Opinion dissidente de M. Schwebel

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080-19920626-JUD-01-05-EN
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OPINION DISSIDENTE DE M. SCHWEBEL

[Traduction]

Depuis que la Cour a étécréée en1922,sajuridiction contentieuse est
limitéeauxaffairesque lesparties luisoumettent,dequelquemanièreque
ce soit. Tel est le droit en la matière depuis que le Conseil de la Société
des Nations a supprimédu projet de statut de la Courla dispositionpré-
voyant une juridiction générale obligatoire que lecomitéconsultatif de
juristes avaitproposée. En développantce droit, la Cour a veilléscrupu-
leusement à ne pas se déclarer compétente lorsquesa compétence était

contestable. Au cours de sa longue et complexe histoire de controverse
juridictionnelle, une histoire qui est unique parmi les cours, la Cour s'est
rarementécartée desatradition deprudencejudiciaire, cela tant par pré-
caution que pour des raisons constitutionnelles.Ce n'estpas seulement
que la Cour n'estpas juridiquement habilitée à déclarersa compétence
vis-à-visd'Etats qui n'y ont pas consenti; faire cela, ou sembler le faire,
dans des cas contestablespourrait convaincre les Etats qu'une accepta-
tion limitéede lajuridiction de la Cour peut êtreinterprétéc eomme illi-
mitée,et les amener à s'abstenir totalement d'accepter la juridiction
de la Cour. Qu'une telleappréhension soitjustifiée a été démontré plus
d'une fois. Il sepeut, ainsi que l'affirme Elihu Lauterpacht dans Aspects
oftheAdministrationofInternationalJustice (199l), qu'en raisonde l'évo-
lution qui sefaitjour dans lajurisprudence de la Cour, dansla pratique
du Conseil de sécuritéde l'organisation des Nations Unies et ailleurs,
que le moment soit venu de réexaminer l'opinion traditionnelle selon
laquelle la juridiction de la Cour est consensuelle, et non obligatoire.
Mais pour le moment, un tel réexamen,fondamental, n'a pas encore eu
lieu.

Lesproblèmesde compétencequi seposent dans les différendsbilaté-
raux sont amplifiésdans les différendsmultilatéraux.Mais, alors que la
pratiquejuridictionnelle des différendsbilatérauxest abondante, les cas
où laCouratraitéde situationsanalogues à celledont elleestmaintenant
saisie sont peu nombreux. Lorsque plusieurs Etats sont accusés d'avoir
commis conjointement (ou solidairement) un acte illicite au regard du
droitinternational etque l'un d'euxseulementcomparaît devant la Cour,
celle-cipeut-elle exercersa compétence àl'égardde cet Etat même sie ,n
déterminantsa responsabilité,elle risque de déterminerou détermine
effectivementla responsabilitéd'un autre Etat? Tel estpour l'essentielle
problèmequelaCourdoitrésoudrepour juger qu'ellea compétencedans
la présenteespèceet que l'action est recevable.
Pour résoudrece problème,les sources de droit privé etles analogies
aveccedroit nesontpas d'un grand secours. Iln'estpas douteuxque dans
le droit interne des Etats une partie peut assignerun coauteur d'un délit civil,un contractant conjoint ouun cofidéjusseuren l'absence des autres
coauteurs,contractants conjoints ou cofidéjusseurs.Maisendroit interne
la compétencen'estpas consensuelle; la situation est fondamentalement
différentede cellequi régitla compétenceinternationale,et de cefait les
principes et modusoperandide lapratique nationale ne peuventguère, en
l'espèce,être appliquésu problèmedont la Cour est saisie.

Leproblèmeauraitpu êtretraité parla Cour dans l'affairedu Détroitde
Corfoumais il ne l'a pas été. Dansson mémoire, le Royaume-Uni affir-
mait: «ou bien le Gouvernement albanais a fait poser des mines ou bien
des mines ont étéposées,soitavecla connivencesoiatu su du Gouverne-
mentalbanais,danscertainesparties deseseauxterritoriales du détroitde
Corfou», mais il ne désignait nommémentaucun coauteur de cet acte
dommageable.En coursd'instance, leconseildu Royaume-Unia soumis

des éléments de preuvevisant àmontrer que les minesavaient en fait été
poséespar des navires de la marine de guerre yougoslave,et que le Gou-
vernement albanais le savait. Mais les conclusions du Royaume-Uni
ne mentionnaient pas la Yougoslavie,et la Cour a de toute manièrejugé
que la preuve de l'intervention de la Yougoslavie, qui était alléguée,
n'avait pas été rapportéeL. 'Albanie, qui avait reconnu la juridiction de
laCouren acceptant une recommandation du Conseildesécurité tendant
à ce que le différend soit soumisà la Cour, a quant à elle soulevéune
exception préliminaired'irrecevabilité,mais celle-ci n'étaitpas fondée
sur l'absence d'un Etat tiers qui aurait été coauteurde l'acte domma-
geable.Enconséquence,leseulenseignementquel'onpuissetirer decette
affaire est que, lorsqu'il ressort des faits alléguésou prosu'ily avait
un coauteur inconnu, la Cour ne rejette pas proprio motu la demande
dirigée contrele coauteur nommémentdésignéI.l n'y aurait eu en l'oc-

currence aucune bonne raison de le faire, puisqu'un arrêt condamnant
l'Albanie n'aurait pu mettre une obligation effective de réparer à la
charged'uncoauteurniconnu ninommépour laraisonmêmequ'iln'était
ni connu ni nommé.

L'affairedel'Ormonétairepris à Rome en1943est le principal précé-
dent,bien que lescirconstancessingulièresde cetteaffaire- liéesau fait
que l'Albanien'avait pas payéau Royaume-Uni la réparationordonnée
par la Cour dans l'affaire du Détroitde Corfou- font qu'ellene corres-
pondpas exactement àlaprésenteaffaireni àaucune autre. Auxfins dela
présente affaire,il est important de noter que la Cour et les conseils de
Nauru et del'Australies'accordentpour penserquel'affairede l'Ormoné-
taireconfèreautorité àune proposition qui demeurevalide, àsavoir que
lorsque les intérêts juridiques d'un Etat tiers seraient on seulementtouchéspar une décisionmaisconstitueraientl'objet mêmd eeladite déci-
sion,laprocédure nepeut êtrepoursuivieenl'absence de cetEtat tiers; et
qu'ils s'accordent aussipour dire qu'à la différencede l'affaire de l'Or
monétaired , ans laquellelaCour nepouvait trancher ledifférenddont elle
étaitsaisiesansseprononcer d'abord surlesactions de l'Albanie,un Etat
qui n'étaitpas partieà l'instance,dans la présente espèce«la détermina-
tion de la responsabilitéde la Nouvelle-Zélandeou du Royaume-Uni
n'estpas une condition préalable à la déterminationde la responsabilité
de l'Australi..»(Arrêt,par.55.)
Maisleuraccordne vapas plusloin. L'Australieaffirme,auxtermesde

l'arrêdt e la Cour, que
«au casparticulier, la détermination dela responsabilité éventuelle

de la Nouvelle-Zélande et du Royaume-Uni n'aurait pas à être
opérée antérieurement à la détermination de la responsabilité de
l'Australie.Mais elleaffirme qu'ily aurait détermination simultanée
de la responsabilité des trois Etats et soutient que, s'agissant de la
Nouvelle-Zélandeetdu Royaume-Uni,les mêmes raisonsprofondes
qui ont conduità la décisionrendue dans l'affairede l'Ormonéraire
s'opposeraient àune telle détermination.» (Ibid.)

La Cour conclut néanmoins, après avoir notéque «la décision qu'elle
avait étépriéede rendre concernant l'attribution de l'orn'étaitpas pure-
ment temporel[le],maisaussilogique »,que :

«Dans laprésente affaire,toute décisiondelaCour surl'existence
ou le contenu de la responsabilitéque Nauru impute àl'Australie
pourrait certes avoir des incidences sur la situation juridique des
deux autres Etatsconcernés,maislaCour n'aura pas à seprononcer
sur cette situation juridique pour prendre sa décisionsur les griefs
formuléspar Nauru contre l'Australie.Par voie de conséquence,la
Cour ne peut refuser d'exercersajuridiction. » (Ibid.)

Pour ma part, j'estime que le raisonnement de la Cour n'est pas
convaincant,pour lesraisons queje vaisexposer.Pour l'essentiel,j'estime
que siun arrêtde la Cour contre un Etat partieàl'instance doiteffective-
mentdéterminerlesobligationsjuridiques d'un ou plusieurs Etats qui ne
sontpasparties, la Cour ne doit pas envisagerderendre un arrêt contrele
premierenl'absence desautres. Il importe peu que la déterminationde la

responsabilitédelapartie absenteprécède la détermination de larespon-
sabilitédelapartie qui estprésente, ouque ladéterminationdelarespon-
sabilitéde la partie absente soit une condition préalable logiquede la
déterminationdelaresponsabilitédelapartie présente.Cequiestdécisif,
c'estde savoir si la détermination des droitsde la partie présente déter-
mineeffectivementles droits dela partie absente.
Avantd'expliquerpourquoi, comptetenu desfaits delacause,je nesuis
d'accord niavecleraisonnement ni avecla conclusion de la Cour, j'exa-
minerai les deux autres affaires surlesquellesla Cour sefonde.ACTIVIT ~ILITAIRES EPARAMILITAIREA SU NICARAGU EA CONTRECELUI-CI

A l'appui de son interprétationde la signification de l'affaire de l'Or
monétairel,a Cour citeun passage de l'arrêt qu'elle a resurla compé-
tence et la recevabilité dans l'affaire desActivitésmilitaires etparamili-
tairesau Nicaragua etcontrecelui-ci:

Il ne fait pas de doute que, quand les circonstances l'exigent,la
Cour déclineral'exercicede sa compétence,commeellel'a faitdans
l'affaire de l'Or monétaireprisRome en 1943,lorsque les intérêts
juridiques d'un Etat qui n'est pas partàl'instance ((seraientnon
seulement touchés par une décision, mais constitueraient l'objet
mêmede ladite décision)) ..En revanche lorsque des prétentions
d'ordrejuridique sontformuléespar undemandeur contre un défen-
deur dans une instance devant la Cour et se traduisent par des
conclusions,la Cour, en principe, ne peut que se prononcer sur ces
conclusions,avec effet obligatoire pour lesparties et pour nul autre

Etat, en vertu de l'article 59du Statut.Commela Cour l'adéjàindi-
qué ..les autres Etats qui pensent pouvoir être affecsar la déci-
sionontlafacultéd'introduire uneinstancedistincteou derecourirà
la procédurede l'intervention. Dans le Statut comme dans la prati-
que des tribunaux internationaux, on ne touve aucune trace d'une
règle concernant les «parties indispensables» comme celle que
défendentlesEtats-Unis,quine seraitconcevable queparallèlement
àun pouvoir, dont la Cour est dépourvue,de prescrire la participa-
tionàl'instance d'un Etattiers. Lescirconstances de l'affairede l'Or
monétairemarquent vraisemblablement la limite du pouvoir de la
Cour derefuser d'exercersajuridiction; aucun despaysmentionnés
en la présente espèce ne peut être considéré comm éetantdans la

mêmesituation que l'Albanie dans cette affaire, au point que sa
présence serait véritablement indispensableà la poursuite de la
procédure. (Arrêdtu 26 novembre 1984,C.Z.J.Recueil 1984,p.431,
par. 88.0(Arrêt,par.51.)
Cet arrêtdela Cour de 1984est àcet égardetàcertains autresà mon avis

erroné;loin de renforcerlajurisprudence del'affairedel'Ormonétaire,il
l'a obscurcie. Il est nécessairede rappeler ce qui était en cause en 1984
pour expliquerpourquoi.
Dans sa requêteet son argumentation, le Nicaragua affirmait pour
l'essentielqu'en se livrantdes activitésmilitaires et paramilitaires au
Nicaragua et contre celui-ci,les Etats-Unis avaient manquéaux obliga-
tions queleurimposaitle droit international conventionnel et coutumier.
Le Nicaragua a engagél'instance contrelesseulsEtats-Unis.Toutefois, il
affirmait dans sarequêteetson argumentation qu'ElSalvador,le Hondu-
ras et le Costa Rica participaient activement aux délits des Etats-Unis
parce qu'ilsprêtaient leur territoire ou leurs forces armées auxfins des
activitésreprochées à ces derniers. Pour leur part, les Etats-Unis ne

soulignaient pas moinsla participation d'ElSalvador,du Honduras et duCostaRica; defait,leurdéfenseau fondcontre lesaccusationsdu Nicara-
gua consistaitàdire qu'ilsavaientconduitleurs activitésdans lecadre de

la légitimedéfensecollectivede ces Etats,quiétaientenbutte à desinter-
ventionssubversivesduNicaragua, assimilablesàune agressionarméedu
faitque le Nicaraguafournissait des armes,une formation,des refugeset
des installations de commande et contrôle, en particulier aux insurgés
d'ElSalvadoretpermettaitleurtransitsursonterritoire. En 1986,la Cour
a condamnéles Etats-Unis en fait comme en droit. Sur les faits, ellea
conclu pour l'essentiel qu'uneresponsabiliténe pouvait être imputéeau
Gouvernementdu Nicaragua parce que des armestraversaientsonterri-
toire pour parvenir aux insurgésàEl Salvador,et en droit, elleajugéque
detoutemanièrela fourniture d'armes à desinsurgésnepouvaitêtreassi-
milée à une agression armée.
Sion litl'arrêtela Cour de 1984surlacompétenceetlarecevabilitéen
mêmetemps que son arrêtde 1986sur le fond,on s'aperçoit que,sur les
faits, les conclusionsénoncéespar la Cour en 1986constituent les hypo-

thèses qu'elle avaittacitementretenues en 1984.C'est-à-direque comme
la Cour n'étaitpas disposée en 1984,au stade de la compétenceet de la
recevabilité,àajouter provisoirement foi aux accusationsportées par les
Etats-Unissur les faits, ellea pu sur le droit arriver décisionselon
laquelle sielledevaitultérieurementadmettrelesconclusionsdu Nicara-
gua sur le fond, El Salvador, le Honduras et le Costa Rica seraient
protégés contre les éventuellesconséquencespréjudiciablesd'untel arrêt
par l'effetdesarticles 59,62et63du Statut.Par l'effetdel'article59,l'arrêt
sur lefond n'aurait pas forceobligatoire sice n'estentre les Etats-Unis et
leNicaraguaet encequi concernecetteaffaireparticulière.Parl'effet des
articles 62 et 63, si El Salvador, le Honduras ou le Costa Rica considé-
raient que leurs intérêts risquaient d'êteffectéspar la décision surle
fond, ou par l'interprétation d'une convention à laquelle ils étaient
parties,ilspouvaient s'appuyer sur les dispositionsstatutairesde la Cour
pour intervenir dans l'affaire.

Mais,surlesprémissesfactuellesposéespar lesEtats-Unis,ilestclairet
ilaurait dû êtreclairen 1984quel'article59nepouvaitutilementprotéger
lesEtats commeEl Salvadorqui étaientvictimesdel'appui queleNicara-
gua étaitaccusé d'apporterà une insurrectionarméeàl'intérieurde leurs
frontières. En supposant que les allégationsde fait des Etats-Unis (et
d'El Salvador)concernant les activitésdu Gouvernement nicaraguayen
fussent vraies,mais en considérantnéanmoins quel'onpouvait interdire
aux Etats-Unis de prendre des mesures contre le Nicaragua pour aider
ElSalvador àsedéfendrecontrecesactivités, àquoiservirait-ilàElSalva-
dor d'invoquerla conclusionjuridique de la Cour selonlaquelle iln'était
pas liépar l'arrtelaCourcontre lesEtats-Unis? SilesEtats-Unisexécu-
taient l'arrêtde la Cour, ils cesseraient d'Œuvrerce qu'eux-mêmeset
El Salvadoraffirmaientêtre lalégitimedéfensecollectived'ElSalvador,
aveclerésultatquelegouvernementdecepays,loinque sesintérêtssoient

préservépsar l'effetdel'article59,pourrait succomberdevant l'assautde
l'insurrectionsivigoureusement appuyéepar le Nicaragua. Et, en réalité,que devait-on apprendre quant aux faits? Bien que le
Nicaragua ait niéà maintes reprises et sous serment qu'il fournissait un
appui matérielauxinsurgésd'ElSalvador,on aultérieurementappris de

sourcesdignes de foi qu'un avionbourréde missilesqui avait décollé du
Nicaragua avaitétéabattu àElSalvador,uneaffaire quiaétéexaminéeau
Conseil de sécurité; etil est ensuite apparu que le Gouvernement de
l'Unionsoviétiqueavaitidentifiépar sonnumérode sérielelanceurd'un
missile sol-air qu'elle avait fourni en 1986 au Gouvernement nicara-
guayenetqui avaitététiré par desinsurgéssalvadoriens àEl Salvador.De
fait, les dirigeants du Nicaragua ont reconnu en 1991 qu'un certain
nombre de missilesfournis par l'Union soviétiqueavaient été remis aux
guérilleros salvadoriens par des membres de l'armée nicaraguayenne,
dont au moins deux furent utiliséspour abattre des avions du Gouverne-
ment salvadorien.On voit donc quellea étél'utilité de l'article59s'agis-
sant de sauvegarderlesintérêtsd'El Salvador.Quant àla possibilitépour
ce pays d'intervenirdans l'instance entre le Nicaragua et les Etats-Unis,
ou d'introduire une instancedistincte, c'étaitune solution qui n'étaitpas

plusadéquatepour ElSalvadoret lespayssetrouvant dansla même situa-
tion, étant donnéqu'ilsavaient dit clairement qu'ilsne souhaitaient pas
que leur sécurité soit en cause devantla Cour et que celle-ciavait déjà
elle-même,en 1984, sommairement rejeté la requête présentée par
ElSalvadorpour interveniraustadede la compétenceetdelarecevabilité
dans l'exercicede son «droit d'intervenir au procès » en vertu de I'ar-
ticle 63 du Statut, et l'avait faitpour des raisons qui n'étaientconformes
ni au Statut ni au Règlementde la Cour.
Lecaractèredeprécédent quel'onpourrait attribuer aujugement de la
Cour dans cetteaffaire estencoreaffaibli par lefaitqu'en 1984leNicara-
gua affirmait, en réponse à l'argument des Etats-Unis quant à l'effet à
attribuerà l'absenced'El Salvador, du Honduras et du Costa Rica, et ce
malgréles termes de sa requête etde son argumentation, qu'il n'aallé-
gu[ait]le comportement illégald'aucun autre Etat que les Etats-Unis»et
qu'il ne demandait ((réparationd'aucun autre Etat B. Ces affirmations

furent démentiesellesaussi,dans lesjours quisuivirent l'arrêturlefond
rendu en 1986contre les Etats-Unis, lorsque le Nicaragua introduisit
devant la Cour des actions étroitementliéescontre le Honduras et le
Costa Rica,vis-à-visdesquels(enapparence àladifférenced'El Salvador)
il avait pu établirun titrede compétence.
A la lumière de ces considérations,ma position en ce qui concerne
l'invocation par la Cour de l'affaire desActivités militairet paramili-
taires au Nicaraguaet contre celui-cist la suivante: les intérse sécu-
ritédesEtatsau profit desquelslesEtats-Unisaffirmaient agirdans l'exer-
cice de la légitimedéfensecollective étaient aussi proches voire plus
proches de 1'«objet mêmede la décision» que les intérêtd se l'Albanie
dans l'affaire del'Or monétaire(voir à cet égardl'analyse du profes-
seur Lori Fisler Damrosch, ((Multilateral Disputes», dans Damrosch
(dir.publ.), fie InternationalCourtofJusticeat a Crossroads,1987,p. 376

et 390).Par leurnature, cesintérêtsitaux de sécuritéétaientvraisembla- TERRES À PHOSPHATES À NAURU (OP.DISS.SCHWEBEL) 335

blement plus importants pour ces pays que ne l'était pourl'Albanieson
intérêt financier; plus précisément, en jugeant queles Etats-Unis

n'avaient pas le droit d'agir de concert avec eux dans l'exercicede leur
légitimedéfensecollective,l'arrêdtelaCour n'apas déterminé lesintérêts
aussi bien juridiques que pratiques de ces Etats moins décisivementet
directementqu'une décisiondelaCourconcernant l'Albanieauraitdéter-
minéles intérêts de ce pays. Cette conclusion est renforcéepar les pres-
criptionsspécifiquesde l'arrêdte laCoursur le fond, qui est alléjusqu'à
statuer non seulement sur les circonstances dans lesquelles El Salvador,
un Etatnon partie à l'instance,pourrait prendre des mesures dans l'exer-
cice de sa légitimedéfensemais sur les contre-mesuresproportionnées
que lestrois Etatsnon partiesà l'instance,El Salvador, le Honduras et le
Costa Rica, pouvaient être autorisésàprendre. L'arrêtdans l'affaire du
«Nicaragua D, comme en l'espèce,devaitêtre d'effet«simultané D,mais

ce n'est pas sa distinction déterminante. La Cour aurait plutôt dû dans
cette affaire, comme elle le devrait dans la présente affaire, accorder du
poids àl'intensité etnon au moment ou à la cause logique des effets en
question. Siles intérêtsjuridiquesd'un Etat tiers doivent être non seule-
mentaffectésmaiseffectivementdéterminép sar l'arrtelaCour, celle-ci
ne doitpas rendre d'arrêt enl'absencede cet Etat tiers.
Detellesaffairespeuvent par leurnature êtreraresetilfaut s'enréjouir,
carleprincipeconsistant à autoriser desEtatstierà empêchere ,nn'inter-
venant pas, un procèsentre deux Etats sur lesquels la Cour aurait autre-
ment compétencen'est guère attrayant. Il s'agitde réaliser un équilibre
entre cequi estapproprié,à savoirque laCour exercepleinement la com-

pétencequi lui a été attribuée, ete qui ne l'est pas,savoirdéterminer
les intérêtsjuridiquesd'un Etat tiers qui n'est pas partie àl'instance. Si
enpratique ilpeutêtreinhabituelquelesintérêtsjuridiques d'un Etattiers
soient l'objet d'une telle détermination, lorsqu'ils le sont, la balance
devrait pencher en faveur de cet Etat, et en faveur de l'irrecevabilitéde
l'actiondirigéecontrelapartie comparante.

DIFFÉRENDFRONTALIERTERRESTRE,INSULAIREET MARITIME

Ledernierprécédentinvoqué parla Cour estl'arrêtu'ellearendu dans

l'affaireduDSfférendfrontalietrrrestre,insulaireetmaritime(ElSalvador/
Honduras). Cet arrêt concernait la requêtàfin d'intervention présentée
par le Nicaraguaenvertu del'article62du Statutde la Cour.LeNicaragua
souhaitaitintervenirsurdiversaspects,maisnon pas surtous, d'une affaire
comportant plusieurs problèmes distincts bien qu'à certains égards
liés.Le Nicaragua n'affirmait pas seulement, en vertu de l'article 62,
qu'ilavait des intérêts'ordre juridique susceptiblesd'être affecpsar la
décisiondans l'affaire: sur un point, il soutenait que ses intérêts étaient
partie intégrante de l'objet mêmedu litige au point que la Chambre
de la Cour ne pouvait correctement exercer sa compétences'il n'était
pas partieà l'instance.Le Nicaragua arguait que s'agissantdu problèmevital de sesdroits dans legolfede Fonsecaet dans les eaux adjacentes, la
Cour ne pouvait statuer sans son consentement.
La Chambre a noté qu'apparemmentle Nicaragua suggéraitainsique
dans de telles circonstances le fait pour un Etat de ne pas intervenir, ou
mêmelerejed t'une requêteàfin d'intervention,pouvaitpriverlaCourdu

droit d'exercerde manièreappropriéela compétenceque lui conféraitle
compromisentre lesdeuxautresEtats.Rejetant cetargument,laChambre
a invoqué enles approuvant ses conclusions concernant l'effet des ar-
ticles 62et 59du Statut énoncéesdans l'affairede I'Ormonétaireet dans
l'affaire des Activités militaet paramilitairesau Nicaraguaet contre
celui-ci.tlaChambre deciterlepassage del'arrêt rendu dans l'affairede
I'Ormonétaire citéci-dessus,auxtermes duquel lesintérêtsjuridiquesde
l'Albanie constituaient ((l'objetmêmede ladite décision)).Elle ajoutait
que sidans l'affaireduDifférendrontalierlesintérêtsjuridiquedu Nica-
ragua relevaient effectivementde l'objetmêmede la décision,cecijusti-
fieraità n'en pas douter une intervention du Nicaragua en vertu de
l'article62,quipose un critèremoinsrigoureux.LaChambre aconcluque
s'agissantdeseaux du golfe,leNicaragua avaitétabliqu'ilavaitun intérêt
d'ordre juridique susceptible d'être affecpar la décision.Mais elle a

jugéqu'à ladifférencedesintérêd tel'Albaniedans l'affairedeI'Ormoné-
taire,l'intérêdtu Nicaragua ne constituait pas ((l'objet mêmede la déci-
sion».Elle a expliquépourquoi dans lestermessuivants :

«bien qu'illui ait ainsiété démontrée manière satisfaisanteque le
Nicaragua a un intérêt d'ordre juridique susceptible d'être affecté
parla décisionqu'ellerendrasur lepoint desavoirsileseauxdugolfe
de Fonseca sont ou non soumises à un condominium ou à une
((communautéd'intérêts » des trois Etats riverains, la Chambre ne
saurait accueillirl'allégationdu Nicaragua d'après laquelle l'intérêt
juridique decetEtatconstituerait«l'objetmême deladite décisioD,
au sens où ces termes ont été employésdans l'affairee l'Ormoné-
taireprià Romeen1943pour décrirelesintérêtd sel'Albanie..Ence
qui concerne lecondominium, lefonddu litigeentrelesParties n'est

pas la validité intrinsèquede l'arrêtde 1917de la Cour de justice
centraméricainedans lesrelations entre lespartiesl'affaireportée
devant elle,maisl'opposabilitéau Honduras, qui n'yétaitpaspartie,
de cet arrêt lui-mêmoeu du régimequi y est déclaré applicable.Le
Honduras, tout en niant que l'arrêtde 1917lui soit opposable, ne
demande pas à laChambre d'en prononcerlanullité.SileNicaragua
estautorisé intervenir,l'arquterendra laChambrenedéclarerapas,
pourcequiestdesrapportsentrecetEtat etlesdeuxautres q,ueleNica-
raguapossède ounepossèdepas,surleseauxdugolfesituéesau-delà de
la délimitationconvenueavec le Honduras,de droits découlantdu
condominium,mais seulementque d,anslesrapportsentreElSalvador
etleHonduras,lerégime decondominiumdéclap rar laCourdejustice
centraméricaine est ounon opposableau Honduras. Certes, si la

Chambre décidait de rejeter les allégations d'El Salvador etde conclure qu'il n'existepas, sur les eaux du golfe, de condominium
opposable au Honduras, celareviendrait àconclure qu'iln'yapas de
condominium du tout. De mêmej,uger que la ((communautéd'inté-
rêts»dont seréclameleHonduras n'existepasentre El Salvadoretle

Honduras en leur qualité d'Etats riverains du golfe reviendraità
juger qu'iln'yapas du tout de ((communautéd'intérê» tsde cegenre
dans legolfe.Dans un cascommedansl'autre,la décisionaffecterait
donc évidemmentun intérêt d'ordre juridique du Nicaragua; mais
mêmeainsi cet intérên te constituerait pas«l'objet mêmede ladite
décision)),commel'étaienltesintérêtd se l'Albaniedans l'affairede
l'Or monétaireprisàRomeen 1943.De celarésulte ..que la question
de savoirsila Chambre aurait lepouvoir de statuer sur cesquestions
sans la participation du Nicaraguaàl'instancene se pose pas, mais
que lesconditions d'uneintervention du Nicaragua sur cetaspect de
l'affaire n'en sont pas moins manifestement remplies.» (C.I.J.
Recueil1990,p. 122,par. 73;lesitaliquessont de moi.)

Ilrésultedu raisonnementci-dessus,semble-t-il,qu'au casoulaChambre,
à l'encontre de ce qu'elle ajugé,aurait estiménécessairede décidersi le
Nicaragua possédait des droits dans un condominium, elle en aurait
concluquelesintérêtd su Nicaragua faisaient partiede l'objetmêmedela
décision.Ainsiinterprétél'arrê dt nt ils'agit nejustifie pas la position de
Nauru - et de la Cour - sur la question dont la Cour est maintenant
saisie,maisla position de l'Australie.

Il resteà rechercher si, quand on se reporte àla situation pendant les
annéesau cours desquelles Nauru fut un territoire administré sousle
régimed'unmandat de la SociétédesNationset,par la suite,fut adminis-
tré commeun territoire soustutelle de l'organisation des Nations Unies,

les faits autorisent ou non à conclure que la Cour ne saurait statuerà
l'égardde l'Australiesans statueren réalitàl'égard des Etats absents,le
Royaume-Uniet la Nouvelle-Zélande.
Le 2 juillet 1919un accord fut conclu entre ((le Gouvernement de
Sa Majesté à Londres, le Gouvernement de Sa Majestédu Common-
wealth d'Australie et le Gouvernement de Sa Majesté duDominion de
Nouvelle-Zélande ».Il rappelait qu'un mandat pour l'administration de
Nauru avaitétéconférp éar lespuissancesalliéesetassociéesà «l'Empire
britannique », mandat qui devait prendre effet à l'entrée en vigueurdu
traitéde paix avec l'Allemagne,et qu'il était ((nécessairde définirles
conditions de l'exercicedudit mandat et de l'exploitation des gisements
de phosphates sur ladite île. Les trois gouvernements ont donc décidé
d'un commun accord que l'administration de Nauru était conférée à un
administrateur et ilsstipulèrentqu: «Lepremieradministrateur doit êtredésigné pour unepériode de
cinq ans par le Gouvernement australien;par la suite l'administra-
teur sera désignéde la manière fixéepar lestrois gouvernements. ))
(Mémoirede la Républiquede Nauru, vol.4,annexe 26,art. 1 .)

Il étaitstipuléquel'administrateur availtepouvoir deprendre desordon-
nances pour maintenirlapaix etl'ordre etassurerlebon gouvernementde
l'île.L'accord précisaiten outre que le titre sur les phosphates de Nauru
était conféréà un Board of Commissioner(sdésigné par la suite comme
les British Phosphates Commissioners, ou «BPC»), composéde trois
membres, qui devaient être nommés chacun par l'un des trois gouverne-
ments, et exerçant chacun ses fonctions tant qu'il ne serait pas révoqué

par le gouvernement qui l'avait désignéL .'accord stipulait que les gise-
ments de phosphates devaient être exploitéset vendus sous la direc-
tion, la gestion et le contrôle des Commissioners. Il stipulait aussi ce qui
suit:

«Les trois gouvernements s'engagentà ne pas intervenir dans la
direction, la gestion, ou le contrôle des opérations d'exploitation,
d'expédition,ou de vente des phosphates; chacun des trois gouver-
nements s'engage àn'accompliretànepermettred'accompliraucun
acte ou aucune chose contraire aux dispositions et fins du présent
accord ou incompatible avec celles-ci.)(Mémoirede la République
de Nauru, vol.4,annexe 26,art. 13.)

L'accord attribuait aux trois gouvernements des parts de la production
desphosphates et en prévoyaitla ventepar d'autres clauses.
L'accord de1919futmodifiépar la suite afinde renforcerl'autoritéde
l'Australie dans l'administration de Nauru, en particulier de telle sorte
que l'administrateur soit désignépar l'Australie etagisse conformément
aux instructions de son gouvernement, qui restait obligé,de son côté,de
procéder à des consultations avec le Royaume-Uni et la Nouvelle-
Zélande.
Lemandat pour Nauru adoptéparleConseilde la SociétédesNations
le 17 décembre 1920 rappelait que le traité de paix stipulait «qu'un

mandat [était]conféré à Sa Majesté britannique pour administrer ...
Nauru...» Il donnait acte du fait que «Sa Majestébritannique)) s'était
engagée à accepterlemandatsurNauru etavait((entreprisdel'exercerau
nom de la Sociétédes Nations ..» Il définissaitles termes du mandat: il
accordait au mandataire «pleins pouvoirs d'administration et de législa-
tion sur leterritoire soumis au présentmandat commeportion intégrante
de sonterritoire»etdisposait quY« ilaccroîtra,par tous lesmoyensen son
pouvoir,lebien-êtrematériee ltmoral,ainsiqueleprogrèssocialdeshabi-
tantsdu Territoire..D
Le mandat fut remplacépar l'accord de tutelle pour le Territoire de
Nauru, que l'Assembléegénérale des Nations Uniesapprouva le
le'novembre 1947.Cet accord fut concluconformémentaux dispositions
del'article81de laCharte desNations Unies,auxtermesduquel «l'auto-ritéqui assurera l'administration du territoire sous tutelle» peut être
constituéepar «un ou plusieurs Etats ou par l'organisation elle-même D.

L'accord de tutelle rappelait qu'en vertu du mandat conféré à
Sa Majestébritannique Nauru «a été administré ...par leGouvernement
del'Australie,au nomdes Gouvernements de l'Australie,de la Nouvelle-
Zélande etdu Royaume-Uni de Grande-Bretagneet d'Irlande du Nord »
(lesitaliquessont de moi). Il rappelait qu:
«SaMajestédésireplacerleTerritoiredeNauru sous lerégimede
tutelle et les Gouvernements de l'Australie,de la Nouvelle-Zélande

et du Royaume-Uni s'engagent à l'administrer selon les conditions
exposéesdans leprésent accordde tutelle. »(Nations Unies, Recueil
destraités,1947,vol. 10,no 138,p. 5.)
Dans l'accord «les Gouvernements de l'Australie, de la Nouvelle-
Zélande etdu Royaume-Uni(ci-aprèsdénommés l'«autorité chargé de
l'administration»)» étaient«conjointementdésigné s.commel'autorité
qui exercera l'administration du Territoire» (les italiques sont de moi).

L'accordstipulait en outre:
((L'autoritéchargéede l'administration répondra dela paix, de
l'ordre, de la bonne administration et de la défensedu Territoire. A
cette fin, en vertu d'un accord conclu entre les Gouvernements de
l'Australie,de la Nouvelle-Zélandeet du Royaume-Uni,le Gouver-
nement del'Australiecontinuera à exercerdans leditterritoirepleins
pouvoirs législatifs,administratifsetjudiciaires, au nomdel'autorité

chargéede l'administration - à moins que lestrois gouvernements
susmentionnés endécident autrementet jusqu'au moment où une
décisiondans cesensinterviendrait.»(Zbid.,p. 6;lesitaliquessont de
moi.)
Le 26 novembre 1965lestrois gouvernementsconvinrent de modifier
lesaccordsenvigueur qu'ilsavaientconclus,enparticuler afin deprévoir

l'instauration d'unconseillégislatif,d'un conseilexécutifde Nauru et de
tribunaux nauruans. Certains pouvoirs étaientattribués à ces organes,
tandis que d'autres étaientréservésà un administrateur désignépar le
Gouvernement australien, ainsi qu'à cegouvernement.
En 1967, à la suite de sériesde pourparlers intensifs entre les repré-
sentants de Nauru, d'une part, et ceux de l'Australie, de la Nouvelle-
Zélandeet du Royaume-Uni de l'autre,un accord fut conclu sur lesdeux
exigencesprincipales de Nauru :son accession à l'indépendanceet l'ac-
quisition, par Nauru, de l'entreprise des phosphates. Les accords qui en
résultèrent furentsignéspar des représentants des trois gouvernements
qui composaient conjointement l'autorité administrante etpar ceux de
Nauru.
Le 9 février1987les trois gouvernements conclurent un accord pour
mettrefin àl'accordde 1919.Cetaccord,qui,comme de nombreuxautres
documents soumis à laCour dans cetteaffaire,qualifie en termes exprès

les trois gouvernement de «gouvernements participants », mit fin auxfonctions des BPC et stipula des modalitésde répartitionde leurs actifs.
Pendant toutes les années qui s'écoulèrend te 1919à 1968,sauf cellesde
l'occupation japonaise pendant la seconde guerre mondiale, l'exploita-
tion desphosphates - pratiquement laseuleactivitééconomiqueorgani-
séesur l'île- fut administréenon par l'Australie,mais par les BPC, qui
étaient dirigéspar trois Commissioners désignés par les trois gouverne-
ments.
Parapplication desinstruments dont on a faitétat,cefut lemandataire
ou l'autorité administrante,maisnon l'Australie,qui était responsableet
fut uniformément considéré comme responsable vis-à-vis de la Société
desNations etdel'organisation desNations Unies. Lescommunications
étaient adresséesau mandataire ou àl'autorité administrante, d'unepart,
la Sociétédes Nationsou àl'organisation desNations Unies del'autre et
étaient échangéesentrc eesentités. L'administrationen place à Nauru et
la législationappliquée àNauru étaientcellesde l'Australie.Cependant

tout acte accompli par l'Australie - l'un des trois gouvernements
«conjointementdésignés ..commel'autorité»qui exerceral'administra-
tion de Nauru selon les termes de l'accord de tutelle - le fut, de 1919
jusqu'à l'indépendancede Nauru, «au nom» des Gouvernements de la
Nouvelle-Zélandeetdu Royaume-Uniautant qu'en sonpropre nom.Non
seulement l'Australie, mais aussi bien la Nouvelle-Zélande et le
Royaume-Uni étaient membresdu Conseil de tutelle en vertu de l'ar-
ticle 86de la Charte, parce qu'ilsétaientchargésd'administrerdesterri-
toires soustutelle»; pendant un certaintemps la Nouvelle-Zélanden'eut
d'autretitreà restermembre du Conseildetutelle queceluid'être chargée
d'administrer le Territoire de Nauru, comme l'un des trois Etats qui
constituaientl'autorité administrante.
Pour sapart Nauru n'a cessé de soutenir quenon seulement l'Australie,
maislestroisgouvernementsparticipants portaient laresponsabilitédela
remise en état des terresàphosphates épuisées;par exemple le compte
rendu despourparlers du 16mai 1967déclare :«des échangesqui suivent
il ressort que les Nauruans maintiendront leur réclamation contre les
gouvernementsparticipants au sujetdelaremiseenétatdeszonesexploi-

téesdans le passé ..»A la trente-quatrième sessiondu Conseil de tutelle
enjuin 1967le représentantde Nauru proposa que «les gouvernements
participants)) acceptent la responsabilitéde remettre en étatles terres
épuisées avantle le'juillet 1967et il réaffirma cette position devant le
Conseil le 22novembre 1967en déclarant:«il incombe auxtroisgouver-
nementsd'assurer laremiseen état desterresexploitéesavantle le'juillet
1967». En 1986Nauru fit savoir aux trois gouvernements qu'elle avait
désigné une commissionpour rechercher «quelgouvernementouorgani-
sationdevraitassumerlaresponsabilitédelaremiseenétat ..»etellesolli-
cita la coopération de chacun de ces gouvernements, notamment la
communication de documents. En 1987Nauru pria «les trois gouverne-
mentsparticipants del'Australie,dela Nouvelle-Zélandeetdu Royaume-
Uni »deconserverintacts lesfonds desBPCjusqu'à cequelacommission
d'enquête ait achevé sa tâche. Après avoirreçu le rapport de la commis-sion d'enquête Nauruenvoyades notes identiques, le 20décembre1988,
aux Gouvernements de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande et du
Royaume-Uni; la note destinée à la Nouvelle-Zélandeest libelléeen
partie dans lestermes suivants:

«Ledépartement desaffairesextérieurestient àréaffirmerlaposi-
tion constamment prise par le Gouvernement de Nauru depuis
l'indépendance,et qui étaitcelle des représentants élusdu peuple
nauruan avant l'indépendance, selon laquelle l'autoritéadminis-
tranteen vertudu mandat etde la tutellepour Nauruétaitet demeure
responsablede la remise en étatdes terres à phosphates épuisées
pendantlapériodeaucoursdelaquelleelleaadministré Nauru, avantle
le*juillet 1967,datàlaquellel'accordde 1967surlesphosphates de
l'îlede Nauru est entré envigueur.
En particulier, le départementdesaffairesextérieurestient réaf-
firmerque la Nouvelle-Zélandqeu, iétaitl'undestroisEtatsintéreset
parties aumandatetà l'accorddetutellepourNauru,n'apas prislesdis-

positionsnécessairepoursatisfairelesbesoinsàlongtermedelapopu-
lationnauruanedont lebien-êtreconstituaiut nemissionsacréeetune
responsabilité primordiale en vertu des accords pertinents; que ce
manquement, quiconstituaitune violationdesditsaccordset du droit
internationalgénérals,'estnotammentmanifestépar lefaitden'avoir
prisaucunedispositionpour remettresuffisammentenétatlesterres à
phosphates épuiséeasfinque la populationnauruane puisseyvivreen
tant que nation souveraine.Le département notequ'à aucunmoment
le GouvernementdeNauru ni aucun représentantautorisédu peuple
nauruan n'aacceptéoureconnuquel'accordsurlesphosphatesde l'île
deNauruaitexonéré les gouvemementsparticipants oul'unquelconque
d'entreeuxde leursresponsabilitéspoulraremiseenétatdesterres.
Enconséquence,ledépartementdesaffairesextérieuresréaffirme
que leGouvernementnéo-zélandaisétaiettdemeuretenu de réparer
ce manquement, soit sous la forme d'une indemnisation ou en

prenant, en coopération avecle Gouvernementde Nauru, toutes les
dispositions pour la remise en état des terres en question selon des
modalités àconvenirentre lesparties.»(Mémoirede la République
de Nauru, vol. 4,annexe 80,no22; lesitaliquessont de moi.)

Enfin, quand Nauru introduisit une instance contre l'Australie devant
la Cour, elle envoya des notes identiques à la Nouvelle-Zélandeet au
Royaume-Uni le 20mai 1989;la note destinée àla Nouvelle-Zélandeest
libelléeenpartie dans lestermes suivants:

«Le département des affaires extérieuresaen outre l'honneur de
faire connaître que, le 19mai 1989,il a dépoune requête devantla
Cour internationale de Justice, à La Haye, pour faire valoir ses
demandes relativesàla remiseen état desterres en question...
Le départementa en outre l'honneur d'attirerl'attention du haut-
commissariat sur le fait que la requête désigne le Commonwealth d'Australie comme seul défendeur ence qui concerne la demande.
Cela estsanspréjudicede la position du département, exposéedans
sa note du 20 décembre1988,selon laquelle la Nouvelle-Zélande,
étantl'undestrois Etatsimpliquésetpartie au mandat et à la tutelle
concernant Nauru était aussi responsable des violations de ces
accords et du droit international général auxquellesil est fait réfé-

rence dans cettenote.»(Mémoiredela Républiquede Nauru, vol.4,
annexe 80,no29.)
Si l'on tient compte du fait essentiel que, de 1919jusqu'à l'indépen-
dance de Nauru en 1968,l'Australie a toujours agi en tant que membre
d'uneautoritéadministranteconjointecomposéedetroisEtatsetqu'ellea
toujours agiau nom des autres membres de ladite autoritéadministrante
commeen sonpropre nom, ilrésulteque sesactesont engagé,oupeuvent
avoir engagénon seulementsaresponsabilité - à supposer qu'ilenexiste
une à un titre quelconque- mais celle des((gouvernementsparticipants».

Par conséquent,si la Cour statuait sur la responsabilité del'Australie,
celareviendraità statuer, semble-t-il,surla responsabilitédela Nouvelle-
Zélande et du Royaume-Uni. Certes la décisionde la Cour dans la
présente instancene s'adresserait, selonsestermes,qu'aux partiesàl'ins-
tance etelleneseraobligatoire quepour lesparties àcetteaffairedétermi-
née.Supposonstoutefois que Nauru puisse etveuille s'engagerdansune
sériedeprocèscommel'afaitle Nicaragua d'abord contrelesEtats-Unis,
puis, après avoir obtenu un arrêt contre les Etats-Unis, contre le
Costa Rica et leHonduras.A supposer, pour lesbesoins de l'argumenta-
tion, que la Courprononce sur le fond une décision défavorableà 1'Aus-
tralie, peut-on sérieusement soutenirque les autres Etats qui, conjointe-

ment avec celle-ci,formaient l'autorité administrante, seraient entendus
sans que l'objetmêmedu débat aitdéjàdonnélieu à une décisionde la
Courdans la présenteaffaire?
Nauru soutient ce qui suit:
«La Cour ne statuerait suraucun droit, suraucune responsabilité
del'unou l'autre Etat enl'espèce,lafoispar l'effetdel'article59du
Statut etparce que la demandeporte avant tout sur lesactes et omis-

sions de l'Australieet de fonctionnaires australiens responsables de
l'administration de Nauru.» (Exposé écritde la République de
Nauru, p. 93,par. 262.)
Laréponse à cetteallégationfondamentale,c'estque la protection accor-
dée aux Etat absentspar l'article 59serait plutôt théoriqueque pratique
compte tenu des caractères très exceptionnelsde la présente affaire; et
quesilademandeporte avanttoutsur lesactesetomissions del'Australie

et de fonctionnaires australiens responsables de l'administration de
Nauru, ces actes et omissionsfurent ceux de l'Australie agissantcomme
l'un destrois Etats qui formaient conjointement l'autoritéadministrante
et furent ceux de l'Australie agissant pour le compte de la Nouvelle-
Zélandeet du Royaume-Uni. La question de l'importanceà attribuerà la situation d'Etats absents
peut dépendred'un équilibre subtil.En l'espèce,pour les raisons indi-
quées,j'estime,quantàmoi,quel'équilibrepenchedu côtéd'une décision
déclarant irrecevablelademande forméecontre l'Australie seule.

(Signé)Stephen M. SCHWEBEL.

Bilingual Content

DISSENTING OPINION OF JUDGE SCHWEBEL

Thecontentiousjurisdiction ofthe Court hasbeenlimitedfrom the out-
set of its existencein 1922to the cases which the parties submit to it, by
whatever means. Thishas beenthe law ofthe matter sincethe Council of
the LeagueofNationsstruckfrom the draft ofthe Court's Statutethepro-
vision for general compulsory jurisdiction proposed by the Advisory
CommitteeofJurists. Inthe developmentofthat law,theCourt hasshown
great carenottofindthat ithasjurisdiction wherejurisdiction isquestion-
able. In itslong and complexhistory ofjurisdictional controversy,a his-
tory which isunique among courts, the Court has rarely departed from
thistradition ofjudicial caution. Its reasons have been prudential as well
as constitutional. Not only is it legallynot entitled to assert jurisdiction
over Stateswhich havenot assentedtoit; doing so,or appearing to do so,
in questionable casesrnaypersuade States that a measuredsubmission to
the Court'sjurisdiction rnaybeinterpreted asunmeasured, withthe result
that theyrnayabstainaltogether fromadhering totheCourt'sjurisdiction.
The reality of this apprehension has been demonstrated more than once.
It rnaybe, asElihuLauterpachtmaintainsin AspectsoftheAdministration
of InternationalJustice(1991),that, because of developmentsin thejuris-
prudence of the Court, in the practice of the Security Council of the

United Nations, and elsewhere,the time isripe forreconsideration ofthe
traditional position that thejurisdiction ofthe Courtis consensualrather
than compulsory. Butas yet such a fundamental reconsiderationhas not
taken place.

Thejurisdictionalproblemsposedinbilateraldisputesaremagnified in
multilateral disputes. But, in contrast to therich body of jurisdictional
practicein bilateraldisputes,the casesin which the Court has addressed
situations analogous to that now before the Court are few. Where more
than oneStateischargedwithjoint (orjoint and several)commissionofan
actwrongfulunder international law,but onlyonesuch Stateisbeforethe
Court, rnaythe Court proceed to exercisejurisdiction overthat Stateeven
thoughitsdetermination ofthe liabilityofthat Staternayorwill entailthe
effectivedetermination of the liability of another?That is the essenceof
theproblem whichthe Court mustresolveifit istofindthat ithasjurisdic-
tion in the instant case and thatthat caseis admissible.

In dealing with that problem, private law sources and analogiesare of
little use. Theres no doubt that, in the municipal law of States, a party

rnay maintain suit against ajoint tortfeasor or CO-contractoror CO-trustee OPINION DISSIDENTE DE M. SCHWEBEL

[Traduction]

Depuis que la Cour a étécréée en1922,sajuridiction contentieuse est
limitéeauxaffairesque lesparties luisoumettent,dequelquemanièreque
ce soit. Tel est le droit en la matière depuis que le Conseil de la Société
des Nations a supprimédu projet de statut de la Courla dispositionpré-
voyant une juridiction générale obligatoire que lecomitéconsultatif de
juristes avaitproposée. En développantce droit, la Cour a veilléscrupu-
leusement à ne pas se déclarer compétente lorsquesa compétence était

contestable. Au cours de sa longue et complexe histoire de controverse
juridictionnelle, une histoire qui est unique parmi les cours, la Cour s'est
rarementécartée desatradition deprudencejudiciaire, cela tant par pré-
caution que pour des raisons constitutionnelles.Ce n'estpas seulement
que la Cour n'estpas juridiquement habilitée à déclarersa compétence
vis-à-visd'Etats qui n'y ont pas consenti; faire cela, ou sembler le faire,
dans des cas contestablespourrait convaincre les Etats qu'une accepta-
tion limitéede lajuridiction de la Cour peut êtreinterprétéc eomme illi-
mitée,et les amener à s'abstenir totalement d'accepter la juridiction
de la Cour. Qu'une telleappréhension soitjustifiée a été démontré plus
d'une fois. Il sepeut, ainsi que l'affirme Elihu Lauterpacht dans Aspects
oftheAdministrationofInternationalJustice (199l), qu'en raisonde l'évo-
lution qui sefaitjour dans lajurisprudence de la Cour, dansla pratique
du Conseil de sécuritéde l'organisation des Nations Unies et ailleurs,
que le moment soit venu de réexaminer l'opinion traditionnelle selon
laquelle la juridiction de la Cour est consensuelle, et non obligatoire.
Mais pour le moment, un tel réexamen,fondamental, n'a pas encore eu
lieu.

Lesproblèmesde compétencequi seposent dans les différendsbilaté-
raux sont amplifiésdans les différendsmultilatéraux.Mais, alors que la
pratiquejuridictionnelle des différendsbilatérauxest abondante, les cas
où laCouratraitéde situationsanalogues à celledont elleestmaintenant
saisie sont peu nombreux. Lorsque plusieurs Etats sont accusés d'avoir
commis conjointement (ou solidairement) un acte illicite au regard du
droitinternational etque l'un d'euxseulementcomparaît devant la Cour,
celle-cipeut-elle exercersa compétence àl'égardde cet Etat même sie ,n
déterminantsa responsabilité,elle risque de déterminerou détermine
effectivementla responsabilitéd'un autre Etat? Tel estpour l'essentielle
problèmequelaCourdoitrésoudrepour juger qu'ellea compétencedans
la présenteespèceet que l'action est recevable.
Pour résoudrece problème,les sources de droit privé etles analogies
aveccedroit nesontpas d'un grand secours. Iln'estpas douteuxque dans
le droit interne des Etats une partie peut assignerun coauteur d'un délitinthe absence ofotherjoint tortfeasors,contractors, ortrustees. Butjuris-
diction isnot consensualin national law ;the situationdiffers fundamen-
tally from that which governs international jurisdiction, from which it

follows that principles and patterns of national practice in this instance
have scantapplication to the issuebeforethe Court.

The problem might have been dealt with by the Court in the
CorfuChannelcasebut it was not.The Memorial ofthe United Kingdom
contended "that the Albanian Government ...either caused to be laid,
connived atorhad knowledgeofthe layingofminesin certain areas ofits

territorial waters in the Strait of Corfu", but it named no other alleged
joint tortfeasor. In the course of the proceedings, British counsel intro-
duced evidence purporting to show that the mines actually had been
laid by ships of the Yugoslav Navy, with the knowledge of the Albanian
Government. But the Applicant's submissions made no reference to
Yugoslaviaand theCourt in anyeventfoundthatthe allegedinvolvement
of Yugoslaviawas not proved. For its part, Albania, which acceptedthe
Court's jurisdiction by its acceptance of a recommendation of the Secu-
rity Council for the submission ofthe dispute tothe Court, raised a preli-
minaryobjectiontothe admissibilityofthe case,butit wasnotfounded on
the absence of an allegedjoint tortfeasor. Accordingly,the mostthat may
begleanedfromthis caseisthat, whereitappearsfrom the factsallegedor
shownthat there was someunknownjoint tortfeasor, the Court will not
dismissthe claim againstthe namedtortfeasorproprio motu.There would
havebeenno goodgroundforitssodoing, sinceaholdingagainstAlbania
could not have entailed the effective liability of an unnamed and
unknown joint tortfeasor for the very reason that it was unnamed and
unknown.

The caseof Monetary GoIdRemovedfromRomein 1943istheprincipal
precedent,although itssingularcircumstances - whichwerelinkedwith
the failure of Albania to pay compensation to the United Kingdom as
ordered bythe Court inthe CorfuChannelcase - ensure that itwillnotbe
on al1fours with the current or another case. For present purposes, it is
important that the Court and counselfor Nauru and Australiaare agreed
that the Monetary Goldcaseis authority for a proposition of continuing

vitality,namely,that whereathird State's legalinterestswould not onlybe
affected by a decision but form the very subject-matter of the decision, civil,un contractant conjoint ouun cofidéjusseuren l'absence des autres
coauteurs,contractants conjoints ou cofidéjusseurs.Maisendroit interne
la compétencen'estpas consensuelle; la situation est fondamentalement
différentede cellequi régitla compétenceinternationale,et de cefait les
principes et modusoperandide lapratique nationale ne peuventguère, en
l'espèce,être appliquésu problèmedont la Cour est saisie.

Leproblèmeauraitpu êtretraité parla Cour dans l'affairedu Détroitde
Corfoumais il ne l'a pas été. Dansson mémoire, le Royaume-Uni affir-
mait: «ou bien le Gouvernement albanais a fait poser des mines ou bien
des mines ont étéposées,soitavecla connivencesoiatu su du Gouverne-
mentalbanais,danscertainesparties deseseauxterritoriales du détroitde
Corfou», mais il ne désignait nommémentaucun coauteur de cet acte
dommageable.En coursd'instance, leconseildu Royaume-Unia soumis

des éléments de preuvevisant àmontrer que les minesavaient en fait été
poséespar des navires de la marine de guerre yougoslave,et que le Gou-
vernement albanais le savait. Mais les conclusions du Royaume-Uni
ne mentionnaient pas la Yougoslavie,et la Cour a de toute manièrejugé
que la preuve de l'intervention de la Yougoslavie, qui était alléguée,
n'avait pas été rapportéeL. 'Albanie, qui avait reconnu la juridiction de
laCouren acceptant une recommandation du Conseildesécurité tendant
à ce que le différend soit soumisà la Cour, a quant à elle soulevéune
exception préliminaired'irrecevabilité,mais celle-ci n'étaitpas fondée
sur l'absence d'un Etat tiers qui aurait été coauteurde l'acte domma-
geable.Enconséquence,leseulenseignementquel'onpuissetirer decette
affaire est que, lorsqu'il ressort des faits alléguésou prosu'ily avait
un coauteur inconnu, la Cour ne rejette pas proprio motu la demande
dirigée contrele coauteur nommémentdésignéI.l n'y aurait eu en l'oc-

currence aucune bonne raison de le faire, puisqu'un arrêt condamnant
l'Albanie n'aurait pu mettre une obligation effective de réparer à la
charged'uncoauteurniconnu ninommépour laraisonmêmequ'iln'était
ni connu ni nommé.

L'affairedel'Ormonétairepris à Rome en1943est le principal précé-
dent,bien que lescirconstancessingulièresde cetteaffaire- liéesau fait
que l'Albanien'avait pas payéau Royaume-Uni la réparationordonnée
par la Cour dans l'affaire du Détroitde Corfou- font qu'ellene corres-
pondpas exactement àlaprésenteaffaireni àaucune autre. Auxfins dela
présente affaire,il est important de noter que la Cour et les conseils de
Nauru et del'Australies'accordentpour penserquel'affairede l'Ormoné-
taireconfèreautorité àune proposition qui demeurevalide, àsavoir que
lorsque les intérêts juridiques d'un Etat tiers seraient on seulementproceedingsmaynot be maintained inthe absence ofthat third State; and
that theyare further agreedthat, unlikethe MonetaryGoldcase,in which

the question at issuein the Court could not be determined without first
passing upon the actions of Albania,a Statenot party to those proceed-
ings, "the determination of the responsibility of New Zealand or the
United Kingdomisnota prerequisitefor the determination ofthe respon-
sibilityofAustralia ..."(Judgment,para. 55).

Butthat isasfar astheiragreement goes.Australiamaintains that, asthe
Court puts it:

"in this case there would not be a determination of the possible
responsibility of NewZealand and the United Kingdom previousto
the determination ofAustralia's responsibility.It nonethelessasserts
that there would be a simultaneousdetermination of the responsibi-
lity of al1three States and argues that, so far as concerns New Zea-
land and the United Kingdom, such a determination would be
equallyprecluded by the fundamental reasonsunderlyingthe Mon-
etaryGolddecision." (Ibid.)

The Court however concludes, after observing that "the decision
requested oftheCourt regardingtheallocation ofthegold, wasnotpurely
temporal but also logical",that :

"In thepresent case,afinding bythe Court regardingthe existence
or the content of the responsibilityattributed to Australia by Nauru
might wellhave implications for the legal situation of the two other
Statesconcerned,but no finding inrespect ofthat legalsituation will
be needed as a basis for the Court's decision on Nauru's claims
against Australia. Accordingly,the Court cannot decline to exercise
itsjurisdiction."(Ibid.)

For my part, 1find the Court's reasoningunpersuasive,in the light of
the considerations setout below.The essenceofmyviewisthat, ifa judg-
ment of the Court against a present State will effectivelydetermine the
legalobligationsof oneormoreStateswhicharenotbeforethe Court,the
Court should not proceed to consider rendering judgment against the
present Statein absence ofthe others.The factthat thetiming ofthe find-
ing of the responsibility of the absent party precedes such a finding in
respectof the presentparty, orthat the finding ofthe responsibility ofthe
absentparty isa logicalprerequisite to the finding ofthe responsibility of
the present party, is not significant. What is dispositive is whether the
determination of the legal rights of the present party effectivelydeter-
minesthe legalrights ofthe absentparty.
Beforesettingout why,onthefactsofthe instant case, 1amnot in agree-

ment with the Court's reasoning or conclusion, 1shall discuss the two
other caseson whichthe Court relies.touchéspar une décisionmaisconstitueraientl'objet mêmd eeladite déci-
sion,laprocédure nepeut êtrepoursuivieenl'absence de cetEtat tiers; et
qu'ils s'accordent aussipour dire qu'à la différencede l'affaire de l'Or
monétaired , ans laquellelaCour nepouvait trancher ledifférenddont elle
étaitsaisiesansseprononcer d'abord surlesactions de l'Albanie,un Etat
qui n'étaitpas partieà l'instance,dans la présente espèce«la détermina-
tion de la responsabilitéde la Nouvelle-Zélandeou du Royaume-Uni
n'estpas une condition préalable à la déterminationde la responsabilité
de l'Australi..»(Arrêt,par.55.)
Maisleuraccordne vapas plusloin. L'Australieaffirme,auxtermesde

l'arrêdt e la Cour, que
«au casparticulier, la détermination dela responsabilité éventuelle

de la Nouvelle-Zélande et du Royaume-Uni n'aurait pas à être
opérée antérieurement à la détermination de la responsabilité de
l'Australie.Mais elleaffirme qu'ily aurait détermination simultanée
de la responsabilité des trois Etats et soutient que, s'agissant de la
Nouvelle-Zélandeetdu Royaume-Uni,les mêmes raisonsprofondes
qui ont conduità la décisionrendue dans l'affairede l'Ormonéraire
s'opposeraient àune telle détermination.» (Ibid.)

La Cour conclut néanmoins, après avoir notéque «la décision qu'elle
avait étépriéede rendre concernant l'attribution de l'orn'étaitpas pure-
ment temporel[le],maisaussilogique »,que :

«Dans laprésente affaire,toute décisiondelaCour surl'existence
ou le contenu de la responsabilitéque Nauru impute àl'Australie
pourrait certes avoir des incidences sur la situation juridique des
deux autres Etatsconcernés,maislaCour n'aura pas à seprononcer
sur cette situation juridique pour prendre sa décisionsur les griefs
formuléspar Nauru contre l'Australie.Par voie de conséquence,la
Cour ne peut refuser d'exercersajuridiction. » (Ibid.)

Pour ma part, j'estime que le raisonnement de la Cour n'est pas
convaincant,pour lesraisons queje vaisexposer.Pour l'essentiel,j'estime
que siun arrêtde la Cour contre un Etat partieàl'instance doiteffective-
mentdéterminerlesobligationsjuridiques d'un ou plusieurs Etats qui ne
sontpasparties, la Cour ne doit pas envisagerderendre un arrêt contrele
premierenl'absence desautres. Il importe peu que la déterminationde la

responsabilitédelapartie absenteprécède la détermination de larespon-
sabilitédelapartie qui estprésente, ouque ladéterminationdelarespon-
sabilitéde la partie absente soit une condition préalable logiquede la
déterminationdelaresponsabilitédelapartie présente.Cequiestdécisif,
c'estde savoir si la détermination des droitsde la partie présente déter-
mineeffectivementles droits dela partie absente.
Avantd'expliquerpourquoi, comptetenu desfaits delacause,je nesuis
d'accord niavecleraisonnement ni avecla conclusion de la Cour, j'exa-
minerai les deux autres affaires surlesquellesla Cour sefonde. The Court quotes in support of its construction of the meaning of the
MonetaryGoldcaseapassageoftheCourt's Judgmentonjurisdiction and
admissibility inMilitaryandParamilitary Activities inandagainst Nicara-
gua :

"There is no doubt that in appropriate circumstancesthe Court
willdecline,as it did in the caseconcerning MonetaryGoldRemoved
from Rome in 1943,to exercise the jurisdiction conferred upon it
where the legal interests of a State not party to the proceedings
'would not only be affected by a decision, but would form the very
subject-matter of the decision'. ..Where however claims of a legal
nature are made by an Applicant against a Respondent in proceed-
ings before the Court, and made the subject of submissions, the
Court hasinprinciple merelyto decideupon those submissions,with
bindingforceforthe parties only, and no other State,in accordance
with Article 59ofthe Statute. Asthe Court has alreadyindicated ...
otherStateswhichconsiderthat theymaybe affectedarefreeto insti-
tute separate proceedings, or to employ the procedure of interven-

tion. There is no trace, either in the Statute or in the practice of
international tribunals, of an 'indispensableparties'rule ofthe kind
argued for bythe United States,whichwould only be conceivablein
parallel to a power,whichthe Court does not possess,to directthat a
third Statebemadea party to proceedings. Thecircumstances ofthe
Monetary Goldcaseprobably representthe limit of the power of the
Court to refuse to exercise its jurisdiction; andnone of the States
referred tocan beregarded asinthe sameposition as Albaniain that
case,soas to betrulyindispensableto the pursuance ofthe proceed-
ings. (Judgment of 26 November 1984,Z.C.J.Reports 1984,p. 431,
para. 88.)"(Judgment,para. 51.)

This 1984Judgment of the Court in the foregoing as well as some other

respectsinmyviewwasinerror;far fromreinforcingthejurisprudence of
the Monetary Goldcase,it obfuscated it. It isnecessaryto recall what was
at issuein 1984to explain why.
In its Application and argument, Nicaragua's essential claimwas that
military and paramilitary activities of the United States in and against
Nicaragua violated obligations of the United States under conventional
and customary international law. Nicaragua brought suit against the
United Statesalone. However,itsApplication and argumentmaintained
that ElSalvador,Honduras and Costa Rica al1werevitallyinvolvedinthe
delicts of the United States,because they were lending their territory or
armedforcestotheindicted activitiesofthe United States.For itspart, the
United Statesno less stressedthe involvementof El Salvador,Honduras
and Costa Rica; indeed, its substantivedefence to Nicaragua's chargesACTIVIT ~ILITAIRES EPARAMILITAIREA SU NICARAGU EA CONTRECELUI-CI

A l'appui de son interprétationde la signification de l'affaire de l'Or
monétairel,a Cour citeun passage de l'arrêt qu'elle a resurla compé-
tence et la recevabilité dans l'affaire desActivitésmilitaires etparamili-
tairesau Nicaragua etcontrecelui-ci:

Il ne fait pas de doute que, quand les circonstances l'exigent,la
Cour déclineral'exercicede sa compétence,commeellel'a faitdans
l'affaire de l'Or monétaireprisRome en 1943,lorsque les intérêts
juridiques d'un Etat qui n'est pas partàl'instance ((seraientnon
seulement touchés par une décision, mais constitueraient l'objet
mêmede ladite décision)) ..En revanche lorsque des prétentions
d'ordrejuridique sontformuléespar undemandeur contre un défen-
deur dans une instance devant la Cour et se traduisent par des
conclusions,la Cour, en principe, ne peut que se prononcer sur ces
conclusions,avec effet obligatoire pour lesparties et pour nul autre

Etat, en vertu de l'article 59du Statut.Commela Cour l'adéjàindi-
qué ..les autres Etats qui pensent pouvoir être affecsar la déci-
sionontlafacultéd'introduire uneinstancedistincteou derecourirà
la procédurede l'intervention. Dans le Statut comme dans la prati-
que des tribunaux internationaux, on ne touve aucune trace d'une
règle concernant les «parties indispensables» comme celle que
défendentlesEtats-Unis,quine seraitconcevable queparallèlement
àun pouvoir, dont la Cour est dépourvue,de prescrire la participa-
tionàl'instance d'un Etattiers. Lescirconstances de l'affairede l'Or
monétairemarquent vraisemblablement la limite du pouvoir de la
Cour derefuser d'exercersajuridiction; aucun despaysmentionnés
en la présente espèce ne peut être considéré comm éetantdans la

mêmesituation que l'Albanie dans cette affaire, au point que sa
présence serait véritablement indispensableà la poursuite de la
procédure. (Arrêdtu 26 novembre 1984,C.Z.J.Recueil 1984,p.431,
par. 88.0(Arrêt,par.51.)
Cet arrêtdela Cour de 1984est àcet égardetàcertains autresà mon avis

erroné;loin de renforcerlajurisprudence del'affairedel'Ormonétaire,il
l'a obscurcie. Il est nécessairede rappeler ce qui était en cause en 1984
pour expliquerpourquoi.
Dans sa requêteet son argumentation, le Nicaragua affirmait pour
l'essentielqu'en se livrantdes activitésmilitaires et paramilitaires au
Nicaragua et contre celui-ci,les Etats-Unis avaient manquéaux obliga-
tions queleurimposaitle droit international conventionnel et coutumier.
Le Nicaragua a engagél'instance contrelesseulsEtats-Unis.Toutefois, il
affirmait dans sarequêteetson argumentation qu'ElSalvador,le Hondu-
ras et le Costa Rica participaient activement aux délits des Etats-Unis
parce qu'ilsprêtaient leur territoire ou leurs forces armées auxfins des
activitésreprochées à ces derniers. Pour leur part, les Etats-Unis ne

soulignaient pas moinsla participation d'ElSalvador,du Honduras et duwasthat itsactivitieswereconductedinthe collectiveself-defenceofthose
nations which were the object of Nicaraguan subversive intervention
whichwastantamount to armedattack,through Nicaragua's provision of
arms, training, transit, sanctuary, and command-and-control facilities
particularly to insurrection in El Salvador.The Court in 1986held against
the United States on the facts and onthe law.It essentiallyconcluded, on
the facts,that no responsibilitycould be attributed to the Government of
Nicaraguaforany flowof arms acrossitsterritory to insurgentsin El Sal-
vador;on the law,itheldthat in anyeventprovision of ams to insurgents
couldnot betantamount to an armed attack.

Now when the Court's Judgment on jurisdiction and admissibility of
1984is read together with that on the merits of 1986,it appears that the
articulate factual holdings of 1986were the inarticulate factual premises
of 1984.Thatisto Say,sincethe Court wasnotdisposedin 1984atthe stage
of jurisdiction and admissibilityprovisionallyto creditthe chargesofthe
United Stateson thefacts,itthen couldarrive at aholding onthe lawthat,
ifit weresubsequentlyto decide in favour of Nicaragua's submissionson
the merits, El Salvador, Honduras and Costa Rica would be protected
againstany adverse effectsof such ajudgmentby reason ofthe import of
Articles59,and 62and 63,ofthe Statute.Byreason ofArticle59,theJudg-
ment on the merits would have no binding force except between the
United States and Nicaragua and in respect of that particular case. By
reason ofArticles62and 63,should El Salvador,Honduras or Costa Rica
consider that their interests might be affected by the decision on the
merits, or affected by the construction of a convention to which they
were Party, they could employthe Court's statutoryprovisionsfor inter-

ventionin the case.

But,onthefactual premisesput forth bytheUnitedStates, itisclearand
shouldhavebeen clearin 1984that Article 59could provide no meaning-
ful protection to States such as El Salvador which were the objects of
alleged Nicaraguan support of armed insurrection within their borders.
Assumingthefactualallegations ofthe UnitedStates (and ofEl Salvador)
aboutthe activitiesofthe Nicaraguan Government to havebeen tme, but
contemplating nonetheless that the United States could be prohibited
from taking measures against Nicaragua to assist El Salvador in its
defenceagainst those activities,of what use would itbe to El Salvador to
relyupon the Court's legalconclusion that the Court's Judgment against
the United States was not binding upon it? If the United States were to
complywiththeJudgment oftheCourt, itwould ceaseto actinwhat itand
El Salvador maintained was the collective self-defence of El Salvador,
with the result that the latter's Government, far from having its interests
conservedbythe force ofArticle 59,could fa11beforethe onslaught ofthe
insurrectionsosignificantly supported by Nicaragua.CostaRica; defait,leurdéfenseau fondcontre lesaccusationsdu Nicara-
gua consistaitàdire qu'ilsavaientconduitleurs activitésdans lecadre de

la légitimedéfensecollectivede ces Etats,quiétaientenbutte à desinter-
ventionssubversivesduNicaragua, assimilablesàune agressionarméedu
faitque le Nicaraguafournissait des armes,une formation,des refugeset
des installations de commande et contrôle, en particulier aux insurgés
d'ElSalvadoretpermettaitleurtransitsursonterritoire. En 1986,la Cour
a condamnéles Etats-Unis en fait comme en droit. Sur les faits, ellea
conclu pour l'essentiel qu'uneresponsabiliténe pouvait être imputéeau
Gouvernementdu Nicaragua parce que des armestraversaientsonterri-
toire pour parvenir aux insurgésàEl Salvador,et en droit, elleajugéque
detoutemanièrela fourniture d'armes à desinsurgésnepouvaitêtreassi-
milée à une agression armée.
Sion litl'arrêtela Cour de 1984surlacompétenceetlarecevabilitéen
mêmetemps que son arrêtde 1986sur le fond,on s'aperçoit que,sur les
faits, les conclusionsénoncéespar la Cour en 1986constituent les hypo-

thèses qu'elle avaittacitementretenues en 1984.C'est-à-direque comme
la Cour n'étaitpas disposée en 1984,au stade de la compétenceet de la
recevabilité,àajouter provisoirement foi aux accusationsportées par les
Etats-Unissur les faits, ellea pu sur le droit arriver décisionselon
laquelle sielledevaitultérieurementadmettrelesconclusionsdu Nicara-
gua sur le fond, El Salvador, le Honduras et le Costa Rica seraient
protégés contre les éventuellesconséquencespréjudiciablesd'untel arrêt
par l'effetdesarticles 59,62et63du Statut.Par l'effetdel'article59,l'arrêt
sur lefond n'aurait pas forceobligatoire sice n'estentre les Etats-Unis et
leNicaraguaet encequi concernecetteaffaireparticulière.Parl'effet des
articles 62 et 63, si El Salvador, le Honduras ou le Costa Rica considé-
raient que leurs intérêts risquaient d'êteffectéspar la décision surle
fond, ou par l'interprétation d'une convention à laquelle ils étaient
parties,ilspouvaient s'appuyer sur les dispositionsstatutairesde la Cour
pour intervenir dans l'affaire.

Mais,surlesprémissesfactuellesposéespar lesEtats-Unis,ilestclairet
ilaurait dû êtreclairen 1984quel'article59nepouvaitutilementprotéger
lesEtats commeEl Salvadorqui étaientvictimesdel'appui queleNicara-
gua étaitaccusé d'apporterà une insurrectionarméeàl'intérieurde leurs
frontières. En supposant que les allégationsde fait des Etats-Unis (et
d'El Salvador)concernant les activitésdu Gouvernement nicaraguayen
fussent vraies,mais en considérantnéanmoins quel'onpouvait interdire
aux Etats-Unis de prendre des mesures contre le Nicaragua pour aider
ElSalvador àsedéfendrecontrecesactivités, àquoiservirait-ilàElSalva-
dor d'invoquerla conclusionjuridique de la Cour selonlaquelle iln'était
pas liépar l'arrtelaCourcontre lesEtats-Unis? SilesEtats-Unisexécu-
taient l'arrêtde la Cour, ils cesseraient d'Œuvrerce qu'eux-mêmeset
El Salvadoraffirmaientêtre lalégitimedéfensecollectived'ElSalvador,
aveclerésultatquelegouvernementdecepays,loinque sesintérêtssoient

préservépsar l'effetdel'article59,pourrait succomberdevant l'assautde
l'insurrectionsivigoureusement appuyéepar le Nicaragua. 334 PHOSPHATE LANDS IN NAURU (DISS .P. SCHWEBEL)

And what, in truth, did the facts turn out to be? As for Nicaragua's
swornand reiterateddenials ofanyinvolvementinthe material support of
insurrectionin El Salvador,it subsequently was authoritativelyreported
that anaircraftflyingfromNicaraguapacked withmissileswasdownedin
El Salvador,an eventwhich wasthe subject of consideration in the Secu-
rity Council; and it later transpired that the Government of the Soviet
Union identified, by serial number, the launch tube of a ground-to-air
missilewhichit had suppliedin 1986to the NicaraguanGovernment and
whichhad beenfired by Salvadoraninsurgentsin El Salvador.Indeed, in

1991it was acknowledged by the leadership of Nicaragua that a number
of Soviet-suppliedmissileshad beentransferred to Salvadoranguerrillas
by elements of the Nicaraguan Army,at least two of which were used to
shoot down aircraft of the Salvadoran Government. So much for the
utility of Article 59 in safeguardingthe position of El Salvador. As for
the possibility of its intervening in the proceedings between Nicaragua
and the United States,or institutingeparateproceedings,that wasa route
which offered no more comfort to El Salvador and similarly situated
States,havingregardtothefacts that theyhad madeclear that theydidnot
wishto litigatetheirsecuritybefore theCourtandthattheCourt earlierin
1984had itselfsummarily dismissed El Salvador'srequest to interveneat
the stageofjurisdiction and admissibilityin exerciseofitsstatutory "right
to intervene in the proceedings" under Article 63, and had done so for

reasons which were in conformityneither with the Statute nor with the
Rules of Court.

Such precedential status as the Court's holding in the case may be
thought to have is further prejudiced by the fact that in 1984Nicaragua
maintained, in respect of the argument of the United States about the
effect to be attributed to the absence of El Salvador, Honduras and
Costa Rica,that - despitethe termsofitsApplication and argument - it
made "no claim of illegal conduct by any State other than the United
States" andthat itsought "no relief. ..fromanyother State".These affir-
mations werebelied aswell,and within days ofthe 1986Judgmrnt on the
merits against the United States, when Nicaragua brought intimately
related claimsin Court againstHonduras and Costa Rica,asto which(in
apparent contrast to El Salvador)it could make out atitle ofjurisdiction.

In the lightofthese considerations, myposition on the Court's reliance
onthe caseof MilitaryandParamilitaryActivitiesinandagainst Nicaragua
comes to this. The security interests of the States in whose interest the
United States claimedto be acting in collectiveself-defencewereas close
ifnot closerto "the verysubject-matterofthe case" asweretheinterestsof
Albania in the Monetary Goldcase(seein thisregard the analysis of Pro-
fessor Lori Fisler Damrosch,"Multilateral Disputes", in Damrosch, ed.,
TheInternationalCourt ofJusticeat a Crossroads,1987,pp. 376,390). In
their nature,those vital securityinterestspresumably were more import-
ant to them than was Albania'sfinancial interest to it; more to the point, Et, en réalité,que devait-on apprendre quant aux faits? Bien que le
Nicaragua ait niéà maintes reprises et sous serment qu'il fournissait un
appui matérielauxinsurgésd'ElSalvador,on aultérieurementappris de

sourcesdignes de foi qu'un avionbourréde missilesqui avait décollé du
Nicaragua avaitétéabattu àElSalvador,uneaffaire quiaétéexaminéeau
Conseil de sécurité; etil est ensuite apparu que le Gouvernement de
l'Unionsoviétiqueavaitidentifiépar sonnumérode sérielelanceurd'un
missile sol-air qu'elle avait fourni en 1986 au Gouvernement nicara-
guayenetqui avaitététiré par desinsurgéssalvadoriens àEl Salvador.De
fait, les dirigeants du Nicaragua ont reconnu en 1991 qu'un certain
nombre de missilesfournis par l'Union soviétiqueavaient été remis aux
guérilleros salvadoriens par des membres de l'armée nicaraguayenne,
dont au moins deux furent utiliséspour abattre des avions du Gouverne-
ment salvadorien.On voit donc quellea étél'utilité de l'article59s'agis-
sant de sauvegarderlesintérêtsd'El Salvador.Quant àla possibilitépour
ce pays d'intervenirdans l'instance entre le Nicaragua et les Etats-Unis,
ou d'introduire une instancedistincte, c'étaitune solution qui n'étaitpas

plusadéquatepour ElSalvadoret lespayssetrouvant dansla même situa-
tion, étant donnéqu'ilsavaient dit clairement qu'ilsne souhaitaient pas
que leur sécurité soit en cause devantla Cour et que celle-ciavait déjà
elle-même,en 1984, sommairement rejeté la requête présentée par
ElSalvadorpour interveniraustadede la compétenceetdelarecevabilité
dans l'exercicede son «droit d'intervenir au procès » en vertu de I'ar-
ticle 63 du Statut, et l'avait faitpour des raisons qui n'étaientconformes
ni au Statut ni au Règlementde la Cour.
Lecaractèredeprécédent quel'onpourrait attribuer aujugement de la
Cour dans cetteaffaire estencoreaffaibli par lefaitqu'en 1984leNicara-
gua affirmait, en réponse à l'argument des Etats-Unis quant à l'effet à
attribuerà l'absenced'El Salvador, du Honduras et du Costa Rica, et ce
malgréles termes de sa requête etde son argumentation, qu'il n'aallé-
gu[ait]le comportement illégald'aucun autre Etat que les Etats-Unis»et
qu'il ne demandait ((réparationd'aucun autre Etat B. Ces affirmations

furent démentiesellesaussi,dans lesjours quisuivirent l'arrêturlefond
rendu en 1986contre les Etats-Unis, lorsque le Nicaragua introduisit
devant la Cour des actions étroitementliéescontre le Honduras et le
Costa Rica,vis-à-visdesquels(enapparence àladifférenced'El Salvador)
il avait pu établirun titrede compétence.
A la lumière de ces considérations,ma position en ce qui concerne
l'invocation par la Cour de l'affaire desActivités militairet paramili-
taires au Nicaraguaet contre celui-cist la suivante: les intérse sécu-
ritédesEtatsau profit desquelslesEtats-Unisaffirmaient agirdans l'exer-
cice de la légitimedéfensecollective étaient aussi proches voire plus
proches de 1'«objet mêmede la décision» que les intérêtd se l'Albanie
dans l'affaire del'Or monétaire(voir à cet égardl'analyse du profes-
seur Lori Fisler Damrosch, ((Multilateral Disputes», dans Damrosch
(dir.publ.), fie InternationalCourtofJusticeat a Crossroads,1987,p. 376

et 390).Par leurnature, cesintérêtsitaux de sécuritéétaientvraisembla-by determiningthat the United States was not entitled to act with them in
their collectiveself-defence,the legal as well asthe practical interests of
those States were no less decisively and centrally determined by the
Court's Judgment than would the interests of Albania have been deter-
mined bythe Court'sruling in respect of it. This conclusion is reinforced
by specificprescriptions of the Court's Judgment on the merits, which
went sofar asto passupon not onlythe circumstancesinwhichthe absent
StateofElSalvadormighttakemeasuresinself-defence but uponthe pro-
portionate counter-measures which the three absent States, El Salvador,
Honduras and Costa Rica, could be permitted to take. Judgment in the

"Nicaragua" case,asin the case now beforethe Court, was to be "simul-
taneous" in itseffect,butthat isnot the dispositivedistinction.The Court
thererather should havegiven,and inthe instant caseshould give,weight
to the intensity and not to the timing or logicalderivation ofthe effectsin
question. If the legal interests of a third State willnot merelybe affected
but effectivelydetermined bythe Court's Judgment,the Court shouldnot
proceed to givejudgment in the absence ofthat third State.

Such casesmaybytheirnature be rare and fortunately so,forthe prin-
ciple of permittingthird States by their non-appearance to foreclose liti-
gation between two States over which the Court othenvise has jurisdic-
tion isunappealing. Thequestion is one ofbalancing the propriety ofthe
Court's exercising to the full the jurisdiction which it has been given

against the impropriety of determiningthe legalinterests of a third State
not party to the proceedings. Whileit may in practicebe unusual for the
legal interests of a third State to be subjectto determination,where
they are, the balance should swing in its favour, and in favour of the
inadmissibilityofthe actionagainstthe present party.

LAND,ISLAND AND MARITIMF ERONTIE RISPUTE

The final precedent applied by the Court is the Judgment in the case
concerningthe Land, IslandandMaritimeFrontierDispute (ElSalvador/
Honduras). It dealt with Nicaragua's Application to intervene in the case
pursuant to Article 62of the Court's Statute. Nicaragua soughtto inter-

vene in various but not al1aspects of a case involving several distinct
though in some respectsinterrelatedmatters.It not onlymaintained, pur-
suant to Article 62, that it had interests of a legal nature that may be
affectedbythe decisioninthe case; in onerespect, Nicaraguaargued that
its interests were souch part of the subject-matter of the case that the
Chamber oftheCourt couldnotproperly exerciseitsjurisdiction without
its participation. Nicaragua contended that, where the vital issue to
be settled concerned the rights of Nicaragua in the Gulf of Fonseca TERRES À PHOSPHATES À NAURU (OP.DISS.SCHWEBEL) 335

blement plus importants pour ces pays que ne l'était pourl'Albanieson
intérêt financier; plus précisément, en jugeant queles Etats-Unis

n'avaient pas le droit d'agir de concert avec eux dans l'exercicede leur
légitimedéfensecollective,l'arrêdtelaCour n'apas déterminé lesintérêts
aussi bien juridiques que pratiques de ces Etats moins décisivementet
directementqu'une décisiondelaCourconcernant l'Albanieauraitdéter-
minéles intérêts de ce pays. Cette conclusion est renforcéepar les pres-
criptionsspécifiquesde l'arrêdte laCoursur le fond, qui est alléjusqu'à
statuer non seulement sur les circonstances dans lesquelles El Salvador,
un Etatnon partie à l'instance,pourrait prendre des mesures dans l'exer-
cice de sa légitimedéfensemais sur les contre-mesuresproportionnées
que lestrois Etatsnon partiesà l'instance,El Salvador, le Honduras et le
Costa Rica, pouvaient être autorisésàprendre. L'arrêtdans l'affaire du
«Nicaragua D, comme en l'espèce,devaitêtre d'effet«simultané D,mais

ce n'est pas sa distinction déterminante. La Cour aurait plutôt dû dans
cette affaire, comme elle le devrait dans la présente affaire, accorder du
poids àl'intensité etnon au moment ou à la cause logique des effets en
question. Siles intérêtsjuridiquesd'un Etat tiers doivent être non seule-
mentaffectésmaiseffectivementdéterminép sar l'arrtelaCour, celle-ci
ne doitpas rendre d'arrêt enl'absencede cet Etat tiers.
Detellesaffairespeuvent par leurnature êtreraresetilfaut s'enréjouir,
carleprincipeconsistant à autoriser desEtatstierà empêchere ,nn'inter-
venant pas, un procèsentre deux Etats sur lesquels la Cour aurait autre-
ment compétencen'est guère attrayant. Il s'agitde réaliser un équilibre
entre cequi estapproprié,à savoirque laCour exercepleinement la com-

pétencequi lui a été attribuée, ete qui ne l'est pas,savoirdéterminer
les intérêtsjuridiquesd'un Etat tiers qui n'est pas partie àl'instance. Si
enpratique ilpeutêtreinhabituelquelesintérêtsjuridiques d'un Etattiers
soient l'objet d'une telle détermination, lorsqu'ils le sont, la balance
devrait pencher en faveur de cet Etat, et en faveur de l'irrecevabilitéde
l'actiondirigéecontrelapartie comparante.

DIFFÉRENDFRONTALIERTERRESTRE,INSULAIREET MARITIME

Ledernierprécédentinvoqué parla Cour estl'arrêtu'ellearendu dans

l'affaireduDSfférendfrontalietrrrestre,insulaireetmaritime(ElSalvador/
Honduras). Cet arrêt concernait la requêtàfin d'intervention présentée
par le Nicaraguaenvertu del'article62du Statutde la Cour.LeNicaragua
souhaitaitintervenirsurdiversaspects,maisnon pas surtous, d'une affaire
comportant plusieurs problèmes distincts bien qu'à certains égards
liés.Le Nicaragua n'affirmait pas seulement, en vertu de l'article 62,
qu'ilavait des intérêts'ordre juridique susceptiblesd'être affecpsar la
décisiondans l'affaire: sur un point, il soutenait que ses intérêts étaient
partie intégrante de l'objet mêmedu litige au point que la Chambre
de la Cour ne pouvait correctement exercer sa compétences'il n'était
pas partieà l'instance.Le Nicaragua arguait que s'agissantdu problèmeand the waters outside it,the Court could not, withoutits consent, givea
decision.
The Chamber observedthat Nicaragua apparently thus suggestedthat
in suchcircumstancesthe failure ofa Stateto intervene,or evenrefusa1of
a requestfor permission to intervene,may deprive the Court of the right
with propriety to exercise jurisdiction conferred upon it by special
agreement between two other States. In rejecting this argument, the
Chamber referred with approval to its holdings respectingthe effect of
Articles62and 59ofthe Statute set out in the Monetary Goldcase and in
Militaly and Paramilitary Activitiesin and against Nicaragua.And it
quoted the passage from the Monetary Goldcase quoted above about
Albania's legalinterestsforming "theverysubject-matterofthe decision".
It continued that, ifintherontierDisputecasethelegalinterestsofNicar-

agua did form part of the verysubject-matter of the decision,this would
doubtless justify an intervention by Nicaragua under Article 62, which
laysdowna lessstringentcriterion.The Chamber found that, inrespectof
the Gulf waters, Nicaragua had shown the existence of an interest of a
legal nature which may be affected by the decision. But it held that that
interest did not form "the very subject-matter of the decision" as did the
interests of Albania in theMonetary Goldcase. The Chamber explained
whyin the followingterms :

"whilethe Chamber isthus satisfiedthat Nicaraguahas a legalinter-
est which may be affected by the decision of the Chamber on the
questionwhether ornot the watersofthe Gulf ofFonsecaaresubject
to a condominium or a 'communityofinterests'ofthethree riparian
States, it cannot accept the contention of Nicaragua that the legal
interestofNicaragua 'wouldformthe verysubject-matterofthe deci-
sion',inthe sensein whichthat phrase wasused in the caseconcern-
ing Monetary Gold Removed from Rome in 1943 to describe the
interests of Albania...Sofar asthe condominium is concerned,the
essentialquestion inissuebetweenthe Parties isnotthe intrinsic val-

idityofthe 1917Judgement oftheCentral American Court ofJustice
as between the parties to the proceedings in that Court, but the
opposability to Honduras, whichwasnot such a party, either ofthat
Judgement itselforofthe régimedeclaredbytheJudgement.Hondu-
ras, while rejectingthe opposability to itselfof the 1917Judgement,
does not ask the Chamber to declare it invalid. ifNicaraguaisper-
mitted to intervene,theJudgmentto be givenby the Chamberwillnot
declare,asbetweenNicaraguaandtheothertwoStates,thatNicaragua
doesordoesnotpossessrightsundera condominiuminthewatersofthe
Gulfbeyonditsagreed delimitationwithHonduras,butmerelythat,as
between El Salvador and Honduras, the régime of condominium
declaredbythe CentralAmericanCourtisorisnotopposabletoHondu-
ras.It is true that a decision of the Chamber rejecting El Salvador's
contentions, and finding that there isno condominium in the watersvital de sesdroits dans legolfede Fonsecaet dans les eaux adjacentes, la
Cour ne pouvait statuer sans son consentement.
La Chambre a noté qu'apparemmentle Nicaragua suggéraitainsique
dans de telles circonstances le fait pour un Etat de ne pas intervenir, ou
mêmelerejed t'une requêteàfin d'intervention,pouvaitpriverlaCourdu

droit d'exercerde manièreappropriéela compétenceque lui conféraitle
compromisentre lesdeuxautresEtats.Rejetant cetargument,laChambre
a invoqué enles approuvant ses conclusions concernant l'effet des ar-
ticles 62et 59du Statut énoncéesdans l'affairede I'Ormonétaireet dans
l'affaire des Activités militaet paramilitairesau Nicaraguaet contre
celui-ci.tlaChambre deciterlepassage del'arrêt rendu dans l'affairede
I'Ormonétaire citéci-dessus,auxtermes duquel lesintérêtsjuridiquesde
l'Albanie constituaient ((l'objetmêmede ladite décision)).Elle ajoutait
que sidans l'affaireduDifférendrontalierlesintérêtsjuridiquedu Nica-
ragua relevaient effectivementde l'objetmêmede la décision,cecijusti-
fieraità n'en pas douter une intervention du Nicaragua en vertu de
l'article62,quipose un critèremoinsrigoureux.LaChambre aconcluque
s'agissantdeseaux du golfe,leNicaragua avaitétabliqu'ilavaitun intérêt
d'ordre juridique susceptible d'être affecpar la décision.Mais elle a

jugéqu'à ladifférencedesintérêd tel'Albaniedans l'affairedeI'Ormoné-
taire,l'intérêdtu Nicaragua ne constituait pas ((l'objet mêmede la déci-
sion».Elle a expliquépourquoi dans lestermessuivants :

«bien qu'illui ait ainsiété démontrée manière satisfaisanteque le
Nicaragua a un intérêt d'ordre juridique susceptible d'être affecté
parla décisionqu'ellerendrasur lepoint desavoirsileseauxdugolfe
de Fonseca sont ou non soumises à un condominium ou à une
((communautéd'intérêts » des trois Etats riverains, la Chambre ne
saurait accueillirl'allégationdu Nicaragua d'après laquelle l'intérêt
juridique decetEtatconstituerait«l'objetmême deladite décisioD,
au sens où ces termes ont été employésdans l'affairee l'Ormoné-
taireprià Romeen1943pour décrirelesintérêtd sel'Albanie..Ence
qui concerne lecondominium, lefonddu litigeentrelesParties n'est

pas la validité intrinsèquede l'arrêtde 1917de la Cour de justice
centraméricainedans lesrelations entre lespartiesl'affaireportée
devant elle,maisl'opposabilitéau Honduras, qui n'yétaitpaspartie,
de cet arrêt lui-mêmoeu du régimequi y est déclaré applicable.Le
Honduras, tout en niant que l'arrêtde 1917lui soit opposable, ne
demande pas à laChambre d'en prononcerlanullité.SileNicaragua
estautorisé intervenir,l'arquterendra laChambrenedéclarerapas,
pourcequiestdesrapportsentrecetEtat etlesdeuxautres q,ueleNica-
raguapossède ounepossèdepas,surleseauxdugolfesituéesau-delà de
la délimitationconvenueavec le Honduras,de droits découlantdu
condominium,mais seulementque d,anslesrapportsentreElSalvador
etleHonduras,lerégime decondominiumdéclap rar laCourdejustice
centraméricaine est ounon opposableau Honduras. Certes, si la

Chambre décidait de rejeter les allégations d'El Salvador etde ofthe Gulfwhichisopposable to Honduras,would betantamount to
afindingthatthere isno condominiumat all.Similarly,afinding that
there isno such 'communityof interests'asis claimedby Honduras,
between El Salvador and Honduras in their capacity as riparian
Statesof the Gulf, wouldbe tantamount to a finding that there is no
such'community ofinterests'intheGulfat all.In eitherevent,sucha
decisionwould therefore evidentlyaffectan interest ofa legalnature
ofNicaragua;but evensothat interestwouldnotbethe 'verysubject-
matter ofthe decision'inthe waythat theinterests ofAibania werein
the caseconcerning MonetaryGoldRemovedfromRomein1943. ..it
followsfromthis that the questionwhetherthe Chamber would have
powerto takea decisiononthesequestions,without theparticipation
of Nicaragua in the proceedings, does not arise; but that the condi-
tions for an intervention by Nicaragua in this aspect of the case are

nevertheless clearly fulfilled." (I.C.J.Reports1990,p. 122,para. 73;
emphasisadded.)
It appears to followfrom the foregoingreasoning that, if, contrary to the
Chamber's holding, ithad found it necessaryto decide whether Nicara-
gua possessed rights in a condominium, it would have concluded that
Nicaragua's interestsformed part of the very subject-matter of the deci-
sion.Sointerpreted,the casesupportsnottheposition ofNauru - and of
the Court - on the question now before the Court but the position of
Australia.

It remains to consider whether or not the facts of the situation in the
years in which Nauru was a Territoryadministered under a Mandate of
the Leagueof Nations and subsequentlywasadministered as a TrustTer-
ritory of the United Nations sustain the conclusion that for the Court to
adjudgeAustralia would entai1its effectivelyadjudgingthe absent States

ofthe United Kingdom and New Zealand.

On 2July 1919,an Agreement was concluded between "His Majesty's
Government in London, His Majesty's Government of the Common-
wealth of Australia, and His Majesty'sGovernment of the Dominion of
New Zealand". It recitedthat a Mandate for the administration of Nauru
had been conferred bythe Ailied and Associated Powersupon "the Brit-
ishEmpire",whichwasto comeintooperation onthecomingintoforce of
theTreatyofPeacewithGermany,andthat itis"necessaryto makeprovi-
sionforthe exerciseof the said Mandate and forthe mining of the phos-
phate deposits on the said Island". The three Governments accordingly
agreedthat the administration of Nauru shallbe vestedin an Administra-
tor and provided : conclure qu'il n'existepas, sur les eaux du golfe, de condominium
opposable au Honduras, celareviendrait àconclure qu'iln'yapas de
condominium du tout. De mêmej,uger que la ((communautéd'inté-
rêts»dont seréclameleHonduras n'existepasentre El Salvadoretle

Honduras en leur qualité d'Etats riverains du golfe reviendraità
juger qu'iln'yapas du tout de ((communautéd'intérê» tsde cegenre
dans legolfe.Dans un cascommedansl'autre,la décisionaffecterait
donc évidemmentun intérêt d'ordre juridique du Nicaragua; mais
mêmeainsi cet intérên te constituerait pas«l'objet mêmede ladite
décision)),commel'étaienltesintérêtd se l'Albaniedans l'affairede
l'Or monétaireprisàRomeen 1943.De celarésulte ..que la question
de savoirsila Chambre aurait lepouvoir de statuer sur cesquestions
sans la participation du Nicaraguaàl'instancene se pose pas, mais
que lesconditions d'uneintervention du Nicaragua sur cetaspect de
l'affaire n'en sont pas moins manifestement remplies.» (C.I.J.
Recueil1990,p. 122,par. 73;lesitaliquessont de moi.)

Ilrésultedu raisonnementci-dessus,semble-t-il,qu'au casoulaChambre,
à l'encontre de ce qu'elle ajugé,aurait estiménécessairede décidersi le
Nicaragua possédait des droits dans un condominium, elle en aurait
concluquelesintérêtd su Nicaragua faisaient partiede l'objetmêmedela
décision.Ainsiinterprétél'arrê dt nt ils'agit nejustifie pas la position de
Nauru - et de la Cour - sur la question dont la Cour est maintenant
saisie,maisla position de l'Australie.

Il resteà rechercher si, quand on se reporte àla situation pendant les
annéesau cours desquelles Nauru fut un territoire administré sousle
régimed'unmandat de la SociétédesNationset,par la suite,fut adminis-
tré commeun territoire soustutelle de l'organisation des Nations Unies,

les faits autorisent ou non à conclure que la Cour ne saurait statuerà
l'égardde l'Australiesans statueren réalitàl'égard des Etats absents,le
Royaume-Uniet la Nouvelle-Zélande.
Le 2 juillet 1919un accord fut conclu entre ((le Gouvernement de
Sa Majesté à Londres, le Gouvernement de Sa Majestédu Common-
wealth d'Australie et le Gouvernement de Sa Majesté duDominion de
Nouvelle-Zélande ».Il rappelait qu'un mandat pour l'administration de
Nauru avaitétéconférp éar lespuissancesalliéesetassociéesà «l'Empire
britannique », mandat qui devait prendre effet à l'entrée en vigueurdu
traitéde paix avec l'Allemagne,et qu'il était ((nécessairde définirles
conditions de l'exercicedudit mandat et de l'exploitation des gisements
de phosphates sur ladite île. Les trois gouvernements ont donc décidé
d'un commun accord que l'administration de Nauru était conférée à un
administrateur et ilsstipulèrentqu: "ThefirstAdministratorshallbeappointed for aterm offiveyears
by the Australian Government; and thereafter the Administrator
shallbeappointedin suchmannerasthethreeGovernments decide."
(Memorial of the Republic of Nauru, Vol.4,Ann. 26,Art. 1.)

It wasprovided that theAdministratorshall havethepower to makeordi-
nances for the peace, order and good government of the Island. The
Agreementfurther specifiedthat titletothephosphates of Nauru shallbe
vested in a Board of Commissioners(subsequently to be known as the
British Phosphate Commissioners, or "BPC"), comprised of three mem-
bers, one to be appointed by each of the three Governments, who shall
hold office during the pleasure of the Government by which he is
appointed. TheAgreementprovidedthat the phosphate depositsshallbe
worked and sold under the direction, management and control of the
Commissioners. It alsospecified that :

"There shallbe no interference by any of the three Governments
with the direction,management or control of the business of work-
ing, shipping, or sellingthe phosphates, and each of the three Gov-
ernmentsbinds itselfnot to do orto permit any act or thing contrary
to or inconsistent with the terms and purposes of this Agreement."
(Memorial ofthe Republic of Nauru, Vol.4, Ann. 26,Art. 13.)

The Agreement allotted shares of the phosphate production to the three
Governments and othenvise provided for its sale.
The 1919 Agreement subsequently was amended to entrench Aus-
tralia's authority in the administration of Nauru, particularly to ensure
thatthe Administratorwouldbe appointed by Australia and wouldact in
accordance with the instructions of its Government, which in turn
remaiced obligated to consult with the United Kingdom and New
Zealand.
The Mandate for Nauru adopted by the Council of the League of
Nations on 17December 1920recalled that the Treaty of Peaceprovided
that "a Mandate should be conferred upon His Britannic Majesty to
administer Nauru .. .".It recorded that "His Britannic Majesty" had
agreed to accepta Mandate in respect of Nauru and had "undertaken to
exerciseiton behalf ofthe Leagueof Nations ...".It defined the terms of
the Mandate,according the Mandatory "fullpower ofadministration and
legislationoverthe territory subjecttothe present Mandateas an integral
portion of his territory" and requiring it to "promote to the utmost the
material and moralwell-beingandthesocialprogress oftheinhabitants of
the territory...".
TheMandate wasreplaced bytheTrusteeship Agreementforthe Terri-
tory of Nauru approved by the United Nations General Assembly on
1November 1947.That Agreementwasenteredinto pursuant to the terms
of Article 81 of the United Nations Charter, which provides that "the «Lepremieradministrateur doit êtredésigné pour unepériode de
cinq ans par le Gouvernement australien;par la suite l'administra-
teur sera désignéde la manière fixéepar lestrois gouvernements. ))
(Mémoirede la Républiquede Nauru, vol.4,annexe 26,art. 1 .)

Il étaitstipuléquel'administrateur availtepouvoir deprendre desordon-
nances pour maintenirlapaix etl'ordre etassurerlebon gouvernementde
l'île.L'accord précisaiten outre que le titre sur les phosphates de Nauru
était conféréà un Board of Commissioner(sdésigné par la suite comme
les British Phosphates Commissioners, ou «BPC»), composéde trois
membres, qui devaient être nommés chacun par l'un des trois gouverne-
ments, et exerçant chacun ses fonctions tant qu'il ne serait pas révoqué

par le gouvernement qui l'avait désignéL .'accord stipulait que les gise-
ments de phosphates devaient être exploitéset vendus sous la direc-
tion, la gestion et le contrôle des Commissioners. Il stipulait aussi ce qui
suit:

«Les trois gouvernements s'engagentà ne pas intervenir dans la
direction, la gestion, ou le contrôle des opérations d'exploitation,
d'expédition,ou de vente des phosphates; chacun des trois gouver-
nements s'engage àn'accompliretànepermettred'accompliraucun
acte ou aucune chose contraire aux dispositions et fins du présent
accord ou incompatible avec celles-ci.)(Mémoirede la République
de Nauru, vol.4,annexe 26,art. 13.)

L'accord attribuait aux trois gouvernements des parts de la production
desphosphates et en prévoyaitla ventepar d'autres clauses.
L'accord de1919futmodifiépar la suite afinde renforcerl'autoritéde
l'Australie dans l'administration de Nauru, en particulier de telle sorte
que l'administrateur soit désignépar l'Australie etagisse conformément
aux instructions de son gouvernement, qui restait obligé,de son côté,de
procéder à des consultations avec le Royaume-Uni et la Nouvelle-
Zélande.
Lemandat pour Nauru adoptéparleConseilde la SociétédesNations
le 17 décembre 1920 rappelait que le traité de paix stipulait «qu'un

mandat [était]conféré à Sa Majesté britannique pour administrer ...
Nauru...» Il donnait acte du fait que «Sa Majestébritannique)) s'était
engagée à accepterlemandatsurNauru etavait((entreprisdel'exercerau
nom de la Sociétédes Nations ..» Il définissaitles termes du mandat: il
accordait au mandataire «pleins pouvoirs d'administration et de législa-
tion sur leterritoire soumis au présentmandat commeportion intégrante
de sonterritoire»etdisposait quY« ilaccroîtra,par tous lesmoyensen son
pouvoir,lebien-êtrematériee ltmoral,ainsiqueleprogrèssocialdeshabi-
tantsdu Territoire..D
Le mandat fut remplacépar l'accord de tutelle pour le Territoire de
Nauru, que l'Assembléegénérale des Nations Uniesapprouva le
le'novembre 1947.Cet accord fut concluconformémentaux dispositions
del'article81de laCharte desNations Unies,auxtermesduquel «l'auto-339 PHOSPHATE LANDS IN NAURU (DISS .P.SCHWEBEL)

authority whichwillexercisetheadministration ofthetrustterritory" may
be "one or more Statesor the Organizationitself'.
TheTrusteeship Agreementrecalled that in pursuance of the Mandate
conferred upon HisBritannic Majesty,Nauru "has beenadministered .. .

bythe Government of Australia on thejoint behalfofthe Governments of
Australia, New Zealand, and the United Kingdom of Great Britain and
Northern Ireland" (emphasisadded). It recited tha:
"His Majesty desires to place the Territory of Nauru under the
Trusteeship System,and the Govemments of Australia, New Zea-
land and the United Kingdom undertake to administer it on the

terms set forth in the present Trusteeship Agreement." (United
Nations, TreatySeries,1947,Vol. 10,No. 138,p. 4.)
TheAgreementdesignated "TheGovernmentsofAustralia,NewZealand
and the United Kingdom (hereinaftercalled 'the Administering Author-
ity')"as "thejoint Authoritywhich willexercisethe administration of the

Territory" (emphasisadded).The Agreementfurther providedthat :

"The AdministeringAuthority will be responsible for the peace,
order, good government and defence of the Territory, and for this
purpose, inpursuance ofanAgreementmadebythe Govemments of
Australia, New Zealand and the United Kingdom, the Government
ofAustraliawill,onbehalfof theAdministeringAuthorityand except

and until othenvise agreed by the Governments of Australia,
New Zealand and the United Kingdom, continue to exercise full
powers oflegislation,administration andjurisdiction in and overthe
Territory." (Zbid.,p. 6; emphasisadded.)

On 26 November 1965,the three Governmentsagreed to modify their

existing Agreements particularly to provide for the establishment of a
Nauruan LegislativeCouncil, ExecutiveCouncil and Nauruan Courts of
Justice. These bodies were given certain powers, while others were
retainedforanAdministratorappointed bythe Government ofAustralia,
and for the AustralianGovemment.
In 1967,as a result of intensive rounds of negotiation between the
representativesofNauru, ontheonehand, and ofAustralia, NewZealand
and the United Kingdom,onthe other,agreement wasreached onthetwo
cardinaldemands ofNauru :itsaccessiontoindependence, and theacqui-
sition by Nauru of the phosphate enterprise. The resultant agreements
weresignedby representatives ofthe threeGovernments jointly compos-
ingthe AdministeringAuthority and of Nauru.

On 9 February 1987,the three Governmentsconcluded an Agreement
to terminate the 1919Agreement. That Agreement, which, like so many
other documentsplacedbeforethe Court inthis case,expresslydescribes
the three Governments as "the Partner Governments", wound up BPCritéqui assurera l'administration du territoire sous tutelle» peut être
constituéepar «un ou plusieurs Etats ou par l'organisation elle-même D.

L'accord de tutelle rappelait qu'en vertu du mandat conféré à
Sa Majestébritannique Nauru «a été administré ...par leGouvernement
del'Australie,au nomdes Gouvernements de l'Australie,de la Nouvelle-
Zélande etdu Royaume-Uni de Grande-Bretagneet d'Irlande du Nord »
(lesitaliquessont de moi). Il rappelait qu:
«SaMajestédésireplacerleTerritoiredeNauru sous lerégimede
tutelle et les Gouvernements de l'Australie,de la Nouvelle-Zélande

et du Royaume-Uni s'engagent à l'administrer selon les conditions
exposéesdans leprésent accordde tutelle. »(Nations Unies, Recueil
destraités,1947,vol. 10,no 138,p. 5.)
Dans l'accord «les Gouvernements de l'Australie, de la Nouvelle-
Zélande etdu Royaume-Uni(ci-aprèsdénommés l'«autorité chargé de
l'administration»)» étaient«conjointementdésigné s.commel'autorité
qui exercera l'administration du Territoire» (les italiques sont de moi).

L'accordstipulait en outre:
((L'autoritéchargéede l'administration répondra dela paix, de
l'ordre, de la bonne administration et de la défensedu Territoire. A
cette fin, en vertu d'un accord conclu entre les Gouvernements de
l'Australie,de la Nouvelle-Zélandeet du Royaume-Uni,le Gouver-
nement del'Australiecontinuera à exercerdans leditterritoirepleins
pouvoirs législatifs,administratifsetjudiciaires, au nomdel'autorité

chargéede l'administration - à moins que lestrois gouvernements
susmentionnés endécident autrementet jusqu'au moment où une
décisiondans cesensinterviendrait.»(Zbid.,p. 6;lesitaliquessont de
moi.)
Le 26 novembre 1965lestrois gouvernementsconvinrent de modifier
lesaccordsenvigueur qu'ilsavaientconclus,enparticuler afin deprévoir

l'instauration d'unconseillégislatif,d'un conseilexécutifde Nauru et de
tribunaux nauruans. Certains pouvoirs étaientattribués à ces organes,
tandis que d'autres étaientréservésà un administrateur désignépar le
Gouvernement australien, ainsi qu'à cegouvernement.
En 1967, à la suite de sériesde pourparlers intensifs entre les repré-
sentants de Nauru, d'une part, et ceux de l'Australie, de la Nouvelle-
Zélandeet du Royaume-Uni de l'autre,un accord fut conclu sur lesdeux
exigencesprincipales de Nauru :son accession à l'indépendanceet l'ac-
quisition, par Nauru, de l'entreprise des phosphates. Les accords qui en
résultèrent furentsignéspar des représentants des trois gouvernements
qui composaient conjointement l'autorité administrante etpar ceux de
Nauru.
Le 9 février1987les trois gouvernements conclurent un accord pour
mettrefin àl'accordde 1919.Cetaccord,qui,comme de nombreuxautres
documents soumis à laCour dans cetteaffaire,qualifie en termes exprès

les trois gouvernement de «gouvernements participants », mit fin aux 340 PHOSPHATELANDS IN NAURU (DISS. OP. SCHWEBEL)

and agreed upon a distribution of its assets.In al1the years from 1919to
1968,apart from those ofJapanese occupation during the Second World
War,the phosphate operations - virtuallythe whole of organized econ-
omicactivityontheIsland - wererunnotbyAustraliabut byBPC,which
was under the direction of three Commissioners appointed by the three
Governments.

In pursuance of the instruments which have been described, it wasthe
Mandatory orAdministeringAuthority,not Australia,whichwasrespon-
sible to, and which was uniformlytreated as responsibleto, the League
and the United Nations. Communications were addressed to and ran
betweenthe Mandatory orthe AdministeringAuthority, onthe one hand,

andthe Leagueorthe UnitedNations, onthe other.Theadministrationin
place in Nauru, and the lawapplied in Nauru, wasAustralian. Butal1that
Australia - one of the three Governmentsdenominated by the Trustee-
shipAgreementas "thejointAuthority" administeringNauru - did,from
1919to the independence of Nauru, was done "on behalf of' the Govern-
ments of New Zealand and the United Kingdom as well as on its own
behalf. Not onlyAustralia,but NewZealand and the United Kingdom as
well, weremembers of the Trusteeship Council under Article 86 of the
Charter by virtue of their "administeringtrust territories"; for a period,
New Zealand's only entitlement to remain a member of the Trusteeship
Council wasby virtue ofitsadministering,asone ofthe three States con-
stitutingthe AdministeringAuthority,the Territory of Nauru.

For itspart, Nauru steadilymaintainednot that Australia,butthethree
Partner Governments, were responsible for rehabilitating worked-out
phosphate lands; for example, the record of the negotiating session of
16May 1967 Statesthat "during the followingdiscussion it emergedthat
the Nauruans will stillmaintain their claim on the Partner Governments
in respect of rehabilitation ofeas mined in the past ...".At the thirty-

fourth sessionoftheTrusteeshipCouncilin June 1967,the representative
of Nauru proposed that "the Partner Governments" should accept
responsibilityfor rehabilitating land worked before1 July 1967,a stand
reiteratedbeforethe Council on 22November 1967whenthe representa-
tive of Nauru maintained that "the three Governments should bear
responsibilityfortherehabilitation ofland minedprior to 1July 1967".In
1986,Nauru advisedthethreeGovernments ofitsappointment ofa Com-
mission to inquire into "the Government or organization who should
acceptresponsibilityfor rehabilitation..." and sought the CO-operation
of each of those Governments,including provision of records. In 1987,
Nauru requested "the three partner Governments ofAustralia, New Zea-
land and theUnited Kingdom" to keep BPCfunds intactpending the con-
clusion of the task of the Commission of Inquiry. After receipt of the
report of the Commission of Inquiry, Nauru on 20 December 1988sentfonctions des BPC et stipula des modalitésde répartitionde leurs actifs.
Pendant toutes les années qui s'écoulèrend te 1919à 1968,sauf cellesde
l'occupation japonaise pendant la seconde guerre mondiale, l'exploita-
tion desphosphates - pratiquement laseuleactivitééconomiqueorgani-
séesur l'île- fut administréenon par l'Australie,mais par les BPC, qui
étaient dirigéspar trois Commissioners désignés par les trois gouverne-
ments.
Parapplication desinstruments dont on a faitétat,cefut lemandataire
ou l'autorité administrante,maisnon l'Australie,qui était responsableet
fut uniformément considéré comme responsable vis-à-vis de la Société
desNations etdel'organisation desNations Unies. Lescommunications
étaient adresséesau mandataire ou àl'autorité administrante, d'unepart,
la Sociétédes Nationsou àl'organisation desNations Unies del'autre et
étaient échangéesentrc eesentités. L'administrationen place à Nauru et
la législationappliquée àNauru étaientcellesde l'Australie.Cependant

tout acte accompli par l'Australie - l'un des trois gouvernements
«conjointementdésignés ..commel'autorité»qui exerceral'administra-
tion de Nauru selon les termes de l'accord de tutelle - le fut, de 1919
jusqu'à l'indépendancede Nauru, «au nom» des Gouvernements de la
Nouvelle-Zélandeetdu Royaume-Uniautant qu'en sonpropre nom.Non
seulement l'Australie, mais aussi bien la Nouvelle-Zélande et le
Royaume-Uni étaient membresdu Conseil de tutelle en vertu de l'ar-
ticle 86de la Charte, parce qu'ilsétaientchargésd'administrerdesterri-
toires soustutelle»; pendant un certaintemps la Nouvelle-Zélanden'eut
d'autretitreà restermembre du Conseildetutelle queceluid'être chargée
d'administrer le Territoire de Nauru, comme l'un des trois Etats qui
constituaientl'autorité administrante.
Pour sapart Nauru n'a cessé de soutenir quenon seulement l'Australie,
maislestroisgouvernementsparticipants portaient laresponsabilitédela
remise en état des terresàphosphates épuisées;par exemple le compte
rendu despourparlers du 16mai 1967déclare :«des échangesqui suivent
il ressort que les Nauruans maintiendront leur réclamation contre les
gouvernementsparticipants au sujetdelaremiseenétatdeszonesexploi-

téesdans le passé ..»A la trente-quatrième sessiondu Conseil de tutelle
enjuin 1967le représentantde Nauru proposa que «les gouvernements
participants)) acceptent la responsabilitéde remettre en étatles terres
épuisées avantle le'juillet 1967et il réaffirma cette position devant le
Conseil le 22novembre 1967en déclarant:«il incombe auxtroisgouver-
nementsd'assurer laremiseen état desterresexploitéesavantle le'juillet
1967». En 1986Nauru fit savoir aux trois gouvernements qu'elle avait
désigné une commissionpour rechercher «quelgouvernementouorgani-
sationdevraitassumerlaresponsabilitédelaremiseenétat ..»etellesolli-
cita la coopération de chacun de ces gouvernements, notamment la
communication de documents. En 1987Nauru pria «les trois gouverne-
mentsparticipants del'Australie,dela Nouvelle-Zélandeetdu Royaume-
Uni »deconserverintacts lesfonds desBPCjusqu'à cequelacommission
d'enquête ait achevé sa tâche. Après avoirreçu le rapport de la commis-identic notes to the Governments of Australia, New Zealand and the
United Kingdom; that for New Zealand in part reads :

"The Department of External Affairs wishesto reaffirm the posi-
tion which hasbeen consistently taken bythe Government of Nauru
sinceindependence, and which wastaken bythe elected representa-
tives of the Nauruan people before independence, that theAdminis-
teringAuthorityundertheMandate andTrusteeshipoverNauruwas
and remainsresponsiblefor the rehabilitationof thephosphate lands
workedout in theperiod of its administration ofNauru, prior to 1st
July, 1967 when the Nauru Island Phosphate Agreement 1967
enteredinto force.
Specifically, the Department of External Affairs wishes to

reaffirm that NewZealand, in its capacityas one of the threeStates
involvedin and party to the Mandate and TrusteeshipAgreements
overNauru, failedto makeproper provision for the long-term needs
of the Nauruan people, whose welfare was a sacredtrust and over-
riding responsibility under the relevant Agreements, and that this
failure,whichwasabreach of those Agreementsand ofgeneralinter-
national law,took the form,inter alia, of a failure to make any pro-
vision forrestoringthe worked-outphosphate lands to a reasonable
level for habitation by the Nauruan people as a sovereign nation.
TheDepartment notes that at nostagehastheGovernmentofNauru,
or any authorized representative of the Nauruan people, accepted
or agreed thatthe NauruIsland PhosphateAgreement absolvedthe
Partner Governments orany of them of their responsibilityfor the
rehabilitationofthelands.
Accordingly, the Department of External Affairs reaffirms that
the New Zealand Government was and remains under an obligation
to makereparation forthis failure,whetherin the form of monetary
compensation orby making,inCO-operationwiththe Government of
Nauru, full provision for the rehabilitation of the relevant lands
in a manner to be agreed between the Parties." (Memorial of the

Republic of Nauru, Vol. 4,Ann. 80,No. 22;emphasisadded.)
Finally,when Nauru brought suitinthe Court againstAustralia, it sent
identic notes on 20May 1989to New Zealand andthe United Kingdom;
that for New Zealand in part reads :

"The Department of External Affairs has the further honour to
statethat on 19thMay, 1989itlodged an Application with the Inter-
national Court ofJustice in The Hague, inpursuit ofitsclaimforthe

rehabilitation ofthe said land...
The Department has the further honour to draw the attention of
the High Commission to the fact that the Application named thesion d'enquête Nauruenvoyades notes identiques, le 20décembre1988,
aux Gouvernements de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande et du
Royaume-Uni; la note destinée à la Nouvelle-Zélandeest libelléeen
partie dans lestermes suivants:

«Ledépartement desaffairesextérieurestient àréaffirmerlaposi-
tion constamment prise par le Gouvernement de Nauru depuis
l'indépendance,et qui étaitcelle des représentants élusdu peuple
nauruan avant l'indépendance, selon laquelle l'autoritéadminis-
tranteen vertudu mandat etde la tutellepour Nauruétaitet demeure
responsablede la remise en étatdes terres à phosphates épuisées
pendantlapériodeaucoursdelaquelleelleaadministré Nauru, avantle
le*juillet 1967,datàlaquellel'accordde 1967surlesphosphates de
l'îlede Nauru est entré envigueur.
En particulier, le départementdesaffairesextérieurestient réaf-
firmerque la Nouvelle-Zélandqeu, iétaitl'undestroisEtatsintéreset
parties aumandatetà l'accorddetutellepourNauru,n'apas prislesdis-

positionsnécessairepoursatisfairelesbesoinsàlongtermedelapopu-
lationnauruanedont lebien-êtreconstituaiut nemissionsacréeetune
responsabilité primordiale en vertu des accords pertinents; que ce
manquement, quiconstituaitune violationdesditsaccordset du droit
internationalgénérals,'estnotammentmanifestépar lefaitden'avoir
prisaucunedispositionpour remettresuffisammentenétatlesterres à
phosphates épuiséeasfinque la populationnauruane puisseyvivreen
tant que nation souveraine.Le département notequ'à aucunmoment
le GouvernementdeNauru ni aucun représentantautorisédu peuple
nauruan n'aacceptéoureconnuquel'accordsurlesphosphatesde l'île
deNauruaitexonéré les gouvemementsparticipants oul'unquelconque
d'entreeuxde leursresponsabilitéspoulraremiseenétatdesterres.
Enconséquence,ledépartementdesaffairesextérieuresréaffirme
que leGouvernementnéo-zélandaisétaiettdemeuretenu de réparer
ce manquement, soit sous la forme d'une indemnisation ou en

prenant, en coopération avecle Gouvernementde Nauru, toutes les
dispositions pour la remise en état des terres en question selon des
modalités àconvenirentre lesparties.»(Mémoirede la République
de Nauru, vol. 4,annexe 80,no22; lesitaliquessont de moi.)

Enfin, quand Nauru introduisit une instance contre l'Australie devant
la Cour, elle envoya des notes identiques à la Nouvelle-Zélandeet au
Royaume-Uni le 20mai 1989;la note destinée àla Nouvelle-Zélandeest
libelléeenpartie dans lestermes suivants:

«Le département des affaires extérieuresaen outre l'honneur de
faire connaître que, le 19mai 1989,il a dépoune requête devantla
Cour internationale de Justice, à La Haye, pour faire valoir ses
demandes relativesàla remiseen état desterres en question...
Le départementa en outre l'honneur d'attirerl'attention du haut-
commissariat sur le fait que la requête désigne le Commonwealth Commonwealth of Australia as sole respondent in respect of the
claim. This is without prejudice to the Department's position, as
recorded in itsNote of 20thDecember, 1988that New Zealand, inits
capacityasone ofthe three States involvedin and party tothe Man-
date and Trusteeship over Nauru, was also responsible for the
breaches of those Agreements and of general international law
referredtointhat Note." (Memorial oftheRepublic ofNauru, Vol. 4,
Ann. 80,No. 29.)
In view ofthe essential fact that, from 1919until Nauruan indepen-

dence in 1968,Australia alwaysacted asa member of ajoint Administer-
ingAuthoritycomposed ofthree States, and alwaysacted on behalf ofits
fellow members of that joint AdministeringAuthority as well as its own
behalf, it followsthat its acts engaged or may have engagednot only its
responsibility - if responsibilitybe engaged at al1 - but those of its
"Partner Govemments".
Consequently,ajudgment bythisCourtupon theresponsibility ofAus-
tralia would appeartobe tantamount to ajudgment upon the responsibi-
lity of New Zealand and the United Kingdom. Of course the Court's
judgment inthe current casewould intermsbedirected onlyto theparties
to itand willhavebindingforce onlyinrespectofthat particular case.But
letussupposethat Nauru could and wouldpursue acourseofseriallitiga-
tion likethat whichNicaraguapursuedfirstagainsttheUnited States and,
having obtainedjudgment against it, against Costa Rica and Honduras.
Can itbeseriouslymaintained that if,arguendo,the Court weretohold on

the merits against Australia, the other States with which it jointly com-
posed the AdministeringAuthority would enjoy a consideration whose
verysubject-matterwould not have been passed upon bythe Court inthe
current case?

Nauru maintains that :
"No legal right or responsibility of either State would be deter-
mined by the Court in this case, both by virtue of Article 59 ofthe
Statute and because the focus of the claim is on the acts and omis-
sions of Australia and of Australian officials responsible for the

administration of Nauru." (Written Statement of the Republic of
Nauru, p. 93,para. 262.)
The answer to that core contention is that the protection afforded the
absent States by Article 59in the quite exceptionalsituation of this case
wouldbe notional rather than real; and that whilethe focusofthe claimis
on the acts and omissions of Australia and Australian officials respon-
sible for the administration of Nauru, those acts and omissions were
those of Australiaacting as one of three States whichjointly constituted
the Administering Authority, and they were those of Australia acting

on behalf of NewZealand andthe United Kingdom. d'Australie comme seul défendeur ence qui concerne la demande.
Cela estsanspréjudicede la position du département, exposéedans
sa note du 20 décembre1988,selon laquelle la Nouvelle-Zélande,
étantl'undestrois Etatsimpliquésetpartie au mandat et à la tutelle
concernant Nauru était aussi responsable des violations de ces
accords et du droit international général auxquellesil est fait réfé-

rence dans cettenote.»(Mémoiredela Républiquede Nauru, vol.4,
annexe 80,no29.)
Si l'on tient compte du fait essentiel que, de 1919jusqu'à l'indépen-
dance de Nauru en 1968,l'Australie a toujours agi en tant que membre
d'uneautoritéadministranteconjointecomposéedetroisEtatsetqu'ellea
toujours agiau nom des autres membres de ladite autoritéadministrante
commeen sonpropre nom, ilrésulteque sesactesont engagé,oupeuvent
avoir engagénon seulementsaresponsabilité - à supposer qu'ilenexiste
une à un titre quelconque- mais celle des((gouvernementsparticipants».

Par conséquent,si la Cour statuait sur la responsabilité del'Australie,
celareviendraità statuer, semble-t-il,surla responsabilitédela Nouvelle-
Zélande et du Royaume-Uni. Certes la décisionde la Cour dans la
présente instancene s'adresserait, selonsestermes,qu'aux partiesàl'ins-
tance etelleneseraobligatoire quepour lesparties àcetteaffairedétermi-
née.Supposonstoutefois que Nauru puisse etveuille s'engagerdansune
sériedeprocèscommel'afaitle Nicaragua d'abord contrelesEtats-Unis,
puis, après avoir obtenu un arrêt contre les Etats-Unis, contre le
Costa Rica et leHonduras.A supposer, pour lesbesoins de l'argumenta-
tion, que la Courprononce sur le fond une décision défavorableà 1'Aus-
tralie, peut-on sérieusement soutenirque les autres Etats qui, conjointe-

ment avec celle-ci,formaient l'autorité administrante, seraient entendus
sans que l'objetmêmedu débat aitdéjàdonnélieu à une décisionde la
Courdans la présenteaffaire?
Nauru soutient ce qui suit:
«La Cour ne statuerait suraucun droit, suraucune responsabilité
del'unou l'autre Etat enl'espèce,lafoispar l'effetdel'article59du
Statut etparce que la demandeporte avant tout sur lesactes et omis-

sions de l'Australieet de fonctionnaires australiens responsables de
l'administration de Nauru.» (Exposé écritde la République de
Nauru, p. 93,par. 262.)
Laréponse à cetteallégationfondamentale,c'estque la protection accor-
dée aux Etat absentspar l'article 59serait plutôt théoriqueque pratique
compte tenu des caractères très exceptionnelsde la présente affaire; et
quesilademandeporte avanttoutsur lesactesetomissions del'Australie

et de fonctionnaires australiens responsables de l'administration de
Nauru, ces actes et omissionsfurent ceux de l'Australie agissantcomme
l'un destrois Etats qui formaient conjointement l'autoritéadministrante
et furent ceux de l'Australie agissant pour le compte de la Nouvelle-
Zélandeet du Royaume-Uni. Theissueofthe weighttobe accordedtothesituationof absent States
maybeafinelybalancedone.Inthiscase,forthe reasonsset out, yown
view isthatthebalanceinclinestowardsholdingtheApplicationagainst
Australiaalonetobe inadmissible.

(Signed)StephenM.SCHWEBEL. La question de l'importanceà attribuerà la situation d'Etats absents
peut dépendred'un équilibre subtil.En l'espèce,pour les raisons indi-
quées,j'estime,quantàmoi,quel'équilibrepenchedu côtéd'une décision
déclarant irrecevablelademande forméecontre l'Australie seule.

(Signé)Stephen M. SCHWEBEL.

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Opinion dissidente de M. Schwebel

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