Opinion dissidente de M. Armand-Ugon

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050-19640724-JUD-01-09-EN
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050-19640724-JUD-01-00-EN
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OPINION DISSIDENTE DE M. ARMAND-UGON

J'ai le vif regret de ne pouvoir m'associer aux conclusions auxquelles

la Cour est parvenue dans le présent arrêt et je me prévaux du droit
d'exposer les raisons de mon dissentiment.
La première exception préliminaire se fonde sur le désistement
effectué dans la procédure de la première requête. Le Gouvernement
belge demanda ce désistement en invoquant le paragraphe 2 del'articl69

du Règlement de la Cour ; ce désistement fut accepté par le Gouverne-
ment espagnol à la demande expresse du Gouvernement belge et la
Cour prescrivit que l'affaire fût rayée du rôle.

Les'deux Parties contestent la portée du désistement. Pour le Gou-
vernement belge il s'agit d'un simple désistement de l'instance ; pour

le Gouvernement espagnol ce désistement aurait mis fin au droit de
porter l'affaire devant la Cour.
Il appartient à la Cour d'interpréter cet acte juridique. C'est une
formule correcte que cet acte soit interprétépar l'organe dont il émane.
Le désistement en question est un contrat judiciaire dont l'objet doit
êtredéterminéavec précision; il n'existe que sur le point qui a fait l'objet

de l'accord des Parties. Sa portée doit rester limitée à leur volonté.
La proposition de désistement a été acceptée parla Partie défenderesse;
un accord des Parties est donc intervenu. Le paragraphe 2 de l'articl69<
du Règlement implique la réalisation d'un accord ; il faut voir dans
l'acte réalisé un contrat judiciaire qui, naturellement, lie les deux
Parties.

La question que soulève ce contrat est de fixer sa nature, son étendue
et ses effets.

Le Statut de la Cour en son article 30 autorise celle-ci à déterminer
par un règlement le mode suivant lequel elle exercera ses attributions
et à fixer notamment sa procédure.
On attribue à un organe international la faculté de créer des règles
de droit en toute indépendance. Si le droit international repose sur
l'accord des Etats, soit exprès, soit tacite, dans le cas de l'article 30 du

Statut, une nouvelle source créatrice se fait jour. La Cour permanente
et la Cour internationale crééespar les Etats ont la fonction de dicter
des règlesde droit, impérativement, comme dans la législation nationale. On a justement pu soutenir que le Règlement dela Cour a la valeur
d'une convention internationale qui lie tous les Etats mais que, par la
volonté des mêmeE stats, cesnormes peuvent êtremodifiées ouabrogées
par la Cour. La Cour admet à l'artic31 du Règlement que les parties
peuvent d'un commun accord lui demander des modifications ou addi-
tions particulières des sections, 2 et4 du titreII du Règlement.
La rubrique Des arrangements amiablee st des désistementse trouvant

dans la première section, lesarticleset 69 auraient pu êtremodifies
ou complétés par le commun accord des Parties en la présente affaire,
avec l'assentiment de la Cour. Les Parties n'ont pas exerce cette faculté.
Pour comprendre la signification et la portée des articles et 69
du Règlement, ilest indispensable d'examiner les sources de ces deux
dispositions.
L'article68 est une refonte de l'articl61 du Règ"ement de 1,22.
L'origine de cet artic61 se trouve dans les travaux de la Cour per-
manente de janvier-mars 1922 qui dressa le premier Règlement decette
Cour.
La Cour permanente examina tout d'abord un questionnaire des
pointsà dbvelopper dans le projet de premier Règlement. Undes points
de ce questionnaire était le suivant Est-ce que les parties peuvent
dessaisir la Cour une fois qu'ellesl'ont saisieieD no2, p.291. U)n

premier article portant le no 44, paragraphe I et paragraphe 2,
de l'annexe 21 b),page 304, donnait une rbponse à cette question. Ce
texte, qui portait sur les n63et 64, fut adopté (p.154)et figura en
définitivedans le premier Règlement avecleno 61.
La discussiondu questionnaire (p83) fit ressortir, selon M.Anzilotti,
que la juridiction de la Cour repose entièrement sur la volonté des
parties et que pour cette raison le désir desparties devrait prévaloir
dans tous les cas. Lord Finlay ajouta:il est convenu que les parties
doivent avoir le droit de dessaisir la Cour d'un commun accord après
l'avoir saisie.
L'article1 primitif, actuelleme68,visait deux cas:celuide l'accord
des parties sur la solution du litige et celui de l'accord desparties en vue
de renoncerà la procédure, c'est-à-dire de dessaisirla Cour de l'affaire.
Dans chaque cas, on prescrivait la radiation de l'affaire du rôle. Dans

l'esprit des auteurs de cet article si le désistement était accompli
de commun accorddesparties, le dessaisissementde la Courétaitconclu.
Cetterenonciationàpoursuivre l'instanceéquivdlaàtun dessaisissement.

Lors de la prbparation du Règlementdu 22mars 1936 ,n transcrivit,
A la note2,de la page318,sérieD, troisiEmeaddendumau no 2,une dis-
cussion à propos de l'article 61 du premier Règlement. Cet extrait
du procès-verbalest du 12mai 1933.

Le baron Roiin-Jaequemyns estima dans ce procès-verbal que,s« un gouvernement a déclaréprendre acte de la déclaration de l'autre gou-
vernement, de cette manière un accord s'est formé entre les deux
parties, et par conséquent l'article 61 trouve son application ». Le

Greffier rappela alors que l'article68 avait étéappliqué dans deux cas
d'affaires introduites par requêteunilatérale, affaire Sino-belge et affaire
de l'usine de Chorzbzei.
La discussion prit fin avec l'intervention de sir Cecil Hurst :

« s'ily a accord*entre les parties pour dessaisir la Cour, la compé-
tence de celle-ci est épuiséeet il n'y a mêmepas matière à ordon-
nance, puisque la compétence de la Cour tire exclusivement sa
source de l'accord des deux parties )).

Selon lui,

« le désistement du demandeur seul ne suffit pas par lui-mêmepour
dessaisir la Cour ; il doit, pour atteindre ce résultat, êtreaccompagné

du consentement de l'autre partie. A son avis, l'articl61 du Règle-
ment, qui ne traite que de l'accord entre les parties, ne vise pas le
cas présent. ))

La réforme de 1936, en Ctablissant le parag~aphe 2 de l'article69,

a eu pou!. but d'introduire le désistement unilatéral et de compléter les
idées qui se trouvaient dans l'article 61. Jusqu'à présent, disait le
jonkheer van Eysinga,

«on était d'accord seulement sur le fait que le désistement était

possible si les deux parties agissaient ensemble. Par l'article 69,
paragraphe 2,la Commission a entendu consacrer la possibilité du
désistement unilatéral. ))

Selon M. Fromageot, la formule proposée n'accordait' pas une possi-

bilité qui n'existait pas jusqu'alors. Cette possibilité en fait existait,
et la meilleure preuve en est qu'elle s'était manifestée à plusieurs
reprises. Il s'agissait, selon lui, d'une question de rédaction.

Cesantécédentspermettent d'affirmer que leparagraphe 2del'article69

n'a eu pour but que d'incorporer par une disposition du Règlement une
pratique antérieure.
Loin d'établir un désistement d'instance, elle a adopté un désistement
qui, s'il est accepté par l'autre partie, crée un accord pour mettre fin
à la procédure. Le paragraphe 2 de l'article69 a, dans ce cas, le même

contenu juridique que le désistement d'un commun accord de l'article 68,
ancien article 61 du premier Règlement, lequel, selon sir Cecil Hurst,
avait pour finalité d'épuiserla compétence. Le paragraphe 2 de l'article 69, d'autre part, n'introduisait pas le droit

de réintroduire la requête; la compétence ayant pris fin, un tel droit
n'&ait pas concevable. Un tel droit pour êtreexercé devait se fonder
sur une disposition du Règlement que celui-ci ne contient pas.

Quant la Cour est saisie d'un différend, il peut se terminer par un
arrêt,mais il y a d'autres moyens de mettre fin aux litiges. L'article 20,
paragraphe 2 du Règlement, dans sa rubrique XVIII, dispose que la

nature de la solution du procès doit êtreindiquCe ; son effet immCdiat ne
peut être autre que la radiation du rôle. Dèsqu'est ordonnéela radiation
du rôle, c'est que l'affaire a une solution définitive.

Le désistement, tel qu'il est organisC par les articles 68 et 69 du
Règlement l,ouvre une autre possibilité d'obtenir la radiation du rôle.
Cesdeux articles sont groupés sous la rubrique Desarrangementsamiables

et des désistements ; il y a un rapprochement entre ces deux situations.
L'article 68 permet aux parties de se mettre d'accord pour la solution
du litige, soit par arrangement amiable, soit par renonciation à pour-

suivre la procédure. Dans ces deux cas, la volonté des parties met fin
au procèset la Cour prend acte de l'accord ou du désistement et ordonne
la radiation de l'affaire sur le rôle sur simple communication des liti-

1 Article 68
Avant le prononcé de l'arrêt, si les parties tombent d'accord sur la solution à
donner au litige et le font connaitre par écrià la Cour ou si, d'un corrimun accord,
elles lui font connaitrepar écrit qu'elles renoncentà poursuivre l'instance,la Cour,
ou le Président si la Cour ne siège pas, rend une ordonnance leur donnant acte
de leur arrangement amiable ou prenant acte de leur désistement et dans chaque
cas prescnvant la radiation de l'affaire sur le rôle.

Article69
I. Si, au cours d'une instance introduite par requête, la partie demanderesse
fait connaître par écrit à la Cour qu'elle renonce à poursuivre la procédure, et
si,à la date de la réception par le Greffe de ce désistement, la partie défenderesse

n'a pas encore fait acte de procédure, la Cour, ou le Président si la Cour ne siége
pas, rend une ordonnance prenant acte du désistement et prescnvant la radiation
de l'affaire sur le rôle. Copie de ladite ordonnance est adressée par le Greffier à
la partie défenderesse.
2. Si.à la date de la réception du désistement, la partie défenderesse a déjà
fait acte de procédure, la Cour ou, si elle ne siège pas, le Président fixe un délai
dans lequel ladite partie doit déclarer si elle s'oppose au désistement. Si, dans le
délai fixé,il n'est pas fait opposition au désistement. celui-ci est réputé acquis et
la Cour ou, si elle ne siège pas, le Président rend une ordonnance en prenant acte
et prescrivant la radiation de l'affaire sur le rôle. S'il est fait opposition, l'instance
se poursuit. 120 BXRCELONA TRrZCTION (OP. DISS. ARMAND-UGON)
gants. Evidemment les parties ne pourront pas revenir sur ce qu'elles

ont stipulé quant à leur accord. Dans un cas et dans l'autre, l'affaire
est définitivement enlevéeà la compétence de la Cour.
Le paragraphe 2 de l'article 6g.envisage un désistement qui nécessite
aussi l'accord des parties, celui de la partie défenderesse pouvant être
implicite. Dans le cas présent, il a étéexpressément donnéà la demande

de la partie demanderesse. Le désistement a donc étéacquis. La Cour
a pris acte des communications ainsi reçues des deux gouvernements
et a rayél'affaire du rôle, le procès ayant pris fin.

Cette disposition ne spécifiepas si elle prévoit un désistement d'action

ou un désistement d'instance, suivant la distinction établie par le droit
interne de certains Etats. Le Gouvernement belge appuie sa thèse sur
une conception dogmatique du désistement qu'il tire, par analogie,
du droit interne. Il soutient qu'un désistement suppose l'abandon de
l'instance et que, pour qu'il comprenne l'abandon de l'action, il doit

y avoir une renonciation à celle-ci. La vulnérabilité de cette thèse
réside précisémentdans le fait qu'elle se fonde sur une analogie, en tant
qu'elle applique à la procédure de la Cour les principes de l'ordre procé-
dura1 interne. Le Règlement a établi sur le désistement un régime
qui lui est propre et qui est indépendant du régime des législations

internes, lesquelles ne peuvent ni compléter ni interpréter le régime
du Règlement. Ce n'est pas dans un argument d'analogie qu'il convient
de chercher la penséequi a motivé le paragraphe 2 de l'article 69. Ce sont
le droit réglementaire et la procédure applicables devant la Cour inter-
nationale de Justice qui régissent la présente affaire et non le droit

interne de certains Etats.

Le Règlement ne fait aucune référenceà ces deux espèces de désiste-
ments. Lors de la revision du Règlement, en 1936, les membres de la
Cour permanente n'ont à aucun moment de leurs débats envisagéle fond

des désistements organiséspar les articles 68 et 69. Les membres de la
Cour savaient fort bien que le droit interne de certains Etats et quelques
règlements de tribunaux arbitraux mixtes acceptaient le désistement
d'instance et le désistement d'action, mais à l'occasion de la revision du
Règlement, aucune allusion ne fut faite à cette distinction. Le Règlement

ne poursuivait qu'un but, celui d'instituer un moyen pour mettre un
terme à la procédure ou à l'instance. Si l'objet du désistement était
simplement l'instance, la partie intéresséedevait l'exprimer clairement,
la compétence de la Cour étant consensuelle. Si les textes ayant trait au
désistement déposéspar les parties ne contenaient aucune indication,

alors se présentait un problème d'interprétation selon les règles du droit
international que la Cour permanente avait établies.

Le paragraphe 2de l'article 69 est une disposition de caractère conven-

tionnel qui ne permet aux parties que ce qu'elle prévoit ; on ne peut

118étendre les attributions qu'ont les gouvernements à des situations non

prévues par ce texte. Les déclarations de droits de l'homme autorisent
celui-ci à faire tout ce que la loi ne lui interdit pas mais, en droit public,
la compétence des organes crééspar ce droit ne peut s'exercer que dans
les limites qui leur sont assignées; il ne leur est permis que ce qui est
prévu par les textes ou ce qui est absolument nécessaire pour réaliser
ce qui est prévu par les textes. Le paragraphe 2 ne prévoit pz:! le droit

de réintroduction d'une affaire après désistement, par la voie d'une
nouvelle requête ; il ne se dégage de ce texte aucune présomption
autorisant un tel droit. Il n'y a du reste aucun principe généralde droit
favorable à cette possibilité de nouvelle requête, qui pour êtreadmise
en droit interne doit s'appuyer généralementsur des textes.

Il n'y a pas de précédents à la Cour favorables à l'existence de ce
droit de réintroduction. C'est la première fois que la Cour est saisie d'une
telle prétention.

Le droit de réintroduction ne trouve aucun appui dans le Règlement ;
il ne peut se déduire de lapratique de la Cour ni de la pratique des Etats
en matière arbitrale. Les législations internes sur ce point sont diver-
gentes. Ce droit ne peut résulter que d'une réserve expresse contenue
dans le désistement accepté par les parties ; une telle réserve manque
dans le cas présent.

Le désistement homologué par la Cour a eu l'accord des Parties de

façon expresse. Les groupes privés avaient négociéun accord, lequel
impliquait un désistement préalable. Cet accord a étéreconnu par le
Gouvernement belge. L'objet de l'accord privé était le retrait définitif
de la demande et sa raison d'êtreétait que les groupes de la Sidro
et de la Fecsa puissent entamer des négociations afin de trouver une
solution à leur différend.

Le Gouvernement espagnol, en répondant à la demande que lui
faisait le Gouvernement belge d'accepter le désistement proposé, devait
tenir compte des règles de procédure de la Cour. Le désistement du
paragraphe 2 de l'articl69 n'est par lui-mêmeun désistement d'instance
que si la partie qui le déposeveut lui donner ce seul effet ; dans ce cas,

on doit l'indiquer clairement. Une considération d'ordre généralvient
appuyer cette manière de voir : la juridiction internationale ne doit
pas êtreéquivoque et le rapport entre Etats sur ce point ne doit pas être
impréciset se prêter àla chicane. D'autre part, le Gouvernement espagnol
entendait que le désistement proposépar le Gouvernement belge conte-
nait quelque chose de plus qu'un simple désistement d'instance. Le principe de l'égalité desparties dans le procès est bien un principe

établipar l'article 35,paragraphe 2,du Statut, les dispositions du Règle-
ment et la jurisprudence de la Cour. La Cour internationale, en son
avis sur les Jugements du tribunal administratif (C.I.J. Recueil 1956,
p. 86), a dit : «Le principe de l'égalitéentre les parties découle des
exigences d'une bonne administration de justice. » Le désistement de

l'instance, en soi, favorise évidemment le demandeur, lui permettant de
corriger les erreurs d'une première requête en en réintroduisant une
nouvelle. C'est ce que reconnaît le Gouvernement belge dans ses obser-
vations : il a dû tenir compte des critiques que la première requêteavait
suscitées de la part du Gouvernement espagnol. Si le texte qui établit
le désistement ne dit pas clairement qu'il s'agit d'un désistement de

l'instance, la partie qui veut lui donner un tel effet doit préciser sans
détoursses intentions et le contenu de son avis de désistement. C'est pour
elle un devoir. Le défendeur est ainsi informédes intentions de la partie
qui se désiste, pour donner son assentiment ou son refus au désistement
en pleine connaissance de cause.

Le Gouvernement belge soutient que, si le Gouvernement espagnol
a commis une erreur de droit en interprétant sa lettre de désistement
comme un retrait définitifde la réclamation et non comme un désistement

de l'instance, il doit en supporter les conséquences. Il n'est pas démontré
que le paragraphe 2 de l'articl69 du Règlement ait prévuun désis +-ement
d'instance ni que cette disposition permette la réintroduction d'une
nouvelle requête. Pour savoir s'il y a eu une error jwris, il faut tout
d'abord savoir quel est le droit. C'est précisémentla question qui est
devant la Cour.

Si la pratique de la Cour autorise des modifications des conclusions
primitives, elle ne permet pas de changement de l'objet de la requête
qui doit demeurer le mêmetout au long de l'instance.

En conclusion, selon le paragraphe 2 de l'article69 du Règlement,

toute demande de désistement non assortie de réservedoit êtreconsidérée
comme une renonciation au droit de présenter une nouvelle requête.
De cette disposition, le droit de réintroduction ne ressort pas ; il doit
ressortir du texte de la demande de désistement.

S'il appartient à la Cour d'interpréter le contrat judiciaire du désiste-
ment intervenu, elle doit prendre en considération les preuves présentées

par les deux gouvernements qui ont déterminé sonadoption. Il convient
d'établir l'histoire des pourparlers entre les deux groupes privés ; c'estseulement après que l'on pourra apprécier la valeur et le contenu des
preuves.
On ne peut pas situer la demande de désistement dans le vide. Elle
ne se conçoit et elle ne se comprend que dans le cadre des conversations

et des pourparlers qui lui ont donné naissance. C'est à la lumière de
ces faits et des actes des intéressés qu'elledoit se lire et s'interpréter.
Il y a entre eux un enchaînement qui les relie à leur point d'aboutisse-
ment. Une relation s'établit entre eux qui dévoile l'objet et le motif

du désistement. Ces divers faits et actes, qui constituent le contexte du
désistement, sont liéspar une corrélation logique ; les uns sont l'explica-
tion des autres. Tous ces élémentsont eu leur influence sur la rédaction
de la demande de désistement, laquelle doit êtreconsidéréeen fonction

des circonstances dans lesquelles elle a étédéposéeet soumise à la déci-
sion de l'autre Partie. Ces conversations ont commencé entre la Sidro
et la Fecsa, avec comme intermédiaire choisi par les deux groupes le

comte de Motrico. Elles sesont poursuivies entrela Sidro et le Gouverne-
ment belge et finalement la formule a étécommuniquée au Gouverne-
ment espagnol. Les conversations, entamées au mois d'octobre 1960,
ont pris fin en avril 1961.

Les documents échangés pendant ces conversations doivent êtrepris
en considération par la Cour pour connaître l'intention commune des
Parties, laquelle doit prévaloir sur le sens littéral des termes. Tout acte
juridique est liéà la volonté réelle des intéressés. Les deux gouverne-

ments ont admis comme élémentde preuve la documentation relative
à ces conversations, laquelle a étésoigneusement examinée dans les
Ccritures et les plaidoiries.
Avant tout départ de celles-ci pour un arrangement amiable entre

les deux groupes, M. March, du groupe de la Fecsa, avait dressé une
note de base1. Le premier paragraphe de cette note de base était ainsi
rCdigé : «Du point de vue moral, le retrait définitif de la demande est
une condition préalable pour engager la négociation. ))Le texte espagnol

est le suivant : «Desde un punto de vista moral la retirada definitiva
de la demanda es condicion previa para la apertura de la negociacion. ))
Cette note était datée du 20 octobre 1960 et fut communiquée par le

comte de Motrico au groupe belge. C'est à la demande de celui-ci que le
comte de Motnco se mit en rapport avec M. March.

Deux jours après, le 22 octobre, le représentant dela Sidro, l'ingénieur

Hernandez, faisait savoir au comte de Motrico son désaccord avec la

l aI. Du point de vue moral, le retrait définitif de la demande esune condi-
tion préalable pour engager la négociation.

2. Une fois cette condition remplie,l'autre partie prendl'engagement d'entre-
prendre en toute bonne foi une négociation immédiate pour essayer de trouver
une solution qui fixerait une indemnité destinée aux actionnaires.
3. La réserve la plus absolue est indispensable au développement de ces pour-
parlers. Aucune publicitéde quelque sorte que ce soit ne seraautorisée tant que
l'on ne sera pas définitivement amvé à un accord éventuel.ncondition du ((retrait définitif dela demande »,s'iln'étaitpas accompagné

d'un arrangement définitif entre les deux groupes. Pour M. Hernandez,
le ((retrait définitif de la demande ))comportait le ((désistement de
l'action judiciaire ))ou le ((retrait ))de l'action judiciaire (observations,
annexe 6, appendice 2, par. 2 et 3).

Le résident de la Sidro. M. Frère. dans sa lettre à M. Hernandez
du 2 décembre 1960, déclaraqu'il ne pourrait prendre le risque d'arrêter
la procédure sans qu'un accord fût signé (observations, annexe 6,
appendice 4).

M.Hernandez écrivitau comte de Motrico, dans un brouillon de lettres
à échanger du 24 janvier 1961, que, comme il y avait une volonté
formelle d'arriver à un règlement ... du litige relatif à la Barcelona
Traction », il acceptait entre autres principes, au nom de la Sidro,

le ((retrait définitif ...de l'action entreprise par le Gouvernement belge
contre le Gouvernement espagnol devant la Cour de La Haye ».
Le comitépermanent de la Sidro était d'accord - dit M. Hernandez
dans la mêmelettre - Dour demander ((de mettre fin à la ~rocédure

actuellement engagéeà La Haye, pour autant que vous veuilliez [comte
de Motrico] bien reconnaître que la présente lettre est le témoignage
fidèle de ce qui a étéconvenu dans nos entretiens » (observations,
annexe 6, appendice 5).

Le comte de Motrico, dûment autorisé par le groupe de la Fecsa,
manifesta dans une lettre à M. Hernandez du 25 janvier 1961, son
accord quant au projet de lettre précédent (observations, annexe 6,
appendice 5).

Dans un entretien que le président de la Sidro, M. Frère, eut avec
le ministre belge du Commerce extérieur le 26 janvier 1961, il le mit
au courant des conversations avec la Fecsa. Le ministre proposa plutôt
((une suspension de la procédure ...pendant une période de trois mois »

(observations, annexe 4, appendice 6).
Le groupe de la Fecsa et M. March ayant repoussé cette suspension,
le président de la Sidro, à l'instance du comte de Motrico, exprima,
dans sa lettre du 23 février 1961, qu'il était disposéd'obtenir du Gou-

vernement belge ((le retrait pur et simple de l'instance introduite devant
la Cour, afin de réaliser la condition considérée comme préalable à la
négociation proprement dite » (observations, annexe 6, appendice 6,
p. 104). En réponseà cette lettre, le comte de Motrico dit qu'«elle reflète
fidèlement ce qui a été traité dansles divers entretiens ))(observations,

annexe 6, appendice 6).
Deux projets de lettresde M.Frère au comtede Motrico, du 9mars 1961
(exceptions, annexe 71, documents I et 2),précédèrent lalettre envoyée
par M. Frère au comte de Motrico à la mêmedate (document no 3). Le

contenu du paragraphe 2 de cette dernière lettre était le suivant :

(J'ai exposé au ministre que le retrait préalable de l'instance

pendante à La Haye constituait en définitive la condition silzequa non pour que la négociation sur les bases qui ont été définiesdans
notre échangede lettres du 23 et du 24 février dernier puisse avoir

lieu.a

Le IO mars 1961 une lettre de M. Frère au comte de Motrico lui
faisait savoir que le Gouvernement belge prendrait la responsabilité
du retrait après un échange de lettres entre l'ambassadeur de Belgique

et le ministre des Affaires étrangères d'Espagne, qui ne serait commu-
niqué à personne, réglant la procédure du retrait de l'instance et qui
resterait ignoré ((de la personne que j'ai rencontrée chez vous)) (lettre
jointe au rapport du comte de Motrico daté du 4 décembre 1963).

Cette proposition n'eut pas de suite, étant contraire à l'exigence no I

de la note de base, relative au retrait définitif de la demande.

Le 17 mars 1961, le comte de Motrico fait savoir au ministère des
Affaires étrangèresespagnoles l'étatdes conversations en vue du désiste-
ment. Dans une lettre du 18 mars suivant, le comte de Motrico dit à son

ministre que M. Frère l'a informé que le Gouvernement belge «a pris
la résolution de s'adresser à la Cour internationale de Justice en lui
demandant le retrait définitif de sa requête présentée contre notre
Gouvernement » et il ajoute« que le Gouvernement belge va rédiger sa
requête de retrait dans des termes analogues à ceux qu'on employa

à l'occasion d'un litige entre le Royaume-Uni et la Bulgarie ».
Le 21 mars le ministre espagnol des Affaires étrangères télégraphie
au comte de Motrico pour l'avertir de la position de son gouvernement
à l'annonce du désistement belge. Il déclareque l'affaire doit êtreconsi-
déréecomme close et que le désistement avait pour but de mettre

fin de façon définitive au litige entre les deux gouvernements.

Deux démarches se déroulent le 22 et le 23 mars entre le ministre
espagnol et l'ambassadeur belge à Madrid. L'ambassadeur cherche
d'abord à associer le Gouvernement espagnol au désistement ; sur le

refus du ministre, il lui fait connaître le texte de l'avis de désistement
déposéà la Cour internationale, qui devait fixer un délai,le priant de ne
pas donner son acceptation au désistement avant l'écoulement de ce
délai.

Voici le texte du désistement :

«A la demande deressortissants belges dont la protection a motivé
l'introduction de la requête ...[du] ...15 septembre 1958, mon
Gouvernement me charge de l'honneur de vous demander de bien

vouloir faire connaître à la Cour que, faisant usage de la faculté que
lui donne l'article 69 du Règlement de la Cour, il renonce à pour-
suivre l'instance introduite par laditerequête. ))126 BARCELONA TRACTION (OP. DISS. ARMAND-UGON)

La Fecsa s'oppsse à entamer des négociations privées avec la Sidro,
tant que le désistement ne sera pas approuvé par la Cour. Le Gouverne-
ment espagnol, à la demande du Gouvernement belge, consent à ne pas
formuler d'opposition au désistement, dans sa lettre à la Cour du
5 avril 1961.

La Cour internationale, par ordonnance du IO avril 1961, homologue
le désistement, prescrivant la radiation de I'affaire du rôle.

Une circulaire du ministère des Affaires étrangères espagnol du

13 avril 1961 fait savoir à ses missions diplomatiques à l'étranger que
le Gouvernement belge a formulé ((le désistement de l'action » entre-
prise et que l'affaire s'est terminée ((par une reconnaissance tacite du
bon renom de l'Espagne 1).

Tels sont lesfaits et documents essentiels quiont abouti au désistement.

Passons maintenant à l'examen des preuves pour établir les con-
clusions à tirer.
Il n'est pas nécessaire de s'attarder à établir lequel des deux groupes
a pris l'initiative des conversations. La Fecsa du moins n'a pas fait le

premier pas. D'abord, elle a mis une condition préalable à toute négocia-
tion, qu'elle a maintenue fermement à travers toutes les phases des
conversations. Elle n'a admis ni la suspension de la procédure, ni la
prolongation du délaipour la présentation des observations et conclu-

sions belges. Elle s'est opposée à toute suggestion contraire au retrait
définitif de la demande. Elle n'a voulu se prêter aux négociations
qu'une fois que le désistement fut accepté par les deux gouvërnements
et homologuépar la Cour. Ces faitsdémontrent l'intérêt évident qu'avait

la Sidro d'aborder la solution du différend.

Des documents qui précédèrent le désistement finalement adopté,
doivent ressortir la signification et le sens de la condition préalable
de la note de base qui fut acceptée par le groupe belge.

Quelest le contenu juridique des mots «retrait dCfinitifde la demande ))

(retirada defînitiva de la demanda)? Dèsle deuxième jour après que le
groupe belge en eut pris connaissance, par M. Hernandez, celui-ci a bien
compris que ce retrait supposait le « retrait définitif de l'action judi-
ciaire ».Postérieurement, il renouvelle cette manière de voir, acceptant

au nom de la Sidro le principe du (retrait définitif de l'action judiciaire
entreprise par le Gouvernement belge contre le Gouvernement espagnol ».
Dans cette mêmelettre, il assimile ce retrait de l'action à la phrase
« mettre fin à la procédure engagée actuellement à La Haye ». Aucun doute ne ressort de ces manifestations de la part de la Sidro ;
il s'agit de renoncer définitivement à saisir la Cour de l'affaire de la
Barcelona Traction. C'est bien une renonciation à porter l'affaire devant
la Cour. Telle est aussi l'opinion du groupe de la Fecsa. Il n'y a donc
dèsle début aucune contestation sur la portée de la condition préalable,
aucune contestation sur le sens de cette phrase.

Le président de la Sidro dit le23 février1961 qu'il est disposéàobtenir
du Gouvernement belge « le retrait pur et simple de l'instance introduite
devant la Cour, afin de réaliser la condition considérée comme préalable
à la négociation proprement dite ». C'est sur cette manifestation que
le président de la Sidro a sa première entrevue avec le ministre belge

du Commerce extérieur. Cette autorité a dû êtreinformée de la préten-
tion du groupe espagnol et du sens de la condition préalable, comme
l'a fait savoir au comte Motrico le président de la Sidro dans sa lettre
du g mars, en se référant aux lettres des 23 et 24 février précédent.
Or, une des bases de la lettre du 23 février était le retrait pur et simple
de l'instance afin de réaliser la condition considérée commepréalable.
Le retrait pur et simple de l'instance signifie pour le président Frère le

retrait de la requête, afin de satisfaire à la note de base. Les Belges
considèrent excessive la ((condition préalable », comme le démontrent
leurs efforts pour l'atténuer. Le ministre belge essaye de la remplacer
par d'autres conditions : suspension de la procédure, délai pour la pré-
sentation des observations, lettres secrètes, demandes de garanties.
Pour eux, il est évident que cette condition préalable est autre chose

qu'un désistement d'instance.

Cette mêmevue est confirmée par la lettre du 18 mars du comte
de Motrico à son ministre.
La requêtede désistement adressée au Président de la Cour est ainsi
conçue :

« A la demandederessortissantsbelges dont la protection a motivé
l'introduction de la requête ...mon gouvernement me charge ...
de vous demander ...que faisant usage de la facultéque lui donne
l'article69, il renonce à poursuivre l'instance introduite par ladite
requête. »

C'est la mêmeformule de désistement que dans l'affaire Borchgrave,
lequel était cependant un désistement définitif qui avait été utilisédans
une autre affaire entre le Gouvernement belge et le Gouvernement
espagnol.
Ce désistement a étéintroduit à la demande de la Sidro, seul ressor-
tissant belge intervenant dans les pourparlers. Aucune autre preuve n'a

étéprésentée sur l'intervention d'autres ressortissants belges auprès
de leur gouvernement. La requête de désistement établit un lien entrele texte de cet acte et l'accord négociéentre la Sidro et le groupe de la
Fecsa et accepté par le ministre du Commerce extérieur. Le conseil
belge dit : «En faisant sa déclaration de désistement du 23 mars 1961,

le Gouvernement belge entendait simplement donner suite à l'exigence
préalable formulée par Juan March. » Le motif de désistement est un
accord entre deux groupes pour que soit mis fin au procès,pour entamer
une négociation avec la Fecsa. Le même conseil belge assure que le
Gouvernement belge a accepté ((le retrait définitif de la requête ... pour

permettre les négociations ».

Les deux groupes étant arrivés à un accord sur la note de base, c'est-
à-dire sur le retrait définitifde la demande, le groupe belge, pour honorer
cet accord, demande à son gouvernement de prendre les mesures néces-

saires à cet effet. Ce gouvernement ne pouvait se prévaloir de l'article 6s
du Règlement, car aucun accord n'était intervenu entre les Parties au
procès ; il dut alors utiliser la voie de l'artic69, paragraphe 2, lequel
permet une demande unilatérale de désistement qui doit quand même
avoir le consentement exprès ou implicite de l'autre partie. C'est ce

qu'il fit. Le Gouvernement belge demanda à la Cour un désistement
fondé sur l'accord des deux groupes et cet accord prévoyait le retrait
définitif de la demande dont la Cour était saisie. L'avis de désistement
du Gouvernement belge faisait sien l'accord auquel avaient abouti les
deux groupes.

Le Gouvernement belge n'a pas manqué d'êtreinformé par le prési-
dent de la Sidro du contenu de la phrase de la condition préalable
((retrait définitif de la demande », tel qu'il l'avait fait connaître au
comte de Motrico. La Sidro a donc demandé au Gouvernement belge

un retrait définitif de la requête introduite devant la Cour. Une pro-
messe a été faitepar la Sidro au groupe espagnol, créant un engagement
de retirer de façon définitive la demande dont la Cour avait étésaisie.
Le Gouvernement belge a fait sien cet engagement en se désistant au
nom de la Sidro, sans aucune condition. Les preuves administrées sont
donc concluantes et décisives; pas mêmele moindre doute ne peut être

permis - sur le sens et la portéedu désistement. Le désistement dans ses
fonctions médiates recherche les mobiles qui lui ont donné naissance
lesquels lui donnent prédominance sur l'expression matérielle. Cet acte,
dans le cas présent, est marqué par des mobiles déterminants, qui sont
dCcisifspour son appréciation.

Le Gouvernement belge a soutenu dans ses plaidoiries que la condi-
tion no I de la note de base a été satisfaite par le dépôt de son avis de

désistement. Or, cette note de base exigeait, pour entreprendre une
négociation entre les deux groupes, le retrait définitif de la demande,
exigence qui supposait, comme on doit le déduire de son texte, qu'unenouvelle demande ne pourrait êtreintroduite une fois que le désiste-
ment aurait été acquis. Le retraitdéfinitide la demande, selon le point I
de la note de base, visait un retrait définitifet non un simple retrait
dela demande ;il faut donner sonsens àl'adjectif définitifLes mots n'ont
de valeur que pour autant qu'ils sont l'expression d'une idée; or, il faut
supposer qu'en adoptant une idée ona voulu quelque chose de déterminé.

Admettre l'interprétation belge conduirait à soutenir que le groupe
espagnol a demandé simplement un désistement d'instance. Or, une telle
interprétation n'est pas sérieuse et se heurte aux faits admis, non-
suspension de la procédure, non-prolongation du délai pour présenter
les observations, non-acceptation des lettres secrètes. Le retrait de la

demande devait êtredéfinitif.

Pour fixer le sens dela phraserretrait définitifde la demande », on doit
encore souligner que le retrait devait se relier à un but d'ordre moral.
Le Gouvernement espagnol et M. March avaient étémalmenés dans la
requêteet le mémoire belges. M. March s'opposait à toute négociation

avec la Sidro tant que ces écrits ne seraient pas retirés définitivement
du prétoire. Le retrait ne devait pas se limiter à la seule instance en
cours ; il devait être définitif.Cet adjectif a une seule acception : l'aban-
don complet et total des assertions incluses dans les documents. On ne
demandait pas un abandon provisoire, on demandait un retrait définitif
de la demande ; il faut bien souligner le mot définitif.D'après l'engage-

ment pris, ces assertions ne pouvaient être reprises plus tard. Une
simple suspension de la procédureles aurait n:?intenues. Le point de vue
moral pouvait uniquement êtresauvegardé par le retrait définitif de
l'affaire. Un désistement d'instance ne comportait pas cet effet.

Le sens du contrat judiciaire de désistement se voit encore confirmé
par le comportement des deux groupes et des gouvernements et par
l'analyse juridique de ces comportements.
Ceux-ci n'ont pas la même importance et la même signification.
Ils sont cependant une source pour l'interprétation du désistement.
Ils impliquent aussi une renonciation à porter l'affaire devant la Cour.

Quelques-uns de ces comportements ont été provoqués par 'des
personnes privées cherchant une négociation et d'autres émanent des
Parties au procès elles-mêmes. Ils doivent être examinés dans leur
ensemble, pour leur attribuer un sens précis et pour rechercher l'objet
et l'intention de l'acte réalisé.

((La pratique internationale connaît des cas dans lesquels on
a discuté le point de savoir si les faits alléguéspouvaient être
interprétéscomme une renonciation, tandis qu'elle ne connaît pas
de cas dans lesquels aurait été affirméela nécessitéd'une déclara- tion expresse. La volonté d'abandonner un droit pourra se déduire
également de l'attitude du sujet. )(Anzilotti,Cours, tome 1,p. 350.)

Un fait saillant émergede ces comportements. Le groupe de la Fecsa
a fait du retrait définitif de la requête une condition sine qua non,
de toute négociation, comme le reconnaît le président de la Sidro.
Cette condition a étéréitérée à de nombreuses reprises, chaque fois
qu'une nouvelle tentative était faite pour l'éliminer. Legroupe de la
Fecsa a maintenu fermement sa position du mois d'octobre 1960 au

mois de mars 1961. Sans retrait définitif de la demande, pas de négocia-
tion. Une telle exigence était connue de la Sidro et du ministre du
Commerce extérieur. Le Gouvernement belge était donc informé de la
nature du désistement que réclamait avec insistance le groupe espagnol.

La lettre du IO mars adressée par M. Frère au comte de Motrico
permet de dégager une présomption favorable quant à la thèse suivant
laquelle le groupe belge savait que la demande de M. March se référait
à un retrait définitif de la demande introduite auprès de la Cour. Par
cette lettre.on &tendait donner un caractZre conditionnel au retrait

inconditionnel exigépar la note de base. En effet, on y proposait que
l'ambassadeur belge eût un entretien avec le ministre des Affaires
étrangères à Madrid pour échanger des lettres réglant la procédure du
retrait de l'instance qui ne seraient communiquées à personne, pas même
à M. March. Une fois la négociation terminée, ces lettres pourraient être
restituées ou détruites. Sur cette base, le Gouvernement belge prendrait

la responsabilité du retrait, mais comme un minimum indispensable.

Cette proposition belge indiquée, comme le dit M. Frère, par le con-
seil juridique du ministère des Affaires étrangères, tendait évidemment
à modifier la condition de la note de base relative au retrait définitif

de la demande. Ainsi éludait-on l'objectif poursuivi par cette note. Cela
démontrait que M. Frère s'apercevait du contenu de cette exigence
et de sa portée juridique. On trouve dans la lettre de M. Frère une
reconnaissance, de la part du Gouvernement belge, du fait que le désiste-
ment demandé n'était pas un simple désistement d'instance, car sans
cette interprétation, la lettre n'aurait pas d'explication raisonnable ;

on voit mal pourquoi le Gouvernement belge aurait hésitéà engager sa
responsabilité si le désistement en question n'avait viséque la procédure.

La proposition du ministre du Commerce extérieur de remplacer cette
condition par une suspension de la procédure pendant trois mois, per-
mettant ainsi aux intéressés denégocier pendant ce délai, fut rejetée

in limine par le groupe de la Fecsa qui la considérait comme incompa-
tible avec la note de base. D'autres propositions faites par M. Frère,avec la connaissance des autorités belges, eurent le mêmesort (retrait
sur accord des intéressés, prorogationdu délai pour la présentation des
observations et conclusions belges, procédure d'échange de lettres
secrètes et mesures de garanties). Si le Gouvernement belge croyait

que le retrait sollicitéimpliquait seulement un désistement de l'instance,
qui devait se traduire en définitive par une suspension de celle-ci,
pourquoi présenter proposition sur proposition pour ne pas accéder
au retrait demandé ?Ce que savaient le ministre du Commerce extérieur,
le président de la Sidro, M. Hernandez, le comte de Motrico, le groupe

de la Fecsa, c'est que le retrait définitif de la demande du rôle de la
Cour équivalait à la renonciation de poursuivre l'affaire devant la Cour.
Dans les pourparlers, ily eut donc un engagement précis, avec objet
et intention bien déterminés, et non un simple échange d'opinions ;
un accord des groupes privés fut négociéet accepté tel quel par le

Gouvernement belge, qui le proposa au Gouvernement espagnol.

Si la proposition de suspension fut refusée à cause de sa faible portée
procédurale, on ne conçoit pas qu'on ait préféré une simple renonciation
à l'instance. La suspension avait encore le mérite de sauvegarder les

exceptions préliminaires dans le cas où la procédure reprendrait plus
tard en cas d'échecdes négociations. Le refus de suspension ne concorde
pas avec le désistement d'instance de la thèse belge. La non-acceptation
de la suspension est aussi un refus d'un désistement d'instance. La note
de base exigeait quelque chose de plus du point de vue procédural

qu'un simple désistement d'instance.

L'intérêtde la Sidro à négocierapparaît clairement tout au long des

pourparlers. La lettre du 23 février1961 de M. Frère en est un exemple ;
il est convaincu, ou du moins il le dit, qu'il existe une base pour un
arrangement favorable aux actionnaires de la Barcelona Traction.
L'intermédiaire affirme que la négociation peut débuter immédiatement
après le retrait de la demande et qu'une solution pourrait êtretrouvée

dans une quinzaine de jours. «C'est - dit M. Frère - en raison de ces
circonstances qu'il va faire un nouvel effort pour amener le gouvernement
à retirer purement et simplement l'instance actuellement en cours. r Dès
le retrait de la demande, s'ouvrirait une négociation propice aux intérêts
belges qui aboutirait à des résultats concrets. C'est en connaissance de

cet état d'esprit que le Gouvernement belge s'est décidé à accéder au
désistement demandé par la Sidro (observations, annexe 6, appendice 7,
p. 108). Cegouvernement a pris la décisionde retirer la demande, comme
le lui demandait la Sidro, pour que le différend soit réglépar voie de
négociations directes entre les deux groupes d'intérêts. Au moment de donner son accord au désistement sur la demande

expresse du Gouvernement belge, le Gouvernement espagnol était en
présencedes faits suivants :une lettre du comte de Motrico luiannonçant
le retrait définitif de la demande de la part du Gouvernement belge
et que ce désistement contiendrait la mêmeréserve que celui du Gouver-
nement britannique en l'affaire avec la Bulgarie. A cette occasion,
le Gouvernement britannique s'était réservé« tous les droits en con-

nexion avec la réclamation du Royaume-Uni contre la Bulgarie ». Or,
le désistement proposé au Gouvernement espagnol ne contenait aucune
réserve de ce type. Le Gouvernement espagnol, vu le texte du désiste-
ment, ne put douter en y donnant son accord qu'il s'agît d'un désiste-
ment définitif, sans aucune réserve, et non d'un désistement d'instance.

Le conseiller juridique de M. Frère avait déclaréau comte de Motrico
que le désistement contiendrait la réservebritannique rappelée ci-dessus.
M. Frère, au nom de la Sidro, avait pris la décisiond'accepter la note
de base, laquelle était connue du Gouvernement belge. L'intermédiaire,
au courant de cette position, la fit connaître à son gouvernement au
moment où celui-ci allait êtresaisi de la requête de désistement. Une

partie qui laisse croire à son adversaire qu'elle prend une position
de droit déterminée, en l'espècele retrait définitif de la demande,
ne peut revenir sur son attitude et soutenir qu'elle a voulu une autre
chose, un simple désistement d'instance. C'est l'application de l'idée
de bonne foi aux termes de laquelle on créeun titre en faveur de son
adversaire en observant un certain comportement.

D'autre part, pour le Gouvernement espagnol, ck désistement était
fait sur la base du paragraphe 2 de l'articl69 du Règlement et non
par référenceà ce que disposent les droits internes de procédure ; or
le paragraphe 2 de l'articl69 n'établit pas un dbistement d'instance
ni un droit de réintroduction et ce droit ne s'accorde pas avec le texte

du dbistement belge : ((renonce à poursuivre l'instance introduite par
ladite requête ».Il est impossible de tirer de l'usage de cette formule
une présomption selon laquelle l'intention n'aurait pas été de mettre fin
A la procédure une fois pour toutes. Si une autre intention abritait cette
formule, il était nécessairede le dire clairement. La bonne foi l'exigeait.

Si, selon la thèse du conseil du Gouvernement belge, le Gouvernement
espagnol avait été informé par le comte de Motrico des conversations
entre les deux groupes privés, le ministre espagnoldes Affaires étrangères
aurait su que le désistement demandé par le groupe espagnol consistait
en un désistement de l'action judiciaire et non de la simple procédure.
Dans cette thèse, il est évident que le ministre espagnol n'aurait pu

hésiter un seul instant à prêterson assentiment au désistement, ce que
l'ambassadeur belge lui demandait à l'instance de son gouvernement.Ainsi cette affaire serait terminée quant à la voie juridictionnelle devant
la Cour pour s'appliquer à une solution entre les deux groupes, position

que le Gouvernement espagnol a toujours défendue dès la naissance du
différend de la Barcelona Traction. Une autre attitude du Gouverne-
ment espagnol parait inadmissible ; il n'aurait jamais donnéson accord
à un simple désistement d'instance. Le Gouvernement belge renonçait
à la voie judiciaire pour obtenir une solution par la voie privée.

Une des raisons pour lesquelles le Gouvernement espagnol ne pouvait
pas accepter ce désistement, et ne l'aurait pas accepté, est une impor-
tarite considération d'ordre moral formulée au paragraphe 3 de sa
communication à la Cour en date du 7 juillet1962 :

((Le Gouvernement espagnol aurait certainement fait opposition
au désistement s'iln'avait pas eu la certitude que cet acte entraînait
par lui-même,la renonciation de la part du Gouvernement belge,
à des accusations aussi diffamatoires qu'injustes à l'égard des

autorités judiciaires, administratives et gouvernementales de 1'Etat
espagnol. ))

Bref, le Gouvernement espagnol ne pouvait consentir sciemment
à un désistement temporaire sans porter atteinte à sa position morale.

Cette raison est décisive en elle-même. Du point de vue juridique,
le Gouvernement espagnol, en acceptant un désistement temporaire,
risquait aussi de compromettre sa position constante sur l'absence de
tout jus standi belge en la matière. Enfin, le Gouvernement espagnol
était convaincu que sa position, à en juger par les pièces de procédure,

était extrêmement solide. Donc, s'il n'avait pas cru le désistement
définitif,il aurait dû examiner avec la plus grande attention la question
de savoir s'il fallait poursuivre la procédure au stade où elle était
parvenue.
Quant au préjudice matériel ou moral effectivement subi, l'Espagne

a étéde nouveau citée devant la Cour sur la base de2 mêmesgraves
accusations, dont tous les Membres des Nations Unies ont été auto-
matiquement informés. Deuxièmement, son adversaire a eu la possi-
bilitéde réviser,à la lumière des arguments de l'Espagne, toute sa thèse
relative aux exceptions préliminaires ; il a effectivement cherché à modi-

fier ses moyens de défense en ce qui concerne l'une des exceptions.
Troisièmement, l'Espagne a dû supporter le lourd fardeau administratif
que constituait une seconde présentation de l'affaire devant la Cour.

La première exception doit donc êtreretenue. Cette exception préliminaire a trait à la compétence de la Cour.

La requête introductive d'instance soutient que le traité du 19 juil-
let 1927, entré en vigueur le 23 mai 1928, lie l'Espagne et la Belgique.

Il est prévuque ces Etats,aux termes de l'article 17de ce traité, peuvent
porter directement, par voie de requête, devant la Cour permanente
de Justice internationale, les litiges ou conflits au sujet desquels les
parties se contesteraient un droit. Ce traité étant en vigueur, selon

l'articl37 du Statut de la Cour internationale de Justice, c'est à celle-ci
qu'est transféréela juridiction prévueen faveur de la Cour permanente.
La Belgique et l'Espagne étant parties au Statut de la Cour inter-
nationale, celle-ci serait donc compétente pour connaître du présent

différend.

Dans ses conclusions, le Gouvernement espagnol énonce que le lien
de juridiction prévupar l'article 17porte sur la soumission des différends
non à la Cour internationale mais seulement à la Cour permanente.

L'admission de l'Espagne aux Nations Unies, en 1955, n'a pas eu pour
effet de substituer à la juridiction obligatoire de la Cour permanente
celle de la Cour internationale,car la Cour permanente fut dissoute avant
que l'Espagne eût étéadmise comme Membre des Nations Unies.

Cette situation n'est pas modifiéepar l'article 37 du Statut, lequel lie les
seuls Etats Membres des Nations Unies avant la dissolution de la
Cour permanente ».La Cour est donc incompétente.

Le Gouvernement belge soutient que l'interprétation de l'arrêt du
26 mai 1959 en l'affaire de l'Incident aérien(C.I.J. Recueil 1959 ,. 127)~

bien que valable et correcte pour l'article 36, paragraphe 5 l,n'est pas
applicable à l'interprétation de l'article 372. La jurisprudence de cet

1 Art.36, par. 5:
u 5. Les déclarations faiteen application de l'artic36 du Statut de la Cour
pumanenta de Justice internationalpour une durée qui n'est pas encore expirée
seront considérées,dans les rapports entre parties au présent Statut, comme
comportant acceptatien de la juridiction obligatoide la Cour internationale de
Justice pour la durée restanà courir d'après ces déclarations et conformémentà
leurs termes.#

Art. 37:
u.Lorsqu'un traité ou une convention en vigueur prévoit le renvoià une jun-
diction que devait instituerla Société des Nations ouà la Cour permanente de
Justice internationale,la Cour internationale de Justice constitueracette juri-
diction entre les parties au présent Statut.arrêta étéreprise dans l'affaire du TempledePréahVihéardu 26mai 1961
(C.I.J. Reczleilrg61, p. 17).
Dans l'arrêt sur l'Incident aérien la Cour n'a fait aucune mention
à l'article 37 pour ne pas préjuger en l'affaire de la première requête

de la Barcelona Traction alors en cours de procédure.
On doit alors établir les motifs qui rendent inapplicable cette juris-
prudence, dans le cas de l'article 37. A cette fin, on doit démontrer
que la question soulevée par l'article 36, paragraphe 5, est une autre
question que cellesoulevéepar l'article 37. En l'absence de cette démons-

tration, la jurisprudence de l'Incident aérienserait correcte, et la thèse
belge doit céder. Seulesnous intéressent les différences juridiques de ces
deux textes. Sont de moindre importance les différencesde faits entre
la présente affaire et celle de l'Incident aérien. Les dernières restent
sans incidences sur le problème juridique des deux textes.
Son argument central consiste à dire qu'il y a une différencejuridique

entre une déclaration faite en vertu de l'article 36, paragraphe 5, et une
déclaration de juridiction inséréedans un traité ou convention (art. 37).

La nature juridique de ces deux obligations et leur contenu sont
identiques. Ces actes ont pour objet de lier les Etats à la juridiction

de la Cour (mêmecontenu) et ils sont aussi des actes consensuels (même
nature). Ils peuvent êtresoumis à des délais ou ne pas l'être.La forme
de l'acte est unilatérale dans un cas, pour devenir ensuite comme dans
l'autre cas, bilatérale. Il est donc difficile de saisir l'existence d'une
différenceentre ces deux obligations, quant à la forme, la nature et le
contenu. Dans les deux cas la réalisation de la juridiction obligatoire

se fait par requêteunilatérale.

Il est exact que les déclarations étaient des actes unilat8raux, mais
parce que ces actes s'adressaient à d'autres Etats, qui avaient accepté
la mêmeobligation, ils donnaient naissance à des accords conventionnels

sur la juridiction, juridiquement équivalents à la clause de juridiction
inséréedans un traité ou convention. La Cour, dans l'affaire du Droit
de passage, a confirmécette manière de voir :

((Le rapport contractuel entre les parties et la juridiction obliga-
toire de la Cour qui en découle sont établis de plein droit et sans

convention spécialede la déclaration. ))

Ces déclarations ne pouvaient êtremodifiéessans le consentement des
parties, ni retirées sauf si ce droit avait été réservéexpressément. Elles
avaient la mêmevaleur et le mêmecontenu juridique qu'une disposition

d'un traité. C'est le point de vue du Gouvernement belge comme on peut
le voir par les réserves qu'il fit quand le Paraguay dénonça unilatérale-
ment sa déclaration d'acceptation de la clause facultative et quand
l'Afrique du Sud retira une partie de sa déclaration. La ratio legis, le but, de ces deux dispositions du Statut est le même,
le transfert dans l'immédiat à la Cour internationale des obligations
juridictionnelles formulées pou; la Cour permanente - dans l'hypo-
thèse que ces dernières doivent être «en vigueur )).

Les deux articles 36, paragraphe 5, et 37, ont étérédigés,discutés
et conclus, par la Commission IV et le Comité respectif en même
temps, comme traitant la mêmequestion juridique d'adaptation pour
la Cour internationale des déclarations de juridiction de la Cour

permanente.
Après avoir expliqué, sous les lettres a) et b) par quels procédésest
assuréela succession de la nouvelle Cour dans la compétence de la Cour
permanente, d'une part par l'article 36, paragraphe 4 (devenu plus tard
paragraphe 5), et d'autre part par l'article 37,le ComitéIV/I a souligné

la nécessitéde

((réglerde quelque manière les cas où compétenceavait été attribuée
à l'ancienne Cour pour connaître des différends s'élevant, soit

entre des Etats qui sont parties au nouveau Statut et d'autres
Etats, soit entre ces autres Etats 1).

Après avoir constaté qu'il est désirable que (des négociations soient

entreprises afin d'obtenir que ces acceptations s'appliquent à la nouvelle
Cour 11,le rapport précité arrive à la conclusion que cette question
« ne saurait êtreréglementéepar la Charte ni par le Statut »,mais que
l'Assembléegénéralepourrait ultérieurement se trouver en mesure de
faciliter des négociations utiles. Les termes employés (compétence

attribuée, acceptation de compétence)ne permettent aucun doute qu'ils
concernent les cas visésà l'article 37 et au paragraphe 5 de l'article 36.

Ces deux textes posent donc la même question :celle du transfert des

déclarations et clauses de juridiction d'une Cour àl'autre. Il s'ensuit donc
que l'interprétation d'un de ces textes doit êtreaussi valide pour l'inter-
prétation de l'autre. La Cour a dit dans l'affaire Nottebohm :((La même
question se pose actuellement devant la Cour : elle doit êtrerésolue

selon les mêmes principes. » (C.I.J. Recueil 1955, p. 22.)

Des clauses juridictionnelles mentionnées, l'une était incorporée au
Statut de la Cour permanente et l'autre à certaines dispositions de
traités ou conventions. Ces actes juridiques ont un but propre dans

l'instrument où ils sont insérés,et leur extinction peut être soumise
soit à un certain délai, soit à cne cause extérieure. Le délai écoulé,
l'obligation devient caduque, comme dans le cas que la cause extérieure
affecte l'objet mêmede l'obligation. Si l'obligation lie un Etat envers

la Cour permanente (déclarationou convention) l'objet poursuivi par cet
engagement devient de réalisation impossible, définitivement, au casoù l'organe Cour permanente a disparu. L'engagement devient caduc
et la caducitése produit àla date de la dissolution de la Cour permanente,
le 18 avril 1946, et pour les déclarations et pour les clauses con-
ventionnelles.

Pour que l'opération transfert d'une Cour à l'autre se réalise,de façon
valide dans l'immédiat, il est indispensable que les clauses juridiction-
nelles soient en vigueur pour les deux Etats à la date où les deux Etats
deviennent parties au Statut. Dans le cas présent, l'obligation du traité
hispano-belge était en vigueur pour la Belgique, quand elle est devenue
partie au Statut, mais cette obligation était caduque quand l'Espagne

le devint à son tour, en décembre 1955.

Le but de l'article 37, disposition transitoire, Êomme il a déjà été

indiqué,n'avait d'autre objet que d'empêcherdans l'immédiatla dispari-
tion des déclarations de juridiction contenues dans certains traités.
C'est aussi le but de l'article 36, paragraphe 5. Les deux dispositions
visaient les déclarations soit bilatérales, soit unilatérales. Les clauses
de juridiction incorporées à un traité ou convention étaient condamnées
à une caducité certaine le jour de la dissolution de la Cour permanente.
Le sauvetage de ces clauses pouvait uniquement comprendre celles en

vigueur intégrant un traité signépar les Etats parties au Statut avant la
dissolution de la Cour permanente. Les clauses non comprises dans cette
catégorie tomberaient irrémédiablement en caducité. C'est ce qui est
arrivé à l'article17,paragraphe 4, du traité, lors de la dissolution de la
Cour permanente. Pour que l'article 17 eût pu suMvre après la dissolu-
tion de la Cour permanente, l'Espagne aurait dû être partie au Statut
avant la dissolution de cette Cour.

Le dessein de l'article37 était de maintenir dans l'immédiat la juri-
diction consentie en transformant son objet. Il n'a aucunement eu pour
objet de faire revivre à travers le temps une obligation qui avait expiré
faute de substance et d'applicabilité, lors de la dissolution de la Cour
permanente. En conséquence,entre le 18 avril1946 et le14 décembre 1955,

on ne saurait prétendre que l'Espagne fût, du fait de l'article 37, liée
à la juridiction obligatoire dela Cour permanente, ni à celle de la Cour
internationale, l'Espagne n'étant pas partie au Statut à l'époquede la
novation de la clause de juridiction. L'engagement qui s'était éteint
ne pouvait renaître sur la base de l'article 37.

On n'a pas visétoute cette juridiction, comme il aurait étédésirable,

en principe, mais seulement celle qui n'est pas tombéeen caducité avant
la disparition de la Cour permanente. Les clauses juridictionnelles des
traités des Etats ennemis ou neutre n'ont pas étela prCoccupation de laconférence de San Francisco, comme on le verra plus avant. L'aspiration
de maintenir toute la juridiction consentie pour la Cour permanente n'a
pas étécontemplée par l'article 37.

Pour voir quelle est la portée de l'article 37, on doit examiner la
situation qui se serait crééesans son adoption. Il n'est pas douteux que
les dispositions des traités acceptant la juridiction de la Cour permanente
qui seraient en vigueur, seraient devenus caduques à la dissolution de la

Cour permanente. L'article 37 a voulu sauvegarder ces dispositions der
traités en vigueur pour les Etats parties au Statut avant cette dissolution.

L'article 37 voulait dans certaines linlites éviter un hiatus, une lacune,
entre les deux Cours et la continuité était obtenue en donnant valeur

pour la nouvelle Cour à quelques déclarations de juridiction annexées
à des traités et qui se référaientà la Cour permanente. Cette continuité
ne pouvait se produire qu'entre les Etats parties au Statut avant la
dissolution de la Cour permanente. L'article 17 du traité de 1927 ne ser-
vait pas à ce but, l'Espagne n'étant pas un de ces Etats.

Il est soutenu que si l'article 36,paragraphe 5, a un caractère transi-
toire, l'article 37 ne l'a pas ; on appuie cette interprétation sur l'article 37
du Statut de la Cour permanente.
On peut noter, en premier lieu, que l'article 37 du Statut de la Cour

permanente avait aussi un caractère transitoire. En effet, une fois
établie la Cour permanente, on devait décider que celle-ci était la juri-
diction dont faisaient état les traités de paix. L'objet de l'article 37
du Statut de la Cour permanente n'était pas, comme il est soutenu,
d'étendre le domaine de la compétence obligatoire mais d'identifier une

juridiction internationale. La compétence obligatoire ne se fondait pas
sur cet article, mais sur les traités qui l'avaient établie, et ne po~vait
se référerde manière expresse à la Cour qui n'avait pas encore étécréée.
Les traités avaient établi la compétence obligatoire de la Cour ((qui
devait se constituer )).Une fois son Statut constitué, il était nécessaire

de déterminerque celle-là, et non une autre,était la juridiction àlaquelle
les traités se référaient : l'article 37 du Statut de la Cour permanente
déterminait quel était l'organe auquel lesdits traités avaient concédéla
compétence obligatoire.
En second lieu, les conclusions à tirer de l'article 37 du Statut de la

Cour permanente ne sont pas applicables à l'article 37 de la Cour actuelle,
leurs objets étant différents. L'objet de l'article 37 de la Cour inter-
nationale c'est de transporter une juridiction pour éviter qu'elle soit
périmée.Au moment de la rédaction de l'actuel article 37, ses rédacteurs
n'étaient pas en présencede traités établissant la compétence obligatoire

d'une Cour non encore crééeet à s'établir. Pour les traités antérieurs
à la constitution de la Cour permanente, il était déjàdéterminé,en vertu
de l'article 37 du Statut dela Cour permanente, que celle-ci étaitl'organe
auquel la compétence avait été attribuée. Au contraire, dans les traités
comme celui de 1927, on attribuait une compétence à un organe juri-dictionnel parfaitement déterminé, la Cour permanente. Ce dont il
s'agissait, c'étaitautant que possible, de transférer dela Cour permanente

à la Cour internationale cette compétence obligatoire, conventionnelle-
ment créée ; il ne s'agissait pas, comme pour l'ancien article 37, de fixer
l'organe auquel la compétence avait étéattribuée par des accords qui
n'avaient pas pu le déterminer. On ne peut assimiler le cas de dissolution
d'une juridiction internationale avec le cas d'une juridiction non encore

constituée. Dans cette dernière situation, on peut considérer qu'il y a
une suspension de l'obligation de se soumettre à une instance judiciaire ;
dans l'autre cas, la juridiction existante s'est éteinteet il y a impossibilité
définitive pour que l'obligation puisse se remplir ; une Cour inexistante
n'a plus de juridiction.

Les deux articles du Statut s'appliquent à des situations analogues
et il est impossible de se prononcer sur l'article 37 en ignorant le débat
de 1959 sur l'articl36, paragraphe 5. On a établiprécédemmentqu'entre
le système de ces deux articles il n'y a pas des différencesfondamentales

telles qu'on puisse imaginer des solutions différentes dans chaque cas.
Ni dans l'arrêt de l'Incident aérien, ni dans l'opinion collective et les
opinions individuelles des juges, il est possible de trouver de raisons
ayant une portée juridique convaincante en faveur de la thèse d'une
distinction entre ces deux articles.

La Cour doit êtrerésoluedans l'interprétation de son Statut. Ou bien
on établit qu'il y a une différencejuridique ou bien on reconnaît qu'il
n'y en a pas.
La thèse du Gouvernement belge apparaît insuffisante sur divers
points.
On soutient que la situation du traité n'apparaît qu'au moment d'un

différend concret, en cas de déclaration d'acceptation de la juridiction
de la Cour. Mais c'est aussi vrai si on se place sur le terrain du traité
de 1927 qui ne contient qu'un engagement d'accepter la juridiction de
la Cour permanente le jour où il yaura un différend concret. C'est donc
une fausse différence : dans les deux cas il y a une obligation ferme de

juridiction et dans les deux cas il n'y a obligation ferme de juridiction
que vis-à-vis d'un mêmejuge, la Cour permanente. C'est une affirmation
sans base juridique, une pétition de principe, de dire que l'obligation
de juridiction ((subsiste puisque le traité reste en vigueur », mais que
le moyen seul (la Cour permanente) a disparu. Il ne suffit pas de le dire,

il faut le prouver, car le traité de 1927 n'a pas viséun recours ((au juge
international ))(art. 2,4 et 17) mais à la Cour permanente.

Si une obligation résultant d'une acceptation par déclaration unila-

térale a pris fin parce que la Cour permanente a disparu, parce queliéeau Statut de cette Cour, elle ne survit pas à celui-ci, l'obligation
résultant d'une clause qui ne vise que la Cour permanente disparaît avec
celle-ci et avec son Statut : de la mêmemanière.

Le traité de 1927 doit êtreinterprétéselon le sens qu'il avait en 1927,

dans le cadre international de 1927 et selon l'intention des parties
en 1927. Ce traité est marqué par son époque; s'il n'y avait pas eu la
Cour permanente il n'y aurait pas eu une référence quelconque à un juge
international, c'eût étéun traité de conciliation et d'arbitrage pur
et simple. C'est cequ'il est devenu le 18 avril 1946. On oublie trop facile-
ment que le traité de 1927 se place cinq ans seulement après l'institution

du premier tribunal international permanent et que les traités qui s'y
rCfèrent ne pouvaient envisager que ce qui existait et depuis peu.

On aboutit àcette analyse par l'application de deux règlesélémentaires

de droit international, l'interprétation des textes clairs et l'interpréta-
tion ((historique )des traités selon le sens qu'ils avaient au moment de
leurs conclusions (affaire relative aux Droits des ressortissantsdesEtats-
Unis d'Amériqueau Maroc, C.I.J. Recueil 1952, p. 188-189).

Il est soutenu que les dispositions de la Charte et celles du Statut

forment un tout impératif pour les Etats Membres des Nations Unies.
Cette manière de voir n'est pas absolument exacte ; elle souffre des
dérogations par rapport à certaines de ses dispositions qui ne sont pas
impératives, ne s'appliquant pas à tous les Membres des Nations Unies.
Il en est ainsi du paragraphe 5 de l'articl36 et de l'article37 du Statut.

La nature juridique particulière de ces deux dispositions ressort de

leur texte même.D'abord elles visent des situations toutes spéciales
et dgterminées, les clauses de juridiction existantes ou en vigueur
rattachées à la Cour permanente et ces dispositions ne s'appliquent qu'à
certains Etats déterminés.Ainsi, l'article 36, paragraphe 5, n'intéresse
que les Etats qui ont fait des déclarations en vigueur et l'article 37

n'intéresseaue les Etats dont les clauses des traités ou conventions sont
encore en vigueur - dans un cas et dans l'autre au moment où ils
deviennent parties au Statut. Cet examen démontre que ces deiix
dispositions n'intéressent que certains Etats, ceux qui ont adhéréà la
juridiction de la Cour, et non pas tous les Etats Membres des Nations
Unies.

Ces deux dispositions sont transitoires et leur application doit pro-
chainement s'éteindre. L'article 36, paragraphe 5, tel que la Cour l'a
interprété,ne peut plus recevoir d'application. Il en sera de mêmedans
l'avenir de l'article37.
Dans une composition plus technique du Statut, ces deux dispositions
auraient dû être insérCesà la fin de celui-ci, sous la rubrique (Disposi-

tions transitoires ». Sans doute, cette méthode n'a pas été adoptéepour conserver la même numération des articles dans les deux Statuts;
lesdispositions transitoires mentionnéesfurent inséréesoù ellesn'allaient
pas opérer des changements de numération.
D'autre part, il faut considérerles effets de la dissolution de la Cour
permanente sur le traité de 1927et sur sa clause juridictionnelle.

La soumission au règlement judiciaire que prévoit le traité de 1927
est concrètement à la Cour permanente - déterminée spécifiquement
et non par référence à une instance internationale génériqueet
indéterminée.
La Cour permanente fut dissoute, définitivement, et la Cour inter-
nationale de Justice est une autre Cour - différente - comme le
démontrent les travaux préparatoires de celle-ci.
Etant admis ces affirmations, il est évident qu'apparaît l'impossibilité
de soumettre à la Cour permanente les différends à surgir entre les
parties, après la dissolution définitive de cette Cour.
C'est précisément en raisonde la disparition de la Cour permanente
et la création d'une nouvelle Cour, qu'il a éténecessaire de rédiger les
conditions de l'articleduStatut actuel pour transférer, dans la mesure
du possible, les compétences attribuées à la Cour qu'on était décidé

à dissoudre.
A la lumièrede ces considérations,tenant compte du principe général
que la juridiction de la Cour ne se présumepas et qu'elle se fonde sur
le consentement des Etats, une interprétation extensive de l'article 37
aurait comme conséquenceune interprétation également extensive du
traitéde 1927,par laquelle une obligation juridictionnelle spécifiquement
déterminée à la Cour permanente se transporterait à une autre Cour,
quand cette obligation n'avait plus d'existence juridique, et l'article7
ne pouvait plus jouer.

La tâche de la Cour a porté essentiellement sur l'interprétation de
l'article37. Cette disposition exige, pour que le transfert de juridiction
d'me Cour. à l'autre prenne effet, deux conditions:

I. Que 1'Etat de qui émane la clause de juridiction incorporée au
'traité,soit partie auStatut et

2. Que cette clause soit en vigueur.

Ces deux conditions qui ressortent clairement de Ilarticle 37 doivent
êtrerempliesconjointement. Chacuned'elles doit êtreremplie au moment
où l'autre se trouve remplie. Si l'une faitefaut, l'article 37 nlopBrepas
le transfert de juridiction.l faut toujours examiner les deux conditions
de l'article37 par rapport à la mêmedate critique. Ce serait une viola-tion du principe de la bonne foi si l'on voulait juger la condition de vali-
ditéde l'article37 par rapport à la date d'entréeen vigueur de la Charte
et la seconde par rapport à la date de l'admission de 1'Etat aux Nations

Unies. Une telle interprétation serait du reste contraire au texte de
l'articl37.

Or, quand l'Espagne fut admise comme Membre des Nations Unies,
en décembre 1955, la clause de juridiction du traité de1927 n'était plus

en vigueur, du fait de la dissolution de la Cour permanente, le avril1946.
A cette date il n'y avait pas de traité avec une clause de juridiction
en vigueur. La seconde condition vient à manquer; en conséquence,
la situation prévue par l'article 37 reste inapplicable dans notre cas.

L'acceptation que cette clause énonçait de la juridiction de la Cour
permanente était désormais sans objet puisque cette Cour n'existait
plus comme moyen pour l'exercer. Le support juridique que cette
acceptation trouvait dans l'article36, paragraphe 1,du Statut de la
Cour permanente avait cesséd'exister par suite de la disparition de ce

Statut. Ainsi l'article17, paragraphe 4, du traité de 1927 était devenu
caduc et n'était plus en vigueur. Voici le texte de cette disposition :

« Si le compromis n'est pas arrêtédans les trois mois à compter
du jour où l'une des Parties aura étésaisie aux fins de règlement
judiciaire, chaque Partie pourra, après préavis d'un mois, porter

directement, par voie de requête, la contestation devant la Cour
permanente de Justice internationale. ))

La dissolution de la Cour permanente a détruit cette clause de
juridiction et son attribution à cette Cour déterminée.

L'Espagne n'a donné son consentement qu'à cette Cour.
Le traité continue à être en vigueur à l'égard des autres moyens
prévus pour le règlement des différends (conciliation et arbitrage), mais
pour le moyen de règlement judiciaire rattaché à la Cour permanente
il a entièrement disparu par ;'effet de la disparition de cette Cour.

Toutes les dispositions du traité se référant à la Cour permanente
avaient perdu toute validité y inclus les articles I et 2. Le véritable
intérêtdu traité résidedans tous les moyens de règlement qu'il a prévus
et non exclusivement dans le règlement judiciaire (Cour permanente).

L'admission de l'Espagne aux Nations Unies a eu pour effet de la
considkrer comme adhérant au Statut de la Cour (art. 93, alinéa I~',
de la Charte). L'Espagne est ainsi investie d'une certaine capacité
prockdurale envers la Cour, mais cette situation n'est pas suffisante
pour déterminer la juridiction de la Cour envers cet Etat ; elle crée
seulement une situation préliminaire pour l'établissement de cettejuridiction. La source de la compétence de la Cour réside dans les
déclarations des Etats (art. 36, par. I et z), et exce~tionnellementdans
l'article36, paragraphe 5, et l'articl37 du Statut.

La demande d'admission d'un Etat aux Nations Unies a comme
conséquence immédiate de le rendre partie au Statut de la Cour. Cette
admission ne signifie pas une acceptation quelconque de la juridiction

de la Cour. Or c'est ce qu'on attribue à l'Espagne du fait de cette admis-
sion par application de l'article 37, interprétation insoutenable, comme
il ressort des précédentes considérations.

L'obligation de règlement judiciaire que prévoit l'article 2 du traité
de 1927 pour certains différendsse rapporte «soit à un tribunal arbitral,

soit à la Cour permanente de Justice internationale ». Cette obligation
si elle est généralequant à un tribunal arbitral (elle ne se réfèrepas
àla Cour permanente d'arbitrage par exemple) elle est particulière quant
à la Cour permanente, qu'elle indique spécifiquement. Cette dernière
Cour est dans le traité de 1927 et l'objetet le moyen, de cette obligation ;
on a eu la volonté d'accepter ce moyen de règlement, mais seulement

parce qu'il s'attachait indissolublement à la Cour permanente, et non
à une autre Cour quelconque. La juridiction et son attribution sont
inséparables de la Cour permanente.

Il y a accord entre les Parties pour accepter que selon l'article 37
la disposition relative à la juridiction devait êtreen vigueur au moment
de l'entrée de l'Espagne aux Nations Unies et naturellemeiit, aussi
au moment de la requête introductive d'instance.
Il est soutenu que le traité de 1927 doit êtreconsidérécomme en
vigueur. Ce traité se renouvelle par périodes de dix années à partir
de sa ratification, à défaut de dénonciation par l'une des parties. Cette

situation serait celle de l'Espagne au moment où elle est devenue
partie au Statut. Ce renouvellement chaque dix années doit s'entendre
cependant comme un renouvellement des dispositions du traité en
vigueur. On ne peut renouveler ce qui est devenu caduc.
Si le traité d1927 reste en vigueur dans quelques-unes de ces disposi-
tions, il faut bien arriverà la conclusion que l'article17, paragraphe 4,

dans sa partie établissant la juridiction de la Cour permanente avait
perdu force de droit du fait de la dissolution de cette Cour le
18 avril 1946.Cette disposition n'était plus en vigueur en décembre 1955.
La clause de juridiction est détachable des autres articles du traité.
Le renvoi mentionné à l'article 37 se réfèreaux normes attributives
de compétence de la Cour permanente. Ces normes sont l'objet spécifique

du renvoi ; il n'ya pas un renvoi aux autres dispositions du traité. C'est
ce qui ressort aussi de l'articl35, paragraphe 2, du Statut qui se réfèreaux ((dispositions particulières des traités en vigueur ))dans un sens
Ctroit.

A propos de l'article 37, le rapport du ComitéIV/I de la conférence
de San Francisco, dit :

((a) il est stipulé à l'article 37 du projet du Statut que seront
considéréesentréMembres de l'organisation, comme s'appliquant

à la Cour nouvelle, les dispositions des traités ou conventions
en vigueur qui prévoient le renvoi des différends à l'ancienne
Cour )).(Documents de la Conférence, vol. 13, p. 419.)

Le renvoi est donc simplement à une clause de juridiction en vigueur.
C'est le renvoi qui doit êtreen vigueur, comme cela ressort aisément
de la lettre de l'article37.

Un traité peut devenir partiellement caduc avant même l'échéance

du terme pour lequel il est conclu. Il en est de mêmepour certains actes
juridiques, lois et règlements, qui peuvent aussi être partiellement
caducs. Il est nécessaire de distinguer dans une obligation internationale
la caducité résultant de l'échéancedu terme prévu, de la caducité
résultant d'un autre fait comportant aussi caducité, comme la dissolution

de la Cour permanente. Cette dissolution a assorti à son tour d'un délai
la validité de la disposition juridictionnelle du traité. L'article 17,
paragraphe 4, du traité est arrivé à son terme le 18 avril 1946. Cette
clause ne pouvait devenir valide au moment où le Statut est entré en
vigueur pour l'Espagne, en décembre 1955.

La divisibilité des obligations internationales en règlesvalables et non
valables est admise par la jurisprudence de la Cour permanente. Un
exemple nous est donné dans l'examen par cette Cour du compromis
en l'affaire des Zones franches. Alors fut admis le principe vitiatur

et non vitiat. En effet, le compromis dans certaines de ses clauses était
en contradiction avec le Statut et la Cour décidaque le compromis était
valable mais étaient nulles des stipulations contraires au Statut. La
Cour n'a pas tenu compte de l'alinéa 2 de l'article I du compromis
(C.P. J.I.sérieC no 17-1, vol.II, p. 492).

La Cour permanente s'est refusée de considérer que les dispositions
particulières d'un traité comme indivisibles et indissolublement liées.

En l'affaire des Zonesfranches (C.P. J.I.sérieA/B no 46, p. 140),cette Cour
a admis que l'article 435 du traité de Versailles était« un tout » séparable
du reste du traité. Il en est de mêmedans les avis consultatifs sur laComflétencd eel'O.I.T. (C.P.J.I. sérieBno 2,p. 23-2 et C.P.J.I .érieB
no 13,p. 18) sur l'indépendance dela partie XII1 du traité.

L'idéede l'intégritéd'une onvention tient son origine d'une notion
du droit privé. Dans l'avis de la Cour sur les Réserves,ette notion de
l'absolue intégrité des conventions fut rejetée comme n'étant pas
suffisamment consolidée comme règle de droit international (C.I.J.
Recueil 1951, p. 24 et 2j). L'avis de la Cour en l'affaire des Réserves
à la conventionsur le génocidemontre certaines limites à la notion

d'indivisibilité d'un traité par rapport aux dispositions qui ne sont pas
essentielles au traité dans son ensemble.Il est légitime de séparer un
article devenu caduc des autres dispositions du traité qui continuent
à êtreen vigueur, et qui permettent que ces dispositions puissent s'appli-
quer, indépendamment de la disposition tombée en caducité.

Le droit international peut viser certaines modalités d'impossibilité
d'exécutiond'un engagement international ;cette impossibilitépeut être
permanente. Dans notre cas, les clauses de juridiction du traité d1927
ont disparu de façon permanente àla date dela dissolution de la Cour
permanente : ce fait devait mettre fià l'obligation de recourirà cette
juridiction. On est en présenced'une impossibilitépermanente d'exécu-
tion d'une obligation internationale - laquelle avait disparu avec la
Cour permanente.
Sur le plan du droit international général,l'article7, paragraphe 4,
du traité de 1927 ,urait étéen somme effacédu traité jusqu'en 1955,
et ceci dans l'hypothèse où l'on admet que la Cour permanente n'a pas
définitivement disparu en avril1946 ,e qui déformela position relative
des deux Cours. Lorsqu'on parle, en effet, de la continuitk des deux

Cours c'est une formule descriptive d'intentions de politique générale
et non pas une affirmation de succession juridique.
Le défaut de la thèse belge dans sa présentation des règles de droit
international sur la suspension est qu'elle suppose le problème de base
résolu :la Cour permanente a disparu :pourquoi l'obligation exprimée
dans le traité qui est l'obligation de recourià la Cour permanente ne
serait-elle que suspendue? Cette thèse présume,affirme mais ne prouve
pas le phénomène original : la suspension dans le cas d'espèce, alors que
la suspension n'existe pasdans lecas de disparitionpermanente de l'objet.

Pour qu'il y ait suspension, il faudrait, en effet, établir qu'il y avait
dans le traité de1927 et dans les intentions des auteurs deux catégories
d'obligations:

- une obligation de fond : obligation de recourir au juge inter-
national ; - une obligation de moyen : le choix, parmi les juges, de la Cour
permanente.

Cette analyse a un caractère artificiel. En 1927, les parties n'ont
décidéqu'une chose : le recours à la Cour permanente ; c'est une vue
théorique et à posteriori des faits que de trouver aujourd'hui dans le
traité cette division en deux obligations dont l'une, celle d'accepter
un juge international quelconque, aurait étésuspendue.

Ceci paraît de nature à faire rejeter l'argumentation belge tout au
moins en ce qui concerne le phénomène de la (suspension ))en dehors
des effets propres de l'article 37.
On doit remarquer que les positions du Gouvernement belge sur
l'article 17 du traité de 1927 lui sont nécessaires pour soutenir la thèse

suivante afin de différencier les articles 36, paragraphe 5, et 37 :
l'article 36, paragraphe 5, concerne non seulement la juridiction qui
reçoit compétence, mais aussi l'obligation de juridiction sur la base du
traité préexistant, le Statut ; au contraire, l'article37 ne fait qu'uassurer
effectivement l'exécution des engagements d'un traité )I.

Donc ici encore on présume que le traité est resté en vigueur en ce
qui coilcerne une obligation générale de juridiction dans le vague,
sans référence à un tribunal déterminé.Si l'on n'admet pas l'existence
d'une obligation de cette nature dans le traité de 1927, l'argument

belge tombe aussi bien pour le traité de 1927 que pour l'article 37
puisque tout est fondé sur l'invention à posteriori d'un engagement
général dejuridiction dans le traité de 1927, lequel n'existe pas.

L'article 37 du Statut qui créeun régime très spécial doit recevoir
i?ne interprétation restrictive pour deux raisons :

I. Il constitue une exception à la modalité d'acceptation de la juri-
diction de la Cour ; c'est une disposition dérogatoire au droit commun
en cette matière. Toute règle exceptionnelle de droit doit recevoir une
interprétation restrictive. Le consentement normal à la juridiction
de la Cour ne peut êtredonnéque par la clause d'un traité, paragraphe I~~

de l'article36, du Statut, ou par une déclaration, paragraphe 2, du même
article. L'article37 établit une juridiction par novation d'une clause de
juridiction. La juridiction de la Cour est facultative, c'est un principe
du Statut ; l'article37 apporte une exception à cette règle en prévoyant
un cas de juridiction automatique et compulsive.

2. L'article 37 est une fiction légale, solution empirique et plus ou

moins arbitraire. Il transfère à la Cour internationale une acceptationde juridiction en vigueur de la Cour permanente. Ce procédé artificiel
de l'expression du droit comporte une interprétation limitative de
l'article en question. La Cour permanente a dit qu'elle «ne conteste

pas le principe d'aprèslequel tout compromis de mêmeque toute clause
prCvoyant la juridiction de la Cour doit être interprétérestrictivement ))
(sérieAIB no 46, p. 138). Il en doit êtreainsi à fortiori lorsqu'il s'agit
d'un régimed'acceptation de la juridiction aussi exceptionnel que celui
de l'article37 du Statut.
L'article 37 a voulu que la clause juridictionnelle en vigueur des
traités et conventions soit considCréeentre parties au Statut comme
une acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour internationale.
Si l'Etat Ctait partieà ce Statut au moment de la dissolution de la Cour
permanente, il a donné un consentement exprès et volontaire au trans-
fertde la Cour ancienne à la nouvelle Cour. Si 1'Etat n'était pas partie

au Statut à ce moment, comme l'Espagne, selon une certaine inter-
prétation, il aurait donné à la nouvelle juridiction un consentement non
déclaréet non volontaire. Cette interprétation considère deux espèces
de consentements, selon que 1'Etat est partie au Statut avant ou après
la dissolution de la Cour permanente. L'article 37 viendrait à établir,
automatiquement, la juridiction de la nouvelle Cour, pour les Etats
parties au Statut après cette dissolution.

Une telle interprhtation traduirait un consentement non déclaré,
un consentement automatique, comme émanant de l'article en question ;
un consentement donné à titre généralet anticipé. Un consentement

ainsi prêtén'est pas la modalitéde consentement que le Statut demande
aux Etats en cas d'acceptation de la juridiction de la Cour. Une mani-
festation aussi exceptionnelle que la prestation de ce consentement
aurait dû figurer clairement dans le texte de l'article 37. Or, il n'en est
pas ainsi. Entre deux interprétations de l'article 37, l'une qui suit le
principe du consentement facultatif, et l'autre qui suit l'idée d'un
prétendu consentement automatique, on doit opter pour la première
interprétation. Toute interprétation extensive est donc inadmissible.
Il serait surprenant que l'article 37 ait établiune juridiction compul-
sive pour une certaine catCgorie d'Etats quand la conférence de San
Francisco a répudiéle principe de la juridiction compulsive pour tous

les Etats.
La juridiction de la Cour se fonde sur le consentement exprès des
Etats, ainsi aucun doute ne pourra êtresoulevésur l'exécutionde l'arrêt
qu'elle va prononcer. Touteinterprétation des textes relatifs à l'accepta-
tion de la juridiction doit s'Cloigner de tout raisonnement ambigu ;
c'est un principe essentiel que la juridiction doit êtreCtablie par des
manifestations claires des Etats. Vouloir forcer les textes se rapportant
à la juridiction de la Cour c'est s'exposeà des conséquencesqui peuvent
affecter son autorité et son prestige. L'arrêtde l'Incident aérienest une
bonne démonstration que la Cour doit utiliser la faculté discrktionnaire
du paragraphe 6 de l'artic1.e36 de son Statut, avec la plus grande pru-dence. S'il y a défaut de compétence on est en présence d'un excès
de pouvoir. Un changement de jurisprudence porté sur une question
de compétence doit êtretrès solidement fondé ; il a intérêtà maintenir

certaine jurisprudence afin de donner une ferme sécuritéaux textes
interprétés. Le fait que le rôle de la Cour est plutôt mince ne peut
justifier un élargissement de sa compétence.

La source de la juridiction de la Cour dérivéede l'article 37 doit
dépendre de la volonté des parties et n'existe que dans la mesure où
elle a étéadmise.
Le transfert à la Cour internationale de Justice de la juridiction

qu'une disposition d'un traité prévoyait en faveur de la Cour permanente
de Justice internationale ne pouvait se faire sans le consentement des
Etats parties à ce traité. Un principe bien établi de droit international
veut que seules les parties à un traité peuvent modifier ses dispositions.

La conférencede San Francisco, en adoptant l'article 37 qui dispose

le renvoi de la juridiction d'une Cour à une autre n'a pu se substituer
au consentement des Etats qui n'étaient pas présents et n'ont pas parti-
cipé à ladite conférence. Comme l'Espagne ne participait pas à cette
conférence, l'article17, paragraphe 4,ne peut lui êtreapplicable. Les
Etats présents à San Francisco n'ont pu modifier un traité signé par
l'Espagne sans son consentement. Toute modification, décidéepar les

Etats de la conférence, des clauses de juridiction incorporées aux dispo-
sitions du traité de 1927 demeurait sans effet par rapport à l'Espagne
à défaut d'acceptation par elle de ces modifications, et elle n'a pas
donnéson acceptation.

D'autre part, à l'occasion de cette conférence, l'Espagne ne fut pas

invitée à y participer ; elle n'était paspersona grata (résolution 39 1),
du 12 décembre 1946, de l'Assembléegénérale). Elleétait étrangère et
exclue aux négociations de San Francisco et le Statut entré en vigueur
le 24 octobre 1945 était toujolirs pour elleres inter alios actaLa confé-
rence avait éliminéde ses réunions les Etats ex-ennemis ou neutres. Il
est évident que les Etats réunisà cette conférencene se sont pas occupés

des clauses de juridiction contenues dans des traités des Etats ex-ennemis
ou neutres pour leur imposer l'obligation d'accepter que certaines
clauses de juridiction soient applicables à la nouvelle Cour pour le cas
où éventuellement ils deviendraient Membres des Nations Unies. Une
telle interprétation n'est pas raisonnable. Les Etats à la conférence, en
créant le traité international qu'est la Charte et le Statut, n'ont pu

établir par une de leurs dispositions des obligations à la charge des
Etats tiers. De telles dispositions ne se présument pas. L'article7 opère
une novation et comme telle elle ne se présume pas ; pour que la nova-tion se produise il est indispensable que la partie exprime formellement
et volontairement son intention de nover. L'Espagne, absente au mo-
ment où l'article 37a été rédigé et accepté,n'a paseu l'occasiondemani-
fester cette intention.

Le rapport du 22 mai 1945 du sous-comitéIV/I/A sur la question du
maintien de la Cour internationale de Justice et sur les problèmesqui
s'y rapportent, entre autres considérations, exprimait in fine de la

lettre d) :
« Dans le cas des Etats ennemis, il sera possibled'incorporer dans
les conditions de paix une clause mettant un terme à leur droit

d'êtreparties au Statut ;dans le cas des autres Etats il sera impos-
sible de procéder decette façon à moins qu'ils nel'admettent. ))

Et la lettre e) ajoutait:

« Il découlede cette conclusion que, tout au moins dans les cas
de certains Etats neutres, l'exclusion de toute participation au
Statut de la Cour qu'énoncele chapitre VII, paragraphe 5, du
projet de la Charte, ne pourrait pas s'effectuer sans une certaine
infraction aux règlesreconnuesdu droit international. 1(U.N.C.I.O.,
vol. 13,p. 530.)

Les antécédents démontrent qu'àla conférencede San Francisco on
envisageait des mesures d'exclusion pour lesEtats ennemis ou certains
Etats neutres, du Statut de la Cour. C'étaitla situation de l'Espagne.

Le sous-comité indiquén'avait donc pas la préoccupationde maintenir
des clauses juridictionnelles inséréesdans les dCclarationsou traités de
ces Etats.
Lorsqu'un Etat - comme l'Espagne - est resté pendant plusieurs
annéesétrangerau Statut, et aussi par décisionde lJAssemblCegénérale
(décisiondu 12 décembre1946) on ne peut prCtendre que cet Etat, du
fait de sa demande d'admission aux Nations Unies, a reconnu la juri-
diction de la Cour internationale de Justice. Un consentement simple-
ment présuméest insuffisant (C.I.J. Recueil I959p ,. 142).

Sans doute, les Etats réunis à la conférencede San Francisco, connais-
sant leurs obligations internationales en matière d'acceptation dela juri-
diction de la Cour permanente, soit par la clause facultative, soit par
disposition d'un traité, ont pu prendre légitimementla charge de les
transférer à la nouvelle Cour. Ces Etats avaient le pouvoir de le faire,
ce pouvoir ne pouvait êtreinvoqué envers desEtats qui, ultérieurement,
viendraient 'àêtreadmis comme Membresdes Nations Unies sur la base
de l'article4 de la Charte. Admettre un tel pouvoir envers les Etats non présents conduirait tout
simplement à les soumettre à un principe que la conférencea fermement
rejeté, celui de conférer à la nouvelle Cour une juridiction obligatoire à

tous égards. Les nouveaux Membres des Kations Unies auraient dû
admettre une telle juridiction imposée par les Etats réunis à San Fran-
cisco, s'ils se trouvaient liéspar des traités en vigueur renvoyant à la
juridiction de la Cour permanente. La jurisprudence de cette Cour et de
la Cour internationale a toujours maintenu qu'elle n'a compétence envers
un Etat que s'il a donné un consentement volontaire et non équivoque.

La juridiction de la Cour se fonde sur le consentement des Etats. La

Cour internationale a dit, dans l'affaire de 1'Ov inonétaire ,u'elle doit se
garder ((d'agir à l'encontre d'un principe de droit international bien
établiet incorporédans le Statut, à savoir que la Cour ne peut exercer sa
juridiction à l'égard d'un Etat si ce n'est avec le consentement de ce
dernier 1).

Selon certaine thèse, il doit s'entendre que ce consentement a été
donné par l'Espagne lors de son incorporation aux Nations Unies. Les
Etats réunis à San Francisco ne pouvaient pas, sans l'intervention de
l'Espagne, l'engager dans une obligation comportant l'acceptation d'une
nouvelle juridiction, celle de la Cour internationale. Ils n'avaient pas le
pouvoir d'imposer à l'Espagne, comme une condition supplémentaire

pour devenir Membre des Nations Unies, celle d'accepter une compé-
tence déterminéede la Cour internationale. L'admettre porterait viola-
tion du principe d'égalitéde droit des Etats ; les conditions d'admissi-
bilité, comme Membre des Nations Unies, n'ont pas prévu que certains
Etats devraient, pour y êtreadmis, consentir à des obligations d'ordre
juridictionnel non exigéespour d'autres Etats.

L'Espagne, en devenant Membre des Nations Unies, n'a pu êtrecon-
trainte d'accepter la juridiction de la Cour internationale pour certaines
affaires ; cette juridiction se caractérise comme étant particulière et
volontaire et non généraleet obligatoire. La juridiction de la Cour doit

s'établir par un texte clair, qui ne se prête pas à l'interprétation, afin
qu'elle.ne puisse surgir par surprise. Il n'y a pas de juridiction compul-
sive de la Cour. Si un doute raisonnable peut exister sur l'interprétation
de l'article 37, son application doit être aussi'faite raisonnablement.
Une interprétation restrictive doit s'imposer.
Ilest soutenu que le Gouvernement espagnol lors de son admission

comme Membre des Nations Unies, en décembre 1955, aurait ratifié
l'article37 du Statut et de ce fait accepté le transfert de juridiction.
Cet article 37 serait une clause d'accession ou d'adhésion, une offre
adressée aux Etats autres que ceux réunis à San Francisco. La Cour internationale, en l'affaire de l'Incident aérien,a réponàucette thèse.
Cesmêmesconsidérations sont pertinentes pour l'article 37.
Au moment où l'Espagne est devenue Membre desNations Unies, son
acceptation de la juridiction de la Cour permanente en vertu de l'article
17,paragraphe 4,du traité de 1927,était devenue caduque à partir de la
date de la dissolution de cette Cour. L'article 37 ne fait pas renaître une

obligation qui n'avait plus d'effet juridique, cette disposition ne pouvait
viser l'Espagne, àla date de son admission aux Nations Unies ;il ressort
donc que l'acceptation que l'Espagne afaite de cette disposition ne consti-
tue pas un consentement donné à la juridiction de la Courinternationale
de Justice (C.I.J. Recueil 1959p,. 145) E.t les manifestations attribuées
postérieurement à l'Espagne d'une telle acceptation ne sont pas fondées.
Il est soutenu que l'article 37 considère uniquement la validité des
clauses juridictionnelles dans le temps,à la duréerestant à courir dans
le cadre des traités dont elles font partie. Tant que l'échéancedu terme
prévupar le traité n'est pas épuisée,ces clausesjuridictionnelles seraient
en vigueur, mais non applicables par disparition du champ d'application
auquel ces clauses se réfèrent. Il y aurait suspension de ces clauses
d'acceptation de la compétencede la Cour jusqu'au moment où les deux
Etatç signataires du traité deviennent parties au Statut.

Cette manière de voir présente certaines difficultés.
D'abord, elle laisse de côté l'argumentation très forte de l'arrêtde
l'Incident aériezz,lorsqu'il admet la caducité de ces clauses juridiction-
nelles par manque du support juridique qu'elles trouvaient dans le
Statut de la Cour permanente, lequel avait cesséd'exister par suite de
sa disparition. L'extinction de ces obligations internationales peut se
rapporter aux délais pour lesquels elles ont étéconclues, mais d'autres
causes peuvent les faire tomber avant l'échéance deces délzis.

Il n'est rieà l'article 37 qui suggère que l'article 17, paragraphe 4,
continuerait à pouvoir êtreravivé après l'expiration du Statut de la
Cour permanente. Pour crCer cet effet, l'artic37 aurait dû être rédigé

différemment. Il aurait été au moins nécessaire qu'il énonçât que les
dispositions de traités acceptant la juridiction de la Cour permanente
devraient être considérées,dans les rapports entre Etats parties au
présent Statut ou pouvant à un moment quelconque devenir parties au
Statut, comme comportant acceptation de la juridiction obligatoire de
la Cour internationale. L'article 37 ne dit rien de pareil et laisse de côté
l'article 17, paragraphe 4, insérédans un trai.téd'un Etat non encore
devenu partie au Statut.

D'autre part, cette théorie de la suspension des clauses convention-
nelles d'acceptation de la juridiction de la Cour crée une situation déli-
cate quant à sa duréeet ses effets. BARCELONA TRACTION (OP. DISS. ARMAND-UGON)
=Y
Pour que les effets de cette suspension prennent fin, un événement
extérieur à la volonté des contractants doit se produire, l'admission d'un
Etat déterminéaux Nations Unies. Si la prolongation de cette admission

s'étend dans le temps de façon démesurée,une telle interprétation peut
conduire à des résultats déraisonnables, qui doivent s'examiner avec la
plus grande prudence. Quand une telle suspension cesse-t-elle d'être
raisonnable ? La difficultéréside dans la recherche d'unités de mesure.
Quelle est l'unité du raisonnable ? A quelles valeurs de comparaison ou
d'appréciation doit-on recourir ? La frontière entre le raisonnable et le

non-raisonnable reste toujours arbitraire, pour la raison qu'entre une
situation et l'autre il n'y a pas de brusque transition.

Si la suspension commence à partir de la date où la Charte est entrée
en vigueur, l'Espagne serait restée plus de dix années étrangère au
Statut. Après ce délai, la clause en suspension peut-elle encore avoir des

effets?
Une telle interprétation présente des aspects artificiels, donne prise à
des concluçions et applicationsarbitraires,qui risquent de compromettre
des principes jusqu'ici acceptés en matière de consentement de l'accep-
tation de la juridiction de la Cour. Si une autre interprétation de l'ar-
ticle37 n'offre pas les inconvénients qu'on vient de signaler, elle doit

étre préférée. *
* *

Est-il admissible juridiquement que les clauses de juridiction des
traités ou convention5 aient, à l'égard desEtats non parties au Statut,
une validité potentielle en vertu de l'article37,soit à partir de l'entrée

en vigueur de la Charte, soità partir de la dissolution de la Cour penna-
nente ? Rien ne vient soutenir cette proposition, ni dans le trxte de cet
article, ni dans les travaux préparatoires, ni dans le cadre d'une inter-
prétation de cette disposition. A cette conception de la validité poten-
tielle de la clause s'ajouterait l'idCe de sa suspension dans l'attente
qu'un Etat soit admis aux Nations Unies, tout en acceptant que cette

suspension prolongéedémesurémentpourrait la rendre caduque.

Il faut examiner la thèse selon laquelle l'articl37 du Statut pourrait

avoir un effet propre pour faire revivre l'article 17 du trait6 de 1927.
Cet article, qui n'avaitcrééqu'une obligation de juridiction vis-à-vis de
la Cour permanente, peut-il ccreprendre » effet grâce à l'article37 du
Statut ?
Tout le problème est centré sur le texte de cet article : ou bien il a
crééune ccsuspension »spéciale,échappant aux règles généralesdu droit

international, une (mise en sommeil »,une «paralysation r provisoire du
moyen de juridiction, même vis-à-vis des Etats non encore parties au Statut avec ((remise en vigueur x par leur adhésion audit Statut ; ou
bien l'article37 n'a pas créécet effet.
Comme il s'agit de l'interprétation du Statut, on n'est pas obligéde

tenir compte de la présentation des arguments des Parties et on doit
procéder à la recherche de la solution par une démarche propre.
Mêmesi l'on admettait la thèse que l'article 37 a voulu étendre ses
effetsà toutes les parties au Statut, quelle que soit la date de leur adhé-
sion, le problème juridique n'est pas pour autant résolucar la question

est de savoir si le Statut pouvait créeren droit international cette obli-
gation nouvelle de ((remise en vigueur » de dispositions caduques par
disparition permanente de l'objet de l'obligation.

On n'avance rien en disant que cette paralysie est le seul but de l'ar-
ticle37 et qu'il n'a que ce but. Une telle affirmation implique qu'une

obligation a pu êtrecréée vis-à-vis d'Etats tiers, pour imposer avant
qu'ils n'aient adhéréau Statut une ((mise en sommeil » d'une clause
'd'un traité bilatéral; ce n'est pas la preuve contraire qui est nécessaire
mais une preuve positive que le Statut pouvait, juridiquement, établir
un tel effet.
Il est exact que tout Etat adhérant au Statut l'accepte tel quel, mais

en décembre 1955, lorsque l'Espagne a adhéréau Statut, existait-il
encore dans le traité de 1927 un article 17qui puisse revivre?L'article 37
peut-il avoir ((saisi» les traités bilatéraux d'un Etat tiers, bien avant
qu'il ne devienne partie au Statut, pour «préserver » la clause juridic-
tionnelle ?
Ceci suppose une opération complexe, nouvelle, contraire à priori au

caractère volontaire de l'acceptation de la juridiction de la Cour et qu'il
faudrait justifier autrement qu'en la décrivant, car ce n'est pas une
démonstration de l'existence juridique d'une obligation que se borner à
dire : (c'est une mise en sommeil x. C'est, en effet, poser un principe
contraire au principe généralement reconnu de l'acceptation volontaire
de la juridiction de la Cour internationale de Justice, acceptation qui

n'a étédonnéeau Statut par l'Espagne qu'en décembre 1955.

D'où la nécessité de soutenir que l'Espagne avait, elle-même,
reconnu que l'effet de l'article 37 était bien de faire revivre l'articl17
du traité de 1927 dèsson adhésion au Statut. Que l'Espagne ait cru ou
non que l'article 37 avait un certain effet est sans portée ; c'est la Cour

qui est seul juge de sa propre compétence selon leStatut,non pas selon
ce que pense de ce Statut une des Parties.

Le problème de base est bien celui-ci : comment donner à l'article 37
un effet de préservation des clauses juridictionnelles des traités bilaté-
raux entre Etats tiers, effet qui, nécessairement, doit prendre date à

l'entréeen vigueur du Statut, avant la disparition dela Cour permanente,
puis un effet de transfert automatique de la juridiction à la Cour inter-
nationale de Justice au jour de l'admission de 1'Etat tiers aux NationsUnies. Il faut bien que la «préservation » s'applique dès l'entrée en

vigueur du Statut puisqu'on prétend que celui-ci vise par l'article 37
« tous les traité»,donc les traités liant des Etats quin'ont encore aucune
obligation résultant de l'appartenance aux Nations Unies et qui pour-
raient, par hypothèse, n'en jamais avoir s'ilsn'entraient pas aux Nations

Unies. Et cependant l'article 37 doit pouvoir s'appliquer sans aucune
limitation de durée car si la «préservation )de la clause juridictionnelle
d'un traité bilatéral a étéeffectuée par l'entrée en vigueur du Statut,
l'article37 s'applique quelle que soit la date d'admission de 1'Etat tiers
aux Nations Unies. Si la préservation est intervenue, elle est effective

« potentiellement »tant que le traité bilatéral est en vigueur.

Pour qu'il en soit autrement, il faut soutenir que l'article 37 ne

((préserve ))la clause juridictionnelle d'un traité bilatéral que le jour de
l'admission de 1'Etat tiers, mais alors c'est le problème déjàsignalé :une
« paralysation » est une opération inconnue en droit international géné-
ral pour lequel une suspension vaut libération de l'obligation ; or, on n'a

pas prouvé que l'article 37 décidait cette remise en vigueur après para-
lysation.
Et cette considération devient plus décisive encore pour l'examen de
la deuxième exception subsidiaire. Si une obligation suspendue ne fait
que reprendre effet à partir du jour où cesse l'empêchement,il n'y a pas

de compétence pendant la périodede suspension ; sinon ce n'est pas une
suspension mais la (mise en sommeil »ou ((paralysie )),descriptions qui
sent en effet nécessaires pour justifier que la suspension n'ait eu aucun
eoet. Car si la périodede suspension disparaît rétroactivement et si l'on

admet la compétence de la Cour internationale de Justice, comme s'il
n'y avait pas eu d'interruption dans l'application du traité bilatéral, ce
n'est plus une suspension d'obligation, par définition. Et ici encore il
faut prétendre que tel était le but de l'article 37, sans un brin de preuve

pour l'établir. Or, pour prouver que la suspension d'une obligation n'a
pas ((libéré 1)les parties de l'obligation pendant toute la durée de la
période de suspension, on doit procéder autrement que par affirmation.

L'Espagne et la Bulgarie ont signéun traité de conciliation, de règle-
ment judiciaire et d'arbitrage le 26 juin 1931, ratifié à Sofia le21 juin

1935(C.P.J.I. sérieE no 13, p.296). L'article 17 permet àchaque partie
au traité de saisir la Cour permanente d'une requête, après préavisd'un
mois. Ce traité se renouvelle chaque cinq années, s'iln'est pas dénoncé
six mois avant l'expiration de ce délai.

Un tel traité est-il encore en vigueur entre ces deux Etats quant à la
compCte.ncede la Cour internationale, mêmeaprès l'arrêtde l'Incidentaérien? Dans l'hypothèse où un passager du malheureux avion abattu
par les forces militaires bulgares ait étéespagnol, le gouvernement de
ce dernier aurait-il eu le droit d'introduire une requêteen protection de

son ressortissant, sur la base de l'article 17 indiqué?

Si l'article 37 rend la Cour internationale compétente, elle décidera
aussi que l'article 17 du traité hispano-bulgare est en vigueur, solutiori
qui parait inattendue et contradictoire.

Il en serait de mêmepour d'autres traités, de la mêmenature que le
traité de 1927, signésentre l'Espagne et la Pologne, la Tchécoslovaquie,
la Hongrie, pour ne citer que quelques-uns de ces traités - Etats qui
pourraient ne pas maintenir de relations diplomatiques.

La pratique internationale se référantà l'application des traités visés
par l'article 37 du Statut a une valeur toute relative. La pratique ayant
un vrai intérêt dansle cas de la présente exception serait celle postérieure
à l'interprétation donnéepar les arrêtsde l'Incident aérienet du Temple

où la question a été poséedeux fois.

Les signataires des protocoles pour adapter les clauses de traités se
référant à la Cour permanente n'avaient d'autre but que d'appliquer,
expressément, ces clauses juridictionnelles qui avaient été convenues
dans les traités à la Cour internationale, mais sans soulever là question

de savoir si l'article 37 comprenait seulement les Membres des Nations
Unies parties au Statut avant la dissolution de la Cour permanente et
les nouveaux Membres des Nations Unies après cette date. Ces proto-
coles se référaientà tous ces Etats. Tout de même, un doute subsistait
quant au champ d'application de cet article.

Ici, la sagesse des Nations Unies s'unissait à la sagesse de la Cour
internationale, dans son interprétation de l'Incident aérien, pour limiter
l'application de l'article 37 aux seuls Etats présents à la conférence de
San Francisco. Ainsi, on savait quels Etats allaient êtrevraiment obli-
gés,sans se placer dans des situations dont on ne pouvait prévoir les
effets quant aux traités qui donnaient compétence à la Cour permanente.

Si une telle conduite de prudence a étéappliquée dans le cas des décla-
rations de l'article 36, paragraphe 5, bien limitées et connues, une même
manière de voir doit à fortiori êtrevalable pour des clauses juridiction-
nelles inséréesdans de nombreux traités et entre Etats parties au Statut
avant la dissolution de la Cour permanente.

L'interprétation soutenue par le demandeur n'a pas l'appui de la pra-

tique de divers organes de l'Organisation des Nations Unies. On peut mentionner deux cas importants, entre autres, citéspar les
Parties.
Cas de I'Actegénéra l La résolution 268 A (III)de l'Assemblée géné-
rale du 28 avril 1949 poursuivait l'objet de restituer à l'Acte général de
Genève du 26 septembre 1928 son efficacitépremière. Cette résolution,

à la lettre e), exprime que cet Acte, avec les modificationsy apportées,
était ouvert à l'adhésion des Membres des Nations Unies, et des Etats
non membres devenus parties au Statut de la Cour internationale ou à
qui l'Assembléegénérale des Nations Unies aurait communiqué copie à
cet effet. Une telle proposition était nécessaire, vu que l'efficacité de
l'Acte généralse trouvait diminuéedu fait que les organes de la Société

desNations, et la Cour permanente, auxquels il se réfère,avaient disparu.
Cette résolution dispose que les amendements apportés à l'Acte général
joueront seulement entre Etats ayant adhéréaudit Acte ainsi revisé. La
lettrec) indique les amendements à apporter aux articles 17, 18, 19,20,
23, 28, 30,33, 34,36, 37 et 41, où les mots «Cour permanente de Justice
internationale )doivent êtreremplacéspar ((Cour internationale de Jus-

tice')).Un tel précédent démontre,sans aucun doute, que l'Assemblée
généralen'a pas cru qu'elle pouvait faire application de l'article 37 du
Statut de la Cour quant aux dispositions de l'Acte généralvisant la
Cour permanente : pour le transfert à la Cour internationale de la juri-
diction accordée à la Cour permanente, un nouvel accord était indis-
pensable, ce qui signifiait que l'articl37 ne jouait pas. L'intervention

de la délégationbelge aux Nations Unies pour aboutir à cette résolution
n'a pas étésans importance.

Si l'article7 ne joue pas dans le cas de l'Acte général,comme l'a admis
la résolution268 A (III)de l'Assembléegénérale, comment peut-on sou-
tenir logiquement que l'article37 doit jouer dans le cas du traité hispano-

belge de 1927 ? Ce traité n'est autre chose qu'un Acte généralen petit
entre deux Etats. En effet,l'Acte général prévoitla solution des litiges
entre Etats par des commissions de conciliation, par l'arbitrage et par
le règlement judiciaire devant la Cour permanente, et le traité hispano-
belge de 1927 indique, pour les différendsentre les deux Etats, les mêmes

moyens de solution. Si, pour que l'Acte généralentre en pleine vigueur
quant à la Cour internationale, il est indispensable que les Etats qui y
ont souscrit et l'ont accepté fassent certaines déclarationsà ce sujet, on
ne voit pas la raison pour laquelle il n'en serait pas de mêmepour les
deux Etats signataires du traité hispano-belge. Si l'article37 nc lie pas
les Etats signataires de l'Acte généralà la juridiction de la Cour inter-

nationale, comment cette disposition pourrait-elle lier le Gouvernement
espagnol à cette Cour ?

L'Acte généraladopté le 26 septembre 1928 par l'Assemblée de la
Société des Nations a reçu l'adhésion de la Belgique le 18 mai 1929 et

de l'Espagne le 16 septembre 1930. Alors se présente la situation sui-vante :si la Belgique invoque cet Acte généralcontre l'Espagne, ellene
pourra le faire qu'une fois que cet Etat aura signéles amendements
introduits à cet Acte (résolution 268A (III)) ;or, si la Belgique invoque
le traité de 1927, essentiellement pareil à l'Acte général,elle pourra le
faire selon une certaine interprétation de l'article 37 sans aucune autre
démarche. Une mêmesituation juridique se verrait régléede deux ma-
nières différentes selon qu'on invoque l'Acte généralou le traité. Il est
difficile de souscrireà une telle interprétation, qui conduit à des résul-
tats contradictoires.

Cas de la constitution de l'O.I.T. : La revision de la constitution de
l'O.I.T. était indispensable après la dissolution de la Cour permanente,
pour toutes les dispositions de cette constitution qui faisaient référence
à cette Cour. Pour les Etats parties au Statut de la Cour internationale
de Justice avant ladite dissolution, le transfert prévu par l'article 37
était suffisant pour les autres Etats non membres des Nations Unies
ou Membres postérieurement à cette dissolution, des amendements
étaient nécessaires.

A propos de l'avis consultatif de 1950 sur le Statut international du
Sud-Ouestafricain et en l'affaire, on doit remarquer que les trois Etats
intervenant dans cette affaire :Union sud-africaine, Ethiopie et Libéria,
étaient Membres originaires des Nations Unies. Il en est ainsi en l'affaire
Ambatielos,les deux Etats parties à celitige étaientMembres desNations
Unies avant le 18 avril 1946. Cesprécédentsne sont donc aucunement
concluants, ils sont toujours dans la ligne d'interprétation des arrêts de
l'Incidentaérielzet du Temple.Cette interprétation a aussi joué,indirec-
tement, en l'affaire du Droit de passage. Au moment où le Portugal
déposasa nouvelle déclaration d'acceptation dela juridiction dela Cour,
il était liépar une déclaration antérieure qui tombait sous le coup du
paragraphe 5 de l'article 36 du Statut.La Cour ne prit en considération

que la dernière déclaration.

Lors de la revision de nombreuses conventions donnant compétence à
la Cour permanente, dans tous les cas, de nouveaux accords ou proto-
coles furent nécessairespour transférer ces compétences à la Cour inter-
nationale. On n'a pas jugéque l'article 37 tranchait la question. Dans
ces protocoles, on a explicitement prévule transfert en.mentionnant la
Cour internationale, ce qui plaide en faveur de la thèse espagnole. L'interprétation que, dans leurs accords, les Etats tiers ont donnée
de l'article37 perd beaucoup de sa force, surtout si ces accords sont
antérieurs à l'interprétation par la Cour internationale du paragraphe 5
de l'article36 du Statut, qui soulève la mêmequestion que l'article 37.
Si l'on se réfèreà l'accord entre la Suède et la Finlande, dug avril 1953,
qui modifie une convention du 29 janvier 1926, on voit qu'il donne vali-

ditéà l'article premier du traité de 1926 et que cette validité ne dépend
pas de l'entrée de la Finlande aux Nations Unies. En effet, quand cet
Etat devint Membre des Nations Unies en 1955, il fut dès lors partie
au Statut de la Cour internationale ; mais à cette date, le traité 1926,
modifié enavril 1953, avait acquis force obligatoire depuis deux années.
C'est cet accord qui a opéréla transformation du traité de 1926 et non

le fait aue la Finlande était devenue ~artie au Statut. La ~rocédure de
cet accord et non l'application de l'articl93,paragraphe 2, dela Charte,
fait supposer que la Finlande entendait que l'article 37 n'était pas suf-
fisant pour rendre applicables les traités où était stipulée la soumission
à la Cour permanente.

Le Statut a organisé deux moyens ordinaires pour l'acceptation par
les Etats de la juridiction de la Cour internationale. Le premier moyen
est le traité ou la convention ; le second la dbclaration unilatérale. Ces

moyens sont ceux que mentionne l'article 36, paragraphes I et2.
Selon certaine thèse, l'Espagne aurait accepté la juridiction, ou mieux
la compétence de la Cour, implicitement, au moment où le Gouverne-
ment belge lui a proposé un compromis comme démarche préalable à la
saisine de la Cour par requête. Quand le Gouvernement espagnol a
repoussé cette proposition il a dit que la Belgique n'a aucun j.us standi

pour lui faire une telle proposition de protection d'une sociétécana-
dienne et qu'on n'avait pas épuiséles recours internes ; on en déduit
que l'Espagne aurait reconnu implicitement la compétence de la Cour,
lors du compromis proposé ou introduit. Telle est la thèse en question.

On doit partir de la base que l'acceptation de la compétence de la
Cour, soit par accord, soit par déclaration, doit être claire et non équi-
voque »,comme le soutient la jurisprudence, jusqu'à ce moment cons-
tante, de la Cour permanente et dela Cour internationale. Les instru-
ments qui correspondent à une telle acceptation de compétence doivent
êtreconcluants, déterminants et ne pas prêter au doute. Une fois le Gouvemement espagnol saisi de la prétention belge, il

manifesta clairement qu'il ne pouvait accepter cette démarche pour les
raisons déjàmentionnées. Ce faisant, il ne crut pas nécessairedéjà d'exa-
miner la question si l'Espagne était ou non liée envers la Belgique par
une clause quelconque, pour porter l'affaire devant la Cour. La propo-
sition tout entière de la Belgique fut repoussée par l'absence d'un

élément premier, la qualité pour introduire une telle prétention. De
cette obligation peut-on déduire que l'Espagne a fait une manifestation
((claire et non équivoque 1)d'acceptation de la compétence de la Cour ?
Cette acceptation peut-elle êtrefaite par implication sur la base d'un

raisonnement implicite ? D'autre part, quelle est la situation juridique
qu'on attribue - dans cette thèse - à l'Espagne ? Aurait-elle conclu
un accord tacite de volonté aux fins de venir devant la Cour ou aurait-
elle simplement exprimé un consentement d'acceptation de la juridiction

dela Cour, aussi par voie d'implication ?Toutes ces questions s'opposent
à la thèse proposée.
Jusqu'à présent c'était un principe bien établi que la compétence de
la Cour doit s'admettre selon le Statut par des manifestations de volonté
expresses et claires, et non par des raisonnements fondés sur des suppo-

sitions, sur des faits douteux et sur des silences qu'on interprète. Pour
que la compétence puisse êtreétablie il faut un acte volontaire, indis-
cutable, non douteux, de 1'Etat auquel on attribue une telle volonté.

Une réflexion s'impose sur cette thèse dangereuse, car elle créerait
une nouvelle notion de l'acceptation de la compétence de la Cour par
acquiescement tacite, ou par accord tacite, situation peu compatible
avec le principe du Statut selon lequel l'acceptation de la juridiction

doit s'établir par un acte et un consentement (clairs et non équivo-
ques ».La juridiction de la Cour ne doit pas s'établir sur des considéra-
tions et des raisonnements ambigus.

On soutient que la présente exception serait incompatible avec l'atti-
tude antérieure du Gouvernement espagnol. On conclut que certains
paragraphes de la note espagllole du 30 septembre 1957 contiennent

une déclaration (claire et non équivoque )de reconnaissance de la juri-
diction de la Cour. Dans cette note, on prend principalement en consi-
dération la proposition belge faite dans sa note du 8 juillet 1957, d'un
compromis pour soumettre le différendàla Cour internationale. La con-
testation, entre les deux Gouvernements, portait sur le point que le

Gouvemement belge ne justifiait pas qu'il pût accorder sa protection
diplomatique à la Barcelona Traction, sociétCcanadienne, sans faire la
preuve de la nationalité belge des actionnaires de cette société.

La question de l'interprétation de l'article 37 ne fut pas posée dans
la note espagnole ni dans la note belge précitées. Le contenu de la note espagnole sur l'existence d'une juridiction obli-

gatoire pour les deux Etats, se rapporte au silence belge à l'objection
fondamentale du département extérieur espagnol, dans ses notes du
22 décembre 1951 et du 5 janvier 1952. On ne voit pas quelle reconnais-
sance expresse peut se dégager du texte d'une phrase incidente. La

référenceà la juridiction est liéeà la question du jus standi. Elle doit se
retenir dans son ensemble. Aucun engagement juridictionnel ne peut se
déduirede cette manifestation. Ce document contient une manifestation
de volonté non équivoque dans le résumé finalde cette note au no 6,

qui dit textuellement : ((Le traité susvisé [celuide 19271n'est pas sus-
ceptible d'êtreinvoqué pour la solution d'un litige qui n'a pu surgir
pour les raisons signalées. ))

Au surplus, cette note du 30 septembre dans la phrase incriminée ne
démontre pas une déclaration de volonté. Il ressort de cette correspon-
dance que le Gouvernement espagnol n'a jamais accepté l'intervention
de la Cour dans la présente affaire. Cette position a seule sa vraie impor-

tance. Le manque de légitimation de la Belgique n'était pas le motif
unique pour l'incompétence de la Cour. Pour le Gouvernement espagnol,
cette question de la légitimation était préalable et la question de la
compétence de la Cour sur la base de l'article 37 ne fut ni effleuréeni

discutée.
Si l'on examine cette note verbale, dans son ensemble, on doit forcé-
ment conclure, de l'examen de circonstances où elle trouve son origine,
des propositions qu'elle rejette et des raisons sur lesquelles se fonde cette

attitude, que le Gouvernement espagnol n'a aucunement accepté, ni de
façon expresse, ni de façon implicite, la compétence de la Cour.

Ce n'est qu'après la requête et le mémoire belgesque le problème des
exceptions préliminaires est devenu actuel et l'Espagne a immédiatement

soulevél'exception préliminaire relative à la compétence. Auparavant,
il n'y avait que le jzcsstandi qui était en discussion. Parler d'une question
de (différend supposé ))dans le texte de la note espagnole du IO juin
1957,c'est dire clairement que l'Espagne ne reconnaissait pas l'existence

d'un différend. Le problèmede l'existence ou de l'inexistence de la juri-
diction obligatoire n'est pas discuté dans la note. Le fait que le Gouver-
nement espagnol, dans sa note du 30 septembre 1957, déclarait que le
traité n'est (pas susceptible d'êtreinvoqué r pour la solution d'un litige

qui n'apas pu surgir pour les raisons signalées implique que toute discus-
sion sur des exceptions préliminaires pour le cas où la Belgique voudrait
porter effectivement le différenddevant la Cour devient superflue.
A partir du moment où la Belgique a effectivement port6 devant la

Cour l'affaire de la Barcelona Traction, ou lorsque cette éventualité a
étédiscutée sérieusemententre les Parties, l'Espagne a immédiatementpris position en niant la compétence de la Cour en prévision de la future
exception préliminaire no 2.
La Cour internationale en l'affaireAnglo-Iranian Oz1Co. donne des

règles pour l'interprétation grammaticale des actes unilatéraux. Cet
arrêtdit :

« Mais la Cour ne saurait se fonder sur une interprétation pure-
ment grammaticale du texte. Elle doit rechercher l'interprétation
qui est en harmonie avec la manière naturelle et raisonnable de lire

le texte, eu égardà l'intention du Gouvernement de l'Iran àl'époque
où celui-ci a acceptéla compétence obligatoire de la Cour. » (C.I.J.
Recueil 1952, p. 104.)

On ne doit retenir, isolément, le sens textuel des mots, sans prendre en
considération leur objet et finalitédans le document où ils sont employés,

car c'est de celui-ci que les mots ont une certaine valeur et signification,
tant qu'expression de volonté de leurs auteurs. La compétence de la
Cour doit résulter d'une déclaration ou d'actes concluants ; il n'y a dans
le cas présent ni déclaration expresse, ni actes concluants.

Lors de la corresponaance diplomatique, le défendeurn'a jamais mani-
festé sa volonté d'obtenir une décision sur le fond, ni de soulever la
question de compétence ; il semble clair qu'on ne peut déduire d'une
telle attitude une acceptation de la compétence de la Cour.

Dans le cas où la Cour se déclarerait compétente, en vei,, de l'ar-
ticle37 de son Statut et ranimerait l'article 17,paragraphe 4,du traité
de 1927 ainsi que d'autres dispositions concordantes avec cet article, le

différend soulevépar le Gouvernement belge ne pourrait pas êtresoumis
à la juridiction de la Cour parce qu'il est néet se rapporte à des situa-
tions et fdits antérieurs à la date à laquelle la juridiction de la Cour a
pu déployer ses effets dans les relations entre la Belgique et l'Espagne.
Jusqu'à l'époque où elle a étéranimée, la clause juridictionnelle était

en sommeil, et a nécessitéun consentement pour êtreremise en vigueur :
le consentement résultant de l'entrée de l'Espagne aux Nations Unies.

Cette date doit être fixée au 14 décembre 1955, date à laquelle
l'Espagne fut admise comme Membre des Nations Unies. Le différend
étant antérieur à cette date critique, il n'a pu êtresoumis à la Cour.

Le traité de 1927, en effet, dans ses articlesI et 2 et protocole addi-
tionnel, vise les différends qui ((viendraient r à surgir entre les deux
Etats. On ne peut dire que le trait6 hispano-belge marque une claire162 BARCELONA TRACTION (OP. DISS. ARMAND-UGON)

volonté de viser tous les différends. La clause de juridiction de l'ar-

ticle 17 du traité, paragraphe 4, que l'article 37 du Statut ranime, ne
s'étend pas à des différends quelconques, mais seulement à ceux qui
sont postérieurs à la date du 14 décembre 1955. Pour les différends
antérieurs à cette date, il n'y a.pas de clause de juridiction valable. Le
présent différend est bien antérieur au 14 décembre 1955, comme le

reconnaît le Gouvernement belge dans sa note diplomatique du 16 mai
1957. Il est donc clair que l'article37 n'a pu rétroagir l'effet de la clause
de juridiction de l'article17 à des différends nésavant son établissement.
La Cour permanente a dit :

iSi les termes qui expriment la limitation ratione temporis sont
clairs, l'intention qui les a dictés n'en apparaît pas moins bien
établie : en la formulant, on a entendu enlever à l'acceptation de

la juridiction obligatoire tout effet rétroactif ». (Série A/B no 74,
P. 24.)

La Cour permanente, en l'affaire Mavrommatis, a dit

iLa Cour est d'avis que, dans le doute, une juridiction basée sur
un accord international s'étend à tous les différends qui lui sont
soumis après son établissementD . ans le cas actuel cette interpréta-
tion semble imposée par les termes mêmesde l'article 26, d'après

lequel doit êtresoumis à la Cour « tout différend quel qu'il soit ...
qui viendrait à s'élever. 1)(Série A no 2,p. 35.)

L'article premier du traité de 1927 dispose

(Les Hautes Parties contractantes s'engagent réciproquement à
régler par voie pacifique et d'après les méthodes prévues par le
présent traité $us les litiges ou conflits, de quelque nature qu'ils
soient, qui viendraient à s'éleverentre la Belgique et l'Espagne et
qui n'auraient pu êtrerésoluspar les procédésdiplomatiques ordi-

naires. ))

L'arrêtcitéde la Cour permanente a interprété la phrase iitout diffé-
rend quel qu'il soit ... qui viendrait à s'élever »,qui correspond au texte

de l'article premier du traité cité ci-dessus (tous les litiges ou conflits
de quelque nature qu'ils soient, qui viendraient à s'élever... »,comme se
référant à tous les différends après l'établissement de la juridiction,
laquelle est entrée en vigueur lorsque l'Espagne est devenue partie au
Statut de la Cour. Les différendsantérieurs restent donc exclus de cette

juridiction.
L'article 17, paragraphe 4, une fois rentré en vigueur, en 1955, les
réserves rationetemporis des articles I et2 du traité jouaient de nouveau. Le Gouvernement belge a suivi la pratique invariable de limiter,
d'accord avec le droit international général,dans ses déclarations du
25 septembre 1925 et du IO juin 1948, l'acceptation de la juridiction
de la Cour par une clause rationetemporis. Il n'est pas pensable que ce
gouvernement ait voulu se départir et déroger cette règle, en signant

le traité de 1927. Ces déclarations permettent de prCsumer clairement
quelle était la volonté de la Belgique en cette matière.
Ily a la mise en vigueur de certaines dispositions du traité de 1927,
qui étaient en sommeil, notamment celles qui mentionnaient la Cour
permanente. On peut dire que certaines dispositions du traité sont mises
en vigueur.

La seule exception à la non-rétroactivité admise par le protocole est
limitée par deux conditions : a) que le litige ait trait à l'interprétation
d'un traité antérieur encore en vigueur ; b) que l'application incriminée
ait commencéavant la signature du traité de 1927 et se soit poursuivie
après la signature. Ces conditions ne visent pas notre cas.

L'article 37 n'établit aucune réserve ratione temporis, il se limite à
mettre en vigueur la partie rclative à la juridiction obligatoire qu'établit
le traité de 1927. C'est dans les diçpositions de ce traité qu'il faut cher-
cher les limitations rationetentporis à la compétence de la Cour. Ce sont
celles signaléesauparavant.

Dans la jonction au fond, quatre points sont à retenir :

I. Le fondement de la juridiction internationale n'est pas, comme en
droit interne, la volonté d'un législateur, mais le consentement des
parties elles-mêmes.

2. C'est à la lumière de cette constatation fondamentale qu'il faut
apprécier l'effet de l'opposition d'une exception préliminaire par 1'Etat
défendeur. Ce dernier fait usage, ainsi, de son droit de faire vérifier

préalablement par la Cour si l'affaire pour laquelle le demandeur a voulu
l'attraire devant la Cour est ou n'est pas l'une de celles pour lesquelles
il a accepté que la Cour se prononce à son égard. Pour cette raison,
lorsqu'est soulevée l'exception préliminaire, la procédure au fond est
arrêtéeet ne peut, normalement, reprendre que lorsqu'a été tranchéela
question soulevée à titre d'exception préliminaire.

3. C'est toujours à la lumière de la constatation fondamentale faite ci-dessus sous le no Iqu'il faut apprécier le problème de l'admissibilité
de la jonction au fond d'une exception préliminaire.

((La jonction au fond [remarquait Anzilotti (p. 647 du 3e adden-

dum au no 2 de la série D)], obligeantun Etat à ester en justice
bien qu'il prétendene pas avoircontracté pareillo ebligationa, dans
la procédureinternationale,une tout autre signification que dans le
droit interne, où l'obligationd'esteren justice ne dépendpas de la
volontédel'intéressé.»

Si donc l'on ne peut certes pas affirmer que la Cour ait besoin du
consentement du défendeur pour pouvoir joindre au fond une exception
préliminaire, il n'en reste pas moins que la jonction au fond ne peut
être décidéequ'à titre de mesure absolument exceptionnelle. Elle va

manifestement à l'encontre du droit du défendeur de ne pas discuter le
fond d'une affaire s'il n'est pas avant tout établi que son consentement
a étédonné, d'une manière ou d'une autre, à ce que la Cour statue sur
cette affaire.
La Cour ne saurait donc avoir recours à la jonction au fond d'une
exception préliminaire que :

a) lorsque les Parties elles-mêmesle demandent, ou

b) lorsque la question soulevéeà titre d'exception préliminairèest telle-
ment liée à la question qui constitue le fond de l'affaire qu'il est
manifestement impossible de trancher l'une sans trancher l'autre en
mêmetemps.

4. Quant à la valeur d'une telle conclusion, il ne saurait y avoir de
différenceaucune selon que la question soulevée à titre d'exception pré-
liminaire est une question de pure procédure ou une question qui est,
en elle-même,une question touchant au fond du droit. Ce qui est néces-
saire c'est qu'il s'agissed'une question distincte de celle qui constitue

le fond même del'affaire. Bien des questions peuvent êtreen elles-mêmes
de fond sans pour autant toucher au fond de l'affaire.

Il convient de garder ces quatre points particulièrement présents à
l'esprit lorsqu'il s'agit de prendre une décisionquant à l'éventualitéde
joindre au fond une question soulevéepar 1'Etat défendeur à titre d'ex-

ception préliminaire. Sila jonction au fond était décidéedans un cas où
cette question aurait pu être tranchée indépendamment du fond de
l'affaire, la Cour irait àl'encontre du but mêmede l'institution des excep-
tions préliminaires. Elle obligerait le défendeur à discuter tout le fond
d'une affaire à propos de laquelle elle risque de devoir reconnaître plus
tard qu'il n'était finalement pas du tout tenu de le faire. En ce qui concerne l'affaire de la Barcelona Traction, rien ne justifie
l'idée d'une jonction au fond des troisième et quatrième exceptions.
L'idée expriméeau cours des audiences, selon la~uelle, dans notre hypo-
thèse, la Cour devrait d'abord explorer les circonstances de la cause

susceptibles d'avoir un effet sur lej~s standi de 1'Etat belge, et devrait
se prononcer en fonction de ces circonstances, risque de mener à une
situation absurde. Ce qui est nécessaire en premier lieu c'est d'établir la
règle qui domine la matière. Ensuite il faut vérifier si cette règle envi-
sage jamais la possibilité qu'en cas de préjudice causé à une société par
un Etat étranger,la protection diplomatique soit exercée par un Etat

autre que 1'Etat national de la sociétéelle-même.Et si la Cour aboutit
à une conclusion négative, elle devra tout simplement déclarer que
1'Etat belge n'a pas qualité pour exercer la protection diplomatique
dans l'affaire de la Barcelona Traction, qu'il se présente comme protec-
teur de la sociétéprétendument lésée ouqu'il veuille agir en tant que
protecteur des prétendus actionnaires belges de la sociétéen question.

Les circonstances du cas d'espèce ne peuvent absolument rien changer
à une telle conclusion.
Selon les termes mêmesde son mandat, la Cour doit appliquer le droit
international ; elle doit appliquer une règle du droit international pour
trancher les questions qui sont soulevéesà titre d'exception préliminaire,
que ce soit la question du défaut de qualité du Gouvernement belge ou
celle du défaut d'épuisement des recours internes. L'idéemêmed'une

décisiond'espèce, telle que le Gouvernement belge semble vouloir la sug-
gérer, est inadmissible. Imaginerait-on quela Cour s'abstienne de recher-
cher la règle de droit international qui concerne les questions envisa-
gées et qu'elle tranche ces questions en elles-mêmessans se soucier
d'avoir défini au préalable les règles à appliquer ? Ou encore imagine-

rait-on qu'après avoir défini ces règles, elle ne les applique pas en
l'espèce? Cela équivaudrait non pas à déciderselon les circonstances du
cas d'espèce mais à inventer et à appliquer à ce dernier une règle diffé-
rente de celle qu'édicte le droit international: donc à violer manifeste-
ment cette règle.
D'autre part, il est bien évident que la question concernant le défaut
de qualité du Gouvernement belge peut êtretranchée sans qu'il y ait

rien à tirer, à cet égard, d'un examen du fond de l'affaire. Le fond de
l'affaire est constitué par la question de savoir si une société canadienne
a ou n'a pas subi en Espagne un dénide justice. Que la réponse à cette
question soit positive ou négative, cela ne modifie en rien la position à
prendre sur le point de savoir si le Gouvernement belge a ou n'a pas
qualité pour intervenir dans l'affaire, soit au titre de la protection diplo-

matique de la société, soit au titre de la protection diplomatique des
prétendus actionnaires belges de la société; ni non plus sur le point de
savoir si la Sidro est ou n'est pas actionnaire de la Barcelona Traction.
Le Gouvernement belge a admis, soit au moment où ii a présentéau
Gouvernement espagnol son projet de compromis, soit ultérieurement

au moment où, après le refus du Gouvernement espagnol, il l'a averti
163 de l'introduction de sa requêteunilatérale, que la question concernant
la qualité du Gouvernement belge pour agir dans l'affaire pouvait et
devait êtretranchée préalablement à tout examen du fond. On se rappel-
lera que le Gouvernement belge avait mêmeexpressément exclu cette
question de celles pour lesquelles une jonction au fond pouvait être

envisagée. Il ne peut pas avoir aujourd'hui une opinion différente de
celle qu'il avait alors ; il ne peut pas prétendre aujourd'hui que la ques-
tion de la qualité pour agir du Gouvernement belge ne peut pas être
disjointe du fond de l'affaire, alors qu'au moment de l'introduction de
la requête il affirmait lui-mêmele contraire.
Les deux gouvernements sont d'accord pour que la Cour statue sur

la question si la dernière requêteest pareille à la première (dans les deux
requêtesil y aurait protection de la Barcelona Traction) et si l'inscrip-
tion au registre de la sociétéprouve la qualité des actionnaires. Ces
points de l'avis des deux gouvernements ne doivent pas se joindre au
fond.
Il en va de même pourla question de l'épuisement des recours internes.

Que la déclaration de faillite de la Barcelona Traction et ses conséquences
aient constitué ou non un déni de justice à l'égard de la société, cela
n'empêchenullement que la société elle-mêmee ,t elle seule, ait eu la
possibilitéet le devoir d'utiliser en temps utile les moyens de recours que
l'ordre juridique espagnol mettait à sa disposition contre la déclaration
de faillite en question. La sociéténe l'a pas fait :elle a donc perdu le

droit de se plaindre, sur le plan international, d'un déni de justice qui,
s'il avait vraiment existé, aurait pu êtreéliminésur le plan interne, et
ne l'a pas étéuniquement à cause de sa propre négligence. Rien dans
cette constatation ne saurait êtremodifié par une recherche visant à
établir si le prétendu déni de justice a existé ou non, ou encore si les
prétendus actionnaires belges de la sociétéont subi ou non, dans leurs

intérêts, une répercussion du préjudice subi par la société. C'està la
société,à ses administrateurs, qui n'ont pas sauvegardé, par les moyens
appropriés, les droits et les intérêtsde la société,que les actionnaires
doivent adresser leurs reproches, et non pas à 1'Etat espagnol qui n'a
jamais eu affaire à eux.

On ne peiit voir comment la Cour pourrait tirer d'un examen au fond
quelque élémentutile pour trancher les exceptions préliminaires rela-
tives au défaut de qualité du Gouvernement belge et au défaut d'épui-
sement des recours internes. La jonction au fond de ces exceptions dans
un cas où les questions qu'elles comportent sont manifestement distinctes
et indépendantes de la question qui constitue le fond de l'affaire ne pour-

rait-elle se considérer comme un écart des règles qui régissent la procé-
dure relative à l'examen des exceptions préliminaires et, au-delà de ces
règles, comme un écart des principes sur lesquels repose la juridiction
internationale elle-même ?

(Signé)ARMANDUGON.

164

Bilingual Content

OPINION DISSIDENTE DE M. ARMAND-UGON

J'ai le vif regret de ne pouvoir m'associer aux conclusions auxquelles

la Cour est parvenue dans le présent arrêt et je me prévaux du droit
d'exposer les raisons de mon dissentiment.
La première exception préliminaire se fonde sur le désistement
effectué dans la procédure de la première requête. Le Gouvernement
belge demanda ce désistement en invoquant le paragraphe 2 del'articl69

du Règlement de la Cour ; ce désistement fut accepté par le Gouverne-
ment espagnol à la demande expresse du Gouvernement belge et la
Cour prescrivit que l'affaire fût rayée du rôle.

Les'deux Parties contestent la portée du désistement. Pour le Gou-
vernement belge il s'agit d'un simple désistement de l'instance ; pour

le Gouvernement espagnol ce désistement aurait mis fin au droit de
porter l'affaire devant la Cour.
Il appartient à la Cour d'interpréter cet acte juridique. C'est une
formule correcte que cet acte soit interprétépar l'organe dont il émane.
Le désistement en question est un contrat judiciaire dont l'objet doit
êtredéterminéavec précision; il n'existe que sur le point qui a fait l'objet

de l'accord des Parties. Sa portée doit rester limitée à leur volonté.
La proposition de désistement a été acceptée parla Partie défenderesse;
un accord des Parties est donc intervenu. Le paragraphe 2 de l'articl69<
du Règlement implique la réalisation d'un accord ; il faut voir dans
l'acte réalisé un contrat judiciaire qui, naturellement, lie les deux
Parties.

La question que soulève ce contrat est de fixer sa nature, son étendue
et ses effets.

Le Statut de la Cour en son article 30 autorise celle-ci à déterminer
par un règlement le mode suivant lequel elle exercera ses attributions
et à fixer notamment sa procédure.
On attribue à un organe international la faculté de créer des règles
de droit en toute indépendance. Si le droit international repose sur
l'accord des Etats, soit exprès, soit tacite, dans le cas de l'article 30 du

Statut, une nouvelle source créatrice se fait jour. La Cour permanente
et la Cour internationale crééespar les Etats ont la fonction de dicter
des règlesde droit, impérativement, comme dans la législation nationale. DISSENTING OPINION OF JUDGE ARMAND-UGON

[ Translation]

FIR~TPRELIMINARY OBJECTION

1much regret that 1 am unable to associate myself with the conclusions
at which the Court has arrived in the present Judgrnent and 1 avail
myself of the right to set out the reasons for my dissent.
The first Preliminary Objection relates to the discontinuance which

occurred in the proceedings on the first Application. The Belgian
Government asked for such discontinuance, invoking paragraph 2 of
Article 69 of the Rules of Court. This discontinuance was agreed to
by the Spanish Government at the express request of the Belgian
Government, and the Court ordered that the case should be removed
from its list.

The two Parties dispute the effect of the discontinuance. The
Belgian Government contends that it was a mere discontinuance of
the proceedings, while the Spanish Government maintains that the
discontinuance put an end to the right to bring the case before the Court.
It is for the Court to construe this legal act.It is proper that this
act should be interpreted by the organ from which it emanates.

The discontinuance in question is a judicial contract the subject of
which must be determined with precision. It exists only in respect
of the point which formed the subject of the agreement between the
parties.- Its scope must remain limited to what they intended. The
proposa1 to discontinue was agreed to by the Respondent Party. An

agreement between the Parties thus came into being. Paragraph 2
of Article 69 of the Rules of Court implies the reaching oan agreement
and, in the act effected, there must be seen a judicial contract which,
of course, is binding on the two Parties.
The question which this contract raises is that of determining its
nature, itsextent and its effects.

Article 30 of the Statute of the Court authorizes the Court to frame
rules for canying out its functions and, in particular, to lay down rules
of procedure.

An international organ is given the power of creating rules of law,
in full independence. If international law is based on the agreement
of States, either express or tacit, in the case of Article 30 of theute
a new creativ-: source has arisen. The Permanent Court and the Inter-
national Court, which were created by States, have the capacity to
lay down mandatory rules of law in the sarne way as any national

legislature. On a justement pu soutenir que le Règlement dela Cour a la valeur
d'une convention internationale qui lie tous les Etats mais que, par la
volonté des mêmeE stats, cesnormes peuvent êtremodifiées ouabrogées
par la Cour. La Cour admet à l'artic31 du Règlement que les parties
peuvent d'un commun accord lui demander des modifications ou addi-
tions particulières des sections, 2 et4 du titreII du Règlement.
La rubrique Des arrangements amiablee st des désistementse trouvant

dans la première section, lesarticleset 69 auraient pu êtremodifies
ou complétés par le commun accord des Parties en la présente affaire,
avec l'assentiment de la Cour. Les Parties n'ont pas exerce cette faculté.
Pour comprendre la signification et la portée des articles et 69
du Règlement, ilest indispensable d'examiner les sources de ces deux
dispositions.
L'article68 est une refonte de l'articl61 du Règ"ement de 1,22.
L'origine de cet artic61 se trouve dans les travaux de la Cour per-
manente de janvier-mars 1922 qui dressa le premier Règlement decette
Cour.
La Cour permanente examina tout d'abord un questionnaire des
pointsà dbvelopper dans le projet de premier Règlement. Undes points
de ce questionnaire était le suivant Est-ce que les parties peuvent
dessaisir la Cour une fois qu'ellesl'ont saisieieD no2, p.291. U)n

premier article portant le no 44, paragraphe I et paragraphe 2,
de l'annexe 21 b),page 304, donnait une rbponse à cette question. Ce
texte, qui portait sur les n63et 64, fut adopté (p.154)et figura en
définitivedans le premier Règlement avecleno 61.
La discussiondu questionnaire (p83) fit ressortir, selon M.Anzilotti,
que la juridiction de la Cour repose entièrement sur la volonté des
parties et que pour cette raison le désir desparties devrait prévaloir
dans tous les cas. Lord Finlay ajouta:il est convenu que les parties
doivent avoir le droit de dessaisir la Cour d'un commun accord après
l'avoir saisie.
L'article1 primitif, actuelleme68,visait deux cas:celuide l'accord
des parties sur la solution du litige et celui de l'accord desparties en vue
de renoncerà la procédure, c'est-à-dire de dessaisirla Cour de l'affaire.
Dans chaque cas, on prescrivait la radiation de l'affaire du rôle. Dans

l'esprit des auteurs de cet article si le désistement était accompli
de commun accorddesparties, le dessaisissementde la Courétaitconclu.
Cetterenonciationàpoursuivre l'instanceéquivdlaàtun dessaisissement.

Lors de la prbparation du Règlementdu 22mars 1936 ,n transcrivit,
A la note2,de la page318,sérieD, troisiEmeaddendumau no 2,une dis-
cussion à propos de l'article 61 du premier Règlement. Cet extrait
du procès-verbalest du 12mai 1933.

Le baron Roiin-Jaequemyns estima dans ce procès-verbal que,s« un It has been rightly held that the Rules of Court have the force of
an international convention binding upon al1 States but that, by the
will of the same States, these Rules can be modified or abrogated by
the Court. In Article 31 of the Rules the Court provides that the
parties may jointly ask it to make particular modifications or additions

to Sections 1, 2 and 4 of heading II of the Rules. The heading Settle-
ment and Discontinzlanceis to be found in Section Iand Articles 68 and
69 could therefore have been modified or supplemented by agreement
between the Parties to the present case, with the Court's consent.
The Parties did not take advantage of this possibility.
To understand the scope and significance of Articles 68 and 69 of
the Rules, it is indispensable to examine the sources of these two
provisions.
Article 68 is a remodelling of Article 61 of the 1922 Rules. The
origin of that Article 61 is to be found in the work of the Permanent
Court between January and March 1922, when it was drawing up the

firstRules of that Court.
The Permanent Court first examinid a questionnaire on the points
to be dealt with in the draft of the first Rules. One of the points in
that questionnaire was the following : Can the parties remove a case
from the Court, once they have submitted it? (P.C.I.J., Series D,
No. 2, p. 291.) A first Article, numbered 44 (given in Annex 21 (b),
at p. 304), gave, in its first and second paragraphs, an answer to that
question. This text, which relates to numbers 63 and 64, was adopted
(p. 154) and appeared finally in the first Rules as Article 61.
The discussion of the questionnaire (pp. 83 and 84) made it clear,
according to Judge Anzilotti, that the Court's jurisdiction was based
entirely on the will of the parties and that for that reason the wishes

of the parties should in al1 circumstances prevail. Lord Finlay added
rhat it was agreed that the parties should have the right to withdraw,
by common consent, a suit which they had brought before the Court.
The original Article 61, now Article 68, covered two cases : that of
an agreement between the parties as to the settlement of the dispute
and that of an agreement between the parties not to go on with the
proceedings, that is to say, to withdraw the case from the Court. In
both events, it was laid down that the case should be removed from
the list. For the authors of that original Article 61, if discontinuance
was effected by common consent of the parties, the withdrawal of the
case from the Court was concluded. This decision not to go on with
the proceedings was equivalent to withdrawing the case from the

Court.
At the time of the preparation of the Rules of 22 March 1936,there
was given as footnote 2 on page 318 of P.C.I.J., SeriesD, No. 2 (Third
Addelzdzlm), an extract from the report of a discussion regarding
Article 61--o+WP%rst' Rules. It is an extract from the minutes of
12 May 1933.
Baron Rolin-Jaequemyns is reported in these minutes as thinking gouvernement a déclaréprendre acte de la déclaration de l'autre gou-
vernement, de cette manière un accord s'est formé entre les deux
parties, et par conséquent l'article 61 trouve son application ». Le

Greffier rappela alors que l'article68 avait étéappliqué dans deux cas
d'affaires introduites par requêteunilatérale, affaire Sino-belge et affaire
de l'usine de Chorzbzei.
La discussion prit fin avec l'intervention de sir Cecil Hurst :

« s'ily a accord*entre les parties pour dessaisir la Cour, la compé-
tence de celle-ci est épuiséeet il n'y a mêmepas matière à ordon-
nance, puisque la compétence de la Cour tire exclusivement sa
source de l'accord des deux parties )).

Selon lui,

« le désistement du demandeur seul ne suffit pas par lui-mêmepour
dessaisir la Cour ; il doit, pour atteindre ce résultat, êtreaccompagné

du consentement de l'autre partie. A son avis, l'articl61 du Règle-
ment, qui ne traite que de l'accord entre les parties, ne vise pas le
cas présent. ))

La réforme de 1936, en Ctablissant le parag~aphe 2 de l'article69,

a eu pou!. but d'introduire le désistement unilatéral et de compléter les
idées qui se trouvaient dans l'article 61. Jusqu'à présent, disait le
jonkheer van Eysinga,

«on était d'accord seulement sur le fait que le désistement était

possible si les deux parties agissaient ensemble. Par l'article 69,
paragraphe 2,la Commission a entendu consacrer la possibilité du
désistement unilatéral. ))

Selon M. Fromageot, la formule proposée n'accordait' pas une possi-

bilité qui n'existait pas jusqu'alors. Cette possibilité en fait existait,
et la meilleure preuve en est qu'elle s'était manifestée à plusieurs
reprises. Il s'agissait, selon lui, d'une question de rédaction.

Cesantécédentspermettent d'affirmer que leparagraphe 2del'article69

n'a eu pour but que d'incorporer par une disposition du Règlement une
pratique antérieure.
Loin d'établir un désistement d'instance, elle a adopté un désistement
qui, s'il est accepté par l'autre partie, crée un accord pour mettre fin
à la procédure. Le paragraphe 2 de l'article69 a, dans ce cas, le même

contenu juridique que le désistement d'un commun accord de l'article 68,
ancien article 61 du premier Règlement, lequel, selon sir Cecil Hurst,
avait pour finalité d'épuiserla compétence. that if "a government had noted the other government's declaration of
withdrawal, the result of this was to constitute an agreement between
the parties, so that Article 61 was applicable". The Registrar then
recalled that Article68 had been applied in two cases submitted by
unilateral application, theSino-Belgian and Chorzow cases.

The discussion ended with a statement by Sir Cecil Hurst to the effect
that :

"if the parties were agreed to remove a case from the Court, the
latter's jurisdiction ceased and there was not even anything to
make an order upon, since the Court's jurisdiction was derived

exclusively from the agreement between the parties".

In his view,

"withdrawal by the applicant did not suffice by itself to put an end
to the jurisdiction of the Court ; for that purpose it must be accom-

panied by the consent of the other party. He thought that
Article 61 of the Rules, which only dealt with the case of an agree-
ment between the parties, did not cover the present case."

The aim of the 1936 reform, in framing paragraph 2 of Article69,
was to introduce unilateral discontinuance and to supplement the con-

cepts embodied in Article 61. Hitherto, said Jonkheer van Eysinga,

"the Court had only been agreed as to the possibility of the joint
abandonment of proceedings by both parties. The Commission's
intention was now by means of Article [69, paragraph z] definitely

to provide for unilateral discontinuance."

In Judge Fromageot's view the proposed text did not make provision
for a possibility which had not previously existed. As a matter of
fact it had existed, and the best proof of that was that there had been
several instances of such possibilities. The point, according to him,

seemed really to be one of drafting.
These antecedents make it possible to affirm that the sole aim of
paragraph 2 of Article 69 was to embody a previously existing practice
in a provision of the Rules.
Far from making provision for discontinuance of the proceedings,
it adopted a discontinuance which, if accepted by the other party,

creates an agreement to put an end to the proceedings. In such a
case, paragraph 2 of Article 69 has the sarne legal content as the dis-
continuance by mutual agreement provided for in Article 68, formerly
Article 61 of the old Rules, which, according to Sir Cecil Hurst, had
the final result of bringing jurisdiction to an end. Le paragraphe 2 de l'article 69, d'autre part, n'introduisait pas le droit

de réintroduire la requête; la compétence ayant pris fin, un tel droit
n'&ait pas concevable. Un tel droit pour êtreexercé devait se fonder
sur une disposition du Règlement que celui-ci ne contient pas.

Quant la Cour est saisie d'un différend, il peut se terminer par un
arrêt,mais il y a d'autres moyens de mettre fin aux litiges. L'article 20,
paragraphe 2 du Règlement, dans sa rubrique XVIII, dispose que la

nature de la solution du procès doit êtreindiquCe ; son effet immCdiat ne
peut être autre que la radiation du rôle. Dèsqu'est ordonnéela radiation
du rôle, c'est que l'affaire a une solution définitive.

Le désistement, tel qu'il est organisC par les articles 68 et 69 du
Règlement l,ouvre une autre possibilité d'obtenir la radiation du rôle.
Cesdeux articles sont groupés sous la rubrique Desarrangementsamiables

et des désistements ; il y a un rapprochement entre ces deux situations.
L'article 68 permet aux parties de se mettre d'accord pour la solution
du litige, soit par arrangement amiable, soit par renonciation à pour-

suivre la procédure. Dans ces deux cas, la volonté des parties met fin
au procèset la Cour prend acte de l'accord ou du désistement et ordonne
la radiation de l'affaire sur le rôle sur simple communication des liti-

1 Article 68
Avant le prononcé de l'arrêt, si les parties tombent d'accord sur la solution à
donner au litige et le font connaitre par écrià la Cour ou si, d'un corrimun accord,
elles lui font connaitrepar écrit qu'elles renoncentà poursuivre l'instance,la Cour,
ou le Président si la Cour ne siège pas, rend une ordonnance leur donnant acte
de leur arrangement amiable ou prenant acte de leur désistement et dans chaque
cas prescnvant la radiation de l'affaire sur le rôle.

Article69
I. Si, au cours d'une instance introduite par requête, la partie demanderesse
fait connaître par écrit à la Cour qu'elle renonce à poursuivre la procédure, et
si,à la date de la réception par le Greffe de ce désistement, la partie défenderesse

n'a pas encore fait acte de procédure, la Cour, ou le Président si la Cour ne siége
pas, rend une ordonnance prenant acte du désistement et prescnvant la radiation
de l'affaire sur le rôle. Copie de ladite ordonnance est adressée par le Greffier à
la partie défenderesse.
2. Si.à la date de la réception du désistement, la partie défenderesse a déjà
fait acte de procédure, la Cour ou, si elle ne siège pas, le Président fixe un délai
dans lequel ladite partie doit déclarer si elle s'oppose au désistement. Si, dans le
délai fixé,il n'est pas fait opposition au désistement. celui-ci est réputé acquis et
la Cour ou, si elle ne siège pas, le Président rend une ordonnance en prenant acte
et prescrivant la radiation de l'affaire sur le rôle. S'il est fait opposition, l'instance
se poursuit. Paragraph 2 of Article 69, moreover, did not introduce the right to
re-submit the application ; jurisdiction having come to an end, such a
right was inconceivable. In order that such a right might be exercised,

it would have had to be based on a provision of the Rules which they
do not contain.

When the Court is seised of a dispute, such dispute may be terminated
by a judgment, but there are other means for putting an end to suits

before the Court. It is provided in Article 20, paragraph 2, of the
Rules, under heading XVIII, that the nature of the result of a suit shall
be stated and its imrnediate effect can only be its removal from the

list. As soon as an order has been made removing a case from the list,
this means that the case has a final result.
Discontinuance, as provided for in Articles 68 and 69 of the Rules1,
opens another possibility for obtaining the removal of a case from the

list. Tnese two Articles come together under the heading Settlement
and Discontinuance; these two situations are related to each other.
Under Article 68, parties can agree as to the resolution of the dispute,

either by means of a settlement or by not going on with the proceedings.
In both cases, the will of the parties puts an end to the suit, and the
Court places on record the agreement or the discontinuance and orders
the case co be removed from the list on a mere communication from

1 Article 68
If at any time before judgment has been delivered, the parties conclude an
agreement as to the settlement of the dispute and so inform the Court in writing,
or by mutual agreement inform the Court in writing that they are not going on
with the proceedings, the Court, or the President if the Court is not sitting, shall
make an order officially recording the conclusion of the settlement or the discon-
tinuance of the proceedings ;in either case the order shall direct the removal of
the case from the list.

Article 69
I. If in the course of proceedings instituted by means of an application, the
applicant informs the Court i'nwnting that it is not going on with the proceedings,
and if, at the date on which this communication is received by the Registry, the
respondent has not yet taken any step in the proceedings, the Court, or the Presi-
dent if the Court is not sitting, will make an order officially recording the discon-
tinuance of the proceedings and directing the removal of the case from the list.

A copy of this order shall be sent by the Registrar to the respondent.
2. If, at the time when the notice of discontinuance is received, the respondent
has already taken some step in the proceedings, the Court, or the President if the
Court is not sitting, shall fix a time-limit withinwhich the respondent must state
whether it opposes the discontinuance of the proceedings. If no objection is
made to the discontinuance before the expiration of the time-limit, acquiescence
will be presumed and the Court, or the President if the Court is not sitting, will
make an order officially recording the discontinuance of the proceedings and
directing the removal of the case from the list. If objection is made, the pro-
ceedings shall continue. 120 BXRCELONA TRrZCTION (OP. DISS. ARMAND-UGON)
gants. Evidemment les parties ne pourront pas revenir sur ce qu'elles

ont stipulé quant à leur accord. Dans un cas et dans l'autre, l'affaire
est définitivement enlevéeà la compétence de la Cour.
Le paragraphe 2 de l'article 6g.envisage un désistement qui nécessite
aussi l'accord des parties, celui de la partie défenderesse pouvant être
implicite. Dans le cas présent, il a étéexpressément donnéà la demande

de la partie demanderesse. Le désistement a donc étéacquis. La Cour
a pris acte des communications ainsi reçues des deux gouvernements
et a rayél'affaire du rôle, le procès ayant pris fin.

Cette disposition ne spécifiepas si elle prévoit un désistement d'action

ou un désistement d'instance, suivant la distinction établie par le droit
interne de certains Etats. Le Gouvernement belge appuie sa thèse sur
une conception dogmatique du désistement qu'il tire, par analogie,
du droit interne. Il soutient qu'un désistement suppose l'abandon de
l'instance et que, pour qu'il comprenne l'abandon de l'action, il doit

y avoir une renonciation à celle-ci. La vulnérabilité de cette thèse
réside précisémentdans le fait qu'elle se fonde sur une analogie, en tant
qu'elle applique à la procédure de la Cour les principes de l'ordre procé-
dura1 interne. Le Règlement a établi sur le désistement un régime
qui lui est propre et qui est indépendant du régime des législations

internes, lesquelles ne peuvent ni compléter ni interpréter le régime
du Règlement. Ce n'est pas dans un argument d'analogie qu'il convient
de chercher la penséequi a motivé le paragraphe 2 de l'article 69. Ce sont
le droit réglementaire et la procédure applicables devant la Cour inter-
nationale de Justice qui régissent la présente affaire et non le droit

interne de certains Etats.

Le Règlement ne fait aucune référenceà ces deux espèces de désiste-
ments. Lors de la revision du Règlement, en 1936, les membres de la
Cour permanente n'ont à aucun moment de leurs débats envisagéle fond

des désistements organiséspar les articles 68 et 69. Les membres de la
Cour savaient fort bien que le droit interne de certains Etats et quelques
règlements de tribunaux arbitraux mixtes acceptaient le désistement
d'instance et le désistement d'action, mais à l'occasion de la revision du
Règlement, aucune allusion ne fut faite à cette distinction. Le Règlement

ne poursuivait qu'un but, celui d'instituer un moyen pour mettre un
terme à la procédure ou à l'instance. Si l'objet du désistement était
simplement l'instance, la partie intéresséedevait l'exprimer clairement,
la compétence de la Cour étant consensuelle. Si les textes ayant trait au
désistement déposéspar les parties ne contenaient aucune indication,

alors se présentait un problème d'interprétation selon les règles du droit
international que la Cour permanente avait établies.

Le paragraphe 2de l'article 69 est une disposition de caractère conven-

tionnel qui ne permet aux parties que ce qu'elle prévoit ; on ne peut

118 the litigants. It is obvious that the parties cannot go back on what
they have said concerning their agreement. In either event the case
is finally and definitively removed from the Court's jurisdiction.
Paragraph 2 of Article 69 envisages a discontinuance which also

requires the agreement of the parties, though that of the respondent
party may be implied. In the present case, agreement was explicitly
given at the request of the Applicant Party. Discontinuance thus
became a fact. The Court placed the communications thus received
from the two Governments on record and ordered that the case should
be removed from the list, the suit having come to an end.

This provision does not specify whether it provides for a disconti-
nuance of the action or for a discontinuance of the proceedings, this
distinction being made in the municipal law of certain States. The
Belgian Government bases its argument on a dogmatic notion of dis-
continuance which it derives, by analogy, from municipal law. It

asserts that discontinuance presupposes the abandonment of the pro-
ceedings and that for it to comprehend abandonment of the action
renunciation thereof is necessary. The vulnerability of this argument
lies precisely in the fact that it is based upon analogy, in so far as it
applies the principles of municipal procedural law to the procedure of
the Court. The Rules have laid down the Court's own system for

discontinuance and this is independent of the systems of municipal
law, which can neither supplement nor interpret the system of the
Rules. It is not in an argument by way of analogy that the concept
which underlay the adoption of paragraph 2 of Article 69 must be
sought. It is the rules and the procedure which are applicable in the
International Court of Justice which apply in the present case and

not the municipal law of certain States.
The Rules do not make any reference to these two kinds of discon-
finuance.
At the time of the 1936 revision of the Rules, the. Members of the
Permanent Court did not, at any point in their discussions, consider
the substance of the discontinuances for which provision is made in

Articles 68 and 69. The Members of the Court knew quite well that
the municipal law of some States and the rules of some Mixed Arbitral
Tribunals allowed discontinuance of proceedings and also discontinuance
of the action ; but, on the occasion of the revision of the Rules, no allu-
sion was made to this distinction. The Rules were devised to achieve
only one purpose, naniely to institute a mearis of putting an end to the

proceedings. If the subject of the discontinuance was simply the pro-
ceedings, the party concerned was required to express this quite clearly,
as the jurisdiction of the Court is consensual. If the texts concerning
discontinuance filed by the parties contained no indication, there arose
a problem of interpretation according to the rules of international law
which the Permanent Court had laid down.

Paragraph 2 of Article69 is a provision which partakes of the nature
of a treaty and which allows parties to do only what it makes provisionétendre les attributions qu'ont les gouvernements à des situations non

prévues par ce texte. Les déclarations de droits de l'homme autorisent
celui-ci à faire tout ce que la loi ne lui interdit pas mais, en droit public,
la compétence des organes crééspar ce droit ne peut s'exercer que dans
les limites qui leur sont assignées; il ne leur est permis que ce qui est
prévu par les textes ou ce qui est absolument nécessaire pour réaliser
ce qui est prévu par les textes. Le paragraphe 2 ne prévoit pz:! le droit

de réintroduction d'une affaire après désistement, par la voie d'une
nouvelle requête ; il ne se dégage de ce texte aucune présomption
autorisant un tel droit. Il n'y a du reste aucun principe généralde droit
favorable à cette possibilité de nouvelle requête, qui pour êtreadmise
en droit interne doit s'appuyer généralementsur des textes.

Il n'y a pas de précédents à la Cour favorables à l'existence de ce
droit de réintroduction. C'est la première fois que la Cour est saisie d'une
telle prétention.

Le droit de réintroduction ne trouve aucun appui dans le Règlement ;
il ne peut se déduire de lapratique de la Cour ni de la pratique des Etats
en matière arbitrale. Les législations internes sur ce point sont diver-
gentes. Ce droit ne peut résulter que d'une réserve expresse contenue
dans le désistement accepté par les parties ; une telle réserve manque
dans le cas présent.

Le désistement homologué par la Cour a eu l'accord des Parties de

façon expresse. Les groupes privés avaient négociéun accord, lequel
impliquait un désistement préalable. Cet accord a étéreconnu par le
Gouvernement belge. L'objet de l'accord privé était le retrait définitif
de la demande et sa raison d'êtreétait que les groupes de la Sidro
et de la Fecsa puissent entamer des négociations afin de trouver une
solution à leur différend.

Le Gouvernement espagnol, en répondant à la demande que lui
faisait le Gouvernement belge d'accepter le désistement proposé, devait
tenir compte des règles de procédure de la Cour. Le désistement du
paragraphe 2 de l'articl69 n'est par lui-mêmeun désistement d'instance
que si la partie qui le déposeveut lui donner ce seul effet ; dans ce cas,

on doit l'indiquer clairement. Une considération d'ordre généralvient
appuyer cette manière de voir : la juridiction internationale ne doit
pas êtreéquivoque et le rapport entre Etats sur ce point ne doit pas être
impréciset se prêter àla chicane. D'autre part, le Gouvernement espagnol
entendait que le désistement proposépar le Gouvernement belge conte-
nait quelque chose de plus qu'un simple désistement d'instance.for. What the governments are entitled to do cannot be extended to
situations for which this text makes no provision. Declarations of
human rights authorize man to do everything which the law does not

prohibit him from doing but, in public law, the powers of the organs
created by such law can be exercised only within the limits assigned
to them. They are only entitled to do what is provided for in the
relevant texts or what is absolutely necessary in order to carry out
what is provided for in those texts. Paragraph 2 does not make
provision for the re-submission, by means of a new application, of a

case which has been discontinued. idor can any presumption in favour
of such a right be drawn therefrom. Furthemore, there is no general
principle of law in favour of the possibility of a new application which,
in order to be permissible in municipal law, must generally be based
upon actual texts.
There are no precedents in the Court in favour of the existence of

such a right of re-submission. This is the first time that such a claim
has corne before the Court.
Such a right of re-submission finds no support in the Rules ; nor can
it be inferred either from the practice of the Court or from the practice
of States in regard to arbitration. Municipal laws on this point are

divergent. This right can result only from an explicit reservation
contained in the discontinuance agreed to by the parties. Such a
reservation is lacking in the present case.

The discontinuance to which the Court gave its officia1approval was
expressly agreed to by the Parties. The private groups had negotiated
an agreement which implied a prior discontinuance and that agreement
was recognized by the Belgian Government. The object of the private

agreement was the final and definitive withdrawal of the claim and its
raison d'êtrewas that the Sidro and Fecsa groups might begin negotia-
tions in order to find a solution to their dispute.
The Spanish Government, when replying to the Belgian Government's
request that it should agree to the proposed discontinuance, had to
take account of the rules of procedure of the Court. Discontinuance

under paragraph 2 of Article 69 is not in itself a discontinuance of the
proceedings unless the party giving notice thereof wishes to give it
this effect only. In such a case it must be clearly indicated. A con-
sideration of a general nature supports this view : international juris-
diction must not be open to doubt and the relationship between States

on this point must not be imprecise and lend itself to quibbling. More-
over, the Spanish Government understood that the discontinuance
proposed by the Belgian Government contained something more than
a mere discontinuance of proceedings. Le principe de l'égalité desparties dans le procès est bien un principe

établipar l'article 35,paragraphe 2,du Statut, les dispositions du Règle-
ment et la jurisprudence de la Cour. La Cour internationale, en son
avis sur les Jugements du tribunal administratif (C.I.J. Recueil 1956,
p. 86), a dit : «Le principe de l'égalitéentre les parties découle des
exigences d'une bonne administration de justice. » Le désistement de

l'instance, en soi, favorise évidemment le demandeur, lui permettant de
corriger les erreurs d'une première requête en en réintroduisant une
nouvelle. C'est ce que reconnaît le Gouvernement belge dans ses obser-
vations : il a dû tenir compte des critiques que la première requêteavait
suscitées de la part du Gouvernement espagnol. Si le texte qui établit
le désistement ne dit pas clairement qu'il s'agit d'un désistement de

l'instance, la partie qui veut lui donner un tel effet doit préciser sans
détoursses intentions et le contenu de son avis de désistement. C'est pour
elle un devoir. Le défendeur est ainsi informédes intentions de la partie
qui se désiste, pour donner son assentiment ou son refus au désistement
en pleine connaissance de cause.

Le Gouvernement belge soutient que, si le Gouvernement espagnol
a commis une erreur de droit en interprétant sa lettre de désistement
comme un retrait définitifde la réclamation et non comme un désistement

de l'instance, il doit en supporter les conséquences. Il n'est pas démontré
que le paragraphe 2 de l'articl69 du Règlement ait prévuun désis +-ement
d'instance ni que cette disposition permette la réintroduction d'une
nouvelle requête. Pour savoir s'il y a eu une error jwris, il faut tout
d'abord savoir quel est le droit. C'est précisémentla question qui est
devant la Cour.

Si la pratique de la Cour autorise des modifications des conclusions
primitives, elle ne permet pas de changement de l'objet de la requête
qui doit demeurer le mêmetout au long de l'instance.

En conclusion, selon le paragraphe 2 de l'article69 du Règlement,

toute demande de désistement non assortie de réservedoit êtreconsidérée
comme une renonciation au droit de présenter une nouvelle requête.
De cette disposition, le droit de réintroduction ne ressort pas ; il doit
ressortir du texte de la demande de désistement.

S'il appartient à la Cour d'interpréter le contrat judiciaire du désiste-
ment intervenu, elle doit prendre en considération les preuves présentées

par les deux gouvernements qui ont déterminé sonadoption. Il convient
d'établir l'histoire des pourparlers entre les deux groupes privés ; c'est The principle of the equality of the parties to a suit is indeed a prin-
ciple laid down in Article 35, paragraph 2, of the Statute, in the pro-

vision of the Rules and in the case-law of the Court. The International
Court of Justice, in its Advisory Opinion on Judgments of the Adminis-
trative Tribunal of the I.L.O. (I.C.J. Reports 1956) said (at p. 86) :
"The principle of equality of the parties follows from the requirements
of good administration of justice." Discontinuance of the proceedings,

in itself, obviously favours the applicant, allowing it to correct the
mistakes contained in the first application when re-submitting a new
one. This was recognized by the Belgian Government in its Obser-
vations. It had to take account of the criticism which the first Appli-
cation had given rise to on the part of the Spanish Government. If
the text which notifies the discontinuance does not clearly state that

it is a discontinuance of the proceedings which is involved, the party
which wishes to give it such an effect must make clear without ambi-
guities its intentions and the purport of its notice of discontinuance.
It is in duty bound to do so. The respondent is thereby informed of
the discontinuing party's intentiori so that it can consent to or refuse
the discontinuance with a full knowledge of what is involved.

The Belgian Government maintains that, if the Spanish Government
made a mistake in law by interpreting its notice of discontinuance as a
final and definitive withdrawal of the claim and not as a discontinuance
of the proceedings, it must bear the consequences thereof. It has not
been shown that paragraph 2 of Article 69 of the Rules of Court pro-

vided for discontinuance of proceedings nor that that provision allows
for the re-submission of a new application. In order to know whether
there has been an error juris, it is first necessary to ascertain the law.
This is precisely the question that is before the Court.
Though the practice of the Court authorizes modifications in the
original-~ubmis;ions, it does not permit of a change in the subject of

the Application, which must remain the same throughout the pro-
ceedings.
In conclusion, according to paragraph 2 of Article 69 of the Rules
of Court, any notice of discontinuance which is not accompanied by
a reservation must be considered as a renunciation of the right to sub-

mit a new application. The right of re-submission does not follow
from this provision ; it must follow from the wording of the notice of
discontinuance.

If it is for the Court to construe the legal contract of discontinuance
which was arrived at, it must take into consideration the evidence
presented by the two Governments which led to its adoption. The
history of the conversations between the two private groups must beseulement après que l'on pourra apprécier la valeur et le contenu des
preuves.
On ne peut pas situer la demande de désistement dans le vide. Elle
ne se conçoit et elle ne se comprend que dans le cadre des conversations

et des pourparlers qui lui ont donné naissance. C'est à la lumière de
ces faits et des actes des intéressés qu'elledoit se lire et s'interpréter.
Il y a entre eux un enchaînement qui les relie à leur point d'aboutisse-
ment. Une relation s'établit entre eux qui dévoile l'objet et le motif

du désistement. Ces divers faits et actes, qui constituent le contexte du
désistement, sont liéspar une corrélation logique ; les uns sont l'explica-
tion des autres. Tous ces élémentsont eu leur influence sur la rédaction
de la demande de désistement, laquelle doit êtreconsidéréeen fonction

des circonstances dans lesquelles elle a étédéposéeet soumise à la déci-
sion de l'autre Partie. Ces conversations ont commencé entre la Sidro
et la Fecsa, avec comme intermédiaire choisi par les deux groupes le

comte de Motrico. Elles sesont poursuivies entrela Sidro et le Gouverne-
ment belge et finalement la formule a étécommuniquée au Gouverne-
ment espagnol. Les conversations, entamées au mois d'octobre 1960,
ont pris fin en avril 1961.

Les documents échangés pendant ces conversations doivent êtrepris
en considération par la Cour pour connaître l'intention commune des
Parties, laquelle doit prévaloir sur le sens littéral des termes. Tout acte
juridique est liéà la volonté réelle des intéressés. Les deux gouverne-

ments ont admis comme élémentde preuve la documentation relative
à ces conversations, laquelle a étésoigneusement examinée dans les
Ccritures et les plaidoiries.
Avant tout départ de celles-ci pour un arrangement amiable entre

les deux groupes, M. March, du groupe de la Fecsa, avait dressé une
note de base1. Le premier paragraphe de cette note de base était ainsi
rCdigé : «Du point de vue moral, le retrait définitif de la demande est
une condition préalable pour engager la négociation. ))Le texte espagnol

est le suivant : «Desde un punto de vista moral la retirada definitiva
de la demanda es condicion previa para la apertura de la negociacion. ))
Cette note était datée du 20 octobre 1960 et fut communiquée par le

comte de Motrico au groupe belge. C'est à la demande de celui-ci que le
comte de Motnco se mit en rapport avec M. March.

Deux jours après, le 22 octobre, le représentant dela Sidro, l'ingénieur

Hernandez, faisait savoir au comte de Motrico son désaccord avec la

l aI. Du point de vue moral, le retrait définitif de la demande esune condi-
tion préalable pour engager la négociation.

2. Une fois cette condition remplie,l'autre partie prendl'engagement d'entre-
prendre en toute bonne foi une négociation immédiate pour essayer de trouver
une solution qui fixerait une indemnité destinée aux actionnaires.
3. La réserve la plus absolue est indispensable au développement de ces pour-
parlers. Aucune publicitéde quelque sorte que ce soit ne seraautorisée tant que
l'on ne sera pas définitivement amvé à un accord éventuel.n made clear. It is only thereafter that it will be possible to judge the
value and the relevance of this evidence.

The notice of discontinuance cannot be situated in a void. Tt can
be conceived of and understood only in the context of the conversations
and discussions which gave rise to it. It is in the light of these facts
and of the acts of those concerned that it must be read and interpreted.

There is a sequence whkh links them with their culmination. The
relationship which is established between them discloses the purpose
of and the reason for the discontinuance. These various facts and
acts, which form the context of the discontinuance, are bound together
by a logical correlation. They explain one another. Al1these factors

influenced the drafting of the notice of discontinuance, and it must
be considered in relation to the circurnstances in which it was filed
and submitted for the decision of the other Party. These conversations
started between Sidro and Fecsa, with Count de Motrico as an inter-

mediary chosen by the two groups. They continued between Sidro
and the Belgian Government and, finally, the text of the notice was
communicated to the Spanish Government. The conversations which
began in October 1960 ended in April 1961.
The documents exchanged during these conversations must be taken

into consideration by the Court in order to ascertain the joint intention
of the Parties, which must prevail over the literal meaning of the words.
Al1legal acts are bound up with the real intention of those concerned.
The two Governments have recognized the documents relating to these

;,onversations as evidence and submitted them to careful examination
in their written pleadings and oral arguments.
Before any step was taken in these conversations towards a friendly
settlement between the two groups, M. March, of the Fecsa group, had
drawn up a basic memoranduml. The first paragraph of this basic

memorandum was drafted as follows : "From the moral standpoint,
the final withdrawal of the clainl is a prior condition for entering into
negotiations." The Spanish text is as follows : "Desde un punto de
vista moral la retirada definitiva de la demanda es condicion previa

para la apertura de la negociacion." This memorandum was dated
20 October 1960 and was communicated by Count de Motrico to the
Belgian group. It was at the request of that group that Count de
Motrico got into touch with M. March.
Two days later, on 22 October, the representative of Sidro, the

engineer M. HernAndez, informed Count de Motrico of his disagreement

1 "1.From the moral standpoint, the final withdrawalof the claim is a prior
condition forentering into negotiations.
2. Once this condition has been fulfilled, the other party undertakto enter
in al1 good faith into immediate negotiatioto seek a solution determinincom-
pensation for the shareholders.

3. Comp1ete.discretion is indispensablefor the development of these discus-
sions. No publicity of any kind will be permitted until a final agreement,,if
such is possible, is reached."condition du ((retrait définitif dela demande »,s'iln'étaitpas accompagné

d'un arrangement définitif entre les deux groupes. Pour M. Hernandez,
le ((retrait définitif de la demande ))comportait le ((désistement de
l'action judiciaire ))ou le ((retrait ))de l'action judiciaire (observations,
annexe 6, appendice 2, par. 2 et 3).

Le résident de la Sidro. M. Frère. dans sa lettre à M. Hernandez
du 2 décembre 1960, déclaraqu'il ne pourrait prendre le risque d'arrêter
la procédure sans qu'un accord fût signé (observations, annexe 6,
appendice 4).

M.Hernandez écrivitau comte de Motrico, dans un brouillon de lettres
à échanger du 24 janvier 1961, que, comme il y avait une volonté
formelle d'arriver à un règlement ... du litige relatif à la Barcelona
Traction », il acceptait entre autres principes, au nom de la Sidro,

le ((retrait définitif ...de l'action entreprise par le Gouvernement belge
contre le Gouvernement espagnol devant la Cour de La Haye ».
Le comitépermanent de la Sidro était d'accord - dit M. Hernandez
dans la mêmelettre - Dour demander ((de mettre fin à la ~rocédure

actuellement engagéeà La Haye, pour autant que vous veuilliez [comte
de Motrico] bien reconnaître que la présente lettre est le témoignage
fidèle de ce qui a étéconvenu dans nos entretiens » (observations,
annexe 6, appendice 5).

Le comte de Motrico, dûment autorisé par le groupe de la Fecsa,
manifesta dans une lettre à M. Hernandez du 25 janvier 1961, son
accord quant au projet de lettre précédent (observations, annexe 6,
appendice 5).

Dans un entretien que le président de la Sidro, M. Frère, eut avec
le ministre belge du Commerce extérieur le 26 janvier 1961, il le mit
au courant des conversations avec la Fecsa. Le ministre proposa plutôt
((une suspension de la procédure ...pendant une période de trois mois »

(observations, annexe 4, appendice 6).
Le groupe de la Fecsa et M. March ayant repoussé cette suspension,
le président de la Sidro, à l'instance du comte de Motrico, exprima,
dans sa lettre du 23 février 1961, qu'il était disposéd'obtenir du Gou-

vernement belge ((le retrait pur et simple de l'instance introduite devant
la Cour, afin de réaliser la condition considérée comme préalable à la
négociation proprement dite » (observations, annexe 6, appendice 6,
p. 104). En réponseà cette lettre, le comte de Motrico dit qu'«elle reflète
fidèlement ce qui a été traité dansles divers entretiens ))(observations,

annexe 6, appendice 6).
Deux projets de lettresde M.Frère au comtede Motrico, du 9mars 1961
(exceptions, annexe 71, documents I et 2),précédèrent lalettre envoyée
par M. Frère au comte de Motrico à la mêmedate (document no 3). Le

contenu du paragraphe 2 de cette dernière lettre était le suivant :

(J'ai exposé au ministre que le retrait préalable de l'instance

pendante à La Haye constituait en définitive la condition silzequa with the condition of "the final withdrawal of the claim", if it were not
accompanied by a final settlement between the two groups. M. Her-

nkndez considered that the "final withdrawal of the claim" involved
"the discontinuance of the legal action" or the "withdrawal" of the
legal action (Observations, Annex 6,Appendix 2,paras. 2 and 3).
The chairman of Sidro, M. Frère, in his letter of2 December 1960
to M. Hernandez, stated that he could not take the risk of stopping
proceedings before an agreement was signed (Observations, Annex 6,
Appendix 4).

M. Hernandez wrote to Count de Motrico, in one of the drafts for an
exchange of letters, date24 January 1961, that, as there was a "definite
wish to arrive at a ...settlement of the dispute relating to Barcelona
Traction", he accepted, on behalf of Sidro, among other principles,
the "final withdrawal of the action brought by the Belgian Government
against the Spanish Govemment before the Court at The Hague".
The Permanent Committee of Sidro had agreed-states M. Hernkndez
in the same letter-to ask the Belgian Government "to put an end to

the proceedings which are at present started in The Hague, if you
[Count de Motrico] will be good enough to recognize that this letter
faithfully represents what was agreed at Our talks" (Obsewatio:ls,
Annex 6,Appendix 5).
The Count de Motrico, being duly authorized by the Fecsa group,
in a letter to M. Hernkndez dated 25 January 1961, manifested his
agreement to the preceding draft letter (Observations, Annex 6,Appen-
dix 5).

In a talk which the chairmaLlof Sidro, M. Frère, had with the Belgian
Minister for External Trade on 26 January 1961, he told him of the
conversations with Fecsa. The Minister suggested that there should
rather be "a suspension of the proceedings .. .for a period of three
months" (Observations, Annex 4,Appendix 6).
The Fecsa group and M. March having rejected such a suspension,
the chairman of Sidro, at the instance of Count de Motrico, stated in

his letter of23 February 1961 that he was prepared to get the Belgian
Govemment to agree to "a pure and simple withdrawal of the proceed-
ings before the Court, so as to fulfil the condition regarded as a pre-
condition for the negotiations proper" (Observations, Annex 6,Appen-
dix 6). In answer to this letter Count de Motrico said that "it faith-
fully reflects whatwas dealt with in the various talks" (Observations,
Annex 6, Appendix 6).
Two drafts for letters from M. Frère to Count de Motrico, dated

9 March 1961 (Preliminary Objections, Annex 71,documents I and 2)
preceded the letter sent by M. Frère to Count de Motrico on the same
day (document No. 3). The contents of the second paragraph of this
last letter were as follows :

"1 explained to the Minister that the prior withdrawal of the
proceedings pending at The Hague was, in sum, a sinequa non non pour que la négociation sur les bases qui ont été définiesdans
notre échangede lettres du 23 et du 24 février dernier puisse avoir

lieu.a

Le IO mars 1961 une lettre de M. Frère au comte de Motrico lui
faisait savoir que le Gouvernement belge prendrait la responsabilité
du retrait après un échange de lettres entre l'ambassadeur de Belgique

et le ministre des Affaires étrangères d'Espagne, qui ne serait commu-
niqué à personne, réglant la procédure du retrait de l'instance et qui
resterait ignoré ((de la personne que j'ai rencontrée chez vous)) (lettre
jointe au rapport du comte de Motrico daté du 4 décembre 1963).

Cette proposition n'eut pas de suite, étant contraire à l'exigence no I

de la note de base, relative au retrait définitif de la demande.

Le 17 mars 1961, le comte de Motrico fait savoir au ministère des
Affaires étrangèresespagnoles l'étatdes conversations en vue du désiste-
ment. Dans une lettre du 18 mars suivant, le comte de Motrico dit à son

ministre que M. Frère l'a informé que le Gouvernement belge «a pris
la résolution de s'adresser à la Cour internationale de Justice en lui
demandant le retrait définitif de sa requête présentée contre notre
Gouvernement » et il ajoute« que le Gouvernement belge va rédiger sa
requête de retrait dans des termes analogues à ceux qu'on employa

à l'occasion d'un litige entre le Royaume-Uni et la Bulgarie ».
Le 21 mars le ministre espagnol des Affaires étrangères télégraphie
au comte de Motrico pour l'avertir de la position de son gouvernement
à l'annonce du désistement belge. Il déclareque l'affaire doit êtreconsi-
déréecomme close et que le désistement avait pour but de mettre

fin de façon définitive au litige entre les deux gouvernements.

Deux démarches se déroulent le 22 et le 23 mars entre le ministre
espagnol et l'ambassadeur belge à Madrid. L'ambassadeur cherche
d'abord à associer le Gouvernement espagnol au désistement ; sur le

refus du ministre, il lui fait connaître le texte de l'avis de désistement
déposéà la Cour internationale, qui devait fixer un délai,le priant de ne
pas donner son acceptation au désistement avant l'écoulement de ce
délai.

Voici le texte du désistement :

«A la demande deressortissants belges dont la protection a motivé
l'introduction de la requête ...[du] ...15 septembre 1958, mon
Gouvernement me charge de l'honneur de vous demander de bien

vouloir faire connaître à la Cour que, faisant usage de la faculté que
lui donne l'article 69 du Règlement de la Cour, il renonce à pour-
suivre l'instance introduite par laditerequête. )) condition for the negotiations on the bases defined in Our exchange
of letters o23 and 24 February last to take place."

On IO March 1961 M. Frère informed Count de Motrico by letter
that the Belgian Government would take the responsibility of Mth-

drawal after an exchange of letters between the Belgian Ambassador
and the Minister for Foreign Affairs of Spain, which would be cornmu-
nicated to no-one, governing the procedure for the withdrawal of the
proceedings and which would remain outside the. knowledge "of the
person whom 1 met in your company" (document annexed to the
Count de Motrice's report dated 4 December 1963).

This proposa1 produced no results, being contrary to the first require-
ment in the basic memorandum, concerning the final withdrawal of
the claim.
On 17 March 1961, Count de Motrico informed the Spanish Minister
for Foreign Affairs of the state of the conversations with a view to
discontinuance. In a letter dated the following day, Count de Motrico

told the Minister that M. Frère had informed him that the Belgian
Government had "decided to ask the International Court of Justice
for the definitive withdrawal of its application submitted against Our
Government" and he added that "the Belgian Govemment will draft
its notice of Mthdrawal in terms similar to those used in connection
with a dispute between the United Kingdom and Bulgaria".

On 21 March, the Spanish Minister for Foreign Affairs telegraphed to
Count de Motrico to inforrn him of his Government's position in respect
of the announcement of the Belgian discontinuance. He stated that
the case must be considered as closed and that the purpose of the dis-
continuance was to put an end definitively to the dispute between the
two Govemments.

There were two contacts, on 22 and 23 March, between the Spanish
Minister and the Belgian Arnbassador in Madrid. The Ambassador
first tried to associate the Spanish Government with the discontinuance.
On the Minister's refusal, he informed him of the text of the notice of
discontinuance filed with the International Court, which was to fix a
tirne-limit, asking him not to communicate his acceptance of the dis-

continuance before the expiry of the time-limit.

The following is the text of the notice of discontinuance

"At the request of Belgian nationals the protection of whom was
the reason for the filing of the application.of]15September 1958,
1 am directed by my Government and 1have the honour to request

you to be good enough to inform the Court that, availing itself
of the right conferred upon it by Article69 of the Rules of Court,
my Government is not going on with the proceedings instituted by
that application."126 BARCELONA TRACTION (OP. DISS. ARMAND-UGON)

La Fecsa s'oppsse à entamer des négociations privées avec la Sidro,
tant que le désistement ne sera pas approuvé par la Cour. Le Gouverne-
ment espagnol, à la demande du Gouvernement belge, consent à ne pas
formuler d'opposition au désistement, dans sa lettre à la Cour du
5 avril 1961.

La Cour internationale, par ordonnance du IO avril 1961, homologue
le désistement, prescrivant la radiation de I'affaire du rôle.

Une circulaire du ministère des Affaires étrangères espagnol du

13 avril 1961 fait savoir à ses missions diplomatiques à l'étranger que
le Gouvernement belge a formulé ((le désistement de l'action » entre-
prise et que l'affaire s'est terminée ((par une reconnaissance tacite du
bon renom de l'Espagne 1).

Tels sont lesfaits et documents essentiels quiont abouti au désistement.

Passons maintenant à l'examen des preuves pour établir les con-
clusions à tirer.
Il n'est pas nécessaire de s'attarder à établir lequel des deux groupes
a pris l'initiative des conversations. La Fecsa du moins n'a pas fait le

premier pas. D'abord, elle a mis une condition préalable à toute négocia-
tion, qu'elle a maintenue fermement à travers toutes les phases des
conversations. Elle n'a admis ni la suspension de la procédure, ni la
prolongation du délaipour la présentation des observations et conclu-

sions belges. Elle s'est opposée à toute suggestion contraire au retrait
définitif de la demande. Elle n'a voulu se prêter aux négociations
qu'une fois que le désistement fut accepté par les deux gouvërnements
et homologuépar la Cour. Ces faitsdémontrent l'intérêt évident qu'avait

la Sidro d'aborder la solution du différend.

Des documents qui précédèrent le désistement finalement adopté,
doivent ressortir la signification et le sens de la condition préalable
de la note de base qui fut acceptée par le groupe belge.

Quelest le contenu juridique des mots «retrait dCfinitifde la demande ))

(retirada defînitiva de la demanda)? Dèsle deuxième jour après que le
groupe belge en eut pris connaissance, par M. Hernandez, celui-ci a bien
compris que ce retrait supposait le « retrait définitif de l'action judi-
ciaire ».Postérieurement, il renouvelle cette manière de voir, acceptant

au nom de la Sidro le principe du (retrait définitif de l'action judiciaire
entreprise par le Gouvernement belge contre le Gouvernement espagnol ».
Dans cette mêmelettre, il assimile ce retrait de l'action à la phrase
« mettre fin à la procédure engagée actuellement à La Haye ». Fecsa was opposed to beginning the private negotiations with Sidro
for so long as the discontinuance had not been approved by the Court.
The Spanish Government, at the request of the Belgian Government,
agreed, in its letter to the Court o5 April 1961, not to oppose the dis-
continuance.
The International Court, in an Order dated IO April 1961, placed
the discontinuance on record and ordered the case to be removed from

the list.
A circular from the Spanish Ministry of Foreign Affairs, dated
13 April 1961, informed its diplomatic missions abroad that the Belgian
Government had "indicated its discontinuance of the action" instituted
and that the case had "ended in tacit recognition of Spain's good
name".
These are the essential facts and documents whic1.iled up to the

discontinuance.

Let us now turn to an examination of the evidence in order to estab-
lish what conclusions are to be drawn.
It is not necessary to spend long clver determining which of the two
Fecsa at least did
groups took the initiative for the conversations.
not take the first step. In the first place, it laid downprior condition
for any negotiations, which it firmly maintained throughout al1 the
phases of the conversations. It would not allow either the suspension
of the proceedings or the extension of the time-limit for the filing of
the Belgian Observations and Submissions. It opposed any suggestion
contrary to the final withdrawal of the claim. It did not wish to be

a party to negotiations until the discontinuance had been accepted by
the two Governments and placed on record by the Court. These
iacts show the obvious interest which Sidro had in seeking to resolve
the dispute.
* * *

The significance and meaning of the prior condition stipulated in

the basic memorandum, which was accepted by the Belgian group,
must be sou~ht in the documents that ~receded the discontinuance
which was fiially adopted.
What is the legal purport of the words "final withdrawal of the claim"
(retirada definitiva de la demanda)? Right from the time when, two
days later, the Belgian group leamed about it from M. Hernkndez,
the latter understood quite well that this withdrawal meant the "final

withdrawal of the court action". Subsequently, he repeated this view
when accepting on behalf of Sidro the principle of the "final withdrawal
of the court action brought by the Belgian Government against the
Spanish Government". In that sarne letter, he assimilated this with-
drawal of the action to the phrase "put an end to the proceedings which
are at present started in The Hague". Aucun doute ne ressort de ces manifestations de la part de la Sidro ;
il s'agit de renoncer définitivement à saisir la Cour de l'affaire de la
Barcelona Traction. C'est bien une renonciation à porter l'affaire devant
la Cour. Telle est aussi l'opinion du groupe de la Fecsa. Il n'y a donc
dèsle début aucune contestation sur la portée de la condition préalable,
aucune contestation sur le sens de cette phrase.

Le président de la Sidro dit le23 février1961 qu'il est disposéàobtenir
du Gouvernement belge « le retrait pur et simple de l'instance introduite
devant la Cour, afin de réaliser la condition considérée comme préalable
à la négociation proprement dite ». C'est sur cette manifestation que
le président de la Sidro a sa première entrevue avec le ministre belge

du Commerce extérieur. Cette autorité a dû êtreinformée de la préten-
tion du groupe espagnol et du sens de la condition préalable, comme
l'a fait savoir au comte Motrico le président de la Sidro dans sa lettre
du g mars, en se référant aux lettres des 23 et 24 février précédent.
Or, une des bases de la lettre du 23 février était le retrait pur et simple
de l'instance afin de réaliser la condition considérée commepréalable.
Le retrait pur et simple de l'instance signifie pour le président Frère le

retrait de la requête, afin de satisfaire à la note de base. Les Belges
considèrent excessive la ((condition préalable », comme le démontrent
leurs efforts pour l'atténuer. Le ministre belge essaye de la remplacer
par d'autres conditions : suspension de la procédure, délai pour la pré-
sentation des observations, lettres secrètes, demandes de garanties.
Pour eux, il est évident que cette condition préalable est autre chose

qu'un désistement d'instance.

Cette mêmevue est confirmée par la lettre du 18 mars du comte
de Motrico à son ministre.
La requêtede désistement adressée au Président de la Cour est ainsi
conçue :

« A la demandederessortissantsbelges dont la protection a motivé
l'introduction de la requête ...mon gouvernement me charge ...
de vous demander ...que faisant usage de la facultéque lui donne
l'article69, il renonce à poursuivre l'instance introduite par ladite
requête. »

C'est la mêmeformule de désistement que dans l'affaire Borchgrave,
lequel était cependant un désistement définitif qui avait été utilisédans
une autre affaire entre le Gouvernement belge et le Gouvernement
espagnol.
Ce désistement a étéintroduit à la demande de la Sidro, seul ressor-
tissant belge intervenant dans les pourparlers. Aucune autre preuve n'a

étéprésentée sur l'intervention d'autres ressortissants belges auprès
de leur gouvernement. La requête de désistement établit un lien entre These utterances on the part of Sidro leave no room for doubt. It
was a question of finally and definitively renouncing the seising of the
Court of the Barcelona Traction case. It was indeed a renunciation

of the bringing of the case before the Court. Such was the opinion
of the Fecsa group too. There was thus from the outset no divergence
as to the significance of the prior condition, no divergence as to the
meaning of this phrase.
On 23 February 1961, the chairman of Sidro stated that he was
prepared to get the Belgian Government to agree to the "pure and
simple withdrawal of the proceedings before the Court so as to fulfil

the condition regarded as a pre-condition for the negotiations proper".
It was in accordance with that statement that the chairman of Sidro
had his first interview with the Belgian Minister for External Trade.
The Minister must have been informed of the demand made by the
Spanishgroup and of the meaning of the prior condition, as the chairman
of Sidro told Count de Motrico in his letter of 9 March, referring to the
letters of the previous 23 and 24 February. But one of the bases of
the letter of 23 February was the pure and simple withdrawal of the

proceedings so as to fulfil the condition regarded as a pre-condition.
The pure and simple withdrawal of proceedings signified to the Chair-
man, M. Frère, the withdrawal of the Application, so as to comply
with the basic memorandum. The Belgians considered the "prior
condition" to be excessive, as is shcwn by their efforts to attenuate it.
The Belg~an Minister tried to get other conditions substituted for it-
suspension of the proceedings, extension of the the-limit for the presen-

tation of the Observations, secret letters, requests for guarantees.
It is obvious that, in their view, this prior condition was something
other than a discontinuance of the proceedings.
This same view is confirmed by the letter of 18 March from Count de
Motrico to his Minister.
The notice of discontinuance sent to the President of the Court
read as follows :

"At the requestof Belgiagznationals the protection of whom was
the reason for the filing of the Application ... 1 am directed by
my Government ... to request you ... that, availing itself of the
right conferred upon it by Article 69 ... [it] is not going on with
the proceedings instituted by that Application."

This is the same formula for discontinuance as in the Borchgrave

case which, however, was a final discontinuance and it had been used
also in another case between the Belgian Government and the Spanish
Government .
This discontinuance was filed at the request of Sidro, the only Belgian
national taking part in the talks. No evidence was brought as to the
intervention of any other Belgian nationals with their Government.
The notice of discontinuance establishes a link between the wordingle texte de cet acte et l'accord négociéentre la Sidro et le groupe de la
Fecsa et accepté par le ministre du Commerce extérieur. Le conseil
belge dit : «En faisant sa déclaration de désistement du 23 mars 1961,

le Gouvernement belge entendait simplement donner suite à l'exigence
préalable formulée par Juan March. » Le motif de désistement est un
accord entre deux groupes pour que soit mis fin au procès,pour entamer
une négociation avec la Fecsa. Le même conseil belge assure que le
Gouvernement belge a accepté ((le retrait définitif de la requête ... pour

permettre les négociations ».

Les deux groupes étant arrivés à un accord sur la note de base, c'est-
à-dire sur le retrait définitifde la demande, le groupe belge, pour honorer
cet accord, demande à son gouvernement de prendre les mesures néces-

saires à cet effet. Ce gouvernement ne pouvait se prévaloir de l'article 6s
du Règlement, car aucun accord n'était intervenu entre les Parties au
procès ; il dut alors utiliser la voie de l'artic69, paragraphe 2, lequel
permet une demande unilatérale de désistement qui doit quand même
avoir le consentement exprès ou implicite de l'autre partie. C'est ce

qu'il fit. Le Gouvernement belge demanda à la Cour un désistement
fondé sur l'accord des deux groupes et cet accord prévoyait le retrait
définitif de la demande dont la Cour était saisie. L'avis de désistement
du Gouvernement belge faisait sien l'accord auquel avaient abouti les
deux groupes.

Le Gouvernement belge n'a pas manqué d'êtreinformé par le prési-
dent de la Sidro du contenu de la phrase de la condition préalable
((retrait définitif de la demande », tel qu'il l'avait fait connaître au
comte de Motrico. La Sidro a donc demandé au Gouvernement belge

un retrait définitif de la requête introduite devant la Cour. Une pro-
messe a été faitepar la Sidro au groupe espagnol, créant un engagement
de retirer de façon définitive la demande dont la Cour avait étésaisie.
Le Gouvernement belge a fait sien cet engagement en se désistant au
nom de la Sidro, sans aucune condition. Les preuves administrées sont
donc concluantes et décisives; pas mêmele moindre doute ne peut être

permis - sur le sens et la portéedu désistement. Le désistement dans ses
fonctions médiates recherche les mobiles qui lui ont donné naissance
lesquels lui donnent prédominance sur l'expression matérielle. Cet acte,
dans le cas présent, est marqué par des mobiles déterminants, qui sont
dCcisifspour son appréciation.

Le Gouvernement belge a soutenu dans ses plaidoiries que la condi-
tion no I de la note de base a été satisfaite par le dépôt de son avis de

désistement. Or, cette note de base exigeait, pour entreprendre une
négociation entre les deux groupes, le retrait définitif de la demande,
exigence qui supposait, comme on doit le déduire de son texte, qu'une of that document and the agreement negotiated between Sidro and the

Fecsa group and accepted by the Minister for External Trade. Counsel
for Belgium said : "In making its declaration of discontinuance on
23 March 1961 the Belgian Government was merely intending to meet
the preliminary demand made by Juan March." The reason for the dis-
continuance was an agreement-bëtween the two groups that the suit
should be brought to an end so that negotiations with Fecsa could be

started. The same Counsel for Belgium stated that the Belgian Govern-
ment accepted "the final withdrawal of the Application ...to permit of
negotiations".
The two groups having arrived at an agreement on the basic memoran-
dum, that is to say, on the final withdrawal of the claim, the Belgian
group, in order to honour that agreement, asked its Government to

take the necessary measures to that effect. That Government could
not avail itself of Article68 of the Rules, since no agreement had
been reached between the Parties to the action ; it therefore had to
utilize the means available under Articl69, paragraph 2,which permits
of a unilateral notice of discontinuance, which must nevertheless
receive the express or implicit consent of the oiher Party. That is

what it did. The Belgian Government notified the Court of a discon-
tinuance based on the agreement between the two groups, and that
agreement provided for the final withdrawal of the claim before the
Court. The Belgian Government's notice of discontinuance endorsed
the agreement reached by the two groups.
The Belgian Government must have been informed by the Chairman

of Sidro of the meaning of the phrase in the prior condition "final
withdrawal of the claim", just as he had informed Count de Motrico
of it. Sidro consequently asked the Belgian Government for a final
withdrawal of the Application filed with the Court. Sidro had made
a promise to the Spanish group, creating an obligation finally to with-
draw the claim of which the Court had been seised. The Belgian Gov-

ernment took over that obligation by discontinuing, on behalf of Sidro,
without any condition. The evidence adduced is therefore conclusive
and decisive ; not even the slightest doubt is possible as to the meaning
and the scope of the discontinuance. The discontinuance is the expres-
sion of the intentions underlying it and these override the words

actually employed. This act, in the present case, bears the mark of
decisive intentions and these must be conclusive in construing it.

It was maintained in oral argument on behalf of the Belgian ~okern-
ment that the first condition of the basic memorandum was satisfied
when it filed its notice of discontinuance. The basic memorandum,
however, required, for the opening of negotiations between the two
groups, the final withdrawal of the claim, a requirement which presup-nouvelle demande ne pourrait êtreintroduite une fois que le désiste-
ment aurait été acquis. Le retraitdéfinitide la demande, selon le point I
de la note de base, visait un retrait définitifet non un simple retrait
dela demande ;il faut donner sonsens àl'adjectif définitifLes mots n'ont
de valeur que pour autant qu'ils sont l'expression d'une idée; or, il faut
supposer qu'en adoptant une idée ona voulu quelque chose de déterminé.

Admettre l'interprétation belge conduirait à soutenir que le groupe
espagnol a demandé simplement un désistement d'instance. Or, une telle
interprétation n'est pas sérieuse et se heurte aux faits admis, non-
suspension de la procédure, non-prolongation du délai pour présenter
les observations, non-acceptation des lettres secrètes. Le retrait de la

demande devait êtredéfinitif.

Pour fixer le sens dela phraserretrait définitifde la demande », on doit
encore souligner que le retrait devait se relier à un but d'ordre moral.
Le Gouvernement espagnol et M. March avaient étémalmenés dans la
requêteet le mémoire belges. M. March s'opposait à toute négociation

avec la Sidro tant que ces écrits ne seraient pas retirés définitivement
du prétoire. Le retrait ne devait pas se limiter à la seule instance en
cours ; il devait être définitif.Cet adjectif a une seule acception : l'aban-
don complet et total des assertions incluses dans les documents. On ne
demandait pas un abandon provisoire, on demandait un retrait définitif
de la demande ; il faut bien souligner le mot définitif.D'après l'engage-

ment pris, ces assertions ne pouvaient être reprises plus tard. Une
simple suspension de la procédureles aurait n:?intenues. Le point de vue
moral pouvait uniquement êtresauvegardé par le retrait définitif de
l'affaire. Un désistement d'instance ne comportait pas cet effet.

Le sens du contrat judiciaire de désistement se voit encore confirmé
par le comportement des deux groupes et des gouvernements et par
l'analyse juridique de ces comportements.
Ceux-ci n'ont pas la même importance et la même signification.
Ils sont cependant une source pour l'interprétation du désistement.
Ils impliquent aussi une renonciation à porter l'affaire devant la Cour.

Quelques-uns de ces comportements ont été provoqués par 'des
personnes privées cherchant une négociation et d'autres émanent des
Parties au procès elles-mêmes. Ils doivent être examinés dans leur
ensemble, pour leur attribuer un sens précis et pour rechercher l'objet
et l'intention de l'acte réalisé.

((La pratique internationale connaît des cas dans lesquels on
a discuté le point de savoir si les faits alléguéspouvaient être
interprétéscomme une renonciation, tandis qu'elle ne connaît pas
de cas dans lesquels aurait été affirméela nécessitéd'une déclara-posed, as must be inferred from its wording, that no new claim would
be b~ought once the discontinuance had taken place. Final withdrawal
of the clGrn,in accordance with the first point ii the basic memorandum,
meant a final withdrawal and not a mere withdrawal of the claim. The

adjective final must be given its meaning. Words are of value only
in so far as they express an idea and it must be supposed that when
a particular notion is chosen something precise is intended.
To admit the Belgian interpretation would lead to holding that the
Spanish group merely asked for a discontinuance of the proceedings.

But such an interpretation is not seriously possible and would run
counter to the recognizd facts-non-suspension of the proceedings,
non-extension of the time-limit for the presentation of Observations,
non-agreement to secret letters. The withdrawal of the claim had to
be final.
In oder to establish the meaning of the phrase "final withdrawal

of the claim", it must be emphasized further that such withdrawal had
to serve a purpose of a moral nature. The Spanish Government and
M. March had been abused in the Belgian Application and Memorial.
M. March was opposed to any negotiations with Sidro so long as those
documents were not finally withdrawn from the Court. The with-
drawal was not to be limited solely to the proceedings then pending,

but had to be final. This adjective has only one accepted meaning-
the complete and total abandonment of the assertions contained in the
documents. It was not a provisional abandonment that was asked
for but the final withdrawal of the claim. The word final must be
given its full emphasis. According to the undertaking entered into,

these assertions could not be repeated again later. A mere suspension
of the proceedings would have maintained them. The moral aspect
could be safeguarded only by the final withdrawal of the case. A dis-
continuance of the proceedings would not have this effect.
The meanintr of the iudicial contract of discontinuance is further
confirmed by the conduct of the two groups and of the Governments,

and by the legal analysis of their conduct.
Their acts have not the same importance or the same significance.
They are however a source which enables us to construe the discon-
tinuance. They also imply abandonment of reference of the case to
the Court.

Some of these acts were brought about by private parties seeking the
holding of negotiations, whilst other acts emanate from the actual
Parties to the case. They must be examined as a whole, in order to
attribute a precise meaning to them and in order to ascertain the pur-
pose and intention of the act performed.

"Cases are known in international practice where it was debated
whether the facts alleged could be interpreted as a renunciation,
but no cases are known in which the need for an explicit statement
was affirmed. The intention to abandon a right may be inferred tion expresse. La volonté d'abandonner un droit pourra se déduire
également de l'attitude du sujet. )(Anzilotti,Cours, tome 1,p. 350.)

Un fait saillant émergede ces comportements. Le groupe de la Fecsa
a fait du retrait définitif de la requête une condition sine qua non,
de toute négociation, comme le reconnaît le président de la Sidro.
Cette condition a étéréitérée à de nombreuses reprises, chaque fois
qu'une nouvelle tentative était faite pour l'éliminer. Legroupe de la
Fecsa a maintenu fermement sa position du mois d'octobre 1960 au

mois de mars 1961. Sans retrait définitif de la demande, pas de négocia-
tion. Une telle exigence était connue de la Sidro et du ministre du
Commerce extérieur. Le Gouvernement belge était donc informé de la
nature du désistement que réclamait avec insistance le groupe espagnol.

La lettre du IO mars adressée par M. Frère au comte de Motrico
permet de dégager une présomption favorable quant à la thèse suivant
laquelle le groupe belge savait que la demande de M. March se référait
à un retrait définitif de la demande introduite auprès de la Cour. Par
cette lettre.on &tendait donner un caractZre conditionnel au retrait

inconditionnel exigépar la note de base. En effet, on y proposait que
l'ambassadeur belge eût un entretien avec le ministre des Affaires
étrangères à Madrid pour échanger des lettres réglant la procédure du
retrait de l'instance qui ne seraient communiquées à personne, pas même
à M. March. Une fois la négociation terminée, ces lettres pourraient être
restituées ou détruites. Sur cette base, le Gouvernement belge prendrait

la responsabilité du retrait, mais comme un minimum indispensable.

Cette proposition belge indiquée, comme le dit M. Frère, par le con-
seil juridique du ministère des Affaires étrangères, tendait évidemment
à modifier la condition de la note de base relative au retrait définitif

de la demande. Ainsi éludait-on l'objectif poursuivi par cette note. Cela
démontrait que M. Frère s'apercevait du contenu de cette exigence
et de sa portée juridique. On trouve dans la lettre de M. Frère une
reconnaissance, de la part du Gouvernement belge, du fait que le désiste-
ment demandé n'était pas un simple désistement d'instance, car sans
cette interprétation, la lettre n'aurait pas d'explication raisonnable ;

on voit mal pourquoi le Gouvernement belge aurait hésitéà engager sa
responsabilité si le désistement en question n'avait viséque la procédure.

La proposition du ministre du Commerce extérieur de remplacer cette
condition par une suspension de la procédure pendant trois mois, per-
mettant ainsi aux intéressés denégocier pendant ce délai, fut rejetée

in limine par le groupe de la Fecsa qui la considérait comme incompa-
tible avec la note de base. D'autres propositions faites par M. Frère, also £rom the attitude of the party concerned." (Anzilotti, Cours
de droit international, Vol. 1, p. 350.)

One salient fact emerges from this conduct. The Fecsa group made

of the final withdrawal of the Application a sine qua non condition for
any negotiations, as is recognized by the chairman of Sidro. This
condition was reiterated on numerous occasions, each time there was
a fresh attempt to get rid of it. The Fecsa group firmly maintained
its position £rom October 1960 to March 1961. No final withdrawal
of the claim : no negotiations. Such a requirement was known to

Sidro and to the Minister for External Trade. The Belgian Government
was thus informed of the nature of the discontinuance insistently
demanded by the Spanish group.

The letter dated IO March sent by M. Frère to Count de Motrico
gives rise to a presumption in favour of the argument that the Belgian
group were aware that M. March's démand referred to a final withdrawal
of the claim brought before the Court. In that letter an attempt was
made to give a conditional character to the withdrawal instead of the

unconditional character insisted on in the basic memorandum. It was
suggested in that letter that the Belgian Ambassador should have a
talk with the Minister for Foreign Affairs in Madrid with a view to
exchanging letters governing the-procedure for the withdrawal of the
proceedings. These letters would be cornmunicated to no-one, not
On the conclusion of the negotiations, they could
even to M. March.
be returned or destroyed. On this basis-but as an indispensable
minimum-the Belgian Government would take the responsibility for
the withdrawal.
This Belgian proposal, which was suggested, as M. Frère says, by
the legal adviser to the Ministry of Foreign Affairs, was obviously

intended to modify the requirement of the basic memorandum for the
final withdrawal of the claim. Thus the finality sought by that memo-
randum would be avoided. This shows that M. Frère was aware of
the meaning of this requirement and of its legal effect. There is in
this letter from M. Frère a recognition by the Belgian Govemment of

the fact that the discontinuance asked for was not a mere discontinuance
of the proceedings, for without such an interpretation, there could be
no reasonable explanation for the letter, and it is difficult to see why
the Belgian Government would have hesitated to commit itself if the
discontinuance in question related only to the proceedings.
The proposa1 by the Minister for Extemal Trade to replace this con-

dition by a suspension of the proceedings for three months, thereby
allowing the Parties concerned to negotiate during this time, was
rejected in limine by the Fecsa group, which considered it incompa-
tible with the basic memorandum. Other proposals by M. Frère,avec la connaissance des autorités belges, eurent le mêmesort (retrait
sur accord des intéressés, prorogationdu délai pour la présentation des
observations et conclusions belges, procédure d'échange de lettres
secrètes et mesures de garanties). Si le Gouvernement belge croyait

que le retrait sollicitéimpliquait seulement un désistement de l'instance,
qui devait se traduire en définitive par une suspension de celle-ci,
pourquoi présenter proposition sur proposition pour ne pas accéder
au retrait demandé ?Ce que savaient le ministre du Commerce extérieur,
le président de la Sidro, M. Hernandez, le comte de Motrico, le groupe

de la Fecsa, c'est que le retrait définitif de la demande du rôle de la
Cour équivalait à la renonciation de poursuivre l'affaire devant la Cour.
Dans les pourparlers, ily eut donc un engagement précis, avec objet
et intention bien déterminés, et non un simple échange d'opinions ;
un accord des groupes privés fut négociéet accepté tel quel par le

Gouvernement belge, qui le proposa au Gouvernement espagnol.

Si la proposition de suspension fut refusée à cause de sa faible portée
procédurale, on ne conçoit pas qu'on ait préféré une simple renonciation
à l'instance. La suspension avait encore le mérite de sauvegarder les

exceptions préliminaires dans le cas où la procédure reprendrait plus
tard en cas d'échecdes négociations. Le refus de suspension ne concorde
pas avec le désistement d'instance de la thèse belge. La non-acceptation
de la suspension est aussi un refus d'un désistement d'instance. La note
de base exigeait quelque chose de plus du point de vue procédural

qu'un simple désistement d'instance.

L'intérêtde la Sidro à négocierapparaît clairement tout au long des

pourparlers. La lettre du 23 février1961 de M. Frère en est un exemple ;
il est convaincu, ou du moins il le dit, qu'il existe une base pour un
arrangement favorable aux actionnaires de la Barcelona Traction.
L'intermédiaire affirme que la négociation peut débuter immédiatement
après le retrait de la demande et qu'une solution pourrait êtretrouvée

dans une quinzaine de jours. «C'est - dit M. Frère - en raison de ces
circonstances qu'il va faire un nouvel effort pour amener le gouvernement
à retirer purement et simplement l'instance actuellement en cours. r Dès
le retrait de la demande, s'ouvrirait une négociation propice aux intérêts
belges qui aboutirait à des résultats concrets. C'est en connaissance de

cet état d'esprit que le Gouvernement belge s'est décidé à accéder au
désistement demandé par la Sidro (observations, annexe 6, appendice 7,
p. 108). Cegouvernement a pris la décisionde retirer la demande, comme
le lui demandait la Sidro, pour que le différend soit réglépar voie de
négociations directes entre les deux groupes d'intérêts.made with the knowledge of the Belgian authorities, met the same fate
(withdrawal on agreement being reached by those concemed, an exten-
sion of the tirne-limit for the presentation of the Belgian Observations
and Submissions, the procedure of an exchange of secret letters and
guarantees). If the Belgian Government believed that the withdrawal
asked for involved only a discontinuance of the proceedings which,
in the last analysis, would be tantamount to a suspension, why did it
submit proposa1 after proposa1 in order to avoid agreeing to the with-
drawal asked for? What the Minister for External Trade, the chairman
of Sidro, M. Hernandez, Count de Motrico, and the Fecsa group knew
was that the final withdrawal of the claim from the Court's list meant
abandonment of the pursuit of the case before the Court. In the
talks, there was accordingly a precise undertaking, with a well-defined

subject and intention, and not a mere exchange of views. An agree-
ment between the private groups was negotiated and acc'epted as it
stood by the Belgian Government, which proposed it to the Spanish
Government .
If the proposa1 for a suspension was declined on account of its in-
significant procedural effect, it is inconceivable that a mere abandon-
ment of the proceedings would have been preferred. A suspension
would still have had the merit of preserving the Preliminary Objections
should the proceedings be recommenced later, in the event of a break-
d6wn in the negotiations. The .refusal of a suspension does not fit in
with the discontinuance of the proceedings as contended for by Belgium.
Refusa1 to accept a suspension was also a refusa1 of a discontinuance
of the proceedings. The basAc memorandum required something
more from the procedural point of view than a mere discontinuance of
proceedings.
*

Sidro's interest in negotiating can be seen clearly throughout the
talks. The letter of23 February 1961 from M. Frère is one example
of this. He was convinced-or at least he says he was-that a basis
existed for a settlement favourable to the Barcelona Traction share-
holders. The intermediary stated that negotiations could begin irnrne-
diately after the withdrawal of the claim and that a solution might be
found within a fortnight. It was, said M.Frère by reason of the fore-
going that he was prepared to make a new effort to induce the Belgian
Govemment purely and simply to withdraw the proceedings then
pending. As soon as this withdrawal of the claim had taken place
negotiations would open propitious to the Belgian interests, which
would lead to concrete results. It was with a knowledge of this state
of mind that the Belgian Govemment decided to agree to the discon-

tinuance asked for by Sidro (Obsenrations, hnex 6, Appendix 7,
p. 108).The Belgian Government took the decbi6n to withdraw the
claim, as Sidro asked it to do, in order that the dispute might be settled
by direct negotiations between the two groups of interests. Au moment de donner son accord au désistement sur la demande

expresse du Gouvernement belge, le Gouvernement espagnol était en
présencedes faits suivants :une lettre du comte de Motrico luiannonçant
le retrait définitif de la demande de la part du Gouvernement belge
et que ce désistement contiendrait la mêmeréserve que celui du Gouver-
nement britannique en l'affaire avec la Bulgarie. A cette occasion,
le Gouvernement britannique s'était réservé« tous les droits en con-

nexion avec la réclamation du Royaume-Uni contre la Bulgarie ». Or,
le désistement proposé au Gouvernement espagnol ne contenait aucune
réserve de ce type. Le Gouvernement espagnol, vu le texte du désiste-
ment, ne put douter en y donnant son accord qu'il s'agît d'un désiste-
ment définitif, sans aucune réserve, et non d'un désistement d'instance.

Le conseiller juridique de M. Frère avait déclaréau comte de Motrico
que le désistement contiendrait la réservebritannique rappelée ci-dessus.
M. Frère, au nom de la Sidro, avait pris la décisiond'accepter la note
de base, laquelle était connue du Gouvernement belge. L'intermédiaire,
au courant de cette position, la fit connaître à son gouvernement au
moment où celui-ci allait êtresaisi de la requête de désistement. Une

partie qui laisse croire à son adversaire qu'elle prend une position
de droit déterminée, en l'espècele retrait définitif de la demande,
ne peut revenir sur son attitude et soutenir qu'elle a voulu une autre
chose, un simple désistement d'instance. C'est l'application de l'idée
de bonne foi aux termes de laquelle on créeun titre en faveur de son
adversaire en observant un certain comportement.

D'autre part, pour le Gouvernement espagnol, ck désistement était
fait sur la base du paragraphe 2 de l'articl69 du Règlement et non
par référenceà ce que disposent les droits internes de procédure ; or
le paragraphe 2 de l'articl69 n'établit pas un dbistement d'instance
ni un droit de réintroduction et ce droit ne s'accorde pas avec le texte

du dbistement belge : ((renonce à poursuivre l'instance introduite par
ladite requête ».Il est impossible de tirer de l'usage de cette formule
une présomption selon laquelle l'intention n'aurait pas été de mettre fin
A la procédure une fois pour toutes. Si une autre intention abritait cette
formule, il était nécessairede le dire clairement. La bonne foi l'exigeait.

Si, selon la thèse du conseil du Gouvernement belge, le Gouvernement
espagnol avait été informé par le comte de Motrico des conversations
entre les deux groupes privés, le ministre espagnoldes Affaires étrangères
aurait su que le désistement demandé par le groupe espagnol consistait
en un désistement de l'action judiciaire et non de la simple procédure.
Dans cette thèse, il est évident que le ministre espagnol n'aurait pu

hésiter un seul instant à prêterson assentiment au désistement, ce que
l'ambassadeur belge lui demandait à l'instance de son gouvernement. When agreeing to the discontinuance at the express request of the
Belgian Government, the Spanish Government had before it the follow-

ing facts : a letter from Count de Motrico informing it of the final with-
drawal of the clairn by the Belgian Government and announcing that
this discontinuance would contain the same reservation as that made
by the British Government in the case against Bulgaria. On that
occasion the British Government reserved "al1 [its] rights in connection
with the claim of the United Kingdom against Bulgaria". But the

discontinuance proposed to the Spanish Government did not contain
any reservation of this type. The Spanish Government, having regard
to the wording of the discontinuance, could not doubt, when agreeing
thereto, that it was a final discontinuance, without any resenration,
and not a discontinuance of the proceedings.

M. Frère's legal adviser had informed Count de Motrico that the
notice of discontinuance would contain the British reservation men-
tioned above. M. Frère, on behalf of Sidro, had taken the decision to
accept the basic mernorandum, which was known to the Belgian Govern-
ment. The intermediary, being aware of this position, informed his
Governrnent of it at the time when the latter was about to receive

communication of the notice of discontinuance. A party which allows
its opponent to believe that it is taking up a particular legal position-
in this instance the final withdrawal of the claim-cannot go back on
its attitude and maintain that it wished for something else, namely
a mere discontinuance of the proceedings. This is an-application of

the concept of good faith, whereby a party creates a right in favour of
its opponent by following a certain course of conduct.
Moreover, for the Spanish Government, this discontinuance was
effected on the basis of paragraph 2 of Article 69 of the Rules of Court,
and not with reference to municipal procedural law. But paragraph 2
of Article 69 does not stipulate a discontinuance of proceedings or a

right of reinstitution, and such right is not in accordance with the
wording of the Belgian discontinuance, namely "is not going on with
the proceedings instituted by that Application". It is impossible to
draw from the use of this formula a presumption that the intention
was not to put an end to the proceedings once and for all. If this
formula had another intention, it was necessary to Say so clearly.

Good faith required it.
If, according to the argument of Counsel for the Belgian Government,
the Spanish Government was informed by Count de Motrico of the
conversations between the two private groups, the Spanish Minister
for Foreign Affairs would have been aware that the discontinuance asked

for by the Spanish group was a discontinuance of the legal action and
not merely of the proceedings. In terms of this contention, it is obvious
that the Spanish Minister could not have hesitated for a single momest
to give his consent to the discontinuance for which the Belgian Ambassa-Ainsi cette affaire serait terminée quant à la voie juridictionnelle devant
la Cour pour s'appliquer à une solution entre les deux groupes, position

que le Gouvernement espagnol a toujours défendue dès la naissance du
différend de la Barcelona Traction. Une autre attitude du Gouverne-
ment espagnol parait inadmissible ; il n'aurait jamais donnéson accord
à un simple désistement d'instance. Le Gouvernement belge renonçait
à la voie judiciaire pour obtenir une solution par la voie privée.

Une des raisons pour lesquelles le Gouvernement espagnol ne pouvait
pas accepter ce désistement, et ne l'aurait pas accepté, est une impor-
tarite considération d'ordre moral formulée au paragraphe 3 de sa
communication à la Cour en date du 7 juillet1962 :

((Le Gouvernement espagnol aurait certainement fait opposition
au désistement s'iln'avait pas eu la certitude que cet acte entraînait
par lui-même,la renonciation de la part du Gouvernement belge,
à des accusations aussi diffamatoires qu'injustes à l'égard des

autorités judiciaires, administratives et gouvernementales de 1'Etat
espagnol. ))

Bref, le Gouvernement espagnol ne pouvait consentir sciemment
à un désistement temporaire sans porter atteinte à sa position morale.

Cette raison est décisive en elle-même. Du point de vue juridique,
le Gouvernement espagnol, en acceptant un désistement temporaire,
risquait aussi de compromettre sa position constante sur l'absence de
tout jus standi belge en la matière. Enfin, le Gouvernement espagnol
était convaincu que sa position, à en juger par les pièces de procédure,

était extrêmement solide. Donc, s'il n'avait pas cru le désistement
définitif,il aurait dû examiner avec la plus grande attention la question
de savoir s'il fallait poursuivre la procédure au stade où elle était
parvenue.
Quant au préjudice matériel ou moral effectivement subi, l'Espagne

a étéde nouveau citée devant la Cour sur la base de2 mêmesgraves
accusations, dont tous les Membres des Nations Unies ont été auto-
matiquement informés. Deuxièmement, son adversaire a eu la possi-
bilitéde réviser,à la lumière des arguments de l'Espagne, toute sa thèse
relative aux exceptions préliminaires ; il a effectivement cherché à modi-

fier ses moyens de défense en ce qui concerne l'une des exceptions.
Troisièmement, l'Espagne a dû supporter le lourd fardeau administratif
que constituait une seconde présentation de l'affaire devant la Cour.

La première exception doit donc êtreretenue.dor had asked him at the instance of his Government. Thus, the case
would be at an end in respect of legal proceedings before the Court, in
order to make way for a solution between the two groups, a position
which the Spanish Government always supported. right from the origin
of the Barcelona Traction dispute. Any other attitude on the part
of the Spanish Government would seem to be ruled out. It would never
have agreed to a mere discontinuance of-groceedings. The Belgian
Government was abandoning judicial settlement in order to obtain
a settlement through private negotiations.
One of the reasons why the Spanish Government could not accept
such a discontinuance, and would not have accepted it, is an important
consideration of a moral order which is expressed in paragraph 3 of
its communication to the Court dated 7 July 1962 :

"The Spanish Government would certainly have opposed the
discontinuance if it had not had the certainty that this act entailed
in itself the renunciation by the Belgian Government of accusations

which are as defamatory as they are unjust against the judicial,
administrative and governmental authorities of the Spanish State."

In short, the Spanish Government could not knowingly consent to a
temporary discontinuance without damage to its moral position. This
reason is in itself decisive.From the legal point of view, the Spanish
Government, by acceptjng a temporary discontinuance, also risked
compromising its constant .position as to the absence of any Belgian
jus standi in the matter. Finally, the Spanish Government was con-
vinced that its position, judging by the pleadings, was extremely sound.
Consequently, if it had not believed the discontinuance to be final,
it would have had to examine with the closest attention the question
whether it ought to go on with the proceedings at the stage which they
had reached.
As to the material or moral prejudice actually suffered, Spain was
again brought before the Court on the basis of the same grave accu-
sations, which were automatically communicated to al1Members of the

United Nations. Secondly, the other party had the opportunity of
revising, in the light of Spain's arguments, its entire case in respect of
the Preliminary Objections and has, indeed, sought to modify its
defence against one of the objections. Thirdly, Spain has had to bear
the heavy administrative burden represented by a second submission
of the case to the Court.

The first Objection must therefore be upheld. Cette exception préliminaire a trait à la compétence de la Cour.

La requête introductive d'instance soutient que le traité du 19 juil-
let 1927, entré en vigueur le 23 mai 1928, lie l'Espagne et la Belgique.

Il est prévuque ces Etats,aux termes de l'article 17de ce traité, peuvent
porter directement, par voie de requête, devant la Cour permanente
de Justice internationale, les litiges ou conflits au sujet desquels les
parties se contesteraient un droit. Ce traité étant en vigueur, selon

l'articl37 du Statut de la Cour internationale de Justice, c'est à celle-ci
qu'est transféréela juridiction prévueen faveur de la Cour permanente.
La Belgique et l'Espagne étant parties au Statut de la Cour inter-
nationale, celle-ci serait donc compétente pour connaître du présent

différend.

Dans ses conclusions, le Gouvernement espagnol énonce que le lien
de juridiction prévupar l'article 17porte sur la soumission des différends
non à la Cour internationale mais seulement à la Cour permanente.

L'admission de l'Espagne aux Nations Unies, en 1955, n'a pas eu pour
effet de substituer à la juridiction obligatoire de la Cour permanente
celle de la Cour internationale,car la Cour permanente fut dissoute avant
que l'Espagne eût étéadmise comme Membre des Nations Unies.

Cette situation n'est pas modifiéepar l'article 37 du Statut, lequel lie les
seuls Etats Membres des Nations Unies avant la dissolution de la
Cour permanente ».La Cour est donc incompétente.

Le Gouvernement belge soutient que l'interprétation de l'arrêt du
26 mai 1959 en l'affaire de l'Incident aérien(C.I.J. Recueil 1959 ,. 127)~

bien que valable et correcte pour l'article 36, paragraphe 5 l,n'est pas
applicable à l'interprétation de l'article 372. La jurisprudence de cet

1 Art.36, par. 5:
u 5. Les déclarations faiteen application de l'artic36 du Statut de la Cour
pumanenta de Justice internationalpour une durée qui n'est pas encore expirée
seront considérées,dans les rapports entre parties au présent Statut, comme
comportant acceptatien de la juridiction obligatoide la Cour internationale de
Justice pour la durée restanà courir d'après ces déclarations et conformémentà
leurs termes.#

Art. 37:
u.Lorsqu'un traité ou une convention en vigueur prévoit le renvoià une jun-
diction que devait instituerla Société des Nations ouà la Cour permanente de
Justice internationale,la Cour internationale de Justice constitueracette juri-
diction entre les parties au présent Statut. This Preliminary Objection is concerned with the jurisdiction of the
Court.
The Application instituting proceedings states that the Treaty of
19 July 1927, which came into force on 23 May 1928, is binding on

Spain and Belgium. Pursuant to Article 17 of that Treaty, these
States mav brintr"direct before the Permanent Court of International
Justice, by means of an application, disputes with regard to which the
parties are in conflict as to their respective rights. This Treaty being
in force, according to Article 37 of the Statute of the International

Court of Justice it is to this Court that the jurisdiction provided for
in favour of the Permanent Court is transferred. As Belgium and
Spain are parties to the Statute of the International Court it is claimed
that this Court possesses jurisdiction to hear and decide the present
dispute.

In its Submissions, the Spanish Government states that the bond of
jurisdiction provided for in Article 17 applies to the submission of
disputes, not to the International Court but only to the Permanent
Court. The admission of Spain to the United Nations, in 1955, did
not have the effect of substituting the compulsory jurisdiction of the

International Court for that of the Permanent Court, for the Permanent
Court was dissolved before Spain was admitted as a Member of the
United Nations. This situation was not modified by Article 37 of the
Statute, which binds only States that were Members of the United
Kations prior to the dissolution of the Permanent Court. The Court

is therefore without jurisdiction.

The Belgian Government maintains that the interpretation given in
the Judgment of26 May 1959 in the Aerial Incident case (I.C.J. Reports
1959, p. 127)~ although valid and correct in respect of Article 36,
paragraph jl, is not applicable as an interpretation of Article 372.

l Article36,para. 5:
"5. Declarations made under Article36 of the Statute of the PermanentCourt
of International Justicand which are still in force shall be deemed, as between
the parties to the presentatute, to be acceptances of the compulsory jurisdiction
of the InternationalCourt of Justice for the period which they still have to run
and in accordance with their terms."

Article 37
"Whenever a treaty or conventionin force provides for reference a matter
to a tribunato have been instituted by thLeague of Nations, or to the Perma-
nent Court of InternationalJustice, the matter shall, as betwethe parties to
the present Statute, be referred to the InternatCourt of Justice."arrêta étéreprise dans l'affaire du TempledePréahVihéardu 26mai 1961
(C.I.J. Reczleilrg61, p. 17).
Dans l'arrêt sur l'Incident aérien la Cour n'a fait aucune mention
à l'article 37 pour ne pas préjuger en l'affaire de la première requête

de la Barcelona Traction alors en cours de procédure.
On doit alors établir les motifs qui rendent inapplicable cette juris-
prudence, dans le cas de l'article 37. A cette fin, on doit démontrer
que la question soulevée par l'article 36, paragraphe 5, est une autre
question que cellesoulevéepar l'article 37. En l'absence de cette démons-

tration, la jurisprudence de l'Incident aérienserait correcte, et la thèse
belge doit céder. Seulesnous intéressent les différences juridiques de ces
deux textes. Sont de moindre importance les différencesde faits entre
la présente affaire et celle de l'Incident aérien. Les dernières restent
sans incidences sur le problème juridique des deux textes.
Son argument central consiste à dire qu'il y a une différencejuridique

entre une déclaration faite en vertu de l'article 36, paragraphe 5, et une
déclaration de juridiction inséréedans un traité ou convention (art. 37).

La nature juridique de ces deux obligations et leur contenu sont
identiques. Ces actes ont pour objet de lier les Etats à la juridiction

de la Cour (mêmecontenu) et ils sont aussi des actes consensuels (même
nature). Ils peuvent êtresoumis à des délais ou ne pas l'être.La forme
de l'acte est unilatérale dans un cas, pour devenir ensuite comme dans
l'autre cas, bilatérale. Il est donc difficile de saisir l'existence d'une
différenceentre ces deux obligations, quant à la forme, la nature et le
contenu. Dans les deux cas la réalisation de la juridiction obligatoire

se fait par requêteunilatérale.

Il est exact que les déclarations étaient des actes unilat8raux, mais
parce que ces actes s'adressaient à d'autres Etats, qui avaient accepté
la mêmeobligation, ils donnaient naissance à des accords conventionnels

sur la juridiction, juridiquement équivalents à la clause de juridiction
inséréedans un traité ou convention. La Cour, dans l'affaire du Droit
de passage, a confirmécette manière de voir :

((Le rapport contractuel entre les parties et la juridiction obliga-
toire de la Cour qui en découle sont établis de plein droit et sans

convention spécialede la déclaration. ))

Ces déclarations ne pouvaient êtremodifiéessans le consentement des
parties, ni retirées sauf si ce droit avait été réservéexpressément. Elles
avaient la mêmevaleur et le mêmecontenu juridique qu'une disposition

d'un traité. C'est le point de vue du Gouvernement belge comme on peut
le voir par les réserves qu'il fit quand le Paraguay dénonça unilatérale-
ment sa déclaration d'acceptation de la clause facultative et quand
l'Afrique du Sud retira une partie de sa déclaration. BARCELONA TRACTION (DISS. OP. ARMAND-UGON) 135

The interpretation given in this Judgment was followed in the Temple
of Preah Vihear Judgment of 26 May 1961 (I.C.J. Reports 1961, p. 17).
In the Judgment in the Aerial Incident case, the Court made no
mention of Article 37 in order not to prejudge the case on the first
Application relating to Barcelona Traction which was then pending.

It must therefore be shown why that interpretation is not applicable
with regard to Article 37. For this purpose, it must be shown that the
question raised by Article 36, paragraph 5, is a different question
from that raised by Article 37. In the absence of such proof, the
decision in the Aerial Incident case would be applicable and the Belgian
contention must be abandoned. It is only the legal differences between

these two texts that concern us. Factual differences between the
present case and that of the Aerial Incident are of less importance, for
they have no bearing on the legal problem conceming the two texts.
The Belgian Government's central argument is to the effect that,
from the legal standpoint, there is a difference between a declaration
under Article 36, paragraph 5, and a declaration of acceptance of

jurisdiction embodied in a treaty or convention (Article 37).
The legal nature of these two undertakings is identical and so is
their content. Their purpose is to make the jurisdiction of the Court
compulsory for the States (the same content) and they are also con-
sensual undertakings (the same nature). They may or may not be
subject to time-limits. The form of the undertaking is unilateral in

one case and becomes subsequently, as in the other case, bilateral. It
is therefore difficult to see how there can be any difference between
these two undertakings, in respect of their form, their nature or their
content. In both cases conipulsory jurisdiction is brought into opera-
tion by means of a unilateral application.
It is true that the declarations were unilateral undertakings. But

as those undertakings were addressed to other States, which had
accepted the same obligation, they gave rise to agreements of a treaty
character conceming jurisdiction which were legally equivalent to the
jurisdictional clause embodied in a treaty or convention. The Coiirt
confirmed this view in the Right of Passage case :

"The contractual relation between the Partiesand the cornpiilso~
jurisdiction of the Court resulting therefrom are establishcd 'ipso
factoand without special agreement'."

These declarations could not be modified \vithout the co~isc~itof the
parties. Nor could they be withdra\vri unless thp ripht to cio so had

been explicitly reserved. They Iiad the sanie force and the çarne
legal content as a provision in a treaty. That is the point of view
of the Belgian Govemment, as cm be styn froni the resen-ations it
made when Paraguay denoii~ict\ci,iiiiil;itt.riilly. its dt~clarr~tionof accept-
ance of the optional claiist>aiici \viit~i Soiith :lfrica \vithdrew part of
its declaration. La ratio legis, le but, de ces deux dispositions du Statut est le même,
le transfert dans l'immédiat à la Cour internationale des obligations
juridictionnelles formulées pou; la Cour permanente - dans l'hypo-
thèse que ces dernières doivent être «en vigueur )).

Les deux articles 36, paragraphe 5, et 37, ont étérédigés,discutés
et conclus, par la Commission IV et le Comité respectif en même
temps, comme traitant la mêmequestion juridique d'adaptation pour
la Cour internationale des déclarations de juridiction de la Cour

permanente.
Après avoir expliqué, sous les lettres a) et b) par quels procédésest
assuréela succession de la nouvelle Cour dans la compétence de la Cour
permanente, d'une part par l'article 36, paragraphe 4 (devenu plus tard
paragraphe 5), et d'autre part par l'article 37,le ComitéIV/I a souligné

la nécessitéde

((réglerde quelque manière les cas où compétenceavait été attribuée
à l'ancienne Cour pour connaître des différends s'élevant, soit

entre des Etats qui sont parties au nouveau Statut et d'autres
Etats, soit entre ces autres Etats 1).

Après avoir constaté qu'il est désirable que (des négociations soient

entreprises afin d'obtenir que ces acceptations s'appliquent à la nouvelle
Cour 11,le rapport précité arrive à la conclusion que cette question
« ne saurait êtreréglementéepar la Charte ni par le Statut »,mais que
l'Assembléegénéralepourrait ultérieurement se trouver en mesure de
faciliter des négociations utiles. Les termes employés (compétence

attribuée, acceptation de compétence)ne permettent aucun doute qu'ils
concernent les cas visésà l'article 37 et au paragraphe 5 de l'article 36.

Ces deux textes posent donc la même question :celle du transfert des

déclarations et clauses de juridiction d'une Cour àl'autre. Il s'ensuit donc
que l'interprétation d'un de ces textes doit êtreaussi valide pour l'inter-
prétation de l'autre. La Cour a dit dans l'affaire Nottebohm :((La même
question se pose actuellement devant la Cour : elle doit êtrerésolue

selon les mêmes principes. » (C.I.J. Recueil 1955, p. 22.)

Des clauses juridictionnelles mentionnées, l'une était incorporée au
Statut de la Cour permanente et l'autre à certaines dispositions de
traités ou conventions. Ces actes juridiques ont un but propre dans

l'instrument où ils sont insérés,et leur extinction peut être soumise
soit à un certain délai, soit à cne cause extérieure. Le délai écoulé,
l'obligation devient caduque, comme dans le cas que la cause extérieure
affecte l'objet mêmede l'obligation. Si l'obligation lie un Etat envers

la Cour permanente (déclarationou convention) l'objet poursuivi par cet
engagement devient de réalisation impossible, définitivement, au cas The ratio legis,the object, of these two provisions of the Statute is
the same, namely the immediate transfer to the International Court of

the jurisdictional obligations in respect of the Permanent Court-it
being understood that these obligations must be "in force".
Article36, paragraph j,and Article 37 were both drawn up, discussed
and adopted by Commission IV and the relevant committee at the same
time, as dealing with the same legal question, namely that of the adap-
tation to the International Court of declarations relating to the juris-
diction of the Permanent Court.

After explaining, in paragraphs (a) and (b), the means by which
the succession of the new Court to the jurisdiction of the Permanent
Court was to be ensured, on the one hand, by Article 36, paragraph 4
(which later became paragraph j),and, on the other hand, by Article 37,
Comniittee IV /I emphasized that-

"acceptances of the jurisdiction of the old Court over disputes
arising between parties to the new Statute and other States, or
between other States, should also be covered in some way".

After stating that it seems desirable "that negotiations should be

initiated with a view to agreement that such acceptances will apply
to the jurisdiction of the new Court", the above-mentioned report
reaches the conclusion that this matter "cannot be dealt with in the
Charter or the Statute", adding that it may later be possible for the
General Assembly to facilitate such negotiations. The terms employed
(jurisdiction of the Court, acceptances of jurisdiction) leave no room

for doubt that they relate to the cases referred to in Article 37 and iii
paragraph 5 of Article36.
These two texts therefore deal with the same question, narnely
that of the transfer of declarations and jurisdictional clauses from one
Court to the other. It therefore follows that the interpretation of
one of these texts must'be valid also as the interpretation of the other.

In the Nottebohm case the Court said :"The same issue is now before
the Court : it must be resolved by applying the same principles"
(I.C.J. Reports 1955 ,. 22).
Of the jurisdictional clauses mentioned, one was incorporated in the
Statute of the Permanent Court and the other in certain provisions of
treaties or conventions. These legal undertakings have their own

special purpose in the instrument in which they are embodied and they
may be extinguislied either through the expiry of a certain time-limit,
or through some external cause. When the time-limit has expired,
the obligation lapses, as it does also in the case in which an external
cause affects the very subject-matter of the obligation. Where the
obligation binds a State in regard to the Permanent Court (a declarationoù l'organe Cour permanente a disparu. L'engagement devient caduc
et la caducitése produit àla date de la dissolution de la Cour permanente,
le 18 avril 1946, et pour les déclarations et pour les clauses con-
ventionnelles.

Pour que l'opération transfert d'une Cour à l'autre se réalise,de façon
valide dans l'immédiat, il est indispensable que les clauses juridiction-
nelles soient en vigueur pour les deux Etats à la date où les deux Etats
deviennent parties au Statut. Dans le cas présent, l'obligation du traité
hispano-belge était en vigueur pour la Belgique, quand elle est devenue
partie au Statut, mais cette obligation était caduque quand l'Espagne

le devint à son tour, en décembre 1955.

Le but de l'article 37, disposition transitoire, Êomme il a déjà été

indiqué,n'avait d'autre objet que d'empêcherdans l'immédiatla dispari-
tion des déclarations de juridiction contenues dans certains traités.
C'est aussi le but de l'article 36, paragraphe 5. Les deux dispositions
visaient les déclarations soit bilatérales, soit unilatérales. Les clauses
de juridiction incorporées à un traité ou convention étaient condamnées
à une caducité certaine le jour de la dissolution de la Cour permanente.
Le sauvetage de ces clauses pouvait uniquement comprendre celles en

vigueur intégrant un traité signépar les Etats parties au Statut avant la
dissolution de la Cour permanente. Les clauses non comprises dans cette
catégorie tomberaient irrémédiablement en caducité. C'est ce qui est
arrivé à l'article17,paragraphe 4, du traité, lors de la dissolution de la
Cour permanente. Pour que l'article 17 eût pu suMvre après la dissolu-
tion de la Cour permanente, l'Espagne aurait dû être partie au Statut
avant la dissolution de cette Cour.

Le dessein de l'article37 était de maintenir dans l'immédiat la juri-
diction consentie en transformant son objet. Il n'a aucunement eu pour
objet de faire revivre à travers le temps une obligation qui avait expiré
faute de substance et d'applicabilité, lors de la dissolution de la Cour
permanente. En conséquence,entre le 18 avril1946 et le14 décembre 1955,

on ne saurait prétendre que l'Espagne fût, du fait de l'article 37, liée
à la juridiction obligatoire dela Cour permanente, ni à celle de la Cour
internationale, l'Espagne n'étant pas partie au Statut à l'époquede la
novation de la clause de juridiction. L'engagement qui s'était éteint
ne pouvait renaître sur la base de l'article 37.

On n'a pas visétoute cette juridiction, comme il aurait étédésirable,

en principe, mais seulement celle qui n'est pas tombéeen caducité avant
la disparition de la Cour permanente. Les clauses juridictionnelles des
traités des Etats ennemis ou neutre n'ont pas étela prCoccupation de laor a convention) the object of the obligation becomes impossible of
achievement, definitively, if the organ, Le., the Permanent Court, has
disappeared. The obligation lapses and the lapsing occurs on the date
of the dissolution of the Permanent Court, 18 April 1946, in respect
both of declarations and of treaty clauses.
In order that the operation of the transfer from one Court to the
other may be effected, immediately, validly, it is essential that the
jurisdictional clauses should be in force in respect of the two States
at the date on which the two States becarne parties to the Statute. In
the present case, the obligation under the Spanish-Belgian Treaty was
in force for Belgium when that country becarne a party to the Statute ;

but this obligation had lapsed when, in its turn, Spain became a party
to the Statute in December 1955.

As already stated, Article 37, which is a transitional provision, had
no other purpose than that of preventing the disappearance in the
immediate future of the declarations accepting jurisdiction which were
contained in certain treaties. This is also the purpose of Article 36,
paragraph 5. The two provisions were concerned with declarations,
whether bilateral or unilateral. The jurisdictional clauses incorporated
in a treaty or convention were inevitably bound to lapse at the date of
the dissolution of the Permanent Court. The preservation of these
clauses could apply only to those that were in force and were included
in a treaty signed by States that were parties to the Statute prior to
the dissolution of the Permanent Court. Clauses not included in this
category would lapse irremediably. That is what happened in the
case of Article 17, paragraph 4,of the Treaty, on the dissolution of the

Permanent Court. To enable Article 17to survive after the dissolution
of the Permanent Court, Spain would have had to be a party to the
Statute before the dissolution of that Court.
The purpose of Article 37 was to maintain for the imrnediate future
the jurisdiction that had been accepted, whilst transforming its object.
Its purpose was not at al1to resuscitate across the passage of time an
obligation which had lapsed for want of substance and applicability,
at the time of the dissolution of the Permanent Court. Consequently,
it cannot be claimed that, between 18 April1946 and 14December 1955,
owing to the effect of Article 37, Spain was bound to the compulsory
jurisdiction of the Permanent Court, nor to that of the International
Court, as Spain was not a party to the Statute at the tirne of the sub-
stitution effected in the jurisdictional clause. The obligation which
had been extinguished could not be revived on the basis of Article 37.
There was no intention to cover al1 such jurisdiction, as might, in
principle, have been desirable, but only jurisdiction that had not lapsed
before the disappearance of the Permanent Court. The San Francisco
Conference, as uill be seen later, did not concern itself with the juris-conférence de San Francisco, comme on le verra plus avant. L'aspiration
de maintenir toute la juridiction consentie pour la Cour permanente n'a
pas étécontemplée par l'article 37.

Pour voir quelle est la portée de l'article 37, on doit examiner la
situation qui se serait crééesans son adoption. Il n'est pas douteux que
les dispositions des traités acceptant la juridiction de la Cour permanente
qui seraient en vigueur, seraient devenus caduques à la dissolution de la

Cour permanente. L'article 37 a voulu sauvegarder ces dispositions der
traités en vigueur pour les Etats parties au Statut avant cette dissolution.

L'article 37 voulait dans certaines linlites éviter un hiatus, une lacune,
entre les deux Cours et la continuité était obtenue en donnant valeur

pour la nouvelle Cour à quelques déclarations de juridiction annexées
à des traités et qui se référaientà la Cour permanente. Cette continuité
ne pouvait se produire qu'entre les Etats parties au Statut avant la
dissolution de la Cour permanente. L'article 17 du traité de 1927 ne ser-
vait pas à ce but, l'Espagne n'étant pas un de ces Etats.

Il est soutenu que si l'article 36,paragraphe 5, a un caractère transi-
toire, l'article 37 ne l'a pas ; on appuie cette interprétation sur l'article 37
du Statut de la Cour permanente.
On peut noter, en premier lieu, que l'article 37 du Statut de la Cour

permanente avait aussi un caractère transitoire. En effet, une fois
établie la Cour permanente, on devait décider que celle-ci était la juri-
diction dont faisaient état les traités de paix. L'objet de l'article 37
du Statut de la Cour permanente n'était pas, comme il est soutenu,
d'étendre le domaine de la compétence obligatoire mais d'identifier une

juridiction internationale. La compétence obligatoire ne se fondait pas
sur cet article, mais sur les traités qui l'avaient établie, et ne po~vait
se référerde manière expresse à la Cour qui n'avait pas encore étécréée.
Les traités avaient établi la compétence obligatoire de la Cour ((qui
devait se constituer )).Une fois son Statut constitué, il était nécessaire

de déterminerque celle-là, et non une autre,était la juridiction àlaquelle
les traités se référaient : l'article 37 du Statut de la Cour permanente
déterminait quel était l'organe auquel lesdits traités avaient concédéla
compétence obligatoire.
En second lieu, les conclusions à tirer de l'article 37 du Statut de la

Cour permanente ne sont pas applicables à l'article 37 de la Cour actuelle,
leurs objets étant différents. L'objet de l'article 37 de la Cour inter-
nationale c'est de transporter une juridiction pour éviter qu'elle soit
périmée.Au moment de la rédaction de l'actuel article 37, ses rédacteurs
n'étaient pas en présencede traités établissant la compétence obligatoire

d'une Cour non encore crééeet à s'établir. Pour les traités antérieurs
à la constitution de la Cour permanente, il était déjàdéterminé,en vertu
de l'article 37 du Statut dela Cour permanente, que celle-ci étaitl'organe
auquel la compétence avait été attribuée. Au contraire, dans les traités
comme celui de 1927, on attribuait une compétence à un organe juri-dictional clauses in treaties of enemy or neutral States. The intention
to maintain al1jurisdiction agreed to in respect of the Permanent Court
was not envisaged in Article 37.

To determine the effect of Article 37, it is necessary to consider the
situation that ufould have been created if it had not been adopted.
There can be no doubt that any provisions of treaties accepting the
jurisdiction of the Permanent Court that were in force would have
lapsed on the dissolution of that Court. Article 37 was intended to
safeguard these provisions in treaties in force in the case of States

parties to the Statute before that dissolution.
The purpose of Article 37 was, within certain limits, to obviate a
hiatus, a lacuna, between the two Courts and continuity was obtained
by giving validity in respect of the new Court to certain declarations
concerning jurisdiction included in treaties and relating to the Perma-

nent Court. This continuity could be ensured only as between those
States that were parties to the Statute prior to the dissolution of the
Permanent Court. Article 17 of the 1927 Treaty could not be used
for this purpose, as Spain was not one of those States.
It is maintained that, although 'Article 36, paragraph 5, is transi-
tional in character, Article 37 is not so. This interpretation is based

on Article 37 of the Statute of the Permanent Court.
It may be noted, in the first place, that Article 37 of the Statute of
the Permanent Court also had a transitional character. Indeed, once
the Permanent Court was established, it became necessary to decide
that that Court was the tribunal referred to in the Peace Treaties.
The purpose of Article 37 of the Statute of the Permanent Court was

not, as is contended, to extend the field of compulsory jurisdiction but
to identify an international tribunal. Conipulsory jurisdiction was not
founded on that Article, but on the treaties by which it was established,
and it couid not be related explicitly to a court which had not yet
been created. The treaties had established the compulsory jurisdiction

of a tribunal which was to be instituted. Once its Statute had been
drawn up, it became necessary to determine that that Coürt, and no
other, was the tribunal to which the treaties referred. Article 37 of
the Statute of the Permanent Court determined the organ on which the
treaties in question had conferred compulsory jurisdiction.
In the second place, the conclusions to be drawn from Article 37

of the Statute of the Permanent Court are not applicable to Article 37
of the present Court, since they serve different purposes. The purpose
of Article 37 of the International Court is to transfer a jurisdiction in
order to prevent it from lapsing. When the present Article 37 was
drawn up, those who drafted it did not have before them treaties

establishing the compulsory jurisdiction of a Court which had not yet
beea created and which still remained to be established. For treaties
prior to the institution of the Permanent Court, it had already been
determined, by virtue of Article 37 of the Statute of the Permanent
Court, that that Court was the organ on which jurisdiction had beendictionnel parfaitement déterminé, la Cour permanente. Ce dont il
s'agissait, c'étaitautant que possible, de transférer dela Cour permanente

à la Cour internationale cette compétence obligatoire, conventionnelle-
ment créée ; il ne s'agissait pas, comme pour l'ancien article 37, de fixer
l'organe auquel la compétence avait étéattribuée par des accords qui
n'avaient pas pu le déterminer. On ne peut assimiler le cas de dissolution
d'une juridiction internationale avec le cas d'une juridiction non encore

constituée. Dans cette dernière situation, on peut considérer qu'il y a
une suspension de l'obligation de se soumettre à une instance judiciaire ;
dans l'autre cas, la juridiction existante s'est éteinteet il y a impossibilité
définitive pour que l'obligation puisse se remplir ; une Cour inexistante
n'a plus de juridiction.

Les deux articles du Statut s'appliquent à des situations analogues
et il est impossible de se prononcer sur l'article 37 en ignorant le débat
de 1959 sur l'articl36, paragraphe 5. On a établiprécédemmentqu'entre
le système de ces deux articles il n'y a pas des différencesfondamentales

telles qu'on puisse imaginer des solutions différentes dans chaque cas.
Ni dans l'arrêt de l'Incident aérien, ni dans l'opinion collective et les
opinions individuelles des juges, il est possible de trouver de raisons
ayant une portée juridique convaincante en faveur de la thèse d'une
distinction entre ces deux articles.

La Cour doit êtrerésoluedans l'interprétation de son Statut. Ou bien
on établit qu'il y a une différencejuridique ou bien on reconnaît qu'il
n'y en a pas.
La thèse du Gouvernement belge apparaît insuffisante sur divers
points.
On soutient que la situation du traité n'apparaît qu'au moment d'un

différend concret, en cas de déclaration d'acceptation de la juridiction
de la Cour. Mais c'est aussi vrai si on se place sur le terrain du traité
de 1927 qui ne contient qu'un engagement d'accepter la juridiction de
la Cour permanente le jour où il yaura un différend concret. C'est donc
une fausse différence : dans les deux cas il y a une obligation ferme de

juridiction et dans les deux cas il n'y a obligation ferme de juridiction
que vis-à-vis d'un mêmejuge, la Cour permanente. C'est une affirmation
sans base juridique, une pétition de principe, de dire que l'obligation
de juridiction ((subsiste puisque le traité reste en vigueur », mais que
le moyen seul (la Cour permanente) a disparu. Il ne suffit pas de le dire,

il faut le prouver, car le traité de 1927 n'a pas viséun recours ((au juge
international ))(art. 2,4 et 17) mais à la Cour permanente.

Si une obligation résultant d'une acceptation par déclaration unila-

térale a pris fin parce que la Cour permanente a disparu, parce que conferred. In treaties such as that of 1927,on the contrary, jurisdiction
was conferred on a jurisdictional organ that was specifically determined,
namely the Permanent Court. What had to be done was, so far as
was possible, to transfer this compulsory jurisdiction, created under
a treaty, from the Permanent Court to the International Court. It
was not, as in the case of the former Article 37, a matter of determining
the organ on which jurisdiction had been conferred by agreements in
which it was impossible to specify the organ. The case of the dissolu-

tion of an international tribunal cannot be assimilated to the case of
a tribunal that has not yet been instituted. In the latter situation,
it may be considered that there is a suspension of the undertaking to
accept the jurisdiction of a court. In the other case, the existing juris-
diction is extinguished and it is absolutely impossible for the obliga-
tion to be fulfilled. A non-existent court can nolonger have jurisdiction.
The two Articles of the Statute apply to analogous situations and it
is impossible to form an opinion about Article 37without taking account
of the discussion in 1959 about Article 36, paragraph 5. It has been
previously shown that, as between the system of these two Articles,
there are no fundamental differences which would lead to devising
different solutions for each case. Neither in the Judgment on the
Aerial Incident case, nor in the Joint Opinion or in the Separate Opin-
ions of individual Judges is it possible to find reasons of a convincing
legal character in favour of the view that a distinction must be drawn

between these two Articles.
The Court must be quite definite about the interpretation of its
Statute. Either it is decided tiat there is a legal difference or else it
is recognized that there is not such a difference.
The Belgian Government's contention is seen to be unconvincing on
several points.
It is maintained that in the case of a declaration of acceptance of the
jurisdiction of the Court a treaty position arises only when a specific
dispute occurs. But this is also true from the standpoint of the 1927
Treaty which contains no more than an obligation to accept the juris-
diction of the Permanent Court at the time when a specific dispute
arises. The difference alleged therefore does not exist. In both cases
there is a firm obligation to accept jurisdiction and, in both cases, there
is a firm obligation to accept jurisdiction only in respect of one and the

same tribunal, namely the Permanent Court. There is no legal bais
for the assertion-which is a mere begging of the question-that the
obligation to accept jurisdiction subsists since the Treaty remains in
force, but that it is merely the means for exercising that jurisdiction
(the Permanent Court) which has disappeared. It is not sufficient
merely to make such an assertion. It must be proved, for the 1927
Treaty did not provide for reference to "an international tribunal"
but to the permanent Court (Articles. 2, 4 and 17).
If an obligation arising from an acceptance by unilateral declaration
came to an end because the Permanent Court disappeared and becauseliéeau Statut de cette Cour, elle ne survit pas à celui-ci, l'obligation
résultant d'une clause qui ne vise que la Cour permanente disparaît avec
celle-ci et avec son Statut : de la mêmemanière.

Le traité de 1927 doit êtreinterprétéselon le sens qu'il avait en 1927,

dans le cadre international de 1927 et selon l'intention des parties
en 1927. Ce traité est marqué par son époque; s'il n'y avait pas eu la
Cour permanente il n'y aurait pas eu une référence quelconque à un juge
international, c'eût étéun traité de conciliation et d'arbitrage pur
et simple. C'est cequ'il est devenu le 18 avril 1946. On oublie trop facile-
ment que le traité de 1927 se place cinq ans seulement après l'institution

du premier tribunal international permanent et que les traités qui s'y
rCfèrent ne pouvaient envisager que ce qui existait et depuis peu.

On aboutit àcette analyse par l'application de deux règlesélémentaires

de droit international, l'interprétation des textes clairs et l'interpréta-
tion ((historique )des traités selon le sens qu'ils avaient au moment de
leurs conclusions (affaire relative aux Droits des ressortissantsdesEtats-
Unis d'Amériqueau Maroc, C.I.J. Recueil 1952, p. 188-189).

Il est soutenu que les dispositions de la Charte et celles du Statut

forment un tout impératif pour les Etats Membres des Nations Unies.
Cette manière de voir n'est pas absolument exacte ; elle souffre des
dérogations par rapport à certaines de ses dispositions qui ne sont pas
impératives, ne s'appliquant pas à tous les Membres des Nations Unies.
Il en est ainsi du paragraphe 5 de l'articl36 et de l'article37 du Statut.

La nature juridique particulière de ces deux dispositions ressort de

leur texte même.D'abord elles visent des situations toutes spéciales
et dgterminées, les clauses de juridiction existantes ou en vigueur
rattachées à la Cour permanente et ces dispositions ne s'appliquent qu'à
certains Etats déterminés.Ainsi, l'article 36, paragraphe 5, n'intéresse
que les Etats qui ont fait des déclarations en vigueur et l'article 37

n'intéresseaue les Etats dont les clauses des traités ou conventions sont
encore en vigueur - dans un cas et dans l'autre au moment où ils
deviennent parties au Statut. Cet examen démontre que ces deiix
dispositions n'intéressent que certains Etats, ceux qui ont adhéréà la
juridiction de la Cour, et non pas tous les Etats Membres des Nations
Unies.

Ces deux dispositions sont transitoires et leur application doit pro-
chainement s'éteindre. L'article 36, paragraphe 5, tel que la Cour l'a
interprété,ne peut plus recevoir d'application. Il en sera de mêmedans
l'avenir de l'article37.
Dans une composition plus technique du Statut, ces deux dispositions
auraient dû être insérCesà la fin de celui-ci, sous la rubrique (Disposi-

tions transitoires ». Sans doute, cette méthode n'a pas été adoptéepour it was bound up with the Statute of that Court, it did not survive after
the disappearance of that Statute. An obligation arising from a
clause which relates only to the Permanent Court disappears with that
Court and with its Statute-in just the same way.
The 1927 Treaty must be construed according to the meaning it had
in 1927, within the international context of 1927, and according to the

intention of fhe parties in 1927. This Treaty bears the mark of its
period. If there had been no Permanent Court, there woiild have been
no reference whatsoever to an international tribunal. The Treaty
would have been purely and simply a treaty of arbitration and con-
ciliation. That is what it became on 18 April 1946. It is too easily
forgotten that the 1927 Treaty was drawn up only five years after the

institution of the first permanent international tribunal and that the
treaties which referred to it eould relate only to what existed and had
only recently come into existence.
This analysis is reached through the application of two elementary
rules of international law, namely that concerning the interpretation
of clear texts and that concerning the "historical" interpretation cf

treaties according to the meaning they had at the time when they were
concluded (case concerning Rights of Nationals of the United States of
America in Morocco, I.C.J. Reports 1952, pp. 18s-189).
It is contended that the provisions of the Charter and those of the
Statute form a single mandatory whole for the States Members of the
United Nations. This view is not absolutely correct. It is sübject to

derogations in relation to certain of those provisions which are not
mandatory, as they do not apply to al1 the Members of the United
Nations. This is the case with regard to paragraph 5 of Article 36
and Article 37 of the Statute.
The particular legal nature of these two provisions is clear from
their actual wording. In the first place, they are concerned with

situations that are quite special and specific, namely the jurisdictional
clauses existing and in force relating to the Permanent Court. Further,
these provisions apply only to certain specific States. Thus, Article 36,
paragraph j, is concerned only with States which had made declarations
that are in force and Article 37 is concerned only with States whose
treaties or conventions contain clauses that are still in force-in both

cases at the time when they become parties to the Statute. This
examination shows that these twlo provisions apply only to certain
States, namely those which have accepted the jurisdiction of the Court,
and not al1States Members of the United Nations.
These two provisions are transitional. and their application must
very soon come to an end. Article 36, paragraph j, as the Court has

interpreted it, can no longer be applied. The same will in future be
true of Article 37.
If the Statute had been set out with a more technical presentation,
these two provisions would have been inserted at the end of it, under
the heading "Transitional Provisions". This method was not adopted, conserver la même numération des articles dans les deux Statuts;
lesdispositions transitoires mentionnéesfurent inséréesoù ellesn'allaient
pas opérer des changements de numération.
D'autre part, il faut considérerles effets de la dissolution de la Cour
permanente sur le traité de 1927et sur sa clause juridictionnelle.

La soumission au règlement judiciaire que prévoit le traité de 1927
est concrètement à la Cour permanente - déterminée spécifiquement
et non par référence à une instance internationale génériqueet
indéterminée.
La Cour permanente fut dissoute, définitivement, et la Cour inter-
nationale de Justice est une autre Cour - différente - comme le
démontrent les travaux préparatoires de celle-ci.
Etant admis ces affirmations, il est évident qu'apparaît l'impossibilité
de soumettre à la Cour permanente les différends à surgir entre les
parties, après la dissolution définitive de cette Cour.
C'est précisément en raisonde la disparition de la Cour permanente
et la création d'une nouvelle Cour, qu'il a éténecessaire de rédiger les
conditions de l'articleduStatut actuel pour transférer, dans la mesure
du possible, les compétences attribuées à la Cour qu'on était décidé

à dissoudre.
A la lumièrede ces considérations,tenant compte du principe général
que la juridiction de la Cour ne se présumepas et qu'elle se fonde sur
le consentement des Etats, une interprétation extensive de l'article 37
aurait comme conséquenceune interprétation également extensive du
traitéde 1927,par laquelle une obligation juridictionnelle spécifiquement
déterminée à la Cour permanente se transporterait à une autre Cour,
quand cette obligation n'avait plus d'existence juridique, et l'article7
ne pouvait plus jouer.

La tâche de la Cour a porté essentiellement sur l'interprétation de
l'article37. Cette disposition exige, pour que le transfert de juridiction
d'me Cour. à l'autre prenne effet, deux conditions:

I. Que 1'Etat de qui émane la clause de juridiction incorporée au
'traité,soit partie auStatut et

2. Que cette clause soit en vigueur.

Ces deux conditions qui ressortent clairement de Ilarticle 37 doivent
êtrerempliesconjointement. Chacuned'elles doit êtreremplie au moment
où l'autre se trouve remplie. Si l'une faitefaut, l'article 37 nlopBrepas
le transfert de juridiction.l faut toujours examiner les deux conditions
de l'article37 par rapport à la mêmedate critique. Ce serait une viola- no doubt in order to preserve the sarne numbering of the articles in
the two Statutes. The transitional ~rovisions mentioned were inserted
where they would not entai1 changes in the nuinbering.
Furthermore, account must be taken of the effe~ts of the dissolution
of the Permanent Court on the 1927 Treaty and on its jurisdictional
clause.
The subjection to a judicial settlement provided for. in the 1927
Treaty relates specifically to the Permanent Court, stipulated by name

and not in the form of a reference to a a.,eric and undetermined inter-
national tribunal.
The Permanent Court was dissolved with final effect and the Inter-
national Ccurt of Justice is another and different Court, as is clear
from the preparatory work concerning it.
This being so, the clear impossibility of submitting to the Permanent
Court any disputes that may arise between the Parties after the final
dissolution of ihat Court becomes apparent.
It is precisely because of the disappearance of the Permanent Court
and the creation of a new Court that it was necessary to draft the
conditions embodied in Article 37 of the present Statute for the purpose
of transferring, so far as was possible, the jurisdiction conferred upon
the Court that it had been decided to dissolve.
In the light of these considerations and taking account of the general
principle that the jurisdiction of the Court is riot to be preçumed and

that it is founded on the consent of States, an extensive interpretation
of Article 37 would, as a consequence, entail an extensive interpretation
also of the 1927 Treaty by means of which a jurisdictional obligation
stated specifically in favour of the Permanent Court would be trans-
ferred to another Court, when such obligation no longer existed legally
and Article 37 could no longer operate.

The Court's task related essentially to the interpretation of Article 37.
For the transfer of jurisdiction from one Court to the other to take
effect, this provision requires the fulfilment of two conditions :

(1)that the State party to the jurisdictional clause embodied in the
treaty should be a party to the Statute, and

(2) that this clause should be in force.

These two conditions, which are clearly laid down in Article 37,
must be fulfilled concurrently. Each of them must be fulfilled at the
time when the other is fulfilled. If one of them is not fulfîlied,
Article 37 does not effect the transfer of jurisdiction. The two con-
ditions prescribed by Article 37must always be considered with referencetion du principe de la bonne foi si l'on voulait juger la condition de vali-
ditéde l'article37 par rapport à la date d'entréeen vigueur de la Charte
et la seconde par rapport à la date de l'admission de 1'Etat aux Nations

Unies. Une telle interprétation serait du reste contraire au texte de
l'articl37.

Or, quand l'Espagne fut admise comme Membre des Nations Unies,
en décembre 1955, la clause de juridiction du traité de1927 n'était plus

en vigueur, du fait de la dissolution de la Cour permanente, le avril1946.
A cette date il n'y avait pas de traité avec une clause de juridiction
en vigueur. La seconde condition vient à manquer; en conséquence,
la situation prévue par l'article 37 reste inapplicable dans notre cas.

L'acceptation que cette clause énonçait de la juridiction de la Cour
permanente était désormais sans objet puisque cette Cour n'existait
plus comme moyen pour l'exercer. Le support juridique que cette
acceptation trouvait dans l'article36, paragraphe 1,du Statut de la
Cour permanente avait cesséd'exister par suite de la disparition de ce

Statut. Ainsi l'article17, paragraphe 4, du traité de 1927 était devenu
caduc et n'était plus en vigueur. Voici le texte de cette disposition :

« Si le compromis n'est pas arrêtédans les trois mois à compter
du jour où l'une des Parties aura étésaisie aux fins de règlement
judiciaire, chaque Partie pourra, après préavis d'un mois, porter

directement, par voie de requête, la contestation devant la Cour
permanente de Justice internationale. ))

La dissolution de la Cour permanente a détruit cette clause de
juridiction et son attribution à cette Cour déterminée.

L'Espagne n'a donné son consentement qu'à cette Cour.
Le traité continue à être en vigueur à l'égard des autres moyens
prévus pour le règlement des différends (conciliation et arbitrage), mais
pour le moyen de règlement judiciaire rattaché à la Cour permanente
il a entièrement disparu par ;'effet de la disparition de cette Cour.

Toutes les dispositions du traité se référant à la Cour permanente
avaient perdu toute validité y inclus les articles I et 2. Le véritable
intérêtdu traité résidedans tous les moyens de règlement qu'il a prévus
et non exclusivement dans le règlement judiciaire (Cour permanente).

L'admission de l'Espagne aux Nations Unies a eu pour effet de la
considkrer comme adhérant au Statut de la Cour (art. 93, alinéa I~',
de la Charte). L'Espagne est ainsi investie d'une certaine capacité
prockdurale envers la Cour, mais cette situation n'est pas suffisante
pour déterminer la juridiction de la Cour envers cet Etat ; elle crée
seulement une situation préliminaire pour l'établissement de cetteto the same crucial date. It would be contrary to the principle of
good faith if the applicability of Article37 were to be judged, in respect
of one condition, with reference to the date of the entry into force of
the Charter and, in respect of the second condition, with reference to
the date of the admission of the State in question to the United Nations.
Such an interpretation would, moreover, be contrary to the text of

Article 37.
But, when Spain was admitted as a Member of the United Nations,
in December 1955, the jurisdictional clause of the 1927 Treaty was no
longer in force, owing to the dissolution of the Permanent Court on
18 April 1946. At that date there was no treaty with a jurisdictional
clause in force. The second condition was unfulfilled. Consequently,

the situation covered by Article 37 does not exist in the case before
the Court.
The acceptance of the jurisdiction of the Permanent Court stated in
this clause was henceforth devoid of object since that Court no longer
existed as a means for exercising it. The legal basis for that acceptance
provided by Article 36, paragraph 1, of the Statute of the Permanent

Court had ceased to exist as a result of the disappearance of that
Statute. Thus, Article 17, paragraph 4, of the 1927 Treaty had lapsed
and was no longer in force. The terms of that provision are as follows :

"If the special agreement has not been drawn up within three
months from the date on which one of the Parties was requested
to submit the matter for judicial settlement, either Party may,

on the expiry of one month's notice, bring the question direct
before the Permanent Court of International Justice by means of
an application."

The dissolution of the Permanent Court destroyed the jurisdictional
clause and the attribution of jurisdiction to the Court specified therein.

Spain gave its consent only in respect of that Court.
The Treatv continues to be in force in res~ect of the other means
provided for the settlement of disputes (conciliation and arbitration),
but in so far as the means of iudicial settlement connected with the
Permanent Court is concerned, it has entirely disappeared through the
disappearance of that Court. Al1 the provisions of the Treaty which

referred to the Permanent Court, including Articles I and 2,had lapsed
completely. The real importance of the Treaty resides in al1 the
means of settlement for which it made provision and not exclusively
in the means of judicial settlement (Permanent Court).
The admission of Spain tothe United Nations resulted in that country
being deemed to be a party to the Statute of the Court (Article 93,
para. 1, of the Charter). Spain thus became invested with a certain

procedural capacity in respect of the Court, but this situation is not
sufficient to establish the jurisdiction of the Court in respect of that
State. It merely creates a preliminary situation for the establishmentjuridiction. La source de la compétence de la Cour réside dans les
déclarations des Etats (art. 36, par. I et z), et exce~tionnellementdans
l'article36, paragraphe 5, et l'articl37 du Statut.

La demande d'admission d'un Etat aux Nations Unies a comme
conséquence immédiate de le rendre partie au Statut de la Cour. Cette
admission ne signifie pas une acceptation quelconque de la juridiction

de la Cour. Or c'est ce qu'on attribue à l'Espagne du fait de cette admis-
sion par application de l'article 37, interprétation insoutenable, comme
il ressort des précédentes considérations.

L'obligation de règlement judiciaire que prévoit l'article 2 du traité
de 1927 pour certains différendsse rapporte «soit à un tribunal arbitral,

soit à la Cour permanente de Justice internationale ». Cette obligation
si elle est généralequant à un tribunal arbitral (elle ne se réfèrepas
àla Cour permanente d'arbitrage par exemple) elle est particulière quant
à la Cour permanente, qu'elle indique spécifiquement. Cette dernière
Cour est dans le traité de 1927 et l'objetet le moyen, de cette obligation ;
on a eu la volonté d'accepter ce moyen de règlement, mais seulement

parce qu'il s'attachait indissolublement à la Cour permanente, et non
à une autre Cour quelconque. La juridiction et son attribution sont
inséparables de la Cour permanente.

Il y a accord entre les Parties pour accepter que selon l'article 37
la disposition relative à la juridiction devait êtreen vigueur au moment
de l'entrée de l'Espagne aux Nations Unies et naturellemeiit, aussi
au moment de la requête introductive d'instance.
Il est soutenu que le traité de 1927 doit êtreconsidérécomme en
vigueur. Ce traité se renouvelle par périodes de dix années à partir
de sa ratification, à défaut de dénonciation par l'une des parties. Cette

situation serait celle de l'Espagne au moment où elle est devenue
partie au Statut. Ce renouvellement chaque dix années doit s'entendre
cependant comme un renouvellement des dispositions du traité en
vigueur. On ne peut renouveler ce qui est devenu caduc.
Si le traité d1927 reste en vigueur dans quelques-unes de ces disposi-
tions, il faut bien arriverà la conclusion que l'article17, paragraphe 4,

dans sa partie établissant la juridiction de la Cour permanente avait
perdu force de droit du fait de la dissolution de cette Cour le
18 avril 1946.Cette disposition n'était plus en vigueur en décembre 1955.
La clause de juridiction est détachable des autres articles du traité.
Le renvoi mentionné à l'article 37 se réfèreaux normes attributives
de compétence de la Cour permanente. Ces normes sont l'objet spécifique

du renvoi ; il n'ya pas un renvoi aux autres dispositions du traité. C'est
ce qui ressort aussi de l'articl35, paragraphe 2, du Statut qui se réfèreof that jurisdiction. The source of the junsdiction of the Court lies

in the declarations of the States (Article 36, paras. I and 2) and, in
exceptional cases, in Article 36, paragraph 5, and Article 37 of the
Statute.
The admission of a State as a Member of the United Nations has the
immediate consequence of making that State a party to the Statute of
the Court. This admission does not signify any acceptance whatsoever
of the jurisdiction of the Court. But such acceptance is attributed to

Spain on the ground of its admission, through the application of
Article 37. This interpretation, as is clear from the foregoing consider-
ations, is quite indefensible.
The obligation to accept judicial settlement provided for in Article 2
of the 1927 Treaty in the case of certain disputes relates either "to an
arbitral tribunal" or "to the Permanent Court of International Justice".
Although this obligation is general in regard to an arbitral tribunal

(it does not refer to the Permanent Court of Arbitration, for instance)
it is particular in regard to the Permanent Court, which it mentions
specifically. In the 1927 Treaty the Permanent Court is both the
objecf and the means for fulfilling this obligation. There was an
intention to accept this means of settlement, but only because it was
indissolublv connected with the Permanent Court and not with anv

other court. Jurisdiction and the attribution of it are inseparable
from the Permanent Court.

The Païties agree in the view that, according to Article 37, the
provision conceming jurisdiction had to be in force at the time when

Spain became a Member of the United Nations and, of .course, also at
the time of the filing of the Application instituting proceedings.
It is contended that the 1927 Treaty must be considered to be in
force. This Treaty is renewable for periods of ten years, as from the
time of its ratification, failing denunciation by one of the parties.
That was the situation of Spain at the time when that country becarne

a party to the Statute: ~his renewal every ten years must, however,
be understood as a renewal of the provisions of the Treaty that are
still in force. It is not possible to renew what has lapsed.
Although the 1927 Treaty remains in force in respect of some of its
provisions, the conclusion is inevitable that Article 17, paragraph 4,
so far as concerns that part of it which establishes the jurisdiction of
the Permanent Court, had lost al1legal force because of the dissolution

of that Court on 18 April 1946. This provision was no longer in force
in December 1955. The jurisdictional clause can be detached from the
other articles of the Treaty. The "reference of a matter" mentioned
in Article 37 is related to the provisions attributing jurisdiction to the
Permanent Court. Those provisions are the specific object of the
reference to the Court. There is no reference to other provisions ofaux ((dispositions particulières des traités en vigueur ))dans un sens
Ctroit.

A propos de l'article 37, le rapport du ComitéIV/I de la conférence
de San Francisco, dit :

((a) il est stipulé à l'article 37 du projet du Statut que seront
considéréesentréMembres de l'organisation, comme s'appliquant

à la Cour nouvelle, les dispositions des traités ou conventions
en vigueur qui prévoient le renvoi des différends à l'ancienne
Cour )).(Documents de la Conférence, vol. 13, p. 419.)

Le renvoi est donc simplement à une clause de juridiction en vigueur.
C'est le renvoi qui doit êtreen vigueur, comme cela ressort aisément
de la lettre de l'article37.

Un traité peut devenir partiellement caduc avant même l'échéance

du terme pour lequel il est conclu. Il en est de mêmepour certains actes
juridiques, lois et règlements, qui peuvent aussi être partiellement
caducs. Il est nécessaire de distinguer dans une obligation internationale
la caducité résultant de l'échéancedu terme prévu, de la caducité
résultant d'un autre fait comportant aussi caducité, comme la dissolution

de la Cour permanente. Cette dissolution a assorti à son tour d'un délai
la validité de la disposition juridictionnelle du traité. L'article 17,
paragraphe 4, du traité est arrivé à son terme le 18 avril 1946. Cette
clause ne pouvait devenir valide au moment où le Statut est entré en
vigueur pour l'Espagne, en décembre 1955.

La divisibilité des obligations internationales en règlesvalables et non
valables est admise par la jurisprudence de la Cour permanente. Un
exemple nous est donné dans l'examen par cette Cour du compromis
en l'affaire des Zones franches. Alors fut admis le principe vitiatur

et non vitiat. En effet, le compromis dans certaines de ses clauses était
en contradiction avec le Statut et la Cour décidaque le compromis était
valable mais étaient nulles des stipulations contraires au Statut. La
Cour n'a pas tenu compte de l'alinéa 2 de l'article I du compromis
(C.P. J.I.sérieC no 17-1, vol.II, p. 492).

La Cour permanente s'est refusée de considérer que les dispositions
particulières d'un traité comme indivisibles et indissolublement liées.

En l'affaire des Zonesfranches (C.P. J.I.sérieA/B no 46, p. 140),cette Cour
a admis que l'article 435 du traité de Versailles était« un tout » séparable
du reste du traité. Il en est de mêmedans les avis consultatifs sur la BARCELONA TRACTION (DISS. OP. ARMAND-UGON) 144
the Treaty. This is clear also from Article 35, paragraph 2, of the

Statute which refers to "the special provisions contained in treaties
in force", in a narrow sense.
With regard to Article 37, the report of Committee IV/I of the San
Francisco Conference says :

"(a) It is provided in Article 37 of the draft Statute that where

treaties or conventions in force contain provisions for the
reference of disputes to the old Court such provisions shall be
deemed, as between the members of the Organization, to be
applicable to the new Court" (Conference Documents, Vol. 13,
P. 384).

The provisions referred to can thus only be jurisdictional clauses in
force. It is the provision for the reference of a matter that must be
in force, as is quite clear from the text of Article 37.

A treaty may lapse partially even before the expiry of the term for
which it is concluded. This is true also in the case of certain legal
instruments, laws and regulations, which may also have lapsed partially.
In an international obligation, a distinction must be made between
lapsing as the result of the expiry of the prescribed term and iapsing

as the result of some other fact, also involving a lapse, such as the disso-
lution of the Permanent Court. That dissolution also constituted the
time-limit for the validity of the jurisdictional provision in the Treaty.
Article 17, paragraph 4, of the Treaty expired on 18 April 1946. That
clause could not come into force again at the time when the Statute
came into force in respect of Spain, in December 1955.

The separation of international obligations as between clauses that
are valid and clauses that are not valid is admitted in the case-law of
the Permanent Court. One example is furnished in that Court's
consideration of the Special Agreement in the Free Zones case. In
that case, the principle vitiatur et non vitiat was admitted. In point

of fact, the Special Agreement was, in the case of some of its clauses,
in contradiction with the Statute andthe Court decided that the Special
Agreement was valid but that the stipuiations contrary to the Statute
were nul1and void. The Court took no account of the second paragraph
of Article I of the Special Agreement (P.C.I.J., Series C, No. 17-1,
VOL.II, p. 492).

The Permanent Court refused to consider that the individuai pro-
visions of a treaty are inseparable and indissolubly connected. In the
Free Zones case (P.C.I.J., Series A /B, No. 46, p. 140)) that Court
considered that Article 435 of the Treaty of Versailles was "a complete
whole" separable from the rest of the Treaty. It took a similar viewComflétencd eel'O.I.T. (C.P.J.I. sérieBno 2,p. 23-2 et C.P.J.I .érieB
no 13,p. 18) sur l'indépendance dela partie XII1 du traité.

L'idéede l'intégritéd'une onvention tient son origine d'une notion
du droit privé. Dans l'avis de la Cour sur les Réserves,ette notion de
l'absolue intégrité des conventions fut rejetée comme n'étant pas
suffisamment consolidée comme règle de droit international (C.I.J.
Recueil 1951, p. 24 et 2j). L'avis de la Cour en l'affaire des Réserves
à la conventionsur le génocidemontre certaines limites à la notion

d'indivisibilité d'un traité par rapport aux dispositions qui ne sont pas
essentielles au traité dans son ensemble.Il est légitime de séparer un
article devenu caduc des autres dispositions du traité qui continuent
à êtreen vigueur, et qui permettent que ces dispositions puissent s'appli-
quer, indépendamment de la disposition tombée en caducité.

Le droit international peut viser certaines modalités d'impossibilité
d'exécutiond'un engagement international ;cette impossibilitépeut être
permanente. Dans notre cas, les clauses de juridiction du traité d1927
ont disparu de façon permanente àla date dela dissolution de la Cour
permanente : ce fait devait mettre fià l'obligation de recourirà cette
juridiction. On est en présenced'une impossibilitépermanente d'exécu-
tion d'une obligation internationale - laquelle avait disparu avec la
Cour permanente.
Sur le plan du droit international général,l'article7, paragraphe 4,
du traité de 1927 ,urait étéen somme effacédu traité jusqu'en 1955,
et ceci dans l'hypothèse où l'on admet que la Cour permanente n'a pas
définitivement disparu en avril1946 ,e qui déformela position relative
des deux Cours. Lorsqu'on parle, en effet, de la continuitk des deux

Cours c'est une formule descriptive d'intentions de politique générale
et non pas une affirmation de succession juridique.
Le défaut de la thèse belge dans sa présentation des règles de droit
international sur la suspension est qu'elle suppose le problème de base
résolu :la Cour permanente a disparu :pourquoi l'obligation exprimée
dans le traité qui est l'obligation de recourià la Cour permanente ne
serait-elle que suspendue? Cette thèse présume,affirme mais ne prouve
pas le phénomène original : la suspension dans le cas d'espèce, alors que
la suspension n'existe pasdans lecas de disparitionpermanente de l'objet.

Pour qu'il y ait suspension, il faudrait, en effet, établir qu'il y avait
dans le traité de1927 et dans les intentions des auteurs deux catégories
d'obligations:

- une obligation de fond : obligation de recourir au juge inter-
national ;in the Advisory Opinions on the Cornpetenceof the I.L.O. (P.C.I.J.,
Series B, No. 2, pp. 23-24 and Series B, No. 13, p. 18), conceming the
independence of Part XII1 of the Treaty.
The idea of the integral character of a convention has its origin in
a notion taken from private law. In the Opinion of the Court on
Reservations,this notion of the absolute integrity of conventions was
rejected as not having been transformed into a rule of international
law (I.C.J. Reports1951, pp. 24-25). The Opinion of the Court in the
case conceming Reservationsto the Conventionon the Prevention and

Punishment of the Crime of Genocide indicates certain lirnits to the
notion of the inseparability of treaty provisions in respect of provisions
which are not fundamental to the treaty as a whole. An article which
has lapsed may quite properly be separated from other provisions of
the treaty which continue to be in force where such provisions cai apply
quite apart from the provision that has lapsed.

International law can envisage various ways in which an international
obligation may become impossible of performance. Such impossibility
may be permanent. In the present case, the jurisdictional clauses of
the 1927 Treaty disappeared permanently on the date of the dissolution
of the Permanent Court. This fact inevitably put an end to the obli-
gation to have recourse to that tribunal. This is an example of a
case where it is pennanently impossible to perform an intemational
obligation-the latter having disappeared with the Permanent Court.
So far as general intemational law is concerned, Article 37,-~-
graph 4, of the 1927Treaty is said, in short, to have been deleted-from
the Treaty until 1955-this being on the hypothesis that the Permanent

Court did not finally and definitively disappear in April 1946, which
distorts the relative position of the two Courts. Any reference to the
continuity of the two Courts is merely a formula describing intentions
as a matter of general policy and is not an assertion of legal succession.
The error in the Belgian contention in its presentation of the rules
of international law concerning suspension is that it supposes that the
basic problem has been resolved :the Permanent Court has disappeared ;
why should the obligation expressed in the Treaty, namely the obliga-
tion to have recourse to the Permanent Court, be only suspended?
This contention presumes, asserts but does not prove, the original
phenomenon :the suspension in this particular case, whereas suspension
does not exist in the case of the permanent disappearance of the subject-
matter.
For there to be suspension, it would indeed be necessary to prove that

there were two categories of obligations in the 1927 Treaty and in the
intentions of those who drew it up :
-a basic obligation, namely the obligation to have recourse to an
international tribunal ; - une obligation de moyen : le choix, parmi les juges, de la Cour
permanente.

Cette analyse a un caractère artificiel. En 1927, les parties n'ont
décidéqu'une chose : le recours à la Cour permanente ; c'est une vue
théorique et à posteriori des faits que de trouver aujourd'hui dans le
traité cette division en deux obligations dont l'une, celle d'accepter
un juge international quelconque, aurait étésuspendue.

Ceci paraît de nature à faire rejeter l'argumentation belge tout au
moins en ce qui concerne le phénomène de la (suspension ))en dehors
des effets propres de l'article 37.
On doit remarquer que les positions du Gouvernement belge sur
l'article 17 du traité de 1927 lui sont nécessaires pour soutenir la thèse

suivante afin de différencier les articles 36, paragraphe 5, et 37 :
l'article 36, paragraphe 5, concerne non seulement la juridiction qui
reçoit compétence, mais aussi l'obligation de juridiction sur la base du
traité préexistant, le Statut ; au contraire, l'article37 ne fait qu'uassurer
effectivement l'exécution des engagements d'un traité )I.

Donc ici encore on présume que le traité est resté en vigueur en ce
qui coilcerne une obligation générale de juridiction dans le vague,
sans référence à un tribunal déterminé.Si l'on n'admet pas l'existence
d'une obligation de cette nature dans le traité de 1927, l'argument

belge tombe aussi bien pour le traité de 1927 que pour l'article 37
puisque tout est fondé sur l'invention à posteriori d'un engagement
général dejuridiction dans le traité de 1927, lequel n'existe pas.

L'article 37 du Statut qui créeun régime très spécial doit recevoir
i?ne interprétation restrictive pour deux raisons :

I. Il constitue une exception à la modalité d'acceptation de la juri-
diction de la Cour ; c'est une disposition dérogatoire au droit commun
en cette matière. Toute règle exceptionnelle de droit doit recevoir une
interprétation restrictive. Le consentement normal à la juridiction
de la Cour ne peut êtredonnéque par la clause d'un traité, paragraphe I~~

de l'article36, du Statut, ou par une déclaration, paragraphe 2, du même
article. L'article37 établit une juridiction par novation d'une clause de
juridiction. La juridiction de la Cour est facultative, c'est un principe
du Statut ; l'article37 apporte une exception à cette règle en prévoyant
un cas de juridiction automatique et compulsive.

2. L'article 37 est une fiction légale, solution empirique et plus ou

moins arbitraire. Il transfère à la Cour internationale une acceptation BARCELONA TRACTION (DISS. OP. BRMAND-UGON) 14~

-an obligation concerning the means, namely the choice, amongst
possible international tribunals,of the Permanent Court.

This analysis has an artificial character. In 1927 the parties decided
on only one thing, namely recourse to the Permanent Court. To say
today that thereis in this Treaty a division into two obligations one
of which, namely the obligation to accept any international tribunal

whatsoever, was suspended is nothing more than a theoretical and
expostfacto view of the facts.
This would seem to justify the rejection of the Belgian argument,
at al1 events so far as concerns the phenomenon of "suspension" over
and above the effects proper to Article 37.
It should be noted that the positions taken up by the Belgian Govern-

ment in regard to Article 17 of the 1927 Treaty are necessary to it
in order that it may put forward the following contention as to the
difference between Article 36, paragraph 5, and Article 37. Article 36,
paragraph 5, concerns not only the tribunal on which jurisdiction is
conferred, but also the obligation to accept jurisdiction on the basis
of the pre-existing treaty, the Statute. Article 37, on the contrary,
does nothing more than "effectively ensure the performance of the treaty

obligations".
Here again it is therefore presumed that the Treaty remained in
force so far as concerns a general obligation to accept jurisdiction in
vague terms,without reference toany specific tribunal. Ifthe existence
of an obligation of this nature in the 1927 Treaty is not admitted, the
Belgian argument collapses both in regard to the 1927 Treaty and in
regard to Article 37 since it is al1 based on the ex Post facto invention

of a general jurisdictional obligation in the 1927 Treaty, which does
not exist.
* * *

Article 37 of the Statute, which creates a very special régime, must
be construed restrictively for two reasons :

(1) It constitutes an exception to the means whereby jurisdiction
of the Court is accepted. It is a provision which constitutes a deroga-
tion from the ordinary law in this matter. Any exceptional rule of

law must be construed restrictively. Normal consent to the juris-
diction of the Court can be given only through a treaty clause (~rticle 36,
para. 1, of the Statute) or through a declaration (para. 2 of the same
Article). Article 37 establishes jurisdiction by the substitution of a
new jurisdictional clause for an old one. The jurisdiction of the Court
is optional ; this is a principle of the Statute.Article 37 introduces an
exception to this rule by providing for a case of automatic and compul-

sory jurisdiction.
(2) Article 37 is a legal fiction, a solution that is empirical and more

or less arbitrary. It transfers to the International Court an acceptancede juridiction en vigueur de la Cour permanente. Ce procédé artificiel
de l'expression du droit comporte une interprétation limitative de
l'article en question. La Cour permanente a dit qu'elle «ne conteste

pas le principe d'aprèslequel tout compromis de mêmeque toute clause
prCvoyant la juridiction de la Cour doit être interprétérestrictivement ))
(sérieAIB no 46, p. 138). Il en doit êtreainsi à fortiori lorsqu'il s'agit
d'un régimed'acceptation de la juridiction aussi exceptionnel que celui
de l'article37 du Statut.
L'article 37 a voulu que la clause juridictionnelle en vigueur des
traités et conventions soit considCréeentre parties au Statut comme
une acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour internationale.
Si l'Etat Ctait partieà ce Statut au moment de la dissolution de la Cour
permanente, il a donné un consentement exprès et volontaire au trans-
fertde la Cour ancienne à la nouvelle Cour. Si 1'Etat n'était pas partie

au Statut à ce moment, comme l'Espagne, selon une certaine inter-
prétation, il aurait donné à la nouvelle juridiction un consentement non
déclaréet non volontaire. Cette interprétation considère deux espèces
de consentements, selon que 1'Etat est partie au Statut avant ou après
la dissolution de la Cour permanente. L'article 37 viendrait à établir,
automatiquement, la juridiction de la nouvelle Cour, pour les Etats
parties au Statut après cette dissolution.

Une telle interprhtation traduirait un consentement non déclaré,
un consentement automatique, comme émanant de l'article en question ;
un consentement donné à titre généralet anticipé. Un consentement

ainsi prêtén'est pas la modalitéde consentement que le Statut demande
aux Etats en cas d'acceptation de la juridiction de la Cour. Une mani-
festation aussi exceptionnelle que la prestation de ce consentement
aurait dû figurer clairement dans le texte de l'article 37. Or, il n'en est
pas ainsi. Entre deux interprétations de l'article 37, l'une qui suit le
principe du consentement facultatif, et l'autre qui suit l'idée d'un
prétendu consentement automatique, on doit opter pour la première
interprétation. Toute interprétation extensive est donc inadmissible.
Il serait surprenant que l'article 37 ait établiune juridiction compul-
sive pour une certaine catCgorie d'Etats quand la conférence de San
Francisco a répudiéle principe de la juridiction compulsive pour tous

les Etats.
La juridiction de la Cour se fonde sur le consentement exprès des
Etats, ainsi aucun doute ne pourra êtresoulevésur l'exécutionde l'arrêt
qu'elle va prononcer. Touteinterprétation des textes relatifs à l'accepta-
tion de la juridiction doit s'Cloigner de tout raisonnement ambigu ;
c'est un principe essentiel que la juridiction doit êtreCtablie par des
manifestations claires des Etats. Vouloir forcer les textes se rapportant
à la juridiction de la Cour c'est s'exposeà des conséquencesqui peuvent
affecter son autorité et son prestige. L'arrêtde l'Incident aérienest une
bonne démonstration que la Cour doit utiliser la faculté discrktionnaire
du paragraphe 6 de l'artic1.e36 de son Statut, avec la plus grande pru- of the iurisdiction of the Permanent Court which is in force. This
artificial method of stating the law requires a restrictive interpretation
of the Article in question. The Permanent Court said that it did not
"dispute the rule-... that every Special Agreement, like every clause
conferring jurisdiction upon the Court, must be interpreted strictly"
(P.C.I.J., SeriesA /B, No..46, pp. 138-139). And this is al1 the more
essential in the case of asystem of acceptance of jurisdiction as excep-
tional as that of Article 37 of the Statute.
The intention of Article 37 was that the jurisdictional clause in
force in treaties and conventions should be considered, as between

parties tothe Statute, asan acceptance of the compulsoryjurisdiction of
the International Court. If a State was a party to that Statute at
the time of the dissolution of the Permanent Court, it gave explicit and
voluntary consent to the transfer from the old Court to the new Court.
If a State was not a party to the Statute at that tirne, as was the case
for Spain, it is said, according to a certain interpretation, to have
given an undeclared and non-voluntary consent to the new jurisdiction.
This interpretation envisages two kinds of consent, according to whether
the State in question was a party to the Statute before or after the
dissolution of the Permanent Court. It is clairned that Article 37
would automatically establish the jurisdiction of the new Court in the
case of States thatbecame parties to the Statute after that dissolution.
Under such an interpretation, an undeclared consent, an automatic
consent would be held to proceed from the Article in question-a consent
given in a general way and beforehand. A consent thus given is not
given in the way the Statute rtquires consent to be giveri by States if
they accept the junsdiction of the Court. Such an exceptional mani-

festation as this form of consent should have been clearly provided for
in the text of Article 37. But that is not the case. As between two
interpretations of Article 37, one following the principle of optional
consent and the other accepting the idea of an alleged automatic con-
- sent, the choice must be in favour of the former interpretation. Any
extensive interpretation is therefore inadmissible.
It would be surprising if Article 37 had established compulsory
jurisdiction for a certain category of States when the San Francisco
Conference had rejected the principle of compulsory jurisdiction for al1
States.
The jurisdiction of the Court is based on the explicit consent of
States. Thus no doubt can arise as tothe execution of any judgment it
may deliver. No interpretation of texts concerning the acceptance of
jurisdiction should be based on any ambiguous reasoning. It is an
essential principle that jurisdiction must be established by clear mani-
festations of the will of States. To attempt to force the meaning of
texts relating to the jurisdiction of the Court would be to risk conse-
quences that might affect its authority and its prestige. The Judgment

in the Aerial Incident case is a good demonstration of the fact that the
Court must employ the discretionary power conferred by Article 36,dence. S'il y a défaut de compétence on est en présence d'un excès
de pouvoir. Un changement de jurisprudence porté sur une question
de compétence doit êtretrès solidement fondé ; il a intérêtà maintenir

certaine jurisprudence afin de donner une ferme sécuritéaux textes
interprétés. Le fait que le rôle de la Cour est plutôt mince ne peut
justifier un élargissement de sa compétence.

La source de la juridiction de la Cour dérivéede l'article 37 doit
dépendre de la volonté des parties et n'existe que dans la mesure où
elle a étéadmise.
Le transfert à la Cour internationale de Justice de la juridiction

qu'une disposition d'un traité prévoyait en faveur de la Cour permanente
de Justice internationale ne pouvait se faire sans le consentement des
Etats parties à ce traité. Un principe bien établi de droit international
veut que seules les parties à un traité peuvent modifier ses dispositions.

La conférencede San Francisco, en adoptant l'article 37 qui dispose

le renvoi de la juridiction d'une Cour à une autre n'a pu se substituer
au consentement des Etats qui n'étaient pas présents et n'ont pas parti-
cipé à ladite conférence. Comme l'Espagne ne participait pas à cette
conférence, l'article17, paragraphe 4,ne peut lui êtreapplicable. Les
Etats présents à San Francisco n'ont pu modifier un traité signé par
l'Espagne sans son consentement. Toute modification, décidéepar les

Etats de la conférence, des clauses de juridiction incorporées aux dispo-
sitions du traité de 1927 demeurait sans effet par rapport à l'Espagne
à défaut d'acceptation par elle de ces modifications, et elle n'a pas
donnéson acceptation.

D'autre part, à l'occasion de cette conférence, l'Espagne ne fut pas

invitée à y participer ; elle n'était paspersona grata (résolution 39 1),
du 12 décembre 1946, de l'Assembléegénérale). Elleétait étrangère et
exclue aux négociations de San Francisco et le Statut entré en vigueur
le 24 octobre 1945 était toujolirs pour elleres inter alios actaLa confé-
rence avait éliminéde ses réunions les Etats ex-ennemis ou neutres. Il
est évident que les Etats réunisà cette conférencene se sont pas occupés

des clauses de juridiction contenues dans des traités des Etats ex-ennemis
ou neutres pour leur imposer l'obligation d'accepter que certaines
clauses de juridiction soient applicables à la nouvelle Cour pour le cas
où éventuellement ils deviendraient Membres des Nations Unies. Une
telle interprétation n'est pas raisonnable. Les Etats à la conférence, en
créant le traité international qu'est la Charte et le Statut, n'ont pu

établir par une de leurs dispositions des obligations à la charge des
Etats tiers. De telles dispositions ne se présument pas. L'article7 opère
une novation et comme telle elle ne se présume pas ; pour que la nova- paragraph 6,of its Statute with the greatest prudence. If there should
be lack of jurisdiction, any action would be ultra vires. A change of
jurisprudence on a question of jurisdiction must have a very solid
basis. Itis important that decisions should be consistent in order to

maintain the authoritative character of the texts inter~reted. The
fact that the Court's list is somewhat slender cannot justify any exten-
sion ofit< jurisdiction.

The jurisdiction of the Court which is derived from Article 37 must
be founded on the will of the parties and it exists only to the extent to
which it has been accepted.
The transfer to the International Court of Justice of jurisdiction
which a provision in a treaty provided for in favour of the Permanent
Court of International Justice could not be made without the consent

of the States parties to the treaty in question. It is a well-established
principl. .f international law that only the parties to a treatyn modify
its provisions.
By adopting Article 37 which provides for the transfer of jurisdiction
from one Court to another, the San Francisco conferenci could not
substitute itself for the consent of States which were not present and

did not take part in that Conference. As Spain did not iake part in
that Conference, Article 17, paragraph 4, cannot be made to apply
to it. The States present at San Francisco were not able to modify
a treaty signed by Spain without the consent of that country. Any
modification decided upon by the States at the Conference, in respect
of jurisdictional clauses embodied in the provisions of the 1927 Treaty,

remained without effect so far as Spain was concerned in the absence
of that State's acceptance of those modifications, and Spain has not
signified its acceptance.
Furthermore, on the occasion of that Conference, Spain was not
invited totake part in it. Spain was not persona grata(resolution 39 (1),
of the General Assembly, of 12 December 1946). Spain, being excluded

from the negotiations at San Francisco, had no part in them, and in
the Statute which came into force on 24 October 1945 remained, so far
as Spain was concerned, res inter alios acta. The Conference had
excluded ex-enemy and neutral States from its meetings. It is obvious
that the States assembled at that Conference did not concern themselves
with the jurisdictionâl clauses contained in treaties of ex-enemy or

neutral States for the purpose of imposing on them the obligation to
agree that certain jurisdictional clauses should be applicable to the
new Court in the possible event of their becoming Members of the
United Nations. Such an interpretation is not reasonable. By making
the international treaty which the Charter and the Statute constitute,
the States at the Conference were not able to establish, by one of the

provisions of those instruments, obligations incumbent on third States.tion se produise il est indispensable que la partie exprime formellement
et volontairement son intention de nover. L'Espagne, absente au mo-
ment où l'article 37a été rédigé et accepté,n'a paseu l'occasiondemani-
fester cette intention.

Le rapport du 22 mai 1945 du sous-comitéIV/I/A sur la question du
maintien de la Cour internationale de Justice et sur les problèmesqui
s'y rapportent, entre autres considérations, exprimait in fine de la

lettre d) :
« Dans le cas des Etats ennemis, il sera possibled'incorporer dans
les conditions de paix une clause mettant un terme à leur droit

d'êtreparties au Statut ;dans le cas des autres Etats il sera impos-
sible de procéder decette façon à moins qu'ils nel'admettent. ))

Et la lettre e) ajoutait:

« Il découlede cette conclusion que, tout au moins dans les cas
de certains Etats neutres, l'exclusion de toute participation au
Statut de la Cour qu'énoncele chapitre VII, paragraphe 5, du
projet de la Charte, ne pourrait pas s'effectuer sans une certaine
infraction aux règlesreconnuesdu droit international. 1(U.N.C.I.O.,
vol. 13,p. 530.)

Les antécédents démontrent qu'àla conférencede San Francisco on
envisageait des mesures d'exclusion pour lesEtats ennemis ou certains
Etats neutres, du Statut de la Cour. C'étaitla situation de l'Espagne.

Le sous-comité indiquén'avait donc pas la préoccupationde maintenir
des clauses juridictionnelles inséréesdans les dCclarationsou traités de
ces Etats.
Lorsqu'un Etat - comme l'Espagne - est resté pendant plusieurs
annéesétrangerau Statut, et aussi par décisionde lJAssemblCegénérale
(décisiondu 12 décembre1946) on ne peut prCtendre que cet Etat, du
fait de sa demande d'admission aux Nations Unies, a reconnu la juri-
diction de la Cour internationale de Justice. Un consentement simple-
ment présuméest insuffisant (C.I.J. Recueil I959p ,. 142).

Sans doute, les Etats réunis à la conférencede San Francisco, connais-
sant leurs obligations internationales en matière d'acceptation dela juri-
diction de la Cour permanente, soit par la clause facultative, soit par
disposition d'un traité, ont pu prendre légitimementla charge de les
transférer à la nouvelle Cour. Ces Etats avaient le pouvoir de le faire,
ce pouvoir ne pouvait êtreinvoqué envers desEtats qui, ultérieurement,
viendraient 'àêtreadmis comme Membresdes Nations Unies sur la base
de l'article4 de la Charte.Provisions of this character are not to be presumed. Article 37 effects
a substitution of one obligation for a previous one and such a substitu-
tion must not be presumed. For such a substitution to take place it
is essential that the party concemed should formally and voluntarily
express its intention to make the substitution. Spain, which was
absent at the time when Article 37 was drawn up and accepted, had

no opportunity to manifest such an intention.
The report of 22 May 1945 of sub-cornmittee IV /I1.4on the question
of continuity of the International Court, and on related problems, said,
amongst other considerations, at the end of paragraph (d) :

"In the case of enemy States, it would be possible as part of the
conditions of peace to terminate their rights under the Statute ;
in the case of other States, this would not be possible unless they

were to agree to it."

And the report added, in paragraph (e):

"From this conclusion it follows that, in the case of certain
neutral States at any rate, the exclusion from participation in the
Statute of the Court which is clearly laid down by Chapter VII,
paragraph 5, of the draft Charter could probably not be accom-
plished without some breach of the accepted rules of international

law" (U.N.C.I.O., Vol. 13, p. 525).

The relevant documents show that, at the San Francisco Conference,
measures of exclusion from the Statute of the Court were contemplated
in respect of enemy States and certain neutral States. That was the
situation with regard to Spain. The sub-committee in question there-
fore did not concern itself with the maintenance of the jurisdictional

clauses embodied in the declarations or treaties of those States.
When a State has for many years remained-as Spain did-a stranger
to the Statute, this being moreover also by decision of the Generai
Assembly (decision of 12 December 1946), it cannot be maintained
that that State, by the fact of its request for admission to the United
Nations, has recognized the jurisdiction of the International Court of

Justice. Consent that is merely presumed is insufficient (I.C.J. Reports
1959,P. 142)-
The States assembled at the San Francisco Conference, knowing
their international obligations in the matter of the acceptance of the
jurisdiction of the Permanent Court, whether through the optionai
clause or through a provision in a treaty, were, of course, able properly

to assume the responsibility of transferring them to the new Court.
Those States had the power to do this. That power could not be
clairned in respect of States which might subsequently come to be
admitted as Members of the United Nations on the basis of Article 4
of the Charter. Admettre un tel pouvoir envers les Etats non présents conduirait tout
simplement à les soumettre à un principe que la conférencea fermement
rejeté, celui de conférer à la nouvelle Cour une juridiction obligatoire à

tous égards. Les nouveaux Membres des Kations Unies auraient dû
admettre une telle juridiction imposée par les Etats réunis à San Fran-
cisco, s'ils se trouvaient liéspar des traités en vigueur renvoyant à la
juridiction de la Cour permanente. La jurisprudence de cette Cour et de
la Cour internationale a toujours maintenu qu'elle n'a compétence envers
un Etat que s'il a donné un consentement volontaire et non équivoque.

La juridiction de la Cour se fonde sur le consentement des Etats. La

Cour internationale a dit, dans l'affaire de 1'Ov inonétaire ,u'elle doit se
garder ((d'agir à l'encontre d'un principe de droit international bien
établiet incorporédans le Statut, à savoir que la Cour ne peut exercer sa
juridiction à l'égard d'un Etat si ce n'est avec le consentement de ce
dernier 1).

Selon certaine thèse, il doit s'entendre que ce consentement a été
donné par l'Espagne lors de son incorporation aux Nations Unies. Les
Etats réunis à San Francisco ne pouvaient pas, sans l'intervention de
l'Espagne, l'engager dans une obligation comportant l'acceptation d'une
nouvelle juridiction, celle de la Cour internationale. Ils n'avaient pas le
pouvoir d'imposer à l'Espagne, comme une condition supplémentaire

pour devenir Membre des Nations Unies, celle d'accepter une compé-
tence déterminéede la Cour internationale. L'admettre porterait viola-
tion du principe d'égalitéde droit des Etats ; les conditions d'admissi-
bilité, comme Membre des Nations Unies, n'ont pas prévu que certains
Etats devraient, pour y êtreadmis, consentir à des obligations d'ordre
juridictionnel non exigéespour d'autres Etats.

L'Espagne, en devenant Membre des Nations Unies, n'a pu êtrecon-
trainte d'accepter la juridiction de la Cour internationale pour certaines
affaires ; cette juridiction se caractérise comme étant particulière et
volontaire et non généraleet obligatoire. La juridiction de la Cour doit

s'établir par un texte clair, qui ne se prête pas à l'interprétation, afin
qu'elle.ne puisse surgir par surprise. Il n'y a pas de juridiction compul-
sive de la Cour. Si un doute raisonnable peut exister sur l'interprétation
de l'article 37, son application doit être aussi'faite raisonnablement.
Une interprétation restrictive doit s'imposer.
Ilest soutenu que le Gouvernement espagnol lors de son admission

comme Membre des Nations Unies, en décembre 1955, aurait ratifié
l'article37 du Statut et de ce fait accepté le transfert de juridiction.
Cet article 37 serait une clause d'accession ou d'adhésion, une offre
adressée aux Etats autres que ceux réunis à San Francisco. La Cour To admit such a power in relation to States not present would quite
simply result in making them subject to a principle which the Con-
ference firmly rejected, narnely that the jurisdiction conferred on the
new Court should be in al1respects compulsory. The new Members of
the United Nations would have had to arcept such jurisdiction imposed

on them by the States assembled at San Francisco, if they happened
to be bound by treaties in force under which matters were to be referred
to the jurisdiction of the Permanent Court. The decisions given by
that Court and by the International Court have always maintained that
the Court possesses jurisdiction in respect of a State only if that State
has given its voluntary and unequivocal consent.

The jurisdiction of the Court is based on the consent of States. The
International Court has said, in the Monetary Goldcase, that it must be
careful not to "run counter to a well-established principle of interna-

tional law embodied in the Court's Statute, namely that the Court can
only exercise jurisdiction over a State with its consent".

According to a certain view, this consent must be understood to have
been given by Spain when that country becarne a Member of the
United Nations. The States assembled at San Francisco could not,

in the absence of Spain, impose on that country an obligation involving
the acceptance of a new jurisdiction, namely that of the International
Court. They had no power to impose on Spain, as a supplementary
condition for Membership of the United Nations, the acceptance of a
specific jurisdiction of the International Court. To admit this would
be contrary to the principle of the legal equality of States. The con-
ditions for admission to membership of the United Nations did not

stipulate that certain States would, in order to be admitted, have to
accept obligations of a jurisdictional nature which other States were
not required to accept.
On becoming a Member of the United Nations, Spain could not have
been compelled to accept the jurisdiction of the Intematioilal Court for
certain cases. It is the distinctive featureof this jurisdiction that it

is particular and voluntary and not general and compulsory. The
jurisdiction of the Court must be established by a clear text which
does not call for interpretation, so that it cannot come as a surprise.
There is no c~rn~ulso~~jurisdiction of the Court. If any reasonable
doubt can exist as to the interpretation ofArticl37,its application also
must be reasonable. A restrictive interpretation is absolutely essential.

It is contended that, when it became a Member of the United Nations,
in December 1955, the Spanish Government ratified Article 37 of the
Statute and thereby accepted the transfer of jurisdiction. Article 37
would thus be a clause concerned with accession or adhesion, an offer
addressed to States other than those assembled at San Franciscs. The internationale, en l'affaire de l'Incident aérien,a réponàucette thèse.
Cesmêmesconsidérations sont pertinentes pour l'article 37.
Au moment où l'Espagne est devenue Membre desNations Unies, son
acceptation de la juridiction de la Cour permanente en vertu de l'article
17,paragraphe 4,du traité de 1927,était devenue caduque à partir de la
date de la dissolution de cette Cour. L'article 37 ne fait pas renaître une

obligation qui n'avait plus d'effet juridique, cette disposition ne pouvait
viser l'Espagne, àla date de son admission aux Nations Unies ;il ressort
donc que l'acceptation que l'Espagne afaite de cette disposition ne consti-
tue pas un consentement donné à la juridiction de la Courinternationale
de Justice (C.I.J. Recueil 1959p,. 145) E.t les manifestations attribuées
postérieurement à l'Espagne d'une telle acceptation ne sont pas fondées.
Il est soutenu que l'article 37 considère uniquement la validité des
clauses juridictionnelles dans le temps,à la duréerestant à courir dans
le cadre des traités dont elles font partie. Tant que l'échéancedu terme
prévupar le traité n'est pas épuisée,ces clausesjuridictionnelles seraient
en vigueur, mais non applicables par disparition du champ d'application
auquel ces clauses se réfèrent. Il y aurait suspension de ces clauses
d'acceptation de la compétencede la Cour jusqu'au moment où les deux
Etatç signataires du traité deviennent parties au Statut.

Cette manière de voir présente certaines difficultés.
D'abord, elle laisse de côté l'argumentation très forte de l'arrêtde
l'Incident aériezz,lorsqu'il admet la caducité de ces clauses juridiction-
nelles par manque du support juridique qu'elles trouvaient dans le
Statut de la Cour permanente, lequel avait cesséd'exister par suite de
sa disparition. L'extinction de ces obligations internationales peut se
rapporter aux délais pour lesquels elles ont étéconclues, mais d'autres
causes peuvent les faire tomber avant l'échéance deces délzis.

Il n'est rieà l'article 37 qui suggère que l'article 17, paragraphe 4,
continuerait à pouvoir êtreravivé après l'expiration du Statut de la
Cour permanente. Pour crCer cet effet, l'artic37 aurait dû être rédigé

différemment. Il aurait été au moins nécessaire qu'il énonçât que les
dispositions de traités acceptant la juridiction de la Cour permanente
devraient être considérées,dans les rapports entre Etats parties au
présent Statut ou pouvant à un moment quelconque devenir parties au
Statut, comme comportant acceptation de la juridiction obligatoire de
la Cour internationale. L'article 37 ne dit rien de pareil et laisse de côté
l'article 17, paragraphe 4, insérédans un trai.téd'un Etat non encore
devenu partie au Statut.

D'autre part, cette théorie de la suspension des clauses convention-
nelles d'acceptation de la juridiction de la Cour crée une situation déli-
cate quant à sa duréeet ses effets.International Court has replied to this view, in the Aeriul Incident case.
The same considerations are relevant with regard to Article37.
At the time when Spain became a Mernber of the United Nations,
its acceptance of the jurisdiction of the Permanent Court under
Article 17,paragraph 4,of the 1927 Treaty had lapsed as from the date

of the dissolution of that Court. Article 37 does not revive an obli-
gation which no longer had any legal effect. This provision could
not apply to Spain at the time of its admission to the United Nations.
It follows therefore that Spain's acceptance of this provision does not
constitute consent to the jurisdiction of the International Court of
Justice (I.C.J. Reports 1959, p. 145). And any manifestations of
acceptance attributed to Spain at a later date are unfounded.

It is contended that -4rticle 37 is concerned solely with the validity
of jurisdictional clauses in pointof time, of the period which they still
have to run within the dontext of the treaties of which they form part.
So long as the term prescribed by the treaty has not expired, these
jurisdictional clauses, it is said, remain in force, though not applicable
because of the disappearance of the field of application to which they
relate. There is said to be a suspension of these clauses for the accept-

ance of the jurisdiction of the Court until the time comes when the two
States signatories of the treaty become parties to the Statute.
This view entails certain difficulties.
In the first place, it takes no account of the very strong argument
in the judgment in the Aerial Incident case, when it admits that the
jurisdictional clauses in question lapsedfor want of the legal basis they
found in the Statute of the Permanent Court, which had ceased to

exist because of its disappearance. The extinction of such inter-
national obligations may be connected with the periods for which they
were concluded, but there may be other causes that bring about their
extinction before the expiry of those periods.
There is nothing in Article 37 to suggest that Article 17,paragraph 4,
would continue to be able to be revived after the expiry of the Statute
of the Permanent Court. To bring about this effect, Article 37 would

have had to be worded differently. It would at least have been neces-
sary for it to state that the provisions of treaties accepting the juris-
diction of the Permanent Court should be considered, as ùetween the
States which are parties to the pre:ent Statute or which may at any
tirne become parties to the Statute, as involving acceptance of the
compulsory jurisdiction of the International Court. Article 37 says
nothing of the kind and has no ef£ect upon Article 17, paragraph 4,

which is included in a treaty of a State that had not yet become a party
to the Statute.
* * *

Furthemore, this theory of the suspension of treaty clausesconceming
the acceptance of the jurisdiction of the Court creates a delicate
situation as regards both the duration of the suspension andits effects. BARCELONA TRACTION (OP. DISS. ARMAND-UGON)
=Y
Pour que les effets de cette suspension prennent fin, un événement
extérieur à la volonté des contractants doit se produire, l'admission d'un
Etat déterminéaux Nations Unies. Si la prolongation de cette admission

s'étend dans le temps de façon démesurée,une telle interprétation peut
conduire à des résultats déraisonnables, qui doivent s'examiner avec la
plus grande prudence. Quand une telle suspension cesse-t-elle d'être
raisonnable ? La difficultéréside dans la recherche d'unités de mesure.
Quelle est l'unité du raisonnable ? A quelles valeurs de comparaison ou
d'appréciation doit-on recourir ? La frontière entre le raisonnable et le

non-raisonnable reste toujours arbitraire, pour la raison qu'entre une
situation et l'autre il n'y a pas de brusque transition.

Si la suspension commence à partir de la date où la Charte est entrée
en vigueur, l'Espagne serait restée plus de dix années étrangère au
Statut. Après ce délai, la clause en suspension peut-elle encore avoir des

effets?
Une telle interprétation présente des aspects artificiels, donne prise à
des concluçions et applicationsarbitraires,qui risquent de compromettre
des principes jusqu'ici acceptés en matière de consentement de l'accep-
tation de la juridiction de la Cour. Si une autre interprétation de l'ar-
ticle37 n'offre pas les inconvénients qu'on vient de signaler, elle doit

étre préférée. *
* *

Est-il admissible juridiquement que les clauses de juridiction des
traités ou convention5 aient, à l'égard desEtats non parties au Statut,
une validité potentielle en vertu de l'article37,soit à partir de l'entrée

en vigueur de la Charte, soità partir de la dissolution de la Cour penna-
nente ? Rien ne vient soutenir cette proposition, ni dans le trxte de cet
article, ni dans les travaux préparatoires, ni dans le cadre d'une inter-
prétation de cette disposition. A cette conception de la validité poten-
tielle de la clause s'ajouterait l'idCe de sa suspension dans l'attente
qu'un Etat soit admis aux Nations Unies, tout en acceptant que cette

suspension prolongéedémesurémentpourrait la rendre caduque.

Il faut examiner la thèse selon laquelle l'articl37 du Statut pourrait

avoir un effet propre pour faire revivre l'article 17 du trait6 de 1927.
Cet article, qui n'avaitcrééqu'une obligation de juridiction vis-à-vis de
la Cour permanente, peut-il ccreprendre » effet grâce à l'article37 du
Statut ?
Tout le problème est centré sur le texte de cet article : ou bien il a
crééune ccsuspension »spéciale,échappant aux règles généralesdu droit

international, une (mise en sommeil »,une «paralysation r provisoire du
moyen de juridiction, même vis-à-vis des Etats non encore parties au In order that the effects of this suspension may be brought to an
end, an event that is extraneous to the will of the contracting parties
must occur, namely the admission of a particular State to the United

Nations. If the period prior to this admission is prolonged for an
undue length of time, the above interpretation may lead to unreasonable
results, which will have to be examined very carefully. When does
such a suspension cease to be reasonable? The difficulty lies in the
choice of units of measurement. What is the unit for what is reason-
able? To what bases for comparison or judgment must resort be made?
The frontier between what is reasonable and what is not reasonable

must always remain arbitrary for the reason that between the one
situation and the other there is no abrupt transition.
If the suspension begins to run from the date on which the Charter
entered into force, Spain would have remained a stranger to the Statute
for more than ten years. Could the suspended clause still have any
effects after that period?

An interpretation in this sense has artificial aspects and gives ground'
for arbitrary conclusions and applications which may compromise
principles hitherto accepted in the matter of consent to the jurisdiction
of the Court. If some other interpretation of Article 37 does not
entai1 the disadvantages just mentioned, it should be preferred.

1s it legally admissible that the jurisdictional clauses of treaties or
conventions should, in respect of States that are not parties to the
Statute, have potential validity by virtue of Article 37, either as fro~n
the entry into force of the Charter or as from the dissolution of the

Permanent Court? There is nothing that could support this proposition,
either in the text of that Article or in the preparatory work, or within
the framework of an interpretation of this provision. To this concept
of the potential validityof the clause there would be added the idea of
its suspension pending the admission of a State to the United Nations,
whilst it would be agreed that this suspension, if unduly prolonged,

might cause the clause tp lapse.

The view must be examined that Article 37 of the Statute could
have the effect of reviving Article 17 of the 1927 Treaty. Can this

Article, which had created an obligation to accept jurisdiction in
respect only of the Permanent Court, "resume" its effect because of
Article 37 of the Statute?
The whole problem centres round the text of this Article. Either it
created a special kind of "suspension", not provided for by the general
rules of international law, a "dormant" condition, a temporary "para-

lysis" of the means of jurisdiction, even in respect of States that are Statut avec ((remise en vigueur x par leur adhésion audit Statut ; ou
bien l'article37 n'a pas créécet effet.
Comme il s'agit de l'interprétation du Statut, on n'est pas obligéde

tenir compte de la présentation des arguments des Parties et on doit
procéder à la recherche de la solution par une démarche propre.
Mêmesi l'on admettait la thèse que l'article 37 a voulu étendre ses
effetsà toutes les parties au Statut, quelle que soit la date de leur adhé-
sion, le problème juridique n'est pas pour autant résolucar la question

est de savoir si le Statut pouvait créeren droit international cette obli-
gation nouvelle de ((remise en vigueur » de dispositions caduques par
disparition permanente de l'objet de l'obligation.

On n'avance rien en disant que cette paralysie est le seul but de l'ar-
ticle37 et qu'il n'a que ce but. Une telle affirmation implique qu'une

obligation a pu êtrecréée vis-à-vis d'Etats tiers, pour imposer avant
qu'ils n'aient adhéréau Statut une ((mise en sommeil » d'une clause
'd'un traité bilatéral; ce n'est pas la preuve contraire qui est nécessaire
mais une preuve positive que le Statut pouvait, juridiquement, établir
un tel effet.
Il est exact que tout Etat adhérant au Statut l'accepte tel quel, mais

en décembre 1955, lorsque l'Espagne a adhéréau Statut, existait-il
encore dans le traité de 1927 un article 17qui puisse revivre?L'article 37
peut-il avoir ((saisi» les traités bilatéraux d'un Etat tiers, bien avant
qu'il ne devienne partie au Statut, pour «préserver » la clause juridic-
tionnelle ?
Ceci suppose une opération complexe, nouvelle, contraire à priori au

caractère volontaire de l'acceptation de la juridiction de la Cour et qu'il
faudrait justifier autrement qu'en la décrivant, car ce n'est pas une
démonstration de l'existence juridique d'une obligation que se borner à
dire : (c'est une mise en sommeil x. C'est, en effet, poser un principe
contraire au principe généralement reconnu de l'acceptation volontaire
de la juridiction de la Cour internationale de Justice, acceptation qui

n'a étédonnéeau Statut par l'Espagne qu'en décembre 1955.

D'où la nécessité de soutenir que l'Espagne avait, elle-même,
reconnu que l'effet de l'article 37 était bien de faire revivre l'articl17
du traité de 1927 dèsson adhésion au Statut. Que l'Espagne ait cru ou
non que l'article 37 avait un certain effet est sans portée ; c'est la Cour

qui est seul juge de sa propre compétence selon leStatut,non pas selon
ce que pense de ce Statut une des Parties.

Le problème de base est bien celui-ci : comment donner à l'article 37
un effet de préservation des clauses juridictionnelles des traités bilaté-
raux entre Etats tiers, effet qui, nécessairement, doit prendre date à

l'entréeen vigueur du Statut, avant la disparition dela Cour permanente,
puis un effet de transfert automatique de la juridiction à la Cour inter-
nationale de Justice au jour de l'admission de 1'Etat tiers aux Nations BARCELONA TRACTION (DISS. OP. ARM.~ND-UGON) I53

not yet parties to the Statute, with a "resuscitation" on their becoming
parties to that Statute, or else Article 37 did not create that effect.
As this is a matter of the interpretation of the Statute, there is no
obligation to take account of the-arguments presented by the Parties.
The Court must seek the solution by its own means.

Even if the view were admitted that Article 37 wa. intended to extend
its effects to al1 parties to the Statute, whatever might be the date
at which they became parties thereto, the legal problem is not solved
thereby, for the question is whether the Statute could create in inter-
national law this new obligation relating to the "resuscitation" of
provisions that had lapsed through the permanent disappearance of
the subiect of the obligation.
"
It is useless to say that this paralysis is the sole purpose of Arti37e
and that it has no other purpose. Such an assertion implies that an
obligation could be created in relation to third States, causing, before
they had become parties to the Statute, a clause in a bilateral treaty to
become "dormant". It is no negative proof that is required, but posi-
tive proof of the fact that the Statute could legally bring about such
an effect.

It is true that every State which becomes a party to the Statute
accepts it as it is.But in December 1955, when Spain became a party
to the Statute, was there still in the 1927 Treaty an Article 17 which
could be revived? Can Article 37 have "seized" the bilateral treaties of
a third State, long before that State became a party to the Statute,
for the purpose of "preserving" the jurisdictional clause?
This presupposes a new and complex operation which a priori is

contrary to the voluntary character of the acceptance of the jurisdiction
of the Court and which would have to be justified by some means other
than a mere description of it. For it is no proof of the Iegal existence of
an obligation merely to say that it is "dormant". This would, in fact,
be laying down a principie contrary tothe generally recognized principle
of the voluntary acceptance of the jurisdiction of the International

Court of Justice. Spain did not give its acceptance of the Statute ijntil
December 1955.
Hence follows the need to argue that Spain had itself recognized that
the effect of Article 37 was indeed to revive Article 17 of the 1927
Treaty at the time when Spain became a party to the Statute. Whether
Spain did or did not believe that Article 37 had a certain effect is quite
immaterial. It is the Court alone \vliich is called upon to determine

its own jurisdiction according to theStatute, and not according to the
view one of the Parties takes of the Statute.
The fundamental problem is in fact the following. How can
-4rticle37 be given an effect of preserving the jurisdictional clauses of
bilateral treatiesbetween third States? That effect must necessarily
date from the entry into force of the Statute, before the disappearance

of the Permanent Court. .4nd how can Article 37 then be given the
effect of automatically transferring jurisdiction to the InternationalUnies. Il faut bien que la «préservation » s'applique dès l'entrée en

vigueur du Statut puisqu'on prétend que celui-ci vise par l'article 37
« tous les traité»,donc les traités liant des Etats quin'ont encore aucune
obligation résultant de l'appartenance aux Nations Unies et qui pour-
raient, par hypothèse, n'en jamais avoir s'ilsn'entraient pas aux Nations

Unies. Et cependant l'article 37 doit pouvoir s'appliquer sans aucune
limitation de durée car si la «préservation )de la clause juridictionnelle
d'un traité bilatéral a étéeffectuée par l'entrée en vigueur du Statut,
l'article37 s'applique quelle que soit la date d'admission de 1'Etat tiers
aux Nations Unies. Si la préservation est intervenue, elle est effective

« potentiellement »tant que le traité bilatéral est en vigueur.

Pour qu'il en soit autrement, il faut soutenir que l'article 37 ne

((préserve ))la clause juridictionnelle d'un traité bilatéral que le jour de
l'admission de 1'Etat tiers, mais alors c'est le problème déjàsignalé :une
« paralysation » est une opération inconnue en droit international géné-
ral pour lequel une suspension vaut libération de l'obligation ; or, on n'a

pas prouvé que l'article 37 décidait cette remise en vigueur après para-
lysation.
Et cette considération devient plus décisive encore pour l'examen de
la deuxième exception subsidiaire. Si une obligation suspendue ne fait
que reprendre effet à partir du jour où cesse l'empêchement,il n'y a pas

de compétence pendant la périodede suspension ; sinon ce n'est pas une
suspension mais la (mise en sommeil »ou ((paralysie )),descriptions qui
sent en effet nécessaires pour justifier que la suspension n'ait eu aucun
eoet. Car si la périodede suspension disparaît rétroactivement et si l'on

admet la compétence de la Cour internationale de Justice, comme s'il
n'y avait pas eu d'interruption dans l'application du traité bilatéral, ce
n'est plus une suspension d'obligation, par définition. Et ici encore il
faut prétendre que tel était le but de l'article 37, sans un brin de preuve

pour l'établir. Or, pour prouver que la suspension d'une obligation n'a
pas ((libéré 1)les parties de l'obligation pendant toute la durée de la
période de suspension, on doit procéder autrement que par affirmation.

L'Espagne et la Bulgarie ont signéun traité de conciliation, de règle-
ment judiciaire et d'arbitrage le 26 juin 1931, ratifié à Sofia le21 juin

1935(C.P.J.I. sérieE no 13, p.296). L'article 17 permet àchaque partie
au traité de saisir la Cour permanente d'une requête, après préavisd'un
mois. Ce traité se renouvelle chaque cinq années, s'iln'est pas dénoncé
six mois avant l'expiration de ce délai.

Un tel traité est-il encore en vigueur entre ces deux Etats quant à la
compCte.ncede la Cour internationale, mêmeaprès l'arrêtde l'IncidentCourt of Justice on the day when the third State is adrnitted to the
United Nations? The "preservation" must, of course, apply as from the
time when the Statute came into force since it is claimed that Article 37
of the Statute applies to "al1 treaties" and therefore to treaties binding

States which have not yet any obligation arising from membership of
the United Nations and which might, by hypothesis, never have any
such obligation if they did not become Members of the United Nations.
Yet it is necessary that Article 37 should apply without any limitation
of time for, if the "preservation" of the jurisdictional clause of a bilateral
treaty has been brought about by the entry into force of the Statute,

Article 37 will apply whatever be the date when the third State is
admitted to the United Nations. If the preservation has occurred,
it is "potentially" effective so long as the bilateral treaty is in force.
For it to be otherwise, it would have to be held that Article 37 does
not "preserve" the jurisdictional clause of a bilateral treaty until the
day when the third State is admitted. But, in that case, the problem

already mentioned remains. A "paralysing" operation is one that is
not known in general international law, according to which suspension
means relief from the obligation. But it has not been proved that
Article 37 determined such renewal after paralysis.
This consideration becomes still more conclusive in the examination
of the alternative second objection. If a suspended obligation cornes
into force again only as from the day on which the obstacle ceases to

exist, there is no jurisdiction during the period of suspension. Other-
wise it is not a case of suspension but of a "dormant" condition or
"paralysis", and these descriptions are in fact necessary to justify
the fact that the suspension has had no eoect. For if the period of
suspension disappears retrospectively and if the jurisdiction of the
International Court of Justice is admitted as if there had been no inter-

ruption in the application of the bilateral treaty, this is no longer a
suspension of the obligation, by definition. Here again it must be
held that this was the purpose of Article 37, but without any shadow
of proof to establish it. Now, to prove that the suspension of an obli-
gation has not "relieved" the parties of the obligation for the whole
of the period of suspension, it is necessary to produce something more

than a mere assertion. *
* *

Spain and Bulgaria signed a Treaty of Conciliation, Judicial Settle-
ment and Arbitration on 26 June 1931, which was ratified in Sofia on
21 June 1935 (P.C.I.J., Series E, No. 13, p. 296). Under Article 17

each party may, subject to one month's notice, bring a dispute before
the Permanent Court by means of an application. This Treaty is
renewed every five years, unless denouncedsix months before the expiry
of that period.
1s such a treaty still in force between these two States in regard to
the jurisdiction of the International Court, eveil after the Judgrnentaérien? Dans l'hypothèse où un passager du malheureux avion abattu
par les forces militaires bulgares ait étéespagnol, le gouvernement de
ce dernier aurait-il eu le droit d'introduire une requêteen protection de

son ressortissant, sur la base de l'article 17 indiqué?

Si l'article 37 rend la Cour internationale compétente, elle décidera
aussi que l'article 17 du traité hispano-bulgare est en vigueur, solutiori
qui parait inattendue et contradictoire.

Il en serait de mêmepour d'autres traités, de la mêmenature que le
traité de 1927, signésentre l'Espagne et la Pologne, la Tchécoslovaquie,
la Hongrie, pour ne citer que quelques-uns de ces traités - Etats qui
pourraient ne pas maintenir de relations diplomatiques.

La pratique internationale se référantà l'application des traités visés
par l'article 37 du Statut a une valeur toute relative. La pratique ayant
un vrai intérêt dansle cas de la présente exception serait celle postérieure
à l'interprétation donnéepar les arrêtsde l'Incident aérienet du Temple

où la question a été poséedeux fois.

Les signataires des protocoles pour adapter les clauses de traités se
référant à la Cour permanente n'avaient d'autre but que d'appliquer,
expressément, ces clauses juridictionnelles qui avaient été convenues
dans les traités à la Cour internationale, mais sans soulever là question

de savoir si l'article 37 comprenait seulement les Membres des Nations
Unies parties au Statut avant la dissolution de la Cour permanente et
les nouveaux Membres des Nations Unies après cette date. Ces proto-
coles se référaientà tous ces Etats. Tout de même, un doute subsistait
quant au champ d'application de cet article.

Ici, la sagesse des Nations Unies s'unissait à la sagesse de la Cour
internationale, dans son interprétation de l'Incident aérien, pour limiter
l'application de l'article 37 aux seuls Etats présents à la conférence de
San Francisco. Ainsi, on savait quels Etats allaient êtrevraiment obli-
gés,sans se placer dans des situations dont on ne pouvait prévoir les
effets quant aux traités qui donnaient compétence à la Cour permanente.

Si une telle conduite de prudence a étéappliquée dans le cas des décla-
rations de l'article 36, paragraphe 5, bien limitées et connues, une même
manière de voir doit à fortiori êtrevalable pour des clauses juridiction-
nelles inséréesdans de nombreux traités et entre Etats parties au Statut
avant la dissolution de la Cour permanente.

L'interprétation soutenue par le demandeur n'a pas l'appui de la pra-

tique de divers organes de l'Organisation des Nations Unies.in the Aerial Incident case? Assuming that one of the passengers in the
unfortunate aircraft brought down by the Bulgarian military forces
was a Spaniard, would hi; ~ovemment have had the right to file an
application in the exercise of protection of its national, on thebais of
the above-mentioned Article 17?
If Article 37 confers jurisdiction on the International Court, it will

also stipulate that Article 17 of the Spanish-Bulgarian Treaty is in
force-a result that seems improbable and that would be contradictory.
The position would be the same in the case of other treaties, of the
same kind as the 1927 Treaty, signed between Spain and Poland,
Czechoslovakia and Hungary, to mention only a few of these treaties
with countries that might not maintain diplomatie relations.

International practice with regard to the application of the treaties
referred to in Article37 of the Statute is only of relative value. The
practice that would be of real interest in the case of the present objec-
tion would be practice subsequent to the interpretation given in the
judgments in the cases concerning the Aerial Incident and the Temple

of Preah Vihear in which the question was raised on two occasions.
The signatories to the protocols drawn up for the purpose of adapting
clauses in treaties referring to the Permanent Court had no other object
than to apply those jurisdictional clauses included in the treaties-
expressly~~o the ~nternational Court. But they did not raise the
question whether Article 37 covered Members of the United Nations
that were parties to the Statute before the dissolution of the Permanent

Court and also new Members of the United Nations after that date.
Those protocols referred to al1 of these States. Nevertheless, a doubt
subsisted as to the field of application of this Article.
Here, the wisdom of the United Nations concurred with the wisdom
of the International Court in its interpretation in the Aerial Incident
case, in limiting the application of Article 37 to those States which
were present at the San Francisco Conference. Thus, it was known

what States were really going to be placed under the obligation, without
going into situations the effects of which could not be foreseen in regard
to treaties which conferred jurisdiction on the Permanent Court. If
such a cautious attitude was adopted in regard to the declarations
referred to in Article36, paragraph 5, which were clearly limited and
well known. a siniilar attitude should a fortiori be observed in regard
to the jurisdictional clauses included in a large number of treaties

between States parties to the Statute prior to the dissolution of the
Permanent court.
* * *

The interpretation upheld by the Applicant is not supported by the
practice ofvarious organs of the United Nations. On peut mentionner deux cas importants, entre autres, citéspar les
Parties.
Cas de I'Actegénéra l La résolution 268 A (III)de l'Assemblée géné-
rale du 28 avril 1949 poursuivait l'objet de restituer à l'Acte général de
Genève du 26 septembre 1928 son efficacitépremière. Cette résolution,

à la lettre e), exprime que cet Acte, avec les modificationsy apportées,
était ouvert à l'adhésion des Membres des Nations Unies, et des Etats
non membres devenus parties au Statut de la Cour internationale ou à
qui l'Assembléegénérale des Nations Unies aurait communiqué copie à
cet effet. Une telle proposition était nécessaire, vu que l'efficacité de
l'Acte généralse trouvait diminuéedu fait que les organes de la Société

desNations, et la Cour permanente, auxquels il se réfère,avaient disparu.
Cette résolution dispose que les amendements apportés à l'Acte général
joueront seulement entre Etats ayant adhéréaudit Acte ainsi revisé. La
lettrec) indique les amendements à apporter aux articles 17, 18, 19,20,
23, 28, 30,33, 34,36, 37 et 41, où les mots «Cour permanente de Justice
internationale )doivent êtreremplacéspar ((Cour internationale de Jus-

tice')).Un tel précédent démontre,sans aucun doute, que l'Assemblée
généralen'a pas cru qu'elle pouvait faire application de l'article 37 du
Statut de la Cour quant aux dispositions de l'Acte généralvisant la
Cour permanente : pour le transfert à la Cour internationale de la juri-
diction accordée à la Cour permanente, un nouvel accord était indis-
pensable, ce qui signifiait que l'articl37 ne jouait pas. L'intervention

de la délégationbelge aux Nations Unies pour aboutir à cette résolution
n'a pas étésans importance.

Si l'article7 ne joue pas dans le cas de l'Acte général,comme l'a admis
la résolution268 A (III)de l'Assembléegénérale, comment peut-on sou-
tenir logiquement que l'article37 doit jouer dans le cas du traité hispano-

belge de 1927 ? Ce traité n'est autre chose qu'un Acte généralen petit
entre deux Etats. En effet,l'Acte général prévoitla solution des litiges
entre Etats par des commissions de conciliation, par l'arbitrage et par
le règlement judiciaire devant la Cour permanente, et le traité hispano-
belge de 1927 indique, pour les différendsentre les deux Etats, les mêmes

moyens de solution. Si, pour que l'Acte généralentre en pleine vigueur
quant à la Cour internationale, il est indispensable que les Etats qui y
ont souscrit et l'ont accepté fassent certaines déclarationsà ce sujet, on
ne voit pas la raison pour laquelle il n'en serait pas de mêmepour les
deux Etats signataires du traité hispano-belge. Si l'article37 nc lie pas
les Etats signataires de l'Acte généralà la juridiction de la Cour inter-

nationale, comment cette disposition pourrait-elle lier le Gouvernement
espagnol à cette Cour ?

L'Acte généraladopté le 26 septembre 1928 par l'Assemblée de la
Société des Nations a reçu l'adhésion de la Belgique le 18 mai 1929 et

de l'Espagne le 16 septembre 1930. Alors se présente la situation sui- Two important instances cited by the parties rnay be mentioned, inter

alia.
The GeneralAct: The General Assembly's Resolution 268 A (III)
of 28 April 1949 was intended to restore its original efficacy to the
Geneva General Act of 26 September 1928. In paragraph (e) this
resolution states that this Act, with the amendments introduced,would
be open to accession by the Members of the United Nations and by the
non-Member States which shall have become parties to the Statute of

the International Court of Justice or to which the General Assembly
of the United Nations shall have communicated a copy for this purpose.
Such a provision was necessary as the efficacy of the General Act had
been impaired by the fact that the organs of the League of Nations and
the Permanent Court to which it refers had disappeared. This resolu-
tion states that the amendments made to the General Act will only
apply as between States having acceded to that Act as thus amended.

Paragraph (c) mentions the amendments to be made to Articles 17,
18,1g, 20,23,28,30,33,34,36,37 and 41,namely the words "Permanent
Court of International Justice" shall be replaced by "International
Court of Justice". This precedent shows, beyond al1 possible doubt,
that the General Assembly did not think it could apply Article 37 of
the Statute of the Court in the case of the provisions of the General
Act relating to the Permanent Court. In order to transfer to the Inter-

national Court the jurisdiction conferred on the Permanent Court,
a new agreement was essential. This meant that Article 37 did not
operate. The Belgian delegation's intervention in the United Nations
in support of this resolution vas not without its importance.
If Articl37 does not operate in the case of the General Act, as was
admitted by the General Assembly's Resolution 268 A (III), how can

it logically be maintained that Article 37 must operate in the case of
the Spanish-Belgian Treaty of 1927? This Treaty is nothing other than
a General Act on a small scale between two States. The General Act
does, in fact, provide for the settlement of disputes between States by
means of conciliation commissions, arbitration and judicial settlement
before the Permanent Court, and the Spanish-Belgian Treaty of 1927
mentions the same means of settlement in regard to disputes between

the two States. If, in order that the General Act may enter fully
into force in respect of the InternationalCourt, it is essential that the
States which signed and accepted it should make certain declarations
to that effect, there is no reason why the same thing should not be
true in the case of the two States that signed the Spanish-Belgian
Treaty. If Article37 does not bind the States that were signatories
of the General Act to accept the jurisdiction of the International Court,

how could that provision bind the Spanish Government to accept the
jurisdiction of that Court?
The General Act adopted by the Assembly of the League of Nations
on 26 September 1928 received the accession of Belgium on18 May 1929
and of Spain on 16 September 1930. Thus the following situationvante :si la Belgique invoque cet Acte généralcontre l'Espagne, ellene
pourra le faire qu'une fois que cet Etat aura signéles amendements
introduits à cet Acte (résolution 268A (III)) ;or, si la Belgique invoque
le traité de 1927, essentiellement pareil à l'Acte général,elle pourra le
faire selon une certaine interprétation de l'article 37 sans aucune autre
démarche. Une mêmesituation juridique se verrait régléede deux ma-
nières différentes selon qu'on invoque l'Acte généralou le traité. Il est
difficile de souscrireà une telle interprétation, qui conduit à des résul-
tats contradictoires.

Cas de la constitution de l'O.I.T. : La revision de la constitution de
l'O.I.T. était indispensable après la dissolution de la Cour permanente,
pour toutes les dispositions de cette constitution qui faisaient référence
à cette Cour. Pour les Etats parties au Statut de la Cour internationale
de Justice avant ladite dissolution, le transfert prévu par l'article 37
était suffisant pour les autres Etats non membres des Nations Unies
ou Membres postérieurement à cette dissolution, des amendements
étaient nécessaires.

A propos de l'avis consultatif de 1950 sur le Statut international du
Sud-Ouestafricain et en l'affaire, on doit remarquer que les trois Etats
intervenant dans cette affaire :Union sud-africaine, Ethiopie et Libéria,
étaient Membres originaires des Nations Unies. Il en est ainsi en l'affaire
Ambatielos,les deux Etats parties à celitige étaientMembres desNations
Unies avant le 18 avril 1946. Cesprécédentsne sont donc aucunement
concluants, ils sont toujours dans la ligne d'interprétation des arrêts de
l'Incidentaérielzet du Temple.Cette interprétation a aussi joué,indirec-
tement, en l'affaire du Droit de passage. Au moment où le Portugal
déposasa nouvelle déclaration d'acceptation dela juridiction dela Cour,
il était liépar une déclaration antérieure qui tombait sous le coup du
paragraphe 5 de l'article 36 du Statut.La Cour ne prit en considération

que la dernière déclaration.

Lors de la revision de nombreuses conventions donnant compétence à
la Cour permanente, dans tous les cas, de nouveaux accords ou proto-
coles furent nécessairespour transférer ces compétences à la Cour inter-
nationale. On n'a pas jugéque l'article 37 tranchait la question. Dans
ces protocoles, on a explicitement prévule transfert en.mentionnant la
Cour internationale, ce qui plaide en faveur de la thèse espagnole. arises. If Belgium invokes this General Act against Spain, it will
only be able to do so when the latter State has signed the amendments
made to that Act (General Assembly Resolution 268 A (III)). But, if
Belgium invokes the 1927 Treaty, which is fundamentally identical
with the General Act, it will, according to a certain interpretation of
Article 37, be able to do so apart from any other condition. The

-same legal situation would thus be governed in two different ways
according to whether it is the General Act or theTreaty that is invoked.
It is difficult to agree with such an interpretation, which leads to con-
tradictory results.

The Constitutionof the I.L.0: The revision of the constitution of the
I.L.O. was necessary, after the dissolution of the Permanent Court, in
respect of al1 the provisions in it which referred to that Court. For
the States which were parties to the Statute of the International Court
of Justice before the said dissolution, the transfer provided for by
Article 37 was sufficient but, for other States which were not Members

of the United Nations or which became Members subsequently to that
dissolution, amendments were necessary.

In regard to the Advisory Opinion of 1950 on the International

Status of South-West Africa atd in the South West Africa cases, it should
be noted that the three States concerned in these cases, namely the
Union of South Africa, Ethiopia and Liberia, were original Members
of the United Nations. The situation was sirnilar in the Ambatielos
case, both States parties to which were Members of the United Nations
before 18 April 1946. These precedents are therefore by no means

conclusive. They are al1 in line with the interpretation given in the
Judgments in the cases concerning the Aerial Incident and the Temfile
of Preah Vihear. This interpretation was upheld also, indirectly, in
the Right of Passage case. At the time when Portugal filed its new
declaration of acceptance of the jurisdiction of the Court, that country
was bound by an earlier declaration to which Article 36, paragraph 5,

of the Statute applied. The Court took account only of the later
declaration.
In connection with the revision of many conventions conferring
jurisdiction on the Permanent Court, new agreements or protocols
were, in al1cases, necessary to effect the transfer of that jurisdiction to
the International Court. It was not considered that Article 37 settled

the question. In these protocols the transfer was explicitly provided
for with mention of the International Court, and this is an argument in
favour of the Spanish contention. L'interprétation que, dans leurs accords, les Etats tiers ont donnée
de l'article37 perd beaucoup de sa force, surtout si ces accords sont
antérieurs à l'interprétation par la Cour internationale du paragraphe 5
de l'article36 du Statut, qui soulève la mêmequestion que l'article 37.
Si l'on se réfèreà l'accord entre la Suède et la Finlande, dug avril 1953,
qui modifie une convention du 29 janvier 1926, on voit qu'il donne vali-

ditéà l'article premier du traité de 1926 et que cette validité ne dépend
pas de l'entrée de la Finlande aux Nations Unies. En effet, quand cet
Etat devint Membre des Nations Unies en 1955, il fut dès lors partie
au Statut de la Cour internationale ; mais à cette date, le traité 1926,
modifié enavril 1953, avait acquis force obligatoire depuis deux années.
C'est cet accord qui a opéréla transformation du traité de 1926 et non

le fait aue la Finlande était devenue ~artie au Statut. La ~rocédure de
cet accord et non l'application de l'articl93,paragraphe 2, dela Charte,
fait supposer que la Finlande entendait que l'article 37 n'était pas suf-
fisant pour rendre applicables les traités où était stipulée la soumission
à la Cour permanente.

Le Statut a organisé deux moyens ordinaires pour l'acceptation par
les Etats de la juridiction de la Cour internationale. Le premier moyen
est le traité ou la convention ; le second la dbclaration unilatérale. Ces

moyens sont ceux que mentionne l'article 36, paragraphes I et2.
Selon certaine thèse, l'Espagne aurait accepté la juridiction, ou mieux
la compétence de la Cour, implicitement, au moment où le Gouverne-
ment belge lui a proposé un compromis comme démarche préalable à la
saisine de la Cour par requête. Quand le Gouvernement espagnol a
repoussé cette proposition il a dit que la Belgique n'a aucun j.us standi

pour lui faire une telle proposition de protection d'une sociétécana-
dienne et qu'on n'avait pas épuiséles recours internes ; on en déduit
que l'Espagne aurait reconnu implicitement la compétence de la Cour,
lors du compromis proposé ou introduit. Telle est la thèse en question.

On doit partir de la base que l'acceptation de la compétence de la
Cour, soit par accord, soit par déclaration, doit être claire et non équi-
voque »,comme le soutient la jurisprudence, jusqu'à ce moment cons-
tante, de la Cour permanente et dela Cour internationale. Les instru-
ments qui correspondent à une telle acceptation de compétence doivent
êtreconcluants, déterminants et ne pas prêter au doute. The interpretation of Article 37 given by third States in their agree-

ments loses much of its force, particularly if those agreements are
prior to the interpretation which the International Court gave of
paragraph 5 of Article36 of the Statute, which raises the same question
as Article 37. If reference is made to the Agreement of g April 1953
between Sweden and Finland, which modifies a convention of 29 Janu-
ary 1926,it will be seen that it makes valid ArticleI of the 1926 Treaty

and that this validity does not depend on the entry of Finland into
the United Nations. Indeed, when that State becarne a Member of
the United Nations in 1955, it "as by reason of that fact a party to
the Statute of the International Court but, at that date, the 1926
Treaty, modified in April 1953, had been binding for two years. It
was that Agreement which effected the transformation of the 1926

Treaty, and not the fact that Finland had become a party to the
Statute. The fact that the procedure adopted was that of the Agree-
ment, and not the application of Article 93,paragraph 2, of the Charter,
gives rise to the supposition that Finland considered that Article 37
was not sufficient to render applicable the treaties in which acceptance
of the jurisdiction of the Permanent Court was stipulated.

The Statute has provided two normal methods by which States may
accept the jurisdiction of the International Court. The first method
is by treaty or convention and the second by a unilateral declaration.
These are the methods mentioned in Article 36, paragraphs I and 2.
According to a certain contention, Spain is said to have accepted

the jurisdiction of the Court-implicitly-at the time when the Belgian
Govemment proposed to the Spanish Government a special agreement
as a preliminary step towards bringing the matter before the Court
by means of an application. When the Spanish Government rejected
this proposal, it said that Belgium had no jus standi entitling it to make
such a proposa1 for the protection of a Canadian Company and that

local remedies had not been exhausted. From this it is a"med that
Spain had implicitly recognized the jurisdiction of the Court in connec-
tion with the special agreement that was proposed or submitted. Such
is the contention advanced.
As a starting point, the basis adopted must be that the acceptance
of the jurisdiction of the Court, whether by agreement or by declaration,

must be "clear and unequivocal" as has been held in the decisions
consistently given hitherto by the Permanent Court and by the Inter-
national Court. The instruments by which such an acceptance of
jurisdiction is given must be conclusive, decisive and such as to leave
no room for doubt. Une fois le Gouvemement espagnol saisi de la prétention belge, il

manifesta clairement qu'il ne pouvait accepter cette démarche pour les
raisons déjàmentionnées. Ce faisant, il ne crut pas nécessairedéjà d'exa-
miner la question si l'Espagne était ou non liée envers la Belgique par
une clause quelconque, pour porter l'affaire devant la Cour. La propo-
sition tout entière de la Belgique fut repoussée par l'absence d'un

élément premier, la qualité pour introduire une telle prétention. De
cette obligation peut-on déduire que l'Espagne a fait une manifestation
((claire et non équivoque 1)d'acceptation de la compétence de la Cour ?
Cette acceptation peut-elle êtrefaite par implication sur la base d'un

raisonnement implicite ? D'autre part, quelle est la situation juridique
qu'on attribue - dans cette thèse - à l'Espagne ? Aurait-elle conclu
un accord tacite de volonté aux fins de venir devant la Cour ou aurait-
elle simplement exprimé un consentement d'acceptation de la juridiction

dela Cour, aussi par voie d'implication ?Toutes ces questions s'opposent
à la thèse proposée.
Jusqu'à présent c'était un principe bien établi que la compétence de
la Cour doit s'admettre selon le Statut par des manifestations de volonté
expresses et claires, et non par des raisonnements fondés sur des suppo-

sitions, sur des faits douteux et sur des silences qu'on interprète. Pour
que la compétence puisse êtreétablie il faut un acte volontaire, indis-
cutable, non douteux, de 1'Etat auquel on attribue une telle volonté.

Une réflexion s'impose sur cette thèse dangereuse, car elle créerait
une nouvelle notion de l'acceptation de la compétence de la Cour par
acquiescement tacite, ou par accord tacite, situation peu compatible
avec le principe du Statut selon lequel l'acceptation de la juridiction

doit s'établir par un acte et un consentement (clairs et non équivo-
ques ».La juridiction de la Cour ne doit pas s'établir sur des considéra-
tions et des raisonnements ambigus.

On soutient que la présente exception serait incompatible avec l'atti-
tude antérieure du Gouvernement espagnol. On conclut que certains
paragraphes de la note espagllole du 30 septembre 1957 contiennent

une déclaration (claire et non équivoque )de reconnaissance de la juri-
diction de la Cour. Dans cette note, on prend principalement en consi-
dération la proposition belge faite dans sa note du 8 juillet 1957, d'un
compromis pour soumettre le différendàla Cour internationale. La con-
testation, entre les deux Gouvernements, portait sur le point que le

Gouvemement belge ne justifiait pas qu'il pût accorder sa protection
diplomatique à la Barcelona Traction, sociétCcanadienne, sans faire la
preuve de la nationalité belge des actionnaires de cette société.

La question de l'interprétation de l'article 37 ne fut pas posée dans
la note espagnole ni dans la note belge précitées. As soon asthe Belgian proposa1 came before the Spanish Government,
the latter stated quite clearly that it could not accept this proposa1
for the reasons already mentioned. It did this because the Spanish
Government did not think it necessary at that stage to examine the

question whether Spain was or was not bound towards Belgium, under
any clause whatsoever, in regard to the submission of the case to the
Court. The proposal made by Belgium was rejected outright because
of the absence of a basic requirement, namely Belgium's right to intro-
duce such a claim. Can it be deduced that Spain gave a "clear and
unequivocal" manifestation of its acceptance of the jurisdiction of the

Court? Can such acceptance be established by implication on the
basis of implied reasoning? Moreover, what is the legal situation attri-
buted-under this view-to Spain? Did Spain conclude a tacit agree-
ment to come before the Court or is Spain held merely to have expressed
willingness to accept the jurisdiction of the Court-also by way of
implication? Al1these questions run counter to the contention advanced.

Hitherto it was a well-established principle that the jurisdiction of
the Court must be accepted as required by the Statute, by explicit
and clear manifestations of intention, and not by arguments founded
on suppositions, on doubtful facts and on silences that have to be
interpreted. For jurisdiction to be established, there must be a volun-
tary, indisputable and indubitable act on the part of the Stateto which

such an intention is attributed.
One observation must be made on this contention which is dangerous
because it would introduce a new notion of the acceptance of the juris-
diction of the Court by tacit acquiescence or by tacit agreement-a
situation far from compatible with the principle of the Statute according

to which acceptance of jurisdiction must be established by clear and
unequivocal act and consent. The jurisdiction of the Court must
not be founded on ambiguous considerations and arguments.

It is maintained that the present objection is incompatible with the
earlier attitude of the Spanish Governmenf. The conclusion is reached
that certain paragraphs in the Spanish Note of 30 September 1957
contain a "clear and unequivocal" declaration of the recognition of the
jurisdiction of the Court. That Note is concemed mainly with the
proposa1 made in the belgian Note of 8 July 1957for a special agreement

for the purpose of submitting the dispute to the International Court.
The divergence in view, as between the two Governments, centred
round the fact that the Belgian Govemment had not proved that it
was entitled to gant its diplomatic protection to Barcelona Traction,
a Canadian company, without furnishing evidence of the Belgian

nationality of the shareholders of that company.
The question of the interpretation of Article 37 was not raised either
in the Spanish Note or in the Belgian Note mentioned above. Le contenu de la note espagnole sur l'existence d'une juridiction obli-

gatoire pour les deux Etats, se rapporte au silence belge à l'objection
fondamentale du département extérieur espagnol, dans ses notes du
22 décembre 1951 et du 5 janvier 1952. On ne voit pas quelle reconnais-
sance expresse peut se dégager du texte d'une phrase incidente. La

référenceà la juridiction est liéeà la question du jus standi. Elle doit se
retenir dans son ensemble. Aucun engagement juridictionnel ne peut se
déduirede cette manifestation. Ce document contient une manifestation
de volonté non équivoque dans le résumé finalde cette note au no 6,

qui dit textuellement : ((Le traité susvisé [celuide 19271n'est pas sus-
ceptible d'êtreinvoqué pour la solution d'un litige qui n'a pu surgir
pour les raisons signalées. ))

Au surplus, cette note du 30 septembre dans la phrase incriminée ne
démontre pas une déclaration de volonté. Il ressort de cette correspon-
dance que le Gouvernement espagnol n'a jamais accepté l'intervention
de la Cour dans la présente affaire. Cette position a seule sa vraie impor-

tance. Le manque de légitimation de la Belgique n'était pas le motif
unique pour l'incompétence de la Cour. Pour le Gouvernement espagnol,
cette question de la légitimation était préalable et la question de la
compétence de la Cour sur la base de l'article 37 ne fut ni effleuréeni

discutée.
Si l'on examine cette note verbale, dans son ensemble, on doit forcé-
ment conclure, de l'examen de circonstances où elle trouve son origine,
des propositions qu'elle rejette et des raisons sur lesquelles se fonde cette

attitude, que le Gouvernement espagnol n'a aucunement accepté, ni de
façon expresse, ni de façon implicite, la compétence de la Cour.

Ce n'est qu'après la requête et le mémoire belgesque le problème des
exceptions préliminaires est devenu actuel et l'Espagne a immédiatement

soulevél'exception préliminaire relative à la compétence. Auparavant,
il n'y avait que le jzcsstandi qui était en discussion. Parler d'une question
de (différend supposé ))dans le texte de la note espagnole du IO juin
1957,c'est dire clairement que l'Espagne ne reconnaissait pas l'existence

d'un différend. Le problèmede l'existence ou de l'inexistence de la juri-
diction obligatoire n'est pas discuté dans la note. Le fait que le Gouver-
nement espagnol, dans sa note du 30 septembre 1957, déclarait que le
traité n'est (pas susceptible d'êtreinvoqué r pour la solution d'un litige

qui n'apas pu surgir pour les raisons signalées implique que toute discus-
sion sur des exceptions préliminaires pour le cas où la Belgique voudrait
porter effectivement le différenddevant la Cour devient superflue.
A partir du moment où la Belgique a effectivement port6 devant la

Cour l'affaire de la Barcelona Traction, ou lorsque cette éventualité a
étédiscutée sérieusemententre les Parties, l'Espagne a immédiatement The reference in the Spanish Sote to the existence of a jurisdiction
binding on both States relates to the Belgian silence in regard to the
fundamental objection advanced by the Spanish Ministry of Foreign
Affairs, in its Notes of 22 December 1951 and j January 19j2. It is
impossible to see how any explicit recognition can be deduced from the

text of an incidental sentence. The reference to jurisdiction is connected
with the question of the jus standi. It must be considered in its con-
text. No jurisdictional obligation can be inferred from the statement.
There is a definite and unequivocal manifestation of intention in the
final summary of this Note given in paragraph 6,which says textually :

"The above mentioned Treaty [of 19271cannot be relied upon for the
settlement of a dispute which, for the reasons indicated, cannot have
arisen."
Moreover, this Note of 30 September does not, in the sentence that
is cited, constitute a declaration of intentio-1. It is clear from this
correspondence that the Spanish Government never agreed to the

intervention of the Court in the present case. This position alone is
what is important. Belgium's lack of capacity was not the sole ground
for lack of jurisdiction in the Court. From the point of view of the
Spanish Government, this question of capacity Bras a preliminary one
and the question of the Court's jurisdiction on the basis of Article 37

was neither discussed nor even touched upon.
If this Note Verbale is examined as a whole, the conclusion must
inevitably be reached, in the light of the circumçtances which gave rise
to it, the proposals which it rejects andthe reasons on which itsattitude
is based, tliat the Spanish Government did not in any way, either ex-
plicitly or implicitly, accept the jurisdiction of the Court.

It was only after the Belgian Application and Memorial that the

question of preliminary objections really arose and Spain immediately
put forward the preliminary objection relating to the jurisdiction of
the Court. Before that, it was only the jus standi that was under
discussion. The use, in the Spanish Note of IO June 1957, of the words
"an alleged dispute" shows clearly that Spain did not admit the existence

of a dispute. The problem of whether or not any compulsory juris-
diction existed was not discussed in the Note. The fact that, in its Note
of 30 September 1957, the Spanish Government stated that "the Treaty
cannot be relied upon for the settlement of a dispute which, for the
reasons indicated, cannot have arisen" implies that any discussion of
preliminary objections in the event of Belgium deciding to bring the

dispute before the Court becomes superfluous.
From the moment when Belgium actually brought the Barcelona
Traction case before the Court, or when that possibility was seriously
discussed between the Parties, Spain immediately took up position bypris position en niant la compétence de la Cour en prévision de la future
exception préliminaire no 2.
La Cour internationale en l'affaireAnglo-Iranian Oz1Co. donne des

règles pour l'interprétation grammaticale des actes unilatéraux. Cet
arrêtdit :

« Mais la Cour ne saurait se fonder sur une interprétation pure-
ment grammaticale du texte. Elle doit rechercher l'interprétation
qui est en harmonie avec la manière naturelle et raisonnable de lire

le texte, eu égardà l'intention du Gouvernement de l'Iran àl'époque
où celui-ci a acceptéla compétence obligatoire de la Cour. » (C.I.J.
Recueil 1952, p. 104.)

On ne doit retenir, isolément, le sens textuel des mots, sans prendre en
considération leur objet et finalitédans le document où ils sont employés,

car c'est de celui-ci que les mots ont une certaine valeur et signification,
tant qu'expression de volonté de leurs auteurs. La compétence de la
Cour doit résulter d'une déclaration ou d'actes concluants ; il n'y a dans
le cas présent ni déclaration expresse, ni actes concluants.

Lors de la corresponaance diplomatique, le défendeurn'a jamais mani-
festé sa volonté d'obtenir une décision sur le fond, ni de soulever la
question de compétence ; il semble clair qu'on ne peut déduire d'une
telle attitude une acceptation de la compétence de la Cour.

Dans le cas où la Cour se déclarerait compétente, en vei,, de l'ar-
ticle37 de son Statut et ranimerait l'article 17,paragraphe 4,du traité
de 1927 ainsi que d'autres dispositions concordantes avec cet article, le

différend soulevépar le Gouvernement belge ne pourrait pas êtresoumis
à la juridiction de la Cour parce qu'il est néet se rapporte à des situa-
tions et fdits antérieurs à la date à laquelle la juridiction de la Cour a
pu déployer ses effets dans les relations entre la Belgique et l'Espagne.
Jusqu'à l'époque où elle a étéranimée, la clause juridictionnelle était

en sommeil, et a nécessitéun consentement pour êtreremise en vigueur :
le consentement résultant de l'entrée de l'Espagne aux Nations Unies.

Cette date doit être fixée au 14 décembre 1955, date à laquelle
l'Espagne fut admise comme Membre des Nations Unies. Le différend
étant antérieur à cette date critique, il n'a pu êtresoumis à la Cour.

Le traité de 1927, en effet, dans ses articlesI et 2 et protocole addi-
tionnel, vise les différends qui ((viendraient r à surgir entre les deux
Etats. On ne peut dire que le trait6 hispano-belge marque une clairedenying that the Court possessed jurisdiction, thereby anticipating the
future Preliminary Objection No. 2.
In the Anglo-Iranian Oil Co. case, the Intemational Court gives
rules for the grammatical interpretation of unilateral declarations.
This Judgment says :

"But the Court cannot base itself on a purely grammatical inter-
pretation of the text. It must seek the interpretation which
is in harmony with a natural and reasonable way of reading the
text, having due regard to the intention of the Government of Iran
at the time when it accepted the compulsory junsdiction of the
Court" (I.C.J. RePorts1952, p. 104).

Account should not be taken, in isolation, of the literal meaning of
words, without regard to the object and purpose they serve in the
document in which they are employed, for it is from this that they derive
a certain value and significance as the expression of the intention of
the author. The jurisdiction of the Court must result from either an

explicit declaration or from acts conclusively establishing it. In the
present case there is no explicit declaration and there are no conclusive
acts.
Inthe diplomatic correspondence, the Respondent has never displayed
any wish to obtain a decision on the merits or to raise the question of
jurisdiction. It seems evident that an acceptance of the jurisdiction

of the Court cannot be inferred from such an attitude.

In the event of the Court's finding that it possesses jurisdiction by

virtue of Article 37 of its Statute and of its reviving Article 17, para-
graph 4, of the 1927 Treaty together with the other provisions which
are in harmony with that Article, the dispute to which the Belgian
Govemment refers could,not be submitted to the jurisdiction of the
Court because it arose and relates to situations and facts prior to the
date on which the Court's jurisdiction could have had effect in the

relations between Belgium and Spain. Until the date at which it was
revived, the jurisdictional clause was dormant and, in order to be
brought again into force, consent thereto was required, this consent
resulting from Spain's entry into the United Nations.
The date in question must be fixed as at 14December 1955,that being
the date on which Spain was admitted as a Member of the United

Nations. As the dispute was prior to this crucial date, it could not be
submitted to the Court.
The 1927 Treaty, in fact, in its Articles I and 2 and in the Final
Protocol, is concerned with disputes that "may arise" between the two
States. It cannot be said that the Spanish-Belgian Treaty indicates162 BARCELONA TRACTION (OP. DISS. ARMAND-UGON)

volonté de viser tous les différends. La clause de juridiction de l'ar-

ticle 17 du traité, paragraphe 4, que l'article 37 du Statut ranime, ne
s'étend pas à des différends quelconques, mais seulement à ceux qui
sont postérieurs à la date du 14 décembre 1955. Pour les différends
antérieurs à cette date, il n'y a.pas de clause de juridiction valable. Le
présent différend est bien antérieur au 14 décembre 1955, comme le

reconnaît le Gouvernement belge dans sa note diplomatique du 16 mai
1957. Il est donc clair que l'article37 n'a pu rétroagir l'effet de la clause
de juridiction de l'article17 à des différends nésavant son établissement.
La Cour permanente a dit :

iSi les termes qui expriment la limitation ratione temporis sont
clairs, l'intention qui les a dictés n'en apparaît pas moins bien
établie : en la formulant, on a entendu enlever à l'acceptation de

la juridiction obligatoire tout effet rétroactif ». (Série A/B no 74,
P. 24.)

La Cour permanente, en l'affaire Mavrommatis, a dit

iLa Cour est d'avis que, dans le doute, une juridiction basée sur
un accord international s'étend à tous les différends qui lui sont
soumis après son établissementD . ans le cas actuel cette interpréta-
tion semble imposée par les termes mêmesde l'article 26, d'après

lequel doit êtresoumis à la Cour « tout différend quel qu'il soit ...
qui viendrait à s'élever. 1)(Série A no 2,p. 35.)

L'article premier du traité de 1927 dispose

(Les Hautes Parties contractantes s'engagent réciproquement à
régler par voie pacifique et d'après les méthodes prévues par le
présent traité $us les litiges ou conflits, de quelque nature qu'ils
soient, qui viendraient à s'éleverentre la Belgique et l'Espagne et
qui n'auraient pu êtrerésoluspar les procédésdiplomatiques ordi-

naires. ))

L'arrêtcitéde la Cour permanente a interprété la phrase iitout diffé-
rend quel qu'il soit ... qui viendrait à s'élever »,qui correspond au texte

de l'article premier du traité cité ci-dessus (tous les litiges ou conflits
de quelque nature qu'ils soient, qui viendraient à s'élever... »,comme se
référant à tous les différends après l'établissement de la juridiction,
laquelle est entrée en vigueur lorsque l'Espagne est devenue partie au
Statut de la Cour. Les différendsantérieurs restent donc exclus de cette

juridiction.
L'article 17, paragraphe 4, une fois rentré en vigueur, en 1955, les
réserves rationetemporis des articles I et2 du traité jouaient de nouveau. any clear intention to cover al1 disputes. The jurisdictional clause
of Article 17 of the Treaty-paragraph 4, which Article 37 of the Statute
revives-does not apply to any disputes whatsoever, but only to dis-
putes which are subsequent to the date of 14 December 1955. For
disputes prior to that date, there is no applicable jurisdictional clause.
The present dispute arose much earlier than 14 December 1955, as is

admitted by the Belgian Government in its diplomatic Note of 16 May
1957. It is clear therefore that Article 37,could not make the effect
of the jurisdictional clause of Article 17 retrospectively applicable to
disputes that arose prior to its coming into force. The Permanent
Court said :

"Not only are the terms expressing the limitation ratione tem-
poris clear, but the intention which inspired it seems equally elear :
it was inserted with the object of depriving the acceptance of the
compulsory jurisdiction of any retroactive effects" (P.C.I.J.,
SeriesA /B, No. 74, p. 24).

In the Mavrommatis case, the Permanent Court said :

"The Court is of opinion that, in cases of doubt, jurisdiction based
on an international agreement embraces all disputes referred to it
after its establishment. In the present case, this interpretation
appears to be indicated by the terms of Article 26 itself where it

is laid down that 'any dispute whatsoever ... which may arise'
shall be submitted to the Court" (P.C.I.J., Series A, No. 2, p. 35).

Article I of the 1927 Treaty stipulates :

"The High Contracting Parties reciprocally undertake to settle

by pacific means and in accordance with the methods provided
for in the present Treaty all disputes or conflicts of any nature
whatsoever which may arise between Belgium and Spain and which
it may not have been possible to settle by the normal methods of
diplomacy."

The Judgment of the Permanent Court cited above interpreted the
phrase "any dispute whatsoever ... which may arise", which corres-
ponds to the text of Article I of the Treaty quoted above "al1 disputes
or conflicts of any nature whatsoever which may arise. ..",as referring
to al1 disputes arising after the establishment of the jurisdiction, and

this came into force when Spain became a party to the Statute of the
Court. Earlier disputes are therefore excluded from this jurisdiction.

When Article 17, paragraph 4, came into force again, in 1955, the
reçervations ratione temporis of Articles I and 2 of the Treaty became
applicable once more: Le Gouvernement belge a suivi la pratique invariable de limiter,
d'accord avec le droit international général,dans ses déclarations du
25 septembre 1925 et du IO juin 1948, l'acceptation de la juridiction
de la Cour par une clause rationetemporis. Il n'est pas pensable que ce
gouvernement ait voulu se départir et déroger cette règle, en signant

le traité de 1927. Ces déclarations permettent de prCsumer clairement
quelle était la volonté de la Belgique en cette matière.
Ily a la mise en vigueur de certaines dispositions du traité de 1927,
qui étaient en sommeil, notamment celles qui mentionnaient la Cour
permanente. On peut dire que certaines dispositions du traité sont mises
en vigueur.

La seule exception à la non-rétroactivité admise par le protocole est
limitée par deux conditions : a) que le litige ait trait à l'interprétation
d'un traité antérieur encore en vigueur ; b) que l'application incriminée
ait commencéavant la signature du traité de 1927 et se soit poursuivie
après la signature. Ces conditions ne visent pas notre cas.

L'article 37 n'établit aucune réserve ratione temporis, il se limite à
mettre en vigueur la partie rclative à la juridiction obligatoire qu'établit
le traité de 1927. C'est dans les diçpositions de ce traité qu'il faut cher-
cher les limitations rationetentporis à la compétence de la Cour. Ce sont
celles signaléesauparavant.

Dans la jonction au fond, quatre points sont à retenir :

I. Le fondement de la juridiction internationale n'est pas, comme en
droit interne, la volonté d'un législateur, mais le consentement des
parties elles-mêmes.

2. C'est à la lumière de cette constatation fondamentale qu'il faut
apprécier l'effet de l'opposition d'une exception préliminaire par 1'Etat
défendeur. Ce dernier fait usage, ainsi, de son droit de faire vérifier

préalablement par la Cour si l'affaire pour laquelle le demandeur a voulu
l'attraire devant la Cour est ou n'est pas l'une de celles pour lesquelles
il a accepté que la Cour se prononce à son égard. Pour cette raison,
lorsqu'est soulevée l'exception préliminaire, la procédure au fond est
arrêtéeet ne peut, normalement, reprendre que lorsqu'a été tranchéela
question soulevée à titre d'exception préliminaire.

3. C'est toujours à la lumière de la constatation fondamentale faite In its declarations of 25 September 1925and IO June 1948,the Belgian
Govemment followed the usual practice of lirniting its acceptance of
the jurisdiction of the Corirt by a clause rntionetemporis,in accordance
with general international law. It is not conceivable that that Govern-
ment intended to depart from or derogate from that practice when it
signed the 1927 Treaty. The declarations in question admit of a clear
presumption of Belgium's intention in this matter.
Certain provisions of the 1927 Treaty which had been dormant were
brought into force, more particularly those provisions which mentioned

the Permanent Court. It may be said that certain provisions of the
Treaty were brought into force.
The only exception to non-retroactivity admitted by the Protocol
is limited by two conditions, namely (a) that the dispute should relate
to the interpretation of a previous treaty still in force, and(b) that the
application challenged should have been initiated before the signature
of the 1927 Treaty and should continue after its signature. These
conditions are not relevant to the case now before the Court.
Article 37 does not establish any reservation ratioxe temporis. It
merely brings into force the part relating to the compulsory juris-
diction established by the 1927 Treaty. It is in the provisions of that
Treaty that the limitations rationetemporison the jurisdiction of the
Court must be sought. These are the limitations already mentioned.

On joinder to the merits four points should be borne in mind :

(1) The basis of international jurisdiction is not, as in municipal law,
the will of a law-maker, but the consent of the parties themselves.

(2) It is in the light of that fundamental observation that the effect
of the raising of a preliminary objection by the respondent State must
be judged. The respondent is thus exercising its right to have the
Court ascertain as a preliminary matter whether the case for which
the applicant has sought to bring it before the Court is or is not one of
those for which it has agreed that the Court should give a decision
where it is concemed. For that reason, when a preliminary objection
is raised, the proceedings on the merits are stopped and can normally

be resumed only when the question raised asa prelirninary objection
has been decided.
(3) It is always in the light of the basic observation made above ci-dessus sous le no Iqu'il faut apprécier le problème de l'admissibilité
de la jonction au fond d'une exception préliminaire.

((La jonction au fond [remarquait Anzilotti (p. 647 du 3e adden-

dum au no 2 de la série D)], obligeantun Etat à ester en justice
bien qu'il prétendene pas avoircontracté pareillo ebligationa, dans
la procédureinternationale,une tout autre signification que dans le
droit interne, où l'obligationd'esteren justice ne dépendpas de la
volontédel'intéressé.»

Si donc l'on ne peut certes pas affirmer que la Cour ait besoin du
consentement du défendeur pour pouvoir joindre au fond une exception
préliminaire, il n'en reste pas moins que la jonction au fond ne peut
être décidéequ'à titre de mesure absolument exceptionnelle. Elle va

manifestement à l'encontre du droit du défendeur de ne pas discuter le
fond d'une affaire s'il n'est pas avant tout établi que son consentement
a étédonné, d'une manière ou d'une autre, à ce que la Cour statue sur
cette affaire.
La Cour ne saurait donc avoir recours à la jonction au fond d'une
exception préliminaire que :

a) lorsque les Parties elles-mêmesle demandent, ou

b) lorsque la question soulevéeà titre d'exception préliminairèest telle-
ment liée à la question qui constitue le fond de l'affaire qu'il est
manifestement impossible de trancher l'une sans trancher l'autre en
mêmetemps.

4. Quant à la valeur d'une telle conclusion, il ne saurait y avoir de
différenceaucune selon que la question soulevée à titre d'exception pré-
liminaire est une question de pure procédure ou une question qui est,
en elle-même,une question touchant au fond du droit. Ce qui est néces-
saire c'est qu'il s'agissed'une question distincte de celle qui constitue

le fond même del'affaire. Bien des questions peuvent êtreen elles-mêmes
de fond sans pour autant toucher au fond de l'affaire.

Il convient de garder ces quatre points particulièrement présents à
l'esprit lorsqu'il s'agit de prendre une décisionquant à l'éventualitéde
joindre au fond une question soulevéepar 1'Etat défendeur à titre d'ex-

ception préliminaire. Sila jonction au fond était décidéedans un cas où
cette question aurait pu être tranchée indépendamment du fond de
l'affaire, la Cour irait àl'encontre du but mêmede l'institution des excep-
tions préliminaires. Elle obligerait le défendeur à discuter tout le fond
d'une affaire à propos de laquelle elle risque de devoir reconnaître plus
tard qu'il n'était finalement pas du tout tenu de le faire.under (1)that the question of the propriety of joining a preliminary

objection to the merits must be examined. As Judge Anzilotti remarked
(P.C.I.J., SeriesD, Third Addendum to No. 2,p. 647) :

"The joinder of an objection tothe merits, whichcompelleda State
to appear beforethe Court, in spite of the fact that it claimednot to
have acceptedany obligationfo doso,was in internationalproceedings

an entirely di8erent matter to the same step in proceedingsut muni-
cipal law, in which the obligationto appear beforea Court was not
dependenton the will of the party concenzed."

Thus, while it certainly cannot be said that the Court needs the
consent of the respondent in order to be able to join a preliminary
objection to the merits, it is none the less true that joinder to the merits
may be decided upon only as an absolutely exceptional step. It runs
manifestly counter to the respondent's right not to have the ments of

a case discussed unless it has first of al1been established that, in one
way or another, its consent has been given to the Court's deciding the
case.
Thus the Court can resort to the joining of a preliminary objection
to the merits only :

(a) when the parties themselves request it, or
(b) when the question raised as a preliminary objection is so bound

up with the question which constitutes the ments of the case that
it is manifestly impossible to decide the one without deciding the
other at the same time.

(4) As regards the validity of such a conclusion, there can be no

difference whatever according to whether the question raised as a
preliminary objection is a purely procedural question or a question
which is in itself a question which touches upon substantive law. What
is necessary is that it should be a question separate from that which
constitutes the actual merits of the case. Many questions can be in
themselves questions of substance without on that account touching

on the merits of the case.
These four points should be borne particularly in mind when taking a
decision on the possibility of joining to the merits a question raised by
the respondent State as a preliminary objection. If joinder to the
merits were decided upon in a case where the question could have been

decided independently of the ments of the case, the Court would be
going against the very purpose of the institution of preliminary objec-
tions. It would be compelling the respondent to address itself to the
whole merits of a case in connection with which it might subsequently
have to hold that, in the end, the respondent had not at al1been bound
to do so. En ce qui concerne l'affaire de la Barcelona Traction, rien ne justifie
l'idée d'une jonction au fond des troisième et quatrième exceptions.
L'idée expriméeau cours des audiences, selon la~uelle, dans notre hypo-
thèse, la Cour devrait d'abord explorer les circonstances de la cause

susceptibles d'avoir un effet sur lej~s standi de 1'Etat belge, et devrait
se prononcer en fonction de ces circonstances, risque de mener à une
situation absurde. Ce qui est nécessaire en premier lieu c'est d'établir la
règle qui domine la matière. Ensuite il faut vérifier si cette règle envi-
sage jamais la possibilité qu'en cas de préjudice causé à une société par
un Etat étranger,la protection diplomatique soit exercée par un Etat

autre que 1'Etat national de la sociétéelle-même.Et si la Cour aboutit
à une conclusion négative, elle devra tout simplement déclarer que
1'Etat belge n'a pas qualité pour exercer la protection diplomatique
dans l'affaire de la Barcelona Traction, qu'il se présente comme protec-
teur de la sociétéprétendument lésée ouqu'il veuille agir en tant que
protecteur des prétendus actionnaires belges de la sociétéen question.

Les circonstances du cas d'espèce ne peuvent absolument rien changer
à une telle conclusion.
Selon les termes mêmesde son mandat, la Cour doit appliquer le droit
international ; elle doit appliquer une règle du droit international pour
trancher les questions qui sont soulevéesà titre d'exception préliminaire,
que ce soit la question du défaut de qualité du Gouvernement belge ou
celle du défaut d'épuisement des recours internes. L'idéemêmed'une

décisiond'espèce, telle que le Gouvernement belge semble vouloir la sug-
gérer, est inadmissible. Imaginerait-on quela Cour s'abstienne de recher-
cher la règle de droit international qui concerne les questions envisa-
gées et qu'elle tranche ces questions en elles-mêmessans se soucier
d'avoir défini au préalable les règles à appliquer ? Ou encore imagine-

rait-on qu'après avoir défini ces règles, elle ne les applique pas en
l'espèce? Cela équivaudrait non pas à déciderselon les circonstances du
cas d'espèce mais à inventer et à appliquer à ce dernier une règle diffé-
rente de celle qu'édicte le droit international: donc à violer manifeste-
ment cette règle.
D'autre part, il est bien évident que la question concernant le défaut
de qualité du Gouvernement belge peut êtretranchée sans qu'il y ait

rien à tirer, à cet égard, d'un examen du fond de l'affaire. Le fond de
l'affaire est constitué par la question de savoir si une société canadienne
a ou n'a pas subi en Espagne un dénide justice. Que la réponse à cette
question soit positive ou négative, cela ne modifie en rien la position à
prendre sur le point de savoir si le Gouvernement belge a ou n'a pas
qualité pour intervenir dans l'affaire, soit au titre de la protection diplo-

matique de la société, soit au titre de la protection diplomatique des
prétendus actionnaires belges de la société; ni non plus sur le point de
savoir si la Sidro est ou n'est pas actionnaire de la Barcelona Traction.
Le Gouvernement belge a admis, soit au moment où ii a présentéau
Gouvernement espagnol son projet de compromis, soit ultérieurement

au moment où, après le refus du Gouvernement espagnol, il l'a averti
163 Inthe Barcelona Traction case, there is nothing to warrant the sugges-
tion that the third and fourth objections should be joined to the merits.
The idea advanced during the hearings to the effect that in the present
situation the Court should first explore the circumstances of the case
which might affect the Belgian State's jus standi, and take its decision
in relation to those circumstances, would be likely to lead to an absurd
situation. What is first necessary is to establish the rule goveming
the matter. Consideration should then be given to the question
whether that rule ever contemplates the possibility, where prejudice
has been caused to a company by a foreignState, of diplomatic protec-
tion being exercised by a State other than the national State of the
company jtself. If thi Court comes to a negative conclusion, it should
quite simply declare that the Belgian State has no capacity to exercise
diplomatic protection in the Barcelona Traction case, whether it comes
forward as the protector of the allegedly injured company or whether
it seeks to act as the protector of the alleged Belgian shareholders of
the company. The circumstances of the particular case cannot in

any way modify this conclusion.
According to its terms of reference the Court must apply international
law. It must apply a rule of international law in order to decide ques-
tions which are raised as preliminary objections, whether it be the
questiop of the Belgian Government's lack of capacity or the question
of failure to exhaust local remedies. The very idea of a decision for
a +articularcase,such as seems to be suggested by the Belgian Govern-
ment, is inadmissible. 1s it possible to conceive of the Court's refrain-
ing from ascertaining the mie of international law which relates to
under consideration and deciding those questions in themselves
without troubling to determine beforehand what rules must be applied?
Or, again, is it conceivable that after determining those rules it should
not apply them to the particular case? This -.vould not be deciding
according to the circumstances of the particular case but inventing and
applying to it a rule different from that laid down by international
law and hence patently violating that rule.
It is moreover quite clear that the question of the Belgian Govern-

ment's lack of capacity can be decided without going in any way into
the ments of the case. The merits of the case consist of the question
whether or not a Canadian company suffered a denial of justice in
Spain. Whether the answer to that question is in the affirmative or
in the negative cannot in any way affect the position to be taken on the
question whether or not the Belgian Government has capacity to inter-
vene in the case, either for the diplomatic protection of the company
or for the diplomatic protection of the company's allegedBelgian share-
holders. Nor can it affect the position on the question whether or not
Sidro is a shareholder of Barcelona Traction.
The Belgian Govenunent agreed, both at the time when it submitted
its draft special agreement to the Spanish Government, and later when,
after the Spanish Government's refusal, it notified it of the fling of de l'introduction de sa requêteunilatérale, que la question concernant
la qualité du Gouvernement belge pour agir dans l'affaire pouvait et
devait êtretranchée préalablement à tout examen du fond. On se rappel-
lera que le Gouvernement belge avait mêmeexpressément exclu cette
question de celles pour lesquelles une jonction au fond pouvait être

envisagée. Il ne peut pas avoir aujourd'hui une opinion différente de
celle qu'il avait alors ; il ne peut pas prétendre aujourd'hui que la ques-
tion de la qualité pour agir du Gouvernement belge ne peut pas être
disjointe du fond de l'affaire, alors qu'au moment de l'introduction de
la requête il affirmait lui-mêmele contraire.
Les deux gouvernements sont d'accord pour que la Cour statue sur

la question si la dernière requêteest pareille à la première (dans les deux
requêtesil y aurait protection de la Barcelona Traction) et si l'inscrip-
tion au registre de la sociétéprouve la qualité des actionnaires. Ces
points de l'avis des deux gouvernements ne doivent pas se joindre au
fond.
Il en va de même pourla question de l'épuisement des recours internes.

Que la déclaration de faillite de la Barcelona Traction et ses conséquences
aient constitué ou non un déni de justice à l'égard de la société, cela
n'empêchenullement que la société elle-mêmee ,t elle seule, ait eu la
possibilitéet le devoir d'utiliser en temps utile les moyens de recours que
l'ordre juridique espagnol mettait à sa disposition contre la déclaration
de faillite en question. La sociéténe l'a pas fait :elle a donc perdu le

droit de se plaindre, sur le plan international, d'un déni de justice qui,
s'il avait vraiment existé, aurait pu êtreéliminésur le plan interne, et
ne l'a pas étéuniquement à cause de sa propre négligence. Rien dans
cette constatation ne saurait êtremodifié par une recherche visant à
établir si le prétendu déni de justice a existé ou non, ou encore si les
prétendus actionnaires belges de la sociétéont subi ou non, dans leurs

intérêts, une répercussion du préjudice subi par la société. C'està la
société,à ses administrateurs, qui n'ont pas sauvegardé, par les moyens
appropriés, les droits et les intérêtsde la société,que les actionnaires
doivent adresser leurs reproches, et non pas à 1'Etat espagnol qui n'a
jamais eu affaire à eux.

On ne peiit voir comment la Cour pourrait tirer d'un examen au fond
quelque élémentutile pour trancher les exceptions préliminaires rela-
tives au défaut de qualité du Gouvernement belge et au défaut d'épui-
sement des recours internes. La jonction au fond de ces exceptions dans
un cas où les questions qu'elles comportent sont manifestement distinctes
et indépendantes de la question qui constitue le fond de l'affaire ne pour-

rait-elle se considérer comme un écart des règles qui régissent la procé-
dure relative à l'examen des exceptions préliminaires et, au-delà de ces
règles, comme un écart des principes sur lesquels repose la juridiction
internationale elle-même ?

(Signé)ARMANDUGON.

164 BARCELONA TR.4CTION (DISS.OP.ARMAND-UGON) 166

its unilateral application, that the question of the Belgian Government's
capacity to take action in the case could and should be decided prior
to any consideration of the merits. It will be recalled that the Belgian

Govemment had even explicitly excluded that question from among
those on which a joinder to the merits might be contemplated. It is
not open to it now to take a view different from the one which it took
then. It cannot now claim that the question of the Belgian Govern-
ment's capacity to take action cannot be disentangled from the merits

of the case, seeing that it asserted the contrary itself at the time of the
filing of the Application.
The two Governments are in agreement that the Court should decide
the question whether the second Application is similar to the first
(both are claimed to be concerned with protection of Barcelona Traction)

and the question whether entry in the company's register is evidence
of the status of shareholder. These points, in the view of both Govern-
ments, should not be joined to the merits.
The same applies to the question of the exhaustion of local remedies.
Whether or not the adjudication in bankruptcy of Barcelona Traction

and its consequences cbnstituted a denial of justice towards the corn-
pany cannot alter the fact that the company itself, and the company
alone, was able and bound to make use in due time of the remedies
which the Spanish legal system made available to it for the purpose
of challenging the adjudication in bankruptcy. The company did not

do so and has therefore lost the right to complain, at the international
level. of a denial of iustice which. if it had reallv existed. could have
been'cured at the rn;nicipal le iel.and was not si cured &ely because
of its own negligence. There is nothing in this finding which could
be modified by investigation of the question whether or not the alleged

denial of justice existed, or whether or not the alleged Belgian share-
holders in the company sustained damage to their own interests as a
result of the prejudice sustained by the company. It is to the company
and to its directors who failed to take appropriate steps to safeguard
the rights and interests of the company that the shareholders should

address their complaints, and not to the Spanish State which has never
had anything to do with them.
It is impossible to see how the Court could derive from an exami-
nation of the merits any element that might be of use for the purpose
of a decision on the preliminary objections concerning the Belgian
Government's lack of capacity and the failure to exhaust local remedies.

Might not the joinder of these objections to the merits, in a case where
the questions with which they deal are manifestly separate from and
independent of the question which constitutes the merits of the case,
be regarded as a departure from the rules governing the procedure for
the examination of prelirninary objections and, over and above those
..
rules, as a departuri from the principles on which international juris-
diction itself is based?
(Signed) ARMAND-UGON.

164

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Opinion dissidente de M. Armand-Ugon

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