Opinion dissidente de M. Armand-Ugon

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038-19590620-JUD-01-03-EN
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OPINION DISSIDENTE DE M. ARMAND-UGON

Je regrette vivement, pour les raisons que j'expose ci-après, de
ne pouvoir me rallier à l'arrêt dela Cour.
Dans la commune de Baarle-Nassau (Pays-Bas),dont la superficie
dépasse4.000 hectares, se trouve, enclavée dans son temtoire, la
commune deBaerle-Duc (Belgique), d'une superficiede zoo hectares.
Dans la section A, dite de Zondereygen, de la commune de Baarle-

Nassau, deux parcelles cadastrales connues, de1836 à 1843 ,ous les
numéros 91 et 92, font l'objet du présent différend, et les Parties
demandent à la Cour de décider à laquelle des deux appartient la
souveraineté sur ce temtoire, portant sur 14 ha, 37 a, 80 Ca.

Le Gouvernement belge fonde ses prétentions de souveraineté à
l'égard des parcelles cadastrales sur les dispositions explicites du

procès-verbal reproduit à l'article 90 du Procès-verbal descriptif
de la Convention de 1843 . eprocès-verbal, en langue néerlandaise,
dans la partie qui concerne les parcelles, est ainsi libellé:
«Les parcellesnumérotées91et 92 appartiennent àla commune
de Baerle-Duc » (De parceelennummer gren 92 behoren tot dege-
meenteBaevle-Hertog).

Le ,Gouvernement néerlandais s'appuie sur deux propositions
principales pour soutenir sa souveraineté: letatu quo du Traité de
1842 et de la Convention de1843 et, àpartir de cette date, la posses-
sion effective, publique et paisible des parcelles. Le Procès-verbal
communal de 1836-184 d1ela commune de Baarle-Nassau, indique
les deux parcelles comme appartenant à cette commune. Son texte,
en langue néerlandaise, est le suivant:
(Section A dite Zondereijge:

Les parcellesnos78 à III inclusappartiennentàla Commune de
Baarle Nassau » (De parceelen van en met nummer 78 tot en met
no. IIIbehoorentot de GemeenteBaarlz Nassau).

La Cour doit décider lequel de ces deux textes est celui de la
Convention de 1843.
Le premier texte indiqué par le Gouvernement belge attribuerait
- à tort selon le Gouvernement néerlandais - les parcelles à la
Belgique. Ce texte provenant d'un certain procès-verbal inséréau
Procès-verbal descriptif de l'article go n'exprime nullement le
consentement et la volonté des Parties contractantes; une faute a

28étécommise en reproduisant à l'article go un procès-verbal qui n'est
pas le Procès-verbal communal de 1836-1841 qui avait étéchoisi
par la Commission mixte. Le Gouvernementnéerlandais a la charge
de la preuve de cette allégation.

L'examen des documents les plus importants et pertinents, par
ordre chronologique, permet plus aisément de saisir les discussions
et les changements d'opinions au sein de la Commission mixte de
délimitation, à propos des parcelles. Ce mêmeexamen conduit à la
décision de la présente affaire. On laissera de côté certains faits
soulevéspar les Parties, qui ne sont pas nécessairement liés à la
réponse à la question soumise à la décisionde la Cour.

Le Procès-verbal communal, commencé le zg novembre 1836,
achevé en1839, arrêté et signéle 22 mars 1841 par les autorités des
deux communes, a, dans la présente affaire, une place fondamentale.
En effet, ce document deviendra, par résolution de la Commission
mixte, la seconde partie de l'article go du Procès-verbal descriptif
de la Convention de 1843.

La séparation de la Belgique et des Pays-Bas, en 1830, avait
rendu nécessairede constater dans un procès-verbal l'appartenance
des parcelles constituant les deux communes de Baarle-Nassau et
de Baerle-Duc.
Les autorités desdeux communes et les personnes quil'ont dressé
procédèrent, en donnant suite aux ordres reçus des autorités res-
pectives, ((à une reconnaissance aussi exacte que possible des
limites qui existent depuis longtemps entre les parcelles enclavées

dans les communes ))Ce procès-verbal a étéétabli contradictoire-
ment sur les bases du registre cadastral, du tableau indicatif, des
registres des propriétés et témoignages des voisins les plus anciens;
toute divergence a étérégléeà l'amiable avec l'assentiment du
propriétaire (contre-mémoire, annexe 1,pp. 6 à 21). Ce document,
terminé en 1839, ne fut signépar les autorités de Baerle-Duc qu'en
mars 1841, quand la Commissionmixte de délimitation eut commen-
cé son travail. Toutes les précautions indiquées montrent le soin
et le sérieux qui présidèrent à la rédaction de cet important docu-
ment, sans ratures ni surcharges, timbré avec le sceau des deux
communes, lequel fut dressé en double exemplaire pour constater
le texte officielet déposéaux archivesde chacune des deux commu-
nes. Les exemplaires originaux ne pouvaient êtrequ'identiques.
Les deux Procès-verbaux gardent les formes d'un traité ou conven-
tion entre les deux communes. C'est un acte juridique unique, qui

est l'Œuvre des autorités des deux communes et qu'il ne sera
possible de modifier que de leur propre accord. Il fait apparaître
quelles sont les parties contractantes; un préambule énonce les
motifs qui ont déterminé sa conclusion et le but poursuivi deconstater certains faits. Le Procès-verbal que les deux communes
ont convenu, qui comprend quatorze pages et se réfère à 5732
parcelles cadastqales, est un accord entre les autorités commu-
nales des deux Etats. Seul l'exemplaire déposéaux archives de la
commune de Baarle-Nassau figure au dossier; l'autre exemplaire
de Baerle-Duc n'a pas étéprésenté par le Gouvernement belge.

Il est regrettable qu'une telle omission se soit produite, car de deux
choses l'une: ou l'exemplaire égaréétait concordant avec celui
versé au dossier, ou il différait de celui-ci. Dans l'une ou l'autre
situation, la présencede ce document aurait éclairci définitivement
le droit des Parties. La présente affaire n'aurait probablement pas
étésoumise àla Cour. La non-possession de ce document, invoquée
par le Gouvernement belge, ne peut lui créerune situation favora-
ble. Il n'a pas expliqué ni prouvé quand et comment la disparition
est survenue; ni le cas fortuiti la force majeure n'ont étéinvoqués.
C'est, de sa part, une simple allégation faite e1955.
Quoi qu'il en soit, aucun doute n'est soulevépar les Parties sur
l'authenticité du Procès-verbalcommunal et comme unique exem-
plaire il fait entièrement foi.

Pour mieux comprendre les travaux de la Commission mixte, il
faut les diviser en deux périodesséparées. Lapremière période va
du 3 juin 1839 jusqu'à son ajournement le 18 janvier 1842, et la
seconde période reprend le 23 février 1843 jusqu'au 8 août de la
mêmeannée, date de la signature du Procès-verbal descriptif. Un

fait important divise le travail de la Commission: c'est le Traité
du 5 novembre 1842,ratifiéle 5 février1843,lequel établit les lignes
généralesdont la Commission devra tenir compte dans l'accom-
plissement de sa mission.

Quand la Commission mixte instituéepar le Traité de Londres du
19 avril 1839 arriva dans ses travaux aux secteurs des communes
de Baarle-Nassau et Baerle-Duc, elle se heurta à des difficultés
sérieuseset particulières pour continuer la ligne frontalière qu'elle
avait tracée jusque-là. Les commissaires belges manifestaient qu'ils
étaient obligés,en vertu des instructions qu'ils avaient reçues, de
maintenir le statu quo en ce qui concerne la commune belge de
Baerle-Duc (lettredu président de la commission belge au président
de la commission néerlandaise, du 4 septembre 1841).

Les commissaires déléguéspar la Commission mixte, réunis le
26 octobre 1841 à Ache1 (175meséance),constatent que ne pouvant
((appliquer à la délimitation entre les communes de Baarle Nassau
et Baarle Duc, les mêmes moyens, le même mode d'opération
employés pour le reste de la ligne, [ils]sont convenus de procéder
dans cette circonstance spéciale de la manière suivante ...,l'on se

30borne ..à reconnaître et constater quelles sont les parcelles, soit
propriétés bâties, soit terres labourables, prés, jardins, vergers, bois,
bruyères, etc., qui appartiennent aux Pays-Bas ou à la Belgique,

c'est-à-dire aux communesde Baarle Nassau ou Baarle Duc. » Pour
ce travail, le Procès-verbal Communal de 1836-1841 est pris «pour
base de la séparation des territoires des deux communes ...En
conséquence, il est ...acceptéde part et d'autre par les déléguéd se
la Commission mixte que le territoire de la commune de Baarle
Nassau se compose de toutes les parcelles sous les numérossuivants :

Section A, dite Zondereijgen.

1, 4,5 et 62à 67 inclus :78 à III inclus; 113, 127 etc.» (contre-
mémoire, annexe XXVII a, pp. 57-58).
Par cette décision prise avec l'intervention du commissaire
belge, le vicomte Vilain XIIII, la sous-commission attribue les
parcelles en cause à Baarle-Nassau.

Une lettredu vicomte Vilain XIIII, du jour suivant, le 27 octobre
1841, adressée au bourgmestre de Baerle-Duc, le prie de lui faire
connaïtre si les parcelles 91 et 92 appartiennent à Baerle-Duc
car, selon le procès-verbal de délimitation de la commune de
Baarle-Nassau, elles appartiennent à Baerle-Duc; «le procès-
verbal de notre commune n'en fait pas mention )),ajoute cette
lettre (contre-mémoire, annexe XXII, p. 51). La réponse à cette
lettre ne figure pas dans le dossier.
La lettre du vicomte Vilain XIIII, se référant à un procès-verbal
dedélimitation dela commune deBaarle-Nassau, n'a pu faire allu-
sion au Procès-verbal de 1836-1841de cette commune, dont l'origi-
nal déposéau Greffe établit que les parcelles nos 91 et 92 appar-
tiennent à Baarle-Nassau. En affirmant dans sa lettre que «le
procès-verbal de notre commune n'en fait pas mention »,il accep-
tait que selon ce procès-verbal les parcelles en question reve-

naient à Baarle-Nassau. Cette lettre est iine preuve corroborante
que les exemplaires originaux déposésaux deux communes concor-
daient sur ce point.
Dans une annexe à un rapport du président de la Commission
néerlandaise de délimitation au ministre des Affaires étrangères
des Pays-Bas, du 31 octobre 1841, il est dit qu'il est arrêtà,Achel,
de part et d'autre par les déléguéd se la Commission mixte que les
territoires des deux communesse composent des parcellesindiquées
dans un tableau qu'il inclut à son rapport. D'après ce tableau,
à la Section A, dite Zondereygen, il est rapporté que les parcelles
g~-et 92 appartiennent à la Belgique. Le président néerlandais,
ce faisant, ne rapportait pas exactement la décisionprise à Achel
sur les parcelles litigieuses. Le ler décembre 1841, la Commission mixte prend connaissance
de la difficultéqui empêche les commissaires désignésde procéde~
à la délimitation continue entre Baarle-Nassaii et la Belgique. Une
telle difficultérésulte de la situation toute spéciale des territoires
de Baarle-Nassau et Baerle-Duc, composés de parcelles entre-
mêlées. Il est arrêtéque l'on procédera à la vérification du travail
de sous-commissions destinées à constater la souveraineté de chaque
Puissance sur les parcelles qui forment les territoires de ces com-
munes (contre-mémoire,annexe XXVI, p. 55).
La Commission mixte plénière,un mois après la décision d'Achel,
le 2 décembre 1841, après discussion et vu les propositions des

commissaires déléguésa ,rrêtela disposition suivante pour la sépa-
ration des territoires des communes en question:

(Paragraphe I.- Une délimitationproprement dite ne pouvant
s'effectuerentre cesdeux communes,sansrencontrer lesplus grandes
difficultés,l'on se borne reconnoitre età désigner les parcelles
consistant en propriétés bâtiesou non bâties qui appartiennentla
commune de Baarle Nassau (Pays-Bas) et à celle de Baarle-Duc
(Belgique).))(Contre-mémoire,annexe XXVII, p. 56.)

La décision du 4 décembre 1841, prise par la Commission tout
entière (176me séance), en reconnaissant pour chacun des deux
États les parcelles qui doivent leur appartenir, en les désignant par
leur numéro et section de cadastre, inclut dans la section A, dite
Zondereygen, entre autres, (les parcelles no78 à II inclus ))comme
appartenant à Baarle-Nassau (mémoire,annexe VI, p. 23).
Donc, au moment où la Commission mixte ajourne ses travaux,
le 18 février 1842, elle avait décidéque les parcelles étaient néer-
landaises (contre-mémoire, annexe XXXI, p. 64). Les douter
soulevés par la lettre du vicomte Vilain XII11 étaient complète-
Il n'y avait aucune incertitude, àcette date,à l'égard
ment dissipés.
de la souveraineté néerlandaise sur les parcelles.

La Commission mixte reprend ses travaux le 23 février 1843
(contre-mémoire, annexe XXXII, p. 65). Les travaux devaient
êtreterminés dans trois mois; ils en ont cependant duré quatre.
La Commission prend alors connaissance du Traité du 5 novembre
1842, dont l'article 14 prescrit le maintien du statu quo entre les
deux communes. La question de la délimitation de la frontière
demeurait ouverte. On convient d'initier les travaux par la revision
définitive des procès-verbaux descriptifs de la limite et on décida
que les sous-commissions seraient chargées de reviser le travail
(contre-mémoire, annexe XXXII, p. 65).

32 Lors de la séance du 3 mars 1843, la Commission mixte adopte
les règles suivantes sur la méthode et la procédure de son travail:

(IO MM. les présidents prendront immédiatement des mesures
pour la confection et la mise au net des plans parcellaires devenus
nécessairespar suite du Traitédu 5 novembre 1842.
2" Les procès-verbaux descriptifs seront revus et complétéspar
une ou plusieurs sous-commissions qui soumettront le résultat de
leurs travaux à l'approbation de la Commissionmixte.
........................

5" Afin de réduire les écritures le plus possible et d'éviter des
collationnements très longs et souvent imparfaits, les procès-ver-
baux descriptifs, dont il faudra un assez grand nombre de copies,
seront autographiéset tirés àfrais communs à 50 exemplaires dont
25 pour chaque commission. » (Contre-mémoire,annexe XXXIII,
p. 66.)
On établit ainsi une division du travail. N'oublions pas que le
Procès-verbal descriptif a 142 articles et qu'on devait terminer
avant trois mois.
Le 4 avril 1843(22Sme séance), la Commission arrêteune résolu-
tion qui comprend deux articles, dont le premier seul intéresse
l'affaire, et qui seront annexés au procès-verbal de cette séance.

Par suite decette résolution, les décisions concernant les communes
de Baarle-Nassau et Baerle-Duc qui sont inséréesdans les procès-
verbaux des 175~0 et 176- séancessont annulées. En conséquence,
les décisions prises le26 octobre, le2 et le4 décembre 1841 sont
laisséessans effet.Ilne telle annulation était la conséquenceimmé-
diate del'adoption à cette mêmeséancedu Procès-verbalcommunal
de 1836-1841 pour constater le statu quoqui devrait êtremaintenu
en vertu de l'article 14 du Traité du 5 novembre 1842. La procla-
mation du maintien du statu quo obligea, naturellement, la Com-
mission mixte à reviser ce qui avait étéconvenu antérieurement à
l'égard des parcelles des deux communes - en dérogation au statu
quo; elle maintenait tout ce qu'elle avait décidésur la base du
statu quo. La résolution du 4 avril 1843 - et il faut la transcrire
intégralement, vu son extrême importance, car elle constituera la
première partie de l'article go du Procès-verbal descriptif de la

Convention de 1843 - est la suivante:

((Article go
Communesde
Baarle-Duc (Belgique) et
Baarle-Nassau (Pays-Bas)
5~e*. La limite, après avoir séparéla commune de Poppel (Bel-
gique), de celle dJAlphen (Pays-Bas),rencontre, au point décrit à
la fin de l'article précédent,le temtoire composant les communes
de Baarle-Duc et Baarle-Nassau. En ce qui concerne ces deux communes, les commissaires dé-
marcateurs :
Vu l'article 14 du Traité du 5 novembre 1840 deux ainsi conçu:

((Le statu quo sera maintenu, tant à l'égarddesvillagesde Baarle-
Nassau (Pays-Bas) et Baarle-Duc (Belgique),que par rapport aux
chemins qui les traversent.))
Considérant quel'étatactuel deslieux, maintenu par la disposition
de l'article quatorze précité, ne permetpas de procéder à la délimi-
tation régulière des deux communesdont il est question;
Considérant, néanmoins, qu'ilpeut êtreutile de constater ce qui
a étécontradictoirement établi par le procès-verbal du vingt-neuf
novembre 1836, arrêté et signéle vingt-deux mars 1840 et un
par les autorités locales des deux communes;

a) Ledit procès-verbal, constatant les parcelles dont se composent
les communes deBaarle-Duc et de Baarle-Nassau, est transcrit, mot
à mot, dans le présent article.
b) Un plan spécial,en quatre feuilles, comprenant le parcellaire,
tout entier, des deux communesest dressé à l'échelledu dix-millième
et à ce plan sont annexéesdeux feuilles détachéesreprésentant, à
l'échelledu deux mille cinq centième, les parties de ces communes
qu'une échelle,plus petite, ne permet pas d'exprimer avec clarté.
(Le procès-verbal,dont il est parléfilus haut, sera inséréici tex-
tuellement).))

Par l'effet decette résolution adoptant le Procès-verbal communal
de 1836-1841, les parcelles litigieuses étaient incorporées à la com-
mune de Baarle-Nassau. Une disposition de ce procès-verbal
indiquait textuellement: (Les parcelles nos 78 à III inclus appar-
tiennent à la Commune de Baarle Nassau. )) Le 4 avril 1843, la
Commission mixte, en décidant de maintenir le statu quo, admettait
la souveraineté néerlandaise sur les parcelles. Elle a fait decette

résolution un choix irrévocable. Après cette date, aucune autre
résolution ne fut prise par la Commission mixte à cet égard.
Le contenu du statu quo que la Commission mixtevenait d'adopter
était aussi accepté par le ministre de Belgique à La Haye, dans la
lettre du 26 juin 1843 adressée au ministre des Affaires étrangères
des Pays-Bas. Il réclame, au nom des habitants de la commune de
Baerle-Duc, un certain droit de jouissance sur les bruyères que
possédait le prince Frédéric des Pays-Bas. Parmi ces biens figurait
la parcelle no 91. Le ministre de Belgique ajouta dans sa lettre:

e Si cette question se présentait pour des terrains belges, sa
solution serait facile, car les articles 8 eIO de la loi du 28 août
1792,garantiraient formellement lesdroits de Baar leDuc. »(Contre-
mémoire, annexes XLI et XLI a.) Pour apprécier la portée juridique de la résolution du 4 avril
1843 du point de vue du présent différend, il convient d'analyser
son contenu. Cette résolution est un accord qui a étérendu selon
la libre volonté concordante des autorités déléguéep sar les deux
Gouvernements pour fixer le statu quo et la situation des deux
communes et qui doit déployer tous ses effets.
Une fois incorporée à l'article 90 du Procès-verbal descriptif,
cette résolution est devenue une disposition de la Convention de
1843. Il en est de mêmedu Procès-verbal communal dont le texte
devait êtrereproduit textuellement.
Il ressort de la résolution précitéeque les commissaires démarca-
teurs, en raison de l'article 14 du Traité du 5 novembre 1842,
devaient maintenir lestatu quoexistant àl'égarddesdeux communes.
Cette méthode respectait la situation interne et préexistante entre
elles. C'est le fondement du principe de I'uti +ossidetis, procédé
naturel et commode. A partir du 4 avril, le statu quosur les parcelles
des deux communes restait fixé.

D'autre part, comme le remarque la résolution indiquée, il y
avait impossibilité de procéder à la délimitation régulièredes deux
communes. Il y avait deux impossibilités pour établir une limite:
une légale(article 14) et l'autre physique (configuration des deux
territoires enclavéset enchevêtrement des parcelles entre elles), ce
qui décidala Commission mixte à adopter le Procès-verbal commu-
nal de 1836-1841 pour constater les parcelles appartenant aux deux
communes, lequel devait être transcrit ccmot à mot » dans le
Procès-verbal descriptif. Le texte de ce Procès-verbal, malgré une
note finale de la résolution du 4 avril 1843, ne fut jamais incorporé
textuellement au procès-verbal de cette séance de la Commission
mixte.
Le Procès-verbal communal qui devait êtretranscrit mot à mot
à l'article go du Procès-verbal descriptif était celui qui fut contra-
dictoirement établi le 29 novembre 1836, arrêtéet signéle 22 mars
1841 par les deux communes. C'est une copie authentique de ce

Procès-verbal qui devait s'incorporer à l'article go, car c'était le
document qui faisait pleine foi et pleine preuve du statu quo des
parcelles entre les deux municipalités - telle étant la volonté des
commissaires démarcateurs, et c'est sur cet objet qu'était inter-
venu leur consentement. Or, ce Procès-verbal communal n'a pas
étéreproduit «mot àmot »à l'article go du Procès-verbal descriptif
de la délimitation entre les Royaumes des Pays-Bas et de la Bel-
gique, comme l'avait décidéla Commission mixte. Dans le Procès-
verbal communal, dont l'exemplaire original a étédéposé au dossier,
les parcelles en cause sont déclarées commeappartenant à Baarle-
Nassau, tandis que le Procès-verbal de l'article 90 les attribue à
Baerle-Duc, comme conséquence de la reproduction d'un document
qui n'est pas le Procès-verbal communal de 1836-1841. L'article go du Procès-verbal descriptif comprend deux parties:
la première est le texte de la résolutiondu 4 avril 1843, et la seconde
partie est l'insertion du Procès-verbal communal de 1836-1841.
C'est une compilation de deux actes provenant d'autorités diffé-
rentes: la Commission mixte et les autorités des communes de
Baarle-Nassau et de Baerle-Duc. La seconde partie n'a pas été
exécutée conformémentà la première partie qui est la reproduction

de la résolution prise le avril; au lieu d'incorporer une copie de
l'original du Procès-verbal communal de1836-1841,on mit àsa place
une copie d'un autre procès-verbal communal, différent de celuique
la Commission mixte avait décidéd'adopter. Il y a donc eu une mise
en ceuvre erronée et vicieuse d'une disposition de la Convention
(article go du Procès-verbal descriptif). La volonté des Parties n'a
pas étérespectée. Cette exécution imparfaite n'équivaut pas à une
revision de cette disposition conventionnelle, laquellen'a pas été
envisagéepar la Commission mixte ni arrêtée par celle-cipostérieu-
rement. La Commission mixte n'est pas revenue sur sa résolution
du 4 avril et aucune modification n'a étéapportée à son texte.
Quand elle faisait un changement dans ses décisions - comme
lorsqu'elle a passé en revue les articles50 à 112 du Procès-verbal
descriptif, séance du 12 juin 1843 - ce changement était dûment

mentionné dans le procès-verbal de la séance (contre-mémoire,
annexe XXXVII, p. 76).
Aucune preuve n'a étéapportée pour justifier la modification du
texte original par un autre texte postérieur. La copie qu'on invoque
comme ayant servi de base au Procès-verbal communal inséré à
l'article go n'a pas étéverséeau dossier. Il n'y a doncaucune preuve
d'une modification voulue sur ce point et la résolution formelle et
claire de la Commission mixte incorporée à l'articlqo n'a été
rapportée ni abrogée à aucun moment. C'est donc cette disposition
conventionnelle qui doit régler la divergence signalée entre le
Procès-verbal communal et le procès-verbal communal transcrit
à l'article go du Procès-verbal descriptif. L'erreur purement maté-
rielle de transcription d'un texte pour un autre doit êtrereconnue
devant les preuves complètes et décisivesproduites par le Gouver-
nement néerlandais. Un acte juridique authentique a étéremplacé

par un acte non authentique, différent de celui qui avait été con-
venü par les Parties. Le procès-verbal communal incorporé à
l'article go est une copie d'un acte non authentique; il n'y a aucune
preuve de son existence. Aucun doute n'est permis sur l'existence
d'une divergence entre les textes des deux proces-verbaux; il
suffit de comparer le texte original avec le texte transcrile texte
original a une valeur juridique exclusive et certaine et doit prévaloir
sur le texte de l'article go.
La confrontation des deux textes néerlandais de ce procès-verbal
de l'article go démontre lui-même uneautre divergence à l'alinéa
qui se rapporte aux parcelles en cause. Le texte produit par la Belgique dit : «De perceelen nummer 91
en 92 behoren totde gemeenteBaerle-Hertog. ))
Le texte produit par les Pays-Bas est le suivant :«De #erceelevi
no 91 en 92 behooren totBaarle-Hertog. ))

Dans le dernier texte, les mots ((degemeente 1ont étésupprimés.
Cette constatation permet d'affirmer que les deux secrétaires com-
munaux ont certifiédeux textes différents et que les commissaires
déléguép sour le collationnement des deux textes n'ont pas rempli
leur tâche avec le soin voulu.
Cette variante de deux textes de l'article go du Procès-verbal
descriptif, attribuant lesparcelles soità la communede Baerle-Duc,
soit à Baarle-Duc, quand, tout au long du texte du Procès-verbal
descriptif, les parcelles sont toujours assignées à une commune
(gemeente), doit s'expliquer comme une interpolation dans le
texte du Procès-verbal communal de 1836-1841 versé au dossier.

Une fois qu'elle acceptait le texte du Procès-verbal communal de
1836-1841pour décideren quoi consistaitlestatu quo,la Commission
mixte ne pouvait rectifier ce Procès-verbal sans l'intervention des
autorités communales. La Commission se reportait à un acte inter-
communal afin d'établir le statu quo qu'elle voulait transcrire mot
à mot dans le Procès-verbal descriptif; elle prescrivait la reproduc-
tion textuelle de ce document. En principe, seuls les organes qui
ont fait un acte juridique sont compétents pour le modifier ou
l'amender. Du reste, ledit Procès-verbal communal indique la
procédure qui doit êtresuivie pour corriger les erreurs qu'il peut
contenir et la qualité des preuves à faire valoir dans cette circons-
tance. La Commission mixte, si elle avait eu l'intention de corriger
le Procès-verbal communal au moment d'incorporer celui qu'elle

a placé à l'article go du Procès-verbal descriptif, aurait dû le quali-
fier de procès-verbal amendé de reconnaissance des limites exactes
entre les communes de Baarle-Nassau, province du Brabant sep-
tentrional, et de Baerle-Duc, province d'Anvers. La Commission ne
l'a pas fait.lle a, au contraire, fait certifier un certain procès-verbal
communal par les secrétaires des deux communes. Il est évident
que la Commission mixte ne pouvait, sans commettre une falsifi-
cation matérielle, transcrire comme copie authentique d'un acte
juridique déterminé un acte qu'elle avait au préalable modifié
secrètement. Dèscemoment, l'acte transcrit et incorporéàl'article go
n'était plus le Procès-verbal communal de 1836-1841, mais un
autre procès-verbal dont l'existence est restée inconnue. Il faut
conclure que la Commission mixte, placée tout au sommet de la

hiérarchie, n'avait pas la capacité de modifier ledit Procès-verbal
communal et de le faire passer ensuite comme le Procès-verbal de
1836-1841. On ne peut exprimer que l'on va faire une citation
concrète et préciseet, par la suite, présenter sous cette étiquette un
texte qui ne concorde pas avec l'original. La Commission mixte
n'a pas eu l'intention ni la volonté de procéder ainsi. II est incontestable- comme l'admettent les Parties - qu'ily a
entre le procès-verbal incorporé à l'article go et le Procès-verbal
communal de 1836-1841une divergence sur le point de l'attribution
des parcelles litigieuses.
Les explications présentées par les Parties sur l'origine de cette
divergence ne dépassent pas la phase de la simple hypothèse. Au-
cune des deux versions n'a le soutien de preuves irréprochables et
décisives. Ce sont des conjectures, des produits de l'esprit et des

présomptions sur des faits contestables. Elles doivent donc être
écartées.
D'autre part, pour la décisionde la présente affaire, il n'est pas
nécessaire de connaître ni d'établirla genèsede la variante signalée
entre les deux textes des procès-verbaux; il suffit de constater que
celle-ci existe.
Le Gouvernement néerlandais en a fait la preuve.
Le Gouvernement belge soutient que c'est volontairement qu'on
a écartéle Procès-verbal authentique; les Parties auraient décidé
d'insérer à l'article go le texte transcrit. Cne telle intention, si elle
a existé, n'a jamais, en aucune circonstance, étéconsignéedans un
acte quelconque. Silence complet sur ce point, soit dans les procès-

verbaux des séancesde la Commission mixte, soit dans le Procès-
verbal descriptif.
Ce Gouvernement ajoute que les Parties sont tombées d'accord
pour adopter le Procès-verbal tel qu'il est transcrit à l'article go.
Une telle affirmation est contraire au texte formel de la résolution
du 4 avril 1843, qui est devenue une disposition conventionnelle,
laquelle a décidéque le procès-verbal à transcrire àl'article go serait
(ledit Procès-verbal )),c'est-à-dire le Procès-verbal communal de
1836-1841, et non un autre procès-verbal. Or, c'est précisémentun
autre procès-verbal non authentique qu'a incorporé à son texte
l'article go. Par ce fait, le consentement des Parties intervenu lors
de la résolution du 4 avril n'a pas étérespecté. La Convention de
1843 n'a pu couvrir le défaut d'exécution d'une disposition de l'ar-

ticle go et lui donner force de loi. La loi n'a pu reconnaître qu'une
copie d'un acte inconnu peut faire foi contre l'exemplaire authen-
tique d'un acte que cette mêmeloi a choisi comme preuve du
statu quo. L'objet du consentement des Parties était de retenir le
statu quo constaté par le Procès-verbal communal de 1836-1841;
ce consentement n'est pas intervenu sur un autre objet.

Le président de la commission néerlandaise de ,délimitation
adresse, le 14 juillet 1843, une lettre au conseiller dJEtat, gouver-

38neur du Brabant septentrional, pour lui faire parvenir deux copies
authentiques de la description des frontières telles qu'elles ont été
définitivement arrêtéespar la Commission mixte. Parmi les annexes
à cettelettre figurait le texte de l'article go tel qu'il a étémentionné

(résolution du 4 avril 1843)~mais sans la transcription du Procès-
verbal indiqué àla fin de cette résolution. Une telle transcription a
sans doute paru inutile, vu que le Procès-verbal communal de
1836-1841 était bien connu par les autorités de la commune de
Baarle-Nassau. On doit déduire que le texte actuel du Procès-verbal
de l'article go n'a pas étéconnu à cette époquepar les autorités de
cette commune (contre-mémoire, annexe XXXVIII).
Par une lettre du 29 avril 1844, le conseiller d'Etat, gouverneur
du Brabant septentrional, fait savoir au bourgmestre de Baarle-
Nassau le placement prochain de bornes, en vertu du traité avec la
Belgique, et luifait connaître les parcelles oùlesdites bornes devront
êtreplacées. Il joint à sa lettre une partie du procès-verbal de la
délimitation, en tant que celui-ci a trait cette commune. L'extrait
de l'annexe de cette lettre consiste uniquement en la reproduction
textuelle de la résolutiondu 4 avril 1843(devenue la première partie

de l'article go), mais sans l'accompagner du texte du procès-verbal
inséré à l'article go du Procès-verbal descriptif. Le bourgmestre de
Baarle-Nassau, à cette occasion, n'a pu connaître le texte de ce
procès-verbal tel qu'il est reproduit à l'article go; il n'avait nulle-
ment besoin du texte du Procès-verbal que la résolution du 4 avril
1843 avait arrêté caril le connaissait parfaitement.
Il ressort clairement de ces deux lettres que ni le gouverneur du
Brabant septentrional, en juillet 1843, ni le bourgmestre de Baarle-
Sassau, en avril 1844, n'ont eu sous leurs yeux le texte apocryphe
inséré à l'article go.

Il est évident que la volonté desParties n'a pas étérespectéeau
moment de l'exécution de la première partie de l'article go, en
insérant à la suite un document autre que celui décidépar les

commissaires démarcateurs. En conséquence, cette partie de la
Convention de 1843 doit êtrerétablie selon le seul consentement
acquis. Le procès-verbal ae l'article go n'est pas celui qui doit
fixer lestatztquo des parcelles en cause; ce statu quo doit se régler
suivant le Procès-verbal communal de 1836-1841. Ainsi en avait
décidé irrévocablementla Commission mixte et la Convention de
1843n'a pu contenir dans son texte une chose différente.

Si nous nous plaçons sur le terrain que seul le procès-verbal de
l'article go fait foi, la revendication néerlandaise est encore perti-
nente. On doit rappeler que le Procès-verbal communal de l'article go
du Procès-verbal descriptif, celui auquel la Convention se réfère,
prévoit la possibilitédecertaines modifications. En effet, ce Procès-

verbal (de l'article go), dans son avant-dernier alinéa, prévoit que
les ((erreurs qui pourraient être découvertes plus tard comme
s'étant glisséesdans ce Procès-verbal pourront êtrecomgées depart
et d'autre, sous réserve cependant que la partie qui demande ou
exige une correction, accompagne sa revendication de preuves
claires et légales1)(mémoire,annexe IV).
De cet alinéa, il ressort que le Procès-verbal de l'article go admet
des modifications. II établit mêmequi aura la charge de la preuve
et la nature des preuves que les Parties devront invoquer pour
redresser les erreurs ultérieurement décelées. Il y a donc une
réserve expresse sur les erreurs consignées au procès-verbal de
l'article go, que peuvent invoquer soit le Gouvernement belge soit

le Gouvernement néerlandais pour démontrer ces erreurs.

L'approbation de la Convention de 1843 n'a pas pour autant dit
le dernier mot sur le statu qzto constaté dans cet instrument; les
erreurs à survenir pouvaient toujours êtrealléguées.
Les preuves présentées par le Gouvernement néerlandais sont
efficaces et concluantes pour démontrer l'erreur du procès-verbal
communal de l'article go.Cespreuves sont ((claires et légale»;elles
proviennent des termes mêmesdu Procès-verbal communal ori-
ginal de 1836-1841, document dont la valeur n'a pas étécontestée
par le Gouvernement belge.
En outre, sur les parcelles en cause, les Pays-Bas ont exercé

pendant de longues années - comme nous le verrons ci-après -
une possession effective, publique et pacifique, après la Convention
de 1843. C'est une autre preuve du statu quo néerlandais qu'avait
admis le Procès-verbal communal 1836-1841.
On invoque le principe di^maintien des traités. Mais un tel
principe - qui du reste n'est pas absolu - ne s'oppose nullement,
surtout quand une clause expresse le prévoit, à la rectification des
erreurs matérielles qu'ils comportent, pourvu qu'elles soient pleine-
ment démontréespar des preuves sérieuses,administrées de manière
évidente et irréfragable.
I,e principe du respect des traités reçoit ainsi une exacte appli-
cation; ce principe n'impose pas l'acceptation d'un traité qui n'est

pas juridiquement valable dans une de ses parties.

La Convention de 1843 a reçu pendant presque une centaine
d'années une application qui ne s'accorde pas avecle texte du procès-
verbal communal inclus à l'article go du Procès-verbal descriptif;
si celui-ci considère les parcelles comme belges, dans la réalité,ces
mêmes parcellesont étésoumises depuis toujours à la souveraineténéerlandaise. Une telle situationparaît confirmer, comme le soutient
la thèse néerlandaise, le remplacement du Procès-verbalcommunal
authentique par un autre dont on ignore l'existence et le contenu.

Une divergence était néeentre la pratique existante à l'égard des
parcelleslitigieuses et le Procès-verbal descript;elle a seulement été
signalée à l'attention des deux Gouvernements en 1890, lors du
projet de Convention de 1892. C'est à ce moment qu'est apparue
l'inadvertance commise dans l'article 90 du Procès-verbal descriptif
de la Convention de 1843, laquelle était passéeinaperçue des deux
Gouvernements.
Cette possession effective sur les parcelles, contraire au proccs-
verbal inséré à l'article 90, est une preuve supplémentaire de la
méprise dénoncéepar le Gouvernement néerlandais.
Le ministre des Affaires étrangères dela Belgique, dans une lettre
au ministre des Pays-Bas à Bruxelles, du 20 août 1890, disait:
« le traité de 1842 ayant stipulé lestatu quo, il parait préférable de
viser ce traité plutôt que la convention de 1863 1);il se référait sans

doute à la Convention de 1843 (contre-mémoire,annexe XLVII).
Le statuquo avait préférencesur les dispositions de laconvention
de 1843.
La carte jointe au procès-verbal de délimitation des deux Baarle
de 1826démontreclairementque lesparcelles en question n'apparte-
naient pas à la commune de Baerle-Duc. La valeur de cette carte
ne saurait être récuséesans examen (duplique,annexe II).
La Convention de 1843, dans son article 3, attribue aux cartes
topographiques au dix-millième, arrêtéeset signéespar les commis-
saires, la mêmeforce et la mêmevaleur qu'à une disposition de la
convention. La carte présentée par la Belgique comme preuve
supplémentaire, qui est une feuille d'un plan spécial, fait mention,
dans sa légende, des parcelles appartenant à la Belgique, des par-
celles indivises entre les deux Royaumes et des parcelles apparte-
nant aux Pays-Bas. Les premières portent la couleur brune, les

secondes sont roses et les troisièmes ne sont pas coloriées.Cette
carte n'est pas l'une des cartes prévues par l'article 3, cité anté-
rieurement, car elle indique de nombreuses parcelles en rose,
sans les attribuer soità l'un, soit à l'autre des deux États. Elle ne
tient pas compte du procès-verbal qu'avait adopté l'article 90, dans
lequel les parcelles sont attribuées soit Baerle-Duc, soit à Baarle-
Nassau; ce procès-verbal n'indique pas qu'il y avait des parcelles
indivises. Cette carte reste en dehors des faits admis par le procès-
verbal communal inséré à l'article 90. On doit considérercette carte
dans son ensemble, et non dans une de ses parties; sa force probante
n'est pas déterminante. D'ailleurs, la carte annexée au procès-
\-erbal de la Commission de délimitation du 5 septembre 1887 ne
relève pas les parcelles en litige comme territoire belge (contre-
mémoire,annexe XLVI) .
D'autre part, les faits juridiques sûrs et déterminants dont il sera

fait état ci-après sont en désaccord complet avec les affirmationsde la carte en question. Une telle circonstance lui enlève force pro-
bante.
L'inscription que contient la carte de l'État-major belge de 1871
n'a pas l'importance qu'on lui attribue en l'occurrence, dès qu'il
n'est pas établi que les autorités néerlandaises en eussent pris
connaissance (mémoire, annexe XIII, p. 31). Cette attribution à

la Belgique des parcelles en question n'est que la répétition de
l'erreur déjà signalée dans le procès-verbal communal inséré à
l'article go. On ne peut tirer de cette constatation un effet de souve-
raineté ni lui attribuer la valeur d'un acte de souveraineté.

Il a étéavancéégalementpar le Gouvernement belge que, lors du
projet de convention de 1892, il fut admis que les parcelles en cause
appartenaient à la Belgique. Cette convention avait pour but de
mettre fin aux enclaves et le projet s'est limitéà replacer celles-ci
dans un seul des deux territoires, sans discuter l'appartenance des
parcelles en faisant des cessions mutuelles. Les Parties, pour aboutir
au but poursuivi de mettre fin aux enclaves belges aux Pays-Bas
et néerlandaisesen Belgique, s'en sont tenues aux donnéeserronées
du procès-verbal de l'article go, sans un examen plus approfondi.
Cette convention non ratifiéene peut êtreopposéeaux Pays-Bas.
La jurisprudence constante de la Cour permanente de Justice inter-

nationale et de notre Cour ne permet pas de faire état des propo-
sitions faites au cours des négociations directes qui n'ont pas abouti
à un accord complet. La reconnaissance faite à cette occasion par
les Pays-Bas ne lui a pas enlevéle droit de la contester. Ils n'ont
pas fait une reconnaissance pure et simple; ce projet de convention
est un acte complexe et en conséquence indivisible. Du reste, après
1892, la situation des parcelles est demeuréeinchangée; la souve-
raineté néerlandaise a continué à s'exercer sur ce petit territoire,
sans aucune réclamation de la part du Gouvernement belge; une
telle situation démontrebien que, del'avis des deux Gouvernements,
la prétendue reconnaissance ne portait aucun effet juridique.

On a dit que la Convention du 23 avril 1897 sur le rachat de la
ligne de chemin de fer de Tilburg à Turnhout reconnaissait la
souveraineté belge sur les parcelles en question. Cette convention
n'a pas étéverséeau dossier; pour soutenir cette prétention on a
eu recours à un extrait de l'exposé des motifs de la Convention
devant le Parlement néerlandais (réplique, annexe XII). Mais les
preuves produites par le Gouvernement néerlandais, citées aux

paragraphes 27 et 36, lettre d, de la duplique, permettent, malgré
l'explication donnée en plaidoirie par le conseil belge (procédure
orale, p. II~), de soutenir que les enclaves viséesdans cet exposédes motifs ne sont pas les parcelles en cause. La redevance due par
le Gouvernement néerlandais ne pouvait tomber sur les propriétés
occupéespar le chemin de fer, car ces propriétésavaient ététrans-
féréesau Gouvernement néerlandais (contre-mémoire, annexe LI,
P. 1.52).

Le Gouvernement néerlandais fait valoir un autre titre de souve-
raineté à l'encontre des prétentions du Gouvernement belge. Il
allègue avoir exercé des attributions de la souveraineté sur les
parcelles dans les années postérieures à la Convention de 1843.
Les faits invoqués pour justifier cette situation sont les suivants:
I. Les parcelles en cause pendant la période qui va de 1845 à
1957ont eu différentspropriétaires et l'annexe LI du contre-mémoire
donne le détailde ces changements. Il est fait état d'actes de ventes,
soit privées, soit publiques, d'actes de partage et de cessions. Dans

tous ces actes, il est expressément dit que les biens qu'ils mention-
nent font partie de la commune de Baarle-Nassau. Voici les dates
de ces opérations, jusqu'à l'année 1921 : 31 janvier 1845, 29janvier
1845, 24 février 1845, 15 mars 1856, 20 mars 1860, 3 août 1863,
20 mai 1863, 19 avril 1866, 16 août 1866, 22 janvier 1867, 8 juillet
1867, 22 juillet 1867, 6 mai 1895, ler juillet 1898,22 avril 1904,
21 mai 1904, 4 octobre 1904, 28 septembre 1904, 23 octobre 1905,
5 décembre 1913 et 16 janvier 1914. Tous ces actes de transferts de
propriété sont inscrits dans les registres néerlandais. Ils se réfèrent
aux cadastres néerlandais, ainsi qu'à leurs numérotages. Les droits
de mutations sont payés dans les bureaux néerlandais. Cesactes se
passent entre voisinsde deux communes et de nationalités belge et
néerlandaise. Il y avait une publicité indéniable de tous ces faits,

vis-à-vis des fonctionnaires de Baerle-Duc et d'Anvers.

Il convient d'examiner de plus près certains de ces actes.

Le 31 janvier 1845 le prince Frédéricdes Pays-Bas cède au Gou-
vernement des Pays-Bas des bruyères lui appartenant, entre les-
quelles se trouve la parcelle no 91. Par ordonnance du ministre des
Finances des Pays-Bas du 23 décembre 1846 les droits du Domaine
sur cette parcelle sont reconnus (contre-mémoire, annexe XLIII).
Cette mêmeparcelle, comme appartenant au domaine de l'État
néerlandais, fait l'objet de la vente publiquc du 15 mars 1856

(P.Par acte du 16 août 1866, Hubert Antoine de Poorter, d'Anvers,
vend à la Sociétéanonyme des Chemins de fer du Nord de la Bel-

gique une propriété situéesur la commune de Baarle-Nassau pour
l'établissement du chemin de fer de Turnhout àTilbourg: c'est une
partie des parcelles en litige.
43 2. En 1851, la parcelle 91 fit l'objet d'une vente par le domaine
de 1'Etat néerlandais. La commune de Baerle-Duc a revendiqué
pour ses habitants, devant le tribunal de Bréda, un droit d'usufruit
sur cette parcelle. Elle ne prétendait donc pas que cette parcelle
fît partie de son temtoireet aurait dû, dans ce cas, porter sa requête
devant les tribunaux belges. C'est un acte de juridiction civile des
tribunaux néerlandais sur une des parcelles.
3, Comme le révèlent les actes mentionnés, les parcelles ont
étéimposées au titre de l'impôt foncier néerlandais. C'est là une
manifestation prolongée et continuelle de la souveraineté néer-

landaise sur les parcelles.
4. Le 4 novembre 1864, le ministre de l'Intérieur confère une
concession relative à la ligne de chemin de fer Tilbourg-Turnhout,
pour autant qu'elle devait traverser le territoire néerlandais et les
parcelles en question.
5. Lors de la construction de cette ligne de chemin de fer, une

partie des parcelles avait étéindiquée pour expropriation, par les
autorités néerlandaises, en décembre 1866. Une telle mesure est
bien un acte gouvernemental; une vente volontaire est intervenue
postérieurement.
Après le projet de Convention de 1892, la situation de fait s'est
maintenue inchangée. Sur les parcelles, de nouvelles maisons sont
construites en 1904, les anciens terrains de bruyères sont défrichés,
les habitants des parcelles enregistrent les naissances, mariages et
décèsaux registresde l'étatcivil de leur commune à Baarle-Nassau.
C'est seulement en 1921 que le Gouvernement belge, pour la
première fois, a soumis au Gouvernement néerlandais ses préten-
tions de souveraineté sur les parcelles.

Sans les contester formellement, le Gouvernement belge oppose à

ces faits qu'il a inscrit les parcelàeson cadastre et les a fait figurer
sur une carte militaire. Il invoque encore la Convention non
ratifiéede 1892et une autre de 1897sur un rachat du chemin de fer.
Les parcelles auraient aussi étél'objet de mutations au cadastre
belge de 1896 et 1904.

La forceprobante de lacarte militaire du 4octobre 1871(mémoire,
annexe XIII), du projet de Convention de 1892 et de la Convention
de 1897a étéexaminéeplus haut :il n'est pas nécessaird'y revenir.

Les parcelles devaient figurer au cadastre belge en 1847(mémoire,
annexe XII), mais cette inscription n'a eu aucune conséquence de
fait, commeilressortde lalettredu IO juillet 1890d'un fonctionnaire
belge (réplique, annexe VIII); la parcelle no 92 seulement apparaît
dans le plan cadastral de Baarle-Nassau et la parcelle nogr a le no71au cadastre belge, mais comprend les nos 189, 191, 193, 203, 205,
206, 207 et 208 du cadastre néerlandais. Les modifications succes-
sives des parcelles au cadastre néerlandais, ainsi que l'inscription

des mutations aux registres néerlandais, sont confirméesde façon
certaine par les documents incorporés à l'annexe LI du contre-
mémoire. Les mutations faites en 1896et 1904furent aussi inscrites
dans les registres néerlandais (contre-mémoire,annexe LI, pp. 149
et 168).

Dans tous les cas signalés antérieurement, le Gouvernement
néerlandaisa exercédesfonctionsgouvernementalesprépondérantes
sur les parcelles en litige, sans qu'elles aient soulevéde la part du
Gouvernement belge aucune protestation ni aucune opposition.
Cette tolérance prolongée de ce Gouvernement à cet égard a créé
au bénéficedu Gouvernement néerlandais un droit de souveraineté
indéniable. Il n'y a aucune preuve que la Belgique ait réclaméla
restitution des parcelles avant 1921, ni qu'il y ait eu des activités
belges sur celles-ci. On pourrait ici rappeler l'importance que la
Cour a donnée, dans l'affaire des Pêcheries, à l'absence de protes-

tations d'un gouvernement dans la consolidation d'un droit (C. I. J.
Recueil I95I, p. 138). Dans l'affaire du Groënland oriental la Cour
permanente n'a pas cru devoir délaisserdesactes gouvernementaux,
même quand le Gouvernement norvégien eut formulé certaines
protestations ou réserves (C. P.J. I., SérieA/B, 1%"53, pp. 62-63),
car elle a retenu l'existence de deux éléments en vue d'établir un
titre de souveraineté valable, à savoir l'intention et la volonté
d'exercer cette souveraineté et la manifestation, de l'activité
étatique. La souveraineté sur les Minquiers et les Ecréhous a été
fixéepar notre Cour exclusivement sur la base de faits pareils à
ceux invoqués par le Gouvernement néerlandais dans la présente
affaire(C. I. J. Recueil 1953,pp. 67 à 70).
Une telle intention d'exercer la souveraineté est particulièrement
remarquable après la Convention de 1843 et après le projet de
Convention de 1892. Le Gouvernement néerlandais a continué à
considérer ces parcelles comme lui appartenant et à exercer les
attributions gouvernementales, de manière publique et paisible.
Ces faits ont établi la souveraineté néerlandaise sur les parcelles
en litige.
*
* *

En définitive, l'article 90 du Procès-verbal descriptif annexé à
la Convention de 1843 et q" fait partie de celle-ci dispose dans sa
première partie qie le Procès-verbal communal signé le 22 mars
1841 sera inséré «mot à mot » comme seconde partie de l'article 90.
Or, le procès-verbalreproduit n'est pas une copie littérale du Pro-
cès-verbalcommunal signé le 22mars 1841. On est en présenced'unedisposition de la Convention de 1843 qui n'est pas juridiquement
valable. Une telle disposition ne peut constituer un titre valable de
souveraineté.
D'autre part, le titre fondé sur l'exercice-effectif, pacifique et
public des fonctions étatiques par les Pays-Bas sur les parcelles en
cause doit êtrepréférableau titre de souveraineté invoqué par la
Belgique, qui n'a jamais exercéréellement la compétence étatique

dont elle se considère titulaire.

Bilingual Content

OPINION DISSIDENTE DE M. ARMAND-UGON

Je regrette vivement, pour les raisons que j'expose ci-après, de
ne pouvoir me rallier à l'arrêt dela Cour.
Dans la commune de Baarle-Nassau (Pays-Bas),dont la superficie
dépasse4.000 hectares, se trouve, enclavée dans son temtoire, la
commune deBaerle-Duc (Belgique), d'une superficiede zoo hectares.
Dans la section A, dite de Zondereygen, de la commune de Baarle-

Nassau, deux parcelles cadastrales connues, de1836 à 1843 ,ous les
numéros 91 et 92, font l'objet du présent différend, et les Parties
demandent à la Cour de décider à laquelle des deux appartient la
souveraineté sur ce temtoire, portant sur 14 ha, 37 a, 80 Ca.

Le Gouvernement belge fonde ses prétentions de souveraineté à
l'égard des parcelles cadastrales sur les dispositions explicites du

procès-verbal reproduit à l'article 90 du Procès-verbal descriptif
de la Convention de 1843 . eprocès-verbal, en langue néerlandaise,
dans la partie qui concerne les parcelles, est ainsi libellé:
«Les parcellesnumérotées91et 92 appartiennent àla commune
de Baerle-Duc » (De parceelennummer gren 92 behoren tot dege-
meenteBaevle-Hertog).

Le ,Gouvernement néerlandais s'appuie sur deux propositions
principales pour soutenir sa souveraineté: letatu quo du Traité de
1842 et de la Convention de1843 et, àpartir de cette date, la posses-
sion effective, publique et paisible des parcelles. Le Procès-verbal
communal de 1836-184 d1ela commune de Baarle-Nassau, indique
les deux parcelles comme appartenant à cette commune. Son texte,
en langue néerlandaise, est le suivant:
(Section A dite Zondereijge:

Les parcellesnos78 à III inclusappartiennentàla Commune de
Baarle Nassau » (De parceelen van en met nummer 78 tot en met
no. IIIbehoorentot de GemeenteBaarlz Nassau).

La Cour doit décider lequel de ces deux textes est celui de la
Convention de 1843.
Le premier texte indiqué par le Gouvernement belge attribuerait
- à tort selon le Gouvernement néerlandais - les parcelles à la
Belgique. Ce texte provenant d'un certain procès-verbal inséréau
Procès-verbal descriptif de l'article go n'exprime nullement le
consentement et la volonté des Parties contractantes; une faute a

28 DISSENTING OPINION OF JUDGE ARMAND-UGON
[Translation]

1 very much regret that, for the reasons set out below, 1 am
unable to concur in the Judgment of the Court.
Enclaved within the territory of the commune of Baarle-Nassau
(Netherlands), which extends over more than 4,000 hectares, is the
commune of Baerle-Duc (Belgium), of an area of 200 hectares.
In Section A, known as Zondereygen, of the commune of Baarle-
Nassau, two plots shown in the survey and known, from 1836 to
1843, as numbers 91 and 92, are the subject of the present dispute
and the Parties ask the Court to decide to which of the two this
territory, of 14.378 hectares, belongs.

The Belgian Government bases its claims to sovereignty in
respect of these plots on the express provisions of the minute re-
produced in Article 90 of the Descriptive Minute of the convention
of 1843. This minute was drawn up in Dutch; the part relating to
the plots is in the following terms :
"The plots numbered 91 and 92 belong to the commune of
Baerle-Duc" (De parceelennummer 91 en 92 behoren totde gemeente
Baerle-Hertog).

The Dutch Government relies on two main propositions in assert-
ing its sovereignty: the status quo laid down by the Treaty of
1842 and by the Convention of 1843, and, after that date, effective,
notorious and peaceful~possession of the plots. The Communal
Minute of 1836-1841, of the commune of Baarle-Nassau, shows the
two plots as belonging to that commune. Its text, which is in Dutch,
is to the following effect:

"Section A, known as Zondereygen :
The plots numbers 78-111inclusive belong to the Commune of
BaarleNassau" (Deparceelenvanen metnummer78totenmetno. III
behomentotde GemeenteBaarleNassau).

The Court has to decide which of these two texts is that of the
Convention of 1843.
The first text indicated by the Belgian Govemment would attri-

bute-wrongly, according to the Dutch Govemment-the plots to
Belgium. This text appearing in a certain minute inserted in the
Descriptive Minute of Article 90 in no way expresses the consent
and the will of the Contracting Parties; a mistake was made in
28étécommise en reproduisant à l'article go un procès-verbal qui n'est
pas le Procès-verbal communal de 1836-1841 qui avait étéchoisi
par la Commission mixte. Le Gouvernementnéerlandais a la charge
de la preuve de cette allégation.

L'examen des documents les plus importants et pertinents, par
ordre chronologique, permet plus aisément de saisir les discussions
et les changements d'opinions au sein de la Commission mixte de
délimitation, à propos des parcelles. Ce mêmeexamen conduit à la
décision de la présente affaire. On laissera de côté certains faits
soulevéspar les Parties, qui ne sont pas nécessairement liés à la
réponse à la question soumise à la décisionde la Cour.

Le Procès-verbal communal, commencé le zg novembre 1836,
achevé en1839, arrêté et signéle 22 mars 1841 par les autorités des
deux communes, a, dans la présente affaire, une place fondamentale.
En effet, ce document deviendra, par résolution de la Commission
mixte, la seconde partie de l'article go du Procès-verbal descriptif
de la Convention de 1843.

La séparation de la Belgique et des Pays-Bas, en 1830, avait
rendu nécessairede constater dans un procès-verbal l'appartenance
des parcelles constituant les deux communes de Baarle-Nassau et
de Baerle-Duc.
Les autorités desdeux communes et les personnes quil'ont dressé
procédèrent, en donnant suite aux ordres reçus des autorités res-
pectives, ((à une reconnaissance aussi exacte que possible des
limites qui existent depuis longtemps entre les parcelles enclavées

dans les communes ))Ce procès-verbal a étéétabli contradictoire-
ment sur les bases du registre cadastral, du tableau indicatif, des
registres des propriétés et témoignages des voisins les plus anciens;
toute divergence a étérégléeà l'amiable avec l'assentiment du
propriétaire (contre-mémoire, annexe 1,pp. 6 à 21). Ce document,
terminé en 1839, ne fut signépar les autorités de Baerle-Duc qu'en
mars 1841, quand la Commissionmixte de délimitation eut commen-
cé son travail. Toutes les précautions indiquées montrent le soin
et le sérieux qui présidèrent à la rédaction de cet important docu-
ment, sans ratures ni surcharges, timbré avec le sceau des deux
communes, lequel fut dressé en double exemplaire pour constater
le texte officielet déposéaux archivesde chacune des deux commu-
nes. Les exemplaires originaux ne pouvaient êtrequ'identiques.
Les deux Procès-verbaux gardent les formes d'un traité ou conven-
tion entre les deux communes. C'est un acte juridique unique, qui

est l'Œuvre des autorités des deux communes et qu'il ne sera
possible de modifier que de leur propre accord. Il fait apparaître
quelles sont les parties contractantes; un préambule énonce les
motifs qui ont déterminé sa conclusion et le but poursuivi dereproducing in Article go a minute which was not the Communal
Minute of 1836-1841upon which the Mixed Commission had decided.
The burden of proving this allegation lies upon the Dutch Govem-
ment.

An examination in their chronological order of the most import-
ant of the relevant documents facilitates an understanding of the
discussions and changes of opinion within the Mixed Boundary
Commission with regard to the plots. Such an examination will also
lead to a decision in the present case. Certain facts adducedby the
Parties, which may not be necessary to the decision on the question
submitted to the Court, will not be dealt with here.
The Communal Minute, which was begun on 29 November 1836
and completed in 1839, being agreed and signed by the authorities
of the two communes on 22 March 1841, occupies a position of
cardinal importance in the present case. That document, indeed,
was to become, as the result of a resolution ofthe Mixed Commission,
the second part of Article go of the Descriptive Minute of the 1843

Convention.
The separation of Belgium and the Netherlands, in 1830, had
made it necessary to draw up a minute recording the ownership
of the plots making up the two communes of Baarle-Nassau and
Baerle-Duc.
The authorities of the two communes and those who drew it up
proceeded, in pursuance of instructions received from the respective
authorities, to "ascertain as accurately as possible the boundaries
which had long existed between the enclaved plots within the
communes". This minute was drawn up after discussion on the
bases of the Survey Register, the lists of plots, the Property Reg-
isters, and the testimony of the oldest inhabitants; al1differences
of opinion were settled with the assent of the owners (Counter-
Memorial, Annex 1, pp. 6-21). The document was completed in
1839 but signed by the authonties of Baerle-Duc only in March
1841, when the Mixed Boundary Commission had already begun
its work. All the precautions indicated revealthe care and serious-
ness which went into the drafting of this important document,
free of erasures or additions, stamped with the seals of the two
communes, which was drawn up in two copies recording the official

text, and deposited in the archives of each of the two communes.
The original copies could not but be identical. The two Minutes
follow the forms of a treaty or convention between the two com-
munes. It is a single legal instrument, the work of the authorities
of the two communes which it will not be possible to alter Save by
their agreement. It indicates who are the contracting parties; a
preamble States the reasons which have determined its conclusion
and the purpose in view, which is to record certain facts.The Minuteconstater certains faits. Le Procès-verbal que les deux communes
ont convenu, qui comprend quatorze pages et se réfère à 5732
parcelles cadastqales, est un accord entre les autorités commu-
nales des deux Etats. Seul l'exemplaire déposéaux archives de la
commune de Baarle-Nassau figure au dossier; l'autre exemplaire
de Baerle-Duc n'a pas étéprésenté par le Gouvernement belge.

Il est regrettable qu'une telle omission se soit produite, car de deux
choses l'une: ou l'exemplaire égaréétait concordant avec celui
versé au dossier, ou il différait de celui-ci. Dans l'une ou l'autre
situation, la présencede ce document aurait éclairci définitivement
le droit des Parties. La présente affaire n'aurait probablement pas
étésoumise àla Cour. La non-possession de ce document, invoquée
par le Gouvernement belge, ne peut lui créerune situation favora-
ble. Il n'a pas expliqué ni prouvé quand et comment la disparition
est survenue; ni le cas fortuiti la force majeure n'ont étéinvoqués.
C'est, de sa part, une simple allégation faite e1955.
Quoi qu'il en soit, aucun doute n'est soulevépar les Parties sur
l'authenticité du Procès-verbalcommunal et comme unique exem-
plaire il fait entièrement foi.

Pour mieux comprendre les travaux de la Commission mixte, il
faut les diviser en deux périodesséparées. Lapremière période va
du 3 juin 1839 jusqu'à son ajournement le 18 janvier 1842, et la
seconde période reprend le 23 février 1843 jusqu'au 8 août de la
mêmeannée, date de la signature du Procès-verbal descriptif. Un

fait important divise le travail de la Commission: c'est le Traité
du 5 novembre 1842,ratifiéle 5 février1843,lequel établit les lignes
généralesdont la Commission devra tenir compte dans l'accom-
plissement de sa mission.

Quand la Commission mixte instituéepar le Traité de Londres du
19 avril 1839 arriva dans ses travaux aux secteurs des communes
de Baarle-Nassau et Baerle-Duc, elle se heurta à des difficultés
sérieuseset particulières pour continuer la ligne frontalière qu'elle
avait tracée jusque-là. Les commissaires belges manifestaient qu'ils
étaient obligés,en vertu des instructions qu'ils avaient reçues, de
maintenir le statu quo en ce qui concerne la commune belge de
Baerle-Duc (lettredu président de la commission belge au président
de la commission néerlandaise, du 4 septembre 1841).

Les commissaires déléguéspar la Commission mixte, réunis le
26 octobre 1841 à Ache1 (175meséance),constatent que ne pouvant
((appliquer à la délimitation entre les communes de Baarle Nassau
et Baarle Duc, les mêmes moyens, le même mode d'opération
employés pour le reste de la ligne, [ils]sont convenus de procéder
dans cette circonstance spéciale de la manière suivante ...,l'on se

30 agreed by the two communes, which consists of fourteen pages and

relates to 5,732 survey plots, constitutes an agreement between the
communal authorities of the two States. Only the copy deposited
in the archives of the commune of Baarle-Nassau has been put in
in this case; the other copy, belonging to Baerle-Duc, has not been
produced by the Belgian Government. This failure to produce it is
to be regretted, for, clearly, either the missing copy agreed with
that which has been put in, or it differed from it. In either event,
the presence of the document would have cast decisive light upon
the rights of the Parties. The present case would probably not have
been submitted to the Court. The non-possession of this document,
invoked by the Belgian Government, cannot create for that Gov-
ernment a more favourable situation. It has neither explained nor
proved when and how this disappearance occurred; neither accident
nor force majeure has been put forward by way of explanation. It
is a mere assertion on its part, made in 1955.
In any event, no doubt has been raised by the Parties as to the
authenticity of the Communal Minute and, as the only existing
copy, it must be regarded as completely authoritative.

In order the better to understand the work of the Mixed Com-
mission, it is convenient to divide it into two separate periods.
The first period extends from 3 June 1839 until its adjournment on
18 January 1842, and the second from 23 February 1843,when its
work was resumed, until8 August of the same year, the date of the
signature of the Descriptive Minute. One important fact occurred
between the two periods of the Commission's work; that was the
Treaty of 5 November 1842, ratified on 5 February 1843, which
laid down the general lines to be followed by the Comn~issionin the
fulfilment of its mission.
When the Mixed Commission established by the Treaty of
London of 19 April 1839 came, in the course of its work, to the
sectors of the communes of Baarle-Nassau and Baerle-Duc, it
encountered serious and special difficulties in continuing the fron-
tier line which it had until then been able to draw. The Belgian
Commissioners indicated that, in view of the instructions which
they had received, they were obliged to maintain the status quo
so far as the Belgian commune of Baerle-Duc was concerned

(letter of the President of the Belgian Commission to the President
of the Netherlands Commission of 4 September 1841).
The Commissioners deputed by the Mixed Commission, having
met at Achel, on 26 October 1841 (175th meeting), recorded that
being unable "to apply to the delimitation between the communes
of Baarle-Nassau and Baerle-Duc the same methods and types of
operations as had been used for the rest of the frontier line, [they]
had agreed in these special circumstances to proceed in the followingborne ..à reconnaître et constater quelles sont les parcelles, soit
propriétés bâties, soit terres labourables, prés, jardins, vergers, bois,
bruyères, etc., qui appartiennent aux Pays-Bas ou à la Belgique,

c'est-à-dire aux communesde Baarle Nassau ou Baarle Duc. » Pour
ce travail, le Procès-verbal Communal de 1836-1841 est pris «pour
base de la séparation des territoires des deux communes ...En
conséquence, il est ...acceptéde part et d'autre par les déléguéd se
la Commission mixte que le territoire de la commune de Baarle
Nassau se compose de toutes les parcelles sous les numérossuivants :

Section A, dite Zondereijgen.

1, 4,5 et 62à 67 inclus :78 à III inclus; 113, 127 etc.» (contre-
mémoire, annexe XXVII a, pp. 57-58).
Par cette décision prise avec l'intervention du commissaire
belge, le vicomte Vilain XIIII, la sous-commission attribue les
parcelles en cause à Baarle-Nassau.

Une lettredu vicomte Vilain XIIII, du jour suivant, le 27 octobre
1841, adressée au bourgmestre de Baerle-Duc, le prie de lui faire
connaïtre si les parcelles 91 et 92 appartiennent à Baerle-Duc
car, selon le procès-verbal de délimitation de la commune de
Baarle-Nassau, elles appartiennent à Baerle-Duc; «le procès-
verbal de notre commune n'en fait pas mention )),ajoute cette
lettre (contre-mémoire, annexe XXII, p. 51). La réponse à cette
lettre ne figure pas dans le dossier.
La lettre du vicomte Vilain XIIII, se référant à un procès-verbal
dedélimitation dela commune deBaarle-Nassau, n'a pu faire allu-
sion au Procès-verbal de 1836-1841de cette commune, dont l'origi-
nal déposéau Greffe établit que les parcelles nos 91 et 92 appar-
tiennent à Baarle-Nassau. En affirmant dans sa lettre que «le
procès-verbal de notre commune n'en fait pas mention »,il accep-
tait que selon ce procès-verbal les parcelles en question reve-

naient à Baarle-Nassau. Cette lettre est iine preuve corroborante
que les exemplaires originaux déposésaux deux communes concor-
daient sur ce point.
Dans une annexe à un rapport du président de la Commission
néerlandaise de délimitation au ministre des Affaires étrangères
des Pays-Bas, du 31 octobre 1841, il est dit qu'il est arrêtà,Achel,
de part et d'autre par les déléguéd se la Commission mixte que les
territoires des deux communesse composent des parcellesindiquées
dans un tableau qu'il inclut à son rapport. D'après ce tableau,
à la Section A, dite Zondereygen, il est rapporté que les parcelles
g~-et 92 appartiennent à la Belgique. Le président néerlandais,
ce faisant, ne rapportait pas exactement la décisionprise à Achel
sur les parcelles litigieuses.way ...They would confine themselves ... to ascertaining and
recording which plots, whether built-up property, arable land,
meadows, gardens, orchards, woods or heathland, etc., belonged to
the Netherlands, and which to Belgium, that is, to the communes of
Baarle-Nassau and Baerle-Duc." For the purpose of this work, the
Communal Minute of 1836-1841 was "taken as the basis of the
division of the] temtories of the two communes.. . Accordingly it
was .. agreed by the delegates of the Mixed Commission that the
territory of the ..commune of Baarle-Nassauincluded all the plots
under the following numbers :

Section A, known as Zondereygen.
1, 4, 5 and 62 to 67 inclusive; 78 toIII inclusive; 113, 127 etc."
(Counter-Mernorial,Annex XXVII a, pp. 57-58).

By this decision, in which the Belgian Commissioner Viscount
Vilain XIIII collaborated, the Sub-Commission attributed the
disputed plots to Baarle-Nassau.
Aletter ofViscount Vilain XIIII, ofthe following day, 27 October
1841, addressed to the burgomaster of Baerle-Duc, asked the latter
to inform him whether plots 91 and 92 belonged to Baerle-Duc for,
according to the boundary minute of the commune of Baarle-
Nassau, they belonged to Baerle-Duc; the minute of Ourcommune
does not refer to them, added the letter (Counter-Memorial,Annex
XXII, p. 51) . he reply to that letter has not been placed before
the Court.
The letter of Viscount Vilain XIIII, referring to a boundary

minute of the commune of Baarle-Nassau, cannot have been allud-
ing to that commune's Minute of 1836-1841, the original of which
has been deposited in the Registry and establishes that plots 91
and 92 belong to Baarle-Nassau. The assertion in his letter that
"the minute of Ourcommune does not refer to them" shows that he
recognized that according to that minute the plots in question were
attnbuted to Baarle-Nassau. This letter is evidence corroborating
the fact that the original copies deposited in the two communes
were in agreement on this point.
In an Annex to a Report sent to the Minister for Foreign Affairs
of the Netherlands on 31 October 1841, by the President of the
Dutch Boundary Commission, it is said that it had been mutually
agreed at Achel by the delegates of the Mixed Commission that the
temtories of the two communesconsisted of the plots indicated in a
table appended to the Report. According to this table,in Section A,
known as Zondereygen, it is stated that plots 91 and 92 belong
to Belgium. The Dutch President in so stating was not accurately
reporting the decision which had been taken at Achel with regard
to the disputed plots. Le ler décembre 1841, la Commission mixte prend connaissance
de la difficultéqui empêche les commissaires désignésde procéde~
à la délimitation continue entre Baarle-Nassaii et la Belgique. Une
telle difficultérésulte de la situation toute spéciale des territoires
de Baarle-Nassau et Baerle-Duc, composés de parcelles entre-
mêlées. Il est arrêtéque l'on procédera à la vérification du travail
de sous-commissions destinées à constater la souveraineté de chaque
Puissance sur les parcelles qui forment les territoires de ces com-
munes (contre-mémoire,annexe XXVI, p. 55).
La Commission mixte plénière,un mois après la décision d'Achel,
le 2 décembre 1841, après discussion et vu les propositions des

commissaires déléguésa ,rrêtela disposition suivante pour la sépa-
ration des territoires des communes en question:

(Paragraphe I.- Une délimitationproprement dite ne pouvant
s'effectuerentre cesdeux communes,sansrencontrer lesplus grandes
difficultés,l'on se borne reconnoitre età désigner les parcelles
consistant en propriétés bâtiesou non bâties qui appartiennentla
commune de Baarle Nassau (Pays-Bas) et à celle de Baarle-Duc
(Belgique).))(Contre-mémoire,annexe XXVII, p. 56.)

La décision du 4 décembre 1841, prise par la Commission tout
entière (176me séance), en reconnaissant pour chacun des deux
États les parcelles qui doivent leur appartenir, en les désignant par
leur numéro et section de cadastre, inclut dans la section A, dite
Zondereygen, entre autres, (les parcelles no78 à II inclus ))comme
appartenant à Baarle-Nassau (mémoire,annexe VI, p. 23).
Donc, au moment où la Commission mixte ajourne ses travaux,
le 18 février 1842, elle avait décidéque les parcelles étaient néer-
landaises (contre-mémoire, annexe XXXI, p. 64). Les douter
soulevés par la lettre du vicomte Vilain XII11 étaient complète-
Il n'y avait aucune incertitude, àcette date,à l'égard
ment dissipés.
de la souveraineté néerlandaise sur les parcelles.

La Commission mixte reprend ses travaux le 23 février 1843
(contre-mémoire, annexe XXXII, p. 65). Les travaux devaient
êtreterminés dans trois mois; ils en ont cependant duré quatre.
La Commission prend alors connaissance du Traité du 5 novembre
1842, dont l'article 14 prescrit le maintien du statu quo entre les
deux communes. La question de la délimitation de la frontière
demeurait ouverte. On convient d'initier les travaux par la revision
définitive des procès-verbaux descriptifs de la limite et on décida
que les sous-commissions seraient chargées de reviser le travail
(contre-mémoire, annexe XXXII, p. 65).

32 On I December 1841, the Mixed Commission studied the diffi-
culty which prevented the Commissioners appointed from estab-
lishing a continuous frontier between Baarle-Nassau and Belgium.
This difficulty arose from the particular character of the territories
of Baarle-Nassau and Baerle-Duc which were made up of inter-
rningled parcels. It was decided to proceed to a verification of the
work of Sub-Commissions designated to record the sovereignty of

each Power over the various plots making up the tenitories of the
two communes (Counter-Memorial, Annex XXVI, p. 55).
One month after the Ache1 decision, on 2 December 1841, a
plenary meeting of the Mixed Commission, after discussion and
having regard to the proposals of the delegates of the Commission,
decided upon the following provision for the division of the terri-
tories of the communes in question:
"Paragraph 1.-It not being possiblewithout the very greatest
difficulty to effect a delimitaiion properly socalled as between
these two communes, al1that can be done is to recognize and to
designate the plots consistingof built or unbuilt property which
belongrespectivelyto the commune ofBaarle-Nassau (Netherlands)
and to the communeof Baarle-Duc (Belgium)."(Counter-Memorial,
Annex XXVII, p. 56.)

The decision of 4 December 1841, by the Plenary Commission
(176th meeting), in recording the plots which should belong respect-
ively to each of the two States, designating them by their survey
sections and numbers, included in Section A, known asZondereygen,
inter alia "the plots numbered 78 to III inclusive" as belonging to
Baarle-Nassau (Memorial, Annex VI, p. 23).
Thus, at the time when the Mixed Commission adjourned its
work on 18February 1842, it had decided that the plots were Dutch

(Counter-Memorial, Annex XXXI, p. 64). The doubts raised by the
letter of Viscount Vilain XII11 had been entirely dissipated. There
was no. uncertainty, at that date, with regard to Dutch sovereignty
over the plots.

The Mixed Commission resumed its work on 23 February 1843
(Counter-Memorial,Annex XXXII, p. 65). Its work was to be com-
pletedwithinthree months; it went on,however,for four monthS.The
Commission then had before it the Treaty of 5 November 1842,
Article 14 of which laid down the maintenance of the status quo
for the two communes. The question of the delimitation of the
frontier remained open. It was decided to begin work with the

definitive revision of the descriptive minutes of the boundary and
that the Sub-Commissions should be entrusted with the task of
revision (Counter-Memorial, Annex XXXII, p. 65). Lors de la séance du 3 mars 1843, la Commission mixte adopte
les règles suivantes sur la méthode et la procédure de son travail:

(IO MM. les présidents prendront immédiatement des mesures
pour la confection et la mise au net des plans parcellaires devenus
nécessairespar suite du Traitédu 5 novembre 1842.
2" Les procès-verbaux descriptifs seront revus et complétéspar
une ou plusieurs sous-commissions qui soumettront le résultat de
leurs travaux à l'approbation de la Commissionmixte.
........................

5" Afin de réduire les écritures le plus possible et d'éviter des
collationnements très longs et souvent imparfaits, les procès-ver-
baux descriptifs, dont il faudra un assez grand nombre de copies,
seront autographiéset tirés àfrais communs à 50 exemplaires dont
25 pour chaque commission. » (Contre-mémoire,annexe XXXIII,
p. 66.)
On établit ainsi une division du travail. N'oublions pas que le
Procès-verbal descriptif a 142 articles et qu'on devait terminer
avant trois mois.
Le 4 avril 1843(22Sme séance), la Commission arrêteune résolu-
tion qui comprend deux articles, dont le premier seul intéresse
l'affaire, et qui seront annexés au procès-verbal de cette séance.

Par suite decette résolution, les décisions concernant les communes
de Baarle-Nassau et Baerle-Duc qui sont inséréesdans les procès-
verbaux des 175~0 et 176- séancessont annulées. En conséquence,
les décisions prises le26 octobre, le2 et le4 décembre 1841 sont
laisséessans effet.Ilne telle annulation était la conséquenceimmé-
diate del'adoption à cette mêmeséancedu Procès-verbalcommunal
de 1836-1841 pour constater le statu quoqui devrait êtremaintenu
en vertu de l'article 14 du Traité du 5 novembre 1842. La procla-
mation du maintien du statu quo obligea, naturellement, la Com-
mission mixte à reviser ce qui avait étéconvenu antérieurement à
l'égard des parcelles des deux communes - en dérogation au statu
quo; elle maintenait tout ce qu'elle avait décidésur la base du
statu quo. La résolution du 4 avril 1843 - et il faut la transcrire
intégralement, vu son extrême importance, car elle constituera la
première partie de l'article go du Procès-verbal descriptif de la

Convention de 1843 - est la suivante:

((Article go
Communesde
Baarle-Duc (Belgique) et
Baarle-Nassau (Pays-Bas)
5~e*. La limite, après avoir séparéla commune de Poppel (Bel-
gique), de celle dJAlphen (Pays-Bas),rencontre, au point décrit à
la fin de l'article précédent,le temtoire composant les communes
de Baarle-Duc et Baarle-Nassau. At the meeting on 3 March 1843, the Mixed Commission adopted
the following rules relating to the method to be adopted and the
procedure to be followed:
"(1) The Presidents shd take immediate steps forthe preparation
of accurate copies of the maps of plots necessitated as a result of
the Treaty of 5 November 1842.
(2) The descriptive minutes shall be revised and completed by
one or more Sub-Commissionswhichshallsubmit the result of their
work for the approval of the MixedCommission.

(5) In order to reduce writing as much as possible and to avoid
very lengthy and often imperfect collating, the descriptive minutes,
of which a considerable number of copies will be required, wiil be
duplicated and run off, the costs being shared, in 50 copies, 25 for
each Commission." (Counter-Memorial,Annex XXXIII, p. 66.)

The work was thus being divided. Itshould not be forgotten that
the Descriptive Minute contains 142 articles and that the work was
to be completed within three months.

On 4 Apnl 1843 (225th meeting), the Commission adopted a
resolution containing two articles of which the first alone is relevant
to the case; the articles were to be annexed to the minutes of that
meeting. As a result of that resolution, the decisions relating to the
communes of Baarle-Nassau and Baerle-Duc, set out in the minutes
of the 175th and 176th meetings, were cancelled. As a result, the
decisions taken on 26 October and on 2 and 4 December 1841 were
rendered ineffective. This cancellation was the immediate conse-
quence of the adoption at that same meeting of the Communal
Minute of 1836-1841, as a record of the status quo, which had to be
maintained in virtue of Article 14 of the Treaty of 5 November
1842. The proclamation of the maintenance of the status quoobvious-
ly compelled the Mixed Commission to revise everything that had
previously been agreed upon with regard to the plots of the two
communes in derogation of the status quo; itmaintained everything

that had been decided on the basis of the status quo. The resolution
of 4 April 1843-which wiil be set out in full having regard to its
extreme importance, for it was to constitute the first part of
Article go of the Descriptive Minute of the 1843 Convention-was
as follows:
"Article go
Communesof
Baarle-Duc (Belgium)and
Baarle-Nassau (Netherlands)
Paragraph I. The boundary line, after separating the commune
of Poppel (Belgium) from the commune of Alphen (Netherlands)
touches, at the point descnbed at the end of the previous Article,
the territory composing the communes of Baarle-Duc and Baarle-
Nassau. En ce qui concerne ces deux communes, les commissaires dé-
marcateurs :
Vu l'article 14 du Traité du 5 novembre 1840 deux ainsi conçu:

((Le statu quo sera maintenu, tant à l'égarddesvillagesde Baarle-
Nassau (Pays-Bas) et Baarle-Duc (Belgique),que par rapport aux
chemins qui les traversent.))
Considérant quel'étatactuel deslieux, maintenu par la disposition
de l'article quatorze précité, ne permetpas de procéder à la délimi-
tation régulière des deux communesdont il est question;
Considérant, néanmoins, qu'ilpeut êtreutile de constater ce qui
a étécontradictoirement établi par le procès-verbal du vingt-neuf
novembre 1836, arrêté et signéle vingt-deux mars 1840 et un
par les autorités locales des deux communes;

a) Ledit procès-verbal, constatant les parcelles dont se composent
les communes deBaarle-Duc et de Baarle-Nassau, est transcrit, mot
à mot, dans le présent article.
b) Un plan spécial,en quatre feuilles, comprenant le parcellaire,
tout entier, des deux communesest dressé à l'échelledu dix-millième
et à ce plan sont annexéesdeux feuilles détachéesreprésentant, à
l'échelledu deux mille cinq centième, les parties de ces communes
qu'une échelle,plus petite, ne permet pas d'exprimer avec clarté.
(Le procès-verbal,dont il est parléfilus haut, sera inséréici tex-
tuellement).))

Par l'effet decette résolution adoptant le Procès-verbal communal
de 1836-1841, les parcelles litigieuses étaient incorporées à la com-
mune de Baarle-Nassau. Une disposition de ce procès-verbal
indiquait textuellement: (Les parcelles nos 78 à III inclus appar-
tiennent à la Commune de Baarle Nassau. )) Le 4 avril 1843, la
Commission mixte, en décidant de maintenir le statu quo, admettait
la souveraineté néerlandaise sur les parcelles. Elle a fait decette

résolution un choix irrévocable. Après cette date, aucune autre
résolution ne fut prise par la Commission mixte à cet égard.
Le contenu du statu quo que la Commission mixtevenait d'adopter
était aussi accepté par le ministre de Belgique à La Haye, dans la
lettre du 26 juin 1843 adressée au ministre des Affaires étrangères
des Pays-Bas. Il réclame, au nom des habitants de la commune de
Baerle-Duc, un certain droit de jouissance sur les bruyères que
possédait le prince Frédéric des Pays-Bas. Parmi ces biens figurait
la parcelle no 91. Le ministre de Belgique ajouta dans sa lettre:

e Si cette question se présentait pour des terrains belges, sa
solution serait facile, car les articles 8 eIO de la loi du 28 août
1792,garantiraient formellement lesdroits de Baar leDuc. »(Contre-
mémoire, annexes XLI et XLI a.) As regards these two communes, the boundary commissioners:

Having regard to Article 14 ofthe Treaty of 5 November 1842,
worded as follows :
'The status quo shall be maintained bothwith regard to the villages
of Baarle-Nassau (Netherlands) and Baarle-Duc (Belgium) and with
regardto theways crossing them.'

Whereas the present situation of these places, maintained by the
provisions of Article 14 referred to above, does not allow of a
regular delimitation of the two communesin question;
-mereas it may nevertheless be useful <O record what was
established, after discussion, by the Minute of 29 November 1836,
agreed and signed on 22 March 1841by the local authorities of the
communes ;

DECIDE :
(a) The above-mentioned Minute, recording the plots composing
the communes of Baarle-Duc and Baarle-Nassau, is transcribed
word for word in the present Article.
(b) A special map, in four sheets, showing the whole detailed
survey plot by plot of the two communes,is drawn up on a scale of
I : ~o,oooand to this map are annexed two separate sheets showing,
on a scale of I :2,500, those parts of the communes which a
smaller scale would not show sufficiently clearly.

(The Minute referredto abovewill here beinserted textually.)"

As a result of this resolution adopting the Communal Minute of
1836-1841, the disputedplots were incorporated in the commune of
Baarle-Nassau. A provision of this minute stated in terms: "Plots
78 to III inclusive belong to the commune of Baarle-Nassau." The

Mixed Commission, on 4 Apnl 1843, in deciding to maintain the
status quo, recognized Dutch sovereignty over the plots. In this
resolution it irrevocably made its choice. After that date no other
resolution was adopted by the Mixed Commission on this point.

The content of the statusquo which had thus been adopted by the
Mixed Commission was also accepted by the Belgian Minister at
The Hague in a letter of 26 June 1843 to the Minister for Foreign
Affairs of the Netherlands. He laid claim, on behalf of the inhabit-
ants of the commune of Baerle-Duc, to a certain right to the use

of heath in the possession of Prince Frederick of the Netherlands.
The property in question included plot 91. The Belgian Minister
added in his letter:
"If the question arose in respect of Belgian temtory, its solution
would be simple, as Articles 8 and IO of the Law of 28 August
1792would forrnally guarantee the rights of Baerle-Duc."
(Counter-Memonal, Annexes XLI and XLI a.) Pour apprécier la portée juridique de la résolution du 4 avril
1843 du point de vue du présent différend, il convient d'analyser
son contenu. Cette résolution est un accord qui a étérendu selon
la libre volonté concordante des autorités déléguéep sar les deux
Gouvernements pour fixer le statu quo et la situation des deux
communes et qui doit déployer tous ses effets.
Une fois incorporée à l'article 90 du Procès-verbal descriptif,
cette résolution est devenue une disposition de la Convention de
1843. Il en est de mêmedu Procès-verbal communal dont le texte
devait êtrereproduit textuellement.
Il ressort de la résolution précitéeque les commissaires démarca-
teurs, en raison de l'article 14 du Traité du 5 novembre 1842,
devaient maintenir lestatu quoexistant àl'égarddesdeux communes.
Cette méthode respectait la situation interne et préexistante entre
elles. C'est le fondement du principe de I'uti +ossidetis, procédé
naturel et commode. A partir du 4 avril, le statu quosur les parcelles
des deux communes restait fixé.

D'autre part, comme le remarque la résolution indiquée, il y
avait impossibilité de procéder à la délimitation régulièredes deux
communes. Il y avait deux impossibilités pour établir une limite:
une légale(article 14) et l'autre physique (configuration des deux
territoires enclavéset enchevêtrement des parcelles entre elles), ce
qui décidala Commission mixte à adopter le Procès-verbal commu-
nal de 1836-1841 pour constater les parcelles appartenant aux deux
communes, lequel devait être transcrit ccmot à mot » dans le
Procès-verbal descriptif. Le texte de ce Procès-verbal, malgré une
note finale de la résolution du 4 avril 1843, ne fut jamais incorporé
textuellement au procès-verbal de cette séance de la Commission
mixte.
Le Procès-verbal communal qui devait êtretranscrit mot à mot
à l'article go du Procès-verbal descriptif était celui qui fut contra-
dictoirement établi le 29 novembre 1836, arrêtéet signéle 22 mars
1841 par les deux communes. C'est une copie authentique de ce

Procès-verbal qui devait s'incorporer à l'article go, car c'était le
document qui faisait pleine foi et pleine preuve du statu quo des
parcelles entre les deux municipalités - telle étant la volonté des
commissaires démarcateurs, et c'est sur cet objet qu'était inter-
venu leur consentement. Or, ce Procès-verbal communal n'a pas
étéreproduit «mot àmot »à l'article go du Procès-verbal descriptif
de la délimitation entre les Royaumes des Pays-Bas et de la Bel-
gique, comme l'avait décidéla Commission mixte. Dans le Procès-
verbal communal, dont l'exemplaire original a étédéposé au dossier,
les parcelles en cause sont déclarées commeappartenant à Baarle-
Nassau, tandis que le Procès-verbal de l'article 90 les attribue à
Baerle-Duc, comme conséquence de la reproduction d'un document
qui n'est pas le Procès-verbal communal de 1836-1841. FRONTIER LAND (DISS. OP. JUDGE AR>I;\XD-I~GOK)
240

In order to appreciate the legal scope of the resolution of 4 April
1843 rom the point of view of the present dispute, it is necessary
to analyze its content. The resolutions an agreement reached in
accordance with the free and concordant wills of the authorities
deputed by the two Governments to fix thestatztsquoand the situa-
tion of the two communes, and it must exercise its full effects.
Once embodied in Article go of the Descriptive Minute, this
resolution became a provision of th1843 Convention. The same is
true of the Communal Minute, the wording of which was to be
exactly reproduced.
It is clear from the resolution that the Boundary Commissioners,

in view of Article14 of the Treaty of 5 November 1842,were to
maintain the statusquoin regard to the two communes. This method
respected the local and pre-existing situation betweenhem. It is
the basis of the principleuti possidetian obvious and convenient
procedure. As from 4 April, thestatus quofor the plots of the two
communes remained fixed.
Moreover, aswas observed in that resolution, there was no possi-
bility of demarcating the boundaries of the two communes in a
regular way. This was impossible for two reasons-one legal
(Article14) and the other physical (the conformation of the two
enclaved territoriesand the intermingling of the plots), and this
decided the Mixed Commission to adopt the Communal Minute of
1836-184 in1order to determine which plots belonged to each of
the two communes; this was to be transcribed "word for word" in
the Descriptive Minute. The text of this Minute, despite a final
note in the resolution of 4 April 1843, was never incorporated
verbatim in the minutes of that meeting of the Mixed Commission.

The Communal Minute, which was to be transcnbed word for
word in Article go of the Descriptive Minute, was the one drawn
up after discussion on 29 November 1836, and agreed and signed
on 22 March 1841 by the two communes. It was an authentic copy
of that Minute which was to be incorporated in Article go, for that
was the document which was authoritative and which evidenced
the status quo of the plots as between the two communes-such
was the intention of the Boundary Commissioners and it was to
that that they had given their consent. Now that Communal

Minute was not reproduced "word for word" in Article go of the
Descriptive Minute of the delimitation between the Kingdoms of
the Netherlands and Belgium, as had been decided by the Mixed
Commission. In the Communal Minute, an original copy of which
has been produced, the disputed plots are declared to belong to
Baarle-Nassau, while the Minute in Article go assigns them to
Baerle-Duc, as the result of the reproduction of a document which is
not the Communal Minute of 1836-1841.
35 L'article go du Procès-verbal descriptif comprend deux parties:
la première est le texte de la résolutiondu 4 avril 1843, et la seconde
partie est l'insertion du Procès-verbal communal de 1836-1841.
C'est une compilation de deux actes provenant d'autorités diffé-
rentes: la Commission mixte et les autorités des communes de
Baarle-Nassau et de Baerle-Duc. La seconde partie n'a pas été
exécutée conformémentà la première partie qui est la reproduction

de la résolution prise le avril; au lieu d'incorporer une copie de
l'original du Procès-verbal communal de1836-1841,on mit àsa place
une copie d'un autre procès-verbal communal, différent de celuique
la Commission mixte avait décidéd'adopter. Il y a donc eu une mise
en ceuvre erronée et vicieuse d'une disposition de la Convention
(article go du Procès-verbal descriptif). La volonté des Parties n'a
pas étérespectée. Cette exécution imparfaite n'équivaut pas à une
revision de cette disposition conventionnelle, laquellen'a pas été
envisagéepar la Commission mixte ni arrêtée par celle-cipostérieu-
rement. La Commission mixte n'est pas revenue sur sa résolution
du 4 avril et aucune modification n'a étéapportée à son texte.
Quand elle faisait un changement dans ses décisions - comme
lorsqu'elle a passé en revue les articles50 à 112 du Procès-verbal
descriptif, séance du 12 juin 1843 - ce changement était dûment

mentionné dans le procès-verbal de la séance (contre-mémoire,
annexe XXXVII, p. 76).
Aucune preuve n'a étéapportée pour justifier la modification du
texte original par un autre texte postérieur. La copie qu'on invoque
comme ayant servi de base au Procès-verbal communal inséré à
l'article go n'a pas étéverséeau dossier. Il n'y a doncaucune preuve
d'une modification voulue sur ce point et la résolution formelle et
claire de la Commission mixte incorporée à l'articlqo n'a été
rapportée ni abrogée à aucun moment. C'est donc cette disposition
conventionnelle qui doit régler la divergence signalée entre le
Procès-verbal communal et le procès-verbal communal transcrit
à l'article go du Procès-verbal descriptif. L'erreur purement maté-
rielle de transcription d'un texte pour un autre doit êtrereconnue
devant les preuves complètes et décisivesproduites par le Gouver-
nement néerlandais. Un acte juridique authentique a étéremplacé

par un acte non authentique, différent de celui qui avait été con-
venü par les Parties. Le procès-verbal communal incorporé à
l'article go est une copie d'un acte non authentique; il n'y a aucune
preuve de son existence. Aucun doute n'est permis sur l'existence
d'une divergence entre les textes des deux proces-verbaux; il
suffit de comparer le texte original avec le texte transcrile texte
original a une valeur juridique exclusive et certaine et doit prévaloir
sur le texte de l'article go.
La confrontation des deux textes néerlandais de ce procès-verbal
de l'article go démontre lui-même uneautre divergence à l'alinéa
qui se rapporte aux parcelles en cause. Article go of the Descriptive Minute is in two parts: the first
is the text of the resolution of 4 April 1843, and the second is the
insertion of the Communal Minute of 1836-1841. It is a compilation
of two instruments originating from different authorities: the
Nixed Commission and the authorities of the communes of Baarle-

Nassau and Baerle-Duc. The second part was not carried out in
conformity with the first part, which is the reproduction of the
resolution passed on 4 April; instead of incorporating a copy of the
original of the Communal Minute of 1836-1841, there was put in
its place a copy of another communal minute differing from that
which the Mixed Commission had decided to adopt. There was thus
an incorrect and vitiating implementation of a provision of the
Convention (Article go of the Descriptive Minute). The intention
of the Parties was not respected. This incorrect implementation
does not amount to a revision of this conventional provision, such
revision not having been envisaged by the Mixed Commission, nor
decided upon by it subsequentlÿ. The Mixed Commission did not
go back upon its resolution of 4 April and no change was made in
its text. Whenever it changed any of its decisions-as when it
reconsidered Articles 50 to 112 of the Descriptive Minute at its
meeting on 12 June 1843-the change was duly noted in the
minutes of the meeting (see Counter-Memorial, Annex XXXVII,

P 7No evidence has been adduced to justify the modification of

the original text by alater and different text. The copy invoked as
having served as the basis for the Communal Minute inserted in
A4rticlego has not been produced. There is therefore no evidence of
any intentional modification on this point, and the clear andforma1
resolution of the Mixed Commission incorporated in Article go
was never at any time rescinded or revoked. It is therefore this
conventional provision which must govern the discrepancy pointed
out between the Communal Minute and the communal minute
transcribed in Article go of the Descriptive Minute. The purely
clerical error in the transcription of one text for another must be
recognized in the light of the complete and decisiveevidence adduced
by the Netherlands Government. An authentic legal instrument was
replaced by a non-authentic instrument differing from that which
had been agreed bythe Parties. The communal minute incorporated
in Article go is a copy of a non-authentic instrument; there is no
evidence of its existence. As to the existence of a discrepancy
between the texts of the two minutes, no doubt is possible; the
original text has only to be compared with the text transcribed;
the original text has an exclusive and certain legal validity and

must prevail over the text of Article go.
A comparison of the two Dutch texts of this minute of Article go
reveals another discrepancy in the paragraph relating to the plots
in issue. Le texte produit par la Belgique dit : «De perceelen nummer 91
en 92 behoren totde gemeenteBaerle-Hertog. ))
Le texte produit par les Pays-Bas est le suivant :«De #erceelevi
no 91 en 92 behooren totBaarle-Hertog. ))

Dans le dernier texte, les mots ((degemeente 1ont étésupprimés.
Cette constatation permet d'affirmer que les deux secrétaires com-
munaux ont certifiédeux textes différents et que les commissaires
déléguép sour le collationnement des deux textes n'ont pas rempli
leur tâche avec le soin voulu.
Cette variante de deux textes de l'article go du Procès-verbal
descriptif, attribuant lesparcelles soità la communede Baerle-Duc,
soit à Baarle-Duc, quand, tout au long du texte du Procès-verbal
descriptif, les parcelles sont toujours assignées à une commune
(gemeente), doit s'expliquer comme une interpolation dans le
texte du Procès-verbal communal de 1836-1841 versé au dossier.

Une fois qu'elle acceptait le texte du Procès-verbal communal de
1836-1841pour décideren quoi consistaitlestatu quo,la Commission
mixte ne pouvait rectifier ce Procès-verbal sans l'intervention des
autorités communales. La Commission se reportait à un acte inter-
communal afin d'établir le statu quo qu'elle voulait transcrire mot
à mot dans le Procès-verbal descriptif; elle prescrivait la reproduc-
tion textuelle de ce document. En principe, seuls les organes qui
ont fait un acte juridique sont compétents pour le modifier ou
l'amender. Du reste, ledit Procès-verbal communal indique la
procédure qui doit êtresuivie pour corriger les erreurs qu'il peut
contenir et la qualité des preuves à faire valoir dans cette circons-
tance. La Commission mixte, si elle avait eu l'intention de corriger
le Procès-verbal communal au moment d'incorporer celui qu'elle

a placé à l'article go du Procès-verbal descriptif, aurait dû le quali-
fier de procès-verbal amendé de reconnaissance des limites exactes
entre les communes de Baarle-Nassau, province du Brabant sep-
tentrional, et de Baerle-Duc, province d'Anvers. La Commission ne
l'a pas fait.lle a, au contraire, fait certifier un certain procès-verbal
communal par les secrétaires des deux communes. Il est évident
que la Commission mixte ne pouvait, sans commettre une falsifi-
cation matérielle, transcrire comme copie authentique d'un acte
juridique déterminé un acte qu'elle avait au préalable modifié
secrètement. Dèscemoment, l'acte transcrit et incorporéàl'article go
n'était plus le Procès-verbal communal de 1836-1841, mais un
autre procès-verbal dont l'existence est restée inconnue. Il faut
conclure que la Commission mixte, placée tout au sommet de la

hiérarchie, n'avait pas la capacité de modifier ledit Procès-verbal
communal et de le faire passer ensuite comme le Procès-verbal de
1836-1841. On ne peut exprimer que l'on va faire une citation
concrète et préciseet, par la suite, présenter sous cette étiquette un
texte qui ne concorde pas avec l'original. La Commission mixte
n'a pas eu l'intention ni la volonté de procéder ainsi. FRONTIER LAND (DISS.OP. JUDGE ~~111.4~~-UGON) 242

The text produced by Belgium reads: "De parceelen nzlmmer 91
en 92 behoren totde gemeenteBaerle-Hertog."
The text produced by the Netherlands is as follows: "De par-
ceelenno. 91 en 92 behooren totBaarle-Hertog."
In the latter version, the words "de gemeente" have been omit-
ted. This observation makes it possible to assert that the two
communal secretaries certified two different texts and that the
Commissioners deputed to collate the two texts did not perform
their task with the requisitecare.
This variation in the two texts of Article go of the Llescriptive
Minute, attributing the plots in one case to the commune of Baerle-
Duc, in the other to Baarle-Duc, whereas, throughout thetext of the
Descriptive Minute, the plots are otherwise invariably assigned to a
commune (gemeente), can only be explained as an interpolation
inserted in the text of the Communal Minute of 1836-1841 which

has been produced.
Once it had accepted the text of the Communal Minute of 1836-
1841 as decisive on the status quo, the Mixed Commission could not
alter that Minute without the intervention of the Communal
authorities. The Commission referred to an intercommunal instru-
ment for the purpose of establishing the status quo which it desired
to be transcribed word for word in the Descriptive Minute; it
prescribed the exact reproduction of that document. In principle,
the organs which have drawn up a legal instrument are alone
com~etent to modifv or amend it. Furthermore. this Communal
?/lin;te indicated th; procedure to be followed for the correction
of mistakes which it might contain and the kind of evidence to be
produced in such circumstances. The Mixed Commission, if it had
had the intention of correcting the Communal Minute at the time
of the incorporation of that inserted in Article go of the Des-

criptive Minute, should have described itas an amended minute
recognizing the exact boundaries between the communes of Baarle-
Nassau, province of North Brabant, and Baerle-Duc, province of
Antwerp. The Commission did not do so. On the contrary, it sec-
ured the certification of a certain communal minute by the secre-
taries of the two communes. It is obvious that the Mixed Commis-
sion could not, without being guilty of material falsification,
transcribe as a genuine copy of a given legal instrument an in-
strument which it had previously secretly altered. From that mo-
ment, the instrument transcribed and incorporated in Article go
was no longer the Communal Minute of 1836-1841, but another
minute the existence of which is unknown. It must be concluded
that the Mixed Commission, though at the top of the hierarchy,
was not competent to alter the Communal Minute and subse-

quently to pass it off as the Minute of 1836-1841. It is not permis-
sible to state that one is going to make a specific and accurate
quotation and then present under that name a text which does not
accord with the original. The Mixed Commission had neither t.he
intention nor the desire to act in this way. II est incontestable- comme l'admettent les Parties - qu'ily a
entre le procès-verbal incorporé à l'article go et le Procès-verbal
communal de 1836-1841une divergence sur le point de l'attribution
des parcelles litigieuses.
Les explications présentées par les Parties sur l'origine de cette
divergence ne dépassent pas la phase de la simple hypothèse. Au-
cune des deux versions n'a le soutien de preuves irréprochables et
décisives. Ce sont des conjectures, des produits de l'esprit et des

présomptions sur des faits contestables. Elles doivent donc être
écartées.
D'autre part, pour la décisionde la présente affaire, il n'est pas
nécessaire de connaître ni d'établirla genèsede la variante signalée
entre les deux textes des procès-verbaux; il suffit de constater que
celle-ci existe.
Le Gouvernement néerlandais en a fait la preuve.
Le Gouvernement belge soutient que c'est volontairement qu'on
a écartéle Procès-verbal authentique; les Parties auraient décidé
d'insérer à l'article go le texte transcrit. Cne telle intention, si elle
a existé, n'a jamais, en aucune circonstance, étéconsignéedans un
acte quelconque. Silence complet sur ce point, soit dans les procès-

verbaux des séancesde la Commission mixte, soit dans le Procès-
verbal descriptif.
Ce Gouvernement ajoute que les Parties sont tombées d'accord
pour adopter le Procès-verbal tel qu'il est transcrit à l'article go.
Une telle affirmation est contraire au texte formel de la résolution
du 4 avril 1843, qui est devenue une disposition conventionnelle,
laquelle a décidéque le procès-verbal à transcrire àl'article go serait
(ledit Procès-verbal )),c'est-à-dire le Procès-verbal communal de
1836-1841, et non un autre procès-verbal. Or, c'est précisémentun
autre procès-verbal non authentique qu'a incorporé à son texte
l'article go. Par ce fait, le consentement des Parties intervenu lors
de la résolution du 4 avril n'a pas étérespecté. La Convention de
1843 n'a pu couvrir le défaut d'exécution d'une disposition de l'ar-

ticle go et lui donner force de loi. La loi n'a pu reconnaître qu'une
copie d'un acte inconnu peut faire foi contre l'exemplaire authen-
tique d'un acte que cette mêmeloi a choisi comme preuve du
statu quo. L'objet du consentement des Parties était de retenir le
statu quo constaté par le Procès-verbal communal de 1836-1841;
ce consentement n'est pas intervenu sur un autre objet.

Le président de la commission néerlandaise de ,délimitation
adresse, le 14 juillet 1843, une lettre au conseiller dJEtat, gouver-

38 It is beyond dispute-as the Parties recognize-that there is
a discrepancy between the minute incorporated in Article go and
the Communal Minute of 1836-1841 on the question of the attri-
bution of the disputed plots.
The explanations submitted by the Parties with regard to the
origin of this discrepancy do not get beyond the state of mere
hypothesis. Neither of the two versions is supported by unques-
tionable and decisive evidence. Al1the time it is conjecture, infer-
ence and assumption on controversial facts. They cannot therefore
be accepted.
On the other hand, for the decision of the present case, it is
not necessary to know or to establish the genesis of the variation

referred to between the two texts of the minutes; it is sufficient
to note the existence of the discrepancy.
The Netherlands Govemment has proved its existence.
The Belgian Govemment contends that the departure from the
authentic Minute was deliberate; its case is that the Parties decided
to insert in Article go the text which was transcribed. Such an
intention, if it rver existed, was never in any way recorded in any
document. There is complete silence on the point, both in the min-
utes of the meetings of the Mixed Commission and in the Des-
criptive Minute.
The Belgian Government adds that the Parties reached agree-
ment as to the adoption of the Minute in the form in which it was
transcribed in Article go. This assertion is contrary to the forma1
text of the resolution of 4 April 1843, which has become a conven-
tional provision, and which decided that the minute to be tran-
scnbed in Article go was "the above-mentioned Minute", that is,
the Communal Minute of 1836-1841 and no other minute. But what
was in fact incorporated in the text of Article go was another non-
authentic minute. As a result of this, the consent of the Parties given
at the time of the resolution of 4 April was not respected. The 1843

Convention cannot serve as a cloak for the failure to implement a
provision of Article go and thus give binding force to what was
done. Its provisions cannot have the effect that a copy of an un-
known instrument is to be regarded as authoritative and prevailing
against the authentic copy of an instrument chosen by it as evidence
of the status quo.The subject-matter of the consent of the Parties
was the maintenance of the status quo recorded by the Communal
Minute of 1836-1841; that consent was not given in respect of any
other subject-matter.

On 14 July 1843, the President of the Netherlands Boundary
Commission addressed a letter to the Councillor of State, the
3sneur du Brabant septentrional, pour lui faire parvenir deux copies
authentiques de la description des frontières telles qu'elles ont été
définitivement arrêtéespar la Commission mixte. Parmi les annexes
à cettelettre figurait le texte de l'article go tel qu'il a étémentionné

(résolution du 4 avril 1843)~mais sans la transcription du Procès-
verbal indiqué àla fin de cette résolution. Une telle transcription a
sans doute paru inutile, vu que le Procès-verbal communal de
1836-1841 était bien connu par les autorités de la commune de
Baarle-Nassau. On doit déduire que le texte actuel du Procès-verbal
de l'article go n'a pas étéconnu à cette époquepar les autorités de
cette commune (contre-mémoire, annexe XXXVIII).
Par une lettre du 29 avril 1844, le conseiller d'Etat, gouverneur
du Brabant septentrional, fait savoir au bourgmestre de Baarle-
Nassau le placement prochain de bornes, en vertu du traité avec la
Belgique, et luifait connaître les parcelles oùlesdites bornes devront
êtreplacées. Il joint à sa lettre une partie du procès-verbal de la
délimitation, en tant que celui-ci a trait cette commune. L'extrait
de l'annexe de cette lettre consiste uniquement en la reproduction
textuelle de la résolutiondu 4 avril 1843(devenue la première partie

de l'article go), mais sans l'accompagner du texte du procès-verbal
inséré à l'article go du Procès-verbal descriptif. Le bourgmestre de
Baarle-Nassau, à cette occasion, n'a pu connaître le texte de ce
procès-verbal tel qu'il est reproduit à l'article go; il n'avait nulle-
ment besoin du texte du Procès-verbal que la résolution du 4 avril
1843 avait arrêté caril le connaissait parfaitement.
Il ressort clairement de ces deux lettres que ni le gouverneur du
Brabant septentrional, en juillet 1843, ni le bourgmestre de Baarle-
Sassau, en avril 1844, n'ont eu sous leurs yeux le texte apocryphe
inséré à l'article go.

Il est évident que la volonté desParties n'a pas étérespectéeau
moment de l'exécution de la première partie de l'article go, en
insérant à la suite un document autre que celui décidépar les

commissaires démarcateurs. En conséquence, cette partie de la
Convention de 1843 doit êtrerétablie selon le seul consentement
acquis. Le procès-verbal ae l'article go n'est pas celui qui doit
fixer lestatztquo des parcelles en cause; ce statu quo doit se régler
suivant le Procès-verbal communal de 1836-1841. Ainsi en avait
décidé irrévocablementla Commission mixte et la Convention de
1843n'a pu contenir dans son texte une chose différente.

Si nous nous plaçons sur le terrain que seul le procès-verbal de
l'article go fait foi, la revendication néerlandaise est encore perti-
nente.Governor of North Brabant, transmitting to him two true copies of

the description of the boundaries aç definitively agreed by the Mix-
ed Commission. Among the annexes to this letter was the text of
Article go as referred to (resolution of 4 ,4pril 1843)~but without
the transcript of the Minute indicated at the end of that resolution.
It doubtless appeared to be unnecessary to send a transcription in
view of the fact that the Communal Minute of 1836-1841 was well
known to the authorities of the commune of Baarle-Nassau. It
must be inferred that the present text of the Minute of Article go
was not at that time known to the authorities of that commune
(Counter-Memorial, Annex XXXVIII).
In aletter of29 April184.4, the Councillor of State, the Governor
of North Brabant, informed the burgomaster of Baarle-Nassau
of the impending placing of boundary marks in accordance with the
Treaty with Belgium and told him which were the plots on which
these boundary marks were to bc placed. He attached to his letter
a part of the boundary minute in so far as that minute related to
that commune. The extract from the Annex to that letter consists
only of the reproduction of the wording of the resolution of 4 April
1843 (which had become the first part of Article go), without the
text of the minute inserted in Article go of the Descriptive Minute.
At this time the burgomaster of Baarle-Nassau could not have

known the text of this minute as reproduced in Article go; he had
absolutely no need of the text of the Minute which the resolution
of 4 April1843 had decided upon because he knew it perfectly well.
It is clear from these two letters that neither the Govemor of
North Brabant, in July 1843,nor the burgomaster of Baarle-Nassau,
in April 1844, had before them the aprocryphal text inserted in
Article go.

Itis quite clear that the intentions of the Parties were not res-
pected at the time of the implementation of the first part of Article
go, when there was inserted after that part a document other than
that decided upon by the Boundary Commissioners. This part of
the 1843 Convention should therefore be restored in accordance
with the sole consent given. The minute of Article go is not that
which was to fix the status quo of the disputed plots; thistatus quo
is to be governed by the Communal Minute of 1836-1841. This had
been irrevocably decided by the Mixed Commission and the 1843
Convention could not contain in its text something different.

If the matter be approached from the point of view that only
the minute of Article go is authoritative, the claim of the Nether-
lands is still apposite. On doit rappeler que le Procès-verbal communal de l'article go
du Procès-verbal descriptif, celui auquel la Convention se réfère,
prévoit la possibilitédecertaines modifications. En effet, ce Procès-

verbal (de l'article go), dans son avant-dernier alinéa, prévoit que
les ((erreurs qui pourraient être découvertes plus tard comme
s'étant glisséesdans ce Procès-verbal pourront êtrecomgées depart
et d'autre, sous réserve cependant que la partie qui demande ou
exige une correction, accompagne sa revendication de preuves
claires et légales1)(mémoire,annexe IV).
De cet alinéa, il ressort que le Procès-verbal de l'article go admet
des modifications. II établit mêmequi aura la charge de la preuve
et la nature des preuves que les Parties devront invoquer pour
redresser les erreurs ultérieurement décelées. Il y a donc une
réserve expresse sur les erreurs consignées au procès-verbal de
l'article go, que peuvent invoquer soit le Gouvernement belge soit

le Gouvernement néerlandais pour démontrer ces erreurs.

L'approbation de la Convention de 1843 n'a pas pour autant dit
le dernier mot sur le statu qzto constaté dans cet instrument; les
erreurs à survenir pouvaient toujours êtrealléguées.
Les preuves présentées par le Gouvernement néerlandais sont
efficaces et concluantes pour démontrer l'erreur du procès-verbal
communal de l'article go.Cespreuves sont ((claires et légale»;elles
proviennent des termes mêmesdu Procès-verbal communal ori-
ginal de 1836-1841, document dont la valeur n'a pas étécontestée
par le Gouvernement belge.
En outre, sur les parcelles en cause, les Pays-Bas ont exercé

pendant de longues années - comme nous le verrons ci-après -
une possession effective, publique et pacifique, après la Convention
de 1843. C'est une autre preuve du statu quo néerlandais qu'avait
admis le Procès-verbal communal 1836-1841.
On invoque le principe di^maintien des traités. Mais un tel
principe - qui du reste n'est pas absolu - ne s'oppose nullement,
surtout quand une clause expresse le prévoit, à la rectification des
erreurs matérielles qu'ils comportent, pourvu qu'elles soient pleine-
ment démontréespar des preuves sérieuses,administrées de manière
évidente et irréfragable.
I,e principe du respect des traités reçoit ainsi une exacte appli-
cation; ce principe n'impose pas l'acceptation d'un traité qui n'est

pas juridiquement valable dans une de ses parties.

La Convention de 1843 a reçu pendant presque une centaine
d'années une application qui ne s'accorde pas avecle texte du procès-
verbal communal inclus à l'article go du Procès-verbal descriptif;
si celui-ci considère les parcelles comme belges, dans la réalité,ces
mêmes parcellesont étésoumises depuis toujours à la souveraineté FRONTIER LAND (DISS. OP. JUDGE ARMAND-UGON) 24j

It must be remembered that the Communal Minute of Article go
of the Descriptive Minute, that to which the Convention refers,
provides for the possibility of certain amendments. For that
minute (of Article go) in its penultimate paragraph provides that
"mistakes which may later be discovered to have crept into this
Minute may be corrected by the two Parties, provided however that
the Party which requests or requires a correction shall accompany
its claim by clear legal evidence" (Memorial,Annex IV).

This paragraph shows that the Minute of Article go was open to
amendment. It even laid down upon whom should be the burden of
proof and the kind of evidence to be adduced by the Parties in
order to secure the correction of errors subsequently discovered.

There was thus an express proviso relating to errors contained in
the minute of Article go, which can be relied upon either by the
Belgian Government or by the Xetherlands Government in order
to show the existence of mistakes.
The approval of the 1843 Convention did not as such Say the last
word with regard to the status quo recorded in that instrument;
mistakes subsequently discovered could still be alleged.
The evidence submitted by the Netherlands Government is
effective and conclusive as showing a mistake contained in the
communal minute of Article go. This evidence is "clear" and
"legal" ;it is based on the very wording of the original Commun-
al Minute of 1836-1841, a document the validity of which has not
been challenged by the Belgian Government.
Furthermore, the Netherlands-as will be seen below-have
over a long period of years exercised effective, notonous and peace-
ful possession of the disputed plots, since the 1843 Convention.
This constitutes further evidence of thestatusquoof the Netherlands

recognized by the Communal Minute of 1836-1841.
Reliance has been placed upon the pnnciple of the upholding of
treaties. But that principle-which in any event is not an absolute
one-is in no way opposed, particularly when there is a clause
expressly providing therefor, to the correction of clerical errors
which they may contain, provided such errors be shown really
to exist by genuine evidence of a clear and unchallengeable nature.
The principle of respect for treaties is thus fully applied; that
principle does not require acceptance of a treaty which is not juri-
dicallyvalid in one of its parts.

For almost one hundred years the Convention of 1843was applied
in a manner which does not conform with the text of the Communal

Minute included in Article go of the Descriptive Minute; although
that article regards the plots as Belgian, these same plots have
actually always been submitted to Netherlands sovereignty. Suchnéerlandaise. Une telle situationparaît confirmer, comme le soutient
la thèse néerlandaise, le remplacement du Procès-verbalcommunal
authentique par un autre dont on ignore l'existence et le contenu.

Une divergence était néeentre la pratique existante à l'égard des
parcelleslitigieuses et le Procès-verbal descript;elle a seulement été
signalée à l'attention des deux Gouvernements en 1890, lors du
projet de Convention de 1892. C'est à ce moment qu'est apparue
l'inadvertance commise dans l'article 90 du Procès-verbal descriptif
de la Convention de 1843, laquelle était passéeinaperçue des deux
Gouvernements.
Cette possession effective sur les parcelles, contraire au proccs-
verbal inséré à l'article 90, est une preuve supplémentaire de la
méprise dénoncéepar le Gouvernement néerlandais.
Le ministre des Affaires étrangères dela Belgique, dans une lettre
au ministre des Pays-Bas à Bruxelles, du 20 août 1890, disait:
« le traité de 1842 ayant stipulé lestatu quo, il parait préférable de
viser ce traité plutôt que la convention de 1863 1);il se référait sans

doute à la Convention de 1843 (contre-mémoire,annexe XLVII).
Le statuquo avait préférencesur les dispositions de laconvention
de 1843.
La carte jointe au procès-verbal de délimitation des deux Baarle
de 1826démontreclairementque lesparcelles en question n'apparte-
naient pas à la commune de Baerle-Duc. La valeur de cette carte
ne saurait être récuséesans examen (duplique,annexe II).
La Convention de 1843, dans son article 3, attribue aux cartes
topographiques au dix-millième, arrêtéeset signéespar les commis-
saires, la mêmeforce et la mêmevaleur qu'à une disposition de la
convention. La carte présentée par la Belgique comme preuve
supplémentaire, qui est une feuille d'un plan spécial, fait mention,
dans sa légende, des parcelles appartenant à la Belgique, des par-
celles indivises entre les deux Royaumes et des parcelles apparte-
nant aux Pays-Bas. Les premières portent la couleur brune, les

secondes sont roses et les troisièmes ne sont pas coloriées.Cette
carte n'est pas l'une des cartes prévues par l'article 3, cité anté-
rieurement, car elle indique de nombreuses parcelles en rose,
sans les attribuer soità l'un, soit à l'autre des deux États. Elle ne
tient pas compte du procès-verbal qu'avait adopté l'article 90, dans
lequel les parcelles sont attribuées soit Baerle-Duc, soit à Baarle-
Nassau; ce procès-verbal n'indique pas qu'il y avait des parcelles
indivises. Cette carte reste en dehors des faits admis par le procès-
verbal communal inséré à l'article 90. On doit considérercette carte
dans son ensemble, et non dans une de ses parties; sa force probante
n'est pas déterminante. D'ailleurs, la carte annexée au procès-
\-erbal de la Commission de délimitation du 5 septembre 1887 ne
relève pas les parcelles en litige comme territoire belge (contre-
mémoire,annexe XLVI) .
D'autre part, les faits juridiques sûrs et déterminants dont il sera

fait état ci-après sont en désaccord complet avec les affirmationsa situation appears to confirm, as maintained in the Netherlands
argument, the fact that the authentic Communal Minute was re-
placed by another, the existence and contents of which are un-
known. A divergence had arisen between the existing practice in
respect of the disputed plots and the Descriptive Minute; this
divergence was not drawn to the attention of the two Governments
until1890, at the time of the draft Convention of 1892. It was then
that the oversight which had occurred in respect of Article go
of the Descriptive Minute of the Convention of 1843 and which had
passed unnoticed by the two Governments became apparent.
This effective os session of the ~lots. contrarv to the Minute
inserted in ~rticie 90, constitutes supplementaryJ evidence of the
mistake alleged to have occurred by the Netherlands Government.

In a letter to the Minister of the Netherlands at Brussels dated
20 August 1890, the Minister for Foreign Affairs of Belgium stated:
"the Treaty of 1842 having laid down the statzrsquo, it seems
preferable to refer to the Treaty rather than to the Convention of
1863"; he was no doubt referring to the Convention of 1843 (Coun-
ter-Memorial, Annex XLVII). The status quo was to prevail over
the provisions of the Convention of 1843.
The rnap appended to the Minute of delimitation of the two
Baarles of 1826 clearly shows that the plots in question did not
belong tothe commune of Baede-Duc. The value of this rnap cannot
be dismissed without examination (Rejoinder, Annex II).
In Article 3, the Convention of 1843 confers upon the topograph-
ical maps to a scale of I :~o,ooo, which were prepared and signed
by the Commissioners, the same force and value as the provisions
of the Convention. The rnap adduced by Belgium as supplementary
evidence, which consists of a sheet from a special map, mentions

in its legend plots belonging to Belgium, plots that were unallocated
as between the two Kingdoms and plots belonging to the Nether-
lands. The first of these are coloured in brown, the second in pink
and the third are not coloured. This rnap is not one of the maps
referred to in Article 3 which has been cited above, for that rnap
indicates many plots in pink without attributing them to one or
the other of the two States. That rnap does not take into account
the Minute which was adopted in Article go and in which the plots
are attributed either to Baerle-Duc or to Baarle-Nassau; this
Minute does not indicate that there were unallocated plots. This
rnap remains outside the facts agreed to in the Communal Minute
inserted in Article 90. This rnap should be considered as a whole
and not in one of its parts alone; the probative value of this rnap is
not conclusive. Moreover, the rnap annexed to the Minutes of the
Boundary Commission of 5 September 1887 does not show the dis-

puted plots as being Belgian territory (Counter-Memorial, Annex
XLVI) .
On the other hand, the well-established and conclusivelegal facts
relied upon below are in complete disagreement with what is shownde la carte en question. Une telle circonstance lui enlève force pro-
bante.
L'inscription que contient la carte de l'État-major belge de 1871
n'a pas l'importance qu'on lui attribue en l'occurrence, dès qu'il
n'est pas établi que les autorités néerlandaises en eussent pris
connaissance (mémoire, annexe XIII, p. 31). Cette attribution à

la Belgique des parcelles en question n'est que la répétition de
l'erreur déjà signalée dans le procès-verbal communal inséré à
l'article go. On ne peut tirer de cette constatation un effet de souve-
raineté ni lui attribuer la valeur d'un acte de souveraineté.

Il a étéavancéégalementpar le Gouvernement belge que, lors du
projet de convention de 1892, il fut admis que les parcelles en cause
appartenaient à la Belgique. Cette convention avait pour but de
mettre fin aux enclaves et le projet s'est limitéà replacer celles-ci
dans un seul des deux territoires, sans discuter l'appartenance des
parcelles en faisant des cessions mutuelles. Les Parties, pour aboutir
au but poursuivi de mettre fin aux enclaves belges aux Pays-Bas
et néerlandaisesen Belgique, s'en sont tenues aux donnéeserronées
du procès-verbal de l'article go, sans un examen plus approfondi.
Cette convention non ratifiéene peut êtreopposéeaux Pays-Bas.
La jurisprudence constante de la Cour permanente de Justice inter-

nationale et de notre Cour ne permet pas de faire état des propo-
sitions faites au cours des négociations directes qui n'ont pas abouti
à un accord complet. La reconnaissance faite à cette occasion par
les Pays-Bas ne lui a pas enlevéle droit de la contester. Ils n'ont
pas fait une reconnaissance pure et simple; ce projet de convention
est un acte complexe et en conséquence indivisible. Du reste, après
1892, la situation des parcelles est demeuréeinchangée; la souve-
raineté néerlandaise a continué à s'exercer sur ce petit territoire,
sans aucune réclamation de la part du Gouvernement belge; une
telle situation démontrebien que, del'avis des deux Gouvernements,
la prétendue reconnaissance ne portait aucun effet juridique.

On a dit que la Convention du 23 avril 1897 sur le rachat de la
ligne de chemin de fer de Tilburg à Turnhout reconnaissait la
souveraineté belge sur les parcelles en question. Cette convention
n'a pas étéverséeau dossier; pour soutenir cette prétention on a
eu recours à un extrait de l'exposé des motifs de la Convention
devant le Parlement néerlandais (réplique, annexe XII). Mais les
preuves produites par le Gouvernement néerlandais, citées aux

paragraphes 27 et 36, lettre d, de la duplique, permettent, malgré
l'explication donnée en plaidoirie par le conseil belge (procédure
orale, p. II~), de soutenir que les enclaves viséesdans cet exposéon the map in question. Such a circumstance deprives the map of
any probative value.
What appears on the Belgian military staff map of 1871 does not
have the importance attributed to it inthe present case, since it has
not been shown that the Netherlands authorities had knowledge
of it (Memorial,Annex XIII, p. 31). On this map, the attribution to
Belgium of the disputed plots constitutes no more than a repetition
of the mistake already indicated in the Communal Minute inserted
in Article 90. What is shown on the map cannot be regarded as
having any effect with regard to sovereignty; nor can one attribute
to it the value of an act of sovereignty.

It has also been contended by the Belgian Government that,
at the time of the draft Convention of 1892, it was agreed that the
disputed plots belonged to Belgium. The purpose of this Convention
was to put an end to the enclaves and the draft confined itself to
putting the enclaves back into one only of the two territones, with-
out discussing to which of them the plots belonged, by effecting
mutual cessions. In order to achieve their purpose of putting an
end to Belgian enclaves in the Netherlands and Netherlands
enclaves in Belgium, the Parties based themselves exclusively on
the erroneous data in Article 90 of the Minute, without further
examination. This unratified Convention cannot be invoked against
the Netherlands. The settled case law of the Permanent Court of
International Justice and of Ourown Court does not allow reliance
to be placed upon proposals made in the course of direct nego-
tiations which do not lead to a complete agreement. The admission
made on that occasion by the Netherlands has not deprived it of
its right to challenge that admission. The Netherlands did not make
an outright admission; the draft Convention is a complex instru-
ment and is therefore indivisible. Moreover, after 1892 the sit-
uation of the plots remained unchanged; Netherlands sovereignty
continued to be exercised over this small territory without any

claim being put fonvard on behalf of the Belgian Government;
such a situation clearly shows that, in the opinion of both Govern-
ments, the alleged admission had no legal effect.
It has been asserted that the Convention of 23 April1897 regard-
ing the repurchase of the Tilburg-Turnhout railroad recognized
Belgian sovereignty over the disputed plots. This Convention has
not been produced before the Court; in support of this assertion
reliance has been placed upon an extract from the Statement of
Reasons for the Convention as laid before the Netherlands Parlia-
ment (Reply, Annex XII). But the evidence submitted by the
Netherlands Government, cited in paragraphs 27 and 36 d) of the
Rejoinder, despite the explanation given during the oral argument
by Counsel for Belgium (Oral Proceedings, p. II~), enables it todes motifs ne sont pas les parcelles en cause. La redevance due par
le Gouvernement néerlandais ne pouvait tomber sur les propriétés
occupéespar le chemin de fer, car ces propriétésavaient ététrans-
féréesau Gouvernement néerlandais (contre-mémoire, annexe LI,
P. 1.52).

Le Gouvernement néerlandais fait valoir un autre titre de souve-
raineté à l'encontre des prétentions du Gouvernement belge. Il
allègue avoir exercé des attributions de la souveraineté sur les
parcelles dans les années postérieures à la Convention de 1843.
Les faits invoqués pour justifier cette situation sont les suivants:
I. Les parcelles en cause pendant la période qui va de 1845 à
1957ont eu différentspropriétaires et l'annexe LI du contre-mémoire
donne le détailde ces changements. Il est fait état d'actes de ventes,
soit privées, soit publiques, d'actes de partage et de cessions. Dans

tous ces actes, il est expressément dit que les biens qu'ils mention-
nent font partie de la commune de Baarle-Nassau. Voici les dates
de ces opérations, jusqu'à l'année 1921 : 31 janvier 1845, 29janvier
1845, 24 février 1845, 15 mars 1856, 20 mars 1860, 3 août 1863,
20 mai 1863, 19 avril 1866, 16 août 1866, 22 janvier 1867, 8 juillet
1867, 22 juillet 1867, 6 mai 1895, ler juillet 1898,22 avril 1904,
21 mai 1904, 4 octobre 1904, 28 septembre 1904, 23 octobre 1905,
5 décembre 1913 et 16 janvier 1914. Tous ces actes de transferts de
propriété sont inscrits dans les registres néerlandais. Ils se réfèrent
aux cadastres néerlandais, ainsi qu'à leurs numérotages. Les droits
de mutations sont payés dans les bureaux néerlandais. Cesactes se
passent entre voisinsde deux communes et de nationalités belge et
néerlandaise. Il y avait une publicité indéniable de tous ces faits,

vis-à-vis des fonctionnaires de Baerle-Duc et d'Anvers.

Il convient d'examiner de plus près certains de ces actes.

Le 31 janvier 1845 le prince Frédéricdes Pays-Bas cède au Gou-
vernement des Pays-Bas des bruyères lui appartenant, entre les-
quelles se trouve la parcelle no 91. Par ordonnance du ministre des
Finances des Pays-Bas du 23 décembre 1846 les droits du Domaine
sur cette parcelle sont reconnus (contre-mémoire, annexe XLIII).
Cette mêmeparcelle, comme appartenant au domaine de l'État
néerlandais, fait l'objet de la vente publiquc du 15 mars 1856

(P.Par acte du 16 août 1866, Hubert Antoine de Poorter, d'Anvers,
vend à la Sociétéanonyme des Chemins de fer du Nord de la Bel-

gique une propriété situéesur la commune de Baarle-Nassau pour
l'établissement du chemin de fer de Turnhout àTilbourg: c'est une
partie des parcelles en litige.
43be maintained that the enclaves referred to in that Statement of
Reasons are not the disputed plots. The dues paid by the Nether-
lands Govemment could not be exacted in respect of the property
occupied by the railroad, for that property had been transferred
to the Netherlands Govemment (Counter-Memorial, Annex LI,
P. 152).

* * *

The Netherlands Govemment puts fonvard another title of

sovereignty as against the claims of the Belgian Govemment. It
maintains that it has exercised the functions of sovereignty over
the plots during the years subsequent to the Convention of 1843.
The facts relied upon in support of this position are as follows:
I. The -disputed plots belonged to different owners during the
period from 1845 to 1957 and Annex LI of the Counter-Memorial
gives the details regarding these changes. Reliance is placed upon
conveyances, private or public, and upon distributions and cessions.
In al1 these instruments it is expressly stated that the properties
mentioned therein are a part of the commune of Baarle-Nassau.
The following are the dates of these operations until 1921:

31 January 184529 January 1845~24February 184515 March 1856,
20 March 1860, 3 August 1863, 20 May 1863, 19 April 1866,
16 August 1866, 22 January 1867,8 July 1867,22 July 1867,6 May
1895, I July 1898, 22 April 1904, 21 May 1904, 4 October 1904,
28 September 1904, 23 October 1go5,5 December 1913and 16Jan-
uary 1914. Al1 these conveyances are entered in Dutch registers.
They refer to Netherlands surveys aswell as to their numbering
therein. The tax payable onthese conveyancesispaid to Netherlands
offices.These conveyances are made between the inhabitants of the
two communes who are of Belgian and Dutch nationality. All these
facts were undoubtedly publicized in so far as the officiaisof Baerle-
Duc and Antwerp were concemed.
It is necessary to scrutinize more closely certain of these convey-
ances.
On 31 January 1845 Prince Frederick of the Netherlands ceded
to the Government of the Netherlands certain heathlands which

belonged to him, arnong which is included plot No. 91. By an
Order of the Minister for Finance of the Netherlands, dated 23 De-
cember 1846, the rights of the Domain over this plot are recognized
(Counter-Memorial, Annex XLIII). Thïs same plot, as belonging
to the Domain of the Netherlands State, was the subject of a public
sale on 15 March 1856 (p. 109).
By a conveyance dated 16 August 1866, Hubert Antoine de
Poorter of Antwerp sold to the Société anonymedes Cheminsde fer
du Nord dela Belgiqueproperty situated in the commune of Baarle-
Nassau for the establishment of a railway from Turnhout to Tilburg.
This was a part of the disputed plots.

43 2. En 1851, la parcelle 91 fit l'objet d'une vente par le domaine
de 1'Etat néerlandais. La commune de Baerle-Duc a revendiqué
pour ses habitants, devant le tribunal de Bréda, un droit d'usufruit
sur cette parcelle. Elle ne prétendait donc pas que cette parcelle
fît partie de son temtoireet aurait dû, dans ce cas, porter sa requête
devant les tribunaux belges. C'est un acte de juridiction civile des
tribunaux néerlandais sur une des parcelles.
3, Comme le révèlent les actes mentionnés, les parcelles ont
étéimposées au titre de l'impôt foncier néerlandais. C'est là une
manifestation prolongée et continuelle de la souveraineté néer-

landaise sur les parcelles.
4. Le 4 novembre 1864, le ministre de l'Intérieur confère une
concession relative à la ligne de chemin de fer Tilbourg-Turnhout,
pour autant qu'elle devait traverser le territoire néerlandais et les
parcelles en question.
5. Lors de la construction de cette ligne de chemin de fer, une

partie des parcelles avait étéindiquée pour expropriation, par les
autorités néerlandaises, en décembre 1866. Une telle mesure est
bien un acte gouvernemental; une vente volontaire est intervenue
postérieurement.
Après le projet de Convention de 1892, la situation de fait s'est
maintenue inchangée. Sur les parcelles, de nouvelles maisons sont
construites en 1904, les anciens terrains de bruyères sont défrichés,
les habitants des parcelles enregistrent les naissances, mariages et
décèsaux registresde l'étatcivil de leur commune à Baarle-Nassau.
C'est seulement en 1921 que le Gouvernement belge, pour la
première fois, a soumis au Gouvernement néerlandais ses préten-
tions de souveraineté sur les parcelles.

Sans les contester formellement, le Gouvernement belge oppose à

ces faits qu'il a inscrit les parcelàeson cadastre et les a fait figurer
sur une carte militaire. Il invoque encore la Convention non
ratifiéede 1892et une autre de 1897sur un rachat du chemin de fer.
Les parcelles auraient aussi étél'objet de mutations au cadastre
belge de 1896 et 1904.

La forceprobante de lacarte militaire du 4octobre 1871(mémoire,
annexe XIII), du projet de Convention de 1892 et de la Convention
de 1897a étéexaminéeplus haut :il n'est pas nécessaird'y revenir.

Les parcelles devaient figurer au cadastre belge en 1847(mémoire,
annexe XII), mais cette inscription n'a eu aucune conséquence de
fait, commeilressortde lalettredu IO juillet 1890d'un fonctionnaire
belge (réplique, annexe VIII); la parcelle no 92 seulement apparaît
dans le plan cadastral de Baarle-Nassau et la parcelle nogr a le no71 2. In 1851, plot No. 91 was the subject of a sale by the Nether-
lands State Domain. The commune of Baerle-Duc claimed for its
inhabitants, before the Breda Tribunal, a right of usufruct over this
plot. It did not therefore claim that this plot was a part of its
temtory for in that case it would have had to apply to the Belgian
courts. This is an exercise of civil jurisdiction by the Netherlands
courts over one of the plots.

3. As is clear from the relevant documents, the plots were sub-
jected to Netherlands land tax. This constitutes a prolonged and
continuous manifestation of Netherlands sovereignty over the
plots.
4. On 4 November 1864, the Minister for the Interior granted a
concession relating to the Tilburg-Turnhout railway in so far as it
had to cross Netherlands temtory and the plots in question.

5. When this railway was being built, a portion of the plots had
been indicated for expropriation by the Netherlands authorities in
December 1866. Such a measure does indeed constitute a govem-
mental act ;a voluntary sale occurred subsequently.

After the draft Convention of 1892, the factual situation was
maintained unchanged. New houses were built on the plots in 1904,
former heathlands were brought into cultivation, and the inhabit-
ants of the plots entered births, marriages and deaths in the regis-
ters of their commune at Baarle-Nassau. It was not until 1921 that
the Belgian Goveniment, for the first time, submitted to the Nether-
lands Government its claims of sovereignty over the plots.

Without formally challenging these facts, the Belgian Govem-
ment urges against them that it had entered the plots on its survey
and that it had included them upon a rnilitary map. It further relies
upon the unratified Convention of 1892and a further Convention of
1897 concerning the repurchase of the railroad. The plots are said
to have been the subject of transfer deeds entered in the Belgian
survey for 1896 and 1904.
The probative value of the military map of 4 October 1871
(Memonal, Annex XIII) and of the draft Convention of 1892 and
of the Convention of 1897 have been dealt with above: it is not
necessary to revert to this matter here.
The plots were to appearin the Belgian surveyin 1847(Memorial,
Annex XII), but this entry had no practical consequences, as is

clear from the letter of IO July 1890 from a Belgian official(Reply,
Annex VIII) ; plot No. 92 appeared only on the survey map of
Baarle-Nassau and plot No. 91 bears the number 71 in the Belgianau cadastre belge, mais comprend les nos 189, 191, 193, 203, 205,
206, 207 et 208 du cadastre néerlandais. Les modifications succes-
sives des parcelles au cadastre néerlandais, ainsi que l'inscription

des mutations aux registres néerlandais, sont confirméesde façon
certaine par les documents incorporés à l'annexe LI du contre-
mémoire. Les mutations faites en 1896et 1904furent aussi inscrites
dans les registres néerlandais (contre-mémoire,annexe LI, pp. 149
et 168).

Dans tous les cas signalés antérieurement, le Gouvernement
néerlandaisa exercédesfonctionsgouvernementalesprépondérantes
sur les parcelles en litige, sans qu'elles aient soulevéde la part du
Gouvernement belge aucune protestation ni aucune opposition.
Cette tolérance prolongée de ce Gouvernement à cet égard a créé
au bénéficedu Gouvernement néerlandais un droit de souveraineté
indéniable. Il n'y a aucune preuve que la Belgique ait réclaméla
restitution des parcelles avant 1921, ni qu'il y ait eu des activités
belges sur celles-ci. On pourrait ici rappeler l'importance que la
Cour a donnée, dans l'affaire des Pêcheries, à l'absence de protes-

tations d'un gouvernement dans la consolidation d'un droit (C. I. J.
Recueil I95I, p. 138). Dans l'affaire du Groënland oriental la Cour
permanente n'a pas cru devoir délaisserdesactes gouvernementaux,
même quand le Gouvernement norvégien eut formulé certaines
protestations ou réserves (C. P.J. I., SérieA/B, 1%"53, pp. 62-63),
car elle a retenu l'existence de deux éléments en vue d'établir un
titre de souveraineté valable, à savoir l'intention et la volonté
d'exercer cette souveraineté et la manifestation, de l'activité
étatique. La souveraineté sur les Minquiers et les Ecréhous a été
fixéepar notre Cour exclusivement sur la base de faits pareils à
ceux invoqués par le Gouvernement néerlandais dans la présente
affaire(C. I. J. Recueil 1953,pp. 67 à 70).
Une telle intention d'exercer la souveraineté est particulièrement
remarquable après la Convention de 1843 et après le projet de
Convention de 1892. Le Gouvernement néerlandais a continué à
considérer ces parcelles comme lui appartenant et à exercer les
attributions gouvernementales, de manière publique et paisible.
Ces faits ont établi la souveraineté néerlandaise sur les parcelles
en litige.
*
* *

En définitive, l'article 90 du Procès-verbal descriptif annexé à
la Convention de 1843 et q" fait partie de celle-ci dispose dans sa
première partie qie le Procès-verbal communal signé le 22 mars
1841 sera inséré «mot à mot » comme seconde partie de l'article 90.
Or, le procès-verbalreproduit n'est pas une copie littérale du Pro-
cès-verbalcommunal signé le 22mars 1841. On est en présenced'unesurvey but includes Nos. 189, 191, 193, 203, 205, 206, 207 and 208
of the Netherlands survey. The successive alterations of the plots
on the Netherlands survey as well asthe entry of transfer deeds on
the Netherlands registers are confirmed beyond any doubt by the
documents embodied in Annex LI of the Counter-Mernorial. The
transfer deeds made in 1896and 1904werealso enteredin the Nether-
lands registers (Counter-Memorial, Annex LI, pp. 149 and 168).

In al1the foregoingcases, the Netherlands Government has exer-
cised preponderant governmental functions in respect of the dis-
puted plots, without these having given rise on the part of the Bel-
gian Government to any protest or any opposition. This prolonged
tolerance of the Belgian Government in this respect has created an
indisputableright of sovereignty in favour of the Netherlands Gov-

ernment. There is no evidence that Belgium claimed restitution
of the parcels before 1921, or that any Belgian activities occurred
thereon. Reference may here be made to the importance which the
Court gave, in the Fisheries case, to the absence of protests by a
government in the consolidation of a nght (I.C.J. Reports 1951,
p. 138). In the Eastern Greenland case the Permanent Court did
not consider that it could neglect governmental acts, even when the
Sonvegian Government had made certain protests or reservations
(P.C.I. J., Series -4/B, N53, pp. 62-63),for it recognized the exis-
tence of two elements required to establish avalid title to sover-
eignty, namely, the intention and the will to exercise such sov-
ereignty, and the manifestation of State activity. Sovereignty over
the Minquiers and Ecrehos was decided by this Court exdusively
on the basis of facts similar to those relied upon bythe Netherlands
Government in the present case (I.C.J.Reports 1953, pp. 67-70).

Such an intention to exercise sovereignty is particularly notable
after the Convention of 1843 and after the draft Convention of
1892. The Netherlands Government has continued to regard these
plots as belonging to it, and to exercise there governmental functions
in a public and peaceable way. These facts have established Nether-

lands sovereignty over the disputed plots.

Inthe final analysis, Article 90 of the Descriptive Minute which
is annexed to the Convention of 1843 and which is a part of that
Convention provides in the first part that the Communal Minute
signed on 22 March 1841 shall be inserted "word for word" as a
second part of Article go. But the Minute vr-hichis reproduced is not
a literal copy of the Communal 3linute signed on 22 March 1841-disposition de la Convention de 1843 qui n'est pas juridiquement
valable. Une telle disposition ne peut constituer un titre valable de
souveraineté.
D'autre part, le titre fondé sur l'exercice-effectif, pacifique et
public des fonctions étatiques par les Pays-Bas sur les parcelles en
cause doit êtrepréférableau titre de souveraineté invoqué par la
Belgique, qui n'a jamais exercéréellement la compétence étatique

dont elle se considère titulaire.What is involved is a provision of the Convention of 1843 which
is not legally valid. Such a provision cannot constitute a valid
title of sovereignty.
On the other hand, the title which is based on the effective,
peaceable and public exercise of State functions by the Nether-
lands over the disputed plots must be given preference over the
.title of sovereignty relied upon by Belgium, which has never
really exercised the State competence which it regards itself as
holding.
(Signed) ARMAND-UGOX.

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Opinion dissidente de M. Armand-Ugon

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