Opinion dissidente de M. le juge Yusuf

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148-20140331-JUD-01-06-EN
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OPINION DISSIDENTE DE M. LE JUGE YUSUF

[Traduction]

La Cour a mal interprété le droit applicable — Le comportement du Japon
aurait dû être apprécié non pas à l’aune de critères étrangers à la convention tels
que le «caractère raisonnable», mais à la lumière de l’article VIII de la convention,
du paragraphe 30 du règlement et des lignes directrices adoptées par la CBI — La
question posée à la Cour portait sur l’interprétation d▯ traité — Il s’agissait de

déterminer si la décision du Japon d’autoriser JARPA II était conforme au droit
applicable — La Cour aurait dû rechercher si les modifications récentes de la
convention avaient eu une incidence sur l’objet et le but de celle-ci — L’article VIII
aurait dû être interprété au regard de cette évolution — Il n’entrait pas dans les
attributions de la Cour de procéder à un examen scientifique de la▯ conception et de
la mise en œuvre de JARPA II — La question de savoir si un programme est mené
à des fins de recherche scientifique ne peut être tranchée e▯ fondant sur le

caractère raisonnable de l’ampleur du recours aux prélèvement▯ s létaux — La
distinction faite entre « recherches scientifiques » et « en vue de recherches
scientifiques» n’est guère convaincante —Il est pour le moins paradoxal de conclure
qu’une activité relève de la recherche scientifique tout en ét▯ ant dépourvue de finalité
scientifique — Les paragraphes 10 e), 10 d) et 7 b) du règlement s’appliquent
uniquement à la chasse commerciale — La Cour n’a pas établi que JARPA II était
un programme de chasse commerciale — La conclusion selon laquelle le Japon a
violé le moratoire sur la chasse commerciale, le sanctuaire de l▯ éan Austral et

l’interdiction relative aux usines flottantes est dès lors sa▯ dement.

I. Introduction

1. Je regrette de ne pouvoir me rallier à la majorité qui a voté eén faveur

de la plupart des points du dispositif. Je le regrette d’autant plus éque je ne
suis certainement pas moins sensible que mes confrères à la capturée et à
la mise à mort des baleines.

2. Nous sommes nombreux à déplorer le sort réservé à ces aniémaux
intelligents, qui revêtent une forte charge symbolique, et la manièére dont
ils sont mis à mort. Ces réactions émotionnelles, parfaitement légitimes,
ne doivent toutefois pas nous faire oublier que les questions portées

devant la Cour doivent être tranchées au regard du droit, et du dréoit uni -
quement. Le règlement judiciaire des différends entre Etats ne séaurait être
dicté par des motifs d’ordre émotionnel ou purement éthique.é
3. J’ai choisi de me dissocier de la majorité car j’ai de sérieéux doutes

quant à la rigueur juridique du raisonnement suivi par la Cour et desé
conclusions auxquelles elle est parvenue. Premièrement, la question péor -
tée devant la Cour concernait l’interprétation d’un traitéé ; il s’agissait de

déterminer si les décisions du Japon étaient conformes aux dispéositions

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pertinentes de la convention. Les éléments permettant d’étabélir la licéité
des permis spéciaux délivrés par le Japon dans le cadre de JARPéA II

étaient à rechercher dans le traité lui-même, plus particulièrement dans
l’article VIII de la convention et le paragraphe 30 du règlement, ainsi que
dans les lignes directrices adoptées aux fins de l’application dudéit
article VIII (comme l’annexe P), et non dans un critère d’examen mal
défini et étranger à la convention. Le recours à un tel critéère revient à nier

la pertinence des dispositions particulières du traité qui constitéuent le
droit applicable en l’espèce.
4. Le différend opposant l’Australie au Japon ne portait pas sur laé
question de savoir si la conception et la mise en œuvre de JARPA II
étaient compatibles avec ses objectifs en tant que programme de recheérche
scientifique. Il n’appartenait pas à la Cour d’examiner et d’éévaluer la

conception et la mise en œuvre d’un plan de recherche dans le cadre d’un
programme de chasse à la baleine à des fins scientifiques (par. 67). Cette
fonction est celle du comité scientifique de la commission baleinièére inter -
nationale (CBI).
5. Deuxièmement, le raisonnement de la majorité est, à mon sens, géra -

vement vicié en ce que la Cour, d’un côté, qualifie les actiévités de
JARPA II de «recherches scientifiques» et, de l’autre, conclut que les per -
mis spéciaux délivrés par le Japon dans le cadre de ce programmée ne l’ont
pas été « en vue de recherches scientifiques ». La Cour veut bien recon -
naître que JARPA II n’est pas un programme mis en œuvre à des fins

commerciales. Si JARPA II n’a pas été conçu aux fins de la recherche
scientifique, les activités de recherche scientifique menées dans éle cadre de
ce programme ne sauraient être purement fortuites, sauf à penser qéue le
hasard fait bien les choses. En tout état de cause, il me semble pouré le
moins paradoxal de conclure que les activités de JARPA II peuvent être
globalement qualifiées de recherches scientifiques sans néanmoins éêtre

menées « en vue de recherches scientifiques », et ce, d’autant plus que la
Cour ne qualifie pas JARPA II de programme de chasse commerciale au
sens de l’article VIII de la convention et ne donne pas de définition de la
notion de « recherche scientifique».
6. Troisièmement, l’obligation de respecter la limite de capture fixéée à

zéro, toutes espèces confondues, énoncée au paragraphe 10 e) du règle -
ment (communément appelée le moratoire) aussi bien que l’inteérdiction
de chasser la baleine dans le sanctuaire de l’océan Austral (para -
graphe 10 d) du règlement) s’appliquent uniquement à la chasse commer -
ciale, et non à la chasse scientifique. Par conséquent, la concluséion selon

laquelle JARPA II viole ces dispositions, ou le moratoire sur les usines
flottantes (par. 7 b)), est selon moi complètement dénuée de fondement
juridique, tout particulièrement en l’absence d’éléments éprouvant sans
ambiguïté que JARPA II est un programme de chasse commerciale
déguisé.
7. Enfin, la Cour aurait dû se demander si l’évolution du cadre réégle -

mentaire institué par la convention — en particulier les modifications
apportées récemment au règlement, fixant à zéro les limitées de capture et

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créant des sanctuaires baleiniers — ne devait pas être prise en compte
dans le cadre de l’interprétation de l’article VIII et du pouvoir discrétion -
naire accordé aux Etats parties aux fins de la recherche scientifiqueé, afin
de clarifier la question de savoir si l’approche favorable à la coénservation
désormais attachée à la convention restreignait le droit de délivrer des

permis spéciaux.
8. Je traiterai ces questions en détail dans les paragraphes qui suiventé.

II. Le différend opposant lées Parties

et le droit applicablée

A. Le différend opposant les Parties

9. Le différend entre les Parties concerne l’interprétation et lé’applica -
tion de l’article VIII de la convention et le pouvoir discrétionnaire conféré

aux Etats contractants de délivrer des permis spéciaux à leurs éressortis -
sants pour « tuer, capturer et traiter des baleines en vue de recherches
scientifiques». Ce pouvoir discrétionnaire est subordonné aux « restric-
tions en ce qui concerne le nombre et à telles autres conditions que éle

gouvernement contractant jugera opportunes », ainsi qu’à d’autres condi -
tions et obligations découlant de l’article VIII lui-même et d’autres dispo -
sitions connexes. Plus particulièrement, la question est de savoir sié le
Japon a usé de ce pouvoir discrétionnaire à des fins autres queé la recherche
scientifique lorsqu’il a autorisé JARPA II.

10. Selon l’Australie, les activités de chasse à la baleine dans leé cadre
de JARPA II sont menées par le Japon non pas à des fins scientifiques
mais à des fins commerciales. Le Japon ne respecterait donc pas les oébli -
gations internationales que lui impose la convention, et violerait en parti -

culier l’interdiction de la chasse commerciale énoncée dans le érèglement,
lequel fait partie intégrante de la convention. Le Japon argue du conétraire
et insiste sur le droit que lui reconnaît le paragraphe 1 de l’article VIII de
la convention de délivrer des permis spéciaux. La question qui se étrouve
au cœur du litige entre les Parties est celle de savoir si le Japon eéxerce ce

droit en toute légitimité lorsqu’il délivre des permis spééciaux dans le cadre
de JARPA II et s’il respecte les conditions prévues en la matière par l’éar -
ticle VIII et les instruments connexes adoptés par la CBI ou son comité é
scientifique.
11. Les critères juridiques qu’il convient de prendre en compte pour

déterminer si un programme est mené «en vue de recherches scientifiques»
au sens de la convention, et peut donc bénéficier d’un permis sépécial de la
part d’un Etat partie, sont ceux énoncés à l’article VIII de la convention
ainsi qu’au paragraphe 30 du règlement et à l’annexe P 1, annexe dans

1 La version de 2009 de l’annexe P figure à l’annexe 116 du contre-mémoire du Japon.
La version revisée de 2012 est disponible sur le site de la CBI, en aénglais, à l’adresse

suivante : http://iwc.int/index.php?cID=3100&cType=document&download=1.

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8 CIJ1062.indb 455 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 386

laquelle sont consignées les dernières lignes directrices pertinenétes aux fins de
l’application de l’article VIII adoptées par consensus par la CBI. C’est en
recourant à l’interprétation et à l’application de ces diéspositions, qui consti -
tuent le droit applicable aux circonstances de l’espèce, que la Coéur aurait dû

tenter de résoudre le différend entre les Parties, en recherchanét également si
le Japon avait violé une quelconque autre obligation conventionnelle,é et non
pas en tentant de déterminer si la conception et la mise en œuvre éd’un pro -
gramme de recherche étaient compatibles avec ses objectifs déclaréés.

B. Le critère d’examen appliqué par la Cour

12. Or, pour apprécier si les permis spéciaux étaient délivréés en vue de
mener des recherches scientifiques dans le cadre de JARPA II, la Cour

s’est fondée non pas sur ce droit applicable, mais sur un critèére d’examen
sans rapport avec la convention. La Cour n’explique pas les raisons péour
lesquelles il était nécessaire de recourir à un tel critère ou inopportun d’in -
voquer les dispositions pertinentes de la convention. Qui plus est, elle
applique ce critère non pas à l’objet du différend entre lées Parties, à savoir

le caractère licite ou illicite du comportement du Japon dans le cadrée de
la délivrance des permis spéciaux, mais à la conception et àé la mise en
œuvre du programme. Il est ainsi dit dans l’arrêt :

«[La Cour] établira … si les baleines mises à mort, capturées et trai -
tées le sont «en vue de» recherches scientifiques, en examinant si, en ce
qui concerne le recours à des méthodes létales, la conception eét la mise

en œuvre du programme sont raisonnables au regard de ses objectifs
déclarés. Ce critère d’examen revêt un caractère objecétif». (Par. 67.)

13. Par conséquent, la Cour définit l’objet de son examen comme éétant
«la conception et la mise en œuvre de JARPA II », et non pas la licéité du
comportement du Japon et la question de savoir si, en délivrant des péer -
mis spéciaux dans le cadre de JARPA II, le Japon a violé ou viole ses

obligations découlant de la convention.
14. Il est vrai que, dans ses plaidoiries, l’Australie a déclaré :

«Pour apprécier le but réellement poursuivi par un Etat contrac -
tant lorsqu’il délivre un permis spécial, il est fort utile d’éexaminer la
conception du programme de chasse [à la baleine] et les modalités éde
son exécution, ainsi que les résultats éventuellement obtenus. » 2

Que la Cour examine, afin d’éclairer la question, la manière doént un pro-

gramme est conçu et mis en œuvre est une chose ; qu’elle considère cet
aspect du programme comme le seul à mériter un tel examen en est uéne
autre. De même, lorsque le Japon a suggéré d’évaluer le caractère « objec -
tivement raisonnable », il entendait appliquer ce critère à l’examen de la
«décision prise par un Etat» de délivrer des permis spéciaux et non pas «à

2 CR 2013/8, p. 53, par. 92 (Crawford).
3 CR 2013/22, p. 60 (Lowe).

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la conception et à la mise en œuvre » de JARPA II. Il a en outre précisé

certains des paramètres qui devaient entrer dans le choix du critèére d’exa-
men qu’il convenait d’appliquer . Même si la Cour avait voulu utiliser le
critère proposé par le Japon, elle aurait dû définir les paréamètres à prendre

en compte ou tenter d’une quelconque manière de définir ce critéère.
15. En tout état de cause, je ne suis pas persuadé que le critère aéppliqué
par la Cour, à savoir le « caractère raisonnable de la conception et de la

mise en œuvre de JARPA II au regard des objectifs déclarés du pro -
gramme», soit fondé en droit ou conforme à la pratique de la Cour. Ilé n’est

arrivé qu’une seule fois — dans l’avis consultatif qu’elle a rendu en 2012
concernant le FIDA — que la Cour utilise le critère des motifs «objectifs et
raisonnables» pour examiner une décision, laquelle était essentiellement
5
d’ordre administratif . Il est arrivé, bien entendu, qu’elle utilise le concept
plus général de «caractère raisonnable», mais rarement en tant que critère
d’examen d’actes discrétionnaires. C’est ainsi que, dans l’éaffaire de la Bar -

celona Traction, elle a estimé que, «dans le domaine de la protection diplo-
matique comme dans tous les autres domaines, le droit international exigée
6
une application raisonnable» . Mais, de même que pour d’autres affaires,
cette conclusion concernait les méthodes d’interprétation 7.
16. La seule affaire dans laquelle la Cour a fait référence au caractère

raisonnable en tant que critère d’examen est celle de l’Elettronica Sicula, au
sujet des « réquisitions déraisonnables» de biens étrangers. En l’espèce, la

Cour devait se prononcer sur la question de savoir si, en vertu du traitéé
qu’elle devait interpréter, la réquisition de certains biens paér les autorités
italiennes était «arbitraire». Face à l’argumentation développée par le conseil

des Etats-Unis, la Cour a employé le critère du «caractère raisonnable» en
tant que critère opposé au «caractère arbitraire» 8. Or ce critère découlait des
termes du traité et n’a pas été adopté par la Cour de sa épropre initiative.

4 « Le Japon est d’accord avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande pour estimer que la

question à se poser est celle de savoir si la décision prise par uén Etat est objectivement
raisonnable ou étayée par un raisonnement cohérent et des preuvées scientifiques dignes de
foi et est, en ce sens, objectivement justifiable. » (CR 2013/22, p. 60 (Lowe).)
5 Jugement n 2867 du Tribunal administratif de l’Organisation internationale du Tr▯avail
sur requête contre le Fonds international de développement agricol▯e, avis consultatif, C.I.J.
Recueil 2012 (I), p. 27 et 29.
6
Barcelona Traction, Light and Power Company, Limited (Belgique c. Espagne),
deuxième phase, arrêt, C.I.J. Recueil 1970, p. 48.
7 Voir, par exemple, Temple de Préah Vihéar (Cambodge c. Thaïlande), exceptions
préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 1961, p. 32-33 :

«D’autre part, la Cour a décidé dans l’affaire de l’Anglo-Iranian Oil Co.
(C.I.J. Recueil 1952, p. 104) que le principe de l’interprétation suivant le sens ordi
naire n’impose pas toujours l’interprétation purement littéréale des mots et des
phrases ; dans l’affaire du Service postal polonais à Dantzig (C.P.J.I., Série B11,
p. 39), la Cour permanente a dit que ce principe ne s’appliquait pas lorsque l’int-r

prétation ainsi donnée conduisait « à des résultats déraisonnables ou absurdes ». Le
cas d’une contradiction entrerait clairement dans cette catégorie.é »
8 Elettronica Sicula S.p.A. (ELSI) (Etats-Unis d’Amérique c. Italie), arrêt, C.I.J.

Recueil 1989, p. 76-77.

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8 CIJ1062.indb 459 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 388

17. En la présente instance, au lieu d’examiner la conception et la mise
en œuvre d’un programme de recherche scientifique, tâche qui reélève du

comité scientifique de la CBI, la Cour aurait dû concentrer son anéalyse,
d’une part, sur la question de savoir si, à la lumière de l’éobjet et du but de
la convention, le Japon avait usé de manière licite du pouvoir disécrétion-
naire qu’il tenait de l’article VIII en délivrant des permis spéciaux dans le
cadre de JARPA II et, d’autre part, sur celle de savoir si le Japon avait

violé ou violait les obligations lui incombant aux termes de la conveéntion
en autorisant et en exécutant JARPA II. Le caractère raisonnable de la
conception et de la mise en œuvre de JARPA II au regard de ses objectifs
déclarés est une question qui prête à controverse et peut êétre source de
polémiques entre les scientifiques chargés d’évaluer la concéeption et la mise
en œuvre des plans de recherche. Les travaux du comité scientifiquée de la

CBI, dont les rapports reflètent souvent des divergences d’opiniéon à propos
de JARPA et de JARPA II, ainsi que les avis exprimés par les experts cités
par les Parties au cours de la procédure orale, en sont l’illustraétion.

C. Le droit applicable

18. L’article VIII de la convention, qui est au cœur du différend oppo -
sant les Parties, est ainsi libellé :
«1. Nonobstant toute disposition contraire de la présente conven -

tion, chaque gouvernement contractant pourra accorder à l’un quel -
conque de ses ressortissants un permis spécial autorisant l’intééressé à
tuer, capturer et traiter des baleines en vue de recherches scientifiqueés
et subordonnant cette autorisation aux restrictions en ce qui concerne
le nombre et à telles autres conditions que le gouvernement contrac -
tant jugera opportunes ; les baleines pourront être tuées, capturées

ou traitées conformément aux prévisions du présent article séans qu’il
y ait lieu de se conformer aux dispositions de la présente conventioné.
Chaque gouvernement contractant devra porter immédiatement à
la connaissance de la commission toutes les autorisations de cette
nature qu’il aura accordées. Un gouvernement contractant pourra
révoquer à tout moment un permis spécial par lui accordé.

2. Dans toute la mesure du possible, les baleines capturées en vertu
de ces permis spéciaux devront être traitées conformément auéx direc -
tives formulées par le gouvernement qui aura délivré le permis,é les -
quelles s’appliqueront également à l’utilisation des produités obtenus.
3. Dans la mesure du possible, chaque gouvernement contractant

devra transmettre à l’organisme que la Commission pourra désigner
à cet effet, à des intervalles d’un an au maximum, les renseigne ments
de caractère scientifique dont il disposera sur les baleines et la chéasse à
la baleine, y compris les résultats des recherches effectuées en applica -
tion du paragraphe 1 du présent article et de l’article IV.
4. Reconnaissant qu’il est indispensable, pour assurer une gestion

saine et profitable de l’industrie baleinière, de rassembler et d’éanaly -
ser constamment les renseignements biologiques recueillis à l’occa-

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sion des opérations des usines flottantes et des stations terrestreés, les
gouvernements contractants prendront toutes les mesures en leur

pouvoir pour se procurer ces renseignements. »
19. L’article VIII constitue une exception au régime institué par la conven -

tion pour réglementer la chasse commerciale mais, contrairement à éce que le
Japon a soutenu dans un premier temps, cet article n’est pas ex«clu du champ
d’application de la convention». Il ne peut en être exclu car il fait partie inté
grante de cet instrument et vise une catégorie distincte de chasse àé la baleine,
que l’on peut désigner sous l’appellation « chasse scientifique» ou chasse aux

fins de la recherche scientifique. Il prévoit un système de permisé spéciaux pour
ce type de chasse, système qui s’appliques«ans qu’il y ait lieu de se conformer
aux dispositions de la présente convention » dès lors que les baleines sont
tuées, capturées ou traitées «conformément aux prévisions» de l’article VIII.
20. Les termes introductifs du paragraphe 1, « Nonobstant toute dis -
position contraire de la présente convention, chaque gouvernement

contractant pourra accorder à l’un quelconque de ses ressortissantés un
permis spécial», doivent être interprétés comme accordant aux Etats par -
ties le pouvoir discrétionnaire de délivrer un permis spécial aéux fins de la
recherche scientifique, ce pouvoir étant subordonné à telles reéstrictions et
conditions « que le gouvernement contractant jugera opportunes ». Ce

pouvoir discrétionnaire conféré aux Etats parties différenécie ce type de
chasse de la chasse commerciale, réglementée par d’autres dispoésitions de
la convention et pour laquelle il appartient à la commission de fixeré des
restrictions et des conditions, notamment en établissant l’étaté des stocks et
les quotas de chasse, conformément au règlement annexé à la éconvention.

21. C’est à l’Etat qui délivre le permis qu’il appartient de éfixer le nombre
de baleines à capturer, d’associer des méthodes non létales éaux méthodes
létales autorisées par l’article VIII et d’imposer toute autre condition jugée
opportune. Néanmoins, les baleines tuées, capturées et traitéées au titre
d’un permis spécial doivent l’être «conformément aux prévisions» de l’ar -
ticle VIII, autrement dit aux fins de la recherche scientifique et conforméé-

ment aux exigences énoncées aux paragraphes 2 et 3 dudit article. Ainsi,
aux termes de l’article VIII, est corrélée à ce droit ou ce pouvoir discrétion -
naire l’obligation de ne pas en user d’une manière arbitraire oéu inconsidé-
rée, ou à des fins autres que celles pour lesquelles il a étéé accordé.
22. Ce pouvoir discrétionnaire conféré par l’article VIII est donc loin

d’être illimité. Il doit en être fait usage de manière léégitime aux seules fins
prévues par la convention — autrement dit la recherche scientifique — et
conformément aux dispositions y énoncées. Parmi les restrictionés impo -
sées au pouvoir discrétionnaire conféré à l’Etat au tiétre de l’article VIII
figure, outre la condition première selon laquelle les permis spécéiaux ne

peuvent être délivrés qu’« en vue de recherches scientifiques », le devoir de
«porter immédiatement à la connaissance de la commission toutes lesé
autorisations de cette nature qu’il aura accordées » (par. 1) et,

«[d]ans toute la mesure du possible, … [de] transmettre à l’organisme
que la Commission pourra désigner à cet effet, à des intervalles d’un

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8 CIJ1062.indb 463 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 390

an au maximum, les renseignements de caractère scientifique dont il
disposera sur les baleines et la chasse à la baleine, y compris les résul-
tats des recherches effectuées en application du paragraphe 1 du pré -
sent article et de l’article IV » (par. 3).

23. En outre, la chair des baleines capturées aux fins de la recherche
scientifique doit être traitée conformément aux directives forméulées par le

gouvernement qui aura délivré le permis (par. 2). Comme indiqué ci-
dessus, viennent également s’ajouter à ces restrictions les obléigations
énoncées au paragraphe 30 du règlement — spécialement prévues pour
permettre au comité scientifique d’examiner et de commenter ces permis

spéciaux — ainsi que les lignes directrices figurant dans l’annexe P, exa -
minées aux paragraphes 33 et 34 ci-dessous.
24. Les obligations et les restrictions limitant le pouvoir discrétionnaiére
accordé par l’article VIII ne sauraient être établies en examinant, comme la
Cour l’a fait dans le présent arrêt, s’il existe un lien raiésonnable entre la

conception et la mise en œuvre de JARPA II et ses objectifs déclarés en tant
que plan de recherche. Elles sont à rechercher dans l’article VIII lui-même
et les instruments connexes élaborés par la CBI et son comité sécientifique
afin de garantir que les Etats habilités à délivrer un permis sépécial usent de

leur pouvoir discrétionnaire de manière légitime. Ce sont sur cées disposi -
tions et instruments que la Cour aurait dû se fonder pour établir éla licéité
du comportement du Japon relativement à la délivrance de permis spééciaux
dans le cadre de JARPA II, et non pas sur le caractère raisonnable de la

conception et de la mise en œuvre du programme au regard de ses objecétifs
déclarés, critère totalement étranger à la convention.
25. Par ailleurs, les modifications apportées au régime de réglemenéta -
tion des activités de chasse à la baleine commerciale, en particuléier le
moratoire sur la chasse commerciale adopté en 1982, toujours en vigueur

aujourd’hui, et l’interdiction de cette forme de chasse dans le saénctuaire
de l’océan Austral ne sauraient être considérées comme sans incidence sur
l’interprétation et l’application de l’article VIII de la convention, dans la
mesure où elles reflètent une évolution des mentalités et édes valeurs socié -

tales vis-à-vis de la chasse à la baleine en général. L’application de
l’article VIII dans le cadre de JARPA II aurait dû être envisagée à travers
le prisme de cette évolution et à la lumière de ses effets suér l’objet et le but
de la convention.

26. Au vu de l’évolution de la convention et du droit international deé
l’environnement en général, la Cour aurait dû rechercher si éla poursuite
de JARPA II, en tant que programme ayant recours à des méthodes
létales aux fins de la recherche scientifique au titre de l’articlée VIII, consti-
tuait une anomalie susceptible de faire échec à l’objet et au béut de la

convention, au regard des modifications apportées récemment à céet ins -
trument qui ont transformé le cadre réglementaire institué par écelle-ci. De

9 L’article IV traite de la collaboration de la commission avec des organismes-indéé
pendants de l’Etat contractant en vue d’encourager, de recommanderé ou d’organiser des
études et des enquêtes sur les baleines et la chasse à la baleiéne.

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8 CIJ1062.indb 465 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 391

fait, un rééquilibrage est intervenu entre conservation et exploitéation
pérenne, la première prenant le pas sur la seconde. Bien que, àé l’heure
actuelle, JARPA II ne semble pas avoir d’effets préjudiciables sur les
stocks de baleines, une telle analyse aurait peut-être permis de déterminer
si un programme mené à des fins de recherche scientifique, comme

JARPA II, avait toujours sa place dans le contexte d’une convention pri -
vilégiant la conservation ou si cette nouvelle approche restreignait éle droit
de délivrer des permis aux fins de la recherche scientifique.

27. Même si, au paragraphe 50 de son arrêt 10, la Cour reconnaît le

caractère central de l’interprétation et de l’application de ces dispositions,
elle glisse rapidement sur l’analyse de ces deux éléments pour ése livrer à
un examen extrêmement détaillé de la « question de savoir si la concep -
tion et la mise en œuvre de JARPA II sont raisonnables au regard des

objectifs de recherche annoncés » (voir sous-titre B, par. 127), qu’elle
adopte comme critère aux fins d’établir si JARPA II est mené à des fins
de recherche scientifique. Il convient de souligner que ni la conceptioné et
la mise en œuvre des programmes de recherche scientifique, ni leur caérac -
tère raisonnable au regard de leurs objectifs déclarés ne sont émentionnés

à l’article VIII de la convention et dans les instruments connexes men -
tionnés ci-dessus. Et pourtant, ces notions se sont étonnamment arrogé
une place centrale dans le raisonnement de la Cour.
28. Il est également dit dans l’arrêt que,

«dès lors que le paragraphe 1 de l’article VIII précise que « les
baleines pourront être tuées, capturées ou traitées conforméément aux

prévisions du présent article sans qu’il y ait lieu de se confoérmer aux
dispositions de la présente convention », les activités de chasse à la
baleine menées au titre d’un permis spécial satisfaisant aux coéndi -
tions prévues à l’article VIII ne sont pas soumises aux obligations
imposées par le règlement concernant le moratoire sur la chasse à la

baleine à des fins commerciales, l’interdiction de chasser la baleéine à
des fins commerciales dans le sanctuaire de l’océan Austral et le
moratoire sur les usines flottantes » (par. 55).

Toutefois, au lieu d’examiner si les permis spéciaux délivréés par le Japon
satisfont aux conditions de l’article VIII, la Cour choisit d’examiner et
d’appliquer le critère non pertinent du « caractère raisonnable au regard

des objectifs déclarés du programme» et en tire ses conclusions finales. Le
droit reconnu par la Cour elle-même dans son arrêt comme applicable à
l’objet du différend opposant les Parties est ainsi écartéé au profit d’un
critère obscur et contestable dont la convention ne fait nullement meén -
tion, l’arrêt faisant de plus abstraction des conséquences que épourrait

avoir sur l’interprétation du pouvoir discrétionnaire accordéé par l’ar -

10Le paragraphe 50 se lit comme suit : « Les questions concernant l’interprétation et

l’application de l’article VIII de la convention sont au cœur de la présente espèce… »

169

8 CIJ1062.indb 467 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 392

ticle VIII le souci de la conservation récemment inscrit dans la conven -
tion.

D. L’analyse de la licéité des permis spéciaux délivrés
dans le cadre de JARPA II

29. Les permis spéciaux délivrés dans le cadre de JARPA II ont-ils
avant tout pour but de mener des recherches scientifiques ou de favoriseér

l’offre sur le marché de la chair de baleine ? Existe-t-il des éléments attes -
tant qu’un permis spécial a été délivré à JARPA II alors que ce pro -
gramme poursuivait un but autre que la recherche scientifique ? Quels
sont les critères permettant de déterminer si un programme est menéé
en vue de recherches scientifiques aux termes de la convention ? Pour

répondre à ces questions ainsi qu’à d’autres interrogatioéns sur la licéité
des permis spéciaux délivrés par le Japon dans le cadre de JARPéA II, il
aurait fallu se fonder sur le droit applicable décrit ci-dessus.
30. Déterminer, sur la base d’un critère objectif, si un programme épour
lequel a été délivré un permis spécial est mené « en vue de recherches
scientifiques» et « conformément aux dispositions de l’article VIII » ne

consiste pas, contrairement à ce qui est dit dans l’arrêt, à rechercher s’il
est fait usage de méthodes létales au-delà de ce qui est raisonnable au
regard des objectifs annoncés du programme, ni si les tailles d’ééchantillon
sont raisonnables au regard de ces objectifs. Ce sont là des questionés sur
lesquelles les scientifiques et les calculs statistiques qu’ils utiliésent à cette

fin divergent. Il ne s’agit pas de critères établis aux termes éde l’article VIII
ou d’une quelconque autre disposition de la convention.
31. De la même manière, la question de savoir si un programme poursuité
une finalité scientifique ne saurait être tranchée à l’auéne du caractère rai -
sonnable de l’ampleur du recours à l’échantillonnage létaél. Aujourd’hui, la

mise à mort ou la capture d’une seule baleine peut être considéérée comme
illégale aux termes de la convention, sauf si cet acte répond aux énécessités
de la recherche scientifique. Aussi, peu importe-t-il que la taille de lé’échan-
tillon des petits rorquals prélevés dans le cadre de JARPA II soit nettement
supérieure à celle de JARPA, à moins qu’il n’ait étéé au préalable établi que
les deux programmes étaient menés en vue de recherches scientifiquées.

32. Comme indiqué ci-dessus, la licéité des permis spéciaux délivrés
dans le cadre de JARPA II devrait en tout premier lieu être appréciée au
regard des obligations de nature procédurale et substantielle imposéées par
l’article VIII lui-même et par le paragraphe 30 du règlement. Il convien -
drait également de tenir compte de l’effet sur l’interprétéation à donner de

l’article VIII des modifications apportées récemment au cadre réglemen -
taire institué par la convention, à la lumière de l’objet eté du but de celle-ci.
Le Japon a-t-il transmis au comité scientifique de la CBI, à des intervalles
d’un an au maximum, les renseignements de caractère scientifique déont il
disposait sur les baleines et la chasse à la baleine, y compris les réésultats

des recherches effectuées, conformément au paragraphe 3 du règlement ?
A-t-il soumis les propositions de permis au comité pour que celui-ci les

170

8 CIJ1062.indb 469 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 393

examine et formule un avis à leur sujet, conformément au paragraphée 30
du règlement, adopté en 1979 ? Pour répondre à ces questions, il importe

d’examiner si, au-delà de ces obligations de nature procédurale, le Japon
a violé ses obligations conventionnelles en ayant recours à des méthodes
létales dans le cadre de JARPA II, en fixant des tailles d’échantillon trop
élevées ou en autorisant que soient proposés à la vente les ésous-produits

des baleines tuées ou capturées dans le cadre de JARPA II.
33. S’agissant des obligations de nature procédurale, le paragraphe 30
du règlement demande à chaque Etat contractant de «fournir au secrétaire
de la commission baleinière internationale ses propositions de permisé scien -

tifiques avant leur délivrance et dans un délai suffisant pour permettre
au comité scientifique de les examiner et de formuler un avis à ce suéjet ».
Ce paragraphe explicite l’exigence formulée au paragraphe 3 de l’ar -
ticle VIII, énumère les quatre types d’information devant figurer dans les
11
propositions de permis et prévoit que « [l]es propositions de permis font
l’objet d’un examen et de commentaires du comité scientifique léors des réu -
nions annuelles dans la mesure du possible…» A ce propos, la Cour estime
que, « [p]our ce qui est des obligations de fond imposées par le para -

graphe 30, … le plan de recherche de JARPA II, sur la base duquel sont
délivrés les permis spéciaux, fournit les informations requisesé par cette dis -
position» (par. 239), avant de conclure que « le Japon a satisfait aux exi -
gences du paragraphe 30 en ce qui concerne JARPA II» (par. 242).

34. Cette conclusion contredit les autres conclusions de la Cour selon
lesquelles les permis spéciaux délivrés dans le cadre de JARPA II ne le
sont pas en vue de recherches scientifiques au sens du paragraphe 1 de

l’article VIII de la convention. Le respect des exigences du paragraphe 30
constitue en soi une particularité importante d’un programme menéé aux
fins de la recherche scientifique. JARPA II a été dûment examiné et com -
menté par le comité scientifique de la CBI en 2005, conformémenét aux

lignes directrices énoncées à l’annexe Y (devenue depuis l’annexe P). Le
comité s’est penché sur les méthodes employées, les efféets des captures sur
la population concernée et les possibilités de participation aux réecherches 12.
Dans d’autres cas, lorsqu’il avait été d’avis qu’une péroposition de permis

présentée par un Etat ne satisfaisait pas aux critères requis, éle comité
avait recommandé que le permis en instance ne soit pas délivré.é C’est
ainsi que, en 1987, il avait expressément recommandé à la commission de
demander à la République de Corée de s’abstenir de délivréer des permis

aussi longtemps qu’elle n’aurait pas démontré que son prograémme de
chasse n’avait pas pour effet d’épuiser les stocks, mais appoértait une

11
A savoir :a) les objectifs de la recherche ; b) le nombre, le sexe, la taille et la popula-
tion des animaux à capturer ; c) les possibilités de participation aux recherches de scienti -
fiques provenant d’autres pays ; et d) les effets potentiels de cette chasse sur la conservation
de la population concernée.
12 Rapport du comité scientifique, J. Cetacean Res. Manage, n 8 (suppl.), 2006, p. 49.
Tous les rapports du comité scientifique sont disponibles en anglais éà l’adresse suivante :
http://iwc.int/scientific-committee-reports.

171

8 CIJ1062.indb 471 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 394

13
contribution concrète à l’évaluation exhaustive de ces populéations . De
même, en 1990, face à une demande de permis présentée par l’URSS, le é
comité avait expressément relevé que « les recherches proposées ne sem -

bl[ai]ent pas structurées de manière à apporter des informationés utiles à la
gestion rationnelle des populations baleinières ou à contribuer àé l’évalua -
tion exhaustive ou à d’autres besoins de la recherche d’une impéortance
14
primordiale » . Tel n’a pas été le cas pour JARPA II, bien que 63 des
195 membres du comité scientifique aient refusé de prendre part à la réu -
nion organisée autour de ce programme (voir arrêt, par. 241).
35. En outre, comme indiqué ci-dessous au paragraphe 53, dans le rap -

port qu’il a publié en 2012, le comité scientifique a expressément recom -
mandé que l’analyse des prises par âge utilisée dans le cadre de ses travaux
sur la modélisation de la dynamique de population des petits rorqualsé soit

effectuée à partir des données issues de JARPA et de JARPA IIé ; dans
le rapport qu’il a publié en 2013, il a fait référence à l’échantillonnage
non létal des baleines à bosse dans le cadre des programmes JARPA et

JARPA II en le jugeant utile pour l’évaluation de certains stocks reproduc -
teurs de cette espèce. Si JARPA II n’était pas un programme mené aux fins
de la recherche scientifique, comme le dit la Cour dans son arrêt, le comité

scientifique de la CBI continuerait-il non seulement à l’examiner et à for -
muler des commentaires à son sujet, mais aussi à recommander d’éutiliser les
données qui en sont issues pour faire progresser ses propres travaux?

36. Un deuxième moyen d’évaluer la finalité scientifique de JARPéA II
consistait à rechercher s’il satisfaisait aux critères énoncéés dans les lignes
directrices de l’annexe P adoptées par consensus par les Etats parties à la

convention en 2006 et revisées en 2009. L’annexe P formule des exigences et
des conditions claires, auxquelles tous les permis spéciaux doivent séatisfaire et
à l’aune desquelles ils doivent être examinés et commentéés par le comité scien -
15
tifique. Les propositions de permis doivent préciser les objectifs deé l’étude

13Rep. IWC, vol. 38, 1988, p. 53-54, le comité

«s’est déclaré de nouveau très préoccupé de constater qéue les captures effectuées au titre
d’un permis spécial au cours de l’année écoulée n’aévaient pas contribué à recueillir des
données biologiques, même élémentaires [proposition de permiés présentée par la Corée].
Rien ne porte à croire que la nouvelle proposition contribuera plus uétilement aux travaux
du comité.Ce dernier demande donc à la commission d’exhorter le Gouvernement coréen
à s’abstenir de délivrer tout permis scientifique spécial taént qu’il n’aura pas démontré
que la prise de 80 baleines par an n’accélère pas le déclin de la population coéncernée
mais apporte une contribution concrète à l’évaluation exhausétive de ladite population. »

14Rep. IWC, vol. 41, 1991, p. 74-75.
15Les objectifs doivent :

a) être quantifiés dans la mesure du possible ;
b) être répartis en deux ou trois catégories, selon que de besoin é(« objectifs
primaires », «objectifs secondaires » et «objectifs accessoires ») ;
c) indiquer, pour chaque proposition présentée pour la première foéis, s’il est prévu
de recourir à des méthodes létales, à des méthodes non léétales ou à une associa
tion des deux ;

172

8 CIJ1062.indb 473 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 395

et les méthodes utilisées pour les atteindre , comporter une évaluation des
17
effets que pourraient avoir les prises sur les populations visées , fournir les
résultats d’une étude de simulation sur les effets des prisesé autorisées au titre

de permis spéciaux sur les populations, ainsi qu’une note sur les édispositions
relatives à la recherche coopérative 18. Ces lignes directrices sont traitées à la

d) inclure une brève déclaration sur l’intérêt que présenéte chaque objectif primaire,

au minimum, pour les trois grands objectifs suivants :
i) améliorer la conservation et la gestion des populations de baleines,
ii) améliorer la conservation et la gestion des autres ressources marines vivantes

ou de l’écosystème dont les populations de baleines font partieé intégrante,
iii) vérifier les hypothèses qui n’ont pas de lien direct avec la geéstion des ressour-
ces marines vivantes ;

e) indiquer, en particulier pour les points d i) et d ii) et au moins pour chaque objectif
primaire, quelle est la contribution de ces objectifs aux domaines suivaénts, entre
autres :

i) les recommandations passées du comité scientifique,
ii) la réalisation de l’évaluation exhaustive ou des évaluationsé détaillées en

cours ou susceptibles d’être réalisées à l’avenir,
iii) la conduite d’une série de mises en œuvre ou de l’évaluatéion de la mise en
œuvre de la procédure de gestion revisée ou de la procédure éde chasse abori -
gène de subsistance,

iv) une meilleure compréhension d’autres enjeux prioritaires identifiéés dans le
règlement intérieur du comité scientifique (CBI, 2006, p. 180),
v) les recommandations d’autres organisations intergouvernementales.

16 Méthodes permettant d’atteindre ces objectifs :

a) méthodes sur le terrain, et notamment :

i) espèces, nombre (voir c) ci-dessous), calendrier, région,
ii) protocole d’échantillonnage pour les aspects létaux de la propoésition,
iii) analyse des raisons pour lesquelles les méthodes non létales, les éméthodes
associées à toute activité de chasse à la baleine commerciale en cours, ou les

analyses des données passées ont été jugées insuffisantes▯ ;
b) méthodes en laboratoire ;

c) méthodes analytiques, notamment estimations de l’efficacité stéatistique, au
besoin ;
d) calendrier comprenant des objectifs intermédiaires (les italiques soént de moi).

17 Evaluation des effets potentiels des captures sur les populations concéernées :

a) synthèse des connaissances sur la structure des populations dans la zéone concernée ;
b) estimation de l’abondance des espèces ou des stocks, en indiquant éles méthodes
utilisées, en analysant le taux d’incertitude et en précisant séi ces estimations ont

déjà été prises en considération par le comité scientiéfique ;
c) indication des résultats d’une étude de simulation sur les efféets des prises autori
sées au titre de permis spéciaux sur les populations ; cette étude doit prendre en
compte l’incertitude et les projets 1) pour la durée de vie attendue du permis (à

savoir nombre d’années) et 2) pour les situations dans lesquelles la proposition
est réputée se poursuivre pour a) n années supplémentaires, b) 2n années supplé-
mentaires et c) une période plus longue à compter du début de la proposition.

18 Note concernant les dispositions relatives à la recherche coopératéive:

a) études sur le terrain ;
b) études analytiques.

173

8 CIJ1062.indb 475 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 396

va-vite dans l’arrêt (par. 240), alors que leur importance ne saurait être
sous-estimée puisque le comité scientifique les a utilisées lors de éson examen

initial de JARPA II et qu’il continue de les utiliser pour s’assurer que le pro -
gramme respecte les dispositions du paragraphe 30 du règlement et de
l’article VIII de la convention.

37. Le Japon a soumis le projet de recherche de JARPA II en mars
2005 et a fourni les informations requises par le paragraphe 30 et l’an -
nexe Y (devenue l’annexe P). Le comité a reconnu que « la proposition de
permis contenait les informations spécifiées au paragraphe 30 du règle -
19
ment » . Le comité n’a pas le pouvoir d’accorder ou de refuser un per -
mis; aux termes de l’article VIII, ce pouvoir est dévolu à l’Etat partie. Les
avis et les commentaires du comité revêtent néanmoins une trèés grande
importance. Lorsque le comité a examiné un projet de recherche, l’éEtat

concerné doit dûment prendre en considération les discussions auxquelles
a donné lieu son projet, ainsi que les conclusions et les recommandatéions
du comité. Aux termes du paragraphe 30, il est également demandé aux

Etats contractants de communiquer « les résultats préliminaires de toute
recherche menée au titre d’un permis ».
38. Il ressort des éléments de preuve produits devant la Cour que le Jéapon
continue de soumettre au comité scientifique les rapports d’expéédition

annuels de JARPA II afin de lui faire connaître les résultats préliminaires de
son programme et la mesure dans laquelle les recommandations du comitéé
ont été prises en compte 20. Il semble donc exister une concertation et une
coopération permanentes entre les scientifiques japonais de JARPA II et le

comité scientifique. Le comité a ainsi été conduit récemméent à relever dans
l’un de ses rapports que le modèle de structure des stocks utiliséé dans le
cadre de JARPA II était « simple et potentiellement performant» et que,

«outre l’intérêt général que présentent les résultatés pour comprendre la
dynamique des petits rorquals de l’Antarctique, ce modèle pourraité se révé -
ler utile à l’avenir pour attribuer à tel ou tel stock des données historiques de
capture » 21. Le comité scientifique formulerait-il des commentaires si positifs

sur JARPA II si ce programme ne poursuivait aucune finalité scientifique ?
39. JARPA II a succédé à JARPA et, même si le caractère licite de ce
dernier n’est pas en cause ici, il ne fait aucun doute que les deux péro -
grammes poursuivent des objectifs qui se chevauchent, comme le recon -

naît la Cour dans son arrêt. A cet égard, il importe de releveré que, en 2007,
le groupe de travail créé par le comité scientifique pour procééder à l’éva -
luation finale des résultats de JARPA a réaffirmé ce qu’avait dit la com -

mission en 1997, à savoir que les données issues de ce programme
pourraient se révéler utiles à exploiter :

19 J. Cetacean Res. Manage, n 8 (suppl.), 2006, p. 50.
20
Voir, par exemple, le rapport que le comité scientifique a publié éen 2012, p. 85.L’en-
semble des rapports d’expédition de JARPA/JARPA II sont disponibles, en anglais, à
l’a21esse suivante : http://www.icrwhale.org/CruiseReportJARPA.htm. o
Rapport de 2012 du comité scientifique, p. 35, J. Cetacean Res. Manage, n 14
(suppl.), 2013, p. 26.

174

8 CIJ1062.indb 477 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 397

«Même s’ils ne sont pas requis pour la gestion au titre de la RMP, é
les résultats de JARPA sont susceptibles d’améliorer la gestioné des
petits rorquals de l’hémisphère sud en permettant : 1) la réduction du
nombre actuel de scénarios plausibles envisagés dans les essais deé

simulation de mise en œuvre de la RMP; et 2) l’identification de nou-
veaux scénarios pour lesquels de futurs essais de simulation de mise é
en œuvre devront être mis au point (par exemple, la composante teém -
porelle de la structure des stocks). Les résultats des analyses de

JARPA pourraient peut-être permettre d’augmenter le nombre de
prises de petits rorquals autorisées dans l’hémisphère sud séans aug -
menter le risque d’épuisement des stocks au-delà du niveau indiqué
actuellement par les essais de simulation de mise en œuvre réaliséés
pour ces petits rorquals. » 22

40. Quant au recours aux prélèvements létaux et à l’ampleur dée ce

recours dans le cadre de JARPA II, il convient de rappeler que l’ar -
ticle VIII de la convention autorise les Etats contractants à accorder des é
permis spéciaux à leurs ressortissants afin de tuer et de captureré des
baleines aux fins de la recherche scientifique, cette autorisation étéant
subordonnée aux restrictions et à telles autres conditions que l’éEtat

contractant « jugera opportunes ». Depuis l’adoption du paragraphe 30
du règlement, en 1979, l’exercice de ce droit est désormais soumis à l’exa -
men et aux commentaires du comité scientifique de la CBI et doit se
conformer aux lignes directrices établies par le comité à cetteé fin, à savoir

l’annexe P. Cette annexe, qui a été approuvée par consensus par tous les
Etats parties à la convention, exige, comme indiqué ci-dessus, « une ana -
lyse des raisons pour lesquelles les méthodes non létales, les mééthodes
associées à toute activité de chasse à la baleine commercialée en cours ou

les analyses des données passées ont été jugées insuffiséantes ». Il s’ensuit
que l’utilisation de méthodes létales aux fins de la recherche éscientifique,
ou la prise en compte insuffisante des méthodes non létales dans éle cadre
des programmes de recherche scientifique, doit non seulement être anaély -
sée et justifiée, mais être aussi soumise à l’examen du céomité scientifique

de la CBI, afin qu’il puisse faire part de ses commentaires à ce séujet.
41. Le Japon a-t-il satisfait à ces conditions et a-t-il sérieusement envi -
sagé de recourir à des méthodes non létales dans le cadre de JARPAII? De
telles méthodes sont-elles utilisées dans le cadre de JARPA I? I Les éléments

de preuve versés au dossier montrent que le plan de recherche mentionéne
clairement les méthodes non létales qu’il est prévu d’utiéliser dans le cadre
de ce programme, notamment les relevés «visuels», l’observation «écosys -
témique» de l’habitat des baleines, « les observations océanographiques et

météorologiques…, dont la banquise, la température de surfacée de la mer,
la hauteur de la surface de la mer et la teneur en chlorophylle sur l’ensemble
de la zone de recherche, à l’aide de données satellites» 23.

22 Voir à l’adresse suivante : http://iwc.int/jarpa.
23 Contre-mémoire du Japon, annexe 150, p. 14-15.

175

8 CIJ1062.indb 479 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 398

42. En outre, au cours des plaidoiries, le conseil du Japon a affirmé quée

«[celui-ci] a[vait] tout mis en œuvre pour employer des méthodes de
recherche non létales » et que « [l]es scientifiques [de JARPA II] [avaie]nt
même obtenu quelques succès avec la méthode des prélèvemeénts biopsiques
et celle du marquage par balise permettant un suivi satellitaire d’espèces de
24
grande taille se déplaçant lentement, telles que les baleines àé bosse» . Il a
invoqué à titre de preuve le rapport d’expédition des scientéifiques de
JARPA II pour l’année 2009-2010, qui décrit de manière détailléée les prélè -

vements non létaux effectués sur des baleines bleues, des baleinées à bosse,
des rorquals communs et des baleines franches australes au cours de cettée
saison 2. Des données similaires figurent également dans le rapport d’expé-
dition le plus récent correspondant à l’année 2012-2013 . Ce rapport four-

nit des détails sur les expériences non létales conduites dans éce cadre, parmi
lesquelles «l’expérience de la distance et de l’angle d’observation», «l’expé -
rience de la photo-identification », « l’échantillonnage par prélèvement

biopsique», « le marquage par balise permettant un suivi satellitaire »,
«l’observation des matières régurgitées et des matières fécales », «l’observa -
tion des déchets marins» et «l’observation océanographique» . 27

43. Pour ce qui est de la taille des échantillons, la seule exigence forméu -
lée au paragraphe 30 du règlement est que « le nombre, le sexe, la taille et
la population des animaux à capturer» soient précisés dans la proposition
de permis; quant à l’annexe P, celle-ci fait référence à la nécessité d’établir

«un protocole d’échantillonnage pour les aspects létaux de la préoposi -
tion». Un protocole d’échantillonnage figure dans le plan de recheréche de
JARPA II (appendices 6-8) 28. La formule statistique utilisée pour calculer

les tailles d’échantillon est également reproduite à l’anénexe de l’appen -
dice 6 du plan de recherche. Le plan de recherche et ses appendices 3 à 8,
qui ont été présentés au comité scientifique de la CBI poéur examen et
commentaires en 2005, contiennent des descriptions encore plus détaillées

des calculs ayant permis de déterminer la taille des échantillons et des
méthodes statistiques utilisées. Il convient toutefois de relever éque les
experts cités à l’audience par les Parties étaient divisés sur la question de

savoir si les tailles d’échantillon finalement retenues par le Japéon dans le
cadre de JARPA II étaient adaptées aux objectifs du programme.
44. Je conçois que plusieurs scientifiques puissent raisonnablement
aboutir à des conclusions différentes sur la taille des échanétillons, compte

tenu des méthodes de calcul utilisées dans le cadre de JARPA II, des élé -
ments discrétionnaires entrant dans le choix des paramètres statisétiques sur
lesquels se fondent les calculs des échantillons, et de l’ensembleé des variables

pouvant conduire à un éventail de tailles d’échantillon posséible. En

24 CR 2013/15, p. 61 (Boyle).
25 Voir à l’adresse suivante : http://www.icrwhale.org/pdf/SC62O3.pdf, p. 9.
26 Voir à l’adresse suivante : https://events.iwc.int/index.php/scientific/SC65a/paper/
viewFile/356/331/SC-65a-O09.
27
28 Ibid., p. 3-4.
Plan de recherche de JARPA II (2005), IWC SC/57/01, appendices 6-8.

176

8 CIJ1062.indb 481 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 399

revanche, ce que je ne conçois pas, c’est que la majorité des jéuges de la Cour
ait conclu que « les tailles d’échantillon [étaie]nt supérieures à ce qui éserait
raisonnable au regard des objectifs annoncés de JARPA II » (par. 212).
L’arrêt reste muet sur les méthodes ou les critères qu’ilé conviendrait d’ap-

pliquer pour obtenir des tailles d’échantillon « raisonnables» à la lumière
des objectifs de JARPA II ou sur ce que devraient être des tailles d’échan -
tillon «raisonnables». Rien dans l’arrêt ne nous permet de savoir ce que
devraient être des tailles d’échantillon adaptées aux objectéifs de JARPA II.

De fait, cette démarche sied aux scientifiques, et non aux juristes, éet une
cour de justice serait bien en peine de se prononcer sur la question.
45. Il ressort de cette analyse que les permis spéciaux délivrés par le
Japon dans le cadre de JARPA II sont clairement conformes aux exi -
gences et conditions prescrites par les dispositions de la convention eté les

lignes directrices y afférentes concernant les permis spéciaux délivrés en
vue de recherches scientifiques, et que le comité scientifique de la éCBI a
reconnu que JARPA II contribuait à une meilleure compréhension de la
dynamique des petits rorquals de l’Antarctique et était utile àé l’analyse de

certains stocks reproducteurs de baleines à bosse. Ces caractéristéiques ne
sauraient être celles d’un programme dont la conception et la miseé en
œuvre ne poursuivent pas de finalité scientifique. Le comité scéientifique de
la CBI a indiqué à plusieurs reprises que « des questions purement scien -

tifiques et non éthiques devaient être 29ises en considération » lors de la
délivrance des permis scientifiques . Ce constat devrait également s’ap -
pliquer à l’analyse de la licéité des permis accordés paré le Japon dans le
cadre de JARPA II.

46. Cela étant, il existe une autre question sur laquelle la Cour aurait édû
se pencher lorsqu’elle a examiné la licéité de JARPA II : celle de savoir si
l’évolution du cadre réglementaire de la convention fixant à zéro les limites
de capture et établissant le sanctuaire de l’océan Austral devait être prise en
compte dans l’interprétation de l’article VIII de la convention en ce qu’elle

pouvait avoir restreint le droit de délivrer des permis spéciaux eén vue de
recherches scientifiques au titre de cet article. A mon sens, la Cour aurait
dû rechercher si un programme tel que JARPA II, qui continue de recourir
à des méthodes létales aux fins de la recherche scientifique aué titre de

l’article VIII, constitue une anomalie susceptible de faire échec à l’objéet et
au but de la convention compte tenu de l’approche favorable à la céonserva -
tion désormais inscrite dans celle-ci. Une telle analyse, outre qu’éelle aurait
ancré le raisonnement et les conclusions de la Cour dans le droit appélicable

au différend entre les Parties, aurait été très précieuése pour les Etats parties
à la convention eu égard à la disparité toujours plus grandeé entre l’ar -
ticle VIII et d’autres dispositions de la convention relatives à la chasse
commerciale.
47. L’article V de la convention autorise la CBI à apporter des modifi -

cations aux dispositions du règlement lorsqu’elles sont nécessaéires à la

29Rapport de 2005 du comité scientifique,J. Cetacean Res. Manage, n o8 (suppl.),
2006, p. 48.

177

8 CIJ1062.indb 483 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 400

réalisation des objectifs et des buts de la convention et utiles àé la conser -
vation, au développement et à l’utilisation optimale des ressouérces balei -

nières. Il prévoit également que ces modifications doivent se féonder sur la
recherche scientifique. Au vu des récentes modifications apportéesé au
règlement, qui ont fait disparaître l’objectif de l’utilisatéion optimale des
ressources baleinières en fixant à zéro les limites de capture,é les permis
spéciaux délivrés au titre de l’article VIII auraient dû être examinés à la

lumière de l’évolution générale de la convention, et en péarticulier de son
objet et de son but, afin de garantir que toutes ses dispositions avaienét été
interprétées de manière à leur donner plein effet.

III. JARPA II poursuit-il des fins autres

que la recherche scieéntifique?

48. Selon le texte de l’arrêt,

«La Cour estime que si JARPA II, pris dans son ensemble, com -
porte des activités susceptibles d’être globalement qualifiéées de
recherches scientifiques …, les éléments de preuve dont elle dispose ne
permettent pas d’établir que la conception et la mise en œuvre éde ce

programme sont raisonnables au regard de ses objectifs annoncés. La
Cour conclut que les permis spéciaux au titre desquels le Japon auto -
rise la mise à mort, la capture et le traitement de baleines dans le écadre
de JARPA II ne sont pas délivrés «en vue de recherches scientifiques»
au sens du paragraphe 1 de l’article VIII de la convention» . (Par. 227.)

49. Sur la base de cette conclusion, il est également dit dans l’arrêét que

«[l]a Cour partira donc du principe que, dès lors qu’elle n’entre pas
dans les prévisions du paragraphe 1 de l’article VIII, la chasse à la
baleine — hormis la chasse aborigène de subsistance — tombe sous
le coup des trois dispositions du règlement invoquées par l’Ausétra -

lie» (par. 230).
Les trois dispositions en question sont le paragraphe 10 e) relatif à l’obli -

gation de respecter le moratoire fixant à zéro le nombre de baleinées pou -
vant être mises à mort, toutes espèces confondues, à des finés commerciale;s
le paragraphe 7 b) relatif à l’interdiction de la chasse commerciale dans le
sanctuaire de l’océan Austral ; et le paragraphe 10 d) relatif au moratoire
sur les usines flottantes.

50. Dans son arrêt, la Cour qualifie les activités menées dans le céadre
de JARPA II de recherches scientifiques tout en parvenant à la conclu -
sion que les permis spéciaux délivrés par le Japon dans ce cadrée ne le sont
pas « en vue de recherches scientifiques ». Ce raisonnement est fort peu
convaincant, et ce, pour plusieurs raisons.
51. Premièrement, la distinction faite par la Cour entre un pro -

gramme qui « comporte des recherches scientifiques » et un programme
mené « en vue de recherches scientifiques » est pour le moins artificielle

178

8 CIJ1062.indb 485 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 401

et dénuée de fondement (par. 67), d’autant que la Cour ne définit pas la

notion de « recherches scientifiques » dans son arrêt. Cela revient à dire :
«Je sais comment définir les activités entreprises dans le but de rééaliser
«X», mais je ne sais pas comment définir « X».» Cela donne également

l’impression qu’un heureux hasard est à l’œuvre ici et que JARPA II,
bien qu’il n’ait pas été conçu aux fins de la recherche sécientifique, a
donné lieu à des activités de recherche scientifique de manièére tout à fait

fortuite.
52. Deuxièmement, tant qu’il n’est pas clairement prouvé qu’uén pro -
gramme comportant des activités de recherche scientifique n’a pas épour
but essentiel la chasse commerciale, ces activités étant menéesé à titre

accessoire, selon le paragraphe 4 de l’article VIII de la convention, un
tel programme ne saurait être considéré comme dépourvu de finaliété
scientifique.

53. Troisièmement, plusieurs éléments de preuve irréfutables renédent
peu convaincante la conclusion de la Cour selon laquelle JARPA II n’est
pas mené en vue de recherches scientifiques : le fait que le comité scienti -

fique de la CBI ait reconnu que JARPA II générait des données utiles à
ses travaux, que JARPA II emploie des méthodes non létales, lesquelles
ne sauraient caractériser la chasse commerciale, que des scientifiqueés

soient présents à bord des navires et, enfin, que le comité sciéentifique
continue de procéder à l’examen de JARPA II et de faire part de ses com -
mentaires à ce sujet. Dans le rapport qu’il a publié en 2012, le comité a
expressément recommandé que l’analyse des prises par âge efféectuée dans

le cadre de ses travaux le soit à partir des données issues, entreé autres, de
JARPA et de JARPA II 30. Dans le rapport qu’il a publié l’année sui -
vante, il a fait référence à l’échantillonnage non létéal des baleines à bosse

dans le cadre de ces deux programmes, le jugeant utile à l’évaluation de
certains stocks reproducteurs de cette espèce 31. Ce rapport renvoyait éga-
lement aux données photographiques de JARPA et de JARPA II concer -
32
nant les baleines bleues , et aux données sur l’épaisseur de la couche de
graisse obtenues à partir des prélèvements létaux effectués dans le cadre
de ces deux programmes 33.
54. Quatrièmement, aucun élément de preuve ne démontre clairemenét

que les permis spéciaux délivrés par le Japon dans le cadre de éJARPA II

30 J. Cetacean Res. Manage, n 14 (suppl.), 2013, p. 29 :

«Section 10.1.4 Développement continu des modèles de prises par âge : la modéli
sation de la dynamique des populations est un moyen d’étudier l’ééventuelle évolution
de l’abondance et de la capacité de charge dans les zones IIIE-VW,é lorsqu’il existe des
données appropriées. Les données utilisées sont le nombre dée prises et la longueur,
l’âge et le sexe des spécimens capturés dans le cadre de camépagnes commerciales
et des deux programmes JARPA, ainsi que les estimations d’abondance iéssues du

programme IDCR/SOWER. »
31 Rapport de 2013 du comité scientifique de la CBI, https://archive.iwc.int/pages/view.
php?ref=2128, par. 10.2.1.1.
32 Ibid., par. 10.3.1.4.
33 Ibid.

179

8 CIJ1062.indb 487 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 402

ne l’ont pas été à des fins de recherche scientifique, à émoins de présumer
la mauvaise foi du Japon. Comme cela a été dit, à juste titre, édans l’affaire
du Lac Lanoux : « [I]l est un principe général de droit bien établi selon
lequel la mauvaise foi ne se présume pas.» 34 En tout état de cause, il n’ap-
partient pas à la Cour d’analyser les motifs auxquels obéit le éJapon lors -

qu’il délivre des permis spéciaux dans le cadre de JARPA II aussi
longtemps que ces permis sont conformes à ses obligations. Il semble,é
toutefois, que l’analyse et les conclusions de l’arrêt portent éà présumer la
mauvaise foi du Japon, sans que cela soit dit expressément, puisque léa
Cour considère que JARPA II viole les dispositions de la convention rela -

tives à la chasse à la baleine à des fins commerciales.
55. Cinquièmement, aucun élément de preuve ne vient étayer l’éalléga -
tion selon laquelle le programme serait mené à des fins commercialées. Aux
termes de l’article VIII de la convention, l’expression «en vue de recherches
scientifiques» ne signifie pas que la mise à mort et la capture des baleines

doivent servir un but exclusivement scientifique. Le paragraphe 2 de l’éar -
ticle VIII prévoit expressément que les baleines mises à mort en vertéu d’un
permis spécial doivent être traitées conformément aux directéives formulées
— y compris en matière de chasse commerciale —par le gouvernement
ayant délivré ledit permis. Par conséquent, l’article VIII prévoit un but

subsidiaire ou accessoire, qui peut revêtir un caractère commerciaél. Il va de
soi que le but principal doit être la recherche scientifique, mais laé vente de
la chair de baleine conformément à l’article VIII ne prive pas un pro -
gramme mené au titre d’un permis spécial de son caractère scéientifiqu:eun
tel programme peut être mené en vue de recherches scientifiques.

56. Quant à la conclusion de l’arrêt selon laquelle l’autorisation accor -
dée au profit de JARPA II est contraire à trois dispositions du règlement
(à savoir par. 7 b), 10 d) et 10 e)), il n’existe à mon sens aucun fondement
juridique à l’appui d’une telle conclusion, sauf à démontérer sans la
moindre ambiguïté que JARPA II est un programme de chasse commer -

ciale déguisé ou que les activités menées dans ce cadre sont pour l’essen -
tiel de nature commerciale. Pour pouvoir affirmer qu’il y a eu violaétion du
moratoire sur la chasse commerciale ou de l’interdiction de la chasseé à la
baleine dans le sanctuaire de l’océan Austral, il faut pouvoir démontrer
que JARPA II est un programme de chasse commerciale.

57. L’adjectif « commerciale» aux paragraphes 10 d) et 10 e) n’a pas
été défini au moment de l’adoption des modifications du rèéglement ; il ne
l’a pas été davantage par la suite. Il ne fait néanmoins aucéun doute qu’il
s’agit de chasse à la baleine à des fins commerciales. Dans soné arrêt, la
Cour ne qualifie pas JARPA II de programme de chasse commerciale,

mais la conclusion selon laquelle ce dernier viole le moratoire sur la céhasse
commerciale (par. 10 e)) et l’interdiction de la chasse à la baleine dans le
sanctuaire de l’océan Austral (par. 10 d)) sous-entend qu’il s’agit d’un
programme mené à des fins commerciales.

34Affaire du Lac Lanoux, 16 novembre 1957, Recueil des sentences arbitr(RSA),
vol. XII, p. 305: «[I]l est un principe général de droit bien établi selon lequel éla mauvaise foi

ne se présume pas. »

180

8 CIJ1062.indb 489 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 403

58. Comment cette conclusion pourrait-elle être compatible avec le
recours à des méthodes non létales dans le cadre de JARPA II ou avec le
fait que le comité scientifique de la CBI ait reconnu l’utilitéé des données
obtenues par ces méthodes, comme indiqué au paragraphe 53 ci-dessus ?
Que dire des éléments attestant les nombreuses contributions scienétifiques

apportées exclusivement par les données obtenues grâce aux mééthodes
non létales utilisées dans le cadre de JARPA II ? Ces éléments montrent
que cent contributions scientifiques ont été recensées entre 1988 et 2013,
lesquelles n’ont pu être réalisées que grâce aux donnéées issues
des méthodes non létales employées dans le cadre de JARPA et de
35
JARPA II . Il paraît particulièrement douteux que de telles contribu -
tions scientifiques puissent être apportées par un programme de chasse
commerciale.
59. Il est dit au paragraphe 230 de l’arrêt que « la Cour ne voit aucun

motif d’examiner les éléments de preuve apportés par les Parties à l’appui
de leurs thèses contradictoires sur le point de savoir si la chasse pératiquée
dans le cadre de JARPA II est, à certains égards, de nature commerciale».
Cette affirmation est cependant contredite par la distinction opéréée dans
l’arrêt entre les activités comportant des recherches scientifiéques et un

programme mené en vue de recherches scientifiques. Une telle distinctéion
n’aurait de sens que s’il pouvait être prouvé que JARPA II est un pro -
gramme de chasse à la baleine à des fins commerciales prévoyanté acces -
soirement la collecte et l’analyse de données biologiques, tel queé prévu au

paragraphe 4 de l’article VIII de la convention. Cette affirmation est éga -
lement contredite par la conclusion selon laquelle JARPA II viole le
moratoire sur la chasse commerciale (règlement, par. 10 d)).

IV. Conclusion

60. Les éléments de preuve produits devant la Cour ne viennent pas
étayer la conclusion selon laquelle les permis spéciaux délivréés dans le
cadre de JARPA II servaient un but autre que la recherche scientifique. Ils

n’établissent pas davantage que ces permis spéciaux ne sont pasé conformes
aux exigences et conditions prescrites par les dispositions de l’artiécle VIII
de la convention, du paragraphe 30 du règlement et des lignes directrices
applicables en matière de programmes de recherche scientifique. La vréaie

question est celle de savoir si l’évolution du cadre réglementaéire institué
par la convention, qui a conduit à fixer à zéro les limites de écapture et à
créer un sanctuaire dans l’océan Austral, doit être prise en compte dans
l’analyse de l’article VIII de la convention et de la licéité des permis spé -
ciaux délivrés par le Japon au titre dudit article aux fins de la érecherche

scientifique, et dans quelle mesure l’application de l’article VIII et le

35 Voir à l’adresse suivante : http://www.icrwhale.org/pdf/ScientificContribution

JARPA.pdf, p. 3.

181

8 CIJ1062.indb 491 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 404

recours aux méthodes létales en vue de recherches scientifiques foént l’objet
de restrictions depuis que l’utilisation optimale des ressources baleéinières
ne compte plus parmi les objectifs essentiels de la convention.
61. Il est tout à fait regrettable que la Cour, au lieu de se livrer àé cette
analyse juridique, ait entrepris d’évaluer la conception et la misée en œuvre

du programme, ainsi que leur caractère raisonnable au regard des objeéc -
tifs du programme, tâche qui relève normalement de la compétencée du
comité scientifique de la CBI. Il est prévu que ce dernier procèéde à une
évaluation globale de JARPA II en 2014. Par le passé, lorsqu’il a estimé
qu’une proposition de permis soumise par un Etat ne satisfaisait pas éaux

critères requis, le comité a expressément recommandé de ne péas délivrer le
permis en question. Or, il ne l’a pas fait pour JARPA II. Cela montre à
tout le moins que la pratique du comité est adaptée à la tâcéhe qui lui a été
assignée, celle d’évaluer la conception et la mise en œuvre édes programmes

de recherche scientifique au titre de la convention, et de faire part deé ses
commentaires à ce sujet à la CBI.

(Signé) Abdulqawi A. Yusuf.

182

8 CIJ1062.indb 493 18/05/15 09:29

Bilingual Content

383

DISSENTING OPINION OF JUDGE YUSUF

The Court misconstrued the applicable law — The parameters of review of
Japan’s conduct are Article VIII of the ICRW, paragraph 30 of the Schedule, and
the Guidelines adopted, not extraneous standards such as “reasonablen▯ess” — The
question before the Court is treaty interpretation — It is whether Japan’s decision
to authorize JARPA II was consistent with the applicable law — The Court should
have assessed the effect of recent amendments on the object and purpose ▯of the
Convention — Article VIII should have been interpreted in light of that evolution —
The Court’s function is not to conduct a scientific review of the design and

implementation of JARPA II — Whether or not a programme is for purposes of
scientific research cannot be determined on the basis of the reasonablen▯ess of the
scale of the use of lethal sampling — The distinction between “scientific research”
and “for purposes of scientific research” adopted by the Judgment ▯is unpersuasive —
It is paradoxical to conclude that something constitutes scientific rese▯arch but is
not for purposes thereof —Paragraph 10 (e), paragraph 10 (d), and paragraph 7 (b)
of the Schedule only apply to commercial whaling — The Court has not established
that JARPA II was commercial whaling — The finding that Japan has breached

the moratorium, the Southern Ocean Sanctuary and the ban on factory ship▯s is
thus unwarranted.

I. Introduction

1. I regret not to be able to join the majority that has voted in favour
of most of the operative paragraphs of this Judgment. I regret it all thée
more since I am certainly no less sensitive than my colleagues to the taék -

ing and killing of the whales.
2. Many of us are disturbed by the killing of these iconic and intelli -
gent animals and by the manner in which they are killed. However, these é
perfectly justified emotional reactions should not make us overlook thaté

it is only by reference to the law that the issues before this Court cané be
resolved. The judicial settlement of disputes between States cannot be
made on emotional or purely ethical grounds.

3. I have decided to dissent because I have serious doubts about the
legal correctness of the Court’s reasoning and its conclusions. Firsté, the
question before the Court is one of treaty interpretation and it is whetéher

or not Japan’s decisions are consistent with the relevant provisions éof the
ICRW. The parameters to determine the legality of Japan’s special peré -

161

8 CIJ1062.indb 450 18/05/15 09:29 383

OPINION DISSIDENTE DE M. LE JUGE YUSUF

[Traduction]

La Cour a mal interprété le droit applicable — Le comportement du Japon
aurait dû être apprécié non pas à l’aune de critères étrangers à la convention tels
que le «caractère raisonnable», mais à la lumière de l’article VIII de la convention,
du paragraphe 30 du règlement et des lignes directrices adoptées par la CBI — La
question posée à la Cour portait sur l’interprétation d▯ traité — Il s’agissait de

déterminer si la décision du Japon d’autoriser JARPA II était conforme au droit
applicable — La Cour aurait dû rechercher si les modifications récentes de la
convention avaient eu une incidence sur l’objet et le but de celle-ci — L’article VIII
aurait dû être interprété au regard de cette évolution — Il n’entrait pas dans les
attributions de la Cour de procéder à un examen scientifique de la▯ conception et de
la mise en œuvre de JARPA II — La question de savoir si un programme est mené
à des fins de recherche scientifique ne peut être tranchée e▯ fondant sur le

caractère raisonnable de l’ampleur du recours aux prélèvement▯ s létaux — La
distinction faite entre « recherches scientifiques » et « en vue de recherches
scientifiques» n’est guère convaincante —Il est pour le moins paradoxal de conclure
qu’une activité relève de la recherche scientifique tout en ét▯ ant dépourvue de finalité
scientifique — Les paragraphes 10 e), 10 d) et 7 b) du règlement s’appliquent
uniquement à la chasse commerciale — La Cour n’a pas établi que JARPA II était
un programme de chasse commerciale — La conclusion selon laquelle le Japon a
violé le moratoire sur la chasse commerciale, le sanctuaire de l▯ éan Austral et

l’interdiction relative aux usines flottantes est dès lors sa▯ dement.

I. Introduction

1. Je regrette de ne pouvoir me rallier à la majorité qui a voté eén faveur

de la plupart des points du dispositif. Je le regrette d’autant plus éque je ne
suis certainement pas moins sensible que mes confrères à la capturée et à
la mise à mort des baleines.

2. Nous sommes nombreux à déplorer le sort réservé à ces aniémaux
intelligents, qui revêtent une forte charge symbolique, et la manièére dont
ils sont mis à mort. Ces réactions émotionnelles, parfaitement légitimes,
ne doivent toutefois pas nous faire oublier que les questions portées

devant la Cour doivent être tranchées au regard du droit, et du dréoit uni -
quement. Le règlement judiciaire des différends entre Etats ne séaurait être
dicté par des motifs d’ordre émotionnel ou purement éthique.é
3. J’ai choisi de me dissocier de la majorité car j’ai de sérieéux doutes

quant à la rigueur juridique du raisonnement suivi par la Cour et desé
conclusions auxquelles elle est parvenue. Premièrement, la question péor -
tée devant la Cour concernait l’interprétation d’un traitéé ; il s’agissait de

déterminer si les décisions du Japon étaient conformes aux dispéositions

161

8 CIJ1062.indb 451 18/05/15 09:29 384 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

mits for JARPA II, are to be found in the treaty itself, particularly Arti -
cle VIII, paragraph 30, of the Schedule and the Guidelines adopted for

the application of Article VIII (such as Annex P) ; and not in some extra -
neous and undefined standard of review. Resort to such a standard
negates the relevance of the specific provisions of the treaty which conésti -
tute the law applicable to this dispute.

4. The dispute before the Court in the instant case is not about the fit
between the aims of JARPA II and its design and implementation as a
scientific research programme ; nor is it the task of the ICJ to review and
evaluate the design and implementation of a research plan for scientificé

whaling (para. 67). That is the function of the Scientific Committee of the
International Whaling Commission (IWC).

5. Secondly, I think that the reasoning of the majority is seriously

flawed in characterizing, on the one hand, JARPA II activities as “scien -
tific research”, while concluding, on the other, that the special perémits
granted by Japan for JARPA II are not “for purposes of scientific
research”. JARPA II is not implemented for commercial purposes and
the Judgment recognizes as much. If it was not designed for purposes of é

scientific research, it could not have simply stumbled into scientific
research activities, unless it is accepted that serendipity was at work éhere.
In any case, it appears to me paradoxical that a programme that is
broadly characterized as scientific research is considered by the majoriéty
not to be “for purposes of scientific research”, particularly withéout its
qualification as commercial whaling under Article VIII, paragraph 4, of

the ICRW and without a definition of the words “scientific research”é.

6. Thirdly, both the obligation to respect zero catch limits of whales

from all stocks (generally known as the moratorium) established in para -
graph 10 (e) of the Schedule and the prohibition on whaling in the
Southern Ocean Sanctuary (para. 10 (d) of the Schedule) apply only to
commercial whaling, not to research whaling. Thus, there is, in my view,é
no legal basis to the conclusion that JARPA II is in breach of those pro -

visions, or of the factory ship moratorium (para. 7 (b)), particularly in
the absence of clear evidence which establishes that JARPA II is com -
mercial whaling in disguise.

7. Finally, the Court should have assessed whether the evolving regula-

tory framework of the Convention — particularly the recent amendments
to the Schedule setting zero catch limits and establishing whale sanctuaér -

162

8 CIJ1062.indb 452 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 384

pertinentes de la convention. Les éléments permettant d’étabélir la licéité
des permis spéciaux délivrés par le Japon dans le cadre de JARPéA II

étaient à rechercher dans le traité lui-même, plus particulièrement dans
l’article VIII de la convention et le paragraphe 30 du règlement, ainsi que
dans les lignes directrices adoptées aux fins de l’application dudéit
article VIII (comme l’annexe P), et non dans un critère d’examen mal
défini et étranger à la convention. Le recours à un tel critéère revient à nier

la pertinence des dispositions particulières du traité qui constitéuent le
droit applicable en l’espèce.
4. Le différend opposant l’Australie au Japon ne portait pas sur laé
question de savoir si la conception et la mise en œuvre de JARPA II
étaient compatibles avec ses objectifs en tant que programme de recheérche
scientifique. Il n’appartenait pas à la Cour d’examiner et d’éévaluer la

conception et la mise en œuvre d’un plan de recherche dans le cadre d’un
programme de chasse à la baleine à des fins scientifiques (par. 67). Cette
fonction est celle du comité scientifique de la commission baleinièére inter -
nationale (CBI).
5. Deuxièmement, le raisonnement de la majorité est, à mon sens, géra -

vement vicié en ce que la Cour, d’un côté, qualifie les actiévités de
JARPA II de «recherches scientifiques» et, de l’autre, conclut que les per -
mis spéciaux délivrés par le Japon dans le cadre de ce programmée ne l’ont
pas été « en vue de recherches scientifiques ». La Cour veut bien recon -
naître que JARPA II n’est pas un programme mis en œuvre à des fins

commerciales. Si JARPA II n’a pas été conçu aux fins de la recherche
scientifique, les activités de recherche scientifique menées dans éle cadre de
ce programme ne sauraient être purement fortuites, sauf à penser qéue le
hasard fait bien les choses. En tout état de cause, il me semble pouré le
moins paradoxal de conclure que les activités de JARPA II peuvent être
globalement qualifiées de recherches scientifiques sans néanmoins éêtre

menées « en vue de recherches scientifiques », et ce, d’autant plus que la
Cour ne qualifie pas JARPA II de programme de chasse commerciale au
sens de l’article VIII de la convention et ne donne pas de définition de la
notion de « recherche scientifique».
6. Troisièmement, l’obligation de respecter la limite de capture fixéée à

zéro, toutes espèces confondues, énoncée au paragraphe 10 e) du règle -
ment (communément appelée le moratoire) aussi bien que l’inteérdiction
de chasser la baleine dans le sanctuaire de l’océan Austral (para -
graphe 10 d) du règlement) s’appliquent uniquement à la chasse commer -
ciale, et non à la chasse scientifique. Par conséquent, la concluséion selon

laquelle JARPA II viole ces dispositions, ou le moratoire sur les usines
flottantes (par. 7 b)), est selon moi complètement dénuée de fondement
juridique, tout particulièrement en l’absence d’éléments éprouvant sans
ambiguïté que JARPA II est un programme de chasse commerciale
déguisé.
7. Enfin, la Cour aurait dû se demander si l’évolution du cadre réégle -

mentaire institué par la convention — en particulier les modifications
apportées récemment au règlement, fixant à zéro les limitées de capture et

162

8 CIJ1062.indb 453 18/05/15 09:29 385 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

ies — should be taken into account in the interpretation of Article VIII
and the discretionary power it grants to States parties for purposes of é
scientific research to shed light on the extent to which the conservatioénist
approach now adopted in the Convention restricts the right to issue spe -

cial permits.

8. I will further elaborate on these matters below.

II. The Dispute between theé Parties and
the Applicable Law

A. The Dispute between the Parties

9. The dispute between the Parties concerns the interpretation and
application of Article VIII of the ICRW and the discretionary power it
grants any Contracting Government to issue special permits to its nationé -
als “to kill, take and treat whales for purposes of scientific researéch”. This

discretionary power is subject to “such restrictions as to number andé . . .
to such other conditions as the Contracting Government thinks fit” anéd
to the other requirements and obligations arising from Article VIII itself
and from other related provisions. More specifically, what is in issue is
whether Japan has used that discretionary power for purposes other than é

scientific research in connection with the authorization granted to
JARPA II.
10. According to Australia, Japan is not conducting whaling under the
JARPA II programme for purposes of scientific research, but for com -

mercial purposes, and is therefore in breach of its international obligaé -
tions under the ICRW, and particularly those relating to commercial
whaling included in the Schedule, which is an integral part of the Conven -
tion. Japan asserts the contrary and insists on its right to issue speciéal

permits under Article VIII, paragraph 1, of the Convention. At the heart
of the dispute between the Parties is the lawful exercise of that right éby
Japan in issuing special permits for JARPA II and its compliance with the
corresponding requirements under Article VIII and related instruments
adopted by the IWC or by the Scientific Committee.

11. In determining whether a given programme is “for purposes of sci -
entific research” under the ICRW, and may therefore be granted a specéial

permit by a State party, the relevant legal criteria to be considered arée
those contained in Article VIII of the Convention, together with para -
graph 30 of the Schedule and Annex P , the latter being the latest relevant

1 The 2009 version of “Annex P” is Annex 116 to the Counter-Memorial of Japan. The
2012 revised version is available on the IWC website at: http://iwc.int/index.php?cID=3100
&cType=document&download=1.

163

8 CIJ1062.indb 454 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 385

créant des sanctuaires baleiniers — ne devait pas être prise en compte
dans le cadre de l’interprétation de l’article VIII et du pouvoir discrétion -
naire accordé aux Etats parties aux fins de la recherche scientifiqueé, afin
de clarifier la question de savoir si l’approche favorable à la coénservation
désormais attachée à la convention restreignait le droit de délivrer des

permis spéciaux.
8. Je traiterai ces questions en détail dans les paragraphes qui suiventé.

II. Le différend opposant lées Parties

et le droit applicablée

A. Le différend opposant les Parties

9. Le différend entre les Parties concerne l’interprétation et lé’applica -
tion de l’article VIII de la convention et le pouvoir discrétionnaire conféré

aux Etats contractants de délivrer des permis spéciaux à leurs éressortis -
sants pour « tuer, capturer et traiter des baleines en vue de recherches
scientifiques». Ce pouvoir discrétionnaire est subordonné aux « restric-
tions en ce qui concerne le nombre et à telles autres conditions que éle

gouvernement contractant jugera opportunes », ainsi qu’à d’autres condi -
tions et obligations découlant de l’article VIII lui-même et d’autres dispo -
sitions connexes. Plus particulièrement, la question est de savoir sié le
Japon a usé de ce pouvoir discrétionnaire à des fins autres queé la recherche
scientifique lorsqu’il a autorisé JARPA II.

10. Selon l’Australie, les activités de chasse à la baleine dans leé cadre
de JARPA II sont menées par le Japon non pas à des fins scientifiques
mais à des fins commerciales. Le Japon ne respecterait donc pas les oébli -
gations internationales que lui impose la convention, et violerait en parti -

culier l’interdiction de la chasse commerciale énoncée dans le érèglement,
lequel fait partie intégrante de la convention. Le Japon argue du conétraire
et insiste sur le droit que lui reconnaît le paragraphe 1 de l’article VIII de
la convention de délivrer des permis spéciaux. La question qui se étrouve
au cœur du litige entre les Parties est celle de savoir si le Japon eéxerce ce

droit en toute légitimité lorsqu’il délivre des permis spééciaux dans le cadre
de JARPA II et s’il respecte les conditions prévues en la matière par l’éar -
ticle VIII et les instruments connexes adoptés par la CBI ou son comité é
scientifique.
11. Les critères juridiques qu’il convient de prendre en compte pour

déterminer si un programme est mené «en vue de recherches scientifiques»
au sens de la convention, et peut donc bénéficier d’un permis sépécial de la
part d’un Etat partie, sont ceux énoncés à l’article VIII de la convention
ainsi qu’au paragraphe 30 du règlement et à l’annexe P 1, annexe dans

1 La version de 2009 de l’annexe P figure à l’annexe 116 du contre-mémoire du Japon.
La version revisée de 2012 est disponible sur le site de la CBI, en aénglais, à l’adresse

suivante : http://iwc.int/index.php?cID=3100&cType=document&download=1.

163

8 CIJ1062.indb 455 18/05/15 09:29 386 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

set of Guidelines for the application of Article VIII adopted by consensus
at the IWC. It is on the basis of the interpretation and application of
these provisions, which constitute the law applicable to the circumstancées

of the present dispute, together with the assessment of whether Japan haés
breached any other treaty obligations, that the Court should have tried éto
resolve the dispute before it, and not on the basis of an analysis of thée fit
between the design and implementation of a research programme and its

stated objectives.

B. The Standard of Review Applied by the Court

12. The Court does not, however, use that applicable law to evaluate

whether the special permits issued by Japan for JARPA II are for purposes
of scientific research. Instead of using those parameters, the Court comées up
with a standard of review that is extraneous to the Convention. The needé to
resort to such a standard is not explained, nor is it indicated that theé appli-

cable provisions of the Convention are somehow inadequate to the task.
Moreover, the Court does not apply the standard it sets forth to the subéject
of the dispute between the Parties, namely the legality of Japan’s coénduct in
issuing special permits to JARPA II, but rather to a review of the design and

implementation of JARPA II. Thus, it is stated in the Judgment that:
“the Court will consider if the killing, taking and treating of whaleés

is ‘for purposes of’ scientific research by examining whether, in éthe
use of lethal methods, the programme’s design and implementation
are reasonable in relation to achieving its stated objectives. This
standard of review is an objective one.” (Para. 67.)

13. Consequently, for the Court the object of the review is “the design

and implementation of JARPA II” rather than the legality of the conduct
of Japan and whether or not Japan, by issuing special permits for
JARPA II, has violated or is violating its obligations under the Conven -
tion.

14. It is true that Australia, in its oral pleadings, suggested that
“[I]n assessing the actual purpose of a Contracting Government in

issuing a special permit it is instructive to have regard to the design é
and implementation of the whaling programme, as well as any results
obtained.” 2

However, it is one thing to use design and implementation as an “instéruc-
tive” factor and another to treat it as the sole object of review to éwhich

regard should be had by the Court. Similarly, the su3gestion by Japan toé
use the standard of “objective reasonableness” concerned the review of
“a State’s decision” to issue special permits and not the “design and
implementation” of JARPA II. Japan’s suggestion was also accompanied

2CR 2013/8, p. 53, para. 92 (Crawford).
3CR 2013/22, p. 60 (Lowe).

164

8 CIJ1062.indb 456 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 386

laquelle sont consignées les dernières lignes directrices pertinenétes aux fins de
l’application de l’article VIII adoptées par consensus par la CBI. C’est en
recourant à l’interprétation et à l’application de ces diéspositions, qui consti -
tuent le droit applicable aux circonstances de l’espèce, que la Coéur aurait dû

tenter de résoudre le différend entre les Parties, en recherchanét également si
le Japon avait violé une quelconque autre obligation conventionnelle,é et non
pas en tentant de déterminer si la conception et la mise en œuvre éd’un pro -
gramme de recherche étaient compatibles avec ses objectifs déclaréés.

B. Le critère d’examen appliqué par la Cour

12. Or, pour apprécier si les permis spéciaux étaient délivréés en vue de
mener des recherches scientifiques dans le cadre de JARPA II, la Cour

s’est fondée non pas sur ce droit applicable, mais sur un critèére d’examen
sans rapport avec la convention. La Cour n’explique pas les raisons péour
lesquelles il était nécessaire de recourir à un tel critère ou inopportun d’in -
voquer les dispositions pertinentes de la convention. Qui plus est, elle
applique ce critère non pas à l’objet du différend entre lées Parties, à savoir

le caractère licite ou illicite du comportement du Japon dans le cadrée de
la délivrance des permis spéciaux, mais à la conception et àé la mise en
œuvre du programme. Il est ainsi dit dans l’arrêt :

«[La Cour] établira … si les baleines mises à mort, capturées et trai -
tées le sont «en vue de» recherches scientifiques, en examinant si, en ce
qui concerne le recours à des méthodes létales, la conception eét la mise

en œuvre du programme sont raisonnables au regard de ses objectifs
déclarés. Ce critère d’examen revêt un caractère objecétif». (Par. 67.)

13. Par conséquent, la Cour définit l’objet de son examen comme éétant
«la conception et la mise en œuvre de JARPA II », et non pas la licéité du
comportement du Japon et la question de savoir si, en délivrant des péer -
mis spéciaux dans le cadre de JARPA II, le Japon a violé ou viole ses

obligations découlant de la convention.
14. Il est vrai que, dans ses plaidoiries, l’Australie a déclaré :

«Pour apprécier le but réellement poursuivi par un Etat contrac -
tant lorsqu’il délivre un permis spécial, il est fort utile d’éexaminer la
conception du programme de chasse [à la baleine] et les modalités éde
son exécution, ainsi que les résultats éventuellement obtenus. » 2

Que la Cour examine, afin d’éclairer la question, la manière doént un pro-

gramme est conçu et mis en œuvre est une chose ; qu’elle considère cet
aspect du programme comme le seul à mériter un tel examen en est uéne
autre. De même, lorsque le Japon a suggéré d’évaluer le caractère « objec -
tivement raisonnable », il entendait appliquer ce critère à l’examen de la
«décision prise par un Etat» de délivrer des permis spéciaux et non pas «à

2 CR 2013/8, p. 53, par. 92 (Crawford).
3 CR 2013/22, p. 60 (Lowe).

164

8 CIJ1062.indb 457 18/05/15 09:29 387 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

by certain criteria for determining what the appropriate standard of
review would consist of . Even if the Court wanted to use the standard

suggested by Japan, it should have defined the criteria underlying its
application by the Court, or otherwise tried to define it.

15. In any case, I am not persuaded that the standard of “reasonable -
ness of the design and implementation of JARPA II in relation to the

stated objectives of the programme”, applied by the Court, is groundeéd in
law or in the practice of this Court. The Court used the test of “objéective
and reasonable” grounds for a decision it was reviewing only once beféore,

in the 2012 Advisory Opinion on the IFAD, where the standard was
adopted concerning what was essentially an administrative matter . There
are of course some cases where the Court employed the more general

concept of “reasonableness”, but rarely as a standard of review ofé discre -
tionary acts. For example, in the Barcelona Traction case, the Court held
that “in the field of diplomatic protection as in all other fields of interna -
6
tional law, it is necessary that the law be applied reasonably” . But this,
as other cases, concerned methods of interpretation 7.

16. The only case where a standard of review of reasonableness was
referred to is the Elettronica Sicula case, concerning “unreasonable requisi -

tions” of foreign property. Here the Court had to determine whether uénder
the treaty which the Court was interpreting the requisition of certain pérop -
erty by Italian authorities was “arbitrary”. On cue from United States

counsel, the test of “reasonableness” was used by the Court as oneé which
constituted the opposite of “arbitrariness” 8. But this test arose from the
terms of the treaty, and was not adopted by the Court on its own.

4
“Japan agrees with Australia and New Zealand in regarding the test as being whether
a State’s decision is objectively reasonable, or supported by coherenét reasoning and
respectable scientific evidence and . . . in this sense, objectively justifiable.” (CR 2013/22,
p. 60 (Lowe).)
5 Judgment No. 2867 of the Administrative Tribunal of the International Labour Organi -

zation upon a Complaint Filed against the International Fund for Agricul▯tural Development,
Advisory Opinion, I.C.J. Reports 2012 (I), pp. 27 and 29.
6 Barcelona Traction, Light and Power Company, Limited (Belgium v. Spain), Second
Phase, Judgment, I.C.J. Reports 1970, p. 48.
7 See, e.g., Temple of Preah Vihear (Cambodia v. Thailand), Preliminary Objections,
Judgment, I.C.J. Reports 1961, pp. 32-33 :

“Moreover, the Court has held in the Anglo-Iranian Oil Co. case (I.C.J. Reports
1952, p. 104) that the principle of the ordinary meaning does not entail that words
and phrases are always to be interpreted in a purely literal way ; and the Permanent
Court, in the case of the Polish Postal Service in Danzig (P.C.I.J., Series B, No. 11,

p. 39), held that this principle did not apply where it would lead to ‘soémething unrea
sonable or absurd’. The case of a contradiction would clearly come unéder that head.”

8
Elettronica Sicula S.p.A. (ELSI) (United States of America v. Italy), Judgment,
I.C.J. Reports 1989, pp. 76-77.

165

8 CIJ1062.indb 458 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 387

la conception et à la mise en œuvre » de JARPA II. Il a en outre précisé

certains des paramètres qui devaient entrer dans le choix du critèére d’exa-
men qu’il convenait d’appliquer . Même si la Cour avait voulu utiliser le
critère proposé par le Japon, elle aurait dû définir les paréamètres à prendre

en compte ou tenter d’une quelconque manière de définir ce critéère.
15. En tout état de cause, je ne suis pas persuadé que le critère aéppliqué
par la Cour, à savoir le « caractère raisonnable de la conception et de la

mise en œuvre de JARPA II au regard des objectifs déclarés du pro -
gramme», soit fondé en droit ou conforme à la pratique de la Cour. Ilé n’est

arrivé qu’une seule fois — dans l’avis consultatif qu’elle a rendu en 2012
concernant le FIDA — que la Cour utilise le critère des motifs «objectifs et
raisonnables» pour examiner une décision, laquelle était essentiellement
5
d’ordre administratif . Il est arrivé, bien entendu, qu’elle utilise le concept
plus général de «caractère raisonnable», mais rarement en tant que critère
d’examen d’actes discrétionnaires. C’est ainsi que, dans l’éaffaire de la Bar -

celona Traction, elle a estimé que, «dans le domaine de la protection diplo-
matique comme dans tous les autres domaines, le droit international exigée
6
une application raisonnable» . Mais, de même que pour d’autres affaires,
cette conclusion concernait les méthodes d’interprétation 7.
16. La seule affaire dans laquelle la Cour a fait référence au caractère

raisonnable en tant que critère d’examen est celle de l’Elettronica Sicula, au
sujet des « réquisitions déraisonnables» de biens étrangers. En l’espèce, la

Cour devait se prononcer sur la question de savoir si, en vertu du traitéé
qu’elle devait interpréter, la réquisition de certains biens paér les autorités
italiennes était «arbitraire». Face à l’argumentation développée par le conseil

des Etats-Unis, la Cour a employé le critère du «caractère raisonnable» en
tant que critère opposé au «caractère arbitraire» 8. Or ce critère découlait des
termes du traité et n’a pas été adopté par la Cour de sa épropre initiative.

4 « Le Japon est d’accord avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande pour estimer que la

question à se poser est celle de savoir si la décision prise par uén Etat est objectivement
raisonnable ou étayée par un raisonnement cohérent et des preuvées scientifiques dignes de
foi et est, en ce sens, objectivement justifiable. » (CR 2013/22, p. 60 (Lowe).)
5 Jugement n 2867 du Tribunal administratif de l’Organisation internationale du Tr▯avail
sur requête contre le Fonds international de développement agricol▯e, avis consultatif, C.I.J.
Recueil 2012 (I), p. 27 et 29.
6
Barcelona Traction, Light and Power Company, Limited (Belgique c. Espagne),
deuxième phase, arrêt, C.I.J. Recueil 1970, p. 48.
7 Voir, par exemple, Temple de Préah Vihéar (Cambodge c. Thaïlande), exceptions
préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 1961, p. 32-33 :

«D’autre part, la Cour a décidé dans l’affaire de l’Anglo-Iranian Oil Co.
(C.I.J. Recueil 1952, p. 104) que le principe de l’interprétation suivant le sens ordi
naire n’impose pas toujours l’interprétation purement littéréale des mots et des
phrases ; dans l’affaire du Service postal polonais à Dantzig (C.P.J.I., Série B11,
p. 39), la Cour permanente a dit que ce principe ne s’appliquait pas lorsque l’int-r

prétation ainsi donnée conduisait « à des résultats déraisonnables ou absurdes ». Le
cas d’une contradiction entrerait clairement dans cette catégorie.é »
8 Elettronica Sicula S.p.A. (ELSI) (Etats-Unis d’Amérique c. Italie), arrêt, C.I.J.

Recueil 1989, p. 76-77.

165

8 CIJ1062.indb 459 18/05/15 09:29 388 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

17. In the present case, the Court should have focused its analysis on
the lawful use by Japan of its discretionary power under Article VIII, in

light of the object and purpose of the Convention, in issuing a special é
permit for JARPA II and whether or not Japan has violated or is violat -
ing its obligations under the ICRW in authorizing and implementing
JARPA II, instead of reviewing the design and implementation of a scien -
tific research programme, which is the task of the Scientific Committee of

the IWC. The reasonableness of the design and implementation of
JARPA II in relation to achieving its stated objectives is a debatable mat -
ter the assessment of which may give rise to genuine differences of opéin -
ion among scientists who have to deal with the design and implementationé
of research plans. This is confirmed by the work of the Scientific Commiét -
tee of the IWC, where the divergences of opinion on JARPA and

JARPA II are often reflected in its reports. It is also confirmed by the
views expressed by the experts presented by the Parties during the oral é
proceedings.

C. The Applicable Law

18. Article VIII of the ICRW, which is at the core of the dispute
between the Parties, reads as follows :
“1. Notwithstanding anything contained in this Convention any

Contracting Government may grant to any of its nationals a special
permit authorizing that national to kill, take and treat whales for
purposes of scientific research subject to such restrictions as to num -
ber and subject to such other conditions as the Contracting Govern -
ment thinks fit, and the killing, taking, and treating of whales in
accordance with the provisions of this Article shall be exempt from

the operation of this Convention. Each Contracting Government
shall report at once to the Commission all such authorizations which
it has granted. Each Contracting Government may at any time revoke
any such special permit which it has granted.

2. Any whales taken under these special permits shall so far as
practicable be processed and the proceeds shall be dealt with in
accordance with directions issued by the Government by which the
permit was granted.
3. Each Contracting Government shall transmit to such body as

may be designated by the Commission, in so far as practicable, and
at intervals of not more than one year, scientific information availableé
to that Government with respect to whales and whaling, including the
results of research conducted pursuant to paragraph 1 of this Article
and to Article IV.
4. Recognizing that continuous collection and analysis of biologi -

cal data in connection with the operations of factory ships and land
stations are indispensable to sound and constructive management of

166

8 CIJ1062.indb 460 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 388

17. En la présente instance, au lieu d’examiner la conception et la mise
en œuvre d’un programme de recherche scientifique, tâche qui reélève du

comité scientifique de la CBI, la Cour aurait dû concentrer son anéalyse,
d’une part, sur la question de savoir si, à la lumière de l’éobjet et du but de
la convention, le Japon avait usé de manière licite du pouvoir disécrétion-
naire qu’il tenait de l’article VIII en délivrant des permis spéciaux dans le
cadre de JARPA II et, d’autre part, sur celle de savoir si le Japon avait

violé ou violait les obligations lui incombant aux termes de la conveéntion
en autorisant et en exécutant JARPA II. Le caractère raisonnable de la
conception et de la mise en œuvre de JARPA II au regard de ses objectifs
déclarés est une question qui prête à controverse et peut êétre source de
polémiques entre les scientifiques chargés d’évaluer la concéeption et la mise
en œuvre des plans de recherche. Les travaux du comité scientifiquée de la

CBI, dont les rapports reflètent souvent des divergences d’opiniéon à propos
de JARPA et de JARPA II, ainsi que les avis exprimés par les experts cités
par les Parties au cours de la procédure orale, en sont l’illustraétion.

C. Le droit applicable

18. L’article VIII de la convention, qui est au cœur du différend oppo -
sant les Parties, est ainsi libellé :
«1. Nonobstant toute disposition contraire de la présente conven -

tion, chaque gouvernement contractant pourra accorder à l’un quel -
conque de ses ressortissants un permis spécial autorisant l’intééressé à
tuer, capturer et traiter des baleines en vue de recherches scientifiqueés
et subordonnant cette autorisation aux restrictions en ce qui concerne
le nombre et à telles autres conditions que le gouvernement contrac -
tant jugera opportunes ; les baleines pourront être tuées, capturées

ou traitées conformément aux prévisions du présent article séans qu’il
y ait lieu de se conformer aux dispositions de la présente conventioné.
Chaque gouvernement contractant devra porter immédiatement à
la connaissance de la commission toutes les autorisations de cette
nature qu’il aura accordées. Un gouvernement contractant pourra
révoquer à tout moment un permis spécial par lui accordé.

2. Dans toute la mesure du possible, les baleines capturées en vertu
de ces permis spéciaux devront être traitées conformément auéx direc -
tives formulées par le gouvernement qui aura délivré le permis,é les -
quelles s’appliqueront également à l’utilisation des produités obtenus.
3. Dans la mesure du possible, chaque gouvernement contractant

devra transmettre à l’organisme que la Commission pourra désigner
à cet effet, à des intervalles d’un an au maximum, les renseigne ments
de caractère scientifique dont il disposera sur les baleines et la chéasse à
la baleine, y compris les résultats des recherches effectuées en applica -
tion du paragraphe 1 du présent article et de l’article IV.
4. Reconnaissant qu’il est indispensable, pour assurer une gestion

saine et profitable de l’industrie baleinière, de rassembler et d’éanaly -
ser constamment les renseignements biologiques recueillis à l’occa-

166

8 CIJ1062.indb 461 18/05/15 09:29 389 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

the whale fisheries, the Contracting Governments will take all practi-
cable measures to obtain such data.”

19. Article VIII constitutes an exception to the regulatory régime

established by the Convention for commercial whaling, but it is not, as é
initially argued by Japan, “outside the scope of the ICRW”. It canénot be
outside the scope of the ICRW, because it is an integral part of the Coné -
vention, and was included therein to deal with a distinct type of whalinég,
which may be referred to as “scientific whaling” or whaling for puérposes

of scientific research. It establishes a system of special permits for téhis
type of whaling, a system that is “exempt from the operation of this éCon -
vention” in so far as the killing, taking and treating of whales is céarried
out “in accordance with the provisions” of Article VIII.
20. The opening words of paragraph 1, i.e., “Notwithstanding any -
thing contained in this Convention any Contracting Government may

grant a special permit”, have to be interpreted in the sense of a disécretion -
ary power granted under the Convention to States parties to issue a spe -
cial permit for purposes of scientific research subject to such restrictéions
and conditions “as the Contracting Government thinks fit”. The disécre -
tionary power granted to States parties distinguishes this type of whaliéng

from the commercial whaling regulated in other parts of the Convention
for which the Commission has to fix the conditions and restrictions, sucéh
as stock status and commercial quotas, in accordance with the Schedule
annexed to the Convention.

21. The fixing of the number of whales to be taken, the combination of
non-lethal methods with the lethal ones permitted by Article VIII and any
other conditions rest with the discretion of the Contracting Government
issuing the permit. Nonetheless, the killing, taking and treating of whaéles for
which special permits are issued have to be carried out “in accordancée with
the provisions” of Article VIII; i.e., for purposes of scientific research and in

compliance with the requirements laid down in paragraphs2 and 3 of that
provision. Thus, there is a correlative obligation under Article VIII itself not
to use such a right or discretionary power for reasons contrary to the péur -
pose for which it was granted, or in an arbitrary or capricious manner.
22. Consequently, the discretionary power granted under Article VIII is

far from being unrestricted. It is to be lawfully used only for the achiéeve -
ment of the purposes laid down in the Convention, namely scientific
research, and in accordance with the provisions of Article VIII. Besides
the primary requirement that such special permits can only be issued “for
purposes of scientific research”, other limitations to the discretionéary

power of the issuing State under Article VIII include the duty to “report at
once to the Commission all such authorizations which it has granted”
(para. 1) and to

“transmit to such body as may be designated by the Commission, in
so far as practicable, and at intervals of not more than one year,

167

8 CIJ1062.indb 462 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 389

sion des opérations des usines flottantes et des stations terrestreés, les
gouvernements contractants prendront toutes les mesures en leur

pouvoir pour se procurer ces renseignements. »
19. L’article VIII constitue une exception au régime institué par la conven -

tion pour réglementer la chasse commerciale mais, contrairement à éce que le
Japon a soutenu dans un premier temps, cet article n’est pas ex«clu du champ
d’application de la convention». Il ne peut en être exclu car il fait partie inté
grante de cet instrument et vise une catégorie distincte de chasse àé la baleine,
que l’on peut désigner sous l’appellation « chasse scientifique» ou chasse aux

fins de la recherche scientifique. Il prévoit un système de permisé spéciaux pour
ce type de chasse, système qui s’appliques«ans qu’il y ait lieu de se conformer
aux dispositions de la présente convention » dès lors que les baleines sont
tuées, capturées ou traitées «conformément aux prévisions» de l’article VIII.
20. Les termes introductifs du paragraphe 1, « Nonobstant toute dis -
position contraire de la présente convention, chaque gouvernement

contractant pourra accorder à l’un quelconque de ses ressortissantés un
permis spécial», doivent être interprétés comme accordant aux Etats par -
ties le pouvoir discrétionnaire de délivrer un permis spécial aéux fins de la
recherche scientifique, ce pouvoir étant subordonné à telles reéstrictions et
conditions « que le gouvernement contractant jugera opportunes ». Ce

pouvoir discrétionnaire conféré aux Etats parties différenécie ce type de
chasse de la chasse commerciale, réglementée par d’autres dispoésitions de
la convention et pour laquelle il appartient à la commission de fixeré des
restrictions et des conditions, notamment en établissant l’étaté des stocks et
les quotas de chasse, conformément au règlement annexé à la éconvention.

21. C’est à l’Etat qui délivre le permis qu’il appartient de éfixer le nombre
de baleines à capturer, d’associer des méthodes non létales éaux méthodes
létales autorisées par l’article VIII et d’imposer toute autre condition jugée
opportune. Néanmoins, les baleines tuées, capturées et traitéées au titre
d’un permis spécial doivent l’être «conformément aux prévisions» de l’ar -
ticle VIII, autrement dit aux fins de la recherche scientifique et conforméé-

ment aux exigences énoncées aux paragraphes 2 et 3 dudit article. Ainsi,
aux termes de l’article VIII, est corrélée à ce droit ou ce pouvoir discrétion -
naire l’obligation de ne pas en user d’une manière arbitraire oéu inconsidé-
rée, ou à des fins autres que celles pour lesquelles il a étéé accordé.
22. Ce pouvoir discrétionnaire conféré par l’article VIII est donc loin

d’être illimité. Il doit en être fait usage de manière léégitime aux seules fins
prévues par la convention — autrement dit la recherche scientifique — et
conformément aux dispositions y énoncées. Parmi les restrictionés impo -
sées au pouvoir discrétionnaire conféré à l’Etat au tiétre de l’article VIII
figure, outre la condition première selon laquelle les permis spécéiaux ne

peuvent être délivrés qu’« en vue de recherches scientifiques », le devoir de
«porter immédiatement à la connaissance de la commission toutes lesé
autorisations de cette nature qu’il aura accordées » (par. 1) et,

«[d]ans toute la mesure du possible, … [de] transmettre à l’organisme
que la Commission pourra désigner à cet effet, à des intervalles d’un

167

8 CIJ1062.indb 463 18/05/15 09:29 390 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

scientific information available to that Government with respect to
whales and whaling, including the results of research conducted pur -
suant to paragraph 1 of this Article and to Article IV” 9(para. 3).

23. In addition, the meat of any whales taken for scientific research has
to be processed and disposed of in accordance with directions issued by

the Government by which the permit was granted (para. 2). As indicated
above, these requirements are further complemented by the obligations
laid down in paragraph 30 of the Schedule which have been specifically
elaborated to enable the Scientific Committee to review and comment on

such special permits and by the Guidelines in Annex P both of which are
examined in paragraphs 33-34 below.
24. The obligations and requirements limiting the discretionary power
granted in Article VIII are not to be sought, as has been done in the Judg -
ment, in an assessment of the reasonableness of the relationship betweené

the design and implementation of JARPA II and its stated objectives as a
research plan. They are to be found in Article VIII itself and in the related
instruments developed by the ICW and by its Scientific Committee to
review and ascertain the lawful use of such discretionary power by thoseé

States issuing the special permits. It is these provisions and instruments
that should have been used by the Court to determine the legality of the
conduct of Japan in issuing such permits for JARPA II, and not the
extraneous standard of reasonableness of the design and implementation

of the programme in relation to its stated objectives.

25. Moreover, the amendments made to the Schedule with respect to
the regulatory framework for commercial whaling, and in particular the
moratorium adopted in 1982, which is still in place, and the Schedule on

the prohibition on commercial whaling in the Southern Ocean Sanctuary,
cannot be considered to be devoid of influence on the interpretation aénd
implementation of Article VIII of the Convention in so far as they reflect
a shift in attitudes and societal values towards the use of lethal methoéds

for whaling in general. Thus, the application of Article VIII in the context
of JARPA II should have been interpreted through the prism of all these
developments, and in light of their effect on the object and purpose of the
Convention.

26. On account of the developments that have taken place both in the
ICRW and in international environmental law in general, the Court
should have assessed whether the continued conduct of JARPA II, as a
programme that uses lethal methods for purposes of scientific research
under Article VIII, constitutes an anomaly, which may frustrate the

object and purpose of the Convention in light of the amendments intro -
duced to it in recent years which have resulted in an evolution of the

9 Article IV deals with the collaboration of the Commission with independent agencies
of the Contracting Governments to encourage, recommend or organize studiées and inves-
tigations relating to whales and whaling.

168

8 CIJ1062.indb 464 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 390

an au maximum, les renseignements de caractère scientifique dont il
disposera sur les baleines et la chasse à la baleine, y compris les résul-
tats des recherches effectuées en application du paragraphe 1 du pré -
sent article et de l’article IV » (par. 3).

23. En outre, la chair des baleines capturées aux fins de la recherche
scientifique doit être traitée conformément aux directives forméulées par le

gouvernement qui aura délivré le permis (par. 2). Comme indiqué ci-
dessus, viennent également s’ajouter à ces restrictions les obléigations
énoncées au paragraphe 30 du règlement — spécialement prévues pour
permettre au comité scientifique d’examiner et de commenter ces permis

spéciaux — ainsi que les lignes directrices figurant dans l’annexe P, exa -
minées aux paragraphes 33 et 34 ci-dessous.
24. Les obligations et les restrictions limitant le pouvoir discrétionnaiére
accordé par l’article VIII ne sauraient être établies en examinant, comme la
Cour l’a fait dans le présent arrêt, s’il existe un lien raiésonnable entre la

conception et la mise en œuvre de JARPA II et ses objectifs déclarés en tant
que plan de recherche. Elles sont à rechercher dans l’article VIII lui-même
et les instruments connexes élaborés par la CBI et son comité sécientifique
afin de garantir que les Etats habilités à délivrer un permis sépécial usent de

leur pouvoir discrétionnaire de manière légitime. Ce sont sur cées disposi -
tions et instruments que la Cour aurait dû se fonder pour établir éla licéité
du comportement du Japon relativement à la délivrance de permis spééciaux
dans le cadre de JARPA II, et non pas sur le caractère raisonnable de la

conception et de la mise en œuvre du programme au regard de ses objecétifs
déclarés, critère totalement étranger à la convention.
25. Par ailleurs, les modifications apportées au régime de réglemenéta -
tion des activités de chasse à la baleine commerciale, en particuléier le
moratoire sur la chasse commerciale adopté en 1982, toujours en vigueur

aujourd’hui, et l’interdiction de cette forme de chasse dans le saénctuaire
de l’océan Austral ne sauraient être considérées comme sans incidence sur
l’interprétation et l’application de l’article VIII de la convention, dans la
mesure où elles reflètent une évolution des mentalités et édes valeurs socié -

tales vis-à-vis de la chasse à la baleine en général. L’application de
l’article VIII dans le cadre de JARPA II aurait dû être envisagée à travers
le prisme de cette évolution et à la lumière de ses effets suér l’objet et le but
de la convention.

26. Au vu de l’évolution de la convention et du droit international deé
l’environnement en général, la Cour aurait dû rechercher si éla poursuite
de JARPA II, en tant que programme ayant recours à des méthodes
létales aux fins de la recherche scientifique au titre de l’articlée VIII, consti-
tuait une anomalie susceptible de faire échec à l’objet et au béut de la

convention, au regard des modifications apportées récemment à céet ins -
trument qui ont transformé le cadre réglementaire institué par écelle-ci. De

9 L’article IV traite de la collaboration de la commission avec des organismes-indéé
pendants de l’Etat contractant en vue d’encourager, de recommanderé ou d’organiser des
études et des enquêtes sur les baleines et la chasse à la baleiéne.

168

8 CIJ1062.indb 465 18/05/15 09:29 391 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

regulatory framework of the Convention. Indeed, the balance between
conservation and sustainable exploitation has clearly shifted in the Coné -
vention in favour of more conservation and less exploitation. Although
JARPA II does not appear to have adverse effects on whale stocks at the
moment, such an assessment could have perhaps shed light on whether a

programme for purposes of scientific research, such as JARPA II, may
still be considered to be consistent with the conservationist approach
adopted in the Convention or whether this new approach restricts the
right to issue permits for scientific research purposes.
27. Although the Judgment recognizes the centrality of the interpreta -
10
tion and application of these provisions in its paragraph 50 , it quickly
skates over their analysis to embark in an extremely detailed assessmenté
of “whether the design and implementation of JARPA II are reasonable
in relation to achieving the programme’s stated research objectives”é (see

subtitle B, para. 127), which is adopted as the standard of review on
whether or not JARPA II is for purposes of scientific research. It bears to
be emphasized that neither the design and implementation of scientific
research programmes nor their reasonableness in relation to achieving a é
programme’s stated objectives are mentioned in Article VIII of the ICRW

or in the related instruments mentioned above. Nonetheless, they have
surprisingly managed to occupy centre stage in the Judgment.

28. The Judgment also recognizes that :

“since Article VIII, paragraph 1, specifies that ‘the killing, taking and
treating of whales in accordance with the provisions of this Article

shall be exempted from the operation of this Convention’, whaling
conducted under a special permit which meets the conditions of Arti -
cle VIII is not subject to the obligations under the Schedule concern -
ing the moratorium on the catching of whales for commercial
purposes, the prohibition of commercial whaling in the South -

ern Ocean Sanctuary and the moratorium relating to factory ships”
(para. 55).

However, instead of analysing whether the special permits issued by
Japan meet the conditions of Article VIII, the Judgment takes up the
examination and application of the extraneous standard of “reasonableé -

ness in relation to achieving the stated objectives of the programmeӎ and
derives its final conclusions from it. Thus, the law applicable to the séub -
ject of the dispute between the Parties, recognized by the Court itself éin
the Judgment, is set aside in favour of an obscure and debatable standard
which cannot be found anywhere in the Convention while the effects of

the conservationist approach adopted in the Convention in recent years

10Paragraph 50 reads as follows : “The issues concerning the interpretation and appli -

cation of Article VIII of the Convention are central to the present case . . .”

169

8 CIJ1062.indb 466 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 391

fait, un rééquilibrage est intervenu entre conservation et exploitéation
pérenne, la première prenant le pas sur la seconde. Bien que, àé l’heure
actuelle, JARPA II ne semble pas avoir d’effets préjudiciables sur les
stocks de baleines, une telle analyse aurait peut-être permis de déterminer
si un programme mené à des fins de recherche scientifique, comme

JARPA II, avait toujours sa place dans le contexte d’une convention pri -
vilégiant la conservation ou si cette nouvelle approche restreignait éle droit
de délivrer des permis aux fins de la recherche scientifique.

27. Même si, au paragraphe 50 de son arrêt 10, la Cour reconnaît le

caractère central de l’interprétation et de l’application de ces dispositions,
elle glisse rapidement sur l’analyse de ces deux éléments pour ése livrer à
un examen extrêmement détaillé de la « question de savoir si la concep -
tion et la mise en œuvre de JARPA II sont raisonnables au regard des

objectifs de recherche annoncés » (voir sous-titre B, par. 127), qu’elle
adopte comme critère aux fins d’établir si JARPA II est mené à des fins
de recherche scientifique. Il convient de souligner que ni la conceptioné et
la mise en œuvre des programmes de recherche scientifique, ni leur caérac -
tère raisonnable au regard de leurs objectifs déclarés ne sont émentionnés

à l’article VIII de la convention et dans les instruments connexes men -
tionnés ci-dessus. Et pourtant, ces notions se sont étonnamment arrogé
une place centrale dans le raisonnement de la Cour.
28. Il est également dit dans l’arrêt que,

«dès lors que le paragraphe 1 de l’article VIII précise que « les
baleines pourront être tuées, capturées ou traitées conforméément aux

prévisions du présent article sans qu’il y ait lieu de se confoérmer aux
dispositions de la présente convention », les activités de chasse à la
baleine menées au titre d’un permis spécial satisfaisant aux coéndi -
tions prévues à l’article VIII ne sont pas soumises aux obligations
imposées par le règlement concernant le moratoire sur la chasse à la

baleine à des fins commerciales, l’interdiction de chasser la baleéine à
des fins commerciales dans le sanctuaire de l’océan Austral et le
moratoire sur les usines flottantes » (par. 55).

Toutefois, au lieu d’examiner si les permis spéciaux délivréés par le Japon
satisfont aux conditions de l’article VIII, la Cour choisit d’examiner et
d’appliquer le critère non pertinent du « caractère raisonnable au regard

des objectifs déclarés du programme» et en tire ses conclusions finales. Le
droit reconnu par la Cour elle-même dans son arrêt comme applicable à
l’objet du différend opposant les Parties est ainsi écartéé au profit d’un
critère obscur et contestable dont la convention ne fait nullement meén -
tion, l’arrêt faisant de plus abstraction des conséquences que épourrait

avoir sur l’interprétation du pouvoir discrétionnaire accordéé par l’ar -

10Le paragraphe 50 se lit comme suit : « Les questions concernant l’interprétation et

l’application de l’article VIII de la convention sont au cœur de la présente espèce… »

169

8 CIJ1062.indb 467 18/05/15 09:29 392 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

on the interpretation of the discretionary power granted underArticle VIII
are ignored.

D. The Assessment of the Legality of the Special Permits
for JARPA II

29. Is the primary purpose of the special permit issued to JARPA II to
undertake scientific research or to facilitate the supply of whale meat to a

commercial market ? Is there evidence to support that JARPA II was
granted special permit for a purpose other than scientific research ? What
are the criteria for determining whether a programme is for purposes of é
scientific research under the ICRW ? To answer these questions and
others relating to the legality of the special permits issued by Japan ién

connection with JARPA II, recourse must be had to the applicable law
outlined above.

30. An objective test of whether a programme for which a special per -
mit has been issued is “for purposes of scientific research” and iés carried
out “in accordance with the provisions of Article VIII” is not, as stated in

the Judgment, whether the use of lethal sampling is on a larger scale than
is reasonable in relation to achieving the programme’s stated objectiéves,
nor whether the sample sizes are reasonable with respect to those objec -
tives. Those are matters on which scientists and the statistical calculaétions
they use for that purpose can differ. They are not criteria establisheéd

under Article VIII or in any other provisions of the Convention.

31. Likewise, whether or not a programme is for purposes of scientific
research cannot be determined on the basis of the reasonableness of the
scale of the use of lethal sampling. The killing or taking of even a sinégle

whale may be considered illegal today under the provisions of the ICRW
unless it is done for purposes of scientific research. Thus, the fact théat the
sample size of minke whales taken under JARPA II is much larger than
that of JARPA makes no difference unless it is established first that éboth
programmes are for purposes of scientific research.

32. As indicated above, the assessment of the legality of the special
permits issued for JARPA II should focus first and foremost on the pro -
cedural and substantive requirements of Article VIII itself and with those
of paragraph 30 of the Schedule. It should also take into account the
effect of recent developments in the regulatory framework of the Conveén -

tion on the interpretation of Article VIII in light of its object and pur -
pose. Did Japan transmit to the Scientific Committee of the IWC, and at
intervals of not more than one year, scientific information available toé it
with respect to whales and whaling, including the results of research coén -
ducted, as required by paragraph 3 of Article VIII? Did it submit the pro-

posed permits for review and comment by the Committee, in accordance
with paragraph 30 of the Schedule, which was adopted in 1979 ? To

170

8 CIJ1062.indb 468 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 392

ticle VIII le souci de la conservation récemment inscrit dans la conven -
tion.

D. L’analyse de la licéité des permis spéciaux délivrés
dans le cadre de JARPA II

29. Les permis spéciaux délivrés dans le cadre de JARPA II ont-ils
avant tout pour but de mener des recherches scientifiques ou de favoriseér

l’offre sur le marché de la chair de baleine ? Existe-t-il des éléments attes -
tant qu’un permis spécial a été délivré à JARPA II alors que ce pro -
gramme poursuivait un but autre que la recherche scientifique ? Quels
sont les critères permettant de déterminer si un programme est menéé
en vue de recherches scientifiques aux termes de la convention ? Pour

répondre à ces questions ainsi qu’à d’autres interrogatioéns sur la licéité
des permis spéciaux délivrés par le Japon dans le cadre de JARPéA II, il
aurait fallu se fonder sur le droit applicable décrit ci-dessus.
30. Déterminer, sur la base d’un critère objectif, si un programme épour
lequel a été délivré un permis spécial est mené « en vue de recherches
scientifiques» et « conformément aux dispositions de l’article VIII » ne

consiste pas, contrairement à ce qui est dit dans l’arrêt, à rechercher s’il
est fait usage de méthodes létales au-delà de ce qui est raisonnable au
regard des objectifs annoncés du programme, ni si les tailles d’ééchantillon
sont raisonnables au regard de ces objectifs. Ce sont là des questionés sur
lesquelles les scientifiques et les calculs statistiques qu’ils utiliésent à cette

fin divergent. Il ne s’agit pas de critères établis aux termes éde l’article VIII
ou d’une quelconque autre disposition de la convention.
31. De la même manière, la question de savoir si un programme poursuité
une finalité scientifique ne saurait être tranchée à l’auéne du caractère rai -
sonnable de l’ampleur du recours à l’échantillonnage létaél. Aujourd’hui, la

mise à mort ou la capture d’une seule baleine peut être considéérée comme
illégale aux termes de la convention, sauf si cet acte répond aux énécessités
de la recherche scientifique. Aussi, peu importe-t-il que la taille de lé’échan-
tillon des petits rorquals prélevés dans le cadre de JARPA II soit nettement
supérieure à celle de JARPA, à moins qu’il n’ait étéé au préalable établi que
les deux programmes étaient menés en vue de recherches scientifiquées.

32. Comme indiqué ci-dessus, la licéité des permis spéciaux délivrés
dans le cadre de JARPA II devrait en tout premier lieu être appréciée au
regard des obligations de nature procédurale et substantielle imposéées par
l’article VIII lui-même et par le paragraphe 30 du règlement. Il convien -
drait également de tenir compte de l’effet sur l’interprétéation à donner de

l’article VIII des modifications apportées récemment au cadre réglemen -
taire institué par la convention, à la lumière de l’objet eté du but de celle-ci.
Le Japon a-t-il transmis au comité scientifique de la CBI, à des intervalles
d’un an au maximum, les renseignements de caractère scientifique déont il
disposait sur les baleines et la chasse à la baleine, y compris les réésultats

des recherches effectuées, conformément au paragraphe 3 du règlement ?
A-t-il soumis les propositions de permis au comité pour que celui-ci les

170

8 CIJ1062.indb 469 18/05/15 09:29 393 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

answer these questions, it is important to examine, in addition to the péro-
cedural requirements, whether Japan has breached its treaty obligations é
by the use of lethal methods in JARPA II, by the scale of the sampling

size involved, by authorizing JARPA II to offer for sale the by-products
of the whales killed or taken in the implementation of the programme.

33. To begin with the procedural requirements, paragraph 30 of the
Schedule requires Contracting Governments to “provide the Secretary téo
the International Whaling Commission with proposed scientific permits
before they are issued and in sufficient time to allow the Scientific Céom -

mittee to review and comment on them”. It elaborates further on the
requirement of paragraph 3 of Article VIII, identifies the four types of
information to be specified in the proposals 11and prescribes that “Pro -
posed permits shall be reviewed and commented on by the Scientific

Committee at Annual Meetings when possible . . .” With regard to these
requirements, the Court finds that “[a]s regards the substantive requéire -
ments of paragraph 30 . . . the JARPA II Research Plan, which consti -
tutes the proposal for the grant of special permits, sets forth the

information specified by that provision” (para. 239). It then concludes
that: “the Court is persuaded that Japan has met the requirements of
paragraph 30 as far as JARPA II is concerned” (para. 242).
34. These findings of the Court contradict its other conclusions that
the special permits granted by Japan in connection with JARPA II are

not for purposes of scientific research pursuant to Article VIII, para -
graph 1, of the Convention. Compliance with the requirements of para -
graph 30 is by itself a significant distinguishing feature of a programme
for purposes of scientific research. The JARPA II programme was duly

reviewed and commented by the Scientific Committee of the IWC in 2005
in accordance with the Guidelines contained in Annex Y (now Annex P)
with regard to its methodology, the effects of catches on the populatiéon
concerned and the opportunities for participation in the research 12. In

other instances, when the Scientific Committee took the view that a per -
mit proposal submitted by a State did not meet its criteria, it specificéally
recommended that the permits sought should not be issued. Indeed,
in 1987 the Scientific Committee explicitly recommended that the Com -

mission request the Republic of Korea to refrain from issuing permits
until it can show that such permits will not further deplete the stock aénd
that it will materially contribute to the comprehensive assessment of théis

11They are : (a) objectives of the research ; (b) number, sex, size and stock of the
animals to be taken ; (c) opportunities for participation in the research by scientists of
other nations; and (d) possible effect on conservation of stock.

12Report of the Scientific Committee (SC Report) 2005, J. Cetacean Res. Manage 8
(Suppl.), 2006, p. 49. All the reports of the Scientific Committee are available at: http://iwc.
int/scientific-committee-reports.

171

8 CIJ1062.indb 470 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 393

examine et formule un avis à leur sujet, conformément au paragraphée 30
du règlement, adopté en 1979 ? Pour répondre à ces questions, il importe

d’examiner si, au-delà de ces obligations de nature procédurale, le Japon
a violé ses obligations conventionnelles en ayant recours à des méthodes
létales dans le cadre de JARPA II, en fixant des tailles d’échantillon trop
élevées ou en autorisant que soient proposés à la vente les ésous-produits

des baleines tuées ou capturées dans le cadre de JARPA II.
33. S’agissant des obligations de nature procédurale, le paragraphe 30
du règlement demande à chaque Etat contractant de «fournir au secrétaire
de la commission baleinière internationale ses propositions de permisé scien -

tifiques avant leur délivrance et dans un délai suffisant pour permettre
au comité scientifique de les examiner et de formuler un avis à ce suéjet ».
Ce paragraphe explicite l’exigence formulée au paragraphe 3 de l’ar -
ticle VIII, énumère les quatre types d’information devant figurer dans les
11
propositions de permis et prévoit que « [l]es propositions de permis font
l’objet d’un examen et de commentaires du comité scientifique léors des réu -
nions annuelles dans la mesure du possible…» A ce propos, la Cour estime
que, « [p]our ce qui est des obligations de fond imposées par le para -

graphe 30, … le plan de recherche de JARPA II, sur la base duquel sont
délivrés les permis spéciaux, fournit les informations requisesé par cette dis -
position» (par. 239), avant de conclure que « le Japon a satisfait aux exi -
gences du paragraphe 30 en ce qui concerne JARPA II» (par. 242).

34. Cette conclusion contredit les autres conclusions de la Cour selon
lesquelles les permis spéciaux délivrés dans le cadre de JARPA II ne le
sont pas en vue de recherches scientifiques au sens du paragraphe 1 de

l’article VIII de la convention. Le respect des exigences du paragraphe 30
constitue en soi une particularité importante d’un programme menéé aux
fins de la recherche scientifique. JARPA II a été dûment examiné et com -
menté par le comité scientifique de la CBI en 2005, conformémenét aux

lignes directrices énoncées à l’annexe Y (devenue depuis l’annexe P). Le
comité s’est penché sur les méthodes employées, les efféets des captures sur
la population concernée et les possibilités de participation aux réecherches 12.
Dans d’autres cas, lorsqu’il avait été d’avis qu’une péroposition de permis

présentée par un Etat ne satisfaisait pas aux critères requis, éle comité
avait recommandé que le permis en instance ne soit pas délivré.é C’est
ainsi que, en 1987, il avait expressément recommandé à la commission de
demander à la République de Corée de s’abstenir de délivréer des permis

aussi longtemps qu’elle n’aurait pas démontré que son prograémme de
chasse n’avait pas pour effet d’épuiser les stocks, mais appoértait une

11
A savoir :a) les objectifs de la recherche ; b) le nombre, le sexe, la taille et la popula-
tion des animaux à capturer ; c) les possibilités de participation aux recherches de scienti -
fiques provenant d’autres pays ; et d) les effets potentiels de cette chasse sur la conservation
de la population concernée.
12 Rapport du comité scientifique, J. Cetacean Res. Manage, n 8 (suppl.), 2006, p. 49.
Tous les rapports du comité scientifique sont disponibles en anglais éà l’adresse suivante :
http://iwc.int/scientific-committee-reports.

171

8 CIJ1062.indb 471 18/05/15 09:29 394 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

13
stock . Similarly, in 1990 with relation to a proposal by the USSR, the
Committee explicitly noted that “the proposed investigations on the
whales to be caught do not appear to be structured either to provide

information essential for rational management of these stocks, or to coné -
tribute to the comprehensive assessment or other critically important
research needs” 1. This was not the case with regard to JARPA II despite

the fact that 63 out of 195 members of the Scientific Committee declined
to participate in the relevant meeting of the Scientific Committee (seeé
paragraph 241 of the Judgment).

35. Moreover, as discussed below in paragraph 53, the Scientific Com -
mittee in its Report of 2012 specifically recommended the use of data
arising, inter alia, from both JARPA and JARPA II for catch-at-age

based analyses for the minke whale population dynamics model it is
investigating; while in its 2013 Report it referred to non-lethal sampling
of humpback whales occurring within the JARPA/JARPA II programmes

as useful in the assessment of certain breeding stocks of humpback
whales. If JARPA II were not a programme for purposes of scientific
research, as the Judgment concludes, would the Scientific Committee of

the IWC continue not only to review and comment on it, but also to rec -
ommend the use of its data for the advancement of its own work ?

36. A second test for assessing whether JARPA II is for purposes of
scientific research is whether it satisfies the criteria laid down in thée Annex P

Guidelines adopted by consensus by the States parties to the Convention
in 2006 and revised in 2009. Annex P establishes clear criteria and condi -
tions, which all special permit proposals should meet, and against whiché

they are to be reviewed and commented by the Scientific Committee.
Such proposals have to specify the objectives of the study 15, the methods

13 Rep. Int. Whal. Commn 38, 1988, pp. 53-54, the Committee :

“reiterated its serious concern at the lack of the collection of even basic biological
information from the previous year’s permit catch [proposed by Korea]. There is no
reason to believe the new proposal will be any more useful in assisting éthe Commit

tee’s work. The Committee, therefore, requests that the Commission strongly urges
the Government of Korea to refrain from issuing a special scientific perémit until it
can fully show that the take of 80 whales per year will not further deplete the stock
and that it will materially contribute to the comprehensive assessment oéf this stock.”

14
15 Rep. Int. Whal. Commn 41, 1991, pp. 74-75.
The objectives should:

(a) be quantified to the extent possible ;
(b) be arranged into two or three categories, if appropriate: “Primary”, “Secondary”
and “Ancillary” ;
(c) include a statement for each primary proposal as to whether it requires élethal
sampling, non-lethal methods or a combination of both ;

172

8 CIJ1062.indb 472 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 394

13
contribution concrète à l’évaluation exhaustive de ces populéations . De
même, en 1990, face à une demande de permis présentée par l’URSS, le é
comité avait expressément relevé que « les recherches proposées ne sem -

bl[ai]ent pas structurées de manière à apporter des informationés utiles à la
gestion rationnelle des populations baleinières ou à contribuer àé l’évalua -
tion exhaustive ou à d’autres besoins de la recherche d’une impéortance
14
primordiale » . Tel n’a pas été le cas pour JARPA II, bien que 63 des
195 membres du comité scientifique aient refusé de prendre part à la réu -
nion organisée autour de ce programme (voir arrêt, par. 241).
35. En outre, comme indiqué ci-dessous au paragraphe 53, dans le rap -

port qu’il a publié en 2012, le comité scientifique a expressément recom -
mandé que l’analyse des prises par âge utilisée dans le cadre de ses travaux
sur la modélisation de la dynamique de population des petits rorqualsé soit

effectuée à partir des données issues de JARPA et de JARPA IIé ; dans
le rapport qu’il a publié en 2013, il a fait référence à l’échantillonnage
non létal des baleines à bosse dans le cadre des programmes JARPA et

JARPA II en le jugeant utile pour l’évaluation de certains stocks reproduc -
teurs de cette espèce. Si JARPA II n’était pas un programme mené aux fins
de la recherche scientifique, comme le dit la Cour dans son arrêt, le comité

scientifique de la CBI continuerait-il non seulement à l’examiner et à for -
muler des commentaires à son sujet, mais aussi à recommander d’éutiliser les
données qui en sont issues pour faire progresser ses propres travaux?

36. Un deuxième moyen d’évaluer la finalité scientifique de JARPéA II
consistait à rechercher s’il satisfaisait aux critères énoncéés dans les lignes
directrices de l’annexe P adoptées par consensus par les Etats parties à la

convention en 2006 et revisées en 2009. L’annexe P formule des exigences et
des conditions claires, auxquelles tous les permis spéciaux doivent séatisfaire et
à l’aune desquelles ils doivent être examinés et commentéés par le comité scien -
15
tifique. Les propositions de permis doivent préciser les objectifs deé l’étude

13Rep. IWC, vol. 38, 1988, p. 53-54, le comité

«s’est déclaré de nouveau très préoccupé de constater qéue les captures effectuées au titre
d’un permis spécial au cours de l’année écoulée n’aévaient pas contribué à recueillir des
données biologiques, même élémentaires [proposition de permiés présentée par la Corée].
Rien ne porte à croire que la nouvelle proposition contribuera plus uétilement aux travaux
du comité.Ce dernier demande donc à la commission d’exhorter le Gouvernement coréen
à s’abstenir de délivrer tout permis scientifique spécial taént qu’il n’aura pas démontré
que la prise de 80 baleines par an n’accélère pas le déclin de la population coéncernée
mais apporte une contribution concrète à l’évaluation exhausétive de ladite population. »

14Rep. IWC, vol. 41, 1991, p. 74-75.
15Les objectifs doivent :

a) être quantifiés dans la mesure du possible ;
b) être répartis en deux ou trois catégories, selon que de besoin é(« objectifs
primaires », «objectifs secondaires » et «objectifs accessoires ») ;
c) indiquer, pour chaque proposition présentée pour la première foéis, s’il est prévu
de recourir à des méthodes létales, à des méthodes non léétales ou à une associa
tion des deux ;

172

8 CIJ1062.indb 473 18/05/15 09:29 395 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

to address objectives 16, the assessment of the potential effects of catches
17
on the stocks involved , and provide the results of a simulation study on
the effects of the permit takes on the stock and a note of the provisions
18
for co-operative research . These Guidelines are given a curt treatment
in the Judgment (para. 240), but their importance cannot be underesti -

(d) include a brief statement of the value of at least each primary objective in the
context of the three following broad categories objectives :

(i) improve the conservation and management of whale stocks,
(ii) improve the conservation and management of other living marine resourcesé
or the ecosystem of which the whale stocks are an integral part and/or,

(iii) test hypotheses not directly related to the management of living marine
resources ;

(e) include, in particular for (d) (i) and (d) (ii), at least for each primary objective,
the contribution it makes to inter alia :

(i) past recommendations of the Scientific Committee,
(ii) completion of the comprehensive assessment or in-depth assessments in
progress or expected to occur in the future,
(iii) the carrying out of implementations or implementation reviews of the RMPé

or AWMP,

(iv) improved understanding of other priority issues as identified in the Sciéen -
tific Committee Rules of Procedure (IWC, 2006, p. 180),

(v) recommendations of other intergovernmental organizations.
16
Methods to address objectives :
(a) field methods, including:

(i) species, number (and see (c) below), time frame, area,
(ii) sampling protocol for lethal aspects of the proposal, and

(iii) an assessment of why non-lethal methods, methods associated with any
ongoing commercial whaling, or analyses of past data have been considered
to be insufficient ;

(b) laboratory methods ;
(c) analytical methods, including estimates of statistical power where approépriate;

(d) time frame with intermediary targets [emphasis added].

17 Assessment of potential effects of catches on the stocks involved :

(a) a summary of what is known concerning stock structure in the area conceréned;
(b) the estimated abundance of the species or stocks, including methods used and

an assessment of uncertainty, with a note as to whether the estimates haéve previ
ously been considered by the Scientific Committee ;
(c) provision of the results of a simulation study on the effects of the péermit takes
on the stock that takes into account uncertainty and projects (1) for éthe expected

life of the permit (i.e., n years) ; (2) for situations where the proposal is assumed
to continue for (a) a further n years, (b) a further 2n years and (c) some longer
period of years since the start of the proposal.

18 A note on the provisions for co-operative research :

(a) field studies ;
(b) analytical studies.

173

8 CIJ1062.indb 474 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 395

et les méthodes utilisées pour les atteindre , comporter une évaluation des
17
effets que pourraient avoir les prises sur les populations visées , fournir les
résultats d’une étude de simulation sur les effets des prisesé autorisées au titre

de permis spéciaux sur les populations, ainsi qu’une note sur les édispositions
relatives à la recherche coopérative 18. Ces lignes directrices sont traitées à la

d) inclure une brève déclaration sur l’intérêt que présenéte chaque objectif primaire,

au minimum, pour les trois grands objectifs suivants :
i) améliorer la conservation et la gestion des populations de baleines,
ii) améliorer la conservation et la gestion des autres ressources marines vivantes

ou de l’écosystème dont les populations de baleines font partieé intégrante,
iii) vérifier les hypothèses qui n’ont pas de lien direct avec la geéstion des ressour-
ces marines vivantes ;

e) indiquer, en particulier pour les points d i) et d ii) et au moins pour chaque objectif
primaire, quelle est la contribution de ces objectifs aux domaines suivaénts, entre
autres :

i) les recommandations passées du comité scientifique,
ii) la réalisation de l’évaluation exhaustive ou des évaluationsé détaillées en

cours ou susceptibles d’être réalisées à l’avenir,
iii) la conduite d’une série de mises en œuvre ou de l’évaluatéion de la mise en
œuvre de la procédure de gestion revisée ou de la procédure éde chasse abori -
gène de subsistance,

iv) une meilleure compréhension d’autres enjeux prioritaires identifiéés dans le
règlement intérieur du comité scientifique (CBI, 2006, p. 180),
v) les recommandations d’autres organisations intergouvernementales.

16 Méthodes permettant d’atteindre ces objectifs :

a) méthodes sur le terrain, et notamment :

i) espèces, nombre (voir c) ci-dessous), calendrier, région,
ii) protocole d’échantillonnage pour les aspects létaux de la propoésition,
iii) analyse des raisons pour lesquelles les méthodes non létales, les éméthodes
associées à toute activité de chasse à la baleine commerciale en cours, ou les

analyses des données passées ont été jugées insuffisantes▯ ;
b) méthodes en laboratoire ;

c) méthodes analytiques, notamment estimations de l’efficacité stéatistique, au
besoin ;
d) calendrier comprenant des objectifs intermédiaires (les italiques soént de moi).

17 Evaluation des effets potentiels des captures sur les populations concéernées :

a) synthèse des connaissances sur la structure des populations dans la zéone concernée ;
b) estimation de l’abondance des espèces ou des stocks, en indiquant éles méthodes
utilisées, en analysant le taux d’incertitude et en précisant séi ces estimations ont

déjà été prises en considération par le comité scientiéfique ;
c) indication des résultats d’une étude de simulation sur les efféets des prises autori
sées au titre de permis spéciaux sur les populations ; cette étude doit prendre en
compte l’incertitude et les projets 1) pour la durée de vie attendue du permis (à

savoir nombre d’années) et 2) pour les situations dans lesquelles la proposition
est réputée se poursuivre pour a) n années supplémentaires, b) 2n années supplé-
mentaires et c) une période plus longue à compter du début de la proposition.

18 Note concernant les dispositions relatives à la recherche coopératéive:

a) études sur le terrain ;
b) études analytiques.

173

8 CIJ1062.indb 475 18/05/15 09:29 396 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

mated since they were used by the Scientific Committee in the initial
review and commentary on JARPA II and continue to be used by it to

ensure its compliance with paragraph 30 of the Schedule to the Conven -
tion as well as Article VIII.

37. Japan submitted the JARPA II proposal in March 2005 and fur -

nished the information required by paragraph 30 and Annex Y (now P).
The Committee recognized that “[t]he proposal provides the information
under paragraph 30 of the Schedule” 1. The Committee does not have the
power to disallow or authorize a permit, which rests in the discretion oéf

the State party under Article VIII. However, its views and comments are
of utmost significance. When the Committee reviews a proposal, the Gov -
ernment concerned must take serious account of the discussions which
have taken place, and of the conclusions and recommendations of the

Committee. Paragraph 30 also requires that “[p]reliminary results of any
research resulting from the permits” should be made available.

38. The evidence before the Court indicates that Japan continues to
submit annual cruise reports to the Scientific Committee to share with iét
the preliminary results of JARPA II and to show the extent to which the
recommendations of the Committee have been taken into account 20.

Thus, there appears to be an ongoing dialogue and co-operation between
the Japanese scientists involved in JARPA II and the Scientific Commit -
tee. This has recently led the Committee to note in one of its reports téhat

the stock structure model used in JARPA II was “simple and potentially
powerful” and that “[a]side from the general relevance of the resuélts to
understanding [of] Antarctic minke whale dynamics, it might in the future
prove useful in allocating historical catches to stocks” 2. Would the Sci -

entific Committee make such favourable comments about JARPA II if it
were not for purposes of scientific research ?

39. JARPA II is the successor programme to JARPA and although the

legality of JARPA is not in issue here, there can be no doubt that the téwo
programmes pursue overlapping objectives as recognized in the Judg -
ment. In this connection, it is important to note that in 2007, when
reviewing the results from the JARPA programme, the review workshop

established by the Scientific Committee reiterated the view already
expressed by the Commission in 1997 that some use could be found for
the data arising from JARPA :

19
20J. Cetacean Res. Manage 8 (Suppl.), 2006, p. 50.
See, for example, SC Report 2012, p. 85. All the JARPA/JARPA II cruise reports are
available at: http://www.icrwhale.org/CruiseReportJARPA.htm.

21SC Report 2012, p. 35 and J. Cetacean Res. Manage 14 (Suppl.), 2013, p. 26.

174

8 CIJ1062.indb 476 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 396

va-vite dans l’arrêt (par. 240), alors que leur importance ne saurait être
sous-estimée puisque le comité scientifique les a utilisées lors de éson examen

initial de JARPA II et qu’il continue de les utiliser pour s’assurer que le pro -
gramme respecte les dispositions du paragraphe 30 du règlement et de
l’article VIII de la convention.

37. Le Japon a soumis le projet de recherche de JARPA II en mars
2005 et a fourni les informations requises par le paragraphe 30 et l’an -
nexe Y (devenue l’annexe P). Le comité a reconnu que « la proposition de
permis contenait les informations spécifiées au paragraphe 30 du règle -
19
ment » . Le comité n’a pas le pouvoir d’accorder ou de refuser un per -
mis; aux termes de l’article VIII, ce pouvoir est dévolu à l’Etat partie. Les
avis et les commentaires du comité revêtent néanmoins une trèés grande
importance. Lorsque le comité a examiné un projet de recherche, l’éEtat

concerné doit dûment prendre en considération les discussions auxquelles
a donné lieu son projet, ainsi que les conclusions et les recommandatéions
du comité. Aux termes du paragraphe 30, il est également demandé aux

Etats contractants de communiquer « les résultats préliminaires de toute
recherche menée au titre d’un permis ».
38. Il ressort des éléments de preuve produits devant la Cour que le Jéapon
continue de soumettre au comité scientifique les rapports d’expéédition

annuels de JARPA II afin de lui faire connaître les résultats préliminaires de
son programme et la mesure dans laquelle les recommandations du comitéé
ont été prises en compte 20. Il semble donc exister une concertation et une
coopération permanentes entre les scientifiques japonais de JARPA II et le

comité scientifique. Le comité a ainsi été conduit récemméent à relever dans
l’un de ses rapports que le modèle de structure des stocks utiliséé dans le
cadre de JARPA II était « simple et potentiellement performant» et que,

«outre l’intérêt général que présentent les résultatés pour comprendre la
dynamique des petits rorquals de l’Antarctique, ce modèle pourraité se révé -
ler utile à l’avenir pour attribuer à tel ou tel stock des données historiques de
capture » 21. Le comité scientifique formulerait-il des commentaires si positifs

sur JARPA II si ce programme ne poursuivait aucune finalité scientifique ?
39. JARPA II a succédé à JARPA et, même si le caractère licite de ce
dernier n’est pas en cause ici, il ne fait aucun doute que les deux péro -
grammes poursuivent des objectifs qui se chevauchent, comme le recon -

naît la Cour dans son arrêt. A cet égard, il importe de releveré que, en 2007,
le groupe de travail créé par le comité scientifique pour procééder à l’éva -
luation finale des résultats de JARPA a réaffirmé ce qu’avait dit la com -

mission en 1997, à savoir que les données issues de ce programme
pourraient se révéler utiles à exploiter :

19 J. Cetacean Res. Manage, n 8 (suppl.), 2006, p. 50.
20
Voir, par exemple, le rapport que le comité scientifique a publié éen 2012, p. 85.L’en-
semble des rapports d’expédition de JARPA/JARPA II sont disponibles, en anglais, à
l’a21esse suivante : http://www.icrwhale.org/CruiseReportJARPA.htm. o
Rapport de 2012 du comité scientifique, p. 35, J. Cetacean Res. Manage, n 14
(suppl.), 2013, p. 26.

174

8 CIJ1062.indb 477 18/05/15 09:29 397 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

“The results from the JARPA programme, while not required for
management under the RMP, have the potential to improve manage-
ment of minke whales in the southern hemisphere in the following
ways: (1) reductions in the current set of plausible scenarios consid -

ered in Implementation Simulation Trials ; and (2) identification of
new scenarios to which future Implementation Simulation Trials will
have to be developed (e.g., the temporal component of stock struc -
ture). The results of analyses of JARPA data could be used in this

way perhaps to increase the allowed catch of minke whales in the
southern hemisphere, without increasing depletion risk above the
level indicated by the existing Implementation Simulation Trials of
the RMP for these minke whales.” 22

40. Turning now to the use of lethal methods and the scale of the sam -

pling involved under JARPA II, it should be recalled that Article VIII of
the Convention authorizes Contracting Governments to grant special
permits to their nationals to kill and take whales for purposes of scienétific
research subject to such restrictions and other conditions that the Gov -
ernment “thinks fit”. At the same time, following the adoption of épara -

graph 30 of the Schedule in 1979, the exercise of that right is subject to
the review and commentary of the Scientific Committee of the IWC and
the respect for the Guidelines issued by the Committee for that purpose,é
namely Annex P. This Annex, which was approved by consensus by all

the States parties to the Convention, requires, as indicated above, “an
assessment of why non-lethal methods, methods associated with any
ongoing commercial whaling, or analyses of past data have been consid -
ered to be insufficient”. Thus, the use of lethal methods for purposes of

scientific research or the insufficient consideration of non-lethal methods
in scientific research programmes has to be assessed and justified, and éis
subject to review and comment by the Scientific Committee of the IWC.

41. Did Japan comply with these conditions and did it give adequate
consideration to the use of non-lethal methods in JARPA II ? Are such
non-lethal methods used in JARPA II ? The evidence submitted to the

Court shows that the JARPA II plan clearly mentions the non-lethal
methodologies which are to be employed in the programme, including
“sighting” surveys, “ecosystem surveys” of the habitat enviréonment of
whales, “oceanographic and meteorological observations . . ., including

sea ice, surface temperature, sea surface height and chlorophyl23α coéncen -
tration over the entire research area, using satellite data” .

22See at: http://iwc.int/jarpa.
23Counter-Memorial of Japan, Ann. 150, pp. 14-15.

175

8 CIJ1062.indb 478 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 397

«Même s’ils ne sont pas requis pour la gestion au titre de la RMP, é
les résultats de JARPA sont susceptibles d’améliorer la gestioné des
petits rorquals de l’hémisphère sud en permettant : 1) la réduction du
nombre actuel de scénarios plausibles envisagés dans les essais deé

simulation de mise en œuvre de la RMP; et 2) l’identification de nou-
veaux scénarios pour lesquels de futurs essais de simulation de mise é
en œuvre devront être mis au point (par exemple, la composante teém -
porelle de la structure des stocks). Les résultats des analyses de

JARPA pourraient peut-être permettre d’augmenter le nombre de
prises de petits rorquals autorisées dans l’hémisphère sud séans aug -
menter le risque d’épuisement des stocks au-delà du niveau indiqué
actuellement par les essais de simulation de mise en œuvre réaliséés
pour ces petits rorquals. » 22

40. Quant au recours aux prélèvements létaux et à l’ampleur dée ce

recours dans le cadre de JARPA II, il convient de rappeler que l’ar -
ticle VIII de la convention autorise les Etats contractants à accorder des é
permis spéciaux à leurs ressortissants afin de tuer et de captureré des
baleines aux fins de la recherche scientifique, cette autorisation étéant
subordonnée aux restrictions et à telles autres conditions que l’éEtat

contractant « jugera opportunes ». Depuis l’adoption du paragraphe 30
du règlement, en 1979, l’exercice de ce droit est désormais soumis à l’exa -
men et aux commentaires du comité scientifique de la CBI et doit se
conformer aux lignes directrices établies par le comité à cetteé fin, à savoir

l’annexe P. Cette annexe, qui a été approuvée par consensus par tous les
Etats parties à la convention, exige, comme indiqué ci-dessus, « une ana -
lyse des raisons pour lesquelles les méthodes non létales, les mééthodes
associées à toute activité de chasse à la baleine commercialée en cours ou

les analyses des données passées ont été jugées insuffiséantes ». Il s’ensuit
que l’utilisation de méthodes létales aux fins de la recherche éscientifique,
ou la prise en compte insuffisante des méthodes non létales dans éle cadre
des programmes de recherche scientifique, doit non seulement être anaély -
sée et justifiée, mais être aussi soumise à l’examen du céomité scientifique

de la CBI, afin qu’il puisse faire part de ses commentaires à ce séujet.
41. Le Japon a-t-il satisfait à ces conditions et a-t-il sérieusement envi -
sagé de recourir à des méthodes non létales dans le cadre de JARPAII? De
telles méthodes sont-elles utilisées dans le cadre de JARPA I? I Les éléments

de preuve versés au dossier montrent que le plan de recherche mentionéne
clairement les méthodes non létales qu’il est prévu d’utiéliser dans le cadre
de ce programme, notamment les relevés «visuels», l’observation «écosys -
témique» de l’habitat des baleines, « les observations océanographiques et

météorologiques…, dont la banquise, la température de surfacée de la mer,
la hauteur de la surface de la mer et la teneur en chlorophylle sur l’ensemble
de la zone de recherche, à l’aide de données satellites» 23.

22 Voir à l’adresse suivante : http://iwc.int/jarpa.
23 Contre-mémoire du Japon, annexe 150, p. 14-15.

175

8 CIJ1062.indb 479 18/05/15 09:29 398 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

42. Moreover, at the oral hearings, Counsel for Japan affirmed that

“Japan has put much effort into non-lethal research methods” and that
JARPA II “scientists have . . . had some success with biopsy sampling
and satellite tagging of large, slow-moving whale species such as the
24
humpback” . As evidence, he referred to the cruise report of the
JARPA II scientists for the year 2009-2010, which gives precise details of
the non-lethal sampling conducted on blue, humpback, fin and southern
25
right whales in that year . Similar data are also availa26e in the most
recent JARPA II cruise report for the year 2012-2013 . This gives details
of the non-lethal experiments conducted, which included “sighting dis -
tance and angle experiment”, “photo-identification experiment”, “biopsy

sampling”, “satellite tag”, “vomiting and faecal observationé”, “marine
debris observation”, and “oceanographic survey” 27.

43. With regard to sample sizes, the only requirement laid down in
paragraph 30 of the Schedule is that the proposal should specify “num -

ber, sex, size and stock of the animals to be taken” ; while Annex P refers
to the need to include a “sampling protocol for lethal aspects of the pro -
posal”. The JARPA II plan includes such a protocol in Appendices 6-8 28.
The statistical formula that is used to calculate the sample sizes is aléso

reproduced in the Appendix to Appendix VI of the JARPA II plan. Fuller
accounts of the sample size calculations and the statistical methodology
used are set out in the JARPA II research plan and in its Appendices 3 to

8, which were submitted to the Scientific Committee of the IWC for com -
ment in 2005. However, the experts presented by the Parties during the
oral proceedings disagreed as to whether the sample size eventually deteér -

mined by Japan for JARPA II is appropriate to the objectives of
JARPA II.

44. It is understandable that different scientists could reasonably come
to different conclusions about the sample sizes, in view of the computéa -
tional methodology used in JARPA II, the elements of discretion involved

in choosing the statistical parameters upon which sample calculations arée
made, and the range of variables which can lead to a range of possible
sample sizes. However, I must say that I do not understand how the

24 CR 2013/15, p. 61 (Boyle).
25 See at: http://www.icrwhale.org/pdf/SC62O3.pdf, p. 9.
26 See at: https://events.iwc.int/index.php/scientific/SC65a/paper/viewFileé/356/3…-
O09.
27 Ibid., pp. 3-4.
28 JARPA II Research Plan (2005), IWC SC/57/01, Apps. 6-8.

176

8 CIJ1062.indb 480 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 398

42. En outre, au cours des plaidoiries, le conseil du Japon a affirmé quée

«[celui-ci] a[vait] tout mis en œuvre pour employer des méthodes de
recherche non létales » et que « [l]es scientifiques [de JARPA II] [avaie]nt
même obtenu quelques succès avec la méthode des prélèvemeénts biopsiques
et celle du marquage par balise permettant un suivi satellitaire d’espèces de
24
grande taille se déplaçant lentement, telles que les baleines àé bosse» . Il a
invoqué à titre de preuve le rapport d’expédition des scientéifiques de
JARPA II pour l’année 2009-2010, qui décrit de manière détailléée les prélè -

vements non létaux effectués sur des baleines bleues, des baleinées à bosse,
des rorquals communs et des baleines franches australes au cours de cettée
saison 2. Des données similaires figurent également dans le rapport d’expé-
dition le plus récent correspondant à l’année 2012-2013 . Ce rapport four-

nit des détails sur les expériences non létales conduites dans éce cadre, parmi
lesquelles «l’expérience de la distance et de l’angle d’observation», «l’expé -
rience de la photo-identification », « l’échantillonnage par prélèvement

biopsique», « le marquage par balise permettant un suivi satellitaire »,
«l’observation des matières régurgitées et des matières fécales », «l’observa -
tion des déchets marins» et «l’observation océanographique» . 27

43. Pour ce qui est de la taille des échantillons, la seule exigence forméu -
lée au paragraphe 30 du règlement est que « le nombre, le sexe, la taille et
la population des animaux à capturer» soient précisés dans la proposition
de permis; quant à l’annexe P, celle-ci fait référence à la nécessité d’établir

«un protocole d’échantillonnage pour les aspects létaux de la préoposi -
tion». Un protocole d’échantillonnage figure dans le plan de recheréche de
JARPA II (appendices 6-8) 28. La formule statistique utilisée pour calculer

les tailles d’échantillon est également reproduite à l’anénexe de l’appen -
dice 6 du plan de recherche. Le plan de recherche et ses appendices 3 à 8,
qui ont été présentés au comité scientifique de la CBI poéur examen et
commentaires en 2005, contiennent des descriptions encore plus détaillées

des calculs ayant permis de déterminer la taille des échantillons et des
méthodes statistiques utilisées. Il convient toutefois de relever éque les
experts cités à l’audience par les Parties étaient divisés sur la question de

savoir si les tailles d’échantillon finalement retenues par le Japéon dans le
cadre de JARPA II étaient adaptées aux objectifs du programme.
44. Je conçois que plusieurs scientifiques puissent raisonnablement
aboutir à des conclusions différentes sur la taille des échanétillons, compte

tenu des méthodes de calcul utilisées dans le cadre de JARPA II, des élé -
ments discrétionnaires entrant dans le choix des paramètres statisétiques sur
lesquels se fondent les calculs des échantillons, et de l’ensembleé des variables

pouvant conduire à un éventail de tailles d’échantillon posséible. En

24 CR 2013/15, p. 61 (Boyle).
25 Voir à l’adresse suivante : http://www.icrwhale.org/pdf/SC62O3.pdf, p. 9.
26 Voir à l’adresse suivante : https://events.iwc.int/index.php/scientific/SC65a/paper/
viewFile/356/331/SC-65a-O09.
27
28 Ibid., p. 3-4.
Plan de recherche de JARPA II (2005), IWC SC/57/01, appendices 6-8.

176

8 CIJ1062.indb 481 18/05/15 09:29 399 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

majority came to the conclusion that “the sample sizes are larger thaén are
reasonable in relation to achieving JARPA II’s stated objectives”
(para. 212). It is not indicated anywhere in the Judgment what methodol -
ogy or criteria should be used to arrive at “reasonable” sample siézes in
light of the objectives of JARPA II or what “reasonable” sample sizes

should be. Nor does the Judgment provide an indication of what sample
sizes would be most appropriate to the objectives of JARPA II. Indeed, it
would be difficult for a Court of law to reach such a determination, whéich
befits scientists, not jurists.

45. The above analysis shows that the special permits issued by Japan
in connection with JARPA II clearly comply with the requirements and
conditions prescribed by the provisions of the ICRW and related Guide -
lines dealing with special permits issued for purposes of scientific reséearch,

and that JARPA II has been acknowledged by the Scientific Committee
of the IWC to contribute to the understanding of Antarctic minke whale
dynamics and to be useful in the assessment of certain breeding stocks oéf
humpback whales. These are not characteristics that can be associated
with a programme the design and implementation of which are not for

purposes of scientific research. The Scientific Committee of the IWC hasé
pointed out on several occasions that “only scientific and not ethicaél
issues should be considered” when issuing scientific permits 2. A similar
consideration should apply in the assessment of the legality of the authéo -

rization granted by Japan in connection with JARPA II.

46. Nonetheless, another issue that should have been addressed in the
context of the legality of JARPA II is whether the evolving regulatory
framework of the Convention setting zero catch limits and establishing

the Southern Ocean Sanctuary should be taken into account in interpret -
ing Article VIII of the Convention and assessing the extent to which it
might restrict the special permits issued under that provision for purpoéses
of scientific research. It is my view that the Court should have assesseéd
whether a programme, such as JARPA II, that continues to use lethal

methods for purposes of scientific research under Article VIII, constitutes
an anomaly, which may frustrate the object and purpose of the Conven -
tion in light of the conservationist approach adopted in the Convention é
in recent years. Such an assessment, in addition to anchoring the reasoné -

ing and conclusions of the Court on the law applicable to the dispute
between the Parties, would have been of great value to the States parties
to the Convention in view of the growing disconnect between Article VIII
and other provisions of the Convention on commercial whaling.

47. Article V of the Convention authorizes the IWC to make such
amendments to the Schedule as are necessary to carry out the objectives é

29 SC Report 2005, J. Cetacean Res. Manage 8 (Suppl.), 2006, p. 48.

177

8 CIJ1062.indb 482 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 399

revanche, ce que je ne conçois pas, c’est que la majorité des jéuges de la Cour
ait conclu que « les tailles d’échantillon [étaie]nt supérieures à ce qui éserait
raisonnable au regard des objectifs annoncés de JARPA II » (par. 212).
L’arrêt reste muet sur les méthodes ou les critères qu’ilé conviendrait d’ap-

pliquer pour obtenir des tailles d’échantillon « raisonnables» à la lumière
des objectifs de JARPA II ou sur ce que devraient être des tailles d’échan -
tillon «raisonnables». Rien dans l’arrêt ne nous permet de savoir ce que
devraient être des tailles d’échantillon adaptées aux objectéifs de JARPA II.

De fait, cette démarche sied aux scientifiques, et non aux juristes, éet une
cour de justice serait bien en peine de se prononcer sur la question.
45. Il ressort de cette analyse que les permis spéciaux délivrés par le
Japon dans le cadre de JARPA II sont clairement conformes aux exi -
gences et conditions prescrites par les dispositions de la convention eté les

lignes directrices y afférentes concernant les permis spéciaux délivrés en
vue de recherches scientifiques, et que le comité scientifique de la éCBI a
reconnu que JARPA II contribuait à une meilleure compréhension de la
dynamique des petits rorquals de l’Antarctique et était utile àé l’analyse de

certains stocks reproducteurs de baleines à bosse. Ces caractéristéiques ne
sauraient être celles d’un programme dont la conception et la miseé en
œuvre ne poursuivent pas de finalité scientifique. Le comité scéientifique de
la CBI a indiqué à plusieurs reprises que « des questions purement scien -

tifiques et non éthiques devaient être 29ises en considération » lors de la
délivrance des permis scientifiques . Ce constat devrait également s’ap -
pliquer à l’analyse de la licéité des permis accordés paré le Japon dans le
cadre de JARPA II.

46. Cela étant, il existe une autre question sur laquelle la Cour aurait édû
se pencher lorsqu’elle a examiné la licéité de JARPA II : celle de savoir si
l’évolution du cadre réglementaire de la convention fixant à zéro les limites
de capture et établissant le sanctuaire de l’océan Austral devait être prise en
compte dans l’interprétation de l’article VIII de la convention en ce qu’elle

pouvait avoir restreint le droit de délivrer des permis spéciaux eén vue de
recherches scientifiques au titre de cet article. A mon sens, la Cour aurait
dû rechercher si un programme tel que JARPA II, qui continue de recourir
à des méthodes létales aux fins de la recherche scientifique aué titre de

l’article VIII, constitue une anomalie susceptible de faire échec à l’objéet et
au but de la convention compte tenu de l’approche favorable à la céonserva -
tion désormais inscrite dans celle-ci. Une telle analyse, outre qu’éelle aurait
ancré le raisonnement et les conclusions de la Cour dans le droit appélicable

au différend entre les Parties, aurait été très précieuése pour les Etats parties
à la convention eu égard à la disparité toujours plus grandeé entre l’ar -
ticle VIII et d’autres dispositions de la convention relatives à la chasse
commerciale.
47. L’article V de la convention autorise la CBI à apporter des modifi -

cations aux dispositions du règlement lorsqu’elles sont nécessaéires à la

29Rapport de 2005 du comité scientifique,J. Cetacean Res. Manage, n o8 (suppl.),
2006, p. 48.

177

8 CIJ1062.indb 483 18/05/15 09:29 400 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

and purposes of the Convention and to provide for the conservation,

development and optimum utilization of whale resources. It also provides
that such amendments shall be based on scientific research. In view of téhe
recent amendments to the Schedule which have done away with the objec-
tive of optimum utilization of whale resources through the establishmenté
of zero catch limits, the special permits issued under Article VIII had to

be assessed in light of the overall evolution of the Convention and, in é
particular, of its object and purpose to ensure an integral and effectéive
interpretation of all its provisions.

III. Is JARPA II Conducted for Purposeés other
than Scientific Reseaérch?

48. It is stated in the Judgment that :

“Taken as a whole, the Court considers that JARPA II involves
activities that can broadly be characterized as scientific research . . .

but that the evidence does not establish that the programme’s design é
and implementation are reasonable in relation to achieving its stated
objectives. The Court concludes that the special permits granted by
Japan for the killing, taking and treating of whales in connection with é
JARPA II are not ‘for purposes of scientific research pursuant to

Article VIII, paragraph 1, of the Convention’.” (Para. 227.)

49. On the basis of that conclusion, it is further stated that :
“[t]he Court therefore proceeds on the basis that whaling that falls

outside Article VIII, paragraph 1, other than aboriginal subsistence
whaling, is subject to the three schedule provisions invoked by Aus -
tralia” (para. 230).

These three provisions are paragraph 10 (e) of the Schedule dealing with
the obligation to respect zero catch limits for the killing for commerciéal
purposes of whales from all stocks ; paragraph 7 (b) of the Schedule on

the prohibition on commercial whaling in the Southern Ocean Sanctuary
and paragraph 10 (d) of the Schedule on the factory ship moratorium.

50. The activities conducted under JARPA II are, on the one hand,
characterized in the Judgment as scientific research, while, on the otheér

hand, it is concluded that the special permits granted by Japan for JARPéA
II are not “for purposes of scientific research”. This is very unpersuasive
for the following reasons.
51. First, the distinction made in the Judgment between a programme
that involves “scientific research” and a programme “for purposes of sci -

entific research” is rather artificial and unsubstantiated (para. 67), par -

178

8 CIJ1062.indb 484 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 400

réalisation des objectifs et des buts de la convention et utiles àé la conser -
vation, au développement et à l’utilisation optimale des ressouérces balei -

nières. Il prévoit également que ces modifications doivent se féonder sur la
recherche scientifique. Au vu des récentes modifications apportéesé au
règlement, qui ont fait disparaître l’objectif de l’utilisatéion optimale des
ressources baleinières en fixant à zéro les limites de capture,é les permis
spéciaux délivrés au titre de l’article VIII auraient dû être examinés à la

lumière de l’évolution générale de la convention, et en péarticulier de son
objet et de son but, afin de garantir que toutes ses dispositions avaienét été
interprétées de manière à leur donner plein effet.

III. JARPA II poursuit-il des fins autres

que la recherche scieéntifique?

48. Selon le texte de l’arrêt,

«La Cour estime que si JARPA II, pris dans son ensemble, com -
porte des activités susceptibles d’être globalement qualifiéées de
recherches scientifiques …, les éléments de preuve dont elle dispose ne
permettent pas d’établir que la conception et la mise en œuvre éde ce

programme sont raisonnables au regard de ses objectifs annoncés. La
Cour conclut que les permis spéciaux au titre desquels le Japon auto -
rise la mise à mort, la capture et le traitement de baleines dans le écadre
de JARPA II ne sont pas délivrés «en vue de recherches scientifiques»
au sens du paragraphe 1 de l’article VIII de la convention» . (Par. 227.)

49. Sur la base de cette conclusion, il est également dit dans l’arrêét que

«[l]a Cour partira donc du principe que, dès lors qu’elle n’entre pas
dans les prévisions du paragraphe 1 de l’article VIII, la chasse à la
baleine — hormis la chasse aborigène de subsistance — tombe sous
le coup des trois dispositions du règlement invoquées par l’Ausétra -

lie» (par. 230).
Les trois dispositions en question sont le paragraphe 10 e) relatif à l’obli -

gation de respecter le moratoire fixant à zéro le nombre de baleinées pou -
vant être mises à mort, toutes espèces confondues, à des finés commerciale;s
le paragraphe 7 b) relatif à l’interdiction de la chasse commerciale dans le
sanctuaire de l’océan Austral ; et le paragraphe 10 d) relatif au moratoire
sur les usines flottantes.

50. Dans son arrêt, la Cour qualifie les activités menées dans le céadre
de JARPA II de recherches scientifiques tout en parvenant à la conclu -
sion que les permis spéciaux délivrés par le Japon dans ce cadrée ne le sont
pas « en vue de recherches scientifiques ». Ce raisonnement est fort peu
convaincant, et ce, pour plusieurs raisons.
51. Premièrement, la distinction faite par la Cour entre un pro -

gramme qui « comporte des recherches scientifiques » et un programme
mené « en vue de recherches scientifiques » est pour le moins artificielle

178

8 CIJ1062.indb 485 18/05/15 09:29 401 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

ticularly in view of the fact that the term “scientific research” éis not

defined in the Judgment. It is like saying : “I know how to identify the
activities undertaken for the purpose of the ‘term X’, but I do not know
how to define the term itself”. It also gives the impression that seréendipity

was at work here and that JARPA II, though not designed for purposes
of scientific research, accidently stumbled into scientific research actéivi -
ties.

52. Secondly, to the extent that it is not clearly proved that a pro -
gramme which involves scientific research activities has as its prepondeér-
ant purpose commercial whaling, and consequently the scientific activitiées

are incidental to the commercial whaling, as provided in Article VIII,
paragraph 4, of the Convention, such a programme cannot be deemed
not to be for purposes of scientific research.

53. Thirdly, the Court’s conclusion that JARPA II is not for purposes
of scientific research is also unpersuasive in light of the indisputableé evi -
dence on the recognition by the Scientific Committee of the IWC of the

generation by JARPA II of data which is useful to the work of the Scien -
tific Committee, on the use by JARPA II of non-lethal methods which are
uncharacteristic of commercial whaling, on the presence of scientists oné

vessels, and on the continuing review and commentary on JARPA II by
the Scientific Committee. In its 2012 Report, the Committee specifically
recommended the use of data arising, inter alia, from both JARPA and
JARPA II for catch-at-age based analyses 30. In the subsequent Report,

reference is made to non-lethal sampling of humpback whales occurring
within the JARPA/JARPA II programmes as useful in the assessment of
certain breeding stocks of humpback whales 3. Similar references were

made in this Report to JARPA and JARPA II photographic data con -
cerning blue whales 3, and to blubber thickness data arising from lethal
sampling in JARPA and JARPA II 3.

54. Fourthly, there is no clear evidence to show that the special permits

issued by Japan for JARPA II were not for purposes of scientific research,

30 J. Cetacean Res. Manage 14 (Suppl.), 2013, p. 29 :

“Section 10.1.4 Continue development of the catch-at-age models : Population
dynamics modelling provides a way to explore possible changes in abundanéce and
carrying capacity within Areas IIIE-VW, where appropriate data are available. The
inputs are catch, length, age and sex data from the commercial harvests and both
JARPA programmes, as well as abundance estimates from IDCR/SOWER.”

31 IWC Scientific Committee Report 2013, https://archive.iwc.int/pages/viewé.
php?ref=2128, para. 10.2.1.1.
32 Ibid., para. 10.3.1.4.
33 Ibid.

179

8 CIJ1062.indb 486 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 401

et dénuée de fondement (par. 67), d’autant que la Cour ne définit pas la

notion de « recherches scientifiques » dans son arrêt. Cela revient à dire :
«Je sais comment définir les activités entreprises dans le but de rééaliser
«X», mais je ne sais pas comment définir « X».» Cela donne également

l’impression qu’un heureux hasard est à l’œuvre ici et que JARPA II,
bien qu’il n’ait pas été conçu aux fins de la recherche sécientifique, a
donné lieu à des activités de recherche scientifique de manièére tout à fait

fortuite.
52. Deuxièmement, tant qu’il n’est pas clairement prouvé qu’uén pro -
gramme comportant des activités de recherche scientifique n’a pas épour
but essentiel la chasse commerciale, ces activités étant menéesé à titre

accessoire, selon le paragraphe 4 de l’article VIII de la convention, un
tel programme ne saurait être considéré comme dépourvu de finaliété
scientifique.

53. Troisièmement, plusieurs éléments de preuve irréfutables renédent
peu convaincante la conclusion de la Cour selon laquelle JARPA II n’est
pas mené en vue de recherches scientifiques : le fait que le comité scienti -

fique de la CBI ait reconnu que JARPA II générait des données utiles à
ses travaux, que JARPA II emploie des méthodes non létales, lesquelles
ne sauraient caractériser la chasse commerciale, que des scientifiqueés

soient présents à bord des navires et, enfin, que le comité sciéentifique
continue de procéder à l’examen de JARPA II et de faire part de ses com -
mentaires à ce sujet. Dans le rapport qu’il a publié en 2012, le comité a
expressément recommandé que l’analyse des prises par âge efféectuée dans

le cadre de ses travaux le soit à partir des données issues, entreé autres, de
JARPA et de JARPA II 30. Dans le rapport qu’il a publié l’année sui -
vante, il a fait référence à l’échantillonnage non létéal des baleines à bosse

dans le cadre de ces deux programmes, le jugeant utile à l’évaluation de
certains stocks reproducteurs de cette espèce 31. Ce rapport renvoyait éga-
lement aux données photographiques de JARPA et de JARPA II concer -
32
nant les baleines bleues , et aux données sur l’épaisseur de la couche de
graisse obtenues à partir des prélèvements létaux effectués dans le cadre
de ces deux programmes 33.
54. Quatrièmement, aucun élément de preuve ne démontre clairemenét

que les permis spéciaux délivrés par le Japon dans le cadre de éJARPA II

30 J. Cetacean Res. Manage, n 14 (suppl.), 2013, p. 29 :

«Section 10.1.4 Développement continu des modèles de prises par âge : la modéli
sation de la dynamique des populations est un moyen d’étudier l’ééventuelle évolution
de l’abondance et de la capacité de charge dans les zones IIIE-VW,é lorsqu’il existe des
données appropriées. Les données utilisées sont le nombre dée prises et la longueur,
l’âge et le sexe des spécimens capturés dans le cadre de camépagnes commerciales
et des deux programmes JARPA, ainsi que les estimations d’abondance iéssues du

programme IDCR/SOWER. »
31 Rapport de 2013 du comité scientifique de la CBI, https://archive.iwc.int/pages/view.
php?ref=2128, par. 10.2.1.1.
32 Ibid., par. 10.3.1.4.
33 Ibid.

179

8 CIJ1062.indb 487 18/05/15 09:29 402 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

unless the bad faith of Japan is presumed. As correctly stated in the
Lac Lanoux case: “there is a general and well-established principle of law
according to which bad faith is not presumed” 34. In any case, it is not the
function of the Court to investigate the motives lying behind Japan’s con -
duct in granting special permits to JARPA II, as long as those permits are

in compliance with Japan’s obligations. It appears, however, that botéh
the review and the conclusions of the Judgment entail a finding of bad
faith which is not explicitly expressed, since JARPA II is considered to be
in violation of the commercial whaling provisions of the ICRW.

55. Fifthly, there is also no evidence to support the claim that the pro -
gramme is being carried out for commercial purposes. The term “for puér-
poses of scientific research” does not, under Article VIII of the ICRW,
mean that such killing and taking of whales has to be exclusively for puér -

poses of scientific research. Article VIII (2) explicitly requires that whales
killed under the special permits should be processed and dealt with as
directed by the Government concerned including for commercial pur -
poses. Thus, Article VIII provides for a subsidiary or incidental purpose
which may have a commercial character. Of course, the preponderant

purpose must be scientific research, but the sale of whale meat in accoré -
dance with Article VIII does not deprive a special permit programme of
its quality as a programme conducted for purposes of scientific researché.

56. Turning finally to the conclusion in the Judgment that the authori -
zation granted to JARPA II is in breach of three provisions of the Sched -
ule (i.e., paras. 7 (b), 10 (d) and 10 (e)), there is, in my view, no legal
basis to such a finding unless it could be clearly shown that JARPA II is
commercial whaling in disguise, or that its activities are preponderantléy

of a commercial nature. In order to affirm that a breach of the commer -
cial whaling moratorium or the prohibition of whaling in the Southern
Ocean Sanctuary has occurred, it would be necessary to demonstrate that é
JARPA II is a programme for the purposes of commercial whaling.

57. The word “commercial” in paragraphs 10 (d) and 10 (e) was not
defined at the time of adoption of the amendments of the Schedule, nor
afterwards. There is no doubt, however, that it refers to whaling for coém -
mercial purposes. The Judgment does not characterize JARPA II as com-
mercial whaling, but the conclusion that the programme is in breach of

the moratorium on commercial whaling (para. 10 (e)) and the prohibi -
tion on commercial whaling in the Southern Ocean Sanctuary
(para. 10 (d)) implies that it is conducted for commercial purposes.

34Lac Lanoux Case, 16 November 1957, at XII Reports of International Arbitral Awords
(RIAA) 305: “[I]l est un principe général de droit bien établi selon léequel la mauvaise foi

ne se présume pas.”

180

8 CIJ1062.indb 488 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 402

ne l’ont pas été à des fins de recherche scientifique, à émoins de présumer
la mauvaise foi du Japon. Comme cela a été dit, à juste titre, édans l’affaire
du Lac Lanoux : « [I]l est un principe général de droit bien établi selon
lequel la mauvaise foi ne se présume pas.» 34 En tout état de cause, il n’ap-
partient pas à la Cour d’analyser les motifs auxquels obéit le éJapon lors -

qu’il délivre des permis spéciaux dans le cadre de JARPA II aussi
longtemps que ces permis sont conformes à ses obligations. Il semble,é
toutefois, que l’analyse et les conclusions de l’arrêt portent éà présumer la
mauvaise foi du Japon, sans que cela soit dit expressément, puisque léa
Cour considère que JARPA II viole les dispositions de la convention rela -

tives à la chasse à la baleine à des fins commerciales.
55. Cinquièmement, aucun élément de preuve ne vient étayer l’éalléga -
tion selon laquelle le programme serait mené à des fins commercialées. Aux
termes de l’article VIII de la convention, l’expression «en vue de recherches
scientifiques» ne signifie pas que la mise à mort et la capture des baleines

doivent servir un but exclusivement scientifique. Le paragraphe 2 de l’éar -
ticle VIII prévoit expressément que les baleines mises à mort en vertéu d’un
permis spécial doivent être traitées conformément aux directéives formulées
— y compris en matière de chasse commerciale —par le gouvernement
ayant délivré ledit permis. Par conséquent, l’article VIII prévoit un but

subsidiaire ou accessoire, qui peut revêtir un caractère commerciaél. Il va de
soi que le but principal doit être la recherche scientifique, mais laé vente de
la chair de baleine conformément à l’article VIII ne prive pas un pro -
gramme mené au titre d’un permis spécial de son caractère scéientifiqu:eun
tel programme peut être mené en vue de recherches scientifiques.

56. Quant à la conclusion de l’arrêt selon laquelle l’autorisation accor -
dée au profit de JARPA II est contraire à trois dispositions du règlement
(à savoir par. 7 b), 10 d) et 10 e)), il n’existe à mon sens aucun fondement
juridique à l’appui d’une telle conclusion, sauf à démontérer sans la
moindre ambiguïté que JARPA II est un programme de chasse commer -

ciale déguisé ou que les activités menées dans ce cadre sont pour l’essen -
tiel de nature commerciale. Pour pouvoir affirmer qu’il y a eu violaétion du
moratoire sur la chasse commerciale ou de l’interdiction de la chasseé à la
baleine dans le sanctuaire de l’océan Austral, il faut pouvoir démontrer
que JARPA II est un programme de chasse commerciale.

57. L’adjectif « commerciale» aux paragraphes 10 d) et 10 e) n’a pas
été défini au moment de l’adoption des modifications du rèéglement ; il ne
l’a pas été davantage par la suite. Il ne fait néanmoins aucéun doute qu’il
s’agit de chasse à la baleine à des fins commerciales. Dans soné arrêt, la
Cour ne qualifie pas JARPA II de programme de chasse commerciale,

mais la conclusion selon laquelle ce dernier viole le moratoire sur la céhasse
commerciale (par. 10 e)) et l’interdiction de la chasse à la baleine dans le
sanctuaire de l’océan Austral (par. 10 d)) sous-entend qu’il s’agit d’un
programme mené à des fins commerciales.

34Affaire du Lac Lanoux, 16 novembre 1957, Recueil des sentences arbitr(RSA),
vol. XII, p. 305: «[I]l est un principe général de droit bien établi selon lequel éla mauvaise foi

ne se présume pas. »

180

8 CIJ1062.indb 489 18/05/15 09:29 403 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

58. How can such a conclusion be reconciled with the use of non-lethal
methods in the JARPA II programme or with the recognition by the Sci -
entific Committee of the IWC of the usefulness of the data obtained withé
these methods as described in paragraph 53 above ? How does one
account for the evidence of the many scientific outputs produced exclu -

sively with the use of data arising from the non-lethal methods employedé
in JARPA II ? This evidence indicates that 100 scientific outputs were
produced between 1988 and 2013 exclusively with the data arising from
non-lethal methods in JARPA and JARPA II 3. It is doubtful that such
a scientific output could be produced by a programme of commercial

whaling.

59. It is stated in paragraph 230 of the Judgment that : “the Court sees

no reason to evaluate the evidence in support of the Parties’ competiéng
contentions about whether or not JARPA II has attributes of commercial
whaling”. This statement is, however, contradicted by the distinctioné
made in the Judgment between activities involving scientific research anéd
a programme for purposes of scientific research. Such a distinction couléd

make sense only if it was proved that JARPA II was a commercial whal -
ing programme with incidental collection and analysis of biological dataé
as provided in Article VIII, paragraph 4, of the ICRW. The statement is
equally contradicted by the conclusion that JARPA II is in violation of

the moratorium on commercial whaling (para. 10 (d) of the Schedule).

IV. Conclusion

60. The evidence before the Court does not support the conclusion
that the special permits for JARPA II have been issued for a purpose
other than scientific research. Nor does it establish that such special per -

mits do not comply with the requirements and conditions prescribed by
the provisions of Article VIII of the ICRW, paragraph 30 of the Schedule
and related Guidelines dealing with scientific research programmes. The é
real issue is whether the evolving regulatory framework of the Conven -

tion in setting zero catch limits and establishing the Southern Ocean
Sanctuary should be taken into account in interpreting Article VIII of the
Convention and the legality of the special permits granted by Japan undeér
that provision for purposes of scientific research, and the extent to whéich
Article VIII and the use of lethal methods for purposes of scientific

research might have been restricted by the fact that the optimum utilizaé -

35 See at: http://www.icrwhale.org/pdf/ScientificContributionJARPA.pdf, p. 3.

181

8 CIJ1062.indb 490 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 403

58. Comment cette conclusion pourrait-elle être compatible avec le
recours à des méthodes non létales dans le cadre de JARPA II ou avec le
fait que le comité scientifique de la CBI ait reconnu l’utilitéé des données
obtenues par ces méthodes, comme indiqué au paragraphe 53 ci-dessus ?
Que dire des éléments attestant les nombreuses contributions scienétifiques

apportées exclusivement par les données obtenues grâce aux mééthodes
non létales utilisées dans le cadre de JARPA II ? Ces éléments montrent
que cent contributions scientifiques ont été recensées entre 1988 et 2013,
lesquelles n’ont pu être réalisées que grâce aux donnéées issues
des méthodes non létales employées dans le cadre de JARPA et de
35
JARPA II . Il paraît particulièrement douteux que de telles contribu -
tions scientifiques puissent être apportées par un programme de chasse
commerciale.
59. Il est dit au paragraphe 230 de l’arrêt que « la Cour ne voit aucun

motif d’examiner les éléments de preuve apportés par les Parties à l’appui
de leurs thèses contradictoires sur le point de savoir si la chasse pératiquée
dans le cadre de JARPA II est, à certains égards, de nature commerciale».
Cette affirmation est cependant contredite par la distinction opéréée dans
l’arrêt entre les activités comportant des recherches scientifiéques et un

programme mené en vue de recherches scientifiques. Une telle distinctéion
n’aurait de sens que s’il pouvait être prouvé que JARPA II est un pro -
gramme de chasse à la baleine à des fins commerciales prévoyanté acces -
soirement la collecte et l’analyse de données biologiques, tel queé prévu au

paragraphe 4 de l’article VIII de la convention. Cette affirmation est éga -
lement contredite par la conclusion selon laquelle JARPA II viole le
moratoire sur la chasse commerciale (règlement, par. 10 d)).

IV. Conclusion

60. Les éléments de preuve produits devant la Cour ne viennent pas
étayer la conclusion selon laquelle les permis spéciaux délivréés dans le
cadre de JARPA II servaient un but autre que la recherche scientifique. Ils

n’établissent pas davantage que ces permis spéciaux ne sont pasé conformes
aux exigences et conditions prescrites par les dispositions de l’artiécle VIII
de la convention, du paragraphe 30 du règlement et des lignes directrices
applicables en matière de programmes de recherche scientifique. La vréaie

question est celle de savoir si l’évolution du cadre réglementaéire institué
par la convention, qui a conduit à fixer à zéro les limites de écapture et à
créer un sanctuaire dans l’océan Austral, doit être prise en compte dans
l’analyse de l’article VIII de la convention et de la licéité des permis spé -
ciaux délivrés par le Japon au titre dudit article aux fins de la érecherche

scientifique, et dans quelle mesure l’application de l’article VIII et le

35 Voir à l’adresse suivante : http://www.icrwhale.org/pdf/ScientificContribution

JARPA.pdf, p. 3.

181

8 CIJ1062.indb 491 18/05/15 09:29 404 whaling in the antarcétic (diss. op. yusuf)

tion of whale resources has been set aside as one of the central objectiéves
of the Convention.

61. It is a pity that instead of such a legal assessment, the Court has
engaged in an evaluation of the design and implementation of the pro -

gramme and their reasonableness in relation to its objectives, a task théat
normally falls within the competence of the Scientific Committee of the é
IWC, which is scheduled to undertake an overall review of the JARPA II
programme in 2014. As a matter of fact, when the Scientific Committee
took the view in the past that a permit proposal submitted by a State did

not meet its criteria, it specifically recommended that the permits sougéht
should not be issued. This has not been the case with regard to JARPA II,
but it shows at least that the Committee’s practice is adequate to thée task
of evaluating the design and implementation of scientific research pro -

grammes under the ICRW and accordingly advising the IWC on that
matter.

(Signed) Abdulqawi A. Yusuf.

182

8 CIJ1062.indb 492 18/05/15 09:29 chasse à la baleine déansl’antarctique (op. disés. yusuf) 404

recours aux méthodes létales en vue de recherches scientifiques foént l’objet
de restrictions depuis que l’utilisation optimale des ressources baleéinières
ne compte plus parmi les objectifs essentiels de la convention.
61. Il est tout à fait regrettable que la Cour, au lieu de se livrer àé cette
analyse juridique, ait entrepris d’évaluer la conception et la misée en œuvre

du programme, ainsi que leur caractère raisonnable au regard des objeéc -
tifs du programme, tâche qui relève normalement de la compétencée du
comité scientifique de la CBI. Il est prévu que ce dernier procèéde à une
évaluation globale de JARPA II en 2014. Par le passé, lorsqu’il a estimé
qu’une proposition de permis soumise par un Etat ne satisfaisait pas éaux

critères requis, le comité a expressément recommandé de ne péas délivrer le
permis en question. Or, il ne l’a pas fait pour JARPA II. Cela montre à
tout le moins que la pratique du comité est adaptée à la tâcéhe qui lui a été
assignée, celle d’évaluer la conception et la mise en œuvre édes programmes

de recherche scientifique au titre de la convention, et de faire part deé ses
commentaires à ce sujet à la CBI.

(Signé) Abdulqawi A. Yusuf.

182

8 CIJ1062.indb 493 18/05/15 09:29

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Opinion dissidente de M. le juge Yusuf

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