Déclaration de M. Lachs (telle que reproduite immédiatement après l'arrêt)

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054-19720818-JUD-01-02-EN
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054-19720818-JUD-01-00-EN
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COhISEILDE L'OACI (DÉCL. ZAFRULLA KHAN) 72

président ont étéconfirmées par celui-ci. Rien de ce qu'a pu dire à cet

égardle conseil de I'lnde devant la Cour n'a fait naître un doute quelcon-
que dans mon esprit à propos de la régularitéou de l'opportunité des
décisionsdu président etde la procédure suivie par le Conseil.
Pour ce qui est de la seconde catégorie, il suffit pour réfuter les objec-
tions de I'lnde de constater que I'article 15 du Règlement pour la solution

des différends ne se rapporte aucunement à unedécision relative à une
exception préliminaire. La question des exceptions préliminaires et de
leur suite fait l'objet de I'articl5 du Règlement, dans le chapitre IIIqui
traite de la suite que comportent les requêtes.Cet article a un caractère

autonome et il épuisele sujet des exceptions préliminaires. La procédure
prévuepour leur examen est définieau paragraphe 4, ainsi libellé: lSi une
exception préliminaire est soulevée, le Conseil, après avoir entendu les
parties, rend une décision sur cette question préjudicielle avant toute
mesure àprendre en vertu du présent Règlement. »C'est exactement ce que

le Conseil a fait.
L'article 15 du Règlement se trouve au chapitre IV, qui définit les
règles applicables li la(procédure 11qui s'engage après qu'une exception
préliminaire a étér,ejetéeet qui concerne le fond d'une affaire. L'article 15,
intitulé 1Décision I)concerne manifestement une décision au fond, et ne

revient pas sur la décision prisesur une exception préliminaire en tant que
question préjudicielleavant que s'engage la procédure au fond.

Le procès-verbal des débatsau Conseil ne fait pas apparaître que I'lnde

ait insistépour que le Conseil se conforme aux prescriptions de I'article
15. Mêmedevant la Cour, certaines irrégularités ont été évoquéepsour
la première fois dans la plaidoirie du conseil de I'lnde, qui a mentionné
encore d'autres irrégularitésdans sa réplique. Quoi qu'il en soit, il est
clair que l'article 15 du Règlement ne s'applique nullement à une déci-

sion .sur une exception préliminaire. C'est ce que le Conseil a supposé à
juste titre et aucun de ses membres n'a expriméd'avis contraire.

M. LACHS, juge, fait la déclaration suivante:

Estimant que certaines observations doivent être faites sur divers
aspects de l'arrêt,je me prévauxdu droit conférépar I'article 57 du Statut

de la Cour pour pr'isenter la déclaration qui suit.

Je souscris pleinement aux conclusions de la Cour concernant sa
compétence pour connaître de l'appel, mais n'en voudrais pas moins
formuler des observations complémentaires sur l'interprétation de
l'article 84 de la Convention de Chicago relative à l'aviation civile interna- CONSEIL DE L'OACI (DÉCL. LACHS) 73

tionale et de l'article II,section 2, de l'Accord relatif au transit des ser-
vices aériens internationaux.

Pour examiner le sens et la portée des mots ((la décision ))employés
à l'article 84, on doit considérer que leur sens strictement littéral ne
constitue qu'un point de départ mais qu'il n'est pas nécessairement con-
cluant car nous ne trouvons aucune formule limitative qui nous dispense

de l'interpréter. Ilest vrai que l'emploi de l'article définiet du singulier
dans ala décision )lrelie directement cette expression à la mesure que le
Conseil doit prendre en vertu de la première phrase de l'article dont il

s'agit. Cela porterait à conclure, semble-t-il, que 1la décision»envisagée
doit êtrela décisionpar laquelle le Conseil statue sur ((un désaccord entre
deux ou plusieurs Etats contractants à propos de l'interprétation ou de
l'application )) de la Convention et de ses annexes, qui ((ne peut être

réglépar voie de riégociation )I.
Mais ce n'est pas seulement en prenant des décisions au fond que
le Conseil peut statuer sur lesdifférends.Ce n'est doncpas seulement de ce

genre de décisions qu'ilpeut êtrefait appel et à cet égardje ne crois pas
possible d'admettrte que l'on peut interpréter le Règlement pour la solu-
tion des différends de telle manièrequ'il restreigne plus que la Convention
elle-même la possibilitéd'interjeter appel. Au surplus, si les rédacteurs

avaient réellement voulu exclure l'appel sur des questions autres que des
questions de fond, ils auraient pu facilement le faire en qualifiant comme
il convenait le terrrie (décision »; ilexiste des précédentsbien connus pour

une rédaction de ce genre.
Cela ne signifie pas bien sûr que ((n'importe quelle décisiondu Conseil ))
est susceptible d'appel car, comme le conseil du Pakistan l'a indiqué,
(1cela irait à I'encoritre de l'objet mêmede la Convention )(audience du 27

juin 1972). Il faut envisager le problème compte tenu des répercussions
que la décisiondont il s'agit pourrait avoir quant à la position des Parties
au regard de l'affaire. En l'espècela Cour s'occupe d'une décisionconcer-

nant un problème de compétence, de sorte qu'il faut tracer une ligne de
démarcation et dire de quel côtése situent les décisionssur la compétence.
Pour trouver la réponse, il suffit de songer à l'importance c~ucialeque ces

décisions présentent toujours, ainsi que le souligne le paragraphe 18 de
l'arrêt.Cela est corifirmépar toute l'histoire du règlement judiciaire inter-
national où les questions de cet ordreont beaucoup plus d'importance que
sur le plan national.

Ces problèmes présentent néanmoins un aspect plus général qu'il
convient d'indiquer. La Cour actuelle et sa devancière ont toujours
procédéavec beaucoup de prudence et de modération chaque fois qu'il

s'est agi de déterminer leur compétence. Conime l'a dit Lauterpacht:
(1Rien ne doit être fait qui puisse donner l'impression que la Cour, par
excèsde zèle, s'est attribué une compétence qui ne lui avait pas étécon-
férée ))(The Development of International Law by the international Court,

1958, p. 91).
Cette modération s'explique par la tendance marquée que l'on constate
à ne pas imposer aux Etats des obligations plus lourdes que celles qu'ilsont expressément acceptées. Cependant, dans le cas d'appels contre des

décisions d'autres instances, ce critère mêmeimpose des limites à la
prudence que la Cour manifeste quand elle doit statuer sur sa compétence.
En fait les raison:; qui expliquent la nécessitéd'interpréter strictement
les clauses juridicti~onnelles sont celles-là mêmesqui obligent à inter-

préter les dispositions en matière d'appel d'une façon qui donne le
maximum d'effet aux garanties que ces dispositions visent à assurer. On
pourrait presque dire que l'instance inférieure et la cour d'appel se ren-
voient la balle en matièredejuridiction. Par conséquent une interprétation
restrictive du droit 'd'appel, et partant des pouvoirs de la cour d'appel,

implique manifestement une interprétation large des pouvoirs juridic-
tionnels du tribunal de première instance. Cela entraînerait en fait des
obligations plus lourdes pour les Etats intéressés - ce que les tribunaux
internationaux ont constamment essayé d'éviter, comme il est indiqué
plus haut. Restreindre le droit des Etats de remettre en question des

décisions qu'ils considèrent comme injustes, ce serait, dans une certaine
mesure au moins, aller à l'encontre de l'objet mêmede l'institution de
l'appel. S'il en est ainsi en général, cela est encore plus vrai pour les
questions de compéitencequi, comme on l'a indiqué plus haut, sont com-
parables en importance, sur le plan international, aux points de fond. Les

observations qui pr~icèdentconfirment que l'exercice de ce que l'arrêt
appelle au paragraphe 26 (1un certain contrôle ... par la Cour 1est justifié
(voir la résolution de l'Institut de droit international en dat; du 25 septem-
bre 1957, Annuaire 1957, p. 476 et suiv.).

Tout en admettant que le Conseil de I'OACI a compétence pour
connaître de la requêteet de la plainte qui lui ont étésoumises, je voudrais

présenter des observiitions sur certaines questions de procédure soulevées
à propos des décisionsdont il a étéfait appel. L'Inde a fc~muléun certain
nombre de conclusions àce sujet (mémoiredu Gouvernement indien, par.
93 à 99 et par. 106 D). Le Pakistan quant à lui les a déniées(contre-
mémoire du Gouvernement pakistanais, par. 59).

L'article 54, alinéa c), de la Convention relative à l'aviation civile
internationale dispose: ((Le Conseil doit ... arrêterson organisation et son
règlement intérieur 1)Conformément aux pouvoirs qui lui étaient ainsi
conférés,le Conseil a approuvé le 9 avril 1957 le Règlement pour la solu-
tion des différends. Celui-ci avait pour objet de s'appliquer ((au règlement

des désaccords ...survenus entre Etats contractants qui peuvent être
soumis au Conseil 1)et ([à l'examen de toute plainte relative ... à une
mesure prise aux termes de l'Accord de transit par un Etat partie à cet
Accord »(article premier, par. 1et 2).
Compte tenu de ces dispositions. les Etats contractants ont le droit

d'escompter que le Conseil s'en tiendra fidèlement aux dispositions du
règlement quand ilassume, dans les situations dont il s'agit, des fonctionsquasi judiciaires, qui font partie intégrante de son activité. Ces disposi-
tions sont l'un des élémentsqui garantissent que tout organe collégialde
cette nature prendra ses décisions comme ilconvient; elles constituent un
cadre pour son fonctionnement normal: à ce titre, elles sont promulguées
pour êtreappliquées.

Le compte rendu de la séance du Conseil en date du 29 juillet 1971
indique à coup sûr que l'on s'est écarté de certaines des dispositions du
Règlement pour la solution des différends. En général, ilest évidemment
vrai que toutes les dérogations aux règlesétablies ne portent pas atteinte
à la validité des décisions mais ilen est certaines qui peuvent léser les

parties dans leurs droits et leurs intérêts.C'est pourquoi si l'une des
parties intéresséessoutient devant la Cour que des irrégularités de
procédure ont été commises,il est raisonnable que cela retienne I'atten-
tion de la Cour. C'est par suite àjuste titre que l'Inde a soulevé des objec-
tions.

Je regrette donc que la Cour n'ait pas examiné la question et, dans son
arrêt,se soit bornéeà Idire si le Conseil est compétent en l'espèce)(par.
45).Statuersur les vices de forme que la Cour peut éventuellement consta-
ter dans la manière dont le Conseil a pris ses décisions ou attirer sur eux
l'attention du Conseil, cela relèverait certainement du 11contrôle de ces

décisions par la Cour ))dont il est question dans un passage de l'arrêt
(par.26) que j'ai déjàmentionnéet auquel je souscris pleinement.

En outre on ne doit pas oublier que le Conseil, vu son expérience
limitée des problèmes de procédure et composé comme il l'est d'experts

dans d'autres domaines que le droit, a sans aucun dot--: besoin de
directives et que la Cour peut certainement les lui fournir. Ces directives
seraient très importantes pour la suite du présent procès et pour les ins-
tances à venir et accroîtraient la confiance des Etats qui confient au
Conseil la tâche de régler des désaccords survenant dans le domaine de

l'aviation civile.

MM. PETRÉNO , NYEAM DAI, LARD, DE CASTRO et JIMENE ZE ARÉ-

CAHAG j,ges, joignent à l'arrêtles exposésde leur opinion individuelle.

M. Mo~ozov, juge:, et M. NACENDRA SINGH,juge ad hoc, joignent à

l'arrêtl'exposéde leur opinion dissidente.

(Paraplré) F. A.

(Paraphé) S. A.

Bilingual Content

72 ICA0 COUNCIL (DECL. ZAFRULLA KHAN)

the Council. Nothing urged by India's counsel in his submissions to the
Court in this context has served to raise any doubt in my mind concerning
the correctness and propriety of the President's rulings and of the pro-
cedure followed by the Council.
As regards the second category, the brief answer to India's objections
is that Article 15 of the Rules for the Settlement of Differences has no

relevance to a decision on a preliminary objection. The subject of Pre-
liminary Objection and Action Thereon is dealt with in Article 5 of the
Rules. This Article is comprised in Chapter III of the Rules, which deals
with Action upon Receipt of Applications. The Article is self-contained
and comprehensive. The procedure for dealing with a preliminary ob-
jection is prescribed in paragraph (4) of Article 5 which runs as follows:

"If a preliminary objection has been filed, the Council. after hearing the
parties,shall decide the question as a preliminary issue before any further
steps are taken under these Rules." This 1sexactly what the Council did.

Article 15 of the Rules is contained in Chapter IV which prescribes
the procedure to be followed in respect of "~roceedin~s", which start

after a preliminary objection has been disposed of and which relate to the
merits of the case. Article 15 which is headed "Decision" obviously has
reference to a decision on the merits, and does not relate back to a
decision on a preliminary objection disposing of the question as a pre-
liminary issue before the commencement of proceedings on the merits.
The record of the discussion before the Council does not show that
India urged compliance by the Council with the requirements of Article

15. Even before the Court some of the alleged irregularities were men-
tioned for the first time in the oral submissions of counsel and the list
was expanded in reply. Be that as it mag, it is clear that Article 15of the
Rules has no application to a decision on a preliminary objection. The
Council rightly proceeded on that assumption and not a single member
gave expression to a difference of view

Judge LACHS makes the following declaration:

Feeling as 1 do that there are certain observations which should be

made on some aspects of the Judgment, 1 avail myself of the right
conferred by Article 57 of the Statute of the Court and append hereunder
the following declaration.

While 1fully agree with the findings of the Court concerning its com-

petence to entertain the appeal, 1wish to comment further on the inter-
pretation of Article 84 of the Chicago Convention on International Civil COhISEILDE L'OACI (DÉCL. ZAFRULLA KHAN) 72

président ont étéconfirmées par celui-ci. Rien de ce qu'a pu dire à cet

égardle conseil de I'lnde devant la Cour n'a fait naître un doute quelcon-
que dans mon esprit à propos de la régularitéou de l'opportunité des
décisionsdu président etde la procédure suivie par le Conseil.
Pour ce qui est de la seconde catégorie, il suffit pour réfuter les objec-
tions de I'lnde de constater que I'article 15 du Règlement pour la solution

des différends ne se rapporte aucunement à unedécision relative à une
exception préliminaire. La question des exceptions préliminaires et de
leur suite fait l'objet de I'articl5 du Règlement, dans le chapitre IIIqui
traite de la suite que comportent les requêtes.Cet article a un caractère

autonome et il épuisele sujet des exceptions préliminaires. La procédure
prévuepour leur examen est définieau paragraphe 4, ainsi libellé: lSi une
exception préliminaire est soulevée, le Conseil, après avoir entendu les
parties, rend une décision sur cette question préjudicielle avant toute
mesure àprendre en vertu du présent Règlement. »C'est exactement ce que

le Conseil a fait.
L'article 15 du Règlement se trouve au chapitre IV, qui définit les
règles applicables li la(procédure 11qui s'engage après qu'une exception
préliminaire a étér,ejetéeet qui concerne le fond d'une affaire. L'article 15,
intitulé 1Décision I)concerne manifestement une décision au fond, et ne

revient pas sur la décision prisesur une exception préliminaire en tant que
question préjudicielleavant que s'engage la procédure au fond.

Le procès-verbal des débatsau Conseil ne fait pas apparaître que I'lnde

ait insistépour que le Conseil se conforme aux prescriptions de I'article
15. Mêmedevant la Cour, certaines irrégularités ont été évoquéepsour
la première fois dans la plaidoirie du conseil de I'lnde, qui a mentionné
encore d'autres irrégularitésdans sa réplique. Quoi qu'il en soit, il est
clair que l'article 15 du Règlement ne s'applique nullement à une déci-

sion .sur une exception préliminaire. C'est ce que le Conseil a supposé à
juste titre et aucun de ses membres n'a expriméd'avis contraire.

M. LACHS, juge, fait la déclaration suivante:

Estimant que certaines observations doivent être faites sur divers
aspects de l'arrêt,je me prévauxdu droit conférépar I'article 57 du Statut

de la Cour pour pr'isenter la déclaration qui suit.

Je souscris pleinement aux conclusions de la Cour concernant sa
compétence pour connaître de l'appel, mais n'en voudrais pas moins
formuler des observations complémentaires sur l'interprétation de
l'article 84 de la Convention de Chicago relative à l'aviation civile interna-73 ICA0 COUNCIL (DECL. LACHS)

Aviation and Section 2 of Article II of the International Air Services
Transit Agreement.
In examining the sense and import of "the decision", as used in Article
84, its strict verbal meaning should constitute a point of departure but
cannot be conclusive, for there is no qualifying word to relieve us of the
task of interpretation. It is true that the use of thedefinite article and the

singular ("the decision") relates that term directly to the action to be
taken by the Council under the first sentence of the Article. This would
seem to point to the conclusion that "the decision" contemplated must
be one whereby the Council disposes of "any disagreement between two
or more contracting States relating to the interpretation or application"
of the Convention and its Annexes which "cannot be settled by nego-

tiation".

However, it is not only by decisions on substance that the Council
can dispose of disagreements. Hence it is not only from such decisions
that appeal may be made-and 1do not, in this connection, find it pos-
sible to maintain that the Rules for the Settlement of Differences can

be so construed as to restrict appealability to any greater extent than
the Convention itself. Moreover, had the drafters definitely wished to
exclude appeals on issues other than those of substance, they could easily
have done so by suitably qualifying the term "decision": there are
well-known precedents for such drafting.

This is, of course, not so say that appeal is allowable "from every

order, or any order of the Council", which, as counsel for Pakistan sug-
gested, would "defeat the very purpose of the Convention" (hearing of
27 June 1972). The matter has to be viewed in the light of the repercus-
sions which the decision in question could have on the positions of the
Parties in regard to the case. In the present instance we are concerned
with a decision on a jurisdictional issue, and so a line has to be drawn

and the question answered as to the side of the line on which "decisions
on jurisdiction" lie. The answer is of course implicit in the crucial im-
portance which such decisions invariably have (as stressed in para. 18
of the Judgment).This is borne out by the entire history of international
adjudication, where these issues are much more vital than in the muni-
cipal context.

There is, however, a more general aspect to these issues. Great caution
and restraint have been exercised by this Court and its predecessor when
ascertaining their own jurisdiction. As Judge Lauterpacht pointed out:
"Nothing should be done which creates the impression that the Court,
in an excess of zeal, has assumed jurisdiction where none has been
conferred upon it." (The Developrnent of International Law by the Inter-
national Coitrt, 1958, p. 91.)

This restraint has had its raison d'être in the clear tendency not to im-
pose more onerous obligations on States than those they have expressly CONSEIL DE L'OACI (DÉCL. LACHS) 73

tionale et de l'article II,section 2, de l'Accord relatif au transit des ser-
vices aériens internationaux.

Pour examiner le sens et la portée des mots ((la décision ))employés
à l'article 84, on doit considérer que leur sens strictement littéral ne
constitue qu'un point de départ mais qu'il n'est pas nécessairement con-
cluant car nous ne trouvons aucune formule limitative qui nous dispense

de l'interpréter. Ilest vrai que l'emploi de l'article définiet du singulier
dans ala décision )lrelie directement cette expression à la mesure que le
Conseil doit prendre en vertu de la première phrase de l'article dont il

s'agit. Cela porterait à conclure, semble-t-il, que 1la décision»envisagée
doit êtrela décisionpar laquelle le Conseil statue sur ((un désaccord entre
deux ou plusieurs Etats contractants à propos de l'interprétation ou de
l'application )) de la Convention et de ses annexes, qui ((ne peut être

réglépar voie de riégociation )I.
Mais ce n'est pas seulement en prenant des décisions au fond que
le Conseil peut statuer sur lesdifférends.Ce n'est doncpas seulement de ce

genre de décisions qu'ilpeut êtrefait appel et à cet égardje ne crois pas
possible d'admettrte que l'on peut interpréter le Règlement pour la solu-
tion des différends de telle manièrequ'il restreigne plus que la Convention
elle-même la possibilitéd'interjeter appel. Au surplus, si les rédacteurs

avaient réellement voulu exclure l'appel sur des questions autres que des
questions de fond, ils auraient pu facilement le faire en qualifiant comme
il convenait le terrrie (décision »; ilexiste des précédentsbien connus pour

une rédaction de ce genre.
Cela ne signifie pas bien sûr que ((n'importe quelle décisiondu Conseil ))
est susceptible d'appel car, comme le conseil du Pakistan l'a indiqué,
(1cela irait à I'encoritre de l'objet mêmede la Convention )(audience du 27

juin 1972). Il faut envisager le problème compte tenu des répercussions
que la décisiondont il s'agit pourrait avoir quant à la position des Parties
au regard de l'affaire. En l'espècela Cour s'occupe d'une décisionconcer-

nant un problème de compétence, de sorte qu'il faut tracer une ligne de
démarcation et dire de quel côtése situent les décisionssur la compétence.
Pour trouver la réponse, il suffit de songer à l'importance c~ucialeque ces

décisions présentent toujours, ainsi que le souligne le paragraphe 18 de
l'arrêt.Cela est corifirmépar toute l'histoire du règlement judiciaire inter-
national où les questions de cet ordreont beaucoup plus d'importance que
sur le plan national.

Ces problèmes présentent néanmoins un aspect plus général qu'il
convient d'indiquer. La Cour actuelle et sa devancière ont toujours
procédéavec beaucoup de prudence et de modération chaque fois qu'il

s'est agi de déterminer leur compétence. Conime l'a dit Lauterpacht:
(1Rien ne doit être fait qui puisse donner l'impression que la Cour, par
excèsde zèle, s'est attribué une compétence qui ne lui avait pas étécon-
férée ))(The Development of International Law by the international Court,

1958, p. 91).
Cette modération s'explique par la tendance marquée que l'on constate
à ne pas imposer aux Etats des obligations plus lourdes que celles qu'ilsassurned. However, in regard to appeals from other fora. this very
criterion imposes limits on the Court's caution in assumingjurisdiction.

Indeed, the sarne reasons which underlie the necessity of interpreting
jurisdictional clauses strictly impel one to adopt an interpretation of
provisions for appeal that would lend maximum effect to the safeguards

inherent in such provisions. For, as between the "lower forum" and
"the court of appeal", there exists as it were a see-saw of jurisdictional
powers. Hence to applya restrictive interpretation of rights of appeal-and
thus of the powers of the "court of appealV-would obviously entail an
extensive interpretation of the jurisdictional powers of the "court of
first instance". This would in fact imply more onerous obligations on

the States concerned: something which (as indicated above) international
tribunals have continuously endeavoured to avoid. To restrict the rights
of States to seek relief frorn what they deem to be wrongful decisions
would to sorne extent. at least. defeat the veryobject of the institution of
appeals. If that is so in general, it applies in particular to issues of juris-
diction. which. as indicated earlier, are in the international field com-

parable in importance to issues of substance. Thus this aspect confirms
the justification for the exercise of what the Judgment describes (para.
26) as "a certain measure of supervision by the Court" (cf. resolution of
25 September 1957 by the Institut de droit international, Annuaire 1957,
pp. 476 ff.).

While 1 agree that the ICA0 Council is competent to entertain the
Application and Cornplaint submitted to it, 1 wish to comment on
some procedural issues which have been raised in regard to the decision
from which an appeal has been made. lndia advanced a series of sub-

missions on the subject (Memorial of India, paras. 93-99 and 106 D).
Pakistan for its part, denied them (Counter-Memorial, para. 59).

Article 54 (c) of the Convention on International Civil Aviation
provides that: "The Council shall . . . determine its organization and
rules of procedure." Within the powers thus vested in it, the Council

approved, on 9 April 1957.the "Rules for the Settlement of Differences".
These were intended to "govern the settlement of . . . disagreements
between Contracting States which rnay be referred to the Council",
and "the consideration of any complaint regarding an action taken by
a State party to the Transit Agreement" (Art. 1(1) and (2)).

In the light of these provisions the contracting States have the right
to expect that the Co~incil will faithfully follow these rules, performing
as it does, in such situations, quasi-judicial functions, for they are anont expressément acceptées. Cependant, dans le cas d'appels contre des

décisions d'autres instances, ce critère mêmeimpose des limites à la
prudence que la Cour manifeste quand elle doit statuer sur sa compétence.
En fait les raison:; qui expliquent la nécessitéd'interpréter strictement
les clauses juridicti~onnelles sont celles-là mêmesqui obligent à inter-

préter les dispositions en matière d'appel d'une façon qui donne le
maximum d'effet aux garanties que ces dispositions visent à assurer. On
pourrait presque dire que l'instance inférieure et la cour d'appel se ren-
voient la balle en matièredejuridiction. Par conséquent une interprétation
restrictive du droit 'd'appel, et partant des pouvoirs de la cour d'appel,

implique manifestement une interprétation large des pouvoirs juridic-
tionnels du tribunal de première instance. Cela entraînerait en fait des
obligations plus lourdes pour les Etats intéressés - ce que les tribunaux
internationaux ont constamment essayé d'éviter, comme il est indiqué
plus haut. Restreindre le droit des Etats de remettre en question des

décisions qu'ils considèrent comme injustes, ce serait, dans une certaine
mesure au moins, aller à l'encontre de l'objet mêmede l'institution de
l'appel. S'il en est ainsi en général, cela est encore plus vrai pour les
questions de compéitencequi, comme on l'a indiqué plus haut, sont com-
parables en importance, sur le plan international, aux points de fond. Les

observations qui pr~icèdentconfirment que l'exercice de ce que l'arrêt
appelle au paragraphe 26 (1un certain contrôle ... par la Cour 1est justifié
(voir la résolution de l'Institut de droit international en dat; du 25 septem-
bre 1957, Annuaire 1957, p. 476 et suiv.).

Tout en admettant que le Conseil de I'OACI a compétence pour
connaître de la requêteet de la plainte qui lui ont étésoumises, je voudrais

présenter des observiitions sur certaines questions de procédure soulevées
à propos des décisionsdont il a étéfait appel. L'Inde a fc~muléun certain
nombre de conclusions àce sujet (mémoiredu Gouvernement indien, par.
93 à 99 et par. 106 D). Le Pakistan quant à lui les a déniées(contre-
mémoire du Gouvernement pakistanais, par. 59).

L'article 54, alinéa c), de la Convention relative à l'aviation civile
internationale dispose: ((Le Conseil doit ... arrêterson organisation et son
règlement intérieur 1)Conformément aux pouvoirs qui lui étaient ainsi
conférés,le Conseil a approuvé le 9 avril 1957 le Règlement pour la solu-
tion des différends. Celui-ci avait pour objet de s'appliquer ((au règlement

des désaccords ...survenus entre Etats contractants qui peuvent être
soumis au Conseil 1)et ([à l'examen de toute plainte relative ... à une
mesure prise aux termes de l'Accord de transit par un Etat partie à cet
Accord »(article premier, par. 1et 2).
Compte tenu de ces dispositions. les Etats contractants ont le droit

d'escompter que le Conseil s'en tiendra fidèlement aux dispositions du
règlement quand ilassume, dans les situations dont il s'agit, des fonctionsintegral part of its jurisdiction. Such rules constitute one of the guar-
antees of the proper decision-making of any collective body of this
character and they set a framework for its regular functioning: as such,
they are enacted to be complied with.

The records of the meeting of the Council on 29 July 1971do indicate
that some provisions of the Rules for the Settlement of Differences were
departed from. In general, of course, notal1departures from established
rules affect the validity of decisions, but there are some which may
prejudice the rights and interests of the parties.t is therefore reason-

able, if one of the parties concerned should submit before this Court
that procedural irregularities occurred, that these submissions should
attract the Court's attention. Thus the objections raised by lndia are
well taken.

1 therefore regret that the Court has not gone into the matter and has

limited itself to giving "a ruling as to whether the Council has juris-
diction in the case" (Judgment, para45). To pronounce upon any forma1
deficiencies the Court may find in the decision-making of the Council,
or to draw that body's attention to them, would surely corne within that
"supervision by the Court over those decisions" referred to in a pas-
sage of the Judgment (para. 26) which 1 mentioned earlier and to which

1 fully subscribe.
Moreover, it is to be taken into account that the Council, in view
of its limited experience on matters of procedure, and being composed
of experts in other fields than law, is no doubt in need of guidance, and
it is surely this Court which may give it. Such guidance would be of
great importance for the further conduct of this case and future cases,

and in the interest of the confidence of States entrusting it with the
resolution of disagreements arising in the field of civil aviation.

Judges PETRÉN,ONYEAMAD , ILLARD, DE CASTROand JIMÉNEZ DE
ARÉCHAGA append separate opinions to the Judgment of the Court.

Judge Mo~ozov and Judge ad hoc NAGENDRA SINGHappend dis-

senting opinions to the Judgment of the Court.

(Initialled) F. A.

(Initialled)S.A.quasi judiciaires, qui font partie intégrante de son activité. Ces disposi-
tions sont l'un des élémentsqui garantissent que tout organe collégialde
cette nature prendra ses décisions comme ilconvient; elles constituent un
cadre pour son fonctionnement normal: à ce titre, elles sont promulguées
pour êtreappliquées.

Le compte rendu de la séance du Conseil en date du 29 juillet 1971
indique à coup sûr que l'on s'est écarté de certaines des dispositions du
Règlement pour la solution des différends. En général, ilest évidemment
vrai que toutes les dérogations aux règlesétablies ne portent pas atteinte
à la validité des décisions mais ilen est certaines qui peuvent léser les

parties dans leurs droits et leurs intérêts.C'est pourquoi si l'une des
parties intéresséessoutient devant la Cour que des irrégularités de
procédure ont été commises,il est raisonnable que cela retienne I'atten-
tion de la Cour. C'est par suite àjuste titre que l'Inde a soulevé des objec-
tions.

Je regrette donc que la Cour n'ait pas examiné la question et, dans son
arrêt,se soit bornéeà Idire si le Conseil est compétent en l'espèce)(par.
45).Statuersur les vices de forme que la Cour peut éventuellement consta-
ter dans la manière dont le Conseil a pris ses décisions ou attirer sur eux
l'attention du Conseil, cela relèverait certainement du 11contrôle de ces

décisions par la Cour ))dont il est question dans un passage de l'arrêt
(par.26) que j'ai déjàmentionnéet auquel je souscris pleinement.

En outre on ne doit pas oublier que le Conseil, vu son expérience
limitée des problèmes de procédure et composé comme il l'est d'experts

dans d'autres domaines que le droit, a sans aucun dot--: besoin de
directives et que la Cour peut certainement les lui fournir. Ces directives
seraient très importantes pour la suite du présent procès et pour les ins-
tances à venir et accroîtraient la confiance des Etats qui confient au
Conseil la tâche de régler des désaccords survenant dans le domaine de

l'aviation civile.

MM. PETRÉNO , NYEAM DAI, LARD, DE CASTRO et JIMENE ZE ARÉ-

CAHAG j,ges, joignent à l'arrêtles exposésde leur opinion individuelle.

M. Mo~ozov, juge:, et M. NACENDRA SINGH,juge ad hoc, joignent à

l'arrêtl'exposéde leur opinion dissidente.

(Paraplré) F. A.

(Paraphé) S. A.

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Déclaration de M. Lachs (telle que reproduite immédiatement après l'arrêt)

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