Opinion individuelle de M. Córdova (traduction)

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034-19590321-JUD-01-02-EN
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034-19590321-JUD-01-00-EN
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OPINION INDIVIDUELLE DE M. CORDOVA

Je suis en désaccord avec la majorité de la Cour, aussi bien
quant à son raisonnement que quant à >a conclusion concernant la
première exception préliminaire des Etats-Unis. Les Etats-Unis
prétendent que, le différend dans la présente affaire étant néavant
le 26 août 1946, la Cour n'a pas compétence pour connaître de la
réclamation du Gouvernement suisse et statuer à ce sujet. Je
partage ce point de vue.
La déclaration- d'acceptation de la juridiction obligatoire de
la Cour par les Etats-Unis limite la compétence de la Cour aux
((différends d'ordre juridique qui s'élèveront à L'avenirN, c'est-à-
dire après le 26 août 1946, la date de la déclaration. Les questions
essentielles pour statuer sur cette première exception préliminaire

sont donc la définition du différend d'ordre juridique international
que la Suisse a soumis à la Cour, de mêmeque la date à laquelle ce
différendest né.
Il me semble que la majorité de la Cour a fondé sa décisionsur
cette exception en présumant que le différend juridique entre les
Parties est constitué par les attitudes divergentes qu'elles ont prises
sur la question de la restitution des avoirs à 1'Interhandel par les
États-unis. Je ne peux pas me joindre à cette conclusion tout àfait
essentielle de la Cour. et c'est de cette différencede oints de vue
que découlela différenceentre les conclusions de la majorité et les
miennes. Si le vrai litige soumisà la Cour se limite à la restitution

des avoirs de lJInterhandel mis sous séquestre, alors, évidemment,
la conclusion que ce différend est né après le26 août 1946 est cor-
recte, ainsi que la décision de rejeter la première exception. Mais
je suis forcé de me séparer de la majorité parce qu'à mon avis le
différendjuridique, le véritable différend entre les gouvernements,
porte sur leurs points de vue opposésconcernant le caractère juri-
dique, ennemi ou neutre, de 1'Interhandel.
Les Parties à ce différend sont parfaitement d'accord sur le
droit applicable à l'affaire. Elles sont d'accord, notamment, sur
les aspects positifs et négatifs du principe de droit international
qui permet, d'une part à un Etat belligérant de saisir et de mettre
sous séquestre les biens en,nemis situéssur son territoire, et d'autre

part interdit à ce mêmeEtat de saisir les biens appartenant à un
pays neutre ou àses ressortissants. Toute la discussion diplomatique
entre les deux Gouvernements et les pièces de procédure de leurs
agents manifestent l'accord sur ce- principe, qui au surplus est
égalementincorporédansla loi des Etats-Unis, le Trading with the
Enemy Act du 6 octobre 1917.Cette loi permet au Gouvernement des
Etats-Unis de saisir et de s'approprier les avoirs des ressortissants
d'un pays ennemi, mais en mêmetemps elle exclut de cette mesureles biens des ressortissants d'un État neutre permettant la restitu-
tion à leurspropriétaires desbiens neutres saisisà tort. Les Parties
sont pleinement d'accord, à la fois sur la loi applicable et sur la
conséquenceinéluctable de l'application de cette 30i,la conservation

juridique des avoirs de 1'Interhandel par les Etats-Unis ou leur
restitution àla société suisse.

Le Gouvernementdes États-unis a saisiles biens de I'Interhandel,
qui comprennent principalement et, entre autres avoirs, les go pour
cent du capital de laGeneralAniline andFilm Corporationconstituée
aux Etats-Unis et y traitant des affaires. Quand ils ont mis ses
avoirs sous séquestre, les Etats-Unis ont alléguéque lJInterhandel
était en fait propriété allemande et n'était qu'un prête-nom pour
la Farben Industry de Francfort. Après avoir fait des enquêtes, le
Gouvernement suisse est arrivé à la conclusion que tel n'était pas
le cas, qu'au moment de la mise sous séquestre des actions qu'elle
possédait dans la GeneralAniline andFilm Corporation,le 16 février
et le 24 avril 1g42,l'Interhandel n'était plus sous le contrôle d'inté-

rêtsallemands, ayant, dès juin 1940, rompu tous rapports finan-
ciers et administratifs avec la société allemande.
Ce différendjuridique fondamental entre les Parties, le caractère
juridique de I'Interhandel, s'est ramifié en d'autres divergences
telles, par exemple, celle relative aux diverses procédyes pour
résoudre ce différendcomme touchant àl'obligation des Etats-Unis
de se conformer à la décision de l'Autorité suisse de recours ou
l'obligation de ce mêmeGouvernement de participer à une procé-
dure de conciliation ou d'arbitrage du différend.Tous ces différends
secondaires reposent, soit sur l'Accord de Washington du 25 mai
1946, soit sur le Traité d'arbitrage et de conciliation du 16 février
1931. A mon avis, tous ces différends ne sont que des phases d'un
seul et mêmedifférend juridique - le caractère neutre ou ennemi
de IJInterhandel. Si les deux Gouvernements avaient étéd'accord
sur le caractère belligérant ou neutre de I'Interhandel, l'affaire

n'aurait jamais étésoumise à la Cour ni aux juridictions internes
des Etats-Unis. La réclamation n'aurait jamais existé.

Si le Gouvernement suisse avait soymis à la Cour sa réclamation,
fondéeseulement sur le refus par les Etats-Unis d'appliquer la déci-
sion de l'Accord de Washington, ou de soumettre à l'arbitrage le
différendconformément au Traité de 1931, j'aurais pu êtreenclin à
penser que le différend aurait porté sur l'inexécution de cet accord
ou de ce traité. Mais ayant présentésa réclamation sur le base de
l'application de principe de droit international du respect dû par
les belligérants aux avoirs neutres, je pense que les conclusions sub-
sidiaires suisses ne sont qu'un moyen d'arriverà la mêmeconclusion
recherchée par le demandeur, la reconnaissance du caractère de
sociéténeutre de I'Interhandel et, comme corollaire, que celle-ci a droit à la restitution des avoirs. En d'autres termes, l'obligation de
rendre ou de restituer les avoirsà 1'Interhandel n'est que la consé-
quence de la solution du véritable et seul différend juridique entre
lesParties -le caractère de la société suiss- mais non le différend
fondamental lui-même. Il se peut même que la restitution des
actions et autres avoirs en elle-mêmene soit pas un différend juri-
dique.
Aprèsavoir ainsi définile différend juridique, il faut fixer l'époque
à laquelle il est réellement né.Ce n'est qu'alors que nous serons en
mesure d'analyser la première exception préliminaire à la lumière
de ces deux questions fondamentales.
Le Gouvernement des Etats-Unis a mis sous séquestre les avoirs

de lJInterhandel le 16 février et le 24 avril 1942. Comme je l'ai dit,
cette mesure a étéprise sur la base du prétendu caractère ennemi de
1'Interhandel affirmépar les autorités des Etats-Unis en dépit de
son apparente nationalité suisse. C'est ainsi qu'elle fut notifiée à
l'agent diplomatique suisse à Washington, dans un aide-mémoiredu
16 février1942 (pièce à l'appui noro des exceptionspréliminaires des
Etats-Unis). Cet aide-mémoire explique également que la mesure ne
signifie nullement l'intention de saisir tous avoirs présentant de
bonne foi le caractère suisse, ce qui évidemment signifie que les
actions ou autres avoirs de 1'Interhandel mis sous séquestre
n'étaient pas considéréscommeappartenant de bonne foi àla société
suisse. C'est le premier document du dossier qui montre que l'une
des Parties a énoncésa position à l'autre sur le caractère de l'Inter-
handel comme société sous contrôle ennemi. Le Gouvernement
suisse n'a pas immédiatement contesté ce caractère ennemi, ni par
conséquent le droit des Etats-Unis de séquestrer ses avoirs. Il a
décidétout d'abord de procéder à certaines enquêtes pour déceler
la véritable situation entre 1'Interhandel et la sociétéallemande

Farben Industries de Francfort. D'après les allégations dans cette
affaire, les deux enquêtes conduites par l'Autoritésuisse compétente
ont montré que les liens entre 1'Interhandel et Farben Industries
avaient étécomplètement rompus depuis 1940, c'est-à-dire avant
mêmel'entrée en guerre des Etats-Unis. Le Gouvernement suisse a
communiqué ses conclusions aux autorités américaines, en expri-
mant l'espoir qu'on~parviendraità un règlementau sujet des avoirs de
l'lnterhandel aux Etats-Unis, avoirs et actions qui avaient étémis
sous séquestre en-1942. Cette demande a étécommuniquée au Gou-
vernement des Etats-Unis dans le mémoire daté du 4 juin 1947
(pièceà Z'appuino 16, exceptions préliminaires). En d'autres termes,
le Gouvernement suisse n'aurait jamais réclaméla restitution des
avoirs s'il n'en était pas arrivé à la conclusion que I'Interhandel
était. de bonne foi. une sociéténeutre suisse et les Etats-Unis
n'auraient jamais mis sous séquestre ces avoirs s'ils n'avaient pas
cru que lJInterhandel était, en réalité, une firme appartenant à
l'ennemi. Il existe bien d'autres communications entre les deux Gouverne-
ments visant des aspects différents et des nuances dans les négocia-
tions touchant au caractère de I'Interhandel, mais toutes se ratta-
chent au blocage provisoireen Suisse de ces avoirs par le Gouverne-
ment suisse. La note datée du 4 juin 1947 paraît êtrele premier

document dans les dossiers qui-énonce les vues opposéesdu Gouver-
nement suisse sur la thèse des Etats-Unis concernant le caractère de
sociétéappartenant à l'ennemi de I'Inteqhandel, à propos de la
restitution des avoirs mis sous séquestreaux Etats-Unis.'aurais donc
accepté la date du 4 juin 1947 comme date à laquelle s'est élevéle
différendentre les deux Gouvernements sur le caractère ennemi ou
neutre de l'Interhande1 à propos de la mise sousséquestre des avoirs
dela GeneralAniline andFilm Corporation, si ce n'était à cause des
expressions dont s'est servi le Département d'Etat dans son mémo-
randum du 18 juin 1947, où, en réponse à l'aide-mémoire du 4 juin
1947 du Gouvernement suisse déjà cité,les États-unis ont déclaré
(pièce à l'appui no 17, exceptions préliminaires) :

((Au cours desnégociations qui ont aboutià l'Accorddu 25 mai
1946, les représentantdses Etats-Unis ont clairementindiquéqu'une
décision, intervenantdans l'afaire de l'lnterhafidel, ne pourrait
exercerd'e8etsur un règlementquelconqueou sur une décisionvisant
la mise sous séquestrep,ar leAlien Property Custodian, en février
1942, des actions de la General Aniline and Film Corporation. Le
Gouvernementdes Etats-LTnisn'a pas modifiésa malaièrede voir en
l'espèce.))
C'est-&-direqueleGouvernementdes États-unis affirmequ'avant
le 25 mai 1946, date de l'Accord de Washington, il avait déjà
discutéet rejeté la thèse du Gouvernement suisse que les conclusions
des Autorités suisses dans le cadre de l'Accord de Washington
concernant le caractère neutre ou ennemi de 1'Interhandel dussent

avoir un «effet sur un règlement quelconque ou sur une décision 1)
visant la mise sous séquestre de ses avoirs et actions. Le Gouverne-
ment demandeur n'ayant fait aucune réponse à cette affirmation
de la plus grande importance, je me sens en droit de penser que le
diférend sur le caractère juridique de l'Interhande1 relatif à la mise
sous séquestre des actions et avoirs par les États-unis a pris nais-
sance avant mêmela date de l'Accord de Washington, le 25 mai 1946.
Je concluç donc que le différendest né avant la date de la décla-
ration des Etats-Unis du 26 août 1946 et que la Cour aurait dû
retenir la première exception préliminaire) :

Je suis d'accord avec la décisionde la Cour de retenir la troisième
exception préliminaire; mais à mon avis, le raisonnement de la
majorité, se fondant principalement sur la nécessitéd'éviter le
danger de suivre deux procédures - nationale et internationale-

ne couvre pas tous les points soulevéspar la Suisse. Je crois que laCour aurait dû fonder l'application du principe de l'épuisement
des recours internes sur une base beaucoup plus large.
La Cour est justifiée à conclure que les tribunaux internes des
États-unis sont saisis exactement du mêmelitige que la Cour aurait
à trancher si elle avait à examiner le fond de l'affaire avant que
les recours internes n'aient étéépuisés.La conclusion que l'Inter-
handel devrait d'abord épuiser tous les recours internes en suspens
aux Etats-Unis avant que la Cour ne puisse examiner et trancher
les mêmesquestions est évidemment parfaitement correcte. Mais,
outre la question de l'existence de deux procédures parallèles,
ily a d'autres traisons qu'à mon avis la Cour aurait dû également
prendre en considération en appliquant le principe à la fois aux
conclusions principales et aux conclusions subsidiaires de la Suisse.

L'argument touchant aux procédures parallèles, que le principe
de l'épuisement des recours internes cherche à éviter, peut être
opposé avec succès aussi bien aux conclusions principales qp'aux
conclusions subsidiaires visant la non-application par les Etats-
Unis de la décision de l'Autorité suisse de recours et leur refus
de soumettre le différend à l'arbitrage. Il ne peut cependant être
opposé à la thèçe avancée par la Suisse tendant à ce que la Cour
décide que les Etats-Unis sont tenus d'entamer la procédure de
conciliation. conformément au Traité d'arbitrage et de conciliation
de 1931. ~a'conciliation étant une procédure qG présente la nature
d'un règlement extrajudiciaire par les parties, qui n'aboutit pas à
une décisionobligatoire, ne saurait certainement pas êtreconsidérée
comme une procédure internationale parallèle à celle suivie devant
les tribunaux internes des Etats-Unis.
Pour pouvoir appliquer le principe de l'épuisement des recours
internes à la réclamation de la Suisse visant la conciliation, il
faut recourir à d'autres raisons qui en sont à la base. Ce principe,
comme je l'ai dit, trouve sa base et sa justification dans des motifs

peut-être plus importants que la simple possibilité d'éviter des
procédures et des décisions contradictoires. La principale raison
de son existenceest la nécessité absolued'harmoniser les juridictions
internationale et nationale - assurant ainsi le respect dû à la
juridiction souveraine des Etats - auxquellesdoivent se soumettre
les ressortissants et les étrangers et dans la protection diplomatique
des gouvernements à laquelle seuls ont droit les étrangers. L'on
parvient à cette harmonie, à ce respect dela souveraineté des États,
en accordant priorité à la juridiction des tribunaux internes de
1'Etat dans les affaires où des étrangers introduisent unarecours
contre un acte de ses autorités exécutives ou législatives. A son
tour, cette priorité n'est assurée que par le respect du principe de
l'épuisement des recours internes.
Le droit de l'État - la Suisse, dans la présente espèce- à assu-
rer la protection de son ressortissant, l'Interhande1, contre un
prétendu acte dommageable d'un gouvernement étranger, celui desÉtats-unis, ne se ppse pas, juridiquement, pendant que les juridic-
tions de ce dernier Etat tranchent définitivement la question de cet
acte dommageable, par une décision de leurs juridictions. Jusqu'à
ce que les tribunaux de 1'Etat défendeur aient rendu leur décision
définitive, 1'Etat ne peut être tenu pour internationalement res-
ponsable, pour la bonne raison que le dommage n'est pas encore
réalisé.Ce principe est à la base de tous les systèmes juridiques,
droit ciyil et droit pénal, droit interne et droit intèrnational.
Un Etat ne peut mêmepas exercer sa protection diplomatique,
et moins encore recourir à une procédure internationale de recours
quelconque, tant que son ressortissant n'a pas préalablement épuisé

les recours juridiques internes qui lui sont offerts par 1'Etat dont
il critique les mesures.
Dans la présente affaire, on ne saurait affirmer que le dommage
a étécausé à lJInterhandel par la mise sous séquestre de ses biens
Dar les autorités locales des Etats-Unis tant aue cette mesure n'est
bas devenue définitive, c'est-à-dire tant qui les juridictions des
Etats-Unis n'ont pas définitivement confirmé cette action par une
décision ayant force de chose jugée. C'est alors et alors seulement
que 1'Interhandel et le Gouvernement suisse seront en droit de
recourir à cette Cour internationale ou à toute autre procédure de
règlement international applicable, tendant à la réparation de la
prétendue violation du droit des gens, réparation que les autorités
locales ne seront plus en mesure d'accorder. C'est pourquoi le
principe bien établi en procédure internationale de l'épuisement des

recours internes a pour base l'idée fondamentale qu'une réclamation
ne peut êtreprésentée,qu'il n'y a pas de réclamation internationale
tant que l'étranger victime du dommage ne s'est pas conformé à
ce principe.
Dans la présente espèce, il semble qu'il y ait eu erreur quant à
1:épuisement des recours internes puisque le Gouvernement des
Etats-Unis lui-mêmea exprimé l'opinion que cet épuisement avait
déjà eu lieu. Sur cette impression erronée, semble-t-il, le Gouverne-
ment suisse, a soumis à la Cour sa requête introductive d'instance
contre les Etats-Unis. Mais lorsque cette impression a étédissipée,
la situation juridique - pour autant que je la comprenne - était
que cette requête avait étéintroduite à tort devant la Cour. En
d'autres termes, il me semble que la Cour aurait dû conclure que
les différents chefs de réclamation du Gouvernement suisse présen-

tés à la Cour, la restitutiondes avoirs bloqués, l'obligation pour les
Etats-Unis de se soumettre à la décision de l'Autorité suisse de
recours et le devoir pour le Gouvernement défendeur de soumettre
le différend à l'arbitrage ouà la conciliation, ne pouvaient pas être
accueillispaf la Cour non seulement en raison de la procédure pen-
dante aux Etats-Unis, mais pour la raison plus générale qu'une
réclamation d'ordre international n'existe encore dans aucun des
différents aspects possibles, restitution des biens, soumission àl'arbitrage oà la conciliation ou application des termes de l'Accord
de Washington, avant que les tribunaux des Etats-Unis n'aient
rendu leur décisionultime et définitivesur la plainte déposéedevant
eux par IlInterhandel.

(SignéR ). CORDOVA.

Bilingual Content

SEPARATE OPINION OF JUDGE CORDOVA

1 am in disagreement with the majority of the Court both with
its reasoning as well as to its conclusion with regard to the First
Preliminary Objection of the United States. The United States
claims that,since the disputein this case arose prior to August 26th,
1946, the Court lacks jurisdiction to consider and adjudicate the
claim of the Swiss Government. 1 agree with such contention.

The United States Declaration of Acceptance of the compulsory
jurisdiction of the Court limits the submission to its competence
to the "legal disputes hereafter arising", that is to Say, after the
date of the Declaration, August 26th, 1946. The paramount
questions to decide this First Preliminary Objection, therefore,

are the definition of the international legal dispute which has
been brought by Switzerland before the Court as well as the date
of its inception.
The majority of the Court, it seems to me, based its decision
on this Objection on the assumption that the legal dispute between
the Parties is constituted by the different attitudesaken by them
on the question of the restoration of the assets to the Interhandel
by the United States. With this most essential finding of the Court1
cannot concur, and, from this difference of points of view derive
the difference inthe conclusionsreached by the majority and by me.
If the real dispute before the Court islimited to the restoration of
the vested assets of Interhandel then, of course, the conclusion that
it arose after August z6th, 1946, is right and right is also the deci-
sion to reject the first objection; bu1 am bound to differ with the
majority because in my way of thinking the legal dispute, the real
difference between governments, lies in their opposite views with
regard to the legal character of Interhandel, enemy or neutral.

The Parties in this suit are in complete agreement in regard to the
law which should be applied in the case. In particular, they agree
on the positive and the negative aspects of the principle of inter-
national law which permits a belligerent State to seize and vest
enemy property lylng within its territory on the one hand, and, on
the other, prohibits the same State to take property belonging
either to a neutral country or to its subjects. The whole diplomatic
discussion of the two Governments and the pleadings of their
Agents show the agreement on this principle, which moreover is
also incorporated in the law of the United States, the Trading
with the Enemy Act of October 6th, 1917. This law empowers
the United States Government to seize and appropriate the assets
of nationals of an enemy country but, at the same time, excludes OPINION INDIVIDUELLE DE M. CORDOVA

Je suis en désaccord avec la majorité de la Cour, aussi bien
quant à son raisonnement que quant à >a conclusion concernant la
première exception préliminaire des Etats-Unis. Les Etats-Unis
prétendent que, le différend dans la présente affaire étant néavant
le 26 août 1946, la Cour n'a pas compétence pour connaître de la
réclamation du Gouvernement suisse et statuer à ce sujet. Je
partage ce point de vue.
La déclaration- d'acceptation de la juridiction obligatoire de
la Cour par les Etats-Unis limite la compétence de la Cour aux
((différends d'ordre juridique qui s'élèveront à L'avenirN, c'est-à-
dire après le 26 août 1946, la date de la déclaration. Les questions
essentielles pour statuer sur cette première exception préliminaire

sont donc la définition du différend d'ordre juridique international
que la Suisse a soumis à la Cour, de mêmeque la date à laquelle ce
différendest né.
Il me semble que la majorité de la Cour a fondé sa décisionsur
cette exception en présumant que le différend juridique entre les
Parties est constitué par les attitudes divergentes qu'elles ont prises
sur la question de la restitution des avoirs à 1'Interhandel par les
États-unis. Je ne peux pas me joindre à cette conclusion tout àfait
essentielle de la Cour. et c'est de cette différencede oints de vue
que découlela différenceentre les conclusions de la majorité et les
miennes. Si le vrai litige soumisà la Cour se limite à la restitution

des avoirs de lJInterhandel mis sous séquestre, alors, évidemment,
la conclusion que ce différend est né après le26 août 1946 est cor-
recte, ainsi que la décision de rejeter la première exception. Mais
je suis forcé de me séparer de la majorité parce qu'à mon avis le
différendjuridique, le véritable différend entre les gouvernements,
porte sur leurs points de vue opposésconcernant le caractère juri-
dique, ennemi ou neutre, de 1'Interhandel.
Les Parties à ce différend sont parfaitement d'accord sur le
droit applicable à l'affaire. Elles sont d'accord, notamment, sur
les aspects positifs et négatifs du principe de droit international
qui permet, d'une part à un Etat belligérant de saisir et de mettre
sous séquestre les biens en,nemis situéssur son territoire, et d'autre

part interdit à ce mêmeEtat de saisir les biens appartenant à un
pays neutre ou àses ressortissants. Toute la discussion diplomatique
entre les deux Gouvernements et les pièces de procédure de leurs
agents manifestent l'accord sur ce- principe, qui au surplus est
égalementincorporédansla loi des Etats-Unis, le Trading with the
Enemy Act du 6 octobre 1917.Cette loi permet au Gouvernement des
Etats-Unis de saisir et de s'approprier les avoirs des ressortissants
d'un pays ennemi, mais en mêmetemps elle exclut de cette mesurefrom such action the property of nationals of a neutral State,
making it possible for neutral property wrongfully seized to be
returned to its owners. There is complete agreement of the
Parties with regard to both the applicable law and the inevitable
consequence of the application of such law, the legal vesting of
the assets of Interhandel by the United States or its return to
the Swiss company.
The United States Government seized the property of Inter-
handel, constituted mainly, and among other assets, by go per cent
of the stock of the General Aniline and Film Corporation, organized
and doing business in the United States. In vesting these assets,
the United States relied on its contention that Interhandel was,
in fact, German owned, serving only as a cloak for the Frankfurt
firm, I.G. Farben. The Swiss Government, after having made
investigations, reached the conclusion that that was not the case;
that Interhandel, at the time of the seizure of its shares in the

General Aniline and Film Corporation, February 16th and
April 24th, 1942, was not any more controlled by German interests,
having as far back as June 1940 broken al1 its financial and
administrative connections with the German company.
This basic legal dispute between the Parties, the juridical
character of Interhandel, develops itself into some other differences
as, for example, the return of the shares, or that related to the
different procedures to solve such dispute as with regard to the
obligation of the United States to abide by the decision of the
Swiss Authority of Review or the obligation of the same Govern-
ment to take part in conciliatory proceedings or to arbitrate the
dispute. Al1 of these secondary differences are based either on the
Washington Accord of May 25th, 1946, or on the Treaty of Ar-
bitration and Conciliation of February 16th, 1931. In my opinion,
al1 these differences are phases only of one and the same legal
dispute-the neutral or enemy character of Interhandel. Should
both Governments have been in agreement with regard to the

character of Interhandel, either as belligerent or as neutral, this
case would have never come before the Court, nor before the local
tribunals of the United States. The claim would have never existed.
If the Swiss Government would have presented its claim before
the Court based only on the refusal by the United States to abide
by the decision of theWashington Accord or to arbitratethe dispute
in compliance with the Treaty of 1931, 1 might have been inclined
to believe that the dispute would have been upon the non-com-
pliance of such Accord or of such Treaty; but having presented its
claim on the basis of the application of the international law
principle of the respect due by belligerents for neutral property,
1 believe that the subsidiary Swiss submissions constitute only a
means to arrive at the same conclusion sought by the plaintiff,
the recognition that Interhandel was a neutral company and, asles biens des ressortissants d'un État neutre permettant la restitu-
tion à leurspropriétaires desbiens neutres saisisà tort. Les Parties
sont pleinement d'accord, à la fois sur la loi applicable et sur la
conséquenceinéluctable de l'application de cette 30i,la conservation

juridique des avoirs de 1'Interhandel par les Etats-Unis ou leur
restitution àla société suisse.

Le Gouvernementdes États-unis a saisiles biens de I'Interhandel,
qui comprennent principalement et, entre autres avoirs, les go pour
cent du capital de laGeneralAniline andFilm Corporationconstituée
aux Etats-Unis et y traitant des affaires. Quand ils ont mis ses
avoirs sous séquestre, les Etats-Unis ont alléguéque lJInterhandel
était en fait propriété allemande et n'était qu'un prête-nom pour
la Farben Industry de Francfort. Après avoir fait des enquêtes, le
Gouvernement suisse est arrivé à la conclusion que tel n'était pas
le cas, qu'au moment de la mise sous séquestre des actions qu'elle
possédait dans la GeneralAniline andFilm Corporation,le 16 février
et le 24 avril 1g42,l'Interhandel n'était plus sous le contrôle d'inté-

rêtsallemands, ayant, dès juin 1940, rompu tous rapports finan-
ciers et administratifs avec la société allemande.
Ce différendjuridique fondamental entre les Parties, le caractère
juridique de I'Interhandel, s'est ramifié en d'autres divergences
telles, par exemple, celle relative aux diverses procédyes pour
résoudre ce différendcomme touchant àl'obligation des Etats-Unis
de se conformer à la décision de l'Autorité suisse de recours ou
l'obligation de ce mêmeGouvernement de participer à une procé-
dure de conciliation ou d'arbitrage du différend.Tous ces différends
secondaires reposent, soit sur l'Accord de Washington du 25 mai
1946, soit sur le Traité d'arbitrage et de conciliation du 16 février
1931. A mon avis, tous ces différends ne sont que des phases d'un
seul et mêmedifférend juridique - le caractère neutre ou ennemi
de IJInterhandel. Si les deux Gouvernements avaient étéd'accord
sur le caractère belligérant ou neutre de I'Interhandel, l'affaire

n'aurait jamais étésoumise à la Cour ni aux juridictions internes
des Etats-Unis. La réclamation n'aurait jamais existé.

Si le Gouvernement suisse avait soymis à la Cour sa réclamation,
fondéeseulement sur le refus par les Etats-Unis d'appliquer la déci-
sion de l'Accord de Washington, ou de soumettre à l'arbitrage le
différendconformément au Traité de 1931, j'aurais pu êtreenclin à
penser que le différend aurait porté sur l'inexécution de cet accord
ou de ce traité. Mais ayant présentésa réclamation sur le base de
l'application de principe de droit international du respect dû par
les belligérants aux avoirs neutres, je pense que les conclusions sub-
sidiaires suisses ne sont qu'un moyen d'arriverà la mêmeconclusion
recherchée par le demandeur, la reconnaissance du caractère de
sociéténeutre de I'Interhandel et, comme corollaire, que celle-ci a a corollary, that it has a right to the return of the assets. In
other words. the return or restoration of the assets to Interhandel
is nothing else but a practical consequence of the solution of the
real and only legal dispute of the Parties-the character of the
Swiss company-but not the basic dispute itself. The return of
the shares and other assets, in itself,is not perhaps even a legal
dispute.
Once the determination of the legal dispute has thus been made,
it is necessary to fix the time when it really arose. Only then wilI
we be in a position to analyse the first Preliminary Objection in
the light of these two basic questions.
The United States Government vested Interhandel's property on
February 16th and April 24th, 1942. This action was taken, as 1
have said, 011the basis of the assumed enemy character of Inter-
handel by the United States authorities in spite of its apparent
Swiss nationality. So it was notified to the Swiss Diplomatic Agent

in N7ashington in a Memorandum of February 16th, 1942 (Exhibit IO
of the Prelinzinary Objectionsof the United States). This Memoran-
dum also stated that such action did not mean, in any way, the in-
tention to take over any bonafide Swiss property, a statement which
evidently meant that the vested shares and other assets of In-
terhandel were not considered bona fide property of the Swiss
corporation. This is the first document in Our record to show
that one Party stated its position to the other with regard to the
character of Interhandel as an enemy-controlled company. The
Swiss Government did not immediately question such enemy
character, nor, therefore, the right of the United States to vest its
property. It decided first to make some investigations in order to
find out what was the real situation between Interhandel and the
German company, Farben Industries of Frankfurt. According to
the allegations in the case, the two investigations conducted by the
competent Swiss authority showed that Interhandel and Farben
Industries had broken completely their relations since 1940, that

is, even before the United States came into the World War; the
Swiss Government communicated these findings to the American
authorities, expressing the hope that "a settlement will be reached
with regard to the Interhandel's property in the United States",
the assets and stock that had been vested in 1942. This petition
was made known to the United States Government in the Me-
morandum dated June 4th, 1947 (Exhibit 16, Prelinzinary Object-
ions). In other words, the Swiss Government would never have
claimed the restoration of the assets had it not come to the con-
clusion that Interhandel was a bonafide neutral Swiss company, nor
the United States would have ever vested such assets, had it not
believed the Interhandel was in reality an enemy-owned firm. droit à la restitution des avoirs. En d'autres termes, l'obligation de
rendre ou de restituer les avoirsà 1'Interhandel n'est que la consé-
quence de la solution du véritable et seul différend juridique entre
lesParties -le caractère de la société suiss- mais non le différend
fondamental lui-même. Il se peut même que la restitution des
actions et autres avoirs en elle-mêmene soit pas un différend juri-
dique.
Aprèsavoir ainsi définile différend juridique, il faut fixer l'époque
à laquelle il est réellement né.Ce n'est qu'alors que nous serons en
mesure d'analyser la première exception préliminaire à la lumière
de ces deux questions fondamentales.
Le Gouvernement des Etats-Unis a mis sous séquestre les avoirs

de lJInterhandel le 16 février et le 24 avril 1942. Comme je l'ai dit,
cette mesure a étéprise sur la base du prétendu caractère ennemi de
1'Interhandel affirmépar les autorités des Etats-Unis en dépit de
son apparente nationalité suisse. C'est ainsi qu'elle fut notifiée à
l'agent diplomatique suisse à Washington, dans un aide-mémoiredu
16 février1942 (pièce à l'appui noro des exceptionspréliminaires des
Etats-Unis). Cet aide-mémoire explique également que la mesure ne
signifie nullement l'intention de saisir tous avoirs présentant de
bonne foi le caractère suisse, ce qui évidemment signifie que les
actions ou autres avoirs de 1'Interhandel mis sous séquestre
n'étaient pas considéréscommeappartenant de bonne foi àla société
suisse. C'est le premier document du dossier qui montre que l'une
des Parties a énoncésa position à l'autre sur le caractère de l'Inter-
handel comme société sous contrôle ennemi. Le Gouvernement
suisse n'a pas immédiatement contesté ce caractère ennemi, ni par
conséquent le droit des Etats-Unis de séquestrer ses avoirs. Il a
décidétout d'abord de procéder à certaines enquêtes pour déceler
la véritable situation entre 1'Interhandel et la sociétéallemande

Farben Industries de Francfort. D'après les allégations dans cette
affaire, les deux enquêtes conduites par l'Autoritésuisse compétente
ont montré que les liens entre 1'Interhandel et Farben Industries
avaient étécomplètement rompus depuis 1940, c'est-à-dire avant
mêmel'entrée en guerre des Etats-Unis. Le Gouvernement suisse a
communiqué ses conclusions aux autorités américaines, en expri-
mant l'espoir qu'on~parviendraità un règlementau sujet des avoirs de
l'lnterhandel aux Etats-Unis, avoirs et actions qui avaient étémis
sous séquestre en-1942. Cette demande a étécommuniquée au Gou-
vernement des Etats-Unis dans le mémoire daté du 4 juin 1947
(pièceà Z'appuino 16, exceptions préliminaires). En d'autres termes,
le Gouvernement suisse n'aurait jamais réclaméla restitution des
avoirs s'il n'en était pas arrivé à la conclusion que I'Interhandel
était. de bonne foi. une sociéténeutre suisse et les Etats-Unis
n'auraient jamais mis sous séquestre ces avoirs s'ils n'avaient pas
cru que lJInterhandel était, en réalité, une firme appartenant à
l'ennemi. There are many other communications between the two Govern-
ments regarding different aspects and shades of the negotiations
relating to the character of Interhandel, but al1 of them were
connected with the provisional blocking in Switzerland bythe Swiss
Government of the Interhandel properties; the Memorandum dated
June 4th, 1947, seems to be the first document on record in which
the opposed views of the Swiss Government to the thesis of the
United States are stated with regard to Interhandel's character
of enemy owned Company in connection with the return of the vested
property by the United States.1 would have therefore accepted the
date of June 4th, 1947, as the date when the dispute between the
two Governments with regard to the enemy or neutral character of
Interhandel arose in connection with the vesting of the assets of
the General Aniline and Film Corporation, had it not been for the
expressions used by the Department of State in its Memorandum
of June 18th, 1947,wherein in answer to the alreadymentioned Aide
Mémoireof June 4th, 1947, of the Swiss Government, the United

States said (Exhibit 17 to the Preliminary Objections) :
"During the course of the negotiationsleading to the Accord of
May 25, 1946, the United States representativesmade clearthat a
decisionon the Interhandel casecan haveno ejjectof any settlement
of or decisionon the vesting actionby the Alien Property Custodian
of February 1942 of the stock of the GeneralAniline and Film Cor-
poration. The United States Governmenthas not changedits views
in this matter."

That is to Say, the United States Government affirms that before
May 25th, 1946, the date of the Washington Accord, it had already
discussed and rejected the contention of the Swiss Government
that the findings of the Swiss authorities under the Washington
Accord, with regard to the character of Interhandel as neutral or

enemy, should have the "effect of any settlement of or decision"
on the question of the vesting of its assets and shares. Since this
most important assertion has been left completely unanswered by
the plaintiff Government, 1feeljustified in my belief that thedispute
upon the legal character of Interhandel in relation with the vesting
of the shares and assets by the United States arose even prior to
the date of the Washington Accord, May 25th,1946.
1 conclude, therefore, that the dispute arose before the date of
the Declaration of the United States, August 26th, 1946, and that
the First Preliminary Objection should have been upheld by the
Court.
1 agree with the Court's decision to retain the Third Preliminary
Objection, but, in my opinion, the reasoning of the majority,
based mainly on the necessity to avoid the danger of two proceedings
being followed-local as well as international-does not cover al1
the issues presented by Switzerland. 1 believe that the Court Il existe bien d'autres communications entre les deux Gouverne-
ments visant des aspects différents et des nuances dans les négocia-
tions touchant au caractère de I'Interhandel, mais toutes se ratta-
chent au blocage provisoireen Suisse de ces avoirs par le Gouverne-
ment suisse. La note datée du 4 juin 1947 paraît êtrele premier

document dans les dossiers qui-énonce les vues opposéesdu Gouver-
nement suisse sur la thèse des Etats-Unis concernant le caractère de
sociétéappartenant à l'ennemi de I'Inteqhandel, à propos de la
restitution des avoirs mis sous séquestreaux Etats-Unis.'aurais donc
accepté la date du 4 juin 1947 comme date à laquelle s'est élevéle
différendentre les deux Gouvernements sur le caractère ennemi ou
neutre de l'Interhande1 à propos de la mise sousséquestre des avoirs
dela GeneralAniline andFilm Corporation, si ce n'était à cause des
expressions dont s'est servi le Département d'Etat dans son mémo-
randum du 18 juin 1947, où, en réponse à l'aide-mémoire du 4 juin
1947 du Gouvernement suisse déjà cité,les États-unis ont déclaré
(pièce à l'appui no 17, exceptions préliminaires) :

((Au cours desnégociations qui ont aboutià l'Accorddu 25 mai
1946, les représentantdses Etats-Unis ont clairementindiquéqu'une
décision, intervenantdans l'afaire de l'lnterhafidel, ne pourrait
exercerd'e8etsur un règlementquelconqueou sur une décisionvisant
la mise sous séquestrep,ar leAlien Property Custodian, en février
1942, des actions de la General Aniline and Film Corporation. Le
Gouvernementdes Etats-LTnisn'a pas modifiésa malaièrede voir en
l'espèce.))
C'est-&-direqueleGouvernementdes États-unis affirmequ'avant
le 25 mai 1946, date de l'Accord de Washington, il avait déjà
discutéet rejeté la thèse du Gouvernement suisse que les conclusions
des Autorités suisses dans le cadre de l'Accord de Washington
concernant le caractère neutre ou ennemi de 1'Interhandel dussent

avoir un «effet sur un règlement quelconque ou sur une décision 1)
visant la mise sous séquestre de ses avoirs et actions. Le Gouverne-
ment demandeur n'ayant fait aucune réponse à cette affirmation
de la plus grande importance, je me sens en droit de penser que le
diférend sur le caractère juridique de l'Interhande1 relatif à la mise
sous séquestre des actions et avoirs par les États-unis a pris nais-
sance avant mêmela date de l'Accord de Washington, le 25 mai 1946.
Je concluç donc que le différendest né avant la date de la décla-
ration des Etats-Unis du 26 août 1946 et que la Cour aurait dû
retenir la première exception préliminaire) :

Je suis d'accord avec la décisionde la Cour de retenir la troisième
exception préliminaire; mais à mon avis, le raisonnement de la
majorité, se fondant principalement sur la nécessitéd'éviter le
danger de suivre deux procédures - nationale et internationale-

ne couvre pas tous les points soulevéspar la Suisse. Je crois que la should have founded its application of the principle of exhaustion
of local remedies on a much broader basis.
The Court is justified in concluding that the local courts of the
United States are dealing with exactly the legal suit which the
Court would have to decide if it had to consider the merits of the
case before the local remedies would have been exhausted; its
finding that Interhandel should first exhaust al1 local remedies
pending in the United States before this Court would be able to
consider and adjudicate the same issues is, of course, entirely
correct. But, besides the question of the existence of two parallel
procedures, there are some other reasons which, in my opinion, the
Court should have taken also into consideration in applying the
principle to both the principal as well as to the subsidiary or alter-
native submissions of Switzerland.
The argument related to the parallel procedures which the princi-

ple of exhaustion oflocal remedies tries to avoid can successfully be
opposed tothe main as well as to the subsidiary submission related
to the non-compliance by the United States of the decision of the
Swiss Authority of Review and to its refusa1to arbitrate the dispute.
It cannot be opposed nevertheless against the contention put
forward by Switzerland that the Court should decide that the
United States are bound to enter into proceedings of conciliation
in compliance with the Treaty of Arbitration and Conciliation of
1931. Conciliation being a procedure in the nature of an extra-
judicial settlement by the parties and not ending in a binding
decision certainly cannot be considered as a parallel international
procedure to that followed before the local courts of the United
States.
To apply the principle of exhaustion of local remedies to the claim
of Switzerland with regard to conciliation, it is necessary to resort
to other reasons which also underlie it. The principle, as 1 have
said, is based and justified on grounds perhaps more important

than the mere possible avoidance of conflicting procedures and
decisions. The main reason for its existence lies in the indispensable
necessity to harmonize the international and the national juris-
dictions-assuring in this way the respect due to the sovereign
jurisdiction of States-by which nationals and foreigners have to
abide and to the diplornatic protection of the Governments to
which only foreigners are entitled. This harmony, this respect for
the sovereignty of States is brought about by giving priority to the
jurisdiction of the local courts of the State in cases of foreigners
claiming against an act of its executive or legislative authorities.
This priority, in tum, is assured only by means of the adherence
to the principle of exhaustion of local remedies.

The right of the State, in the present instance Switzerland, to
protect its national Interhandel, for an alleged wrongful act of a
foreign government, that of the United States, does not legally

43Cour aurait dû fonder l'application du principe de l'épuisement
des recours internes sur une base beaucoup plus large.
La Cour est justifiée à conclure que les tribunaux internes des
États-unis sont saisis exactement du mêmelitige que la Cour aurait
à trancher si elle avait à examiner le fond de l'affaire avant que
les recours internes n'aient étéépuisés.La conclusion que l'Inter-
handel devrait d'abord épuiser tous les recours internes en suspens
aux Etats-Unis avant que la Cour ne puisse examiner et trancher
les mêmesquestions est évidemment parfaitement correcte. Mais,
outre la question de l'existence de deux procédures parallèles,
ily a d'autres traisons qu'à mon avis la Cour aurait dû également
prendre en considération en appliquant le principe à la fois aux
conclusions principales et aux conclusions subsidiaires de la Suisse.

L'argument touchant aux procédures parallèles, que le principe
de l'épuisement des recours internes cherche à éviter, peut être
opposé avec succès aussi bien aux conclusions principales qp'aux
conclusions subsidiaires visant la non-application par les Etats-
Unis de la décision de l'Autorité suisse de recours et leur refus
de soumettre le différend à l'arbitrage. Il ne peut cependant être
opposé à la thèçe avancée par la Suisse tendant à ce que la Cour
décide que les Etats-Unis sont tenus d'entamer la procédure de
conciliation. conformément au Traité d'arbitrage et de conciliation
de 1931. ~a'conciliation étant une procédure qG présente la nature
d'un règlement extrajudiciaire par les parties, qui n'aboutit pas à
une décisionobligatoire, ne saurait certainement pas êtreconsidérée
comme une procédure internationale parallèle à celle suivie devant
les tribunaux internes des Etats-Unis.
Pour pouvoir appliquer le principe de l'épuisement des recours
internes à la réclamation de la Suisse visant la conciliation, il
faut recourir à d'autres raisons qui en sont à la base. Ce principe,
comme je l'ai dit, trouve sa base et sa justification dans des motifs

peut-être plus importants que la simple possibilité d'éviter des
procédures et des décisions contradictoires. La principale raison
de son existenceest la nécessité absolued'harmoniser les juridictions
internationale et nationale - assurant ainsi le respect dû à la
juridiction souveraine des Etats - auxquellesdoivent se soumettre
les ressortissants et les étrangers et dans la protection diplomatique
des gouvernements à laquelle seuls ont droit les étrangers. L'on
parvient à cette harmonie, à ce respect dela souveraineté des États,
en accordant priorité à la juridiction des tribunaux internes de
1'Etat dans les affaires où des étrangers introduisent unarecours
contre un acte de ses autorités exécutives ou législatives. A son
tour, cette priorité n'est assurée que par le respect du principe de
l'épuisement des recours internes.
Le droit de l'État - la Suisse, dans la présente espèce- à assu-
rer la protection de son ressortissant, l'Interhande1, contre un
prétendu acte dommageable d'un gouvernement étranger, celui desarise until the judicial authorities of the latter decide irrevocably
upon such wrongful act through a decision of its judicial authorities.
Before the tribunals of the respondent State have handed down

its final decision, the State maynot be considered liable internation-
ally because and for the simple and good reason that the damage
has not as yet been consummated. This principle informs al1systems
of law-civil as well as criminal, local as well as international.

A State may not even exercise its diplomatic protection, and
much less resort to any kind of international procedure of redress
until its subject has previously exhausted the legal remedies offered
him by the State of whose action he complains.

In the present case it cannot be affirmed that the damage to
Interhandel has been caused by the vesting of its property by the
local authorities of the United States until such vesting has been
definitely consummated, that is, until the judicial authorities of the
Unites States will have definitely confirmed such action by a judg-
ment which will have the force of res judicata. Then, and only then,
will Interhandel and the Swiss Government be entitled to resort to

this International Court or any other competent international
proceedings seeking redress for the supposed violation of the law
of nations which the local authorities will not be any more in a
position to grant. That is why the well-settled principle of inter-
national procedure of the exhaustion of local remedies is based on
the fundamental idea that a claim is not ripe, that there is no
international claim, until the damaged foreigner has complied with
such principle.

In the present case it seems that there was a mistake with regard
to the exhaustion of local remedies since the United States Govern-
ment itself expressed its opinion that such exhaustion had already
been effected. On this false impression, it seems, the Swiss Govern-
ment presented before the Court its Application instituting pro-
ceedings against the United States. But once this wrong belief
had been dispelled, the juridical situation-as far as 1 can under-
stand it-was that such Application had been wrongfully brought

before the Court. In other words, it seems to me that the finding
of the Court should have been, that the different claims of the
Swiss Govemment before the Court, the restoration of the vested
assets, the obligation of the United States to comply with the
decision of the Swiss Authority of Review and the duty of the
respondent Government to arbitrate or conciliate the dispute, could
not be entertained by the Court not only because of the pending
proceedings in the United States but because of the more general
reason that an international claim does not yet exist in any of
its different possible faces, restoration of property, submission toÉtats-unis, ne se ppse pas, juridiquement, pendant que les juridic-
tions de ce dernier Etat tranchent définitivement la question de cet
acte dommageable, par une décision de leurs juridictions. Jusqu'à
ce que les tribunaux de 1'Etat défendeur aient rendu leur décision
définitive, 1'Etat ne peut être tenu pour internationalement res-
ponsable, pour la bonne raison que le dommage n'est pas encore
réalisé.Ce principe est à la base de tous les systèmes juridiques,
droit ciyil et droit pénal, droit interne et droit intèrnational.
Un Etat ne peut mêmepas exercer sa protection diplomatique,
et moins encore recourir à une procédure internationale de recours
quelconque, tant que son ressortissant n'a pas préalablement épuisé

les recours juridiques internes qui lui sont offerts par 1'Etat dont
il critique les mesures.
Dans la présente affaire, on ne saurait affirmer que le dommage
a étécausé à lJInterhandel par la mise sous séquestre de ses biens
Dar les autorités locales des Etats-Unis tant aue cette mesure n'est
bas devenue définitive, c'est-à-dire tant qui les juridictions des
Etats-Unis n'ont pas définitivement confirmé cette action par une
décision ayant force de chose jugée. C'est alors et alors seulement
que 1'Interhandel et le Gouvernement suisse seront en droit de
recourir à cette Cour internationale ou à toute autre procédure de
règlement international applicable, tendant à la réparation de la
prétendue violation du droit des gens, réparation que les autorités
locales ne seront plus en mesure d'accorder. C'est pourquoi le
principe bien établi en procédure internationale de l'épuisement des

recours internes a pour base l'idée fondamentale qu'une réclamation
ne peut êtreprésentée,qu'il n'y a pas de réclamation internationale
tant que l'étranger victime du dommage ne s'est pas conformé à
ce principe.
Dans la présente espèce, il semble qu'il y ait eu erreur quant à
1:épuisement des recours internes puisque le Gouvernement des
Etats-Unis lui-mêmea exprimé l'opinion que cet épuisement avait
déjà eu lieu. Sur cette impression erronée, semble-t-il, le Gouverne-
ment suisse, a soumis à la Cour sa requête introductive d'instance
contre les Etats-Unis. Mais lorsque cette impression a étédissipée,
la situation juridique - pour autant que je la comprenne - était
que cette requête avait étéintroduite à tort devant la Cour. En
d'autres termes, il me semble que la Cour aurait dû conclure que
les différents chefs de réclamation du Gouvernement suisse présen-

tés à la Cour, la restitutiondes avoirs bloqués, l'obligation pour les
Etats-Unis de se soumettre à la décision de l'Autorité suisse de
recours et le devoir pour le Gouvernement défendeur de soumettre
le différend à l'arbitrage ouà la conciliation, ne pouvaient pas être
accueillispaf la Cour non seulement en raison de la procédure pen-
dante aux Etats-Unis, mais pour la raison plus générale qu'une
réclamation d'ordre international n'existe encore dans aucun des
différents aspects possibles, restitution des biens, soumission àarbitration or conciliation, or compliance with the terms of the
Washington Accord, until the tribunals of the United States hand
down their last and final decision on the suit brought before them
by Interhandel.

(Signe4 R. CORDOVA.l'arbitrage oà la conciliation ou application des termes de l'Accord
de Washington, avant que les tribunaux des Etats-Unis n'aient
rendu leur décisionultime et définitivesur la plainte déposéedevant
eux par IlInterhandel.

(SignéR ). CORDOVA.

Document file FR
Document Long Title

Opinion individuelle de M. Córdova (traduction)

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