Opinion dissidente de M. Morelli

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050-19640724-JUD-01-08-EN
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050-19640724-JUD-01-00-EN
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OPINION DISSIDENTE DE M. MORELLI

Je suis d'avis que, des quatre exceptions présentées par le Gouverne-
ment espagnol comme exceptions préliminaires, c'est uniquement sur la
deuxième que la Cour pouvait statuer au stade actuel de la procédure.
La Cour aurait dû retenir une telle exception en déclarant son défaut

de juridiction.
Les autres exceptions, bien que présentées par le Gouvernement
espagnol comme exceptions préliminaires, n'ont pas, en réalité,le carac-
tère d'exceptions préliminairesparce qu'elles posent toutes des problèmes
concernant directement et uniquement le fond de l'affaire. Cela étant, la
Cour ne pouvait, à mon avis, statuer sur lesdites exceptions, comme elle

a statuésur la première en la rejetant. La Cour ne pouvait non plus faire
ce qu'elle a fait au sujet de la troïsième et de la quatrième exception en
décidant de joindre ces deux exceptions au fond. En effet, la jonction
au fond, au sens de l'article62,paragraphe 5, du Règlement, suppose le
caractère préliminaire de l'exception ; condition qui, à mon avis, n'est
pas réaliséepar rapport aux exceptions dites préliminaires dont il s'agit.

Je pense que la première, la troisième et la quatrième exception
auraient dû être déclarées irrecevables en tant qu'exceptions prélimi-
naires. Ce qui aurait laissé ouverte, pour l'Espagne, la possibilité de
poser de nouveau les mêmesquestions, en tant que questions concer-
nant justement le fond, dans la suite de la procédure.

11est bien vrai que la décision, par la Cour, de joindre au fond la
troisième et la quatrième exception ne s'éloigne pas beaucoup, pour
ce qui concerne les conséquences pratiques, d'une décision, à mon avis
plus correcte, par laquelle la Cour aurait déclaréces deux exceptions
irrecevables en tant qu'exceptions préliminaires. Il y a toutefois une
distinction fondamentale à faire entre la jonction au fond et la déclara-

tion d'irrecevabilité ; distinction qui, comme je l'espère, ressortira clai-
rement des considérations que je me propose de consacrer aux exceptions
préliminaires en général.
Je commencerai mon opinion dissidente par une première partie ayant
pour objet la question concernant la juridiction de la Cour. J'indiquerai,
tout d'abord, quel est, à mon avis, le fonctionnement de l'article 37 du

Statut pour démontrer ensuite que cet article n'a pas jouépar rapport à
l'article 17, alinCa4, du traité hispano-belge du 19 juillet 1927. Je
passerai, dans une deuxième partie, auxdites considérations généralesen
matière d'exceptions préliminaires. Une troisième partie sera consacrée
au désistement en généralet à l'application, pour ce qui concerne la
première exception préliminaire espagnole relative justement au désis-

tement, des considérations génCralessur les exceptions préliminaires.
L'application de ces considérationsàla troisième et àla quatrième excep-tion préliminaire espagnole trouvera sa place respectivement dans la
quatrième et la cinquième partie.

I. L'article37 du Statut de la Cour internationale de Justice se trouve
dans un rapport que l'on pourrait dire à la fois historique et rédactionnel

avecl'article 37 duStatut de la Cour permanente, article dont l'article37
du Statut de la Cour actuelle utilise certaines expressions. Malgrécela
une différence radicale existe entre les deux dispositions pour ce qui
concerne leur fonction respective.
L'article37 du Statut de la Cour permanente a le caractère d'une
disposition purement interprétative d'autres dispositions, c'est-à-dire des

dispositions des traités visant le renvoià ilne juridiction à établir par la
Sociétédes Nations. Il s'agit d'une disposition que l'on peut considérer
comme complémentaire par rapport à d'autres dispositions ayant, au
contraire, le caractère de dispositions principales. La juridiction est
crééepar ces dernières dispositions, à savoir par les dispositions des
traités visant le renvoi à une juridiction à établir par la Société des

Nations. Or, par l'effet de l'articl37 du Statut de la Cour permanente
et pour les parties de ce Statut, la juridiction ainsi crééedoit êtreconsi-
dérée commeune juridiction conférée à la Cour permanente.

A la différencede l'article 37 du Statut de la Cour permanente, qui,
comme on l'a dit, est une règle complémentaire par rapport à d'autres

règles, lesquelles ont déjà créé,bien que d'une façon incomplète, une
certaine juridiction, l'articl37 du Statut de la Cour internationale pos-
sèdeune importance et exerce une fonction autonome. C'est cet article 37
qui crée, par lui-même, des règles juridictionnelles nouvelles, c'est-
à-di~edes règles conférant une certaine juridiction à la Cour internatio-

nale de Justice, bien qu'il se réfère à d'autres dispositions pour déter-
miner les conditions de son propre fonctionnement ainsi que le contenu
des règles juridictionnelles qu'il vise à créer.

2. L'article37 du Statut actuel contient une double référence: a) la
référenceaux dispositions prévoyant le renvoi à une juridiction que

devait instituer la Sociétédes Nations ; b) la référenceaux dispositions
prévoyant le renvoi à la Cour permanente.
Par cette dernière référence l'article 37 opère ce que l'on appelle le
((transfert))à la Cour internationale de Justice de la juridiction de la
Cour permanente.
La formule du transfert est une formule abrégéeet commode, qui

peut êtrebien employée, à la condition toutefois que l'on en précise le
sens. Il faut tenir présent à l'esprit qu'une juridiction n'est concevable
que par rapport à l'organe auquel elle est conférée; ce qui empêchedepenser que la juridiction d'un organe puisse êtreproprement transférée
à un autre organe. Il s'agit en réalité d'une juridiction nouvellequi est

attribuée à un organe donné moyennant le renvoi aux dispositions
réglant la juridiction appartenant à un autre organe.
Or il est bien possible d'imaginer qu'une juridiction soit établie par le
moyen d'un renvoi à des dispositions qui ne sont plus en vigueur et
mêmepar le moyen d'un renvoi àdes formules qui n'ont jamais eu valeur
juridique. Toutefois lorsqu'on parle de transfert on veut indiquer un
certain rapport existant entre deux juridictions différentes et cela un
double point de vue. Il s'agit, en premier lieu, d'un rapport concernant
le contenu et les modalités des dispositions réglant les deux juridictions.

Ces dispositions sont identiques sauf pour ce qui concerne l'indication
de l'organe auquel la juridiction est attribuée. En deuxième lieu le
transfert dCnote un rapport chronologique entre les deux juridictions.
Une nouvelle juridiction est créCese rattachant à une autre juridiction
qui, au moment où la nouvelle est créée,est encore existante et qui, à
partir dudit moment et par le fait mêmede la création de la nouvelle
juridiction, est supprimée.
Ce n'est pas seulement par la référenceaux traités et conventions
prévoyant explicitement le renvoi à la Cour permanente que l'article 37
créedesrèglesiuridictionnelles nouvelles. La mêmeo~érationest accom-
" >
plie aussi par la réf6renceaux traités et conventions prévoyant le renvoi
à une iuridiction aue devait instituer la Sociétédes Nations.MêmeDour
ce qui concerne cette dernière référence l'article37 n'a pas le caractère
purement interprétatif qu'avait la disposition, rédigée endes termes
semblables, quisetrouvait àl'article 37du Statut de la Cour permanente.
On pourrait dire que, par ladite référence aussi,l'article 37 du Statut
actuel a opéréle transfert àla Cour internationale de la juridiction déjà
conférée à la Cour permanente ;cela en constatant que leç traités pré-
voyant le renvoi à une juridiction à établir par la SociétCdes Nations

devaient, par l'effet de l'article 37 du Statut de la Cour permanente, être
interprétéscomme visant la juridiction de la mêmeCour.

3. L'article 37 du Statut actuel pose donc des règlesautonomescréant
la juridiction de la Cour, bien qu'il se réfère pour cela,d'une certaine
façon, à d'autres dispositions. Comme je l'ai déjàdit, il est bien possible
qu'une règle juridictionnelle ou, plus en général, qu'une règle de droit
quelconque se réfère à des dispositions qui ne sont plus en vigueur ;et

il est même possiblequ'une règlede droit se réfèreàdes formules n'ayant
jamais eu valeur juridique. Mais cen'est pas le cas de l'article 37, parce
que celui-ci se réfèreà des traités ou à des conventions et qu'il ajoute
qu'il doit s'agir d'un traité ou d'une convention «en vigueur ».Il faut
déterminer alorsle sens àdonner à cette expression,pour ce qui concerne
surtout le moment par rapport auquel le traité ou la convention doit
êtreen vigueur.
L'expression dont il s'agit se trouve dans d'autres dispositions du Statut de la Cour, comme l'article 35, paragraphe z, et l'article 36,
paragraphe ler. La même expression setrouvait aussi à l'article 37 du
Statut de la Cour permanente. Mais cela n'oblige évidemment pas de

donner à l'expression (en vigueur D,dans l'article 37 du Statut actuel,
le mêmesens et la même portéeque dans les autres dispositions que je
viens d'indiquer. Il est nécessairede tenir compte des caractères et du
contenu des différentes dispositions dans lesquelles l'expression est

employée.

4. L'article 35, paragraphe 2, du Statut, confère au Conseil de sécu-
rité la tâche de régler lesconditions auxquelles la Cour est ouverte aux

Etats non parties au Statut, cela «sous réservedes dispositions particu-
lières des traités en vigueur )).Il s'agit là de dispositions réglant déjà la
matière, indépendamment de la référencefaite à ces dispositions par le
paragraphe 2 de l'article 35, paragraphe qui se borne à les réserver. En

tant que dispositions réglant par elles-mêmesla matière, il faut, évidem-
ment, qu'elles soient des dispositions en vigueur : en vigueur par rapport
à la date que l'on considère comme décisiveà cette fin et que le para-
graphe z de l'article3j ne précisepas du tout. Par conséquent, l'expres-

sion ((envigueur ))dans ce paragraphe peut êtreestimée comme tout à
fait superflue.
La mêmeremarque peut êtrefaite àpropos de l'expression «envigueur ))
qui se trouve au paragraphe rer de l'article 36 du Statut, où il est dit

que la compétence de la Cour s'étend,entre autres, à tous les cas spkcia-
lement prévus « dans les traités et conventions en vigueur ))En effet la
disposition du paragraphe I~~ de l'article 36, loin de créer, par elle-
même,la compétence de la Cour, ne fait que renvoyer à d'autres sources

de compétence qui se trouvent en dehors du Statut : à des accords soit
particuliers (compromis) soit généraux,parmi lesquels mention est faite
des traités et des conventions. Il est tout à fait évident, mêmesi l'ar-
ticle 36, paragraphe ler, ne le disait pas, qu'il doit s'agir de traités et de
conventions en vigueur : en vigueur au moment où le traité ou la con-

vention doit avoir application, à savoir au moment du procès. Le pro-
blèmeconsistant à déterminer plus exactement le moment décisifà cette
fin (moment de la requêteou bien moment du jugement) est un problème
qui est laisséouvert par l'expression ((en vigueur ». C'est que par cette

expression le paragraphe I~~ de l'article 36 ne se réfèrepas à un moment
donné en spécifiant.que les traités et conventions auxquels il renvoie
doivent êtreen vigueur. Il s'agit, partant, d'une expression superflue.
Pour ce qui concerne l'article 37 du Statut de la Cour permanente,

j'ai déjàdit que cet article était une disposition purement interprétative
d'autres dispositions conventionnelles. C'est de ces dernières disposi-
tions (interprétées, bien entendu, conformément à l'article 37) que la
juridiction était créée. Orparler à ce propos, comme le faisait l'article 37,

d'un traité ou d'une convention « en vigueur » n'ajoutait rien du tout et
n'avait aucune influence surla façon dont l'article 37, en tant que règle
interprétative, devait fonctionner.

86 A la différencedes articles 35,paragraphe 2,et 36, paragraphe I~', du
Statut de la Cour internationale et de l'article 37 du Statut de la Cour
permanente, où l'expression ((en vigueur ))se réfèreà des dispositions
réglant par elles-mêmesla matière, l'article 37 du Statut actuel emploie

cette expression par rapport à des dispositions qui ne règlent pas la
matière dont il s'agit. La matière dont il s'agit est la juridiction de la
Cour internationale de Justice. Or cette juridiction découlede règlesqui
sont crééespar l'article 37 lui-mêmemoyennant un renvoi à des dispo-
sitions concernant une tout autre matière, c'est-à-dire la juridiction de

la Cour permanente. Aussi, en spécifiant que ces dispositions doivent
êtredes dispositions en vigueur, l'article 37 donne une indication qui,
loin d'êtresuperflue ou surabondante, a une importance substantielle à
l'égarddu fonctionnement dudit article.

5. On pourrait penser que, par la référenceà des traités et à des con-
ventions (en vigueur ))l'article37 entend indiquer une modalité concer-
nant le contenu mêmedes règles qu'il vise à créer; cela dans le sens que

ces règles, concernant la juridiction de la Cour actuelle, auraient une
validité dans le temps identique à celle des dispositions auxquelles
l'article37 se réfèreet qui concernent la juridiction de la Cour. perma-
nente. D'après une telle interprétation, la portée de l'expression (en
vigueur ))dans l'article37 serait très proche de celle de la mêmeexpres-

sion dans l'article 36, paragraphe ler.De la même façonque l'article 36,
paragraphe I~~, dit que la Cour internationale peut êtresaisie sur la
base d'un traité seulement si ce traité est en vigueur, l'article 37 dirait
que la Cour internationale peut êtresaisie sur la base d'une règle créée

par le mêmearticle 37 seulement si un traité concernant la juridiction
de la Cour permanente est en vigueur. Ni l'une ni l'autre des deux dis-
positions que l'on vient de mentionner ne se référerait à un moment
donné en spécifiant que le traité dont il s'agit doit êtreun traité en

vigueur.
Mais une telle interprétation n'est pas soutenable. La conséquence
logique en serait que les règles juridictionnelles crééespar l'article 37
n'auraient joué que pour une très courte période, c'est-à-dire jusqu'au
18 avril 1946, date de la dissolution de la Cour permanente : compte

tenu du principe de la perpetuatiojurisdictionis, elles n'auraient joué
que pour les procès introduits avant la date que je viens d'indiquer.
Cela à moins que l'on n'entende l'expression ((en vigueur ))dans un sens
tout à fait spécial, à savoir dans le sens qu'une règlevisant la juridiction

de la Cour permanente n'aurait pas cesséd'êtreen vigueur par l'effet
de la dissolution de cette Cour ; ou bien à moins que l'on n'applique l'ex-
pression (en vigueur ))non pas spécifiquement à la clause visant la juri-
diction de la Cour permanente, mais plutôt, dans son ensemble, au

traité dans lequel une telle clause est inscrite.
Mais il y a plus. D'après l'interprétation que j'ai envisagée, les règles
juridictionnelles crééespar l'article 37 n'auraient pas, en réalité,joué
mêmepour la courte période que j'ai indiquée ; cela pour la raison trèssimple que l'article 37, en prescrivant le transfert de la juridiction de
la Cour permanente à la Cour internationale, a entraîné, par là même,
l'extinction des clauses des traités concernant la juridiction de la Cour

permanente. De cette façon l'existence contemporaine de la juridiction
des deux Cours, présupposéepar l'interprétation que l'on considère, est
écartée.Pour donner un sens à l'article 37, il faudrait alors estimer,
aux fins de cet article, comme étant en vigueur, non pas une clause
réellement en vigueur, mais plutôt une clause qui serait en vigueur si

l'article37 n'avait pas joué.

6. Tout cela oblige de donner une tout autre portée à l'expression
((en vigueur » dans l'article37 du Statut. Cette expression ne concerne

pas le contenu des règles juridictionnelles crééespar l'article 37 ; elle
concerne plutôt le procédétechnique par lequel ces règles sont créées,
c'est-à-dire le fonctionnement mêmede l'article 37.
L'article 37 rattache la création de certaines règles juridictionnelles
(de règlesconférant juridiction à la Cour internationale) au fait de l'exis-

tence de traités ou de conventions concernant la juridiction de la Cour
permanente, traités ou conventions qui doivent être en vigueur afin
que l'effet prévu par l'article 37 puisse se produire.
Les traités et conventions, auxquels l'article 37 se réfère,doivent
êtreen vigueur par rapport à un moment donné. Ce moment est le

moment de l'entrée en vigueur du Statut : moment où s'accomplit
l'opération juridique prévue par celui-ci à son article 37.
Cela résultedes termes mêmesde l'article 37. Cet article part de l'hypo-
thèse d'un traité ou d'une convention en vigueur qui « prévoit »le renvoi
à une juridiction que devait instituer la Société desNations ou à la

Cour permanente de Justice internationale. Pour indiquer cette hypo-
thèse, l'article37 emploie le verbe ((prévoit ))au temps présent, tandis
qu'il emploie le futur lorsqu'il continue en statuant que c'est la Cour
internationale de Justice qui «constituera » cette juridiction. Ce dernier
membre de phrase se réfèreau temps (futur)dans lequel devront jouer

les règles juridictionnelles crééespar le moyen de l'opération juridique
prévue à l'article 37 ; au contraire, la condition requise pour que cette
opération puisse s'accomplir est indiquée, dans le premier membre de
phrase, par une référenceau temps présent. Il faut en conclure que les
traités et conventions, auxquels l'article 37 se réfère, nepeuvent être

que des traités et conventions en vigueur au moment de l'entrée en
vigueur du Statut.
On pourrait faire une remarque analogue à propos de l'article 36,
paragraphe j, où l'on envisage l'hypothèse de dtklarations faites en appli-
cation de l'article36 du Statut de la Cour permanente «pour une durée

qui n'est pas encore expirée » ((which are still in force »dans le texte
anglais) et où l'on indique, au contraire, par un verbe au futur ((seront
considérées ») l'effet juridique que le même article 36, paragraphe 5,
attache aux déclarations dont il s'agit. La référenceàun moment donné,

88pour indiquer la durée de la déclaration, est renforcéedans l'article 36,
paragraphè 5, par l'adverbe (encore )).
On peut remarquer, par contre, que l'expression « en vigueur », dans

l'article37 du Statut actuel, joue d'une autre façon que dans l'article 37
du Statut de la Cour permanente ; cela mêmepour ce qui concerne les
traités et les conventions qui sont envisagés aussi par- cette dernière
disposition, c'est-à-dire les traités et les conventions prévoyant le renvoi
à une juridiction que devait instituer la Société desNations. A la diffé-
rence de l'article 37 du Statut de la Cour permanente, l'article 37 du

Statut actuel emploie l'expression « en vigueur 11par rapport àun moment
donné, à savoir au moment de l'entrée en vigueur du Statut. La diffé-
rence dé~end de la fonction différente exercée Dar l'une et Dar l'autre
disposition : l'article37 du Statut de la Cour permanente était une dis-
position purement interprétative de règles juridictionnelles déjà exis-

tantes, tandis que l'article 37 du Statut actuel crée,par lui-même, des
rè- .s juridictionnelles nouvelles, même lorsqu'il renvoie aux traités
concernant une juridiction que devait instituër la Sociétédes Nations.

7. J'ai dit que l'article37 du Statut actuel se réfèreà des traités et

à des conventions qui sont en vigueur au moment de l'entrée en vigueur
du Statut, moment où s'accomplit l'opération juridique prévue par le
mêmearticle 37. Il faut préciser que, si l'on s'en tient aux termes de
l'article37, il faut entendre par entrée en vigueur du Statut soit son
entréeen vigueur initiale soit, pour un Etat donné,son entréeen vigueur
à 1'Cgardde celui-ci par l'effet de l'admission de 1'Etat dont il s'agit aux

Nations Unies. Cela, bien entendu, sur la base des termes mêmesde
l'article37, article qui n'autorise aucune distinction entre Membres
originaires et Membres ultérieurement admis. Autre chose est voir si,
parmi les admissions qui ont étéopérées enfait, il y a eu des admissions
qui, en présence des conditions requises à l'article 37, ont donné lieu à

l'effet juridique prévu par celui-ci.

Or la condition fondamentale requise à l'article 37 consiste dans le
fait qu'il faut que le traité ou la convention prévoyant le renvoi à la
Cour permanente soit un traité ou une convention en vigueur. J'ai déjà
dit que le traité ou la convention doit êtreen vigueur au moment de

l'entrée en vigueur du Statut. Mais il faut encore ajouter qu'il ne suffit
pas que le traité ou la convention soit en vigueur dans une partie quel-
conque de ses dispositions. Il est nécessaire,au contraire, que le traité ou
la convention soit en vigueur spécifiquement pour ce qui concerne sa
clause conférant juridiction à la Cour permanente. Si cette clause est

devenue caduque, le traité dans lequel elle est insérée, bien qu'envigueur
éventuellement pour ce qui concerne les autres dispositions qui le com-
posent, n'est plus un traité en vigueur prévoyant le renvoi à la Cour
permanente de Justice internationale. Il s'ensuit que l'hypothèse envi-
sagée à l'article37, d'après les termes mêmesde celùi-ci, ne se trouve
pas réalisée. Nul doute, à mon avis, que la dissolution de la Cour permanente a

entraîné la caducité de toutes les clauses, et plus généralementde toutes
les règlesjuridictionnelles, conférant juridictionà cette Cour, règles qui,
par ce fait même,sont devenues dépourvues d'objet. D'où la conséquence
que l'opération juridique prévue à l'article 37 est devenue impossible
à partir du 18 avril 1946, date de la dissolution de la Cour permanente.
Compte tenu du fait historique qu'il n'y a pas eu, avant cette date,

d'admissions aux Nations Unies, il est loisible de constater que l'opéra-
tion juridique prévue à l'article37 ne s'est accomplie qu'une fois seule-
ment, à savoir au moment de l'entrée en vigueur initiale du Statut et,
par conséquent, uniquement à l'égard des Membres originaires des
Nations Unies. Mais il s'agit là d'une simple constatation, non pas
d'une limitation qu'il faudrait considérer inhérente au fonctionnement
de l'article37.

8. Si les conditions requise5 à l'articl37 sont réalisées,en particulier
si, au moment de l'entrée en vigueur du Statut, un traité ou une con-
vention était en vigueur prévoyant le renvoi à la Cour permanente,
l'opération envisagée à l'articl37 s'est accomplie par la création d'une
règlejuridictionnelle correspondante relative à la Cour internationale de
Justice. La créationd'une telle règlea étéaccompagnée,par l'effet même

de l'article37, de l'extinction contemporaine de la règle relative à la
Cour permanente. Ce qui n'a aucune influence sur la condition requise
à l'article37 par l'expression «en vigueur »,condition qui constitue une
condition du fonctionnement même de l'article 37 et non pas une con-
dition de la persistance de la règle crééepar cet article.

Les règlesjuridictionnelles crééesmoyennant l'opération juridique de
l'article37 sont des règles dont le contenu et les modalités (sauf pour ce
qui concerne l'indication de l'organe auquel la juridiction est conférée)
sont déterminéspar la référenceaux traités relatifs àla Cour permanente.
Cette référencejoue aussi par rapport aux clauses des traités qui con-
cernent la durée dela règlejuridictionnelle relativeàla Cour permanente.
Evidemment si l'échéancedu délai dont est assortie la règle juridic-

tionnelle relative à la Cour permanente est intervenue avant l'entréeen
vigueur du Statut actuel, cela a empêché l'opération visée à l'articl37,
parce qu'il n'y avait pas de traité en vigueur aux termes mêmesde cet
article. Si, au contraire, l'échéancedu délaiintervient après l'entrée en
vigueur du Statut et, par conséquent, lorsque l'article 37 a déjà joué
par la création d'une règle juridictionnelle relative à la Cour internatio-
nale, cette règleexpire au moment mêmeoù inteMent l'échéancedudit

délai.Mais cela n'a rien à faire avec le fait que l'artic37 vise expressé-
ment des traités ou conventions « en vigueur » parce que, comme on l'a
dit, cette expression se réfère uniquement au moment où s'accomplit
l'opérationenvisagde audit article. Au contraire il s'agit simplement d'une
conskquence du renvoi que le mêmearticle fait au traité concernant la
juridiction de la Cour permanente pour déterminer le contenu et lesmodalités des règles juridictionnelles concernant la Cour actuelle que
l'article37 vise à créer.

Si l'on compare l'article 37 avec l'article 36, paragraphe 5, on voit

que c'est d'une manière expresse que cette dernière disposition, à la
différencede l'article 37, énoncela conséquence, quant à l'extinction de
la règlejuridictionnelle concernant la Cour actuelle et crééepar lemoyen
envisagéau mêmearticle 36, paragraphe 5, de l'échéancedu délai relatif
à une déclaration concernant la Cour permanente. Cette conséquence est

énoncéepar les mots cpoq la duréerestant à courir d'après ces déclara-
tions et conformément à leurs termes ))tandis que par les mots (pour
une durée qui n'est pas encore expirée )),contenus dans la première
partie de la disposition, on se réfèreau fait que la déclaration est en
vigueur au moment de 11entr6een vigueur du Statut et, par conséquent,
au moment du fonctionnement même de l'article 36, paragraphe 5

(référencequi correspond à la référence expresseà un traité en vigueur
qui figure dans l'article37).
Il n'y a pas besoin de préciser enfin que l'opération juridique visée
àl'article37 une fois accomplie par la création d'une règlejuridictionnelle
relative à la Cour actuelle, la validité de cette règle n'a étéd'aucune

façon affectée par la dissolution subséquente de la Cour permanente.
Cela pour la raison bien simple qu'il s'agit là d'un événementnon prévu
par le traité auquel l'article37 se réfère.

g. Ce que j'ai remarqué à propos de l'extinction de la règle juridic-
tionnelle relative à la Cour permanente, opéréepar l'effet mêmedu

fonctionnement de l'article 37, m'empêchede partager une affirmation
faite à maintes reprises par le Gouvernement espagnol. D'après ce gou-
vernement, pour que la juridiction de la Cour internationale puisse être
invoquée sur la base de l'article 37 du Statut, une condition complémen-
taire serait requise, condition consistant à ce que la clause prévoyant

la juridiction de la Cour permanente soit en vigueur au moment où la
requêteà la Cour internationale est introduite.

Cette condition, pourtant, serait une condition tout à fait irréalisable ;
cela pour la raison que, comme on l'a dit, dans tous les cas où l'article37
a joué, c'est le mêmearticle 37 qui, en prescrivant le transfert de juri-

diction de la Cour permanente à la Cour internationale, a entraîné, par
le fait même d'un tel transfert, l'extinction de la clause relative à la
juridiction de la Cour permanente : extinction qui s'est, par conséquent,
produite indépendamment de la dissolution de la Cour permanente et
bien avant un tel événement.

En réalité,pour quela Cour internationale puisse exercer sa juridiction
sur la base de l'article37 du Statut, il est necessaire qu'au moment où
la requête est introduite, soit en vigueur, non pas la règlejuridictionnelle
relative à la Cour permanente, mais plutôt la règle juridictionnelle con-
cernant la Cour internationale et crééemoyennant l'opération juridiqueviséeà l'article37 ; règledont le caractère de règle en vigueur, comme je
l'ai déjàdit, n'a étéaucunement affectépar l'extinction de la règlerela-
tive à la Cour permanente, à la suite de la dissolution de cette Cour.

Pour les mêmes raisons, il m'est impossible de souscrire à quelques
mots qui se trouvent dans les motifs de l'avis consultatif du II juillet

1950 sur le Statut international du Sud-Ouest africain, là où la Cour déclare
que l'article7 du Mandat «est encore en vigueur u (C.I.J. Recueil 1950,
p. 138). Si la façon dont je conçois le fonctionnement de l'article37 du
Statut est exacte, pour justifier la conclusion à laquelle la Cour arrive
dans le dispositif de l'avis, conclusion portant que la référenceà la Cour
permanente de Justice internationale doit êtreremplacée par la réfé-

rence à la Cour internationale de Justice, il aurait étésuffisant de cons-
tater que l'article7 du Mandat était en vigueur au moment de l'entrée
en vigueur du Statut. A ce moment-là, l'article 7 du Mandat, en tant
que tel, s'est éteint par l'effet mêmede l'article7 du Statut, justement
parce qu'il était remplacé par une règle nouvelle et correspondante
relative à la juridiction de la Cour internationale de Justice.

IO. Le Statut de la Cour, avec son article 37, n'est entré en vigueur
à l'égard del'Espagne que le 14 décembre 195j par l'effet de I'admis-

sion de cet Etat aux Nations Unies. A cette date, l'article37 n'avait
aucune possibilité de jouer parce qu'il n'existait alors aucun traité ou
aucune convention prévoyant le renvoi à la Cour permanente qui pût
êtreconsidéré, entant que tel, en vigueur aux termes du mêmearticle 37.
En particulier, la disposition de l'article17, alinéa 4, du traité di1
19 juillet1927 entre l'Espagne et la Belgique était devenue caduque à
partir du 18 avril 1946 par l'effet de la dissolution de la Cour perma-

fiente. Cette disposition ne statuait pas que les parties étaient soumises
à une juridiction internationale génériqueou abstraite et, en tant que
telle, tout à fait inconcevable. Elle prévoyait, au contraire, la juridic-
tion d'un organe donné, qui était spécifiquement indiqué. Cet organe
était la Cour permanente de Justice internationale. La dissolution d'une
telle Cour a nécessairement entraîné la caducité de la clause du traité

visant la juridiction de la même Cour, clause qui est devenue, par ce
fait, dépourvue d'objet.
II. Pour écarter un tel résultat, il n'est pas possible, à mon avis,

d'invoquer, comme l'a fait le Gouvernement belge, l'indivisibilité des
dispositions du traité de 1927. On ne voit pas, en effet, pour quelle
raison la prétendue indivisibilité devrsit jouer de façon à sauvegarder
l'article17, alinéa 4, plutôt que de la façon opposée, c'est-à-dire en
entraînant la caducité du traité tout entier.
Il est bien sûr, à mon avis, que l'artic17,alinéa 4,est devenu caduc,
par défaut d'objet, à la suite de la dissolution de la Cour permanente.

C'est là la seule constatation qui importeaux fins du fonctionnement de
l'article37 du Statut. Le sort des autres dispositions du traité de1927 n'importe pas du tout. Mais, si l'on veut poser également le problème
concernant le maintien en vigueur des autres dispositions du traité,
quelle est la conséquence que, pour la solution d'un tel problème, il
faudrait tirer de l'affirmation que le traité constitue un tout indivisible ?

Si, d'accord avec le Gouvernement belge, on pense que «le recours au
juge est une pièce essentielle du système du traité D,que «les diverses
procédures de règlement ont été combinées avec soin, de telle sorte
qu'en extraire ce qui concerne la Cour revient à démanteler le système
tout entier », que la clause de l'article17, alinéa 4, (était une condition
essentielle du co~sentement des parties à l'ensemble du traité »,le résul-

tat auquel il faudrait aboutir, une fois supposée l'impossibilité, ainsi
affirmée,de faire jouer la divisibilité dans le cas du traité hispano-belge,
serait simplement que le traité tout entier est devenu caduc.

12. Pour écarter la caducité de l'article 17, alinéa 4, du traité de

1927, le Gouvernement belge a avancé aussi la thèse d'après laquelle
la dissolution de la Cour permanente n'aurait eu d'autre conséquence
que l'impossibilité temporaire d'application de ladite disposition ; dis-
position qui aurait été suspendue dans ses effets sans cesser d'êtreen
vigueur. Le Gouvernement belge s'est référé, à ce propos, à la notion de
suspension des obligations internationales. Il a fait remarquer que l'im-

possibilité d'exécution d'une obligation n'entraîne l'extinction de l'obli-
gation qu'au cas où il s'agit d'une impossibilité permanente ; s'il s'agit,
au contraire, d'une impossibilité temporaire, l'obligation n'est pas
éteinte, mais simplement suspendue.
Or, ii n'est pas correctà mon avis, d'utiliser, par rapport àl'article17,

alinéa 4,dutraité de 1927, les diversesnotions employéespar la Belgique,
c'est-à-dire les notions d'exécution de l'obligation, d'impossibilité d'exé-
cution, d'extinction ou bien de suspension-de l'obligaiio~ en tant que
conséquence de l'impossibilité, permanente ou bien temporaire, de
l'exécution de la mêmeobligation. C'est que ladite disposition du traité
de 1927, à proprement parler, n'a pas créé,à la charge des Etats con-

tractants, une véritable obligation : l'obligation de tenir un certain
comportement, comportement qui pourrait êtredevenu impossible par
la suite, avec les conséquences que l'on pense pouvoir rattacher à une
telle impossibilité, c'est-à-dire justement à l'impossibilité de l'exécution
de l'obligation (extinction ou bien suspension de l'obligation selon qu'il

s'agit d'impossibilité permanente ou bien temporaire).
L'article17, alinéa 4, du traité de 1927 a créépour chacun des Etats
contractants, non pas une obligation, mais pl.utôt une situation de sou-
mission à des pouvoirs juridiques donnCs, pouvoirs qui, eux aussi, ont
étécréés par la même disposition.Cespouvoirs sont, d'un côté,le pouvoir
de juridiction conféréà un certain organe, qui est précisémentla Cour

permanente et, de l'autre côté, le pouvoir, pour l'autre Etat contrac-
tant, de saisir la mêmeCour. Puisqu'il s'agit de pouvoirs juridiques
conférés ou bienà un organe donné ou bien à un Etat mais par rapport
à un organe donné, la disparition d'un tel organe, à savoir la dissolution96 BARCELONA TRACTION (OP. DISS. MORELLI)

de la Cour permanente, a nécessairement entraîné l'extinction desdits
pouvoirs et, en mêmetemps, l'extinction de la situation correspondante
de soumission aux mêmes pouvoirs.Ces pouvoirs ont étééteints et non
pas simplement suspendus ; cela pour la raison que l'organe envisagé,
à savoir la Cour permanente, a été suppriméd'une façon définitive et
non pas suspendu dans son fonctionnement pour un certain temps.

13. Si l'on a égard à la véritable portée de l'article 17, alinéa 4,du

traité de 1927, on voit clairement qu'il n'est pas correct de ramener le
problème du maintien en vigueur ou de la caducité de ladite disposition,
comme l'a fait la Belgique, au problème des effets de la disparition d'une
institution internationale sur les traités confiant certaines fonctions à
cette institution.
Si un traité crée desobligations pour les Etats contractants et prévoit

en mêmetemps l'intervention d'un certain organe par rapport à l'exécu-
tion de ces obligations, les mêmes obligations peuvent bien continuer à
exister malgré la disparition de l'organe, cette disparition n'entraînant
nécessairement que l'extinction des pouvoirs de l'organe et de la soumis-
sion des Etats au mêmeorgane. Mais cela n'a rien à faire avec le pro-
blème du maintien en vigueur ou de la caducité de l'article 17,alinéa 4,

du traité de 1927 et surtout avec le fonctionnement de l'article 37 du
Statut. Cet article suppose l'existence, au moment de son entrée en
vigueur, de la juridiction de la Cour permanente. Or une telle juridic-
tion, que l'articl17 du traité de 1927 avait créée,n'existait plus lorsque,
le 14 décembre 1955, le Statut est entré en vigueur pour l'Espagne.

14. Il n'est pas non plus possible de voir, comme le prétend le Gouver-

nement belge, une analogie quelconque entre le cas de la disparition de
l'organe auquel un traité a conféréjuridiction et le cas d'un traité con-
férantjuridiction àun organe non encore établi,comme le cas des clauses
du traité de Versailles renvoyant à la juridiction à créerpar la Société
des Nations.
Dans ce dernier cas, en effet, il y avait des dispositions par rapport

auxquelles un problème de caducité ne se posait pas du tout : des dis-
positions qui prévoyaient l'établissement futur d'un certain organe et
qui, par conséquent, subordonnaient à un tel événement leur propre
effet attributif de juridiction. On peut très bien reconnaître que ces
dispositions étaient en vigueur avant que l'organe institué par la Société
des Nations, auquel elles renvoyaient, ait étéen état de fonctionner.

Mais cette constatation n'a rien à faire avec l'expression ((en vigueur ))
qui se trouve à l'article37 du Statut de la Cour permanente, expression
qui se réfèreau moment du procès et non pas au moment de l'entrée
en vigueur du Statut, comme c'est, au contraire, le cas pour la même
expression à l'article37 du Statut actuel.

15. J'ai dit que l'effet de l'articl37 du Statut consiste à créer des
règles nouvelles concernant la juridiction de la Cour actuelle, règles quiont pris naissance au moment où l'article 37 a joué. Ledit effet de l'ar-
ticle 37 est toutefois subordonné à la condition qu'il existe un traité ou
une convention « en vigueur )concernant la juridiction de la Cour per-

manente ; condition qui doit exister au moment de l'entrée en vigueur
du Statut. Or l'article 17, alinéa4, du traité hispano-belge était devenu
caduc avant l'entrée en vigueur du Statut à l'égard de l'Espagne ; ce
qui amène à la conclusion que la condition prescrite à l'article 37 ne

s'est pas réalisée.
On peut toutefois se demander (et c'est là, semble-t-il, un problème
que le Gouvernement espagnol a poséen lui donnant des formulations
qui ne sont ni uniformes ni absolument claires) si l'article 17, alinéa 4,
du traité de 1927 n'a pas étéremis en vigueur par le mêmearticle 37

du Statut. Il s'agirait, bien entendu, d'une remise en vigueur n'ayant
d'autre effet que de réaliserla condition poséepar l'article 37 pour son
propre fonctionnement.
Cette dernière remarque empêche,d'une façon péremptoire, de répon-
dre à la question par l'affirmative. Si l'articl37 exige, comme condition

nécessaire de son propre fonctionnement, que les clauses prévoyant le
recours à la Cour permanente soient en vigueur au moment de l'entrée
en vigueur du Statut, il est tout à fait absurde de penser que le même
article37 anéantisse complètement une telle exigence en disposant que
les clauses concernant la juridiction de la Cour permanente, devenues

caduques à la suite de la dissolution de celle-ci, sont remises en vigueur
rien que pour le fonctionnement du mêmearticle 37.
Cela serait, d'autre part, contraire à l'idéemêmedu transfert de la
juridiction de la Cour permanente à la Cour internationale de Justice.
Par le-transfert on veut réaliser la continuité entre deux juridictions :

entre une juridiction effectivement existante au moment où le transfert
est opéréet une juridiction nouvelle destinée à remplacer la première.
Or cette continuité ne se réaliserait pas du tout au cas où la juridiction
de la Cour permanente serait devenue caduque avant l'entréeen vigueur
du Statut et par conséquent avant le moment où la juridiction de la

Cour actuelle aurait pris naissance. La remise en vigueur supposée de
la première juridiction ne serait qu'une pure fiction, tout à fait incapable
d'assurer ladite continuité.

II. SUR LES EXCEPTIONS PRÉLIMINAIRES EN GÉNÉRAL

I. L'article62 du Règlement parle des exceptions préliminaires pour
attacher à ces exceptions l'effet de suspendre la « procédure sur le fond 1)
et d'ouvrir, en mêmetemps, une phase de la procédure, dans laquelle

la Cour n'a que la tâche de statuer sur l'exception dont il s'agit, tâche
que la Cour peut toutefois s'abstenir d'accomplir en cette phase, en
décidant de joindre l'exception au fond.

Le terme « préliminaire 1)dans l'expression «exception préliminaire ))

peut êtreentendu dans un double sens. D'un côtéon indique par ce terme l'effet qui est attaché à une excep-
tion présentée comme préliminaire, effet consistant justement à ouvrir
une phase de la procédure qui pourrait êtredite, elle aussi, préliminaire.

C'est dans ce sens que l'article 62 parle d'exception préliminaire
lorsqu'il dit, au paragraphe I~', que Toute exception préliminaire doit
êtreprésentée )dans un certain délai.En effet, loin de prescrire le moyen
par lequel certaines exceptions doivent êtreprésentées, l'article 62 ne

fait qu'accorder à la partie une faculté, faculté que la partie est libre
de ne pas exercer. En d'autres termes, une exception, qui serait suscep-
tible d'êtreprésentéesuivant le moyen indiqué à l'article 62, peut être
également présentéedans les piècesde procédure dont il est fait mention
à l'article41. C'est seulement au cas où la partie choisit la voie ouverte

par l'article 62 qu'elle doit présenter l'exception dans le délai fixéau
paragraphe ~er de cet article, en se conformant aussi aux autres pres-
criptions qui sont données au paragraphe 2.
Il s'ensuit que, lorsque l'article 62, paragraphe ler, parle d'exception

qualifiéede ((préliminaire D,il indique par ce terme, plutôt qu'un certain
caractère possibledes exceptions des parties, un certain moyen par lequel
les exceptions peuvent êtreprésentées.

2. Il est toutefois bien sûr que le moyen prévu à l'article 62 peut être
utilisé, non pas pour toutes les exceptions ou défenses des parties, mais
uniquement pour les exceptions ayant un certain caractère. 11est bien
sûr qu'unepartie n'a pasla possibilité,par le fait de présenter une excep-

tion ou une défensesuivant la procédure indiquéeà l'article 62, d'obliger
la Cour à donner la solution préalable d'une certaine question, indépen-
damment du rapport dans lequel cette question se trouve avec les autres
questions à trancher dans le procès.

Une exception ne peut donc êtreprésentéepar le moyen indiqué à
l'article 62 que si elle possède un certain caractère ; caractère concer-
nant le contenu mêmede l'exception et consistant justement en un
certain rapport dans lequel la question soulevée par l'exception doit se

trouver avec les autres questions à résoudre. La nécessité d'un tel
caractère n'est poséeque d'une façon implicite par l'article 62. Il s'agit
d'un caractère qui peut êtretrès bien indiqué par le mêmeterme préli-
minaire ))que l'article 62 emploie dans un but différent, c'est-à-dire

pour dénoter le moyen par lequel l'exception peut êtreprésentée.Voilà
l'autre sens dans lequel peut être entendu le terme (préliminaire ))dans
l'expression (exception préliminaire ».

Une question ne peut former l'objet d'une exception préliminaire aux
termes de l'article 62 du Règlement qu'au cas où la solution d'une telle
question est logiquement nécessaire avant d'aborder l'examen des autres
questions. Il doit s'agir d'un ordre, entre les diffkrentes questions,

imposépar une nécessité logique, non pas simplement conseil16par des
raisons d'opportunité ou d'iconomie.

96 Si un certain ordre n'est pas imposé par une nécessité logique, c'est
à la Cour qu'il appartient de déterminer l'ordre le plus convenable à

suivre. A cet égardla Cour peut s'inspirer de différents critères, critères
qui, comme je le disais, pourraient êtremêmedes critères d'économie.
Aussi la Cour pourrait-elle estimer convenable de commencer par exa-
miner une question de droit, qui se présente comme facile à résoudre,
avant d'aborder une question compliquée de fait, s'il apparaît qu'une
solution possible de la question de droit pourrait écarter la nécessité

d'examiner la question de fait.
La liberté, pour la Cour, de déterminer l'ordre à suivre, lorsque I'ordre
entre les différentes questions n'est pas imposépar une nécessité logique,
ne pourrait êtreéliminée oulimitée par l'attitude des parties : à plus
forte raison, par l'attitude de l'une des parties. Il serait inconcevable
que l'une des parties, par le moyen prévu à l'article 62OU par un autre

moyen, puisse obliger la Cour à donner la solution préalable d'une cer-
taine question, lorsque cette solution préalable n'est pas imposée par
une nécessité logique.

3. Il est tout à fait évident que la question de savoir si une décision

au fond est ou non possible doit nécessairement être tranchée avant
l'examen du fond. Nul doute, par conséquent, que les exceptions pro-
cédurales (d'incompétence ou autres) visant à empêcher l'examen du
fond peuvent êtreprésentéescomme exceptions préliminaires aux termes
de l'article 62 du Règlement. Il s'agit de voir si cette possibilité existe
uniquement pour les exceptions que je viens d'indiquer ou si la même

possibilité peut êtreadmise pour certaines questions concernant le fond.

C'est par la négative qu'il faut trancher le problème que je viens de
poser. La solution négative d'un tel problème découlede la constatation
qu'il n'y a aucun ordre logique nécessaire entre les différentes questions
qui s'élèventdans un procès donné et qui concernent toutes le fond ; ce

qui revient à dire qu'il n'existe pas de questions concernant le fond dont
la solution préalable soit imposCe par une nécessité logique.II s'ensuit
qu'il n'y a pas de questions concernant le fond qui puissent êtreprésen-
téescomme préliminaires aux termes de l'article 62 du Règlement.
La conclusion àlaquelle j'ai abouti est confirméepar,les termes mêmes

de l'article 62. Cet article statue, au paragraphe 3, que dès rkception
par le Greffier de l'acte introductif de l'exception, la procédure «sur le
fond »est suspendue. Le mêmearticle, au paragraphe 5, accorde à la
Cour la faculté de joindre l'exception préliminaire ((au fond ». Il ressort
des dispositions de l'article 62 que je viens de rappeler une nette dis-
tinction entre l'examen de l'exception préliminaire et l'examen du fond ;

ce qui empêche de penser qu'une question concernant le fond puisse
êtreprésentéepar le moyen d'une exception préliminaire aux termes de
l'article62. Il est en effet évident que, si la procédure sur le fond est
suspendue, il n'est pas possible, pendant une telle suspension, de tran-
cher une question qui concerne justement le fond. Il est également évi-dent qu'il ne serait pas correct de dire qu'une exception donnée peut
êtrejointe au fond lorsqu'il s'agit d'une exception concernant, elle aussi,
le fond.

4. Par conséquent, si la partie présente comme préliminaire une
exception concernant le fond, la Cour ne peut que déclarer l'exception
irrecevable en tant qu'exception préliminaire ; ce qui n'empêcheévi-

demment pas la partie de présenter la mêmeexception, comme toutes
les autres exceptions concernant le fond,dans la suite éventuelle de la
procédure.
L'exception concernant le fond présentéepar la partie comme préli-
minaire doit êtredéclarée irrecevableen tant qu'exception préliminaire ;
elle ne doit pas êtrejointe au fond aux termes du paragraphe 5de l'ar-

ticle 62. En effet, la décisionpar laquelle la Cour joint une exception au
fond présuppose la recevabilité de l'exception en tant qu'exception
préliminaire. Il doit s'agir d'une exception visant à empêcher l'examen
du fond : d'une exception toutefois sur laquelle la Cour ne peut se pro-
noncer sans l'examen de certains éléments quitouchent également au
fond. Au contraire, dans l'hypothèse que j'ai faite, il s'agit d'une ques-

tion concernant directement le fond.
La déclaration d'irrecevabilité est obligatoire pour la Cour et non pas
discrétionnaire comme la jonction d'une exception préliminaire au fond.
En outre, la déclaration d'irrecevabilité n'est pas liéeavec une certaine
attitude de la partie contre laquelle l'exception est introduite ; elle doit
êtreprononcée mêniesi cette partie ne s'oppose pas à ce que la question
soulevée par l'exception présentée comme préliminaire soit tranchée

préalablement aux autres questions concernant également le fond, dans
une phase préliminaire de la procédure. Ni l'une des parties ni les deux
parties d'accord ne peuvent limiter la liberté, pour la Cour, de déter-
miner l'ordre à suivre dans l'examen des différentes questions concer-
nant le fond, en obligeant la Cour à donner la solution préalable d'une
de ces questions.

5. Il faut toutefois considérer un argument par lequel on pourrait
penser d'écarter la conclusion que j'ai atteinte.

On pourrait faire observer qu'il est bien possible que la Cour soit
saisie pour trancher non pas un différenddans son ensemble, mais uni-
quement une question dont la solution est nécessaire pour le règlement
du différend. Un tel procès peut êtreintroduit soit par un accord entre
les parties, c'est-à-dire par un compromis, soit par une requête unila-
térale, comme le prouve l'article 36 du Statut, d'après lequel l'accepta-

tion de la juridiction obligatoire de la Cour peut avoir pour objet des
simplesquestions de droit ou de fait. De la possibilitC d'un procès devant
la Cour ayant un objet limité à une question donnCe de droit ou de fait
on pourrait penser à dCduire que, au moins s'il y a, entre les parties,
un accord exprès ou tacite à cet Cgard, il est Cgalement possible que,
pour la solution d'une question quelconque, soit utilisée une phase parti- culièrede la procédure :précisémentcette phase de la procédure qui est
envisagée à l'article 62 du Règlement.

Mais une telle déduction ne serait pas correcte. En effet une chose est
donner à un procès un objet limité à une certaine question ; en d'autres
termes, une chose est limiter àune certaine question la tâche confiée â
la Cour, tâche dont la Cour s'acquitte, d'une façon complète, justement
par la solution de la question dont il s'agit. Autre chose serait détacher
une certaine question de l'ensemble des questions qui devront toutes
êtretranchées par la Cour aux fins de la solution du différend que la
même Courdevra donner; cela pour consacrer à l'examen de cette
question une phase préliminaire de la procédure qui, en tant que telle,

serait suivie d'une phase ultérieure dans laquelle les autres questions
seraient examinées et le différend réglépar la mêmeCour. Dans ce
dernier cas, à la différencedu premier, il y aurait une limitation, non
pas de la tâche confiée à la Cour, mais plutôt de la liberté dont la Cour
doit jouir pour déterminer l'ordre à suivre dans l'examen des différentes
questions concernant le fond qui devront, toutes, êtretranchées par la
Cour. Limitation qui, àmon avis, est tout à fait inadmissible.

III. SUR LE DÉSISTEMENT (PREMIÈRE EXCEPTION PRÉLIMINAIRE)

I. Les articles 68 et 69 du Règlement envisagent des faits ayant des
caractères différents pour rattacher à ces faits des conséquencesjuri-
diques identiques ; conséquences juridiques consistant toujours dans
l'extinction ou la cessation du procès, c'est-à-dire dans la clôture de
la procédure.
L'article 68 envisage tout d'abord l'arrangement amiable, à savoir
l'hypothèse où «les parties tombent d'accord sur la solution à donner
au litige».

L'arrangement amiable produit, sur la base du droit international
général,l'effet que le différendest régléd'une certaine façon (effet qui
ne consiste pas toujours dans l'extinction du droit litigieux, comme il a
étéaffirmépar la Belgique). La règleparticulière de l'article 68du Règle-
ment, en tenant compte de l'effet produit par l'arrangement amiable
sur la base du droit international généralet du fait que le but propre
au procès, c'est-à-dire la solution du litige, est atteint par un autre
moyen, à savoir par le moyen de l'arrangement amiable, rattache au
mêmearrangement amiable, au cas où les parties le font connaître par
écrità la Cour, la conséquencedela clôture de la procédure. L'article 68
dit justement que, dans l'hypothèse que l'on vient d'indiquer, la Cour,

ou le Président si la Cour ne siègepas, rend une ordonnance donnant
acte aux parties de leur arrangement amiable et prescrivant la radiation
de l'affaire sur le rôle.
Il faut faire remarquer qu'il n'est pas vrai, comme il a étéaffirmépar
la Belgique, que l'arrangement arniable fasse obstacle à une nouvelle instance. L'arrangement amiable, si les conditions indiquées à l'ar-
ticle 68 du Règlement sont remplies et sur la base de cet article, produit
bien la conséquencede la clôture du procèsau cours duquel il est accom-

pli ; mais il ne touche ni au pouvoir d'action conférééventuellement aux
parties ni à la juridiction éventuelle de la Cour. En effet, le différend
réglépar l'arrangement amiable peut bien renaître. En ce cas, chacune
des parties peut exercer l'action qui, éventuellement, lui appartient, par

une requête qui devrait êtreconsidérée commepleinement recevable ;
et la Cour peut exercer sa juridiction éventuelle par une décision au
fond. Il va sans dire toutefois que la Cour, en rendant une telle décision,
doit tenir compte de l'arrangement amiable intervenu entre les parties.

2. Par le mêmearticle 68 et par l'article 69 l'effet de la clôture de la
procédure est rattaché non seulement à l'arrangement amiable no.cifié
par les Parties à la Cour, mais aussi à une déclaration de volonté visant
spécifiquement à produire un tel effet, déclaration de volonté qui est

dite ((désistement ». L'article 68 envisage le désistement fait par les
parties d'un commun accord ; l'article 69 le désistement fait par la
partie demanderesse au cours d'une instance introduite par requête.

L'effet du désistement consiste, en tout cas, dans la clôture de la pro-

cédure.Cela résulte destermes mêmespar lesquels le contenu de la décla-
ration de désistement est indiqué aux articles 68 et 69. L'article 68 fait
l'hypothèse où les parties, d'un commun accord, font connaître à la
Cour (qu'elles renoncent à poursuivre l'instance » ; l'article 69 fait

l'hypothèse où «la partie demanderesse fait connaître par écrit à la
Cour qu'elle renonce à poursuivre la procédure ». Cela signifie qu'à la
suite du désistement l'instance ou la procédure (les deux ternes ne peu-
vent avoir que le mêne sens) ne peut êtrepoursuivie ; si bien que le
paragraphe 2 de l'article 69, pour le cas où le désistement n'est pas réput6

a-quis à raison de l'opposition de la partie défenderesse, déclare que
« l'instance se poursuit ».Aussi bien dans l'hypothèse de l'article 68 que
dans celle de l'article Gg (pourvu que, dans cette dernière hypothèse,
le désistement soit réputéacquis, aux termes du paragraphe z), l'ordon-
nance prenant acte du désisteinent prescrit la radiation de l'affaire sur

le rôle.

Les raisonspour lesquellesles parties d'un commun accord, aux termes
de l'article 68, ou bien la seule partie demanderesse, aux termes de
l'article 69, décident d'accomplir un acte de désistement, peuvent être

les plus diverses ; et ces raisons n'ont pas besoin d'êtreindiquées dans
l'acte de désistement. Celui-ci peut êtredéterminé,entre autres, par la
possibilité ou la probabilité d'un arrangement amiable. Mais il peut
s'agir aussi d'un arrangement amiable déjà intervenu entre les parties ;

cela non seulement au cas de l'article 68mais aussi au cas de l'article 69.
Les parties ayant conclu un arrangement amiable, au lieu de le notifierà la Cour aux termes de l'article 68, peuvent se servir de l'autre moyen

offert par le mêmearticle ; elles peuvent aussi, par conséquent, faire
connaître par écrit à la Cour qu'elles renoncent à poursuivre l'instance,
et cela mêmesansindiquerle motif d'un tel désistement, à savoir l'arran-
gement amiable intervenu entre les parties. Il se peut aussi que, l'arran-
gement amiable une fois conclu, c'est.la partie demanderesse seule qui
accomplit l'acte de désistement aux termes de l'article 69 (sauf, natu-
rellement, dans l'hypothèse du paragraphe 2 de cet article, la nécessité
de la non-opposition de la partie défenderesse).

3. Le désistement prévu soit à l'article 69, comme c'est le cas dans
l'espèce,soit aussià l'article 68 du Règlement (de même que,sur la base
de ce dernier article, l'arrangement amiable notifié par les parties à la
Cour, abstraction faite, bien entendu, des effets produits par l'arrange-
ment amiable sur la base du droit international général) neproduit
donc d'autres conséquencesjuridiques que celle consistant à éteindreles
effets de la requêteprésentée à la Cour, c'est-à-direà clore le procès au
cours duquel le désistement est intervenu.

Aussi le désistement en tant que tel ne touche-t-il pas, en premier
lieu,à l'existence mêmedu diffbrend entre les parties. Malgréle désis-
tement (soit le désistement fait par les parties d'un commun accord,
soit le désistement de la seule partie demanderesse accompagné, si c'est
le cas, de la non-opposition de lapartie défenderesse),les parties peuvent
garder leur attitude respective par rapport au conflit d'intérêts dontil
s'agit; en ce cas, le différendqui avait étésoumis à la Cour continue à
subsister même aprèsle désistement.
En outre, le désistement, en tant que tel, ne touche ni à l'éventuel
pouvoir d'action de la partie et à la juridiction de la Cour, ni au droit

substantiel sur lequel la demande était fondée.Il s'ensuit que, s'il s'agit
d'un désistement pur et simple, le différendpeut être soumis à la Cour
par une nouvelle requêteet que la Cour doit le juger sur la même base
de droit qui existait avant le désistement.

4. Le désistement, une fois parfait, produit ses effets d'une manière
définitive. Etant donné que, comme on l'a dit, l'effet du désistement
consiste uniquement dans la clôture de la procédure, cela veut dire que,
à la suite du désistement, le procès, au cours'duquel le désistement est

intervenu, est définitivement clos. Ce qui n'empêche toutefois pas, pour
les raisons déjà indiquées, la possibilité d'un nouveau procès pour le
même différend.
Dans les pourparlers qui ont amené au désistement de la Belgique,
on a, à maintes reprises, employé le terme (déhitif ))pour indiquer le
caract6re que, d'après les intéressés espagnols et le Gouvernement
espagnol lui-même, ledésistement ov retrait de la demande devait BARCELONA TRACTION (OP. DISS. MORELLI)
104

avoir. Par exemple, dans la (note de base ))rédigéepar M. March, il
est dit que ((le retrait définitifde la demande est une condition préalable
pour engager la négociation 1).Toutefois, l'adjectif par lequel le désis-

tement est qualifié ne change rien à la nature de celui-ci ; cet adjectif
n'indique pas du tout par lui-méme, comme le prétend l'Espagne dans
ses défenses, que le désistement dût produire des effets qui ne sont pas

ceux propres au désistement en tant que tel, ou qu'il dût produire, outre
ces effets, d'autres effets.

Le caractère (définitif a que, d'après les intéressés espagnolset le
Gouvernement espagnol, le désistement devait avoir, peut êtreentendu
de deux façons différentes.

En premier lieu, le terme ((définitif ))a étéemployé euégardau carac-
tère parfait du désistement. Etant donné qu'il s'agissait en l'espèce de
l'hypothèse du paragraphe 2 de l'article 69, on a voulu indiquer, de cette

façon, un désistement susceptible d'être réputé acquis aux termes dudit
paragraphe 2, la partie défenderesse n'ayant pas fait opposition dans
le délaifixé.C'est en ce sens aue le terme ((définitif ))est entendu même

par l'Espagne aux paragraphes 39, 54, 55, 56, 60, 119, 125 de sa pre-
mière exception préliminaire. Cette façon d'entendre le caractère (défi-
nitif )) du désistement s'accorde, du côté belge, avec le passage de la

requête(par. 5) dans lequel il est dit que ((le groupe espagnol avait fait
savoir qu'il ne désirait pas négocier tant que se déroulerait le procès
pendant devant la Cour internationale de Justice 1)C'est dans le même

sens que le Gouvernement belge entend le caractère définitif du désis-
tement lorsque, au paragraphe 25 de ses observations, il se réfèrea sa
proposition de mars 1961 ((que ce désistement ne fût rendu effectif, par

l'acceptation du Gouvernement espagnol, qu'une fois qu'un accord entre
les parties privéesserait réalisé ».

Mais le terme ((définitif ))est employé aussi, à propos du désistement
belge, dans un autre sens, à savoir pour indiquer que les intéressés
espagnols et le Gouvernement espagnol ont exigéun véritable désiste-

ment et qu'un véritable désistement a étéaccompli par la Belgique : un
désistement véritable par opposition à une notion différente, c'est-à-dire
à celle d'une simple suspension de la procédure.

La suspension de la procédure n'est pas envisagée expressément par
le Règlement de la Cour bien qu'elle soit admise par certains systèmes
de droit interne. Elle consiste dans une pause que subit un procès qui

reste toutefois ouvert, pause pendant laquelle aucun acte de procédure
ne peut êtreaccompli. La suspension une fois terminée, le procèsreprend
son cours sans qu'il y ait besoin, pour cela, d'une nouvelle instance.

Or, comme il est dit au paragraphe 5 de la requête, le Gouvernement
belge s'était justement déclaré (disposéà solliciter de la Cour une sus-

pension de la procédure )); cette proposition, aussi bien que l'autre pro-
position concernant une prolongation du délaiimparti pour le dépôt de

IO2105 BARCELONA TRACTION (OP. DISS. MORELLI)
la répoiise belge aux exceptions préliminaires espagnoles, fut jugée

insuffisante par M. March ; ce qui, comme le dit le mêmeparagraphe de
la requête, amena le Gouvernement belge à accomplir un véritable
désistement, à savoir un désistement que, justement pour le distinguer
de la simple suspension, on a, à maintes reprises, qualifié de« définitif».
C'est en ce sens que le terme « définiti» est employé aux paragraphes 70

et 71 de la première exception prdliminaire espagnole, tandis que les
paragraphes immédiatement successifs se réfèrent à un sens tout à fait
différent. De même le (retrait définitifde la demande » se trouve opposé
à la simplesuspensionde la procédure,entre autres, aux paragraphes 122
et 123de la mêmeexception préliminaire espagnole.

5. Si l'on reconnaît (comme, à mon avis, il faut le reconnaître) que,
sÙrla base des articles 68 et 69 du Règlement, le désistement ne produit
d'autre effet que la clôture du procès au cours duquel le même désis-

tement est accompli, il s'ensuit qu'il est bien possible, après le désiste-
ment et la clôture du procès qui en constitue la conséquence, de déposer
une nouvelle requêteen vue d'introduire un nouveau procès.

Une telle possibilitén'est aucunement subordonnée à la nécessitéd'une

réserve quelconque. La nécessité dela réserve ne pourrait êtreaffirmée
que si l'on partait de l'idée,à mon avis erronée, que le désistement, en
tant que tel, produit, outre la clôture de la procédure, d'autres effets ;
effets que la réserve aurait justement le but d'écarter.

Si le désistement en tant que tel, à savoir en tant qu'acte envisagépar
les articles 68 et 69 du Règlement, ne produit que l'effet consistant dans
la clôture de la procédure, il est bien possible qu'un désistement, en par-
ticulier un désistement accompli par la partie demanderesse aux termes
de l'article 69, soit accompagné d'un autre acte de volonté de la même

partie, acte produisant, sur la base du droit international génCralou
d'autres règles de droit particulier, les effets qui lui sont propres. Il est
toutefois bien sûr que l'existence d'un tel acte, dans un cas concret,
devrait êtreprouvée par la partie intéressée. L'existence de cet acte,
contemporain au désistement mais distinct de celui-ci, ne pourrait être

présumée; elle ne pourrait pas non plus êtredéduite du défaut d'une
réserve 2 l'acte de désistement.

6. Une fois reconnue, en général, la possibilité d'autres actes de la

partie demanderesse accompagnant le désistement et produisant leurs
propres effets,.il est utile d'indiquer ici, toujours sur un plan très général,
quelles sont les différentes hypothèses susceptibles de se réaliser.
La première hypothèse possible est celle d'un désistement pur et
simple, non accompagnC d'autres manifestations de volonté et produi-

sant, par conséquent,le seul effet,propre au désistement, de la clôture de
la procédure. Une deuxième hypothèse se réaliselorsqu'il y a, de la part du deman-
deur, non seulement le désistement de l'instance, mais aussi l'abandon

de sa prétention ou de sa protestation en tant qu'élément constitutif du
différendqui avait étésoumis à la Cour, avec la conséquencede l'extinc-
tion d'un tel différend.Il se peut que l'abandon de la prétention ou de
la protestation ne soit pas accompagné de la renonciation ni au pouvoir
d'action devant la Cour ni au droit subjectif substantiel sur lequel la

prétention ou la protestation était fondée.En ce cas, si le différendrenaît
ou, plus exactement, si vient à naître un nouveau différend correspon-
dant, dans une mesure plus ou moins large, au différend éteint, la Cour
peut bien êtresaisie pour le règlement d'un tel différend ; différend qui
doit êtreéventuellement tranché sur la base du droit subjectif substan-
tiel que la partie demanderesse avait invoqué avant le désistement.

Il se peut au contraire (et nous nous trouvons alors en face de la troi-
sièmehypothèse) que le désistement soit accompagné de la renonciation
au pouvoir d'action devant la Cour. Le pouvoir d'action, en ce cas,
s'éteint, ce qui entraîne aussi l'extinction de la juridiction de la Cour.
Etant donné que la renonciation au pouvoir d'action n'implique pas

nécessairement la renonciation au droit substantiel, celui-ci peut bien
êtreinvoqué par la suite, soit en dehors d'un procès quelconque soit
dans un procès qui serait introduit devant une autorité autre que la
Cour, ou mêmedevant la Cour, par un moyen autre que l'exercice du
pouvoir d'action ayant formé l'objet de la renonciation (par exemple,
moyennant un compromis).

Il y a enfin la quatrième hypothèse possible, c'est-à-dire l'hypothèse
où la partie demanderesse qui se désiste de l'instance, renonce aussi à
son droit substantiel ou bien reconnaît qu'un tel droit substantiel
n'existe pas. Cette renonciation ou cette reconnaissance produit des

effets concernant le fond même du différend. Le droit substantiel
auquel il a étérenoncé ou qui est reconnu comme inexistant ne peut
plus êtreinvoquéni en dehors d'un procèçni au cours d'un procès éven-
tuel ; procès qui est tout à fait possible, mêmedevant la Cour, étant
donnéque la renonciation ou la reconnaissance concernant le droit sub-
stantiel ne touchent, ni l'une ni l'autre par elles-mêmes,au pouvoir

d'action devant la Cour.
La distinction entre les deux dernières hypothèses que l'on vient d'in-
diquer est, dans le droit international, plus nette que dans le droit
interne. Etant donné que, dans le droit international, le pouvoir d'action
et la juridiction correspondante n'ont pas, comme dans le droit interne,

un caractère généralet qu'ils découlent, au contraire, de certaines règles
particulières, il est aiséd'envisager une renonciation au pouvoir d'action
découlant d'une règle donnée, renonciation ne touchant pas du tout au
droit subjectif substantiel. Dans le droit interne, au contraire, on envi-
sage d'ordinaire la renonciation, non pas au pouvoir d'action en tant
que tel, mais plutôt au droit subjectif substantiel. C'est cette renoncia-

tion, en effet, qui constitue l'hypothèse que l'on oppose à l'hypothèsedu désistement pur et simple de la procédure. Tandis que l'on qualifie
ce dernier désistement comme désistement d'instance,on emploie la for-
mule de désistement d'actionpour indiquer quelque chose qui ne corres-
pond pas exactement à une telle formule, c'est-à-dire la renonciation,
non pas au pouvoir procédural d'action, mais plutôt au droit subjectif
substantiel. C'est justement cette terminologie qui est employée par
l'une et par l'autre des parties dans la présente affaire.suffit de rappe-
ler,à cet égard,qu'au paragraphe 294de son mémoire le Gouvernement
belge dit que, dans la plus grande partie du continent européen, on

entend «par désistement d'action la renonciation du demandeur à son
action, donc à son droit1)La mêmeterminologie, qui révèle unecertaine
confusion entre le pouvoir procédural d'action et le droit subjectif sub-
stantiel, est employéedans les défenses espagnoles.
Quoi qu'il en soit, pour ce qui concerne la terminologie et pour ce qui
concerne l'hypothèse qui est envisagke d'ordinaire dans le droit interne,
il faut déterminer, pour les fins qui nous intéressect, quelle est l'hypo-
thèse qui, d'après le Gouvernement espagnol, se serait réalisée enl'espèce
à la suite du désistement belge.

7. Dans les conclusions aux exceptions préliminaires le Gouvernement
espagnol a demandé à la Cour de se déclarer incompétente pour recevoir
ou pour juger la réclamation formuléedans la nouvelle requêtebelge,
((toute juridiction de la Cour pour décider des questions se référant
à cette réclamation, soit à la compétence, àla recevabilité, ou au fond,
ayant pris fin 1)à la suite du désistement belge. Dans les conclusions
déposéesaprès l'audience du 8 mai 1964, le Gouvernement espagnol
a demandé que, pour le motif que l'on vient d'indiquer, de même que
pour les motifs énoncés à l'appui des autres exceptions préliminaires,

la requêtebelge soit déclarée définitivement irrecevable.
Si l'on s'en tient à la façon dont les conclusions du Gouvernement
espagnol ont étéformulées,on pourrait êtreamené à entendre la première
cxception préliminaire dans un sens purement procédural, c'est-à-dire
dans le sens qu'elle visait proprement et uniquement à nier la juridiction
de la Cour pour réglerle différend.Etant donnéque la juridiction de la
Cour dans la présente affaire était fondéepar la Belgique sur le traité
de 1927et sur l'article 37 du Statut,la première exception préliminaire
serait, d'après cette interprétation, entendue dans le sens que, par la
mêmeexception, l'Espagne affirmait que la Belgique avait renoncé au

pouvoir d'action devant la Cour découlant éventuellement desdites
dispositions.
Il faut toutefois faire remarquer que la thèse d'après laquelle la
Belgique aurait renoncé à son pouvoir d'action, en tant que tel, est
une thèse qui ne se trouve ni développéeni même esquissée d'une
façon claire dans les défensesespagnoles. Il s'agit, d'ailleurs, d'une thèse
qui ne s'accorde pas avec la formule de l'irrecevabilité ((définitive ))
employée par l'Espagne dans ses conclusions finales. Une déclarationd'irrecevabilité, en effet, ne pourrait avoir pour objet que la seule
demande introductive de la procédure au cours de laquelle la déclaration
d'irrecevabilité serait prononcée. Au contraire, en demandant que la
requête belge soit déclarée ((définitivement 1)irrecevable, l'Espagne

a demandé à la Cour un jugement qui ne concerne pas spécifiquement
la requête du 19 juin 1962, mais qui concerne aussi d'autres requêtes
éventuelles, requêtes qui, à la suite du jugement demandé par l'Espagne,
devraient être considérées également «irrecevables ». L'Espagne a

demandé, en substance, un jugement produisant les effets de la chose
jugée au sens matériel, jugement qui, en tant que tel, ne pourrait être
qu'un jugement au fond.

8. Pour préciser la véritable portée dela première exception prélimi-
naire, il est nécessaired'entendre les conclusions espagnoles à la lumière
des arguments développéspar l'Espagne dans la procédure écrite aussi

bien qu'au cours des plaidoiries.
Or il faut remarquer, tout d'abord, que dans la circulaire envoyée
à ses missions diplomatiques à l'étranger le 13 avril 1961, après l'ordon-
nance de la Cour prescrivant la radiation de l'affaire sur le rôle, le Gouver-

nement espagnol, tout en qualifiant le désistement belge comme un
((désistement de l'action s, dit que le Gouvernement belge a étéamené
à « se désister de la protection de certains intérêtsprivésdont la défense
n'était pas possible dans ie cadre de l'ordre juridique international ».

Le Gouvernement espagnol aboutit ensuite à la conclusion d'après
laquelle La renonciation belge constitue donc la reconnaissance défini-
tive de la bonne position de l'Espagne. ))Or la première exception
préliminaire se réfère,dans son paragraphe 62, à ladite circulaire ; circu-

laire qui, d'après la même exception préliminaire, démontre ((aussi
clairement que possible, que le Gouvernement espagnol considérait
le litige international entre les deux gouvernements comme ayant pris
définitivement fin ».

Mais c'est aussi d'autres passages de la première exception prélimi-
naire que ressort le sens qu'aurait, d'après le Gouvernement espagnol,
le désistement belge ; désistement qui, bien que qualifié de ((désistement
d'action », aurait, en réalité, pourobjet un droit subjectif substantiel,

c'est-à-dire le droit de protection diplomatique. Par exemple, au para-
graphe 98, le Gouvernement espagnol se réfèreà la définition donnée
par le Dictionnaire de la terminologie du Droit international, d'après
laquelle le terme «désistement 1)peut (servir à désigner la renonciation

à une prétention ou à un droit ); après quoi le mêmeGouvernement
espagriol répèteprécisémentque l'on peut ,utiliser ce mot à propos de la
renonciation àune demande ou àun droit ».De même,au paragraphe 101,
on indique par le terme de désistement d'action ((l'intention des parties

touchant leurs droits quant au fond de l'affaire )).Encore, au para-
graphe 102, on dit que (dans la plupart des cas où un désistement inter-
vient après accord entre les Etats, l'avis de désistement traduira un
accord dont le but sera de réglerle litige une fois pour toutes ».On peutenfin rappeler qu'au paragraphe 103, à propos du désistement belge
dans l'affaireBorchgrave, mention est faite de l'intention du Gouverne-
ment belge ((de renoncer, une fois pour toutes, à son droit d'ester en
justice» ;ce qui serait justement la conséquence du fait que le même
gouvernement avait reconnu « que la responsabilité du Gouvernement
espagnol n'était en aucune mesure engagée ».

La véritable portée de !a première exception préliminaire résulte
aussi des arguments à l'appui présentésdans les plaidoiries. On a mis
le désistementbelge en rapport avec les exceptionspréliminairesopposées
par l'Espagne à la première requête, en particulier avec l'exception
préliminaire relative au défaut de qualité, pour affirmer que le désiste-
ment impliquait la renonciation dela part dela Belgique à son argumen-
tation en défensecontre les exceptions préliminaires espagnoles.Compte
tenu du fait que la question de la qualité, comme nous le verrons par la
suite (quatrième partie), concerne un droit subjectif substantiel, tel que
le droit de protection diplomatique, on voit très clairement par là que,

d'après la thèse avancée par l'Espagne dans sa première exception
préliminaire, la Belgique, en renonçant par le désistement à son argu-
mentaticn àcet égard,aurait disposédudit droit substantiel. La Belgique
aurait ou bien renoncé à ce droit ou bien reconnu l'inexistence du même
droit.
Sil'on considèredonc la façon dont la première exception préliminaire
est présentéeet que l'on entende les conclusionsespagnoles àla lumière
des arguments développésdans la procédure écrite aussi bien qu'au
cours des plaidoiries, on voit très clairementà mon avis, que par cette
exception l'Espagne a nié, comme conséquence du désistement du
Gouvernement belge, la possibilitépour celui-ci d'exercer, d'une manière

quelconque, le droit de protection diplomatiqueà l'égarddela Barcelona
Traction. Désormais, du point de vue du Gouvernement espagnol,
un tel droit ne'pourrait plus êtreinvoquépar la Belgique, non seulement
devant la Cour, mais aussi dans un procès qui serait introduit devant
une autre juridiction quelconque ou même en dehors de tout procès.

g. Si telle est la portée de la première exception préliminaire, il est
bien sûr que, par cette exception, on a poséun problème concernant,
non pas la possibilité ou l'impossibilitéd'un jugement au fond, mais,
au contraire, la façon mêmedont le fond de l'affaire aurait dû être jugé

par la Cour. Or, pour les raisons que j'ai indiquéesdans la deuxième
partie, un tel problème, en tant que problème concernant directement
et exclusivement le fond, ne pouvait êtreexaminépar la Cour au stade
actuel de la procédure. Par conséquent la Cour aurait dû, à mon avis,
déclarer la première exception irrecevable en tant qu'exception
préliminaire. IV. SUR LA TROISIÈME EXCEPTION PRÉLIMINAIRE

1. Par la troisième exception préliminairel'Espagne a niéà la Belgique
la qualité pour exercer la protection diplomatique en faveur de la société
Barcelona Traction aussi bien qu'en faveur des actionnaires belges de la
sociétépour le préjudice subi par celle-ci.
La protection diplomatique n'est, à mon avis, autre chose que l'exer-
cice par un Etat de son droit subjectif de prétendre, pour ses ressortis-

sants (personnes physiques et personnes morales), à un certain traite-
ment de la part d'un autre Etat. Lorsqu'un Etat exige, par les voies
diplomatiques, que l'un de ses ressortissants soit traité par un autre
Etat de la façon prescrite par les règles internationales en la matière
ou qu'il réclame une réparation en raison du fait qu'un tel traitement

n'a pas étéaccordé, le premier Etat ne fait qu'exercer le droit qui découle
desdites règlesinternationales. Il s'agit de règlessubstantielles accordant
un droit subjectif ayant le caractère de droit substantiel. C'est simple-
ment en considération du moyen ordinaire par lequel un tel droit est
exercé qu'on le qualifie de droit de protection diplomatique. Il n'y a

aucune raison d'envisager un droit de protection diplomatique comme
un droit distinct du droit substantiel découlant des règles relatives au
traitement des étrangers.
Tout autre, semble-t-il, est la conception adoptée par le Gouverne-
ment espagnol, qui parle de la protection diplomatique comme d'une
institution ayant le but de garantir les règles internationales concernant

le traitement des étrangers. Le Gouvernement espagnol semble distin-
guer, d'une part, le droit, pour un Etat, d'exiger un certain traitement
de ses ressortissants et, d'autre part, comme corollaire de ce droit,
la faculté, pour le mêmeEtat, d'intervenir en vertu de 13 protection
diplomatique.

A mon avis, un tel dédoublement n'est ni nécessaireni même conce-
vable. En tout état de cause, il est bien sûr que, lorsqu'un Etat agit
non pas par la voie diplomatique mais par la voie judiciaire, le droit qu'il
invoque corrme fondement de sa demande est simplement le droit
substantiel découlant des règles concernant le traitement des étrangers.
L'autre droit ou l'autre facuité que l'on voudrait concevoir (à tort,

à mon avis) comme quelque chose de distinct dudit droit substantiel
afin d'expliquer le fondement de l'intervention par la voie diplomatique,
n'entrerait pas du tout en ligne de compte dans la procédure judiciaire.

2. Dans un procès introduit par une demande fondée sur un droit

découlant d'une règleconcernant le traitement des étrangers (appelons-le
droit de protection diplomatique, sous réserve des précisionsque nous
venons de donner) la question de savoir si un tel droit existe, ou s'il
n'existe pas, est évidemment une question touchant directement au fond
de l'affaire. Par conséquent le jugement qui tranche cette question est

un jugement au fond, produisant les effets de la chose jugée au sens
108matériel. Aussi un jugement qui constate que le droit de protection
diplomatique n'existe pas, dans un cas concret, est-il un jugement
statuant sur le fond de la demande et non pas un jugement déclarant que
le fond de la demande ne peut êtreexaminé, un jugement, en d'autres
termes, déclarant la demande irrecevable.
Or c'est pour diverses raisons que le droit de protection diplomatique

peut êtreestiméinexistant dans un cas concret. L'une des raisons pos-
sibles consiste dans le défaut de qualité pour 1'Etat qui invoque un
prétendu droit de protection diplomatique. Par qualité on n'entend pas
autre chose, en ce cas, que l'appartenance à un Etat plutôt qu'à un
autre Etat du droit substantiel qui est invoqué dans le procès ; aussi
s'agit-il d'une qualité substantielle et non pas procédurale. Etant donné

que le droit de protection diplomatique, comme tout autre droit, ne peut
êtreconçu qu'en tant que droit appartenant à un Etat donné à l'égard
d'un autre Etat donné, nier que le droit de protection diplomatique,
par rapport à une certaine personne privée, appartient à 1'Etat qui
l'invoque comme fondement de la demande adressée au juge par cet Etat,
revient à déclarer qu'une telle demande est, pour cette raison, mal

fondée ; cela indépendamment du fait qu'il se soit ou non produit la
violation, par 1'Etat défendeur, d'une obligation, obligation quiexisterait
éventuellement à l'égard d'un Etat autre que le demandeur. On voit
par là qu'un jugement disant que 1'Etat demandeur n'a pas qualité
par rapport au droit de protection diplomatique qu'il invoque, est un
jugement par lequel la demande est rejetée au fond et non pas déclarée

irrecevable.

3. Quel est le fond de l'affaire dans le cas d'espèce? La Belgique
demande à l'Espagne réparation pour la violation alléguéed'une obliga-
tion internationale de l'Espagne envers la Belgique. L'Espagne refuse la
réparation demandéeen niant qu'il y ait eu, desa part, la violation d'une

obligation envers la Belgique. L'existence de la violation est niée par
l'Espagne sur la base de différents motifs. L'un de ces motifs consiste
à nier l'existence mêmede l'obligation qui aurait étéviolée: l'existence,
bien entendu, d'une obligation envers la Belgique.L'Espagne soutient en
effet que, mêmeau cas où il serait possible de parler d'upe obligation
internationale et de la violatioii d'une telle obligationils'agirait d'une

obligation de l'Espagne envers un Etat autre que la Belgique, de sorte
que celle-ci ne pourrait rien prétendre.
Comme on le voit, la question de savoir si la Belgique a ou non qualité
pour avancer contre l'Espagne la prétention qu'elle a avancée ne consti-
tue qu'un aspect du fond de l'affaire. Un arrêt sur cette question ne
serait pas un arrêt sur la recevabilité de la demande ; ilserait, au con-
traire, un arrêt sur le fond. Aussi un arrêt par lequel la Cour aurait

tranché ladite question dans le sens souhaité par l'Espagne aurait-il été,
non pas un arrêt déclarant la demande irrecevable, mais plutôt un arrêt
dCcidant le fond de la demande dans le sens que la prétention avancée
par la Belgique serait mal fondée.Un tel arrêt n'aurait pas eu un effetlimité à la procédure actuelle, effet consistant à empêcherque la procé-
dure ne soit poursuiïie devant la Cour. En tant qu'arrêt sur le fond,
il aurait produit les effets de la chose jugée :la chose jugée au sens
matériel. L'arrêtaurait étéobligatoire pour les parties aussi bien que

pour tout juge (la Cour elle-mêhe ou un autre juge quelconque) qui
serait appelé à statuer sur le mêmeobjet et entre les mêmesparties.
A la suite d'un tel arrêt la Belgique n'aurait pu plus rien prétendre
de l'Espagne par rapport aux mesures prises par celle-ci à l'égard dela
Barcelona Traction.

4. Il n'est pas possible de suivre le Gouvernement espagnol dans
sa tentative de séparer du fond de l'affaire la question concernant la
qualité de 1'Etat demandeur pour intervenir au titre de la protection
diplomatique (plaidoirie du 7mai 1964) : cela pour la raison très simple,
déjàindiquée, que la qualité dont il s'agit n'est autre chose que l'appar-

tenance à 1'Etat demandeur du droit substantiel invoqué par lui comme
fondement de sa demande.
Le Gouvernement espagnol lui-même reconnaît expressément que
c'est une question de fond de déterminer si l'obligation internationale,
dont un Etat allègue la violation, était ou non existante. Or une telle
obligation ne pourrait êtredéclaréeexistante ou bien inexistante si ce

n'est en tant qu'obligation incombant à un Etat donné envers un autre
Etat donné. Par conséquent, si c'est une question de fond de savoir si,
en prenant une certaine mesure à l'égard d'une personne privée, 1'Etat
défendeur a ou non violéune obligation internationale qu'il avait envers
1'Etat demandeur, c'est également une question de fond, ne constituant

qu'un aspect de la mêmequestion, d'établirsi c'est envers 1'Etat deman-
deur que 1'Etat défendeur est lié par l'obligation dont on allègue la
violation ; en d'autres termes, si c'est à 1'Etat demandeur qu'appartient
le droit subjectif (droit de protection diplomatique) correspondant
à une telle obligation.
La solution de cette question dépend de la solution de différents

points. Il faut non seulement déterminer quelle est la personne privée
qui a étéfrappéepar la mesure reprochéeà 1'Etat défendeur, mais il faut
voir aussi si cette personne est ou non liéeavec 1'Etat demandeur par
le lien de la nationalité. Il s'agit de points concernant tous l'existence
mêmed'une obligation de 1'Etat défendeur envers YEtat demandeur
et par conséquent l'existence d'une violation de cette obligation et, par

là, la responsabilité internationale invoquée par 1'Etat demandeur.
Aussi s'agit-il de points concernant tous le fond de l'affaire.

5. La question présentée par l'Espagne comme troisième exception

préliminaire est donc une question n'ayant pas du tout un caractère
préliminaire, parce que sa solution s'identifie à la décision mêmedu
fond de l'affaire. C'estpourquoi ladite question ne pouvait êtreexaminée
par la Cour au stade actuel de la procédure, stade qui était limité auxquestions ayant réellement, et non pas en raison d'une qualification
donnéepar la partie, le caractère de questions
L'im~ossibilité. Dour la Cour. d'examiner. au stade actuel de la
procédure, la question-de la qualité de la Belgique pour exercer la pro-

tection diplomatique était une hpossibilité absolue. Il ne s'agissziit
pas du tout de l'exercice éventueldela facultédiscrétionhaire de joindre
l'exception au fond, faculté qui suppose le caractère prdliminaire de
l'exception. Au contraire, la question de la qualité, dans le cas d'espèce,
Ctait une question concernant directement et exclusivement le fond,
non pas une question préliminaire qui aurait pu se présenter comme
liéeau fond d'une façon qui aurait pu autoriser la Cour à la joindre au
fond.
Il n"y avait pas non plus lieu de distinguer dans le cadre de ce qu'on
a appelé exception préliminaire no 3,comme l'a fait le Gouvernement
belge (plaidoirie du 23avril 1964),des questions qui étaient mûres pour
être tranchées et des questions qui, au contraire, ne l'étaient pas.

Cette distinction ne pourrait se fajre qu'à l'égard de questions ayant
toutes le caractère de véritables questions préliminaires ; elle serait
alors en rapport avec le lien plus ou moins étroit qui pourrait exister
entre chaque question et le fond de l'affaire. Dans l'espèce il s'agissait
non pas de questions distinctes, mais plutôt de différents points se rame-
nant tous à la même question, c'est-à-dire à la question de la qualité
de 1'Etat belge. Or, comme je l'ai dit, cette qualité relève du droit
substantielet la question de savoir si elle existe ou non est une question,
non pas simplement liéeau fond, mais plutôt concernant directement
et exclusivement le fond.
Je n'ai pas besoin de faire remarquer que l'accord, qui existait,
semble-t-il, entre les parties quant à la possibilité actuelle de résoudre

certains points, estimés par l'une et par l'autre partie comme mûrs pour
êtredécidés,était un accord n'ayant aucune influence sur les pouvoirs
de la Cour. Un tel accord non seulement n'obligeait pas mais n'autorisait
mêmepas la Courd'examiner, au stade actuel de la procédure,la question
de la qualité ni dans son ensemble ni dans certains des points d'où
elle résulte.

6. La question de la qualité ne pouvait donc, en aucun cas, être
examinée au stade actuel de la procédure. L'exception qui la concerne
ne pouvait non plus êtrejointe au fond aux termes de l'article 62,
paragraphe 5, du Règlement. Elle devait, au contraire, êtredéclaree
irrecevable en tant qu'exception préliminaire.

Il est sans doute possible de se demander si la question dela qualité
doit êtreexaminée avant les autres questions concernant également
le fond et quel ordre il faut suivre entre les différentspoints d'où ladite
question résulte. Il appartient exclusivement à la Cour et non pas aux
parties (ni à la partie défenderesse ni aux deux parties d'un commun
accord) de résoudre un tel problème. C'est un problème dont la solution
dépend,non pas de raisonslogiques, mais simplement de raisons d'oppor- tunité et d'économie :un problème que la Cour ne pourrait envisager que
sur la base d'une vue d'ensemble de toutes les questions concernant le
fond et, par conséquent, seulement dans la phase de la procédure dans

laquelle ces questions peuvent êtretranchées.

Il suffit de faire remarquer à cet égard qu'il est bien possible, dans
un cas donné, qu'une question autre que celle de la qualité (par exemple,
la question concernant le contenu mêmede la règle de droit invoquée

comme fondement de la demande) se présente comme une question plus
facile à résoudre que la question de la qualité. Dans un cas pareil la Cour
peut bien trouver convenable de commencer par l'examen de ladite
question et de prononcer éventuellement, sur la base de la solution
donnée à cette question, le rejet au fond de la demande, sans aborder

du tout la question de la qualité.

I. Par la quatrième exception préliminaire l'Espagne a affirméque
les remèdes accordés par le droit interne espagnol n'avaient pas été
épuisés,pour conclure à ce que la Cour déclare, pour cette raison,
1'~irrecevabilité définitive))de la demande belge.
u
Le caractère préliminaire de cette exception et, par conséquent,
sa recevabilité en tant qu'exception préliminaire dépendent de la nature
que l'on reconnaît à la règle sur laquelle la mêmeexception est fondée.
Il faut faire remarquer, à cet égard, que le Gouvernement espagnol n'a
pas fondésa quatrième exception préliminaire directement sur l'article 3

du traité hispano-belge de 1927. Le Gouvernement espagnol a invoqué,
au contraire, une règle du droit international général : la règle dite de
l'épuisement préalabledes voies de recours internes, règle qui, d'après le
mêmeGouvernement espagnol, ne serait que confirmée par l'article 3
du traité de 1927.

Or la règle de l'épuisement des recours internes, en tant que règle du
droit international général,est, à mon avis, une règle substantielle
et non pas procédurale. Il s'agit précisémentd'une règlecomplémentaire
d'autres règles ayant, elles aussi, le caractère de règles substantielles :
c'est-à-dire des règles concernant le traitement des étrangers.

Lesdites règles prescrivent aux Etats, auxquels elles s'adressent,
un résultat final déterminé quant au traitement des ressortissants
étrangers, tout en laissant 1'Etat obligé libre pour ce qui concerne
les moyens à employer. Par conséquent, si un organe de 1'Etat obligé

accomplit un acte contraire au résultat voulu, l'existence d'un fait
illicite international et de la responsabilité internationale de 1'Etat
ne peut être affirméetant qu'il existe, pour le ressortissant étranger,
la possibilité d'obtenir, par les voies de l'ordre interne, la réalisation
du résultat visépar la règle internationale. 2. Il e ensuit que, si dans un procès international introduit,comme
le procèsactuel, par une demande fondéesur la lésion,par un organe de
1'Etat défendeur, d'un ressortissant de 1'Etat demandeur on constate
que les recours admis par le droit interne du premier Etat n'ont pasCté
épuisés,la conclusion à tirer de cette constatation n'est pas l'irreceva-

bilitéde la demande, mais plutôt le rejet de la demande au fond. Dans
l'hypothèse que je viens d'indiquer, en effet, on constate que la violation
alléguéedu droit substantielinternational de 1'Etat demandeur ne s'est
pas accomplie.

La conséquenced'une telle constatation ne peut consister qu'à nier la
responsabilité de l'Etat défendeur et, par là, à rejeter la demande au
fond. L'arrêtqui décidede cette façon est, partant, un arrêtau fond,
produisant, en tant que tel,ffet de chosejugéeau sens matériel. Or c'est
justement un tel jugement qui a étédemandé,bien que sous la formule
inexacte et contradictoire de l'irrecevabilité définitive,par l'Espagne
dans sa quatrième exception préliminaire. Mais un tel jugement ne pou-
vait êtrerendu par la Cour au stade actuel de la procédure.
Il faut en conclure que la quatrième exception prkliminaire aussi

devait être,non pas jointe au fond, mais plutôt déclarée irrecevable
en tant qu'exception préliminaire.

(Signé) Gaetano MORELLI.

Bilingual Content

OPINION DISSIDENTE DE M. MORELLI

Je suis d'avis que, des quatre exceptions présentées par le Gouverne-
ment espagnol comme exceptions préliminaires, c'est uniquement sur la
deuxième que la Cour pouvait statuer au stade actuel de la procédure.
La Cour aurait dû retenir une telle exception en déclarant son défaut

de juridiction.
Les autres exceptions, bien que présentées par le Gouvernement
espagnol comme exceptions préliminaires, n'ont pas, en réalité,le carac-
tère d'exceptions préliminairesparce qu'elles posent toutes des problèmes
concernant directement et uniquement le fond de l'affaire. Cela étant, la
Cour ne pouvait, à mon avis, statuer sur lesdites exceptions, comme elle

a statuésur la première en la rejetant. La Cour ne pouvait non plus faire
ce qu'elle a fait au sujet de la troïsième et de la quatrième exception en
décidant de joindre ces deux exceptions au fond. En effet, la jonction
au fond, au sens de l'article62,paragraphe 5, du Règlement, suppose le
caractère préliminaire de l'exception ; condition qui, à mon avis, n'est
pas réaliséepar rapport aux exceptions dites préliminaires dont il s'agit.

Je pense que la première, la troisième et la quatrième exception
auraient dû être déclarées irrecevables en tant qu'exceptions prélimi-
naires. Ce qui aurait laissé ouverte, pour l'Espagne, la possibilité de
poser de nouveau les mêmesquestions, en tant que questions concer-
nant justement le fond, dans la suite de la procédure.

11est bien vrai que la décision, par la Cour, de joindre au fond la
troisième et la quatrième exception ne s'éloigne pas beaucoup, pour
ce qui concerne les conséquences pratiques, d'une décision, à mon avis
plus correcte, par laquelle la Cour aurait déclaréces deux exceptions
irrecevables en tant qu'exceptions préliminaires. Il y a toutefois une
distinction fondamentale à faire entre la jonction au fond et la déclara-

tion d'irrecevabilité ; distinction qui, comme je l'espère, ressortira clai-
rement des considérations que je me propose de consacrer aux exceptions
préliminaires en général.
Je commencerai mon opinion dissidente par une première partie ayant
pour objet la question concernant la juridiction de la Cour. J'indiquerai,
tout d'abord, quel est, à mon avis, le fonctionnement de l'article 37 du

Statut pour démontrer ensuite que cet article n'a pas jouépar rapport à
l'article 17, alinCa4, du traité hispano-belge du 19 juillet 1927. Je
passerai, dans une deuxième partie, auxdites considérations généralesen
matière d'exceptions préliminaires. Une troisième partie sera consacrée
au désistement en généralet à l'application, pour ce qui concerne la
première exception préliminaire espagnole relative justement au désis-

tement, des considérations génCralessur les exceptions préliminaires.
L'application de ces considérationsàla troisième et àla quatrième excep- DISSENTING OPINION OF JUDGE MORELLI

[Translation]
It is my opinion that of the four objections presented by the Spanish
Government as preliminary objections, it is solely on the second that
it was open to the Court to take a decision at the present stage of the

proceedings. The Court should have upheld this objection and declared
that it has no jurisdiction.
The other objections, although presented by the Spanish Govern-
ment as preliminary objections, do not really possess the character of
preliminary objections, because they al1 raise questions which directly
and solely concern the merits of the case. This being so, it was not

in my opinion open to the Court to take a decision on those objections,
as it has done on the first by dismissing it. Nor was it open to the
Court to do what it has done in connection with the third and fourth
objections in deciding to join those t.vo objections to the ments. For
joinder to the merits, within the meaning of Article 62, paragraph 5,
of the Rules of Court, implirs the preliminary nature of the objection,
and in my opinion this condition is not met in respect of the so-called

preliminary objections in question.
1 consider that the first, third and fourth objections should have
been declared inadmissible as preliminary objections. This would have
left it open to Spain toaise the same questions once again, as questions
which in fact relate to the merits, in the further proceedings.

It isquite true that the Court's decision to join the third and fourth

objections to the merits is not in respect of its practical consequences
very far removed from what in my view would have been a more correct
decision by the Court declaring those two objections inadmissible as
preliminary objections. There is, however, a fundamental distinction
between joinder to the merits and a declaration of inadmissibility, and
this distinction will1 hope clearly emerge from the considerations 1

propose to devote to the subject of preliminary objections in general.

1 shall begin my Dissenting Opinion with a first part dealing with
the question of the Court's jurisdiction. 1 shall first of all describe
what 1consider to be the operation of Article37 of the Statute and then
go on to show that this Article did not operate in respect of the fourth
paragraph of Article 17 of the Hispano-Belgian Treaty of 19 July 1927.

In the second part 1 shall pass on to the above-mentioned general
considerations on the subject of preliminary objections. The third
part will be devoted to discontinuance in general and to the application
in respect of the first Spanish Prelirninary Objection, which relates to
the discontinuance, of the general considerations on the subject of
preliminary objections. The application of those considerations to thetion préliminaire espagnole trouvera sa place respectivement dans la
quatrième et la cinquième partie.

I. L'article37 du Statut de la Cour internationale de Justice se trouve
dans un rapport que l'on pourrait dire à la fois historique et rédactionnel

avecl'article 37 duStatut de la Cour permanente, article dont l'article37
du Statut de la Cour actuelle utilise certaines expressions. Malgrécela
une différence radicale existe entre les deux dispositions pour ce qui
concerne leur fonction respective.
L'article37 du Statut de la Cour permanente a le caractère d'une
disposition purement interprétative d'autres dispositions, c'est-à-dire des

dispositions des traités visant le renvoià ilne juridiction à établir par la
Sociétédes Nations. Il s'agit d'une disposition que l'on peut considérer
comme complémentaire par rapport à d'autres dispositions ayant, au
contraire, le caractère de dispositions principales. La juridiction est
crééepar ces dernières dispositions, à savoir par les dispositions des
traités visant le renvoi à une juridiction à établir par la Société des

Nations. Or, par l'effet de l'articl37 du Statut de la Cour permanente
et pour les parties de ce Statut, la juridiction ainsi crééedoit êtreconsi-
dérée commeune juridiction conférée à la Cour permanente.

A la différencede l'article 37 du Statut de la Cour permanente, qui,
comme on l'a dit, est une règle complémentaire par rapport à d'autres

règles, lesquelles ont déjà créé,bien que d'une façon incomplète, une
certaine juridiction, l'articl37 du Statut de la Cour internationale pos-
sèdeune importance et exerce une fonction autonome. C'est cet article 37
qui crée, par lui-même, des règles juridictionnelles nouvelles, c'est-
à-di~edes règles conférant une certaine juridiction à la Cour internatio-

nale de Justice, bien qu'il se réfère à d'autres dispositions pour déter-
miner les conditions de son propre fonctionnement ainsi que le contenu
des règles juridictionnelles qu'il vise à créer.

2. L'article37 du Statut actuel contient une double référence: a) la
référenceaux dispositions prévoyant le renvoi à une juridiction que

devait instituer la Sociétédes Nations ; b) la référenceaux dispositions
prévoyant le renvoi à la Cour permanente.
Par cette dernière référence l'article 37 opère ce que l'on appelle le
((transfert))à la Cour internationale de Justice de la juridiction de la
Cour permanente.
La formule du transfert est une formule abrégéeet commode, qui

peut êtrebien employée, à la condition toutefois que l'on en précise le
sens. Il faut tenir présent à l'esprit qu'une juridiction n'est concevable
que par rapport à l'organe auquel elle est conférée; ce qui empêchede BARCELONA TRACTION (DISS. OP. MORELLI) 86

third and fourth Spanish Preliminary Objections will be dealt with in
the fourth and fifth parts.

I. Article 37 of the Statute of the International Court of Justice
has a relationship which might be called both historical and verbal
with Article 37 of the Statute of the Permanent Court, some of the
terms of that Article being used by Article 37 of the Statute of the
present Court. In spite of this there is a radical difference between

the two provisions in respect of their functions.
Article37 of the Statute of the Permanent Court is of the nature of
a provision seMng purely to interpret other provisions, namely clauses
in treaties which provide for reference to a tribunal to be establishecl
by the League of Nations. It is a provision which may be regarded
as supplementary to other provisions which themselves, on the other

hand, possess the character of principal provisions. Jurisdiction is
created by these latter provisions, that is to say by the treaty clauses
providing for reference to a tribunal to be established by the League
of Nations. By the operation of Article 37 of the Statute of the Per-
manent Court, and for the parties to that Statute, jurisdiction thus
created is to be deemed jurisdiction conferred upon the Permanent

Court.
Unlike Article 37 of the Statute of the Permanent Court, which, as
already stated, is a provision supplementing other provisions which
had already-though only partially-created a certain jurisdiction,
Article 37 of the Statute of the International Court has importance in
itself, and serves an independent purpose. Article 37 of itself creates

new jurisdictional rules, namely rules conferring a certain jurisdiction
upon the International Court of Justice, although it refers back to other
provisions to determine the conditions of its own operation and the
content of the jurisdictional rules it seeks to create.

2. Article37 of the present Statute speaks of two categories of
provisions : (a) provisions for reference of a matter to a tribunal to
have been instituted by the League of Nations ; and (b) provisions for
reference of a matter to the Permanent Court.
By its mention of the latter, Article 37 effects what is called the
"transfer" of the Permanent Court's jurisdiction to the International

Court of Justice.
The transfer formula is short and convenient, and there is no objec-
tion to its use provided its meaning is defined. It must be borne in
mind that juiisdiction is conceivable only in relation to the organ on
which it is conferred ; this means that it is not possible to consider the

84penser que la juridiction d'un organe puisse êtreproprement transférée
à un autre organe. Il s'agit en réalité d'une juridiction nouvellequi est

attribuée à un organe donné moyennant le renvoi aux dispositions
réglant la juridiction appartenant à un autre organe.
Or il est bien possible d'imaginer qu'une juridiction soit établie par le
moyen d'un renvoi à des dispositions qui ne sont plus en vigueur et
mêmepar le moyen d'un renvoi àdes formules qui n'ont jamais eu valeur
juridique. Toutefois lorsqu'on parle de transfert on veut indiquer un
certain rapport existant entre deux juridictions différentes et cela un
double point de vue. Il s'agit, en premier lieu, d'un rapport concernant
le contenu et les modalités des dispositions réglant les deux juridictions.

Ces dispositions sont identiques sauf pour ce qui concerne l'indication
de l'organe auquel la juridiction est attribuée. En deuxième lieu le
transfert dCnote un rapport chronologique entre les deux juridictions.
Une nouvelle juridiction est créCese rattachant à une autre juridiction
qui, au moment où la nouvelle est créée,est encore existante et qui, à
partir dudit moment et par le fait mêmede la création de la nouvelle
juridiction, est supprimée.
Ce n'est pas seulement par la référenceaux traités et conventions
prévoyant explicitement le renvoi à la Cour permanente que l'article 37
créedesrèglesiuridictionnelles nouvelles. La mêmeo~érationest accom-
" >
plie aussi par la réf6renceaux traités et conventions prévoyant le renvoi
à une iuridiction aue devait instituer la Sociétédes Nations.MêmeDour
ce qui concerne cette dernière référence l'article37 n'a pas le caractère
purement interprétatif qu'avait la disposition, rédigée endes termes
semblables, quisetrouvait àl'article 37du Statut de la Cour permanente.
On pourrait dire que, par ladite référence aussi,l'article 37 du Statut
actuel a opéréle transfert àla Cour internationale de la juridiction déjà
conférée à la Cour permanente ;cela en constatant que leç traités pré-
voyant le renvoi à une juridiction à établir par la SociétCdes Nations

devaient, par l'effet de l'article 37 du Statut de la Cour permanente, être
interprétéscomme visant la juridiction de la mêmeCour.

3. L'article 37 du Statut actuel pose donc des règlesautonomescréant
la juridiction de la Cour, bien qu'il se réfère pour cela,d'une certaine
façon, à d'autres dispositions. Comme je l'ai déjàdit, il est bien possible
qu'une règle juridictionnelle ou, plus en général, qu'une règle de droit
quelconque se réfère à des dispositions qui ne sont plus en vigueur ;et

il est même possiblequ'une règlede droit se réfèreàdes formules n'ayant
jamais eu valeur juridique. Mais cen'est pas le cas de l'article 37, parce
que celui-ci se réfèreà des traités ou à des conventions et qu'il ajoute
qu'il doit s'agir d'un traité ou d'une convention «en vigueur ».Il faut
déterminer alorsle sens àdonner à cette expression,pour ce qui concerne
surtout le moment par rapport auquel le traité ou la convention doit
êtreen vigueur.
L'expression dont il s'agit se trouve dans d'autres dispositions dulurisdiction of one organ as capable of being actually transferred to
another. In fact new jurisdiction is conferred on a particular organ
by means of a reference to the provisions ,governing-the jurisdiction
pertaining to another.
Now it is perfectly possible toconceive of the creation of jurisdiction

by means of a reference to provisions which are no longer in force, or
even by means of a reference to formulae which never had any legal
validity. However, when the term transfer is used what is meant is
that there is a certain relationship between two different jurisdictions,
from two points of view. In the first place there is a relationship in
respect of the content of the provisions governing the two jurisdictions

and the conditions of their application. These provisions are identical
except as regards the specification of the organ on which jurisdiction is
conferred. Secondly, transfer denotes a chronological relationship
between the two jurisdictions. A new jurisdiction is created, linking
up with another jurisdiction which still exists at the time when the
new one is created, but which is abolished as from that moment, by the

very fact of the creation of the new jurisdiction.
It is not only by its reference to treaties or conventions explicitly
providing for reference of a matter to the Permanent Court that
Article 37 creates new jurisdictional rules. The same operation is
effected by the reference totreaties or conventions providing forreference
of a matter to a tribunal to have been instituted by the League of

Nations. Even in respect of this latter reference, Article 37 does not
have the purely interpretative character of the similarly worded pro-
vision in Article 37 of the Statute of the Permanent Court. It might
be said that by this reference also Article 37 of the present Statute
effected the transfer to the International Court of jurisdiction already
conferred upon the Permanent Court, in view of the fact that treatiis
providing for reference to a tribunal to have been established by the

League of Nations had, by the operation of Article 37 of the Statute of
the Permanent Court, to be interpreted as referring to the jurisdiction
of that Court.

3. Thus, Article 37 of the present Statute lays down autonomous
rules creating the Court's jurisdiction, although for this purpose it

refers back, in a certain fashion, to other provisions. As 1 have said
already, it is quite possible, in general, for a jurisdictional rule, or more
generally any legal ruie at all, to refer back to provisions which are no
longer in force ; and it is even possible for a legal rule to refer to for-
mulae which never had legal validity. But that is not the case with
Article 37, since this refers to treaties or conventions and adds that

such treaty or convention must be "in force". We thus have to deter-
mine the meaning to be attributed to this term, particularly with
regard to the time at which such treaty or convention must be
in force.
This term is found in other provisions of the Statute of the Court, Statut de la Cour, comme l'article 35, paragraphe z, et l'article 36,
paragraphe ler. La même expression setrouvait aussi à l'article 37 du
Statut de la Cour permanente. Mais cela n'oblige évidemment pas de

donner à l'expression (en vigueur D,dans l'article 37 du Statut actuel,
le mêmesens et la même portéeque dans les autres dispositions que je
viens d'indiquer. Il est nécessairede tenir compte des caractères et du
contenu des différentes dispositions dans lesquelles l'expression est

employée.

4. L'article 35, paragraphe 2, du Statut, confère au Conseil de sécu-
rité la tâche de régler lesconditions auxquelles la Cour est ouverte aux

Etats non parties au Statut, cela «sous réservedes dispositions particu-
lières des traités en vigueur )).Il s'agit là de dispositions réglant déjà la
matière, indépendamment de la référencefaite à ces dispositions par le
paragraphe 2 de l'article 35, paragraphe qui se borne à les réserver. En

tant que dispositions réglant par elles-mêmesla matière, il faut, évidem-
ment, qu'elles soient des dispositions en vigueur : en vigueur par rapport
à la date que l'on considère comme décisiveà cette fin et que le para-
graphe z de l'article3j ne précisepas du tout. Par conséquent, l'expres-

sion ((envigueur ))dans ce paragraphe peut êtreestimée comme tout à
fait superflue.
La mêmeremarque peut êtrefaite àpropos de l'expression «envigueur ))
qui se trouve au paragraphe rer de l'article 36 du Statut, où il est dit

que la compétence de la Cour s'étend,entre autres, à tous les cas spkcia-
lement prévus « dans les traités et conventions en vigueur ))En effet la
disposition du paragraphe I~~ de l'article 36, loin de créer, par elle-
même,la compétence de la Cour, ne fait que renvoyer à d'autres sources

de compétence qui se trouvent en dehors du Statut : à des accords soit
particuliers (compromis) soit généraux,parmi lesquels mention est faite
des traités et des conventions. Il est tout à fait évident, mêmesi l'ar-
ticle 36, paragraphe ler, ne le disait pas, qu'il doit s'agir de traités et de
conventions en vigueur : en vigueur au moment où le traité ou la con-

vention doit avoir application, à savoir au moment du procès. Le pro-
blèmeconsistant à déterminer plus exactement le moment décisifà cette
fin (moment de la requêteou bien moment du jugement) est un problème
qui est laisséouvert par l'expression ((en vigueur ». C'est que par cette

expression le paragraphe I~~ de l'article 36 ne se réfèrepas à un moment
donné en spécifiant.que les traités et conventions auxquels il renvoie
doivent êtreen vigueur. Il s'agit, partant, d'une expression superflue.
Pour ce qui concerne l'article 37 du Statut de la Cour permanente,

j'ai déjàdit que cet article était une disposition purement interprétative
d'autres dispositions conventionnelles. C'est de ces dernières disposi-
tions (interprétées, bien entendu, conformément à l'article 37) que la
juridiction était créée. Orparler à ce propos, comme le faisait l'article 37,

d'un traité ou d'une convention « en vigueur » n'ajoutait rien du tout et
n'avait aucune influence surla façon dont l'article 37, en tant que règle
interprétative, devait fonctionner.

86 such as Article 35, paragraph 2, and Article 36, paragraph I. The
same term was also to be found in Article 37 of the Statute of the

Permanent Court. But this obviously does not mean that the expres-
sion "in force" in Article 37 of the present Statute must necessarily
have the same significance and scope as in the other provisions 1 have
just mentioned. It is necessary to have regard to the character and
content of the different provisions in which the term is used.

4. Article 3j, paragraph 2, of the Statute confers on the Security
Council the function of laying dowii the conditions under which the

Court shall be open to the States not parties to the Statute, but "subject
to the special provisions contained in treaties in force". These are
provisions by which the subject-matter is already governed, indepen-
dently of the reference made to such provisions in Article 35, para-
graph 2, which confines itself to reserving them. As provisions which
govern the subject-matter, independently, they must, of course, be

provisions which are in force with relation to the date which is regarded
as decisive for that purpose and which is not specified at al1 in
Article 35, paragraph 2. The expression "in force" used in that para-
graph may therefore be considered as quite superfluous.
The same observation may be made concerning the term "in force"

used in Article 36, paragraph 1, of the Statute, which states that the
jurisdiction of the Court comprises, inter alia, al1 matters specially
provided for "in treaties and conventions in force". Far from itself
creating jurisdiction for the Court, the provision contained in Article 36,
paragraph 1, in fact merely makes reference to other sources of juris-

diction, separate from the Statute, namely to special or general agree-
ments, among which treaties and conventions are mentioned. It is
perfectly clear, even were it not specified in Article 36, paragraph 1,
that by this must be meant treaties and conventions in force : in force
at the time when such treaty or convention has to be applied, namely

at the time of the proceedings. The questions of the more precise
determination of the point in time which is decisive for this purpose
(application or judgrnent),is left open by the term "in force". The fact
is that in using the term, Article 36, paragraph 1, does not specify
any particular point in time when stating that the treaties and conven-

tions to which it refers must be in force. The term is therefore super-
fluous.
As regards Asticle 37 of the Statute of the Permanent Court 1 have
already said that it is a provision that is purely interpretative of other
treaty provisions. It was by these provisions (interpreted, of course,

in accordance with Article 37) that jurisdiction was created. To speak
in this connection, as did Article 37, of a treaty or convention "in force"
added nothing whatsoever and in no way influenced the manner in
which Article 37, as an interpretative rule, had to operate. A la différencedes articles 35,paragraphe 2,et 36, paragraphe I~', du
Statut de la Cour internationale et de l'article 37 du Statut de la Cour
permanente, où l'expression ((en vigueur ))se réfèreà des dispositions
réglant par elles-mêmesla matière, l'article 37 du Statut actuel emploie

cette expression par rapport à des dispositions qui ne règlent pas la
matière dont il s'agit. La matière dont il s'agit est la juridiction de la
Cour internationale de Justice. Or cette juridiction découlede règlesqui
sont crééespar l'article 37 lui-mêmemoyennant un renvoi à des dispo-
sitions concernant une tout autre matière, c'est-à-dire la juridiction de

la Cour permanente. Aussi, en spécifiant que ces dispositions doivent
êtredes dispositions en vigueur, l'article 37 donne une indication qui,
loin d'êtresuperflue ou surabondante, a une importance substantielle à
l'égarddu fonctionnement dudit article.

5. On pourrait penser que, par la référenceà des traités et à des con-
ventions (en vigueur ))l'article37 entend indiquer une modalité concer-
nant le contenu mêmedes règles qu'il vise à créer; cela dans le sens que

ces règles, concernant la juridiction de la Cour actuelle, auraient une
validité dans le temps identique à celle des dispositions auxquelles
l'article37 se réfèreet qui concernent la juridiction de la Cour. perma-
nente. D'après une telle interprétation, la portée de l'expression (en
vigueur ))dans l'article37 serait très proche de celle de la mêmeexpres-

sion dans l'article 36, paragraphe ler.De la même façonque l'article 36,
paragraphe I~~, dit que la Cour internationale peut êtresaisie sur la
base d'un traité seulement si ce traité est en vigueur, l'article 37 dirait
que la Cour internationale peut êtresaisie sur la base d'une règle créée

par le mêmearticle 37 seulement si un traité concernant la juridiction
de la Cour permanente est en vigueur. Ni l'une ni l'autre des deux dis-
positions que l'on vient de mentionner ne se référerait à un moment
donné en spécifiant que le traité dont il s'agit doit êtreun traité en

vigueur.
Mais une telle interprétation n'est pas soutenable. La conséquence
logique en serait que les règles juridictionnelles crééespar l'article 37
n'auraient joué que pour une très courte période, c'est-à-dire jusqu'au
18 avril 1946, date de la dissolution de la Cour permanente : compte

tenu du principe de la perpetuatiojurisdictionis, elles n'auraient joué
que pour les procès introduits avant la date que je viens d'indiquer.
Cela à moins que l'on n'entende l'expression ((en vigueur ))dans un sens
tout à fait spécial, à savoir dans le sens qu'une règlevisant la juridiction

de la Cour permanente n'aurait pas cesséd'êtreen vigueur par l'effet
de la dissolution de cette Cour ; ou bien à moins que l'on n'applique l'ex-
pression (en vigueur ))non pas spécifiquement à la clause visant la juri-
diction de la Cour permanente, mais plutôt, dans son ensemble, au

traité dans lequel une telle clause est inscrite.
Mais il y a plus. D'après l'interprétation que j'ai envisagée, les règles
juridictionnelles crééespar l'article 37 n'auraient pas, en réalité,joué
mêmepour la courte période que j'ai indiquée ; cela pour la raison très Unlike Articles 35, paragraph 2, and 36, paragraph 1,of the Statute
of the International Court, and Article 37 of the Statute of the Perma-
nent Court, where the term "in force" refers to provisions which them-
selves govern the subject, Article 37 of the present Statute uses this
term in relation to provisions which do not govern the subject in ques-

tion. The subject in question is the jurisdiction of the International
Court of Justice. That jurisdiction derives from rules which Article 37
itself creates, by means of a reference to provisions concerning a com-
pletely different subject, namely the jurisdiction of the Permanent
Court. Thus, the indication that these latter provisions must be in
force is by no means superfluous or redundant, but is of substantive

importance for the operation of Article 37.

5. It might be considered that,by referring to treaties or conventions
"in force", the intention of Article37 is to make some particular speci-
fication concerning the actual substance of the rules it seeks to create-

to the effect that these rules, concerning the jurisdiction of the present
Court, would have validity in point of time identical to that of the
provisions concerning the jurisdiction of the Permanent Court to which
Article 37 refers. According to this interpretation, the meaning of the
expression "in force" in Article 37 would be very close to that of the
same expression in Article 36, paragraph I. Just as Article 36, para-

graph 1, provides that the International Court may be seised on the
bais of a treaty only if that treaty is in force, Article 37 would mean
that the International Court may be seised on the basis of a rule created
by Article 37 only if a treaty concerning the jurisdiction of the Perma-
nent Court is in force. Thus neither of the provisions just mentioned
would be understood to refer to any particular point in time in its

specification as to the treaty concerned being in force.

This interpretation is not tenable, however. Its logical consequence
would be that the jurisdictional rules created by Article 37 would
have operated only over a very brief period-namely until18 April 1946,
the date when the Permanent Court was dissolved : taking into account

the principle of perpetuatio jurisdictionis,they would have applied
solely to proceedings instituted prior to that date. This would be so
unless the term "in force" were to be understood in a very special
sense-namely as meaning that a provision concerning the jurisdiction
of the Permanent Court did not cease to be in force as a result of the
dissolution of that Court ; or unless the term "in force" were applied

not specifically tothe clause relating to the jurisdiction of the Permanent
Court, but to the treaty as a whole in which the clause is contained.

But this is not all. According to the interpretation which 1 have
been considering, the jurisdictional rules created by Article 37 would
not, in reality, have operated even during the brief period 1 mentioned,simple que l'article 37, en prescrivant le transfert de la juridiction de
la Cour permanente à la Cour internationale, a entraîné, par là même,
l'extinction des clauses des traités concernant la juridiction de la Cour

permanente. De cette façon l'existence contemporaine de la juridiction
des deux Cours, présupposéepar l'interprétation que l'on considère, est
écartée.Pour donner un sens à l'article 37, il faudrait alors estimer,
aux fins de cet article, comme étant en vigueur, non pas une clause
réellement en vigueur, mais plutôt une clause qui serait en vigueur si

l'article37 n'avait pas joué.

6. Tout cela oblige de donner une tout autre portée à l'expression
((en vigueur » dans l'article37 du Statut. Cette expression ne concerne

pas le contenu des règles juridictionnelles crééespar l'article 37 ; elle
concerne plutôt le procédétechnique par lequel ces règles sont créées,
c'est-à-dire le fonctionnement mêmede l'article 37.
L'article 37 rattache la création de certaines règles juridictionnelles
(de règlesconférant juridiction à la Cour internationale) au fait de l'exis-

tence de traités ou de conventions concernant la juridiction de la Cour
permanente, traités ou conventions qui doivent être en vigueur afin
que l'effet prévu par l'article 37 puisse se produire.
Les traités et conventions, auxquels l'article 37 se réfère,doivent
êtreen vigueur par rapport à un moment donné. Ce moment est le

moment de l'entrée en vigueur du Statut : moment où s'accomplit
l'opération juridique prévue par celui-ci à son article 37.
Cela résultedes termes mêmesde l'article 37. Cet article part de l'hypo-
thèse d'un traité ou d'une convention en vigueur qui « prévoit »le renvoi
à une juridiction que devait instituer la Société desNations ou à la

Cour permanente de Justice internationale. Pour indiquer cette hypo-
thèse, l'article37 emploie le verbe ((prévoit ))au temps présent, tandis
qu'il emploie le futur lorsqu'il continue en statuant que c'est la Cour
internationale de Justice qui «constituera » cette juridiction. Ce dernier
membre de phrase se réfèreau temps (futur)dans lequel devront jouer

les règles juridictionnelles crééespar le moyen de l'opération juridique
prévue à l'article 37 ; au contraire, la condition requise pour que cette
opération puisse s'accomplir est indiquée, dans le premier membre de
phrase, par une référenceau temps présent. Il faut en conclure que les
traités et conventions, auxquels l'article 37 se réfère, nepeuvent être

que des traités et conventions en vigueur au moment de l'entrée en
vigueur du Statut.
On pourrait faire une remarque analogue à propos de l'article 36,
paragraphe j, où l'on envisage l'hypothèse de dtklarations faites en appli-
cation de l'article36 du Statut de la Cour permanente «pour une durée

qui n'est pas encore expirée » ((which are still in force »dans le texte
anglais) et où l'on indique, au contraire, par un verbe au futur ((seront
considérées ») l'effet juridique que le même article 36, paragraphe 5,
attache aux déclarations dont il s'agit. La référenceàun moment donné,

88 for the very simple reason that Article 37, by the very fact of pre-
scribing the transfer of the jurisdiction of the Permanent Court to the
International Court, automatically entailed the extinction of the treaty
clauses relating to the jurisdiction of the Permanent Court. This
excludes the simultaneity of jurisdiction ori the part of both Courts

which is required by the interpretation under consideration. In order
to give meaning to Article 37 it would be necessary to assume, for the
purposes of that Article, that there was in force, not a clause which
was really in force, but a clause which would have been in force had
Article 37 not operated.

6. Al1this makes it necessary to put an entirely different construc-

tion upon the term "in force" in Article 37 of the Statute. This term
does not relate to the content of the jurisdictional rules created by
Article 37, but rather to the technical process by which those rules are
created, namely to the actual operation of Article 37.
Article37 hinges the creation of certain jurisdictional rules (rules
conferring jurisdiction upon the International Court) on the existence
of treaties or conventions concerning the jurisdiction of the Permanent

Court, which must be in force in order for Article 37 to produce its
intended effect.
The treaties and conventions referred to by Article 37 must be in
force in relation to a particular point of time. That is, at the time of
khe entry into force of the Statute, the time when the legal operation
for which the Statute provides in Article 37 is effected.
This follows from the actual terms of Article 37. That Article

predicates a treaty or convention in force which "provides" for reference
of a matter to a tribunal to have been instituted by the League of
Nations, or to the Permanent Court of International Justice. To
specify the contingency it covers, Article 37 uses the verb "provides"
in the present tense, whereas it uses the future in going on to stipulate
that the matter "shall" be referred to the International Court of

Justice. The last part of this sentence refers to the (future) time in
which the jurisdictional rules created by the legal operation for whicli
Article 37 makes provision are to have effect ; while on the contrary
the condition necessary for this operation to take place is indicated
in the first part of the sentence by a reference to the present tirne.
It must be concluded fromthis that the treaties and conventionsreferred
to in Article37 cannot be other than treaties and conventions in force

at the time of the entry into force of the Statute.
A similar observation might be made with regard to Article 36,
paragraph 5, which deals with the contingency of declarations made
under Article 36 of the Statute of the Permanent Court "which are
still in force" (pour une duréequi n'est pas encoreexpirée,in the French
text), while on the contrary the future tenseis used ("shall be deemed")

to indicate the legal effect conferred by Article36,paragraph 5,on the
declarations concemed. The reference to a given point in time inpour indiquer la durée de la déclaration, est renforcéedans l'article 36,
paragraphè 5, par l'adverbe (encore )).
On peut remarquer, par contre, que l'expression « en vigueur », dans

l'article37 du Statut actuel, joue d'une autre façon que dans l'article 37
du Statut de la Cour permanente ; cela mêmepour ce qui concerne les
traités et les conventions qui sont envisagés aussi par- cette dernière
disposition, c'est-à-dire les traités et les conventions prévoyant le renvoi
à une juridiction que devait instituer la Société desNations. A la diffé-
rence de l'article 37 du Statut de la Cour permanente, l'article 37 du

Statut actuel emploie l'expression « en vigueur 11par rapport àun moment
donné, à savoir au moment de l'entrée en vigueur du Statut. La diffé-
rence dé~end de la fonction différente exercée Dar l'une et Dar l'autre
disposition : l'article37 du Statut de la Cour permanente était une dis-
position purement interprétative de règles juridictionnelles déjà exis-

tantes, tandis que l'article 37 du Statut actuel crée,par lui-même, des
rè- .s juridictionnelles nouvelles, même lorsqu'il renvoie aux traités
concernant une juridiction que devait instituër la Sociétédes Nations.

7. J'ai dit que l'article37 du Statut actuel se réfèreà des traités et

à des conventions qui sont en vigueur au moment de l'entrée en vigueur
du Statut, moment où s'accomplit l'opération juridique prévue par le
mêmearticle 37. Il faut préciser que, si l'on s'en tient aux termes de
l'article37, il faut entendre par entrée en vigueur du Statut soit son
entréeen vigueur initiale soit, pour un Etat donné,son entréeen vigueur
à 1'Cgardde celui-ci par l'effet de l'admission de 1'Etat dont il s'agit aux

Nations Unies. Cela, bien entendu, sur la base des termes mêmesde
l'article37, article qui n'autorise aucune distinction entre Membres
originaires et Membres ultérieurement admis. Autre chose est voir si,
parmi les admissions qui ont étéopérées enfait, il y a eu des admissions
qui, en présence des conditions requises à l'article 37, ont donné lieu à

l'effet juridique prévu par celui-ci.

Or la condition fondamentale requise à l'article 37 consiste dans le
fait qu'il faut que le traité ou la convention prévoyant le renvoi à la
Cour permanente soit un traité ou une convention en vigueur. J'ai déjà
dit que le traité ou la convention doit êtreen vigueur au moment de

l'entrée en vigueur du Statut. Mais il faut encore ajouter qu'il ne suffit
pas que le traité ou la convention soit en vigueur dans une partie quel-
conque de ses dispositions. Il est nécessaire,au contraire, que le traité ou
la convention soit en vigueur spécifiquement pour ce qui concerne sa
clause conférant juridiction à la Cour permanente. Si cette clause est

devenue caduque, le traité dans lequel elle est insérée, bien qu'envigueur
éventuellement pour ce qui concerne les autres dispositions qui le com-
posent, n'est plus un traité en vigueur prévoyant le renvoi à la Cour
permanente de Justice internationale. Il s'ensuit que l'hypothèse envi-
sagée à l'article37, d'après les termes mêmesde celùi-ci, ne se trouve
pas réalisée. order to indicate the duration of the declaration is further strengthened,
in Article36, paragraph 5, by the use of the word "still".

It may be noted on the other hand that in Article 37 of the present
Statute, the term "in force" has a different effect from that of Artic37
of the Statute of the Permanent Caurt ; this is so even with regard to
the treaties and conventions also covered by this latter provision,
namely treaties and conventions which provide for reference to a
tribunal to have been instituted by the League of Nations. Unlike
Article 37 of the Statute of the Permanent Court, Article37 of the

Statute of the present Court uses the term "in force" in relation to a
particular point in time, namely the entry into force of the Statute.
The difference is due to the difference in the functions of two provisions :
Article 37 of the Statute of the Permanent Court simply interpreted
existing jurisdictional rules, whereas Article 37 of the present Statute
in itself creates new jurisdictional rules, even where it refers back to

treaties providing for reference of a matter to a tribunal to have been
instituted by the League of Nations.

7. 1have said that Article 37 of the present Statute refers to treaties
or conventions in force at the time of the entry into force of the Statute,
at the point in time when the legal operation for which Article 37 makes
provision takes place. It must be made clear that if regard is had

only to the terms of Article 37, the entry into force of the Statute is to
be taken to mean either its initial entry into force or, in respect of a
particular State, its entry into force for that State as a result of the
admission of that State to thc United Nations. This is of course so
on the basis of the wording of Article 37 alone, which makes no distinc-
tion between original Members and Members admitted later. It is
another matter to ascertain whether, among the admissions which

have actually taken place, there have been some which, in the light of
the conditions required by Article 37, have given rise to the legal effect
for which that Article makes provision.
Now the basic condition laid down by Article 37 is that the treaty
or convention providing for reference to the Permanent Court shall
be a treaty or convention in force. 1 have already said that the treaty

or convention must be in force at the time of entry into force of the
Statute. It must be added, however, that it is not enough for the
treaty or convention to be in force in respect of any of its provisions
indiscriminately. On the contrary, it is necessary for the treaty or
convention to be in force specifically in respect of its clause conferring
jurisdiction on the Permanent Court. Should that clause have lapsed,
the treaty containing it, though possibly still in force so far as its other

provisions are concerned, is no longer a treaty in force providing for
reference to the Permanent Court of International Justice. It follows
that the contingency covered by Article 37 fails to materialize, because
of the very terms of that Article. Nul doute, à mon avis, que la dissolution de la Cour permanente a

entraîné la caducité de toutes les clauses, et plus généralementde toutes
les règlesjuridictionnelles, conférant juridictionà cette Cour, règles qui,
par ce fait même,sont devenues dépourvues d'objet. D'où la conséquence
que l'opération juridique prévue à l'article 37 est devenue impossible
à partir du 18 avril 1946, date de la dissolution de la Cour permanente.
Compte tenu du fait historique qu'il n'y a pas eu, avant cette date,

d'admissions aux Nations Unies, il est loisible de constater que l'opéra-
tion juridique prévue à l'article37 ne s'est accomplie qu'une fois seule-
ment, à savoir au moment de l'entrée en vigueur initiale du Statut et,
par conséquent, uniquement à l'égard des Membres originaires des
Nations Unies. Mais il s'agit là d'une simple constatation, non pas
d'une limitation qu'il faudrait considérer inhérente au fonctionnement
de l'article37.

8. Si les conditions requise5 à l'articl37 sont réalisées,en particulier
si, au moment de l'entrée en vigueur du Statut, un traité ou une con-
vention était en vigueur prévoyant le renvoi à la Cour permanente,
l'opération envisagée à l'articl37 s'est accomplie par la création d'une
règlejuridictionnelle correspondante relative à la Cour internationale de
Justice. La créationd'une telle règlea étéaccompagnée,par l'effet même

de l'article37, de l'extinction contemporaine de la règle relative à la
Cour permanente. Ce qui n'a aucune influence sur la condition requise
à l'article37 par l'expression «en vigueur »,condition qui constitue une
condition du fonctionnement même de l'article 37 et non pas une con-
dition de la persistance de la règle crééepar cet article.

Les règlesjuridictionnelles crééesmoyennant l'opération juridique de
l'article37 sont des règles dont le contenu et les modalités (sauf pour ce
qui concerne l'indication de l'organe auquel la juridiction est conférée)
sont déterminéspar la référenceaux traités relatifs àla Cour permanente.
Cette référencejoue aussi par rapport aux clauses des traités qui con-
cernent la durée dela règlejuridictionnelle relativeàla Cour permanente.
Evidemment si l'échéancedu délai dont est assortie la règle juridic-

tionnelle relative à la Cour permanente est intervenue avant l'entréeen
vigueur du Statut actuel, cela a empêché l'opération visée à l'articl37,
parce qu'il n'y avait pas de traité en vigueur aux termes mêmesde cet
article. Si, au contraire, l'échéancedu délaiintervient après l'entrée en
vigueur du Statut et, par conséquent, lorsque l'article 37 a déjà joué
par la création d'une règle juridictionnelle relative à la Cour internatio-
nale, cette règleexpire au moment mêmeoù inteMent l'échéancedudit

délai.Mais cela n'a rien à faire avec le fait que l'artic37 vise expressé-
ment des traités ou conventions « en vigueur » parce que, comme on l'a
dit, cette expression se réfère uniquement au moment où s'accomplit
l'opérationenvisagde audit article. Au contraire il s'agit simplement d'une
conskquence du renvoi que le mêmearticle fait au traité concernant la
juridiction de la Cour permanente pour déterminer le contenu et les In my opinion, there can be no doubt that the dissolution of the
Permanent Court entailed the lapse of al1 the clauses, more generally

speaking of al1 the jurisdictional rules, conferring jurisdiction upon
that Court, since by this very fact those rules became devoid of object.
Hence the consequence that the legal operation for which Article 37
makes provision became impossible as from 18 April 1946, the date of
the dissolution of the Permanent Court. Since it is a historical fact
that before that date there were no admissions to the United Nations,
it is permissible to conclude that the legal operation provided for by

Article37 occurred once only, namely whep the Statute first entered
into force, and consequently solely in respect of the original Members
of the United Nations. But this is no more than a statement of fact,
not a restriction to be considered as inherent in the functioning of
Article37.

8. If the conditions laid down in Article 37 are present, and more
particularly if, at the time of the entry into force of the Statute, a
treaty or convention providing for reference to the Permanent Court
was in force, the operation for which Article 37 makes provision was
effected by the creation of a corresponding jurisdictional rule relating
to the International Court of Justice. By the effect of Article 37
itself, the creation of that rule was accompanied by the simultaneous

extinction of the rule relating to the Permanent Court. This has no
influence on the condition laid down in Article 37 by the use of the
term "in force", that requirement being a condition for the operation
of Article 37, not a condition for the subsistence of the rule created
by that Article.
The jurisdictional rules created by the legal operation provided for
by Article 37 are rules the content and conditions of application of

which (except as regards the indication of the organ on which juris-
diction is conferred) are determined by the reference back to the treaties
relating to the Permanent Court. That reference also applies to the
treaty clauses governing the duration of the jurisdictional rule relating
to the Permanent Court. Obviously if the expiry of the time-limit
governing the jurisdictional rule relating to the Permanent Court

occurred before the entry into force of the presenttatute, this prevented
the operation for which Article 37 makes provision taking place, because
no treaty was then in force under the terms of the Article. If, on the
contrary, the the-limit expires after the entry into force of the Statute,
and consequently after Article 37 has already operated to create a
jurisdictional rule relating to the International Court, that rule expires
at the same time as the time-limit in question expires. But this has

nothing to do with the fact that Article 37 explicitly refers to treaties
or conventions "in force", because, as has been said, that term relates
solely to the time when the operation contemplated in the Article is
carried out. On the contrary, it is merely a consequence of that
Article's reference back to the treaty concerning the jurisdiction ofthemodalités des règles juridictionnelles concernant la Cour actuelle que
l'article37 vise à créer.

Si l'on compare l'article 37 avec l'article 36, paragraphe 5, on voit

que c'est d'une manière expresse que cette dernière disposition, à la
différencede l'article 37, énoncela conséquence, quant à l'extinction de
la règlejuridictionnelle concernant la Cour actuelle et crééepar lemoyen
envisagéau mêmearticle 36, paragraphe 5, de l'échéancedu délai relatif
à une déclaration concernant la Cour permanente. Cette conséquence est

énoncéepar les mots cpoq la duréerestant à courir d'après ces déclara-
tions et conformément à leurs termes ))tandis que par les mots (pour
une durée qui n'est pas encore expirée )),contenus dans la première
partie de la disposition, on se réfèreau fait que la déclaration est en
vigueur au moment de 11entr6een vigueur du Statut et, par conséquent,
au moment du fonctionnement même de l'article 36, paragraphe 5

(référencequi correspond à la référence expresseà un traité en vigueur
qui figure dans l'article37).
Il n'y a pas besoin de préciser enfin que l'opération juridique visée
àl'article37 une fois accomplie par la création d'une règlejuridictionnelle
relative à la Cour actuelle, la validité de cette règle n'a étéd'aucune

façon affectée par la dissolution subséquente de la Cour permanente.
Cela pour la raison bien simple qu'il s'agit là d'un événementnon prévu
par le traité auquel l'article37 se réfère.

g. Ce que j'ai remarqué à propos de l'extinction de la règle juridic-
tionnelle relative à la Cour permanente, opéréepar l'effet mêmedu

fonctionnement de l'article 37, m'empêchede partager une affirmation
faite à maintes reprises par le Gouvernement espagnol. D'après ce gou-
vernement, pour que la juridiction de la Cour internationale puisse être
invoquée sur la base de l'article 37 du Statut, une condition complémen-
taire serait requise, condition consistant à ce que la clause prévoyant

la juridiction de la Cour permanente soit en vigueur au moment où la
requêteà la Cour internationale est introduite.

Cette condition, pourtant, serait une condition tout à fait irréalisable ;
cela pour la raison que, comme on l'a dit, dans tous les cas où l'article37
a joué, c'est le mêmearticle 37 qui, en prescrivant le transfert de juri-

diction de la Cour permanente à la Cour internationale, a entraîné, par
le fait même d'un tel transfert, l'extinction de la clause relative à la
juridiction de la Cour permanente : extinction qui s'est, par conséquent,
produite indépendamment de la dissolution de la Cour permanente et
bien avant un tel événement.

En réalité,pour quela Cour internationale puisse exercer sa juridiction
sur la base de l'article37 du Statut, il est necessaire qu'au moment où
la requête est introduite, soit en vigueur, non pas la règlejuridictionnelle
relative à la Cour permanente, mais plutôt la règle juridictionnelle con-
cernant la Cour internationale et crééemoyennant l'opération juridique Permanent Court for the purpose of determining the content and pro-
visions of application of the jurisdictional rules concerning the present
Court which Article 37 seeks to create.
If Article 37 is compared with Article 36, paragraph 5, it is seen
that, unlike Article 37, this latter provision explicitly specifies the
consequence of the expiry of the period laid down for a declaration
relating to the Permanent Court as regards the extinction of the juris-

dictional rule concerning the present Court created by the means pro-
vided for in Article36, paragraph 5. That consequence is specified by
the words "for the period which they still have to run and in accordance
with their terms", whereas the words "and which are still in force",
used in the first part of the provision, refer to the fact of the dedaration
being in force at the time of the entry into force of the Çtatute and
co~lsequently at the time of the operation of Article 36, paragraph 5

(this reference corresponds to the explicit reference to a treaty in force
in Article37).

There is no need to add that after the accomplishment of the legal
operation provided for in Article 37 by the creation of a jurisdictional
rule relating to the present Court, the validity of that rule was in no
way affected by the subsequent dissolution of the Permanent Court.

This is so for the very simple reason that this was an event not foreseen
by the treaty to which Article 37 refers.

g. My observations concerning the extinction of the jurisdictional
provision concerning the Permanent Court, brought about by the very
effect of the operation of Article 37, prevents me from subscribing to
a statement frequently made by the Spanish Government. According

to that Govemment, for the jurisdiction of the International Court
to be able to be asserted on the basis of Article 37 of the Statute, an
additional requirement would have to be fulfilled, namely that the
clause providing for the jurisdiction of the Permanent Court should be
in force at the time of the filing of the Application with the International
Court.

This condition would however be quite incapable of fulfilment.
This is becabse, as has been said, in every case where Article 37 has
operated, that sarne Article, by stipulating the transfer of jurisdiction
from the Permanent to the International Court, caused, by the very
fact of the transfer, the extinction of the clause relating to the juris-
diction of the Permanent Court ; hence this extinction occurred inde-
pendently from the dissolution of the Permanent Court and well before

that event.
In reality, for the International Court to be able to exercise juris-
diction on the basis of Articl37 of the Statute, it is necessary that there
should be in force at the time of the filing of the Application not the
jurisdictional provision relating to the Permanent Court but rather the
jurisdictional provision relating to the International Court created byviséeà l'article37 ; règledont le caractère de règle en vigueur, comme je
l'ai déjàdit, n'a étéaucunement affectépar l'extinction de la règlerela-
tive à la Cour permanente, à la suite de la dissolution de cette Cour.

Pour les mêmes raisons, il m'est impossible de souscrire à quelques
mots qui se trouvent dans les motifs de l'avis consultatif du II juillet

1950 sur le Statut international du Sud-Ouest africain, là où la Cour déclare
que l'article7 du Mandat «est encore en vigueur u (C.I.J. Recueil 1950,
p. 138). Si la façon dont je conçois le fonctionnement de l'article37 du
Statut est exacte, pour justifier la conclusion à laquelle la Cour arrive
dans le dispositif de l'avis, conclusion portant que la référenceà la Cour
permanente de Justice internationale doit êtreremplacée par la réfé-

rence à la Cour internationale de Justice, il aurait étésuffisant de cons-
tater que l'article7 du Mandat était en vigueur au moment de l'entrée
en vigueur du Statut. A ce moment-là, l'article 7 du Mandat, en tant
que tel, s'est éteint par l'effet mêmede l'article7 du Statut, justement
parce qu'il était remplacé par une règle nouvelle et correspondante
relative à la juridiction de la Cour internationale de Justice.

IO. Le Statut de la Cour, avec son article 37, n'est entré en vigueur
à l'égard del'Espagne que le 14 décembre 195j par l'effet de I'admis-

sion de cet Etat aux Nations Unies. A cette date, l'article37 n'avait
aucune possibilité de jouer parce qu'il n'existait alors aucun traité ou
aucune convention prévoyant le renvoi à la Cour permanente qui pût
êtreconsidéré, entant que tel, en vigueur aux termes du mêmearticle 37.
En particulier, la disposition de l'article17, alinéa 4, du traité di1
19 juillet1927 entre l'Espagne et la Belgique était devenue caduque à
partir du 18 avril 1946 par l'effet de la dissolution de la Cour perma-

fiente. Cette disposition ne statuait pas que les parties étaient soumises
à une juridiction internationale génériqueou abstraite et, en tant que
telle, tout à fait inconcevable. Elle prévoyait, au contraire, la juridic-
tion d'un organe donné, qui était spécifiquement indiqué. Cet organe
était la Cour permanente de Justice internationale. La dissolution d'une
telle Cour a nécessairement entraîné la caducité de la clause du traité

visant la juridiction de la même Cour, clause qui est devenue, par ce
fait, dépourvue d'objet.
II. Pour écarter un tel résultat, il n'est pas possible, à mon avis,

d'invoquer, comme l'a fait le Gouvernement belge, l'indivisibilité des
dispositions du traité de 1927. On ne voit pas, en effet, pour quelle
raison la prétendue indivisibilité devrsit jouer de façon à sauvegarder
l'article17, alinéa 4, plutôt que de la façon opposée, c'est-à-dire en
entraînant la caducité du traité tout entier.
Il est bien sûr, à mon avis, que l'artic17,alinéa 4,est devenu caduc,
par défaut d'objet, à la suite de la dissolution de la Cour permanente.

C'est là la seule constatation qui importeaux fins du fonctionnement de
l'article37 du Statut. Le sort des autres dispositions du traité de1927means of the legal operation provided for in Article 37, and whose
status as a provision in force remained completely unaffected by the
extinction of the provision relating to the Permanent Court pursuant
to that Court's dissolution.
For the same reasons 1 am unable to subscribe to a phrase in the
reasoning of the Advisory Opinion of II July 1950 concerning the

International Status of South West Ajrica, in which the Court states
that Article 7 of the Mandate "is still in force" (I.C.J. Reports IgjO,
p. 138). If my conception of the operation of Article 37 of the Statute
is correct, in order to support the conclusion reached by the Court in
the operative provisions of the Opinion, to the effect that the reference
to the Permanent Court of International Justice is to be replaced by
a reference to the International Court of Justice, it would have been

sufficient to find that Articl7 of the Mandate was in force at the time
of the entrv into force of the Statute. At that time Article 7 of the
Mandate as such was extinguished by the very operation of Article 37
of the Statute, precisely because it was replaced by a new corresponding
provision relating to the jurisdiction of the International Court of
Justice.

IO. The Statute of the Court, including Article 37, did not come
into force for Spain until14 December 1955,as a result of the admission
of that State to the United I'ations. On that date, Article 37 had no
possibility of application,because at that date there was no treaty or

convention providing for reference to the Permanent Court which could
be considered, as such, as being in force within the meaning of Articl37.
In particular, Article 17 (4)of the Hispano-Belgian Treaty of 19July
1927 had lapsed on 18 April 1946, as a result of the dissolution of the
Permanent Court. That provision did not decide that the parties
were subject to some generic or abstract jurisdiction, quite inconceiv-

able as such. On the contrary, it provided for the jurisdiction of a
particular organ, specifically named. That organ was the Permanent
Court of International Justice. The dissolution of that Court neces-
sarily entailed the lapse of the treaty clause relating to the jurisdiction
of that Court, which thereby became devoid of object.

II. This result cannot in my view be set aside by arguing, as does
the Belgian Government, the inseparability of the provisions of the
1927 Treaty. It is difficult to find any reason why this alleged in-
separability should have the effect of keeping Article 17 (4) in force,

rather than the contrary effect of entailing the lapse of the entire
treaty.
In my opinion there can be no doubt that Article 17 (4)lapsed, for
lack of object, as a result of the dissolution of the Permanent Court.
This is the only conclusion which is relevant for the purpose of the
operation of Article 37 of the Statute. The fate of the other provisions n'importe pas du tout. Mais, si l'on veut poser également le problème
concernant le maintien en vigueur des autres dispositions du traité,
quelle est la conséquence que, pour la solution d'un tel problème, il
faudrait tirer de l'affirmation que le traité constitue un tout indivisible ?

Si, d'accord avec le Gouvernement belge, on pense que «le recours au
juge est une pièce essentielle du système du traité D,que «les diverses
procédures de règlement ont été combinées avec soin, de telle sorte
qu'en extraire ce qui concerne la Cour revient à démanteler le système
tout entier », que la clause de l'article17, alinéa 4, (était une condition
essentielle du co~sentement des parties à l'ensemble du traité »,le résul-

tat auquel il faudrait aboutir, une fois supposée l'impossibilité, ainsi
affirmée,de faire jouer la divisibilité dans le cas du traité hispano-belge,
serait simplement que le traité tout entier est devenu caduc.

12. Pour écarter la caducité de l'article 17, alinéa 4, du traité de

1927, le Gouvernement belge a avancé aussi la thèse d'après laquelle
la dissolution de la Cour permanente n'aurait eu d'autre conséquence
que l'impossibilité temporaire d'application de ladite disposition ; dis-
position qui aurait été suspendue dans ses effets sans cesser d'êtreen
vigueur. Le Gouvernement belge s'est référé, à ce propos, à la notion de
suspension des obligations internationales. Il a fait remarquer que l'im-

possibilité d'exécution d'une obligation n'entraîne l'extinction de l'obli-
gation qu'au cas où il s'agit d'une impossibilité permanente ; s'il s'agit,
au contraire, d'une impossibilité temporaire, l'obligation n'est pas
éteinte, mais simplement suspendue.
Or, ii n'est pas correctà mon avis, d'utiliser, par rapport àl'article17,

alinéa 4,dutraité de 1927, les diversesnotions employéespar la Belgique,
c'est-à-dire les notions d'exécution de l'obligation, d'impossibilité d'exé-
cution, d'extinction ou bien de suspension-de l'obligaiio~ en tant que
conséquence de l'impossibilité, permanente ou bien temporaire, de
l'exécution de la mêmeobligation. C'est que ladite disposition du traité
de 1927, à proprement parler, n'a pas créé,à la charge des Etats con-

tractants, une véritable obligation : l'obligation de tenir un certain
comportement, comportement qui pourrait êtredevenu impossible par
la suite, avec les conséquences que l'on pense pouvoir rattacher à une
telle impossibilité, c'est-à-dire justement à l'impossibilité de l'exécution
de l'obligation (extinction ou bien suspension de l'obligation selon qu'il

s'agit d'impossibilité permanente ou bien temporaire).
L'article17, alinéa 4, du traité de 1927 a créépour chacun des Etats
contractants, non pas une obligation, mais pl.utôt une situation de sou-
mission à des pouvoirs juridiques donnCs, pouvoirs qui, eux aussi, ont
étécréés par la même disposition.Cespouvoirs sont, d'un côté,le pouvoir
de juridiction conféréà un certain organe, qui est précisémentla Cour

permanente et, de l'autre côté, le pouvoir, pour l'autre Etat contrac-
tant, de saisir la mêmeCour. Puisqu'il s'agit de pouvoirs juridiques
conférés ou bienà un organe donné ou bien à un Etat mais par rapport
à un organe donné, la disparition d'un tel organe, à savoir la dissolutionof the 1927 Treaty is of no interest. But if it is desired also to consider

the question of the preservation in force of the other provisions of that
Treaty, what consequence must be drawn, for the solution of that
problem, from the assertion that the Treaty constitutes an inseparable
whole? If it is considered, as does the Belgian Government, that "resort
to adjudication is an essential part of the economy of the treaty" that
"the various methods of settlement were carefully combined, so that

to remove those which concern the Court amounts to dismantling the
whole system" and that Article 17 (4) "was an essential condition for
the consent of the parties to the treaty as a whole" the inevitable
result, assuming the impossibility, thus affirmed, of separability of the
provisions of the Hispano-Belgian Treaty, would simply be that the
entire treaty has lapsed.

12. Against the lapse of Article 17 (4) of the 1927 Treaty, the
Belgian Government also argued that the sole consequence of the disso-
lution of the Permanent Court was the temporary impossibility of
performance of that provision, which is said to have been suspended
in its effects without ceasing to be in force. In this connection the

Belgian Govemment relied on the concept of the suspension of inter-
national obligations. It observed that impossibility of performance of
an obligation entails the extinction of the obligation only if the impos-
sibility is permanent ; in the case of temporary impossibility, on the
other hand, the obligation is not extinguished, but is merely suspended.

However it is not correct in my view to apply to Article 17 (4) of the

1927 Treaty the various concepts used by Belgium, namely performacce
of the obligation, impossibility of performance, and extinction or sus-
pension of the obligation as a consequence of permanent or temporary
impossibility of performance. This is because strictly speaking that
provision of the 1927 Treaty did not create a true obligation for the
contracting States, that of adopting a certain course of conduct, which

might subsequently have become impossible with the consequences
considered to attach to such impossibility, namely impossibility of
performance of the obligation (extinction or suspension of the obli-
gation depending on the permanent or temporary nature of the impos-
sibility.

Article 17 (4) of the 1927 Treaty created for each of the contracting
States not an obligation, but rather a situation of subjection to parti-
cular legal powers, they also being created by the same provision.
Those powers consist on the one hand of the power of jurisdiction con-
ferred on a certain organ, the Permanent Court, and on the other hand
the power for the other contracting State to seise that Court. Since

these are legal powers conferred either on aparticular organ or on a State
with reference to a particular organ, the disappearance of that organ,
the Permanent Court, necessarily entailed the extinction of those powers96 BARCELONA TRACTION (OP. DISS. MORELLI)

de la Cour permanente, a nécessairement entraîné l'extinction desdits
pouvoirs et, en mêmetemps, l'extinction de la situation correspondante
de soumission aux mêmes pouvoirs.Ces pouvoirs ont étééteints et non
pas simplement suspendus ; cela pour la raison que l'organe envisagé,
à savoir la Cour permanente, a été suppriméd'une façon définitive et
non pas suspendu dans son fonctionnement pour un certain temps.

13. Si l'on a égard à la véritable portée de l'article 17, alinéa 4,du

traité de 1927, on voit clairement qu'il n'est pas correct de ramener le
problème du maintien en vigueur ou de la caducité de ladite disposition,
comme l'a fait la Belgique, au problème des effets de la disparition d'une
institution internationale sur les traités confiant certaines fonctions à
cette institution.
Si un traité crée desobligations pour les Etats contractants et prévoit

en mêmetemps l'intervention d'un certain organe par rapport à l'exécu-
tion de ces obligations, les mêmes obligations peuvent bien continuer à
exister malgré la disparition de l'organe, cette disparition n'entraînant
nécessairement que l'extinction des pouvoirs de l'organe et de la soumis-
sion des Etats au mêmeorgane. Mais cela n'a rien à faire avec le pro-
blème du maintien en vigueur ou de la caducité de l'article 17,alinéa 4,

du traité de 1927 et surtout avec le fonctionnement de l'article 37 du
Statut. Cet article suppose l'existence, au moment de son entrée en
vigueur, de la juridiction de la Cour permanente. Or une telle juridic-
tion, que l'articl17 du traité de 1927 avait créée,n'existait plus lorsque,
le 14 décembre 1955, le Statut est entré en vigueur pour l'Espagne.

14. Il n'est pas non plus possible de voir, comme le prétend le Gouver-

nement belge, une analogie quelconque entre le cas de la disparition de
l'organe auquel un traité a conféréjuridiction et le cas d'un traité con-
férantjuridiction àun organe non encore établi,comme le cas des clauses
du traité de Versailles renvoyant à la juridiction à créerpar la Société
des Nations.
Dans ce dernier cas, en effet, il y avait des dispositions par rapport

auxquelles un problème de caducité ne se posait pas du tout : des dis-
positions qui prévoyaient l'établissement futur d'un certain organe et
qui, par conséquent, subordonnaient à un tel événement leur propre
effet attributif de juridiction. On peut très bien reconnaître que ces
dispositions étaient en vigueur avant que l'organe institué par la Société
des Nations, auquel elles renvoyaient, ait étéen état de fonctionner.

Mais cette constatation n'a rien à faire avec l'expression ((en vigueur ))
qui se trouve à l'article37 du Statut de la Cour permanente, expression
qui se réfèreau moment du procès et non pas au moment de l'entrée
en vigueur du Statut, comme c'est, au contraire, le cas pour la même
expression à l'article37 du Statut actuel.

15. J'ai dit que l'effet de l'articl37 du Statut consiste à créer des
règles nouvelles concernant la juridiction de la Cour actuelle, règles qui and, at the same time, the extinction of the corresponding situation
of subjection to those powers. Those powers were extinguished and
not simply suspended, because the organ provided for, namely the
Permanent Court, was definitively abolished and not merely suspended

in its operation for a certain period.

13. If regard is had to the true significance of Article 17 (4)of the
1927 Treaty, it becomes clear that it is not correct, as Belgium has
done, to assimilate the question of the preservation in force or lapse
of that provision to the question of the effects of the disappearance of
an international agency on the treaties conferring certain functions

on that auencJ.
If a treaty creates obligations for the contracting States and at the
same time provides for the intervention of a certain organ in connec-
tion with the performance of those obligations, the obligations may
well continue to exist despite the disappearance of the organ which
is not necessarily bound to entai1 more than the extinction of the

powers of the organ and of the subjection of the States to it. But this
has nothing to do with the question of the ,preservation in force or
lapse of Article17 (4) of the1927 Treaty or even less with the operation
of Article 37 of the Statute. That Article requires the existence, at
the time of its entry into force, of the jurisdiction of the Permanent

Court. But that jurisdiction, created by Article 17 of the1927 Treaty,
had ceased to exist w!ien the Statute came into force for Spain on
14December 1955.

14. Nor is it possible, as is sought by the Belgian Government, to
find any analogy between the case of the disappearance of the organ
on which jurisdiction is conferred by a treaty and the case of a treaty
conferring jurisdiction on an organ yet to be established, as in the case

of the clauses in the Treaty of Versailles which refer to a tribunal to
be instituted by the League of Nations.
In this latter case there were provisions in connection with which
no problem of lapse arose at al1; these were provisions which looked
to the future institution*of a particular organ and which therefore made
their own attribution of jurisdiction dependent on that event. Those

provisions can readily be held to have been in force before the organ
instituted by the League of Nations, to which they referred, was in a
position to operate. Rut this has nothing to do with the term "in
force" in Article 37 of the Statute of the Permanent Court, which
relates to a point in time which is that of the proceedings and not to

the point in time of the entry into force of the Statute, as is the case,
on the contrary, in respect of the identical term in Article 37 of the
present Statute.

15. 1 have said that the effect of Article 37 of the Statute is to
create new rules concerning the jurisdiction of the present Court, thoseont pris naissance au moment où l'article 37 a joué. Ledit effet de l'ar-
ticle 37 est toutefois subordonné à la condition qu'il existe un traité ou
une convention « en vigueur )concernant la juridiction de la Cour per-

manente ; condition qui doit exister au moment de l'entrée en vigueur
du Statut. Or l'article 17, alinéa4, du traité hispano-belge était devenu
caduc avant l'entrée en vigueur du Statut à l'égard de l'Espagne ; ce
qui amène à la conclusion que la condition prescrite à l'article 37 ne

s'est pas réalisée.
On peut toutefois se demander (et c'est là, semble-t-il, un problème
que le Gouvernement espagnol a poséen lui donnant des formulations
qui ne sont ni uniformes ni absolument claires) si l'article 17, alinéa 4,
du traité de 1927 n'a pas étéremis en vigueur par le mêmearticle 37

du Statut. Il s'agirait, bien entendu, d'une remise en vigueur n'ayant
d'autre effet que de réaliserla condition poséepar l'article 37 pour son
propre fonctionnement.
Cette dernière remarque empêche,d'une façon péremptoire, de répon-
dre à la question par l'affirmative. Si l'articl37 exige, comme condition

nécessaire de son propre fonctionnement, que les clauses prévoyant le
recours à la Cour permanente soient en vigueur au moment de l'entrée
en vigueur du Statut, il est tout à fait absurde de penser que le même
article37 anéantisse complètement une telle exigence en disposant que
les clauses concernant la juridiction de la Cour permanente, devenues

caduques à la suite de la dissolution de celle-ci, sont remises en vigueur
rien que pour le fonctionnement du mêmearticle 37.
Cela serait, d'autre part, contraire à l'idéemêmedu transfert de la
juridiction de la Cour permanente à la Cour internationale de Justice.
Par le-transfert on veut réaliser la continuité entre deux juridictions :

entre une juridiction effectivement existante au moment où le transfert
est opéréet une juridiction nouvelle destinée à remplacer la première.
Or cette continuité ne se réaliserait pas du tout au cas où la juridiction
de la Cour permanente serait devenue caduque avant l'entréeen vigueur
du Statut et par conséquent avant le moment où la juridiction de la

Cour actuelle aurait pris naissance. La remise en vigueur supposée de
la première juridiction ne serait qu'une pure fiction, tout à fait incapable
d'assurer ladite continuité.

II. SUR LES EXCEPTIONS PRÉLIMINAIRES EN GÉNÉRAL

I. L'article62 du Règlement parle des exceptions préliminaires pour
attacher à ces exceptions l'effet de suspendre la « procédure sur le fond 1)
et d'ouvrir, en mêmetemps, une phase de la procédure, dans laquelle

la Cour n'a que la tâche de statuer sur l'exception dont il s'agit, tâche
que la Cour peut toutefois s'abstenir d'accomplir en cette phase, en
décidant de joindre l'exception au fond.

Le terme « préliminaire 1)dans l'expression «exception préliminaire ))

peut êtreentendu dans un double sens.rules having come into existence at the time of the operation of
Article 37. This effect of Article37 is, however, subject to the con-
dition that there is a treaty or convention "in force" concerning the
jurisdiction of the Permanent Court, and that condition must be present
at the tirne of the entry into force of the Statute. But Article 17 (4)

of the Hispano-Belgian Treaty had lapsed before the Statute came into
force for Spain, which leads to the conclusion that the condition laid
down in Article37 has not been fulfilled.
The question may well arise, however (and this appears to be a
question raised by the Spanish Government in terms which are neither
uniform nor completely clear), whether Article 17 (4) of the 1927

Treaty was not revived by Article 37 of the Statute. This would of
course be a revival having no other effect than the fulfilment of the
condition laid down by Article 37 for its own operation.

This observation forbids an affirmative reply to the question. If
Article 37 requires, as a necessary condition for its own operation, that

the clauses providing for reference to the Permanent Court should be
in force at the tirne of the entry into force of the Statute, it would be
quite absurd to conceive of Article 37 completely destroying this
requirement by providing that the clauses relating to the jurisdiction
of the Permanent Court, which lapsed as a result of the dissolution of
that Court, are revived merely for the sake of the operation of Arti37.

Moreover, this would be contrary to the very concept of the transfrr
of the jurisdiction of the Permanent Court to the International Court
of Justice. That transfer was intended to ensure continuity between
two jurisdictions-a jurisdiction which actually existed at the time
when the transfer took place, and a new jurisdiction, intended to
replace it. But that continuity wocild have in no way been achieved

if the jurisdiction of the Permanent Court had lapsed before the entry
into force of the Statute and consequently before the jurisdiction of
the present Court came into existence. The assumed revival of the
first jurisdiction would be a pure fiction and quite incapable of ensuring
such continuity.

II. ON PRELIMINAR OYBJECTIONS IN GENERAL

I. In referring to preliminary objections, Article62 of the Rules of
Court attaches to these objections the effect of suspending the "pro-
ceedings on the merits" and, at the same time, of initiating a phase in
the proceedings in which the only task the Court ha to perform is to

give its decision on the objection in question. The Court may, how-
ever, refrain from discharging this task in this phase and may decide
to join the objection to the merits.
The tem "preliminary" in the expression "preliminary objection"
may be understood in two senses. D'un côtéon indique par ce terme l'effet qui est attaché à une excep-
tion présentée comme préliminaire, effet consistant justement à ouvrir
une phase de la procédure qui pourrait êtredite, elle aussi, préliminaire.

C'est dans ce sens que l'article 62 parle d'exception préliminaire
lorsqu'il dit, au paragraphe I~', que Toute exception préliminaire doit
êtreprésentée )dans un certain délai.En effet, loin de prescrire le moyen
par lequel certaines exceptions doivent êtreprésentées, l'article 62 ne

fait qu'accorder à la partie une faculté, faculté que la partie est libre
de ne pas exercer. En d'autres termes, une exception, qui serait suscep-
tible d'êtreprésentéesuivant le moyen indiqué à l'article 62, peut être
également présentéedans les piècesde procédure dont il est fait mention
à l'article41. C'est seulement au cas où la partie choisit la voie ouverte

par l'article 62 qu'elle doit présenter l'exception dans le délai fixéau
paragraphe ~er de cet article, en se conformant aussi aux autres pres-
criptions qui sont données au paragraphe 2.
Il s'ensuit que, lorsque l'article 62, paragraphe ler, parle d'exception

qualifiéede ((préliminaire D,il indique par ce terme, plutôt qu'un certain
caractère possibledes exceptions des parties, un certain moyen par lequel
les exceptions peuvent êtreprésentées.

2. Il est toutefois bien sûr que le moyen prévu à l'article 62 peut être
utilisé, non pas pour toutes les exceptions ou défenses des parties, mais
uniquement pour les exceptions ayant un certain caractère. 11est bien
sûr qu'unepartie n'a pasla possibilité,par le fait de présenter une excep-

tion ou une défensesuivant la procédure indiquéeà l'article 62, d'obliger
la Cour à donner la solution préalable d'une certaine question, indépen-
damment du rapport dans lequel cette question se trouve avec les autres
questions à trancher dans le procès.

Une exception ne peut donc êtreprésentéepar le moyen indiqué à
l'article 62 que si elle possède un certain caractère ; caractère concer-
nant le contenu mêmede l'exception et consistant justement en un
certain rapport dans lequel la question soulevée par l'exception doit se

trouver avec les autres questions à résoudre. La nécessité d'un tel
caractère n'est poséeque d'une façon implicite par l'article 62. Il s'agit
d'un caractère qui peut êtretrès bien indiqué par le mêmeterme préli-
minaire ))que l'article 62 emploie dans un but différent, c'est-à-dire

pour dénoter le moyen par lequel l'exception peut êtreprésentée.Voilà
l'autre sens dans lequel peut être entendu le terme (préliminaire ))dans
l'expression (exception préliminaire ».

Une question ne peut former l'objet d'une exception préliminaire aux
termes de l'article 62 du Règlement qu'au cas où la solution d'une telle
question est logiquement nécessaire avant d'aborder l'examen des autres
questions. Il doit s'agir d'un ordre, entre les diffkrentes questions,

imposépar une nécessité logique, non pas simplement conseil16par des
raisons d'opportunité ou d'iconomie.

96 On the one hand, this term is used to denote the effect produced by
an objection that is presented as a preliminary objection, this effect
being precisely the initiation of a phase in the proceedings which also
might be called preliminary.
It is in thissense that Article 62 speaks of preliminary objections

when it says, in paragraph 1, that "a preliminary objection must be
filed" within a certain time-limit. Indeed, far from prescribing the
means by which certain objections must be presented, Article 62
merely provides a party with a faculty which it is free not to exercise,
In other words, an objection which might be filed in the way specified

in Article 62 can be presented also in the pleadings mentioned in
Article 41. It is only if the party chooses the course made available
by Article 62 that it mzcst file the objection within the time-limit fixed
in paragraph I of that Article, complying alsowith the other stipulations
specified in paragraph 2.

It follows that, when Article 62 (1) refers to an objection that is
described as "preliminary", it indicates, by that term, not so much a
certain possible character of the objections raised by the parties, as a
certain means by which the objections may be presented.

2. Itis quite certain, however, that the means provided in Article 62
can be utilized, not for al1 objections or al1 pleas advanced by the
parties, but only for objections possessing a certain character. It is
quite certain that a party cannot, merely by presenting an objection
or a plea according to the procedure indicated in Article 62, compel
the Court to give a prior decision on a certain question, regardless of

any relationship between that question and the other questions that
have to be decided in the case.
Thus an objection may be presented by the means indicated
in Article 62 only if it possesses a certain character ; and that cha-
racter relates to the actual content of the objection and consists pre-

cisely in a certain relationship that must exist between the question
that is raised by the objection and the other questions that have to be
decided. The necessity for such a character is only impliedly pres-
cnbed by Article 62. The character of the objection may very well be
indicated by the sarne term "preliminary" wliich Article 62 employs
with a different object, namely to denote the means by which

the objection may be presented. This is the other sense in which
the word "preliminary" in the term "preliminary objection" may be
understood.
A question can constitute the subject of a preliminary objection
within the meaning of Article 62 of the Rules of Court only if a decision

on that question is logically necessary before proceeding with the con-
sideration of the other questions. There must be, between the different
questions, an order that is imposed by a logical necessity and not
merely one inspired by considerations of expediency or economy.

96 Si un certain ordre n'est pas imposé par une nécessité logique, c'est
à la Cour qu'il appartient de déterminer l'ordre le plus convenable à

suivre. A cet égardla Cour peut s'inspirer de différents critères, critères
qui, comme je le disais, pourraient êtremêmedes critères d'économie.
Aussi la Cour pourrait-elle estimer convenable de commencer par exa-
miner une question de droit, qui se présente comme facile à résoudre,
avant d'aborder une question compliquée de fait, s'il apparaît qu'une
solution possible de la question de droit pourrait écarter la nécessité

d'examiner la question de fait.
La liberté, pour la Cour, de déterminer l'ordre à suivre, lorsque I'ordre
entre les différentes questions n'est pas imposépar une nécessité logique,
ne pourrait êtreéliminée oulimitée par l'attitude des parties : à plus
forte raison, par l'attitude de l'une des parties. Il serait inconcevable
que l'une des parties, par le moyen prévu à l'article 62OU par un autre

moyen, puisse obliger la Cour à donner la solution préalable d'une cer-
taine question, lorsque cette solution préalable n'est pas imposée par
une nécessité logique.

3. Il est tout à fait évident que la question de savoir si une décision

au fond est ou non possible doit nécessairement être tranchée avant
l'examen du fond. Nul doute, par conséquent, que les exceptions pro-
cédurales (d'incompétence ou autres) visant à empêcher l'examen du
fond peuvent êtreprésentéescomme exceptions préliminaires aux termes
de l'article 62 du Règlement. Il s'agit de voir si cette possibilité existe
uniquement pour les exceptions que je viens d'indiquer ou si la même

possibilité peut êtreadmise pour certaines questions concernant le fond.

C'est par la négative qu'il faut trancher le problème que je viens de
poser. La solution négative d'un tel problème découlede la constatation
qu'il n'y a aucun ordre logique nécessaire entre les différentes questions
qui s'élèventdans un procès donné et qui concernent toutes le fond ; ce

qui revient à dire qu'il n'existe pas de questions concernant le fond dont
la solution préalable soit imposCe par une nécessité logique.II s'ensuit
qu'il n'y a pas de questions concernant le fond qui puissent êtreprésen-
téescomme préliminaires aux termes de l'article 62 du Règlement.
La conclusion àlaquelle j'ai abouti est confirméepar,les termes mêmes

de l'article 62. Cet article statue, au paragraphe 3, que dès rkception
par le Greffier de l'acte introductif de l'exception, la procédure «sur le
fond »est suspendue. Le mêmearticle, au paragraphe 5, accorde à la
Cour la faculté de joindre l'exception préliminaire ((au fond ». Il ressort
des dispositions de l'article 62 que je viens de rappeler une nette dis-
tinction entre l'examen de l'exception préliminaire et l'examen du fond ;

ce qui empêche de penser qu'une question concernant le fond puisse
êtreprésentéepar le moyen d'une exception préliminaire aux termes de
l'article62. Il est en effet évident que, si la procédure sur le fond est
suspendue, il n'est pas possible, pendant une telle suspension, de tran-
cher une question qui concerne justement le fond. Il est également évi- If a certain order is not imposed by any logical necessity, it is for the
Court to determine the order that may most suitably be followed.
In this connection, the Court may be guided by various criteria and
these, as 1 have said, might even be criteria of economy. Thus the
Court might find it desirable to start by cc-nsidering a question of law

that is so presented that it is easy to settle, before entering upon the
consideration of a complicated question of fact, if it appears that a
possible decision of the question of law might obviate the necessity for
considering the question of fact.
The Court's freedom to determine the order to be followed, when
the order between the different questions is not imposed by any logical

necessity, cannot be removed or restricted by the attitude of the parties,
still less by the attitude of one of the parties. It would be inconceiv-
able that, by making use of the means provided by Article 62 or of
any other means, one of the parties should be able to compel the Court
to give a prior decision on a certain question, when such prior decision
is not called for by any logical necessity.

3. It is quite obvious that the question whether a decision on the
merits is or is not possible must necessarily be settled before the merits
are considered. There can therefore be no doubt that procedural objec-
tions (on the ground of lack of jurisdiction or on any other grounds)
aimed at preventing consideration of the merits can be presented as

preliminary objections under Article 62 of the Rules of Court. What
has to be determined is whether this possibility exists solely for the
objections 1 have just mentioned or whether the sarne possibility can
be admitted in respect of certain questions relating to the merits.
The answer to the question 1 have just raised must be in the negative.
This follows from the fact that there is no necessary logical order

between the various questions al1 relating to the merits in a case.
This is tantamount to saying that there are no questions relating to the
merits the prior decision of which is called for by logical necessity.
It follows that there are no questions relating to the merits that can
be presented as preliminary questions under Article 62 of the Rules of
Court.

The conclusion 1 have reached is confirmed by the actual terms of
Article 62. This Article stipulates, in paragaph 3, that, upon receipt
by the Registrar of a preliminary objection filed by a party, the pro-
ceedings "on the merits" shall be suspended. In paragraph 5, the
same Article gives the Court the faculty of joining the preliminary
objection "to the merits". There emerges from the provisions of

Article 62 which 1 have just recalled a clear distinction between con-
sideration of the preliminary objection and consideration of the merits.
This precludes any idea of it being possible to raise a question relating
to the ments by means of a preliminary objection under Article 62.
It is indeed obvious that, if proceedings on the merits are suspended,
it is not possible, during such suspension, to decide any question whichdent qu'il ne serait pas correct de dire qu'une exception donnée peut
êtrejointe au fond lorsqu'il s'agit d'une exception concernant, elle aussi,
le fond.

4. Par conséquent, si la partie présente comme préliminaire une
exception concernant le fond, la Cour ne peut que déclarer l'exception
irrecevable en tant qu'exception préliminaire ; ce qui n'empêcheévi-

demment pas la partie de présenter la mêmeexception, comme toutes
les autres exceptions concernant le fond,dans la suite éventuelle de la
procédure.
L'exception concernant le fond présentéepar la partie comme préli-
minaire doit êtredéclarée irrecevableen tant qu'exception préliminaire ;
elle ne doit pas êtrejointe au fond aux termes du paragraphe 5de l'ar-

ticle 62. En effet, la décisionpar laquelle la Cour joint une exception au
fond présuppose la recevabilité de l'exception en tant qu'exception
préliminaire. Il doit s'agir d'une exception visant à empêcher l'examen
du fond : d'une exception toutefois sur laquelle la Cour ne peut se pro-
noncer sans l'examen de certains éléments quitouchent également au
fond. Au contraire, dans l'hypothèse que j'ai faite, il s'agit d'une ques-

tion concernant directement le fond.
La déclaration d'irrecevabilité est obligatoire pour la Cour et non pas
discrétionnaire comme la jonction d'une exception préliminaire au fond.
En outre, la déclaration d'irrecevabilité n'est pas liéeavec une certaine
attitude de la partie contre laquelle l'exception est introduite ; elle doit
êtreprononcée mêniesi cette partie ne s'oppose pas à ce que la question
soulevée par l'exception présentée comme préliminaire soit tranchée

préalablement aux autres questions concernant également le fond, dans
une phase préliminaire de la procédure. Ni l'une des parties ni les deux
parties d'accord ne peuvent limiter la liberté, pour la Cour, de déter-
miner l'ordre à suivre dans l'examen des différentes questions concer-
nant le fond, en obligeant la Cour à donner la solution préalable d'une
de ces questions.

5. Il faut toutefois considérer un argument par lequel on pourrait
penser d'écarter la conclusion que j'ai atteinte.

On pourrait faire observer qu'il est bien possible que la Cour soit
saisie pour trancher non pas un différenddans son ensemble, mais uni-
quement une question dont la solution est nécessaire pour le règlement
du différend. Un tel procès peut êtreintroduit soit par un accord entre
les parties, c'est-à-dire par un compromis, soit par une requête unila-
térale, comme le prouve l'article 36 du Statut, d'après lequel l'accepta-

tion de la juridiction obligatoire de la Cour peut avoir pour objet des
simplesquestions de droit ou de fait. De la possibilitC d'un procès devant
la Cour ayant un objet limité à une question donnCe de droit ou de fait
on pourrait penser à dCduire que, au moins s'il y a, entre les parties,
un accord exprès ou tacite à cet Cgard, il est Cgalement possible que,
pour la solution d'une question quelconque, soit utilisée une phase parti-relates to those merits. It is equally obvious that it would not be
correct to Say that a particular objection may be joined to the merits in
the case of an objection which itself concerns the merits.

4. Consequently, if a party presents as a preliminary objection an
objection that concerns the merits, the Court cannot do otherwise
than declare the objection inadmissible as a preliminary objection.
This does not of course preclude the party in from presenting
the same objection, like al1 other objections conceming the merits, in

any further broceedings.
An objection relating to the merits which is presented by a party
as a preliminary objection must be declared to be inadmissible as a
preliminary objection. It must not be joined to the merits under
paragraph 5 of Article62. A decision by the Court joining an objec-
tion to the merits presupposes the admissibility of the objection as a

preliminary objection. The objection must be one that is intended to
prevent consideration of the merits, but one on which the Court cannot
give a decision without considering certain matters which are also
connected with the merits. In the hypothesis 1 have stated the ques-
tion is, on the contrary, one that directly concerns the merits.
The declaration of inadmissibility is obligatory forthe Court and not

discretionary like the joinder of a preliminary objection to the merits.
Furthermore, the declaration of inadmissibility is something quite
apart from anyaattitude which may be adopted by the party against
which the objection is raised. The objection must be declared inad-
missible even if that party does not object to the question which is
raised by the objection presented as a preliminary objection being

decided prior to the other questions which also relate to the merits,
in a preliminary phase of the proceedings. It is not possible for one of
the parties or the two parties in mutual agreement to limit the Court's
freedom to determine the order to be followed in the examination of
the different questions relating to the merits, by compelling the Court
to give a prior decision on one of those questions.

5. Consideration must, however, be given to an argument that might
be advanced to set aside the conclusion 1 have reached.
It might be argued that it is quite possible for the Court to be seised

for the purpose of deciding, not a dispute in its entirety, but solely a
question a decision on which is necessary for the settlement of the dis-
pute. Proceedings of this kind can be instituted either by mutual
consent of the parties, that is to say, by a special agreement, or by a
unilateral application, as is shown by Article 36 of the Statute, accord-
ing to which acceptance of the c.ompulsoryjurisdiction of the Court may

relate to no more than questions of law or of fact. From the possi-
bility of proceedings before the Court confined to the subject of a
specificquestion of law or of fact, it might be inferred that, at any rate
if there is an explicit or tacit agreement between the parties to this
effect, it is also possible to utilize a special phasethe proceedings for culièrede la procédure :précisémentcette phase de la procédure qui est
envisagée à l'article 62 du Règlement.

Mais une telle déduction ne serait pas correcte. En effet une chose est
donner à un procès un objet limité à une certaine question ; en d'autres
termes, une chose est limiter àune certaine question la tâche confiée â
la Cour, tâche dont la Cour s'acquitte, d'une façon complète, justement
par la solution de la question dont il s'agit. Autre chose serait détacher
une certaine question de l'ensemble des questions qui devront toutes
êtretranchées par la Cour aux fins de la solution du différend que la
même Courdevra donner; cela pour consacrer à l'examen de cette
question une phase préliminaire de la procédure qui, en tant que telle,

serait suivie d'une phase ultérieure dans laquelle les autres questions
seraient examinées et le différend réglépar la mêmeCour. Dans ce
dernier cas, à la différencedu premier, il y aurait une limitation, non
pas de la tâche confiée à la Cour, mais plutôt de la liberté dont la Cour
doit jouir pour déterminer l'ordre à suivre dans l'examen des différentes
questions concernant le fond qui devront, toutes, êtretranchées par la
Cour. Limitation qui, àmon avis, est tout à fait inadmissible.

III. SUR LE DÉSISTEMENT (PREMIÈRE EXCEPTION PRÉLIMINAIRE)

I. Les articles 68 et 69 du Règlement envisagent des faits ayant des
caractères différents pour rattacher à ces faits des conséquencesjuri-
diques identiques ; conséquences juridiques consistant toujours dans
l'extinction ou la cessation du procès, c'est-à-dire dans la clôture de
la procédure.
L'article 68 envisage tout d'abord l'arrangement amiable, à savoir
l'hypothèse où «les parties tombent d'accord sur la solution à donner
au litige».

L'arrangement amiable produit, sur la base du droit international
général,l'effet que le différendest régléd'une certaine façon (effet qui
ne consiste pas toujours dans l'extinction du droit litigieux, comme il a
étéaffirmépar la Belgique). La règleparticulière de l'article 68du Règle-
ment, en tenant compte de l'effet produit par l'arrangement amiable
sur la base du droit international généralet du fait que le but propre
au procès, c'est-à-dire la solution du litige, est atteint par un autre
moyen, à savoir par le moyen de l'arrangement amiable, rattache au
mêmearrangement amiable, au cas où les parties le font connaître par
écrità la Cour, la conséquencedela clôture de la procédure. L'article 68
dit justement que, dans l'hypothèse que l'on vient d'indiquer, la Cour,

ou le Président si la Cour ne siègepas, rend une ordonnance donnant
acte aux parties de leur arrangement amiable et prescrivant la radiation
de l'affaire sur le rôle.
Il faut faire remarquer qu'il n'est pas vrai, comme il a étéaffirmépar
la Belgique, que l'arrangement arniable fasse obstacle à une nouvellethe determination of some particular question, that phase in the pro-
ceedings being precisely the one provided for by Article 62 of the Rules
of Court.
But such a conclusion would not be correct. Indeed, it is one thing
to confine the subject of proceedings to a particular question ; in other
words, it is one thing to confine to one question the task which is
entrusted tothe Court and which the Court discharges fully by deciding
that question. It would be another thing to detach a particular
question from the whole body of questions al1requiring decision by the
Court for the purpose of the decision which the Court is required to
give on the dispute, so that there might be devoted to this question
a preliminary phase of the proceedings which, as sach, would be followed
by a subsequent phase in which the other questions would be considered
and the dispute decided by the Court. In this latter case,unlike the

former, there would be a restriction, not of the task entrusted to the
Court, but rather of the freedom which the Court must enjoy in deter-
mining the order to be followed in the examination of the different
questiop* concerning the merits which will ail have to be decided by the
Court. No such restriction is, in my view, permissible.

III. ONDISCONTINUAN (CIRST PRELIMINARYOBJECTION)

I. Articles 68 and 69 of the Rules of Court are concerned with facts
that differ in character but they ascribe to those facts identical legal
consequences. These legal consequences always take the form of the
extinction or termination of the proceedings, that is to say, they put
an end to the proceedings.
Article 68 deals first with settlement, that is to say, the continkency
in which "the parties conclude an agreement as to the settlement of the
dispute".
Settlement produces, on the bais of general international law, the

effect that the dispute is resolved in a certain way (this effect does not
always consist of extinction of the right at issue, as is stated by Belgium).
The particular rule of Article 68 of the Rules of Court, taking account
of the effect produced by a settlement on the bais of general inter-
national law and of the fact that the specificurpose of the proceedings,
that is to say, the resolution of the dispute, is achieved by another
means, namely by means of settlement, ascribes to that settlement, where
the parties inform the Court thereof in writing, the consequence of
putting an end to the proceedings. Article 68 provides that, in the
situation just described, the Court, or the President if the Court is not
sitting, makes an order officially recording the conclusion of the settle-
ment and directing the removal of the case from the list.

It must be observed that it is not trqe, as stated by Belgium, that
a settlement is a bar to new proceedings. Settlement, if the conditions instance. L'arrangement amiable, si les conditions indiquées à l'ar-
ticle 68 du Règlement sont remplies et sur la base de cet article, produit
bien la conséquencede la clôture du procèsau cours duquel il est accom-

pli ; mais il ne touche ni au pouvoir d'action conférééventuellement aux
parties ni à la juridiction éventuelle de la Cour. En effet, le différend
réglépar l'arrangement amiable peut bien renaître. En ce cas, chacune
des parties peut exercer l'action qui, éventuellement, lui appartient, par

une requête qui devrait êtreconsidérée commepleinement recevable ;
et la Cour peut exercer sa juridiction éventuelle par une décision au
fond. Il va sans dire toutefois que la Cour, en rendant une telle décision,
doit tenir compte de l'arrangement amiable intervenu entre les parties.

2. Par le mêmearticle 68 et par l'article 69 l'effet de la clôture de la
procédure est rattaché non seulement à l'arrangement amiable no.cifié
par les Parties à la Cour, mais aussi à une déclaration de volonté visant
spécifiquement à produire un tel effet, déclaration de volonté qui est

dite ((désistement ». L'article 68 envisage le désistement fait par les
parties d'un commun accord ; l'article 69 le désistement fait par la
partie demanderesse au cours d'une instance introduite par requête.

L'effet du désistement consiste, en tout cas, dans la clôture de la pro-

cédure.Cela résulte destermes mêmespar lesquels le contenu de la décla-
ration de désistement est indiqué aux articles 68 et 69. L'article 68 fait
l'hypothèse où les parties, d'un commun accord, font connaître à la
Cour (qu'elles renoncent à poursuivre l'instance » ; l'article 69 fait

l'hypothèse où «la partie demanderesse fait connaître par écrit à la
Cour qu'elle renonce à poursuivre la procédure ». Cela signifie qu'à la
suite du désistement l'instance ou la procédure (les deux ternes ne peu-
vent avoir que le mêne sens) ne peut êtrepoursuivie ; si bien que le
paragraphe 2 de l'article 69, pour le cas où le désistement n'est pas réput6

a-quis à raison de l'opposition de la partie défenderesse, déclare que
« l'instance se poursuit ».Aussi bien dans l'hypothèse de l'article 68 que
dans celle de l'article Gg (pourvu que, dans cette dernière hypothèse,
le désistement soit réputéacquis, aux termes du paragraphe z), l'ordon-
nance prenant acte du désisteinent prescrit la radiation de l'affaire sur

le rôle.

Les raisonspour lesquellesles parties d'un commun accord, aux termes
de l'article 68, ou bien la seule partie demanderesse, aux termes de
l'article 69, décident d'accomplir un acte de désistement, peuvent être

les plus diverses ; et ces raisons n'ont pas besoin d'êtreindiquées dans
l'acte de désistement. Celui-ci peut êtredéterminé,entre autres, par la
possibilité ou la probabilité d'un arrangement amiable. Mais il peut
s'agir aussi d'un arrangement amiable déjà intervenu entre les parties ;

cela non seulement au cas de l'article 68mais aussi au cas de l'article 69.
Les parties ayant conclu un arrangement amiable, au lieu de le notifierspecified in Article 68 of the Rules of Court are fulfilled, and on the
basis of that Article, does indeed produce the consequenc: of putting
an end to the proceedings in the course of which it is concluded. But
it does not affect any right of action conferred on the parties or any

jurisdiction the Court rnay possess. The dispute which is resolved by
the settlement rnay well arise again. ID that event, each of the parties
rnay exercise any action to which it is entitled, by means of an appli-
cation which would have to be considered fully admissible ; and the
Court if itpossesses jurisdiction rnay exercise it by giving a decision on
the merits. It is clear, however, that, in giving such a decision, the

Court must take account of the settlement concluded between the
parties.

2. The effect of putting an end to the proceedings is ascribed by
Article 68 and Article 69 not only to a settlement notified by the parties
to the Court but also to a declaration of intention made specifically

for the purpose of producing such an effect, namely a declaration of
intention known as "discontinuance". Article 68 deals with the
discontinuance effected by the parties by mutual agreement. Article 69
deals with the discontinuance effected by the applicant in the course of
proceedings instituted by means of an application.

Discontinuance has, in any case, the effect of putting an end to the
~roceedinr"s. This is evident from the actualterms in which the content
of the notice of discontinuance is indicated in Articles 68 and 69.
Article 68 deals with cases in which the parties, by mutual agreement,
infonn the Court "that they are not going on with the proceedings".
Article 69 deals with cases in which "the applicant informs the Court

in writing that it is not going on with the proceedings". This means
that, after the discontinuance, the proceedings (in French the two
terms instance and procédurecan only have the same meaning) cannot
be pursued. Thus, Article 69, paragraph 2, referring to the case in
which, because of the objection of the respondent, acquiescence in the

discontinuance is not presumed, states that "the proceedings shall
continue". Both in the case dealt with in Article 68 and in that dealt
with in Article 69 (provided that, in the latter case, acquiescence in
the discontinuance is presumed, in accordance with paragraph z), the
order recording the discontinuance of the proceedings directs the removal
of the case from the list.

The reasons for which either the parties by mutual agreement under
Article 68, or the applicant alone under Article 69, rnay decide to give
notice of discontinuance, can be of the most varied character. And
these reasons need not be stated in the notice of discontinuance. Dis-
continuance rnay be due, inter alia, to the possibility or the probability
of a settlement. But it rnay be due also to a settlement that has

already been concluded between the parties ; and this rnay be so both
in the circumstances to which Article 68 refers and also in the circum-
stances to which Article 69 refers. If the parties have concluded aà la Cour aux termes de l'article 68, peuvent se servir de l'autre moyen

offert par le mêmearticle ; elles peuvent aussi, par conséquent, faire
connaître par écrit à la Cour qu'elles renoncent à poursuivre l'instance,
et cela mêmesansindiquerle motif d'un tel désistement, à savoir l'arran-
gement amiable intervenu entre les parties. Il se peut aussi que, l'arran-
gement amiable une fois conclu, c'est.la partie demanderesse seule qui
accomplit l'acte de désistement aux termes de l'article 69 (sauf, natu-
rellement, dans l'hypothèse du paragraphe 2 de cet article, la nécessité
de la non-opposition de la partie défenderesse).

3. Le désistement prévu soit à l'article 69, comme c'est le cas dans
l'espèce,soit aussià l'article 68 du Règlement (de même que,sur la base
de ce dernier article, l'arrangement amiable notifié par les parties à la
Cour, abstraction faite, bien entendu, des effets produits par l'arrange-
ment amiable sur la base du droit international général) neproduit
donc d'autres conséquencesjuridiques que celle consistant à éteindreles
effets de la requêteprésentée à la Cour, c'est-à-direà clore le procès au
cours duquel le désistement est intervenu.

Aussi le désistement en tant que tel ne touche-t-il pas, en premier
lieu,à l'existence mêmedu diffbrend entre les parties. Malgréle désis-
tement (soit le désistement fait par les parties d'un commun accord,
soit le désistement de la seule partie demanderesse accompagné, si c'est
le cas, de la non-opposition de lapartie défenderesse),les parties peuvent
garder leur attitude respective par rapport au conflit d'intérêts dontil
s'agit; en ce cas, le différendqui avait étésoumis à la Cour continue à
subsister même aprèsle désistement.
En outre, le désistement, en tant que tel, ne touche ni à l'éventuel
pouvoir d'action de la partie et à la juridiction de la Cour, ni au droit

substantiel sur lequel la demande était fondée.Il s'ensuit que, s'il s'agit
d'un désistement pur et simple, le différendpeut être soumis à la Cour
par une nouvelle requêteet que la Cour doit le juger sur la même base
de droit qui existait avant le désistement.

4. Le désistement, une fois parfait, produit ses effets d'une manière
définitive. Etant donné que, comme on l'a dit, l'effet du désistement
consiste uniquement dans la clôture de la procédure, cela veut dire que,
à la suite du désistement, le procès, au cours'duquel le désistement est

intervenu, est définitivement clos. Ce qui n'empêche toutefois pas, pour
les raisons déjà indiquées, la possibilité d'un nouveau procès pour le
même différend.
Dans les pourparlers qui ont amené au désistement de la Belgique,
on a, à maintes reprises, employé le terme (déhitif ))pour indiquer le
caract6re que, d'après les intéressés espagnols et le Gouvernement
espagnol lui-même, ledésistement ov retrait de la demande devaitsettlement, they may, instead of notifying the Court of it in accordance
with Article 68, use the other means offered by the same Article. They
rnay also inform the Court in writing that they are not going on with

the proceedings, and they rnay do this even without stating the reason
for such discontinuance, that is to Say, without mentioning the settle-
ment arrived at between the parties. It rnay also be that, once the
settlement has been concluded, the applicant alone rnay give notice of
discontinuance in accordance with the terms of Article 69 (provided,
of course, in the hypotheçis of paragraph 2 of that Article, that the

respondent does not oppose the discontinuance).

3. The discontinuance referred to both in Article 69, as in the
present case, and also in Article 68 of theRules of Court (and similarly,
on the basis of the last-named Article, a settlement notified by the

parties to the Court, naturally leaving aside the effects produced by
a settlement on the basis of general international law) therefore pro-
duces no other legal consequences than that of extinguishing the effects
of the application filed with the Court, that is to Say, other than that
of putting an end to the proceedings in the course of which the discon-
tinuance was effected.

Thus, discontinuance as such does not affect, in the hst place, the
actual existence of the dispute between the parties. Notwithstanding
the discontinuance (whether effected by the parties by mutual agree-
ment or by the applicant alone, accompanied, if such be the case, by
the non-opposition of the respondent) the parties rnay maintain their
respective attitudes in relation to the conflict of interests at issue.

In that case, the dispute which had been submitted to the Court con-
tinues to subsist even after the discontinuance.
Furthermore, the discontinuance, as such, does not affect either any
right of action possessed by the party and the jurisdiction of the Court,
or the substantive right on which the claim was based. It follows

that, in the case of a discontinuance pure and simple, the dispute can
be submitted to the Court by means of a new application and that the
Court must deliver judgrnent upon it on the same legal basis that existed
before the discontinuance:

Once the discontinuance has been perfected, it produces its
4.
effects in a final manner. In view of the fact that, as has been said,
the effect of the discmtinuance is merely to put an end to the pro-
ceedings, this means that, after the discontinuance, the proceedings in
the course of which the discontinuance was effected are finally termin-
ated. For the reasons already given, however, this does not preclude
the possibility of new proceedings in respect of the same dispute.

In the discussions which led up to the discontinuance by Belgium,
the term "final" was very frequently employed to indicate the character
which, according to the Spanish nationals concemed and the Spanish
Government itself, the discontinuance or withdrawal of the claim had BARCELONA TRACTION (OP. DISS. MORELLI)
104

avoir. Par exemple, dans la (note de base ))rédigéepar M. March, il
est dit que ((le retrait définitifde la demande est une condition préalable
pour engager la négociation 1).Toutefois, l'adjectif par lequel le désis-

tement est qualifié ne change rien à la nature de celui-ci ; cet adjectif
n'indique pas du tout par lui-méme, comme le prétend l'Espagne dans
ses défenses, que le désistement dût produire des effets qui ne sont pas

ceux propres au désistement en tant que tel, ou qu'il dût produire, outre
ces effets, d'autres effets.

Le caractère (définitif a que, d'après les intéressés espagnolset le
Gouvernement espagnol, le désistement devait avoir, peut êtreentendu
de deux façons différentes.

En premier lieu, le terme ((définitif ))a étéemployé euégardau carac-
tère parfait du désistement. Etant donné qu'il s'agissait en l'espèce de
l'hypothèse du paragraphe 2 de l'article 69, on a voulu indiquer, de cette

façon, un désistement susceptible d'être réputé acquis aux termes dudit
paragraphe 2, la partie défenderesse n'ayant pas fait opposition dans
le délaifixé.C'est en ce sens aue le terme ((définitif ))est entendu même

par l'Espagne aux paragraphes 39, 54, 55, 56, 60, 119, 125 de sa pre-
mière exception préliminaire. Cette façon d'entendre le caractère (défi-
nitif )) du désistement s'accorde, du côté belge, avec le passage de la

requête(par. 5) dans lequel il est dit que ((le groupe espagnol avait fait
savoir qu'il ne désirait pas négocier tant que se déroulerait le procès
pendant devant la Cour internationale de Justice 1)C'est dans le même

sens que le Gouvernement belge entend le caractère définitif du désis-
tement lorsque, au paragraphe 25 de ses observations, il se réfèrea sa
proposition de mars 1961 ((que ce désistement ne fût rendu effectif, par

l'acceptation du Gouvernement espagnol, qu'une fois qu'un accord entre
les parties privéesserait réalisé ».

Mais le terme ((définitif ))est employé aussi, à propos du désistement
belge, dans un autre sens, à savoir pour indiquer que les intéressés
espagnols et le Gouvernement espagnol ont exigéun véritable désiste-

ment et qu'un véritable désistement a étéaccompli par la Belgique : un
désistement véritable par opposition à une notion différente, c'est-à-dire
à celle d'une simple suspension de la procédure.

La suspension de la procédure n'est pas envisagée expressément par
le Règlement de la Cour bien qu'elle soit admise par certains systèmes
de droit interne. Elle consiste dans une pause que subit un procès qui

reste toutefois ouvert, pause pendant laquelle aucun acte de procédure
ne peut êtreaccompli. La suspension une fois terminée, le procèsreprend
son cours sans qu'il y ait besoin, pour cela, d'une nouvelle instance.

Or, comme il est dit au paragraphe 5 de la requête, le Gouvernement
belge s'était justement déclaré (disposéà solliciter de la Cour une sus-

pension de la procédure )); cette proposition, aussi bien que l'autre pro-
position concernant une prolongation du délaiimparti pour le dépôt de

IO2 BARCELONA TRACTION (DISS. OP. MORELLI) IO4

to possess. For instance, the "basic memorandum" drawn up by
M. March says that "the final withdrawal of the claim is a prior condi-
tion for entering into negotiations". However, the adjective by which

the discontinuance is qualified does not in any way change the nature
of the discontinuance. This adjective does not in any way of itself
indicate, as Spain claims in its arguments, that the discontinuance was
bound to produce effects which are not the effects pertaining to discon-
tinuance as such, or that it was bound to produce other effects in addition
to those effects.

The "final" character which, according to the Spanish nationals
concerned and the Spanish Government, the discontinuance had to
possess, can be underçiood in two different ways.
In the first place, the term "final" has been used in regard to the
perfected character of the discontinuance. Since the contingency
envisaged was that of paragraph z of Article 69, it was intended to

indicate in this way a discontinuance capable of a presumption of
acquiescence under paragraph 2 in the absence of any objection by the
respondent within the prescribed time-limit. It is in this sense that
the term "final" is understood by Spain itself in paragraphs 39, 54, 55,
56, 60, 119 and 125 of its first Preliminary Objection. This interpre-

tation of the "final" character of the discontinuance is in line, on the
Belgian side, with the passage in the Application (paragraph (5)) in
wliich it is stated that "the Spanish group had intimated that it did
not wish to negotiste so long as the case before the International Court
of Justice wa~-~roceedin~".- It is in the same sense that the Belgian
Government understands the final character of the discontinuance

when, in paragraph 25 of its Observations, it refers to its proposa1 of
March 1961 "that the discontinuance should become effective through
acceptance by the Spanish Government only after ail agreement had
been arrived at between the private parties".
But the term "final" is also applied to tlie Belgian disco~-itinua~~nie

another sense, namely to indicate that the Spanish nationals concerned
and the S~anish Government reouired true discontinuance and that
true discontinuance was effected by Belgium ; true discontinuance as
opposed to a different concept, namely mere suspension of the pro-
ceedings.
Suspension of the proceedings is not explicitly contemplated in the

Rules of Court although it is admitted by certain systems of municipal
law. It consists of a pause in the course of proceedings which never-
theless remain open, a pause during which no step in the proceedings
may be taken. Once the suspension has come toan end, the proceedings
resume their course without there being any need for the institution

of new proceedings. ,
Now, as is stated in paragraph (5) of the Application, the Belgian
Government had in fact said that it was "prepared to ask the Court
for a suspension of the proceedings". This proposal, and also the other
proposa1 concerning an extension of the time-limit fixed for the filing105 BARCELONA TRACTION (OP. DISS. MORELLI)
la répoiise belge aux exceptions préliminaires espagnoles, fut jugée

insuffisante par M. March ; ce qui, comme le dit le mêmeparagraphe de
la requête, amena le Gouvernement belge à accomplir un véritable
désistement, à savoir un désistement que, justement pour le distinguer
de la simple suspension, on a, à maintes reprises, qualifié de« définitif».
C'est en ce sens que le terme « définiti» est employé aux paragraphes 70

et 71 de la première exception prdliminaire espagnole, tandis que les
paragraphes immédiatement successifs se réfèrent à un sens tout à fait
différent. De même le (retrait définitifde la demande » se trouve opposé
à la simplesuspensionde la procédure,entre autres, aux paragraphes 122
et 123de la mêmeexception préliminaire espagnole.

5. Si l'on reconnaît (comme, à mon avis, il faut le reconnaître) que,
sÙrla base des articles 68 et 69 du Règlement, le désistement ne produit
d'autre effet que la clôture du procès au cours duquel le même désis-

tement est accompli, il s'ensuit qu'il est bien possible, après le désiste-
ment et la clôture du procès qui en constitue la conséquence, de déposer
une nouvelle requêteen vue d'introduire un nouveau procès.

Une telle possibilitén'est aucunement subordonnée à la nécessitéd'une

réserve quelconque. La nécessité dela réserve ne pourrait êtreaffirmée
que si l'on partait de l'idée,à mon avis erronée, que le désistement, en
tant que tel, produit, outre la clôture de la procédure, d'autres effets ;
effets que la réserve aurait justement le but d'écarter.

Si le désistement en tant que tel, à savoir en tant qu'acte envisagépar
les articles 68 et 69 du Règlement, ne produit que l'effet consistant dans
la clôture de la procédure, il est bien possible qu'un désistement, en par-
ticulier un désistement accompli par la partie demanderesse aux termes
de l'article 69, soit accompagné d'un autre acte de volonté de la même

partie, acte produisant, sur la base du droit international génCralou
d'autres règles de droit particulier, les effets qui lui sont propres. Il est
toutefois bien sûr que l'existence d'un tel acte, dans un cas concret,
devrait êtreprouvée par la partie intéressée. L'existence de cet acte,
contemporain au désistement mais distinct de celui-ci, ne pourrait être

présumée; elle ne pourrait pas non plus êtredéduite du défaut d'une
réserve 2 l'acte de désistement.

6. Une fois reconnue, en général, la possibilité d'autres actes de la

partie demanderesse accompagnant le désistement et produisant leurs
propres effets,.il est utile d'indiquer ici, toujours sur un plan très général,
quelles sont les différentes hypothèses susceptibles de se réaliser.
La première hypothèse possible est celle d'un désistement pur et
simple, non accompagnC d'autres manifestations de volonté et produi-

sant, par conséquent,le seul effet,propre au désistement, de la clôture de
la procédure.of the Belgian reply to the Spanish Preliminary Objections, was con-
sidered to be insufficient by M. March. This led the Belgian Govem-
ment, as is stated in the same paragraph of the Application, to effect
a real discontinuance, that is to Say, a discontinuance which, precisely
in order to distinguish it from a mere suspension was, on many occa-

sions, described as "final". It is in this sense that the term "definitive"
is employed in paragraphs 70 and 71 of the first Preliminary Objection
of the Spanish Govemment, whereas the paragraphs i~ediately
following use it in an entirely different sense. Similarly, the "final
withdrawal of the clairn" is the term used as opposed to a mere sus-
pension of the proceedings, ilzteralia,in pzragraphs 122 and 123 of the
same Spanish Preliminary Objection.

5. If it is recognized (as, in my opinion, it must be recognized) that,
on the basis of Articles 68 and 69 of the Rules of Court, the discon-
tinuance produces no other effects than that of putting an end to thc
proceedings in the course of which the discontinuance is effected, it
follows that it is quite possible, after the discontinuance and the ending
of the proceedings resulting therefrom, to file a new application for the
purpose of instituting new proceedings.

Such a possibility is in no way dependent on the need for any reser-
vation whatsoever. The need for a reservation could be upheld only
on the basis of the, in my view erroneous, concept that discontinuance,
as such, produces in addition to the effect of putting an end to the
proceedings, other effects and it is those other effects that the reserva-
tion would in fact be intended to obviate.
If discontinuance as such, that is to Say, as the step referred to in
Articles 68 and 69 of the Rules of Court, produces only the effect of
putting an end to the proceedings, it is quite possible that a disconti-
nuance-more particularly a discontinuance effected by the applicant
in accordance with the terms of Article 69-could be accompanied by
another act of will of the same party producing independent effects
of its own on the basis of general international law or of other particular
rules. It is, however, quite certain that the existence of such an act,
in any particular case, would have to be proved by theparty concerned.

The existence of this act, contemporaneous with the discontinuance
but distinct from it, could not be presumed. Nor could it be inferred
from the absence of any reservation in the notice of discontinuance.

6. If it is recognized,in general, that discontinuance may be accom-
panied by other acts of the applicant party and that those acts may
produce independent effects of their own, it may be convenient to refer
here, again in a quite general way, to the different cases that may arise.
The first case is that of discontinuance pure and simple, not accom-
panied by any other expressions of intention and, consequently, pro-
ducing the sole effect pertaining to discontinuance, namely that of
putting an end to the proceedings. Une deuxième hypothèse se réaliselorsqu'il y a, de la part du deman-
deur, non seulement le désistement de l'instance, mais aussi l'abandon

de sa prétention ou de sa protestation en tant qu'élément constitutif du
différendqui avait étésoumis à la Cour, avec la conséquencede l'extinc-
tion d'un tel différend.Il se peut que l'abandon de la prétention ou de
la protestation ne soit pas accompagné de la renonciation ni au pouvoir
d'action devant la Cour ni au droit subjectif substantiel sur lequel la

prétention ou la protestation était fondée.En ce cas, si le différendrenaît
ou, plus exactement, si vient à naître un nouveau différend correspon-
dant, dans une mesure plus ou moins large, au différend éteint, la Cour
peut bien êtresaisie pour le règlement d'un tel différend ; différend qui
doit êtreéventuellement tranché sur la base du droit subjectif substan-
tiel que la partie demanderesse avait invoqué avant le désistement.

Il se peut au contraire (et nous nous trouvons alors en face de la troi-
sièmehypothèse) que le désistement soit accompagné de la renonciation
au pouvoir d'action devant la Cour. Le pouvoir d'action, en ce cas,
s'éteint, ce qui entraîne aussi l'extinction de la juridiction de la Cour.
Etant donné que la renonciation au pouvoir d'action n'implique pas

nécessairement la renonciation au droit substantiel, celui-ci peut bien
êtreinvoqué par la suite, soit en dehors d'un procès quelconque soit
dans un procès qui serait introduit devant une autorité autre que la
Cour, ou mêmedevant la Cour, par un moyen autre que l'exercice du
pouvoir d'action ayant formé l'objet de la renonciation (par exemple,
moyennant un compromis).

Il y a enfin la quatrième hypothèse possible, c'est-à-dire l'hypothèse
où la partie demanderesse qui se désiste de l'instance, renonce aussi à
son droit substantiel ou bien reconnaît qu'un tel droit substantiel
n'existe pas. Cette renonciation ou cette reconnaissance produit des

effets concernant le fond même du différend. Le droit substantiel
auquel il a étérenoncé ou qui est reconnu comme inexistant ne peut
plus êtreinvoquéni en dehors d'un procèçni au cours d'un procès éven-
tuel ; procès qui est tout à fait possible, mêmedevant la Cour, étant
donnéque la renonciation ou la reconnaissance concernant le droit sub-
stantiel ne touchent, ni l'une ni l'autre par elles-mêmes,au pouvoir

d'action devant la Cour.
La distinction entre les deux dernières hypothèses que l'on vient d'in-
diquer est, dans le droit international, plus nette que dans le droit
interne. Etant donné que, dans le droit international, le pouvoir d'action
et la juridiction correspondante n'ont pas, comme dans le droit interne,

un caractère généralet qu'ils découlent, au contraire, de certaines règles
particulières, il est aiséd'envisager une renonciation au pouvoir d'action
découlant d'une règle donnée, renonciation ne touchant pas du tout au
droit subjectif substantiel. Dans le droit interne, au contraire, on envi-
sage d'ordinaire la renonciation, non pas au pouvoir d'action en tant
que tel, mais plutôt au droit subjectif substantiel. C'est cette renoncia-

tion, en effet, qui constitue l'hypothèse que l'on oppose à l'hypothèse A second case occurs when there is, on the part of the applicant, not
only a discontinuance of the proceedings, but also the abandonment
of its claim or of its protest as a constituent element of the dispute

which had been submitted to the Court, with the consequence that the
dispute is extinguished. It is possible that the abandonment of the
claim or of the protest may not be accompanied by abandonment either
of the right of action before the Court or of the substantive right on
which the claim or the protest was based. In that case, if the dispute

arises again or, more precisely, if a new dispute arises corresponding,
to a greater or lesser degree, to the extinct dispute, the Court may well
be seised for the settlement of such a dispute and, if so, that dispute
will have to be decided on the basis of the substantive right which the
applicant party had invoked before the discontinuance.
- -
It is poSsible, on the other hand (and here we are confronted with
a third case), that the discontinuance may be accompanied by the
abandonment of the right of action hefore the Court. In this case, the
right of action is extinguished and this results in the extinction also
of the jurisdiction of the Court. In view of the fact that the abandon-

ment of the right of action does not necessarily imply the abandonment
of the substantive right, the latter right may very well be invoked
subsequently, either quite apart from any legal proceedings, or in the
course of proceedings instituted before some authority other than the
Court, or even before the Court, by some means other than the exercise

of the right of action which was abandoned (for means of a special
agreement).
Lastly, there is a fourth possible case. This is the case in which the
applicait party which discontinues the proceedings abandons also its
substantive right or recognizes that such substantive right does not

exist. Such abandonment or admission produces effects going to the
actual merits of the dispute. The çubstantive right that is abandoned
or is recognized to be non-existent can no longer be invoked either
apart from legal proceedings or in the course of any possible proceedings,
such proceedings being quite possible, even before the Court, seeing

that the abandonment or admission in respect of the substantive right
do not, of themselves, affect the right of action before the Court.

The distinction between the last two cases mentioned is clearer in
international law than in municipal law. Having regard to the fact
that, in international law, the right of action and the corresponding

jurisdiction are not, as in municipal law, of a general character but,
on the contrary, are derived from certain particular rules, it is easy to
conceive of an abandonment of the right of action deriving from a
given rule which would not in any way affect the substantive right.
The abandonment which is contemplated in municipal law, on the

contrary, is usually not an abandonment of the right of action as such,
but rather of the substantive right. It is this abandonment, in fact,
which constitutes the situation which has been opposed to a meredu désistement pur et simple de la procédure. Tandis que l'on qualifie
ce dernier désistement comme désistement d'instance,on emploie la for-
mule de désistement d'actionpour indiquer quelque chose qui ne corres-
pond pas exactement à une telle formule, c'est-à-dire la renonciation,
non pas au pouvoir procédural d'action, mais plutôt au droit subjectif
substantiel. C'est justement cette terminologie qui est employée par
l'une et par l'autre des parties dans la présente affaire.suffit de rappe-
ler,à cet égard,qu'au paragraphe 294de son mémoire le Gouvernement
belge dit que, dans la plus grande partie du continent européen, on

entend «par désistement d'action la renonciation du demandeur à son
action, donc à son droit1)La mêmeterminologie, qui révèle unecertaine
confusion entre le pouvoir procédural d'action et le droit subjectif sub-
stantiel, est employéedans les défenses espagnoles.
Quoi qu'il en soit, pour ce qui concerne la terminologie et pour ce qui
concerne l'hypothèse qui est envisagke d'ordinaire dans le droit interne,
il faut déterminer, pour les fins qui nous intéressect, quelle est l'hypo-
thèse qui, d'après le Gouvernement espagnol, se serait réalisée enl'espèce
à la suite du désistement belge.

7. Dans les conclusions aux exceptions préliminaires le Gouvernement
espagnol a demandé à la Cour de se déclarer incompétente pour recevoir
ou pour juger la réclamation formuléedans la nouvelle requêtebelge,
((toute juridiction de la Cour pour décider des questions se référant
à cette réclamation, soit à la compétence, àla recevabilité, ou au fond,
ayant pris fin 1)à la suite du désistement belge. Dans les conclusions
déposéesaprès l'audience du 8 mai 1964, le Gouvernement espagnol
a demandé que, pour le motif que l'on vient d'indiquer, de même que
pour les motifs énoncés à l'appui des autres exceptions préliminaires,

la requêtebelge soit déclarée définitivement irrecevable.
Si l'on s'en tient à la façon dont les conclusions du Gouvernement
espagnol ont étéformulées,on pourrait êtreamené à entendre la première
cxception préliminaire dans un sens purement procédural, c'est-à-dire
dans le sens qu'elle visait proprement et uniquement à nier la juridiction
de la Cour pour réglerle différend.Etant donnéque la juridiction de la
Cour dans la présente affaire était fondéepar la Belgique sur le traité
de 1927et sur l'article 37 du Statut,la première exception préliminaire
serait, d'après cette interprétation, entendue dans le sens que, par la
mêmeexception, l'Espagne affirmait que la Belgique avait renoncé au

pouvoir d'action devant la Cour découlant éventuellement desdites
dispositions.
Il faut toutefois faire remarquer que la thèse d'après laquelle la
Belgique aurait renoncé à son pouvoir d'action, en tant que tel, est
une thèse qui ne se trouve ni développéeni même esquissée d'une
façon claire dans les défensesespagnoles. Il s'agit, d'ailleurs, d'une thèse
qui ne s'accorde pas avec la formule de l'irrecevabilité ((définitive ))
employée par l'Espagne dans ses conclusions finales. Une déclarationabandonment of the proceedings. While this latter form of abandon-
ment is described as a discontinuanceof proceedings,the term discon-
tinuanceof the action is used to indicate something that does not exactly
correspond to such a tem, namely the abandonment, not of the proce-
dura1 right of action, but rather of the substantive right. This is the
terminology which is employed by both the Parties in the present case.
It will suffice, in this connection, to recall that, in paragraph 294of
its Memorial, the Belgian Government states than in most countries on
the European Continent "by discontinzlanceof the actionis meant the
abandonme~t by the plaintiff of his action, thus of his right". The
same terminology, which reveals a certain confusion between the pro-
cedural right of action and the substantive right, is used in the Spanish
arguments.
At al1events, so far as concerns the terminology and in regard to the
hypothesis which is usually contemplated in municipal law, it is neces-

sary, for the purposes with which we are concerned, to determine
which hypothesis is, according to the Spanish Govemment, the one
that applies in this particular case as a result of the Belgian discon-
tinuance.

7. In the Submissions in the Preliminary Objections the Spanish
Govemment asked the Court to declare that it has no jurisdiction to
admit or adjudicate upon the claim made in the new Belgian Appli-
cation, "al1 jurisdiction on the part of the Court to decide questions
relating to that claim, whether with regard to jurisdiction, admissibility
or the merits, having come to an end" pursuant to the Belgian discon-
tinuance. In the Submissions filed after the hearing on 8 May 1964
the Spanish Government asked, for the reason set out above and for
the reasons given in support of the other Preliminary Objections, that
the Belgian Application be declared definitively inadmissible.
If regard is had only to the way in which the Spanish Govemment's
Submissions are fonizulated, the first Preliminary Objection might be
understood in a purely procedural sense, namely that it was specifically

and solely designed to deny the jurisdiction of the Court to decide the
dispute. Since the Court's jurisdiction in the present case was founded
by Belgium on the 1927 Treaty and Article 37 of the Statute, the
first Preliminary Objection would according to this const~ction be
understood in the sense that Spain thereby asserted that Belgium had
abandoned any right of action before the Court which might derive
from those provisions.

It must however be observed that the contention that Belgium
abandoned its right of action as such is not developed or even clearly
outlined in the Spanish arguments. It is moreover a contention which
does not fit in with the formula of "definitive" inadmissibility used by
Spain in its final Submissions. For the only possible subject of a
declaration of inadrnissibility would be the application instituting thed'irrecevabilité, en effet, ne pourrait avoir pour objet que la seule
demande introductive de la procédure au cours de laquelle la déclaration
d'irrecevabilité serait prononcée. Au contraire, en demandant que la
requête belge soit déclarée ((définitivement 1)irrecevable, l'Espagne

a demandé à la Cour un jugement qui ne concerne pas spécifiquement
la requête du 19 juin 1962, mais qui concerne aussi d'autres requêtes
éventuelles, requêtes qui, à la suite du jugement demandé par l'Espagne,
devraient être considérées également «irrecevables ». L'Espagne a

demandé, en substance, un jugement produisant les effets de la chose
jugée au sens matériel, jugement qui, en tant que tel, ne pourrait être
qu'un jugement au fond.

8. Pour préciser la véritable portée dela première exception prélimi-
naire, il est nécessaired'entendre les conclusions espagnoles à la lumière
des arguments développéspar l'Espagne dans la procédure écrite aussi

bien qu'au cours des plaidoiries.
Or il faut remarquer, tout d'abord, que dans la circulaire envoyée
à ses missions diplomatiques à l'étranger le 13 avril 1961, après l'ordon-
nance de la Cour prescrivant la radiation de l'affaire sur le rôle, le Gouver-

nement espagnol, tout en qualifiant le désistement belge comme un
((désistement de l'action s, dit que le Gouvernement belge a étéamené
à « se désister de la protection de certains intérêtsprivésdont la défense
n'était pas possible dans ie cadre de l'ordre juridique international ».

Le Gouvernement espagnol aboutit ensuite à la conclusion d'après
laquelle La renonciation belge constitue donc la reconnaissance défini-
tive de la bonne position de l'Espagne. ))Or la première exception
préliminaire se réfère,dans son paragraphe 62, à ladite circulaire ; circu-

laire qui, d'après la même exception préliminaire, démontre ((aussi
clairement que possible, que le Gouvernement espagnol considérait
le litige international entre les deux gouvernements comme ayant pris
définitivement fin ».

Mais c'est aussi d'autres passages de la première exception prélimi-
naire que ressort le sens qu'aurait, d'après le Gouvernement espagnol,
le désistement belge ; désistement qui, bien que qualifié de ((désistement
d'action », aurait, en réalité, pourobjet un droit subjectif substantiel,

c'est-à-dire le droit de protection diplomatique. Par exemple, au para-
graphe 98, le Gouvernement espagnol se réfèreà la définition donnée
par le Dictionnaire de la terminologie du Droit international, d'après
laquelle le terme «désistement 1)peut (servir à désigner la renonciation

à une prétention ou à un droit ); après quoi le mêmeGouvernement
espagriol répèteprécisémentque l'on peut ,utiliser ce mot à propos de la
renonciation àune demande ou àun droit ».De même,au paragraphe 101,
on indique par le terme de désistement d'action ((l'intention des parties

touchant leurs droits quant au fond de l'affaire )).Encore, au para-
graphe 102, on dit que (dans la plupart des cas où un désistement inter-
vient après accord entre les Etats, l'avis de désistement traduira un
accord dont le but sera de réglerle litige une fois pour toutes ».On peut proceedings in which the declaration of inadmissibility is made. But
by asking that the Belgian Application be declared "definitively"
inadmissible, Spain has on the contrary asked the Court for a judgment

relating not specifically to the Application of 19 June 1962, but also
relating to any other applications which, pursuant to the judgment
asked for bvJl,~ain. would likewise have to be deemed to be "inadmis-
sible". In subçtance Spain has asked for a judgment producing the
effect of res judicata in the material sense, and such a judgment could,

as such, only be a judgment on the merits.

In order to define the true scope of the first Preliminary Objec-
8.
tion, it is necessary to construe the Spanish Submissions in the light
of the arguments developed by Spain both in the written and in the
oral proceedings.
It must be observed in the first place that in the circular sent to

its diplomatic missions abroad on 13 April 1961, after the Order of
the Court directing the removal of the case from the list, the Spanish
Government, while it describes the Belgian discontinuance as a "discon-
tinuance of the action", says that the Belgian Government was led "to
discontinue the protection of certain private interests whose defence

was not possible within the ambit of international law". The Spanish
~overnmknt then comes to the conclusion that "Belgium's not on
with the proceedings therefore constitutes a definitive recognition that
the position taken by Spain is w~ell-founded". But the first Preliminary
Objection refers to this circular in paragraph 62, stating that it demon-

strates "as clearly as possible that the Spanish Government considered
theinternational dis9ute betweenthetwo governmentsas having definitively
come to an end".

But there are also other passages in the first Preliminary Objection
which show the meaning which the Spanish Government attaches to the
Belgian discontinuance. Although described as a "discontinuance of
the action", that discontinuance is said to have as its subject, in reality,
a substantive right, namely the right of diplomatic protection. For

instance in paragraph 98 the Spanish Government refers to the defini-
tion given in the Dictionnaire de la terminologie du Droit international,
according to which the term "discontinuance" can "be used to designate
the renunciation of a claim or of a right". After this, the Spanish
Government repeats precisely that the word can be "used in connection

with the renunciation of a claim or of a right". Similarly, in para-
graph IOI the term "discontinuance of the action" is used to denote
"the intention of the parties concerning their rights as to the merits of
the case". Again, in paragraph 102 it is said that "in most cases in

which discontinuance occurs after agreement between the States the
notice of discontinuance will reflect an agreement the purpose of whichenfin rappeler qu'au paragraphe 103, à propos du désistement belge
dans l'affaireBorchgrave, mention est faite de l'intention du Gouverne-
ment belge ((de renoncer, une fois pour toutes, à son droit d'ester en
justice» ;ce qui serait justement la conséquence du fait que le même
gouvernement avait reconnu « que la responsabilité du Gouvernement
espagnol n'était en aucune mesure engagée ».

La véritable portée de !a première exception préliminaire résulte
aussi des arguments à l'appui présentésdans les plaidoiries. On a mis
le désistementbelge en rapport avec les exceptionspréliminairesopposées
par l'Espagne à la première requête, en particulier avec l'exception
préliminaire relative au défaut de qualité, pour affirmer que le désiste-
ment impliquait la renonciation dela part dela Belgique à son argumen-
tation en défensecontre les exceptions préliminaires espagnoles.Compte
tenu du fait que la question de la qualité, comme nous le verrons par la
suite (quatrième partie), concerne un droit subjectif substantiel, tel que
le droit de protection diplomatique, on voit très clairement par là que,

d'après la thèse avancée par l'Espagne dans sa première exception
préliminaire, la Belgique, en renonçant par le désistement à son argu-
mentaticn àcet égard,aurait disposédudit droit substantiel. La Belgique
aurait ou bien renoncé à ce droit ou bien reconnu l'inexistence du même
droit.
Sil'on considèredonc la façon dont la première exception préliminaire
est présentéeet que l'on entende les conclusionsespagnoles àla lumière
des arguments développésdans la procédure écrite aussi bien qu'au
cours des plaidoiries, on voit très clairementà mon avis, que par cette
exception l'Espagne a nié, comme conséquence du désistement du
Gouvernement belge, la possibilitépour celui-ci d'exercer, d'une manière

quelconque, le droit de protection diplomatiqueà l'égarddela Barcelona
Traction. Désormais, du point de vue du Gouvernement espagnol,
un tel droit ne'pourrait plus êtreinvoquépar la Belgique, non seulement
devant la Cour, mais aussi dans un procès qui serait introduit devant
une autre juridiction quelconque ou même en dehors de tout procès.

g. Si telle est la portée de la première exception préliminaire, il est
bien sûr que, par cette exception, on a poséun problème concernant,
non pas la possibilité ou l'impossibilitéd'un jugement au fond, mais,
au contraire, la façon mêmedont le fond de l'affaire aurait dû être jugé

par la Cour. Or, pour les raisons que j'ai indiquéesdans la deuxième
partie, un tel problème, en tant que problème concernant directement
et exclusivement le fond, ne pouvait êtreexaminépar la Cour au stade
actuel de la procédure. Par conséquent la Cour aurait dû, à mon avis,
déclarer la première exception irrecevable en tant qu'exception
préliminaire.is to settle the dispute once and for all". It may be recalled finally
that, in paragraph 103, with reference to the Belgian discontinuance
in the Borchgrave case, mention is made of the Belgian Government's
intention "of abandoning once and for al1its right to appear before the
Court". This is said to be precisely the consequence of the fact that the
same Government had recognized "that the responsibility of the Spanish

Government was not at al1involved".
The real significance of the first Preliminary Objection can be seen
also from the arguments presented in support of it at the hearing.
A relationship was inferred between the Belgian discontinuance and the
Preliminary Objections advanced by Spain against the first Application
and, more particularly, the Preliminary Objection relating to lack of

capacity, and it was asserted that the discontinuance implied the aban-
donment by Belgium of its arguments against the Spanish Preliminary
Objections. Having regard to the fact that the question of capacity,
as we shall see later (Part IV below) is concerned with a substanti-re
right, namely the right of diplomatic protection, it is seen very clearly
that, according to the contention advanced by Spain in its first Prelim-

inary Objection, Belgium, when, through its discontinuance, it aban-
doned its arguments in this connection, disposed of the said substantive
right. It is claimed that Belgium either abandoned that right or
recognized its non-existence.
Thus if account is taken of the way in which the first Preliminary
Objection is presented and if the Spanish Submissions are understood
in the light of the arguments developed both in the written proceedings

and also in the course of the hearing, it becomes in my view very clear
that by this objection Spain denies, as a consequence of the Belgian
Government's discontinuance, that it is possible for that Government
to exercise the right of diplomatic protection in any way whatsoever
in respect of Barcelona Traction. Henceforward, from the Spanish
Government's point of view, such a right could no longer be invoked

by Belgium, not only before the Court but also in any proceedings that
might be instituted before any other jurisdiction whatsoever, or even
quite apart from any legal proceedings.

If this is the significance of the first Preliminary Objection, it
is quite certain that this objection raises a problem that is concerned,

not with the possibility or impossibility of a judgment on the merits,
but, on the contrary, with the very way in which the merits of the case
should be judged by the Court. But, for the reasons 1 have given in
Part II above, such a question, as a question relating directly and
exclusively to the merits, could not be considered by the Court at the
present stage of the proceedings. Consequently the Court should in

my view have decl~red the first Objection inadmissible as a preliminary
objection. IV. SUR LA TROISIÈME EXCEPTION PRÉLIMINAIRE

1. Par la troisième exception préliminairel'Espagne a niéà la Belgique
la qualité pour exercer la protection diplomatique en faveur de la société
Barcelona Traction aussi bien qu'en faveur des actionnaires belges de la
sociétépour le préjudice subi par celle-ci.
La protection diplomatique n'est, à mon avis, autre chose que l'exer-
cice par un Etat de son droit subjectif de prétendre, pour ses ressortis-

sants (personnes physiques et personnes morales), à un certain traite-
ment de la part d'un autre Etat. Lorsqu'un Etat exige, par les voies
diplomatiques, que l'un de ses ressortissants soit traité par un autre
Etat de la façon prescrite par les règles internationales en la matière
ou qu'il réclame une réparation en raison du fait qu'un tel traitement

n'a pas étéaccordé, le premier Etat ne fait qu'exercer le droit qui découle
desdites règlesinternationales. Il s'agit de règlessubstantielles accordant
un droit subjectif ayant le caractère de droit substantiel. C'est simple-
ment en considération du moyen ordinaire par lequel un tel droit est
exercé qu'on le qualifie de droit de protection diplomatique. Il n'y a

aucune raison d'envisager un droit de protection diplomatique comme
un droit distinct du droit substantiel découlant des règles relatives au
traitement des étrangers.
Tout autre, semble-t-il, est la conception adoptée par le Gouverne-
ment espagnol, qui parle de la protection diplomatique comme d'une
institution ayant le but de garantir les règles internationales concernant

le traitement des étrangers. Le Gouvernement espagnol semble distin-
guer, d'une part, le droit, pour un Etat, d'exiger un certain traitement
de ses ressortissants et, d'autre part, comme corollaire de ce droit,
la faculté, pour le mêmeEtat, d'intervenir en vertu de 13 protection
diplomatique.

A mon avis, un tel dédoublement n'est ni nécessaireni même conce-
vable. En tout état de cause, il est bien sûr que, lorsqu'un Etat agit
non pas par la voie diplomatique mais par la voie judiciaire, le droit qu'il
invoque corrme fondement de sa demande est simplement le droit
substantiel découlant des règles concernant le traitement des étrangers.
L'autre droit ou l'autre facuité que l'on voudrait concevoir (à tort,

à mon avis) comme quelque chose de distinct dudit droit substantiel
afin d'expliquer le fondement de l'intervention par la voie diplomatique,
n'entrerait pas du tout en ligne de compte dans la procédure judiciaire.

2. Dans un procès introduit par une demande fondée sur un droit

découlant d'une règleconcernant le traitement des étrangers (appelons-le
droit de protection diplomatique, sous réserve des précisionsque nous
venons de donner) la question de savoir si un tel droit existe, ou s'il
n'existe pas, est évidemment une question touchant directement au fond
de l'affaire. Par conséquent le jugement qui tranche cette question est

un jugement au fond, produisant les effets de la chose jugée au sens
108 IV. ON THE THIRDPRELIMINARO YBJECTIOJ

1. In the third Preliminary Objection, Spain denies that Belgium
has the capacity to exercise diplomatic protection in favour of the

Barcelona Traction Company, or in favour of the Belgian shareholders
in that Company in respect of the damage suffered by it.
In my opinion, diplomatic protection is nothing other than the
exercise by a State of its right to claim from anott~er State a certain
treatment for its nationals (whether natural orjuristic perçons). When
a State demands, through the diplomatic channel, that one of its

nationals shall be treated by another State iil the manner prescribed
by the international rules on the subject, or when it claims compensation
because that treatment has not been afforded, the first State is nlerely
exercising the right conferred upon it by those international rules.
These are substantive rules conferring a right which hes the character

of a substantive right. It is simply because of the means by which
that right is usually exercised that it is known as the right of diplomatic
protection. There is no reason to consider that a right of diplomatic
protection exists independently of the substantive right established by
the rules relating to the treatment of foreigners.

The Spanish Government appearsto have adopted an entirely different
concept, which considers diplomatic protection as an institution the
purpose of which is to guarantee the international rules relating to the
treatment of foreigners. The Spanish Government appears to make a
distinction between the right of a State to demand a certain treatment

for its nationals and, as a corollary of that right, the same State's
faculty of intervention through the exercise of diplomatic protection.

In my opinion, this differentiation is neither necessary noi even
conceivable. In any event it is quite certain that when a State acts
not through the diplomatic channel but by use of the judicial method,

the right it invokes as the basis of its claim is simply the substantive
right conferred by the rules concerning the treatment of foreigners.
No account it al1 could be taken in judicial proceedings of the other
right, or other faculty sought to be conceived of (wrongly, in my opinion)
as something apart from the said substantive right in order to provide
an explanation for the basis of diplomatic intervention.

z. In proceedings instituted by an application based on a right
deriving from a rule concerning the treatment of foreigners (which may
be called the right of diplomatic protection, subject to the above
qualifications), the question of whether or not such a right exists is

obviously one which directly concerns the merits of the case. Conse-
quently, a judgment deciding this question is a judgment on the merits,
producing the effect ofres judicatain the material sense. Thus a judg-matériel. Aussi un jugement qui constate que le droit de protection
diplomatique n'existe pas, dans un cas concret, est-il un jugement
statuant sur le fond de la demande et non pas un jugement déclarant que
le fond de la demande ne peut êtreexaminé, un jugement, en d'autres
termes, déclarant la demande irrecevable.
Or c'est pour diverses raisons que le droit de protection diplomatique

peut êtreestiméinexistant dans un cas concret. L'une des raisons pos-
sibles consiste dans le défaut de qualité pour 1'Etat qui invoque un
prétendu droit de protection diplomatique. Par qualité on n'entend pas
autre chose, en ce cas, que l'appartenance à un Etat plutôt qu'à un
autre Etat du droit substantiel qui est invoqué dans le procès ; aussi
s'agit-il d'une qualité substantielle et non pas procédurale. Etant donné

que le droit de protection diplomatique, comme tout autre droit, ne peut
êtreconçu qu'en tant que droit appartenant à un Etat donné à l'égard
d'un autre Etat donné, nier que le droit de protection diplomatique,
par rapport à une certaine personne privée, appartient à 1'Etat qui
l'invoque comme fondement de la demande adressée au juge par cet Etat,
revient à déclarer qu'une telle demande est, pour cette raison, mal

fondée ; cela indépendamment du fait qu'il se soit ou non produit la
violation, par 1'Etat défendeur, d'une obligation, obligation quiexisterait
éventuellement à l'égard d'un Etat autre que le demandeur. On voit
par là qu'un jugement disant que 1'Etat demandeur n'a pas qualité
par rapport au droit de protection diplomatique qu'il invoque, est un
jugement par lequel la demande est rejetée au fond et non pas déclarée

irrecevable.

3. Quel est le fond de l'affaire dans le cas d'espèce? La Belgique
demande à l'Espagne réparation pour la violation alléguéed'une obliga-
tion internationale de l'Espagne envers la Belgique. L'Espagne refuse la
réparation demandéeen niant qu'il y ait eu, desa part, la violation d'une

obligation envers la Belgique. L'existence de la violation est niée par
l'Espagne sur la base de différents motifs. L'un de ces motifs consiste
à nier l'existence mêmede l'obligation qui aurait étéviolée: l'existence,
bien entendu, d'une obligation envers la Belgique.L'Espagne soutient en
effet que, mêmeau cas où il serait possible de parler d'upe obligation
internationale et de la violatioii d'une telle obligationils'agirait d'une

obligation de l'Espagne envers un Etat autre que la Belgique, de sorte
que celle-ci ne pourrait rien prétendre.
Comme on le voit, la question de savoir si la Belgique a ou non qualité
pour avancer contre l'Espagne la prétention qu'elle a avancée ne consti-
tue qu'un aspect du fond de l'affaire. Un arrêt sur cette question ne
serait pas un arrêt sur la recevabilité de la demande ; ilserait, au con-
traire, un arrêt sur le fond. Aussi un arrêt par lequel la Cour aurait

tranché ladite question dans le sens souhaité par l'Espagne aurait-il été,
non pas un arrêt déclarant la demande irrecevable, mais plutôt un arrêt
dCcidant le fond de la demande dans le sens que la prétention avancée
par la Belgique serait mal fondée.Un tel arrêt n'aurait pas eu un effetment finding that the right of diplomatic protection does not exist in
a particular caseis a judgment on the merits of the claim, not a judgment
declaring that the substance of the clairn cannot be considered or in
other words a judgment declaring the claim inadmissible.

There are various reasons whyin a particular case aright of diplomatic
protection may be deemed to be non-existent. One possible reason
is lack of capacity on the part of the State which relies on a would-be
right of diplomatic protection. By capacity, in this instance, is meant

nothing other than that the substantive right relied on in the proceed-
ings pertains to one State rather than to another ;it is thus substantive
and not procedural capacity. Since the right of diplomatic protection,
like any other right, can be conceived of only as a right possessed by
a particular State as against another particular State, denial that the
right of diplomatic protection in respect of a certain private person
pertains to the State which advances it as the basis of the claim made
by that State to the Court is equivalent to a finding that the claim is,
for, this reason,not well-founded. This is so irrespective of whether
or not the respondent State has committed any breach of an obligation,
such obligation possibly existing towards a State other than the appli-
cant. We thus see that a judgment declaring that the applicant State
lacks capacity to exercise the right of diplomatic protection to which it
lays claim, is a judgment dismissing the claim on the merits and not one
declaring itto be inadmissible.

3. What are the merits in the.present case? Belgium claims com-
pensation from Spain for the alleged breach of an international obliga-
tion owed by Spain to Belgium. Spain refusescompensation, and denies
that it has committed a breach of any obligation towards Belgium.
Spain denies the existence of such breach on various grounds. One
consists of a denial of the existence of the obligation alleged to have been
violated : naturally, the existence of an obligation towards Belgium.
Spain maintains that even were it possible to speak of an international
obligation and of a breach of that obligation, the obligation in question
would be owed by Spain to a State other than Belgium, and Belgium
would thus have no claim in the matter.

Hence, the question of whether Belgium does or does not possess

the capacity to bring the claim it has brought against Spain is nothing
other than an aspect of the merits of the case. A judgment on this
question would not be a judgment on the adrnissibility of the claim, it
would on the contrary be-a judgment on the merits. Thus a judgment
by the Court deciding this question in the manner desired by Spain
would not be a judgment declaring the claim inadmissible, but rather
a judgment deciding the merits of the claim tothe effect that Belgiurn's
claim is without foundation. The effect of such a judgment wquldlimité à la procédure actuelle, effet consistant à empêcherque la procé-
dure ne soit poursuiïie devant la Cour. En tant qu'arrêt sur le fond,
il aurait produit les effets de la chose jugée :la chose jugée au sens
matériel. L'arrêtaurait étéobligatoire pour les parties aussi bien que

pour tout juge (la Cour elle-mêhe ou un autre juge quelconque) qui
serait appelé à statuer sur le mêmeobjet et entre les mêmesparties.
A la suite d'un tel arrêt la Belgique n'aurait pu plus rien prétendre
de l'Espagne par rapport aux mesures prises par celle-ci à l'égard dela
Barcelona Traction.

4. Il n'est pas possible de suivre le Gouvernement espagnol dans
sa tentative de séparer du fond de l'affaire la question concernant la
qualité de 1'Etat demandeur pour intervenir au titre de la protection
diplomatique (plaidoirie du 7mai 1964) : cela pour la raison très simple,
déjàindiquée, que la qualité dont il s'agit n'est autre chose que l'appar-

tenance à 1'Etat demandeur du droit substantiel invoqué par lui comme
fondement de sa demande.
Le Gouvernement espagnol lui-même reconnaît expressément que
c'est une question de fond de déterminer si l'obligation internationale,
dont un Etat allègue la violation, était ou non existante. Or une telle
obligation ne pourrait êtredéclaréeexistante ou bien inexistante si ce

n'est en tant qu'obligation incombant à un Etat donné envers un autre
Etat donné. Par conséquent, si c'est une question de fond de savoir si,
en prenant une certaine mesure à l'égard d'une personne privée, 1'Etat
défendeur a ou non violéune obligation internationale qu'il avait envers
1'Etat demandeur, c'est également une question de fond, ne constituant

qu'un aspect de la mêmequestion, d'établirsi c'est envers 1'Etat deman-
deur que 1'Etat défendeur est lié par l'obligation dont on allègue la
violation ; en d'autres termes, si c'est à 1'Etat demandeur qu'appartient
le droit subjectif (droit de protection diplomatique) correspondant
à une telle obligation.
La solution de cette question dépend de la solution de différents

points. Il faut non seulement déterminer quelle est la personne privée
qui a étéfrappéepar la mesure reprochéeà 1'Etat défendeur, mais il faut
voir aussi si cette personne est ou non liéeavec 1'Etat demandeur par
le lien de la nationalité. Il s'agit de points concernant tous l'existence
mêmed'une obligation de 1'Etat défendeur envers YEtat demandeur
et par conséquent l'existence d'une violation de cette obligation et, par

là, la responsabilité internationale invoquée par 1'Etat demandeur.
Aussi s'agit-il de points concernant tous le fond de l'affaire.

5. La question présentée par l'Espagne comme troisième exception

préliminaire est donc une question n'ayant pas du tout un caractère
préliminaire, parce que sa solution s'identifie à la décision mêmedu
fond de l'affaire. C'estpourquoi ladite question ne pouvait êtreexaminée
par la Cour au stade actuel de la procédure, stade qui était limité aux not be limited to the present proceedings, preventing the pursuance

of those proceedings before the Court. As a judgment on the merits,
it would produce the effect of res judicata in the material sense. The
judgrnent would be binding upon the parties, and upon any tribunal
(the Court itself or any other tribunal) which might be called upon to
give a decision on the same subject between thë same parties. As a
result ofsuch a judgment, it would not be open to Belgium to make

any further claim upon Spain in respect of tlie measures taken by the
latter with regard to Barcelona Traction.

4. It is not possible to follow the Spanish Government in its attempt
to separate from the merits of the case the question of the Applicant
State's capacity to intervene for the purpose of diplomatic protection

(hearing of 7 May 1964) for the very simple reason, already indicated,
that capacity in this instance is nothing other than the possession by
the Applicant State of the substantive right relied on as the basis of
its claim.
The Spanish Government itself explicitly recognizes that the deter-
mination of the existence or otherwise of an international obligation,

the breach of which a State alleges, is a matter of the merits. Such an
obligation could be declared existent or non-existent only asan obligation
owed by a particular State to another particular State. Consequently
if the question of whether or not the Respondent State has committed
a breach of an international obligation owed to the Applicant State by
taking a certain measure in respect of a private person is a matter of

the merits, the establishment of whether the obligation which is alleged
to have been breached by the Respondent State is owed to the Applicant
State-namely whether the right (the right of diplomatic protection)
corresponding to the obligation pertains to the Applicant State-is
also a matter for the merits, being only one aspect of the same question.

The answer to this question depends on the resolution of a number

of points. Not only is it necessary to determine the identity of the
private person affected by the measure of which the Respondent State
is accused, but it is also necessary to ascertain whether or not that per-
son is linked to the Applicant State by a bond of nationality. These
are al1points relating to the very existence of an obligation on the part
of the Respondent State towards the Applicant State, hence the exis-

tence of a breach of such obligation, and hence the international liability
asserted by the Applicant State. Al1 these points thus concern the
merits of the case.

5. The question raised by Spain as its third Prelirninary Objection
is therefore by no means of a preliminary character, since the answer

to it is inseparable from an actual decision on the ments of the case.
This is why this question was not open to consideration by the Court
at the present stage of the proceedings, which was confined to questionsquestions ayant réellement, et non pas en raison d'une qualification
donnéepar la partie, le caractère de questions
L'im~ossibilité. Dour la Cour. d'examiner. au stade actuel de la
procédure, la question-de la qualité de la Belgique pour exercer la pro-

tection diplomatique était une hpossibilité absolue. Il ne s'agissziit
pas du tout de l'exercice éventueldela facultédiscrétionhaire de joindre
l'exception au fond, faculté qui suppose le caractère prdliminaire de
l'exception. Au contraire, la question de la qualité, dans le cas d'espèce,
Ctait une question concernant directement et exclusivement le fond,
non pas une question préliminaire qui aurait pu se présenter comme
liéeau fond d'une façon qui aurait pu autoriser la Cour à la joindre au
fond.
Il n"y avait pas non plus lieu de distinguer dans le cadre de ce qu'on
a appelé exception préliminaire no 3,comme l'a fait le Gouvernement
belge (plaidoirie du 23avril 1964),des questions qui étaient mûres pour
être tranchées et des questions qui, au contraire, ne l'étaient pas.

Cette distinction ne pourrait se fajre qu'à l'égard de questions ayant
toutes le caractère de véritables questions préliminaires ; elle serait
alors en rapport avec le lien plus ou moins étroit qui pourrait exister
entre chaque question et le fond de l'affaire. Dans l'espèce il s'agissait
non pas de questions distinctes, mais plutôt de différents points se rame-
nant tous à la même question, c'est-à-dire à la question de la qualité
de 1'Etat belge. Or, comme je l'ai dit, cette qualité relève du droit
substantielet la question de savoir si elle existe ou non est une question,
non pas simplement liéeau fond, mais plutôt concernant directement
et exclusivement le fond.
Je n'ai pas besoin de faire remarquer que l'accord, qui existait,
semble-t-il, entre les parties quant à la possibilité actuelle de résoudre

certains points, estimés par l'une et par l'autre partie comme mûrs pour
êtredécidés,était un accord n'ayant aucune influence sur les pouvoirs
de la Cour. Un tel accord non seulement n'obligeait pas mais n'autorisait
mêmepas la Courd'examiner, au stade actuel de la procédure,la question
de la qualité ni dans son ensemble ni dans certains des points d'où
elle résulte.

6. La question de la qualité ne pouvait donc, en aucun cas, être
examinée au stade actuel de la procédure. L'exception qui la concerne
ne pouvait non plus êtrejointe au fond aux termes de l'article 62,
paragraphe 5, du Règlement. Elle devait, au contraire, êtredéclaree
irrecevable en tant qu'exception préliminaire.

Il est sans doute possible de se demander si la question dela qualité
doit êtreexaminée avant les autres questions concernant également
le fond et quel ordre il faut suivre entre les différentspoints d'où ladite
question résulte. Il appartient exclusivement à la Cour et non pas aux
parties (ni à la partie défenderesse ni aux deux parties d'un commun
accord) de résoudre un tel problème. C'est un problème dont la solution
dépend,non pas de raisonslogiques, mais simplement de raisons d'oppor-which really, and not simply because they are so qualified by a party,
have the character of preliminary questions.
The bar on the Court's considering at the present stage of the pro-
ceedings the question of Belgium's capacity to exercise diplomatic
protection was an absolute bar. There could be no question of a
possible exercise of the discretionary power to join the objection to
the merits, which presupposes the preliminary character of the objec-
tion. On the contrary, in the present case the question of capacity

was a question directly and exclusively concerning the merits, not a
preliminary question arising as linked to the merits in such a way as
to jnstify the Court in joining it to the merits.

Nor were there any grounds for making a distinction, within the
arnbit of what ha5 been called Preliminary Objection No. 3-as did
the Belgian Govemment (heanng of 23 April 1964)-between questions
ripe for decision and questions which were not. This distinction could
apply only in respect of questions which al1possessed the character of
genuine preliminary questions ;it would then be a matter of the greater
or lesser degree of relationship between each question and the merits
of the case. In this case the questions concerned were not separate
questions, but rather different points al1relating to the same question,
namely the question of the capacity of the Belgian State. Now as
1 said before, that capacity derives from the substantive right ; and

the question of whether or not it exists is a question which is not merely
connected with the merits, but rather which directly and exclusively
concerns the merits.
1 need hardly point out that the argument which appeared to exist
between the parties, conceming the possibility of deciding at this stage
certain points considered by both as ripe for decision, was one which
could have no influence on the powers of the Court. Such an agree-
ment not only did not oblige the Court, but did not even give it author-
ity to consider the question of capacity at the present stage of the
proceedings, either as a whole or in respect of certain of the points
on which it arises.

6. The question of capacity could therefore definitely not be one
arising for consideration at the present stage of the proceedings. Nor

was the objection relating to it capable of being joined to the merits
under Article 62 (5) of the Rules of Court. It ought on the contrary
to have been declared inadmissible as a preliminary objection.
Whether the question of capacity should be considered before the
other questions which also concem the merits, and the order in which
the different points on which that question arises should be taken, are
of course matters which may arise for consideration. It restsexclusi-
vely with the Court and not with the parties (either with the respondent
party or with both parties acting in agreement) to decide such matters.
The decision depends not upon logical reasons, but simply upon reasons tunité et d'économie :un problème que la Cour ne pourrait envisager que
sur la base d'une vue d'ensemble de toutes les questions concernant le
fond et, par conséquent, seulement dans la phase de la procédure dans

laquelle ces questions peuvent êtretranchées.

Il suffit de faire remarquer à cet égard qu'il est bien possible, dans
un cas donné, qu'une question autre que celle de la qualité (par exemple,
la question concernant le contenu mêmede la règle de droit invoquée

comme fondement de la demande) se présente comme une question plus
facile à résoudre que la question de la qualité. Dans un cas pareil la Cour
peut bien trouver convenable de commencer par l'examen de ladite
question et de prononcer éventuellement, sur la base de la solution
donnée à cette question, le rejet au fond de la demande, sans aborder

du tout la question de la qualité.

I. Par la quatrième exception préliminaire l'Espagne a affirméque
les remèdes accordés par le droit interne espagnol n'avaient pas été
épuisés,pour conclure à ce que la Cour déclare, pour cette raison,
1'~irrecevabilité définitive))de la demande belge.
u
Le caractère préliminaire de cette exception et, par conséquent,
sa recevabilité en tant qu'exception préliminaire dépendent de la nature
que l'on reconnaît à la règle sur laquelle la mêmeexception est fondée.
Il faut faire remarquer, à cet égard, que le Gouvernement espagnol n'a
pas fondésa quatrième exception préliminaire directement sur l'article 3

du traité hispano-belge de 1927. Le Gouvernement espagnol a invoqué,
au contraire, une règle du droit international général : la règle dite de
l'épuisement préalabledes voies de recours internes, règle qui, d'après le
mêmeGouvernement espagnol, ne serait que confirmée par l'article 3
du traité de 1927.

Or la règle de l'épuisement des recours internes, en tant que règle du
droit international général,est, à mon avis, une règle substantielle
et non pas procédurale. Il s'agit précisémentd'une règlecomplémentaire
d'autres règles ayant, elles aussi, le caractère de règles substantielles :
c'est-à-dire des règles concernant le traitement des étrangers.

Lesdites règles prescrivent aux Etats, auxquels elles s'adressent,
un résultat final déterminé quant au traitement des ressortissants
étrangers, tout en laissant 1'Etat obligé libre pour ce qui concerne
les moyens à employer. Par conséquent, si un organe de 1'Etat obligé

accomplit un acte contraire au résultat voulu, l'existence d'un fait
illicite international et de la responsabilité internationale de 1'Etat
ne peut être affirméetant qu'il existe, pour le ressortissant étranger,
la possibilité d'obtenir, par les voies de l'ordre interne, la réalisation
du résultat visépar la règle internationale. of convenience and economy. It is only on the basis of a comprehensive
view of al1 the questions concerning the merits, and consequently
only in the phase of the proceedings in which such questions arise for
decision, that the Court could embark upon an examination of such
matters.

It suffices to observe in this connection that it is quite poîsible, in a
particular case, for a question other than that of capacity (for example,
the question of the actual content of the rule of law on which the clairn
relies) to appear to lend itself more readily to decision than the question
of capacity. In such case, the Court may well think fit to begin by
considering that question and, on the basis of the conclusion reached

on that question, possibly to decide to reject the claim on the merits
without dealing with the question of capacity at all.

I. In the fourth Preliminary Objection Spain asserted that the reme-
dies provided by Spanish municipa! law had not been exhausted and
submitted that the Court should for this reason declare the Belgian

claim to be "definitively inadmissible".
The preliminary character of this objection and hence its admissibi-
lity as a preliminary objection depend on what is held to be the nature
of the rule on which the objection is based. It must be observed in
this connection that the Spanish Government did not base its fourth
Preliminary Objection directly on Article 3 of the Hispano-Belgian

Treaty of 1927. On the contrary, the Spanish Govemment relied on a
rule of general international law, the local remedies rule which, accord-
ing to the Spanish Government, is only confirmed by Article 3 of the
1927 Treaty.

However, the local remedies rule, as a rule of general international

law, is in my view substantive and not procedural. It is indeed a rule
which is supplementary to other rules which also themselves possess
the character of substantive rules, narnely the rules concerning the
treatment of foreigners.
Those rules require from the States to which they are directed a
particuiar final result in respect of the treatment of foreign nationals,

leaving the State which is under the obligation free as regards the means
to be used. Consequently, if an organ of the State which is under the
obligation performs an act contrary to the desired result, the existence
of an intemationally unlawful act and of the international responsi-
bility of the State cannot be asserted so long as the foreign national has
a possibility of securing, through the means provided by the municipal

legal system, the result required by the international rule. 2. Il e ensuit que, si dans un procès international introduit,comme
le procèsactuel, par une demande fondéesur la lésion,par un organe de
1'Etat défendeur, d'un ressortissant de 1'Etat demandeur on constate
que les recours admis par le droit interne du premier Etat n'ont pasCté
épuisés,la conclusion à tirer de cette constatation n'est pas l'irreceva-

bilitéde la demande, mais plutôt le rejet de la demande au fond. Dans
l'hypothèse que je viens d'indiquer, en effet, on constate que la violation
alléguéedu droit substantielinternational de 1'Etat demandeur ne s'est
pas accomplie.

La conséquenced'une telle constatation ne peut consister qu'à nier la
responsabilité de l'Etat défendeur et, par là, à rejeter la demande au
fond. L'arrêtqui décidede cette façon est, partant, un arrêtau fond,
produisant, en tant que tel,ffet de chosejugéeau sens matériel. Or c'est
justement un tel jugement qui a étédemandé,bien que sous la formule
inexacte et contradictoire de l'irrecevabilité définitive,par l'Espagne
dans sa quatrième exception préliminaire. Mais un tel jugement ne pou-
vait êtrerendu par la Cour au stade actuel de la procédure.
Il faut en conclure que la quatrième exception prkliminaire aussi

devait être,non pas jointe au fond, mais plutôt déclarée irrecevable
en tant qu'exception préliminaire.

(Signé) Gaetano MORELLI. 2. It foilows that if in international proceedings instituted, like
the present proceedings, by a claim based on damage to a national of
the applicant State by an organ of the respondent State, it is found
that the remedies made available by the municipal law of the respondent

State have not been exhausted, the conclusion which must be drawn
from this finding is not the inadmissibility of the claim, but rather the
dismissal of the claim on the merits. In the eventuality 1 have des-
cribed what is in fact found is that the alleged violation of the sub-
stantive international right of the applicant State has not been accom-
plished.
The consequence of such a finding can only be a denial of the respon-
sibility of the respondent State qd hence dismissal of the claim on the
merits. A judgment to this effect is thus a judgment on the merits
and produces as such resjudicatain the material sense. It is just such
a judgment, although incorrectly and contradictorily worded in the
form of definitive inadmissibility, that is asked for by Spain in its
fourth Preliminary Objection. But it was not open to the Court to
give such a judgment in the present phase of the proceedings.
It must be concluded that the fourth Prelirninary Objection also

ought to be, not joined to the merits, but rather declared inadmissible
as a preliminary objection.

(Signed) Gaetano MORELLI.

Document file FR
Document Long Title

Opinion dissidente de M. Morelli

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