Traduction

Document Number
153-20150507-ORA-01-01-BI
Parent Document Number
153-20150507-ORA-01-00-BI
Bilingual Document File
Bilingual Content

Traduction

Translation

CR 2015/20

Jeudi 7 mai 2015 à 16 h 30

Thursday 7 May 2015 at 4.30 p.m. - 2 -

10 The PRESIDENT: Please be seated. The sitting is open. The Court meets today to hear

Chile’s second round of oral argument. I now give the floor to Mr. Bethlehem.

Sir Daniel BETHLEHEM :

1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, le Chili s’est efforcé de trouver

un fil directeur cohérent dans les arguments développés hier par la Bolivie. C’est en effet un

véritable abîme qui sépare ses exposés du début de l’audience de ceux qu’elle a présentés à la fin.

L’éminent agent de la Bolivie a ainsi, pour la première fois, fait usage de l’expression pactum de

contrahendo dans le cadre de la présente affaire. Ensuite, nous avons appris qu’il ne s’agissait en

2
fait que d’un «simple» pactum de contrahendo , le conseil tentant de minimiser l’importance de la

chose. Nous avons aussi pris connaissance hier d’une nouvelle théorie concernant l’affaire, théorie

reposant sur une obligation de négocier parallèle, qui coexiste avec le traité de 1904 sans jamais le

rencontrer, et sans que cet instrument ne soit jamais évoqué. Comme s’il s’agissait d’univers

parallèles, séparés par des portes coulissantes. Le traité de 1904 et le pactum de contrahendo

coexistent sans jamais se recouper. C’est surréaliste. Nous assistons là à un véritable exercice de

dadaïsme juridique. Dans le même temps, la Bolivie ne nous dit rien des termes de la décision

qu’elle sollicite, sur lesquels le Chili a insisté lundi ; or, c’est cette demande qui rend le

recoupement inévitable. La Bolivie lance des arguments, espérant que la Cour en retiendra l’un ou

l’autre.

2. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, je vous ai longuement parlé

3
lundi du traité de paix et d’amitié de 1904 . La Bolivie ne vous en a pratiquement rien dit hier. Il

n’a pas été question du règlement territorial d’ensemble établi dans ce traité. Il n’a nullement été

fait référence au droit d’accès de la Bolivie à l’océan Pacifique tel qu’énoncé à l’article VI de cet

instrument. Ce que la Bolivie a dit, c’est qu’elle reconnaissait que le traité de 1904 était en vigueur

en 1948 et continuait de s’appliquer aujourd’hui . 4 Effectivement, la Bolivie fait valoir

1
CR 1015/19, p. 11, par. 6 (Rodríguez-Veltzé).
2Ibid., p. 52, par. 6 (Akhavan).

3CR 2015/18, p. 33-46, par. 1-57 (Bethlehem).
4
CR 2015/19, p. 40, par. 6 (Remiro Brotóns). - 3 -

quotidiennement son droit d’accès à l’océan Pacifique tel qu’énoncé à l’article VI du traité, à

travers des territoires et ports souverains du Chili. Ce traité est donc toujours en vigueur, et il

11 continue aujourd’hui de régir l’accès de la Bolivie à l’océan Pacifique, comme au 30 avril 1948,

date de la conclusion du pacte de Bogotá.

3. Mme Chemillier-Gendreau a fait remonter hier la théorie bolivienne d’une obligation de

négocier parallèle à une note en date du 26 novembre 1879, rédigée par le ministre chilien des

affaires étrangères, M. Santa María . 5 Nous avions nous aussi projeté à l’écran une note du

président du Chili en date du 7 janvier 1884 dans laquelle il était fait mention d’un droit d’accès de

la Bolivie à l’océan Pacifique. Il est intéressant de noter que Mme Chemillier-Gendreau n’a

commenté que brièvement l’accord de cession territoriale de 1895 ; ensuite M. Remiro Brotóns est

cependant revenu plus longuement dessus, en en reconnaissant l’importance. Je reviendrai sur ce

6
point dans un instant .

4. M. Wordsworth examinera tout à l’heure plus longuement cette théorie de l’obligation

parallèle. Son exposé appelle toutefois deux observations préliminaires.

5. Ma première observation concerne les notes de 1879 et 1884 qui ont été invoquées par

7
Mme Chemillier-Gendreau et que je vous invite à lire . C’est sur elles que le conseil de la Bolivie

cherche à fonder la prétention à un accès souverain à l’océan Pacifique ; or, tel n’est pas l’objet de

ces notes. Il n’y est question ni d’accès souverain, ni des couloirs, enclaves, zones côtières ou

8
spéciales évoqués par M. Akhavan . Ces notes ne concernent que l’accès à l’océan Pacifique. Un

accès à titre perpétuel, un droit de transit commercial absolu et inconditionnel, accordé à la Bolivie

en application de l’article VI du traité de 1904. Et, comme le montrent les déclarations faites par le

président du Congrès national et le président boliviens en 1905  déclarations que je vous ai

9
exposées lundi , la Bolivie voyait, dans les négociations qui avaient conduit au traité de 1904,

un succès marquant, puisqu’elle avait pu obtenir, à travers elles, son autonomie commerciale et

douanière.

5
CR 2015/19, p. 29, par. 10 (Chemillier-Gendreau).
6 Ibid., p. 44, par. 16 (Remiro Brotóns).

7 Ibid., p. 29, par. 10 (Chemillier-Gendreau).
8
Ibid., p. 51, par. 4 (Akhavan).
9 CR 2015/18, p. 42, par. 41-42 (Bethlehem). - 4 -

6. Ma seconde observation est simple, à savoir que la Bolivie ne saurait fonder une

prétention valable sur des instruments antérieurs à 1904. Le traité de 1904 a tiré un trait,

formellement et intégralement, sur ce qui s’était produit avant. Il a pris toute la place. Pour les

Parties, il s’agissait d’un traité de paix définitif. Tout ce qui lui était antérieur n’était plus pertinent.

12 7. L’accord de cession de 1895 appelle un bref commentaire. Au paragraphe 228 du

mémoire de la Bolivie, il est indiqué ce qui suit :

«Dans la présente affaire, l’obligation de négocier découle de l’engagement
juridique qu’a pris le Chili de négocier un accès souverain à la mer pour la Bolivie.
Elle a été expressément formulée dans l’accord de cession territoriale de 1895, ainsi
que dans des instruments postérieurs, et le Chili l’a réaffirmée à plusieurs reprises au
cours des décennies suivantes.» 10

8. Cet argument est développé aux paragraphes 338 et suivants du mémoire de la Bolivie.

Celle-ci y affirme être convenue, avec le Chili, qu’elle ne devrait pas rester enclavée et que ce

dernier s’engageait expressément à lui céder des territoires pour lui assurer un accès souverain à

l’océan Pacifique.

9. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, l’invocation, dans les écritures

de la Bolivie, de l’accord de cession de 1895 est sans ambiguïté aucune. C’est le fondement même

de la demande bolivienne.

10. Force est cependant de constater que, dans son exposé d’hier, M. Remiro Brotóns s’est

distancié de cette thèse, affirmant à présent que l’accord de cession de 1895 n’était pas la source

d’une obligation, mais constituait un simple précédent démontrant que les Parties étaient convenues

d’une cession territoriale .

11. Le Chili a pris bonne note de cet aveu fait avec réticence, du bout des lèvres, selon lequel

l’accord de 1895 était bel et bien «dépourvu de tout effet». Il relève aussi qu’un instrument

antérieur au traité de 1904 et jamais entré en vigueur ne saurait attester durablement de quoi que ce

soit. Le fait qu’elle soit fondée sur un instrument qui n’est jamais entré en vigueur est une

condamnation sans appel de l’argumentation de la Bolivie. A cela s’ajoute que le traité de 1904 a

supplanté et remplacé l’accord de 1895. Enfin, comme je l’ai fait observer lundi, l’échange de

10
MB, par. 228.
11CR 2015/19, p. 44, par. 16 (Remiro Brotóns). - 5 -

notes de 1896, selon lequel les traités de 1895 sont «dépourvus de tout effet», tombe lui aussi sous

12
le coup de l’exclusion énoncée à l’article VI du pacte de Bogotá .

12. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, vous avez entendu la Bolivie

dire hier que la demande qu’elle a portée devant vous n’a rien à voir avec le traité de 1904 ; qu’il

s’agit d’une obligation de négocier parallèle, distincte, l’objet et le résultat de ces négociations

étant sans rapport avec le traité de 1904. M. Akhavan l’a formulé comme suit : «un traité peut être

13
13 pertinent à l’égard d’un différend sans pour autant le régler» . Je reviendrai dans quelques instants

sur ce point qui touche au cœur du présent différend. Mais avant cela, une observation liminaire

s’impose.

13. Le présent différend, la présente demande, dont la Bolivie a saisi la Cour apparaît, de

quelque point de vue que l’on se place, hautement artificielle. C’est ce que vous aurez constaté

lundi, en entendant les exposés du Chili, et hier, en entendant ceux de la Bolivie. C’est un fait

avéré. Par la décision qu’elle sollicite, la Bolivie cherche à obtenir que la Cour prescrive au Chili

de s’acquitter de ladite obligation de bonne foi «de manière prompte et formelle, dans un délai

raisonnable et de manière effective, afin que soit assuré à la Bolivie un accès pleinement souverain

à l’océan Pacifique» . Avec une telle demande, comment la Bolivie peut-elle, de manière si peu

crédible, d’une simple pirouette, éluder le traité de 1904 et son règlement territorial global, qui lui

confère un droit d’accès conventionnel, à titre perpétuel, à l’océan Pacifique à travers des territoires

et ports chiliens ?

14. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, quelle que soit la manière

dont la Bolivie l’habille, il est tout à fait limpide que sa demande recoupe par essence,

nécessairement, immanquablement, le traité de 1904. De fait, M. Remiro Brotóns a levé le voile

hier en déclarant que rien n’interdisait de renégocier un traité ou de conclure un accord

15
complémentaire . C’est tout à fait juste, mais c’est précisément là où le bât blesse. Ce que la

Bolivie vous demande, c’est effectivement une renégociation du traité de 1904 ou la conclusion

12
CR 2015/18, p. 44-45, par. 47-53 (Bethlehem).
13CR 2015/19, p. 54, par. 13 (Akhavan).

14MB, par. 500 c).
15
CR 2015/19, p. 46, par. 25 (Remiro Brotóns). - 6 -

d’un accord complémentaire ; et ce, par le biais de négociations prescrites par la Cour en vue

d’atteindre un résultat particulier. Le conseil de la Bolivie a employé hier des expressions hautes

en couleurs au sujet des prétendues hallucinations du Chili concernant la nature des arguments

défendus par la Bolivie, les merveilles de la flore du désert d’Atacama, et j’en passe. Mais c’est la

Bolivie qui se livre à des exercices de contorsion, cherchant désespérément à éviter tout contact

avec le traité de 1904 comme s’il était toxique. Le malheur, c’est que c’est sur sa propre

argumentation que toutes ces contorsions produisent un effet toxique.

15. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, la Cour est un instrument de

règlement judiciaire. Or, la Bolivie, en tentant de dissocier sa demande du traité de 1904, se

14 présente devant vous pour vous demander de jouer le rôle de médiateur obligatoire entre les Parties.

Elle ne saurait parvenir à ses fins par de tels subterfuges.

16. Ceci m’amène à l’argument avancé par M. Akhavan, qui est au cœur de la présente

espèce. Il a dit, je cite, qu’un «traité p[ouvait] être pertinent à l’égard d’un différend sans pour

autant le régler». Par cette phrase, M. Akhavan reconnaît le lien entre la demande de la Bolivie et

le traité de paix de 1904, tout en cherchant à le minimiser. C’est également ce qu’a essayé de faire

M. Remiro Brotóns en caricaturant les arguments du Chili, lorsqu’il a déclaré que, selon ce dernier,

il suffirait d’un seul point de contact avec le traité de 1904 pour que la Cour n’ait pas compétence . 16

Il a également soutenu que l’argument du Chili aurait pour effet de transformer l’article VI du pacte

17
en un trou noir qui engloutirait tout ce qui s’est produit par la suite .

17. Pour ma part, je ne minimiserai pas cet aspect. Il est important. Mais il montre

précisément la faille béante de l’argumentation de la Bolivie.

18. MM. Remiro Brotóns et Akhavan reconnaissent qu’il existe un lien entre l’argumentation

de la Bolivie et le traité de 1904. Reste la question la suivante : quel type de lien ? S’agit-il d’un

seul point de contact, comme M. Remiro Brotóns voudrait vous le faire accroire ? Est-ce un simple

effleurement, comme M. Akhavan cherche à en convaincre la Cour ? S’agit-il, autrement, d’un

lien périphérique, accessoire, incident, passager, éloigné ou indirect ?

16
CR 2015/19, p. 41, par. 8 (Remiro Brotóns).
17Ibid. - 7 -

19. Le traité de paix de 1904, tout comme le règlement territorial global et le droit d’accès à

l’océan Pacifique qu’il énonce, est loin d’être éloigné, périphérique ou incident par rapport à la

demande de la Bolivie tendant à ce que la Cour prescrive au Chili de négocier «afin que [lui] soit

assuré … un accès pleinement souverain à [la mer]». La demande de la Bolivie se rapporte à

l’essence même du traité de 1904, au cœur du règlement qui y est énoncé, à la question qu’il régit.

20. Pour répondre à l’argument de la Bolivie, nul besoin pour le Chili d’établir la distinction

entre des liens périphériques et purement incidents, qui pourraient ne pas tomber sous le coup de

l’article VI du pacte, et des liens inextricables, qui exigent qu’un traité ou accord antérieur à 1948

continue de s’appliquer au comportement ultérieur à 1948. Etablir pareille distinction reviendrait à

formuler des conjectures juridiques réservées aux théoriciens. Ce qu’il convient de déterminer,

15 c’est la nature du lien dont il est question en l’espèce, et ce, où que se situe, en définitive, la ligne

de partage entre les différents types de liens.

21. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, il ne fait pas l’ombre d’un

doute que le lien entre le traité de paix de 1904 et l’objet de la demande de la Bolivie est direct,

étroit, central et matériel. Le droit souverain d’accès à l’océan Pacifique que revendique la Bolivie

nécessiterait forcément, immanquablement, de modifier le traité de 1904. La Bolivie l’a reconnu

par la voix de M. Remiro Brotóns, qui a soutenu que rien ne s’opposait à ce que les termes du traité

de 1904 soient renégociés ou qu’un accord complémentaire soit conclu.

22. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, la Bolivie tente de remédier

de deux manières à ce problème essentiel de son argumentation. Tout d’abord, elle soutient qu’une

question ne saurait être réglée et en litige à la fois . Ensuite, elle affirme, en se fondant sur

l’article 27 de la charte de l’OEA et l’article XXXIV du pacte, que le caractère définitif du

19
règlement est indispensable .

23. Ces affirmations relèvent de la même logique, à savoir que, le Chili et la Bolivie ayant,

au fil des années, eu des échanges et mené des négociations au sujet de l’accès souverain à

l’océan Pacifique, cette question ne saurait être considérée comme réglée. Selon la Bolivie, si l’on

négocie, c’est que rien n’est réglé.

18
CR 2015/19, p. 55, par. 16 (Akhavan).
19Ibid., p. 54-55, par. 14 (Akhavan). - 8 -

24. Un certain nombre d’observations peuvent être formulées en réponse à cet argument.

Premièrement, je voudrais simplement rappeler les arguments avancés lundi par Mme Pinto.

Contrairement à la situation qui prévalait dans l’affaire Nicaragua c. Colombie, les deux volets de

l’article VI du pacte — c’est-à-dire, d’une part, les questions réglées au moyen d’une entente entre

les Parties et, d’autre part, celles qui sont régies par un traité en vigueur — signifient ceux choses

différentes . La Bolivie déploie tant d’efforts pour s’abriter derrière l’arrêt Nicaragua c. Colombie

qu’elle omet de se demander si les circonstances de l’affaire en question, circonstances auxquelles

la Cour a expressément fait référence dans son arrêt, peuvent s’appliquer en la présente instance.

Eh bien, tel n’est pas le cas ! La Bolivie omet aussi de traiter la question de savoir si l’objet de sa

demande est «régi» par le traité de paix de 1904. Je ne répéterai pas ici les propos de Mme Pinto,

me contentant de rappeler qu’elle a traité cette question en détail.

16 25. Deuxièmement, M. Akhavan ne dit rien de l’article XXXIV du pacte. Or cet article est

une disposition concernant la compétence de la Cour pour connaître d’un différend. Si la Cour

n’est pas compétente en vertu des articles V, VI ou VII du pacte, les mécanismes de règlement des

différends prévus dans cet instrument sont épuisés.

26. Troisièmement, le sens du terme «réglé» a également été traité par Mme Pinto dans son

21
exposé de lundi . Comme elle l’a relevé, une question est «réglée» au moyen d’une entente si elle

a été tranchée par ladite entente. Du point de vue de l’interprétation du texte, le terme «réglé» ne

signifie pas nécessairement  ni ne laisse entendre  qu’il a été mis fin à tous les désaccords.

Dans un contexte juridique, si quelque chose est «réglé», c’est que les parties se sont engagées par

un instrument juridique contraignant. S’agissant du traité de paix de 1904, le Chili continue

aujourd’hui  comme il n’a jamais cessé de le faire , d’accorder à la Bolivie le droit de transit

commercial perpétuel, absolu et inconditionnel sur son territoire et dans ses ports qu’elle tient de

cet instrument. Le Chili s’acquitte quotidiennement des obligations qui lui incombent au titre du

traité. Ce sont des obligations qui ont été réglées. Naturellement, la Bolivie veut que le Chili

continue de s’acquitter des obligations découlant du traité de 1904. Mais elle veut également

20CR 2015/18, p. 25-27, par. 15-20 (Pinto).

21CR 2015/18, p. 26, par. 18 (Pinto). - 9 -

remettre en cause cet instrument. La demande de la Bolivie se caractérise donc par une absence

manifeste de cohérence interne.

27. Quatrièmement, la Bolivie se fonde sur les échanges et négociations qui ont eu lieu au fil

des années pour soutenir que la question en cause en l’espèce n’a pas été réglée. Je serai bref sur

ce point, et je terminerai là-dessus, car d’autres conseils traiteront cette question plus en détail. Il

s’agit néanmoins d’un élément important sur lequel il n’est pas inutile d’insister. La présente

instance se rapporte à l’inviolabilité des traités et au fait que les négociations politiques sont sans

préjudice du droit. Ce ne sont pas là des considérations de fond, mais bien des considérations

relatives à la compétence. Ce ne sont pas des négociations qui créent la compétence d’une

juridiction. La Bolivie ne saurait, en invoquant des négociations qui n’ont pas abouti, remettre en

cause un traité qui, à compter du 30 avril 1948, a régi la question en cause dans la présente affaire.

28. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, ainsi s’achève mon exposé de

cet après-midi. Monsieur le président, je vous saurais gré de bien vouloir appeler à la barre

M. Wordsworth.

The PRESIDENT: Thank you. I now give the floor to Mr. Wordsworth.

17 M. WORDSWORTH :

L’EXCEPTION PRÉLIMINAIRE D ’INCOMPÉTENCE SOULEVÉE PAR LE CHILI

L’article VI du pacte de Bogotá appliqué à la demande de la Bolivie

I. Introduction

1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, je répondrai en quatre points

aux conclusions présentées hier par la Bolivie.

2. Premièrement, concernant la qualification du différend dont vous êtes saisis, les deux

Parties s’accordent bien évidemment sur le fait que la détermination de la question réellement en

cause en l’espèce est un aspect fondamental de la fonction de la Cour à ce stade préliminaire de la

procédure. Au-delà des divergences de vues qui existent entre elles quant au poids à accorder à la

qualification que fait la Bolivie de sa propre demande, le point capital est que celle-ci souhaiterait,

en définitive, que la Cour se livre à cet exercice en ne s’intéressant qu’à certaines parties de sa - 10 -

requête, et sans se prononcer sur la décision sollicitée ni lui accorder davantage qu’un rapide coup

d’œil. Cette position n’est pas défendable, la décision sollicitée par la Bolivie étant essentielle pour

permettre à la Cour de déterminer la question réellement en cause en la présente espèce,

c’est-à-dire le véritable objet du différend dont elle est saisie.

3. Deuxièmement, la Bolivie souhaite voir la Cour concentrer son examen sur ce qui

constitue, selon elle, un processus parallèle de négociations, dont l’existence serait indépendante du

traité de 1904. Elle accorde, en particulier, une importance inédite aux échanges intervenus

jusqu’en 1948 à propos des négociations, en vue de démontrer que, à cette date, la question de

l’accès souverain à la mer n’avait pas été réglé par le traité de 1904. Or, le simple fait de négocier

 ou, a fortiori, l’existence de simples échanges concernant des négociations  ne saurait défaire

d’une quelconque manière ce qui a été réglé par un traité préexistant. Si tel était le cas, aucun Etat

n’accepterait jamais d’entamer des discussions avec un autre. Ce n’est que lorsque des

négociations particulières conduisent à un accord modifiant la situation juridique qui prévalait

jusqu’alors que l’on peut considérer qu’il y a eu remise en cause de ladite situation juridique, de ce

qui s’était passé avant. Par ailleurs, bien que la Bolivie allègue qu’un pactum de contrahendo a été

conclu, rien dans les documents antérieurs à 1948 ne lui permet d’en prouver l’existence, ni celle

de tout autre accord susceptible d’écarter ce fait juridique fondamental : en 1948, la question de

savoir si la Bolivie possédait un accès souverain à la mer était une question réglée et régie par le

traité de paix de 1904.

18 4. Troisièmement, en invoquant ce processus de négociations prétendument parallèle  qui

se serait déroulé avant et après 1948 , la Bolivie détourne l’attention du fait que, examinés

objectivement, les échanges en question portent tous sur la question de l’accès de la Bolivie à la

mer. Il convient, à cet égard, de souligner que

a) la nature de l’accès de la Bolivie à la mer est demeurée à tout moment, pendant la période

considérée, et demeure aujourd’hui une question réglée et régie par le traité de paix de 1904 ;

b) la Bolivie est incapable de répondre à ce point essentiel, et ce n’est pas en surlignant à l’écran,

chaque fois qu’elle le peut, les mots «indépendamment de» qu’elle y parviendra. Quel que soit

le sens qu’elle entendait donner à cette expression, la Bolivie ne cherche pas aujourd’hui à - 11 -

obtenir un accès à la mer qui serait aujourd’hui indépendant de la situation juridique réglée et

régie par le traité de paix de 1904.

c) Au contraire, l’accès souverain que demande la Bolivie devant la Cour implique de toute

évidence la revision du règlement auquel les Parties sont parvenues par cet instrument, étant

précisé qu’aucun des documents invoqués par la Bolivie ne donne à penser que les Parties aient

eu quelque intention d’établir la compétence obligatoire de la Cour à l’égard des questions

réglées et régies par le traité de 1904.

5. Enfin, la Bolivie n’a rien à opposer à l’argument selon lequel c’est le fond, et non la forme

qui compte ici. Il va de soi que, si l’on supprimait de sa demande les termes faisant référence à la

prétendue obligation de négocier, la Cour serait incompétente par l’effet de l’article VI du pacte de

Bogotá. Ce sur quoi la Cour doit, en définitive, se prononcer, c’est donc de savoir s’il est permis

d’ajouter les termes «obligation de négocier» de sorte à modifier la nature d’une question qui

tomberait, sans cela, sous le coup de l’exception énoncée par l’article VI. Le Chili soutient que la

réponse est négative, et que toute tentative en ce sens n’est que pur artifice.

II. La qualification qu’il convient de donner à la demande

6. J’examinerai à présent chacun de ces quatre points en détail, en commençant par ce qui a

été dit hier à propos de la manière dont il convient de qualifier la demande en la présente espèce.

7. Mon ami et collègue M. Forteau a projeté à l’écran certains extraits de la requête de la

Bolivie ; il nous en a lu les paragraphes 1, 2 et 31, mais pas le paragraphe 32, c’est-à-dire le

passage essentiel auquel je me suis particulièrement intéressé lundi et qui s’affiche maintenant sur

vos écrans . [Projection] Si je le qualifie d’«essentiel», c’est que ce passage démontre de la

manière la plus simple et irréfutable que la demande présentée aujourd’hui par la Bolivie est bien,
19
que cela lui plaise ou non, en contradiction avec le traité de paix de 1904.

8. Je rappellerai que, ainsi que cela ressort des éléments qu’a exposés M. Bethlehem à

l’instant, la Bolivie ne saurait contester le fait juridique suivant : le traité de paix de 1904,

pleinement en vigueur entre les Parties, établit que l’accès à la mer de la Bolivie à un caractère non

souverain. Il s’ensuit que, comme je l’ai exposé moi-même lundi, la demande bolivienne est, de

22CR 2015/19, p. 18-19, par. 14-15 (Forteau). - 12 -

fait, en contradiction avec cet instrument. Et mon ami M. Akhavan peut bien faire référence à des

voies parallèles, ce n’est pas en nous expliquant que la circulation de Téhéran ne produit pas

forcément des carambolages qu’il pourra réfuter notre argument selon lequel la demande de la

Bolivie vise et implique nécessairement la revision de questions réglées et régies par le traité de

paix de 1904 . Il en va de même de l’allégation de M. Forteau selon laquelle la demande de la

24
Bolivie aurait été l’objet d’une «déformation aussi radicale qu’inacceptable» . Eh bien, cela n’est

certainement pas le cas  nous nous sommes contentés de lire les mots figurant sur la page que la

Bolivie vous a présentée  et ces voies prétendument parallèles finissent fatalement par se

rencontrer lorsque l’on en vient à la décision réellement sollicitée par la Bolivie. Celle-ci confirme

25
d’ailleurs, en parlant de lex specialis et de lex posterior , qu’elle a parfaitement conscience que

lesdites voies ne peuvent demeurer indéfiniment parallèles.

9. Trois de mes collègues de l’équipe bolivienne brandissent par ailleurs le principe pacta

sunt servanda comme s’il s’agissait d’un argument . Or, il n’en est rien.

a) Premièrement, ce que dit en réalité la Bolivie, c’est que certains seraient liés par les traités et

d’autres pas, notamment lorsqu’il s’agit du règlement de longue date établi par le traité de paix

de 1904.

b) Deuxièmement, l’invocation de principes fondamentaux ne répond pas à l’objet de la phase

relative à la compétence, qui n’est pas d’examiner s’il existe une obligation de négocier à

laquelle le Chili serait tenue. En réalité, à ce stade de la procédure, la Cour doit déterminer si

l’existence et l’exécution de cette prétendue obligation constituent une question relevant de sa

compétence. Or, la réponse est non, car il s’agit d’une question qui, en 1948, était réglée et

régie par le traité de 1904. Et même s’il y avait lieu de se pencher sur ce qui s’est passé

après 1948, il suffit de dire que tous les éléments postérieurs à cette date auxquels se réfère la

23CR 2015/19, p. 51, par. 4 (Akhavan).

24Ibid., p. 18, par. 11 (Forteau).
25
Ibid., p. 52, par. 6 (Akhavan).
26Ibid., p. 27, par. 2 (Chemillier-Gendreau) ; p. 47-48, par. 27 (Remiro Brotóns) ; p. 51, par. 5 (Akhavan). - 13 -

20 Bolivie concernent cette même question  qui, en 1948, était réglée et régie par le traité

de 1904 , la Bolivie étant incapable de démontrer que les Parties aient eu la moindre intention

d’établir la compétence obligatoire de la Cour.

10. Les autres éléments que j’ai examinés lundi, notamment la Constitution bolivienne

de 2009 et l’émission obligataire de 2013, confirment également que les demandes aujourd’hui

formulées visent à obtenir la revision du règlement établi par le traité de paix de 1904 . 27

11. M. Forteau n’a rien trouvé à répondre à ces éléments, se contentant d’affirmer que ce qui

importe, ce sont les termes de la requête déposée dans une affaire . Cette position, à l’instar de

29
l’exposé écrit de la Bolivie , n’est pas conforme à la jurisprudence. A cet égard, je relèverai que

les passages les plus pertinents des arrêts rendus dans les affaires des Essais nucléaires ont été 30

omis, que ceux tirés de l’arrêt Diallo concernent la question tout à fait distincte de la recevabilité de

nouvelles demandes , et que, dans l’extrait cité de l’arrêt en l’affaire relative à Certains intérêts

allemands en Haute-Silésie polonaise, il s’agissait du refus de la Cour de reformuler les

conclusions d’une partie au motif que les demandes sous-jacentes n’avaient pas été correctement

exposées . Ces arrêts renvoient donc à des situations très différentes.

12. Il me faut également soulever un point fondamental : il est évidemment faux d’affirmer

qu’il appartient au demandeur de définir comme il l’entend les contours précis d’un différend

donné ou de la vraie question en cause en l’espèce. Si tel était le cas, tout demandeur pourrait, en

formulant soigneusement ses demandes, tourner les limites juridictionnelles établies par des

dispositions telles que l’article VI du pacte ou, de fait  pour prendre un autre exemple 

l’article 288 de la CNUDM, tel qu’il a été examiné par le tribunal arbitral constitué en vertu de

l’annexe VII dans la sentence récente rendue en l’affaire Maurice c. Royaume-Uni. Il existe

pléthore d’affaires récentes dont la Cour et d’autres juridictions internationales ont eu à connaître,

27CR 2015/18, p. 50-52, par. 18-24 (Wordsworth).

28CR 2015/19, p. 20-21, par. 21 (Forteau).
29
Exposé écrit du Gouvernement de l’Etat plurinational de Bolivie (EEB) déposé le 7 novembre 2014 en réponse
à l’exception préliminaire du Chili, par. 13 et 20.
30
Essais nucléaires (Australie c. France), arrêt, C.I.J. Recueil 1974, p. 262, par. 29 ; et Essais nucléaires
(Nouvelle-Zélande c. France), arrêt, C.I.J. Recueil 1974, p. 466, par. 30.
31 Ahmadou Sadio Diallo (République de Guinée c. République démocratique du Congo), arrêt,

C.I.J. Recueil 2010 (II), p. 656, par. 39.
32Certains intérêts allemands en Haute-Silésie polonaise, fond, arrêt n°7, 1926, C.P.J.I. série A n°7, p. 34-35. - 14 -

dans lesquelles les demandeurs ont tenté de reformuler leurs demandes, de nature territoriale ou

autre, pour les faire entrer dans le cadre de la CNUDM ou de traités anciens relatifs à la protection

des droits de l’homme, tels que la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes

de discrimination raciale ; le Chili souligne que, dans ces affaires, les juridictions concernées ont

21 fait preuve, comme il se doit, de la plus grande prudence à l’égard de pareilles demandes

lorsqu’elles se sont interrogées sur leur compétence.

13. S’agissant de la question de la qualification, M. Remiro Brotóns est certes revenu sur la

33
Constitution de 2009, mais sans parvenir à répondre à notre argument . Il a reconnu que

l’article 267 de ce texte énonçait la nécessité d’obtenir «un accès souverain à la mer comme

34
objectif permanent et inaliénable» de l’Etat bolivien , mais a semblé considérer qu’il s’agissait

d’une question d’ordre politique , affirmant  fort curieusement  que le traité de 1904 était

protégé par ladite Constitution par l’effet des dispositions générales concernant le statut des traités

dans la hiérarchie des normes . 36

14. Cela est en totale contradiction avec les termes mêmes de la Constitution et des

déclarations et autres documents établis par la suite par l’Etat bolivien, que je vous ai présentés

lundi .

15. M. Remiro Brotóns a également affirmé, en se référant aux dispositions transitoires de la

Constitution, que les traités susceptibles d’être remis en cause devant les juridictions

38
internationales étaient limités à ceux ayant trait à la protection des investissements . Je relève

qu’aucun document n’a été cité à l’appui de cette affirmation. En tout état de cause, le décret

présidentiel portant désignation de l’agent de la Bolivie en la présente affaire indique on ne peut

33Voir CR 2015/18, p. 50-52, par. 18-24 (Wordsworth) ; voir Constitution de l’Etat plurinational de Bolivie,
7 février 2009 (EPC, annexe 62), p. 926 et 929, art. 267 et Neuvième disposition transitoire.
34
CR 2015/19, p. 45, par. 18 (Remiro Brotóns).
35
Ibid., p. 45, par. 18 (Remiro Brotóns).
36Ibid., p. 45-46, par. 22 (Remiro Brotóns).

37 CR 2015/18, p. 50-52, par. 18-24 (Wordsworth) ; voir également Tribunal constitutionnel bolivien,
avis n 003/2013 rendu à Sucre le 25 avril 2013 (EPC, annexe 73), p. 1025-1027, sect. III 11), portant examen de la loi
bolivienne sur l’application des dispositions normatives  exposé des motifs, 6 février 2013 (EPC, annexe 71), p. 1003,
art. 6.

38CR 2015/19, p. 45, par. 21 (M. Remiro Brotóns). - 15 -

plus clairement que celle-ci a été introduite aux fins de faire valoir le prétendu «droit» visé à

39
l’article 267 de la Constitution bolivienne .

16. Je rappellerai par ailleurs à la Cour que l’avis d’émission obligataire de 2013 de l’Etat

o
bolivien  qui s’affiche de nouveau à l’écran et figure sous l’onglet n 37 du dossier de

plaidoiries  indique clairement que i) la présente procédure a été introduite conformément au

mandat défini à l’article 267 de la Constitution ; c’est la première phrase ; que ii) la Bolivie

considère que le traité de paix de 1904 est l’élément faisant obstacle à l’exercice de son prétendu

22 droit constitutionnel à posséder un accès souverain à la mer ; et que iii) c’est conformément à cette

position, ainsi qu’à l’allocution de 2011 du président Morales dont je vous ai aussi parlé lundi , 40

41
que la présente instance a été introduite . La Bolivie a choisi, lors du premier tour de plaidoiries,

de faire abstraction de ce document, qui confirme pourtant clairement que la «question» qu’il vous

est demandé de trancher n’est autre que la «question» réglée et régie par le traité de paix de 1904.

III. La situation antérieure à 1948

17. J’en viens à présent à l’intérêt nouveau porté par la Bolivie aux documents antérieurs

à 1948, qui ne fait que traduire sa crainte, si le Chili avait raison de considérer que la question à

l’examen était, à partir de cette date, réglée et régie par le traité de paix de 1904, que notre

exception d’incompétence soit fondée.

18. Selon la Bolivie, les questions réglées et régies par le traité de paix de 1904, d’une part,

et la question de savoir s’il existe un pactum de contrahendo imposant au Chili de céder à la

Bolivie une partie de son territoire côtier, d’autre part, sont différentes et coexistent de façon

parallèle. La Bolivie se fonde sur 11 documents antérieurs à 1948 pour affirmer que ce prétendu

pactum existait avant la signature du pacte de Bogotá. Or, il est évident, même à première vue,

qu’aucun de ces documents n’établit le moindre pactum de contrahendo contredisant l’argument

39 o
Décret présidentiel n 09385 de l’Etat plurinational de Bolivie en date du 3 avril 2013, joint à la lettre en date
du 24 avril 2013 adressée au greffier par M. Choquehuanca, ministre bolivien des affaires étrangères (EPC, annexe 72),
p. 1007.
40Allocution délivrée par M. Evo Morales le 23 mars 2011, journée de la mer en Bolivie, accessible à l’adresse
http://www.diremar.gob.bo/node/265, et sous l’onglet n 32 du dossier de plaidoiries du 4 mai 2015, p. 5 et 6.

41Voir CR 2015/18, p. 51-52, par. 21-22 (Wordsworth) ; voir également Avis d’émission obligataire de l’Etat
bolivien en date du 22 août 2013, accessible à l’adresse http://www.bourse.lu/instrument/listdocuments?cd
Val=201919&cdTypeVal=OL, et sous l’onglet n 35 du dossier de plaidoiries du 4 mai 2015, p. 33. - 16 -

central du Chili sur la question de la compétence, à savoir qu’à compter de 1948, le contexte

juridique pertinent était régi par le traité de paix de 1904.

19. Le premier document qui vous a été soumis, et qui apparaît à l’écran, est un

mémorandum chilien en date du 9 septembre 1919 . Le Chili y indique qu’il «entend veiller à ce

que la Bolivie dispose d’un accès à la mer», en lui cédant une partie d’Arica et que,

indépendamment des dispositions du traité de 1904, il «accepte d’entamer de nouvelles

négociations visant à répondre à l’aspiration de son voisin et ami, sous réserve [de] remporte[r] le

43
plébiscite» visé par le traité d’Ancón . Il s’agit là d’une déclaration exprimant l’intention du Chili

d’œuvrer pour atteindre un objectif, et non d’un pactum de contrahendo.

23 20. [Projection] Hier vous a été montré un court extrait du protocole d’accord du

10 janvier 1920, dans lequel il est indiqué que le Chili était «décidé à déployer tous les efforts»,

«[i]ndépendamment de ce qui a[vait] été établi par» le traité de 1904, et acceptait d’entamer des

négociations «visant à répondre à l’aspiration de son voisin et ami» . Pour rétablir la réalité des

faits, il me suffit de vous faire lire les premier et dernier paragraphes de ce même document, qui

o
figurent sous l’onglet n 39 de notre nouveau dossier de plaidoiries, dont vous ne manquerez pas

d’apprécier la brièveté. Au premier paragraphe, il est dit que les ministres étaient «convenus

d’organiser ces réunions afin d’échanger des vues générales concernant la mise en œuvre concrète

de buts si ambitieux» , en l’occurrence, le renforcement des liens entre les deux Etats. Et ensuite,

o
à l’avant-dernier paragraphe, au verso de la page figurant sous l’onglet n 39, on peut lire ce qui

suit : «les présentes déclarations ne contiennent aucune disposition de nature à créer des droits ou

46
des obligations pour les Etats dont les représentants les prononcent» .

21. En conséquence, l’idée que ce document aurait établi un pactum de contrahendo est, si je

puis m’exprimer ainsi, pour le moins tirée par les cheveux. La Bolivie a fait valoir hier qu’il était

47
«remarquable» que le Chili se soit «totalement désintéressé du protocole d’accord de 1920» . On

42Mémorandum chilien en date du 9 septembre 1919, MB, annexe 19.

43Ibid., par. IV et V.

44Protocole d’accord (Acta Protocolizada) du 10 janvier 1920, MB, annexe 101, p. 394.
45
Ibid., p. 393.
46Ibid., p. 402.

47CR 2015/19, p. 56, par. 19 (Akhavan). - 17 -

s’étonnera plutôt de ce que, en s’appuyant sur ce document, la Bolivie ait omis d’appeler l’attention

de la Cour sur un aspect aussi essentiel de sa valeur juridique.

48
22. [Projection] La Bolivie s’est ensuite fondée sur une lettre en date du 6 février 1923 , qui

figure sous l’onglet n 40 de notre dossier de plaidoiries, par laquelle le ministre chilien des affaires

étrangères accusait réception de la proposition de la Bolivie en vue d’une «revision» du traité

de 1904, «aux fins d’ouvrir la voie à une nouvelle situation internationale» . Le Chili a répondu

qu’il n’entendait pas reviser le traité de paix de 1904, mais, se référant aux déclarations de son

délégué devant la Société des Nations, qu’il «demeur[ait] attentif» aux propositions de la Bolivie

en vue de conclure un nouveau pacte «adapté à la situation de la Bolivie sans modifier le traité de

50
paix» ni «rompre la continuité territoriale du Chili» . Rappeler que le Chili était «attentif» aux

propositions de la Bolivie ne fait guère avancer le débat.

24 23. Ceci nous amène logiquement aux documents de la Société des Nations, auxquels

 chose notable  la Bolivie ne s’est pas référée hier et dans lesquels figurent des déclarations

51
attestant de la volonté du Chili de négocier, mais pas sur la question de l’accès souverain .

24. Plusieurs échanges ont eu lieu entre les deux Etats en 1923, mais la Bolivie s’est gardée

de vous les présenter tous. [Projection] Le 12 février 1923, le ministre bolivien des affaires

étrangères a rappelé que le Chili n’acceptait pas de reconnaître «la revision» du traité de paix

de 1904, ajoutant que «la revendication maritime de [son] pays ne saurait se situer en dehors du

52
contexte juridique du traité de 1904» . Nous sommes bien d’accord.

25. [Projection] Ceci m’amène au prochain document sur lequel la Bolivie s’est fondée

53
mercredi . Il s’agit d’une lettre en date du 22 février 1923 adressée à la Bolivie par le ministre

chilien des affaires étrangères, par laquelle le ministre faisait part de son optimisme quant à la

48Note du ministre chilien des affaires étrangères en date du 6 février 1923, MB, annexe 48, mentionnée dans
CR 2015/19, p. 31, par. 14 (Chemillier-Gendreau).
49
Note du ministre chilien des affaires étrangères en date du 6 février 1923, MB, annexe 48, p. 209.
50
Ibid., p. 210.
51 Voir par exemple déclaration de M. Agustín Edwards, délégué du Chili, à la XXIIe séance plénière de la
Société des Nations tenue le 28 septembre 1921, MB, annexe 160.

52Note en date du 15 février 1923 adressée à M. Luis Izquierdo, ministre chilien des affaires étrangères, par
M. Ricardo Jaimes Freyre, envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de la Bolivie au Chili, EPC, annexe 40,
p. 597.

53CR 2015/19, p. 31, par. 14 (Chemillier-Gendreau). - 18 -

possible satisfaction des «aspirations» de la Bolivie «si elles se limit[aient] à solliciter un libre

accès à la mer et ne pren[aient] pas la forme de la revendication maritime que suggér[ait] la note de

54
Votre Excellence» . La Cour n’aura pas manqué de noter que, dans cette communication, le terme

«souverain» brille par son absence.

o
26. [Projection] Le document suivant, qui figure sous l’onglet n 43, est un mémorandum en

date du 23 juin 1926 . Par la voie d’un de ses conseils, la Bolivie a fait valoir mercredi que :

«le Chili dans un mémorandum du 23 juin 1926 propose alors le transfert à la Bolivie d’une partie

56
du territoire d’Arica» . La phrase actuellement surlignée à l’écran en témoigne. Mais la Cour

souhaitera peut-être lire la phrase suivante : [projection suivante] «Aucune de ces propositions ne

57
méritait d’être acceptée.»

27. La Bolivie s’est ensuite appuyée sur un autre document, à savoir la proposition adressée

en 1926 par M. Kellogg, secrétaire d’Etat des Etats-Unis d’Amérique, au Pérou et au Chili, en vue

de trouver une solution au différend qui opposait ces deux Etats au sujet des provinces de Tacna et

25 58
d’Arica . Elle consistait à vendre les deux provinces à la Bolivie. Je formulerai deux

observations. Tout d’abord, une proposition émanant du secrétaire d’Etat des Etats-Unis

d’Amérique ne saurait créer des droits pour la Bolivie ou des obligations pour le Chili. Ensuite, la

proposition de M. Kellogg est de toute évidence incompatible avec l’existence d’un pactum de

contrahendo antérieur. [Projection] C’est d’ailleurs ce qui ressort de la réponse du Chili à la

o
proposition de M. Kellogg (onglet n 44).

a) Le Chili a rappelé qu’aux termes du traité de paix de 1904, la Bolivie «avait renoncé à disposer

d’un littoral et exigé, ceci étant plus conforme à ses intérêts, d’obtenir une compensation

59
pécuniaire, ainsi que des moyens de communication» . Il a également fait observer que la

Bolivie souhaitait prendre part aux négociations relatives aux provinces de Tacna et d’Arica,

54Note du ministre chilien des affaires étrangères en date du 22 février 1923 ; MB, vol. II, première partie,
annexe 50, p. 215.

55Mémorandum chilien en date du 23 juin 1926 ; MB, vol. II, première partie, annexe 20.
56
CR 2015/19, p. 31, par. 15 (Chemillier-Gendreau).
57
Mémorandum chilien en date du 23 juin 1926 ; MB, vol. II, première partie, annexe 20, p. 95.
58CR 2015/19, p. 31, par. 15 (Chemillier-Gendreau), faisant référence au mémorandum du secrétaire d’Etat des
Etats-Unis d’Amérique, M. Frank B. Kellogg, en date du 30 novembre 1926 ; MB, vol. II, première partie, annexe 21.

59Mémorandum chilien en date du 4 décembre 1926 ; MB, vol. II, première partie, annexe 22, p. 107. - 19 -

ajoutant ce qui suit : «Aucun motif, qu’il relève de la justice ou de l’équité, ne saurait justifier la

60
présente demande, que la Bolivie formule aujourd’hui comme un droit.»

b) En des termes ne pouvant guère créer d’obligations juridiques, le Chili a fait valoir qu’il n’avait

«pas rejeté l’idée d’octroyer une bande de territoire et un port à l’Etat bolivien», ajoutant que la

question demeurait «en suspens» . La Bolivie semble attacher beaucoup d’importance à ce

terme ; or, à la lecture dudit document, il apparaît que la question de savoir si la Bolivie était en

droit de réclamer un accès souverain par un territoire qui ne lui avait jamais appartenu n’était

nullement en suspens. La question en suspens était de savoir si le Chili déciderait de lui

accorder pareil droit, rompant ainsi le statu quo. Le Chili a fait savoir qu’il acceptait, «par

62
principe, d’examiner la proposition» . La citation n’est pas reproduite entièrement sur la

diapositive, mais je vais vous la lire tel qu’elle figure dans le mémoire, à l’annexe 22,

page 109 : «C’est pourquoi le Gouvernement chilien accepte, par principe, d’examiner la

proposition, démontrant ainsi son engagement résolu en faveur de la paix et de l’amitié.» Nous

sommes bien loin d’un pactum de contrahendo.

28. [Projection] Pour ce qui est du protocole de 1929 au traité de Lima, qui figure sous

l’onglet n 45, le Chili et le Pérou étaient convenus qu’ils ne pourraient, «sans accord préalable

entre eux, céder à une tierce Puissance la totalité ou une partie des territoires» de Tacna et

26 d’Arica . Or, la Bolivie fait aujourd’hui valoir que, si les deux Etats étaient convenus de ce point,

c’est qu’il existait forcément entre eux une question en suspens, avec «la nécessité de la régler en

dehors des termes du traité de 1904» . Il ne s’agit là que d’une simple affirmation qui, si elle était

avérée, signifierait qu’il existait également une question en suspens avec le Pérou, le protocole

étant applicable aux deux provinces de Tacna et d’Arica. Quoi qu’il en soit, il n’y a là rien qui

donne à penser qu’il existait un pactum de contrahendo entre la Bolivie et le Chili. De surcroît, il

ressort de ce document que le Chili n’a pas, et n’aurait pu, conférer à la Bolivie un droit

60Ibid.

61Ibid.
62
Ibid., p. 109.
63
Protocole complémentaire au traité de Lima, signé le 3 juin 1929 ; MB, vol. II, première partie, annexe 107,
article premier, p. 423.
64CR 2015/19, p. 32, par. 17 (Chemillier-Gendreau). - 20 -

inconditionnel à un accès souverain à la mer passant par Arica, puisqu’il ne pouvait donner effet à

pareil droit sans le consentement du Pérou. [Fin de projection]

29. Le dernier épisode antérieur à 1948 sur lequel se fonde la Bolivie est celui des échanges

entre les Partiesqui ont conduit à l’échange de notes de 1950, Mme Chemillier-Gendreau s’étant, à
65
cet égard, référée aux annexes 58 à 68 du mémoire de la Bolivie . Je ferai observer, en premier

lieu, que seules les deux premières annexes sont antérieures à 1948 et, en second lieu, que la

Bolivie ne peut raisonnablement soutenir que ces documents constituaient un accord, et encore

moins assorti d’une obligation de résultat. Ces documents ne sauraient pas non plus être considérés

comme ayant remis en cause quelque question déjà réglée.

30. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, il n’existait, en 1948, aucun

pactum de contrahendo et, à ce stade de la procédure, cet argument de la Bolivie peut être

aisément, et à juste titre, rejeté.

31. En tout état de cause, le simple fait qu’il y ait eu des échanges relatifs à des négociations

ne pouvait, à lui seul, défaire la situation juridique établie par le traité de 1904. Bien au contraire,

comme je l’ai précisé au début de mon intervention, ces échanges ne font que confirmer l’existence

d’une situation juridique bien établie, en l’occurrence par le traité de paix de 1904, que la Bolivie

cherchait à modifier. La question de savoir si celle-ci disposait d’un droit à un accès souverain à

l’océan Pacifique était, en 1948, une question réglée et régie par le traité de paix de 1904.

27
IV. La situation à compter de 1948

32. Les documents sur lesquels se fonde la Bolivie en ce qui concerne la période postérieure

à 1948 apportent une réponse importante à ce qu’elle a dit hier au sujet de la définition de la

question dont est saisie la Cour, à savoir que, ainsi que l’a indiqué l’agent de la Bolivie, cette

66
question a trait à un pactum de contrahendo, et non au traité de paix de 1904 . Si tel était le cas,

on s’attendrait bien sûr à ce que les échanges de notes de 1950 et de 1975 qui ont été si

abondamment traités hier s’apparentent, du moins dans une certaine mesure, à pareil pactum. Or,

et cela est fâcheux pour la Bolivie, il n’en est rien.

65CR 2015/19, par. 18 (Chemillier-Gendreau).

66Ibid., p. 11, par. 6 (Rodríguez Veltzé). - 21 -

33. La Cour aura peut-être relevé que la Bolivie était restée plutôt évasive quant au contenu

réel des documents en question, sur lesquels elle s’appuie pourtant amplement.

er o
34. Dans sa note en date du 1 juin 1950, qui figure sous l’onglet n 46, la Bolivie a proposé

que [projection] «les Gouvernements de la Bolivie et du Chili entament officiellement des

négociations directes en vue de satisfaire à ce besoin fondamental que représente pour la Bolivie un

accès souverain à l’océan Pacifique» . 67

35. La Bolivie estime que le document le plus important est la réponse du Chili en date du

68
20 juin 1950, à laquelle Mme Chemillier-Gendreau et ses collègues ont fait référence hier . Or,

cette note ne figurait pas dans le dossier de plaidoiries et n’a pas été projetée à l’écran. Le Chili n’a

o
pas accepté la proposition de la Bolivie, mais a déclaré qu’il était  cela figure sous l’onglet n 47

[projection] 

«disposé à entamer officiellement des négociations directes en vue de trouver la

formule qui permettrait à la Bolivie de se voir accorder un accès souverain à
l’océan Pacifique, et au Chili d’obtenir des compensations de nature non territoriale
tenant pleinement compte de ses intérêts» . 69

36. Même à supposer, à des fins purement juridictionnelles, que cet échange établisse un

accord international, il ne saurait, d’aucune manière, constituer le pactum de contrahendo que la

Bolivie invoque pour définir la question à l’examen.

37. J’ajouterai simplement deux points sur cet échange : premièrement, malgré l’expression

«sans préjudice de la situation juridique créée par le traité de paix de 1904» qui figure dans la note

du 20 juin 1950 , l’échange porte, en substance, sur la question déjà réglée et régie par le traité, à

28 savoir celle de l’accès de la Bolivie à la mer ; et, deuxièmement, aucun élément de ladite note ne

révèle la moindre intention de tourner les dispositions de l’article VI du pacte ou d’établir

autrement la compétence de la Cour.

67 o
Note n 529/21 en date du 1er juin 1950 adressée au ministre chilien des affaires étrangères par l’ambassadeur
de la Bolivie ; MB, vol. II, première partie, annexe 109A, p. 431.
68
CR 2015/19, p. 32, par. 19 (Chemillier-Gendreau) et p. 57-58, par. 22 (Akhavan).
69Note n 9 en date du 1 juin 1950 adressée à l’ambassadeur de la Bolivie par le ministre chilien des affaires
étrangères ; MB, vol. II, première partie, annexe 109B, p. 433.

70Ibid. - 22 -

38. Il en va tout à fait de même du mémorandum Trucco de 1961 , ainsi que des échanges

72
découlant de l’acte de Charaña de 1975, dont il a tant été question hier . Là encore, la Bolivie a

renvoyé la Cour à ces documents, auxquels elle attache une si grande importance, dans ses écritures

comme dans ses plaidoiries, sans toutefois les lui montrer.

39. Le principal document sur lequel la Bolivie s’appuie est daté du 19 décembre 1975. Le

Chili y énonce les lignes directrices d’une négociation entre les deux Etats concernant une

éventuelle cession de territoire. Ce document apparaît sur vos écrans et figure sous l’onglet n 48 o

de notre dossier de plaidoiries. Faute de temps, il sera difficile d’en donner intégralement lecture ;

mais le point essentiel débute au paragraphe c) : «Comme l’a indiqué S. Exc. le président Banzer,

la cession à la Bolivie d’une côte maritime souveraine, reliée au territoire bolivien par une bande de

73
territoire également souveraine, serait envisagée.»

40. En reprenant ce document, la Cour se rendra compte que les mêmes trois points s’y

appliquent aussi. Premièrement, rien ne donne à penser qu’il s’agit là d’un quelconque pactum de

contrahendo susceptible d’être présenté comme constituant la véritable question en cause en

l’espèce ; deuxièmement, rien, dans ce document, ne révèle une quelconque intention d’établir une

compétence obligatoire ; et, troisièmement, la question en cause est celle de l’accès de la Bolivie à

la mer, c’est-à-dire en substance la même que celle qui a été réglée et est régie par le traité de paix

de 1904.

41. Nous reconnaissons bien évidemment qu’il est indiqué au paragraphe b) dudit document

qu’il convient de n’«entraîner aucune modification des dispositions du [traité de 1904]» . Pour 74

autant, le rôle de la Cour consiste à examiner objectivement les documents sur lesquels la Bolivie

se fonde afin de déterminer s’ils établissent l’existence d’une question fondamentalement

différente, qui ne tomberait pas sous le coup de l’article VI. Or, selon nous, ces documents ne font

rien de tel et, en tout état de cause, la formulation «sans entraîner aucune modification» n’apporte

71 Mémorandum en date du 10 juillet 1961 adressé au ministère bolivien des affaires étrangères par l’ambassade
du Chili en Bolivie ; EPC, annexe 48.
72
CR 2015/19, p. 11, par. 4 (Rodríguez Veltzé) ; p. 19, par. 16 (Forteau) ; p. 32, par. 17 (Chemillier-Gendreau) ;
p. 33, par. 21 (Chemillier-Gendreau) ; p. 56, par. 18 (Akhavan).
73 o
Note n 686 du ministre chilien des affaires étrangères en date du 19 décembre 1975 ; MB, annexe 73,
p. 302-303.
74Ibid., p. 302. - 23 -

rien à l’argument de la Bolivie. La question centrale qui se pose en ce qui concerne l’article VI

reste celle de savoir si la demande de la Bolivie, telle qu’elle est désormais formulée, exige une

revision de la question réglée et régie par le traité de paix de 1904. Selon nous, tel est bien le cas.

29 42. Pour clore cette partie, j’examinerai brièvement la résolution de 1983 de l’Organisation

des Etats américains, qui a été abondamment citée hier , ainsi qu’une déclaration faite par le

76
délégué du Chili devant l’Assemblée générale de cette organisation le 12 novembre 1986 . Le

passage de la résolution de 1983 qui nous intéresse se lit comme suit ; il s’agit du paragraphe 2, qui

o
figure sous l’onglet n 49 [projection] :

«2. De demander instamment à la Bolivie et au Chili, au nom de la fraternité
américaine, d’entamer un processus de rapprochement et de renforcement de l’amitié
entre leurs peuples visant à normaliser leurs relations et à surmonter les difficultés les

opposant, et, plus particulièrement, à trouver une formule qui permette d’offrir à la
Bolivie un accès souverain à l’océan Pacifique...» 77

43. Une fois encore, les trois mêmes points s’appliquent : selon toute vraisemblance, cette

déclaration n’établit pas un pactum de contrahendo susceptible de constituer le problème en cause

en l’espèce ; il ne s’agit pas d’une question fondamentalement différente et elle ne révèle aucune

intention d’établir la compétence d’une juridiction.

44. De fait, lors de cette réunion, le délégué du Chili a déclaré que «les frontières entre le

Chili et la Bolivie [avaient] été fixées une fois pour toutes par un traité international signé

librement par les deux pays en 1904» , puis, comme vous pouvez le voir sous l’onglet n 50 de vos o

dossiers de plaidoiries que [projection] :

«Toute négociation avec la Bolivie visant à satisfaire l’aspiration de celle-ci à
un accès souverain à l’océan Pacifique à travers le territoire chilien est une question
qui doit être réglée directement par la Bolivie et le Chili et qui pourrait éventuellement

nécessiter la participation du Pérou … [et le délégué d’ajouter que] [t]oute négociation
de ce type doit également être le résultat d’un processus, qui suppose d’améliorer et de
normaliser les relations entre nos deux pays...» 79

75CR 2015/19, p. 13, note de bas de page 6 (Rodríguez Veltzé) ; p. 19, par. 16 (Forteau) ; p. 35-36, par. 29
(Chemillier-Gendreau).

76CR 2015/19, p. 35-36, par. 29 (Chemillier-Gendreau).
77
Résolution 686 (XIII-0/83) de l’Organisation des Etats américains, adoptée le 18 novembre 1983 ; MB,
annexe 195, p. 723-724.
78Déclaration en date du 18 novembre 1983 faite par M. Schweitzer, ministre chilien des affaires étrangères, à la

quatrième session de la commission générale de l’Assemblée générale de l’Organisation des Etats américains (extrait) ;
EPC, annexe 55, p. 781.
79Ibid. - 24 -

45. Pour ce qui est de la question essentielle de la détermination du véritable problème en

cause en l’espèce, il est difficile de concevoir formulation plus éloignée du pactum de contrahendo

que la Bolivie invoque.

30 46. Nombre de déclarations de même nature, qui n’ont pas été mentionnées hier, ont été

80
prononcées par le Chili devant l’Organisation des Etats américains ; puisque il a été fait référence

à l’intervention du Chili du 12 novembre 1986 , j’observerai que le délégué du Chili a également

o
déclaré devant l’OEA, et vous le trouverez sous l’onglet n 51 [projection] :

«Je souhaite rappeler les vues du Chili sur ce point : il n’existe pas de différend
territorial entre la Bolivie et le Chili, puisque nos frontières ont été établies par le
[traité de paix de 1904] … dont nous défendons l’inviolabilité. Il s’ensuit qu’aucun

organe international n’est compétent pour connaître d’un quelco82ue sujet ayant trait à
une question déjà réglée au moyen d’un traité bilatéral.»

47. Ainsi, en ce qui concerne la déclaration du ministre Trucco, qui n’a donné lieu à aucun

83
commentaire , la position expressément formulée par le Chili était que l’existence du traité

de 1904 excluait tout recours à une juridiction ; par ailleurs, aux fins de déterminer quelle est la

véritable question dont est saisie la Cour, le pactum de contrahendo désormais invoqué par la

Bolivie brille, là encore, par son absence.

V. Le fond, pas la forme

48. J’en arrive à mon dernier point, à savoir que c’est en réalité le fond, et non la forme, qui

compte dans le contexte juridictionnel de l’espèce.

49. L’analogie que j’ai faite lundi concernant l’approche suivie par les cours et tribunaux

internationaux relativement à la compétence ratione temporis n’a suscité aucune réaction, mais il

80Voir par exemple, Statement by the Chilean Representative at the Sixth Plenary Session of the General

Assembly of the OAS, 24 October 1979 ; MB, annexe 202, p. 738 ; déclaration du ministre chilien des affaires étrangères
à la deuxième réunion de l’Assemblée générale de l’Organisation des Etats américains tenue le 6 juin 1990 ; MB,
annexe 214, p. 778-779 ; Statement by the Under-Secretary of Foreign Affairs of Chile at the Second Session of the
General Commission of the General Assembly of the OAS, 7 June 1994 ; MB, annexe 218, p. 789 ; Statement by the
Foreign Minister of Chile at the Fourth Plenary Session of the General Assembly of the OAS, 4 June 1996 ; MB,
annexe 220, p. 795 ; déclaration du ministre chilien des affaires étrangères à la quatrième séance plénière de l’Assemblée
générale de l’Organisation des Etats américains tenue le 3 juin 1997 ; MB, annexe 221, p. 798 ; et Statement by the
Foreign Minister of Chile at the Fourth Plenary Session of the General Assembly of the OAS, 6 June 2000 ; MB,
annexe 223, p. 803.

81CR 2015/19, p. 36, par. 29 (Chemillier-Gendreau).
82
Statement by the Chilean Representative at the Third Session of the General Assembly of the OAS,
12 November 1986 ; MB, annexe 208, p. 758.
83
CR 2015/18, p. 60-61, par. 55-56 (Wordsworth).
84Ibid., p. 59, par. 51 c) (Wordsworth). - 25 -

me faut préciser que l’argument selon lequel c’est le fond qui importe en l’espèce découle des

termes bien pesés de l’article VI.

50. La question de savoir si une question est ou non réglée conduit nécessairement à définir

la question dont il s’agit, et à rechercher si une demande formulée en vertu de l’article XXXI du

pacte a trait à une question qui a été réglée. Ce qui importe, c’est donc le résultat juridique attendu
31
au moyen de cette demande, et non la formulation particulière du mécanisme par lequel ce résultat

doit être atteint. Du point de vue de la compétence, cela ne fait aucune différence concrète, et il n’y

a aucune raison d’établir une distinction juridique de principe entre i) une demande tendant à la

revision d’une question qui a été réglée au moyen d’une entente, et ii) une demande tendant à

obtenir que des négociations  qui aboutiront immanquablement au même résultat  soient

légalement prescrites par une décision judiciaire.

51. La Bolivie le reconnaît, et s’est donc employée à établir l’existence d’un pactum de

contrahendo totalement imaginaire, postérieur à la signature du pacte, pour tenter d’étayer

l’argument selon lequel il existe une nouvelle question, postérieure à 1948, qui n’a pas été réglée

par le traité de paix de 1904. Deux observations s’imposent à cet égard :

a) Pour définir la question pertinente en l’espèce, la Cour a le pouvoir, en vertu de l’article VI, de

vérifier si la Bolivie peut, de manière au moins plausible, établir l’existence du prétendu pactum

de contrahendo. La Bolivie n’étant pas en mesure de le faire, il s’ensuit que ce pactum

imaginaire ne saurait redéfinir la question qui est à présent soumise à la Cour.

b) Ensuite, même à supposer que la Bolivie ne prenne pas ses rêves pour la réalité et que

l’existence de ce pactum de contrahendo soit établie, cela ne change rien au fait que la revision

du règlement établi par le traité de paix de 1904 demeure l’issue principale et inéluctable de la

demande, de sorte que l’on ne saurait considérer que ladite demande soulève une question

nouvelle ou différente de celle déjà réglée et régie par le traité de 1904, c’est-à-dire celle de

savoir si la Bolivie a droit à un accès souverain à la mer.

52. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, je vous remercie de votre

attention, et vous prie de donner la parole à M. Dupuy.

The PRESIDENT: Thank you. I give the floor to Professor Dupuy. - 26 -

Mr. DUPUY:

1. Mr. President, Members of the Court, in its first round of oral argument, Bolivia tried to

persuade you that you had no need, at the outset of these proceedings, to verify that you had

jurisdiction to deal with its Application  as if it had forgotten the extent to which the Court itself

has constantly recalled, throughout the development of its case law, how it could only exercise its

32 judicial function if it had received a mandate to do so by means of the explicit consent of both

Parties .

2. To be quite honest, as we left the hearings yesterday morning, it was almost becoming a

little difficult to tell exactly what Bolivia’s argument was, given how much contradiction and

confusion, on both temporal and material issues, had emerged among its various counsel. Are we

to believe that a right existed ab initio  meaning, I presume, as my friend and colleague

Professor Chemillier-Gendreau was suggesting yesterday, as from the attack on the port of

Antofagasta on 14 February 1879  in other words, that Bolivia had a territorial title to a sea

86
coast ?

3. Or are we dealing more simply, though very differently, with an obligation to negotiate

based on the existence of a new agreement between the Parties, distinct from the 1904 Treaty

which Bolivia has told us often enough it is not asking to be annulled? An agreement described in

terms not used before by our opponents  in the words of my colleague Professor Akhavan, a

pactum de contrahendo  but a pact concluded we know not how or when ? 87

4. Unless this is not a pact, which is a conventional instrument by definition, but rather a

unilateral commitment on the part of Chile, formed by the sedimentary build-up of a number of

declarations or diplomatic exchanges between the two States? But then we are still no clearer as to

the point at which the various elements that came to form this commitment are deemed to have

reached the necessary stage of crystallizing into a legal obligation, going beyond mere diplomatic

discussions. Are we talking about before or after 1904? Before or after 1948? When exactly is

85
Case concerning the Aerial Incident of 27 July 1955 (Israel v. Bulgaria), Judgment, I.C.J. Reports 1959, p. 142;
Territorial and Maritime Dispute (Nicaragua v. Colombia), Preliminary Objections, Judgment, I.C.J. Reports 2007 (II),
p. 852, para. 51.
8CR 2015/19, p. 29, para. 10 (Chemillier-Gendreau).
87
Ibid., p. 51, para. 4 (Akhavan). - 27 -

this strange transformation  whether sudden or progressive  this chance transition from

tentative diplomacy to the unbending rigour of the law, supposed to have taken place? No answer

to these questions has been forthcoming from the Applicant in this case.

33 5. Nonetheless, the response to these questions is in no way insignificant, Members of the

Court! From the outset, the point at issue here is your competence  as ever, based solely on the

consent of the parties  to entertain an Application whose object, as Bolivia has sought to

emphasize quite enough, is purportedly different from the one identified by Chile. So it is essential

to go back to the fundamentally simple facts of the matter raised by the Application and to those of

the objection which it has prompted on the part of Chile to the jurisdiction of the Court (I). I shall

then recall that the determination of that jurisdiction, pursuant to Article VI of the Pact of Bogotá,

cannot be joined with the merits, given the legal context of the basis on which the proceedings have

been brought (II).

I. The fundamental facts of the matter

6. The simple question before the Court at this preliminary stage is whether the matter

referred to it by Bolivia’s Application was or was not already settled by the 1904 Peace Treaty, in

force when the Pact of Bogotá was signed in 1948.

7. And to answer that question, it is necessary for the Court to characterize Bolivia’s claim.

This claim, as our distinguished opponents repeated often enough yesterday morning, concerns the

issue of whether Bolivia has a right of access to the Pacific Ocean, the arrangements for which

Chile is said to be under an obligation to negotiate with it.

8. The fact is, however, that this “matter” concerning Bolivia’s access to the sea  the term

“matter” needing to be taken here within the meaning of Article VI of the Pact of Bogotá  has

been responded to by common accord between the two countries under the terms of the

1904 Treaty, which spells out that response quite unequivocally. The existing boundary between

the two countries grants no direct or “fully sovereign” access from Bolivian territory to the Pacific

Ocean. And the two parties, taking account of the landlocked nature of Bolivia’s territory,

established a right of commercial transit for Bolivia. Since then, the situation has not changed.

9. So, in an attempt to circumvent that situation, Bolivia came before you last Wednesday

with a new and admirably creative approach, designed to place the obligations borne by Chile on a - 28 -

second footing. Until then, we had been accustomed to seeing it rely on the 1895 Treaty in its

written pleadings. But no! Now we are told that, henceforth, that treaty is to be seen as no more

34 than an indication, a simple but revealing fact, in Bolivia’s attempt to create a kind of historical

continuum whose origins remain a mystery, but whose effects are claimed to be decisive. And it is

this continuum, it would appear, which forms the basis for a consent by Chile other than that

established in 1904: no longer a treaty that never entered into force, either in 1895 or afterwards,

but, henceforth, a pactum de contrahendo . 88

10. But as we heard yesterday, this pactum is said to consist, according to Bolivia, of an

amalgam of unilateral declarations and exchanges of notes. Be that as it may, the Court has no

need here to engage in a delicate analysis of this composite pipe dream by examining its merits 

or examining it on the merits, if I may be allowed this play on words.

11. Even supposing that some of its constituent parts could have formed the substance of a

unilateral or contractual commitment entered into by Chile (which they do not), the Court will

recall how Professor Chemillier-Gendreau dwelt in her presentation yesterday on the exchange of

notes of 1950, the Trucco memorandum of 1961 and indeed the two countries’ diplomatic

statements of position between 1975 and 1977 , with Professor Akhavan then following her in that

90
regard .

12. Now, Mr. President, if we really try to find some point which all these miscellaneous

items have in common, there is just one: which is that, however they may be characterized, all of

them post-date 1948, when the Pact of Bogotá was signed. Consequently, according to the only

instrument on the basis of which the Court has been seised, and because, obviously, the matter

raised by Bolivia’s Application is the same as that settled by the Peace Treaty, a treaty that was in

force in 1948, the International Court of Justice does not have jurisdiction to entertain that

Application, as is determined by Article VI of the Pact.

13. There is, I think, no point at this stage in going back over the content and the

implications of that provision. I would refer you in that respect to the arguments of

88
CR 2015/19, p. 52, para. 8 (Akhavan).
8Ibid., p. 32, para. 19 et seq. (Chemillier-Gendreau).
90
Ibid., p. 58, para. 23 et seq. (Akhavan). - 29 -

Professor Pinto, which were not contradicted by my friend Professor Remiro Brotóns yesterday

35 morning. Nor shall I return to the artificial nature of Bolivia’s argument, as already described to

you this afternoon by Daniel Bethlehem.

14. Of course, without engaging in prophecy, it is quite likely that our opponents, but

nonetheless friends, will tell you tomorrow that the precedents which go to make up this

assemblage with supposedly conventional status extend over the longer term; and that some of

them go back to a time before 1948. They will tell you this, though, without being able to

demonstrate to you that the “critical mass” of this improbable commitment had already been

reached before the pact adopted in Bogotá was signed. And it is in the face of that improbability,

in the truest sense of the word, that Bolivia is seeking to establish this historical continuum of

which we know not when it began nor when it took shape.

15. But then, Mr. President and Members of the Court, that brings up a question! If Bolivia

was so convinced that the 1904 Peace Treaty, while remaining in force, had in some way been

overtaken, as if in the streets of Marseilles, Naples or Tehran, by another commitment which cut in

front of it  which my colleagues on the other side of the Bar were describing to you yesterday as
91
one that was parallel to it  why then, and why indeed, did Bolivia not see fit to ratify the Pact of

Bogotá before 2011?

16. And why, having finally ratified it, did Bolivia maintain that reservation until the very

eve of the filing of its Application? Barely two weeks later! Why, since this was precisely, let us

recall, a reservation intended to block the application of Article VI of the Pact of Bogotá? A

reservation that made such application conditional upon its own author’s judgment as to whether
92
the arrangement in question “affects the vital interests of a State” ! A reservation whose content

provoked doubtful comments from the Secretary-General of the OAS.

17. Why would such a reservation have been maintained, if not because Bolivia knew very

well that Article VI remained an inescapable obstacle to your jurisdiction in this instance, taking

9CR 2015/19, p. 51, para. 4 (Akhavan).
92
“The Delegation of Bolivia makes a reservation with regard to Article VI, inasmuch as it considers that pacific
procedures may also be applied to controversies arising from matters settled by arrangement between the Parties, when
the said arrangement affects the vital interests of a State”, tab 3 of the judges’ folder for Chile’s first round, pp. 24, 54
and 55. - 30 -

account of the existence and the content of the 1904 Treaty? So, for want of anything better, and

36 because both the constraints of its new Constitution and the declarations of its President demanded

a political as well as a judicial initiative, Bolivia had to fabricate an ersatz convention in order to

circumvent the real one that was blocking its path to the Court.

18. And if Bolivia delayed to such an extent in withdrawing its reservation, it was because it

wished to preserve itself from the implacable terms of Article VI right until the end. And if it

finally decided to withdraw it, it was in no way “to dispel any doubts regarding the applicability of

the Pact to its relations with Chile”, as my friend Professor Remiro Brotóns was kind enough to put

it , but because it knew very well that this reservation would in any event have no effect vis-à-vis

the only State that counts in this instance, namely Chile; indeed, Chile had twice stated quite

unambiguously, most recently when Bolivia ratified the Pact of Bogotá in 2011, that it objected to

such a reservation, as it is entitled to do under the Vienna Convention on the Law of Treaties.

Hemmed in by the Pact, Bolivia then decided to seek a way out by trying to suppress the terms of

the 1904 Peace Treaty in order to make it easier to forget.

19. Can we then take the view that the Court might wait to pronounce on its jurisdiction, that

the Parties should turn to deal with the merits of the dispute? Certainly not! For the Republic of

Chile, the answer to that question is obviously negative, Members of the Court, by virtue of the

legal context in which the Court has been seised.

II. The basis relied on for the Court’s jurisdiction requires Chile’s objection
to be answered at the preliminary stage

20. Contrary to what was presented to you in the objection to the Court’s jurisdiction raised

by Colombia in its case with Nicaragua, an objection which you considered in your frequently cited

Judgment of 2007, there is no second basis here for the jurisdiction of the Court, with the Pact on

the one hand and the Court’s Statute on the other. Here, there is only one basis relied on by the

Applicant in its claim: it all comes down to reliance on the Pact. So those are the provisions which

have to be applied. There is also, apart from the pipe dream concocted by Bolivia, only one

93CR 2015/19, p. 44, para. 17 (Remiro Brotóns). - 31 -

37 applicable treaty, the provisions of which, unlike those of the 1928 Treaty between Nicaragua and

Bolivia, are entirely unambiguous in terms of both their content and their validity at the time when

the Pact was signed in 1948.

21. Mr. President, you have encouraged us to avoid unnecessary repetition in our second

round, and I shall not set forth here again the reasons why we do not find ourselves in either of the

situations identified by the Court in 2007 as exceptions to the right of a State that raises an

94
objection to have it answered at the preliminary stage .

22. The only test to verify the jurisdiction of the Court is whether the treaty giving the

responses of which we are aware to the matters raised by Bolivia’s Application was in force or not

in 1948. And Bolivia itself acknowledges that such was indeed the case, while at the same time

trying to have that real treaty prevailed over by an improbable pactum.

23. I would emphasize, however, that applying the above-mentioned test of jurisdiction

corresponds to answering Chile’s objection. And that in no sense means entering into the

substance of a Bolivian claim based on the allegation that a right exists which it can rely on without

even telling us when it came into being! Even though the date when it emerged is nonetheless

critical in terms of verifying whether or not the Court has jurisdiction in this case!

24. The Court will thus encounter no difficulty here in establishing another right, of a purely

procedural nature: the right of the author of a preliminary objection to have, at the preliminary

stage, a judgment on that objection. And let us bear in mind that the Court is all the more

encouraged to pronounce in limine litis since in the Pact of Bogotá, Article XXXIII states that if the

parties fail to agree as to whether the Court has jurisdiction over the controversy, the Court itself

shall “first” decide that question.

25. One final reason, though  not an ancillary reason, but a fundamental one  going

beyond even the provisions of the lex specialis represented by the Pact of Bogotá, seems to lead

38 necessarily to the objection filed by the Republic of Chile being examined and dealt with at the

preliminary stage.

9Territorial and Maritime Dispute (Nicaragua v. Colombia), Preliminary Objections, Judgment, I.C.J. Reports
2007 (II), p. 852, para. 51; CR 2015/19, p. 44, para. 17 (Remiro Brotóns); CR 2015/18, p. 63, para. 6 (Dupuy). - 32 -

26. And that reason lies quite simply in what has always been the consensual nature of your

jurisdiction.

27. Was it not your predecessor, the Permanent Court of International Justice, which

recognized in the Mavrommatis Palestine Concessions case that its jurisdiction was limited and

95
only existed in so far as consent had been given by the respondent ? As one informed

commentator on this jurisprudence noted, such a consideration is all the more valid when the Court

is faced with an objection raised by that respondent; and that in itself justifies the objection being

96
answered before all other things, to which the respondent is entitled , moreover, as you recalled

again in 2007 .97

That brings me to an end, Mr. President, and I would ask you now to give the floor to

Professor Harold Koh.

The PRESIDENT: Thank you, Professor Dupuy. Since the hearing began a little after

4.30 this afternoon, Chile may continue for a short while after 6 p.m., but I would ask its remaining

speakers not to go beyond 6.10. I give the floor to Mr. Koh.

M. KOH :

1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, c’est un honneur pour moi que

de me présenter devant vous au nom du Chili pour mettre en évidence ce qui se joue réellement

dans le cadre de ces audiences.

2. Il ressort clairement des exposés que vous ont été présentés jusqu’à présent que la Cour

peut faire droit à l’exception préliminaire du Chili sans se prononcer sur le fond de l’affaire. La

Bolivie et le Chili sont, l’un vis-à-vis de l’autre, liés par deux traités : le traité de paix bilatéral de

1904 et le pacte multilatéral de Bogotá de 1948 . Le premier a réglé, et régit, la question du droit

95
Mavrommatis Palestine Concessions, Judgment No. 2, 1924, P.C.I.J., Series A, No. 2, p. 16.
96
G. Abi-Saab, Les exceptions préliminaires dans la procédure de la Cour internationale, 1967, p. 35.
97Territorial and Maritime Dispute (Nicaragua v. Colombia), Preliminary Objections, Judgment, I.C.J. Reports
2007 (II), p. 852, para. 51.

98 Traité de paix et d’amitié entre la Bolivie et le Chili, signé à Santiago le 20 octobre 1904 (le «traité de paix
de 1904»), onglet n 1 du dossier de plaidoiries.

99 Traité américain de règlement pacifique, signé à Bogotá le 30 avril 1948 (entré en vigueur le 6 mai 1949) (le
«pacte de Bogotá»), onglet n 3 du dossier de plaidoiries. - 33 -

39 d’accès souverain au Pacifique revendiqué par la Bolivie. Quarante-quatre ans plus tard, le

deuxième, par son article VI, a expressément exclu de la compétence de la Cour toute question

«réglée» ou «régie» par un traité en vigueur en 1948, privant donc la Cour de compétence à l’égard
100
de la requête de la Bolivie .

3. Mais quels risques la Cour prendrait-elle si elle devait malgré tout se déclarer compétente

ou traiter la question de la compétence en même temps que le fond ? La Bolivie formule sa

demande comme portant sur l’obligation de négocier un accès souverain qui incomberait au Chili.

Cette nouvelle demande a de lourdes conséquences sur l’inviolabilité des traités et la faculté des

nations à mener librement des pourparlers diplomatiques sans préjudice des questions déjà réglées.

4. A l’article VI du pacte de Bogotá, l’ensemble des hautes parties contractantes sont

convenues que la Cour ne devait pas compromettre l’inviolabilité des traités existants en se

déclarant compétente à l’égard de questions déjà réglées ou régies par un traité. Pourtant, en

faisant valoir une «obligation de négocier», la Bolivie demande à présent à la Cour de prescrire au

Chili de renégocier un traité en vue de transformer son accès non souverain à la mer par le territoire

chilien en un accès souverain. Faire droit à la demande de la Bolivie bouleverserait les frontières

stables définies par un traité bilatéral conclu il y a plus de 110 ans.

5. Hier, la Bolivie a invoqué, à l’appui de l’obligation de négocier qu’elle allègue, divers

échanges diplomatiques antérieurs et postérieurs à 1948. Mais ce qu’elle a oublié, c’est que,

lorsqu’elles ont conclu le pacte de Bogotá, les hautes parties contractantes ne cherchaient pas à

mettre fin à ces échanges, mais à les inscrire dans un cadre non pas judiciaire mais diplomatique.

Comme Mme Pinto l’a précisé, en 1948, les parties au pacte ont choisi d’aller de l’avant, pas de

101
reculer . Elles n’ont jamais exclu la possibilité de mener, à l’avenir, des pourparlers
102
diplomatiques au sujet de questions d’intérêt mutuel déjà réglées ou régies par traité . En

revanche, bien qu’elles aient permis que certaines questions soient portées devant la Cour, les

parties au pacte ont toujours refusé qu’un seul Etat demande unilatéralement le réexamen d’une

question déjà réglée au moyen d’une entente ou régie par un traité en vigueur. Par conséquent, la

100 o
Pacte de Bogotá, onglet n 3 du dossier de plaidoiries, p. 4, 32 et 33, art. VI.
10CR 2015/18, p. 22-23, par. 8-9 (Pinto).
102
Ibid., p. 27, par. 22 (Pinto). - 34 -

prétention de la Bolivie à ce que lui soit reconnu un droit historique d’accès souverain au Pacifique

— droit antérieur au traité de paix de 1904 et ayant continué d’exister après la conclusion de cet

instrument — relève de la négociation diplomatique, et non d’une décision rendue par une

40 juridiction n’ayant pas compétence pour connaître de questions réglées de longue date et portées

devant elle par une requête unilatérale.

6. Si la Bolivie avait voulu consacrer l’obligation juridique incombant au Chili de négocier

par la suite en vue de lui assurer un accès souverain à la mer, elle aurait pu inclure dans le traité une

disposition prescrivant aux deux Parties de négocier de bonne foi sur cette question. Au lieu de

cela, la Bolivie demande à la Cour d’exercer sa compétence pour prescrire judiciairement une

obligation de négocier en vue d’atteindre un résultat précis. Dans une situation aussi déséquilibrée,

les deux nations ne sont pas libres d’engager des pourparlers diplomatiques sans préjuger du

résultat de ces négociations. Ce que la Bolivie sollicite instamment, ce n’est pas une obligation de

négocier de bonne foi, mais l’obligation d’atteindre un résultat prédéterminé.

7. D’après la théorie de la Bolivie, toute négociation engendre deux voies parallèles. Chaque

fois qu’un Etat conclut un traité qui règle une question, il peut en résulter une série d’obligations

fantômes de négocier au sujet d’une autre question qui n’a pas été réglée à la satisfaction de la

partie adverse. Et, lorsque cet Etat engage des pourparlers diplomatiques au sujet de cette autre

question, cela crée une nouvelle base  un pactum de contrahendo  permettant d’invoquer la

compétence de la Cour. Hier, M. Akhavan a soutenu que cette théorie «ne vis[ait] pas à créer un

103
précédent d’application générale en droit international» . Il n’en demeure pas moins qu’elle

aurait deux conséquences désastreuses.

8. Premièrement, l’article VI du pacte de Bogotá serait balayé. Or cet article préserve les

frontières souveraines de toute contestation unilatérale devant la Cour. Mais d’après la théorie de

la Bolivie, aucune question faisant l’objet de négociations ne serait jamais réglée. La quasi-totalité

des traités de limites, tels que le traité de paix de 1904, qui constitue le cadre des relations

quotidiennes des deux pays, pourraient faire l’objet d’un réexamen judiciaire dès lors que les

parties se sont assises à la table des négociations. Comme l’a expliqué sir Daniel, le traité de paix

103CR 2015/19, p. 52, par. 6 (Akhavan). - 35 -

de 1904 a non seulement énoncé un règlement territorial, mais aussi une série d’autres

arrangements et engagements visant à renforcer, à l’avenir, les liens politiques et commerciaux

entre les deux Etats . Si la Bolivie obtenait que la Cour réexamine le volet relatif au règlement

territorial, pourquoi ne la contraindrait-elle pas à revoir aussi les autres aspects de ce traité ?

9. Deuxièmement, le pacte de Bogotá visait à mettre un terme aux questions territoriales,

mais aussi à une longue liste d’autres différends historiques. Le fait que deux Etats puissent

41 négocier au sujet d’une question réglée par un traité conclu antérieurement ne saurait conférer

compétence à la Cour pour réexaminer cette question. Autrement, les Etats d’Amérique latine ne

pourraient pas négocier librement sur une question réglée ou régie avant 1948 sans risquer de

rétablir la base de compétence même qu’ils avaient auparavant exclue. La crainte de procédures

judiciaires aurait alors l’effet pervers de retenir les Etats de négocier sur de telles questions. Si l’on

appliquait la théorie de la Bolivie, cela paralyserait le dialogue diplomatique, et la Cour se

trouverait en permanence plongée au cœur de pourparlers diplomatiques délicats, ce qui ne

correspond guère à sa fonction judiciaire.

10. La nouvelle théorie de la Bolivie permettrait à des conseils de talent de fabriquer de

toutes pièces la compétence de la Cour à l’égard de questions déjà réglées, celle-ci pouvant alors

s’attendre à subir bien d’autres audiences sur des exceptions préliminaires — comme celle

d’hier —, regorgeant de fragments de discours, de déclarations ministérielles et d’échanges

diplomatiques censés permettre de contourner l’exclusion juridictionnelle que constitue l’article VI.

Nonobstant les efforts de M. Akhavan pour en minimiser la portée, la théorie de la Bolivie

encouragerait sans aucun doute les tentatives unilatérales visant à remettre en cause, par voie

judiciaire, l’histoire du continent et ses frontières. Cela finirait par vider de leur sens les limites

soigneusement établies par le pacte de Bogotá.

11. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, ce qui est en jeu ici va au-delà

des intérêts des deux Parties. Les deux instruments pertinents aux fins de la compétence font partie

105
d’un ensemble plus large de traités qui lient la Bolivie et le Chili . Le pacte de Bogotá est

parvenu à empêcher que des règlements territoriaux existants et d’autres questions connexes soient

104
CR 2015/18, p. 37-38, par. 19-26 (Bethlehem).
105CR 2015/18, p. 55, par. 33 (Wordsworth). Voir aussi EPC, note de bas de page 88. - 36 -

e
réexaminés à l’initiative d’un seul Etat. Mais, comme l’a expliqué sir Daniel, au cours des XIX et

XX siècles, la Bolivie a, par douze traités distincts au moins, défini des frontières en litige non

106
seulement avec le Chili, mais aussi avec ses quatre autres voisins . La Bolivie peut-elle à présent

demander à la Cour de prescrire la renégociation de toutes ces frontières ? Et même si elle s’en

abstenait, ces autres partenaires régionaux pourraient-ils, eux aussi, se présenter devant la Cour en

lui adressant pareille demande ?

12. La Cour a précisé que [projection]

«[l’article VI] visait clairement à empêcher que de telles procédures, et en particulier
les voies de recours de nature judiciaire, pussent être utilisées afin de rouvrir des
42
questions déjà réglées entre les pa107es au pacte par une décision judiciaire
internationale ou par un traité» .

Combien de questions réglées de ce type pourrait-il y avoir ? Doivent-elles désormais toutes être

réexaminées par voie judiciaire ? Qu’en est-il des frontières définies avant 1948 concernant

d’autres pays d’Amérique latine qui ne sont pas devant la Cour aujourd’hui ? Et si la question de

savoir si la Bolivie a ou non droit à un accès souverain, question manifestement réglée par le traité

de paix de 1904, pouvait être réexaminée par la Cour, pourquoi ne pas réexaminer également les

nombreuses autres questions que tout le monde considérait comme résolues ?

13. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, la stabilité des frontières en

Amérique latine est un succès pour le continent, obtenu de haute lutte. Le respect des traités, des

frontières, de la primauté du droit et de la stabilité exige que le Chili et ses voisins

latino-américains, Bolivie comprise, honorent leurs engagements conventionnels. L’article VI du

pacte de Bogotá consacre ce principe.

14. Au fond, l’argumentation de la Bolivie revient à ébranler et à déstabiliser des structures

juridiques bien établies visant à préserver les frontières régionales et conserver des relations

amicales. Or ces structures sont essentielles, non seulement pour les relations bilatérales pacifiques

de ces pays, mais aussi pour leur participation à la coopération régionale.

15. Permettre aux demandeurs de se soustraire à l’article VI par un tour de passe-passe

juridictionnel encouragerait d’autres Etats de la région à tenter unilatéralement de faire réexaminer

106CR 2015/18, p. 35, note de bas de page 69 (Bethlehem).
107
Différend territorial et maritime (Nicaragua c. Colombie), exceptions préliminaires, arrêt,
C.I.J. Recueil 2007 (II), p. 858, par. 77 ; les italiques sont de nous. - 37 -

des questions résolues à l’égard desquelles le pacte avait exclu le règlement judiciaire. Cela

fragiliserait un cadre juridique régional conçu pour favoriser la stabilité et la coopération pacifique.

Cela paralyserait les discussions indispensables menées dans des enceintes diplomatiques

 notamment par les deux Parties — au sujet de questions délicates. Cela permettrait aux Etats

d’entraîner la Cour dans l’examen de questions diplomatiques épineuses.

16. Pour conclure, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, la Bolivie

invite la Cour à remettre en cause ce qui était réglé depuis longtemps, et ce, en fabriquant de toutes

pièces une compétence permettant de régir, par voie judiciaire, ce qu’un traité contraignant régit

depuis longtemps. Faire droit à cette demande ébranlerait l’inviolabilité des traités ayant force

obligatoire, ainsi que la faculté des Etats à engager librement des pourparlers diplomatiques. Cela

compromettrait le respect des traités contraignants et du droit international en tant que bases de la

stabilité régionale, de la paix et de la coopération en Amérique latine. Pour éviter cela, la Cour

devrait faire droit à l’exception préliminaire du Chili en confirmant, au vu des éléments dont elle

43 dispose, que la demande de la Bolivie soulève une question qui était «réglée» et «régie» par un

traité liant les deux Parties au moment de la conclusion du pacte de Bogotá.

17. Je vous remercie, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, et vous prie

de bien vouloir appeler à la barre l’agent, qui formulera ses conclusions. Merci.

The PRESIDENT: Thank you, Mr. Koh. I now give the floor to H.E. Mr. Felipe Bulnes,

Agent of Chile.

M. BULNES :

Conclusion de l’agent du Chili et conclusions finales

1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, je conclurai en rappelant que,

dans le traité de paix de 1904, la Bolivie et le Chili

a) ont rétabli des relations pacifiques, vingt ans après la fin de la guerre du Pacifique ;

b) ont délimité l’intégralité de leur frontière de telle manière que la Bolivie n’avait pas droit à un

territoire côtier ; et - 38 -

c) sont convenus que la Bolivie pourrait, à titre perpétuel, accéder librement à la mer par le

territoire du Chili et ses ports situés sur le Pacifique. Depuis lors, la Bolivie n’a cessé de faire

abondamment usage de ce droit perpétuel et absolu de libre transit.

2. Depuis près d’un siècle, la Bolivie aspire à modifier le règlement conclu en 1904 et à

obtenir un accès souverain à la mer.

3. La Bolivie a toujours décrit cette aspiration — et c’est toujours le cas aujourd’hui —

comme «une revendication historique», se rapportant à un territoire perdu lors d’une guerre qui a

pris fin en 1884 . Or les pays d’Amérique latine ont décidé, à l’article VI du pacte, de se tourner

vers l’avenir, et d’exclure les demandes unilatéralement soumises à la Cour dans le cadre d’une

revendication historique.

4. Comme vous l’avez vu, lorsque la Bolivie a signé le pacte en 1948, et de nouveau

109
lorsqu’elle l’a ratifié en 2011, elle a formulé une réserve . Elle savait qu’une demande visant à

modifier le règlement énoncé dans le traité de paix de 1904 ne relèverait pas de la compétence de la

Cour.

44 5. Avant que la Bolivie ne décide unilatéralement d’introduire la présente instance, les deux

Etats s’accordaient à reconnaître cette exclusion juridictionnelle, qui était essentielle aux yeux du

110
Chili lorsqu’il a décidé de ratifier le pacte et de rester partie à cet instrument .

6. Chose plus importante encore, la Bolivie demande à la Cour, par la décision qu’elle

sollicite, de prescrire au Chili d’accepter de modifier le règlement énoncé dans le traité de paix de

1904. Elle lui demande d’ordonner au Chili de lui céder un territoire, de transformer son accès non

souverain à la mer en un accès souverain. Telle est la conséquence inévitable du pactum de

111
contrahendo sur lequel l’agent et les conseils de la Bolivie ont mis l’accent .

108 o
Discours du président Evo Morales lors de la Journée bolivienne de la mer, 23 mars 2011 ; onglet n 32 du
dossier de plaidoiries, p. 5 et 6. Voir aussi déclaration de S. Exc. M. Choquehuanca, ministre bolivien des affaires
étrangères, quatrième session de l’assemblée générale de l’OEA, 5 juin 2012, onglet n 34 du dossier de plaidoiries, p. 13
et 14.

109Chambre bolivienne des députés, législature 2011-2012, 38 session, 24 mars 2011 ; onglet n 33 du dossier de
plaidoiries, p. 31-32.

110 Débat de la Chambre du Congrès national du Chili, contexte du décret n° 526 – Traité américain de
règlement pacifique (1967) ; EPC, vol. 3, p. 738 et 739 (annexe 49) ; et Chambre des députés du Chili, 42 session,
12 mai 1965 ; onglet n 31 du dossier de plaidoiries, p. 11-14.

111Voir, par exemple, CR 2015/19, p. 11, par. 6 (Rodríguez Veltzé). - 39 -

7. Or l’article VI — et j’en aurai terminé —, empêche la Bolivie de tirer ainsi abusivement

profit du pacte ; l’ensemble des parties à cet instrument ont confié à la Cour la mission d’empêcher

les Etats de présenter des demandes artificielles de ce type, conçues pour tenter d’établir sa

compétence là où, en réalité, elle n’existe pas.

8. Au vu de ce qui précède, j’ai l’honneur de donner officiellement lecture de la conclusion

finale du Chili :

«La République du Chili prie respectueusement la Cour de dire et juger que la demande présentée

par la Bolivie à son encontre ne relève pas de la compétence de la Cour.»

9. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, je remercie sincèrement la

Cour pour l’attention vigilante qu’elle a accordée à cette question délicate. Je remercie également

le greffier et les fonctionnaires du Greffe d’avoir permis le bon déroulement de la procédure, ainsi

que les interprètes, les traducteurs et les dactylographes pour leur excellent travail.

10. Monsieur le président, ainsi s’achèvent les plaidoiries du Chili.

The PRESIDENT: Thank you Mr. Bulnes. The Court takes note of the final submissions

which you have just read out on behalf of Chile. Bolivia will present its second round of oral

argument on Friday 8 May, at 3 p.m. It will have a maximum of one hour and 35 minutes in which

to do so.

The Court is adjourned.

The Court rose at 6.10 p.m.

___________

Document Long Title

Traduction

Links