Opinion dissidente de M. Kreca, juge ad hoc (traduction)

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091-19960711-JUD-01-07-EN
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C'est tresrespectueusement que je me trouve contraint, A mon grand
regret, deme prévaloirdu droit de formuler une opinion dissidente.
Chacune des exceptions soulevéespar la Yougoslavie semblant être
conçue comme un tout distinct,je lesexaminerai séparément,afin que les
conclusions auxquellesj'aboutirai constituent un fondement solide pour
ma conclusion génkraleconcernant la compétencede la Cour et la rece-
vabiliti: de la demande de la Bosnie-Herzégovine.

1. Ma conception du sens de la première exception préliminaireest
fondamentalement différente de celle de la Cour. Avant de décider siin
cuacreao, il existe un différendinternational au sens de l'article IX de la
convention sur le génocide,ilestà mon avisnkceçsüirede déterminersi la
Bosnie-Herzégovine i l'époqueou la requete et le mémoireont ésé sou-
mis et la Bosnie-Herzégovinetelle qu'elle existeaujourd'hui alorsque la

présente affaireest ril'examenconstituent effectivement un seulet mkrne
Etat. Cette question està mon avis un exemple typique de ce que dans
son opinion individuelle en l'affaire du Cunzerounseptentrional' sir
Gerald Fitzmaurice a décrit comme relevant d'exceptions((qui peuvent
et, à strictement parler, doivent êtreexaminéespréalablementa toute
ques~ion de compétence»,car elle ouvre la voie a la persvau stand; in
judicio de la Bosnie-Herzégovine.
S'ils'agitu inèmeEtüt, alors la question soulevéepar E'exceptionpré-
liminaire est pertinente. Dans leas contraire, la situation ermon avis
claire- il n'ya pas de différendconcernant l'articlIX de la convention
- el, ainsi, plucitum u6iudpersonule.
A cet égard,la question soulevéepar la première exception prélimi-
naire n'estpas une question de recevabilitéstrictosensu, mais une ques-
tion suigeneris touchant à la fois la recevabilitéet la compétencerarione

persunae.
2. La question susmentionnéeest directement liée à la notion de diffé-
rend international,qui consisle en deux éléments cumulé -s un élément
materiel et un élémentformel. La définitiongénéralement acceptéd eu
ternie {(différend)que la Cour a donnéedans l'affaire des Concessions
Muvromrnuti~en Plïleslinene représenteen fait que l'élkmentmatériel
de la notion de ((diffkrend international». Pour pouvoir qualifier «un
désaccordsur un point de droit ou de fait, une contradiction, une opposi-
tion de thèsesjuridiquesou d'intérêts)l),squels sont evidents en l'espèce,
de crdifférendinternational». unautre élément. formel celui-làe.st indis-
pensable, à savoir que les parties au «désaccord)>au en «apposition>)doivent êtredes Etats au sens du droit international public. L'articleIX
de la convention sur le génocide disposeque la Cour est compétentepour

connaître des {(différendsenire les parties». Le terme <(parties»,tel qu'il
résulte i l'évidencede l'article XI de la convention, désigneIes Etats,
qu'ils soientou non membres de l'Organisation desNations Unies.
Le terme «Etat» n'estpas non plus utiliséin abslracto dans laconven-
tion sur le génocideni ailleurs; il désigneune entitéconcrètequi réunit
dans sa personnalitéles élémentsconstitutifs de 1'Eiat iels que ceux-ci
sont définisparledroit international. La prétention d'une entita la qua-
lit6d'Etat, et mêmesa reconnaissance par d'autres Etats, ne sont pas, au
regard du droit, suffisantes en elles-memespour faire de cette entitéun
Etat au sens du droit iniernational.
Dès le tout début de l'instance devant la Cour, la Yougoslavie a
contestéa la Bosnie-Herzégovinela qualitéd'Etat. Certes, comme l'a
note la Cour, la Yougoslavie a expressémentretirécette exception préli-
minaire. Toutefois, ellea formulé a l'appui de sa troisième exception des
arguments de Fondpour dénier à la Bosnie-Herzégovinela qualitéd'Ela1

durant la période pertinente.Elle a par exemple soulignéque «les or-
ganes centraux du gouvernement de cette république ne contrôlaient
qu'unetrèsperircfraction de son iernioire ..Tlexislaien fait quatre Etats
sur le terricorre de l'ex-République socialisde Bosnie-Herzégovine ..,,3
En substance, la troisiémeexception de la Yougoslaviepeut êtreramenée
à l'argument selon lequel, au regard des réglesjuridiques applicables, la
Bosnie-Herzégovine «n'a pas établi sa qualité d'Etat indépendant» a
l'intérieur des limitadministratives de cette ex-entité fédérale.'étaitlà
une autre raison pour laquelle la Cour devait prendre position sur la
question susmentionnée, non seulement pour pouvoirstatuer sur la pre-
mière exception préliminairede la,Yougoslavie, mais aussi pour décider
si et dans quelle mesure elleétait compétenteen la présente affaire.
La réponse a la question de savoir si la Bosnie-Herzégovine,aux
inoments pertinents, ttait coiistituen Etat il'intérieudes limitesadmi-
nistratives de l'entitéfédéralee Bosnie-Herzégovinea un effet concret
sur la successionà la convention sur le génocide.Etre lie par la conven-

tion sur le génocide est seulement l'une des formes de la {(substitution
d'un Etat à un autre dans la responsabilitédes relations internationales
d'un territoire».Le inot {(territoire))vise l'espacedans lequel l'Ela€nou-
vellement forméexerce: la summu potesrus, espace a l'intérieurduquel il
est constituéen Etat au sens des normes en vigueur du droit internatio-
nal. Il est peine besoin de dire qu'aucune basejuridique ne permet àun
Etat d'assumer des obligations contractuelles au nom d'un autre Etat ou
d'autres Etats, qu'ils soient reconnus ou non. La Bosnie-Herzégovine
prétend expressément - et, qui plus est, la tolalité de son mémoire
repose sur cette prétention- qu'elleagit au nom de l'ensemblede l'ex-
entitt fëdéralede Bosnie-Herzégovine,c'est-&-direqu'elle est1'Etat suc-cesseur relativement i la totalitk du territoire de cette ex-entitéfédérale,
C'est pourquoi il est à mon avis essentielque la Cour, lorsqu'elle definit
la situation en fait et en droit dans le territoire de Bosnie-Herzégovine
aux moments pertinents, définisseprécisémentl'étendue de ça compé-
tence.
Finalement, par sa portée,la réponse à la question de I'identitkéta-
tique de Ia Bosnie-Herzégovine est à mon avis également pertinenteen ce
qui concerne l'argument formulkpar la Yougoslavie dans sa cinquième
exception préliminaire, a savoir qu'«il y a en l'espèce un conflitinterne

entre trois parties, auxquelles la République fidérative de Yougoslavie
n'est pas partieprenante».
Compte tenu de ce qui précède,et même sila Yougoslavie n'avait pas
présenté un tel argument, la Cour n'enest pas moins tenue de s'assurer de
sa compétence.Comme il a éikétablidans l'arrêt rendudans l'affaire de
l'Appel concernant lu comyttence du Conseilde I'OACI:

<<LaCour n'en doit pas moins s'assurer de sa compétenceet elle
doit, s'il a lieu, l'examiner d'office.Le vraiproblkme soulevéen
l'espéce,du fait qu'une partie 'est abstenue de présenterune objec-
tion à lacompétence sousIa forme d'une exception prkliminaire, a
étéde savoir si cette partie ne devrait pas êtreconsidéréecomme
ayant ainsi acceptéla compétence dela Cour. >j4

3.(Lu notion d'Etut ab intra.) La riotion d'Etat ab infru définitl'Ela1
comme un phénomèneisoléet statique sur la base de:ses élémentscons-
titutifs.'Etat ainsi défini s'entendgénéralementd'une entitécompre-
nant une population permanente, un territoire ktabli et une auroritésou-

veraine. 11n'est pas rare que d'autres élémentsde 1'Etatsoient aussi cités
mais ils ne méritentpas la qualification d'klémentsconstitutifs, soit qu'il
s'agisse, par leur nature, d'éléments dérive (sar exemple «la capacité
d'ktablir des relations avec d'autres Etats~}, soit qu'ils reflètentdes
notions exclusivistesontologiquemeni incompatiblesavecFanature démo-
cratique du droit international positifc<niveaude civilisation permettant
1'Etard'observer les principes du droit international», etc.).
Quant à la nature des éléments constitutifs de 1'Etatçitésci-dessus, il
s'agitde faitsjuridiques.En tant que faitsjuridiques, ils ont deux dimen-
sions.
La qualificationd'<<élémen csnstitutifs de 1'Et»treflètela dimension
phénoménologiquestatique de Ia notion d'Etat. Elle procede de 1'Etat
qui, en tant que fait, c'est-à-dire phénoménologiquemente ,st axé surles

éléments coristitutifs fondamentaux de son être statique.
Dans le cas de l'apparition de nouveaux Etats, leséléments constitutifs
de 1'Etatperdent leurscaractéristiquesphénoménologiques - car dans ce
cas iln'yn pas d'Etat en tant qu'entité- et setransforment en condirions
préuluhles à la naissance:d'un Etat. End'autres termes, pour qu'une cer-

CIi1.J.RecuIYR, p.52.

71 taine entitédevienne un Etat, elledoit remplir cumulativement des condi-
tions qui sont, au sensmateriel, identiques aux Élémentsconstitutifs d'un
Etat pris auxsens slalique et phénornenologique.

4. Quelle est la relation mutuelle entre les élémentconstitutifs fonda-
mentaux de I'Elat? Du point de vue formel, la question peut sembler
superflue,car son libellémeme suggèrela seulerkponse possible, i savoir
qu'il s'agit d'élémenq tui opèreritcumulativement. Toutefois, cette ques-
tion a sa propre logique si on l'envisagedu point de vue de la valeur rela-
tive des élkrnentscuniulésou, en d'autres termes, si t'on envisage,au sein
de la notion d'Etacconstituédes trois élkmentscités,la relation mutuelle
de ces éléments uh iniru.
MEme si la valeur comparée de ces éléments estdans une certaine
mesuredéterminée ;l'avancepar leurnature cumulative,certainesconclu-
sions peuvent néanmoinsêtretirées. Premiérement,il n'est pas douteux
qu'il existe bien une échelldee valeurs, sans allerjusqu'à une hiérarchie.
Il suffit de noter que territoire et population sont également inhérents ;i
certaines entitésnon étatiques.11est aussi hors de doute que l'élémend te
souverainetéest propre au seul Etat. Troisièmement - et cela est la du=
ferenfia specfica entre les Etats et d'autres entités, nonétatiques - In

souverainetéest dans un sensune condition sine qua non, une condition
d'une valeur particuliére,car l'autorité souverainen'est pas seulement
l'un des élémentc sonstitutifs de I'Etat, mais elle esten même temps celui
qui donne une substance concrète aux notions assez abstraites et larges
de <<territoire)et de «population>>et, cefaisant, les relie a la notion
d'Etat au sens du droit international. A l'évidence,pour qu'un «terri-
toire» soit un ({territoire&tatique»il doit êtresoumis une autoritésou-
veraine. A défaut, un «territoire» n'est pas un territoire étatique mais
quelque chose d'autre (res nullius, territoire sous tutelle, res cornmunis
omnium,patrimoine commun de l'hurnanitk, etc.).
5. Les éléments constitutifsde 1'Etatexistaient-ils dans le cas de la
Bosnie-Herzégovine a la date pertinente?
6. Il n'est pas douteux que la Bosnie-Herzégovineavait une ({popula-
tion permanente» si I'on utilise l'expression au sens technique, c'est-
Ii-dire au sens d'un groupe d'individus lies au territoire en question par
leur mode de vie.
Toutefois, en droit international positif, l'expression«population per-

manente» acquiert un sens différent.Dans un systkme qui accorde une
importance fondamentale aux principesde 1"galitédes droits et de l'auto-
déterminationdes peuples (voir ci-aprèspar. 57, 68 et 711,la notion de
«populnlion permanente»,au moins lorsque I'onse réfèrea un territoire
habitépar plusieurs peuples, ne peut avoir seulement le sens technique
susvisé.Dans un tel cas, pour pouvoir parler d'une ((population perma-
nente>> compte tenu des principesde l'égalité ded sroits et de l'autodéter-
mination des peuples, un minimum de consensus doit exister entre les
peuples concernésquant aux conditions de Ieurviecommune.
En Bosnie-I-Ierzégovinec,e minimurn n'existait pas. Le rgfërendum du
29 févrieret du Iermars 1992,en relation avecle plébiscite national du APPLICATION DE CONVENTION G~NOCIDE (OP. DISS. KRE~A) 664

peuple serbe en Bosnie-Herzégovine de9 s et 10novembre 1941,a montré
que la ({population permanente» de l'entité fédérad le Bosnie-Herzégo-
vineétaitdiviséeen un peuplc croaio-musulman, d"unepart, et un peuple
serbe, de l'autre. La réunion descommunes h majoriik croate au sein de
lamrnmunautk croate d'Herceg-Bosnale 19novembre 1991et, en parti-
culier, la Formationde la communauté étatiqueindépendante:d'Herceg-
Bosna le4juillet 1992symbolisaientlesdivergenceslotales dechoix entre
les trois peuples de Bosnie-Herzégovine.S'agissant d'une entité dans
laquelle lasumrno polt.srasest un élkmentconstitutif d'une importance

particulièreet compte tenu de la maniere dont elle étaitrépartieen Bos-
nie-Herzégovine,de solidesarguments permettent d'affirmerqu'il y avait
cn fait trois ((populations permanentes>>en Bosnie-Herzégovine.

7. L'utilisation de l'expression <(territoiredéfininimplique des fron-
tières définieet étübliesconformtment aux regles du droit international
positif. En tant que condition de l'existence d'un Eiat, ({desfrontikres
définieset établies»n'ont pas une valeur absolue - en prütique on a
considéré qu'unEtat tiait constituémêmelorsque toutes ses frontières
n'étaient pas définies.Toutefois, il est essenticl qu'<<ilexiste une bande

consistante de territoire indéniablement controléepar le gouverncrneni
du prétenduEtat»'. La régleest que les frontières doivent êtreétablies
par traité international ou, exceptionnellement,ur la basedu principe de
I'effectivilé.
La question de savoir si la Bosnie-Herzégovineavait «des frontières
définieset établies»a un double aspect, matérielet chronologique.
8. Du point de vue matéricl,il s'agitde savoir si l'on peut assimiler les
limites administratives territoriales internes d'un Etat composite à des
frontières entre Etats au sens du droit iniernational?
La réponsene peut êtreque négativetant du point de vue du droit
interne de la République féderativesocialiste de Yougoslüvie que du

point de vue du droit international.
En ce qui concerne le droit interne de la Républiquefédérative socia-
liste de Yougoslavie,il suffit de noter lesdispositions de l'article 5, para-
graphe 1, de la Constitution de la République Fkdkrativesocialiste de
Yougoslavie, qui disposait expressémentque «le territoire de la Répu-
blique fédérativesocialiste de Yougoslavie est unifié»et qu'il est «com-
pose desterritoires des rkpubliquessocialistes».La raison de penser qules
«limites» entre les entitésfSdéralesn'étaientque des lignes de démarca-
tion administratives estaussi attesttc par le fait qu'ellesn'avaient pas été
établiesdirectement par un acte juridique. Ellesétaientdéterminées indi-
rectement, par le biais desterritoires des communes qui constituaientune
certaine entitéfédéralede telle sorte qu'ellesétaient,en un sens, un agré-

gat de frontièresçommunales. Ainsi, la Constitution de Bosnie-Herzégo-
vine stipulaità l'article 5: «Le territoirde la Républiquesocialiste de
Bosnie-Herzégovine estcompose des superficies descommunes. »

5M N Shaw. lnr~rnatiorinlLo1986p. 127. La nature administrative des limites des entités fkdéralesen Répu-
blique fkdérativesocialiste dc Yougoslavie a aussi étéreconnue par la

commission d'arbitrage de la conférencesur la Yougoslavie dont lesavis
sont utiliséspar le demandeur comme argument principal. Dans son avis
nu 3,la commission a qualifielesfrontièresentre IFSentités fédéraleysou-
goslaves de {(lignesde délimitation»b.
En droit international, les termes «frontiéres» ou «frontières éta-
tiques» sont réservés aux Etats dotésde la personnalite internationale.
En l'espèce,si la Républiquefédérative socialistede Yougoslavie étaitun
Etüt au regard du droit international public et de la Charte des Nations
Unies, ses rtpubliques en ttaient lesélémentcsonstitutifs et, compte tenu
de la nature juridique d'une fédérationi,lsétaientlesélémentsconstitutifs
d'un seul Etat inforo externo, et d'un Etat composite in Joro interno
puisqu'une fkdérationse distingue par l'existenceparallèled'une organi-
sation gouvernementale fédéraleet d'une organisation gouvernementale

des républiquesde la manièreet dans la mesure établies par la constitu-
tion et par la loi.
9. Du point de vue chronologique, la question se pose différemment:
leslimitesadministratives territoriales de la Bosnie-Herzégovine ont-elles
été rrünsforméesen frontièresau sens du droit international, [rucrutcm-
poris, a partirdu moment ou «la souverüineti et l'indépendance>d >e la
Bosnie-Herzégovineont étéproclamées?
Une telletransformation est enprincipe possible. Des<<non-frontières»
peuvent devenir des ccfrontitres» de la meme manière dont les «fron-
tières~sont définies, c'est-à-direpar accord ou, exceptionnellement, sur
la base du principe de l'effectivité.
Les républiques soviétiquee st la Républiquetchéqueet la Slovaquie

fournissent des exemples d'une telle transformation. Dans le cas de la
Yougoslavie, une telle transformation impliquait deux choses: premikre-
ment, qu'unedécisionsur la dissolution de la Républiquefédérative socia-
liste deYougoslavi~:ait étk prise ouune restructuration étütico-juridique
effectuie par l'organe investide l'autorité suprêmd eans le cadrc d'une
procédure appropriée et,deuxièmement,que, dans un cas comme dans
l'autre, l'établissemente la Bosnie-Herzégovine entant qu'Etat indépen-
dant ait étéenvisagé.Les faits pertinents imposüienl une telle solution.
Premièrement, la Bosnie-Herzégovinen'étaitpas un klémentconstitutif
authentique de 1'Etatyougoslüve.Un tel statut étaitcelui,notamment, des
peuples de Bosnie-Herzégovine(voir ci-après par. 48-60). En outre, la
Bosnie-Herzégovineétantune entitk dérivéedu droit constitutionnel de la
Yougoslavie sans droit de sécession,son existencedépendaitde cellede la
Yougoslavie. En conséquence, meme d~nsl'hypolhése où la dissolutionde

la Ripub fiquefédérative sucialistede Yougo~luvie étai1 eff~rcti cv~l,ne
sign8erait pus m soi la trun?rfjrwiationde lu Busnie-Hcrzkgovineen un

Conférencepour la paix cn b'ougoslavie,commissiond'arbitran",3, par2,
al. 3.

74l APPLICATION DE CONVENTIONGENOCEDE(OP. DISS. KKE~A) 666

Erat indipendanf ù [intérieur de ses limites adminisrrarives. Juridique-
ment, ceîle ~li.~.solulinypo~hétique auruir & necessairerneraf déboucher

Jur un réarnBnugcmenptolitique et juridique de l'espace de luBumie- Her-
ïegovir~esur lu base de la nurme de l'kgalitkdes droitset d~I'autodéter-
rninution despeuples.
La Bosnie-Herzkgovinen'a pas acceptéle ({projetpour l'organisation
future de lYEtat>p>roposépar un groupe de travail comprenant des repré-
sentantsde touteslesrépubliquescomme base denouveaux pourparlers aux-
quels auraient participéles présidentsdes républiqueset la présidencede
1'Etatei qui, entre autres, comprenaitune ((procédureproposée pourla dis-
sociütionde laYougoslavie>> sur la basde l'autodéterminationdes peuples.
Cette partiedu «projet>),lequela étéClaborépour faire facea la crisecons-
titutionnelleue connaissait la République fédérativ socialistede Yougo-

slaviede manière pacifiqueet démocratiqueet dans le respect des normes
pertinentesdu droit international et le droit interne de la Républiquefédé-
rative socialiste de Yougoslavie, envisageait unesolution correspondante
pour les frontières. Surla base d'un amendementde la Constitution de la
République fédérativesocialisted Yeougoslavie, le{(projet)}énonçaitI'obli-
galion du gouvernement fédéra le «cl préparerdes propositions concer-
nant la délimitation territorialeet les frontikresdes futurs Etats el autres
questions d'importance pour la formulation de la loi sule retrait^^.
Reste le principede l'effectivi~comme basc possible de la Iransforma-
tion deslimitesadministratives territoriales de I'eniitkfédéralde Bosnie-

Herzégovine en frontitres internationales, Comme ce principe implique
l'exerciceréelet effectifde l'autorité souveraine,et compte tenu dc la
portéede l'autorité souverainedu gouvernement central Sarajevo (voir
ci-aprèspar. 181, il n'est pas douteux y ue cette transformation en fron-
tièressur la base du principe de I'effectiviié nes'estpas produite.

10. La commission d'arbitrage de la conference sur Iü Yougoslavie,
dont la Bosnie-Herzkgovinecite l'avisa i'appuide sesprktentions, déclare
à cei égard:

(<Adéfautd'un accord contraire, leslimitesantérieuresacquikreni
le caractère de frontières protégéespar le droit internaiional. Telle
est la conclusion a laquelle:conduit le principe du respect du statu
quo territorialet particuliérementcelui de I'uri pns.side~zs...[qui],

bien qu'initialement rcconnu dans le reglement des problèmes de
décolonisationen Amériqueet en Afrique, constitue aujourd'hui un
principc présentantun caractère généralc ,omme l'a déclaré la Cour
internationale de Justice dans son arrêtdu 22 décembre1986dans
l'affaire entre le Burkina Faso et la Républiquedu Mali (Differend
frontu!ier, C.I.J.Recueil 1986, p. 565, par. 20):

«Ce principe ne revètpas pour autant le caractère d'unerègle

yFocirs,numérospkial, janvier 1992,p. 33.
I particulikre, inhérenteA un systémedéterminéde droit interna-
tional.Tlconstirue un principe général, logiquementliéau ph&
nomene de l'accessiona l'indépendance, où qu'il semanifeste. Son
but évidentest d'éviterque IYndépendanceet la stabilitédes nou-
veaux Etats ne soient mises en danger par des luttes fratricides.»"

Un tel raisonnement ne tient pas juridiquement.
Premièrement, l'expression crstatu quo territorial)) est en l'espèceune
conrradic~ioin adiecio. Elle a bien un sens logique et juridique dans

l'ordre international, dans les relations mutuellesentre les Etats en tant
que sujets du droit international. Le szalu quo territorial est, aux Nations
Unies, un substitut terminologique pour le principe du respect de l'inté-
gritéterritoriale de 1'Etatet,à strictement parler, il vise les Etais au sens
du droit international et non les entitéscomposant une fédéralion. In
joro interno, le {(stutuquo territorial» a une importance limitéepour la
proprc organisation territoriale de 1'Etat et est une question qui relève

strictement de la compétence interne (domaineréservé). Ainsid ,epuis la
création de la Yougoslavie en 1918, leslimites territoriales et administra-
tivesinternes ont kte tracéestrois fois: d'abord en 1918 dans le cadre du
Royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes,le pays étant divisé
en trente-deux régions;ensuite en 1929, dans le cadre du Royaume de
Yougoslavie, avec.l'organisation de neuf unités administratives, lesbano-
vinas,et, enfin, avant 1943 et durant les premières annkes de l'aprés-

guerre, dans le cadre dela formation de la Yougoslavie fédérale et de ses
six républiques. En con~équencel,'expression ccstatu quo territorial>iEn
druil inl~rnene peut êtrect~nsidkrkqeuecomme une espècedemktaphorejuri-
dique exprimant une règïe dg droit nationa!qui interdiruide les modijîer.
Deuxièmement,la référence à l'arrêtde la Cour internationale de Justice
dans l'affairedu D(flerendfiontu1ierne peut êtrepertinente en l'espècenon
seulement parceque la citation est tronqukey,mais aussiparce que la signi-

fication de cetarrêt dans son ensembleest sensiblementdifferente.
Hors du contexte colonial auquel s'applique le raisonnement de la
Cour dans l'affaire du Dflérend fronralier, le principe de l'usipossidftis
ne peut avoir en droit international positif que son sens premier tel qu'il
est exprimé par l'adage {rufipossidetis, ita posedeatur>>,c'est-à-dire le
sens du principe de l'effeaivité.
II. En ce qui concerne la qualification des frontières de la Bosnie-
Herzégovine,il est intéressant d'examiner l'c<accord-cadreconcernant la

fédération)}conclu le 2 mars 1994 à Washington. Le chapitre 1 (4cCréa-
lion») de cet accord dispose notamment:

-
Conférenoepour Irpaixen Yougoslavie, commissiond'arbitragavisn" 3, par. 2,
al9La partiedeI'arrtque lacommission acitéeseterminepar les motsan&-3r1.eIo
contesturiondesfrunrièrcsturre durcirude lapiimunce ridnirnrstrunrei()par.20; les
ilaliquessode moi);voir les paragraphes15,20 et del'arrêdans l'affàiredDg-
firend frîvonial. .J.Recueil1985,pp.564-56 5,6. ((Les Bosniaques et les Croates, en tant que peuples constitutifs

(aux côtés d'autres citoyens)et citoyens de la Républiquede Bosnie-
Herzegovine, agissant dans l'exercice de leurs droits souverains,
transforment en fédérütionla structure interne des territoires de la
Républiquede Bosnie-Herzégovine dolit Irpopulation est en majo-
ritébosniaque ou croate, cette fédérationétant composéed'entités
fédéralesayant des droits et des responsabilitéségaux )

Bien que l'r<accord-cadre»ne mentionne pas les frontiires, iln'est pas
douteux que son contenu, eu égard aux normes pertinentesdu droit inter-
national, a des incidences précises en cequi concerne lesfrontières dela
Bosnie-Herzégovine.
L'«accord-cadre» équivaut à une renonciation tacite à l'idéed'une
Bosnie-Herzégovineunifiéeet donc A l'idéede faire des limites adminis-
tratives de la Bosnie-Herzégovine des froniièresinternationales. Il est en
particulier clair que, par cet accord, les représentants politiques des
peuples croate et musulman de Bosnie-Herzégovinesont convenus de
constituer un Etat fédéral qua iurait des liensconfédérauxavec la Croa-
tie. La constitutionde la fédération découlseans aucun doute du principe
de l'égalité dedsroits et de l'autodéterminationdes peuplesmusulman et

croate en Bosnie-Herzkgovinemêmesi cette norme n'est pas expressé-
meni mentionnéedans l'accord. L'affirmationselon laquellela fédération
étaitconstituéesur la base de «l'exercicedes droits souvcrains ...[des]
Bosniaques et des Croates en tant que peuples constitutifs »justifie une
telle conclusion. Certes, l'accord procèdede «la souveraineté et [de]
l'intégritéterritoriale de la République deBosnie-Herzégovine)) maisce
syntagme, dans le contexte des faits pertinents, a une importance plus
déclarative quematérielle.L'«accord-cadre » définitle territoire de la
Bosnie-Herzégovinecomme les «territoires de la République deBosnie-
Herzégovinedont la population est en majorité bosniaqueou croate». En
ce qui concerne les territoiresde la Bosnie-Herzégovine dont la popula-
tion est en majoritéserbe, l'«accord-cadre)) dispose:

«Les dfcisions concerilant le stütut constitutionnel des territoires
de la Républiquede Bosnie-Herzégovinedont la population mi en
majorité serbe seront prises au cours des négociaiionsen vue d'un
règlementpacifique et à la conference internationale sur I'cx-You-
goslavic.)>

Ilest donc hors de doute que:

uj musulmane sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine;érationcroato-

bJ IFSterritoires de la Bosnie-Herzégovinedont la population est en
majorité serbene font pas partie des territoires de la fédkration;
c) les représentants dela fedérationcroato-musulmane agissent et sont
acceptéssur la scéneinternationale, y compris au sein des organisa-
tions intçrnationales, en tant que représentantsd'un Etat autonome
et indépendant; APPLICATIONDE CONVENTION G~?NOCIDE (OP, DlSS. KRECA) 669

d) l'«accord-cadre» lie la décisionsur le statut des «territoires de la
République de Bosnie-Herzégovinedont la population est en majo-
ritéserbe))aux «négociationsen vue d'un reglement pacifique et à la
confkrence internationale sur l'ex-Yougoslavie». Etanr donné:les

règlesdu droit international généralsur les procéduresde prise des
décisions qui, cela va sans dire, s'appliquent aussi à la conférence
internationale sur l'ex-Yougoslavie, la conclusion qui s'impose est
que la signification matérielle ei juridique de l'«accord-cadre» en çe
qui concerne lesfrontières dela Bosnie-Herzégovinees1que la fédéra-
tion, constituéepar la volontéde:deux des trois peuples constitutifs

de la Bosnie-Herzégovine,a renoncé i ce que les limites administra-
tives de la Bosnie-Herzégovine soient des fronrieres étatiquesde la
fédérationen laissant ouverte la possibilitéque ces frontiéres soient
modifiees sur la base de décisions prises«au cours des négociations
en vue d'unrèglement pacifique et à la confkrence internationale sur
l'ex-Yougoslavie».

12. Ce sont lesaccords de Dayton qui ont transforméleslimitesadmi-
nistratives de la Bosnie-Herzégovineen frontiéres internationales. L'ar-
ticle 10disposeque«[l]aRépublique fédérativ de Yougoslavieet la Repu-

blique de Bosnie-Herzégovinese reconnaissent l'uneI'aulre comme Etats
indépendants souverains A l'intérieurde leurs Frontikresinternationales».
13. Quelles que soient les définitionsthéoriques dela souverainetéet
lesdistinctions en découlant concernant ses manifestations, il est évident
que la souverainetédes Etats impliquent:

i) Suprema poie.~tas - {(l'onentend par cela que I'Etat n'a au-dessus de
soiaucune autre autorité,si cen'estcelledu droit internati~nai)}'~'L . e
signe «égal >que l'on place entre suprema potestus et indépendance l l
dénoteun fait important: que l'entitéqui prétend A la qualitédYEiat

au sens du droit international public prend des décisions politiques
vitales de maniére autonome et independamment des Etats tiers. Un
Etat au sens du droit international ne peut pas ct ne doit pas SC
conformer à des dkciçionspolitiques étrangères,qu'il le Fassesur une
base formelleou informelle. Tel estle sensde la réserve selon laquelle
(<lapremièrecondition de la qualitk dYEtatest qu'il doit y avoir un
gouvernement effectivementindépendantde tout autre Etat >)12.

ii) Surnrnu potestas - au sens de I'cxerciced'une autoritéréelleet effec-
tive surle territoire de I'Etat. L'intention d'établirune véritableauto-
ritén'est rien de pliasqu'un projet politique, une construction intel-
lectuelle qui nes'estpas matérialiséeC . ette intention doit êtreréalisée
et cela implique, entre autres, I'existence d'un réseauinstitutionnel

sérieA/B no41, opinionindividuellede M. Anzilotti,p. 57.sultatf8 1931, C P.J.1
" Affairede I'Iledepal ma., ecueidessenrencesarbiirliles,vol. I838.
l2H. Lauterpach RlcognirroninInternutionai Law1949,p.26. propre et apte a appliquer ses décisionssur toute l'étenduedu terri-
toire deI'Etat. Ainsi, lasurnmu pot~stas n'est qu'une figure de style
«avant qu'une organisation politique stable ait été crééeet que les
autoritéspubliques ne soient devenuesassez fortes pour affirmer leur
autorité sur le territoire pays» 13.

Ces deux éléments dela souveraineté constituent un tout organique.
Pour cequi estde leurs relations mutuelles, sun~mu potestas a un carac-
tèred'antériorité car,pour qu'une entité constitueun Etatindépendant,il

est essentielukcllesoit néeen qualitéd'Etat -du point de vue théorique
la suprema potesrus esi la condition de l'existenced'un Etat indépendant,
la differentraspecijicuentre Etats indépendants et Etats dépendants.

14. La question de savoir si la Bosnie-Herzégovine jouissait de la
sunzrnu potesras i l'intérieurdes limites administratives de la Bosnie-
Herzégovinedoit êtrecirconscrite dans un cadre temporel défini.Aux fins
de cette question précise,deux dates sont pertinentes:

a) la date de la proclamation d'une «Bosnie souveraine et indépen-
dante»;

h) la date où une instance a kt6 introduite contre la RépubliqueEdéra-
tive de Yougoslavie devant la Cour internationale de Justice.
Est-ce que, a ces dates, le requérantavait une <corganisationpolitique
stable» à l'intkrieurdes limitesadminisiraiives de la Bosnie-Herzégovine,

d'une part, et est-ce que ses «autoritCs publiques [étaient] assezfortes
pour affirmer leur autorité sur l'ensemble du territoire» de la Bosnie-
Herzégovine,de l'autre?
15. Selon les affirmations du demandeur, la Bosnie-Herzégovinea été
proclaméerrBosniesouveraine et indépendante)}le 6 mars 1992lorsque
lesrésultatsdu référendumorganise les 29 févrieret 1"'mars 1992 ont été
officiellementannoncés.IIné~r pas contest6yu'ù celle dafe ledemandeur
n 'uvuitpa~ une ccorganisaaiunp~liliqu~srable» sur l'ensemble du terri-

toire de la Bosnie-l-ferzkgoviaeet que ses ~cauforitésubliques [n 'étai~nt
pus] assezforle psour ajJrmer leuruusoritésur l'ensemble du terriroirew
de lu Bosnip-Herzégovine. P114. pcrrriculièremen, avant ICIproclumutzon
d'une ccBosnie ~ouverai~leet indkpendun!e» àil'intérieurdes limites&mi-
nistrutzvesde luBosnie-Herzkgoiline, deux Eratsde facto - lu Republika
Srpska et In Cornmunuut6 croate d'Herceg-Bosna - uvaienf frk consti-
rués.
La Communauté croate d'Herceg-Bosna a étéfondéele 9 novembre

1991(e'llea étép :roclaméecommunauté étatiqueindépendante sousle
meme nom le 4 juillet 19921,tandis que la République serbede Bosnie-
Herzégovine a ttéforméepar une déclaration del'assembléedu peuple

l3Aspectsjuridiquede lquestiondcsîles#Aland, rapporde lacommission inter-
nationalede juristes, JournaluSielaeSocrérdes Mations, supglkmentspécia3,"
1920,p 9 APPLICATIONDE CONVENTION GGNOCID {EP.DISS. KRE~A) 671

serbe publiée en janvier 1992(elle s'est rebaptiséeRepublika Srpska le
7 avrilde la même année 14).
Le dénominateur commun de ces deux entitésest qu'elles représen-
lent l'institutionnalisation d'une auiorite dans des régionsoù, dans l'en-
semble, les partis des peuples serbeel croate de Bosnie-Herzégovineont

remporté la majorité lors des premières électionsmultipartites tenues
les 18 et 19 novembre 1990" et que leur existence decoule directement
des divergences de vues substantielles qui s'étaient faitjour entre les
partis nationaux des trois peuples constitutifs en ce qui concerne le
statut futur de l'entité fédéralee Bosnie-Herzégovine.Ces divergences
étaientdéjàapparues clairement et sans ambiguïtéau momeni du déclen-

chement de la crise constitutionnelle en Républiquefédkrativeso~ialiste
de Yougoslavie avec la proclamation de la asouveraineté et [de] I'indé-
pendance» des entitésfédérales de Slovénieet de Croatie, et ont culminé
lorsque {(laplate-forme sur le statutde la Bosnie-Herzkgovineet l'amé-
nagement rutur de la communauté yougoslave» a étéadoptée par ce
qui était alorsl'assembléecroupion de Bosnie-Herzégovine le14octobre
1991.

La «plate-forme sur le statut de la Bosnie-Herzégovine» qualifiait
notamment la Bosnie-Herzégovined'«Etat démocratiquesouverain»qui
préconiseraitl'adoption d'une«convention sur la reconnaissance mutuelle
de la souveraineté,de l'inviolabilitéet de'imrnutabilitedes frontièresdes
actuelles républiques»'6.
L'effetpratique de Ia «plate-forme» a étéla dissolution de la structure
juridico-étatiquede l'entité fédéradlee Bosnie-Herzégovine, les pouvoirs

dont sesorganes étaientinvestis aux termesde la Constitution fédéraleet
de la Constitution de Bosnie-Herzégovine viufuctiétantdonc eux-memes
passksaux trois communautés ethniques.
16. (Republika Srpska. j L'assembléedu peuple serbe de Bosnie-Her-
zégovine,lors de la session qu'elleatenue le 9janvier 1992,a adoptéune
<<déclarationsur la proclamation dc la Républiqueserbe de Bosnie-Her-
zégovine~dans les

ctrégionsautonomes serbes et régionset autres communautés eth-

niques serbes de Bosnie-Herzkgovine, y compris les régionsoù le
peuple serbe est demeuréminoritaire en raison du gknocideperpétré
contre lui durant la seconde guerre mondiale, conformément aux
résultatsdu plkbisciteerganist les9 et10novembre 1991 lors duquel
la population serbe a vote pour demeurer dans ['Etat yougoslave
commun)) 17.

-
l4Journaolflciel de la Rkpubliquesuciolir~ede Bosnie-Herzégovirie,ndé-, du 19
cembre 1991.
l5Ibid.
l6Ibid, n" 32,du 16octobre 1991.
l7Jour110o1fficdupeuple serbdeBosnie-Herzégov non292, APPLICATION DE CONVENTION GENOCID (OP.DISS.KRE~A)
572

Cette déclaration stipulaitnotamment que:
«en attendant l'électionet la constitution desnouveaux organes et

institutions qui seront créés evertu de:la Constitution de la Répu-
blique, lcs fonctions des organes étatiques de la RCpublique seront
exercéespar l'actuelle assemblkedu peuple serbe en Bosnie-Herzé-
govine et par le conseil desinistres» (art. VI};

et que
«les règlementsfédérauxa ,insi que ceux de l'ex-Bosnie-Hertkgovine,
Al'exceptionde ceuxque l'assembléedu peuple serbe ajugécontraire

i la Constitution fédéraled, emeureront en vigueur en attendant la
promulgation de la Constitution de la République, de ses lois et de
ses règlements» (art. VIII).
L'assemblke du peuple serbe de Bosnie-Herzégovine, à sa session du

29 fevrier1992, a adopte la {(Constitutionde la Republika Srpska~ sur la
base du
{(droitnaturel inaliénableet intranslërable du peuple serbeà l'auto-

détermination, l'auto-organisation et i l'association, sur la base
duquel il peut librement déterminerson statué politiqueet assurer
son développementéconomique,social et cullurel)},

Ces actes officielss'accompagnérentde l'exercice effectifde l'autorité
sur les territoires des communes.
Les forces arrnCesde la Republika Srpska étaientd'abord composées
des unitésde défenseterritoriale dans les communes et d'autres forma-
tions armées.L'arméede la Republika Srpska a étéforméeIF 13 mai
1992 18.
L'armkede la Republika Srpska, dés sa constitution, a opéréde
manière autonomc en tant que force militaire de 1'Etatproclame. Cela

est clairement confirmé dans le rapport susmentionné du Secrétaire
géinéra: l
«La prksidence de la Bosnie-Herzégovineavait d'abord hésité à
entamer des pourparlers ..avec les dirigeants de la ({République

serbede Bosnie-Herzégovine»et avait exige au contraire des pour-
parlers directs avec les autorités de Belgrade. Un representant de
haut rang de l'armée populaire yougoslave (APY), le gknéral
Nedeljko BoskoviE,a menédes discussions avecla présidencede la
Bosnie-Herzégovine,mais il est dksormuis kvid~nrque sa parole ne
lipas Ie cr,mmund~nr de l'armée de lu((RipuhaZ'quseerbede Bosnie-
Herzkgovine N, legkrzkrrrl ludit- ilesfclair égalenzentyue 1'uppa-
ritiondu gPnéralMladiC et dex force ^u'il commun&, lesquelles

'"apport présentparleSecrktairgéneraclonformémentau paragrap4de laréso-
lutioii 752(19du)Conseil dskuritk, doS124049,30 mai 1'392,pa2. APPI,ICATIONDE CONVENTIONGkNOClLlE (OP. DISS. KRECA) 673

agissrnt de inaniercindépendanteet échuppenrsemble-t-ilau contrôl~
de l'APY, compliquebcaucouple problème .soulevéuu parlrgruphe 4
de Irrésolution 752 (1992).~'~

En outre, la Republika Srpska avait ses propres organes législatifs, exé-
cutifs et judiciaires.
17.(Communauté croated 'Herceg-Bnsnu.) L'Herceg-Bosna, 1'Etatdu
peuple croate de Bosnie-Herzégovine, a &léproclam&le 4 juillet 1992.A
I'exccpiionde certaines modifications territorialecctteproclamation ne

faisait qu'officialisersituation crééen novembre 1991lorsque laCom-
munautécroate d'Herceg-Bosilaa étécrééeD . es le tout début, elle a de
jucto fonctionné commeun Etat.
L'Herçeg-Busnaavait sa propre armée.Le décretsur lesforcesarmées
de la Communauté croatedlHerceg-Bosna disposait que lesforcesarmées
constituaient un corps unifiécomprenant les «forces régulières et de
réserven20.On trouve confirmation de l'existence desforces arméesauto-
nomes d'Herceg-Bosnaégalementdans le «rapport présentépar le Secré-

taire général enapplication du paragraphe 4 de la résolution752 (1992)
du Conseil de sécurité»(voir ci-aprespür.18).Dans une lettre adressee le
29 avril 1993à M. Cyrus Vanceet ;ilord Owen, coprésidentsde laconfk-
rence sur l'ex-Yougoslavie,M. Hadzo Efendii., en qualitéde «premier
ministre par intérim»,déclarenotamment :

«En vue de réaliserl'accord visau point 5 de la déclarationcom-
mune faite par MM. Alija lzetbegovic et Mato Boban à la réiunion
tenue à Zagreb le 24avril 1997 ..nous vous serions obligésd'entre-
prendre des démarchesvisant ii 1ü créationd'une commission inter-

nationale indépendanteet distincte chargkc d'tlablir les faits en ce
qui concerne lesviolations du droit humanitaire international ei les
crimes de guerre commis contre la population civile au cours des
çonj7it ~ui ont repris entre I'armke dc fa République de Bosriie-
Herzégovine et les forces du conseil de defera sreate (IIVO) en
Bosnie ceatrril~et dansceutain~s autres parties ck lu Républiqu de
Bosnie-J-lerzégvine ,2'

Outre ses forces armees, i'Herceg-Bosnaavait sespropres organes exécu-
tifs, législatifsetdiciaires.

C'est la présidence,composée dereprbenrünts du peuple croate de
Bosnie-Herzégovineet dirigéepar le président dela présidence,qui était
investie del'autoritt suprême.Les représentantscroates se relirerent des
organes communs du demandeur el setransportèrent à Mostar gui fut

l9Boc 512409, mai 1992,par. 8 et(leitaliquessontmoi}.
20Borba,Belgrade,6juillet 1992.
*'Lettreen ddte du 29 avril1adressta«M. Cyrus VanceetA lorDavid Owen,
parintérim.sdlaconîkrenccsul'ex-YougoslaviparHadzo EfendiC,prçmiministre

82proclamée capitalede 1'Etat 12.LHerceg-Bosna s'appropria tout le maté-
riel de I'APY airisi que tous les biens des organes et organismes de
l'ancienne fkdération.Des entreprises publiques et d'Etat furent consti-
tuéesdans les secteurs de I'agriculiure, de la foresterie, de l'exploitation

minière,de la poste, des télégrammes etdu téléphone(PTT) et de l'édi-
tion?>.
IIfut décidéque la loi sur les tribunaux dc droit commun s'appli-
qucrait meme en situation de guerre, et des tribunaux militaires furent
constitués dans Ics zones d'opérations militaires, en tant que sections
autonomes des principaux tribunaux militaires.
18.A mon avis,il n'estpas douteux qu'au moment de la proclamation
de la {(Bosniesouveraine et indépendante))les autoritis dc Sarajevo qui

avaient étéreconnues par la conimunautéin~ernationalecomme les auto-
ritEs de l'ensemblede la Bosnie-Herzégovine n'exerçaientpas, tant s'en
faut, la sumrnupotestus sur lesterritoires setrouvanta l'intérieur delignes
de délimitation administrativede l'entite Fkderalede Bosnie-Herzégovine.
IJne<<organisationpolitique stable de la Bosnicsouveraine et indepen-
dante» n'existait tout simplement pas aucune des deux dates perti-
nentes. Qui plus est, mtme uvunrILp Iroclamation de ICISosnie-IIerz&go-

vin^en tunt gu'Efar crsouveruinet indkpenn'unt~ ,'crppareiladm~nistratif,
judiciuir~ er !égiskutifungbrme de !'eatitk fkdéruield~Bosnie-Herzé-
goiiirzuvuit cm.76defonctionner. II dkcouleciesfirir.perrinents que lapro-
clutnarionde liaRépuAligzie du peuple serbe et de la Commranuuté croafe
cl'Herceg-Bosnuin'ontfail qu *fJIcialiseir riL~.~olutiotz1'uppareild'Ela i
del'en rfijedéruledeBnsnie- Her~ég~ vineetsonretnplucernen îur/tistruc-
tairexccorrespondcrntcd ses troicsorninunautés ~thniqucs.Ce processus a
touché les structures d'autorité tantcivilesque militaires. Cela est aussi

attestédans le rapport prbenté par 1c Secrétairegénéral enapplication
du paragraphe 4 de la résolution752 (1992)du Conseilde sécurité . ux
paragraphes 5et 1Ode cerapport, le Secrétairegénéraé l voquel'existence
de l'armée dc <cla prétendue<<Républiqu eerbe de Bosnic-Herzégovine>>,
et les «forces de défenseterritoriale de la Bosnie-Herzégovine, placées
sous le contrôle politique de la présidencede cette République» et Ics
«forces de défenseterritoriale locales [croates] ».Aucune «organisation
politique stable>> nk jjainaivu le jour en «Bosnie-Herzégovine SOUVC-
raine et indépendante)},mêmeaprès la proclamation dc l'indépendance,

et ilest donc bideni que lesautoritésdu demandeur n'étaient pas«assez
fortes pour affirmer leur autoritésur l'ensembledu territoire»de la Bos-
nie-Herzégovine.
Ce fait évidentest confirméégalementdans le «Rapport sur la situa-
tion des droits de l'homme sur le territoire de l'ex-Yougoslavieprésentk
par M. T. Mazowiecki, rapporteur spécialde la Commission des droits

21Lettredu prksidendu Gouvcrncrnentde la Républiquede Rosnie-Hcrzkgovineau
SecrétairegénkradeI'Organisationdes NatioUnies,13 mai 1593.
23Bubu,Belgrade. 6juill1392 APPLICATIONDE CONVENTIONG~NOCIDE (OP. DES. KRE~A) 675

de l'homme: enapplication du paragraphe 14de la résolution14921s-111
de 1aCommission, en date d'mut 1992)).Aux termes de ce rapport :

«Une grande partie du territoire de la Bosnie-Herzégovine n'est
pas sous le contrôle du gouvernement reconnu. La plupart des
observüteurs conviennent que le Gouvernement de la ({Rkpublique

serbe de Bosnie-Herzégovine»,Etat non reconnu proclamélorsque
la Bosnie-Herzégovine a déclaré son indépendance de la Yougo-
slavie contre les vŒuxde la population serbe, contrôle cinquante à
soixante-dix pour cent du territoire ...La «République serbe de
Bosnie-Hcrzegovine» comprend quatre ({régionsautonomes», dont
Banja Luka, où s'est rendu le rapporteur spécial. Selonles infor-

mations reçues, le droit applicable dans la ({République serbe de
Bosnie-Herzégovine»est le droit de la République fédérative de
Yougoslavie, telque modifié par le législateurloca»24

Tout ce qu'ifrestp u ujouieresl que la «Ripublique serbe de Basnie-
Herzkgovine» a'u pus é~é proclamée rlorsque la Bosuie-I-lerzkgovinera
déclartson Indkpenduncr N puisque iu rRépubliqueserbe cleBosnie-Her-
zégovrne>ai éré yrocl~~mé e 9junvier 1992, u1or.sque leparlement crou-
pion de Bosnie-Hei*zégovinn e'alzrockrmé l'ind&p~nduncd ee celle-cique le
6 murs de lu tnavnr unnke.

Le {(Rapport présentepar le Secrétairegénéral en applicationdu para-
graphe 4 de la résolution752 (1992)du Conseil de sécurité»indique:

«Mais les observateurs internationaux sont convaincus que cer-
taines partiesde la Bosnie-Herzégovinesont contrôléespar des unités
militaires croates, qu'ellesappartiennentux forces de défenseterri-
toriale locales, des groupes paramilitaires ou i I'armke

Cette indicatronvise en .fuitlm territoires des communes constituani la
Comrnaknau~c éroule d'firceg-Busnu Jorrnee le 9 izovcmhre1991, c'esr-
ù-dire avant Io proclcrrnatiori dt. nlu Bosnie-Herzégovine souveraine et
indkpendun ie».
Le territoirà l'intérieurduquel lesorganes du demandeur exerçaient
une autorité rkelleet effectivecomprenaient en fait:

«Trois régionsdistinctes sont sous le contr8le du Gouvernement
de Bosnie-Herzégovine, àsavoir une partie de la capitale, Sarajevo,
la régionconnue sous le nom de Bihac, adjacente à la frontikre avec

la Croatie au nord-ouest de laBosnie, et des parties du centre de la
Bosnie-Herzégovine. »26

2dDOC.E~N.~/I99~~-119,9.18 (les ital~sontdemoi).
25DOC.Sl24049, p 4, par. 10.
2GRapportsurles droitsl'hommesurlesterritoirdc l'ex-Yougoslaviepréspari
M. T. hiazowiecki,rapporteurçpedela Commissiondes droitsde l'homen,appli-
catrodu paragraphe14de la rksolution 1992s-Ill de la Commission,en14aoûtdu
1992,doc EICN411992lS-1/9,p. 18. 19. Erant donnéle inotneni où ont et6 consfirzrislRepuAlikcrSrpsku et
I'Hcrceg-Bosna, d'utiepar f,er I'Erurriernandeur,(leI'auire,on es?en clroir
de conclure que ku consrirutiorl de lu RepublikkaSrp.skka ef de I'i-ierceg-
Busnu nepeut êrrequuk$éede ré belli na i^rméecontre I'uuroritt ceiitrale,
cdr iln'y avuil!out sin~plemetilpas d'uurorilkcenrruled IZpoque; onpeur
~implerii~n.nirre qtreplusieurs Etars onvu lejour d I'oçcusionde la crise
constirutiunizel/eel ttutiqique coiinaissait lu Fkderiiriyougoslave.

L'hypocheçe dc l'existenced'une autorite centrale croato-musulmane en
Bosnie-Herzégovine ne repose sur aucun fait depuis Ic toul débutde la
crise comme l'atteste de manière convaincantela guerre qui a éclaté entre
lesforcescroates et musulmanesen 1993.Dans une lettre adresséeau pré-
sident de la sous-commission des affaires européennes de la commis-
sion desaffaires étrangères du Sénatdes Etats-Unis d'Amériquele 24 fe-
vrier 1993,le premier ministre de Bosnie-Herzégovine,le membre croate

du gouvernement rnixle croüto-musulman, M. AkmadziC,a dCclai-6que
M. IzetbegoviE,comme M. SilajdziC,etüit seulement«un membre musul-
man du gouvernement)) (voir ci-aprèspar. 37). La lettre que le premier
ministre a adresséeau Secrétaire généra dle l'organisation des Nations
Unics le 7 mai 1993est révélatricdee la situation au seindu gouvernement
mixte croato-musulman FITBosnie-Herzégovine;elle indique notamment:

<<Le7 mai 1993,j'ui uppri~par lu presse que M. IJcrdzfiF ojkndiC :
adwssé une lettreà Votre E,rce/lence en qunlir&de gretnier rninisrre

par intéritn.
J'ai l'honneur d'informer VotreExcellenceque M. Hadzo Eféndié
ri'upas éti élumernbre du guuiiernernenr, ni vice-présidentdu gou-
vernement, et en particulier qu'iln'a pas Cté du présidentpar inté-
rim du Gouvernement de la République de Bosi~ie-Herzégovine.
M. Hadzo Efendic n'a pas étéélusur ma proposition. Or ce mode
d'électionest le seul qui soit légal,conforme à la législationet 5 la
réglementation en vigueur et1République de Bosnie-Herzégovine.

Je précisea Votre Excellenceque ntrlautre que moi-tnimc ?lepeur
signer des iiocumeiir.~du Gouverncmen~ de Ir1Républiquede Busnie-
Herz&,qovineen qualité de prLsirknt du ggouvrrnernrnf. En consé-
quetice,je prieVotre E~cellence denr considkrer ciucun~iocun~~n tu
présiclentdu Gouvernemenf de lu Rgpuhliyue de Bosaip-H~rzégoviiz~
comme valuhle ù nioins qu'il nsoif revgfu dema signulurr.
Mes bureaux se trouvent pro~isoirement fiMostar, oii j'exerce
mes fonctions de président du Gouvernement de la Républiquede
Bosnie-Herzégovine. »27

Ainsi, lesinstitutions suivantes fonctionnaient sur le territoire de la Bos-
nie-Herzégovinedurant la périodepertinente:

t7Lcttredatéedu 7 mai 1893, adresçeau Secrétaigerzeralde l'Organisation dcs
Nations Unies, M. BoulroBoutros-Ghalipar M. MiloAkrnadzic,présidentduGou-
verncmcnlde laKépubliqucdc Bosnic-HcrzCgovi(lesitaliques sontmoi).l APPLlCATIONDE CONVENTIONG~NOCIDE (OP. DISS. KRE~A) 677

a) Les organes étatiques des prétendues autorités centrales (alliance
croato-musulmane),qui sesont formellementdissoutes avec le déclen-
chement du conflit arméentre lesMusulmanset lesCroates et ont été

transformées en une autoritémusulmane. Cette dernières'est ensuite
diviséeen septembre 1993en gouvernement de Sarajevo et autorités
de laprovince autonome de Bosnie occidentale;
b) les organes étatiquesde la Republika Srpska;
c) les organes étaliquesdlHerceg-Bosna;
d) et, compter de mars 1994, égalementles organes étatiquesde la
fédération nouvellemeiit constituéequi, toutefois, ne fonctionnaient
que sur le papier.

20. M.Jadranko Prlic,premier ministre de la Républiquecroate dYHer-
ccg-Bosna et d'Herzégovine,a témoigné quela création dela fédération

croato-musulmüne en Bosnie-Herzégovineétaitune simpleproclamation.
Dans une interview publiéedans le quotidien Slobodna Dalmuc~u le
18 décembre1995, rkpondant à une question au sujet des fonctions de
ministre de la défensedu gouvernement de la fidérationel de la Répu-
blique,M. Prli.5,quia paraphé Icstraiiés de Dayton au nom de Iüfédéra-
tion croato-musulmane, adtclare ce qui suit:

«Il faut dire que penlluni toute lu périoclr deux Elrrts el deux
arrniexeexisîaient.Mais ily avait unecertaine formede coordination
et des rksultats ont étéobtenus, principalement grâce A l'appui de

l'arméeet de I'Etat croates.»28
Lorsqu'on lui a demandé jusqu'i quand 1'Herceg-Busnafonctionnerait, il

a réponduce qui suit:

«Aucune date limite n'a puètre fixée.Cela dépendrade I'cnsernble
du processus. Quand tous lesdroits du peuple croate seront garantis
ct que la ftidkration scra alors capablc d'assumer les fonctions qui
sont celles de I'Herceg-Bosna, alors 1'Herceg-Bosnasera restruc-
turée,probablement en une communautépolitique. »lq

Ce qu'a dit le présidentcroate, M. Tudjman, l'un desparticipants a la
conférence de Dayton, implique que la revitalisation de la fédérationétait
l'undes objectifsde la conférence.Dans lerapport sur la situation de1'Etat
croate et des nations (1995}, M. Tudjman a notamment dkclaréce qui
suit

«Les protagonistes internationaux attachent une importance par-
ticulièrea la fédération,dans le cadre de leur projet concernant la
paix ei le nouvel ordre dans cette région,comme l'atteste le fait que
I'nccord sur la criution de ia,fëd&ratiode Bssnie-FTerzkgovine, signé

ZX SIoRod~inWaEmacga, plit, 18dkembr1995 (leitaliqueaonidemoi}.
Ilrid APPLICATION DECONVENTIONGENOCIDE (OP.DISB.KR ECA) 678

par les représentants des peuples croate et bosniaque musulman, a
étéapprouvé par les représentantsdes Etats-Unis d'Amérique, de
l'Union curopeeiîne et de l'Allemagne.» 'O

II semble queseuls lesaccords de Dayton et la volonté politiquequi leur
adonnénaissance aient suscité la prisede mesures sérieusescn vue de la

constitution effectivede la fédérationcroaio-musulinane.
Le 14janvier 1996:deux moisaprès lasignature des accords de Dayton
et presque deux ans aprèsla proclamation de la fédération croato-musul-
mane, la rcprksidence de l'Union dCinocratique croate de Bosnie-Herzé-
govine» a adopte une décisionsur l'établissementde la Communauté
croate d3Herceg-Bosnaen tant que cornmui-iaulépolitique, économique
et culturelledu peuple:croalc en Bosnie-Herzégovine. dan^ lecudrp.dre

son choix d'c~pplicatiouintégraledes crcçordsde Dayturi, la présideiicede
la communauté démocratique croate (HDZ) de Bosnie-Herztgovine a
aussi adoptéune résolutionsur le transfert progressif des pouvoirs exé-
cutifs de la Républiquecroate d3Herceg-Bosna aux autoritésde la fédira-
tion de Bosnie-Herzégovine.Des nlembrcs de iüprésidencede la commu-
nautédémocratiquecroaie de Bosnie-Hcrzegovine ont aussi demandéa

leur^homologu~s rnusulmrrnsau sein de la fkdérarion de coinnimcrr à
rruns@rer I~rrrspuuiluir.~aux organes de lufédération 31.
Le gouvernement de la fedtration n'a étéconstituéque le 31 janvier
1996.Le prtsident de la fkdération,M. K. Zubak, dans I'alloculion qu'il
a prononcéedevant l'Assembléecoiistiiuan tc,a soulignénotamment que,
<<purIetrrinsferr des pouvoirs cle lu rkptiblique au gouverrimwni JE Iu
fkdirutiun, /esfoncrions de ('Herceg-Bostiu Jeront I~~.%$&T~Es.4laj2dkra-

tim »32+
Comme Le Monde l'a rapporte:
«les Croates ~Cparatistesde Bosnie ont annonce samedi 15juin qu'ils

forinaient uri nouveau gouvernement pour leur c<Etatindépendant
d'Herceg-Bosnas. En principe, touies les institutions de cet Etat
autoproclamé auraient dû disparaîlre avec I'avéncmentde celles de
la fédérationcroato-musulmane. )>33

Ainsi, leprojet politique de création d'une fédératioc nroaio-musul-
maiie en Bosnie-Herzégovine,incorporédans l'accord de Washington de:
1993, ne s'estpas traduit dans les faits. tes entitks étatiquesmusulmanes
el croates ont continuéde fonctiotiner aprèsl'accord en tant qu'Etats d~
jrrcto,qui ont de temps àautre poursuivi une sorte de coordination poli-

tique et militaire i des fins politiques pragmatiques. Mais cette coopéra-
tionétait,de par ses caractéristiquesinhérenleç,une coopération entre
entitésétatiques,

3"csnrk, Zdgreb,2janvier 199(leaitalique^sode moi).
3[ Ve~evnjiLUI. Zagre15 janvier1946.
" BrirbtBeIgra.dIC 'evrier1496(les italison1demoi).
-'Le tMu,tdemardi 18juin 1996,p3. A lu lumière desaccords de Duyron, lancerIufi~fkrution ES^une ubligu-

lion politiqueî confrnctuelk; ainsi, étanthnnk la siruution actuell~, on
pourrait dire queIuf2dkrutian eJr une entllékrulique in statu nascendi.

L'épithéte «autoprodamé)>qui est habituellement utiliséepour quali-
fier la Republika Srpska et 1'Herceg-Bosnane saurait avoir d'effet juri-
dique. Selon son sensgramrnaiical premier, elledénotele fait évidentque
nul nepeut «proclamer>>un Etat en train de naître sicen'est lui-mêm e
en ce sens tout nouvel Etat en train dc naître est {(autoproclamé».La
question est donc, au fond, de savoir non si un nouvel Etat est {(auto-
proclamé» ou proclamépar une seconde ou tierce partie, mais si la pro-

clamation est fondéeen fait et en droit.
Cette kpithètene peut avoir de sensjuridique que dans le cadre de la
théorie constitutivequi voitdans la reconnaissance des Etats une condi-
tion de leur existence,odans la pratique neoconstitutive de l'application
de la théoriedéclarative,gui prévaut.
21. La Bosnie-Herzégovineen tant quYElat à I'intkrieur des limites
administratives de l'ex-entitéadministrative fkdéraledu meme nom ne
pouvait &trementionnéequ'après l'application des accords de Dayton.
Une qualification précisede la Bosnie-Herzégovineen ces termes ne peut
êtredonnée qu'apres uneanalyse globaledu contenu de ces accords.

22. Les «accords de Dayton)), nom collectif qui désigne une série
d'accords, ont des effetsjuridiques ambivalents.
Du point de vue formel, la partie fondamentale des accords devraitêtre
l'accord-cadregknéralpour la paix en Basnie-Herzkgovine.Cette conclu-
sion s'imposecar les autres accords sont qualifiésd'annexes l'accord-
cadre ginéral(accord relatif aux aspccts militaires du règlementde paix;
accord relatià la stabilisation régionale; accord relatiA la ligne de
démarcation interentitéset aux questions connexes; accord relatif aux
élections; accord relatifà l'arbitrage; accord relatif aux droits de
l'homme; accord relatifaux rkfugiéset aux personnes déplacées; accord
portant créationd'unecommission de préservationdesmonuments natio-

I naux; accord relatifà la constitution d'entreprises publiques en Bosnie-
Herzégovine; accord relatif au dispositif civild'application de l'accord de
paix; et accord relatifl'équipeinternationale de police)à l'exceptionde
l'accord relatifau paraphe de l'accord-cadregén&ralpour la paix en Bos-
nie-Herzégovine. Lecontenu de l'accord-cadre général, d'une part, et des
autres accords, signéssous fornle d'annexes, de l'autre, donne à penser
que les principaux engagements propres à assurer un règlementglobal
destinéà mettre fin au conflit tragique de la régiocomme indiqué dans
!'accord-cadre géneral,figurent dans ces annexes.
Parnature, l'accord-cadregéneralrenfermedefaçonspécifiquedesdecla-
rations politiques et des éléments relatifsa des garanties comparables

h un trait&internationalsrricro sensu, creant des droits et obligations
réciproquespour les parties. Relèventdes déclarationsd'intentions poli-
tiques lesdispositions d'uneséried'articles (art. II, III, IV, V, VI1X)dans lesquels lesparties ne font que noter avec satisfaction et approuver
les arrangements énoncés dans lesünncxes. Les seulsarticles de I'üccord-
cadre gei~Craql ui obligent lesparties comme le Léraitun traité internatio-
nal stricto sensu soirt les artiçics1 ci VIT, Certes, la plupart des ar-
ticles susmentionnes comprennent une clause type disposant que «les
parties respecteront pleinement lesengagements priset en encourageront
Iyapplication>>m, ais une telle formulation, eu égardau cotitenu de l'ar-
ticlepremier de l'accord-cadreet àla nature de cesengagements,et tout au
moins en ce qui coilcernc la Rkpublique l'kdirativede Yougoslavie et la
Croatie, constitue plus une sorte de garantic yuc Ics partiesaux accords
désignés comme des annexes honoreront leurs engagements qu'une obli-
gation contraignante. Particulikrement important i cet égard, outre la

clause type susmentionnée,est l'accord relatif üu paraphe de l'accord-
cadre générap lour la paixen Bosnie-Herzégovine.Par cea tccord, qui n'est
püs forrncllcincni une:annexe de l'accord-cadre général« ,[l]esparties [la
République deRosnie-Herzégovine,la République deCroatie et la Répu-
blique fédérativede Yougoslavie], ei les entitks qu'elles reprisentent,
s'engagent signer cesaccords» (art. 1). II disposc que l'application
mime de l'accord-cadre générae lt de ses annexes sera confiéeà une com-
mission interimaire mixte composéede représentants dela fedérationde
Bosnie-Herzégovine,de la Republika Srpska et de la Rkpublique de Bos-
nic-H-lerztgovinc.La situaiion de la Républiquede Bosnie-Herzégovine
en tant que partie contractaiitcest dans ce contexte pariiculiérepuisque
aux termes de l'article1,paragraphe 3, de sa Constitution, la République

de Bosnic-Herzégovine «est forméede deux entités,la fédération deBos-
nie-Herzégovineet la Republika Srpska (ci-aprèsdknommées{(lescnti-
tes»))>.Ainsi, lesentités figurantdans la structure des accords de Dayton,
A l'annexe 4 des accords, sont les parties; de ce fait, étant donnéles
conditions régissantla Consiitution de la République deBosnie-Herze-
govine en Etat à l'intérieurdeslimites administratives de l'ex-entitéfédk-
ralc,la KCpublique de Bosnie-Herzkgoviiiegaraillit les obligations des
entitésdela constituer. Cette incolzereiicedécouledc la position préalahle
- d'une validitéjuridique douteuse - d'une personnali tejuridique inin-
terrompue de la Bosnie-Heizégovinc en tiiiiquYEtar au sens du droit
international (voir ci-apréspar. 23).

Ainsi, les annexes, peut-on dire, constituent l'essentieldes accords de

Dayton; tandis que l'accord-cadrc génkriil,conme l'indique son nom
même,n'est que le cadre juridico-politique dans lequel s'inscrit la rigle-
mentation qui forme le contenu des annexes. Les parties à l'<<accord-
cadre général)s>ont, commeindiquédans leprÉambule,{(laRkpubliquede
Bosnie-Herzégovine,la République deCroatie et la Républiquefédéra-
tive de Yougoslavie>>L . es parties aux annexes de l'accord sont toutefois
différentes. La République de Bosnie-Herzkgovine,la fcdkration de Bos-
nie-Herzégovineet la Republika Srpska sont, soit seules soii avec la
Croatie et la Yr~ugoçlavie,parties ii la plupart des annexes. Toutes troisl
APPLICATIONDE CONVENTIONGÉNOCIDE (01'. DES. KRE~A) 681

ont signe l'accord relatif aux aspects militaires du règlement de paix,
l'accord relatifà la ligne de démarcation interentitéset aux questions
connexes, l'accord relatif aux élcciions,l'accord relatif aux réfugiés et
personnes déplacées, l'accorp dortant creation d'une commission de pre-
servation des monuments nationaux, et l'accord relatif5 l'équipe inter-
nationale de police. Avec la Rkpublique de Croatie et la République

fédérative de Yougoslavie, cestrois parties ont signél'accord relatif à la
stabilisation régionaleet l'accord relatifau dispositif civil d'application
de l'accord de paix. La fidérationde Bosnie-Herzégovineet la Republika
Srpska sont parties l'accord relatifà la constitution d'entreprises pu-
bliques en Bosnie-Herzkgovineet a l'accord relatifa l'arbitrage. La Cons-
titution de la République de Bosnie-Herzégovinefait aussi partie inlé-
grünte des accords de Dayton. Elleconstitue l'annexe4 de l'accord-cadre

et est approuvk par des déclarations respectives de la Rkpublique de
Bosnie-Herzbgovine, de la fédération deBosnie-Herzégovineet de la
I Republika Srpska.
23. Eu kard au conrenu des accord^de Daÿtori etcnrnpbe renuen par-
ticuiierde 161~ifuationuctu~l/e, laBosriie-Herzégovinepeut être gulzl$ée
au regard du droir internulional d'Etar in statu nascendi. A l'époquede
l'entrécen vigueur des accords de Dayton, la Ripublique de Bosnie-
Herzégovine, entant quYEtat à l'intérieurdes limites administratives de

l'ex-entitéfédérale yougoslave du mêmenom, ne possédaitlittéralement
aucun des attributs pertinents dc 1'Etat au sens du droit international.
Plus particulièrement:

uJ a cejour, la Républiquede Bosnie-Herzégovinn e'a toujours pasd'auto-
ritésétatiques centrales.L'annexe4 (Constitutionde la Bosnie-Herzégo-
vine)des accords de Dayton prévoiten ses articlesIV, V, VI et V1Ides
autoritésmixtes Cassemblée parlementaire, présidence, consei les mi-
nistres, courconstitutionnelleet banque centrale),mais laconstitutionest
subordonnkcidesilections libres,équitablesetdkmocratiques«permet-
tant d'établirles basesd'un gouvernementreprksentaiif 34.Aux terines
de l'article4 dcstDispositionsiransitoires),qui constituent l'annexeII
de la Constitu~ion,<c[t]antqu'ilsn'ont pas étéremplacésen vertu d'une

loi ou d'un accord applicables,lesservices,les institutions et lesautres
organes oficieis de la Bosnie-Herzégovinecontinuent de fonctionner
conformkmentau droit applicable» 15.Interprétkede manière systéma-
tique,la dispositionci-dessusimpliqueque lesservices,lesinstitutions et
les autres organes des entitks sur le territoire de Bosnie-Herzégovine
({continuent de fonctionner conformémentau droit applicable» ;
b) A ce jour, la République deBosnie-Herzégovinen'est dotée d'aucune
législationcohérentequi lui soit propre. Certes, la Constitution de la

République,texte:juridique suprême,est entréeen vigueur mais

34Préambule dcl'accord relaaux élections,doc. At501790-S119959.9,6.
35Ibrd, p 69 <r[t]outesleslois,tous les rGglemeiitset tous les codesde procédure
qui eiaient applicables sur le terriioire de Bosnic-Herzégovine au
moment de I'cntree en vigueur delaConstitution restent en vigucur
dans la mçsure où ils nc sont pas incompatibles avec cette der-

iiiere, à moins qu'un organe compétent du Gouvernement de Bos-
nie-Herzégovine n'en dkcide auirement )>36;

c) la Républiquede Bosnic-Herzégovinen'a pas de systèmejudiciaire ni de
procédure administrative uniformes. CE ['ailest aussi formellement attesté
par l'articl3 des «Dispositions transitoires}),qui est ainsi libelle:

«Toutes lesprockdures engagtes devant les tribunaux ou les ad-
ministrations publiques €onctioniiant sur le territoire de Bosnie-
Herzégovineau inornent de l'entréeen vigueur de la Constitution se
poursuivent ou sont transféréesàd'autres tribunaux ou d'autres ad-
ministrations publiques de Bosnie-Herzégovine selonles lois qui éta-

blissent la compétence de ces tribunaux ou de cesadtniniçtrationsw l';
dj la République de Bosnie-Herzégovine n'a pas d'armée qui lui soit
propre. De plus, une arméecommune n'esl pas une institution d'une

autorité centrale, puisqu'ellc ne figure pas au nombre des responsa-
bilitts prévuesdans I'accord dç paix et dans l'accord relatif à la sta-
bilisation régionale,qui sont pertinents en la matitre. Par leur libellé
et leur contenu, ceux-ci ressemblent plus à des accords relatifs a des
mesures de confiance et de skcuritk entre Eic~lssouverains cl indépen-
dants qu'à des accordsentre enriiésfaisant partie d'un mime Elai. Le

principal objectif desobligations conlractées dans lecadre de l'accord
relatifaux aspects militaires du rkglement de paix est d'instituer une
cessaiion durablc des hostilitéssce qui implique que:

c<[>i]ucune entité n'aura recours A la menace ou à l'emploi de la
force contre l'autrc entité et, en aucune circonstance, les forces
arméesd'une entiténe pknétreront ou séjourneront sur le territoire
de l'autre entité sans I'asseniiment du gouvernement de celle-ci et
de la présidence de 2a Bosnie-Herzégovine »

et que {{des mesures durables de sécurité et delimitation des armc-
ments ... en vude favoriser une rkconciliation permanente entre touies
les partiesi>seront arrêttesS. L'accord relatafla stabilisation régionale

énoncetoiitefois une obligation générale de prendre des mesuresgra-
duelles en faveur de la stabilitéet la limitaiion des armements dans la
régianen parvenant à desniveaux de fora défensiveéquilibrés et stables
avec des effectifstenantconipte de la sécuritéde chacune des parties et
de la nicessitéd'éviterunecourse aux armements dans la région39;

3Woc A15017YO-S/IY95198 <9,ispositionslran~itoirarl.2, p 68
37thid.,mi. 3.
38Accord rclstifauxaspectsmilitairesdu règlementde paart.1,2c), p 7.
39Accord relatiila stabilisationrégionale,p. 40. eJ la République deBosnie-Herzégovinen'a pas sa propre police. La
compétencedes forces de police des entitésesi limitée ration^loci.
Seule 1'Equipeinternationale de police, créée en vertu de l'accord y
relatif (annexe 11)'est autorisée,dans I'cxercicedes fonctions définies
à l'articleII1de cet accord, opérersur l'ensembledu territoire de la
Républiquede Bosnie-Herzégovine.

Des conditions devant ètre satisfaites pour que la Bosnie-Herzégovine
acquièrela qualitédYEtata l'intérieurde ses limitesadministratives, seule
la condilion concernani la définition contraciuellede ces limites adminis-
tratives eniant que frontières internationalementreconnues l'aété pleine-
ment 40.
24. Compt~ tenude ce yuipre'cédeo ,n peut dire quén droitr70rnvneen
faHilu Bosnie-Iferzégovine en rtltqu 'Etal à JYintErieures litnitesadmi-
nisirutheh de l'ex-eafitéfécfiruledu mêmenom peur êtredéjnie comme
an pr~jer polifique d~ la cornmunuutf interntltionale orgunisée,doni la
matéricrlî.î.uti~rété transforméepar les accords de Dayton en une obli-

guiion conar~rignaniepour les parti~s à ces accords. Le fait qu'il s'agit
plus d'une obligation contractuelle d'établirla Bosnie-Herzégovine en
tant qu'Etat que d'une consécrationde la situation existante est attesté
par la nature de la Constitution de laRkpublique deBosnie-Herzégovine.
Dans son étatactuel, ellen'estpas une constitution ~tricrosensu,a savoir
un acte de l'autoriti constituante interne, mais un traité international en
contenant le texte. Le tcrme «partie>>désigne unEtat qui a consenti
ktre liépar le traité etpour lequel le traite est en vigueur4'. En vertu de
l'article aj de la convention sur le droit des traités,

«l'expression «traité>s'entend d'un accord international conclu par
écritentre Etats et régipar le droit international, qu'il soit consigné
dans un insirument unique ou dans deux ou plusieurs iiisiruments
connexes, et quelle que soit sa dénominationparticulikre~.

En d'autres termes, sous le titre «Constitutiondela Bosnie-Herzégovine»
on trouve un traitéentre deux entitésétatiques - la fédérationde Bos-
nie-Herzégovinect la Republika Srpska - visant a établir un Etat à
l'intérieurdes limites administratives de l'ex-entitéfkdéralede Bosnie-
Herzégovine, puisque «[t]out Etat a la capacité de concluredes traiié~»~~.

En outre, la personnalitkde I'iinedes parties- la fédérationde Bosnie-
Herzégovine - relèvebien davantage de la fiction politique qu'clle ne
posskdelesattributs rkelsd'un Eiat (voir ci-dessuspar. 19).Ainsi, dans un
contexte plus large, l'obligation contractuelle globale d'établilra Bosnie-
Herzégovine a l'intérieurde ses limitesadministratives impliquel'exécution
d'une obligation contractuelle distincteassuméepar les entitks etatiques
I

40Articlc X de l'accord-cadre gépourlapaixen Bosnie-Herzégovine

Convent~onsur le drodestraités;1969,art. 2, Yar
l Ibid,art. 5. APPLlCATION DE CONVENTION GENOCIDE (OP.DISS. KKECA) 684

croateet musulmanedeBosnie-Herzkgovineau titredel'accorddeWashing-
ton - l'obligationde constituer la féd6rarionde Bosnie-Herzégovine.

Actuelktnenl, 19ahLsrnd ceeséIkment~ conslifutds ccl1'Etat quisont foii-
dutnetztau.~uu fegard du droit internulionrijuif de luBosnic- Herzkgovine

ù l'inlericur de es limites admiizisfrutiv~sut1Efat sui generis: B sirgit
d'une rrlutioticonrrucluelle entrc detix ~nlirksd layueil~est associ un
.dément fortemenr rnurqui! de pprotecforaf inrernafiorzul. Ce statut
~'exprrnt~ eideuxniveazrx, cisavoir:

cl) au niveau desfaits,comme le montre Icsiatut de I'IFOR. Cette force
est définiecomme une {(forced'application militairemultinationale»43
dtployéeen Bosnie-Herzégovinepour «aider i veiller au respect des

dispositions du présent accord >j44.L'IFOR n'est pas seulement une
force armée qui ({aurala libertécomplètcde sedkplaccr sans entravc
par voies terrestre, aérienneet fluvialedans l'ensemblede la Bosnie-
Herzégovine~~~m , ais elleest niErneautorisée<<iprendre lesmesures
requises, y compris l'enilsloide la force nécessaire,pour veillerau res-

pect des dispositions de la présenteannexe et pour assurer sa propre
protection^^^;
6) au niveau du droit, eu égardaux dispositions particulièrement perli-
nentes de l'article VI de la Constitution de Bosnie-Herzégovine,qui
institue une cour consti~utionnelle,laquelle est un organe intrinseque-

ment judiciaire qui a rtcornpétenceexcilusivepour réglertout diffk-
rend apparaissant dans lecadre de la Coiistitution entre lesentitésou
entre la Bosnie-Herzégovineet une entitéou lesdeux ou entre Icsins-
iiiutions de Bosnie-Her~l.govine»~~L . e paragraphe 1 de l'article sus-
mentionné, relaiià la composition de la cour, est ainsi libellé:

<<LaCour constituiionnelle de Bosnie-Herzegovine est formée

de neuf membres.
a) Quatre membres sont choisis par la chambrc des représentünis
de la fédération,deux membres par l'assembléede la Repu-
blika Srpska. Lcs trois membres restants sont choisis par le

présidentde la Cour européeilnedes droits de E'hommc:après
consuliation avec la prksiden~e.>>~'

IIest donc hors de douie qu'en pratique l'électiond'un tiers desmembres
de la cour n'est en aucune manikre influencke par la présidencede la
Républiquede Bosnie-Herzégovineni par un autre organe de la Répu-

-
4"rtrtle 1 de l'accord relataiix aspects militaires reglement de priixduc.
At571790-SIIY951799p,6.
44Ibrd
45 Ibid,p 17.
dVbld., p 7.
47 Ibidp 64.
48 Ibirl.blique ou des entités,en pratique, ktant donnéque la consultation n'apar
définitionaucune force obligatoire.
On peut aussi mentionner les dispositions relatives ii la compétence de
l'équipeinternationale de police. Cette force est notamment compétente
pour {(contrôler, observcr et inspecter lesactivitéset facilitésde maintien
de l'ordre, y compris les organismes, structures et procéduresjudiciaires

connexes»4T.La portée véritablede ces pouvoirs dans le contexte de la
supremapotestus de la Rkpublique de Bosnie-Herzégovine estmise en
lumiere par lesdispositions de l'articleVI1de l'accord, qui définitles ins-
titutions de maintien de l'ordre commeles institutions chargéesde main-
tenir l'ordre, demenerlesenquêtespénales,d'assurer la sécurité publique
et la sécuritéde l'Etat, ou de s'occuper desdétentionsou des procédures

judiciaire^^^. l
Les élémcnisrelevant du protectorat in~ernational ont en Outre une
double importance. D'une part, el en particulier en ce qui concerne la
composition de la cour constitutionnelle, ils sont pürtie intégrantede la
structure étatique de la Bosnie-Herzégovine,telle que façonnéepar les
accords de Dayton, et, de l'autre, ils servent à garantir l'exécution des
obligations qu'ont assumécsles entités en signant les accords.
25. 11existe une analogie essentielle entre la Républiquede Bosnie-

Herzégovineel la Finlande aprksque celle-ci eut déclaré sonindkpen-
dancele4 décembre191 7. Comme la Cour permanente de Justice interna-
tionale n'existaitpas a l'époque, c'es t la commission dejuristes que l'on
a demandé de rendreun avis sur le statut de la Finlande. Dans son rap-
port, la commission a notamment notéce qui suit:

(<Certainséléments essentield se I'Etat, même desélémcnis de fait,
lui ont assez longtemps fait défaut. Lü vie politique et sociale était
dksorganisée;l'autoritén'était plusassez forte pour s'affirmer; la
guerre civile sévissait; la Diele, dont la légalitkavait étécontestée

par une grande partie du peuple, avait été disperséepar le parti révo-
lutionnaire ...la force armée et la police étaient BivisCesen deux
camps opposés ..II est donc difficilede dire a quelle date précisela
République de Finlande, dans le sens juridique du mot, est nke
comme Etat souverain définitivementconstitué. Ce n'est certaine-
ment pas avant qu'une organisation politique stable n'ait &té créée et
que lesautoritéspubljq~iesne soient devenues assezfortes pour affir-
merleur autoritk sur le territoire du pays sans le concours de troupes

étrangeres.» 51
Comme l'adéclaré M. Warren Christopher, secrétaired'Etat des Etats-
Unis d'Amérique :

49Article Ili, paragraphe1 a), l'accordrelatiil'équipeinternationale de police,
doM.lhid , art. VpI,107.,. 104.
51Rapportde lacornmisslondejuristes (Larnoude, prksiderit,Sti-uycken,Hubcr),Juur-
JIUofJciedle lu SnciétedeNatrons, ,rupplém~nsrpétrn"3, 1921,p. 8-9. «Sans elections, il n'yaurü psis d'Eiat bosniaque unifié,pas de
constitution nationale ni d'appareiljudiciaire et guère d'espoird'un
renforcement de la coopération entre les diverses cominunauies de
Bosnie. » 52

26. La reconnüissancc de la Bosnie-Herzégovineest Fréquemment,
expressément ou implicitemcnl,invoquée commeattestant I'existcnced :e la
Bosnie-Herzégovine en tünt quYEtaisouverain et indépendant i l'intérieur

des limites administrativesde l'ex-entiti.fédérale yougoslavd eu même nom.
Une telleattitude estquelque peu surprenante, étantdonnéque«13Etat
existe par lui-mêmeet la reconnaissance d'un Etat n'est rien d'autre
qu'une déclaration de cetteexistence, reconnue par les Etats dont elle
émane )xs3.

Cela estparticulieremenl vrai sil'onconsidèreque«la pratique adoptée
par lesEtats montre que I'üctcde reconnaissance est cependant coiisidéré
cornine une décisionde caractere essentiellement politique que chuque
Etat prend suivunr l'opinionqu'il sefirlr lui-migrned~ /IIsiluarion» 54.

11est raisonnable de supposer que sur la base de ces seulsfaits un érni-
nent juriste est en mesure de conclure que «la reconnaissance fait tou-
jours partie de la langue des diplomates mais çlle n'appartient pas à la
langue du droit» 55.
11est vrai que la situation de1stBosnie-Herzegovineest particuliére,car

ellea été reconnuepar pratiquemerit toute la communauté internationale.
Ce fait sert de fondement rila thèse selon laquelle
«la reconnaissance, tout comme la qualitéde membre d'organisa-

lions internationales, tkmoigne de la conviction de ces Etats que
l'entitépolitique ainsi reconnue constitue une réalitéet lui confère
certains droits et certaines obligations au regard du droit internatio-
nal >55.

Cette thèse,élégantd eu point de vue de la doctrine, met notamment en
lumiére le caractère ambivalent de l'institution de la reconnaissance
des Etats. Selon la théoriedéclarative,qui est cellequi prévaut,la recon-

naissance des Etats devrait êtreune dkclüration de la situation factuelle
formuléekges urti.en harmonie aveclesrèglesjuridiques rkgissantl'appü-
rition de nouveaux Etats. Il est clair que la «conviction des Etats que
l'entitépolitique ..constitue une réalité>n>c correspond pas nécessaire-

S2(<WithoutEleçtions, ThereM'il1BNo Unified BosnianStaten, ln~ernu/innalI.Itrald
Tribune, 15-16juin1996,p 6.
53DeirtscheCriniinen~ul av-Gessclclic.EIntpokunui.r,5 AD 11,p.15(1929-1930).
54Mémorandumdu Secrétariatde I'Organisationdes Nations Unies de février1950
concernant la qucstionde la représentatdes Mcmbres iiI'Organisaiiondes Nations
Unies,doc. S114666 ,o~ument~ofjcieb du Con.reildc sécuriti.ciriyitiimr oirnde.supyl:-
mentjriiivicr-mai 1950,19.
55L. EIenkin,((GeneralCourseon Public InternationalLaw», Recueil des cours de
['Académiede droit intenutionalde La Hayt.216,1985,p. 31.
56Exposé [luGouvcrricniente la Républiqude Bosnic-Herzégovinseur lesexceptions
prkliminaires,par.4 14 APPLICA'rIONDE CONVENTION GENOCIDE (~t'DISS. KRE~A) 687

ment aux faits. Par définition,la ccconviction»n'est pas uneappréciation
objective des faits, mais bien une appréciation subjective - c'est pour-
quoi il estnécessaire enl'espècede s'efforcer d'établirle sens prkcis de
l'expression ((conviction desEtats~ etdc voir si oui ou non cette convic-
tion est fondee en fait et en droit. A défaut,l'ensembledu problkme rele-

verait de la règlede l'ccopinionmajoritaire», de tellemaniéreque lesfaits
seraient ceque la majoritéconsidère qu'ilssont.
Cela étant,il est d'une manière générale nécessaid ru point de vue du
droit d'examiner dans chaque cas individuel si les critères juridiques
applicables à la reconnaissance sont satisfaits.
11est évidentque la Bosnie-Herzégovine entant qu'Etat apparu à
l'intérieur des limitadministrativesde l'ex-entitéfédérale yougoslave:du
mernenom ne peut EtreclassEcque parmi lesnouveaux Etats. Tlest donc

nkcessairede voir quels critèresS'appliquenta la reconnaissance des nou-
veüux Etats.
On peut considérerque pourl'essentiel ces critèressont énoncéa su para-
graphe 100({(Conditionsminimales pour la reconnaissance de nouveaux
Etats~) du Resta~ement ofthe Luw:

({Avantde reconnaitre une entitéen tant que nouvel Etat, 1'Eiat
dont émane la reconnaissance doit s'assurer raisonnablement, au
regard des faits, que l'entité:

a) a un territoire et une population définis;
b) est sous le pouvoir d'un régimequi satisfait aux conditions mini-
males régissantla reconnaissance d'un gouvernement en vertu
du [paragraphe] 101;
c) a la capacilt d'avoir des relations internationales;
d) permet raisonnablement de penser que les conditions énoncées
aux clauses a) a cJ continueront d'êtresatisfaites.uS7

Le paragraphe 101dispose:

r<Avant de reconnaitre un régime rkvolulionnaire en tant que gou-
vernement d'un Etat, 1'Etatdoni émane lareconnaissance est tenu
de s'assurer raisonnablement, compte tenu des faits, que ce rigirne:
u) exerce son pouvoir sur le territoire et lapopulation de 1'Eta;ou

b) exerce son autoritésurune partie substantielle du territoire et de
la population de 1'Etdtet permet raisonnablement de penser qu'il
réussiraa évincer le gouvernementanterieur sur le territoire de
I'Etat.~~~

Les critèrescitéssont dans l'ensemble applicablesü la Bosnie-I-lerzégo-
vine. Lorsqu'on procède i une telle évaluation, une considération est
décisive:

57ArnericiinLawInstitute,Reîtarernerirofthe Law. Srçund,ForeignRelLawoof
/he Unlled Sture1965,p 321.
JnIb~d,p 322 APPtlCATION DE CONVENTIONGENOCIVE (01'. DISS. KKECA) 688

«La reconnaissance d'ungouvernement IICpose problèmeque si
un changement anormal de gouvernement ü cu licu, c'est-A-diseun
changenient de gouvernement en violation dc la coi~stiluiion de
t'Etatos"

La Bosnie-MerzCgovine ne satisfaisait aux critèresde la reconnaissance ni
d'un point de vue statique ni d'un point de vue dynamique. Plus pürticu-
lièrement,au mornerit où elle a ité reconnue, non seulement elle n'avait
pas <<unterritoire et une population définis))(voir ci-dessus par. 6-9) et

ii'exerçait pas non plus, notammeiit, «son conirôle sur une partie subs-
tantielle du territoiret de la population>>(voir ci-dessus par. 181,mais
elle ne permettait pas «raisonnablcmenl de penser» qu'elle pourrait ;i
Iyüvcnirsatisfaireà ces critéressans uii appui extkricur actif. La Basnie-
Herzégovineelle-mème,dans sa «deuxièmedemande en indicütion de
mesures conservatoires» du 27juillci 1993, note, à la fin de ses conclu-
sions: {(IIs'agit de la dernière occasionqu'aura la Cour de sauver ...
E'Etatde Bosnic-Herzégovine»(p. 55).Les«conditions miiiimalcspour la

reconnaissance des nowvçaLixEtam énoncéesci-dessus doivent ricoup
sûr êtrecomplétées par des conditions juridiques puisque {(l'exercicede
I'autodkterinination [est]un critkre additioniiedt la qualitéd'Etat, dont
le déni>>ferait obstüclcà la qualitéd'Etatm.
Ces critèresadditionnels conforlcnt encore la conclusion selon laquelle
laBosnie-Hcrzcgovinea été reconnue exclusivementpour des raisons poli-
tiques. De même,les lignes directricessur la reconnaissance de nouveaux

Etats en Europe orientale et en Union soviétique, surla base desqucllcsla
Bosnie-Herzégovine a étéreconnue par la Communautéeuropéenneet ses
Etats membres, etles débatsqui ont eu licuà I'Organisaiiondes Nations
Unies lors de l'admission de la Bosnie-Herzégovine,indiquent que, du
point de vue juridique, la rccrinnaissance a étéaccordéesur la base du
droit des peuples à disposcr d'eux-mêmes mème si,en l'espèce,I'exercicc
de ce droit esta tout le moins doutcux (vair ci-apréspar. 44-76).
En d'autres termes, la reconnaissancede la Bosnic-Herzégovineen tant
qu'Elat indépendanta étémotivkedavan tagc par des motifs de politique

nationale cides considérationsd'opportunité que par l'existencedes prin-
çipcsjuridiques applicables en la matitre. Ellc a tté pour l'essentiell'un
des instruments de la rkalisation d'un projct politique sur le reglement de
la crise yougoslave, un instrument qui reflktüit la logique interne de ce
projet iiidépcndammentdes règlesjuridiques applicables. Le caractère
utilitairee la rcconnaissance dans lecas de la Yougoslavie aété souligné
par l'ambassadeur Brown :

«Lord Carrington, qui prcsidait la conférencesur la Yougosla-

vie...estimait que la reconnaissance était unearme importante pour

rheC'lrifedSIUI~J.196p.321. Reslaienient oj flSecond,ForeignKela/ronsLaw of
" M N. Shaw,Inrernu!;unulLuw, 2' éd, 1986.p 132. API'LICATIONDE CONVENTION GÉNOCIDE (OP. DISS. KRECA)
659

rapprocher lesdeux parties. La reconnaissance pouvait êtreune inci-
tation à coopkrer ou une sanction pour dtfaut de coopération.oh'

Cela est particulièrement manifeste dans la «Déclaration sur la Yougo-
slavie~du 16 septembre 1991qui, avecles{(Lignesdirectricessur la recon-
naissancede nouveaux Etats en Europe orientale et en Union soviétique»
adoptéesle mtme jour par le conseil rninistkrielde la Communautk euro-
péenne,a servide base i la reconnaissance de la Bosnie-Herzégovinepar
la Communautéeuropéenneet ses Etats membres.
Dans leur déclaration, la Communauté européenne et ses Etats

membres invitaient
<<touresIesrkpuhblique sougoslaves à déclareravanf le 23 décembre si:

- elles souhaitenl etre reconnuesen tont yu'E~ats indkpendunts:
- ellesacceptent les engagements contenus dans les lignes direc-
trices susrnentionnées;
- elles occeplent les dispositionreprisel. durale projet de coaven-
rion qui esî ù dkxumen ri la confirence sur la Yougoslavie,
notamment les dispositions du chapitre lt sur les droits de

l'homme et les droits des groupes ethniques et nalionaux»".
La Bosnie-Herzégovine, ainsique les autres entités fédérale dse laRepu-
blique fédérative socialistede Yougoslavie, a donc irCinvitde à déclarersi

ellesouliaitaitêtrereconnuecvnzmeEtar indépendanrC . ette invitation a
&téraite A un moment ou le désird'indépendance ne s'étaitpas encore
exprime de manière appropriéeen Bosnie-Herzégovine. Le référendum
sur le statut de la Bosnie-Herzégovinelors duquel deux habitants sur
trois se sont déclarés en faveud re la ({souverainetéet l'indkpendance de
la Bosnie-Herzégovine»n'a eu lieu qukn mars 1992. Il est difficile de
soutenir qu'une telle invitation, émanantd'un organe qui avait offert ses

bons officesetsa médiationpour réglerla crise yougoslave, a pu n'avoir
aucun effet sur les choix politiques faits cBosnie-Herzégovine,d'autant
plus qu'elleüssujcttisliala reconnaissance àcertaines conditions, natam-
ment l'acceptation dcs ({dispositionsreprises dans le projet de conven-
tion ...i l'examen à la conférencesur la Yougoslavie». La disposition
clef du ({projet de convention» que le prksident de la conférence,lord
Carrington, a présentéa la conférencele 23 octobre 1991,est son article
premier, qui est ainsi libelle:

«Les nouvelles relations entre les républiques reposeront sur les
éléments suivants :

a) statut de républiques souveraines et indépendantes,dotéesd'une
personnalitéinternationale pour celles qui Ic désirent;

6'E. G. Brown, {(Forcand Diplomacy inYugoslavia.the U.S.InterestAmericnn
ForeignPoliry Nenisler!vol 15,114, aofi1993,p 2
"ZCoopérationpolitiquen Europe,communiquk dc presse16dkembre 1991(lesita-
liques sont moi). APPLICATION DE CONVENrION G~NOCIUE (OP. DIÇS. KRE~A) 690

bj libre association des républiques dotées d'une personnalité inter-
nationale comme envisagédans la présenteconvention ;
cJ dispositions détailléesy, compris des mécanismesde supervision,
pour la protection des droits de l'homme et l'octroi d'un statut
spécial ri certains groupes et zones;
............................

dj dans lecadre d'un siglement d'ensemble, reconnaissancede l'indé-
pendance - ü I'intkrieur des froniikreç actuelles, sans accord
contraire - des républiques qui souhatient étre indépendantes» ,
Les circonstances montrent qu'il existait unlien entre la reconnais-

sance et ledémembremenide la République fédérativseocialiste de You-
goslavie selon sa,divisioil adminisirative en entitésfkdérales,comme le
prévoyait l'article1 a) du projet de convention. Ce schéma,qui prévoyait
la substitution automatique ila personnalité dela Républiquefédérative
socialiste de Yougoslavie dc la personnalitédes entites fédérales, reflétait
lejugement de valeur exprimédans la «Déclaration sur la Yougoslavie~~
du 16décembre 199 1,sur la base de laquelle son contenu reposait. On ne

peut expliquer autrement certaines formulations figurant dans la déclara-
tion - par exemple, celle selon laquellela Communautéeuropéenne et
ses Etats rnenlbrcs «ne reconnailront pas des entitésqui seraient le résul-
tat d'une agression». Par définition, l'agressionest

<<l'emploi de la force arméepar un Etat contre la souveraineté,I'inté-
grité territorialeou l'indépendance politiqued'rin autre Elnl, ou de
toute autre manière incompatible avecla Charte desNations Unies» 63.
En fait,certains indicesatlestent que, en prksentant le projet de çonven-

ticin,ceux qui fournissaient leurs bons officeset leur médiationdonnaient
effet i une decision politique sur la transformation des entitésfédérales
yougoslaves en Etats souverains. La dkclaration du 6 octobre 1991 for-
mulée danslecadredela coopération politiqueen Europe soulignait que:

«il avaitété convenu qu'une solution politique devaitetre recherchée
dans la perspectivede la reconnaissance de l'indépendancedes répu-
bliques qui le souhaitent, au terme d'un processus de négociation
menéde bonne foi et avec la participation de toutes lesparties)),

Urie autre indication est le titre mêmedu document - leterme «conven-
tion» dénoteun ccuccord enlre Erarsau sens du droit infernational». La
convention sur ledroit des traités(1964), qui es1leixIuru dans cedomaine,
dispose en son article 2 qu'on entend par «traité» «un accord internatio-
nal conclu par écritentre Ftats et régipar le droit international ..quelle
que soit sa denomination particulière>).L'artide 6 de la convention dis-
pose que «[t]out Etat a la capacitéde conclure des traités».

annexe,articlpremier(lesrtaliquessont de moi).aleen date du 14 décembre1974, Lx lien établi entre la reconnaissance et certaines fins politiques
concrètes attcslc que la reconnaissance de l'indépendancedes entités

fédérales yougoslaves avait bien un tel caractère. La déclaration des
Etats-Unisd'Amériqueet dela Communautéeuropéennesur la reconnais-
sance des républiquesyougoslaves stipuk notamment :
<(LaCommunauté et ses Etats membres et les Etats-Unis sont

convenus de coordonner la maniéredont ilsenvisagent d'achever les
processusde reconnaissance des républiquesyougoslavesdemandant
l'indépendance.

i) que les Etats-Unis, dans ce contexte, examineront rapidement
et dans un esprit positif les demandes de reconnaissance de la
Croatie et de la Slovéniedemunil.reu .ïc)utt.n/Cc/oubk approche
fondée sur le déploiemenrcielefl-ircdepuix desi2rcrtionUnies et

Iucconfkredn epaix de la Communau~e curopkenne,prksidéepar
Iord Currington;
ii) qu'ilconvient d'examiner dans un esprit positif les demandes de
reconnaissance des deux autres républiques, sousréservede la
solution des questions qui subsisieni au seinde la Communauté
européenneh propos de ces deux républiques.A cet kgard, [les
signataires] engagent fermement toutes les parties en Bosnie-
Herzégovine a adopter sans délai desdispositions constitution-
nelles permettant un développement pacifiqueet harmonieux de
cetterkpublique dans ses frontièresactuelles. La Communaute et

ses Etats membres et les Etats-Unis sont aussi convenus de
s'opposer fermement tout effort visüntsiporter atteinte à la
stabilitéetà l'intégritterritoriale de ces deux républiques))
En ce qui concerne la reconnaissance de la Bosnie-Herzégovine entant

qu'Ecatindépendantàl'intérieur des limites administratives de l'ex-entité
fkdérale,au moins deux conclusions s'imposent:
a) phénoménologiquement,en l'espèce,la rcconnaissance de la Bosnie-
Herzégovine n'a pas suivilalogique naturelledu processusjuridique

de la reconnaisssince,qui devrait consister a prendre acte passivement
de la création de 1'Etai. Dans le cas de la Bosnie-Herzégovine,la
reconnaissance, comme l'attestent les événements, a étél'un des ins-
truments utilisés pour constituer la Bosnie-Herzkgovine en tant
qu'Etat à l'intérieurde ses limites administrativesEn reconnaissant
la Bosnie-Herzégovine, lesEtats en cause ont en fait manifestéleur
intention de la créerou de participerà sa crkation;
h) juridiquement, la reconnaissance de la Bosnie-Herzégovinea l'inté-
rieur de ses limitesadministratives constituait reconnaissance d'un
Etat non existant. Elle a étéaccordée uniquementpour des raisons
poljtiques puisque,au moment où elle estintervenue, la Bosnie-Her-

zégovine ne satisfaisaits auxcritères minimums pour êtrereconnue
en tant que nouvel Etat.l APPLICATIONDE CONVENTIONG~NOCIDE (OP.DISS.KRECA) 692

En outre, compte tenu de l'importance du droit des peuples à disposer
d'eux-ni&mes en tant que critèredans la dicision concernant la qualité
d'ElütM, on peut conclure quc Ihüdrnissionde la Bosnie-Herzégovine à
l'organisation des Nations Unies a étéun acte diplomatique qui allait à
l'encontre de la pratique établie del'Organisationicet égard.

DEUXIEM EXCEPTION PRELIMINAIRE

27. La position de la Cour concernant la deuxièmeexception prélimi-

naire de la Yougoslavie repose surdeux prémisses:
i) elle «n'a pas, pour se prononcer sur cette exception, à cxriminer les
dispositions de droit interne qui ont été invoquées à l'appui ou
l'encontre de laditeexception au cours de la procédure)),étantdonné

que «[clonformémentau droit international, il ne fait pas de doute
que tout chef dYEtatest présumé pouvoir agir au nom de I'Etat dans
ses relations internationales», et
ii}uM. Izetbegovicavait étéreconnu,en particulier par l'organisation des
Nations Unies,commcktant Icchefd'Etat» ctsa <(qualitde chefd'Etat
a continuéde luietre reconnuedans de nombreuses enceintesinternatio-
nalespar la suitet plusieursaccords internationaux))(arrêt, par.44).

Mes vues sur cepoint sont très différente. a requèteintroductive d'ins-
tance, comme cellede la Bosnie-Herzégovine,coilstitue un acte unilatéral
typiquede 1'Etatqui produit desconséquencesjuridiquesdans les relations
mutuellesentre les partiesà la convention sur le génocide.C'est pourquoi
la Cour est autorisée à prendre en considérationles dispositions perri-

nentesdudroit constitutionnel dela Bosnie-Herzégovine,ainsq iue d'autres
afTairesdans lesquellesl'application d'une normedu droit international
étaitsubordonnéeau droit interne (par exemplel'affairedes Gisementsdia-
~nuntif&redsu Griyu~ilundocciclenful,1871(Recueildes urbirrogesinrernu-
~ionuux,1856-1872, vol. 2, p676-705(1423)); laSentence C!:lrvelri(1888)
(Moore, InlcrnalionalArbirruzions 1945-1968, vol. 2);l'affaire desZones
fvanche de lu Houle-Savoie et du Pclys de Gex, 1932(C.P.J.I. serieA/B
nu 46); l'affaire dePêrJierics(C.1.J. Recucil 1958, p. 125-126); l'affaire

Norrcbohrn(C.I.J. Rccraeii1955, p. 4); l'affaire de l'Application de la
convenlionde 1902pour réglerla llulelledes mineur3(C.I.J. Recueil 1958,
p. 62-66),etc.). En d'auires termes,ilne suffitpas d'un conflitentre le droii
interne etEedroii international comme,par exemple,dans l'affaire relative
h Certainis ntkrkls aiie'lt.nrPId~Huute-Silk.sipo1onui.wou l'affaire du
VapeurWimbledon, mais d'une affaire dans laque1Ieces deux droits sont
en coordination et dépendentl'un de l'autre.
In concreto, la Yougoslavie afirme que M. A. IzetbegoviC n'a pas pu
donner l'autorisation d'introduire une instance devant la Cour en la pré-

sente affaireparce que :

J.D~igard,Herogn~Iiand the UniteriNurions,1987,p. 79. i) iln'entrait pas dans les attributions du présidentde la présidencede
Bosnie-Herzégovinede donner une telle autorisation et, parce que,

ii};ifa date pertinente, M. Izetbegovikn'était pas,selon la Constitution

de Bosnie-Herzkgovine:présidentde la présidence.

Il est incontestable que ces deux arguments reposent principalement
sur ledroit interne de Bosnie-Herzégovinede telle manière que recher-

cher les réponses que Ie droit constitutionnel de Bosnie-Herzégovine
apporte à ces deux questions est essentiel,quoique de maniérediffkrenie,
pour I'applicaiiondcs normes periinentes du droit international. La Bos-
nie-HcrzSgovincelle-mCmclereconnaît indirectement lorsqu'elledemande
i la Cour de:

({prendreconnaissance des faits qui suivent, lesquelsétablissentque
le présidentTzetbegoviC a &ré rkguiikrernentnnrnmtprtsident de la
présidencede la République deBosnie-Herzégovineet qu'il ~xerçnil
sesJoncrionsconfirrnémenr uux procéduresconstiiutionaellesperri-
nentes» 65.

S'agissantdu point i), le principe généradle droit énonce à l'article46 de
la convention sur le droit des traités (1969) vise à réaliser unéquilibre
relaiif entre droit international et droit interne sous la forme d'une ihéo-
rie internationaliste modifiée(théoriedu chef de 1'Etat).La seule manière
pour la Cour de décidersi ceprincipe juridique généralest applicable en

l'espèceest d'examiner le droit interne de Bosnie-Herzigovine pour eta-
blir si, lorsque M. lzetbegovii. a accorde l'autorisation d'introduire une
instance devant la Cour, le droit interne de Bosnie-Herzégovine a été
violé.
Le point ii) ne peut non plus êtretranché sans un examen du droit
interne de la Bosnie-Herzégovine.
On ne peut nier, comme le riote la Bosiiie-Herzégovirie,qu'<c[a]ucune
règledu droit international ..n'exigeque la structure d'un Etat ait une

forme particuliére~66.Il est égalementincontestable que le droit inter-
national, étant souverain et indépendant du droit interne, déterminele
cercle des personnes quireprésentent 1'Etatdans les relations internatio-
nales (cela vaut mkmc si le cerclc des personnes reprkseniani I'Etat in
<fbroexterno est deteminé sur la base de dispositions constitutionnelles
praiiquernent identiques). Toutefois, sedes maleriue, l'argument ii) for-
mulédans la deuxième exceptionpréliminaire ne contesle pas le droit de
M. AiijuIzetbegoviE, epi stqutilitde cchefd'Etur,el confr,rn7émen(tru droit
inrerntrrionalde dontier l'autorisation d'introduireune insrancedevant la

Cour, n7ui.vconteste que M. IzerhegoviCait PIP Ie cfiej.de['Etul à [adate
pertinenle,c'est-à-direau rnornenloù il a donnéIaraiorisationenquestion.

h5 ExposCdu Gouvcrncmentdc la Républiquede Bosnie-1-lerzkgoviiicp,. 42.
" Sol?arunccide//zui~icnnsulrari61 J Recueil1975, p43. APPLICATION DE CONVENTION GENOCIDE (OP. DISS. KRECA) 694

La seule manièrede répondre à la question soulevkedans la deuxikme
exception prkliminaire est d'examiner le droit internc constitutionnel de
Bosnie-Herzégovine. A contrario,la norme pertinente du droit interna-
tional serait celle déterminantnon seulement la structure d'un Etat mais
aussi lcs modalitésde la constitution et la duréede vie de cette structure.

28. Audeuxièmejour des audiencesconsacrkes à lapremi&redemande

en indication de mesures conservatoires, l'agentde Bosnie-Herzégovine a
notamment souligne ce qui suit:
r<Le pi*ési&ni Izetbegovii-a personnell~nzent uccrédiféM. Sacir-

bey, qui a comparu devant vous hier, et moi-mérneen tant qu'agents
extraordinaires et plénipotentiaires dea Bosnie-Herzégovineauprès
de la Cour.>>67

Que lesdéclarations de:celui qui étaitalors l'agentde la Bosnie-Herzégo-
vinecorrespondent aux faits est co~ifirrnpar le texte de l'actede nomina-
tion de

«SQIIExcellence Muhamed Sacirbey, notre ambassadeur et repré-
sentant permanent auprès de I'Organisalion des Nations Unies, et
Francis A. Boyle, professeur de droit international à l'Université
d'Illinois...comme agents génCrauxdotés de pouvoirs extraordi-
naireset plénipotentiairesafin qu'en notre nom ils introduisent une
instance etdefendent nos intérêts devant la Cour internationale de

Justice»
Le iextc de cet acte était signé,comme indiquédans l'acte, par {(Alija

IzetbegoviC,président dela Rkpublique de Bosnie-Herzégovine». Letitre
{(présidentdela République de Bosnie-Herzégovine)> indique sans équi-
voque le caractere personnel de l'accrédiiationdu présidentIzetbegovii:
- d'aulant plusque, contrairement A la pratique de la présidencede Bos-
nic-HcrzCgovinc, il n'estpas indiqué dans le textequ'il s'agid'un acte de
la présidenceh?Le fail que ce1acle ai1 &itrkdigé«sur le papier a en-tete
officicldc la présidence))ne saurait à mon avis prouver que l'acte a été

accompli au nom de la présidencede Bosnie-Herzégovine.L'utilisation
du papier a en-têteofficieln'est qu'une indicationprini-afaciequi permet
de supposer que ce qui est écritsur ce papier esi un actde l'organe dont
le nom figure dans l'en-tete. Cette supposition est réfutablecar le papier
A en-tkte officieln'est que le signed'identification extérieur del'auteur et

CR 93/13,p 38 (Icsitaliquessont de moi).
6sParexemplc,ledkcrctcurIcchangcmcntdu nomde laRépubliquesocialistedBos-
nic-HcrzCgovin(déclaratidu Gouverrjementdela République eBosnie-Herzkgovine
surles exceptions préliminaires,ans,ol 1,annexe2.1a)etéprispar((lprésidence
de la Républiquesocialistc dc Bosnic-Herzégolorsd'uneréunion tenuele 8 avril
1992ii,esignépar Ic «présidentdc la précidee la RépubliqusocialisteRosnie-
Hcrzégovinc,Alij:i lzetbegovii.>i.La décisionsur la procd'uneimenace immi-
nente de gucrreadoptk Ic mtmc jour, ainsi quetous les autres actes publila par
présidencde Bosnie-Hcrzégovincs,odcs cxcmplcsidentiques.sert en outre de support àla décisionde l'organe,et ellesera vérifiédeans
chaque cas concret selon que lesconditions formelleset matérielles régis-
sant l'adoption de l'acterédigksur le papieri en-têteont été satisfaites. Il
seraita contrurio absurde de supposer que tout texte écritsur le papier d

en-têteofficield'un organe constitue ip~ofacto un acte de cet organe.
In concreto, on peut se demander si le papier a en-têtesur lequel
M. IzetbegoviCa donnél'autorisation d'introduire une instancedevant la
Cour est sans aucun doute le seul papier à en-tbte officielde la prksidcnce
de la République de Bosnie-Herzégovine.Cette question est légitime
parce que le mot «présidence» figurant dans l'en-tétese trouve sous le
nom de 1'Eiat- «Républiquede Bosnie-Herzégovine> > et au-dessus

du mot <!présideniji.Le mot c<présidence» peut aussi etre pris dans le
sens de bureau du président,étant donnéen particulier que M. Izetbe-
govit est qualifiéde «président de la République de Bosnie-Herzégo-
vine)).Le nom de la direction collectivede 1'Etataux termes de la Cons-
titution de Bosnie-Herzégovine n'estpas «présidence>> mais «présidence
de la Rfpublique de Bosnie-Herzégovine » h9.

11est particulièrement important que, contrairement aux dispositions

de l'article 10 du règlement intérieur de la présidenceet A la pratique
habituelle de celle-ci, la lettre signéeparM. Alija lzetbegovic ne porte
aucun des sceaux (ni le petit ni le grand) de la présidencede Eosnie-
Herzée.dine.
Ces diffkrents points attestent de manièreconvaincante qu'en l'occur-
rence on a affaire a une (iaccréditation personnelle» de M. IzetbegoviC.
Le présidentIzetbegovii:était-ilautorisépar ledroit intcrne de la partic
demanderesse a accréditerun «agent extraordinaire et plénipotentiaire

auprès de la Cour»?
29. La fonction du «président de la Rkpublique de Bosnie-Herzigo-
vine» n'est pas établiepar la Constitution de Bosnie-Herzégovine. LE
chapitre X de la Constitution évoque la«pr&sidence de la Rkpubliquc de
Bosnie-Herzégovine»comme l'organe ((reprksentant la République de
Bosnie-Herzégovine » 7! Ld présidencede la République deBosnie-Her-
zigovine est la direction collective de l'Ela1«qui agit et décide collecti-
vement dans Iccadre de réunionsel est collectivementresponsable de ses
actc~»~'-

La présidencede la République deBosnie-Herzégovineprise collecti-
vement, en tant que collège,estaux termes de la Constitution l'organe de
représentation. Le prksident de la présidence,en tant que priaius infer
pcrres,n'exerceaucun pouvoir politique indépendant. Les actes relevant
des attributions de la présidencede la Republique de Bosnie-Herzégovine

69Chapitre X de la Cotistrtution de Bosnie-Herzégovine.
70Articl219.paragraphe1, delaConstitution dc Rosnie-Herrkgovine.
Article3 du règlementintérieurdc la présidence dela République~oçBos-stede
nie-Her~egovine,Jour~aolf$c(lla R$tlblfq~esorialis!e rlr trosnie-Hcrnog36,ne,
1990(décrets, décisionest conclusions ainsi que rkglementsayant force de loi
dans lescas prévuspar la Constitution) sont adoptés parla présidencedc
la République deBosnie-Herzégovinedans son ensembleT2.
Le présidentde la présidence,au nom de la présidence,représente cette
dernièreT3.D'un intérêp tarticulier parmi les fonctions du présidentde la
présidence énumérées a l'article 22 du réglementintériçur estla fonciion

consistant a «signer les actes adoptéspar Ia présidence».
En conséquence, M. IzetbegoviC,en tant que présidentde la prési-
dence, n'était pas auiorisé à {(accréditer personnellement ...un agent
extraordinaire et plénipotentiairede la Bosnie-Herzégovineaupris de la
Cour ».
JO. La Yougoslavie fait valoir dans sa précedenteexception prélirni-
naire qu'a l'époqueou l'autorisation d'introduire une instance devant la
Cour a été donnée(le 20 mars 1993), M. Izetbegovii:{(n'occupait pas les

fonctioiis de prksident de la République» et que <<l'autorisationd'intro-
duire et de conduire une instance a été accordée en violation d'une règlc
de droit interne d'importance fondamentale >>74.
La Bosnie-HcrzCgovine,d'autre part, estime que

«le 20 mars 1993,date h laquellela présente instancea été introduite
devant la Cour internationale de Justice, le présidentet la présidence
exerçaient légalementleurs fonctions, conformémentaux dispositions
pertinentesde la Constitution, y compris cellcs relatives rl'étatde
guerreou d'urgence.Ensa qualitédc presidcntde la présidence,lepré-
sidentIzetbegovic estlégalement habilité $ reprksenterinternationüle-
meni la Républiquede Bosnie-Herzégovine dans celte affaire»75

II y a désaccordsur le point de savoir si M. Izetbegovii:aurait pexer-
cer Icç fonctions de présidentde la presidence PX consdilurioneaprès le
20 décembre1492.11est indiscutable que M. A. Izetbegovii:assumait les

Fonctions de présidentde la présidencede 1ü République socialistede
Bosnie-I-lerzkgovineen décembre 1990, conformément aux dispositions
constitutionnelles applicables. Son mandat a kt6proroge d'un an, confor-
mément à l'amendement L1 (par. 4, point 6) de la Consiitution de la
Républiquesocialiste de Bosnie-HcrzCgovine,qui disposait :

({Le président dela presidence est élupar la prksidence parmi ses
membres pour une périodede un an et ilestrééligible une seulfeois
pour une annéesupplémentaire. )>

La Constitution interdisait donc à quiconque d'exercer les fonctions de
présidentde la présidencependant plus de deux ans ou pour plus de deux

72Ar~içle49 du réglemenitnti-ricur.
73Article21 du réglement interieur.
74ExceptionsprklirninaisclitYougoslavie, p. 141,par. A.2.
75Exposédu Gouvernement dcla Rép~ibliqdeBosnie-Herzégovinsurlesexceptions
préliminairep,. 47, par.2.19 AI'PLICATIONDE CONVENTIONGENOCIDE (OP. DISS. KRE~A) 697

mandats consécutifs.Cette interdiction ttait absolue dans le texte origi-
naire de la Constitution de la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégo-
vine car,en ce qui concerne le président dela présidence,aucune excep-
tion n'était envisagéemêmeen cas d'r<etat de guerre ou de menace
imminente de guerre». L'article 358de la Constitution confirme une telle
interprétation:

«En cas d'étatde guerre ou de menace imminente de guerre le
mandat des membres de la présidencede la Républiquesocialiste de
Bosnie-Herzégovineest prorogéjusqu'i ce yue lesconditions permet-
tant l'électionde nouveaux membres de la présidencesoient réunies.

Cette interdiction aétémodifiéeparl'amendement LI (par. 4, point 8)de
la Constitution de la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzkgovine,aux
termes duquel:
«En cas d'étatde guerre ou de menace imminente de guerre le

mandai des tnetnhres de luprésidence eldu présideni~onlprorogks
jusqu'à ceque les cogaditiunnéce~sairep sour I'klecfionde nouveaux
membres de ICpIrksidence .wirritréuniesfi 76
Cet amendement étendla portéerutionepersolauede l'exception etablie

au profit des membresde la présidencepar l'article358de la Constitution
de ln Républiquesocialistede Bosilie-Herzégovineau prksident de lapr&
sidence. LESprincipaux clémentsdes solutions consacries dans l'amende-
ment LI sont les suivants:
crj la prorogation du mandat est liée à l'éventualitéd'un «étatde guerre

ou d'une menace imminente de guerre»;
h) l'interdictiond'un troisièmemandat consécutif n'estpas abolie, mais la
prorogation d'un mandat en cours est envisagéedans lescas prévus;
c) la prorogation du mandat esl limitéepar les ((conditionspermettant
l'électionde nouveaux membresde la prksidence», non par la cessa-
tion de l'{<étate guerre ou [de la] menace imminente de guerre».

La Bosnie-Herzégovineinvoque aussi l'article 220 de la Constitution
consolidéede la Rtpublique de Bosnie-HerzEgovineadopte le 24 février
1993, qui est ainsi libellé:
«En cas de gucrre ou d'état d'urgence,le mandat des membres de

la présidenceet du présidentsont prorogésjusqu'à ce que-lescondi-
tions nécessairesà de nouvellesélections à la présidence soientreu-
nies.»
A mon avis, le texte consolidede la Constitution ne peut, en l'occurrence,

Etreaccepté comme rondement juridique pertinent.
Plus particulièrement, dans la pratique constitutionnelle yougoslave,
l'élaboraliond'un texle consolidéétaitune procedure de pure technique

Journalufjr, ie n Répirbliqeocinlisde Bosnre-Herzegoiiine,no13,21 avril
1989p. 338. APPLICA.TIONDE CONVENTIONGENOCIDE (OP. DlSS. KRECA) 698

juridique permettani d'ajuster un texte normatif, la constitution ou une

loi, en fonction de son objectif et des impératifsde son application
concrète. Elle excluait toute inodification juridique mdme mineure du
texteet se réduisaitIc plus souvent Bune renumerotation de ses diverses
composantes. Ainsi, dans la pratique constitutionnelle yougoslave, le
texte consolidéd'un acte normatif ne pouvait être invoqué dans le cadre
d'une procédureofficielle,notamment une procédure judiciaire.
Comparé a l'amendement LI, l'article 220 du texte consolidé de la
Constitution de la République deBosnie-Herzégovineapporte une modi-
ficationà la Constitution. La prorogation du mandat des membres et du
president de la présidenceest liéepar l'amendementLI (par. 4, point 8)à
121{(guerreou une menace iinminente de guerre» alors qu'à l'article 220
du texie consolidk, le motif de la prorogation est la ((guerre ou l'état

d'urgence >iOn peut donc conclure que la consolidation du texte dissi-
mule en faitune modificalion de la Constitution.

La présidencedc Bosnie-Herzégovine,comme indiquédans le pream-
bule de la Constitution,a adoptéune décisionaux fins d'établirun texte
consolidéde la Constitution de la République deBosnie-Herzégovine et
elle n't~aitpas autoriséepar la Constitution h apporter une modification
à cette dernière,l'Assembléede Bosnie-Herzégovineétantexclusivement
compétentepour ce faire7'. La présidence ainsique le gouvernement de
la République, chacunedes chambres de l'Assembléeet au moins trente
membres de I'Assemblkesemblent êtreseuls habilites à proposer des
amendements à la Constit~iion'~. Les modificatioi~sde la Constitution
dc la Republiquc de Bosnie-Herzégovinedoivent prendre la forme d'amen-

dements ou dc lois constitutionnelle^^^.
II découlede cequi précèdcque l'articlc220 de la Constitution coilso-
lidie de la République deBosnie-Herzégovine,en ce qu'il lie la proroga-
tion du mandai des membres et du prisident de la présidence iun ((état
d'urgence)) également, cotistitue unemodificalion de laConstitution de
la République deBosnic-Herzégovine, etcette modification a Etéeffec-
tuée,du point de vue tant de la forme que du fond, contra consrirurio-
nem.
31. En conséquence, ilrestei déterminersi, eu égardaux dispositions
de l'articlc 358de la Constitution de la Bosnie-Herzégovinetelle que
modifiéepar l'amendement L1(par. 4, point X), les conditions prescriies
pour la prorogation du mandat du présidentde la présidencede la Rtpu-
blique de Bosnie-Herzégovineaprès le 20 décembre 1992, c'est-&-dire

aprésl'expiration de son second mandat consécutif,etaient réunies.
La disposiiion pertinente de la Constitutiode la Bosnie-Herzégovine
disposait que le {(mandat du président seraprorogé» en cas dc ({guerreou menace imminente de guerre». En d'autres termes, la survenance
d'une «guerre ou menace imminente de guerre» constituait le fondement
constitutionnel de la prorogation automatique du mandat du président
de la présidence.
La satisfaction de cette condition EX con.~~iluiioneimpliquait que la
décision relativeà l'existence d'une «guerre ou menace imminente de
guerre), soit prise par l'orgaiie compéientconformément la procédure
constitutionnelle élablie.
32, La présidencede la Rtpublique socialiste dc Bosnie-Herzégovine,
lors desa réunion du 8 avril 1992,a adoptéune «décisionsur la proclama-
tion d'une menace imminentedc guerre)) dans le territoire dla Bosnie-
Hcrzegovine.Cette décisiona été prisec ,ommeindiquédans le prkambule,

({conformémentaux dispositionsdes amendements LI et LXXIT ila
Constitution de la Rtpubliquc socialiste de Bosnie-Herzégovineet
surla proposition de l'Assembléede la Républiquesocialiste de Bos-

nie-Herzégovine».
Il ressort de cette indication:

a) que la «décision»a été prise sur la proposition de l'Assembléede la
Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovine;et
6) que la présidencea pris cette «décision)>sur la base des amendements
LI cl LXXII ri la Constitution de la Républiquesocialiste de Bosnie-

Herzégovine.
33. Les compétences de l'Assembléede la République socialiste de
Bosnie-Herzkgovineont été dtfinies par l'article314de la Constitution de

la Républiquesocialistede Bosnie-Herzégovine(voir ci-aprèspar.36). La
conclusion sans équivoquequi découledu texte de cet article est qu'il
n'entrait pasdans lesattributions de l'Assemblée de la République socia-
listede Bosnie-Herzégovine de présenter une proposition sur laprocla-
mation d'une menace irrirninentede guerre. L'article314aétémodifiépar
l'amendement LXXI adopté le 31 juillet 1990. Les dispositions de cet
amendement relatives aux compétencesde !'Assembléesiégea nten ses-
sion plénière,toutes chambres réunies,etaieni ainsi libellées:

((5. Les chambres de I'Assemblkede la Rép~ibliquesocialiste de
Bosnie-Herzégovine rCuniesen sçssion plénièrepeuvent:
- déciderde modifier la Constitution de la Républiquesocialistede

Bosnie-Herzégovine ;
- proclamcr la Constitution de laRépubliquesocialislede Bosnie-
Herzégovineet toute modification apportée icelle-ci;
- faire des proposiiions, exprimer des avis et approuver des modi-
fications la Constitution de la Républiquefkdérativesocialiste
de Yougoslavie;
- approuver des modifications des frontières de la Rtpublique
fédkrativesocialiste de Yougoslavie ; - se prononcer sur des modifications des frontières dc la Répu-
blique socialistede Bosnie-Herzégovine;
- examiner des questions de politique étrangère;

- se prononcersur la prorogation du mandat desdéputés a I'Assem-
bléede la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovineet des
édiles siégean atux assemblées descommuneset des municipalités;
- adopter le plan social de la Bosnie-Herzégovine,le budget et les
comptes définitifsdu budget de la Républiquesocialiste de Bos-
nie-Herzégovine ;
- organiser un référendum à l'kchelonde fa République;
- seprononwr sur l'émissiond'emprunts publics à l'échellede la
République ;
- seprononcer surles dettes ciautres obligations de la Républiquc;
- déciders'ilconvieilt de confier les affaires relevant de la compé-
tence de la Républiquei une communautémunicipale prise en

tant que communautésociopolitique distincte;
- élire etreleverde leursfonctions: leprésident etlevice-présidente
l'Assemblée de la Républiquesocialistede Bosnie-Herzégovinel;e
membre de la présidencede la Republique fédérativesocialisie
de Yougoslavie originaire de laRépubliquesocialiste de Bosnie-
Herzégovine; le président,le vice-présidentet les membres du
Gouvernementde la Républiquesocialistede Bosnie-Herzégovine;
le présidentet les juges de la Cour constitutionnelle de Bosnie-
Herzégovine;le prbident et les juges de la Cour suprêmede
Bosnie-Herzégovine;et le présidentet les membres des organes
de l'Assemblée de la Républiquesocialistede Bosnie-Herzigovine;
- élircet releverde leurs fonciions les membres de la délégation dc

l'Assembléede la Républiquesocialistedc Bosnie-Herzkgovine
la chambre des républiqueset des provinces de l'Assembléede la
Républiquefédérative socialistd ee Yougoslavie;
- nommer et releverde leursfonctions:lesministres,le gouverneur de
labanquenationalede Bosnie-Herzégovinlee,procureurde la Repu-
blique, l'avocat général dlaeRépublique etle secrétaire général de
I'hssernbli.de la Républiquesocialistede Bosnie-Herzégovine;
- adopter le reglement interieur de l'Assembléede la République
socialiste deBosnie-Herzégovine ;

Les chambres de l'Assembléede la Républiquesocialiste dc Bos-
nie-Herzégovinepeuvent décider d'examiner en session plénière
d'autres questions relevanl des attributions ordinaires de I'Assem-
blie de la Rkpubliyue socialiste de Bosnie-Herzégovine >)

Ainsi, la présentationd'une proposition tendant la proclamation d'une
{(menace de guerre imminente}) ne relevait pas de la compétence de

" Journalofi~relde In Képubiigiie.rocderBosnie-Hcrzigovbino21,du 31juillet
1990. APPI.ICATIONDE CONVENTION GÉNOCIDE (OP. nrss.KRE~) 701

l'Assembléede la Républiquesocialistedc Bosnie-Herzégovineen session
plénièreet n'&ait pas non plus envisagee dans la version modifiéede
l'article314de la Constitution de la Partie requérantç.A fortiori, elle ne
relevait pas non plus des compétences des chambres de l'Assemblée
siégeant individuellement.
34. Seul le texteconsolide de la Constitution de la Rkpublique de Bos-
nie-Herzégovinecontient une disposition selon laquelle l'Assembléede la
République deBosnie-Herzégovine,entre autres, <<déciddee la guerre et
dc la paix>>s1T.outefois, cette disposition ne peut êtreconsidéréecomme

periinente en I'espéce pour deux raisons principales. Premièrement,elle
constitue de par sa nature une revisionde la Constitution effectuéecontra
constitutionepnsous la formed'une consolidation du texte de la Constitu-
tion - donc, les arguments présenies ence qui concerne l'article 220 du
texte consolidéde la Constitution s'appliquent par analogie (voir ci-des-
sus par. 30).Deuxièmemerit,la Constitution consolidéede la République
de Bosnie-Herzégovine a étéadoptéeen fevrier 1993,c'est-A-direpresque
unan aprèsl'adoptionde la {(décision sur la proclamation d'unemenacede

guerre imminente», de telle sorte qu'en l'especeelle n'est pas pertinente.
35.Le prkambule de la «Décisionsur la proclamation d'une menace
imminente de guerre)}stipule, notamment, que la décisiona tté prise
<<conformkmcntaux dispositions des an~endernentsLI et LXXII de la
Constitution de la Républiquesocialistc de Bosnie-Herzkgovinen. Aux
termes de cette décision,donc, les amendements LI et LXXlI semblent
constituer un fondement constiiutionnel concret. Le contenu de l'amen-
dement LXXII ne peut guèreétrelie a la ({décisionsur la proclamation
d'une menace imminentede guerre», car cet amendement abroge en fait

l'amendement XVIl de la Constitution de la Republique socialiste de
Bosnie-Herzkgovineen cc qu'il stipule: «Les dispositions de l'arnende-
ment XVil de laConstitution de la République socialiste de Bosnie-
Herzégovinesur le Conseil de la Républiquesont caduques.»" Prima
fucie, il existe une relation entrl'amendement LI et la «Décisian sur la
proclamation d'une menace imminente de guerre)), puisque cet amen-
dement avait pour objet d'établirles compktencesde la présidencede la
Rkpublique socialiste de Bosnie-Herzégovine.L'amendement LI était
ainsi libellé:

«1. La présidencede la Rtpublique socialiste de Bosnie-Herzkgo-
vine :
1) représentela Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovine;
2) examine des questions relatives à la mise en Œuvre des poli-

tiques adaptéesen ce qui concerne la défensede tous les peuples, la
sûreti:de I'Etat, la protection socialeet la coopkration internationale
et elle propose à l'Assembléede la Républiquesocialiste de Bosnie-

Art~cle206, paragraphe5, tcxteconsolide.
82Journaloficiel de la RépublrocinlisdeBo.rnie-Heriigovinno21,du31~LIillet
1990. .-

APPL~CATION nE CONVENTION GBNOCID (EP.DIS~. KRECA) 702

Herzégovine,pour adoption, les mesures voulues pour mettre en
Œuvre ces politiquescl, en cas d'urgence empêchantou entravant
sérieusementla réalisationde l'ordre social prévupar la Constitu-

tion, propose à l'Assembléede la Républiquesocialiste de Bosnie-
Herzégovine,pour adoption, les mesures nkccssairespour faire face
aux troubles qui se produisent;
3)élaborele plan de défensede la Républiqueet fournit lesdirec-
tives voulues enconformitéavec la loi;
4) conformément aux décisionset propositions de l'Assembléede
la République socialistc de Bosnie-Herzégovine,examine des ques-
tions relativeà la participation de la Républiquesocialiste de Bos-
nie-Herzégovinea l'élaborationet à la mise en muvrede la politique
étrangère dela République fédkrativesocialiste de Yougoslavieà la
coopération entre la Republiquc ei les autres républiqueset pro-

vinces autonomes dans le domaine de la coopération internationale
dans le cadre de la politique étrangère dela Républiquefédérative
socialiste de Yougoslavieet des traitésinternationauci,sur la base
de consuliations prealübies au sein de la République, propose des
candidats pour occuper des postes de chef de mission diplomatique
el notifie ses propositions a cet eàla présidencede la République
fedérativesocialiste dc Yougoslavie el à l'Assembléede la Répu-
blique socialistedeBosnie-Merzégovinc;
5) propose, après consultations préalables au sein de la Répu-
blique, des candidatsaux postes de présidentet de juge de la Cour

constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine;
6) propose, aprks consultations préalablesau sein de la Répu-
blique, des candidats aux postesde membre du conseil de la Répu-
blique;
7) faides propositions pour les décorationsconférées par la pré-
sidence de 1ü République fédérative socialistede Yougoslavie et
confëre des dkorations ei autres marques d'honneur de la Répu-
blique conformément Bla loi;
8) accorde des grâcesaux dclinquants, conformémenta la loi;
9) adopte le règlementinlérieur dela présidence.^'^

Compte tenu des cornpetencesqui sont cellesde la présidencede la Répu-
blique socialistedeBosnie-Hcrtkgovine,primo fucie 'amendement LI ne
saurait en aucune manièreconstituer un fondement constitutionnel pos-
sible pour l'adoptionde la {<décisionsur la proclamation d'une menace
de guerre imminente)). L'amendement LI n'autorise aucunement la pré- ~
sidence iproclamer une menacede guerre imminente de sa propre initia-
tive ou sur la proposition d'un autre organe. En sonparagraphe 2, ledit

amendement définitles cornpetences de la présidence«en cas de circons-
tances extraordinaires empéchanlou entravant sérieusementla réalisa-

s3Journa!oficiel de la Ripbsocinlis(le Bornre-H~rzégotiD21,du kjuillet
1990.

El1 APPLICATIONDE CONVENTION GENOCIUE (OP. DISS. KRE~I) 703

tion de l'ordre social établipar la Constituti)),mais ces circonstances
ne sauraient inclure la proclamation d'une menace de guerre imminent.
D'unepari, l'expressionc<circonstancesextraordinaires)est beaucoup plus
largequel'expression«menacede guerre imminente ».Dans la terminologie
constitutioniaelleyougoslave, l'expression«circonstances extraordinaires))
dénote une situation provoquée parune catastrophe naturelle (l'arti364
de la Constitution dela Républiquesocialistede Bosnie-Herzkgovinecite,

parmi les «circonstances extraordinaires», des évknernentscomme «les
catastrophes naturelles, lesépidémie..»). Tous les pouvoirs relatifsun
étatde guerre ou A une menace deguerre imminente Ctaiententièrement
entre lesmains des organes fkdératix.D'autre part,mêmesi aux termes du
paragraphe 2 de ramendement LI la question d'une({menaceimminentede
guerre))relevait des compétencedse la présidence, procéduresuiviepour
adopter la «Décisionsur la proclamatiori d'une menace imminentede
guerre»ne peut êtreconsidérkeque comme inconstitutionnelledu point de
vue formel,car le paragraphe susviséde l'amendement LI donne rila pré-
sidence, en casde circonstances extraordinaires, le droit de ({proposeà
L'Assemblédee la Républiquesocialistede Bosnie-Herzégovine de prendre

lesmesures nécessairespour mettre finaux troubles>!.Ainsi, la présidence
n'étaitpas autoriséeà«prendrelesmesureznécessairespour meitre fin aux
rroubles~(lesitaliquessont de moi),mais seulementdeproposer ù I'Asserri-
blCeu'pprendre de trllcs mesures. Lesconditions préalablesune tell^pro-
cédureexistaient puisqu'ilressort du texte du préambulede la «dkcision)>
que l'Assemblée Stait en sessionlorsqu'ila étéproposéde proclamer une
menacede guerre imminente.
35. En conséquence,ttant donnéqu'aux termes de l'article358 de la
Constitution de Bosnie-Herzégovine tel que modifiépar I'ümendement LI
(par. 4, point 8)la prorogation automatique du mandat du président de la
présidenceétait constitutionnellement subordonnée à une «guerre ou
menace imminentede guerre» et qu'eu égard aux dispositions pertinentes
de l'article 314 de la Constitution de la Républiquesocialiste de Bosnie-

Herzégovinetel que modifiépar l'amendement LXXI et ]"amendementLI,
la ({Décision surla proclamation d'une menace imminente de guerre» a
étéadoptéeen violation de la Constitution par un organe non habilité A
l'adopter, le mandat de présidentde la présidencde M. Alija TzetbegoviC
n'a paspu ètreautomatiquement prorogéaprésle 20 décembre 1992.
37. La lettre adresséepar le premier ministre de Bosnie-Herzégovine
au Secrétaire général de l'organisation des Nations Unies le 1" mars
1993,c'est-à-dire vingt jours avantque M. Alija lzetbegovikn'ait donné
l'autorisa~iond'introduire une instance devant la Cour, est ainsi libellée:

«J'ai égalementfait savoirà la commission que fe mandat de prk-
sident de la présidencede M. Alija Izetbegovii:étaitvenu i expira-
tion. Cela montre bien qu'ilest nécessaireque la communautéinter-

nationale aide non seulementà protégerla souverainetéet l'intégrité
territorialee la Bosnie-Herzégovine, mais aussia veilleà ce que le
pays soit gouverne conformément à ses principes démocratiqueset constitutionnels. Je vous serais reconnaissant de faire distribuer la
présenteet son annexe comme documcnt de l'Assemblée générale au
titre du point143de l'ordre du jour, et du Conscil de sécurité.

L'annexede cette lettre estune «Lettre datcc du 24 février1933,adressie
au prksidentde la sous-commissiondes affaireseuropéennesde la commis-
sion dcs affairesétrangèresdu SCnatdes Etats-Unis d'Amériquepar lepre-
mier ministrc de Bosnie-Herzégovine »et se lit en partie comme suit:

«Je vous prie de noter par ailleurs que le mandat de présidentde
laprésidencede la République deBosnie-Herzégovinede M. Alija
IzetbegoviEest venu a expiration le 20 décembre 1992. Il n'a pas
actuellement le pouvoir constitutionnel d'agir en cette qualité.Seule
la présidencepeut, en vertu de la Constitution, invoquer lespouvoirs
d'urgence, et non pas le président de son propre chef, qui n'est que

primus inter paires. De mêmeque M. Silajdzii., M. Izetbegovii. ne
parle pas pour l'ensemblede la présidence ence qui concerne l'étape
aciuelledes pourparlcrs de paix Vance/Owen,mais en tant que l'un
des membres musulmans de la présidence. »85

A cet égard, M. R. Zacklin, directeur et adjoint du Secrétairegénéral
adjoint chargé du bureau des affairesjuridiques, dans une lettre adressée
au Greffier de la Cour internationale de Justice le 25 mars 1993, souli-
gnait notamment ce qui suit:

«M. lzetbegovit a participe au dkbat gCnéralde la dernièresession
de l'Assemblée gknéraleen qualitéde présidentde la Bosnie-Herzégo-
vineet aucune communicationn'a éié adressée depuis lorsà I'Organi-
sation des Nations Unies indiquant qu'il n'était plus président .

l'Organisationdes Nations Unieset à la conférence internationale sur
l'ex-Yougoslavie,M. Izetbegovii: a été considérket continue d'etre
considéré commlee prisident de la Bosnie-Herzégovine ».R"
Le fait qu'«[à] l'organisation des Nations Unies et a la conference

internationale sur l'ex-Yougoslavic, M. Izetbegovik a éiécoasidkré et
contrnued'ktre considéré comme Ie pré;iin%nr de lu Bosnie-Herzigovinm
peut-il modifier l'ordre juridique établipar la Consiitution de Bosnie-
Herzégovine?
On ne peut répondre à cctte question que par la négativecar, défaut,
on se trouverait dans la situation absurde d'attribuer a l'institution de la
reconnaissance, qui ES~ en pratique un acte éminemment politique,des
effets constitutionnels, le pouvoir de modificr l'organisation politique

interne d'un Etat. Une autre conclusion peut néanmoinsèlretirée - à

84DOC At4111899-Sl25350mars 1995.
85Ibrd,
intcrnationalede Justice,M.r,R. Zacklin, directeradjoint duSecretairgknéwlour
adjoinchar& du burcazidesaffairesjurididcel'Organisatides NationsUnies.savoir que la communauté internationale organiséedans le cadre de
l'organisation des Nations Unies a commis une erreur de droit (error
juri.71,h en juger d'aprèsle libellé dc la Iettresusmentionnée,en ce qui
concerne la nature de l'institution de chef de 1'Etatdans le systèmecons-
titutionnel de la Bosnie-Herzégovine.

38. A la lumièredes dispositionspertinentes du droit interne de la Bos-
nie-Herzégovine,il est évidentque M. Alija Izetbegovic n'était pasau
21 décembre1991constitutionneliernent habilité à agir en qualitéde pre-
sident de la présidencede la Bosnie-Herzégovine. La pertinence de ce fait
au regard du droit international ne peut êtreniée,étantdonriéqu'à mon
avis nous sommesen présence#un principe générad l e droit selon lequel:

«l'acte d'un agent de 1'Eratne peut juridiquement êtreimputé à
I'Etat s'ilne relevait pas de la compétencede cetagent. L'acte d'un
agent de 1'Etatincompétentn'est pas un acte de 1'Eiat.~~~

39. Ce principe général esa tussi &non& à l'article 8 de la convention
sur le droit des traiteés de1969.
Une mesure prise par un agent de I'Etat en dehors de sa sphère decom-

pétence estpar definition non avenue, et elle est limitéeau domaine des
faits car elle est dénuéed'effet juridique. A cet égard,I'observaiion ci-
aprèsqui figuredans le commentaire de l'article8 de la convention sur le
droit des traités s'appliquepar analogie :

{{lorsqu'unepersonne dcpourvue de toute compétence pour repré-
senter l'Etat à cette fin prétendneanmoins exprimer son consente-
ment Aêtreliéepar le traité, ..[il faut conclure] en droit que l'acte
n'étaitpas imputable à 1'Etat et que celui-ci ne pouvait donc pas
avoir manifeste un consentement qvelconqu~ ...l'acte non autorisé
d'un tel représentantest sans effet

TKOISIÈM EE CEPTION PR~&LIMINAIRE

40. Lesedes materiae de la troisièmeexception prériminaireest l'argument
selonlequel la souverainetéet Pindépendance de la Bosnie-Herzégovino ent
été proclamées illégalemee nt violation flagraniedu principe de l'égalitde
droitsdespeuples etdeleurdroit à disposerd'eux-memes;decefait, la Partie

requérante n'apu succéderàla convention surle génocidede 1948.
La Cour constate, tout simplement, que:
«la Bosnie-Herzégovine estdevenue Membre de l'organisation des
Nations Unies a la suite des décisionsprises le 22 mai 1992par le

dam Li'affaiCuire.1929,citdans Bin Cheng,GrnerulPrincîpleofrLawaasApplred by,
Internutitinul Couand Tribunais, 195p. 202.
ss Projetd'articlessur le desitraité, vec commentaires,adoptépar la Commis-
siondu droit internalioaasadix-huitièmsessionDocumentsoflrie1.dela confërence
desNations Uniessur le drudest~aitépremiéreet deuxièmesessioVnienne, 26 mars-
24 mai 1968et9 avril-2mai1969, p.13,par. 1. Conseil de sécuritéet l'Assembléegénkrüle,organescompktents en
vertu de la Charte)),

et elle indiqueque:

«l'article XI de la convention sur le génocideouvre celle-cà «tout
Membre des Nations Unies »; dèsson admission au sein dt IyOrga-
nisation, la Bosnie-Herzégovinepouvaii donc devenir partie itla
convention. Peu importent alors lescirconstances dans lesquelleselle
a accéde à l'independancc.~ (Paragraphe 19 de I'arrètde la Cour.)

A mon avis, la légalité de la naissance de la Bosnie-Herzégovineest
loin d'étreétablieau regard des réglesjuridiques applicables. Elle repose
implicitement sur la notion du prétendu {(processusdedissolution» de la
Yougoslavie, élaboré par la commission d'arbitrage de la conrerence sur
l'ex-Yougoslaviedans ses avis, qui n'est pas un terme juridique .~lriclo
sensu. Cette notion doit êtreconsidkriiecomme une métaphore dans le
cadre de laquelle un Etat est représentécomme une sorte de récipient

duquel la substance vitale s'échappepeu a peu et qui, par lavolontéd'un
crtateur imaginaire, seraipar transsubstantiation trünsforméeen nouvel
organisme étatique.
(Ceci est attesté de manière éloquentpar la position adoptéepar la
commission d'arbitrage en ce qui concerne la date de la succession
dYEtatdans le cas de la Yougoslavie. Dans son avis no 11,la commis-

sion a déclare:
«que les dales auxquelles les Elais issus de I'ancienrieRépublique
fédkrativesocialiste de Yougoslavie ont succédk celle-ci sont les
suivantes:
*
- le X octobre 1991 pour la République deCroatie et la Répu-
blique de Slovénie,
- le 17novembre 199 1pour l'ex-République yougoslave de Ma&-
daine,
- le 6 mars 1992 pour la République de Bosnie-Herzégovine»
(conférence internationale sur l'ex-Yougoslavie, commission
d'arbitrage, avisno 11,par. 10).

Ainsi, la commission affirmeque la successionest intervenuedans les
relations entrela République fkdérativesocialistede Yougoslavieen qua-
litéd'Eiat predécesseuret lesrépubliquesnouvellemenitndependantesen
qualitéd'Etats successeurs.En d'autres termes,ellene s'estpas produite
uno iclu;en fait, ce qu'on appelle succession esten réaliune sériede
successionsqui se sont produites l'une après l'autre entre le 8 octobre
1991et le 27 avril 1942.La successionde la Slovénieet de laCroatie n'a
pas détruitla personnalitéjuridique internationade la Républiquefédé-
rativesocialistedeYougoslavieen tant qu2Etatprédécesseur A. cuntrurio,
la Macédoinene pouvait seséparerde la Rtpublique fédérative socialiste
de Yougoslavieet succéder à celle-cidans le même temps.II en esr de

même de la Bosnie-H~rzégovinep ,arccque cette ex-entité fédérald e,e l'avisde la commission,a kgalementsuccidé6 la Républiquefédérative
socialiste de Yougoslavie. Cette approche de la commissionpourrait

s'expliquer raisonnablementpar cl'irtreracricomplexe enrre Ie.7clélihé-
rutionsde lucornmissiotadkrhitrugt.~t 1t.décisianspolrfiqireadesinstiru-
rionsh la Communauré europC.elanet de ses Elnts membre^. [inrerac-
rion] quie.~rt.murywable » (commissiond'arbiiragede la conférencesur
1Tex-Yougoslav ieavis sur desquestionsdécoulantde la dissolutionde la
Yougoslavie, note liminairede Maurizio Ragazzi, International Legul
Maîeri(~ls,1992,p. 1490).Compte tenu decequi précèdei,lexisteun lien
patent entre cette qualification etle contenu dearticle1a) du projet de
convention présenté par le prksidentde la conférence,aux termes duquel
({lesnouvelles relationsentre les ripubliques reposeront sur les élkments

suivants:a) statut de républiques souveraines et indépendantesdotées
d'une personnaliteinlernationalepour cellesqui le désirent,etc»)
Le fait qu'ilexiste un lien substantiet, de fait, causal entre la Iegalitt
de la naissanced'un Etat et le statut d'un Etat successeurdu point de vue
juridique estdc la plus haute importance (voir ci-aprèspar. 81-88}.

Pour parvenir ü uneconclusionsur le point de savoirsi la Bosnie-Nerzé-
govinea étécréée dans la légalitéi,l faut examiner tant les normes appli-
cablesdu droit international queledroit inlemede la Républiquefédérative
socialiste deYougoslavic.La pertinencedu droit interne de la République
fédérative socialistee Yougoslavie a cet égarddécourede la nature spéci-
fique, dans les Etats multiethniques,de la norme de l'égalitéde droits des
peuples et de:leur droitàdisposer d'eux-mêmes (vociir-aprespar. 44-46).

A. Periittence du droitinternufionalen ce qui concerne In naissance
de nouveauxErais
41. On cherche:souvent à répondre à cette question de la pertinencedu

droit international en choisissant entredeux qualifications qui s'excluent
rnutuellemcnt : lnaissance des Etats en tant quequestion de faitou en tant
que questionde droit. Aucune de ces qualifications,prises individuellement
et indépendamment de toute autre considération, ne correspond vraimen t
la réalité des chosecs,ar ellcsrelivent d'une simplificationabusiveet d'une
distinction insoutenable.La premièredonne penser que le droit interna-
tional est indifférent 1üquestion de la naissance des Etats, que ceux-ci
sont créés dans un videjuridique, une sorte de «terrain vague>> juridique,
par la libre interaction d'élémentsde puissanceet d'opportunité, Quant i
la seconde,elleréduitla naissance des Etats à des procédureslégalistes,i
la seule volontéd'un légisiateurinternational imaginaire, se matérialisani
sous la forme d'un Etat indépendammentdes processus sociauxexistant

dans la réalité. n dernièreanalyse, lapremikrequalificalionréduitle droit
international relatif la naissance desEtats à une rationalisationà pos-
teriori d'événemenq tsui sesont effectivementproduits etdonc à sa propre
négation, alorsque la seconde défend uneposition totalement opposée,
élevantle droit international au niveau d'un créateurde phénornknesso-
ciaux. APPLICATIONDE CONVENTION G~NOCIDE (OP.DISS. KRE~A) 708

Le vice fondamental que comporte le chox de l'une ou l'autre de ces
deux explications s'excluant muiuellement tient à la confusion des deux
dimensions que coinporte la naissance desEtats: la dimension sociopoli-
tique et la diiriensionjuridique. Tout comme il est incontestable que la
naissance desEtats estd'unpoint de vuesociopolitiqiiela résultantede pro-
cessussociauxréels,ilest aussiincontestablequ'ellea lieudans I'environne-
mentde lacommunauté internationale.Ainsi,le droit international ne peut
s'abstenirde réglementerunequestionaussicrucialede la vieinternationale.
C'est à juste titre que Shaw a fait observer que:

«la relation...entre lescritères factuelsetjuridiques est une relation
évolutivecruciale. Les questions de savoir si la naissance d'unnou-
vel Etat est d'abord une question de fait ou de droit et comment
l'interaction entre lesritèresde l'effectivitket les autres principes
juridiques pertinents peutétrcaccommodéesont des questions d'une
complexitéet d'une importance considérüble.uBS

42. Depuis qu'il existe,le droit intcrnational n'a jamais été ou n'a
jamais pu êtreindifférent àla question de la naissancedes Eiats.La subs-
tance et la nature de ces règlesont subi des modifications en fonction de
sondéveloppement.Grossomodo, lesrègles du droit international concer-
nant la naissance des Etats peuvent êtreregroupées en deuxcaikgorieç:

- lapremièrecomprendrait les règlesdu droit international définissant
1'Etatab intra, en tant que fait juridique au sein du systèmejuridique
international. En dkutres termes, ces règlesdu droit international
définissentce qu'est un Etat. Cette définitionmeme est statique et se
réduit à l'énumérationdes élémentsconstitutifs de 1'Etat. Dans

l'ensemble, elle estfondéesur le principe de l'effectivité et par ce
inoyen le droit international définit sens statique et catégorielde la
notion dYF,tat;
- la secondecatégoriecomprendrait les règledéfinissant1'Etatub extru,
du point de vue des autres règlespertinentes du droit international. Si
la définitionab insraprend comme point de départ1'Etaten tant que
phénomèneisoléet statique, la difiniiion uh extra place 1'Etatdans le
systèmedu droit international, liant sa naissance et son fonctionne-
ment au sein de la communautéinternationale 1i d'autres règlesjuri-
diques. En exprimant l'aspect dynamique d'une question concrète
concernant un Etat donnk, la notion d'Etat ab extra comprend, en
fait, des normes et des principes fondamentaux concernant la nais-

sance des Etats. Ces principes existent pratiquement depuis que le
droit international existe.a naissance des Etats, depuis le traite de
Westphalie (1648)'a été justifiéepar divers principescomme I'équi-
libre des puissances, la légitimitéet l'interprétation dela «Sainte-
Alliance», les compétencesquasi législatives dessuperpuissances, le

M. N. Shaw,JnrevnurionLm;, 2' td.1986,p.126 principe de la nationalite, et, au XXr siècle,le droit des peupleà dis-
poser d'eux-memes.On peut dire que ces principes découlent quant
au fond de la notion de légalité.

43. Il nefaut toutefois pas oublier quela nature de la notion de légalité
s'est modifiéeau fur et à mesure quele droit international s'estdéveloppé.
Cette notion était fondée, pendantune assezlongue période,sur descritires
subjectifs et rkducteurs, qui reconnaissaient, dans une communautéqui

toléraitle recours incontrôlé à la force et mêmea la guerre, la possession
d'un facteur législatif, n'entendanlta légalitéu'au sens formel du terme.
Déterminé au cas par cas, en fonctiondu respectde prescriptions formelles
et proctdurales, cette Iéigalie'étaitpas une légalitésrrrcrosensu, mesurée
au regard des normes d'un droit interne plus développém , ais plutôt une
décisionpolitique présentée souu sne forme plus acceptable.
La division hikrarchique du droit international en fonction de la valeur
juridique de ses normes est a la base d'un changement radical d'attitude
en ce qui concerne la question de la légalitéL . a division du droit inter-

national en droit «supérieur)>et <<inTkrieur » ouvcrt la voieà la concep-
tualisütion des normes impérativesdu droit international général(jus
cogens) aiix articles 53 et 64 de la convention de 1969sur le droit des
Iraites. Comme le déclareM. Ammoun dans son opinion individuelle
dans l'affairede la BarcelonaTracrion(deuxièmephase, 1970):

rrpar une pratique déji longue des Nations Unies, le concept dejus
cogens acquiert une plusgrande effectivité,sanctionnant, en tant que
norme impérativedu droit des gens, les principes figurant au fron-
tispice de la charte^^^.

Le jus cogens ouvre la voie ii une modification globale des relations
entre la souverainetédes Etats et l'ordre juridique international et a la
création de conditionspermettant à la réglede droit de prévaloirsur la
libre volontédes Etats.En tant que nome objective non réductrice,il
constitue une base pertinente, un critkre permettant de contester la léga-
lité d'actes individuclç au sein de la communauté internationale. En

conskquence, illimite fondamentalement l'impact de I'effectivitéen droit
international. Dans un systèmedans lequel la notion de légalité est défi-
nie, I'effectiviténe peutêtrejuridiquement acceptéeque dans les cas oh
elle n'estpas en conflit avec les normes qui servent de critèresde légalité.
Dans leslimitesde I'ordrede jure, opposer I'effectivitcila légalité est une
démarche incorrçctc, parce que acccpter I'effectivitf.en tant que règle

crreviendrüiten faitA saper les fondementsmgmesdu droit des gens
età couvrir de son autoritédouteuse une gamme infiniede faits illi-
cites internationaux et de méconnaissances d'obligationsinternatio-
nales>) 91

90C.1J. Recueil1970, p. 394
Y'J. H.W. Verzjil,Inîernuirunai inwHrs!orrculP~rsperlrvol.1, 1968,p.293. APPLICATION DE CONVENTIONG~NOCIDE (OP.DISS. KRECA) 710

44. La notion d'une légalité matérielleet homogène intervient inévita-
blement en ce qui concerne la naissance des Etats. C'est ce que donne h

penser une pratique internationale qui est encore insuffisamment déve-
loppéeet stabilisée.Prenons le cas de laRhodésiedu Sud. En I'occur-
rence, le criiérede I'effectivitbétaitpleinement satisfait, car le gouverne-
ment minoritaire blanc exerçait une autorité effective sur le territoire.
Mais, en dépit de cela, le Conseil de sécuritéde l'organisation des
Nations Unies a eslimk,dans sa résolution217du 20 novembre 1965,que
la déclaration d'indépendancne'avait({aucunevaliditélégale»et que l'indé-
pendance nationale avait étéproclaméepar des({autoritésillégales» C.ette
attitude eriversa Rhodésiedu Sud, qui,sur 1übasedu critèreab inrnrétait
sans aucun doute un Etai, était dictéepar l'intention {(depermettre au

peuplede Rhodésiedu Sud de déterminer sonpropre avenir conformément
aux objectifs de la résolution 1514 (XV) de l'Assembléegénérale))de
1960". La résolution1514du 14décembre1960de I'Assemblkegtnérale
des Nations Unies, intitulée ({Déclaration sur l'octro de l'indépendance
aux pays et aux peuplescoloniaux~> stipulait notamment que:

({Tous lespeuplesont ledroit de disposerd'eux-mEmes.En vertu de
cedroit, ils déterminent librement leurstatut politique et poursuivent
librement leur développement économiques ,ocialet culturel.(Par.2.)
Aussi, la pratique des Etats confirmait que

(<Dansle cas d'une entitéentendant devenir un Elat et acceptée
par la communauté internationale comme habilitée A exercer son
droitA I'autodk~esmination,ilpeut trksbienêtrenicessaire de démon-
trer que les prescriptions internes du principe n'ont pas été mécon-
nues.On ne pcut définir cettecondition trop rigoureusement compte
tenu de la pratique des Etats i ce jour, niais il semblerait que l'on
puisse affirmer qu'une discrimination systématiqueet institutionna-

liséepeut faire échecà une revendication de la qualitéd'Etat.~~~
Toutefois, on irait trop loin en affirmant que l'introduction de la notion
de légalitémattrielle a réalisé une unificatiharmonieuse des définitions
de I'Etal ab inlruet ab exfra. Cela n'a pas été possible en raison de la
carencc institutionnelle chronique de l'ordre international qui, s'exerçant

dans l'environnementd'une communautéau premier chef politique - ce
qu'est virtuellementla communautéinternationale -, amène souvent la
politique à prévaloirsur le droit. D'ou l'écartexistant entre droit inter-
national etordreintcrnütional, puisque les normes n'ont pas toujours été
appliquées commeelles auraient dû l'btre eu égard à leur contenu, mais
plus ou moins sous l'influenced'opinions politiques, non juridiques. Jest
indiscutable que la réalisation de l'harmonie susmentionnée constitue
non seulement un objectif maisaussi une condition de l'établissementde
l'ordre international en tant qu'ordre djure dans ce contexte particulier.

-
92Résolut~on217(1965)du Conscil dc sicuriti., 20 no1965.par.7
93M N. Shaw,op ci?,p.132. B. La ligralitt dlaproc!~mudiun de 1'indkpendunce
de !a Bosnie-Herzégc~via au regard du droil inferne de la Rgpublique
fedkrulivesocicl/istede Yougoslavie

1. Pertinence du droit internede la Rgpuhliquefédgrulivesocialiste de
Yougoslavieen I'csp2ce

45. La norme juridique internationale originelle qu'est le droit des
peuples à disposer d'eux-mêmes està la fois incomplèteet imparfaite, au
moins en ce qui concerne les sujets ayant droit a l'autodétermination
dans lesEtats multiethniques et l'exercicepar ceux-cide ce droàtl'auto-
détermination externelorsque cet exerciceporte atteintea l'intégritter-
ritoriale d'un Etat. Etant incomplète,cette norme est à certains égards
inapplicable à certaines situations concrètes et constitue une sorte de
structurenormative décorativeet vide. Les entitésintkresséesl'invoquent
souvent,mais elle ne peut opérerque hors de la sphèrejuridique, en tant
que façade commode d'une stratégieéminemment politique,reposant sur
l'opportunitéet l'équilibre des puissances.
Cela &nt, il faut considérer ledroit à l'autodétermination externe

dans les Etats composés de plus d'un peuple commeune norme complexe
comprenant deux parties: d'une part, la norme juridique internationale
originelledudroit despeuples à l'autadéterrninationexterne et, de l'autre,
les élémentspertinents du droit interne de 1'Etat en cause. Dans ce
contexte, la norme juridique internationale originellejoue le rôle d'une
norme généraleet permissive, qui assume un caractére opérationnel et
peut devenir opéranteau cas où le droit interne d'un Etat multieihnique
a prévule droit l'autodéterminationexterne, s'ilhabiliteà l'exerceret
dkfinit les modalitésde son exercice. En d'autres termes, les dispositions
pertinentes du droit interne sontans chaque cas partie intégrante de la
norme du droit des peuples à l'autodétermination externe.Ce n'est que
de cetternanikreque la normejuridique internationale originelleprimai~e
du droit A I'autodetermination externe devient applicable au niveau du
postulat foi~damental de la primaute du droit.
La nécessitéd'une tellerelaiian entre droit international et droit interne
esta juste titre soulignéeparce qui sui:
{{Pourque la primauté dudroit régissela vie internationale, elle
' doitenglober une vaste gamme d'opérationsde plus en plus com-
plexesqui sont régiesen partie par le droit international et en partie
par le droit interne.11est donc important que lesjuridictions et les

tribunaux internationaux soientà même,lorsqu'ils statuent surdes
opérations internationalescomplexes,d'appliquer simultanémentles
principles etrkgles pertinents du droit internalional et les disposi-
tions du systkme de droit interne qui peuvent êtreapplicables à
l'opérationen cause ...L'une desfanctions essentiellesdu droit inler-
national et de l'organisation internationale est de promouvoir l'état
dedroit à I'intCrieurdes nationet entre elles,car ce n'est que sla
base de l'ktat de droità l'intérieurdes nations que l'étatde droit entre les nations peut se développeret êtregaranti. LESjuridictions
et lestribunaux internationaux peuvent contribuer ice résultatplus
efficacementsi Ilmesure dans laquelle l'interprétationet l'applica-
tion du droit interne dans le cadre de leurs activitksest un corollaire

normal et nécessaire du règlerncntjudiciaire international d'opera-
tions complexes est mieux comprise. »94
Libérédu manichéismeet du fardeau pesant de la controverse théorique
entre dualisme et monisme, le droit international positif s'est résolument

engagt sur cette voie. On peut citer une longue liste de réglesdu droit
internationül positif qui reposent sur une symbioseentre une norme inter-
nationale contenant des référenceesxpresseset implicitesau droit interne
etles normes correspondantes de ce droit interne. A titre d'exemple,
l'article6 de la convention de 1969 sur le droit des traités dispose
qu'un Etat peut invoquer le fait que son consentement a êtreliépar un
traite a été exprimeen violation d'une disposition de son droit interne
concernant la compétencepour conclure des traitéssi «cette violation a

étémanifeste et concerilait une rigle de son droit interne d'importance
fondamentalen. On peut citer aussi le droit de la mer, dans le cadre
duquel la protection et la préservationdu milieu marin sont entikement
réglementées sur labase d'une symbiose entre le droit international et les
droits internes. Par exemple, l'artic207: paragraphe 1(«Pollution d'ori-
gine tellurique») de la convention sur le droit de la mer dispose:

«Les Etats adoptent des lois ct règlementspour prkvenir, réduire
et maîtriser la pollution du milieu marin d'origine tellurique ...en
tenant compte des rkgles et des normes, ainsi que des pratiques ei
procéduresrecommandkes, internationalemen t convenues.»

Lii pratique diplomatique des Etats trouve égalementdans le droit
interneun critérede la validité des actesinternationaux. On peut men-
tionner la pratique des Etats-Unisd'Amérique inauguree par le prksident
Wilson instaurant un nouveau critèrede <cconstitutionna!ite>rq,ui fait de
l'«arrivke au pouvoir>>d'un nouveau gouvernement par des moyens

constitutionnels une condition préalable 5 la reconnaissance de: ce:gou-
vernement par Ics Etats-Unisg5.
46. Ainsi, en la présente affaire,il ne s'agit pas d'un conflit entre une
norme du droit intcrnational et une norme du droit interne, un type
d'affaire dont ont eu à connaître plusieurs tribunaux internationaux
(«Cummunaufks >s grtco-bulgares, C. P.I.J. série B no 17, p. 32 ;Zones
ji.ancher de Haute-Savoie PIdu Puys de Gex, C.P.I.J. sérieA no 22,
p. 167; Traitementdes nationaux pulonuis et au6respersonnes d'origine

ou de languepolonaises dans le rerrilnire de Duntzig, C.P.I.J. sérieA/B
no 44, p. 241,mais de l'application d'une norme internationale de struc-
ture contplcxe, à savoir une norme qui englobe des normes de droit

Y4C. WilfredJenkç,Thi~Pru~pectacfInrernrirr/~udicarion,1964.p. 547
Y5 hl. Whiieman, Drg~iqiJInrernur~o~lw,vol 2,p 69interne relatives il'autodttermination externe. d'estimequ'en la prksente

affaire le raisonnement de la Cour dans l'affaire relativeauxEmprunts
brési/ens (1929) est pertinent.
Dans cette affaire, la Cour a notamment fait observer:
«La Cour étantarrivéei la conclusion qu'ily a lieu d'appliquer le
droit interne d'un pays déterminéi,lne sembleguéredouteux qu'elle
doit s'efforcerde l'appliquer comme on l'appliquerait dans ledit

pays. Ce ne serait pas appliquer un droit interne que de l'appliquer
d'une manitiredifférentede celledont il serait appliquédans le pays
ou il est en vigueur.
11s'ensuitque la Cour doit tenir le plus grand compte de la juris-
prudence nationale, car c'est A l'aide de cette jurisprudence qu'elle
pourra determiner quelles sont vraiment les règlesqui, en fait, sont
appliquées dans le pays dont le droit est reconnu applicslble en
l'espèce.Si la Cour étaitmise dans la nécessité de faire abstraction
de la jurisprudence, le résultaten serait qu'elle pourrait éventuelle-
ment appliquer d'autres règlesque celles effectivementappliquées;
cela semblerait alleà l'encontrede l'idéemêmequi est ;ila base de
l'application du droit interne.

Sans doute, la Cour apprécieralibrement la jurisprudence natio-
nale.Si celle-ciest incertainou partagée,il appartiendra h la Cour
de choisir l'interprétationqu'ellecroit êtrela plus conformeiila loi.
Mais 11ne serait pas conforme A la fonction qu'exerce la Cour
lorsqu'elleapplique une loi nationale que de l'obliger faire abstrac-
tion de la jurisprudence»96

2. Conception con.siitutionnei!e deI'Etut yougoslave et d~ iuBosnie-
Herz&govincet1 Eantqu'en fitfkderule

47. Pour mieux faire comprendre la conception constitutionnelle de
l'Etat yougoslaveet de I'entitkfédéralequ'étaitla Bosnie-Herzkgovine,je
me référerai a certaines dispositions des coiistitutions de I'Etat yougo-

slave qui donnent une idte de la nature de cet Etat et, plus précisément,
du statut des peuples qu'ilrassemblait.
48. La prernikreconstitution de I'Etat yougoslave, la Constitution du
Royaume des Serbes, Croates et Slovknes, promulguéele 28juin 1921,
définissaitleRoyaume comme riun Etat de Serbes, Croates et Slovènes,
monarchie héréditaire,constitutionnelle et parlementaire. Son nom offi-
cielest: Royaume des Serbes,Croates etSlovknes>).Selon l'article3, (<la
langue officielledu Royaume est le serbe-croate-slovene».

49. La Constitution du Royaume de Yougoslavie du 3 septembre 1931
n'enindiquait pas nommémentlespeuples constitutifs. Iln'était question

" 6.P.J 1.sérieA nu21, p. 124. -

APPLICATIONDE CONVENTION G~NOCIDE (OP. DISS.KRECA) 714

de ceux-cique de manièreindirecte, par exemple àl'article3 qui disposait
que «la langue officielledu Royaume [est] le serbe-croate-slovène)).

50. La résolutionorganisant la Yougoslavie selon le principe fkdéral,
approuvéele 29 novembre 1943 la deuxième conférence du conseil anti-
fasciste de la libérationnationale de la Yougoslavie, contenait notam-
ment cette disposition :

<<En vertu du droit qu 'a chaquepeuple de disposer de lui-même,
y compris Ie droi~de .F.séparerdhautrespeupl~s ou de s'uniravec
eux ..le conseil antifasciste de la libération nationalede la Yougo-
slavie adopte la présente

RÉSOLUTION
.*...,..._.........,.._......
2) Pour donner effet au principe de la souverainetédes peuplesde
Yougoslavie, ..la Yougoslavie est et sera édifiée selon le principe
fédératifqui garantit la pleine égalitédes Serbes, Croates, Slovenes,
Macéduloaienesr Morzténigrins, cést-&dire des peuples de S~rbie,

Croatie, Slovfpiie, Macédoine, Monrénkgro et Bosnie-Nerzkgo-
vin.e.»97
51. La première constitution de la Yougoslavie fédérative,celle de

1946,définiien cestermes en soliarticle premier la Républiquefédérative
populaire de Yougoslavie:
«Etat fédéralpopulaire à forrnc républicaine, communauté de
peuples égaux en droits qui, en vertu du droit des peuples à disposer

d'eux-mêmes, y compris celui de sécession,ont décide devivre unis
dans 1'Etatfédéra p.
52. La deuxièmeconstitution, celle de 1963, dkfinit la Fédérationen

ces lemes:
<(Etat fkdéralde peuples égauxlibrement unis,communautédémo-
cratique socialiste fondke sur le pouvoir des travailleurs et l'autono-
inie politique.»

La Consiitution de la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovinedc
1963dispose notamment dans ses «Principes fondamentaux » :

«Liésdans toute lcur histoire commune par leur coexistence, leurs
aspirations et leur combat pour ln libertéet le progres social, les
Serbes, lesMusulmans et lesCroates, surmontant lesentreprises des
puissancesétrangkreset des forces réactionnaireslocales, sesont ras-
sembléspour la prernikrefois dans la liberté,l'égalitéet la fraternité,
dans le cadre de leur république,qui est devenue la forme sociopo-

litique dans laquelle sesont incarnéeslcur unitéet leur égalité et par

" Rtsotutionportant coiistitution dc la Yougoselonleprincipefédkratif,Journul
officitde 10F~dérr~liyougusluae,n"111945(les italiques sont de moi).

123 lcur tjgalitk avec lautres peupi~s de Yougoslavie, avec Iesquelsils
ont volontairement fbrmé unEtut communsur la base du droitù dis-
poser de mi-mêmr,y compris lcdroit dese eéprarerlesuns des uuire.7:
la République fedérative populaire de Yougoslavie garantit ainsi la
pleineégalitéet l'existencedes conditions d'undéveloppementnatio-
nal généralet du progrès culturelet matérielsur la voie d'une trans-
formation socialiste globale>>(Lesitaliques sont de moi.)

A l'article premier, la Bosnie-Herzégovine est qualifiéede crcomrnunauté
socialiste démocratiqueconstituéed'un Etat des peuples de Bosnie-Her-
zégovine,fondée surlepouvoir des travailleurs et l'autonomie politique».
53.La Constitution de la Républiqucfédérative socialiste de Yougo-
slavie de 1974 commence par l'exposéde ({Principes fondamentaux)),
dont le chapitrc1se lisait comme suit:

«Partant du droit de chaque peuple i !'autodéterminatio~iy, com-
pris le droit à la sécession,en vertu de leur volonté librement
expriméedans la lutte commune de toutes lesnations et nationalités
au cours de la guerre de libkratjon nationale et de la révolution
socialiste.,.ont crééune communautéfedérative socialistede tra-
vailleurs- la Républiquefédérative socialiste de Yougoslavie ..»

Le chapitre VI1 de ces «Principes fondamentaux>>déclarenotamment
que la Republique fédérative socialistd ee Yougoslavie reconnaît:
<<- ledroit qu'achaquepeuplede définiret d'édifiersonpropre ordre
social etpolitiquepdr des voiesetmoyens librement choisis;

- le droit des peuples à disposer d'eux-mêmeset ;iaccéder à
l'indépendancenationale, le droit de mener une guerre de libe-
ration pourréaliser ces fins;
- le devoir de respecter lesrèglesde droit international gknérale-
ment reconnues».
Dans le corps de ses dispositions, la Constitution définitla République

fëdérativesocialiste de Yougoslavie de la manièresuivante :
<<unEtat fédéra l communautéétatique de nations librementunies
etde leurs républiques socialistes..fondéesur lepouvoir et l'auto-
gestion de la classe ouvrièreet de tous les travailleurs,el commu-
nautédémocratiqueautogestionnaire socialistede travailleurs et de
citoyens, de nations et dc nationalitéségales endroits» (article pre-
mier de la Constitution).

54. La Constitution de 1974 de la République socialiste de Bosnie-
Herzégovine dispose en son article premier:

<<La République socialiste de Bosnie-Herzkgovine est un Etat
démocratique socialiste et une communauté démocratique prüti-
quant l'autogestion socialiste,qui est composéedc travailleurs et de
citoyens,des peuples de Bosnie-Herzégovine - MnasultnunsS ,erbes
ei Ci=oarc s et de personnes appartenant à d'autres peuples et nationalitésqui y viventct elleestfondéesur le pouvoir etl'autoges-
tion dela classe ouvrièreet de tous les travailleurs ainsi que sur lu
souverralnettet Iëgalitk desclroirdes peuple^de Bosnie-Herzégovine
et des personnes d%utres peuples et nationalitésqui y vivent.

La République socialistede Bosnie-Herzégovine faitpartie inté-
grante de la Rtpublique fédêrative socialistd ee Yougoslavie. » (Les
italiques sont de moi.)
1 L'article 2 de la Constitution est ainsi conçu:
({Lestravailleurs ci lescitoyens, lespeupks de Bosnie-Herzégovine

- Serbes, Croates et Musulrnan.~ - et les personnes appartenant a
d'autres peuples et nationalitésexercenf leurs d~oifssouverainsdans
lu R6publique sucialiste clrBosnie-Herzégovine,a l'exception des
droits qui, dans l'intérêctornmurides travailleurs et des citoyens, des
peuples et des nationalités,sont mis en Œuvredans la RCpubligue
fkdérativesocialiste de Yougoslavie cn vertu de sa constituiion.~
(Les italiques sont de moi.)
11es1 dit notamment dans le préambule que:
1
{(les peuples de Bosnie-Herzégovine - Musuiinuns, Serbes et
Crorrres...ainsi que les ouvriers et autres travailleurs et citoyens,
les peuples et lesnationalités des autres républiques socialisteset
des provinces socialistes autonomes de la République fédérative
socialiste de Yougoslavie ont obtenu des succèsmarquants sur ...la
voie ...de J'unitéet de l'égalii..»
et plus loin que:
I
«l'ordre social et politique de la Bosnie-Herzégovineest fondésur
les principes consacrésdans EaConstitution de la Républiquefédé-
rative socialiste de Yougoslavie par les peuples et lesnationalités et
les travailleurse Yougoslavie».
IIest dit dansles «Principes fondamentaux» de laConstitution que:

<<Les peuplrs de Busaie-Herzkgovine - Serbes, Musulmans et
Croate5 ...et les autres peuples et nationalités de Yougoslavie ...
exerpmt leur droitde disposer d'eux-mêmes, y ccomprisle droit de
fuirr sécession,se sont volontairement réunisen un Etat commun -
luR6publiqueJedératisv ociulisfe de Yougoslavie, el se sont ainsi
assuréles conditions de leur pleine égalitéet d'un développement
national généra.l..» (Chap. 1.)
Le chapitre Il desmemes «Principes fondamentaux »dispose notamment
que:

cles peuples de Busnie-Herzigovine - Croates, Serbes el Musul-
munset lesmembres des autres peuples et nationalités - exerceront
darasIEcadre de IuRépublique soçiafisiede Bosnie-H~rzegovine,en
tant qu'Etat et communautc autogérée, leurs droits souverains et
feront valoir leurs intérêtse classe et leurinrkrélsnationaux>> (les
italiques sont de moi).1 11est précise. articuliérernentque:
«Inspirépar les principes...du respect de la libertéet deI'indé-
pendance des peuples, dc la coexistence pacifique active,de I'ouver-

ture au monde et du développement nécessaire d'une cooperation
internationale gknerale, la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégo-
vine participerü, sur un pied d'égaliavec les autres républiqueset
provinces autonomes, 6 l'exercicede la politique étrangérede la
République fkdérativesocialisie de Yougoslavie.» (<Principes fon-
damentaux~, chap. X.)
Le 31 juillet 1490, l'Assembléede la République socialiste de Bosnie-
Herzégovinea adopté les amendements LIX a LXXX rila Constitution
de la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovine(Journalofficielde la
Republique.sociulistede Bosnie-Herzégovine, no 21, 31juillet 1990). Le

texte de l'amendement LX, qui se substitue au paragraphe I de l'article
premier de la Constitution de la Republique socialiste deosnic-Herzé-
govine, se lit comme suit:
«1. La Republique socialiste de Bosnie-Herzégovineest un Etal
souveuain démacra tique composk ,ans 1%alité, des cifoyen.9,JP.S
peup1et.se Bosnic el d'Herzégovine - desMusulmans, des Serbes,
des Croates, ainsi que des autres peuples et nationalités qui vivent
dans la République. »

I L'amendement LI dispose que
«Une représentationpropor~ionnelleestgarantie A tous lespeuples
et i toutes les nationalités dans les assemblées descommunautés
sociopolitiques, dans les organes élupar celles-cala prksidencede
la République socialiste de Bosnie-Herzkgovineet dans les autres

organes de 1'Etat.»(Le texte de l'amendement s'ajoute l'articl3.)
Le paragraphe 10de l'amendement LXX est ainsi conçu:
I <(L'Assembléd ee la Ripublique socialiste de Bosnie-Herzégovine

crkera un conseil chargéde réglerla question de l'égalidespeuples
et des nationalitésde Bosnie-Herzégovine. Les membres du conseil
seront choisis parmi lesdéputésmembres des nations de Bosnie-
Herzégovine - Musulmans, Serbes et Croates - en proportions
égales,et d'un certainnombre de membres choisisparmi lesdkputks
des autres peupleset nationalités ouautres populations qui viventen
Bosnie-Herzégovine.Le conseil prendra su de'çisiopar consensus
des représentantsde toutes les natiuns et nationalités. Le conseil
débattraparticulièrementdes quesrions liéesà I'égalitdes langues et
des alphabets, a I'organisation et aux activités desinstitutions cultu-
relles ayant une importance particulièrepour l'expression etI'affir-
mation des particularitésdes divers peuples et des diverses nationa-
lités,et lapromulgafiondes règlementsdapplicution desdisposiiions
consiifulio~lnellfixon fexpressémentles principes de l'&alité des
peuples et des nationalité>i(Les italiques sont de moi.) APPLlCATlON DE CONVENTIONGENOCIDE (OP. DISS. KRECA) 18
l
55. 11est un fait depuis toujours indéniable,que l'on retrouve sous
tous leschangements, fort variés,qu'a connus 1'Etatyougoslave depuis sa
créationen 1918 et qui a étéi;mplicitementou explicitement, àla base dc
toutes les configurations const~tutionnellde lYEtat.csuvoir que lu You-
goslavie aioujuurJsétC e=ser?tiellernen,epuissu anissunce, uie cornmu-
nuurk de peuples.
Ce qui a changé,c'est le nombre de peuples constitutifs de 1'Etat.Au
moment de sa crfation, en 1918,InYougoslavie étaitune communauté de
trois peuples: les Serbes, les Croates et les Slovènes.La Constitution

fédéralede 1946 a reconnu la qualité depeuple constitutif aux Macédo-
nienset aux Monténégrins,considérésjusque-là commd ees «fractions de
l'entitknationale serbe». Enfin1ü Constitution de 1963a fait figurer les
Musulmans parmi les peuples constitutifs.
56.Depuis la constitution en fkdérationdc 1'Eiat yougoslave, cette
consrunie udominé iota/ernr.net surzsuucme t-csfrictionIkntitéfédkrale
qu'duit lu Bo~nic-Herzégovine. C'estlà l'originedu qudlificaiirdt(petite
Yougoslavie», quelque peu littéraire mais largement ernployk A l'endroit
de la Bosnie-Herzégovine, où les traits essentiels de la Fédérationyou-
goslave sont reproduits dans un cadre exigu.
La Yougoslavie fédératives'est rormee, aux termes de la résolution
prise, en 1943,par la deuxièmeconférence duconseil antifasciste de libé-
ration nationale de la Yougoslavie, en tant que communautéde peuples
souverains etégaux,des initiatives constitutionnelles devant par la suite
institueres rcpubliques en entitésfkdérales.Ainsidonc, comme lesautres

républiques,la Bosnie-Herzégovineest officiellementnée de la Constitu-
tion de 1946 - sans compter que des autorités provisoires avaient étk
mises en place dèsl'adoption de la résolutionportant créationde 1'Etat
fédératifde Yougoslavie.
Aux termes de la Constitution fédérale de 1946et de sa propre consti-
tution promulguéela mèmeannée,la Bosnie-Herzégovinea vu lejour en
tantqu'Etat des peuples serbeset croates. Les Musulmans ont participé i
la formation de la Fédérationyougoslave et A cellede la Bosnie-Herzé-
govine elle-même,en tant que parrie intégrante des peuples serbes ou
croates,ou, pour être plus précis, entant que SerbesOU Croates de reli-
gion musulmane, et non en tantque peuple constitutif doté du droit de
disposerde lui-même.
57. Les solutions constitutionnelles retenues en 1963 ont modifiéle
statut constitutionnel des Musulmans pour en faire un peuple constitutif.
Par suite de ce changement, la Bosnie-Herzkgovineest définiedans la
Constitution dela République de1953comme un Etat forméde (<l'union
démocratiquesocialiste des peuples de Bosnie-Herzégovine ...»Les prin-

cipes fondamentaux de la Constitution qualifient de peuples de Bosnie-
Herzégovine>> ,les Serbes, les Musulmans et les Croates». Les regle-
rnents constitutionnels de 1974ont conservé auxMusulmans ce statut.
Autrement dit, les Musulmans ont été transformée sn nation constitu-
tivea posteriori, par l'exercicedu droit Al'autodéterminationdes Serbes
et des Croates, aprèsformation de la Bosnie-Herzégovineentant qu'entitéde la Fédérationyougoslave. Cette circonstance a-t-elle un effet sur
l'étendueet la nature des droits des Musulmans en tant que nation cons-
titutive? On ne peut que répondrepar la négative.Ayant acquis la qualité
de nation constitutive, les Musulmans sont entrésen possession de droits
absolument égauxau mêmetitre que les Serbes et les Croates de Bosnie-

Herzégovine. Lapleine égalité des droits des peuples constitutifs n'a cessé
d'être confirmédeans tous les textes constitutionnels ultérieurs, ceuxde la
Fédérationcomme ceux de la Bosnie-Herzégovine,de 1946 à 1974.Cette
confirmation s'exprime non seulementpar l'emploi de termes correspon-
dants («le droit de chaque peuple)), «pleine égalité)), ((souveraineté et
égalitédes peuples» à titre d'exemple), mais encore par l'inversion de
l'ordre dans lequel les peuples sont cités - considération particulière-
ment significativedans les constitutions de la Bosnie-Herzégovine - qui
tend à bien marquer, tant par le fond que par la manièrede s'exprimer, la
pleine égalité des peuplesconstitutifs. En termes concrets, cette égalité
renvoie, de manière à la fois explicite et implicite, au droit qu'a «chaque
nation de disposer d'elle-mêmey , compris le droit de se séparer d'autres
nations ou de s'unir à elles)).

58. A considérer lesdivers choix constitutionnels - et lapratiquejuri-
diqueet polirique qui ena découlé - qui ont amené ù quulifierla Bosnie-
Herzégovinedefédérationde nations, le conceprsui generis defédération
de personnes étaitcelui qui se rapproche leplus de la réalitéde la situa-
tion. Cette façon de voir les choses était corroboréepar plusieurs élé-
ments factuels d'importance fondamentale.
En premier lieu, du point de vue du droit comme du point de vue des
faits, la Bosnie-Herzégovineétaitune communauté de trois peuples. La
Républiquede Bosnie-Herzégovinen'étaitpas, à la différencedes autres
républiques yougoslaves, une formeauthentique, originelle, de la person-
nalitéd'Etat de la Yougoslavie, elle a étécrééeà posteriori a titre de sub-
division administrativeet territoriale interne de I'Etat, dans la phase fédé-

rale de l'existence de celui-ci.Ratione valorem, la Bosnie-Herzégovine
n'étaitpas seulement formée,elle fonctionnait aussi, sur le plan politique
et sur le plan juridique, comme une communautéde peuples. On en don-
nera pour preuve la composition des organes directeurs de la République
socialiste de Bosnie-Herzégovine.La question des cadres dirigeants de
celle-ciétaitrégléepar le ((pacte social relatàfla politique du personnel
en Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovine~~~A . u paragraphe 3 de
l'article 7 de ce pacte, les signataires se sont engagàgarantir:

«la représentation proportionnée et adéquate des peuples et des
nationalités aux assemblées descommunautés sociopolitiques, des
institutions publiques et des organes des formations sociopolitiques
de la République,et l'électionaux charges publiques, pour un man-
dat de un ou deux ans, de candidats choisis parmi tous les peuples)).

98Journalofficiel de lu Républiquesociuliste de Bosnie-Herno34, du 8 no-
vembre1982.

128 AI'PLICAI'IODE CONVENTIONGENOCIDE (01'. UISS. KRE~A) 720

Cette solution avait aussi sa sanction légale.Le paragraphe a) de I'ar-
ticl170 de la loi relative aux amendements et aux modifications de la loi
sur l'administrationpubliq~c~~prévoyaitque

<<ledirecteur d'une administration publique et son adjoint peuvent
étrtdémisde leurs fonctions avant la finde leur mandat dans le cas
où l'exigentles critèresd'éligibilitendant à assurer la reprtscnta-
tion équitabledes peuples ...de Bosnie-Herzégovinedans l'adminis-
trationde 1'Etatet la mise en Œuvrede la politique du personnel)).

Le paragraphe a) de I'arlicle 175 de cette loi contient une disposition
analogue concernant les hautes fonctions politiques.
Onest uinsiurn~n.Pù ronclureque,d'unpointde vue ppkknomknologique,
lu Bosnie-Herzkgovine n'@toit une entiti jZde'rale qu'en uppurrnce et

qu'elle éiair,dans son essmce et dans sa réalitématérielle,!'union des
peupies qui kaconstituaient.
En deuxitme lieu, Io Constidutionde 1974 de lu Ripuhlique fédémliw
~ocialislpde Yougoslnvie et lu Constitution de lu République.suciuli,~ee
Bosnie-Herzégovinepromulguéelu même unnée déjnisj.uientle droit a
I'nutodéterrninutioncornme un droir rles pcuple.~suhjecrifet colleci$
Cette disposition étaitreprise des constitutions antérieures.Elle répind
la naturemernede la situation. Le sujet investdu droità disposer de

lui-meme est, par définition,un peuple. Mais le fait que le droitdispo-
serde soi-même soit exercé sur un ceriain territoire est touàfait diffé-
rent du fiditque, dans le cas d'une communautémultinationale disposant
d'un territoire, lesconséquencesde l'exercicee ce droit sont elles-mêmes
territorialiskes.n règlegknkrale,le droit a l'autodéterminationet I'exis-
tence d'un territoire se superposent dans le cas d'une communauté
monoethnique; ainsi les formulations qui reconnaissent le droit à une
entité territorialene sont qu'une commodité delangage. Mais dans le cas
de communautés muliieihniques, composéesde peuples dotésde droits
cgriux, leterritoire n'est que lechamp matériel de l'exercicede droits

égaux à l'autodétermination.
En troisikn~clieu, la Bosnie-Herzégovine, en mnf yu 'entitéfédkrale,
iz'avnitpas/ribénkjcedudmit d J'mtocieterrnjnnii17n,ctirnpriledroirde
sécession.
En quatriémelieu, iu Bo~nre-Hcrzkgovine ne possérduinf onplus aucun
clersaldributcluss'iquede I'Eîat qui cnracdérisentcirnritésfkdkralcs des
jEdkrcrrionsmodernes.Bien qu'ellefût «un élémenc tonstitutif de la fkdé-
ration)},la Bosnie-Herzégovine,commed'autres entitésfédéralesr ,épon-
dait siune conception constitutionnelle et juridique particulière dans le
fédéralisme yougoslave. A partir de 1963,ellea présenléunedichotomie:

d'un c6tk elle étaitdotCe des pouvoirs qui caractkrisent la plupart des
entités fédérales desfédérationscontemporaines; de l'autre colt,elle

O9Journalofficielde luRipublique ruciulbrede Bosnie-Her, Q10,du 28 mars
1991. AI'PLICAI'IODE CDWEIENTION GÉNOCIDE (OP. DISS. KRECA) 721

représentaitune communauté démocratiquesocialiste auiogérée detra-
vailleurs et de citoyens - les peuples de Bosnie-Hcrzegovine (Musul-

mans, Serbes, Croates) et les membres des autres peuples ou nationalités
vivant sur le territoire- fondéesur le pouvoir-et l'autogestion de la
classe ouvrière et de tous les travailleurs ainsi que sur la souverainetéet
l'égalité dedsroits des peuples de Bosnie-Herzégovine(article premier de
la Constitution de 1974de la RkpubIique socialiste de Bosnie-Herzégo-
vine). Cette dichotomie de la personrialiiéde la Bosnie-Herzégovinedans
l'appareil constitutior~rielde la Yougoslavie résulted'un sous-eniendu
idéologiquefondamental qui postule que I'Etat, crkütion de classe,cst un
phénomkne historique passager, incompatible avec la société socialistet
par conséquent voué i disparaître. «Désétatisation»étaitle maître mot
de la philosophie constitutionnelle de la Yougoslavie après l'érectionde
l'autogestion en micanisrne organisateur de la société: lasociete contre

I'Etat, tel étaitle parti pris politique fondamental qui s'imposait rnérne
dans la sphère du droit. La <<déstialisation)> a donné naissance à la
notion de {{travailleurset peuples)),de telle sorte que le fédéralisme,ç-
sant d'être«gouvernemental » est devenu «sociopolitique ». Le jeu entre
ces deux aspects antagonistes de la Bosnie-Herzégovinefaisait la part
belle à l'aspect ({communautéautogérke». C'est ce que font clairement
apparaître le statut constitutionnele i'autogestioncl l'appropriation par
la sociétéq,uien dkcoule,des moyens de production, fondement des rela-
tions sociales (chapitre II des «Principes fondamentaux» de la Constitu-
tion de 1974de la Républiquesocialistede Bosnie-Herzégovine). Ainsil,a
Bosnie-Herzégovine elle-mêmé etait définie comme la «communauté
démocratiquepratiquant I'autogestion socialiste» (article premier de la
Constitution de 19741,et l'Assembléecomme «un organe d'autogestion

socialisteet l'organe délibérant suprêm deans le domaine des droits et des
obligations de la communautésociopalitique» (art. 136).
Le fait que la Bosnie-Herzégovineétaitessentiellemcni une commu-
nautk de peuples s'est trouve confirmé dans le «texte consolidén de la
Constitution de Bosnie-Herzégovine,paru en mars 1993,après la procla-
mation de l'indépendance ei de la souverainetéde cette entitéfédkrale,et
confirméencore i t'écheloninternational par une séried'instruments. La
Républiquede Bosnie-Herzégovine est défini e l'article premier de ce
«tcxtc consolidé»comme un <cEtat souverain indépendant ...des peuples
de Bosnie-Herzégovine - Musulmans, Serbes, Croates et membres des
autres peuples qui viventsur leterritoire».Pour comprendre le sens exact
de cette formule, il faut la rapprocher de la disposition interprétativede
l'article69 (<<Dispositionsfinales transitoireO), ainsi libdlé:

«Le terme de «membres des auires peuples qui vivent dans la
République»et le terme de «membres des autres peuples qui vivent
sur le territoire)) utilists dans la Constitution visent les nationalités
minoritaires de la Bosnie-Herzégovine )

Letexteconstitutionnel susmentionnépriservaitlescaractéristiquesessen-
tielles que présentaitla Bosnie-Herzégovine en tant que fridérationper-sonnelle. TIy étaitprécisé, sulra base du principe de l'«égalitdes peuples
de Bosnie-Herzégovine)}, que :

«Dans les assemblées descommunautéssociopolitiques el dans les
orgünes qu'elles élisentila présidencede la Républiquede Bosnie-
Herzégovine, unereprésentation proportionnelle est garantie aux
peuples de Bosnie-Herzégovine etaux autres peuples qui vivent sur
le territoire.loo

Tous les projets de structure constitutionnelle proposks pour la Bosnie-
Herzégovineau cours des negociations visant ütrouver une solution poli-
tique au conflit cn Bosnie-Herzégovineprennent pour point de départ
une Bosnie-Herzégovine qualifié de:communautk de peuples.
Le projet de {(Structure constilulionnelle proposée pour la Boçnie-

Hcrzégovinej> présentépar les coprésidentsle 27octobre 1992(dit «plan
Vance-Owen») et approuvéexpressémentle 16 novembre par le Conseil
de sécurité(résolution 787 (1992), par. 1j, prévoyait notamment que :
«C. Le fait qu'il existetrois grands groupes c<ethniques»(nationauxlreli-
gieux}ainsi qu'un groupe «divers>>doit être reconnudans la Constitu-
tion.» 'O'L'article premierdu chapitre premier de 1'«Accord constitution-
nel relatif l'union desRépubiiquesde Bosnie-Herzégovine» présentp ear

lescoprkçidentsOwen et Stoltenberg en septembre 1993disposait que:
«l'union des Républiques deBosnie-Herzégovineest composée de
trois républiques constitutiveset comprend trois peuples consrilu-
tifs: les Musulmans, les Serbes et les Croates, ainsi qu'un groupe

d'autres peuples» 'O2.
Le priambule de l'annexe 4 des accords de Dayton qualifie ccles
Bosniaques, les Croates et les Serbes» dc <(peuples constitutifs»
(A1501740-Sl19951999 p,.54).On peut donc conclure que le fait que la

Bosnie-Herzégovine est essentiellement une communautéde peuples est
reconnu sur le plan international.

3. La proclumafionde la Bosnie-Herzégovine en tant qnr'Efat,souverain

54. Dans la partie de son mémoirequi porte le titre :«Le statut inter-
national de la Bosnie-Herzégovine»,cca) Le prétendu défautde qualitk
d'Etat de la Bosnie-Herzégovine)>l,e demandeur résume cn ces termes sa
position sur la question:

ciLa commission d'arbitrage a constatél'existence desprincipaux
élkmentsa cet égarddans son avis no 11du 16juillet 1993:

1" Paragraphe13 de l'articldu texteconsoliddela Constitutiondla République
de Bosnic-Herzégovine
(S124795).rtdu Secrétairgénkralsurlaconfereiiceinternationalesur i'ex-Yougoslavie
'O2DUCS1263371Add1 .,app. 1. {(parun référendumtenu les 29 révrieret 1"'mars 1992,la majo-

rité dela population de cette républiques'estprononcéeen faveur
d'une Bosniesouveraine et indépendante,Les résultatsde ce réfé-
rendum ont étéproclamésofficiellement le 6 mars et, quels que
soient les événements dramatiques qui ont affectédepuis lors la
Bosnie-Herzégovine,lesautoritésconstitutionnelles de cette repu-
blique se sont, depuis cette date, cornportkes comme celles d'un
Etat souverain en vue de maintenir son intégrité territorialeet la
plknitude et I'exclusivitede leurs compétences.» 'O3

60. Pour Etreparfaite sur le plan juridique, la proclamationde la sou-
verainetéet de l'indépendance dela Bosnie-Herzégovineaurait dû, en
droit yougoslave interne, rêpondre a deux conditions:
primo, que le droit yougoslave ait prévule droit de sécessiondes eniités

fédtrale;
s~cundo,que les procédures fixéesdans le droit ei la Constitution aient
étésuivies, car:
«Que la fédérationsescinde endeux Eiais ou davantage fait aussi
passer au premier plan leproblkme thkorique de l'autodétermination
sous forme de sécession.Cette dissolurion peut Etrele résultatd'un

iiccord amiable constitutionnel, ou le résultatd'un acte de sécession
par la force. Dans ce dernier cas, les réglesdu droit international
peuvent êtreinvoquées mais,hormis les cas de sujétion coloniale
reconnue, ilsemble qu'il n'y ait pas de droii 5 l'autodétermination
qui s'applique a des Etats indépendants etjustifie qu'ils recourentà
la sécession. 'O4

61. Ilest indubitablequelesentitésfédéraley sougoslavesn'avaientpas le
droit de sécession(jus secessionis). Le droit de disposerde soi-memeétait
absolument réservé aux nations constitutives(voir ci-dessuspar.48-56).
Les dispositions de la Constitution de la Républiquefkdkrativesocia-
listedeYougoslavierelativesà l'autodétermination externepermetten dtecon-
clure que le droià l'autodétermination externe avait éptéleinementexercé.
Pour commencer, «le droit de disposer de soi-méme,y compris ledroit
de fairesec es si on,^taitexpriméautemps passédans laConstitution de
la Républiquefédérative socialiste de Yougoslavie, comme dans toutes
lesconstitutions prkcédentcs de la Yougoslavie fédéraleA . ce moment-la,
le passage qui en traitait étaitsituédans les «Principes fondamentaux»
de laConstitution et lecorps du textede celle-ci n'endisait rien. Enfinni

la Constitution ni la loi ne prévoyaientde procédurepour l'exercicedu
droit de disposer de soi-mème. En d'autres termes, les nations constitu-
tives de la Yougoslavie avalent exerci. leur droit itl'autodétermination
externe au moment où s'ttait forméela Yougoslavie fédéraleA . yant
décidé de coexister dans un Etat commun, elles avaient épuisé ce droit

'O3Memoire,par,4.2.1.10.
1-9M N Shaw, InlernarionalLa1986,p 139. APPLICATION DE CONVENTION GENOCIDE (OP. DISS. KRE~A) 724

qui, dès lors,constituait le fondement juridique de l'existencedecei Eiai
commun - son validusrirul -usmais non un droit vivant, actuel, que
I l'on pouvait invoquer à son gré.Celane signifiepas pour aulant quela
question du droit a l'autodétermination externeait étérésoluepour de

bon. Elle aurait pu, comme d'autres problkmes, Etre redéfiniedans les
procédures constiiuiionnelles garanties.
La Cour consiitutionnelle de Yougoslavie, organe principal qui veillait
iila constitutionnalit6 et a la légalidu dispositif constitutionnel de la
Républiquefedérativesocialistede Yougoslavie, a soulignédans sa déci-
sion 1U no 108/1-91(Journalqfficielde IraRkpublique,fëdirative socklisie
dg Yougusluïie, no 83/91)que :

<<cedroit [de disposer de soi-mFmc,y compris le droit de faire seces-
sion]ne peut s'exercer~UP danslesconditinnset selon les?nodalirisqui
seront dkteiminEer colilformkmml à /u Cunslirution de 10Republique
fédéralivesociulistede Yuiagoslavieî au droit deypeuples de disposer
d'eux-m&rnesy, ycunzpri-I7a'roide fairseécession- envertu d'un acte

public promulgué par I'Açsembleed:e la Republique fédérative socia-
liste de Yougoslavie ou d'un accord intervenu entre les peuples de
Yougoslavieet leurs républiques >(les italiquessont de moi).
C'est ainsi,i la lumikrc dcs dispositions de la Constitution de 1aRépu-
blique fkdérativesocialistede Yougoslavie, qu'ilfaut lire l'arrêtrendu par

la Cour constitutionnelle yougoslave selon lequel:
«tout acte parlequel une républiquese déclareraitEtat souverain et
indépendant constitue une modification non constitutionnelle de
l'organisationde 1'Etatyougoslave, c'est-à-dire un acte de skcession

auqucl la décisionde la Cour constitutionnelle de Yougoslavie ôte
tout effetjuridique»IO5.
Il était proposéde résoudre Pacontroverse que soulevait l'exercice du
droit A I'autodktermination externe con~titnaiioneorris, c'est-à-direpar
voie dc reviçion constitutionnelle, dans les «Principes d'organisation de

1'Etatfuturproposépar le groupe de travail des reprksentants de toutes
lesrtpubliques pour servir de base aux pourparlers à venir entre le pré-
sident de laRepublique et la présidencede I'Etat».
Ce texte, qui part du postulat que:
«La communautéd'Etat yougoslave, considbée comme un Etat

fédéradle citoyens kgaux et de peuples égauxet de leurs républiqucs
[ennote :Kasim Trnka, Bosnie-Herzégovine,propose de nommer les
républiquesen premier] etcomme un Etat démocratique,sera fondée
sur les droits civilset les lib~rtésfondameniales, l'empiredu droiet
la justice sociale>),

'O5Réponsede la Cour constitutionnelle yougàsla question poséepar lord Car-
rington sur le point de savoir s'il s'agissaiten l'esplcc d'unc dissolution ou d'une séces-
sion;cile par la commission d'nrbitragc dc la conférenceinternationalesurl'ex-Yougo-
slavic,noSU365'91.1 APPLICATION DE CONVENTIONGENOCIDE (OP. DISS. KRECA) 725

présenteune parrie intitulée{{Projetde procédurede:dissociation de la
Yougoslavie » qui se lit comme suit:
«Les initiativesprises par certainesrépubliques pourfaire sécession
de la Yougoslavie,c'est-a-direpour se (<dissocier>u pays, et Iapres-
sante volonté générad l'apporter une solutionpacifique,démocratique

et constitutionnellea la crise constitutionnelle, soulèventla question
des procéduresselon lesquellesces initiativespourraient seconcrétiser.
Ces initiatives ont pour objet le retrait de certaines républiquesde
la République fëdérativesocialiste de Yougoslavie. Ellex .~lrppuient
.~ur le drnifpermranenf el imprescr ipfible de,s pt~upleÙ disposer
d'eux-mêmee st rlevraienierrerigiespar la Constirution.
Le droit des peuples i disposer d'eux-mémes,qui fait partie des
droits universelsen droit moderne, figure parmi les principes fonda-
mentaux de la Constitution de la Républiquefédérative socialistede
You -sl la vie.
:Pourtonr, i'e.~~rciccfu ifrroides peuples de luire skce=~sion ,ui
comporte le droit pour certaines rkpubbliquesde .sedissocier de la
Républiqujekdkrative soci~ii~~idreYougoslavie, n'es[pus rkglernenlé

par la Consrirutionde celle-ci. Ijufaudonc amender cette Consiltu-
rionafw 11) créerle5fonn'emenfsde i'cxercicede ce droit,
La revision en ce sens de la Constitution de la Républiquefédéra-
tive socialiste de Yougoslavie devrait êtrefondée sur le processus
démocratique d'expression des idées, l'égalitédes nations yougo-
slaves, la protection des libertésfondamentales et des droits civils
et de l'homme, et le principe du règlement pacifique des différends.
Conformément 5 ce qui précède,il conviendrait d'apporter a la
Constitution de la République fédérative socialistd ee Yougoslavie
tels amendements qui fixeraient d'une maniere générale la procédure
d'exercicedu droit des peuples de faire secessionet, ainsi, du retrait
de certaines républiques de la République fkdérativesocialiste de
Yougoslavie.

Les amendements à la Constitution de la Républiquefkdérative
socialiste de Yougoslavie devraient fixer les dispositions suivantes:
1. Le droit d'une républiquede prendre l'initiativde se retirede
la République fédérütivesocialiste dc Yougoslavie est dévolu à
l'assembléede la republique considérée, saufsi la constitution de
cette républiquecn dispose autrement.
2. Le sort de cettc initiative est rép:ar référendum, avecgaran-
tie de participation libre,irecte et secrktede tous lescitoyens de la
république.

3. Au cours dcs préparatirs du référendum,les populations et
l'électoratseront informés objectivementet en tempsutile de l'impor-
tance et des conséquences du référendum.
4. Le réfkrendumsera contrble par dcs représentants deI'Assem-
bléeyougoslave et,si possible, par des représentantsdes autres répu-
bliques et des institutions internationales compétentes. 5. Une décisionest rkputéeprise si plus dela moitié des&lecteurs
inscrits votent en sa faveur.
6. Drrns ie.7rk~nibiiqusù risirdendesmembresdeplusieursnations
yo~gosiaves~ la wojorilé est calculéeskparkmenrpour chacunedes
nations.SI une nation vote contre,IOU~L es ~ocuiiréOU cellenurion
est prépondéranie et quisotil limitrophedu reste du territoireyougrr-
slave el perdvens'irrtég~ed su masse terrirorialcunlinuenl defaire
parlie deIQ République jkdérnfivesociulisrede Yuugosluvie.

7. Sile résultatdu référendumesi négatif,la mêmeinitiative peut
êtrereprise à I'expiraiion d'un délaide cinq ans.
8. L'asscmblte de la république informera les populations et
l'Assembléeyougoslave des résultatsdu référendumet prksentera à
l'Assemblée yougoslave uneproposition d'acte constitutionnel de
retraitde la républiqueconsidérée dela Républiquefédérative socia-
liste de Yougoslavie, conformément à la volontéexpriméepar le
peuple à l'occasiondu référendum.
9. L'Assemblée yougoslave reconnaît la légalitCIla légitimitéde
la ~olontéexpriméepar le peuple et les membres des nations et

donne pour instructions: au gouvernement fédéralde prkparer le
retrait formel de la républiqueconsidérée de la République fédéra-
tive socialistede Yougoslavie.
A cette fin, le gouvernement féderala l'obligation de:

uJ rédigerun projet de répariiiion des intérêts et des biens com-
muns de la Fkderation (meubles et immeubles) situésdans le
pays età l'étrangeret officiellementréputéspropriétéde la Fédé-
ration; des obligations et des créancesinternationales; des biens
de la banque nationale de Yougoslavie; des devises étrangéres,
des marchandises et des réservesmonétaires dela Fédération;
des biens de l'armée populaire yougoslave;des archives de la
Yougoslavie; de certains ouvrages d'infrastructure, des droits de
licence et autres,etdes obligations découlant des conventions
internationales ratifiées.Dans ce projet, le gouvernement fédéral
règle égalemeni les questions de citoyenneté, de pensions de
retraite, de droitsvils eautres problémes du meme:ordre. Cela
implique la reconnaissance d'une responsabilitécommune dans

les obligations etles assurances par lesquelles la Rkpublique
fédérative socialisee Yougoslavie estliée à des pays étrangers;
bJ proposer l'Assemblée yougoslaveles modalitésd'électionet le
mandat de l'organe ou comitéparitaire qui sera chargé deredi-
ger un projetde répartitiondes droits etdes obligations et de le
présenter àl'Assembléeyougoslave;
c) proposer la dklimitation des territoires et la démarcation des
frontières des futurs Etats et la solution des autres grands pro-
blémessoulevéspar l'acte formel de retrait.

10. Au vu des propositions du gouvernement fédéralconcernant
les problèmesmatérielset territoriaux, l'Assembléeyougoslave éla- hPPLICAT\ON DE CONVENTION GÉNOCIDE (OP.DISS .RE~A) 727

bore avec l'assentiment des assemblées républicainesun amende-
ment constitutionnel (loi constitutionnelle) portant acte de sécession
de la République fédérative socialistede Yougoslavie; cet amende-
ment règle,entre autres questions:

- le droit des citoyens de choisir librement (conditions et modalités
de l'expression du choix des citoyens en cas de changement ter-
ritorial) et l'obligation d'accorder une justeréparation en cas de
changement de résidence;
- l'obligation de garantir la protection de la justice aux citoyens,
personnes morales et membres de certaines nations (réparation

pour les préjudices qui résultent directementde la réalisationdu
droit de sécession,etc.);
- l'obligation de mettre certaines lois et actes publics en confor-
mité avec lastructure de la République fédérative socialistede
Yougoslavie telle que modifiée;
- la surveillance et le contrôle de I'accomplissement d'obligations
déterminées ;
- les autres questions qui doivent êtrerésoluesavant la dissocia-

tion définitive(concernant notamment l'appareil judiciaire, la
protection de l'environnement, les coentreprises, etc.);
- la périodede transition et le moment exact de la séparation. »lo6

Mais il se trouve que la Bosnie-Herzégovinen'apas accepté l'optionpro-
posée,comme l'attestent clairement les arrangements pris par le référen-
dum sur une «Bosnie souveraine et indépendante».
62. La proclamation d'une «Bosnie souveraine et indépendante))avait
deux aspects qui se composaient de deux décisions, selon le para-
graphe 4.2.1.10 du mémoire:

1) un référendum tenule 29 févrieret le 1" mars 1992,àl'issueduquel la
majoritéde la population de la Républiques'est prononcée enfaveur
d'une Bosnie souveraine et indépendante;
2) la proclamation officielledes résultatsdu référendumle 6 mars 1992.
La souverainetéet l'indépendancede la Bosnie ont pris effet à cette
date, étant donnéque, selon la Bosnie-Herzégovine:

«Quels que soient lesévénements dramatiques qui ont affecté la
Bosnie-Herzégovine,lesautorités constitutionnellesdecette Répu-
blique se sont, depuis cette dute, comportées comme celles d'un
Etat souverain en vue de maintenir l'intégritéterritoriale de la

République etla plénitudeet I'exclusivitéde leurs pouvoirs. »(Les
italiques sont de moi.)
Si I'on interprète correctement la déclaration que I'on vient de citer, on

est amené a conclure que la Bosnie-Herzégovinea étéconstituéeen ((Bos-

'O6FOCUS numkrospkial, janvier1992,p. 31-33.nie souveraineet indépendante» i la date de la proclamation des résultats
du référendum. En d'autres termes, la proclamation de ces résultatsavaii
un effet constirutif, créateurd'Etat.

63. La question poséeau reférendumdu 29 fkvrieret du 1"'mars était
la suivante:

«Etes-vous en faveur d'une Bosnie-Herzégovinesouveraine et
indépendante,Etat de citoyens égaux,des peuples de Bosnie-Herzé-
govine - Musulmans, Serbes et Croates et des membres des autres
peuples qui vivent sur le territoire4?»

Le référendum a été organisépour rtdeierminerle statut de la Bosnie-Her-
zégovine~.La décision d'y procédera étéprise en vertu de l'article 152
de la Constitution de la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovine,

de la disposition 5, ligne 9, de l'amendement LXXI A la Constitution
de la République socialiste de Bosnie-Herzégovinect des dispositions
des articles3 et 26 de la loi sur Feréférendum'O7.
11 est indubitableA la Lumièrede cequi prbcéde,que l'Assembléede la
Rkpublique socialistede Bosnie-Herzégovineavait le pouvoir de:procéder
A LITIréférendum,tant un riférendum préliminaire,c'est-A-direun rkfé-
rendlim pour une consultation préliminaire,qu'un référendumultérieur
pour confirmation des textes législatifs, réglementairest autres.

64. Mais on peut se demander si l'Assembléede la Rkpublique socia-
listede Bosnie-Herzégovineavait Icdroit d'organiser un reférendumpour
déterminerle statut de la Bosnie-Herzégovine.
Prenant pour point de départ la disposition d'ordre généralvoulant
que «l'Assembléede la Républiqiie socialiste de Bosnie-Herzégovine
exerce ses droits et ses responsabilitéssur la base et dans le cadre de la
Constitution et de la loin et dans le respect de la rkglequi régitlesrap-
ports entre la Constitution et la loi, tournons-nous maintenant vers l'ar-

ticle 314 de la Constitutionde la Républiquesocialiste de Bosnie-I-ierzé-
govine qui prkcise les cornpetences de I'Assemblkede la Républiqu~:
«L'Assemblée de la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovine:

1) se prononce sur la modification de la Constitution de la Répu-
blique; si la Constituiion de la République fédérativs eocialiste de
Yougoslavic est modifiée,fait une proposition, émet un avis ou
donne son assentiment;
2) déterminela politique de la Rkpubliquc et rkglelesautres ques-
tions fondamentales intéressantle développementpolitique, écono-
mique, socialet çulturcl de celle-ci;

3) examine les problkmes d'intérêc tommun des organisations de
travailleurs, organismes autogéréset communautés et harmonise

'O7JouvnnlofjîcieiIn RPpub~blisociulisirlr Rcisnici-Herzégo,"' 291197et
24f1991.
IUXArticle313 de la Constitution de la Republiquesocialiste de Bosnie-Herztgovine. APPLlCATlON DE CONVENTIONGÉNOCIDE (OP. DISS.KRECA) 729

leurs relations et leurs intérêts; encouragela conclusion d'accords
d'autogestion et de pactes sociaux;
4) examine les problèmes que: présentent la politique étrangéreet

lesrelations internationales; approuve la négociationde traitésinter-
nationaux dans les cas prévuspar la Constitution de la République
fédérative socialistede Yougoslavie;
5) détermine lesort des propositions, ou approuve les arrange-
ments concernant les dispositions que l'Assembléede la République
fédérative socialistede Yougoslavie doit prendre A propos d'une
proposition d'accord des assemblées desrépubliques;
6) adopte le plan socialde la Bosnie-Herzégovine, le budgetde la
République, le bilanet la répartition générale des ressources de la
Républiqueet le plan d'aménagementdu territoire de la Bosnie-Her-

zégovine; adopte leslois, règlementset autres décisians publiquesde
portée généralep ;ublic les interprttations définitives des loisde la
République;
7) seprononce sur la modification des frontièresde la République;
8) déterminele systèmede dtfense nationale de la Ripublique;
9) accorde l'amnistie pour les infractions prévuespar la loi;

10) décidede l'endettement de la République et deses emprunts
publics ;
11) créeles organisations de travailleurs;
12) organise lesréférendumsrépublicüinç;

13) détermine lamise en application des lois, règlementset autres
décisions publiques de la Rkpublique et les obligations des organes
et organisations de la République, ainsique de la mise enapplication
des lois de la République etde la Fédération ;
14) assure le contrdle politique des décisionsdu conseil exécutifet
des organes d'autoritéde la Républiqueet de celles de leurs subdi-
visions politiques et donne des orientatioris gtnérales; assure le
contrôle politique des titulaires des chargespubliques et autres fonc-
tions sociales qui sont responsables devant elle;
15) se saisit des avis et des propositionsde la Cour consiitution-
nellt de Bosnie-Herzégovinequi ont trait A la protection des prin-

cipes constitutionnels et de la légalité;
16) se saisit des rapports de l'appareiljudiciaire de la République
relatifsà l'application des loiset aux résultatsobtenus et, publie des
notes de principe sur ces rapports;
17) veilleiil'ordre public;
18) élitet destituele présidentct les membres de la présidencede
la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovineet le membre de la
présidencede la République fédérative socisrlisiede Yougoslavie qui
la représente;
19) élitet destitue la délégation del'assembléeAla chambre des

républiqueset des provinces de l'Assemblée de la Républiquefédé-
rative socialisie:de Yougoslavie; 20) élitet destitue son présidentet son vice-président, ainsique les
membres de ses commissions, comiies et autres organes;

21) élitet destitue leprésidentet les membres du conscil exécutif,
le présidentet les juges de la Cour constitutionnelle de Bosnie-Her-
zégovine,le président et les juges de la Cour suprême deBosnie-

Herzégovine ci des autres tribunaux désignés par la loi ainsi que les
membres du Conseil de la République;
22) nomme ei destitue les secrétairesde la Républiqueet autres
responsables des organes etorganismes d'autoritéde la République
qui agissent dans les domaines de compétence dela République; le
procureur social de la République pour l'autogestion, son secrétaire
génkralet ses secrétaires,Ic procureurde la République,le gouver-
neur de la banque nationale de Bosnie-Herzégovineet les fonction-
naires de celle-ci,les membres desorganes directeurs et administra-
tifs désignes cette fin par la Constitution et palaloi;
23) décide de la prorogation du mandai des représentants des
communautés sociopolitigues aux organes délibérants;
24) assume toute aulre fonction que prévoitla Constitulion.

L'Assernblécpeut adopter des déclarations,des résolutionset des
recommandations. »

Le paragraphe 12de l'article 134de la Constiiution, qui donne a 1'Assem-
blie le droit d'<<organiserun réftrendum~ signifieque l'Assembléepeut
procéderpar voie de réfkrendurnpour trancher les questions relevant de
sescompétences.Cette interprétations'imposesil'on seréfkreau texte de
la loisur le référendum,qui préciseque «l'Assembléede la République
socialistede Bosnie-Herzégovinepeut organiser un référendumsur les
questions relevant de ses compétences» (art. 26).La manière dont la
question proposte au référendum a été formulé meontre clairement qu'il
s'agissaitde mod~$er le statut de la Bosnie-Herzégovirie en termes de
droit public. L'objet du référendum étaid te faire de la Bosnie-Herzégo-
vine,entitCfédérale de la Fédérationyougoslave,une (<Bosniesouveraine
etindépendante»,pour reprendre la formule employée. Sinon,le reféren-
dum n'avait aucun sens, puisque certains attributs de 1'Etat propres au
modkle fediral yougoslave avaient dejh ktéreconnus à la Bosnie-Herzk-
govine au morncnt du référendum.
Lü question poséeavait pour but, sur le plan juridique purement for-
mel, de déterminerle statut de la Bosnie-Herzégovine endroit public,ce

qui étaitdonc el1contradiction àla fois avecla Constitution de la Bosnie-
Herzégovirie et avec celle de Ia Républiquefédkrativesocialiste deYou-
goslavie. Pour êtreplus précis,la Constitution de la Bosnie-Herzégovine
prévoit au paragraphe 2 de son article premier que la Republique fait
partie de la Republique fédtrativesocialistede Yougoslavie. La Constitu-
iion de celle-cidéfinitla Fédérationcomme <<unEtat fédéral ..de repu-
bliyues socialistes»(art. l), au nombre desquelles figurela Republique de
Bosnie-Herzégovine(art. 5,par. 11etprevoit que «la frontikredela Répu- APPLICAïiON DE CONVENTIONG~NOCIDE (OP. DISS. KRECA) 731

blique fédérativesocialiste de Yougoslavie ne peut etremodifiéesans le
consentement de toutes les républiques»(art. 5, par. 3). 11va sans dire

que, du point de vue constitutionnel, le simple fait d'organiser un réfk-
rendum sur le statuit de la Bosnie-Herzkgovineétait une menace pour
l'intégritéterritoriale de la République fédérativs eocialiste de Yougo-
slavie, garantie par la Constitution de celle-ci et, plus prkcisément,un
acte incriminépar le code pénal yougoslave.
La proclamation de l'indépendanceet de la souveraineté dela Bosnie-
Herzégovine surla base des résultatsdu référendumconstituait en elle-
mêmeune menace pour l'intégrité terriloriale de la Républiquefédérative
socialistede Yougoslavie.
65. L'organisation d'un réferendumpour «déterminer le statut de la
Bosnie-Herzégovine»étaiten lui-mêmecontraire a la Constitution la
fois sur le plan de laforme el du fond.
Son inconstitutionnülitéformelle apparaît notamment dans le fait que

l'Assembléede la Républiquesocialistede Bosnie-Herzégovinea organise
un réferendum pourlequel elle n'ktait pas compétenteselon la Constitu-
tion et selon la loi,In concreto.il s'agissait d'un cas précisd'incompé-
tence, puisque l'organe qui aurait étéautrement compétentpour organi-
ser ce référendumavait mis en question le ({statutde la Bosnie-Herzégo-
vine» et ainsi agiultra vires.D'autre part, organiser un référendumsur le
{(statutde la Bosnie-Herzégovine»étaitaussi contraire ijla Constitution
au fond, puisque la formation de la Bosnie-Herzégovine enEtat «souve-
rain et indépendant»etait, en tant que telle, contraire a la Constitution
de la République fédérativs eocialistede Yougoslavie. Plus précisément,
lesattributs de «souverainetéet d'indépendance ))de la Bosnie-Herzégo-
vine portaient en eux-mêmes une modification defsrontièresd5Etatde la

Républiquefédérative socialistd ee Yougoslavie, alors que, selon la Cons-
titution de celle-ci,Icterritoire de 1'Etat Formeune seule entité (art. 5,
par. 1)et que <<lafrontiérede la Républiquefidérativesocialiste de You-
goslavie tic peut êtremodifiéesans le consentement de toutes les rEpu-
bliqueç~ (ibid., par.3).De surcroit, le référendumest fondamentalement
contraire a la Constitution de la Bosiiie-Herzégovineelle-mêmeL . 'amcn-
dement LXX apportéàcelle-ciprévoiten son paragraphe 10 la création
d'un conseil charge d'exercer le droità l'égalitédes nations et des natio-
nalitésde Bosnie-Herzégovine. Ce conseil a notamment pour mandat
d'«étudieren particulier lesquestions liées à ..la promulgation des règle-
ments donnant effet aux dispositions çonstitutionnelles qui consacrent
explicitement le principe de l'égalitédes peuples et des nationalités)).Ce
conseil se compose

({d'unnombre égalde députeschoisisparmi lesmembres des peuples
de Bosnie-Herzégovine - Musulmans, Serbes et Croates, el d'un
nombre proporlionné de députéschoisis parmi les autres peuples,
nationalitéset autres groupes qui vivent en Bosnie-Herzégovine»,

qui doivent prendrc leur décision<<surla base de l'accord desmembres
issus de lous les peuples et de ioutes les nationalités)}. APPLICATION DE CONVENTION G~~NOCIDE (OP.DISS.KRE~A) 732

Sur le plan juridique, le paragraphe 10de cet amendement LXX vise

assur6ment igarantir l'égalité des peuplesL .'importance du conseil dans
l'appareilconstjtutionnel de la Bosnie-Herzégovineapparaît trés claire-
ment au paragraphe 10, où il cst dit que

«pour lesquestionsconcernantI'exercicedu droit àl'egalitdespeuples
etdesnationalitésde la Bosnie-Herzégovine 1,'Asscmbléperend sesdéci-
sions,sur propositiondu conseil,selon uneprocédureparticulikrefixée
dans Itrèglementde l'Assembléd ee laRkpubliquesocialistede Bosnie-
Herzégovine, i lamajoritédesdeux tiers desdéputéq sui lacomposent P.

Dans la Constitution, le conseil Était conçu comme une instance obligée,
un lieu où pouvaient se tenir les délibérationset ou les propositions ten-
dant à l'égalité des peuplepsouvaient puiser leur origine. La proposition
d'organiser un référendum sulre «statut de la Bosnie-Herzégovine»fai-
sait ainsi partie des questions que le conseil avait à examiner, car elle
avait un effet direct sur «le principe de l'égalitentre les peuples et les
nationalités)}.
Le champ de cette inconstitutionnalité iila fois formelle et rnatknelle
s'Clendaussi à l'acte de «proclamation officielledes résultatsdu référen-

dun?, le 6 mars 1992)). Le terme de <cproclamationofficielle» évoque,
nzutnfismutundis, l'importance des faiis qui constituent l'inconstitution-
nalité formelleet matérielledu référendum.

Le réftrendum sur le {(statut de la Bosnie-Herzégovine»releve de la
catégoriedite des réfkrendumspréiliminaires dans l'organisation constitu-
tionnelle de la République sociüliste de Bosnie-Herzégovine,puisqu'il
s'agissait de consulter les citoyenà titre préliminairesur le statut de la
Bosnie-Herzégovine.C'estpourquoi, la c<proclamationofficielledesrésul-
tats du réfkrendum»est en fait un acte juridique. Plus pariiculièrement,

la rkpartition des voix lors d'un référendumn'estpas un fait rormel, que
le résultat decetterépariiiion s'imposeou non à l'organe qui a organise
le référendum.Ce résultat est la condition matériellequi rend possible
l'acte formel. Tellc esi, en l'occurrence, la nature de la «proclamation
officielle.
Ainsi definie, la position juridique de:la «proclamation officielleude
l'entitéfédéralede la Bosnie-Herzégovine entant qu'«€rat souverain ei
indkpendant})est, sur leplan matériel, uneinconstitutionnalitéde plus au
regard des dispositions pertinentes de la Constitution de la République
socialiste deBosnie-Herzkgovine.Plus particuliérement, l'article 252 de
cette constitution disposeque:

«les peuples et les nationalites ... de Bosnie-Herzégovineont pour
droit et devoir sacrésel inaliénablesde sauvegarder et de promou-
voir la liberté,?ndkpendance, la souveraineté,l'irttégrillerriloriule

et le système social Etuhlipar lu Constitutionen RGpuhiique fid&t.ru-
fivesocialistede Yougoslavie et duns laRépuhliyue sociuii.~.reBos-
nie-H~rïPgovine~(les italiques sont de moi).Le point 7 de l'amendement LXlX de la Constitution de la République
socialiste dcBosnie-Herztgovine dispose:que: {(Lesorganismes et actes

politiques qui visentA modifier par laforce le systèmeconstitutionnel et
/es menaces contre l'intégrité territoriaet l'indépendancede la Ripu-
hlique Jedératisv ocialistede Yuugoslu vi~>>sont interdits (lesitaliques
sont de moi). Ces deux dispositions constitutionnelles font de l'«intégrité
territorialen l'objet placé sl'égidede la Constitution, alors que la «pro-
clamation officielle» estune faqon de menacer directement cet objet.
66. La consuEtationsur le statut de la Bosnie-Herzégovine a étéorga-
niséesous forme de rkfkrendum.Tellea étéla méthodede scrutin, que la
Bosnie-Herzégovine n'ajamais contestée, puisqu'elle a dit dans son
mémoire, à propos de la proclamation de la souverainetéet de I'indtpen-
dance de la République(mémoire,par. 4.2.1.IO),que «la majorité dela
population» a répondu parl'affirmative i la question posée. L'emploidu
terme «population» au singulier montre indubitablement que la Bosnie-
Herzégovine penseelle aussi qu'il s'agissaitn l'occurrence d'uneçonsul-
tation publique.
On peut se demander si le référendum public, c'est-à-dire l'expression

directede la volontédes citoyens,indépendammentdes questions qui font
l'objet despoints5 et 6, offrail un moyen appropriéde déciderdu «statut
de la Bosnie-Herzégovine)). Un référendum estpar définition unmode
d'exercicede la souveraineté nationale,c'est-à-diredu pouvoir du peuple
en tant que ~EPP~C OSm. me il existe en Bosnie-Herzégovine trois peuples,
chacun investidu droit de disposerde lui-m&me,ilest indiscutable, quelles
que soient les raisons exposéesaux paragraphes 5 et 27 de la présente
opinion, que le mécanisme du riférendurnpublic est totalement impropre
5exprimer-la volontéde chacun de cestrois peuples. Si,hypothèsede pure
conjecture, une majorité de citoyens représentantla majoritt de chacun
des trois peuples, avaitvote en faveur d'une «Bosnie souveraine et indé-
pendante}),on aurait pu dire que le référendumpublic revenait essentiel-
lement iiun rérerendurn national, bicn qu'il n'en fût pas uen lui-mime.
Mais, on le sait, tel n'a pas étélc cas. Comme lestrois peuples de Bosnie-
Herzégovinesont, selon la Constitution du pays, (<souverainset égaux>>,
un référendumnational ne peut avoir de pertinence qu'en ce que s'y

exerce directement le droittti'autodétermination.Le droit à disposer de
soi-m&meaurait pu êtreexerce diffkrcmment, par anticipation, par deci-
sion des represenzants élus des trois peuples dc Bosnie-Herzégovine,
d'autant qu'en 1990des électionsdémocratiquespluralistesavaient eu lieu
en Bosnie-Herzégovine.Les tableaux représentant la distribution des
circonscriptions étaientle reflet exactde la structure ethnique du pays
puisque lespartis nationaux des trois peuples ont, chacunde son côte, re-
cueillila quasi-totalitédes votes de l'entiténationale qu'ilsreprésentaient.
Un référendum n'était paasppropriépour se prononcer sur le «statut
de la Bosnie-Herzégovine)>n ,on seulement du point de vue de la consti-
tutionnalité,puisqu'il nepermettait a la volontédes crois peuplesde Bos-
nie-Herzégovine de s'exprimer,mais aussi du point de vue dc la loi même
sur le rtfkrendlim sur la base de laquelle il avait 6te organisé. Les dispositions de Ia loi sur le référendum deBosnie-Herzégovine,si
on les considèreen elles-memeset tellesqu'elles sont formulées, interdi-
sent de conclure que l'on peut déterminer{<leslatui de la Bosnie-Herzé-

govine~ par voie de réfkrendum.
Ouire:lesdispositions d'ordre général relatives l'organisation du réfé-
rendum déjà évoquéea su paragraphe 5de la présentcopinion, ilfaut exa-
miner ici cellesqui concerneni les modalitésde la prise de décisionet la
qualitédes personnes participant au scrutin.
L'article 33 de la loi dispose que
«la décisiond'organiser un référendumesi prise i la majoritédes
travailleurs et des citoyens inscrits sur les listes électoralesdans

territoire ou lapartie du territoire de la Rtpublique socialiste de
Bosnie-Herzégovineoù se tient le référendum>>.
La décisionsur laquelle porte le riferendum est donc prise à la majo-
rité.Si l'on met de cotéle problèmede la lkgalitéde la consultation elle-
meme,il reste encore isedemander si unc question légitime,coinme celle
du «statut de la Bosnie-Herzégovine»,peut tire tranchéea la majorité

simple.On est fondé As'interroger quand on gai1que la Constitution de
la Républiquesocialistede Bosnie-I-Ierzégovinv eeut que lesdeux tiers au
moins de l'électoratde la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovine
soient d'accord pour qu'il y ait modification des frontiéres dela Repu-
blique (amendement LX11a l'article 5 de la Constituti~n)'~~.Ainsi, la
Constitution exige une majoritédes deux tiers pour corriger le tracé:des
subdivisions administratives de la fédérütion:déterminées demanière
indirecte, alors que la loir le réferendumn'exigeque la majoritésimple
pour déciderdu statut de la Bosnie-Herzégovine endroit public. Cela suf-
fita mon avis A montrer que le législateur,lorsqu'il a adoptéla loisur le
réferendum(soit qu'il n'aitpas tenu compte de la Constitution de la
République socialiste de Bosnie-Herzégovine,soit qu'il ait simplement
pris appui sur elle), n'avait pas dans l'esprit un réferendum de cette

nature. Pour êtreplus clair, ilst difficiled'imaginer que le législateuse
soit montréplus exigeant pour un référendumsur un trace de frontières
- qui, dans la pratique des entitésfédérales yougoslavesn ,e conc~rnait
rien de plus que quelques hectares dc phturages et de forêtsou quelques
villages- que peur un référendumsur la question de portée historique
de l'existencememe d'une entitt fédérale.

La loi sur leréférendumprtvoyait égalementque «tous lestravailleurs
et lescitoyens inscritssur lesistesélectoralesdu territoire, c'est-à-dire la
partie du territoire de la Républiquesocialistede Bosnie-Herzégovineoù
setient le référendum »,ont ledroit de participer celui-ci(art. 33).Cette
disposition soulève la question de savoir qui participe effectivement au
scrutin. La disposition donnant à ((tous les travailleurs et tous les

citoyens)) le droit de vote signifie que la qualitéd'électeurn'étaitpas

'O9Journuofficiedc lu Aipubliquesocialiste de Bosnrc-Hcrzrgovine,vol 21, 1990.dkterminéepar la qualité decitoyen de la République.Le seul critère était
la residence, condition d'inscription sur les Pistesélectorales.C'est ainsi
que le droit de vote étaitpar exemple accordaux Slovènesou aux Macé-
doniens qui rksidaient en Bosnie-Herzégovine,alors que les Musulmans
ou les Serbes citoyens de Bosnie-Herzégovinequi résidaientdans une
autre république enétaientprivés.
67. Du point de vue, enfin, du droit constitutionnel de la République
fédérative socialisde Yougoslavie,peut-il y avoir de décision plusauto-

riske sur la valeur juridique du référendumportant sur le «statut de la
Bosnie-Herzégovine»que celle de la Cour constitutionnelle de Yougo-
slavieelle-mêmec ,hampionne par excellencede la constitutionnaliiéetde
la légalitédans le systémeconstitutionnel de la République ftdkrative
socialiste de Yougoslavie (article 375 de la Constitution de celle-ci)?La
Cour n'ajamais examine à part le référendumsur le siatut de la Bosnie-
Herzégovine. Mais ellea rendu plusieurs décisionssur les actes dmmême
ordre pris par lesentitésfédéralequi sesont proclamées{csouveraineset
indépendantes)) avant la Bosnie-Herzégovine.Laissant de cBtéles deci-
sions effectivement rendues par la Cour dans cescas concrets, nous ren-
verrons à ccrtains passages de leurs attendus dont la port& dépasse,par
la forme et par le fond, l'espècesur laquelle la Cour se prononçait. En
d'autres termes,ces passages offrent une analyse juridique valable, éma-
nant de l'instance juridictionnelleupreme de la République fédérative
socialiste de Yougoslavie surla question. Dans son arrêtIU no 108/1-91

(Juuraul oJjcie de lai Républiquefédéralisv uciailislede Yougoslavie,
no 83/91),la Cour constitutionnelle a fait notamment remarquer que:

«Le droii des peuples de Yougoslavieà disposer d'eux-mêmesq ,ui
comprend le droit de faire sécession,ne peut s'exercer,de l'avisde la
Cour constitutionnelle de Yougoslavie, par décisionunilatkrale des
peuples de Yougoslavie, c'est-à-direpar un acte des assemblées des
républiquesde la République fkdérativesocialistede Yougoslavie ...
Le fait que la Constitution de la Républiquefédkrative socialisde
Yougoslavie ne prévoit pasde procédurepour l'exercicedu droit 5
disposer de soi-même,y conipris ledroit de faire sécession,ne signi-
fie pasue cedroit peut s'exercerpar décisionunilatéraled'autodk-
termination ou de sécession. Aucun peupleni, spécialement,aucune
assembléede rkpublique ne peut, agissant unilatéralement,décider
de l'exercicede ce droit avant que n'aient étdéterminées conjointe-
ment les modalitéset les conditions de cet exercice.
Une proclamation unilatéralede souveraineté et d'indépendance

d'une des républiquescomposant la Républiquefédérative socialiste
de Yougoslavie est,de l'avisde la Cour conslitutionnelle de Yougo-
slavie,une infraction aux dispositions de la Constitutdenla Répu-
blique fédkrative socialistede Yougoslavie relativàla composition
et aux frontières dela Républiquefkdkrativesocialiste de Yougosla-
vie, Etat fédkralet communautéd'Etat de peuples volontairement
unis et de leurs rtpubliques socialistes.» APPLICATION DE CONVENTIONGENOCIDE (OP. DISS. KRE~A) 736

On rappellera que cet arril a été rendu par la Cour en assemblée plénière,
comme prévu à l'article 381 de la Constitution de la République fédéra-

tive socialiste de Yougoslavie, cn présencedes deux juges de la Bosnie-
Herzégovine.

C. Lkgaliré de /a proclumation de 1'indkperadunce
cleIa Bosnie-Herzégovine t.a droitinternational

68. Toute uneséried'instruments internationaux, ouverte par la Charte

des Nations Unies et poursuivie par la declararion sur l'octroi de I'indé-
pendance aux pays et aux peuples coloniaux de 1960, les pactes relatifs
aux droits de l'homme, de 1966,et la déclarationrelative aux principes
du droit international touchant les relations amicales et la coopération
entre lesEtats conformémenti la Charte des Nations Unies, de:1974,fait
de l'égalitéde droits des peuples et de leur droit i disposer d'eux-mêmes

une valeur universelle fondamentale de l'ordre public democratique
consacré dans la Charte, valeur érigée en norme positive du droit inter-
national génkral,ayant la qualité de jus cog~ns"~. Dans son arr&ten
l'affaire du Timor oriental la Cour dit notamment:

<<LaCour considère que ...le droitdes peuples à disposer d'eux-
memes,tel qu'il s'est développ épartir de la Charte et de la pratique
de l'organisation des Nations Unies, est un droit opposable erga

ornnes. Le principe du droit des peuples à disposcr d'eux-mêmesa
étéreconnu par la Charte desNations Uriies et dans la jurisprudence
de la Cour (voir Consérjuence.j ~uridiqup eosur les Etuts d~ la prP-
sence coatirauede l'Afrique du Sud en Namibie (Sud- Uuesrafricain)
nonobsiaat 11 resolution 276 (1970) du Conseil de skcurilk, avix

consultutfj; C.1.I..Recueil 1971, p. 31-32,par. 52-53; Suhura occi-
rlentc~l,visconsultatif, C.I.J Recueil 1975, p. 31-33,par. 54-59);il
s'agitlà d'un dcs principes essentielsdu droit international contem-
porain. >',1

110J. J CaiccdciPerdonio, «la ieoriiixrogensen dereçho intcrnacionala lude
laConvention de Vienasabre cl dereçhode los tratados i>,Revisd~ullemiocolotn-
bina de jurr~prudencia,lanvier-1975,p.216-274, L. Alexidz<(CegalNature oïJu.7
Crigensin Contemporary Intcriiational Lawii, Rec,uerldtr cours de 1'ArudC:niit~.lcdroit
in!ernatronul r!r La Hriyr, t. 172, 1981,p. 262; Bednotequc. ((Parmi cespnn-
cips (ilc droit i l'indhpendancecomplèteiiel ((ledroit n autodéterminaijugesont
inaliénablesel doiveice titre faire l'objetd'une reconnaissanceimmtdiate et sanacon-
dition~((<Non-aligncrncntet droit intesnational>i,ibid., t. 151, +M. Sahovic,
{(Codificatiof the kgal PrinçiplofCoexistencea:nd the Developmentof Contempo-
midyCoop~rui~un,1972,p. 23; projet d'article5sur la responsabilitéinternationale la liste
des crimes inlernationaux s'étendkgalementa «b) la violation gravc d'une obligation
internationaleimportance essentiellepour la sauvegarde du droit des pcuples disposer
d'eux-mSmeç))(art14),cinquièmerapport sur la responsabilitede l'Etat, Annuazrerlt!lu
Commrssion 11 i1~ilinlernatronal, 1976,vol. 11,deuxièmepartie, p. 70.
Il1C.I.J. Recuei1995,p.102. APPI.ICATIONDE CONVENTION G~NOCIDE (OP. DISX. KRE~A) 337

69. L'égalité dedsroits et l'autodéterminationdespeuples formeni une
nome structurellement complexe.
D'une part, l'expression elle-même, c<bgalitéde droits des peuples et
droit [despeuples]a disposer d'eux-mêmes», est issud ee la conjonction,
de l'amalgame d'un principejuridique généra(ll'«égalitéde droit») et du
principe de l'autodéterminationdes peuples.Le ternle «égalitkde droits)},

substitut normatif d'«égalitédes Etats~, ya un sens plus général en ce
qu'ilvise,sous une acception plus large, lesrapports qu'a chaque peuple,
considéréindividuellement, avec la totalité des droits reconnus aux
peuples par le droit international. Est sous-entendue I'interdictioii de
faire quelque disiinciion que ce soit entre les peuples et entre les divers
droits qui sont reconnus àchacun d'eux. En d'autres termes, le principe
de l'<<égalitée droits» dtfinit le champ d'application des principes du
droit international qui concernent le statut des peuples.droit idispo-
ser de soi-méme a cependant un sensmatérielimmédiaten ce que

«tous les peuples ont le droit de déterminer leurstatut politique, en
toute libertéet sansngkrenceextérieure,et de poursuivre leur déve-
loppement économique,social et culturel et tout Etat a le devoir de
respecterce droit, conSonnémentaux dispositions de la Charte»
(paragraphe 1de la déclarationrelative aux principes).

D'autre part, la règledel'<<égalitde droits des peuples et deleur droàt
disposer d'eux-mêmes»est incomplète,car elle ne forme pas sur IFplan
de l'application un principe aiilonorne. Pour êtreplus précis, ellene
donne en effet aucune définitionde la notion de «peuple», et on ne
trouve dans le droit international en vigueur aucune définition quiper-
mettrait,a titre de référencinstitutionnelle autoriske, de savcerqu'est
un «peuple». C'est pourquoi la seule façon de rendre opératoire et de
donner effetau principe de l'<<égalite droits des peupleset de leur droit
à disposer d'eux-mêmes*est de s'appuyer sur les règlesdu droit interne
(ci-dessus par.44-45]. Ces règlesdu droit interne peuvent de la même
manière êtrevalables en cas d'exercice du droit à I'autodktermination
externequand ils'agitd5Etatscomprenant plus d'un seulpeuple,I'interdic-
tion de violer l'intégrité territoeil'unité politiqueétantce qu'elleest.
70. 11y a de bonnes raisons de soutenir que la proclamation de ta Bos-
nie-Herzégovineen tant qu'Etat (<souverainet indépendant» à l'intérieur
de sesfrontières administrativesest une violation du principe fondamental
de l'égalitde droits des peupleset de leur droii disposer d'eux-memes.
En supposant que toutes lesautres conditions, de procédureet de fond,
trouvant alorsis'appliquer se trouvaient rkunieç(voir ci-dessuspar. 59-

63),la proclamation de laBosnie-Herzégovineen tant qu'c<Etatsouverain
et indépendant)}ne peut êtrevalable que comme résultat de la volonté
concurrente des trois peuplesde Bosnie-Herzégovine.Or, on observe des
divergences évidentesentre les positions politiques fondamentales des
représenrantsde cestrois peuples.Alors que la volontédes dirigeants poli-
tiques musulmans s'est exprimée enfévrier1991dans le projet de déçlara-
tion sur la Bosnie-Herzégovinesouveraine,déclarationqui a été, au moinstemporairement, acceptéepar les dirigeants politiques croates, les diri-
geants politiques serbes de Bosnie ont insistépour que la Bosnie-Herzé-
govine reste une entitéfédéralede la Fédérationyougoslave.
Le référendum des29 févrieret 1"'mars 1992n'a pas été lamanifesta-
tion de l'égalitde droits et du droit des trois peuples de Bosnie-Herzé-
govine A disposer d'eux-mêmes,ni sur le plan de la forme (voir ci-après
par. 64) ni sur celui du fond. Absolument anormal sur le plan de la
forme, sur celui du fond il pourrait êtrequalifiéau mieux d'autodétermi-
nation (lefucto des peuples musulman et croate de Bosnie-Herzégovine.
Un plébiscitenational du peuple serbe de Bosnie-Herzégovinea été orga-
nisé,par voie de référendum,les 9 et 10novembre 1991, «dans les zones

des régionsautonomes serbes et autres enclaves ethniques serbes en Bos-
nie-Herzégovine)), à l'occasion duquel 96,4% des citoyens ont votéen
faveur d'un Etat indépendant dans le cadre de la Fédérationyougoslave
(Politi 11ue, 13novembre 1991).
Les circonstances dans lesquelles a été organiséle référendum des
29 févrieret le' mars 1992montrent que l'intention étaitde trancher le
statut juridique de la Bosnie-Herzégovineindépendamment du principe
de l'égalitde droits des peuples et de leur droitisposer d'eux-mêmes.
En premier lieu, M. Alija IzetbegoviCa déclaréce qui suit lors d'une
conférencede presse tenue a Sarajevo le 30janvier 1991 :

«Si la Slovénieet la Croatie se séparentde la fédération actuelle,
je considéreraiqueje n'aiplus aucune autoritépour conduire d'autres
pourparlers relatifAla nouvelle Yougoslavie. Je proposerai d'orga-
niser un référendumde tous les citoyens de Bosnie-Herzégovine, non
des peuples considérésséparément, pourqu'ils se prononcent sur

l'indépendanceet la souverainetéde la Bosnie-Herzégovine.»Il2(Les
italiques sont de moi.)

En deuxième lieu,la Bosnie-Herzégovinea mentionnéplus d'une fois
dans ses conclusions le «peupledelu République » (par exemple, aux pa-
ragraphes 5, 31, 114, 134à 136de la requêteintroductive d'instance du
20 mars 1993,et aux paragraphes 4.2.1.IOet 4.2.2.19 du mémoire). C'est
ainsi qu'au paragraphe 4.2.1.10 du mémoireil est écritque le référendum
relatif a la souverainetéde la Bosnie-Herzégovineest fondé surla volonté
de la ((majoritédelapopulatiorl de cette république))(lesitaliques sont de
moi).
On voit donc que le fond de la décision référendaire n'étap itas la
volonté des trois peuplesde Bosnie-Herzégovinede ((déterminerleur sta-
tut politique)), mais plutôt la volonté,a la lumière desfaits et du droit,
d'un imaginaire ((peuple de Bosnie-Herzégovine». Le sens objectif du
terme ((population de Bosnie-Herzégovine))dans le contexte considéré
est la négationde l'existence destrois peuples de Bosnie-Herzégovine,et,

Il((Référendumsur l'indépendance dlea Bosnie-Herzégov,lte PolitDuily,
31janvier 1991(les italiquessont de moi). N~PLICA'rIO DENCONVENTION GÉNOCIDE (OP.DISS . RE~A) 739

par la, la négationde I'applicabilitéen l'occurrence du principe de I'éga-
litéde droits des peuples et de leur droitàdisposer d'eux-mêmes.
En troisième lieu, la référenceque fait la Bosnie-Herzégovine à l'avis
de la commission d'arbitrage, organe consultatif de la conférencesur la
Yougoslavie, a des rapports raisonnablement étroitsavec la position de
la commission sur la question de I'autodétermination dupeuple serbe de
Bosnie-Herzégovine. En réponse à la question de lord Carrington, prési-

dent de la conférencesur la Yougoslavie, la commission a notamment
insistésur le fait que:

«la population serbe de Bosnie-Herzégovine ...a le droit de bénéfi-
cier de tous les droits des minorités reconnus aux minorités et aux
groupesethniques par le droit international et par lesdispositions du
projet de convention de la conférencepour la paix en Yougoslavie
du 4 novembre 1991,que les républiquesde Bosnie-Herzégovinese .
sont engagéesa mettre en auvre»l Il3.

En d'autres.termes, une interprétation de la commission d'arbitrage rela-
tivement à l'indépendancede la Bosnie-Herzégovine,qui a servi de point
de départa la politique de reconnaissance de la Bosnie-Herzégovine,a été
établieindépendamment de toute norme impérative relative iil'égalitde

droits des peuples et à leur droit de disposer d'eux-mêmes, puisque l'un
des peuples constitutifs de Bosnie-Herzégoviney était traitécomme une
«minonté» et un «groupe ethnique)).
71. Le droit de disposer de soi-mêmese subdivise en droit à I'autodé-
termination interne et droit a I'autodétermination externe. Ces deux
droits forment une unitéorganique, résultat dialectique du développe-
ment de la notion d'autodétermination.
Le droit à I'autodétermination interne prend forme dans I'environne-
ment institutionnel d'un Etat souverain et indépendant. Il se rambnc au

droit qu'a chaque Etat de choisir librement, sans ingérence extérieure,la
forme de son système social(autodétermination politique) et au droit de
disposer librement de sesrichesseset ressources naturelles. Ainsi conçu, le
droit a I'autodétem~inationinterne couvre les notions de souverainetéet
de démocratie.
Le droit à I'autodétermination externeest le droit de choisir le cadre
institutionnel de l'exercice ininterrompu du droit (iI'autodétermination
interne. La qualitéd'Etat n'est pas le résultatnécessaireet automatique
de l'exercicedu droit à I'autodétermination externe puisque celui-ci peut
avoir pour résultat non pas seulement l'«institution d'un Etat souverain

et indépendant)),mais aussi l'«association ou l'intégration libreAun Etat
indépendant ou l'adoption de quelque autre statut politique librement
choisi par un peuple)).

Il3Conférence poulra paixen Yougoslavie, commissiond'arbitrage,avis no2, par.4. APPLICATION DE CONVENTION GBNOCIDE (OP.UISS. KKE~A} 740

72. La question fondamentale qui se pose a ce niveau est celle de
savoir si le droitl'autodétermination externeest universel ou s'ilest de
portée limitke.
Il semble indiscutable que le droità l'autodétermination est,in ubs-
trucro, un principe de portéeuniverselle.Limiter sa porrkereviendrait 2 y
dérogertacitement en partie. L'universalité est unqualitéinhérentedes
deux aspects du droiti disposer de soi-méme(autodétermination interne
et autodétermination externe). Les formules employées elles-memes indi-
quent clairement, hors de tout doute, que le droit I'autodktermination
appartient a «tous les peuples» (article premier des deux pactes relatifs
aux droits de l'homme de 1966 et dkclaraiion relative aux principes du

droit international louchant tes rclations amicales et la coopération entre
lesEtats de 1970).Si tel n'étaitpas le cas, le dràiI'autodktermination
renverrait non a l'«égalitkde droits)}des peuples, mais i l'<(inégaldeé
droits),.
Lc fait que dans la pratique de la Cour tavis consultatifs dans l'affaire
de laNamibie, C. 1.JRecueil 1971, p. 31,et dans l'affairedu Saharocci-
dental,C.J.J. Recueil 1975,p. 31) le droik l'autodéterminationexterne
ait étéliéaux territoires non autonomes ne peut étre considéré comme
limitant la portéedu droit ü I'autodBterrninationrurionepersonac, mais
comme l'application ad curum du droit universel.

73. On ne peut cependant postuler que l'universalitédu droit a I'auto-
déterminationsignifienécessairement qu'ily serait sans limite. L'exercice
du droit à l'autodétermination ades limiies déterminkaspar le principe
même du droit des peuplesi disposer d'eux-mêmee st par lesautres rkgles
de l'appareiljuridique international.
Ces limites s'imposentau droità disposer de soi-mémedans satotalité,
c'est-à-dire qu'elles touchent l'autodézerminationinterne comme l'auio-
déterminationexterne.
Dans le cas par exemple de l'autodétermination interne,il est clair
qu'en matièred'autodétermination politique le droit de disposer dc soi-
mêmene permet pas de choisir un systhmesocial fondé.sur la ségrégation
ou la discrimination raciale. Parfinitioii,ledroiiil'autodétermination

est plus précisémentune nome permissiveg&néialer,ecouvrant une auto-
risation catégorique.L'exercicede cette autorisation s'inscrit ccpcndant
dans lecadre du droit international, c'est-8-dire qu'il seheurte aux limites
fixées par les interdictions catégoriques d'autres normes impératives
(concrètenient,la norme prohibant la discrimination raciale).
La limite fondamentale qui s'impose i l'exercicedu droit I'autodé-
termination externe découledu principe même del'égalité de droits et du
droit des peuplesà disposer d'eux-meimes.Le droità I'avlodktermination
ne peut étreinterprété

cicommeautorisant ou encourageant une action, quelle qu'ellesoit,

quidkmernbrerait ou menacerait, totalement ou partiellement, I'inte-
gritétcrritorialc ou l'unitk politique dc tout Etat souverain et indé-
pendant se conduisant conformément au principe de d'égalité de droits et du droit des peuples a disposer d'eux-mêmes...et dotéainsi

d'un gouvernement représentant l'ensembledu peuple appartenant
au territoire sans distinction de race, de croyance ou de couleur)) Il4.

Cette contrainte qui s'exerce sur le droit à l'autodétermination externe
pris au sens étroit, dans le cadre du principe de l'égalitéde droits des
peuples et de leur droit a disposer d'eux-mêmes, fait ressortir la perti-
nence du principe de l'intégritéterritoriale et de l'unité politiquede 1'Etat.
Liéecomme ellel'esta l'exercicedu droit à I'autodétermination, droit que
possèdent les «peuples», cette contrainte protège l'intégrité territoriale et

I'unitépolitique d'un Etat de toute entreprise qui pourrait être lancée ri
l'intérieur de cet Etat, par opposition a l'interdiction d'employer ou de
menacer d'employer la force riunsles relations internationales entre Etats,
qui protège l'intégritéterritoriale et l'unité politiquede 1'Etat de toute
action extérieure.
74. Comme l'a fait remarquer Henkin: «il est admis que le droit de
disposer de soi-même ...n'implique pas pour un peuple le droit de faire

sécessionde 1'Etatexistant»'15.
La mêmerègles'applique aux fédérations:

«Que la fédérationse scinde en deux Etats ou davantage fait aussi
passer au premier plan le problème théoriquede I'autodétermination
sous forme de sécession.Cette dissolution peut êtrele résultatd'un
accord amiable constitutionnel, ou le résultatd'un acte de sécession
par la force. Dans ce dernier cas, les règlesdu droit international

peuvent êtreinvoquées mais, hormis les cas de sujétion coloniale
reconnue, il semble qu'il n'y ait pas de droit à I'autodétermination
qui s'applique a des Etats indépendants et justifie qu'ils recourent a
la sécession.» 'l6

En d'autres termes, cela revient à dire que, dans un Etat composC de
plusieurs peuples, le principe de l'égalitéde droits et du droit à I'auto-
détermination aboutit a I'interdiction de I'autodétermination externe
puisque celle-cirevient évidemment à ((démembrerou menacer totalement

ou partiellement l'intégritéterritoriale ou l'unitépolitique)) de 1'Etat en
question. Le sujet visépar cette interdiction est un peuple dotédu droit
de disposer de lui-même;étant donné que

«les revendications de sécession conlporterit, d'abord et avant tout
des prétentions territoriales non réglées ...les deux principes, réputés
concurrents, de pcuple et de territoire, opèrenten fait en tandem)) Il7.

. Il4Declaration relatiaux principe...par. 1.
"5 L. Henkin, ((General Course of Public International Law)), Reciteil des colrrs(le
1Xcu(1ér1idiee droit i~~terrruiueLadFluye.t. 216,1989,p. 243.
IlfM. N. Shaw. Irirern<irionlait1986, p.139.
lL71,. Rrilmayer, Secession and Self-determination», Yale Jotirnal of It~rernorionul
I~itr,vol. 16. 1991,p. 178 (lesitaliqiiessont clemoi). APPLICATIONDE CONVEWI'ION G~NOCIDE (OP. DISS. KRE~A) 742

75. Cette interdiction trouve son fondement dans leconflit qui oppose
deux principes de memeforce juridique: celui de l'autodétermination et
celuide l'intégritterritoriale. Cc dernier est devetrucru remporis un élé-
ment essentielde llégalitCsouveraine des Etats (alinéad) de la rubrique
{(te principe de l'égalitsouveraine des Etats)), dans la déclarationrela-
tive aux principes du droit international), une norme impérative, de
telle sorte que le conflit dont nous parlionsst impossible a résoudrepar
réferenceü la hiérarchiedes principes du droit international. Outre cette
considérationpratique, il y a aussi une question de principe,à savoir que
nul n'est mieux qualifiéqu'un Etat, entité politique souveraine,pour deci-
der de son sort lorsqu'il se trouve pris entre deux principes fondamenta-
lement antagonistes et lorsque sa décisionest sans effet sur les droits

d'autres Etüts tiers.
76. Selon le paragraphe 7 de la déclarationrelative aux principes du
droit international,l'inlerdiction de démembrerou de menacer l'intégrité
territoriale ou l'unitépolitique d'un Etat protège les Etats

«se conduisant conformément aux principes de l'égalitéde droits et
du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ...et dotés d'un gou-
vernemcnt représentantl'ensembledu peuple appartenant au terri-
toire, sans distinction de race, de croyance ou de couleur».

Cette disposition fixedeux critéres:lepremier est celuidu comportement
de 1'Etatvis-à-visdu principe de l'égalitéde droits des peuples et de leur
droit a disposer d'eux-mèmes; le second est celui de la composition

du gouvernement, qui doit garantir la reprksentatioii de l'ensembledu
peuple, sans discrimination de race, de croyance ou de couleur. Par na-
ture, ce second critèreest d'ordre généralD . ans le cas concret qui nous
occupe, il faut aussi l'interprétercommesignifiant l'absencede discrimi-
nation entre lespeuples de la République fédérativseocialiste de Yougo-
slavie.
Qu'en est-ilde ce pointde vue de Ikpplication de cesdeux critkresjuri-
diques au cas de la Fédérationyougoslave?
77. Le droit des peuples a disposer d'eux-mêmesn'a pas été qu'une
simple dkclaration inscrite dans lestextcs constitutionnels etjuridiques de
la Fédkrationyougoslave. C'étaitun principe fondateur de 1'Etatyougo-
slave. De la mêmemaniére, endroit constiiutionncl yougoslave, (<égalité
des nations,) et «égalitédes peuples)}allaient de pair avec le droit a
l'autodétermination.
La Constit~ition de la République fédérativs eocialiste de Yougosla-

vie de 1974faisait explicitement de l'égalitdes peuples l'un desgrands
principes constitutionnels (<<Principesondamentaux~j,chap, 1)'qu'ellea
développesen de multiples dispositions dans ça partie dispositive et nor-
mative articlespremier, 244 et 245,par exemple). L'articla245,consacré
aux relations à l'intérieurde la Fédération,dit bien que «dans la RFpu-
blique fédbrativesocialiste de Yougoslavie, les peuples ...jouissent de
l'égalit>}. APPLICATION DE CONVENTION GÉNOCLDE (OP.DISS .KE~A) 743

L'égalité des peuples au niveau des organes d'autorité de 1'Etat you-
goslave étaitassuréede deux manières:

i) par des dispositions constitutionnelles portant sur l'égalde la repré-
sentation des républiqueset desprovinces, c'est-à-dire la coreprésenta-
tion des républiquesau sein des organes fédéraux.Les deux chambres
de l'Assembléede la République fédérative socialistede Yougosla-
vie, la chambre de représentation générale(chambre fédérale) et la
chambre de représentation fédérale(chambre des républiques et des
provinces), étaientconstituées selonle principe classique de la parité
(articles 284 et 291 de la Constitution de la République fédérative
socialiste de Yougoslavie). Le même principe valaitpour le chef

d'Etat collectif qu'était la présidence de la République fédérative
socialiste de Yougoslavie (amendement XLI de la Constitution,
point 1).Lors de la nomination des membres du Conseil exécutiffédé-
ral, le Gouvernement de la Républiquefédérative socialistede You-
goslavie veillait assurer une égalereprésentation des républiques et
une représentation adéquatedes provinces (amendement XLlII de la
Constitution de la République fédérative socialistede Yougoslavie).
Le principe de l'égalitde représentation des républiquess'appliquait
égalementdans lesorganesjudiciaires (Cour constitutionnelleet Cour
(suprême)fédérale);
ii) par des pactes sociaux régissantla politique derecrutement descadres,

et fixant les conditions de leur nomination, parmi lesquelles l'origine
nationale figurait en bonne place lorsqu'il s'agissaitde communautés
multiethniques.

En 1990, lesplus hautes charges de la Républiquefédérative socialiste
de Yougoslavie, immédiatementavant la proclamation de I'indépendance
de certaines entitésfédérales, présentaienlte tableau suivant:

présidentde la présidence :croate; vice-président:serbe ;
premier ministre du gouvernement fédéral: croate; vice-premiers
ministres: serbe et slovène;
président du Parlement: musulman de Bosnie-Herzégovine.Le dernier
cabinet fédéralcomprenait cinq Croates, trois Serbes, un Musulman,
un Serbe de Bosnie, trois Slovènes,un Monténégrin,un Yougoslave,
un Albanais, un Hongrois et deux Macédoniens.

On ne peut qu'en conclure que les organes d'Etat de la République
fédérative socialistede Yougoslavie représentaient tous les peuples you-
goslaves.
78. Quant à la position de la Bosnie-Herzégovinesur cette question,
on constatera qu'elle ne met aucunement en cause la représentativité des

organes de la République fédérative socialistd ee Yougoslavie; la Bosnie-
Herzégovinesoutient que cette représentativitéavait disparu avec la pro-
clamation de l'indépendancede certaines entitésfédérales et que de sur-
croît ((les organes fédérauxcommuns dans lesquels étaient représentées APPLICATIONDE CONVENTIONGENOCIDE(OP. DISS . RE~A) 744

toutes les républiquesyougoslaves n'existaient plus; depuis lors, aucun

organe de ce type n'a fonctionné))(mémoire, par. 4.2.1.26). Sa thèse
repose sur l'idée généralqeue
«dans le cas d'un Etat de type fédéral,qui réunitdes communautés

dotéesd'une certaine autonomie, et qui sont, en outre, associées à
l'exercice du pouvoir politique dans le cadre d'institutions com-
munes à la fédération,l'existencede 1'Etatimplique que les organes
fédérauxreprésententles composantes de la fédérationet disposent
d'un pouvoir effectif))Il8.

Dans lecas de la Yougoslavie, les«organes fédéraux)) ont cesséd'exis-
ter à la suite du référendumsur l'indépendancetenu dans trois répu-
bliques et «en Bosnie-Herzégovine,[par l'effet] d'une résolutionsur la
souverainetéadoptéepar le Parlement le 14 octobre 1991,dont la com-
munauté serbe de la République de Bosnie-Herzégovinea contesté la
validité))l9:

«La composition et le fonctionnement des organes essentielsde la
Fédération,qu'il s'agissede la prksidence fédérale,du conseil fédé-
ral, du conseil des républiqueset des provinces, du conseil exécutif

fédérald, e la Cour constitutionnelle ou de l'armée fédéraln e,e satis-
font plus aux exigences de participation et de représentativitéinhé-
rentes à un Etat fédéral.»'20

11est difficiled'accorder une valeur juridique à une telle affirmation. On
ne peut y prêterfoi, ni dans son sens généralni dans son sens particulier,
pour les raisons que l'on va exposer.
79. Le membre de phrase «les organes fédéraux représentenltes com-
posantes de la fédération)) peut avoirdeux sens. Le premier est que la
fédération,par ses organes, représenteles entitésfédérales.Cette inter-
prétation découlelogiquement du fait que la fédérationest, par défini-

tion, un pouvoir d'un rang plus élevé et supérieurpar rapport aux parties
qui la constituent, et que les organes de l'ensemble représentent ces
parties. Le deuxième sens estque les organes fédéraux,par leur composi-
tion même,représentent les entitésfédérales,en d'autres termes qu'ils
sont une sorte de synthèse institutionnelle de la représentativité deces
entitésfédérales.
C'est évidemmentde ce côté quepenchent les prétentionsde la Bosnie-
Herzégovine,corroborées par l'avis de la commission d'arbitrage. Or, si

l'on rapproche comparativement la pratique de la fédérationet de la
constitution de la Républiquefédérative socialiste de Yougoslavie, on voit
que ces prétentions sont sans fondement. En règlegénérale, les organes
fédéraux représentent 1'Etat fédéraldans son ensemble (par exemple:

Il8Coiiference internationale lar paix en Yougoslavie, commissd'arbitrage,
avisno 1par. I d).
Il9Ibicl.,parO).
'2"Ibid .,r.2b).le président desEtats-Unis, la Chambre des représentants dece même
pays, ou encore les organes exécutifset judiciaires de la quasi-totalitédes
Etats fédéraux)et seul le parlement fédéral est hicuméral, représentatif
des élémentc sonstitutifde la fédération(par exemplele Sénatdes Etats-

Unis, du Canada ou du Brésil,le Bundesrat allemand, le Conseil national
suisse, etc.).
On rappellera aussi que le choix constitutionnel qu'avait opéré a cet
égardla Républiquefédérative socialistd ee Yougoslavie s'inscrivaitdans
Ic cadre de cette pratique généralementacceptée desEtats fédéraux. A
l'exceptiondu conseil des républiques et des provirices, tous les organes
fédérauxde la Yougoslavie représentaientl'ensemblede la Fédération.
Les déléguédsu conseil fédéral représentaientc<les organismes autogérés
et lescommunautés clorganisations sociopolitiques)>etffaieatilus dans
lesrépubliqueset lesprovinces(article 129de la Constitution de la Repu-
blique fédérative socialistee Yougoslavie). De plus, les membres ei les
fonctionnaires du conseil exécutifredéralne représentaient pasles rkpu-
bliques ni lesprovinces, et une disposition constitutionnelle expresse leur
interdisait de recevoir des directiveset des instructions de ces républiques
ou provinces (art. 362). Le présidentet les membres de la présidencede

la République fédérative socialiste de Yougoslüvie, le président etles
membres de la Cour constitutionnelle el les autres fonctionnaires EdC-
raux prètaientserment,s'engageaient Apromouvoirla souveraineté,I'indé-
pendance et l'intégritéde la République fédérativs eocialiste de Yougo-
slavie,et juraient d'observer la Constitution de la Fédération(art. 397),
ils n'étaientdonc pas, selon la Constitution, des représentantsdes repu-
bliques ou des provinces.
80. 11 s'ensuit qu'iln'y a aucun lienjuridique entre le refus effectif de
prendre part aux travaux des organes fkdérauxet l'existence de ces
memes organes aux yeux de la loi. Ce que montre bien le cas de la You-
goslavie. Aucun organe fédkral n'a été dissout ni aboli parce que
quelqucs titulaires dcharges fédérales s'eCntaientdélibkrkmentabsentes
OU avaient démissionnkii litre personnel.
La Constit~itionde la Républiquefédérative socialistdee Yougoslavie
du 27 avril 1992 et la loi constitutionnelle et ses rkglements d'ap-
plication ont étéapprouvés par l'Assembléede la République fédéra-
tive socialistede Yougoslavie. En vertu de cette loi, tous lesorgafédé-
raux suprêmes restaient en activitéen attendant l'électiondes rriembres

des nouveaux organes (art. 2). La présidencede la République fédéra-
tive socialiste de Yougoslavie est restEe en fonction jusqu'i l'élection
du président de la République(15 juin 1992)et le conseil exécu~iffédé-
ral jusqu'i la formation du nouveau gouvernement fédéral(14 juillet
1492).
La pariicipation aux travaux des organes fédérauxet le mandat des
représentants elusrépondaienta l'intention d'attribuer aux décisionsque
prenait la Fédérationlebénéficd e'une personnalitéjuridiqueobjectivedu
point de vue du droit interne et du droit international, et ce dans l'intérét
général.L'abstention délibérédees titulaires élusde charges f6déralesen APPLICATION DE CONVEh'TION CLNOCID (OP.DISS . REC'A) 746

Bosnie-Herzégovine était considérée commeconstituant un abus de
droit 12'.Les conséquences d'unabus de droit affectent ceux qui le com-
mettent, selon le principe généraldu droit nullus cotntnodunîcupere de
sua injuria propria et ex delicto nonoritur actio.
81. L'argumentation de la Bosnie-Herzégovine sefonde implicitement

sur une interprétation inverse et libéraledu principe du consentement
fondant la Iégitimité de 1'Etat.L'idée d'origine,a savoir qu'un gouverne-
ment légitimeémanedu consentement de ceux qu'il gouverne, est inter-
prétéepar la Bosnie-Herzégovinecomme signifiantque le fait de quitter
un organe d'Etat entraîne la perte de Iégitimitédu gouvernement et repré-
sente l'expressiondu droit de faire sécessiond'un Etat existant.
Alors qu'en fait:

((leconsentement effectif n'estpas indispensable a la légitimité poli-
tique ...Les séparatistesne peuvent fonder leur argumentation sur
un droit d'«option négative)),parceque ce droit n'existepas dans la
théoriede la démocratie.
Le principe du gouvernement fondé surle consentement des gou-
vcrnésne comprend pas nécessairementle droit de choisir la non-

participation. II exige seulement l'existence,dans le cadre de l'unité
politique existante, du droit de participer par voie électorale.D'autre
part, le droit de participation ne comprend pas le droit de sécession.
Au contraire, il signifieque lesgroupes mécontentsne peuvent trou-
ver de solution que dans leur intégration absolue dans l'unité poli-
tique, dans leur pleine participation a la prise de décision.))122

82. Peut-on dire que ((l'existencede 1'Etat suppose que les organes
fédéraux...détiennentle pouvoir effectif?))
L'exercicedu pouvoir effectif est, par définition,la finalitéde I'exis-
tence des organes d'Etat, que 1'Etatsoit une entité unitaire ou une struc-
ture fédérale. Restea savoir, in concreto, si une crise manifeste dans le
fonctionnement des organes d'Etat de la fédérationa pour conséquence
de les faire cesserd'exister. Dire que la crise constitutionnelle de la Répu-

blique fédérative socialistede Yougoslavie a pour équivalent ladispari-
tion des organes fédérauxest juridiquement inacceptable. L'efficacité,le
nombre et la qualité des organes d'Etat sont autant de variables où
s'exprime une situation politique réelle. TIy a en principe des situations
dans lesquelles les organes d'Etat cessent effectivement d'exercer leur
pouvoir - par exemple en cas d'occupation militaire, de guerre civileet,

12'La Cour constitutionnelle de Yougoslaviea dédans sa décision11U no 122191
que le fait pour les fonctionnairesauxdc ne pas participer auxtravaux des organes
fédéraux représentaitune modification non constitutionnelle de la composition des
organes fédéraucommuns de I'Eta>(Jourtmlofficiel(lela R6publiquefidérutive socia-
liste (le Yougoslusie,no 89/91).Cette décisiona été prisepar la Cour constitutionnelle
siégeantau complet, avecla participationdeux juges de Bosnie-Herzégovine.
lz2L. Brilmayer, ((Secession and Self-detcrmination: A Territorial Interpretation)),
YuleJournal ofInternationulLat\>,vol. 16, 1991,p. 184-185. dans une certaine mesure, de certaines crises constitutionnelles - sans
1 pour autant cesser d'exister. Les organes dlEtat, en tant qu'élémentsde
l'appareil d'Etat, ne cessent d'existerque lorsque 1'Etatau nom duquel ils

agissent cesse lui-même d'exister.

D. Le rapport entre la Iigalitéde la naissanced'unEtat
ef lu ~ucce.s.sid'Etrrtsen matièrede traitésinternationaux

83. La Bosnie-Herzégovine prétendêtre«Etat successeur )):

ci) parce que «succession dJEtats» signifie «la substitution d'un Etat à
un autre dans la responsabilité des relationsinternationales d'un ter-
ritoire)) selon la définition très largement acceptée qu'endonnent les
deux conventions de Vienne sur la succession dYEtatsde 1978 et de
1983;
b) parce qu'«il est évidentque la Bosnie-Herzégovine s'estsubstituéea
l'ex-République fédérative socialistd ee Yougoslavie pour les rela-
tions internationales de ce qui constituait la Républiquefédérative de
Bosnie-Herzégovine avant la dissolution de l'ex-Yougoslavie))
(mémoire,par. 4.2.1.26).

1 La position de la Yougoslavie sur ce point est au contraireque ((lapré-
tendue Républiquede Bosnie-Herzégovinen'est pas devenue partie à la
convention de 1948pour la préventionet la répressiondu crime de géno-
cideconformémentaux dispositions de la convention elle-même))(conclu-
sions, B.l):

a) parce que «lYEtatdemandeur ne peut pas adhérerpar succession aux
traités internationaux auxquels 1'Etatprédécesseué r taitpartie car il a
violéde façon flagrante le principe de l'égalitde droits des peuples et
de leur droit à disposer d'eux-mêmes)) (exceptions préliminaires,
par. B.1.2.39);
b) parce que, «[é]tantdonné que I'Etat demandeur a violéles obliga-
l tions découlantdu principe de IYCgalitd éedroits des peuples et de leur
droit à disposer d'eux-mêmesl,a convention de Vienne sur la succes-
sion d'Etats en matière de traités ne pourrait pas s'appliquer en
l'espèce,mêmesi elle etait entréeen vigueur)) (ibid., par. B.1.3.5);

c) parce que «[l]a notification de successionest un moyen d'adhéreraux
traités concluspar 1'Etatprédécesseurlorsque le nouvel Etat a fondé
son existence sur le principe de l'égalité de droits des peuples et de
leur droit à disposer d'eux-mêmes.Or, en l'espèce,1'Etatdemandeur
a fondé sonexistence sur la violation des droits découlant dece prin-
cit.: Darconséau.nt.i* ne saurait recourir à la notification dc succes-
sion comme moyen d'adhésionaux traités internationaux de son pré-
décesseur. ))(Ibid, par. B.1.4.1.)

Essentiellement,cette exception de la Yougoslavie repose sur l'idéeque laBosnie-Herzégovine,puisqu'ellea «violéde façon flagrante le principe de
l'égalitéde droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes))
n'est pas Etat successeur et ne peut donc avoir acquis par succession la
qualité dYEtatpartie à la convention de 1948 pour la prévention et la

répressiondu crime de génocide.
Pour se prononcer valablement sur cette exception, il faut d'abord
répondre à la question de savoir s'ily a un lienentre succession d'Etats et
légalité deschangements territoriaux.
84. Répondre à cette question suppose l'existence d'une définition pré-
cisede cequ'est la succession.Or, le terme est utilisédans un sens large et
imprécis.

((Succession d'Etats désignea la fois le changement territorial lui-
même - en d'autres termes le fait qu'un Etat en remplace un autre
sur un territoire donné - et l'acquisition par succession par l'un de

ces Etats des droits et obligations de l'autre, c'est-à-dire de 1'Etat
dont le territoire est passéaux Etats successeurs.>) 123

On voit que le terme «succcssion >)désigne deux choses :u) lechangement
territorial lui-même; h) la dévolution desdroits et des obligations de
1'Etatprédécesseur à 1'Etatsuccesseur ou aux Etats successeurs.
Cette distinction entre la succession comprise sous l'angle du change-
ment territorial (successionde fuclo) et la successionpar transmission des
droits et des obligations dc 1'Etatprédécesseur à 1'Etatsuccesseur ou aux
Etats successeurs (succession de jure) se retrouve également dans la

convention de Vienne sur la succession d'Etats en matière de traités, à
laquelle la Bosnie-Herzégovinese réfèrepour établir sa qualitéd'«Etat
successeur)).En son article 2 (((Expressionsemployées))),alinéa h), cette
convention définitla «succession d'Etats» comme «la substitution d'un
Etat à un autre dans la responsabilité des relationsinternationales d'un
territoire)). L'article (((Cas de succession d7Etats viséspar la présente
convention))) préciseque cet instrument ((s'applique uniquement aux
effets d'une succession d'Elats se produisant conformément au droit
international, et plus particulièrement aux principesdu droit internatio-

nal incorporésdans la Charte des Nations Unies)). Les rapports entre
l'alinéah) de I'articl2 et I'article6 sont précisément définidsans le com-
mentaire de I'article 2 du projet d'articles sur la successioii d'Etats en
matièrede traités,sur la base duquel a étéadoptéI'article2 de la conven-
tion. On peut lire notamment dans ce commentaire:

((l'expression[«succession)] est employéepour désigner uniquement
le fait de la substitution d'un Etatà un autre dans la responsabilité

12'H. Kelsen, Diciiotttiuire(le Irrrerrtrinologiedu droir itrterrrutionul,vol. 42, p. 314;
O'Connell,TliLnw ofSrate Siiccessioti,1956,p. 3et 6; K. Zemanek,«Die WiencrKon-
vention über die Staatennachfolgein Vetrage)),FestschriftBir Alfred Verrlross, 1980,
p. 719; M. Jones,«State Successionin Matterof Treatics)),Brirfili YrcrrBook of Inter-
tiutionulLrriv,vol. 24, 1947,p. 360-361. des relations internationales du territoire, abstraction faite de toute
idéede succession des droits et obligations i l'occasion de cet évé-
nement >)124.

Cette définitionde la succession correspond à la notion fondamentale
de ((succession d7Etats» telle qu'elle se dégage de l'étude du sujet à
laquelle a procédéla Commission du droit international. Plus particuliè-
rement :

«La manière dont la Commission a envisagé lanotion de succes-
sion après avoir étudiéla question de la succession en matière de
traités repose sur l'établissement d'une distinctionnette entre, d'une

part, le fait de la substitution d'un Etat à un autre dans la respon-
sabilité des relations internationales d'un territoire et, d'autre part,
la transmission de droits et obligations conventionnels de I'Etat pré-
décesseur à I'Etat successeur ...
Pour préciserla différenceentre le fait de la substitution d'un Etat

à un autre et la transmission de droits et obligations, la Commission
a introduit dans l'article 2 une disposition définissant le sens de
I'expression«succession dYEtats»aux fins du projet. Conformément
à cette disposition, I'expression «succession dlEtats)> est employée
dans tout le projet d'articles pour indiquer simplement un change-
ment dans la responsabilité des relations internationales d'un terri-

toire, ce qui exclut de la définitiontoutes les questions relatives aux
droits et obligations en tant que conséquencesjuridiques accessoires
de ce changement. » '25

Cette distinction s'imposait car

«la difficultétient au fait que I'expression((successiond'Etats» n'est
pas qualifiéedans la définitionqui en est donnéeau paragraphe 16)
de l'article2. On pourrait en déduireque la convention est aussi des-

tinée à s'appliquer a des successions illicites.» '26

C'est pourquoi

«l'article 6 est la clause de sauvegarde la plus importante du projet
d'articles car il préservela légalitéde toutes les dispositions de la
future convention en limitant leur application aux effets d'une suc-
cession légale ...les dispositions de la future convention ne s'appli-

Iz4Projet d'articles la successiond'Etatsen matière detraitAnnuairedelu Coni-
mission(ludroit internation1972,vol. II,p. 249, par. 3.On trouve exactementla même
interprétation danecommentaire relatia l'article2 duprojet d'articles sur la succession
d'Etatsen matièredebiens,archiveset dettesd'Eta(Annuaire(lela Comrnissiondudroit
inrernutionul1981,vol. II,deuxikmepartie, p.20-21).
lz5Annuaire clelu Commissiondu droit it~ter~iatio,972,vol. II, p. 244, par. 29-30.
'26Sette-Camara,Documentsofjîcielsde lu conféret~creiesNations Uniessur la succes-
sioncl'Etarsen rnutièrede traités,pretnlèresesp. 49, par. II. queraient pas aux transferts illicites contraires à la volonté de la
population du territoire et au principe de I'autodéterinination)) lz7.

Ainsi donc, la «succession dYEtats»,((substitution d'un Etat à un autre
dans la responsabilité des relations internationales d'un territoire)) ne
signifie pas ((qu'il y a ipsofucto acte juridique substitutif de la part de
1'Etatacquéreur à l'égardde l'ensembledes droits et des devoirs du sou-

verain pré~édent))"~ ni, comme en l'espèce,qu'il y a adhésionaux traités
internationaux de la République fédérative socialistede Yougoslavie,
Etat prédécesseur.Il faudrait pour cela que la «substitution d'un Etat A
un autre)) se soit produite ((conformémentau droit international, et plus
particulièrement, aux principes du droit international incorporés dans la
Charte des Nations Unies)).

85. Une clause disposant qu'un changement territorial doit s'effectuer
((conformémentau droit international, et plus particulièrement aux prin-
cipesdu droit international incorporésdans la Charte des Nations Unies)),
est d'ordre déclaratif. Ainsi,

«si l'article..ne figurait pas dans la convention, il serait impossible
d'en conclure que la convention peut s'appliquer à des successions
légitimes,du point de vue des principes du droit international, et
notamment de la Charte des Nations Unies, qui est la clef de vollte
de toute convention internationale)) 129.

Le principe sur lequel s'appuie l'article6 de la convention sur la succes-
sion d'Etats en matière de traités coulede source, c'est un axiome dans
tout ordre juridique stricto sensu. C'est la projection focaliséerutiotze
muteriuede la notion générale de la licéitédes actes, I'application de cette
notion de licéité dans le domaine de la succession. Etant donnéI'impor-
tance fondamentale de la notion de licéité pour l'existencemêmede I'Etat

de droit, la règlequi veut que les dispositions d'un instrument de codifi-
cation ne s'appliquent qu'aux faits et aux situations qui sont conformes
au droit international est une présomption d'ordre général, qui se passe
dc ~ommentaire'~".La nécessitérationnelle de l'impératif universel de
licéitéa conduit la Commission à prévoirune règledistincte pour limiter
I'application des dispositions de la convention aux successions licites:

((D'autres membres, en revanche, ont été d'avis de souligner, en ce
qui concerne plus particulièrement les transferts de territoires, que

Iz7Tabibi, Documenrsofficiels de la confereticedes Nations Unies sur la sirccmioti
d'Erarsen niatiérede rroirés,pretniéresession, p. 50, par.20.
Iz8O'Connell,op. cir., p. 3.
lZ9Ushakov, Docurnetlisof~ciels(le la cotfirence clesNuiions Uniessur lusirccession
d'Ernrsen matière(le rraités,preniièresession, p. 51,par.24.
I3O«Admettrequ'hormis certainesexccptionsbien déterminéeus,n acte illiciteou ses
conséquencesimmédiates puissent devenirsitu vigore une source de droit pour
l'auteur,c'cst introduiredans un système juridique unceontradictionqui nc peut
ne peutoffrir aucuneexceptionArcette alternative impéries.H.aLauterpacht,re et
Recognirioniti InrernarioLuic~1947,p. 421.) APPLICATION DE CONVENTION GÉNOCIDE (OP.DISSK . RE~A) 75 1

seuls les transferts se produisant conformément au droit internatio-
nal relèveraient de la notion de «succession d'Etats» aux fins des
présents articles.Comme le fait de mentionner expressémentcet élé-
ment de conformité avec le droit international à propos d'une caté-
gorie de cas de succession d'Etats aurait risquéde donner lieu à des
malentendus quant à la position prise à l'égarddudit élémentpour
d'autres catégoriesde cas de succession d'Etats, la Commission a
décidéde faire figurer parmi les articles générauxune disposition
sauvegardant la question de la licéité de la succession dYEtatsvisée

dans le projet d'articles. En conséquence, l'article6 dispose que les
articles s'appliquent uniquement aux effetsd'une succession d'Etats
se produisant conformément au droit international. >)13'

86. La notification de succession n'est que le moyen technique par
lequel I'Etat successeur se déclare disposé à êtreconsidérécomme tenu
par le traité auquel I'Etat prédécesseurétait initialement partie. Ainsi,
pour qu'une notification de succession produise les effetsjuridiques vou-
lus,il faut que la successionelle-même ait étlicite. Ce critèrede la licéité
de la succession fait partie du «droit international, et plus particulière-
ment [des]principes du droit international incorporés dans la Charte des

Nations Unies)).
En l'espèce,et spécialementdu point de vue de la Bosnie-Herzégovine,
le principe de I'intégriterritoriale et de l'unité politiqueet celui de I'éga-
litéde droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmessont
d'une importance particulière.
La pertinence particulière de ces principes sous l'anglede la succession
découle logiquementde la nature des changements qui ont mis en branle
le mécanismede la succession,et du rôle de l'égalité de droits des peuples
et de leur droit a disposer d'eux-mêmesdans l'édificationdes nouveaux

Etats. C'est pourquoi ces principes, qui figurent dans la Charte des
Nations Unies, ont étésoulignés avectant de relief. Le rapporteur spé-
cial,M. Mohammed Bedjaoui, déclaraitce qui suit dans la proposition
qu'il a présentée à propos de la licéitédes successions:

«Parmi les conditions de la succession d'Etats doivent figurer le
respect du droit international général et esdispositions de la Charte
des Nations Unies sur I'intégrité territoriale des Etats et le droit des
peuples à disposer d'eux-mêmes» .'32

Le préambulede la convention sur la succession d'Etats en matière de
traités«rappel[le] que le respect de l'intégritterritoriale et de I'indépen-
dance politique de tout Etat est exigépar la Charte des Nations Unies)).

13'Documents officielsde lu confirence des Narions Unies surlu successiond'Etufset1
inotièrede truifis, premièresession, p. 255, par.2.
Cinquihe rapportsurla successiond'Etatsdans desmatières ausue lestraitks,
doc. AlCN.41259,Annuairede lu Cotninissiondu droit internafiorial,1972,vol. II,p. 72,
par.28.Cette formule confirme que l'intégritéterritoriale et I'indépendance poli-
tique doivent leur existence à la Charte des Nations Unies et qu'elles
s'imposent donc aux Etats indépendamment dela convention.
87. La proclamation de la Bosnie-Herzégovinecomme ((Etat souve-
rain et indépendant))est à mes yeux une violation fondamentale du prin-
cipe impératif del'égalitéde droits des peuples et de leur droàtdisposer
d'eux-mêmes,tant sur le plan de la forme que sur celui du contenu.

Sur le plan de la forme, les circonstances suivantes attestent une viola-
tion fondamentale:
u) la proclamation de la Bosnie-Herzégovine s'estfaite de manière non
constitutionnelle, contrairement aux dispositions applicables de la
Constitution de Bosnie-Herzégovine etde la Constitution de la Répu-
blique fédérative socialistde Yougoslavie;

h) le droit de disposer de soi-mêmea étédefucto considéréen l'espèce
non pas comme un droit appartenant aux peuples, mais comme le
droit d'un territoire appartenantàun Etat souverain et indépendant.
Sur le plan du fond, lescirconstances suivantes attestent une violation du
principe de l'égalitde droits des peupleset de leur droitdisposer d'eux-
mêmes :

a) la proclamation de I'indépendancede l'entité fédéraq leu'étaitla Bos-
nie-Herzégovine,violant le droit interne de la République fédérative
socialistede Yougoslavie et dela Bosnie-Herzégovine,menaçait I'inté-
gritéterritoriale et I'unitépolitique de la République fédératieocia-
liste de Yougoslavie, contrevenait auparagraphe 7 de la déclaration
relative aux principes du droit international.;
h) la proclamation de I'indépendancede la Bosnie-Herzégovinedans ses
frontières administratives n'étaitpas fondéesur I'égalitéde droits et

le droitidisposer d'eux-mêmes des trois peuples de Bosnie-Herzégo-
vine.
La proclamation de I'indépendanccde la Rosnie-Herzégovine n'était
donc pas conforme aux principes de l'égalité de droits des peuples et de
leur droità disposer d'eux-mêmes:de l'intégritéterritoriale et de l'unité
politique des Etats et, de ce fait même,ne peut fonder une succession légi-
time s'agissant de la successionde la Bosnie-Herzégovine à la convention
pour la préventionet la répression du crimede génocide.

88. Essentiellement, la proclamation de I'indépendancede la Bosnie-
Herzégovineétaitun acte de sécessioii.La Bosnie-Herzégovine neconteste
pas cette affirmation de la Yougoslavie, tiréede l'exposéde la Bosnie-
Herzégovine elle-même q,ui se lit ainsi
«Que la Bosnie,au moment de sa sécession,ait possédé ou non un
droi!à I'autodétermination est dénuéde pertinence car: 1) elle est
maintenant un Etat souverain reconnu, et 2) même si,pour les

besoins du raisonnement, l'on supposait qu'elle ne possédaitpas de
droità I'autodéterminationau regard du droit international, ce der-
nier, certainementn'interciisuitpas qu'elleparvienne au statut d'Etat APPLICATtONDE CONVENTION GENOCIDE (OP.DISS. KRE~A) 753

independant a l'occasion de la désintégrationde l'ex-République
fédkrativesocialiste de Yougoslavie.)>(Exposédu Gouvernement de
la République de Bosnie-Herzégovine sur les exceptions prklimi-
naires, p. 60.)
89. Per d~f;nirionem,la sécessionest«la criation d'un Etat par l'emploi
ou la menace de l'emploi de la force et sans Je consentement de l'ancien

souverain»133.On comprend donc que
«la Charte des Nations Unies ne fasse place ni au terme ni a la
notion de «sécession»,car l'idée estprofondément étrangèrea son
esprit eliises principes normatifs. Elle érigele respecde l'intégrité
territoriale en norme constitutionnelle, en règle de jus cogens. Le

1"'janvier 1970, leSecrélairegénéral de l'Organisation des Nations
Unies a fait la déclarationsuivante:
«Ainsi, il nc saurait y avoir d'équivoquepossible en ce qui con-
cerne l'attitude de l'Organisation quand il s'agit de la secession
d'une régiondonnée d'unEtat Membre. En sa qualitéd'organisa-
tion internationale,'ONUn'a jamaisaccepté, n'acceptepaset n'ac-
ceptera jamais, je pense, le principe de la sécession d'unepartie

d'un de ses Etüts Membres.»134
Le Conseil de sécuritéa qualifié d'illégale la skcession.Dans sa résolu-
tion 169 (1961) relative au Congo, il a notamment:

c<Réprouv[é knergiqucmeat les activités sécessionnistes illégale-
ment menées par l'administration provinciale du Katanga avec
l'appui deressources de l'extérieuret secondées par des mercenaires
étrangers ..et
L)tclïar/é],
................. . .... . .... .,

d) que toutes les activitks sécessionnistesdirigees contre la Répu-
blique du Congo [étaient]contraires A Ia loi fondamentale.»

La qualification d'illégalique le droit international impose implicite-
ment A la sécessionse retrouveà l'alinéa7du paragraphe 5 de la déclara-
tion relative aux principes du droit international touchant les relations
amicales et la coopérationentre les Etats conformémenta la Charte des
Nations Unies, où il est dit notamment que le droit à disposer de soi-
meme ne peut Elrecompris comme

«autorisant niencourageant uneaction, quellequ'ellesoit, qui demem-
brerait ou nieriacerta otalement ou partiellement, l'intégrité territo-
rialeou l'unité politiquede tout Etat souverain et indépendant».

Au niveau régional, celuide l'Europe, on retrouve cettequalification
de la sécessiondans la déclarationsur lesprincipes régissantlesrelations

133J Crawford,The Lrearioof Srnresin Inrsrnnfiol aw, 1979,p. 247.
'3"ONU, Chroniquemensuelle,vol. VII, janvier-dkem1970. APPLICATIONDE CONVENTIONG~NOCIDE (OP. DISS. KRE~A) 754

mutuelles entre des Etats participants, qui figure dans l'acte finalde la
conférencesur la sécurité et la coopération en Europe, adopte le 1"'août
1975 Helsinki :
«Les Etats participants tiennent mutuellement pour inviolables

toutes leurs frontières respectives ainsiue celles de tous les Elats
d'Europe et s'abstiennent donc maintenant ct i l'avenir de tout
attenlal contre ces frontikres)>
On trouve aussi une condamnation explicitede la sécessiondans lesprin-
l cipes générauxde droit reconnus par les nations civiliséesen tant que
source de droit international selon le paragraphe 1 c) de l'article 38 du

Statut de la Cour internationale de Justice. La sécession esttenue pour
un crime des plus graves par kedroit national des nations civilisées.
L'attaque lancée de l'intérieurcontre l'intégriterritoriale d'un pays et la
tentative d'attaque ou la préparation d'une attaque sont plus particulié-
l rement qualifiéesde crimes d'une extrêmegravite dans la quasi-totalité
des codes pénauxdes nations civiliskes.
90. L'admission de Ia Bosnie-Herzégovineau sein des Nations Unies
ne peut remédierau défaut juridique de fond qui entache sa constitution
en Etat indépendant,car il faut bien faire la distinction entre:

«la sécessiondans l'exercicede l'autodéterminationet la sécession en
violationde I'autodeterrnination. Quand le territoire ecauseest une
entitk dotéedu droit ;disposer d'elle-mème,on peut présumer que
tout gouvernement sécessionniste jouit de l'appui généraldu peuple :
en tel cas, Easécession,si l'exercicedu droiA disposer de soi-mEme
est interditpar la force,estréputée se fairc en applicatiori du droit

du territoireA disposer de lui-meme, ou, ;itout le moins, sans en
contredire le principe» lJ5
Il serait difficilede nque son admission rI'Organisarion des Nations
Unies adonné à la Bosnie-Herzkgovineun appui politique généralP . our-
tant, Icsappuis politiques que cela lui a valdc manièregknéralcnc pcu-
vent ni ne doivent être interprétés commu ene validationà posteriori de
sa naissance illégale.Mêmesi telle était l'intentionde l'Assembléegkné-
rale lorsqu'elle a accueilli la Bosnie-Herzégovinecomme membre de

l'organisation des Nations Unies, cette lkgitimation serait juridiquement
impossible puisqu'elle serait une dérogation a cette norme dejus cogens
qu'est ledroit des peuples a disposer d'eux-mêmesO . r, lesnormes dujus
cogens ne souffrent d'aucune exception, et toui régimeou toute situation
qui seraient en concurrence avec lui, qu'ils trouvent leur originedans un
acte bilatéralou dans un acte unilatéral, nepeuvent devenir le droit à
cause du caractère impératifdu jus cugens: pour Etreplus précis,cet acte
resterüit dans le domaine du simple fait. On peut dire qu'il y a là un

J.Crawlord,op. rit., p. 258;voir égalt'opini idiwdueiiedeM. Ammoun
dans l'affaireSuhoru o~cirlt.nC.I.J, Recue1975.p.99-100.exernpIeclassique d'application du principe gknéralde droit qu'exprime
la maxime yuidvuid oh inilioviiiosus est,non polesr fraclu tenzporis
corrvakscere.
A mon avis donc, il faut voir dans l'admission de la Bosnie-Werzégo-
vine à l2Organisatiandes Nations Unies un simple fait, sans rapportavec
la licéitde la naissance de la Bosnie-Herzégovine. Cetteconclusion cor-

respond au fait que
{<lareconnaissance par lesNalions Unies signifiequ'un Etat (ou son
gouvernement) sera invitéaux grandes conférencesinternationales,
autoriséà adhérer à de nombreux traitésinternationaux, à devenir
membre de plusieurs institutions internalionales età envoyer des

observateurs aux autres» 236.
91. En rejetant la troisième exception préliminaiee la Yougoslavie, la
Cour a régléun aspect du problèmede sa compétence rrslionpersonue,
L'autre aspcct dçce problémcestceluidu statut de la Yougoslavieen tant
la convention sur-legénocide.Je souscrisA la conclusion de la
que partie
Cour selon laquelle la Yougoslavie estartie ücetteconvention, maisje ne
peux souscrire 2l'argumentatioiiqui l'a menée ;iconclure ainsi.
A propos de la qualité de partiei la convention de la Yougoslavie, la
Cour déclarece qui suit:
«iln'apasÉtécontestéque laYougoslavie soi1partie àla convention

sur le génocide [et qu'elle]...était liéepar les dispositions de la
convention a la date du dépôtde la requEteen la présente affaire.N.
Carrit, par. 17).
La Cour fonde cette conclusion sur les considérations suivantes:

u) «il n'a pasétécontesté quela Yougoslavie soit partie ala convention
sur le génocide»;
b) «[l]ors de la proclamation de la Républiquefédkrative de Yougosln-
vie,le 27 avril1982, une déclaration formelle a étéadoptée en soi1
nom, aux termes de laquelle:

<<L a épublique fédérativ dee Yougoslavie,assurant la conti-

nuitéde 1'Etatet de la personnalitéjuridiqueet politiqueinterna-
tionale de la Républiquefédkrativesocialistede Yougoslavie,res-
pectera strictement tousles engagementsque la République féde-
rativesocialistede Yougoslaviea prisà l'écheloninternational.))
L'intention ainsiexpriméepar la Yougoslaviede demeurer liéepar
lestraitésinternationaux auxquels étaitparlie l'ex-Yougoslaviea été

confirméedans une note officielledu 27avril 1492adresséeau Secré-
taire généralar la missionpermanente de la Yougoslavieauprks des
Nations Unies.» (Arrêt, par. 17.)

136H.G. Schermers,Inrernariol onsrirutiot~aLl1980,p.929. Je pense comme la Cour que la Yougoslavie est partie à la convention
sur le génocide, maisl'argumentation de la Cour concernant les effets de
la déclaration officiellepubliéele 27 avril 1992me semble impossible à
soutenir.
92. Logiquement, dire qu'«il n'a pas été contesté que la Yougoslavie
était partieà la convention sur legénocide)),c'estdire que la Yougoslavie

est partieà la convention sur le génocideparce que cette qualiténe lui a
pas étécontestée.
Il est vrai que la procédure relative aux exceptions préliminaires se
fonde essentiellement sur l'initiative des parties. Cela nesignifiepas que
les parties ont le droit de se prononcer sur la compétencede la Cour.
On peut dire que la Cour, lorsqu'ellestatue sur des exceptions prélimi-
naires, réalise deux objectifsliésentre eux et interdépendants:

a) I'objectif direct consistant a statuer sur une exception dans un arrêt
((par lequel elle retient l'exception, la rejette ou déclare que cette
exception n'a pas dans les circonstances de l'espèceun caractère
exclusivement préliminaire))(Règlementde la Cour, art. 79, par. 7);

b) l'objectif indirect consistant à vérifierou confirmer sa compétence.
Du point de vue de cet objectif, lesexceptions préliminaires soulevées
par une partie ne sont qu'un instrument, un moyen de procédure
pour établirla compétencede la Cour, suo nomineet suo vigore,car
selon son Statut celle-ci est tenue de le faire non pas proprio motu
mais bien ex officio. Car,

«La Cour est la gardienne de son Statut. II n'est pas dans son
pouvoir d'abandonner ...une fonction qui, en vertu d'une disposi-
tion expresse du Statut, est une garantie essentielle de sa juridic-
tion obligatoire. Elle ne le peut eu égard,en particulier, au fait que
le principe consacrépar l'article 36, paragraphe 6, du Statut est
l'affirmation d'un des principesles plus fermement établisde la
pratique arbitrale et judiciaire internationale et qui est le suivant:
en ce qui concernesa compétence,le tribunal international, et non

la partie intéresséea, le pouvoir de décidersi ledifférenddont il
est saisiest couvert par l'instrument quiétablitsa compétence. ))13'
93. Les représentants qui ont participé à la session commune de

l'Assembléede la République fédérative socialistede Yougoslavie, de
l'Assembléenationale de la Républiquede Serbie et de l'Assembléede la
République de Monténégroont affirmédans leur déclaration du 27 avril
1992 :

«La Républiquefédérativede Yougoslavie, assurant la continuité
de 1'Etatet de la personnalitéjuridique et politique internationale de

IJ7Itirerl~and, sceprionsprélimincriresoC.I.J.Recueil1959,opinion dissidente
de sir Hersch Lauterpacht, p. 104(les italiques sont de moi). APPLICATION DE CONVENTION GÉNOCIDE (OP.DISSK. RE~A) 757

la République fédérative socialistede Yougoslavie, respectera stric-
tement tous les engagements que la République fédérative socialiste
de Yougoslavie a pris à l'écheloninternational dans le passé.

Simultanément, elle est disposée à respecter pleinement les droits
et les intérêtdes républiques yougoslaves qui ont déclaré leur indé-
pendance. La reconnaissance des Etats nouvellement constituésinter-
viendra une foisqu'auront été régléelsesquestions en suspens actuel-
lement en cours de négociationdans le cadre de la conférencesur la
Yougoslavie.
Restant liéepar toutes ses obligations vis-à-vis des organisations
et institutions internationales auxquelles elle appartient, la Répu-

blique fédérativede Yougoslavie ne fera rien pour empêcherles
Etats nouvellement constitués d'adhérer à ces organisations et insti-
tutions, notamment à l'organisation des ~ations-Unies et à ses insti-
tutions spécialisées.
Les missions diplomatiques et consulaires de la République fédé-
rative de Yougoslavie à l'étrangercontinueront, sans interruption, a
s'acquitter de leurs fonctions qui consistentà représenter et à pro-
téger des intérêtdse la Yougoslavie.
à tous les ressor-
De plus, elles offriront une protection consulaire
tissants de la République fédérative socialistede Yougoslavie qui la
solliciteront; en attendant que leur statut national soit définitive-
ment arrêté.
La République fédérativede Yougoslavie reconnaît, simultané-
ment, la pleine continuité de la représentation des Etats étrangers
assuréepar les missions diplomatiques et consulaires de ces Etats sur
son territoire.138

On ne peut retenir cette déclarationcomme fondement pour êtreliépar
la convention sur le génocide, pour deux raisons au moins, l'une de
caractère formel et l'autre de caractère matériel.
La raison d'ordre formel est liée à la nature des déclarations dans
l'appareil constitutionnel yougoslave. Depuis l'édificationde celui-ci, les
déclarationsde l'Assembléeconstituent les décisionsde politique générale
de l'organe représentatif, qui portent sur des problèmes qui échappent
aux textes réglementaires ou à la compétencede l'organe repré~entatif"~.
Actes politiques, ces déclarations n'ont pas force obligatoire, et ne com-

portent d'ailleurs pas de sanction légaleen cas de non-respect de leur
contenu.
Les ((représentantsqui ont participé à la session commune de I'Assem-
bléede la République fédérative socialistdee Yougoslavie, de l'Assemblée
nationale de la Républiquede Serbie et de l'Assembléede la République

-
13Won~titutionde la RCpubliquefédérative eougoslavie,Belgrade, 1992,Nations
Unies,doc. 923877, 5 mai 1992, annexe, .-2.
i39M. Snuderl,Cot~sritutiolalu,Ljubljana, 1957,vol. II, p. 47; A. Fira, Consti~ic-
tiorialLaiv.Belgrade, 1977,p. 381. APPLICATION DE CONVENTION GBNOCID (EP.DISSK. RECA) 758

de Monténégro))et de l'Assembléefédérale elle-mêm nee sont pas des
représentantshabilités à représenter1'Etat à l'étrangerdans les relations
internationales, et lesmesures qu'ilsadoptent, même si ellesnt force obli-
gatoire, ne peuvent donc êtremises en vigueur par des décisions unilaté-
rales d'organes d'Etat A ce autorisés. La raison d'ordre matériel serap-
porte à la teneur de la déclaration. L'affirmation que la République
fédérativede Yougoslavie ((respectera strictement tous les engagements

que la Républiquefédérative socialiste de Yougoslavie a pris à l'échelon
international)) n'yapparaît pasinabstracto, comme une acceptation géné-
rale et inconditionnelle des engagements prisdans le passépar la Répu-
blique fédérative socialiste de Yougoslaviec;'estune formuledéclaratoire,
fondéesur le postulat que la Républiquefédérative de Yougoslavie assure
«la continuité de1'Etatet de la personnalité juridique et politique inter-
nationale de la Républiquefédérative socialiste de Yougoslavie)). Ce qui
n'est pas contestépar la Bosnie-Herzégovine,qui affirme que

«c'est en se fondant sur cette «continuité» présuméeque la Yougo-
slavie (Serbie et Monténégro)se considèrecomme liéepar tous les
engagements internationaux pris par l'ex-République fédérative
socialiste de Yougoslavie)) (mémoire,par. 4.2.2.11).

Selonla déclaration,la République fédérative de Yougoslavie n'assume pas
lesobligations de la République fédérative socialiste de Yougoslavime,ais
((restetenue de tolitesses obligationÙl'égard desinstitutions et des orga-
nisations internationalesdont elle esten~bre»(les italiques sont de moi).
A la session tenue par la chambre fédéralede l'Assembléede la Répu-
blique fédérative socialistede Yougoslavie le 27 avril 1992, session à
laquelle a été proclamée lC aonstitution de la République fédérative de

Yougoslavie, le président de l'Assembléede Serbie a indiqué dans son
discours liminaire que:
((l'adoption de décisions unilatéralespar certaines républiques au
moment où ellesont fait sécessionde la Yougoslavie etlareconnais-
sance internationale de ces républiquesdans les frontières adminis-
tratives des anciennes républiquesyougoslaves ont obligélespeuples
yougoslaves qui veulent continuer de vivre en Yougoslavie àréamé-

nager les relationsàl'intérieurdu pays))
et que «la Serbie et le Monténégrone reconnaissent pas le fait de I'aboli-
tion et de la disparition de la Yougoslavie»'40. Prenant également la
parole à l'ouverture de cette session, le présidentde l'Assembléedu Mon-
ténégro asoulignéque la Serbie et le Monténégroétaient«les seuls Etats

qui avaient conservéleur qualité d'Etat au moment de la création dela
Yougoslavie et qui avaient décidéde réaménagerl'ex-Yougoslaviesur le
plan constitutionnel))14'.
De surcroît, mêmesi la République fédérative de Yougoslavie avait

'40Polirika, Belgr28eavril 199, . 6.
'4'Ibirl.(les italiquessont de moi).exprimé l'intention d'assumerofficiellement les obligations de la Répu-
blique fédérative socialistde Yougoslavie dans cette déclaration,celle-ci,
en tant que texte exprimant cette intention, ne pourrait guèreêtreconsi-

dérée que comme une proclamation politique a laquelle il faudrait encore,
faute de régimede successionautomatique,donner force opératoireselon
les règlesdu droit des traitésapplicablesa la manifestation de la volonté
d'êtreliépar voie conventionnelle.
94. Comme après l'adoption de sa constitution le 27 avril 1992, la
Yougoslavie n'a pas manifestésa volontéd'êtreliéepar la convention sur
le génocide selonlesmodalités prévues a l'articleXI de celle-ci,et comme
elle n'a pas non plus envoyéau Secrétaire générad le l'organisation des
Nations Unies de notification de succession, la seule base juridique qui
permet de considérerla Yougoslavie comme partie a cette convention est
évidemment et exclusivementle fait qu'elle ait assuméla personnalité et
la continuitéjuridiques de la Républiquefédérative socialistede Yougo-
slavieà l'égard destraitésmultilatéraux.
Dans la pratique du Secrétairegénéral en tant qud eépositaire d'accords
multilatéraux, la Yougoslavie est également considéréa e, rès la modifi-
cation territoriale intervenue en 1991et 1992,comme partie aux traités
multilatéraux, bien qu'elle n'ait pas manifesté savolonté d'êtreliéepar

des traitésdans les formes prescrites et qu'ellen'ait pas non plus adressé
au Secrétaire générale,n qualitéde dépositaire, les notifications de suc-
cession voulues. La date à laquelle la République fédérativede Yougo-
slaviea manifesté son acceptationest donnée pourlejour où ellea été liée
par l'instrument considéréS .i l'on regarde par exemple le document inti-
tulé((Traitésmultilatérauxdéposés auprèsdu Secrétaire général »concer-
nant l'année 1992, on constate que la Yougoslavie y figure parmi les
Etats partiesà la convention pour la préventionet la répressiondu crime
de génocide et que c'est le 29 août 1950 qui est donné comme date
d'adhésion a cet instrument, a savoir la date a laquelle la République
fédérative socialistede Yougoslavie l'a ratifié. trouve des dates iden-
tiques dans les éditions de1993et de 1994du mêmedocument. La situa-
tion est la même mutatis mutandis, pour les autres conventions multila-
térales déposéea suprès du Secrétaire général.
TIest donc indiscutable que, dans sa pratique de dépositaire des traités
multilatéraux,le Secrétaire général n'caesséde considérerla Yougoslavie
comme partie à ces traités sur la base de leur acceplation par la Répu-

blique fédérative socialistede Yougoslavie.
95. Conformément à la pratique établie,donc, le ((Précisde la pra-
tique du Secrétaire général - dépositaire des accords multilatéraux))
conclut :

((L'indépendance d'unnouvel Etat successeur, qui exerce par la
suite sa souverainetésur son territoire, est bien sûr sans effet sur les
droits et lesdevoirs conventionnels de 1'Etatprédécesseurui concer-
nent son propre territoire (le territoire restant). Ainsi donc, aprèsla
dissociation de certaines parties du territoire deUnion des Répu- bliques socialistes soviétiques (quisont devenues des Etats indépen-
dants), l'union des Républiques socialistes soviétiques (devenuela
Fédération deRussie) a continuéd'exister en tant qu'Etat prédéces-

seur et tous sesdroits et devoirs conventionnels sont restés valablesà
l'égardde son territoire ...On peut dire la mêmechose de la Répu-
blique fédérativede Yougoslavie (Serbie et Monténégro), qui sub-
siste en tant qu7Etat prédécesseuraprès dissociation de certaines
parties du territoire de l'ex-Yougoslavie, La résolution 4711 de
l'Assembléegénéraleen date du 22 septembre 1992,dans laquelle il
est dit que la République fédérative de Yougoslavie ne peut pas
assurer automatiquement la continuitéde la qualitéde membre de

l'ancienne Républiquefédérative socialiste de Yougoslavie à I'Orga-
nisation des Nations Unies (voir par. 89 ci-dessus), a étéadoptée
dans le cadre des Nations Unies et dans le contexte de la Charte des
Nations Unies, et non pour indiquer que la Républiquefédérative de
Yougoslavie ne devait pas être considéréceomme un Etat prédéces-
seur.» '42

Mais il est dit également:

«la sityation est différente lorsqueI'Etat prédécesseurdisparaît. Tel
a étéle cas lorsque la République tchèqueet la Slovaquie se sont
forméesaprès que leur territoire s'est séparéde la Tchécoslovaquie,
qui a cesséd'exister. Chacun des nouveaux Etats se trouvait alors en
position d'Etat successeur.» 143

Cette pratique est tout à fait conforme à l'interprétationde la résolu-
tion 4711de l'Assembléegénérale des Nations Unies sur laquelle la You-
goslavie s'appuie au demeurant pour soutenir qu'elle n'a pas perdupar le
simple fait d'un changement territorial son statut de partie aux conven-
tions multilatérales.
Il est dit dans la lettre du bureau des affaires juridiques de I'Organisa-
tion des Nations Unies en date du 16avril 1993que:

«le statut de la Yougoslavie en tant que partie aux traitésn'est pas
modifiépar l'adoption par l'Assembléegénérale,le 22 septembre
1992,de sa résolution 4711.Dans cette résolution,l'Assemblée géné-
rale a décidéque la Républiquefédérativede Yougoslavie (Serbie et

Monténégro)ne participerait pas aux travaux de l'Assemblée géné-
rale. Elle ne visait pas la qualitéd'Etat partie aux traités de la You-
goslavie.))
96. Pour en revenir aux considérationsexposéesau paragraphe 297 du

«Précis»,la représentantepermanente des Etats-Unis d'Amériqueauprès
de l'organisation des Nations Unies a protesté, dans la lettre qu'elle a
adresséeau Secrétaire généralle 5 avril 1996 (A151195-Sl19961251 8,avril

142STlLEG.8,p. 89, par. 297.
'43lbidp.,r. 298. APPLICATIONDE CONVENTIONGENOCIDE(OP. UISS. KRECA) 761

1996)'contre la qualification attribuée à la Yougoslavie dans ce docu-
ment. Quatre jours plus tard, le 9 avril 1996, le conseiller juridique de
l'ONU a publié un {(Erratum)} (doc. LA41TR1220) ayant pour but
de faire disparaître du paragraphe 297 du «Précis» la qualification
d'Etat prédécesseurattribukc à la Républiquefédérativede Yougosla-
vie.Des protestations contre cette qualification ont égalementétkelevkes
dans les lettres adresséesau Secrklaire généralpar le représentant per-
manent de l'Allemagne aupris de l'Organisation des Nations Unies
(doc. N50/929-S11996J263,11 avril 1996)et par le chargé d'affairespar
intérimde la mission permanente de la Guinéeau nom de I'organisa-
tion de la conférence islamiqueet du groupe de contact sur la Bosnie-

Herzégovine (doc. M501930-St19961260, 12 avril 1996).Ces deux lettres
étaient datéesdu 10avril 1996,date postérieuredonc àla rédactionet
la publication de l'aErratum>).
Les formes dans lesquelles se présente:cette question concrete btent
toute pertinence aux objections qui viennent d'êtrecitées à l'«Erratum»
du conseillerjuridique. Pour étreplus précis:

u) le fond des objections élevées par les représentants permanents des
trois Eiats Membres de l'Organisation est constitue d'<copinions» et
d'«interprétations)>concernant le statut juridique de la Yougoslavie
qualifiëe d'Etat prédécesseurdans le «Précis dela pratique du Secré-
tairegénéra l dépositairedes accords multilatéraux», plus exacte-
ment aux paragraphes 297 et 298. En d'autres ternes, ces objections
ne visaient pas la pratique de !'Organisation ou de ses organes en
tant que fait objectif intervenu dans ce domaine concrel, mais bien
l'interprétationde cette pratique, telle qu'elleétaitprésentéedans le

«Précis»;
6) par définition, unerratumest une ((erreurde rédactionou faute typo-
graphique dans un texte publiéou écrit)>'a.
Sans soulever mèmela question de savoir sil'<<Erratum»en ques-
tion étaiten l'occurrence justifi,n ne peut qu'admettre qu'ilconcer-
nait certainspassages du «PréciLsde la pratique du Secrétairegéné-
rai..)>(lesitaliques sont de moi). Un <<précisn>'a pas en lui-même la
valeur d'un document autonome, d'un instrument qui détermineou
constitue quelque chose. IIn'estque la synihéseabrégéel,'affirmatioi~
extrinsèque lapidaired'un faitayant une réalité en dehors et indépen-
damment de lui. D'ailleurs, il est dit dans l'introduction du<Précis»

en question que l'objet de celui-ci «est de faire ressortilescaracté-
ristiquesprincipalesde la pratique suivieen cette matièrepar le Secré-
taire général)()p. 1).

11s'ensuitque dans ce cas particulier l'erratum ne met pas en cause
la pertinence de la pratique du Secrétaire générae ln sa qualité de

'4.IVcb~f :erhird N~J~IInIrernarionnlDrctr1966,p.772 APPLICATIONDE CONVENTIONG~ZNOCIDE (OP.DISSK. RECA) 762

dépositaire des traités multilatéraux. Cette pratique, en ce qui
concerne le statut de la République fédérativede Yougoslavie A
l'égard destraités multilatéraux,est uniforme et constante et il n'cst
pas vraiment nécessaired'établirun «précis»qui en ferait ((ressortir
les caractéristiques principales));
c) on ne peut voir dans le fait que le ternie ((Républiquefédérative))
n'est utiliséni avant ni aprèsle nom~Yougoslavie»la preuve qu'il ne
s'agitpas de la Républiquefédérativede Yougoslavie. Le nom ((You-

goslavie)) désigne1'Etatyougoslave, indépendamment des modifica-
tions de fait ou de droit que celui-ci a connues au cours de son exis-
tence, modifications dont son nom est d'ailleurs le reflet. Au moment
par exempleoù la Yougoslavie a assuméles obligations de la conven-
tion pour la préventionet la répressiondu crime de génocide (enaoût
1950), son nom complet était ((Républiquepopulaire fédérative de
Yougoslavie». En vertu de sa pérennitéet de la continuitéde sa per-
sonnalité juridique, la Yougoslavie est partie aux conventions qui
liaientà l'époquede la Société deNs ations, 1'Etatyougoslave, appelé
alors le ((Royaume des Serbes, Croates et Slovènes)).
11s'ensuit que les expressions «ex-Yougoslavie>)ou ((République
fédérativede Yougoslavie (Serbie et Monténégro))) n'ont en elles-
mêmes pas d'autre sensque leur sens épistémologique. u point de vue
de la République fédérative socialistede Yougoslavie, le Royaume
des Serbes, Croates et Slovènes représente((l'ex-Yougoslavie», de la
même façonque la ((Yougoslavie démocratique populaire)) consti-

tuéeà la deuxième sessionde l'assembléeantifasciste de la libération
populaire de Yougoslavie le 29 novembre 1943 représentait ((l'ex-
Yougoslavie)) par rapport Ala République populaire fédérativede
Yougoslavie, crééepar la Constitution de 1946.Le caractère conven-
tionnel de cette terminologie apparaît aussi dans la pratique des or-
ganes principaux des Nations Unies en cequi concerne l'utilisation de
l'appellation ((Républiquefédérativede Yougoslavie (Serbieet Mon-
ténégro)))D. epuis le2 novembre 1995, leConseil de sécurité utilise
dans ses résolutions (résolutions1021et 1022) le terme ((République
fédérativede Yougoslavie)) au lieu de l'ancien terme ((République
fédérativede Yougoslavie (Serbie et Monténégro))), sans que soit
intervenue quelque décision expresseet sans que la situation juridique
ait changépar rapport à celle ou il utilisait, de mêmeque les autres
organes des Nations Unies, le terme ((Républiquefédérativede You-
goslavie (Serbie et Monténégro))).Le fait que cette évolution de la
pratique du Conseil de sécuritédate du jour qui a suivi la signature
provisoire des accords de paix de Dayton donne de bonnes raisons de

conclure que l'usageconcret n'est pas fondésur des critèresjuridiques
objectifs mais plutôt sur des considérations politiques.

97. La pratique du Secrétaire générae l,n sa qualitéde dépositaire des
traités multilatéraux, répond au principejuridique géné qrailveut qu'une
réductionde son territoire ne modifie pas ipsofacto la personnalitéjuri- APPLlCATiON DE CONVENTION GÉNOCIDE (OP.DISS.KRE~A) 763

dique d'un Etat. Ce principe de droit international est profondément enra-
cinédans la pratique internationale '45.Dès1925,l'arbitre en l'affairede la
Dette ottotnune, M. Borel, soutenait que malgréla perte de territoire et

malgréla révolution «la Républiqueturque [était] réputée en droit inter-
national assurer la continuitéde la personnalitéinternationale de l'ancien
empire turc)>'46.Dans la pratique des Nations Unies, ce mêmeprincipe se
retrouve dans l'opinion donnéepar le Secrétariat à propos de la sécession
du Pakistan de l'Inde: «le territoire qui fait sécession,le Pakistan, sera un
Etat nouveau; ..la partie du territoire qui a fait sécessionétaitconsidérée

comme un nouvel Etat; la partie restante a continuéd'êtreun Etat exis-
tant, avec les mêmesdroits et les mêmesdevoirs qu'a~paravantu'~'. On
évoque, à titre d'exception éventuelle,le cas où le changement territorial
affecte le ((nucleusterritorial)) de'Etat148.Mais la Yougoslavie n'est pas
dans ce cas puisque son «nucleus territorial)) a été

98. TIest intéressantde noter que la pratique de la Cour est identique
à celle du Secrétairegénéraldépositaire des traités multilatéraux.On lit
dans l'Annuuire1993-1994de la Cour internationale de Justice que:

«Au 31juillet 1994,la liste des cent quatre-vingt-quatre Membres
des Nations Unies étaitla suivante:
Etat Dure d irdtnissiot~

Yougoslavie . . . . . . . . . . . . . Membre originaire. » I5O

On trouve la mêmeformule dans l'édition précédentd ee l'Annuaire151.
Selon le paragraphe 1de l'article 93 de la Charte des Nations Unies, tous
les Membres des Nations Unies sont ipsofucto parties au Statut de la
Cour internationale de Justice.
La pratique de la Cour coïncide donc tout à fait avec l'interprétation
de la résolution 47/1 de I'Assemblécgénéraleque le Secrétairegénéral

adjoint, conseiller juridique de l'organisation des Nations Unies, a pré-
sentéedans la lettre qu'il a adresséele 29 septembre 1992aux représen-

145Pour D. Anzilotti, il s'agit del'unedes règlesles plus sûres du droitinternational:
«nessun principiopiù sicurodi questone1diritto internazie, dans «La fornazione
del Regnod'Italianei guardidel dirittointernazionale»,Rivistu di dirirto ititernoiionale,
1912, p.9.
1954, p.40.ns K. Marek,ldetlfifyand Continuityof Stores in PirblicInrernafionulLaw,
lJ7Communiqué de pressede l'ONU, PM1473,12août 1947(At~nuaire(lelu Conztnis-
sion cludroit it~tert~ofl,ol. II, p. 101).
148Hall, A Treufiseon Itltert~afionalLaw, 1924, p.22; AmericanSociety of Interna-
tional Law,Panelon ~StateSuccession andRelationswithFederalStates)),Gold Room,
RayburnHouse Office Building,Washington,D.C., E. Williamson, départemendt7Etat
des Etats-Unisd'Amérique1, " avril 1992,p. 10.
149M. Akchursl,A Modern Inrroductionto InfernufionulLo~v(1984),p. 147.
C.I.J. Annuuire1993-1994.no48, p. 69.
C.I.J. Antli~uire1992-1993,no47, p. 61.tants pemianents de la Bosnie-Herzégovine etde la Croatie auprès de
l'organisation, ou il est dit que «la résolutionne met pas fin à I'appar-
tenance de la Yougoslavie à l'organisation et ne la suspend pas»'52.

CINQUIÈME EXCEPTION PRÉLIMINAIRE

99. Dans sa cinquième exception préliminaire,la Yougoslavie soulève
trois points de droit principaux à propos:

u) de la qualification du conflit en Bosnie-Herzégovine;
b) de la nature territoriale ou non territoriale des obligations des Etats
aux termes de la convention sur le génocide;
c) de la nature de la responsabilitéd'un Etat dont il est question à I'ar-
ticle 1Xde la convention.

100. Si l'on prend en considération la nature territoriale des obliga-
tions que la convention sur le génocide imposeaux Etats, la qualification
du conflit en Bosnie-Herzégovine est d'une extrêmeimportance. Que

cette question touche de prèsau fond de l'affaire ne doit pas empêcherla
Cour de
«se livrer à un examen sommaire du fond du différend dans la

mesure ou cela lui est nécessairepour s'assurer que l'affaire fait
apparaître des prétentions raisonnablement soutenables ou des ques-
tions pouvant raisonnablement prêter à contestation, autrement dit
des prétentions ou des contestations qui sont fondées rationnelle-
ment sur un ou plusieurs principes de droit dont l'application peut
permettre de résoudre le différend. L'essentiel,en cequi concerne cet
examen préliminairedu fond, est qu'ilfaudra trancher la question de

la compétenceou de la recevabilitéqui est en cause en considérant
non pas si la prétention du demandeur est fondée maisexclusive-
ment si elle fait apparaître un droità soumettre cette demande à la
décisionde la Cour. >'53

A mon avis, le conflit en Bosnie-Herzégovinene peut êtresimplement
qualifié,comme l'affirmela Yougoslavie, de«guerre civile))ou de((conflit
interne)). Cette qualification ne serait qu'en partie correcte.
Le conflit arméen Bosnie-Herzégovine estun conflit de nature parti-
culière,sui generis, où se mêlent des élémend tse guerre civile et des élé-
ments de conflit international armé.
Les éléments de guerre civilesont de toute évidenceprésents;pourtant,

ils ne sont pas,à mon avis, le trait dominant du conflit. Ils se sont sur-
tout manifestésdans la périodede crise constitutionnelle qui a précédé la

lS2OrganisationdesNationsUnies,Assemblée générdalec,.A/47/48n,nexe,30sep-
tembre 1992.
153Essuisnucléuires,C.I.J. Recueil 1974, opiniondissidMM.edOnyeama,Dil-
lard,Jimknezde Aréchagaet sirHumphreyWaldoçk,p. 364.proclamation de l'indépendancede la Bosnie-Herzégovinepar un parle-
ment incomplet. La phase non active des préparatifsde cette guerre a été
spécialementcellede la créationde milicesnationales (dès1991),alors que
la phase active a commencé avecles attaques lancéescontre les organes
des autoritésfédérales centrales,notamment contre des unitésde l'armée

populaire yougoslave.

Après la proclamation de la souveraineté etde l'indépendancepar le
parlement incomplet de Bosnie-Herzégovine,la guerre est devenue,ce me
semble, un conflit arméinternational, avec pour adversaires un Etat fictif
reconnu de jure (la République deBosnie-Herzégovine)et, en face, deux
Etats defacto non reconnus par la communautéinternationale (la Repu-
blika Srpskaet I'Herceg-Bosna).C'était uneguerredu type bellutnomniurn
contra otntles,ce qu'illustrent éloquemment la guerreentre les autorités
musulmanes de Sarajevoet I'Herceg-Bosnaen 1993et la guerre entre les
autorités de Sarajevo et la Bosnie occidentale, régionmusulmane auto-
nome parallèle proclaméeen septembre 1993.

101. Le passage que la Cour consacre dans son arrêt à la nature des

droits et des obligations des Etats découlant de la convention se lit
comme suit :
«les droits et obligations consacréspar la convention sont des droits
et obligations erga ornnes.La Cour constate que l'obligation qu'a
ainsi chaque Etat de préveniret de réprimer le crime de génocide
n'est pas limitéeterritonalement par la convention. » (Par. 31.)

TIfaut à mon avis bien faire la distinction nette entre, d'une part, la
nature juridique du principe interdisant le génocideet, de l'autre, la mise
en application ou la réalisationde ce principe.
Le principe qui interdit le génocide,norme dejus cogetzs,fixe lesobli-
gations de 1'EtatBl'égardde la communautéinternationale prise dans sa
totalité et, par sa nature mêmc,intéressetous les Etats. En tant que règle
dejus cogetzs,il n'a pas, et ne peut absolun~entpas avoir, d'application
territorialement limitée,telle qu'une certaine fraction de la communauté
internationale n'y serait pas soumise. Autrement dit, I'interdiction du
génocide est une norme universelle qui lie tous les Etats où qu'ils se

trouvent dans le monde.
En tant que norme s'imposant absolument, I'interdiction du génocide
oblige tous les sujets de droit international, en dehors mêmede toute
convention. C'est en cela,et en cela seulement, que cette norme concrète
est d'application universelle (c'est-à-dire erga omnes) et la notion de
((non-territorialité)),autre façon de présenterl'idéed'une application ter-
ritoriale limitée,peut êtreconsidérée commeun aspect de l'essence même
de I'interdiction absolue du génocide.
Les choses se présentent différemmentquand il s'agit de faire respecter
cette norme de I'interdiction du génocideou de lui donner effet. Comme
toute autre règlede droit international, elle est applicable par les Etatsnon pas dans un espace imaginaire mais dans le domaine territorialisé de
la communautéinternationale. Comme l'afait remarquer la Cour perma-
nente de Justice internationale en l'affaire du Lotus:

«Or, la limitation primordiale qu'impose le droit international à
I'Etat est celle d'exclure - sauf l'existence d'une règle permissive
contraire - tout exercicede sa puissance sur le territoire d'un autre

Etat. Dans ce sens, lajuridiction est certainement territoriale; elle ne
pourrait ètre exercéehors du territoire, sinon en vertu d'une règle
permissive découlant du droit international coutumier ou d'une
convention.
.............................

Dans ces conditions, tout ce qu'on peut demander à un Etat, c'est
de ne pas dépasserles limites que le droit international trace à sa
compétence; en deçà de ces limites, le titre à la juridiction qu'il
exerce se trouve dans sa souveraineté. >154

Une telle conception de la compétenceterritoriale amène à considérer
d'une manière généralq eue l'obligation de 1'Etat tenu d'appliquer une
règlede droit international, tant sur le plan prescriptif que sur celui de la
mise enŒuvre, estde nature territoriale. Si tel n'était paslecas, il y aurait

infraction aux principes de l'intégritéterritoriale et de la souveraineté,qui
relèventeux aussi du jus cogens.
102. Quel est le statut de la convention sur le génocide?Pour cequi est
de l'obligation de prévention,elle neconsacre pas le principe de la répres-
sion universelle. Elle opte très clairement pour le principe territorial de
I'obligation de préventionet

«la seule action possible à l'égarddes crimes commis en dehors du
territoire de la partie contractante ne peut ètreque le fait des organes
des Nations Unies, au titre de leur compétence générale)>155.

Ainsi donc,

((lesEtats sont ...tenus de punir les personnes accuséesd'avoir com-
mis les actes tombant sous le coup de la convention dans la mesure
ou ces actes ont étécommis sur leur territoire)) lS6.

L'article VI1 du projet de convention sur le génocideétabli par le
Secrétaire généraé ltaitinspirédu principe de la répression uni~erselle'~~.

Dans son projet de convention, le comité spécialsur le génocidea rem-
placéle texte de cet article VI1et c'est ainsi que «le comité rejetapar
4 voix (parmi lesquelles cellesde la France, des Etats-Unis d'Amérique

Is4Lotus,arrit n9. 1927,C.P.J.I. sérieA no 1p. 18-19.
Is5N. Robinson, Tlie GenociùeConi~ention .ts Origin and Interpretution1949,
p. 13-14.
Is6Ibid.p. 31.
15'DOCE . 11447p.8. APPLICATION DE CONVENTION G~NOCIDE (OP.DISSK. RE~A) 767

et de l'Union des Républiquessocialistes soviétiques),contre 2 avec une
abstention le principe de la répression universelle))Is8.
Une attitude hostile au principe de la répression universelleapparaît

également dans les déclarations et les réservesdont a fait l'objet la
conventionlS9, dans les communications des et des
organisations non gouvernementales dotéesdu statut consultatif auprès
du Conseil économique et social I6l.
Le rapporteur spéciala conclu que:

((puisque il n'existepas de cour criminelle internationale, la question
de la répressionuniverselle devra êtreréexaminée si l'on décidd ee
rédigerde nouveaux instruments internationaux pour prévenir et
réprimerle crime de génocide)) '62.

L'intention de ses auteurs d'instituer sous le couvert de la convention
des obligations territoriales pour les Etats apparaît de façon claire et irré-
futable à I'articleXII, qui se lit comme suit:

«Toute Partie contractante pourra, à tout moment, par notifica-
tion adresséeau Secrétaire générad le l'organisation des Nations

Unies, étendrel'applicationde laprésenteconvention à tous les ter-
ritoires ouà l'unquelconquedes territoires dont elle dirigeles rela-
tions extérieures. (Les italiques sont de moi.)

Il va sans dire que si telle n'avait pas été leurintention, cet ar-
ticle n'aurait ni sens ni logique.
103. Un Etat peut-il êtreresponsable de génocide?Se référantA«la
responsabilitéd'un Etat en matière de génocideou de I'un quelconque
des autres actes énumérés à I'articleIII», la Cour observe que I'articleIX
n'exclut aucune forme de responsabilitéd'Etat et que:

«La responsabilitéd'un Etat pour le fait de ses organes n'est pas
davantage exclue par I'article IV de la convention, qui envisage la
commission d'un acte de génocidepar des ((gouvernants)) ou des

((fonctionnaires. (Arrêt, par. 32.)
Cette position n'est pas à mon avis défendable.
L'article IV de la convention, qui fixe la responsabilité pénale en cas

de génocide ou de I'un des actes énumérés à l'article III, a un sens
double:

a) un sens positif, qui prend son origine dans le principe de la respon-
sabilité individuelle puisqu'ilfixe la responsabilité pénale des«per-

158Voir(Etudesurla questionde la préventet la répressducrime degénocide)),
établieparN. Ruhashyankiko,rapporteur spécl,oc. E/CN.4/Sub.2/416,4juillet 1978,
p.49.
'"9Ibid .,52-55.
Ibid .,55.
16*Ibic l.56. APPLICATION DE CONVENTIONGÉNOCIDE (OP.DISSK. RE~A) 768

sonnes ...qu'elles soient des gouvernants, des fonctionnaires ou des
particuliers)). Cette règle relèvede lales lata,parce que:
«la pratique internationale d'après la seconde guerre mondiale a
fait constamment l'application du principe de la responsabilité

pénale individuelleen matière de crimes de droit international
parmi lesquels se place le génocide»Ia;

6) un sens négatifqui est celui de I'exclusionde la responsabilité pénale
des Etats, des gouvernements ou des autoritésdes Etats et du refus de
reconnaître la validitéen cette matière de la doctrine de l'acte d'Etat.
Cette conception a une expression en droit international positif.
Lorsqu'elle a élaboréle projet de code des crimes contre la paix et la
sécuritéde l'humanité,la Commission du droit international a notam-
ment conclu ratione persoue:

«En ce qui concerne le contenu rafione personae, la Commis-
sion a estiméque ses efforts devaient à ce stade être consacrés
exclusivement à la responsabilité pénale des individus. Cette dé-
marche s'expliquepar l'incertitude qui pèseencore sur le problème
de la responsabilitépénaledes Etats ...II est vrai que la responsabi-

lité criminelle des individun'écarte pasla responsabilité internatio-
nale des Etats en ce qui concerne les conséquencesdes actes com-
mis par lespersonnesagissanten qualité d'organes ou d'agentsde ces
Etats. Mais cette responsabilitéest d'une autre nature, et elle s'ins-
crit dans le concept traditionnel de la responsabilitédes Etats ..la
question de la responsabilité pénale internationale devait être
limitée,au moins au stade actuel, àcelledes individu^.))'^“

La solution que consacre l'article IV de la convention répond à une
conception plus généralede l'impossibilité d'établirla responsabilité
pénale des personnesjuridiques (societas delinquere non potest).
Cette façon de voir les choses prend pour postulat que le phénomène
du délit criminelne peut être quele fait de l'homme, c'est-à-dire qu'il ne

peut êtrequ'un acte matérielou une omission. Comme les Etats sont des
entités juridiques de nature abstraite, des personnes sans corps matériel
qui ne peuvent avoir de responsabilité pénale,ilsne peuvent perpétrerdes
actes criminels.
Est-il vraiment nécessairede dire que la nécessitéde sauvegarder les
valeurs essentielles de la communauté internationale soulève laquestion
de la responsabilité pénalede I'Etat, telle qu'elle s'illustre notamment

<Etude surla question de la prévention etla repressiondu crime degknocide)),
etablieparN. Ruhashyankiko,rapporteur spécil,oc. WCN.4ISub.î/415,4 juillet 1978,
p. 36, par. 151.
Rapport dela Commission dudroit international sur les travaudxe sa trente-
sixièmesession, 7mai-27 juillet 1,oc. A139110,Artnuairede lu Coniniissiorrdu droir
interr~arion,984,vol. II,dcuxiemepartie, par.32. APPLICATION DE CONVENTION GBNOCID (OEP.DISS.KRE~A) 769

dans le projet de code des crimes contre la paix et la sécuritéde I'huma-
nité?'6sEn théorie,la qucstion de la responsabilitk pénalede IyEtats'ins-
crit dans le schémaparfait du modèle opposant autorité de 1'Etat à la
délinquancede I'Etat, c'est-à-dire dans le schémade la responsabilité col-
lective simultanée de 1'Etat dans sa personne juridique et dans sa per-

sonne physique, qui est sa représentation politique.
Pourtant, les textes dont on vient de parler ne sont que des projets qui,
quelle que soit au demeurant leur pertinence, n'ont pas encore trouvéleur
place dans le droit international positif. Ce simple fait, quelles que soient
les circonstances concrètes d'une affaire, interdità la Cour, autorité qui
applique le droit positg à des cas particuliers, de tenir compte de ces
textes ou de leur reconnaître aucune autorité. La Cour déborderait sinon

les frontières de sa fonction judiciaire fondamentale pour entrer dans
le domaine législatifou quasi Iégi~latif'~~.
104. Mêmedans l'hypothèse ou, tructu temporis, depuis l'entréeen
vigueur de la convention, la responsabilité pénaledu génocide oude tout
autre acte visé à l'article II1serait étendue aux Etats, la validitéde cette
extension en I'espèceserait tout àfait discutable.

La problématique repose sur la naturede la clause compromissoire que
constitue l'article TXde la convention.TIest certain que la reconnaissance
de la compétencede la Cour à l'égarddcs différends relatifs à I'interpré-
tation,à l'application ou à l'exécutionde la convention est antérieure à la
règlegénéraledu caractère facultatif de la compétencede la Cour en droit
international. Cela a deux conséquences,sur le plan juridique et métaju-
ridique. Sur le plan juridique, un précédentdoit êtreinterprétéstricte-

ment'", surtout lorsqu'il s'agit de restreindre les droits souverains des
Etats. En l'espèce,la Cour a compétenceàl'égarddes différends((relatifs
à l'interprétation, l'application ou I'exécutionde laprésente convention»
(les italiques sont de moi). En d'autres termes, en vertu de l'article IX de
la convention, la Cour a compétence pour réglerles différends relatifs
aux dispositiotzs pertit~entes de lu conventiomais non les différendsqui
concernent les règlesqui pourraient exister cn dehors de son cadre même.

Sur le plan métajuridique, l'élargissementde la compétencede la Cour
au-delà des dispositions dc l'articleXde la convention aurait pour effet,
en bonne logique, d'empêcherles Etats d'agir dans les autres différends.
Le fait qu'un Etat soit manifestement disposé à accepter la compétence

165Annitaire dela Conm~isnlildroititi~ert~aal,76,vol.II, deuxièmepartie,p. 7-18.
«[O]nne saurait exagérerla gravitédu crimede génocide,et tout traitéconçuen vue
desa répressionmérite l'interprétala plus extensive.Toutefois, la convention
sur legénocidest un acteconçu pour produire deseffetsde droit en créant entreles
Etats qui sont parties des obligationsjuridiques; c'est pourquoi il nous a paru
nécessairede l'examineren fonction de son fondement de droit.))rveà la
tarif. C.I.J. Recireil1951, opinion dissidentede M. Guerrero, sir Arnold McNair,
MM. Read et Hsu Mo, p. 47.
16'C.P.J.I. sérieAn0 7, 76. obligatoire de la Cour à titre géntral se trouverait corroboré si la Cour
prenait une telle initiative.
105. L'article 1X de la convention se lit comme suit:

«Les différendsentre lesParties contractantes relatifsi I5interpré-
tation, l'application ou l'exécutionde la présente convention,ycom-
pris ceux relatifs5 la responsabilitéd'unEtat en matière degénocide
ou de I'unquelconque desautres actes énurnércs à I'articleIll, seront
soumis à la Cour internationale de Justice, Ala requêitd'une partie
au différend.D

Si l'on veut déterminerle sens véritablede l'expression «responsabilité
d'un Etat en matière degénocideou de l'un quelconque des autres actes
énumérés à l'article JIID,il faut s'arrèter sur plusieurs considérations
décisives:

n) L'article 1X est de la nature des clauses compromissoires clas-
siques. Disposition de procédure,il vise à déterminerla compétencede
la Cour dans le domaine dilimitépar «l'interprktation, l'application ou
l'exécution» desdispositions en cause de la convention. C'est pourquoi
aucune interprétation de l'article IX ne peut in concretodépasserlesdis-
positions relatives à la responsabilitépénale individuelleque contient
l'articleIV de la convention (voir ci-dessus par. 101). Comme l'ont
exprimé avec vigueur sir Percy Spender et sir GeraldFiamaurice dans

leur opinion dissidente commune dans l'affaire du Sud-Ouesf ufriçai : n
«Le principe d'interprktarion qui tend A donnes aux dispositions
leur maximum d'effet utile nc saurait légitimentètre invoque pour
introduire ce qui kquivaudraiti une revision de cesdispositions.»Ibn

l b) Le membre de phrase «la responsabilitéd'un Etat en matiére de
génocideou de I'unquelcoriquedes autres actes énurnérks a l'article111))
est abstrait et d'une ampleur floue, notamment du point de vue de la
convention sur le droitpénal «oh il faudrait évitede donner a 1'Etatle
caractere d'une fictionjuridique, procédèqui nc saurait êtreutiliséqu'en
matièrecivile ou coin merci ale1^'.De surcroît, le terme «responsabilité
d'un Etal» apparait dans les dispositions de procédurede la convention.

Il n'est pas utilisédans le dispositif pour qualifier une conséquencepos-
sible du crime de ginocide. La raison en est manifestement que l'on a
opté pour la responsabilité pbnale individuelle en cas de génocideou
d'acte répréhensible connexe.
Manley Hudson conclut en effet:

«L'article va plus loin cependant en dkclarant «cornpris» les dif-
férends({relatifshla responsabilitéd'un Etat en matiérede génocide
ou de I'un quelconque des autres actes énuméré s I'article III».
Cornme aucune autre disposition de la convention ne traite expres-

"jYCI R~LUPI I962, p468.
'59N. Ruhashyailkiko,opcr, p.82,par.314. sémentde la responsabilitéde I'Etat, on voit mal comment un diffé-
rend dont cette responsabilité ferait l'objetpourrait être((compris))
parmi les différends relatifs a l'interprétation,à l'application ou à
l'exécutionde la convention. Comme lesparties s'engagent à I'article
premier à prévenir le génocide,on peut concevoir qu'un différend
relatifà la responsabilitéd'un Etat soit un différend relatif à I'exé-

cution de la conveiition. Pourtant, si on la considère dans son en-
semble, celle-ci ne vise que le châtiment des individus; elle n'entre-
voit pas du tout la répression desEtats, exclued'ailleursà I'articleV,
où les parties s'engagent à prendre les mesures législatives néces-
saires. La «responsabilitéd'un Etat)) dont ilest question a I'article1X
n'est donc pas la responsabilitépénale.»

Le véritable sens du terme ((responsabilité d'un Etat)) est donc à
rechercher à la lumièrede la responsabilité desobligations assuméespar

les parties en vertu de la convention. Ces responsabilités primaires sont
précisées aux articles V et VI, et elles couvrent:

- l'obligation de prendre les mesures législatives nécessairespour as-
surer l'application des dispositions de la convention;
- l'obligation d'intenter contre les personnes accuséesde l'un des actes
énumérés A I'articl111 de la convention une action devant les tri-
bunaux compétents de I'Etat sur le territoire duquel l'acte a été com-
mis.

L'obligation qu'ont les parties contractantes de ((prendre ... les me-
sures législativesnécessaires)) et de punir les personnes coupables de
génocide ou d'actes relatifsau génocideconstitue une forme de respon-
sabilitéinternationale de I'Etat, responsabilitéà l'égard des intérêf ton-
damentaux de la communauté internationale considéréedans sa totalité
et inscrite dans la norme qui interdit le gcnocidc.
Etant donné la nature de ces obligations, il est difficilede ne pasnsi-
sidérercomme Icrapporteur spécial,M. N. Ruhashyankiko, que, «au stade
actuel de développement du droit international pénal, I'Etat ne saurait
avoir qu'une responsabilité politique pour les crimes internationaux»I7'

ou, pour êtrepeut-être plusprécis,que 1'Etatpeut êtrepolitiquement res-
ponsable au premier chef s'il manque a assumer les obligations qui
concernent l'interdiction et la répression des crimesinternationaux.
c) Faire de 1'Etat le responsable du crime de génocide,au sens de la
responsabilité essentiellement politique, n'exclut pas priori sa responsa-
bilitécivile. En matière de génocide,celle-ci a deux aspects:

17"M. M. Whiteman,Digest of lt~ten?atiot~aL1,968,p. 857.
17'((Etudesur la qucstion de la prévention etla répressiondu crimedc génocide)),
N. Ruhashyankiko, rapporteur spécial/,CN.4/Sub.2/416,4juillet 1978, p. 38, par. 159. i) responsabilitécivilepour lecrime de génocidecommissur le territoire
lui-même,
ii) responsabilitécivilepour lecrime de génocide commissur le territoire
d'un autre Etat.

Dans le premier cas, ce serait la responsabilitécivile en droit interne
qui serait évaluéee ,t jugéedans toute son étendue,par les autoritésjudi-
ciaires nationales de la partie contractante.
Le deuxième cas est qualitativement différent.Si on laisse de côtéles
conditions dans lesquelles un Etat peut êtretenu responsable d'un géno-
cide commis sur le territoire d'un autre Etat, la responsabilitécivile peut
opérer en deux temps. La première phase comprend les demandes en
réparation adresséesaux autorités compétentes de 1'Etatresponsable du

génocideet jugéesselon les procédures établiespar le droit interne de
celui-ci.La deuxième phasecomprend l'action entreprise devant lajustice
internationale en réparation des préjudices subisdu fait d'un génocide,
les parties en cause étant I'Etat responsable du génocideet I'Etat sur le
territoire duquel celui-ci a étécommis. C'est-à-dire que l'on retrouve le
cas typique de la responsabilité civile infernationale de I'Etat. Etant
donnéque le groupe national, ethnique, racial ou religieux qu'ils'agissait
de mettre a l'abri du crime de génociden'a pas devant la Cour de locus
standi, c'est I'Etat sur le territoire duquel le crime a étéperpétré qui doit
épouserla cause de ce groupe ((national, ethnique, racial ou religieux))

une fois épuisés les recours prévuspar le droit interne.
Je suis convaincu que la responsabilitécivile internationale des Etats
pour crime de génociden'entre pas dans les prévisionsde la convention.
Si tel étaitle cas, cette disposition serait, cela va sans dire, susceptible de
multiples analyses, mais il est difficilede tirer une quelconque conclusiori
sur la force qu'aurait alors la notion de responsabilitécivile internatio-
nale dans la convention sans s'aventurer dans les conjectures juridiques.
On admet facilement que le principe de la responsabilitécivileinternatio-
nale de 1'Etaten cas de génocide renforcerait l'interdictionde celui-ci.En

l'espèce,pourtant, la question porte sur la définitionde la responsabilité
pour génocide endroit positif et non pas sur les solutions qui seraient
les meilleures in abstracto. Comme l'a dit M. Whitaker, rapporteur
spécial :

((11est..recommandé,lors de la revision de la convention, d'envi-
sager ...d'inclure dans cet instrument des dispositions concernant la
responsabilité desEtats en cas de génocideet la réparation de tels
actes.» '72

"* Examendes faits nouveauxintervenusdans les domainesqui ont déjà fait l'objet
d'unétudeou d'une requête d epartde la sous-commission- version revisée et màe
jour de I'«Etudesurla questionde la préventet la répressidu crimede génocide)),
établieparM. B Whitaker(EICN.4ISub.7I1985/62, juillet 1985,p. 30. par. 54). SIXIÈME EXCEPTION PRÉLIMINAIRE

106. Quant à la sixièmeexception préliminaire de la Yougoslavie, la
Cour conclut que:

«La Bosnie-Herzégovinepouvait devenir partie à la convention
par l'effetdu mécanismede la succession dYEtats.Du reste, le Secré-
taire général desNations Unies a considéréque tel avait étéle cas))
(arrêt,par. 20),

et que

«la Cour ne considère pas nécessaire,pour déciderde sa compétence
en l'espèce,de se prononcer sur les questionsjuridiques concernant
la succession d'Etats en matière de traités qui ont été soulevéep sar
les Parties. Que la Bosnie-Herzégovine soit devenue automatique-

ment partie iila convention sur legénocide à la date de son accession
à l'indépendancele 6 mars 1992,ou qu'elle le soit devenue par l'effet
- rétroactif ou non - de sa notification de succession du 29 dé-
cembre 1992, en tout étatde cause, elle y était partie à la date du
dépôtde sa requête,le 20mars 1993.))(Par. 23.)

107. A mon avis c'est le contraire qui est vrai. Nul ne nie que la Bos-
nie-Herzégovine((pouvait devenir partie à la convention par le méca-
nisme de la succession d'Etatsu. Mais la vraiequestiorzn'est pas de savoir
si la Bosnie-Herzégovine pouvcrit((devenirpartie », puisque tout nouvel
Etat en a en principe la faculté, mais bien de savoir si elle estdevenue

partie à la conveiztionpar I'effiitdu rriécaizisrridee la successiond'Etats.
Le fait que le Secrétaire généraa lit ((considéréque tel avait étéle cas»
n'est pas décisif,ses fonctions de dépositaire ayant une portéeclairement
définieen droit international positif. Comme le dit le commentaire de
l'article 72 (((Fonctions des dépositaires)))de la convention sur le droit
des traités:

«un dépositairea, dans certaines limites, le devoir d'examiner si une
signature, un instrument ou une réservesont conformes aux dispo-
sitions applicables du traitéou des présents articles et,le cas échéant,
d'appeler sur cette question l'attention de 1'Etat en cause. Mais le
devoir dudépositaire à cet bgarcls'arrêtelu. IIn'entrepas dans les
jonctions du clépositairede se prononcer sur la validitéd'un instru-

ment ou d'unerbserve. »173
Autrement dit, il est bien établique «le dépositairen'est lzabiliténiù stu-

17'Nations Unies,Docun~etlisofficielsde la corfbrencesur le droirdes frailés.prrtnibre
et detisiè»resessiotl, Vienne, 26 mai 1968et 9 avril-22 mai 1969p,. 964 (les
italiquessont de moi).tuer ai à prendre de dkcisionssur des questiun~liees à I'uccnrnpli~semenr

desr5fonctions» Il4.
A mon avis, la Cour devait sedemander si la Bosnie-Herzégovineétait
devenue partieàlaconvention par lemécanismede la succession,du point
dc vue entout cas de laYougoslavie,pour les deux raisons suivantes:

- Sur le plan formel, il y a un diffkrend entre la Bosnie-Herzégovineet
la Yougoslavie parce que les positions des parties sur la «succession
automatique» sont diamétralement opposées.Alors que la Bosnie-
Herzégovineconsidèreque la succession automatique fait partie du
droit international positif et soutient par conséquentqu'elle a «suc-
cédéuuiomatiquement la convention sur le la You-

goslavie le nie, soutenant que {(leprincipe de la «table rase)}est et
demeure en vigueur en tant que norme de droit international coutu-
mier pour les nouveaux Etat~kj'~~.
(On notera que des expressions comme «succession automatique

en ce qui concerne la convention sur le génocide»ou «est automati-
quement devenue partie par succession à la convention sur le gkno-
cide})ne sont pas assez précises etsont pourcette raison incorrectes.
L'objet dela succession n'est pas le traite, en tant qu'acte juridique,
mais le statut des parties i un traitéparticulier et/ou leurs droits et
leurs devoirs à l'égardde ce traité.Si les traités,en tant qu'actesjuri-
diques, étaient l'objet de la succession, cela vaudrait aussi pour les

traitésdont les obligations ont été accompliesq ,ui seraient aussi va-
lables qu'auparavant mêmes'ilsn'ont plus qu'un interet historique,
ce qui n'est évidemmentpas le cas ici.)
- Sur le plan matériel,la Bosnie-Herzégovinen'ayant pas manifestela

volontéd'etre liéepar la convention dans lesformes prescrites par
l'articleXI de celle-ci,les règlesde successionsont le seul mécanisme
que l'on peut invoquer pour dire qu'elle est effectivement parlie à
cette convention.

108. La convention sur le génocide est, par nature, un instrument
conventionnel dc droit international pénal. Cela tient h sa matièremême,
et n'a pas vraiment a ètredémontré.Une convention qui a pour objet de
définirct de riprimer le génocide entant que crime de droit international
et dont Icsdispositions sont mises en application par le droit pénal de
chaque pays pourrait difficilementsedéfinirautrement. 11faut considérer
aussi que, dans une communautécomme la communautéinternationale,

beaucoup de conventions et autrcs instruments juridiques internationaux
ont une significationhumanitaire direcle ou indirecte. Cette signification

Nations Unies,DocurnenrsSficzeselu~onfirensc ur le drocle~snirbpremrère
etrlr~csilrsession, Vienne,26mars-24mai 196ct9 avril-mai 1969,p. 97, par. 8 (les
italiquessont dmoi)
f75Exposkdu Gouverncmenl de laRépubliquede Bosnie-Herzegovinesur lescxcep-
tions préliminaires1,4 novemb1495,par. 6.9, p. 55 (les itasontde moi)
Exceptionsprclirninaide la Republiqufédérativde Yougoçlavie,par. B1.4.10. APPLICATION DE CONVENTION G~NOCIDE (OP.DISSK . RE~A) 775

est la conséquence logiquedu fait qu'en dernière analyse lacommunauté
internationale est le genre humain (genushumunum)et que, dans un sys-
tèmedont les sujets fondamentaux, les sujets originels, sont des entités
abstraites, c'est en définitive l'individuque visent les règlesdu droit. On
ne peut pourtant en conclure que la convention sur le génocide est une
convention humanitaire, une convention qui ressortit au droit humani-
taire, car ce terme désigne desrèglesconsacréespar les traitéset la cou-
tume internationale ayant pour objet de ((réduireou limiter les souf-
frances des individus et circonscrire le domaine dans lequel est autorisée
la sauvagerie des conflitsarmés»'77(on rappellera d'ailleurs que le nom
complet de la conférencede Genèvede 1974-1976qui a adopté les pro-

tocoles 1 et II était ((Conférencediplomatique surla réaffirmation etle
développement du droit international humanitaire applicable dans les
conflits armés))).
Si l'on qualifiaitd'«humanitaires» les conventions ou les autres instru-
mentsjuridiques internationaux au vu de leur importance directe ou indi-
recte pour le statut juridique des individus, on transformerait la plus
grande partie du droit international en ((droit humanitaire)). Ainsi conçu,
le ((droit humanitaire)) engloberait tous les instruments relatifs au statut
des minorités, audroit des peuples à disposer d'eux-mêmes, à la répres-
sion des actes de terrorisme et, d'une manière généralet,outes les conven-
tions conclues dans le domaine du droit international pénal.

Le terme ((conventionhumanitaire)) ou ((convention de nature huma-
nitaire)) sert apparemment à faire valoir l'importance de la convention
dont il s'agit. Pourtant, les qualificatifs de ((conventionhumanitaire)) ou
de ((convention relative aux droits de l'homme)), etc., ne renvoient pas,
en toute logique,à l'autoritéjuridique de l'instrument: ilsdénotentplutôt
le fait que celui-ci appartientà une certaine catégorie, unespecies, de
l'appareil du droit international. C'est d'une autre terminologie qu'il faut
user pour exprimer l'importance d'une convention, et, dans les circons-
tances concrètesde notre affaire, dire que la convention sur le génocide
est une ((conventionde portée générale multilatéralde'intérêu tniversel)).
109. L'article34 de la convention sur la succession d'Etats en matière

de traités de 1978 (((Succession d'Etats en cas de séparation de parties
d'un Etat))) dispose notamment ce qui suit:
((1.Lorsqu'une partie ou des parties du territoire d'un Etat s'en
séparentpour former un ou plusieurs Etats, que 1'Etatprédécesseur
continue ou non d'exister:

a) tout traitéen vigueur a la date de la succession d'Etatsà l'égard
de l'ensembledu territoire de 1'Etatprédécesseur reste en vigueur
à l'égardde chaque Etat successeur ainsi formé)).

La disposition pertinente de l'article citéa éformulée en termesde suc-
cession automatique. Elle répondsur le plan théoriquea une conception

877J.G.Starke,Inrrodncriontu Inrrn~atiLaw, 1989,p. 553. AI~PLICATIONDE CONVENTION GÉNOCIDE (OP. DISS.KRECA) 776

de la succession universelle inspiréed'une stricte analogie avec la notion

d'héritageen droit civil etlou avec celle de succession légale(substitution
+ continuation) selon laquelle «[Iy]Etatsuccesseur en droit international
succèdeaux droits et obligations de son prédécesseur,qui deviennent les
siens» '78.
In concreto, la question fondamentale est cellede la qualitéde la «suc-
cession automatique)) prévue à l'article 34 de la convention de 1978:
relève-t-elleou non de la Iex Iutu,du droit international positif?

110. Pour répondre à cette question fondamentale, il faut:

a) évaluerla solution fixéeau paragraphe 1de cet article du point de vue
du droit des traités;
b) l'évaluer aussidu point de vue de la pratique des Etats antérieure à la
convention de 1978;

c) évaluer enfin la pratique des Etats postérieure à l'adoption de la
convention en août 1978.

L'article 34 («Succession d'Etats en cas de séparation de parties d'un
Etat») fait partie intégrante de la convention et la règlequ'il consacre est
une règlede droit conventionnel qui a le mêmestatut que la convention

tout entière. L'article49 de celle-ci(«Entréeen vigueur))), dispose:

«1. La présente conventionentrera en vigueur le trentième jour
qui suivra la date du dépôtdu quinzièmeinstrument de ratification
ou d'adhésion. »

Comme cette condition n'a pas été rempliel,a convention ne s'est pas ins-
crite dans le contexte du droit positif. Par conséquent, la règlefixéeau
paragraphe 1de l'article 34 est encore de legeferendu.

Cette règlepourrait évidemmentrelever de la les luta en dehors du
cadre de la convention si elle exprimait le droit coutumier existant. Mé-
rite-t-elle ce qualificatif de règlede droit coutumier?

Dans la conception courante du droit coutumier, à laquelle la Cour
a souscrit'79,la création d'unerèglede droit international coutumier dé-
pend de «deux élémentsgénérateurs:1) la pratique générale desEtats;
2) l'acceptation par les Etats de cette pratique générale entant que règle
de droit »IX0.
L'analyse de la pratique internationale dans le cas où certaines parties

'78«Der Nachfolgerdes Volkcrrechtsaber tritt inRechtc und Pflichtenscines Vor-
gangersso ein, alswarenes scineeigenen))(H. M. Huber,Beirragezu einrr Lekre sonder
Sruuterisuccessio,erlin, 1897,p. 14).
Voir,parexemple,Ploteoircotiti~iel lurnerdirNord. C.I.J. Rec~~il1969,p.44,
par. 77.
InuCi.Schwarzenberger, Manunlof hrernorionnlLIW, 1967,p. 32. d'un Etat se séparentde celui-ci tandis que cet Etat continue d'exister
amine à deux grandes conclusions :

a) Sur le plan quantitatif, ilestdifficilesinon impossiblede parler d'une
pratique généralisée C.omme le constate objectivement la Commission
du droit international dans ses commentaires sur l'article 33 (({Succes-

sion d'Etatsen cas de séparationde parties d'un Etat>))et sur l'article 34
I (({Casde 1'Etatqui subsiste apres séparation d'une partie de son terri-
taire») de son projet: <<Depuis la créationde l'ONU, les cas dc sépara-
tion aboutissant i la créationd'un Etat nouvellement indépendant ..ont
été relativement peunombreux. » IslLa pratique antérieure Acette période
ne modifie pas fondamentalement cette conception car {(Avant la crea-

tion de l'ONU, les colonies étaient à tous points de vue considérées
comme des territoires de la puissance coloniale>>et cccertainsdes précé-
dents habituellçmcnt cités... dans les cas de sécessionconcernaient la
sécessionde colonies»ls2. II serait préfkrablect plus juste de parler de
précédentsassez nombreux.

h) Sur le plan qualitatif, ces précédentsfont apparaitre une position
identique à l'égarddes traitks de 1'Etatprédécesseur:les Etats nouveaux
n'étaientni liéspar ces traitésni habilitesipsojure iiassurer la continuité
des traités antérieurs à leur propre indépendance.Si l'on considère la
périodeantérieure la créationdes Nations Unies,

<([l]aplupart des auteurs considèrent, et cette façon de voir est
confirméepar la pratique des Etats, qu'un Etat nouvellement coris-
titué«fait tablc rase», saufpour ce qui est des obligations <<locales»

ou «réelles>) 183
Quant i la pratique de l'èrede l'organisation des Nations Unies,elleest

illustréepar le commentaire de l'article 33 du projet (article 34 de la
convention),qui cite lesexemplesdu Pakistan et de Singapour. Le cas du
Pakistan est considérkconinle un exempled'application du principe selon
lequel, au moment de sa sécession,le nouvel Etat se trouve devant une
«table rase)),au sens qu'il n'est n~~llemen tbligk d'accepter lemaintien
en vigueur des traites conclus par son prédécesseu rH4.Pour ce qui est de
Singapour, et malgré l'«accord dedévolution» de 1965, ce pays «a

adopté une attitude semblable a celle d'autres Etats nouvellement indé-
pendants~, Bsavoir que: «Tout en se montrant disposéea maintenir en
vigueur lestraites conclus par la Fédkrationen vigueur, Singapour consi-
dérait que le maintien en vigueur relevaitdu consentement

'81Projetd'articlessur la successiond'Etatsen matièrede trait&,avec commentaires,
adopti.parlaCommissiondu droitinternationai sa vingt-sixdmesession,Do~umenisde
la roiifrvrnce des NatronsUnresIusuccessrond'Etuf~enniuiièrdr fruit&. srdsicle
1977 cireprise dIn sessioen 1978,vol. 111,p. 102,pa17.
IBZIbld p.,101,par. 12,
Ia3Ibid.p. 44,par 3
'a4Ibid , p 102,par. 17
Ix5Ihid., p. 1et suiv., par 18. La Commission du droit international a considéréque le cas du Pakis-
tan était «un peu spécial)) lS6,sans doute parce qu'il faisait l'objet d'un
avisjuridique du Sccrétariatde I'ONU. Le passage pertinent de cet avis
se lit comme suit:

«1. Du point de vue du droit international, on se trouve en pré-
senced'un cas ou une partie d'un Etat se détache delui et devient un
nouvel Etat. Sous cet angle, il n'ya pas dechangement dans le statut

international de I'lnde; elle demeure un Etat, et conserve tous les
droits et obligationsdécoulant des traités et,par conséquent,tous les
droits et obligations attachés à la qualitéde Membre des Nations
Unies. Le territoire qui se détache,le Pakistan, sera un nouvel Etat,
qui n'aura pas les droits et obligations conventionnels de I'ancien
Etat, et qui ne possédera évidemment pasla qualitéde membre des

Nations Unies.
En droit international, la situation est analogue a cequi s'estproduit
quand 1'Etatlibre d'Irlande s'est séparéde la Grande-Bretagne ou la
Belgiquedes Pays-Bas.Dans ces cas, la partie qui s'estdétachée a été
considérée commu en nouvel Etat; la partie restante a subsisté comme
Etat, avec latotalité des droits et devoirsqu'il avaitauparavant.)) ls7

Cet avisjuridique concerne le problème concret que soulevait la posi-
tion du Pakistan à l'égardde la Charte des Nations Unies, mais la façon
dont il est formuléet l'argumentation qui y est développéemontrent bien

qu'il exposeune position de principe. En tout état de cause, il est mani-
feste que les Etats l'ont interprétécomme étantla position de principe de
l'organisation des Nations Unies sur les rapports entre la partie du ter-
ritoire d'un Etat qui fait sécessionpour devenir un Etat nouveau et les
droits et les obligations conventionnels de I'ancien Etat Is8.
111. 11semblerait que la démarche méthodologiqueretenue par la

Commission pour rédiger l'article34 de la convention consistait à se fon-
der sur la distinction établieentre deux éléments:
a) l'obligation du nouvel Etat de continuer de respecter lestraitésde son

prédécesseurdans son territoire après la succession d'Etats;

ls6Projet d'articles sur la successiond'Etats en matiére de,vcc commeiitaires,
la conféreticedes Nations Uniessur lu sirccessiond'Etats en matièrede truitts, session de
1977 et reprisee lu session et11978, vol. III, p. 102,par. 17.
Avis juridique rendu le 8 août 1947 par le Secrétairegbnéraladjoint chargé des
affairesjuridiques, approuvéet rendu public par le Secrétairdlans lecommuniqué
de presse de'ONU PMl473, 12août 1947(Ailnuairede la Coir~inissiordiu droit ititerna-
tional, 1962,vol. II,p. 119).
lasDans la note verbalede sa mission permanente auprésde l'organisation des Nations
Unies en date du 1I septembre 1963,le Gouvernement afghan, qui affirmeque «le Pakis-
tan n'est pas Etat successeur ence qui concerne le droit conventionnel britannique parce
qu'il estun Etat nouveau», trouve précisCrtn argument dans le fait que le Secrétaire
généradle l'organisation des Nations Unies aniéle droit de succession» du Pakistan
(Sérielégislativedes Notions Utries,documentation concernant la succession d'Etats,
STILEGISER.BI14, 1967,p. 2, par. 3a)et note 1).h) le droit du nouvel Etat de se considérer commepartie à ces traités,en
son nom propre, après la succession d'Etat~'~~.

La Commission s'est explicitement fondéesur cette distinction pour
formuler les dispositions de l'article 15 de son projet, lequel est ainsi
conçu :

«Un Etat nouvellement indépendant n'est pas tenu de maintenir
un traitéen vigueur ni d'y devenirpartie du seul fait qu'a la date de
la succession d'Etats le traité étaiten vigueur i l'égarddu territoire
auquel se rapporte la succession d'Etats.))

Si la Commission s'est inspiréede la pratique des Etats lorsqu'elle a
élaboréles articles 15 et 33 de son projet (futurs articles 16 et 34 de la

convention), il faut admettre une parfaite analogie quand on s'interroge
sur lesconséquencesde la succession,d'une part, dans lecas de la création
d'un Etat nouvellement indépendant par sécessiond'une métropole et,
d'autre part, dans le cas de la création d'unEtat par séparation de cer-
taines parties d'un Etat existant. Pendant la périodeantérieure à la créa-
tion des Nations Unies, lescas de ((sécession))étaient, descas de ((séces-
sion de colonies»'90. En d'autres termes, la pratique est quasiment
uniforme, telle que l'illustrent les cas du Pakistan et de Singapour, les

seuls citésdans le commentaire de l'article 33 du projet comme exem-
plaires de la pratique de la période postérieurea la créationdes Nations
Unies, caractériséepar la règlede la ((table rase)).
Faisant ainsi la distinction entre lesconséquencesde la successiondans
le cas d'un Etat nouvellement indépendantdont le territoire était un ter-
ritoire dépendant juste avant la date de la sécession,et le cas d'un Etat
nouveau formépar séparation d'une partie d'un Etat existant, et pré-
voyant des règlesdifférentespour l'unet l'autre - la «table rase»pour le

premier et la ((continuitéautomatique)) pour le second - la convention
sortait assurkment du domaine de la codification de la pratique existante
pour entrer dans celui du développement progressifdu droit.
La disposition relative à la ((continuitéautomatique)) serait difficilea
justifier dans une convention sur la succession,mêmedans l'hypothèseoù
les nouveaux Etats, adoptant la logique qui les autoriserait à se consi-
déreren leur nom propre comme parties aux traitésaprès la succession,
auraicnt uniformément accepteles droits et les obligations découlant des
traitésde 1'Etatprédécesseur.

Le simple fait que nous traitions du droit du nouvel Etat «de se consi-
dérercomme partie aux traités en son nompropre)) (les italiques sont de
moi), droit rendu opératoire selon les règlesdu droit des traitésfondées

'" Voir le commentaire del'article 15 (((PosiàiI'kgarddes traités deI'Etatpré-
dkcesseurn)du projetd'articleDoatt?ienrsoffciels (le 10 confirericedesA1urionsUriies
strrlusuccessiod'Eiu/s en murièrede rruirés,sessionde 1977 er reprilusessionen
19I9OIbiflp. 101,par. 12..2. APPLICATION DE CONVENTION G~NOCIDE (OP.DISS . RE~A) 780

sur le principe essentieldu consentement, ce simple fait donc, exclut de la
logique de la codification de la pratique existante le cas de figure de la
((continuitéautomatique)), qui, par son sens même,ne peut être qu'une

obligation. Ce dont on pourrait débattre, puisqu'il s'agitd'un droit ou
d'une faculté,c'est Icpoint de savoir si cedroit ou cette faculté,au regard
de la pratique, est ordinaire ou impératif(relevant du jus cogens). Qu'un
droit soit exercéde manière constante ne suffit pas à le transformer en
obligation. Par analogie, si la grande majorité des Etats, se prévalant de
l'autorisation qui leur en est donnée à l'article 33 de la convention sur le
droit de la mer de 1982, devait proclamer une zone contiguë, cela ne
signifierait pas que la création d'une zone contiguë serait obligatoire.

Cette pratique aurait pour conséquence d'instituerune coutumequant au
droit à une zone économiqueexclusive, ou in concret0 une règlecoutu-
mièrerelative au droitde 1'Etatsuccesseur «à se considérer partie, en son
nom propre, aux traitésauxquels étaitpartie I'Etat prédécesseur)).

On peut donc souscrire sans difficulté à ceque dit l'expert consultant
de la conférence, sirFrancis Vallat :

«La règle[de l'article 2 - «Succession d'Etats en cas de sépara-
tion de parties d'un Etat))] ne se fonde pas sur une pratique bien éta-

blie nisur des précédents;elle relèvedu développement progressifdu
droit international plutôt que de sa codification.» 191

On a fait remarquer, à propos de l'article 34 de la convention que

«la Commission du droit international a abandonnéle principe de la
«table rase» pour mettre à sa place la règlede la continuité. Cefai-
sant, elle ne pouvait ignorer qu'elle faisait davantage que traduire
l'étatcourant du droit et qu'elleen proposait un développementpro-
gressif. Car la règlede la «table rase» faisait partie du droit inter-
national généralet devait y rester indépendamment de la solution
adoptéedans la convention. » 19*

Que des conventions créent du droit multilatéraln'est pas du tout singu-
lier:

«La succession en ce qui concerne les traités-loismultilatéraux,
après séparation ousécession, estun droit, ce n'est pas une obliga-
tion. Ces conventions constituent un corps de règlesde droit inter-
national. Elles necréentpas de droits subjectifs pour les Etats consi-
dérés individuellement.En cas de succession, il n'y a pas de droits
acquis d'une tierce partie qu'il faudrait protéger enrendant 1'Etat

I9lComptes rendus analytiques des séances plénièreest des séancesde la commission
plénière,8' séance, 8août 1978, p. 109,par. 10.
IpZRitter, Tlie UN Conferenceon Successionin respect of Trerities, Vien~la.31 Jirly-
23 Attgnrf 1978, p. 52-55. APPLICATiONDE CONVENTIONG~NOCIDE (OP.DIÇS.KRE~~\) 781

successeur responsable du respect de ce droit. 11n'y a pas change-
ment automatique d'attribution, Autrement dit, iln'y a pas de suc-
cession automatique.» lg3

Enfin, iln'est pas inutile de se pencher sur la pratique des Etats aprés
l'adoption, le 22 août 1978,de la convention de Vienne sur ta succession
d'Etats en matière de traités, ouverte iila signature le 28 février1979.
L'article 46 («Signature») de la septieme partie se lit comme suit :

{(La presente convention sera ouverte d la signature de tous les
Etars de la manièresuivante: jusqu'au 28 février1979,au ministère
fédéral des affaires étrangèresde la République d'Autricheet en-
suite,jusqu'au 31 aoùt 1979,au Siègede l'Organisation des Nations
Unies itNew York.»

Il serait difficile,m&meavec le plus grand optimisme, dejuger satisfai-
sante l'attitude des Etats l'égardde la convention. Dans la vingtaine

d'annkes,ou presque, qui s'estécoulée depuis qu'ellea étéouverte rati-
ficationet iadhésion,treize Etats seulement ont déposéleursinstruments
de ratification, d'adhésionou de succession,et le seuil de quinze instru-
ments, 5 l'évidencemodeste, àpartir duquel elleentre en vigueur n'a pas
encore étéatteint. Qu'on leveuilileou non, cela témoigne dece que les
Etats pensent de la convention, mèmesi le simple nombre des ratifica-
tionsou des adhésions n'établit pas de façon concluante le degré d'accep-
tation des règlesque contient un textenon entréen vigueur. La pratique

des Etatsapparus depuis 1993montre de manièreprobante que la succes-
sion automatique n'est pas reconnue comme réglepositive (voir «Traités
multilatcrüux déposésaupr?s du Secrétairegénéral - Etat au 31 dé-
cembre 1993 »).
112. 11dicoule de ce qui précéde que la réglede la succession automa-
tique en matikre de traitésmultilatéraux - de kge ferendu dans l'état
actuel des choses - n'estpas reçue par le droit international positif. Cela
ne signifiepas pour autant qu'un nouvel Etat entame sa vieau sein de la
communauté internationale tubuh~rasa, comme un nouveau-ne engen-

dré dans un nkünt juridique, privéde tout droit ou de toute obligation
conventionnels. Si tel étaitle cas, il aurait contradiction avec la notion
même de communautéinternationale organiséedejure, notion qui exclut
E'idtede reconnaître ou de tolérer l'existencde quelque enèitkque ce soit
qui ne serait pas directcmcnt ou indirectement sujetde droit.
De surcroît, lesdroits etles obligations issusde traitéssont soumis a la
distinction établiedans le dictur bien connu de la Cour en l'affairede la
BarceIonaTracfion, Lighr and Power Company, Ltd:

«Une distinction essentielledoit en particulier ktre ktablieentre les
obligations des Etsis envers la communauté internationale dans son

'93K. Zernanek, "Stnte Succession aftcr Decolonization", Rccdeslcours dr
I'Academiddc droiiniernatiorialLaIfuye,t 116,1965,p.233. ensemble et celles qui naissent vis-à-visd'un autre Etat ...par leur
nature même,les premièresconcernent tous les Etats. »lg4
(Le droit international moderne ne reprend pas la position classique
selon laquelle seulela coutume, source formellede droit, peut à l'origine
constituer une norme de droit international générala ,lors qu'une règle
néepar voie de traité représente par déjnitionune norme particulière à
laquellelepassagedu tempspeut éventuellementdonner lestatut de règle

de droit international général enla rendant coutumière. Position utile
lorsque la communauté internationale était embryonnaire, peu déve-
loppée, et qu'il fallaitbien trouver une solution pour combler les vastes
lacunes que présentaitle droit positif. Position aujourd'hui indéfendable,
tant en théorieque du point de vue du droit positif.
Théoriquement, s'il est juste de considérer que le caractère obliga-
toire du droit international généraltrouve son fondement dans «la
volonté dela con~munautéinternationale dans son ensemble)), la cou-
tume générale et les traités multilatérauxde grande portée ne sont que
la façon dont cette volonté s'exprime concrètement. La qualitéjuri-

dique des rapports entre cette coutume et ces traitésest détirminéepar
la capacitéqu'ont l'unet l'autre moyen d'exprimer cette volonté.Toute
autre façon de voir introduit une distinction implicite dans les fonde-
ments du caractère obligatoire du droit international, car il est évident
que ni lacoutume généraleni lesgrands traités multilatérauxn'exigent
l'unanimité,leconsentement de tous lesEtats. Il s'ensuit qu'attribuerà
la coutume un rôle exclusif dans la création du droit international
général est unesorte de plaisanterie métaphysique(Lauterpacht parle
du phénomènemystérieuxconcernant ledroit international coutumier,
qui est censéêtreune source dedroit à la condition d'être conformeau
droit (((Souverainetésur leszones sous-marines)), British YearBook of'

International Laiv, 1950,vol. 27, p. 394); il se demande aussi «pour7
quoi la coutume est obligatoire. La réponse,au-delà de laquelle le droit
ne permet pas d'aller, estque c'est la communauté internationale qui
veut'que le droit international, sous ses diverses manifestations, ait le
pouvoir de s'imposer)) (H. Lauterpacht, International Law, Collected
Papers, 1, Generul Works, 1970,p. 58).
Sur le plan du droit positif, la capacitéqu'ont les traités multilaté-
raux de portéegénéralede créer desnormes de jus cogens superveniens
a étéfixéepar la convention sur le droit des traités. Le commentaire de
l'article 50 du projet de convention (qui sera l'article 53 du texte final)
dit notamment: «une modification d'une règleimpératives'effectuera

trèsprobablement par voie de traité multilatéralgénéral)()Annuairede
la Commissiondudroit international 1966,vol. II,p. 270, par. 4). Si un
traité multilatéralgénéral esctapable de créer unenorme de jus cogens,
forme la plus accomplie du droit international, il estA fortiori, capable
d'engendrer une norme du droit international général.)

19'C.I.J. Recue1970,p. 32. Les traités multilatéraux générau adoptés dansI'intérEd t e la commu-
nauté internationale, qui sont la concrétisation de la volonté de l'en-

semble de cette communauté,valent evga otnnes,indépendammentde tout
assentiment contractuel. La convention sur legénocideen est un exemple.
Comme L'adit la Cour internationale de Justice dans son avis consultatif
sur les Réservesd Irzconvention pour lu prévention et lu répressiondu
cnwie degénocide,en prenant pour point de départle fait que le génocide
se qualific comme «le refus du droit à l'existencede groupes humains

entiers» qui est contraire à la foisA la morale et a l'esprit et aux fins des
Nations Unies» : ({lesprincipes qui sonl à la base de la convention sont
des principes reconnus par les nations civilisées comme obligeant les
Etats même et?deliors de ttout liencotzv~ntionnd»'~~.
Ainsi, les principes sur lesquels s'appuiela convention sur le génocide
font partie du corpusjuris cogentis. Tout Etat nouveau est a priori sou-
mis ices principes, dans lesquels s'exprime l'intérêt univers del1s com-

munauté internationale tout entikre lg6.
l 3. L'avis de la Cour que je viens de citer soulèveune question
d'importance fondamentale dans le cas qui nous occupe, celle des rap-
ports entre lesprincipes qui sous-tendent la convention sur le gknocideet
lesdispositions de celle-ci.Cette question a deux aspects, un aspect quan-
titatif et un aspect qualitatif.'aspcclquantilalif lient aux rapports entre

les principes sur lesquels se fondent la convention et les disposilions de
celle-ci:ces principes s'appliquent-ilsAla convention dans son ensemble?
A mon avis, on ne peut répondreque par la négative. Les principes fon-
damentaux du droit international qui sous-tendent la convention sur le
génociden'apparaissent que dans le corps du texte, dans les clauses dkfi-
nissant son objet et ses fins. Les dispositions transitoires et les disposi-
tions finales, auxquelles ilfaudrait ajouter les dispositions de procédure

concernant le règlement des différends, ne sont pas de cellesdont on peut
dire qu'elles explicitent l'espritet ta lettre des normes fondamentales du
droit international. Cela sevoit non sculcment dans le fait qu'il estpos-
sible de faire des reserves sur ces dispositions, mais aussi dans le méca-
nisme de denonciatin prévua l'article XIV de la convention.

Pour cequi est de l'aspect qualitatif, les rapports entre «les principes
qui sous-tendent la convention» et les dispositions de fond de celle-ci

lq*C.LJ. Recueil 1951,p. 23 (italiquesont demoi)
19"n peutconclurequec'est enconsidérationdecette qualitéque l'ancienSecrétaire
général,Dag HammarsjkBlda ,vaitinsistauprksdes autorites du Congo, pendantles
opérationsde l'OrganisatidesNatronsUnles dansce pays,pour queles princips de la
conventions'imposentmemc àun Etat nouvCdUcomme IeCongo eisoientrespectespar
les autorités politiques subaltàs1'1ntkriere I'Etat congolais (rapport annueldu
Secrétairegénéra19Gû -961,Nations UniesDucurncrirt,$ficiel.~de /'.4ssetnhlétgénérale,
tionalLaw>>R,ecueildescoursde,I'Acridemdpkdroit ~nrernatlonadle La Haye, vol. 106,
4962,p. 228). APPLICAïïON DE CONVENTION GENOCIDE (OP.DISSK. RECA) 784

permettent de déterminer si l'effet juridique des premiers s'étendaux
deuxièmes. Les dispositions de fond de la convention sont l'expression
normative des «principes qui sous-tendent la convention», la résolution
d'un impératifcatégoriquegénéral - inapplicable a toutes fins pratiques
- en une série d'impératifs catégoriques particulierest concrets, qui sont
les diverses dispositions de la convention.

Cela revient Adire que les dispositions de fond de la convention sur le
génocide, expression concrète des principesqui la sous-tendent, ont une
valeur interprétative, telle enseigne qu'ellesparticipent de la force obli-
gatoire qu'ont les principes eux-mêmes.

Si tel n'était paslecas, cesprincipes de grande valeur ((reconnus par les
nations civiliséescomme obligeant lesEtats)), resteraient éthérés, comme
le cénotaphe desbonnes intentions à jamais inaccomplies.
Silesdispositions de laconvention sur legénociden'étaient pasI'expres-
sion concrète des principes qui sous-tendent celle-ci, la communauté
internationale devrait faire faàedes obstacles juridiques insurmontables
dans la poursuite de son intention d'éliminerle crime de génocide.Par
exemple, les Etats non partiesà la convention ne seraient pas liéspar les
dispositions de celle-ciqui définissentle génocide,ni tenus de l'obligation
de préveniret de réprimerce crime.
114. En d'autres termes, la Bosnie-Herzégovine,Etat nouveau, est liée
à priori par les dispositions fondamentales de la convention sur le géno-
cide mêmeen dehors de tout lien conventionnel. En adhérant formelle-

ment à la convention sur le génocide, la Bosnie-Herzégovinene ferait,a
l'égard des dispositionsde fond de la convention, que confirmer par voie
contractuelle des obligations auxquelles elle serait au demeurant tenue
volensnolens,puisque ce sont des obligations qui n'obéissentpas au libre
arbitre des Etats.
Les effetsjuridiques de l'adhésionà la convention sont essentiellement
ceux d'une soumission aux règles decelle-ciqui ne sont pas d'ordre impé-
ratif, c'est-à-dire aux règlesde procédureque fixent par exemple les ar-
ticles VIII, lx, XIV, XV et XVI.

115. La ((succession automatique)) et la ((notification de succession»
s'excluentmutuellement. La succession automatique aurait pour effet de
transférer automatiquement, ipso jure,les droits et les devoirs conven-
tionnels de I'Etat prédécesseuà 1'Etatsuccesseur. La successionne serait
donc pas le résultat d'unacte de volontéde I'Etat successeur, maisl'effet

d'une règlede droit international prévoyant le transfert des droits et des
devoirs conventionnels en conséquencede la substitution d'un Etat à un
autre dans la responsabilité des relationsinternationales d'un territoire.
La ((notification de succession))ne sejustifie sur le plan de la logique et
sur le plan du droit que si letransfert des droits et des devoirs conven-
tionnels, ou les modalitésde ce transfert, sont subordonnésà la volonté
de I'Etat successeur, puisqu'elle se définit commeune notification, quel
que soit son libelléou sa désignation,faite par un Etat successeur, expri-tnant le consentement de cet Etut ù êtreconsidérécomnze liépur le
truité>)197 E.n d'autres termes, les dispositions de fond s'appliquent dans

lescas où I'Etat successeur n'est pas tenu par le droit international objec-
tif de continuer de respecter les traités desEtats qui l'ont précédé sur son
territoire, mais où il a le droit, selon la règle,de seconsidérercomme par-
tie aux traités en son nom propre.
116. De ce point de vue, la question qui se pose est cellede savoir si la
((notification de succession» est, par elle-même, l'expressionen bonne
et due forme de la volontéd'êtreliépar un traité. Elle est légitime à un

double titre :
i) à cause du lien qui existe entre les règlesde succession en matière de
traités internationaux et cellesdu droit des traités,
ii) à cause de la signification de l'instrument de ((notification de succes-

sion».
II est tout naturel que la succession d'Etats en matièrede traités aitles
liens les plus étroitsavec le droit des traitéslui-mêmeet qu'on puisse la
considérer comme réglantcertains aspects de la conclusion et de I'exécu-

tion des traités etde la participation à ceux-ci.
Humphrey Waldock, rapporteur spécial, décritces liensen ces termes:
«la Commission ne peut faire autrement qu'examiner la question de

la succession d7Etats en matière de traitésdans le cadre généraldu
droit des traités...La solution la plus sCiredes problèmesde succes-
sion en matière de traités doit, semble-t-il, êtrerecherchéedans le
cadre des principes et des règlesdu droit des traités plutôt quedans
celui d'une théorie générald ee la succession. >'98

Ou, comme le dit encore O'Connell:
((L'effet qu'a sur les traités le changement de souveraineté n'est
pas la manifestation de quelque principe généralni de quelque règle

de la succession d'Etats; il ressortit plutôt au droit des traitéset à
leur interprétation.))199
La définitionde la ((notificationde succession» qui est donnéeau para-
graphe g) de l'article 2 de la convention sur la succession d'Etats en

matièrede traités etla pratique suivie par les Etats dans ce domaine font
sérieusementdouter du fait qu'une ((notification de succession» soit, en
tant qu'instrument, un moyen de consentir à êtreliépar un traité.
La convention sur le droit des traités de 1969 précisedans son ar-
ticle 11(((Moyensd'expressiondu consentement à êtreliépar un traité))):

«Le consentement d'un Etat à êtreliépar un traité peut être
exprimé par la signature, l'échanged'instruments constituant un

IY7Paragrapheg) de l'article2 de laconventionsurla successiond'Etatsen rndeiCre
traités (les italiquessont de moi).
Ig8Annuaire(lela Coniniissiondu clroiiinrernutionril.1968,vol. 1,p. 135, par.52.
D. P. O'Connell,The Laiv of SrareSuccessiot~.1956,p. 15. traite, la ratification, l'acceptation, l'approbation ou I'adhésion,ou
par tout autre moyen convenu.»

La façon dont l'article 11est formulén'exclut pas la possihilitk que la
notification de succession soit pour 1'Etat un moyen d'exprimer san
consentement à Êitre liépar un traité. La réalisationde cette possibilité
suppose cependant l'accord des parties car, selon le droit des traitéstel
que l'illustre l'articlee la convention, la <(notificationde succession»

est indubiiablement un cataire moyeu N d'exprimer son consentement à
êtreliépar un traité,subordonnécependant à la condition qu'exprime le
qualificatir «convenu». DE ce point de vue, nla:notfication de succes-
sionN, en rant qu'acte unilatéralde I'Erar.consriruela base dP~n accord
accessoire pnformp simpl&ee enfrele nouvelErat et chacune des purlies
uux truitks quliaient /'Etuprédkcessrur. Ainsi donc, la ((notificationde
succession» reprkscnte En fait un mode abstrait, génériqued , e la volonté
du nouvel Etat d'êtreliépar lestraitéssignés par1'Etatprédécesseuru ,ne
forme de consentement qui répond,dans chaque cas particulier, àla rkgle
généraledu droit des traités surla manifestation de la volontéque fixe
l'article II dla convention et aux modalités queprescrivent lesdisposi-

tions pertinentes du traitéconsidéré.
On peut imaginer une exception a la règlegénéralequi veut que le
consentement de 1'Etat successeur à êtreliépar un traité s'exprime ad
casnm en conformitéavec l'article 11 de la convention sur le droit des
traités: savoir l'hypothèse où,en dehors et indkpendamment de la çon-
vention, il existerait une règle généralementacceptéequi ferait de la
«notification de succession» un moyen particulier de lier les nouveaux
Eiats par un traite. L'article 73 de la convention fournil d'ailleurs les
motifs qui justifient unetelle interprétatio:«Les dispositions de la pré-
senle convention ncpréjugentaucune question qui pourrait apparaître se
poser A propos d'un traité dufait d'une successiondiEtats ..»

Rien n'indique vraimentqu'une tcllc regle existe. La convention sur le
droit des traités,qui est par nature la résultante dela codification et du
diveloppement progressif du droit, ne prévoit rien enson article 11,rela-
tif aux modes d'expression du consentement à Etre lie par un traité,qui
ferait de la «notification de succession^l'un de ces modes d'expression.
Cela est d'autant plus frappant que cet article1repose sur lasimplifica-
tion des modalitésde l'expression du consentement. Etat de chose qui
s'explique àmon avis par le fait que des questions fondameniales restent
à résoudredans le domaine de la successiondZEtatsen n~aiikrede traités.
Le terme «notificationde succession»ne peut avoir que deux sensfon-
damentaux :

a) soit il désigne l'actede confirmation du fait que le nouvel Etat est lié
par iraiiéet,en tel cas, la cnotificaiion~ n'a qu'un effetdéclaratoire;
b) soit il désigne uninstrument, quel qu'en soit le Sibellet queIlequ'en
soitla désignation,dans lequel s'exprime leconsentement de 1'Etat
successeur à &treliépar un traitt. Au sens a), la règlefondamentale de la succession d'Etats en matière
de traitésest celle de la succession automatique: les droits et les devoirs
qui découlent destraitéssont ipsojure transférésde I'Etat prédécesseur à
1'Etatsuccesseur par le fait mêmedu changement territorial. Dans ce cas,
la ((notification de succession» n'est pas fondamentalement indispen-
sable. Elle ne fait qu'annoncer s'il y a un changement de territoire et

qu'en conséquencela règle du transfert automatique des droits et des
devoirs découlantdes traités apris effet.
Au sens b), la ((notification de succession» est un moyen d'exprimer le
consentement à êtreliépar un traité.Comme la succession n'est pas et ne
peut êtreun moyen indépendant d'exprimer la volonté d'êtreliépar un
traité, sauf dans l'hypothèse de la succession automatique, le terme
((notification de succession» n'a qu'une valeur descriptive, ce n'estqu'une
rubrique couvrant les diverses voies par lesquelles un Etat nouveau peut

faire reconnaître son consentement à êtreliépar un traité.
La pratique de la succession en matière de traités concerne surtout
l'accessiond'anciennes coloniesà l'indépendancepar rapport à leur métro-
pole. Elle secaractérisepar sa diversitéetpar l'absencede règlesclaires et
précises.Si I'onpeut discerner une tendance plus marquéeque les autres,
c'estqu'«un grand nombre de nouveaux Etats se répartissenten diverses
catégoriescorrespondant à des solutions (tau choix»200,tendance proche
de la «table rase)).ourtant, qu'ils aient acceptéla formule Nyerere efixé

une période déterminép eour reconsidérerles traités,période qui expire-
rait automatiquement si elle n'était pasmise a profit par le nouvel Etat
avant son échéanceo ,u qu'ils aient acceptéla formule zambienne, qui pos-
tule la continuitéd'application de beaucoup de traitésantérieurs à I'indé-
pendance mais ne limite pas lesdélaisdans lesquelsles traitésdoivent être
déclarés caducsou adoptésen pratique s'ilsparaissent convenir, les nou-
veaux Etats ont souscrit aux traitésen adressant les notifications voulues
à leur dépositaire.Leur positionà l'égardde tel ou tel traités'estexprimée

par «acceptation», «accession», etc.201IIn'y a pas beaucoup d'exemples
d'un Etat successeur acceptant un traitépar la voie d'un instrument que
I'onpourrait appeler ((notification de succession». Le terme ((notification
de succession»est plutôt une expression synthétique, collective,désignant
lesdiversesmodalitéspar lesquellesles nouveaux Etats se lient aux traités
signéspar 1'Etatprédécesseur. La notions'estessentiellement développée
dans la pratique du Secrétaire générad le l'Organisation des Nations
Unies, en sa qualitéde dépositaire des traitésmultilatéraux.Elle suppose
l'existenced'une règlede droit international général prévoyanlta dévolu-

tion àI'Etat successeurdes droits et des devoirs découlantdes traitésmul-
tilatéraux auxquels I'Etat prédécesseurétaitpartie, ce qui ne correspond
pas à la réalité des choses, uisque:

200Kearney,Annuaire(le lu Cotntni.du droit international, 1966,p.140.,
dYEtats,TILEGISER.BIlutiI96,,p. 42, par. 11,p. 181et 224-229.oncernantla succession APPLICATION DE CONVENTIONGÉNOCIDE (OP.DISS K.RE~A) 788

«Malgré certaines preuves qui attestent du contraire mais qui
émanentsurtout de sources plutôt diplomatiques que juridiques, on
peut soutenir que le principe général estque les Etats nouvellement
créésqui ne sont pas le résultat d'un démembrement politique,et
dont on ne peut dire objectivement qu'ils assurent la continuitépoli-
tique d'un prédécesseuq ruelconque, naissent viergesde toute obliga-
tion conventionnelle, sauf les obligations qu'ilsuraient contractées
en échangede la reconnaissance de leur qualité d'Etat ou pour toute
autre raison et sauf les obligations purement locales ou«réelles)>de

1'Etatqui exerçait antérieurementla souverainetésur le territoire du
nouvel Etat. »202

La pratique des nouveaux Etats après l'adoption de la convention sur
la succession d'Etats en matièrede traitésn'est peut-être pas homogène,
mais elle ne s'oriente pasdu tout vers le choix de la ((notificationde suc-
cession)) comme moyen spéciald'acceptation des traités conclus par
I'Etat prédécesseur.
117. L'articleXI de la convention sur le génocide est ainsiconçu:

«La présente convention seraouverte jusqu'au 31 décembre1949
a la signature au nom de tout Membre de l'organisation des Nations
Unies et de tout Etat non membre a qui l'Assembléegénéraleaura
adressé uneinvitation à cet effet.
La présente convention sera ratifiée et les instruments de ratifica-
tion seront déposésauprès du Secrétaire générad le l'organisation
des Nations Unies.

A partir du 1" janvier 1950, il pourra êtreadhéréii la présente
convention au nom de tout Membre de l'Organisation des Nations
Unies et de tout Etat non membre qui aura reçu l'invitation susmen-
tionnée.
Les instruments d'adhésion seront déposésauprès du Secrétaire
généralde l'organisation des Nations Unies.»

Cet article signifie incontestablement que la ratification et l'adhésion
sont les moyens par lesquels les Etats peuvent exprimer leur consente-
ment a êtreliéspar la convention sur le génocide.Dans sa notification de
succession du 29 décembre 1992, la Bosnie-Herzégovine déclarece qui
suit:

«Le Gouvernement de la République de Bosnie-Herzégovine,
ayant examiné la conventionpour la préventionet la répressiondu
crime de génocidedu 9 décembre1948, à laquelle l'ancienne Répu-
blique fédérative socialistde Yougoslavie étaitpartie, soul~aiteêtre
le successeurde cette dernièreet s'engage a respecter et exécuter
scrupuleusement toutes les clauses figurant dans ladite convention,

202McNair,Law ofTreuties, 1961,p. 601 APPLICATION DE CONVENTION G~NOCIDE (OP.DISS.KRECA) 789

avec effetà compter du 6 mars 1992,date ii laquelle la Bosnie-Her-
zégovine estdevenue indépendante. » (Les italiques sont de moi.)
Le Secrétairegénérad l e l'Organisation des Nations Unies, agissant ensa

qualitéde dépositaire, a fait la communication suivante :
«Le 29 décembre1442,la nolificadionde successiondu Gouverne-
ment de la Bosnie-Herzégovine ala convention [surle génocide] aété
déposée aupsb du Secrélairegénéral ,vec effet au 6mars 1992,date

;ilaquelle la Bosnie-Herzégovinea assuméla responsabilitk de ses
relations internationalen203
Le 15 juin 1993le Secrétairegknérala reçu du Gouvernementyougoslave
la communication suivante :

«Considkrant que la substitution de souverainetésur la partie du
territoire de la Rkpubliquefkdérativesocialiste de Yougoslavie qui
constituait antérieurementja Républiquede Bosnie-Herzégovines'est
effectuéeen violation des réglesdu droit international, le Gouverne-
ment de la Républiquefédkrativede Yougoslavie déclarepar la pre-
sente qu'il neconsidèrepas que laprétendue Républiquede Bosnie-

Herzégovineest partie a [laditeconvention] el qu'il considère quela
prétendue République deBosnie-Herzigovine est tenue de I'obliga-
tion de respecterles règlesde préventionetde rkpressiondu crimede
génocide conformkmenl au droit international général, indépendam-
ment de la convention sur la préventionet la répressiondu crime de
gknocide.»

118. On peut mon avis tirer de ces considérationsgénéraleset de
celles qui portent directement sur la ({notificationde succession» de la
Bosnie-Herzégovine,lesconclusions suivantes:
La «notification de succession» de la Bosnie-Herzégovine n'estpas

entièremenrconfonne a la pratique des Etats telle qu'elleest consacrée
dans la convention sur lasuccessiond'Etats en matière de traités.four
&ireplus précis, le mkçanisme de la «notification de succession» s'est
développé dans le contexte spkcialde la décolonisation.
(L'expression elle-même est assez imprécise.Dans la pratique des
Nations Unies, ces notifications sont appelées({déclarations » (voir
l'introduction au document «Traitésmultilatéraux déposéü suprks du

Secrétaire général - Etat au 31 dkcembre 1891 », note 4, citépar la
Cour au paragraphe 6 de son ordonnance du 8 avril 1993).La «no-
tification)}d'un acte est une manière assez foue de qualifier la pra-
tique des Etars,qui consiste en une ({note» - sans le complémenl«de
succession)^(voir Série 1kgi.slafivedes Nalions Uni~s - Documen-
tation concernant. la succession d'Etats, STILEGISER.BI14, 1967,

203Communicationdu Seçrktairegénéradlc l'organisat~ondes Nations Unies en date
du 18mars 1993,C.N.451 1992.Treariec-5(Uepositary Nutfiarzon), sous le titre ({Suc-
cessiun bBosniaand 1-Ierzegovjnileitaliquesonde moi). APPLICATIONI3ECONVENTION GÉNOCIDE (OP. DISS. ICRE~A) 790

p. 225-228) - dans laquclle ils se déclarent lits de manière continue
par lestraités multilatérauxconclus en leur nompar 1'Etatdont ilssoni
issus avant leur propre accession ü la pleine souveraineté,ou sous le
couvert de laquelle ils deposenl leur insirument d'adhésion aux traités
en question, cette adhésionprenant effet à la date du dépbtde cet ins-

trument. JIvaudrait donc mieux parler d'une t(dcc1arationd'accepta-
tion d'un traité)). De surcroît, les «nates>>dont on vient de parler
représententen règle générale une façon d'accomplir les obligations
conventjonnclles découlantdes «accords de dévolution».)

La convention sur le gknocidene prévoitpas la «notification de succes-
sion» parmi les moyens d'exprimerun consentement. Ainsi, dans le cas
concret qui nous occupe, il faudrait qu'il y ait accord entre la Bosnie-
Herzégovineet chacune des parties a la convention quant a la recevabilité
d'une ctnoiitication de succession» pour que ce: consentement soit
exprimézo4. Ln Yougoslavie, partie a la convention, a fait une réserve

dans laquelle cllea déclaré qu'elle neconsidéraitpas {(laprétendueRepu-
blique de Bosnie-Herzégovinecomme partie [à ladite conveniion]» parce
que «la substitution de souverainetésur la partie du territoire de la Répu-
blique fédérative socialistede Yougoslavie qui conslituait antérieurement
la République de Bosnie-Herzégovine s'est effectuée en violation des
règlesdu droit international». En faisant celte réserve,la Yougoslavie a
contestéle statut d'Etat successeur de la Bosnie-Herzégovineparce que

«la substitution d'un Etat a un autre dans la responsabilité...» n'est
qu'un aspect, l'aspect factuel, de la succession ou, pour &treplus précis,
n'estqu'un changement territorial qui fait naitre la question juridique de:
la succession. D'où l'on conclut qu'iln'y a eu aucun accord accessoire
entre la Bosnie-Herzégovineet la Yougoslavie et que la notification de
successionde la Bosnie-Herzkgovinen'a pas, à l'égardde la Yougoslavie,
l'effetjuridique d'un consentement A ètreliepar la convention sur legéno-

cide. Cela rejoint une observation présentée par Tabibi a la 966"séance
de la Commission du droit international: «II ne peut y avoir de succes-
sion en matièrede traites en l'absenced'une disposition expressedu traité
lui-même ou sans le consentement exprèsde l'autre:partie. >)205
119. La Cour adopte implicitemenr le point de vue selon lequel la
convention est devenueapplicable entre la Bosnie-HerzCgovineet la You-
goslavie sur la base des accords de Dayton. C'est ce qui découle deson
affirmation :

«a supposer mëme que la convention sur le génocide ne soitentrée

en vigueur entre les Parties qu'à la signature des accords de Dayton-

«En l'absencede dispositionsfixantdcs conditions particuliksuçcessionou
restreignant autremenltemecanisrncde la succession,le Seceknérals'inspire
iicipatioiides Eti)((<Prkcisde la prdtique du Sccrttairegtnkraldepositairede
traitésmutt~latéraux),TlLEG R,p. 89, par 297.)
losAnriuuirede IComtnuaion (ludroit intrrnritiunul,1968,vp.135,par 64 Paris, toutes les conditions sontà présent réuniespour fonder la
compétencede la Cour ratione personae)) (arrêt, par.26).

Cette interprétation esa mon avis indéfendable.

La Yougoslavie a soutenu que «la convention sur legénocide estappli-
cable entre les Parties au présent litigà compter de la signature des
accords de Dayton de 1995))et que «ce n'est que dans ces accords de
Dayton (notamment l'annexe 6...) que les Parties au présent litigeont
admis I'applicabilitéde la convention sur le génocide>)206E.n fait, sans
acte de reconnaissance, le liencontractuel entre la Bosnie-Herzégovine et
la Yougoslavie ne pouvait êtreétablien cequi concerne la convention sur
le génocide. Cet acte de reconnaissance réciproque est une condition

préalable généraleà l'instauration entre deux Etats d'un lien contractuel
bilatéral, puisqu'unrapport contractuel entre Etats est une relation inruitu
personue.
La Yougoslavie et la Bosnie-Herzégovine sesont reconnues I'une et
I'autre réciproquement aux termesde l'article de l'accord-cadre général
pour la paix en Bosnie-Herzégovinezo7.Cet articleX dispose notamment :

«La République fédérativede Yougoslavie et la République de
Bosnie-Herzégovinese reconnaissent l'uneI'autre commeEtats indé-
pendants souverains à l'intérieurde leurs frontières internationa>)s.

Dans des circonstances normales, la reconnaissance mutuelle a en elle-
mêmepour effet d'établir un nesus contractuel dans le contexte d'un
accord multilatéralentre des pays qui se reconnaissent l'un I'autre, entre
1'Etatqui reconnaît et I'Etat qui est reconnu. En général,le premier fait
des réservessur la participation de I'autre quand il ne reconnaît pas pour
éviterque ne s'institue tacitement entre eux un accord accessoire qui
constituerait en lui-même une reconnaissancedefucto.

Mais les circonstances de l'affaire ne peuvent êtrequalifiéesde nor-

males. Dans la notification qu'ellea adresséeau Secrétairegénéral l'Or-
ganisation des Nations Unies le 15juin 1993, la Yougoslavie a souligné
qu'elle«ne considérait pas laprétendueBosnie-Herzégovinecomme étant
partie à [la]convention [sur le génocide]))car, a son avis,
«la substitution de souveraineté sur la partie du territoire de la
République fédérative socialistee Yougoslavie qui constituait anté-

rieurement la République de Bosnie-Herzégovine s'est effectuée en
violation des règlesdu droit international)).
En d'autres termes, la Yougoslavie conteste par cette notification lagi-
timitéde la naissance de la Bosnie-Herzégovineentant qu'Etat. On pour-
rait dire bien entendu qu'en règle généraleun acte de reconnaissance

20'Doc.A/50179S 0,1995/93909,ovembre1995 ,.4.remédieau vice de la naissance d'un Etat. C'est l'essence mêmede la
reconnaissance d'un Etat nouveau: ((Reconnaître la qualitéd'Etat a une
communauté politique c'est déclarer qu'ellerépond aux conditions qui
définissentlaqualité dYEtaten droit international. »208La présenteaffaire
pourrait êtreconsidérée comme faisant exceptionA cette règlegénérale, et
ce pour deux raisons fondamentales :

Pritno,la Yougoslavie n'a cesséde soutenir, mêmeaprès la signature
des accords de Dayton, que la Bosnie-Herzégovineavait étéinstituéede
manièreillégale,ce qu'atteste de manièrepatente et incontestable la troi-
sièmeexception préliminaire.Le fait que la Yougoslavie ait renoncé,au
cours de la procédure, a soulever sa quatrième exception, dans laquelle
elle alléguait l'inexistence de fait de la Bosnie-Herzégovine dans les
limites administratives de l'ancienne entitéfédérale,tout en continuant
d'affirmer que la Bosnie-Herzégovine s'étaitconstituée contra legem,
amène à conclure que la reconnaissance de la Bosnie-Herzégovinepar la
Yougoslavie dans les accords de Dayton n'avait d'autre but que de

reconnaître
«en tant que fait ...l'indépendancede l'entitéprétendant étre un
Etat et ..de faire connaître la volontéde I'Etat accordant sa recon-
naissance d'accepter les conséquences normalesde ce fait, à savoir
les égardsd'usage dans les relations internationale^))^^^,

sans que la Yougoslavie renonce pour autant a sa position sur l'illécéité
de la constitution de la Bosnie-Herzégovine enEtat indépendant.
Secundo, dans sa troisième exception préliminaire,la Yougoslavie a
notamment soutenu que le principe de ((l'égalité de droits des peuples et
de leur droit a disposer d'eux-mêmes»était une norme impérative du
droit international général (jus cogens). Si la valeur de cet argument

pouvait êtreétablie, la reconnaissance, même conçue et réalisée comme
un acte de validation à posteriori, serait sans effetjuridique, puisqu'on ne
peut dérogerpar convention inrer seaux normes de jus cogens, qui sont
des impératifsabsolus et inconditionnels.
Hormis le domaine de la reconnaissance, les accords de Dayton ne
disent rien des relations entre la Républiquefédérativede Yougoslavie et

la Républiquede Bosnie-Herzégovineen tant que parties a la convention
sur le génocide. L'allégation selon laquell«edans [les]accords ..(notam-
ment l'annexe6:..) ..les Parties au présent litigeont admis I'applicabilité
de la convention sur le génocide>)21n0e s'appuie sur rien dans le texte des
accords.
L'annexe 6 des accords de Dayton, ici invoquéecomme base de I'appli-
cabilitéde la convention sur le génocide,contient en fait un ((accord rela-
tif aux droits del'homme))auquel sont parties la Républiquede Bosnie-

208H. Lauterpacht,Recognitiot~iraIt~ternul aw, 1947,p. 6.
20%. Brierly,ThLaiuof Nutiot~s,1963,p. 138.
2'0CR 9616,p. 24.Herzégovine, la Fédération de Bosnie-Herzégovine et la Republika
Srpska. Le seul rapport qu'il ya entre cette annexe 6 et la Yougoslavie est
que celle-ci,comme la République de Croatie et la République deBosnie-

Herzégovine,s'est engagée aux termesde l'article VI1de l'accord-cadre
général, à
«appliqu[er] entièrement les dispositions relatives aux droits de
I'homme énoncées au titre premier de l'annexe 6, ainsi que les dis-
positions relatives aux réfugiéet aux personnes déplacées énoncées

au titre premier de l'annexe7)).
Le titre premier de I'accord relatif aux droits de I'homme énumèredes
libertéset des droits personnels et politiques essentiellement classiques
que les «parties [la République deBosnie-Herzégovine,la Fédération de
Bosnie-Herzégovineet la Republika Srpska]garantissent àtoutes les per-
sonnes placéessous leur juridiction)) (article premier de I'accord). L'ar-

ticleVI1de l'accord-cadre estla confirmation contractuelle, formuléeen
termes généraux,de l'obligation de respecter les droits fondamentaux
énumérés à I'article premierde I'accordrelatif aux droits de I'homme,que
les partiesàcet accord-cadre sont tenues de respecter parce qu'elles sont
parties aux instruments qui consacrent ces droits, et parce qu'il s'agit
dans certains cas de principes impératifs qui s'imposent d'eux-mêmes.
Ainsi donc, l'objet de I'articleI1de l'accord-cadre relèvede la logique
politique, dont la prémisse estla nécessitéde faire participer des sujets
qui ne se trouvent pas en Bosnie-Herzégovine a l'exécutiondes accords
de Dayton, plutôt qu'il ne vise à imposer des obligations concrètes à
l'égard desdroits énuméréa su titre premier de I'accord relatif aux droits
de l'homme.

Je dirai en d'autres termes que la reconnaissance, condition préalable
générale à la création dunexus contractuel bilatéral, n'est pas suffisante
dans ce cas précispour me faire admettre que la convention sur le géno-
cide s'applique aux relations entre la Yougoslavie et la Bosnie-Herzégo-
vine. Les circonstances de l'affaire m'amènent à conclure qu'il faudrait
aussi pour cela que soit satisfaite une condition qualificative, celle de
l'inexistencede la notification adresséepar la Yougoslavie au Secrétaire
généralde l'organisation des Nations Unies le 15 juin 1993. Par son
contenu, cette notification est en effet une réserveque fait la Yougoslavie
pour empêcherque ne s'établisse lenexus dont je parlais, et ce en
l'absencede la quatrièmeexception préliminaire relative à la légalitde la
création de la Bosnie-Herzégovineen tant quYEtat. La reconnaissance
mutuelle formaliséepar I'articleVI1de l'accord-cadre peutdoncêtrequa-
lifiéede reconnaissance de la créationde la Bosnie-Herzégovineau sens

factuel du terme, assortie cependant d'une réservequant a la légalitde
cette création.Pour ce qui est de la réalisationde la condition qualifica-
tive des relations entre la Yougoslavie et la Bosnie-Herzégovine, la dis-
position qui figureinjne àl'articleX de I'accord estici pertinente: «Les
autres aspects de leur reconnaissance réciproque feront l'objet de nou-
veaux pourparlers. )) APPLICATION DE CONVENTION GENOCIDE (OP.DISSK . RE~A) 794

120. La position de la Cour quant à sa compétencerutione temporis se
trouve résuméedans le passage suivant du paragraphe 34 de l'arrêt:

«la convention sur le génocide- et en particulier son article -X ne
comporte aucune clause qui aurait pour objet ou pour conséquencede
limiter de la sorte l'étendue desa compétenceationetemporis,et ...les
Partieselles-mêmen s'ont formuléaucuneréserve à ceteffet,nià la con-
vention, nià l'occasion de la signature des accords de Dayton-Paris.
La Cour constate ainsi qu'ellea compétenceen I'espécepour assurer
l'application dela convention sur le génocideaux faits pertinents.

Pour ce qui est de la compétencerulione lernporisde la Cour, la situa-
tion estiImes yeux fort claire, au regard de la règlededroit international
généralconsacrée au paragraphe 3 de l'article 24 (((Entréeen vigueur)))
de la convention sur le droit des traités:
((Lorsque le consentement d'un Etat à êtreliépar un traitéest éta-

blià une date postérieure à l'entrée en vigueurdudit traité,celui-ci,
à moins q'il n'en dispose autrement, entre en vigueurà l'égardde cet
Etat à cette date.))
L'article IX de la convention sur legénocide est unedisposition de pro-
cédureet, faisant partie intégrante de la convention, partage le sort de
celle-ci ou, pour êtreplus précis,le sort de ses dispositions contractuelles.

Par conséquent, si la convention n'a pas d'effet rétroactif- elle n'en a
pas, cela va sans dire-, l'article IX n'a pas non plus d'effet retroactif.
Ainsi, en vertu du principe généralde non-rétroactivité,la convention ne
s'applique qu'aux événementset aux situations qui se sont produits après
qu'elle estentréeen vigueur à l'égardde la Bosnie-Herzégovineou, dans
les circonstances de la présenteaffaire, après qu'elle est devenue appli-
cablc entre laBosnie-Herzogovine et la Yougoslavie.
L'analogie que la Cour a établieentre la présente affaire et celle des
Concessions Mavrornrnatis etz Palestine (arrêt, par. 26) ne me semble
pas convaincante. S'ily a une analogie, c'est plutôt avec l'affairemha-
tielos:

((Accepter cette théorie serait conférer un effet rétroactifà I'ar-
ticle 29 du traitéde 1926,alors que l'article 32 du mêmetraitéénonce
que le traité,ce qui doit signifiertoutes les dispositionsdu traité,en-
trera en vigueur des sa ratification. Cette conclusion aurait pu être
contredite s'il avait existé une clause ou une raison particulières
appelant une interprétation rétroactive. Il n'existe pas dans le cas
présentde telle clauseni de telle raison.II est donc impossibled'ud-
mettre que l'une quelconquede ses dispositions doive êtreconsidérée
comme ayant étéen vigueur à unedate antérieure. )>2"

"' Ambarielos.exceptionspréliminaires.arrêt,C.I.J. Recueil 1952.p. 40 (les italiques
sont de moi).

203 Car, comme il est dit sans ambiguïtk dans le commentaire relatif a
l'article 24 de la convention sur le droit des traités:

«lorsqu'uneclausejuridictionnelle se rrouveinclusedans les clauses
defond d'untruité,dont ellea pour objet de garantir l'exécution,IP
princip deelunon-rktrouctiïirépeut avoirpour effgt& [t'miierratione

temporis l'application deIn clausejuridicrionnelle. Ainsi, dans de
nombreuses affaires relevant de la convention européenne de sauve-
garde des droits de l'homme et des libertésfondamentales, la Com-
mission europkenne des droits de l'homme s'est déclaréeincompé-
tente pourconnaitre des requêtes concernant deprétendues violations
des droits de l'homme qui auraient éti:commises avant que la

convention n'entre en vigueur à l'égardde 1'Etatmis en cause.»212

En considérationde ce qui précédej,e me permets de conclure que ni
lesconditions de compétenceni lesconditions de recevabilitéqui auraient
di3êtrerempliespour que la Cour puisseconnaître de I'affairen'ont été à

mon avis satisfaites.

>12Projetd'articlessurle ddestraitb, aveccornmeniair,doptéparla Commis-
sion du droit internationalAsa dix-husessionNations Unies,Docunientsofjciels
de luconfërencrsur le droit des traités,prem~èreet deuxzèmeVienne,25 mars-
24 mai1968 et9 avril-22mai 196p.35, par. 2.

204

Bilingual Content

In spite of my respect for the Court, 1am cornpelled,with deep regret,
Io avail myself of the right io express a disseniing opinion.
As each objection appears ta be designed as a separate whole, 1shall
treat the objections raised by Yugoslavia separately, in such a way as to
ensure that the conclusions drawn therefrom will serveas a proper basis
for my general conclusion concerning the jurisdiction of the Court and
the admissibility of Bosnia and Herzegovina'sclaim.

1. My approach to the meaning of the first preliminary objection is
essentially diîfercnt frorn that of the Court. Prior to deciding whether in
concreto there is an international dispute within the tcrms of Article IX
of the Genocide Convention, it is necessary,in my opinion, to resolvethe
dilemma of whether Bosniaand Herzegovina at the time when theAppli-
cation, as well as theMernorial, were submitted, and Bosnia and Herze-

govina as it cxists today when this case is being heard, are actually one
and the same State. This question represents, in rny opinion, a typical
example of what Judge Eitzrnaurice in his separate opinion in the Norifi-
ern Ct~meroonscase ' described as objections "which can and strictly
should be taken in ndvunce of any question of cornpetence", for it opens
the way for the persona srandiin judicio of Bosnia and Herzegovina.

If they are the same State, then the issue raiçed by the preliminary
objection is in order.In the event lhat they are not, the siiuation is in my
opinionclear - there isno disputeconcerning Article IX of the Conven-
tion - hence, placitum aliud personale.
In this regard, the issue raised by the first preliminary objection is not
an issue of adrnissibilitysfrictosensu,but a mixture, in its own righl, of
adrnissibilityand jurisdiction rutione personae.

2. The aforementioned question is directly linked with the concept of
an international dispute, the substance of which conçists of two cumula-
tive alements - the matcrial, and the forrnal. The generally accepted
definition of the dispute which the Court gave in the Mavrommatis Pal-
estine Concessions case represehts, in fact, only the material elernent of
the concept of "international dispute". In order to qualify "a disagree-
ment over a point of law or fact, riconflict of legalviewsor of interests",
which isevident in this specific case, as an "international dispute",
anoihcr, forma1element is indispensable, i.e that the parties in the "dis-
agreement or conflict" be States in ihe sense of international public law.

'L C.J Reports 195.7,p. 105.
2PC./.J., SeriesA, No 2,p. 11.

69 C'est tresrespectueusement que je me trouve contraint, A mon grand
regret, deme prévaloirdu droit de formuler une opinion dissidente.
Chacune des exceptions soulevéespar la Yougoslavie semblant être
conçue comme un tout distinct,je lesexaminerai séparément,afin que les
conclusions auxquellesj'aboutirai constituent un fondement solide pour
ma conclusion génkraleconcernant la compétencede la Cour et la rece-
vabiliti: de la demande de la Bosnie-Herzégovine.

1. Ma conception du sens de la première exception préliminaireest
fondamentalement différente de celle de la Cour. Avant de décider siin
cuacreao, il existe un différendinternational au sens de l'article IX de la
convention sur le génocide,ilestà mon avisnkceçsüirede déterminersi la
Bosnie-Herzégovine i l'époqueou la requete et le mémoireont ésé sou-
mis et la Bosnie-Herzégovinetelle qu'elle existeaujourd'hui alorsque la

présente affaireest ril'examenconstituent effectivement un seulet mkrne
Etat. Cette question està mon avis un exemple typique de ce que dans
son opinion individuelle en l'affaire du Cunzerounseptentrional' sir
Gerald Fitzmaurice a décrit comme relevant d'exceptions((qui peuvent
et, à strictement parler, doivent êtreexaminéespréalablementa toute
ques~ion de compétence»,car elle ouvre la voie a la persvau stand; in
judicio de la Bosnie-Herzégovine.
S'ils'agitu inèmeEtüt, alors la question soulevéepar E'exceptionpré-
liminaire est pertinente. Dans leas contraire, la situation ermon avis
claire- il n'ya pas de différendconcernant l'articlIX de la convention
- el, ainsi, plucitum u6iudpersonule.
A cet égard,la question soulevéepar la première exception prélimi-
naire n'estpas une question de recevabilitéstrictosensu, mais une ques-
tion suigeneris touchant à la fois la recevabilitéet la compétencerarione

persunae.
2. La question susmentionnéeest directement liée à la notion de diffé-
rend international,qui consisle en deux éléments cumulé -s un élément
materiel et un élémentformel. La définitiongénéralement acceptéd eu
ternie {(différend)que la Cour a donnéedans l'affaire des Concessions
Muvromrnuti~en Plïleslinene représenteen fait que l'élkmentmatériel
de la notion de ((diffkrend international». Pour pouvoir qualifier «un
désaccordsur un point de droit ou de fait, une contradiction, une opposi-
tion de thèsesjuridiquesou d'intérêts)l),squels sont evidents en l'espèce,
de crdifférendinternational». unautre élément. formel celui-làe.st indis-
pensable, à savoir que les parties au «désaccord)>au en «apposition>)66 1 APPLlCATiON OF CENOCI1)B CONVENTION (DISSO.P.KRECA)

Article 1X of the Genocide Convention stipulates the cornpetence of the
Court for the "disputes between the Parties". The tenn "Parties", as it
abviausly results frorn Article XI of the Convention, means States, either
members or non-rnembers of the United Nations.

The term "State" is not usrd eirher in abstrac~oin the Genocide Con-
vention, or elscwhere; it means a concrete entity which combines in its
personalily the constituting elernentsof a State, determined by the inter-
national law. The pretention of an entityto represent a State, and even

recognition by other States, is noi, in the eyesof the law, sufficienton its
own to make it a State within the meaning of international law.

From the very beginning of the proceedings before the Court, Yugo-
slavia challenged the siaiehood of Bosnia and Herzegovina. It is true
that, asihc Caurt noted, Y ugoslavia explicitlywithdrew lhis preliminary
objection. However substantial arguments against the statehood of
Bosniaand Herzegovinaat the relevant time were indicatedby Yugoslavia
in support of its third objection.Exew~plicuusu, Yugoslavia emphasized
that "[tlhe central organs of the Government of this Republic controlled

a very srnall part of the territory of Bosnia and Herzegovina . ..In fact
four States existed in the territory of the former Socialiçt Republic of
Bosnia and Herzegovina . .."3. The third objection of Yugoslavia may
in substance be reduced to the assertion thai Bosnia and Herzegovina, in
the Iight of relevant legalrules, "has not established its independent state-
hood" within the administrative boundaries of that former federal unit.
This was an additional reason for the Court to take its stand on the
aforementioned question, notonly inorder to be able:totake the decision
on the first preliminary objection of Yugoslavia, but also in order to
decide whether, and to what extent, it was competeni in ihis case.
The response to the question whether Bosnia and Herzegovina, at the

relevant points in time, was constituted as a State within theadrninistra-
tive boundaries of the federal unit of Bosnia and Herzegovina has, in my
opinion, a definite affect on the successioto the Genocide Convention.
To be bound by ihe Genocide Convention is only one of the forms of
"replacement of one State by another in the responsibility for interna-
tional relations of the territory".he word "territory" refers to the space
in which the newly formed State exercises summu poteslas, the space
within whichit isconstituted as a State in the senseof the relevant noms
of international law. It need hardly be said that there isno legalbasisthat
would enable one State to assume contractual obligaiions in the name of
another State or States, whether reçognizedor not. Bosnia and Herze-

govina explieitlyclaims - and, what is more, its entireMernorial isbased
on that daim - that it is acting in thname of the whole of the former
federal unit OFBosnia and Herzegovina, i.e., that Bosnia and Herze-doivent êtredes Etats au sens du droit international public. L'articleIX
de la convention sur le génocide disposeque la Cour est compétentepour

connaître des {(différendsenire les parties». Le terme <(parties»,tel qu'il
résulte i l'évidencede l'article XI de la convention, désigneIes Etats,
qu'ils soientou non membres de l'Organisation desNations Unies.
Le terme «Etat» n'estpas non plus utiliséin abslracto dans laconven-
tion sur le génocideni ailleurs; il désigneune entitéconcrètequi réunit
dans sa personnalitéles élémentsconstitutifs de 1'Eiat iels que ceux-ci
sont définisparledroit international. La prétention d'une entita la qua-
lit6d'Etat, et mêmesa reconnaissance par d'autres Etats, ne sont pas, au
regard du droit, suffisantes en elles-memespour faire de cette entitéun
Etat au sens du droit iniernational.
Dès le tout début de l'instance devant la Cour, la Yougoslavie a
contestéa la Bosnie-Herzégovinela qualitéd'Etat. Certes, comme l'a
note la Cour, la Yougoslavie a expressémentretirécette exception préli-
minaire. Toutefois, ellea formulé a l'appui de sa troisième exception des
arguments de Fondpour dénier à la Bosnie-Herzégovinela qualitéd'Ela1

durant la période pertinente.Elle a par exemple soulignéque «les or-
ganes centraux du gouvernement de cette république ne contrôlaient
qu'unetrèsperircfraction de son iernioire ..Tlexislaien fait quatre Etats
sur le terricorre de l'ex-République socialisde Bosnie-Herzégovine ..,,3
En substance, la troisiémeexception de la Yougoslaviepeut êtreramenée
à l'argument selon lequel, au regard des réglesjuridiques applicables, la
Bosnie-Herzégovine «n'a pas établi sa qualité d'Etat indépendant» a
l'intérieur des limitadministratives de cette ex-entité fédérale.'étaitlà
une autre raison pour laquelle la Cour devait prendre position sur la
question susmentionnée, non seulement pour pouvoirstatuer sur la pre-
mière exception préliminairede la,Yougoslavie, mais aussi pour décider
si et dans quelle mesure elleétait compétenteen la présente affaire.
La réponse a la question de savoir si la Bosnie-Herzégovine,aux
inoments pertinents, ttait coiistituen Etat il'intérieudes limitesadmi-
nistratives de l'entitéfédéralee Bosnie-Herzégovinea un effet concret
sur la successionà la convention sur le génocide.Etre lie par la conven-

tion sur le génocide est seulement l'une des formes de la {(substitution
d'un Etat à un autre dans la responsabilitédes relations internationales
d'un territoire».Le inot {(territoire))vise l'espacedans lequel l'Ela€nou-
vellement forméexerce: la summu potesrus, espace a l'intérieurduquel il
est constituéen Etat au sens des normes en vigueur du droit internatio-
nal. Il est peine besoin de dire qu'aucune basejuridique ne permet àun
Etat d'assumer des obligations contractuelles au nom d'un autre Etat ou
d'autres Etats, qu'ils soient reconnus ou non. La Bosnie-Herzégovine
prétend expressément - et, qui plus est, la tolalité de son mémoire
repose sur cette prétention- qu'elleagit au nom de l'ensemblede l'ex-
entitt fëdéralede Bosnie-Herzégovine,c'est-&-direqu'elle est1'Etat suc-562 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (DISS. OP. KRECA)

govina is the successocStare in relation to the entire territory of that
former federal unit. Hence, in my opinion, it is essential that the Court,
in definingthe factual and Iegalsiaie of affüirs in the territory of Bosnia
and Herzegovina at the relevant points in tirne, should precisely deter-
mine the scope of itsjiirisdiction.
Finally, in its scopethe answer to the question of the State identiry of
Bosnia and Herzegovina is, in my view, also relevant with regard io ihe
Yugoslav claim srated in the fifth preliminary objection according to

which the case "in point is an international conflict betweenthree sidesin
which FRY was not taking part".

Having in mind the foregoing, and even in the event that Yugoslavia
has not made such an assertion, the Court is not relieved of the obliga-
tion sodo sa. As established in the Judgment on the Appeal Relating lo
the Jurisdiction of the ICAO Council:

"'TheCourt must however always be satisfiedthat it has jurisdic-
tàon, and must if necessary go into that matter proprio rnotu. The
real issue raised by the present case was whelher, in the event of a
party's failure to pur forward ajurisdictional objection as a prelimi-
nary one, lhat party rnight not thereby be held ta have acquiescedin
the juridiction of the C~urt."~

3. (TheconceptoJfhe Srure ab inrra.) The concept of the State ab infra
definesthe State as an isolated, static phenornenon on the basisof its con-
stituent elements. The Slate so defined is usually understood to be an

entity cornprisedcumiilativelyof a permanent population, an established
territory and sovereignauihori ty.Not infrequently, other elements ofthe
State are also cited but they do ncrtmerit the qualification of constituent
elernents.They are by their nature either derived elements(exempli cuusa,
"capacity to enter into relations with other States") or they reflectexclu-
sivisticconcepts which are ontologically in contradiction with the demo-
cratic nature of positive iniernational law ("degreeof civilization such as
enables it to observe rhe principlesof international law", etc.).
As far as the nature of the citcd constituent elements of the State are
concerned, they are legal facts. As legal facts they have two dimensions.

The qualification "constituent elementsof the State" reflects the stalic,

phenornenological dimension of the concept of thc State. It proceeds
from the State as a fact, Le., phenomcnologicalIy, and focuses on the
basic constituent elemenls of its static being.
In thecase of the emergence of new States, the constituent elements of
the concept of the State lose their phenomenological characteristics -
since in that case,there is no State as an entity - and are transformed
into prerequisiresfor the emergence of a State. In other words,far a cer-

I.C.J. Reporrs 19p.,52.cesseur relativement i la totalitk du territoire de cette ex-entitéfédérale,
C'est pourquoi il est à mon avis essentielque la Cour, lorsqu'elle definit
la situation en fait et en droit dans le territoire de Bosnie-Herzégovine
aux moments pertinents, définisseprécisémentl'étendue de ça compé-
tence.
Finalement, par sa portée,la réponse à la question de I'identitkéta-
tique de Ia Bosnie-Herzégovine est à mon avis également pertinenteen ce
qui concerne l'argument formulkpar la Yougoslavie dans sa cinquième
exception préliminaire, a savoir qu'«il y a en l'espèce un conflitinterne

entre trois parties, auxquelles la République fidérative de Yougoslavie
n'est pas partieprenante».
Compte tenu de ce qui précède,et même sila Yougoslavie n'avait pas
présenté un tel argument, la Cour n'enest pas moins tenue de s'assurer de
sa compétence.Comme il a éikétablidans l'arrêt rendudans l'affaire de
l'Appel concernant lu comyttence du Conseilde I'OACI:

<<LaCour n'en doit pas moins s'assurer de sa compétenceet elle
doit, s'il a lieu, l'examiner d'office.Le vraiproblkme soulevéen
l'espéce,du fait qu'une partie 'est abstenue de présenterune objec-
tion à lacompétence sousIa forme d'une exception prkliminaire, a
étéde savoir si cette partie ne devrait pas êtreconsidéréecomme
ayant ainsi acceptéla compétence dela Cour. >j4

3.(Lu notion d'Etut ab intra.) La riotion d'Etat ab infru définitl'Ela1
comme un phénomèneisoléet statique sur la base de:ses élémentscons-
titutifs.'Etat ainsi défini s'entendgénéralementd'une entitécompre-
nant une population permanente, un territoire ktabli et une auroritésou-

veraine. 11n'est pas rare que d'autres élémentsde 1'Etatsoient aussi cités
mais ils ne méritentpas la qualification d'klémentsconstitutifs, soit qu'il
s'agisse, par leur nature, d'éléments dérive (sar exemple «la capacité
d'ktablir des relations avec d'autres Etats~}, soit qu'ils reflètentdes
notions exclusivistesontologiquemeni incompatiblesavecFanature démo-
cratique du droit international positifc<niveaude civilisation permettant
1'Etard'observer les principes du droit international», etc.).
Quant à la nature des éléments constitutifs de 1'Etatçitésci-dessus, il
s'agitde faitsjuridiques.En tant que faitsjuridiques, ils ont deux dimen-
sions.
La qualificationd'<<élémen csnstitutifs de 1'Et»treflètela dimension
phénoménologiquestatique de Ia notion d'Etat. Elle procede de 1'Etat
qui, en tant que fait, c'est-à-dire phénoménologiquemente ,st axé surles

éléments coristitutifs fondamentaux de son être statique.
Dans le cas de l'apparition de nouveaux Etats, leséléments constitutifs
de 1'Etatperdent leurscaractéristiquesphénoménologiques - car dans ce
cas iln'yn pas d'Etat en tant qu'entité- et setransforment en condirions
préuluhles à la naissance:d'un Etat. End'autres termes, pour qu'une cer-

CIi1.J.RecuIYR, p.52.

71tain entity to become a State it rnust cumulatively fulfilconditions which
are, in the material sense, identical with the constituent elernents of a
State in the static, phenomenological sense.
4. Whal is the mutual relalionship among the basic conslituenl ele-
ments of the State? From the forma1 standpoint, the question may
appear to be superfluous,as by its very wording itsuggesls the only pos-
sibleanswer and that is that they are elernentsthat function cumulatively.
However, the question does have a logicof its own ifone viewsit as relat-
ing to the value relationship among the cumulative elementsor, in other
words, if one views, within the concept of the State compnsed of the
three çited elernents, their mulual relationship ab infra.
With the reservation that the value relationship among the cited ele-

ments is to some extent determined in advance by the cumulative nature
of the elements, some conclusions can nonetheless be drawn. First, there
is no doubt that a certain value relationship, if not even a hierarchy, does
exist. Suffice it to note that territory and population are immanent to
some non-State entities as well. It is also beyond doubt that the efement
of sovereignty is peculiat to the Statealone. Thirdly - and this is the
dqjerentia spec$ca between States and other, non-State entities - sov-
erejgnty is in a srnse a qualifying condition, a condition of special value,
for sovereignauihoriiy is not only one of the consiiluent elemenls of the
State, but itisat the same time an element which givesconcrete substance
to the rather abstrüct andbroad concepts of "territory" and "population"
and, in so doing, links thern to the concept of the Srate in the sense of

international law. Evidently, for a "territory" to be "State territory" it
must be subject to sovereign authority. Without it a "territory" is not a
State territory but it is sornething else (renuliius,trusteeship territory,
re.7comrnunia omnium, common heritage ofrnankind and the like).

5. Were the constituent elements of a State in existence in the case of
Bosniü and Herzcgovina at the relevant point in tirne?
6. There is no doubt that Bosnia and Herzegovina had a "permanent
populatioii" if we use the term in the technical sense, Le., in the sense af
a group of individuals who were linked to the relevant territory by their
way of life.
However, within the system of positive international law, the term
"permanent population" acquires a different meaning. In a system that
recognizesthe fundamental significance of the noms of equal righls and

self-determinalion of peopIes (see paras. 67-68,7 1below), the concept of
a "permanent population", at least when referring to a territory inhabited
by severalpeoples, cannot have only the cited technicalmeaning. In that
case, if one is tu be able to speaOF a "permanedt population" in viewof
the norm on equal rights and self-determination of peoples, there has to
be a minimum of consensus among the peoplesregarding the conditions
of tlieir lifetogether.
In Bosnia and Herzegovina that minimum did not exiçt. The Referen-
dum of 29 February and 1March 1992,in relation to the national plebi- taine entitédevienne un Etat, elledoit remplir cumulativement des condi-
tions qui sont, au sensmateriel, identiques aux Élémentsconstitutifs d'un
Etat pris auxsens slalique et phénornenologique.

4. Quelle est la relation mutuelle entre les élémentconstitutifs fonda-
mentaux de I'Elat? Du point de vue formel, la question peut sembler
superflue,car son libellémeme suggèrela seulerkponse possible, i savoir
qu'il s'agit d'élémenq tui opèreritcumulativement. Toutefois, cette ques-
tion a sa propre logique si on l'envisagedu point de vue de la valeur rela-
tive des élkrnentscuniulésou, en d'autres termes, si t'on envisage,au sein
de la notion d'Etacconstituédes trois élkmentscités,la relation mutuelle
de ces éléments uh iniru.
MEme si la valeur comparée de ces éléments estdans une certaine
mesuredéterminée ;l'avancepar leurnature cumulative,certainesconclu-
sions peuvent néanmoinsêtretirées. Premiérement,il n'est pas douteux
qu'il existe bien une échelldee valeurs, sans allerjusqu'à une hiérarchie.
Il suffit de noter que territoire et population sont également inhérents ;i
certaines entitésnon étatiques.11est aussi hors de doute que l'élémend te
souverainetéest propre au seul Etat. Troisièmement - et cela est la du=
ferenfia specfica entre les Etats et d'autres entités, nonétatiques - In

souverainetéest dans un sensune condition sine qua non, une condition
d'une valeur particuliére,car l'autorité souverainen'est pas seulement
l'un des élémentc sonstitutifs de I'Etat, mais elle esten même temps celui
qui donne une substance concrète aux notions assez abstraites et larges
de <<territoire)et de «population>>et, cefaisant, les relie a la notion
d'Etat au sens du droit international. A l'évidence,pour qu'un «terri-
toire» soit un ({territoire&tatique»il doit êtresoumis une autoritésou-
veraine. A défaut, un «territoire» n'est pas un territoire étatique mais
quelque chose d'autre (res nullius, territoire sous tutelle, res cornmunis
omnium,patrimoine commun de l'hurnanitk, etc.).
5. Les éléments constitutifsde 1'Etatexistaient-ils dans le cas de la
Bosnie-Herzégovine a la date pertinente?
6. Il n'est pas douteux que la Bosnie-Herzégovineavait une ({popula-
tion permanente» si I'on utilise l'expression au sens technique, c'est-
Ii-dire au sens d'un groupe d'individus lies au territoire en question par
leur mode de vie.
Toutefois, en droit international positif, l'expression«population per-

manente» acquiert un sens différent.Dans un systkme qui accorde une
importance fondamentale aux principesde 1"galitédes droits et de l'auto-
déterminationdes peuples (voir ci-aprèspar. 57, 68 et 711,la notion de
«populnlion permanente»,au moins lorsque I'onse réfèrea un territoire
habitépar plusieurs peuples, ne peut avoir seulement le sens technique
susvisé.Dans un tel cas, pour pouvoir parler d'une ((population perma-
nente>> compte tenu des principesde l'égalité ded sroits et de l'autodéter-
mination des peuples, un minimum de consensus doit exister entre les
peuples concernésquant aux conditions de Ieurviecommune.
En Bosnie-I-Ierzégovinec,e minimurn n'existait pas. Le rgfërendum du
29 févrieret du Iermars 1992,en relation avecle plébiscite national du564 APPLICATIONOF GENOCIDE CONVENTION (DISS. OP. KRE~A)

scite of the Serb people in Bosnia and Herzegovina of 9-10 November

1991, showed that the "permanent population" of the federal unit of
Bosnia and Herzegovina was dividedinto the Muslim-Croat peoples onthe
one hand and the Serb people on the other. The unificalion of the com-
munes with a majority Croat population inlo the Croatian Community
of Herceg-Bosna on 19 Novembcr 1991 and especially the formalion
of the independent State community of Herceg-Bosna on 4 JuZy1992,
symbolized the completç divergence of options among the three peoples
of Bosnia and Herzegovina. ln an entity in which surnrna potesras is a

constituent element of special impor~anceand bearirig in rnind how it
was distributed in Bosnia and Herzegovina, there are strong grounds to
claim that in Bosnia and Herzegovina there were in fact three "perma-
nent populations".
7. The use of the tcrrn "defined territory" implies defined and settled
boundaries in accordance with the ruIes of positive international law. As
a condition for the existenceof a State, "defined and settled boundaries"
do not have absolule value - in practice a State has been considered to
have been constituted even when al1 its boundaries were not defined.

However, it is essential that "theres a consistent band of territory which
is undeniably controlled by the Government of the alleged State"'. The
rule is thal the boundaries be established by international treaty or,
exceptionally, on the basis of the principle of effectiveness.

The question whether Bosniaand Herzegovina had "definedand settled
boundaries" has a two-fold meaning: material and in terms of time.
8. In the material sense, the relevant question is whether one cal)
equate administrative-territoriaboundaries within a composite State and

frontiers between States in the sense of international law?
The answcr can only be negative both Cromthe standpoint of the
interna1 law of the Socialist Federal Republic of Yugoslavia (SFRY)
and from the standpoint of international law,
As far as the interrial law of SFRY is concerned, sufficeit to note ihe
provisions of Article 5 (1) of the SFRY Constitution which stipulaied
expressis verbis that the "territory of SFRY is unified" and that it is
"composed of the territories of the Socialist Republics". That the
"boundaries" belween the federal units were merely lines of administra-
tive division is also evidenced by the Fact that they were not directly

established by any legal acl. They weredetermined indireclly, via the ter-
ritories of the communes which cornprised a certain federal unit so that
they were, in a sense, the aggregation of communal borders. Thus, the
Constitution of Bosnia and Herzegovina stipulated in Article 5: "[tlhe
territory of SR Bosnia-Herzegovinais composed OF the areas of the com-
M u1'les''.

M.N. Shaw, Infcrnu!ic~i uw, 198p. 127.

73 APPLICATION DE CONVENTION G~NOCIDE (OP. DISS. KRE~A) 664

peuple serbe en Bosnie-Herzégovine de9 s et 10novembre 1941,a montré
que la ({population permanente» de l'entité fédérad le Bosnie-Herzégo-
vineétaitdiviséeen un peuplc croaio-musulman, d"unepart, et un peuple
serbe, de l'autre. La réunion descommunes h majoriik croate au sein de
lamrnmunautk croate d'Herceg-Bosnale 19novembre 1991et, en parti-
culier, la Formationde la communauté étatiqueindépendante:d'Herceg-
Bosna le4juillet 1992symbolisaientlesdivergenceslotales dechoix entre
les trois peuples de Bosnie-Herzégovine.S'agissant d'une entité dans
laquelle lasumrno polt.srasest un élkmentconstitutif d'une importance

particulièreet compte tenu de la maniere dont elle étaitrépartieen Bos-
nie-Herzégovine,de solidesarguments permettent d'affirmerqu'il y avait
cn fait trois ((populations permanentes>>en Bosnie-Herzégovine.

7. L'utilisation de l'expression <(territoiredéfininimplique des fron-
tières définieet étübliesconformtment aux regles du droit international
positif. En tant que condition de l'existence d'un Eiat, ({desfrontikres
définieset établies»n'ont pas une valeur absolue - en prütique on a
considéré qu'unEtat tiait constituémêmelorsque toutes ses frontières
n'étaient pas définies.Toutefois, il est essenticl qu'<<ilexiste une bande

consistante de territoire indéniablement controléepar le gouverncrneni
du prétenduEtat»'. La régleest que les frontières doivent êtreétablies
par traité international ou, exceptionnellement,ur la basedu principe de
I'effectivilé.
La question de savoir si la Bosnie-Herzégovineavait «des frontières
définieset établies»a un double aspect, matérielet chronologique.
8. Du point de vue matéricl,il s'agitde savoir si l'on peut assimiler les
limites administratives territoriales internes d'un Etat composite à des
frontières entre Etats au sens du droit iniernational?
La réponsene peut êtreque négativetant du point de vue du droit
interne de la République féderativesocialiste de Yougoslüvie que du

point de vue du droit international.
En ce qui concerne le droit interne de la Républiquefédérative socia-
liste de Yougoslavie,il suffit de noter lesdispositions de l'article 5, para-
graphe 1, de la Constitution de la République Fkdkrativesocialiste de
Yougoslavie, qui disposait expressémentque «le territoire de la Répu-
blique fédérativesocialiste de Yougoslavie est unifié»et qu'il est «com-
pose desterritoires des rkpubliquessocialistes».La raison de penser qules
«limites» entre les entitésfSdéralesn'étaientque des lignes de démarca-
tion administratives estaussi attesttc par le fait qu'ellesn'avaient pas été
établiesdirectement par un acte juridique. Ellesétaientdéterminées indi-
rectement, par le biais desterritoires des communes qui constituaientune
certaine entitéfédéralede telle sorte qu'ellesétaient,en un sens, un agré-

gat de frontièresçommunales. Ainsi, la Constitution de Bosnie-Herzégo-
vine stipulaità l'article 5: «Le territoirde la Républiquesocialiste de
Bosnie-Herzégovine estcompose des superficies descommunes. »

5M N Shaw. lnr~rnatiorinlLo1986p. 127.665 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (PISS. OP. KRECA)

The administrative nature of the boundaries of the federal units in
SFRY was also recognized by the Arbitration Commission of the Con-
ference on Yugoslavia whose opinions are used by the Applicant as its
main argument. In Opinion No. 3, it described the boundaries between
the Yugoslav Federalunits as "demarcation linesX6.

In the light of international law, the terms "frontier" or "State border
lines" are reserved for States with international personality. More par-
ticularly, whereas the SFRY was a State in terms of public international
Iaw and of the United Nations Charter, the repvblics were the compo-
nent parts of Yugoslavia and, in the context of the legal nature of a fed-
eralion, they were the component parts of a single State inforoexterau
and of a composite State in for0 interno since the federation is disrin-
guished by the parallel existence of a federal and a republican govern-

ment organization in a manner and on a scale established under the
Constitution and the law.
.,
9. From the standpoint of time, the question is posed differently -
werethe administrative-territorialboundaries of Bosnia and Herzegovina
transformed into borders in the sense of international law, iruciu lem-
poris, from the moment the "sovereignty and independence" of Bosnia

and Herzegovina was proclaimed?
The possibilityof such a transformation exists in principle. "Non-
borders" cün become "borders" in the same way in which "borders" are
constituted, that is by agreement or, exceptionally, on the basis of thc
principle of effectiveness.
Examples of such ü transformation are thecases of thc Soviet Repub-
licsand the Czech Republic and Slovakia. In the Yugoslav case, such a
transformation implied two things: first, that a decision on the dissolu-

tion of SFRY or a state-legal restructuring had been takenby the highest
organ of authority through an appropriate procedure and, second, that
in either case, the establishment of Bosnia and Herzegovina as an inde-
pendent State had been envisaged. The relevant facts imposed such a
solution. First, Bosniaand Herzegovina was not an authentic constituent
of the Yugoslav State. Such a status was enjoyed, among others. by the
peoples of Bosnia and Herzegovina (paras. 48-60 below). Further, being
a derivative entity of the constilutional law of Yugoslavia without the
right to secession, Bosnia and Herzegovina's existencedepended on the

existenceof Yugoslavia. Conscquently,even landgrtheIzypothesisfliut the
dissolution of SFRY Iiud zukenplace, this would nol in IlseiJsignifv the
tuansformation ofBosniu and fï~rzegovina inlo an independent Stale
within itsadminisrrativeboundnrie Lsegally, the hypotlietical ~lisscilurion
~iouldnecessarily have had 10 result in thepoliticadand Iqal reconstruc-

6Thc Conferencefor PeaceinYugoslavia,ArbitratioCommission,Opinron No.3,
para. 2 (3).

74 La nature administrative des limites des entités fkdéralesen Répu-
blique fkdérativesocialiste dc Yougoslavie a aussi étéreconnue par la

commission d'arbitrage de la conférencesur la Yougoslavie dont lesavis
sont utiliséspar le demandeur comme argument principal. Dans son avis
nu 3,la commission a qualifielesfrontièresentre IFSentités fédéraleysou-
goslaves de {(lignesde délimitation»b.
En droit international, les termes «frontiéres» ou «frontières éta-
tiques» sont réservés aux Etats dotésde la personnalite internationale.
En l'espèce,si la Républiquefédérative socialistede Yougoslavie étaitun
Etüt au regard du droit international public et de la Charte des Nations
Unies, ses rtpubliques en ttaient lesélémentcsonstitutifs et, compte tenu
de la nature juridique d'une fédérationi,lsétaientlesélémentsconstitutifs
d'un seul Etat inforo externo, et d'un Etat composite in Joro interno
puisqu'une fkdérationse distingue par l'existenceparallèled'une organi-
sation gouvernementale fédéraleet d'une organisation gouvernementale

des républiquesde la manièreet dans la mesure établies par la constitu-
tion et par la loi.
9. Du point de vue chronologique, la question se pose différemment:
leslimitesadministratives territoriales de la Bosnie-Herzégovine ont-elles
été rrünsforméesen frontièresau sens du droit international, [rucrutcm-
poris, a partirdu moment ou «la souverüineti et l'indépendance>d >e la
Bosnie-Herzégovineont étéproclamées?
Une telletransformation est enprincipe possible. Des<<non-frontières»
peuvent devenir des ccfrontitres» de la meme manière dont les «fron-
tières~sont définies, c'est-à-direpar accord ou, exceptionnellement, sur
la base du principe de l'effectivité.
Les républiques soviétiquee st la Républiquetchéqueet la Slovaquie

fournissent des exemples d'une telle transformation. Dans le cas de la
Yougoslavie, une telle transformation impliquait deux choses: premikre-
ment, qu'unedécisionsur la dissolution de la Républiquefédérative socia-
liste deYougoslavi~:ait étk prise ouune restructuration étütico-juridique
effectuie par l'organe investide l'autorité suprêmd eans le cadrc d'une
procédure appropriée et,deuxièmement,que, dans un cas comme dans
l'autre, l'établissemente la Bosnie-Herzégovine entant qu'Etat indépen-
dant ait étéenvisagé.Les faits pertinents imposüienl une telle solution.
Premièrement, la Bosnie-Herzégovinen'étaitpas un klémentconstitutif
authentique de 1'Etatyougoslüve.Un tel statut étaitcelui,notamment, des
peuples de Bosnie-Herzégovine(voir ci-après par. 48-60). En outre, la
Bosnie-Herzégovineétantune entitk dérivéedu droit constitutionnel de la
Yougoslavie sans droit de sécession,son existencedépendaitde cellede la
Yougoslavie. En conséquence, meme d~nsl'hypolhése où la dissolutionde

la Ripub fiquefédérative sucialistede Yougo~luvie étai1 eff~rcti cv~l,ne
sign8erait pus m soi la trun?rfjrwiationde lu Busnie-Hcrzkgovineen un

Conférencepour la paix cn b'ougoslavie,commissiond'arbitran",3, par2,
al. 3.

74fion ofthe sprrce of Bosniuand Herzegouinu on ihe busis of rhcnorin on

eqlaairights nnd seif-determination ofpeoples.

Bosnia and Herzegovina did not accept the "Concept for the future
organizürion of the Slate", proposed by a working group comprising rep-
resentatives of al1the Republics, as a basis for further talks involvingihe
republican presidentsand the State Presidency,which, interalia,included
a "Pi-oposedProcedure for dissociation from Yugoslavia" on the basis of
the self-determination of peoples. This part of the "Concept" which was

drawn up to deal with ihc constitutional crisis in SFRY in a peaccful and
dernocratic manner, respecting the relevant norms of international law
and the interna1lawof SFRY, envisageda correspondingsolution for the
borders as wdl, On the basis of the draft amendment tothe SFRY Con-
stitution, the "Concept" stipulated the obligation of the Federal Govern-
ment to "c. prepare proposals for the territorial dernarcütion and the
frontiers of the future States and other issues of importance for formu-
lating the enactment on ~ithdrawal"~.

What remains therefore, is the principle of effectivenessas a possible
basis for the transformation of the administrative-territorial boundarics
of the federalunit of Bosnia and Herzegovina into international borders.
As this principle impliesthe effective,aciual exerciseof sovereignauthor-
ity, and considering the scopeof that authority of the central government
in Sarajevo (see para. 18 below), itis beyond doubt that the mcntioned
transformation of boundaries on the basis of the principle of effeciivc-
ness did not occur.
10. The Arbitration Commission of the Conference on Yugoslavia
whose opinion Bosnia and Herzegovina uses as argument, slales with
respect to the relevant question :

"[elxcept where otherwise ügreed, the former boundaries become
borders protected by international law. This conclusion follows from

the principle of respect forthe territorial status quo and, in parlicu-
lar, from the principle of ulipossidelis . . .[which] though initially
applied in settling dccolonization issues in Arnerica and Africa, is
today recognized as a general principle, as stated by the lnterna-
tional Court of Justice in its Judgment of 22 December 1986in the
case betweenBurkina Faso and Mali (Frontier Disprrre,(1986) 1.C.J.
Reporrs 554 al 565):

'Neverthelessthe principle is not a special rule which pertaiils

'Focrrs,SpecialIssue, January 1992,p. 33.l APPLICATION DE CONVENTIONGENOCEDE(OP. DISS. KKE~A) 666

Erat indipendanf ù [intérieur de ses limites adminisrrarives. Juridique-
ment, ceîle ~li.~.solulinypo~hétique auruir & necessairerneraf déboucher

Jur un réarnBnugcmenptolitique et juridique de l'espace de luBumie- Her-
ïegovir~esur lu base de la nurme de l'kgalitkdes droitset d~I'autodéter-
rninution despeuples.
La Bosnie-Herzkgovinen'a pas acceptéle ({projetpour l'organisation
future de lYEtat>p>roposépar un groupe de travail comprenant des repré-
sentantsde touteslesrépubliquescomme base denouveaux pourparlers aux-
quels auraient participéles présidentsdes républiqueset la présidencede
1'Etatei qui, entre autres, comprenaitune ((procédureproposée pourla dis-
sociütionde laYougoslavie>> sur la basde l'autodéterminationdes peuples.
Cette partiedu «projet>),lequela étéClaborépour faire facea la crisecons-
titutionnelleue connaissait la République fédérativ socialistede Yougo-

slaviede manière pacifiqueet démocratiqueet dans le respect des normes
pertinentesdu droit international et le droit interne de la Républiquefédé-
rative socialiste de Yougoslavie, envisageait unesolution correspondante
pour les frontières. Surla base d'un amendementde la Constitution de la
République fédérativesocialisted Yeougoslavie, le{(projet)}énonçaitI'obli-
galion du gouvernement fédéra le «cl préparerdes propositions concer-
nant la délimitation territorialeet les frontikresdes futurs Etats el autres
questions d'importance pour la formulation de la loi sule retrait^^.
Reste le principede l'effectivi~comme basc possible de la Iransforma-
tion deslimitesadministratives territoriales de I'eniitkfédéralde Bosnie-

Herzégovine en frontitres internationales, Comme ce principe implique
l'exerciceréelet effectifde l'autorité souveraine,et compte tenu dc la
portéede l'autorité souverainedu gouvernement central Sarajevo (voir
ci-aprèspar. 181, il n'est pas douteux y ue cette transformation en fron-
tièressur la base du principe de I'effectiviié nes'estpas produite.

10. La commission d'arbitrage de la conference sur Iü Yougoslavie,
dont la Bosnie-Herzkgovinecite l'avisa i'appuide sesprktentions, déclare
à cei égard:

(<Adéfautd'un accord contraire, leslimitesantérieuresacquikreni
le caractère de frontières protégéespar le droit internaiional. Telle
est la conclusion a laquelle:conduit le principe du respect du statu
quo territorialet particuliérementcelui de I'uri pns.side~zs...[qui],

bien qu'initialement rcconnu dans le reglement des problèmes de
décolonisationen Amériqueet en Afrique, constitue aujourd'hui un
principc présentantun caractère généralc ,omme l'a déclaré la Cour
internationale de Justice dans son arrêtdu 22 décembre1986dans
l'affaire entre le Burkina Faso et la Républiquedu Mali (Differend
frontu!ier, C.I.J.Recueil 1986, p. 565, par. 20):

«Ce principe ne revètpas pour autant le caractère d'unerègle

yFocirs,numérospkial, janvier 1992,p. 33.
I667 APPLICATIONOF GENOCIDECONVEN~ON (nrss.OP. KRELAI

solely to one specificsystem of international law. It is a general
principle, which is logically connected with the phenomenon of
the obtaining of independence, wherever it occurs. 11sobvious
purpose is to prevent the independence and stability of the new

States being endangereù by fratriçidal str~ggles."'~
Such reasoning is not legally tenable.

First, the phrase "territorial status quo" in thisspecificcase is a con-
tïaclirioin adieciu. It does have a logical and legal sensc in the ioterna-
tional ordes, in the mutual relations hetween States as persons in inter-
national law. The territorial status quo in the United Nations systemis a
terminological substitute for the principle of respecfing a State's territo-
rial integrity, and strictly speaking,it refers to Statcs in the senseof inter-
national law and not to the integral parts of a Sederation.Inforo interno,

the "territorial status quo'ys of qualified significancefor a State's own
territorial organization as a matter which falls within the domain of
strictly internal jurisdiction (domaine rbervc'). So, since the creation of
Yugoslavia in 1918, the internal administrative territorial boundaries
have been drawn three times: first in 1918 within the Kingdom of the
Srrbs, Croats and Sloveneswith a division of thecountry into 32regions ;

next In 1929,in the Kingdom of Yugoslavia, with the organization of
nine BanovinuJsas administrative units; and then in the perjod between
1943and the early post-war years during the formation of Federal Yugo-
slavia and its six republics. Con~.equently,the expression "terrif~riai
starus quo" in municipal law cun only be consideredas a kind r)j legai1
mefaphorfora rule of national Inw whichwouldprohibit changing admin-
isdralive bounduries.

Second,reference tothe lucigrnent of the International Çourl ofJusttce
in the Frunfier Disputce ase cannot have effect in this concrete case not
ooly becausethe relevantpart of theJudgmcnt isnot cited inexwnso', but
also because the meaningof the Judgrnent as a whole differs significantly.
Outside the colonial contextto which the reasoningof the Court iipplies
in the Fronrier Dispute case, the principleof ia?ipiis.~ideiiisn positiveinter-
national law can only have the rneaningwhich corresponds to the original

meaning of that pnnciple as expressed in the formula "ulipos~idetis, îta
posidea~ur", i.e.the rneaning of the principle of effectiveness.
Il. With regard to the qualification of the borders of Bosnia and
Herzegovina, it is interesting to examine the "Framework Agreement for
the Federation" concluded on 2 March 1994in Washington. Chapter 1
(Establishment) of the "Framework Agreement for the Federation" stipu-
lates, inter alia, that:

- -
The Conferencefur Peacein Yugoslavia, ArbitratioCommission, OpinionNo. 3,
para. 2 (4)
Thepart oftheJudgmentwhichtheCommission kas cited cndswith twords 'pro-
vokrd by rhechuilengïnoffronirersfollotu heiwnthdrawaloftheadniinis~crirgpower"
(para. 20; emphasis added) Sparagraphs 19,20, 23oftheFroit!irr Dispute ludgment,
1.C.J. Reports 1986, pp. 564-5566 particulikre, inhérenteA un systémedéterminéde droit interna-
tional.Tlconstirue un principe général, logiquementliéau ph&
nomene de l'accessiona l'indépendance, où qu'il semanifeste. Son
but évidentest d'éviterque IYndépendanceet la stabilitédes nou-
veaux Etats ne soient mises en danger par des luttes fratricides.»"

Un tel raisonnement ne tient pas juridiquement.
Premièrement, l'expression crstatu quo territorial)) est en l'espèceune
conrradic~ioin adiecio. Elle a bien un sens logique et juridique dans

l'ordre international, dans les relations mutuellesentre les Etats en tant
que sujets du droit international. Le szalu quo territorial est, aux Nations
Unies, un substitut terminologique pour le principe du respect de l'inté-
gritéterritoriale de 1'Etatet,à strictement parler, il vise les Etais au sens
du droit international et non les entitéscomposant une fédéralion. In
joro interno, le {(stutuquo territorial» a une importance limitéepour la
proprc organisation territoriale de 1'Etat et est une question qui relève

strictement de la compétence interne (domaineréservé). Ainsid ,epuis la
création de la Yougoslavie en 1918, leslimites territoriales et administra-
tivesinternes ont kte tracéestrois fois: d'abord en 1918 dans le cadre du
Royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes,le pays étant divisé
en trente-deux régions;ensuite en 1929, dans le cadre du Royaume de
Yougoslavie, avec.l'organisation de neuf unités administratives, lesbano-
vinas,et, enfin, avant 1943 et durant les premières annkes de l'aprés-

guerre, dans le cadre dela formation de la Yougoslavie fédérale et de ses
six républiques. En con~équencel,'expression ccstatu quo territorial>iEn
druil inl~rnene peut êtrect~nsidkrkqeuecomme une espècedemktaphorejuri-
dique exprimant une règïe dg droit nationa!qui interdiruide les modijîer.
Deuxièmement,la référence à l'arrêtde la Cour internationale de Justice
dans l'affairedu D(flerendfiontu1ierne peut êtrepertinente en l'espècenon
seulement parceque la citation est tronqukey,mais aussiparce que la signi-

fication de cetarrêt dans son ensembleest sensiblementdifferente.
Hors du contexte colonial auquel s'applique le raisonnement de la
Cour dans l'affaire du Dflérend fronralier, le principe de l'usipossidftis
ne peut avoir en droit international positif que son sens premier tel qu'il
est exprimé par l'adage {rufipossidetis, ita posedeatur>>,c'est-à-dire le
sens du principe de l'effeaivité.
II. En ce qui concerne la qualification des frontières de la Bosnie-
Herzégovine,il est intéressant d'examiner l'c<accord-cadreconcernant la

fédération)}conclu le 2 mars 1994 à Washington. Le chapitre 1 (4cCréa-
lion») de cet accord dispose notamment:

-
Conférenoepour Irpaixen Yougoslavie, commissiond'arbitragavisn" 3, par. 2,
al9La partiedeI'arrtque lacommission acitéeseterminepar les motsan&-3r1.eIo
contesturiondesfrunrièrcsturre durcirude lapiimunce ridnirnrstrunrei()par.20; les
ilaliquessode moi);voir les paragraphes15,20 et del'arrêdans l'affàiredDg-
firend frîvonial. .J.Recueil1985,pp.564-56 5,6.668 APPLlCATIONOF GENOCIDE CONVENTION (DISS. OP. KRECA)

"Bosniacs and Croats, as constituent peoples (along with others)
and citizen8of the Republic of Boxniaand Herzegovina, in the exer-

cise of their sovercignrights, transform the interna1structure ofthe
territories with a majority of Bosniac and Croat population in the
Republic of Bosnia and Herzegovina into a Federation, which is
çomposed of federal units with equal rights and responsibiEities."

Though the "Framework Agreement" makes no mention of frontiers,

there is no doubt that its contents, in the context of relevant norms of
international law,has definite implications with respect to the borders of
Bosnia and Herzegovina.
Thc "Framework Agreement" represents a tacit renunciation of the
concept of a unified Bosnia and Herzegovina and thereby of the admin-
istrativeboundaries of Bosnia and Herzegovina as international fron-
tiers. In particular, it is clear that by lhis Agreement, the political repre-
sentatives of the Croat and Muslim peoples in Boçnia and Herzegovina
agreed ta constitute a federal Stare which would have confederal links
with Croatia. The Constitution of the Federation wüs undoubtedly
derived from the norm of equal rights and self-determination of ihe Mus-
lim and Croat pcoples in Bosninand Herzegovina even though ihis nom
is not explicirlymentioncd in the Agreement. Such a conclusion is war-
ranted by the qualification thai the Federation was constiiuted on the

basis of "the exercise ofsovereign rights.. .[of]Bosniacs and Croais as
constituent peoples". True, the Agreement proceeds from the "sover-
eignty and territorial integriiy of the Republic of Bosnia and Herze-
govina" but this syntagmin the context of the relevant facts has more of
a deda rative than a material significancc. The "Framework Agreement''
dcfines the territory of Bosnia and Herzegovina as "territories with a
majority of Bosniac and Croat populations in the Republic of Bosnia
and Herzegovina". In relation to the parts of Bosnia and Herzegovina
inhabited by a majority Serb population,the "FrameworkAgreement"says:

"[tlhede~isions on the constitutional status of the territories of the
Republic of Bosnia and Herzegovina with ü majority of Serbian
population shall be:made in the course of negotiations toward a
peaceful settlement and at the International Conference on the
Former Yugoslavia".

It is therefore beyond question that:
(0) the "Framework Agreement" envisages the constitution of a Mus-
lim-Croat Federation on the territory of Bosnia and Herzegovina;

(b) tmajority Serb people are left out of the territoriofnthe Federation;

(cl represenratives of the Muslim-Croat Federation are acting and are
accepled in international affairs, including international organiza-
tions, as representatives of an autonomous, independent Statc ; ((Les Bosniaques et les Croates, en tant que peuples constitutifs

(aux côtés d'autres citoyens)et citoyens de la Républiquede Bosnie-
Herzegovine, agissant dans l'exercice de leurs droits souverains,
transforment en fédérütionla structure interne des territoires de la
Républiquede Bosnie-Herzégovine dolit Irpopulation est en majo-
ritébosniaque ou croate, cette fédérationétant composéed'entités
fédéralesayant des droits et des responsabilitéségaux )

Bien que l'r<accord-cadre»ne mentionne pas les frontiires, iln'est pas
douteux que son contenu, eu égard aux normes pertinentesdu droit inter-
national, a des incidences précises en cequi concerne lesfrontières dela
Bosnie-Herzégovine.
L'«accord-cadre» équivaut à une renonciation tacite à l'idéed'une
Bosnie-Herzégovineunifiéeet donc A l'idéede faire des limites adminis-
tratives de la Bosnie-Herzégovine des froniièresinternationales. Il est en
particulier clair que, par cet accord, les représentants politiques des
peuples croate et musulman de Bosnie-Herzégovinesont convenus de
constituer un Etat fédéral qua iurait des liensconfédérauxavec la Croa-
tie. La constitutionde la fédération découlseans aucun doute du principe
de l'égalité dedsroits et de l'autodéterminationdes peuplesmusulman et

croate en Bosnie-Herzkgovinemêmesi cette norme n'est pas expressé-
meni mentionnéedans l'accord. L'affirmationselon laquellela fédération
étaitconstituéesur la base de «l'exercicedes droits souvcrains ...[des]
Bosniaques et des Croates en tant que peuples constitutifs »justifie une
telle conclusion. Certes, l'accord procèdede «la souveraineté et [de]
l'intégritéterritoriale de la République deBosnie-Herzégovine)) maisce
syntagme, dans le contexte des faits pertinents, a une importance plus
déclarative quematérielle.L'«accord-cadre » définitle territoire de la
Bosnie-Herzégovinecomme les «territoires de la République deBosnie-
Herzégovinedont la population est en majorité bosniaqueou croate». En
ce qui concerne les territoiresde la Bosnie-Herzégovine dont la popula-
tion est en majoritéserbe, l'«accord-cadre)) dispose:

«Les dfcisions concerilant le stütut constitutionnel des territoires
de la Républiquede Bosnie-Herzégovinedont la population mi en
majorité serbe seront prises au cours des négociaiionsen vue d'un
règlementpacifique et à la conference internationale sur I'cx-You-
goslavic.)>

Ilest donc hors de doute que:

uj musulmane sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine;érationcroato-

bJ IFSterritoires de la Bosnie-Herzégovinedont la population est en
majorité serbene font pas partie des territoires de la fédkration;
c) les représentants dela fedérationcroato-musulmane agissent et sont
acceptéssur la scéneinternationale, y compris au sein des organisa-
tions intçrnationales, en tant que représentantsd'un Etat autonome
et indépendant;(d) the "Framework Agreement" links the decision on the status of
"territories of Bosniaand Herzegovina with a majority Serb popwla-
tion" to the "course of negotiations toward a peaceful settlement
and at the International Conference or1the Former Yugoslavia". In

viewof the rulesoi'general international Iawon the decision-making
procedurewhich,it goeswithout saying,apply alsoto the International
Confcrence on the Former Yugoslavia, the conclusion that imposes
itselfis that the material-legül meaning of the "Frarnework Agree-
ment" with respectto the borders of Bosniaand Herzegovina is that
the Federation, constituled as a result of the willof two out of the
three constituent peopl~sof Bosnia and Herzegovina, renounced the
adminisirative borders of Bosnia and Herzegovina as State borders

of the Federation Içavingopen the possibilityof those borders being
changed on the basis of decisions taken "in the course of negotia-
lions toward a peaceful çettlementand at the International Confer-
ence on the Former Yugoslavia".

12. It was the Dayton Agreement which transformed the adrninistra-
tive Bowndariesof Bosnia and Herzegovina into international borders.
Article 10of the:Agreement stipulales that "[tlhe Federal Republic of
Yugoslavia and the Republic of Bosnia and Herzegovina rccognize each
other as sovereignindependent States within their international borders".
13. Kegardless of theoretical definitions of sovereigntyand the distinc-

tions based on them regardjng its manifestations, it is evident that the
sovereignty of States implies :
(i) supremnpolesrus - "by which is meant that the State has ovcrit no
other authority than that of international law"lO.The equals-mark

that is being placcd between supremupotestus and independeilcet' is
indicative of a substantial fact - Tharthe entiry purporting to be a
State in thesenseof international public lawtakes vital political deci-
sions autonomously and independently of third States. A State in the
international legal sense cannot and must no; comply with alien
political decisions regardless of wheiher such cornpliance has a
formal or infonnal basis. Therein lies the meaning of the quülifica-

tion according to which "the first condition for statehood is that
there must eiist a government actually independent of any other
State" Z.
(ii} surnrnapotestus - in the sense of the exerciseof real, factual author-
ity on the territory of the State. The intenrion to establish genuine
authority is na more than a political project, an intellectual construc-
tion that has not materialized. That inten~ionhas to be realized and

this implies,infer alia,the existence oran institutional network suit-

CU.FIOM RégimebrtiveenGernrunvand Austria,Advi~uryOpinioir. 1931P C 1.3..
Se"iIslandofoLus Pa1ma.rcase, Report.\ofInt~rnuririci ii~A1wards. Vol IIp.838.
l'H Lauterpachr, Recogniiionin InterttutioLaiv, 1944,p.26. APPLICATIONDE CONVENTION G~?NOCIDE (OP, DlSS. KRECA) 669

d) l'«accord-cadre» lie la décisionsur le statut des «territoires de la
République de Bosnie-Herzégovinedont la population est en majo-
ritéserbe))aux «négociationsen vue d'un reglement pacifique et à la
confkrence internationale sur l'ex-Yougoslavie». Etanr donné:les

règlesdu droit international généralsur les procéduresde prise des
décisions qui, cela va sans dire, s'appliquent aussi à la conférence
internationale sur l'ex-Yougoslavie, la conclusion qui s'impose est
que la signification matérielle ei juridique de l'«accord-cadre» en çe
qui concerne lesfrontières dela Bosnie-Herzégovinees1que la fédéra-
tion, constituéepar la volontéde:deux des trois peuples constitutifs

de la Bosnie-Herzégovine,a renoncé i ce que les limites administra-
tives de la Bosnie-Herzégovine soient des fronrieres étatiquesde la
fédérationen laissant ouverte la possibilitéque ces frontiéres soient
modifiees sur la base de décisions prises«au cours des négociations
en vue d'unrèglement pacifique et à la confkrence internationale sur
l'ex-Yougoslavie».

12. Ce sont lesaccords de Dayton qui ont transforméleslimitesadmi-
nistratives de la Bosnie-Herzégovineen frontiéres internationales. L'ar-
ticle 10disposeque«[l]aRépublique fédérativ de Yougoslavieet la Repu-

blique de Bosnie-Herzégovinese reconnaissent l'uneI'aulre comme Etats
indépendants souverains A l'intérieurde leurs Frontikresinternationales».
13. Quelles que soient les définitionsthéoriques dela souverainetéet
lesdistinctions en découlant concernant ses manifestations, il est évident
que la souverainetédes Etats impliquent:

i) Suprema poie.~tas - {(l'onentend par cela que I'Etat n'a au-dessus de
soiaucune autre autorité,si cen'estcelledu droit internati~nai)}'~'L . e
signe «égal >que l'on place entre suprema potestus et indépendance l l
dénoteun fait important: que l'entitéqui prétend A la qualitédYEiat

au sens du droit international public prend des décisions politiques
vitales de maniére autonome et independamment des Etats tiers. Un
Etat au sens du droit international ne peut pas ct ne doit pas SC
conformer à des dkciçionspolitiques étrangères,qu'il le Fassesur une
base formelleou informelle. Tel estle sensde la réserve selon laquelle
(<lapremièrecondition de la qualitk dYEtatest qu'il doit y avoir un
gouvernement effectivementindépendantde tout autre Etat >)12.

ii) Surnrnu potestas - au sens de I'cxerciced'une autoritéréelleet effec-
tive surle territoire de I'Etat. L'intention d'établirune véritableauto-
ritén'est rien de pliasqu'un projet politique, une construction intel-
lectuelle qui nes'estpas matérialiséeC . ette intention doit êtreréalisée
et cela implique, entre autres, I'existence d'un réseauinstitutionnel

sérieA/B no41, opinionindividuellede M. Anzilotti,p. 57.sultatf8 1931, C P.J.1
" Affairede I'Iledepal ma., ecueidessenrencesarbiirliles,vol. I838.
l2H. Lauterpach RlcognirroninInternutionai Law1949,p.26.670 APPLICATION OF GtNOCIDE CONVENTlON (DISS. OP. KRECA)

able for and capable of implernenting its decisions throughout the
State territory. Hence, surnma pol~sias is a mere figure of speech
"untila stable political organisation has been created, and unlil pub-

licauthorities becornestrong enough to assert themselvesthroughoul
the territorof the State"I3.

These two segments of sovereigntyconstitute an organic wholc. As for
their mutual relationship, summu potestas has the character of a prior
assumption as, for an entity to constitute an independent State, it is
essential that it should have corne:into existence as a State- from the
theoretical standpaint suprerncr potestas is the qualifying condition of
existence of an independent State, the d(f7erentiaspecificabetween inde-
pendent and dependent States.

14. The question whelher Bosnia and Herzegovina had sumtna potes-
ras within the administrative boundaries of Bosnia and Herzegovina
rnust be linked to a certain tirne frame. For rhe purpose of this specific
question, IWO points in time are relevant:

lu) the moment of the proclamation of a "sovereign and independent
Bosnia" ; and,
(h) the moment at which proceedings were brought against lhc Federal
Republic of Yugoslavia before the lnternalional Court of Justice.

Did the Applicant atthesc relevant points in time have a "stable poli-
tical organization" wjthin the administrütive boundaries of Bosnia and
Herzegovina on the one hand and were its "public authorities strong

enough to assert themsclves throughout the territory" of Bosnia and
Herzegovina on the other?
15. Acçording to the assertions of the Applicant, Bosnia and Herzc-
govina was proclaimed a "sovereign and independent Bosnia" on 6 March
1992 when the results of the referendum held on 29 February and
1 March 1992were officiallypromulgated. Ifi. ~eyond dii~pule~hut,ut
that poinr in ritn~,die Appiiruat didnof huvr u 'trral>poiiticalorguni-

zution" t!iroug/iour the ferritory of Bosnia und Herz~govina nor were
its 'public laurhoriiiesstrong enmg11 10assert ~hern~elvc kroughoui th^
terriîory" of Bosnia und Nerzegovinra. More particuiarly, prior to .the
proclratnationof''hovereign and independent Bosniu " witltintPrpadn~inis-
trarive bourzciurieofRosaitaand Herzegovina two de facto States - the
Repuhlic oj'Srpsku and the Cruutfan Community of Herccg-Bosna -

hudbeen formed.
The Croatian Community of Herccg-Bosna was founded on 9 Novem-
ber 1991(and it was proclaimed an independent State comrnunity under
the samename on 4 July 19921w , hereas the Republic of the Serb people
of Bosniaand Herzegovina was formed by a Declaration of the Assembly

l3LegalAspectsof LheAalandIslandQuestion, ReporttheInternationalCornmiltee
oCJuristsOSficr Sot~rnolfthe Leaguof A'ntiorS~cial Supp No 3, p.3 (1920) propre et apte a appliquer ses décisionssur toute l'étenduedu terri-
toire deI'Etat. Ainsi, lasurnmu pot~stas n'est qu'une figure de style
«avant qu'une organisation politique stable ait été crééeet que les
autoritéspubliques ne soient devenuesassez fortes pour affirmer leur
autorité sur le territoire pays» 13.

Ces deux éléments dela souveraineté constituent un tout organique.
Pour cequi estde leurs relations mutuelles, sun~mu potestas a un carac-
tèred'antériorité car,pour qu'une entité constitueun Etatindépendant,il

est essentielukcllesoit néeen qualitéd'Etat -du point de vue théorique
la suprema potesrus esi la condition de l'existenced'un Etat indépendant,
la differentraspecijicuentre Etats indépendants et Etats dépendants.

14. La question de savoir si la Bosnie-Herzégovine jouissait de la
sunzrnu potesras i l'intérieurdes limites administratives de la Bosnie-
Herzégovinedoit êtrecirconscrite dans un cadre temporel défini.Aux fins
de cette question précise,deux dates sont pertinentes:

a) la date de la proclamation d'une «Bosnie souveraine et indépen-
dante»;

h) la date où une instance a kt6 introduite contre la RépubliqueEdéra-
tive de Yougoslavie devant la Cour internationale de Justice.
Est-ce que, a ces dates, le requérantavait une <corganisationpolitique
stable» à l'intkrieurdes limitesadminisiraiives de la Bosnie-Herzégovine,

d'une part, et est-ce que ses «autoritCs publiques [étaient] assezfortes
pour affirmer leur autorité sur l'ensemble du territoire» de la Bosnie-
Herzégovine,de l'autre?
15. Selon les affirmations du demandeur, la Bosnie-Herzégovinea été
proclaméerrBosniesouveraine et indépendante)}le 6 mars 1992lorsque
lesrésultatsdu référendumorganise les 29 févrieret 1"'mars 1992 ont été
officiellementannoncés.IIné~r pas contest6yu'ù celle dafe ledemandeur
n 'uvuitpa~ une ccorganisaaiunp~liliqu~srable» sur l'ensemble du terri-

toire de la Bosnie-l-ferzkgoviaeet que ses ~cauforitésubliques [n 'étai~nt
pus] assezforle psour ajJrmer leuruusoritésur l'ensemble du terriroirew
de lu Bosnip-Herzégovine. P114. pcrrriculièremen, avant ICIproclumutzon
d'une ccBosnie ~ouverai~leet indkpendun!e» àil'intérieurdes limites&mi-
nistrutzvesde luBosnie-Herzkgoiline, deux Eratsde facto - lu Republika
Srpska et In Cornmunuut6 croate d'Herceg-Bosna - uvaienf frk consti-
rués.
La Communauté croate d'Herceg-Bosna a étéfondéele 9 novembre

1991(e'llea étép :roclaméecommunauté étatiqueindépendante sousle
meme nom le 4 juillet 19921,tandis que la République serbede Bosnie-
Herzégovine a ttéforméepar une déclaration del'assembléedu peuple

l3Aspectsjuridiquede lquestiondcsîles#Aland, rapporde lacommission inter-
nationalede juristes, JournaluSielaeSocrérdes Mations, supglkmentspécia3,"
1920,p 9of the Serb people issued in January 1982 (it changed its name to the
Republic of Srpska on 7 Aprilof the same year '3.
The çommon denominator of both units isthat they represent the insti-
tutionalization ofauthority in regions in which, in the main, the parties
of the Serb and Croatian peoples of Bosnia and Herzegovina won a
majority at the first multi-party elections held on 18and 19 Novernber
1990 " and under the direct influence of the substantive difïerences that

had emerged arnong the national parties of the three constituent peoples
with respect to the future status of the federal unit of Bosnia and Herze-
govina, Those differences appeared in a clear and unambigrious form
already at the tirne of the outbreak of the constitutional crisis in SFRY
with the proclamation of the "sovereignty and independence" of the fed-
eral units of Slovenia and Croatia, and culminated when the "Plaiform
on the Status of Bosnia and Herzegavina and the Future Set-Up of
the Yugoslav Community" was adopted by the then rump Assembly of
Basnia and Herzegovina on 14 October 1991.

The "Platform on the Status of Bosnia and Herzegovina" inter uiliu
qualified Bosnia and Herzegovina as a "democratic sovereign State"
which would advocüte the adoption of a "Convention on the mutual
recognition of the sovereignty, inviolability and unchangeability of the
borders of the present-day rep~blics'"~.
The practical effectof the "Platform on the Status" was the dissolution
of the stute-legal body ofthefederu lnitofBosnia undHerzegovina,

hence the powers vested in its organs according to the federal Constitu-
tion and the Constitution of Bosnia and Herzegovina viafacii were itself
taken over by the three elhnic cornmunities.
16. (Repubbik~Srpska. j The Assernbly of the Serb people of Bosnia
and Herzegovina at ils session held on 9 January 1492 adopted a
"Deelaration on the Proclamation of the Republic of the Serb People of
Bosnia and Herzegovina" inthe areas

"of the Serb autonomous regions and areas and other ethnic Serb
communities in Bosnia-Herzegovina, including the areas where the
Serb people has remained a minority as a result of genocide against
it during WorldWar Two and further to the outcome of the plebi-

scite held on November 9 and 10, 1991 at which the Serb people
voled to remain in the cornmon State of Yugo~lavia"'~.

l4OflczuIGazetleofrlte Socialist RepubofcBosnia and Herzegovina, No. of
19 December 1991.
j5Ibid.
1bIb~d,No.320f160ctober1991. ,
l7Offici0Gazcrieof thSerb People of Busrriaand fferzeguvina, No. 2/92. APPLICATIONDE CONVENTION GGNOCID {EP.DISS. KRE~A) 671

serbe publiée en janvier 1992(elle s'est rebaptiséeRepublika Srpska le
7 avrilde la même année 14).
Le dénominateur commun de ces deux entitésest qu'elles représen-
lent l'institutionnalisation d'une auiorite dans des régionsoù, dans l'en-
semble, les partis des peuples serbeel croate de Bosnie-Herzégovineont

remporté la majorité lors des premières électionsmultipartites tenues
les 18 et 19 novembre 1990" et que leur existence decoule directement
des divergences de vues substantielles qui s'étaient faitjour entre les
partis nationaux des trois peuples constitutifs en ce qui concerne le
statut futur de l'entité fédéralee Bosnie-Herzégovine.Ces divergences
étaientdéjàapparues clairement et sans ambiguïtéau momeni du déclen-

chement de la crise constitutionnelle en Républiquefédkrativeso~ialiste
de Yougoslavie avec la proclamation de la asouveraineté et [de] I'indé-
pendance» des entitésfédérales de Slovénieet de Croatie, et ont culminé
lorsque {(laplate-forme sur le statutde la Bosnie-Herzkgovineet l'amé-
nagement rutur de la communauté yougoslave» a étéadoptée par ce
qui était alorsl'assembléecroupion de Bosnie-Herzégovine le14octobre
1991.

La «plate-forme sur le statut de la Bosnie-Herzégovine» qualifiait
notamment la Bosnie-Herzégovined'«Etat démocratiquesouverain»qui
préconiseraitl'adoption d'une«convention sur la reconnaissance mutuelle
de la souveraineté,de l'inviolabilitéet de'imrnutabilitedes frontièresdes
actuelles républiques»'6.
L'effetpratique de Ia «plate-forme» a étéla dissolution de la structure
juridico-étatiquede l'entité fédéradlee Bosnie-Herzégovine, les pouvoirs

dont sesorganes étaientinvestis aux termesde la Constitution fédéraleet
de la Constitution de Bosnie-Herzégovine viufuctiétantdonc eux-memes
passksaux trois communautés ethniques.
16. (Republika Srpska. j L'assembléedu peuple serbe de Bosnie-Her-
zégovine,lors de la session qu'elleatenue le 9janvier 1992,a adoptéune
<<déclarationsur la proclamation dc la Républiqueserbe de Bosnie-Her-
zégovine~dans les

ctrégionsautonomes serbes et régionset autres communautés eth-

niques serbes de Bosnie-Herzkgovine, y compris les régionsoù le
peuple serbe est demeuréminoritaire en raison du gknocideperpétré
contre lui durant la seconde guerre mondiale, conformément aux
résultatsdu plkbisciteerganist les9 et10novembre 1991 lors duquel
la population serbe a vote pour demeurer dans ['Etat yougoslave
commun)) 17.

-
l4Journaolflciel de la Rkpubliquesuciolir~ede Bosnie-Herzégovirie,ndé-, du 19
cembre 1991.
l5Ibid.
l6Ibid, n" 32,du 16octobre 1991.
l7Jour110o1fficdupeuple serbdeBosnie-Herzégov non292,The Declaration stipuhted, inletulia,that :

"[plending the election and constitution of new organs and institu-
tions to be eçtablished under the Constitution of the Republic, rhe
functions of the State organs in the Republic shall be dischargeciby
the present Assembly of the Serb people in Bosnia-Herzegovina and
by the Council of Ministers" (Art. VI);

and that

"[l]hc federal regulations, along with those of the former Bosnia-
Herzegovina, except those found by the Serb People's Assembly tu
bc contrary to the Fcderal Constitution, shall remain in force pend-
ing the promulgalion of the Republic's Constitution, its laws and
other regulations" (Art. V111).

The Assembly of the Scrb People in Bosnia and Herzegovinü, at its
session held on 29 February 1992, adopted the "Constitution of the
Republic of Srpska" on the basis of the

"inaliennble and intrünsferable natural right of the Serb people to
self-determination,self-organization and association, on the basis of
which it niay freely determine its political slatus and ensure eco-
nomic, socid and cultural development".

The forma1 ücts wereaccompanied by the actual assumption of avthor-
ity in the territories of the communes.
The amed forces of the Republic ofSrpska was at first composed of

territorial defenceunits in the communes and of other armed formations.
The Army of the Republic of Srpska was formed on 13 May 199218.

The Amy of the Republic of Srpska, Frorn its formation, operated
autonomously as the militas. force of the proclairned State. Clear
confirmation of this is to be found in the above-mentioned report of the
Secretary-General :

"The Bosnia and Herzegovina Presidency had jnitially been reluc-
tant to engagein talks . .with the leadership of the 'Serbian Repub-
lic of Bosnia and Hcrzegovina' and insisteciupon direct talks with
the Belgrade authorities instead. A senior Yugoslav Peuples'Amy
(JNA) rcpresentative from Belgrade, General Nedeljko Boskovii.,

has conducted discussions with the Bosnia and Herzegovina Presi-
dency, but in ha.sbecorne cleur ihar his word tk no[ bindiprgon the
commanderof the army oj ihe 'SerbRepublic ofBosniu undHerze-
govina: GenerulMladïé - it ialso clearthur theemergenceof Gen-
eral Mladii and theforces under his command as iiallçpendenlaclors

18Report ofthe Secrrtary-Generalpursuato paragraph4 af thc Stxur~tyCouncil
rcsolution752/199doc S/24049,30 May 1992,para.2. APPLICATION DE CONVENTION GENOCID (OP.DISS.KRE~A)
572

Cette déclaration stipulaitnotamment que:
«en attendant l'électionet la constitution desnouveaux organes et

institutions qui seront créés evertu de:la Constitution de la Répu-
blique, lcs fonctions des organes étatiques de la RCpublique seront
exercéespar l'actuelle assemblkedu peuple serbe en Bosnie-Herzé-
govine et par le conseil desinistres» (art. VI};

et que
«les règlementsfédérauxa ,insi que ceux de l'ex-Bosnie-Hertkgovine,
Al'exceptionde ceuxque l'assembléedu peuple serbe ajugécontraire

i la Constitution fédéraled, emeureront en vigueur en attendant la
promulgation de la Constitution de la République, de ses lois et de
ses règlements» (art. VIII).
L'assemblke du peuple serbe de Bosnie-Herzégovine, à sa session du

29 fevrier1992, a adopte la {(Constitutionde la Republika Srpska~ sur la
base du
{(droitnaturel inaliénableet intranslërable du peuple serbeà l'auto-

détermination, l'auto-organisation et i l'association, sur la base
duquel il peut librement déterminerson statué politiqueet assurer
son développementéconomique,social et cullurel)},

Ces actes officielss'accompagnérentde l'exercice effectifde l'autorité
sur les territoires des communes.
Les forces arrnCesde la Republika Srpska étaientd'abord composées
des unitésde défenseterritoriale dans les communes et d'autres forma-
tions armées.L'arméede la Republika Srpska a étéforméeIF 13 mai
1992 18.
L'armkede la Republika Srpska, dés sa constitution, a opéréde
manière autonomc en tant que force militaire de 1'Etatproclame. Cela

est clairement confirmé dans le rapport susmentionné du Secrétaire
géinéra: l
«La prksidence de la Bosnie-Herzégovineavait d'abord hésité à
entamer des pourparlers ..avec les dirigeants de la ({République

serbede Bosnie-Herzégovine»et avait exige au contraire des pour-
parlers directs avec les autorités de Belgrade. Un representant de
haut rang de l'armée populaire yougoslave (APY), le gknéral
Nedeljko BoskoviE,a menédes discussions avecla présidencede la
Bosnie-Herzégovine,mais il est dksormuis kvid~nrque sa parole ne
lipas Ie cr,mmund~nr de l'armée de lu((RipuhaZ'quseerbede Bosnie-
Herzkgovine N, legkrzkrrrl ludit- ilesfclair égalenzentyue 1'uppa-
ritiondu gPnéralMladiC et dex force ^u'il commun&, lesquelles

'"apport présentparleSecrktairgéneraclonformémentau paragrap4de laréso-
lutioii 752(19du)Conseil dskuritk, doS124049,30 mai 1'392,pa2. Beyond the conrrol ofJNA greatly complicales the issues raised in
paragraph 4 of the Security Council Resolution 752 (1 992)." l9

In addition, Republic Srpska had its own legislative, executiveand judi-
çial organs.
17. (Croarian community ofIierceg-Bosna. j Herceg-Bosna, the State
of the Croatian people in Bosnia and Herzegovina, was proclaimed on
4 July 1992. With the exception of certain territorial changes, this act

only formalized the situation created in November 1991 when the
Croutian Comrnunity of Herceg-Bosna was created. From the very
beginning, this functioned de jkcio as a State.
Herceg-Bosna had its own armed force. The Decree on the armed
forces of the Croatian Communily of Herceg-Bosna stipulated that the
armed forces constitute a unified whole compriçing the "regular and
reserveforces"20.Confirmation of the existenceof the autonomous armed

forces of Herceg-Bosna is to be found also in the "Report of the Secre-
Vary-Generalpursuant to paragraph 4 of Security Council resolution 752
(1992)" (see para. 18below). The Government in Sarajevo did not deny
this fact either. A letter addressed by Hadzo EfendiCas "Acting Prime
Minister" to C. Vance and Lord Owen, the Co-Chairmen of the Confer-
ence on Former Yugoslavia on 29 April 1993, says inderdia:

"With the purpose of realizing the agreement from item 5 of the
Common Statement made by Messrs Alija IzetbegoviCand Mato
Boban at the meeting held in Zagreb on April 24, 1993 ... wewould

liketo ask you to undertake activities aimed at establishing a sepa-
rate,independent internationac lommission for establishingthe facts
on violations of internatlonal humanitarian law and war crimes
committed over the civilian population during therenewed conflicts
befweer? the Army oj the R B-H and HVO in CenrralBosntcd and
some otherparts of the Republic ofBosniu und Herzeg~vina."~'

In addition to its armed forces, Herçeg-Bosna had its own executive,

legislative andjudicialorgans.
Supreme authority was vested in the Presidency, cornposed of repre-
sentzilivesof the Croat people in Bosnia and Herzegovina, headedby the
President of the Presidency.The Çraatian representatives withdrew from
the joint organs of the Applicant and moved to Mostar which was pro

l9I3oc.St2409,30 May 1992,paras. 8-9 (emphasisadded).
20Barba,Belgrade,6 July 1992
2'Letterdated 29 April 1993from ActPnme MinisterHadzoETendicaddressedto
"CyrusVance, Lord David Owen, Co-chairmen of The Conference'on FormerYugo-
slavia". APPI,ICATIONDE CONVENTIONGkNOClLlE (OP. DISS. KRECA) 673

agissrnt de inaniercindépendanteet échuppenrsemble-t-ilau contrôl~
de l'APY, compliquebcaucouple problème .soulevéuu parlrgruphe 4
de Irrésolution 752 (1992).~'~

En outre, la Republika Srpska avait ses propres organes législatifs, exé-
cutifs et judiciaires.
17.(Communauté croated 'Herceg-Bnsnu.) L'Herceg-Bosna, 1'Etatdu
peuple croate de Bosnie-Herzégovine, a &léproclam&le 4 juillet 1992.A
I'exccpiionde certaines modifications territorialecctteproclamation ne

faisait qu'officialisersituation crééen novembre 1991lorsque laCom-
munautécroate d'Herceg-Bosilaa étécrééeD . es le tout début, elle a de
jucto fonctionné commeun Etat.
L'Herçeg-Busnaavait sa propre armée.Le décretsur lesforcesarmées
de la Communauté croatedlHerceg-Bosna disposait que lesforcesarmées
constituaient un corps unifiécomprenant les «forces régulières et de
réserven20.On trouve confirmation de l'existence desforces arméesauto-
nomes d'Herceg-Bosnaégalementdans le «rapport présentépar le Secré-

taire général enapplication du paragraphe 4 de la résolution752 (1992)
du Conseil de sécurité»(voir ci-aprespür.18).Dans une lettre adressee le
29 avril 1993à M. Cyrus Vanceet ;ilord Owen, coprésidentsde laconfk-
rence sur l'ex-Yougoslavie,M. Hadzo Efendii., en qualitéde «premier
ministre par intérim»,déclarenotamment :

«En vue de réaliserl'accord visau point 5 de la déclarationcom-
mune faite par MM. Alija lzetbegovic et Mato Boban à la réiunion
tenue à Zagreb le 24avril 1997 ..nous vous serions obligésd'entre-
prendre des démarchesvisant ii 1ü créationd'une commission inter-

nationale indépendanteet distincte chargkc d'tlablir les faits en ce
qui concerne lesviolations du droit humanitaire international ei les
crimes de guerre commis contre la population civile au cours des
çonj7it ~ui ont repris entre I'armke dc fa République de Bosriie-
Herzégovine et les forces du conseil de defera sreate (IIVO) en
Bosnie ceatrril~et dansceutain~s autres parties ck lu Républiqu de
Bosnie-J-lerzégvine ,2'

Outre ses forces armees, i'Herceg-Bosnaavait sespropres organes exécu-
tifs, législatifsetdiciaires.

C'est la présidence,composée dereprbenrünts du peuple croate de
Bosnie-Herzégovineet dirigéepar le président dela présidence,qui était
investie del'autoritt suprême.Les représentantscroates se relirerent des
organes communs du demandeur el setransportèrent à Mostar gui fut

l9Boc 512409, mai 1992,par. 8 et(leitaliquessontmoi}.
20Borba,Belgrade,6juillet 1992.
*'Lettreen ddte du 29 avril1adressta«M. Cyrus VanceetA lorDavid Owen,
parintérim.sdlaconîkrenccsul'ex-YougoslaviparHadzo EfendiC,prçmiministre

82claimed the capital of thc Stüte12. Herceg-Bosna appropriated al1 the
tnurérielof JNA as wellas al1the property of the organs and bodies of
the former Cederation.Public, State enterprises were formed in the seciors
of agriculture, forestry and mining, the Post, Telegram and Telephone
Service (PTT) and publi~hing~~.

Ttwas determined that thc Law on Regular Courts would be applied
even under conditions of war, and military ~ribunalswere set up in the

zones of militüry operations, as aulonornous departmeilis of the [nain
military tribunals.
18. In rny opinion there can be no doubt that at the moment of the
proclamation of "sovereign and independent Bosnia" the authorities in
Sarajevo which had been recognized by the international communiiy as
the authorities of the:whole of Bosnia and Herzegovina did not by a long
way exercisc.rummapoicsfarion the territories within theadministrative
demarcation Iinesof the federal unit of Bosnia and Herzcgovina.

A "[sltable palitical orgaiiization of sovereign and independent
Bosnia" simplydid not existat either of the relevant points in time. What
is more, even hefilre the proclumuiion of B~n~~n aind Herzegovinu as rr
",roi:ereiund independ~n t Sfrrte,theunifi~d ulln~inisfrcrtij,diciul lrnd
legisluiive upprrrutus9J'filejederal unil of Bosnia and Hcrzcgovinu had
ceased rofunctiun. It folloivs Sron? lizerelevani facls lhut the proclupna-
fiorzuf flrRepl,ub/icoJ [AcSerb PEOI)~ (7tiofthe Croafiur~ Communiry O/

Herceg-Bosnu rnerely forn~ulizedthe dissolution qf the siareapparcrrus oJ
ihe fideral unit of &o.sniuand Herzegovinu und ifs replacciw~nt hy rl?e
lypropriut~ strucrures of rhe tlrree ethnic communi!îes. That process
ernbraced both the civilian and rnilitary structures of autllority.This is
evideiiccdalso in the Report of the Secretary-Generiil pursuant to para-
graph 4 of Security Council resolution 752 (1992). In paragraphs 5 and
10 thc Report refers ta the existence of "the army of tlîc so-called Ser-
bian Republic of Bosnia and Herzegovina'", and the "territorial Defence
of Bosnia and Herzegovina whiçh is under the politicalcontrol of the

Presidency of that Rcpublic" and "local [Croat] Territorial Dcfence".
The "[sltable political organization of sovereign and independcnt Ras-
nia", was not creatcd even after the proclamation of independcilce so
tfiat it isobvious that the organs of'the Applicant werc not "strong
enough to assert themselves thsoughout the lerritory" of Bosnia aild
Herzegovina.

This obvious faci is confirmed also in ihc "Report on the situation of

liuman rights in the territory of the former Yugoslavia submitted by
Mr. T. Mazowiecki, Special Rapporteur of the Commissionon Human

to2theSecrelary-CeneraiotheUnited Nations. 13May 1993.liofBosnia-Herzegovina
" Burbu. Belgrade,6 July 1992.proclamée capitalede 1'Etat 12.LHerceg-Bosna s'appropria tout le maté-
riel de I'APY airisi que tous les biens des organes et organismes de
l'ancienne fkdération.Des entreprises publiques et d'Etat furent consti-
tuéesdans les secteurs de I'agriculiure, de la foresterie, de l'exploitation

minière,de la poste, des télégrammes etdu téléphone(PTT) et de l'édi-
tion?>.
IIfut décidéque la loi sur les tribunaux dc droit commun s'appli-
qucrait meme en situation de guerre, et des tribunaux militaires furent
constitués dans Ics zones d'opérations militaires, en tant que sections
autonomes des principaux tribunaux militaires.
18.A mon avis,il n'estpas douteux qu'au moment de la proclamation
de la {(Bosniesouveraine et indépendante))les autoritis dc Sarajevo qui

avaient étéreconnues par la conimunautéin~ernationalecomme les auto-
ritEs de l'ensemblede la Bosnie-Herzégovine n'exerçaientpas, tant s'en
faut, la sumrnupotestus sur lesterritoires setrouvanta l'intérieur delignes
de délimitation administrativede l'entite Fkderalede Bosnie-Herzégovine.
IJne<<organisationpolitique stable de la Bosnicsouveraine et indepen-
dante» n'existait tout simplement pas aucune des deux dates perti-
nentes. Qui plus est, mtme uvunrILp Iroclamation de ICISosnie-IIerz&go-

vin^en tunt gu'Efar crsouveruinet indkpenn'unt~ ,'crppareiladm~nistratif,
judiciuir~ er !égiskutifungbrme de !'eatitk fkdéruield~Bosnie-Herzé-
goiiirzuvuit cm.76defonctionner. II dkcouleciesfirir.perrinents que lapro-
clutnarionde liaRépuAligzie du peuple serbe et de la Commranuuté croafe
cl'Herceg-Bosnuin'ontfail qu *fJIcialiseir riL~.~olutiotz1'uppareild'Ela i
del'en rfijedéruledeBnsnie- Her~ég~ vineetsonretnplucernen îur/tistruc-
tairexccorrespondcrntcd ses troicsorninunautés ~thniqucs.Ce processus a
touché les structures d'autorité tantcivilesque militaires. Cela est aussi

attestédans le rapport prbenté par 1c Secrétairegénéral enapplication
du paragraphe 4 de la résolution752 (1992)du Conseilde sécurité . ux
paragraphes 5et 1Ode cerapport, le Secrétairegénéraé l voquel'existence
de l'armée dc <cla prétendue<<Républiqu eerbe de Bosnic-Herzégovine>>,
et les «forces de défenseterritoriale de la Bosnie-Herzégovine, placées
sous le contrôle politique de la présidencede cette République» et Ics
«forces de défenseterritoriale locales [croates] ».Aucune «organisation
politique stable>> nk jjainaivu le jour en «Bosnie-Herzégovine SOUVC-
raine et indépendante)},mêmeaprès la proclamation dc l'indépendance,

et ilest donc bideni que lesautoritésdu demandeur n'étaient pas«assez
fortes pour affirmer leur autoritésur l'ensembledu territoire»de la Bos-
nie-Herzégovine.
Ce fait évidentest confirméégalementdans le «Rapport sur la situa-
tion des droits de l'homme sur le territoire de l'ex-Yougoslavieprésentk
par M. T. Mazowiecki, rapporteur spécialde la Commission des droits

21Lettredu prksidendu Gouvcrncrnentde la Républiquede Rosnie-Hcrzkgovineau
SecrétairegénkradeI'Organisationdes NatioUnies,13 mai 1593.
23Bubu,Belgrade. 6juill1392Rights, pursuani to paragraph 14of Commission Resolution 19921s- 111
of August 1992". The "Report" states, inter aliuthat

"[rnluchof the territory of Bosnia and Herzegovina is not under the
control of the recognized Government. Most observers agree that
the Serbian Republic of Bosnia and Herzegovina, an unrecognized

government proclaimed ~vhen Bosnia and Herzegovina declared ils
independcnce from Yugoslavia against the wishes of the Serbian
population, controls betwesn 50 and 70 per cent of theterritory . . .
It ['Serbian Republic of Bosnia and Herzegovina'] is comprised of
four 'autonomous regions', one of which, Banja Luka, was visited
by the Special Rapporteur.

According to the information received, the law applied wilhin the
'Serbian Republic of Bosnia and Herzegovina'is the law of the Fed-
eral Republic of Yugoslavia, as rnodifiedby the local legi~latures."~~

AIl?liaineeds tu b~ ud~fed isthar lie "Serbiu~R r epublicof Bosniu und
Herzegovina" wasnor proclaimed "wfien Bosnia undHerzegovfna declured
irs independence" since the "S~ubiun Republic ofBo~nia und I-lerze-
go vin0" ivusproclaimed on 9 Junurrry 1992 whiletlw rzrmpParliamen! of
Bo?nia and Herseg.govinu proclairned dhe in~fepe~~denc ef Bosniu und
Herzrgovinu un6 March of the sunze year.

The "Report of the Secretary-General pursuant to paragraph 4 of
Security Council resolution 752(1992)" states that:

"lnternalional observers do noi, however, doubt that portions of
Bosnia and Herzegovina are under the control of Croatian rnilitary
units, whether belonging to the local Territorial Defence, to para-
rnilitarygroups or to the Croatian

This in fact refirs IO the terriiorte~ of the cornmuraes comprising the
Croodian Communityof Herceg-Bosna forrned on 9 Nove~nber1991, ihür
is beforc the proclamation oj'"so~ereign and indcpendenr Bom~niau.

The territory within which the organs of the Applicant exercised real,
effectiveauthority comprised in fact:

"Three separate regions are under the control of the Government
of Bosnia and Herzegovina, namely, part of the capital, Sarajevo;
the region known as Bihac, adjacent to the border wilh Croatia in

North-West Boinia, and parts ofcentral Bosniaand Her~egovina."~~

24DOCW . CN.41199US-1199,18(emphasisadded).
25Doc. S124049p. 4, para. 10.
26Reporton the human rights in territorof the formcr Yugoslavia,submitbyd
Ms. T.Mazowieçki,SpecialRapporteurof theCommissionon Human Rights,pursilant
1992tS-1t9,p18.f CommissionResolution19921s-11uf 14August 1992,doc.E/CN.# APPLICATIONDE CONVENTIONG~NOCIDE (OP. DES. KRE~A) 675

de l'homme: enapplication du paragraphe 14de la résolution14921s-111
de 1aCommission, en date d'mut 1992)).Aux termes de ce rapport :

«Une grande partie du territoire de la Bosnie-Herzégovine n'est
pas sous le contrôle du gouvernement reconnu. La plupart des
observüteurs conviennent que le Gouvernement de la ({Rkpublique

serbe de Bosnie-Herzégovine»,Etat non reconnu proclamélorsque
la Bosnie-Herzégovine a déclaré son indépendance de la Yougo-
slavie contre les vŒuxde la population serbe, contrôle cinquante à
soixante-dix pour cent du territoire ...La «République serbe de
Bosnie-Hcrzegovine» comprend quatre ({régionsautonomes», dont
Banja Luka, où s'est rendu le rapporteur spécial. Selonles infor-

mations reçues, le droit applicable dans la ({République serbe de
Bosnie-Herzégovine»est le droit de la République fédérative de
Yougoslavie, telque modifié par le législateurloca»24

Tout ce qu'ifrestp u ujouieresl que la «Ripublique serbe de Basnie-
Herzkgovine» a'u pus é~é proclamée rlorsque la Bosuie-I-lerzkgovinera
déclartson Indkpenduncr N puisque iu rRépubliqueserbe cleBosnie-Her-
zégovrne>ai éré yrocl~~mé e 9junvier 1992, u1or.sque leparlement crou-
pion de Bosnie-Hei*zégovinn e'alzrockrmé l'ind&p~nduncd ee celle-cique le
6 murs de lu tnavnr unnke.

Le {(Rapport présentepar le Secrétairegénéral en applicationdu para-
graphe 4 de la résolution752 (1992)du Conseil de sécurité»indique:

«Mais les observateurs internationaux sont convaincus que cer-
taines partiesde la Bosnie-Herzégovinesont contrôléespar des unités
militaires croates, qu'ellesappartiennentux forces de défenseterri-
toriale locales, des groupes paramilitaires ou i I'armke

Cette indicatronvise en .fuitlm territoires des communes constituani la
Comrnaknau~c éroule d'firceg-Busnu Jorrnee le 9 izovcmhre1991, c'esr-
ù-dire avant Io proclcrrnatiori dt. nlu Bosnie-Herzégovine souveraine et
indkpendun ie».
Le territoirà l'intérieurduquel lesorganes du demandeur exerçaient
une autorité rkelleet effectivecomprenaient en fait:

«Trois régionsdistinctes sont sous le contr8le du Gouvernement
de Bosnie-Herzégovine, àsavoir une partie de la capitale, Sarajevo,
la régionconnue sous le nom de Bihac, adjacente à la frontikre avec

la Croatie au nord-ouest de laBosnie, et des parties du centre de la
Bosnie-Herzégovine. »26

2dDOC.E~N.~/I99~~-119,9.18 (les ital~sontdemoi).
25DOC.Sl24049, p 4, par. 10.
2GRapportsurles droitsl'hommesurlesterritoirdc l'ex-Yougoslaviepréspari
M. T. hiazowiecki,rapporteurçpedela Commissiondes droitsde l'homen,appli-
catrodu paragraphe14de la rksolution 1992s-Ill de la Commission,en14aoûtdu
1992,doc EICN411992lS-1/9,p. 18. 19. Erant donnéle inotneni où ont et6 consfirzrislRepuAlikcrSrpsku et
I'Hcrceg-Bosna, d'utiepar f,er I'Erurriernandeur,(leI'auire,on es?en clroir
de conclure que ku consrirutiorl de lu RepublikkaSrp.skka ef de I'i-ierceg-
Busnu nepeut êrrequuk$éede ré belli na i^rméecontre I'uuroritt ceiitrale,
cdr iln'y avuil!out sin~plemetilpas d'uurorilkcenrruled IZpoque; onpeur
~implerii~n.nirre qtreplusieurs Etars onvu lejour d I'oçcusionde la crise
constirutiunizel/eel ttutiqique coiinaissait lu Fkderiiriyougoslave.

L'hypocheçe dc l'existenced'une autorite centrale croato-musulmane en
Bosnie-Herzégovine ne repose sur aucun fait depuis Ic toul débutde la
crise comme l'atteste de manière convaincantela guerre qui a éclaté entre
lesforcescroates et musulmanesen 1993.Dans une lettre adresséeau pré-
sident de la sous-commission des affaires européennes de la commis-
sion desaffaires étrangères du Sénatdes Etats-Unis d'Amériquele 24 fe-
vrier 1993,le premier ministre de Bosnie-Herzégovine,le membre croate

du gouvernement rnixle croüto-musulman, M. AkmadziC,a dCclai-6que
M. IzetbegoviE,comme M. SilajdziC,etüit seulement«un membre musul-
man du gouvernement)) (voir ci-aprèspar. 37). La lettre que le premier
ministre a adresséeau Secrétaire généra dle l'organisation des Nations
Unics le 7 mai 1993est révélatricdee la situation au seindu gouvernement
mixte croato-musulman FITBosnie-Herzégovine;elle indique notamment:

<<Le7 mai 1993,j'ui uppri~par lu presse que M. IJcrdzfiF ojkndiC :
adwssé une lettreà Votre E,rce/lence en qunlir&de gretnier rninisrre

par intéritn.
J'ai l'honneur d'informer VotreExcellenceque M. Hadzo Eféndié
ri'upas éti élumernbre du guuiiernernenr, ni vice-présidentdu gou-
vernement, et en particulier qu'iln'a pas Cté du présidentpar inté-
rim du Gouvernement de la République de Bosi~ie-Herzégovine.
M. Hadzo Efendic n'a pas étéélusur ma proposition. Or ce mode
d'électionest le seul qui soit légal,conforme à la législationet 5 la
réglementation en vigueur et1République de Bosnie-Herzégovine.

Je précisea Votre Excellenceque ntrlautre que moi-tnimc ?lepeur
signer des iiocumeiir.~du Gouverncmen~ de Ir1Républiquede Busnie-
Herz&,qovineen qualité de prLsirknt du ggouvrrnernrnf. En consé-
quetice,je prieVotre E~cellence denr considkrer ciucun~iocun~~n tu
présiclentdu Gouvernemenf de lu Rgpuhliyue de Bosaip-H~rzégoviiz~
comme valuhle ù nioins qu'il nsoif revgfu dema signulurr.
Mes bureaux se trouvent pro~isoirement fiMostar, oii j'exerce
mes fonctions de président du Gouvernement de la Républiquede
Bosnie-Herzégovine. »27

Ainsi, lesinstitutions suivantes fonctionnaient sur le territoire de la Bos-
nie-Herzégovinedurant la périodepertinente:

t7Lcttredatéedu 7 mai 1893, adresçeau Secrétaigerzeralde l'Organisation dcs
Nations Unies, M. BoulroBoutros-Ghalipar M. MiloAkrnadzic,présidentduGou-
verncmcnlde laKépubliqucdc Bosnic-HcrzCgovi(lesitaliques sontmoi).677 APPI.ICATIONOF GENOCLDECONVENTION (DISS. OP. KK~~A)

(a) the State organs of the so-calledcentral authorities (Croat-Muslim
alliance), whichformally collapsed with thc outbreak of the armed
çonflict between the Miislirnsand the Croats and was transformedi
into Muslim aulhorily. The latter then split up in Septernber 1993
into the Government in Sarajevo and the authoritiçs ofthe Autono-
mous Province of Western Bosnia;
(bJ the State organs of the Republic of Srpska;

(CI the State organs of Herccig-Bosna;and
(dl as ofMarch 1994,also the Stateorgans of the ncwly formed Federa-
tion which, however, Functionedonly on papes.

20. Mr. Jadranko PrliC, Prime Minisier of the Croatia Republic of
Herceg-Bosna and Hercegovina, testified to the fact that the promotion
of Croat-Muslim Federation in Bosnia and Herzegovina was a mere
proclamation. In an interview given to the Slobodna DalmucQo daily
newspaper of 18Decernber 1995,answering the question about the func-
tions of the Minisier of Defcnce in the Government of the Federalion
and the Republic, Mr. Prlik,who initialled the Dayton Trcaties on behalf

of the Croat-Muslim Federation, replied as follows:
"it should be said that crllrherirnetwslatesand~i~o arrnieswere in

existenc eut, there was a certain form of coordination and a result
was achieved,primarily thanks to the supportof the Croat army and
Croat state"18.

When asked until when Herceg-Bosna wouldhnction he replied as fol-
Iows:

"No deadline could be set. That will dcpend on the overall pro-
cess.When al1 thcrights of the Croat people are ensured aiid then
the Federation becorncscapable of taking over those funclions that
Herceg-Bosna has, thcn Herceg-Bosna will be reshaped, probably
into a politicalornrn~nity."~~

The words of the Croat President Tudjman, one of the participants in the
Dayton Conference, implythat revival of the Federation was one of the
aims of the Conference. In the Report on the state of the Croatian State
and Nations in 1995,Mr. Tudjman mentioned, inter dia, that:

"The international proponents attach special significance to the
Federation, within their concept of peacaandneworder in this area,
astestifiedby the factthatthe dgreemenl on implementatioa of B-FI
Federulion,signed by the rcpresentatives of Croatian and Muslim-

28SlohodnriOulmariju,Splil, 18DeŒmb1995(emphasisadded).
lb7d.

86l APPLlCATIONDE CONVENTIONG~NOCIDE (OP. DISS. KRE~A) 677

a) Les organes étatiques des prétendues autorités centrales (alliance
croato-musulmane),qui sesont formellementdissoutes avec le déclen-
chement du conflit arméentre lesMusulmanset lesCroates et ont été

transformées en une autoritémusulmane. Cette dernières'est ensuite
diviséeen septembre 1993en gouvernement de Sarajevo et autorités
de laprovince autonome de Bosnie occidentale;
b) les organes étatiquesde la Republika Srpska;
c) les organes étaliquesdlHerceg-Bosna;
d) et, compter de mars 1994, égalementles organes étatiquesde la
fédération nouvellemeiit constituéequi, toutefois, ne fonctionnaient
que sur le papier.

20. M.Jadranko Prlic,premier ministre de la Républiquecroate dYHer-
ccg-Bosna et d'Herzégovine,a témoigné quela création dela fédération

croato-musulmüne en Bosnie-Herzégovineétaitune simpleproclamation.
Dans une interview publiéedans le quotidien Slobodna Dalmuc~u le
18 décembre1995, rkpondant à une question au sujet des fonctions de
ministre de la défensedu gouvernement de la fidérationel de la Répu-
blique,M. Prli.5,quia paraphé Icstraiiés de Dayton au nom de Iüfédéra-
tion croato-musulmane, adtclare ce qui suit:

«Il faut dire que penlluni toute lu périoclr deux Elrrts el deux
arrniexeexisîaient.Mais ily avait unecertaine formede coordination
et des rksultats ont étéobtenus, principalement grâce A l'appui de

l'arméeet de I'Etat croates.»28
Lorsqu'on lui a demandé jusqu'i quand 1'Herceg-Busnafonctionnerait, il

a réponduce qui suit:

«Aucune date limite n'a puètre fixée.Cela dépendrade I'cnsernble
du processus. Quand tous lesdroits du peuple croate seront garantis
ct que la ftidkration scra alors capablc d'assumer les fonctions qui
sont celles de I'Herceg-Bosna, alors 1'Herceg-Bosnasera restruc-
turée,probablement en une communautépolitique. »lq

Ce qu'a dit le présidentcroate, M. Tudjman, l'un desparticipants a la
conférence de Dayton, implique que la revitalisation de la fédérationétait
l'undes objectifsde la conférence.Dans lerapport sur la situation de1'Etat
croate et des nations (1995}, M. Tudjman a notamment dkclaréce qui
suit

«Les protagonistes internationaux attachent une importance par-
ticulièrea la fédération,dans le cadre de leur projet concernant la
paix ei le nouvel ordre dans cette région,comme l'atteste le fait que
I'nccord sur la criution de ia,fëd&ratiode Bssnie-FTerzkgovine, signé

ZX SIoRod~inWaEmacga, plit, 18dkembr1995 (leitaliqueaonidemoi}.
Ilrid678 AH"ICA.I.IONOF GENOCIDE CONVENTION (DISS OP. KRECA)

Boshniak people, was endorsed by represcntatives of USA, Euro-

pean Union and Gennany.""'

It seernsthüt only the Dayton Agreement and the political willthat gave

birth to them, encouraged serious steps towards actual constiiuiion of'the
Muslim-Croat Federation.
On 14 January 1996, a couple of months after the signing of the
Dayton Agreement and almost two years after the proclamalion of the
Croat-Muslim Federation, the "Presidency of the Croatian Democratic
Uriion for B-H" adoptcd ü decision on the establishment of the Croatian
comrnunity of 1-lerceg-Bosnaas ü political, economic and cultural com-

munity of Croatian people in Bosnia and Herzegovina. Wifhirz If.option
fora thorougii iinpl~mentationofthe Dayton Agreement, thc Presidency
of the Croat Democratic Cornmunity (HDZ) of Bosnia and Herzegovina
also passed a resolution on the progressive transfer of the function of
execuiive auihority of the:Croatian Republic of Herceg-Bosna to the
aulhorilies of the Federütion of Bosnia and Herzegovina. Memberç of
the HDZ Presidency of Bosnia and Herzegovina also cc~llcdon rhe

Muslim coulaferpuri in ~l?eFederurlonto slart lrunsfcrring~heautli»rizy
roilie orgunsof lie Federaiion 3'.
The Government of the Federalion was established as late as 31Janu-
ary 1996. President ofthe Federatioii Mr. K. Zubak, in his address to the
Constitutional Assernbly stressed, inrcrulirï,that'%y iransfrrringu~~fl~or-
iiy fr~m the Republicro the Govcrnmenroj tlze Fedei-afiorrhejunctions
of Herceg-Bosnucvillbe trunsferred trithe Fec/er~rion"~~.

As Le Monde reported :
"The Croat separatists in Bosnia announced on Saturdny 15June

that theywereforming a newgovernmentfor their 'independent State
of Herzeg-Bosna'. In principle, al1the institutions of this self-pro-
claimed State should have disappeared with the advent of the institu-
tions of the Croat-Muslim Ftderdti~n."~~

Hence, the politicalproject of promotion of Muslim-Croat Federation
in Bosnia and Herzegovina, incorporiited in the Washington Agreement
of 1993,has not materialized. Muslim and Croat Siate entities continued
to function after the agreement as de ,frreroStates, which from time to
time kept entering into a sort of political and military CO-ordinationfor
the sakc of pragmatic political aims. But thar co-operrition wüs; accord-

ing to itsinherent characteristiçs, a CO-operationbetween State entities.

3QVjesnrk,Zagreb.2 lanuary 1946(emphasisaddedl
31V(,c.cerryLzZagreb,15lanuary 1946
" Z~orbu, elgrade, 1Febrii1996 (cmphasisadded).
" Le Munrlr,Tuesddy18June 199C,/3/Traiiflution lheRi~galiJy APPLICATION DECONVENTIONGENOCIDE (OP.DISB.KR ECA) 678

par les représentants des peuples croate et bosniaque musulman, a
étéapprouvé par les représentantsdes Etats-Unis d'Amérique, de
l'Union curopeeiîne et de l'Allemagne.» 'O

II semble queseuls lesaccords de Dayton et la volonté politiquequi leur
adonnénaissance aient suscité la prisede mesures sérieusescn vue de la

constitution effectivede la fédérationcroaio-musulinane.
Le 14janvier 1996:deux moisaprès lasignature des accords de Dayton
et presque deux ans aprèsla proclamation de la fédération croato-musul-
mane, la rcprksidence de l'Union dCinocratique croate de Bosnie-Herzé-
govine» a adopte une décisionsur l'établissementde la Communauté
croate d3Herceg-Bosnaen tant que cornmui-iaulépolitique, économique
et culturelledu peuple:croalc en Bosnie-Herzégovine. dan^ lecudrp.dre

son choix d'c~pplicatiouintégraledes crcçordsde Dayturi, la présideiicede
la communauté démocratique croate (HDZ) de Bosnie-Herztgovine a
aussi adoptéune résolutionsur le transfert progressif des pouvoirs exé-
cutifs de la Républiquecroate d3Herceg-Bosna aux autoritésde la fédira-
tion de Bosnie-Herzégovine.Des nlembrcs de iüprésidencede la commu-
nautédémocratiquecroaie de Bosnie-Hcrzegovine ont aussi demandéa

leur^homologu~s rnusulmrrnsau sein de la fkdérarion de coinnimcrr à
rruns@rer I~rrrspuuiluir.~aux organes de lufédération 31.
Le gouvernement de la fedtration n'a étéconstituéque le 31 janvier
1996.Le prtsident de la fkdération,M. K. Zubak, dans I'alloculion qu'il
a prononcéedevant l'Assembléecoiistiiuan tc,a soulignénotamment que,
<<purIetrrinsferr des pouvoirs cle lu rkptiblique au gouverrimwni JE Iu
fkdirutiun, /esfoncrions de ('Herceg-Bostiu Jeront I~~.%$&T~Es.4laj2dkra-

tim »32+
Comme Le Monde l'a rapporte:
«les Croates ~Cparatistesde Bosnie ont annonce samedi 15juin qu'ils

forinaient uri nouveau gouvernement pour leur c<Etatindépendant
d'Herceg-Bosnas. En principe, touies les institutions de cet Etat
autoproclamé auraient dû disparaîlre avec I'avéncmentde celles de
la fédérationcroato-musulmane. )>33

Ainsi, leprojet politique de création d'une fédératioc nroaio-musul-
maiie en Bosnie-Herzégovine,incorporédans l'accord de Washington de:
1993, ne s'estpas traduit dans les faits. tes entitks étatiquesmusulmanes
el croates ont continuéde fonctiotiner aprèsl'accord en tant qu'Etats d~
jrrcto,qui ont de temps àautre poursuivi une sorte de coordination poli-

tique et militaire i des fins politiques pragmatiques. Mais cette coopéra-
tionétait,de par ses caractéristiquesinhérenleç,une coopération entre
entitésétatiques,

3"csnrk, Zdgreb,2janvier 199(leaitalique^sode moi).
3[ Ve~evnjiLUI. Zagre15 janvier1946.
" BrirbtBeIgra.dIC 'evrier1496(les italison1demoi).
-'Le tMu,tdemardi 18juin 1996,p3. la the Iigh~offhe Duyton Agreerneni, pronzoriun of the F~derulz s n
u puii~icai und contracruul ohligufion, tlzus iuieiuqf ~kepresnt slute
of aflfàirsitcouM be srai.~lira~heFederafio i7 a Sfate enrity in statu
nascendi.
The qualification "self-proclaimed" whichis usually attached to the
Republic of Srpska and Herceg-Bosna can hardly have any legal effeçt.
According to its original, grammatical meaning, it denotes the obvious
fact that no-oiicün "proclairn" a newiy emerging State except itsel- in
that sense every newly emerging State is "self-proclaimed". The heart of
the matter is therefore, not whether a new State is "self-proclaimed" or is

proclaimed by a second or third Party, but whether the proclamation is
based on faci and the law.
This quülifiçation can have legalrneaning only wiihin the reasoning of
constitutive theory on the recognition of States as a condition of their
emergence or in the neoconstitutive practice of the application of the
ruling,declarütive theory.
21. Bosnia and Herzegovina as a State within the administrative bor-
der~ of the former federal administrative unit, bearing the name of the
former federal unit, could only be discussed, so to speak, after the
enforcement of the Dayton Agreements. A precisequalification of Bosnia

and Herzegovina in these terms may be givenonly after a global analysis
of the contents o€the above-mentioned Agreements.
22. The "Dayton Agreements" as a collective name for a series of
agreements, are endowed with arnbivalenr legal faculties.
ln forma1terms, the fundamental part of the Agreementsshould be the
General Framework Agreement for Peace in Bosnia and Herzegovina.
Such a conclusion is irnposcd by thc fact that other agreements were
qualificd as annexes to tlie General Framework Agreement (Agreement
on the Military Aspectsof the Peace Settlernent; Agreement on Regional
Stabilization; Agreement on Inter-Eniity Boundary Line and Related
Issues; Agreement on Elections; Agreement on Arbiiraiion; Agreement
on Human Rights; Agreement on Refugees and Displaced Persans;

Agreement on the Commission to Preserve National Monuments; Agree-
ment on the Establishment of Bosnia and Herzegovina Public Corpora-
tions; Agreement on Civilian Implementation; Agreement on Iniernatio-
na1PoliceTask Force),with the exception of the Agrcemeni on Initialling
the General Frarnework Agreementfor Peacein Bosnia and Herzegovina.
The contents of the General Framework Agreement, on the one hand,
and the:rest ofthe Agreements, drawn up in the form of annexes, on the
~ther, suggestthüt the main commitments conducive to a comprehensive
settlement to bring an end to the tragic conflict in theregioas stated in
the General Framework Agreement, are contained in those annexes.

The Gencral Framework Agreement, by its riature, is a specificcombi-
nation of elementsof political declarations and elements relativto guar-
antees which resemble an international treaiy,strictosensu, conceived as
an act creating reciprocal rights and obligations of the parties thereto.
The elements chasacteristic of political declarations are reflected in A lu lumière desaccords de Duyron, lancerIufi~fkrution ES^une ubligu-

lion politiqueî confrnctuelk; ainsi, étanthnnk la siruution actuell~, on
pourrait dire queIuf2dkrutian eJr une entllékrulique in statu nascendi.

L'épithéte «autoprodamé)>qui est habituellement utiliséepour quali-
fier la Republika Srpska et 1'Herceg-Bosnane saurait avoir d'effet juri-
dique. Selon son sensgramrnaiical premier, elledénotele fait évidentque
nul nepeut «proclamer>>un Etat en train de naître sicen'est lui-mêm e
en ce sens tout nouvel Etat en train dc naître est {(autoproclamé».La
question est donc, au fond, de savoir non si un nouvel Etat est {(auto-
proclamé» ou proclamépar une seconde ou tierce partie, mais si la pro-

clamation est fondéeen fait et en droit.
Cette kpithètene peut avoir de sensjuridique que dans le cadre de la
théorie constitutivequi voitdans la reconnaissance des Etats une condi-
tion de leur existence,odans la pratique neoconstitutive de l'application
de la théoriedéclarative,gui prévaut.
21. La Bosnie-Herzégovineen tant quYElat à I'intkrieur des limites
administratives de l'ex-entitéadministrative fkdéraledu meme nom ne
pouvait &trementionnéequ'après l'application des accords de Dayton.
Une qualification précisede la Bosnie-Herzégovineen ces termes ne peut
êtredonnée qu'apres uneanalyse globaledu contenu de ces accords.

22. Les «accords de Dayton)), nom collectif qui désigne une série
d'accords, ont des effetsjuridiques ambivalents.
Du point de vue formel, la partie fondamentale des accords devraitêtre
l'accord-cadregknéralpour la paix en Basnie-Herzkgovine.Cette conclu-
sion s'imposecar les autres accords sont qualifiésd'annexes l'accord-
cadre ginéral(accord relatif aux aspccts militaires du règlementde paix;
accord relatià la stabilisation régionale; accord relatiA la ligne de
démarcation interentitéset aux questions connexes; accord relatif aux
élections; accord relatifà l'arbitrage; accord relatif aux droits de
l'homme; accord relatifaux rkfugiéset aux personnes déplacées; accord
portant créationd'unecommission de préservationdesmonuments natio-

I naux; accord relatifà la constitution d'entreprises publiques en Bosnie-
Herzégovine; accord relatif au dispositif civild'application de l'accord de
paix; et accord relatifl'équipeinternationale de police)à l'exceptionde
l'accord relatifau paraphe de l'accord-cadregén&ralpour la paix en Bos-
nie-Herzégovine. Lecontenu de l'accord-cadre général, d'une part, et des
autres accords, signéssous fornle d'annexes, de l'autre, donne à penser
que les principaux engagements propres à assurer un règlementglobal
destinéà mettre fin au conflit tragique de la régiocomme indiqué dans
!'accord-cadre géneral,figurent dans ces annexes.
Parnature, l'accord-cadregéneralrenfermedefaçonspécifiquedesdecla-
rations politiques et des éléments relatifsa des garanties comparables

h un trait&internationalsrricro sensu, creant des droits et obligations
réciproquespour les parties. Relèventdes déclarationsd'intentions poli-
tiques lesdispositions d'uneséried'articles (art. II, III, IV, V, VI1X)dans lesquels lesparties ne font que noter avec satisfaction et approuver
les arrangements énoncés dans lesünncxes. Les seulsarticles de I'üccord-
cadre gei~Craql ui obligent lesparties comme le Léraitun traité internatio-
nal stricto sensu soirt les artiçics1 ci VIT, Certes, la plupart des ar-
ticles susmentionnes comprennent une clause type disposant que «les
parties respecteront pleinement lesengagements priset en encourageront
Iyapplication>>m, ais une telle formulation, eu égardau cotitenu de l'ar-
ticlepremier de l'accord-cadreet àla nature de cesengagements,et tout au
moins en ce qui coilcernc la Rkpublique l'kdirativede Yougoslavie et la
Croatie, constitue plus une sorte de garantic yuc Ics partiesaux accords
désignés comme des annexes honoreront leurs engagements qu'une obli-
gation contraignante. Particulikrement important i cet égard, outre la

clause type susmentionnée,est l'accord relatif üu paraphe de l'accord-
cadre générap lour la paixen Bosnie-Herzégovine.Par cea tccord, qui n'est
püs forrncllcincni une:annexe de l'accord-cadre général« ,[l]esparties [la
République deRosnie-Herzégovine,la République deCroatie et la Répu-
blique fédérativede Yougoslavie], ei les entitks qu'elles reprisentent,
s'engagent signer cesaccords» (art. 1). II disposc que l'application
mime de l'accord-cadre générae lt de ses annexes sera confiéeà une com-
mission interimaire mixte composéede représentants dela fedérationde
Bosnie-Herzégovine,de la Republika Srpska et de la Rkpublique de Bos-
nic-H-lerztgovinc.La situaiion de la Républiquede Bosnie-Herzégovine
en tant que partie contractaiitcest dans ce contexte pariiculiérepuisque
aux termes de l'article1,paragraphe 3, de sa Constitution, la République

de Bosnic-Herzégovine «est forméede deux entités,la fédération deBos-
nie-Herzégovineet la Republika Srpska (ci-aprèsdknommées{(lescnti-
tes»))>.Ainsi, lesentités figurantdans la structure des accords de Dayton,
A l'annexe 4 des accords, sont les parties; de ce fait, étant donnéles
conditions régissantla Consiitution de la République deBosnie-Herze-
govine en Etat à l'intérieurdeslimites administratives de l'ex-entitéfédk-
ralc,la KCpublique de Bosnie-Herzkgoviiiegaraillit les obligations des
entitésdela constituer. Cette incolzereiicedécouledc la position préalahle
- d'une validitéjuridique douteuse - d'une personnali tejuridique inin-
terrompue de la Bosnie-Heizégovinc en tiiiiquYEtar au sens du droit
international (voir ci-apréspar. 23).

Ainsi, les annexes, peut-on dire, constituent l'essentieldes accords de

Dayton; tandis que l'accord-cadrc génkriil,conme l'indique son nom
même,n'est que le cadre juridico-politique dans lequel s'inscrit la rigle-
mentation qui forme le contenu des annexes. Les parties à l'<<accord-
cadre général)s>ont, commeindiquédans leprÉambule,{(laRkpubliquede
Bosnie-Herzégovine,la République deCroatie et la Républiquefédéra-
tive de Yougoslavie>>L . es parties aux annexes de l'accord sont toutefois
différentes. La République de Bosnie-Herzkgovine,la fcdkration de Bos-
nie-Herzégovineet la Republika Srpska sont, soit seules soii avec la
Croatie et la Yr~ugoçlavie,parties ii la plupart des annexes. Toutes troisthe Annexes.The three aforementioned parties signed the Agreement on
the Military Aspects of the Peace Settlernent; Agreement on Inter-Entity
Boundary Line and Related Issues; Agreement on Elections; Agreement
on Refugees and Displaced Persons; Agreement on Commission to Pre-

serve National Monuments; and Agreement on International PoliceTask
Force. Togeiher with the Republic of Croatia and the Federal Republic
of Yugoslavia, the three parties figure as parties to the Agreement on
Regional Stabilization and the Agreement on Civilian Implementation of
the Peace Setrlemenl.The Federation of Bosnia and 1-lerzegovinaand the
Rcpublic of Srpekaare parties ta the Agreementon Establishment of
Bosnia and Herzegovina Public Corporations and the Agreement on
Arbitration. The Constitution of the Republic of Bosnia and Herze-

govina is also an integral part of the Dayton Agreements. It is designed
in the form of Annex 4 of the Agreement and is approved by respective
declarations of the Republic of Bosnia and Herzegovina, the Federation
of Bosnia and Herzegovina and the Republic Srpska,
23. In the light of rhecontents ufthe DuyirtonAgreements and inpur-
ticularin rhelighl of rhecurrgnt stute oj ajJaai Brosria and Herzego vina
may be quulifiedin tlernaofinternurional law a3 aS~ale in statu nascendi.

At the time of the entry into force of the Dayton Agreements, the
Republic of Bosniaand Herzegovina, as a State within the administrative
borders of the former Yugoslav fcderal unit of the same name, posscssed
literally no relevant attribute of a State in terms of inlcrnationül law.
More particularly:

(u) The Republic of Bosnia and Herzegovina has no central State
authorities tnthis day. Annex 4 (Constitution of Boçniüand Herze-
govina) to tha Dayton Agreements stipulates iArticles IV,V,VI and
VI1joint aulhoritieçin the formof a ParliarnentaryAssembly,a Presi-
dency, a Council of Ministers, a Constitutional Court and a Central
Bank,but the Constitution is~onditionedupon "free, fair, and demo-
craticelections"as a basisfor a representativegovernmentw4I.n keep-

ing with the provision of Article 4 of "Transitional Arrangements",
joined in the form oFAnnex TTto the Constitution, "[ulntil supersedeci
by applicable agreementor law,governmentaloffices,instituiions, and
other bodies of Bosnia and Herzegovina will operate in accordance
wilh applicable la^"^^.Systematically in~erpreted,the above-men-
tioned provision implies thal governmental offices, institutians and
other bodies of the entitiesin the territory of Bosniaand Herzegovina
"will operate in accordancewith applicable law" ;

(b) The Republic of Bosnia and Herzegovina up to the present lime has
possessed no cohcrent legislation of its own. True,Ihe Constitution
of ihc Republic as a supreme legal acl hüs corneinto force but

J4Preambleof the Agrçcmerion Elecliondoc.A1501790-511995199p9.53.
35Ibzclp.76.l
APPLICATIONDE CONVENTIONGÉNOCIDE (01'. DES. KRE~A) 681

ont signe l'accord relatif aux aspects militaires du règlement de paix,
l'accord relatifà la ligne de démarcation interentitéset aux questions
connexes, l'accord relatif aux élcciions,l'accord relatif aux réfugiés et
personnes déplacées, l'accorp dortant creation d'une commission de pre-
servation des monuments nationaux, et l'accord relatif5 l'équipe inter-
nationale de police. Avec la Rkpublique de Croatie et la République

fédérative de Yougoslavie, cestrois parties ont signél'accord relatif à la
stabilisation régionaleet l'accord relatifau dispositif civil d'application
de l'accord de paix. La fidérationde Bosnie-Herzégovineet la Republika
Srpska sont parties l'accord relatifà la constitution d'entreprises pu-
bliques en Bosnie-Herzkgovineet a l'accord relatifa l'arbitrage. La Cons-
titution de la République de Bosnie-Herzégovinefait aussi partie inlé-
grünte des accords de Dayton. Elleconstitue l'annexe4 de l'accord-cadre

et est approuvk par des déclarations respectives de la Rkpublique de
Bosnie-Herzbgovine, de la fédération deBosnie-Herzégovineet de la
I Republika Srpska.
23. Eu kard au conrenu des accord^de Daÿtori etcnrnpbe renuen par-
ticuiierde 161~ifuationuctu~l/e, laBosriie-Herzégovinepeut être gulzl$ée
au regard du droir internulional d'Etar in statu nascendi. A l'époquede
l'entrécen vigueur des accords de Dayton, la Ripublique de Bosnie-
Herzégovine, entant quYEtat à l'intérieurdes limites administratives de

l'ex-entitéfédérale yougoslave du mêmenom, ne possédaitlittéralement
aucun des attributs pertinents dc 1'Etat au sens du droit international.
Plus particulièrement:

uJ a cejour, la Républiquede Bosnie-Herzégovinn e'a toujours pasd'auto-
ritésétatiques centrales.L'annexe4 (Constitutionde la Bosnie-Herzégo-
vine)des accords de Dayton prévoiten ses articlesIV, V, VI et V1Ides
autoritésmixtes Cassemblée parlementaire, présidence, consei les mi-
nistres, courconstitutionnelleet banque centrale),mais laconstitutionest
subordonnkcidesilections libres,équitablesetdkmocratiques«permet-
tant d'établirles basesd'un gouvernementreprksentaiif 34.Aux terines
de l'article4 dcstDispositionsiransitoires),qui constituent l'annexeII
de la Constitu~ion,<c[t]antqu'ilsn'ont pas étéremplacésen vertu d'une

loi ou d'un accord applicables,lesservices,les institutions et lesautres
organes oficieis de la Bosnie-Herzégovinecontinuent de fonctionner
conformkmentau droit applicable» 15.Interprétkede manière systéma-
tique,la dispositionci-dessusimpliqueque lesservices,lesinstitutions et
les autres organes des entitks sur le territoire de Bosnie-Herzégovine
({continuent de fonctionner conformémentau droit applicable» ;
b) A ce jour, la République deBosnie-Herzégovinen'est dotée d'aucune
législationcohérentequi lui soit propre. Certes, la Constitution de la

République,texte:juridique suprême,est entréeen vigueur mais

34Préambule dcl'accord relaaux élections,doc. At501790-S119959.9,6.
35Ibrd, p 69682 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (DISS. OP. KRE~)

"[alIl laws, regulatlons and judicial rules of procedure in effect
within the territory of Bosnia and Herzegovina when thc:Consti-
tution enrers into force shall remain in effect ta the extent no1
inconsislent with the Constitution: until otherwise determined by
a co~npetentgovemmental body of Bosnia and Her~egovinü"~~;

(c) The Republic of Bosnia and Herzegovina has no singlejudicial sys-
tem or administrative procedure. This fact is also forrnally cndorsed

by Article 3 of the "Transitional Arrangements", lvhich States:
"[al11proceedings in courts or administrative agçncies functioning
within the territory of Bosnia and Herzegovina when the Consti-
tution enters into force shall continue in orbç trünsferred to other

courts or agencies iii Eosnia and Herzegovina in accordance with
any legislation governing thc cornpetence of such courts or
agencies" 37;

) The Republic of Bosnia and Herzegovina has no arnied force of its
own. Moreover, a joint army is not an institution of a central
authority, sinceit does not figure:as one of the responsibiliiicsof the
Peaçe Settlernenl and the Agreement on Regional Stabilization,
which are relevant in this rnütter. By their wording and their contçnt
they resemble the agreements among sovereign, independent States
on confidence and security building measures, rather tliün agree-
rncnts among cntities within one State. The main purpose of the

obligations entçred into iiiiderthe Agreement on the Military
Aspects of the Peace Seltlement relate to the establishment of a
durable cessation of hostilities, which implies that
"[nleitlier Entity shall threaten or use fora agairist the olher

Entity, and under no circumstances shall any armed forces of
either Entity enter into or stay within the ierritory of the other
Entity without the consent of the govcrnment of the latter and of
the Presidency of Bosnia and Herzegovina"

and that "lasting security and arrns control rneasurcs . . which aim
to promotc a permanent reconciliaiion between all Parties" arc to be
established3s. The Agreement on Regional Sta bilization, however,
provided for a general obligation or establishment of progressive
measures for regional stübility and arms control by achieving bal-
ances and stable dcfence force lcvelsat the constant numbers con-
sistent with the parties' respectivesecurity and the need to avoid an
arms race in the regionJ9;

3bDOC. A/50/790-S/1485/99Transitional Arrangements, Art p.76.
l7Il~d, Art 3.
IJjld, Art. 1((u),(CI p,8.
3gIbiO, p2,

91 <r[t]outesleslois,tous les rGglemeiitset tous les codesde procédure
qui eiaient applicables sur le terriioire de Bosnic-Herzégovine au
moment de I'cntree en vigueur delaConstitution restent en vigucur
dans la mçsure où ils nc sont pas incompatibles avec cette der-

iiiere, à moins qu'un organe compétent du Gouvernement de Bos-
nie-Herzégovine n'en dkcide auirement )>36;

c) la Républiquede Bosnic-Herzégovinen'a pas de systèmejudiciaire ni de
procédure administrative uniformes. CE ['ailest aussi formellement attesté
par l'articl3 des «Dispositions transitoires}),qui est ainsi libelle:

«Toutes lesprockdures engagtes devant les tribunaux ou les ad-
ministrations publiques €onctioniiant sur le territoire de Bosnie-
Herzégovineau inornent de l'entréeen vigueur de la Constitution se
poursuivent ou sont transféréesàd'autres tribunaux ou d'autres ad-
ministrations publiques de Bosnie-Herzégovine selonles lois qui éta-

blissent la compétence de ces tribunaux ou de cesadtniniçtrationsw l';
dj la République de Bosnie-Herzégovine n'a pas d'armée qui lui soit
propre. De plus, une arméecommune n'esl pas une institution d'une

autorité centrale, puisqu'ellc ne figure pas au nombre des responsa-
bilitts prévuesdans I'accord dç paix et dans l'accord relatif à la sta-
bilisation régionale,qui sont pertinents en la matitre. Par leur libellé
et leur contenu, ceux-ci ressemblent plus à des accords relatifs a des
mesures de confiance et de skcuritk entre Eic~lssouverains cl indépen-
dants qu'à des accordsentre enriiésfaisant partie d'un mime Elai. Le

principal objectif desobligations conlractées dans lecadre de l'accord
relatifaux aspects militaires du rkglement de paix est d'instituer une
cessaiion durablc des hostilitéssce qui implique que:

c<[>i]ucune entité n'aura recours A la menace ou à l'emploi de la
force contre l'autrc entité et, en aucune circonstance, les forces
arméesd'une entiténe pknétreront ou séjourneront sur le territoire
de l'autre entité sans I'asseniiment du gouvernement de celle-ci et
de la présidence de 2a Bosnie-Herzégovine »

et que {{des mesures durables de sécurité et delimitation des armc-
ments ... en vude favoriser une rkconciliation permanente entre touies
les partiesi>seront arrêttesS. L'accord relatafla stabilisation régionale

énoncetoiitefois une obligation générale de prendre des mesuresgra-
duelles en faveur de la stabilitéet la limitaiion des armements dans la
régianen parvenant à desniveaux de fora défensiveéquilibrés et stables
avec des effectifstenantconipte de la sécuritéde chacune des parties et
de la nicessitéd'éviterunecourse aux armements dans la région39;

3Woc A15017YO-S/IY95198 <9,ispositionslran~itoirarl.2, p 68
37thid.,mi. 3.
38Accord rclstifauxaspectsmilitairesdu règlementde paart.1,2c), p 7.
39Accord relatiila stabilisationrégionale,p. 40.(e) Thc Republic of Bosniaand Herzegovinadoes not have its awn police
force. The cornpetenceof the poliçe forces of the entities is limited
ratione loci. Only the International Police Task Force, established
under the corresponding Agreementmarked as Annex 11,is author-
ized, in kcepingwith its tasks laiddown in Article III of the Agree-
Inent, to act throughout the Republicof Bosniaand Herzegovina.

Of the relevant conditions for statehood of Boçnia and Herzegovina
within its adn~inistrativeborders, only the condition concerning the con-
lractually determined administrative bnrders of Bosnia and Herzegovina

as the internationally recognized ones, has been fully rnet40.

24. In ihe Iighiof thejbregoing itmrzy be suid thar rherelevant fucluol
und ieg~11starus of BoxniaandHerz~guvina us u Sfafe within the aûmia-
iLstraiivbordersof rhe sume ex-Jec/erul unir, muy iredej~ed as a political
projecr of the organizedinternational commuprity,ivhosernaterioiizution
was trunsformedby the naylon Agreemenls inroa bindingobligutioraof
rhe parrlm to the Agreements. The fact that this is more a contractual
obligation to establish Bosnia and Herzegovina as a State than a conse-

cralion of the current state of affairs is testified to by the nature of the
Constitution of the Republic of Bosnia and Herzegovina. As it stands, it
is not, strictoS~~'PFSa,constitution, that is, anact of the interna1consti-
tuiion-making authority, but isan international treaty incorporating the
text of the Constitution. The term "pürty" denotes a Stak which has con-
sented to be bound by the treaty and for which the treaty isin force4\. By
virtue of Article 2 (u) of the Convention on the Law of Treaties,

" 'treaty'means an international agreement concludedbetween States
in written form and governed by international law, whether em-
bodied in a single instrument or in two or more related instruments
and whatever its particulsir designation".

In other words, underlying the title 'Tonstitution of Bosnia and Herze-
govina" is ü treaty of two State entities- the Federalion of Bosnia and
Herzegovina and the Republika Srpska - to establish a State within the

administrative borders of the former federal unit of Bosnia and Herze-
govina, since "[elveryState possessescapücity to conclude trea~ies"~~.
Moreover, the personality of one of the parlies - the Federation of
Bosnia and Herzegovina - possesses elements of political fiction that
considerablyoutweighthe real attributes of statehood (seepara. 14above).
Hence, in a bioader çontext, the global contractual obligation to eslab-
lish Bosnia and Herzegovina within itsadministrative borders also covers

the maierialization of a separaie contractual obligation undertükenby

govinaticlcX of the GeneralFramework Agreementfor Peace in Bosnia and Hcrze-
Conventionun the Law oCTreaties,1969,Art.2 (9).
42Ilird..Art. 6. eJ la République deBosnie-Herzégovinen'a pas sa propre police. La
compétencedes forces de police des entitésesi limitée ration^loci.
Seule 1'Equipeinternationale de police, créée en vertu de l'accord y
relatif (annexe 11)'est autorisée,dans I'cxercicedes fonctions définies
à l'articleII1de cet accord, opérersur l'ensembledu territoire de la
Républiquede Bosnie-Herzégovine.

Des conditions devant ètre satisfaites pour que la Bosnie-Herzégovine
acquièrela qualitédYEtata l'intérieurde ses limitesadministratives, seule
la condilion concernani la définition contraciuellede ces limites adminis-
tratives eniant que frontières internationalementreconnues l'aété pleine-
ment 40.
24. Compt~ tenude ce yuipre'cédeo ,n peut dire quén droitr70rnvneen
faHilu Bosnie-Iferzégovine en rtltqu 'Etal à JYintErieures litnitesadmi-
nisirutheh de l'ex-eafitéfécfiruledu mêmenom peur êtredéjnie comme
an pr~jer polifique d~ la cornmunuutf interntltionale orgunisée,doni la
matéricrlî.î.uti~rété transforméepar les accords de Dayton en une obli-

guiion conar~rignaniepour les parti~s à ces accords. Le fait qu'il s'agit
plus d'une obligation contractuelle d'établirla Bosnie-Herzégovine en
tant qu'Etat que d'une consécrationde la situation existante est attesté
par la nature de la Constitution de laRkpublique deBosnie-Herzégovine.
Dans son étatactuel, ellen'estpas une constitution ~tricrosensu,a savoir
un acte de l'autoriti constituante interne, mais un traité international en
contenant le texte. Le tcrme «partie>>désigne unEtat qui a consenti
ktre liépar le traité etpour lequel le traite est en vigueur4'. En vertu de
l'article aj de la convention sur le droit des traités,

«l'expression «traité>s'entend d'un accord international conclu par
écritentre Etats et régipar le droit international, qu'il soit consigné
dans un insirument unique ou dans deux ou plusieurs iiisiruments
connexes, et quelle que soit sa dénominationparticulikre~.

En d'autres termes, sous le titre «Constitutiondela Bosnie-Herzégovine»
on trouve un traitéentre deux entitésétatiques - la fédérationde Bos-
nie-Herzégovinect la Republika Srpska - visant a établir un Etat à
l'intérieurdes limites administratives de l'ex-entitéfkdéralede Bosnie-
Herzégovine, puisque «[t]out Etat a la capacité de concluredes traiié~»~~.

En outre, la personnalitkde I'iinedes parties- la fédérationde Bosnie-
Herzégovine - relèvebien davantage de la fiction politique qu'clle ne
posskdelesattributs rkelsd'un Eiat (voir ci-dessuspar. 19).Ainsi, dans un
contexte plus large, l'obligation contractuelle globale d'établilra Bosnie-
Herzégovine a l'intérieurde ses limitesadministratives impliquel'exécution
d'une obligation contractuelle distincteassuméepar les entitks etatiques
I

40Articlc X de l'accord-cadre gépourlapaixen Bosnie-Herzégovine

Convent~onsur le drodestraités;1969,art. 2, Yar
l Ibid,art. 5.the Croat and Muslim state eniities in Busilia and Herzegovina under
the Washington agreement - the obligation to form the Federation of
Bosnia and Herzegovina.
At praenf, an uhscnceof the crucial Siuite elernentsin lernis O/'infer-

natiouuJla cilnîakes Bos~~ia and Herzegovina wiilzin ils atinlinistratiue
borders u Sfcrtesui generis: w combinat(on of a mutructuul relotiop~.~hip
qf ~ciiu~ntrtics witha sfroprgly i~istalledeienwnt of an inrrrnariontrlpro-
recloruie. This stütus is expressed al two levelç,that is

(u) the factual Ievel,as reflected in the position of TFOR. These forces
are, by definition, a "multinational miliiary lmplementation
Force" 43deployed to Bosnia and Herzegovina to "help ensure coin-

pliance with the provisions of this Agreemei~t"~".IFOR is noz only
one armed force which shall "havc compleie and unimpeded free-
doni of movcinent by ground, air, and waier throughout Bosnia and
Her~egovinü"~~but is even authorized to "takc such actions as
required, incIudingthe use of 'ecessaryforce, io ensure cornpliance
with thisAnnex,and to ensure itsown prote~tion"~;

(hl ihe legal Icvel,since particularly relevant provisionsof Ariicle VI of
the Constitution of Bosnia and Herzegovina (Constituiional Court),
which is an inherently adjudicative body which has "exclusivejuris-
diction to dccide any dispute thüt arises under ihis Consiiiution
between the Entities or between Bosnia and Herzegovina and an
Entity or Entities, or between institutions of Bosnia and F-lerze-

govina" 47.Paragraph 1of the above-meiitioned Article provides for
the composition of the Court in tlie following way :

"The Constitutional Court of Bosnia and Herzegovina shall
have nine members.

(u) Four members shall be selectedby the House of Representü-
tivesof the Federalio~i,and Iwo membcrs by the Xssemblyof
theRepublika Srpska. The remaining three members shall be
selected by the President of the European Court of Hurnün
Rights after consultation with the Pre~idency."~~

1s is, therefore, beyond any doubt that the election of one-third of the
members of the court is not in any way influencecl by the Presidency of
the Republic of Bosnia and Herzegovina or by any other organ of the

-
43Article 1 of thAgreement on the MilitarAspects of the Pzace Scttlement,dm.
A/50/790/S11995/999,.7.
44lhid
Ihd, p 19.
4Vbid.l..pX.
47Ihzc.p. 71
4Xhi., p. 70 APPLlCATION DE CONVENTION GENOCIDE (OP.DISS. KKECA) 684

croateet musulmanedeBosnie-Herzkgovineau titredel'accorddeWashing-
ton - l'obligationde constituer la féd6rarionde Bosnie-Herzégovine.

Actuelktnenl, 19ahLsrnd ceeséIkment~ conslifutds ccl1'Etat quisont foii-
dutnetztau.~uu fegard du droit internulionrijuif de luBosnic- Herzkgovine

ù l'inlericur de es limites admiizisfrutiv~sut1Efat sui generis: B sirgit
d'une rrlutioticonrrucluelle entrc detix ~nlirksd layueil~est associ un
.dément fortemenr rnurqui! de pprotecforaf inrernafiorzul. Ce statut
~'exprrnt~ eideuxniveazrx, cisavoir:

cl) au niveau desfaits,comme le montre Icsiatut de I'IFOR. Cette force
est définiecomme une {(forced'application militairemultinationale»43
dtployéeen Bosnie-Herzégovinepour «aider i veiller au respect des

dispositions du présent accord >j44.L'IFOR n'est pas seulement une
force armée qui ({aurala libertécomplètcde sedkplaccr sans entravc
par voies terrestre, aérienneet fluvialedans l'ensemblede la Bosnie-
Herzégovine~~~m , ais elleest niErneautorisée<<iprendre lesmesures
requises, y compris l'enilsloide la force nécessaire,pour veillerau res-

pect des dispositions de la présenteannexe et pour assurer sa propre
protection^^^;
6) au niveau du droit, eu égardaux dispositions particulièrement perli-
nentes de l'article VI de la Constitution de Bosnie-Herzégovine,qui
institue une cour consti~utionnelle,laquelle est un organe intrinseque-

ment judiciaire qui a rtcornpétenceexcilusivepour réglertout diffk-
rend apparaissant dans lecadre de la Coiistitution entre lesentitésou
entre la Bosnie-Herzégovineet une entitéou lesdeux ou entre Icsins-
iiiutions de Bosnie-Her~l.govine»~~L . e paragraphe 1 de l'article sus-
mentionné, relaiià la composition de la cour, est ainsi libellé:

<<LaCour constituiionnelle de Bosnie-Herzegovine est formée

de neuf membres.
a) Quatre membres sont choisis par la chambrc des représentünis
de la fédération,deux membres par l'assembléede la Repu-
blika Srpska. Lcs trois membres restants sont choisis par le

présidentde la Cour européeilnedes droits de E'hommc:après
consuliation avec la prksiden~e.>>~'

IIest donc hors de douie qu'en pratique l'électiond'un tiers desmembres
de la cour n'est en aucune manikre influencke par la présidencede la
Républiquede Bosnie-Herzégovineni par un autre organe de la Répu-

-
4"rtrtle 1 de l'accord relataiix aspects militaires reglement de priixduc.
At571790-SIIY951799p,6.
44Ibrd
45 Ibid,p 17.
dVbld., p 7.
47 Ibidp 64.
48 Ibirl.685 APPLICATIONOF GENOCEDECONVENTION (DISS. OP. KKE~A)

Republic or Entities, in practical terrns, given the faci that consultation

per de3nitionen~ has no binding force.
The provisions relating to the cornpetence of the Tnternational Police
Task Force can be mentioned arnong others. The compeiences of these
forces cover, inter aliu, the "monitoring, observing and inspecting [of]
law enforcement activities and facilities, includjng associated judicial
organizations, structures, and proceeding~"~~.The real range of these

powers in the context of suprernupoteslas of the Republic of Bosniaand
Herzegovina becomesclear in view of the provisions of Article VTIof the
Agreement which dcfines law enforcernent agencies as those involved in
law enforcement, crirninal investigations, public and State security, or
deteniion or judiciül activities50.

The elements of international protectorate moreover possessa twofold
significance. O11 the one hand, thcy are, especiallywhen the composition
of the Constitutional Court is concerned, an integral part of the Stare
structure of Bosnia and Herzegovina, construed by the Dayion Agree-
ments, while on ihc other, they serve lo guarantee enforcement obliga-
tions entered into by the entities under the agreements.

25. There is an essential analogy between the Republiç of Bosnia and
Herzegovina and Finland after its proclamation of independencc on
4 December 1917.Since the Permanent Court ofInternational Jus~icedid
riotexjst atthe time, an opinion on the status of Finland was requested of
the International Committee of Jurists. In its Report the Cornmittee

noted, inreraria,that:
"Certain clements essential to the existence of a slate, even some
elernents of fact,were lacking for a fairly considerabte period. Politi-

cal and social lifewas disorganized; the üuthori~ieswere not strong
~noughta assert themsclves,civil war was rife; further the Diet, the
lcgality of which had been disputed by a large section of the people,
had been diçpersed by the revolutionary party . . ihe armed camps
and the police were divided into two opposing forces .. .It is. ihere-
fore, ciifficul10 say at what exact date the Finnish Republic, in the

legal sense of the term, actually became a definiteiycanstituied sov-
ereign state. This certainly did not take place uniil stable political
organization had been created, and until the public authorities had
hecome strorig enough to assert themselvesthsoughout the territo-
ries of the:state without the assistance of foreign troop~."~'

As Warren Christopher, the United States Secretary of State,
noted:

49ArticleIII.](u)of the Agreement on Ititemational Police lask fordoc AlSQf
79OiSt9195/999p. 118.
50Ibid.Art. VII, p. 120.
5fReport hy theInternationaCommittee of Jurisis (Larnoude(President), Struycken,
Huber),OJjîcr Jairniiofthe Leagurof iY~7rioi?sS.pSupp No. 3 (1920),p. 8blique ou des entités,en pratique, ktant donnéque la consultation n'apar
définitionaucune force obligatoire.
On peut aussi mentionner les dispositions relatives ii la compétence de
l'équipeinternationale de police. Cette force est notamment compétente
pour {(contrôler, observcr et inspecter lesactivitéset facilitésde maintien
de l'ordre, y compris les organismes, structures et procéduresjudiciaires

connexes»4T.La portée véritablede ces pouvoirs dans le contexte de la
supremapotestus de la Rkpublique de Bosnie-Herzégovine estmise en
lumiere par lesdispositions de l'articleVI1de l'accord, qui définitles ins-
titutions de maintien de l'ordre commeles institutions chargéesde main-
tenir l'ordre, demenerlesenquêtespénales,d'assurer la sécurité publique
et la sécuritéde l'Etat, ou de s'occuper desdétentionsou des procédures

judiciaire^^^. l
Les élémcnisrelevant du protectorat in~ernational ont en Outre une
double importance. D'une part, el en particulier en ce qui concerne la
composition de la cour constitutionnelle, ils sont pürtie intégrantede la
structure étatique de la Bosnie-Herzégovine,telle que façonnéepar les
accords de Dayton, et, de l'autre, ils servent à garantir l'exécution des
obligations qu'ont assumécsles entités en signant les accords.
25. 11existe une analogie essentielle entre la Républiquede Bosnie-

Herzégovineel la Finlande aprksque celle-ci eut déclaré sonindkpen-
dancele4 décembre191 7. Comme la Cour permanente de Justice interna-
tionale n'existaitpas a l'époque, c'es t la commission dejuristes que l'on
a demandé de rendreun avis sur le statut de la Finlande. Dans son rap-
port, la commission a notamment notéce qui suit:

(<Certainséléments essentield se I'Etat, même desélémcnis de fait,
lui ont assez longtemps fait défaut. Lü vie politique et sociale était
dksorganisée;l'autoritén'était plusassez forte pour s'affirmer; la
guerre civile sévissait; la Diele, dont la légalitkavait étécontestée

par une grande partie du peuple, avait été disperséepar le parti révo-
lutionnaire ...la force armée et la police étaient BivisCesen deux
camps opposés ..II est donc difficilede dire a quelle date précisela
République de Finlande, dans le sens juridique du mot, est nke
comme Etat souverain définitivementconstitué. Ce n'est certaine-
ment pas avant qu'une organisation politique stable n'ait &té créée et
que lesautoritéspubljq~iesne soient devenues assezfortes pour affir-
merleur autoritk sur le territoire du pays sans le concours de troupes

étrangeres.» 51
Comme l'adéclaré M. Warren Christopher, secrétaired'Etat des Etats-
Unis d'Amérique :

49Article Ili, paragraphe1 a), l'accordrelatiil'équipeinternationale de police,
doM.lhid , art. VpI,107.,. 104.
51Rapportde lacornmisslondejuristes (Larnoude, prksiderit,Sti-uycken,Hubcr),Juur-
JIUofJciedle lu SnciétedeNatrons, ,rupplém~nsrpétrn"3, 1921,p. 8-9. "Withc~ut elections, there will be no unified Bosnia state, no
national constitution orjudiciary and IittIehope for greüter coopcra-
tion among Bosnia'sdiverse carnmuiiities." 52

26. The recognition of Rosniaand Herzegovina is hequently, explicitly
or implicitly, used as an argument in support of the existenw of Bosnia

and Herzegovina as a sovcreignand independent Statc within the admin-
istraiive boundaries of the former Yugoslav federal unit.
Such an approach is sornewhat surprising, since "the Siaie exists by
ilself (par I.ui-nr6n1eand the rccognition of a State is nothing else than a
dcclaration of lhis existence,rccognized by the States from whichit ema-
nates"_?.

This is speciallyso, having in mind that "the praçtice of States shows
~hatthe üct of recognition is still regarded as essentially a political deci-
sion, ~vhiclicach S~ate deciclesin uccorduizce ivitli ifoivnfrre uppreciu-
rion of the situufir~n"~~.
Itis reasonablc to suppose thüt, merely by relying on these facts, ihc

leariied scholür is able to conclude thal "[r]ecognition is still in the lan-
guagc of diplomats but it does not belong in ihe Iünguage oof la^"^^.

It is true that the position of Bosnia and Herzegavina is a speçificone,
since ii has been recognized by praclicülly the whole international com-
munity. This facr servesas the basis for the thesis that

"recogiiition, along with rnen~bersliipof interiiational organizations,
beaw witness to these States' conviction that the political eiitity so
recognized is a reality and confers an ir certain rights and obliga-

tions undcr international I~w''~~.

This, in doctrinal tcrms. elegant thesis highlights among oiher things,

the ambivalent nature of the insiitute of recognition of States. in the
spiritof the ruling, declarative theory, the recognition ofStates should be
a staternent of the i'actualsituation forrned 1ege.ruriisin hazrnony with
the relevant legal rules on the emergenceof new States. The "States' con-
viction that the political entity . .. isa reality" clearly need not corre-
spond to the Factuülsituation. "Conviction", per dejnirioneit snnot a

Tribune,15-16 June 1996,p. 6. WilBe No UnifiedBosnianState",InrrrirufzonalIfetuld
53 Dcut~cheContineiitalGas-Gesselschaf11PulisliState.5 AD Iatp. 15(1929-1930).
54United NationsSccretariatMemorandum of February 1950çoncerningthequestion
of represcntationof Membersin the UnitedNations, UnitedNationsdoc S11465S, COR,
5th Year,Supp. for Jaii./May1550,p.19.

52 L Henkin, "Generdl Co~irseon Public IntcrnationiilLaw", RecuezIdesLuurs de
I'dccldcnrieddroirittfernurionalde Lu Huyr. Vol.6,11989,p.31.
56Statementof thc Governmentof the Republic of Bosniaand Henegovina un Pre-
Iiminay Objections,para.4.14. «Sans elections, il n'yaurü psis d'Eiat bosniaque unifié,pas de
constitution nationale ni d'appareiljudiciaire et guère d'espoird'un
renforcement de la coopération entre les diverses cominunauies de
Bosnie. » 52

26. La reconnüissancc de la Bosnie-Herzégovineest Fréquemment,
expressément ou implicitemcnl,invoquée commeattestant I'existcnced :e la
Bosnie-Herzégovine en tünt quYEtaisouverain et indépendant i l'intérieur

des limites administrativesde l'ex-entiti.fédérale yougoslavd eu même nom.
Une telleattitude estquelque peu surprenante, étantdonnéque«13Etat
existe par lui-mêmeet la reconnaissance d'un Etat n'est rien d'autre
qu'une déclaration de cetteexistence, reconnue par les Etats dont elle
émane )xs3.

Cela estparticulieremenl vrai sil'onconsidèreque«la pratique adoptée
par lesEtats montre que I'üctcde reconnaissance est cependant coiisidéré
cornine une décisionde caractere essentiellement politique que chuque
Etat prend suivunr l'opinionqu'il sefirlr lui-migrned~ /IIsiluarion» 54.

11est raisonnable de supposer que sur la base de ces seulsfaits un érni-
nent juriste est en mesure de conclure que «la reconnaissance fait tou-
jours partie de la langue des diplomates mais çlle n'appartient pas à la
langue du droit» 55.
11est vrai que la situation de1stBosnie-Herzegovineest particuliére,car

ellea été reconnuepar pratiquemerit toute la communauté internationale.
Ce fait sert de fondement rila thèse selon laquelle
«la reconnaissance, tout comme la qualitéde membre d'organisa-

lions internationales, tkmoigne de la conviction de ces Etats que
l'entitépolitique ainsi reconnue constitue une réalitéet lui confère
certains droits et certaines obligations au regard du droit internatio-
nal >55.

Cette thèse,élégantd eu point de vue de la doctrine, met notamment en
lumiére le caractère ambivalent de l'institution de la reconnaissance
des Etats. Selon la théoriedéclarative,qui est cellequi prévaut,la recon-

naissance des Etats devrait êtreune dkclüration de la situation factuelle
formuléekges urti.en harmonie aveclesrèglesjuridiques rkgissantl'appü-
rition de nouveaux Etats. Il est clair que la «conviction des Etats que
l'entitépolitique ..constitue une réalité>n>c correspond pas nécessaire-

S2(<WithoutEleçtions, ThereM'il1BNo Unified BosnianStaten, ln~ernu/innalI.Itrald
Tribune, 15-16juin1996,p 6.
53DeirtscheCriniinen~ul av-Gessclclic.EIntpokunui.r,5 AD 11,p.15(1929-1930).
54Mémorandumdu Secrétariatde I'Organisationdes Nations Unies de février1950
concernant la qucstionde la représentatdes Mcmbres iiI'Organisaiiondes Nations
Unies,doc. S114666 ,o~ument~ofjcieb du Con.reildc sécuriti.ciriyitiimr oirnde.supyl:-
mentjriiivicr-mai 1950,19.
55L. EIenkin,((GeneralCourseon Public InternationalLaw», Recueil des cours de
['Académiede droit intenutionalde La Hayt.216,1985,p. 31.
56Exposé [luGouvcrricniente la Républiqude Bosnic-Herzégovinseur lesexceptions
prkliminaires,par.4 14faciual condition but its subjective expression - helice it is necessary ad
crrst~nto carry outan investigation so as to establish the precisenleaning
of the phrase "States' conviction" and to seewhether or not it is büsed on

fücr or Paw.A contrario, the whole problem would be shifted to the
domain of the rule of "majarity opinion", so that faclwould be what the
majarity considers il to be,

Having that in mind, it is, generülly speaking, necessary frorn the
standpoint of Iüwto examine in each individual casc whether the relevant
legal criteria for recognition are met.

Concerning Bosnia and Herzegovina, it is obvious that, as an assurned
State in the administrative boundaries of thüt former Yugoslav federal
unit, it could be ranked among the circle of States onfy as a new State.
Hence, it isnecessaryto see whichcriteria are relevant for the recognition
of new States.
The essenceof those criteria may be taken to be expressed in para-
graph 100 (Minimum Requirements for Recognition of New States} of

the Resrcrrernen of the Law:
"Before recognizingan entity as a newstate, the recognizing state
is required to make a determinalion, reasonably based upon fact,

that the entity:
(a) has a defined territory and population;
(A) is under the control of a regime that satisfies the niinimum
requirements for recognition as a government under [para-

graph] 101;
(cd has the capacity to engage in foreign relations;
('d) shows reasonablc indications bhat the requirements of
Clauses (a)-(cl will continuc to be satisfied." 57

Paragraph 101stipulates:
"Before recognizing a revolutionary regime as a government of
a state, the:rccognizing state is required to make a determination,

reasonably based upon fact, thüt the regime
(a) is in control of the territory and population of the state; or
(b) is in control of a substantial part of the territory and popula-
tion of the state and shows reasonablc promise that it will suc-

ceed in displacing the previous government in the territory of
the state." 58
The cited criteria are, as a whole, applicable to the case of Bosnia and

Herzegovina. In such an assessment, it is decisivethat

-
57Amer~can LawInstitute, Restnt~menrof the I,uiv. SecoForeignRelurionshiv of
tlie Urir~edStutr1965,p 321.
58Ibidp.322. APPLICA'rIONDE CONVENTION GENOCIDE (~t'DISS. KRE~A) 687

ment aux faits. Par définition,la ccconviction»n'est pas uneappréciation
objective des faits, mais bien une appréciation subjective - c'est pour-
quoi il estnécessaire enl'espècede s'efforcer d'établirle sens prkcis de
l'expression ((conviction desEtats~ etdc voir si oui ou non cette convic-
tion est fondee en fait et en droit. A défaut,l'ensembledu problkme rele-

verait de la règlede l'ccopinionmajoritaire», de tellemaniéreque lesfaits
seraient ceque la majoritéconsidère qu'ilssont.
Cela étant,il est d'une manière générale nécessaid ru point de vue du
droit d'examiner dans chaque cas individuel si les critères juridiques
applicables à la reconnaissance sont satisfaits.
11est évidentque la Bosnie-Herzégovine entant qu'Etat apparu à
l'intérieur des limitadministrativesde l'ex-entitéfédérale yougoslave:du
mernenom ne peut EtreclassEcque parmi lesnouveaux Etats. Tlest donc

nkcessairede voir quels critèresS'appliquenta la reconnaissance des nou-
veüux Etats.
On peut considérerque pourl'essentiel ces critèressont énoncéa su para-
graphe 100({(Conditionsminimales pour la reconnaissance de nouveaux
Etats~) du Resta~ement ofthe Luw:

({Avantde reconnaitre une entitéen tant que nouvel Etat, 1'Eiat
dont émane la reconnaissance doit s'assurer raisonnablement, au
regard des faits, que l'entité:

a) a un territoire et une population définis;
b) est sous le pouvoir d'un régimequi satisfait aux conditions mini-
males régissantla reconnaissance d'un gouvernement en vertu
du [paragraphe] 101;
c) a la capacilt d'avoir des relations internationales;
d) permet raisonnablement de penser que les conditions énoncées
aux clauses a) a cJ continueront d'êtresatisfaites.uS7

Le paragraphe 101dispose:

r<Avant de reconnaitre un régime rkvolulionnaire en tant que gou-
vernement d'un Etat, 1'Etatdoni émane lareconnaissance est tenu
de s'assurer raisonnablement, compte tenu des faits, que ce rigirne:
u) exerce son pouvoir sur le territoire et lapopulation de 1'Eta;ou

b) exerce son autoritésurune partie substantielle du territoire et de
la population de 1'Etdtet permet raisonnablement de penser qu'il
réussiraa évincer le gouvernementanterieur sur le territoire de
I'Etat.~~~

Les critèrescitéssont dans l'ensemble applicablesü la Bosnie-I-lerzégo-
vine. Lorsqu'on procède i une telle évaluation, une considération est
décisive:

57ArnericiinLawInstitute,Reîtarernerirofthe Law. Srçund,ForeignRelLawoof
/he Unlled Sture1965,p 321.
JnIb~d,p 322 APPtlCATION DE CONVENTIONGENOCIVE (01'. DISS. KKECA) 688

«La reconnaissance d'ungouvernement IICpose problèmeque si
un changement anormal de gouvernement ü cu licu, c'est-A-diseun
changenient de gouvernement en violation dc la coi~stiluiion de
t'Etatos"

La Bosnie-MerzCgovine ne satisfaisait aux critèresde la reconnaissance ni
d'un point de vue statique ni d'un point de vue dynamique. Plus pürticu-
lièrement,au mornerit où elle a ité reconnue, non seulement elle n'avait
pas <<unterritoire et une population définis))(voir ci-dessus par. 6-9) et

ii'exerçait pas non plus, notammeiit, «son conirôle sur une partie subs-
tantielle du territoiret de la population>>(voir ci-dessus par. 181,mais
elle ne permettait pas «raisonnablcmenl de penser» qu'elle pourrait ;i
Iyüvcnirsatisfaireà ces critéressans uii appui extkricur actif. La Basnie-
Herzégovineelle-mème,dans sa «deuxièmedemande en indicütion de
mesures conservatoires» du 27juillci 1993, note, à la fin de ses conclu-
sions: {(IIs'agit de la dernière occasionqu'aura la Cour de sauver ...
E'Etatde Bosnic-Herzégovine»(p. 55).Les«conditions miiiimalcspour la

reconnaissance des nowvçaLixEtam énoncéesci-dessus doivent ricoup
sûr êtrecomplétées par des conditions juridiques puisque {(l'exercicede
I'autodkterinination [est]un critkre additioniiedt la qualitéd'Etat, dont
le déni>>ferait obstüclcà la qualitéd'Etatm.
Ces critèresadditionnels conforlcnt encore la conclusion selon laquelle
laBosnie-Hcrzcgovinea été reconnue exclusivementpour des raisons poli-
tiques. De même,les lignes directricessur la reconnaissance de nouveaux

Etats en Europe orientale et en Union soviétique, surla base desqucllcsla
Bosnie-Herzégovine a étéreconnue par la Communautéeuropéenneet ses
Etats membres, etles débatsqui ont eu licuà I'Organisaiiondes Nations
Unies lors de l'admission de la Bosnie-Herzégovine,indiquent que, du
point de vue juridique, la rccrinnaissance a étéaccordéesur la base du
droit des peuples à disposcr d'eux-mêmes mème si,en l'espèce,I'exercicc
de ce droit esta tout le moins doutcux (vair ci-apréspar. 44-76).
En d'autres termes, la reconnaissancede la Bosnic-Herzégovineen tant
qu'Elat indépendanta étémotivkedavan tagc par des motifs de politique

nationale cides considérationsd'opportunité que par l'existencedes prin-
çipcsjuridiques applicables en la matitre. Ellc a tté pour l'essentiell'un
des instruments de la rkalisation d'un projct politique sur le reglement de
la crise yougoslave, un instrument qui reflktüit la logique interne de ce
projet iiidépcndammentdes règlesjuridiques applicables. Le caractère
utilitairee la rcconnaissance dans lecas de la Yougoslavie aété souligné
par l'ambassadeur Brown :

«Lord Carrington, qui prcsidait la conférencesur la Yougosla-

vie...estimait que la reconnaissance était unearme importante pour

rheC'lrifedSIUI~J.196p.321. Reslaienient oj flSecond,ForeignKela/ronsLaw of
" M N. Shaw,Inrernu!;unulLuw, 2' éd, 1986.p 132.689 APPLICATIONOF GENOCIDE CONVENTION (niss.or. KRECA)

sjdestogether. Recognition could be an incentivefor cooperation or
a sanction for lack of cooperali~n."~~
This is particularly conspicuous in the "Declaration on Yugoslavia" of
16 December 1991which together with the "Guidelines on the recogni-

tion of new Slaleç inEastern Europe and the Soviet Union", passed on
the same day by the EC Ministerial Council, served as a basis for the
recognition of Bosniaand Herzegovina by the European Community and
itsmember States.
By their Declaration, the EC and its member Slaleç invited

"al! YugoslavRepublics to srate by 23 Dec~mberivhether:
- they wish fo be recognizedus independent Slutes ;

- they accept thecornmitments contained in the above-mentioned
guidelines;
- they accept theprovisions IuiJ dmvn in the Druft Convention -
especially those in Chapter II on human rightç and rights of
national or elhnic groups - underconsiderutionhy the Cunjér-
enceon Yugoslavin." h2

Bosiliaand Herzegovina therefore, together with the other federaf units
of SFRY, ~:rcsinviterltostaie ivheiher ii wished to be recognizedas an
independentState. The invitation was made at a time when the desire for
indepcndençe had stillnot been expressed in the appropriate way in Bos-
nia and Herzegovina. The referendum on the stalus of Bosnia and Herze-
govina at which two out of the three peoples of Bosnia and Herzegovina
declared themselvesin favour of the "sovereignty and independence of

Bosnia and Herzegovina" was not held until March 1992. It is hard to
assume that such an invitation, extended by a body which had offered its
good services and mediation in dealing with the Yugoslav crisis, could
have had no effcct on the political options taken in Bosnia and Herze-
govina, particularly if ~heinvitation to recognition is linked with the
terms for recognition which, inseralia, included the acceptance of "the
provisions laiddown in the Draft Convention . . under consideration by
the Conference on Yugoslavia". The key provision of the "Draft Con-
vention" whichthe Conference Chairman Lord Carrington presented to
the Conference on 23 October 1991iscontained InArticle 1whiçh reads:

"The newrelations belween the Republics willbe based on the fol-
lowing :

(a) savereign and indcpendent Republics with an international per-
sonality for those which wish il;

6'E. G. Brown, "Force and Diplomacy in Yugoslaviti:U.S. InterestAmericuti
ForeignPolicy Newslrttrr, Vol. 15,No. 4, Rugusl 192.,p.
62EuropeanPoliticalCo-operaiion,PreRclcase17Demmber 1991 (emphasiadded). API'LICATIONDE CONVENTION GÉNOCIDE (OP. DISS. KRECA)
659

rapprocher lesdeux parties. La reconnaissance pouvait êtreune inci-
tation à coopkrer ou une sanction pour dtfaut de coopération.oh'

Cela est particulièrement manifeste dans la «Déclaration sur la Yougo-
slavie~du 16 septembre 1991qui, avecles{(Lignesdirectricessur la recon-
naissancede nouveaux Etats en Europe orientale et en Union soviétique»
adoptéesle mtme jour par le conseil rninistkrielde la Communautk euro-
péenne,a servide base i la reconnaissance de la Bosnie-Herzégovinepar
la Communautéeuropéenneet ses Etats membres.
Dans leur déclaration, la Communauté européenne et ses Etats

membres invitaient
<<touresIesrkpuhblique sougoslaves à déclareravanf le 23 décembre si:

- elles souhaitenl etre reconnuesen tont yu'E~ats indkpendunts:
- ellesacceptent les engagements contenus dans les lignes direc-
trices susrnentionnées;
- elles occeplent les dispositionreprisel. durale projet de coaven-
rion qui esî ù dkxumen ri la confirence sur la Yougoslavie,
notamment les dispositions du chapitre lt sur les droits de

l'homme et les droits des groupes ethniques et nalionaux»".
La Bosnie-Herzégovine, ainsique les autres entités fédérale dse laRepu-
blique fédérative socialistede Yougoslavie, a donc irCinvitde à déclarersi

ellesouliaitaitêtrereconnuecvnzmeEtar indépendanrC . ette invitation a
&téraite A un moment ou le désird'indépendance ne s'étaitpas encore
exprime de manière appropriéeen Bosnie-Herzégovine. Le référendum
sur le statut de la Bosnie-Herzégovinelors duquel deux habitants sur
trois se sont déclarés en faveud re la ({souverainetéet l'indkpendance de
la Bosnie-Herzégovine»n'a eu lieu qukn mars 1992. Il est difficile de
soutenir qu'une telle invitation, émanantd'un organe qui avait offert ses

bons officesetsa médiationpour réglerla crise yougoslave, a pu n'avoir
aucun effet sur les choix politiques faits cBosnie-Herzégovine,d'autant
plus qu'elleüssujcttisliala reconnaissance àcertaines conditions, natam-
ment l'acceptation dcs ({dispositionsreprises dans le projet de conven-
tion ...i l'examen à la conférencesur la Yougoslavie». La disposition
clef du ({projet de convention» que le prksident de la conférence,lord
Carrington, a présentéa la conférencele 23 octobre 1991,est son article
premier, qui est ainsi libelle:

«Les nouvelles relations entre les républiques reposeront sur les
éléments suivants :

a) statut de républiques souveraines et indépendantes,dotéesd'une
personnalitéinternationale pour celles qui Ic désirent;

6'E. G. Brown, {(Forcand Diplomacy inYugoslavia.the U.S.InterestAmericnn
ForeignPoliry Nenisler!vol 15,114, aofi1993,p 2
"ZCoopérationpolitiquen Europe,communiquk dc presse16dkembre 1991(lesita-
liques sont moi).690 APP1,ICATIONOF GENOCIDE CONVENTION (DISS. OP. KRE~)

(15) a free association of the Republics wilh an international per-
sonality as envisaged in this Convention;
(c)comprehensive arrangements, including supervisory rnecha-
nisms for the protection of human rights suiidspecinlstatus for
certain groups and areas;
.............................

(1 in the frümework of general settlemenl, recognition ofthe inde-
pendence, withinthe existing borders, unless othenvise agreed,
of those Republics wishing il."
The relevant circumstances show that lhere existed a connection
between recognition and the dismemberment of the SFRY along the

seams of the administrative division into federal unils asprovided for by
Article 1 (a) of the Draft Convention. That concept, which included the
automatic substitution for the pcrsonality of the SFRY of the personality
of the federal units, rcflected the value judgrnenlof the "Declaration on
Yugoslavia" of 16 December 1991, on the basis of which its contents
were designed. There can bc no orher explanation for certain formula-
tions contained in the Declaration - exmpli causa, those according to
which the European Community and its rnember States "will not recog-
nize entities which are ihe result of aggression". Aggression per defini-

lionerrzis the
"use of armed force by n stule against the sovereignty, territorial
integrity or politicalridependeiiceof unother stule, or in any other
rnanner inconsislenl with the Chartes of the United Nations" G3.

In fact, there are certain indications that the presentatioof the Draft
Convention by the providers of good offices and mediators was the
expression of a political decision on the lransformatiozi of Yugoslav fkd-
eral units into sovereign States. Thc EPC statement of 6 October 1991
emphasized that

"itwas agreed that a political solution should be sought in thcper-
spective of recognition of the independence of those republics wish-
ing it,aithe end of the negotiating proccss conducted in good faith
and involving al1pürties".

A further indication isthe actual title of the document- the term "Con-
vention" denotes an ''ugreemenl beriveeu srares inrhe sense ofinterna-
rionai iaw". The Convention on the Law of Trealies (1969), lex lata in
this area, stipulates in Article 2 thata "Treaty" represents "'aninterna-
tional agreement concluded between States in wrilten form and gaverned

by international law . . wbaceverils pürtjcular designation". Article 6 of
the Convention stipulates thal "[elvery State possesses cüpacity to con-
clude treaties".

63Art.1,Gcneral Assemblyresoliition3314 (XXIX)of14Decernber1974 (emphasis
addedl APPLICATION DE CONVENrION G~NOCIUE (OP. DIÇS. KRE~A) 690

bj libre association des républiques dotées d'une personnalité inter-
nationale comme envisagédans la présenteconvention ;
cJ dispositions détailléesy, compris des mécanismesde supervision,
pour la protection des droits de l'homme et l'octroi d'un statut
spécial ri certains groupes et zones;
............................

dj dans lecadre d'un siglement d'ensemble, reconnaissancede l'indé-
pendance - ü I'intkrieur des froniikreç actuelles, sans accord
contraire - des républiques qui souhatient étre indépendantes» ,
Les circonstances montrent qu'il existait unlien entre la reconnais-

sance et ledémembremenide la République fédérativseocialiste de You-
goslavie selon sa,divisioil adminisirative en entitésfkdérales,comme le
prévoyait l'article1 a) du projet de convention. Ce schéma,qui prévoyait
la substitution automatique ila personnalité dela Républiquefédérative
socialiste de Yougoslavie dc la personnalitédes entites fédérales, reflétait
lejugement de valeur exprimédans la «Déclaration sur la Yougoslavie~~
du 16décembre 199 1,sur la base de laquelle son contenu reposait. On ne

peut expliquer autrement certaines formulations figurant dans la déclara-
tion - par exemple, celle selon laquellela Communautéeuropéenne et
ses Etats rnenlbrcs «ne reconnailront pas des entitésqui seraient le résul-
tat d'une agression». Par définition, l'agressionest

<<l'emploi de la force arméepar un Etat contre la souveraineté,I'inté-
grité territorialeou l'indépendance politiqued'rin autre Elnl, ou de
toute autre manière incompatible avecla Charte desNations Unies» 63.
En fait,certains indicesatlestent que, en prksentant le projet de çonven-

ticin,ceux qui fournissaient leurs bons officeset leur médiationdonnaient
effet i une decision politique sur la transformation des entitésfédérales
yougoslaves en Etats souverains. La dkclaration du 6 octobre 1991 for-
mulée danslecadredela coopération politiqueen Europe soulignait que:

«il avaitété convenu qu'une solution politique devaitetre recherchée
dans la perspectivede la reconnaissance de l'indépendancedes répu-
bliques qui le souhaitent, au terme d'un processus de négociation
menéde bonne foi et avec la participation de toutes lesparties)),

Urie autre indication est le titre mêmedu document - leterme «conven-
tion» dénoteun ccuccord enlre Erarsau sens du droit infernational». La
convention sur ledroit des traités(1964), qui es1leixIuru dans cedomaine,
dispose en son article 2 qu'on entend par «traité» «un accord internatio-
nal conclu par écritentre Ftats et régipar le droit international ..quelle
que soit sa denomination particulière>).L'artide 6 de la convention dis-
pose que «[t]out Etat a la capacitéde conclure des traités».

annexe,articlpremier(lesrtaliquessont de moi).aleen date du 14 décembre1974, Testifying to such a nature of the recognition of independence of the
Yugoslav federal units is the linkagoT recognition with practical politi-

cal aims. The United States-European Comrnunity Declaration on the
recognition of the Yugoslav republics States Inkr uliu:

"The Community and its member States and the United States

liave agreed to coordinate their approstches to çornpleting the pro-
cessof recognizingthoseYugoslav republicsthat seek independence,

(i) that the United States will, inthis context, give rapid and posi-
tive considerationto the requests for recognition by Croatia and
SIovenia in ~uch n ivu?;os to supporr the dual-lruck npproach

bu.~eJon the rleploymen?oftlie UN peacekeepingforce and rhe
European Communitÿ Peuce Conference chaired by Lord Cur-
rkglon.
(ii) that positive consideration should be given to the requests for
recognition of theother two republics, contingent on the resolu-
tion of the remaining European Cornmunity questions relating
to those two republics. In this context, they strongly urge al1
parties in Bosnia-Herzegovina to adopt wilhout dclay constitu-
tionalarrangements that willprovide for a peac~ful and harmo-
nious development of this republic within ils existing borders.

The Community and its member States and the United States
also agree strongly to oppose any effort to undermine the sta-
bility and territorial integrity of thoIwo republics."

In connection with the recognition of Bosnia and Herzegovina as an
independent State within the administrative boundaries of the former
Federalunit, at least two conclusions have ta be drawn:

(a) Herzegovina did not follow the natural logic of the legal process of

recognition, namely, that it should be a passive acknowledgment of
the establishmeni of the State. In the case of Bosnia and Herze-
govina, the recognition, as tes~ifiedto by developments, was one of
the instruments for the establishment of Bosnia and Herzegovina as
a Stnte within itsadministrative boundaries. The recogniaingStates,
by recognizing Bosniaand Herzegovina, actually demonstrated their
intention 10 create it or to participate in its creation;
(b) legally,the recognition of Bosnia and Herzegovina within its admin-
istrative boundaries represented the recognition of a non-existent
State. It was granted exclusivelyon the basisof political considera-

tions since, at the moment of recognition, Bosnia and Herzegovina
did not fulfil the minimum requirements for recognition as a new
State. Lx lien établi entre la reconnaissance et certaines fins politiques
concrètes attcslc que la reconnaissance de l'indépendancedes entités

fédérales yougoslaves avait bien un tel caractère. La déclaration des
Etats-Unisd'Amériqueet dela Communautéeuropéennesur la reconnais-
sance des républiquesyougoslaves stipuk notamment :
<(LaCommunauté et ses Etats membres et les Etats-Unis sont

convenus de coordonner la maniéredont ilsenvisagent d'achever les
processusde reconnaissance des républiquesyougoslavesdemandant
l'indépendance.

i) que les Etats-Unis, dans ce contexte, examineront rapidement
et dans un esprit positif les demandes de reconnaissance de la
Croatie et de la Slovéniedemunil.reu .ïc)utt.n/Cc/oubk approche
fondée sur le déploiemenrcielefl-ircdepuix desi2rcrtionUnies et

Iucconfkredn epaix de la Communau~e curopkenne,prksidéepar
Iord Currington;
ii) qu'ilconvient d'examiner dans un esprit positif les demandes de
reconnaissance des deux autres républiques, sousréservede la
solution des questions qui subsisieni au seinde la Communauté
européenneh propos de ces deux républiques.A cet kgard, [les
signataires] engagent fermement toutes les parties en Bosnie-
Herzégovine a adopter sans délai desdispositions constitution-
nelles permettant un développement pacifiqueet harmonieux de
cetterkpublique dans ses frontièresactuelles. La Communaute et

ses Etats membres et les Etats-Unis sont aussi convenus de
s'opposer fermement tout effort visüntsiporter atteinte à la
stabilitéetà l'intégritterritoriale de ces deux républiques))
En ce qui concerne la reconnaissance de la Bosnie-Herzégovine entant

qu'Ecatindépendantàl'intérieur des limites administratives de l'ex-entité
fkdérale,au moins deux conclusions s'imposent:
a) phénoménologiquement,en l'espèce,la rcconnaissance de la Bosnie-
Herzégovine n'a pas suivilalogique naturelledu processusjuridique

de la reconnaisssince,qui devrait consister a prendre acte passivement
de la création de 1'Etai. Dans le cas de la Bosnie-Herzégovine,la
reconnaissance, comme l'attestent les événements, a étél'un des ins-
truments utilisés pour constituer la Bosnie-Herzkgovine en tant
qu'Etat à l'intérieurde ses limites administrativesEn reconnaissant
la Bosnie-Herzégovine, lesEtats en cause ont en fait manifestéleur
intention de la créerou de participerà sa crkation;
h) juridiquement, la reconnaissance de la Bosnie-Herzégovinea l'inté-
rieur de ses limitesadministratives constituait reconnaissance d'un
Etat non existant. Elle a étéaccordée uniquementpour des raisons
poljtiques puisque,au moment où elle estintervenue, la Bosnie-Her-

zégovine ne satisfaisaits auxcritères minimums pour êtrereconnue
en tant que nouvel Etat.Moreover, havingin mind the importance ofself-determination of peaples
as a criterion in the decision regarding statehoodh4, it may be concluded

that the admission of Bosniaand Herzegovina to the United Nations was
an acl ofdiplomacy which runs counter to the esiablished practice of the
Organization in that regard.

27. The position ofthe Court regarding the second preliminary objec-
tion raised by Yugoslavia is based on two prernises:
(i) thatit"does not, in order to rule on that objection, have to consider
the provisions of domestic law which wereinvoked in the course of

the proceedings either in support of or in opposition to that objec-
tion", since "[alccording to international law, there is no doubt thaa
every Head of Siaie is presumed to be able to act on behalf of the
State in its international relations", and
(ii) that, "Mr. Tzetbcgovikwas recognized, in particular by the United
Nations, as the Head of State" and that "his status as Head of State
continued subsequenily to be recognized in many international
bodies and scveral international agreements" (Judgmcnt, para. 44).

My views on the rnatter are very different. The Application likethat of
Bosnia and Herzegovina instituting proceedings before the Court consti-
tutes a typical unilateral act of the State producing tegalconsequencesfor
the mutual relations among the parties to the Genocide Convention.
Hencethe Court is authorized to consider the relevant provisionsof Bos-
nia and Herzegovina'sconstitutional law, as wellas other cases in which
the application ofa norm of international law was dependcnt upon inter-
na1law} (exernplicausa, the Wesiern Griquuland Diamund Deposit.5 case
(1871) (2 Recueil des arhiîruges inrernalionaux 1856-72, pp. 676-795

(1923)); Clevelund A wrard (1888) (2 Moore, Internutiunrrl Arbitrations
1945-58); the case concerning Free Zones 01 Upper Suiloy und ~heDi.7-
6rbt ofGex (1932) (P.C.I.J., Series A/B, No, 46) ; the Fisheriescase
(1.C.J. Reports 1951,pp . 125-126); the No~deholrm case (1C.J. Reporls
1955, p. 4); thecaseconcerning the dpplicutiun qf'the Conventionof1902
Governing the GuardianshipofInfant s1C.J. Reports 1958, pp. 62-66),
etc.). In other words, thisisnot a case of çonflict between interna1 and
international law, as,exempli causa, in the Cerluin GermanInrerests in
Polish UpperSilesia or S.S. "Wimbledon" cases, but a matter in which
these two laws are in CO-ordination,dependent on each other.

Inconcrelo,Yugoslavia claims that Mr. A. Izetbegovil:could not have
issued an auihorization for instituting proceedings before the Court in
the present case since:

" J. Dugard,Hecogniiioandthe UniteNations, 1987,p.79.l APPLICATIONDE CONVENTIONG~NOCIDE (OP.DISS.KRECA) 692

En outre, compte tenu de l'importance du droit des peuples à disposer
d'eux-ni&mes en tant que critèredans la dicision concernant la qualité
d'ElütM, on peut conclure quc Ihüdrnissionde la Bosnie-Herzégovine à
l'organisation des Nations Unies a étéun acte diplomatique qui allait à
l'encontre de la pratique établie del'Organisationicet égard.

DEUXIEM EXCEPTION PRELIMINAIRE

27. La position de la Cour concernant la deuxièmeexception prélimi-

naire de la Yougoslavie repose surdeux prémisses:
i) elle «n'a pas, pour se prononcer sur cette exception, à cxriminer les
dispositions de droit interne qui ont été invoquées à l'appui ou
l'encontre de laditeexception au cours de la procédure)),étantdonné

que «[clonformémentau droit international, il ne fait pas de doute
que tout chef dYEtatest présumé pouvoir agir au nom de I'Etat dans
ses relations internationales», et
ii}uM. Izetbegovicavait étéreconnu,en particulier par l'organisation des
Nations Unies,commcktant Icchefd'Etat» ctsa <(qualitde chefd'Etat
a continuéde luietre reconnuedans de nombreuses enceintesinternatio-
nalespar la suitet plusieursaccords internationaux))(arrêt, par.44).

Mes vues sur cepoint sont très différente. a requèteintroductive d'ins-
tance, comme cellede la Bosnie-Herzégovine,coilstitue un acte unilatéral
typiquede 1'Etatqui produit desconséquencesjuridiquesdans les relations
mutuellesentre les partiesà la convention sur le génocide.C'est pourquoi
la Cour est autorisée à prendre en considérationles dispositions perri-

nentesdudroit constitutionnel dela Bosnie-Herzégovine,ainsq iue d'autres
afTairesdans lesquellesl'application d'une normedu droit international
étaitsubordonnéeau droit interne (par exemplel'affairedes Gisementsdia-
~nuntif&redsu Griyu~ilundocciclenful,1871(Recueildes urbirrogesinrernu-
~ionuux,1856-1872, vol. 2, p676-705(1423)); laSentence C!:lrvelri(1888)
(Moore, InlcrnalionalArbirruzions 1945-1968, vol. 2);l'affaire desZones
fvanche de lu Houle-Savoie et du Pclys de Gex, 1932(C.P.J.I. serieA/B
nu 46); l'affaire dePêrJierics(C.1.J. Recucil 1958, p. 125-126); l'affaire

Norrcbohrn(C.I.J. Rccraeii1955, p. 4); l'affaire de l'Application de la
convenlionde 1902pour réglerla llulelledes mineur3(C.I.J. Recueil 1958,
p. 62-66),etc.). En d'auires termes,ilne suffitpas d'un conflitentre le droii
interne etEedroii international comme,par exemple,dans l'affaire relative
h Certainis ntkrkls aiie'lt.nrPId~Huute-Silk.sipo1onui.wou l'affaire du
VapeurWimbledon, mais d'une affaire dans laque1Ieces deux droits sont
en coordination et dépendentl'un de l'autre.
In concreto, la Yougoslavie afirme que M. A. IzetbegoviC n'a pas pu
donner l'autorisation d'introduire une instance devant la Cour en la pré-

sente affaireparce que :

J.D~igard,Herogn~Iiand the UniteriNurions,1987,p. 79.693 APPI,ICATION OF GENOCIDE CONVENTION (DISS. OP. KRECA}

(i) the issueof such authorization wüs not within the scope of the com-
petence of the President of the Presidency of Bosnia and Herze-
govina, and
(ii) at the relevant point in time, Mr. IzetbegoviC was nol, according 10
the Constitution of Bosnia and Herzegovina, the Prcsident of the
Presidency.

Ttis indisputüble that both claims are based primarily on the internal
law of Bosnia and Herzegovina so that diagnosing solutions established
by the constitutional law of Bosnia and Herzegovina with respect to both
questions is essential, albeit in different ways, for the application of

the relevani norms of international law. This is indirectly recognized by
Bosnia and Herzegovina itself in its request to the Court to:

"take cognizance of the following facts which establish lhat Presi-

dent lzetbegovit wus duly cdppointed Pre.~identof the Presidency of
Bosnia and Herzegovina and thai he exercised his funcrions in
occordulanc e iilthe relevanreonsfiiutional pro ce dure.^"^^.

ln the point under (i) the relevant general legal principle as expressed in
Article 46 of theConvention on the Law of Treaties (1969)seeksto strike
a relalive balance between intcrnatiorial and internal law in the form of a
modified internationalistic theory (Head of State Theory). The only way
for the Court to decide whether this general legal principle is applicable
in this specificaseis by entering into an examination of the internal 1aw
of Bosnia and Herzegovina with a view to establishing whether, when
Mr. IzetbegoviC granted the authorizütioti to institute proceedings before
the Court the internal law of Bosnia and Herzegovina was violated.

The point under (ii)also cannot be resolvedwithout an examination of
the intemal law of Bosnia and Herzegovina.
There is no denying, as isnoted by Bosnia and Herzegovina, that "[nlo
ruleof international law . . .requires the structure of a State to follow
anyparticular pü~tern"~. ltis alsu beyond dispute that international law,
being sovereign and independent of internal law, determines the:circle of
persons that represent the State in international affairs (this holds good
regardless of the fact that the circle of persons representing the State in
fora exterau is detemincd on the basis of virtually identical constitu-

tional regulations). However, sedes materiae the point under(il) raisedin
the second preliminary objection dues not question the right ofMr. Alva
fzetbegoviC, ns Head of State, and inconjormiiy with ialernuiionnlbuiv,
io Ssue un uuthorization,for the ilistituiion ofproceedipigs hefore the
Court but ruther questions whetherMr. Izetbegovik kvas,althe relevant
point in rime, i.e., ut thtirneof issuingofrheauthorization in queslion,

Statementofthe Governmcnt of the RepubofcRosniaand Herzegovina,p. 42.
ffCasc concerningthe WesternSaharaddvfsoryOpinioti,I C.J. Reports 1975,p. 43. i) iln'entrait pas dans les attributions du présidentde la présidencede
Bosnie-Herzégovinede donner une telle autorisation et, parce que,

ii};ifa date pertinente, M. Izetbegovikn'était pas,selon la Constitution

de Bosnie-Herzkgovine:présidentde la présidence.

Il est incontestable que ces deux arguments reposent principalement
sur ledroit interne de Bosnie-Herzégovinede telle manière que recher-

cher les réponses que Ie droit constitutionnel de Bosnie-Herzégovine
apporte à ces deux questions est essentiel,quoique de maniérediffkrenie,
pour I'applicaiiondcs normes periinentes du droit international. La Bos-
nie-HcrzSgovincelle-mCmclereconnaît indirectement lorsqu'elledemande
i la Cour de:

({prendreconnaissance des faits qui suivent, lesquelsétablissentque
le présidentTzetbegoviC a &ré rkguiikrernentnnrnmtprtsident de la
présidencede la République deBosnie-Herzégovineet qu'il ~xerçnil
sesJoncrionsconfirrnémenr uux procéduresconstiiutionaellesperri-
nentes» 65.

S'agissantdu point i), le principe généradle droit énonce à l'article46 de
la convention sur le droit des traités (1969) vise à réaliser unéquilibre
relaiif entre droit international et droit interne sous la forme d'une ihéo-
rie internationaliste modifiée(théoriedu chef de 1'Etat).La seule manière
pour la Cour de décidersi ceprincipe juridique généralest applicable en

l'espèceest d'examiner le droit interne de Bosnie-Herzigovine pour eta-
blir si, lorsque M. lzetbegovii. a accorde l'autorisation d'introduire une
instance devant la Cour, le droit interne de Bosnie-Herzégovine a été
violé.
Le point ii) ne peut non plus êtretranché sans un examen du droit
interne de la Bosnie-Herzégovine.
On ne peut nier, comme le riote la Bosiiie-Herzégovirie,qu'<c[a]ucune
règledu droit international ..n'exigeque la structure d'un Etat ait une

forme particuliére~66.Il est égalementincontestable que le droit inter-
national, étant souverain et indépendant du droit interne, déterminele
cercle des personnes quireprésentent 1'Etatdans les relations internatio-
nales (cela vaut mkmc si le cerclc des personnes reprkseniani I'Etat in
<fbroexterno est deteminé sur la base de dispositions constitutionnelles
praiiquernent identiques). Toutefois, sedes maleriue, l'argument ii) for-
mulédans la deuxième exceptionpréliminaire ne contesle pas le droit de
M. AiijuIzetbegoviE, epi stqutilitde cchefd'Etur,el confr,rn7émen(tru droit
inrerntrrionalde dontier l'autorisation d'introduireune insrancedevant la

Cour, n7ui.vconteste que M. IzerhegoviCait PIP Ie cfiej.de['Etul à [adate
pertinenle,c'est-à-direau rnornenloù il a donnéIaraiorisationenquestion.

h5 ExposCdu Gouvcrncmentdc la Républiquede Bosnie-1-lerzkgoviiicp,. 42.
" Sol?arunccide//zui~icnnsulrari61 J Recueil1975, p43.~heHead of Stute. The only way to answer this question raised in the

second prelirninary objection is by examining the Internai, constitutional
law of Bosnia and Herzegovina. A contrurio, the relevant nom OF inter-
national law would be the one determining not only the pattern of the
structure of a State but also the rnodalities of the Constitution and the
duration of that structural paitern.
28. On the secondday of the hcaring regarding the first request for the

indicaiion of provisional meüsures, the Agent of Bosnia and Herzegovina
pointcd out inter alia that :

"Presiht IzethegoviE personally acçrediied . . . Ambnssador
Sacirbey, who appeared before you yesterday, and me as General
Agents with Extraordinary and Plenipotentiary Powersto the Court
on behalf of Bosnia and Her~egovina."~~

That the staternents of the then Agent of Bosnia and Herzegovina corre-
spond to the füctual situation is confirmed by the text of the act on the
appointmerit of

"H.E. Muhamed Sacirbey, OurArnbassador and Permanent Rep-
resentative 10 the United Nations, and Francis A. Boylc, Professor
of International Law at the University of Illinois College .. .to be
our General Agents with Extraordinary and Plenipotentiary Powers

to Instituie, conduci and defcndagainst any and al1legal proceed-
ings on our behülf before the International Court of Justice."

The text ofthis act was signed,as stated in the act, by "Alija IzetbegoviC,
President of the Republic of Bosnia and W~rzegovina".The title "Presi-
dent of the RepubIic of Bosnia and Herzegovina" indicates unequivocally
the personal nature of President Izetbegovii.'~accrediiation - particu-
larly so as, contrary to the practice of the Presidency of Bosnia and

Herzegovina, it is not stüted in the text that it is an act of the Presi-
dencyhH. The fact.ihat the act wüs written "on the officia1stationery of
the Presidency" cannot, in my opinion, be takenas proof that the act was
içsuedin the name of the Presidencyof Bosnia and Herzegovina. The use
of oficial stationery is only prima faciegrounds for the assumptian thüt
whüt is written on it is an act of the organ whose name appears in the

heading. The assumption is refutable as officia1stationery is only the
external sign of identification of its owner, incorporates the decision of

67CR93113,p 38 (ernphasrsadded)
68 E.irmplcnus~~the Decreeon thechangeofnameof theSocialistRepublicof Bosnia
and Herzegovina(Statement ofthe Governmentof the Republic OF Bosnia andHerzc-
govinaon PrelirninarObjections,Anncxcs,Vol IAnn 2.12) wds issuedby the "Presi-
dency ofthe Soc~alistRepublicof Bosniaand Herzegovina ata sessionheon April 8,
1992",and signedhy the "Preçidenofthe Presidcncyof SKB-H Alija Izeibegoi~iAn
identicalcxarnplcisthe Decisionon the prmlamation of an iniminçnt threat of war
passed on the sameday, as welbasthe nther publisheactof thePresidencyof Bosnia
and Hemgovina APPLICATION DE CONVENTION GENOCIDE (OP. DISS. KRECA) 694

La seule manièrede répondre à la question soulevkedans la deuxikme
exception prkliminaire est d'examiner le droit internc constitutionnel de
Bosnie-Herzégovine. A contrario,la norme pertinente du droit interna-
tional serait celle déterminantnon seulement la structure d'un Etat mais
aussi lcs modalitésde la constitution et la duréede vie de cette structure.

28. Audeuxièmejour des audiencesconsacrkes à lapremi&redemande

en indication de mesures conservatoires, l'agentde Bosnie-Herzégovine a
notamment souligne ce qui suit:
r<Le pi*ési&ni Izetbegovii-a personnell~nzent uccrédiféM. Sacir-

bey, qui a comparu devant vous hier, et moi-mérneen tant qu'agents
extraordinaires et plénipotentiaires dea Bosnie-Herzégovineauprès
de la Cour.>>67

Que lesdéclarations de:celui qui étaitalors l'agentde la Bosnie-Herzégo-
vinecorrespondent aux faits est co~ifirrnpar le texte de l'actede nomina-
tion de

«SQIIExcellence Muhamed Sacirbey, notre ambassadeur et repré-
sentant permanent auprès de I'Organisalion des Nations Unies, et
Francis A. Boyle, professeur de droit international à l'Université
d'Illinois...comme agents génCrauxdotés de pouvoirs extraordi-
naireset plénipotentiairesafin qu'en notre nom ils introduisent une
instance etdefendent nos intérêts devant la Cour internationale de

Justice»
Le iextc de cet acte était signé,comme indiquédans l'acte, par {(Alija

IzetbegoviC,président dela Rkpublique de Bosnie-Herzégovine». Letitre
{(présidentdela République de Bosnie-Herzégovine)> indique sans équi-
voque le caractere personnel de l'accrédiiationdu présidentIzetbegovii:
- d'aulant plusque, contrairement A la pratique de la présidencede Bos-
nic-HcrzCgovinc, il n'estpas indiqué dans le textequ'il s'agid'un acte de
la présidenceh?Le fail que ce1acle ai1 &itrkdigé«sur le papier a en-tete
officicldc la présidence))ne saurait à mon avis prouver que l'acte a été

accompli au nom de la présidencede Bosnie-Herzégovine.L'utilisation
du papier a en-têteofficieln'est qu'une indicationprini-afaciequi permet
de supposer que ce qui est écritsur ce papier esi un actde l'organe dont
le nom figure dans l'en-tete. Cette supposition est réfutablecar le papier
A en-tkte officieln'est que le signed'identification extérieur del'auteur et

CR 93/13,p 38 (Icsitaliquessont de moi).
6sParexemplc,ledkcrctcurIcchangcmcntdu nomde laRépubliquesocialistedBos-
nic-HcrzCgovin(déclaratidu Gouverrjementdela République eBosnie-Herzkgovine
surles exceptions préliminaires,ans,ol 1,annexe2.1a)etéprispar((lprésidence
de la Républiquesocialistc dc Bosnic-Herzégolorsd'uneréunion tenuele 8 avril
1992ii,esignépar Ic «présidentdc la précidee la RépubliqusocialisteRosnie-
Hcrzégovinc,Alij:i lzetbegovii.>i.La décisionsur la procd'uneimenace immi-
nente de gucrreadoptk Ic mtmc jour, ainsi quetous les autres actes publila par
présidencde Bosnie-Hcrzégovincs,odcs cxcmplcsidentiques.695 APPLICATIONOF GENQCIDE CONVENTION (DISS. OP. KRECA)

the argan as well, and depends on whether in each concrete case the

forma1and material conditions for issuing the act writien on the official
stationery have been met. A conirario ii would be absurd to assumeihat
every text written on the official stationery of an orgün constitutes ipso
facto an act of that organ.
In çoncreto, the question may be posed whether the stationery on
which Mr. Izetbegovii.gave the authorization for instituting proceedings
before the Court is without any doubt the only officia1stationery of the

Presidency of the Republic of Bosnia and Herzegovina. The grounds for
raising this question are providedby the fact that the word "Presidcncy"
on the stationery heading is found underneath the name of the State -
"Republic of Bosnia and Herzegovina" - and above the word "Presi-
dent". The word "Presidency" can also be iaken lo indicate ihe head-
quarlers of the President, parti~ularly as Mr.Izetbegovic is described as
the "President of the Republic of Bosnia and Herzegovina". The name of

the collective Head ofState, according to the Constitution of Bosnia and
Herzegovina, is noi the "Presidency" but the "Presidency of the Republic
of Bosnia and Herzegovina" 6Y.
Of particular importance is the fact thüt incontravention of Article 10
of the Operating Procedure of the Presidency and its customary practice,
the letter signed by Mr. Alija Izetbegoviédoes not feature any stamp
(either the small or the large one) ofhe Presidency of Bosnia and Herze-

govina.
Theseseveral points provide convincing evidence that in this concrete
case we are dealing with a "personal accreditation" by Mr. Izetbegovii..
Was President Izetbegoviéauthorized on the basis of the interna1 law
of theAppliçanr to personally açcredit a "Celieral Agent withextraordi-
nary and plenipotentiary powers to the Court"?
29. The function of the "President of the Republic of Bosnia and
Herzegovina" isnot established by the Constitution of Bosnia and Herze-

govina. Chapter X of the Constitution speaks of the "Presidency of the
Rcpublic of Bosnia and Herzegovina" as the organ "representing the
Republic of Bosnia and Wer~egovina"~~ .he Presidency of the Rcpublir:
of Bosnia and Herzegovina is the colleciiveHead of Siaie "that operates
and decides collectivelyat meetings and bears colleciiveresponsibility for
itswork"".
The Presidency of theRepublic of Bosnia and Herzegovina taken as a

whole, as a collegium, is the organ of representation according to the
Constiiuiion. The President of the Presidencyas the primus interpares
does not exercise any independent political powers. The enaçtments
withinthc terrns of referenceof the Presidency of the Republic of Bosnia

6Thapter X of the ConstitutioOFBosniaand 1-Ierxgovina
7"Arlici219(1)of the Constitutionof Bosnia and Herzegovina.
" Articl3 or theRulesof Procedureofthe Presidencyof the Smiülist Republic of
Dosniaand HerzegovinaOJfiau!C;ure!rO/the SuciuliRepublicufBosntuundHcrze-
govirinNo. 36 (IQ90)sert en outre de support àla décisionde l'organe,et ellesera vérifiédeans
chaque cas concret selon que lesconditions formelleset matérielles régis-
sant l'adoption de l'acterédigksur le papieri en-têteont été satisfaites. Il
seraita contrurio absurde de supposer que tout texte écritsur le papier d

en-têteofficield'un organe constitue ip~ofacto un acte de cet organe.
In concreto, on peut se demander si le papier a en-têtesur lequel
M. IzetbegoviCa donnél'autorisation d'introduire une instancedevant la
Cour est sans aucun doute le seul papier à en-tbte officielde la prksidcnce
de la République de Bosnie-Herzégovine.Cette question est légitime
parce que le mot «présidence» figurant dans l'en-tétese trouve sous le
nom de 1'Eiat- «Républiquede Bosnie-Herzégovine> > et au-dessus

du mot <!présideniji.Le mot c<présidence» peut aussi etre pris dans le
sens de bureau du président,étant donnéen particulier que M. Izetbe-
govit est qualifiéde «président de la République de Bosnie-Herzégo-
vine)).Le nom de la direction collectivede 1'Etataux termes de la Cons-
titution de Bosnie-Herzégovine n'estpas «présidence>> mais «présidence
de la Rfpublique de Bosnie-Herzégovine » h9.

11est particulièrement important que, contrairement aux dispositions

de l'article 10 du règlement intérieur de la présidenceet A la pratique
habituelle de celle-ci, la lettre signéeparM. Alija lzetbegovic ne porte
aucun des sceaux (ni le petit ni le grand) de la présidencede Eosnie-
Herzée.dine.
Ces diffkrents points attestent de manièreconvaincante qu'en l'occur-
rence on a affaire a une (iaccréditation personnelle» de M. IzetbegoviC.
Le présidentIzetbegovii:était-ilautorisépar ledroit intcrne de la partic
demanderesse a accréditerun «agent extraordinaire et plénipotentiaire

auprès de la Cour»?
29. La fonction du «président de la Rkpublique de Bosnie-Herzigo-
vine» n'est pas établiepar la Constitution de Bosnie-Herzégovine. LE
chapitre X de la Constitution évoque la«pr&sidence de la Rkpubliquc de
Bosnie-Herzégovine»comme l'organe ((reprksentant la République de
Bosnie-Herzégovine » 7! Ld présidencede la République deBosnie-Her-
zigovine est la direction collective de l'Ela1«qui agit et décide collecti-
vement dans Iccadre de réunionsel est collectivementresponsable de ses
actc~»~'-

La présidencede la République deBosnie-Herzégovineprise collecti-
vement, en tant que collège,estaux termes de la Constitution l'organe de
représentation. Le prksident de la présidence,en tant que priaius infer
pcrres,n'exerceaucun pouvoir politique indépendant. Les actes relevant
des attributions de la présidencede la Republique de Bosnie-Herzégovine

69Chapitre X de la Cotistrtution de Bosnie-Herzégovine.
70Articl219.paragraphe1, delaConstitution dc Rosnie-Herrkgovine.
Article3 du règlementintérieurdc la présidence dela République~oçBos-stede
nie-Her~egovine,Jour~aolf$c(lla R$tlblfq~esorialis!e rlr trosnie-Hcrnog36,ne,
1990and Herzegovina(decrees,decisionsand conclusions aswellas regulations
with the effect of law in cases stipulaled by the Constitution) are adopted
by the Presidencyof the Republic of Bosniaand Herzegovinaas a wh~le~~,
The President of the Presidency, on behalf of the Presidcncy, repre-

sents the Presidency74Of particular interest among the f'unctitionof the
President of the Presidency listed in Article 22 of the Operating Pra-
cedure is the function to "sign acts passed by the Presidency".
Consequently, Mr. Izetbegovik,as the Presidenitof the Presidency, was
not authorized to "personally accredii[ed] . .. [a] General Agent with
Extraordinary and Plenipoientiüry Powers to the Court on behalf of
Bosnia and Herzegovinü".
30.Yvgoslavia claims in its previous objection that at the time at

which the authorization for instituting proceedings before the Court was
issued (20 March 19931,Mr. Tzetbegovii:"did not serve as Ihe President
of the Republic" and that the "authorization for Ihe initiation and con-
duct or proceedings was granted in violation of rules of interna1law of
fundamental significance" 74.
Bosnia and Herzegovina, on the olher hand, finds that

"on 20 March 1443,the time of filing OS Ihc present case in the Inter-
national Court of Justice, the President of tlie Presidency exercised
their functions Eawfully,in accordance with the relevant constitu-
tional provisions, including lhose relating to a state of war or emer-
gency.As President or the Presidency, President Izelbegovii:is legally

entitledto reprcsent the Republic of Bosnia and Herzegovina inter-
nationally in this rnatter.''75
The dispute is over the question whether Mr. IzetbegoviC could have

performed the functiori of President of the Presidcncy ex cons/irufiorlt.
after 20 December 1992. It is indisputable that Mr. A. lzetbegovii:
assumed the funciion of President of the Presidency of the Socialist
Republic of Bosnia and Herzcgovina in December 1990, in conformity
with the relevant constitu~ional provisions. The term of ofice was
extcnded by a year, also in conformity with Amendment LI (para. 4,
point 6) to the Constitution of the Socialist Republic of Bosnia and
Herzegovinü which stipulated :

"The President ofthe Presidencyis elccted by the Presidency from
arnong its members For a period of one year and he may be re-
elected for another, consecutive year on one occasion."

The Constitution therefore prohibited the exerciseof the function of the
President of the Presidency for more than two years or two consecutive

71Article 49 of the OperatingProcedure.
73Articlc 21 otheOperatingProcedure.
74PreliniinarObjections of Yugûsiavia141, para. A.2
75Statement of the Governmenof the KepublicofBosnia andHerzcgovina onPre
liminaryObjectionsp.47, para, 2.19.(décrets, décisionest conclusions ainsi que rkglementsayant force de loi
dans lescas prévuspar la Constitution) sont adoptés parla présidencedc
la République deBosnie-Herzégovinedans son ensembleT2.
Le présidentde la présidence,au nom de la présidence,représente cette
dernièreT3.D'un intérêp tarticulier parmi les fonctions du présidentde la
présidence énumérées a l'article 22 du réglementintériçur estla fonciion

consistant a «signer les actes adoptéspar Ia présidence».
En conséquence, M. IzetbegoviC,en tant que présidentde la prési-
dence, n'était pas auiorisé à {(accréditer personnellement ...un agent
extraordinaire et plénipotentiairede la Bosnie-Herzégovineaupris de la
Cour ».
JO. La Yougoslavie fait valoir dans sa précedenteexception prélirni-
naire qu'a l'époqueou l'autorisation d'introduire une instance devant la
Cour a été donnée(le 20 mars 1993), M. Izetbegovii:{(n'occupait pas les

fonctioiis de prksident de la République» et que <<l'autorisationd'intro-
duire et de conduire une instance a été accordée en violation d'une règlc
de droit interne d'importance fondamentale >>74.
La Bosnie-HcrzCgovine,d'autre part, estime que

«le 20 mars 1993,date h laquellela présente instancea été introduite
devant la Cour internationale de Justice, le présidentet la présidence
exerçaient légalementleurs fonctions, conformémentaux dispositions
pertinentesde la Constitution, y compris cellcs relatives rl'étatde
guerreou d'urgence.Ensa qualitédc presidcntde la présidence,lepré-
sidentIzetbegovic estlégalement habilité $ reprksenterinternationüle-
meni la Républiquede Bosnie-Herzégovine dans celte affaire»75

II y a désaccordsur le point de savoir si M. Izetbegovii:aurait pexer-
cer Icç fonctions de présidentde la presidence PX consdilurioneaprès le
20 décembre1492.11est indiscutable que M. A. Izetbegovii:assumait les

Fonctions de présidentde la présidencede 1ü République socialistede
Bosnie-I-lerzkgovineen décembre 1990, conformément aux dispositions
constitutionnelles applicables. Son mandat a kt6proroge d'un an, confor-
mément à l'amendement L1 (par. 4, point 6) de la Consiitution de la
Républiquesocialiste de Bosnie-HcrzCgovine,qui disposait :

({Le président dela presidence est élupar la prksidence parmi ses
membres pour une périodede un an et ilestrééligible une seulfeois
pour une annéesupplémentaire. )>

La Constitution interdisait donc à quiconque d'exercer les fonctions de
présidentde la présidencependant plus de deux ans ou pour plus de deux

72Ar~içle49 du réglemenitnti-ricur.
73Article21 du réglement interieur.
74ExceptionsprklirninaisclitYougoslavie, p. 141,par. A.2.
75Exposédu Gouvernement dcla Rép~ibliqdeBosnie-Herzégovinsurlesexceptions
préliminairep,. 47, par.2.19697 APPLICATIONOF GENOCIDECONVENTION (DISS. OP. KRE~A)

terms. This prohibition was absolute in the original text of the Conslitu-
tion ofthe SocialistRepublic of Bosnia and Herzegovina as,in respect to
the President of the Presidency, no exceptions werc envisagedeven in the
case of a "state of war or imminent threat of wür". That such an inter-
pretation is correct is corroborated by Article 358of the Constitution:

"In the event of a state of war or imminent threat of warthe mun-
date ofthe Mernbers qf the Presiden cfySR B-H siiullb~ cu~ztinued
untii suchtirne usaheconditionsforeleclion of tiie newMernbersof
the Presiclencyare mel." (Emphasis added.)

The prohibition was modified by Amendment LI (par. 4 (8)) to the Con-
stitution of the Socialist Republic of Bosnia and Herzegovina according
to which :
"In the evenl ofa state of wür or imminent threat of war, themari-
date of Members of the Presidency and the President shall be con-

tinued until such time as the conditions for election of new Members
of the Presidencyare met."7h
This amendmcnt extends rarione personae the range of the exception
established for members of the Presidency by Article 358of the Constitu-
tion of the Socialist Republic of Bosnia and I-Teszegovinato include the
President of the Presidency.The main elcmentsof the solutionscontained

in Amendment LI are:
(a) the continuation ofthe ierm of office is li~ikedto the eventuality of
a "slate of war or imminent threat of war";
(h) the prohibition of a third consec~itivemandate isnot abolished, but
the continuation of a mandate is envisagcd in the cited cases;

(c) the continuation of the mandate is Iimited by appropriate "çondi-
tions Eorthe election af new Members of the Prcsidency", not by the
termination of the "state of war or imminent threai of war".
Bosnia and Herzegovina nlso refers 10 Article 220 of the Consolidated
Constitution of the Republic of Bosnia and Herzcgovina adopted on
24 February 1993, which seads :

"In the event of war or a state of emergency, the mandate of the
Members of the Presidency and of the President shall be continued
untilsuch tirne as the conditions for new electionsfor the Presidency
are met."

In rny opinion, the consolidated text of the Constitution cannot, in this
particular case, be accepted as a relevant legal basis.
More particularly,aconsolidated text in Yugoslavconstitutional prac-
tice was a strictly legal-technicalprocedurc whereby the text of a noma-

76Ofjîci~IGriz~tte ofthSocialiHepvblicOJ Rusnirund Herzegovi~a, No. 13 of
21 April 1989,p338 AI'PLICATIONDE CONVENTIONGENOCIDE (OP. DISS. KRE~A) 697

mandats consécutifs.Cette interdiction ttait absolue dans le texte origi-
naire de la Constitution de la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégo-
vine car,en ce qui concerne le président dela présidence,aucune excep-
tion n'était envisagéemêmeen cas d'r<etat de guerre ou de menace
imminente de guerre». L'article 358de la Constitution confirme une telle
interprétation:

«En cas d'étatde guerre ou de menace imminente de guerre le
mandat des membres de la présidencede la Républiquesocialiste de
Bosnie-Herzégovineest prorogéjusqu'i ce yue lesconditions permet-
tant l'électionde nouveaux membres de la présidencesoient réunies.

Cette interdiction aétémodifiéeparl'amendement LI (par. 4, point 8)de
la Constitution de la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzkgovine,aux
termes duquel:
«En cas d'étatde guerre ou de menace imminente de guerre le

mandai des tnetnhres de luprésidence eldu présideni~onlprorogks
jusqu'à ceque les cogaditiunnéce~sairep sour I'klecfionde nouveaux
membres de ICpIrksidence .wirritréuniesfi 76
Cet amendement étendla portéerutionepersolauede l'exception etablie

au profit des membresde la présidencepar l'article358de la Constitution
de ln Républiquesocialistede Bosilie-Herzégovineau prksident de lapr&
sidence. LESprincipaux clémentsdes solutions consacries dans l'amende-
ment LI sont les suivants:
crj la prorogation du mandat est liée à l'éventualitéd'un «étatde guerre

ou d'une menace imminente de guerre»;
h) l'interdictiond'un troisièmemandat consécutif n'estpas abolie, mais la
prorogation d'un mandat en cours est envisagéedans lescas prévus;
c) la prorogation du mandat esl limitéepar les ((conditionspermettant
l'électionde nouveaux membresde la prksidence», non par la cessa-
tion de l'{<étate guerre ou [de la] menace imminente de guerre».

La Bosnie-Herzégovineinvoque aussi l'article 220 de la Constitution
consolidéede la Rtpublique de Bosnie-HerzEgovineadopte le 24 février
1993, qui est ainsi libellé:
«En cas de gucrre ou d'état d'urgence,le mandat des membres de

la présidenceet du présidentsont prorogésjusqu'à ce que-lescondi-
tions nécessairesà de nouvellesélections à la présidence soientreu-
nies.»
A mon avis, le texte consolidede la Constitution ne peut, en l'occurrence,

Etreaccepté comme rondement juridique pertinent.
Plus particulièrement, dans la pratique constitutionnelle yougoslave,
l'élaboraliond'un texle consolidéétaitune procedure de pure technique

Journalufjr, ie n Répirbliqeocinlisde Bosnre-Herzegoiiine,no13,21 avril
1989p. 338.tjve act, the Constitution or laws, was adjusted to its purpose and to

the requirements of practical implementation. It cxcluded even rninor
material-lepl changes in the text of the act and was for the most part
reduced to aprocedure of renurneraiion of segmentsof the normative act.
Hence, in Y ugoslav constitutional practice, the consolidated text of a
norniative act could not be rcferred to in forma1proceedings including
court proceedings.
In cornparison with the contents of Amendment LI, Article 220 of the
consolidated text of the Constitution of the Republic of Bosnia and
Herzegovina constitutes ü modification of the Constitution, The prolon-
gation of the terni of office of the Members and the President of the

Presidency in Amendment LT (para. 4 (8)) is linked to a case "of war or
imminent lhreat of war" whereas in Article 220 of the consolidated text
the basis for the prolongationis acase "of war or a state of emergency".
Hençe, it may be concluded thüt the form of consolidation of the text
actually conccüls a modification of the Constitution.
The Presidency of Bosnia and Herzegovina, as stated in the preamble
to the Constitution, adopted a decision to establish a consolidated text of
the Constitution of the Republic of Bosnia and Herzegovina, and was
not authorized by the Cons~itutionto effect any changes to the Constitu-
tion,lhis being wiihin the exclusivecompelence of the Assembly of Bos-
nia and Herzegovina ''.The Presidencyas wellas the Government of the

Republic, each of the Assembly Chambers and al least 30 Assembly
Dcpiities, appear as the only possible:proponenls of proposais to amend
the Çonstil~tion~~. Changes in the Constitution of the Republic of Bos-
nia and Herzegovina may only be made in the form of Consiitutional
Amendmcnts or Constit~itionalhws7?.
It fullows from the above that Article 220 of the Consolidated Consti-
tution ofthe Repuhlic of Bosnia and Herzegovina, in the section in which
the continuation of the term of officeof Members and the President of
the Presidency is linked also to a "state of emergençy", constitutes a
inodification of the Constitution of the Republic of Bosnia and Herze-
govina, and thütthe chiinge was eîfected, both formally and materially,

contra constifufiotiem.
31. Consequently, what rernains to be seen is whether, in thelight or
the provisions OFArticle 358of the Bosnia and Hersegovina Constitution
as ürnended by Amendment LI (4 @}), the esiablished conditions had
been met for the continuation of the mandate of the Presideni of the
Presidency of the Republic of Bosnia and Herzegovina after 20 Decem-
ber 1992,i.e., afler the expiry of his second consecutiveterm.
The relevant provision of Bosniaand Herzegovina'sConslitution stipu-
lated that the "mandate of the President shallbe continued" in the event

77Articlc 268(31,(4) of theConstitution
Article 268(OC the Coiistitution.
Articl268 (5of theConstitution. APPLICA.TIONDE CONVENTIONGENOCIDE (OP. DlSS. KRECA) 698

juridique permettani d'ajuster un texte normatif, la constitution ou une

loi, en fonction de son objectif et des impératifsde son application
concrète. Elle excluait toute inodification juridique mdme mineure du
texteet se réduisaitIc plus souvent Bune renumerotation de ses diverses
composantes. Ainsi, dans la pratique constitutionnelle yougoslave, le
texte consolidéd'un acte normatif ne pouvait être invoqué dans le cadre
d'une procédureofficielle,notamment une procédure judiciaire.
Comparé a l'amendement LI, l'article 220 du texte consolidé de la
Constitution de la République deBosnie-Herzégovineapporte une modi-
ficationà la Constitution. La prorogation du mandat des membres et du
president de la présidenceest liéepar l'amendementLI (par. 4, point 8)à
121{(guerreou une menace iinminente de guerre» alors qu'à l'article 220
du texie consolidk, le motif de la prorogation est la ((guerre ou l'état

d'urgence >iOn peut donc conclure que la consolidation du texte dissi-
mule en faitune modificalion de la Constitution.

La présidencedc Bosnie-Herzégovine,comme indiquédans le pream-
bule de la Constitution,a adoptéune décisionaux fins d'établirun texte
consolidéde la Constitution de la République deBosnie-Herzégovine et
elle n't~aitpas autoriséepar la Constitution h apporter une modification
à cette dernière,l'Assembléede Bosnie-Herzégovineétantexclusivement
compétentepour ce faire7'. La présidence ainsique le gouvernement de
la République, chacunedes chambres de l'Assembléeet au moins trente
membres de I'Assemblkesemblent êtreseuls habilites à proposer des
amendements à la Constit~iion'~. Les modificatioi~sde la Constitution
dc la Republiquc de Bosnie-Herzégovinedoivent prendre la forme d'amen-

dements ou dc lois constitutionnelle^^^.
II découlede cequi précèdcque l'articlc220 de la Constitution coilso-
lidie de la République deBosnie-Herzégovine,en ce qu'il lie la proroga-
tion du mandai des membres et du prisident de la présidence iun ((état
d'urgence)) également, cotistitue unemodificalion de laConstitution de
la République deBosnic-Herzégovine, etcette modification a Etéeffec-
tuée,du point de vue tant de la forme que du fond, contra consrirurio-
nem.
31. En conséquence, ilrestei déterminersi, eu égardaux dispositions
de l'articlc 358de la Constitution de la Bosnie-Herzégovinetelle que
modifiéepar l'amendement L1(par. 4, point X), les conditions prescriies
pour la prorogation du mandat du présidentde la présidencede la Rtpu-
blique de Bosnie-Herzégovineaprès le 20 décembre 1992, c'est-&-dire

aprésl'expiration de son second mandat consécutif,etaient réunies.
La disposiiion pertinente de la Constitutiode la Bosnie-Herzégovine
disposait que le {(mandat du président seraprorogé» en cas dc ({guerre699 APPLICATIONOF GENOClDE CONVENTION(DISS. OP.KRE~)

of "war or imminent threat of war". In other words, "war or imminent
threat of war" constituted the material, constitutional basis for the auco-
matic continuation of the mandate of the President of the Presidency.

The fulfilment of this requirement ex constitutione implies that the
decision on the existenceof "war or imminent threat of war" MIUStaken
by the competent organ in line with established constitutional procdure.

32. The Presidency of the Socialist RepubIic of Bosnia and Herze-
govina, al its session of 8 April 1992,passed a "Decision on the procla-
mation of an imminent threat of war" in the territory of Bosnia and
Herzegovina. The decision was taken, as stated in the prearnble

"in conformity with the provisions of Amcndments LI and LXXII
to the Constitution of the Soçialist Republic of Bosnia and Herze-
govina and upon the proposal of the Assembly of ihe Socialist
Republic of Bosnin and Herzegovina".

It follows from this statement:

(a) that the "Decision" was takcn upon the proposa[ of the Asscrnblyof
the Soçialist Republic of Bosnia and Herzegovina, and,
('6) tha2 the Presidency look the "Decision" on the basis of Amend-
rnents LI and Lm11 io theConstitution of the SocialistRepublic of

Bosnia and Herzegovina.
33. The campetences of the Assembly of the SocialistRepublic of Bos-

nia and Herzegovina were established by Article 314 ofthe Constitution
of the Socialist Republic of Bosnia and Herzegovina (seepara. JG below).
The unequivocal conclusion to be drawn frrointhe text of that Article is
that the submission of the proposa1on the proclamation of the imminent
threat of war was not wiihin the ternis of referenceof the Assemblyof the
Socialist Republic of Bosnia and Herzegovina. Article 314 was rnodified
by Amendmeni LXXl adopted on 31 July 1990. ln the part relating to
the cornpetences of the Assembly adopted at a joint session of al1 the
AssemblyChambers, the Amendment stipulated :

"5. The Chambers of the Assembly af SR B-H at their joint ses-
sion may:

- decide on changes to the Constitution of the Socialist Republic
ofBosnia and Herzegovina;
- proclaim the Constitution of the Socialist Republic of Bosnia
and Herzegovina and any changes thereto;
- make proposais, express opinions and approve any changes to

the Constitution of the SocialistFedcral Republic of Yugoslavia;

- approve changes to the borders of the Socialist Federal Republic
of Yugoslavia;ou menace imminente de guerre». En d'autres termes, la survenance
d'une «guerre ou menace imminente de guerre» constituait le fondement
constitutionnel de la prorogation automatique du mandat du président
de la présidence.
La satisfaction de cette condition EX con.~~iluiioneimpliquait que la
décision relativeà l'existence d'une «guerre ou menace imminente de
guerre), soit prise par l'orgaiie compéientconformément la procédure
constitutionnelle élablie.
32, La présidencede la Rtpublique socialiste dc Bosnie-Herzégovine,
lors desa réunion du 8 avril 1992,a adoptéune «décisionsur la proclama-
tion d'une menace imminentedc guerre)) dans le territoire dla Bosnie-
Hcrzegovine.Cette décisiona été prisec ,ommeindiquédans le prkambule,

({conformémentaux dispositionsdes amendements LI et LXXIT ila
Constitution de la Rtpubliquc socialiste de Bosnie-Herzégovineet
surla proposition de l'Assembléede la Républiquesocialiste de Bos-

nie-Herzégovine».
Il ressort de cette indication:

a) que la «décision»a été prise sur la proposition de l'Assembléede la
Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovine;et
6) que la présidencea pris cette «décision)>sur la base des amendements
LI cl LXXII ri la Constitution de la Républiquesocialiste de Bosnie-

Herzégovine.
33. Les compétences de l'Assembléede la République socialiste de
Bosnie-Herzkgovineont été dtfinies par l'article314de la Constitution de

la Républiquesocialistede Bosnie-Herzégovine(voir ci-aprèspar.36). La
conclusion sans équivoquequi découledu texte de cet article est qu'il
n'entrait pasdans lesattributions de l'Assemblée de la République socia-
listede Bosnie-Herzégovine de présenter une proposition sur laprocla-
mation d'une menace irrirninentede guerre. L'article314aétémodifiépar
l'amendement LXXI adopté le 31 juillet 1990. Les dispositions de cet
amendement relatives aux compétencesde !'Assembléesiégea nten ses-
sion plénière,toutes chambres réunies,etaieni ainsi libellées:

((5. Les chambres de I'Assemblkede la Rép~ibliquesocialiste de
Bosnie-Herzégovine rCuniesen sçssion plénièrepeuvent:
- déciderde modifier la Constitution de la Républiquesocialistede

Bosnie-Herzégovine ;
- proclamcr la Constitution de laRépubliquesocialislede Bosnie-
Herzégovineet toute modification apportée icelle-ci;
- faire des proposiiions, exprimer des avis et approuver des modi-
fications la Constitution de la Républiquefkdérativesocialiste
de Yougoslavie;
- approuver des modifications des frontières de la Rtpublique
fédkrativesocialiste de Yougoslavie ; - decide on modificaiions of the borders of the Socialist Republic
of Bosnia and Herzegovina;
- review foreign policy issues;
- decide on the prolongation of the mandates of deputies to the
Assembly of SR B-H and those of aldermen scrving in the
assemblies of the communes and assembliesof municipaliiies ;
- pass the socialplan of Bosnia and Herzegovina, thebudget and
finalaccourits of the budget of SR B-H ;

- cal1a Republic-wide referendum;
- decide on the ffoating of Republic-wide public lons;

- decide on debts or other obligations of the Republic;
- decide on whether to entrust affairs wi~hinthe competence of the
Republic to a municipal comrnunity as a separate socio-political
community;
- elect and relieveof offic:the President and Vice-Presidentof the
Assembly of SR £3-H;the member of the Presidency of SFRY
frorn SR B-H; the President, Vice-Presidentand members of the
Governrnent of SR B-H; the Presideni and Judges of the Con-
stitutional Court of Basnia and Herzegovina; the Presideni .and
Judges of the Supaenie Court of Bosnia and Herzegovina; the
Presideni and members of the working bodies of ihe Assemblyof
SR B-H;

- ePectand relieve of office members of the Delegation of the
Assemhlyof SR B-H in the Chamber of Rçpublics and Provinces
of ihe Assemblyof SFRY;

- appoint and relieve of office: ministers; the Governor of the
National Bank of Sosnia and Herzegovina ;the Public Prosecu-
tor of ihe Republic, the Public Attorney of the Republic and the
Secretary General OF the Assembly of SR B-H;
- adopt the Rules of Procedure of the Assembly of SR B-II;

The Chambers of the Assembly of SR B-H may decide to review
at a joint session other matters wilhin the comrnon lerms of refer-
ence of the Asçembiyof SR B-H."aO

Consequenlly, the submission of the proposa1to proclaim an "imminent
threat of war" was nat within the competence of the AssernbIy of the

fiOficia Glarerr~ othr Suciiilist Repuhlic ofBosrrilJierzegoviria, N21 of
31 July1990 - se prononcer sur des modifications des frontières dc la Répu-
blique socialistede Bosnie-Herzégovine;
- examiner des questions de politique étrangère;

- se prononcersur la prorogation du mandat desdéputés a I'Assem-
bléede la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovineet des
édiles siégean atux assemblées descommuneset des municipalités;
- adopter le plan social de la Bosnie-Herzégovine,le budget et les
comptes définitifsdu budget de la Républiquesocialiste de Bos-
nie-Herzégovine ;
- organiser un référendum à l'kchelonde fa République;
- seprononwr sur l'émissiond'emprunts publics à l'échellede la
République ;
- seprononcer surles dettes ciautres obligations de la Républiquc;
- déciders'ilconvieilt de confier les affaires relevant de la compé-
tence de la Républiquei une communautémunicipale prise en

tant que communautésociopolitique distincte;
- élire etreleverde leursfonctions: leprésident etlevice-présidente
l'Assemblée de la Républiquesocialistede Bosnie-Herzégovinel;e
membre de la présidencede la Republique fédérativesocialisie
de Yougoslavie originaire de laRépubliquesocialiste de Bosnie-
Herzégovine; le président,le vice-présidentet les membres du
Gouvernementde la Républiquesocialistede Bosnie-Herzégovine;
le présidentet les juges de la Cour constitutionnelle de Bosnie-
Herzégovine;le prbident et les juges de la Cour suprêmede
Bosnie-Herzégovine;et le présidentet les membres des organes
de l'Assemblée de la Républiquesocialistede Bosnie-Herzigovine;
- élircet releverde leurs fonciions les membres de la délégation dc

l'Assembléede la Républiquesocialistedc Bosnie-Herzkgovine
la chambre des républiqueset des provinces de l'Assembléede la
Républiquefédérative socialistd ee Yougoslavie;
- nommer et releverde leursfonctions:lesministres,le gouverneur de
labanquenationalede Bosnie-Herzégovinlee,procureurde la Repu-
blique, l'avocat général dlaeRépublique etle secrétaire général de
I'hssernbli.de la Républiquesocialistede Bosnie-Herzégovine;
- adopter le reglement interieur de l'Assembléede la République
socialiste deBosnie-Herzégovine ;

Les chambres de l'Assembléede la Républiquesocialiste dc Bos-
nie-Herzégovinepeuvent décider d'examiner en session plénière
d'autres questions relevanl des attributions ordinaires de I'Assem-
blie de la Rkpubliyue socialiste de Bosnie-Herzégovine >)

Ainsi, la présentationd'une proposition tendant la proclamation d'une
{(menace de guerre imminente}) ne relevait pas de la compétence de

" Journalofi~relde In Képubiigiie.rocderBosnie-Hcrzigovbino21,du 31juillet
1990.Socialist Republic of Bosnia and Herzegovina exercisedat ajoint session
of al1the Assembly Chambers nor was it envisaged by the amended ver-
sion of Article 314 of the Applicant's Constitution. A fortior tie,same
conclusion applies to the cornpetences of the Assembly exercisedat ses-
sions of individuiilAssembly Chambers.
34. Ttis only the consolidated text of the Constitution of the Republic
of Bosnia and Herzegovina that contains a provision according to whiçh
the Assembly of the Republic of Bosnia and Herzegovina, inter alia,
"decides 011 war and pea~e"~'.This provision, however, çannot be con-
sidered as relevant inthis specific casefor two main reasons. Firstly, by
its nature itconstitutes a rcvisionof the Constitution carried out coconlw

consiitralionemin the Formof a consolidation of the text of the Constitu-
tion - hence, the arguments presented in reference to Article 220 of the
ConsoIidated Constitution applyper analogkrrn(seepara. 30abave). Sec-
ondly, the Consolidated Conslitution of the Republic of Bosnia and
Herzegovina was passed in February 1993,i.e., ülmost a year after the
adoption of the "Decision on the proclamation of imminent threat of
war", so that with respect ta this concrete case it is irrelévant.
35. The preümbie to the "Decision on the proclamation ofan immi-
nent threat of war" States, inrerdia, thai it was taken "in accordance
with the provisions ofAmendments LI and LXXII io the Constitution of
SR B-H". In the wording of this Decision, therefore, Amendments LI

and LXXTl appear as a concrete constitutional basis. The contents of
Amendment LXXTIcan hardly be linked to the "Decision on the proc-
lamation of imminent threat of war", as this Amendment actualIy übro-
gates Amendment XVITto the Constitution of the Socialist R~publicof
Bosnia and Herzegovina by stipulating that: "The provisions of Amend-
ment XVll to theConsiiiution of SR B-Hon the Council of the Republic
shall cease to be ali id."^^Prima Fdcie,there isa link between Amend-
ment LI and the "Decision on the proclamation of imminent threat of
war", since the subject of the Amcndment was the establishment of the
compctences of the Presidency of the SociaIist Republic tif Bosnia and
Herzegovina. Amendment LI stipulaied that:

" 1. The Presidency ofthe Socialist Republic of Bosnia and Herze-
govina:

(1) reprcsents the Socialist Republic of Bosnia and Herzcgovina ;
(2) reviews questions relating to the implementation of adopted
policiesin the areas of al1peopIes'defence, state securjty, social self-
protection and international co-operation and proposes to the
Assembly of SR Bosnia and Herzegovina the passageof appropriate

Article 206 (5}theconsolidatedtext.
" Ofjcia Füi~ftcof fhrSocialir~Republic uJBortiia und flrrrc'govina2l of
31 July 1990. APPI.ICATIONDE CONVENTION GÉNOCIDE (OP. nrss.KRE~) 701

l'Assembléede la Républiquesocialistedc Bosnie-Herzégovineen session
plénièreet n'&ait pas non plus envisagee dans la version modifiéede
l'article314de la Constitution de la Partie requérantç.A fortiori, elle ne
relevait pas non plus des compétences des chambres de l'Assemblée
siégeant individuellement.
34. Seul le texteconsolide de la Constitution de la Rkpublique de Bos-
nie-Herzégovinecontient une disposition selon laquelle l'Assembléede la
République deBosnie-Herzégovine,entre autres, <<déciddee la guerre et
dc la paix>>s1T.outefois, cette disposition ne peut êtreconsidéréecomme

periinente en I'espéce pour deux raisons principales. Premièrement,elle
constitue de par sa nature une revisionde la Constitution effectuéecontra
constitutionepnsous la formed'une consolidation du texte de la Constitu-
tion - donc, les arguments présenies ence qui concerne l'article 220 du
texte consolidéde la Constitution s'appliquent par analogie (voir ci-des-
sus par. 30).Deuxièmemerit,la Constitution consolidéede la République
de Bosnie-Herzégovine a étéadoptéeen fevrier 1993,c'est-A-direpresque
unan aprèsl'adoptionde la {(décision sur la proclamation d'unemenacede

guerre imminente», de telle sorte qu'en l'especeelle n'est pas pertinente.
35.Le prkambule de la «Décisionsur la proclamation d'une menace
imminente de guerre)}stipule, notamment, que la décisiona tté prise
<<conformkmcntaux dispositions des an~endernentsLI et LXXII de la
Constitution de la Républiquesocialistc de Bosnie-Herzkgovinen. Aux
termes de cette décision,donc, les amendements LI et LXXlI semblent
constituer un fondement constiiutionnel concret. Le contenu de l'amen-
dement LXXII ne peut guèreétrelie a la ({décisionsur la proclamation
d'une menace imminentede guerre», car cet amendement abroge en fait

l'amendement XVIl de la Constitution de la Republique socialiste de
Bosnie-Herzkgovineen cc qu'il stipule: «Les dispositions de l'arnende-
ment XVil de laConstitution de la République socialiste de Bosnie-
Herzégovinesur le Conseil de la Républiquesont caduques.»" Prima
fucie, il existe une relation entrl'amendement LI et la «Décisian sur la
proclamation d'une menace imminente de guerre)), puisque cet amen-
dement avait pour objet d'établirles compktencesde la présidencede la
Rkpublique socialiste de Bosnie-Herzégovine.L'amendement LI était
ainsi libellé:

«1. La présidencede la Rtpublique socialiste de Bosnie-Herzkgo-
vine :
1) représentela Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovine;
2) examine des questions relatives à la mise en Œuvre des poli-

tiques adaptéesen ce qui concerne la défensede tous les peuples, la
sûreti:de I'Etat, la protection socialeet la coopkration internationale
et elle propose à l'Assembléede la Républiquesocialiste de Bosnie-

Art~cle206, paragraphe5, tcxteconsolide.
82Journaloficiel de la RépublrocinlisdeBo.rnie-Heriigovinno21,du31~LIillet
1990.702 APPLICATION OF:GENOClDE CONVENTION (DISS. OP. KKECA)

measures to irnplement those policies and, in the evenl of an emer-
gency prcventing or seriously hamering the realization OFthe social
order as established by the Constitution, proposes tothe Assembly
of SR Bosnia and Herzegovina the adoption of nccessary masures
ta overcome Ihe intervening disturbances;

(3) establishes the dcfence plan of the Republic and provides
appropriate guide-linesin confor~nitywith the law;
(4) in accordance with the positions and proposais of the Assen>-
bly of SR Bosnia and Herzegovina reviews matters related to the

participationof the SocialistRepublic of Bosnia and Herzegovina in
the establishment and irnplernenlation of the foreign policy of the
Socialist Federal Republic of Yugoslavia, to co-operation between
the Republic and other Republjcs and Autonuinous Provinces in the
area of international CO-operatinn within the framework of Ihe
adopied foreign policy of SFRY and international Ireaties, and, on
the büsis of prior consultations within the Republirs,proposes can-
didates for appointment as heads ofdiplomatic missionsand informs
the Presidency of SFRY and the Assemblyof SR Bosnia and Herze-
govina of its proposals;

(5)establishes, on the basis of prios consultations within the
Republic, proposals for candidates for the appointment as President
and Judges ofthe Constitutional Court of Bosnia and 1-lerzegovina;
(6) establishes on Ihe basis of prior consulsslrionsiIheRepublic,
the proposa1 of candidates for appointment as members of the
Council of the Republic;
(7) establishes proposals for decorations conferred by the SFRY
Presidency and confers decorations and other marks of honour of
the Republic in conformity with the law;

(8) pardons offenders, in conformity with the law;

(9) adopts the Rules of Procedure of the Pre~idency."~~
In the light of the established competences of the Presidency of the
Socialist Republic of Bosnia and Herzegovina, prima facie, any accep-
Éanceof Amendrncnt L1as apossible constitutional basis Forpassing the

"Decision on the proclamation of imminent threat of war" is out of the
question. Arnendment L1givesno authorization whatsoever to the Prcsi-
dency to proclaim an imminent threat of war upon its awn initiative or
upon the proposal of any other organ. In ils paragraph 2, the said
Amendment cstablishes the competences of thePresidency "in the event
of extraordinary conditions preventing or seriously hampering the reali-

XWf$ciul Grizets~ ofrke Socrlrlirr Republic of Bosnin and HerzNo.vi21 of
31 July1980 .-

APPL~CATION nE CONVENTION GBNOCID (EP.DIS~. KRECA) 702

Herzégovine,pour adoption, les mesures voulues pour mettre en
Œuvre ces politiquescl, en cas d'urgence empêchantou entravant
sérieusementla réalisationde l'ordre social prévupar la Constitu-

tion, propose à l'Assembléede la Républiquesocialiste de Bosnie-
Herzégovine,pour adoption, les mesures nkccssairespour faire face
aux troubles qui se produisent;
3)élaborele plan de défensede la Républiqueet fournit lesdirec-
tives voulues enconformitéavec la loi;
4) conformément aux décisionset propositions de l'Assembléede
la République socialistc de Bosnie-Herzégovine,examine des ques-
tions relativeà la participation de la Républiquesocialiste de Bos-
nie-Herzégovinea l'élaborationet à la mise en muvrede la politique
étrangère dela République fédkrativesocialiste de Yougoslavieà la
coopération entre la Republiquc ei les autres républiqueset pro-

vinces autonomes dans le domaine de la coopération internationale
dans le cadre de la politique étrangère dela Républiquefédérative
socialiste de Yougoslavieet des traitésinternationauci,sur la base
de consuliations prealübies au sein de la République, propose des
candidats pour occuper des postes de chef de mission diplomatique
el notifie ses propositions a cet eàla présidencede la République
fedérativesocialiste dc Yougoslavie el à l'Assembléede la Répu-
blique socialistedeBosnie-Merzégovinc;
5) propose, après consultations préalables au sein de la Répu-
blique, des candidatsaux postes de présidentet de juge de la Cour

constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine;
6) propose, aprks consultations préalablesau sein de la Répu-
blique, des candidats aux postesde membre du conseil de la Répu-
blique;
7) faides propositions pour les décorationsconférées par la pré-
sidence de 1ü République fédérative socialistede Yougoslavie et
confëre des dkorations ei autres marques d'honneur de la Répu-
blique conformément Bla loi;
8) accorde des grâcesaux dclinquants, conformémenta la loi;
9) adopte le règlementinlérieur dela présidence.^'^

Compte tenu des cornpetencesqui sont cellesde la présidencede la Répu-
blique socialistedeBosnie-Hcrtkgovine,primo fucie 'amendement LI ne
saurait en aucune manièreconstituer un fondement constitutionnel pos-
sible pour l'adoptionde la {<décisionsur la proclamation d'une menace
de guerre imminente)). L'amendement LI n'autorise aucunement la pré- ~
sidence iproclamer une menacede guerre imminente de sa propre initia-
tive ou sur la proposition d'un autre organe. En sonparagraphe 2, ledit

amendement définitles cornpetences de la présidence«en cas de circons-
tances extraordinaires empéchanlou entravant sérieusementla réalisa-

s3Journa!oficiel de la Ripbsocinlis(le Bornre-H~rzégotiD21,du kjuillet
1990.

El1ration of the constitntionally established order", but those conditions
codd hardly include the proclamation or imminent threat of war. On the
one hand the term "extraordinary conditions" is far broader than the
term "imminent threat of war". In Yugoslav constitutional terininology,
the term "extraordinüry conditions" served ~odenote a srale of affairs

provoked by natural disasters (Article 364 of the Constitution of the
Sociülist Repuhlic of Bosnia and Herzegovina enunciates as "extraordi-
nary conditions" events like "natural disaster, epidemics"). Al1powers
linked to a stüte of war or imminent threat of war were entirely in the
hands of federal organs. On the other hand, even on the hypolhcsis that
the competences of rhePresidencyon the basis ofparagraph 2 of Amend-
ment LI inciuded the question of "imminent threat of war", the pro-
cedure by which the "Decision on ihc proclamation of imminent threat
of war" was passed could only be gualifiedas formally unconsritutional,
as the citedparagraph of Amendment L1stipulates the right of the Presi-
dency in the case of exiraordinary conditions "to propose to the Assem-
bly of SR B-H that ittake necessary measures to eliminate the existing
disturbances". Hence, the Presidency was notauthorized to "takkc neces-

sury measures luremove the e,~,i-isdgi.iturhances"(emphasis added) but
only to propose to the Assembly the taking of such measures. The pre-
requisites for such a procedure existed as, judging from the text of the
preamble of the "Decision", the Assernbly had convened when it made
the proposa1 for the proclamation of an imminent lhreat of war.

36. Consequently, bearing in mind that on the basis of Article 358 of
the Constitution of Bosnia and Herzegovjna as amended by Amendment
LI (4 (8)) "wür or imminent threat of war" was the constitutional con-
dition for the automatic continuation of the mandate of the President
of the Presidency and thai in the light of the relevant provisions of
Article314of the Constitution ofSR Bosniaand Herzegovina as amended

by Amendment LXXTand Amendment LI, the "Decision on the procla-
mation of imminent ihreat of war" was passed in contravention of the
Constitution by an unauthosized organ, the mandate of Mr. Alija Tzet-
begovikas President of the Presidencycould not have beenautomatically
continued after 20 December 1992.
37. The letter addressed by the Prime Ministerof Bosnia and Herze-
govina to the Secretdry-General of the United Nations on 1March 1993,
i.e., 20 days before Mr. Alija lzetbegovik issued the authorization for the
institution of proceedings before the Court, reads inderaliaa:

"1 also adviscd . . that the mandate of Mr. Alija Izetbegoviiias
President of the Presidcncy had expired. This is to dernonstrate the

immediüte needfor the international community to assistnot only in
protecting Bosnia and Herzegovina's sovereignty and territorial
integrity but also in assuring that the country is governed in accord-
ance with ita democratic and constitutional principles. I should be APPLICATIONDE CONVENTION GENOCIUE (OP. DISS. KRE~I) 703

tion de l'ordre social établipar la Constituti)),mais ces circonstances
ne sauraient inclure la proclamation d'une menace de guerre imminent.
D'unepari, l'expressionc<circonstancesextraordinaires)est beaucoup plus
largequel'expression«menacede guerre imminente ».Dans la terminologie
constitutioniaelleyougoslave, l'expression«circonstances extraordinaires))
dénote une situation provoquée parune catastrophe naturelle (l'arti364
de la Constitution dela Républiquesocialistede Bosnie-Herzkgovinecite,

parmi les «circonstances extraordinaires», des évknernentscomme «les
catastrophes naturelles, lesépidémie..»). Tous les pouvoirs relatifsun
étatde guerre ou A une menace deguerre imminente Ctaiententièrement
entre lesmains des organes fkdératix.D'autre part,mêmesi aux termes du
paragraphe 2 de ramendement LI la question d'une({menaceimminentede
guerre))relevait des compétencedse la présidence, procéduresuiviepour
adopter la «Décisionsur la proclamatiori d'une menace imminentede
guerre»ne peut êtreconsidérkeque comme inconstitutionnelledu point de
vue formel,car le paragraphe susviséde l'amendement LI donne rila pré-
sidence, en casde circonstances extraordinaires, le droit de ({proposeà
L'Assemblédee la Républiquesocialistede Bosnie-Herzégovine de prendre

lesmesures nécessairespour mettre finaux troubles>!.Ainsi, la présidence
n'étaitpas autoriséeà«prendrelesmesureznécessairespour meitre fin aux
rroubles~(lesitaliquessont de moi),mais seulementdeproposer ù I'Asserri-
blCeu'pprendre de trllcs mesures. Lesconditions préalablesune tell^pro-
cédureexistaient puisqu'ilressort du texte du préambulede la «dkcision)>
que l'Assemblée Stait en sessionlorsqu'ila étéproposéde proclamer une
menacede guerre imminente.
35. En conséquence,ttant donnéqu'aux termes de l'article358 de la
Constitution de Bosnie-Herzégovine tel que modifiépar I'ümendement LI
(par. 4, point 8)la prorogation automatique du mandat du président de la
présidenceétait constitutionnellement subordonnée à une «guerre ou
menace imminentede guerre» et qu'eu égard aux dispositions pertinentes
de l'article 314 de la Constitution de la Républiquesocialiste de Bosnie-

Herzégovinetel que modifiépar l'amendement LXXI et ]"amendementLI,
la ({Décision surla proclamation d'une menace imminente de guerre» a
étéadoptéeen violation de la Constitution par un organe non habilité A
l'adopter, le mandat de présidentde la présidencde M. Alija TzetbegoviC
n'a paspu ètreautomatiquement prorogéaprésle 20 décembre 1992.
37. La lettre adresséepar le premier ministre de Bosnie-Herzégovine
au Secrétaire général de l'organisation des Nations Unies le 1" mars
1993,c'est-à-dire vingt jours avantque M. Alija lzetbegovikn'ait donné
l'autorisa~iond'introduire une instance devant la Cour, est ainsi libellée:

«J'ai égalementfait savoirà la commission que fe mandat de prk-
sident de la présidencede M. Alija Izetbegovii:étaitvenu i expira-
tion. Cela montre bien qu'ilest nécessaireque la communautéinter-

nationale aide non seulementà protégerla souverainetéet l'intégrité
territorialee la Bosnie-Herzégovine, mais aussia veilleà ce que le
pays soit gouverne conformément à ses principes démocratiqueset grateful iyou would havethe text of the present letter and its annex
circulated as a document of the General Assembly, under agenda
item 143 and of the Security Co~ncil."~"

The Annex of this letier is "Letter dated 24 February 1993 frorn the
Prime Minister of Bosniüand Herzegovina to the Chairman of theEuro-
pean Affairs Subcommittee of the Senate Foreign Affairs Cornmittee of
the United States of Atnerica", and states inter aliu:

"Furthermore, pleasc be advised that the mandate of Mr. Alija
Izetbcgovikas President of the Prcsidency of Ihc Republic of Bosnia
and Herzegovina expiredl on 20 Decembcr 1992. He is presently
without constitutional authority to act in that capacity. The Presi-
dency, and not the President alone, is the representative body of the
Republic ofBosniaand Herzegovina. Only the Presidencycan invoke
constitutional emergençypowers, not thePresident üloiie.The Presi-

dent is merelyprimus interpares. Likc Mr. SiIajdziC.M, r. Izetbegovii:
does not speak for the Presidency as a whole with respectto the cur-
rent stage of the Vance/Owentalks,but only as one Muslin?member
of the Presidency."85
ln tliis conneclion, Mr. R. Zacklin, Director and Deputy to the Under-
Secretary-General in charge of the Office of Legal Affairs, in a letter

addressed to the Registrar of the International Court of Justice on
25 March 1943,stressed inier nliuthat:
"Mr. Izetbegovih participated in the generat debate of Ihe last
sessionof the General Assemblyas President of Bosnia-Merzegovina
and no communication has bcen made to the United Nations since
then advising us that he isno longer the President. In the United

Nations and in the International Conference on the former Yugo-
slavia, Mr. Izetbegovii: has becn regarded and continues to be
regarded as the President of Bosnia-Eler~egovina."~~
Can the fact that '931 -1e United Nations and in the Internarional
Conferenceon the former Yugoslavia, Mr. Izetbegovii.has been regarded
und continues to be regarded as the Pre.sir.idetf Bosnia-Herzegovinai"
change the legal order established by the Constitution of Bosnia and

Herzegovina?
The answer la this question can onlybe negative, as if this were not the
case,wewould find ourselvesin the absurd situation of attrlbuting to the
institution of recognition, which is in practice an eminently political act,
constitutional powers,the powerto change:theinterna1potitical structure
of a State. Another conclusion may be drawn however - that the inter-

84DOÇ. Ai471899-5125 5360a,ch1995.
" Ibid
8"etter düted25 March 1993 addressedio E. Valencia-Ospina,Registrar,Interna-
tional Court of JustiCromR. Zacklin, United Nations Director and Deputy to the
Under-Secretary-GeneraIlnchargeof tOfficof LegalAffairs. constitutionnels. Je vous serais reconnaissant de faire distribuer la
présenteet son annexe comme documcnt de l'Assemblée générale au
titre du point143de l'ordre du jour, et du Conscil de sécurité.

L'annexede cette lettre estune «Lettre datcc du 24 février1933,adressie
au prksidentde la sous-commissiondes affaireseuropéennesde la commis-
sion dcs affairesétrangèresdu SCnatdes Etats-Unis d'Amériquepar lepre-
mier ministrc de Bosnie-Herzégovine »et se lit en partie comme suit:

«Je vous prie de noter par ailleurs que le mandat de présidentde
laprésidencede la République deBosnie-Herzégovinede M. Alija
IzetbegoviEest venu a expiration le 20 décembre 1992. Il n'a pas
actuellement le pouvoir constitutionnel d'agir en cette qualité.Seule
la présidencepeut, en vertu de la Constitution, invoquer lespouvoirs
d'urgence, et non pas le président de son propre chef, qui n'est que

primus inter paires. De mêmeque M. Silajdzii., M. Izetbegovii. ne
parle pas pour l'ensemblede la présidence ence qui concerne l'étape
aciuelledes pourparlcrs de paix Vance/Owen,mais en tant que l'un
des membres musulmans de la présidence. »85

A cet égard, M. R. Zacklin, directeur et adjoint du Secrétairegénéral
adjoint chargé du bureau des affairesjuridiques, dans une lettre adressée
au Greffier de la Cour internationale de Justice le 25 mars 1993, souli-
gnait notamment ce qui suit:

«M. lzetbegovit a participe au dkbat gCnéralde la dernièresession
de l'Assemblée gknéraleen qualitéde présidentde la Bosnie-Herzégo-
vineet aucune communicationn'a éié adressée depuis lorsà I'Organi-
sation des Nations Unies indiquant qu'il n'était plus président .

l'Organisationdes Nations Unieset à la conférence internationale sur
l'ex-Yougoslavie,M. Izetbegovii: a été considérket continue d'etre
considéré commlee prisident de la Bosnie-Herzégovine ».R"
Le fait qu'«[à] l'organisation des Nations Unies et a la conference

internationale sur l'ex-Yougoslavic, M. Izetbegovik a éiécoasidkré et
contrnued'ktre considéré comme Ie pré;iin%nr de lu Bosnie-Herzigovinm
peut-il modifier l'ordre juridique établipar la Consiitution de Bosnie-
Herzégovine?
On ne peut répondre à cctte question que par la négativecar, défaut,
on se trouverait dans la situation absurde d'attribuer a l'institution de la
reconnaissance, qui ES~ en pratique un acte éminemment politique,des
effets constitutionnels, le pouvoir de modificr l'organisation politique

interne d'un Etat. Une autre conclusion peut néanmoinsèlretirée - à

84DOC At4111899-Sl25350mars 1995.
85Ibrd,
intcrnationalede Justice,M.r,R. Zacklin, directeradjoint duSecretairgknéwlour
adjoinchar& du burcazidesaffairesjurididcel'Organisatides NationsUnies.705 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (DISS. OP. KKE~A)

national community organized within the United Nations wüs in legal
error (errai.juris),judging from the meaning of the formulations used in
the aforementioned letter, with regard to the nature of the institution of

Head of State in the constitutional system of Bosnia and Herzegovina.

38. ln the light of the relevant provisions of Bosnia and Herzegovina's
interna1law, ii is evident that Mr. Alija Izetbegoviéwas without consti-
tutional authoz-ityto act in thecapacity of President of the Presidency of
Bosnia and Herzegovina as of 21 December 1991.The relevance of that
fact cannot be denied in the domain of international Iüw,as, in rny view,

we are faced with a general legal principle according to which:
"the act af an officialcannot juridically be set up as an act of State
unless it was within the sphere of compçtency of that official.Theact

of an incompetent officia1is not an act of the State."s7
34. This general principle is also expressed in Article 8 of the Conven-
iiori on the Law of Treaties (196g).

A measure taken by an officia1outside the sphere of cornpetence of
that officia1isby definition a non-existent measure, a measure limited lo
the factual sphere as itiç devoid of legaleffect.In that respect the quali-
fication contained in the commentary on Article 8 of the Converition on
the Law of Treaties is applicableper analogiam:

"wherea person lacking ünyauthonty ta represent the Skite in this
connection purported to express its consent tobe bound by a treaty,
the true lcgal position was that his act waç not attributable to the
Slate and that, in consequence, there was no question of any consent
having been expressed by it . . . theunauthorized act of the repre-

sentative is without legal effect"sR.

40. The sedesrnuteriae of the third prelirninaryobjeciion liesin the state-
meni that Bosniaand Herzegovina's proclamationof sovereigntyand inde-
pendencewaseffected in an illegalmanner in flagrantbreach ofthe principle
of equal rights and self-determinationof peoples; hence, no successionof

the Applicantto the Genocide Conventionof 1948could havebeenpossible.
The Court finds, quite simply, that
"Bosnia and Herzegovina became a Member of the United Nations
foIlowing the decisions adopted on 22 May 1992 by the Security

57Thc PresidxngCammissinner ofthe France-MexicanMixed Claims Commission
byInternarionulCoura und Tribunois1953,p.205.enerulPrincplesofLuw as dpplietf
RuDraft Articleon the Lawof Treatieswith commentariesadopted by the Iat its
EighteenthSession, UNCLT,Firstand Second Sessions,Vienna26Marçh-24May 1568
and 5 April-2May 1969,OflciuERecords, p.13,para 1.savoir que la communauté internationale organiséedans le cadre de
l'organisation des Nations Unies a commis une erreur de droit (error
juri.71,h en juger d'aprèsle libellé dc la Iettresusmentionnée,en ce qui
concerne la nature de l'institution de chef de 1'Etatdans le systèmecons-
titutionnel de la Bosnie-Herzégovine.

38. A la lumièredes dispositionspertinentes du droit interne de la Bos-
nie-Herzégovine,il est évidentque M. Alija Izetbegovic n'était pasau
21 décembre1991constitutionneliernent habilité à agir en qualitéde pre-
sident de la présidencede la Bosnie-Herzégovine. La pertinence de ce fait
au regard du droit international ne peut êtreniée,étantdonriéqu'à mon
avis nous sommesen présence#un principe générad l e droit selon lequel:

«l'acte d'un agent de 1'Eratne peut juridiquement êtreimputé à
I'Etat s'ilne relevait pas de la compétencede cetagent. L'acte d'un
agent de 1'Etatincompétentn'est pas un acte de 1'Eiat.~~~

39. Ce principe général esa tussi &non& à l'article 8 de la convention
sur le droit des traiteés de1969.
Une mesure prise par un agent de I'Etat en dehors de sa sphère decom-

pétence estpar definition non avenue, et elle est limitéeau domaine des
faits car elle est dénuéed'effet juridique. A cet égard,I'observaiion ci-
aprèsqui figuredans le commentaire de l'article8 de la convention sur le
droit des traités s'appliquepar analogie :

{{lorsqu'unepersonne dcpourvue de toute compétence pour repré-
senter l'Etat à cette fin prétendneanmoins exprimer son consente-
ment Aêtreliéepar le traité, ..[il faut conclure] en droit que l'acte
n'étaitpas imputable à 1'Etat et que celui-ci ne pouvait donc pas
avoir manifeste un consentement qvelconqu~ ...l'acte non autorisé
d'un tel représentantest sans effet

TKOISIÈM EE CEPTION PR~&LIMINAIRE

40. Lesedes materiae de la troisièmeexception prériminaireest l'argument
selonlequel la souverainetéet Pindépendance de la Bosnie-Herzégovino ent
été proclamées illégalemee nt violation flagraniedu principe de l'égalitde
droitsdespeuples etdeleurdroit à disposerd'eux-memes;decefait, la Partie

requérante n'apu succéderàla convention surle génocidede 1948.
La Cour constate, tout simplement, que:
«la Bosnie-Herzégovine estdevenue Membre de l'organisation des
Nations Unies a la suite des décisionsprises le 22 mai 1992par le

dam Li'affaiCuire.1929,citdans Bin Cheng,GrnerulPrincîpleofrLawaasApplred by,
Internutitinul Couand Tribunais, 195p. 202.
ss Projetd'articlessur le desitraité, vec commentaires,adoptépar la Commis-
siondu droit internalioaasadix-huitièmsessionDocumentsoflrie1.dela confërence
desNations Uniessur le drudest~aitépremiéreet deuxièmesessioVnienne, 26 mars-
24 mai 1968et9 avril-2mai1969, p.13,par. 1.706 APPLICATION OF GENOCII3E CONVENTION (DISS.OP. KRE~A)

Council and the General Assembly, bodies competent under thc
Charter",

and indicates that

"Article XI of the Genocide Convention opens it to 'any Member of
the United Nations'; from the time of its admission to the Organiza-
tion, Bosniaand Herzegovina could lhus becornea party tothe Con-
vention. Hence the circumstances of its accession to independence
are of little consequence," (Para. 19of theJudgrnent.}

In my opinion, the legality of Bosnia and Herzçgovina's birth is far
Irom being a fact in the lighof the relevant legalrules. It implicillyrelies
on the concept of the so-cülled "process of dissolution" of Yugoslavia,
claborated in the Opinions of the Arbitralion Commission of the Con-
ference on Yugoslavia, which is not a Iegalterm srrictosensu. This con-
cept isrnost aptly seen as a sort of metaphor where a State figures as a
kiild of vesse1from which its vital substance is trickling away and which,
through the will of an imaginary creator, is being transfo~med into the
tissueof a new State organisrn.

(This is eloquently shown by the position taken by the Arbitra-
tion Commission in relation to the date of succession of States in
ihe Yugoslav case. IR its Opinion No. 11, the Commission took
the vicw:

"That thedate upon which the States sternmingfrom the Socialist
Federal Republic of Yugoslavia succeeded the Socialist Federal
Republic of YugosIavia are:
- 8 Octoher 1991in the case of the Republic of Croatia and the
Republic of Slovenia,
- 17November 1991in the case of the former Yugoslav Republic
of Macedonia,
- 6 March 1992in the case of the:Republic of Bosnia and Herze-
govina" (International Conference on the Former Yugoslavia,

Arbitration Commission, Opinion No. 11, para. IO).
Thus theCommission claimsthat the successionhere occurred in the
relations between the SFRY as the predecessor-State and the newly-
independent republics as the successor-States. In other words, it did
not take place lrnofctu; vacher,what is known as successionis in fact a
set of successions whichoccurred one afier another between 8 Octnber
1991and 27 April 1992.The succession of Sloveniaand Croatia has
not destroyed the international legal personality of the SFRY as the

predecessor-State. A contrario, Macedonia could not exit €rom the
SFRY and sucçeedSFRY at the same time. The sme upplies ro Bos-
niaund Herzegovina, because this former federal unit, in the Commis-
sion's view, also succceded SFRY. Such an approach of thc Commis-
sioncould reasonably be explainedby "thecornplex inferacrionbetween Conseil de sécuritéet l'Assembléegénkrüle,organescompktents en
vertu de la Charte)),

et elle indiqueque:

«l'article XI de la convention sur le génocideouvre celle-cà «tout
Membre des Nations Unies »; dèsson admission au sein dt IyOrga-
nisation, la Bosnie-Herzégovinepouvaii donc devenir partie itla
convention. Peu importent alors lescirconstances dans lesquelleselle
a accéde à l'independancc.~ (Paragraphe 19 de I'arrètde la Cour.)

A mon avis, la légalité de la naissance de la Bosnie-Herzégovineest
loin d'étreétablieau regard des réglesjuridiques applicables. Elle repose
implicitement sur la notion du prétendu {(processusdedissolution» de la
Yougoslavie, élaboré par la commission d'arbitrage de la conrerence sur
l'ex-Yougoslaviedans ses avis, qui n'est pas un terme juridique .~lriclo
sensu. Cette notion doit êtreconsidkriiecomme une métaphore dans le
cadre de laquelle un Etat est représentécomme une sorte de récipient

duquel la substance vitale s'échappepeu a peu et qui, par lavolontéd'un
crtateur imaginaire, seraipar transsubstantiation trünsforméeen nouvel
organisme étatique.
(Ceci est attesté de manière éloquentpar la position adoptéepar la
commission d'arbitrage en ce qui concerne la date de la succession
dYEtatdans le cas de la Yougoslavie. Dans son avis no 11,la commis-

sion a déclare:
«que les dales auxquelles les Elais issus de I'ancienrieRépublique
fédkrativesocialiste de Yougoslavie ont succédk celle-ci sont les
suivantes:
*
- le X octobre 1991 pour la République deCroatie et la Répu-
blique de Slovénie,
- le 17novembre 199 1pour l'ex-République yougoslave de Ma&-
daine,
- le 6 mars 1992 pour la République de Bosnie-Herzégovine»
(conférence internationale sur l'ex-Yougoslavie, commission
d'arbitrage, avisno 11,par. 10).

Ainsi, la commission affirmeque la successionest intervenuedans les
relations entrela République fkdérativesocialistede Yougoslavieen qua-
litéd'Eiat predécesseuret lesrépubliquesnouvellemenitndependantesen
qualitéd'Etats successeurs.En d'autres termes,ellene s'estpas produite
uno iclu;en fait, ce qu'on appelle succession esten réaliune sériede
successionsqui se sont produites l'une après l'autre entre le 8 octobre
1991et le 27 avril 1942.La successionde la Slovénieet de laCroatie n'a
pas détruitla personnalitéjuridique internationade la Républiquefédé-
rativesocialistedeYougoslavieen tant qu2Etatprédécesseur A. cuntrurio,
la Macédoinene pouvait seséparerde la Rtpublique fédérative socialiste
de Yougoslavieet succéder à celle-cidans le même temps.II en esr de

même de la Bosnie-H~rzégovinep ,arccque cette ex-entité fédérald e,e rliedeliherations of the Arbitrarion Commissionaladrhepoliricol deci-
sion.of the EC institutionsundmember States [whichj is nutt~ivorihy"
(Conference on Yugoslav Arbitration Commission :Opinions on Ques-

tions Arising from the Dissolution of Yugoslavia, Tntroductory Note
by Maurizio Ragazzi, InrernationalLegul Muteriais, 1992,p. 1490).In
the light of the above, there exists a cIear connection between such
qualification and the content of Article 1 (a) OFtheDraft Convention
submitted by President of the Conference propusing that "[nlewrela-
tions between the Republics will be based on the following: (a) sov-
ereign and independent Republicswith an international personality for
those who wish it, etc.")

Of utmost importance is the fact that there existsa substantial connec-
tion, infact a causal connection,betweenthe legalityof the birth of a State
and the status of a successorState in legalterms (seeparas. 81-88below).

ln order to reach a conclusion as to whether Bosnia and Herzegovina
was established in the legal way, itis necessary toexamine baththe rele-
vant norrns of international law and the internal law of SFRY. The rele-
vance of the internal Iüwof SFRY to that effectderives from the specific
nature of the norm of equal rights and self-determination of peoples in
multi-ethnic States (seeparas. 44-46 above).

A. Relevunceof Inlrrautioaal Law

to the Birlh ofSrares
41. A reply in the matter of relevanceis often sought in the option Tor
one of the IWO mutually exclusivequaIifiçations: birahof States as questio

fc~ctior as questiojuris. Neilher of thesr qualifications, taken on ilsown
merits and individually, really corresponds to theactual state of affairs,
in view of their oversimplification and untenable. segregation. The first
suggesls that international law is indifferent to the issue of the birth of
States, thatthey are created in a legal vacuum, a sort of legal vacant
space, in a free interaction of power and opportunity elements. The
second, however, reduces the birth of States tu legalistic procedures, to
a matter of the mere will of an imaginary international legislator, rnateri-
alled in the fom of a State, independently of real social processes.In,the
final analysis, the first statement reduces international law relativto the
birth of States to an ex posl rationalization of actual developments and

thereby to itsown negation, whilethe second takes açompletely opposite
course, elevating international law to the level of a maker, a creator of
social phenomena. l'avisde la commission,a kgalementsuccidé6 la Républiquefédérative
socialiste de Yougoslavie. Cette approche de la commissionpourrait

s'expliquer raisonnablementpar cl'irtreracricomplexe enrre Ie.7clélihé-
rutionsde lucornmissiotadkrhitrugt.~t 1t.décisianspolrfiqireadesinstiru-
rionsh la Communauré europC.elanet de ses Elnts membre^. [inrerac-
rion] quie.~rt.murywable » (commissiond'arbiiragede la conférencesur
1Tex-Yougoslav ieavis sur desquestionsdécoulantde la dissolutionde la
Yougoslavie, note liminairede Maurizio Ragazzi, International Legul
Maîeri(~ls,1992,p. 1490).Compte tenu decequi précèdei,lexisteun lien
patent entre cette qualification etle contenu dearticle1a) du projet de
convention présenté par le prksidentde la conférence,aux termes duquel
({lesnouvelles relationsentre les ripubliques reposeront sur les élkments

suivants:a) statut de républiques souveraines et indépendantesdotées
d'une personnaliteinlernationalepour cellesqui le désirent,etc»)
Le fait qu'ilexiste un lien substantiet, de fait, causal entre la Iegalitt
de la naissanced'un Etat et le statut d'un Etat successeurdu point de vue
juridique estdc la plus haute importance (voir ci-aprèspar. 81-88}.

Pour parvenir ü uneconclusionsur le point de savoirsi la Bosnie-Nerzé-
govinea étécréée dans la légalitéi,l faut examiner tant les normes appli-
cablesdu droit international queledroit inlemede la Républiquefédérative
socialiste deYougoslavic.La pertinencedu droit interne de la République
fédérative socialistee Yougoslavie a cet égarddécourede la nature spéci-
fique, dans les Etats multiethniques,de la norme de l'égalitéde droits des
peuples et de:leur droitàdisposer d'eux-mêmes (vociir-aprespar. 44-46).

A. Periittence du droitinternufionalen ce qui concerne In naissance
de nouveauxErais
41. On cherche:souvent à répondre à cette question de la pertinencedu

droit international en choisissant entredeux qualifications qui s'excluent
rnutuellemcnt : lnaissance des Etats en tant quequestion de faitou en tant
que questionde droit. Aucune de ces qualifications,prises individuellement
et indépendamment de toute autre considération, ne correspond vraimen t
la réalité des chosecs,ar ellcsrelivent d'une simplificationabusiveet d'une
distinction insoutenable.La premièredonne penser que le droit interna-
tional est indifférent 1üquestion de la naissance des Etats, que ceux-ci
sont créés dans un videjuridique, une sorte de «terrain vague>> juridique,
par la libre interaction d'élémentsde puissanceet d'opportunité, Quant i
la seconde,elleréduitla naissance des Etats à des procédureslégalistes,i
la seule volontéd'un légisiateurinternational imaginaire, se matérialisani
sous la forme d'un Etat indépendammentdes processus sociauxexistant

dans la réalité. n dernièreanalyse, lapremikrequalificalionréduitle droit
international relatif la naissance desEtats à une rationalisationà pos-
teriori d'événemenq tsui sesont effectivementproduits etdonc à sa propre
négation, alorsque la seconde défend uneposition totalement opposée,
élevantle droit international au niveau d'un créateurde phénornknesso-
ciaux.708 APPLICATION OF CENOCIDECONVENTION (DISS. OP. KRECA)

The fundamental defect in the option for either of the two mulually
exclusiveexplanations isthe confusion of two dimensions involved in the
birth of States:the socio-poIitica1and the legal.As it is indisputable that

birth of States is a mrttterof realistic social processesfrom a socio-politi-
cal standpoint, so it is that the birth of States tükes place in the environ-
ment of the international comrnunity. Thus, international law cannot
abdicate from the segulation of such a crucial issueof international life.
Shaw is right in observing that:

"[tlhe relationship.. .between factual and legal criteria is a crucial
shifting one. Whether the birth ofa newstate is primarily a question
of factor law and how the interaction between the criteria of effec-
tiveness and other relevant legal principlcs may be reconciled are
questions of considerable complexily and significan~e."~~

42. Sinceits inception international law has never bcen or could have
been indifferentto the question of the birth of States. The substance and
nature of its rules have undergone modifications depending on the
achieved degree of advancement of international law. Grosso modo, the
rules of international law concerning the birth of States rnay be classified
into two groups:

- the first wouldcomprise therulesof international lawdefiningthe State
ab inlro,as a legalfact within the systemof international Iaw.In other
words, these rulesof international law definewliut ciStrrreis.The very
definitionis static and narrowed down to an enumerarion of the con-
stituentelementsofa State. On the whole,such a definitionof aSlate is
founded on the principleofeffectivenessand hythismeansinternational
law specifiesthe static, çategorial meaningof the conceptof a State.

- the second group would comprise the rules defininga Stateab exira,

from the point of view of other relevant rules of international law.
While definition abinfra startsfrom a Stateasan isolated,staticpheno-
rncnon, definition ah exira locates the State in the sysiem of interna-
tional law, linking its birth and funciioning in the international com-
munity to other legalrules.In expressingthedynamicsideof a concrete
issueconcerning acertain State,the notion of a State ah exrrcrinclrides,
in fact, pnnciples and noms fundamental to the birth of States.
Those principleshave accornpaniedpracticallythe wholeperiod ofexis-
tence of international Eaw.The birth of States, since the Westphalian
Peace Accordin 1648,has beenjustified by a principle-likebalance of
power, legitimacyand interpretation of the "Holy Alliance", the quasi-

legislativecompeteiices of super-powçrs, the principle of nationality,
and, during the twentieth century, the self-determination OFpcoples.

" M. N. Shaw, International La2nd ed., 1986,p 126. APPLICATIONDE CONVENTION G~NOCIDE (OP.DISS. KRE~A) 708

Le vice fondamental que comporte le chox de l'une ou l'autre de ces
deux explications s'excluant muiuellement tient à la confusion des deux
dimensions que coinporte la naissance desEtats: la dimension sociopoli-
tique et la diiriensionjuridique. Tout comme il est incontestable que la
naissance desEtats estd'unpoint de vuesociopolitiqiiela résultantede pro-
cessussociauxréels,ilest aussiincontestablequ'ellea lieudans I'environne-
mentde lacommunauté internationale.Ainsi,le droit international ne peut
s'abstenirde réglementerunequestionaussicrucialede la vieinternationale.
C'est à juste titre que Shaw a fait observer que:

«la relation...entre lescritères factuelsetjuridiques est une relation
évolutivecruciale. Les questions de savoir si la naissance d'unnou-
vel Etat est d'abord une question de fait ou de droit et comment
l'interaction entre lesritèresde l'effectivitket les autres principes
juridiques pertinents peutétrcaccommodéesont des questions d'une
complexitéet d'une importance considérüble.uBS

42. Depuis qu'il existe,le droit intcrnational n'a jamais été ou n'a
jamais pu êtreindifférent àla question de la naissancedes Eiats.La subs-
tance et la nature de ces règlesont subi des modifications en fonction de
sondéveloppement.Grossomodo, lesrègles du droit international concer-
nant la naissance des Etats peuvent êtreregroupées en deuxcaikgorieç:

- lapremièrecomprendrait les règlesdu droit international définissant
1'Etatab intra, en tant que fait juridique au sein du systèmejuridique
international. En dkutres termes, ces règlesdu droit international
définissentce qu'est un Etat. Cette définitionmeme est statique et se
réduit à l'énumérationdes élémentsconstitutifs de 1'Etat. Dans

l'ensemble, elle estfondéesur le principe de l'effectivité et par ce
inoyen le droit international définit sens statique et catégorielde la
notion dYF,tat;
- la secondecatégoriecomprendrait les règledéfinissant1'Etatub extru,
du point de vue des autres règlespertinentes du droit international. Si
la définitionab insraprend comme point de départ1'Etaten tant que
phénomèneisoléet statique, la difiniiion uh extra place 1'Etatdans le
systèmedu droit international, liant sa naissance et son fonctionne-
ment au sein de la communautéinternationale 1i d'autres règlesjuri-
diques. En exprimant l'aspect dynamique d'une question concrète
concernant un Etat donnk, la notion d'Etat ab extra comprend, en
fait, des normes et des principes fondamentaux concernant la nais-

sance des Etats. Ces principes existent pratiquement depuis que le
droit international existe.a naissance des Etats, depuis le traite de
Westphalie (1648)'a été justifiéepar divers principescomme I'équi-
libre des puissances, la légitimitéet l'interprétation dela «Sainte-
Alliance», les compétencesquasi législatives dessuperpuissances, le

M. N. Shaw,JnrevnurionLm;, 2' td.1986,p.126709 APPLICATION OF GENOCIDE CONVEN'I'ION(DISE. OP.KRECA)

11may be said that the aboveprinciples basicallyderive from the con-

cept of legalit.

43. Ttshould be kept in rnind, howcver, that the nature of Ihc legaliry

concept has been changing with the developrnent of international law.
That concept wasbased, for quite some lime, upon subjective, elimina-
tory criicria, which reçognized, in a comrnunity that toleraied un-
conlrolled resort to force and even to war, the property of a legislative
factor, rneaning legalityno more than in the formal sense of the word.
Beterrnined ndcumin, on the basis of the fulfilment of forma1and pro-
cedural requircmenrs, that legality was not stricto sensu legality, as
measured by the norms of a more developed interna1 law, but ralher a
polilical decision in a more acceptable guise.
A basis for a radical change of attitude to the question of legality is

provided by the hierarchical division of international law according lo
the criierion of the legalmerit of ils norrns. The division of international
law into "lower" and "higher" law opened the way towards the concep-
tualization ofperemptory norms ofgeneral international law (jus cogens) ,
effected by Articles 53 and 64 of the Convention on the Law of Treaties
of 1969.As Judge Ammoun put it in his separate opinion in the Barce-
lona Tractio case (Second Phase, 1970):

"through an already lengthy practice of the 'UnitedNations, thecon-
cept ofjus cogcnsobtained a greater degree of effectiveness,by rati-
fying, as an imperative nom of international law, the principles
appearing in the preamble to the Charter7'*'.

Jus cogens creates groundsfor a global change in relations of State
sovereignty to the legalorder in the international community and for the
establishment of conditions in which the rule of law can prevail over the
free willof States.As an objective, non-eliminatory norm, it conslitutes a
materia1basis, a criterion for challengingthe legalityof individual acts in
the international comrnunity. Therefore, it essentiallylimits the impact of
effectivenessin interna~ionallaw. Effectivenessin a systemwiih a defined

concept of legality may be legallyacceptcd only in cases in which it does
not confliçt with the norms that serve as criteria of legality. Within the
co-ordinales of the dejure order effectivenve ersuslegality is an incor-
rect approach. because to accept effectivenessas a rule

"would indeed be to apply a halchet to the very rootç of the law of
nations and tocover wilh its spurious authonty an infinitiveseriesof
international wrongs and disregard for international ~bligations"~'.

IC.J. Reporrs 1970,p304.
J.H. W. VerujlInternrrfiunulLuw in Historical Perspec1968,p. 293. principe de la nationalite, et, au XXr siècle,le droit des peupleà dis-
poser d'eux-memes.On peut dire que ces principes découlent quant
au fond de la notion de légalité.

43. Il nefaut toutefois pas oublier quela nature de la notion de légalité
s'est modifiéeau fur et à mesure quele droit international s'estdéveloppé.
Cette notion était fondée, pendantune assezlongue période,sur descritires
subjectifs et rkducteurs, qui reconnaissaient, dans une communautéqui

toléraitle recours incontrôlé à la force et mêmea la guerre, la possession
d'un facteur législatif, n'entendanlta légalitéu'au sens formel du terme.
Déterminé au cas par cas, en fonctiondu respectde prescriptions formelles
et proctdurales, cette Iéigalie'étaitpas une légalitésrrrcrosensu, mesurée
au regard des normes d'un droit interne plus développém , ais plutôt une
décisionpolitique présentée souu sne forme plus acceptable.
La division hikrarchique du droit international en fonction de la valeur
juridique de ses normes est a la base d'un changement radical d'attitude
en ce qui concerne la question de la légalitéL . a division du droit inter-

national en droit «supérieur)>et <<inTkrieur » ouvcrt la voieà la concep-
tualisütion des normes impérativesdu droit international général(jus
cogens) aiix articles 53 et 64 de la convention de 1969sur le droit des
Iraites. Comme le déclareM. Ammoun dans son opinion individuelle
dans l'affairede la BarcelonaTracrion(deuxièmephase, 1970):

rrpar une pratique déji longue des Nations Unies, le concept dejus
cogens acquiert une plusgrande effectivité,sanctionnant, en tant que
norme impérativedu droit des gens, les principes figurant au fron-
tispice de la charte^^^.

Le jus cogens ouvre la voie ii une modification globale des relations
entre la souverainetédes Etats et l'ordre juridique international et a la
création de conditionspermettant à la réglede droit de prévaloirsur la
libre volontédes Etats.En tant que nome objective non réductrice,il
constitue une base pertinente, un critkre permettant de contester la léga-
lité d'actes individuclç au sein de la communauté internationale. En

conskquence, illimite fondamentalement l'impact de I'effectivitéen droit
international. Dans un systèmedans lequel la notion de légalité est défi-
nie, I'effectiviténe peutêtrejuridiquement acceptéeque dans les cas oh
elle n'estpas en conflit avec les normes qui servent de critèresde légalité.
Dans leslimitesde I'ordrede jure, opposer I'effectivitcila légalité est une
démarche incorrçctc, parce que acccpter I'effectivitf.en tant que règle

crreviendrüiten faitA saper les fondementsmgmesdu droit des gens
età couvrir de son autoritédouteuse une gamme infiniede faits illi-
cites internationaux et de méconnaissances d'obligationsinternatio-
nales>) 91

90C.1J. Recueil1970, p. 394
Y'J. H.W. Verzjil,Inîernuirunai inwHrs!orrculP~rsperlrvol.1, 1968,p.293. 44. The concept of a material, homogeneous legality is unavoidably
reiiecledin the matter of the birth of States. This is suggestedby anas yet
insufficientlyadvanced and stslbilizedinternational practice. Let us take
the case of Southern Rhodesia. In that case, the criterion of cffectiveness

was fully met, as the white, minority government, exercised effectiverule
over the territory. But, in spite of that, United Nations Security Council
resolution 217 of 20 November 1965 established that the declaration of
independence had "no legal validity" and national governmcnt had been
proclaimed by "illegal authorities". Such an attitude towards Southern
Rhodesia, which on the basis of the ab infra criterion, was a State beyond
any doubt, was governed by the:intention "to allow the people of Sauth-
ern Rhodesia to determine their own future consistent with the objectives
of GenerskSAssembly resolution 1514 (XV)" [1950jY U2nited Nations

Genei-alAssembly resolution 1514of 14 Decernber 1960,eniitled "Dec-
laration on the Granting of Independence to Colonial Countries and
Peoples" established, interuliu,that

"AI1 peoples have the right to self-determination. By virlue of

that right they freely determine thcir political status and freely
pursue their economic, social and cultural development." (Para. 2.) ,
In that way the practice of States confirmed that :

"in the case of an entity seeking to become ü state and accepted by
the international community as being entitled to exercisethe right of
self-detemination, it may wellbe necessaryro demonstrate that the
interna1 r~quirsmcnts of the principle have not been offended. One
cannot definç this condition too rigorously inview of state practice
to date, but it would appear lo be a sound proposition that system-
atic and institutionalised discrimination might invalidate a daim to
~tatehood."~~

However, it would be an overstatement to assert that the introduction OF
the concept of material lcgality created a harmonious unity between the
nb intru and ah extra definitions of a State. This has not been achieved
due to the chronic institutional insufficiency of the international order
which, acting in the environment of a primarily political comrnunity -
which is what the international comrnunity virtually is - often Icads to

Ihf:prevalericeof policy over law. Hence, the discrepancy between inter-
national law and international order, since norms have not always been
applied as they should have been in viewof their substance, but more or
Icss under the influence of non-legal, political views. Indisputably, the
achievement of the aforementioned harmony constitutes not only an aim
of but also a condition for the establishment of international order as a
de jure order in this particular context.

-
92 SeçurityCouncil resolution217(IY65), 24 Novemb1965,para.7.
93M N. Shaw,op cit,p. 132.

119 APPLICATION DE CONVENTIONG~NOCIDE (OP.DISS. KRECA) 710

44. La notion d'une légalité matérielleet homogène intervient inévita-
blement en ce qui concerne la naissance des Etats. C'est ce que donne h

penser une pratique internationale qui est encore insuffisamment déve-
loppéeet stabilisée.Prenons le cas de laRhodésiedu Sud. En I'occur-
rence, le criiérede I'effectivitbétaitpleinement satisfait, car le gouverne-
ment minoritaire blanc exerçait une autorité effective sur le territoire.
Mais, en dépit de cela, le Conseil de sécuritéde l'organisation des
Nations Unies a eslimk,dans sa résolution217du 20 novembre 1965,que
la déclaration d'indépendancne'avait({aucunevaliditélégale»et que l'indé-
pendance nationale avait étéproclaméepar des({autoritésillégales» C.ette
attitude eriversa Rhodésiedu Sud, qui,sur 1übasedu critèreab inrnrétait
sans aucun doute un Etai, était dictéepar l'intention {(depermettre au

peuplede Rhodésiedu Sud de déterminer sonpropre avenir conformément
aux objectifs de la résolution 1514 (XV) de l'Assembléegénérale))de
1960". La résolution1514du 14décembre1960de I'Assemblkegtnérale
des Nations Unies, intitulée ({Déclaration sur l'octro de l'indépendance
aux pays et aux peuplescoloniaux~> stipulait notamment que:

({Tous lespeuplesont ledroit de disposerd'eux-mEmes.En vertu de
cedroit, ils déterminent librement leurstatut politique et poursuivent
librement leur développement économiques ,ocialet culturel.(Par.2.)
Aussi, la pratique des Etats confirmait que

(<Dansle cas d'une entitéentendant devenir un Elat et acceptée
par la communauté internationale comme habilitée A exercer son
droitA I'autodk~esmination,ilpeut trksbienêtrenicessaire de démon-
trer que les prescriptions internes du principe n'ont pas été mécon-
nues.On ne pcut définir cettecondition trop rigoureusement compte
tenu de la pratique des Etats i ce jour, niais il semblerait que l'on
puisse affirmer qu'une discrimination systématiqueet institutionna-

liséepeut faire échecà une revendication de la qualitéd'Etat.~~~
Toutefois, on irait trop loin en affirmant que l'introduction de la notion
de légalitémattrielle a réalisé une unificatiharmonieuse des définitions
de I'Etal ab inlruet ab exfra. Cela n'a pas été possible en raison de la
carencc institutionnelle chronique de l'ordre international qui, s'exerçant

dans l'environnementd'une communautéau premier chef politique - ce
qu'est virtuellementla communautéinternationale -, amène souvent la
politique à prévaloirsur le droit. D'ou l'écartexistant entre droit inter-
national etordreintcrnütional, puisque les normes n'ont pas toujours été
appliquées commeelles auraient dû l'btre eu égard à leur contenu, mais
plus ou moins sous l'influenced'opinions politiques, non juridiques. Jest
indiscutable que la réalisation de l'harmonie susmentionnée constitue
non seulement un objectif maisaussi une condition de l'établissementde
l'ordre international en tant qu'ordre djure dans ce contexte particulier.

-
92Résolut~on217(1965)du Conscil dc sicuriti., 20 no1965.par.7
93M N. Shaw,op ci?,p.132.711 APPLICATIONOF GENOCIDE CONVENTION(DISS. OP. KRE~A)

B. TheLegalily of rlieProclamarionof BosniaundHecegovina S.
Independeni nerheLight offheInterilal Lutvof the Sociulist Federul
Republic of Yugosluvio

1. Rel~vranct. fthe internulluw of rlzcSociuli.~FederuR l~pzrbdicof
Yugosluvininthisparticul care

45. The original international legal norm of self-determination of
peoples isboth incompleteand imperfect, at least when itconcerns sub-
jecis entiiled ta self-deierminationin multi-eihniStates and iheir exer-
ciseof external self-detcrminationinfringingupon theterritorial integrity
of a State. Given itsincompleteness,the original normof self-deterrriina-
tion of peoplesis rendered inapplicablein its respectiveparts to certain
praçtical situations and constitutes a sort of decorative,empty normative
structure. lnterestedntitiesoften refer ta it, but it can function onFyout-
side the legal domain, as a convenient coverfor an eminently political
strategy, based on opportuneness and the balance of power.

This impliesa need io çeethe norm of the right to external self-deter-

mination in the States cornposedof more than one people as a complex
norm consisting of two parts: on the one hand, original international
legalnorms of the right of peopleIo exlernal self-determination,and, on
the other, relevantparts of theinternal laof the givenState.Tnthis con-
text, ihe originalinternational leganorm of the right of peoples has the
role ofa general,pennissiv~norin, which assumes anoperativecharacter,
the property of a norm whichrnay becomeeffectivein the eventthat the
internal law of a multi-ethnic.State has stipulated the right ta external
self-determination ifit defines the entitlement to itas wellas the pro-
cedure for iwexercisc.In othcr words, the relevant provisionsof internal
law are ad cu.suman integral part of the norm of the right of peoples io
extemal self-determination. Only in this way does the original interna-
tional legal norm of the right to extcrnal self-determination become
applicable at the levelof the fundamental prerniseof the rule of 3aw.
Thc necessiiyfor such a relationship between international and inter-
na1laws is rightfully suggestedby the following:

"If the rule of law is to be made effectivein warld affairs it must
cover a wide range of increasinglycomplex transactions which are
governedpartly by international and partly by municipal law . . It
is therefore important that international courts and tribunals should
be in a position, when adjudicating upon complex international
transactions, to apply simultaneously thc rclevant principles and
rules of international law and the provisions of any system of
municipallaw whichmay be applicable to the particular transaction
. . One of the essentialfunctions of international law and interna-
tional organisation isto prornote the rule of 1awwithin as well as

among nations, for only on the basis of the rule of law within
nations can the rule of Pawamong nations develop and be made B. La ligralitt dlaproc!~mudiun de 1'indkpendunce
de !a Bosnie-Herzégc~via au regard du droil inferne de la Rgpublique
fedkrulivesocicl/istede Yougoslavie

1. Pertinence du droit internede la Rgpuhliquefédgrulivesocialiste de
Yougoslavieen I'csp2ce

45. La norme juridique internationale originelle qu'est le droit des
peuples à disposer d'eux-mêmes està la fois incomplèteet imparfaite, au
moins en ce qui concerne les sujets ayant droit a l'autodétermination
dans lesEtats multiethniques et l'exercicepar ceux-cide ce droàtl'auto-
détermination externelorsque cet exerciceporte atteintea l'intégritter-
ritoriale d'un Etat. Etant incomplète,cette norme est à certains égards
inapplicable à certaines situations concrètes et constitue une sorte de
structurenormative décorativeet vide. Les entitésintkresséesl'invoquent
souvent,mais elle ne peut opérerque hors de la sphèrejuridique, en tant
que façade commode d'une stratégieéminemment politique,reposant sur
l'opportunitéet l'équilibre des puissances.
Cela &nt, il faut considérer ledroit à l'autodétermination externe

dans les Etats composés de plus d'un peuple commeune norme complexe
comprenant deux parties: d'une part, la norme juridique internationale
originelledudroit despeuples à l'autadéterrninationexterne et, de l'autre,
les élémentspertinents du droit interne de 1'Etat en cause. Dans ce
contexte, la norme juridique internationale originellejoue le rôle d'une
norme généraleet permissive, qui assume un caractére opérationnel et
peut devenir opéranteau cas où le droit interne d'un Etat multieihnique
a prévule droit l'autodéterminationexterne, s'ilhabiliteà l'exerceret
dkfinit les modalitésde son exercice. En d'autres termes, les dispositions
pertinentes du droit interne sontans chaque cas partie intégrante de la
norme du droit des peuples à l'autodétermination externe.Ce n'est que
de cetternanikreque la normejuridique internationale originelleprimai~e
du droit A I'autodetermination externe devient applicable au niveau du
postulat foi~damental de la primaute du droit.
La nécessitéd'une tellerelaiian entre droit international et droit interne
esta juste titre soulignéeparce qui sui:
{{Pourque la primauté dudroit régissela vie internationale, elle
' doitenglober une vaste gamme d'opérationsde plus en plus com-
plexesqui sont régiesen partie par le droit international et en partie
par le droit interne.11est donc important que lesjuridictions et les

tribunaux internationaux soientà même,lorsqu'ils statuent surdes
opérations internationalescomplexes,d'appliquer simultanémentles
principles etrkgles pertinents du droit internalional et les disposi-
tions du systkme de droit interne qui peuvent êtreapplicables à
l'opérationen cause ...L'une desfanctions essentiellesdu droit inler-
national et de l'organisation internationale est de promouvoir l'état
dedroit à I'intCrieurdes nationet entre elles,car ce n'est que sla
base de l'ktat de droità l'intérieurdes nations que l'étatde droit entre les nations peut se développeret êtregaranti. LESjuridictions
et lestribunaux internationaux peuvent contribuer ice résultatplus
efficacementsi Ilmesure dans laquelle l'interprétationet l'applica-
tion du droit interne dans le cadre de leurs activitksest un corollaire

normal et nécessaire du règlerncntjudiciaire international d'opera-
tions complexes est mieux comprise. »94
Libérédu manichéismeet du fardeau pesant de la controverse théorique
entre dualisme et monisme, le droit international positif s'est résolument

engagt sur cette voie. On peut citer une longue liste de réglesdu droit
internationül positif qui reposent sur une symbioseentre une norme inter-
nationale contenant des référenceesxpresseset implicitesau droit interne
etles normes correspondantes de ce droit interne. A titre d'exemple,
l'article6 de la convention de 1969 sur le droit des traités dispose
qu'un Etat peut invoquer le fait que son consentement a êtreliépar un
traite a été exprimeen violation d'une disposition de son droit interne
concernant la compétencepour conclure des traitéssi «cette violation a

étémanifeste et concerilait une rigle de son droit interne d'importance
fondamentalen. On peut citer aussi le droit de la mer, dans le cadre
duquel la protection et la préservationdu milieu marin sont entikement
réglementées sur labase d'une symbiose entre le droit international et les
droits internes. Par exemple, l'artic207: paragraphe 1(«Pollution d'ori-
gine tellurique») de la convention sur le droit de la mer dispose:

«Les Etats adoptent des lois ct règlementspour prkvenir, réduire
et maîtriser la pollution du milieu marin d'origine tellurique ...en
tenant compte des rkgles et des normes, ainsi que des pratiques ei
procéduresrecommandkes, internationalemen t convenues.»

Lii pratique diplomatique des Etats trouve égalementdans le droit
interneun critérede la validité des actesinternationaux. On peut men-
tionner la pratique des Etats-Unisd'Amérique inauguree par le prksident
Wilson instaurant un nouveau critèrede <cconstitutionna!ite>rq,ui fait de
l'«arrivke au pouvoir>>d'un nouveau gouvernement par des moyens

constitutionnels une condition préalable 5 la reconnaissance de: ce:gou-
vernement par Ics Etats-Unisg5.
46. Ainsi, en la présente affaire,il ne s'agit pas d'un conflit entre une
norme du droit intcrnational et une norme du droit interne, un type
d'affaire dont ont eu à connaître plusieurs tribunaux internationaux
(«Cummunaufks >s grtco-bulgares, C. P.I.J. série B no 17, p. 32 ;Zones
ji.ancher de Haute-Savoie PIdu Puys de Gex, C.P.I.J. sérieA no 22,
p. 167; Traitementdes nationaux pulonuis et au6respersonnes d'origine

ou de languepolonaises dans le rerrilnire de Duntzig, C.P.I.J. sérieA/B
no 44, p. 241,mais de l'application d'une norme internationale de struc-
ture contplcxe, à savoir une norme qui englobe des normes de droit

Y4C. WilfredJenkç,Thi~Pru~pectacfInrernrirr/~udicarion,1964.p. 547
Y5 hl. Whiieman, Drg~iqiJInrernur~o~lw,vol 2,p 69determination. 1 am of the view that, in this case, the reasoning of the
Court in the case çoncerning Brazilian Loans (1424)is relevant.

In theBruzilian Loanscase the Court pointed out, interalia, that

"[olnce the Courthas arrived at the concIusion thatit is necessary to
apply the municipal law of a particular country, there seems no
doubt that il must seek to apply it as it would be applied in that
country. Ttwould not be applying the municipal law of a country if
ilwere to apply it in a manner different from that in which that law
would be applied in the country in which it is in force.
Tt follows that the Court must pay the utrnost regard to the deci-
sions of the municipal courts of a country, for it is with the aid of

their jurisprudence that it will be enabled ta decide what are the
rules which, in actual fact, are applied in the country the law of
which isrecognized as applicable in a given case. If the court were
obliged to disregard the decisionç of municipal courts, the resull
wauld be that it might in certain circurnstanceapply rules other than
ihosc actually applied; this would seem to be contrary to the whole
theory on which the application of municipal law is based.
Ofcourse, the Court willendeavour EO make ajust appreciation of
the jurisprudence of municipal courts. If this is uncertain or divided,
it will rest withthe Court to select the interprelation which it con-

siders most in conformity with the law. To compel the Court to dis-
regard that jurisprudence would not be in conformity with its func-
tion when applying municipal la^."^^

2. Constiiufional concept ofthe Yugoslcrv Stale - constitutionalcon-
cept ofBosnda and Herzegaviaa asa federal unil

47. In order to elucidate the constitutional concept of the Yugoslav
State and that of Bosnia and Herzegovina as a federal unit,1will quote
sorne relevant provisions of the constitutions of the Yugoslav State that
suggesta conclusion on its nature and, more specifically,on the status of
its peoples.

48. The first constiiution of the Yugoslav State - Ihc constitution of
the Kingdom of Serbs, Croats and Slovcneç, promulgated on 28 June
1921, stipulated that the Kingdom "is a state of Serbs, Croats and
Slovenes, a constitutional, parliamentary and hereditary monürchy. The
officia1state name is:Kingdom of Serbs, Croats and Slovenes."Article 3
of the Constitution provided that the "officiallanguage of the Kingdom
wiHbe Serb-Croat-Slovenian".
49. The Constitution of the Kingdom of Yugoslavia of 3 September
1931,did not indicate.expressis verbis its constitutive. peoples.They were

96P.C.I.J.SeriesA, rVo21,p.124.

122interne relatives il'autodttermination externe. d'estimequ'en la prksente

affaire le raisonnement de la Cour dans l'affaire relativeauxEmprunts
brési/ens (1929) est pertinent.
Dans cette affaire, la Cour a notamment fait observer:
«La Cour étantarrivéei la conclusion qu'ily a lieu d'appliquer le
droit interne d'un pays déterminéi,lne sembleguéredouteux qu'elle
doit s'efforcerde l'appliquer comme on l'appliquerait dans ledit

pays. Ce ne serait pas appliquer un droit interne que de l'appliquer
d'une manitiredifférentede celledont il serait appliquédans le pays
ou il est en vigueur.
11s'ensuitque la Cour doit tenir le plus grand compte de la juris-
prudence nationale, car c'est A l'aide de cette jurisprudence qu'elle
pourra determiner quelles sont vraiment les règlesqui, en fait, sont
appliquées dans le pays dont le droit est reconnu applicslble en
l'espèce.Si la Cour étaitmise dans la nécessité de faire abstraction
de la jurisprudence, le résultaten serait qu'elle pourrait éventuelle-
ment appliquer d'autres règlesque celles effectivementappliquées;
cela semblerait alleà l'encontrede l'idéemêmequi est ;ila base de
l'application du droit interne.

Sans doute, la Cour apprécieralibrement la jurisprudence natio-
nale.Si celle-ciest incertainou partagée,il appartiendra h la Cour
de choisir l'interprétationqu'ellecroit êtrela plus conformeiila loi.
Mais 11ne serait pas conforme A la fonction qu'exerce la Cour
lorsqu'elleapplique une loi nationale que de l'obliger faire abstrac-
tion de la jurisprudence»96

2. Conception con.siitutionnei!e deI'Etut yougoslave et d~ iuBosnie-
Herz&govincet1 Eantqu'en fitfkderule

47. Pour mieux faire comprendre la conception constitutionnelle de
l'Etat yougoslaveet de I'entitkfédéralequ'étaitla Bosnie-Herzkgovine,je
me référerai a certaines dispositions des coiistitutions de I'Etat yougo-

slave qui donnent une idte de la nature de cet Etat et, plus précisément,
du statut des peuples qu'ilrassemblait.
48. La prernikreconstitution de I'Etat yougoslave, la Constitution du
Royaume des Serbes, Croates et Slovknes, promulguéele 28juin 1921,
définissaitleRoyaume comme riun Etat de Serbes, Croates et Slovènes,
monarchie héréditaire,constitutionnelle et parlementaire. Son nom offi-
cielest: Royaume des Serbes,Croates etSlovknes>).Selon l'article3, (<la
langue officielledu Royaume est le serbe-croate-slovene».

49. La Constitution du Royaume de Yougoslavie du 3 septembre 1931
n'enindiquait pas nommémentlespeuples constitutifs. Iln'était question

" 6.P.J 1.sérieA nu21, p. 124.714 APPLICATlONOF GENOClDE CONVENTION (DISS. OP. KRE~A)

mentioned only indirectly,as, for example, in the provision of Article 3of
the Constitution stipulating thüt the "officia1language of the Gngdom
[shalt bel Serbian-Croat-Slovenian".
50. The resolution constituting Yugoslavia on the federal principle,
approved by the Second Conference of the Anti-Fascist Council of

National Liberation of Yugoslavia on 29Novernber 1843,said, inlerdia,

"By virtue ofrhe righiof eachpeople EO self-determinarioniaclud-
ing the righrro sepuration or uli$cation wirh utker peoples, ... the

Anti-Fascist Council of National Ljberation of Yugoslavia, passes
the following

(2) To effectuate the principle of sovereignty of the peoples of
Yugoslavia, . ..Yugoslavia is being constructed and will be con-
structed on the federal principle which will secure full equaljty to
Scrbs, Croafs, Siovenians, Mucedoniunsand Montenegrans, id est
peoplcs of Serhia, Croutiu, Sloveniu, Macetionia,Munfcneground
Bosnia and Nerzegovinu .. ."9'

51. The first Constitution of the federal Yugoslavia of 1946 in its
Article 1 defined the Federal Peoples' Republic of Yugoslavia as

"a federal peoples'State in the form of a Republic, a community of
equal peoples, who have expressed their will, based on the righi to
self-detemination, including the right toseparation, to live together
in afederal State".

52. In the secoiid Constitution of 1963, the Federation was defined
as a:
"Federal state of freely unified and equal peoples and a socialist
democraticcommunity based on the rule of working peopleand self-

government."
The Constitution of the So~ialistRepublic of Bosnia and Herzegovina
of 1963,laid down in its BasicPrinciples, intedia, thal,

"Linked throughout their cornmon history by their livingtogether,
by rheir aspirations and struggle for frecdom and social progress,
SErbs, Muslims and Crouts, overcoming the attempts of foreign
powcrs and locrilreactionary forces, have corne together for the first
time in freedom, equality and brotherhood in their Republic, which

became the politicüland sociaIform of both their unily and mutual
equality and their eyuality with rheotherpeoples of Yuguslavia wirk

" Decision on buildingup Yugoslaviaontlizfedcrdi priOj#ciaGluzetie ofDFJ,
No. 111445(cmphasisadded). -

APPLICATIONDE CONVENTION G~NOCIDE (OP. DISS.KRECA) 714

de ceux-cique de manièreindirecte, par exemple àl'article3 qui disposait
que «la langue officielledu Royaume [est] le serbe-croate-slovène)).

50. La résolutionorganisant la Yougoslavie selon le principe fkdéral,
approuvéele 29 novembre 1943 la deuxième conférence du conseil anti-
fasciste de la libérationnationale de la Yougoslavie, contenait notam-
ment cette disposition :

<<En vertu du droit qu 'a chaquepeuple de disposer de lui-même,
y compris Ie droi~de .F.séparerdhautrespeupl~s ou de s'uniravec
eux ..le conseil antifasciste de la libération nationalede la Yougo-
slavie adopte la présente

RÉSOLUTION
.*...,..._.........,.._......
2) Pour donner effet au principe de la souverainetédes peuplesde
Yougoslavie, ..la Yougoslavie est et sera édifiée selon le principe
fédératifqui garantit la pleine égalitédes Serbes, Croates, Slovenes,
Macéduloaienesr Morzténigrins, cést-&dire des peuples de S~rbie,

Croatie, Slovfpiie, Macédoine, Monrénkgro et Bosnie-Nerzkgo-
vin.e.»97
51. La première constitution de la Yougoslavie fédérative,celle de

1946,définiien cestermes en soliarticle premier la Républiquefédérative
populaire de Yougoslavie:
«Etat fédéralpopulaire à forrnc républicaine, communauté de
peuples égaux en droits qui, en vertu du droit des peuples à disposer

d'eux-mêmes, y compris celui de sécession,ont décide devivre unis
dans 1'Etatfédéra p.
52. La deuxièmeconstitution, celle de 1963, dkfinit la Fédérationen

ces lemes:
<(Etat fkdéralde peuples égauxlibrement unis,communautédémo-
cratique socialiste fondke sur le pouvoir des travailleurs et l'autono-
inie politique.»

La Consiitution de la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovinedc
1963dispose notamment dans ses «Principes fondamentaux » :

«Liésdans toute lcur histoire commune par leur coexistence, leurs
aspirations et leur combat pour ln libertéet le progres social, les
Serbes, lesMusulmans et lesCroates, surmontant lesentreprises des
puissancesétrangkreset des forces réactionnaireslocales, sesont ras-
sembléspour la prernikrefois dans la liberté,l'égalitéet la fraternité,
dans le cadre de leur république,qui est devenue la forme sociopo-

litique dans laquelle sesont incarnéeslcur unitéet leur égalité et par

" Rtsotutionportant coiistitution dc la Yougoselonleprincipefédkratif,Journul
officitde 10F~dérr~liyougusluae,n"111945(les italiques sont de moi).

123 ~vhorn lhey volunrarily enlered a cornmon stute on the blasisofthe
right tu self-dekennfnalim,includingflie right Io separalion: the
Federal Peoples' Republic of Yugoslavia thereby secured Fullequal-
ity and conditions of comprehensive national development, material
and cultural progress for an overail socialist transformation."
(Emphasis added .)

Article 1 of the Constitution of Bosnia and Herzegovina qualified ir as
"a state socialist democratic community of peoples of Bosniaand Herze-
govina based on the rule of working people and seIf-governrnent".
53. The Constitution of the SFRY of 1974begins wirh Chapter 1 of
the Basic Principles, which was worded as follows:

"The peoples of Yugoslavia,starting Fromthe right of each nation
to self-determination, includingthe right tosecession,on the grounds
of thcir will freelyexpressed in thejoint struggle of al1peoples and
nationalities in the national liberation war and socialist revolution
.. .have created a socialisl federal community of worki~igpeople -
the Socialist Federal Republic of Yugoslavia . . .".

In Chapter VI1of the Basic Principles, it is stated, inferaliil, that the
Socialist Federal Republic of Yugoslavia upholds:
"- the right of each people freelyto determine and build its social
and political order by ways and means freely chosen;

- the right of people to self-determination and national indepen-
dence and the rightto wage a libcrationwar, inpwrsuit of these
causes;
- regard for generally accepted noms of international law".

The Constitution of the SFR Y in its operative pari, defined itas a

"FederalStaie, a state community of freely united peoples and their
socialist Republics . . .based on the rule and self-management of
the working class and of al1working people and the socialist self-
managed democratic community of working people and citizens
and equal peoples and nationalities" (Art. 1 of the Constitution).

54. The Constitution of 1474 of the Socialist Republic of Bosnia and
Henegovina laid dawn in itsArticIe 1:

"The Socialist Republic of Bosnia and Herzegovina is a socialist
democratic. State and socialist self-managed democratic communily
of working people;and citizens,peoplm ofBosnia and Herzegovina
- Musiims, SeiAbsand Crouis, with the members of other peoples
and nationalities, who live in it, haseun the rule and self-manage- lcur tjgalitk avec lautres peupi~s de Yougoslavie, avec Iesquelsils
ont volontairement fbrmé unEtut communsur la base du droitù dis-
poser de mi-mêmr,y compris lcdroit dese eéprarerlesuns des uuire.7:
la République fedérative populaire de Yougoslavie garantit ainsi la
pleineégalitéet l'existencedes conditions d'undéveloppementnatio-
nal généralet du progrès culturelet matérielsur la voie d'une trans-
formation socialiste globale>>(Lesitaliques sont de moi.)

A l'article premier, la Bosnie-Herzégovine est qualifiéede crcomrnunauté
socialiste démocratiqueconstituéed'un Etat des peuples de Bosnie-Her-
zégovine,fondée surlepouvoir des travailleurs et l'autonomie politique».
53.La Constitution de la Républiqucfédérative socialiste de Yougo-
slavie de 1974 commence par l'exposéde ({Principes fondamentaux)),
dont le chapitrc1se lisait comme suit:

«Partant du droit de chaque peuple i !'autodéterminatio~iy, com-
pris le droit à la sécession,en vertu de leur volonté librement
expriméedans la lutte commune de toutes lesnations et nationalités
au cours de la guerre de libkratjon nationale et de la révolution
socialiste.,.ont crééune communautéfedérative socialistede tra-
vailleurs- la Républiquefédérative socialiste de Yougoslavie ..»

Le chapitre VI1 de ces «Principes fondamentaux>>déclarenotamment
que la Republique fédérative socialistd ee Yougoslavie reconnaît:
<<- ledroit qu'achaquepeuplede définiret d'édifiersonpropre ordre
social etpolitiquepdr des voiesetmoyens librement choisis;

- le droit des peuples à disposer d'eux-mêmeset ;iaccéder à
l'indépendancenationale, le droit de mener une guerre de libe-
ration pourréaliser ces fins;
- le devoir de respecter lesrèglesde droit international gknérale-
ment reconnues».
Dans le corps de ses dispositions, la Constitution définitla République

fëdérativesocialiste de Yougoslavie de la manièresuivante :
<<unEtat fédéra l communautéétatique de nations librementunies
etde leurs républiques socialistes..fondéesur lepouvoir et l'auto-
gestion de la classe ouvrièreet de tous les travailleurs,el commu-
nautédémocratiqueautogestionnaire socialistede travailleurs et de
citoyens, de nations et dc nationalitéségales endroits» (article pre-
mier de la Constitution).

54. La Constitution de 1974 de la République socialiste de Bosnie-
Herzégovine dispose en son article premier:

<<La République socialiste de Bosnie-Herzkgovine est un Etat
démocratique socialiste et une communauté démocratique prüti-
quant l'autogestion socialiste,qui est composéedc travailleurs et de
citoyens,des peuples de Bosnie-Herzégovine - MnasultnunsS ,erbes
ei Ci=oarc s et de personnes appartenant à d'autres peuples et ment of the working clüss and al1working people and onsovar~ignty
und equulity oj"thepeoples of Bosniu andHerzegovina and the mem-
bers of other nations a~idnationalities, living in ii.

The Socialist Republic of Bosnia and Herzegovina is an integral
part of the Socialist Federal Republic of Yugoslavia." (Emphasis
added .)

Article 2 of the Constitution of Bosnia and M~rzegovinastipulates:
"Working people ünd citizens,peaples of Bosniaand Hcvzegovrna
- Serhs, Croats and Muslims and members of other natiuns and
nationalities shrallcxercise ~heirsovereigrr rights in [he Sociulisr
Repuhlic ofBosnia und Herzegovina, except for those righes which
the Constitution of the SFRY hüs designated to be exercised in the
Socialist FederaI Republic of Yugoslavia in the comrnon interest of
working people and citizens, peoples and nationalilies." (Ernphasis

added.)
The Preamble says, inter dia, that
"peoples of Bosnia and Herzegovina - Muslinzs,Serbs und Crorrts
. . . dong with workcrs and other working people and citizens
and peoples and nationalities in other socialisr repubiics and socia-

ljst autonomous provinces of the Socialist Republic of Yugo-
slaviü achieved significant success in . .. advancing . .. unity and
equality . .."
and further states that
"the social and political orderof Bosnia and Hcrzegovina is hased

on the principleslaid down in the SFRY constitution by the peoples
and nationalitiesand working people of Yugoslavia".

The Basic Principles of the Constitution stipulate that
"The peoplrs of Boxniaana'Herzegovina - Serbs, Muslims und

Croals ... with other peoples and nationalities of Yugoslavia, . . .
hased on the rightEO self-determinufion inchding the riglrro sece;i-
sion, have volunrurily corne together in rliecommun Sfrtfv - the
SociaIisrFederal Republic qf Yugosl~tvia,and have ihereby secured
fullequality and the conditions for cornprehensivenational develop-
ment .. ."(Chapter 1 of the Basic Principles.)
Chapter Il of the same Basic PrincipIes stipulates, inlerdia, that

"'rhepeoples of Bosnia and Herzgovinn - Croats, Serbs undMus-
lims and members of other peoples and nationalities shall exercise
wirhinthe SocictIixtRepublicof Bosnia and Herz~govina, as a Statc
and self-managed çommunity, theirsoiiereignrigfitsarldfurther their
class and national in~erests."(Ernphasis added.) nationalitésqui y viventct elleestfondéesur le pouvoir etl'autoges-
tion dela classe ouvrièreet de tous les travailleurs ainsi que sur lu
souverralnettet Iëgalitk desclroirdes peuple^de Bosnie-Herzégovine
et des personnes d%utres peuples et nationalitésqui y vivent.

La République socialistede Bosnie-Herzégovine faitpartie inté-
grante de la Rtpublique fédêrative socialistd ee Yougoslavie. » (Les
italiques sont de moi.)
1 L'article 2 de la Constitution est ainsi conçu:
({Lestravailleurs ci lescitoyens, lespeupks de Bosnie-Herzégovine

- Serbes, Croates et Musulrnan.~ - et les personnes appartenant a
d'autres peuples et nationalitésexercenf leurs d~oifssouverainsdans
lu R6publique sucialiste clrBosnie-Herzégovine,a l'exception des
droits qui, dans l'intérêctornmurides travailleurs et des citoyens, des
peuples et des nationalités,sont mis en Œuvredans la RCpubligue
fkdérativesocialiste de Yougoslavie cn vertu de sa constituiion.~
(Les italiques sont de moi.)
11es1 dit notamment dans le préambule que:
1
{(les peuples de Bosnie-Herzégovine - Musuiinuns, Serbes et
Crorrres...ainsi que les ouvriers et autres travailleurs et citoyens,
les peuples et lesnationalités des autres républiques socialisteset
des provinces socialistes autonomes de la République fédérative
socialiste de Yougoslavie ont obtenu des succèsmarquants sur ...la
voie ...de J'unitéet de l'égalii..»
et plus loin que:
I
«l'ordre social et politique de la Bosnie-Herzégovineest fondésur
les principes consacrésdans EaConstitution de la Républiquefédé-
rative socialiste de Yougoslavie par les peuples et lesnationalités et
les travailleurse Yougoslavie».
IIest dit dansles «Principes fondamentaux» de laConstitution que:

<<Les peuplrs de Busaie-Herzkgovine - Serbes, Musulmans et
Croate5 ...et les autres peuples et nationalités de Yougoslavie ...
exerpmt leur droitde disposer d'eux-mêmes, y ccomprisle droit de
fuirr sécession,se sont volontairement réunisen un Etat commun -
luR6publiqueJedératisv ociulisfe de Yougoslavie, el se sont ainsi
assuréles conditions de leur pleine égalitéet d'un développement
national généra.l..» (Chap. 1.)
Le chapitre Il desmemes «Principes fondamentaux »dispose notamment
que:

cles peuples de Busnie-Herzigovine - Croates, Serbes el Musul-
munset lesmembres des autres peuples et nationalités - exerceront
darasIEcadre de IuRépublique soçiafisiede Bosnie-H~rzegovine,en
tant qu'Etat et communautc autogérée, leurs droits souverains et
feront valoir leurs intérêtse classe et leurinrkrélsnationaux>> (les
italiques sont de moi).It is made particularly clear that
"Starting from the principles.. .of respect for freedom and inde-
pendence of peoples, active peaceful coexistence, openness to the
world and the need for the development of comprehensive inter-
national cooperation, the Socialist Republic of Bosnia and Herze-
govina shall participate, on an equal footing with other republics

and autonomous provinces, in the exercise of the foreign policy of
the Socialist Republic ofYugoslavia." (Chapter X of the BasicPrin-
ciples.)
On 31 July 1990the Assembly of the Socialist Republic of Bosnia and
Herzegovina approved Amendments LIX-LXXX to the Constitution of
the Socialist Republic of Bosnia and Herzegovina (OSfaci Gaazerreofalzc
Socialisf Republicof Bosnia and Herzegovina, No. 21 of 31 July 1990).

Amendment LX teplaced paragraph 1 of Article I of the Constitution
of the Socialiss Republic of Bosnia and Herzegovina and reads as
follows:
"1, The Socialist Repubtic of Bosnia and Herzegovina is a d~rno-
cruricsovereignslaae of equaIcitizens,people3 of Bosnia and Herze-
govi~iir- Muslims, Sèrbsand Croats and members of oiher peoples
and nationalities living in it."

Amendment L1stipulates that:

"Al1peoples and nationalities will be guaranreed proportionate
representation in the assemblies of socio-political communities,
bodies elected by them in the Presidency of SR B-H and inother
State organs" (this arnendmcnt is addcd to Article 3 of the Consti-
tulion of the Socialist Republic of Bosnia and Herzegovina).
Paragraph 1Oof Amendment LXX stipulates that :

"The Assemblyof SR Bosnia and Herzegovina shallform a Coun-
cil to deal with the questiof the exerciseof the equality of peoples
and nationalities of Busnia and Herzegovina. Members of the Çoun-
cil will be appointed from the rariks of deputie- members of the
nations ofBoçnia and Herzegovina - Muslims, Serbs and Croats in
equal proportion, and respective number of deputies from the ranks
ofother peoples and nationalities and others who livein Bosnia and
Herzegovina. The Council sliai'reach its decisioby n consensusof

~hemcmbersofal1nations undnalirraaiitiees T.he Council shall spe-
cificallydiscusç the issues relating to the equalofylanguages and
alphabets; the organization and activities of cultural institutions of
particular importance for the expression and afismation of the
national speçificitiof individual peoples and nationali~iesand the
promulgcrtirin of t-egufatioflro implernerltconsfidutionaIprovisions
cxpressdycktermining the principles ofeyualiry anaong ppeoplcsand
ricifionalitie(Emphasis added.)1 11est précise. articuliérernentque:
«Inspirépar les principes...du respect de la libertéet deI'indé-
pendance des peuples, dc la coexistence pacifique active,de I'ouver-

ture au monde et du développement nécessaire d'une cooperation
internationale gknerale, la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégo-
vine participerü, sur un pied d'égaliavec les autres républiqueset
provinces autonomes, 6 l'exercicede la politique étrangérede la
République fkdérativesocialisie de Yougoslavie.» (<Principes fon-
damentaux~, chap. X.)
Le 31 juillet 1490, l'Assembléede la République socialiste de Bosnie-
Herzégovinea adopté les amendements LIX a LXXX rila Constitution
de la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovine(Journalofficielde la
Republique.sociulistede Bosnie-Herzégovine, no 21, 31juillet 1990). Le

texte de l'amendement LX, qui se substitue au paragraphe I de l'article
premier de la Constitution de la Republique socialiste deosnic-Herzé-
govine, se lit comme suit:
«1. La Republique socialiste de Bosnie-Herzégovineest un Etal
souveuain démacra tique composk ,ans 1%alité, des cifoyen.9,JP.S
peup1et.se Bosnic el d'Herzégovine - desMusulmans, des Serbes,
des Croates, ainsi que des autres peuples et nationalités qui vivent
dans la République. »

I L'amendement LI dispose que
«Une représentationpropor~ionnelleestgarantie A tous lespeuples
et i toutes les nationalités dans les assemblées descommunautés
sociopolitiques, dans les organes élupar celles-cala prksidencede
la République socialiste de Bosnie-Herzkgovineet dans les autres

organes de 1'Etat.»(Le texte de l'amendement s'ajoute l'articl3.)
Le paragraphe 10de l'amendement LXX est ainsi conçu:
I <(L'Assembléd ee la Ripublique socialiste de Bosnie-Herzégovine

crkera un conseil chargéde réglerla question de l'égalidespeuples
et des nationalitésde Bosnie-Herzégovine. Les membres du conseil
seront choisis parmi lesdéputésmembres des nations de Bosnie-
Herzégovine - Musulmans, Serbes et Croates - en proportions
égales,et d'un certainnombre de membres choisisparmi lesdkputks
des autres peupleset nationalités ouautres populations qui viventen
Bosnie-Herzégovine.Le conseil prendra su de'çisiopar consensus
des représentantsde toutes les natiuns et nationalités. Le conseil
débattraparticulièrementdes quesrions liéesà I'égalitdes langues et
des alphabets, a I'organisation et aux activités desinstitutions cultu-
relles ayant une importance particulièrepour l'expression etI'affir-
mation des particularitésdes divers peuples et des diverses nationa-
lités,et lapromulgafiondes règlementsdapplicution desdisposiiions
consiifulio~lnellfixon fexpressémentles principes de l'&alité des
peuples et des nationalité>i(Les italiques sont de moi.) 55. A consistently undeniable façt, underlying the broad spectrum of
changes that have affected the Yugoslav State since its inception in 1918,
was a point of departure, explicit or implicit, of al1constitutional solu-

tions: rhai isrhal YugosIuviahasprirnarily beena cornmuaityojpeoples
J~W? ifsbirrh.

The subjerstof changes was the number of constitutive, Staic-making
peoples. At themoment of its inception in 1418,Yugoslavia was a com-
munity of three constitutive peoples (Serbs, Croats and Slovenes). The
Federal Constitution of 1946recognized the status of constitutive peoples
of Macedonians and Montenegrans, who used to be takcn to be paris of
the Serbian national corps. Finally, the Constitution of 1963 included
Muslims in theranks of constitutive peoples.
56. Sincethe formation of the Yugoslav State as a federation this con-
shnt IîasgovernedfuIlylya,nd withouiany reservation, the jerferal unit of

Bosnia and Herzegovitia. Hence, the widely used but samewhat lilerary
qualification of Bosnia and Herzegovina as the 'hsmallYugoslavia",
where the essential characteristics of the Yugoslav federation are
expressed in a narrow margin.
Federal Yugoslavia was formed under the resolution of the Second
Conference of the Anti-Fascist Council of National Liberation of Yugo-
slavia in 1943,as a community of sovereignand equal peoples, whilesub-
sequent constitutional intervention created republics, as federal units.
Thus, likethe rest ofthe republics, Bosniaand Herzegovina was formally
brought into being by its Constitution of 1946, although temporary
aulhorities had been created since the adoption of the rcsolution estab-
lishing Yugoslavia as a federal State.

In thelight of bolh the federal Constitution of 1946and the republican
Constitution pramulgated the same year, Bosnia and Herzegovina was
formed as a State of Serb and Croat peoples. Muslims partiçipated in ihe
formation of the Yugoslav federation and in Rosnia and Herzegovina
itselfas an integral part of the Serb or Croat peoples, or more preciselas
the Serbs or Croats of Muslim religion, not as a constitutive people,
endowed with the right to self-deiermination.

57. Thc constitutional solutions of 1963 chünged the constitutional
position ofMuslims, promoting them into aconstitutive people. In keep-
ing with this change Bosnia and Herzegovina was defined by its republi-
can Constitution of 1963 as the: "state socialist demoeratic union of
peoples of Bosnia and Herzegovina . ..".The Basic Principles of the

Constitution nürnedas "pcoplesof Bosniaand Herzegovjna" : "theSerbs,
Muslims and Croats". This staiuç was reserved for the Muslims in the
constitutional regulations of 1974.
In other words, the Musljms were tumed into a constitutive nation ex
post: after Bosnia and Herzegovina had been formed, on the basis of the
exerçisedright to self-determination of Serbs and Croats, as a federal unit APPLlCATlON DE CONVENTIONGENOCIDE (OP. DISS. KRECA) 18
l
55. 11est un fait depuis toujours indéniable,que l'on retrouve sous
tous leschangements, fort variés,qu'a connus 1'Etatyougoslave depuis sa
créationen 1918 et qui a étéi;mplicitementou explicitement, àla base dc
toutes les configurations const~tutionnellde lYEtat.csuvoir que lu You-
goslavie aioujuurJsétC e=ser?tiellernen,epuissu anissunce, uie cornmu-
nuurk de peuples.
Ce qui a changé,c'est le nombre de peuples constitutifs de 1'Etat.Au
moment de sa crfation, en 1918,InYougoslavie étaitune communauté de
trois peuples: les Serbes, les Croates et les Slovènes.La Constitution

fédéralede 1946 a reconnu la qualité depeuple constitutif aux Macédo-
nienset aux Monténégrins,considérésjusque-là commd ees «fractions de
l'entitknationale serbe». Enfin1ü Constitution de 1963a fait figurer les
Musulmans parmi les peuples constitutifs.
56.Depuis la constitution en fkdérationdc 1'Eiat yougoslave, cette
consrunie udominé iota/ernr.net surzsuucme t-csfrictionIkntitéfédkrale
qu'duit lu Bo~nic-Herzégovine. C'estlà l'originedu qudlificaiirdt(petite
Yougoslavie», quelque peu littéraire mais largement ernployk A l'endroit
de la Bosnie-Herzégovine, où les traits essentiels de la Fédérationyou-
goslave sont reproduits dans un cadre exigu.
La Yougoslavie fédératives'est rormee, aux termes de la résolution
prise, en 1943,par la deuxièmeconférence duconseil antifasciste de libé-
ration nationale de la Yougoslavie, en tant que communautéde peuples
souverains etégaux,des initiatives constitutionnelles devant par la suite
institueres rcpubliques en entitésfkdérales.Ainsidonc, comme lesautres

républiques,la Bosnie-Herzégovineest officiellementnée de la Constitu-
tion de 1946 - sans compter que des autorités provisoires avaient étk
mises en place dèsl'adoption de la résolutionportant créationde 1'Etat
fédératifde Yougoslavie.
Aux termes de la Constitution fédérale de 1946et de sa propre consti-
tution promulguéela mèmeannée,la Bosnie-Herzégovinea vu lejour en
tantqu'Etat des peuples serbeset croates. Les Musulmans ont participé i
la formation de la Fédérationyougoslave et A cellede la Bosnie-Herzé-
govine elle-même,en tant que parrie intégrante des peuples serbes ou
croates,ou, pour être plus précis, entant que SerbesOU Croates de reli-
gion musulmane, et non en tantque peuple constitutif doté du droit de
disposerde lui-même.
57. Les solutions constitutionnelles retenues en 1963 ont modifiéle
statut constitutionnel des Musulmans pour en faire un peuple constitutif.
Par suite de ce changement, la Bosnie-Herzkgovineest définiedans la
Constitution dela République de1953comme un Etat forméde (<l'union
démocratiquesocialiste des peuples de Bosnie-Herzégovine ...»Les prin-

cipes fondamentaux de la Constitution qualifient de peuples de Bosnie-
Herzégovine>> ,les Serbes, les Musulmans et les Croates». Les regle-
rnents constitutionnels de 1974ont conservé auxMusulmans ce statut.
Autrement dit, les Musulmans ont été transformée sn nation constitu-
tivea posteriori, par l'exercicedu droit Al'autodéterminationdes Serbes
et des Croates, aprèsformation de la Bosnie-Herzégovineentant qu'entité719 APPI.ICATIONOF CENOClOE CONVENTION (D~SS. OP. KRE~A)

within the Yugoslav federation. Does this Fact influence the scope and

qualily of the rights of Muslirns as a constitutive nation? The reply can
only be in the negative. Having been granted the status of a canstitulive
nation, the Muslims came into possession of absolutely equal rights in
the same way as Serbs and Croats in Bosnia and Herzegovina. The full
equality of rights of constitutive peoples was accentuated in con.finuoby
al1 constitutional solutions, whether federal or in Bosnia and Herze-
govina, between 1946and 1974.This was effecled not only by the use of
corresponding terms (exempli causa, "the right of each people"; "full

equality" ; "sovereignty and equality of peoples") but by inversion in
quoting the names of peoples, strikingly present in the constitutions of
Bosnia and Herzegovina, so as to stress both in substance and diction
the full equaliiy of constitutive peoples. In concreto, equality is both
an explicit and implicit reference ta the right of "each nation to self-
determination inçluding the right to secession or unification with other
peoples".

58. In rhe light c,J'onstifutionul solutions und consequent legul und
politiculpruclice resulringin the yual~~aiion ofBosnniaandHcrzegovina
as nJederution of nations,personalfederation sui generis was the closesl
to the acrual slate~Jufluirs. Such a qualification wasjustified by several
facts offundamental importance.

Firstly, in the light of both noms and facts, Bosnia and Herzegovina
was a community of three peoples. The Republic of Bosnia and Herze-
govina was not, unlike the rest of the Yugoslav republics, a genuine,

original form of the State personality of the Yugoslav State, but was cre-
ated ex pst, as a relevant form of interna1administrative and territorial
division ofthe State in thefederal phase of its existence.Ratione valoretn,
Bosniaand Herzegovina wasnot only constituted but also functioned, in
politicai and legal terms, as a community of peoples. It sufficestu point
to the composition of the bodies of authority in the Socialist RepubIic of
Bosnia and Herzegovina. The issue of cadres in Bosnia and Herzegovina
was governed by the "Social compact on personal policy in SR of Bosnia
and Her~egovina"~~.Article 7 (3) thereof bound the signatories of the
compact to secure:

"the proportionate and, in particular, adequate representation of
peoples and nationalitjes on the asçembliesof socio-political cam-
munities, staie organs and bodies of socio-political organizations in

the Republic and el~ctionto posts with aterm of officeof one or two
years from among the ranks of al1the peoples".

98OfficidGuzeite ofrhc Sociulist RepublofBosniu and Herzegoi;inu,No. 34 of
8 November1982.

128de la Fédérationyougoslave. Cette circonstance a-t-elle un effet sur
l'étendueet la nature des droits des Musulmans en tant que nation cons-
titutive? On ne peut que répondrepar la négative.Ayant acquis la qualité
de nation constitutive, les Musulmans sont entrésen possession de droits
absolument égauxau mêmetitre que les Serbes et les Croates de Bosnie-

Herzégovine. Lapleine égalité des droits des peuples constitutifs n'a cessé
d'être confirmédeans tous les textes constitutionnels ultérieurs, ceuxde la
Fédérationcomme ceux de la Bosnie-Herzégovine,de 1946 à 1974.Cette
confirmation s'exprime non seulementpar l'emploi de termes correspon-
dants («le droit de chaque peuple)), «pleine égalité)), ((souveraineté et
égalitédes peuples» à titre d'exemple), mais encore par l'inversion de
l'ordre dans lequel les peuples sont cités - considération particulière-
ment significativedans les constitutions de la Bosnie-Herzégovine - qui
tend à bien marquer, tant par le fond que par la manièrede s'exprimer, la
pleine égalité des peuplesconstitutifs. En termes concrets, cette égalité
renvoie, de manière à la fois explicite et implicite, au droit qu'a «chaque
nation de disposer d'elle-mêmey , compris le droit de se séparer d'autres
nations ou de s'unir à elles)).

58. A considérer lesdivers choix constitutionnels - et lapratiquejuri-
diqueet polirique qui ena découlé - qui ont amené ù quulifierla Bosnie-
Herzégovinedefédérationde nations, le conceprsui generis defédération
de personnes étaitcelui qui se rapproche leplus de la réalitéde la situa-
tion. Cette façon de voir les choses était corroboréepar plusieurs élé-
ments factuels d'importance fondamentale.
En premier lieu, du point de vue du droit comme du point de vue des
faits, la Bosnie-Herzégovineétaitune communauté de trois peuples. La
Républiquede Bosnie-Herzégovinen'étaitpas, à la différencedes autres
républiques yougoslaves, une formeauthentique, originelle, de la person-
nalitéd'Etat de la Yougoslavie, elle a étécrééeà posteriori a titre de sub-
division administrativeet territoriale interne de I'Etat, dans la phase fédé-

rale de l'existence de celui-ci.Ratione valorem, la Bosnie-Herzégovine
n'étaitpas seulement formée,elle fonctionnait aussi, sur le plan politique
et sur le plan juridique, comme une communautéde peuples. On en don-
nera pour preuve la composition des organes directeurs de la République
socialiste de Bosnie-Herzégovine.La question des cadres dirigeants de
celle-ciétaitrégléepar le ((pacte social relatàfla politique du personnel
en Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovine~~~A . u paragraphe 3 de
l'article 7 de ce pacte, les signataires se sont engagàgarantir:

«la représentation proportionnée et adéquate des peuples et des
nationalités aux assemblées descommunautés sociopolitiques, des
institutions publiques et des organes des formations sociopolitiques
de la République,et l'électionaux charges publiques, pour un man-
dat de un ou deux ans, de candidats choisis parmi tous les peuples)).

98Journalofficiel de lu Républiquesociuliste de Bosnie-Herno34, du 8 no-
vembre1982.

128720 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (DISSO . P.KRE~A)

Such a solution was also legally sanctioned. Article 170riof the Law on
the Changes and Amendments of the Law. on State Administrationyy
stipulated that any

"Official as head of an administrative agency and his deputy may
be recalled before the end of their respective terms if so required by
eligibility criteria for the equal representation of peoples . . . of
Bosnia and Herzegovina in State administration and in pursuance
of personnel policy".

An identical provision is contained in Article 17% of the same law
relating to high political officials.
The abovefucts suggesi thut Bosnia and Herzegovina ivaspllenomeno-
logically only apparently afederal unit, luhile.substantivel~~nd rnatericilly
it ,vas ciunion of ils constitutive peoples.

Secondly, the SFRY Constitution of 1974 and the Con.stiturionof the
Socialist Republic of Bo.sniaand Herzegovinapronzulguted tlzesame year,
dejïned the right to self-determination as a subjective, collective right of
peoples. Such a provision was consigned in earlier constitutions. It derives
from the very nature of the matter. The subject entitled to self-determina-
tion is, by definition, a people. It is yetanother question that, on the one
hand, the right to self-determination is exercised on the territory in ques-
tion, and that, on the other, in the circumstances of a territorialized inter-
national community the consequences of the exercised right to self-deter-
mination are territorialized. Overlapping of the right to self-determination
and territorialization occurs, as a rule, in single-peoplecommunities, and
it follows that formulations which recognize the right to a territorial
entity are colloquial formulations. However, in multi-ethnic communities
composed of peoples provided with equal rights, a territory is exclusively
an area where equal nghts of self-determination are exercised.

Thirdly, Bosnia and Herzegovina, as afederal unit, ,vas not equipped
ivitlia rigltt to self-determination that ivouldincludethe right to secession.

Fourthly, Bosnia urzrlHerzegovina likeivisepossessed none of the clas-
sic uttributes of stutelzood ~vlzichare characteristic of federal units in
modernfederations. Although a "constitutive element of the federation"
Bosnia and Herzegovina was, in the structure of Yugoslav federalism like
other federal units, designed - both constitutionally and legally - in a
specificway. After 1963,it had dichotomic properties: on the one hand,
it possessed the powers characteristic of most of the other federal units in
contemporary federations, and, on the other, it represented the socialist

Official Gazerte of the Socialisr Republic of Bosnia andHerzegovina, No. 10 of
28 March 1991. AI'PLICAI'IODE CONVENTIONGENOCIDE (01'. UISS. KRE~A) 720

Cette solution avait aussi sa sanction légale.Le paragraphe a) de I'ar-
ticl170 de la loi relative aux amendements et aux modifications de la loi
sur l'administrationpubliq~c~~prévoyaitque

<<ledirecteur d'une administration publique et son adjoint peuvent
étrtdémisde leurs fonctions avant la finde leur mandat dans le cas
où l'exigentles critèresd'éligibilitendant à assurer la reprtscnta-
tion équitabledes peuples ...de Bosnie-Herzégovinedans l'adminis-
trationde 1'Etatet la mise en Œuvrede la politique du personnel)).

Le paragraphe a) de I'arlicle 175 de cette loi contient une disposition
analogue concernant les hautes fonctions politiques.
Onest uinsiurn~n.Pù ronclureque,d'unpointde vue ppkknomknologique,
lu Bosnie-Herzkgovine n'@toit une entiti jZde'rale qu'en uppurrnce et

qu'elle éiair,dans son essmce et dans sa réalitématérielle,!'union des
peupies qui kaconstituaient.
En deuxitme lieu, Io Constidutionde 1974 de lu Ripuhlique fédémliw
~ocialislpde Yougoslnvie et lu Constitution de lu République.suciuli,~ee
Bosnie-Herzégovinepromulguéelu même unnée déjnisj.uientle droit a
I'nutodéterrninutioncornme un droir rles pcuple.~suhjecrifet colleci$
Cette disposition étaitreprise des constitutions antérieures.Elle répind
la naturemernede la situation. Le sujet investdu droità disposer de

lui-meme est, par définition,un peuple. Mais le fait que le droitdispo-
serde soi-même soit exercé sur un ceriain territoire est touàfait diffé-
rent du fiditque, dans le cas d'une communautémultinationale disposant
d'un territoire, lesconséquencesde l'exercicee ce droit sont elles-mêmes
territorialiskes.n règlegknkrale,le droit a l'autodéterminationet I'exis-
tence d'un territoire se superposent dans le cas d'une communauté
monoethnique; ainsi les formulations qui reconnaissent le droit à une
entité territorialene sont qu'une commodité delangage. Mais dans le cas
de communautés muliieihniques, composéesde peuples dotésde droits
cgriux, leterritoire n'est que lechamp matériel de l'exercicede droits

égaux à l'autodétermination.
En troisikn~clieu, la Bosnie-Herzégovine, en mnf yu 'entitéfédkrale,
iz'avnitpas/ribénkjcedudmit d J'mtocieterrnjnnii17n,ctirnpriledroirde
sécession.
En quatriémelieu, iu Bo~nre-Hcrzkgovine ne possérduinf onplus aucun
clersaldributcluss'iquede I'Eîat qui cnracdérisentcirnritésfkdkralcs des
jEdkrcrrionsmodernes.Bien qu'ellefût «un élémenc tonstitutif de la fkdé-
ration)},la Bosnie-Herzégovine,commed'autres entitésfédéralesr ,épon-
dait siune conception constitutionnelle et juridique particulière dans le
fédéralisme yougoslave. A partir de 1963,ellea présenléunedichotomie:

d'un c6tk elle étaitdotCe des pouvoirs qui caractkrisent la plupart des
entités fédérales desfédérationscontemporaines; de l'autre colt,elle

O9Journalofficielde luRipublique ruciulbrede Bosnie-Her, Q10,du 28 mars
1991. AI'PLICAI'IODE CDWEIENTION GÉNOCIDE (OP. DISS. KRECA) 721

représentaitune communauté démocratiquesocialiste auiogérée detra-
vailleurs et de citoyens - les peuples de Bosnie-Hcrzegovine (Musul-

mans, Serbes, Croates) et les membres des autres peuples ou nationalités
vivant sur le territoire- fondéesur le pouvoir-et l'autogestion de la
classe ouvrière et de tous les travailleurs ainsi que sur la souverainetéet
l'égalité dedsroits des peuples de Bosnie-Herzégovine(article premier de
la Constitution de 1974de la RkpubIique socialiste de Bosnie-Herzégo-
vine). Cette dichotomie de la personrialiiéde la Bosnie-Herzégovinedans
l'appareil constitutior~rielde la Yougoslavie résulted'un sous-eniendu
idéologiquefondamental qui postule que I'Etat, crkütion de classe,cst un
phénomkne historique passager, incompatible avec la société socialistet
par conséquent voué i disparaître. «Désétatisation»étaitle maître mot
de la philosophie constitutionnelle de la Yougoslavie après l'érectionde
l'autogestion en micanisrne organisateur de la société: lasociete contre

I'Etat, tel étaitle parti pris politique fondamental qui s'imposait rnérne
dans la sphère du droit. La <<déstialisation)> a donné naissance à la
notion de {{travailleurset peuples)),de telle sorte que le fédéralisme,ç-
sant d'être«gouvernemental » est devenu «sociopolitique ». Le jeu entre
ces deux aspects antagonistes de la Bosnie-Herzégovinefaisait la part
belle à l'aspect ({communautéautogérke». C'est ce que font clairement
apparaître le statut constitutionnele i'autogestioncl l'appropriation par
la sociétéq,uien dkcoule,des moyens de production, fondement des rela-
tions sociales (chapitre II des «Principes fondamentaux» de la Constitu-
tion de 1974de la Républiquesocialistede Bosnie-Herzégovine). Ainsil,a
Bosnie-Herzégovine elle-mêmé etait définie comme la «communauté
démocratiquepratiquant I'autogestion socialiste» (article premier de la
Constitution de 19741,et l'Assembléecomme «un organe d'autogestion

socialisteet l'organe délibérant suprêm deans le domaine des droits et des
obligations de la communautésociopalitique» (art. 136).
Le fait que la Bosnie-Herzégovineétaitessentiellemcni une commu-
nautk de peuples s'est trouve confirmé dans le «texte consolidén de la
Constitution de Bosnie-Herzégovine,paru en mars 1993,après la procla-
mation de l'indépendance ei de la souverainetéde cette entitéfédkrale,et
confirméencore i t'écheloninternational par une séried'instruments. La
Républiquede Bosnie-Herzégovine est défini e l'article premier de ce
«tcxtc consolidé»comme un <cEtat souverain indépendant ...des peuples
de Bosnie-Herzégovine - Musulmans, Serbes, Croates et membres des
autres peuples qui viventsur leterritoire».Pour comprendre le sens exact
de cette formule, il faut la rapprocher de la disposition interprétativede
l'article69 (<<Dispositionsfinales transitoireO), ainsi libdlé:

«Le terme de «membres des auires peuples qui vivent dans la
République»et le terme de «membres des autres peuples qui vivent
sur le territoire)) utilists dans la Constitution visent les nationalités
minoritaires de la Bosnie-Herzégovine )

Letexteconstitutionnel susmentionnépriservaitlescaractéristiquesessen-
tielles que présentaitla Bosnie-Herzégovine en tant que fridérationper-722 APPLlCATlQN OF CENWIDE CONVENTION (DISS .P. KRE~A)

federation. On the basis of the principle of the "eqwalityof the peoples
of Bosnia and Herzegovina" it is stipulated tha:

"In the assernbliesof the socio-political communities, and in the
bodies elected by them of the Presidency of the Republic of Bosnia
and Herzegovina, proportional representation shall be guaranteed
to the peoples of Bosniaand Herzegovina and to the other peoples
living in it."'OU

Al1the plans for the constitutional arrangements of Bosnia and Herze-
govina submitted during the negotiations about the peaceful solution of
the conflict in Bosnia and Herzegovina start from the qualificalion of
Bosnia and Herzegovina as a community of peoples.

In the draft "Constitutional Structure for Boçnia and Hercegovina",
subrnitted by the Co-Chairmen on 27 October 1992,and on 16 Novem-
ber specificallyendorsed by the Security Council (resolution 787 (1992)
para. 1) (the so-called Vance-Owen Plan), it is said, inter aliri, that:
"(c) The constitution is to recognize three 'constituent peoples', as
well as groups of boters"' Io'.Article 1 of Chapter I of the "Constitu-
tional Arrangements of the Union of Republic of Bosnia and Herce-

govina" submitted by the Co-Chairmen Owen and Stolienberg in Sep-
tember 1993, envisaged that :
"[tlheUnion ofRepublic of Bosnia and Hercegovina iscornposed of
three Constituent Republics and encompasses three constituent

pcoples: the Muslims, Serbs and Croats, as wellas a group of other
peoples '''O2.
In the Preamble io Annex4 of the Dayton Agreement "Bosniacs, Croats,
and Serbs" are qualified as conslituent peoples (A/50/790/5/19951999,

p. 59) So it can be said that the fact that Bosnia and Herzegovina is
essentially a community of peoples is recognized on an international
plane.

3. The promulgrrrion of'Bosnia und Herzegovinu as a .~overeignSlate

59. In the part of the Mernorial entitled: "The Internationat Status of
Bosnia and Herzegovina", "(a) The alleged absence ofstatehood of Bos-
nia and Herzegovina", the Applicant, summing up ils viewsof the subject
matter, States:

"The existence of the main elements in this respect has been
summedup 6y the Arbitration Commission in its Opinion No. 11of
15July 1983 :

ItmArticle3 (1.3) of refined teofthe ConstitutiooftheRepublic of Bosniaand
Hcrzcgovina.
ln'ICFY16,Anncx 1,Sl25403.

'O2Agreement relating Bosnia and Henegouina,ICFY,Appendix1sonnelle. TIy étaitprécisé, sulra base du principe de l'«égalitdes peuples
de Bosnie-Herzégovine)}, que :

«Dans les assemblées descommunautéssociopolitiques el dans les
orgünes qu'elles élisentila présidencede la Républiquede Bosnie-
Herzégovine, unereprésentation proportionnelle est garantie aux
peuples de Bosnie-Herzégovine etaux autres peuples qui vivent sur
le territoire.loo

Tous les projets de structure constitutionnelle proposks pour la Bosnie-
Herzégovineau cours des negociations visant ütrouver une solution poli-
tique au conflit cn Bosnie-Herzégovineprennent pour point de départ
une Bosnie-Herzégovine qualifié de:communautk de peuples.
Le projet de {(Structure constilulionnelle proposée pour la Boçnie-

Hcrzégovinej> présentépar les coprésidentsle 27octobre 1992(dit «plan
Vance-Owen») et approuvéexpressémentle 16 novembre par le Conseil
de sécurité(résolution 787 (1992), par. 1j, prévoyait notamment que :
«C. Le fait qu'il existetrois grands groupes c<ethniques»(nationauxlreli-
gieux}ainsi qu'un groupe «divers>>doit être reconnudans la Constitu-
tion.» 'O'L'article premierdu chapitre premier de 1'«Accord constitution-
nel relatif l'union desRépubiiquesde Bosnie-Herzégovine» présentp ear

lescoprkçidentsOwen et Stoltenberg en septembre 1993disposait que:
«l'union des Républiques deBosnie-Herzégovineest composée de
trois républiques constitutiveset comprend trois peuples consrilu-
tifs: les Musulmans, les Serbes et les Croates, ainsi qu'un groupe

d'autres peuples» 'O2.
Le priambule de l'annexe 4 des accords de Dayton qualifie ccles
Bosniaques, les Croates et les Serbes» dc <(peuples constitutifs»
(A1501740-Sl19951999 p,.54).On peut donc conclure que le fait que la

Bosnie-Herzégovine est essentiellement une communautéde peuples est
reconnu sur le plan international.

3. La proclumafionde la Bosnie-Herzégovine en tant qnr'Efat,souverain

54. Dans la partie de son mémoirequi porte le titre :«Le statut inter-
national de la Bosnie-Herzégovine»,cca) Le prétendu défautde qualitk
d'Etat de la Bosnie-Herzégovine)>l,e demandeur résume cn ces termes sa
position sur la question:

ciLa commission d'arbitrage a constatél'existence desprincipaux
élkmentsa cet égarddans son avis no 11du 16juillet 1993:

1" Paragraphe13 de l'articldu texteconsoliddela Constitutiondla République
de Bosnic-Herzégovine
(S124795).rtdu Secrétairgénkralsurlaconfereiiceinternationalesur i'ex-Yougoslavie
'O2DUCS1263371Add1 .,app. 1. 'in a referendum held on 29 February and 1 March 1992, the
majority of people of the Republic have expressed themselvesin
füvour of a soveteign and independent Bosnia, the result of the
referendum was officiallypromulgated on 6 March, and sincethat
date, notwithstanding the drunatic events thai have oçcurred in
Bosnia and Herzegovina, the constitutional authorities of the
Republic have acted like those of sovereignstate in order to main-
tain its territorial integrity and their fulland exclusivepowers''O3

60. Two conditions should have been met to make the promulgation
of sovereignty and independence of Bosnia and i-ierzegovina legally
perfect, in the lighi of interna1law of SFRY, as follows:

first, that Yugoslav law should have provided for the right to secessionof
federal units; and
second, that the procedure prescribed by theConstitution and law should
have been observed, for,
"[wlhether the federation dissolves into two or more states also
brings into rocus the doctrine of self-detemination in the form of

secession. Sucha dissolution may be the result of an amicable and
constitutional agreement or rnay occur pursuant to a forceful exer-
cise of secession.ln the latter case, international legal rules may be
pleaded in aid, but the position would stem to be ihat (apart from
recognised colonial situations) thereis no right of self-determination
applicable to independent states that would justify the resort to
secession."'O4

61. The Yugoslav federal units possessed no right to secession (jus
secessiunis), beyond any doubt. The right to self-determination was
absolutety reserved for constitutive nations (see paras. 48-56 above).
'Inthe part relating to external self-determination, the provisions of the
SFRY constitution offer the conclusion that the right to extemal self-
determination had been fully exercised.
To begin with "the right to self-detemination, including the right to
secession"was forrnulatedin the past tense in the SFRY Constitution, as
in al! previous constitutionsof the federal Yugoslavia. Then, the right in
question was locaied in the Basic Principles of the Constitution and there
was no mention of it in the operative provisions of the Constitution.

Finally, neither the Constitution nor the law envisagedany procedure for
an exercise of the right to self-detemination. In other words, the consti-
tutive nations of Yugoslavia exercisedthe right to external self-determi-
nation at the time of the formation of the federal Yugoslavia. Once ~hey
had decided to live in a common State they dispensed with that right,
which from that time on constituted a legalmerit of existenceof the com-

'O3Memonal, para. 4.2.1.10.
M. N. Shaw,InternationalLaw, 1986,p139. {(parun référendumtenu les 29 révrieret 1"'mars 1992,la majo-

rité dela population de cette républiques'estprononcéeen faveur
d'une Bosniesouveraine et indépendante,Les résultatsde ce réfé-
rendum ont étéproclamésofficiellement le 6 mars et, quels que
soient les événements dramatiques qui ont affectédepuis lors la
Bosnie-Herzégovine,lesautoritésconstitutionnelles de cette repu-
blique se sont, depuis cette date, cornportkes comme celles d'un
Etat souverain en vue de maintenir son intégrité territorialeet la
plknitude et I'exclusivitede leurs compétences.» 'O3

60. Pour Etreparfaite sur le plan juridique, la proclamationde la sou-
verainetéet de l'indépendance dela Bosnie-Herzégovineaurait dû, en
droit yougoslave interne, rêpondre a deux conditions:
primo, que le droit yougoslave ait prévule droit de sécessiondes eniités

fédtrale;
s~cundo,que les procédures fixéesdans le droit ei la Constitution aient
étésuivies, car:
«Que la fédérationsescinde endeux Eiais ou davantage fait aussi
passer au premier plan leproblkme thkorique de l'autodétermination
sous forme de sécession.Cette dissolurion peut Etrele résultatd'un

iiccord amiable constitutionnel, ou le résultatd'un acte de sécession
par la force. Dans ce dernier cas, les réglesdu droit international
peuvent êtreinvoquées mais,hormis les cas de sujétion coloniale
reconnue, ilsemble qu'il n'y ait pas de droii 5 l'autodétermination
qui s'applique a des Etats indépendants etjustifie qu'ils recourentà
la sécession. 'O4

61. Ilest indubitablequelesentitésfédéraley sougoslavesn'avaientpas le
droit de sécession(jus secessionis). Le droit de disposerde soi-memeétait
absolument réservé aux nations constitutives(voir ci-dessuspar.48-56).
Les dispositions de la Constitution de la Républiquefkdkrativesocia-
listedeYougoslavierelativesà l'autodétermination externepermetten dtecon-
clure que le droià l'autodétermination externe avait éptéleinementexercé.
Pour commencer, «le droit de disposer de soi-méme,y compris ledroit
de fairesec es si on,^taitexpriméautemps passédans laConstitution de
la Républiquefédérative socialiste de Yougoslavie, comme dans toutes
lesconstitutions prkcédentcs de la Yougoslavie fédéraleA . ce moment-la,
le passage qui en traitait étaitsituédans les «Principes fondamentaux»
de laConstitution et lecorps du textede celle-ci n'endisait rien. Enfinni

la Constitution ni la loi ne prévoyaientde procédurepour l'exercicedu
droit de disposer de soi-mème. En d'autres termes, les nations constitu-
tives de la Yougoslavie avalent exerci. leur droit itl'autodétermination
externe au moment où s'ttait forméela Yougoslavie fédéraleA . yant
décidé de coexister dans un Etat commun, elles avaient épuisé ce droit

'O3Memoire,par,4.2.1.10.
1-9M N Shaw, InlernarionalLa1986,p 139.mon state, its validus~ilulus,but noi a living,topical right to be resorted
to at will. This does not mean, however, that the issue of the right to
external self-determination was closed for good, TI could, like other
issues, have been redefined in the guaranteed constitutional procedure.

The Constitutional Court of Yugoslavia, as the main agent securing
constitutionality and legalityin the constitutional systemof SERY, under-
scored in its decision 1U No. 10811-91(OSJiciulGazette of SFRY,
No. 83/91)that, inter alia:

"this right [right to self-determination including the right to seces-
sion] may be exercised only under condirions und In a rnainnerto be
defertnined inconfirmi~y ivith theSFRY constituta iodnthe riglit of
peoples f sev-de ferwninfion inclucling.the right lo secession -
under an enactment promulgated by the SFRY Assembly or in
agreement arnong the peoples of Yugoslavia and their republics"
(emphüsisadded).

Therefore, in the light of the relevant provisions of the SFRY Constitu-
tion, the ruling of the Constitutional Court of Yugoslavia reads as fol-
lows :

"any enactrnent of a republic thai declares the republic to bc a sov-
ereign and independent state - is an unconstitutional change of the
stateorder of Yugoslüvia, i.e., an act of secession, which,by virtue
of the decision of the Constitutional Court of Yugoslavia can havc
no legal effect"'O5.

The proposailto resolve the controversies surrounding the exerciseof the
right to external self-determination conslitlrtione arbis, nameéyvia a cor-
respondingconstitutional revision, wascontained in the "Concept for the
Future Organization of the State proposed by a Working Group com-
prising Represeniatives of al1the Republics üs a basis for further Talks

between the Republican President and the Srate Presidency".
Starting from the basic premise that
"The Yugoslavstate comrnunity, seen as a federal state of equal citi-
zens and equal peoples and their republies [footnate commentdry:
Kasim Trnka from Bosnia and Herzegovina proposed that the repub-

ljcs be placed first] and as a democratic state, will be founded on
human and civilrights and liberties, the rule of law and socialjustice",

lm Reply of theConstitutionalCourtof Yugoslaviato thequestionof LordCarrington
whetheritwas amatterof dissolutionsecessio- referredto by the ArbitraCom-
missronof ICFY, No. SU 365191. APPLICATION DE CONVENTION GENOCIDE (OP. DISS. KRE~A) 724

qui, dès lors,constituait le fondement juridique de l'existencedecei Eiai
commun - son validusrirul -usmais non un droit vivant, actuel, que
I l'on pouvait invoquer à son gré.Celane signifiepas pour aulant quela
question du droit a l'autodétermination externeait étérésoluepour de

bon. Elle aurait pu, comme d'autres problkmes, Etre redéfiniedans les
procédures constiiuiionnelles garanties.
La Cour consiitutionnelle de Yougoslavie, organe principal qui veillait
iila constitutionnalit6 et a la légalidu dispositif constitutionnel de la
Républiquefedérativesocialistede Yougoslavie, a soulignédans sa déci-
sion 1U no 108/1-91(Journalqfficielde IraRkpublique,fëdirative socklisie
dg Yougusluïie, no 83/91)que :

<<cedroit [de disposer de soi-mFmc,y compris le droit de faire seces-
sion]ne peut s'exercer~UP danslesconditinnset selon les?nodalirisqui
seront dkteiminEer colilformkmml à /u Cunslirution de 10Republique
fédéralivesociulistede Yuiagoslavieî au droit deypeuples de disposer
d'eux-m&rnesy, ycunzpri-I7a'roide fairseécession- envertu d'un acte

public promulgué par I'Açsembleed:e la Republique fédérative socia-
liste de Yougoslavie ou d'un accord intervenu entre les peuples de
Yougoslavieet leurs républiques >(les italiquessont de moi).
C'est ainsi,i la lumikrc dcs dispositions de la Constitution de 1aRépu-
blique fkdérativesocialistede Yougoslavie, qu'ilfaut lire l'arrêtrendu par

la Cour constitutionnelle yougoslave selon lequel:
«tout acte parlequel une républiquese déclareraitEtat souverain et
indépendant constitue une modification non constitutionnelle de
l'organisationde 1'Etatyougoslave, c'est-à-dire un acte de skcession

auqucl la décisionde la Cour constitutionnelle de Yougoslavie ôte
tout effetjuridique»IO5.
Il était proposéde résoudre Pacontroverse que soulevait l'exercice du
droit A I'autodktermination externe con~titnaiioneorris, c'est-à-direpar
voie dc reviçion constitutionnelle, dans les «Principes d'organisation de

1'Etatfuturproposépar le groupe de travail des reprksentants de toutes
lesrtpubliques pour servir de base aux pourparlers à venir entre le pré-
sident de laRepublique et la présidencede I'Etat».
Ce texte, qui part du postulat que:
«La communautéd'Etat yougoslave, considbée comme un Etat

fédéradle citoyens kgaux et de peuples égauxet de leurs républiqucs
[ennote :Kasim Trnka, Bosnie-Herzégovine,propose de nommer les
républiquesen premier] etcomme un Etat démocratique,sera fondée
sur les droits civilset les lib~rtésfondameniales, l'empiredu droiet
la justice sociale>),

'O5Réponsede la Cour constitutionnelle yougàsla question poséepar lord Car-
rington sur le point de savoir s'il s'agissaiten l'esplcc d'unc dissolution ou d'une séces-
sion;cile par la commission d'nrbitragc dc la conférenceinternationalesurl'ex-Yougo-
slavic,noSU365'91.the "Concept" contüins a part entitled "Proposed Procedure lor Dis-
association from Yugoslavia" which reads:

"In conneclion with initiatives in certain republics for secession
from Yugoslavia, that is, the 'disunion' ofthe country, and in view
ofthe general demand for a peaceful, democraiic and constitutional
resolution of the constitutional cnsis, the question of procedure
arises with regardto the possible realization of these initiatives.
The aim of ihe initiativesis the withdrawal of certain republics
from the Socialist Federal Republic of Yugoslavia. They are based
on bhepermanent and inulienahleright ofpeoples ro ser-delemina-
tiun und sliouldbe colastitutionallyreguluied.
The right of peoples to self-detennination, as one of the universal
rights of modern law, is set out in the basic principles of the ÇERY
Constitution.

I-loiucver,îlie realizcriionof~heright ofpeoples to secession, which
incdudesthe possibility of cerluin repuhlics' withdraivaifrom th^
SFRY, is nor reguluted by the SFRY Consfitulion. Ir i~ fherefire
necessury luamend theSFRY Constitution in order to creurea busis
fur exercising ihis righr.
Revision of the SFRY Constiiulion on these linesshould be based
on the democratic nature of the entire process of statement oviews,
the equalily ofthe Yugoslav nations, the protection of fundamental
human and civilrights and freedoms, and the pnnciple of the peace-
ful resolution of al1disputes.
In kceping with the above, appropriate amendments should be
made to the SFRY Constitution which would in a general manner

regulate the procedure for the execution of the right of peoples to
secession and thereby the withdrawal of certain republics from the
SFRY.

The amendments to the SFRY Constitution should express ihe
following commitments:
1. The right io launchthe initiative for a certain republic to with-
draw From the SFRY is vested in the Assembly of the respective
republic, except if otherwise regulated by the republican constitu-

tion.
2. A decisian on the initiative is taken at a referendum at which
the Eree,direct and secret voting of al1 citizens of the republic is
ensured.
3. During the preparations for the referendum, the public and
voters will be informed objectively and on time of the importance
and the consequences of the referendum.
4, The referendum will be monitored by representatives of
the Assembly of Yugoslavia and, possibly, representatives of nther
republics and interesied international institutions.1 APPLICATION DE CONVENTIONGENOCIDE (OP. DISS. KRECA) 725

présenteune parrie intitulée{{Projetde procédurede:dissociation de la
Yougoslavie » qui se lit comme suit:
«Les initiativesprises par certainesrépubliques pourfaire sécession
de la Yougoslavie,c'est-a-direpour se (<dissocier>u pays, et Iapres-
sante volonté générad l'apporter une solutionpacifique,démocratique

et constitutionnellea la crise constitutionnelle, soulèventla question
des procéduresselon lesquellesces initiativespourraient seconcrétiser.
Ces initiatives ont pour objet le retrait de certaines républiquesde
la République fëdérativesocialiste de Yougoslavie. Ellex .~lrppuient
.~ur le drnifpermranenf el imprescr ipfible de,s pt~upleÙ disposer
d'eux-mêmee st rlevraienierrerigiespar la Constirution.
Le droit des peuples i disposer d'eux-mémes,qui fait partie des
droits universelsen droit moderne, figure parmi les principes fonda-
mentaux de la Constitution de la Républiquefédérative socialistede
You -sl la vie.
:Pourtonr, i'e.~~rciccfu ifrroides peuples de luire skce=~sion ,ui
comporte le droit pour certaines rkpubbliquesde .sedissocier de la
Républiqujekdkrative soci~ii~~idreYougoslavie, n'es[pus rkglernenlé

par la Consrirutionde celle-ci. Ijufaudonc amender cette Consiltu-
rionafw 11) créerle5fonn'emenfsde i'cxercicede ce droit,
La revision en ce sens de la Constitution de la Républiquefédéra-
tive socialiste de Yougoslavie devrait êtrefondée sur le processus
démocratique d'expression des idées, l'égalitédes nations yougo-
slaves, la protection des libertésfondamentales et des droits civils
et de l'homme, et le principe du règlement pacifique des différends.
Conformément 5 ce qui précède,il conviendrait d'apporter a la
Constitution de la République fédérative socialistd ee Yougoslavie
tels amendements qui fixeraient d'une maniere générale la procédure
d'exercicedu droit des peuples de faire secessionet, ainsi, du retrait
de certaines républiques de la République fkdérativesocialiste de
Yougoslavie.

Les amendements à la Constitution de la Républiquefkdérative
socialiste de Yougoslavie devraient fixer les dispositions suivantes:
1. Le droit d'une républiquede prendre l'initiativde se retirede
la République fédérütivesocialiste dc Yougoslavie est dévolu à
l'assembléede la republique considérée, saufsi la constitution de
cette républiquecn dispose autrement.
2. Le sort de cettc initiative est rép:ar référendum, avecgaran-
tie de participation libre,irecte et secrktede tous lescitoyens de la
république.

3. Au cours dcs préparatirs du référendum,les populations et
l'électoratseront informés objectivementet en tempsutile de l'impor-
tance et des conséquences du référendum.
4. Le réfkrendumsera contrble par dcs représentants deI'Assem-
bléeyougoslave et,si possible, par des représentantsdes autres répu-
bliques et des institutions internationales compétentes.726 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (DES. OP. KKECA)

5. A decision willbe deemed adopted if it receivesmore than one
half of the votes ofll registered voters.
6. In reptablicspopulated bymembers of severalYugosluiinrrtions,
the necessary rnujoriîywill be estabiishedfor each Yugo.~lrrnation
sepcrratelyij one ncrtionvotes uguinst,al1settlerneuis in whichrkis
rialiorispuedotniriaaland whichbarder on the remaining territoryof
l'ugos/uviaund CU^ conxtituleit~terriiorial compactnesiwiil remain
plrrt ~he SFRY.
7. Ifthe result of the referendum is negative, the same initiative
may be launched after the expiry of a period of fiveyears.

8. The Assembly of the republic will inform the public and the
Assembly of Yugoslavia of the result of the referendum, and will
submit to the Assembly of Yugoslavia a proposal to üdopt a consti-
tutional enactment on the withdrawal of therespectiverepublic from
theSFRY, in accordance with the willof the people expressed at the
referendum.
9. The Assembly of Yugoslavia acknowledges the legality and
legitimacy of the expressed will of the people and inembers of
nations, and instructs the Federal Government ta carry out the
necessary preparations for the adoption of the enactment on with-

drawal from the SFRY.
In this context, the Federal Government is obligated to:
(a) prepare a proposal For the division ofjointly created valuesand
the property or the federation (movable and immovable prop-

erty) in the country and abroad registeredas the properiyofthe
federation; internationalobligations and clairns; assets of the
National Bank of Yugoslavia ; Foreign currency, çommodity
and monetary reservesof the federation, property of the Yugo-
dav People's Army, archives of Yugoslavia, certain infrastruc-
ture facilities, licencesandher rights and obligations ensuing
from ratified international conventions, The Federal Govern-
ment proposa1would also include issuesrelating tocitizenship,
pension and other rights of citizens and the like. Thisrequires
the establishment of cornmon responsibility for the obligütions
and guarüntees of the SFRY toward foreign countries;

(b) propose to the Assembly of Yugoslavia the manner of the elec-
tion and authorkation of a parity body or cornmittee which
will prepare a proposa1 for the division of rights and obliga-
tions and submit it to the AssembIyof Yugoslavia;
(c) prepare proposals for the territorial demarcation and the
frontiersof thefuture states and other issues of importance for
fomulating the enactment on withdrawal.

10. On the basis of the Fedcral Government proposals regarding
materia1 and territorial issues, the Assembly of Yugostavia will 5. Une décisionest rkputéeprise si plus dela moitié des&lecteurs
inscrits votent en sa faveur.
6. Drrns ie.7rk~nibiiqusù risirdendesmembresdeplusieursnations
yo~gosiaves~ la wojorilé est calculéeskparkmenrpour chacunedes
nations.SI une nation vote contre,IOU~L es ~ocuiiréOU cellenurion
est prépondéranie et quisotil limitrophedu reste du territoireyougrr-
slave el perdvens'irrtég~ed su masse terrirorialcunlinuenl defaire
parlie deIQ République jkdérnfivesociulisrede Yuugosluvie.

7. Sile résultatdu référendumesi négatif,la mêmeinitiative peut
êtrereprise à I'expiraiion d'un délaide cinq ans.
8. L'asscmblte de la république informera les populations et
l'Assembléeyougoslave des résultatsdu référendumet prksentera à
l'Assemblée yougoslave uneproposition d'acte constitutionnel de
retraitde la républiqueconsidérée dela Républiquefédérative socia-
liste de Yougoslavie, conformément à la volontéexpriméepar le
peuple à l'occasiondu référendum.
9. L'Assemblée yougoslave reconnaît la légalitCIla légitimitéde
la ~olontéexpriméepar le peuple et les membres des nations et

donne pour instructions: au gouvernement fédéralde prkparer le
retrait formel de la républiqueconsidérée de la République fédéra-
tive socialistede Yougoslavie.
A cette fin, le gouvernement féderala l'obligation de:

uJ rédigerun projet de répariiiion des intérêts et des biens com-
muns de la Fkderation (meubles et immeubles) situésdans le
pays età l'étrangeret officiellementréputéspropriétéde la Fédé-
ration; des obligations et des créancesinternationales; des biens
de la banque nationale de Yougoslavie; des devises étrangéres,
des marchandises et des réservesmonétaires dela Fédération;
des biens de l'armée populaire yougoslave;des archives de la
Yougoslavie; de certains ouvrages d'infrastructure, des droits de
licence et autres,etdes obligations découlant des conventions
internationales ratifiées.Dans ce projet, le gouvernement fédéral
règle égalemeni les questions de citoyenneté, de pensions de
retraite, de droitsvils eautres problémes du meme:ordre. Cela
implique la reconnaissance d'une responsabilitécommune dans

les obligations etles assurances par lesquelles la Rkpublique
fédérative socialisee Yougoslavie estliée à des pays étrangers;
bJ proposer l'Assemblée yougoslaveles modalitésd'électionet le
mandat de l'organe ou comitéparitaire qui sera chargé deredi-
ger un projetde répartitiondes droits etdes obligations et de le
présenter àl'Assembléeyougoslave;
c) proposer la dklimitation des territoires et la démarcation des
frontières des futurs Etats et la solution des autres grands pro-
blémessoulevéspar l'acte formel de retrait.

10. Au vu des propositions du gouvernement fédéralconcernant
les problèmesmatérielset territoriaux, l'Assembléeyougoslave éla- formulate, with the consent of the republican assemblies, a consti-
tutional enactment (constitutional law) on withdrawal from the
SFRY which, among othea things, establishes:

- citizens'right of choice (term and manner in which citizens will
state their choice in the event of territorial changes), and the
obligation to ensurejust compensation for change ofresidençe);

- the obligation to provide judicial protection of the rights of
citizens, legal entities and members of certain nations (com-
pensation for damages resulting directly from the execution

of the right to withdrawal, etc.);
- the obligation to harmonize certain laws and other enactments
with changes in the structure ofthe SFRY;

- supervision and control of the enforcement of determined obli-
gations;
- other issueswhi~hmust be resolved by the time of the definitive
disassociation Cjudiciary,environment protection, joint ventures
and the like);

- the transitional period and the moment of disassociation from
theSFRY ."
However, Bosnia and Herzegovina did not accept the proposed "Con-
cept", as clcarlydemonstrated by the arrangements for the referendum

on "sovereign and independent Bosnia".
62. The promulgrition of Bosnia and Herzegovina asa "sovereign and
independent Bosnia" was,according to item 4.2.1.10 of the Mernorial,
composed of two elements,two actiins :
(1) a referendum held on 29 February and 1 March 1992, when the

majority of people of the Republic expressed themselvas in favour of
a sovereignand independent Bosnia ; and
(2) the officialpromulgation of the results ofthe referendum on 6 March
3942.The sovereigntyand independenceof Bosnia were constituted on
that date,inviewof the fact that accordingto Bosniaand Herzegovina:

"Sincefhatdure noiwithstanding the dramatic events that have
occurred in Bosnia-Herzegovina, the constitutional authorities of
the Republic have acted like those of sovereign State in order
to maintain its territorial integrity and thus full and exclusive
powers." (Emphasis added.)

A correct inierpretatinn of the above-quoted sialement of Bosnia and
Herzegovina leads one to the conclusion that Bosnia and Herzegovina

'06FOCUS S,~ial Issue,Janiiary 1992,pp. 31-33.

136 hPPLICAT\ON DE CONVENTION GÉNOCIDE (OP.DISS .RE~A) 727

bore avec l'assentiment des assemblées républicainesun amende-
ment constitutionnel (loi constitutionnelle) portant acte de sécession
de la République fédérative socialistede Yougoslavie; cet amende-
ment règle,entre autres questions:

- le droit des citoyens de choisir librement (conditions et modalités
de l'expression du choix des citoyens en cas de changement ter-
ritorial) et l'obligation d'accorder une justeréparation en cas de
changement de résidence;
- l'obligation de garantir la protection de la justice aux citoyens,
personnes morales et membres de certaines nations (réparation

pour les préjudices qui résultent directementde la réalisationdu
droit de sécession,etc.);
- l'obligation de mettre certaines lois et actes publics en confor-
mité avec lastructure de la République fédérative socialistede
Yougoslavie telle que modifiée;
- la surveillance et le contrôle de I'accomplissement d'obligations
déterminées ;
- les autres questions qui doivent êtrerésoluesavant la dissocia-

tion définitive(concernant notamment l'appareil judiciaire, la
protection de l'environnement, les coentreprises, etc.);
- la périodede transition et le moment exact de la séparation. »lo6

Mais il se trouve que la Bosnie-Herzégovinen'apas accepté l'optionpro-
posée,comme l'attestent clairement les arrangements pris par le référen-
dum sur une «Bosnie souveraine et indépendante».
62. La proclamation d'une «Bosnie souveraine et indépendante))avait
deux aspects qui se composaient de deux décisions, selon le para-
graphe 4.2.1.10 du mémoire:

1) un référendum tenule 29 févrieret le 1" mars 1992,àl'issueduquel la
majoritéde la population de la Républiques'est prononcée enfaveur
d'une Bosnie souveraine et indépendante;
2) la proclamation officielledes résultatsdu référendumle 6 mars 1992.
La souverainetéet l'indépendancede la Bosnie ont pris effet à cette
date, étant donnéque, selon la Bosnie-Herzégovine:

«Quels que soient lesévénements dramatiques qui ont affecté la
Bosnie-Herzégovine,lesautorités constitutionnellesdecette Répu-
blique se sont, depuis cette dute, comportées comme celles d'un
Etat souverain en vue de maintenir l'intégritéterritoriale de la

République etla plénitudeet I'exclusivitéde leurs pouvoirs. »(Les
italiques sont de moi.)
Si I'on interprète correctement la déclaration que I'on vient de citer, on

est amené a conclure que la Bosnie-Herzégovinea étéconstituéeen ((Bos-

'O6FOCUS numkrospkial, janvier1992,p. 31-33. has been constituted as "sovereign and independent Bosnia" since the
date of promulgation of the referendum results. In other words, the
. promulgation of the results of the referendum held on 29 February and
1March had a constitutive, State-making character.
63. The referendum of 29 February and 1 March asked the following:

"Are you for a sovereign and independent Bosnia and Herze-
govina, a State of equal citizens, peoples of Bosniaand Herzegovina
- Muslims, Serbs and Croats and members of other people5 living
in it?'

The referendum was called in order to "determine the status of Bosnia
and Herzegovina". The decision to cal1the referendum was taken by vir-
tue of'Article 152of the Constitution of the Socialist Republic of Bosnia
and Herzegovina, the provision of item 5, line 9, of Amendment LXXI to

the Constitution of the Socialist Republic of Bosnia and Herzegovina
and the provisions of Articles 3 and 26 of the Law on Referendum 'O7.
There can be no doubt that the Assembly of the Socialist Republic of
Bosnia and Herzegovina had the authority to cal1a referendum, in the
light of theabove-mentioned facts - both a preliminary referendum, i.e.,
a referendum for preliminary voting, and a subsequent one for the con-
firmation of laws, regulations and other enactments.
64. It is questionable, however, whether the Assembly of the Socialist
Republic of Bosnia and Herzegovina was entitled to cal1a referendum in

order to determine the status of Bosnia and Herzegovina.
Starting from a general provision that "the Assembly of SR Bosnia
and Herzegovina is exercising its rights and responsibilities on the basis
of and within the constitution and la^"'^^and abiding by the relevant
rule on the relationship between the constitution and law, we now turn to
Article 314 of the Constitution of the Socialist Republic of Bosnia and
Herzegovina which stipulates the competences of the Assembly of the
Socialist Republic of Bosnia and Herzegovina :

"The Assembly of SR Bosnia and Herzegovina shall:
(1) Decide on the changes of the Constitution of the Socialist
Republic of Bosnia and Herzegovina; submit a proposal or opinion,
or issue an approval of the changes to the Constitution of the

SFRY ;
(2) Determine the policy and decide on other fundamental issues
of relevance to the political, economic, social and cultural develop-
nient of the Republic;
(3) Consider the issuesof common interest to the organizations of
associated labour and other self-managed organizations and com-

--
'O'OJficialGUZCIIoCf ~IreSocialistRepitblicofBosnia and Herzegosit~a,No. 29 (1977)
and 24 (1991).
IonArticle313of theConstitutionof theSocialistRepublicof BosniaandHerzegovina.nie souveraineet indépendante» i la date de la proclamation des résultats
du référendum. En d'autres termes, la proclamation de ces résultatsavaii
un effet constirutif, créateurd'Etat.

63. La question poséeau reférendumdu 29 fkvrieret du 1"'mars était
la suivante:

«Etes-vous en faveur d'une Bosnie-Herzégovinesouveraine et
indépendante,Etat de citoyens égaux,des peuples de Bosnie-Herzé-
govine - Musulmans, Serbes et Croates et des membres des autres
peuples qui vivent sur le territoire4?»

Le référendum a été organisépour rtdeierminerle statut de la Bosnie-Her-
zégovine~.La décision d'y procédera étéprise en vertu de l'article 152
de la Constitution de la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovine,

de la disposition 5, ligne 9, de l'amendement LXXI A la Constitution
de la République socialiste de Bosnie-Herzégovinect des dispositions
des articles3 et 26 de la loi sur Feréférendum'O7.
11 est indubitableA la Lumièrede cequi prbcéde,que l'Assembléede la
Rkpublique socialistede Bosnie-Herzégovineavait le pouvoir de:procéder
A LITIréférendum,tant un riférendum préliminaire,c'est-A-direun rkfé-
rendlim pour une consultation préliminaire,qu'un référendumultérieur
pour confirmation des textes législatifs, réglementairest autres.

64. Mais on peut se demander si l'Assembléede la Rkpublique socia-
listede Bosnie-Herzégovineavait Icdroit d'organiser un reférendumpour
déterminerle statut de la Bosnie-Herzégovine.
Prenant pour point de départ la disposition d'ordre généralvoulant
que «l'Assembléede la Républiqiie socialiste de Bosnie-Herzégovine
exerce ses droits et ses responsabilitéssur la base et dans le cadre de la
Constitution et de la loin et dans le respect de la rkglequi régitlesrap-
ports entre la Constitution et la loi, tournons-nous maintenant vers l'ar-

ticle 314 de la Constitutionde la Républiquesocialiste de Bosnie-I-ierzé-
govine qui prkcise les cornpetences de I'Assemblkede la Républiqu~:
«L'Assemblée de la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovine:

1) se prononce sur la modification de la Constitution de la Répu-
blique; si la Constituiion de la République fédérativs eocialiste de
Yougoslavic est modifiée,fait une proposition, émet un avis ou
donne son assentiment;
2) déterminela politique de la Rkpubliquc et rkglelesautres ques-
tions fondamentales intéressantle développementpolitique, écono-
mique, socialet çulturcl de celle-ci;

3) examine les problkmes d'intérêc tommun des organisations de
travailleurs, organismes autogéréset communautés et harmonise

'O7JouvnnlofjîcieiIn RPpub~blisociulisirlr Rcisnici-Herzégo,"' 291197et
24f1991.
IUXArticle313 de la Constitution de la Republiquesocialiste de Bosnie-Herztgovine.rnunitiesand harrnonize their relations and interests; encourage self-
management agreements and social compacts;
(4) Consider the issues in the sphere of foreign policy and inter-
national relations: approve the negotiation of international treaties

in cases stipulaicd by the SFRY Constitution;

(5) Determine the proposals, or approve arrangements for rela-
tionships to be decided on by the Assembly of the Socialist Federal
Republic OF Yugoçlavia on the merit of a proposal, namely agree-
ment by the republic assemblies;
(6) Adopt the social plan of Bosnia and Herzegovina, the buciget
of the Republic, the balance sheet, the republican global bülançe of
resources and the land development plan of Bosnia and Herze-
govina; pass the laws and olher regulations and general enactrnents;
issue authentic interpretations of republican laws ;

(7) Decide on modifications of republican borders;
(8) Determine the system of national defence in the Republic;
(9) Grünt amnesty for crirninal offencesstipulated in the law of

the Republic ;
(10) Decide on the indebtedness of the Republic and on çalling
public bans in the Republic;
(1I) Establish work organizations;
(12) Cal1a republican referendum ;
(13) Detemine the policy of enforcemenl of republican laws and
other regulations and general enactments and obligations OFthe
organs and organizations in the Republic and enforcement of the
federal and republican laws;
(14) Supervise politicallythe performances of the ExccutiveCoun-
cil and republican bodies of authority and their organizations and
issue general guidelines; supervise politically the holdcrs of public
and other social funccions, reporting to the Assembly ;

(15) Hear the opinions and proposals ofthe Constitutional Court
of Bosnia and Herzegovina concerning the protection of constitu-
tionality and legality;

(16) Hear the reports of the republican judiciary on law enforce-
ment and their performance and issue position papers on thcse
reports;
(17) Exercise public surveillance;
(18) Elect and recallthe president and members of the Presidency
of the Socialist RepubIic of Bosnia and Herzegovina and the
memberç of the Presidency of the Socialist Federal Republic of
Yugoslavia;
(19) Elect and recall the delegation of the Assembly to the
Chamber of Republics and Provinces in the SFRY Assembly; APPLlCATlON DE CONVENTIONGÉNOCIDE (OP. DISS.KRECA) 729

leurs relations et leurs intérêts; encouragela conclusion d'accords
d'autogestion et de pactes sociaux;
4) examine les problèmes que: présentent la politique étrangéreet

lesrelations internationales; approuve la négociationde traitésinter-
nationaux dans les cas prévuspar la Constitution de la République
fédérative socialistede Yougoslavie;
5) détermine lesort des propositions, ou approuve les arrange-
ments concernant les dispositions que l'Assembléede la République
fédérative socialistede Yougoslavie doit prendre A propos d'une
proposition d'accord des assemblées desrépubliques;
6) adopte le plan socialde la Bosnie-Herzégovine, le budgetde la
République, le bilanet la répartition générale des ressources de la
Républiqueet le plan d'aménagementdu territoire de la Bosnie-Her-

zégovine; adopte leslois, règlementset autres décisians publiquesde
portée généralep ;ublic les interprttations définitives des loisde la
République;
7) seprononce sur la modification des frontièresde la République;
8) déterminele systèmede dtfense nationale de la Ripublique;
9) accorde l'amnistie pour les infractions prévuespar la loi;

10) décidede l'endettement de la République et deses emprunts
publics ;
11) créeles organisations de travailleurs;
12) organise lesréférendumsrépublicüinç;

13) détermine lamise en application des lois, règlementset autres
décisions publiques de la Rkpublique et les obligations des organes
et organisations de la République, ainsique de la mise enapplication
des lois de la République etde la Fédération ;
14) assure le contrdle politique des décisionsdu conseil exécutifet
des organes d'autoritéde la Républiqueet de celles de leurs subdi-
visions politiques et donne des orientatioris gtnérales; assure le
contrôle politique des titulaires des chargespubliques et autres fonc-
tions sociales qui sont responsables devant elle;
15) se saisit des avis et des propositionsde la Cour consiitution-
nellt de Bosnie-Herzégovinequi ont trait A la protection des prin-

cipes constitutionnels et de la légalité;
16) se saisit des rapports de l'appareiljudiciaire de la République
relatifsà l'application des loiset aux résultatsobtenus et, publie des
notes de principe sur ces rapports;
17) veilleiil'ordre public;
18) élitet destituele présidentct les membres de la présidencede
la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovineet le membre de la
présidencede la République fédérative socisrlisiede Yougoslavie qui
la représente;
19) élitet destitue la délégation del'assembléeAla chambre des

républiqueset des provinces de l'Assemblée de la Républiquefédé-
rative socialisie:de Yougoslavie;730 APPI~ICATLONOF GENOCIDE CONVENTION (nrssOF. KRE~A)

(20) Elect and recall the President and Vice-President of the
Assembly, membersof commissions, cornmitteesand of other bodies
of the Assembly ;
(21) EIeci and recall the President and members of the Executive

Council, the President and Judges of the Constitutional Court of
Bosnia and Herzegovina, the President and Judges of the Supreme
Couri of Bosniaand Herzegovina and other courts siipulated by law
and rnembers of the Council of the Republic;
(22) Appoint and recali republican Secretaries and other execu-
tives of the republican bodiesof authority and organizations acting
in the spheres of interest of the Republic; the republican Social
Attorney of Self-management,the Secretary-General and çecretaries
of the Assembly, the Republican prosecutor, the Governor of the
National Bank of Bosnia and Herzegovina and other officials,mem-
bers of decision-making bodies and members of managing bodies of
the organizations stipulated as such by this constitutionand the law;

(23) Decide on the extension of terms of officeof the delegütesto
the assembliesof soçio-political communities;
(24) PerTormother Functionslaid down in the presentConstitution.
The Assembly may pass daçlarations, resolutions and recommen-
dations."

The provision of paragraph 12of Article 134of the Constitution entitling
the Assembly "to call a rcferendum" means that the Assembly is to ciill
the referendum on issuesfalling within its competence.The need for such
an intcrpretation is found intheLaw on Referendurn which says that the
'%ssembly of SR Bosnia and Hcrzegovina may calla referendum on
issuesfallingwithin its purview" (Art.26 of the Law). The formulation of
the referendum question clearly indicates the intention of cliangin,gthe
siatus of Bosniaand Herzegovina in terms of public law. The rrtrioof the

referendum was to transform Bosnia and Herzegovina frorn a federal
unit within the Yugoslav fcderation into "sovereign and independent
Bosnia" as the referendum qucstion reads. If this were no1 the casethe
referendurn would have been devoid of any purpose in view of the fact
that certain elements of statehood inherent to the Yugoslav mode1 of
federalism were accorded to Bosnia and Herzegovina at the tirne when
the referendum was called.
The purpose of the referendum question was, in the strictly formal
legalcontext, 10 determine the statuç of Bosnia and Herzegovina in terms
of public Iaw.Hence, the purpose of refercndum was contrary both to the
Constitution of Bosnia and Herzegovina and the Constitution of SFRY.
More particularly, the Constitution of Bosnia aiid Herzegovina stipulates

in Article 1(2) that the Socialisi Republic of Bosnia and Herzegovina is
a part of SFRY. The Constitution of SFRY defined the federation as "a
federal state. . .of socialist republics(Art. 1 of the Constitution), one
memher of which, besidcsother republics, was the Republic of Bosnia
and Herzegovina (Art. 5 (1) of the Constitution) and provided thüt the 20) élitet destitue son présidentet son vice-président, ainsique les
membres de ses commissions, comiies et autres organes;

21) élitet destitue leprésidentet les membres du conscil exécutif,
le présidentet les juges de la Cour constitutionnelle de Bosnie-Her-
zégovine,le président et les juges de la Cour suprême deBosnie-

Herzégovine ci des autres tribunaux désignés par la loi ainsi que les
membres du Conseil de la République;
22) nomme ei destitue les secrétairesde la Républiqueet autres
responsables des organes etorganismes d'autoritéde la République
qui agissent dans les domaines de compétence dela République; le
procureur social de la République pour l'autogestion, son secrétaire
génkralet ses secrétaires,Ic procureurde la République,le gouver-
neur de la banque nationale de Bosnie-Herzégovineet les fonction-
naires de celle-ci,les membres desorganes directeurs et administra-
tifs désignes cette fin par la Constitution et palaloi;
23) décide de la prorogation du mandai des représentants des
communautés sociopolitigues aux organes délibérants;
24) assume toute aulre fonction que prévoitla Constitulion.

L'Assernblécpeut adopter des déclarations,des résolutionset des
recommandations. »

Le paragraphe 12de l'article 134de la Constiiution, qui donne a 1'Assem-
blie le droit d'<<organiserun réftrendum~ signifieque l'Assembléepeut
procéderpar voie de réfkrendurnpour trancher les questions relevant de
sescompétences.Cette interprétations'imposesil'on seréfkreau texte de
la loisur le référendum,qui préciseque «l'Assembléede la République
socialistede Bosnie-Herzégovinepeut organiser un référendumsur les
questions relevant de ses compétences» (art. 26).La manière dont la
question proposte au référendum a été formulé meontre clairement qu'il
s'agissaitde mod~$er le statut de la Bosnie-Herzégovirie en termes de
droit public. L'objet du référendum étaid te faire de la Bosnie-Herzégo-
vine,entitCfédérale de la Fédérationyougoslave,une (<Bosniesouveraine
etindépendante»,pour reprendre la formule employée. Sinon,le reféren-
dum n'avait aucun sens, puisque certains attributs de 1'Etat propres au
modkle fediral yougoslave avaient dejh ktéreconnus à la Bosnie-Herzk-
govine au morncnt du référendum.
Lü question poséeavait pour but, sur le plan juridique purement for-
mel, de déterminerle statut de la Bosnie-Herzégovine endroit public,ce

qui étaitdonc el1contradiction àla fois avecla Constitution de la Bosnie-
Herzégovirie et avec celle de Ia Républiquefédkrativesocialiste deYou-
goslavie. Pour êtreplus précis,la Constitution de la Bosnie-Herzégovine
prévoit au paragraphe 2 de son article premier que la Republique fait
partie de la Republique fédtrativesocialistede Yougoslavie. La Constitu-
iion de celle-cidéfinitla Fédérationcomme <<unEtat fédéral ..de repu-
bliyues socialistes»(art. l), au nombre desquelles figurela Republique de
Bosnie-Herzégovine(art. 5,par. 11etprevoit que «la frontikredela Répu-"frontier of the SFRY cannot be changed without the consent of al1the
repubIics7'(Art. 5(3) of the Constitution). Obviously, in terms of the rele-

vant conslitutional regulations, the very fact of caIling a referendum on
the status of Bosnia and Herzegovina constituted a potential rhreat to the
territorial integrity ofSFRY protected by the SFRY Constitution, or
more particularly, an act incriminated by the Penal Code of SFRY.

The very promulgation of the "sovereignty and independence" of
Bosnia and Herzegovina on the basis of the referendum held, constituted
a threat to the territorial integritof the SFRY.

65. The üct of Iaunching a referendum in order to "detesmine the
status of Bosnia and Herzegovina" was formally and materially
unconstitutionaI.

Elernents of forma1 unconstitutionality are dernonslrated by the fact
that the Assembly of the Socialist Republic of Bosnia and Herzegovina
cnlled a referendum which felloutside its constitutionally and legallylim-
ited jurisdiciion.In concrefo, this is a case of specificnon-cornpetence,
because the organ othenvise campetent ta cal! a referendum, having
called a referendum on the "status of Bosnia and Herzegovina", had
acted ultra vires.At the same time, callinga referendum on the "status of
Bosnia and Herzegovina" constituted an unconstitutional act in the
material sense (material unconstitutionality), because the building of
Bosnia and Herzegovina as a "sovereign and independent" State, taken
PPT se, was contrary to the SFRY Constitution. More particularly, the
"sovereignty and independence of Bosnia" rneans an automatic modifica-
tion of the State Frontiersof SFRY, while by virtue of the SFRY Coir-

stitution the State territory isbut one (Art. (1) of the Constitution} and
"the frontier of SFRY cannot be changed without the consent of al1
rtpublics" (Art. 5 (3) of the Constitution). Moreover, calling a referen-
dum was materially unconstitutional in terms of the Constitution of Bos-
nia and Herzegovina itself, Amendment LXX to the constitution of the
Socialist Republic of Bosnia and Herzegovina established, inirs para-
graph 10: a Council entrusted with the exerciseof ~heright to equality of
nations and nationalities of Bosnia and Herzegovina. The mandate of the
Council is inter ariato "consider in particulür the questions relating to
. ..the promulgation of regulations ensuring the rnaterialization of con-
stitutional provisions whiçh provide explicitly for the principleof equal-
ity of peoples and nationalities". The Council is cornposed of an

"equal number of deputies from among the ranks of mernbers of
peoplesof Bosniaand Herzegovina - Muslims,Serbsand Croals, and
a corresponding number of deputies rnembers or other people and
nationalities and the others who livein Bosnia and Herzegovina",

who are to take decisions "on the ment of agreement of members from
among the ranks of al1peoples and nationalitics". APPLICAïiON DE CONVENTIONG~NOCIDE (OP. DISS. KRECA) 731

blique fédérativesocialiste de Yougoslavie ne peut etremodifiéesans le
consentement de toutes les républiques»(art. 5, par. 3). 11va sans dire

que, du point de vue constitutionnel, le simple fait d'organiser un réfk-
rendum sur le statuit de la Bosnie-Herzkgovineétait une menace pour
l'intégritéterritoriale de la République fédérativs eocialiste de Yougo-
slavie, garantie par la Constitution de celle-ci et, plus prkcisément,un
acte incriminépar le code pénal yougoslave.
La proclamation de l'indépendanceet de la souveraineté dela Bosnie-
Herzégovine surla base des résultatsdu référendumconstituait en elle-
mêmeune menace pour l'intégrité terriloriale de la Républiquefédérative
socialistede Yougoslavie.
65. L'organisation d'un réferendumpour «déterminer le statut de la
Bosnie-Herzégovine»étaiten lui-mêmecontraire a la Constitution la
fois sur le plan de laforme el du fond.
Son inconstitutionnülitéformelle apparaît notamment dans le fait que

l'Assembléede la Républiquesocialistede Bosnie-Herzégovinea organise
un réferendum pourlequel elle n'ktait pas compétenteselon la Constitu-
tion et selon la loi,In concreto.il s'agissait d'un cas précisd'incompé-
tence, puisque l'organe qui aurait étéautrement compétentpour organi-
ser ce référendumavait mis en question le ({statutde la Bosnie-Herzégo-
vine» et ainsi agiultra vires.D'autre part, organiser un référendumsur le
{(statutde la Bosnie-Herzégovine»étaitaussi contraire ijla Constitution
au fond, puisque la formation de la Bosnie-Herzégovine enEtat «souve-
rain et indépendant»etait, en tant que telle, contraire a la Constitution
de la République fédérativs eocialistede Yougoslavie. Plus précisément,
lesattributs de «souverainetéet d'indépendance ))de la Bosnie-Herzégo-
vine portaient en eux-mêmes une modification defsrontièresd5Etatde la

Républiquefédérative socialistd ee Yougoslavie, alors que, selon la Cons-
titution de celle-ci,Icterritoire de 1'Etat Formeune seule entité (art. 5,
par. 1)et que <<lafrontiérede la Républiquefidérativesocialiste de You-
goslavie tic peut êtremodifiéesans le consentement de toutes les rEpu-
bliqueç~ (ibid., par.3).De surcroit, le référendumest fondamentalement
contraire a la Constitution de la Bosiiie-Herzégovineelle-mêmeL . 'amcn-
dement LXX apportéàcelle-ciprévoiten son paragraphe 10 la création
d'un conseil charge d'exercer le droità l'égalitédes nations et des natio-
nalitésde Bosnie-Herzégovine. Ce conseil a notamment pour mandat
d'«étudieren particulier lesquestions liées à ..la promulgation des règle-
ments donnant effet aux dispositions çonstitutionnelles qui consacrent
explicitement le principe de l'égalitédes peuples et des nationalités)).Ce
conseil se compose

({d'unnombre égalde députeschoisisparmi lesmembres des peuples
de Bosnie-Herzégovine - Musulmans, Serbes et Croates, el d'un
nombre proporlionné de députéschoisis parmi les autres peuples,
nationalitéset autres groupes qui vivent en Bosnie-Herzégovine»,

qui doivent prendrc leur décision<<surla base de l'accord desmembres
issus de lous les peuples et de ioutes les nationalités)}. The ralio legis of Amendment LXX (10) certainly liesin ensuring and
guaranteeing the equality of peoples. The significance attached CO the

Council, within the constitutional system of Bosnia and Herzegovina, is
amply demonstrated in paragraph 10,which says that
"in questions of interest to the exercise of equality of peoples and
nationalities inB-H, at the propasal of the Council, the Assembly

shalldecide, by means of a specificprocedure set out in the Rules of
Order of the Assembly of the Socialist Republic Bosniaand Herze-
govina, by a two-thirds majority of the total number of deputes".
The Council was designedby the Constitution as an unavoidable instance,

a forum where deliberations were concentrated and proposals originated
for the equality of peoples. In view of these facts, the proposa1 to cal1a
referendum on the "status of Bosnia and Herzegovina" must have been
an issue for consideration by ihe Council, as this is the question that
dircctly infringed upon "the principlesof equality among peoples and
nalionalities".
The circlç of formal and material unconstitutionality encompasses also
Ihe act of "oîïîcial promulgation of the results of the referendum
on March 6, 1992". The qualification of "ofieial promulgation" invokes,
m~iluti.mutunth, the relevanceof the facts corroborating the formal and
material unconstitutionality of calling the referendum on the status of
Bosnia and Herzegovina.

The referendum on the "status of Bosnia and Herzcgovina" falls into
the category of the sa-called preliminary referenda In the constitutional
regulütion of the SocialistRepubric of Bosnia and Herzegovina, sinccthe
purpose had been a preliminary voting of citizenson the relevant issueof
the ssatus of Bosnia and Herzegovina. ïhat is why the "officia1promul-
gation of the results ofa referendum" is, actually, a legal act. More par-
ricvl:irly, votingof citizens i11a referendum is no decision in forma1
terms, irrespective of whether the result of the voting is or is not binding
an the organ whichcalled the referendum. The result of the refcrendum is
a material condition for decision-making in formal terrns and this is, in
the present case, the nature of the "officia1promulgation".
Sucha legal nature of the "official promulgation" of a federal unit of
Bosnia and Herzegovina as a "sovereign and independent" State consti-
tutes an additional aspect of material unconstisutionality in respect to the
relevant decisions ofthe Constitution of the Sociatist Republic of Bosnia

and Herzegovina. More particularly, Article 252 of that Constitution
stipulated that the:
"[slacred and inalienable right and responsibjlity of peoples and

nationalities. . . of Bosnia and Herzegovina is to safeguard and
foster freedom, independence, sovereignty, territorialunify and ~hr
ronsfitutionaliyesrablis/~edsocialsystem ofrheSFR Y and theSocial-
t'sRepuhlic Bosniu and Herzegovina" (emphasis added). APPLICATION DE CONVENTION G~~NOCIDE (OP.DISS.KRE~A) 732

Sur le plan juridique, le paragraphe 10de cet amendement LXX vise

assur6ment igarantir l'égalité des peuplesL .'importance du conseil dans
l'appareilconstjtutionnel de la Bosnie-Herzégovineapparaît trés claire-
ment au paragraphe 10, où il cst dit que

«pour lesquestionsconcernantI'exercicedu droit àl'egalitdespeuples
etdesnationalitésde la Bosnie-Herzégovine 1,'Asscmbléperend sesdéci-
sions,sur propositiondu conseil,selon uneprocédureparticulikrefixée
dans Itrèglementde l'Assembléd ee laRkpubliquesocialistede Bosnie-
Herzégovine, i lamajoritédesdeux tiers desdéputéq sui lacomposent P.

Dans la Constitution, le conseil Était conçu comme une instance obligée,
un lieu où pouvaient se tenir les délibérationset ou les propositions ten-
dant à l'égalité des peuplepsouvaient puiser leur origine. La proposition
d'organiser un référendum sulre «statut de la Bosnie-Herzégovine»fai-
sait ainsi partie des questions que le conseil avait à examiner, car elle
avait un effet direct sur «le principe de l'égalitentre les peuples et les
nationalités)}.
Le champ de cette inconstitutionnalité iila fois formelle et rnatknelle
s'Clendaussi à l'acte de «proclamation officielledes résultatsdu référen-

dun?, le 6 mars 1992)). Le terme de <cproclamationofficielle» évoque,
nzutnfismutundis, l'importance des faiis qui constituent l'inconstitution-
nalité formelleet matérielledu référendum.

Le réftrendum sur le {(statut de la Bosnie-Herzégovine»releve de la
catégoriedite des réfkrendumspréiliminaires dans l'organisation constitu-
tionnelle de la République sociüliste de Bosnie-Herzégovine,puisqu'il
s'agissait de consulter les citoyenà titre préliminairesur le statut de la
Bosnie-Herzégovine.C'estpourquoi, la c<proclamationofficielledesrésul-
tats du réfkrendum»est en fait un acte juridique. Plus pariiculièrement,

la rkpartition des voix lors d'un référendumn'estpas un fait rormel, que
le résultat decetterépariiiion s'imposeou non à l'organe qui a organise
le référendum.Ce résultat est la condition matériellequi rend possible
l'acte formel. Tellc esi, en l'occurrence, la nature de la «proclamation
officielle.
Ainsi definie, la position juridique de:la «proclamation officielleude
l'entitéfédéralede la Bosnie-Herzégovine entant qu'«€rat souverain ei
indkpendant})est, sur leplan matériel, uneinconstitutionnalitéde plus au
regard des dispositions pertinentes de la Constitution de la République
socialiste deBosnie-Herzkgovine.Plus particuliérement, l'article 252 de
cette constitution disposeque:

«les peuples et les nationalites ... de Bosnie-Herzégovineont pour
droit et devoir sacrésel inaliénablesde sauvegarder et de promou-
voir la liberté,?ndkpendance, la souveraineté,l'irttégrillerriloriule

et le système social Etuhlipar lu Constitutionen RGpuhiique fid&t.ru-
fivesocialistede Yougoslavie et duns laRépuhliyue sociuii.~.reBos-
nie-H~rïPgovine~(les italiques sont de moi).733 APPLICATION OF GENOCIDE CONVEMrION (DISS. OP. KRE~A)

Item 7 of Amendment LXIX to the Constitution of the SocialistRepubli~
of Bosnia and Herzegovina provided that: "Political organizations and
acts aimed at the forcefulchangeof the constitutionally estüblished system,

and fhreaisfo fhe ferritoriul uniryundindep~ndenceofSFR 1"' (emphasis
added) are prohibited. Both of the constitutional provisions rnentioned
above incIude "territorial unity" as a constitutionally protected objecl
while "officialpromulgation" is a form of direct threat to that object.

66. The referendum for determination of the status of Bosnia and
Herzegovina was called in the form of a referendum of citizens.This fact
derivesfrom the rnethod of voting at the referendum, which remained un-
disputcd by Bosnia and Herzegovina, as it stated in its Mernorial, in the
context of the promulgation of its sovereignty and independence (Memo-
rial, para.4.2.1.10), ilmrealir~,that "the majority of the people of the
Republic" voted positivelyon the referendum question. The use of the
term "'people" inthe singular undoubtedly suggests that Bosnia and

Herzegovina is also of the viewthat this was but a civic referendum.
Was a civicreferendum, in the forrn of a dire~texpression ofthe will of
citizens, quite apart Erom the questions elabornted in items 5 and 6, a
good way in which to decide the "status of Bosnia and Herzegovina"?
Civic referendum is, per dcjÎnitionem, a form of the exercise of national
sovereignly, that is tosay. the rule of the people as Dernos. Since ihree
peoples exist in Bosnja and Herzegovina and are provided with the:right
to self-determination, itis indisputable, irrespective of the reasons stated
in paragraphs 5and 27 of this opinion, that the form of civicreferendum
isabsolutely inadequate to express the will of each of the three peoples.
In sorne sort of ultimately strained hypothesis that "sovereign and inde-
pendent Bosnia" was voted for by such a majority ofcitizens cmbodyiiig
the majority of each of the members of thethree peoples, it might be said

that a civicrefetendum çansummated the national referendum, although
par se it was not such a referendum. But that was not the casc, as is
known. In view of the facl that al1the three peoplesof Bosnia and Herze-
govina are, by virtue of the Constitution of Bosnia and Herzegovina,
"sovereign and equal", a national referendurn is only relevant for the
direct exercise ofthe right to self-delermination. A separate exercise of
the righttu self-determination could have beenünticipaled bymeans of a
corresponding decision taken by elected representatives of the three
peoples of Bosnia and Herzegovina, particularly as in 1990,democratic
rnultiparty electionswere heldin Bosnia and Herzegovina. Maps of con-
stituencies correctly mirrored the ethnic structure ofBosnia and Herze-
govina sirice the national parties of the three peoples individually
gathered practically all the votes of their national corps.
The referendum was an inadequate form of voting on the "status of

Bosnia and Herzegovina" not only beçause of'thc reasons reIating to its
constilutionalily and essential inability to express the will of the three
peoples of Bosniaand Herzegovina, but bccause of the very provisions of
the Law on Referendum on the basis of which il was helù.Le point 7 de l'amendement LXlX de la Constitution de la République
socialiste dcBosnie-Herztgovine dispose:que: {(Lesorganismes et actes

politiques qui visentA modifier par laforce le systèmeconstitutionnel et
/es menaces contre l'intégrité territoriaet l'indépendancede la Ripu-
hlique Jedératisv ocialistede Yuugoslu vi~>>sont interdits (lesitaliques
sont de moi). Ces deux dispositions constitutionnelles font de l'«intégrité
territorialen l'objet placé sl'égidede la Constitution, alors que la «pro-
clamation officielle» estune faqon de menacer directement cet objet.
66. La consuEtationsur le statut de la Bosnie-Herzégovine a étéorga-
niséesous forme de rkfkrendum.Tellea étéla méthodede scrutin, que la
Bosnie-Herzégovine n'ajamais contestée, puisqu'elle a dit dans son
mémoire, à propos de la proclamation de la souverainetéet de I'indtpen-
dance de la République(mémoire,par. 4.2.1.IO),que «la majorité dela
population» a répondu parl'affirmative i la question posée. L'emploidu
terme «population» au singulier montre indubitablement que la Bosnie-
Herzégovine penseelle aussi qu'il s'agissaitn l'occurrence d'uneçonsul-
tation publique.
On peut se demander si le référendum public, c'est-à-dire l'expression

directede la volontédes citoyens,indépendammentdes questions qui font
l'objet despoints5 et 6, offrail un moyen appropriéde déciderdu «statut
de la Bosnie-Herzégovine)). Un référendum estpar définition unmode
d'exercicede la souveraineté nationale,c'est-à-diredu pouvoir du peuple
en tant que ~EPP~C OSm. me il existe en Bosnie-Herzégovine trois peuples,
chacun investidu droit de disposerde lui-m&me,ilest indiscutable, quelles
que soient les raisons exposéesaux paragraphes 5 et 27 de la présente
opinion, que le mécanisme du riférendurnpublic est totalement impropre
5exprimer-la volontéde chacun de cestrois peuples. Si,hypothèsede pure
conjecture, une majorité de citoyens représentantla majoritt de chacun
des trois peuples, avaitvote en faveur d'une «Bosnie souveraine et indé-
pendante}),on aurait pu dire que le référendumpublic revenait essentiel-
lement iiun rérerendurn national, bicn qu'il n'en fût pas uen lui-mime.
Mais, on le sait, tel n'a pas étélc cas. Comme lestrois peuples de Bosnie-
Herzégovinesont, selon la Constitution du pays, (<souverainset égaux>>,
un référendumnational ne peut avoir de pertinence qu'en ce que s'y

exerce directement le droittti'autodétermination.Le droit à disposer de
soi-m&meaurait pu êtreexerce diffkrcmment, par anticipation, par deci-
sion des represenzants élus des trois peuples dc Bosnie-Herzégovine,
d'autant qu'en 1990des électionsdémocratiquespluralistesavaient eu lieu
en Bosnie-Herzégovine.Les tableaux représentant la distribution des
circonscriptions étaientle reflet exactde la structure ethnique du pays
puisque lespartis nationaux des trois peuples ont, chacunde son côte, re-
cueillila quasi-totalitédes votes de l'entiténationale qu'ilsreprésentaient.
Un référendum n'était paasppropriépour se prononcer sur le «statut
de la Bosnie-Herzégovine)>n ,on seulement du point de vue de la consti-
tutionnalité,puisqu'il nepermettait a la volontédes crois peuplesde Bos-
nie-Herzégovine de s'exprimer,mais aussi du point de vue dc la loi même
sur le rtfkrendlim sur la base de laquelle il avait 6te organisé. The provisions of the Law on Referendurn of Bosniüand 1-Ierzegovina
taken per JP arc certainly not formulaied ço as to imply the possibility
of deciding "on the status of Bosnia and Herzegovina" by means of a
referendurn, as designed by the Law.
Apart from the general provisions on calling the referendum already
discussed in paragraph 5 of this opinion, the provisions concerning ihe
method of decision-making and the individuals participating in ihe

voting are also of relevance.
Article 33 of the Law stipulales that the
"decision on referendum is io be taken by a majority vote of'al1
working people and citizens registered as voters in the territory
or part of the terriiory of SR of Bosnia and Herzegovina where the

refcrendurn is called".
The decision at the referendum is to be taken by majority vote. Leav-
ing aside the issue of the lcgality of a referendum, a logiral question
arises, i.e.,whether a valid issue,such as "the status of Bosnia and Herze-
govina", may possiblybe decidedby simplemajority. The rational reason

underlying this question relates Io the fact that the Constitution of ihe
Sacialisl Republic of Bosnia and Herzegovina stipulated voting of at
least two-thirds of the total number of voters of the Socialist Republic of
Bosnia and Herzegovina on the question of a change of borders of the
Socialist Republic of Bosniü and Herzegovina (Amendment LX11 to Ar-
ticle 5 of the Constitutionlog).In other words, the constitutionaI require-
ment for the correction of indirectly determined lines ofadministrative
division within the federation was a Iwo-thirds majority, whilethe Law on
Referendum required a simple majority for the decision on the status of

Bosnia and Herzegovinain Lemsof public law. Thisis, in my view, suffi-
cient proof that the legislatordid not, when passingIhe Law on Referen-
dum (either irrespectiveof the Constitution of the Socialist Republic of
Bosniaand Herzegovina or just relyingon the Constitution of theSocialist
Republic of Bosnia and Herzegovina), have in mind a referendum of that
kind. More particularly, it isdifficult lo imagine that the legislalor would
lay down much stricter requirements fora referendum on the change of
borders, which i11the practice of the Yugoslav federal units was nothing
but a couple of hectares of Pasture lands, forests or villages, than
for a referendum on the fateful, existential question of the very federal
unit.

The Law on Referendum also slipulated that "al1workii~gpeople and
citizens included in voters' listsin the lerritory, narnely that part of ter-
ritory of SR B-Hwhere referendum shall~akeplace", shall have the right
tu vote in the referendum (Ari. 33 of the Law). Such a provision raises
the question aboui who in f%ctwas voting at the referendum. The provi-
sion entitling "ail working people and citizens" to vote means that the
criterion ofeligibilitto vote was not citizenshipin the rcpublic. The only

'OYOSficruI azeleofthe SociulzxrRepubliç OJBusniaand Herzegouit~a,No. 21(1990)

143 Les dispositions de Ia loi sur le référendum deBosnie-Herzégovine,si
on les considèreen elles-memeset tellesqu'elles sont formulées, interdi-
sent de conclure que l'on peut déterminer{<leslatui de la Bosnie-Herzé-

govine~ par voie de réfkrendum.
Ouire:lesdispositions d'ordre général relatives l'organisation du réfé-
rendum déjà évoquéea su paragraphe 5de la présentcopinion, ilfaut exa-
miner ici cellesqui concerneni les modalitésde la prise de décisionet la
qualitédes personnes participant au scrutin.
L'article 33 de la loi dispose que
«la décisiond'organiser un référendumesi prise i la majoritédes
travailleurs et des citoyens inscrits sur les listes électoralesdans

territoire ou lapartie du territoire de la Rtpublique socialiste de
Bosnie-Herzégovineoù se tient le référendum>>.
La décisionsur laquelle porte le riferendum est donc prise à la majo-
rité.Si l'on met de cotéle problèmede la lkgalitéde la consultation elle-
meme,il reste encore isedemander si unc question légitime,coinme celle
du «statut de la Bosnie-Herzégovine»,peut tire tranchéea la majorité

simple.On est fondé As'interroger quand on gai1que la Constitution de
la Républiquesocialistede Bosnie-I-Ierzégovinv eeut que lesdeux tiers au
moins de l'électoratde la Républiquesocialiste de Bosnie-Herzégovine
soient d'accord pour qu'il y ait modification des frontiéres dela Repu-
blique (amendement LX11a l'article 5 de la Constituti~n)'~~.Ainsi, la
Constitution exige une majoritédes deux tiers pour corriger le tracé:des
subdivisions administratives de la fédérütion:déterminées demanière
indirecte, alors que la loir le réferendumn'exigeque la majoritésimple
pour déciderdu statut de la Bosnie-Herzégovine endroit public. Cela suf-
fita mon avis A montrer que le législateur,lorsqu'il a adoptéla loisur le
réferendum(soit qu'il n'aitpas tenu compte de la Constitution de la
République socialiste de Bosnie-Herzégovine,soit qu'il ait simplement
pris appui sur elle), n'avait pas dans l'esprit un réferendum de cette

nature. Pour êtreplus clair, ilst difficiled'imaginer que le législateuse
soit montréplus exigeant pour un référendumsur un trace de frontières
- qui, dans la pratique des entitésfédérales yougoslavesn ,e conc~rnait
rien de plus que quelques hectares dc phturages et de forêtsou quelques
villages- que peur un référendumsur la question de portée historique
de l'existencememe d'une entitt fédérale.

La loi sur leréférendumprtvoyait égalementque «tous lestravailleurs
et lescitoyens inscritssur lesistesélectoralesdu territoire, c'est-à-dire la
partie du territoire de la Républiquesocialistede Bosnie-Herzégovineoù
setient le référendum »,ont ledroit de participer celui-ci(art. 33).Cette
disposition soulève la question de savoir qui participe effectivement au
scrutin. La disposition donnant à ((tous les travailleurs et tous les

citoyens)) le droit de vote signifie que la qualitéd'électeurn'étaitpas

'O9Journuofficiedc lu Aipubliquesocialiste de Bosnrc-Hcrzrgovine,vol 21, 1990.criterion was residence,since itwas a condition of enlistment for voting.
Hence, the righi io vote in the referendum was, for instance, accorded to
Slovenes or Macedonians, who had a residencc in Bnsnia and Hcrze-
govina, whlleMuslims or Serbs, citizens of Bosniaand Herzegovina, who
resided in another republic were deprived of that right.

67. Finally, from the standpoint of the Constitutional law of SFRY, it
would be hard to imagine a more rneritorious judgment on the legal
evaluation of the referendum on the "status of Bosnia and Herzegovina"
thari the one handed down by the Constitutional Court of Yugoslavia as
the main proponent of constitutionaEityand legalityin the constitutional
system of SFRY (Art. 375 of the SFRY Constitution). The Constitu-
tional Court of Yugoslavia never took up the referendum on the status of
Bosnia and Herzegovina as a separate issue. However, itmade several
rulings on the analogous acts of federal units which had prornulgated
"sovereignty and independence" before Bosnia and Herzegovina. Apar~
from the actual decisions of the Constitutional Court of Yugoslavia in
the çoncrete cases,we shall quote [rom relevant parts of the explanations
of those decisions since they extend beyond the framework of the con-
crete issue in forma[ and material terms, on which the court ruled. In

other words they constitute ameritorious legalevaluation of the highest
judicial instance in SFRY on the relevant question. In rding 1 U
No. 108/1-91(Oficlf~lGazette of SFR Y, No. 8319 11,the Constitutional
Court pointed out, inferaIia, that

"The right of peoples of Yugoslaviato self-determination, includ-
ing the rightto secession,may not, in the viewof the Consfitutional
Court ofYugoslavia, beexcrcisedby unilateral acts ofthe pcoples of
Yugoslavia, namely enactrnents of the Asscmblies of the republics
within the SocialistFederaI Republic of Yugoslavia .. . Although
the procedure for thc exercise of the right to self-determination
including the right io secession is not provided for by the SFRY
Constitution, thisdoes not mean that the right can be exercised on
the basis of unilateral actsn self-determination and secession. No
people and, more parlicularly, no assembly of a repubtic can, by
means of a unilateral act, decide on the exerciseof that right beîore

the procedure and conditions governing the procedure Lave been
jointiy determined for the exercise of that right.
A unilateral promulgation of sovereignty and independence of
republics making up the Socjalist Federal Republic of Yugoslavia
implies,in the opinion of the Constitutional Court of Yugoslavia, an
infringement upon the provisions of the SFRY Constitution con-
cerning the composition of the Socialist Federal Republic of Yugo-
slaviaand of theFrontiersof Yugoslavia as a fcderal state and state
cornmunity of voluntarily united peoples and their çocialist repub-
lics."dkterminéepar la qualité decitoyen de la République.Le seul critère était
la residence, condition d'inscription sur les Pistesélectorales.C'est ainsi
que le droit de vote étaitpar exemple accordaux Slovènesou aux Macé-
doniens qui rksidaient en Bosnie-Herzégovine,alors que les Musulmans
ou les Serbes citoyens de Bosnie-Herzégovinequi résidaientdans une
autre république enétaientprivés.
67. Du point de vue, enfin, du droit constitutionnel de la République
fédérative socialisde Yougoslavie,peut-il y avoir de décision plusauto-

riske sur la valeur juridique du référendumportant sur le «statut de la
Bosnie-Herzégovine»que celle de la Cour constitutionnelle de Yougo-
slavieelle-mêmec ,hampionne par excellencede la constitutionnaliiéetde
la légalitédans le systémeconstitutionnel de la République ftdkrative
socialiste de Yougoslavie (article 375 de la Constitution de celle-ci)?La
Cour n'ajamais examine à part le référendumsur le siatut de la Bosnie-
Herzégovine. Mais ellea rendu plusieurs décisionssur les actes dmmême
ordre pris par lesentitésfédéralequi sesont proclamées{csouveraineset
indépendantes)) avant la Bosnie-Herzégovine.Laissant de cBtéles deci-
sions effectivement rendues par la Cour dans cescas concrets, nous ren-
verrons à ccrtains passages de leurs attendus dont la port& dépasse,par
la forme et par le fond, l'espècesur laquelle la Cour se prononçait. En
d'autres termes,ces passages offrent une analyse juridique valable, éma-
nant de l'instance juridictionnelleupreme de la République fédérative
socialiste de Yougoslavie surla question. Dans son arrêtIU no 108/1-91

(Juuraul oJjcie de lai Républiquefédéralisv uciailislede Yougoslavie,
no 83/91),la Cour constitutionnelle a fait notamment remarquer que:

«Le droii des peuples de Yougoslavieà disposer d'eux-mêmesq ,ui
comprend le droit de faire sécession,ne peut s'exercer,de l'avisde la
Cour constitutionnelle de Yougoslavie, par décisionunilatkrale des
peuples de Yougoslavie, c'est-à-direpar un acte des assemblées des
républiquesde la République fkdérativesocialistede Yougoslavie ...
Le fait que la Constitution de la Républiquefédkrative socialisde
Yougoslavie ne prévoit pasde procédurepour l'exercicedu droit 5
disposer de soi-même,y conipris ledroit de faire sécession,ne signi-
fie pasue cedroit peut s'exercerpar décisionunilatéraled'autodk-
termination ou de sécession. Aucun peupleni, spécialement,aucune
assembléede rkpublique ne peut, agissant unilatéralement,décider
de l'exercicede ce droit avant que n'aient étdéterminées conjointe-
ment les modalitéset les conditions de cet exercice.
Une proclamation unilatéralede souveraineté et d'indépendance

d'une des républiquescomposant la Républiquefédérative socialiste
de Yougoslavie est,de l'avisde la Cour conslitutionnelle de Yougo-
slavie,une infraction aux dispositions de la Constitutdenla Répu-
blique fédkrative socialistede Yougoslavie relativàla composition
et aux frontières dela Républiquefkdkrativesocialiste de Yougosla-
vie, Etat fédkralet communautéd'Etat de peuples volontairement
unis et de leurs rtpubliques socialistes.»It is worth mentioning that the above ruling was approved in the course

of the court deliberatioizs in full composition as provided for in
Article 381of the SFRY Constitution and in the presence of both judges
from Bosnia and Herzegovina.

C. Cegality oj'the Proclamation of Independencrof Bosniu atzd
fiersrgovina in the Light of IrtferncrtionuL l aw

68. In a series of international instruments starting with the United
Nations Charter and continuing via the Declaration on the Granling of
Independence to Colonial Countries and Peoples (1960), and the Cov-
enants on Human Righls (1956), to the Declaration on Principles of

International Law concerning Friendly Relations and Co-operation
arnong States in Accordance with the Charter of the United Nations
(19741,the equal rights and self-determination of peoples has been of
essential universal value of the democratis ordrepublic embodied in the

United Nations Charter, and raised to a positive nom of general inter-
national law with the character of jsdscugen.rIi0. In the casc concerning
East Timor, the Court in its Judgment stated inler aliu:

'"lnthe Court's view, . .. the right of peoples to self-determina-
tion, as it is evolvcd from the Charter and from United Nations
practice, has an erga omnescharacter . . the principle of self-detcr-

mination of peoples has been recognized by the United Nations
Charter and in the jurisprudence of the Court (see Legal Conse-
quences for Staies of ~/ICContinued Presence of South Africu in
Natnibiu (Soual? WEJ f dfiicu j norwiihsranding S~curity Council
Rt.solubion 276 (1970)' Advisory Opinion, I.C.J. Reports 1971,

pp. 31-32, paras. 52-53; Western Saharcr,Advisory Opinion. I.C.J.
Reports 1975, pp. 31-33>paras. 54-59); it is one of the essential prin-
ciples of contemporary international: law." '''

liOJ. JCaicedo Perdorno, "La teoria diuscogrnsenderechointernacional a la luz de
IaGonvenciondc Vienasobre el derccho de los tratados", Revlsia dAcu~iern~rolom-
bina(lejurisprudettciu,January-June 1975,pp. 216-2L.Alex~dze ,kgal Nature ofjus
cogrns in Contemporary International Law", Recueildes cours deI'Acadhit:riedroir
internationaldLuHqve, Vol. 172,1981,p. 262; Bcdjaouinotes that "Among those prin-
ciples, 'the rightof complete indepcndenoe'and 'the ofgself-determination'are con-
sidered to ixinalienable and inust axordingly be recognizedimmediatand unçondi-
tionally" [translac~iy the Regiszry. "Non-alignernent et droit international". ibzd.,
Vol. 151,1976,p. 42k.M. Sahorit, "Codification of tLegal Principlesof Coexistence
and the Developmentof Contemporary International Law", in Prlnc~gof In~rr?iufional
LaitmConcernirigFriendZyRelationsand Coopr~atiun1472 p. 23, drafl rulon Interna-
tional Responsibilitythe list ofinternaticrimesçovers also "{ba seriousbreachof
an international obligation of essentialimporofnsafeguardingthc right aCself-deter-
minaiion of peoples" (Art.19)Firth Report on State Responsibility, Yrarbcioy the
InreritarzonLaiv Commission,1976,Vol II, Part Two, p 75).
11'I C 3 Reports1995, p. 102. APPLICATION DE CONVENTIONGENOCIDE (OP. DISS. KRE~A) 736

On rappellera que cet arril a été rendu par la Cour en assemblée plénière,
comme prévu à l'article 381 de la Constitution de la République fédéra-

tive socialiste de Yougoslavie, cn présencedes deux juges de la Bosnie-
Herzégovine.

C. Lkgaliré de /a proclumation de 1'indkperadunce
cleIa Bosnie-Herzégovine t.a droitinternational

68. Toute uneséried'instruments internationaux, ouverte par la Charte

des Nations Unies et poursuivie par la declararion sur l'octroi de I'indé-
pendance aux pays et aux peuples coloniaux de 1960, les pactes relatifs
aux droits de l'homme, de 1966,et la déclarationrelative aux principes
du droit international touchant les relations amicales et la coopération
entre lesEtats conformémenti la Charte des Nations Unies, de:1974,fait
de l'égalitéde droits des peuples et de leur droit i disposer d'eux-mêmes

une valeur universelle fondamentale de l'ordre public democratique
consacré dans la Charte, valeur érigée en norme positive du droit inter-
national génkral,ayant la qualité de jus cog~ns"~. Dans son arr&ten
l'affaire du Timor oriental la Cour dit notamment:

<<LaCour considère que ...le droitdes peuples à disposer d'eux-
memes,tel qu'il s'est développ épartir de la Charte et de la pratique
de l'organisation des Nations Unies, est un droit opposable erga

ornnes. Le principe du droit des peuples à disposcr d'eux-mêmesa
étéreconnu par la Charte desNations Uriies et dans la jurisprudence
de la Cour (voir Consérjuence.j ~uridiqup eosur les Etuts d~ la prP-
sence coatirauede l'Afrique du Sud en Namibie (Sud- Uuesrafricain)
nonobsiaat 11 resolution 276 (1970) du Conseil de skcurilk, avix

consultutfj; C.1.I..Recueil 1971, p. 31-32,par. 52-53; Suhura occi-
rlentc~l,visconsultatif, C.I.J Recueil 1975, p. 31-33,par. 54-59);il
s'agitlà d'un dcs principes essentielsdu droit international contem-
porain. >',1

110J. J CaiccdciPerdonio, «la ieoriiixrogensen dereçho intcrnacionala lude
laConvention de Vienasabre cl dereçhode los tratados i>,Revisd~ullemiocolotn-
bina de jurr~prudencia,lanvier-1975,p.216-274, L. Alexidz<(CegalNature oïJu.7
Crigensin Contemporary Intcriiational Lawii, Rec,uerldtr cours de 1'ArudC:niit~.lcdroit
in!ernatronul r!r La Hriyr, t. 172, 1981,p. 262; Bednotequc. ((Parmi cespnn-
cips (ilc droit i l'indhpendancecomplèteiiel ((ledroit n autodéterminaijugesont
inaliénablesel doiveice titre faire l'objetd'une reconnaissanceimmtdiate et sanacon-
dition~((<Non-aligncrncntet droit intesnational>i,ibid., t. 151, +M. Sahovic,
{(Codificatiof the kgal PrinçiplofCoexistencea:nd the Developmentof Contempo-
midyCoop~rui~un,1972,p. 23; projet d'article5sur la responsabilitéinternationale la liste
des crimes inlernationaux s'étendkgalementa «b) la violation gravc d'une obligation
internationaleimportance essentiellepour la sauvegarde du droit des pcuples disposer
d'eux-mSmeç))(art14),cinquièmerapport sur la responsabilitede l'Etat, Annuazrerlt!lu
Commrssion 11 i1~ilinlernatronal, 1976,vol. 11,deuxièmepartie, p. 70.
Il1C.I.J. Recuei1995,p.102. 69. Equal rights and self-determination of peoples is a complex norm
in lerms of structure.

On the one hand, the very phrase "equal righls and self-detennination
of peoples" is a link, an amalgam of a general legal principle ("equal
rights"} and the nom on the self-determination of peoples. "Equal
rights" in the above phrase, as a normative substitute for "equality of
States", has a broader meaning because it defines, in a broader rom, the
relationship of each people taken individually to the sum of rights reçog-
nized to peoples under international law. Its virtual meaning lies in a
prohibition of any distinction between peoplesand the respective rights
recognized to thern. In other words, the principle of "equal rights"
defines the scope of the norms of international law that relate to the
siatus of peoples. The right to self-determination does, however, have an
immediale rnaterial substance as

"al1 peoples have the right freely to determine, without external
interference, their political status and to pursue iheir economic,
social and cultural development and every Slate has the duty to
respect this right in accordance with the provisions of the Charter"
(para. 1 of the Declaration on Principles).

On ~heother hand, the norm on "equal rights and self-determination of
peoples" is incamplete, less than full nom in view of its application.
More particularIy, it contains no definition ofthe notion of "people" and
no such definition, as an institutional mechanisni auttiorized to define
what a "people" is, can be found to exjst in the international lawin force.
Thar is why the only way to make the norrns on "equal rights and self-
determination of peoples" operational and effective is to takc the norrns
of internallaw which define"peoplcs", as relevant (paras. 44-45 above).
The noms of internai lawcanlikewisebe relevant in lhc event of an exer-
cise of external self-determination in States comprising more chan one
people, in vicwof the nature ofthe prohibition of violations of territorial
integrity and political unity.

70. Certain strong arguments support the asçertation chat the procla-
mation of Bosnia and Herzegovina as a "sovereign and independent"
State within its administrative borders wasa violation of the fundamental
entitlement to equal rights and self-determinalion of peoples.
On the assurnption that other relevant processes and material require-
ments were in place (paras. 59-63above), the rnerit of the proclamation
of Bosnia and Herzegovina as a "sovereign and independent" Stale,
could onlyrelate to the converging willof the thrce peoplesin Bosniaand
Herzegovina. Hawever, there was an evident divergence in the basic
politicalstances of the representatives of these three peaples. While the
willof the Muslim political leadership was expressed in the Draft Decla-
ration on the Sovereign Bosnia and Herzegovina since February 1991,
which has beçn, at least temporarily, accepteciby Croat political leaders, APPI.ICATIONDE CONVENTION G~NOCIDE (OP. DISX. KRE~A) 337

69. L'égalité dedsroits et l'autodéterminationdespeuples formeni une
nome structurellement complexe.
D'une part, l'expression elle-même, c<bgalitéde droits des peuples et
droit [despeuples]a disposer d'eux-mêmes», est issud ee la conjonction,
de l'amalgame d'un principejuridique généra(ll'«égalitéde droit») et du
principe de l'autodéterminationdes peuples.Le ternle «égalitkde droits)},

substitut normatif d'«égalitédes Etats~, ya un sens plus général en ce
qu'ilvise,sous une acception plus large, lesrapports qu'a chaque peuple,
considéréindividuellement, avec la totalité des droits reconnus aux
peuples par le droit international. Est sous-entendue I'interdictioii de
faire quelque disiinciion que ce soit entre les peuples et entre les divers
droits qui sont reconnus àchacun d'eux. En d'autres termes, le principe
de l'<<égalitée droits» dtfinit le champ d'application des principes du
droit international qui concernent le statut des peuples.droit idispo-
ser de soi-méme a cependant un sensmatérielimmédiaten ce que

«tous les peuples ont le droit de déterminer leurstatut politique, en
toute libertéet sansngkrenceextérieure,et de poursuivre leur déve-
loppement économique,social et culturel et tout Etat a le devoir de
respecterce droit, conSonnémentaux dispositions de la Charte»
(paragraphe 1de la déclarationrelative aux principes).

D'autre part, la règledel'<<égalitde droits des peuples et deleur droàt
disposer d'eux-mêmes»est incomplète,car elle ne forme pas sur IFplan
de l'application un principe aiilonorne. Pour êtreplus précis, ellene
donne en effet aucune définitionde la notion de «peuple», et on ne
trouve dans le droit international en vigueur aucune définition quiper-
mettrait,a titre de référencinstitutionnelle autoriske, de savcerqu'est
un «peuple». C'est pourquoi la seule façon de rendre opératoire et de
donner effetau principe de l'<<égalite droits des peupleset de leur droit
à disposer d'eux-mêmes*est de s'appuyer sur les règlesdu droit interne
(ci-dessus par.44-45]. Ces règlesdu droit interne peuvent de la même
manière êtrevalables en cas d'exercice du droit à I'autodktermination
externequand ils'agitd5Etatscomprenant plus d'un seulpeuple,I'interdic-
tion de violer l'intégrité territoeil'unité politiqueétantce qu'elleest.
70. 11y a de bonnes raisons de soutenir que la proclamation de ta Bos-
nie-Herzégovineen tant qu'Etat (<souverainet indépendant» à l'intérieur
de sesfrontières administrativesest une violation du principe fondamental
de l'égalitde droits des peupleset de leur droii disposer d'eux-memes.
En supposant que toutes lesautres conditions, de procédureet de fond,
trouvant alorsis'appliquer se trouvaient rkunieç(voir ci-dessuspar. 59-

63),la proclamation de laBosnie-Herzégovineen tant qu'c<Etatsouverain
et indépendant)}ne peut êtrevalable que comme résultat de la volonté
concurrente des trois peuplesde Bosnie-Herzégovine.Or, on observe des
divergences évidentesentre les positions politiques fondamentales des
représenrantsde cestrois peuples.Alors que la volontédes dirigeants poli-
tiques musulmans s'est exprimée enfévrier1991dans le projet de déçlara-
tion sur la Bosnie-Herzégovinesouveraine,déclarationqui a été, au moins738 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (VISS. OP. KRE~PI}

the political leadership of Bosnian Serbs insisted on the preservation of
Bosnia and Hezegovina as a federal unit within the Yugoslav federation.

The referendum of 29 February and 1 Marçh 1942was not an expres-
sion of equal rights and self-determination of the three peoples of Bosnia
and Herzegovina, whether in terms of its f~rm(seepara. 64 above) or ils
substance. Although absolutelyinappropriate in form, itssubstance could,
however, be qualified at best as the de facroself-determination of the
Muslim and Croat peoples in Bosnia and Herzegovina. A national plebi-
scite of the Serbian people in Bosnia and Herzegovinawas organized in
the forn~of referendum on 9and 10November 1991,"in the areas of the
Serbian autonomous regions and other Serbian ethnic enclavesin Bosnia
and Herzegovina", where 96.4 per cent of citizens voted for an indepen-

deni State within the Yugoslav federation (Politika, 11and 13November
1991).
Relevant circurnstancesconccrning the referendum of 29 Februüry and
1March 1992reveal ihe inlentionto have the decision on the legaistatus
of Bosnia and Herzegovina rüken independently of the norrn on equal
rights and self'determination of peoples.
In the first place, Mr. Alija lzclbegovii:stated the following atpress
conference in Sarajevo on 79January 1991:

"lf Slovenia and Croatia secede from the present Federation,
1willconsider thai 1no longer have any authority to conduct further
talks ona new Yugoslavia. I will propose ~hata refcrendu breheld
of al1 citizens of Bosnia and Herzegovina - not of individual

peoples - to decide on the independence and sovereignty of
Bosnia-Herzegovina." '12

Seçondly,Bosnia and Herzegovina'ssubmissionsmentioned more than
once the "People oJ tlie Republic"(exempli causa,paras. 5, 31, 114, 134,
135, 136of the Application instituling proceedings filedin the Registry of
the Court on 20 March 1993; Memnrial, paras. 4.2.1.10; 4.2.2.19). Thus
in paragraph 4.2.1.IO itwas written that ~he referendum on the sovcr-
eignty of Bosnia and Herzegovina was based on the will of the "majority
of peopl~ of the Republic" (emphasis added).

This proves that the merit of the relevant decision was not the will of
the three peoples of Bosnia and Herzegovina tu "determine their political
but wsis rather the will, in the light of facts and law, of an imagi-
status",
nary "peopleof Bosnia and Herzegovina". The objective meaning of the
phrase "people of Bosnia and Herzegovina" in the givençontext liesin a
denial of the existenceof the three peoples of Bosnia and Herzegovina,

Il2 Referendumon the independenceof Bosnia and Her~egov,he Polirika Daily,
31January 1991(emphasisadded).

147temporairement, acceptéepar les dirigeants politiques croates, les diri-
geants politiques serbes de Bosnie ont insistépour que la Bosnie-Herzé-
govine reste une entitéfédéralede la Fédérationyougoslave.
Le référendum des29 févrieret 1"'mars 1992n'a pas été lamanifesta-
tion de l'égalitde droits et du droit des trois peuples de Bosnie-Herzé-
govine A disposer d'eux-mêmes,ni sur le plan de la forme (voir ci-après
par. 64) ni sur celui du fond. Absolument anormal sur le plan de la
forme, sur celui du fond il pourrait êtrequalifiéau mieux d'autodétermi-
nation (lefucto des peuples musulman et croate de Bosnie-Herzégovine.
Un plébiscitenational du peuple serbe de Bosnie-Herzégovinea été orga-
nisé,par voie de référendum,les 9 et 10novembre 1991, «dans les zones

des régionsautonomes serbes et autres enclaves ethniques serbes en Bos-
nie-Herzégovine)), à l'occasion duquel 96,4% des citoyens ont votéen
faveur d'un Etat indépendant dans le cadre de la Fédérationyougoslave
(Politi 11ue, 13novembre 1991).
Les circonstances dans lesquelles a été organiséle référendum des
29 févrieret le' mars 1992montrent que l'intention étaitde trancher le
statut juridique de la Bosnie-Herzégovineindépendamment du principe
de l'égalitde droits des peuples et de leur droitisposer d'eux-mêmes.
En premier lieu, M. Alija IzetbegoviCa déclaréce qui suit lors d'une
conférencede presse tenue a Sarajevo le 30janvier 1991 :

«Si la Slovénieet la Croatie se séparentde la fédération actuelle,
je considéreraiqueje n'aiplus aucune autoritépour conduire d'autres
pourparlers relatifAla nouvelle Yougoslavie. Je proposerai d'orga-
niser un référendumde tous les citoyens de Bosnie-Herzégovine, non
des peuples considérésséparément, pourqu'ils se prononcent sur

l'indépendanceet la souverainetéde la Bosnie-Herzégovine.»Il2(Les
italiques sont de moi.)

En deuxième lieu,la Bosnie-Herzégovinea mentionnéplus d'une fois
dans ses conclusions le «peupledelu République » (par exemple, aux pa-
ragraphes 5, 31, 114, 134à 136de la requêteintroductive d'instance du
20 mars 1993,et aux paragraphes 4.2.1.IOet 4.2.2.19 du mémoire). C'est
ainsi qu'au paragraphe 4.2.1.10 du mémoireil est écritque le référendum
relatif a la souverainetéde la Bosnie-Herzégovineest fondé surla volonté
de la ((majoritédelapopulatiorl de cette république))(lesitaliques sont de
moi).
On voit donc que le fond de la décision référendaire n'étap itas la
volonté des trois peuplesde Bosnie-Herzégovinede ((déterminerleur sta-
tut politique)), mais plutôt la volonté,a la lumière desfaits et du droit,
d'un imaginaire ((peuple de Bosnie-Herzégovine». Le sens objectif du
terme ((population de Bosnie-Herzégovine))dans le contexte considéré
est la négationde l'existence destrois peuples de Bosnie-Herzégovine,et,

Il((Référendumsur l'indépendance dlea Bosnie-Herzégov,lte PolitDuily,
31janvier 1991(les italiquessont de moi).thereby denying the relevance of the norm on equal rights and self-
determination of peoples.

Thirdly, the reference of Bosnia and Herzegovina to the opinion of the
Arbitration Commission as advisory body of the Conference on Yugo-
slavia is reasonably connected to the standpoint of the Commission on
the issue of self-determination of Serbian people in Bosnia and Herze-
govina. In reply to the question raised by Lord Carrington, Chairman of
the Conference on Peace in Yugoslavia: "As a constituent people of
Yugoslavia, do the Serbian Populations(s) in . . .Bosnia-Herzegovina
enjoy the right to self-determination?", the Commission, inter alia,
stressed :

"that the Serbian population of Bosnia-Herzegovina . . .is entitled
to al1the minority rights accorded to minorities and ethnic groups
under international law and under the provisions of the draft Con-
vention of the Conference on Yugoslavia of 4 November 1991, to
which the Republics of Bosnia-Herzegovina .. .have undertaken to
give effect" 13.

In other words, a construction of the Commission on independence of
Bosnia and Herzegovina which served as basis for the policy of recogni-
tion of Bosnia and Herzegovina has been derived independently of a
cogent norm on equal rights and self-determination of peoples, since one
of the constituent peoples of Bosnia and Herzegovina has been treated as
a "minority and ethnic group".

71. The right to self-determination iscomposed of two rights: the right
to internal and the right to external self-determination. These two rights
are an organic unity expressing dialectics in the development of the idea

of self-determination.
The right to internal self-determination is materialized in the institu-
tional environment of a sovereign, independent State. It is reduced to the
right of each State freely, without external interference, to choose the
form of its social system (political self-determination) and the right to
free disposal of its natural wealth and resources. So construed, a right
to internal self-determination embodies the ideas of sovereignty and
democracy.
The right to external self-determination means the right to choose the
institutional framework for the continuous exerciseof internal self-deter-
mination. Statehood is thus not the necessary and automatic outcome of
the exercise of the right to external self-determination, since that right
could be expressed not only by the "establishment of a sovereign and
independent State" but by "free association or integration with an inde-
pendent State or the emergence into any other political status freely
determined by a people"

"3 The Conferenceon Yugoslavia,ArbitrationCommission,OpinionNo. 2, para.4.

148 N~PLICA'rIO DENCONVENTION GÉNOCIDE (OP.DISS . RE~A) 739

par la, la négationde I'applicabilitéen l'occurrence du principe de I'éga-
litéde droits des peuples et de leur droitàdisposer d'eux-mêmes.
En troisième lieu, la référenceque fait la Bosnie-Herzégovine à l'avis
de la commission d'arbitrage, organe consultatif de la conférencesur la
Yougoslavie, a des rapports raisonnablement étroitsavec la position de
la commission sur la question de I'autodétermination dupeuple serbe de
Bosnie-Herzégovine. En réponse à la question de lord Carrington, prési-

dent de la conférencesur la Yougoslavie, la commission a notamment
insistésur le fait que:

«la population serbe de Bosnie-Herzégovine ...a le droit de bénéfi-
cier de tous les droits des minorités reconnus aux minorités et aux
groupesethniques par le droit international et par lesdispositions du
projet de convention de la conférencepour la paix en Yougoslavie
du 4 novembre 1991,que les républiquesde Bosnie-Herzégovinese .
sont engagéesa mettre en auvre»l Il3.

En d'autres.termes, une interprétation de la commission d'arbitrage rela-
tivement à l'indépendancede la Bosnie-Herzégovine,qui a servi de point
de départa la politique de reconnaissance de la Bosnie-Herzégovine,a été
établieindépendamment de toute norme impérative relative iil'égalitde

droits des peuples et à leur droit de disposer d'eux-mêmes, puisque l'un
des peuples constitutifs de Bosnie-Herzégoviney était traitécomme une
«minonté» et un «groupe ethnique)).
71. Le droit de disposer de soi-mêmese subdivise en droit à I'autodé-
termination interne et droit a I'autodétermination externe. Ces deux
droits forment une unitéorganique, résultat dialectique du développe-
ment de la notion d'autodétermination.
Le droit à I'autodétermination interne prend forme dans I'environne-
ment institutionnel d'un Etat souverain et indépendant. Il se rambnc au

droit qu'a chaque Etat de choisir librement, sans ingérence extérieure,la
forme de son système social(autodétermination politique) et au droit de
disposer librement de sesrichesseset ressources naturelles. Ainsi conçu, le
droit a I'autodétem~inationinterne couvre les notions de souverainetéet
de démocratie.
Le droit à I'autodétermination externeest le droit de choisir le cadre
institutionnel de l'exercice ininterrompu du droit (iI'autodétermination
interne. La qualitéd'Etat n'est pas le résultatnécessaireet automatique
de l'exercicedu droit à I'autodétermination externe puisque celui-ci peut
avoir pour résultat non pas seulement l'«institution d'un Etat souverain

et indépendant)),mais aussi l'«association ou l'intégration libreAun Etat
indépendant ou l'adoption de quelque autre statut politique librement
choisi par un peuple)).

Il3Conférence poulra paixen Yougoslavie, commissiond'arbitrage,avis no2, par.4. 72. The question of fundamental importance in this context is whether

the right to external self-determination is universal or limited in scope?

It seemsindisputable that inabstracto the right to self-determination is
a norm of universal scope. A limitation of the scope of the right to self-
determination would mean tacit partial derogation from it. Universality
is an inherent characteristic of both aspects of the right to self-determi-
nation - internal and extemal self-determination. It is clearly and
undoubtedly indicated by the wording that self-determination belongs
to "al1peoples" (Art. 1of both Covenants on Human Rights (1966) and
Declaration on Principles of International Law regarding Friendly Rela-
tions and Co-operation among States (1970)).Were that not the case, the
right to self-determination would relate not to the "equal rights" of
peoples but to an "unequal right".

The fact that in the Court's practice (Advisory Opinion in the Nurnibiu

case, I.C.J. Reports 1971, p. 31 ; Western Sahara case, I.C.J. Reports
1975,pp. 12,31), the right to external self-determination has been linked
to non-self-governing territories cannot be interpreted as a limitation of
the scope of the right to self-determination rutionepersonae, but as an
application of universal law ad cusum.
73. However, there is no automatic equation between universality and
non-limitation of the right to self-determination. In the exercise of the
right to self-determination there are lirnits determined by the very norm
of self-determination of peoples and limitations deriving from other
noms in the system of international law.
These limitations affect the right to self-determination in its entirety,
i.e., their subject rnatter is both internal and external self-determination.

Exempli cuusri,when it comes to internal self-determination, it is evi-
dent that in the context of political self-determination, the subject right
includes no option for a social system based on racial discrimination or
segregation. More particularly, the right to self-determination, ex dejni-

tione, is a general permissive nom, a norm comprising categorical
authorization. The exercise of that authorization is effected, however,
within the system of international law, which is to Saythat it encounters
limits in categorical prohibitions contained in other cogent norms (in
concreto, in the norm prohibiting racial discrimination).
The basic constraint affecting the exercise of external self-determina-
tion derives from the very norm on equal rights and self-determination of
peoplcs. The right to self-determination shall not

"be construed as authorizing or encouraging any action which could
disrnember or impair, totally or in part, the territorial integrity or
political unity of sovereign and independent Statesconducting them-
selves in compliance with the principle of equal rights and self- APPLICATION DE CONVENTION GBNOCIDE (OP.UISS. KKE~A} 740

72. La question fondamentale qui se pose a ce niveau est celle de
savoir si le droitl'autodétermination externeest universel ou s'ilest de
portée limitke.
Il semble indiscutable que le droità l'autodétermination est,in ubs-
trucro, un principe de portéeuniverselle.Limiter sa porrkereviendrait 2 y
dérogertacitement en partie. L'universalité est unqualitéinhérentedes
deux aspects du droiti disposer de soi-méme(autodétermination interne
et autodétermination externe). Les formules employées elles-memes indi-
quent clairement, hors de tout doute, que le droit I'autodktermination
appartient a «tous les peuples» (article premier des deux pactes relatifs
aux droits de l'homme de 1966 et dkclaraiion relative aux principes du

droit international louchant tes rclations amicales et la coopération entre
lesEtats de 1970).Si tel n'étaitpas le cas, le dràiI'autodktermination
renverrait non a l'«égalitkde droits)}des peuples, mais i l'<(inégaldeé
droits),.
Lc fait que dans la pratique de la Cour tavis consultatifs dans l'affaire
de laNamibie, C. 1.JRecueil 1971, p. 31,et dans l'affairedu Saharocci-
dental,C.J.J. Recueil 1975,p. 31) le droik l'autodéterminationexterne
ait étéliéaux territoires non autonomes ne peut étre considéré comme
limitant la portéedu droit ü I'autodBterrninationrurionepersonac, mais
comme l'application ad curum du droit universel.

73. On ne peut cependant postuler que l'universalitédu droit a I'auto-
déterminationsignifienécessairement qu'ily serait sans limite. L'exercice
du droit à l'autodétermination ades limiies déterminkaspar le principe
même du droit des peuplesi disposer d'eux-mêmee st par lesautres rkgles
de l'appareiljuridique international.
Ces limites s'imposentau droità disposer de soi-mémedans satotalité,
c'est-à-dire qu'elles touchent l'autodézerminationinterne comme l'auio-
déterminationexterne.
Dans le cas par exemple de l'autodétermination interne,il est clair
qu'en matièred'autodétermination politique le droit de disposer dc soi-
mêmene permet pas de choisir un systhmesocial fondé.sur la ségrégation
ou la discrimination raciale. Parfinitioii,ledroiiil'autodétermination

est plus précisémentune nome permissiveg&néialer,ecouvrant une auto-
risation catégorique.L'exercicede cette autorisation s'inscrit ccpcndant
dans lecadre du droit international, c'est-8-dire qu'il seheurte aux limites
fixées par les interdictions catégoriques d'autres normes impératives
(concrètenient,la norme prohibant la discrimination raciale).
La limite fondamentale qui s'impose i l'exercicedu droit I'autodé-
termination externe découledu principe même del'égalité de droits et du
droit des peuplesà disposer d'eux-meimes.Le droità I'avlodktermination
ne peut étreinterprété

cicommeautorisant ou encourageant une action, quelle qu'ellesoit,

quidkmernbrerait ou menacerait, totalement ou partiellement, I'inte-
gritétcrritorialc ou l'unitk politique dc tout Etat souverain et indé-
pendant se conduisant conformément au principe de d'égalité de detemination of peoples . . .and .. . possessed of a government
repreçenting the whole people belongingto the territary without dis-
tinction as to race, çreed or co10ur""~.

The above-mentioned constraint on the exercise of external self-determi-
wationin a narrow sense,within the rneaning of the:norm on equal rights

and self-determination of peoples, rcveüls the relevance of the norm on
territorialintegrily and political unity of a State. Beinglinked to the exer-
cise of the right to self-determination to which "peoples" are entilled, this
limitation protects the territorial integrity and political unity of a State
from any action thai mighi be undcrtaken wiiliinthe Srare - unlike the
ban on the use of force and threat of force in inler~rational r~i~rtions
amongStores which safeguard its territorial integri~yand political unity
against an exleraai action.

74. As Henkin pointed out "[ilt is accepted that self-detemination ...
does not include a right of secession for a people from an cxisting
States'l15.
The rule applies equally to federations:

"[wlhether the federation dissolves into two or more States also
brings inta focus the doctrine of self-determinalion in the fom of
secession. Such a dissolution may be the result of an amiçableand
constitutionaflagreement or may occur pursuanl to a forceful exer-

cise of secession. Inthe latter case, international legal rules may be
pleaded in aid, but the position wauld çeem Io bc that (apart from
recognised colonial situations) there is no right of self-determination
applicable to independent states that would juslify the resort to
secession." Il6

In other words, that is to say that in the existing States made up of
several peoples, the norm of equal rights and self-determination estab-
lishes prohibition of the exerçise of external self-determination, since it
naturally represents an aciion which "dismembers or impairs totally or in

part, the territorial integrity or political unity". The addressee of that
prohibition is a people equipped with the right to self-determination; in
viewof the fact that

"[slecessionistclaims involve,first and foremosd,disputed claims to
territory . .The two supposedly cornpeting principlesof people:and
territory actually work in iandem."

DeclarationofPnnciples, para. 7.
IL5L. Henkin, "Gcneral Course ofPublicInternationalLaw", Recueil descoursde
I'Acad~:niiede drornrernarinn~lrLa Huye, Vol 216, 1989,p 243.
IlGM. N. Shaw,InternatronalLaw, 1986,p. 139
L Brilmayer, "Secessionand Self-Detcmrnation", Yale Journal of Internur~onal
Law, Vol. 16,1991,p E78(emphasis added). droits et du droit des peuples a disposer d'eux-mêmes...et dotéainsi

d'un gouvernement représentant l'ensembledu peuple appartenant
au territoire sans distinction de race, de croyance ou de couleur)) Il4.

Cette contrainte qui s'exerce sur le droit à l'autodétermination externe
pris au sens étroit, dans le cadre du principe de l'égalitéde droits des
peuples et de leur droit a disposer d'eux-mêmes, fait ressortir la perti-
nence du principe de l'intégritéterritoriale et de l'unité politiquede 1'Etat.
Liéecomme ellel'esta l'exercicedu droit à I'autodétermination, droit que
possèdent les «peuples», cette contrainte protège l'intégrité territoriale et

I'unitépolitique d'un Etat de toute entreprise qui pourrait être lancée ri
l'intérieur de cet Etat, par opposition a l'interdiction d'employer ou de
menacer d'employer la force riunsles relations internationales entre Etats,
qui protège l'intégritéterritoriale et l'unité politiquede 1'Etat de toute
action extérieure.
74. Comme l'a fait remarquer Henkin: «il est admis que le droit de
disposer de soi-même ...n'implique pas pour un peuple le droit de faire

sécessionde 1'Etatexistant»'15.
La mêmerègles'applique aux fédérations:

«Que la fédérationse scinde en deux Etats ou davantage fait aussi
passer au premier plan le problème théoriquede I'autodétermination
sous forme de sécession.Cette dissolution peut êtrele résultatd'un
accord amiable constitutionnel, ou le résultatd'un acte de sécession
par la force. Dans ce dernier cas, les règlesdu droit international

peuvent êtreinvoquées mais, hormis les cas de sujétion coloniale
reconnue, il semble qu'il n'y ait pas de droit à I'autodétermination
qui s'applique a des Etats indépendants et justifie qu'ils recourent a
la sécession.» 'l6

En d'autres termes, cela revient à dire que, dans un Etat composC de
plusieurs peuples, le principe de l'égalitéde droits et du droit à I'auto-
détermination aboutit a I'interdiction de I'autodétermination externe
puisque celle-cirevient évidemment à ((démembrerou menacer totalement

ou partiellement l'intégritéterritoriale ou l'unitépolitique)) de 1'Etat en
question. Le sujet visépar cette interdiction est un peuple dotédu droit
de disposer de lui-même;étant donné que

«les revendications de sécession conlporterit, d'abord et avant tout
des prétentions territoriales non réglées ...les deux principes, réputés
concurrents, de pcuple et de territoire, opèrenten fait en tandem)) Il7.

. Il4Declaration relatiaux principe...par. 1.
"5 L. Henkin, ((General Course of Public International Law)), Reciteil des colrrs(le
1Xcu(1ér1idiee droit i~~terrruiueLadFluye.t. 216,1989,p. 243.
IlfM. N. Shaw. Irirern<irionlait1986, p.139.
lL71,. Rrilmayer, Secession and Self-determination», Yale Jotirnal of It~rernorionul
I~itr,vol. 16. 1991,p. 178 (lesitaliqiiessont clemoi). 75. The basis of prohibition lies in the conflict of two norms of the
same legal rank - the norm of self-determination and the norm of ter-
ritorial integrity. The latter, tructu ternporis, has become an integral
ingredient of the sovereign equality of States (point (d) of the Principle
of Sovereign Equality of States in the Declaration on Principles of Inter-
national Law), a cogent norm per se, so that the aforementioned conflict
is impossible to resolve on the grounds of hierarchy of norms of interna-
tional law. Apart from this practical justification, such a solution has a
principled one, i.e., no one is more qualified than a State, as a sovereign
political unit, to decide on its fate when it finds itselfcaught between two

substantially opposing norms and when its decision does not affect the
rights of third States.

76. According to paragraph 7 of the Declaration on Principles of
International Law, the prohibition of dismemberment or impairment in
the territorial integrity or political unity concerns the States

"conducting themselvesin compliance with principles of equal rights
and self-determination of peoples . . .and possessed of government
representing the whole people belonging to the territory without dis-
tinction as to race, creed or colour".

The stated provisions contain two criteria: the first is the conduct of the
State in compliance with the principle of equal rights and self-determina-
tion of peoples, and the second is the criterion of representatives of a
government with the view to ensuring the representation of the whole
people without discrimination as to race, creed or colour. By its nature,
the second criterion is general. In this concrete case, it should also be

interpreted as an absence of discrimination among peoples who com-
prised the SFRY.

How does this relate to the application of the two legal criteria in the
case of the Yugoslav federation?
77. The self-determination of peoples has been more than a statement
in constitutional and legal documents of the federal Yugoslavia. It was a
constitutive principle of the Yugoslav State. Equally, in the Yugoslav
constitutional law, "national equality" or "equality of peoples" went
hand in hand with the right to self-determination.

The 1974 Constitution of the SFRY qualified equality of peoples
explicitly as one of the major constitutional principles (the first section of
the Basic Principles) and developed it into several provisions in the
operative, normative part of the Constitution (e.g., Arts. 1, 244, 245).
Article 245, devoted to the relations within the Federation, stipulated

that: "ln SFRY peoples . ..enjoy equality." APPLICATIONDE CONVEWI'ION G~NOCIDE (OP. DISS. KRE~A) 742

75. Cette interdiction trouve son fondement dans leconflit qui oppose
deux principes de memeforce juridique: celui de l'autodétermination et
celuide l'intégritterritoriale. Cc dernier est devetrucru remporis un élé-
ment essentielde llégalitCsouveraine des Etats (alinéad) de la rubrique
{(te principe de l'égalitsouveraine des Etats)), dans la déclarationrela-
tive aux principes du droit international), une norme impérative, de
telle sorte que le conflit dont nous parlionsst impossible a résoudrepar
réferenceü la hiérarchiedes principes du droit international. Outre cette
considérationpratique, il y a aussi une question de principe,à savoir que
nul n'est mieux qualifiéqu'un Etat, entité politique souveraine,pour deci-
der de son sort lorsqu'il se trouve pris entre deux principes fondamenta-
lement antagonistes et lorsque sa décisionest sans effet sur les droits

d'autres Etüts tiers.
76. Selon le paragraphe 7 de la déclarationrelative aux principes du
droit international,l'inlerdiction de démembrerou de menacer l'intégrité
territoriale ou l'unitépolitique d'un Etat protège les Etats

«se conduisant conformément aux principes de l'égalitéde droits et
du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ...et dotés d'un gou-
vernemcnt représentantl'ensembledu peuple appartenant au terri-
toire, sans distinction de race, de croyance ou de couleur».

Cette disposition fixedeux critéres:lepremier est celuidu comportement
de 1'Etatvis-à-visdu principe de l'égalitéde droits des peuples et de leur
droit a disposer d'eux-mèmes; le second est celui de la composition

du gouvernement, qui doit garantir la reprksentatioii de l'ensembledu
peuple, sans discrimination de race, de croyance ou de couleur. Par na-
ture, ce second critèreest d'ordre généralD . ans le cas concret qui nous
occupe, il faut aussi l'interprétercommesignifiant l'absencede discrimi-
nation entre lespeuples de la République fédérativseocialiste de Yougo-
slavie.
Qu'en est-ilde ce pointde vue de Ikpplication de cesdeux critkresjuri-
diques au cas de la Fédérationyougoslave?
77. Le droit des peuples a disposer d'eux-mêmesn'a pas été qu'une
simple dkclaration inscrite dans lestextcs constitutionnels etjuridiques de
la Fédkrationyougoslave. C'étaitun principe fondateur de 1'Etatyougo-
slave. De la mêmemaniére, endroit constiiutionncl yougoslave, (<égalité
des nations,) et «égalitédes peuples)}allaient de pair avec le droit a
l'autodétermination.
La Constit~ition de la République fédérativs eocialiste de Yougosla-

vie de 1974faisait explicitement de l'égalitdes peuples l'un desgrands
principes constitutionnels (<<Principesondamentaux~j,chap, 1)'qu'ellea
développesen de multiples dispositions dans ça partie dispositive et nor-
mative articlespremier, 244 et 245,par exemple). L'articla245,consacré
aux relations à l'intérieurde la Fédération,dit bien que «dans la RFpu-
blique fédbrativesocialiste de Yougoslavie, les peuples ...jouissent de
l'égalit>}. The equality of peoples in the composition of the State auihoriiies of
SFRY was ensured in two ways:
(i) via constitutional provisioon the equül reprcscnlaiion of republics
and provinces, narnely the joint representation of republics in the

federal bodies. Both chambers of the SFRY Assembly, the general
reprcçentaiion (Federal Chamber} and the federal house (Chambcr
of Republics and Provinces) wereformed according to the classical
principle of parity (Arts. 284 and 291 of the SFRY Constitution).
The same principle applied to the collectiveHead of State - Presi-
dency of the SFRY (Amendment XLI, point 1, to the SFRY Con-
stitution). Carewas taken, in appointing members of the Federal
Executive Council (Government of SFRY) to ensure an equal repre-
scntation of republics and an adequate representation of provinces
(Amendment XLIII ta the SFRY Constitution). The principle of
equal representation of republics was applied in the courts [Consti-
tutional Court and Federal (Supreme) Court).

(ii) Social compacts on ihe poficy of recruitment of cadres determined
eligibilitycriteria in which national origin was placed high on the list
in rnulti-ethnic communities.

The personnel picture in the highest State bodies in SFRY in 1990,
immediately prior to proclamation of dcclaraiion of independence in
some federal units, was as follows:

President of the Presidency ofSFRY: Croat; Vice-Presidenl: Serb;
Prime Minister of the Federal Governmcnt: Croat; Vice-premiers: Serb
and Slovene;
President of the Parliament: Muslim from Bosnia and Herzegovina. The
latest Federal cabinet con~prisedfiveCroats; three Serbs; one Muslim;
one Serb from Bosnia; three SEovenes;one Montenegran; one Yugo-
slav; one Albanian; one Hungarian; and two Maccdonians.

In thelight of the aforementioned facts, one cannot but canclude that
the State organs of SFRY represented al1the Yugoslav peoples.

78. As to Bosniü and Herzegovina's view on the subject-matter, it
never questions the representativeness of the SFRY bodies in prin-
ciple, but points oui that, by the proclamation of independcnccof somc
federsllunits, ihat representativenehad disappeared and, moreover, "the
common federal bodies on which al1 the Yugoslav republics where
represented no longer exist; no body of ihat type has functioned APPLICATION DE CONVENTION GÉNOCLDE (OP.DISS .KE~A) 743

L'égalité des peuples au niveau des organes d'autorité de 1'Etat you-
goslave étaitassuréede deux manières:

i) par des dispositions constitutionnelles portant sur l'égalde la repré-
sentation des républiqueset desprovinces, c'est-à-dire la coreprésenta-
tion des républiquesau sein des organes fédéraux.Les deux chambres
de l'Assembléede la République fédérative socialistede Yougosla-
vie, la chambre de représentation générale(chambre fédérale) et la
chambre de représentation fédérale(chambre des républiques et des
provinces), étaientconstituées selonle principe classique de la parité
(articles 284 et 291 de la Constitution de la République fédérative
socialiste de Yougoslavie). Le même principe valaitpour le chef

d'Etat collectif qu'était la présidence de la République fédérative
socialiste de Yougoslavie (amendement XLI de la Constitution,
point 1).Lors de la nomination des membres du Conseil exécutiffédé-
ral, le Gouvernement de la Républiquefédérative socialistede You-
goslavie veillait assurer une égalereprésentation des républiques et
une représentation adéquatedes provinces (amendement XLlII de la
Constitution de la République fédérative socialistede Yougoslavie).
Le principe de l'égalitde représentation des républiquess'appliquait
égalementdans lesorganesjudiciaires (Cour constitutionnelleet Cour
(suprême)fédérale);
ii) par des pactes sociaux régissantla politique derecrutement descadres,

et fixant les conditions de leur nomination, parmi lesquelles l'origine
nationale figurait en bonne place lorsqu'il s'agissaitde communautés
multiethniques.

En 1990, lesplus hautes charges de la Républiquefédérative socialiste
de Yougoslavie, immédiatementavant la proclamation de I'indépendance
de certaines entitésfédérales, présentaienlte tableau suivant:

présidentde la présidence :croate; vice-président:serbe ;
premier ministre du gouvernement fédéral: croate; vice-premiers
ministres: serbe et slovène;
président du Parlement: musulman de Bosnie-Herzégovine.Le dernier
cabinet fédéralcomprenait cinq Croates, trois Serbes, un Musulman,
un Serbe de Bosnie, trois Slovènes,un Monténégrin,un Yougoslave,
un Albanais, un Hongrois et deux Macédoniens.

On ne peut qu'en conclure que les organes d'Etat de la République
fédérative socialistede Yougoslavie représentaient tous les peuples you-
goslaves.
78. Quant à la position de la Bosnie-Herzégovinesur cette question,
on constatera qu'elle ne met aucunement en cause la représentativité des

organes de la République fédérative socialistd ee Yougoslavie; la Bosnie-
Herzégovinesoutient que cette représentativitéavait disparu avec la pro-
clamation de l'indépendancede certaines entitésfédérales et que de sur-
croît ((les organes fédérauxcommuns dans lesquels étaient représentéessince" (Memorial, para. 4.2.1.26). The claim rests on a general thesis
that

"in the case of a federal-type State, which embraces communities
that possess a degree of autonomy and, moreover, participate in the
exerciseof political power withinthe framework of institutions com-

mon to the Federation, the existence of the State implies that the
federal organs represent the components of the Federation and wield
effective power" l18.

In the case of Yugoslavia, "common federal bodies" ceased to exist
due to referendum on independence in three republics, and in "Bosnia
and Herzegovina, by a sovereignty resolution adopted by Parliament
on October 14th, 1991,whose validity has been contested by the Serbian
community of the Republic of Bosnia and Herzego~ina"'~~,

"The composition and workings of the essential organs of the
Federation, be they the Federal Presidency, the Federal Council, the
Council of the Republics and the Provinces, the Federal Executive

Council, the Constitutional Court or the Federal Army, no longer
meet the criteria of participation and representativeness inherent in a
federal state."'*O

This claim could be hardly taken as legally meritorious. The lack of
credibility of the above claim, both in its general and in specificmeaning,
is evidenced by the following.
79. The wording "the federal organs represent the components of the
Federation" has two possible meanings. First, that the Federation, via its
organs, represents federal units. Such a meaning of the above wording is
logically implied by the fact that a federation is, by definition, a higher,

superior power in relation to its constituent parts and that the organs of
the whole represent the parts constituting it, and, secondly, that federal
organs by their very composition represent federal units - in other
words they are a sort of institutional aggregate of the representativeness
of federal units.

The claim of Bosnia and Herzegovina, supported by the Opinion of the

Commission, is evidently aimed in that direction. In the light of the com-
parative practice of the federation and constitution of the SFRY, those
claims are groundless. As a rule, federal organs represent the federal
State as a whole (esetnpli cciusa:United States President; United States
House of Representatives; executive and judicial organs in almost al1

118International Conference on Peace in Yugoslavia, Arbitration Commission,
OpinionNo. 1,para. I (d).
IlIbid .,ra.2 (a).
120Ibid., para. (b). APPLICATIONDE CONVENTIONGENOCIDE(OP. DISS . RE~A) 744

toutes les républiquesyougoslaves n'existaient plus; depuis lors, aucun

organe de ce type n'a fonctionné))(mémoire, par. 4.2.1.26). Sa thèse
repose sur l'idée généralqeue
«dans le cas d'un Etat de type fédéral,qui réunitdes communautés

dotéesd'une certaine autonomie, et qui sont, en outre, associées à
l'exercice du pouvoir politique dans le cadre d'institutions com-
munes à la fédération,l'existencede 1'Etatimplique que les organes
fédérauxreprésententles composantes de la fédérationet disposent
d'un pouvoir effectif))Il8.

Dans lecas de la Yougoslavie, les«organes fédéraux)) ont cesséd'exis-
ter à la suite du référendumsur l'indépendancetenu dans trois répu-
bliques et «en Bosnie-Herzégovine,[par l'effet] d'une résolutionsur la
souverainetéadoptéepar le Parlement le 14 octobre 1991,dont la com-
munauté serbe de la République de Bosnie-Herzégovinea contesté la
validité))l9:

«La composition et le fonctionnement des organes essentielsde la
Fédération,qu'il s'agissede la prksidence fédérale,du conseil fédé-
ral, du conseil des républiqueset des provinces, du conseil exécutif

fédérald, e la Cour constitutionnelle ou de l'armée fédéraln e,e satis-
font plus aux exigences de participation et de représentativitéinhé-
rentes à un Etat fédéral.»'20

11est difficiled'accorder une valeur juridique à une telle affirmation. On
ne peut y prêterfoi, ni dans son sens généralni dans son sens particulier,
pour les raisons que l'on va exposer.
79. Le membre de phrase «les organes fédéraux représentenltes com-
posantes de la fédération)) peut avoirdeux sens. Le premier est que la
fédération,par ses organes, représenteles entitésfédérales.Cette inter-
prétation découlelogiquement du fait que la fédérationest, par défini-

tion, un pouvoir d'un rang plus élevé et supérieurpar rapport aux parties
qui la constituent, et que les organes de l'ensemble représentent ces
parties. Le deuxième sens estque les organes fédéraux,par leur composi-
tion même,représentent les entitésfédérales,en d'autres termes qu'ils
sont une sorte de synthèse institutionnelle de la représentativité deces
entitésfédérales.
C'est évidemmentde ce côté quepenchent les prétentionsde la Bosnie-
Herzégovine,corroborées par l'avis de la commission d'arbitrage. Or, si

l'on rapproche comparativement la pratique de la fédérationet de la
constitution de la Républiquefédérative socialiste de Yougoslavie, on voit
que ces prétentions sont sans fondement. En règlegénérale, les organes
fédéraux représentent 1'Etat fédéraldans son ensemble (par exemple:

Il8Coiiference internationale lar paix en Yougoslavie, commissd'arbitrage,
avisno 1par. I d).
Il9Ibicl.,parO).
'2"Ibid .,r.2b).federal States) and only the federal chamber is hicu~nerul,representing
parts of the federation (United States Senate, Canada or Brazil, German
Bundesrat, National Council in Switzerland, etc.).

Also, the relevant solution in the SFRY Constitution ranged within the
framework of that generally accepted practice in federal States. With the
exception of the Council of Republics and Provinces, al1federal organs in
SFRY represented the federation as a whole. Delegates in the Federal
Council represented "self-managing organizations and communities and
socio-politicalorganizations" and wereelected in the republics and prov-
inces (Art. 129 of the SFRY Constitution); members of the Federal
Executive Council and officials did not, moreover, represent republicsl
provinces and an explicit constitutional provision prohibited them from
accepting guidelines and orders from republics and provinces (Art. 362).

The President and Members of the SFRY Presidency, President and
Members of the Constitutional Court and other federal officials used to
take an oath to the effect that they would foster the sovereignty, inde-
pendence and integrity of the SFRY, abide by the Constitution of
the Federation (Art. 397), so that they were not representatives of the
republics/provinces under the Constitution.

80. It follows that there is no legal connection between an actual
refusa1 to participate in the federal organs and the existence of these
organs in the eyes of law. This is evidenced by the Yugoslav case. No
federal organ has been dissolved or wound up on the grounds of wilful
absence and individual resignations on the part of certain federal officials.

The Constitution of the SFRY of 27 April 1992,as well as the consti-

tutional law and its implementation, wereapproved by the SFRY Assem-
bly. By virtue of that law, al1the supreme federal organs continued to act
pending the election of new organs (Art. 2 of the Law). TheSFRY Presi-
dency acted until the election of the President of the Republic (15 June
1992)and the Federal Executive Council acted until the formation of a
new federal government (14 July 1992).

Participation in the activities of federal organs and the duties of the
elected representativeswere construed with the intention of endowing the
resulting decisions of the federation with objective legal personalities in
terms of national and international law, in the general interest.The wilful
abstention of federal officials electedin Bosnia and Herzegovina was seenle président desEtats-Unis, la Chambre des représentants dece même
pays, ou encore les organes exécutifset judiciaires de la quasi-totalitédes
Etats fédéraux)et seul le parlement fédéral est hicuméral, représentatif
des élémentc sonstitutifde la fédération(par exemplele Sénatdes Etats-

Unis, du Canada ou du Brésil,le Bundesrat allemand, le Conseil national
suisse, etc.).
On rappellera aussi que le choix constitutionnel qu'avait opéré a cet
égardla Républiquefédérative socialistd ee Yougoslavie s'inscrivaitdans
Ic cadre de cette pratique généralementacceptée desEtats fédéraux. A
l'exceptiondu conseil des républiques et des provirices, tous les organes
fédérauxde la Yougoslavie représentaientl'ensemblede la Fédération.
Les déléguédsu conseil fédéral représentaientc<les organismes autogérés
et lescommunautés clorganisations sociopolitiques)>etffaieatilus dans
lesrépubliqueset lesprovinces(article 129de la Constitution de la Repu-
blique fédérative socialistee Yougoslavie). De plus, les membres ei les
fonctionnaires du conseil exécutifredéralne représentaient pasles rkpu-
bliques ni lesprovinces, et une disposition constitutionnelle expresse leur
interdisait de recevoir des directiveset des instructions de ces républiques
ou provinces (art. 362). Le présidentet les membres de la présidencede

la République fédérative socialiste de Yougoslüvie, le président etles
membres de la Cour constitutionnelle el les autres fonctionnaires EdC-
raux prètaientserment,s'engageaient Apromouvoirla souveraineté,I'indé-
pendance et l'intégritéde la République fédérativs eocialiste de Yougo-
slavie,et juraient d'observer la Constitution de la Fédération(art. 397),
ils n'étaientdonc pas, selon la Constitution, des représentantsdes repu-
bliques ou des provinces.
80. 11 s'ensuit qu'iln'y a aucun lienjuridique entre le refus effectif de
prendre part aux travaux des organes fkdérauxet l'existence de ces
memes organes aux yeux de la loi. Ce que montre bien le cas de la You-
goslavie. Aucun organe fédkral n'a été dissout ni aboli parce que
quelqucs titulaires dcharges fédérales s'eCntaientdélibkrkmentabsentes
OU avaient démissionnkii litre personnel.
La Constit~itionde la Républiquefédérative socialistdee Yougoslavie
du 27 avril 1992 et la loi constitutionnelle et ses rkglements d'ap-
plication ont étéapprouvés par l'Assembléede la République fédéra-
tive socialistede Yougoslavie. En vertu de cette loi, tous lesorgafédé-
raux suprêmes restaient en activitéen attendant l'électiondes rriembres

des nouveaux organes (art. 2). La présidencede la République fédéra-
tive socialiste de Yougoslavie est restEe en fonction jusqu'i l'élection
du président de la République(15 juin 1992)et le conseil exécu~iffédé-
ral jusqu'i la formation du nouveau gouvernement fédéral(14 juillet
1492).
La pariicipation aux travaux des organes fédérauxet le mandat des
représentants elusrépondaienta l'intention d'attribuer aux décisionsque
prenait la Fédérationlebénéficd e'une personnalitéjuridiqueobjectivedu
point de vue du droit interne et du droit international, et ce dans l'intérét
général.L'abstention délibérédees titulaires élusde charges f6déralesenas constituting an abuse of the I~w'~'T . he consequences of an abuse of

law affect thosc who resort to it, in line with the generül legaI principle
rzulluscornn~odu? nupere de sua injuria proprio el ex deelictonon oritur
ffcfio.
81. Bosnia and Herzegovina's reasoning has been tacitly brised on an
inverted liberalistic idea of consent as a fundamental of the legitimacyof
a State. The original idea, that a legitimate govern~ncntmust stem fram
the consent of the govemed, is interpreted in Bosnia and Herzegovina's

approach as implying that stepping out of the State organs entails a loss
of legitimacyof the government and constilutes the right to opl out of an
existing State.
Infact.

"actual consent is not necessr-iryto political legitimacy ... Separa-
tisls cünnot base their arguments upon a righ tto opt out because no

such right cxists in dcmocratic theory.

Governrnent by the consent of the g-overneddoes not necessarily
encompass a right toopt out. Itonly requires that within the existing
political unit a right to pürticipate through electoral processes be
available. Moreover, participatory rights do not entai1 a right to
secede.On the contrary, they suggest that the appropriate solution

for dissaiisfiedgroups rests in their full inclusion in the polity, with
full participation in its decision-making processes." lP2

82. Does the "Existence of the state impl[y]that the federal organs . . .
yield effective power"?
The exercise of effectivepower isper defmirionem the purpose of thïr

existence of State orgüns irrespective of whether the State ir;unitary or
federal. In concrefo, the question is whether an evident crisis in the Euiic-
tioning of State organs of the Federation led to theiscmsing to exist? To
equate the constitutional crisisin SFRY and the non-existence of federal
organs is legally unacceptable. The scope of the effeciiveness,q~iantity
and quality of State organs is a variable category, becüuse it demon-
strates an actual, poiitiçal siate of affüirs. In principle, there are situa-
tions in which State organs do in fact cease from exercising power (e.g.,

cases of militüry occupütion, civil war and, to a certain extent, various
forms of çonstiiulional crises), but do not cease to exist. State organs as

12'The ConçUtutiunalCourt OFYugoslaviastatedin itDecisionIIU No. 12391thüt
thcabbientionof federriloîiîcialsfwork in fcderalorgansrepresent"an unconstitu-
tio~ialchangeof thecompositionof tliecornnionfederalstate"(OfjGaze!teufSI'R Y,
Nu. 89/91) That decisionwas approvedby the ConstitutionCourt in itfullcomposi-
tionand with the participalionof bojudgesfrcm Bosniaand Hcr~egovina.
Iz2L Brilmayer,"Secession and Self-determination: A Territorial Inierpretation",
Yole Jourrinof In1rriinrioLutv,1991, Vol.16,pp 181-185. APPLICATION DE CONVEh'TION CLNOCID (OP.DISS . REC'A) 746

Bosnie-Herzégovine était considérée commeconstituant un abus de
droit 12'.Les conséquences d'unabus de droit affectent ceux qui le com-
mettent, selon le principe généraldu droit nullus cotntnodunîcupere de
sua injuria propria et ex delicto nonoritur actio.
81. L'argumentation de la Bosnie-Herzégovine sefonde implicitement

sur une interprétation inverse et libéraledu principe du consentement
fondant la Iégitimité de 1'Etat.L'idée d'origine,a savoir qu'un gouverne-
ment légitimeémanedu consentement de ceux qu'il gouverne, est inter-
prétéepar la Bosnie-Herzégovinecomme signifiantque le fait de quitter
un organe d'Etat entraîne la perte de Iégitimitédu gouvernement et repré-
sente l'expressiondu droit de faire sécessiond'un Etat existant.
Alors qu'en fait:

((leconsentement effectif n'estpas indispensable a la légitimité poli-
tique ...Les séparatistesne peuvent fonder leur argumentation sur
un droit d'«option négative)),parceque ce droit n'existepas dans la
théoriede la démocratie.
Le principe du gouvernement fondé surle consentement des gou-
vcrnésne comprend pas nécessairementle droit de choisir la non-

participation. II exige seulement l'existence,dans le cadre de l'unité
politique existante, du droit de participer par voie électorale.D'autre
part, le droit de participation ne comprend pas le droit de sécession.
Au contraire, il signifieque lesgroupes mécontentsne peuvent trou-
ver de solution que dans leur intégration absolue dans l'unité poli-
tique, dans leur pleine participation a la prise de décision.))122

82. Peut-on dire que ((l'existencede 1'Etat suppose que les organes
fédéraux...détiennentle pouvoir effectif?))
L'exercicedu pouvoir effectif est, par définition,la finalitéde I'exis-
tence des organes d'Etat, que 1'Etatsoit une entité unitaire ou une struc-
ture fédérale. Restea savoir, in concreto, si une crise manifeste dans le
fonctionnement des organes d'Etat de la fédérationa pour conséquence
de les faire cesserd'exister. Dire que la crise constitutionnelle de la Répu-

blique fédérative socialistede Yougoslavie a pour équivalent ladispari-
tion des organes fédérauxest juridiquement inacceptable. L'efficacité,le
nombre et la qualité des organes d'Etat sont autant de variables où
s'exprime une situation politique réelle. TIy a en principe des situations
dans lesquelles les organes d'Etat cessent effectivement d'exercer leur
pouvoir - par exemple en cas d'occupation militaire, de guerre civileet,

12'La Cour constitutionnelle de Yougoslaviea dédans sa décision11U no 122191
que le fait pour les fonctionnairesauxdc ne pas participer auxtravaux des organes
fédéraux représentaitune modification non constitutionnelle de la composition des
organes fédéraucommuns de I'Eta>(Jourtmlofficiel(lela R6publiquefidérutive socia-
liste (le Yougoslusie,no 89/91).Cette décisiona été prisepar la Cour constitutionnelle
siégeantau complet, avecla participationdeux juges de Bosnie-Herzégovine.
lz2L. Brilmayer, ((Secession and Self-detcrmination: A Territorial Interpretation)),
YuleJournal ofInternationulLat\>,vol. 16, 1991,p. 184-185.elements of State organization cease to exist when the State on whose
behalf they are acting ceases to exist.

D. The Relationsliip betrveen the Legality of the Birth of u Stute und
Succession ,vit/Respect to International Treaties

83. Bosnia and Herzegovina claims that it is a "successor State"
because :

(a) "succession of States" means the "replacement of one State by
another in the responsibility for the international relations of terri-
tory", according to the very widelyaccepted definition given in both
Vienna Conventions on Succession of States of 1978and 1983; and

(6) "it is obvious that Bosnia and Herzegovina has replaced the former
SFRY for the international relations of what was the Federal
Republic of Bosnia and Herzegovina before the dissolution of
former Yugoslavia" (Memorial, para. 4.2.1.26).

On the contrary, the position of Yugoslavia in the subject-matter is
that "the so-called Republic of Bosnia and Herzegovina has not become
a Stateparty to that 1948Convention on the Prevention and Punishment
of the Crime of Genocide in accordance with the provisions of the Con-
vention itself" (Submissions, B.1) because:

(a) "The Applicant Statc cannot enter into the international treaties of
the predecessor State on the basis of succession because it flagrantly
violated the principle of equal rights and self-determination of
peoples" (Preliminary Objections, para. B.1.2.39) ;

(b) "As the Applicant State has violated the obligations deriving from
the principle of equal rights and self-determination of peoples, the
Vienna Convention on the Succession of States in Respect of
Treaties could not apply to this case even if it had come into
force" (ibid., para. B.1.3.5); and

(c) "Notification of succession is a manner of entry into treaties of the
predecessor State in cases where the new State has based its exist-
ence upon the principle of equal rights and self-determination of
peoples. In this particular case, the Applicant State has based its
existence on the violation of duties deriving from the principle of
equal rights and self-determination of peoples, and thus cannot
make use of the notification of succession as a method of entry
into the international treaties of its predecessor State." (Ibid.,
para. B.1.4.11 .)

The essence of this objection by Yugoslavia is that because of its dans une certaine mesure, de certaines crises constitutionnelles - sans
1 pour autant cesser d'exister. Les organes dlEtat, en tant qu'élémentsde
l'appareil d'Etat, ne cessent d'existerque lorsque 1'Etatau nom duquel ils

agissent cesse lui-même d'exister.

D. Le rapport entre la Iigalitéde la naissanced'unEtat
ef lu ~ucce.s.sid'Etrrtsen matièrede traitésinternationaux

83. La Bosnie-Herzégovine prétendêtre«Etat successeur )):

ci) parce que «succession dJEtats» signifie «la substitution d'un Etat à
un autre dans la responsabilité des relationsinternationales d'un ter-
ritoire)) selon la définition très largement acceptée qu'endonnent les
deux conventions de Vienne sur la succession dYEtatsde 1978 et de
1983;
b) parce qu'«il est évidentque la Bosnie-Herzégovine s'estsubstituéea
l'ex-République fédérative socialistd ee Yougoslavie pour les rela-
tions internationales de ce qui constituait la Républiquefédérative de
Bosnie-Herzégovine avant la dissolution de l'ex-Yougoslavie))
(mémoire,par. 4.2.1.26).

1 La position de la Yougoslavie sur ce point est au contraireque ((lapré-
tendue Républiquede Bosnie-Herzégovinen'est pas devenue partie à la
convention de 1948pour la préventionet la répressiondu crime de géno-
cideconformémentaux dispositions de la convention elle-même))(conclu-
sions, B.l):

a) parce que «lYEtatdemandeur ne peut pas adhérerpar succession aux
traités internationaux auxquels 1'Etatprédécesseué r taitpartie car il a
violéde façon flagrante le principe de l'égalitde droits des peuples et
de leur droit à disposer d'eux-mêmes)) (exceptions préliminaires,
par. B.1.2.39);
b) parce que, «[é]tantdonné que I'Etat demandeur a violéles obliga-
l tions découlantdu principe de IYCgalitd éedroits des peuples et de leur
droit à disposer d'eux-mêmesl,a convention de Vienne sur la succes-
sion d'Etats en matière de traités ne pourrait pas s'appliquer en
l'espèce,mêmesi elle etait entréeen vigueur)) (ibid., par. B.1.3.5);

c) parce que «[l]a notification de successionest un moyen d'adhéreraux
traités concluspar 1'Etatprédécesseurlorsque le nouvel Etat a fondé
son existence sur le principe de l'égalité de droits des peuples et de
leur droit à disposer d'eux-mêmes.Or, en l'espèce,1'Etatdemandeur
a fondé sonexistence sur la violation des droits découlant dece prin-
cit.: Darconséau.nt.i* ne saurait recourir à la notification dc succes-
sion comme moyen d'adhésionaux traités internationaux de son pré-
décesseur. ))(Ibid, par. B.1.4.1.)

Essentiellement,cette exception de la Yougoslavie repose sur l'idéeque la"flagrant violation of the principle of equal rights and self-determination
of peoples", Bosnia and Herzegovina was not a successor State and
hence could not have acquired the capacity of State party to the 1948

Convention on Genocide on the grounds of succession.

To make a valid conclusion on the merits of the objection, it is
necessary to answer the question of whether there isa connection between
succession of States and legality of territorial changes.
84. The answer to this question implies a precise definition of the con-
cept of succession. The term "succcssion" is used in a broad, imprecise
meaning.

"Succession of States means both the territorial change itself - in
other words, the fact that within a given territory one State replaces
another - and the successionof one of those States to the rights and
obligations of the other, i.e., the State whose territory has passed to
the successor States." 123

lt can be seen that the term "succession" means two things: (a) territo-
rial change itself; and (b) transmission of rights and obligations from
predecessor State to successor State(s).
The distinction between succession taken in terms of territorial change
(defucto succession) and succession as transmission of derived rights and
obligations from predecessor State to successor State(s) (dejure succes-
sion) is drawn also by the Convention on Succession of States in respect

of Treaties, referred to by Bosnia and Herzegovina in order to prove its
status of "Successor State". This Convention in its Article 2 (b) (Use of
Terms) defines "succession of States" as "the replacement of one State by
another in the responsibility for the international relations of the terri-
tory". At the same time, Article 6 (Cases of Successionof States Covered
by the Present Convention) specifiesthat the Convention "applies only to
the effects of a succession of States occurring in conformity with the
international law and, in particular, the principles of international law
embodied in the Charter of the United Nations". Relations between
Article 2 (b) aiid Article 6 of the Convention are precisely defined in
the Comment to Article 2 of the Draft Articles on Successionof States in
respect of Treaties on the basis of which Article 2 of the Convention on
Succession of States in respect of Treaties was adopted. This Comment,
inter dia, says:

"the term ['succession']is used as referring exclusively to tlzefirct of
replcrcementof one State by another in the responsibility for inter-

'*' H. Kelsen,Dictiorrrlairede la rertazinologiedu droir iriirl,ol. 42, p. 314.
ThusO'Conncll,TlreLa~vof StcitrSucce.ssion,1956,pp. 3, 6; K. Zcmanek,"DieWiener
Konventionüberdie Staatennaçhfolgein Vetrflge",FesrsclirififiirAlfred Verdross, 1980,
p. 719; M. Jones, "State Successin Matterof Treaties",Briridi Year Book of Inter-
national Law,1947,Vol. 24, pp. 360-361.Bosnie-Herzégovine,puisqu'ellea «violéde façon flagrante le principe de
l'égalitéde droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes))
n'est pas Etat successeur et ne peut donc avoir acquis par succession la
qualité dYEtatpartie à la convention de 1948 pour la prévention et la

répressiondu crime de génocide.
Pour se prononcer valablement sur cette exception, il faut d'abord
répondre à la question de savoir s'ily a un lienentre succession d'Etats et
légalité deschangements territoriaux.
84. Répondre à cette question suppose l'existence d'une définition pré-
cisede cequ'est la succession.Or, le terme est utilisédans un sens large et
imprécis.

((Succession d'Etats désignea la fois le changement territorial lui-
même - en d'autres termes le fait qu'un Etat en remplace un autre
sur un territoire donné - et l'acquisition par succession par l'un de

ces Etats des droits et obligations de l'autre, c'est-à-dire de 1'Etat
dont le territoire est passéaux Etats successeurs.>) 123

On voit que le terme «succcssion >)désigne deux choses :u) lechangement
territorial lui-même; h) la dévolution desdroits et des obligations de
1'Etatprédécesseur à 1'Etatsuccesseur ou aux Etats successeurs.
Cette distinction entre la succession comprise sous l'angle du change-
ment territorial (successionde fuclo) et la successionpar transmission des
droits et des obligations dc 1'Etatprédécesseur à 1'Etatsuccesseur ou aux
Etats successeurs (succession de jure) se retrouve également dans la

convention de Vienne sur la succession d'Etats en matière de traités, à
laquelle la Bosnie-Herzégovinese réfèrepour établir sa qualitéd'«Etat
successeur)).En son article 2 (((Expressionsemployées))),alinéa h), cette
convention définitla «succession d'Etats» comme «la substitution d'un
Etat à un autre dans la responsabilité des relationsinternationales d'un
territoire)). L'article (((Cas de succession d7Etats viséspar la présente
convention))) préciseque cet instrument ((s'applique uniquement aux
effets d'une succession d'Elats se produisant conformément au droit
international, et plus particulièrement aux principesdu droit internatio-

nal incorporésdans la Charte des Nations Unies)). Les rapports entre
l'alinéah) de I'articl2 et I'article6 sont précisément définidsans le com-
mentaire de I'article 2 du projet d'articles sur la successioii d'Etats en
matièrede traités,sur la base duquel a étéadoptéI'article2 de la conven-
tion. On peut lire notamment dans ce commentaire:

((l'expression[«succession)] est employéepour désigner uniquement
le fait de la substitution d'un Etatà un autre dans la responsabilité

12'H. Kelsen, Diciiotttiuire(le Irrrerrtrinologiedu droir itrterrrutionul,vol. 42, p. 314;
O'Connell,TliLnw ofSrate Siiccessioti,1956,p. 3et 6; K. Zemanek,«Die WiencrKon-
vention über die Staatennachfolgein Vetrage)),FestschriftBir Alfred Verrlross, 1980,
p. 719; M. Jones,«State Successionin Matterof Treatics)),Brirfili YrcrrBook of Inter-
tiutionulLrriv,vol. 24, 1947,p. 360-361. national relations of territory leavingasideany connotation of inheri-
tance of rights or obligations on the occurrence of that event" 124.

Such a definition of succession corresponds to the basic concept of

"succession of States" which emerged from the study of the topic by the
International Law Commission. More particularly:

"The approach to succession adopted by the Commission after its
study of the topic of succession in respect of treaties is based upon
drawing a clear distinction between, on the one hand, the fact of
replacement of one State by another in the responsibility for the
international relations of a territory and, on the other, the transmis-

sion of treaty rights and obligations from the predecessor to the suc-
cessor State . . .
In order to make clear the distinction between the fact of replace-
ment of one State by another and the transmission of rights and obli-
gations, the Commission inserted in article 2 a provision defining
the meaning of the expression 'successionof States' for the purpose
of the draft. Under this provision the expression 'succession of

States' is used throughout the articles to denote simply a change in
the responsibility for the international relations of a territory, thus
leaving aside from the definition al1questions of the rights and obli-
gations as a legal incident of that change."

This distinction was necessary as

"the difficultystemmed from the fact that the expression 'succession'
was not qualified in the definitions of it given in art. 2 (1, 6). From
that paragraph it might be deduced that the convention was also

intended to apply to unlawful su~cessions"'~~.

Because of that,

"art. 6 was the most important saving clause of the draft articles,
since it safeguarded the legality of al1provisions of the future con-
ventions by limiting their application to the effects of lawful succes-
sion . . the provisions of the future convention would not apply to

'24Draft Articleson Successionof Statesin respectof Treaties, Yearbook ofilte Inter-
narionulLaw Coninri'iori, 1972, Vol. II, p. 231, para. 3; identical interpretation was
quoted inesrenso in thc comment toArticlc 2 of the Draft Articleson Succcssionof
Statesin respectof State Property, Archives adebts, ibid., Vol. II, PartTwo, p. 21.

125 Yeurbookoj'tlte Inrerrra~ionuLlUIVContrrlissiori,1972,Vol. II,p. 226, paras.29-30.
12hSette-Carnara,UNCSS, FirstSession,p. 53, para. II. des relations internationales du territoire, abstraction faite de toute
idéede succession des droits et obligations i l'occasion de cet évé-
nement >)124.

Cette définitionde la succession correspond à la notion fondamentale
de ((succession d7Etats» telle qu'elle se dégage de l'étude du sujet à
laquelle a procédéla Commission du droit international. Plus particuliè-
rement :

«La manière dont la Commission a envisagé lanotion de succes-
sion après avoir étudiéla question de la succession en matière de
traités repose sur l'établissement d'une distinctionnette entre, d'une

part, le fait de la substitution d'un Etat à un autre dans la respon-
sabilité des relations internationales d'un territoire et, d'autre part,
la transmission de droits et obligations conventionnels de I'Etat pré-
décesseur à I'Etat successeur ...
Pour préciserla différenceentre le fait de la substitution d'un Etat

à un autre et la transmission de droits et obligations, la Commission
a introduit dans l'article 2 une disposition définissant le sens de
I'expression«succession dYEtats»aux fins du projet. Conformément
à cette disposition, I'expression «succession dlEtats)> est employée
dans tout le projet d'articles pour indiquer simplement un change-
ment dans la responsabilité des relations internationales d'un terri-

toire, ce qui exclut de la définitiontoutes les questions relatives aux
droits et obligations en tant que conséquencesjuridiques accessoires
de ce changement. » '25

Cette distinction s'imposait car

«la difficultétient au fait que I'expression((successiond'Etats» n'est
pas qualifiéedans la définitionqui en est donnéeau paragraphe 16)
de l'article2. On pourrait en déduireque la convention est aussi des-

tinée à s'appliquer a des successions illicites.» '26

C'est pourquoi

«l'article 6 est la clause de sauvegarde la plus importante du projet
d'articles car il préservela légalitéde toutes les dispositions de la
future convention en limitant leur application aux effets d'une suc-
cession légale ...les dispositions de la future convention ne s'appli-

Iz4Projet d'articles la successiond'Etatsen matière detraitAnnuairedelu Coni-
mission(ludroit internation1972,vol. II,p. 249, par. 3.On trouve exactementla même
interprétation danecommentaire relatia l'article2 duprojet d'articles sur la succession
d'Etatsen matièredebiens,archiveset dettesd'Eta(Annuaire(lela Comrnissiondudroit
inrernutionul1981,vol. II,deuxikmepartie, p.20-21).
lz5Annuaire clelu Commissiondu droit it~ter~iatio,972,vol. II, p. 244, par. 29-30.
'26Sette-Camara,Documentsofjîcielsde lu conféret~creiesNations Uniessur la succes-
sioncl'Etarsen rnutièrede traités,pretnlèresesp. 49, par. II.750 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (DISSO . P.KKE~A)

unlawful transfers which were contrary to the will of people and to
the principle of self-determination" '27.

Therefore, "succession of States" in terms of "replacement of one State
by anothcr in the responsibility for the international relations of terri-
tory" "does not mean ipsofucto a juridical substitution of the acquiring
State in the complex rights and duties possessed by the previous sover-
eign" 128 or, in the present case, entry into the international trcaties of

SFRY as a predecessor State. The condition thereto is that the "replace-
ment of one State by another" occurred "in conformity with interna-
tional law, in particular, with the principles of international law em-
bodied in the Charter of the United Nations".

85. A provision concerning territorial changes to be effected "in con-

formity with international law and, in particular, with the principles of
international law embodied in the Charter of the Unitcd Nations" has a
declarative impact. So,
"even if the article did not appear in the convention, that instrument

would apply only to lawful succession from the point of view of the
principles of international law especially those embodied in the UN
Charter, which was the keystone of al1international conventions" 129.

The principle underlying the provision of Article 6 of the Convention on
Successionof States in respect of Treaties is a self-evidentprinciple, axio-
matic to any legal order stricto sensu. Tt is ratione muterirre a narrowed
projection of the general concept of lawfulness of acts, an application of
the concept of lawfulness to the questions of succession. In view of the

material significance of lawfulness for the very existence of a de jure
order, the rule making provisions of any codification applicable only to
the facts occurring and situations established in conformity with intema-
tional law is a general presumption, a self-explanatory matterI3". The
reason for a universal provision of legality led the Commission separately
to specify the rule limiting the application of the provisions of the Con-
vention to the cases of lawful succession:

"Other members, however, were of the opinion that in regard,
particularly, to transfers of territory it was desirable to underline

12'Tabibi,UNCSS, FirstSession,p. 54, para.20.

128O'Connell.op. cil.p. 3.
129Ushakov, UNCSS, FirstSession, pp.54-55, para.24.

''O"toadmit that,apartfromwcll-definedexceptions,an unlawfulact,orits immediate
consequcnces,maybecome slto vigorasourceof legalrightforthcwrongdocr,is to
introduceinto a legal system a contradiction whiccannot be solved except by
dcnialof its legal character. Internatl w does not and cannot forman excep-
tion to that imperative alternati(H. Lauterpacht,Recognilioriin International
Law, 1947,p. 421.) queraient pas aux transferts illicites contraires à la volonté de la
population du territoire et au principe de I'autodéterinination)) lz7.

Ainsi donc, la «succession dYEtats»,((substitution d'un Etat à un autre
dans la responsabilité des relations internationales d'un territoire)) ne
signifie pas ((qu'il y a ipsofucto acte juridique substitutif de la part de
1'Etatacquéreur à l'égardde l'ensembledes droits et des devoirs du sou-

verain pré~édent))"~ ni, comme en l'espèce,qu'il y a adhésionaux traités
internationaux de la République fédérative socialistede Yougoslavie,
Etat prédécesseur.Il faudrait pour cela que la «substitution d'un Etat A
un autre)) se soit produite ((conformémentau droit international, et plus
particulièrement, aux principes du droit international incorporés dans la
Charte des Nations Unies)).

85. Une clause disposant qu'un changement territorial doit s'effectuer
((conformémentau droit international, et plus particulièrement aux prin-
cipesdu droit international incorporésdans la Charte des Nations Unies)),
est d'ordre déclaratif. Ainsi,

«si l'article..ne figurait pas dans la convention, il serait impossible
d'en conclure que la convention peut s'appliquer à des successions
légitimes,du point de vue des principes du droit international, et
notamment de la Charte des Nations Unies, qui est la clef de vollte
de toute convention internationale)) 129.

Le principe sur lequel s'appuie l'article6 de la convention sur la succes-
sion d'Etats en matière de traités coulede source, c'est un axiome dans
tout ordre juridique stricto sensu. C'est la projection focaliséerutiotze
muteriuede la notion générale de la licéitédes actes, I'application de cette
notion de licéité dans le domaine de la succession. Etant donnéI'impor-
tance fondamentale de la notion de licéité pour l'existencemêmede I'Etat

de droit, la règlequi veut que les dispositions d'un instrument de codifi-
cation ne s'appliquent qu'aux faits et aux situations qui sont conformes
au droit international est une présomption d'ordre général, qui se passe
dc ~ommentaire'~".La nécessitérationnelle de l'impératif universel de
licéitéa conduit la Commission à prévoirune règledistincte pour limiter
I'application des dispositions de la convention aux successions licites:

((D'autres membres, en revanche, ont été d'avis de souligner, en ce
qui concerne plus particulièrement les transferts de territoires, que

Iz7Tabibi, Documenrsofficiels de la confereticedes Nations Unies sur la sirccmioti
d'Erarsen niatiérede rroirés,pretniéresession, p. 50, par.20.
Iz8O'Connell,op. cir., p. 3.
lZ9Ushakov, Docurnetlisof~ciels(le la cotfirence clesNuiions Uniessur lusirccession
d'Ernrsen matière(le rraités,preniièresession, p. 51,par.24.
I3O«Admettrequ'hormis certainesexccptionsbien déterminéeus,n acte illiciteou ses
conséquencesimmédiates puissent devenirsitu vigore une source de droit pour
l'auteur,c'cst introduiredans un système juridique unceontradictionqui nc peut
ne peutoffrir aucuneexceptionArcette alternative impéries.H.aLauterpacht,re et
Recognirioniti InrernarioLuic~1947,p. 421.) that only transfers occurring in conformity with international law
should fall within the concept of 'succession of States' for the pur-
pose of the present articles. Since, to specifythe element of conform-
ity with the international law with reference to one category of suc-
cession of States might give rise to misunderstandings as to the

position regarding that element on other categories of succession of
States, the Commission decided to include amongst the general
articles a provision safeguarding the question of lawfulness of the
succession of States dealt with in the present articles. Accordingly,
article 6 provides that the present articles relate only to the effects
of a succession of States occurring in conformity with international
law." 13'

86. Notification of succession is only a technical means by which the
successor State expressesits consent to be considered bound by the treaty

whose original party is the predecessor State. Hence, to make a notifica-
tion of succession produce its intended legal effects, the actual succession
must have been lawful. The criterion of lawfulness of the succession is
"international law and, in particular, the principles of international law
embodied in the Charter of the United Nations".

In the present case, and with regard to the position of Bosnia and
Herzegovina, of special importance are the principles of territorial integ-

rity and political unity, and of equal rights and self-determination of
peoples.
The specificrelevance of those principles for the matter of succession is
a logical consequence of the nature of changes activating the institution
of succession and the role of equal rights and self-determination of
peoples in constituting new States. Hence, these principles of the United
Nations Charter have been particularly accentuated. The Special Rap-
porteur, Mr. Mohammed Bedjaoui, stated in his proposal concerning
lawfulness of succession that,

"The conditions for succession of States shall include respect for

general international law and the provisions of the United Nations
Charter concerning the territorial integrity of States and the right of
peoples to self-determinati~n."'~'

The Preamble to the Convention on Succession of States in respect of
Treaties "recall[s] that respect for the territorial integrity and political
independence of any State is required by the Charter of the United

13'UNCSS, First Session, p.236, para. 1.

132Fifth Report on succession in respect of matters other than treaties, doc.
AlCN.4125 9eurbook of illetnternutionul Law Comtnission, 1972, Vol. 11, p. 66,
para.28. APPLICATION DE CONVENTION GÉNOCIDE (OP.DISSK . RE~A) 75 1

seuls les transferts se produisant conformément au droit internatio-
nal relèveraient de la notion de «succession d'Etats» aux fins des
présents articles.Comme le fait de mentionner expressémentcet élé-
ment de conformité avec le droit international à propos d'une caté-
gorie de cas de succession d'Etats aurait risquéde donner lieu à des
malentendus quant à la position prise à l'égarddudit élémentpour
d'autres catégoriesde cas de succession d'Etats, la Commission a
décidéde faire figurer parmi les articles générauxune disposition
sauvegardant la question de la licéité de la succession dYEtatsvisée

dans le projet d'articles. En conséquence, l'article6 dispose que les
articles s'appliquent uniquement aux effetsd'une succession d'Etats
se produisant conformément au droit international. >)13'

86. La notification de succession n'est que le moyen technique par
lequel I'Etat successeur se déclare disposé à êtreconsidérécomme tenu
par le traité auquel I'Etat prédécesseurétait initialement partie. Ainsi,
pour qu'une notification de succession produise les effetsjuridiques vou-
lus,il faut que la successionelle-même ait étlicite. Ce critèrede la licéité
de la succession fait partie du «droit international, et plus particulière-
ment [des]principes du droit international incorporés dans la Charte des

Nations Unies)).
En l'espèce,et spécialementdu point de vue de la Bosnie-Herzégovine,
le principe de I'intégriterritoriale et de l'unité politiqueet celui de I'éga-
litéde droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmessont
d'une importance particulière.
La pertinence particulière de ces principes sous l'anglede la succession
découle logiquementde la nature des changements qui ont mis en branle
le mécanismede la succession,et du rôle de l'égalité de droits des peuples
et de leur droit a disposer d'eux-mêmesdans l'édificationdes nouveaux

Etats. C'est pourquoi ces principes, qui figurent dans la Charte des
Nations Unies, ont étésoulignés avectant de relief. Le rapporteur spé-
cial,M. Mohammed Bedjaoui, déclaraitce qui suit dans la proposition
qu'il a présentée à propos de la licéitédes successions:

«Parmi les conditions de la succession d'Etats doivent figurer le
respect du droit international général et esdispositions de la Charte
des Nations Unies sur I'intégrité territoriale des Etats et le droit des
peuples à disposer d'eux-mêmes» .'32

Le préambulede la convention sur la succession d'Etats en matière de
traités«rappel[le] que le respect de l'intégritterritoriale et de I'indépen-
dance politique de tout Etat est exigépar la Charte des Nations Unies)).

13'Documents officielsde lu confirence des Narions Unies surlu successiond'Etufset1
inotièrede truifis, premièresession, p. 255, par.2.
Cinquihe rapportsurla successiond'Etatsdans desmatières ausue lestraitks,
doc. AlCN.41259,Annuairede lu Cotninissiondu droit internafiorial,1972,vol. II,p. 72,
par.28.752 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (DISSO. PKRE~A)

Nations". That wording confirms that the existenceof territorial integrity
and political independence derive from the United Nations Charter and,

hence, binds the States irrespective of the Convention.
87. The proclamation of Bosnia and Herzegovina as a "sovereign and
independent state" constitutes, in my view, a substantial breach of the
cogent norm on equal rights and self-determination of peoples in both
the forma1and material sense.
A substantial breach in the formal sense is reflected in the following:

(a) tducted in an unconstitutional way, contrary to the relevant provi-

sions of its own Constitution and that of the SFRY;

(6) self-determination in the subject case was de fucto conceived as a
right of a territory within a sovereign, independent State, rather
than as a right of peoples.
The breach of the norm on equal rights and self-determination of
peoples in a material sense is reflected in the following:

(a) the proclamation of independence of a federal unit of Bosnia and
Herzegovina, in violation of relevant provisions of the interna1 law
of the SFRY and of Bosnia and Herzegovina, endangered the terri-
torial integrity and political unity of SFRY, in contravention of the
provision of paragraph 7 of the Declaration on Principles;

(h) the proclamation of the independence of Bosnia and Herzcgovina
within its administrative borders was not based on the equal rights
and self-determination of al1 three peoples of Bosnia and Herze-
govina.

Therefore, the proclamation of the independence of Bosnia and Herze-
govina was not in conformity with the relevant principles of equal rights
and self-determination of peoples, and territorial integrity and political
unity and,as such, has no merit for lawful successionin terms of the suc-
cession of Bosnia and Herzegovina with respect to the Convention on
Prevention and Punishment of the Crime of Genocide.
88. By its nature, the proclamation of Bosnia and Herzegovina's inde-
pendence was an act of secession. Bosnia and Herzegovina does not con-
test that assertion of Yugoslavia. It is taken from paragraph 3.22 of the

Statement of Bosnia and Herzegovina which reads:
"whether or not Bosnia, at the time of its secession, had a rigizt to
self-determination is irrelevant because: (1) it is now a recognized,
sovereign State, and (2) even if, urguetzdo,it were supposed that it
had no right to self-determination in international law, international
law certainly did not prohibit its achieving the status of an indepen-
dent State at the occasion of the disintegration of the FormerCette formule confirme que l'intégritéterritoriale et I'indépendance poli-
tique doivent leur existence à la Charte des Nations Unies et qu'elles
s'imposent donc aux Etats indépendamment dela convention.
87. La proclamation de la Bosnie-Herzégovinecomme ((Etat souve-
rain et indépendant))est à mes yeux une violation fondamentale du prin-
cipe impératif del'égalitéde droits des peuples et de leur droàtdisposer
d'eux-mêmes,tant sur le plan de la forme que sur celui du contenu.

Sur le plan de la forme, les circonstances suivantes attestent une viola-
tion fondamentale:
u) la proclamation de la Bosnie-Herzégovine s'estfaite de manière non
constitutionnelle, contrairement aux dispositions applicables de la
Constitution de Bosnie-Herzégovine etde la Constitution de la Répu-
blique fédérative socialistde Yougoslavie;

h) le droit de disposer de soi-mêmea étédefucto considéréen l'espèce
non pas comme un droit appartenant aux peuples, mais comme le
droit d'un territoire appartenantàun Etat souverain et indépendant.
Sur le plan du fond, lescirconstances suivantes attestent une violation du
principe de l'égalitde droits des peupleset de leur droitdisposer d'eux-
mêmes :

a) la proclamation de I'indépendancede l'entité fédéraq leu'étaitla Bos-
nie-Herzégovine,violant le droit interne de la République fédérative
socialistede Yougoslavie et dela Bosnie-Herzégovine,menaçait I'inté-
gritéterritoriale et I'unitépolitique de la République fédératieocia-
liste de Yougoslavie, contrevenait auparagraphe 7 de la déclaration
relative aux principes du droit international.;
h) la proclamation de I'indépendancede la Bosnie-Herzégovinedans ses
frontières administratives n'étaitpas fondéesur I'égalitéde droits et

le droitidisposer d'eux-mêmes des trois peuples de Bosnie-Herzégo-
vine.
La proclamation de I'indépendanccde la Rosnie-Herzégovine n'était
donc pas conforme aux principes de l'égalité de droits des peuples et de
leur droità disposer d'eux-mêmes:de l'intégritéterritoriale et de l'unité
politique des Etats et, de ce fait même,ne peut fonder une succession légi-
time s'agissant de la successionde la Bosnie-Herzégovine à la convention
pour la préventionet la répression du crimede génocide.

88. Essentiellement, la proclamation de I'indépendancede la Bosnie-
Herzégovineétaitun acte de sécessioii.La Bosnie-Herzégovine neconteste
pas cette affirmation de la Yougoslavie, tiréede l'exposéde la Bosnie-
Herzégovine elle-même q,ui se lit ainsi
«Que la Bosnie,au moment de sa sécession,ait possédé ou non un
droi!à I'autodétermination est dénuéde pertinence car: 1) elle est
maintenant un Etat souverain reconnu, et 2) même si,pour les

besoins du raisonnement, l'on supposait qu'elle ne possédaitpas de
droità I'autodéterminationau regard du droit international, ce der-
nier, certainementn'interciisuitpas qu'elleparvienne au statut d'Etat Socialist Federal Republic of Yugoslavia." (Statement of the
Government of the Republic of Bosnia and Herzegovina on Prelimi-
nary Objections, p. 60.)

89. Secessionis,per dejinirionem,"the creation of a State by the use or
threat of force and without the consent of the former ~overeign"'~~.
Therefore it is understandable that the
"United Nations Charter does not recognize the term or concept of

'secession',for this concept is profoundly at odds with the spirit and
normative principles of the Charter. The Charter raises respect for
territorial integrity to the rank of a constitutional norm, a nom of
jus cogens.On January 1, 1970,the UN Secretary-General made the
following statement:
'So,as far as the questionof secessionof a particular sectionof a
Member State is concerned, the United Nations' attitude is un-
equivocal.As an international organization, the UnitedNations has

neveracceptedand does not accept, and 1do not believe itwillever
accept, the principleof secession ofa part of a Member State.'"IM

The Security Council has characterized secessionas illegal.In its resolu-
tion 169(1961)on the Congo, the Security Council, inter alia,

"stronglydeprecateld] the secessionist activitiesillegallycarried out
by the provincial administration of Katanga with the aid of external
resources and manned by foreign mercenaries . . and

.............................

(d) that al1secessionist activitiesagainst the Republic of Congo are
contrary to the Loifondamentale".
The implicit characterization of secessionas an illegalact under inter-
national law can be found in paragraph 7 of the "Declaration of Prin-

ciples of International Law Concerning Friendly Relations among
States" which stipulates, inter alia, that the right to self-determination
shall not be construed as

"authorizing or encouraging any action which could dismember or
impair, totally or in part, the territorial integrity or political unityof

sovereign and independent States".
On the regional, European level,such a characterization of secessionis
contained in the Declaration on Principles Guiding Relations between

13'J. Crawford,Tlie Creatioriof States in InternationalLaw, 1979,p. 247.
'34UnitedNations, Montlily Cl~ronicle,Vol. 7, p. 36(Febniary 1970). APPLICATtONDE CONVENTION GENOCIDE (OP.DISS. KRE~A) 753

independant a l'occasion de la désintégrationde l'ex-République
fédkrativesocialiste de Yougoslavie.)>(Exposédu Gouvernement de
la République de Bosnie-Herzégovine sur les exceptions prklimi-
naires, p. 60.)
89. Per d~f;nirionem,la sécessionest«la criation d'un Etat par l'emploi
ou la menace de l'emploi de la force et sans Je consentement de l'ancien

souverain»133.On comprend donc que
«la Charte des Nations Unies ne fasse place ni au terme ni a la
notion de «sécession»,car l'idée estprofondément étrangèrea son
esprit eliises principes normatifs. Elle érigele respecde l'intégrité
territoriale en norme constitutionnelle, en règle de jus cogens. Le

1"'janvier 1970, leSecrélairegénéral de l'Organisation des Nations
Unies a fait la déclarationsuivante:
«Ainsi, il nc saurait y avoir d'équivoquepossible en ce qui con-
cerne l'attitude de l'Organisation quand il s'agit de la secession
d'une régiondonnée d'unEtat Membre. En sa qualitéd'organisa-
tion internationale,'ONUn'a jamaisaccepté, n'acceptepaset n'ac-
ceptera jamais, je pense, le principe de la sécession d'unepartie

d'un de ses Etüts Membres.»134
Le Conseil de sécuritéa qualifié d'illégale la skcession.Dans sa résolu-
tion 169 (1961) relative au Congo, il a notamment:

c<Réprouv[é knergiqucmeat les activités sécessionnistes illégale-
ment menées par l'administration provinciale du Katanga avec
l'appui deressources de l'extérieuret secondées par des mercenaires
étrangers ..et
L)tclïar/é],
................. . .... . .... .,

d) que toutes les activitks sécessionnistesdirigees contre la Répu-
blique du Congo [étaient]contraires A Ia loi fondamentale.»

La qualification d'illégalique le droit international impose implicite-
ment A la sécessionse retrouveà l'alinéa7du paragraphe 5 de la déclara-
tion relative aux principes du droit international touchant les relations
amicales et la coopérationentre les Etats conformémenta la Charte des
Nations Unies, où il est dit notamment que le droit à disposer de soi-
meme ne peut Elrecompris comme

«autorisant niencourageant uneaction, quellequ'ellesoit, qui demem-
brerait ou nieriacerta otalement ou partiellement, l'intégrité territo-
rialeou l'unité politiquede tout Etat souverain et indépendant».

Au niveau régional, celuide l'Europe, on retrouve cettequalification
de la sécessiondans la déclarationsur lesprincipes régissantlesrelations

133J Crawford,The Lrearioof Srnresin Inrsrnnfiol aw, 1979,p. 247.
'3"ONU, Chroniquemensuelle,vol. VII, janvier-dkem1970.Participating States contained in the Conference on Security and Co-
operation in Europe (CSCE) Final Act adopted on I August 1975 at

Helsinki :
"[tlhe participating States regard as inviolablealone another's fron-
tiers as wellas the frontiers of al1States in Europeand therefore they
will refrain now and in future from assaulting these frontiers".

On the other hand, an explicitcondemnation of secessioncan be hund in
the general principles of law recognized by civilizednations as a forma1
source of international law pursuant to Article 38 (cl of the Siaiute
of the International Court of Justice. Secessionis deemed to be a most
serious crime by the national legislations of civilizednations. More par-
ticularly, an inside assault on the territorial integrity of a country

or an atternpted assaull, including preparatory actions, are categorizcd
as one of the gravest of crimes in virtually al1 the criminal codes of
civilizcdnations.
90. The admission of Bosnia and Herzegovina to the United Nations
cannot convalidate substantial legal derccts in its es~ablishment as an
independent State, especiallybecause of the need to draw a sharp distinc-
tion between

"secession in pursuance of, and in violation of, self-determinatian.
Where the territory in questionisa self-determiriütionunit it may be
presumed that any secessionary government possesses the general
support of the people; secession in such a case. where self-determi-
nation is forclblydenied, willbe presumed to be in furtherünce of, or
at least not inconsistent wiih, the application of self-determination
to the territory in question."lJ5

There is not much doubt that the admission of Bosnia and Herze-
govina to the United Nations has given general, political support to Bos-
nia and Herzegovina. Howeverthat political support does not, and could
not, be interpreted as a subsequent convalidation of illegality of Bosnia
and Hcrzegovina's birth. Even if the General Assembly had such an
intention in mind when admitting Bosnia and Herzegovina to the mem-
bership of the United Nations, such an outcorne was legally impossible,
since such an act implied a derogation from the self-determination of
peoples which has the character of jus çogens. Norms ofjus cvgens do

not tolerate derogation, so any concurrent régimeor situation, whether it
beestablished by way of a bilateral or unilateral aci, cannat acquire legal
force due to the peremptoriness ofjus cogens - more specifically,this act
or acts remains in the sphere of simple facts. One could say that this is a
classicexample of application of the general principle oflaw expressed in

J.Crawford,op ci?, p. 25seealso, separateopiniofJudge Ammoun,Wedberrn
Saharo,1.C J. Reporrr IYJJ,pp. 99-100.

163 APPLICATIONDE CONVENTIONG~NOCIDE (OP. DISS. KRE~A) 754

mutuelles entre des Etats participants, qui figure dans l'acte finalde la
conférencesur la sécurité et la coopération en Europe, adopte le 1"'août
1975 Helsinki :
«Les Etats participants tiennent mutuellement pour inviolables

toutes leurs frontières respectives ainsiue celles de tous les Elats
d'Europe et s'abstiennent donc maintenant ct i l'avenir de tout
attenlal contre ces frontikres)>
On trouve aussi une condamnation explicitede la sécessiondans lesprin-
l cipes générauxde droit reconnus par les nations civiliséesen tant que
source de droit international selon le paragraphe 1 c) de l'article 38 du

Statut de la Cour internationale de Justice. La sécession esttenue pour
un crime des plus graves par kedroit national des nations civilisées.
L'attaque lancée de l'intérieurcontre l'intégriterritoriale d'un pays et la
tentative d'attaque ou la préparation d'une attaque sont plus particulié-
l rement qualifiéesde crimes d'une extrêmegravite dans la quasi-totalité
des codes pénauxdes nations civiliskes.
90. L'admission de Ia Bosnie-Herzégovineau sein des Nations Unies
ne peut remédierau défaut juridique de fond qui entache sa constitution
en Etat indépendant,car il faut bien faire la distinction entre:

«la sécessiondans l'exercicede l'autodéterminationet la sécession en
violationde I'autodeterrnination. Quand le territoire ecauseest une
entitk dotéedu droit ;disposer d'elle-mème,on peut présumer que
tout gouvernement sécessionniste jouit de l'appui généraldu peuple :
en tel cas, Easécession,si l'exercicedu droiA disposer de soi-mEme
est interditpar la force,estréputée se fairc en applicatiori du droit

du territoireA disposer de lui-meme, ou, ;itout le moins, sans en
contredire le principe» lJ5
Il serait difficilede nque son admission rI'Organisarion des Nations
Unies adonné à la Bosnie-Herzkgovineun appui politique généralP . our-
tant, Icsappuis politiques que cela lui a valdc manièregknéralcnc pcu-
vent ni ne doivent être interprétés commu ene validationà posteriori de
sa naissance illégale.Mêmesi telle était l'intentionde l'Assembléegkné-
rale lorsqu'elle a accueilli la Bosnie-Herzégovinecomme membre de

l'organisation des Nations Unies, cette lkgitimation serait juridiquement
impossible puisqu'elle serait une dérogation a cette norme dejus cogens
qu'est ledroit des peuples a disposer d'eux-mêmesO . r, lesnormes dujus
cogens ne souffrent d'aucune exception, et toui régimeou toute situation
qui seraient en concurrence avec lui, qu'ils trouvent leur originedans un
acte bilatéralou dans un acte unilatéral, nepeuvent devenir le droit à
cause du caractère impératifdu jus cugens: pour Etreplus précis,cet acte
resterüit dans le domaine du simple fait. On peut dire qu'il y a là un

J.Crawlord,op. rit., p. 258;voir égalt'opini idiwdueiiedeM. Ammoun
dans l'affaireSuhoru o~cirlt.nC.I.J, Recue1975.p.99-100.the maxirn yuidquicl ab initio vitiosw est, nonpolest IracEu Iempuris
convalescere.

ln my opinion, therefore, the rneaning of the admission ofBosniaand
Herzegovina to the United Nations is çonfined to the recognition of
Bosnia and Herzegovina as a fact, and has no impact on the legality of
iis birth. Such a conclusion corresponds to the fact that

"[rlecognition by the UN meançlhat a State (or its government) will
be invited Io important international conferences,allowed to accede
to nurnerous international treaties and to become a Mernbcr of
several international organizations and to $end observers to

others" lJh.
91. By rejecling Yugoslavia's third preliminary objection, the Court
hns responded toone side of the question of its jurisdictionrutione per-
sunue. The other side of the question relates to the status ofYugoslavia
as a party to the Genocide Convention. 1 am in agreement with the

Court's finding that Yugoslavia is a party to the Genocide Convention
but 1disagree with the Court's reasoning leading to that finding.
With regard to Yugoslavia'sstatus as a party to the Genocide Conven-
tion, the Court States that:
"it has not been contested that Yugoslavia was party to the

Genocide Convention [and] ... was bound by the provisions of the
Convention on the date of the filing of the Application in the
present case . . .(para. 17 of the Judgn~ent).
The Court bases this conclusion an the following:

(a) "that it has not been contested that Yugoslavia was Party to the
Genocide Convention", and
(b j that

"[alt the tirne of the proclamation of the Federal Republic of
Yugoslavia, on 27 April 1992,a forma1declaration was adopted
on its'behalf to the effectthat:
'The Federal Republic of Yugoslavia, continuing the State,

international legaland political personnlityofthe Socialist Fed-
eral Republic of Yugoslavia,shall strictly abide by al1the com-
mitrnents that the Socialist FederaE Republic of Yugoslavia
assumed internationally.'
This intention thus expressed by Yugoslavia to remain bound

by the international treaties to whiçh the former Yugoslavia was
garty was confirmcd in an officia1Note of 27 April 1992 from
the Permanent Mission of Yugoslavia ta the United Nations,
addressed to the Secretary-General." (Para. 17 of the Judgment.)

H. G. Schermcrs,InrernarionCunstitufiotiaw, 1980,p.929.exernpIeclassique d'application du principe gknéralde droit qu'exprime
la maxime yuidvuid oh inilioviiiosus est,non polesr fraclu tenzporis
corrvakscere.
A mon avis donc, il faut voir dans l'admission de la Bosnie-Werzégo-
vine à l2Organisatiandes Nations Unies un simple fait, sans rapportavec
la licéitde la naissance de la Bosnie-Herzégovine. Cetteconclusion cor-

respond au fait que
{<lareconnaissance par lesNalions Unies signifiequ'un Etat (ou son
gouvernement) sera invitéaux grandes conférencesinternationales,
autoriséà adhérer à de nombreux traitésinternationaux, à devenir
membre de plusieurs institutions internalionales età envoyer des

observateurs aux autres» 236.
91. En rejetant la troisième exception préliminaiee la Yougoslavie, la
Cour a régléun aspect du problèmede sa compétence rrslionpersonue,
L'autre aspcct dçce problémcestceluidu statut de la Yougoslavieen tant
la convention sur-legénocide.Je souscrisA la conclusion de la
que partie
Cour selon laquelle la Yougoslavie estartie ücetteconvention, maisje ne
peux souscrire 2l'argumentatioiiqui l'a menée ;iconclure ainsi.
A propos de la qualité de partiei la convention de la Yougoslavie, la
Cour déclarece qui suit:
«iln'apasÉtécontestéque laYougoslavie soi1partie àla convention

sur le génocide [et qu'elle]...était liéepar les dispositions de la
convention a la date du dépôtde la requEteen la présente affaire.N.
Carrit, par. 17).
La Cour fonde cette conclusion sur les considérations suivantes:

u) «il n'a pasétécontesté quela Yougoslavie soit partie ala convention
sur le génocide»;
b) «[l]ors de la proclamation de la Républiquefédkrative de Yougosln-
vie,le 27 avril1982, une déclaration formelle a étéadoptée en soi1
nom, aux termes de laquelle:

<<L a épublique fédérativ dee Yougoslavie,assurant la conti-

nuitéde 1'Etatet de la personnalitéjuridiqueet politiqueinterna-
tionale de la Républiquefédkrativesocialistede Yougoslavie,res-
pectera strictement tousles engagementsque la République féde-
rativesocialistede Yougoslaviea prisà l'écheloninternational.))
L'intention ainsiexpriméepar la Yougoslaviede demeurer liéepar
lestraitésinternationaux auxquels étaitparlie l'ex-Yougoslaviea été

confirméedans une note officielledu 27avril 1492adresséeau Secré-
taire généralar la missionpermanente de la Yougoslavieauprks des
Nations Unies.» (Arrêt, par. 17.)

136H.G. Schermers,Inrernariol onsrirutiot~aLl1980,p.929. 1agree with the Court that Yugoslavia is a party to the Genocide Con-
vention but its reasoning regarding the effect of the formal declaration
issued on 27 April 1992does not appear to be tenable.

92. A logicalmeaning of the pronouncernent that "it hüs not been con-
tested that Yugoslavia was party to the Genocide Convention" is that
Yugoslavia is a party to the Genocide Convention berause its status as a
party has not been contested.
Itis irue that theproceedingson prelirninary objections are substan-
tially based on the initiative of the parties. However, that does not mean
that the parties have the right to determine the junsdiciionof the Court.

By a decision on preliminary objections, the Court rnight be said to
achieve two mutually connecied and interdependent objectives:
(a) the direct objectiveis that the Court decides on the objection in the

form of a judgment "by which it çhall either uphold the objection,
reject ir, or declare that the objection does not possess, in the
cjrcurnstances of the case, an exclusively preliminary characies"
(Art. 79 (7) of the Rules of Court);
(b) theindirectobjective isto ascertain or confirm itsjurisdiction. In the
light of this objective, preliminary objections raised by a pariy are
only a tool, a proc~durally designed instrument for the establish-

ment of the jurisdiction of the Caurt, suo nomina et suo vigore, for
according to its Statute it is under an obligation to do so - not
proprio mmo but ex offleio. For,

"[tlheCourt is the guardian of its Statute. ltis not within its
power to abandon. . . a function which by virtue of an express
provision ofthe Statute is an essential safeguard of its cornpulsory
jurisdiction. This is so in particular in view of the Eact that the
principle enshrined in Article 36(6) of the Statute ideclaratory of
one of the most firmlyestablished principles of international arbi-
tral and judicial practice. Thotprincipleis tliurin #hgmaater ofifs
jurisdicfion, ani~fernafionalrribunal, and no!!heinteresred party,
has thepower of decision whether tticdisputr brfore it iscovered

by rheinsrrurnenlcreiiringils jurisdiction." '37
93. The participants in the Joint Session of the SFRY Assembly, the

National Assembly of the Republic of Serbia and the Assembly of the
Republic ofMontenegro have dedared, intm aliu,by a Declaration made
on 27 April 1992:

"The Federal Republic of Yugoslavia, continuing the State, inter-
national, legal and political personalitp of the Socialist Federal

137lnterhnndelPr~liminnryObjEciions, Jvdgment, I.C.J. Repor193'9,dissenting
opinionof SirHerschLauterpach p.104 (ernphasisadded).

165 Je pense comme la Cour que la Yougoslavie est partie à la convention
sur le génocide, maisl'argumentation de la Cour concernant les effets de
la déclaration officiellepubliéele 27 avril 1992me semble impossible à
soutenir.
92. Logiquement, dire qu'«il n'a pas été contesté que la Yougoslavie
était partieà la convention sur legénocide)),c'estdire que la Yougoslavie

est partieà la convention sur le génocideparce que cette qualiténe lui a
pas étécontestée.
Il est vrai que la procédure relative aux exceptions préliminaires se
fonde essentiellement sur l'initiative des parties. Cela nesignifiepas que
les parties ont le droit de se prononcer sur la compétencede la Cour.
On peut dire que la Cour, lorsqu'ellestatue sur des exceptions prélimi-
naires, réalise deux objectifsliésentre eux et interdépendants:

a) I'objectif direct consistant a statuer sur une exception dans un arrêt
((par lequel elle retient l'exception, la rejette ou déclare que cette
exception n'a pas dans les circonstances de l'espèceun caractère
exclusivement préliminaire))(Règlementde la Cour, art. 79, par. 7);

b) l'objectif indirect consistant à vérifierou confirmer sa compétence.
Du point de vue de cet objectif, lesexceptions préliminaires soulevées
par une partie ne sont qu'un instrument, un moyen de procédure
pour établirla compétencede la Cour, suo nomineet suo vigore,car
selon son Statut celle-ci est tenue de le faire non pas proprio motu
mais bien ex officio. Car,

«La Cour est la gardienne de son Statut. II n'est pas dans son
pouvoir d'abandonner ...une fonction qui, en vertu d'une disposi-
tion expresse du Statut, est une garantie essentielle de sa juridic-
tion obligatoire. Elle ne le peut eu égard,en particulier, au fait que
le principe consacrépar l'article 36, paragraphe 6, du Statut est
l'affirmation d'un des principesles plus fermement établisde la
pratique arbitrale et judiciaire internationale et qui est le suivant:
en ce qui concernesa compétence,le tribunal international, et non

la partie intéresséea, le pouvoir de décidersi ledifférenddont il
est saisiest couvert par l'instrument quiétablitsa compétence. ))13'
93. Les représentants qui ont participé à la session commune de

l'Assembléede la République fédérative socialistede Yougoslavie, de
l'Assembléenationale de la Républiquede Serbie et de l'Assembléede la
République de Monténégroont affirmédans leur déclaration du 27 avril
1992 :

«La Républiquefédérativede Yougoslavie, assurant la continuité
de 1'Etatet de la personnalitéjuridique et politique internationale de

IJ7Itirerl~and, sceprionsprélimincriresoC.I.J.Recueil1959,opinion dissidente
de sir Hersch Lauterpacht, p. 104(les italiques sont de moi). Republic of Yugoslavia, shall strictly abide by al1the commitments
that the SFR of Yugoslavia assumed internationally in the past.

At the same time, it shall be ready to fully respect the rights and
interests of the Yugoslav Republics which declared independence.
The recognition of the newly-formed States will follow after al1the
outstanding questions negotiated within the conference on Yugo-
slavia have been regulated.

Remaining bound by al1obligations to international organizations
and institutions whose member it is, the Federal Republic of Yugo-
slavia shall not obstruct the newly-formed States tojoin these organi-
zations and institutions, particularly the United Nations and its
specialized agencies.

The Diplomatic and Consular Missions of the Federal Republic
: of Yugoslavia shall continue without interruption to perform their

functions of representing and protecting the interests of Yugoslavia.

They shall also extend consular protection to al1nationals of the
SFR Yugoslavia whenever they request them to do so until a final
regulation of their nationality status.

The Federal Republic of Yugoslavia recognized, at the same time,

the full continuity of the representation of foreign States by their
diplornatic and consular mission in its territory." 13$

This declaration, per se, cannot be qualified as a basis for being bound
by the Genocide Convention, at least on account of the two basic
reasons, one being of a forma1and the other of a material nature.
The formal reason resides in the nature of the declarations in the con-

stitutional system of Yugoslavia. The declarations of the Assembly in the
constitutional system of Yugoslavia have, since its foundation, repre-
sented general political acts of the representative body, which have as
their subject the questions which are not subject to legal regulations or
are not included within the competence of the representative body'39.As
political acts, they are not binding, so they do not contain legal sanctions
for the case of non-observance.

The "Participants to the Joint Session of the SFRY Assembly, the
National Assembly of the Republic of Serbia and the Assembly of the
Republic of Montenegro, and the Federal Assembly itselî" are not organs

138Constitutionof the FederalRepublicof Yugosavia,Belgrade, 1992,pp. 57-58.

139M. Snuderl,ConsrirurionuLl UILjubljana, 1957,Vol. II, p. 47; A. FConslitu-
rionulLaw, Belgrade, 1977, p. 381. APPLICATION DE CONVENTION GÉNOCIDE (OP.DISSK. RE~A) 757

la République fédérative socialistede Yougoslavie, respectera stric-
tement tous les engagements que la République fédérative socialiste
de Yougoslavie a pris à l'écheloninternational dans le passé.

Simultanément, elle est disposée à respecter pleinement les droits
et les intérêtdes républiques yougoslaves qui ont déclaré leur indé-
pendance. La reconnaissance des Etats nouvellement constituésinter-
viendra une foisqu'auront été régléelsesquestions en suspens actuel-
lement en cours de négociationdans le cadre de la conférencesur la
Yougoslavie.
Restant liéepar toutes ses obligations vis-à-vis des organisations
et institutions internationales auxquelles elle appartient, la Répu-

blique fédérativede Yougoslavie ne fera rien pour empêcherles
Etats nouvellement constitués d'adhérer à ces organisations et insti-
tutions, notamment à l'organisation des ~ations-Unies et à ses insti-
tutions spécialisées.
Les missions diplomatiques et consulaires de la République fédé-
rative de Yougoslavie à l'étrangercontinueront, sans interruption, a
s'acquitter de leurs fonctions qui consistentà représenter et à pro-
téger des intérêtdse la Yougoslavie.
à tous les ressor-
De plus, elles offriront une protection consulaire
tissants de la République fédérative socialistede Yougoslavie qui la
solliciteront; en attendant que leur statut national soit définitive-
ment arrêté.
La République fédérativede Yougoslavie reconnaît, simultané-
ment, la pleine continuité de la représentation des Etats étrangers
assuréepar les missions diplomatiques et consulaires de ces Etats sur
son territoire.138

On ne peut retenir cette déclarationcomme fondement pour êtreliépar
la convention sur le génocide, pour deux raisons au moins, l'une de
caractère formel et l'autre de caractère matériel.
La raison d'ordre formel est liée à la nature des déclarations dans
l'appareil constitutionnel yougoslave. Depuis l'édificationde celui-ci, les
déclarationsde l'Assembléeconstituent les décisionsde politique générale
de l'organe représentatif, qui portent sur des problèmes qui échappent
aux textes réglementaires ou à la compétencede l'organe repré~entatif"~.
Actes politiques, ces déclarations n'ont pas force obligatoire, et ne com-

portent d'ailleurs pas de sanction légaleen cas de non-respect de leur
contenu.
Les ((représentantsqui ont participé à la session commune de I'Assem-
bléede la République fédérative socialistdee Yougoslavie, de l'Assemblée
nationale de la Républiquede Serbie et de l'Assembléede la République

-
13Won~titutionde la RCpubliquefédérative eougoslavie,Belgrade, 1992,Nations
Unies,doc. 923877, 5 mai 1992, annexe, .-2.
i39M. Snuderl,Cot~sritutiolalu,Ljubljana, 1957,vol. II, p. 47; A. Fira, Consti~ic-
tiorialLaiv.Belgrade, 1977,p. 381.of foreign representation authorized to appear on behalf of the State in
international relations, so that, the measures they adopt, even when
legally binding, cannot be put into effect by one-sided acts of State
organs which have such authority. The material reason concerns the
content of the Declaration. The statement that the Federal Republic of
Yugoslavia "shall strictly abide by al1 the commitments that the SFR

Yugoslavia assumed internationally" is not given in the Declaration in
abstracto, in the form of an unconditional, generalized acceptance of the
commitments that the SFRY assumed internationally in the past, but as
a declarative expression of the premise that the FR of Yugoslavia is
"continuing the State, international, legal and political personality of the
Socialist Federal Republic of Yugoslavia". This fact is not contested by
Bosnia and Herzegovina, for it asserts that

"it is on the basis of this alleged 'continuity' that Yugoslavia (Serbia
and Montenegro) considers itself to be bound by al1 international
commitments undertaken by the former SFRY" (Memorial,
para. 4.2.2.11).

According to the Declaration, the FR of Yugoslavia does not assume the
obligations of the SFRY, but "remain.~bound by ail obligations to inter-
national organizations and institutions of \vhicltiisa member "(emphasis
added).
At the meeting of the Federal Chamber of the Assembly of the SFRY
held on 27 ~~riÏ1992, which proclaimed the ~onstitutioiof the Federal .
Republic of Yugoslavia, the President of the Assembly of Serbia empha-
sized, in his introductory speech, inter alia, that:

"[tlhe adoption of one-sided acts by some of the republics on their
secessionfrom Yugoslavia and the international recognition of those
republics in the administrative borders of the former Yugoslavia
republics forced the Yugoslav peoples who want to continue to live
in Yugoslavia to rearrange the relations in it"

and that "Serbia and Montenegro do not recognize that Yugoslavia is
abolished and does not exist" IN. Another opening speaker, the President
of the Assembly of Montenegro emphasized that Serbia and Montenegro
were "the only States which brought their statehood with them on the
creation of Yugoslavia, and decided to constitutionally rearrange the
former Yugoslavia" 14'.

Moreover, even if the intention of the FR of Yugoslavia to assume

I4OPolitikCI,Belgrad28April 1992,p.6.
I4lIbid. (cmphasisadded).

167 APPLICATION DE CONVENTION GBNOCID (EP.DISSK. RECA) 758

de Monténégro))et de l'Assembléefédérale elle-mêm nee sont pas des
représentantshabilités à représenter1'Etat à l'étrangerdans les relations
internationales, et lesmesures qu'ilsadoptent, même si ellesnt force obli-
gatoire, ne peuvent donc êtremises en vigueur par des décisions unilaté-
rales d'organes d'Etat A ce autorisés. La raison d'ordre matériel serap-
porte à la teneur de la déclaration. L'affirmation que la République
fédérativede Yougoslavie ((respectera strictement tous les engagements

que la Républiquefédérative socialiste de Yougoslavie a pris à l'échelon
international)) n'yapparaît pasinabstracto, comme une acceptation géné-
rale et inconditionnelle des engagements prisdans le passépar la Répu-
blique fédérative socialiste de Yougoslaviec;'estune formuledéclaratoire,
fondéesur le postulat que la Républiquefédérative de Yougoslavie assure
«la continuité de1'Etatet de la personnalité juridique et politique inter-
nationale de la Républiquefédérative socialiste de Yougoslavie)). Ce qui
n'est pas contestépar la Bosnie-Herzégovine,qui affirme que

«c'est en se fondant sur cette «continuité» présuméeque la Yougo-
slavie (Serbie et Monténégro)se considèrecomme liéepar tous les
engagements internationaux pris par l'ex-République fédérative
socialiste de Yougoslavie)) (mémoire,par. 4.2.2.11).

Selonla déclaration,la République fédérative de Yougoslavie n'assume pas
lesobligations de la République fédérative socialiste de Yougoslavime,ais
((restetenue de tolitesses obligationÙl'égard desinstitutions et des orga-
nisations internationalesdont elle esten~bre»(les italiques sont de moi).
A la session tenue par la chambre fédéralede l'Assembléede la Répu-
blique fédérative socialistede Yougoslavie le 27 avril 1992, session à
laquelle a été proclamée lC aonstitution de la République fédérative de

Yougoslavie, le président de l'Assembléede Serbie a indiqué dans son
discours liminaire que:
((l'adoption de décisions unilatéralespar certaines républiques au
moment où ellesont fait sécessionde la Yougoslavie etlareconnais-
sance internationale de ces républiquesdans les frontières adminis-
tratives des anciennes républiquesyougoslaves ont obligélespeuples
yougoslaves qui veulent continuer de vivre en Yougoslavie àréamé-

nager les relationsàl'intérieurdu pays))
et que «la Serbie et le Monténégrone reconnaissent pas le fait de I'aboli-
tion et de la disparition de la Yougoslavie»'40. Prenant également la
parole à l'ouverture de cette session, le présidentde l'Assembléedu Mon-
ténégro asoulignéque la Serbie et le Monténégroétaient«les seuls Etats

qui avaient conservéleur qualité d'Etat au moment de la création dela
Yougoslavie et qui avaient décidéde réaménagerl'ex-Yougoslaviesur le
plan constitutionnel))14'.
De surcroît, mêmesi la République fédérative de Yougoslavie avait

'40Polirika, Belgr28eavril 199, . 6.
'4'Ibirl.(les italiquessont de moi). formally the obligations of the SFRY were built into the Declaration, the
Declaration, as the external textual expression of such an intention, could
hardly represent anything more than a political proclamation which
should be operationalized, in the absence of rules on automatic succes-
sion, in accordance with the relevant rules of the Law of Treaties on the
expression of consent to be bound by a treaty.

94. Whereas after the adoption of its Constitution on 27 April 1992,
Yugoslavia did not express its consent to be bound by the Genocide Con-
, vention in the way prescribed by Article X1 of the Convention and nor
did it send to the Secretary-General of the United Nations the notifica-
tion of succession,it is obvious that the only possible legalbasis on which

Yugoslavia could be considered a party to the Genocide Convention is
the legal identity and continuity of the SFRY in the domain of multi-
lateral treaties.

In the practice of the Secretary-General as depositary of multilateral
treaties, Yugoslavia figures also, after the territorial changes which took
place in the period 1991-1992, as a party to the multilateral treaties
deposited with the Secretary-General, although the FR of Yugoslavia did
not express its acceptance to be bound by concrete treaties in the ways
fixed by the treaties, nor did it address to the Secretary-General as
depositary the appropriate notifications of succession.The date when the
FR of Yugoslavia expressed its acceptance to be bound is mentioned as

the day on which it was bound- by that specific instrument. Exempli
causa, in the "Multilateral Treaties Deposited with the Secretary-Gen-
eral" for 1992, and in the list of "Participants" of the Convention on the
Prevention and Punishment of the Crime of Genocide, "Yugoslavia" is
included, and the 29 August 1950is mentioned as the date of the accept-
ance of the obligation - the date on which the SFRY ratified that Con-
vention. Identical dates are also found in the issues of the "Multilateral
Treaties Deposited with the Secretary-General" for 1993and 1994.Such
a mode1 is applied, mutatis mutandis, to other multilateral conventions
deposited with the Secretary-General of the United Nations.
Therefore, it is indisputable that the practice of the Secretary-General
as the depositary of the multilateral treaties consistently qualifies Yugo-
slavia as a party to these multilateral treaties on the basis of the accept-
ance of those treaties expressed by the SFRY.
95. On the basis of existing practice, the "Summary of Practice of the

Secretary-General as depositary of Multilateral Treaties:' concludes:

"The independence of a new successor State, which then exercises
its sovereignty on its territory, is of course without effect as concerns
the treaty rights and obligations of the predecessor Statc as concerns
it own (remaining) territory. Thus, after the separation of parts of
the territory of the Union of Soviet Socialist Republics (whichexprimé l'intention d'assumerofficiellement les obligations de la Répu-
blique fédérative socialistde Yougoslavie dans cette déclaration,celle-ci,
en tant que texte exprimant cette intention, ne pourrait guèreêtreconsi-

dérée que comme une proclamation politique a laquelle il faudrait encore,
faute de régimede successionautomatique,donner force opératoireselon
les règlesdu droit des traitésapplicablesa la manifestation de la volonté
d'êtreliépar voie conventionnelle.
94. Comme après l'adoption de sa constitution le 27 avril 1992, la
Yougoslavie n'a pas manifestésa volontéd'êtreliéepar la convention sur
le génocide selonlesmodalités prévues a l'articleXI de celle-ci,et comme
elle n'a pas non plus envoyéau Secrétaire générad le l'organisation des
Nations Unies de notification de succession, la seule base juridique qui
permet de considérerla Yougoslavie comme partie a cette convention est
évidemment et exclusivementle fait qu'elle ait assuméla personnalité et
la continuitéjuridiques de la Républiquefédérative socialistede Yougo-
slavieà l'égard destraitésmultilatéraux.
Dans la pratique du Secrétairegénéral en tant qud eépositaire d'accords
multilatéraux, la Yougoslavie est également considéréa e, rès la modifi-
cation territoriale intervenue en 1991et 1992,comme partie aux traités
multilatéraux, bien qu'elle n'ait pas manifesté savolonté d'êtreliéepar

des traitésdans les formes prescrites et qu'ellen'ait pas non plus adressé
au Secrétaire générale,n qualitéde dépositaire, les notifications de suc-
cession voulues. La date à laquelle la République fédérativede Yougo-
slaviea manifesté son acceptationest donnée pourlejour où ellea été liée
par l'instrument considéréS .i l'on regarde par exemple le document inti-
tulé((Traitésmultilatérauxdéposés auprèsdu Secrétaire général »concer-
nant l'année 1992, on constate que la Yougoslavie y figure parmi les
Etats partiesà la convention pour la préventionet la répressiondu crime
de génocide et que c'est le 29 août 1950 qui est donné comme date
d'adhésion a cet instrument, a savoir la date a laquelle la République
fédérative socialistede Yougoslavie l'a ratifié. trouve des dates iden-
tiques dans les éditions de1993et de 1994du mêmedocument. La situa-
tion est la même mutatis mutandis, pour les autres conventions multila-
térales déposéea suprès du Secrétaire général.
TIest donc indiscutable que, dans sa pratique de dépositaire des traités
multilatéraux,le Secrétaire général n'caesséde considérerla Yougoslavie
comme partie à ces traités sur la base de leur acceplation par la Répu-

blique fédérative socialistede Yougoslavie.
95. Conformément à la pratique établie,donc, le ((Précisde la pra-
tique du Secrétaire général - dépositaire des accords multilatéraux))
conclut :

((L'indépendance d'unnouvel Etat successeur, qui exerce par la
suite sa souverainetésur son territoire, est bien sûr sans effet sur les
droits et lesdevoirs conventionnels de 1'Etatprédécesseurui concer-
nent son propre territoire (le territoire restant). Ainsi donc, aprèsla
dissociation de certaines parties du territoire deUnion des Répu- became independent States), the Union of Soviet Socialist Republics
(as the Russian Federation) continued to exist as a predecessor
State, and al1its treaty rights and obligations continued in force in
respect of its territory ..The same applies to the Federal Republic
of Yugoslavia (Serbia and Montenegro), which remains as the pre-
decessor State upon separation of parts of the territory of the former
Yugoslavia. General Assembly resolution 4711of 22 September 1992,
to the effect that the Federal Republic of Yugoslavia could not auto-
matically continue the membership of the former Yugoslavia in the
United Nations (see para. 89 above), was adopted within the frame-

work of the United Nations and the context of the Charter of the
United Nations, and not as an indication that the Federal Republic
of Yugoslavia was not to be considered a predecessor State."142

On the other side, a
"different situation occurs when the predecessor State disappears.
Such was the case when the Czech Republic and Slovakia were

formed after the separation of their territories from Czechoslovakia,
which ceased to exist. Each of the new States is then in the position
of a succeeding State." 143
Such a practice is completely in accordance with the interpretation of

the range of resolution 4711 of the General Assembly of the United
Nations which, otherwise, serves as the basis of the contentions that
Yugoslavia, by the mere fact of territorial changes lost, ipso facfo, the
status of party to multilateral conventions.
In the lettcr from the United Nations Office of Legal Affairs of
16April 1993,it is stated, inter alia, that
"the status of Yugoslavia as a party to treaties was not affected by

the adoption of the General Assembly resolution 4711of 22 Septem-
ber 1992.By that resolution, the General Assembly decided that the
Federal Republic of Yugoslavia (Serbia and Montenegro) shall not
participate in the work of the General Assembly. It did not address
Yugoslavia's status as a party to treaties."

96. Regarding the qualification mentioned in paragraph 297 of the
"Summary", the Permanent Representative of the United States to the
United Nations in her letter addressed to the Secretary-General dated
5 April 1996 (doc. ,4151195;Sl19961251,8 April 1996)protested against

142STlLEG.8,p. 89, para. 297(emphasisadded).
143Ibid, para. 298.

169 bliques socialistes soviétiques (quisont devenues des Etats indépen-
dants), l'union des Républiques socialistes soviétiques (devenuela
Fédération deRussie) a continuéd'exister en tant qu'Etat prédéces-

seur et tous sesdroits et devoirs conventionnels sont restés valablesà
l'égardde son territoire ...On peut dire la mêmechose de la Répu-
blique fédérativede Yougoslavie (Serbie et Monténégro), qui sub-
siste en tant qu7Etat prédécesseuraprès dissociation de certaines
parties du territoire de l'ex-Yougoslavie, La résolution 4711 de
l'Assembléegénéraleen date du 22 septembre 1992,dans laquelle il
est dit que la République fédérative de Yougoslavie ne peut pas
assurer automatiquement la continuitéde la qualitéde membre de

l'ancienne Républiquefédérative socialiste de Yougoslavie à I'Orga-
nisation des Nations Unies (voir par. 89 ci-dessus), a étéadoptée
dans le cadre des Nations Unies et dans le contexte de la Charte des
Nations Unies, et non pour indiquer que la Républiquefédérative de
Yougoslavie ne devait pas être considéréceomme un Etat prédéces-
seur.» '42

Mais il est dit également:

«la sityation est différente lorsqueI'Etat prédécesseurdisparaît. Tel
a étéle cas lorsque la République tchèqueet la Slovaquie se sont
forméesaprès que leur territoire s'est séparéde la Tchécoslovaquie,
qui a cesséd'exister. Chacun des nouveaux Etats se trouvait alors en
position d'Etat successeur.» 143

Cette pratique est tout à fait conforme à l'interprétationde la résolu-
tion 4711de l'Assembléegénérale des Nations Unies sur laquelle la You-
goslavie s'appuie au demeurant pour soutenir qu'elle n'a pas perdupar le
simple fait d'un changement territorial son statut de partie aux conven-
tions multilatérales.
Il est dit dans la lettre du bureau des affaires juridiques de I'Organisa-
tion des Nations Unies en date du 16avril 1993que:

«le statut de la Yougoslavie en tant que partie aux traitésn'est pas
modifiépar l'adoption par l'Assembléegénérale,le 22 septembre
1992,de sa résolution 4711.Dans cette résolution,l'Assemblée géné-
rale a décidéque la Républiquefédérativede Yougoslavie (Serbie et

Monténégro)ne participerait pas aux travaux de l'Assemblée géné-
rale. Elle ne visait pas la qualitéd'Etat partie aux traités de la You-
goslavie.))
96. Pour en revenir aux considérationsexposéesau paragraphe 297 du

«Précis»,la représentantepermanente des Etats-Unis d'Amériqueauprès
de l'organisation des Nations Unies a protesté, dans la lettre qu'elle a
adresséeau Secrétaire généralle 5 avril 1996 (A151195-Sl19961251 8,avril

142STlLEG.8,p. 89, par. 297.
'43lbidp.,r. 298.such a qualification. Four days later, on 9 April 1996,the Legal Counsel
of the United Nations issued "Errata" (doc. LA41TRJ220) which, inter
alia, deleted the qualification of the FR of Yugoslavia as a predecessor
State contained in paragraph 297 of the "Summary". Protests against such
a qualificationof Yugoslaviawerealso expressedin the letters addressed to
the Secretary-General by the Permanent Representative of Germany to
the United Nations (doc. Al501929;Sf19961263,11 Apnl 1996)and by
the Chargé d'Affaires ad interitn of the Permanent Mission of Guinea

on behalf of the Organization of the Islamic Conference (OIC) and the
Contact Group on Bosnia and Herzegovina (doc. Al501930;Sl19961260,
12 April 1996). Both of the latter letters were, however, dated 10 April
1996, i.e., after the "Errata" had been prepared and published.

The formal circumstances of this concrete question make, in my
opinion, both the objections and the "Errata" of the Legal Counsel of the
United Nations irrelevant. More particularly,

(a) The subject-matter of the objections submitted in the letters of the
permanent representatives of three member States of the Organiza-
tion are "views" and "interpretations" of the legal position of Yugo-
slavia as a predecessor State expressed in the "Summary of Practice
of the Secretary-General as depositary of multilateral treaties", or,
to put it more precisely, in paragraphs 297 and 298 of that docu-

ment. In other words, the above-mentioned objections do not con-'
Cern the practice of the Organization and of its organs in the
concrete matter as an objective fact, but relate to the interpretation
of that practice presented in the "Sumrnary".
(b) "Errata" per defitiitionemrepresents "a mis-statement or misprint in
soinething that is published or written" 144.
Leaving aside the question of whether the "errata" are well
founded in this specificcase, it is obvious that the document con-
cerns the relevant parts of the "Summary of Practice of the Secre-
tary-General" (emphasis added). A "Summary" by itself does not
have the value of an autonomous document, a document which
determines or constitutes something. It isjust the condensed expres-

sion, the external lapidary assertion of a fact which exists outside it
and independently from it. In that sense, the Introduction to the
"Summary of the Practice of the Secretary-General as depositary of
multilateral treaties" says,nteraliu,that "the purpose of the present
summary is to highlight the main features of the practice followed
by the Secretary-General in this field" (p. 1).
Therefore, the errata in this specificcase do not question the rele-
vance of the practice of the Secretary-General as the depositary of

lu Webster'sThirdNew Ititernu~iot~lictioriary, 1966,p. 772. APPLICATIONDE CONVENTIONGENOCIDE(OP. UISS. KRECA) 761

1996)'contre la qualification attribuée à la Yougoslavie dans ce docu-
ment. Quatre jours plus tard, le 9 avril 1996, le conseiller juridique de
l'ONU a publié un {(Erratum)} (doc. LA41TR1220) ayant pour but
de faire disparaître du paragraphe 297 du «Précis» la qualification
d'Etat prédécesseurattribukc à la Républiquefédérativede Yougosla-
vie.Des protestations contre cette qualification ont égalementétkelevkes
dans les lettres adresséesau Secrklaire généralpar le représentant per-
manent de l'Allemagne aupris de l'Organisation des Nations Unies
(doc. N50/929-S11996J263,11 avril 1996)et par le chargé d'affairespar
intérimde la mission permanente de la Guinéeau nom de I'organisa-
tion de la conférence islamiqueet du groupe de contact sur la Bosnie-

Herzégovine (doc. M501930-St19961260, 12 avril 1996).Ces deux lettres
étaient datéesdu 10avril 1996,date postérieuredonc àla rédactionet
la publication de l'aErratum>).
Les formes dans lesquelles se présente:cette question concrete btent
toute pertinence aux objections qui viennent d'êtrecitées à l'«Erratum»
du conseillerjuridique. Pour étreplus précis:

u) le fond des objections élevées par les représentants permanents des
trois Eiats Membres de l'Organisation est constitue d'<copinions» et
d'«interprétations)>concernant le statut juridique de la Yougoslavie
qualifiëe d'Etat prédécesseurdans le «Précis dela pratique du Secré-
tairegénéra l dépositairedes accords multilatéraux», plus exacte-
ment aux paragraphes 297 et 298. En d'autres ternes, ces objections
ne visaient pas la pratique de !'Organisation ou de ses organes en
tant que fait objectif intervenu dans ce domaine concrel, mais bien
l'interprétationde cette pratique, telle qu'elleétaitprésentéedans le

«Précis»;
6) par définition, unerratumest une ((erreurde rédactionou faute typo-
graphique dans un texte publiéou écrit)>'a.
Sans soulever mèmela question de savoir sil'<<Erratum»en ques-
tion étaiten l'occurrence justifi,n ne peut qu'admettre qu'ilconcer-
nait certainspassages du «PréciLsde la pratique du Secrétairegéné-
rai..)>(lesitaliques sont de moi). Un <<précisn>'a pas en lui-même la
valeur d'un document autonome, d'un instrument qui détermineou
constitue quelque chose. IIn'estque la synihéseabrégéel,'affirmatioi~
extrinsèque lapidaired'un faitayant une réalité en dehors et indépen-
damment de lui. D'ailleurs, il est dit dans l'introduction du<Précis»

en question que l'objet de celui-ci «est de faire ressortilescaracté-
ristiquesprincipalesde la pratique suivieen cette matièrepar le Secré-
taire général)()p. 1).

11s'ensuitque dans ce cas particulier l'erratum ne met pas en cause
la pertinence de la pratique du Secrétaire générae ln sa qualité de

'4.IVcb~f :erhird N~J~IInIrernarionnlDrctr1966,p.772 multiIiitera1treaties. This practice is, in relation to the status of the
FR of Yugoslavia as party to the multilateral treaties, uniform and
without exceptions, so lhat it has no pressing need of a "summary"
which would "highlight [its]main features" ;

(cl The fact that the term "Federal RepubEic"isno1used beforeor after
the namc "Yugoslavia" cannot, in rny opinion, be taken as proof
that it does no1çoncern the FR of Yugoslavia. The name "Yugo-
slavia" designates the Yugoslav State, regardlcss of the Fdctualand
legal changes which it experienced during its existence, whichwere
also reflectedin its narne. For example, at the time when Yugoslavia
entered into the obligations under the Convention on the Prevention

and Punishmen tof the Crime of Genocide - in August 1950 - the
fullname of the Yugoslav State was "Federal People'sRepublic of
Yugoslavia", Yugoslavia is, on thebasis of legal identity and conti-
nuity, a party to the conventions which bound - in the era of the
League of Nations - the Yugoslav State which was called, at thai
time, the "Kingdom of Serbs, Croats and Slovenes".
Itfollows that the terrns such as the "former Yugoslavia" or the
"Federal Republic of Yugoslavia (Serbiaand Montenegro)" per se
have no other meaning except the epistemiological one. In relalion
to the SFRY, the Kingdom of Serbs, Croats and Slovenesrepresents
the "former Yugoslavia". just as the "Democratic Federal Yugo-
slavia", constituted at SessionII of the Anti-Fascist Assemblyof tlic
People'sLiberation of Yugoslavia on 29 November 1943,represents

the "former Yugoslavia" in relation to the Federal People's Repub-
lic of Yugoslavia established by thc 1946 Constitution. The con-
ventional nature of such terms is also seen ii~the practicc of the
principal organs of the United Nations wjth respcct to the use of the
name "Federal Republic of Yugoslavia (Serbia and Montenegro)".
Siiiçe22Novernber 1995,îhe Security Council usesin its resolutions
1021and 1022the term "Federal Republic of Yugoslavia" instead
of the former "Federal Republic of Yugoslavia (Serbia and Mon-
tenegro)" without any express decision and in a legally unchanged
situation In relation to the one in which it, like other organs of the
United Nations, employed the term "Federal Republic of Yugo-
slavia (Serbia and Montenegro)". The fact that this change in the
practice of the Security Council appeared on the day following
the initialling of the Peace Agreement in Daytori, gives a strong

basis for the conclusion that the concrete practice is not based on
objective, legalcriteriü but rather on political criteria.

97. The practice of the Secretary-General as the depositary of multi-
lateral treaties corresponds ro ihe general legal principle thata diminu-
tion of territory does notof itselfaffect the legalpersonality of the State.

171 APPLICATIONDE CONVENTIONG~ZNOCIDE (OP.DISSK. RECA) 762

dépositaire des traités multilatéraux. Cette pratique, en ce qui
concerne le statut de la République fédérativede Yougoslavie A
l'égard destraités multilatéraux,est uniforme et constante et il n'cst
pas vraiment nécessaired'établirun «précis»qui en ferait ((ressortir
les caractéristiques principales));
c) on ne peut voir dans le fait que le ternie ((Républiquefédérative))
n'est utiliséni avant ni aprèsle nom~Yougoslavie»la preuve qu'il ne
s'agitpas de la Républiquefédérativede Yougoslavie. Le nom ((You-

goslavie)) désigne1'Etatyougoslave, indépendamment des modifica-
tions de fait ou de droit que celui-ci a connues au cours de son exis-
tence, modifications dont son nom est d'ailleurs le reflet. Au moment
par exempleoù la Yougoslavie a assuméles obligations de la conven-
tion pour la préventionet la répressiondu crime de génocide (enaoût
1950), son nom complet était ((Républiquepopulaire fédérative de
Yougoslavie». En vertu de sa pérennitéet de la continuitéde sa per-
sonnalité juridique, la Yougoslavie est partie aux conventions qui
liaientà l'époquede la Société deNs ations, 1'Etatyougoslave, appelé
alors le ((Royaume des Serbes, Croates et Slovènes)).
11s'ensuit que les expressions «ex-Yougoslavie>)ou ((République
fédérativede Yougoslavie (Serbie et Monténégro))) n'ont en elles-
mêmes pas d'autre sensque leur sens épistémologique. u point de vue
de la République fédérative socialistede Yougoslavie, le Royaume
des Serbes, Croates et Slovènes représente((l'ex-Yougoslavie», de la
même façonque la ((Yougoslavie démocratique populaire)) consti-

tuéeà la deuxième sessionde l'assembléeantifasciste de la libération
populaire de Yougoslavie le 29 novembre 1943 représentait ((l'ex-
Yougoslavie)) par rapport Ala République populaire fédérativede
Yougoslavie, crééepar la Constitution de 1946.Le caractère conven-
tionnel de cette terminologie apparaît aussi dans la pratique des or-
ganes principaux des Nations Unies en cequi concerne l'utilisation de
l'appellation ((Républiquefédérativede Yougoslavie (Serbieet Mon-
ténégro)))D. epuis le2 novembre 1995, leConseil de sécurité utilise
dans ses résolutions (résolutions1021et 1022) le terme ((République
fédérativede Yougoslavie)) au lieu de l'ancien terme ((République
fédérativede Yougoslavie (Serbie et Monténégro))), sans que soit
intervenue quelque décision expresseet sans que la situation juridique
ait changépar rapport à celle ou il utilisait, de mêmeque les autres
organes des Nations Unies, le terme ((Républiquefédérativede You-
goslavie (Serbie et Monténégro))).Le fait que cette évolution de la
pratique du Conseil de sécuritédate du jour qui a suivi la signature
provisoire des accords de paix de Dayton donne de bonnes raisons de

conclure que l'usageconcret n'est pas fondésur des critèresjuridiques
objectifs mais plutôt sur des considérations politiques.

97. La pratique du Secrétaire générae l,n sa qualitéde dépositaire des
traités multilatéraux, répond au principejuridique géné qrailveut qu'une
réductionde son territoire ne modifie pas ipsofacto la personnalitéjuri-763 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (DISS .P. KRE~A)

This principle of international law is deeply rooted in international prac-

ti~e'~~A . Searly as 1925,the arbitrator, Professor Borel, held in the Otta-
man Debt Arbitration that, notwithstanding both the territorial losses
and the revolution, "in international law, the Turkish Republic was
deemed to continue the international personality of the former Turkish

Empire"146.In the practice of the United Nations, it is expressed in the
opinion given by the United Nations Secretariat regarding the secession
of Pakistan from India in which it was stated that "[tlhe territory which
breaks off, Pakistan, willbe a new State; ... the portion which separated
was considered a new State; the remaining portion continued as an exist-

ing State with al1the rights and duties which it had before" 14'.A possible
exception cited is the case in which territorial changes affect the "terri-
torial nucleus" of a Statei48,which did not happen in the case of Yugo-
slavia since the "territorial nucleus" has been preservedi49.

98. It is noteworthy to underline that the practice of the Court is iden-
tical to the practice of the Secretary-General as depositary of multilateral
treaties. The Yearbook 1993-1994 of the International Court of Justice
says that :

"On 31 July 1994,the following 184 States were Members of the
United Nations :

Store Date of Admission

Yugoslavia ............... Original Member." Is0

An identical formulation is also found in the previous issuei5'. On the
basis of Article 93 (1) of the Charter of the United Nations, al1Members
of the United Nations are ipsofacto parties to the Statute.

Such a practice of the Court is infull agreement with the interpretation
of the scope of resolution 4711of thc General Assembly given in a letter
which the Under-Secretary-General and the Legal Counsel of the United
Nations addressed on 29 September 1992 to the permanent representa-

'45D. Anzilotti, this isone of the mostcertain rules in international law: "nessun prin-
cipio più sicuro di questo ncl diritto internazionale", "La fornazione del Regno d'Italia
nei guardi del diritto internazionale", Revislu di diritto interriazioriale,1912,p. 9.

14Citcd in K. Marck, Identity and Coritinuityof States in Public InternutionalLuw,
1954,p. 40.
14'United Nations Press Release PMl473, 12August 1947(Yearbook of tlze Interna-
rionulLuiv Conlnlission,Vol. II, p. 101).
14R Hall, A Treuriseon Inrer~iutionl aw, 1924,p. 22; American Society of lnterna-
tional Law, Panelon "State Successionand Rclations with Federal States", Gold Room,
Department,us1April 1992, p. 10.ashington, D.C., E. Williamson, United States State

IsI.C.J. Ycurbook 1993-1994,rNo. 48, p. 67.rernurionalLaw, 1984,p. 147.
Is1.C.J. Yeurbook 1992-1993, No. 47, p. 59. APPLlCATiON DE CONVENTION GÉNOCIDE (OP.DISS.KRE~A) 763

dique d'un Etat. Ce principe de droit international est profondément enra-
cinédans la pratique internationale '45.Dès1925,l'arbitre en l'affairede la
Dette ottotnune, M. Borel, soutenait que malgréla perte de territoire et

malgréla révolution «la Républiqueturque [était] réputée en droit inter-
national assurer la continuitéde la personnalitéinternationale de l'ancien
empire turc)>'46.Dans la pratique des Nations Unies, ce mêmeprincipe se
retrouve dans l'opinion donnéepar le Secrétariat à propos de la sécession
du Pakistan de l'Inde: «le territoire qui fait sécession,le Pakistan, sera un
Etat nouveau; ..la partie du territoire qui a fait sécessionétaitconsidérée

comme un nouvel Etat; la partie restante a continuéd'êtreun Etat exis-
tant, avec les mêmesdroits et les mêmesdevoirs qu'a~paravantu'~'. On
évoque, à titre d'exception éventuelle,le cas où le changement territorial
affecte le ((nucleusterritorial)) de'Etat148.Mais la Yougoslavie n'est pas
dans ce cas puisque son «nucleus territorial)) a été

98. TIest intéressantde noter que la pratique de la Cour est identique
à celle du Secrétairegénéraldépositaire des traités multilatéraux.On lit
dans l'Annuuire1993-1994de la Cour internationale de Justice que:

«Au 31juillet 1994,la liste des cent quatre-vingt-quatre Membres
des Nations Unies étaitla suivante:
Etat Dure d irdtnissiot~

Yougoslavie . . . . . . . . . . . . . Membre originaire. » I5O

On trouve la mêmeformule dans l'édition précédentd ee l'Annuaire151.
Selon le paragraphe 1de l'article 93 de la Charte des Nations Unies, tous
les Membres des Nations Unies sont ipsofucto parties au Statut de la
Cour internationale de Justice.
La pratique de la Cour coïncide donc tout à fait avec l'interprétation
de la résolution 47/1 de I'Assemblécgénéraleque le Secrétairegénéral

adjoint, conseiller juridique de l'organisation des Nations Unies, a pré-
sentéedans la lettre qu'il a adresséele 29 septembre 1992aux représen-

145Pour D. Anzilotti, il s'agit del'unedes règlesles plus sûres du droitinternational:
«nessun principiopiù sicurodi questone1diritto internazie, dans «La fornazione
del Regnod'Italianei guardidel dirittointernazionale»,Rivistu di dirirto ititernoiionale,
1912, p.9.
1954, p.40.ns K. Marek,ldetlfifyand Continuityof Stores in PirblicInrernafionulLaw,
lJ7Communiqué de pressede l'ONU, PM1473,12août 1947(At~nuaire(lelu Conztnis-
sion cludroit it~tert~ofl,ol. II, p. 101).
148Hall, A Treufiseon Itltert~afionalLaw, 1924, p.22; AmericanSociety of Interna-
tional Law,Panelon ~StateSuccession andRelationswithFederalStates)),Gold Room,
RayburnHouse Office Building,Washington,D.C., E. Williamson, départemendt7Etat
des Etats-Unisd'Amérique1, " avril 1992,p. 10.
149M. Akchursl,A Modern Inrroductionto InfernufionulLo~v(1984),p. 147.
C.I.J. Annuuire1993-1994.no48, p. 69.
C.I.J. Antli~uire1992-1993,no47, p. 61.tives of Bosnia and Herzegovina and Croatia to the United Nations and
which asserts, inter aliu, that "the resolution does not terminale nor sus-
pend Yugoslavia's membership in the Organization" 152.

99. Three principal legal questions are raised by Yugoslavia's fifth
preliminary objection, and relate to:

(a) the qualification of the conflict in Bosnia and Herzegovina;
(h) the territorial or non-territorial nature of thc obligations of States
under the Genocide Convention; and
(c) the type of the State responsibility referred to in Article 1X of the
Convention.

100. Having in mind the territorial nature of the obligations of States
under the Genocide Convention, the qualification of the conflict in Bos-
nia and Herzegovina is of considerable importance. Even if this question
is closely linked to the merits, this does not prevent the Court from

"mak[ing] a summary survey of the merits to the extent necessary to
satisfy itself that the case discloses claims that are reasonably argu-
able or issues that are reasonably contestable; in other words, that

these claims or issues are rationally grounded on one or more prin-
ciples of law, the application of which may resolve the dispute. The
essence of this preliminary survey of the merits is that the question
of jurisdiction or admissibility under consideration is to be deter-
mined not on the basis of whether the applicant's claim is right but
exclusivelyon the basis whether it discloses a right to have the claim
adjudicated." IS3

In my opinion, the conflict in Bosnia and Herzegovina cannot be quali-
fied as "civil war" or "interna1 conflict" exclusivelyas Yugoslavia asserts.

That assertion is only partly correct.
The armed conflict in Bosnia and Herzegovina was a special, sui
generis conflict, in which elements of civil war and international armed
conflict were intermingled.
Elements of civil war were obviously present in the armed conflict in
Bosnia and Herzegovina; however, according to my opinion, they could
in no way be seen as its dominant characteristic. They were especially

152United Nations,GeneralAssernbly,Al471485,30 September1992,Annex.

l" N~iicleuTests, I.C.JReporrs 1974, joint dissentingopinion of JudgesOnyeania,
Dillard,Jiménez deAréchagaand Sir Hurnphrey Waldock,p. 364.tants pemianents de la Bosnie-Herzégovine etde la Croatie auprès de
l'organisation, ou il est dit que «la résolutionne met pas fin à I'appar-
tenance de la Yougoslavie à l'organisation et ne la suspend pas»'52.

CINQUIÈME EXCEPTION PRÉLIMINAIRE

99. Dans sa cinquième exception préliminaire,la Yougoslavie soulève
trois points de droit principaux à propos:

u) de la qualification du conflit en Bosnie-Herzégovine;
b) de la nature territoriale ou non territoriale des obligations des Etats
aux termes de la convention sur le génocide;
c) de la nature de la responsabilitéd'un Etat dont il est question à I'ar-
ticle 1Xde la convention.

100. Si l'on prend en considération la nature territoriale des obliga-
tions que la convention sur le génocide imposeaux Etats, la qualification
du conflit en Bosnie-Herzégovine est d'une extrêmeimportance. Que

cette question touche de prèsau fond de l'affaire ne doit pas empêcherla
Cour de
«se livrer à un examen sommaire du fond du différend dans la

mesure ou cela lui est nécessairepour s'assurer que l'affaire fait
apparaître des prétentions raisonnablement soutenables ou des ques-
tions pouvant raisonnablement prêter à contestation, autrement dit
des prétentions ou des contestations qui sont fondées rationnelle-
ment sur un ou plusieurs principes de droit dont l'application peut
permettre de résoudre le différend. L'essentiel,en cequi concerne cet
examen préliminairedu fond, est qu'ilfaudra trancher la question de

la compétenceou de la recevabilitéqui est en cause en considérant
non pas si la prétention du demandeur est fondée maisexclusive-
ment si elle fait apparaître un droità soumettre cette demande à la
décisionde la Cour. >'53

A mon avis, le conflit en Bosnie-Herzégovinene peut êtresimplement
qualifié,comme l'affirmela Yougoslavie, de«guerre civile))ou de((conflit
interne)). Cette qualification ne serait qu'en partie correcte.
Le conflit arméen Bosnie-Herzégovine estun conflit de nature parti-
culière,sui generis, où se mêlent des élémend tse guerre civile et des élé-
ments de conflit international armé.
Les éléments de guerre civilesont de toute évidenceprésents;pourtant,

ils ne sont pas,à mon avis, le trait dominant du conflit. Ils se sont sur-
tout manifestésdans la périodede crise constitutionnelle qui a précédé la

lS2OrganisationdesNationsUnies,Assemblée générdalec,.A/47/48n,nexe,30sep-
tembre 1992.
153Essuisnucléuires,C.I.J. Recueil 1974, opiniondissidMM.edOnyeama,Dil-
lard,Jimknezde Aréchagaet sirHumphreyWaldoçk,p. 364.expressed in the period of constitutional crisis before the proclamation of
the independence of Bosnia and Herzegovina by the incomplete parlia-
ment of Bosnia and Herzegovina. The passive, preparatory stage of that

war consisted especially of the acts of creation of national militias as
early as in 1991, whilethe active phase of the war started with attacks
against the organs of the central federal authorities, especiallyagainst the
units of the Yugoslav People'sArmy.
After the proclamation of sovereignty and independence of Bosnia and
Herzegovina by the incomplete parliament of osn ni and Herzegovina,
the civil war became, in my opinion, an international armed conflict, in
which one side consisted of a fictitious, dejure recognized State - the
Republic of Bosnia and Herzegovina - and the other side consisted of
two de facto States not recognized by the international community -
Republika Srpska and Herzeg-Bosna. This was belluri?omniu,n contra
oinnes,whichiseloquently shown by the war betweenthe Muslim authori-
ties in Sarajevo and Herzeg-Bosna in 1993,and by the war between the
authorities in Sarajevo and the alternative Muslim Autonomous Region
of Western Bosnia, proclaimed in September 1993.

101. The relevant passage of the Court's Judgment relating to the
nature of the rights and obligations of Statesunder the Convention reads
as follows:
"the rights and obligations enshrinedby the Convention are rights and
obligationsergaomnes.The Court notes that the obligation eachState
thus has to prevent and to punish the crime of genocideis not ternto-
rially limitedby the Convention." (Para. 31 of the Judgment.)

In my opinion, it is necessary to draw a clear distinction, on theone
hand, between the legal nature of the norm prohibiting genocide, and, on
the other, the implementation or enforcement of that norm.
The nom prohibiting genocide, as a norm of jus cogens, establishes
obligations of a State toward the international community as a whole,
hence by its very nature it is the concern of al1States. As a norm ofjus
cogens it does not have, nor could it possibly have, a limited territorial
application with the effect of excluding its application in any part of the
international community. In other words, the norm prohibiting genocide
as a universal norm binds States in al1parts of the world.

As an absolutely binding norm prohibiting genocide, it binds al1sub-
jects of international law even without any conventional obligation. To
that effect, and only to that effect, the concrete nom is of universal
applicability (a norm ergu omnes), and hence "non-territorality" as
another pole of limited territorial application may betaken as an element
of the very being of a cogent norm of genocide prohibition.

The position is different, however, when it cornes to the implementa-
tion or enforcement of the norm of genocide prohibition. The norm pro-
hibiting genocide, like other international legal noms, is applicable byproclamation de l'indépendancede la Bosnie-Herzégovinepar un parle-
ment incomplet. La phase non active des préparatifsde cette guerre a été
spécialementcellede la créationde milicesnationales (dès1991),alors que
la phase active a commencé avecles attaques lancéescontre les organes
des autoritésfédérales centrales,notamment contre des unitésde l'armée

populaire yougoslave.

Après la proclamation de la souveraineté etde l'indépendancepar le
parlement incomplet de Bosnie-Herzégovine,la guerre est devenue,ce me
semble, un conflit arméinternational, avec pour adversaires un Etat fictif
reconnu de jure (la République deBosnie-Herzégovine)et, en face, deux
Etats defacto non reconnus par la communautéinternationale (la Repu-
blika Srpskaet I'Herceg-Bosna).C'était uneguerredu type bellutnomniurn
contra otntles,ce qu'illustrent éloquemment la guerreentre les autorités
musulmanes de Sarajevoet I'Herceg-Bosnaen 1993et la guerre entre les
autorités de Sarajevo et la Bosnie occidentale, régionmusulmane auto-
nome parallèle proclaméeen septembre 1993.

101. Le passage que la Cour consacre dans son arrêt à la nature des

droits et des obligations des Etats découlant de la convention se lit
comme suit :
«les droits et obligations consacréspar la convention sont des droits
et obligations erga ornnes.La Cour constate que l'obligation qu'a
ainsi chaque Etat de préveniret de réprimer le crime de génocide
n'est pas limitéeterritonalement par la convention. » (Par. 31.)

TIfaut à mon avis bien faire la distinction nette entre, d'une part, la
nature juridique du principe interdisant le génocideet, de l'autre, la mise
en application ou la réalisationde ce principe.
Le principe qui interdit le génocide,norme dejus cogetzs,fixe lesobli-
gations de 1'EtatBl'égardde la communautéinternationale prise dans sa
totalité et, par sa nature mêmc,intéressetous les Etats. En tant que règle
dejus cogetzs,il n'a pas, et ne peut absolun~entpas avoir, d'application
territorialement limitée,telle qu'une certaine fraction de la communauté
internationale n'y serait pas soumise. Autrement dit, I'interdiction du
génocide est une norme universelle qui lie tous les Etats où qu'ils se

trouvent dans le monde.
En tant que norme s'imposant absolument, I'interdiction du génocide
oblige tous les sujets de droit international, en dehors mêmede toute
convention. C'est en cela,et en cela seulement, que cette norme concrète
est d'application universelle (c'est-à-dire erga omnes) et la notion de
((non-territorialité)),autre façon de présenterl'idéed'une application ter-
ritoriale limitée,peut êtreconsidérée commeun aspect de l'essence même
de I'interdiction absolue du génocide.
Les choses se présentent différemmentquand il s'agit de faire respecter
cette norme de I'interdiction du génocideou de lui donner effet. Comme
toute autre règlede droit international, elle est applicable par les EtatsStates not in an imaginary space, but in an area of the territoralized inter-
national community.And, as was poinled out by the Permanent Court of
International Justice in the "Lolus" case:

"Now the first and foremost restriction imposed by international
law upon a State is that - failing the existence of a permissive rule

to the contrary - it may not exercise its power in any form in the
territory of another State. In this sensejurisdiction is certainly terri-
torial; it cannot be exercisedby a State outside its territory except by
virtue of a permissive rule derived from international custom or
from a convention.
.............................

In these circumstances, al1that can be required of a State is that it
should not overstep the limits which international law places upon
its jurisdiction; within these limits, its title to exercise jurisdiction
rests in its sovereignty."'54

A territorial jurisdiction conceived in this way suggests, as a general
rule, the territorial character of the State's obligation in terms of imple-
mentation of an international legalnorm, both in prescriptive and enforce-

ment terms. If this were not the case, norm on territorial integrity and
sovereignty, also having the character of jus cogens, would be violated.

102. What is the status of the Genocide Convention? With respect to
the obligation of prevention of the crime of genocide, the Convention
does not contain the principle of universal repression. It has firmly opted

for the territorial principle of the obligation of prevention and
"the only action relating to crimes committed outside the territory of

the Contracting Party is by organs of the United Nations within the
scope of the general competence" 155.

Accordingly,
"the States are . . .obliged to punish persons charged with the com-

mission of acts coming under the Convention insofar as they were
committed in their territory" '56.

Article VI1of the draft Genocide Convention, prepared by the Secre-
tary-General, was based on the concept of universal repression15'.In its
draft Convention the Ad Hoc Committee on Genocide replaced the text
of Article V11,hence "the principle of universal repression was rejected
by the Committee by 4 votes (among which were France, the United

154~~L~~~ ,Ju~~gtnet~rNo. 9, P.C.I.J., Series AIO,pp. 18-19.
Is5N. Robinson, The Genocide Convention, Its Origin and Interpretation1949,
pp. 13-14.
Is6Ibid.p.31.
Is7DOC.E1447p ,.8.non pas dans un espace imaginaire mais dans le domaine territorialisé de
la communautéinternationale. Comme l'afait remarquer la Cour perma-
nente de Justice internationale en l'affaire du Lotus:

«Or, la limitation primordiale qu'impose le droit international à
I'Etat est celle d'exclure - sauf l'existence d'une règle permissive
contraire - tout exercicede sa puissance sur le territoire d'un autre

Etat. Dans ce sens, lajuridiction est certainement territoriale; elle ne
pourrait ètre exercéehors du territoire, sinon en vertu d'une règle
permissive découlant du droit international coutumier ou d'une
convention.
.............................

Dans ces conditions, tout ce qu'on peut demander à un Etat, c'est
de ne pas dépasserles limites que le droit international trace à sa
compétence; en deçà de ces limites, le titre à la juridiction qu'il
exerce se trouve dans sa souveraineté. >154

Une telle conception de la compétenceterritoriale amène à considérer
d'une manière généralq eue l'obligation de 1'Etat tenu d'appliquer une
règlede droit international, tant sur le plan prescriptif que sur celui de la
mise enŒuvre, estde nature territoriale. Si tel n'était paslecas, il y aurait

infraction aux principes de l'intégritéterritoriale et de la souveraineté,qui
relèventeux aussi du jus cogens.
102. Quel est le statut de la convention sur le génocide?Pour cequi est
de l'obligation de prévention,elle neconsacre pas le principe de la répres-
sion universelle. Elle opte très clairement pour le principe territorial de
I'obligation de préventionet

«la seule action possible à l'égarddes crimes commis en dehors du
territoire de la partie contractante ne peut ètreque le fait des organes
des Nations Unies, au titre de leur compétence générale)>155.

Ainsi donc,

((lesEtats sont ...tenus de punir les personnes accuséesd'avoir com-
mis les actes tombant sous le coup de la convention dans la mesure
ou ces actes ont étécommis sur leur territoire)) lS6.

L'article VI1 du projet de convention sur le génocideétabli par le
Secrétaire généraé ltaitinspirédu principe de la répression uni~erselle'~~.

Dans son projet de convention, le comité spécialsur le génocidea rem-
placéle texte de cet article VI1et c'est ainsi que «le comité rejetapar
4 voix (parmi lesquelles cellesde la France, des Etats-Unis d'Amérique

Is4Lotus,arrit n9. 1927,C.P.J.I. sérieA no 1p. 18-19.
Is5N. Robinson, Tlie GenociùeConi~ention .ts Origin and Interpretution1949,
p. 13-14.
Is6Ibid.p. 31.
15'DOCE . 11447p.8.States of America and the Union of Soviet Socialist Republics) against 2
with 1 abstention" 'j8.
An unfavourable position regarding the principle of universal punish-
ment emerges also from declarations and reservations concerning the

Genocide Con~ention"~, Communication of Governments16" and by
non-governmental organizations that have a consultative status with the
Economic and Social Council 16'.
The Special Rapporteur concluded that

"since no international criminal court has been established, the ques-
tion of universal punishment should be reconsidered, if it is decided
to prepare new international instruments for the prevention and
punishment of genocide" 162.

The intention of the drafters of the Convention to establish territorial
obligations of States under the Convention clearly and irrefutably stems
from the provisions of Article XI1of the Convention which reads:

"Any Contracting Party may at any time, by notification addressed
to the Secretary-General of the United Nations, estend tlteapplica-
tionof thepresent Conventionto a11or any of tlzeterritoriesfor the
conductof whoseforeign relations thatContractingParty is respon-

sible."(Emphasis added.)
It is obvious that, if this were not the case, the said Article would be
deprived of al1sense and logic.

103. Could a State be responsible for genocide? The Court finds, when
it refers to "the responsibility of a State for genocide or for any of the
other acts enumerated in Article Ill", that Article IX does not exclude
any form of State responsibility, nor is

"the responsibility of a State for acts of its organs excluded by
Article IV of the Convention, which contemplates the commission
of an act of genocide by 'rulers' or 'public officials"' (para. 32 of
the Judgment).

Such a position does not appear, in my opinion, to be tenable.
Article IV of the Genocide Convention, which stipulates criminal
responsibility for genocide or the other acts enumerated in Article III of
the Convention, has a twofold meaning:

(a) a positive meaning, starting from the principle of individual guilt,
since Article IV establishes as criminally responsible "persons . . .

i58See Studyof the Questionof thePrevention and PunishmeonfttheCrimeof Geno-
cide,prepared byN. RuhashyankikoS ,pecial Rapporteurd,oc. WCN.41Sub.214146,July
1978,p. 49.
i59Ibid., pp. 51-52.
Ibid., pp. 52-55.
16'Ibid., p. 55.
16*Ibid., p. 56. APPLICATION DE CONVENTION G~NOCIDE (OP.DISSK. RE~A) 767

et de l'Union des Républiquessocialistes soviétiques),contre 2 avec une
abstention le principe de la répression universelle))Is8.
Une attitude hostile au principe de la répression universelleapparaît

également dans les déclarations et les réservesdont a fait l'objet la
conventionlS9, dans les communications des et des
organisations non gouvernementales dotéesdu statut consultatif auprès
du Conseil économique et social I6l.
Le rapporteur spéciala conclu que:

((puisque il n'existepas de cour criminelle internationale, la question
de la répressionuniverselle devra êtreréexaminée si l'on décidd ee
rédigerde nouveaux instruments internationaux pour prévenir et
réprimerle crime de génocide)) '62.

L'intention de ses auteurs d'instituer sous le couvert de la convention
des obligations territoriales pour les Etats apparaît de façon claire et irré-
futable à I'articleXII, qui se lit comme suit:

«Toute Partie contractante pourra, à tout moment, par notifica-
tion adresséeau Secrétaire générad le l'organisation des Nations

Unies, étendrel'applicationde laprésenteconvention à tous les ter-
ritoires ouà l'unquelconquedes territoires dont elle dirigeles rela-
tions extérieures. (Les italiques sont de moi.)

Il va sans dire que si telle n'avait pas été leurintention, cet ar-
ticle n'aurait ni sens ni logique.
103. Un Etat peut-il êtreresponsable de génocide?Se référantA«la
responsabilitéd'un Etat en matière de génocideou de I'un quelconque
des autres actes énumérés à I'articleIII», la Cour observe que I'articleIX
n'exclut aucune forme de responsabilitéd'Etat et que:

«La responsabilitéd'un Etat pour le fait de ses organes n'est pas
davantage exclue par I'article IV de la convention, qui envisage la
commission d'un acte de génocidepar des ((gouvernants)) ou des

((fonctionnaires. (Arrêt, par. 32.)
Cette position n'est pas à mon avis défendable.
L'article IV de la convention, qui fixe la responsabilité pénale en cas

de génocide ou de I'un des actes énumérés à l'article III, a un sens
double:

a) un sens positif, qui prend son origine dans le principe de la respon-
sabilité individuelle puisqu'ilfixe la responsabilité pénale des«per-

158Voir(Etudesurla questionde la préventet la répressducrime degénocide)),
établieparN. Ruhashyankiko,rapporteur spécl,oc. E/CN.4/Sub.2/416,4juillet 1978,
p.49.
'"9Ibid .,52-55.
Ibid .,55.
16*Ibic l.56.768 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (DISSO. P.KRE~A)

whether they are constitutionally appointed rulers, public officiaisor
private individuals". This rule represents les lutu, because:

"international practice since the Second World War has con-
stantly applied the principle of individual criminal responsibility
for crimes of international law, including those of genocide" 163,

(b) a negative meaning - contained in the exclusion of criminal respon-
sibility of States, governments or State authorities and the rejection
of the application of the doctrine of the act of the State in this
matter. Such a solution isexpressed in the positive international law.

The International Law Commission, when elaborating the Draft
Code of Offences against the Peace and Security of Mankind, con-
cluded, inter uliu, in relation to the content rutione personueof the
Draft Code that:

"With regard to the content rurionepersonue, the Commission
took the view that its efforts at this stageshould be devoted exclu-
sively to the criminal responsibility of individuuls.This approach
was dictated by the uncertainty still attaching to the problem of
criminal responsibility of States . . .True, the criminal responsi-
bility of individualsdoes not eliminate the international responsi-
bility of States for the acts committed by persons acting as organs

or agents of the State. But, such responsibility is of a different
nature and falls within the traditional concept of State responsi-
bility . . .the question of international criminal responsibility
should be limited, at least at the present stage, to that of
individuals." 164

The resolution built into Article TVof the Genocide Convention repre-
sents an expression of a broader understanding of the inability to establish
the criminal responsibilityof legalpersons (societusdelinquerenonpotest).
The understanding is based on the premise that a criminal offence as a
phenomenon is reduced to a human action, that is to Say, to a physical
act or to its omission. Since States are legal entities of an abstract char-
acter, persons without a physical body and incapable of criminal liability,

they thus cannot be guilty as perpetrators of criminal acts.

It is hardly necessary to state that the interest of safeguarding the
essential values of the international community involves the issue of
criminal responsibility of a State as illustrated, infer uliu, by the Draft

16'Studyof theQuestionof the Prevention and Punishmenotf the Crimeof Genocide,
preparedby Mr.N. Ruhashyankiko,Special Rapporteurd , oc. WCN.41Sub.214154, July
1978,p. 36,para. 151.
164Reportof the International LaCommissionon the workof itsthirty-sixthsession
(7 Mayto 27 July 1984 (doc. A/39/10), Yeurbookof the InternationalLuw Commission,
1984,Vol. II, PartTwo, p. II, para. 32. APPLICATION DE CONVENTIONGÉNOCIDE (OP.DISSK. RE~A) 768

sonnes ...qu'elles soient des gouvernants, des fonctionnaires ou des
particuliers)). Cette règle relèvede lales lata,parce que:
«la pratique internationale d'après la seconde guerre mondiale a
fait constamment l'application du principe de la responsabilité

pénale individuelleen matière de crimes de droit international
parmi lesquels se place le génocide»Ia;

6) un sens négatifqui est celui de I'exclusionde la responsabilité pénale
des Etats, des gouvernements ou des autoritésdes Etats et du refus de
reconnaître la validitéen cette matière de la doctrine de l'acte d'Etat.
Cette conception a une expression en droit international positif.
Lorsqu'elle a élaboréle projet de code des crimes contre la paix et la
sécuritéde l'humanité,la Commission du droit international a notam-
ment conclu ratione persoue:

«En ce qui concerne le contenu rafione personae, la Commis-
sion a estiméque ses efforts devaient à ce stade être consacrés
exclusivement à la responsabilité pénale des individus. Cette dé-
marche s'expliquepar l'incertitude qui pèseencore sur le problème
de la responsabilitépénaledes Etats ...II est vrai que la responsabi-

lité criminelle des individun'écarte pasla responsabilité internatio-
nale des Etats en ce qui concerne les conséquencesdes actes com-
mis par lespersonnesagissanten qualité d'organes ou d'agentsde ces
Etats. Mais cette responsabilitéest d'une autre nature, et elle s'ins-
crit dans le concept traditionnel de la responsabilitédes Etats ..la
question de la responsabilité pénale internationale devait être
limitée,au moins au stade actuel, àcelledes individu^.))'^“

La solution que consacre l'article IV de la convention répond à une
conception plus généralede l'impossibilité d'établirla responsabilité
pénale des personnesjuridiques (societas delinquere non potest).
Cette façon de voir les choses prend pour postulat que le phénomène
du délit criminelne peut être quele fait de l'homme, c'est-à-dire qu'il ne

peut êtrequ'un acte matérielou une omission. Comme les Etats sont des
entités juridiques de nature abstraite, des personnes sans corps matériel
qui ne peuvent avoir de responsabilité pénale,ilsne peuvent perpétrerdes
actes criminels.
Est-il vraiment nécessairede dire que la nécessitéde sauvegarder les
valeurs essentielles de la communauté internationale soulève laquestion
de la responsabilité pénalede I'Etat, telle qu'elle s'illustre notamment

<Etude surla question de la prévention etla repressiondu crime degknocide)),
etablieparN. Ruhashyankiko,rapporteur spécil,oc. WCN.4ISub.î/415,4 juillet 1978,
p. 36, par. 151.
Rapport dela Commission dudroit international sur les travaudxe sa trente-
sixièmesession, 7mai-27 juillet 1,oc. A139110,Artnuairede lu Coniniissiorrdu droir
interr~arion,984,vol. II,dcuxiemepartie, par.32.Code of Offences against the Peace and Security of Mankindl".
Theoretically, the issue of criminal responsibility of a State may be
situated within the framework of a pure mode1 of a State authority or
State as the offender, namely in the framework of collective, simultaneous
responsibility of a State as a legal person and physical personality, as

its political representative.
However, the above are just projects which, irrespective of their rele-
vance, have not yet found a place within positive international law. This
fact per se, irrrespective of the circumstances of a concrete case, renders
the Court, as an authority implementing posifiiie law to subject cases,
incapable of taking such projects into account or accepting them as rele-

vant. If this were not the case, the Court would step away from its fun-
damental judicial function and penetrate into the legislative or quasi-
legislative area 16G.
104. Even in the hypothesis that, tractu temporis, since the Genocide
Convention came into force, criminal responsibility for genocide or for
any of the other acts enumerated in Article III has been extended to
States as well,the relevance of such a change to the subject case could be

highly questionable.
The rationale of such a question is the nature of the compromissory
clause contained in Article IX of the Genocide Convention. The estab-
lishment ofjurisdiction of the Court for disputes concerningthe interpre-
tation, application or fulfilment of the Convention is undoubtedly
precedent to the general rule of an optional character of the Court's juris-
diction in international law. This fact has a dual meaning - legal and

meta-legal. In legal terms, precedent has to be strictly interpreted 16',par-
ticularly when it cornes to the restriction of the sovereign rights of States.
In this case, the jurisdiction of the Court is founded in relation to dis-
putes "relating to the interpretation, application or fulfilment of the
presenf Convention"(emphasis added). In other words, the Court has, on
the basis of Article IX of the Convention, jurisdiction to settle disputes
relating to the relevantprovisions of the Conventionbut not such disputes
concerning the rules as might possibly exist outside its frame.

Meta-legal meaning resides in the fact that the extension of the
Court's jurisdiction beyond the provisions of Article IX of the Conven-
tion would, in normal reasoning, inhibit the States in other cases. An
evident readiness of States to accept the binding jurisdiction of the

165Yearbookof the Inren~a~ionaLlaw Cornmission,1976,Vol. II,Part Two, pp. 7-18.
16"the enormity of the crime of genocide can hardly be exaggcrated, and any treaty
for its rcpression deservesthe mosl generous interpretation; but the Genocide Con-
vention is an instrument whichs intended to produce legaleffects by creating legal
obligations between the parties to it" (Reservorionsrothe Convenrionor1the Preven-
/ion and Put~isl~tnenorf :IreCrime of Genocide. Advisor-vOpinion. I.C.J. Reports
19.51,joint disscnting opinion of Judges Guerrero, Sir Arnold McNair, Read and
Hsu Mo, p. 47).
16P.C.I.J.. Series A, No. 7, p. 76. APPLICATION DE CONVENTION GBNOCID (OEP.DISS.KRE~A) 769

dans le projet de code des crimes contre la paix et la sécuritéde I'huma-
nité?'6sEn théorie,la qucstion de la responsabilitk pénalede IyEtats'ins-
crit dans le schémaparfait du modèle opposant autorité de 1'Etat à la
délinquancede I'Etat, c'est-à-dire dans le schémade la responsabilité col-
lective simultanée de 1'Etat dans sa personne juridique et dans sa per-

sonne physique, qui est sa représentation politique.
Pourtant, les textes dont on vient de parler ne sont que des projets qui,
quelle que soit au demeurant leur pertinence, n'ont pas encore trouvéleur
place dans le droit international positif. Ce simple fait, quelles que soient
les circonstances concrètes d'une affaire, interdità la Cour, autorité qui
applique le droit positg à des cas particuliers, de tenir compte de ces
textes ou de leur reconnaître aucune autorité. La Cour déborderait sinon

les frontières de sa fonction judiciaire fondamentale pour entrer dans
le domaine législatifou quasi Iégi~latif'~~.
104. Mêmedans l'hypothèse ou, tructu temporis, depuis l'entréeen
vigueur de la convention, la responsabilité pénaledu génocide oude tout
autre acte visé à l'article II1serait étendue aux Etats, la validitéde cette
extension en I'espèceserait tout àfait discutable.

La problématique repose sur la naturede la clause compromissoire que
constitue l'article TXde la convention.TIest certain que la reconnaissance
de la compétencede la Cour à l'égarddcs différends relatifs à I'interpré-
tation,à l'application ou à l'exécutionde la convention est antérieure à la
règlegénéraledu caractère facultatif de la compétencede la Cour en droit
international. Cela a deux conséquences,sur le plan juridique et métaju-
ridique. Sur le plan juridique, un précédentdoit êtreinterprétéstricte-

ment'", surtout lorsqu'il s'agit de restreindre les droits souverains des
Etats. En l'espèce,la Cour a compétenceàl'égarddes différends((relatifs
à l'interprétation, l'application ou I'exécutionde laprésente convention»
(les italiques sont de moi). En d'autres termes, en vertu de l'article IX de
la convention, la Cour a compétence pour réglerles différends relatifs
aux dispositiotzs pertit~entes de lu conventiomais non les différendsqui
concernent les règlesqui pourraient exister cn dehors de son cadre même.

Sur le plan métajuridique, l'élargissementde la compétencede la Cour
au-delà des dispositions dc l'articleXde la convention aurait pour effet,
en bonne logique, d'empêcherles Etats d'agir dans les autres différends.
Le fait qu'un Etat soit manifestement disposé à accepter la compétence

165Annitaire dela Conm~isnlildroititi~ert~aal,76,vol.II, deuxièmepartie,p. 7-18.
«[O]nne saurait exagérerla gravitédu crimede génocide,et tout traitéconçuen vue
desa répressionmérite l'interprétala plus extensive.Toutefois, la convention
sur legénocidest un acteconçu pour produire deseffetsde droit en créant entreles
Etats qui sont parties des obligationsjuridiques; c'est pourquoi il nous a paru
nécessairede l'examineren fonction de son fondement de droit.))rveà la
tarif. C.I.J. Recireil1951, opinion dissidentede M. Guerrero, sir Arnold McNair,
MM. Read et Hsu Mo, p. 47.
16'C.P.J.I. sérieAn0 7, 76.Court on a broad basis would be strengthened by such a move on the
part of the Court.

105. Article IX of the Convention stipulates that:
"Disputes between the Contracting Parties relating to the interpre-
tation, application or fulfilment of the present Convention, including
those relating to the responsibility of a State for genocide or for any
of the other acts enumerated in article III, shall be submitted to the

International Court of Justice at the request of any of the parties to
the dispute."
If one attempts to determinethe genuine meaning of thewording "respon-
sibility of a State for genocide or for any of the other acts enumerated in
article III",several elements are of crucial importance.

(u) Article IX by its nature is a standard compromissory clause. As a
procedural provision, it aims at determining the jurisdiction of the Court
within the CO-ordinatesof "interpretation, application or fulfilment" of
the material provisions of the Convention. Hence, interpretations of
Article IX of the Convention may not in concret0 go beyond the provi-

sions on individual criminal responsibility stipulated in Article IV of the
Convention (see para. 101above). As is forcefully expressed in the joint
separate opinion of Judges Sir Percy Spender and Sir Gerald Fitzmaurice
in the South West Africu case:
"The principle of interpretation directed to giving provisions their

maximum effect cannot legitimately be employed in order to intro-
duce what would amount to a revision of those pr~visions."'~~
(6) The wording "responsibility of a State for genocide or for any of
the other acts enumerated in article III" is abstract and broad in its
vagueness, particularly in terms of the convention on criminal law "in
which care should be taken to avoid giving the State a fictitious legal
character, a procedure which should only be used in civil or commercial

mat ter^"'^^ . hat is more, the wording "responsibility of a State" is
incorporated into the procedural provisions of the Genocide Convention.
It is not used, however, in the operative part of the Convention to denote
a possible consequence of committing the crime of genocide. The reason
for such a solution is obviously to be traced in the option for individual
criminal responsibility for genocide or related punishable acts.
For, as Manley Hudson concludes:

"The article goes further, however, in 'including'among such dis-
putes 'those relating to the responsibility of a State for genocide or
any of the other acts enumerated in Article III'.As no other provi-
sion in the Convention deals expressly with State responsibility, it is

I.C.J. Reports 1962,468.
169N. Ruhashyankikoo, pcit.p. 82, para.314. obligatoire de la Cour à titre géntral se trouverait corroboré si la Cour
prenait une telle initiative.
105. L'article 1X de la convention se lit comme suit:

«Les différendsentre lesParties contractantes relatifsi I5interpré-
tation, l'application ou l'exécutionde la présente convention,ycom-
pris ceux relatifs5 la responsabilitéd'unEtat en matière degénocide
ou de I'unquelconque desautres actes énurnércs à I'articleIll, seront
soumis à la Cour internationale de Justice, Ala requêitd'une partie
au différend.D

Si l'on veut déterminerle sens véritablede l'expression «responsabilité
d'un Etat en matière degénocideou de l'un quelconque des autres actes
énumérés à l'article JIID,il faut s'arrèter sur plusieurs considérations
décisives:

n) L'article 1X est de la nature des clauses compromissoires clas-
siques. Disposition de procédure,il vise à déterminerla compétencede
la Cour dans le domaine dilimitépar «l'interprktation, l'application ou
l'exécution» desdispositions en cause de la convention. C'est pourquoi
aucune interprétation de l'article IX ne peut in concretodépasserlesdis-
positions relatives à la responsabilitépénale individuelleque contient
l'articleIV de la convention (voir ci-dessus par. 101). Comme l'ont
exprimé avec vigueur sir Percy Spender et sir GeraldFiamaurice dans

leur opinion dissidente commune dans l'affaire du Sud-Ouesf ufriçai : n
«Le principe d'interprktarion qui tend A donnes aux dispositions
leur maximum d'effet utile nc saurait légitimentètre invoque pour
introduire ce qui kquivaudraiti une revision de cesdispositions.»Ibn

l b) Le membre de phrase «la responsabilitéd'un Etat en matiére de
génocideou de I'unquelcoriquedes autres actes énurnérks a l'article111))
est abstrait et d'une ampleur floue, notamment du point de vue de la
convention sur le droitpénal «oh il faudrait évitede donner a 1'Etatle
caractere d'une fictionjuridique, procédèqui nc saurait êtreutiliséqu'en
matièrecivile ou coin merci ale1^'.De surcroît, le terme «responsabilité
d'un Etal» apparait dans les dispositions de procédurede la convention.

Il n'est pas utilisédans le dispositif pour qualifier une conséquencepos-
sible du crime de ginocide. La raison en est manifestement que l'on a
opté pour la responsabilité pbnale individuelle en cas de génocideou
d'acte répréhensible connexe.
Manley Hudson conclut en effet:

«L'article va plus loin cependant en dkclarant «cornpris» les dif-
férends({relatifshla responsabilitéd'un Etat en matiérede génocide
ou de I'un quelconque des autres actes énuméré s I'article III».
Cornme aucune autre disposition de la convention ne traite expres-

"jYCI R~LUPI I962, p468.
'59N. Ruhashyailkiko,opcr, p.82,par.314. difficult to see how a dispute concerning such responsibility can be
includedamong disputes relating to the interpretation or application
or fulfilment of the Convention. In view of the undertaking of the
parties in Article 1to prevent genocide, it is conceivable that a dis-
pute as to State responsibility may be a dispute as to fulfilmcnt of

the Convention. Yel read as a whole, the Convention refers to the
punishment of individuals only; the punishrnenl of a State is not
adumbrated in any way, and it is excluded frorn Article V by which
lhc parties undertake to eriactpunitive legislation.Henccthe 'respon-
sibilityof a Statc'referred to in ArticleIXisnot criminal liability."'70

The genuinemeaning of the wording "responsibility of a State" should
hence be traced within the responsibility for the obligations entered into
by the parties under the Convention. Primary responsibilities of the
parties have been stipulated in Articles V and VI, and cavering:

- an obligation to enact necessary legislationto give effect to the pro-
visions of the Convention; and

- the obligation of instituting legalproceedings for punishable actspro-
vided for by Article IIIof the Convention ügainst persons charged in
a competent tribunal of the State in the territory of which the act was
committed.

Obligations of the Contracting Parties "10 enact . . . the necessary
legislation" and to punish persons who commit genocidc and related
acts constitute a for- of international responsibilityof the Stxte, responsi-
bility towards crucial interest of the international cornmunity as a

whole, built into the norrn prohibiting genocide.

Given the nature of thcse obligations, one could hardly disagree with
the Special Rapporteur, Mr. N. Ruhashyankiko, that "at the present
stage in the developrnent of international criminal law, the Stasecan bear
only political responsibility forinternational crimes"I7l, or perhaps, in
more precise terms, the State can bear primarily political responsibility
for a failure to perform obligations conceming the prohibition and pun-

ishment of international crimes.
(c) The qualification ofa State as aresponsible entity for the crime of
genocide as a primarily political responsibilityis not apriori exclusive of
the civilresponsibility of a Slate. The civil responsibilityof a State in the
matter of genocide may assume two forms of expression :

M. M. Whitenian, DigrsroflriternarionLriw,1968.p. 857
I7lStudy ofthe Questioof thePreventionand Punishment of the Crimeof Cenocide,
preprtreby Mr. N. Ruhashyankiko,SpecialRapporteur, doz. EtCN.4fSub.214164, July
1978,p 38, para159 sémentde la responsabilitéde I'Etat, on voit mal comment un diffé-
rend dont cette responsabilité ferait l'objetpourrait être((compris))
parmi les différends relatifs a l'interprétation,à l'application ou à
l'exécutionde la convention. Comme lesparties s'engagent à I'article
premier à prévenir le génocide,on peut concevoir qu'un différend
relatifà la responsabilitéd'un Etat soit un différend relatif à I'exé-

cution de la conveiition. Pourtant, si on la considère dans son en-
semble, celle-ci ne vise que le châtiment des individus; elle n'entre-
voit pas du tout la répression desEtats, exclued'ailleursà I'articleV,
où les parties s'engagent à prendre les mesures législatives néces-
saires. La «responsabilitéd'un Etat)) dont ilest question a I'article1X
n'est donc pas la responsabilitépénale.»

Le véritable sens du terme ((responsabilité d'un Etat)) est donc à
rechercher à la lumièrede la responsabilité desobligations assuméespar

les parties en vertu de la convention. Ces responsabilités primaires sont
précisées aux articles V et VI, et elles couvrent:

- l'obligation de prendre les mesures législatives nécessairespour as-
surer l'application des dispositions de la convention;
- l'obligation d'intenter contre les personnes accuséesde l'un des actes
énumérés A I'articl111 de la convention une action devant les tri-
bunaux compétents de I'Etat sur le territoire duquel l'acte a été com-
mis.

L'obligation qu'ont les parties contractantes de ((prendre ... les me-
sures législativesnécessaires)) et de punir les personnes coupables de
génocide ou d'actes relatifsau génocideconstitue une forme de respon-
sabilitéinternationale de I'Etat, responsabilitéà l'égard des intérêf ton-
damentaux de la communauté internationale considéréedans sa totalité
et inscrite dans la norme qui interdit le gcnocidc.
Etant donné la nature de ces obligations, il est difficilede ne pasnsi-
sidérercomme Icrapporteur spécial,M. N. Ruhashyankiko, que, «au stade
actuel de développement du droit international pénal, I'Etat ne saurait
avoir qu'une responsabilité politique pour les crimes internationaux»I7'

ou, pour êtrepeut-être plusprécis,que 1'Etatpeut êtrepolitiquement res-
ponsable au premier chef s'il manque a assumer les obligations qui
concernent l'interdiction et la répression des crimesinternationaux.
c) Faire de 1'Etat le responsable du crime de génocide,au sens de la
responsabilité essentiellement politique, n'exclut pas priori sa responsa-
bilitécivile. En matière de génocide,celle-ci a deux aspects:

17"M. M. Whiteman,Digest of lt~ten?atiot~aL1,968,p. 857.
17'((Etudesur la qucstion de la prévention etla répressiondu crimedc génocide)),
N. Ruhashyankiko, rapporteur spécial/,CN.4/Sub.2/416,4juillet 1978, p. 38, par. 159. (i) civil responsibility for the crime of genocide committed in its own
State territory; and
(ii) civil responsibility for the crime of genocide committed in the terri-
tory of another State.
In the eventuality contemplated by (i) above, it would be civilrespon-

sibilitynder internal law whichis to be considered and adjudicated in its
entirety by the internal judicial authorities of a contracting party.
A case falling under (ii) above would be different in terms of quality.
Leaving aside the conditions in which a State may be responsible for
genocide perpetrated in the territory of another State, civil responsibility
would be characterized by two stages. The first stage would comprise a
claim for reparations to the competent authorities of the State respon-
sible for genocide and adjudicated in the procedure established by its own
internal law. The second stage would involve an international litigation
for the reparation of losses incurred by genocide, the parties to it being
the State responsible for genocide and the State on whose territory geno-
cide was perpetrated. In other words, it would be a case of the typical

,international civil responsibility of a State. Given the fact that the
national, ethnic, racial or religiousgroup, as an object safeguarded from
the crime of genocide, has no locus stundi in the Court, the State on
whose territory the crime has been perpetrated should espouse the cause
of the "national, ethnic, racial or religious" group after having exhausted
local legal remedies.
1 am convinced that the Genocide Convention providedfor no interna-
tional civilresponsibilityof States for the crimeof genocide.Such a stand-
ing of the Convention on the matter of international responsibility may of
course be qualified in more than one way, but it is difficult to infer any
conclusion on the force of the concept of international civil responsibility
within the fibreof the Convention, unless one strays into the area of legal
construction. Tt is easy to accept the view that the international civil

responsibility of States for the crime of genocide would strengthen the
effectiveness of prohibition of the crime of genocide. However, in the
present case, the question is reduced to the qualification of positive
law concerning responsibility for genocide and not to the qualification
of optimal solutions in ubstructo. As suggested by Special Rapporteur
Whitaker

"when the Convention is revised consideration shall be given to
including provisions for a State responsibility for genocide together
with reparations" '72.

"' Reviewof furtherdevelopmentin fields which the siib-commission bseen con-
mentof the crimeof genocide,prepared byMr.V. Whitaker(E/CN.4/Sub.2/1985/6,2July
1985,p. 26, para.54. i) responsabilitécivilepour lecrime de génocidecommissur le territoire
lui-même,
ii) responsabilitécivilepour lecrime de génocide commissur le territoire
d'un autre Etat.

Dans le premier cas, ce serait la responsabilitécivile en droit interne
qui serait évaluéee ,t jugéedans toute son étendue,par les autoritésjudi-
ciaires nationales de la partie contractante.
Le deuxième cas est qualitativement différent.Si on laisse de côtéles
conditions dans lesquelles un Etat peut êtretenu responsable d'un géno-
cide commis sur le territoire d'un autre Etat, la responsabilitécivile peut
opérer en deux temps. La première phase comprend les demandes en
réparation adresséesaux autorités compétentes de 1'Etatresponsable du

génocideet jugéesselon les procédures établiespar le droit interne de
celui-ci.La deuxième phasecomprend l'action entreprise devant lajustice
internationale en réparation des préjudices subisdu fait d'un génocide,
les parties en cause étant I'Etat responsable du génocideet I'Etat sur le
territoire duquel celui-ci a étécommis. C'est-à-dire que l'on retrouve le
cas typique de la responsabilité civile infernationale de I'Etat. Etant
donnéque le groupe national, ethnique, racial ou religieux qu'ils'agissait
de mettre a l'abri du crime de génociden'a pas devant la Cour de locus
standi, c'est I'Etat sur le territoire duquel le crime a étéperpétré qui doit
épouserla cause de ce groupe ((national, ethnique, racial ou religieux))

une fois épuisés les recours prévuspar le droit interne.
Je suis convaincu que la responsabilitécivile internationale des Etats
pour crime de génociden'entre pas dans les prévisionsde la convention.
Si tel étaitle cas, cette disposition serait, cela va sans dire, susceptible de
multiples analyses, mais il est difficilede tirer une quelconque conclusiori
sur la force qu'aurait alors la notion de responsabilitécivile internatio-
nale dans la convention sans s'aventurer dans les conjectures juridiques.
On admet facilement que le principe de la responsabilitécivileinternatio-
nale de 1'Etaten cas de génocide renforcerait l'interdictionde celui-ci.En

l'espèce,pourtant, la question porte sur la définitionde la responsabilité
pour génocide endroit positif et non pas sur les solutions qui seraient
les meilleures in abstracto. Comme l'a dit M. Whitaker, rapporteur
spécial :

((11est..recommandé,lors de la revision de la convention, d'envi-
sager ...d'inclure dans cet instrument des dispositions concernant la
responsabilité desEtats en cas de génocideet la réparation de tels
actes.» '72

"* Examendes faits nouveauxintervenusdans les domainesqui ont déjà fait l'objet
d'unétudeou d'une requête d epartde la sous-commission- version revisée et màe
jour de I'«Etudesurla questionde la préventet la répressidu crimede génocide)),
établieparM. B Whitaker(EICN.4ISub.7I1985/62, juillet 1985,p. 30. par. 54). 106. With regard to the sixth preliminary objection raised by Yugosla-
via, the Court finds that:

"Bosnia and Herzegovina could become a party to the Conven-
tion through the mechanism of State succession. Moreover, the
Secretary-General of the United Nations considered that this had
been the case" (para. 20 of the Judgment)

and that

"the Court does not consider it necessary, in order to decide on its
jurisdiction in this case, to make a determination on the legal issues
concerning State succession in respect to treaties which have been
raised by the Parties. Whether Bosnia and Herzegovina autoinati-

cally became party to the Genocide Convention on the date of its
accession to independence on 6 March 1992,or whether it became a
party as a result- retroactive or not - of its Notice of Succession
of 29 December 1992,at al1events it was a party to it on the date of
the filing of its Application on 20 March 1993." (Para. 23 of the
Judgment .)

107. 1 must say that, in my view, the opposite is the case. No one
denies that Bosnia and Herzegovina "could become a party to the Con-
vention through the mechanism of state succession". However, the real
question is not whetker Bosnia undHerzegovitra "could havebecotne a
party",for every nebvStute has inprinciple tlzutpossibility, but ,vlietherit

became aparty IO the Conventiontlrrougkthe siiccessionmecltuni.sm.The
fact that the Secretary-General "considered that this had been the case"
is not of decisive importance, as the scope of depositary functions is
clearly defined in positive international law. As stated in the Commen-
tary to Article 77 (Functions of Depositaries) of thc Convention on the
Law of Treaties:

a depositary has a certain duty to examine whether signatures,
instruments and reservations are in conformity with any applicable
provisions of the treaty or of the present articles, and if necessary to
bring the matter to the attention of the State in question. Tltut is,
hobvever,the linzitof tlzedepositary S duty in tliis connexion.II is no
part of thefunctions to adjudicate on the validity of an instrumentor

reservution."173
In other words it is firmlyestablished that "the depositary is no1invested

17)UNCLT, Firstand SecondSessions, Vienna,26 March-24 May1968and9 April-
22 May 1969, Of@ciu RecordsDocumentsof the Conference,p. 89, para.4 (emphasis
added). SIXIÈME EXCEPTION PRÉLIMINAIRE

106. Quant à la sixièmeexception préliminaire de la Yougoslavie, la
Cour conclut que:

«La Bosnie-Herzégovinepouvait devenir partie à la convention
par l'effetdu mécanismede la succession dYEtats.Du reste, le Secré-
taire général desNations Unies a considéréque tel avait étéle cas))
(arrêt,par. 20),

et que

«la Cour ne considère pas nécessaire,pour déciderde sa compétence
en l'espèce,de se prononcer sur les questionsjuridiques concernant
la succession d'Etats en matière de traités qui ont été soulevéep sar
les Parties. Que la Bosnie-Herzégovine soit devenue automatique-

ment partie iila convention sur legénocide à la date de son accession
à l'indépendancele 6 mars 1992,ou qu'elle le soit devenue par l'effet
- rétroactif ou non - de sa notification de succession du 29 dé-
cembre 1992, en tout étatde cause, elle y était partie à la date du
dépôtde sa requête,le 20mars 1993.))(Par. 23.)

107. A mon avis c'est le contraire qui est vrai. Nul ne nie que la Bos-
nie-Herzégovine((pouvait devenir partie à la convention par le méca-
nisme de la succession d'Etatsu. Mais la vraiequestiorzn'est pas de savoir
si la Bosnie-Herzégovine pouvcrit((devenirpartie », puisque tout nouvel
Etat en a en principe la faculté, mais bien de savoir si elle estdevenue

partie à la conveiztionpar I'effiitdu rriécaizisrridee la successiond'Etats.
Le fait que le Secrétaire généraa lit ((considéréque tel avait étéle cas»
n'est pas décisif,ses fonctions de dépositaire ayant une portéeclairement
définieen droit international positif. Comme le dit le commentaire de
l'article 72 (((Fonctions des dépositaires)))de la convention sur le droit
des traités:

«un dépositairea, dans certaines limites, le devoir d'examiner si une
signature, un instrument ou une réservesont conformes aux dispo-
sitions applicables du traitéou des présents articles et,le cas échéant,
d'appeler sur cette question l'attention de 1'Etat en cause. Mais le
devoir dudépositaire à cet bgarcls'arrêtelu. IIn'entrepas dans les
jonctions du clépositairede se prononcer sur la validitéd'un instru-

ment ou d'unerbserve. »173
Autrement dit, il est bien établique «le dépositairen'est lzabiliténiù stu-

17'Nations Unies,Docun~etlisofficielsde la corfbrencesur le droirdes frailés.prrtnibre
et detisiè»resessiotl, Vienne, 26 mai 1968et 9 avril-22 mai 1969p,. 964 (les
italiquessont de moi).~ititkuny competet~ceto udjudicute upon or to determir~etriatters arising in

connexion ivith the performance of ifsfunctiot~s""~.
In my opinion, the Court had to consider whether Bosnia and Herze-
govina had become a party to the Convention on the basis of succession,
at least vis-à-vis Yugoslavia, for two reasons:

- in the formal sense, there exists a dispute between Bosnia and Herze-
govina and Yugoslavia in that the positions of the parties to the dis-
pute in relation to "automatic succession" are radically opposed.
While Bosnia and Herzegovina considers automatic succession to be
a feature of positive international law and therefore contends that "it
Ilas autot~zaticallysucceeded to the Genocide Convention" 175,Yugo-

slavia denies this, claiming that "the 'clean slate' rule has been and
remains in force as a rule of customary international law for new
States" '76.
(lt should be noted that expressions such as "automatic succession

to the Genocide Convention" or "has automatically succeeded to the
Genocide Convention" are not sufficiently precise and are, conse-
quently, incorrect. The objects of succession are not treaties as legal
acts but concern the status of the parties to the concrete treaty andlor
the rights and obligations stipulated by that treaty. If treaties as legal
acts were the object of sudcession, then succession would also apply

to treaties whose obligation has been performed, for they are as valid
as before, albeit merely of historical interest, which is clearly not the
case.)

- in the material sense, as Bosnia and Herzegovina did not express its

consent to be bound by the Convention in the way prescribed by
Article XI of the Convention, the rules of succession are the only
possible basis on which Bosnia and Herzegovina could be considered
a party to the Genocide Convention.

108. The Genocide Convention, by its nature, is a convention in the
field of international criminal law. This is something which results from
the very nature of the matter, and which hardly needs arguing. A conven-
tion which has, as its subject, the definition and punishment of genocide
as a crime under international law, and whose provisions are imple-
mented through national criminal legislation, could hardly be defined in

a different way. Another consideration is that in a community like the
international community, many conventions and other international legal
acts have a direct or indirect humanitarian meaning. Such a meaning of

174UNCLT, First andSecondSessions,Vienna, 26 March-24 Ma1 y968and 9 Apd-
22May 1969 ,jfici relord., ocumentsof theConferenc, .89,para8(emphasisadded).

175Statementof the Governmentof the Rcpublicof Bosnia and Herzegovinaon Prc-
liminaryObjections,14November 1995, para.6.9 at p. 1II (emphasisadded).
176Preliminary Objectionsf the FederalRepublicof Yugoslavia,para. B.1.4.10.tuer ai à prendre de dkcisionssur des questiun~liees à I'uccnrnpli~semenr

desr5fonctions» Il4.
A mon avis, la Cour devait sedemander si la Bosnie-Herzégovineétait
devenue partieàlaconvention par lemécanismede la succession,du point
dc vue entout cas de laYougoslavie,pour les deux raisons suivantes:

- Sur le plan formel, il y a un diffkrend entre la Bosnie-Herzégovineet
la Yougoslavie parce que les positions des parties sur la «succession
automatique» sont diamétralement opposées.Alors que la Bosnie-
Herzégovineconsidèreque la succession automatique fait partie du
droit international positif et soutient par conséquentqu'elle a «suc-
cédéuuiomatiquement la convention sur le la You-

goslavie le nie, soutenant que {(leprincipe de la «table rase)}est et
demeure en vigueur en tant que norme de droit international coutu-
mier pour les nouveaux Etat~kj'~~.
(On notera que des expressions comme «succession automatique

en ce qui concerne la convention sur le génocide»ou «est automati-
quement devenue partie par succession à la convention sur le gkno-
cide})ne sont pas assez précises etsont pourcette raison incorrectes.
L'objet dela succession n'est pas le traite, en tant qu'acte juridique,
mais le statut des parties i un traitéparticulier et/ou leurs droits et
leurs devoirs à l'égardde ce traité.Si les traités,en tant qu'actesjuri-
diques, étaient l'objet de la succession, cela vaudrait aussi pour les

traitésdont les obligations ont été accompliesq ,ui seraient aussi va-
lables qu'auparavant mêmes'ilsn'ont plus qu'un interet historique,
ce qui n'est évidemmentpas le cas ici.)
- Sur le plan matériel,la Bosnie-Herzégovinen'ayant pas manifestela

volontéd'etre liéepar la convention dans lesformes prescrites par
l'articleXI de celle-ci,les règlesde successionsont le seul mécanisme
que l'on peut invoquer pour dire qu'elle est effectivement parlie à
cette convention.

108. La convention sur le génocide est, par nature, un instrument
conventionnel dc droit international pénal. Cela tient h sa matièremême,
et n'a pas vraiment a ètredémontré.Une convention qui a pour objet de
définirct de riprimer le génocide entant que crime de droit international
et dont Icsdispositions sont mises en application par le droit pénal de
chaque pays pourrait difficilementsedéfinirautrement. 11faut considérer
aussi que, dans une communautécomme la communautéinternationale,

beaucoup de conventions et autrcs instruments juridiques internationaux
ont une significationhumanitaire direcle ou indirecte. Cette signification

Nations Unies,DocurnenrsSficzeselu~onfirensc ur le drocle~snirbpremrère
etrlr~csilrsession, Vienne,26mars-24mai 196ct9 avril-mai 1969,p. 97, par. 8 (les
italiquessont dmoi)
f75Exposkdu Gouverncmenl de laRépubliquede Bosnie-Herzegovinesur lescxcep-
tions préliminaires1,4 novemb1495,par. 6.9, p. 55 (les itasontde moi)
Exceptionsprclirninaide la Republiqufédérativde Yougoçlavie,par. B1.4.10.international legalacts resultç unavoidably from the fact that, in the final
analysis, the international comrnunity is gentrshramanunat,hat in a system
whose original and basic subjects are abstsactbeings, the individual rep-

resents the final addressee of the legal rules. Howevcr, it could not be
concludcd from that that the Genocide Convention is a humanitarian
convention, a convention which belongs to humanitarian Iaw, because
that terrn denotes the rules contained in conventions and international
customs whose subject is "tu reduce or limit the suffering ofindividuals,
and tu circumscribethe area within which the savagery of armed conflicts
is permis~ible""~ (in that çense it should be noted that the full name of
the Geneva Conference of 1974-1977 which adopted Protocols 1 and 11
waç "Diplomatie Conference on the Reaffirmation and Developnient of
lnternational Murnanitarian Law Appliciiblein ArmedConflicts").

The qualification ofa convention or of other international legalacts as

"humanitarian", on the basis of the direct or indirect significaneeof that
convention for the legal status of individuals, wouldmake the predomi-
nant part of international law a "humanitarian law". Exempli causa, the
"humanitarian law" underscood in such a way would include the instru-
ments which regulate the position of the minorities, the right of peoples
to self-detemination, the conventions which punish acrs of terrorism,
and, in gcneral, al1conveiitions in the field of international criminnl law,
The terrn "humanitarian convention" or "conventionof humanitarian
character" isused, so it seems, in order to stress the importance of ihe
convention. However, terms like "humanitarian convention", "conveii-
tion on hun-ianrights", etc., do not, logically speaking, denote the legal
force of the convention, but rather its appurtenance to a species, in the
system of international law. The importance of a convention may rather

be expressed by other qualifications - in this concrete case by the
quaIification according to which the Genocide Convention represents a
"general multitateral convention of universal interest",

109. Article 34(Succession ofStates in Cases of Separation of Parts of
a State) of the Convention on Succession in respect of Treaties (1978)
stipulates intercili:

"1. When a part or parts of the territory of a State scpürate to
form one or more States, whether or not the predecessor State con-
tinues lo exist:
(u) any treaty in force at the date of the succession of States in
respect of the entire territory of the predecessor Statecontinues
in forcc in respect of each successor State su formed".

The relevant provision of the cited Article has been formulated In terms
of automatic succession. Theoretically, it corresponds to the concept of

J.G. Siarke,InrrodustiotoIntcirnutioLani,1989,p. 553 APPLICATION DE CONVENTION G~NOCIDE (OP.DISSK . RE~A) 775

est la conséquence logiquedu fait qu'en dernière analyse lacommunauté
internationale est le genre humain (genushumunum)et que, dans un sys-
tèmedont les sujets fondamentaux, les sujets originels, sont des entités
abstraites, c'est en définitive l'individuque visent les règlesdu droit. On
ne peut pourtant en conclure que la convention sur le génocide est une
convention humanitaire, une convention qui ressortit au droit humani-
taire, car ce terme désigne desrèglesconsacréespar les traitéset la cou-
tume internationale ayant pour objet de ((réduireou limiter les souf-
frances des individus et circonscrire le domaine dans lequel est autorisée
la sauvagerie des conflitsarmés»'77(on rappellera d'ailleurs que le nom
complet de la conférencede Genèvede 1974-1976qui a adopté les pro-

tocoles 1 et II était ((Conférencediplomatique surla réaffirmation etle
développement du droit international humanitaire applicable dans les
conflits armés))).
Si l'on qualifiaitd'«humanitaires» les conventions ou les autres instru-
mentsjuridiques internationaux au vu de leur importance directe ou indi-
recte pour le statut juridique des individus, on transformerait la plus
grande partie du droit international en ((droit humanitaire)). Ainsi conçu,
le ((droit humanitaire)) engloberait tous les instruments relatifs au statut
des minorités, audroit des peuples à disposer d'eux-mêmes, à la répres-
sion des actes de terrorisme et, d'une manière généralet,outes les conven-
tions conclues dans le domaine du droit international pénal.

Le terme ((conventionhumanitaire)) ou ((convention de nature huma-
nitaire)) sert apparemment à faire valoir l'importance de la convention
dont il s'agit. Pourtant, les qualificatifs de ((conventionhumanitaire)) ou
de ((convention relative aux droits de l'homme)), etc., ne renvoient pas,
en toute logique,à l'autoritéjuridique de l'instrument: ilsdénotentplutôt
le fait que celui-ci appartientà une certaine catégorie, unespecies, de
l'appareil du droit international. C'est d'une autre terminologie qu'il faut
user pour exprimer l'importance d'une convention, et, dans les circons-
tances concrètesde notre affaire, dire que la convention sur le génocide
est une ((conventionde portée générale multilatéralde'intérêu tniversel)).
109. L'article34 de la convention sur la succession d'Etats en matière

de traités de 1978 (((Succession d'Etats en cas de séparation de parties
d'un Etat))) dispose notamment ce qui suit:
((1.Lorsqu'une partie ou des parties du territoire d'un Etat s'en
séparentpour former un ou plusieurs Etats, que 1'Etatprédécesseur
continue ou non d'exister:

a) tout traitéen vigueur a la date de la succession d'Etatsà l'égard
de l'ensembledu territoire de 1'Etatprédécesseur reste en vigueur
à l'égardde chaque Etat successeur ainsi formé)).

La disposition pertinente de l'article citéa éformulée en termesde suc-
cession automatique. Elle répondsur le plan théoriquea une conception

877J.G.Starke,Inrrodncriontu Inrrn~atiLaw, 1989,p. 553.universal succession based on a strict analogy with the notion of inheri-

tance in civil law andfor the concept on legal succession (substitution +
continuation) according to which "the successor State under interna-
tional law succeeds to its predecessor's rights and obligations, which
become ils own" [translation by the Registry]
In concreto, the fundamental question is the qualification of the term
"automatic succession" as stipulated by Article 34 of the Convention on

Successionin respect of Treaties (1978), Le.,does it constitute lex latu, a
part of positive international law - or not?
110. The answer to the fundamental question thus posed implies:

(a) a qualification of the solution established by Article 34 (1) of the
Convention from the standpoint of treaty law;
(6) a qualification of that solution from the standpoint of the practice
of States prior to the adoption of the Convention on Succession in
respect of Treaties;
(c) a qualification of the practice of States after the Convention was
adopted at the diplomatic conference in Vienna in August 1978.

Article 34 (Succession of States in Cases of Separation of Parts of a
State) is an integral part of the Convention on Succession in respect of

Treaties, hence the rule contained in it is a treaty rule and shares the fate
of the Convention itself. Article 49 (Entry into Force) of the Convention
stipulates that :

"1. The present Convention shall enter into force on the thirtieth
day following the date of deposit of the fifteenth instrument of rati-
fication or accession."

Since the condition for the coming into force of the Convention has not
been fulfilled,the Convention has not become a part of the positive legal
milieu. Consequently, the rule contained in Article 34 (1) is in a state of
lexferendu.
The rule contained in Article 34 (1)could, naturally, be lex lutuoutside
the framework of the Convention as an expression of existing customary

law. Does this rule merit the qualification of a customary rule?
The generally held view ofcustomary law, endorsed by this Court 179,is
that the creation of a rule of customary international law postulates:
"two constitutive elements: (1) a general practice of States, and (2) the
acceptance by States of the general practice as la^''^^^.

An analysis of practice in cases of separation of parts of a State when

'78"Der Nachfolgerdes VOlkerrechta sber tritt in Rechteund Pflichten seinesVor-
gangersso ein, alswiirenes seine eigenen"(H. M. Huber,Beitrügezu eitler Lelire vonder
Siuutensuccessiot, erlin, 189, . 14).
179E.rempli cousu. Nortlt Seu Contit~entalSl~e(fcases, I.C.J. Reporrs 1969, p. 44,
para.77.
IRnG. Schwarzenberger A, Manual of InternuiionalLavi?,1967,p. 32. AI~PLICATIONDE CONVENTION GÉNOCIDE (OP. DISS.KRECA) 776

de la succession universelle inspiréed'une stricte analogie avec la notion

d'héritageen droit civil etlou avec celle de succession légale(substitution
+ continuation) selon laquelle «[Iy]Etatsuccesseur en droit international
succèdeaux droits et obligations de son prédécesseur,qui deviennent les
siens» '78.
In concreto, la question fondamentale est cellede la qualitéde la «suc-
cession automatique)) prévue à l'article 34 de la convention de 1978:
relève-t-elleou non de la Iex Iutu,du droit international positif?

110. Pour répondre à cette question fondamentale, il faut:

a) évaluerla solution fixéeau paragraphe 1de cet article du point de vue
du droit des traités;
b) l'évaluer aussidu point de vue de la pratique des Etats antérieure à la
convention de 1978;

c) évaluer enfin la pratique des Etats postérieure à l'adoption de la
convention en août 1978.

L'article 34 («Succession d'Etats en cas de séparation de parties d'un
Etat») fait partie intégrante de la convention et la règlequ'il consacre est
une règlede droit conventionnel qui a le mêmestatut que la convention

tout entière. L'article49 de celle-ci(«Entréeen vigueur))), dispose:

«1. La présente conventionentrera en vigueur le trentième jour
qui suivra la date du dépôtdu quinzièmeinstrument de ratification
ou d'adhésion. »

Comme cette condition n'a pas été rempliel,a convention ne s'est pas ins-
crite dans le contexte du droit positif. Par conséquent, la règlefixéeau
paragraphe 1de l'article 34 est encore de legeferendu.

Cette règlepourrait évidemmentrelever de la les luta en dehors du
cadre de la convention si elle exprimait le droit coutumier existant. Mé-
rite-t-elle ce qualificatif de règlede droit coutumier?

Dans la conception courante du droit coutumier, à laquelle la Cour
a souscrit'79,la création d'unerèglede droit international coutumier dé-
pend de «deux élémentsgénérateurs:1) la pratique générale desEtats;
2) l'acceptation par les Etats de cette pratique générale entant que règle
de droit »IX0.
L'analyse de la pratique internationale dans le cas où certaines parties

'78«Der Nachfolgerdes Volkcrrechtsaber tritt inRechtc und Pflichtenscines Vor-
gangersso ein, alswarenes scineeigenen))(H. M. Huber,Beirragezu einrr Lekre sonder
Sruuterisuccessio,erlin, 1897,p. 14).
Voir,parexemple,Ploteoircotiti~iel lurnerdirNord. C.I.J. Rec~~il1969,p.44,
par. 77.
InuCi.Schwarzenberger, Manunlof hrernorionnlLIW, 1967,p. 32.the predecessor State continues to exist suggests two principal conclu-
sions:
(a) In quantitative terms it is difficult, if not impossible, to speak of a

generalized practice in this respect. As the ILC loyally notes in its com-
mentary on Article 33 (Succession of States in Cases of Separation of
Parts of a State) and Article 34 (Position of a State Continues after Sepa-
ration of Part of TtsTerritory) of its Draft: "During the United Nations
period cases of separation resulting in the creation of a newly indepen-
dent State . . .have been comparatively few."I8' Previous practice does
not substantively affect the argument because "[blefore the era of the
United Nations, colonies were considered as being in the fullest sense ter-

ritories of the colonial power", hence, "some of the earlier precedents
usually cited .. . in cases of secessionconcerned secessionof colonies" IE2.
One could rather, and with greater justification, speak of a certain
number of precedents;

(6) These precedents in the qualitative sense have in common an iden-
tical position regarding treaties of the predecessor State - new States
were neither bound nor entitled ipso jure to the continuance of pre-

independence treaties. In relation to the period prior to the foundation of
the United Nations,
"[tlhe majority of writers take the view, supported by State practice,

that a newly independent State begins its life with a clean slate,
except in regard to 'local'or 'real'obligations" Is3.

The practice in the United Nations era is presented in the commentary on
Article 33 of the Draft (Article 34 of the Convention) with the cases of
Pakistan and Singapore. The case of Pakistan is qualified as the applica-
tion of the principle that on separation such a State has a "clean slate" in
the sense that it is not under any obligation to accept the continuance in
force of its predecessor's treatiesis4. As far as Singapore is concerned, in
spite of the "devolution agreement" of 1965,it "adopted a posture simi-
lar to that of other newly independent States", that is, "[wlhile ready to
continue Federation treaties in force, Singapore regarded that continu-

ance as a matter of mutual consentniE5.

Draft Articles on Succession of States in respect of Treaties with commentaries
adopted by the International Law Commission at its twenty-sixthsession, United Nations
Conference on Succession of States in respect of Treaties, 1977session and resumed ses-
sion 1978,OfjÇcialRccor(ls,Vol. III,Documents.of the Conference, p. 92, para. 17.
IR3Ibid., p. 41, para. 3.
Ibid., p. 92, para. 17.
Is5Ibid., pp. 93-99, para. 18. d'un Etat se séparentde celui-ci tandis que cet Etat continue d'exister
amine à deux grandes conclusions :

a) Sur le plan quantitatif, ilestdifficilesinon impossiblede parler d'une
pratique généralisée C.omme le constate objectivement la Commission
du droit international dans ses commentaires sur l'article 33 (({Succes-

sion d'Etatsen cas de séparationde parties d'un Etat>))et sur l'article 34
I (({Casde 1'Etatqui subsiste apres séparation d'une partie de son terri-
taire») de son projet: <<Depuis la créationde l'ONU, les cas dc sépara-
tion aboutissant i la créationd'un Etat nouvellement indépendant ..ont
été relativement peunombreux. » IslLa pratique antérieure Acette période
ne modifie pas fondamentalement cette conception car {(Avant la crea-

tion de l'ONU, les colonies étaient à tous points de vue considérées
comme des territoires de la puissance coloniale>>et cccertainsdes précé-
dents habituellçmcnt cités... dans les cas de sécessionconcernaient la
sécessionde colonies»ls2. II serait préfkrablect plus juste de parler de
précédentsassez nombreux.

h) Sur le plan qualitatif, ces précédentsfont apparaitre une position
identique à l'égarddes traitks de 1'Etatprédécesseur:les Etats nouveaux
n'étaientni liéspar ces traitésni habilitesipsojure iiassurer la continuité
des traités antérieurs à leur propre indépendance.Si l'on considère la
périodeantérieure la créationdes Nations Unies,

<([l]aplupart des auteurs considèrent, et cette façon de voir est
confirméepar la pratique des Etats, qu'un Etat nouvellement coris-
titué«fait tablc rase», saufpour ce qui est des obligations <<locales»

ou «réelles>) 183
Quant i la pratique de l'èrede l'organisation des Nations Unies,elleest

illustréepar le commentaire de l'article 33 du projet (article 34 de la
convention),qui cite lesexemplesdu Pakistan et de Singapour. Le cas du
Pakistan est considérkconinle un exempled'application du principe selon
lequel, au moment de sa sécession,le nouvel Etat se trouve devant une
«table rase)),au sens qu'il n'est n~~llemen tbligk d'accepter lemaintien
en vigueur des traites conclus par son prédécesseu rH4.Pour ce qui est de
Singapour, et malgré l'«accord dedévolution» de 1965, ce pays «a

adopté une attitude semblable a celle d'autres Etats nouvellement indé-
pendants~, Bsavoir que: «Tout en se montrant disposéea maintenir en
vigueur lestraites conclus par la Fédkrationen vigueur, Singapour consi-
dérait que le maintien en vigueur relevaitdu consentement

'81Projetd'articlessur la successiond'Etatsen matièrede trait&,avec commentaires,
adopti.parlaCommissiondu droitinternationai sa vingt-sixdmesession,Do~umenisde
la roiifrvrnce des NatronsUnresIusuccessrond'Etuf~enniuiièrdr fruit&. srdsicle
1977 cireprise dIn sessioen 1978,vol. 111,p. 102,pa17.
IBZIbld p.,101,par. 12,
Ia3Ibid.p. 44,par 3
'a4Ibid , p 102,par. 17
Ix5Ihid., p. 1et suiv., par 18.778 APPLICATIONOF GENOCIDE CONVENTlON (DISS. OP. KRECA)

The ILC viewed the:case of Pakistan as a "special one" Inhprobably
because it prompted a legal opinion of the United Nations Secretariat.

The relevant part of the opinion reads:

"1. From the viewpoint of international law, the situation is one

in which pari of an existing State breaks off and becomes a new
Stale.On this analysis there is no change in the international status
of India; it continues as a State with al1treaty rights and obligations
of membership in the United Nations. The territory which breaks
off, Pakistan, will be a new State, it will not have the treaty rights

and obligations of the old State . ..

In international law the situation is analogous to the separation of

the Irish Free State from Britain, and of Belgiurnfrom the Nether-
lands. In these cases the portion which separated was considered a
new State; the rernainingportion continued as an existing Statc with
al1the rights and duties which it had before." Ig7

This legal opinion wasgivcnin connection with the concreie issuecon-
cerning Pakistan's position in relation to the Charter of the United
Nations, but its wording and argumentation clearly indicate thai it was

designed as an opinion of principle. In any event, there are clear indica-
tions lhat States interpreted it as a principled position of the United
Nations with regard to the relationship of a part of a State territory
which breaks off and becomes a new State, to the treaty rights and obli-
gations of the old Stase'"".

111. Ic would appearthat the main methodological approach of thc
Commission in drafting Article: 34 of the Convention was based on the
drawing of a distinction between two things :

(a) the obligation of the new State: to continue to apply the treaties of
itx predecessor to its territory after the succession of States; and,

UnitcdNationsConference on Successionof Statesin scspectof Treaties,14ses-
sion and resumedxssion 1978, O@rial Records,Vol. III,Documentsof the Conference,
p. 92,Fard.17.

Ig7LegaI opinion of 8 August 1947 by the Assisiani Seçretary-CeneralCor Lcgal
Affairs, approvedand made public by the Secretary-Generalin United Nations Press
Rekase PMl473, 12 August 1947(Ycorbooo kfriteIrirernionalLLIWCommission. 1962,
Vol. II,p.101.
In the nore verbale oits Permanent Mission tothe United Nations receivedon
Il September1963,the Govcrnmentof Afghanistanbasesits assertion that "Pakistanis
not a sucoessorioBritishtrearyrighthecausePakistan 1sa new State" prccis~lyonthe
argumentrhaz the Seçrztary-Generaol f the United Nations"deniedthe rightof succes-
States, 1367(ST/LEG/SER.R/14),tp.2, para.3l(n)and footnote 1.ls on Successionof La Commission du droit international a considéréque le cas du Pakis-
tan était «un peu spécial)) lS6,sans doute parce qu'il faisait l'objet d'un
avisjuridique du Sccrétariatde I'ONU. Le passage pertinent de cet avis
se lit comme suit:

«1. Du point de vue du droit international, on se trouve en pré-
senced'un cas ou une partie d'un Etat se détache delui et devient un
nouvel Etat. Sous cet angle, il n'ya pas dechangement dans le statut

international de I'lnde; elle demeure un Etat, et conserve tous les
droits et obligationsdécoulant des traités et,par conséquent,tous les
droits et obligations attachés à la qualitéde Membre des Nations
Unies. Le territoire qui se détache,le Pakistan, sera un nouvel Etat,
qui n'aura pas les droits et obligations conventionnels de I'ancien
Etat, et qui ne possédera évidemment pasla qualitéde membre des

Nations Unies.
En droit international, la situation est analogue a cequi s'estproduit
quand 1'Etatlibre d'Irlande s'est séparéde la Grande-Bretagne ou la
Belgiquedes Pays-Bas.Dans ces cas, la partie qui s'estdétachée a été
considérée commu en nouvel Etat; la partie restante a subsisté comme
Etat, avec latotalité des droits et devoirsqu'il avaitauparavant.)) ls7

Cet avisjuridique concerne le problème concret que soulevait la posi-
tion du Pakistan à l'égardde la Charte des Nations Unies, mais la façon
dont il est formuléet l'argumentation qui y est développéemontrent bien

qu'il exposeune position de principe. En tout état de cause, il est mani-
feste que les Etats l'ont interprétécomme étantla position de principe de
l'organisation des Nations Unies sur les rapports entre la partie du ter-
ritoire d'un Etat qui fait sécessionpour devenir un Etat nouveau et les
droits et les obligations conventionnels de I'ancien Etat Is8.
111. 11semblerait que la démarche méthodologiqueretenue par la

Commission pour rédiger l'article34 de la convention consistait à se fon-
der sur la distinction établieentre deux éléments:
a) l'obligation du nouvel Etat de continuer de respecter lestraitésde son

prédécesseurdans son territoire après la succession d'Etats;

ls6Projet d'articles sur la successiond'Etats en matiére de,vcc commeiitaires,
la conféreticedes Nations Uniessur lu sirccessiond'Etats en matièrede truitts, session de
1977 et reprisee lu session et11978, vol. III, p. 102,par. 17.
Avis juridique rendu le 8 août 1947 par le Secrétairegbnéraladjoint chargé des
affairesjuridiques, approuvéet rendu public par le Secrétairdlans lecommuniqué
de presse de'ONU PMl473, 12août 1947(Ailnuairede la Coir~inissiordiu droit ititerna-
tional, 1962,vol. II,p. 119).
lasDans la note verbalede sa mission permanente auprésde l'organisation des Nations
Unies en date du 1I septembre 1963,le Gouvernement afghan, qui affirmeque «le Pakis-
tan n'est pas Etat successeur ence qui concerne le droit conventionnel britannique parce
qu'il estun Etat nouveau», trouve précisCrtn argument dans le fait que le Secrétaire
généradle l'organisation des Nations Unies aniéle droit de succession» du Pakistan
(Sérielégislativedes Notions Utries,documentation concernant la succession d'Etats,
STILEGISER.BI14, 1967,p. 2, par. 3a)et note 1).(6) the right of the new State to consider itself a party to those treaties
in its own name after the succession of StatesIs9.

The Commission proceeded explicitly from this distinction in formu-
lating the provisions of Article 15 of the Draft Convention which stipu-
lates that:

"A newly independent State is not bound to maintain in force, or
to become a party to, any treaty by reason only of the fact that at
the date of the succession of States the treaty was in force in respect
of the territory to which the succession of States relates."

If the Commission was guided by the practice of States in formulating
the provisions of Articles 15and 33 of the Draft (Articles 16 and 34 of
the Convention) then a complete analogy has to be applied when one is
deterrnining the consequences of succession in the case of the creation of

a newly independent State by secession from the metropolis and the cre-
ation of a State by the separation of parts of an existing State. In par-
ticular, in the period prior to the United Nations era, cases of "sece~sion'~
concerned the "secession of colonies" lgOI .n other words this is a virtually
uniform practice, the practice in the case of Pakistan and Singapore, the
only cases cited in the commentary to Article 33of the Draft to illustrate
the practice during the United Nations period, being characterized as the
"clean slate" rule.

Making a distinction between the consequences of succession in the
case of a newly independent State the territory of which immediately
before the date of succession was a dependent territory, and the case of a
new State formed by separation of a part of an existing State, and estab-
lishing different rules for these two cases - "clean slate" in the former
and "automatic continuity" in the latter - the Convention undoubtedly
went beyond the sphere of codification of existing practice and entered
the sphere of progressive development.
The provision on "automatic continuity" could hardly bejustified in a
convention on succession even in the event that the new States, following

the logic of the right to consider themselves as parties to the treaties in
their own name after the successionof States, had uniformly accepted the
rights and obligations stemming from the treaties of the predecessor
State.
The very fact that we are dealing with the right of the new State "to
consider itself a party to the treatiesin itsownname"(emphasis added),
a right that has been operationalized in conformity with the rules of

SecCommentary to Article 15,Position in respectof thc Treaties of the Predecessor
State of the Draft Articles, UnitedNations Conferenceon Successionof States in respect
of Treaties, 1977sessionand resumed session 1978,ia Records,Vol.IIIDocuments
of the Conference, p., para. 2.
IYo Ibid.,p. 91, para. 12.h) le droit du nouvel Etat de se considérer commepartie à ces traités,en
son nom propre, après la succession d'Etat~'~~.

La Commission s'est explicitement fondéesur cette distinction pour
formuler les dispositions de l'article 15 de son projet, lequel est ainsi
conçu :

«Un Etat nouvellement indépendant n'est pas tenu de maintenir
un traitéen vigueur ni d'y devenirpartie du seul fait qu'a la date de
la succession d'Etats le traité étaiten vigueur i l'égarddu territoire
auquel se rapporte la succession d'Etats.))

Si la Commission s'est inspiréede la pratique des Etats lorsqu'elle a
élaboréles articles 15 et 33 de son projet (futurs articles 16 et 34 de la

convention), il faut admettre une parfaite analogie quand on s'interroge
sur lesconséquencesde la succession,d'une part, dans lecas de la création
d'un Etat nouvellement indépendant par sécessiond'une métropole et,
d'autre part, dans le cas de la création d'unEtat par séparation de cer-
taines parties d'un Etat existant. Pendant la périodeantérieure à la créa-
tion des Nations Unies, lescas de ((sécession))étaient, descas de ((séces-
sion de colonies»'90. En d'autres termes, la pratique est quasiment
uniforme, telle que l'illustrent les cas du Pakistan et de Singapour, les

seuls citésdans le commentaire de l'article 33 du projet comme exem-
plaires de la pratique de la période postérieurea la créationdes Nations
Unies, caractériséepar la règlede la ((table rase)).
Faisant ainsi la distinction entre lesconséquencesde la successiondans
le cas d'un Etat nouvellement indépendantdont le territoire était un ter-
ritoire dépendant juste avant la date de la sécession,et le cas d'un Etat
nouveau formépar séparation d'une partie d'un Etat existant, et pré-
voyant des règlesdifférentespour l'unet l'autre - la «table rase»pour le

premier et la ((continuitéautomatique)) pour le second - la convention
sortait assurkment du domaine de la codification de la pratique existante
pour entrer dans celui du développement progressifdu droit.
La disposition relative à la ((continuitéautomatique)) serait difficilea
justifier dans une convention sur la succession,mêmedans l'hypothèseoù
les nouveaux Etats, adoptant la logique qui les autoriserait à se consi-
déreren leur nom propre comme parties aux traitésaprès la succession,
auraicnt uniformément accepteles droits et les obligations découlant des
traitésde 1'Etatprédécesseur.

Le simple fait que nous traitions du droit du nouvel Etat «de se consi-
dérercomme partie aux traités en son nompropre)) (les italiques sont de
moi), droit rendu opératoire selon les règlesdu droit des traitésfondées

'" Voir le commentaire del'article 15 (((PosiàiI'kgarddes traités deI'Etatpré-
dkcesseurn)du projetd'articleDoatt?ienrsoffciels (le 10 confirericedesA1urionsUriies
strrlusuccessiod'Eiu/s en murièrede rruirés,sessionde 1977 er reprilusessionen
19I9OIbiflp. 101,par. 12..2.780 APPLICATIONOF GENOCIDE CONVENTION (DISS .P. KRE~A)

treaty law based on the fundamental principle of consent, eliminates,
within the logic of codification of existing practice, the construction on
"automatic continuity" which is, by its meaning, an obligation. What
could be open to debate as we are dealing with a right or authorization is
whether that right or authorization, depending on the nature of the prac-
tice, is an ordinary or categorical authorization (jus cogens). Even the

uniform exerciseof a right does not provide grounds for transforming the
right into an obligation. Per analogiain,if on the basis of the authorizing
norm contained in Article 33 of the Convention on the Law of the Sea
(1982)a large majority of States were to proclaim a contiguous zone, that
would not mean that the establishment of the zone would constitute an
obligation of States. The consequences of such a practice would be the

constitution of customary rules on the right of States to proclairn exclu-
sive economic zones or inconcret0 the customary rule on the riglztof the
successor State "to consider itself as a party to the predecessor State's
treaties in its own name".
It is therefore not difficult to agree with the opinion of the Expert Con-
sultant of the Conference, Sir Francis Vallat, that

"[tlhe rule [in Article - Successionof States in Case of Separation

of Parts of a State] was not based either on established practice or on
precedent, it was a rnatter of the progressive development of inter-
national law rather than of codification" 19'.

It was noted that, in the case of Article 34 of the Convention

"the International Law Commission abandoned the 'clean slate'
principle and introduced, on the contrary, a rule of continuity. It
was clear that in doing so it had been aware of the fact that it was
not simply reflectingthe present state of the law, but was proposing

progressive development. For 'clean slate' was part of general inter-
national law and would continue to be so, whatever solution was
adopted in the Convention." '92

Multilateral law-making conventions do not represent an exception since:

"Succession to multilateral law-making conventions after separa-
tion or secessionis a right, not an obligation. Multilateral law-mak-
ing conventions establish a body of rules of international law. They

do not create subjective rights of individual States.In case of succes-
sion no acquired right of a third party need beprotected, by making
it the successor's responsibilityto perform it. No automatic change

Sirtnt?tuRecords,Committeeof theWhole,48thMeeting,8 August 1978,p. 105,
para. 10.
Ig2Ritter,The UN Conferenceon Successionin Respecrof Treuties. Vien31.July-
23 Augusr 1978,pp. 52-55. APPLICATION DE CONVENTION G~NOCIDE (OP.DISS . RE~A) 780

sur le principe essentieldu consentement, ce simple fait donc, exclut de la
logique de la codification de la pratique existante le cas de figure de la
((continuitéautomatique)), qui, par son sens même,ne peut être qu'une

obligation. Ce dont on pourrait débattre, puisqu'il s'agitd'un droit ou
d'une faculté,c'est Icpoint de savoir si cedroit ou cette faculté,au regard
de la pratique, est ordinaire ou impératif(relevant du jus cogens). Qu'un
droit soit exercéde manière constante ne suffit pas à le transformer en
obligation. Par analogie, si la grande majorité des Etats, se prévalant de
l'autorisation qui leur en est donnée à l'article 33 de la convention sur le
droit de la mer de 1982, devait proclamer une zone contiguë, cela ne
signifierait pas que la création d'une zone contiguë serait obligatoire.

Cette pratique aurait pour conséquence d'instituerune coutumequant au
droit à une zone économiqueexclusive, ou in concret0 une règlecoutu-
mièrerelative au droitde 1'Etatsuccesseur «à se considérer partie, en son
nom propre, aux traitésauxquels étaitpartie I'Etat prédécesseur)).

On peut donc souscrire sans difficulté à ceque dit l'expert consultant
de la conférence, sirFrancis Vallat :

«La règle[de l'article 2 - «Succession d'Etats en cas de sépara-
tion de parties d'un Etat))] ne se fonde pas sur une pratique bien éta-

blie nisur des précédents;elle relèvedu développement progressifdu
droit international plutôt que de sa codification.» 191

On a fait remarquer, à propos de l'article 34 de la convention que

«la Commission du droit international a abandonnéle principe de la
«table rase» pour mettre à sa place la règlede la continuité. Cefai-
sant, elle ne pouvait ignorer qu'elle faisait davantage que traduire
l'étatcourant du droit et qu'elleen proposait un développementpro-
gressif. Car la règlede la «table rase» faisait partie du droit inter-
national généralet devait y rester indépendamment de la solution
adoptéedans la convention. » 19*

Que des conventions créent du droit multilatéraln'est pas du tout singu-
lier:

«La succession en ce qui concerne les traités-loismultilatéraux,
après séparation ousécession, estun droit, ce n'est pas une obliga-
tion. Ces conventions constituent un corps de règlesde droit inter-
national. Elles necréentpas de droits subjectifs pour les Etats consi-
dérés individuellement.En cas de succession, il n'y a pas de droits
acquis d'une tierce partie qu'il faudrait protéger enrendant 1'Etat

I9lComptes rendus analytiques des séances plénièreest des séancesde la commission
plénière,8' séance, 8août 1978, p. 109,par. 10.
IpZRitter, Tlie UN Conferenceon Successionin respect of Trerities, Vien~la.31 Jirly-
23 Attgnrf 1978, p. 52-55. of attribution; in other words: no automatic succession, therefore,
takes place." Ig3

Finally, it is also worth examining the practice of States following the
adoption on 22 August 1978of the Convention on Succession in respect
of Treaties, which was open for signature until 28 February 1979.
Article 46 (Signature) of Chapter VI1of the Convention stipulates

"The present Convention shall be open for signature by al1States
until 28 February 1979at the Federal Ministry for Foreign Affairs
of the Republic of Austria, and subsequently, until 31 August 1979,
at the United Nations Headquarters in New York."

The position of States regarding the Convention could hardly, even
given a maximum degree of benevolence, be described as satisfactory. In
the almost twenty years since the Convention was opened to ratification
and accession, only 13States have deposited instruments of ratification,
accession or succession, so that not even the obviously modest require-
ment of 15instruments of ratification or accession for the Convention to

enter into effect has been fulfilled.This fact - volenstzoletzs - is indica-
tive of the attitude of States towards the Convention, regardless of the
fact that the number of ratifications or accessions cannot, in itself, be
considered conclusive with regard to the acceptance of the rules con-
tained in a Convention which has not come into force. The practice of
new States which have emerged since 1993clearly shows that automatic
succession is not accepted as a positive rule (Multilateral Treaties Depos-
ited with the Secretary-General, Status as at 31 December 1993).
112. It follows from the above that the rule on automatic succession of
multilateral treaties- les ferenda, as matters now stand - has not been
acccpted in positive international law. However, it would be wrong to
conclude from this that a new State begins life in the international com-

munity as a trrbularusa, a newborn in a legal vacuum deprived of al1
treaty rights and obligations. Such a state of affairs would be in contra-
diction with the very idea of an organized, dejure international commu-
nity, an idea which does not recognize or tolerate the existence of any
entity which is not directly or indirectly subject to the rule of law.

Moreover, treaty rights and obligations are subject to the division of
rights and obligationseffectedin the well-knowndictum of the Court in the
case concerning BarceIonuTraction,Lighrut~dPower Cornparzy,Litnited:

"[aln essential distinction should be drawn between the obligations
of a State toward the international community as a whole, and those

'93K. Zemanek, "State Successionafter Decolonization", Recueil (les coirrs de
I'Acucltr~iee droir itirerna~iorIU(Haye, Vol. 116, 1965,p. 233. APPLICATiONDE CONVENTIONG~NOCIDE (OP.DIÇS.KRE~~\) 781

successeur responsable du respect de ce droit. 11n'y a pas change-
ment automatique d'attribution, Autrement dit, iln'y a pas de suc-
cession automatique.» lg3

Enfin, iln'est pas inutile de se pencher sur la pratique des Etats aprés
l'adoption, le 22 août 1978,de la convention de Vienne sur ta succession
d'Etats en matière de traités, ouverte iila signature le 28 février1979.
L'article 46 («Signature») de la septieme partie se lit comme suit :

{(La presente convention sera ouverte d la signature de tous les
Etars de la manièresuivante: jusqu'au 28 février1979,au ministère
fédéral des affaires étrangèresde la République d'Autricheet en-
suite,jusqu'au 31 aoùt 1979,au Siègede l'Organisation des Nations
Unies itNew York.»

Il serait difficile,m&meavec le plus grand optimisme, dejuger satisfai-
sante l'attitude des Etats l'égardde la convention. Dans la vingtaine

d'annkes,ou presque, qui s'estécoulée depuis qu'ellea étéouverte rati-
ficationet iadhésion,treize Etats seulement ont déposéleursinstruments
de ratification, d'adhésionou de succession,et le seuil de quinze instru-
ments, 5 l'évidencemodeste, àpartir duquel elleentre en vigueur n'a pas
encore étéatteint. Qu'on leveuilileou non, cela témoigne dece que les
Etats pensent de la convention, mèmesi le simple nombre des ratifica-
tionsou des adhésions n'établit pas de façon concluante le degré d'accep-
tation des règlesque contient un textenon entréen vigueur. La pratique

des Etatsapparus depuis 1993montre de manièreprobante que la succes-
sion automatique n'est pas reconnue comme réglepositive (voir «Traités
multilatcrüux déposésaupr?s du Secrétairegénéral - Etat au 31 dé-
cembre 1993 »).
112. 11dicoule de ce qui précéde que la réglede la succession automa-
tique en matikre de traitésmultilatéraux - de kge ferendu dans l'état
actuel des choses - n'estpas reçue par le droit international positif. Cela
ne signifiepas pour autant qu'un nouvel Etat entame sa vieau sein de la
communauté internationale tubuh~rasa, comme un nouveau-ne engen-

dré dans un nkünt juridique, privéde tout droit ou de toute obligation
conventionnels. Si tel étaitle cas, il aurait contradiction avec la notion
même de communautéinternationale organiséedejure, notion qui exclut
E'idtede reconnaître ou de tolérer l'existencde quelque enèitkque ce soit
qui ne serait pas directcmcnt ou indirectement sujetde droit.
De surcroît, lesdroits etles obligations issusde traitéssont soumis a la
distinction établiedans le dictur bien connu de la Cour en l'affairede la
BarceIonaTracfion, Lighr and Power Company, Ltd:

«Une distinction essentielledoit en particulier ktre ktablieentre les
obligations des Etsis envers la communauté internationale dans son

'93K. Zernanek, "Stnte Succession aftcr Decolonization", Rccdeslcours dr
I'Academiddc droiiniernatiorialLaIfuye,t 116,1965,p.233.782 APPLtCATIONOF GENOCIDE CONVENTION (DISS. OP.KRE~)

arising vis-a-vis another State... By their very nature, the former

are the concern of al1States."lg4
(Modern international law does not take the classicalviewüccording
to which only custom, as a forma1source, may originally constitute a
notmof general international law, whereas a ruie created by treaty, per
definilionem,represents a particular nom which may possibly acquire
the status of a norm of general international law tractu temporis by
means of custom. This view played its part when the international

community was primitive and undeveloped and when constructions
like thiswere required to fil1in the vast gaps ithepositive Iaw.Today
sucha concept is untenable both in theory and from the standpoint of
positive law.
Theoretically, if it is righrlyconsidered that the basis of the binding
nature of general international law is the "will of the intemational
community as a whole", gencral custom and comprehensive multilat-
eral treaties are only the instrumentalization of that will.Their mutual
relationship in value terms is determined by ihe inherent citpacity of
both sources to express that will.Any other approach implicitlyintro-

duces dualism into the foundation of the binding nature of interna-
tional law for it is obvious that neither general custom nor general
multilateral treatiesimplyunanimity, the agreementof al1States. There-
fore, to recognizecustom ashaving an exclusiverole in the generation
of general international law is tantamount to a metaphysical joke
(Lauterpacht speaks of "the mysteriouç phcnomenon of customary
international law which is deemed to be a source of law only on condi-
tion that itis in accordance with law" ("Sovereignty over Submarine
Areas", 27 British Ycur Book ofInternatiutia1 Laiv 376,p. 394 (1450));
he also raisesthe question of "why custom is binding. The answer,
beyond which itis inlaw not possible to go, is that it is the will of the

intemalional community that international law, in its various manifes-
tations, shaH be binding" (19. Lauterpacht, In!ernu~iunu law, Col-
lected Papers, 1, General Works, 1970, p. 58).

In positive legalterms, the capacity of general multilateral treaties to
generaie norrns jus cogens superveniens has been esiablished by the
Convention on the Law of Treaties. The comnientary on Article 50 of
the Draft (Article53 of the Convention) says [nier dia : "a rnodifica-
tion of a rule ofjus cogens would today most probably "o eficted
through a general multilateral treaty"- YeairbotikoftlieInternafional

Law Commission, 1966, Vol. II, p. 248, para. 4. If a general multi-
lateral treaty is capable ocreatinga norm ofjus cogens, as the most
perfect partof international law, then a furtiorl it is capableof gen-
erating a norm of general international law.) ensemble et celles qui naissent vis-à-visd'un autre Etat ...par leur
nature même,les premièresconcernent tous les Etats. »lg4
(Le droit international moderne ne reprend pas la position classique
selon laquelle seulela coutume, source formellede droit, peut à l'origine
constituer une norme de droit international générala ,lors qu'une règle
néepar voie de traité représente par déjnitionune norme particulière à
laquellelepassagedu tempspeut éventuellementdonner lestatut de règle

de droit international général enla rendant coutumière. Position utile
lorsque la communauté internationale était embryonnaire, peu déve-
loppée, et qu'il fallaitbien trouver une solution pour combler les vastes
lacunes que présentaitle droit positif. Position aujourd'hui indéfendable,
tant en théorieque du point de vue du droit positif.
Théoriquement, s'il est juste de considérer que le caractère obliga-
toire du droit international généraltrouve son fondement dans «la
volonté dela con~munautéinternationale dans son ensemble)), la cou-
tume générale et les traités multilatérauxde grande portée ne sont que
la façon dont cette volonté s'exprime concrètement. La qualitéjuri-

dique des rapports entre cette coutume et ces traitésest détirminéepar
la capacitéqu'ont l'unet l'autre moyen d'exprimer cette volonté.Toute
autre façon de voir introduit une distinction implicite dans les fonde-
ments du caractère obligatoire du droit international, car il est évident
que ni lacoutume généraleni lesgrands traités multilatérauxn'exigent
l'unanimité,leconsentement de tous lesEtats. Il s'ensuit qu'attribuerà
la coutume un rôle exclusif dans la création du droit international
général est unesorte de plaisanterie métaphysique(Lauterpacht parle
du phénomènemystérieuxconcernant ledroit international coutumier,
qui est censéêtreune source dedroit à la condition d'être conformeau
droit (((Souverainetésur leszones sous-marines)), British YearBook of'

International Laiv, 1950,vol. 27, p. 394); il se demande aussi «pour7
quoi la coutume est obligatoire. La réponse,au-delà de laquelle le droit
ne permet pas d'aller, estque c'est la communauté internationale qui
veut'que le droit international, sous ses diverses manifestations, ait le
pouvoir de s'imposer)) (H. Lauterpacht, International Law, Collected
Papers, 1, Generul Works, 1970,p. 58).
Sur le plan du droit positif, la capacitéqu'ont les traités multilaté-
raux de portéegénéralede créer desnormes de jus cogens superveniens
a étéfixéepar la convention sur le droit des traités. Le commentaire de
l'article 50 du projet de convention (qui sera l'article 53 du texte final)
dit notamment: «une modification d'une règleimpératives'effectuera

trèsprobablement par voie de traité multilatéralgénéral)()Annuairede
la Commissiondudroit international 1966,vol. II,p. 270, par. 4). Si un
traité multilatéralgénéral esctapable de créer unenorme de jus cogens,
forme la plus accomplie du droit international, il estA fortiori, capable
d'engendrer une norme du droit international général.)

19'C.I.J. Recue1970,p. 32.783 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (DISSO. P.KKE~A)

General multilateral treaties adopted in the interest of the international
community, being the instrumental form of expression of the will of the
international community as a whole, operate erga omnes independently

of contractual approval. The Genocide Convention is a case in point. As
indicated by the International Court of Justice in its Advisory Opinion
concerning Reservations to the Convention on the Prevention and PunisIl-
ment of the Crime of Genocide, proceeding from the qualification of
genocide as "a denial of the right of existence of entire human groups"
which "is contrary to moral law and to the spirit and aims of the United

Nations", "the principles underlying the Convention . . are recognized
by civilized nations as binding on States, even iilithoutany conventionul
obligation" Ig5.
Hence, the principles underlying the Genocide Convention are part of
the corpusjuris cogentis. Any new State is a priori subject to these rules
since they express the universal interest of the international community
as a ~hole'~~.
113. The cited opinion of the Court raises a question of fundamental

importance for these concrete proceedings - the question of the relation-
ship between the principles underlying the Genocide Convention and the
provisions of the Genocide Convention. This question has two dimen-
sions - a quantitative and a qualitative one. The quantitative dimension
of the question has to do with the relationship between underlying prin-
ciples and the provisions of the Convention, Le.,whether those principles
apply to the Convention as a whole. The answer to this question can, in

my opinion, only be negative. The fundamental principles of interna-
tional law underlying the Genocide Convention are manifested only in
the substantive provisions of the Convention, the provisions defining its
object and purpose. The transitional and final provisions of the Conven-
tion, to which should be added the procedural provisions regarding
methods of settling disputes, are not such as to warrant being described
as expressing the spirit and letter of the fundamental principles of inter-

national law. This is corroborated not only by the possibility of express-
ing reservations regarding these provisions but also by the effect of
termination carried out in accordance with Article XIV of the Con-
vention.
In qualitative terms the relationship between the "principles underlying
the Convention" and the substantive provisions of the Convention is rele-

1951.C.J.Reports1951,p. 23 (emphasisadded).
It mightbe concluded that, having mind that natuef the principles underlying
theGenocide Conventiont,he thenSecretary-GeneraHl amrnarsjkolwarned theCongo
authoritiesduringUnitedNations operationsin that country that the principloefsthe
Conventionmust be heldto govern even anewStatc like theCongoandto applyto sub-
ordinatepolitical authorities withinCeongo State (AnnualReportof the Secretary-
General 1960-1961, GenerAalssembly,16thSess., Supp.No. 1,p. 11; Waldock,"General
Courseon Public International Law"Recueil des coursde l'Académiede droir internu-
tionul dLa HU)^,Vol. 106, 1962, p.228). Les traités multilatéraux générau adoptés dansI'intérEd t e la commu-
nauté internationale, qui sont la concrétisation de la volonté de l'en-

semble de cette communauté,valent evga otnnes,indépendammentde tout
assentiment contractuel. La convention sur legénocideen est un exemple.
Comme L'adit la Cour internationale de Justice dans son avis consultatif
sur les Réservesd Irzconvention pour lu prévention et lu répressiondu
cnwie degénocide,en prenant pour point de départle fait que le génocide
se qualific comme «le refus du droit à l'existencede groupes humains

entiers» qui est contraire à la foisA la morale et a l'esprit et aux fins des
Nations Unies» : ({lesprincipes qui sonl à la base de la convention sont
des principes reconnus par les nations civilisées comme obligeant les
Etats même et?deliors de ttout liencotzv~ntionnd»'~~.
Ainsi, les principes sur lesquels s'appuiela convention sur le génocide
font partie du corpusjuris cogentis. Tout Etat nouveau est a priori sou-
mis ices principes, dans lesquels s'exprime l'intérêt univers del1s com-

munauté internationale tout entikre lg6.
l 3. L'avis de la Cour que je viens de citer soulèveune question
d'importance fondamentale dans le cas qui nous occupe, celle des rap-
ports entre lesprincipes qui sous-tendent la convention sur le gknocideet
lesdispositions de celle-ci.Cette question a deux aspects, un aspect quan-
titatif et un aspect qualitatif.'aspcclquantilalif lient aux rapports entre

les principes sur lesquels se fondent la convention et les disposilions de
celle-ci:ces principes s'appliquent-ilsAla convention dans son ensemble?
A mon avis, on ne peut répondreque par la négative. Les principes fon-
damentaux du droit international qui sous-tendent la convention sur le
génociden'apparaissent que dans le corps du texte, dans les clauses dkfi-
nissant son objet et ses fins. Les dispositions transitoires et les disposi-
tions finales, auxquelles ilfaudrait ajouter les dispositions de procédure

concernant le règlement des différends, ne sont pas de cellesdont on peut
dire qu'elles explicitent l'espritet ta lettre des normes fondamentales du
droit international. Cela sevoit non sculcment dans le fait qu'il estpos-
sible de faire des reserves sur ces dispositions, mais aussi dans le méca-
nisme de denonciatin prévua l'article XIV de la convention.

Pour cequi est de l'aspect qualitatif, les rapports entre «les principes
qui sous-tendent la convention» et les dispositions de fond de celle-ci

lq*C.LJ. Recueil 1951,p. 23 (italiquesont demoi)
19"n peutconclurequec'est enconsidérationdecette qualitéque l'ancienSecrétaire
général,Dag HammarsjkBlda ,vaitinsistauprksdes autorites du Congo, pendantles
opérationsde l'OrganisatidesNatronsUnles dansce pays,pour queles princips de la
conventions'imposentmemc àun Etat nouvCdUcomme IeCongo eisoientrespectespar
les autorités politiques subaltàs1'1ntkriere I'Etat congolais (rapport annueldu
Secrétairegénéra19Gû -961,Nations UniesDucurncrirt,$ficiel.~de /'.4ssetnhlétgénérale,
tionalLaw>>R,ecueildescoursde,I'Acridemdpkdroit ~nrernatlonadle La Haye, vol. 106,
4962,p. 228). APPLICAïïON DE CONVENTION GENOCIDE (OP.DISSK. RECA) 784

permettent de déterminer si l'effet juridique des premiers s'étendaux
deuxièmes. Les dispositions de fond de la convention sont l'expression
normative des «principes qui sous-tendent la convention», la résolution
d'un impératifcatégoriquegénéral - inapplicable a toutes fins pratiques
- en une série d'impératifs catégoriques particulierest concrets, qui sont
les diverses dispositions de la convention.

Cela revient Adire que les dispositions de fond de la convention sur le
génocide, expression concrète des principesqui la sous-tendent, ont une
valeur interprétative, telle enseigne qu'ellesparticipent de la force obli-
gatoire qu'ont les principes eux-mêmes.

Si tel n'était paslecas, cesprincipes de grande valeur ((reconnus par les
nations civiliséescomme obligeant lesEtats)), resteraient éthérés, comme
le cénotaphe desbonnes intentions à jamais inaccomplies.
Silesdispositions de laconvention sur legénociden'étaient pasI'expres-
sion concrète des principes qui sous-tendent celle-ci, la communauté
internationale devrait faire faàedes obstacles juridiques insurmontables
dans la poursuite de son intention d'éliminerle crime de génocide.Par
exemple, les Etats non partiesà la convention ne seraient pas liéspar les
dispositions de celle-ciqui définissentle génocide,ni tenus de l'obligation
de préveniret de réprimerce crime.
114. En d'autres termes, la Bosnie-Herzégovine,Etat nouveau, est liée
à priori par les dispositions fondamentales de la convention sur le géno-
cide mêmeen dehors de tout lien conventionnel. En adhérant formelle-

ment à la convention sur le génocide, la Bosnie-Herzégovinene ferait,a
l'égard des dispositionsde fond de la convention, que confirmer par voie
contractuelle des obligations auxquelles elle serait au demeurant tenue
volensnolens,puisque ce sont des obligations qui n'obéissentpas au libre
arbitre des Etats.
Les effetsjuridiques de l'adhésionà la convention sont essentiellement
ceux d'une soumission aux règles decelle-ciqui ne sont pas d'ordre impé-
ratif, c'est-à-dire aux règlesde procédureque fixent par exemple les ar-
ticles VIII, lx, XIV, XV et XVI.

115. La ((succession automatique)) et la ((notification de succession»
s'excluentmutuellement. La succession automatique aurait pour effet de
transférer automatiquement, ipso jure,les droits et les devoirs conven-
tionnels de I'Etat prédécesseuà 1'Etatsuccesseur. La successionne serait
donc pas le résultat d'unacte de volontéde I'Etat successeur, maisl'effet

d'une règlede droit international prévoyant le transfert des droits et des
devoirs conventionnels en conséquencede la substitution d'un Etat à un
autre dans la responsabilité des relationsinternationales d'un territoire.
La ((notification de succession))ne sejustifie sur le plan de la logique et
sur le plan du droit que si letransfert des droits et des devoirs conven-
tionnels, ou les modalitésde ce transfert, sont subordonnésà la volonté
de I'Etat successeur, puisqu'elle se définit commeune notification, quel
que soit son libelléou sa désignation,faite par un Etat successeur, expri-785 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (DISS .P. KRE~A)

boundhy the treuty"'". In other words, it is applied in cases when the
successor State is not bound, by norms of objective international law, to
continue to apply the treaties of its predecessor to its territory after the

succession of States but is entitled, according to the relevant norm, to
consider itself as a party to the treaties in its own name.

116. In this connection, the question is whether "notification of suc-
cession" is appropriate, per se, for expressing consent to be bound by
treaty. The legitimacy of this question relies on two facts:

(i) the connection that exists between the rules on succession with
respect to international treaties and the rules of treaty law, and
(ii) the meaning of the instrument of "notification of succession".

It is natural that the successionof States with respect to treaties has the
closest links with the law of treaties itself and could be regarded as deal-
ing with particular aspects of participation in treaties, the conclusion of

treaties and the application of treaties.
SpecialRapporteur Humphrey Waldock describedthese links as follows:
"the Commission could not do otherwise than examine the topic of
succession with respect to treaties within the general framework of

the law of treaties . . the principles and rules of the law of treaties
seemed to provide a surer guide to the problems of succession with
respect to treatis than any general theories of succession" '98.

Or as stated by O'Connell,
"The effect of change of sovereignty on treaties is not a manifesta-
tion of some general principle or rule of State succession, but rather
a matter of treaty law and interpretation." '99

The determination of "notification of succession" given in Ar-
ticle 2 (g) of the Convention on Successionin respect of Treaties, as well
as the practice of States in the matter, cast serious doubts as to the pos-
sibility of "notification of succession" as an instrument, per se, that acts

as a means of binding by treaty.
The Convention on the Law of Treaties (1969) stipulates in Article II
(Means of Expressing Consent To Be Bound by a Treaty ):

"The consent of a State to be bound by a treaty may be expressed
by signature, exchange of instruments constituting a treaty, ratifica-

IgArt~cle2 (g) of the Convention on Succession ofStates in respectof Treaties
(emphasisadded).
198Yearbookof tl~eItiternationalLaw Commission, 1968,p. 131, para.52.
'YD. P. O'Connell,TlieLaw of State Succession, 1956,p. 15.tnant le consentement de cet Etut ù êtreconsidérécomnze liépur le
truité>)197 E.n d'autres termes, les dispositions de fond s'appliquent dans

lescas où I'Etat successeur n'est pas tenu par le droit international objec-
tif de continuer de respecter les traités desEtats qui l'ont précédé sur son
territoire, mais où il a le droit, selon la règle,de seconsidérercomme par-
tie aux traités en son nom propre.
116. De ce point de vue, la question qui se pose est cellede savoir si la
((notification de succession» est, par elle-même, l'expressionen bonne
et due forme de la volontéd'êtreliépar un traité. Elle est légitime à un

double titre :
i) à cause du lien qui existe entre les règlesde succession en matière de
traités internationaux et cellesdu droit des traités,
ii) à cause de la signification de l'instrument de ((notification de succes-

sion».
II est tout naturel que la succession d'Etats en matièrede traités aitles
liens les plus étroitsavec le droit des traitéslui-mêmeet qu'on puisse la
considérer comme réglantcertains aspects de la conclusion et de I'exécu-

tion des traités etde la participation à ceux-ci.
Humphrey Waldock, rapporteur spécial, décritces liensen ces termes:
«la Commission ne peut faire autrement qu'examiner la question de

la succession d7Etats en matière de traitésdans le cadre généraldu
droit des traités...La solution la plus sCiredes problèmesde succes-
sion en matière de traités doit, semble-t-il, êtrerecherchéedans le
cadre des principes et des règlesdu droit des traités plutôt quedans
celui d'une théorie générald ee la succession. >'98

Ou, comme le dit encore O'Connell:
((L'effet qu'a sur les traités le changement de souveraineté n'est
pas la manifestation de quelque principe généralni de quelque règle

de la succession d'Etats; il ressortit plutôt au droit des traitéset à
leur interprétation.))199
La définitionde la ((notificationde succession» qui est donnéeau para-
graphe g) de l'article 2 de la convention sur la succession d'Etats en

matièrede traités etla pratique suivie par les Etats dans ce domaine font
sérieusementdouter du fait qu'une ((notification de succession» soit, en
tant qu'instrument, un moyen de consentir à êtreliépar un traité.
La convention sur le droit des traités de 1969 précisedans son ar-
ticle 11(((Moyensd'expressiondu consentement à êtreliépar un traité))):

«Le consentement d'un Etat à êtreliépar un traité peut être
exprimé par la signature, l'échanged'instruments constituant un

IY7Paragrapheg) de l'article2 de laconventionsurla successiond'Etatsen rndeiCre
traités (les italiquessont de moi).
Ig8Annuaire(lela Coniniissiondu clroiiinrernutionril.1968,vol. 1,p. 135, par.52.
D. P. O'Connell,The Laiv of SrareSuccessiot~.1956,p. 15.786 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (DISSO. P.KRECA)

tion, acceptance, approval or accession, or by any other means if so

agreed."

The formulation of Article 11of the Convention on the Law of Trea-
ties does not exclude the possibility of notification of succession being
understood as a means of expressing approval to be bound by a treaty.
The operationalization of this possibility implies, however, the agreement
of the parties for, in thelight of treaty law as expressed in Article 11of
the Convention, "notification of succession" undoubtedly cornes under
"uny other rneans" of expressing consent to be bound by a treaty but is
conditioned by the phrase "if so agreed". From this viewpoint, "rzotrficu-
lion of successiotz"us a utzilateralact of the State, constitutes a basisfor
a collateral agreement in simplijïedform betiveen the new Stute und the
individuulparties to its predecessor'streaties. Thus "notification of suc-
cession" actually represents an abstract, generalized form of the new
State's consent to be bound by the treaties of the predecessor State - a

form of consent which is, in each particular case, realized in conformity
with the general rule of the law of treaties on expression of consent to be
bound by a treaty contained in Article 11of the Convention on the Law
of Treaties and prescribed by provisions of the concrete Treaty.
An exception to the general rule according to which consent of the suc-
cessor State to be bound by a treaty has to be expressed ad casum in con-
formity with Article 11of the Convention on the Law of Treaties could
be envisaged in the event that, outside and independently of the Conven-
tion, there exists a generally accepted rule according to which "notifica-
tion of succession" is considered a specific means of binding new States
by treaties. Grounds for such an interpretation are also provided by
Article 73 of the Convention on the Law of Treaties: "The provisions of
the present Convention shall not prejudge any question that may arise
in regard to a treaty from a succession of States . .."
There is no real evidencethat such a rule exists.The Convention on the
Law of Treaties which is, by its nature, a combination of codification and
progressive development, does not make any mention in its Article 11

(Means of Expressing Consent To Be Bound by a Treaty) of "notification
of succession" as such a means. This is particularly conspicuous in view
of the fact that Article 11is built on the premise of deformalization of the
means of expressingconsent to be bound by a treaty. The reason for such
a state of affairs lies, in my opinion, in the still outstanding basic ques-
tions regarding the succession of States with respect to treaties.
"Notification of succession" can only have two basic meanings:

(a) it can represent a confirmation that the new State is bound by treaty
and, in that case, it has only a declarative effect; and
(6) itcan represent an instrument, however phrased or named, express-
ing consent of a successor State to be bound by the treaty. traite, la ratification, l'acceptation, l'approbation ou I'adhésion,ou
par tout autre moyen convenu.»

La façon dont l'article 11est formulén'exclut pas la possihilitk que la
notification de succession soit pour 1'Etat un moyen d'exprimer san
consentement à Êitre liépar un traité. La réalisationde cette possibilité
suppose cependant l'accord des parties car, selon le droit des traitéstel
que l'illustre l'articlee la convention, la <(notificationde succession»

est indubiiablement un cataire moyeu N d'exprimer son consentement à
êtreliépar un traité,subordonnécependant à la condition qu'exprime le
qualificatir «convenu». DE ce point de vue, nla:notfication de succes-
sionN, en rant qu'acte unilatéralde I'Erar.consriruela base dP~n accord
accessoire pnformp simpl&ee enfrele nouvelErat et chacune des purlies
uux truitks quliaient /'Etuprédkcessrur. Ainsi donc, la ((notificationde
succession» reprkscnte En fait un mode abstrait, génériqued , e la volonté
du nouvel Etat d'êtreliépar lestraitéssignés par1'Etatprédécesseuru ,ne
forme de consentement qui répond,dans chaque cas particulier, àla rkgle
généraledu droit des traités surla manifestation de la volontéque fixe
l'article II dla convention et aux modalités queprescrivent lesdisposi-

tions pertinentes du traitéconsidéré.
On peut imaginer une exception a la règlegénéralequi veut que le
consentement de 1'Etat successeur à êtreliépar un traité s'exprime ad
casnm en conformitéavec l'article 11 de la convention sur le droit des
traités: savoir l'hypothèse où,en dehors et indkpendamment de la çon-
vention, il existerait une règle généralementacceptéequi ferait de la
«notification de succession» un moyen particulier de lier les nouveaux
Eiats par un traite. L'article 73 de la convention fournil d'ailleurs les
motifs qui justifient unetelle interprétatio:«Les dispositions de la pré-
senle convention ncpréjugentaucune question qui pourrait apparaître se
poser A propos d'un traité dufait d'une successiondiEtats ..»

Rien n'indique vraimentqu'une tcllc regle existe. La convention sur le
droit des traités,qui est par nature la résultante dela codification et du
diveloppement progressif du droit, ne prévoit rien enson article 11,rela-
tif aux modes d'expression du consentement à Etre lie par un traité,qui
ferait de la «notification de succession^l'un de ces modes d'expression.
Cela est d'autant plus frappant que cet article1repose sur lasimplifica-
tion des modalitésde l'expression du consentement. Etat de chose qui
s'explique àmon avis par le fait que des questions fondameniales restent
à résoudredans le domaine de la successiondZEtatsen n~aiikrede traités.
Le terme «notificationde succession»ne peut avoir que deux sensfon-
damentaux :

a) soit il désigne l'actede confirmation du fait que le nouvel Etat est lié
par iraiiéet,en tel cas, la cnotificaiion~ n'a qu'un effetdéclaratoire;
b) soit il désigne uninstrument, quel qu'en soit le Sibellet queIlequ'en
soitla désignation,dans lequel s'exprime leconsentement de 1'Etat
successeur à &treliépar un traitt.787 APPLICATION OF CENOCIDE CONVENTION (DISSOP. KRECA)

In the case of (a) above, the basic nom on the succession of States
with respect to treaties is automatic succession- ihe righis and obliga-
tions stemming from treaties ipsojure, ihat are transferred from the pre-
decessor State to the successor State by the very act of territorial change.
In this case, "notification of succession" is essentially unnecessary. II

would mcrely be informaiion that ü territorial change had occurred and
that, as a result, theule on the automatic transfer of rights and ohliga-
tions stipulatedby treaty had been activated.
In the case under (LI a)ove, "notification of succession" is a means of
expressingconsent to be bound by a treaty. Sincesuccession per se is no1
and cannot be an independent method of expressing consent to be bound
by a treaty, except under the hypolhesis of automatic succession, itfol-

lowsthat "notification of succession" can only be a descriptive notion, a
collectiveterm for various forms of expression of consent of a new State
to be bound by a treaty.
The praclice O€ Siales in thearea of succession with respectto treaties
is predominantly linked to the gaining of independence of former colo-
nies from the metropolis. it ischaracterized by diversiiy and,the absence
of clear and precise-rules.If any tendency can be said to be prevalent, it
is that"a great many new States couldbe classifiedin ava~iety of 'pick

and chooçe'categ~rieç'"~~ whichis by its meaningclose to the "cleanslate"
concept. However, regardless of whether they haveaccepted the Nyerere
formula and laid down a specified periodfor the reviewof treaties, which
period would automatically lapse if not taken up by ihe new Siatc before
its expiry, or the Zambia formula? which assurned the continued appli-
cation of many pre-independence treaties, but which laid down an
unlimited period of review to determine which had lapsed or which had
in practice been adopted if the new States considered them suited to their
needs. Those new Slates adopted such treaties by sending appropriate

notes to the depositary. The position on specifictreaties was expressed in
the form of "acceptance", "accession", and the like201.There are not
many examples of the acceptance of a treaty by a successor expressedin
the form of an instrument that could be called a "notification ofsucces-
sion". "Notification of succession" is rather a synthetic, collective term
denoting various forms of new States being bound by ihe lrealiesof the
predecessor State, and was developed primarily in ihe praclice of the
United Nations Secretary-General as the depoçitary of multilateral

treaties. The lerm implies the existence ofa rule of genera ilternational
law ori the transfer of rights and obligations stemming from multilateral
treaties to which the predecessor State is a pariy, to the successocState
which does not correspond to the açiual state of affairs since:

200Kearney,Yeurbook ofrheIn!ernut~onal aw Coi~imissi1968,Vol. 1p 136
Sec Uniled Rr~rioLgisiu~~vSeriesMaterialson Succession States(STILEGI
SER.B/141,1967,pp. 42 (1);I81; 224-229. Au sens a), la règlefondamentale de la succession d'Etats en matière
de traitésest celle de la succession automatique: les droits et les devoirs
qui découlent destraitéssont ipsojure transférésde I'Etat prédécesseur à
1'Etatsuccesseur par le fait mêmedu changement territorial. Dans ce cas,
la ((notification de succession» n'est pas fondamentalement indispen-
sable. Elle ne fait qu'annoncer s'il y a un changement de territoire et

qu'en conséquencela règle du transfert automatique des droits et des
devoirs découlantdes traités apris effet.
Au sens b), la ((notification de succession» est un moyen d'exprimer le
consentement à êtreliépar un traité.Comme la succession n'est pas et ne
peut êtreun moyen indépendant d'exprimer la volonté d'êtreliépar un
traité, sauf dans l'hypothèse de la succession automatique, le terme
((notification de succession» n'a qu'une valeur descriptive, ce n'estqu'une
rubrique couvrant les diverses voies par lesquelles un Etat nouveau peut

faire reconnaître son consentement à êtreliépar un traité.
La pratique de la succession en matière de traités concerne surtout
l'accessiond'anciennes coloniesà l'indépendancepar rapport à leur métro-
pole. Elle secaractérisepar sa diversitéetpar l'absencede règlesclaires et
précises.Si I'onpeut discerner une tendance plus marquéeque les autres,
c'estqu'«un grand nombre de nouveaux Etats se répartissenten diverses
catégoriescorrespondant à des solutions (tau choix»200,tendance proche
de la «table rase)).ourtant, qu'ils aient acceptéla formule Nyerere efixé

une période déterminép eour reconsidérerles traités,période qui expire-
rait automatiquement si elle n'était pasmise a profit par le nouvel Etat
avant son échéanceo ,u qu'ils aient acceptéla formule zambienne, qui pos-
tule la continuitéd'application de beaucoup de traitésantérieurs à I'indé-
pendance mais ne limite pas lesdélaisdans lesquelsles traitésdoivent être
déclarés caducsou adoptésen pratique s'ilsparaissent convenir, les nou-
veaux Etats ont souscrit aux traitésen adressant les notifications voulues
à leur dépositaire.Leur positionà l'égardde tel ou tel traités'estexprimée

par «acceptation», «accession», etc.201IIn'y a pas beaucoup d'exemples
d'un Etat successeur acceptant un traitépar la voie d'un instrument que
I'onpourrait appeler ((notification de succession». Le terme ((notification
de succession»est plutôt une expression synthétique, collective,désignant
lesdiversesmodalitéspar lesquellesles nouveaux Etats se lient aux traités
signéspar 1'Etatprédécesseur. La notions'estessentiellement développée
dans la pratique du Secrétaire générad le l'Organisation des Nations
Unies, en sa qualitéde dépositaire des traitésmultilatéraux.Elle suppose
l'existenced'une règlede droit international général prévoyanlta dévolu-

tion àI'Etat successeurdes droits et des devoirs découlantdes traitésmul-
tilatéraux auxquels I'Etat prédécesseurétaitpartie, ce qui ne correspond
pas à la réalité des choses, uisque:

200Kearney,Annuaire(le lu Cotntni.du droit international, 1966,p.140.,
dYEtats,TILEGISER.BIlutiI96,,p. 42, par. 11,p. 181et 224-229.oncernantla succession788 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (DISSO. P.KRE~A)

"ln spite of some evidenceto the contrary, emanating mainly from

diplomatic rather than legal sources, it is submitted that the general
principle is that newlyestablished States which do not result from a
political dismemberment and cannot fairly be said to involve politi-
cal continuity with any predecessor, start with a clean slate in the
matter of treaty obligation, Save in so far as obligations may be
accepted by them in return for the grant of recognition to them or
for other reasons, and except as regards the purely local or 'real'
obligations of the State formerly exercising sovereignty over theter-
ritory of the new State."'02

The practice of new States following the adoption of the Convention
on Succession in respect of Treaties is heterogeneous but is clearly not
heading in the direction of establishment of "notification of succession"
as a specificmeans of binding new States by the treaties of the predeces-
sor State.

117. ArticleXI of the Genocide Convention stipulates:
"The present Convention shall be open until 31 December 1949
for signature on behalf of any Member of the United Nations and of

any non-member State to which an invitation to sign has been
addressed by the General Assembly.
The present Convention shall be ratified, and the instruments of
ratification shall be deposited with the Secretary-General of the
United Nations.
After 1 January 1950the present Convention may be acceded to
on behalf of any Member of the United Nations and of any non-
member State which has received an invitation as aforesaid.

Instruments of accession shall be deposited with the Secretary-
General of the United Nations."

Tt follows unequivocally from the cited Article that ratification and
accession are the relevant means of expressing States' consent to be
bound by the Genocide Convention. In its notification of succession of
29 December 199, Bosnia and Herzegovina States:

"The Government of the Republic of Bosnia and Herzegovina,
having considered the Convention on the Prevention and Punish-
ment of the Crime of Genocide of 9 December 1948 to which the
former Socialist Federal Republic of Yugoslavia was a party ~vis/les

IO succeed to the same and undertakes faithfully to perform and
carry out al1 the stipulations therein contained with effect from APPLICATION DE CONVENTIONGÉNOCIDE (OP.DISS K.RE~A) 788

«Malgré certaines preuves qui attestent du contraire mais qui
émanentsurtout de sources plutôt diplomatiques que juridiques, on
peut soutenir que le principe général estque les Etats nouvellement
créésqui ne sont pas le résultat d'un démembrement politique,et
dont on ne peut dire objectivement qu'ils assurent la continuitépoli-
tique d'un prédécesseuq ruelconque, naissent viergesde toute obliga-
tion conventionnelle, sauf les obligations qu'ilsuraient contractées
en échangede la reconnaissance de leur qualité d'Etat ou pour toute
autre raison et sauf les obligations purement locales ou«réelles)>de

1'Etatqui exerçait antérieurementla souverainetésur le territoire du
nouvel Etat. »202

La pratique des nouveaux Etats après l'adoption de la convention sur
la succession d'Etats en matièrede traitésn'est peut-être pas homogène,
mais elle ne s'oriente pasdu tout vers le choix de la ((notificationde suc-
cession)) comme moyen spéciald'acceptation des traités conclus par
I'Etat prédécesseur.
117. L'articleXI de la convention sur le génocide est ainsiconçu:

«La présente convention seraouverte jusqu'au 31 décembre1949
a la signature au nom de tout Membre de l'organisation des Nations
Unies et de tout Etat non membre a qui l'Assembléegénéraleaura
adressé uneinvitation à cet effet.
La présente convention sera ratifiée et les instruments de ratifica-
tion seront déposésauprès du Secrétaire générad le l'organisation
des Nations Unies.

A partir du 1" janvier 1950, il pourra êtreadhéréii la présente
convention au nom de tout Membre de l'Organisation des Nations
Unies et de tout Etat non membre qui aura reçu l'invitation susmen-
tionnée.
Les instruments d'adhésion seront déposésauprès du Secrétaire
généralde l'organisation des Nations Unies.»

Cet article signifie incontestablement que la ratification et l'adhésion
sont les moyens par lesquels les Etats peuvent exprimer leur consente-
ment a êtreliéspar la convention sur le génocide.Dans sa notification de
succession du 29 décembre 1992, la Bosnie-Herzégovine déclarece qui
suit:

«Le Gouvernement de la République de Bosnie-Herzégovine,
ayant examiné la conventionpour la préventionet la répressiondu
crime de génocidedu 9 décembre1948, à laquelle l'ancienne Répu-
blique fédérative socialistde Yougoslavie étaitpartie, soul~aiteêtre
le successeurde cette dernièreet s'engage a respecter et exécuter
scrupuleusement toutes les clauses figurant dans ladite convention,

202McNair,Law ofTreuties, 1961,p. 601 6 March 1992,the date on which the Republic of Bosniaand Herze-
govina became independent." (Emphasis added.)
The Secretary-General of the United Nations, acting in his capacity as

depositary, communicated the following:
"On 29 December 1992,the notijcution of successionby the Gov-
ernment of Bosnia and Herzegovina to the above-mentioned [Geno-
cide] Convention was deposited with the Secretary-General, with
effect from 6 March 1992, the date on which Bosnia and Herze-
govina assumed responsibility for its international relations."203

On 15June 1993,the Secretary-General received from the Government
of Yugoslavia the followingcommunication:

"Considering the fact that the replacement of sovereignty on the
part of the territory of the Socialist Federal Republic of Yugoslavia
previously comprising the Republic of Bosnia and Herzegovina was
carried out contrary to the rules of international law, the Govern-
ment of the Federal Republic of Yugoslavia herewith States that it
does not consider the so-calledRepublic of Bosnia and Herzegovina
a party to the [saidConvention] but does consider that the so-called
Republic of Bosnia and Herzegovina is bound by the obligation to
respect the noms on preventing and punishing the crime of genocide

in accordance with general international law irrespective of the Con-
vention on the Prevention and Punishment of the Crime of Geno-
cide."
118. On the basis of the above general considerations as wellas those
relating directly to the "notification of succession" of Bosniaand Herze-
govina, the following relevant conclusions can, in my view, be drawn:

The "notification of succession"of Bosnia and Herzegovina is not fully
in harmony with the practice of States as expressed in the relevant pro-
visions of the Convention on Successionin respect ofTreaties. More par-
ticularly, the concept of "notification of succession" was developedin the
practice of States specifically inconnection with decolonization.

(The expression itselfis rather imprecise.In United Nations practice
such notifications are called- "declarations" (see Introduction to the
Multilateral Treaties Deposited with the Secretary-General, Status as
at 31 December 1991,and cited by the Court in paragraph 6 of the
Order of 8 April 1993,note 4). "Notification" of a function is a rather
loose qualification of the practice of States, in the form of a "note"
without the suffix "of succession" (see United Nations, Legislutive
Series, Materials on Succession of States (ST/LEG/SER.B/14), 1967,
pp. 225-228), to declare themselves bound uninterruptedly by multi-

203Communication from the Secretary-Generalof the United Nations dated 18March
1993(reference.N.451.1992.Treaties-5(Depositary Notification)), entitled "Succession
by Bosnia and Herzegovina" (emphasis added). APPLICATION DE CONVENTION G~NOCIDE (OP.DISS.KRECA) 789

avec effetà compter du 6 mars 1992,date ii laquelle la Bosnie-Her-
zégovine estdevenue indépendante. » (Les italiques sont de moi.)
Le Secrétairegénérad l e l'Organisation des Nations Unies, agissant ensa

qualitéde dépositaire, a fait la communication suivante :
«Le 29 décembre1442,la nolificadionde successiondu Gouverne-
ment de la Bosnie-Herzégovine ala convention [surle génocide] aété
déposée aupsb du Secrélairegénéral ,vec effet au 6mars 1992,date

;ilaquelle la Bosnie-Herzégovinea assuméla responsabilitk de ses
relations internationalen203
Le 15 juin 1993le Secrétairegknérala reçu du Gouvernementyougoslave
la communication suivante :

«Considkrant que la substitution de souverainetésur la partie du
territoire de la Rkpubliquefkdérativesocialiste de Yougoslavie qui
constituait antérieurementja Républiquede Bosnie-Herzégovines'est
effectuéeen violation des réglesdu droit international, le Gouverne-
ment de la Républiquefédkrativede Yougoslavie déclarepar la pre-
sente qu'il neconsidèrepas que laprétendue Républiquede Bosnie-

Herzégovineest partie a [laditeconvention] el qu'il considère quela
prétendue République deBosnie-Herzigovine est tenue de I'obliga-
tion de respecterles règlesde préventionetde rkpressiondu crimede
génocide conformkmenl au droit international général, indépendam-
ment de la convention sur la préventionet la répressiondu crime de
gknocide.»

118. On peut mon avis tirer de ces considérationsgénéraleset de
celles qui portent directement sur la ({notificationde succession» de la
Bosnie-Herzégovine,lesconclusions suivantes:
La «notification de succession» de la Bosnie-Herzégovine n'estpas

entièremenrconfonne a la pratique des Etats telle qu'elleest consacrée
dans la convention sur lasuccessiond'Etats en matière de traités.four
&ireplus précis, le mkçanisme de la «notification de succession» s'est
développé dans le contexte spkcialde la décolonisation.
(L'expression elle-même est assez imprécise.Dans la pratique des
Nations Unies, ces notifications sont appelées({déclarations » (voir
l'introduction au document «Traitésmultilatéraux déposéü suprks du

Secrétaire général - Etat au 31 dkcembre 1891 », note 4, citépar la
Cour au paragraphe 6 de son ordonnance du 8 avril 1993).La «no-
tification)}d'un acte est une manière assez foue de qualifier la pra-
tique des Etars,qui consiste en une ({note» - sans le complémenl«de
succession)^(voir Série 1kgi.slafivedes Nalions Uni~s - Documen-
tation concernant. la succession d'Etats, STILEGISER.BI14, 1967,

203Communicationdu Seçrktairegénéradlc l'organisat~ondes Nations Unies en date
du 18mars 1993,C.N.451 1992.Treariec-5(Uepositary Nutfiarzon), sous le titre ({Suc-
cessiun bBosniaand 1-Ierzegovjnileitaliquesonde moi). lateral treaties concluded on their behalf by the parent State before the
new State ernerged to full sovereignty or to deposit their own instru-
ments of ücceptanceof suchtreaties, effective€romthe date of deposit
of the new instrument. It would therefore be more opportune to speak

of a "declaratjon of entry into the treaty". Furlbermore, the mentioncd
"notes", as a rule, represented a fom of realization of conventiorial
obligations assumed by "devo1utionagreements".)

The Genocide Convention does not envisage "notification of succes-
sion" as a means of expression of consent to be bound by the treniy so
that in the concrete case at hand agreement would be required between
Bosnia and Herzegovina and the individual parties to the Convention on
acceptance of a "notification of succession" as a means of expressingcon-

sent to be bound by the ConventionLo4.Yugoslavia, as a party to the
Convention, submitled its reservation stating that it "does not consider
the so-called Republic of Bosnia and Herzegovina a party [to the said
Convention]" because the "replacement of sovereigntyon the part of the
territory of SFRY previously comprising the Repnblic of Bosnia and
Herzegovina was carried out contrary to the rules of international law".
Yugoslavia, by this reservation, disputed the status of the successor State

of Bosnia and Herzegovina because the "replacement of one State by
another in the responsibility ..." constitutes only one, factual aspect of
succession or, more preciscly, a territorial change which provokes the
question of successionin a legalsense. Hencethe conclusion that follows
içthat no appropriate collateral agreement was reached between Bosnia
and Herzegovina and Yugoslavia, so that notification of succcssion by
Bosnia and Herzegovina does not have, vis-&vis Yugoslavia, the legal
effect of consent to be bound by the Genocide Convention. This ws

pointed out üt the 965th meeting of the International Law Comnission
by Tabibi: "Successionwith respect to treaties did not take placewithout
an express provision of the treaty or the express consent of tlie other
parly ."205
119. The Court irnplicitlytakes the view ihat on the basis of the Day-
ton Agreement the Genocide Convention became applicable as between
Bosnia and Herzegovina and Yugoslavia. Such a conclusion stems from

its pronouncement that

"even iFit wereto be assumed that the Genocide Convention did not
enter into force between the Parties until the signature af the

2n3"In theabsenccofprovisionswhichsct spixificconditionsfor succesorowhich
otherwisercstricsuccessiothe Secretary-Generalis guidedby the participation
clausesofthetreatiab wellas hythcgeneralprinciplesgoverningthe participation
ofStates"("Sunimaryor PracticeoftheSecrelary-General s Depositaryof Multi-
205Yc'earbnu(itheInternnzionulLuw Commissioir,1968,Vol. p. 132'para.64. APPLICATIONI3ECONVENTION GÉNOCIDE (OP. DISS. ICRE~A) 790

p. 225-228) - dans laquclle ils se déclarent lits de manière continue
par lestraités multilatérauxconclus en leur nompar 1'Etatdont ilssoni
issus avant leur propre accession ü la pleine souveraineté,ou sous le
couvert de laquelle ils deposenl leur insirument d'adhésion aux traités
en question, cette adhésionprenant effet à la date du dépbtde cet ins-

trument. JIvaudrait donc mieux parler d'une t(dcc1arationd'accepta-
tion d'un traité)). De surcroît, les «nates>>dont on vient de parler
représententen règle générale une façon d'accomplir les obligations
conventjonnclles découlantdes «accords de dévolution».)

La convention sur le gknocidene prévoitpas la «notification de succes-
sion» parmi les moyens d'exprimerun consentement. Ainsi, dans le cas
concret qui nous occupe, il faudrait qu'il y ait accord entre la Bosnie-
Herzégovineet chacune des parties a la convention quant a la recevabilité
d'une ctnoiitication de succession» pour que ce: consentement soit
exprimézo4. Ln Yougoslavie, partie a la convention, a fait une réserve

dans laquelle cllea déclaré qu'elle neconsidéraitpas {(laprétendueRepu-
blique de Bosnie-Herzégovinecomme partie [à ladite conveniion]» parce
que «la substitution de souverainetésur la partie du territoire de la Répu-
blique fédérative socialistede Yougoslavie qui conslituait antérieurement
la République de Bosnie-Herzégovine s'est effectuée en violation des
règlesdu droit international». En faisant celte réserve,la Yougoslavie a
contestéle statut d'Etat successeur de la Bosnie-Herzégovineparce que

«la substitution d'un Etat a un autre dans la responsabilité...» n'est
qu'un aspect, l'aspect factuel, de la succession ou, pour &treplus précis,
n'estqu'un changement territorial qui fait naitre la question juridique de:
la succession. D'où l'on conclut qu'iln'y a eu aucun accord accessoire
entre la Bosnie-Herzégovineet la Yougoslavie et que la notification de
successionde la Bosnie-Herzkgovinen'a pas, à l'égardde la Yougoslavie,
l'effetjuridique d'un consentement A ètreliepar la convention sur legéno-

cide. Cela rejoint une observation présentée par Tabibi a la 966"séance
de la Commission du droit international: «II ne peut y avoir de succes-
sion en matièrede traites en l'absenced'une disposition expressedu traité
lui-même ou sans le consentement exprèsde l'autre:partie. >)205
119. La Cour adopte implicitemenr le point de vue selon lequel la
convention est devenueapplicable entre la Bosnie-HerzCgovineet la You-
goslavie sur la base des accords de Dayton. C'est ce qui découle deson
affirmation :

«a supposer mëme que la convention sur le génocide ne soitentrée

en vigueur entre les Parties qu'à la signature des accords de Dayton-

«En l'absencede dispositionsfixantdcs conditions particuliksuçcessionou
restreignant autremenltemecanisrncde la succession,le Seceknérals'inspire
iicipatioiides Eti)((<Prkcisde la prdtique du Sccrttairegtnkraldepositairede
traitésmutt~latéraux),TlLEG R,p. 89, par 297.)
losAnriuuirede IComtnuaion (ludroit intrrnritiunul,1968,vp.135,par 64 Dayton-Paris Agreement, al1 the conditions are now fulfilled to

found the jurisdiction of the Court ratione personae" (para. 26 of
the Judgment).
In rny opinion, such an interpretation is untenable.
Yugoslavia argues that the "Genocide Convention became applicable
between the Parties to this case as from the signature of the Dayton
Agreement of 1995" and that "it was only under the Dayton Agreement
(particularly Annex 6 . . .that the Parties in contention accepted the

applicability of the Genocide Conventi~n"~~~.It is a fact that in the
absence of recognition, the contractuallaexusbetweenBosnia and Herze-
govina and Yugoslavia could not be established in the tramework of the
Genocide Convention. A rnutual recogriition of two States is the general
condition for the establishment of the bilateral contractual nexu.c,sincea
contractual nelationship between States represents a relationship intuitu
personae.
Yugoslavia and Bosnia and Herzegovina recognized each other by
Article X of the General Framework Agreement for Peace in Bosnia and
HerzegovinaZu7.Article X of the Ceneral Framework Agreement stipu-
lates, irnEeria, that

"The Federal Republic of Yugoslavia and the Republic of Bosnia
and Herzegovina recognize each other as sovereign independent
States within their international borders."
In normal circumstances, the muiual recognition per se results in the

establishment of the contractud nexus in the framework of a rnultilateral
agreement between the countries which recognize each other, or between
the State which extends recognition and the Stare which is being recog-
nized. For reservations regarding the status of a party to the agreement
of a State which isnot reeognized,arc expressed,as a rule,in order not to
establish a tacit coltateral agreement beriveen that State and the recog-
nizing State, an agreement which represents per se a defacto recognition.
The circumstances in this concrete case could not be terrned normal. In
the notification addressed to the Secretary-Gencral of the United Nations
an 15 June 1993, Yugoslavja emphasized that "it does not consider the
so-calleci Bosnia and Herzegovina a party to chat [Genocide Conven-
tion]" since, in its opinion,

"the replacement of sovereignty on the part of the territory af the
Socialist Federal Republic of Yugoslavia previously comprising the
Republic of Bosniaand Herzegovina was carried out contrary to the
rules of International Law".

ln other words, Yugoslaviachallenges, by the notification referredto, the
legality of the genesisof Bosnia and Herzegovina as a State. It could, of
course, be said that a recognition, as a rule, convalidates the defects in

2U6CR96i6p ,. 23
Doc A1501790, 119951999, Novemhcr 1995,p.4. Paris, toutes les conditions sontà présent réuniespour fonder la
compétencede la Cour ratione personae)) (arrêt, par.26).

Cette interprétation esa mon avis indéfendable.

La Yougoslavie a soutenu que «la convention sur legénocide estappli-
cable entre les Parties au présent litigà compter de la signature des
accords de Dayton de 1995))et que «ce n'est que dans ces accords de
Dayton (notamment l'annexe 6...) que les Parties au présent litigeont
admis I'applicabilitéde la convention sur le génocide>)206E.n fait, sans
acte de reconnaissance, le liencontractuel entre la Bosnie-Herzégovine et
la Yougoslavie ne pouvait êtreétablien cequi concerne la convention sur
le génocide. Cet acte de reconnaissance réciproque est une condition

préalable généraleà l'instauration entre deux Etats d'un lien contractuel
bilatéral, puisqu'unrapport contractuel entre Etats est une relation inruitu
personue.
La Yougoslavie et la Bosnie-Herzégovine sesont reconnues I'une et
I'autre réciproquement aux termesde l'article de l'accord-cadre général
pour la paix en Bosnie-Herzégovinezo7.Cet articleX dispose notamment :

«La République fédérativede Yougoslavie et la République de
Bosnie-Herzégovinese reconnaissent l'uneI'autre commeEtats indé-
pendants souverains à l'intérieurde leurs frontières internationa>)s.

Dans des circonstances normales, la reconnaissance mutuelle a en elle-
mêmepour effet d'établir un nesus contractuel dans le contexte d'un
accord multilatéralentre des pays qui se reconnaissent l'un I'autre, entre
1'Etatqui reconnaît et I'Etat qui est reconnu. En général,le premier fait
des réservessur la participation de I'autre quand il ne reconnaît pas pour
éviterque ne s'institue tacitement entre eux un accord accessoire qui
constituerait en lui-même une reconnaissancedefucto.

Mais les circonstances de l'affaire ne peuvent êtrequalifiéesde nor-

males. Dans la notification qu'ellea adresséeau Secrétairegénéral l'Or-
ganisation des Nations Unies le 15juin 1993, la Yougoslavie a souligné
qu'elle«ne considérait pas laprétendueBosnie-Herzégovinecomme étant
partie à [la]convention [sur le génocide]))car, a son avis,
«la substitution de souveraineté sur la partie du territoire de la
République fédérative socialistee Yougoslavie qui constituait anté-

rieurement la République de Bosnie-Herzégovine s'est effectuée en
violation des règlesdu droit international)).
En d'autres termes, la Yougoslavie conteste par cette notification lagi-
timitéde la naissance de la Bosnie-Herzégovineentant qu'Etat. On pour-
rait dire bien entendu qu'en règle généraleun acte de reconnaissance

20'Doc.A/50179S 0,1995/93909,ovembre1995 ,.4.the genesis of a State. Such a conclusion could be drawn fron~the very
nature of the recognition of the new State, since "To recognize a political
cornrnunity as a state is to declare that it fulfils the conditions of state-
hood as required by International Law."*ORThis specific case could be
qualified as an exception from the general rule, for two basic reasons:

Primo, Yugoslavia insisted, even after the signature of the Dayton
Agreement, that Bosnia and Herzegovina was constituted in an illegal
way. A clear and unequivocal proof of that is the content of the third
objection. The fact that Yugoslavia withdrew, during the procedure, its
fourth preliminary objection which concerned the factual non-existence
of Bosnia and Herzegovina in the administrative borders of that former
federal unit, but continued to argue that Bosnia and Herzegovina was

constituted contra fegem,leads one to the conclusion that the recognition
of Bosnia and Herzegovina by Yugoslavia in the Dayton Agreement had
only the function of acknowledging

"as a fact . . .the independence of the body claiming to be a State

and . . .declar[ing] the recognizing State's readiness to accept the
normal consequences of that fact, namely, the usual courtesies of
international intercourse" 209
while keeping its attitude towards the legality of the constitution of

Bosnia and Herzegovina as an independent State.
Secundo, in its third preliminary objection Yugoslavia claims, inter
alia, that the norm on the "equal rights and self-determination of peoples"
is a peremptory norm of gencral international law (jus cogens). If that
argument could be proved to be correct, then the recognition, even if
conceived and designed as convalidation, would be without legal effect,
since the noms of jus cogens as the absolute, unconditional imperative,
cannot be derogated by inter se agreements.

Outside the context of recognition, the Dayton Agreement does not
touch the relations between the Federal Republic of Yugoslavia and the
Republic of Bosnia and Herzegovina as parties to the Genocide Conven-
tion. The allegation that "under the Dayton Agreement (particularly
Annex 6 . ..) . . the Parties in contention accepted the applicability of
the Genocide Con~ention"~'~has no foothold in the text of the Dayton
Agreement.

Annex 6 of the Dayton Agreement, which is invoked as the basis ofthe
application of the Genocide Convention in this specificcase, represents,
in fact, the "Agreement on Human Rights", whose parties are - the

H. Lautemacht,Recoar~itionin lnternatiottulL'. 94... 6.
2w L. ~rierl~;Tli. ~ 2 V~ations, 1963,p. 138.
*IoCR9616,p. 24.remédieau vice de la naissance d'un Etat. C'est l'essence mêmede la
reconnaissance d'un Etat nouveau: ((Reconnaître la qualitéd'Etat a une
communauté politique c'est déclarer qu'ellerépond aux conditions qui
définissentlaqualité dYEtaten droit international. »208La présenteaffaire
pourrait êtreconsidérée comme faisant exceptionA cette règlegénérale, et
ce pour deux raisons fondamentales :

Pritno,la Yougoslavie n'a cesséde soutenir, mêmeaprès la signature
des accords de Dayton, que la Bosnie-Herzégovineavait étéinstituéede
manièreillégale,ce qu'atteste de manièrepatente et incontestable la troi-
sièmeexception préliminaire.Le fait que la Yougoslavie ait renoncé,au
cours de la procédure, a soulever sa quatrième exception, dans laquelle
elle alléguait l'inexistence de fait de la Bosnie-Herzégovine dans les
limites administratives de l'ancienne entitéfédérale,tout en continuant
d'affirmer que la Bosnie-Herzégovine s'étaitconstituée contra legem,
amène à conclure que la reconnaissance de la Bosnie-Herzégovinepar la
Yougoslavie dans les accords de Dayton n'avait d'autre but que de

reconnaître
«en tant que fait ...l'indépendancede l'entitéprétendant étre un
Etat et ..de faire connaître la volontéde I'Etat accordant sa recon-
naissance d'accepter les conséquences normalesde ce fait, à savoir
les égardsd'usage dans les relations internationale^))^^^,

sans que la Yougoslavie renonce pour autant a sa position sur l'illécéité
de la constitution de la Bosnie-Herzégovine enEtat indépendant.
Secundo, dans sa troisième exception préliminaire,la Yougoslavie a
notamment soutenu que le principe de ((l'égalité de droits des peuples et
de leur droit a disposer d'eux-mêmes»était une norme impérative du
droit international général (jus cogens). Si la valeur de cet argument

pouvait êtreétablie, la reconnaissance, même conçue et réalisée comme
un acte de validation à posteriori, serait sans effetjuridique, puisqu'on ne
peut dérogerpar convention inrer seaux normes de jus cogens, qui sont
des impératifsabsolus et inconditionnels.
Hormis le domaine de la reconnaissance, les accords de Dayton ne
disent rien des relations entre la Républiquefédérativede Yougoslavie et

la Républiquede Bosnie-Herzégovineen tant que parties a la convention
sur le génocide. L'allégation selon laquell«edans [les]accords ..(notam-
ment l'annexe6:..) ..les Parties au présent litigeont admis I'applicabilité
de la convention sur le génocide>)21n0e s'appuie sur rien dans le texte des
accords.
L'annexe 6 des accords de Dayton, ici invoquéecomme base de I'appli-
cabilitéde la convention sur le génocide,contient en fait un ((accord rela-
tif aux droits del'homme))auquel sont parties la Républiquede Bosnie-

208H. Lauterpacht,Recognitiot~iraIt~ternul aw, 1947,p. 6.
20%. Brierly,ThLaiuof Nutiot~s,1963,p. 138.
2'0CR 9616,p. 24.793 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (DISS .P.KRE~A)

Republic of Bosnia and Herzegovina, the Federation of Bosnia and
Herzegovina, and Republika Srpska. The only connection between Yugo-
slavia and Annex 6consists in the fact that Yugoslavia, together with the
Republic of Croatia and the Republic of Bosnia and Herzegovina, by vir-
tue of Article VI1 of the General Framework Agreement

"agree to and shall fully comply with the provisions concerning
human rights set forth in Chapter One of the Agreement at Annex 6,
as well as the provisions concerning refugees and displaced persons
set forth in Chapter One of the Agreement at Annex 7".
Chapter One of the Agreement on Human Rights contains a list of indi-
vidual, mainly classical, personal and political rights and liberties which

the "Parties [the Republic of Bosnia and Herzegovina, the Federation of
Bosnia and Herzegovina and Republika Srpska] shall secure to al1per-
sons within their jurisdiction" (Art. 1 of the Agreement). Article VITof
the General Framework Agreement is the contractual confirmation,
phrased in a general way, of the obligation of the respect of basicuman
rights and freedoms enumerated in Article 1of the Agreement on Human
Rights, which the parties to the General Framework Agreement are
bound to respect as parties to the instruments whichcontain them, and in
some cases as cogent rules, independently of their acceptance. Therefore,
the purpose of Article VI1 of the General Framework Agreement is
rather in the field of political reasoning, the reasoning which starts from
the need to engage politically the subjects outside Bosnia and Herze-

govina in the implementation of the Dayton Agreement, and less as
imposing concrete obligations regarding human rights as contained in
Chapter One of the Agreement on Human Rights.
ln other words, in this specificcase, the recognition as a general condi-
tion for the establishment of the bilateral contractualnexus is not suffi-
cient to enable me to consider the Genocide Convention applicable in the
relations between Yugoslavia and Bosnia and Herzegovina. It results
from the circumstances of the case that, for thatpurpose, a qualifactory
condition is also indispensable, and that condition would consist of the
absence of the notification of Yugoslavia addressed to the Secretary-
General of the United Nations on 15June 1993,which represents, by its
material meaning, a reservation made by Yugoslavia with the effect of
preventing the establishment of the mentioned nesus, and in the absence
of the fourth preliminary objection regarding the legality of the constitu-
mutual recog-
tion of Bosnia and Herzegovina as a State. Therefore, the
nition given in the form of Article 7 of the General Framework Agree-
ment may be qualified as the recognition of the creation of Bosnia and
Herzegovina in the factual sense of the word, but with a reservation
regarding the legality of its constitution. With respect to the fulfilment of
this qualificative condition in the relations between Yugoslavia and
Bosnia and Herzegovina, the provision given infine of Article X of
the Agreement is relevant, and reads "[flurther aspects of their mutual
recognition will be subject to subsequent discussions".Herzégovine, la Fédération de Bosnie-Herzégovine et la Republika
Srpska. Le seul rapport qu'il ya entre cette annexe 6 et la Yougoslavie est
que celle-ci,comme la République de Croatie et la République deBosnie-

Herzégovine,s'est engagée aux termesde l'article VI1de l'accord-cadre
général, à
«appliqu[er] entièrement les dispositions relatives aux droits de
I'homme énoncées au titre premier de l'annexe 6, ainsi que les dis-
positions relatives aux réfugiéet aux personnes déplacées énoncées

au titre premier de l'annexe7)).
Le titre premier de I'accord relatif aux droits de I'homme énumèredes
libertéset des droits personnels et politiques essentiellement classiques
que les «parties [la République deBosnie-Herzégovine,la Fédération de
Bosnie-Herzégovineet la Republika Srpska]garantissent àtoutes les per-
sonnes placéessous leur juridiction)) (article premier de I'accord). L'ar-

ticleVI1de l'accord-cadre estla confirmation contractuelle, formuléeen
termes généraux,de l'obligation de respecter les droits fondamentaux
énumérés à I'article premierde I'accordrelatif aux droits de I'homme,que
les partiesàcet accord-cadre sont tenues de respecter parce qu'elles sont
parties aux instruments qui consacrent ces droits, et parce qu'il s'agit
dans certains cas de principes impératifs qui s'imposent d'eux-mêmes.
Ainsi donc, l'objet de I'articleI1de l'accord-cadre relèvede la logique
politique, dont la prémisse estla nécessitéde faire participer des sujets
qui ne se trouvent pas en Bosnie-Herzégovine a l'exécutiondes accords
de Dayton, plutôt qu'il ne vise à imposer des obligations concrètes à
l'égard desdroits énuméréa su titre premier de I'accord relatif aux droits
de l'homme.

Je dirai en d'autres termes que la reconnaissance, condition préalable
générale à la création dunexus contractuel bilatéral, n'est pas suffisante
dans ce cas précispour me faire admettre que la convention sur le géno-
cide s'applique aux relations entre la Yougoslavie et la Bosnie-Herzégo-
vine. Les circonstances de l'affaire m'amènent à conclure qu'il faudrait
aussi pour cela que soit satisfaite une condition qualificative, celle de
l'inexistencede la notification adresséepar la Yougoslavie au Secrétaire
généralde l'organisation des Nations Unies le 15 juin 1993. Par son
contenu, cette notification est en effet une réserveque fait la Yougoslavie
pour empêcherque ne s'établisse lenexus dont je parlais, et ce en
l'absencede la quatrièmeexception préliminaire relative à la légalitde la
création de la Bosnie-Herzégovineen tant quYEtat. La reconnaissance
mutuelle formaliséepar I'articleVI1de l'accord-cadre peutdoncêtrequa-
lifiéede reconnaissance de la créationde la Bosnie-Herzégovineau sens

factuel du terme, assortie cependant d'une réservequant a la légalitde
cette création.Pour ce qui est de la réalisationde la condition qualifica-
tive des relations entre la Yougoslavie et la Bosnie-Herzégovine, la dis-
position qui figureinjne àl'articleX de I'accord estici pertinente: «Les
autres aspects de leur reconnaissance réciproque feront l'objet de nou-
veaux pourparlers. ))794 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (DISSO . P.KRE~A)

120. The position of the Court regarding its jurisdiction ratione tem-
poris can be summarized by the following part of paragraph 34 of the
Judgrnent, in which it finds:

"that the Genocide Convention - and in particular ArticleIX - does
not contain any clause the object or effect of which is to limit in such
manner the scopeof itsjurisdiction ratione temporis,and nor did the
Parties themselvesmake any reservationto that end, either to the Con-
vention or on the occasion of the signatureof the Dayton-Paris Agree-
ment. The Court thus finds that it has jurisdiction in this case to give
effect to the Genocide Convention with regard to the relevant facts."

Concerning the jurisdiction of the Court ratione temporis, the situation
is, in my opinion, clear - according to the rule of general international
law, expressed in paragraph 3 of Article 24 (Entry into Force) of the
Convention on the Law of Treaties:

"When the consent of a State to be bound by a treaty is estab-
lished on a date after the treaty has come into force, the treaty enters
into force for that State on that date, unlessthe treaty otherwise pro-
vides."
Article IX of the Genocide Convention is a procedural provision of the
Convention and, being an integral part of it, shares the Convention's des-
tiny or, to put it more precisely,the destiny of its contractual provisions.
Consequently, if the Convention does not have a retroactive effect - and

it obviously does not - then its Article 1X likewise has no such effect.
So, as the general rule of non-retroactivity stipulates, the Convention is
applied to the events and situations which took place after it had come
into effect in relation to Bosnia and Herzegovina or, in the circumstances
of the present case, when the Convention became applicable between
Bosnia and Herzegovina and Yugoslavia.
The analogy which the Court has drawn between this case and Mav-
rommatis Palestine Concessions (para. 26 of the Judgment) does not
seem convincing. One can rather speak of an analogy between this case
and the Anzbatieloscase to the effect that:

"To accept this theory would mean giving retroactive effect to
Article 29 of the Treaty of 1926, whereas Article 32 of this Treaty
Statestlluttlie Treaty,ivhiclimusttneanal1tlzeprovisions ofthe Treaty,
shall come into force immediately upon ratification. Such a conclu-
sion might have been rebutted if there had been any special clause or
any special object necessitating retroactive interpretation. Tlzere is
no suchclauseor object in thepresent case. It is thereforeitnpossible
to kold thar any of ifs provisions must be rleemed to have been in
force earlier."21'

2" Ambatielos. Prelit~tin~bjections,Jiidgtne1.C.J. Reports 1952, p.40 (emphasis
added). APPLICATION DE CONVENTION GENOCIDE (OP.DISSK . RE~A) 794

120. La position de la Cour quant à sa compétencerutione temporis se
trouve résuméedans le passage suivant du paragraphe 34 de l'arrêt:

«la convention sur le génocide- et en particulier son article -X ne
comporte aucune clause qui aurait pour objet ou pour conséquencede
limiter de la sorte l'étendue desa compétenceationetemporis,et ...les
Partieselles-mêmen s'ont formuléaucuneréserve à ceteffet,nià la con-
vention, nià l'occasion de la signature des accords de Dayton-Paris.
La Cour constate ainsi qu'ellea compétenceen I'espécepour assurer
l'application dela convention sur le génocideaux faits pertinents.

Pour ce qui est de la compétencerulione lernporisde la Cour, la situa-
tion estiImes yeux fort claire, au regard de la règlededroit international
généralconsacrée au paragraphe 3 de l'article 24 (((Entréeen vigueur)))
de la convention sur le droit des traités:
((Lorsque le consentement d'un Etat à êtreliépar un traitéest éta-

blià une date postérieure à l'entrée en vigueurdudit traité,celui-ci,
à moins q'il n'en dispose autrement, entre en vigueurà l'égardde cet
Etat à cette date.))
L'article IX de la convention sur legénocide est unedisposition de pro-
cédureet, faisant partie intégrante de la convention, partage le sort de
celle-ci ou, pour êtreplus précis,le sort de ses dispositions contractuelles.

Par conséquent, si la convention n'a pas d'effet rétroactif- elle n'en a
pas, cela va sans dire-, l'article IX n'a pas non plus d'effet retroactif.
Ainsi, en vertu du principe généralde non-rétroactivité,la convention ne
s'applique qu'aux événementset aux situations qui se sont produits après
qu'elle estentréeen vigueur à l'égardde la Bosnie-Herzégovineou, dans
les circonstances de la présenteaffaire, après qu'elle est devenue appli-
cablc entre laBosnie-Herzogovine et la Yougoslavie.
L'analogie que la Cour a établieentre la présente affaire et celle des
Concessions Mavrornrnatis etz Palestine (arrêt, par. 26) ne me semble
pas convaincante. S'ily a une analogie, c'est plutôt avec l'affairemha-
tielos:

((Accepter cette théorie serait conférer un effet rétroactifà I'ar-
ticle 29 du traitéde 1926,alors que l'article 32 du mêmetraitéénonce
que le traité,ce qui doit signifiertoutes les dispositionsdu traité,en-
trera en vigueur des sa ratification. Cette conclusion aurait pu être
contredite s'il avait existé une clause ou une raison particulières
appelant une interprétation rétroactive. Il n'existe pas dans le cas
présentde telle clauseni de telle raison.II est donc impossibled'ud-
mettre que l'une quelconquede ses dispositions doive êtreconsidérée
comme ayant étéen vigueur à unedate antérieure. )>2"

"' Ambarielos.exceptionspréliminaires.arrêt,C.I.J. Recueil 1952.p. 40 (les italiques
sont de moi).

203795 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (DISSO. P.KRECA)

For, as it is clearly stated in the commentary on Article 24 of the Con-
vention on the Law of Treaties:

"ivl~eajurisdictio~~acllause is uttaclied to thesubstantive clausesof
a treaty as a means of securing their due application, the non-retro-
activityprinciple may operate to linlit ratione temporis the applica-
tion of thejurisclictionulclciuse.Thus in numerous cases under the

European Convention for the Protection of Human Rights and Fun-
damental Freedoms, the European Commission of Human Rights
had held that it is incompetent to entertain complaints regarding
alleged violations ofuman rights said to have occurred prior to the
entry into force of the Convention with respect to the State inues-
ti~n."~'~

On the basis of the foregoing, 1 take the liberty of concluding that, in
my opinion, the relevant conditions for the entertainment of the case by
the Court, relating both to jurisdiction and to admissibility, have not
been met.

(Signed) Milenko KRECA.

212Draft Articlon the Lawof Treaties with commentaasd,optedbyth[CL at its
EighteenthSession,UNCLT,First andSecond Session, ienna, 26 March-4 ay 1968
and 9April-22May 1969,Oficia Records, p. 32,para.2. Car, comme il est dit sans ambiguïtk dans le commentaire relatif a
l'article 24 de la convention sur le droit des traités:

«lorsqu'uneclausejuridictionnelle se rrouveinclusedans les clauses
defond d'untruité,dont ellea pour objet de garantir l'exécution,IP
princip deelunon-rktrouctiïirépeut avoirpour effgt& [t'miierratione

temporis l'application deIn clausejuridicrionnelle. Ainsi, dans de
nombreuses affaires relevant de la convention européenne de sauve-
garde des droits de l'homme et des libertésfondamentales, la Com-
mission europkenne des droits de l'homme s'est déclaréeincompé-
tente pourconnaitre des requêtes concernant deprétendues violations
des droits de l'homme qui auraient éti:commises avant que la

convention n'entre en vigueur à l'égardde 1'Etatmis en cause.»212

En considérationde ce qui précédej,e me permets de conclure que ni
lesconditions de compétenceni lesconditions de recevabilitéqui auraient
di3êtrerempliespour que la Cour puisseconnaître de I'affairen'ont été à

mon avis satisfaites.

>12Projetd'articlessurle ddestraitb, aveccornmeniair,doptéparla Commis-
sion du droit internationalAsa dix-husessionNations Unies,Docunientsofjciels
de luconfërencrsur le droit des traités,prem~èreet deuxzèmeVienne,25 mars-
24 mai1968 et9 avril-22mai 196p.35, par. 2.

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Opinion dissidente de M. Kreca, juge ad hoc (traduction)

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