a case, which fails to appear, and affirms its refusal to
accept the jurisdiction of the Court, cannot obtain from the Court any-
thing more than a postponement of the consideration of its rights. This is
not what Article 53 says. Failure to appear is a means of denying juris-
diction which is recognized in the procedure of the Court, and to oblige a
State to defend its position otherwise than by failure to appear would be
to create an obligation not provided for in th2 Statute. It has been argued
that the only way of challenging the jurisdiction of the Court is to employ
a preliminary objection. The way in which States challenge the Court's
jurisdiction is not inlposed upon them by a formalism which is unknown
in the procedure of the Court; when they consider that such jurisdiction
does not exist, they rnaychoose to keep out of what, for them, is an unreal
dispute. Article 53 is the proof of this, and the Court must then satisfy
itself of itswn jurisdiction, and of the reality of the dispute brought
before it. A State w:hichfails to appear does of course run a risk, that of 119 ESSAIS NUCLÉAIRES (OP. DISS.GROS)

ciation de sa demande de rejet d'une instance. Mais c'est un risque qu'il
est seul maître de prendre et de comparer à celui qui résulterait pour lui
d'une atteinte prolongéependant une procédure à laquelle il ne veut pas

prendre part à propos d'une affaire qu'il estime entièrement endehors de
la compétencedujuge. Certainesindications données à propos de l'ordon-
nance du 22juin 1973montrent que la possibilitéde remises successives
n'est pas exclue.

La Cour permanente de Justice internationale avait déjàmis en garde
contre l'idéequ'une requêtesuffità créerun litigejusticiable: «La compé-
tence de la Cour ne saurait dépendre seulement de la manière dont la
requêteestformulée)) (C.P.J.I. sérieA no6,p. 15).

Si, commeje le pense, le défautprévu à l'article 53n'est pas sanctionné
en soi, il devient évidentque les raisons de ce défaut,lorsqu'elles ont été
formuléesclairement, doivent être examinéespar la Cour de façon com-

plète et surtout qu'il faut les accepter ou les rejeter formellement et sans
délai. L'idéeque le défautn'est pas opposable àla Cour et au demandeur
parce qu'il s'agit d'une demande de mesures conservatoires me parait
donc manquer de pertinence.

En premier lieu personne ne conteste «le lien qui doit exister, en vertu
de l'article 61, paragraphe 1 [aujourd'hui article 66, paragraphe 11,du
Règlement, entre une demande en indication de mesures conservatoires
et la requête initiale;))Compétenceen matière de pêcheries(Royaume-
Unic.Islande), ordonnance du 17août 1972,paragraphe 12).Unedemande
de mesures provisoires est donc une phase particulière maisnon pas indé-
pendante de la requêteinitiale; il n'y a pas de magie des mots et il est
impossible de croire qu'on puisse écarterdes problèmes de compétence,

de recevabilitéet de réalitéde la requête principale en indiquant simple-
ment que ces points essentiels pour le juge d'attribution qu'est la Cour
ne sont tenus pour acquis que provisoirement, prima facie, sans qu'ils
soient préjugés. C'estdans chaque affaire, en fonction des problèmes
juridictionnels au sens le plus large, des circonstances et«du droit de
chacun» (article 41- c'est moi qui souligne) qu'il convient de décider
s'il est possible d'indiquer des mesures conservatoires et il faut que les
formules employéescorrespondent aux réalités.

Telle n'est pas l'analyse du pouvoir institué dans l'article 41 du Statut
qui a été faitedans la présenteinstance. La Cour,par le renvoi de la dé-
cision sur leseffetsdu défaut, aadoptéune thèsed'indépendancecomplète
de la demande de mesures conservatoires par rapport à l'affaire objet de
la requête.

Il est inutile de se référàrcertains systèmesjuridiques internes qui
connaîtraient une telle indépendance car la Cour a ses propres règlesde
procédureet doit les appliquer dans son systèmejuridictionnel tel qu'il a
été établisur la base d'une juridiction acceptéevolontairement, en fonc-not supplying the Court with al1possible material for the consideration of
its applicationfor disrnissalof the case. But that is a risk which the State,
and it alone, is free to chooseto take, and to compare withthe riskwhichit
would run as the result of a long drawn-out procedure in which it does
not wish to participate, with regard to a matter which it considers to be
wholly outside the Court's jurisdiction. Certain indications given in con-
nection with the Ordler of 22 June 1973 show that the possibility of
successivedeferments is not ruled out.
The Permanent Court of International Justice gave a warning against
the notion that an Application is sufficient to create a justiciable dispute:

". ..the Court's jurisdiction cannot depend solely on the wording of the
Application." (Certa,fn German Interests in Polish Upper Silesia, Juris-
diction,Judgment No. 6, 1925,P.C.I.J., Series A, No. 6, p. 15.)
If, as 1think, failure to appear as provided for in Article 53 is not in
itself subject to any sanction, it becomes evident that the reasons for such
failure to appear, when they have been clearly stated, must be examined
fully by the Court, and above al1 they must be formally accepted or
rejected, and that without delay. The idea that a failure to appear is not
opposable to the Court and to the Applicant because it is a case of a
request for interim imeasures of protection is therefore, in my view,
beside the point.
In the first place, ino-onedisputes "the connection which must exist
under Article 61,para.graph 1,[nowArt. 66, para. 11of the Rules between
a request for interim ineasures of protection and the original Application
filed with the Court" (Fisheries Jurisdiction(United Kingdom v. Iceland),
InterimProtection,Orderof 17August 1972,Z.C.J. Reports 1972,para. 12).
A request for interim measures of protection is thus a particular phase,
but one which is not lindependentof the original Application;there is no
magic in words, and it is impossible to believe that problems of juris-
diction, admissibility and reality of the principal Application can be
conjured away simply by stating that these points, which are essential for
a court of specificjurisdiction like this Court, are just being taken for
granted provisionally, prima facie, without their being prejudged. It is in

each individual case by reference to the jurisdictional problems in the
widest sense, to the circumstances, and to the "respective rightsof either
party" (Art. 41, emphasis added) that a decision should be taken as to
whether it ispossible to indicateinterim measures, and theforms of words
used must correspond to reality.
Such was not the analysis of the power instituted in Article 41 of the
Statute which was carried out in the present instance. The Court, by
putting off the decision on the effects of non-appearance, embraced the
proposition that a recluestfor provisional measures is utterly independent
in relation to the case which is the subject of the Application.
It is no use referring to certain domestic systems of law which feature
such independence, b'ecausethe Court has its own rules of procedure and
must apply them in its jurisdictional system, which, as a corollary of a
certain kind of international society, has been established on the basistion d'une certaine sociétéinternationale. C'est un fait de la vie inter-
nationale que le recours aujuge n'estpas obligatoire; la Cour doit veiller

à ce qu'une telle obligation ne soit pas introduite par lebiais de demandes
de mesures conservatoires, à l'égardd'Etats dont la conviction visibleet
proclaméeest qu'ils n'ont accepté aucun lien avec la Cour, soit de façon
générales ,oit dans une matière déterminée.

S'il s'agissaitd'un Etat dont le défautfût dûà une absence totale de
juridiction de la Cour, soit fautede clausejuridictionnelle valable,soit en
raison du caractère irrecevable de la demande principale, la décisionim-
médiate d'incompétencevis-à-vis de la requête introductive d'instance
elle-mêmeserait prise sans délai;la décisionde la Cour dans la présente
affaire est que, malgrél'affirmation qu'une matière a étéformellement
exclue de la compétencede la Cour et que 1'Etatauteur de cette affirma-
tion se considère comme en dehors de la juridiction de la Cour pour
tout ce qui se rapporte à cette matière, il est possible d'indiquer des
mesures conservatoires sans préjugerle droit de cet Etat.

Dans lejugement que la Courdoit porter surtoute demande de mesures
provisoires l'urgence n'estpas une considérationdominante et exclusive;
il faut rechercher entre les deux notions de juridiction et d'urgence un
équilibrequi varie avec les donnéesde chaque affaire. Si la juridiction
est évidenteet l'urgence aussi,il n'y a aucune difficultémais c'est une
hypothèseexceptionnelle. Lorsque la juridiction n'est pas évidente, qu'il
y ait urgence ou non, la Cour doit prendre le temps nécessairepour un
examen des problèmes posésqui soit de nature àentraîner sa conviction,
ce qu'elle pouvait faire sans délai exagérédans la présente affaire à
l'égardde diverses objectionsà son pouvoir dejuger l'affaire tellequ'elle
est décritedans larequêteprincipale.
Il n'y a pas de présomption de compétencede la Cour en faveur du
demandeur, ni de présomption d'incompétence en faveurdu défendeur;

ilya un droit de chacun àun examenutile et sérieuxdesathèse.

Un Etat n'a pas à attendre deux ans ou davantage avant que la Cour
vérifiesa prétentior, qu'il n'existe pas de différend justiciable,car dans
ce cas il n'y a rien débattre; l'autre Etat auteur de la demande dont la
réalitéest contestée a évidemment un droit égal à faire reconnaître
l'existencedu différend qu'il invoque.Mais l'égalitentre cesprétentions
est rompue si, par le biais de l'urgence alléguee l'indication de mesures
conservatoires, une présomption joue en faveurdu demandeur sans vérifi-
cation sérieusepar le juge de l'objection. On a plaidéde la part du de-
mandeur que lesargumentations surtous cesproblèmes seraientexposées
ultérieurement;cela seul,en soi, estla négationde la prétentionde l'autre
Etat d'êtreimmédiatementmis hors d'un litige inexistant selonlui. Ainsi,
pour maintenir l'égalitéentre les parties, dans un cas où des objections
relativesà la contexture du différend lui-mêmseont élevéesl,e traitementof the voluntary acceptance of jurisdiction. It is a fact of international
life that recourse to adjudication is not compulsory; theCourt has to take
care Iest, by the indirect method of requests for provisional measures,
such compulsion be introduced vis-à-vis States whose patent and pro-
claimed conviction i!; that they have not accepted any bond with the
Court, whe'her in a general way or with regard to a specified subject-
matter.
If it were a question of a State whose non-appearance was due to the
ta1 absrn~e of the Court's jurisdiction, whether for want of a valid
jurisdictional clause or by reason of the inadmissible character of the
principal claim, the immediate decision of lack of jurisdiction in regard
to the Application instituting proceedings itself would be taken without
delay; the decision of the Court in the present case is that, despite the
affirmation that a certain subject-matter has been formally excluded from
the jurisdiction of the Court, and the fact that the State which made that
affirmation considers itself to be outside the jurisdiction of the Court in

regard to everything connected with that subject-matter, it is possible
to indicate provisiorial measures without prejudging the rights of that
State.
In the decision which the Court has to take on any request for provi-
sional measures, urgency is not a dominant and exclusive consideration;
one has to seek, between the two notions of jurisdiction and urgency, a
balance which varies with the facts of each case. If the jurisdiction is
evident and the urgency also, then there is no difficulty, but that is an
exceptional hypotheisis. When the jurisdiction is not evident, whether
there is urgency or not, the Court must take the time needed for such an
examination of the problems arising as will enable it to decide one way
or the other, and that is something which it could have done without
undue delay in the present instance with regard to various objections to
its power to judge the case as described in the principaI Application.
There is no presuimption of the Court's jurisdiction in favour of the
applicant, nor any piresumptionof its lack ofjurisdiction in favour of the
respondent: there is only theright of each of them to a proper and serious
examination of its position.
A State does not have to wait two years or more for the Court to

vindicate its claim thiatno justiciable dispute exists, for if that is the case
there is nothing to be argued over; the other State, which has submitted
the claim whose reality is contested, evidently has an equal right to have
the Court acknowlecrlgethe existence of the dispute it invokes. But the
equality between these claims is upset if, by the indirect means of the
allegedly urgent necessity for the indication of provisional measures, a
presumption operatles in favour of the applicant without the Court's
carrying out any serious appraisal of the objection. On behalf of the
Applicant it has been pleaded that argument on al1these problems will
be presented later; l.hat in itself is a negation of the claim of the other
State to be immediately relieved of a dispute which it alleges not to exist.
Thus, to maintain equality between the parties, in a case where objections

25121 ESSAISNUCLÉAIRES (OP. DISS.GROS)

prioritaire de ces objections est une nécessité.Dans leur opinion dissi-
dente commune sir Arnold McNair et MM. Basdevant, Klaestad et
Read écrivaientsur la question de l'obligation d'arbitrage:

((Rien dans la déclaration de 1926n'indiquant une intention de
tenir pour suffisantesdes considérationsprimafacie, nous estimons,
sur la base du principe ci-dessusrappeléet de l'application qui en a

étéconstammentfaite, que le Royaume-Uni ne peut êtredéclaré tenu
d'accepter laprocédure d'arbitragepar application de la déclaration
de 1926que s'ilest établid'une manière qui satisfassela conviction
de la Cour que le différend relatif à la validitéde la réclamation
Ambatielos rentre dans la catégoriede ceux pour lesquels le Royau-
me-Uni a consenti à l'arbitrage par la déclarationde 1926.~(Amba-
tielos,fond: obligationd'arbitrage, C.I.J. Recueil1953,p. 29.)

M. Winiarski a pris position aussi en faveur de la prioritéde certaines
questions de recevabilitépar rapport aux questions de compétence(avis
concernant Certaines dépensesdes Nations Unies, C.I.J. Recueil 1962,
p. 449).De mêmed ,ans une opinion individuellede sirGerald Fitzmaurice:

((11est cependant d'autres exceptions n'ayant pas le caractère
d'exceptionsà la compétencedelaCour qui peuvent et, à strictement
parler, doivent êtreexaminées préalablement à toute question de
compétence. Ainsi, une exceptiond'après laquelle la requêten'a
pas révéléqu'il existait véritablement un différeentre les parties
doit êtrediscutéeavantla compétence,car, s'iln'ya pas de différend,
il n'y a rienpropos de quoi laCour puisseenvisagersa compétence
ou son incompétence. C'estpour cette raison qu'une telle exception
concernerait plutôt la recevabilitéque la compétence.»

«Dans le domaine généraldu droit international, il n'ya rien qui
corresponde aux procédures applicablesdanslaplupart des systèmes
juridiques nationaux et oùl'on prévoit l'élimination relativementtôt
au cours de l'instance, avant que le tribunal soit appelérancher,
des demandes considérées comme inacceptablesou ne pouvant être
examinéespour un motif a priori. Etant donné l'absence d'un «fil-
trage» analogue dans le domaine juridictionnel où la Cour se meut,

on doit considérerle droit de prendre des mesures semblables, pour
des motifs semblables, comme entrant dans les pouvoirs inhérents
oudansla compétencedelaCouren tant que tribunal international.))
(Cameroun septentrional, C..J. Recueil 1963,p. 105, 106-107.)

C'est cet ensemble de questions de compétenceet de recevabilitéqui
ont étérenvoyéespar la Cour à la prochaine phase; il appartiendraalors
à la Cour, et alors seulement, de déciderdans son arrêtle sort de ces
questions. NLJCLEARTESTS (DISS . P.GROS) 121

relating to the very stuff of the dispute are raised, the priority treatment
of these objections is a necessity. In their joint dissenting opinion Judges
McNair, Basdevant, Klaestad and Read wrote, with reference to the
question of the ob1igat:ionto submit to arbitration:
"Since there is nothing in the Declaration of 1926to indicite an
intention that prima facie considerations should be regarded as

sufficient,it is Ouropinion, based on the principle referred to above
and the way in which this principle has been invariably applied, that
the United Kingdom can only be held to be under an obligation to
accept the arbitril procedure by application of the Declaration of
1926if itcan be established to the satisfaction of the Court that the
difference asto the validity of the Ambatielos claim falls within the
category of differences in respect of which the United Kingdom
consented to arbitiration in the Declaration of 1926." (Ambatielos,
Merits, 1C.J. Reports 1953,p. 29.)

President Winiarski also expressed himself in favour of the priority of
certain questions of aclmissibilityover questions of jurisdiction (Certain
Expensesof the UnitedNations (Article 17,paragraph 2, of the Charter),
I.C.J. Reports 1962,p. ~449)S.ir Gerald Fitzmaurice likewise,in a separate
opinion, said:

"There are however other objections, not in the nature of objec-
tions to the competence of the Court, which can and strictly should
be taken in advanceof any question of competence. Thus a plea that
the application did not djsclose the existence, properly speaking, of
any legal dispute between the parties, must precede competence, for
if there is noispute, there is nothing in relation to which the Court
can consider whether it is competent or not. It is for this reason that
such a plea would be rather one of admissibility or receivability
than of competen~;e:"

"In the general international legal fieldthere is nothing correspon-
ding to the proce'duresfound under most national systems of law,
for eliminating at arelatively early stage, before they reach the court
which would otherwise hear and decide them, claims that are
considered to be objectionable or not entertainable on some a priori

ground. The absence of any corresponding 'filter'procedures in the
Court's jurisdictional field makes it necessary to regard a right to
take similar action, on similar grounds, as being part of the inherent
powers or jurisdiction of the Court as an international tribunal."
(Northern Camerclons,I.C.J. Reports 1963,pp. 105and 106f.)

Itis this nexus of questions of jurisdiction and of admissibility which
has been deferred by i:heCourt to the next phase; it will then be for the
Court,and then alone, to decidethe fate ofthese questions in itsjudgment. Ilya désormaisunecertaine tendance à considérerque les ordonnances
du 17août 1972sur les pêcheriesont en quelque sorte consolidéle droit
en matièrede mesures conservatoires. Mais chaque cas doit êtreexaminé
selon ses mériteset, comme le dit l'article 41, selon ((lescirconstances)).
Or le cas de l'Islande étaitentièrementdifférentquant aux circonstances.
La Cour s'étaitrendu compte de l'existence de sa propre compétence,
l'urgenceétaitadmise, la réalitéet la définition précide l'objet du diffé-
rend n'étaientpas contestées;enfin le droit des Etats demandeurs qui fut
sauvegardépar les ordonnances était reconnu comme un droit actuelle-

ment exercétandis que la prétention de l'Islande étaitune modification
du droit existant. Il suffitd'énumérercespoints pour voir que la situation
est entièrement différenteaujourd'hui; pour le dernier point c'est même
une situation inverse puisque les demandeurs se fondent sur une préten-
tion à la modification du droit positif actuel en demandantà la Cour de
reconnaître l'existenced'une règleinterdisant ledépassementd'un seuilde
pollution atomique.
*

C'est en présence d'unetelle situation que la Cour s'est trouvéepour
appliquer I'article 41du Statut dans la présenteaffaire. Les objections
quisétaientfaites ou pouvaient l'êtreà la compétence dela Cour et à la
recevabilitéde lademande ont un caractèreprioritaireabsolu. L'article41
ne donne pas à la Cour un pouvoir discrétionnaire mais une compétence
liéepar les conditions établiesdans ce texte; il faut que «les circonstances
l'exigent))et que les mesures soient nécessairespour conserver le «droit
de chacun)), ce qui recouvre le même examendu fàit et du droit que
l'article 53, paragraphe 2, imposeà la Cour, en plus de cette obligation

généralepour tout juge, y compris le juge de référéd ,e s'assurer de sa
propre compétence;c'est ceque rappelle l'article 36, paragraphe 6. Or,
l'examendu fait et du droit qui est la condition de toute décisionsur des
mesures conservatoires ne peut êtresystématiquementremis à plus tard
avecl'indication que lepouvoir de la Cour fondésur l'article41 du Statut
((présupposequ'un préjudiceirréparablene doit pas êtrecauséaux droits
en litige devant le juge et qu'aucune initiative concernant les questions
litigieuses ne doit anticiper sur l'arrêtde la Cour» (ordonnance, para-
graphe 20).C'estrésoudrepar une simpleaffirmationleproblèmede l'exis-
tence des «circonstances» auxquelles se réfèrel'article 41. L'article41
oblige la Cour à rechercher si les circonstances exigent qu'elle utilisele
pouvoir d'indiquer des mesures et elle ne peut l'exercer, même si les cir-
constances l'exigent, que si sa décision peut sauvegarder le droit de
chacun ...mais si1'Etatcitéen défenseinvoque l'absencetotale de pouvoir
dela Cour et s'il n'ya pas véritablement d'objet dela demande, où serait
le droità conserver?

Ce qui a étédit plus haut sur le caractère absolument prioritaire de

certaines objections montre qu'il est impossibled'échapper à la nécessité A certain tendency liasarisen to consider that the Orders of 17August
1972in the Fisheries .Turisdictiocases have, as it were, consolidated the

law concerning provisional measures. But each case must be examined
according to its own merits and, as Article 41 says, according to "the
circumstances". Now the case of Iceland was entirely different in cir-
cumstances. The Court had developed an awareness of the existence of
its ownjurisdiction, the urgency was admitted, the reality and the precise
definition of the dispute were not contested; finally, the right of the
Applicant States which was protected by the Orders was recognized as
being a rightcurrently exercised,whereas the claim of Icelandconstituted
a modification of existing law. It sufficesto enumerate these points to
show that the situation is entirely different today; so far as the last point
is concerned, the situation is now even the reverse, since the Applicants
stand upon a claim to the modification of existingpositive law when they
ask the Court to recognize the existence of a rule forbidding the over-
stepping of a threshold of atomic pollution.
*

Such was the situation with which the Court found itself confronted
when the application of Article 41 of the Statute in the present case was
to be considered. The:objections which were made or could be made to

the jurisdiction of the Court and the adrnissibility of the claim have a
character of absolute priority. Article 41 does not give the Court a dis-
cretionary power but a competencebound by the conditionslaid down in
that text; it is necessary that "circumstances so require" and that the
measures should be necessary to preserve "the respectiverights of either
party", which covers the same examination of fact and of law that Ar-
ticle53,paragraph 2, i,mposeson the Court, in addition to the general ob-
ligation upon every judge, including a judge of urgent cases, to satisfy
himself that he has jurisdiction; that is what Article 36, paragraph 6,
recalls. Now, the exaiminationof fact and of law which is the condition
of any decision on provisional measures cannot be systematically put off
until later with the iiidication that the Court's power under Article 41
of the Statute "pres-upposes that irreparable prejudice should not be
caused to rights which are the subject of dispute in judicial proceedings
and that the Court's judgment should not be anticipated by reason of any
initiativeregardingthr:matters inissuebeforetheCourt" (Order, para. 20).
That is to solve by a mere assertion the problem of the existence of the
"circumstances" to which Article 41 refers. Article 41 obliges the Court
to see whether the circumstancesrequire it to use the power of indicating

measures and, even if circumstancesso require, it can only exercise that
power if its decision will be able to preserve the respective rights of
either party. But ifthe Statecited as respondent invokes the Court's total
absence of power, and if the subject of the claim is really non-existent,
what rightsbould there be to preserve?
What has been said above with regard to the character of absolute
priority attaching ta1certain objections shows that it is impossible tode trancher de teles objections avant d'indiquer des mesures conserva-
toires; s'il n'ya pas de droit, il n'y a rien conserver. Si la demande
manque d'objet, la requêteprincipale tombe, et avec elle la demande de
mesures conservatoires. L'objection estd'un caractère si fondamental

quant aux bases mêmesde la juridiction de la Cour qu'il me semble être
un abus de mots de dire qu'un droit à agir dans de telles circonstances
pourrait existerprima facie.
Lorsque laCour déclare surla base de l'article41 qu'une décisionindi-
quant des mesures conservatoires ne préjuge nila juridiction ni le fond,
ce n'est pas une constatation destinée rassurer les Etats sur le caractère
temporaire et aléatoirede cette décision;c'estl'affirmation que l'examen
del'affairepar la Cour selonlescritèresdel'article41du Statut lui permet,
dans les circonstances de cette affaire, de penser que sa décision nepeut
pas, effectivement, préjugersa juridiction ni la qualitépour agir. 11ne
s'agit pas d'une sortede formule rituelle, mais de la garantie que la Cour
est satisfaite que l'article a étécorrectement interprété et appliqué à
une certaine affaire. Mais si une indication de mesures conservatoires
préjuge en réalitlajuridiction ou l'existenced'undroità agir,la Cour n'a
pas le pouvoir de déciderces mesuresparce que lesconditions poséespar
l'article 41 du Statut ne seraient pas respectées. Cesconditions n'ayant
pas étéremplies dans la présente affaire ily a un excèsde pouvoir dans

l'application de l'article 41 par l'ordonnance du22juin 1973indiquant
des mesures conservatoires. *

Dans la présenteaffaire, sur un point de grande importance, la Cour a
passéoutre à l'une des conditions d'acceptation d'une demandede mesu-
res conservatoires. Dans l'affairedel'Usinede Chorzow,la Cour perma-
nente de Justice internationale a refuséd'indiquer des mesures conserva-
toires parce que la demande tendait à obtenir un jugement provisionnel
adjugeant une partie des conclusionsde la requêteet que, par conséquent,
«la demande ...ne rentre pas dans les termes des dispositions du Statut
etdu Règlement))(C.P.J.I. sérieA no12,p. 10).Il s'agitbien d'une condi-
tion de portéegénéralepour l'interprétationde l'article 41 du Statut de
la Cour permanente de Justice internationale qui était identique à I'ar-
ticle 41 actuel, et de la reconnaissance d'une exigencede la procédureen
matièredejuridiction incidente. 11serait eneffetcontrairela natured'une
procédure incidente,par définition, qu'ellepermette de régler le litige
dont ellen'estqu'un élément accessoire.

La comparaison de la demande principale (requête,paragraphe 50,
conclusions du demandeur) et de la demande de mesures provisoires
(demande, paragraphes 3-4 et 74) montre qu'il s'agissait bien d'une de-
mande dejugement provisionnel. La demande de mesures conservatoires
devait donc êtrerejetéepour ce motif également.

(Signé)André GROS.escape from the nececjsityof settling such objections before indicating
measures of protection; if there are no rights, there is nothing to protect.
If the claim has no subject, the principal application falls to the ground,

and with it the request for provisional measures. The objection is of so
fundamental a nature iinregard to the very bases ofthe Court's jurisdiction
that it seems to me to be a misuse of language to Saythat ajus standi to
act in such circumstances could exist prima facie.
When the Court declares on the basis of Article 41 that a decision
indicating provisional measures prejudges neither the jurisdiction nor the
merits, that is not a finding which is likely to reassure States as to the
temporary and circurnstantial nature of that decision; it is an assertion
that the examination of the case by the Court in accordance with the
criteria of Article 41 of the Statute enables it, in the circumstances of
this case, to consider that its decision cannot in fact prejudge either its
jurisdiction or the question of jus standi. It is not just a kind of ritual
formula, but a warrailty that the Court is satisfied that Article 41 has
been correctly interpreted and applied to a certain case. But if in reality
an indication of provisional measures prejudges the jurisdiction or the
existence ofjus standi, the Court does not have the power to grant these
measures, because the condition laid down by Article 41 of the Statute
will not have been respected. These conditions not having been fulfilled
in the present case, the application of Article 41 in the Order of 22 June
1973indicating provisional measures constitutes an action ultra vires.
*
* *
In the present case, on a point of great importance, the Court has
ignored one of the conditions for the acceptance of a request for provi-
sional measures. In the case concerning the Factory ut Chorzbw, the
Permanent Court of International Justice refused to indicate provisional

measures because the request could be regarded as designed to obtain an
interim judgment in favour of a part of the claim formulated in the
Application and that, consequently, "the request [was] not covered by
the terms of the provisions of the Statute and Rules" (P.C.I.J., Series A,
No. 12, p. IO).Here Ive have a condition of general scope for the inter-
pretation of Article 41 of the Statute of the Permanent Court of Inter-
national Justice, whic:hwas identical to the present Article 41, and the
recognition of a procedural requirement operating in regard to inter-
locutory jurisdiction. For it wo& indeed, by definition, be contrary to
the nature of interlocutory proceedings if they enabled the dispute of
which they were only an accessory element to be disposed of.
Comparison between the principal claim (Application, para. 50, sub-
missions of the Applicant) and of the request for provisional measures
(Request, paras. 3 f. ernd74) shows thatthe latter was indeed designed to
obtain an interimjudgment. The request for provisional measures ought
therefore to have been rejected on that ground also.

(Signed) André GROS.

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Document Long Title

Opinion dissidente de M. Gros

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