Opinion dissidente de M. Petrén

Document Number
056-19740725-JUD-01-09-EN
Parent Document Number
056-19740725-JUD-01-00-EN
Document File
Bilingual Document File

OPINION DISSIDENTE DE M. PETRÉN

A mon regret, il m'a fallu voter contre l'arrêtdans son ensemble et je
dois yjoindre une opinion dissidente.
En la présenteaffaire comme en l'affaire parallèlede laCompétenceen

matière depêcheries(Royaume-Uni c. Islande), la question essentielle
posée à la Cour est de savoir si l'élargissementpar l'Islandà,partir du
1" septembre 1972, de sa zone de compétence exclusive en matière de
pêcheriesde 12 à 50millesest fondéen droit international. Le parallélisme
entre les deux affaires s'étend aussi la source de la compétence de la
Cour, qui est exclusivement à rechercher, en l'un et l'autre cas, dans
l'accord conclu entre les Parties en 1961; or les passages des notes
échangéesen 1961 qui concernent la compétence sont identiques d'une
affaireà l'autre. A défautd'une jonction des deux affaires, qui m'aurait
paru souhaitable, qu'il me soit au moins permis de me référer largement
à mon opinion dissidente en l'affaire Royaume-Uni c. Islande. Comme
dans cette autre affaire et pour les mêmesraisons, je trouve:) que, en
ne se prononçant pas sur la conformité de l'élargissementde la zone
islandaise de pêche avecle droit international, la Cour omet de remplir la
tâche qui lui incombe; 6) que, en consacrant l'arrêtà des questions de
droits préférentielset historiques ainsi qu'à des questions de mesures de
conservation, la Cour dépasse la compétence strictement limitée que

l'accord de 1961lui confère.
Pour les raisons indiquées dans mon opinion dissidente en l'autre
affaire, j'estime que c'est contrairement au droit international en vigueur
que l'Islande a élargisa zone de pêche.Or il ressort clairement des motifs
du présent arrêtque la première partie de son dispositif, en déclarant
inopposable à la Républiquefédérale d'Allemagne l'extension unilatérale
des droits de pêche exclusifsde l'Islande, se fonde uniquement sur des
considérations visant les droits historiques de la République fédérale,
et que la Cour évitedélibérément de prendre position surla question de
la conformité del'extension de la zonede pêche avecledroit international.
Dans ces conditions, il ne m'a évidemmentpas été possiblede voter pour
cette partie du dispositif.
*
* *

Dans la partie suivante du dispositif (al3 et 4), la Cour impose aux
Parties, sans le consentement de l'Islande, l'obligation de négocierentre
elles une solution (devant inclure un régimede mesures de conservation)
de leurs divergences de vues concernant leurs droits de pèche respectifs

69241 COMPÉTENCEPÊCHERIES (OP. DISS. PETRÉN)

au-delà de 12 milles. Etant d'avis que la Cour dépasse les limites de sa

compétence en orientant I'arrêt vers l'établissemend t 'un régimede droits
préférentielset historiques ainsi que de mesures de conservation, je vois,
à plus forte raison, un excèsde pouvoir dans la création d'un devoir de
négocier, avec obligation de conclure, pour l'établissement d'un tel
régime.
Au paragraphe 70 la Cour constate que les mesures conservatoires

qu'elle a indiquées en la présente affaire le 17 août 1972 cessent d'avoir
effet àcompter de la date de I'arrêt,ce qui est une conséquence inéluctable
des dispositions de l'article 41 du Statut. Après quoi la Cour déclareque
les négociations prescrites par l'arrêt impliquent, eu égard aux circons-
tances de l'espèce, que les Parties ont l'obligation de tenir raisonnable-
ment compte de leurs droits réciproques et des nécessitésde la conserva-

tion jusqu'à la conclusion des négociations. Que chaque Etat ait I'obliga-
tion de respecter les droits des autres Etats, cela est une évidence qui n'est
pas de nature àfaire l'objet d'une constatation dans un arrêt,àmoins qu'il
ne s'agisse précisément de créeo ru de définirde nouveaux droits. Sila Cour
avait l'intention d'imposer aux Parties, en remplacement des mesures

conservatoires expirées, l'obligation d'observer pendant les négociations
certaines restrictions dans leur activité de pêche, elledevrait le préciser
dans le dispositif de I'arrêtet ne pas se borner à une phrase vague dans les
motifs. Mais la vraie signification de ce passage est, à mes yeux, tout
autre. II faut y voir un symptôme de ce que, dans le système de I'arrêt, la
Cour est à considérer comme possédant, jusqu'à un règlement définitif

du présent différend, unejuridiction continue sur toutes les relations des
Parties en matière de pêcheriesdans la zone comprise entre 12 et 50
milles. A mon avis, une telle juridiction ne saurait trouver de fondement
dans l'accord de 1961.
Sur la mêmepartie du dispositif de I'arrêt,je me permets de formuler
une observation faisant suite acelles que j'ai énoncéesdans mon opinion

en l'autre affaire. La Cour impose aux Parties l'obligation de fonder leurs
négociations sur une sériede considérations, ou l'on cherche en vain une
réponse à la question primordiale de savoir si les eaux situéesentre 12et
50 milles sont à considérer comme faisant partie de la zone de pêchede
l'Islande. Il ne faut guère d'imagination pour se rendre compte qu'une

divergence de vues persistante sur ce point pourrait bloquer les négocia-
tions dès le début. Selon que l'on répond à la question positivement ou
négativement, la République fédérale nesaurait prétendre à la même
survie de ses droits historiques, comme l'admet d'ailleurs I'arrêten son
paragraphe 61. Ainsi la situation procédurale crééepar le présent arrêt
est elle embarrassante. La requête a demandéquelle est la nature juridique

des eaux de pêchecontestées, la Cour évitede répondre -comme l'aurait
voulu sa fonction judiciaire - et les Parties se voient enjoindre d'engager
des négociations pour la conduite desquelles une réponse aurait été
nécessaire. II me parait douteux que des négociations imposéesdans de
telles conditions aboutissent.242 COMPÉTENCE PÊCHERIES (OP. DISS. PETRÉN)

Telles sont les raisons pour lesquelles je me suis vu obligé de voter
contre la deuxième partie du dispositif.

Reste la troisième et dernière partie du dispositif(a1.5),concernant la
quatrième conclusion finale par laquelle la Cour est priéede dire et juger
que les actes des garde-côtes islandais visant à gêner,par la menace ou
l'emploi de la force, les navires de pêcheimmatriculésdans la République
fédérale d'Allemagneou à entraver leurs opérations sont contraires au
droit international et que l'Islande doit à ce titre réparation à la Répu-

blique fédérale.

Cette demande, apparue dans le mémoire de la République fédérale
sur le fond, ne figurait pas dans la requête introductive d'instance
enregistrée au Greffe le 5juin 1972. Dans son arrêtdu 2 février 1973, la
Cour a déclaréqu'elle avait compétence pour connaître de la requête et

statuer sur le fond du différend. Cet arrêtétait uniquement fondé sur le
paragraphe 5 de l'échangede notes de 1961ainsi conçu:
ccLe Gouvernement islandais continuera de s'employer à mettre

en Œuvre la résolution de 1'Althing en date du 5 mai 1959 relative
à l'élargissement de la juridiction sur les pêcheries autour de
l'Islande ... mais aura l'obligation de notifier six mois à l'avance au
Gouvernement de la République fédéraled'Allemagne toute mesure
en ce sens; au cas où surgirait un différend enla matière, la question
sera portée, à la demande de l'une ou de l'autre partie, devant la

Cour internationale de Justice.))
Il s'agit donc de savoir si l'expression ((un différend en la matière))

signifie que peuvent êtresoumises à la Cour non seulement la question de
la conformité d'un futur élargissement de la juridiction de l'Islande sur
les pêcheriesavec le droit international, mais aussi desquestions addition-
nelles telles que la présente demande en réparation. Si tel était le cas, il
faudrait encore que la constatation de la compétence de la Cour pour
connaître de la requêteet statuer sur le fond du différendimplique que
la Cour puisse aussi statuer sur une demande additionnelle visant des

incidents postérieurs à l'enregistrement de la requête. Laquestion est
d'autant plus délicate enl'espèceque la Partie défenderesse a choiside ne
pas se présenter devant la Cour et qu'il y a lieu d'appliquer l'article 53 du
Statut.

L'acceptation, par l'Islande, de la juridiction de la Cour avait un

caractère exceptionnel. II est évidentque, dans l'intention du Gouverne-
ment islandais, elle était strictement limitéeà la question de la conformité
de la prochaine mesure d'élargissement de la zone islandaise de pêche
avec le droit international. Vu l'atmosphère dans laquelle l'accord de1961a éténégocié,on doit supposer que le Gouvernement de la Répu-
blique fédéraleétaitconscient de cette manière de voir du Gouvernement
islandais. C'està un moment où les souvenirs laissés par la première
((guerredela morue ))étaient encoreprésentsdans lesesprits que 1'Althing
a approuvé les deux accords de 1961 avec le Royaume-Uni et la Répu-
bliquefédérale. L'eût-ilfait s'ilavait pensé accepteren mêmetemps devoir
déférer àla Cour tout différend pécuniaire néd'un futur élargissementde
la zone islandaise de pêche? Voilàpourquoi je considèreque la demande
en réparation formulée par la République fédérale ne relèvepas de la

clause juridictionnelle de l'accord de 1961.Cela me dispense d'examiner
les conséquencesdu fait que cette demande ne figurait ni dans la requête
introductive d'instance ni dans l'arrêt sur lacompétence.

La Cour se déclare compétente pour connaître de la demande en
réparation mais trouve qu'elle ne saurait ((donner suite»,motif pris du
manque de preuves suffisantes. A mes yeux, la Cour ne devrait pas rejeter
ainsi la demande, car elle n'apas offertla République fédérale l'occasion
de compléter sadocumentation au cours de la procédure orale confor-
mément à l'article 54 du Règlement de 1946.La procédure orale permet
notamment àla Cour d'amener par sesquestions lesplaideurs àcompléter
les lacunes de la présentation de leurs thèses,ou mêmà retirer une partie
de leurs demandes.
La phrase finale du paragraphe 76 de l'arrêtsemble impliquer que, si
la République fédérale renouvelaitsa demande en réparation, la Cour

serait prêteàl'examiner. Laissant de côtétoute considération de droit de
procédure,je me bornerai àconstater que mon interprétation de l'accord
de 1961 nepermet pas de lui accorder un effetaussi prolongé.
Il ressort de ce que je viens de dire qu'il m'a fallu voter contre la
dernière partie du dispositif.

(Signé)S. PETRÉN.

Bilingual Content

OPINION DISSIDENTE DE M. PETRÉN

A mon regret, il m'a fallu voter contre l'arrêtdans son ensemble et je
dois yjoindre une opinion dissidente.
En la présenteaffaire comme en l'affaire parallèlede laCompétenceen

matière depêcheries(Royaume-Uni c. Islande), la question essentielle
posée à la Cour est de savoir si l'élargissementpar l'Islandà,partir du
1" septembre 1972, de sa zone de compétence exclusive en matière de
pêcheriesde 12 à 50millesest fondéen droit international. Le parallélisme
entre les deux affaires s'étend aussi la source de la compétence de la
Cour, qui est exclusivement à rechercher, en l'un et l'autre cas, dans
l'accord conclu entre les Parties en 1961; or les passages des notes
échangéesen 1961 qui concernent la compétence sont identiques d'une
affaireà l'autre. A défautd'une jonction des deux affaires, qui m'aurait
paru souhaitable, qu'il me soit au moins permis de me référer largement
à mon opinion dissidente en l'affaire Royaume-Uni c. Islande. Comme
dans cette autre affaire et pour les mêmesraisons, je trouve:) que, en
ne se prononçant pas sur la conformité de l'élargissementde la zone
islandaise de pêche avecle droit international, la Cour omet de remplir la
tâche qui lui incombe; 6) que, en consacrant l'arrêtà des questions de
droits préférentielset historiques ainsi qu'à des questions de mesures de
conservation, la Cour dépasse la compétence strictement limitée que

l'accord de 1961lui confère.
Pour les raisons indiquées dans mon opinion dissidente en l'autre
affaire, j'estime que c'est contrairement au droit international en vigueur
que l'Islande a élargisa zone de pêche.Or il ressort clairement des motifs
du présent arrêtque la première partie de son dispositif, en déclarant
inopposable à la Républiquefédérale d'Allemagne l'extension unilatérale
des droits de pêche exclusifsde l'Islande, se fonde uniquement sur des
considérations visant les droits historiques de la République fédérale,
et que la Cour évitedélibérément de prendre position surla question de
la conformité del'extension de la zonede pêche avecledroit international.
Dans ces conditions, il ne m'a évidemmentpas été possiblede voter pour
cette partie du dispositif.
*
* *

Dans la partie suivante du dispositif (al3 et 4), la Cour impose aux
Parties, sans le consentement de l'Islande, l'obligation de négocierentre
elles une solution (devant inclure un régimede mesures de conservation)
de leurs divergences de vues concernant leurs droits de pèche respectifs

69 DISSENTING OPINION OF JUDGE PETRÉN

[Translationj

To my regret, 1have found it necessary to vote against the Judgment
as a whole, and 1therefore append this dissenting opinion.
In the present calse, as in the parallel case concerning Fisheries Juris-
diction (L'nited Ki~~gdomv. Iccland), the essential question before the
Court is whether the extension by Iceland, as from 1September 1972,of
its zone of exclusiv~efisheries jurisdiction from the 12-mile to the 50-mile
limit is well founded in international law. The parallelism between the

two cases also extends to the source of the Court's jurisdiction, which in
either case can only be sought in the agreement concluded between the
Parties in 1961; what is more, the passages concerning jurisdiction in the
Notes exchanged in 1961 are identical in either case. Though the cases
were not joined, a.s 1 would have thought desirable, 1 may surely be
permitted a broad reference to my dissenting opinion in the proceedings
instituted against Iiieland by the United Kingdom. As in that other case,

and for the same r.easons, I find: (a) that, in not ruling upon the con-
formity or otherwise of the extension of Iceland's fishery zone with inter-
national law, the Court has failed to fulfil the task incumbent upon it;
(b) that, in devotingthe Judgment to questions of preferential and historic
rights and to questions of measures of conservation, the Court has
exceeded the strictly limited jurisdiction conferred upon it by the 1961
agreement.

For the reasons indicated in my dissenting opinion in the other case,
1consider that when Iceland extended its fishery zone it did so contrary
to the prevailing international law. Yet it is clear from the reasoning of
the present Judgment that the first part of its operative clause, in finding
tliat the unilateral extension of Iceland's exclusive fishery rights is not
opposable to the Federal Republic of Germany, is based entirely on
considerations concerning the historic rights of the Federal Republic,

and that the Court has deliberately avoided the adoption of any position
on the question of the conformity of the extension of the fishery zone
with international law. That being so, 1was obviously unable to vote for
that part of the opiirative clause.
*

* *

In the following part of the operative clause, subparagraphs 3 and 4,
the Court, without the consent of Iceland, imposes upon the Parties the
obligation to negotiate between themselves for the solution (which must
include a conservation régime) of their differences concerning their

69241 COMPÉTENCEPÊCHERIES (OP. DISS. PETRÉN)

au-delà de 12 milles. Etant d'avis que la Cour dépasse les limites de sa

compétence en orientant I'arrêt vers l'établissemend t 'un régimede droits
préférentielset historiques ainsi que de mesures de conservation, je vois,
à plus forte raison, un excèsde pouvoir dans la création d'un devoir de
négocier, avec obligation de conclure, pour l'établissement d'un tel
régime.
Au paragraphe 70 la Cour constate que les mesures conservatoires

qu'elle a indiquées en la présente affaire le 17 août 1972 cessent d'avoir
effet àcompter de la date de I'arrêt,ce qui est une conséquence inéluctable
des dispositions de l'article 41 du Statut. Après quoi la Cour déclareque
les négociations prescrites par l'arrêt impliquent, eu égard aux circons-
tances de l'espèce, que les Parties ont l'obligation de tenir raisonnable-
ment compte de leurs droits réciproques et des nécessitésde la conserva-

tion jusqu'à la conclusion des négociations. Que chaque Etat ait I'obliga-
tion de respecter les droits des autres Etats, cela est une évidence qui n'est
pas de nature àfaire l'objet d'une constatation dans un arrêt,àmoins qu'il
ne s'agisse précisément de créeo ru de définirde nouveaux droits. Sila Cour
avait l'intention d'imposer aux Parties, en remplacement des mesures

conservatoires expirées, l'obligation d'observer pendant les négociations
certaines restrictions dans leur activité de pêche, elledevrait le préciser
dans le dispositif de I'arrêtet ne pas se borner à une phrase vague dans les
motifs. Mais la vraie signification de ce passage est, à mes yeux, tout
autre. II faut y voir un symptôme de ce que, dans le système de I'arrêt, la
Cour est à considérer comme possédant, jusqu'à un règlement définitif

du présent différend, unejuridiction continue sur toutes les relations des
Parties en matière de pêcheriesdans la zone comprise entre 12 et 50
milles. A mon avis, une telle juridiction ne saurait trouver de fondement
dans l'accord de 1961.
Sur la mêmepartie du dispositif de I'arrêt,je me permets de formuler
une observation faisant suite acelles que j'ai énoncéesdans mon opinion

en l'autre affaire. La Cour impose aux Parties l'obligation de fonder leurs
négociations sur une sériede considérations, ou l'on cherche en vain une
réponse à la question primordiale de savoir si les eaux situéesentre 12et
50 milles sont à considérer comme faisant partie de la zone de pêchede
l'Islande. Il ne faut guère d'imagination pour se rendre compte qu'une

divergence de vues persistante sur ce point pourrait bloquer les négocia-
tions dès le début. Selon que l'on répond à la question positivement ou
négativement, la République fédérale nesaurait prétendre à la même
survie de ses droits historiques, comme l'admet d'ailleurs I'arrêten son
paragraphe 61. Ainsi la situation procédurale crééepar le présent arrêt
est elle embarrassante. La requête a demandéquelle est la nature juridique

des eaux de pêchecontestées, la Cour évitede répondre -comme l'aurait
voulu sa fonction judiciaire - et les Parties se voient enjoindre d'engager
des négociations pour la conduite desquelles une réponse aurait été
nécessaire. II me parait douteux que des négociations imposéesdans de
telles conditions aboutissent.respective fishery rights beyond the 12-mile limit. As in my opinion the
Court has exceedecl its jurisdiction in hinging its Judgment on the estab-
lishment of a régimeof preferential and historic rights and conservation
measures, the creation of a duty to negotiate for the establishment of
such a régime,coupled with an obligation to succeed, is afortiori, in my

view. ultra vires.
~he Court observes in paragraph 70 that the interim measures which it
indicated in the present case on 17August 1972cease to have effect asfrom
the date of theJudgment, as an inevitable consequence of the provisions of
Article 41 of the Statute. The Court then declares that the negotiations
ordered in the Judgrnent involve in the circumstances of the case an

obligation upon the:Parties to pay reasonable regard to each other's rights
and to conservation requirements pending the conclusion of the negotia-
tions. Now it is self-evident that States have the obligation to respect the
rights of other States, and there would be no point in stating as much in a
judgment unless the creation or definition of new rights was in contempla-
tion. If it was the (lourt's intention to impose on the Parties, by way of

replacement for the:expired interim measures, the obligation of observing
certainrestraints in their fishingactivities during the negotiations, it should
have made this clear in the operative clause of theJudgment and not have
confined itself to a vague sentence in the reasoning. But what this passage,
to my mind, really !signifiesis something entirely different. It must be seen
as symptomatic of the fact that, by the logic of the Judgment, the Court

must be considered to possess, until the final settlement of the present
dispute, a continuirig jurisdiction over the whole of the relations between
the Parties so far as fisheries in the belt between the 12-mile and 50-mile
limits are concerned. In my view, no basis f~r such jurisdiction can be
found in the 1961 (agreement.
On the same part of the operative clause of the Judgment 1venture to

make one observation which follows on from those 1 have made in my
opinion in the other case. The Court imposes on the Parties the obliga-
tion to base their negotiations on a series of considerations within whose
enumeration, seek ;asone may, one can find no answer to the primordial
question as to whether the waters between the 12-mileand 50-mile limits
are to be considered as part of Iceland's fishery zone. Little imagination

is needed to realize:that any persistent disagreement on this point could
condemn the negotiations to deadlock from the start. The remaining
lifespan which the Federal Republic may claim for its historic rights
depends, as the Judgrnent moreover admits in paragraph 61,on whether
that question is answered affirmatively or negatively. Thus the procedural
situation created b:ythe present Judgment is embarrassing. The Applica-
tion asked what was the legal status of the fishing waters in dispute; the

Court, although it formed part of its judicial functions to answer this
question, avoided cloing so, and the Parties now find themselves enjoined
to undertake negc~tiations for which a reply on that point is a pre-
requisite. 1 find it doubtful that negotiations imposed in such condi-
tions would succeed.242 COMPÉTENCE PÊCHERIES (OP. DISS. PETRÉN)

Telles sont les raisons pour lesquelles je me suis vu obligé de voter
contre la deuxième partie du dispositif.

Reste la troisième et dernière partie du dispositif(a1.5),concernant la
quatrième conclusion finale par laquelle la Cour est priéede dire et juger
que les actes des garde-côtes islandais visant à gêner,par la menace ou
l'emploi de la force, les navires de pêcheimmatriculésdans la République
fédérale d'Allemagneou à entraver leurs opérations sont contraires au
droit international et que l'Islande doit à ce titre réparation à la Répu-

blique fédérale.

Cette demande, apparue dans le mémoire de la République fédérale
sur le fond, ne figurait pas dans la requête introductive d'instance
enregistrée au Greffe le 5juin 1972. Dans son arrêtdu 2 février 1973, la
Cour a déclaréqu'elle avait compétence pour connaître de la requête et

statuer sur le fond du différend. Cet arrêtétait uniquement fondé sur le
paragraphe 5 de l'échangede notes de 1961ainsi conçu:
ccLe Gouvernement islandais continuera de s'employer à mettre

en Œuvre la résolution de 1'Althing en date du 5 mai 1959 relative
à l'élargissement de la juridiction sur les pêcheries autour de
l'Islande ... mais aura l'obligation de notifier six mois à l'avance au
Gouvernement de la République fédéraled'Allemagne toute mesure
en ce sens; au cas où surgirait un différend enla matière, la question
sera portée, à la demande de l'une ou de l'autre partie, devant la

Cour internationale de Justice.))
Il s'agit donc de savoir si l'expression ((un différend en la matière))

signifie que peuvent êtresoumises à la Cour non seulement la question de
la conformité d'un futur élargissement de la juridiction de l'Islande sur
les pêcheriesavec le droit international, mais aussi desquestions addition-
nelles telles que la présente demande en réparation. Si tel était le cas, il
faudrait encore que la constatation de la compétence de la Cour pour
connaître de la requêteet statuer sur le fond du différendimplique que
la Cour puisse aussi statuer sur une demande additionnelle visant des

incidents postérieurs à l'enregistrement de la requête. Laquestion est
d'autant plus délicate enl'espèceque la Partie défenderesse a choiside ne
pas se présenter devant la Cour et qu'il y a lieu d'appliquer l'article 53 du
Statut.

L'acceptation, par l'Islande, de la juridiction de la Cour avait un

caractère exceptionnel. II est évidentque, dans l'intention du Gouverne-
ment islandais, elle était strictement limitéeà la question de la conformité
de la prochaine mesure d'élargissement de la zone islandaise de pêche
avec le droit international. Vu l'atmosphère dans laquelle l'accord de Such are the reasons why 1 found myself obliged to vote against the
second part of the operative clause.

There remains the third and last part of the opetative clause, sub-
paragraph 5, concerning the fourth final submission requesting the
Court to adjudge and declare that the acts of interference by Icelandic
coastal patrol boats with fishing vesselsregistered in the Federal Republic
of Germany or with their fishing operations by the threat or use of force
are unlawful unde:r international law, and that Iceland is under an
obligation to make compensation therefor to the Federal Republic of
Germany.
This claim, which appeared in the Federal Republic's Memorial on the
merits, was not inciludedin the Application instituting proceedings filed

in the Registry on !jJune 1972.In its Judgment of 2 February 1973,the
Court found that it had jurisdiction to entertain the Application and to
deal with the meritsiof the case. That Judgment was based entirely upon
paragraph 5 of the Exchange of Notes of 1961,which reads as follows:
"The Government of the Republic of Iceland shall continue to
work for the implementation of the Althing Resolution of 5 May
1959, regarding the extension of the fishery jurisdiction of Iceland.
However, it shall give the Government of the Federal Republic of

Germany six ~nonths' notice of any such extension; in case of a
dispute relating to such an extension, the matter shall, at the request
of either Party, be referred to the International Court of Justice."

The point at issue is therefore whether the phrase "a dispute relating to
such an extension" signifies that it is not only the question whether a
future extension of Iceland's fishery jurisdiction is in conformity with
international law that may be referred to the Court, but also such

supplementary questions as the present compensation claim. Even in the
affirmative, it woul!d still be necessary that the Court's finding that it
possessed jurisdiction to entertain the Application and deal with the
merits of the dispute should further imply that the Court may adjudicate
upon an additional claim concerning incidents subsequent to the filing
of the Application. This question is al1the more delicate in the present
case because the respondent Party has chosen not to be represented before
the Court and the situation calls for the application of Article 53 of the
Statute.
Iceland's acceptance of the Court's jurisdiction was exceptional in
character. It is plain that the Government of Iceland meant it to be
strictly limited toh,equestion of whether the next step in the extension of
Iceland's fishery zone would be in conformity with international law.
Considering the atnîosphere in which the 1961agreement was negotiated,1961a éténégocié,on doit supposer que le Gouvernement de la Répu-
blique fédéraleétaitconscient de cette manière de voir du Gouvernement
islandais. C'està un moment où les souvenirs laissés par la première
((guerredela morue ))étaient encoreprésentsdans lesesprits que 1'Althing
a approuvé les deux accords de 1961 avec le Royaume-Uni et la Répu-
bliquefédérale. L'eût-ilfait s'ilavait pensé accepteren mêmetemps devoir
déférer àla Cour tout différend pécuniaire néd'un futur élargissementde
la zone islandaise de pêche? Voilàpourquoi je considèreque la demande
en réparation formulée par la République fédérale ne relèvepas de la

clause juridictionnelle de l'accord de 1961.Cela me dispense d'examiner
les conséquencesdu fait que cette demande ne figurait ni dans la requête
introductive d'instance ni dans l'arrêt sur lacompétence.

La Cour se déclare compétente pour connaître de la demande en
réparation mais trouve qu'elle ne saurait ((donner suite»,motif pris du
manque de preuves suffisantes. A mes yeux, la Cour ne devrait pas rejeter
ainsi la demande, car elle n'apas offertla République fédérale l'occasion
de compléter sadocumentation au cours de la procédure orale confor-
mément à l'article 54 du Règlement de 1946.La procédure orale permet
notamment àla Cour d'amener par sesquestions lesplaideurs àcompléter
les lacunes de la présentation de leurs thèses,ou mêmà retirer une partie
de leurs demandes.
La phrase finale du paragraphe 76 de l'arrêtsemble impliquer que, si
la République fédérale renouvelaitsa demande en réparation, la Cour

serait prêteàl'examiner. Laissant de côtétoute considération de droit de
procédure,je me bornerai àconstater que mon interprétation de l'accord
de 1961 nepermet pas de lui accorder un effetaussi prolongé.
Il ressort de ce que je viens de dire qu'il m'a fallu voter contre la
dernière partie du dispositif.

(Signé)S. PETRÉN.it may be supposedl that the Government of the Federal Republic was
conscious of the Icelandic Government's attitude in this respect. It was
at a moment when memories of the first "cod war" were still fresh that
the Althing approved the two 1961agreementswith the United Kingdom
and the Federal Republic respectively. Would it have done so if it had
believed that it was ,atthe same time accepting that any pecuniary dispute
arising out of a future extension of the Iceland fishery zone should be
referred to the Court? 1think not, and therefore consider that the Federal
Republic's compenisation claim does not fa11within the scope of the
jurisdictional clause of the 1961agreement. That being so, it is scarcely
necessary for me to consider the consequences of the fact that this claim

was mentioned neit.her in the Application instituting proceedings nor in
the Judgment on juirisdiction.
The Court finds that it has jurisdiction to deal with the compensation
claim, but finds that it is unable to "accede" to it for want of sufficient
evidence. In my vie:w,the Court ought not to have dismissed the sub-
mission in this way, for it did not afford the Federal Republic the oppor-
tunity to complete its documentation in thecourse of the oral proceedings,
in conformity with Article 54 of the 1946Rules of Court. The oral pro-
ceedings enable the Court, inter alia,to lead litigants by its (pestions to
fil1in the gaps in the presentation of their arguments, or even to withdraw
part of their claims.
The last sentence of paragraph 76 of the Judgment seems to imply that
if the Federal Republic revived its compensation claim the Court would
be ready to consider it. Leaving aside al1 considerations of procedural
law, 1will confine myself to stating that, according to my interpretation
of the 1961agreement, it cannot be accorded so prolonged an effect.
Itfollows from the foregoing that 1found It necessary to vote against
the last part of the operative clause.

(Signed) S. PETRÉN.

Document file FR
Document Long Title

Opinion dissidente de M. Petrén

Links