Opinion dissidente commune de Sir Percy Spender et Sir Gerald Fitzmaurice (traduction)

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047-19621221-JUD-01-07-EN
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047-19621221-JUD-01-00-EN
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OPINION DISSIDENTE COMMUNE

DE SIR PERCY SPENDER ET SIR GERALD FITZMAURICE

Puisaue nous ne sommes Das à même denous rallier à la décision

de la Cour, il est nécessaireque nous énoncions lesraisons de notre
opinion dissidente.
L'affaire présente une importance particulière. Non seulement
elle pose un problème fondamental de méthode judiciaire, mais elle
présente aussi des difficultéstout à fait exceptionnelles - ce que
fait ressortir la faible majorité dont dépend la décision.
Ces difficultésne sont pas simplement techniques, bien qu'il en
existe de cet ordre. Elles résultent plutôt du fait que l'affaire est
de celles dont la solution risque d'êtredominée ou tout au moins
fortement influencéepar la manière dont on l'aborde.
Pour pouvoir se déclarer compétente, la Cour doit rejeter non
seulement toutes les exceptions formellement présentées par le
défendeur, mais encore certaines autres que nous mentionnerons le
moment venu.

A notre avis, la Cour n'a pu le faire qu'en adoptant des prémisses
qui, ainsi qu'il ressortira de ce que nous avons à dire, supposent
largement à l'avance l'exactitude des conclusions auxquelles on
aboutit.
Nous pensons que le point de vue généraladopté par la majorité
de la Cour en la présente affaire peut raisonnablement se décrire
comme suit - à savoir qu'il est souhaitable et juste qu'une dispo-
sition visant la juridiction obligatoire sur certains différends qui
figure (ou qui figurait) comme élémentd'une institution - le Man-
dat pour le Sud-Ouest africain - laquelle existe toujours en tant
qu'institution - ne soit pas tenue pour inopérante, simplement en
raison d'une modificc~tiondes circonstances - pour vu que cette
modification n'ait pas affecté la possibilitématériellede continuer
l'exécution. La Cour actuelle existe et elle a le même caractère
généralet remplit le même genre de fonctions que le tribunal

(l'ancienne Cour permanente) qui avait primitivement compé-
tence en vertu de cette disposition (c'est-à-dire l'articl7 du
Mandat pour le Sud-Ouest africain). Puisqu'il existe encore des
Etats (et parmi eux les Etats demandeurs) qui auraient eu le droit
d'invoquer l'article7 avant que ne se produise le changement dans
les circonstances, il faut aujourd'hui interpréter cet article commeleur donnant toujours ce droit, nonobstant toute disposition con-
traire dans ses termes réels outout obstacle résultant de tout autre
facteur pertinent.
11est évident que, dès lors qu'un tribunal a adopté une telle
manière de voir, sa tâche principale sera de découvrir des motifs
de rejeter les diverses exceptions ou contre-indications qui pour-
raient exister ou se présenter.
Nous n'avons pas cru pouvoir adopter cette .manière de voir. A
notre avis, la seule façon correcte de procéderest de commencer par
l'examen des éléments juridiques,en se référanten particulier, pour
les questions qui touchent à l'interprétation, aux termes réellement
employés, après quoi, partant de cet examen, on examinera les
conclusions correctes qu'il convient d'en tirer en vertu des règlesde

droit. C'est dans cet esprit que nous avons abordé notre tâche.

Nous ne sommes ni aveugles, ni insensibles quant aux différentes
considérations de caractère non juridique, social, humanitaire ou
autre, qui soulignent cette affaire; mais ce sont là des questions
qui ressortissent à l'arène politique plutôt que juridique. Nous
ne saurions leur permettre de nous écarter de notre devoir d'ar-
river à une conclusion strictement sur la base de ce que nous
croyons être l'opinion juridique correcte. Elles nous amènent
cependant à signaler un autre aspect de la question.
Un tribunal appelé à examiner des exceptions à sa compétence
doit écarter de sa considération toutes les questions touchant au

fond de l'affaire, moins que les questions de compétencene soient
si étroitement mêléesaux questions de fond qu'elles ne sauraient
êtreexaminées séparémentet doivent êtrejointes à celles-ci. Une
cour peut toutefois légitimement, en examinant les aspects juridic-
tionnels d'une affaire, tenir compte d'un facteur qui est fondamental
pour la compétence d'un tribunal quel qu'il soit, à savoir si les
questions qui se posent au fond sont de natureàpouvoir fairel'objet
d'une décisionjuridique objective.
Les mémoiresen la présente affaire montrent que ce que la Cour
est surtout appeléeàtrancher surle fond est la question de savoir si,
à plusieurs égards différents, 1'Etat défendeur, en sa qualité de
Mandataire, a violé les obligations que lui impose l'article 2 du
Mandat d'«accroître par tous les moyens en son pouvoir le bien-être

matériel et moral ainsi que le progrès social des habitants du
territoir...». Il est à peine un terme de cette phrase qui ne se
soit aujourd'hui chargé de divers sous-entendus et associations.
Il est à peine un terme qui ne nécessiterait une définition ou une
redéfinition objective préliminaire, avant de pouvoir s'appliquer
légitimement à la solution d'un litige juridique concret. Il est à
peine un terme qui ne pourrait s'appliquer de façon totalement
différenteà la mêmesituation ou à la même série de faits, suivant les opinions subjectives différentes touchant sa signification, ou ce
qui devrait êtresa signification dans le contexte; et ilest assuré
d'avance qu'en l'absence de critère objectif toute tentative d'appli-
quer ces termes aux faits d'un litige donné sera largement pénétrée

d'un élément subjectif. Les termes de cette phrase posent des
questions d'appréciation plutôt que de décisionobjective. En l'état
actuel des choses, nous avons les doutes les plus sérieux quant aux
bases juridiques sur lesquelles peuvent êtrefondéslescritèresobjectifs
nécessaires.
II est incontestable que le forum normal pour apprécier et
appliquer une disposition de ce genre est un forum techniqu,e et
politique, comme l'étaient (autrefois) le Commission permanente des
Mandats ou le Conseil de la Sociétédes Nations, ou comme le sont
aujourd'hui (en matière de tutelle) le Conseil de tutelle et 1'Assem-

bléedes Nations Unies. Mais lefaitque, dans lescirconstances actuel-
les, ce contrôle technique ou politique ne peut s'exercer en pratique
sur le Mandat pour le Sud-Ouest africain n'est pas un motif de
demander à un tribunal de remplir une tâche qui, en dernière
analyse, n'apparaît guère comme une tâche judiciaire.
A notre avis, les considérations qui précèdent renforcent singuliè-
rement l'opinion que, pour d'autres motifs, nous avons adoptée à
propos de la troisième exception préliminaire, àsavoir que le diffé-
rend sur la conduite du Mandat pour ce qui est de la (mission sacrée ))
(par opposition aux différends visant les intérêts étatiquesindivi-

duels des Membres de la Sociétédes Nations dans le cadre des
termes du Mandat) n'est pas de l'ordre des différends auxquels la
clause du Mandat sur la compétence obligatoire était destinée à
s'appliquer (ou s'appliquait).

NOUSen arrivons maintenant au fond de l'affaire à son stade
actuel, qui pose la question de la compétence de la Cour pour
connaître du fond et, en manière d'introduction, no.us voudrions

exposer que nos conclusions sur cette phase de l'affaire ont été
déduites en tenant compte de l'ensemble de quatre principes de droit
essentiels que nous croyons fondamentaux pour trancher les ques-
tions posées.Les voici :

1. Le principe du consentement en tant que base essentielle de
la juridiction internationale. Ceconsentement peut êtredonnéd'a-
vance, en termes généraux,ou bien ad hoc et, dans un cas déter-
miné, il peut êtreconsidéré commeayant été donné. Mais il faut
démontrer de façon objective qu'il a étédonné en fait et qu'il
couvre le cas determiné soumis à la Cour; cela ne saurait simple-
ment se présumer.

2. Le principe que les droits conférésou attribués àdes personnes
ou à des entités en une qualité déterminéeou en tant que mem-
152 bres d'une classe spécifiéen,e leur sont pas conférésou attribués
en leur capacité personnelle ou individuelle et cessent par
conséquent de s'offrir à elles si ellesperdent la qualitédéterminée
ou si elles cessent d'êtremembres de la classe indiquée.Ces droits
ne s'offrent pas davantage à elles en une qualité différente ou en
tant que membres d'une autre classe.

3. Le principe d'après lequel les dispositions s'interprètent et
s'appliquent prima facie selon les termes dans lesquels elles sont
rédigées,lorsque ceux-ci sont clairs et non ambiguspour exprimer
l'intention des parties, et ne peuvent êtrenégligéesou écartées
en quoi que ce soit que s'il est possible d'invoquer l'application
évidente d'un principe juridique d'autorité supérieure. Le prin-
cipe d'interprétation qui tend à donner aux dispositions leur
maximum d'effet utile ne saurait légitimement êtreinvoquépour
introduire ce qui équivaudrait àune revision de ces dispositions.

4. Le principe qu'un tribunal ne saurait corriger 1es.erreurs ou
omissions passées des parties et qu'il n'est pas du ressort d'un
tribunal de placer certaines des parties dans la position qui eût été

la leur si ellesavaient pris les mesures qu'elles auraient pu prendre
mais qu'elles n'ont pas prises, voire qu'elles ont délibérément
évitéde prendre.

A notre avis, l'arrêtde la Cour ne se conforme pas à ces principes,
soit qu'il n'en tienne pas compte, soit qu'il avance des motifs in-
suffisantspour s'en écarter comme, selon nous, il le fait clairement.
Il est dans la tradition juridique anglo-saxonne une maxime bien
connue: « Hnrd casesmake bad Law »,que l'on pourrait paraphraser
en disant que la fin, si légitime soit-elle en soi, ne justifie pas les
moyens lorsque les moyens considérésentant que moyens juridiques
sont tels qu'ils sont inadmissibles.
C'est sur la base de cette considération, et en tant que Membres
d'une Cour dont la mission, telle qu'elle est définieà l'article 38,

paragraphe 1, de son Statut «est de régler conforniément au
droit international les différends qui lui sont soumis »,qu'il nous
est impossible d'accepter le raisonnement sur lequel repose l'arrêt
de la Cour.

EXPOS~ DES QUESTIONS PERTINENTES

Bien que l'arrêtexpose les questions en cause, nous croyons qu'il
n'en dégagepas suffisamment la véritable nature et nous nous pro-
posons de le refaire brièvement nous-mêmes.
La compétence de la Cour procède essentiellement de l'ar-
ticle36, paragraphe 1, de son Statut aux termes duquel elle peut

153 connaitre de toutes les affaires que les parties lui soumettent
[d'un commun accord] ou de tous les cas cspécialement prévus ...

dans les traités et conventions en vigueur 1).Mais le point de savoir
si, dans un cas donné, la Cour peut exercer sa compétence à titre
obligatoire dépend d'éléments extérieurs à cette disposition - par
exemple de l'existence d'une déclaration faite en vertu de l'article
36, paragraphe 2 (la((disposition facultative »),ou des termes d'une
clause de règlement judiciaire obligatoire par la Cour figurant dans
un traité ou une co~iyention en vigueur.
C'est pourquoi les Etats demandeurs ont invoquéla juridiction de
la Cour surla base de l'effet combinédel'article 7 du Mandat pour le

Sud-Ouest africain et de l'article 37 du Statut de la Cour. S'ils ont
citécette dernièredisposition, qui est en réalité decaractère mécarii-
que, c'est que le tribunal prévu à l'origine pour le règlement des
différendsvenant à s'éleverdans le cadre de l'article 7 du Mandat
était la Cour qui a précédé l'actuelle, à savoir l'ancienne Cour per-
manente de Justice internationale qui a cesséd'exister en 1946.Cette
Cour était également mentionnée dans les clauses juridictionnelles
de nombreux autres actes internationaux. A notre avis, l'effet de

l'article37 du Statut de la Cour actuelle -- et son seul effet pertinent
en l'espèce - a étéde substituer (entre les parties au Statut) la
Cour actuelle à l'ancienne Cour permanente dans tous les cas où,
aux termes d'ccun traité ou rd'] une convention en vigueur », la
Cour permanente aurait été compétente pour connaitre de l'affaire
et statuer sur celle-ci. Les passages pertinents de cet article sont les
. suivants:

(Lorsqu'untraitéouune conventionen vigueurprévoitlerenvoi...
à la Cour permanente de Justice internationale, la Courinternatio-
nale de Justice constituera cette juridiction entre les parties ail
présentStatut. 11

Nous attironsl'attention sur la rédaction semblable de cet article
du Statut et de l'article 36, paragraphe 1,en tant qu'ils visent tous
deux les traités et conventions en vigueur. Cela a une importance
sur laquelle nous reviendrons.
Toutefois il est clair que, quelle que soit l'interprétation correcte

à donner aux mots (un traité ou une convention en vigueur »,
l'article 37 ne peut s'appliquer d'après son texte qu'aux clauses
juridictionnelles d'actes qui sont en droit des traités ou des con-
ventions et qui en tant que tels (c'est-à-dire en tant que traités ou
conventions) sont (cen vigueur 1).Ce n'est que pour les clauses
figurant dans des actes répondant à ces conditions que la Cour
actuelle a été substituée à,l'ancienne Cour permanente.
La première thèse de 1'Etat défendeur est que l'acte pertinent -

le Mandat pour le Sud-Ouest africain - ne remplit ni l'une ni l'autre
de ces conditions, c'est-à-dire qu'il n'a pas le caractère d'un traité
ou d'une convention et que, même s'ila ce caractère, il n'est plus en
vigueur.
154 OP. DISS. COMMUPYEJUGES SPEPYDER ET FITZMAURICE
470
En tout cas il est kvident que l'article 37, quelque applicable
qu'il soit par ailleurs, ne confère pas, et ne peut conférer, à lui seul
compétence à la Cour car d'après son texte il ne s'applique qu'aux

cas où la Cour permanente aurait eu compétence. Donc, pour voir
s'il en aurait été +si en l'espèce, il faut se référerà la disposition
invoquée par les Etats demandeurs comme étant celle qui a prévu
le renvoi à la Cour permanente, à savoir l'article 7 du Mandat pour
le Sud-Ouest africain. TToicile passage pertinent de cette dispo-
sition:

Le Mandataire accepte que tout différend, quelqu'il soit, qui
viendrait à s'éleverentre lui et un autre Membrede la Société des
Nations relatif à l'interprétationou à l'application des dispositions
du Mandat, et qui ne soit pas susceptibled'êtreréglé par des négo-
ciations, soit soumis à la Cour permanente de Justice internatio-
nale...»

Cette disposition soumet nettement l'obligation à trois, ou peut-être
mêmequatre, conditions: il doit y avoir un (différend »;ce différend
doit s'êtreélevéentre le Mandataire et ((un autre Membre de la
Sociétédes Nations n; il doit êtrerelatif (à l'interprétation ou à
l'application des dispositions du Mandat N; et enfin il doit êtretel
qu'il ((ne soit pas susceptible d'êtreréglépar des négociations ».

Nous soulignons les mots (ne soit pas susceptible »:
Qu'elles aient étéeffectivement soulevéespar 1'Etat demandeur
ou qu'elles soient inhérentes àla rédaction de l'article 7,les questions
- que posent ces conditions sont (pourles énumérer dans l'ordre où il
conviendrait d'en traiter) les suivantes:

I. S'ily a un différend,s'agit-ild'un différendentre.le Mandataire
et (un autre Membre de la Sociétédes Nations ))- ou en d'autres
termes les Etats demandeurs ont-ils qualitépour invoquer l'article 7?
2. Si les demandeurs ont qualité pour invoquer l'article 7, existe-

t-il réellement un véritable différend entre eux en tant que tels et
l'État défendeur -- et que doit-on entendre à cette fin par différend?
Par exemple (entre autres), les demandeurs en tant que Parties aux
présentes instances sont-ils également Parties au véritable différend
qui existe?

3. Si les demandeurs'sont Parties non seulement aux présentes
instances, mais encore au différendavec l'État défendeur, ce diffé-
rend appartient-il à la catégorie que vise l'article 7?
4. Y a-t-il eu des négociationsàproprement parler en vue derégler
le différend spécifiqueentre les demandeurs et le défendeur?

5. Peut-on considérer que le différend ((ne soit pas susceptible ))
d'êtreréglépar des négociations? Nous examinerons les différentes questions en cause dans l'ordre
suivant :

Premièrement - Les deux questions que pose l'article 37 du
Statut :existe-t-il ((un traité ou une convention )et, sioui, est-il((en
vigueur ))en tant que tel?

Deuxièmement - La question principale que pose l'article 7 du
Mandat, à savoir: les Etats demandeurs ont-ils qualité pour l'invo-
quer?

Troisièmement - Les diverses questions ayant trait à l'existence
d'un différendopposant réellement lesdemandeurs en tant que tels
et le défendeur, et, si un tel différend existe, à son caractère en
rapport avec l'article 7.

Quatrièmement - Les diverses questions ayant trait aux négo-
ciations - y a-t-il eu des négociationsau sens prévuà l'article 7 et,
si oui, peut-on en conclure que le différend (ne soit pas susceptible ))
d'êtreréglépar des négociations?

Ces quatre questions ou groupes de questions correspondent en
gros, mais pas absolument, aux quatre exceptions préliminaires

d'incompétence qui ont étésoulevéespar 1'Etat défendeur.
Mais, avant de les aborder, nous croyons nécessairede dire quel-
ques mots de la pertinence, en ce qui concerne ces questions et ces
exceptions, de l'avis consultatif rendu par la Cour le II juillet 1950
sur le statut du Mandat pour le Sud-Ouest africain et sur des
questions connexes.

III

L'AVIS CONSULTATIF RENDU PAR LA COUR EN 1950

Nous hésitons beaucoup à traiter de ce que nous appellerons
l'avis de 1950 l.Nous considérons cet avis comme erronésur un ou
deux points importants, mais non pas surtous les points. Toutefois,
cette opinion n'affecte pas nos conclusions en l'espèce car nous
croyons qu'il s'agit aujourd'hui de questions différentes. Si nous
sommes obligésde le préciser,c'est,en premier lieu,que l'arrêtde la

Cour se fonde en partie sur l'avis de 1950; et, en second lieu, que le
caractèrepertinent de cet avis a fait l'objet de longs développements
de la part des Parties au cours de la présente procédure. Les deux
demandeurs ont soutenu que l'avis de 1950est exact àtous égardset
(sans se fonder pour autant sur l'autorité de la chose jugée) qu'il
régit entièrement et automatiquement les questions qui se posent

Sur la première questioposéeàla Cour, cet avis peutse diviser en trois parties:
qui traite de l'article 7. Le raisonnedela Cour sur chacun de ces deux derniers
articles sembleondé sur des motifs toutà fait distinctet séparés. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 472

en l'espèce.L'État défendeur l'a contesté et il a également produit
des preuves dont il a prétendu qu'elles étaient nouvelles et que,
si ellesavaient étésoumises àla Cour en 1950,ellesl'auraient amenée
à se prononcer différemment. Les demandeurs ont répondu en niant
que ces preuves fussent nouvelles ni qu'elles eussent eu la moindre
influence sur l'avis de la Cour.
Nous considéronsla plus grande partie de ce débat comme hors
du sujet. Certaines des questions soulevéesen l'espèce (cellesqui ont
trait aux troisième et quatrième exceptions préliminaires) ne se sont

pas posées,et n'auraient pas pu se poser, au cours de la procédure
de 1950, qui n'avait pas comme la procédure actuelle un caractère
contentieux. En ce qui concerne l'une des principales questions qui
se posaient en 1950, celle du statut du Mandat en tant qu'institution
internationale, la Cour n'a guère fait plus en1950 que de constater,
pour divers motifs, que la dissolution de la Société des Nations
n'avait pas entraîné la caducité du Mandat et que, malgré cette
dissolution, le Mandat était encore en vigueur. Mais la Cour ne
s'est spécialement occupée ni de la base sur laquelle le Mandat
était en vigueur, ni du point précis de savoir s'il était encore en

vigueur en tant que traité ou convention. Dans le dispositif de son
avis de 1950, la Cour n'a rien fait de plus, en ce qui concerne la
présente espèce,que d'énoncer qu'en raison de l'article 37 du Statut
la Cour actuelle était substituée à l'ancienne Cour permanente;
mais, sur ce point comme pour la très brève mention qu'elle a
dans son avis faite de l'articl37 et de l'articl7 du Mandat, la Cour
semble avoiradmis l'existence des conditions nécessairessansappro-
fondir la matière. Le peu qu'elle ait dit n'aide en rien, et il ne saurait
en êtreautrement puisqu'aucune question ayant trait àla compéten-
ce n'était soumise à la Cour en 1950. Il est clair que des hypothèses
apparemment faites sans aucun raisonnement ni sans aucune étude

sur ce qu'elles impliquaient précisément, dans un avis consultatif
portant essentiellement sur d'autres points ne soulevant pas de
question concrète de compétence, ne constituent pas une base suffi-
sante pour établir la compétence dans une procédure contentieuse
ultérieure au cours de laquelle ces questions sont directement posées.
De même, nous pensons que la conclusion à laquelle la Cour est
parvenue en 1950, et d'après laquelle l'Assembléegénérale desNa-
tions Unies a qualité pour exercer les fonctions de surveillance de
l'ancien Conseil de la Sociétédes Nations aux termes de l'article 6
du Mandat, est également sans pertinence en l'espèce, car il ne
s'agit pas spécifiquement de «dévolution »,de (succession » ni de
((continuation » - quelle que soit l'importance que les Parties ont

donnée àcesnotions dans leurs écritures et plaidoiries. Nous répétons
que la question présentement soumise àla Cour est une pure question
de compétence. La compétence de la Cour ne saurait se présumer
sur la seule base d'une dévolution. L'existence de l'article7 suffità
le prouver. Si la compétence de la Cour en tant que successeur de la
Cour permanente ne se dégagepas expressément de l'effet combiné

157 OP. DISS. COMMUNE J'UGES SPENDER ET FITZMAURICE 473

des articles 36 et 37, il n'y a pas compétence. Personne ne conteste
que l'article 37 substitue la Cour actuelle à l'ancienne, sous réserve
que les conditions poséesà l'article 37 soient remplies au moment
où la compétence est invoquée. Il s'agit de savoir si ces conditions
sont remplies en l'espèce. De même, personnene doute que l'article 7
du Mandat contienne une obligation de recourir au règlement
judiciaire, sous réserve que les conditions poséesà cet article soient
remplies. Là encore, il s'agit de savoir si elles le sont.

Cesont là à nos yeux des questions tout àfait différentesde celles
qui ont étésoumises à la Cour en 1950 ;'est pourquoi nous essaye-
rons d'envisager uniquement en elles-mêmes lesquestions de com-
pétence qui se posent en l'espèce.

Tenant compte de l'opinion qui est la nôtre sur la troisième
exception préliminaire, à savoir que l'article 7 était destiné unique-
ment à sauvegarder les intérêtsindividuels des Membres de la
Sociétédans le territoire soumis au Mandat, d'après les termes de
celui-ci, et ne s'appliquait pas aux différendsrelatifs à la conduite
du Mandat, une grande partie de la discussion sur la première ex-
ception préliminaire (de mêmeque la seconde) présente pour nous
un certaincaractère artificiel puisque, dans le contexte de la présente
affaire, ces exceptions n'ont guèrede sens et sont en tout casinutiles
si l'article ne vise pas la conduite du Mandat. C'est pourquoi nous
discutons ces exceptions en supposant qu'il s'y applique, nous

bornant àsignaler qu'une grande partie des obscurités quientourent
ces exceptions s'éclaircissent si l'on adopte le point de vue opposé
qui est le nôtre.

I. Le fardeau dela preuve. Le devoir dela Cour de vérifierà sa
satisfaction quela compétence est établiede façon concluante

Pour éviter que notre attitude quant au caractère du Mandat et
quant à la première exception préliminaire ne soulève de malenten-
du, il nous faut commencer par rappeler que, la Partie qui invoque
la compétence de la Cour ayant la charge de la démontrer d'une
manière concluante, il s'ensuit qu'il appartient au demandeur de
montrer que le Mandat est sans doute raisonnable un «traité ou une
convention en vigueur ))aux fins des articles 36 et 37 du Statut.
Au surplus, et en dehors de toute question de fardeau de la preuve,

la Cour, avant d'admettre sa compétence, doit êtreconvaincue de
façon concluante - convaincue sans doute raisonnable - que
la compétence existe bien. S'il se révèleun doute raisonnable -
et à plus forte raison, pour dire le moins, s'il existe un doute très
sérieux -, alors, étant donné que le principe du consentement est
158 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 474

la base indispensable de la compétence internationale, il faudrait
arriver à la conclusion que la compétence n'est pas établie. Bref,
d'après les règles normales d'interprétation des clauses de juri-
diction, le doute devrait se résoudre à l'encontre de l'existence de la
compétence.

Dans les passages qui suivent, nous arrivons à la conclusion que

s'ily a place pour une discussion, et mêmeune discussion serrée,
l'opinion qui doit prévaloir est que le Mandat n'avait pas le caractère
d'un traité ou d'une convention; qu'on ne saurait légitimement
examiner l'article 7 du Mandat en l'isolant du reste du Mandat pour
lui attribuer un certain caractère conventionnel propre, indépen-
damment de l'acte dans lequel il est incorporé; et que, mêmesi le
Mandat ou l'article 7 pris séparémentavaient ce caractère, ni l'un
ni l'autre ne sont plus aujourd'hui en vigueur en tant que traité.
Nous désironscependant préciser tout à fait clairement que notre
conclusion finale sur la première exception préliminaire ne repose
pas su: ces seuls facteurs. Elle repose également sur le simple fait
que 1'Etat défendeur n'a aucune obligation de réfuterle caractère

conventionnel passé et présent du Mandat ou de l'article 7. C'est
au demandeur qu'il appartient d'établir sans doute raisonnable
ce caractère puisque cela touchè àla racine mêmede la compétence.
La Cour a également le devoir d'êtreconvaincue en ce sens affir-
mativement.
A notre avis, l'examen du dossier de la procédureet des plaidoiries
prononcéesmontre que, mêmedans l'appréciation la plus favorable
des considérations qu'on peut développer à l'appui de la thèse que
le Mandat ou l'article 7 étaient et sont«un traité ou une convention
en vigueur »,des doutes très sérieux - pour dire le moins --
demeurent sur le point de savoir si tel est réellement le cas. Pour ce
motif seul, il faudrait retenir la première exception préliminaire,
mêmes'il n'y avait pas d'autres raisons plus positives de le faire.

2. Le Mandat était-ilztn traitéou une convention?

a) Le caractèrejuridique d'un traitéou d'une convention
Avant d'examiner le caractère du Mandat, ce qui nous obligera à
énoncer aussi brièvement que possible les traits saillants de la
procédure qui lui a donné naissance, il faut se référerà certains
points de droit préliminaires.
Notre point de vue sur ce qu'il faut entendre par lestermes « traité
ou convention )n'est ni étroit ni doctrinaire. Nous ne sommes pas

coupables - tout au moins nous l'espérons - des solécismes con-
sistant soit à supposer que seuls peuvent êtreconsidéréscomme
159 OP. DISS. COMM.UNE J.UGES SPENDER ET FITZMAURICE
475
traités ou conventions les actes effectivement dénommés tels, soit à

confondre l'accord international en tant qu'acte avec l'instrument
particulier dans lequel il est inscrit. Nous attachons à la notion de
traité ou de convention la portée la plus large, l'étendant à tout ce
qui constitue ou incorpore un accord international, quelsqu'en soient

la forme, le style ou le titre--à tout accord qu'il soit solennel ounon.
Mais, tandis que le droitinternationaladopte àjuste titre un point
de vue libéral sur ce qu'il faut entendre par traité, convention ou
autre forme d'accord international, cette notion n'est pas illimitée.
Elle n'est pas synonyme, comme l'arrêtde la Cour pourrait presque

conduire à le supposer, de la notion d'actes et instruments inter-
nationaux en général.C'est ainsi que, dans le projet final sur la
« Conclusion, l'entrée envigueur et l'enregistrement des traités »qui
a étécomplétéau début de la présente année (doc. A/C.N. 41148 du

3 juillet 1962), la Commission du droit international des Nations
Ùnies a adopté la définition suivante du mot traité, à laquelle nous
nous associons :

«L'expression « traité »s'entend de tout accord international en
forme écrite, qu'ilsoit consignédans un instrument unique ou dans
deux ou plusieurs instruments connexes, et quelle que soit sa
dénominationparticulière[iciseplace l'énumération d'une douzaine
dedénominationspossiblescomprenant bienentendu : «conventipn »,
« accord » et « déclaration »], conclu entre deux ou plusieurs Etats
ou autres sujets du droit international et régipar le droit inter-
national. ))

On voit que cette notion de ce qu'il faut entendre par traité,
quoique large, n'est pas illimitée. Nous signalons en particulier dans

le contexte*les phrases « en forme écrite » et ((conclu entre deux ou
plusieurs Etats ou autres sujets du droit international »l. C'est
ainsi qu'un accord verbal, quoique susceptible d'être considéré
comme obligatoire (voir par exemple la déclaration Ihlen dans

l Il faut noterà titre subsidiaire - et c'est pourquoi nous le mentionnons en
note - que, si,contrairementà notre opinion, le Mandat poule Sud-Ouestafricain
avait eu par ailleurs la nature d'utraité ou d'une convention, on pourrait fonder
une objection à cette conclusion en invoquant le caractère des partiesà l'accord
de Mandat (si c'en était un). Comme nous le démontrerons plus loin, la seule
entité autre que le Mandataire lui-même qui aurait pu avoir le rang de partie
aurait été la Société des Nations, ou le Conseii de la Sociétéagissant pour celle-ci.
Mais il n'est nullemencertain qu'en 1920 (lorsquele Mandat a étédéfini) l'opinion
juridique internationaleeût accepté la conclusion à laquelle est arrivée la présente
Cour dans l'affaire des Dommages subis au service des hTations U~zies(Recueil I949,
p. 174)~ d'après laquelle les organisatiointernationales peuvent avoir une per-
sonnalité juridique séparée et distincte de celle de leurs membret avoir le rang
d'entités ((sujets du droit internationIIPar conséquent, à moins d'envisager le
Nandat à la lumière des conceptions juridiques contemporainescelui-ci n'aurait pu
avoir la nature d'un traité ou d'une conventionque si les parties avaienétédes
États.A notre avis, le seul État qui aurait pu être partie au Mandat, s'il s'agissait
d'un traité ou d'une convention, était le Mandataire,ce qui signifierait(sur la
base des prémisses qui précèdent) que le Mandat n'était nullement un traité ou
une convention, parce qu'il n'avait pasété concl«entre deux ou plusieurs Étatsr.
Nous y reviendrons pIus loin.l'affaire du Groënland oriental, C. P. J. I., SérieA/B no 53, pp. 69
etseq.),ne constituerait pas un traité ou une convention. Il elzserait
de même par exempled'unedéclarationd'intention ou d'une assurance
contenue dans un discours prononcédevant une conférenceou une
assembléeinternationak. Une déclaration comportant l'acceptation
unilatérale d'obligations ne serait en rien un accord international,
puisqu'il faut qu'un accord international soit conclu entre ((deux

ou plusieurs » parties.
Le caractèrequasi conventionnel qu'on attribue parfois aux décla-
rations selon la «disposition facultative »formulées enapplication de
l'article 36, paragraphe 2,du Statut résulterait uniquement de la
multiplicité de ces déclarations et de leur engrènement mutuel, qui
leur confèreun aspect bilatéral ou multilatéral. Lne seule déclaration
de ce genre, prise absolument isolément, ne saurait constituer un
accordinternational. Il est clair que les déclarations de la dispo-
sitionfacultativene rentrent pas dans lestermes «traités et conven-
tions » du paragraphe I de l'article 36, sans quoi le paragraphe 2

eût été inutile, sauf peut-être pour des raisons de commodité ou
d'accentuation. Si l'on devait considérer qu'un Etat qui a déclaré
l'intention d'accepter la juridiction obligatoire de la Cour pour
certaines catégories de différendsaurait de la sorte conclu un traité
ou une convention, un différend relevant des catégories spécifiées
ferait partie des cas (spécialement prévus » dans les « traités et
conventions en vigueur » au sens du paragraphe I. Nous avons
déjà attiré l'attention sur la similitude entre les termes de lJar-
ticle 37 du Statut et ceux de l'article 36, paragraphe 1, à propos

des traités ou conventions en vigueur. Il est clair que l'expres-
sion devait avoir le même sensdans les deux cas et nous ne pou-
vons coniprendre pourquoi on lui donnerait un sens plus large
dans un cas que dans l'autre. Il s'en dégageraune autre conséquence
lorsque nous examinerons plus loin si l'on peut détacher l'article 7
du Mandat et le considérer comme une déclaration isoléede carac-
tère conventionnel.
Les questions qui précèdentposent quelques-uns des problèmes de
droit les plus importants soulevés par cette partie de l'affaire.

L'arrêtde la Cour a pour effet d'identifier la notion d'accord inter-
national avec tout acte ou instrument qui incorpore des obligations
internationales, ou qui donne lieu à de telles obligations, ou qui
contient un (engagement »international ou s'y rattache. A notre
avis, il y alà une erreur, comme le montrent les exemples ci-dessus,
et l'onpourrait en fournird'autres. Pour reprendre le cas des engage-
ments unilatéraux, ceux-ci peuvent, comme nous l'avons déjà dit,
avoir un caractère quasi conventionnel quand ils s'engrènent les uns
dans les autres ou qu'ils s'engrènent dans les dispositions d'un traité

existant (commecefut le cas dans certaines des affaires de Minorités) ;
faute de quoi, il leur manque nécessairement l'élémentbilatéral OU
multilatéral essentiel pour donner à une disposition quelconque un
caractère conventionnel. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 477
Ce sont là de simples exemples. En résumé,l'idée quecela suffit,
s'ilexiste une obligation internationale, est une pétition de principe

qui présupposece qu'il s'agit de démontrer, car nul n'a jamais con-
testéque le Mandat ait donnélieu (et, tant qu'il demeure en vigueur
en tant qu'institution, donne lieu) à des obligations internationales.
Maiscela ne suffit pas àen faire un traité ou une convention ou toute
autre forme d'accord international. On ne saurait souligner trop
énergiquement que le critère n'est pas, ou n'est pas seulement, la
création d'obligations internationales, mais le caractèredeL'acteou de
I'instrument qui donne à ces obligations leur valeur juridique. Tel
est le point essentiel qu'il faut examiner danscette partie de l'affaire
relativement au Mandat pour le Sud-Ouest africain.
Il nous semble d'ailleurs évident, comme nous l'avons dit plus
haut, que nous ne commettons pas l'erreur élémentaire deconfondre
ou d'identifier l'instrument qui incorpore un acte international ouqui

en constitue la preuve avec cet acte lui-même. Bienqu'il soit souvent
commode de parler de l'instrument qui incorpore le Mandat pour le
Sud-Ouest africain comme du ((Mandat » (ou comme étant ((le
Mandat »), nous n'entendons pas signifier par là que le Mandat
consiste dans le morceau depapier original sur lequelila été transcrit
à Genèveet qui a étédéposéaux archives de la Sociétédes Nations
le 17 décembre 1920. Ce que nous entendons par le Mandat n'est
pas ce morceau de papier, mais l'acte international qui lui a donné
naissance, à savoir, selon nous, la résolution du Conseil de la Société
des Nations du même jour.Ce qu'il faut vérifierc'est la nature de
cette résolution pour voir si elle avait le caractère d'un traité ou
d'une convention.
Enfin, avant d'en passer à cet examen, nous entendons faire état
de preuves contemporaines aux articles 36 et 37 du Statut de la Cour

pour montrer qu'en dehors des principes de droit que nous avons
discutés et d'autres auxquels nous viendrons plus loin - comme
aussi des règles normales d'interprétation juridique - il n'est pas
permis d'interpréter les termes «traités ou conventions » dans ces
articles comme ayant une portée plus large que celle d'accords
internationaux, car ces preuves montrent que, lorsqu'on a eu en vue
quelque chose de plus large et de plus étendu que les instruments
de caractère conventionnel, il était possible de l'indiquer expressé-
ment et que cela a étéfait. Par exemple, l'article 80, paragraphe 1,
de la Charte, que les demandeurs en cette affaire ont si souvent
invoqué, déclare(entre autres) (aucune disposition du présent cha-
pitre ne sera interprétéecomme modifiant ...en aucune manière ...
les dispositions d'actes internationaux en vigueur ..» (les italiques

sont de nous). Il se peut mêmefort bien que cette formule ait été
expressément employée à l'article 80 pour viser notamment les
Mandats. Si les articles36 et 37 s'étaientservis d'une rédaction Sem-
blable à celle qui est marquée en italique dans ce passage, il n'aurait
pas été douteux que le Mandat était visé,quelque opinion que l'on
pût avoir sur le caractère de cet acte ou de cet instrument.De même, dans la résolution de l'Assemblée desNations Vnies du 12 février
1946 qui prévoit le transfert de certains avoirs de la Société des
Nations et la reprise de certaines fonctions de celle-ci, la partie qui
vise la possibilitéde transférer les fonctions politiques, y comprisdes
fonctions comme cellesde surveillance par le Conseildela Société aux
termes de l'article 6 du Mandat (bien que la résolutionne les ait pas
effectivement transférées, non plus que toutes autres fonctions
politiques, ni que les Nations Unies n'aient repris aucune de ces
fonctions), était rédigéede manière à se référer aux ((traités,
conventions, accords et autres instruments internationaux de carac-

tère politique» (les italiques sont de nous). Ici encore, si on avait
employé dans l'article 37 quelque formule semblable, telle que
((traités et autres accords et instruments internationauk », il n'y
aurait pas eu de doute.
Ces faits, ainsi que le principe du consentement comme base
de la compétence internationale, ne permettent pas juridiquement
d'interpréter àl'encontre du Mandataire les mots (traité ou conven-
tion ))dans l'article 37 comme s'ils avaient un sens plus large et
en particulier comme s'ils visaient tout instrument contenant une
clause de juridiction, indépendamment du caractère conventionnel
de cet instrument. Il est donc nécessaire d'établir strictement

que le Mandat présente ce caractère.
A ce point de vue, nous reconnaissons qu'on peut êtretenté de
considérer qu'un instrument qui contient une clause de juridiction
(en particulier s'il est rédigé commel'article 7 - «le Mandataire
. accepte ...» etc.) présentepro tanto un caractère conventionnel. Mais
nous ne croyons pas possible ou légitime dedétacher une disposition
d'un instrument et de l'isoler, de lui attribuer un caractère conven-
tionnel, puis, surcette base, de considérerque le mêmecaractère est
ainsi attribué à l'instrument tout entier. Pris isolément, l'article 7
ne pourrait pas être cun traité ou une convention ))aux fins de
l'article37 du Statut, car une clause de juridiction prise isolément

et en dehors du contexte où elle figure n'a pas de signification et ne
peut avoir d'existence réelle.Elle ne saurait s'interpréter et ne peut
certainement pas s'appliquer isolément. Le fait qu'elle figure dans
l'acte peut sans doute fournir une indication sur le caractère de ce
dernier et peut dans une certaine mesure témoigner de la nature de
l'instrument, mais c'est tout. Au surplus, il semble que si l'on
détachait l'article7 du reste du Mandat il présenterait alorsle carac-
tère d'une déclaration unilatérale entraînant l'acceptation unilaté-
rale d'une obligation, puisque l'engagement émanait du Mandataire
seul. Les déclarations unilatéralespeuvent contenir des engagements
et peuvent certainement créer des obligations internationales vala-
bles. Mais, comme nous l'avons notéplus haut, elles ne rentrent pas

dans la catégoriedes traités, conventions ou autres formes d'accords
internationaux puisqu'elles n'ont pas de caractère bilatéral.
Ayant donné les explications qui précèdentsur notre point de vue
concernant quelques-uns des principaux facteurs juridiques qui OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAUKICE
479
entrent en cause dans cette partie de l'affaire - d'autres sont

réservés pour un examen ultérieur--, nous en arrivons à l'examen
du Mandat lui-même.

b) Le système desMandats

Les divers territoires sous Mandat étaient tous des territoires
situés en Afrique, au Moyen-Orient et dans l'océan Pacifique à la
souveraineté desquels l'Allemagne ou la Turquie avaient renoncé

après la première guerre mondiale. Mais, avant de voir ce qu'il est
advenu de ces Mandats et en particulier du Mandat pour le Sud-
Ouest africain allemand, nous croyons essentiel d'établir une nette
distinction entre le système des Mandats d'une part et les Mandats

et leurs dispositions de l'autre. C'est en ne faisant pas cette distinc-
tion que l'on a créébeaucoup de confusion en l'espèce.Le système
des Mandats a étécréépar l'article 22 du Pacte de la Société des
Nations. Mais il n'en a pas étéde mêmedes Mandats proprement

dits. L'article 22 avait principalement pour objet: a) d'énoncerles
caracrères et les buts généraux dusystème; b) de distinguer entre
les différentstypes de Mandats («A », (B ))et ((C », ainsi qu'on les
a appelés)et d'énoncer d'une manière généralc ee qui serait néces-

saire dans chaque cas en vue de protéger les intérêtsdu territoire
sous mandat et de ses habitants l; c) d'établir une procédure de
contrôle de l'adniinistration des divers Mandats: ainsi, des rapports
devaient êtreenvoyéspar les Mandataires au Conseildela Société des

Nations et une Commission permanente des Mandats devait être
chargée de recevoir ces rapports et de donner au Conseil son avis
((sur toutes questions relatives à l'exécution desmandats 1).
Mais l'article 22 ne conférait par lui-mêmeaucun Mandat, ne

nommait aucun Mandataire et ne définissait les termes d'aucun
Mandat. Ainsi qu'on le verra, cela devait être faitpar ailleurs. Les
autres aspects del'article 22 qui sont particulièrement importants en
l'espècesont les suivants:

I. Il indiquait que les Mandats devaient êtreexercés par les
Mandataires (au nom de la Société ».

2. Il énonçait que (le bien-êtreet le développement )des peuples

des territoires sous Mandat formaient (une mission sacréede civili-

l Les Mandats (A Bconcernaient les pays du Moyen-Orient dont l'existence
comme nationsindépendantespouvait êtrereconnueprovisoirement et qui n'avaient
besoin que des conseils et de l'aide du Mandataire pour guider leur administration.
Les Mandats rB )concernaient les territoires d'Afrique centrale moins développés
qui pourraient en fin de compte devenir indépendants mais dont le Mandataire
devait assumer l'administration en attendant.Les Mandats (C x concernaient le
Sud-Ouest africain et certains territoiresdu Pacifique qui ne pouvaient «être
mieux administrées que sous les lois du Mandataire,comme une parie intégrante
de son territoire1.

164 sation 1)et qu'il convenait (d'incorporer dans le présentPacte des
garanties pour l'accomplissement de cette mission ». (Les italiques
sont de nous.)

3. Il disposait en son paragraphe 8 que, «si le degréd'autorité de
contrôle ou d'administration » à exercer par un Mandataire n'avait
pas ((fait l'objetd'une convention antérieure entre les Membres de la
Société »,il serait expressémentstatué sur cespoints par le Conseil ))

(les italiques sont de nous).
Avant d'en venir aux Mandats eux-mêmes. ilconvient de traiter

en Particulier du point 2 ci-dessus. Les « »(ou assurances,
ou sauvegardes, ainsi qu'on les appelle parfois) pour .l'accomplisse-
ment de la mission sacréedevaient êtreincorporées dans le Pacte
même. Il faut en déduire, d'après les principes d'interprétation

normaux, que toutes les mesures, obligations, etc., qui n'avaient
pas étéprévuesdans le Pacte ne pouvaient faire partie des « garan-
ties » aux fins de l'article 22, ni avoir le statut de telles ((garanties ))
- en d'autres termes, elles ne pouvaient être considérées comme
quelque chose d'essentiel au fonctionnement du système des Man-

dats ainsi que le concevait l'article 22. Au surplus, l'article 22 ne
donnait pas au Conseil de la Société le pouvoird'ajouter aux garan-
ties énoncéesdans cet article. En fait, le Conseilpouvait, aux termes
du paragraphe 8 de l'article 22, statuer sur les termes des Mandats

.et imposer par là desobligations aux Mandataires, maisil nepouvait
leur donner le statut de « garanties »,à moins qu'elles ne fussent
déjà définies comme des garanties dans une disposition du Pacte.
Ces ((garanties »étaient, bien entendu, préciséesdans le corps de
l'article 22. Certains paragraphes portaient entre autres sur la

prohibition d'abus tels que la traite des esclaves ou le trafic des
armes et celui del'alcool, sur la démilitarisation, etc. Maisla garantie
ou sauvegarde essentielle était la disposition relative aux rapports
et aux fonctions de surveillance à exercer par la Commission

permanente des Mandats et par le Conseil de la Société.
Nulle part dans l'article 22 ni dans le reste du Pacte l, il n'existe
de disposition correspondante prévoyant ce que l'on a appelé
(d'après nous à tort 2, le ((contrôle judiciaire » de l'administration

L'article14 du Pacte prévoyait l'établissement d'une Cour permanente de
Justice internationalmais (à part sa compétence consultativeà l'égard du Conseil
et de l'Assemblée de la Société) celle-ci ne devait connaîtreque des différends
1que les parties lui soumettront».L'article14 n'instituaipas la juridiction obli-
gatoire, que ce fût en matière de Mandaou en toute autrematière. La compétence
obligatoire devait êtreétablie spécialement. Dans le cas des Mandats,l'obligation
pour le Mandataire de se soumettre à la juridiction obligatoin'était pas établie
par le Pacte mais par les clauses des divers actes de Mandat.

4 notre avis, le «contrôlee n'est une fonction judiciaireque lorsque la loi
confie spécifiquement aux tribunaux une fonction de contrôle, comme cela peut
se produire, par exemple, dans le domaine interne en matière de protection des
mineurs ou des aliénés. Dans la procédure contentieuse, qui est la seule forme de
procédure à laquelle pouvait donner lieu l'article 7 du Mandat pour le Sud-
Ouest africain, le rôle de la Cour est de trancher udifférend donné - ce qui est
une fonction éminemment judiciaire et non pas une fonction de contrôle. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 481

des Mandats; il faut donc en conclure que, en tout cas àcette époque
(1919-1920), la disposition relative au règlement judiciaire obli-
gatoire des différendsrelatifs aux Mandats n'était pas considérée
comme un élément essentieldu système et ne faisait pas partie des
((garanties » pour l'accomplissement de la mission sacrée de civili-

sation au sensde l'article 22.Dire le contraire constitue à notre avis
une affirmation pure et simple et un argument pro domo.
Nous n'avons pas à nous demander s'il eût étébon ou mauvais
que le ((contrôle judiciaire 1)constituât l'une des garanties. Notre
tâche est simplement de constaterle fait et d'en tirer les conséquen-
cesjuridiques nécessaires.Cette question seprésentera ànouveau et,
bien entendu, si nous avons raison en ce qui concerne la trois.iéme
exception préliminaire, il est naturel qu'une disposition tendant à
assurer la protection judiciaire des intérêts étatiquesdes Membres

de la Sociétédes Nationsdans les temtoires sous Mandat n'ait pas
figuréparmi les « garanties » prévuesà l'article 22.

Il ressort à l'évidencedu résumé que nous venons de donner de
l'article22 que celui-ci avait principalement pour objet de définir
et de décrirele caractère d'un certain trustet du systèmeprévupour
le mettre en euvre; d'établir à cette fin certaines garanties dans

l'intérêtdes habitants des territoires en question; et de prévoir une
certaine procédure à cet égard. Mais il n'a pas crééde Mandats
particuliers; et l'accomplissement par un Mandataire desobligations
inhérentes au Mandat qui lui était conférépour qu'il l'exerçât «au
nom de la Société » relevait (voirparagraphe 8 de l'article 22) de la
définition expresse des pouvoirs du Mandataire qui devait faire
l'objet d'un accord entre «les Membres de la Société ))ou de leur
part, ou sur laquelle, à défaut d'un tel accord, il devait êtrestatué

par le Conseil de la Sociétéagissant en tant que tel.
Nous examinerons donc maintenant comment, de quelle ma-
nière et sous quelle forme cette définition expresse (qui consti-
tuait le Mandat) a étéfaite. Nous le ferons bien entendu en nous
référant au cas du Mandat pour le Sud-Ouest africain, mais il
convient de noter que la méthodeet la forme adoptées (àsavoir une
résolution du Conseil de la Société)ont étéexactement les mêmes
pour tous les Mandats, de quelque catégorie qu'ils fussent, à la
seule exception du Mandat pour l'Irak qui, fait important, a pris,

pour desraisons spéciales,la forme d'un traité réelet indubitable (ou
de plusieurs traités) entre Sa Majestébritannique et le roi d'Irak.
Le fait que tous les autres Mandats aient étéétablis suivant une
méthodeuniforme est important en tant qu'il n'y a rien eu de parti-
culier à cet égard dans le cas du Sud-Ouest africain. Si les autres

Si l'on excepte les «conditions d'égalitépour les échanges et le commerce»
prévues dans le cas des MandatB u,les droits des missionnaires, etc.Mandats avaient été établispar des actes ou instruments constituant
indubitablement des accords internationaux et en ayant la forme,
on aurait pu considérercette disparitédu Mandat pour le Sud-Ouest

africain comme purement accidentelle ou fortuite; et, puisqu'il n'y
a pas véritablement de différence d'espèceentre ce Mandat et les
autres (tout au moins ceux de la catégorie ((C ))dont relevait le
Sud-Ouest africain), on aurait pu le considérer comme étant de
mêmenature et comme ayant par conséquent aussi le caractère
d'un traité. Mais tel n'est pas le cas.

c) L'élaborationdu Mandat pour le Sud-Ouest africain

Résumons(sansvouloir en faire un long historique) les démarches
initiales qui ont conduit à l'institution ou à la promulgation du
Mandat pour le Sud-Ouest africain :
1. es-diver s andataires pour les anciens temtoires allemands
d'Afrique et du Pacifique ont étédésignéspar les cinq Principales

Puissances alliéeset associéesde la première guerre mondiale, les
États-unis d'Amérique,l'Empire britannique, la France, l'Italie et
le Japon (désignées parfois ci-après les (Principales Puissances »),
en faveur desquellesl'Allemagne avait renoncéàsa souveraineté sur
lesdits territoires aux termes de l'article119 du traité de Versailles.
Ce sont essentiellement ces pays qui ont décidé deréglerle sort
des territoires en question en les plaçant sous Mandat au titre
d'une mission sacréede civilisation1,mais le système lui-mêmea été
crééc ,omme nous l'avons vu, par l'article 22 du Pacte de la Société

des Nations.
2. Le transfert effectif des territoires aux divers Mandataires,
pris en cette qualité, a faitl'objet d'une disposition de l'article 257
du traité de Versailles; mais, avant mêmela signature du traité
(28 juin rgrg), une décisiondu Conseil supérieur de guerre prise et
publiée au début du mois de mai 1919 avait désigné lesdivers

Mandataires, dont l'Union sud-africainepour le Sud-Ouest africain;
en fait, le défendeur avait accepté le Mandat dans le courant du
mêmemois. La décision du Conseil supérieur de guerre a été
confirmée enaoût 1919. Mais la plupart des territoires sous Mandat
(y compris le Sud-Ouest africain) étaient déjà administrés par les
futurs Mandataires sur la base d'une occupation militaire résultant
des opérations de guerre. Lord Balfour a plus tard soulignéce point
devant le Conseil de la Sociétédes Nations en disant: (Le mandat

est, par définition, une limitation que les vainqueurs s'imposent
dans l'exercice de leur souveraineté sur les territoires conquis. Les
l Pour cette raison et du fait qu'elles étaient les bénéficiaires de la cession faite
par l'Allemagne, il se peut qu'en cette qualité, et non (comme on le verra) en tant
que parties aux Mandats, les Principales Puissances aient gardé et gardent encore
à titre latent un intérét résiduel ou réversible dans les en cause, sauf
dans les cas où ceux-ci sont devenusautoou ont accédà l'indépendance.
167Puissancesalliées et associéesse sont imposécette limmitation dans
l'intérêtde l'humanité et elles ont demandé à la SociétédesNations
de les aider dans l'application de cette politique générale. 1) Cette
déclaration, mêmesi on n'en approuve pas toutes les incidences
juridiques, tend clairement à appuyer l'opinion selon laquelle le

consentement donné par le Mandataire aux termes de l'article 7 doit
êtreinterprétéd'une façonrestrictive plutôt que libérale.

3. Le traité de Versailles (ainsi que le Pacte de la sociétédes
Nations qui en faisait partie) est entréen vigueur le IO janvier 1920;

le transfert effectif des territoires sous Mandat aux Mandataires,
pris en cette qualité, n'a donc eu lieu formellement, en vertu de
l'article 257, qu'à cette date. C'est le mêmejour que le système des
Mandats est entré en vigueur aux termes de l'article 22 du Pacte;
mais les Mandats mêmesne sont apparus que beaucoup plus tard -
pour le Sud-Ouest africain, le 17 décembre 1920. Onvoit donc que,
bien avant la création formelle du système des Mandats et plus
longtemps encore avant l'établiskment des termes des Mandats
mêmes, lesdivers Mandataires administraient en fait les territoires
sousMandat (pratiquement en qualitéde Mandataires) par une sorte

d'anticipation.

Selon nous, la situation décrite ci-dessus contribue beaucoup à
expliquer pourquoi les Mandats n'ont finalement pas pris la forme
de traités ordinaires. Certes, la SociétédesNations, en tant qu'entité,
était intéressée de près mais sa capacité de conclure des traités
était alors douteuse et aurait certainement étémise en doute.
Comment pourrait-on donc faire entrer en jeu la Société des
Nations sans soulever de questions quant à sa capacité de con-
clure des traités? En tout cas, il se peut fort bien qu'on ait

considérécomme inappropriée et de nature à souleverdes difficultés
juridiques l'apparition soudaine, plus de dix-huit mois après que les
Mandataires eussent assumé de factoleurs fonctions en cette qualité,
de traités comportant des signatures et ratifications et des disposi-
tions relatives à leur entrée en vigueur (d'ailleurs, qui exactement
les aurait signéset d'après quoi leur entrée en vigueur aurait-elle
été fixée?).
Le dosiier contient néanmoins des preuves que l'intention avait
d'abord été d'instituer les Mandats par voie de traités; mais cette
intention a étéabandonnée pour des raisons obscures,mais que l'on

peut deviner. Cela ne nous conduit cependant pas à la conclusion
qui semble avoir ététiréepar certains et d'après laquelle le Mandat

l Société des NationJournal officiel, dix-huitsession du Conseil1922,
pages546-548.
168devrait tout de mêmeêtreconsidéré commeconstituant ce que
l'on a pu vouloir en faire à l'origine- un traité. Nous en tirons la
conclusion contraire, à savoir qu'en fin de compte l'intention n'a
pas étéd'en faire un traité, sans quoi on aurait donné suite à cette
intention primitive. Les méthodes d'interprétation autorisées ne

sauraient aboutir à aucune autre conclusion.
Comme l'espace nous manque pour passer en revue toute la
documentation, nous préféronsnous concentrer sur un ou deux
points particulièrement importants. Le premier concerne un rapport
de M. Hymans, représentant de la Belgique au Conseil de la $ociété
des Nations, adopté à l'unanimité par le Conseil le 5 août 1920.
Ce rapport, qui est d'une particulière importance, contient un
examen détaillé des problèmes inhérents à l'institution du système
des Mandats en vue d'assurer l'exécution de l'article 22 du Pacte.
Il rappelle (inter alia) que l'artic22 pose deux principes essentiels
s'appliquant à tous les peuples non encore capables de se diriger
eux-mêmes :

1) c'est une mission sacrée de civilisation d'assurer le bien-êtreet

le développement de ces peuples ;
2) certaines garantiessont formuléespour assurer l'accomplissement
de cette mission, à savoir:

a) la tutelle de ces peuples sera confiéeaux nations les plus
aptes à assumer cette responsabilité;
b) ces nations l'exerceront en qualité de Mandataires et au
nom de la Société.

A ce propos, on notera que, parmi les garanties et sécurités
(telles qu'elles sont spécifiéesdans le rapport), il n'est pas fait
mention d'une (surveillance judiciaire 1)à exercer par la Cour
permanente sur l'administration du Mandat. Nous constatons
donc que, dans un rapport indiquant spécifiquement les 'garanties
prévues par le Pacte pour l'accomplissement de la mission (et cela
selon l'opinion unanime du Conseil puisque le rapport a étéadopté
à l'unanimité), il ne figure rien qui laisse entendre que des garanties
supplémentaires aient été exigées ou envisagées. En particulier,
pour ce qui nous concerne, il n'est pas question dans le rapport
du caractère nécessairedu règlement judiciaire des différends relatifs

à l'administration du Mandat.
Le mêmerapport confirme que les Principales Puissances alliées
et associéesavaient déjà choisi les Puissances mandataires par une
décision publiée en mai 1919 et que les territoires en question
étaient déjà effectivement administrés par les Puissances manda-
taires auxquelles on avait l'intention de les confier.
Le rapport indique ensuite que des projets de traité avaient été
négociésentre les Puissances alliées principalement intéressées,
mais que ces projets n'avaient pas été publiés. (On les trouveradans Conférence de la paix 1919-1920, Recueil des actesde la Confé-
rence,partie VI A, pages 73 et ss. Ils avaient la forme de conventions
formelles entre les Principales Puissances alliées et associées et les
Puissances mandataires.)

Le rapport ajoutait que la distribution des Mandats, c'est-à-dire
la désignation des Puissances mandataires et la détermination des
territoires sur lesquels leur autorité s'exercerait, appartenait aux
Principales Puissances alliéeset associées et qu'il n'y avait pas de
divergences de vue à cet égard. En ce qui concerne le degré d'auto-
rité, de contrôle ou d'administration, le'rapport proposait que les

Principales Puissances alliéeset associéesfissent connaître en même
temps que leur décision, quant à la Puissance mandataire, leurs
propositions, quant aux termes du mandat à exercer ». Nous sou-
lignons le mot (propositions )).
Le rapport proposait ensuite au Conseil les résolutions suivantes:

c1. Le Conseil décide de prier les Principales Puissances de
vouloir bien
a) lui désigner les Puissances auxquelles elles ont décidé
d'attribuer les mandats prévus parl'Article 22;
b) lui faire connaître les limites des territoires soumis à ces
mandats ;

c) lui communiqlier les termes et conditions des mandats
qu'elles proposent à l'adoption du Conseil suivant les
prescriptions de l'Article 22 [lesitaliques sont de nous].

II. Le Conseilprendra acte de la désignationdes Mandataires et
examinera les projets de mandats qui lui seront communiquésafin
de vérifiers'ils sont conformes aux prescriptions de l'Article 22
du Pacte.
III. Le Conseilnotifiera à chaque Puissance désignée,qu'elle est
investie du mandat dont en mêmetemps il lui communiquera les

termes et conditions. ))
Ce rapport a étéadopté à l'unanimité par le Conseil le 5 août 1920
et les résolutions proposées ont été dûment approuvées.
Mais le projet proposé pour les Mandats ((C 1)n'a étésoumis au
Conseil de la Société des Nations que le 14 décembre 1920. Le

représentant du Royaume-Uni a alors ((déposéles projets de
mandats préparéspar le Gouvernement britannique ))relatifs au
Sud-Ouest africain et aux autres territoires à placer sous Mandat
((C ». Le Conseil a invité le Secrétariat à examiner ces projets et
((à consulter, sur tels points qu'il jugerait utile, d'autres autorités
juridiques spécialiséesen la matière ))l.Sous réserve de quelques
modifications faites par le Conseil de la Sociétédes Nations -

auxquelles nous reviendrons plus tard -, ces projets ont constitué
la base de la résolution du Conseil de la Société des Nations du
17 décembre 1920 qui contient le Mandat pour le Sud-Ouest africain.
SociétBdes Nations, Jouvnal officzme,année, no 1,p. II.

170 L'énoncédes faits qui précèdeprouve clairement, à notre avis,
deux points:

I. Touteintention qu'auraient pu avoir les Principales Puissances
alliéeset associéesde conférerles Mandats, désigner les Puissances
mandataires, définir les limites des territoires sous Mandat et
énoncer les termes des Mandats dans des traités ou conventions
formels conclus entre elles et les Mandataires a étéabandonnée en
faveur de la procédure indiquée dans la résolution du Conseil de la
Sociétédes Nations du 5 août 1920: action du Conseil de la Société
des Kations en application directe de l'article 22 du Pacte.

2. A partir d'un certain point, c'est-à-dire à partir du moment
où il a adopté sa résolution du 5 août 1920, le Conseil a pour ainsi
dire « pris en charge » l'ensemble de l'opération; il a prié les Puis-
sances de lui faire connaître les termes qu'elles proposaient pour
les Mandats, afin de pouvoir s'assurer de leur conformité avec
l'article22 du Pacte et de leur donner alors de son firopre fait, force
de loi. En bref, les Mandats ne devaient pas prendre la forme de
traités ou de conventions entre les Principales Puissances et les
Mandataires: ils devaient prendre la forme d'actes quasi législatifs
du Conseil. Nous verrons que c'est bien la forme qu'ils ont prise et
que cela constitue un facteur décisif ence qui concerne cette partie
de l'affaire.

d) La firornulgationdu Mandat
Tel qu'il a étéfinalement adopté par le Conseil de la Société des
Nations et promulgué par une résolution du Conseil du 17 décembre
1920, le Mandat pour le Sud-Ouest africain avait subi certaines
modifications après avoir étésoumis,sous forme de projet contenant
les propositions des Principales Puissances, au Secrétariat et à
d'c autres autorités juridiques P.Ces modifications, auxquelles nous
arrivons màintenant, avaient été adoptées par le Conseil dans le
cadre de sa résolution finale. Elles n'affectent pas la substance du

Mandat, mais elles affectent sous certains aspects extrêmement
significatifs les questions de compétence que soulève la phase
actuelle de l'espèce. Toutefois leur signification majeure tient à ce
qu'elles ont étéeffectuées, et cela par le Conseil agissant en tant
que tel et de son propre fait - si bien que le Mandat a étésous sa
forme finale un acte accompli par un organe d'une organisation
internationale dans l'exercice des pouvoirs que lui conférait sa
constitution. Il n'a pas étéun traité ou une convention entre Etats
ou autres entités internationales et n'a pas eu ce caractère. Citons maintenant les termes du Mandat adopté par le Conseil
de la Sociétédes Nations le 17 décembre 1920, car nous ne pensons

pas qu'il soit possible d'en comprendre le caractère si l'on ne peut
s'y référer aisément. Voici ce texte :

Le Conseil de la Société deNs ations:
Considérantque, par l'article 119 du Traité de Paix avec 1'Alle-
magne signé à Versailles le 28 juin 1919, l'Allemagne a renoncé,
en faveur des Principales Puissances alliées et associées,à tous ses
droits sur ses possessions d'outre-mer, y compris le Sud-Ouest
Africain Allemand ;

Considérantque les Principales Puissances alliéeset associéesont
convenu qu'un mandat soit conféréà Sa Majesté Britannique pour
êtreexercé en son nom par le Gouvernement de l'union de l'Afrique
du Sud, conformément à l'article 22 du Pacte de la Société des
Nations, sur le territoire du Sud-Ouest Africain Allemand et ont
proposéque le mandat soit formulé ainsi que suit;

Considérantque Sa Majesté Britannique, agissant pour le Gou-

vernement de l'Union de l'Afrique du Sud, et en son nom, s'est
engagée à accepter le mandat sur le dit territoire et a entrepris de
l'exercer au nom de la Société des Nations, conformément aux
dispositions suivantes;
Considérantque, aux termes de l'article 22 ci-dessus mentionné,
paragraphe 8, il est prévu que si le degréd'autorité, de contrôle ou
d'administration à exercer par le Mandataire n'a pas fait l'objet
d'une Convention antérieure entre les Membres de la Société,ilsera
expressément statué sur ces points par le Conseil;
Par la présente, confirmant le mandat, a statué sur ses termes

comme suit :

Le territoire sur lequel Sa Majesté Britannique assume, pour 1~
Gouvernement de l'union de l'Afrique du Sud (ci-aprèsdénomméle
Mandataire) et en son nom, l'administration, sous le régime du
mandat, comprend l'ancien protectorat du Sud-Ouest Africain.

ARTICLE 2
Le Mandataire aura pleins pouvoirs d'administration et de légis-
lation sur le territoire faisant l'objedu mandat. Ce temtoire.sera
administré selon la législation du Mandataire comme partie inté-
grante de son territoire. Le Mandataireest en conséquenceautoriséà

appliquer aux régions soumises au mandat la législation de l'union
de l'Afrique du Sud, sous réserve des modifications nécessitées par
les conditions locales.
Le Mandataire accroîtra, par tous les moyens en son pouvoir, le
bien-êtrematériel et moral ainsi que le progrès social des habitants
du territoire soumis au présent mandat.
172 ARTICLE 3
Le mandataire veillera à ce que la traite des esclaves soit inter-
dite; àce que le travail obligatoire ne soit autorisé que dans le cas
de travapx publics essentiels et dans les services publics et sous
condition qu'une rémunération équitable soitallouée.
En outre, le Mandataire veillera à ce que le trafic de l'armement
et des munitions soit contrôlé en conformité avec des-principes
analogues à ceux de la Convention relative au contrôle du trafic des
armements, signéele IO septembre 1919 ou de touteautre conven-
tion qui amende cette dernière.
Il sera interdit de fournir des spiritueux et desboissonsalcooliques
aux indigènesdu territoire.

L'instruction militaire des indigènes sera interdite, sauf pour
assurer la police locale et la défense localedu territoire. En outre,
aucune base militaire ou navale ne sera établie dans le territoire, ni
aucune fortification.

Sous réserve des dispositions de la législation locale concernant
le maintien de l'ordre public et des bonnes meurs, le Mandataire
assurera, dans toute l'étenduedu territoire, la libertéde conscience
et le libre exercice de tous les cultes et donneàatous les mission-
naires, sujets ou citoyens de tout Membre de la Société des Nations,
la faculté de pénétrer,de circuler et de résider dans le territoire
dans le but d'exercer leur ministère.

Le mandataire devra envoyer au Conseil de la Société desNations
un rapport annuel satisfaisant le Conseil et contenant toute infor-
mation intéressant le territoire et indiquant les mesures prises pour
assurer les engagements pris suivant les article2,3, 4,5.

L'autorisation du Conseil de la SociétédesNations est nécessaire
pour modifier les dispositions du présent mandat.
Le Mandataire accepte que tout différend, quel qu'il soit, qui
viendrait à s'éleverentre lui et un autre Membre de la Société des
Nations relatifà l'interprétation ouà l'application des dispositions
du Mandat, et qui ne soit pas susceptible d'êtrerégpar des négocia-
tions, soit soumisà la Cour permanente de Justice internationale,
prévuepar l'article 14 du Pacte de la Société desNations.

Le présent exemplaire sera déposédans les archives de la Société
des Nations. Des copies certifiéesconformesen seront remises par le
Secrétaire général dela Société desNations à toutes les Puissarices
signataires du Traité de Paix avec l'Allemagne.

Fait à Genèvele 17 décembre 1920. n
173 Les différences entre le Mandat tel qu'il a étéadopté le 17 décem-

bre 1920 et tel qu'il avait étéproposé au Conseil le 14 décembre
sont les suivantes :

1) Le projet proposé le 14 décembre 1920 ne contenait pas le
quatrième alinéa du préambule qui figure dans le texte final, à
savoir :

ccCo~zsidéran qtue, aux termes de l'article 22 ci-dessus mentionné,
paragraphe 8, il est prévuque si le degréd'autorité,de contrôle ou
d'administration à exercer par le Mandataire n'a pas fait l'objet
d'une Convention antérieure entre les Membresde la Société, il sera
expressémentstatué sur ces points par le Conseil l.))

Ce considérant a été ajouté par le Conseil; il met en évidence un
point qui, sinon, aurait pu ne pas êtretout à fait clair, à savoir que
le texte n'avait pas fait l'objet d'une convention antérieure entre
les Membres de la Sociétéet a étépar conséquent le fait du Conseil

aux termes du paragraphe 8 de l'article 22 du Pacte; ainsi que cela
devait êtreétant donné les circonstances. Ce point, comme nous le
verrons, est pertinent à la question de savoir si les Membres de la
Sociétédes Nations ont jamais étéindividuellement parties au

Mandat, à supposer que celui-ci fût un traité ou une convention.
2) Immédiatement après le préambule, nous trouvons dans le
projet original du 14 décembre: [Le Conseil de la Société des

Nations.. .]
(Par la présente, approuvelestermes du Mandat commesuit :...»

A quoi le Conseil a substitué : [Le Conseil.. .,etc.]
((Par la présente, confirmant le Mandat, a statué sur ses termes
comme suit ...))

L'effet de cette modification a étéclairement de substituer à ce que
l'on aurait pu estimer êtreune simple approbation de termes pré-
existants, quelque chose de nouveau, à savoir la définition des

termes du Mandat par le Conseil même 3.
11a étéalléguéque l'autorité du Conseil aux termes del'articl22, paragraphe 8,
était une autorité limitée au seul territoire. Nous pensons que c'est là une assertion
insoutenable. Une administration se limitant au seul territoirene signifie rien du
tout. Attribuer ce sens entiPrement artificiel au paragraphe8 de l'articl22 c'està
notre avis ne pas tenir compte du reste de cet articleet du but qu'il visait. Nous
pensons que le Conseil avait toute compétence de soumettre l'administration du
Mandataire sur le territoiret sa population placée sous tutelle aux conditions et
limitations qu'il estimait nécessairàsl'accomplissement des objectifsde l'artic22,
sous réserve qu'elles fussent conformes aux termes de l'articl22 et non incompati-
bles avec cet article. De toute façon, et c'est là le point importle Conseil et tous
ses Membres, y compris bien sûr les Principales Puissances, pensaient agirdans le
cadre de leur compétence en statuant sur les termes de chaque acte de Mandat.
Toute autre opinion serait incompatible avec l'attitude detous les États, alors et
depuis lors Membres du Conseil.
Traduction du Greffe.
Ce que le Conseil a confirmé c'est l'attribution d'un Mandat au Mandataire,
attribution qui devait êtrefaite par les Principales Puissances alliées et associées en
conséquence de l'article119 du traité de Versailles. 3) Dans la version du 14 décembre,le premier alinéa de l'article 7
du Mandat prévoyait que toute modification apportée aux termes
du Mandat pourrait êtreapprouvée à la majorité. Cette référence
àla majoritéa étééliminée par le Conseil,fait dont nousexaminerons
plus loin la signification en ce qui concerne la position du Conseil
en matière de Mandats.

4) Le second alinéa de l'article 7 - l'alinéa critique pour les
présentes espèces - disposait à l'origine :

((Si un différend quelconques'élevaitentre les Membres de la
Société des Nations ...ce différendsera soumis ...)l,etc.

Le Conseil a modifiéce paragraphe de la façon suivante:

Le Mandataire accepte que tout différend, quelqu'il soit, qui
viendrait à s'éleverentre lui et un autre Membre de la Société des
Nations...)),etc.
Nous indiquerons plus loin les raisons de cette modification et
nous mentionnerons simplement ici qu'elles rendent virtuellement
impossible de soutenir que, si (contrairement à ce que nous pensons)
le Mandat a étéun traité ou une convention, les divers Membres

de la SociétédesNations y étaient, en tant quetels,individuellement
parties.
* * *

e) Le caractèredu Mandat tel qu'il a été$romulgzté
Le Mandat tel qu'il figure dans la résolution du Conseil de la So-
ciété des Nations du 17 décembre 1920 n'a manifestement pas l'air
d'un traité, d'une convention ou d'un accord international sous une
autre forme. En sa forme, il a manifestement l'air de ce qu'il pré-
tend être - une déclaration promulguée par une résolution du

Conseil de la Sociétédans l'exercice d'un pouvoir à elle conféré
par le paragraphe 8 de l'article 22 du Pacte précisément pour le
cas où les termes du Mandat n'auraient pas «fait l'objet d'une
convention antérieure entre les Membres de la Société ». Selon
toutes les apparences, le Mandat a donc étéun acte quasi législatif
accompli par le Conseil de la Société desNations dans l'exercice de
la compétencequelui donnait le Pacte de faire face àune éventualité
spécifiée - compétence qu'il était obligé d'exercer au cas où les
termes du Mandat n'auraient pas fait l'objet d'une convention
antérieure entre les Membres de la Société des Nations. Puisqu'il
en est ainsi, la Cour doit donc s'assurer d'une manière concluante

que le Mandat a un caractère différent - qu'il est en fait un accord
international et a le caractère d'un traité.

Traduction du Greffe.
I7j Nous pourrions ajouter, mais il devrait être à peine nécessaire
de le dire, qu'un acte accomplien vertu d'une autorisation contenue
dans un instrument qui est lui-même en traité (en l'espècele Pacte
de la Société des Nations) n'a Das i.bso facto un caractère conven-
1,
tionnel. Pour prendre un exemple récent et familier - aux termes
de l'article 17 de la Charte des Nations Unies, l'Assembléegénérale
est habilitée à approuver le budget de l'organisatiqn et le budget,
une fois approuvé, a force obligatoire pour les Etats Membres.
On ne saurait prétendre que le budget soit pour autant un traité »,
pas plus que ne l'est une résolution de l'Assembléegénéralerépar-
tissant les dé~ensesdes Nations Unies entre les Membres de l'Or-
ganisation conformément à l'article17, paragraphe 2,de la Charte.
Tous les arguments qui ont étéavancés en vue d'établir le

caractère conventionnel du Mandat semblent reposer sur l'une ou
l'autre des hypothèses suivantes, ou sur les deux. La première,
que nous avons déjà évoquée, est que tout instrument créant des
obligations internationales a un caractère conventionnel. Pour
réfuter cette manière de voir, il suffit de nous référerà ce que nous
avons déjà dit sous la rubrique (Caractère juridique d'un traité
ou d'une convention ».
La seconde hypothèse est que, si un acte ou un instrument fait
suite àcertains consentements antérieurs, il en résulte qu'il constitue
lui-mêmeun accord. Or, il n'en est rien. Nous avons déjà cité le

cas de l'article17 de la Charte; et nous pourrions citer de nombreux
exemples, tirés du droit privé, d'actes qui, faisant suite à divers
consentements et accords, ont eux-mêmesun caractère tout à fait
différent. Mêmedes actes législatifspeuvent faire suite à un consen-
tement; il se peut même, commec'est souvent le cas, qu'une règle
co?stitutionnelle exige ce consentement. Mais, quand un chef
d'Etat promulgue un décret ou une ordonnance indiquant, comme
c'est souvent le cas, que cet acte est effectué (par et avec le consen-
tement )de son conseil ou d'un autre organe, cela ne donne pas à

cet acte le moindre soupçon de caractère contractuel.
Par conséquent, ni le fait que le Mandat ait créé des obligations
internationales, ni le fait qu'il mentionne dans son préambule
l'existence de certains consentements antérieurs n'est concluant
ou nous avance beaucoup en la matière. Certes, il fallait un accord
antérieur entre les Principales Puissances tendant à conférer un
Mandat à une Puissance donnée :et il fallait une entente commune -
disons un accord -- entre elles quant aux projets de Mandat à
proposer au Conseil. Il est clair que le Mandat n'aurait jamais été
promulgué s'il n'y avait pas eu à l'arrière-plan une entente com-

mune et générale.Mais cela ne suffit pas pour lui donner un caractère
conventionnel. Comme nous l'avons vu plus haut, la pierre de
touche n'est pas de déterminer s'il existait à l'arrière-plan un
consentement, une entente ou un accord, ni si des obligations inter-
nationales avaient étécréées, mais quel était lecaractèrede l'acte
ou de I'instrztmentqui a donné à ces obligationslezwforce jzwidique. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE
492
Cet acte était, à notre avis, la résolution du Conseil. A partir de
cette résolution du 17 décembre 1920, le Mandat a eu force juri-
dique; auparavant, quels que fussent les accords pris, il n'avait

pas force juridique.
Les faits que nous avons exposés montrent clairement que la
résolution du Conseil ne saurait être considérée commeun instru-
ment se bornant àconsigner et à enregistrer les termes d'un accord
international dans lequel les droits et obligations en question .au-
raient eu leur véritable origine. En premier lieu, cette résolution,
comme nous l'avons vu, énonce spécifiquement (dans le quatrième
alinéa du préambule que le Conseil'lui-même a ajouté) que les
termes n'en avaient pas étéconvenus par des entités ayant ou
étant censées avoir un intérêten la matière. En second Iieu, les

documents montrent clairement, comme nous l'avons vu, que le
Conseil n'a pas simplement repris et publié automatiquement les
termes proposés par les Principales Puissances alliées et associées,
se bornant à approuver un accord antérieur et indépendant et
agissant pratiquement comme un organe enregistreur. Ainsi que
nous l'avons noté, l'idéed'incorporer les Mandats dans des traités
ou conventions ordinaires avait été abandonnée; le Conseil a
changé les termes proposés par les Principales Puissances sur
certains points importants déjà indiqués et il a publié un texte

revisé, statuant expressément de son propre fait sur les termes du
Mandat. L'accord des Principales Puissances sur les termes à
ccproposer » au Conseil n'a certainement pas suffi à donner un
caractère conventionnel à l'acte de Mandat même. Ko? plus que
l'accord conclu entre ces Puissances en 1919 quant aux Etats à qui
seraient attribués des Rlandats.
Étant donnéces circonstances et vu la forme de l'acte de Mandat
et l'existence du quatrième, alinéa du préambule, il n'est guère
possible d'estimer que les Etats demandeurs se soient acquittés
de la charge qui leur incombait de prouver que le Mandat avait

un caractère conventionnel.
On a toutefois suggéréque le Mandat n'est pas tout entier dans
la résolution pertinente du Conseil et qu'il est également en partie
contenu dans l'article22 du Pacte, qui a un caractère conventionnel.
Nous avons déjà montré que l'article 22 avait trait au système
des Mandats. La seule obligation spécifique qu'il imposait aux
Mandataires était de faire rapport au Conseil, mais, pour l'Etat
défendeur, cette obligation figurait dans l'article 6 du Mandat
pour le Sud-Ouest africain, qui était donc un instrument se suffisant

à lui-même. La résolution pertinente du Conseil a été intitulée
((Mandat pour le Sud-Ouest africain allemand ))et elle a toujours
étéconnue sous ce titre; lorsque dans le domaine international on
cite ou mentionne le Mandat pour le Sud-Ouest africain, c'est
toujours de cette résolution qu'il s'agit. Les référencesau «présent
Mandat ))figurant dans la résolution (aux articles 2 et 7, par ex- OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 493

emple) montrent bien que celle-ci était considérée comme «le
Mandat » l.
* * *

On peut relever ici certaines indications subsidiaires sur le

caractère du Mandat, et, pour commencer, le fait que, d'après le
premier alinéa de l'article 7, les termes .du Mandat ne pouvaient
être modifiés qu'avec l'autorisation du Conseil de la Société des
Nations. Cette disposition a bien sûr étéinséréeafin de prévenir
toute tentative de modification soit unilatérale, soit par accord
entre le Mandataire et une ou plusieurs autres entités. On se rappel-
lera que ce qui avait été prévu à l'origine était l'approbation du

Conseil à la majorité. Mais c'est l'autorisation de tout le Conseil
qui est finalement devenue nécessaire. Nous n'attachons pas d'im-
portance au fait que cet amendement ait donné un droit de veto
aux Principales Puissances en tant que Membres permanents du
Conseil - puisque ce dernier devait suivre 'la règle de l'unanimité.
L'amendement introduit par le Conseil a eu pour effet de donner

un droit de veto à chacun de ses Membres. Ce que cet amendement
du Conseil met en évidence c'est que le Mandat était considéré
comme étant, fondamentalement aussi bien que formellement, un
acte du Conseil en tant que tel et que l'autorisation du Conseil en
tant qu'entité était par conséquent nécessaire pour toute modifi-
cation du Mandat. Cette disposition n'est certainement pas compa-
tible avec l'opinion selon laquelle le Conseil n'aurait joué dans

. l'institution du Mandat que le rôle d'un agent ou d'un entrepreneur
à qui on aurait jugé commode de faire appel pour donner effet en
termes concrets à des arrangements pris par d'autres et qui aurait
ensuite disparu de la scène. Cette opinion est également incompa-
tible avec le rôle de surveillance revenant au Conseil aux termes
de l'article 6 du Mandat.

Enfin, il y a le fait que le Mandat, de mêmeque tous les autres
Mandats (B ))et cC »,n'a pas étéenregistré en tant que ((traité ou
engagement international )aux termes de l'article 18 du Pacte -
précurseur de l'article 103 de la Charte des Nations Unies 2.Le
dépôt dans les archives de la Société desNations prévu au dernier
alinéa du Mandat ne constituait pas un enregistrement en tant que

traité aux fins de l'article18. Il ne s'agissait là que de la disposition
de forme commune à presque tous les instruments internationaux
et selon laquelle leur texte original doit êtredéposé soitauprès du

lAu surplus, même si l'on admet que le Mandat figure en partàl'articl22
du Pacte, ce dernier n'est plen vigueur en tant que traité ou conventioet,
de toute façon, la clade règlement judiciaireaquelle doit s'appliquer l'article
37du Statut de la Cour, pour autant qu'il soit applicable, se trouve dans le Mandat
(article 7) et non dans le Pacte.
Cela a étéconfirmé par des recherches officiellesve.
178 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 494

gouvernement du pays hôte, soit, selon le cas, auprès de I'organi-
sation internationale dans le cadre ou sous les auspices de laquelle
l'accord a étéconclu. Un bref examen des termes du système
d'enregistrement approuvé par le Conseil en mai 1920 suffit à

montrer que le dépôt dans les archives de la Société desNations
ne pouvait constituer un enregistrement aux termes de l'article 18.
Au surplus, cela est aussi confirmépar le fait qu'aucun des Mandats
- à l'exception du Mandat pour l'Irak, qui pour des raisons spéciales
avait la forme d'un traité - n'a jamais figurédans le Recueil des
traités publié par la Sociétédes Nations.
Certes, il est possible qu'un instrument constitue en fait un traité
ou un autre accord international mêmes'il n'a pas étéenregistré

et ce défaut d'enregistrement ne suffit par conséquent pas à dé-
terminer le caractère du Mandat. Mais le défaut d'enregistrement
est concluant quant à la manière dont les intéressésenvisageaientle
Mandat: ils ne le considéraient pas comme un traité, une conven-
tion ni un accord international sous une autre forme.
Il est raisonnablement certain que, si les intéressésavaient nette-
ment considéréle Mandat comme un traité ou une convention, ils

l'auraient fait enregistrer conformément à l'article 18, comme le
Royaume-Uni a fait plus tard enregistrer le Mandat pour l'Irak.
Il est certain que, si une des personnes mêlées aux événementsde
1920 avait pu penser que l'acte de Mandat était un traité ou une
convention, cela aurait difficilement échappéà l'attention du Secré-
taire général.Le fait que l'acte de Mandat n'ait pas étéenregistré
. ne permet peut-être pas d'établir de façon concluante qu'il ne
s'agissait pas d'un accord international mais, comme on doit sup-

poser que les Membres de la Société desNations faisaient normale-
ment enregistrer tout instrument présentant à leurs yeux un tel
caractère, ce défaut d'enregistrement prouve bien que ni le Conseil
ni aucun Membre de la Société desNations (niaucunedesPrincipales
Puissances) ne pensait que le Mandat fût un accord international l.
Un dernier fait va à l'encontre de la thèse selon laquellele Mandat
aurait un caractère conventionnel: c'est la difficultéd'identifier de

manière satisfaisante les parties au Mandat, si on le considère
comme un traité ou une convention. Nous traiterons de cette
question dans la section suivante.

3. Le Mandat est-il ((en vigueur ))en tant que traité ou convention?
a) A quelle date doit-il Être en vigueur commetel?

Étant donnéqu'à notre avis le Mandat n'a pas et n'a jamais eu
le caractère intrinsèque d'un accord international, il est à stricte-

Certes, nous n'ignorons pas que, dans l'affaire Mavrommafis (C. P. J. I., série
un traité ou une convention en vigueuMais ce point n'a pas été débattu, lest
exceptions d'incompétencse fondant sur d'autrmotifs. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 495

ment parler inutile de rechercher s'il est encore en vigueur comme
((traité ou convention ))Nous nous proposonsnéanmoins de lefaire
car, sileMandat n'est pas en soi un accord international, il présente

cependant certains aspects sur lesquels on peut se fonder pour pré-
tendre qu'il s eu, dans une certaine mesure, un caractère conven-
tionnel. Cela étant, nous ne voudrions pas appuyer notre opinion
sur la seuleconclusion qui consiste àdire qu'il n'a pas eu ce caractère
- encore que nous estimions cette conclusion exacte.
Il est une autre raison pour laquelle nous croyons essentiel

d'examiner si le Mandat est encore ((en vigueur ))comme traité ou
convention, à supposer qu'il ait eu ce caractère. On semble avoir
complètement perdu de vue le fait que la question soulevée par la
première exception préliminaire n'est pas simplement de savoir si
le Mandat est (en vigueur ». La question découlant de l'article 37

du Statut est de savoir si le Mandat est en vigueur commetraitéou
convention.A cet égard, il ne suffit pas de s'en remettre à l'avis de
la Cour de 1950 comme établissant qu'en tout état de cause le
Mandat est en vigueur sur une base institutionnelle.
L'expression ((en vigueur )doit, selon nous, êtreconsidérée comme

ayant à l'article 37 le mêmesens qu'à l'article 36, paragraphe 1,
du Statut, où il s'agit des ((traités et conventions en vigueur »,
c'est-à-dire en vigueur à la date de l'introduction d'une affaire par
voie de requête,qui est la date à laquelle doivent êtreprésents tous
les élémentsnécessairespour assurer la compétence de la Cour l.

b) Quelles seraient les partiesau Maqzdatconsidéré commeun traité
ou une conventionen vigueur?

Il est, ou il devrait être, admis que, si le Mandat a étéun traité
ou une convention, il a dû comporter des parties contractantes et
qu'il a cesséd'êtreen vigueur comme tel si ces parties ont disparu

etlou si leur nombre est tombé au-dessous du minimum (de deux)
nécessairepour qu'un accord soit et demeure en vigueur comme tel.
Nous ne saurions admettre l'idéed'un traité sans parties. On a cité
les actuelles tutelles des Nations Unies. Nous n'avons pas à dire s'il
s'agitlà devéritables accords(voirarticles 81-83 et 85 de la Charte) ;

l On a avancé, dans l'hypothèse où le Mandat aurait été un traité ou une con-
vention en vigueur avant la dissolution de laciét6 des Nations,que l'article 37
Nations et des NationsUnies d'invoquer la juridiction de la présente Cour jusqu'à
la date de la dissolution de la Société;qu'à partir du moment où le Mandat a été
régipar l'article 37 il a contàl'être;et qu'en conséquence il y a lieu de conclure
que ces États ont continué depuis lors et jusqu'à ce jour à jouir du droit d'invoquer
l'article 7 du Mandat.
Il est évident que les pr6misses ne justifient pas la conclusion.
L'article 37 du Statut nel>rol~nyeapas la durée des traités ou conventions en
vigueur à l'époque où le Statut est devenu applicableIl va sans dire quesi, au
moment où la juridiction dela Cour est invoquée, un traité ou une conventioest
devenu caduc que ce soit par expiration dson terme, par accord entre les parlies
ou pour toute autre raison, ce traité ou cette convention ne saurait constitler
fondement de la juridiction de la Cour.cela impliquerait une interprétation des dispositions pertinentes du
chapitre XII de la Charte. Mais s'il y a accords,il y a certainement
parties. Au reste, en 1920 et selon le droit international de l'époque,
il n'existait pas d'accords internationaux dont les parties ne pussent
êtrefacilement identifiées.

Il nous faut donc examiner la question de savoir quelles ont été

(outre le Mandataire lui-même)et quelles sont à présent les parties
au Mandat considérécomme traité ou convention : nous n'avons pas
l'intention cependant d'examiner des propositions évidemment in-
soutenables, telles que celle quiveut que les habitants des territoires
sousMandat soientdirectement ou indirectement parties au Mandat.
Reste à examiner le cas des Principales Puissances alliéeset asso-
ciées, des Membres in6ividuels de la Société desNations et enfin
de la Sociétéelle-mêmeou de son Conseil.

i) Les Principales Puissances alliéeset associées. - On a prétendu
que les Principales Puissances alliéeset associéesont été,en même
temps que le Mandataire, parties au Mandat. S'il en a étéainsi ces
Puissances semblent l'avoir totalement ignoré pendant près de
quarante ans. Nous avons déjà vu que l'idéepremière de donner au
Mandat la forme d'un traité ou d'une convention ordinaire avait
été abandonnée; à notre avis, aucun lien contractuel n'a été établi
avec ou entre les Principales Puissances alliéeset associéesni sur
la base de l'acte de Mandat ni en conséquence de cet acte, et l'inten-
tion n'a jamais étéqu'il en fût ainsi. C'est ce que prouvent non

seulement les faits antérieurs au 17 décembre 1920 mais encore le
texte mêmedu préambule, lequel indique clairement que le rôle
des Puissances s'est borné à nommer le Mandataire et à proposer
les termes du Mandat au Conseil, qui devait les accepter ou les
rejeter - et qui en fait les a modifiés avant de les promulguer
comme émanant de lui-même. Dès au'elles eurent fait cette dé-
marche, les Puissances sont devenues functus oficio, sauf à l'égard
des droits résiduels ou des droits de retour sur le territoire sous
Mandat lui-mêmequ'elles ont pu conserver à titre expectatif. A

partir de ce moment, c'est le Conseil de la Sociétéqui a agi et, si
un traité ou une convention a pu en résulter de quelque manière
que ce soit, les Puissances, comme telles et comme groupe, n'y ont
pas été parties; car, dèslors (commele Pacte en dispose), le Manda-
taire a exercéle Mandat ((au nom de la Société ))et les Puissances
ont disparu de la scène, si ce n'est à titre de Membres du Conseil.
L'absence de tout lien contractuel en ce qui touche les Puissances
est démontrée en outre par le fait que, bien que les Etats-Unis
d'Amériqueaient participé àla premièrerédaction des Mandats (C ))

et à l'attribution à 1'Etat défendeur, en 1919, du Mandat pour le
Sud-Ouest africain, non seulement ils n'ont pas participé à la
séancedu 17 décembre 1920 du Conseil de la Société desNations
181- puisqu'ils n'ont jamais ratifié le traité de Versailles ni adhéréà
la Société - mais encore ils n'ont connu qu'après coup ce qui a été
soumis au Conseil le 14 décembre 1920, pour êtreréglétrois jours
plus tard l, et ce qui a étédécidépar le Conseil. Nous savons au
reste que, dans le traité séparé queles États-unis ont conclu avec
l'Allemagne à Berlin en 1921, ils se sont réservétous droits et
avantages prévus dans le traité de Versailles au bénéficedes Prin-
cipalesPuissances alliéeset associées,y comprisceux qui touchaient
aux anciennes colonies allemandes, et ont stipulé qu'ils ne seraient
liéspar aucune décision dela Sociétédes Nations à moins d'y avoir

expressément donné leur accord. On ne voit pas si les États-unis
ont jamais expressémentdonnéleur agrément aux termes du Mandat
pour le Sud-Ouest africain.

11est également impossible de concilier l'idée que les Puissances
étaient parties au Mandat (ou à l'un quelconque des Mandats), ou
se considéraient comme telles, avec leur conduite ultérieure, non
plus qu'avec certains élémentsde la situation juridique découlant
de l'acte de Mandat.

Après le mois de décembre 1920, aucune Puissance n'a jamais
prétendu être, en qualité de Principale Puissance alliée, partie
séparéeau Mandat ni avoir d'autres intérêtsdans l'administration
du Mandat que ceux qui découlaient de sa qualité de Membre du
Conseil. D'ailleurs, toute prétention de ce genre n'eût guère été
juridiquement compatible avec le fait qu'aux termes du premier
alinéa de son article 7 le Mandat ne pouvait êtremodifiéqu'avec
l'autorisation du Conseil de la Sociétédes Nations (une disposition
similaire figurant dans tous les Mandats « B » et «C »).
Cette situation était sans doute obscurcie par le fait que les
Principales Puissances (à l'exception toutefois des États-unis)

étaient elles-mêmes Membrespermanents du Conseil de la Société
des Nations, lequel prenait ses décisions à l'unanimité. On peut
en outre, mais ce n'est pas facile, interpréter le premier alinéa de
l'article7 du Mandat comme n'excluant pas la nécessitéd'autres
autorisations en sus de celle du Conseil. On peut égalementsoutenir
que despays peuvent devenir parties à des traités tout en acceptant
qu'ils puissent êtremodifiéssans leur consentement et que telle a
étéen fait la position des Puissances à l'égarddu Mandat en raison
ou en vertu du premier alinéa de l'article 7.
Ce sont là des arguments ou deshypothèses (en réalité des spécu-
lations) forcées; l'important est qu'absolument rien ne prouve

que ces hypothèses soient exactes, plutôt que celle, beaucoup plus
naturelle et probable, d'après laquelle, si le Mandat a été un traité,

l C'est ce qui ressort des annexes 154et 154a, b et c aux procès-verbauxde la
douzième session du Conseil de la Sociétédes Nations.
182l'autre partie à ce traité a été laSociétéseule ou le Conseil de la
Sociétéagissanten son nom. II est très clair que le Conseil estimait

pour sa part qu'il était la seule autorité ayant compétence pour
modifier les termes d'un acte de Mandat et que les Principales
Puissances alliéeset associéessiégeant au Conseil partageaient ce
point de vue. En de nombreuses occasions, le Conseil a agi sur cette
base. Il parait incontestable que les Principales Puissances alliées

et associées siégeant au Conseil ont admis que, sauf à titre de
Membres du Conseil de la Société,leurs fonctions avaient pris fin
dès que les Mandats eurent étéétablis. Rien ne permet de penser
qu'aucune d'entre elles ait jamais cru que son autorisation fût

indispensable pour modifier un Mandat, ni qu'il n'en fût ainsi que
parce qu'elles avaient abandonné leurs droits en la matière l.
Mais, quelle qu'ait pu êtrela situation à l'époquede la Société
des Nations, dire que les Puissances ont été(et sont encore) parties
au Mandat considérécomme un traité ou une conventionsoulèverait

aujourd'hui des difficultés encore plus insurmontables, surtout si
l'on admet la conclusion à laquelle la Cour est parvenue en 1950
et d'après laquelle le Mandat pourrait $tre modifiépar accord entre
le Mandataire et les Nations Unies - car les Principales Puis-

sances n'ont ni voix prioritaire ni droit de veto à l'Assembléedes
Natjons Unies et trois d'entre elles seulement - en y comprenant
les Etats-Unis d'Amérique - sont Membres permanents du Conseil
de Sécurité. Il faut donc conclure qu'en l'absence de dispositions
expresses à cette fin il est juridiquement impossible de penser qu'un

groupe de pays puissent êtreparties à un traité susceptible d'être
modifié sans leur consentement ou même,semble-t-il, contraire-
ment à leur avis.
Le comportement des Puissances depuis 1945 n'est pas plus com-

patible qu'il ne l'avait été auparavant avec la thèse d'après laquelle
toutes, ou l'une quelconque d'entre elles, auraient été parties aux

Ce qui s'est passé au sujetdu Mandat pour l'Irak nous paraît instructif.
Le Mandat a étéconféréau Royaume-Uni par le Conseil supérieur alliéSan
Remo, le 25 avril 1920. Le Royaume-Uni a accepté le Mandat.
Ensuite de quoi le Royaume-Uni a conclu une série de traités avec le roi d'Irak.
Ces traités ou la plupart d'entre eont étécommuniqués au Conseil de la Société.
Aucun autre État n'y était partie.
Dans une communication du Royaume-Uni du 27 septembre 1924adressée au
Conseil de la Socié-é et au Conseil seul -ces traités étaient résuméset complétés
par une déclaration fixant les obligationde la Puissance mandataire envers la
Société,eu égardà l'application del'arti22edu Pacte. Danscette communication,
le Royaume-Uni se déclaraitprêt à s'entendre1avec le Cogzseilsur certains termes
qui étaient indiqués.
Parmi les engagementspris à l'égard du Conseil et que celui-ci a acceptés, figu-
raient un engagement de présenterun rapport annuel denature à satisfaire lCon-
seil, une promesse qu'aucune modification ne serait apportée aux termes du traité
sans l'autorisation dConseil et une clause de règlement judiciaire ayant, en gros,
la même forme que le second alinéa de l'article 7 du Mandapour le Sud-Ouest
africain.Les Principales Puissances alliéeset associées étaient, comme telles,
absolument étrangères à ces engagements, lesquels étaient pris à l'égard du
Conseil et du Conseil seulement.
183 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 499

divers Mandats considérés comme des traités ou conventions.
Ainsi, comment expliquerait-on, dans cette hypothèse, le passage
de la résolution de la Société desNations du 18 avril 1946 mention-

nant l'intention des Mandataires de continuer à assumer leurs obli-
gations contenues dans les Mandats jusqu'à ce que de nouveaux
arrangements soient pris entre les Nations Unies et les diverses
Puissances mandataires »(les italiques sont de nous) ?
De même,lorsque divers territoires sous Mandat sont passéssous

le régime de tutelle des Nations Unies, la chose a étéfaite directe-
ment par la Puissance mandataire intéresséeet aucune des Princi-
pales Puissances aQées et associées en tant que telle n'a jamais
revendiqué un droit quelconque à êtreconsidérée commeun État

(directement intéressé » aux termes du régimede tutelle, en vertu
de l'article 79 de la Charte des Nations Unies.
Il faut donc en conclure que l'idéeque les Principales Puissances
ou l'une quelconque d'entre elles soient ou aient jamais étéparties
au Mandat en tant que traité ou convention est trop artificielle et

trop gratuite pour qu'on l'admette. Ce n'est guère qu'un effort
quelque peu désespéré pour présenter une entité quelconque comme
une partie existant encore et susceptible par conséquent, avec le
Mandataire, d'être considérée comme maintenant le Mandat en
vigueur à l'heure actuelle en tant que traité ou convention l. Il en

est de même,dans une très large mesure, d'une deuxième catégorie
de parties éventuelles dont nous allons traiter ci-dessous.
ii) Les _Wembresindividuels de la Sociétédes Nations. - Si les

Membres de la Sociétéont étéen leur qualité comme tels parties
au Mandat, aucun problème ne se pose car, la Sociétéétant dissoute,
ses anciens Membres ont perdu ladite qualité et ne peuvent plus
être parties au Mandat en tant que Membres de la Société.La
question est et doit êtrepar conséquent de savoir si, à supposer

qu'ils aient étéparties au Mandat, ils l'ont été à titre indiyiduel
comme Etats souverains distincts existant encore (en tant qu'Etats)
aujourd'hui.
Nous estimons que cette question ne saurait être tranchée que
par la négative. Ln acte ou (Declaration » (tel était le nom donné

Lne variante de ce thème consisteàdire que quatreseulement des Principales
Puissances alliéeset associées ont été partiesau Mandat considéré comme un
traité ou une conventionOn omet ainsi les États-unisCette thèse ests'il sepeut,
plus artificielle encque celle dont elle est une variantSon seul mérite est de
tenter de surmonter la difficulténée du fait que les Étatsne faisant pas partie
de la Société des Nations, n'ont pas particàpla session du Conseil de décembre
1920. Pour le restelle est passible des mêmes critiques. Les Étatsont évidem-
ment participé à l'élaboration du Mandat et à la rédaction des termes proposés
au Conseil.
En tout état de cause cette thèse est absolument incompatible avec les deux
premiers considérants dela résolution du Conseil du 17 décembre 1920. Les Principa-
les Puissances-alliées et associées comprenaiepar définition, en vertdu traité
de pais, les Etats-Unis.Ceux-ci étaient distinctementcompris dans l'expression
descripti\-rles PrincipalesPuissances alliées et associé1)Voir procès-verbaux
de la douzième session du Conseil de la Société desons, annexe 154 b.à la résolution du Conseil du 17 décembre 1920 qui contenait le
Mandat) émispar et au nom du Conseil, agissant de son propre

fait, n'a pu faire entrer en jeu les Membres de la Sociétéqu'en leur
qualité comme tels - qualité qu'ils n'ont plus. Pour qu'ils soient
devenus et soient encore parties aux Mandats en leur qualité
individuelle d'Etats, indépendamment de leur appartena.nce à la
Sociétéi,l aurait fallu quelque chose qui relevât du processus habituel

des signatures, ratifications, pleins'pouvoirs etc. séparés.La forme
et la procédure qui ont présidé à l'établissement du Mandat inter-
disent de croire que les Membres individuels aient pu y êtreparties
à titre distinct et qu'ils aient pu avoir à l'égarddu Mandat un autre
statut que celui de Membres de la Sociétéparticipant à ses activités.
Mais, en tout état de cause, cette conception des Membres

considérés commeparties individuelles et distinctes est exclue par
l'énonciation expresse qui figure dans le préambule du Mandat
(quatrième considérant) et d'après laquelle, les termes du Mandat
n'ayant pas fait l'objet d'une convention antérieure entre les
Membres de la Société,il a étéexpressément statué à leur égard
par le Conseil dans l'exercice des pouvoirs que lui conférait l'ar-

ticle 22, paragraphe 8, du Pacte pour agir en pareil cas. Quarante
ou cinquante pays ne sauraient êtreparties distinctes à un accord
énonçant expressément que ses termes n'ont pas fait l'objet d'une
convention entre eux. On a avancé que l'expression Membres de
la Sociétédes Nations ))revêt dans le quatrième considérant un
sens spécial, limité et restreint, qu'elle ne porte pas sur I'ensembIe

des Membres de la Sociétéet qu'elle se borne, par exemple, aux
Principales Puissances. S'il en est ainsi, étant donné qu'il faut
supposer que les mots ((Membre ))ou ((Membres ))de la Société
des Nations ont le mêmesens où qu'ils figurent dans le Mandat, il
s'ensuit que l'expression ((un autre Membre de la Société ))a, au
deuxième alinéa de l'article 7, le même prétendu sens spécial,

limité et restreint que dans le préambule et ne comprend donc pas
les Etats demandeurs qui se réclament à présent du deuxième
alinéa de l'article 7.
Mais il est évident qu'une telle supposition est erronée. 11 ne
s'agissait pas seulement que les Principales Puissances abandon-
nassent l'idéede négocier le Mandat par voie de traité ou de con-

vention. Les autres Membres de la Sociétéexistaient, mais ils
n'ont guère étéconsultés ou sollicitésde donner leur consentement.
Il ressort du procès-verbal d'une séance--tenue le 13décembre1920
- par le sous-comitéVI(c) de l'Assembléede la Société desNations,
quiavait la question des Mandats à son ordre du jour, que le Conseil
de la Sociétéexaminait déjà les projets de Mandats (A ))et allait

probablement examiner sous peu les projets de Mandats (B ))et
((C )),alors que l'Assemblée n'était encore aucunement informée
de ce qui se passait. Le Conseil n'avait transmis au sous-comité
que des exemplairesdes projets de Mandats (A »,étant bien entendu
qu'il s'agissait là de renseignements confidentiels dont il ne devait

185pas être fait usage. Quatre jours plus tard, le Conseil promulguait
le Mandat pour le Sud-Ouest africain.
Il nous apparaît donc assez évident que le Conseil n'a pas eu
l'intention de prendre des engagements contractuels au nom des
États individuels qui faisaient partie à cette époque ou devaient
plus tard faire partie de la Société desNations. Les demandeurs ont
admis, selon nous à juste titre, que le Conseil a agi en vertu des
dispositions de l'article22,paragraphe 8, du Pacte et en vertu de
ces seules dispositions. Le Conseil a fait là ce qu'en telles circons-
tances et aux termes de cet article il était de son devoir de faire.
Il n'avait pas, selon nous, l'intention d'accepter des obligations

conventionnelles et il n'avait certainement pas non plus l'intention
d'en accepter une au nom des États individuels Membres de la
Société.
A la vérité,on chercherait en vain dans le Pacte un pouvoir
quelconque en vertu duquel le Conseil aurait pu conclure des
accords conventionnels de manière à rendre des États individuels,
Membres de la Sociétéà cette époque ou à une date ultérieure,
parties à un traité ou à une convention. On chercherait également
en vain dans les faits un pouvoir donné par les États au Conseil
en vue d'agir au nom de chacun d'entre eux et de conclure un
traité ou une convention en leur nom; et il est établi que tous les
Membres de la Sociétéqui n'étaient pas aussi Membres du Conseil
ont ignoré jusqu'à sa promulgation la teneur du Mandat.
La décision prise par le Conseil en vertu de l'article 22, para-

graphe 8, a engagéla Sociétéet ses Membres non pas du fait qu'un
traité ou une convention est entré en vigueur, mais uniquement du
fait que la Société,comme telle, et ses États Membres étaient liésà
l'avance, en vertu du Pacte, par toute définitiondu degréd'autorité,
de contrôle ou d'administration à exercer par le Mandataire sur
laquelle le Conseil statuerait en vertu de l'article, paragraphe 8.
Ils étaientlié par le Mandat, dans la mesure où cela est pertinent,
mais ils l'étaient en tant que Membres de la Sociétéet par cette
voie et non point en tant que parties effectives au Mandat même.
Une autre preuve en est que, dans des dispositions comme l'article5
ou l'article7,le Mandat se réfèrenon pas aux «parties au présent
Mandat » ou aux ((parties à la présente déclaration » mais aux
« Membres de la Société ».C'est en tant que Membres de la Société
et non comme parties au Mandat qu'ils se sont vu conférercertains

droits. En fait, l'une des réfutations les plus frappantes de la thèse
selon laquelle les Membres de la Sociétéauraient étéconsidérés
comme parties au Mandat est, comme nous l'avons dit plus haut,
qu'après avoir reçu les projets de Mandats proposés par les Puis-
sances le Conseil de la Sociétéa modifiéconsidérablement le deux-
ième alinéa de l'article 7. Il a amendé cette disposition de telle
sorte qu'au lieu que tous les Membres de la Sociétéconsentissent
au règlement judiciaire obligatoire des différends le Mandataire
seul l'acceptait. Il semble que cela ait été faitparce qu'on avai- OP. DISS.COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 502

à juste titre - l'impression qu'une obligation de ce genre ne
pouvait découlerque d'un consentement exprès. Mais, si les Mem-
bres de la Sociétédes Nations avaient été parties au Mandat, ils
auraient par là mêmedonné leur consentement. Il est clair qu'ils
n'étaient pas considéréscomme parties au Mandat.
On ne saurait dire non plus que, comme le Mandat conféréà
l'Union sud-africaine devait êtreexercé par celle-ci <(au nom de

la Sociétédes Nations )),chaque Etat qui était Membre de la
Sociétéest devenu par là partie individuelle à l'acte de Mandat en
tant que traité ou convention.
Nous en concluons que tout intérêtque les Membres de la Société
des h'ations pouvaient avoir dans le Mandat, ou toute participation
qu'ils pouvaient avoir au Mandat en tant qu'acte international,
procédait uniquement de leur qualité de Membres de la Sociétédes
Nations.
*
* *

iii)Ln Société des Kations ou son Conseil en tant que partie. - De
ce qui précède,on ne peut que conclure que,tous les autrescandidats
ayant étééliminés,la seule partie au Mandat à part le Mandataire
(en admettant que le Mandat fût un traité ou une convention) a été
la Sociétédes Nations mêmeou le Conseil agissant en son nom.
Telle est la seule conclusion compatible avec les faits les plus im-
portants - à savoir, que le Mandat a étéun acte du Conseil; que
c'est le Conseil qui a statué sur ses termes; qu'il était exercé (au
. nom de la Sociétédes Nations 1);qu'en dehors de certains droits

spécifiques accordéspar des dispositions particulières du Mandat
aux cMembres de la Société desNations ))(c'est-à-dire en leur
qualité comme tels) toutes les obligations prévues par le Mandat
étaient dues à la Société desNations; et que le Mandat ne pouvait
êtremodifiéqu'avec l'autorisation de l'ensemble du Conseil.
La seule question douteuse, à laquelle nous avons fait allusion
plus haut, est de savoir si, à cette date, une organisation inter-
nationale telle que la Sociétédes Nations et mieux encore un de ses
organes tel que le Conseil de la Sociétéauraient étéconsidérés
comme possédant une personnalité internationale distincte et la

capacité de conclure des traités. Ce doute a peut-être étél'une des
considérations qui ont déterminé laforme effectivement prise par
le Mandat. Mais, s'il en est ainsi, ce n'est qu'un argument de plus
en faveur de la conclusion à laquelle nous avons abouti à propos de
la première partie de la première exception préliminaire, à savoir
que le Mandat n'a jamais eu de caractère conventionnel - car,
si l'on doit éliminerà l'exception du Mandataire, toutes les entités
qui auraient pu êtreparties au Mandat en tant que traité ou con-
vention (y compris la Sociétédes Kations et son Conseil),on aboutit
inévitablement à la conclusion que le Mandat ne constituait pas
un accord international (ce dont il n'avait d'ailleurs certainement

pas la forme).
187 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE
503
Comme nous l'avons suggéréplus haut, les doutes concernant la
capacité de la Sociétédes Nations et de son Conseil à conclure des

traités et la nécessité évidentede donner au Conseil une position
inattaquable en la matière, ainsi que les prescriptions du para-
graphe 8 de l'article 22 du Pacte, ont pu constituer - et nous
sommes pour notre part persuadés que tel a étéle cas - un élément
dans la décisionqui a étéprise de donner au Mandat la forme d'une
résolution du Conseil plutôt que celle d'un traité ou d'une conven-

tion entre les Principales Puissances alliéeset associéeset le Man-
dataire.
C'étaitla seule facon de mettre le Conseil -àsa vraie place. Dans
un traité ou une convention, mêmesi on avait voulu prévoir la
position de la Société desNations et du Conseil, celle-ci aurait pu

se révéler en fin de compte impossible à définir, si ce n'est par
l'intermédiaire et avec la coopération des Puissances et du Manda-
taire. Une situation de ce genre aurait étéabsolument incompatible
avec l'article 22 du Pacte et avec toute la conception du système
des Mandats.
Mais cela ne peut êtrequ'hypothétique. Ce qui ne fait pas de

doute, c'est que, si le Mandat a étéuntraité ou une convention, seuls
le Mandataire etla SociétédesNationsou le Conseily étaientparties.
Étant donné queni la Sociéténile Conseiln'existent plus, le nombre
des parties est réduit à moins de deux et c'est pourquoi, en tant que
traité ouconvention, le Mandat n'est plus en vigueur.

Au surplus, le Mandat n'a pas étéenregistré en tant que traité
ou convention conformément à l'article 18 du Pacte. Comme nous
l'avons notéplus haut, cela montre bien que les intéressés ne consi-
déraient pas que le Mandat eût un caractère conventionnel. Mais,
si, comme le prétendent les demandeurs, il a étéun traité ou une

convention, le défaut d'enregistrement suffirait à poser la question
de savoir si, en tant que traitéou convention, il était ((obligatoire »
aux termes de l'article 18. Dans la négative, la question se poserait
alors de savoir si un traité ou convention qui n'est pas (obliga-
toire 1)est ou peut être (en vigueur ))l.

Concl.usionsur la premièreexceptionpréliminaire: les conditions
nécessaires pour que la Cour soit compétente aux termes des ar-
ticles 36 et 37 du Statut ne sont pas remplies, en tant que le Mandat
a étéun acte du Conseil de la Sociétéet au'il n'est Das et n'a iamais
été ((un traité ou une convention 1(ni un accord international sous

une autre forme) ou, subsidiairement, s'il l'a été, qu'il n'est plus
en vigueur en tant que tel car il ne compterait plus maintenant
qu'une seule partie -- le Mandataire.
l Même si, comme on l'a prétendu, ce fait ne doit pas signifier plus que ce qui
est prévu àl'article 102, paragraph2, de la Charte des Nations Unies -àsavoir
qu'un instrument non enregistré ne peut pas êtreznvoqué Idevant un organe de
l'Organisation)-, la Cour est l'un de ces organes (voir article 7, paragra1,e
dela Charte)

188 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPEKDER ET FITZMAURICE 504

Normalement, la réponse que nous avons donnée à la première
exception devrait suffire. Mais, comme nous-pensons que chacune
des exceptions soulevéespar le défendeur est en soi un obstacle à
la compétence de la Cour, nous estimons qu'il est de notre devoir,
étant donné les circonstances spéciales de l'affaire, d'exprimer
notre opinion sur chacune de ces exceptions.
Il existe aussi des raisons particulières qui nous amènent à

traiter de la deuxième exception.
Bien que nous soyons convaincus que le Mandat n'est pas en soi
un traité ou une convention en vigueur, nous reconnaissons, comme
nous l'avons déjà indiqué, que le Mandat repose, et à juste titre,
sur la base d'un certain consentement. Mais notre reconnaissance
de ce fait ne se fonde pas sur les raisons avancées à l'appui des
allégations des demandeurs et n'entraîne pas les mêmes consé-
quences. Un argument qui, à l'encontre de la plupart des preuves,
soutient que le Mandat était un traité et cherche ensuite à mini-
miser les difficultés qui résultent de ce raisonnement en disant que
ce traité était sui eeneris ou n'était pas «un accord ordinaire ))
révèle,nous semble-t-il, ses propres faiblesses. Il en va de même
de l'argument selon lequel le Mandat serait aujourd'hui un traité
ou une convention en vigueur, mais qui ne peut indiquer qui en
sont les parties, mis à part le Mandataire; ou qui, tout en alléguant
qu'il s'agit d'un cas spécial, prétend que cela n'a pas d'importance
qu'il y ait ou non des parties; ou qui, négligeant un principe de

droit, postule que certains Etats jouissent d'un droit qui n'était
le leur qu'en vertu d'une qualité qu'ils ont perdue.
Une autre raison, plus impérieuse, est que la seconde exception
soulèvede façon beaucoup plus directe que la première une question
qui doit toujours êtreau centre de tout problème ayant trait à la
compétence de la Cour, à savoir la qualité des Etats demandeurs
pour invoquer la clause qui, selon eux, confère à la Cour sa com-
pétence
* * *

I. Importance et caractère dela deztxième-exceptionpréliminawc

Étant donné que les clauses de règlement judiciaire indiquent
invariablement les entités ou catégories d'entités qui sont fondées
à se prévaloir du droit de demander à soumettre l'affaire au règle-
ment judiciaire, la question fondamentale qui se pose sur ce point
de l'affaire actuelle est de savoir si les termes mêmesde l'article7
permettent aux demandeurs de s'en prévaloir et, dans la négative,
sur quelle base juridique (s'ilen est) ils peuvent cependant prétendre
avoir le droit de le faire. Nous rappelons que, pour ce qui est de
cette question, l'article7 dispose que le Mandataire accepte que

189tout.différend qui viendrait à s'éleverentre lui et (un autre Membre
de la Sociétédes Nations ))soit soumis au règlement judiciaire.
Il est clair que l'article 37 du Statut ne peut avoir pour effet
de substituer la Cour actuelle à l'ancienne Cour permanente dans

une a8aire od celle-ci n'aurait fias ezl comfiétence.Il n'a pas pour
effet d'élargirla compétence. Il remplace simplement le renvoi à la
Cour permanente par le renvoi à la Cour actuelle. Cet article ne
détermine pas, et ne peut déterminer par lui-même,si dans le cas
donné la Cour permanente aurait été effectivement compétente.
Nous devons insister sur ce point parce que, si évident qu'il soit,

il ne paraît pas avoir étépleinement apprécié en l'espèce.Une dis-
position telle que l'article 37, qui ne vise pas expressément le cas
des Mandats mais se rapporte à toute sorte ou toute espèce de
très nombreux traités ou convehtions, est absolument neutre quant
à savoir si, dans un cas donné, il existe une obligation de se sou-
mettre au règlement judiciaire. Le fioint de savoh si l'obligation

existe ou non dans un cas donné dépend de la clause de règlement
judiciaire qui l'aurait créée (enl'espèce l'article 7 du Mandat) l,
clause à laquelle l'article 37 ne peut ni ajouter ni changer quoi que
ce soit. A défaut d'une disposition expresse en ce sens, et il n'y en
a pas, l'article 37 ne peut que conférer à la Cour actuelle la com-
pétence pré-existante - quelle qu'elle ait pu être - de la Cour
permanente et ne saurait conférer une compétence différente ou

plus étendue..Au surplus, il ne peut par lui-mêmedéterminer s'il
existe une compétencequelconque.
On peut admettre sans réserve que la Cour actuelle, dans le
cadre de l'article 37, se substitue autant que possible à l'ancienne
Cour permanente dans l'exercice de toute compétence que cette
dernière aurait pu exercer en son temps. Mais la question se pose

quand mêmedans tout cas d'espèce :la Cour permanente elle-même
aurait-elle pu exercer sa compétence? A notre avis, elle ne pouvait
le faire et ne l'aurait fait en vertu de l'article 7 du Mandat que sur
l'instance d'un Membre de la Sociétédes Nations - qualité que
ne possèdent pas les demandeurs en l'espèce. Il est si évident,
pensons-nous, que l'actuelle Cour internationale ne peut exercer

une compétence que l'ancienne Cour permanente n'aurait pas pu
exercer en son temps, et qu'en lait la Cour permanente n'aurait pas
pu se déclarer compétente dans une instance ouverte contre le
Mandataire par un Etat non membre de la Société des Nations,
qu'il n'est guèrenécessaire d'endire plus sur cet aspect de l'affaire.

l C'est l'article 7 du Mandat qurégit la 9orléede l'obligation du Mandataire
de se soumettre au règlement judiciaire. Unobligation illimitde se soumettre
au règlement judiciaire est presque sans précédent. En pratiqutoute clause de
règlement judiciaircontient des conditions et des restrictions quelconques. L'une
d'eues, très fréquente et presque invariaest une limitation quant à la catégorie
d'États ou d'entités qui peuvent invoquer la clause. Dans le cas des traités, le droit
conventionnelstBtablis par une autorité internationalou sousdsessauspices, la
limitationnormale est la qualité d'État Membre de l'organisation6ressée. Au cours de la présente procédure, la Cour - selon nous, sans
raison valable en droit - a considéréla question sur la base de la
compétence que la Cour permanente aurait pu exercer et aurait
exercée si elle était encore en fonction auiourd'hui - c'est-à-dire
si la Société desNations avait été dûment dissoute en 1946 mais
que la Cour permanente avait survécu et siégeait actuellement
pour connaître de la présente affaire. Or, cela équivaut à faire une
pétition de principe et à négliger le fait que l'article 37 ne peut

avoir d'autre effet que de donner compétence à la Cour actuelle
dans une affaire que la Cour permanente aurait été habilitée à
juger. Cela présuppose nécessairement une affaire née à l'époque
de la Cour permanente, car une Cour non existante ne saurait
évidemment avoir une compétence quelconque. Si la Cour perma-
nente fonctionnait encore, il n'aurait pas éténécessaire de la rem-
placer par la Cour actuelle. Si la Cour actuelle a remplacé l'ancienne
Cour, c'est parce que cette dernière fonctionnait et qu'elle ne
fonctionne plus. Donc ce que la Cour actuelle ((a hérité ))(pour
ainsi dire) de l'ancienne Cour c'est la compétence que l'ancienne
Cour étaiten fait habilitéed exercerlorsqu'ellefonctionnait - c'est-
à-dire la compétence qui rentrait alors dans le cadre de sa juridic-
tion. Elle ne s'étendait pas à une-instance prétendument intentée

aux termes de l'article 7 par des Etats non membres de la Société
des Nations, catégorie à laquelle appartiennent les demandeurs.

A notre avis ce raisonnement est concluant et strictement incon-
testable en ce qui concerne la deuxième exception préliminaire.
Nous allons néanmoins considérer maintenant la question en nous
demandant si la Cour permanente, en supposant qu'elle ait survécu
à la dissolution de la Société desNations et qu'elle siège encore,
serait compétente pour connaître et juger des requêtes présentées
actuellement àla Cour.

Dans cette partie de l'affaire, la Cour est appelée à examiner la
thèse présentéeau nom des États demandeurs d'après laquelle,
bien qu'ils ne soient plus Membres de la Sociétédes Nations depuis
sa dissolution, ils doivent néanmoins êtreconsidéréscomme ayant
conservé ou comme possédant encore le droit d'invoquer l'article 7
en t,ant qu'anciens Membres de cette Société, c'est-à-direen tant
qu'Etats Membres à la date de sa dissolution.
Nous nous proposons d'examiner d'abord si l'espèce de trans-
formation ou de métamorphose impliquée par la thèse des deman-
deurs comme il vient d'êtreindiquéa la moindre possibilité d'être
admise sur la base des termes mêmesde l'article 7 ou par voie

d'ccinterprétation 1)légitime de cet article. Nous examinerons plus
loin si cette transformation peut êtreadmise sur la base d'une pré-
somption ou d'une conséquenceimplicite quelconque découlant decirconstancesextérieures à l'article 7 mêmeou par application d'un

principe général de droit ayant pour effet d'opérer pareille trans-
formation.

2. Interprétationde l'article 7

a) Les termesmêmes de l'article
Comme point de départ nous adopterons l'hypothèse, que nous
démontrerons plus amplement par la suite, selon laquelle, à défaut
de disposition expresse en sens contraire, les droits qui ont été
conférés àune personne ou à une entité, ou qui peuvent êtreexercés

par celles-ci, en une qualité donnée ou en tant que membre d'une
catégorie donnée, ne peuvent ni êtreexercés en une autre qualité
ou comme membres d'une autre catégorieni continuer à êtreexercés
en cas de perte de la qualité spécifiéeou de cessation de l'apparte-
nance à la catégorie spécifiée.
Ainsi, les droits conférésàun État A comme membrede la Société
des Nations, ou simplement (aux Membres de la Sociétédes Na-
tions ))(1'Etat A étant ou devenant l'un de ses Membres), n'étaient
pqs, et ne pouvaient être,des droits conférésindividuellement à

1'Etat A comme tel et susceptibles d'êtreconservés par cet Etat
indéfiniment,sanslimitation de temps, indépendamment deses rap-
ports avec la SociétédesNations ou de l'existence mêmede celle-ci l.
La question de principe fondamentale posée par la deuxième
exception préliminaire est donc la suivante :pour quel motif, s'il en
est, des Etats investis de droits en leur qualité de membres d'une
catégorie, et uniquement en cette qualité, pourraient-ils invoquer
ces droits à titre individuel (alors qu'ils ne sont plus membres de

cette catégorie ou que celle-ci a cesséd'exister) ou en qualité de
membres d'une autre catégorie distincte?
Lord McNair (tel est maintenant son titre) a étéen 1950 le seul
Membre de la Cour à considérer spécialement cette question sous
cette forme et il a, en fait, mis de côté le principe d'après lequel le
droit conférépar l'article 7 serait fondésur une catégorie, jugeant
que la mention de la qualité de Membre de la Sociétédes Nations
n'était qu'une descriptiondes États fondésà exercer ce droit et non
pas une condition de son exercice. Cette mention ne signifiait pas

tant que la Sociétédes Nations existera et qu'elle comptera des
Membres )) (C.I. J. Recueil 1950,~~. 159). En résumé, pour para-
phraser quelque peu son idée, un Etat, nécessairement, ne peut plus
êtremembre d'une organisation qui n'existe plus aujourd'hui, mais
cela n'a pas d'importance si on peut encore l'identifier comme un
Etat qui était investi du droit en question alors que l'organisation
existait encore.

l Du point de vue mêmede la simple logique, il est clair que les droits conférés
expressément aux membres d'une catégorie, comme telsne leur sont pas pour
autant conféréà titre individuel.

192 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 508

C'est naturellement avec hésitation que nous nous sentons obligés,
pour des raisons qui apparaîtront plus bas, d'êtred'un autre avis
que ce juge éminent. Lord McNair a fait là une tentative, la seule
qui ait jamais étéfaite, de réconcilier avec les termes mêmesde
l'articl7 une thèse comme celle que soutiennent les actuels deman-
deurs. Mais il a négligé,nous semble-t-il,,le fait que l'artic7en'a
jamais étédestiné à s'appliquer à des Etats particuliers en tant
quJEtnfs. Nul ne savait en 1920 quels seraient exactement les
Membres de la Sociétédes Nations, ni ce qu'il en adviendrait. Leur
liste pouvait changer considérablement avec le temps et c'est ce qui
s'est passé. Cette liste $ait variable. Elle'pouvait à un moment

donné comprendre des Etats A, B et C; à un autre, les Etats A et
B pouvaient en êtrerayéset des Etats D et E y êtreinscrits. C'est
ce qui s'est produit de temps à autre. L'article7 n'était pas destiné
à s'appliquer à l'un quelconque de ces Etats A, B, C, D ou E
conzmetel. Il était destiné à s'appliquer à tout État qui serait à
un moment donné Membre de la Sociétédes Nations - et cela
seulement s'il était Membre de la Société,mais aussi longtemps qu'il
le serait. On n'avait pas envisagé de l'appliguer autrement. C'est
pourquoi, si l'article a conféréun droit à l'Ethiopie et au Libéria,
actuels demandeurs, c'est uniquement en tant qu'ils ont satisfait
au critère indiqué: être Membre de la Société desNations. Sans

quoi ils n'auraient pas eu ce droit.
A notre avis, il ne saurait par conséquent faire de doute que,
pendant l'existence de la Société desNations, la qualité de Membre
étaitune condition et que la Cour permanente se serait déclarée
incompétente pour trancher un différendentre le Mandataire et un
Etat non membre. Vn cas analogue s'est présentéquand, avant
de devenir Membre de la Société desNations, l'Allemagne a réclamé
(en qualité de partie au traité de Versailles dans lequel étaient
incorporés le Pacte et l'article22)le droit d'intervenir à propos de
l'administration d'un ancien territoire allemand sous Mandat belge :

le Conseilde la SociétédesNations n'a pas répondu aux réclamations
allemandes et la Belgique, en tant que Mandataire, a répondu que
toutes ces questions ((sont de la seule compétence de la Sociétédes
Nations )l.
De même,nous ne doutons pas - et nous ne pensons pas qu'il
puisse y avoir le moindre doute à ce sujet - qu'un pays, comme
par exemple le Brésil, qui avait tout d'abord étéMembre de la
Société desNations pour la quitter ensuite, avait perdu les droits
qu'il détenait de l'article7, et que la Cour permanente se serait
déclaréeincompétente si le Brésil avait introduit une instance aux
termes de cette disposition.

Dans ces conditions, quelle différencey aufait-il en principe entre
un cas comme celui du Brésil et celui des Etats demandeurs dans
les présentesinstances ?On pourrait prétendre que la différencetient

l SociétdesNations, Journal oficzel, VIII, pp. 316-317.
193à la manière selon laquelle a pris fin l'appartenance à la Société
des Nations. A strictement parler, sans doute, la raison particulière
qui estàl'origine de la perte de la qualitéspécifiou de la cessation
de l'appartenance à la catégorie spécifiéeest sans pertinence. Le
fait même suffit.Toutefois, nous allons traiter de ce point. On peut
dire que le Brésil a quitté la Société desNations volontairement
et délibérémentet qu'en conséquence il ne pouvait évidemment
ontinuer à jouir des mêmesdroits que dans le passé, alors que les
Etats demandeurs n'ont pas renoncé à leur qualité - mais l'ont
perdue. La Sociétédes Nations ayant pris fin, ils ont nécessairement
cessé d'en être Membres. Mais il faut se demander pourquoi la
Sociétéa pris fin. Elle ne s'est pas simplement écroulée.La réponse
est évidemment qu'elle a pris fin du fait des demandeurs eux-mêmes,
qui se sont joints aux autres Membres de la Sociétépour la dis-

soudre. Mêmesi la Sociétédes Nations avait pris fin pour des raisons
échappant absolument au contrôle de ses Membres et contrairement
à leur volonté, le statut et la capacité s'attachant à la qualité de
Membre de la Société n'enseraient pas moins devenus caducs.
Mais tel n'a pas étéle cas. Ce sont les Membres de la Sociétédes
Nations eux-mêmesqui ont mis fin à leur qualité de Membres. De
plus, bien que la question des territoires sous Mandat ait étépleine-
ment considéréetant àSan Francisco, lors de la créationdes Nations
Unies, qu'à Genève, lors de la dissolution de la Société desNations,
ainsi que le montre le dossier, aucune disposition n'a étéprise pour
faire faceà une situation du genre de celle qui se présente actuelle-
ment. Pour des raisons que nous indiquerons plus loin, nous n'ac-
ceptons ni qu'il se soit agi là d'une simple omission, ni qu'une
disposition en ce sens ait étéimplicitement prise au cours des
derniers débats de Genève et dans la résolution de la Société des
Nations du 18 avril 1946 concernant les territoires sous Mandat.
Il nous semble donc qu'en se joignant aux autres Etats pour

mettre fin à leur qualité de Membres de la Société desNations,
les Etats demandeurs ont accompli un acte tout aussi volontaire
et délibéré que celui du Brésil; entre les deux cas, nous ne pouvons
voir qu'une différencede méthode. Nous considérons qu'en se dé-
pouillant eux-mêmesde leur qualité de Membres de la Société des
Nations, sans prendre de dispositions quant à la situation ainsi
créée ence qui concernait l'article 7 du Mandat, les demandeurs
ont mis fin aux droits que leur conférait cet article, tout aussi
complètement que le Brésil.
Mêmesi l'on part de l'idéeque les Membres de la Sociétédes
Nations, qu'ils fussent effectivement parties au Mandat ou non, se
sont vy conférerpar l'article7les droits spécifiquesde tierces parties
ou d'Etats tiers,la difficultédemeure. Mêmes'il existe des principes
de droit applicables aux États tiers qui pourraient, par ailleurs,
permettre à ces droits de survivre, ils ne peuvent survivre que
selon leurstermes. S'étantdeleur propre fait dépocullésde la qualité
en vertu de laquelle ilsuissaient de ces droits, les Etats en questionne peuvent plus les invoquer, mêmeà titre d'États tiers; en effet,
aucune doctrine relative aux droits des Etats tiers ne saurait aller
jusqu'à permettre à ces derniers de continuer à invoquer des droits
auxquels ils ont eux-mêmes effectivement renoncé.

b) L'application des principes générauxdu droit relatifs li la
qualité

Au cas où l'opinion que nous venons d'énoncer serait considérée
comme trop stricte, nous voudrions attirer l'attention sur le principe
général dedroit universellement reconnu - et essentiel au bon
ordre des choses - d'après lequel les droits dont dispose une per-
sonne ou une entité en une certaine qualité ne demeurent pas à sa
dispositionen une autre qualité - ou après la perte de la première
qualité - à moins que des arrangements spéciaux n'aient étépris
à cette fin. C'est ceque l'on voit constamment dans le domaine du
droit privé.Les trustees,administrateurs, curateurs, tuteurs légaux,
etc. jouissent de certains droits particuliers se rapportant à leur
leur statut en ces qualités. Dèsque ce statut cesse, les droits qui y

sont attachéset qui n'existent pasindépendamment deviennent égale-
ment caducs. Ou encore, certains pouvoirs ou facultés peuvent être
attachés àune qualité donnée.Le fait d'acquérir un autre statut ou
une autre qualité, ou simplement de continuer à exister comme
individu, ne saurait permettre de conserver les droits inhérents à
l'ancienne qualité.De même, le simplefait que les Etats demandeurs
continuent à exister comme États, ou qu'ils soient aujourd'hui
Membres des Nations Unies au lieu de l'êtrede la Sociétédes
Nations, ne leur donne en soi - en l'absence de dispositions spé-
ciales en sens contraire - aucun droit, d'autant moins qu'ils ont

eux-mêmesmis fin à leur qualité de Membres de la Sociétédes
Nations, à continuer d'invoquer une disposition dont les Membres
de la Sociétédes Nations pouvaient seuls se prévaloir.
Il paraît à peine nécessaire d'insister sur un point aussi élémen-
taire. Toutefois nous devons le faire car, à notre avis, la Cour l'a
ignoré en substance. Par exemple, on a beaucoup entendu parler
dans ces affaires de l'aspect ((police du Mandat » que présente
l'article7. Mais, pour prendre un exemple de la vie de tous les jours,
peut-on sérieusement prétendre que, lorsqu'une force de police est
licenciée, ses anciens membres peuvent continuer à exercer leurs
anciennes fonctionsde police ?Il serait bien extraordinairequ'aucun

tribunal sanctionne cette idée. Si les anciens Membres de la Société
des Nations ont jamais eu des fonctions de (police 1)aux termes
de l'article7,c'étaiten tant que membres de la force de police que
représentait la Société - force qui est maintenant dispersée et
dissoute.
Au surplus - et ce point n'est pas sans signification - il n'est
pas vrai, mêmesi cela était pertinent en droit, que l'obligation du

19.5 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 513
Mandataire resterait en substance la mêmesi elle était due main-
tenant aux anciens Membres de la Société.Cela tient aux consé-

quences différentes qu'un arrêt de la présente Cour peut avoir par
rapport à un arrêt de la Cour permanente, eu égard à l'article 94,
paragraphe 5,de la Charte des Nations Unies.
De quelque manière que l'on compare cet article et l'article 13,
paragraphe 4,du Pacte, il est évident qu'il y a entre eux des diffé-
rences substantielles. Il n'y a pas lieu de développer ici ces diffé-
rences; il suffit de dire que, à notre avis, non seulement les
conséquences qui peuvent découler de l'article 94, paragraphe 2,
de la Charte sont différentes de celles qui auraient pu résulter de
l'article 13, paragraphe 4, du Pacte, mais elles pourraient êtreplus

lourdes. De plus, le Conseil était liépar la règlede l'unanimité. En
outre, c'étaitau Conseil et à lui seul qu'appartenait, aux termes du
Pacte, l'initiative des mesures éventuelles qu'il proposait, alors que
l'effet de l'article94, paragraphe 2, de la Charte est de conférer
aux arrêtsde la présente Cour l'appui de la possibilité de sanctions
ou de mesures d'exécutionsur l'instance de l'État en faveur duquel
le jugement a étéprononcé. Si donc le Mandataire est encore lié
par une obligation, il s'y attache virtuellement, sur la base de l'effet
combinéde l'article 37 du Statut et de l'article 7 du Mandat, des
conséquencesdifférenteset plus lourdes qu'auparavant. Ainsi, il est
tout à fait inexact de dire que l'on n'a pas demandé au Mandataire

d'accepter une obligation plus lourde que celle à laquelle il aurait
dû se soumettre au temps de la Société;et cette situation constitue
ànotre avis un obstacle absolu à toute extension ou perpétuation
desobligations du Mandataire d'aprèsl'article 7 au-dessus et au-delà
des termes véritables de cet article, à moins que cela ne puisse se
justifier, sans laisser la place au moindre doute, sur la base d'un
principe d'interprétation juridique applicable ou d'une règlegénérale
de droit, d'autant qu'il est raisonnable, selon nous, de penser que
c'est précisément en vue de faire jouer l'article 94 de la Charte que
la présente action a été intentée.

Puisqu'à notre avis la situation est tout à fait claire sur la base
des termes mêmesde l'article 7 et des règles ordinaires de droit
en matière de qualité, la question se pose maintenant de savoir s'il
existe un principe d'interprétation applicable qui justifierait une

conclusion différente. On en peut suggérer deux: le principe de
l'effet maximum ))et celui de (l'intention présuméedes parties )).

c) Le principe de «l'eflet maximum ))

Ceprincipe peut êtreutilisi5pour donner à une disposition la plus
grande portée raisonnablement compatible avec son texte' et avecles circonstances générales de l'espèce; mais seulement si une telle
interprétation est compatible avec ce texte et ces circonstances. On
ne saurait l'employer pour (récrire ))une disposition d'une manière
nettement incompatible avec son texte, ou mêmeeffectivement

contraire à celui-ci. De même,son application doit êtreécartéesi
les circonstances prouvent l'absence complète de toute base pour
l'interprétation qui en résulterait. Nous montrerons plus loin, à
propos des faits relatifs à la dissolution de la Société des Nations,
pourquoi nous pensons que c'est exactement ce que montrent les
.i-constances. Pour le moment. nous souli"erons sim~lement ce
que peut entraîner réellement l'interprétation proposéepar les de-

mandeurs; car, selon nous, avant de pouvoir appliquer en droit le
principe de ((l'effet maximum D, il faut être prêt à formuler les
changements que la disposition en cause exigerait si elle avait été
rédigée à l'origine de faqon à produire expressément l'effet voulu,
et, cela fait, considérersi le résultat reste dans les limites de ce que
l'on peut raisonnablement qualifier d'c(interprétation )légitime ou
s'il dépasseces limites et équivaut à une revision ou à une ((rectifi-
cation ))quasi législative de la disposition en question.

En l'espèce,l'interprétation défendue par les États demandeurs
aurait pu êtreeffectuéeexpressément par des modifications soit de
l'article7 du Mandat soit de l'article 37 du Statut. Des modifications
de l'article 7 exprimée dsns les termes de cet article n'auraient pu
êtreeffectuéesqu'au moment de la rédaction de l'article 7, et c'est
sur cette base qu'il faut les considérer. On peut envisager deux

méthodes possibles. L'une aurait consisté à remplacer les mots ((un
autre Membre de la Société desNations » par,« un autre Etat ))ou
((tout autre Etat intéressé ))ou ((tout autre Etat qui est ou a .été
à un moment quelconque Membre de la Sociétédes Nations ».Nous
estimons que les chances de voir en 1920 le Mandataire, ou sur ce
point n'importe quel Mandataire, disposéà accepter un libelléaussi
radical - si quelqu'un l'avait suggéré - eussent éténégligeables.

L'autre méthode d'obtenir le résultat voulu aurait consisté à
ajouter aprèsles mots (un autre Membre de la Société desNations 1)
une phrase telle que ((ou,,si la Sociétévient à êtredissoute à un
moment quelconque, tout Etat qui en sera Membre à cette époque ».
Dans la prochaine section nous expliqueronspourquoi nous pensons
qu'il est absolument impossible que des termes de ce genre aient pu
êtreemployés en 1920.

En ce qui concerne l'article 37 du Statut, il faudrait supposer
qu'il eût contenu (et le lire comme s'il contenait) un paragraphe
supplémentaire rédigé à peu près comme ceci:
Lorsqu'un traité ou convention prévoitle renvoi au règlement
judiciaire de différendsentre les Membresde la Société deN s ations,

de cette dissolution, comme visant les différendsentre des Etatst
qui étaientMembresde la Société à la date de sa dissolution.» Nous pensons, après mûre réflexion, que les rédacteurs du Statut
lors de la conférence préliminaire de Washington de mars-
avril1945 et ultérieurement lors de la conférencede San Francisco,
n'auraient jamais fait le saut dans l'inconnu qu'impliquait un tel
engagementsans effectuer préalablement des recherches trèsprécises
sur les traités susceptibles d'êtreaffectés,afin de voir à quoi serait
revenu exactement un tel engagement. Aucune recherche de ce
genre n'a étéeffectuée à notre connaissance; et nous ne croyons pas
qu'il soit possible en l'occurrence de lire dans l'articl37 les termes
supplémentaires qui eussent produit l'effet voulu s'ils avaient été
inclus à l'origine dans son texte.

Pour résumer ce point -- nous estimonsquel'application du prin-
cipe de l'effet maximum dans la présente affaire entraînerait une
rectification des dispositions en cause dans une mesure inadmissible,
dépassant nettement les limites de l'interprétation légitime. Nous
rappellerons que dans la seconde phase de l'affaire des Traitésde
paix (qui présente certaines affinités marquées avec les présentes
espèces) la Cour a adopté une attitude exactement opposée à celle
qu'elle adopte maintenânt. Tout en jugeant que certaines des
parties avaient violé ce qu'elle considérait comme une obligation
conventionnelle de désignerleurs représentants à certains tribunaux
de trois membres prévus par les traités de paix, la Cour a cependant
rejeté l'opinion selon laquelle, dans les circonstances données, la
clause de règlement judiciaire pertinente aurait pu légitimement
s'interpréter de manière à permettre le fonctionnement d'un tribu-

nal de deux membres au lieu de trois. Comme l'a dit la Cour dans
un passage qui fait depuis lors partie du fonds commun des textes
de droit international, une décision dans ce secs aurait équivalu
((non à interpréter les traités, mais à les reviser))En bref, la Cour
a refusé de rectifier une disposition qui, dans ses termes effectifs
et dans les circonstances qui se présentaient alors, ne pouvait
produire le résultat prétendu. A notre avis, c'est précisément une
rectification de ce genre que la Cour effectue maintenant et avec
beaucoup moins de justification en droit qu'il n'y en aurait eu
dans l'affaire des Traitésde paix.
Le caractère unilatéral de l'article7 offre une autre raison d'es-
timer que les interprétations extensives de cette disposition ne sont
pas fondées, à moins qu'elles ne soient supportées par une justifi-
cation des plus incontestables. Cet article ne pouvait êtreinvoqué

que contre le Mandataire et non par lui, mêmesi ce dernier recher-
chait de son côté une décision judiciaire sur un point ayant trait
au Nandat et se présentant à propos d'un différend avec un autre
Membre de la Société desNations. C'est là une raison de plus pour
interpréter l'article7 strictement, ou du moins scrupuleusement. d) L'intention $résumée des parties

Nous en arrivons au deuxième principe d'interprétation sur la
base duquel on pourrait avancer une conclusion autre que la nôtre.
L'un des principaux arguments développésen l'espècea étéque,
du temps de la Sociétédes Nations, quoiquecertains États pussent,
en quittant la Société,perdre le droit d'invoquer l'article 7, il
restait toujours d'autres États qui pouvaient le faire, en sorte que
l'articl7 n'aurait pu devenir lettre morte. Or, s'il faut maintenant
lire l'articl7 d'awès ses termes stricts. aucun État - dit-on -
ne pourrait aujourd'hui l'invoquer, en sorte qu'il aurait entièrement
cesséd'être applicable; onprétend donc que, comme ce vide n'a
jamais pu entrer dans les intentions des rédacteurs du Mandat,
il faut lire l'artic7ecomme continuant à conférerdes droits aux
anciens Membres de la Société desNations.
Puisqu'une situation dans laquelle aucun État n'aurait qualité
pour invoquer l'article 7 ne pouvait se produire que par suite de la

dissolution totale de la Société desNations, l'argument en question
doit se fonder sur l'hypothèse soit que les rédacteurs ont prévu
cette éventualité, soit que, s'ils l'avaient prévue, ils y auraient
fait face de la manière que prétendent les demandeurs.

Il est clair que, si les rédacteurs ont réellement prévu cette
éventualité, le fait qu'ils n'aient pas pris de disposition pour y
faire face doit avoir été l'effetd'une volonté délibérée; ainsi l'argu-
ment fondé sur leurs ccintentions présumées » conduirait à une
conclusion inverse, à savoir que le vide ne doit pas êtrecomblépar
voie d'interprétation.
Mais il est évident que les intéressésn'ont pas prévu une éven-
tuelle dissolution de la Sociétédes Nations et qu'ils se seraient
refusésà l'envisager. D'ailleurs, mêmeen admettant qu'ils l'aient
fait, nous ne voyons pas sur quelle base on pourrait légitimement
présumer qu'ils auraient pris des dispositions expresses pour le

maintien en vigueur de l'article 7 ou de l'obligation du Mandataire
de se soumettre au règlement judiciaire obligatoire. Si l'on peut
faire des suppositions, elles doivent êtreen sens contraire, car les
circonstances dans lesquelles la dissolutionde la Sociétédes Nations
se produirait ou pourrait se produire devaient nécessairement être
tout à fait imprévisibles en 1920; il est on ne peut plus certain
qu'aucune des Puissances mandataires (et point seulement l'Afrique
du Sud) n'aurait consenti à accepter une obligation perpétuelle
de se soumettre au règlement judiciaire devant continuer à jouer
dans une situation dont personne ne pouvait prévoir la nature.
A cette époque (1920) le consentement au règlement judiciaire
obligatoire était relativement rare et il n'aurait certainement ,
pas étédonnéà l'égardd'une obligation de durée illimitée,dans des
conditions inconnues.
En réalité,ce que les demandeurs demandent à la Cour de faire,
c'est d'interpréter l'articl7 à la lumière des intentions présumées

199 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 515
que l'on pourrait attribuer aux parties pour le cas où elles auraient
prévu non seulement la dissolution de la Sociétédes Nations mais

aussi les circonstances de cette dissolution, c'est-à-dire que la
Sociétéferait place àl'organisation des Natinns Unies, qu'un régime
de tutelle serait établi, etcMais ce n'est pas une méthode légitime
d'interprétation que de lire une disposition d'après des intentions
présumées a fiosteriori.On ne peut déduireles intentions des parties
que de ce qu'elles ont raisonnablement pu prévoir à l'époque, et
non pas de ce qu'elles auraient pu vouloir si elles avaient exacte-
ment prévu l'avenir, ce qu'elles ne pouvaient faire.

11est évident que l'époque où l'on aurait pu faire face aux consé-
quences de la dissolution de la Société desNations et prendre des
dispositions en conséquence, tout au moins pour ce qui concerne
l'article7, n'est pas celle de la rédaction du Mandat (1920) mais

celle de la dissolution de la Société(1945-1946). Or, on n'a rien fait
de la sorte et nous allons expliquer maintenant pourquoi nous
pensons que cela n'est pas dû à une omission mais qu'on l'a voulu,
délibérémentet pour cause. Cela étant, nous ne connaissons aucun
principe quipermettrait, et moins encore exigerait, qu'un tribunal
prenne des mesures rectificatives sous le couvert d'un processus
d'interprétation, simplement parce que l'affaire n'a pas évolué
comme les parties, on certaines d'entre elles, l'avaient envisagé.

Il nous faut examine; maintenant certains autres arguments

sur la base desquels les Etats demandeurs prétendent qu'ils ont le
droit d'invoquer l'article 7 en l'espèce. Ces arguments reposent sur
des considérations plus ou moins externes, telles que la situation
actuelle du Mandat ou les dispositions d'autres instruments, etc.
Sous en laisserons certains de côté, en partie faute de place, mais
surtout parce que nous considérons que ce ne sont nullement des
arguments juridiques. Ce ne sont rien de plus que des motifs ou des
raisons faisant valoir qu'il est politiquement souhaitable que les
demandeurs aient le droit d'invoquer l'article7 et que la Cour se
déclare compétente. Si compréhensible que soit ce sentiment, il ne
saurait avoir aucune portée sur les questions juridiques en cause
et seules ces dernières doivent retenir notre attention.
D'autres arguments sont bien d'ordre juridique - tout en étant
à notre avis mal fondés -, mais nous n'en traiteronspas parce que,

dans son présent arrêt, la Cour ne se fonde pas effectivement sur
eux, bien qu'ils aient étélonguement débattus par les parties dans
la procédure écriteet orale et que la Cour y ait fait directement ou
indirectement allusion dans l'affaire de 1950 - tel est le cas, par
exemple, de l'argument fondé sur l'article 80, paragraphe 1, de la
2O0Charte des Nations Unies l,ou sur une prétendue ((continuation »

ou dévolution, en faveur des Nations Unies et de ses Membres,
des fonctions, pouvoirs ou droits de la Société des Nations et de
ses Membres touchant aux territoires sous Mandats.
Les arguments que nous examinerons peuvent se diviser en trois

grandes catégories selon qu'ils se fondent a) sur le caractère ins-
titutionnel du Mandat et sa survivance en tant qu'institution,
sinon en tant que traité ou convention; b) sur le rôle soi-disant

essentiel et nécessaire de l'article 7 dans le cadre du Mandat; et c)
sur les assurances que le Mandataire aurait données en 1946 en
prévision de la dissolution de la Société desNations, impliquant
que le Mandataire aurait accepté d'êtreliépar l'article 7 à l'égard

de tout Etat Membre de la Sociétédes Nations à la date de sa
dissolution.

a) Le fondement institutionnel et les e8ets du Mandat
En résumé,l'argument avancé sous ce titre est que la survivance

admise du Mandat en tant qu'institution implique nécessairement
sa survivance intégrale, tous ses élémentsrestant intacts y compris
l'article 7. Mais, l'article 7 ne pouvait êtreinvoqué que par les

1L'article 80, paragraphe I,dela Charte n'a rien à voir avec la compétence de la
Cour.
On a toutefois cherché à s'en servir dela façon suivante: cet article aura((pré-
servé .les droits des États; l'un de ces droits était celui qui était énoncédans l'arti-
cle 7 de l'acte de Mandat; par conséquent, ce droit aurait survécuà la dissolution
dela Sociétéjusqu'à ce que le territoire sous Mandat soit placé sous tutelle.
Non seulement cet argument est défectueux en soi, mais il ignore les termes
mêmes de l'article 80, paragraphe I. Cet article représente clairement une clause
d'interprétation,appelée communément 1,clause de sauvegarde »,d'un type que
l'on trouve fréquemment dans les instruments législatifs ou conventionnelsdestinés
à empêcher que les dispositions d'une loi ou d'un traité soient i7zterhrétéedse façon
àavoir des effets dépassant leur objectif.
Sauf dans un sens vague et tout à fait indéterminé, une clause de ce genre ne
:préserve aaucun droit. Elle empêcheque l'application de la loi ou du traité affecte
des droits (quels qu'ils soienou quel que soit leur contenu) autrement que de la
manière prévue par le statut ou le traité. L'article 80, paragraphe1,ne maintient
ni ne stabilise certains droits tels qu'ils existaientate d'entrée en vigueur de la
Charte; il n'assure pas non plus leur continuité; il ne les accroît ni ne les réduit. Il
les laisse en dehors de l'effet des dispositionschapitre XII dela Charte.
Ce que l'article 80, paragraphe 1, passe sous silence est aussi importantque ce
qu'il exprime. Il ne dit pas que certains droits seront maintenIl ne dit pas que ces
droits serontpar la suite, jusqu'à la conclusion d'accords de tutelle, sujetà exé-
cution ou qu'ils ne prendront pas fin ni ne deviendront caducs par expiration du
terme. défaut d'objectif, impossibilité d'exécution ou pour toute autre raison. 11
ne dit pas que ces droits ne seront ni modifiés, ni sujeàsmodification, même par
lin procédéjuridique normal.

Il est évident que le but de l'article 80, paragraph1,est tout à fait différent de
ce qu'on a prétendu et ne permet pas, par des méthodesrationnellesd'interprétation,
d'appuyer les arguments avancés. I e seul but de cet article était d'empêcher qu'une
disposition du chapitreXII de la Charte pût êtreinterprétée de façonà modifier des
droits existant antérieurement S.un certain événement.
201 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 517

Membres de la Société desNations (aujourd'hui disparue), il ne
pratiquement survivre. Donc, tout Etat qui était Membre
de la Sociétéau moment de sa dissolution doit avoir le droit de
l'invoquer.
A notre avis cet argument est fallacieux à deux égards. La pre-
mière erreur est de prétendre que la'survivance ou le maintien en
vigueur d'une institution entraîne naturellement la survivance ou
le maintien en vigueur de tous ses élémentsintacts. Nous revien-
drons sur ce point. La deuxième erreur est de penser que cette
survivance pourrait de quelque façon augmenter ce que nous
appellerons la stature de l'institution, en lui donnant des effets
supplémentaires, et qu'une disposition pourrait survivre autrement
que d'après ses propres termes.A notre avis,l'articl7a uniquement
survécu en ce sens qu'il n'a pas étéphysiquement rayé de l'acte
de Mandat et qu'il figure toujours sur le document contenant la
résolution ou déclaration originale de la Sociétédes Nations du

17 décembre 1920. La Cour, qui doit déterminer l'application de
l'article7 en tant que partie de l'acte de Mandat et suivant le
principe que cet acte est ou représente un traité ou une convention
en vigueur, peut le faire (et c'est, selon nous, la seule solution)
en décidant que les demandeurs ne peuvent invoquer l'article 7
puisqu'il ne donne de droits qu'aux Membres de la Société des
Nations. Selon nous, la Cour ne saurait appliquer correctement
cet article d'une autre manière car, s'il fait encore partie de l'acte
de Mandat, par là mêmeil en fait partie dans les termes où il a été
primitivement rédigé envue de son insertion dans cet acte et
qui n'ont jamais étémodifiés.La Cour ne peut donc à la fois se
fonder sur la persistance de l'article7 dans l'acte de Mandat et
refuser de l'appliquer conformément aux termes dans lesquels il y
figure.
Mais, si exact cela soit-il, nous ne voulons pas fonder notre
opinion sur une simple considération de logique. Les raisons de
fond qui nous poussent àrejeter l'argument tiréde la survivance du
Mandat en tant qu'institution sont, premièrement, que nous con-

sidéronscomme fallacieuse l'idéeque, si une institution survit, tous
ses éléments doivent également survivre; et, deuxièmement, que
nous estimons qu'il est faux qu'une disposition de règlement
judiciaire obligatoire comme l'article 7 ait un tel caractère de
nécessitéinhérente au système des Mandats qu'il faille lui attribuer
un champ d'application continu et réel entxnt qu'élément essentiel
de ce système.
En ce qui concerne la première de ces questions, il n'existe en fait
aucun principe de droit international qui exige que, puisqu'un
instrument ou une institution survit ou continue d'exister, il en soit
nécessairement ainsi pour tous ses éléments,sans aucune espèce de
séparation possible. Bien au contraire, le droit international ne
prévoit aucune incompatibilité entre, d'une part, la survivance ou
le maintien en vigueur d'un accord, institution ou organe inter-

202national et, d'autre part, l'expiration ou la caducité pour une raison
ou pour une autre d'un de ses élémentsparticuliers ou de fonctions,
obligations ou droits particuliers qui y sont prévus. Cette situation
est même très répandue; il arrive souvent par exemple qu'un
instrument reste en vigueur alors qu'une de ses dispositions parti-
culièrescesseou a cesséde jouer, du fait que ses termes sont devenus
inapplicables ou son exécution impossible, ou pour toute autre
raison.
Si l'examen d'une clause donnée montre (comme dans le cas des
articles 6 et7 du Mandat) que, d'après ses propres termes, elle ne
peut plus être appliquée, bien que l'instrument ou l'institution
survive en tant que tel, il faut prima facie en conclure que cette
clause est devenue caduque, bien que l'acte ou l'institution reste
par ailleurs intact.

On ne pourrait soutenir le contraire que dans le cas où la clause

en question aurait un caractère si essentiel et si fondamental que
l'acte ou l'institution ne pourrait fonctionner sans elle. Il nous
faut donc voir maintenant si, au sensjuridique, l'article du Mandat
a un caractère de nécessitéinhérente tel que cela justifie de l'appli-
quer comme la Cour en a décidé.

b)L'argument tiréde la nécessité
Nous arrivons ici au cŒur de la présente affaire car le prétendu
caractère essentiel de l'articl7 de l'acte de Mandat est non seule-
ment à la base de l'argument selon lequel le Mandataire aurait
accepté en 1946 de continuer à considérer l'article 7 comme appli-
cable (nous en parlerons plus loin), mais il est aussi à la base et
forme l'essence de presque tous les arguments avancés en faveur de
la compétence de la Cour en l'espèce. Si l'article 7 n'est pas un
élément essentieldu Mandat,' tous les arguments substantiels pré-
sentésen faveur de la compétence sont réduits à néant. La première

question est donc de savoir comment interpréter correctement les
termes «essentiel », «nécessitéinhérente »,etc. Il ne suffit pas de
simples affirmations de nécessiténon appuyées par des critères
juridiques. Le principal motif avancéen faveur du caractère néces-
saire de l'article en l'espèceest que l'on considérait comme essen-
tiel, dans l'intérêtdes peuples non encore capables de se diriger
eux-mêmes,qu'il y eût une ((surveillance judiciaire» sur la façon
dont la Puissance mandataire accomplissait les obligations inter-
nationales de sa mission sacrée. Il faut, dit-on, donner effet à cette
nécessitéd'une façon ou d'une autre.
Etant donnénotre opinion sur la troisième exceptionpréliminaire,
à savoir que l'articl7 n'a nullement étéinstitué pour la protection

203 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 519
des habitants du territoire sous Mandat, nous ne pouvons évidem-
ment pas accepter un argument de nécessité fondésur le motif qui
vient d'êtrementionné. Toutefois, mêmesi notre avis était différent
à cet égard, nous rejetterions encore ce motif. Il ne suffit pas de
montrer Simplement que la disposition ou la clause en question est

souhaitable, ou qu'il est bon qu'elle existe, ou qu'elle sert une fin
utile.Il faut beaucoup plus que cela.
Anotre avis, il faut que la disposition ou la clause ait un caractère
tel que l'instrument, l'institution ou le système auquel elle se rap-
porte, nefonctionneraitpassanselle - ce qui est tout à fait différent.
En général,les clauses de règlement judiciaire ne sont pas considé-
réescomme possédant ce caractère dans le cadre des instruments où
elles figurent. Elles peuvent présenter un tel caractère dans des cas
rares et plutôt spéciaux. C'est par exemple le cas de la convention
de Genève de 1958 sur la pêcheet la conservation des ressources
biologiques de la haute-mer dans laquelle des dispositions détaillées
prévoyant l'arbitrage obligatoire sont intégréesdans le traité com-
me un aspect essentiel de la méthode pour déterminer, d'après le
traité, les mesures de conservation légitime des ressources biologi-
ques de la haute-mer. Mais, sauf dans ce genre de cas, les dispositions
prévoyant le règlement judiciaire obligatoire, aussi souhaitables

qu'elles puissent être en principe, n'ont jamais étéconsidérées
comme une condition sine qua non de la mise en Œuvre d'un traité
et toute suggestion en ce sens rencontrerait normalement une vive
opposition. Leur simple présencedans un traité, déterminée pardes
raisons variées, n'en indique pas le caractère de nécessité.
Ainsi l'absence de l'article7 n'aurait pas laissé leMandat dans
une situation différente ou pire que celle d'une centaine d'autres
instruments qui ne contiennent aucune clause de règlement judi-
ciaire. Si, au lieu de mentionner la Cour permanente, l'article avait
prévu qu'on ferait appel à des arbitres, dont l'un aurait été le
détenteur d'une fonction déterminée, et si, par la suite, cette fonc-
tion avait cesséd'exister pour une raison ou pour une autre, pour-
rait-on dire que, l'article n'étant plus susceptible d'êtremis en
Œuvre, ce fait aurait frappéle Mandat à la base et y aurait mis fin?
La réponse serait évidemment «non ».En principe, on pourrait
donner la mêmeréponse s'il n'avait pas été possible, pour une
raison ou pour une autre, de continuer d'appliquer l'article tel qu'il

a étérédigé.Le Mandat pourrait subsister quand même sans
l'article, tout comme il aurait pu subsister si la Cour permanente
avait disparu sans successeur.

Une raison plus préciseen faveur de la « nécessité», que l'on a
fortement soulignée, est que la règle de l'unanimité en vigueur au
Conseil de la Sociétédes Nations (y compris le vote du Mandataire
lui-mêmelorsque la question des Mandats était à l'examen) avait
pour effet que le Conseil ne pouvait, en dernier ressort, imposer ses

204 OP. DISS. COhIXlUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 520

vues au Mandataire. Puisque le Conseil ne pouvait pas demander
d'avis consultatif à la Cour permanente, avis qui n'aurait pas été
obligatoire, et p?~isqu'aux termes de l'article 34 du Statut de la
Cour, seuls les Etats pouvaient présenter à la Cour une affaire
contentieuse et obtenir une décision obligatoire, on prétend qu'il
était essentiel pour protéger la mission sacrée qu'un Membre, ou
des Membres, de la Sociétédes Nations fussent habilités à-invoquer
l'article7 et à soumettre le différend au jugement de la Cour
permanente.
De tous les arguments avancés dans cette affaire, celui-ci nous
semble le moins fondé. Il n'existe à notre avis aucune raison conce-

vable permettant de supposer qu'on ait jamais eu l'intention, dans
le cadre du système des Mandats, d'habiliter le Conseil de la Société
des Nations à imposeer ses vues au Mandataire. L'existence de la
règle de l'unanimité montre une situation exactement inverse et
prouve donc le contraire.
Au surplus, peut-on s'imaginer sérieusement que, si ceux qui ont
crééle système avaient eu l'intention de donner au Conseil en der-
nier ressort le pouvoir de lier ou de contraindre le Mandataire, ils
s'en seraient remis à la possibilité éventuelle qu'un Membre indi-
viduel de la Sociétédes Nations fût disposé à intervenir (dans une
affaire n'affectant aucunement ses propres intérêtsen tant qu'Etat)

et à prendre fait et cause pour le Conseil, comme les demandeurs
l'ont fait en l'espèceau nom de l'Assemb!éedes Nations Unies dans
un différendopposant essentiellement 1'Etat défendeur et 1'Assem-
blée ?Pareillesprocédurespeuvent êtremises en Œuvreaujourd'hui.
On n'y songeait mêmepas en 1920 et elles n'ont certainement pas
étéenvisagéesdans le cadre du système des Mandats.
L'article22 du Pacte et l'article 6 du Mandat stipulent que le
Mandataire enverra des rapports au Conseil de la Société des Na-
tions. Le fait mêmede l'existencede la règlede l'unanimité, joint au
fait que, selon le paragraphe 5 de l'article du Pacte de la Société

des Ic'ations,le Mandataire devait participerau vote, montre que le
système était fondésur la discussion, la négociation et le commun
accord. L'idée d'imposer quoi que ce fût au Mandataire y était
complètement étrangère.
Encore plus étrangère à l'ambiance de l'époque eût étél'idéede
faire appel à cette fin aux Membres individuels de la Société des
Kations. A notre avis, comme nous l'exposons clairement à propos
de la troisième exception préliminaire, l'objectif réelde l'article
et des articles similaires des autres Mandats n'était pas de per-
mettre aux Membres individuels de la Société des Nations de pro-
tégerles intérêtsdu Conseilou de la Société vis-à-vis du Mandataire,
mais de leur permettre de protéger leurs propres intérêtset ceux

de leurs ressortissants dans les territoires sous Mandat. Ces intérêts
pouvaient êtreconsidérablesen particulier dans le cas des Mandats
((A » et cB D.Le principal souci du Conseil ne concernant pas ce
genre d'intérêtsmais l'administration du Mandat vis-à-vis des
205 habitants, on a estimé nécessaire de donner aux Membres de la
sociétédes Nations pris individuellement un droit d'action direct
et indépendant en la matière. Mêmesi nous n'avions pas raison à
cet égard, nous considérerionsquand même,pour les motifsindiqués

ici et pour d'autres que nous allons mentionner, que l'article 7
était considérécomme un élémentaccessoire et nullement essentiel
du Mandat.
*

Il existe encore une autre raison, peut-être inavouée mais assez
évidente, d'invoquer le caractère de ((nécessité 1)de l'article 7. Si

l'on considère l'affaire dans son ensemble et à la lumière de son
histoire depuis la dissolution de la Sociétédes Nations, il nous
apparaît clairement que les demandeurs (et la Cour aussi, pensons-
nous) cherchent à appliquer une sorte de principe de « vision a
posterio )ret se fondent sur quelque doctrine de (nécessitésub-
séquente B absolument inconnue en droit international. Voici ce qui

s'est passé: une disposition qui, à l'origine, n'avait qu'une impor-
tance accessoire et qui, nous le verrons, n'avait jamais étéutilisée
en pratique, a en raison d'événements récentspris une importance
et (par l'effet de l'article 94 de la Charte) acquis des virtualités
qu'elle ne possédaitpas à l'origine. On prétend que dans les circons-
tances actuelles seul l'article 7 permet d'exercer un contrôle
quelconque sur le Mandataire.

Cela peut se comprendre, mais cela ne constitue par un argument
juridiqu vaelable. Cela ne donne pas plus de motifs juridiques de
lire de nouveaux termes dans l'article 7 que si l'on réclamait la
rectification d'une certaine frontière parce que, quarante ans après
sa fixation, d'importants gisements deminerai auraientétédécouverts
dans cette région.Des événements ultérieurs peuvent affecter l'im-

portance d'une disposition; ils ne sauraient affecter son caractère
juridique intrinsèque lequel, en vertu du principe de la ((contem-
poranéité ))en matière d'interprétation, doit s'apprécier d'après la
place qu'elle occupait dans le contexte du système ou du régime
dont elle faisait partie à l'époqueoù celui-ci a étéétabli. Des modi-
fications dans ce contexte peuvent accroître l'importance de la
disposition en question; ils n'altèrent pas son caractère juridique

intrinsèque et ne donnent pas naissance à de nouveaux droits à
son égard l.

' On peut en donner de nombreux exemples. Supposons, par exemple, que
dans un système de communications régi par un traité (par exemple la navigation
agnenne), l'utilisation de certains itinérasoumise au consentement des États
par lesquels ou au-dessus desquelspassent.Il se peut que, par suite modifi-
soient bloquées ou deviennentinutilisableCela peut accroître l'importance deslée
États permettantune utilisatioétendue des zones contrôlées: mon ne pourrait
en déduire que leur consentement n'est plnécessaire. Le caractère juridique des
dispositions en question ne serait pas affecté par l'importancede leur objet
dans le système. En l'espèce,les événementsont accru l'importance du recours à
l'article 7, en supposant qu'on puisse l'invoquer. Mais ils ne sau-
raient ni créerun droit de l'invoquer qui n'aurait pas existé précé-
demment, ni lui donner un caractère juridique de nécessitéinhérente
qu'il n'avait pas dans le cadre primitif du Mandat.

Il est un certain nombre d'autres facteurs qui montrent très
clairement qu'il serait erroné de considérer que l'article 7 présente
un caractère essentiel ou nécessairement inhérent au système du
Mandat. Nous avons dkjà signalé qu'il ne figurait pas parmi les
(garanties ))ou sauvegardes prévues par le Pacte de la Société des
Nations et qui, selon le paragraphe I de l'article 22 de ce Pacte,

devaient figurer dans le Pacte même.L'article 22 a pris les dis-
positions voulues pour que des rapports soient présentés par le
Mandataire au Conseil de la Sociétédes Nations et pour créerune
Commission permanente des Mandats chargée de donner des avis
au Conseil. La raison en est vraisemblablement que les rédacteurs
de l'article ont considéréque l'obligation de faire rapport était un
élémentessentiel et nécessaire de tozctsystème de Mandats devant
remplir les buts énoncésà l'article 22. Il est impossible d'échapper

à la conclusion qu'il n'a pas étéconsidéréqu'il fût égalementnéces-
saire que le Mandataire fût contraint de se soumettre au règlement
judiciaire et c'est pourquoi, si mêmeon a envisagéce point lors de
la rédaction de l'article 22 du Pacte, la question a étélaissée de
côté pour êtrerégléeen dehors de l'article 22, dans l'instrument qui
définissait les termes du Mandat. En tout cas, les termes du para-
graphe I de l'article 22 s'opposent à ce qu'une disposition non
prévuedans le Pacte prenne rang d'élémentessentiel au fonctionne-
ment du Mandat.

Précisément lamêmesituation a étécrééeet existe en la matière
du régime de tutelle des Nations Unies. La Charte contient des
dispositionsdétailléessur la surveillance administrative, la création
du Conseil de tutelle, etc.; mais toute obligation de se soumettre
à la juridiction obligatoire est laissée aux ((accords ))de tutelle
individuels, pour y êtreincluse s'il y a lieu. Au surplus, alors que
certains de ces accords contiennent cette obligation, d'autres ne la
contiennent pas. A notre avis, c'est là un fait très significatif. Trois

sur quatre des Mandats ((C ))qui ont étéramenésdans le cadre des
dispositions de la Charte des Nations Unies relatives à la tutelle
n'ont pas fait l'objet d'une clause comparable dans les accords de
tutelle pertinents. Il s'agit des accords de tutelle qui visent les
territoires antérieurement placéssousMandat japonais, la Nouvelle-
Guinée et Nauru. Aucun d'entre eux ne contient de clause de
rè"lement iuridiciaire.
Si l'article7 présentait un caractère aussi essentiel en vue de

l'application du Mandat et en vue de garantir et d'assurer les OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 523
intérêtsdes habitants des territoires sousMandat, il était tout aussi

essentiel d'insérer des dispositions semblables dans les accords de
tutelle relatifs aux mêmespopulations et territoires. Mais ce qu'on
a considérécomme essentiel au moment qui a précédé la mise sous
tutelle semble ne plus avoir étéconsidérécomme essentiel au
moment qui a suivi cette opération. Et cependant, les principes
fondamentaux du régimede tutelle étaient les mêmes que-ceux du
système des Mandats.
Anotre avis, cette considération par elle-mêmerévèlele caractère
artificiel de la théorie d'après laquelle l'articletait une nécessité
fondamentale du fonctionnement du système des Mandats.
On a cherché à neutraliser ou à expliquer cela en se référantà
la différenceentre les systèmes de vote de la Sociétédes Nations et
de l'Assembléegénérale des Nations Unies; la première appliquait

la règle de l'unanimité pour toutes les décisionset la seconde pra-
tique la majorité des deux-tiers pour toutes les questions importan-
tes. On soutient que c'est ce qui permettait de se dispenser de la
nécessitéfondamentale de l'article 7 aussitôt qu'un temtoire sous
Mandat était placé sousle régimede tutelle.
Si la différence du système de vote pouvait avoir eu la signifi-
cation qu'on lui attribue, il paraîtrait quelquepeu surprenant qu'un
article que l'on prétend faire partie de l'essence mêmedu système
des Mandats ait étéécartéou omis de ces trois accords de tutelle,
sans que personne ait demandéquelle était la raison de cet abandon
et si la sauvegarde de la ((missionsacrée1)risquait d'en êtreaffectée
et dans quelle mesure.
Si l'articl7 répondait à une nécessitési fondamentale dans le
système des Mandats, ce serait, nous semble-t-il, trop demander que

de vouloir faire accepter l'idéed'après laquelle rien n'aurait été
dit par qui que ce soit à l'Assembléegénérale,ni aucune trace ne
resterait pour expliquer l'omission de cet article lorsque les trois
Mandats ont étéplacés sous desaccords de tutellerépétant en subs-
tance les dispositions de fond des Mandats eux-mêmes.L'article a
été abandonné sansun mot.
L'explication avancée se heurte à d'autres écueils.L'Assemblée
générale,sauf dans un nombrelimité de questions, n'a aucunpouvoir
de prendre des décisionsrelatives à l'administration des territoires
sous tutelle:elle ne peut faire que des recommandations. 11semble-
rait que, si l'article était essentiel sous le système des Mandats,
il ne l'était guère moins sous le régime de tutelle. On ne voit pas
quelle différence de principe existeraità ce point de vue entre les

deux systèmes, pour la seule raison d'une différenceentre la procé-
dure de vote de la Société desNations et celle de l'Assemblée
générale. Dans un système comme dans l'autre, l'État trastee
aurait pu se montrer récalcitrant et ignorer les vues, dans un cas,
de la Commission permanente des Mandats et du Conseil de la
Sociétédes Nations et, dans l'autre, du Conseil de tutelle et de
l'Assembléegénérale.Si dans le premier système il était essentiel,
208 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDEK ET FITZMAIJRICE 524
dans l'intérêtdes populations indigènes, de recourir à la Cour pour

obtenir un arrêt contre lJEtat trustee, la chose parait tout aussi
essentielle sous le régimede tutelle.
Au surplus, l'un de ces trois Mandats, à savoir l'ancien Mandat
japonais, a étéconverti au bénéficedes Etats-Unis en une tutelle
sur zones stratégiques, l'Assemblée généralé e tant écartée detoutes

les fonctions des Nations Unies s'y. rapportant l.Seul le Conseil
de Sécuritépeut exercer ces fonctions et toutes ((décisions » prises
par lui seraient, semble-t-il, soumises à l'articles7, paragraphe 3,
de la Charte, qui requiert le vote affirmatif de 1'Etat trustee - les
États-Unis eux-mêmes.
S'ilen est ainsi, la base de l'explication s'effondre. Dans le cas

contraire, il faudrait que nous iussions prêts à croire que, lorsque
le Conseil de Sécurité a approuvé cet accord de tutelle particulier,
les Membres du Conseil ont tenu pour acquis - cela irait sans dire
- que l'article 27, ,paragraphe 3, ne s'appliquait pas, tout au
moins au vote de 1'Etat trustee. Cela nous narait absolument im-
probable.

Au surplus, il n'a pas étéexpliquépourquoi la clause de règlement
judiciaire a étéinséréedans le dernier Mandat « C » placé sous
tutelle à la même époque - le Mandat pour le Samoa - en dépit
du fait que, d'après le raisonnement de la Cour, la nécessité enavait
disparii.
Dans ces conditions, à quoi devait servir la clause dans cet

accord de tutelle particulier 2? Et quel but la mêmeclause figurant
dans tous les autres accords de tutelle pour les territoires autrefois
sous Mandats ((A ))et «B » était-elle destinéeà servir, puisqu'elle a
cessé,pour ainsi dire, du jour au lendemain, d'êtrenécessaire en
vue de servir son but primitif?
A notre avis, le but ou l'intention de la clause n'a pas changé.

Si elle n'est pas essentielle sous le régime de tutelle, elle ne l'était
pas davantage sous le système des Mandats.
Enfin, dans l'opinion de la Cour, l'application de l'article 7 ne
se limitait pas au cas où, pour ramener à l'ordre la Puissance man-
dataire, le Conseil ne pouvait agir ,en raison de la règle de l'unani-
mité. Cela permettait donc à un Etat non membre du Conseil de

solliciter un arrêt contre 1'Etat mandataire, mêmeà l'encontre
des désirsdu Conseil ou mêmede la majorité des Membres de la
Société.En dernière analyse, la nécessitéfondamentale de l'ar-
ticle 7 repose sur la présomption de l'éventualité qu'il serait néres-
saire de protéger la mission sacrée, mêmeà l'encontre des vues

Article 83 dela Charte.
Il est manifeste, à notre avis, que le but - quel q--ide la clause de rè-
glement judiciairest resté le même sous les deux systèmes. Mais comme nole
démontrerons quand nous traiterons de la troisième exception préliminaire, ce but
n'était pas celui auétéindiqué par la Cour. Elle se rapportait .exclusivement aux
intérêts étatiques individuels conféréspar les différents Mandats aux États Membres
le cas des Mandat«Ca»imais très étendus dans celui des Mand(AssetiaRm)).dans

209 OP. DISS. COMM'UNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 525
unanimes du Conseil, chargé, d'après le Pacte même, du devoir
de surveillance. -

A notre avis, le fait que trois des quatre accords de tutelle se
rapportant aux anciens territoires sous Mandats cC » - dont les
populations, parmi toutes celles viséespar l'article2 du Pacte de la
Société,étaient les moins capables de cse diriger elles-mêmes )-
ne contenaient pas cette clause de contrôle judiciaire prétendument
fondamentale et essentielle, alors que les accords visant des popu-
lations beaucoup plus développées(les anciens Mandats «A » et
(B »)contenaient une clause correspondant à l'article 7,se concilie
difficilement,pour dire le moins,avec la thèse du caractère essentiel.
Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il y a là une preuve très forte

en sens contraire.
Un autre point qui pourrait légitimement êtrepris en ligne de
compte pour apprécier le degré de cnécessité » qui s'attache à
l'articl7 est la mesure dans laquelle il a étéutilisé en fait. Après
tout, on ne saurait négligerune période de quarante ans et, tout
en reconnaissant pleinement le bien-fondé de la remarque qu'a
faite dans l'affaire de1950 le juge Read que l'utilité d'une clause
de règlement judiciaire ne saurait être appréciée simplement en
vérifiant le nombre de cas dans lesquels elle a étéinvoquée,puisque
son existence mêmea pu servir de préventif contre les violations

de l'instrument envisagé, le fait n'en demeure pas moins que, si
l'on considère les affaires Mavrommatis comme étant au fond les
phases d'une mêmeaffaire, le présent litige n'est que le deuxième
cas en quarante ans où a étéinvoquée la clause de règlement judi-
ciaire d'un Mandat quelconqueet le premier après quarante ans en
matière de Mandats «B » ou «C ». En outre, puisque l'affaire
Mavrommatis concernait les intérêts d'unressortissant d'un Membre
de la Société desNations dans le territoire sous Mandat en question,
le cas actuel est le premier où la question de l'administration du
Mandat soit soumise à décision judiciaire au point de vue des

populations du territoire sous Mandat.
Ce qui est peut-être plus significatif encore, c'est le doute sur la
catégorie de différends visés par l'article 7 - le point soulevé
dans la troisième exception préliminaire du défendeur. Il serait
certainement difficile de considérer comme fondamentale et essen-
tielle, comme inhérente, nécessaireet non séparable, comme indis-
pensable au fonctionnement du Mandat et par conséquent comme
devant être préservéeet perpétuée d'une manièreou d'une autre,
une disposition que, mêmeaujourd'hui, la Cour n'a estimée que
par la plus étroite des majorités se rattacher à l'administration du

Mandat, plutôt que de la considérer comme simplement relative
aux intérêtsindividuels spécifiques des différents Membres de la
Société desNations et de leurs ressortissants dans le territoire sous
Mandat. Une incertitude si manifeste et se prolongeant sur une
période aussi longue se concilie mal avec la thèse d'après laquelle
la disposition en question est un élément indispensable du sys-
tème dont elle fait partie. A notre avis, les diverses considérations qui viennent d'être
discutées ne peuvent justifier qu'une seule conclusion - c'est que
la thèse d'après laquelle l'article 7 est une partie essentielle, in-

hérente et nécessairedu système des Mandats n'a pas étédémontrée.
En cpnséquence,cet argument ne peut servir de fondement au droit
des Etats demandeurs à invoquer l'article.

c) Le prétenduaccordd'avril 1946

La Cour amve à la conclusion qu'à la réunion de l'Assemblée
d'avril 1946 un accord est intervenu entre les Rlembres de la
Sociétéder Nations en vue de continuer les différents Mandats. en
ce qui concerne les obligations des Puissances mandataires, non-
obstant la dissolution de la Société.
Dans son contexte, la question est de savoir si ce prétendu accord
s'appliquait à l'article7 (et aux clauses correspondantes des autres
Mandats) et, si oui, quel en étaitl'effet. Comme nousl'avons indiqué

plus haut, l'article7 comportait l'engagement unilatéral de la part
du seul Mandataire de se présenter devant la Cour permanente à
la demande des autres Membres de la Société desNations. Aucune
espèce d'«accord )!de la part de ces autres Membres n'aurait pu
suffireà perpétuer l'obligation du Mandataire après la dissolution
de la Société desNations. Pour y parvenir, ce qu'il aurait fallu,
età la conditionqu'iljût sufisanzmentdirect,expliciteetnon équizloque,
c'eût étéun engagement de la part du Mandataire lui-même
dont, dans toutes les circonstances contemporaines, on aurait pu

déduire de façon concluante un accord entre le Mandataire et
chacun des autres Etats alors Membres de la Société desNations
pris individuellement. Nous laissons de côté la considération du
problème de savoir si un pareil accord était possible dans le cadre
de l'article 37 du Statut, puisqu'il n'aurait existé, s'il avait existé
en fait, qu'à une époque postérieure à l'entrée en vigueur de l'ar-
ticle 37. Nous laissons également de côté l'examen de la question
de savoir si un pareil accord, en supposant qu'il fût démontré,
pouvait entrer dans les dispositions de l'article 36, paragraphe 1,

du Statut de la Cour ou si cet engagement pouvait êtreenvisagé
comme une déclaration unilatérale dans le cadre de l'article 36,
paragraphes 2 et 4, du Statut.
Nous nous attachons et nous nous limitons à la véritable question
à laquelle il faut répondre, à savoir: le Mandataire a-t-il soit dans
un discours, soit dans une déclaration, soit en participant à une
résolution de l'Assemblée de la Sociétédes Nations, pris un tel

l La Cour ne dit pas si l'accord en question étainou non.te

211 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMADRICE 527

engagement dans des termes permettant de considérer qu'il s'est
clairement engagéà renouveler ou à perpétuer à l'égarddes anciens
Membres de la Sociétédes Nations une clause de règlement judi-
ciaire qui, d'après ses termes mêmes,était sur le point de devenir
caduque ?
Ainsi présentée, il nous semble que poser la question c'est y

répondre - et par la négative - dès que l'on examine les déclara-
tions et résolutions pertinentes.
Les énoncéssur lesquels la Cour se fonde au sujet de l'article 7
du Mandat pour le Sud-Ouest africain sont une déclaration faite à
Genève le 9 avril 1946 par le représentant de l'Afrique du Sud
et les paragraphes 3 et 4 de la résolution de l'Assemblée de la
Société desNations du 18 avril qui a étéadoptée à l'unanimité.
Nous y cherchons en vain un élément quelconquequi aurait l'effet

qu'on prétend.
Pour pertinente qu'elle soit, nous ne jugeons pas nécessaire
d'examinerla question desavoir dans quelle mesure des déclarations
unilatérales faites de la sorte à des conférences internationales ou
la partcipation aux résolutions qui en ont résultépeuvent donner
lieu à des obligations juridiques rigoureusement obligatoires. Ce
qui est très clair, c'est que la résolution de la Société desNations
du 18 avril 1946 n'a mêmepas prétendu imposer ou constater
d'obligations quelconques. Elle a simplement noté, ainsi qu'elle

l'énonce expressément, certaines déclarations d'intentions anté-
rieures.
Ces déclarations de tous les Mandataires (et non pas seulement
de l'Afrique du Sud) ont étéfaites en termes très générauxet, dans
certains cas, dans des termes au moins prudents et quelque peu
circonspects, voire restrictifs. Elles ne mentionnent aucun obliga-
tion déterminée en vertu des Mandats et, selon nous, elles ne sont
rien de plus que des déclarations d'intention formulées devant la

Société desNations à la veille de sa dissolution. Le caractère de la
résolution de la Sociétén'est pas différent.
Au surplus, le caractère général de la déclaration sud-africaine
et l'emploi de formules telles que ((continuera à ...administrer [le
territoire] en se conformant scrupuleusement aux obligations du
Mandat, afin d'assurerle progrès,et de sauvegarder lesintérêtd se ses
habitants 1)(les itaIiques sont de nous) montrent clairement, selon
nous, que le Mandataire ne songeait qu'à la méthode pratique

d'administration du territoire vis-à-vis de ses habitants et non pas
aux obligations collatérales d'un autre caractère qu'il avait pu
avoir envers les Membres de la Société desNations l.Par exemple,
nous ne considérerions pas une déclaration de ce genre comme coxn-

' Cela est confirme quand on lit la déclarattout entière dont une partie
(dans son contexte) pourrait êsoulignée, savoir les mota:la disparitides
organes de la Sociétédes Nations qui s'occupent du contrmandats,à savoir,
en pvewier lieu, la Commission mandats et le Conseil de la Société,empêchera
évidemment de se conformer entièremenàla lettre du Manda».portant promesse de continuer, aprèsla dissolutionde la Sociétédes
Nations, les droits commerciaux et autres réservéspar les Mandats
aux Membres de la Société des Nations ou à leurs ressortissants et
nous soulignons ce point parce que ce n'est pas seulement de I'ar-

ticle 7 et des clauses de règlement judiciaire des autres Mandats
qu'il s'agit ici l. Si des dispositions de ce caractère sont encore en
vigueur, elles le sont pour d'autres raisons et certainemgnt pas en
vertu du genre de déclarations faites à Genève par le représentant

de l'Afrique du Sud (et pour le compte des autres Puissances
mandataires).
C'est exactement le mêmetableau qui ressort de la résolution
finale de la Société desNations du 18 avril 1946. La paragraphe final

(Note que les Membres de la Sociétéadministrant actuellement des
territoires sous mandat ont exprimé leur intention de continuer à
les administrer, en vue du bien-être et du développementdes peuples
intéressés, conformément aux obligations contenues dans les divers
mandats, jusqu'à ce que de nouveaux arrangements soient pris ...»,

etc. (les italiques sont de nous).
Si on y ajoute les référencesantérieures àla dissolutionimminente
de la Sociétédes Nations faites dans cette résolution et dans les
déclarations des divers Mandataires 2, tout cela pourrait être

considérépresque comme la reconnaissance du fait que, lors de
cette dissolution, les Mandats, comme tels, cesseraient d'être en
vigueur, mais qu'en attendant d'autres arrangements les territoires
intéresséscontinueraient, du point de vue de leurs habitants, à être

administrés comme si les Mandats étaient encore en vigueur ou sur
la même baseque celle des Mandats. Ce dont la Sociétédes Nations
se préoccupait ce n'était pas des obligations déterminées des Man-

=Il serait même possible de discuter du point de savoir si toutes les dispositions
des accords de Mandats étaient compatibles avec les dispositionsde la Charte des
Nations Unies dont les termesliaient déjàlaplupart des États Membres dela Société
des Nations.
Il est utile de résumer la façon dont chacune des autres Puissances mandataires
a déclaré sesintentions concernant l'exécutiofuturede ses obligations (les italiques
sont de nous). C'est ainsi que la Grande-Bretagne a déclarl'intention de continuer
à administrer (1conformément aux principes généraux des mandats existants »; la
France, qu'elle se proposait de ((poursuivrel'exécution de la mission qui lui avait
étéconfiée »;la Belgique, qu'elle resta«tpleinement consciente de toutes les obliga-
tions qu'imposent aux Membres des Nations Unies les dispositions de l'article 80
de la Charte »; la Nouvelle-Zélande, que la dissolution de la Société des Nations
ne diminuait pas ses obligation(1envers les habitants d..territoire qucontinuera
à être administré par la Nouvelle-Zélande conformément aux termes du Mandat,
en vue d'assurer le bien-être et le progrès des habitantsl'Australie, de son côté,
a déclaréquela dissolution de la Sociéténe serait pas considéréepar eIIe comme la
déchargeant des obligations qui lui ont étéimposées » en vertu du système des
Mandats, qu'elle considérait comme conservant toute leur validité et toute leur
force. Au surplus, lorsquele12 avril1946, le projet de résolution a étédiscuté dans
les commissions et a étéadopté en vue d'êtreprésenté à l'Assemblée de la Société
opinion différenteàraucun autre point de vue) a déclaréque ses territoires conti-
nueraient à êtreadministrés dans l'esprit du Pacte et de la Charte.

213 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 529

dataires envers les États, ni des droits ou intérêtsdes États ou de
leurs ressortissants, mais de l'intérêtdes populations indigènes et
de la (c.ontinuit d'a~ppnation des principes du système des man-
dats ))l.
Quoi qu'il en soit, il est tout à fait clair pour nous qu'on ne
saurait considérerque ces déclarations et ces résolutionsconstituent
des engagements obligatoires de continuer à appliquer les disposi-
tions du Mandat dans leur intégralité et indépendamment de la

façon dont une clause particulière quelconque serait affectéepar la
dissolution de la Société desNations; et nous ne parvenons pas à
comprendre comment un tribunal pourrait en déduire un engage-
ment quelconque et moins encore la prolongation indéfinie d'une
obligation juridictionnelle sur le point de devenir caduque d'après
ses termes mêmes. Nouspensons qu'il aurait fallu pour cela bien
autre chose; quelque chose qui visât explicitement cette obligation.
Autre chose est, en partant de l'idéeque la dissolution de la Société

des Nations pouvait êtreconsidéréecomnie mettant fin au système
des Mandats tozit entier (ce qui, croyons-nous, était la pensée de
ceux qui étaient à Genève),de déduire implicitement (sur cettebase)
de ce qui avait été dit un engagement de continuer d'appliquer les
dispositions du Mandat qui se référaientaux habitants du territoire
et qui, d'après leurs termes, ne dépendaient pas directement de la
continuation del'existence dela SociétédesNations ou de l'apparte-
nance à celle-ci ou n'y étaient pas directement liées.Autre chose est
de tirer des conclusions implicites semblables, lorsqu'il ne s'agit

pas seulement de-maintenir en vie le système comme tel, en dépit
de la dissolution de la Société,mais aussi de maintenir en vigueur
des clauses particulières, telles que l'article7, se rapportant spéci-
fiquement à l'existence de la Sociétédes Nations ou au fait de
l'appartenance à celle-ci. Nous pensons que cela dépasse les limites
des conclusions implicites permises. Rien moins qu'un engagement
visant spécifiquementla clause ou la catégoriede clausesen question
n'aurait pu suffire en ce qui concerne ce genre de disposition. On ne

trouve rien de tel dans la déclaration sud-africaine, ni dans aucune
des déclarations des autres Mandataires ni dans la résulotion perti-
nente de la Sociétédes Nations. Et même, commenous l'avons
signalé,les référencesexplicites à l'administration du territoire dans
l'intérêtdes habitants, et à cette administration seule, constituent
une contre-indication précise.
Dans le cas de l'Union sud-africaine, cette conclusion est rendue
plus claire encore par une autre considération. A la fois dans la

déclaration de l'Afrique du Sud et dans la résolutionde la Société des
Nations du 18 avril 1946, les référencesà ce qui était envisagé sont
déclarées faites en considération d'autres arrangements ou en
attendantcesautres arrangements-- bref, il s'agissait d'une situation

l Voir la déclaration du représentant de la Chine lorsqu'il aàpla Com-
mission le projet de résolutiod. N.J. O., supplément spécial79).

214 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 530
temporaire. Mais les termes exprès de la déclaration de l'Afrique

du Sud montrent très clairement que c'était aux arrangements en
vue de l'incorporation du territoire sous Mandat au territoire de
l'Union que le Gouvernement de l'Union songeait; et que par
conséquent, comme l'avait déjà prévul'union dans desdéclarations
antérieures, le territoire ne serait pas placésous le régime detutelle
des Nations Unies ou tout au moins que cela était très improbable.
Nous n'avons pas à dire si cette attitude du Mandataire était
politiquement souhaitable. Le fait est que c'est l'attitude qu'il a
prise; la conclusion juridique que nous en tirons c'est qu'il est parfai-
tement inconcevable qu'un État visant à l'incorporation du tem-
toire sous Mandat à son propre territoire ait pu êtredisposé en
mêmetemps (ou puisse être tenu pour avoir eu cette disposition ou
l'intention de la laisser entendre) à perpétuer, peut-être indéfini-
ment, une obligation de se soumettre à la compétence obligatoire
qui, d'après ses termes mêmes,était justement sur le point de
devenir inopérante.
Il est evident que la question de l'articl7 (et des clauses corres-

pondantes des autres Mandats)n'a jamais étéexpressémentsoulevée
à Genève. Il n'existe pas non plus la moindre preuve que les repré-
sentants des Etats Membres aient songé à cet article. Les constata-
tions de la Cour surcette partie de l'affaireprésument implicitement
que, si tel avait éle cas,les divers Mandataires auraient tous immé-
diatement donné leur accord à la continuation de cette obligation.
Rien dans les documents ne nous paraît justifier cette présomption,
et nous y trouvons beaucoup d'éléments contraires - mêmedans
le cas de Mandataires autres que l'Afrique du Sud. Dans le cas de
cette dernière, il nous semble que les probabilités inhérentes à la
situation sont si évidemment en sens contraire que la question est
virtuellement hors de discussion. Nous n'avons pas ànousprononcer
sur la valeur généralede cette attitude. La situation juridique est
que si, envisageant la dissolution de la Sociétédes Nations, un
Mandataire quelconque s'était vu demander d'accepter explicite-
ment de continuer à appliquer l'article 7 pour ce qui est des ex-
Membres de la Société desNations, n'importe lequel de ces Manda-

taires avait la compétence juridique pour le refuser - car, si une
obligation est sur le point de devenir inopérante d'après ses propres
termes, comme c'était le cas de l'article 7,son renouvellement ou
son maintien en vigueur ne peut se faire que par consentement. En
conséquence, s'il y a (comme cela est clair) des motifs de penser
qu'au cas où l'on aurait explicitement soulevéla question l'Afrique
du Sud aurait, en fait, refuséson consentement - ou s'il n'est pas
improbable qu'elle l'eut fait -, il devient évidemment tout à fait
impossible de déduire im$Zicitementde la déclaration faite à Genève
par l'union un engagement d'accepter - mêmesi, par ailleurs,
pareil engagement pouvait ressortir implicitement de ses déclara-
tions, ce qui, selon nous, ne saurait êtrele cas. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 531

Enfin, il est évident que tout engagement de continuer les obli-
gations de l'article pour ce qui est des«ex-Membres » ou «anciens
Membres »de la Société des Nations aurait nécessitéune définition
précise. Quels étaient exactement les Etats qui devaient êtrere-
gardés comme entrant dans ces catégories (Membres originaires,
Membres à la date de la dissolution, pays ayant étéMembres à un
moment quelconque, Membres également Membres des Nations
Unies, etc.)? La dissolution de la Société desNations allait immé-
diatement entraîner l'apparition de plusieurs catégories d'États

ayant au moins un titre possible à êtrepris en considération.,La
question de savoir quelles sont précisément lesentités auxquelles
se rapporte l'obligation de recourir au règlement judiciaire obliga-
toire (et par conséquent quelles sont exactement les entités qui ont
le droit de l'invoquer) est toujours et nécessairement fondamentale
en ce qui est de la portée de l'obligation. Cela ne peut jamais se
présumer: il faut que cela soit définiou énoncé;et cela seul est un
motif de ne pouvoir déduire des énonciations et des déclarations
de 1946 un engagement implicite du Mandataire se rapportant à
une catégorie indéterminée debénéficiaires.

Les conclusions auxquelles nous arrivons ci-dessus quant à la

portée et à l'interprétation exactes des déclarations faites et de la
résolutionadoptée àGenèveen avril 1946 sont largement confirmées
par certains autres éléments de l'historique de la question auxquels
nous en arrivons maintenant.

d) Le traitement générad le la question des Mandats au cozrrsde
la période 1945-1946
La manière de traiter la question des Mandats tant aux Nations
Unies qu'à la Sociétédes Nationspendant la période 1945-1946 sert
à confirmer les conclusions auxquelles nous sommesarrivés dans les

sections antérieures de cette partie de l'affaire,la fois du point
de vue généralet, plus particulièrement, en ce qui concerne l'effet
à attribuer aux déclarations faites et aux résolutions adoptées à
Genève en avril 1946. Cela confirme également l'opinion que nous
avons déjà exprimée selon laquelle ce n'est pas per incztviam mais
de propos délibéré quela question de la position des Mandats après
la dissolution de la Sociétédes Nations n'a pas été traitéede façon
plus explicite et en particulier que n'ont pas étéprises des disposi-
tions quelconques tisant la situation qui se présenterait si unm-
toire sous Mandat, n'étant pas de ceux qui auraient accédéà
l'indépendance, n'était pas placé sous le régime de tutelle des
Sations Unies.

2x6 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 532

1) En premier lieu, il ressort très clairement des documents que,
danstoute la manière dont elles ont abordéla question des activités
de la Sociétédes Nations, les Nations Unies ont manifesté une
grande prudence et mêmeune certaine répugnance. Il est absolu-

ment clair l que toute idéede ce qu'on pourrait appeler une reprise
généraleou une absorption des fonctions et des activités de la
Sociétédes Nations a étécatégoriquement rejetée. A un autre point
de vue, nous avons déjà mentionné que, dans la résolution de l'As-
sembléedes Nations Unies visant le transfert de certaines fonctions
et de certains pouvoirs de la Sociétédes. Nations et tendant à

assurer (sous certaines réserves) la continuation de ses activités
techniques, la question des fonctions politiques de la Sociétédes
Nations, comme par exemple celles qui avaient trait aux Mandats,
a été traitéetout différemment. Dans ce domaine, l'Assemblée
n'étaitdisposée àagir qu'à la demande spécifiquedes parties tendant
à la reprise de l'exercice des fonctions de la Sociétédes Nations

et, mêmesi pareille demande était présentée(iln'yen a jamais eu),
l'Assembléeétait prêteseulement à l'étudier ou à la soumettre à
l'organe compétent des Nations Cnies » - ce qui n'était pas pré-
cisémentune attitude enthousiaste. Comme nousl'avons dit, aucune
demande de ce genre n'a jamais été faite et aucunefonctionpolitique
de la Société des Nations n'a jamais, comme telle, étéreprise ni

assumée 2, bien qu'il soit évident que des fonctions parallèles ont
étéassumées par les Nations Unies de diverses manières en vertu
de la Charte, en particulier dans le domaine du maintien de la paix.

2) Les Nations Unies nlont donc pas repris le système des
Mandats de la Sociétédes Nations comme tel, ni aucune fonction
donnée s'y rapportant. En revanche, c'est là l'une des questions
qui a trouvé son ((parallèle » dans la Charte, à savoir dans l'institu-

tion du régimede tutelle des Nations Unies (chapitres XII et XIII)
et dans les autres dispositio~zsde la Charte relatives aux territoires
non azttonomes(chapitre XI et article73).

3) En bref - et noustenons à le souligner - il y a eu dès l'origine
une élection(un choix) de la part des Nations TJniesde traiter de la
question des territoires non autonomes (catégorie dans laquelle
nous estimons que les territoires sous Mandat entraient incontes-

tablement - tout au moins les territoires ((B ))et (C ») selon les
dispositions des chapitres XI, XII et XIII de la Charte et non pas
en reprenant et en complétant ou en modernisant le système des
Mandats de la Société desNations.

1 Voir compte rendu sommaire de la Commission préparatoiredes Sations
Unies crééeàla fin de la conférence de San Francisco, C. P. N. U., Comit2-3, pp.
et 10-11.
C'est l'une des raisonpour lesquelles nous pensonque l'opinion exprimée
par la Cour dans son avis consultatide 1950, d'après laquelle les fonctions de
surveillance de l'ancien Conseil dela Société desns sont passéàsl'Assemblée
des Nations TJnies qui avait le droit de les exercer, était certaerronée. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 533
4) Plusieurs faits montrent qu'il y a eu là une politique délibérée.

L'un des plus frappants est que, comme la Cour l'a confirmédans
son avis de 1950, les rédacteurs de la Charte n'y ont pas inclus
d'obligations pour les Membres des Nations Unies administrant
les territoires sous Mandat de placer ceux-ci sous le régime de
tutelle. En revanche, la conférence de San Francisco - et nous
soulignons ce point lui aussi - a, au moyen du chapitre XI de la
Charte (etplus particulièrement del'article 73que nous examinerons
plus loin), crééune situation qui, selon nous, impliquait que tout

territoire sous Mandat non placé sous tutelle devait êtretraité par
le Mandataire comme un territoire non autonome au sens de l'ar-
ticle 73 de la Charte, vis-à-vis duquel les obligations définiespar
cette disposition (y compris celle de faire rapport) devaient être
remplies.

5) Il est clair que les Membres (ou les Membres éventuels) des
Nations Unies, à San Franciko ou par la suite, envisageaient que
tous les territoires sous Mandat seraient placés sous tutelle, sauf
ceux qui atteindraient l'indépendance. Mais le caractère délibéré
(démontrépar leur conduite) de leur décisionde ne prendre aucune

disposition pour le cas possible où cette attente ne serait pas satis-
faite dans tous les cas (sauf évidemment la disposition prise par le
chapitre XI et l'article 73) ressort, en ce qui concerne le Mandat
pour le Sud-Ouest africain, de la déclaration faite par le représen-
tant de l'union sud-africaine le II mai 1945 au Comité II/4 de la
Conférencede San Francisco l.Dans cette déclaration, il aindiqué
dans les termes les plus clairs possibles l'intention de l'Union de
réclamer l'incorporation du territoire sous Mandat au territoire

national de l'Union. Au surplus, nous ne voyons pas de raison de
douter de l'exposéfait au nom du défendeur (dans le mémoireécrit
exposant ses exceptions préliminaires) énonçant que la déclaration
faite à San Francisco par le Gouvernement de l'union contenait
(bien que cela n'apparaisse pas dans le compte rendu) un avertisse-
ment que le Gouvernement de l'Union ne saurait êtreconsidéré
comme ayant ((acquiescéà la continuation du Mandat ou à l'inclu-

sion du territoire 'sous Mandat] sous une forme quelconque de
tutelle de la nouvelle organisation internationale » 2.Le fait de cette
déclaration sud-africaine qui était longue et très explicite, joint au
fait que le chapitre XII de la Charte, en dépit de ses diverses
référencesaux territoires sous Mandat, s'est délibérémentabstenu
d'imposer une obligation quelconque de les placer sous tutelle,

Résuméedans la collection des documents deConférence des Nations Unies
sur l'organisation internatiovol.,, p.434.Le texte intégral de la déclaration
dont l'exactitude n'pas 6técontestée, et qui s'accorde avec un procès-verbal
non officiel aux mains du Secrétariat des Nations Unies, figure dans les exceptions
préliminaires écrites du défendeur (pp. 25voir aussi la n1,p. 26).
Voir la notI àla page 26 des exceptions préliminaires écrites du défendeur.
Il n'a pas davantage été contesté que ce passage eût été,en fait, inclus dans les
procès-verbaux. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 534
interdit à notre avis de prétendre qu'il y ait eu un malentendu ni

de soutenir pour ce motif que, par voie d'acte judiciaire, la Cour
devrait prendre des dispositions à propos d'un cas pour lequel les
rédacteurs de la Charte n'ont pas jugénécessaired'en prendre eux-
mêmes - sans doute parce qu'ils espéraient qu'il ne se produirait
pas ou parce que, s'il se produisait, ils étaient prêtss'en remettre
à l'application de l'article73 de la Charte. Le fait qu'en fin de
compte le Sud-Ouest africain a étéle seul territoire sous Mandat
qui n'ait pas étéplacé sous tutelle ne saurait évidemment fournir
de motifs juridiques pour traiter ce territoire sur une autre base que
celle qui aurait été applicable si son cas avait été conforme à la
règle, au lieu d'êtreune exception. En droit, il ne saurait être
question d'imposer une sanction au Mandataire pour n'avoir pas
suivi la mêmeattitude que les autres Mandataires, quand il n'était
nullement dans l'obligation juridique de le faire.La seule question
qui se pose est de déterminer les conséquencesjuridiques de ce fait,
eu égard à la dissolution de la Sociétédes Nations. Cela nous
amène au point suivant.

6) La possibilité que certains territoiresous Mandat ne fussent
pas placés sous tutelle n'est pas la seule qui ait étéacceptée par
ceux qui ont participé à la conférence de San Francisco - ils ont
aussi accepté lerisque qu'à moins de $rendre desdisfiositionsprécises
$our celala fin de la Société desNations portât atteinte au maintien
en vigueur de clauses particulières desMandats, clauses qui, d'après
leurs termes, se rattachaientà l'existence de la Société desNations
et à la qualité de Membre de la Société.Il faut présumer qu'ils

ont couru ce risque les yeux ouverts, puisque la dissolution de la
Société desNations, d'une manière ou d'une autre, étaitun but et
une intention politique de tous ceux des Membres de la Société des
Nations qui étaientprésents à San Francisco (y cornfirisles demnn-
deztrs.
7) Toute la question des Mandats a 6té suffisamment discutée
(demêmequ'à Genève er)avril1946, comme nous allons y venir)pour
permettre et mêmepour imposer d'admettre que les intéressés

connaissaient bien les divers actes de Mandat et savaient que,
d'après lezirs termes, certaines clauses de ces actes ne pouvaient
fonctionner ou rester en vigueur sur la mêmebase après la fin de la
Société desNations etla fin del'afi#artenunceàlaSociété desNations,
à moins que des dispositions expresses ne fussent prises pour faire
face à la situation; et par conséquent que ces dispositions expresses
devraient êtreprises, faute de quoi il faudrait accepter toutes les
conséquences qui en découleraient. Mais, entre autres omissions,
aucune disposition n'a étéprise pour remédierau fait qu'après la fin
de la Société desNations il n'y aurait plus de membres de celle-ci et,
par conséquent, plus d'Etats en mesure d'invoquer l'article7 selon
s2s termes, si (comme cela devait êtreen principe) le droit de le
faire était limitéaux Etats dc la catégoriedéfiniedans cet article.

219 OP. DIS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 535

8) Si le26 juin 1945, date de la signature de la Charte, représen-
tait en pratique la dernière occasion à laquelle, selon la Charte elle-
même,il fût possible d'insérerdans la Charte une disposition en vue
de régler je cas où un territoire sous Mandat ne serait pas placésous
tutelle ou derésoudretous les problèmes susceptibles d'êtresoulevés
par la dissolution imminente de la Sociétédes Nations, ce n'était
nullement la dernière occasion de faire quelque chose en ces matiè-
res. La possibilitéexistait encore à l'occasion de la dissolution de la
Société desNations elle-même.Puisque la plupart des Membres de

la Sociétédes Nations (y compris les État? demandeurs) étaient
aussi Membres des Nations Unies et vice-versa, la base d'une
politique concertée existait. De même,il y a eu l'occasion de l'adop-
tion de la résolution XIV (1) des Nations Unies du 12 février 1946,
déjà citée, énonçant les conditions selon lesquelles les Xations
Unies seraient disposéesà reprendre les fonctions politiques de la
Société desNations, dont celles relatives aux Mandats. Comme nous
l'avons vu, ces conditions n'étaient pas encourageantes - fait
significatif en lui-même.Mais il restait la possibilitépour la Société

des Nations (dissouteseulement en avril 1946) ou pour les parties à
un «acte international » deprésenter aux Nations Vnies une deman-
de formelle d'assumer l'exercice de toutes fonctions de ce genre.
Aucune demande de cet ordre n'a jamais étéprésentée.

g) Non seulement aucune demande n'a étéprésentée mais,
lorsqu'en avriI 1946 à Genève lereprésentant de la Chine a présenté
un projet de résolution (cité intégralement en note à la p. 538 ci-
dessous) tendant à inviter les Nations Unies à reprendre les fonc-
tions de surveillance du Conseil de la Société desNations en ma-

tière d'administration des Mandats, il n'a pas étédonné suite à ce
projet. En revanche, la résolution que nous avons examinée à la
section c) immédiatement ci-dessus a étéadoptée (pour son texte,
voir mêmenote au bas de la p. 538) l.Certes, la question de la re-
prise par les Nations Unies des fonctions du Conseil de la Société
des Nations est distincte de la question du droit qu'auraient encore
les anciens Membres de la Sociétéd'invoquer la clause de règlement
judiciaire du Mandat. Mais ces deux questions sont étroitement
liées. Elles dépendaient l'une et l'autre de la dissolution de la

Sociétédes Nations et les deux assembléesse sont montrées aussi
indifférentes dans un cas que dans l'autre. La première question a,
du moins, étésoulevéepar le projet de résolution chinois. L'autre
n'a jamais étésoulevéeet rien n'indique que personne tint àle faire;
or, il est impossible (et, du point de vue juridique, cela doit être

La différence entre le projet chinois original et la résolution finalement adoptée
constituà nos yeux une raisde plus de ne pas accepter l'opinion énoncée par la
Cour en 1950 selon laquelle les fonctions du Conseil de la Sociétéen ce qui concerne
les Mandats seraienpassées aux Nations Unies, car c'était exactece que
proposait le projet chinois orqui n'a pas été adopté. exclu) que les intéressésn'aient pas eu connaissance des termes de
dispositionstelles que l'article 7, ni de l'effet que la dissolutionde la
Sociétédes Nations aurait sur ces dispositions si aucune contre-
mesure n'était prise.

IO) Nous avons dkjà évoquéet citéles déclarations de caractère
trhs genéralet prudent faites à Genèveà propos des Mandats. Mais
mêmeauparavant la question avait été débattue en détail par la
Commission préparatoire des Nations Unies créée à la fin de la con-
férence de San Francisco pour la période intérimaire précédant

l'entréeen vigueur de la Charte et la première partie de la première
session de l'Assemblée desNations Unies en janvier 1946, en vue de
préparer cette session. La plupart de ceux qui se sont réunis à
Genève pour dissoudre la Société des Nations étaient représentés
à la Commission préparatoire. Ils savaient donc bien ce qui s'y

était passé.Elle institua un Comitéexécutif. Ce Comitéprépara un
rapport en vue de la première session de l'Assembléedes Nations
Unies. Le chapitre IV de la partie III de ce rapport proposa la
créationd'un Comitétemporaire de tutelle chargéd'exercerpendant
la période intérimaire certaines fonctions qui reviendraient par
la suite au Conseil de tutelle des Nations Unies l. L'une des fonc

tions proposéepar le Comité exécutifpour ce Comité detutelle - et
sur laquelle nous attirons particulièrement l'attention - était de:

«donner des avis à l'Assembléegénéralesur les questions que

pourrait soulever letransfert à l'organisation des Nations Unies de
toutes fonctions et responsabilitésassuméesjusqu'ici en vertu du
régimedes mandats »2.
L'une des responsabilités qui, selon la thèse des demandeurs en
l'espèce, aurait été essentielle au fonctionnement du système des

Mandats était la (surveillance judiciaire ))du Mandat. Il est donc
instructif de noter ce qui est advenu de cette proposition. Elle n.'a
pas été adoptéepar la Comnzissionfirifaratoire et a étéremplacéepar
une recommandation à1'Ass~mblée desNations Unies d'adopter une
résolution demandant aux Etats Membres administrant des Man-

dats de soumettre à leur égard des accords de tutelle pour examen
pendant la deuxième partie de la première Assemblée à l'automne
1946 3; c'est cette recommandation qui a étéfinalement adoptée
par l'Assembléedans sa résolution XI du 9 février 1946.

II) Les discussions de la Commission préparatoire en décembre
194.5 qui ont précédé l'élaboration de la recommandation indiquent

l Document PC/EX/IIJ/R~V. 1, chap. IV, sect2,par. 3, p. 55. Un sous-com.té
vation suivante:cÉtant donné que les questions soulevées par la terminaisodnur-
régime desMandats sont traitées au chapitre IV de la Partie III, on ne trouvera ici
aucune recommandation à cet égard» Ibid., chap. IX, sect. 3, I,2et 5, p110.
Ibid., par4 (IV), p56.
Wocument PC/2o, chap. IV, sect1,p. 49. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE. 537

déji qu'on ne s'attendait pas à un transfert automatique des tem-
toires sous Mandat dans le régimede tutelle. Dans son intervention
du 20 décembre 194 j,le représentant de l'Australie, tout en expri-
mant sa sympathie envers les objectifs prévus,a dit qu'il n'existait
pas d'obligation de mettre sous tutelle les territoires sous Mandat

et a soulignéqu'il n'y avait à cet égard aucunedifférenceentre les-
dits territoires et les autres formes de territoires dépendants l.Le
même jour et encore trois jours plus tard 3,le représentant de l'Afri-
que du Sud a formulé de nouveau les plus explicites réserves.

12) Tout cela a étérépétélorsque l'Assemblées'est réunie en
janvier 1946. Le représentant de l'Afrique du Suda fait de nouvelles
déclarations dans le mêmesens (17 et 22 janvier) 4.Le représentant

du Royaume-Uni a annoncé (le mêmejour) que son pays avait
décidéde commencer des négociations à propos du Tanganyika, du
Cameroun et du Togo, mais ne serait dispcséà mettre ces territoires
sous tutelle que si les négociations se révélaient satisfaisantes;
quant à la Palestine, son cas était entièrement réservépour des

raisons spéciales 5. Le 19 janvier, le représentant de la France a
indiqué que son gouvernement se proposait de « poursuivre l'exé-
cution de la mission qui lui avait été confiéepar la Société des
Nations » mais, pensant qu'il cserait dans l'esprit de la Charte j)
que cette mission s'exerçât désormais sous le régime de la tutelle,
était prêt à (étudier » la question sous certaines réserves 6. Dans

plus d'une déclaration il a étéfait mention de la nécessitéd'obtenir
l'approbation des peuples des territoires sous Mandat. L'Australie,
la Belgique et la Nouvelle-Zélande ont également déclaré qu'elles
étaient en principe disposées à placer sous tutelle les territoires
qu'elles administraient sous Mandat.

13)Dans la résolution XI adoptée en conséquence le g février,
l'Assemblée, «invitant nles gouvernements intéressésà négocierdes
accords de tutelle, a accueilli avec satisfaction

«les déclarationsfaites par certains États administrant des terri-
toires actuellement sous mandat, de leur intention de négocierdes
accordsde tutelle pour certainsdecesterritoires...»(lesitaliquessont
de nous) '.

Mêmesi l'on attribue en partie le libellédes passages en italiques
à l'existence de cas spéciaux comme ceux de la Palestine et de la

l Commission préparatoire des Nations Unies, Comité 4, procès-verba39.p.
2Commission préparatoire des Nations Unies, Journal131.
4 Assemblée générale, documents officiels, première session, première partie
douzième séance plénière. pp. 185-186; et ibid., Quatrième Commission,troisième
séance, p.O.
Ibid., onzième séance plénière, pp. 166-167.
Ibid., seizième séance plénièr231..
Document Nations Unies A 64, p. 13. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 538

Transjordanie (qui étaient sur le point d'accéderà l'indépendance)
et au fait que le Japon qui administrait un certain nombre de

territoires sous Mandat dans le Pacifique n'était alors ni Membre
des Nations Unies ni présent à l'Assemblée(pas plus qu'il ne devait
l'êtreà Genèveen avril), le tableau n'est pas complet. Il faut ajouter
que les déclarations faites au nom de l'Afrique du Sud ne pouvaient

certainement pas être interprétéescomme ccexprimant l'intention 1)
de négocierun accord de tutelle pour le Sud-Ouest africain; et il
était clair que la situation étaitincertaine tant en ce qui concernait
ce territoire que d'autres temtoires sous Mandat et que tout dé-

pendrait de la négociation d'accords de tutelle satisfaisants (même
dans le cas des territoires à propos desquelsdes c(déclarations d'in-
tention )avaient été faites).

14) Telle était donc la situation lorsque se sont réunis à Genève
en avril 1946 les Membres de la Sociétédes Nations, dont beaucoup
avaient participé aux débatsdesNations Unies mentionnésci-dessus
et qui en avaient tous eu connaissance. Nous avons déjà décrit, à

la section c) ci-dessus de la présente opinion, ce qui s'est passé.
La différenceentre le projet de résolution chinois original, présenté
par le représentant de la Chine mais auquel il n'a pas été donné
suite, et la résolution finalement adoptée par l'Assemblée de la

Sociétéest si frappante et si révélatrice que nous citons en note ces
deux documents in extenso l.

1 Le projet chinois original était lesuivant:

«L'Assemblée,
Considérant que le Conseil de Tutelle n'apas encore étéconstitué et que
tous les territoires somandat de la Société des Nations n'ont pas encore été
transformés en territoires sous tutelle;
Considérant qu'il y aurait lieu, afin d'évitertoute interruption dans la surueil-
lance du régimedes mandats dans ces territoires, de transféàel'organisation
des Nations Unies les fonctions assuméeà cet égard par la Société desNations
(lesitaliquesont de nous);
Recommande que les Puissances mandataires ainsi que les Puissances ad-
Nations Unies des rapportssoannuels et acceptentcque ces Territoires soient

inspectés par l'organisation,jusqu'au moment où le Conseil de Tutelle aura
étéconstitué. »
La résolution finalement adoptée par la Société des Nations est rédigée
comme suit:
KL'Assemblée :

Rappelant que l'articl22 du Pacte applique à certains territoiresplacés
sous mandat le principe que le bien-être et le développement des peuples non
encore capables de se diriger eux-mêmes dans les conditions particulièrement
difficiles du monde moderne forment une mission sacrée de civilisation:
I.Exprime sa satisfaction pour la manière dont les divers organes de la
Société des Nations ont rempli les fonctions qui leur étaient confiées pour
l'application du système des mandats et rend tout particulièrement hommage
àl'Œuvre accomplie par la Commission des mandats; OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE
539
Nous exposerons plus loin le motif qui explique, à notre avis,
l'attitude adoptée par l'Assembléedes Nations Unies et celle de la

Société des Nations. Pour l'instant, nous relèverons ce qui, dans
ces attitudes, nous semble êtrejuridiquement important en ce qui
concerne les présentes affaires.
Il nous parait impossible, étant donné les faits que nous avons
décrits et considérant l'affaire dans son ensemble, de penser que

l'Assembléedes Nations Unies et celle de la Société des Nations
n'aient pas étéparfaitement conscientes et averties de l'ensemble
des incidences de la question des Mandats et de la dissolution de
la Société.desNations à cet égard; ou, en d'autres termes, il faut
considérer qu'elles l'étaient, vu les faits (et mêmesimplement à

titre de présomption de droit). .En dehors des dzsPositions de l'arti-
cle 73 de la Charte (voir section suivante), elles se sont délibérément
abstenues de prendre des dispositions concernant la situation pou-
vant se présenter si un territoire sous Mandat n'était pasplacésous
tutelle ou ne l'était qu'aprèsde longs délais - bien qu'elles eussent

étéaverties qu'une telle situation pourrait se présenter. De même,
elles n'ont pas essayéd'adapter les Mandats àla situation découlant
de la disparition de la Sociétéet de la qualité de Membre.de cette
Société.
Non seulement elles ne l'ont pas fait mais, au moins par deux
fois, ellesont rejetédes propositions en vue de transférer aux Nations

Vnies les fonctions de la Sociétédes Nations en matière de Mandats
(proposition du Comité exécutif dela Commission préparatoire des
Nations Unies - paragraphe IO ci-dessus; et projet de résolution
chinoisoriginal de Genève).L'acceptation de l'une ou l'autre de ces
propositions n'aurait naturellement pas en soi résolu les difficultés

concernant la cessation de l'appartenance à la Société.Le problème
aurait étéprobablement mis en évidence, mais cela est en dehors
de notre propos. Ce qui nousintéresseici est simplementde montrer
que les deux assemblées ne désiraient (en dehors de l'article 73 de
la Charte) prendre aucune disposition expresse en vue de faire face

aux conséquences de la fin de la Sociétédes Nations et de l'apparte-

de territoire sous mandatéàél'entière indépendancese félicite que, depuis la
dernière session de l'Assemblée, la Syrie, le Liban et la Transjordanie aient
cesséd'êtredes territoires sous mandat pour devenir desmembrindépendants
de la communautéinternationale;

fonctions ence qui concerne les territoires somandat,amais note que desà ses
principes correspondanà ceux que déclare l'arti22du Pacte sont incorporés
dans les chapitres XI, XII et XII1 de la Charte des Natiünies;

territoires somandat ont exprimé leur intention de continueàlles adminis-
trer, en vue du bien-être et du développement des peuples intéressés,6-
ment aux obligations contenues dans les divers mandats,jusqu'à ce que de
nouveaux arrangements soient pris entre les Nations Unies et les diverses
Puissances mandataires.» OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 540

nance à cette Société, ouà l'éventualitéd'un échecdans le transfert
sous tutelle d'un territoire sous Mandat. C'est là la cléde toute
l'affaire.
C'est la cléde toute !'affaire parce qu'il est très évident que les
deux assemblées(et les Etats demandeurs étaientMembresdes deux)
se sont fondéeset ont firéférsée fonder sur l'espoir ou l'attente que

les territoires sous Mandat seraient finalement placés sous tutelle.
Autre chose est de savoir si pareille supposition était raisonnable
dans le cas du Sud-Ouest africain, vu les déclarations faites au
nom du Gouvernement de l'Union. Il n'en reste pas moins qu'on
s'esfbien fondé sur cet espoir, en pleine connaissance des faits qui
montraient manifestement qu'il pourrait ne pas se réaliser et en
pleine connaissance de ce que le Mandataire n'étaitsoumis à aucune
obligation juridique en la matière.
Il nous paraît assez clair qu'on peut raisonnablement conclure
que cette attitude étaiten grande partie motivéepar le désird'éviter

mêmede suggérerque l'un des territoires sous Mandat pût ne pas
êtretransférésous tutelle; ou de donner l'impression de sanctionner
la situation qui pourrait se présenter si cela se produisait (la Société
des Kations étant dissoute entre-temps), en prévoyant cette situa-
tion ou en donnant à n'importe quel Mandataire des motifs de
prétendre que, une disposition expresse ayant étéprise polir la
continuation des Mandats en tant que Mandats, il n'y avait pas
lieu d'envisager d'autres mesures.
En bref, l'attitude prise par les intéresséssur l'ensemble de cette

question indique qu'ils ont pensé qu'il n'était pas nécessaire de
prévoir cette situation et qu'il était mêmede meilleure politique de
ne pas le faire. Cette méthode ayant étéadoptéeet ses conséquences
éventuelles acceptées, aucun principe juridique ne permet à un
tribunal de remonter dans le temps et de prendre, par action judi-
ciaire, des dispositions pour un cas que les intéressésavaient choisi
d'omettre pour des raisons qui leur semblaient bonnes et suffisantes
à l'époque.
Le fait que les événements ultérieursont prouvé que cette poli-

tique était erronée dans le cas particulier du Sud-Ouest africain
ne saurait bien entendu justifier une rectification judiciaire. Cela
équivaudrait à appliquer un principe de ((vision a posteriori1)qui,
nous l'avons déjàdit, n'est pas légitime. Le fait est qu'en exerqant
le meilleur jugement politique possible eu égard aux circonstances
de l'époqueles deux assembléesont suivi le cours qui leur paraissait
le plus sage -- et il n'est pas certain qu'elles aient eu tort, si l'on
considère la question dans son ensemble l. Il n'appartient pas au-
jourd'hui à un juge, mieux informk avec le temps, de faire plus que

d'appliquer le droit tel qu'il est, à la lumière des faits tels qu'ils se
présentaient lorsqu'a surgi la situation dont il est saisi.
l Il se peut que cetpolitique ait eu pour résultat de faire placer sous tutelle
d'anciens territoires Mandat qui autrement n'auraientpas subi ce transfert.
Mais si une attitua des avantagesil faut accepter les désavantages corrélatifs,
en droit du moins. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 541

Mais il serait injuste de supposer que les intéressésétaient in-
différents à leurs responsabilités. Ils ne l'étaient pas. Ils connais-
saient le rôle de protection de l'article 73 de la Charte, auquel nous
arrivons maintenant.

e) Le rQlede l'article 73 de la Chartedes Nations Unies

Lorsqu'on lit l'article 73 de la Charte des Kations Unies en corré-
lation avec l'article 22 du Pacte de la Société desNations, il est
évident que les dispositions de l'un ont étélargement inspiréespar

celles de l'autre. L'analogie des concepts aussi bien que de la rédac-
tion est frappante et, pour montrer les affinités entre les deux
articles, nous reproduisons en note le texte du premier paragraphe
de chacun d'eux l.
L'article 73 fixe un certain nombre d'obligations incombant aux

Membres des Nations Unies chargés d'administrer des territoires
non autonomes, dont nous mentionnerons quelques-unes, et établit
en particulier (àl'alinéae)) une obligation de soumettre des rapports
aux Nations Unies qui, bien que moins sévèreet g6néraleque pour

les Mandats (Mandat pour le Sud-Ouest africain: article 6), n'était
nullement négligeable, comme l'a amplement démontrél'attitude
de l'Assemblée desNations Unies. Cette disposition (article 73) ne
se limitait nullement au cas des territoires sous Mandat mais elle
l'englobait sans aucun doute, comme nous allons le montrer.

Telle éta.itdonc la disposition qui, bien qu'écartéepar la Cour
en 1950 comme non pertinente, offrait un degré raisonnable de
protection (pour azttant cjz4'il fût j2tgénécessaire ou sozlhaitablede
prévoir une telle protection)contre la possibilitéqu'un territoire sous

suivant:aragraphe I de l'articl22 du Pacte de la Société des Nations était le

a1. Les principes suivants s'appliquenaux colonies et territoires qà la
suite de la guerre, ont cessé d'êtresous la souveraineté des États qui les gou-
vernaient précédemment et qui sont habités par des peuples non encore capables
de sediriger eux-mêmes dans les conditionsparticulièremendifficiles du monde
moderne. Le bien-être et le développement de ces peuples forment une mission
sacrée de civilisationet il convient d'incorporerdans le présent Pacte des
garanties pourl'accomplissement de cette mission»
Le paragraphe déterminant de l'article 73 est son paragraphe introductif:
(Les Membres des Nations Unies qui ont ou qui assument la responsabilité
d'administrer des territoires dont les populationss'administrent pasencore
complètement elles-mêmes, reconnaissent le principe de la primauté des inté-
rêts des habitants deces territoiresIls acceptentcomme une mission sacrée
l'obligation de favoriser dans toute la mesure du possible leur prospérité, dans
le cadre du système de paix et de sécurité internationétabli par la présente
Charte et,à cettefin :..»
226 Mandat pût rester en dehors du régimede tutelle, soit tout à fait,
soit pendant iine longue période l.
Le fait que l'article 73 n'aurait pas suffi à lui seul à combler,
pour l'article 7 du Mandat pour le Sud-Ouest africain, la lacune

causéepar la disparition de la qualité de Membre de la Sociétédes
Nations ne peut que prouver encore mieux et confirmer que les
Membres des Nations Unies n'ont jamais attaché d'importance par-
ticulière aux clauses de règlement judiciaire des Mandats, opinion
également confirméeen ce qui concerne l'Assembléede la Société
des Nations par le caractère de sa résolution finale du 18 avril 1946

relative aux territoires sous Mandat qui a étéexaminéeplus haut.
Nous pensons qu'il est juridiquement impossible d'affirmer que
l'article 73 ne s'applique pas aux territoires sous Mandat, du moins
en ce qui concerne les Mandats ((R 1)et C »,étantdonnéles affinités
de l'article 73 et de l'article 22 du Pacte. Le premier devait certai-

nement s'appliquer à une catégorie de territoires beaucoup plus
vaste qu'au grouperelativement réduit des territoires sous Mandat;
mais il serait étrange qu'une notion expressément destinée à s'ap-
pliquer àce groupe ait cesséde lesconcerner lorsqu'ellea étéétendue
à d'autres territoires, d'autant que les Etats administrant les terri-
toires de ce groupe n'étaient pas obligés de les transférer sous

tutelle. Cela serait revenu en fait à les laisser échouerdans une sorte
de no nzan's band international.

Nous ne pensons pas que telle était l'intention de la Charte, et
- la référenceau chapitre XI (qui contient l'article 73) figurant au

paragraphe 3 de la résolution de la Sociétédes Nations du 18 avril
1946 (voir pp. 538-539) prouve que notre opinion correspond à celle
de l'époque. Sinon,la mention du chapitre XI n'aurait pas de sens.
L'article 73 énoncequ'il se rapporte aux (territoires dont les po-
pulations ne s'administrent pas encore complètement elles-mêmes »,
définitionqui couvreprécisémentle cas des territoires sous Mandats

((B )et ((C ». Reprenant presque les termes de l'article 22 du Pacte,
son obligation majeure est (de favoriser dans toute la mesure du
possible la prospérité ))des habitants de ces territoires et d'assurer
((leur progrès politique, économiqueet social,ainsi que le dévelop-
pement de leur instruction ». En outre, la mention d'une ((missian

sacrée 1)constitue la marque de toute la notion de Mandat. On ne
saurait ignorer ces affinités et on ne peut guère douter de leur
portée juridique.

l On estfrappé de voir que, dèsIe débutde son existence, l'Assemblée des Nations
Unies n'était pas disposàeaccepter l'applicatide l'article 73 aux territoires sous
Mandat. On comprend facilement pourquoi: cela aurait rendu par la suite plus
difficile d'insister pour que les territoires sous Mandat fussent placés sous tutelle
ne fussent pas traitécomme les autres territoires nonautonomes. C'est là une
question d'opinionmais, du point de vue juridique, cela ne peut que confirmer que
bout sur une politique de(tutelle exclusivemen11allant jusqu'à refuser d'appli-n
quer l'article aux territoires sous Mandat non placés sous tutelle. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 543

Il est tout à jait clair qu'ciGenève,en aaril 1946, on.n'a pas douté
de cettefiortéejuridique et que la décisionde l'Assembléede la Société
des Nntio~zsde ne pas prendre de dispositio?zssfiécialespour les terri-
toires sozhsMa-dat repose en partie sur ce fait. En réalité,cela est

absolument clair si l'on considère la résolution du 18 avril 1946 sur
laquelle s'appuie l'arrêt de la Cour pour aboutir à une conclusion
différente. Cette résolution indique notam~utenq tue ((les chapitres XI,
XII et XII1 de la Charte des Nations Unies ))(les italiques sont de
nous) comprennent (des principes correspondant à ceux que déclare

l'article 22 du Pacte ».C'est une desraisons pour lesquelles 1'Assem-
bléede la SociétédesNations s'est contentée de prendre simplement
(note que [les Puissances mandataires ...] orit exprimé leur inten-
tion ))de continuer à administrer les territoires ((en vue du bien-
êtreet du développement des peuples intéressés )),etc.

A cette occasion, le représentant de l'Australie avait parlé exac-
tement dans le mêmesens; apïès avoir dit que les territoires sous
Mandat australien seraient, en fin de compte, placés sous tutelle et
qu'entre-temps ils seraient administrés selon lesystème des Mandats,
il avait continué :

(Dans l'intervalle, toutes garanties sont fournies non seulement
par l'engagementque le Gouvernement australienprend aujourd'hui
devant l'Assemblée,mais aussi par les obligationsinternationales
firécisefsigurantau chapitreXI delaCharte ..Il n'y aura doncaucun
vide,aucuninterrègne à combler entre lesdeuxrégimes ))(les italiques

sont de nous) l.

L'allusion de l'orateur au fait qu'il n'y aurait <aucun vide, aucun
interrègne ))peut êtrecomparée aux termes du projet original de
résolution chinois, reproduit en note au basde la page 538ci-dessus 2.
1.e mêmeargument a étérépétépar le représentant de l'Australie
à l'Assemblée générale des Nations ITnies de novembre 1947, en

des termes encore plus explicites:
... Nous avons insérédans la Charte un chapitre traitant en
particulier des Territoires non autonomes. Nous l'avons fait afin de

couvrir le cas de territoires, tels que les Territoires sous mandat,
qui ne sont pas placés sousle Régimede tutelle, comme c'est le cas
par exemple pour le Sud-Ouest africain.. .Par conséquent,la Charte
de l'Organisation des Nations Unies ne laisse subsister aucune
solution de continuité. ))

l Il nous sembleioévident qu'au moins certaines des Puissances94,mandataires
n'ont pas partagé l'opinion du représentant de la Chine énoncée dans sa résolution
primitive selon laquelle il y aurait un interrègne; c'est ce qui explique le fait qu'une
autre résolution, toutà fait différente, ait étéprésentée. Cela explique également
l'importance de la référenceauchapitre XI figurant dans la résolution de l'Assemblée
de la Société des Nations, référencedont la Cour n'a pas tenu compte en 1950 et
dont elle continueà ne pas tenir compte.
Assemblée générale des Nations Unies, documents officiels, deuxième session,
Séances plénières, vol. 1, 1947, pp. 587-588.
228 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 544

A San Francisco, en 1945, le maréchal Smuts, président de la
Commission II, a mêmedit que le chapitre XI:

«...s'applique à tous les territoires non autonomes; il s'agit à la
fois des territoires qui sont sous Mandat, des territoires conquis
sur les pays vaincus et des actuelles colonies des Puissances. Il

s'agit maintenant de l'ensembledes peuples non autonomes vivant
dans des territoires non autonomes. )l

C'était l'opinion commune en 1g46/1947 et immédiatement après,
ainsi qu'il ressort de l'exposé écritprésenté à la Cour par les États-
Unis en 1950 (Mémoires,plnidoiries et documents, 1950, pp. 124

et ss.) ;de l'exposé écritdu Gouvernement des PhiIippines (pp. 249
et ss.); et de l'exposé présentéà la Cour au nom du Secrétaire
général des Nations Unies à la mêmeoccasion 2.

Il nous semble que la seule et unique conclusion que l'on puisse
en tirer est la suivante. Premièrement, absolument rien ne permet
de déduire de tout ce qui a été ditou fait à Genève en avril 1946
l'existence d'un engagement exprès ou tacite du Mandataire ou

d'un accord généralau sujet de l'article 7. Les indices sont en sens
contraire. L'article 7 et son objet étaient bien éloignésde la pensée
des Membres de la Sociétédes Nations (et des Nations Unies). Tout

Conférence des Nations Unies sur l'organisation internationale, document1144
I1!16, vol. VIII, p. 127. [Traduction du Greffe.]
Ibid., p.224. NOUScitons également un extrait plus développé dela déclaration
faite par le représentant de l'Australie à l'Assemblée générale de la Société des
Nations le II avril 1946 (les italiques sont de nou:)
«Il en a étéainsi du système des mandats. La Charte des Nations Unies a
développédans deux directions les principes qui étaient à la base de ce système.
En premier lieu, elle applique à tout territoire dépendant administré par les
Membres des Nations Unies le principe d'après lequel le but essentiel detoute
administration doit être d'accroître le bien-êtret de favoriser le développe-
ment de la population des territoiresdépendants, et l'autorité chargée de
l'administrationdoitrendre compte à une autorité internationalede sa gestion:
une dispositionà cet eifet est inscrite au chapitre XI de la Charte. L'autorité

chargée de l'administrations'engage notamment à communiquer aux Nations
Unies des renseignements relatifs aux conditions d'ordreéconomique, social et
éducatif existant dansles territoires dont elle est responsable.
En second lieu, la Charte prévoit, aux chapitres XII et XIII, un régime
internationalde tutelle pour certaines catégories de territoiresdépendants.
Les buts essentiels sont identiqueà ceux que le chapitre XI assigne pour les
territoires dépendants en général. Mais, sous le régime internationde tutelle,
on fait un pas de plus en établissant un Conseil de tutelle spécialisé, qui a le
pouvoir non seulement d'examiner les rapports des autorités chargées de
l'administration, mais encore de faire procéder à des visites dans les territoires
sous tutelle, pour se rendre compte sur place, dela façon dont lesdites autorités
s'acquittent de leur mission. Ces pouvoirs d'inspection vont au-delà de ceux
que le Pacte conféraità la Comnzission permanente des mandats. Le régime de
tutelle, au sens strict du terme, ne s'appliquera cependant qu'aux territoires
qui auront été volontairement placés sous ce régimeà la suite d'accords parti-
culiers de tutelle.,,(SociétB des Nations, Journal ~,fïciel, supplément spécial
no 194. P. 17.)
229 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE
545
au long des débats, on n'a pas parlé une seule fois de surveillance ni
de règlement judiciaire. L'examen des comptesrendus des débatset
du texte de la résolution de l'Assembléemontre bien qu'ilsportaient
uniquement sur les obligations des Puissances mandataires envers
les populations indigènes - c'est-à-dire les obligations de fond que
l'on trouve à l'article22 du Pacte et qui sont répétéesdans les
différentsMandats.

Deuxièmement, il est clair que tous les intéressésavaient décidé
de se contenter de ce qu'ils avaient fait, c'est-à-dire d'avoir créé le
régimede tutelle dans le cadre duquel les territoires sous Mandat
pourraient êtreplacés (maissans qu'il yeût d'obligation juridique à
cet égard); d'avoir établi pour les territoires non autonomes le
régimedu chapitre XI, qui englobait les territoires sous Mandat non
placéssous tutelle, mais ne comprenait pas de clause de règlement
judiciaire obligatoire; et d'avoir pris note des déclarations d'inten-
tion selon lesquelles les Mandataires acceptaient (en attendant
d'autres arrangements) de continuer à administrer les territoires
pour le bien-êtredes populations de ces territoires, en se conformant
en généralaux termes des Mandats.
Les intéressésn'étaient pas disposés à dépasser ce point et ne
l'ont pas dépassé.En particulier - à l'exception de ce que nous
venons de mentionner -, ils n'ont pris aucune disposition, et n'a-
vaient pas l'intention d'en prendre, pour faire face à la situation

résultant de la dissolution de la SociétédesNations et dela cessation
de la qualité de Membre de la Société;ni pour faire face à la situa-
tion qui se présenterait ou pourrait se présenter si, après la dis-
parition de la Société des Nations, un territoire sous Mandat
n'était pas placé soustutelle.

C'est aux demandeurs qu'incombait la charge de prouver l'exis-
tence d'un accord auquel auraient participé les Puissances manda-
taires au sujet de l'article.A notre avis ils ne se sont pas acquittés
de cette tâche.
*
k *
Conclusion sur la deuxième exception péliminaire: pour conclure
sur cette partie de l'affaire, nous en revenons à l'un de ses aspects

qui concerne tous les arguments et contre-arguments relatifsà
l'obligation du défendeur aux termes de l'article 7 - c'est-à-dire au
principe fondamental du consentement, donné généralement ou
spécialement, comme fondement essentiel de la compétence d'un
tribunal international. Ce principe est tout aussi applicable au cas
d'une obligation de recours au règlement judiciaire figurant dans
un acte tel que le Mandat qu'à celui d'une obligation analogue
découlant d'autres instruments; nous avons mêmedéjà fait état dedeux motifs nous permettant de dire que ce principe s'applique ici
avec encore plus de force: premièrement, dans le cas des Mandats,
seul le Mandataire s'était engagé à se soumettre au règlement
judiciaire, il était obligéde s'y soumettre sur l'instance d'autres

Membres de la Société des Nations et il ne pouvait, pour sa part,
imposer une obligation similaire; deztxièmement, un arrêt de la
présente Cour a des conséquencesdifférentes àraison de l'articl94
de la Charte. Le caractère unilatéral de l'article 7 constitue un
motif de plus de l'interpréter restrictivement lorsqu'il est invoqué
contre le Mandataire et de ne pas étendre sa portée au-delà de ce
que le Mandataire peut justement être tenu pour avoir accepté.
En inférant que le Mandataire aurait consenti à se soumettre au
règlement judiciaire obligatoire sur l'instance d'anciens Membres de
la Société des Nations, on semble de nouveau faire appel à l'argu-
ment fondé sur une vision des choses a posteriori.On pourrait
démontrer de façon presque concluante que le Mandataire ne peut
avoir envisagéen 1920la dissolutionde la SociétédesNationset que,
s'il l'avait fait, il aucertainement refusé d'accepter une obliga-
tion de règlement judiciaire persistantaprès cette dissolution.
La fiortéde tout consentement doit êtrenécessairement évaluée
à la lumière des circonstances telles qu'elles étaient connues et
telles qu'elles existaient au moment où le consentement a étédonné.
De même,si ce consentement avait trait à des événementsfuturs,
ildoit êtreévaluéenfonction dece que l'onpouvait raisonnablement
prévoir à l'époque.Mêmes'il y avait eu en 1920 un événementsur
la base duquel on eût pu prédire la dissolution de la Société des
Nations, cet événementaurait nécessairement été considéré comme
impliquant un écroulement de l'ordre mondiai - situation en vue
de laquelle aucun État n'aurait étédisposéà contracter une obli-
gation perpétuelle de se soumettre au règlement judiciaire obliga-

toire - situation dans laquelle tout le processus du règlement
judiciaire pouvait même s'écrouler.En résumé,si l'on avait pu
prévoir quoi que ce fût, cela n'eût pas étéce qui s'est réellement
produit, mais exactement le contraire.
Ce n'est pas là une base raisonnable pour présumer un consente-
nient se rapportant à quelque chose que le Mandataire n'a jamais pu
prévoir; c'est pourquoi il est évident qu'on ne saurait considérer
qu'il ait donnéson accord.

Pour toutes les raisons mentionnées ci-dessus, nous estimons que
la deuxième exception préliminaire doit êtreretenue, parce que les
États demandeurs, en y mettant fin de leur propre fait, ont cessé
d'appartenir à.la catégorie d'États habilitée à invoquer l'articl7
du Mandat, parce u'aucune dispositionn'a étéprise pour remplacer
cette catégorie d'8tats par une autre à laquelle appartiendraient
les États demandeurs (et parce que le Mandataire n'a jamais
consenti à pareille substitution, qu'il ne s'est jamais engagé à
l'admettre et qu'il n'y a pas eu d'accord en ce sens).

231 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 547

Sous ce chef, l'État défendeur nie qu'il existe entre les États
demandeurs et lui-mêmeun différend quelconque qui soit en subs-
tance du genre de ceux que prévoit l'article 7 du Mandat et il
prétend qu'en conséquence la condition touchant l'existence d'un
(différend »au sens prévu par l'article7 n'est pas remplie. .
Avant d'examiner cette prétention nous devons traiter d'un point
connexe. L'article7 n'exige pas seulement qu'il y ait différendmais
encore que ce différend sépare le Mandataire dJ«un autre Membre
de la Société des Nations ». Pour les besoins de cette troisième
exception,il fautadmettre évidemment, au contraire des conclusions
auxquelles nous sommes parvenus sur les première et deuxième
exceptionspréliminaires,que les demandeurs doivent êtreconsidérés
comme satisfaisant à la condition de l'appartenance à la Société

des Nations ou, subsidiairement, qu'ils ont le droit d'invoquer
l'article7 bien qu'ils ne fassent plus partie de la Société.
La question ne s'en pose pas moins, avant d'examiner le caractère
des différends que l'article 7 entendait viser, de savoir si dans les
présentes affaires il existe bien, à proprement parler, un diijérend
quelconqueentre les Etats demandeurs et 1'Etat défendeur. Aux
termes de l'article 7 comme aux termes du Statut de la Cour et
mêmeen vertu d'un principe plus général, il faut que le différend
à l'égard duquel on invoque la compétence de la Cour soit un
différendopposant les parties mêmes à la procédure engagéedevant
la Cour.
Il est évident qu'un différendn'est pas crééou constitué unique-
ment par l'introduction d'une instance, par la présentation d'une

requêteou par le fait d'invoquer la clause de règlement judiciaire
obligatoire - sinon l'obligation figurant (comme toujours) dans une
telle clause et imposant qu'il y ait différend serait superflue. En
l'espèce, existe-t-ià proprement parler entre les États demandeurs
et le défendeurun différendd'une autre nature que celui qui découle
du simple fait que les demandeurs ont introduit une instance contre
le défendeu1?
Il nous apparaît que non. On sait du reste que les présentes
affairestrouvent tout leur fons et origo dans les activités de l'As-
semblée des Nations Unies relatives au territoire sous Mandat et
au Mandataire et qu'elles en découlent directement. Quiconque
étudie le compte rendu des travaux de l'Assembléeou des divers
comités ou sous-comités de l'Assembléequi se sont occupés de la
question, et notamment les résolutions de l'Assembléetouchant le

Sud-Ouest africain qui ont directement entraîné l'ouverture de la
présente procédure devant la Cour, ne peut douter un instant que
le-vrai différend touchant le Sud-Ouest africain n'existe qu'entre
1'Etat défendeur et l'Assemblée desNations Unies et que les Etats
232 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 548

demandeurs n'agissent en réalitéqu'à titre représentatif dans une
procédure que l'Assembléenepeut introduire elle-même,puis qu'aux
termes de l'article 34 du Statut seuls les États ont qualité pour se
présenter au contentieux devant la Cour.
Pour ce seul motif, nous estimons donc que nous serions justifiés
à affirmerque cette condition de l'article 7 n'est pas remplie, puis-

qu'il n'existe aucun différend véritable entre l'État défendeur et
les États demandeurs à titre individuel.
Il est reconnu que les demandeurs n'ont en l'espèceaucun intérêt
matériel direct. Ne sont affectésni leurs propres intérêts nationaux,
ni ceux d'aucun de leurs ressortissants aux termes de l'acte du
Mandat ou dans le territoire sous Mandat. Ils ont engagé cette
procédure - le fait est reconnu - dans le seul dessein de défendre
ou de maintenir le Mandat, non dans leur propre intérêtmais dans
celui des habitants du territoire sous Mandat, et c'est sur l'instance
de l'Assemblée qu'ils le font, ainsi qu'il ressort clairement des

~ésolutionsde l'Assemblée 1361 (XIV) de novembre 1959 et 1565
(XV) de décembre 1960.
Il ne nous appartient pas de commenter cette façon d'agir, si ce
n'est dans la mesure où nous devons examiner quelles en sont les
conséquences juridiques. Nous nous rendons compte que l'on peut
fort bien admettre que des,Etats partiesà des traités ou conventions,
ou jouissant des droits d'Etats tiers découlant de traités ou conven-
tions, ont dans certains genres d'affaires un intérêtjuridique à ce
que ces instruments soient dûment observés, mêmesi l'infraction
alléguée neles a pas, ou ne les a pas encore, affectés directement.
Mais, puisque nous ne considérons pas le Mandat comme un traité

ou une convention, ni les Etats demandeurs comme des parties au
Mandat en tant que traité ou convention (à supposer qu'il le soit),
et puisque nous estimons que les demandeurs ont perdu la qqalité
en vertu de laquelle ils auraient pu faire valoir des droits d'Etats
tiers, nous ne saurions considérer qu'ils détiennent en l'espèceun
intérêtjuridique quel qu'il soit en vertu d'une participation directe
quelconque au Mandat.
Aurions-nous même-tort sur ce point, le fait est que l'intérêt
véritable actuel des Etats demandeurs en l'espèce tient à leur
qualité de Membres des Nations Unies, à leur participation aux
activités de l'Assemblée desNations Unies concernant le Sud-Ouest

africain et à l'intérêtque l'Assemblée,se fondant sur l'avis de la
Cour de 1950, estime avoir dans l'administration du Mandat. La
jurisprudence internationale établit en effet que c'est de la situation
telle qu'elle existait immédiatement avant l'introduction de l'ins-
tance qu'il convient de faire état. Tout adifférend ))qui pouvait
alors séparer les États demandeurs de 1'Etat défendeur était un
différend au sein des Nations Unies, en leur qualité de Membres
des Nations Unies, et dans le cadre de l'Assemblée, là encore en
leur qualité de Membres de l'Assemblée. OP. DISS. COMMUNE J'CTGESSPENDER ET FITZMAURICE 549

Ce qui s'est fait jour à l'Assembléen'est pas non plus, au sens
strict du terme, un différend à proprement parler mais bien plutôt
une opposition de vues politique. Les États demandeurs n'ont avec
l'État défendeur aucune opposition de vues passéeni présente qui
dépassecelles qui séparent le défendeurd'un grand nombre d'autres
États représentés à l'Assemblée,eux aussi à titre de Membres de
l'Assemblée,ou qui en diffère; l'intérêtdes demandeurs en la ma-

tière n'est pas non plus différent de celui de beaucoup d'autres
Membres, ni plus important. Ils n'ont, notamment, aucun sujet de
différendindividuel ni spécifiqueles séparant de l'État défendeur
en dehors de l'Assemblée,ainsi qu'il ressort du fait qu'ils n'on! ni
entamé ni tenté d'entamer de négociations directes avec 1'Etat
défendeur par les voies diplomatiques;
Jusqu'au moment où ils ont introduit les présentes instances, les
demandeurs ont toujours agi en leur qualité de Membres des Nations
Unies; et, quant à la différenceque cela aurait fait pour leur ca-
ractère essentiel, les présentes instances auraient fort bien pu être

introduites par tout autre Etat de la catégorie des ex-Membres de
l'ancienne SociétédesNations. Les écrituresetlesfilaidoiriesauraient
fiu étreidentiques, au nom près des demandeurs.

Nous estimons qu'un différend qui n'a étéconduit par un État
(si le mot ((conduit ))convient ici) que dans le seul cadre d'une
organisation internationale, en sa qualité de Membre de l'organi-
sation, et par simple participation à ses activités, sans que le diffé-
rend ait jamais étésoulevédirectement hors de l'organisation avec
l'État défendeur,ne saurait constituer un différendentre Etats, du
type de ceux qui sont prévus par la clause normale. de règlement
judiciaire.

Nous sommes ainsi portés à conclure que, avant l'institution de la
présente procédure(laquelle n'étaitpas en-soi suffisante), il n'y avait
pas àproprement parler différendentre 1'Etat défendeuret les Etats
demandeurs comme telsrépondant àl'intention normaled'une clause
juridictionnelle comme l'article 7 du Mandat, et que par consé-
quent la condition touchant l'existence réelled'un différendentre
le Mandataire et les États demandeurs n'est pas remplie.

La carence que nous venons de signaler est en un certain sens
d'ordre technique, encore que sa technicité soit loin d'êtresans
importance. Mais le temps et une action adéquate pourraient y
remédier. Nous avons une raison beaucoup plus fondamentale de
juger quele différend,ou plutôt le motif de plainte alléguéen l'espè-
ce, n'est pas ce que prévoit l'article7.
Les dispositions de fond du Mandat (et plus encore des autres
espèces de Mandats) appartiennent à deux catégories principales.
La première (qu'on pourrait appeler la catégorie touchant (l'ad- OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 550

ministration du Mandat ») comprend les dispositions inséréesau
bénéficedes populations du territoire. L'autre (qu'on pourrait
appeler la catégoriedes droits et intérêtsdes Etats) comprend celles
qui ont étéinséréesau profit des Membres de la Sociétéet de leurs
ressortissants (droits commerciaux, clause de la porte ouverte,
liberté pour les missionnaires d'exercer leurs activités, etc.).
La question est de savoir sil'article du Mandat (clause commune
à tous les Mandats) intéresse ces deux catégories de dispositions ou
seulement la dernière. Il peut sembler à première vue qu'au sens
littéral de l'article la réponse soit claire: cet article spécifiequ'il
s'agit de« tout différendquel qu'il soit ...relatif à l'interprétation
ou à l'application des dispositions du Mandat ».Convaincus de la
nécessitéd'interpréter les dispositions suivant leur sens naturel et
ordinaire dans le contexte et (en l'absence de toutes ambiguïtés ou

contradictions) sans référence aux travaux préparatoires, nous
devons indiquer pourquoi nous ne saurions donner au passage ci-
dessus le sens qu'il paraît avoir à première vue et pourquoi nous
estimons qu'en l'espècela référenceaux travaux préparatoires se
justifie, en dehors mêmedu fait qu'en tout état de cause on s'en est
si largement servi au sujet des première et deuxième exceptions
préliminaires qu'il ne serait guère possible de ne pas en tenir compte
dans l'examen de la troisième exception, incontestablement liéeaux
autres.
L'extrait de l'article7 que nous venons de citer n'indique pas
tout le sens du passage pertinent, qui est à rappeler en entier:
« Tout différendquel qu'il soit ..entre (le Mandataire) et un autre
Membre de la Société desNations relatif jil'interprétation ou à
l'application des dispositions du Mandat 1).Etant donnéle sens que

nous donnons au mot «différend » et étant donné qu'il est indispen-
sable qu'il existe entre les parties la procédure un différenddirect
opposant leurs intérêtsen leur propre qualité, et non pas seulement
à titre de Membres d'une organisation internationale, le passage
ci-dessus, dans le contexte de la présente affaire, recèle une ambi-
guïté. Les termes pourraient en êtreinterprétés comme signifiant
tout différendquel qu'il soit, ayant le caractère que nous venons de
mentionner. Nous tenons que les demandeurs n'avaient à la date
critique (celle des requêtes) aucun intérêten l'affaire (mêmedans
L'administration du Mandat), si ce n'est en leur qualité de Membres
des Nations Unies. Pour ce seul motif, nous ne pourrions considérer
le cas comme prévu.

Maisil existeune autre ambiguïté, bien plus grave, qui nous oblige
à rechercher si l'expression «tout différendquel qu'il soit » désigne
tout différend relatif aux dispositions du Mandat en généralou s'il
faut considérerque le texte ne porte que sur un différend,quel qu'il
soit, relatif aux dispositions du Mandat affectant les droits ou les OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 551

intérêtsdes États ou de leurs ressortissants. La question se pose en
raison de la condition qui suit immédiatement, à savoir qu'il s'agit
obligatoirement d'un différend ((qui ne soit pas susceptible d'être
réglépar des négociations ».
Les implications de cette phrase constituent, selon nous, la cléde
toute la question de la portée réellede l'article7. Le mot (cnégocia-
tion»,au sensprévupar unedispositiontelle quel'article 7,désigne,à
notre sens, desnégociations entre les parties aux instances introdui-
tes devant la Cour. Nous exposerons dans la partie consacréeà la
quatrième exception préliminaire les raisons que nous avons d'en
tenir pour cette fason de voir. Nous supposerons pour l'instant ce

qu'assurément quiconque traitant de la question au moment où le
Mandat a étérédigéaurait supposé, à savoir que ce mot de négocia-
tion désigneune négociation menéesoit entre les véritables parties
à la procédure soumise à la Cour, soit directement pour leur compte
et en leur nom.
Or, le fait qu'un différenddoit êtretel qu'il « ne soit pas suscep-
tible»d'êtreréglé par desnégociationsimpliquenécessairementqu'il
soit de ceux qui pozbrraientêtrerégléspar voie de négociation, et ce
entre les parties compétentes à cette fin. Si un différendn'étaitpas
suscefitibled'êtreréglé (c'est-à-dire, par définition,impossible àrégler)
par toute négociationquellequ'elle fût entre lespartiesdevant laCour,

ilest évident quelacondition posée,àsavoirque le différenddoit être
de ceux qui ne sont pas «susceptibles d'êtreréglés » par des négo-
ciations, serait absurde.
Par crèglement »,nous entendons règlement définitif et, selon
nous, un règlement définitifest un règlement négocié entre desparties
compétentes pour régler définitivement le différend dont il s'agit.
La question se pose dèslors :si les Etats demandeurs et 1'Etat défen-
deur pouvaient en négociantentreeux réglerd'une façon quelconque
un différendsans rapport avec leurs propres droits ou intérêtsétati-
ques ou nationaux, maisrelevant du genre de dispositionsrelatives à

1'«administration du Mandat » la mission sacrée -, un règlement
quelconque négociéentre des Etats individuels tels que les Etats
demandeurs et le Mandataire pourrait-il régler aucune question
relative à l'administration généraledu Mandat même? Un tel
règlement, négociéentre les demandeurs et le défendeur seul, pour-
rait-il lier tout autre Etat estimant avoir un intérêtdans l'adminis-
tration du Mandat - ou lier l'Assembléedes Nations Unies? Il est
évident que non - un règlement de ce genre pourrait êtreentière-
ment inacceptable pour ces autres entités.
Il ne suffit pas, selon nous, de répondre qu'un règlement entre les
États demandeurs et l'État défendeur eût été 2sn règlement en ce

sens qu'il aurait empêché lesdemandeurs d'engager une action
quelconque en vertu de l'article 7. Un règlement de ce genre n'aurait
rien réglédu tout à l'égard detout autre État qui s'en serait déclaré OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 552

mécontent, ni à l'égard des Nations Unies l, et n'aurait rien réglé
véritablement pour le défendeur.

Chacun sait que, si les présentes instances ont été introduites,
c'est que la décisionde la Cour serait obligatoirepour le Mandataire.

Les principes élémentaires de justice et de bonne foi exigent donc,
si leMandataire peut parvenir àréglerdirectement le différendavec
les Etats demandeurs (ce qui ne lui a jamais encore étédemandé),
que ce règlement soit définitifet valable ergaomnes.Mais il va de soi
que cet effet ne saurait être obtenu par un tel règlement.

Supposons donc, puisque cette possibilité n'est peut-être pas
exclue, que, sur le fond, la Cour se prononce en faveur du défendeur.

Cette décisionne deviendrait resjudicata que pour les Etats deman-
deurs (article 59 du Statut). Elle ne lierait pas l'Assemblée des
Nations Unies et elle ne lierait aucun Etat à part les demandeurs.
Tout autre État qui en serait mécontent pourrait, un jour ou l'autre,
introduire une nouvelle instance pour des motifs soit exactement,
soit en substance identiques et les résultats pourraient en êtreou
non les mêmes.Pour le Mandataire, rien ne serait donc jamais
définitif. En revanche une décisionprise à l'encontre du défendeur

serait obligatoire pour lui et l'article 94 de la Charte pourrait être
invoqué, au besoin, par l'autre partie.
L'évidente disparitéentre ces deux situations ne se concilie pas
facilement avec des principes de justice normaux, et nous ne
pouvons croire qu'on ait eu à l'esprit une situation aussi mal équi-
librée lors de la rédaction de l'article 7. Nous estimons que cette
disposition, comme il ressort clairement de ses termes, ne devait
s'appliquer, dans l'esprit de ses rédacteurs, qu'à des différends du

genre de ceux qui peuvent êtrerégléspar voie de négociation et
dont, par conséquent, dans le cas présent, on peut légitimement
penser (siles faits le démontrent) que le différend (n'est pas suscep-
tible ))d'être ainsi réglén ;ous estimons en outre que le seul genre
de différend qui présente ce caractere est celui qui concerne les
droits ou les intérêts nationaux des Etats intéressés.Les Etats ont
compétence pour régler définitivement de tels différends par voie
de négociation. Mais les différendstouchant l'administration géné-

rale du Mandat, au point de vue des habitants du territoire, sont
de ceux qui, en principe, ne peuvent pas êtreréglés tout simplement
par négociations entre le Mandataire et un autre Etat. Les obliga-
tions du Mandataire à l'égardde la (mission sacrée » ne sauraient,
par leur natuye, faire l'objet de négociations entre le Mandataire
et un autre Etat Membre de la Société desNations. Le présent

Ce n'est pas répondre, évidemment, que de dire qu'en pratique les demandeurs
n'auraientnégociéaucun règlement dont ils n'auraient pasu que l'Assemblée
l'accepterait ou, si veut absolument y voir une réponse, elle est assez révélatrice
en ce qu'elle confirme ce que nous penàosavoir que le présent différend ne se
pose pas en fait entre le défendeur et les demandeurs. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 553
différendappartenant àcette catégorie,nousestimonsqu'il ne relève
pas de l'article 7.
*

Nous voudrions invoquer maintenant brièvement un autre point
qui ne nous paraît guèremoins important. Nous ne pouvonsconcilier
la thèse selon laquelle l'article7 concerne des différends touchant
l'administration généraledu Mandat avec les fonctions de surveil-
lance attribuées au Conseil de la Sociétépar l'article 6 du Mandat.
Cette conjonction signifierait que, si le Conseil de la Sociétédes
Nations s'étaitdéclaré parfaitement satisfait de l'administration du
Mandat telle que le Mandataire la pratiquait, ou mêmes'il avait
fait au Mandataire certaines suggestions à ce sujet, suggestions
auxquelles celui-ci se serait rangé et qu'il aurait appliquées, tout
Membre de la Sociétéqui n'eût pas été satisfaitde l'administration
du Mandataire ou n'eût pas partagé les vues du Conseil aurait pu
introduire une instance devant la Cour permanente en vertu de

l'article7.
Quelque chose de plus extraordinaire encore aurait pu se produire.
Un Membre de la Société desNations aurait pu, sur quelque point
touchant l'administration du Mandat, obtenir de la Cour perma-
nente une décisionqui n'eût pas, en fait, étéla plus favorable aux
intérêtsdes populations du territoire sous Mandat - en raison par
exemple de l'insuffisance de la documentation technique soumise à
la Cour. Pourtant, aux termes de l'article59 du Statut, le Manda-
taire aurait été liépar cette décisionet obligéde l'appliquer aux
habitants, alors que le Conseil de la Sociétéy aurait peut-être été
absolument opposéet n'aurait lui-mêmepas été liépar elle.
Nous ne saurions croire qu'on ait jamais souhaité que de telles
situations pussent se produire et, en en jugeant, il convient, pour

les raisons que nous avons indiquées ci-avant dans la présente
opinion, de se reporter à l'époque à laquelle ces dispositions -
l'article 6 et l'arti7l- ont étérédigéescomme parties intégrantes
d'un ensemble cohérent et complet, ce que le Mandat n'aurait cer-
tainement pas étési l'article 7 avait eu le sens que la Cour lui
attribue.
Les situations que nous venons de décrire comme pouvant se
produire si l'on estime que l'article porte sur des différendsrelatifs
à l'administration du Mandat ne sont aucunement d'ordre fantai-
siste ou hypothétique. L'une d'elles s'est produite effectivement
dans une autre affaire au sujet d'une disposition, semblable en
substance à l'article7, figurant dans un accord de tutelle des
Nations Unies.

Nous avons peine à imaginer que ceux qui ont crééle système
dans lequel les Mandats devaient êtreexercés (au nom de la Société
des Nations ))et dans lequel le Mandataire devait êtreresponsable
et seul responsable devant le Conseil de la Sociétéauraient accepté
de diluer l'autorité du Conseil (et notamment quand le Conseil
238 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 554

pouvait lui-mêmedemander àla Cour permanente un avis consul-
tatif) au point d'accorder aux Membres de la Sociétédes Nations
un droit de recours absolument indépendant, non seulement pour
protéger leurs propres droits et intérêtsindividuels mais encore
dans le domaine mêmede l'administration généraledu Mandat, qui
était spécialement du ressort du Conseil.

Ces diverses considérationsnous amènent à dire que, en dépit du
sens apparemment simple de l'article 7 du Mandat d'après l'inter-
prétation littérale de l'expressio«tout différend quel qu'il soi»,
une analyse plus attentive montre que le sens et l'intention véri-
tables sont autres et excluent les différendsrelatifsl'administra-
tion généraledu Mandat. Si quelque doute subsiste, c'est alors que
le recours aux travaux préparatoires se justifie, pour rechercher
s'ils confirment l'interprétation que nous venons de donner; c'est
ce que nous allons faireà présent.

Avant la fin de la conférence de la paix de Paris de 1919, une
Commission des Mandats avait étécréée envue de s'occuper de la
rédaction de divers modèles de mandats l.A sa première séance,
le 28 juin1919 ,n projet de mandat «C » composé de cinq articles
a étéproposé comme base de discussion. Ce firojet ne contenait
aucuneclaztsede règlementjudiciaire. Il ne contenait non plus aucune
clause concernant la liberté des cultes ni les dispositions assurant
aux missionnaires sujets ou citoyens de tout Membre de la Société
des Nations la faculté de pénétreret de résider dans le territoire,
etc. énoncéesplus tard à l'article5 des actes de Mandat «C ».

A sa séancesuivante, le 8 juillet, la Commission a examiné non
seulement le projet de Mandat «C » mais encore deux projets de
Mandat « B »,l'un proposépar le représentant de la France et qui
devait servir de base de discussion et l'autre présentépar les États-
Unis. Le projet «B » fran~ais était bref et comprenait onze articles
assez courts. Il ne contenait,pas de clause de règlemenjtudiciaire.
En revanche, le projet des Etats-Unis comportait, à côté de cer-
taines clauses relatives à l'administration du Mandat concernant les
peuplesdu territoire sous Mandat, un certain nombre de dispositions
très détailléestouchant les droitsà accorder aux États Membres
de la Sociétéet à leurs sujets ou citoyens sur un certain nombre

de sujets divers. Ce projet américain contenait une clause de règle-
ment judiciaire et il ressort très clairement des procès-verbau-
c'est sur quoi nous voulons insister- que la discussion de cette

Conférencede la paix 1919-1Recueil des actes de la cnnférence,Partie VI.
Paris. 193p. 327.

239 OP. DISS. COMDlUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 555

clause de règlement judiciaire, qui ne figurait que dans le projet
des Etats-Unis, s'est concentrée sur les droits détaillésà accorder
d'après ceprojet aux Membres de la Sociétéet àleurs ressortissants.
La clause de règlement judiciaire était la suivante:
«Si un différend s'élèveentre les Membres de la Sociétédes
Nations en ce qui concerne l'interprétation ou l'application de la
présente Convention et que ce différendne puisse êtreréglépar
les négociations,il sera porté devant la Cour permanente de Justice
internationale..
Les sujets ou citoyens des États membres de la Sociétédes
Nations peuvent égalemenp torter desréclamationsen cequi concerne
des infractions aux droits qui leur sont conférpar les article5, 6,
7, 7a, et 7b de ce Mandat devant ladite Cour pour décision. Le
jugement rendu par cette Cour sera sans appel dans les deux cas
précédents etaura le mêmeeffet qu'une sentence arbitrale rendue
en application de l'article13du Pacte » (lesitaliques sont de nous).

Les articles du projet «B » des États-unis mentionnés ci-dessus
visaient ce qu'on pourrait appeler la «porte ouverte »aux échanges
commerciaux, etc. en faveur des sujets ou citoyens des États Mem-
bres de la Société(article 5) ;la liberté des cultes et des dispositions
concernant les missionnaires(article 6);l'égalité detraitement pour
le commerce et la navigation de tous les Etats Membres de .la
Société des Nations, et certaines dispositions à-l'encontre de toute
discrimination entre les sujets ou citoyens des Etats Membres de la
Société(article 7) ;l'octrai des concessions de chemins de fer, postes,
télégraphes,stations radio-électriques et tous autrestravaux publics
sans distinction d'aucune sorte aux sujets ou citoyens des Etats

Membres de la Société(article 7 a); et, une sorte de clause de la
nation la plus favorisée en faveur des Etats Membres de la Société
des Nations (article 7 6) et de leurs ressortissants.
Ces clauses préoyaient donc une série de droits qui seraient
conféréstant aux Etats Membres de la Sociétéqu'à leurs sujets et
citoyens. Le texte de la clause de règlement judiciaire était assez
curieux et n'était pas très heureux. Le second alinéa semblait
ynférer quelque droit d'action directe aux ressortissants des
Etats Membres - idée qui n'a d'ailleurs pas étéretenue. Si l'on
considère cette clause dans son ensemble, ainsi que les mots que
nous avons soulignés, et si l'on examine le contexte dans lequel elle
a étéproposée et discutée, il apparaît nettement que le premier
alinéa devait concerner les droits et intérêtsdes Etats Membres en

vertu du Mandat et le second les droits et intérêtsdes ressortissants
des Etats Membres en vertu de certains articles particuliers, dont
un certain nombre portait à la fois sur les droits des ressortissants
et sur ceux des Etats.
En bref le fait est qu'il semble que personne n'ait pensé à intro-
duire une disposition touchant le règlement judiciaire obligatoire
avant que les Etats-Unis n'eussent fait des proposi~ions détaillées
touchant certainsdroits, commerciaux et autres, des Etats Membres OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 556

de la Sociétéet de leurs ressortissants; c'est dans ce contexte, et
nul autre, que la clause de règlement judiciaire a étédiscutée. C'est
sur cette base que la question a ététraitée.
Au cours de la séance suivante, le g juillet, la Commission a
poursuivi son examen des deux projets de Mandat « B »,celui de la
France et celui des Etats-Unis; mais le projet français a été pris
comme base de discussion article par article. Les quatre premiers
articles, qui traitaientdu genre de questions faisant l'objet des quatre

premiers articles du Mandat pour le Sud-Ouest africain, ont été
provisoirement adoptés, avec certains amendements.
La Commission a abordé alors l'article 5 du projet français de
Mandat «B 1)Le premier alinéa, très court, établissait l'égalité des
droits entre les citoyens des Etats Membres de la Sociétéquant
à leur résidence,à la protection de leurs personnes et de leurs biens,
à l'acquisition de biens immobiliers et mobiliers et à l'exercice de
leurs professions, sur la mêmebase que les droits accordés aux
nationaux de la Puissance mandataire. Ces dispositions ont été
acceptées après amendement.
Le reste de l'article 5 du projet français qui - là encore, en

termes brefs, et seulement en principe - traitait de l'égalitécom-
merciale à accorder aux ressortissants des Etats Membres de la
Société,dela liberté de navigation et de transit et de la protection à
l'encontre de tout droit différentiel sur les marchandises, a été
examiné en mêmetemps que l'article 7 du projet des Etats-Unis.
La Commission a examiné ensuite s'il y avait avantage à insérer
dans cet article 5 du projet français des stipulations détaillées
comme celles du projet américain de Mandat cR ». Le représentant
des États-Unis a affirmé que celles-ci étaient indispensables pour
assurer la bonne exécution du Mandat par le Mandataire. On lit
ensuite dans le procès-verbal :

Lord Robert Cecil(Empire britannique)pense que cette question
est liéeau droit d'appel devant la Cour Internationale. Si cet appel
est autorisé,ilest préférablde poserseulement leprincipe d'égalité
et de laisserà la Cour le soin de l'appliquer aux cas particuliers.
Il pense néanmoins qu'il y aurait lieu de remplacer les mots:
((égalitécommerciale »[qui figurent dans le projet français] par:
((égalitécommercialeet industrielle1)Si, au contraire, aucun appel
devant la Cour Internationale n'est autorisé, il sera nécessaire
d'élaborerdes stipulations détaillées.

La séance du matin s'est terminée sur cette observation. Cette
discussion indique clairement, selon nous, que l'objectif de la clause

de règlement judiciaire, et le seul contexte dans lequel elle a été
examinée, était la protection des droits commerciaux et autres
qu'on avait l'intention de conférer dans les actes de Mandat aux
États hIembres de la Sociétéet à leurs ressortissants.
C'est à la suite de cette discussion que le premier point examiné
par la Commission à sa séance de l'après-midi du mêmejour a été OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 557

l'article 15du projet des gtats-unis,qui contenait la clause de règle-
ment judiciaire ci-dessus mentionnée. La Commission se proposait
de poursuivre la discussion de l'article 5,du projet français, mais,
sur la suggestion du représentant des Etats-Unis, elle a accepté
d'examiner d'abord la clause de règlement judiciaire.
Le représentant de la France a déclaréqu'il ne faisait aucune
objection au principe de l'appel devant une Cour internationale,
mais qu'il estimait que, si desparticuliers pouvaient avoirrecours à
cette procédure, toute administration deviendrait impossible. Le
président était de cet avis: la responsabilité du droit d'appel ne

devait appartenir qu'à un gouvernement. Il estimait qu'il y aurait
certainement avantage à faire passer de la sphère politiquedans la
sphère juridique le règlement deq suestionscommecelle du droitde
$ro;firiétm ais il demandait que le gouvernement qui déciderait si
la réclamation devait êtreportée devant la Cour en assumât la
responsabilité.

C'est pour répondre à ce souci que lord Robert Cecil a proposé
alors de rédiger comme suit le second alinéa de la clause d'appel:

«Les Membres de la Sociétédes Nations pourront également,
pour le compte de leurs sujets ou citoyens, porter des réclamations
pour infraction à leurs droitetc.N,
cela répondait aux divers points de vue. La formule a étéacceptée

par le représentant des États-Unis et adoptée, semble-t-il, sans
autre discussion.
Il a étéprocédéalors à la suppression de la dernière phrase de la
clause de règlement judiciaire du projet américain, à savoir celle qui
disposait que le jugement rendu par la Cour serait dans les deux cas
sans appel et aurait le mêmeeffet qu'une sentence arbitrale rendue
en application de l'article 13 du Pacte. Cette phrase devenait super-
flue si toutes les réclamations devaient êtreprésentéesà la Cour par
lesgouvernements, qu'il s'agît de leurs propres droits découlant des
Mandats ou de ceux de leurs ressortissants.
La Commission a repris ensuite l'examen de la dernière partie de
l'article5 du projet français; comme c'est ce projet qui devait
constituer la base des discussions ultérieures plutôt que le projet
américainet ses dispositionsdétailléestouchant les droits àaccorder

aux États et à leurs ressortissants, la référenceaux(article 5, 67,
7 a et 7 b » a étésupprimée de la clause de règlement judiciaire.
L'article5 du projet français a étéalors approuvé àtitre provisoire,
avec quelques amendements.
La Commission a abordé ensuite un nouveau projet de Mandat
« C ».Ce projet contenait à présent un nouvel article qui, sous sa
formedéfinitive,est devenu l'article 5 du Mandat pour le Sud-Ouest
africain, garantissant la liberté des cultes dans le territoire sous
Mandat et, pour les missionnairesressortissants des États Membres
de la Sociétédes Nations, la liberté d'exercer leur ministère. Dans OP.DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 558
ce mémeprojet apparaît, pour la premièrefois aussi, une clause de

règlement judiciaire rédigée grossomododans les mêmestermes que
ceux qui devaient êtresoumis le 14 décembre1920 au'lonseil de la
Sociétédes Nations et que celui-ci devait adopter, après l'avoir
amendée, dans sa résolution du 17 décembre 1920 promulguant le
Mandat.
Il nous semble donc que les procès-verbaux ne pourraient indiquer

plus clairement que la rédaction de ce qu'on peut appeler pour
plus de simplicité les clauses des droits nationaux des Mandats et
la rédaction de la clause de règlement judiciaire allaient de pair,
chacune exerçant un effet sur l'autre, et que la clause de règlement
judiciaire n'a jamais étédiscutée dans le contexte des obligations
des Mandataires touchant les peuples des territoires sous Mandat.

Pour reprendre les propres termes de lord Finlay, parlant du Mandat
pour la Palestine, dans l'une des affaires Mavronzmatis (C,.P. J. I.,
série A no 2, p. 43) : ccToutes ces clauses [c'est-a-dire celles qui
concernent les droits commerciaux et autres des Etats et de leurs
ressortissants] offrent d'infinies possibilités de conflits entre le

Mandataire et d'autres Membres de la Sociétédes Nations, et il
était au plus haut point nécessaire qu'un tribunal fût prévu pour
régler ces conflits »l. A aucune époque durant la rédaction des
projets, personne n'a le moins du monde suggéréque la clause de
règlement judiciaire eût étéconçue dans un autre dessein, c'est-à-
dire pour réglementer l'accomplissement de la mission sacrée.

Il est évident qu'elle était sans rapport avec les devoirs fidu-
ciaires du Mandataire à l'égarddes peuples des territoires. Elle ne
visait pas si haut. Il est tout à fait inconcevable, si l'article 7 a eu
le caractère fondamental et essentiel que la Cour lui.attribue, s'il a
étéconçu comme l'une des garanties de l'application du Pacte et
pour faire de la Cour le suprêmegarant de l'accomplissement de la

mission sacrée, qu'il ne se puisse trouver dans les procès-verbaux
un seul mot à l'appui de l'opinion de la Cour 2.
En résumé,l'étude des procès-verbaux confirme l'opinion que
nous sommes faite antérieurement et indépendamment, en nous
fondant sur les termes de l'article 7etsur lecontextedu Mandat dans
son ensemble. Cette opinion, en premier lieu, que l'article 7 doit

êtreentendu comme désignant un difiérendau sens traditionnel du
mot, comme il aurait été compris en 1920, à savoir un différend

l Nous citons .lord Finlaynous ne citons aucune autre autoritjuridique,
mais nous signalons unopinion toutà fait semblablà la nôtre qu'en sa qualité
de représentant del'opinion des juristes internationauxeinberg a exprimée
à l'Académie de La Haye en 1937 et qui est citée intégralement dans l'opinion
dissidente duPrésident de la Cour en l'espèce.
L'importance que les États-Unisattachaienten 1920 aux clauses touchant
l'égalité commerciale et industriedans les territoiresous Mandat apparaît
dans la correçpondance échangée par les États-Unle Conseil de la Sociétéet le
secrétaire d'Etat britanniqaux Affaires étrangères entre le mois de novembre
Société desNations, annexe154 et 154a, b, c. de12me session du Conseil de la OP.DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZhlAURICE 559

entre les parties présentes devant la Cour concernant leurs propres
intérêts,dans lequel ces parties agissent en leur nom propre et non
pas pour le compte de quelque autre entité ou intérêt;et, en second
lieu, que l'articl7, dans le contexte et dans le schéma généraldu
Mandat, visait à permettre aux Membres de la Sociétéde protéger
leurs propres droits et ceux de leurs ressortissants, mais non pas
d'intervenir dans des questions intéressant uniquement l'adminis-

tration du Mandat à l'égarddes peuples du territoire sous Mandat.
Sur ce dernier point, nous estimons que les procès-verbaux confir-
ment absolument l'opinion que nous avons adoptée en rejetant
l'argument selon lequel l'article a été introduit, et était indispen-
sable, pour compenser le fait qu'en raison de l'article 34 du Statut
de la Cour (qui n'avait d'ailleurs pas encore étérédigé en1919,
lorsque la Commission des Mandats délibérait) le Conseil de la
Sociétén'étaitpas habilitéà participerà une procédurecontentieuse,

mais seulement àdemander des avis consultatifs et ne pouvait donc,
en dernier ressort, obtenir une décisionobligatoire contre le Man-
dataire. Nous avons exprimé l'opinion qu'en 1919-1920 l'ambiance
n'aurait pas été favorable à l'insertion d'une clause de règlement
judiciaire qui eût visécet objectif, et les procès-verbaux le confir-
ment. L'article 7 n'a pas étéintroduit pour permettre aux Membres
de la Sociétéd'aider le Conseil à faire exécuter le Mandat, mais
pour leur permettre de protéger leurs propres droits nationaux que
le Conseil, pour sa part, n'avait aucun intérêt spécial à protéger.

Un autre point, qui confirme cette même opinion, est que la
disposition essentielle touchant l'intérêt des peuples du territoire
sous Mandat qui, dans les Mandats ((C » (article z), imposait au
Mandataire l'obligation d'accroître par tous les moyens en son
pouvoir le bien-être matérielet moral ainsi que le progrès social des
habitants, se retrouvait sous une forme un peu différente dans les
Mandats ((B n, mais était totalement absente des Mandats ((A n.
Or, une clause de règlement judiciaire semblable à l'articl7 figurait

dans les Mandats (A » - évidemment parce qu'ils contenaient
(comme c'était le cas) certaines dispositions concernant les droits
et intérêtsdes Membres de la Sociétéet de leurs ressortissants dans
les territoires sous Mandat, et pour cette raison seulement.

Nous n'avons plus à traiter sous ce chef qu'un seul point, à

savoir l'argument que l'on essaie de tirer de l'existence de ce qu'on
appelle la « clause du Tanganyika ».
On a vu que, pendant les travaux de rédaction, la division primi-
tive de la clause de règlement judiciaire en deux parties (droit des
Etats; droit des ressortissants) a étééliminée; eneffet, du moment
où il a étéadmis quetoutes les instances, quel qu'en fût lecaractère,
devaient êtreprésentéespar des gouverr~ements,soit en leur nom
propre, soit pour le compte de leurs ressortissants, la raison d'être de cette division disparaissait. Elle n'a étémaintenue, et pour une
raison qu'on ignore, que dans l'un des Mandats, le Mandat britan-
nique sur l'Est africain, dont la clause de règlement judiciaire
contient un premier alinéa rédigédans les mêmestermes que l'arti-
cle 7, et un second alinéa disposant que les Etats Membres de la
Société desNations pourront également soumettre à la Cour toute
plainte émanant de leurs ressortissants I. On a voulu en conclure

que le premier alinéa de la clause du Tanganyika (et par conséquent
toute disposition comme l'article 7 dont les termes sont les mêmes
que ceux de ce premier alinéa) devait obligatoirement se rapporter
à des différendsrelatifs à l'administration du Mandat.
Ne serait-il mêmequestion que d'interprétation pure et simple,
nous estimons que c'est là une base trop fragile pour étayer sem-
blable conclusion. La seconde partie de la clause est tout à fait
superflue, comme en témoigne l'affaire Mavrommatis. Au surplus,

le Mandat belge sur l'Est africain est analogue au Mandat britan-
nique sur le Tanganyika. Ilserait tout à fait absurde de prétendre
que le second alinéa avait pour but d'établir une différenceentre
ces deux Mandats. On n'a jamais avancé aucune raison à l'appui
de cette vue. En tout cas les procès-verbaux montrent que ce qui
s'est passé, c'est tout simplement que la clause du Tanganyika a
conservé la forme primitive de la clause de règlement judiciaire
introduite et discutée en relation-avec les droits des Membres de la

Société desNations en tant quJEtats et les droits réservésà leurs
ressortissants et que, sous cette forme, la première partie devait
couvrir les droits des Membres en tant qu'États et la seconde les
droits de leurs ressortissants. Ce qui s'est passé dans le cas du
Tanganyika, c'est tout bonnement que les deux parties n'ont jamais
étéamalgaméescomme dans tous les autres textes; ou plutôt qu'on
a simplement négligéd'omettre la seconde partie, comme superflue.
On ne saurait en déduire aucune notion utile quant au sens de la

première partie. Dans ces conditions, on ne peut donc légitimement
en tirer aucune déduction contraire à l'opinion qui est la nôtre.

Conclztsion :nous estimons que la troisième exception prélimi-
naire est valable et doit êtreretenue.

Eu égard à l'opinion que nous venons d'exposer sous le chef
précédentet selon laquelle les problèmes posésdans les présentes

* La raison pour laquelle la clause du Tanganyin'a pas Btér6digée sous la
caprices rédactionnels qui se produisent constammlors des conférences inter-
nationalesil estné probablementdu fait que l'opinion était divisée sur le point
de savoir si, une clause étant superflue, il valait mieux l'oextabundanti
cautelala laisser subsister.requêtes nesont pas de ceux qui puissent êtrerégléspar des négo-
ciations entre les demandeurs etl'État défendeur,ces Parties n'étant
pas compétentes pour régler des problèmes de ce genre pa-r une
négociation où elles seraient seules en jeu, la question de savoir si
le présent différend est ((susceptible ))ou non d'êtreréglépar des
négociations se pose à peine pour nous. Nous l'examinerons néan-

moins, parce qu'elle touche certains points de principe qui nous
paraissent importants.
Le défendeur n'a pas nié que des discussions aient eu lieu aux
Kations Unies, mais il s'est borné à affirmer qu'elles ne sont pas
tenues dans des conditions offrant de véritables chances de succès,
de sorte que l'on ne saurait dire que le différend soit de ceux qui
ne sont en aucune circonstance susceptibles d'êtrerégléspar des
négociations.
Cette thèse touche certaines questions de fait dans lesquellesnous

ne proposons pas d'entrer, puisque, selon nous, il n'y a eu, en l'es-
pèce, à proprement parler, aucune négociationdu genre prévu à
l'article7.
Aux termes de l'article 7, le différendqui ne soit pas susceptible
d'êtreréglépar des .négociationsdoit êtrele différendentre le Man-
dataire et l'autre Membre de la Sociétédes Nations intéressé.c'est-
à-dire le véritable différendentre les parties à la procédure soumise
à la Cour, comme telles. Cela signifie que les négociations requises

par l'article 7 doivent porter sur ce différend à l'exclusion de tout
autre. Or, en l'espèce, les requêtes ont étédéposéesen novembre
1960 et il est par conséquent tout à fait évident que, jusqu'à cette
date, lesdébatsde l'Assembléesur lesquels se fondent lesdemandeurs
(pût-on même les qualifierde négociations)n'ont rien eu à voir avec
le véritable différendentre les Etats demandeurs et 1'Etat défendeur,
puisque ce différendn'existait pas alors comnietel1. La seule chose
qui ait existé jusqu'à cette date est un désaccord entre l'Assemblée

(en tant que personne morale) et l'un de ses Membres - 1'Etat
défendeur; tout ce qui s'est passé jusque là a consisté en diverses
démarchesau sein de l'Assembléeet de ses commissions, auxquelles
lesdéfendeursont en effet participé, maissimplement àtitre de Mem-
bres de l'Assemblée. Attribuer à ces discussions antérieures le
caractère d'une négociation relative au présent digérend (qui n'a
surgi qu'en novembre 1960, et encore l),d'une négociation menée
par les demandeurs au sein de l'Assembléeet par l'intermédiaire de

l'Assemblée,oupar l'Assembléeelle-mêmeau nom des demandeurs,
nous paraît absolument arbitraire.
Nous ne voudrions pas exagérer le degréd'importance des négo-
ciations nécessairespour établir qu'un minimum a été fait,dans les

Il n'existe d'aillepas encoreà présent, au sens strict dmot, puisque,
ainsi que nous l'avons fait observer sous le chef précédent, il ne saurait avoir été
engendré uniquement par l'introductide l'instance; et qu'aucun autre échange
jamais eu lieu.s de l'Assemblée, ni directement entre les Parties comme telles, n'a OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE
562
circonstances données,afin de prouver que les Parties n'ont pas pu
régler leur différend. Mais nous estimons indispensable que des
négociations aient effectivement eu lieu entre les véritables Parties
à l'instance introduite devant la Cour, en leur qualité d'États

individuels.
En outre, les négociations doivent avoir trait au différend (et à
nul autre) dont l'existence est alléguéeentre les Parties à l'instance
introduite devarit la Cour et qui doit être antérieurà l'introduction
de l'instance. Il ne suffit pas que la négociation (à supposer qu'elle
ait eu lieu) ait concernéun différendqui, à l'époqueoù cette (négo-
ciation1) n lieu, n'existait pas spécifiquement entre les Parties
devant la Cour et qui ne consistait qu'en une controverse générale
poursuivie dans l'enceinte d'une assembléeinternationale.

Nous ne prétendons pas nier la pertinence ni l'utilité des discus-
sions poursuivies dans une enceinte internationale telle que l'As-
semblée des Nations Unies. Mais nous ne pensons pas que des
discussions de ce genre puissent normalement êtreconsidéréescom-
me de véritables négociations entre les parties devant le Cour,
ni qu'elles répondent à ce que, selon nous, l'article 7 dispose.
Ces discussions sont, nécessairement, d'un caractère trop généralet
trop vague pour constituer des négociations entre les parties
mêmesqui se présentent ensuite devant 1%Cour, au sujet d'un
différenddéterminéles séparant en tant qu'Etats.

Quoi qu'il en soit, ce qui nous paraît évident c'est qu'une ((négo-
ciation ))qui se limite à l'enceinte d'une Assembléeinternationale,
et qui consiste en allégations formuléespar certains Membres, en
résolutions de l'Assemblée, en mesures prises par l'Assembléeen
vertu de ces résolutions, en dénégations répondant aux allégations
et en refus soit d'accepter les résolutions, soit de se conformer aux
mesures prises en vertu de ces résolutions, ne suffit pas à justifier
une décision de la Cour selon laquelle le différend ((n'est pas »
susceptible d'êtreréglé par des négociations,alors qu'aucun échange

de vues diplomatique n'a jamais eu lieu entre les parties et que par
conséquent aucun effort en vue d'un règlement n'a jamais étéfait
à l'échelongouvernemental et diplomatique. Les négociationsdirec-
tes entre les parties mêmes à un différendconstituant la méthode
usuelle et normalement indispensable pour tenter de parvenir à un
règlement, nous ne voyons pas comment la Cour peut dire et juger
que le différend (ouqu'un différendquelconque)((n'est pas suscep-
tible )d'êtrerégléa ,lorsqu'on n'a jamais eu recours àcette méthode.
Nous ne croyons pas que l'on doive présumer ou postuler que des

échangesde vues qui ont échouéau sein de I'Assembléeou de ses
organessubsidiaires ne puissent, repris dans des conditions différen-
tes et par des parties moins nombreuses, avoir quelque chance de
succès - assez du moins pour interdire d'affirmer raisonnablement
le contraire avant que cette méthode n'ait étéemployée. Évaluer
les chances de succès est affaire de jugement personnel, mais là
n'est pas la question; à nos yeux, le fait qu'aucune négociation

247directe n'ait étéengagée,ni mêmetentée, entre les Parties au présent
différend en leur qualité comme telles nous semble constituer. (eu
égard aux termes de l'article 7) un obstacle formel à la présente
procédure.
*

Il s'ensuit,à notre avis, que la quatrième exception préliminaire

doit êtreretenue.
*

Xous conclurons en faisant observer que les prescriptions tou-
chant les (différends ))et les (négociations »ne constituent pas de
simples questions d'ordre technique. Elles apparaissent sous une
forme ou sous une autre dans presque toutes les clauses de règle-
ment judiciaire qui aient jamais étérédigées,et pour une excellente
raison. Elles y sont inséréesà dessein pour protéger les parties, dans
toute la mesure du possible, contre des litiges internationaux inuti-
les, prématurés, insuffisamment motivés pu simplement spécieux.

Faute de cette mesure de protectioil, les Etats n'accepteraient pas
de signer de clauses de règlement judiciaire obligatoire. C'est là
un aspect de la question auquel il ne nous semble pas qu'on ait
accordéassez d'attention.

Xotre conclusion finale sur l'ensemble des présentes affaires est
que, pour toutes les raisons exposées et à l'égard de chacune des
exceptjons soulevées, soit pour les motifs présentés effectivement
par 1'Etat défendeur, soit pour d'autres motifs, la Cour n'est pas

compétente en l'espèce et devrait refuser d'exercer sa juridiction.

(Signé) Percy C. SPENDER.

(Signé)G. G. FITZ~~AVRICE.

Bilingual Content

JOINT DISSENTING OPINION OF SIR PERCY
SPENDER AND SIR GERALD FITZMAURICE

Since we find ourselves unable to concur in the decision of the
Court, it is necessary that we should state the reasons for Our
dissent.
The case is one of special importance. It involves not only a
fundamental question of judicial approach; it is as wellone which
presents quite exceptional difficulties-a fact reflected by the
narrow majority on which the decision rests.
These difficulties are not merely technical, though these exist.
They spring rather from the fact that the case belongs to a type
the outcome of which is liable to be dominated, or at least strongly
influenced, by the character of the initial approach to it.
In order to assume jurisdiction, the Court had not only to reject

al1the objections formally presented by the Respondent but also
certain others. These we shall mention in due course.

The Court has, in Ouropinion, only been able do this by adopting
premises which, as will emerge from what we have to Say, largely
assume beforehand the correctness of the conclusions arrived at.

The general approach adopted by the majority of the Court
in the present case can, we think, reasonably, be described as
follows-namely that it is desirable and right that a provision
for the compulsory adjudication of certain disputes, which figures
(or did figure) as part of an institution-the Mandate for South
West Africa-which is still in existence as an institution, should
not be held to have become inoperative merely on account of a

change of circumstances-provided that this change has not
affected the Physical possibility of continued performance. The
present Court exists, and is of the same general character and
carries out the same kind of functions as the tribunal (the former
Permanent Court) which originally had jurisdiction under this
provision (Le. Article 7 of the Mandate for South West Africa).
Since there still exist States (and amongst them the Applica~it
States) who would have been entitled to invoke Article 7 before
the changed circumstances came about, this Article must now be
interpreted as still giving them this right, notwithstandianything OPINION DISSIDENTE COMMUNE

DE SIR PERCY SPENDER ET SIR GERALD FITZMAURICE

Puisaue nous ne sommes Das à même denous rallier à la décision

de la Cour, il est nécessaireque nous énoncions lesraisons de notre
opinion dissidente.
L'affaire présente une importance particulière. Non seulement
elle pose un problème fondamental de méthode judiciaire, mais elle
présente aussi des difficultéstout à fait exceptionnelles - ce que
fait ressortir la faible majorité dont dépend la décision.
Ces difficultésne sont pas simplement techniques, bien qu'il en
existe de cet ordre. Elles résultent plutôt du fait que l'affaire est
de celles dont la solution risque d'êtredominée ou tout au moins
fortement influencéepar la manière dont on l'aborde.
Pour pouvoir se déclarer compétente, la Cour doit rejeter non
seulement toutes les exceptions formellement présentées par le
défendeur, mais encore certaines autres que nous mentionnerons le
moment venu.

A notre avis, la Cour n'a pu le faire qu'en adoptant des prémisses
qui, ainsi qu'il ressortira de ce que nous avons à dire, supposent
largement à l'avance l'exactitude des conclusions auxquelles on
aboutit.
Nous pensons que le point de vue généraladopté par la majorité
de la Cour en la présente affaire peut raisonnablement se décrire
comme suit - à savoir qu'il est souhaitable et juste qu'une dispo-
sition visant la juridiction obligatoire sur certains différends qui
figure (ou qui figurait) comme élémentd'une institution - le Man-
dat pour le Sud-Ouest africain - laquelle existe toujours en tant
qu'institution - ne soit pas tenue pour inopérante, simplement en
raison d'une modificc~tiondes circonstances - pour vu que cette
modification n'ait pas affecté la possibilitématériellede continuer
l'exécution. La Cour actuelle existe et elle a le même caractère
généralet remplit le même genre de fonctions que le tribunal

(l'ancienne Cour permanente) qui avait primitivement compé-
tence en vertu de cette disposition (c'est-à-dire l'articl7 du
Mandat pour le Sud-Ouest africain). Puisqu'il existe encore des
Etats (et parmi eux les Etats demandeurs) qui auraient eu le droit
d'invoquer l'article7 avant que ne se produise le changement dans
les circonstances, il faut aujourd'hui interpréter cet article commeto the contrary in its actual terms, or resulting from any other
relevant factor.

It is evident that once a tribunal has adopted an approach or
this nature, its main task willbe to discover reasons for rejecting the

various objections or contra-indications that may exist, or arise.

We have felt unable to adopt this approach. In Our opinion, the
only correct method of procedure is to begin by an examination
of the legal elements, with especial reference, where questions of
interpretation are concerned, to the actual language employed,
and then, on the basis of this examination, to consider what are
the correct conclusions which, as a matter of law, should be drawn
from them. It is in this spirit that we have approached Our task.

We are not unmindful of, nor are we insensible to, the various
considerations of a non-juridical character, social, humanitarian

and other, which underlie this case; but these are matters for the
political rather than for the legal arena. They cannot be allowed to
deflect usfrom Ourduty of reaching a conclusion strictly on the basis
of what we believe to be the correct legal view. They do however
lead us to draw attention to another aspect of the matter.

A Court called upon to consider objections to its jurisdiction
must exclude from consideration al1 questions relating to the
merits of the dispute, unless the jurisdictional issues are so inter-
twined with the merits that they cannot be considered separately,
and must be joined to the merits. It is nevertheless legitimate
for a Court, in considering the jurisdictional aspects of any case,
to take into account a factor which is fundamental to the jurisdic-
tion of any tribunal, namely whether the issues arising on the merits
are such as to be capable of objective legal determination.

It is apparent from the Memorials in the present case, that what
the Court willprincipally be asked to decide on the merits iswhether,

in a number of different respects, the Respondent State, as Manda-
tory, is in breach of its obligation under Articl2 of the Mandate to
"promote to its utmost the material and moral well-being and the
social progress of the inhabitants of the territory ...".There is
hardly a word in this sentence which has not now become loaded
with a variety of overtones and associations. There is hardly a
term which would not require prior objective definition, or re-
definition, before it could justifiably be applied tothe determination
of a concrete legal issue. There is hardly a term which could not be
applied in widely different ways to the same situation or set of facts,
according to differing subjective views as to what it meant, or

151leur donnant toujours ce droit, nonobstant toute disposition con-
traire dans ses termes réels outout obstacle résultant de tout autre
facteur pertinent.
11est évident que, dès lors qu'un tribunal a adopté une telle
manière de voir, sa tâche principale sera de découvrir des motifs
de rejeter les diverses exceptions ou contre-indications qui pour-
raient exister ou se présenter.
Nous n'avons pas cru pouvoir adopter cette .manière de voir. A
notre avis, la seule façon correcte de procéderest de commencer par
l'examen des éléments juridiques,en se référanten particulier, pour
les questions qui touchent à l'interprétation, aux termes réellement
employés, après quoi, partant de cet examen, on examinera les
conclusions correctes qu'il convient d'en tirer en vertu des règlesde

droit. C'est dans cet esprit que nous avons abordé notre tâche.

Nous ne sommes ni aveugles, ni insensibles quant aux différentes
considérations de caractère non juridique, social, humanitaire ou
autre, qui soulignent cette affaire; mais ce sont là des questions
qui ressortissent à l'arène politique plutôt que juridique. Nous
ne saurions leur permettre de nous écarter de notre devoir d'ar-
river à une conclusion strictement sur la base de ce que nous
croyons être l'opinion juridique correcte. Elles nous amènent
cependant à signaler un autre aspect de la question.
Un tribunal appelé à examiner des exceptions à sa compétence
doit écarter de sa considération toutes les questions touchant au

fond de l'affaire, moins que les questions de compétencene soient
si étroitement mêléesaux questions de fond qu'elles ne sauraient
êtreexaminées séparémentet doivent êtrejointes à celles-ci. Une
cour peut toutefois légitimement, en examinant les aspects juridic-
tionnels d'une affaire, tenir compte d'un facteur qui est fondamental
pour la compétence d'un tribunal quel qu'il soit, à savoir si les
questions qui se posent au fond sont de natureàpouvoir fairel'objet
d'une décisionjuridique objective.
Les mémoiresen la présente affaire montrent que ce que la Cour
est surtout appeléeàtrancher surle fond est la question de savoir si,
à plusieurs égards différents, 1'Etat défendeur, en sa qualité de
Mandataire, a violé les obligations que lui impose l'article 2 du
Mandat d'«accroître par tous les moyens en son pouvoir le bien-être

matériel et moral ainsi que le progrès social des habitants du
territoir...». Il est à peine un terme de cette phrase qui ne se
soit aujourd'hui chargé de divers sous-entendus et associations.
Il est à peine un terme qui ne nécessiterait une définition ou une
redéfinition objective préliminaire, avant de pouvoir s'appliquer
légitimement à la solution d'un litige juridique concret. Il est à
peine un terme qui ne pourrait s'appliquer de façon totalement
différenteà la mêmesituation ou à la même série de faits, suivantought to mean in the context; and it is a foregone conclusion that,
in the absence of objective criteria, a large element of subjectivity
must enter into any attempt to apply these terms to the facts of
a given case. They involve questions of appreciation rather than

of objective determination. As at present advised we have serious
misgivings as to the legal basis on which the necessary objective
criteria can be founded.

The proper forum for the appreciation and application of a
provision of this kind is unquestionably a technical or political
one, such as (formerly) the Permanent Mandates Commission, or
the Council of the League of Nations-or today (as regards Trustee-
ships), the Trusteeship Council and the Assembly of the United
Nations. But the fact that, in present circumstances, such technical
or political control cannot in practice be exercised in respect of the
Mandate for South-West Africa, is not a ground for asking a Court

of law to discharge a task which,in the finalanalysis, hardly appears
to be a judicial one.
The above considerations, in our opinion, strongly reinforce
the view which, on other grounds, we have taken as to the third
preliminary objection, namely that disputes about the conduct of
the Mandate in relation to the "sacred trust" (as opposed to dis-
putes about the individual statal interests of the Members of the
League under the terms of the Mandate) are not the kind of disputes
to which the compulsory adjudication clause of the Mandate was
intended to, or did, apply.

We now turn to the substance of the case in its present phase,

which involves the question of the competence of the Court to
proceed to the merits; and by way of introduction we would Say
that Our conclusions in this phase have been reached against the
background of four major principles of law which we believe to
be fundamental to any determination of the issues involved.
They are:

I. The principle of consent as the essential condition for
founding international jurisdiction.Such consent may be given
generally, in advance, or ad hoc, and may in a proper case be
held to have been given. But that it was in fact given, and that
it covers the actual case before the Court, must be objectively
demonstrated, and cannot simply be presumed.

2. The principle that rights conferred on or vested in persons
or entities in a specified capacity, or as members of a specified
152 les opinions subjectives différentes touchant sa signification, ou ce
qui devrait êtresa signification dans le contexte; et ilest assuré
d'avance qu'en l'absence de critère objectif toute tentative d'appli-
quer ces termes aux faits d'un litige donné sera largement pénétrée

d'un élément subjectif. Les termes de cette phrase posent des
questions d'appréciation plutôt que de décisionobjective. En l'état
actuel des choses, nous avons les doutes les plus sérieux quant aux
bases juridiques sur lesquelles peuvent êtrefondéslescritèresobjectifs
nécessaires.
II est incontestable que le forum normal pour apprécier et
appliquer une disposition de ce genre est un forum techniqu,e et
politique, comme l'étaient (autrefois) le Commission permanente des
Mandats ou le Conseil de la Sociétédes Nations, ou comme le sont
aujourd'hui (en matière de tutelle) le Conseil de tutelle et 1'Assem-

bléedes Nations Unies. Mais lefaitque, dans lescirconstances actuel-
les, ce contrôle technique ou politique ne peut s'exercer en pratique
sur le Mandat pour le Sud-Ouest africain n'est pas un motif de
demander à un tribunal de remplir une tâche qui, en dernière
analyse, n'apparaît guère comme une tâche judiciaire.
A notre avis, les considérations qui précèdent renforcent singuliè-
rement l'opinion que, pour d'autres motifs, nous avons adoptée à
propos de la troisième exception préliminaire, àsavoir que le diffé-
rend sur la conduite du Mandat pour ce qui est de la (mission sacrée ))
(par opposition aux différends visant les intérêts étatiquesindivi-

duels des Membres de la Sociétédes Nations dans le cadre des
termes du Mandat) n'est pas de l'ordre des différends auxquels la
clause du Mandat sur la compétence obligatoire était destinée à
s'appliquer (ou s'appliquait).

NOUSen arrivons maintenant au fond de l'affaire à son stade
actuel, qui pose la question de la compétence de la Cour pour
connaître du fond et, en manière d'introduction, no.us voudrions

exposer que nos conclusions sur cette phase de l'affaire ont été
déduites en tenant compte de l'ensemble de quatre principes de droit
essentiels que nous croyons fondamentaux pour trancher les ques-
tions posées.Les voici :

1. Le principe du consentement en tant que base essentielle de
la juridiction internationale. Ceconsentement peut êtredonnéd'a-
vance, en termes généraux,ou bien ad hoc et, dans un cas déter-
miné, il peut êtreconsidéré commeayant été donné. Mais il faut
démontrer de façon objective qu'il a étédonné en fait et qu'il
couvre le cas determiné soumis à la Cour; cela ne saurait simple-
ment se présumer.

2. Le principe que les droits conférésou attribués àdes personnes
ou à des entités en une qualité déterminéeou en tant que mem-
152 class, are not conferred on or vested in them in their personal
or individual capacity, and therefore cease to be available to
them if they lose the specified capactiy, or cease to be members

of the indicated class; and are equally not available to them in a
different capacity, or as members of another class.

3. The principle that provisions are primafacie to be inter-

preted and applied according to their terms, where these are
clear and unambiguous in their expression of the intention of
the parties, and that such terms can only be ignored or overridden
(if at all) on the basis of some demonstrably applicable legal
principle of superior authority. The principle of interpreta-
tion directed to giving provisions their maximum effect cannot
legitimately be employed in order to introduce what would
amount to a revision of those provisions.

4. The principle that a Court of law cannot correct the past
errors or omissions of the parties, and that it is not the province
of a Court to place some of the parties in the same position asthey
would have been in if they had taken action they could have
taken, but did not take, and even deliberately avoided taking.

In Ouropinion, the judgment of the Court fails to give expression
to these principles, either ignoring them or advancing no adequate
grounds for departing from them-as in Our view it clearly does.
In the Anglo-saxon legal tradition there is a well-known saying
that "hard cases make bad law", which might be paraphrased
to the effect that the end however good in itself does not justify the

means, where the means, considered as legal means, are of such
a character as to be inadmissible.
It is because of the foregoing considerations, and as Members of
a Court whose task it is under Articl38, paragraph I,of its Statute,
"to decide in accordance with international law", that we are
unable to accept the reasoning on which the Judgment of Court is
based .

STATEMENT OF THE ISSUES INVOLVED

Although the issues now involved are stated in the Judgment,
their real character is not we think sufficiently brought out there,
and we propose briefly to re-state them in Our own way.
The jurisdiction of the Court is fundamentally derived from
Article 36, paragraph I, of the Statute of the Court, which en-

153 bres d'une classe spécifiéen,e leur sont pas conférésou attribués
en leur capacité personnelle ou individuelle et cessent par
conséquent de s'offrir à elles si ellesperdent la qualitédéterminée
ou si elles cessent d'êtremembres de la classe indiquée.Ces droits
ne s'offrent pas davantage à elles en une qualité différente ou en
tant que membres d'une autre classe.

3. Le principe d'après lequel les dispositions s'interprètent et
s'appliquent prima facie selon les termes dans lesquels elles sont
rédigées,lorsque ceux-ci sont clairs et non ambiguspour exprimer
l'intention des parties, et ne peuvent êtrenégligéesou écartées
en quoi que ce soit que s'il est possible d'invoquer l'application
évidente d'un principe juridique d'autorité supérieure. Le prin-
cipe d'interprétation qui tend à donner aux dispositions leur
maximum d'effet utile ne saurait légitimement êtreinvoquépour
introduire ce qui équivaudrait àune revision de ces dispositions.

4. Le principe qu'un tribunal ne saurait corriger 1es.erreurs ou
omissions passées des parties et qu'il n'est pas du ressort d'un
tribunal de placer certaines des parties dans la position qui eût été

la leur si ellesavaient pris les mesures qu'elles auraient pu prendre
mais qu'elles n'ont pas prises, voire qu'elles ont délibérément
évitéde prendre.

A notre avis, l'arrêtde la Cour ne se conforme pas à ces principes,
soit qu'il n'en tienne pas compte, soit qu'il avance des motifs in-
suffisantspour s'en écarter comme, selon nous, il le fait clairement.
Il est dans la tradition juridique anglo-saxonne une maxime bien
connue: « Hnrd casesmake bad Law »,que l'on pourrait paraphraser
en disant que la fin, si légitime soit-elle en soi, ne justifie pas les
moyens lorsque les moyens considérésentant que moyens juridiques
sont tels qu'ils sont inadmissibles.
C'est sur la base de cette considération, et en tant que Membres
d'une Cour dont la mission, telle qu'elle est définieà l'article 38,

paragraphe 1, de son Statut «est de régler conforniément au
droit international les différends qui lui sont soumis »,qu'il nous
est impossible d'accepter le raisonnement sur lequel repose l'arrêt
de la Cour.

EXPOS~ DES QUESTIONS PERTINENTES

Bien que l'arrêtexpose les questions en cause, nous croyons qu'il
n'en dégagepas suffisamment la véritable nature et nous nous pro-
posons de le refaire brièvement nous-mêmes.
La compétence de la Cour procède essentiellement de l'ar-
ticle36, paragraphe 1, de son Statut aux termes duquel elle peut

153 ables the Court to hear any cases referred to it by the parties

!-i.e.jointly] or any cases "specially provided for ...in treaties or
conventions in force". But whether in any particular case that
jurisdiction can be exercised compulsorily depends on factors lying
outside this provision-for instance the existence of a Declaration
under paragraph 2of Article 36 (the "Optional Clause") or the terms
of a provision for compulsory adjudication by the Court contained
in some treaty or convention in force. It is for this reason that the
Applicant States have invoked the jurisdiction of the Court on the
basis of the combined effect of Article 7 of the Mandate for South
West Africa and of Article 37 of the Statute of the Court. The reason
for citing the latter provision, which is really mechanistic in
character, is that the original forum for the settlement of disputes
arising under Article 7 of the Mandate was the predecessor of the

present Court, the former Permanent Court of International Justice,
which ceased to exist in 1946. This latter Court was equally the
forum specified in the adjudication clauses of many other inter-
national instruments. In Our view, the effect of Article 37 of the
Statute of the present Court-and its sole relevant effect in the
context of this case--was (as between the parties to the Statute)
to substitute the present Court for the former Permanent Court in
al1cases in which under a "treaty or convention in force", the Per-
manent Court would have had jurisdiction and would have been
competent to hear and determine the case. Its relevant portions
read as follows:

"Whenever a treaty or convention in force provides for reference
ofa matter to ...the Permanent Court of International Justice, the
matter shall, as between the parties to the present Statute, be
referred to the International Courtof Justice."

\ive draw attention to the similarity of wording berween this
provision and Article 36, paragraph 1, of the Statute, in so far as
each relates to treaties and conventions in force. This has a sig-
nificance we shall mention later.
It is, however, clear that, whatever may be the correct inter-
pretation to be given to the phrase "a treaty or convention in force",
Article 37 can, on the face of it, only apply to adjudication clauses
contained in instruments which are in law treaties or conventions,
and which also are as such, i.e. as treaties or conventions, "in

force". Only in the case of clauses figuring in instruments fulfilling
these conditions is the present Court substituted for the former
Permanent Court.
The first contention of the Respondent State is that the relevant
instrument-the Mandate for South West Africa--does not fulfil
either of these conditions, that it neither has the character of a
treaty or convention nor, if it has, is it any longer in force. connaitre de toutes les affaires que les parties lui soumettent
[d'un commun accord] ou de tous les cas cspécialement prévus ...

dans les traités et conventions en vigueur 1).Mais le point de savoir
si, dans un cas donné, la Cour peut exercer sa compétence à titre
obligatoire dépend d'éléments extérieurs à cette disposition - par
exemple de l'existence d'une déclaration faite en vertu de l'article
36, paragraphe 2 (la((disposition facultative »),ou des termes d'une
clause de règlement judiciaire obligatoire par la Cour figurant dans
un traité ou une co~iyention en vigueur.
C'est pourquoi les Etats demandeurs ont invoquéla juridiction de
la Cour surla base de l'effet combinédel'article 7 du Mandat pour le

Sud-Ouest africain et de l'article 37 du Statut de la Cour. S'ils ont
citécette dernièredisposition, qui est en réalité decaractère mécarii-
que, c'est que le tribunal prévu à l'origine pour le règlement des
différendsvenant à s'éleverdans le cadre de l'article 7 du Mandat
était la Cour qui a précédé l'actuelle, à savoir l'ancienne Cour per-
manente de Justice internationale qui a cesséd'exister en 1946.Cette
Cour était également mentionnée dans les clauses juridictionnelles
de nombreux autres actes internationaux. A notre avis, l'effet de

l'article37 du Statut de la Cour actuelle -- et son seul effet pertinent
en l'espèce - a étéde substituer (entre les parties au Statut) la
Cour actuelle à l'ancienne Cour permanente dans tous les cas où,
aux termes d'ccun traité ou rd'] une convention en vigueur », la
Cour permanente aurait été compétente pour connaitre de l'affaire
et statuer sur celle-ci. Les passages pertinents de cet article sont les
. suivants:

(Lorsqu'untraitéouune conventionen vigueurprévoitlerenvoi...
à la Cour permanente de Justice internationale, la Courinternatio-
nale de Justice constituera cette juridiction entre les parties ail
présentStatut. 11

Nous attironsl'attention sur la rédaction semblable de cet article
du Statut et de l'article 36, paragraphe 1,en tant qu'ils visent tous
deux les traités et conventions en vigueur. Cela a une importance
sur laquelle nous reviendrons.
Toutefois il est clair que, quelle que soit l'interprétation correcte

à donner aux mots (un traité ou une convention en vigueur »,
l'article 37 ne peut s'appliquer d'après son texte qu'aux clauses
juridictionnelles d'actes qui sont en droit des traités ou des con-
ventions et qui en tant que tels (c'est-à-dire en tant que traités ou
conventions) sont (cen vigueur 1).Ce n'est que pour les clauses
figurant dans des actes répondant à ces conditions que la Cour
actuelle a été substituée à,l'ancienne Cour permanente.
La première thèse de 1'Etat défendeur est que l'acte pertinent -

le Mandat pour le Sud-Ouest africain - ne remplit ni l'une ni l'autre
de ces conditions, c'est-à-dire qu'il n'a pas le caractère d'un traité
ou d'une convention et que, même s'ila ce caractère, il n'est plus en
vigueur.
154470 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE

It is evident, in any case, that Article 37, however applicable
it may otherwise be, does not and could not, standing alone,
confer jurisdiction on the Court, for on the face of it, it only ap-
plies to cases in which the Permanent Court would have had
jurisdiction. To ascertain whether this would have been so in
the present case, reference must accordingly be made to the
clause which is invoked by the Applicant States as being the
one which provided for recourse to the Permanent Court, namely

Article 7 of the Mandate for South West Africa. The relevant
parts of this provision read as follows:
"The Mandatory agrees that, if any dispute whatever should
arise between the Mandatory and another Member of the League
of Nations relating to the interpretation or the applicationof the
provisionsof the Mandate, such dispute, if it cannot be settled by
negotiation, shall be submitted to the Permanent Court of Inter-
national Justice..''

This provision clearly conditions the obligation in three, or perhaps
four, ways: there must be a "dispute"; this dispute must arise
between the Mandatory and "another Member of the League of
?r:atioils"; it must relate to "the interpretation or ...application of
the provisions of the Mandate"; and, finally, it must be such as
"cannot be settled by negotiation". We stress the word "cannot'?.

The issues arising out of these conditions-whether as actually
formulated by the Respondent State, or as being inherent in the

terminology of Article 7 (stated in the order in which it will be
convenient to deal with them)-are as follows:
I. If there is a dispute, is it a dispute between the Mandatory and
"another Member of the League of NationsJ'-or in other words
have the Applicant States the capacity to invoke Article 7?

2. If the Applicants have such capacity, is there really any ge-
nuine dispute at al1 between them, as such, and the Respondent
State-and what ought to be understood by a dispute for this
purpose;-for instance (inter alia)are the Applicants, as parties to
the present proceedings, also parties to the real dispute which
exists?

3. Ifthe Applicants are not only the parties to these proceedings,
but also the parties to the dispute with the Respondent State, is
this dispute of the kind to which Article 7 relates?
4. Have there been any negotiations at all, properly speaking,
with a view to settling the particular dispute between the Applicants
and the Respondent ?

5. Can it be held that the dispute "cannot" be settled by negotia-
tion ? OP. DISS. COMMUPYEJUGES SPEPYDER ET FITZMAURICE
470
En tout cas il est kvident que l'article 37, quelque applicable
qu'il soit par ailleurs, ne confère pas, et ne peut conférer, à lui seul
compétence à la Cour car d'après son texte il ne s'applique qu'aux

cas où la Cour permanente aurait eu compétence. Donc, pour voir
s'il en aurait été +si en l'espèce, il faut se référerà la disposition
invoquée par les Etats demandeurs comme étant celle qui a prévu
le renvoi à la Cour permanente, à savoir l'article 7 du Mandat pour
le Sud-Ouest africain. TToicile passage pertinent de cette dispo-
sition:

Le Mandataire accepte que tout différend, quelqu'il soit, qui
viendrait à s'éleverentre lui et un autre Membrede la Société des
Nations relatif à l'interprétationou à l'application des dispositions
du Mandat, et qui ne soit pas susceptibled'êtreréglé par des négo-
ciations, soit soumis à la Cour permanente de Justice internatio-
nale...»

Cette disposition soumet nettement l'obligation à trois, ou peut-être
mêmequatre, conditions: il doit y avoir un (différend »;ce différend
doit s'êtreélevéentre le Mandataire et ((un autre Membre de la
Sociétédes Nations n; il doit êtrerelatif (à l'interprétation ou à
l'application des dispositions du Mandat N; et enfin il doit êtretel
qu'il ((ne soit pas susceptible d'êtreréglépar des négociations ».

Nous soulignons les mots (ne soit pas susceptible »:
Qu'elles aient étéeffectivement soulevéespar 1'Etat demandeur
ou qu'elles soient inhérentes àla rédaction de l'article 7,les questions
- que posent ces conditions sont (pourles énumérer dans l'ordre où il
conviendrait d'en traiter) les suivantes:

I. S'ily a un différend,s'agit-ild'un différendentre.le Mandataire
et (un autre Membre de la Sociétédes Nations ))- ou en d'autres
termes les Etats demandeurs ont-ils qualitépour invoquer l'article 7?
2. Si les demandeurs ont qualité pour invoquer l'article 7, existe-

t-il réellement un véritable différend entre eux en tant que tels et
l'État défendeur -- et que doit-on entendre à cette fin par différend?
Par exemple (entre autres), les demandeurs en tant que Parties aux
présentes instances sont-ils également Parties au véritable différend
qui existe?

3. Si les demandeurs'sont Parties non seulement aux présentes
instances, mais encore au différendavec l'État défendeur, ce diffé-
rend appartient-il à la catégorie que vise l'article 7?
4. Y a-t-il eu des négociationsàproprement parler en vue derégler
le différend spécifiqueentre les demandeurs et le défendeur?

5. Peut-on considérer que le différend ((ne soit pas susceptible ))
d'êtreréglépar des négociations?471 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE

We shall consider the various issues that arise in the following
order :
First-the two issues arising on Article 37 of the Statute : is there
a "treaty or convention", and if so, is it "in force" as such?

Secondly-the primary question arising on Article 7 of the Man-
date, namely have the Applicant States the capacity to invoke it ?

Thirdly-the various issues about the .existence of a dispute,
genuinely between the Applicants as such and the Respondent,
and if there is one, as to its character in relation to Article 7.

Faurthly-the ~arious issues about negotiation--has there been
any negotiation of the kind contemplated by Article 7, and if so
can the conclusion be drawn that the dispute "cannot" be settled
by negotiation ?

These four issues or classes of issiies correspond broadly, though
not identically, with the four specific preliminary objections to the
jurisdiction of the Court raised by the Respondent State.

Before we deal with them, however, we find it necessary to say
something about the relevance to these issues and objections, of the
Advisory Opinion about the status of the Mandate for South West
Africa, and related matters, which the Court gave on II July 1950.

III

THE ADVISORY OPINION GIVEN BY THE COURT IN 1950

We are most reluctant to devote any space to the 1950 Opinion,
as we shall cal1it l. We believe that Opinion was wrong in one or
two important aspects, but by no means in all. But this belief
ha not affected Our views in the present case, because we think

that different issues are now involved. We are compelled to make
this clear because, in the first place, the Judgment of the Court is
partly founded on the 1950 Opinion; and secondly, the relevance of
that Opinion was much debated in the arguments of the Parties to
the present proceedings. The Applicants maintained both that the
1950 Opinion was correct in al1 respects and that (though not on
any basis of res jzidicata) it completely and automatically governed

the issues arising in the present proceedings. The Respondent State

This Opinion of the Court, on the first specific question submto it, is
divisible into thrparts: that which deals with Artic2eto 5 of the Mandate,
on each of these two latter articles appearto rest upon quite separateandasoning
distinct grounds.

156 Nous examinerons les différentes questions en cause dans l'ordre
suivant :

Premièrement - Les deux questions que pose l'article 37 du
Statut :existe-t-il ((un traité ou une convention )et, sioui, est-il((en
vigueur ))en tant que tel?

Deuxièmement - La question principale que pose l'article 7 du
Mandat, à savoir: les Etats demandeurs ont-ils qualité pour l'invo-
quer?

Troisièmement - Les diverses questions ayant trait à l'existence
d'un différendopposant réellement lesdemandeurs en tant que tels
et le défendeur, et, si un tel différend existe, à son caractère en
rapport avec l'article 7.

Quatrièmement - Les diverses questions ayant trait aux négo-
ciations - y a-t-il eu des négociationsau sens prévuà l'article 7 et,
si oui, peut-on en conclure que le différend (ne soit pas susceptible ))
d'êtreréglépar des négociations?

Ces quatre questions ou groupes de questions correspondent en
gros, mais pas absolument, aux quatre exceptions préliminaires

d'incompétence qui ont étésoulevéespar 1'Etat défendeur.
Mais, avant de les aborder, nous croyons nécessairede dire quel-
ques mots de la pertinence, en ce qui concerne ces questions et ces
exceptions, de l'avis consultatif rendu par la Cour le II juillet 1950
sur le statut du Mandat pour le Sud-Ouest africain et sur des
questions connexes.

III

L'AVIS CONSULTATIF RENDU PAR LA COUR EN 1950

Nous hésitons beaucoup à traiter de ce que nous appellerons
l'avis de 1950 l.Nous considérons cet avis comme erronésur un ou
deux points importants, mais non pas surtous les points. Toutefois,
cette opinion n'affecte pas nos conclusions en l'espèce car nous
croyons qu'il s'agit aujourd'hui de questions différentes. Si nous
sommes obligésde le préciser,c'est,en premier lieu,que l'arrêtde la

Cour se fonde en partie sur l'avis de 1950; et, en second lieu, que le
caractèrepertinent de cet avis a fait l'objet de longs développements
de la part des Parties au cours de la présente procédure. Les deux
demandeurs ont soutenu que l'avis de 1950est exact àtous égardset
(sans se fonder pour autant sur l'autorité de la chose jugée) qu'il
régit entièrement et automatiquement les questions qui se posent

Sur la première questioposéeàla Cour, cet avis peutse diviser en trois parties:
qui traite de l'article 7. Le raisonnedela Cour sur chacun de ces deux derniers
articles sembleondé sur des motifs toutà fait distinctet séparés.472 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAUKICE
denied this and also adduced material claimed to be new and such
as, had it been available in 1950, would have caused the Court to
find differently. The Applicants, in reply, denied both that the ma-

terial was new, or that it would have had any influence on the views
of the Court.

We regard most of this discussion as having been misplaced.
Some of the issues now arising (those connected with the third
and fourth preliminary objections) did not arise at all, and could
not have arisen, in the course of the 1950 proceedings, which were
not, as these are, contentious proceedings. As regards one of the
central issues arising in1950, namely that of the status of the Man-
date as an international institzltiothe Court in 1950 did little more
than find, on various grounds, that the dissolution of the League of
Kations had not caused the Mandate to lapse, and that despite this
dissolution, the Mandate was still in force. But the Court did not
specifically addressItself to the question of the basis upon which the
hiandate was in force nor, in particular, to whether it was still in

force asa treatyorconvention. In the dispositive of its 1950 Opinion,
the Court did no more, in relation to the present context, than state
that by reason of Article 37 of the Statute, the present Court was
substituted for the former Permanent Court; but both there, and in
the very brief references to Article 37, and to Article 7 of the Man-
date, made in the body of the Opinion, the Court seems to have
assumed the existence of the necessary conditions without going
into that matter. The little that was said provides no realassistance,
and this was necessarily so since no jurisdictional issue of any kind
was before the Court in 1950. Assumptions apparently made
without any reasoning as to, or consideration of, the specific under-
lying issues involved, in an Advisory Opinion directed chiefly to
other matters not involving any concrete jurisdictional question,
clearlv do not constitute a sufficient basis on which to found iuris-
dicti& in subsequent contentious proceedings in which these issues
are no\v directly raised.

In the same way we think that the 1950 finding of the Court,
to the effect that the Assembly of the United Nations was entitled
to exercise the supervisory functions of the former League Council
under Article 6of the Mandate, is equally irrelevant to the present
<<.ceedings, which do not involve any specificissue of "devolution",
inheritance" or "carry overl'-much as these matters have been
discussed in the arguments of the parties. We repeat that the issue
now before the Court is a purely jurisdictional one. The jurisdic-
tion of the Court could not be presumed on any merely devolu-
tionary basis. The existence of Article 37 is alone enough to show
that. The jurisdiction of the Court as successor to the Permanent
Court, was provided for expressly by the combined operation of
.4rticles 36 and 37--or else it does not exist at all. No one contests

157 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 472

en l'espèce.L'État défendeur l'a contesté et il a également produit
des preuves dont il a prétendu qu'elles étaient nouvelles et que,
si ellesavaient étésoumises àla Cour en 1950,ellesl'auraient amenée
à se prononcer différemment. Les demandeurs ont répondu en niant
que ces preuves fussent nouvelles ni qu'elles eussent eu la moindre
influence sur l'avis de la Cour.
Nous considéronsla plus grande partie de ce débat comme hors
du sujet. Certaines des questions soulevéesen l'espèce (cellesqui ont
trait aux troisième et quatrième exceptions préliminaires) ne se sont

pas posées,et n'auraient pas pu se poser, au cours de la procédure
de 1950, qui n'avait pas comme la procédure actuelle un caractère
contentieux. En ce qui concerne l'une des principales questions qui
se posaient en 1950, celle du statut du Mandat en tant qu'institution
internationale, la Cour n'a guère fait plus en1950 que de constater,
pour divers motifs, que la dissolution de la Société des Nations
n'avait pas entraîné la caducité du Mandat et que, malgré cette
dissolution, le Mandat était encore en vigueur. Mais la Cour ne
s'est spécialement occupée ni de la base sur laquelle le Mandat
était en vigueur, ni du point précis de savoir s'il était encore en

vigueur en tant que traité ou convention. Dans le dispositif de son
avis de 1950, la Cour n'a rien fait de plus, en ce qui concerne la
présente espèce,que d'énoncer qu'en raison de l'article 37 du Statut
la Cour actuelle était substituée à l'ancienne Cour permanente;
mais, sur ce point comme pour la très brève mention qu'elle a
dans son avis faite de l'articl37 et de l'articl7 du Mandat, la Cour
semble avoiradmis l'existence des conditions nécessairessansappro-
fondir la matière. Le peu qu'elle ait dit n'aide en rien, et il ne saurait
en êtreautrement puisqu'aucune question ayant trait àla compéten-
ce n'était soumise à la Cour en 1950. Il est clair que des hypothèses
apparemment faites sans aucun raisonnement ni sans aucune étude

sur ce qu'elles impliquaient précisément, dans un avis consultatif
portant essentiellement sur d'autres points ne soulevant pas de
question concrète de compétence, ne constituent pas une base suffi-
sante pour établir la compétence dans une procédure contentieuse
ultérieure au cours de laquelle ces questions sont directement posées.
De même, nous pensons que la conclusion à laquelle la Cour est
parvenue en 1950, et d'après laquelle l'Assembléegénérale desNa-
tions Unies a qualité pour exercer les fonctions de surveillance de
l'ancien Conseil de la Sociétédes Nations aux termes de l'article 6
du Mandat, est également sans pertinence en l'espèce, car il ne
s'agit pas spécifiquement de «dévolution »,de (succession » ni de
((continuation » - quelle que soit l'importance que les Parties ont

donnée àcesnotions dans leurs écritures et plaidoiries. Nous répétons
que la question présentement soumise àla Cour est une pure question
de compétence. La compétence de la Cour ne saurait se présumer
sur la seule base d'une dévolution. L'existence de l'article7 suffità
le prouver. Si la compétence de la Cour en tant que successeur de la
Cour permanente ne se dégagepas expressément de l'effet combiné

157 473 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
that Article37 substitutès the present for the formerCourt, provided'
that the conditions specified in Article37 are fulfilled at the mo-

ment jurisdiction is invoked. The question is are they here ful-
filled? Equally no-one doubts that Article 7 of the Mandate con-
tains an obligation to have recourse to adjudication, provided the
conditions specified in it are fulfilled.ain the question is, are
they?

These are quite different issues, in Ouropinion, from those which
were before the Court in 1950 ,nd accordingly we shall endeavour
to deal with the jurisdictional issues in the present case entirely
on their own merits.

THE FIRST PRELIMINARY OBJECTION

Having regard to the view we take on the third Preliminary
Objection, namely that Article7 was only intended to safeguard the
individual interests of League Members in the Mandated territory,
conferred under the terms of the Mandate, and did not cover dis-
putes about the conduct of the Mandate, much of the discussion
on the first preliminary objection (as also the second) has for us
a certain unreality, since these objections are hardly meaningful,
and are in any event unnecessary, in the context of this case, if
Article 7does not relate to the conduct of the Mandate. Wetherefore
discussthese objections on the assumption that it does, merely
pointing out that a great deal which is obscure regarding these
objections becomes clear on the opposite view, which is ours.

I. The burden of proof. The duty of the Court itself to be satisfied
that jurisdictionis concl+~sivelystablished

In order that Our attitude as to the character of the Mandate,
and in regard to the first Preliminary Objection, should not be
misunderstood, we must begin by recalling that, since the burden
of establishing the jurisdiction of the Court lies on the party
asserting it, and this must be established conclusively, it follows
that it is for the Applicants to show that the Mandate is beyond
reasonable doubt a "treaty or convention in force" for the purposes
of Articles36 and 37 of the Statute. Moreover, quite apart from
any question of onus of proof, a duty lies upon the Court, before
it may assume jurisdiction, to be conclusively satisfied-satisfied
beyond a reasonable doubt-that jurisdiction does exist. If a
reasonable doubt-and still more if a very serious doubt, to put
it no higher-is revealed as existing, then, because of the principle

158 OP. DISS. COMMUNE J'UGES SPENDER ET FITZMAURICE 473

des articles 36 et 37, il n'y a pas compétence. Personne ne conteste
que l'article 37 substitue la Cour actuelle à l'ancienne, sous réserve
que les conditions poséesà l'article 37 soient remplies au moment
où la compétence est invoquée. Il s'agit de savoir si ces conditions
sont remplies en l'espèce. De même, personnene doute que l'article 7
du Mandat contienne une obligation de recourir au règlement
judiciaire, sous réserve que les conditions poséesà cet article soient
remplies. Là encore, il s'agit de savoir si elles le sont.

Cesont là à nos yeux des questions tout àfait différentesde celles
qui ont étésoumises à la Cour en 1950 ;'est pourquoi nous essaye-
rons d'envisager uniquement en elles-mêmes lesquestions de com-
pétence qui se posent en l'espèce.

Tenant compte de l'opinion qui est la nôtre sur la troisième
exception préliminaire, à savoir que l'article 7 était destiné unique-
ment à sauvegarder les intérêtsindividuels des Membres de la
Sociétédans le territoire soumis au Mandat, d'après les termes de
celui-ci, et ne s'appliquait pas aux différendsrelatifs à la conduite
du Mandat, une grande partie de la discussion sur la première ex-
ception préliminaire (de mêmeque la seconde) présente pour nous
un certaincaractère artificiel puisque, dans le contexte de la présente
affaire, ces exceptions n'ont guèrede sens et sont en tout casinutiles
si l'article ne vise pas la conduite du Mandat. C'est pourquoi nous
discutons ces exceptions en supposant qu'il s'y applique, nous

bornant àsignaler qu'une grande partie des obscurités quientourent
ces exceptions s'éclaircissent si l'on adopte le point de vue opposé
qui est le nôtre.

I. Le fardeau dela preuve. Le devoir dela Cour de vérifierà sa
satisfaction quela compétence est établiede façon concluante

Pour éviter que notre attitude quant au caractère du Mandat et
quant à la première exception préliminaire ne soulève de malenten-
du, il nous faut commencer par rappeler que, la Partie qui invoque
la compétence de la Cour ayant la charge de la démontrer d'une
manière concluante, il s'ensuit qu'il appartient au demandeur de
montrer que le Mandat est sans doute raisonnable un «traité ou une
convention en vigueur ))aux fins des articles 36 et 37 du Statut.
Au surplus, et en dehors de toute question de fardeau de la preuve,

la Cour, avant d'admettre sa compétence, doit êtreconvaincue de
façon concluante - convaincue sans doute raisonnable - que
la compétence existe bien. S'il se révèleun doute raisonnable -
et à plus forte raison, pour dire le moins, s'il existe un doute très
sérieux -, alors, étant donné que le principe du consentement est
158474 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
of consent as the indispensable foundation of international jurisdic-
tion, the conclusion would have to be reached that jurisdiction is
not established. In short, the doubt would, according to the normal
canons for the interpretation of jurisdictional clauses, have to be
resolved against the existence of jurisdiction.

In what follows, we reach the conclusion that, while there may
be room for some, even considerable, argument, the better view is
that the Mandate did not have the character of a treaty or conven-
tion; that Article 7 of the Mandate cannot properly be considered
in isolation from the rest of the Mandate as having some sort of
treaty character of its own, independently of the instrument it is
embodied in; and that even if either the Mandate, or Article 7
separately considered, had such a character, neither is any longer
in force on a treaty basis. We wish nevertheless to make it quite
clear that Our final conclusion on the first preliminary objection
does not rest upon these factors alone. It rests also upon the simple
fact that no onus lies upon the Respondent State to disProvethe
past and present treaty character of the Mandate or of Article 7.
The onus lies upon the Applicants of establishing that character
beyond reasonable doubt, since this goes to the root of jurisdic-

tion. The duty lies equally upon the Court of being aflirmatively
satisfied to that effect.

In Ouropinion, an examination of the,record in these proceedings,
and of the oral arguments presented, shows that even on the most
favourable assessment of the considerations that can be adduced
<< support of the view that the Mandate or Article 7 was and is a
treaty or convention in force", very serious doubt-to Say the
least of it--must remain as to whether this really is the case.
On this ground alone, the first Prelirninary Objection should be
held good, even if there were not more positive reasons for doing so.

2. Was the Mandate a treaty or convention?
(a) Legal nature of a treaty or convention

Before considering the character of the Mandate, which will
involve stating, as briefly as we can, the salient features of the pro-
cess by which it was brought into being, there are some preliminary
points of law that must be referred to.
We do not adopt a narrow or doctrinaire view as to what is corn-
prised by the term "treaty or convention". We are not-or at least
sowe hope-guilty of the solecisms either of supposing that treaties
or conventions are only what are actually labelled as such, or of

159 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 474

la base indispensable de la compétence internationale, il faudrait
arriver à la conclusion que la compétence n'est pas établie. Bref,
d'après les règles normales d'interprétation des clauses de juri-
diction, le doute devrait se résoudre à l'encontre de l'existence de la
compétence.

Dans les passages qui suivent, nous arrivons à la conclusion que

s'ily a place pour une discussion, et mêmeune discussion serrée,
l'opinion qui doit prévaloir est que le Mandat n'avait pas le caractère
d'un traité ou d'une convention; qu'on ne saurait légitimement
examiner l'article 7 du Mandat en l'isolant du reste du Mandat pour
lui attribuer un certain caractère conventionnel propre, indépen-
damment de l'acte dans lequel il est incorporé; et que, mêmesi le
Mandat ou l'article 7 pris séparémentavaient ce caractère, ni l'un
ni l'autre ne sont plus aujourd'hui en vigueur en tant que traité.
Nous désironscependant préciser tout à fait clairement que notre
conclusion finale sur la première exception préliminaire ne repose
pas su: ces seuls facteurs. Elle repose également sur le simple fait
que 1'Etat défendeur n'a aucune obligation de réfuterle caractère

conventionnel passé et présent du Mandat ou de l'article 7. C'est
au demandeur qu'il appartient d'établir sans doute raisonnable
ce caractère puisque cela touchè àla racine mêmede la compétence.
La Cour a également le devoir d'êtreconvaincue en ce sens affir-
mativement.
A notre avis, l'examen du dossier de la procédureet des plaidoiries
prononcéesmontre que, mêmedans l'appréciation la plus favorable
des considérations qu'on peut développer à l'appui de la thèse que
le Mandat ou l'article 7 étaient et sont«un traité ou une convention
en vigueur »,des doutes très sérieux - pour dire le moins --
demeurent sur le point de savoir si tel est réellement le cas. Pour ce
motif seul, il faudrait retenir la première exception préliminaire,
mêmes'il n'y avait pas d'autres raisons plus positives de le faire.

2. Le Mandat était-ilztn traitéou une convention?

a) Le caractèrejuridique d'un traitéou d'une convention
Avant d'examiner le caractère du Mandat, ce qui nous obligera à
énoncer aussi brièvement que possible les traits saillants de la
procédure qui lui a donné naissance, il faut se référerà certains
points de droit préliminaires.
Notre point de vue sur ce qu'il faut entendre par lestermes « traité
ou convention )n'est ni étroit ni doctrinaire. Nous ne sommes pas

coupables - tout au moins nous l'espérons - des solécismes con-
sistant soit à supposer que seuls peuvent êtreconsidéréscomme
159475 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE

confusing an international agreement as an act, with the particular
instrument in which it is embodied. We give the widest connotation
to the notion of treaty or convention as covering everything that

constitutes or embodies an international agreement, whatever its
form, style or nomenclature-any agreement, forma1 or informal.
But while international law takes, and rightly takes, a liberal
view of what constitutes a treaty, convention or other form of
international agreement, the notion is not an unlimited one. It is
not synonymous, as the Judgment of the Court rnight almost lead

one to suppose, with international acts and instruments generally.
Thus, in its final draft on the "Conclusion, Entry into Force and
Registration of Treaties" completed earlier this year (Document
A/CN. 41148 of 3 July 1962) ,he International Law Commission
of the United Nations adopted the following definition of a treaty,

with which we associate ourselves:

" 'Treaty' means any international agreement in written form,

whether embodiedin a singleinstrument or in two or morerelated
instruments and whatever its particular designation Fere followsa
list of some dozen possible appellations including of course 'con-
vention', 'agreement' and 'declaration'],concludedbetween two or
more States or other subjects of international law and governed
by international law."

It will be seen that this concept of what constitutes a treaty,
though wide, isnot a limitless one. We drawattention in particular,
in the context, to the phrases "in written form" and "concluded
between two or more States or other subjects of international
1aw-l. Thus a verbal agreement, while it might be held binding

(see the Ihlen Declaration in the Eastern Greenlandcase, P.C.I.J.

to Our view, the Mandate for South West Africa would otherwishave been in the contrary
nature of a treaty or conventionan objection to this conclusion could be based
on the characterof the parties to the Mandate agreement (if it was one). As we
shall demonstrate later, the only entity other than the Mandatoryitself which
could have rankedas a party would have been the League of Nations or the Council
of the League acting for it. But is by no means certain that in 1920 (when the
Mandate was formulated) international legal opinion would have accepted the
conclusion arrived at by the present Court in the Injuries to United Nations Servants
case (Reports 1949, p. 174)that internationalorganizations could have a legal
personalityseparate and distinct from that of their Members, and rank as entities
"subjectsof internationallaw". If not, then, considered in the light of contempo-
raneous legal thinking, the Mandate could onlyhave ranked as a treaty or conven-
tion if the parties to it were States. Ouis that thonly State which could have
been a party to the Mandate, if it was a treaty or convention, was the Mandatory,
and this would mean (on the above premises) that theMandate was not a treaty
or convention at all, because not concluded between "twoor more States". We
deal with this further later. OP. DISS. COMM.UNE J.UGES SPENDER ET FITZMAURICE
475
traités ou conventions les actes effectivement dénommés tels, soit à

confondre l'accord international en tant qu'acte avec l'instrument
particulier dans lequel il est inscrit. Nous attachons à la notion de
traité ou de convention la portée la plus large, l'étendant à tout ce
qui constitue ou incorpore un accord international, quelsqu'en soient

la forme, le style ou le titre--à tout accord qu'il soit solennel ounon.
Mais, tandis que le droitinternationaladopte àjuste titre un point
de vue libéral sur ce qu'il faut entendre par traité, convention ou
autre forme d'accord international, cette notion n'est pas illimitée.
Elle n'est pas synonyme, comme l'arrêtde la Cour pourrait presque

conduire à le supposer, de la notion d'actes et instruments inter-
nationaux en général.C'est ainsi que, dans le projet final sur la
« Conclusion, l'entrée envigueur et l'enregistrement des traités »qui
a étécomplétéau début de la présente année (doc. A/C.N. 41148 du

3 juillet 1962), la Commission du droit international des Nations
Ùnies a adopté la définition suivante du mot traité, à laquelle nous
nous associons :

«L'expression « traité »s'entend de tout accord international en
forme écrite, qu'ilsoit consignédans un instrument unique ou dans
deux ou plusieurs instruments connexes, et quelle que soit sa
dénominationparticulière[iciseplace l'énumération d'une douzaine
dedénominationspossiblescomprenant bienentendu : «conventipn »,
« accord » et « déclaration »], conclu entre deux ou plusieurs Etats
ou autres sujets du droit international et régipar le droit inter-
national. ))

On voit que cette notion de ce qu'il faut entendre par traité,
quoique large, n'est pas illimitée. Nous signalons en particulier dans

le contexte*les phrases « en forme écrite » et ((conclu entre deux ou
plusieurs Etats ou autres sujets du droit international »l. C'est
ainsi qu'un accord verbal, quoique susceptible d'être considéré
comme obligatoire (voir par exemple la déclaration Ihlen dans

l Il faut noterà titre subsidiaire - et c'est pourquoi nous le mentionnons en
note - que, si,contrairementà notre opinion, le Mandat poule Sud-Ouestafricain
avait eu par ailleurs la nature d'utraité ou d'une convention, on pourrait fonder
une objection à cette conclusion en invoquant le caractère des partiesà l'accord
de Mandat (si c'en était un). Comme nous le démontrerons plus loin, la seule
entité autre que le Mandataire lui-même qui aurait pu avoir le rang de partie
aurait été la Société des Nations, ou le Conseii de la Sociétéagissant pour celle-ci.
Mais il n'est nullemencertain qu'en 1920 (lorsquele Mandat a étédéfini) l'opinion
juridique internationaleeût accepté la conclusion à laquelle est arrivée la présente
Cour dans l'affaire des Dommages subis au service des hTations U~zies(Recueil I949,
p. 174)~ d'après laquelle les organisatiointernationales peuvent avoir une per-
sonnalité juridique séparée et distincte de celle de leurs membret avoir le rang
d'entités ((sujets du droit internationIIPar conséquent, à moins d'envisager le
Nandat à la lumière des conceptions juridiques contemporainescelui-ci n'aurait pu
avoir la nature d'un traité ou d'une conventionque si les parties avaienétédes
États.A notre avis, le seul État qui aurait pu être partie au Mandat, s'il s'agissait
d'un traité ou d'une convention, était le Mandataire,ce qui signifierait(sur la
base des prémisses qui précèdent) que le Mandat n'était nullement un traité ou
une convention, parce qu'il n'avait pasété concl«entre deux ou plusieurs Étatsr.
Nous y reviendrons pIus loin.476 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER .4ND FITZMAURICE
Reports, Series A/B, No. 53, at pp. 69 et sep.), would not be a
treaty or convention. Nor zcfoulda statement (e.g. of intention)

made, or an assurance given, in the course of, say, a speech at an
international conference or assembly, be a treaty or convention. A
declaration containing a unilateral assumption of obligations would
not be an international agreement at all, since an international
agreement must be concluded between "two or more" parties.

The quasi-treaty character which "optional clause" declarations
made under paragraph 2 of Article 36 of the Statute are sometimes
said to possess, would arise solely from the multiplicity of these
declarations and their interlocking character, which gives them
a bilateral or multilateral aspect. A single such declaration, if it

stood quite alone, could not be an international agreement. Op-
tional clause declarations are clearly not covered by the words
"treaties or conventions" in paragraph I of Article 36, or there
would have been no need for paragraph 2, except perhaps forreasons
ofconvenience oremphasis. If aState making a declaration ofwilling-
ness to accept the jurisdiction of the Court compulsorily for cer-
tain classes of disputes were held thereby to have entered into a
treaty or convention, a dispute of the class specified would rank
as a matter "specially provided for" in "treaties or conventions in
force" within the meaning of paragraph I. We have already drawn
attention to the similarity of wording between Article 37 of the
Statute and Article 36, paragraph 1,in the reference to treaties

or conventions in force. The term was clearly intended to mean
the same in both places, and we cannot see why it should be given
a more extended meaning in the one than in the other. This will
have a further significance when we come later to consider whether
Article 7 of the Mandate could be detached from it and considered
as an isolated declaration having treaty character.

The foregoing points involve some of the most important ques-
tions of law arising on this part of the case. The Judgment of the
Court in effect identifies the idea of an international agreement

with any act or instrument embodying, or giving rise to, interna-
<<onal obligations, or which contains or involves an international
engagement". This we believe to be a fallacy, as the above exam-
ples show, and others could be adduced. To take again the case
of unilateral engagements, thcse may as already mentioned have
a quasi-treaty character when they interlock with one another, or
interlock with provisions of an existing treaty (as in certain of the
Ilfinorities cases). Othenvise they must necessarily lack the element
of the bilateral or multilateral essential to give anything treaty
character..l'affaire du Groënland oriental, C. P. J. I., SérieA/B no 53, pp. 69
etseq.),ne constituerait pas un traité ou une convention. Il elzserait
de même par exempled'unedéclarationd'intention ou d'une assurance
contenue dans un discours prononcédevant une conférenceou une
assembléeinternationak. Une déclaration comportant l'acceptation
unilatérale d'obligations ne serait en rien un accord international,
puisqu'il faut qu'un accord international soit conclu entre ((deux

ou plusieurs » parties.
Le caractèrequasi conventionnel qu'on attribue parfois aux décla-
rations selon la «disposition facultative »formulées enapplication de
l'article 36, paragraphe 2,du Statut résulterait uniquement de la
multiplicité de ces déclarations et de leur engrènement mutuel, qui
leur confèreun aspect bilatéral ou multilatéral. Lne seule déclaration
de ce genre, prise absolument isolément, ne saurait constituer un
accordinternational. Il est clair que les déclarations de la dispo-
sitionfacultativene rentrent pas dans lestermes «traités et conven-
tions » du paragraphe I de l'article 36, sans quoi le paragraphe 2

eût été inutile, sauf peut-être pour des raisons de commodité ou
d'accentuation. Si l'on devait considérer qu'un Etat qui a déclaré
l'intention d'accepter la juridiction obligatoire de la Cour pour
certaines catégories de différendsaurait de la sorte conclu un traité
ou une convention, un différend relevant des catégories spécifiées
ferait partie des cas (spécialement prévus » dans les « traités et
conventions en vigueur » au sens du paragraphe I. Nous avons
déjà attiré l'attention sur la similitude entre les termes de lJar-
ticle 37 du Statut et ceux de l'article 36, paragraphe 1, à propos

des traités ou conventions en vigueur. Il est clair que l'expres-
sion devait avoir le même sensdans les deux cas et nous ne pou-
vons coniprendre pourquoi on lui donnerait un sens plus large
dans un cas que dans l'autre. Il s'en dégageraune autre conséquence
lorsque nous examinerons plus loin si l'on peut détacher l'article 7
du Mandat et le considérer comme une déclaration isoléede carac-
tère conventionnel.
Les questions qui précèdentposent quelques-uns des problèmes de
droit les plus importants soulevés par cette partie de l'affaire.

L'arrêtde la Cour a pour effet d'identifier la notion d'accord inter-
national avec tout acte ou instrument qui incorpore des obligations
internationales, ou qui donne lieu à de telles obligations, ou qui
contient un (engagement »international ou s'y rattache. A notre
avis, il y alà une erreur, comme le montrent les exemples ci-dessus,
et l'onpourrait en fournird'autres. Pour reprendre le cas des engage-
ments unilatéraux, ceux-ci peuvent, comme nous l'avons déjà dit,
avoir un caractère quasi conventionnel quand ils s'engrènent les uns
dans les autres ou qu'ils s'engrènent dans les dispositions d'un traité

existant (commecefut le cas dans certaines des affaires de Minorités) ;
faute de quoi, il leur manque nécessairement l'élémentbilatéral OU
multilatéral essentiel pour donner à une disposition quelconque un
caractère conventionnel.477 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
These are merely some examples. In brief, the assumption that it
suffices if an international obligation exists, is to beg the whole
question at issue, and to assume what has to be demonstrated;
for no one has ever contested that the Mandate gave (and so long
as it continues in force as an institution gives) rise to international
obligations. But that does not of itself make it a treaty, convention

or other form of international agreement. It cannot be too strongly
emphasized that the test is not, or is not merely, the creation
of international obligations, but thecharacterof the act or instrz,~ment
that givesthoseobligationstheir legalforce.This is the essential point
which, in relation to the Mandate for South West Africa, has to be
investigated in this part of the case.
Nor, as we said earlier, and as we believe is evident, are we
making the elementary mistake of confusing or identifying the
instrument embodying or evidencing an international act ,with the
act itself. Although it will frequently be convenient to speak of the
instrument that embodied the Mandate for South West Africa as
"the (or as being the) llandate", we shall not thereby be meaning
that the Mandate consists'of the original piece of paper on which it
was written out in Geneva and which was deposited in the Archives
of the League of Nations on December 17, ~gzo. What we under-
standbythe Mandate isnot this piece of paper, but the international

act that gave rise to it, namely, in Our view, the Resolution of the
Council of the League of the same date. What hasto be investigated
is the nature of this Resolution and ;vhetlier it had a treaty or
conventional character.

Finally, before we pass on to this investigation, we wish to refer
to evidence contemporary with Articles 36 and 37 of the Court's
Statute in order to show that, quite apart from the legal principles
we have been discussing, and others we shall corne to later-as also
the normal rules of legal interpretation-it could not be permissible
to read the term "treaties or conventions" in these Articles as
having a connotation more extensive than that of international
agreements; for this evidence shows that when something wider and
more inclusive than instruments of a conventional character was
intended, this could be and was indicated in terms. For instance,
Article 80, paragraph 1, of the Charter, upon which so much reliance

has been placed by the Applicants in this case, states (inter alia)
that nothing in Chapter XII of the Charter "shall be construed ..to
alter in any manner ...the terms of existing international instru-
ments...", etc. (italics ours).Indeed, this phrase may welI have been
employed in Article 80 expressly with the Mandates in mind (inter
alia). Had wording similar to that italicized inthis passage been used
in Articles36 and 37, no doubt would have existed that the Mandate
was covered, whatever view might be taken as to the cliaracter of
that act or instrument. Similarly, in the United Nations Assembly
Resolution of February 12,1946, providing for the transfer of certain
162 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 477
Ce sont là de simples exemples. En résumé,l'idée quecela suffit,
s'ilexiste une obligation internationale, est une pétition de principe

qui présupposece qu'il s'agit de démontrer, car nul n'a jamais con-
testéque le Mandat ait donnélieu (et, tant qu'il demeure en vigueur
en tant qu'institution, donne lieu) à des obligations internationales.
Maiscela ne suffit pas àen faire un traité ou une convention ou toute
autre forme d'accord international. On ne saurait souligner trop
énergiquement que le critère n'est pas, ou n'est pas seulement, la
création d'obligations internationales, mais le caractèredeL'acteou de
I'instrument qui donne à ces obligations leur valeur juridique. Tel
est le point essentiel qu'il faut examiner danscette partie de l'affaire
relativement au Mandat pour le Sud-Ouest africain.
Il nous semble d'ailleurs évident, comme nous l'avons dit plus
haut, que nous ne commettons pas l'erreur élémentaire deconfondre
ou d'identifier l'instrument qui incorpore un acte international ouqui

en constitue la preuve avec cet acte lui-même. Bienqu'il soit souvent
commode de parler de l'instrument qui incorpore le Mandat pour le
Sud-Ouest africain comme du ((Mandat » (ou comme étant ((le
Mandat »), nous n'entendons pas signifier par là que le Mandat
consiste dans le morceau depapier original sur lequelila été transcrit
à Genèveet qui a étédéposéaux archives de la Sociétédes Nations
le 17 décembre 1920. Ce que nous entendons par le Mandat n'est
pas ce morceau de papier, mais l'acte international qui lui a donné
naissance, à savoir, selon nous, la résolution du Conseil de la Société
des Nations du même jour.Ce qu'il faut vérifierc'est la nature de
cette résolution pour voir si elle avait le caractère d'un traité ou
d'une convention.
Enfin, avant d'en passer à cet examen, nous entendons faire état
de preuves contemporaines aux articles 36 et 37 du Statut de la Cour

pour montrer qu'en dehors des principes de droit que nous avons
discutés et d'autres auxquels nous viendrons plus loin - comme
aussi des règles normales d'interprétation juridique - il n'est pas
permis d'interpréter les termes «traités ou conventions » dans ces
articles comme ayant une portée plus large que celle d'accords
internationaux, car ces preuves montrent que, lorsqu'on a eu en vue
quelque chose de plus large et de plus étendu que les instruments
de caractère conventionnel, il était possible de l'indiquer expressé-
ment et que cela a étéfait. Par exemple, l'article 80, paragraphe 1,
de la Charte, que les demandeurs en cette affaire ont si souvent
invoqué, déclare(entre autres) (aucune disposition du présent cha-
pitre ne sera interprétéecomme modifiant ...en aucune manière ...
les dispositions d'actes internationaux en vigueur ..» (les italiques

sont de nous). Il se peut mêmefort bien que cette formule ait été
expressément employée à l'article 80 pour viser notamment les
Mandats. Si les articles36 et 37 s'étaientservis d'une rédaction Sem-
blable à celle qui est marquée en italique dans ce passage, il n'aurait
pas été douteux que le Mandat était visé,quelque opinion que l'on
pût avoir sur le caractère de cet acte ou de cet instrument.De même, 478 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZRIAURICE
League assets and the assumption of certain League functions, that
part which related to the possible transfer of political functions, in-

cluding such functions as the supervisory functions of the League
Council under Article 6 of the Mandate (though it did not actually
transferthese, or any other political functions, nor were any assumed
by the United Nations) was styled, and referred to as "treaties,
international conventions, agreements and otheri+zstrumentshaving
a political character" (italics ours). Here again, if some siniilar
phrase, such as "treaties and other international agreements and
instruments", had been employed in Article 37, no doubt would
have existed.

These facts, and the principle of consent as the basis of interna-
tionaljurisdiction, make it legally inadmissible as against the Man-
datory to interpret the words "treaty or convention" in Article 37
as if it had a wider extension, and in particular as if it covered any
instrument containing an adjudication clause, irrespective of the
conventional character of that instrument. It is therefore necessary
to establish strictly that the Mandate has that character.

We recognize in this connection that it may be tempting to
regard an instrument containing an adjudication clause (particu-
larly one worded like Article 7-"The Mandatory agrees ...",etc.)
as being pro tanto of a conventional character. We do not however
think it possible or legitimate to detach and isolate one provision

of an instrument, ascribe a treaty character to it and then, on that
basis, deem a similar character to be thereby imparted to the whole
instrument. Article 7, standing on its own, could not be a "treaty or
convention" for the purposes of Article 37 of the Statute, for an
adjudication clause, standing on its own, and apart from the context
in which it occurs, is meaningless and can have no real existence.
It could not be interpreted, and certainly could not be applied in
isolation. The fact that it is in the instrument may indeed be a
pointer to the character of the latter, may afford some evidence as
to the nature of the instrument: but that is all. Moreover, it would
seem that if one did detach Article 7 from the rest of the Mandate,
it would then assume the character of a unilateral declaration in-

volving a unilateral assumption of obligation, since the Mandatory
alone gave the undertaking. Unilateral declarations may contain
undertakings, and can certainlycreate valid international obligations;
but, asnoted above, they do not come within the category oftreaties,
conventions or other fornis of international agreements, since they
have no bilateral charzcter.

With the above explanations of Our approach in regard to some
of the principal legal factors involved in this part of the case-

163 dans la résolution de l'Assemblée desNations Vnies du 12 février
1946 qui prévoit le transfert de certains avoirs de la Société des
Nations et la reprise de certaines fonctions de celle-ci, la partie qui
vise la possibilitéde transférer les fonctions politiques, y comprisdes
fonctions comme cellesde surveillance par le Conseildela Société aux
termes de l'article 6 du Mandat (bien que la résolutionne les ait pas
effectivement transférées, non plus que toutes autres fonctions
politiques, ni que les Nations Unies n'aient repris aucune de ces
fonctions), était rédigéede manière à se référer aux ((traités,
conventions, accords et autres instruments internationaux de carac-

tère politique» (les italiques sont de nous). Ici encore, si on avait
employé dans l'article 37 quelque formule semblable, telle que
((traités et autres accords et instruments internationauk », il n'y
aurait pas eu de doute.
Ces faits, ainsi que le principe du consentement comme base
de la compétence internationale, ne permettent pas juridiquement
d'interpréter àl'encontre du Mandataire les mots (traité ou conven-
tion ))dans l'article 37 comme s'ils avaient un sens plus large et
en particulier comme s'ils visaient tout instrument contenant une
clause de juridiction, indépendamment du caractère conventionnel
de cet instrument. Il est donc nécessaire d'établir strictement

que le Mandat présente ce caractère.
A ce point de vue, nous reconnaissons qu'on peut êtretenté de
considérer qu'un instrument qui contient une clause de juridiction
(en particulier s'il est rédigé commel'article 7 - «le Mandataire
. accepte ...» etc.) présentepro tanto un caractère conventionnel. Mais
nous ne croyons pas possible ou légitime dedétacher une disposition
d'un instrument et de l'isoler, de lui attribuer un caractère conven-
tionnel, puis, surcette base, de considérerque le mêmecaractère est
ainsi attribué à l'instrument tout entier. Pris isolément, l'article 7
ne pourrait pas être cun traité ou une convention ))aux fins de
l'article37 du Statut, car une clause de juridiction prise isolément

et en dehors du contexte où elle figure n'a pas de signification et ne
peut avoir d'existence réelle.Elle ne saurait s'interpréter et ne peut
certainement pas s'appliquer isolément. Le fait qu'elle figure dans
l'acte peut sans doute fournir une indication sur le caractère de ce
dernier et peut dans une certaine mesure témoigner de la nature de
l'instrument, mais c'est tout. Au surplus, il semble que si l'on
détachait l'article7 du reste du Mandat il présenterait alorsle carac-
tère d'une déclaration unilatérale entraînant l'acceptation unilaté-
rale d'une obligation, puisque l'engagement émanait du Mandataire
seul. Les déclarations unilatéralespeuvent contenir des engagements
et peuvent certainement créer des obligations internationales vala-
bles. Mais, comme nous l'avons notéplus haut, elles ne rentrent pas

dans la catégoriedes traités, conventions ou autres formes d'accords
internationaux puisqu'elles n'ont pas de caractère bilatéral.
Ayant donné les explications qui précèdentsur notre point de vue
concernant quelques-uns des principaux facteurs juridiques qui JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
479
others will be leftfor later consideration-we proceed to a considera-
tion of the Mandate itself.

(b) The Mandate System

The various mandated territories were al1 territories in Africa,
the Middle East or the Pacific, sovereignty over wliich was renoun-

ced after the First World War by Germany or Turkey. But before
considering what became of them, and in particular of German
South West Africa, it is, we think, essential to distinguish clearly
between the Mandates System, and the individual Mandates and
their terms. Failure to do this has caused much confusion in this case.
The former (the System) was the creation of Article 22 of the Cove-

nant of the League of Nations. The latter, the Mandates themselves,
were not. The principal functions performed by Article 22 were (a)
to specify the general character and purposes of the System; (b) to
distinguish between the various classes of Mandates ("A", "B" and
"C" as they came to be called) setting out in broad outline what

would be necessary in each type of case, in order to safeguard the
interests of the mandated territory and its inhabitants l; and (c)
to set up certain machinery to supervise the administration of the
individualMandates: thus reports were to be rendered by Manda-
tories to the Council of the League, and a Permanent Mandates
Commissionwas to be constituted to receive these reports and advise

the Council "on all matters relating to the observance of the Man-
dates''.

But Article 22 did not itself confer any Mandates, appoint any
Mandatories, or define the terms of any Mandates. This was done
aliter, as will be seen. The remaining features of Article 22 that are

of especialimportance in the present context were as follows:

(1) It indicated that the Mandates were to be exercised by the
Mandatories "on behalf of the League".
(2) It stated that the "well-being and development" of the peoples

of the Mandated terntories formed "a sacred trust of civilization"

The "A" Mandates related to countries in the Middle East whose existence as
independent nations could provisionally be recognizedand which needed only
administrativeadvice and assistance from the selectedMandatory. The "B"
Mandates relatedto less advanced territones Central Africa which might event-
ually attainindependence, but for the administrationof which the Mandatory
must meanwhile be responsible.The "C" Mandates related to South WestAfrica
and certain Pacific territoriwhich could "be best administered ..as integrai
portions" of the Mandatory's territoand under its laws. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAUKICE
479
entrent en cause dans cette partie de l'affaire - d'autres sont

réservés pour un examen ultérieur--, nous en arrivons à l'examen
du Mandat lui-même.

b) Le système desMandats

Les divers territoires sous Mandat étaient tous des territoires
situés en Afrique, au Moyen-Orient et dans l'océan Pacifique à la
souveraineté desquels l'Allemagne ou la Turquie avaient renoncé

après la première guerre mondiale. Mais, avant de voir ce qu'il est
advenu de ces Mandats et en particulier du Mandat pour le Sud-
Ouest africain allemand, nous croyons essentiel d'établir une nette
distinction entre le système des Mandats d'une part et les Mandats

et leurs dispositions de l'autre. C'est en ne faisant pas cette distinc-
tion que l'on a créébeaucoup de confusion en l'espèce.Le système
des Mandats a étécréépar l'article 22 du Pacte de la Société des
Nations. Mais il n'en a pas étéde mêmedes Mandats proprement

dits. L'article 22 avait principalement pour objet: a) d'énoncerles
caracrères et les buts généraux dusystème; b) de distinguer entre
les différentstypes de Mandats («A », (B ))et ((C », ainsi qu'on les
a appelés)et d'énoncer d'une manière généralc ee qui serait néces-

saire dans chaque cas en vue de protéger les intérêtsdu territoire
sous mandat et de ses habitants l; c) d'établir une procédure de
contrôle de l'adniinistration des divers Mandats: ainsi, des rapports
devaient êtreenvoyéspar les Mandataires au Conseildela Société des

Nations et une Commission permanente des Mandats devait être
chargée de recevoir ces rapports et de donner au Conseil son avis
((sur toutes questions relatives à l'exécution desmandats 1).
Mais l'article 22 ne conférait par lui-mêmeaucun Mandat, ne

nommait aucun Mandataire et ne définissait les termes d'aucun
Mandat. Ainsi qu'on le verra, cela devait être faitpar ailleurs. Les
autres aspects del'article 22 qui sont particulièrement importants en
l'espècesont les suivants:

I. Il indiquait que les Mandats devaient êtreexercés par les
Mandataires (au nom de la Société ».

2. Il énonçait que (le bien-êtreet le développement )des peuples

des territoires sous Mandat formaient (une mission sacréede civili-

l Les Mandats (A Bconcernaient les pays du Moyen-Orient dont l'existence
comme nationsindépendantespouvait êtrereconnueprovisoirement et qui n'avaient
besoin que des conseils et de l'aide du Mandataire pour guider leur administration.
Les Mandats rB )concernaient les territoires d'Afrique centrale moins développés
qui pourraient en fin de compte devenir indépendants mais dont le Mandataire
devait assumer l'administration en attendant.Les Mandats (C x concernaient le
Sud-Ouest africain et certains territoiresdu Pacifique qui ne pouvaient «être
mieux administrées que sous les lois du Mandataire,comme une parie intégrante
de son territoire1.

164 and that "securities for the performance of this trust should be

embodied in this Covenant" (our italics).

(3) It provided (paragraph (8) of Article 22) that the "degree of

authority, control, or administration" to be exercised by any Man-
datory should, "if not $reuiously agreedzi$on by the Membevs of the
League" (our italics),be "explicitly defined in eachcaseby the Coun-
cil" (our italics).

Before passing on to the Mandates themselves, it is convenient to
comment in particular on head (2) above. The "securities" (or
guarantees or safeguards as they are variously called) for the
performance of the sacred trust were to be embodied in the Cove-

nant itself. The implication of this, according to normal principles of
interpretation, was that any measure, obligation, etc., which was
not provided for in the Covenant, could not rank as, or have the
status of a "security" for the purposes of Article 22-01. in other
words it could not be considered as something essential to the func-

tioning of the Mandates System as conceived of in Article 22.
Moreover, Article 22 didnot confer on the Council of the League any
authority to add to the securities specified inthat Article. The Coun-
cil could, in effect, under paragraph 8 of Article 22, define the terms
of particular Mandates and thereby impose obligations on the

Mandatory, but not so as to give these the status of a "security",
unless they were already specified as being securities in some pro-
vision of the Covenant.
These "securities" were of course set out in Article 22 itself.
Certain paragraphs made provision, inter alia, for the avoidance of

abuses such as the slave trade, the arms and liquor traffic, for
demilitarisation, and so on. But the chief security or safeguard
consisted in the provision made for reporting, and for the super-
visorgr functions to be exercised by the Permanent Mandates
Commission and the League Council.

Nowhere in Article 22, or elsewhere in the Covenant l, is any
corresponding provision made for what (though in our view errone-
ously 2, has been called "judicial supervision" in respect of the

lArticle14 of the Covenant providedfor the establishmentof a Permanent Court
of International Justice, but (apartfrom an advisory jurisdiction in relationto
the Council and Assembly of the League) it was to be competent only to hear
lished no compulsory jurisdictioneither in respect of Mandates or anythingselse.
Any such compulsory jurisdiction had to be established specially. In the case of
the Mandates, an obligation on thepart of the Mandatory to submit to compulsory
jurisdiction was not created by the Covenant, but by clauses of the various in-
dividual Mandate instruments.
In Our viéw "supervision" is not a judicial function except where the law
specifically entrusta supervisory function to the Courts, as mights be the case
for instance, inthe domestic field, where the welfare of infants and minors, or
of persons of unsound mind is concerned. In contentious proceedings such as
alone could take place on the basis of Article7 of the Mandate for South West
Africa, the function of the Court is to determine a specific dispute-eminently
judicial, not supervisory function.

165 sation 1)et qu'il convenait (d'incorporer dans le présentPacte des
garanties pour l'accomplissement de cette mission ». (Les italiques
sont de nous.)

3. Il disposait en son paragraphe 8 que, «si le degréd'autorité de
contrôle ou d'administration » à exercer par un Mandataire n'avait
pas ((fait l'objetd'une convention antérieure entre les Membres de la
Société »,il serait expressémentstatué sur cespoints par le Conseil ))

(les italiques sont de nous).
Avant d'en venir aux Mandats eux-mêmes. ilconvient de traiter

en Particulier du point 2 ci-dessus. Les « »(ou assurances,
ou sauvegardes, ainsi qu'on les appelle parfois) pour .l'accomplisse-
ment de la mission sacréedevaient êtreincorporées dans le Pacte
même. Il faut en déduire, d'après les principes d'interprétation

normaux, que toutes les mesures, obligations, etc., qui n'avaient
pas étéprévuesdans le Pacte ne pouvaient faire partie des « garan-
ties » aux fins de l'article 22, ni avoir le statut de telles ((garanties ))
- en d'autres termes, elles ne pouvaient être considérées comme
quelque chose d'essentiel au fonctionnement du système des Man-

dats ainsi que le concevait l'article 22. Au surplus, l'article 22 ne
donnait pas au Conseil de la Société le pouvoird'ajouter aux garan-
ties énoncéesdans cet article. En fait, le Conseilpouvait, aux termes
du paragraphe 8 de l'article 22, statuer sur les termes des Mandats

.et imposer par là desobligations aux Mandataires, maisil nepouvait
leur donner le statut de « garanties »,à moins qu'elles ne fussent
déjà définies comme des garanties dans une disposition du Pacte.
Ces ((garanties »étaient, bien entendu, préciséesdans le corps de
l'article 22. Certains paragraphes portaient entre autres sur la

prohibition d'abus tels que la traite des esclaves ou le trafic des
armes et celui del'alcool, sur la démilitarisation, etc. Maisla garantie
ou sauvegarde essentielle était la disposition relative aux rapports
et aux fonctions de surveillance à exercer par la Commission

permanente des Mandats et par le Conseil de la Société.
Nulle part dans l'article 22 ni dans le reste du Pacte l, il n'existe
de disposition correspondante prévoyant ce que l'on a appelé
(d'après nous à tort 2, le ((contrôle judiciaire » de l'administration

L'article14 du Pacte prévoyait l'établissement d'une Cour permanente de
Justice internationalmais (à part sa compétence consultativeà l'égard du Conseil
et de l'Assemblée de la Société) celle-ci ne devait connaîtreque des différends
1que les parties lui soumettront».L'article14 n'instituaipas la juridiction obli-
gatoire, que ce fût en matière de Mandaou en toute autrematière. La compétence
obligatoire devait êtreétablie spécialement. Dans le cas des Mandats,l'obligation
pour le Mandataire de se soumettre à la juridiction obligatoin'était pas établie
par le Pacte mais par les clauses des divers actes de Mandat.

4 notre avis, le «contrôlee n'est une fonction judiciaireque lorsque la loi
confie spécifiquement aux tribunaux une fonction de contrôle, comme cela peut
se produire, par exemple, dans le domaine interne en matière de protection des
mineurs ou des aliénés. Dans la procédure contentieuse, qui est la seule forme de
procédure à laquelle pouvait donner lieu l'article 7 du Mandat pour le Sud-
Ouest africain, le rôle de la Cour est de trancher udifférend donné - ce qui est
une fonction éminemment judiciaire et non pas une fonction de contrôle.conduct of the Mandates; and the deduction must therefore be
drawn that, at any rate at this time (the period 1919-~gzo),provision
for the compulsory adjudication of disputes about the Mandates
waç not regarded as an essential element of the system, and did not
rank as a "secunty" for the performance of the sacred trust of
civilization within the meaning of Article 22.The argument to the

contrary rests we think on bare assertion and special pleading.
We are not concerned to argue whether it would have been a good
thing or not that "judicial supervision" should have been one of the
securities. Our duty is simply to note the fact and draw the neces-
sary legal deductions from it. The point will recur, and of course
if we are correct in Our view on the third preliminary objection, it
would only be natural that a provision for the judicial protection of
the statal interests of1,eague Members in the Mandated territories
should not figure amongst the "securities" in Article 22.

It will be ecident from the foregoing summary of Article 22

that it was chieflyl concerned with defining and describing the
nature of a certain trust, and of the system contemplated for car-
rying it out; with establishing certain safeguards .tothat end, in the
interests of the inhabitants of the territories concerned; and with
the provision of certain machinery in that connection. But it
created no actual Mandates, and the performance by any given
Mandatory of its duties in discharge of the Mandate conferred on
it, and to be "exercised ...on behalf of the League", was to be left
(see paragraph (8) of Article 22) to the explicit definition of the
authonty of the Mandatory, either by agreement between, or
on the part of, "the Members of the League", or, in default of such
agreement, by the Council of the League acting as such.

We therefore turn now to consider how, and in what man-
ner and form, this explicit definition (which constituted the
individual Mandate) was effected. We shall of course be doing so
with reference to the case of the Mandate for South West Africa,
but it should be noted that the method and form adopted (namely,
a Resolution of the League Council) was exactly the same in the
case of al1 the various Mandates, of whatever category, with the
single exception of that for Iraq which, significantly enough and
for specialreasons,took the form of an actualand undoubted treaty
(or treaties) between Ris Britannic Majesty and the King of Iraq.
The importance of the uniform method of creation of al1the other
Mandates was that there was nothing in it peculiar to the case
of South West Africa. Had the other Mandates been created by

i.e. apart from "Equal opportunities forthe trade and commerce" of Members
of the League, which were reservedthe case of the "B" Mandates, missionary
rights, etc.
166 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 481

des Mandats; il faut donc en conclure que, en tout cas àcette époque
(1919-1920), la disposition relative au règlement judiciaire obli-
gatoire des différendsrelatifs aux Mandats n'était pas considérée
comme un élément essentieldu système et ne faisait pas partie des
((garanties » pour l'accomplissement de la mission sacrée de civili-

sation au sensde l'article 22.Dire le contraire constitue à notre avis
une affirmation pure et simple et un argument pro domo.
Nous n'avons pas à nous demander s'il eût étébon ou mauvais
que le ((contrôle judiciaire 1)constituât l'une des garanties. Notre
tâche est simplement de constaterle fait et d'en tirer les conséquen-
cesjuridiques nécessaires.Cette question seprésentera ànouveau et,
bien entendu, si nous avons raison en ce qui concerne la trois.iéme
exception préliminaire, il est naturel qu'une disposition tendant à
assurer la protection judiciaire des intérêts étatiquesdes Membres

de la Sociétédes Nationsdans les temtoires sous Mandat n'ait pas
figuréparmi les « garanties » prévuesà l'article 22.

Il ressort à l'évidencedu résumé que nous venons de donner de
l'article22 que celui-ci avait principalement pour objet de définir
et de décrirele caractère d'un certain trustet du systèmeprévupour
le mettre en euvre; d'établir à cette fin certaines garanties dans

l'intérêtdes habitants des territoires en question; et de prévoir une
certaine procédure à cet égard. Mais il n'a pas crééde Mandats
particuliers; et l'accomplissement par un Mandataire desobligations
inhérentes au Mandat qui lui était conférépour qu'il l'exerçât «au
nom de la Société » relevait (voirparagraphe 8 de l'article 22) de la
définition expresse des pouvoirs du Mandataire qui devait faire
l'objet d'un accord entre «les Membres de la Société ))ou de leur
part, ou sur laquelle, à défaut d'un tel accord, il devait êtrestatué

par le Conseil de la Sociétéagissant en tant que tel.
Nous examinerons donc maintenant comment, de quelle ma-
nière et sous quelle forme cette définition expresse (qui consti-
tuait le Mandat) a étéfaite. Nous le ferons bien entendu en nous
référant au cas du Mandat pour le Sud-Ouest africain, mais il
convient de noter que la méthodeet la forme adoptées (àsavoir une
résolution du Conseil de la Société)ont étéexactement les mêmes
pour tous les Mandats, de quelque catégorie qu'ils fussent, à la
seule exception du Mandat pour l'Irak qui, fait important, a pris,

pour desraisons spéciales,la forme d'un traité réelet indubitable (ou
de plusieurs traités) entre Sa Majestébritannique et le roi d'Irak.
Le fait que tous les autres Mandats aient étéétablis suivant une
méthodeuniforme est important en tant qu'il n'y a rien eu de parti-
culier à cet égard dans le cas du Sud-Ouest africain. Si les autres

Si l'on excepte les «conditions d'égalitépour les échanges et le commerce»
prévues dans le cas des MandatB u,les droits des missionnaires, etc.acts or instruments that unquestionably were and took the form
of international agreements, it might have been argued that the
difference in the case of the Mandate for South West Africa was
merely accidental or fortuitous, and that thert being no real dif-
ference of kind between it and other Mandates (at any rate so far
as the "C" category went, to which South West Africa belonged),
it also should be held to be of the same nature, and equally to
have treaty character. But this was not the situation.

(c) The framing of the Mandate for South.West Africn

The initial steps (we shall not go into a lot of back history)
leading to the issuing or promulgation of the Mandate for South
West Africa were as follows:
I. The various Mandatories for the ex-German territories in
Africa and the Pacific were nominated by the five Principal Allied
and Associated Powers of the First World War, the United States

of America, the British Empire, France, Italyand Japan (hereafter
sometimes called the "Principal Powers"), in whose favour sover-
eignty over these territones was renounced by Germany under
Article 119 of the Treaty of Versailles. It was basically they who
decided to deal with these territories by placing them under Man-
date as a sacred trust for civilizationl, though the System itself,
as has been seen, was the creation of -4ïticle zz of the League
Covenant .

z. The actual transfer of the territories to the various Manda-
tories, in their capacity as such, was provided for by Article 3-57
of the Treaty of Versailles; but already before that Treaty was
signed on June 28, 1919, a decision of the Supreme War Council,
made and published by it early in May of that year, had designated
the vanous Mandatories, and amongst them the 'I'nion of South
Africa in respect of South West Africa; in point of fact the Respon-
dent accepted the Mandate the same month. This decision of the
Supreme War Council was confirmed in August of the same year.
But even before that, most of the mandated territories (including
South West Africa) were being administered by the future manda-
tories on a basis of military occupation resulting from the operations

of the War. This point was stressed by Lord Balfour in the Council
of the League when he subsequently said "Remember that a
Mandate is a self-imposed limitation by the conquerors [of rightsj
l For thireason, and as having taken the cession from Germany, it may be
that, in that capacity, though not (as will be seen) as parties to the Mandates,
the Principal Powers retained, and may still retain on a dormant basis, a residual
or reversionarinterestin the actual territorconcernedexcept where these
have attained self govemmenor independence.
167Mandats avaient été établispar des actes ou instruments constituant
indubitablement des accords internationaux et en ayant la forme,
on aurait pu considérercette disparitédu Mandat pour le Sud-Ouest

africain comme purement accidentelle ou fortuite; et, puisqu'il n'y
a pas véritablement de différence d'espèceentre ce Mandat et les
autres (tout au moins ceux de la catégorie ((C ))dont relevait le
Sud-Ouest africain), on aurait pu le considérer comme étant de
mêmenature et comme ayant par conséquent aussi le caractère
d'un traité. Mais tel n'est pas le cas.

c) L'élaborationdu Mandat pour le Sud-Ouest africain

Résumons(sansvouloir en faire un long historique) les démarches
initiales qui ont conduit à l'institution ou à la promulgation du
Mandat pour le Sud-Ouest africain :
1. es-diver s andataires pour les anciens temtoires allemands
d'Afrique et du Pacifique ont étédésignéspar les cinq Principales

Puissances alliéeset associéesde la première guerre mondiale, les
États-unis d'Amérique,l'Empire britannique, la France, l'Italie et
le Japon (désignées parfois ci-après les (Principales Puissances »),
en faveur desquellesl'Allemagne avait renoncéàsa souveraineté sur
lesdits territoires aux termes de l'article119 du traité de Versailles.
Ce sont essentiellement ces pays qui ont décidé deréglerle sort
des territoires en question en les plaçant sous Mandat au titre
d'une mission sacréede civilisation1,mais le système lui-mêmea été
crééc ,omme nous l'avons vu, par l'article 22 du Pacte de la Société

des Nations.
2. Le transfert effectif des territoires aux divers Mandataires,
pris en cette qualité, a faitl'objet d'une disposition de l'article 257
du traité de Versailles; mais, avant mêmela signature du traité
(28 juin rgrg), une décisiondu Conseil supérieur de guerre prise et
publiée au début du mois de mai 1919 avait désigné lesdivers

Mandataires, dont l'Union sud-africainepour le Sud-Ouest africain;
en fait, le défendeur avait accepté le Mandat dans le courant du
mêmemois. La décision du Conseil supérieur de guerre a été
confirmée enaoût 1919. Mais la plupart des territoires sous Mandat
(y compris le Sud-Ouest africain) étaient déjà administrés par les
futurs Mandataires sur la base d'une occupation militaire résultant
des opérations de guerre. Lord Balfour a plus tard soulignéce point
devant le Conseil de la Sociétédes Nations en disant: (Le mandat

est, par définition, une limitation que les vainqueurs s'imposent
dans l'exercice de leur souveraineté sur les territoires conquis. Les
l Pour cette raison et du fait qu'elles étaient les bénéficiaires de la cession faite
par l'Allemagne, il se peut qu'en cette qualité, et non (comme on le verra) en tant
que parties aux Mandats, les Principales Puissances aient gardé et gardent encore
à titre latent un intérét résiduel ou réversible dans les en cause, sauf
dans les cas où ceux-ci sont devenusautoou ont accédà l'indépendance.
167which they obtained over conquered territories. It is imposed bp
the Allied and hssociated Powers themselves in the interests oi
what they conceive [to bel the general welfare of mankind; and they
have asked the League of Nations to assist them in seeing that this
policy should be carried into effect '." While not necessarily sub-
scribing to all the legal implications of thiç statement, it clearly
tends to support the view that a strict rather than a liberal inter-
pretation should be placed on the consent given by the Mandatory
iinder Article 7.

3. The Treaty of Versailles (and with it the League Covenant
which formed part of it) came into force on January IO, 1920, and
it was therefore not until then that, by virtue of Article 2j7,
the actual transfer of the mandated territories to the Mandatories,
in their capacity as such, formally took effect. On the same date,
the Mandates System came into being under Article 22 of the Cove-
nant; but the actual Mandates did not appear until much later-

in the case of South West .4frica, not until Pecember 17, 1920. It
will thus be seen that, considerably before the forma1 creation of
the Mandates System, and still more before the terms of the actual
Mandates were settled, the various Mandatories were in fact admi-
nistering the Mandated territories (in practice as Mandatories)
on a qaasi anticipatory basis.

The situation above described goes far, we consider, to explaining
why the eventual Mandates did not take the form of ordinary
treaties. The League of Nations as an entity was clearly closely
concerned,yet itstreaty making capacity was at that time doubtful,

and would certainly have been doubted. How then could the League
be brought in, in a manner that would not involve any question of
its treaty rnaking capacity? It may in any case well have been
considered that the sudden emergence of treaties, withsignatures and
ratifications and provisions for coming into force (and who precisely
would sign, and upon what would coming into force have depended ?)
more thaneighteen monthsafter the Mandatories had de facto started
to function as such, would be inappropriate, and might well give rise
to legal dificulties.

There is nevertheless evidence in the record that it had originnlly
been intended to create the Mandates by treaty, but tliis intention
was abandoned for reasons which are obscure, thoiigh they can
be guessed at. U'e do not however draw from this circumstance
the conclusion apparently drawn by some, that the Mandate should

League of Nationsd'cia~~ouvnal,18th Session of the Coun(1922)pp.546-
548.
168Puissancesalliées et associéesse sont imposécette limmitation dans
l'intérêtde l'humanité et elles ont demandé à la SociétédesNations
de les aider dans l'application de cette politique générale. 1) Cette
déclaration, mêmesi on n'en approuve pas toutes les incidences
juridiques, tend clairement à appuyer l'opinion selon laquelle le

consentement donné par le Mandataire aux termes de l'article 7 doit
êtreinterprétéd'une façonrestrictive plutôt que libérale.

3. Le traité de Versailles (ainsi que le Pacte de la sociétédes
Nations qui en faisait partie) est entréen vigueur le IO janvier 1920;

le transfert effectif des territoires sous Mandat aux Mandataires,
pris en cette qualité, n'a donc eu lieu formellement, en vertu de
l'article 257, qu'à cette date. C'est le mêmejour que le système des
Mandats est entré en vigueur aux termes de l'article 22 du Pacte;
mais les Mandats mêmesne sont apparus que beaucoup plus tard -
pour le Sud-Ouest africain, le 17 décembre 1920. Onvoit donc que,
bien avant la création formelle du système des Mandats et plus
longtemps encore avant l'établiskment des termes des Mandats
mêmes, lesdivers Mandataires administraient en fait les territoires
sousMandat (pratiquement en qualitéde Mandataires) par une sorte

d'anticipation.

Selon nous, la situation décrite ci-dessus contribue beaucoup à
expliquer pourquoi les Mandats n'ont finalement pas pris la forme
de traités ordinaires. Certes, la SociétédesNations, en tant qu'entité,
était intéressée de près mais sa capacité de conclure des traités
était alors douteuse et aurait certainement étémise en doute.
Comment pourrait-on donc faire entrer en jeu la Société des
Nations sans soulever de questions quant à sa capacité de con-
clure des traités? En tout cas, il se peut fort bien qu'on ait

considérécomme inappropriée et de nature à souleverdes difficultés
juridiques l'apparition soudaine, plus de dix-huit mois après que les
Mandataires eussent assumé de factoleurs fonctions en cette qualité,
de traités comportant des signatures et ratifications et des disposi-
tions relatives à leur entrée en vigueur (d'ailleurs, qui exactement
les aurait signéset d'après quoi leur entrée en vigueur aurait-elle
été fixée?).
Le dosiier contient néanmoins des preuves que l'intention avait
d'abord été d'instituer les Mandats par voie de traités; mais cette
intention a étéabandonnée pour des raisons obscures,mais que l'on

peut deviner. Cela ne nous conduit cependant pas à la conclusion
qui semble avoir ététiréepar certains et d'après laquelle le Mandat

l Société des NationJournal officiel, dix-huitsession du Conseil1922,
pages546-548.
168 nevertheless still be deemed to be what it may originally have been

intended to he-a treaty. W-edraw the opposite concliision, that
in the final result it wasnot intended to be a treaty, or the original
intention would have been proceeded with. No other conclusion
can well be come to on any permissible process of interpretation.

As it is impossible for us within reasonable limits of space to go
over al1 the documentation, we propose to concentrate on one or
two salient mattcrs. The first of these consists of a report by the
Belgian representative on the Council of the League (M. Hymans)
which was adopted unanimously by the Council on August 5,
1920. Thisreport contained a detailed consideration of the problems
associated with the creation of the Mandates System, with a view

to securing the performance of Article 22 of the Covenant, and
it is of special importance. It stated (inte~ aliat)hat Article 22laid
down two essential principles which applied to al1peoples not able
to stand by themselves, namely:

(1)it was the sacred trust of civilization to assure the well-
being and development of these peoples;

(2) certain guarantees were stipulated to ensure the performance
of this trust, namely :
(a) the tutelage of such peoples was to be entrusted to the na-
tions best fitted to undertake this responsibility;
(.b) such nations were to exercise this tutelage as Mandatories

and on behalf of the League.

Pausing there, it will be noted thal amongst these guarantees and
securities (as specified in this Report), there is no mention of any
"judicial supervision" to bt: exercised by the Permanent Court
relative to the conduct of the Mandate. IVe therefore have the
position that in a Report which specifically stated what (in the
unanimous view of the Council, since it was adopted unanimously)
were the securities intended by the Covenant for the performance
of thetrust, there was no suggestion of any kind that any additional
security was required or contemplated. In particular, for Our pur-
poses, there was no reference in the Report to any necessity for

judicial determination of disputes relating to the conduct of the
Mandate.
The same Report confirmed that the Principal Allied and Asso-
ciated Powers had already, by a decision published in May 1919,
decided who were to be the Mandatory Powers, and that the terri-
tories concerned urere actually already being administered by the
Mandatory Powers to whom it was intended to entrust them.
The Report went on to Saythat draft treaties had been negotiated
between the Allied Powers principally concerned, but that the
drafts had not been published. (These drafts are to be found in

169devrait tout de mêmeêtreconsidéré commeconstituant ce que
l'on a pu vouloir en faire à l'origine- un traité. Nous en tirons la
conclusion contraire, à savoir qu'en fin de compte l'intention n'a
pas étéd'en faire un traité, sans quoi on aurait donné suite à cette
intention primitive. Les méthodes d'interprétation autorisées ne

sauraient aboutir à aucune autre conclusion.
Comme l'espace nous manque pour passer en revue toute la
documentation, nous préféronsnous concentrer sur un ou deux
points particulièrement importants. Le premier concerne un rapport
de M. Hymans, représentant de la Belgique au Conseil de la $ociété
des Nations, adopté à l'unanimité par le Conseil le 5 août 1920.
Ce rapport, qui est d'une particulière importance, contient un
examen détaillé des problèmes inhérents à l'institution du système
des Mandats en vue d'assurer l'exécution de l'article 22 du Pacte.
Il rappelle (inter alia) que l'artic22 pose deux principes essentiels
s'appliquant à tous les peuples non encore capables de se diriger
eux-mêmes :

1) c'est une mission sacrée de civilisation d'assurer le bien-êtreet

le développement de ces peuples ;
2) certaines garantiessont formuléespour assurer l'accomplissement
de cette mission, à savoir:

a) la tutelle de ces peuples sera confiéeaux nations les plus
aptes à assumer cette responsabilité;
b) ces nations l'exerceront en qualité de Mandataires et au
nom de la Société.

A ce propos, on notera que, parmi les garanties et sécurités
(telles qu'elles sont spécifiéesdans le rapport), il n'est pas fait
mention d'une (surveillance judiciaire 1)à exercer par la Cour
permanente sur l'administration du Mandat. Nous constatons
donc que, dans un rapport indiquant spécifiquement les 'garanties
prévues par le Pacte pour l'accomplissement de la mission (et cela
selon l'opinion unanime du Conseil puisque le rapport a étéadopté
à l'unanimité), il ne figure rien qui laisse entendre que des garanties
supplémentaires aient été exigées ou envisagées. En particulier,
pour ce qui nous concerne, il n'est pas question dans le rapport
du caractère nécessairedu règlement judiciaire des différends relatifs

à l'administration du Mandat.
Le mêmerapport confirme que les Principales Puissances alliées
et associéesavaient déjà choisi les Puissances mandataires par une
décision publiée en mai 1919 et que les territoires en question
étaient déjà effectivement administrés par les Puissances manda-
taires auxquelles on avait l'intention de les confier.
Le rapport indique ensuite que des projets de traité avaient été
négociésentre les Puissances alliées principalement intéressées,
mais que ces projets n'avaient pas été publiés. (On les trouveraForeign Relations of the United States-Paris Peace Conferelzce,
Vol. IX at 649 et seq.They were in the fonn of forma1 conventions
between the Principal Allied and Associated Powers and the Man-
datory Powers.)
The Report then stated that the right to allocale the Mandates,
i.e. to appoint the Mandatory Powers, and to determine the terri-
tories over which they would exercise authority, belonged to the
Principal Allied and Associated Powers and that this admitted of
no divergence of opinion. As to the degree of authority, control
or administration, the Report suggested that the Principal Allied

and Associated Powers should "at the same time as .they a.cquaint
us with their decisions as to the Mandatory Powers, inform us of
their proposals with regard to the terms of the Mandate to be
exercised". We stress the word "proposals".
The Report then suggested to the Council the following resolu-
tions :
"1. The Council decides to request the Principal Powers to

(a) name the Powers to whom they have decided to allocate
the Mandates provided for in Article 22;

(b) to inform it as to the frontiers of the territories to come
under these Mandates;
(c) to communicate to it the terms and conditions of the
Mandates that they popose should be adopted by the
Council from (sic)followingthe prescriptions of Articl22
(italicsours).
II. The Council will take cognizance of the Mandatory Powers
appointed and will examine the draft Mandates communicated to
it, in order to ascertain that they conform to the prescription of
Article22 of the Covenant.
III. The Council will notify to each Power appointed that it is
investedwith the Mandate, and will,at the same time, communicate
to it the terms and conditions."
This Report was adopted by the Council unanimously on Au-
gust 5, 1920, and the suggested resolutions were duly carried.
It was not, however, until December 13,1920, that a proposed

draft "C" Mandates were placed before the Council of the League.
The United Kingdom representative on that day "handed in a
draft Rlandate proposed by the British Government" relating to
South West Africa and other "C" Mandate territories. The Council
referred the drafts to the Secretariat "to consider the Mandate
and to consult other legal experts on any points necessaryW1.
Subject to certain alterations made by the Council of the League-
to which reference is made later-these drafts formed the basis of
the Resolution ofthe Council of the League of December 17, 1920,
containing the Mandate for South West Africa.

l Leagzle of Nations OfficialJournal, 2ndYear1,p.II.
170dans Conférence de la paix 1919-1920, Recueil des actesde la Confé-
rence,partie VI A, pages 73 et ss. Ils avaient la forme de conventions
formelles entre les Principales Puissances alliées et associées et les
Puissances mandataires.)

Le rapport ajoutait que la distribution des Mandats, c'est-à-dire
la désignation des Puissances mandataires et la détermination des
territoires sur lesquels leur autorité s'exercerait, appartenait aux
Principales Puissances alliéeset associées et qu'il n'y avait pas de
divergences de vue à cet égard. En ce qui concerne le degré d'auto-
rité, de contrôle ou d'administration, le'rapport proposait que les

Principales Puissances alliéeset associéesfissent connaître en même
temps que leur décision, quant à la Puissance mandataire, leurs
propositions, quant aux termes du mandat à exercer ». Nous sou-
lignons le mot (propositions )).
Le rapport proposait ensuite au Conseil les résolutions suivantes:

c1. Le Conseil décide de prier les Principales Puissances de
vouloir bien
a) lui désigner les Puissances auxquelles elles ont décidé
d'attribuer les mandats prévus parl'Article 22;
b) lui faire connaître les limites des territoires soumis à ces
mandats ;

c) lui communiqlier les termes et conditions des mandats
qu'elles proposent à l'adoption du Conseil suivant les
prescriptions de l'Article 22 [lesitaliques sont de nous].

II. Le Conseilprendra acte de la désignationdes Mandataires et
examinera les projets de mandats qui lui seront communiquésafin
de vérifiers'ils sont conformes aux prescriptions de l'Article 22
du Pacte.
III. Le Conseilnotifiera à chaque Puissance désignée,qu'elle est
investie du mandat dont en mêmetemps il lui communiquera les

termes et conditions. ))
Ce rapport a étéadopté à l'unanimité par le Conseil le 5 août 1920
et les résolutions proposées ont été dûment approuvées.
Mais le projet proposé pour les Mandats ((C 1)n'a étésoumis au
Conseil de la Société des Nations que le 14 décembre 1920. Le

représentant du Royaume-Uni a alors ((déposéles projets de
mandats préparéspar le Gouvernement britannique ))relatifs au
Sud-Ouest africain et aux autres territoires à placer sous Mandat
((C ». Le Conseil a invité le Secrétariat à examiner ces projets et
((à consulter, sur tels points qu'il jugerait utile, d'autres autorités
juridiques spécialiséesen la matière ))l.Sous réserve de quelques
modifications faites par le Conseil de la Sociétédes Nations -

auxquelles nous reviendrons plus tard -, ces projets ont constitué
la base de la résolution du Conseil de la Société des Nations du
17 décembre 1920 qui contient le Mandat pour le Sud-Ouest africain.
SociétBdes Nations, Jouvnal officzme,année, no 1,p. II.

170 The foregoing statement of the facts, in Our view makes two
things abundantly clear :

I. Any intention which the Principal Allied and Associated
Powers may at one time have had to confer the Mandates, name
the Mandatory Powers, define the limits of the Mandated territo-
ries, and set out the terms of the Mandates in a forma1 treaty or
convention between themselves and the blandatories, was aban-
doned in favour of the procedure set out in the resolution of the
Council of the League of August 5,1920, namely, action taken by
the Council of the League directly pursuant to Article 22 of the
Covenant .

2. At a certain point, i.e. when it adopted the Resolution of
August 5, 1920, and thereafter, the League Council so to speak
"took charge" of the whole operation, and what it required of the
Powers was that these should communicate to it their proposed
terms for the Mandates, in order that the Council might satisfy
itself that they conformed to Article 22 of the Covenant, and the
Council would then, by its own act, give these terms the force of
law. In short the Mandates were not to,take the form of treaties
or conventions between the Principal Powers and the Mandatories :
they were to take the form of a quasi-legislative act of the Council.
As will be seen, this is the form they did.take, and this constitutes
the decisive factor regarding this part of the case.

(d) The promulgation of the Mandate
The Mandate for South West Africa, as eventually adopted by
the Council of the League and promulgated by a Council resolution
of December 17, 1920, had undergone certain alterations as a result
of being referred to the Secretariat and to "other legal experts"
at the stage when it consisted of a draft containing the proposals
of the Principal Powers. These alterations, to which we shall come
presently, were accepted by the Council for the purposes of its
final resolution. They do not affect the substance of the Mandate,

but they do affect in certain highly significant respects the jurisdic-
tional questions under consideration in the present phase of this
case. Their chief significance, however, lies in the fact that they
were made at all, and by the Council acting as such, and as its
own act-so that the Mandate, in its final form, was the act of
an organ of an international organization, in the active exercise
of powers conferred on it by its constitution. It was not a treaty
or convention between States or other international entities and
had not character as such. L'énoncédes faits qui précèdeprouve clairement, à notre avis,
deux points:

I. Touteintention qu'auraient pu avoir les Principales Puissances
alliéeset associéesde conférerles Mandats, désigner les Puissances
mandataires, définir les limites des territoires sous Mandat et
énoncer les termes des Mandats dans des traités ou conventions
formels conclus entre elles et les Mandataires a étéabandonnée en
faveur de la procédure indiquée dans la résolution du Conseil de la
Sociétédes Nations du 5 août 1920: action du Conseil de la Société
des Kations en application directe de l'article 22 du Pacte.

2. A partir d'un certain point, c'est-à-dire à partir du moment
où il a adopté sa résolution du 5 août 1920, le Conseil a pour ainsi
dire « pris en charge » l'ensemble de l'opération; il a prié les Puis-
sances de lui faire connaître les termes qu'elles proposaient pour
les Mandats, afin de pouvoir s'assurer de leur conformité avec
l'article22 du Pacte et de leur donner alors de son firopre fait, force
de loi. En bref, les Mandats ne devaient pas prendre la forme de
traités ou de conventions entre les Principales Puissances et les
Mandataires: ils devaient prendre la forme d'actes quasi législatifs
du Conseil. Nous verrons que c'est bien la forme qu'ils ont prise et
que cela constitue un facteur décisif ence qui concerne cette partie
de l'affaire.

d) La firornulgationdu Mandat
Tel qu'il a étéfinalement adopté par le Conseil de la Société des
Nations et promulgué par une résolution du Conseil du 17 décembre
1920, le Mandat pour le Sud-Ouest africain avait subi certaines
modifications après avoir étésoumis,sous forme de projet contenant
les propositions des Principales Puissances, au Secrétariat et à
d'c autres autorités juridiques P.Ces modifications, auxquelles nous
arrivons màintenant, avaient été adoptées par le Conseil dans le
cadre de sa résolution finale. Elles n'affectent pas la substance du

Mandat, mais elles affectent sous certains aspects extrêmement
significatifs les questions de compétence que soulève la phase
actuelle de l'espèce. Toutefois leur signification majeure tient à ce
qu'elles ont étéeffectuées, et cela par le Conseil agissant en tant
que tel et de son propre fait - si bien que le Mandat a étésous sa
forme finale un acte accompli par un organe d'une organisation
internationale dans l'exercice des pouvoirs que lui conférait sa
constitution. Il n'a pas étéun traité ou une convention entre Etats
ou autres entités internationales et n'a pas eu ce caractère. We now set out the terms of the Mandate as adopted by the
League Council on December 17, 1920, since it is not in Our view
possible to understand its character without the convenience of

easy reference to it. It read :-

"MANDATE FOR GERMAN SOUTH WEST firRICA

The Council of the League of Nations :
Whereasby Article 119of theTreaty of Peace with Germany signed
at Versailles on June 28th, 1919, Germany renounced in favour of
the Principal Allied and Associated Powers al1 her rights over her
oversea possessions, including therein German South-West Africa;
and

Whereas LnePrincipal Allied and Associated Powers agreed that,
in accordance with Article 22 Part 1 (Covenant of the League of
Nations) of the said Treaty, a Mandate should be conferred upon
His Britannic Majesty to be exercised on his behalf by the Govern-
ment of the Union of South Africa to administer the territory
aforementioned, and have proposed that the Mandate should be
'ormulated in the following terms; and
Whereas His Britannic Majesty, for and on behalf of the G~vern-
ment of the Union of South Africa, has agreed to accept the Man-

date in respect of the said territory and has undertaken to exercise
it on behalf of the League of Nations in accordance with the following
provisions; and
V7hereas, by the aforementioned Article 22, paragraph 8, it is
provided that the degree of authority, control or administration to
be exercised by the Mandatory not having been previously agreed
upon by the Members of the League, shall be explicitly defined by
the Council of the League of Nations:
Confirming the said Mandate, defines its terms as follows :-

The territory over which a Mandate is conferred upm His
Britannic Majesty for and on behalf of the Government of the Union
of South Africa (hereinafter called the Mandatory) comprises the
territory which formerly constituted the German Protectorate of
South-West Africa.

ARTICLE 2
The Mandatory shall have full power of administration and
legislation over the territory subject to the present Mandate as an
integral portion of the Union of South Africa, and may apply the
laws of the Union of South Africa to the territory, subject tosuch
local modifications as circumstancesmay require.

The Mandatory shall promote to the utmost the material and
moral well-being and the social progress of the inhabitants of the
territory subject to the present Mandate.
172 Citons maintenant les termes du Mandat adopté par le Conseil
de la Sociétédes Nations le 17 décembre 1920, car nous ne pensons

pas qu'il soit possible d'en comprendre le caractère si l'on ne peut
s'y référer aisément. Voici ce texte :

Le Conseil de la Société deNs ations:
Considérantque, par l'article 119 du Traité de Paix avec 1'Alle-
magne signé à Versailles le 28 juin 1919, l'Allemagne a renoncé,
en faveur des Principales Puissances alliées et associées,à tous ses
droits sur ses possessions d'outre-mer, y compris le Sud-Ouest
Africain Allemand ;

Considérantque les Principales Puissances alliéeset associéesont
convenu qu'un mandat soit conféréà Sa Majesté Britannique pour
êtreexercé en son nom par le Gouvernement de l'union de l'Afrique
du Sud, conformément à l'article 22 du Pacte de la Société des
Nations, sur le territoire du Sud-Ouest Africain Allemand et ont
proposéque le mandat soit formulé ainsi que suit;

Considérantque Sa Majesté Britannique, agissant pour le Gou-

vernement de l'Union de l'Afrique du Sud, et en son nom, s'est
engagée à accepter le mandat sur le dit territoire et a entrepris de
l'exercer au nom de la Société des Nations, conformément aux
dispositions suivantes;
Considérantque, aux termes de l'article 22 ci-dessus mentionné,
paragraphe 8, il est prévu que si le degréd'autorité, de contrôle ou
d'administration à exercer par le Mandataire n'a pas fait l'objet
d'une Convention antérieure entre les Membres de la Société,ilsera
expressément statué sur ces points par le Conseil;
Par la présente, confirmant le mandat, a statué sur ses termes

comme suit :

Le territoire sur lequel Sa Majesté Britannique assume, pour 1~
Gouvernement de l'union de l'Afrique du Sud (ci-aprèsdénomméle
Mandataire) et en son nom, l'administration, sous le régime du
mandat, comprend l'ancien protectorat du Sud-Ouest Africain.

ARTICLE 2
Le Mandataire aura pleins pouvoirs d'administration et de légis-
lation sur le territoire faisant l'objedu mandat. Ce temtoire.sera
administré selon la législation du Mandataire comme partie inté-
grante de son territoire. Le Mandataireest en conséquenceautoriséà

appliquer aux régions soumises au mandat la législation de l'union
de l'Afrique du Sud, sous réserve des modifications nécessitées par
les conditions locales.
Le Mandataire accroîtra, par tous les moyens en son pouvoir, le
bien-êtrematériel et moral ainsi que le progrès social des habitants
du territoire soumis au présent mandat.
172 The Mandatory shall see that the slave trade is prohibited, and
that no forced labour is permitted, except for essential public
works and services, and then only for adequate remuneration.

munition is controlled in accordance with principles analogous to
those laid down in the Convention relating to the control of the
arms traffic,signed on September ~oth, 1919, or in any convention
amending the same.
The supply of intoxicating spirits and beverages to the natives
shall be prohibited.

The military training of the natives, otherwise than for purposes
of interna1 police and the local defence of the territory, shall be
prohibited. Furthermore, no military or naval bases shall be estab-
lished or fortifications erected in the territory.

Subject to the provisions of any local law for the maintenance of
public order and public morals, the Mandatory shall ensure in the
territory freedom of conscience and the free exercise of al1forms of
worship, and shall allow al1 missionaries, nationals of any State
Member of the League of Nations, to enter into, travel and reside
in the territory for the purpose of prosecuting their calling.

The Mandatory shall make to the Councilof the League of Nations
an annual report to the satisfaction of the Council, containing full
information with regard tothe territory, and indicating the measures
taken to carry out the obligations assumed under Articles 2,3, 4
and 5.

ARTICLE7
The consent of the Council of the League of Nations is required
for any modification of the terms of the present Mandate.
The Mandatory agrees that, if any dispute whatever should arise
between the Mandatory and another Member of the League of
Nations relating to the interpretation or the application of the
provisions of the Mandate, such dispute, if it cannot be settled by
negotiation, shall be submitted to the Permanent Court of Inter-
national Justice provided for by Article 14 of the Covenant of
the League of Nations.
The present Declaration shall be deposited in the archives of the
League ofNations. Certified copies shall be forwarded by the Sec-
retary-General of the League of Nations to al1 Powers Signatories
of the Treaty of Peace with Germany.
Made at Genevathe 17th day of December,1920."

173 ARTICLE 3
Le mandataire veillera à ce que la traite des esclaves soit inter-
dite; àce que le travail obligatoire ne soit autorisé que dans le cas
de travapx publics essentiels et dans les services publics et sous
condition qu'une rémunération équitable soitallouée.
En outre, le Mandataire veillera à ce que le trafic de l'armement
et des munitions soit contrôlé en conformité avec des-principes
analogues à ceux de la Convention relative au contrôle du trafic des
armements, signéele IO septembre 1919 ou de touteautre conven-
tion qui amende cette dernière.
Il sera interdit de fournir des spiritueux et desboissonsalcooliques
aux indigènesdu territoire.

L'instruction militaire des indigènes sera interdite, sauf pour
assurer la police locale et la défense localedu territoire. En outre,
aucune base militaire ou navale ne sera établie dans le territoire, ni
aucune fortification.

Sous réserve des dispositions de la législation locale concernant
le maintien de l'ordre public et des bonnes meurs, le Mandataire
assurera, dans toute l'étenduedu territoire, la libertéde conscience
et le libre exercice de tous les cultes et donneàatous les mission-
naires, sujets ou citoyens de tout Membre de la Société des Nations,
la faculté de pénétrer,de circuler et de résider dans le territoire
dans le but d'exercer leur ministère.

Le mandataire devra envoyer au Conseil de la Société desNations
un rapport annuel satisfaisant le Conseil et contenant toute infor-
mation intéressant le territoire et indiquant les mesures prises pour
assurer les engagements pris suivant les article2,3, 4,5.

L'autorisation du Conseil de la SociétédesNations est nécessaire
pour modifier les dispositions du présent mandat.
Le Mandataire accepte que tout différend, quel qu'il soit, qui
viendrait à s'éleverentre lui et un autre Membre de la Société des
Nations relatifà l'interprétation ouà l'application des dispositions
du Mandat, et qui ne soit pas susceptible d'êtrerégpar des négocia-
tions, soit soumisà la Cour permanente de Justice internationale,
prévuepar l'article 14 du Pacte de la Société desNations.

Le présent exemplaire sera déposédans les archives de la Société
des Nations. Des copies certifiéesconformesen seront remises par le
Secrétaire général dela Société desNations à toutes les Puissarices
signataires du Traité de Paix avec l'Allemagne.

Fait à Genèvele 17 décembre 1920. n
173 The differences between the Mandate as adopted on December
17,1920, and as it had been proposed to the Council on December
14. were as follows :-

(1) The draft as proposed on December 14, 1920, did not contain
the fourth recital of the preamble in the final text, namely:

"Whereas, by the above-mentioned Article 22, paragraph 8,
it is provided that the degree of authority, control or administration
to be exercised by the Mandatory, not having been previously
agreed upon by the Members of the League, shall be explicitly
defined by the Council of the League of Nations1."

This recital was added by the Council, and it brings out what
might otherwise not have been quite clear, namely that the text
had not been previously agreed by the Members of the League, and

was therefore, as it had in the circumstances to be, the act of the
Council under Article 22 (8) of the Covenant. This point, as will
be seen, is material to the question whether the Members of the
League were ever individually parties to the Mandate if it was a
treaty or convention.

(2) The original December 14 draft read as follows immediately
after the preambular recitals: [The Council of the League of Na-

tions.. .]
"Hereby approves the terms of the Mandate as fo1lows:-"

For this the Council substituted: [The Council ...,etc.]
"Confiming the said Mandate, defines its terms as follows ..."

Clearly the effect of this was to substitute for what might have
been contended to beamere approvalof pre-existing terms,something
new, namely the definition of the terms of the Mandate by the
act of the Council itself *.

l It has been asserted that the Council's authority under Article 22 (8) was
limited to authorityover territoryonly. We regard this as an untenable assertion.
It is meaningless to speak of administration over bare territory.To give this, in
Our view, wholly artificial meaningto Article22 (8) is to disregard the rest of that
Article and the purposes it was designed to serve. The Council was in Our view
perfectly competent to subject the Mandatory's administrationof the territoryand
its peoples placedunder tutelage to such conditions and limitationsas it thought
fit in order to carry outthe purposes of Arti22,provided they were in conformity
with and not inconsistent withthe terms of Article22. In any case, and this is the
important consideration,the Council and al1 its Members, including of course the
Principal Powers, believed it was acting within the scope of its authoridefining
the terms of each Mandate instrument. The conduct of al1 States, Members of the
Council, then and since is wholly inconsistentwith any other view.

What the'louncil confirmed- was the conferring of a Mandate upon the Man-
datory. That had to be the act of the Principal Allied and Associated Powers
consequent upon Article 119 of the Treaty of Versailles.
174 Les différences entre le Mandat tel qu'il a étéadopté le 17 décem-

bre 1920 et tel qu'il avait étéproposé au Conseil le 14 décembre
sont les suivantes :

1) Le projet proposé le 14 décembre 1920 ne contenait pas le
quatrième alinéa du préambule qui figure dans le texte final, à
savoir :

ccCo~zsidéran qtue, aux termes de l'article 22 ci-dessus mentionné,
paragraphe 8, il est prévuque si le degréd'autorité,de contrôle ou
d'administration à exercer par le Mandataire n'a pas fait l'objet
d'une Convention antérieure entre les Membresde la Société, il sera
expressémentstatué sur ces points par le Conseil l.))

Ce considérant a été ajouté par le Conseil; il met en évidence un
point qui, sinon, aurait pu ne pas êtretout à fait clair, à savoir que
le texte n'avait pas fait l'objet d'une convention antérieure entre
les Membres de la Sociétéet a étépar conséquent le fait du Conseil

aux termes du paragraphe 8 de l'article 22 du Pacte; ainsi que cela
devait êtreétant donné les circonstances. Ce point, comme nous le
verrons, est pertinent à la question de savoir si les Membres de la
Sociétédes Nations ont jamais étéindividuellement parties au

Mandat, à supposer que celui-ci fût un traité ou une convention.
2) Immédiatement après le préambule, nous trouvons dans le
projet original du 14 décembre: [Le Conseil de la Société des

Nations.. .]
(Par la présente, approuvelestermes du Mandat commesuit :...»

A quoi le Conseil a substitué : [Le Conseil.. .,etc.]
((Par la présente, confirmant le Mandat, a statué sur ses termes
comme suit ...))

L'effet de cette modification a étéclairement de substituer à ce que
l'on aurait pu estimer êtreune simple approbation de termes pré-
existants, quelque chose de nouveau, à savoir la définition des

termes du Mandat par le Conseil même 3.
11a étéalléguéque l'autorité du Conseil aux termes del'articl22, paragraphe 8,
était une autorité limitée au seul territoire. Nous pensons que c'est là une assertion
insoutenable. Une administration se limitant au seul territoirene signifie rien du
tout. Attribuer ce sens entiPrement artificiel au paragraphe8 de l'articl22 c'està
notre avis ne pas tenir compte du reste de cet articleet du but qu'il visait. Nous
pensons que le Conseil avait toute compétence de soumettre l'administration du
Mandataire sur le territoiret sa population placée sous tutelle aux conditions et
limitations qu'il estimait nécessairàsl'accomplissement des objectifsde l'artic22,
sous réserve qu'elles fussent conformes aux termes de l'articl22 et non incompati-
bles avec cet article. De toute façon, et c'est là le point importle Conseil et tous
ses Membres, y compris bien sûr les Principales Puissances, pensaient agirdans le
cadre de leur compétence en statuant sur les termes de chaque acte de Mandat.
Toute autre opinion serait incompatible avec l'attitude detous les États, alors et
depuis lors Membres du Conseil.
Traduction du Greffe.
Ce que le Conseil a confirmé c'est l'attribution d'un Mandat au Mandataire,
attribution qui devait êtrefaite par les Principales Puissances alliées et associées en
conséquence de l'article119 du traité de Versailles. (3) The first paragraph of Article 7 of the Mandate as it appeared
in the December 14 draft had provided that the consent of the
Council for any modification of the terms of the Mandate instrument
might be given by a majority. This reference to a majority was
struck out by the Council. The significance of this, as indicative of
thestatus of the Council in relation to the Mandate will be considered

hereafter .
(4) The second paragraph of Article 7-the critical paragraph
from the point of view of these proceedings-as originally drafted
provided :
"If any dispute whatever should arise between the Members of
the League of Nations ...this dispute shall be submitted ...",etc.

This was altered by the Council to read
"The Mandatory agrees that if any dispute whatever should arise
between the Mandatory and another Memberof the League.. .",etc.

We shall state later what were the reasons for this alteration,
and shall only mention here that they make it virtually impossible
to hold the view that if (contrary to what we think) the Mandate
was a treaty or convention, the various llembers of the League
were individually parties to it as such.

(e) The characterof the Mandate as promulgated

On the face of it, the Mandate as set out in the League Council's
resolution of December 17, 1920, does not look like a treaty, con-
vention or other form of international agreement. In form and on
the face of it, itlooks like what it purported to be-a Declaration
promulgated by a resolution of the Council of the League in the
exercise of a power conferred upon it by paragraph 8 of Article 22
of the Covenant, exercisable precisely if the terms of the Mandate
had not been "previously agreed upon by the Members of the Lea-
gue". To al1appearances therefore, the Mandate was a quasi-legis-
lative act of the League Council, carried out in the exercise of a
power given to it by the Covenant to meet a stated contingency-a
power which it was bound to exercise if the terms of the Mandate
had not previouslybeen agreedupon by the Members of the League.
This being so, the Court must accordingly be conclusively satisfied
that the Mandate has a different character-that it is in fact an
international agreement, and has treaty character. 3) Dans la version du 14 décembre,le premier alinéa de l'article 7
du Mandat prévoyait que toute modification apportée aux termes
du Mandat pourrait êtreapprouvée à la majorité. Cette référence
àla majoritéa étééliminée par le Conseil,fait dont nousexaminerons
plus loin la signification en ce qui concerne la position du Conseil
en matière de Mandats.

4) Le second alinéa de l'article 7 - l'alinéa critique pour les
présentes espèces - disposait à l'origine :

((Si un différend quelconques'élevaitentre les Membres de la
Société des Nations ...ce différendsera soumis ...)l,etc.

Le Conseil a modifiéce paragraphe de la façon suivante:

Le Mandataire accepte que tout différend, quelqu'il soit, qui
viendrait à s'éleverentre lui et un autre Membre de la Société des
Nations...)),etc.
Nous indiquerons plus loin les raisons de cette modification et
nous mentionnerons simplement ici qu'elles rendent virtuellement
impossible de soutenir que, si (contrairement à ce que nous pensons)
le Mandat a étéun traité ou une convention, les divers Membres

de la SociétédesNations y étaient, en tant quetels,individuellement
parties.
* * *

e) Le caractèredu Mandat tel qu'il a été$romulgzté
Le Mandat tel qu'il figure dans la résolution du Conseil de la So-
ciété des Nations du 17 décembre 1920 n'a manifestement pas l'air
d'un traité, d'une convention ou d'un accord international sous une
autre forme. En sa forme, il a manifestement l'air de ce qu'il pré-
tend être - une déclaration promulguée par une résolution du

Conseil de la Sociétédans l'exercice d'un pouvoir à elle conféré
par le paragraphe 8 de l'article 22 du Pacte précisément pour le
cas où les termes du Mandat n'auraient pas «fait l'objet d'une
convention antérieure entre les Membres de la Société ». Selon
toutes les apparences, le Mandat a donc étéun acte quasi législatif
accompli par le Conseil de la Société desNations dans l'exercice de
la compétencequelui donnait le Pacte de faire face àune éventualité
spécifiée - compétence qu'il était obligé d'exercer au cas où les
termes du Mandat n'auraient pas fait l'objet d'une convention
antérieure entre les Membres de la Société des Nations. Puisqu'il
en est ainsi, la Cour doit donc s'assurer d'une manière concluante

que le Mandat a un caractère différent - qu'il est en fait un accord
international et a le caractère d'un traité.

Traduction du Greffe.
I7j We might add, what it should scarcely be necessary to Say, that
the fact that an act is done under an authority contained in an
instrument which is itself a treaty (in this case the League Covenant)

does not per se give the resulting act a treaty character. To take a
familiar recent instance-under Article 17 of the United Nations
Charter the General Assembly is authorized to approve the budget
of the Organization, and the budget as approved is binding on the
Member States. It could not be contended that it is on this ac-
count a "treaty" any more than could a resolution of the General
Assembly apportioning the expenses of the United Nations amongst
its Members under Article 17 (2)of the Charter.

Al1the arguments that have been advanced for the purpose of
establishing the treaty character of the Mandate seem to repose on
one or both of two assumptions. The first, which we have already
discussed, is that any instrument creating international obligations
has treaty character. In refutation of this view, we need only refer
to what we have already said under the head of "Legal nature of a

treaty or convention".

The second assumption is that if an act or instrument follows
upon certain antecedent consents, this entails that it is itself an
agreement. This is not the case. We have already cited cases such
as those under Article 17 of the Charter; and we could cite numerous
examples drawn from private law, of acts which can follow upon
various consents and agreements, but which are themselves of quite
a different character. Even legislative acts can follow upon certain
consents, and there may even be, and often is, a constitutional
requirement that these should have been obtained. Yet when a
Head of State issues a Decree or Order, and the latter recites
(as it often does) that it is made "by and with the consent" of
his Council, or of some other body, this does not impart even a
vestige of a contractual character to the resultant act.
Consequently, neither the fact that the Mandate created inter-
national obligations, nor the fact that it recites in its Preamble the

existence of certain antecedent consents, is conclusive, or carries
the matter much further. Of course, there had to be an antecedent
agreement between the Principal Powers to confer a Mandate on a
particular Power: and there had to be a common understanding-
cal1 it agreement-between them as to the draft terms of the Man-
date wich they would propose to the Council. Clearly the Man-
date would never have been promulgated except against a back-
ground of some general common understanding. But this does not
sufice to give it a treaty character. The test, as we have said
earlier, must be, not whether certain background consents or
understandings or agreements existed, nor whether international
obligations were created, but what avasthe characterof the act or
instrument that gave tlzoseoOligatio~:their legnl fovce.This act was

176 Nous pourrions ajouter, mais il devrait être à peine nécessaire
de le dire, qu'un acte accomplien vertu d'une autorisation contenue
dans un instrument qui est lui-même en traité (en l'espècele Pacte
de la Société des Nations) n'a Das i.bso facto un caractère conven-
1,
tionnel. Pour prendre un exemple récent et familier - aux termes
de l'article 17 de la Charte des Nations Unies, l'Assembléegénérale
est habilitée à approuver le budget de l'organisatiqn et le budget,
une fois approuvé, a force obligatoire pour les Etats Membres.
On ne saurait prétendre que le budget soit pour autant un traité »,
pas plus que ne l'est une résolution de l'Assembléegénéralerépar-
tissant les dé~ensesdes Nations Unies entre les Membres de l'Or-
ganisation conformément à l'article17, paragraphe 2,de la Charte.
Tous les arguments qui ont étéavancés en vue d'établir le

caractère conventionnel du Mandat semblent reposer sur l'une ou
l'autre des hypothèses suivantes, ou sur les deux. La première,
que nous avons déjà évoquée, est que tout instrument créant des
obligations internationales a un caractère conventionnel. Pour
réfuter cette manière de voir, il suffit de nous référerà ce que nous
avons déjà dit sous la rubrique (Caractère juridique d'un traité
ou d'une convention ».
La seconde hypothèse est que, si un acte ou un instrument fait
suite àcertains consentements antérieurs, il en résulte qu'il constitue
lui-mêmeun accord. Or, il n'en est rien. Nous avons déjà cité le

cas de l'article17 de la Charte; et nous pourrions citer de nombreux
exemples, tirés du droit privé, d'actes qui, faisant suite à divers
consentements et accords, ont eux-mêmesun caractère tout à fait
différent. Mêmedes actes législatifspeuvent faire suite à un consen-
tement; il se peut même, commec'est souvent le cas, qu'une règle
co?stitutionnelle exige ce consentement. Mais, quand un chef
d'Etat promulgue un décret ou une ordonnance indiquant, comme
c'est souvent le cas, que cet acte est effectué (par et avec le consen-
tement )de son conseil ou d'un autre organe, cela ne donne pas à

cet acte le moindre soupçon de caractère contractuel.
Par conséquent, ni le fait que le Mandat ait créé des obligations
internationales, ni le fait qu'il mentionne dans son préambule
l'existence de certains consentements antérieurs n'est concluant
ou nous avance beaucoup en la matière. Certes, il fallait un accord
antérieur entre les Principales Puissances tendant à conférer un
Mandat à une Puissance donnée :et il fallait une entente commune -
disons un accord -- entre elles quant aux projets de Mandat à
proposer au Conseil. Il est clair que le Mandat n'aurait jamais été
promulgué s'il n'y avait pas eu à l'arrière-plan une entente com-

mune et générale.Mais cela ne suffit pas pour lui donner un caractère
conventionnel. Comme nous l'avons vu plus haut, la pierre de
touche n'est pas de déterminer s'il existait à l'arrière-plan un
consentement, une entente ou un accord, ni si des obligations inter-
nationales avaient étécréées, mais quel était lecaractèrede l'acte
ou de I'instrztmentqui a donné à ces obligationslezwforce jzwidique. 492 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
in Our view the resolution of the Council. From the moment of
its issue on December 17, 1920, the Mandate had the force of law.
Previous to that, whatever agreements existed, it had not.

The facts we have adduced make it clear that the resolution of
the Council cannot be regarded as an instrument simply registering
and recording the terms of an international agreement, from
which agreement the rights and obligations concerned really
sprang. In the first place, this resolution, as has been seen, spe-
cifically recited (in the fourth recital which the Council itself
introduced) that the terms had not been agreed by entities which
had, or might be thought to have, an interest in the matter. Second-
ly, the Record makes it clear that, ashas been seen, the Council did
not simply take over and re-issue automatically the terms proposed
to it bythe Principal Allied and Associated Powers, in mere approval
of an antecedent and independent agreement, acting in effect as a
"rubber stamp". As has been noted, the idea of embodying the
Mandates in ordinary treaties or conventions had been abandoned;
and the Council, in certain significant respects already indicated,

altered the terms as proposed by the Principal Powers, and issued
these revised terms expressly as the Council's own act,in definition
of the terms of the Mandate. The mere fact that the Principal
Powers agreed amongst themselves as to what terms they would
"propose" to the Council, cannot possibly give the Mandate instru-
ment itself treaty character. Nor can the fact that these Powers
had in 1919 agreed on the States to whom a Mandate was to be
conferred.

In these circumstances,and having regard to the form of the Man-
date instrument and to the fourth recital in the Preamble, it is not
reasonably possible to consider that the onus which lies on the
Applicant States to establish that the Mandate had a treaty
character, has been discharged.
It has however been suggested that the Mandate is not al1 con-

tained in the relevant Council resolution, and that it is also partly
contained in Article 22 of the Covenant, which does have a treaty
character. We have already shown that what Article 22 was con-
cerned with was the systeri:In only provided for one specific obli-
gation to be imposed on Mandatories, namely to render reports to
the Council. But the obligationitself, so far as the Respondent State
was concerned, was imposed by Article 6 of the Mandate for South
West Africa, thus making it a self-contained instrument. The
relevant Council resolution was entitled, and has always been known,
as the "Mandate for German South West Africa"; and when, in the
international field, the Mandate for South West Africa is referred
to or cited, it is to this resolution that reference is made. That this
was considered to be "the Mandate" is apparent from the references OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE
492
Cet acte était, à notre avis, la résolution du Conseil. A partir de
cette résolution du 17 décembre 1920, le Mandat a eu force juri-
dique; auparavant, quels que fussent les accords pris, il n'avait

pas force juridique.
Les faits que nous avons exposés montrent clairement que la
résolution du Conseil ne saurait être considérée commeun instru-
ment se bornant àconsigner et à enregistrer les termes d'un accord
international dans lequel les droits et obligations en question .au-
raient eu leur véritable origine. En premier lieu, cette résolution,
comme nous l'avons vu, énonce spécifiquement (dans le quatrième
alinéa du préambule que le Conseil'lui-même a ajouté) que les
termes n'en avaient pas étéconvenus par des entités ayant ou
étant censées avoir un intérêten la matière. En second Iieu, les

documents montrent clairement, comme nous l'avons vu, que le
Conseil n'a pas simplement repris et publié automatiquement les
termes proposés par les Principales Puissances alliées et associées,
se bornant à approuver un accord antérieur et indépendant et
agissant pratiquement comme un organe enregistreur. Ainsi que
nous l'avons noté, l'idéed'incorporer les Mandats dans des traités
ou conventions ordinaires avait été abandonnée; le Conseil a
changé les termes proposés par les Principales Puissances sur
certains points importants déjà indiqués et il a publié un texte

revisé, statuant expressément de son propre fait sur les termes du
Mandat. L'accord des Principales Puissances sur les termes à
ccproposer » au Conseil n'a certainement pas suffi à donner un
caractère conventionnel à l'acte de Mandat même. Ko? plus que
l'accord conclu entre ces Puissances en 1919 quant aux Etats à qui
seraient attribués des Rlandats.
Étant donnéces circonstances et vu la forme de l'acte de Mandat
et l'existence du quatrième, alinéa du préambule, il n'est guère
possible d'estimer que les Etats demandeurs se soient acquittés
de la charge qui leur incombait de prouver que le Mandat avait

un caractère conventionnel.
On a toutefois suggéréque le Mandat n'est pas tout entier dans
la résolution pertinente du Conseil et qu'il est également en partie
contenu dans l'article22 du Pacte, qui a un caractère conventionnel.
Nous avons déjà montré que l'article 22 avait trait au système
des Mandats. La seule obligation spécifique qu'il imposait aux
Mandataires était de faire rapport au Conseil, mais, pour l'Etat
défendeur, cette obligation figurait dans l'article 6 du Mandat
pour le Sud-Ouest africain, qui était donc un instrument se suffisant

à lui-même. La résolution pertinente du Conseil a été intitulée
((Mandat pour le Sud-Ouest africain allemand ))et elle a toujours
étéconnue sous ce titre; lorsque dans le domaine international on
cite ou mentionne le Mandat pour le Sud-Ouest africain, c'est
toujours de cette résolution qu'il s'agit. Les référencesau «présent
Mandat ))figurant dans la résolution (aux articles 2 et 7, par ex-493 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE

contained in the resolution (e.g. in Article 2 and 7) to "the present
Mandate" l
* *

Certain subsidiaryindications as to the character of the hfandate
may now be noticed. There is, to begin with, the fact that under

the first paragraph of Article 7, the terms of the Mandate could
only be modified with the consent of the League Council. This
naturally was inserted in order to prevent any attempt at modifi-
cation, either unilaterally, or by agreement between the Mandatory
and some other entity or entities. It will be recalled that initially,
consent by a majority of the Council was proposed. But this was
altered bythe Council so as to require consent by the whole Council.
We attach no importance to the fact that-since the Council acted
by unanimity-this alteration gave a veto to the Principal Powers

as standing Members of the Council. The effect of the alteration
made by the Council was to give each Member a veto. What the
alteration introduced by the Council makes evident is that the
Mandate was regarded as being basically, as well as formally, the
act of the Council as such, whose consent as an entity was therefore
necessary for any modification of it. This provision is certainly not
consistent with the view that the role of the Council in bringing the
Mandate into being was that of a mere agent or promoter (entre-
preneur), utilized as a matter of convenience in order to give effect
in concrefe terms to the arrangements of others, and which there-

after drops out of the picture. Nor is the supervisory role of the
Coiincil under Article 6 of the Mandate consistent with such a view.

Finally, thereisthe fact that the Mandate, in common with al1the

other "B" and "CHMandates, was not registered as a "treaty orinter-
national engagement" under Article 18 of the Covenant-precur-
sor ofArticle 103of the United Nations Charter 2.The provision inthe
final paragraph of the Mandate, for its deposit in the Archives of the
League, did not amount to a registration of it as a treaty for
the purposes of Article 18. This was merely the cornmon form
provision, which appears in almost every international instrument,
for depositing the original text either with the headquarters gov-

Article22vof the Covenant, the Covenant is no longer in force as a treaty or con-
vention and, inany case, the adjudicatclause to which Articleof the Court's
Statutemust attach itself if it is to apply at all, is in the M(Article 7),
not the Covenant.
This has been confirmed by official enquiry at Geneva.

178 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 493

emple) montrent bien que celle-ci était considérée comme «le
Mandat » l.
* * *

On peut relever ici certaines indications subsidiaires sur le

caractère du Mandat, et, pour commencer, le fait que, d'après le
premier alinéa de l'article 7, les termes .du Mandat ne pouvaient
être modifiés qu'avec l'autorisation du Conseil de la Société des
Nations. Cette disposition a bien sûr étéinséréeafin de prévenir
toute tentative de modification soit unilatérale, soit par accord
entre le Mandataire et une ou plusieurs autres entités. On se rappel-
lera que ce qui avait été prévu à l'origine était l'approbation du

Conseil à la majorité. Mais c'est l'autorisation de tout le Conseil
qui est finalement devenue nécessaire. Nous n'attachons pas d'im-
portance au fait que cet amendement ait donné un droit de veto
aux Principales Puissances en tant que Membres permanents du
Conseil - puisque ce dernier devait suivre 'la règle de l'unanimité.
L'amendement introduit par le Conseil a eu pour effet de donner

un droit de veto à chacun de ses Membres. Ce que cet amendement
du Conseil met en évidence c'est que le Mandat était considéré
comme étant, fondamentalement aussi bien que formellement, un
acte du Conseil en tant que tel et que l'autorisation du Conseil en
tant qu'entité était par conséquent nécessaire pour toute modifi-
cation du Mandat. Cette disposition n'est certainement pas compa-
tible avec l'opinion selon laquelle le Conseil n'aurait joué dans

. l'institution du Mandat que le rôle d'un agent ou d'un entrepreneur
à qui on aurait jugé commode de faire appel pour donner effet en
termes concrets à des arrangements pris par d'autres et qui aurait
ensuite disparu de la scène. Cette opinion est également incompa-
tible avec le rôle de surveillance revenant au Conseil aux termes
de l'article 6 du Mandat.

Enfin, il y a le fait que le Mandat, de mêmeque tous les autres
Mandats (B ))et cC »,n'a pas étéenregistré en tant que ((traité ou
engagement international )aux termes de l'article 18 du Pacte -
précurseur de l'article 103 de la Charte des Nations Unies 2.Le
dépôt dans les archives de la Société desNations prévu au dernier
alinéa du Mandat ne constituait pas un enregistrement en tant que

traité aux fins de l'article18. Il ne s'agissait là que de la disposition
de forme commune à presque tous les instruments internationaux
et selon laquelle leur texte original doit êtredéposé soitauprès du

lAu surplus, même si l'on admet que le Mandat figure en partàl'articl22
du Pacte, ce dernier n'est plen vigueur en tant que traité ou conventioet,
de toute façon, la clade règlement judiciaireaquelle doit s'appliquer l'article
37du Statut de la Cour, pour autant qu'il soit applicable, se trouve dans le Mandat
(article 7) et non dans le Pacte.
Cela a étéconfirmé par des recherches officiellesve.
178 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
494
ernment or, as the case may be, with the international organization
in or under the auspices of which it has been drawn up. Indeed
a glance at the terms of the System of Registration approved by
the Council in May 1920 is sufficient to establish that the provision

for deposit in the League's archives could not amount to registration
under Article 18. This is further confirmed by the fact that none of
the Mandates-with the exception only of Iraq, which for special
reasons was in the form of a treaty- ever appeared in the Treaty
Series published by the League.

It is of course possible for an instrument in fact to be a treaty or
other international agreement despite non-registration, and there-

fore the non-registration of the Mandate was not of itself conclusive
as to the latter's character. But what the fact of non-registration
does conclusively establishis how it was regardedby thoseconcerned,
i.e. that they did not regard it as a treaty, convention or other form
of international agreement.
It is reasonably certain that if those concerned had definitely
regarded the Mandate as a treaty or convention, they would have
registered it under Article 18,as the United Kingdom laterregistered

the Mandate for Iraq. Certainly the need for.registration, if anyone
connected with the events of 1920 ever thought the Mandate in-
strument was a treaty or convention, could hardly have escaped
the notice of the Secretary-General. That the Mandate instrument
was not registered may not establish conclusively that it was not an
international agreement, but since it must be assumed that the
Members of the Leaguedid normally register anything they thought
had that character, non-registration is good evidence that, in the
case of the Mandate, neither the Council nor any Member of the

League (or any of the Principal Powers) thought it wasl.

A final factor militating against the view that the Mandate had
treaty character is the difficulty of satisfactorily identifying the
parties to it, considered as a treaty or convention. This matter we
shall consider in the next section.

3. Is the Mandate "in force" as a treaty or convention?

(a) At what date must it be in forceas such?
Since, in Ourview, the Mandate has not, and never did have the
intrinsic character of an international agreement, it is strictly

. l We are aware of course that inthe case of Mavrornrnatis (P.C.I. J., Series A/B,
No. 2, atII)the parties dinot dispute that the Palestine Mandate was a treaty
or convention in force. The issue was not contested, objto jurisdiction were
based on other grounds. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 494

gouvernement du pays hôte, soit, selon le cas, auprès de I'organi-
sation internationale dans le cadre ou sous les auspices de laquelle
l'accord a étéconclu. Un bref examen des termes du système
d'enregistrement approuvé par le Conseil en mai 1920 suffit à

montrer que le dépôt dans les archives de la Société desNations
ne pouvait constituer un enregistrement aux termes de l'article 18.
Au surplus, cela est aussi confirmépar le fait qu'aucun des Mandats
- à l'exception du Mandat pour l'Irak, qui pour des raisons spéciales
avait la forme d'un traité - n'a jamais figurédans le Recueil des
traités publié par la Sociétédes Nations.
Certes, il est possible qu'un instrument constitue en fait un traité
ou un autre accord international mêmes'il n'a pas étéenregistré

et ce défaut d'enregistrement ne suffit par conséquent pas à dé-
terminer le caractère du Mandat. Mais le défaut d'enregistrement
est concluant quant à la manière dont les intéressésenvisageaientle
Mandat: ils ne le considéraient pas comme un traité, une conven-
tion ni un accord international sous une autre forme.
Il est raisonnablement certain que, si les intéressésavaient nette-
ment considéréle Mandat comme un traité ou une convention, ils

l'auraient fait enregistrer conformément à l'article 18, comme le
Royaume-Uni a fait plus tard enregistrer le Mandat pour l'Irak.
Il est certain que, si une des personnes mêlées aux événementsde
1920 avait pu penser que l'acte de Mandat était un traité ou une
convention, cela aurait difficilement échappéà l'attention du Secré-
taire général.Le fait que l'acte de Mandat n'ait pas étéenregistré
. ne permet peut-être pas d'établir de façon concluante qu'il ne
s'agissait pas d'un accord international mais, comme on doit sup-

poser que les Membres de la Société desNations faisaient normale-
ment enregistrer tout instrument présentant à leurs yeux un tel
caractère, ce défaut d'enregistrement prouve bien que ni le Conseil
ni aucun Membre de la Société desNations (niaucunedesPrincipales
Puissances) ne pensait que le Mandat fût un accord international l.
Un dernier fait va à l'encontre de la thèse selon laquellele Mandat
aurait un caractère conventionnel: c'est la difficultéd'identifier de

manière satisfaisante les parties au Mandat, si on le considère
comme un traité ou une convention. Nous traiterons de cette
question dans la section suivante.

3. Le Mandat est-il ((en vigueur ))en tant que traité ou convention?
a) A quelle date doit-il Être en vigueur commetel?

Étant donnéqu'à notre avis le Mandat n'a pas et n'a jamais eu
le caractère intrinsèque d'un accord international, il est à stricte-

Certes, nous n'ignorons pas que, dans l'affaire Mavrommafis (C. P. J. I., série
un traité ou une convention en vigueuMais ce point n'a pas été débattu, lest
exceptions d'incompétencse fondant sur d'autrmotifs.495 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
unnecessary to consider whether. it is still in force, regarded as a

"treaty or convention". Nevertheless we propose to do so, because
the Mandate, if not itself an international agreement, had certain
aspects on the basis of which it may be argued that it had some
conventional character. This being so, we would not wish to rest Our
view on the sole conclusion that it had not-correct though we
believe this conclusion to be.

Furthermore we think it essential to consider whether the
Mandate is still "in force" as a treaty or convention, assiiming it
was one, for the following reason. The fact that the issue raised
by the first Preliminary Objection is not whether the Mandate is
simply "in force", appears to have been completely lost sight of.
The issue arising on Article 37 of the Statute is whether the Mandate

is in force as a treaty or convention. For this purpose it is not suf-
ficient to rely on the Court's 1950 Opinion as establishing that the
Mandate is, in any case, in force on an instz'tz~tionab lasis.

The term "in force" in Article 37 must, we think, be taken to have
the same meaning as in the reference to "treaties and conventions

in force" in Article 36, paragraph 1, of the Çtatute, namely in
force at the date when the Court is seized of the case by Applica-
tion, this being the date when al1 the elements necessary to give
the Court jurisdiction must be present l.

(b) Who wozrldbethe $arties to the Mandate as a treaty or coniien-
tion in force?

It is, or should be, common ground that, assuming the Mandate
to have been a treaty or convention, there must have been parties
to it, and that it would have ceased to be in force as such on the
disappearance of the parties, and/or the reduction of them to below
the minimum number (of two) requisite for an agreement to be,
and remain, in force as such. We do not accept the view that a

treaty can be "partyless". The present-day United Nations trus-
teeships have been cited. 1T'hether these are true agreements

The suggestion is advancedthat assuming the Mandate was a treaty or con-
vention in force prior to the dissolutof the League, Article 37 of the Court's
Statute would havepermitteda State, a Member both of the League and the United
Nations, to invoke the jurisdictof this Court up to the time that the League was
under it, and that accordinglit must beiconcluded that such States continuedined
thereafterand until today to enjoy the right to invoke Article 7 of the Mandate.

The premises manifestly donot support the conclusion.
Article37 of the Statute did not keep in force treaties or conventions in forcewhen
the Statute came into operationIt goes without sayinthat if at the time wheii
the jurisdictioof the Court is invoked a treaty or conventioncome toan end,
as such, whether by effluxion of time, agreemebetween the parties, ofor any
other reason, such treatyor conventioncannot provide the ground upon which
jurisdictionan be based. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 495

ment parler inutile de rechercher s'il est encore en vigueur comme
((traité ou convention ))Nous nous proposonsnéanmoins de lefaire
car, sileMandat n'est pas en soi un accord international, il présente

cependant certains aspects sur lesquels on peut se fonder pour pré-
tendre qu'il s eu, dans une certaine mesure, un caractère conven-
tionnel. Cela étant, nous ne voudrions pas appuyer notre opinion
sur la seuleconclusion qui consiste àdire qu'il n'a pas eu ce caractère
- encore que nous estimions cette conclusion exacte.
Il est une autre raison pour laquelle nous croyons essentiel

d'examiner si le Mandat est encore ((en vigueur ))comme traité ou
convention, à supposer qu'il ait eu ce caractère. On semble avoir
complètement perdu de vue le fait que la question soulevée par la
première exception préliminaire n'est pas simplement de savoir si
le Mandat est (en vigueur ». La question découlant de l'article 37

du Statut est de savoir si le Mandat est en vigueur commetraitéou
convention.A cet égard, il ne suffit pas de s'en remettre à l'avis de
la Cour de 1950 comme établissant qu'en tout état de cause le
Mandat est en vigueur sur une base institutionnelle.
L'expression ((en vigueur )doit, selon nous, êtreconsidérée comme

ayant à l'article 37 le mêmesens qu'à l'article 36, paragraphe 1,
du Statut, où il s'agit des ((traités et conventions en vigueur »,
c'est-à-dire en vigueur à la date de l'introduction d'une affaire par
voie de requête,qui est la date à laquelle doivent êtreprésents tous
les élémentsnécessairespour assurer la compétence de la Cour l.

b) Quelles seraient les partiesau Maqzdatconsidéré commeun traité
ou une conventionen vigueur?

Il est, ou il devrait être, admis que, si le Mandat a étéun traité
ou une convention, il a dû comporter des parties contractantes et
qu'il a cesséd'êtreen vigueur comme tel si ces parties ont disparu

etlou si leur nombre est tombé au-dessous du minimum (de deux)
nécessairepour qu'un accord soit et demeure en vigueur comme tel.
Nous ne saurions admettre l'idéed'un traité sans parties. On a cité
les actuelles tutelles des Nations Unies. Nous n'avons pas à dire s'il
s'agitlà devéritables accords(voirarticles 81-83 et 85 de la Charte) ;

l On a avancé, dans l'hypothèse où le Mandat aurait été un traité ou une con-
vention en vigueur avant la dissolution de laciét6 des Nations,que l'article 37
Nations et des NationsUnies d'invoquer la juridiction de la présente Cour jusqu'à
la date de la dissolution de la Société;qu'à partir du moment où le Mandat a été
régipar l'article 37 il a contàl'être;et qu'en conséquence il y a lieu de conclure
que ces États ont continué depuis lors et jusqu'à ce jour à jouir du droit d'invoquer
l'article 7 du Mandat.
Il est évident que les pr6misses ne justifient pas la conclusion.
L'article 37 du Statut nel>rol~nyeapas la durée des traités ou conventions en
vigueur à l'époque où le Statut est devenu applicableIl va sans dire quesi, au
moment où la juridiction dela Cour est invoquée, un traité ou une conventioest
devenu caduc que ce soit par expiration dson terme, par accord entre les parlies
ou pour toute autre raison, ce traité ou cette convention ne saurait constitler
fondement de la juridiction de la Cour.(seeArticles 81to 83 and 85 of the Charter) is not a question we are
called upon to or should express an opinion upon; this would
i~ivolvean interpretation of the relevant provisions of Chapter XII
of the Charter. Bi~t if they are agreements they certainly have
parties. In 1320, however, and under international law as it theri

stood, there was no such thing as an international agreement the
parties to which could not readily be identified.
\Te must therefore consider the question of who were (apart
from the Mandatory itself), and who are now, the parties to the
Mandate considered as a treaty or convention: but we do not
propose to examine obviously untenable propositions such as
that the inhabitants of the mandated territory were directly or
indirectly parties. There remain for consideration the Principal
Allied and Associated Powers, the individual Members of the League
of Nations, and finally the 1-eague itself or League Council.

(i) The Principal Allied and Associated Powers-It has been
suggested that the Principal Allied and Associated Powers were
the parties, together with the Mandatory. If such was the case,

these Powers appear to have been totally unaware of it for up-
wards of forty years. It has already been seen that the original
idea of casting the Mandate into the form of an ordinary treaty 3r
convention was abandoned, and in Our view no contractual nexus
was established or intended to be established with or betuieen
the Principal Allied and Associated Powers on the basis, or in
consequence, of the Mandate instrument. This is evidenced not
only from the facts antecedent to December 17, 1920, but also
from the text of the Preamble itself, which makes it clear that
the role of the Powers was confined to naming the Mandatory,
and to proposing the terms of the Mandate for the acceptance or
rejection of the Council-terms which the Council in fact modified
before issuing them as its own act. Once the Powers had taken
this action they became functus ogicio, apart from such residual
or reversionary rights in the mandated territory itself as they
may have retained on a dormant basis. Thenceforward, the action

was the League Council's, and if it resulted in a treaty or conven-
tion at all, it was not one to which the Powers as such ar,d as a
group were parties; for thencefonvard (as provided by the Cove-
nantl the Mandatory exercised the Mandate "on behalf of the
League", and the Powers disappeared from the scene except as
Members of the Council.
The absence of any contractual nexus so far as the Powers
were concerned, is further evidenced by the fact that, although
the United States of America had participated in the earlier drafting
of the "C" Mandates, and in the allocation of the Mandate for South
West Africa to the Respondent State in 1919, it not only was not
present at the Coiincil Meeting of December 17, 1920-since it had

181cela impliquerait une interprétation des dispositions pertinentes du
chapitre XII de la Charte. Mais s'il y a accords,il y a certainement
parties. Au reste, en 1920 et selon le droit international de l'époque,
il n'existait pas d'accords internationaux dont les parties ne pussent
êtrefacilement identifiées.

Il nous faut donc examiner la question de savoir quelles ont été

(outre le Mandataire lui-même)et quelles sont à présent les parties
au Mandat considérécomme traité ou convention : nous n'avons pas
l'intention cependant d'examiner des propositions évidemment in-
soutenables, telles que celle quiveut que les habitants des territoires
sousMandat soientdirectement ou indirectement parties au Mandat.
Reste à examiner le cas des Principales Puissances alliéeset asso-
ciées, des Membres in6ividuels de la Société desNations et enfin
de la Sociétéelle-mêmeou de son Conseil.

i) Les Principales Puissances alliéeset associées. - On a prétendu
que les Principales Puissances alliéeset associéesont été,en même
temps que le Mandataire, parties au Mandat. S'il en a étéainsi ces
Puissances semblent l'avoir totalement ignoré pendant près de
quarante ans. Nous avons déjà vu que l'idéepremière de donner au
Mandat la forme d'un traité ou d'une convention ordinaire avait
été abandonnée; à notre avis, aucun lien contractuel n'a été établi
avec ou entre les Principales Puissances alliéeset associéesni sur
la base de l'acte de Mandat ni en conséquence de cet acte, et l'inten-
tion n'a jamais étéqu'il en fût ainsi. C'est ce que prouvent non

seulement les faits antérieurs au 17 décembre 1920 mais encore le
texte mêmedu préambule, lequel indique clairement que le rôle
des Puissances s'est borné à nommer le Mandataire et à proposer
les termes du Mandat au Conseil, qui devait les accepter ou les
rejeter - et qui en fait les a modifiés avant de les promulguer
comme émanant de lui-même. Dès au'elles eurent fait cette dé-
marche, les Puissances sont devenues functus oficio, sauf à l'égard
des droits résiduels ou des droits de retour sur le territoire sous
Mandat lui-mêmequ'elles ont pu conserver à titre expectatif. A

partir de ce moment, c'est le Conseil de la Sociétéqui a agi et, si
un traité ou une convention a pu en résulter de quelque manière
que ce soit, les Puissances, comme telles et comme groupe, n'y ont
pas été parties; car, dèslors (commele Pacte en dispose), le Manda-
taire a exercéle Mandat ((au nom de la Société ))et les Puissances
ont disparu de la scène, si ce n'est à titre de Membres du Conseil.
L'absence de tout lien contractuel en ce qui touche les Puissances
est démontrée en outre par le fait que, bien que les Etats-Unis
d'Amériqueaient participé àla premièrerédaction des Mandats (C ))

et à l'attribution à 1'Etat défendeur, en 1919, du Mandat pour le
Sud-Ouest africain, non seulement ils n'ont pas participé à la
séancedu 17 décembre 1920 du Conseil de la Société desNations
181 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAUKICE
497
never ratified the Treaty of Versailles or become a Rlember of the
League--but was unaware of what had been submitted to the
Council on December 14, 1920, and dealt with by the latter three
days laterl; or of w-hat action the Council had taken, until after
the event. bioreoker we know that in the separate treaty which the
United States concluded with Germany in Berlin in rgz?, it re-

served for itself all rights and advantages set out in the Treaty of
Versailles for the PrincipalAllied and Associated Pouers, including
those in respect of the former German colonies, and stipiilated that
it should not be bound by any action taken by the League of Na-
tions unless the 1:nited States should expressly give its assent to
such action. Whether the 'L'nitedStates ever did expressly $ive
its consent to the terms of the Mandate for couth 'Il'est-\fi-ica does
not appear.

The view that the Powers were or regarded themselves aa
being parties to the Mandate (or to ariy of the Mandates) is equally

impossible to reconcile with their subsequent conduct, as also
with certain elements of the legal situation resulting from the
Mandate instrument.
At no time subsequent to December 1920, did any of the Powers
claim to be a separate party, qua Principal Allied Powers, or to
have any interest in the conduct of the Mandate othenvise than
through their membership of the League Council. Such a claim
would also have been hardly consistent, legally, with the fact that
according to paragraph I of Article 7 of the Mandate, it could
only be modified with the consent of the League Council (a similar
provision appeared in al1 the "B" and "C" Mandates).

This situation was no doubt masked by the fact that the Principal

Powers (minus the United States however) were themselves per-
manent members of the League Council which acted by unanimity.
Moreover, it is possible, though not easy, to read paragraph I of
Article 7 of the Mandate as not excluding the necessity for other
consents, additionally to the Council's. Again, it can be contended
that countries may become parties to treaties which they have
agreed shall be subject to modification without their consent, and
that this was in fact the position of the Powers in relation to the
Mandate, because of or under paragraph I of Article 7.

These are far-fetched arguments, or hypotheses (speculations
really), and the point is that there is no evidence at al1 to show
that this was the position, rather than the much more natural

and likely hypothesis that if the Mandate was a treaty, the other

This appears from Annexes 154, 154 a, bc,to Procès-Verbaux of Meetin?
of 12th Session of the Council of the League of Nations.
182- puisqu'ils n'ont jamais ratifié le traité de Versailles ni adhéréà
la Société - mais encore ils n'ont connu qu'après coup ce qui a été
soumis au Conseil le 14 décembre 1920, pour êtreréglétrois jours
plus tard l, et ce qui a étédécidépar le Conseil. Nous savons au
reste que, dans le traité séparé queles États-unis ont conclu avec
l'Allemagne à Berlin en 1921, ils se sont réservétous droits et
avantages prévus dans le traité de Versailles au bénéficedes Prin-
cipalesPuissances alliéeset associées,y comprisceux qui touchaient
aux anciennes colonies allemandes, et ont stipulé qu'ils ne seraient
liéspar aucune décision dela Sociétédes Nations à moins d'y avoir

expressément donné leur accord. On ne voit pas si les États-unis
ont jamais expressémentdonnéleur agrément aux termes du Mandat
pour le Sud-Ouest africain.

11est également impossible de concilier l'idée que les Puissances
étaient parties au Mandat (ou à l'un quelconque des Mandats), ou
se considéraient comme telles, avec leur conduite ultérieure, non
plus qu'avec certains élémentsde la situation juridique découlant
de l'acte de Mandat.

Après le mois de décembre 1920, aucune Puissance n'a jamais
prétendu être, en qualité de Principale Puissance alliée, partie
séparéeau Mandat ni avoir d'autres intérêtsdans l'administration
du Mandat que ceux qui découlaient de sa qualité de Membre du
Conseil. D'ailleurs, toute prétention de ce genre n'eût guère été
juridiquement compatible avec le fait qu'aux termes du premier
alinéa de son article 7 le Mandat ne pouvait êtremodifiéqu'avec
l'autorisation du Conseil de la Sociétédes Nations (une disposition
similaire figurant dans tous les Mandats « B » et «C »).
Cette situation était sans doute obscurcie par le fait que les
Principales Puissances (à l'exception toutefois des États-unis)

étaient elles-mêmes Membrespermanents du Conseil de la Société
des Nations, lequel prenait ses décisions à l'unanimité. On peut
en outre, mais ce n'est pas facile, interpréter le premier alinéa de
l'article7 du Mandat comme n'excluant pas la nécessitéd'autres
autorisations en sus de celle du Conseil. On peut égalementsoutenir
que despays peuvent devenir parties à des traités tout en acceptant
qu'ils puissent êtremodifiéssans leur consentement et que telle a
étéen fait la position des Puissances à l'égarddu Mandat en raison
ou en vertu du premier alinéa de l'article 7.
Ce sont là des arguments ou deshypothèses (en réalité des spécu-
lations) forcées; l'important est qu'absolument rien ne prouve

que ces hypothèses soient exactes, plutôt que celle, beaucoup plus
naturelle et probable, d'après laquelle, si le Mandat a été un traité,

l C'est ce qui ressort des annexes 154et 154a, b et c aux procès-verbauxde la
douzième session du Conseil de la Sociétédes Nations.
182 party to it was the League alone, or the League Council acting

for it.It is quite clear that the Council's view was that it alone was
the competent authority to modify the terms of a Mandate in-
strument, a view which it is evident the Principal Allied and
Associated Powers on the Council accepted. The Council on many
occasions acted on this view. It seems indisputable that the Prin-
cipal Allied and Associated Powers on the Council accepted the

position that, except in their capacity as Members of the League
Council, their functions had been completed once the Mandates
had been established. There is no evidence to suggest that any of
them ever thought that their consent was essential to any modifica-
tion of a Mandate, or that this was merely because they had waived

their rights in the matterl.
But whatever may have been the position in the time of the
League of Nations, the view that the Powers were (and still are
now) parties to the Mandate as a treaty or convention, would lead
to even more formidable difficulties to-day, particularly if the

Court's 1950finding that the Mandate could be alteredby agreement
between the Mandatory and the United Nations was correct--
for in the Assembly of the United Nations the Principal Powers
have no controlling vote or veto, and only three of them are-if
the United Statesis included-Permanent Members of the Security

Council. One can only conclude that in the absence of express
provisions producing such a result, it is not legally possible to
entertain the idea that a group of countries can be parties to a
treaty which can be altered without their consent, or even, it would
seem, contrary to their wishes.

Nor is the post-1945 conduct of the Powers consistent, any
more than it ever war, with the view that the]., or any of them,
were parties to the various Mandates as treaties or conventiocs.

l What took place in relation to the Mandate of Iraq is we think informative.
The Mandate was conferred upon the United Kingdom by the Supreme Allied
Council at San Remo on Aprilz5,1920.The United Kingdom accepted the Mandate.
Thereafter the UnitedKingdom entered into a series of Treaties between itself
and the King of Iraq. These or most of them were communicated to the Council of
the League. No other Statewas a party to these Treaties.
In a communication from the United Kingdom of September 27, 1924, to the
Council of the League-and to italone-these Treaties were summarized and
supplemented by a statement setting out the Mandatory Powers own obligations
to the League, with regard to the application of Ar22of the Covenant. In this
communication the United Kingdom stated that it was "willing to agree" with the
Councilupon certain termswhich were set out.
Amongst the undertakings given tothe Council and accepted by it was one that
an annual report should be made to the satisfaction of the Council, another to the
effect that no modification of the terms of the Treaties would be agreed to without
the consent of the Council, and an adjudicatioclause which in generalfollows
PrincipalAllied and Associated Powers wereas such complete strangers to these
undertakings;which were given to the Council and to it alone.l'autre partie à ce traité a été laSociétéseule ou le Conseil de la
Sociétéagissanten son nom. II est très clair que le Conseil estimait

pour sa part qu'il était la seule autorité ayant compétence pour
modifier les termes d'un acte de Mandat et que les Principales
Puissances alliéeset associéessiégeant au Conseil partageaient ce
point de vue. En de nombreuses occasions, le Conseil a agi sur cette
base. Il parait incontestable que les Principales Puissances alliées

et associées siégeant au Conseil ont admis que, sauf à titre de
Membres du Conseil de la Société,leurs fonctions avaient pris fin
dès que les Mandats eurent étéétablis. Rien ne permet de penser
qu'aucune d'entre elles ait jamais cru que son autorisation fût

indispensable pour modifier un Mandat, ni qu'il n'en fût ainsi que
parce qu'elles avaient abandonné leurs droits en la matière l.
Mais, quelle qu'ait pu êtrela situation à l'époquede la Société
des Nations, dire que les Puissances ont été(et sont encore) parties
au Mandat considérécomme un traité ou une conventionsoulèverait

aujourd'hui des difficultés encore plus insurmontables, surtout si
l'on admet la conclusion à laquelle la Cour est parvenue en 1950
et d'après laquelle le Mandat pourrait $tre modifiépar accord entre
le Mandataire et les Nations Unies - car les Principales Puis-

sances n'ont ni voix prioritaire ni droit de veto à l'Assembléedes
Natjons Unies et trois d'entre elles seulement - en y comprenant
les Etats-Unis d'Amérique - sont Membres permanents du Conseil
de Sécurité. Il faut donc conclure qu'en l'absence de dispositions
expresses à cette fin il est juridiquement impossible de penser qu'un

groupe de pays puissent êtreparties à un traité susceptible d'être
modifié sans leur consentement ou même,semble-t-il, contraire-
ment à leur avis.
Le comportement des Puissances depuis 1945 n'est pas plus com-

patible qu'il ne l'avait été auparavant avec la thèse d'après laquelle
toutes, ou l'une quelconque d'entre elles, auraient été parties aux

Ce qui s'est passé au sujetdu Mandat pour l'Irak nous paraît instructif.
Le Mandat a étéconféréau Royaume-Uni par le Conseil supérieur alliéSan
Remo, le 25 avril 1920. Le Royaume-Uni a accepté le Mandat.
Ensuite de quoi le Royaume-Uni a conclu une série de traités avec le roi d'Irak.
Ces traités ou la plupart d'entre eont étécommuniqués au Conseil de la Société.
Aucun autre État n'y était partie.
Dans une communication du Royaume-Uni du 27 septembre 1924adressée au
Conseil de la Socié-é et au Conseil seul -ces traités étaient résuméset complétés
par une déclaration fixant les obligationde la Puissance mandataire envers la
Société,eu égardà l'application del'arti22edu Pacte. Danscette communication,
le Royaume-Uni se déclaraitprêt à s'entendre1avec le Cogzseilsur certains termes
qui étaient indiqués.
Parmi les engagementspris à l'égard du Conseil et que celui-ci a acceptés, figu-
raient un engagement de présenterun rapport annuel denature à satisfaire lCon-
seil, une promesse qu'aucune modification ne serait apportée aux termes du traité
sans l'autorisation dConseil et une clause de règlement judiciaire ayant, en gros,
la même forme que le second alinéa de l'article 7 du Mandapour le Sud-Ouest
africain.Les Principales Puissances alliéeset associées étaient, comme telles,
absolument étrangères à ces engagements, lesquels étaient pris à l'égard du
Conseil et du Conseil seulement.
183 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
499
On that basis what would one make, for instance, of the passage

in the resolution of the League of April 18, 1946, which referred to
the Mandatories' intentions to continue to discharge their obliga-
tions under the Mandates "until other arrangements have been
agreed to between the United Nations and the respectiveMandato-
Powers" (italics ours) ?

Again, when various cd the mandated territories were brought
under the Trusteeship System of the United Nations, this was
done directly by the Mandatory Power concerned, and at no time
did any of the Principal Allied and Associated Powers claim, as

ruch, any right to be a State "directly concerned" with the terms of
trustecship under -1rticle 79 of the Charter of the United Sations.

The conclusion must be that the notion of the Principal Powers
or any of them being or ever having been parties to the Mandate,

qzta treaty or convention, is too artificial and gratuitous to be ac-
cepted. It represents little more than a rather desperate attempt
to prod~ce some entity as a party which is still extant, and can
therefore, together with the Mandatory, be pointed to as keeping
the Mandate in force today as a treaty or convention1. Much the

same applies to the next suggested category of parties, to which
we now address ourselves.

(ii) The indiüidun.1 Members oj the Leagzre-If the Members of

the League were parties to the Mandate in their capacity as such,
there would be no problem, for the League being dissolved, its
former Members have lost that capacity and could no longer be
parties to the Mandate as Members of the League. The question
is therefore, and must be, if they were parties, were they so in their

individual capacity as separate sovereign States, still extant (as
States) today?

We think this .question can only be answered in the negative.
An instrument or "Declaration" (which was the name given to

l A variation of this theme is the view that four only of the PrinAllied and
Associated Powers were parties to the Mandate as a treaty or convention. This
variationomits the United States. This contentionis, if anythingmore artificial
than the major theme of which it is a variationIts only ment is that it seeks to
overcome the difficulty created bythe fact that the United States, not being a
Member of the League, was not present at the meeting of the Council in December
1920. Otherwise the same criticisms apply to it. The CniteStates had of course
participatedin the conferring ofthe Mandate and in drafting the termsproposed
to the Council.
The contention in any case is quite inconsistwith the recitals to the Council's
resolution of December17, 1920, recitaIand 2.The Principal Allied and Associated
Polvers by definitionunder the Peace Treaty included the United States. The
United States \vas distinctlyincluded in the constantlyused descriptivephrase
"the Principal Allied and Associated Powers": see Annex 154b, Minutes of 12th
Session of Council of the League.
184 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 499

divers Mandats considérés comme des traités ou conventions.
Ainsi, comment expliquerait-on, dans cette hypothèse, le passage
de la résolution de la Société desNations du 18 avril 1946 mention-

nant l'intention des Mandataires de continuer à assumer leurs obli-
gations contenues dans les Mandats jusqu'à ce que de nouveaux
arrangements soient pris entre les Nations Unies et les diverses
Puissances mandataires »(les italiques sont de nous) ?
De même,lorsque divers territoires sous Mandat sont passéssous

le régime de tutelle des Nations Unies, la chose a étéfaite directe-
ment par la Puissance mandataire intéresséeet aucune des Princi-
pales Puissances aQées et associées en tant que telle n'a jamais
revendiqué un droit quelconque à êtreconsidérée commeun État

(directement intéressé » aux termes du régimede tutelle, en vertu
de l'article 79 de la Charte des Nations Unies.
Il faut donc en conclure que l'idéeque les Principales Puissances
ou l'une quelconque d'entre elles soient ou aient jamais étéparties
au Mandat en tant que traité ou convention est trop artificielle et

trop gratuite pour qu'on l'admette. Ce n'est guère qu'un effort
quelque peu désespéré pour présenter une entité quelconque comme
une partie existant encore et susceptible par conséquent, avec le
Mandataire, d'être considérée comme maintenant le Mandat en
vigueur à l'heure actuelle en tant que traité ou convention l. Il en

est de même,dans une très large mesure, d'une deuxième catégorie
de parties éventuelles dont nous allons traiter ci-dessous.
ii) Les _Wembresindividuels de la Sociétédes Nations. - Si les

Membres de la Sociétéont étéen leur qualité comme tels parties
au Mandat, aucun problème ne se pose car, la Sociétéétant dissoute,
ses anciens Membres ont perdu ladite qualité et ne peuvent plus
être parties au Mandat en tant que Membres de la Société.La
question est et doit êtrepar conséquent de savoir si, à supposer

qu'ils aient étéparties au Mandat, ils l'ont été à titre indiyiduel
comme Etats souverains distincts existant encore (en tant qu'Etats)
aujourd'hui.
Nous estimons que cette question ne saurait être tranchée que
par la négative. Ln acte ou (Declaration » (tel était le nom donné

Lne variante de ce thème consisteàdire que quatreseulement des Principales
Puissances alliéeset associées ont été partiesau Mandat considéré comme un
traité ou une conventionOn omet ainsi les États-unisCette thèse ests'il sepeut,
plus artificielle encque celle dont elle est une variantSon seul mérite est de
tenter de surmonter la difficulténée du fait que les Étatsne faisant pas partie
de la Société des Nations, n'ont pas particàpla session du Conseil de décembre
1920. Pour le restelle est passible des mêmes critiques. Les Étatsont évidem-
ment participé à l'élaboration du Mandat et à la rédaction des termes proposés
au Conseil.
En tout état de cause cette thèse est absolument incompatible avec les deux
premiers considérants dela résolution du Conseil du 17 décembre 1920. Les Principa-
les Puissances-alliées et associées comprenaiepar définition, en vertdu traité
de pais, les Etats-Unis.Ceux-ci étaient distinctementcompris dans l'expression
descripti\-rles PrincipalesPuissances alliées et associé1)Voir procès-verbaux
de la douzième session du Conseil de la Société desons, annexe 154 b.the Council's Resolution of December 17, 1920, embodying the
Mandate) issued by and in the name of the Council as its own act,
coidd not bring in the Members of the League except in their
capacity as such-a capacity they no longer have. For them to

have become, and still to be, parties to the Mandates, in their
individual statal capacity, independently of their membership of
the L.eagzie,would have required something in the nature of the or-
dinary processes of separate signatures, ratifications, full powers,
etc. The whole form and method of issue of the Mandate is hostile
to the notion of the individual Members as separate parties to it,
or as having any status in regard to it, other'than as Members of
the League and through their participation in its activities.
But in any case, the notion of the Members as separately and
individually parties, is excluded by the express statement in the
Preamble to the Mandate (fourth recital) that the Members of
the League, not having previously agreed upon the tern~s of the
Mandate, these were now being defined by the Councilin the exercise
of the power given it to do so in such circumstances by Article 22,
paragraph 8, of the Covenant. Forty or fifty countries cannot

be separate parties to an agreement which specifically recites that
they have not agreed upon its terms. It has been suggested that
the term "Members of the League" in this fourth recital had some
special, limited and restricted meaning, not including the generality
of the Members, and confined, for instance, to the Principal Powers.
If this were correct, then, since it must be assumed that the term
"Member" or "Members" of the League had the same meaning
wherever used in the Mandate, it would follow that the term
"any ...Member of the League" as used in Article 7,paragraph 2,
had the same alleged special, limited and restricted meaning as in
the Preamble, and did not therefore include the Applicant States
now claiming under paragraph 2 of Article7.

But clearly this suggestion is not correct. It was not merely a
question of the Principal Powers giving up the notion of negotiating
the Mandate by treaty or convention. The other Members of the
League were extant, but they were hardly even consulted or asked
to agree. From the Summary Record of a meeting of the Sub-
Committee VI (c) of the League Assembly, the Committee on whose
business agenda the question of Mandates was placed-a meeting
held as late as December 13, 1920- it appears that the Council
of the League were already considering the draft of "A" Mandates,
and would probably be considering shortly the "B" and "C"
Jrafts also, yet the Assembly was being kept in the dark on what
was happening. Copies only of the draft "A" Mandates had been
furnished by the Council to the Sub-Committee, but on the strict
understanding that this information was confidential and that it

185à la résolution du Conseil du 17 décembre 1920 qui contenait le
Mandat) émispar et au nom du Conseil, agissant de son propre

fait, n'a pu faire entrer en jeu les Membres de la Sociétéqu'en leur
qualité comme tels - qualité qu'ils n'ont plus. Pour qu'ils soient
devenus et soient encore parties aux Mandats en leur qualité
individuelle d'Etats, indépendamment de leur appartena.nce à la
Sociétéi,l aurait fallu quelque chose qui relevât du processus habituel

des signatures, ratifications, pleins'pouvoirs etc. séparés.La forme
et la procédure qui ont présidé à l'établissement du Mandat inter-
disent de croire que les Membres individuels aient pu y êtreparties
à titre distinct et qu'ils aient pu avoir à l'égarddu Mandat un autre
statut que celui de Membres de la Sociétéparticipant à ses activités.
Mais, en tout état de cause, cette conception des Membres

considérés commeparties individuelles et distinctes est exclue par
l'énonciation expresse qui figure dans le préambule du Mandat
(quatrième considérant) et d'après laquelle, les termes du Mandat
n'ayant pas fait l'objet d'une convention antérieure entre les
Membres de la Société,il a étéexpressément statué à leur égard
par le Conseil dans l'exercice des pouvoirs que lui conférait l'ar-

ticle 22, paragraphe 8, du Pacte pour agir en pareil cas. Quarante
ou cinquante pays ne sauraient êtreparties distinctes à un accord
énonçant expressément que ses termes n'ont pas fait l'objet d'une
convention entre eux. On a avancé que l'expression Membres de
la Sociétédes Nations ))revêt dans le quatrième considérant un
sens spécial, limité et restreint, qu'elle ne porte pas sur I'ensembIe

des Membres de la Sociétéet qu'elle se borne, par exemple, aux
Principales Puissances. S'il en est ainsi, étant donné qu'il faut
supposer que les mots ((Membre ))ou ((Membres ))de la Société
des Nations ont le mêmesens où qu'ils figurent dans le Mandat, il
s'ensuit que l'expression ((un autre Membre de la Société ))a, au
deuxième alinéa de l'article 7, le même prétendu sens spécial,

limité et restreint que dans le préambule et ne comprend donc pas
les Etats demandeurs qui se réclament à présent du deuxième
alinéa de l'article 7.
Mais il est évident qu'une telle supposition est erronée. 11 ne
s'agissait pas seulement que les Principales Puissances abandon-
nassent l'idéede négocier le Mandat par voie de traité ou de con-

vention. Les autres Membres de la Sociétéexistaient, mais ils
n'ont guère étéconsultés ou sollicitésde donner leur consentement.
Il ressort du procès-verbal d'une séance--tenue le 13décembre1920
- par le sous-comitéVI(c) de l'Assembléede la Société desNations,
quiavait la question des Mandats à son ordre du jour, que le Conseil
de la Sociétéexaminait déjà les projets de Mandats (A ))et allait

probablement examiner sous peu les projets de Mandats (B ))et
((C )),alors que l'Assemblée n'était encore aucunement informée
de ce qui se passait. Le Conseil n'avait transmis au sous-comité
que des exemplairesdes projets de Mandats (A »,étant bien entendu
qu'il s'agissait là de renseignements confidentiels dont il ne devait

185must not be used. Four days later the Council promulgated the
Mandate for South West Africa.
It is therefore, we think, evident enough that the Council did not
purport to enter into any contractual engagement on behalf of the
individual States which, either at that time were, or at an'; time
thereafter should become, Members of the League. The Applicants
admitted, and we think correctly admitted, that the Council acted
under the provisions of Article 22 (S) of the Covenant, and not
otherwise. The Councilwas doing what, in the circumstances, it u-as
under a duty to do under that Article. It was not we think purport-
ing to enter into any treaty obligation at all, and it certainly was
not purporting to enter into one on behalf of the individual States,
Members of the League.

Indeed, one will look in vain for any authority in the Covenant
by virtue of which the Councilcould enter into treaty arrangements
so as to make individual States, who were Members of the League,
then or at any subsequent time, parties to a treaty or convention.
The facts equally fail to disclose any authority giveri by States to the
Council to act foreach of tbem and to enterinto a treaty or conven-
tion on their behalf; and it is established that, apart from those
Members of the Leagiie, who were also Members of the Council,
al1 other States were ignorant beforehand of what was contained
in the Mandate.
Action taken by the Council under Article 22 (S) bound the
League and its Members not because any treaty or convention came

into existence, but solely because the League as such, and the States
Members of the League, u-ere bound in advance under the Covenant
by whatever definitior, of the degree of authority, control oradmini-
stration to be esercised by theMandatory Power, was made by the
Council acting under Article 22(8).They were boztqzdbythe Mandate,
in so far as that isrelevant; but as, and through, being Members of
the League, not as actual parties to the Mandate itself. A further
indication to the same effect, is thatin such provisions as Article5
and 7,the Mandate refers- not to the "Parties to the present Man-
date", or to the "Parties to the present Declaration", but to the
"Members of the League". It was as Members of the League, and
not as parties to the Mandate, that certain rights were conferred on
them. Indeed, one of the most striking refutations of the view ihat

the Members of the League were ever regarded as parties to the
hlandate is to be found in the fact, noted earlier. that the League
Council, when it received the draft terms proposed by the Powers,
made an important change in paragraph o of Article 7.It changed
this provision in such a way that instead of al1the Members of the
League undertaking the obligation of compulsory adjudication of
disputes, the Mandatory alone undertook it. This appears to have
been done because it was felt-and rightly felt- that ail obligation
of this kind could only result from specific consent. But had the
186pas être fait usage. Quatre jours plus tard, le Conseil promulguait
le Mandat pour le Sud-Ouest africain.
Il nous apparaît donc assez évident que le Conseil n'a pas eu
l'intention de prendre des engagements contractuels au nom des
États individuels qui faisaient partie à cette époque ou devaient
plus tard faire partie de la Société desNations. Les demandeurs ont
admis, selon nous à juste titre, que le Conseil a agi en vertu des
dispositions de l'article22,paragraphe 8, du Pacte et en vertu de
ces seules dispositions. Le Conseil a fait là ce qu'en telles circons-
tances et aux termes de cet article il était de son devoir de faire.
Il n'avait pas, selon nous, l'intention d'accepter des obligations

conventionnelles et il n'avait certainement pas non plus l'intention
d'en accepter une au nom des États individuels Membres de la
Société.
A la vérité,on chercherait en vain dans le Pacte un pouvoir
quelconque en vertu duquel le Conseil aurait pu conclure des
accords conventionnels de manière à rendre des États individuels,
Membres de la Sociétéà cette époque ou à une date ultérieure,
parties à un traité ou à une convention. On chercherait également
en vain dans les faits un pouvoir donné par les États au Conseil
en vue d'agir au nom de chacun d'entre eux et de conclure un
traité ou une convention en leur nom; et il est établi que tous les
Membres de la Sociétéqui n'étaient pas aussi Membres du Conseil
ont ignoré jusqu'à sa promulgation la teneur du Mandat.
La décision prise par le Conseil en vertu de l'article 22, para-

graphe 8, a engagéla Sociétéet ses Membres non pas du fait qu'un
traité ou une convention est entré en vigueur, mais uniquement du
fait que la Société,comme telle, et ses États Membres étaient liésà
l'avance, en vertu du Pacte, par toute définitiondu degréd'autorité,
de contrôle ou d'administration à exercer par le Mandataire sur
laquelle le Conseil statuerait en vertu de l'article, paragraphe 8.
Ils étaientlié par le Mandat, dans la mesure où cela est pertinent,
mais ils l'étaient en tant que Membres de la Sociétéet par cette
voie et non point en tant que parties effectives au Mandat même.
Une autre preuve en est que, dans des dispositions comme l'article5
ou l'article7,le Mandat se réfèrenon pas aux «parties au présent
Mandat » ou aux ((parties à la présente déclaration » mais aux
« Membres de la Société ».C'est en tant que Membres de la Société
et non comme parties au Mandat qu'ils se sont vu conférercertains

droits. En fait, l'une des réfutations les plus frappantes de la thèse
selon laquelle les Membres de la Sociétéauraient étéconsidérés
comme parties au Mandat est, comme nous l'avons dit plus haut,
qu'après avoir reçu les projets de Mandats proposés par les Puis-
sances le Conseil de la Sociétéa modifiéconsidérablement le deux-
ième alinéa de l'article 7. Il a amendé cette disposition de telle
sorte qu'au lieu que tous les Membres de la Sociétéconsentissent
au règlement judiciaire obligatoire des différends le Mandataire
seul l'acceptait. Il semble que cela ait été faitparce qu'on avai- Members of the Leagiie been fiarties to the RiIandate, they would
thereby ha\.e consented. Clearly they were not considered to be
parties.

Nor could it be contended that, because the Mandate conferred

on the Union of Soiith Africa was to be exercised by it "on behalf of
the League", this made each State which was a Member of the Lea-
gue, into a separate party to the Mandate instrument as a treaty or
convention.
\Ve conclude that any interest in the Mandate which the Members
of the League possessed, or any part in it as an international act
which they may have had, was solely in their capacity as Members
of the League.

(iii) The League or League Council as $arty-From the foregoing,
the inevitable conclusion must be drawn that, al1other candidates
having been eliminated, the only party to the Mandate, apart from
the Mandatory(and if the Mandate was a treaty or convention at al]),

was the League itself or the Council acting for it. This is the only
conclusion consistent with the salient facts-naniely that the
Mandate was the act of the Council; that the Council defined its
terms; that the Mandate was exercised 'fon behalf of the League";
that except for certain specific rights given by particular provisions
of the Mandate to the "Members of the League" (in their capacity
as such, that is), al1the obligationsof the Mandate were owed to the
League; and that the Mandate could only be modified with the
consent of the whole Council.

The only doubt, to which we alluded earlier, is whether, at that
date, an international organization such as the League, and still
more a particular organ of it, such as the League Council, would
have been regarded as having separate international personality
and treaty-making capacity.This doubt may well have been one of

the considerations which suggested the actual form taken by the
Mandate. But if so, this would merely bear out the conclusion we
came to on the first part of the first preliminary objection, namely
that the Mandate never had treaty character at all-for if al1 the
entities that might possibly have been parties to it, considered as a
treaty or convention, apart from the Mandatory, have to be elimi-
nated (including the League and its Council), the inescapable con-
clusion is that the Mandate was not (as it certainly was not in forml
an international agreement. OP. DISS.COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 502

à juste titre - l'impression qu'une obligation de ce genre ne
pouvait découlerque d'un consentement exprès. Mais, si les Mem-
bres de la Sociétédes Nations avaient été parties au Mandat, ils
auraient par là mêmedonné leur consentement. Il est clair qu'ils
n'étaient pas considéréscomme parties au Mandat.
On ne saurait dire non plus que, comme le Mandat conféréà
l'Union sud-africaine devait êtreexercé par celle-ci <(au nom de

la Sociétédes Nations )),chaque Etat qui était Membre de la
Sociétéest devenu par là partie individuelle à l'acte de Mandat en
tant que traité ou convention.
Nous en concluons que tout intérêtque les Membres de la Société
des h'ations pouvaient avoir dans le Mandat, ou toute participation
qu'ils pouvaient avoir au Mandat en tant qu'acte international,
procédait uniquement de leur qualité de Membres de la Sociétédes
Nations.
*
* *

iii)Ln Société des Kations ou son Conseil en tant que partie. - De
ce qui précède,on ne peut que conclure que,tous les autrescandidats
ayant étééliminés,la seule partie au Mandat à part le Mandataire
(en admettant que le Mandat fût un traité ou une convention) a été
la Sociétédes Nations mêmeou le Conseil agissant en son nom.
Telle est la seule conclusion compatible avec les faits les plus im-
portants - à savoir, que le Mandat a étéun acte du Conseil; que
c'est le Conseil qui a statué sur ses termes; qu'il était exercé (au
. nom de la Sociétédes Nations 1);qu'en dehors de certains droits

spécifiques accordéspar des dispositions particulières du Mandat
aux cMembres de la Société desNations ))(c'est-à-dire en leur
qualité comme tels) toutes les obligations prévues par le Mandat
étaient dues à la Société desNations; et que le Mandat ne pouvait
êtremodifiéqu'avec l'autorisation de l'ensemble du Conseil.
La seule question douteuse, à laquelle nous avons fait allusion
plus haut, est de savoir si, à cette date, une organisation inter-
nationale telle que la Sociétédes Nations et mieux encore un de ses
organes tel que le Conseil de la Sociétéauraient étéconsidérés
comme possédant une personnalité internationale distincte et la

capacité de conclure des traités. Ce doute a peut-être étél'une des
considérations qui ont déterminé laforme effectivement prise par
le Mandat. Mais, s'il en est ainsi, ce n'est qu'un argument de plus
en faveur de la conclusion à laquelle nous avons abouti à propos de
la première partie de la première exception préliminaire, à savoir
que le Mandat n'a jamais eu de caractère conventionnel - car,
si l'on doit éliminerà l'exception du Mandataire, toutes les entités
qui auraient pu êtreparties au Mandat en tant que traité ou con-
vention (y compris la Sociétédes Kations et son Conseil),on aboutit
inévitablement à la conclusion que le Mandat ne constituait pas
un accord international (ce dont il n'avait d'ailleurs certainement

pas la forme).
187503 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE

As we suggested earlier, doubtsabout the treaty-making capacity
of the League and its Council, coupled with the obvious need for
providing the Council with an unimpeachable standing in the mat-
ter, and the requirements of Article 22 (8) of the Covenant, may
well have been, indeed we believe it was, a factor in the decision to

formulate the Mandate as a Resolution of the Council, rather than
as a treaty or convention between the Principal Allied and ,4sso-
ciated Powers and the Mandatory.

In no other way could the Council be given its proper place.
Under a treaty or conventio~i, even if it had made provision for the

position of the League and its Council, this position might well have
been impossible to assert, in the last resort, escept through and
with the co-operation of the Powers, and of the Mandatorgr. Such a
situation woi~ldhave been wholly incompatible with Article 22 of
the Covenant, and with the whole concept of the Mandates Sgrstem.

These can only be speculations. What is quite clear is that if the

Mandate was a treaty or convention, the parties, and only parties
to it, were the Mandatory and the League or its Council. Since
neither League nor Council exist now, the number of parties is less
than two, and therefore, as a treaty or convention,the Mandate is no
longer in force.
There iç, further, the fact of the non-registration of the Mandate
as a treatv or convention under Article 18 of the Covenant. As
previously noticed, this is a strong indication that those concerned

did not regard it as having treaty character. But ifit was a treaty
or convention, as the Applicants contend, then its non-registration
as such would raise the question, under Article 18, whether it was
"binding" in its clzaracteras a treaty or convention.If it were not, the
further question would arise whether a treaty or convention which
is "not binding" is, or can be, "in forceu1.

Conclzuion on the first flrelirninavy objection : the conditions
requisite to give the Court jurisdiction under Articles 36 and 37
of its Statute are not fulfilled, inasmuch as the Mandate was the
act of the League Council and is not and never was a "treaty or
convention" (or other form of international agreement); or alter
natively, if it was, it is no longer in force as such, as there would
now remain only one party-the Mandatory.

Even if, as has been suggestethis should not be takrn to mean more than
isprovided forby Articl102,paragraph 2,of the United NationCharter-namely
thatan unregistered instrument cannobe invoked "before any organs of the United
NationsH-the Court is such an organ (see Article 7, paragr1,hof the Charter). OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE
503
Comme nous l'avons suggéréplus haut, les doutes concernant la
capacité de la Sociétédes Nations et de son Conseil à conclure des

traités et la nécessité évidentede donner au Conseil une position
inattaquable en la matière, ainsi que les prescriptions du para-
graphe 8 de l'article 22 du Pacte, ont pu constituer - et nous
sommes pour notre part persuadés que tel a étéle cas - un élément
dans la décisionqui a étéprise de donner au Mandat la forme d'une
résolution du Conseil plutôt que celle d'un traité ou d'une conven-

tion entre les Principales Puissances alliéeset associéeset le Man-
dataire.
C'étaitla seule facon de mettre le Conseil -àsa vraie place. Dans
un traité ou une convention, mêmesi on avait voulu prévoir la
position de la Société desNations et du Conseil, celle-ci aurait pu

se révéler en fin de compte impossible à définir, si ce n'est par
l'intermédiaire et avec la coopération des Puissances et du Manda-
taire. Une situation de ce genre aurait étéabsolument incompatible
avec l'article 22 du Pacte et avec toute la conception du système
des Mandats.
Mais cela ne peut êtrequ'hypothétique. Ce qui ne fait pas de

doute, c'est que, si le Mandat a étéuntraité ou une convention, seuls
le Mandataire etla SociétédesNationsou le Conseily étaientparties.
Étant donné queni la Sociéténile Conseiln'existent plus, le nombre
des parties est réduit à moins de deux et c'est pourquoi, en tant que
traité ouconvention, le Mandat n'est plus en vigueur.

Au surplus, le Mandat n'a pas étéenregistré en tant que traité
ou convention conformément à l'article 18 du Pacte. Comme nous
l'avons notéplus haut, cela montre bien que les intéressés ne consi-
déraient pas que le Mandat eût un caractère conventionnel. Mais,
si, comme le prétendent les demandeurs, il a étéun traité ou une

convention, le défaut d'enregistrement suffirait à poser la question
de savoir si, en tant que traitéou convention, il était ((obligatoire »
aux termes de l'article 18. Dans la négative, la question se poserait
alors de savoir si un traité ou convention qui n'est pas (obliga-
toire 1)est ou peut être (en vigueur ))l.

Concl.usionsur la premièreexceptionpréliminaire: les conditions
nécessaires pour que la Cour soit compétente aux termes des ar-
ticles 36 et 37 du Statut ne sont pas remplies, en tant que le Mandat
a étéun acte du Conseil de la Sociétéet au'il n'est Das et n'a iamais
été ((un traité ou une convention 1(ni un accord international sous

une autre forme) ou, subsidiairement, s'il l'a été, qu'il n'est plus
en vigueur en tant que tel car il ne compterait plus maintenant
qu'une seule partie -- le Mandataire.
l Même si, comme on l'a prétendu, ce fait ne doit pas signifier plus que ce qui
est prévu àl'article 102, paragraph2, de la Charte des Nations Unies -àsavoir
qu'un instrument non enregistré ne peut pas êtreznvoqué Idevant un organe de
l'Organisation)-, la Cour est l'un de ces organes (voir article 7, paragra1,e
dela Charte)

188 JOINT DISS. OPIN.JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
504

SECOND PRELIMINARY OBJECTION

In the normal course it would be sufficient to rest upon the
answer we gave to the first objection. Since however we believe
that each of the objections raised by the Respondent stands in
the way of the Court assuming jurisdiction, we deem it Our duty,
in the special circumstances of the case, to express Our views on

each objection.
There are also special reasons why we should deal with the
Second Objection.
Although we are satisfied that the Mandate is not a treaty
or convention, in force as such, we recognize, as we have already
indicated, that the Mandate had a certain background of consent,
as indeed it had to have. We cannot, in recognizing this, do so for
the reasons, or with the consequences, adduced in support of the
Applicants' contentions. A view which, in the face of most of the
evidence, asserts that the Mandate was a treaty, and then seeks
to discount the resulting difficulties on theround that this treaty

was sui generis or was not an ordinary agreement, confesses it
seems to us a lack of cogency. The same may be said of a view
which holds the Mandate to be in force today as a treaty or conven-
tion, but which is unable to indicate who are now the parties to
this treaty or convention, apart from the Mandatory; or which,
on the same plea of it being a special case, argues that it is imma-
terial whether there are any parties or not; or which again, in dis-
regard of legal principle, postulates for certainStates a right they
only had in a capacity they have lost.

But in any event, the Second Objection raises in a much more

direct form than the First, an issue which must always be central
to any question of the jurisdiction of the Court, namely the
capacity of the Applicant States to invoke the clause alleged to
confer jurisdiction on the Court.

I. Importance and character of the Second Preliminary Objection

Since adjudication clauses invariably indicate what are the
entities, or classes of entity, entitled to avail themselves of the
right to cal1 for a reference to adjudication, the basic question
arising on this part of the present case is whether the actual terms
of Article7 permit the Applicants to invoke it ;and if not, on what
legal basis (if any) they can nevertheless claim to do so. These
terms, we would recall, so far as here relevant, are that the Man-

datory agrees to submit to adjudication, disputes with "any other
Member of the League of Nations".
189 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPEKDER ET FITZMAURICE 504

Normalement, la réponse que nous avons donnée à la première
exception devrait suffire. Mais, comme nous-pensons que chacune
des exceptions soulevéespar le défendeur est en soi un obstacle à
la compétence de la Cour, nous estimons qu'il est de notre devoir,
étant donné les circonstances spéciales de l'affaire, d'exprimer
notre opinion sur chacune de ces exceptions.
Il existe aussi des raisons particulières qui nous amènent à

traiter de la deuxième exception.
Bien que nous soyons convaincus que le Mandat n'est pas en soi
un traité ou une convention en vigueur, nous reconnaissons, comme
nous l'avons déjà indiqué, que le Mandat repose, et à juste titre,
sur la base d'un certain consentement. Mais notre reconnaissance
de ce fait ne se fonde pas sur les raisons avancées à l'appui des
allégations des demandeurs et n'entraîne pas les mêmes consé-
quences. Un argument qui, à l'encontre de la plupart des preuves,
soutient que le Mandat était un traité et cherche ensuite à mini-
miser les difficultés qui résultent de ce raisonnement en disant que
ce traité était sui eeneris ou n'était pas «un accord ordinaire ))
révèle,nous semble-t-il, ses propres faiblesses. Il en va de même
de l'argument selon lequel le Mandat serait aujourd'hui un traité
ou une convention en vigueur, mais qui ne peut indiquer qui en
sont les parties, mis à part le Mandataire; ou qui, tout en alléguant
qu'il s'agit d'un cas spécial, prétend que cela n'a pas d'importance
qu'il y ait ou non des parties; ou qui, négligeant un principe de

droit, postule que certains Etats jouissent d'un droit qui n'était
le leur qu'en vertu d'une qualité qu'ils ont perdue.
Une autre raison, plus impérieuse, est que la seconde exception
soulèvede façon beaucoup plus directe que la première une question
qui doit toujours êtreau centre de tout problème ayant trait à la
compétence de la Cour, à savoir la qualité des Etats demandeurs
pour invoquer la clause qui, selon eux, confère à la Cour sa com-
pétence
* * *

I. Importance et caractère dela deztxième-exceptionpréliminawc

Étant donné que les clauses de règlement judiciaire indiquent
invariablement les entités ou catégories d'entités qui sont fondées
à se prévaloir du droit de demander à soumettre l'affaire au règle-
ment judiciaire, la question fondamentale qui se pose sur ce point
de l'affaire actuelle est de savoir si les termes mêmesde l'article7
permettent aux demandeurs de s'en prévaloir et, dans la négative,
sur quelle base juridique (s'ilen est) ils peuvent cependant prétendre
avoir le droit de le faire. Nous rappelons que, pour ce qui est de
cette question, l'article7 dispose que le Mandataire accepte que

189 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
505

It is clear that Article 37 of the Statute cannot operate so asto

substitute the present Court for the former Permanent Court
in a case in which that Court could not have had jurisdiction. It does
not operate so as to increase jurisdiction. It merely substitutes
for a reference to the Permanent Court a reference to this Court.
Itcannot, and does not, ofitself determinewhether, in the givencase,
that Court would in fact have been competent. We must stress
this point because, evident though it should be, it does not seem
to have been fully appreciated in the present case. A provision

like Article 37, which is not specifically directed to the case of
Mandates, and relates to a very large number of treaties and con-
ventions of al1 sorts and kinds, is quite neutral as to whether in
any given case an obligation to submit to adjudication does exist.
Whetherthe obligation exists in any given case, or not, depends on
the adjudication clause alleged to create it (in this case Article 7
of the Mandate)l, which such a provision as Article 37 can neither
add to nor alter. Failing any express provision to that effect, and
there is none, Article 37 could only operate so as to confer on the

present Court the $re-existing competence-whatever that was-
of the Permanent Court, and not so as to confer a different or more
extensive competence. Moreover Article 37 could not of itç'elf
determine whether any competence at al1existed.

One may accept unreservedly that the present Court is, within
the'limits of Article 37, substituted to the fullest possible extent
for the former Permanent Court, to exercise any jurisdiction which

that Court could, in its day, have exercized. The question would
still remain in any givencase; could the Permanent Court itself have
exercized that jurisdiction? In Our view, it could not and would
not have done so under Article 7 of the Mandate, except at
the instance of a Member of the League of Nations-a quality
not attaching to the present Applicants. It is, in Our view, so
evident both that the present International Court cannot exercise
a jurisdiction which the former Permanent Court could not, in

its day, have exercized, and that in fact the Permanent Court
could not then have assumed jurisdiction in proceedings brought
against the Mandatory by a non-Member of the League, that little
more should be necessary to be said on this part of the case.

It is the scope of the Mandatory's oblito submit to adjudicatiowhich
is almost unheard of. Practicalevery adjudicationclause contains conditions
and limitations of some kind. A very frequent, almostinvone, is a limitation
asto the class of State or entity which can invoke the clause. In the case of treaties,
the right is normaiiy restricted to the parties to thand in the case of in-
stniments not .of a treaty character, framed by or under the auspices of an inter-
nationalorganization, the normal limitation is to States Members of the organi-
zation concerned.tout.différend qui viendrait à s'éleverentre lui et (un autre Membre
de la Sociétédes Nations ))soit soumis au règlement judiciaire.
Il est clair que l'article 37 du Statut ne peut avoir pour effet
de substituer la Cour actuelle à l'ancienne Cour permanente dans

une a8aire od celle-ci n'aurait fias ezl comfiétence.Il n'a pas pour
effet d'élargirla compétence. Il remplace simplement le renvoi à la
Cour permanente par le renvoi à la Cour actuelle. Cet article ne
détermine pas, et ne peut déterminer par lui-même,si dans le cas
donné la Cour permanente aurait été effectivement compétente.
Nous devons insister sur ce point parce que, si évident qu'il soit,

il ne paraît pas avoir étépleinement apprécié en l'espèce.Une dis-
position telle que l'article 37, qui ne vise pas expressément le cas
des Mandats mais se rapporte à toute sorte ou toute espèce de
très nombreux traités ou convehtions, est absolument neutre quant
à savoir si, dans un cas donné, il existe une obligation de se sou-
mettre au règlement judiciaire. Le fioint de savoh si l'obligation

existe ou non dans un cas donné dépend de la clause de règlement
judiciaire qui l'aurait créée (enl'espèce l'article 7 du Mandat) l,
clause à laquelle l'article 37 ne peut ni ajouter ni changer quoi que
ce soit. A défaut d'une disposition expresse en ce sens, et il n'y en
a pas, l'article 37 ne peut que conférer à la Cour actuelle la com-
pétence pré-existante - quelle qu'elle ait pu être - de la Cour
permanente et ne saurait conférer une compétence différente ou

plus étendue..Au surplus, il ne peut par lui-mêmedéterminer s'il
existe une compétencequelconque.
On peut admettre sans réserve que la Cour actuelle, dans le
cadre de l'article 37, se substitue autant que possible à l'ancienne
Cour permanente dans l'exercice de toute compétence que cette
dernière aurait pu exercer en son temps. Mais la question se pose

quand mêmedans tout cas d'espèce :la Cour permanente elle-même
aurait-elle pu exercer sa compétence? A notre avis, elle ne pouvait
le faire et ne l'aurait fait en vertu de l'article 7 du Mandat que sur
l'instance d'un Membre de la Sociétédes Nations - qualité que
ne possèdent pas les demandeurs en l'espèce. Il est si évident,
pensons-nous, que l'actuelle Cour internationale ne peut exercer

une compétence que l'ancienne Cour permanente n'aurait pas pu
exercer en son temps, et qu'en lait la Cour permanente n'aurait pas
pu se déclarer compétente dans une instance ouverte contre le
Mandataire par un Etat non membre de la Société des Nations,
qu'il n'est guèrenécessaire d'endire plus sur cet aspect de l'affaire.

l C'est l'article 7 du Mandat qurégit la 9orléede l'obligation du Mandataire
de se soumettre au règlement judiciaire. Unobligation illimitde se soumettre
au règlement judiciaire est presque sans précédent. En pratiqutoute clause de
règlement judiciaircontient des conditions et des restrictions quelconques. L'une
d'eues, très fréquente et presque invariaest une limitation quant à la catégorie
d'États ou d'entités qui peuvent invoquer la clause. Dans le cas des traités, le droit
conventionnelstBtablis par une autorité internationalou sousdsessauspices, la
limitationnormale est la qualité d'État Membre de l'organisation6ressée.506 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
In the present proceedings what the Court has done-in Our
view without legal justification-is to consider the matter on the

footing of what jurisdiction the Permanent Court could and would
have exercized if it was still functioning now-that is to Say on the
assumption that the League of Nations was duly dissolved in 1946,
but that the Permanent Court had survived and was here and now
sitting and hearing the present case. This is of course to beg the
whole question at issue, and to disregard the fact that Article 37
could do no more than operate so as to give the present Court
jurisdiction in a case in which the Permanent Court would have
had jurisdiction. This necessarily presupposes a case arising at a
time when the Permanent Court wasinexistence, for a non-existent
Court can obviously have no jurisdiction at all. If the Permanent
Court was still functioning, there would have been no need to
substitute the present Court for it. If the present Court has been
substituted for the former Court, it is because the latter was and
is not any longer functioning. Hence the .jurisdiction which the
present Court "inherits" (so to speak) from the former Court is
the jurisdiction which the former Court actually mas ernpowered

to exercisewhen it was functioning--that is to Say the jurisdiction
whicli then fell within the scope of its competence. This did not
include proceedings purported to be brought under Article 7
by non-Members ofthe League, under which category the Applicants
fall.
In Our view this is conclusive so far as the Second Preliminary
Objection is concerned, and strictly incontrovertible. Nevertheless,
we will consider the matter on the basis of whether the Permanent
Court, if it had survived the dissolution of the League, and were
here and now sitting, would be competent to hear and determine
the Applications now before the Court.

What the Court is called upon to cctnsider in this part of the
case is the claim made on behalf of the Applicant States, that
although they are no longer Members of the League, because

the League itself has been dissolved, nevertheless as former Mem-
bers, that is, as States who were Members at the date of its dissolu-
tion, they should be deemed to have retained, or still to possess,
the right to invoke Article 7.
We propose to begin by considering whether the kind of transfor-
mation or metamorphosis involved by the Applicants' claim, as
just stated, could possibly be admitted on the actual language of
Article 7, or by any legitimate process of "interpretation" of it.
We shall later consider whether such a transformation could be
postulated on the basis of any process of presumption or implica-
tion derived from circumstances lying outside Article 7 itself, or Au cours de la présente procédure, la Cour - selon nous, sans
raison valable en droit - a considéréla question sur la base de la
compétence que la Cour permanente aurait pu exercer et aurait
exercée si elle était encore en fonction auiourd'hui - c'est-à-dire
si la Société desNations avait été dûment dissoute en 1946 mais
que la Cour permanente avait survécu et siégeait actuellement
pour connaître de la présente affaire. Or, cela équivaut à faire une
pétition de principe et à négliger le fait que l'article 37 ne peut

avoir d'autre effet que de donner compétence à la Cour actuelle
dans une affaire que la Cour permanente aurait été habilitée à
juger. Cela présuppose nécessairement une affaire née à l'époque
de la Cour permanente, car une Cour non existante ne saurait
évidemment avoir une compétence quelconque. Si la Cour perma-
nente fonctionnait encore, il n'aurait pas éténécessaire de la rem-
placer par la Cour actuelle. Si la Cour actuelle a remplacé l'ancienne
Cour, c'est parce que cette dernière fonctionnait et qu'elle ne
fonctionne plus. Donc ce que la Cour actuelle ((a hérité ))(pour
ainsi dire) de l'ancienne Cour c'est la compétence que l'ancienne
Cour étaiten fait habilitéed exercerlorsqu'ellefonctionnait - c'est-
à-dire la compétence qui rentrait alors dans le cadre de sa juridic-
tion. Elle ne s'étendait pas à une-instance prétendument intentée

aux termes de l'article 7 par des Etats non membres de la Société
des Nations, catégorie à laquelle appartiennent les demandeurs.

A notre avis ce raisonnement est concluant et strictement incon-
testable en ce qui concerne la deuxième exception préliminaire.
Nous allons néanmoins considérer maintenant la question en nous
demandant si la Cour permanente, en supposant qu'elle ait survécu
à la dissolution de la Société desNations et qu'elle siège encore,
serait compétente pour connaître et juger des requêtes présentées
actuellement àla Cour.

Dans cette partie de l'affaire, la Cour est appelée à examiner la
thèse présentéeau nom des États demandeurs d'après laquelle,
bien qu'ils ne soient plus Membres de la Sociétédes Nations depuis
sa dissolution, ils doivent néanmoins êtreconsidéréscomme ayant
conservé ou comme possédant encore le droit d'invoquer l'article 7
en t,ant qu'anciens Membres de cette Société, c'est-à-direen tant
qu'Etats Membres à la date de sa dissolution.
Nous nous proposons d'examiner d'abord si l'espèce de trans-
formation ou de métamorphose impliquée par la thèse des deman-
deurs comme il vient d'êtreindiquéa la moindre possibilité d'être
admise sur la base des termes mêmesde l'article 7 ou par voie

d'ccinterprétation 1)légitime de cet article. Nous examinerons plus
loin si cette transformation peut êtreadmise sur la base d'une pré-
somption ou d'une conséquenceimplicite quelconque découlant de 507 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE

on the basis of the application ofsomegeneral principle oflaw operat-
ing to effect such transformation.

2. The interpretation of Article7
(a) The actual language of the Article

We shall assume as Our starting point something which we shall
demonstrate more fully later, namely that, in the absence of ex-
press provision to the contrary, rights conferred on or exercise-
able by a person or entityin a specified capacity, or as a member of
a specified class, cannot be exercized in another capacity, or as
a member of another class, or continue to be exercized if the speci-
fied capacity is lost or membership of the class ceases.

' Thus, rights conferred on State A as a Member of the League,
or simplyon "Members of the League" (State A happening to be or

become a Member) were not, and could not be rights conferred
individually on State A as such, which State A could thenceforth
retain indefinetly, without limitation of time, irrespective of its
relationship to, or of the very existence of the Leaguel.

The fiindamental issue of principle raised by the second prelimi-
nary objection is therefore: on what grounds, if any, can States
invested with rights as, and onlyas, members of a class, claim those
rights in their individual capacity (no longer being members of that
class, or that class having ceased to exist),or as members of another
and different class?

Lord McNair (ashe now is) was the only Member of the Court in

the 1950 case who specifically considered this issue in that form,
and he, in effect, set aside the class basis of the right conferred
by Article 7,holding that the mention of membership of the League
constituted only a description of the States entitled to exercise the
right, and was not a condition of its exercise. It did not mean
"so long as the League exists and they are Members of it" (I.C.J.
Reports 1950 ,t p. 159.) In short, his view, to paraphrase it a little,
was that a State must, of necessity, no longer be a member of a
now non-existing organization, but this did not matter so long as
it could still be identified as a State that was invested with the
right when the organization still existed.

Even asa matter of ordinary logic, it is clear that rights conferred expressly on
members of a class,such, are not thereby conferred on them as individuals.

192circonstancesextérieures à l'article 7 mêmeou par application d'un

principe général de droit ayant pour effet d'opérer pareille trans-
formation.

2. Interprétationde l'article 7

a) Les termesmêmes de l'article
Comme point de départ nous adopterons l'hypothèse, que nous
démontrerons plus amplement par la suite, selon laquelle, à défaut
de disposition expresse en sens contraire, les droits qui ont été
conférés àune personne ou à une entité, ou qui peuvent êtreexercés

par celles-ci, en une qualité donnée ou en tant que membre d'une
catégorie donnée, ne peuvent ni êtreexercés en une autre qualité
ou comme membres d'une autre catégorieni continuer à êtreexercés
en cas de perte de la qualité spécifiéeou de cessation de l'apparte-
nance à la catégorie spécifiée.
Ainsi, les droits conférésàun État A comme membrede la Société
des Nations, ou simplement (aux Membres de la Sociétédes Na-
tions ))(1'Etat A étant ou devenant l'un de ses Membres), n'étaient
pqs, et ne pouvaient être,des droits conférésindividuellement à

1'Etat A comme tel et susceptibles d'êtreconservés par cet Etat
indéfiniment,sanslimitation de temps, indépendamment deses rap-
ports avec la SociétédesNations ou de l'existence mêmede celle-ci l.
La question de principe fondamentale posée par la deuxième
exception préliminaire est donc la suivante :pour quel motif, s'il en
est, des Etats investis de droits en leur qualité de membres d'une
catégorie, et uniquement en cette qualité, pourraient-ils invoquer
ces droits à titre individuel (alors qu'ils ne sont plus membres de

cette catégorie ou que celle-ci a cesséd'exister) ou en qualité de
membres d'une autre catégorie distincte?
Lord McNair (tel est maintenant son titre) a étéen 1950 le seul
Membre de la Cour à considérer spécialement cette question sous
cette forme et il a, en fait, mis de côté le principe d'après lequel le
droit conférépar l'article 7 serait fondésur une catégorie, jugeant
que la mention de la qualité de Membre de la Sociétédes Nations
n'était qu'une descriptiondes États fondésà exercer ce droit et non
pas une condition de son exercice. Cette mention ne signifiait pas

tant que la Sociétédes Nations existera et qu'elle comptera des
Membres )) (C.I. J. Recueil 1950,~~. 159). En résumé, pour para-
phraser quelque peu son idée, un Etat, nécessairement, ne peut plus
êtremembre d'une organisation qui n'existe plus aujourd'hui, mais
cela n'a pas d'importance si on peut encore l'identifier comme un
Etat qui était investi du droit en question alors que l'organisation
existait encore.

l Du point de vue mêmede la simple logique, il est clair que les droits conférés
expressément aux membres d'une catégorie, comme telsne leur sont pas pour
autant conféréà titre individuel.

192508 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
It is, naturally, with diffidence that we feel bound, for reasons

which \vil1 appear, to differ from this distinguished Judge. Lord
McNair's opinion was indeed an attempt, the only one which has
ever been made, to reconcile such a claim as that of the present
Applicants with the actual language of Article 7. But it appears to
us to have overlooked the fact that Article 7 was never intended
to apply to any particular States as States. Nobody knew in 1920
what the exact membership of the League would be, or what it
would remain. This membership might, and did, Vary periodically
a good deal. It was a shifting membership. At one time it might
comprise States A, B and C; at another A and B might have dropped
out,and D and E have cornein. This kind ofthing occurred from time
to time. Article7 was not intended to apply to any of these States,
A, B, C, D, or E, as such. It was intended to apply to ang7State
~vhich, at any given moment was-and only if and so long as it
was-a Meniber of the League. It was not intended to apply other-
wise. Therefore, if Article 7 conferred a right on Ethiopia and

Liberia, the present Applicants, it was solely as a consequence of
the fact that they happened to fulfil the criterion specified, namely
mernbership of the League. Otherwise they would not have had
this right.

Consequently there can, in Our opinion, be no doubt at al1 that
during the lifetime of the League, membership was a condition,
and that the Permanent Court would have held itself incompetent
to adjudicate in the case of a dispute bettveen the Mandatory and
a non-Member. An analogy is afforded by the fact that when
Gerrnany, before she became a Member of the League, claimed (as
a Party to the Treaty of Versailles in which the Covenant and
Article 22 were embodied) to be entitled to intervene about the
administration of a formerGerman terntory under Belgian Mandate,
the German cornplaints were not answered by the League Council,

and Belgium as Mandatory stated that al1such matters were "within
the exclusive cornpetence of the League of Kations" l.

Similarly, we entertain no doubt, and we do not think there
can be any doubt, that a country such as, for instance, Brazil,
lvhich was a hlember of the League at first, but subsequently- left
it, thereupon lost its rightsder Article 7,and that the Permanent
Court would have declared itself incompetent in any proceedings
brought by Brazil under that provision.

Vi7hatthen would be the difference in principle between such a
case as Brazil's and that of the Applicant States in these proceed-
ings? It may be suggested that a differencearises out of the different

League of Nations OfFcialJournal, VIII, pp. 316-317.

193 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 508

C'est naturellement avec hésitation que nous nous sentons obligés,
pour des raisons qui apparaîtront plus bas, d'êtred'un autre avis
que ce juge éminent. Lord McNair a fait là une tentative, la seule
qui ait jamais étéfaite, de réconcilier avec les termes mêmesde
l'articl7 une thèse comme celle que soutiennent les actuels deman-
deurs. Mais il a négligé,nous semble-t-il,,le fait que l'artic7en'a
jamais étédestiné à s'appliquer à des Etats particuliers en tant
quJEtnfs. Nul ne savait en 1920 quels seraient exactement les
Membres de la Sociétédes Nations, ni ce qu'il en adviendrait. Leur
liste pouvait changer considérablement avec le temps et c'est ce qui
s'est passé. Cette liste $ait variable. Elle'pouvait à un moment

donné comprendre des Etats A, B et C; à un autre, les Etats A et
B pouvaient en êtrerayéset des Etats D et E y êtreinscrits. C'est
ce qui s'est produit de temps à autre. L'article7 n'était pas destiné
à s'appliquer à l'un quelconque de ces Etats A, B, C, D ou E
conzmetel. Il était destiné à s'appliquer à tout État qui serait à
un moment donné Membre de la Sociétédes Nations - et cela
seulement s'il était Membre de la Société,mais aussi longtemps qu'il
le serait. On n'avait pas envisagé de l'appliguer autrement. C'est
pourquoi, si l'article a conféréun droit à l'Ethiopie et au Libéria,
actuels demandeurs, c'est uniquement en tant qu'ils ont satisfait
au critère indiqué: être Membre de la Société desNations. Sans

quoi ils n'auraient pas eu ce droit.
A notre avis, il ne saurait par conséquent faire de doute que,
pendant l'existence de la Société desNations, la qualité de Membre
étaitune condition et que la Cour permanente se serait déclarée
incompétente pour trancher un différendentre le Mandataire et un
Etat non membre. Vn cas analogue s'est présentéquand, avant
de devenir Membre de la Société desNations, l'Allemagne a réclamé
(en qualité de partie au traité de Versailles dans lequel étaient
incorporés le Pacte et l'article22)le droit d'intervenir à propos de
l'administration d'un ancien territoire allemand sous Mandat belge :

le Conseilde la SociétédesNations n'a pas répondu aux réclamations
allemandes et la Belgique, en tant que Mandataire, a répondu que
toutes ces questions ((sont de la seule compétence de la Sociétédes
Nations )l.
De même,nous ne doutons pas - et nous ne pensons pas qu'il
puisse y avoir le moindre doute à ce sujet - qu'un pays, comme
par exemple le Brésil, qui avait tout d'abord étéMembre de la
Société desNations pour la quitter ensuite, avait perdu les droits
qu'il détenait de l'article7, et que la Cour permanente se serait
déclaréeincompétente si le Brésil avait introduit une instance aux
termes de cette disposition.

Dans ces conditions, quelle différencey aufait-il en principe entre
un cas comme celui du Brésil et celui des Etats demandeurs dans
les présentesinstances ?On pourrait prétendre que la différencetient

l SociétdesNations, Journal oficzel, VIII, pp. 316-317.
193 manner in which League membership was terminated. Strictlj
speaking, of course, the particular reason why the specified capacity,
or membership of the specified class is lost, is quite irrelevant. The
fact alone suffices. However, we will deal with the point. Brazil, it

may be said, voluntarily and deliberately left the League, and there-
fore obviously could not continue to enjoy the same rights as before;
whereas the Applicant States did not renounce their membership
-they lost it. The League came to an end, and therefore they
necessarily ceased to be members of it. But it has to be asked, why
did the League corne to an end! It didnot simply lapse. Theanswer
is, of course, that it came to an end by the act of the Applicants
themselves in joining with the other Members of the 1,eague to
dissolve it. Even if it had been the case that the League came to
an end for reasons quite outside its Rlembers' control, and contrary
to their will, the fact of the cessation of the status andcapacity of
League membership would have remained. But even this is not the
case. Termination was the act of the Members of the League them-
selves. Moreover, although, as the Record shows, the case of the
mandated territories was- fully considered both at San Francisco
when the Cnited Nations was founded, and at Geneva when the

League was dissolved, no provision uras made to meet the type of
case which has now arisen. For reasons which will appear later,
we reject the view either that this was due to a mere oversight, or
that such provision was in fact implicitly made in the course of the
final debates at Geneva and by the League resolution concerning
mandated territories of April 18. 1946.

It seems to us, therefore, that the action of the Applicant States
in joining to bring about the cessation of their League membership
was fully as voluntary and deliberate as Brazil's; and we can only
see a difference of method between the two cases. \Te consider that
the Applicants, by divesting themselves of their League member-
ship, without making provision for the position thus created in

relation to Articl7 of the Mandate, put an end to their rights under
that provision, just as completely as Brazil did.

Even if the matter is placed on the basis that the llembers of
the League, whether or not actually parties to the Mandate, were
granted specific third-party or third-State rights by Article 7, the
difficulty remains. Even if there are principles of third-State law
which might otherwise cause those rights to survive, they can only
survive according to their terms. The States concerned having, by
their own act, divested themselves of the capacity in which they
enjoyed these rights, can no longer claim them, even on a third-

194à la manière selon laquelle a pris fin l'appartenance à la Société
des Nations. A strictement parler, sans doute, la raison particulière
qui estàl'origine de la perte de la qualitéspécifiou de la cessation
de l'appartenance à la catégorie spécifiéeest sans pertinence. Le
fait même suffit.Toutefois, nous allons traiter de ce point. On peut
dire que le Brésil a quitté la Société desNations volontairement
et délibérémentet qu'en conséquence il ne pouvait évidemment
ontinuer à jouir des mêmesdroits que dans le passé, alors que les
Etats demandeurs n'ont pas renoncé à leur qualité - mais l'ont
perdue. La Sociétédes Nations ayant pris fin, ils ont nécessairement
cessé d'en être Membres. Mais il faut se demander pourquoi la
Sociétéa pris fin. Elle ne s'est pas simplement écroulée.La réponse
est évidemment qu'elle a pris fin du fait des demandeurs eux-mêmes,
qui se sont joints aux autres Membres de la Sociétépour la dis-

soudre. Mêmesi la Sociétédes Nations avait pris fin pour des raisons
échappant absolument au contrôle de ses Membres et contrairement
à leur volonté, le statut et la capacité s'attachant à la qualité de
Membre de la Société n'enseraient pas moins devenus caducs.
Mais tel n'a pas étéle cas. Ce sont les Membres de la Sociétédes
Nations eux-mêmesqui ont mis fin à leur qualité de Membres. De
plus, bien que la question des territoires sous Mandat ait étépleine-
ment considéréetant àSan Francisco, lors de la créationdes Nations
Unies, qu'à Genève, lors de la dissolution de la Société desNations,
ainsi que le montre le dossier, aucune disposition n'a étéprise pour
faire faceà une situation du genre de celle qui se présente actuelle-
ment. Pour des raisons que nous indiquerons plus loin, nous n'ac-
ceptons ni qu'il se soit agi là d'une simple omission, ni qu'une
disposition en ce sens ait étéimplicitement prise au cours des
derniers débats de Genève et dans la résolution de la Société des
Nations du 18 avril 1946 concernant les territoires sous Mandat.
Il nous semble donc qu'en se joignant aux autres Etats pour

mettre fin à leur qualité de Membres de la Société desNations,
les Etats demandeurs ont accompli un acte tout aussi volontaire
et délibéré que celui du Brésil; entre les deux cas, nous ne pouvons
voir qu'une différencede méthode. Nous considérons qu'en se dé-
pouillant eux-mêmesde leur qualité de Membres de la Société des
Nations, sans prendre de dispositions quant à la situation ainsi
créée ence qui concernait l'article 7 du Mandat, les demandeurs
ont mis fin aux droits que leur conférait cet article, tout aussi
complètement que le Brésil.
Mêmesi l'on part de l'idéeque les Membres de la Sociétédes
Nations, qu'ils fussent effectivement parties au Mandat ou non, se
sont vy conférerpar l'article7les droits spécifiquesde tierces parties
ou d'Etats tiers,la difficultédemeure. Mêmes'il existe des principes
de droit applicables aux États tiers qui pourraient, par ailleurs,
permettre à ces droits de survivre, ils ne peuvent survivre que
selon leurstermes. S'étantdeleur propre fait dépocullésde la qualité
en vertu de laquelle ilsuissaient de ces droits, les Etats en questionState basis; for no doctrine of third-State rights can extend to

enabling third States to continue to claim rights they have them-
selves, in effect, renounced.

(b) Application of the generalprinciples oflaw relativetu cap~~city

In case the view stated above is thought to be unduly strict, we
would draw attention to the universally received general principle
of law-one essential to the orderly conduct of affairs-that rights
available to a person or entity in one capacity, do not remain avail-
able in another capacity-or if the first capacity cornes to an end-
unless special arrangements have been made to produce this result.
This is constantly seen in the sphere of private law. Trustees,
administrators, curators, legal guardians, etc., have certain par-
ticular rights appertaining to their status in these capacities. The

moment such a status ceases, rights which are attached to the
status, and do not exist independentlg- of it, also cease to exist.
Similarly, powers or faculties may be enjoyed in a specified capacity.
A change over to another status or capacity, or simply continued
existence as an individual, cannot carry with it the retention of
rights enjoyed in a previous capacity. In the same way, the mere
fact that the Applicant States in this case continue to exist as State;
or that, instead of being Members of the League, they are now
Members of the United Nations, gives them in itself-in the absence
of special arrangements to the contrary-no right at all, especially
after they have themselves terminated their League membership,
to continue to invoke a pr~vision available only to Members of
the League.

It would hardly seem necessary to insist on such an elementary
point. Yet insist we must, since in Ourview it has been in substance
ignored bythe Court. For instance, much has been heard in this case

of what might be called the "policing the Mandate" aspect of
Article 7. But could it seriously be suggested in every-day life that
if a police force is disbanded, its ex-members can still go on exer-
cizing their former police functions? This would seem to be an
extraordinary notion forany Court of law to endorse. If the former
Members of the League had any "police" functions under Article 7,
it was as Members of the police force which was the League-a
force now disbanded and dissolved.

Moreover-and this is not without its significancel--it is not the
case, even if it were legally relevant, that the substance of the

195ne peuvent plus les invoquer, mêmeà titre d'États tiers; en effet,
aucune doctrine relative aux droits des Etats tiers ne saurait aller
jusqu'à permettre à ces derniers de continuer à invoquer des droits
auxquels ils ont eux-mêmes effectivement renoncé.

b) L'application des principes générauxdu droit relatifs li la
qualité

Au cas où l'opinion que nous venons d'énoncer serait considérée
comme trop stricte, nous voudrions attirer l'attention sur le principe
général dedroit universellement reconnu - et essentiel au bon
ordre des choses - d'après lequel les droits dont dispose une per-
sonne ou une entité en une certaine qualité ne demeurent pas à sa
dispositionen une autre qualité - ou après la perte de la première
qualité - à moins que des arrangements spéciaux n'aient étépris
à cette fin. C'est ceque l'on voit constamment dans le domaine du
droit privé.Les trustees,administrateurs, curateurs, tuteurs légaux,
etc. jouissent de certains droits particuliers se rapportant à leur
leur statut en ces qualités. Dèsque ce statut cesse, les droits qui y

sont attachéset qui n'existent pasindépendamment deviennent égale-
ment caducs. Ou encore, certains pouvoirs ou facultés peuvent être
attachés àune qualité donnée.Le fait d'acquérir un autre statut ou
une autre qualité, ou simplement de continuer à exister comme
individu, ne saurait permettre de conserver les droits inhérents à
l'ancienne qualité.De même, le simplefait que les Etats demandeurs
continuent à exister comme États, ou qu'ils soient aujourd'hui
Membres des Nations Unies au lieu de l'êtrede la Sociétédes
Nations, ne leur donne en soi - en l'absence de dispositions spé-
ciales en sens contraire - aucun droit, d'autant moins qu'ils ont

eux-mêmesmis fin à leur qualité de Membres de la Sociétédes
Nations, à continuer d'invoquer une disposition dont les Membres
de la Sociétédes Nations pouvaient seuls se prévaloir.
Il paraît à peine nécessaire d'insister sur un point aussi élémen-
taire. Toutefois nous devons le faire car, à notre avis, la Cour l'a
ignoré en substance. Par exemple, on a beaucoup entendu parler
dans ces affaires de l'aspect ((police du Mandat » que présente
l'article7. Mais, pour prendre un exemple de la vie de tous les jours,
peut-on sérieusement prétendre que, lorsqu'une force de police est
licenciée, ses anciens membres peuvent continuer à exercer leurs
anciennes fonctionsde police ?Il serait bien extraordinairequ'aucun

tribunal sanctionne cette idée. Si les anciens Membres de la Société
des Nations ont jamais eu des fonctions de (police 1)aux termes
de l'article7,c'étaiten tant que membres de la force de police que
représentait la Société - force qui est maintenant dispersée et
dissoute.
Au surplus - et ce point n'est pas sans signification - il n'est
pas vrai, mêmesi cela était pertinent en droit, que l'obligation du

19.5 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
511
Mandatory's obligation would remain unaltered if this were now
owed to former Members of the League. This is because of the
different consequences that may result from a Judgment of
the present Court, as compared with the Permanent Court, having
regard to Article 94, paragraph 2, of the United Nations Charter.

Whatever the comparison between that Article and Article 13 (4)
of the Covenant, it is evident that there are substantial differences
between the two Articles. It is hardly appropriate to develop these
differences here; it is sufficient to Say that in Our opinion, not only
are the consequences that may flow from Article 94 (2) of the
Charter different from those whichcould have resulted fromArticle 13
(4) of the Covenant, but they could be more onerous in character.
Moreover, the Council was bound by the unanimity rule. Further-
more, under the Covenant it was for the Council, and for it alone,
to initiate whataction, if any, it wouldpropose, whereas the effect of
Article 94 (2)of the Charter is to invest the judgments of the present
Court with a backing of possible sanctions or enforcement action

at the instance of a State in whose favour judgment has been
pronounced. If, therefore, the Mandatory is still under an obligation,
by virtue of the combined effect of Article 37 of the Statute and
Article 7 of the Mandate, it is one that, potentially, has different
and more burdensome consequences than before. Thus to say that
the Mandatory is not being asked to submit to anything more than
it would have had to submit toin the days of the League is clearly
incorrect; and this situation, inOuropinion, constitutes an absolute
bar to any extension or perpetuation of the Mandatory's obligations
under Article 7, above and beyond its actual language, unless this
can be justified beyond possibility of reasonable doubt on the
basis of some applicable principle of legal interpretation or general
ru!e of law, particularly since it is reasonably evident, we think

that it is precisely in order to bring Article 94 of the Charter into
play that the present proceedings have been brought.

Since, in Our view, the position is quite clear on the basis of the
actual language of Article 7, and of the ordinary law as to capacity,

we turn next to the question whether there is any applicable
principle of interpretation which would justify a different conclu-
sion. Two may be suggested: the principle of "maximum effect",
and the principle of the "presumed intentions of the parties".

(c) The +rinci+Zeof "maximum eoect"

This principle is one which can be employed in order to give
as full a scope to a provision as is reasonablyconsistent with its
196 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 513
Mandataire resterait en substance la mêmesi elle était due main-
tenant aux anciens Membres de la Société.Cela tient aux consé-

quences différentes qu'un arrêt de la présente Cour peut avoir par
rapport à un arrêt de la Cour permanente, eu égard à l'article 94,
paragraphe 5,de la Charte des Nations Unies.
De quelque manière que l'on compare cet article et l'article 13,
paragraphe 4,du Pacte, il est évident qu'il y a entre eux des diffé-
rences substantielles. Il n'y a pas lieu de développer ici ces diffé-
rences; il suffit de dire que, à notre avis, non seulement les
conséquences qui peuvent découler de l'article 94, paragraphe 2,
de la Charte sont différentes de celles qui auraient pu résulter de
l'article 13, paragraphe 4, du Pacte, mais elles pourraient êtreplus

lourdes. De plus, le Conseil était liépar la règlede l'unanimité. En
outre, c'étaitau Conseil et à lui seul qu'appartenait, aux termes du
Pacte, l'initiative des mesures éventuelles qu'il proposait, alors que
l'effet de l'article94, paragraphe 2, de la Charte est de conférer
aux arrêtsde la présente Cour l'appui de la possibilité de sanctions
ou de mesures d'exécutionsur l'instance de l'État en faveur duquel
le jugement a étéprononcé. Si donc le Mandataire est encore lié
par une obligation, il s'y attache virtuellement, sur la base de l'effet
combinéde l'article 37 du Statut et de l'article 7 du Mandat, des
conséquencesdifférenteset plus lourdes qu'auparavant. Ainsi, il est
tout à fait inexact de dire que l'on n'a pas demandé au Mandataire

d'accepter une obligation plus lourde que celle à laquelle il aurait
dû se soumettre au temps de la Société;et cette situation constitue
ànotre avis un obstacle absolu à toute extension ou perpétuation
desobligations du Mandataire d'aprèsl'article 7 au-dessus et au-delà
des termes véritables de cet article, à moins que cela ne puisse se
justifier, sans laisser la place au moindre doute, sur la base d'un
principe d'interprétation juridique applicable ou d'une règlegénérale
de droit, d'autant qu'il est raisonnable, selon nous, de penser que
c'est précisément en vue de faire jouer l'article 94 de la Charte que
la présente action a été intentée.

Puisqu'à notre avis la situation est tout à fait claire sur la base
des termes mêmesde l'article 7 et des règles ordinaires de droit
en matière de qualité, la question se pose maintenant de savoir s'il
existe un principe d'interprétation applicable qui justifierait une

conclusion différente. On en peut suggérer deux: le principe de
l'effet maximum ))et celui de (l'intention présuméedes parties )).

c) Le principe de «l'eflet maximum ))

Ceprincipe peut êtreutilisi5pour donner à une disposition la plus
grande portée raisonnablement compatible avec son texte' et avec512 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
language, and with the general circumstances of the case; but
only if such an interpretation would be so consistent. It cannot
be employed to "re-write" a provision in a manner positively

inconsistent with, or even actually contrary to what it says.
Equally, its application must be excluded if the circumstances are
such as to evidence a complete lack of any basis for the interpreta-
tion that would result. We shall show later, in dealing with the
facts relative to the dissolution of the League, why we think that
this is precisely what the circumstances do show. For the moment
we will merely point out what the interpretation contended for
by the Applicants would really involve, for it is Our view that
before the principle of "maximum effect" may with legal propriety
be applied, one must be prepared to write out the changes that
would be required in the provision concerned, if it had originally
been drafted so as expressly to produce the effect contended for;
and having done that, to consider whether the result remains
within the bounds of what can reasonably be regarded as legitimate
"interpretation", or whether is goes beyond that, and amounts
to a revision or quasi-lègislative "rectification"of the provision

in question.
In the present case, the interpretation the Applicant States
contend for could have been effected expressly by changes in
either Article 7 of the Mandate or in Article 37 of the Statute.
Changes in Article 7, exflressedin its terms, could only have been
effected at the time when Article 7 was drafted, and must be
considered on that basis. Two possible methods may be envisaged.
One would have been to replace the phrase "another Member of the
League of Nations" by "any other State" or "any other interested
State" or "any other State which at any time is or has been a
Member of the League". We consider that the chances of the Man-
datory, or for that matter any of the Mandatories, having been
willing in 1920 to accept any such sweeping wording-even if
anyone had suggested it-can be regarded as negligible.
Alternatively, the result contended for could have been achieved
by adding after the words "another Member of the League of
Nations", some such phrase as "or, should the League at any

time be dissolved, any State which was a Member at the date of
dissolution". In the next following subsection we shall give Our
reasons for holding that it is quite out of the question that any
such language should have been employed in 1920.
As regards Article 37 of the Statute, what would be necessary
would be to suppose that it had contained (and to read it as
containing) an additional paragraph running somewhat as follows :
"Whenever any such treaty or convention provides for the refer-
ence to adjudicationof disputes between Membersof the League of
Nations, it shall, in the event of, and notwithstanding,the dissolu-
tion of the League, be deemed to relate to disputes between States
who were Membersof the League at the date of its dissolution."

197les circonstances générales de l'espèce; mais seulement si une telle
interprétation est compatible avec ce texte et ces circonstances. On
ne saurait l'employer pour (récrire ))une disposition d'une manière
nettement incompatible avec son texte, ou mêmeeffectivement

contraire à celui-ci. De même,son application doit êtreécartéesi
les circonstances prouvent l'absence complète de toute base pour
l'interprétation qui en résulterait. Nous montrerons plus loin, à
propos des faits relatifs à la dissolution de la Société des Nations,
pourquoi nous pensons que c'est exactement ce que montrent les
.i-constances. Pour le moment. nous souli"erons sim~lement ce
que peut entraîner réellement l'interprétation proposéepar les de-

mandeurs; car, selon nous, avant de pouvoir appliquer en droit le
principe de ((l'effet maximum D, il faut être prêt à formuler les
changements que la disposition en cause exigerait si elle avait été
rédigée à l'origine de faqon à produire expressément l'effet voulu,
et, cela fait, considérersi le résultat reste dans les limites de ce que
l'on peut raisonnablement qualifier d'c(interprétation )légitime ou
s'il dépasseces limites et équivaut à une revision ou à une ((rectifi-
cation ))quasi législative de la disposition en question.

En l'espèce,l'interprétation défendue par les États demandeurs
aurait pu êtreeffectuéeexpressément par des modifications soit de
l'article7 du Mandat soit de l'article 37 du Statut. Des modifications
de l'article 7 exprimée dsns les termes de cet article n'auraient pu
êtreeffectuéesqu'au moment de la rédaction de l'article 7, et c'est
sur cette base qu'il faut les considérer. On peut envisager deux

méthodes possibles. L'une aurait consisté à remplacer les mots ((un
autre Membre de la Société desNations » par,« un autre Etat ))ou
((tout autre Etat intéressé ))ou ((tout autre Etat qui est ou a .été
à un moment quelconque Membre de la Sociétédes Nations ».Nous
estimons que les chances de voir en 1920 le Mandataire, ou sur ce
point n'importe quel Mandataire, disposéà accepter un libelléaussi
radical - si quelqu'un l'avait suggéré - eussent éténégligeables.

L'autre méthode d'obtenir le résultat voulu aurait consisté à
ajouter aprèsles mots (un autre Membre de la Société desNations 1)
une phrase telle que ((ou,,si la Sociétévient à êtredissoute à un
moment quelconque, tout Etat qui en sera Membre à cette époque ».
Dans la prochaine section nous expliqueronspourquoi nous pensons
qu'il est absolument impossible que des termes de ce genre aient pu
êtreemployés en 1920.

En ce qui concerne l'article 37 du Statut, il faudrait supposer
qu'il eût contenu (et le lire comme s'il contenait) un paragraphe
supplémentaire rédigé à peu près comme ceci:
Lorsqu'un traité ou convention prévoitle renvoi au règlement
judiciaire de différendsentre les Membresde la Société deN s ations,

de cette dissolution, comme visant les différendsentre des Etatst
qui étaientMembresde la Société à la date de sa dissolution.»513 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE

Itis Our considered opinion that those who drew up the revised
Statute at the preliminary Washington Conference of March-April
1945, and subsequently at San Francisco, would never have taken
the leap in the dark which such a commitment would have involved,
without carrying out a most careful preliminary investigation of
the treaties that might be affected, in order to see just what such
a commitment would amount to. No such investigation was, so
far as we are aware, ever carried out; and in the circumstances,
we donot believe it is possible to imply in Article 37 such additional

words as would have produced the effect contended for, as if they
had been originally included in terms.
To sum up on this point-we consider that the application
of the principle of maximum effect in the present case would involve
an inadmissible degree of rectification of the provisions concerned,
altogether exceeding the bounds of what is possible by way of
legitimate interpretation. We would recall that in the second phase
of the PeaceTreaties case (which had certain marked affinities with
the present one), the Court took exactly the opposite line to the
one it is now taking. Despite a finding that some of the parties
were in breach of what the Court had held to be a treaty obligation
to appoint their members of certain three-member tribunals pro-
vided for under the Peace Treaties, the Court nevertheless rejected
the view that, in the circumstances, the relevant adjudication
clause could legitimately be interpreted so as to permit a two-

member, instead of a three-member, tribunal to function. To do
that, the Court held, in a phrase which has since become part of
the common stock of international legal phraseology, would be
"not to interpret treaties but to revise them". In short, the Court
refused to rectify a provision which, on its actual terms, and in
the circumstances which had arisen, was inadequate to produce
the result contended for. It is precisely such a rectification which
the Court is in Our view now effecting, and with considerably less
le"alwarrant than would have existed for a rectification inthe Peace
Treaties case.

Another reason why extensive interpretations of Article 7 are
not justified unless there is the clearest warrant for them, is the
unilateral character of that provision. It could be invoked against,
but not by, the Mandatory, even if the latter should itself want a

legal ruling on some point relating to the Mandate arising in a
dispute with another Member of the League. This makes it al1the
more necessary to interpret Article 7 strictly, or at least
scrupulously. Nous pensons, après mûre réflexion, que les rédacteurs du Statut
lors de la conférence préliminaire de Washington de mars-
avril1945 et ultérieurement lors de la conférencede San Francisco,
n'auraient jamais fait le saut dans l'inconnu qu'impliquait un tel
engagementsans effectuer préalablement des recherches trèsprécises
sur les traités susceptibles d'êtreaffectés,afin de voir à quoi serait
revenu exactement un tel engagement. Aucune recherche de ce
genre n'a étéeffectuée à notre connaissance; et nous ne croyons pas
qu'il soit possible en l'occurrence de lire dans l'articl37 les termes
supplémentaires qui eussent produit l'effet voulu s'ils avaient été
inclus à l'origine dans son texte.

Pour résumer ce point -- nous estimonsquel'application du prin-
cipe de l'effet maximum dans la présente affaire entraînerait une
rectification des dispositions en cause dans une mesure inadmissible,
dépassant nettement les limites de l'interprétation légitime. Nous
rappellerons que dans la seconde phase de l'affaire des Traitésde
paix (qui présente certaines affinités marquées avec les présentes
espèces) la Cour a adopté une attitude exactement opposée à celle
qu'elle adopte maintenânt. Tout en jugeant que certaines des
parties avaient violé ce qu'elle considérait comme une obligation
conventionnelle de désignerleurs représentants à certains tribunaux
de trois membres prévus par les traités de paix, la Cour a cependant
rejeté l'opinion selon laquelle, dans les circonstances données, la
clause de règlement judiciaire pertinente aurait pu légitimement
s'interpréter de manière à permettre le fonctionnement d'un tribu-

nal de deux membres au lieu de trois. Comme l'a dit la Cour dans
un passage qui fait depuis lors partie du fonds commun des textes
de droit international, une décision dans ce secs aurait équivalu
((non à interpréter les traités, mais à les reviser))En bref, la Cour
a refusé de rectifier une disposition qui, dans ses termes effectifs
et dans les circonstances qui se présentaient alors, ne pouvait
produire le résultat prétendu. A notre avis, c'est précisément une
rectification de ce genre que la Cour effectue maintenant et avec
beaucoup moins de justification en droit qu'il n'y en aurait eu
dans l'affaire des Traitésde paix.
Le caractère unilatéral de l'article7 offre une autre raison d'es-
timer que les interprétations extensives de cette disposition ne sont
pas fondées, à moins qu'elles ne soient supportées par une justifi-
cation des plus incontestables. Cet article ne pouvait êtreinvoqué

que contre le Mandataire et non par lui, mêmesi ce dernier recher-
chait de son côté une décision judiciaire sur un point ayant trait
au Nandat et se présentant à propos d'un différend avec un autre
Membre de la Société desNations. C'est là une raison de plus pour
interpréter l'article7 strictement, ou du moins scrupuleusement.514 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
(d) The 9reszlmedintentions of the fiarties

We now turn to the second principle of interpretation on the
basis of which a different conclusion from the one we have come
to may be urged. It has been a major contention in this case that
in the life-time of the League, although some States might, by
leaving the League, lose their nght to invoke Article 7, there
alwaysremained other States which could invoke it, sothat Article 7
could never become a dead letter. If, however, Article 7 had to
be read according to its strict language now, there would-so the
argument runs-be no State which couldinvoke it, so that it would
cease to operate at all; this void can never have been intended
by the original framers of the Mandate, consequently it must be
filled by reading Article7 as still confemng rights on ex-Members
of the League.
Since a situation in which there would be no States qualified
to invoke Article 7 could only arise by reason of the complete
dissolution or break-up of the League, this contention must pre-
suppose either that the original framers foresaw that possibility,
or that, had they foreseen it, they would have provided for it,
and would have done so in the sense contended for by the Ap-
plicants.
It is clear that if the framers actually foresaw the possibility,
then their failure to provide for it must have been deliberate, and

therefore the argument based on their "presumed intentions" would
lead to the opposite conclusion, namely that the void ought not to
be made good by any interpretative process.

It is, however, evident that those concerned did not foresee,
and would have refused to contemplate, a possible break-up of the
League. But even supposing them to have done so, we can see no
ground on which it could legitimately be assumed that they would
have made express provision for the continuance in force of Arti-
cle 7, of the Mandatory's obligation to submit to compulsory
adjudication. Ifany assumption at allcould be made, it would have
to be in the opposite sense, for the circumstances in which a break-
up of the League would or might occur, must necessarily have been
quite unforeseeable in 1920; and it is as certain as anything can
be that none of the Mandatory Powers (not only South Africa)
would have been willing to accept a obligation unlimited in point
of time to submit to adjudication, which would still remain operative
in a situation the nature of which nobody could predict. At that
date (1920)wiUingnessto submit to compulsory adjudication at all
was a comparative rarity, and would certainly not have been
forthcoming for an obligation of limitless duration under unknown
conditions.

What the Applicants are really asking the Court to do, is to
interpret Article 7 in the light of the presumed intentions of the

199 d) L'intention $résumée des parties

Nous en arrivons au deuxième principe d'interprétation sur la
base duquel on pourrait avancer une conclusion autre que la nôtre.
L'un des principaux arguments développésen l'espècea étéque,
du temps de la Sociétédes Nations, quoiquecertains États pussent,
en quittant la Société,perdre le droit d'invoquer l'article 7, il
restait toujours d'autres États qui pouvaient le faire, en sorte que
l'articl7 n'aurait pu devenir lettre morte. Or, s'il faut maintenant
lire l'articl7 d'awès ses termes stricts. aucun État - dit-on -
ne pourrait aujourd'hui l'invoquer, en sorte qu'il aurait entièrement
cesséd'être applicable; onprétend donc que, comme ce vide n'a
jamais pu entrer dans les intentions des rédacteurs du Mandat,
il faut lire l'artic7ecomme continuant à conférerdes droits aux
anciens Membres de la Société desNations.
Puisqu'une situation dans laquelle aucun État n'aurait qualité
pour invoquer l'article 7 ne pouvait se produire que par suite de la

dissolution totale de la Société desNations, l'argument en question
doit se fonder sur l'hypothèse soit que les rédacteurs ont prévu
cette éventualité, soit que, s'ils l'avaient prévue, ils y auraient
fait face de la manière que prétendent les demandeurs.

Il est clair que, si les rédacteurs ont réellement prévu cette
éventualité, le fait qu'ils n'aient pas pris de disposition pour y
faire face doit avoir été l'effetd'une volonté délibérée; ainsi l'argu-
ment fondé sur leurs ccintentions présumées » conduirait à une
conclusion inverse, à savoir que le vide ne doit pas êtrecomblépar
voie d'interprétation.
Mais il est évident que les intéressésn'ont pas prévu une éven-
tuelle dissolution de la Sociétédes Nations et qu'ils se seraient
refusésà l'envisager. D'ailleurs, mêmeen admettant qu'ils l'aient
fait, nous ne voyons pas sur quelle base on pourrait légitimement
présumer qu'ils auraient pris des dispositions expresses pour le

maintien en vigueur de l'article 7 ou de l'obligation du Mandataire
de se soumettre au règlement judiciaire obligatoire. Si l'on peut
faire des suppositions, elles doivent êtreen sens contraire, car les
circonstances dans lesquelles la dissolutionde la Sociétédes Nations
se produirait ou pourrait se produire devaient nécessairement être
tout à fait imprévisibles en 1920; il est on ne peut plus certain
qu'aucune des Puissances mandataires (et point seulement l'Afrique
du Sud) n'aurait consenti à accepter une obligation perpétuelle
de se soumettre au règlement judiciaire devant continuer à jouer
dans une situation dont personne ne pouvait prévoir la nature.
A cette époque (1920) le consentement au règlement judiciaire
obligatoire était relativement rare et il n'aurait certainement ,
pas étédonnéà l'égardd'une obligation de durée illimitée,dans des
conditions inconnues.
En réalité,ce que les demandeurs demandent à la Cour de faire,
c'est d'interpréter l'articl7 à la lumière des intentions présumées

199parties as these might have been expected to be had they foreseen
not only that the League would be dissolved, but the circumstances
in which this would occur, i.e. that the League would be followed
by the United Nations, that the trusteeship system would be set up,

and so on. But it is not a legitimate process of interpretation
to read a provision on the basis of presumed intentions deduced
in the light of nothing but after-knowledge. One can only deduce
intentions in the light of what the parties might reasonably have
been expected to foresee at the time, and not on what those inten-
tions might have been had the parties had an actual foreknowledge
of the future, which they could never in fact have had.
The time for facing, and providing for, the consequences of
the break-up of the League, so far as Article 7 was concerned, was
of course not in 1920, when the Mandate was framed, but in 1945-
1946, when the League was breaking up. However, this was not
done; and we shall presently give Ourreasons for thinking that this
was not due to any oversight but deliberately and for good cause.
This being ço, we know of no principle wliich, merely because mat-
ters have not in fact turned out as the parties, or some of them,
may have anticipated, would enable, let alone require, a Court of

law to take remedial action in the guise of some process of inter-
pretation.

3. Othercontentions
We have now to consider certain other contenrions on the
basis of which it has been claimed that the Applicant States in this
case are entitled to invoke Article 7.These are founded on more or
less extraneous considerations, such as the situation which has
now arisen in regard to the Mandate, or the provisions of other in-
struments, etc. A number of these arguments we will not deal with,
partly for reasons of space, but mainly because they do not
serm to us to be legal arguments at all. They are no more than

mctives or reasons for urging that it is politically desirable that the
Applicants should be allowed to invoke Article 7, and that the
Court should assume jurisdiction. This feeling, understandable
though it may be, cannot have any bearing on the legal issues
involved, and these must be Our sole concern.
Another group of arguments which do have a legal character-
though in Our view they are unsound-we shall not deal with
because they are not effectively relied upon by the Judgrnent of
the Court in the present case, although they were much discussed
by the Parties in their writtenand oral pleadings, and were directly
or indirectly relied upon by the Court in the 1950 case-such as
for instance the argument based on Article 80, paragraph 1,of the
200 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 515
que l'on pourrait attribuer aux parties pour le cas où elles auraient
prévu non seulement la dissolution de la Sociétédes Nations mais

aussi les circonstances de cette dissolution, c'est-à-dire que la
Sociétéferait place àl'organisation des Natinns Unies, qu'un régime
de tutelle serait établi, etcMais ce n'est pas une méthode légitime
d'interprétation que de lire une disposition d'après des intentions
présumées a fiosteriori.On ne peut déduireles intentions des parties
que de ce qu'elles ont raisonnablement pu prévoir à l'époque, et
non pas de ce qu'elles auraient pu vouloir si elles avaient exacte-
ment prévu l'avenir, ce qu'elles ne pouvaient faire.

11est évident que l'époque où l'on aurait pu faire face aux consé-
quences de la dissolution de la Société desNations et prendre des
dispositions en conséquence, tout au moins pour ce qui concerne
l'article7, n'est pas celle de la rédaction du Mandat (1920) mais

celle de la dissolution de la Société(1945-1946). Or, on n'a rien fait
de la sorte et nous allons expliquer maintenant pourquoi nous
pensons que cela n'est pas dû à une omission mais qu'on l'a voulu,
délibérémentet pour cause. Cela étant, nous ne connaissons aucun
principe quipermettrait, et moins encore exigerait, qu'un tribunal
prenne des mesures rectificatives sous le couvert d'un processus
d'interprétation, simplement parce que l'affaire n'a pas évolué
comme les parties, on certaines d'entre elles, l'avaient envisagé.

Il nous faut examine; maintenant certains autres arguments

sur la base desquels les Etats demandeurs prétendent qu'ils ont le
droit d'invoquer l'article 7 en l'espèce. Ces arguments reposent sur
des considérations plus ou moins externes, telles que la situation
actuelle du Mandat ou les dispositions d'autres instruments, etc.
Sous en laisserons certains de côté, en partie faute de place, mais
surtout parce que nous considérons que ce ne sont nullement des
arguments juridiques. Ce ne sont rien de plus que des motifs ou des
raisons faisant valoir qu'il est politiquement souhaitable que les
demandeurs aient le droit d'invoquer l'article7 et que la Cour se
déclare compétente. Si compréhensible que soit ce sentiment, il ne
saurait avoir aucune portée sur les questions juridiques en cause
et seules ces dernières doivent retenir notre attention.
D'autres arguments sont bien d'ordre juridique - tout en étant
à notre avis mal fondés -, mais nous n'en traiteronspas parce que,

dans son présent arrêt, la Cour ne se fonde pas effectivement sur
eux, bien qu'ils aient étélonguement débattus par les parties dans
la procédure écriteet orale et que la Cour y ait fait directement ou
indirectement allusion dans l'affaire de 1950 - tel est le cas, par
exemple, de l'argument fondé sur l'article 80, paragraphe 1, de la
2O0United Nations Charter l,or on a supposed "carry-over" or devolu-

tion of the functions, powers or rights of the League of Nations
and its Members in respect of mandated temtories, in favour of the
United Nations and its Members.
The contentions we shall deal are broadly of three kinds, based

(a) on the institutional character of the Mandate, and its survival
as aninstitution, if not as a treaty or convention; (b) on the alleged-
ly essential and necessary function performed by Article 7 in the
scheme of the Mandate; and (c) on assurances said to have been
given by the Mandatory in 1946 in anticipation of the dissolution

of the League, and to have involved an agreement to be bound
by Article 7 in relation to any State which was a Member of the
League at the date of its dissolution.

(a) The institzttional basis and efects of the Mandate

The contention advanced under this head is briefly that the
admitted survival of the Mandate as an institution necessanly
implies its survival complete and with all its parts intact, including
Article 7. If, however, Article 7 could only be invoked by Members

Article 80(1)of the Charter has nothing to do with the Court's jurisdiction.

It has however been sought to cal1 it in aid as follows: the Article, it is said,
"c~nserved" the rights of States; one of these rights was that stated in Article 7 of
the Mandate instrument; therefore the rightsurvived the League dissolution until
the mandated territory was brought under trusteeship.
Theargument is not onlyinherently unsound, it ignores the words of Article1).
This Article is clearlan interpretationclause, commonly called a saving clause,
of a type frequently to be found in legislative or treaty instrumentdesigned to
prevent Statute or Treaty provisionsbeing interpreted so as to operate beyond their
intendment.

Such a clause does not, except in a loose and quite indefinite sense, "conserve"
(whatever they are and whatever their content) except as provided by theStatuteem
or Treaty. Article 80(1)does not maintain or stabilize rights as they existed at the
date of the Charter coming into operation, nor does it insure the continuance of
those rightsor increase or diminish them. It leaves them unaffected by Chapter XII
of the Charter.
What Article 80 (1)does not Say is as importanas what it does Say. It does not
Say that rights shall continue. It does not provide that these rights shall not there-
after, until trusteeship agreemenhave been concluded, be subject tothe operation
of law, or that they shall not terminate or be extinguished by effluxion of time,
failure of purpose, impossibility of performance or for any other reason. It does
not say these rights shall not be altered or be subjto alteration eveby normal
legal processes.
It is evident that thpurpose of Article 80(1) was quite different to what has
been contended and does not lend itself by any rational method of interpretation
to support the contention advanced.The sole purpose of the Article was to prevent
any provision of Chapter XII of the Charter being construed so as to alter existing
rights prior to a certain event.

201Charte des Nations Unies l,ou sur une prétendue ((continuation »

ou dévolution, en faveur des Nations Unies et de ses Membres,
des fonctions, pouvoirs ou droits de la Société des Nations et de
ses Membres touchant aux territoires sous Mandats.
Les arguments que nous examinerons peuvent se diviser en trois

grandes catégories selon qu'ils se fondent a) sur le caractère ins-
titutionnel du Mandat et sa survivance en tant qu'institution,
sinon en tant que traité ou convention; b) sur le rôle soi-disant

essentiel et nécessaire de l'article 7 dans le cadre du Mandat; et c)
sur les assurances que le Mandataire aurait données en 1946 en
prévision de la dissolution de la Société desNations, impliquant
que le Mandataire aurait accepté d'êtreliépar l'article 7 à l'égard

de tout Etat Membre de la Sociétédes Nations à la date de sa
dissolution.

a) Le fondement institutionnel et les e8ets du Mandat
En résumé,l'argument avancé sous ce titre est que la survivance

admise du Mandat en tant qu'institution implique nécessairement
sa survivance intégrale, tous ses élémentsrestant intacts y compris
l'article 7. Mais, l'article 7 ne pouvait êtreinvoqué que par les

1L'article 80, paragraphe I,dela Charte n'a rien à voir avec la compétence de la
Cour.
On a toutefois cherché à s'en servir dela façon suivante: cet article aura((pré-
servé .les droits des États; l'un de ces droits était celui qui était énoncédans l'arti-
cle 7 de l'acte de Mandat; par conséquent, ce droit aurait survécuà la dissolution
dela Sociétéjusqu'à ce que le territoire sous Mandat soit placé sous tutelle.
Non seulement cet argument est défectueux en soi, mais il ignore les termes
mêmes de l'article 80, paragraphe I. Cet article représente clairement une clause
d'interprétation,appelée communément 1,clause de sauvegarde »,d'un type que
l'on trouve fréquemment dans les instruments législatifs ou conventionnelsdestinés
à empêcher que les dispositions d'une loi ou d'un traité soient i7zterhrétéedse façon
àavoir des effets dépassant leur objectif.
Sauf dans un sens vague et tout à fait indéterminé, une clause de ce genre ne
:préserve aaucun droit. Elle empêcheque l'application de la loi ou du traité affecte
des droits (quels qu'ils soienou quel que soit leur contenu) autrement que de la
manière prévue par le statut ou le traité. L'article 80, paragraphe1,ne maintient
ni ne stabilise certains droits tels qu'ils existaientate d'entrée en vigueur de la
Charte; il n'assure pas non plus leur continuité; il ne les accroît ni ne les réduit. Il
les laisse en dehors de l'effet des dispositionschapitre XII dela Charte.
Ce que l'article 80, paragraphe 1, passe sous silence est aussi importantque ce
qu'il exprime. Il ne dit pas que certains droits seront maintenIl ne dit pas que ces
droits serontpar la suite, jusqu'à la conclusion d'accords de tutelle, sujetà exé-
cution ou qu'ils ne prendront pas fin ni ne deviendront caducs par expiration du
terme. défaut d'objectif, impossibilité d'exécution ou pour toute autre raison. 11
ne dit pas que ces droits ne seront ni modifiés, ni sujeàsmodification, même par
lin procédéjuridique normal.

Il est évident que le but de l'article 80, paragraph1,est tout à fait différent de
ce qu'on a prétendu et ne permet pas, par des méthodesrationnellesd'interprétation,
d'appuyer les arguments avancés. I e seul but de cet article était d'empêcher qu'une
disposition du chapitreXII de la Charte pût êtreinterprétée de façonà modifier des
droits existant antérieurement S.un certain événement.
201 517 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER ,4ND FITZMAURICE
of the League of Nations (nownon-existent) it would for al1practical
purposes not have survived. Hence any State which \vas a Rlember
of the League at the time of its dissolution must be entitled to
invoke it.
This contention seems to us to involve two fallacies. The first is

the view that the survival or continued existence of an institu-
tion does necessarily entai1 the survival or continued existence
intact of all its parts. We will return to this. The second is that
survival can somehow operate to add stature to the institution, so
to speak, giving it an added effect, and that a provision can survive
otherwise than in accordance with its own terms. In Our opinion,
Article 7 has survived only in the sense that it has not been actually
excised from the Mandate instrument, and still stands on paper as
part of the original League of Nations Resolution or Declaration of
December 17, 1920. As part of the Mandate instrument, and on the
basis that this instrument is or represents a treaty or convention
in force, the Court must determine the application of Article 7
and may do so (and in Our view may only do so) by finding that,
as it only gives rights to'Members of the League, the Applicants
cannot invoke it. The Court cannot, in Our view, properly apply

it in any other way, for if it still stands part of the Mandate instru-
ment, then by that very token it stands part of it in the same terms
as it was originally framed for purposes of insertion inthat instru-
ment, and which have never been amended. The Court could not
therefore both rely on the continued presence of Article 7 in the
Mandate instrument, and refuse to apply it in accordance with the
terms in which it figures there.

But, correct as this is, we do not wish to rest Our view on any
mere argument of logic. The substantial grounds on which we reject
the contention based on the survival ofthe Mandate as an institution
are first, that we regard as fallacious the view that if an institution
survives, al1 its parts must survive too; and secondly, that we
regard as incorrect the further view that a provision for compulsory
adjudication, such as Article
7, has such a character of inherent
necessity in the context of the Mandates System, that a continued
and substantive field of application must be postulated for it, as
an essential element of the System.

As regards the first ofhese questions, there is in fact no principle
of international law which requires that because an instrument or
institution survives or continues in existence, it must necessarily
do so with respect to al1its parts on a completely non-severable
basis. The position is quite the contrary: international law postu-
lates no incompatibility between the survival, or continued existence
of an international agreement, organ or institution, and a termi-
202 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 517

Membres de la Société desNations (aujourd'hui disparue), il ne
pratiquement survivre. Donc, tout Etat qui était Membre
de la Sociétéau moment de sa dissolution doit avoir le droit de
l'invoquer.
A notre avis cet argument est fallacieux à deux égards. La pre-
mière erreur est de prétendre que la'survivance ou le maintien en
vigueur d'une institution entraîne naturellement la survivance ou
le maintien en vigueur de tous ses élémentsintacts. Nous revien-
drons sur ce point. La deuxième erreur est de penser que cette
survivance pourrait de quelque façon augmenter ce que nous
appellerons la stature de l'institution, en lui donnant des effets
supplémentaires, et qu'une disposition pourrait survivre autrement
que d'après ses propres termes.A notre avis,l'articl7a uniquement
survécu en ce sens qu'il n'a pas étéphysiquement rayé de l'acte
de Mandat et qu'il figure toujours sur le document contenant la
résolution ou déclaration originale de la Sociétédes Nations du

17 décembre 1920. La Cour, qui doit déterminer l'application de
l'article7 en tant que partie de l'acte de Mandat et suivant le
principe que cet acte est ou représente un traité ou une convention
en vigueur, peut le faire (et c'est, selon nous, la seule solution)
en décidant que les demandeurs ne peuvent invoquer l'article 7
puisqu'il ne donne de droits qu'aux Membres de la Société des
Nations. Selon nous, la Cour ne saurait appliquer correctement
cet article d'une autre manière car, s'il fait encore partie de l'acte
de Mandat, par là mêmeil en fait partie dans les termes où il a été
primitivement rédigé envue de son insertion dans cet acte et
qui n'ont jamais étémodifiés.La Cour ne peut donc à la fois se
fonder sur la persistance de l'article7 dans l'acte de Mandat et
refuser de l'appliquer conformément aux termes dans lesquels il y
figure.
Mais, si exact cela soit-il, nous ne voulons pas fonder notre
opinion sur une simple considération de logique. Les raisons de
fond qui nous poussent àrejeter l'argument tiréde la survivance du
Mandat en tant qu'institution sont, premièrement, que nous con-

sidéronscomme fallacieuse l'idéeque, si une institution survit, tous
ses éléments doivent également survivre; et, deuxièmement, que
nous estimons qu'il est faux qu'une disposition de règlement
judiciaire obligatoire comme l'article 7 ait un tel caractère de
nécessitéinhérente au système des Mandats qu'il faille lui attribuer
un champ d'application continu et réel entxnt qu'élément essentiel
de ce système.
En ce qui concerne la première de ces questions, il n'existe en fait
aucun principe de droit international qui exige que, puisqu'un
instrument ou une institution survit ou continue d'exister, il en soit
nécessairement ainsi pour tous ses éléments,sans aucune espèce de
séparation possible. Bien au contraire, le droit international ne
prévoit aucune incompatibilité entre, d'une part, la survivance ou
le maintien en vigueur d'un accord, institution ou organe inter-

202518 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
nation or cessation, on one ground or another, of some particular
part of it, or of particular functions, rights or obligations provided

for by it. This situation is indeed rather a common one, and ituite
often occurs that, for instance, an instrument remains in force, but
that some particular provision of it ceases or has ceased any longer
to be operative, because its terms have become inapplicable, or
because it is now impossible of performance, or for some other
reason.
If an inspection of a particular clause shows that, although an
instrument or institution survives as such, the clause concerned is
no longer possible of performance, or can no longer be applied
according to its terms (as is the case with Articles 6 and 7 of the
Mandate) then the prima facie conclusion must be that although
the instrument or institutionothenvise remains intact, that particu-
lar clause is at an end.
The only circumstances in which it might be possible to maintain
the contras., would be where the provision concerned was of so
fundamental and essential a character that the instrument or

institutioncould not function without it. Accordingly we must now
consider whether, in the legal sense, a character ofinherent necessity
attaches to Article 7of the Mandate as to justify its application in
the manner decided upon by the Court.

(b)The argumentfrom necessity

We here reach the heart of the present case, for the claimed
essentiality of Article7 of the Mandate instrument is not only the
very root from which has grown the contention that an agreement
was entered into by the Mandatory in 1946 to continue to re-
gard Article 7 as applicable (wedeal with thislater):it also provides
both the root and many of the branches of most, if not al1the con-
tentions in favour of the assumption of jurisdiction in the case. If
Article 7 is not an essential element of the Mandate, al1the argu-
ments of any real substance presented in favour of the assumption
of jurisdiction fa11to the ground. The first question therefore is

how such terms as "essential", "inherently necessary", etc., are
properly to be understood. Bare assertions of necessity unsupported
by any legal criteria are insufficient. The main ground upon which
the necessary character of Article 7 is predicated in the present
case, is that it was considered essential in the interests of the peoples
who were as yet unable to stand alone that there should be a
"judicial supervision" of the discharge by the Mandatory Power
of its international obligations of the sacred trust. Thatnecessity,
it is urged, must somehow or other be given effect to.
Having regard to the view we take on the third preliminary
objection,namely that Article 7was not instituted for the protection

203national et, d'autre part, l'expiration ou la caducité pour une raison
ou pour une autre d'un de ses élémentsparticuliers ou de fonctions,
obligations ou droits particuliers qui y sont prévus. Cette situation
est même très répandue; il arrive souvent par exemple qu'un
instrument reste en vigueur alors qu'une de ses dispositions parti-
culièrescesseou a cesséde jouer, du fait que ses termes sont devenus
inapplicables ou son exécution impossible, ou pour toute autre
raison.
Si l'examen d'une clause donnée montre (comme dans le cas des
articles 6 et7 du Mandat) que, d'après ses propres termes, elle ne
peut plus être appliquée, bien que l'instrument ou l'institution
survive en tant que tel, il faut prima facie en conclure que cette
clause est devenue caduque, bien que l'acte ou l'institution reste
par ailleurs intact.

On ne pourrait soutenir le contraire que dans le cas où la clause

en question aurait un caractère si essentiel et si fondamental que
l'acte ou l'institution ne pourrait fonctionner sans elle. Il nous
faut donc voir maintenant si, au sensjuridique, l'article du Mandat
a un caractère de nécessitéinhérente tel que cela justifie de l'appli-
quer comme la Cour en a décidé.

b)L'argument tiréde la nécessité
Nous arrivons ici au cŒur de la présente affaire car le prétendu
caractère essentiel de l'articl7 de l'acte de Mandat est non seule-
ment à la base de l'argument selon lequel le Mandataire aurait
accepté en 1946 de continuer à considérer l'article 7 comme appli-
cable (nous en parlerons plus loin), mais il est aussi à la base et
forme l'essence de presque tous les arguments avancés en faveur de
la compétence de la Cour en l'espèce. Si l'article 7 n'est pas un
élément essentieldu Mandat,' tous les arguments substantiels pré-
sentésen faveur de la compétence sont réduits à néant. La première

question est donc de savoir comment interpréter correctement les
termes «essentiel », «nécessitéinhérente »,etc. Il ne suffit pas de
simples affirmations de nécessiténon appuyées par des critères
juridiques. Le principal motif avancéen faveur du caractère néces-
saire de l'article en l'espèceest que l'on considérait comme essen-
tiel, dans l'intérêtdes peuples non encore capables de se diriger
eux-mêmes,qu'il y eût une ((surveillance judiciaire» sur la façon
dont la Puissance mandataire accomplissait les obligations inter-
nationales de sa mission sacrée. Il faut, dit-on, donner effet à cette
nécessitéd'une façon ou d'une autre.
Etant donnénotre opinion sur la troisième exceptionpréliminaire,
à savoir que l'articl7 n'a nullement étéinstitué pour la protection

203 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
519
of the inhabitants of the mandated territory at all, we obviously
could not accept any plea of necessity based on the above-mentioned
ground. But even if we took a different view about that, we should
still reject this ground. Merely to show that the provision or clause
concerned is desirable, or that it is a good thing to have it, or that
it serves a useful purpose, is not enough. Far more than that is
required.

In Ouropinion what is required is that the provision or clause be
of such a character that the instrument, institution or system it
relates towill not function without it- quite a different thing. In
general, provisions for adjudication have not been regarded as
having this character in relation to the instruments they figure in.
In rare and somewhat special cases they may have. An example
is afforded by, for instance, the 1958 Geneva Convention on the
Conservation of Fisheries on the High Seas, in which elaborate
provisions for compulsory arbitration are built into the body of the
treaty as an essential part of the method of determining what
measures of conservation on the high seas are legitimate under the
Treaty. But except in such types of case, provisions for compulsory
adjudication, desirable though they may be in principle, have never
been regarded as a sine qzta non of the operation of a treaty, and
any such suggestion would normally meet with strong opposition.

Their mere presence in a treaty, for which there may be a variety
of reasons, is no indication of necessity.

Equally the absence of Article 7 would have left the Mandate
in no different and no worse position than hundreds of other in-
struments not containing any adjudication clause. If, instead of
the Permanent Court, the Article had provided for a reference to
Arbitrators, one of whom was to be the holder of a designated
office and that officesubsequently, for any reason, ceased to exist,
could it be said that the Article, being no longer capable of per-
formance, this would have gone to the root of the whole Mandate
and thus put an end to it. The answer clearly would be "No".
In principle the same answer should be given should the Article as
framed fail of further performance for any reason. The Mandate

could still subsist without the Article, just asit could have done
if the Permanent Court had come to an end and no successor Court
had arisen.

A more specific ground of "necessity", heavily relied upon, is the
fact that by reason of the unanimity rule which prevailed in the
Council of the League of Nations (including, when Mandates
questions were under consideration, the vote of the Mandatory
itself) the Council, in the last resort, could not impose its own view OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 519
des habitants du territoire sous Mandat, nous ne pouvons évidem-
ment pas accepter un argument de nécessité fondésur le motif qui
vient d'êtrementionné. Toutefois, mêmesi notre avis était différent
à cet égard, nous rejetterions encore ce motif. Il ne suffit pas de
montrer Simplement que la disposition ou la clause en question est

souhaitable, ou qu'il est bon qu'elle existe, ou qu'elle sert une fin
utile.Il faut beaucoup plus que cela.
Anotre avis, il faut que la disposition ou la clause ait un caractère
tel que l'instrument, l'institution ou le système auquel elle se rap-
porte, nefonctionneraitpassanselle - ce qui est tout à fait différent.
En général,les clauses de règlement judiciaire ne sont pas considé-
réescomme possédant ce caractère dans le cadre des instruments où
elles figurent. Elles peuvent présenter un tel caractère dans des cas
rares et plutôt spéciaux. C'est par exemple le cas de la convention
de Genève de 1958 sur la pêcheet la conservation des ressources
biologiques de la haute-mer dans laquelle des dispositions détaillées
prévoyant l'arbitrage obligatoire sont intégréesdans le traité com-
me un aspect essentiel de la méthode pour déterminer, d'après le
traité, les mesures de conservation légitime des ressources biologi-
ques de la haute-mer. Mais, sauf dans ce genre de cas, les dispositions
prévoyant le règlement judiciaire obligatoire, aussi souhaitables

qu'elles puissent être en principe, n'ont jamais étéconsidérées
comme une condition sine qua non de la mise en Œuvre d'un traité
et toute suggestion en ce sens rencontrerait normalement une vive
opposition. Leur simple présencedans un traité, déterminée pardes
raisons variées, n'en indique pas le caractère de nécessité.
Ainsi l'absence de l'article7 n'aurait pas laissé leMandat dans
une situation différente ou pire que celle d'une centaine d'autres
instruments qui ne contiennent aucune clause de règlement judi-
ciaire. Si, au lieu de mentionner la Cour permanente, l'article avait
prévu qu'on ferait appel à des arbitres, dont l'un aurait été le
détenteur d'une fonction déterminée, et si, par la suite, cette fonc-
tion avait cesséd'exister pour une raison ou pour une autre, pour-
rait-on dire que, l'article n'étant plus susceptible d'êtremis en
Œuvre, ce fait aurait frappéle Mandat à la base et y aurait mis fin?
La réponse serait évidemment «non ».En principe, on pourrait
donner la mêmeréponse s'il n'avait pas été possible, pour une
raison ou pour une autre, de continuer d'appliquer l'article tel qu'il

a étérédigé.Le Mandat pourrait subsister quand même sans
l'article, tout comme il aurait pu subsister si la Cour permanente
avait disparu sans successeur.

Une raison plus préciseen faveur de la « nécessité», que l'on a
fortement soulignée, est que la règle de l'unanimité en vigueur au
Conseil de la Sociétédes Nations (y compris le vote du Mandataire
lui-mêmelorsque la question des Mandats était à l'examen) avait
pour effet que le Conseil ne pouvait, en dernier ressort, imposer ses

204on the Mandatory. Since the Council could only ask the Permanent
Court for advisory opinions which would not be binding, and since
under Article 34 of the Statute of the Court, only States could

appear before the Court as litigants and obtain a binding decision,
therefore it was essential, so it is claimed, in order to protect the
sacred trust, for a Member or Members of the League to be able to
invoke Article 7 and bring the dispute to the Permanent Court for
adjudication.

Of al1 the arguments advanced in this case, this seems to us to
have the least substance. There is in Our view no conceivable
warrant for supposing that it was ever intended to be a part of the
Mandates System that the Council of the League should be able to
impose its own view on the Mandatory. The existence of the una-
nimity rule shours the exact reverse, and therefore proves the
contrary.
Moreover, can it be seriously imagined, if it had been the inten-
tion of those who created the System that the Council should, in

the last resort, be able to bind or coerce the Mandatory, that this
would have been left to the chance possibility that some individual
Member of the League would be willing to intervene (in a matter
that in no way affected its own interests as a State), and to espouse
the cause ofthe Council,in the same way that the present Applicants
have done on behalf of the 'CTnitedNations Assembly in what is
essentially a dispute between the Respondent State and the Assem-
bly? Such processes may be carried through now. They were not
even thought of in 1920, and certainly were not contemplated under
the Mandates System.
Article 22 of the Covenant, and Article 6 of the Mandate, pro-
vided for reports to be rendered by the Mandatory to the League
Council. The very fact of the unanimity rule coupled with the
further fact that under paragraph 5 of Article 4 of the League
Covenant, the Mandatory had to participate inthe vote, shows that
the system was one which was intended to be worked by a process

of discussion, negotiation, and common understanding. The whole
idea of imposing anything on the Mandatory was foreign to it.
Still more foreign to the climate of opinion of that time would
have been the idea of using individual Members of the League for
the purpose. In Our opinion, as we make clear in connection with
the Third Preliminary Objection, the real object of Article 7, and
the similar articles in other Mandates, was not to enable the indi-
vidual Members of the League to protect the interests of the Council
or the League vis-à-v thesMandatory, but to enable them to protect
their own interests and those of their nationals, in the mandated
territories. Particularlin the case of the "A" and "B" Mandates,
these could be considerable. Because the Council's main concern
would not be over such interests, but would relate chiefly to the
conduct of the Mandate, vis-à-v thesinhabitants, it was considered

205 OP. DISS. COhIXlUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 520

vues au Mandataire. Puisque le Conseil ne pouvait pas demander
d'avis consultatif à la Cour permanente, avis qui n'aurait pas été
obligatoire, et p?~isqu'aux termes de l'article 34 du Statut de la
Cour, seuls les Etats pouvaient présenter à la Cour une affaire
contentieuse et obtenir une décision obligatoire, on prétend qu'il
était essentiel pour protéger la mission sacrée qu'un Membre, ou
des Membres, de la Sociétédes Nations fussent habilités à-invoquer
l'article7 et à soumettre le différend au jugement de la Cour
permanente.
De tous les arguments avancés dans cette affaire, celui-ci nous
semble le moins fondé. Il n'existe à notre avis aucune raison conce-

vable permettant de supposer qu'on ait jamais eu l'intention, dans
le cadre du système des Mandats, d'habiliter le Conseil de la Société
des Nations à imposeer ses vues au Mandataire. L'existence de la
règle de l'unanimité montre une situation exactement inverse et
prouve donc le contraire.
Au surplus, peut-on s'imaginer sérieusement que, si ceux qui ont
crééle système avaient eu l'intention de donner au Conseil en der-
nier ressort le pouvoir de lier ou de contraindre le Mandataire, ils
s'en seraient remis à la possibilité éventuelle qu'un Membre indi-
viduel de la Sociétédes Nations fût disposé à intervenir (dans une
affaire n'affectant aucunement ses propres intérêtsen tant qu'Etat)

et à prendre fait et cause pour le Conseil, comme les demandeurs
l'ont fait en l'espèceau nom de l'Assemb!éedes Nations Unies dans
un différendopposant essentiellement 1'Etat défendeur et 1'Assem-
blée ?Pareillesprocédurespeuvent êtremises en Œuvreaujourd'hui.
On n'y songeait mêmepas en 1920 et elles n'ont certainement pas
étéenvisagéesdans le cadre du système des Mandats.
L'article22 du Pacte et l'article 6 du Mandat stipulent que le
Mandataire enverra des rapports au Conseil de la Société des Na-
tions. Le fait mêmede l'existencede la règlede l'unanimité, joint au
fait que, selon le paragraphe 5 de l'article du Pacte de la Société

des Ic'ations,le Mandataire devait participerau vote, montre que le
système était fondésur la discussion, la négociation et le commun
accord. L'idée d'imposer quoi que ce fût au Mandataire y était
complètement étrangère.
Encore plus étrangère à l'ambiance de l'époque eût étél'idéede
faire appel à cette fin aux Membres individuels de la Société des
Kations. A notre avis, comme nous l'exposons clairement à propos
de la troisième exception préliminaire, l'objectif réelde l'article
et des articles similaires des autres Mandats n'était pas de per-
mettre aux Membres individuels de la Société des Nations de pro-
tégerles intérêtsdu Conseilou de la Société vis-à-vis du Mandataire,
mais de leur permettre de protéger leurs propres intérêtset ceux

de leurs ressortissants dans les territoires sous Mandat. Ces intérêts
pouvaient êtreconsidérablesen particulier dans le cas des Mandats
((A » et cB D.Le principal souci du Conseil ne concernant pas ce
genre d'intérêtsmais l'administration du Mandat vis-à-vis des
205necessary to give the individual Members of the League a direct and

independent right of action in the matter. Even if, however, we are
wrong as to that, we should still consider, for the reasons we have
given, and others we shall corne to, that Article 7 was regarded as
an incidental and in no way an essential element of the Mandate.

There is yet another ground, possibly unavowed but evident
enough,on which the "necessity" of Article 7 is predicated. Looking

at the matter as a whole and in the light of its history since the
dissolution of the League, it seems to us quite clear that the Appli-
cants (and we think the Court also) are seeking to apply a sort of
principle of "hindsight" and are basing themselveson some doctrine
of "subsequent necessity" quite unknown to international law.
What has happened is that a provision which was originally of
incidental importance and, as will be seen, practically never used,
has, because of recent events, acquired an importance, and is seen
(because of Article 94 of the Charter) to have potentialities which it
did not originally possess. In present circumstances, so it is argued,

it is only through Article 7 that any control can be achieved over
the Mandatory.

This may be understandable, but it is not a valid legalargument.
It no more affordslegal grounds for reading new terms into Article 7
than there wo- cl be for claiming the rectification of a frontier in
a givel: regior because, subsequent to the date when the frontier
was fixed forty years ago, valuable minera1 deposits have been
discovered in that region. Subsequent events may affect the im-
+ortanceof a provision: they cannot affect its intrinsic legal character
which, by reason of the principle of "contemporaneity" in interpre-

tation, must be adjudged on the basis of the place the provision
occupied in the context of the system or framework it formed part
of, at the time when the latter was set up. Changes in this context
may increase the importance of the provisions concerned: they do
not alter its intrinsic legal character, or give rise to new rights in
respect of it l.

Many examples could be given. For instance if, in a system of communications
governed by treaty(e.g. air navigation), the use of certainis subjected to
the consent of the States through or over which these routes pass, the fact that
owing toclimatic or other changes other routes, the use of which is uncontrolled,
become blocked or unusable, may increase the importance of States permitting
that such congent need no longer be obtained. The legal character of the provisions
concerned would remain unaffected by the increased importance in the system
the subject-mattethey related to. habitants, on a estimé nécessaire de donner aux Membres de la
sociétédes Nations pris individuellement un droit d'action direct
et indépendant en la matière. Mêmesi nous n'avions pas raison à
cet égard, nous considérerionsquand même,pour les motifsindiqués

ici et pour d'autres que nous allons mentionner, que l'article 7
était considérécomme un élémentaccessoire et nullement essentiel
du Mandat.
*

Il existe encore une autre raison, peut-être inavouée mais assez
évidente, d'invoquer le caractère de ((nécessité 1)de l'article 7. Si

l'on considère l'affaire dans son ensemble et à la lumière de son
histoire depuis la dissolution de la Sociétédes Nations, il nous
apparaît clairement que les demandeurs (et la Cour aussi, pensons-
nous) cherchent à appliquer une sorte de principe de « vision a
posterio )ret se fondent sur quelque doctrine de (nécessitésub-
séquente B absolument inconnue en droit international. Voici ce qui

s'est passé: une disposition qui, à l'origine, n'avait qu'une impor-
tance accessoire et qui, nous le verrons, n'avait jamais étéutilisée
en pratique, a en raison d'événements récentspris une importance
et (par l'effet de l'article 94 de la Charte) acquis des virtualités
qu'elle ne possédaitpas à l'origine. On prétend que dans les circons-
tances actuelles seul l'article 7 permet d'exercer un contrôle
quelconque sur le Mandataire.

Cela peut se comprendre, mais cela ne constitue par un argument
juridiqu vaelable. Cela ne donne pas plus de motifs juridiques de
lire de nouveaux termes dans l'article 7 que si l'on réclamait la
rectification d'une certaine frontière parce que, quarante ans après
sa fixation, d'importants gisements deminerai auraientétédécouverts
dans cette région.Des événements ultérieurs peuvent affecter l'im-

portance d'une disposition; ils ne sauraient affecter son caractère
juridique intrinsèque lequel, en vertu du principe de la ((contem-
poranéité ))en matière d'interprétation, doit s'apprécier d'après la
place qu'elle occupait dans le contexte du système ou du régime
dont elle faisait partie à l'époqueoù celui-ci a étéétabli. Des modi-
fications dans ce contexte peuvent accroître l'importance de la
disposition en question; ils n'altèrent pas son caractère juridique

intrinsèque et ne donnent pas naissance à de nouveaux droits à
son égard l.

' On peut en donner de nombreux exemples. Supposons, par exemple, que
dans un système de communications régi par un traité (par exemple la navigation
agnenne), l'utilisation de certains itinérasoumise au consentement des États
par lesquels ou au-dessus desquelspassent.Il se peut que, par suite modifi-
soient bloquées ou deviennentinutilisableCela peut accroître l'importance deslée
États permettantune utilisatioétendue des zones contrôlées: mon ne pourrait
en déduire que leur consentement n'est plnécessaire. Le caractère juridique des
dispositions en question ne serait pas affecté par l'importancede leur objet
dans le système. In the present case, events have increased the importance of

invoking Article 7 if it can be invoked at all. But they cannot create
a legal right to invoke it which did not previously exist, or impart
to it a legal character of inherent necessity which, in the original
scheme of the Mandate, it did not have.

There are a number of other factors which show quite clearly
that it woulà be wrong to regard Article 7 as having any essential
or inherently necessary character in the scheme of the Mandate.
We have already pointed out that it did not figure as one of the
"securities" or safeguardsprovided for in the League Covenant, and
which, according to Article 22, paragraph 1, of the Covenant

were to be provided for in the Covenant itself.'Provision was duly
made in Article 22 for reports to be rendered by the Mandatory
to the League Council and for setting up a Permanent Mandates
Commission to advise the Council. Presumably this was because an
obligation to report was regarded as being of the essence, as a
necessary part of any Mandate System that was to fulfil the objects
stated in Article 22. The conclusion is inescapable that it was not
regarded as similarly necessary that the Mandatory should be
obliged to submit to adjudication, and this therefore, if it was ever
thought of at al1when Article 22'of the Covenant was framed, was
left to be settled outside Article 22, in the instrument defining the
terms of the Mandate. In any case, the terms of Article 22, para-

graph 1, preclude anything not provided for in the Covenant
from ranking as essential for the functioning of the Mandate

Precisely the same position was established for, and exists in
relation to the United Nations Trusteeship System. The Charter
contains elaborate provisions for administrative supervision, the
setting up of a Trusteeship Council, etc.; but any obligation to
submit to compulsory adjudication is left for inclusion, if at all,
in the individual trusteeship. "agreements". Furthermore, while
some of these embody this obligation, others do not. This we
regard as a very significant fact. Three out ofthe four "CHMandates,

which were brought under the trusteeship provisions of the Charter
of the United Nations, did not contain in the respective trusteeship
agreements any comparable clause. These three were the Trusteeship
Agreementsfor the territories previously held by Japan under Man-
date,and those which related to New Guinea and Nauru. In none of
these is there to be found any adjudication clause.

If Article 7 was of such an essential character in the performance
of the Mandate andin order to safeguard and ensure the interests of

207 En l'espèce,les événementsont accru l'importance du recours à
l'article 7, en supposant qu'on puisse l'invoquer. Mais ils ne sau-
raient ni créerun droit de l'invoquer qui n'aurait pas existé précé-
demment, ni lui donner un caractère juridique de nécessitéinhérente
qu'il n'avait pas dans le cadre primitif du Mandat.

Il est un certain nombre d'autres facteurs qui montrent très
clairement qu'il serait erroné de considérer que l'article 7 présente
un caractère essentiel ou nécessairement inhérent au système du
Mandat. Nous avons dkjà signalé qu'il ne figurait pas parmi les
(garanties ))ou sauvegardes prévues par le Pacte de la Société des
Nations et qui, selon le paragraphe I de l'article 22 de ce Pacte,

devaient figurer dans le Pacte même.L'article 22 a pris les dis-
positions voulues pour que des rapports soient présentés par le
Mandataire au Conseil de la Sociétédes Nations et pour créerune
Commission permanente des Mandats chargée de donner des avis
au Conseil. La raison en est vraisemblablement que les rédacteurs
de l'article ont considéréque l'obligation de faire rapport était un
élémentessentiel et nécessaire de tozctsystème de Mandats devant
remplir les buts énoncésà l'article 22. Il est impossible d'échapper

à la conclusion qu'il n'a pas étéconsidéréqu'il fût égalementnéces-
saire que le Mandataire fût contraint de se soumettre au règlement
judiciaire et c'est pourquoi, si mêmeon a envisagéce point lors de
la rédaction de l'article 22 du Pacte, la question a étélaissée de
côté pour êtrerégléeen dehors de l'article 22, dans l'instrument qui
définissait les termes du Mandat. En tout cas, les termes du para-
graphe I de l'article 22 s'opposent à ce qu'une disposition non
prévuedans le Pacte prenne rang d'élémentessentiel au fonctionne-
ment du Mandat.

Précisément lamêmesituation a étécrééeet existe en la matière
du régime de tutelle des Nations Unies. La Charte contient des
dispositionsdétailléessur la surveillance administrative, la création
du Conseil de tutelle, etc.; mais toute obligation de se soumettre
à la juridiction obligatoire est laissée aux ((accords ))de tutelle
individuels, pour y êtreincluse s'il y a lieu. Au surplus, alors que
certains de ces accords contiennent cette obligation, d'autres ne la
contiennent pas. A notre avis, c'est là un fait très significatif. Trois

sur quatre des Mandats ((C ))qui ont étéramenésdans le cadre des
dispositions de la Charte des Nations Unies relatives à la tutelle
n'ont pas fait l'objet d'une clause comparable dans les accords de
tutelle pertinents. Il s'agit des accords de tutelle qui visent les
territoires antérieurement placéssousMandat japonais, la Nouvelle-
Guinée et Nauru. Aucun d'entre eux ne contient de clause de
rè"lement iuridiciaire.
Si l'article7 présentait un caractère aussi essentiel en vue de

l'application du Mandat et en vue de garantir et d'assurer les JOINT DISS. OPIN. J'UDGES SPENDER AND FITZMAURICE
523
the peoples of the Mandates territories, it was just as essential that
similar provisions should be insertedin the trusteeship agreements
relating tothese same peoples and temtories. But what is said to
have been essential the moment before placing under trusteeship,
seems to have been considered no longer so the moment after. Yet
the basic principles of the Trusteeship System were the same as
those of the Mandates System.

This consideration of itself reveals, wethink, the artificiality ofthe
claim that Article 7 was a fundamental necessity for the working
of the Mandate System.
It is sought to neutralize or explain this away by reference to the
different voting systems in the League andin the General Assembly
of the United Nations; in the former the unanimity de for all
decisions, in the latter two-thirds majority onallimportant ques-
tions.This, soit isclaimed,dispensedwith the fundamental necessity
of Article 7 as soon as a mandate territory was brought under the
Trusteeship System.

Ifthis difference in the two voting systems could have had the
significance asserted, it would seem somewhat unusual that an
Article claimed to have been of the very essence of the Mandate
System should have been discarded or omitted from these three
trusteeship agreements without a query from anyone why it was

to be dropped, and whether, if it were dropped, the safeguarding of
the "sacred trust" was likely to be affected and to what extent.
It is, we think, stretchingcredulity too far to accept the view
(if Article7 was so fundamentally necessary under the Mandate
System) that when these three Mandates were brought under
trusteeship, repeating in the trusteeship agreement in substance
the substantive provisions of the Mandates themselves, nothing
would have been said by anyone in the General Assembly, or that
no record would remain explaining the omission. The Article
was abandoned without a word.
The explanation advanced breaks down on other grounds. The
General Assembly has no power, except on a limited number
of matters, to make decisions relating to the administration of
trusteeship territories;it may only make recommendations. One
would think that if Article 7 were essential under the Mandate
System it was hardly less essential under the Trusteeship System.
It is not apparent what difference in principle would exist in this

respect between the two systems merely because of the voting
procedure in the League as compared with that applicable in the
General Assembly. In either system a trustee State could have
proved recalcitrant and disregarded the views of, in the one case
the Mandates Commission and the Council of the League, and in
the other the Trusteeship Council and the General Assembly. If the
need in the former system for recourse to the Court in order to be OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 523
intérêtsdes habitants des territoires sousMandat, il était tout aussi

essentiel d'insérer des dispositions semblables dans les accords de
tutelle relatifs aux mêmespopulations et territoires. Mais ce qu'on
a considérécomme essentiel au moment qui a précédé la mise sous
tutelle semble ne plus avoir étéconsidérécomme essentiel au
moment qui a suivi cette opération. Et cependant, les principes
fondamentaux du régimede tutelle étaient les mêmes que-ceux du
système des Mandats.
Anotre avis, cette considération par elle-mêmerévèlele caractère
artificiel de la théorie d'après laquelle l'articletait une nécessité
fondamentale du fonctionnement du système des Mandats.
On a cherché à neutraliser ou à expliquer cela en se référantà
la différenceentre les systèmes de vote de la Sociétédes Nations et
de l'Assembléegénérale des Nations Unies; la première appliquait

la règle de l'unanimité pour toutes les décisionset la seconde pra-
tique la majorité des deux-tiers pour toutes les questions importan-
tes. On soutient que c'est ce qui permettait de se dispenser de la
nécessitéfondamentale de l'article 7 aussitôt qu'un temtoire sous
Mandat était placé sousle régimede tutelle.
Si la différence du système de vote pouvait avoir eu la signifi-
cation qu'on lui attribue, il paraîtrait quelquepeu surprenant qu'un
article que l'on prétend faire partie de l'essence mêmedu système
des Mandats ait étéécartéou omis de ces trois accords de tutelle,
sans que personne ait demandéquelle était la raison de cet abandon
et si la sauvegarde de la ((missionsacrée1)risquait d'en êtreaffectée
et dans quelle mesure.
Si l'articl7 répondait à une nécessitési fondamentale dans le
système des Mandats, ce serait, nous semble-t-il, trop demander que

de vouloir faire accepter l'idéed'après laquelle rien n'aurait été
dit par qui que ce soit à l'Assembléegénérale,ni aucune trace ne
resterait pour expliquer l'omission de cet article lorsque les trois
Mandats ont étéplacés sous desaccords de tutellerépétant en subs-
tance les dispositions de fond des Mandats eux-mêmes.L'article a
été abandonné sansun mot.
L'explication avancée se heurte à d'autres écueils.L'Assemblée
générale,sauf dans un nombrelimité de questions, n'a aucunpouvoir
de prendre des décisionsrelatives à l'administration des territoires
sous tutelle:elle ne peut faire que des recommandations. 11semble-
rait que, si l'article était essentiel sous le système des Mandats,
il ne l'était guère moins sous le régime de tutelle. On ne voit pas
quelle différence de principe existeraità ce point de vue entre les

deux systèmes, pour la seule raison d'une différenceentre la procé-
dure de vote de la Société desNations et celle de l'Assemblée
générale. Dans un système comme dans l'autre, l'État trastee
aurait pu se montrer récalcitrant et ignorer les vues, dans un cas,
de la Commission permanente des Mandats et du Conseil de la
Sociétédes Nations et, dans l'autre, du Conseil de tutelle et de
l'Assembléegénérale.Si dans le premier système il était essentiel,
208 524 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER 4ND FITZhlAURICE

able to obtain judgment against the trustee State 'in the interests
of the indigenous peoples was essential, it would seem equally
essential under the Trusteeship System.
Moreover, one of these three Mandates, namely that previously
held by Japan, was converted into a strategic trusteeship under the

United Statesin respect ofwhich the GeneralAssembly was excluded
from al1the functions of the United Nations relating thereto lOnly
the Security Council could exercise those functions, and any "deci-
sions" made by it would appear to be subject to Article 27 (3) of
the Charter requiring the affirmative coriçent of the trustee State
-the LTnitedStates itself.
If so, the foundation of the explanation falls away. If not, we

must be prepared to believe that the Members of the Security
Council when approving this particular trusteeship agreement
took it for granted-it went without saying-that Article 27
(3) did not apply, at least to the vote of the trustee State. \Ne
think this is wholly improbable.

Furthermore,no explanation is forthcoming why, in the remaining
"C" Mandate brought under trusteeship at the same period-

that relating to Samoa-the adjudication clause did appear,
despite the fact that its necessity had, on the Court's reasoning,
disappeared.
What purpose, then, was the clause in this particular trusteeship
agreement designed to serve 2? And what purpose was the same
clause contained in al1 the other trusteeship agreements for the
territories-previously the "A" and "B" Mandates-intended to

serve, since overniglit, as it were, it no longer continued to be nec-
essary to serve its original purpose.
The purpose or intent of the clause did not in Ourview alter. If it
was not essential under the Trusteeship Systenl neither was it
under the Mandate System.
Finally Article 7 was not, in the Court's view, limited in its
operation to cases where the Council was unable to act and so

bring the Mandatory Power to book because of the unaniniity
rule. Thus, it permitted a State, not a Nember of the Council to
seek a judgment against the Mandatory State even against the
~vishesof the Council or indeed the majority of the Members of the
League. In the ultimate analysis the fundamental necessity of
Article 7 is predicated on the eventuality of it being necessary
to protect the sacred trust even against the unanimous view of the

' -4rticl83of the Charter.
It is manifestwe think, that the purpose of the adjudicationclause-
whatever that purpose was-remained the same under both systems.However,
as we will establish when dealing with the third PrelObjection, its purpose
was not that stated by the Court. It related exclusively to the statal individual
interests conferred by the respective Mandates upon States, Members of the League
hnd their nationals. These were minimin the case of "C" Mandatesbut quite
extensive ithe case of the"A" and "Bu Mandates. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDEK ET FITZMAIJRICE 524
dans l'intérêtdes populations indigènes, de recourir à la Cour pour

obtenir un arrêt contre lJEtat trustee, la chose parait tout aussi
essentielle sous le régimede tutelle.
Au surplus, l'un de ces trois Mandats, à savoir l'ancien Mandat
japonais, a étéconverti au bénéficedes Etats-Unis en une tutelle
sur zones stratégiques, l'Assemblée généralé e tant écartée detoutes

les fonctions des Nations Unies s'y. rapportant l.Seul le Conseil
de Sécuritépeut exercer ces fonctions et toutes ((décisions » prises
par lui seraient, semble-t-il, soumises à l'articles7, paragraphe 3,
de la Charte, qui requiert le vote affirmatif de 1'Etat trustee - les
États-Unis eux-mêmes.
S'ilen est ainsi, la base de l'explication s'effondre. Dans le cas

contraire, il faudrait que nous iussions prêts à croire que, lorsque
le Conseil de Sécurité a approuvé cet accord de tutelle particulier,
les Membres du Conseil ont tenu pour acquis - cela irait sans dire
- que l'article 27, ,paragraphe 3, ne s'appliquait pas, tout au
moins au vote de 1'Etat trustee. Cela nous narait absolument im-
probable.

Au surplus, il n'a pas étéexpliquépourquoi la clause de règlement
judiciaire a étéinséréedans le dernier Mandat « C » placé sous
tutelle à la même époque - le Mandat pour le Samoa - en dépit
du fait que, d'après le raisonnement de la Cour, la nécessité enavait
disparii.
Dans ces conditions, à quoi devait servir la clause dans cet

accord de tutelle particulier 2? Et quel but la mêmeclause figurant
dans tous les autres accords de tutelle pour les territoires autrefois
sous Mandats ((A ))et «B » était-elle destinéeà servir, puisqu'elle a
cessé,pour ainsi dire, du jour au lendemain, d'êtrenécessaire en
vue de servir son but primitif?
A notre avis, le but ou l'intention de la clause n'a pas changé.

Si elle n'est pas essentielle sous le régime de tutelle, elle ne l'était
pas davantage sous le système des Mandats.
Enfin, dans l'opinion de la Cour, l'application de l'article 7 ne
se limitait pas au cas où, pour ramener à l'ordre la Puissance man-
dataire, le Conseil ne pouvait agir ,en raison de la règle de l'unani-
mité. Cela permettait donc à un Etat non membre du Conseil de

solliciter un arrêt contre 1'Etat mandataire, mêmeà l'encontre
des désirsdu Conseil ou mêmede la majorité des Membres de la
Société.En dernière analyse, la nécessitéfondamentale de l'ar-
ticle 7 repose sur la présomption de l'éventualité qu'il serait néres-
saire de protéger la mission sacrée, mêmeà l'encontre des vues

Article 83 dela Charte.
Il est manifeste, à notre avis, que le but - quel q--ide la clause de rè-
glement judiciairest resté le même sous les deux systèmes. Mais comme nole
démontrerons quand nous traiterons de la troisième exception préliminaire, ce but
n'était pas celui auétéindiqué par la Cour. Elle se rapportait .exclusivement aux
intérêts étatiques individuels conféréspar les différents Mandats aux États Membres
le cas des Mandat«Ca»imais très étendus dans celui des Mand(AssetiaRm)).dans

209 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
525
Council, charged, as it was, under the Covenant itself, with the
duty of supervision
In Ourview the fact that in three of the four trusteeship agree-
ments in relation to the previous "C" mandated territories-whose
peoples, of al1 those covered by Article 22 of the Covenant of the
League, were the least able "to stand by themselves"-did not
contain this so-called fundamentally essential judicial supervision

clause,whilst in those for the much more developed peoples (the
previous "A" and "B" Mandates) the replica ofArticle 7 was includ-
ed, is hardly consistent, to Say the least,with the thesis of essential-
ity. At the barest minimum it is strong evidence against it.

A further point ~vhichmay legitimately be taken into account in
estimating the degree of "necessity" to be attached to Article 7 is
the extent to which it has in fact been utilized. After all,a period
of forty years is not negligible; and while recognizing to the full
the justice of Judge Read's remark in the 1950 case, that the utility
of an adjudication clause could not be determined merely by refer-
ence to how often it was resorted to, since its mere existence might
act as a deterrent to breaches of the instrument concerned, it
nevertheless remains the fact that, if the Mavrommatis cases
are treated as basically phases of the same case, the present case is
only the second occasion in forty years on which the adjudication
clause of any Mandate has been invoked, and the firstafter forty
years, in the case of a "B" or "C" Mandate. Moreover, since the
Mavrommatis cases had reference to the interests of a national of a

Member of the League in the Mandated territory concerned, the
present occasion is the first on which any question of the conduct
of the Mandate in relation to the inhabitants of the Mandated
territory has been raised for judicial determination.

Perhaps more significant is the doubt as to the class of disputes
covered by Article ?--the point raised in the Respondent's third pre-
liminary objection. It would surely be difficult to regard as basic,
essential, inherently necessary and non-severable, indispensable to
the functioning of the Mandate, and therefore as something which
must by one means or another be preserved and perpetuated, a pro-
vision which, even now, the Court has onlyfound by the narrowest of
majorities to relate to the conduct of the Mandate, rather than sim-
ply to the specific individualinterests in the Mandated territory, of
the several Members of the League, and their nationals. Such mani-
fest uncertainty, continuing for so long, is not readily compatible
with the view that the provision concerned constitutes an indispen-
sible element of the system it forms part of. OP. DISS. COMM'UNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 525
unanimes du Conseil, chargé, d'après le Pacte même, du devoir
de surveillance. -

A notre avis, le fait que trois des quatre accords de tutelle se
rapportant aux anciens territoires sous Mandats cC » - dont les
populations, parmi toutes celles viséespar l'article2 du Pacte de la
Société,étaient les moins capables de cse diriger elles-mêmes )-
ne contenaient pas cette clause de contrôle judiciaire prétendument
fondamentale et essentielle, alors que les accords visant des popu-
lations beaucoup plus développées(les anciens Mandats «A » et
(B »)contenaient une clause correspondant à l'article 7,se concilie
difficilement,pour dire le moins,avec la thèse du caractère essentiel.
Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il y a là une preuve très forte

en sens contraire.
Un autre point qui pourrait légitimement êtrepris en ligne de
compte pour apprécier le degré de cnécessité » qui s'attache à
l'articl7 est la mesure dans laquelle il a étéutilisé en fait. Après
tout, on ne saurait négligerune période de quarante ans et, tout
en reconnaissant pleinement le bien-fondé de la remarque qu'a
faite dans l'affaire de1950 le juge Read que l'utilité d'une clause
de règlement judiciaire ne saurait être appréciée simplement en
vérifiant le nombre de cas dans lesquels elle a étéinvoquée,puisque
son existence mêmea pu servir de préventif contre les violations

de l'instrument envisagé, le fait n'en demeure pas moins que, si
l'on considère les affaires Mavrommatis comme étant au fond les
phases d'une mêmeaffaire, le présent litige n'est que le deuxième
cas en quarante ans où a étéinvoquée la clause de règlement judi-
ciaire d'un Mandat quelconqueet le premier après quarante ans en
matière de Mandats «B » ou «C ». En outre, puisque l'affaire
Mavrommatis concernait les intérêts d'unressortissant d'un Membre
de la Société desNations dans le territoire sous Mandat en question,
le cas actuel est le premier où la question de l'administration du
Mandat soit soumise à décision judiciaire au point de vue des

populations du territoire sous Mandat.
Ce qui est peut-être plus significatif encore, c'est le doute sur la
catégorie de différends visés par l'article 7 - le point soulevé
dans la troisième exception préliminaire du défendeur. Il serait
certainement difficile de considérer comme fondamentale et essen-
tielle, comme inhérente, nécessaireet non séparable, comme indis-
pensable au fonctionnement du Mandat et par conséquent comme
devant être préservéeet perpétuée d'une manièreou d'une autre,
une disposition que, mêmeaujourd'hui, la Cour n'a estimée que
par la plus étroite des majorités se rattacher à l'administration du

Mandat, plutôt que de la considérer comme simplement relative
aux intérêtsindividuels spécifiques des différents Membres de la
Société desNations et de leurs ressortissants dans le territoire sous
Mandat. Une incertitude si manifeste et se prolongeant sur une
période aussi longue se concilie mal avec la thèse d'après laquelle
la disposition en question est un élément indispensable du sys-
tème dont elle fait partie. In our opinion the various considerations discussed above can

justify only one conclusion-that the case for viewing Article 7
as an essential and inherently necessary part of the Mandates
System has not been made out. Consequently this plea cannot be
made the basis of any right of the Applicant States to invoke the
Article.

(c) The nllegedAgreement of April 1946

The Court comes to the conclusion that an agreement wasreached
among al1the Members of the League at the Assembly meeting in
April 1946, to continue the different Mandates with reference to
the obligations of the Mandatory Powers, notwithstanding the
dissolution of the Organization.
The issueinvolved, is in its contextwhether this alleged agreement
applied to Article 7 (and the corresponding clauses in other Man-
dates),and if so with what effect. As has been pointed out earlier,
Article 7 involved a unilateral undertaking on the part of the Man-

datory alone to go before the Permanent Court at the instance of
other Members of the League. No amount of "agreement" on the
part of these other Members could have sufficed to perpetuate
the obligation of the Mandatory after the dissolution of the League.
What would have been required to achieve that, if su$ciently
direci, explicit and unequivocal, would have been an undertaking
on the part of the Mandatory itself from which, in al1 the sur-
rounding circumstances an agreement between itself and each
and every other State then a Member of the League may con-
clusively be inferred. We leave aside consideration of whether

such an agreement could be within Article 37 of the Statute, since
it would exist, if it exists at all, onlyfrom a point of time subsequent
to Article 37 coming into operation. We leave aside, as well,
consideration of whether such an agreement, if established, could
fall within the provisions of Article 36 (1)of the Court's Statute, or
if such an undertaking could be regarded as an unilateral declara-
tion under Article 36 (2) and (4) of the Statute.

We direct and confine ourselves to the real question to be an-
swered, namely, did the Mandatory, either in a speech or statement,
or by joining in a League Assembly resolution, give such an under-
taking in any terms which enable it to be held that the Mandatory
l The Court does not indicate whetherthe agreementstated to have been
arrived at was "tacior otherwise. A notre avis, les diverses considérations qui viennent d'être
discutées ne peuvent justifier qu'une seule conclusion - c'est que
la thèse d'après laquelle l'article 7 est une partie essentielle, in-

hérente et nécessairedu système des Mandats n'a pas étédémontrée.
En cpnséquence,cet argument ne peut servir de fondement au droit
des Etats demandeurs à invoquer l'article.

c) Le prétenduaccordd'avril 1946

La Cour amve à la conclusion qu'à la réunion de l'Assemblée
d'avril 1946 un accord est intervenu entre les Rlembres de la
Sociétéder Nations en vue de continuer les différents Mandats. en
ce qui concerne les obligations des Puissances mandataires, non-
obstant la dissolution de la Société.
Dans son contexte, la question est de savoir si ce prétendu accord
s'appliquait à l'article7 (et aux clauses correspondantes des autres
Mandats) et, si oui, quel en étaitl'effet. Comme nousl'avons indiqué

plus haut, l'article7 comportait l'engagement unilatéral de la part
du seul Mandataire de se présenter devant la Cour permanente à
la demande des autres Membres de la Société desNations. Aucune
espèce d'«accord )!de la part de ces autres Membres n'aurait pu
suffireà perpétuer l'obligation du Mandataire après la dissolution
de la Société desNations. Pour y parvenir, ce qu'il aurait fallu,
età la conditionqu'iljût sufisanzmentdirect,expliciteetnon équizloque,
c'eût étéun engagement de la part du Mandataire lui-même
dont, dans toutes les circonstances contemporaines, on aurait pu

déduire de façon concluante un accord entre le Mandataire et
chacun des autres Etats alors Membres de la Société desNations
pris individuellement. Nous laissons de côté la considération du
problème de savoir si un pareil accord était possible dans le cadre
de l'article 37 du Statut, puisqu'il n'aurait existé, s'il avait existé
en fait, qu'à une époque postérieure à l'entrée en vigueur de l'ar-
ticle 37. Nous laissons également de côté l'examen de la question
de savoir si un pareil accord, en supposant qu'il fût démontré,
pouvait entrer dans les dispositions de l'article 36, paragraphe 1,

du Statut de la Cour ou si cet engagement pouvait êtreenvisagé
comme une déclaration unilatérale dans le cadre de l'article 36,
paragraphes 2 et 4, du Statut.
Nous nous attachons et nous nous limitons à la véritable question
à laquelle il faut répondre, à savoir: le Mandataire a-t-il soit dans
un discours, soit dans une déclaration, soit en participant à une
résolution de l'Assemblée de la Sociétédes Nations, pris un tel

l La Cour ne dit pas si l'accord en question étainou non.te

211 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
527
clearly engaged itself to renew or perpetuate, in relation to forme1
Members of the League, a compulsory adjudication clause which,
on its actual language was about to lapse?

Put in that way, it seems to us that the question answers itself-
and in the negative- so soon as the relevant statements and resolu-
tions are considered.
The pronouncements relied on by the Court as regards Article 7
of the Mandate for South West Africa are a statement made by the
South African representative at Geneva on April 9,1946, and
paragraphs 3 and 4 of the League Assembly'ç resolution of 18 April,
which was adopted unanimously. We look in vain in these for
anything that would have the effect contended for.

MJedo not find it necessary to consider the question, pertinent
though it is, ofhow far purely unilateral statements made inthis way
at international meetings, or how far participation in any resulting
resolutions, can give rise to strictly binding legal obligations. W7hat
is quite clear is that the League resolution ofApril18, 1946 d,id not
even purport to impose or record any obligations. It merely tooknote
of certain antecedent statements of intention, as it expressly recites.

These statements, made by al1 the Mandatories (not only South
Africa), were made in very general and, in some cases at least, cau-
tious and somewhat guarded, indeed limited terms. They mention
no specific obligations under the Mandates, and in Our view are
no more than statements of intention made to the League on the eve
of its dissolution.or is the League resolution any different.

Furthermore, it seems to us clear from the general character
of the South African statement and the use of such phraseology as
"will continue to ndminister the territory scrupulously in accordance

\trith the obligations of the Mandate, for the advn~zcementnd prolno-
tion of the interests of the inlznbitn~zts"(italics ours), that what the
Mandatory had in mind \vas the actual process of the administration
of the territory vis-à-vis its inhabitants, andnot collateral obliga-
tions of anotherkind owed to RIembersof the League l.For instance,
we would not regard such a statement as involving any promise to
continue, after the dissolution of the League, the commercial and

l This is borne out when the stateas a whole is read, part of which (in its
contelit) might be emphasized nthe word:"The disappearance of those organs
of the League concerned with the supervision of mandates, priwzarily the Mandates
Commission and the League Council, will necessarily precludecompliance
with the letter of the Mandate." OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMADRICE 527

engagement dans des termes permettant de considérer qu'il s'est
clairement engagéà renouveler ou à perpétuer à l'égarddes anciens
Membres de la Sociétédes Nations une clause de règlement judi-
ciaire qui, d'après ses termes mêmes,était sur le point de devenir
caduque ?
Ainsi présentée, il nous semble que poser la question c'est y

répondre - et par la négative - dès que l'on examine les déclara-
tions et résolutions pertinentes.
Les énoncéssur lesquels la Cour se fonde au sujet de l'article 7
du Mandat pour le Sud-Ouest africain sont une déclaration faite à
Genève le 9 avril 1946 par le représentant de l'Afrique du Sud
et les paragraphes 3 et 4 de la résolution de l'Assemblée de la
Société desNations du 18 avril qui a étéadoptée à l'unanimité.
Nous y cherchons en vain un élément quelconquequi aurait l'effet

qu'on prétend.
Pour pertinente qu'elle soit, nous ne jugeons pas nécessaire
d'examinerla question desavoir dans quelle mesure des déclarations
unilatérales faites de la sorte à des conférences internationales ou
la partcipation aux résolutions qui en ont résultépeuvent donner
lieu à des obligations juridiques rigoureusement obligatoires. Ce
qui est très clair, c'est que la résolution de la Société desNations
du 18 avril 1946 n'a mêmepas prétendu imposer ou constater
d'obligations quelconques. Elle a simplement noté, ainsi qu'elle

l'énonce expressément, certaines déclarations d'intentions anté-
rieures.
Ces déclarations de tous les Mandataires (et non pas seulement
de l'Afrique du Sud) ont étéfaites en termes très générauxet, dans
certains cas, dans des termes au moins prudents et quelque peu
circonspects, voire restrictifs. Elles ne mentionnent aucun obliga-
tion déterminée en vertu des Mandats et, selon nous, elles ne sont
rien de plus que des déclarations d'intention formulées devant la

Société desNations à la veille de sa dissolution. Le caractère de la
résolution de la Sociétén'est pas différent.
Au surplus, le caractère général de la déclaration sud-africaine
et l'emploi de formules telles que ((continuera à ...administrer [le
territoire] en se conformant scrupuleusement aux obligations du
Mandat, afin d'assurerle progrès,et de sauvegarder lesintérêtd se ses
habitants 1)(les itaIiques sont de nous) montrent clairement, selon
nous, que le Mandataire ne songeait qu'à la méthode pratique

d'administration du territoire vis-à-vis de ses habitants et non pas
aux obligations collatérales d'un autre caractère qu'il avait pu
avoir envers les Membres de la Société desNations l.Par exemple,
nous ne considérerions pas une déclaration de ce genre comme coxn-

' Cela est confirme quand on lit la déclarattout entière dont une partie
(dans son contexte) pourrait êsoulignée, savoir les mota:la disparitides
organes de la Sociétédes Nations qui s'occupent du contrmandats,à savoir,
en pvewier lieu, la Commission mandats et le Conseil de la Société,empêchera
évidemment de se conformer entièremenàla lettre du Manda». otherrights reserved bythe Mandates for the Members of the League

ortheir nationals, and we stress this because it is not merely Article 7
andthe adjudication clauses of the other Mandates that are involved
here l. If any provisions of this character continue in force, they do
so for other reasons, and certainly not by virtue of the type of
statement made by the South African representative (and on behalf

of other Mandatory Powers) at Geneva.

Exactly the same picture emergesfrom the final League resolution

of April 18, 1946. Its concluding paragraph refers to "the expressed
inten.tionsof the Members of the League now administering territo-
ries under mandate to continue to administer them for the well-being
and developgnent of the peoples concerncd in accordance with the
obligations in the respective mandates, until other arrangements

have been agreed.. .", etc. (italics ours).

Coupled with earlier'references to the coming dissolution of
the League in this and the statements of the \ arious Mandatories 2,
al1this could be regarded almost as a recognition that, upon this dis-

solution, the Mandates, as such, would cease to be in force, but that,
pending other arrangements, the territories concerned would, in
relation to their inhabitants, continue to be administered as if the
Mandates were still in force, or on the same basis as that of the Man-
dates. What the League was concerned with was not specific obli-

gations owed by Mandatories to States nor the rights or interests of
States or their nationals but urith the interests of the indigenous

l Indeed it is open to argument whether al1 the provisions of the Mandate in-
struments were consistent with the provisions of the Charter of the United Nations
by the terms of which most States hfembers of the League were already bound.
It will be useful to summarize the manner in which each of the otherMandatory
Powers present stated their intentions as to the future observance by them of
their obligations (the italics are ours). Thus, Great Britainstated its intention
was to continue to administer "in accordance with the general principles of the
existing Mandates"; France that it intended "to pursue the execution of the mission
entrusted to it"; Relgium that it would remain fully alive to the obligations de-
volving upon Members of the United Nations under Article 80 of the Charter;
New Zealand that the dissolution of the League did not diminish her obligations
"to the inhabitants of the territory..[which] would continue to be administered
in accordance with the terms of the Mandate for the promotion and advancement
of the inhabitants"; whilst Australia stated that the League's dissolution would
"not be regarded by it as lessening the obligations imposed it" by the Mandates
System, which it regarded as having full force and effect. Moreover,whon 12 April
1946 the draft resolution was in the committee stagesand adopted for submission
to the Assembly of the League, the representative of France (no one in any sense
expressing any other view) stated that its territories would continue to be admini-
stered in the spirit of the Couenant and of the Charter.portant promesse de continuer, aprèsla dissolutionde la Sociétédes
Nations, les droits commerciaux et autres réservéspar les Mandats
aux Membres de la Société des Nations ou à leurs ressortissants et
nous soulignons ce point parce que ce n'est pas seulement de I'ar-

ticle 7 et des clauses de règlement judiciaire des autres Mandats
qu'il s'agit ici l. Si des dispositions de ce caractère sont encore en
vigueur, elles le sont pour d'autres raisons et certainemgnt pas en
vertu du genre de déclarations faites à Genève par le représentant

de l'Afrique du Sud (et pour le compte des autres Puissances
mandataires).
C'est exactement le mêmetableau qui ressort de la résolution
finale de la Société desNations du 18 avril 1946. La paragraphe final

(Note que les Membres de la Sociétéadministrant actuellement des
territoires sous mandat ont exprimé leur intention de continuer à
les administrer, en vue du bien-être et du développementdes peuples
intéressés, conformément aux obligations contenues dans les divers
mandats, jusqu'à ce que de nouveaux arrangements soient pris ...»,

etc. (les italiques sont de nous).
Si on y ajoute les référencesantérieures àla dissolutionimminente
de la Sociétédes Nations faites dans cette résolution et dans les
déclarations des divers Mandataires 2, tout cela pourrait être

considérépresque comme la reconnaissance du fait que, lors de
cette dissolution, les Mandats, comme tels, cesseraient d'être en
vigueur, mais qu'en attendant d'autres arrangements les territoires
intéresséscontinueraient, du point de vue de leurs habitants, à être

administrés comme si les Mandats étaient encore en vigueur ou sur
la même baseque celle des Mandats. Ce dont la Sociétédes Nations
se préoccupait ce n'était pas des obligations déterminées des Man-

=Il serait même possible de discuter du point de savoir si toutes les dispositions
des accords de Mandats étaient compatibles avec les dispositionsde la Charte des
Nations Unies dont les termesliaient déjàlaplupart des États Membres dela Société
des Nations.
Il est utile de résumer la façon dont chacune des autres Puissances mandataires
a déclaré sesintentions concernant l'exécutiofuturede ses obligations (les italiques
sont de nous). C'est ainsi que la Grande-Bretagne a déclarl'intention de continuer
à administrer (1conformément aux principes généraux des mandats existants »; la
France, qu'elle se proposait de ((poursuivrel'exécution de la mission qui lui avait
étéconfiée »;la Belgique, qu'elle resta«tpleinement consciente de toutes les obliga-
tions qu'imposent aux Membres des Nations Unies les dispositions de l'article 80
de la Charte »; la Nouvelle-Zélande, que la dissolution de la Société des Nations
ne diminuait pas ses obligation(1envers les habitants d..territoire qucontinuera
à être administré par la Nouvelle-Zélande conformément aux termes du Mandat,
en vue d'assurer le bien-être et le progrès des habitantsl'Australie, de son côté,
a déclaréquela dissolution de la Sociéténe serait pas considéréepar eIIe comme la
déchargeant des obligations qui lui ont étéimposées » en vertu du système des
Mandats, qu'elle considérait comme conservant toute leur validité et toute leur
force. Au surplus, lorsquele12 avril1946, le projet de résolution a étédiscuté dans
les commissions et a étéadopté en vue d'êtreprésenté à l'Assemblée de la Société
opinion différenteàraucun autre point de vue) a déclaréque ses territoires conti-
nueraient à êtreadministrés dans l'esprit du Pacte et de la Charte.

213 529 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER .4ND FITZMAURICE

peoples, and to be assured of "the continued application of the
principles of the Mandatt?System" l.

However that may be, it is quite clear to us that these statements
and resolutions cannot be regarded as constituting binding under-
takings to continue to apply all the p~ovisions of the Mandate, inte-

grally, and irrespective of how any particular clauses would be
affected by the dissolution of the League; and we are unable to see
how a Court could infer from them an undertaking of any kind, let
alone the indefinite prolongation of a jurisdictional obligation about
to lapse according to its terms. For this, we think much more would
have been required, something explicitly directed to that obligation.
Itis one thing, on the basis that the dissolution of the League might
be regarded as tenninating the whole Mandates System (which is
what we think those at Geneva had in mind), to imply (on that basis)
from what was said, an undertaking to continue to apply those

provisions of the Mandate which had reference to the inhabitants
of the territory, and were not, according to their terms, directly
dependent on, or hamessed to,the continued existence of the League
or of League Membership. It is quite another thing to draw similar
implications where it is not merely a matter of keeping the system
as such alive, despite the termination of the League, but of also
keeping alive particular clauses, such as Article 7, specificallg7
related to the existence of the League or the fact of League Member-
ship. Here we think that the limits of permissible implication are
reached. Nothing short of an undertaking specifically directed to

the clause concerned, or to the class of clause, would have sufficed
in relation to thistype of provision. No such thing is to be found in
the South African statement, or in any of the statements of other
Mandatories or in the relevant League resolution. Indeed, as we
have pointed out, the explicit references to, and only to, the
administration of the territory in the interests of the inhabitants,
ronstitutes a definite contra-indication.

In the case of the Union of South Africa, another consideration
makes this conclusion even clearer. In both the South African
statement and in the League resolution of April 18,1946, the refer-
ences to what was intended are stated to be in view of or fiending
other arrangements-in short a temporary situation was envisaged.
But it is quite clear from the express language used in the South

See statement of representatof China when presenting the draft resolution
in Cornmittee, of N.,O.J., Spec. Sup. at p. 79.
214 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 529

dataires envers les États, ni des droits ou intérêtsdes États ou de
leurs ressortissants, mais de l'intérêtdes populations indigènes et
de la (c.ontinuit d'a~ppnation des principes du système des man-
dats ))l.
Quoi qu'il en soit, il est tout à fait clair pour nous qu'on ne
saurait considérerque ces déclarations et ces résolutionsconstituent
des engagements obligatoires de continuer à appliquer les disposi-
tions du Mandat dans leur intégralité et indépendamment de la

façon dont une clause particulière quelconque serait affectéepar la
dissolution de la Société desNations; et nous ne parvenons pas à
comprendre comment un tribunal pourrait en déduire un engage-
ment quelconque et moins encore la prolongation indéfinie d'une
obligation juridictionnelle sur le point de devenir caduque d'après
ses termes mêmes. Nouspensons qu'il aurait fallu pour cela bien
autre chose; quelque chose qui visât explicitement cette obligation.
Autre chose est, en partant de l'idéeque la dissolution de la Société

des Nations pouvait êtreconsidéréecomnie mettant fin au système
des Mandats tozit entier (ce qui, croyons-nous, était la pensée de
ceux qui étaient à Genève),de déduire implicitement (sur cettebase)
de ce qui avait été dit un engagement de continuer d'appliquer les
dispositions du Mandat qui se référaientaux habitants du territoire
et qui, d'après leurs termes, ne dépendaient pas directement de la
continuation del'existence dela SociétédesNations ou de l'apparte-
nance à celle-ci ou n'y étaient pas directement liées.Autre chose est
de tirer des conclusions implicites semblables, lorsqu'il ne s'agit

pas seulement de-maintenir en vie le système comme tel, en dépit
de la dissolution de la Société,mais aussi de maintenir en vigueur
des clauses particulières, telles que l'article7, se rapportant spéci-
fiquement à l'existence de la Sociétédes Nations ou au fait de
l'appartenance à celle-ci. Nous pensons que cela dépasse les limites
des conclusions implicites permises. Rien moins qu'un engagement
visant spécifiquementla clause ou la catégoriede clausesen question
n'aurait pu suffire en ce qui concerne ce genre de disposition. On ne

trouve rien de tel dans la déclaration sud-africaine, ni dans aucune
des déclarations des autres Mandataires ni dans la résulotion perti-
nente de la Sociétédes Nations. Et même, commenous l'avons
signalé,les référencesexplicites à l'administration du territoire dans
l'intérêtdes habitants, et à cette administration seule, constituent
une contre-indication précise.
Dans le cas de l'Union sud-africaine, cette conclusion est rendue
plus claire encore par une autre considération. A la fois dans la

déclaration de l'Afrique du Sud et dans la résolutionde la Société des
Nations du 18 avril 1946, les référencesà ce qui était envisagé sont
déclarées faites en considération d'autres arrangements ou en
attendantcesautres arrangements-- bref, il s'agissait d'une situation

l Voir la déclaration du représentant de la Chine lorsqu'il aàpla Com-
mission le projet de résolutiod. N.J. O., supplément spécial79).

214 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
530
African statement, that what the Union Government had in mind
were arrangements for the incorporation of the Mandated territory
inthe territory of the Union; and consequently, as had already been
foreshadowed by the Union in earlier statements, that the territory
would not be, or at least was most unlikely to be, broughtunder the
United Nations trusteeship system. Whether this was politically or
otherwise a desirable attitude for the Mandatory to take up, is not
for us to Say. The fact is that it did so, and the legal concliision we

drawis that it is quite inconceivable that a State which was airning
at the incorporation of the Mandated territory in its own territory
could possibly have been willing, or be thought to have been willing,
or to have been intending to imply willingness, simultaneously to
perpetuate, possibly indefinitely, an obligation of compulsory juris-
diction which, on its term, was just about to become inoperative.

Of course the question of Article 7 (and the corresponding pro-
visions of other Mandates) was never specificallyraised at Geneva.
Nor indeed is there the slightest evidence that its provisions were
in the minds of the representatives of the Rftxmber States. The
Court's finding on this part of the case implicitly assumes that,
had it been, the various Mandatories would al1 immediately have
agreed to the continuance of this obligation. We see absolutely

nothing in the record to justify, and a good deal to negative this
assumption-even in the case of Mandatories other than South
Africa. In the case of the latter, we think the inherent probabilities
are so obviously against it, as to place theatter virtually beyond
discussion. The general merits of such an attitude are not for us to
pronounce upon. The legal position is that if, in view of the disso-
lution of the League, any Mandatory had been asked explicitly to
agree to continue to apply Article 7in respect of ex-Members of the
League, it was within the legal competence of any such Mandatory
to refuse-for if an obligationis about to become inoperative as, on
itsown terms, Article 7 was, its renewal or perpetuation can only
be by consent. Consequently, if there are grountls (as there clearly
are) for thinking that South Africa, on an explicit raising of the
matter, would in fact have refused consent-or not improbably
would have done so-then it obviously becomes quite impossible to
imply from the Union's Geneva statement aIiy undertaking to

accept-even if such any undertaking could otherwise be implied
from those statements, which in Ourview it cannot be. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 530
temporaire. Mais les termes exprès de la déclaration de l'Afrique

du Sud montrent très clairement que c'était aux arrangements en
vue de l'incorporation du territoire sous Mandat au territoire de
l'Union que le Gouvernement de l'Union songeait; et que par
conséquent, comme l'avait déjà prévul'union dans desdéclarations
antérieures, le territoire ne serait pas placésous le régime detutelle
des Nations Unies ou tout au moins que cela était très improbable.
Nous n'avons pas à dire si cette attitude du Mandataire était
politiquement souhaitable. Le fait est que c'est l'attitude qu'il a
prise; la conclusion juridique que nous en tirons c'est qu'il est parfai-
tement inconcevable qu'un État visant à l'incorporation du tem-
toire sous Mandat à son propre territoire ait pu êtredisposé en
mêmetemps (ou puisse être tenu pour avoir eu cette disposition ou
l'intention de la laisser entendre) à perpétuer, peut-être indéfini-
ment, une obligation de se soumettre à la compétence obligatoire
qui, d'après ses termes mêmes,était justement sur le point de
devenir inopérante.
Il est evident que la question de l'articl7 (et des clauses corres-

pondantes des autres Mandats)n'a jamais étéexpressémentsoulevée
à Genève. Il n'existe pas non plus la moindre preuve que les repré-
sentants des Etats Membres aient songé à cet article. Les constata-
tions de la Cour surcette partie de l'affaireprésument implicitement
que, si tel avait éle cas,les divers Mandataires auraient tous immé-
diatement donné leur accord à la continuation de cette obligation.
Rien dans les documents ne nous paraît justifier cette présomption,
et nous y trouvons beaucoup d'éléments contraires - mêmedans
le cas de Mandataires autres que l'Afrique du Sud. Dans le cas de
cette dernière, il nous semble que les probabilités inhérentes à la
situation sont si évidemment en sens contraire que la question est
virtuellement hors de discussion. Nous n'avons pas ànousprononcer
sur la valeur généralede cette attitude. La situation juridique est
que si, envisageant la dissolution de la Sociétédes Nations, un
Mandataire quelconque s'était vu demander d'accepter explicite-
ment de continuer à appliquer l'article 7 pour ce qui est des ex-
Membres de la Société desNations, n'importe lequel de ces Manda-

taires avait la compétence juridique pour le refuser - car, si une
obligation est sur le point de devenir inopérante d'après ses propres
termes, comme c'était le cas de l'article 7,son renouvellement ou
son maintien en vigueur ne peut se faire que par consentement. En
conséquence, s'il y a (comme cela est clair) des motifs de penser
qu'au cas où l'on aurait explicitement soulevéla question l'Afrique
du Sud aurait, en fait, refuséson consentement - ou s'il n'est pas
improbable qu'elle l'eut fait -, il devient évidemment tout à fait
impossible de déduire im$Zicitementde la déclaration faite à Genève
par l'union un engagement d'accepter - mêmesi, par ailleurs,
pareil engagement pouvait ressortir implicitement de ses déclara-
tions, ce qui, selon nous, ne saurait êtrele cas.531 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
Finally, it is obvious that any undertaking to continue with the .
obligations of Article 7 in relation to "ex-Members", or "former
Members", of the League, would have needed precise definition.

Just what States were to be regarded as corning within these cate-
gories (original Members, Members at the date of dissolution,
countries at any time Members, Members also Members ofthe United
Nations, etc.)?The moment the League was dissolved, there would
evidently be more than one class of State which would have at least
a possible claim to be considered.The question of what precisely are
the entities to which any obligation to have recourse to compulsory
adjudication relates (and therefore what precisely are the entities
entitled to invoke it), is always and necessarily fundamental to the
scope of the obligation. This can never be presumed: it requires to
be defined or stated; and this alone is a reason why an implied
undertaking by the Mandatory in relation to an uncertain class of
beneficiary cannot be inferred from the statements and declara-
tions of 1946.

The conclusions we arrive at above as to the correct scope and
interpretation of the statements made, and the resolution adopted
at Geneva in April, 1946, are amply confirmed by certain other
elements in the history of the matter, to which we now come.

(d) The general treatment of the Mandates question inthe fieriod
1945-1946
The course of dealing with the question of Mandates, both in the
United Nations and in the League, during the period 1945-1946,
serves to confirm the conclusions wehave arrived at in the preceding

sections of this part of the case, both generally and, more particu-
larly, as regards the effect to be attributed to the statements made
and the resolutions adopted at Geneva in April, 1946.It alsoconfirms
the view we have already expressed that the failure to deal more
explicitly with the question of the position of the Mandates after
the dissolution of the League, and especially the failure to make any
provision for the situation which would anse if any mandated
temtory, not being one that had attained independence, was not
placed under the United Nations trusteeship system, was not fier
incuriam but deliberate. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 531

Enfin, il est évident que tout engagement de continuer les obli-
gations de l'article pour ce qui est des«ex-Membres » ou «anciens
Membres »de la Société des Nations aurait nécessitéune définition
précise. Quels étaient exactement les Etats qui devaient êtrere-
gardés comme entrant dans ces catégories (Membres originaires,
Membres à la date de la dissolution, pays ayant étéMembres à un
moment quelconque, Membres également Membres des Nations
Unies, etc.)? La dissolution de la Société desNations allait immé-
diatement entraîner l'apparition de plusieurs catégories d'États

ayant au moins un titre possible à êtrepris en considération.,La
question de savoir quelles sont précisément lesentités auxquelles
se rapporte l'obligation de recourir au règlement judiciaire obliga-
toire (et par conséquent quelles sont exactement les entités qui ont
le droit de l'invoquer) est toujours et nécessairement fondamentale
en ce qui est de la portée de l'obligation. Cela ne peut jamais se
présumer: il faut que cela soit définiou énoncé;et cela seul est un
motif de ne pouvoir déduire des énonciations et des déclarations
de 1946 un engagement implicite du Mandataire se rapportant à
une catégorie indéterminée debénéficiaires.

Les conclusions auxquelles nous arrivons ci-dessus quant à la

portée et à l'interprétation exactes des déclarations faites et de la
résolutionadoptée àGenèveen avril 1946 sont largement confirmées
par certains autres éléments de l'historique de la question auxquels
nous en arrivons maintenant.

d) Le traitement générad le la question des Mandats au cozrrsde
la période 1945-1946
La manière de traiter la question des Mandats tant aux Nations
Unies qu'à la Sociétédes Nationspendant la période 1945-1946 sert
à confirmer les conclusions auxquelles nous sommesarrivés dans les

sections antérieures de cette partie de l'affaire,la fois du point
de vue généralet, plus particulièrement, en ce qui concerne l'effet
à attribuer aux déclarations faites et aux résolutions adoptées à
Genève en avril 1946. Cela confirme également l'opinion que nous
avons déjà exprimée selon laquelle ce n'est pas per incztviam mais
de propos délibéré quela question de la position des Mandats après
la dissolution de la Sociétédes Nations n'a pas été traitéede façon
plus explicite et en particulier que n'ont pas étéprises des disposi-
tions quelconques tisant la situation qui se présenterait si unm-
toire sous Mandat, n'étant pas de ceux qui auraient accédéà
l'indépendance, n'était pas placé sous le régime de tutelle des
Sations Unies.

2x6 532 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
(1) In the first place it emerges quite clearly from the record that

the whole approach of the United Nations to the question of the
activities of the League of Nations was one of great caution and
indeed of reluctance. It is crystal clear that there was a definite
rejection of any idea of what might be called a general take-over
or absorption of League functions and activities. \%lehave al-
ready mentioned in another connection that in the United Na-
tions Assembly resolution providing for the transfer of certain
functions and powers of the League, and for ensuring (subject to
certain reservations) the continued exercise of its technicalactivities,

the subject of the League's political functions such as, inter alia,
those relating to Mandates, was dealt with quite differently. In this
field the Assembly was only willing to act upon a specific request
of the parties to assume the exercise of functions of the League, and
even if such a request were received (none ever was) the Assembly
was only willing to "examine" it, or "submit [it] to the appropriate
organ of the United NationsJ'-not exactly an enthusiastic attitude.
As stated, no such request was ever made, and no political functions

of the League were, as such, taken over or assumed 2,though of
course in a number of ways, parallel functions were assumed by the
United Nations under its own Charter, e.g. in the sphere of peace-
keeping.

(2) The United Nations did not therefore take over the League
Mandates system as such, or anÿ specific functions in connection
with it. On the other hand, this was one of the matters which was
"paralleled" in the Charter, namely by the institution of the United
Nations trusteeship system (Chapters XII and XIII), and by the

otherprovisions in the Charter relatingto non-self-governingterritories
(Chapter XI and Article 73).

(3) In short-and we wish to stress this-there was froni the start
an election(choice) on the part of the United Nations to deal with
the question of non-self-gorerning territories (acategory under which
we think the Mandated territories-or at the least the "B" and "C"
territories-unquestionably came) by means of the provisions of
Chapters XI,XII and XIII of the Charter, and not by taking over,
and siipplementing or modemising, the League Mandates System.

l See Summary Records of the PreparatorCommission of the United Nations
setup at the end of the San Francisco Conference, U.N.Committee 7, pp2-3
and 10-11.
This is one reason why we think that the view expressed by the Court in its
1950 Opinion; to the effect that the supervisory functions of the former League
Councilpassed to the Assembly of the United Nations which was entitledr-
cise them, was definitely wrong.
217 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 532

1) En premier lieu, il ressort très clairement des documents que,
danstoute la manière dont elles ont abordéla question des activités
de la Sociétédes Nations, les Nations Unies ont manifesté une
grande prudence et mêmeune certaine répugnance. Il est absolu-

ment clair l que toute idéede ce qu'on pourrait appeler une reprise
généraleou une absorption des fonctions et des activités de la
Sociétédes Nations a étécatégoriquement rejetée. A un autre point
de vue, nous avons déjà mentionné que, dans la résolution de l'As-
sembléedes Nations Unies visant le transfert de certaines fonctions
et de certains pouvoirs de la Sociétédes. Nations et tendant à

assurer (sous certaines réserves) la continuation de ses activités
techniques, la question des fonctions politiques de la Sociétédes
Nations, comme par exemple celles qui avaient trait aux Mandats,
a été traitéetout différemment. Dans ce domaine, l'Assemblée
n'étaitdisposée àagir qu'à la demande spécifiquedes parties tendant
à la reprise de l'exercice des fonctions de la Sociétédes Nations

et, mêmesi pareille demande était présentée(iln'yen a jamais eu),
l'Assembléeétait prêteseulement à l'étudier ou à la soumettre à
l'organe compétent des Nations Cnies » - ce qui n'était pas pré-
cisémentune attitude enthousiaste. Comme nousl'avons dit, aucune
demande de ce genre n'a jamais été faite et aucunefonctionpolitique
de la Société des Nations n'a jamais, comme telle, étéreprise ni

assumée 2, bien qu'il soit évident que des fonctions parallèles ont
étéassumées par les Nations Unies de diverses manières en vertu
de la Charte, en particulier dans le domaine du maintien de la paix.

2) Les Nations Unies nlont donc pas repris le système des
Mandats de la Sociétédes Nations comme tel, ni aucune fonction
donnée s'y rapportant. En revanche, c'est là l'une des questions
qui a trouvé son ((parallèle » dans la Charte, à savoir dans l'institu-

tion du régimede tutelle des Nations Unies (chapitres XII et XIII)
et dans les autres dispositio~zsde la Charte relatives aux territoires
non azttonomes(chapitre XI et article73).

3) En bref - et noustenons à le souligner - il y a eu dès l'origine
une élection(un choix) de la part des Nations TJniesde traiter de la
question des territoires non autonomes (catégorie dans laquelle
nous estimons que les territoires sous Mandat entraient incontes-

tablement - tout au moins les territoires ((B ))et (C ») selon les
dispositions des chapitres XI, XII et XIII de la Charte et non pas
en reprenant et en complétant ou en modernisant le système des
Mandats de la Société desNations.

1 Voir compte rendu sommaire de la Commission préparatoiredes Sations
Unies crééeàla fin de la conférence de San Francisco, C. P. N. U., Comit2-3, pp.
et 10-11.
C'est l'une des raisonpour lesquelles nous pensonque l'opinion exprimée
par la Cour dans son avis consultatide 1950, d'après laquelle les fonctions de
surveillance de l'ancien Conseil dela Société desns sont passéàsl'Assemblée
des Nations TJnies qui avait le droit de les exercer, était certaerronée. JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMclURICE
533
(4) This was a deliberate policy, as is shown by a number of
things. One of the most striking is the fact that, as the Court con-
firmed in its 1950 Opinion, those who framed the Charter created no

obligation under it for Members of the United Nations administering
Mandated territories to bring these into the trusteeship system.The
San Francisco Conference did, on the other hand-and this again we
stress-by means of Chapter XI of the Charter (and more particu-
larly by Article 73 which we shall consider later) create a positiors
which, according to oiir view of it, involved that any Mandated
territory not placed under trusteeship must be dealt with by the
Mandatory as a non-self-governing territory under Article 73 of the

Charter, in respect of which the obligations (including the reporting
obligations) of that provision must be carried out.

(j) It is clear that the Members (orprospective Members) of the

United Nations at San Francisco and thereafter, looked to the
bringing into trusteeship of al1mandated territoriesother than such
as attained independence. But the deliberate character of their
decision (evidenced by their conduct) not to make any provision
for the possibility that this expectation might not in every case be
realised (apart of course from the provision made by Chapter XI and
Article 73), can be seen in relation to the Mandate for South West
africa from the statement which the representative of the Union of

South Africa made on II May 1945 in Committee III4 of the San
Francisco Conference l.In this he indicated in the clearest possible
terms the intention of the Union to claim the incornoration of the
mandated territory in the national territory of the aio on M.oreover,
we see no reason to doubt the statement made on behalf of the Re-
spondent State (inthe written Mernorial settingout its preliminary
objections) to the effect that the declaration which the Union Gov-
ernment made at San Francisco included (though this does not

appear on the record) an intimation that the Union Government
must not be held "to have acquiesced in the continuance of the
Mandate or the inclusion of the [mandated] territory in any form of
trusteeship under the new International Organization" 2.The fact
of this South African Statement, which was long and extremely ex-
plicit, coupled with the fact that Chapter XII of the Charter, despite
its various references to the mandated territories, deliberately re-
frained from imposin;; any obliga'cioiîto bring them into trusteeship,

makes it impossible, wethink, to suggest there was any misapprehen-

Summarily recorded in G.hT.C.I.O. Docts,, IO,.p. 434. The full statement,
the accuracy of which has not been challenged, and which accords with an unofficial
written PreliminaryObjections, pp. 25-26-andsee footnoteton pagee26.n the Respondent's

See footnotI on page 26 of the Respondent's written PreliminObjections.
It has equally not been contested that this further passage was in fact included. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 533
4) Plusieurs faits montrent qu'il y a eu là une politique délibérée.

L'un des plus frappants est que, comme la Cour l'a confirmédans
son avis de 1950, les rédacteurs de la Charte n'y ont pas inclus
d'obligations pour les Membres des Nations Unies administrant
les territoires sous Mandat de placer ceux-ci sous le régime de
tutelle. En revanche, la conférence de San Francisco - et nous
soulignons ce point lui aussi - a, au moyen du chapitre XI de la
Charte (etplus particulièrement del'article 73que nous examinerons
plus loin), crééune situation qui, selon nous, impliquait que tout

territoire sous Mandat non placé sous tutelle devait êtretraité par
le Mandataire comme un territoire non autonome au sens de l'ar-
ticle 73 de la Charte, vis-à-vis duquel les obligations définiespar
cette disposition (y compris celle de faire rapport) devaient être
remplies.

5) Il est clair que les Membres (ou les Membres éventuels) des
Nations Unies, à San Franciko ou par la suite, envisageaient que
tous les territoires sous Mandat seraient placés sous tutelle, sauf
ceux qui atteindraient l'indépendance. Mais le caractère délibéré
(démontrépar leur conduite) de leur décisionde ne prendre aucune

disposition pour le cas possible où cette attente ne serait pas satis-
faite dans tous les cas (sauf évidemment la disposition prise par le
chapitre XI et l'article 73) ressort, en ce qui concerne le Mandat
pour le Sud-Ouest africain, de la déclaration faite par le représen-
tant de l'union sud-africaine le II mai 1945 au Comité II/4 de la
Conférencede San Francisco l.Dans cette déclaration, il aindiqué
dans les termes les plus clairs possibles l'intention de l'Union de
réclamer l'incorporation du territoire sous Mandat au territoire

national de l'Union. Au surplus, nous ne voyons pas de raison de
douter de l'exposéfait au nom du défendeur (dans le mémoireécrit
exposant ses exceptions préliminaires) énonçant que la déclaration
faite à San Francisco par le Gouvernement de l'union contenait
(bien que cela n'apparaisse pas dans le compte rendu) un avertisse-
ment que le Gouvernement de l'Union ne saurait êtreconsidéré
comme ayant ((acquiescéà la continuation du Mandat ou à l'inclu-

sion du territoire 'sous Mandat] sous une forme quelconque de
tutelle de la nouvelle organisation internationale » 2.Le fait de cette
déclaration sud-africaine qui était longue et très explicite, joint au
fait que le chapitre XII de la Charte, en dépit de ses diverses
référencesaux territoires sous Mandat, s'est délibérémentabstenu
d'imposer une obligation quelconque de les placer sous tutelle,

Résuméedans la collection des documents deConférence des Nations Unies
sur l'organisation internatiovol.,, p.434.Le texte intégral de la déclaration
dont l'exactitude n'pas 6técontestée, et qui s'accorde avec un procès-verbal
non officiel aux mains du Secrétariat des Nations Unies, figure dans les exceptions
préliminaires écrites du défendeur (pp. 25voir aussi la n1,p. 26).
Voir la notI àla page 26 des exceptions préliminaires écrites du défendeur.
Il n'a pas davantage été contesté que ce passage eût été,en fait, inclus dans les
procès-verbaux.534 JOINT DISS. OPIN. JUDCES SPENDER AND FITZMAURICE
sion, or to argue, on that ground, that the Court should, by judicial
action, make provision for a case which the framers of the Charter

did not see fit toprovide for themselves-presumably because they
hoped it would not occur, or were prepared, if it should occur, to
leave to the application of Article3 of the Charter. The fact that, in
the event, South West Africa was the only mandated territory not
brought into trusteeship, obviously cannot be a legal ground for
dealing with this territory on any different basis from that which
would have obtained if its case had been the rule and not the ex-
ception. It cannot, in law, be a question of imposing a sanction on
the Mandatory for not having followed the same course asits fellow-
mandatories when it was under no legal obligation to do so. It can
only be a question of establishing what arethe legal consequences of
this, having regard to the dissolution of the League. This brings us to
oiir next point.

(6) The possibility that some mandated territories might not
be brought into trusteeship was not the only one accepted by
those atteriding the San Francisco Conference-they also took
the risk that the termination of the League might, u?tlessspecific
provision were made for this, affect the continued applicability of
particular clauses of the mandates, clauses which, by their terms.
were geared to the existence of the League and of membership of

the League. This risk they must be presumed to have run with
their eyes open, since the coming termination of the League, by
one means or another, was a political aim and intention of al1those
AIew~bersof the League (including the Applicant States) who zoere
present at San Francisco.

(7) There was a sufficient discussion of the whole question of
Mandates (as also at Geneva in April 1946, to which we shall come)

to make it legitimate, and indeed necessary, to assume that those
concerned were familiar with the various instruments of Mandate,
and were aware that certain clauses of these instruments could not,
accordingto their terms, function or remain operative on the same
basis after the termination of the League, and the terminntion of
League membership, unless express provision were made to meet
the case; and accordingly that such express provision urould have to
be made,or else any consequences involved would have to be accept-
ed. But, amongst other omissions,no provision was made to meet the
fact that, after the termination of the League there would be no
Members of the League at all, and therefore no States which could
invoke Article 7 according to its terms, if the right to do so was
(as in principle it must be) confined to States of the class specified
in it.

210 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 534
interdit à notre avis de prétendre qu'il y ait eu un malentendu ni

de soutenir pour ce motif que, par voie d'acte judiciaire, la Cour
devrait prendre des dispositions à propos d'un cas pour lequel les
rédacteurs de la Charte n'ont pas jugénécessaired'en prendre eux-
mêmes - sans doute parce qu'ils espéraient qu'il ne se produirait
pas ou parce que, s'il se produisait, ils étaient prêtss'en remettre
à l'application de l'article73 de la Charte. Le fait qu'en fin de
compte le Sud-Ouest africain a étéle seul territoire sous Mandat
qui n'ait pas étéplacé sous tutelle ne saurait évidemment fournir
de motifs juridiques pour traiter ce territoire sur une autre base que
celle qui aurait été applicable si son cas avait été conforme à la
règle, au lieu d'êtreune exception. En droit, il ne saurait être
question d'imposer une sanction au Mandataire pour n'avoir pas
suivi la mêmeattitude que les autres Mandataires, quand il n'était
nullement dans l'obligation juridique de le faire.La seule question
qui se pose est de déterminer les conséquencesjuridiques de ce fait,
eu égard à la dissolution de la Sociétédes Nations. Cela nous
amène au point suivant.

6) La possibilité que certains territoiresous Mandat ne fussent
pas placés sous tutelle n'est pas la seule qui ait étéacceptée par
ceux qui ont participé à la conférence de San Francisco - ils ont
aussi accepté lerisque qu'à moins de $rendre desdisfiositionsprécises
$our celala fin de la Société desNations portât atteinte au maintien
en vigueur de clauses particulières desMandats, clauses qui, d'après
leurs termes, se rattachaientà l'existence de la Société desNations
et à la qualité de Membre de la Société.Il faut présumer qu'ils

ont couru ce risque les yeux ouverts, puisque la dissolution de la
Société desNations, d'une manière ou d'une autre, étaitun but et
une intention politique de tous ceux des Membres de la Société des
Nations qui étaientprésents à San Francisco (y cornfirisles demnn-
deztrs.
7) Toute la question des Mandats a 6té suffisamment discutée
(demêmequ'à Genève er)avril1946, comme nous allons y venir)pour
permettre et mêmepour imposer d'admettre que les intéressés

connaissaient bien les divers actes de Mandat et savaient que,
d'après lezirs termes, certaines clauses de ces actes ne pouvaient
fonctionner ou rester en vigueur sur la mêmebase après la fin de la
Société desNations etla fin del'afi#artenunceàlaSociété desNations,
à moins que des dispositions expresses ne fussent prises pour faire
face à la situation; et par conséquent que ces dispositions expresses
devraient êtreprises, faute de quoi il faudrait accepter toutes les
conséquences qui en découleraient. Mais, entre autres omissions,
aucune disposition n'a étéprise pour remédierau fait qu'après la fin
de la Société desNations il n'y aurait plus de membres de celle-ci et,
par conséquent, plus d'Etats en mesure d'invoquer l'article7 selon
s2s termes, si (comme cela devait êtreen principe) le droit de le
faire était limitéaux Etats dc la catégoriedéfiniedans cet article.

219 535 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAUR1C.E
(8) If June 26, 1945, the date of the signature of the Charter,

represented in practice the last occasion on which, under the Charter
itself, any provision could be made for the case of a mandated
territory not being placed under trusteeship, or for meeting any
problems that might be created by the coming dissolution of the
League, it was by no means the last occasion of any kind on which
something could have been done about these things. There was still
the occasion of the dissolution of the League itself. Since a large
proportion of the Members of the League (including the Applicant
States) were also Members of the United Nations, and vice-versa,

the basis for a concerted policy existed. There was equally the
occasion of the adoption of the United Nations Resolution XIV (1)
of February 12, 1946, already referred to, stating the terms on
which the United Nations would be prepared to take over political
functions from the League, such as those relating to mandates.
These terms, as we have seen, were not encouraging-a fact
significant in itself. But remained open to the League (not dissolved
until April1g46) or tothe parties to any "internationalinstrument"
to make a forma1 request to the United Nations to assume the
exercise of any such functions. No such request was ever made.

(9) It was not only not made, but when, at Geneva in April 1946,
the representative of China presented a draft Resolution (quotedin
full ina footnote on p. 538 below) the effect of which would have
been to request the United Nations to take over the supervisory
functions of the League Council in respect of the conduct of the
Mandates, this draft was not proceeded with. Instead, the Resolu-

tion which we have considered under sub-section (c) immediately
preceding this one, was adopted (for text, see the same footnote
on p. 538)l. The question of the United Nations taking over func-
tions from the League Council is of course not the same one as
that of the right of former Members of the League to go on invoking
the adjudication clause of the Mandate. But they are closely related.
Both hinged on the dissolution of the League, and the two As-
semblies appear to have been equally indifferent to both. The
one question was at least raised by the original Chinese resolution.
The other was never raised at all, and there is no indication that

anyone was interested in raising it; yet it is impossible (and it
really has to be excluded in point of law) that those concerned were
unaware of the terms of provisions such as Article 7, or of the

The contrasbetween the original Chinese draft andthe one eventualIy adopted
taken by theCourt in 1950,that the functions of the League Council in respect
of Mandates had passed to the United Nations;for this was the very thing
which the originalinese draft proposed but which was not adopted. OP. DIS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 535

8) Si le26 juin 1945, date de la signature de la Charte, représen-
tait en pratique la dernière occasion à laquelle, selon la Charte elle-
même,il fût possible d'insérerdans la Charte une disposition en vue
de régler je cas où un territoire sous Mandat ne serait pas placésous
tutelle ou derésoudretous les problèmes susceptibles d'êtresoulevés
par la dissolution imminente de la Sociétédes Nations, ce n'était
nullement la dernière occasion de faire quelque chose en ces matiè-
res. La possibilitéexistait encore à l'occasion de la dissolution de la
Société desNations elle-même.Puisque la plupart des Membres de

la Sociétédes Nations (y compris les État? demandeurs) étaient
aussi Membres des Nations Unies et vice-versa, la base d'une
politique concertée existait. De même,il y a eu l'occasion de l'adop-
tion de la résolution XIV (1) des Nations Unies du 12 février 1946,
déjà citée, énonçant les conditions selon lesquelles les Xations
Unies seraient disposéesà reprendre les fonctions politiques de la
Société desNations, dont celles relatives aux Mandats. Comme nous
l'avons vu, ces conditions n'étaient pas encourageantes - fait
significatif en lui-même.Mais il restait la possibilitépour la Société

des Nations (dissouteseulement en avril 1946) ou pour les parties à
un «acte international » deprésenter aux Nations Vnies une deman-
de formelle d'assumer l'exercice de toutes fonctions de ce genre.
Aucune demande de cet ordre n'a jamais étéprésentée.

g) Non seulement aucune demande n'a étéprésentée mais,
lorsqu'en avriI 1946 à Genève lereprésentant de la Chine a présenté
un projet de résolution (cité intégralement en note à la p. 538 ci-
dessous) tendant à inviter les Nations Unies à reprendre les fonc-
tions de surveillance du Conseil de la Société desNations en ma-

tière d'administration des Mandats, il n'a pas étédonné suite à ce
projet. En revanche, la résolution que nous avons examinée à la
section c) immédiatement ci-dessus a étéadoptée (pour son texte,
voir mêmenote au bas de la p. 538) l.Certes, la question de la re-
prise par les Nations Unies des fonctions du Conseil de la Société
des Nations est distincte de la question du droit qu'auraient encore
les anciens Membres de la Sociétéd'invoquer la clause de règlement
judiciaire du Mandat. Mais ces deux questions sont étroitement
liées. Elles dépendaient l'une et l'autre de la dissolution de la

Sociétédes Nations et les deux assembléesse sont montrées aussi
indifférentes dans un cas que dans l'autre. La première question a,
du moins, étésoulevéepar le projet de résolution chinois. L'autre
n'a jamais étésoulevéeet rien n'indique que personne tint àle faire;
or, il est impossible (et, du point de vue juridique, cela doit être

La différence entre le projet chinois original et la résolution finalement adoptée
constituà nos yeux une raisde plus de ne pas accepter l'opinion énoncée par la
Cour en 1950 selon laquelle les fonctions du Conseil de la Sociétéen ce qui concerne
les Mandats seraienpassées aux Nations Unies, car c'était exactece que
proposait le projet chinois orqui n'a pas été adopté. effect that the dissolution of the League would have on these pro-
visions, if no counter-action was taken.

(IO) We have already drawn attention to, and cited, the very
general and guarded types of statement made about the Man-
dates at Geneva. But even before that, the matter had been
further discussed in the Preparatory Comiriission of the United

Nations set up at the close of the San Francisco Conference to
function during the interin. period before the Charter would
come into force, and before the first part of the first United Nations
Assembly would be held in January 1946,and to prepare for this. In
this Commission, most of those mho met at Geneva to dissolve the

League were represented. They were therefore aware of what had
taken place in the Preparatory Commission. The Commission set
up an Executive Committee. This Committee prepared a Report
in view of the first session of the United Nations Assembly. Part III
of Chapter IV of this Report proposed the setting up of a Temporary
Trusteeship Committee to carry out, in the intervening period,

certain of the functions that would eventually fa11to the United
h'ations Trusteeship Councill. One of the functions the Executive
Committee proposed for such a Trusteeship Committee-and we
draw particular attention to this-was to

"advise the General Assembly on any matters that might arise
with regard to the transfer to the United Nations of anyfunctions
and responsibilitieshitherto exercisedunder the Mandate Sy~tem".~

Amongst the responsibilities which, according to the argument
of the Applicants in this case, was essentially necessary for the

functioning of the Mandates System, was the function of "judicial
super~ision" of the Mandate. It is therefore instructive to note what
happened to this proposal. It uas not adopted by the Prcparatovy
Comrllission,and was re~laced by a recommendation to the Lnited
Nations Assembly that it should adopt a resolution calling on

Member States adininistering Mandates, to submit trusteeship
agreements in respect of them for consideration at the second part
of the first Assembly in the autumn of 1946 3, a recommendation
eventually adopted by the Assembly, in Resolution XI of Febru-
ary 9, 1946.

(II) Yet in the discussions in the Preparatory Commission in
December 1945, which preceded the formulation of this recommen-
l Document PclExI113iRev. 1,Chapt. IV, Sec. 2, para. 3, p. 55. A Sub-Com-
mittee of the Executive Committee includedin its report to the latt(inteniia)
the following observation"Since the questions arisinfrom the winding up of the
Mandates System are dealt within Part III, Chapter IV, no recommendation is
included ...Ibid.C,hapt. IX, See 3, paras. 1,2 and j,p. 110.
Ibid.,para.4 (IV), p56.
Document PC,zo, Chap. IV, Sec. 1,p. 49. exclu) que les intéressésn'aient pas eu connaissance des termes de
dispositionstelles que l'article 7, ni de l'effet que la dissolutionde la
Sociétédes Nations aurait sur ces dispositions si aucune contre-
mesure n'était prise.

IO) Nous avons dkjà évoquéet citéles déclarations de caractère
trhs genéralet prudent faites à Genèveà propos des Mandats. Mais
mêmeauparavant la question avait été débattue en détail par la
Commission préparatoire des Nations Unies créée à la fin de la con-
férence de San Francisco pour la période intérimaire précédant

l'entréeen vigueur de la Charte et la première partie de la première
session de l'Assemblée desNations Unies en janvier 1946, en vue de
préparer cette session. La plupart de ceux qui se sont réunis à
Genève pour dissoudre la Société des Nations étaient représentés
à la Commission préparatoire. Ils savaient donc bien ce qui s'y

était passé.Elle institua un Comitéexécutif. Ce Comitéprépara un
rapport en vue de la première session de l'Assembléedes Nations
Unies. Le chapitre IV de la partie III de ce rapport proposa la
créationd'un Comitétemporaire de tutelle chargéd'exercerpendant
la période intérimaire certaines fonctions qui reviendraient par
la suite au Conseil de tutelle des Nations Unies l. L'une des fonc

tions proposéepar le Comité exécutifpour ce Comité detutelle - et
sur laquelle nous attirons particulièrement l'attention - était de:

«donner des avis à l'Assembléegénéralesur les questions que

pourrait soulever letransfert à l'organisation des Nations Unies de
toutes fonctions et responsabilitésassuméesjusqu'ici en vertu du
régimedes mandats »2.
L'une des responsabilités qui, selon la thèse des demandeurs en
l'espèce, aurait été essentielle au fonctionnement du système des

Mandats était la (surveillance judiciaire ))du Mandat. Il est donc
instructif de noter ce qui est advenu de cette proposition. Elle n.'a
pas été adoptéepar la Comnzissionfirifaratoire et a étéremplacéepar
une recommandation à1'Ass~mblée desNations Unies d'adopter une
résolution demandant aux Etats Membres administrant des Man-

dats de soumettre à leur égard des accords de tutelle pour examen
pendant la deuxième partie de la première Assemblée à l'automne
1946 3; c'est cette recommandation qui a étéfinalement adoptée
par l'Assembléedans sa résolution XI du 9 février 1946.

II) Les discussions de la Commission préparatoire en décembre
194.5 qui ont précédé l'élaboration de la recommandation indiquent

l Document PC/EX/IIJ/R~V. 1, chap. IV, sect2,par. 3, p. 55. Un sous-com.té
vation suivante:cÉtant donné que les questions soulevées par la terminaisodnur-
régime desMandats sont traitées au chapitre IV de la Partie III, on ne trouvera ici
aucune recommandation à cet égard» Ibid., chap. IX, sect. 3, I,2et 5, p110.
Ibid., par4 (IV), p56.
Wocument PC/2o, chap. IV, sect1,p. 49.537 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE

dation, there were further indications that no automatic transfers
of Mandated temtories into the trusteeship system could be ex-
pected. Speaking on December 20, 1945, the representative of
Australia, while expressing sympathy with the aims involved,

denied that there was any obligation tobnng mandated territories
into trusteeship, and insisted that in this respect there was 110
difference between these territories andany other form of dependent
territoryl. The representative of South Africa on the same oc-
casion aand again three days later once more made the most ex-
plicit reservations.

(12) When the Assembly itself met in January 1946, al1this was
repeated. The representative of South Africa made further similar
statements (January 17 and 22)*. The representative of the United
Kingdom (same day) announced a decision to start negotiations

in respect of Tanganyika, the Cameroons and Togoland, but ex-
pressed willingness actually to bnng them into trusteeship only if
satisfactory terms could be negotiated, and reserved the case of
Palestine entirely, for specialreasons 5.The representative ofFrance
(19 January) said that the French Government intended "to carry
on with the work entrusted to it by the League of Nations", but
beiieving that a transfer into trusteeship "would be in the spirit of
the Charter", it was prepared to "study" the matter, subject to

certain reservations 6. More than one statement referred to the
necessity for obtaining the approval of the peoples of the mandated
territories. Other statements of willingness in principle to place
mandated territories under trusteeship were made on behalf of
Australia, Belgium and New Zealand.

(13) In itsresulting Resolution XI of g February, the Assembly in
"inviting" the negotiation of trusteeship agreements, welcomed

"the declarations made by certainStates administering territories
now held under Mandate, of an intention to negotiate trusteeship
agreements in respects of someof thesetemtories.. ." (italicsours').

Even if one attributes the wording of the italicised passages
partly to the existence of special cases such as those of Palestine

l U.N.P.C. Committee 4, Summary Records. p. 39.
Ibid., p. 40.
U.N. P.C. JournaI, p. 131.
G.A.O.R., First Session, First Part,th plenary meeting, pp. 185-6; and
ibid., Fourth Comm., 3rd meeting, IO.

Ibid., 11'th Plenary, 166-167.
Ibid., 16th plenarp. 231.
U.N. Document A/64, p. 13. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE. 537

déji qu'on ne s'attendait pas à un transfert automatique des tem-
toires sous Mandat dans le régimede tutelle. Dans son intervention
du 20 décembre 194 j,le représentant de l'Australie, tout en expri-
mant sa sympathie envers les objectifs prévus,a dit qu'il n'existait
pas d'obligation de mettre sous tutelle les territoires sous Mandat

et a soulignéqu'il n'y avait à cet égard aucunedifférenceentre les-
dits territoires et les autres formes de territoires dépendants l.Le
même jour et encore trois jours plus tard 3,le représentant de l'Afri-
que du Sud a formulé de nouveau les plus explicites réserves.

12) Tout cela a étérépétélorsque l'Assemblées'est réunie en
janvier 1946. Le représentant de l'Afrique du Suda fait de nouvelles
déclarations dans le mêmesens (17 et 22 janvier) 4.Le représentant

du Royaume-Uni a annoncé (le mêmejour) que son pays avait
décidéde commencer des négociations à propos du Tanganyika, du
Cameroun et du Togo, mais ne serait dispcséà mettre ces territoires
sous tutelle que si les négociations se révélaient satisfaisantes;
quant à la Palestine, son cas était entièrement réservépour des

raisons spéciales 5. Le 19 janvier, le représentant de la France a
indiqué que son gouvernement se proposait de « poursuivre l'exé-
cution de la mission qui lui avait été confiéepar la Société des
Nations » mais, pensant qu'il cserait dans l'esprit de la Charte j)
que cette mission s'exerçât désormais sous le régime de la tutelle,
était prêt à (étudier » la question sous certaines réserves 6. Dans

plus d'une déclaration il a étéfait mention de la nécessitéd'obtenir
l'approbation des peuples des territoires sous Mandat. L'Australie,
la Belgique et la Nouvelle-Zélande ont également déclaré qu'elles
étaient en principe disposées à placer sous tutelle les territoires
qu'elles administraient sous Mandat.

13)Dans la résolution XI adoptée en conséquence le g février,
l'Assemblée, «invitant nles gouvernements intéressésà négocierdes
accords de tutelle, a accueilli avec satisfaction

«les déclarationsfaites par certains États administrant des terri-
toires actuellement sous mandat, de leur intention de négocierdes
accordsde tutelle pour certainsdecesterritoires...»(lesitaliquessont
de nous) '.

Mêmesi l'on attribue en partie le libellédes passages en italiques
à l'existence de cas spéciaux comme ceux de la Palestine et de la

l Commission préparatoire des Nations Unies, Comité 4, procès-verba39.p.
2Commission préparatoire des Nations Unies, Journal131.
4 Assemblée générale, documents officiels, première session, première partie
douzième séance plénière. pp. 185-186; et ibid., Quatrième Commission,troisième
séance, p.O.
Ibid., onzième séance plénière, pp. 166-167.
Ibid., seizième séance plénièr231..
Document Nations Unies A 64, p. 13.and Transjordan (about to attain independence), and to the fact
that Japan, which administered a number of mandated territories
in the Pacific, was then neither a Member of the United Nations,
nor present at the Assembly, nor to be present at Geneva in April,

this was not the whole picture. There was also the fact that the
statements made on behalf of South Africa could not possibly have
been construed as "declarations of intention" to negotiate a
trusteeship agreementfor South West Africa; and it was inany case

clear that, both with regard to that territory and other mandated
temtories, the position was uncertain, and would depend (even
in the case of those territories in respect of which declarations of
intention had been made) on the negotiation of satisfactory trustee-

ship agreements.
(14) Such then was the position when the Members of the League
of Nations met at Geneva in April 1946, many of them having

been represented at the United Nations proceedings above-
mentioned, and all of them aware of these. What transpired
has already been described under the previous section (c)
of this part of Our Opinion. The contrast between the original

draft CEnese resolution, presented by the representative of China
but not proceeded with, and the eventual resolution of the League
Assemblyis soglaring andrevealing, that we set out both resolutions
verbatim in a footnote l.

-- -
The original Chinese draft read as foilows:

"The Assembly,
Considering that the Trusteeship Council has not yet been constituted and
that all mandated territoriesunder the League have not been transferred
into temtories trusteeship;
Considering that the League's function of supervising mandated temtories
should be transferred to the United Nationsin order to avoid a period of inter-
regnum in the supervision of the mandatory regime in these territones [italics
added] ;
Recommends that the mandatory powers as well as those administering ex-
enemy mandated temtories shall continue to submit annual reports to the
United Nations and to submit to inspection by thesame until the Trusteeship
Council shall have been constituted."

The Resolution finally adopted by the League Assembly was the following:

"The Assembly :

Recalling that Article 22 of the Covenant applies to certain territories
placed under mandate the pnnciple that the well-being and development of
peoples not yet able to standalone in the strenuous conditions of the modern
world form a sacred trust of civilization:
I.Expresses its satisfaction with the manner in which the organs of the
League have performed the functions entrusted to them with respect to the
mandates system and in particular pays tribute to the work accomplished
by the Mandates Commission; OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 538

Transjordanie (qui étaient sur le point d'accéderà l'indépendance)
et au fait que le Japon qui administrait un certain nombre de

territoires sous Mandat dans le Pacifique n'était alors ni Membre
des Nations Unies ni présent à l'Assemblée(pas plus qu'il ne devait
l'êtreà Genèveen avril), le tableau n'est pas complet. Il faut ajouter
que les déclarations faites au nom de l'Afrique du Sud ne pouvaient

certainement pas être interprétéescomme ccexprimant l'intention 1)
de négocierun accord de tutelle pour le Sud-Ouest africain; et il
était clair que la situation étaitincertaine tant en ce qui concernait
ce territoire que d'autres temtoires sous Mandat et que tout dé-

pendrait de la négociation d'accords de tutelle satisfaisants (même
dans le cas des territoires à propos desquelsdes c(déclarations d'in-
tention )avaient été faites).

14) Telle était donc la situation lorsque se sont réunis à Genève
en avril 1946 les Membres de la Sociétédes Nations, dont beaucoup
avaient participé aux débatsdesNations Unies mentionnésci-dessus
et qui en avaient tous eu connaissance. Nous avons déjà décrit, à

la section c) ci-dessus de la présente opinion, ce qui s'est passé.
La différenceentre le projet de résolution chinois original, présenté
par le représentant de la Chine mais auquel il n'a pas été donné
suite, et la résolution finalement adoptée par l'Assemblée de la

Sociétéest si frappante et si révélatrice que nous citons en note ces
deux documents in extenso l.

1 Le projet chinois original était lesuivant:

«L'Assemblée,
Considérant que le Conseil de Tutelle n'apas encore étéconstitué et que
tous les territoires somandat de la Société des Nations n'ont pas encore été
transformés en territoires sous tutelle;
Considérant qu'il y aurait lieu, afin d'évitertoute interruption dans la surueil-
lance du régimedes mandats dans ces territoires, de transféàel'organisation
des Nations Unies les fonctions assuméeà cet égard par la Société desNations
(lesitaliquesont de nous);
Recommande que les Puissances mandataires ainsi que les Puissances ad-
Nations Unies des rapportssoannuels et acceptentcque ces Territoires soient

inspectés par l'organisation,jusqu'au moment où le Conseil de Tutelle aura
étéconstitué. »
La résolution finalement adoptée par la Société des Nations est rédigée
comme suit:
KL'Assemblée :

Rappelant que l'articl22 du Pacte applique à certains territoiresplacés
sous mandat le principe que le bien-être et le développement des peuples non
encore capables de se diriger eux-mêmes dans les conditions particulièrement
difficiles du monde moderne forment une mission sacrée de civilisation:
I.Exprime sa satisfaction pour la manière dont les divers organes de la
Société des Nations ont rempli les fonctions qui leur étaient confiées pour
l'application du système des mandats et rend tout particulièrement hommage
àl'Œuvre accomplie par la Commission des mandats;539 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE

We shall state presently the reason which we think underlay the
attitudes both of the United Nations and of the League Assemblies.
Here we will state what appears to us to the legal significance of
these attitudes, so far as the present affair is concerned.

It seems to us impossible, on the facts as we have described
them, and looking at the matter as a whole, to take any other
view than that both the United Nations andthe League Assemblies
were fully aware of and alerted to the whole implications of the

mandates question, and of the dissolution of the League relative
to that; or that alternatively they must, on the facts (and even
simply as a presumption of law), be held to have been. Apart
/rom what was povided for by Article 73 of the Charter (see next
section), they deliberately refrained from making provision for the
situation which might arise if any mandated territory was not

placed under trusteeship, or if there were long delays- although
forewarned that this very situation might arise. They refrained
equally from any attempt to adapt the Mandates to the situation
arising from the termination of the League and of League member-
ship.

They not only "refrained", but at least twice (proposa1 of the
Executive Cornmittee of the Preparato~ Commission of the United
Nations-head (IO) above ;and original Chinese resolution at Gene-
va) they rejectedproposals for a transfer of League functions res-
pecting Mandates to the United Nations. Acceptance of either of

these proposals would naturally not, of itself, have got over the
difficultv about cessation of Leaeue membershi~. It would ~robablv
have b&ught that question in& the open, bui this is not he
Our concem here is simply to show that the two Assemblies were
(exept for Article 73 of the Charter) unwilling to provide in any spe-

cificwayfor the consequences of the termination ofthe League andits
membership, or for a possible eventual failure to bring a mandated
temtory into trusteeship. In this lies the key to the whole matter.

2. Recalls the role of the League in assisting Iraq to progress from its status
under an 'A' Mandate to a condition of complete independencewelcomes the
termination of the mandated status ofSyria, the Lebanon and Transjordan,
which have, since the last session of the Assembly, become independent
members of the world community;
3. Recognizes that, on the termination of the League's existence, its functions
with respect to the mandated territories willme to an end, but notes that
Chapters XI, XII and XII1 of the Charter of the United Nations embody
principles correspondinto those declared in Artic22of the Covenant of the
League ;
4. Takes note of the expressed intentionsof the members of the League
now administering territoriesnder mandate to continue to administerthem
for the well-being and development of the peoples concernedin accordance
with the obligations contained in the respective mandatestil other arran-
gements have been agreed between the United Nations and the respective
mandatory powers." OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE
539
Nous exposerons plus loin le motif qui explique, à notre avis,
l'attitude adoptée par l'Assembléedes Nations Unies et celle de la

Société des Nations. Pour l'instant, nous relèverons ce qui, dans
ces attitudes, nous semble êtrejuridiquement important en ce qui
concerne les présentes affaires.
Il nous parait impossible, étant donné les faits que nous avons
décrits et considérant l'affaire dans son ensemble, de penser que

l'Assembléedes Nations Unies et celle de la Société des Nations
n'aient pas étéparfaitement conscientes et averties de l'ensemble
des incidences de la question des Mandats et de la dissolution de
la Société.desNations à cet égard; ou, en d'autres termes, il faut
considérer qu'elles l'étaient, vu les faits (et mêmesimplement à

titre de présomption de droit). .En dehors des dzsPositions de l'arti-
cle 73 de la Charte (voir section suivante), elles se sont délibérément
abstenues de prendre des dispositions concernant la situation pou-
vant se présenter si un territoire sous Mandat n'était pasplacésous
tutelle ou ne l'était qu'aprèsde longs délais - bien qu'elles eussent

étéaverties qu'une telle situation pourrait se présenter. De même,
elles n'ont pas essayéd'adapter les Mandats àla situation découlant
de la disparition de la Sociétéet de la qualité de Membre.de cette
Société.
Non seulement elles ne l'ont pas fait mais, au moins par deux
fois, ellesont rejetédes propositions en vue de transférer aux Nations

Vnies les fonctions de la Sociétédes Nations en matière de Mandats
(proposition du Comité exécutif dela Commission préparatoire des
Nations Unies - paragraphe IO ci-dessus; et projet de résolution
chinoisoriginal de Genève).L'acceptation de l'une ou l'autre de ces
propositions n'aurait naturellement pas en soi résolu les difficultés

concernant la cessation de l'appartenance à la Société.Le problème
aurait étéprobablement mis en évidence, mais cela est en dehors
de notre propos. Ce qui nousintéresseici est simplementde montrer
que les deux assemblées ne désiraient (en dehors de l'article 73 de
la Charte) prendre aucune disposition expresse en vue de faire face

aux conséquences de la fin de la Sociétédes Nations et de l'apparte-

de territoire sous mandatéàél'entière indépendancese félicite que, depuis la
dernière session de l'Assemblée, la Syrie, le Liban et la Transjordanie aient
cesséd'êtredes territoires sous mandat pour devenir desmembrindépendants
de la communautéinternationale;

fonctions ence qui concerne les territoires somandat,amais note que desà ses
principes correspondanà ceux que déclare l'arti22du Pacte sont incorporés
dans les chapitres XI, XII et XII1 de la Charte des Natiünies;

territoires somandat ont exprimé leur intention de continueàlles adminis-
trer, en vue du bien-être et du développement des peuples intéressés,6-
ment aux obligations contenues dans les divers mandats,jusqu'à ce que de
nouveaux arrangements soient pris entre les Nations Unies et les diverses
Puissances mandataires.» 540 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE

It is the key to the whole matter because it is strjkingly
et-ident tliat the two Assemblies (and the Applicant States n-ere
Members of both) relied, and fireferred to relv, on the hope or ex-
pectation that the mandated territories would eventuallybebrought
into trusteeship. Whether this u:as a reasonable assumption in the
case of South West Africa, considering the declarations that were

made on behalf of the Union Government, is another matter. The
fact remains tliat it zcasrelied upon, in the full knowledge of facts
from which it was manifest that the expectation might not be
realized, and of the fact that the hlandatory was under no legal
obligation in the matter.
It seems to us fairly clear as a matter of reasonable inference,
that an important part of the reason for this attitude was the desire
to avoid even the suggestion that any mandated territory might

not be brought into trusteeship; or, by providing for the situation
that might arise if that was not done (and if the League had in the
meantime been dissolved) to appear to be countenancing such a
situation by providing for it, or to be giving grounds on the basis
of which any hlandatory could contend that, express provision
having been made for continuing the Mandates as Mandates, n3
further action was required.
In short, given the view that they took of the whole matter,

those concerned thought it unnecessary to provide for this situation
and better policy not to. This course having been chosen, and the
possible consequences it entailed accepted,there is no legal principle
which woiild enable a Court of law to put the clock back and, by
judicial action, make provision for a case which those concerned
elected not to deal with, for reasons which appeared to them good
and sufficient at the time.

The fact that subsequent events have shown the policy to be
mistaken in the particular case of South West Africa, cannot of
course provide any justification for judicial rectification. This
would be to apply a principle of "hindsight" which we have al-
ready said is not a legitimate one. The fact is that, making the
best political judgment they could in the circumstances of the
time, the turoAssemblies pursued the course they thought was wisest
-norisit certain they werewrong, considering the matter asa~vhole l.

It is not for a Judge today, in the light of the greater knowledge
granted him by the passage of time, to do more than applythe law as
it is, in the light of the factsas they stood when the situation he is
dealing with arose.

l It may well have resulted in formandated territoribeing placed under
trusteeshithat otherwise might not have been. But if a given course has advan-
tages, its correspondidisadvantages must, in lat any rate, be accepted. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 540

nance à cette Société, ouà l'éventualitéd'un échecdans le transfert
sous tutelle d'un territoire sous Mandat. C'est là la cléde toute
l'affaire.
C'est la cléde toute !'affaire parce qu'il est très évident que les
deux assemblées(et les Etats demandeurs étaientMembresdes deux)
se sont fondéeset ont firéférsée fonder sur l'espoir ou l'attente que

les territoires sous Mandat seraient finalement placés sous tutelle.
Autre chose est de savoir si pareille supposition était raisonnable
dans le cas du Sud-Ouest africain, vu les déclarations faites au
nom du Gouvernement de l'Union. Il n'en reste pas moins qu'on
s'esfbien fondé sur cet espoir, en pleine connaissance des faits qui
montraient manifestement qu'il pourrait ne pas se réaliser et en
pleine connaissance de ce que le Mandataire n'étaitsoumis à aucune
obligation juridique en la matière.
Il nous paraît assez clair qu'on peut raisonnablement conclure
que cette attitude étaiten grande partie motivéepar le désird'éviter

mêmede suggérerque l'un des territoires sous Mandat pût ne pas
êtretransférésous tutelle; ou de donner l'impression de sanctionner
la situation qui pourrait se présenter si cela se produisait (la Société
des Kations étant dissoute entre-temps), en prévoyant cette situa-
tion ou en donnant à n'importe quel Mandataire des motifs de
prétendre que, une disposition expresse ayant étéprise polir la
continuation des Mandats en tant que Mandats, il n'y avait pas
lieu d'envisager d'autres mesures.
En bref, l'attitude prise par les intéresséssur l'ensemble de cette

question indique qu'ils ont pensé qu'il n'était pas nécessaire de
prévoir cette situation et qu'il était mêmede meilleure politique de
ne pas le faire. Cette méthode ayant étéadoptéeet ses conséquences
éventuelles acceptées, aucun principe juridique ne permet à un
tribunal de remonter dans le temps et de prendre, par action judi-
ciaire, des dispositions pour un cas que les intéressésavaient choisi
d'omettre pour des raisons qui leur semblaient bonnes et suffisantes
à l'époque.
Le fait que les événements ultérieursont prouvé que cette poli-

tique était erronée dans le cas particulier du Sud-Ouest africain
ne saurait bien entendu justifier une rectification judiciaire. Cela
équivaudrait à appliquer un principe de ((vision a posteriori1)qui,
nous l'avons déjàdit, n'est pas légitime. Le fait est qu'en exerqant
le meilleur jugement politique possible eu égard aux circonstances
de l'époqueles deux assembléesont suivi le cours qui leur paraissait
le plus sage -- et il n'est pas certain qu'elles aient eu tort, si l'on
considère la question dans son ensemble l. Il n'appartient pas au-
jourd'hui à un juge, mieux informk avec le temps, de faire plus que

d'appliquer le droit tel qu'il est, à la lumière des faits tels qu'ils se
présentaient lorsqu'a surgi la situation dont il est saisi.
l Il se peut que cetpolitique ait eu pour résultat de faire placer sous tutelle
d'anciens territoires Mandat qui autrement n'auraientpas subi ce transfert.
Mais si une attitua des avantagesil faut accepter les désavantages corrélatifs,
en droit du moins. JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
541

But it would be doing an injustice to those concerned to suppose

that they were indifferent to their responsibilities .They were not.
They knew of the protective cover which was provided by Article 73
of the Charter, and to this we now come.

(e) The yoleof Article 73 of the United Xations Charter

It must be evident to anyone who reads Article 73 of the United
Nations Charter, in conjunction with Article 22 of the League
Covenant, that the provisions of the one were fashioned to a major
extent upon those of the other. The similarity not only of concept

but of language is striking, and in order to show the affinity between
the two, we reproduce the text of the first paragraph of each in a
footnote l.
Article 73 provided for-a number of obligations for Members of
the United Nations administering non-self-governing territories,

to some of which we shall refer, and in particular it provided (by
its sub-paragraph (e)) for a reporting obligation to the United Na-
tions which, if less stringent and comprehensive than that provided
for under the Mandates (and under Article 6 of the Mandate for

South West Africa), was nevertheless far from negligible, as events
in the United National Assembly have amply demonstrated. This
provision (Article 73) was not in any way confined to the case of
Mandated territories, but it undoubtedly covered that case, as we
shall show.

Here then was the provision which, though set aside as irrelevant
by the Court in 1950, did in fact afford a reasonable measure of
coverage (in so fur as it was considered necessary or desirable to
provide any) against the possibility that some Mandated territory

l Article22, paragraph 1, of the League Covenant was as follows:

"To those colonies and territoriewhich aas consequence of the late war
them andsewhich are inhabited by peoples not yet able to stand by themselvesd
under the strenuous conditionsof the modern world, there should be applied
the principle that the well-being and development of such peoples form a
sacred trust of civilisation and that the securities for the performance of this
trust should be embodied in this Covenant."

The opening and governing paragraph of Article73 of the Charter reads:
"Members of the United Nations which have or assume responsibilities for
the administration of territoriewhose peoples have not yet attained a full
measure of self-government, recognize the principle that theinterests of the
inhabitants of these territorieare paramount, and accept as a sacred trust
the obligation to promote to the utmost, within the system of international
peace and security establishedby the present Charter, the well-being of the
inhabitants of these territorieand to this end:..." OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 541

Mais il serait injuste de supposer que les intéressésétaient in-
différents à leurs responsabilités. Ils ne l'étaient pas. Ils connais-
saient le rôle de protection de l'article 73 de la Charte, auquel nous
arrivons maintenant.

e) Le rQlede l'article 73 de la Chartedes Nations Unies

Lorsqu'on lit l'article 73 de la Charte des Kations Unies en corré-
lation avec l'article 22 du Pacte de la Société desNations, il est
évident que les dispositions de l'un ont étélargement inspiréespar

celles de l'autre. L'analogie des concepts aussi bien que de la rédac-
tion est frappante et, pour montrer les affinités entre les deux
articles, nous reproduisons en note le texte du premier paragraphe
de chacun d'eux l.
L'article 73 fixe un certain nombre d'obligations incombant aux

Membres des Nations Unies chargés d'administrer des territoires
non autonomes, dont nous mentionnerons quelques-unes, et établit
en particulier (àl'alinéae)) une obligation de soumettre des rapports
aux Nations Unies qui, bien que moins sévèreet g6néraleque pour

les Mandats (Mandat pour le Sud-Ouest africain: article 6), n'était
nullement négligeable, comme l'a amplement démontrél'attitude
de l'Assemblée desNations Unies. Cette disposition (article 73) ne
se limitait nullement au cas des territoires sous Mandat mais elle
l'englobait sans aucun doute, comme nous allons le montrer.

Telle éta.itdonc la disposition qui, bien qu'écartéepar la Cour
en 1950 comme non pertinente, offrait un degré raisonnable de
protection (pour azttant cjz4'il fût j2tgénécessaire ou sozlhaitablede
prévoir une telle protection)contre la possibilitéqu'un territoire sous

suivant:aragraphe I de l'articl22 du Pacte de la Société des Nations était le

a1. Les principes suivants s'appliquenaux colonies et territoires qà la
suite de la guerre, ont cessé d'êtresous la souveraineté des États qui les gou-
vernaient précédemment et qui sont habités par des peuples non encore capables
de sediriger eux-mêmes dans les conditionsparticulièremendifficiles du monde
moderne. Le bien-être et le développement de ces peuples forment une mission
sacrée de civilisationet il convient d'incorporerdans le présent Pacte des
garanties pourl'accomplissement de cette mission»
Le paragraphe déterminant de l'article 73 est son paragraphe introductif:
(Les Membres des Nations Unies qui ont ou qui assument la responsabilité
d'administrer des territoires dont les populationss'administrent pasencore
complètement elles-mêmes, reconnaissent le principe de la primauté des inté-
rêts des habitants deces territoiresIls acceptentcomme une mission sacrée
l'obligation de favoriser dans toute la mesure du possible leur prospérité, dans
le cadre du système de paix et de sécurité internationétabli par la présente
Charte et,à cettefin :..»
226542 JOINT DIS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE

might remain outside the trusteeship sg-stem or remain outside for
a prolonged period l.
That Article 73 would not, in respect of such a provision as
Article 7 of the Mandate for South West Africa, have served in itself
to cure the defect arising from the termination of al1League Rlem-
bership can only afford further evidence of, and confirm the fact that

the llembers of the United Nations never attached any particular
importance to the adjudication provisions of the Mandates, a view
equally confirmed in respect of the League Assembly by the
character of its final resolution on Mandated territories of April 18,
'1946,already considered.
The view that Article 73 does not apply to Mandated territories is,
we think, legally untenable, at any rate as regards any territories

under "B" or "C" Mandate, having regard to the affinities of
Article 73 with Article 22 of the Covenant. The former was clearly
intended to apply to a much larger range of territories than the
relatively small class of the Mandated territories; but it would
be a strange consequence if a concept devised expressly to relate
to that class should, when extended to other territories, therebybe
held to have ceased to apply to the class it was originally devised

for, especially given that the States administering territories
in this class were under no obligation to bring them into the trustee-
ship class. This would indeed have been to leave them high and dry
in a sort of international no-man's land.
Ive do not believe this was the intention of the Charter, and the
reference to Chapter XI (containing Article 73) made in paragraph 3
of the League Eesolutiori of April 18, 1946 (see pp. 535-539) shows

that the view we have expressed was equally the view taken at the
time. The reference to Chapter XI would otherwise be meanincless.
Article 73 declares itself to relate to "territories whose peoples
have not yet attained a full measure of self-government"-a defini-
tion precisely covering Mandated territories of the "B" and "CH
class. In almost the language of Article 22 of the Covenant, its
major obligation is "to promote to the utmost ...the well-being of

the inhabitants of these territories", and to assure "their political,
economic, social and educational advancement". Again, the refer-
ence it contains to the "sacred trust" constitutes the very hall-mark
of the whole Mandates concept. These affinities cannot be ignored,
nor is their legal import open to serious question we think.

The striking thinis that from early in its existence the Cnited Nations As-
sembly was unwilling to allow that Article 73 related to Mandated territories.
It is easy to see why: to have received them might to some extent have wealrened
the case for insisting that the Mandated territmust be brought into trustee-
ship, and must not be dealt withlike other non-self-governiterritories. Tiss
a matter of opinion: but as a matter of itcan only confirm us in the view that
the Assembly's attitudein respect of RIandated territowas throughout based
on a policy of "truSteeshionly", and thishas extended even to denying the
applicabilitof Article 73 to Mandated territoiiot placed under trusteeship. Mandat pût rester en dehors du régimede tutelle, soit tout à fait,
soit pendant iine longue période l.
Le fait que l'article 73 n'aurait pas suffi à lui seul à combler,
pour l'article 7 du Mandat pour le Sud-Ouest africain, la lacune

causéepar la disparition de la qualité de Membre de la Sociétédes
Nations ne peut que prouver encore mieux et confirmer que les
Membres des Nations Unies n'ont jamais attaché d'importance par-
ticulière aux clauses de règlement judiciaire des Mandats, opinion
également confirméeen ce qui concerne l'Assembléede la Société
des Nations par le caractère de sa résolution finale du 18 avril 1946

relative aux territoires sous Mandat qui a étéexaminéeplus haut.
Nous pensons qu'il est juridiquement impossible d'affirmer que
l'article 73 ne s'applique pas aux territoires sous Mandat, du moins
en ce qui concerne les Mandats ((R 1)et C »,étantdonnéles affinités
de l'article 73 et de l'article 22 du Pacte. Le premier devait certai-

nement s'appliquer à une catégorie de territoires beaucoup plus
vaste qu'au grouperelativement réduit des territoires sous Mandat;
mais il serait étrange qu'une notion expressément destinée à s'ap-
pliquer àce groupe ait cesséde lesconcerner lorsqu'ellea étéétendue
à d'autres territoires, d'autant que les Etats administrant les terri-
toires de ce groupe n'étaient pas obligés de les transférer sous

tutelle. Cela serait revenu en fait à les laisser échouerdans une sorte
de no nzan's band international.

Nous ne pensons pas que telle était l'intention de la Charte, et
- la référenceau chapitre XI (qui contient l'article 73) figurant au

paragraphe 3 de la résolution de la Sociétédes Nations du 18 avril
1946 (voir pp. 538-539) prouve que notre opinion correspond à celle
de l'époque. Sinon,la mention du chapitre XI n'aurait pas de sens.
L'article 73 énoncequ'il se rapporte aux (territoires dont les po-
pulations ne s'administrent pas encore complètement elles-mêmes »,
définitionqui couvreprécisémentle cas des territoires sous Mandats

((B )et ((C ». Reprenant presque les termes de l'article 22 du Pacte,
son obligation majeure est (de favoriser dans toute la mesure du
possible la prospérité ))des habitants de ces territoires et d'assurer
((leur progrès politique, économiqueet social,ainsi que le dévelop-
pement de leur instruction ». En outre, la mention d'une ((missian

sacrée 1)constitue la marque de toute la notion de Mandat. On ne
saurait ignorer ces affinités et on ne peut guère douter de leur
portée juridique.

l On estfrappé de voir que, dèsIe débutde son existence, l'Assemblée des Nations
Unies n'était pas disposàeaccepter l'applicatide l'article 73 aux territoires sous
Mandat. On comprend facilement pourquoi: cela aurait rendu par la suite plus
difficile d'insister pour que les territoires sous Mandat fussent placés sous tutelle
ne fussent pas traitécomme les autres territoires nonautonomes. C'est là une
question d'opinionmais, du point de vue juridique, cela ne peut que confirmer que
bout sur une politique de(tutelle exclusivemen11allant jusqu'à refuser d'appli-n
quer l'article aux territoires sous Mandat non placés sous tutelle.543 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE

It is quite clèar that their import was not doubted ut Geneva Zn
April 1946, and that the decision of the League Assembly to make no
seecific provision in respectof Mandated territorieswas in part based
on this. Nothing could in fact be clearer on the basis of the very

Resolution of April 18, 1946, on which the Judgment of the Court
relies in order to reach a different conclusion. This Resolution
recited, inter alia, that "Chapters XI, XII and XII1 of the Charter of
the United Nations" (italics ours) embodied "principles correspond-
ing to those declared in Article 22 of the Covenant of the League";
and this was one of the grounds on which the League Assembly was
content merely to "take note of the expressed intentions" of the

Mandatory Powers to continue to administer "for the well-being and
development of the peoples concerned", etc.

Exactly the same point was made by the representative of
Australia on the same occasion when, after saying that the -4ustra-
lian Mandated territories would eventually be brought into trustee-
ship, and would in the meantime be administered in accordance

with the Mandates, he continued:
"Until then the ground is covered not only by the pledge which
the Government of Australia hk given to the Assembly today, but
also bythe explicitinternationalobligationslaid downin ChapterXI
of the Charte.r.. Therewill beno gap, no interregnumto beprovided
for" (italics ours)l

'I'he point made in this statement about there being "no gap,
no interregnum" may be compared with the language of the original

Chinese draft resolution reproduced in the footnote on p. 538 abo~e.~
The same point was repeated by the representative of Australia
inthe General Assembly of the United Nations in November 1947,
even more explicitly, as follows :

"...we have put into the Charter a special Chapter dealing with
non-self-governingterritories.This was in order to meet the position
of territories such as mandated territories which are not placed
under the trusteeship system-a territory like South West Africa ...
Therefore there is no gap in the Charter of the United Nations."

L. ofPI'O. J., Special Supplement No. 194 at pa47.
It is evident, we think, that at least some of the Mandatory Powers dnot
share the view of the representatof China as indicated his original resolution,
that there was an interregnum;and this explains the fact that another and quite
different resolution was introduced. It explains also the significance of the reference
to Chapter XI in the League Assembly resolution, a reference which was
disregardedby the Court in 1950 and continues to be disregardedby it.
UN. Records General Assembly (2nd Sess. Plenary Vol.I, 1947 at 587-588). OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 543

Il est tout à jait clair qu'ciGenève,en aaril 1946, on.n'a pas douté
de cettefiortéejuridique et que la décisionde l'Assembléede la Société
des Nntio~zsde ne pas prendre de dispositio?zssfiécialespour les terri-
toires sozhsMa-dat repose en partie sur ce fait. En réalité,cela est

absolument clair si l'on considère la résolution du 18 avril 1946 sur
laquelle s'appuie l'arrêt de la Cour pour aboutir à une conclusion
différente. Cette résolution indique notam~utenq tue ((les chapitres XI,
XII et XII1 de la Charte des Nations Unies ))(les italiques sont de
nous) comprennent (des principes correspondant à ceux que déclare

l'article 22 du Pacte ».C'est une desraisons pour lesquelles 1'Assem-
bléede la SociétédesNations s'est contentée de prendre simplement
(note que [les Puissances mandataires ...] orit exprimé leur inten-
tion ))de continuer à administrer les territoires ((en vue du bien-
êtreet du développement des peuples intéressés )),etc.

A cette occasion, le représentant de l'Australie avait parlé exac-
tement dans le mêmesens; apïès avoir dit que les territoires sous
Mandat australien seraient, en fin de compte, placés sous tutelle et
qu'entre-temps ils seraient administrés selon lesystème des Mandats,
il avait continué :

(Dans l'intervalle, toutes garanties sont fournies non seulement
par l'engagementque le Gouvernement australienprend aujourd'hui
devant l'Assemblée,mais aussi par les obligationsinternationales
firécisefsigurantau chapitreXI delaCharte ..Il n'y aura doncaucun
vide,aucuninterrègne à combler entre lesdeuxrégimes ))(les italiques

sont de nous) l.

L'allusion de l'orateur au fait qu'il n'y aurait <aucun vide, aucun
interrègne ))peut êtrecomparée aux termes du projet original de
résolution chinois, reproduit en note au basde la page 538ci-dessus 2.
1.e mêmeargument a étérépétépar le représentant de l'Australie
à l'Assemblée générale des Nations ITnies de novembre 1947, en

des termes encore plus explicites:
... Nous avons insérédans la Charte un chapitre traitant en
particulier des Territoires non autonomes. Nous l'avons fait afin de

couvrir le cas de territoires, tels que les Territoires sous mandat,
qui ne sont pas placés sousle Régimede tutelle, comme c'est le cas
par exemple pour le Sud-Ouest africain.. .Par conséquent,la Charte
de l'Organisation des Nations Unies ne laisse subsister aucune
solution de continuité. ))

l Il nous sembleioévident qu'au moins certaines des Puissances94,mandataires
n'ont pas partagé l'opinion du représentant de la Chine énoncée dans sa résolution
primitive selon laquelle il y aurait un interrègne; c'est ce qui explique le fait qu'une
autre résolution, toutà fait différente, ait étéprésentée. Cela explique également
l'importance de la référenceauchapitre XI figurant dans la résolution de l'Assemblée
de la Société des Nations, référencedont la Cour n'a pas tenu compte en 1950 et
dont elle continueà ne pas tenir compte.
Assemblée générale des Nations Unies, documents officiels, deuxième session,
Séances plénières, vol. 1, 1947, pp. 587-588.
228 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
544
Indeed at San Francisco in 1945 the President of Commission II,

Field Marshall Smuts had stated that Chapter XI
"... applies the trusteeship principle to ali dependent territories
whether they are mandates, whether they are territories taken from
defeated countries, or whether they are existing coloniesof Powers.
The whole fieldof dependent peoplesliving in dependentterritories

is now covered."
That this view was commonly held in 1946!1947 and immediately

thereafter appears from the Written Statement of the United
States presented to the Court in 1950 (1950 Pleadings, Oral Ar-
guments, Documents at pp. 124 et seq.) ;of the Government of the
Philippines (at pp. 249 et seq.);and from the statement made to the
Court on behalf of the Secretary-General of the United Nations

on the same occasion 2.
*

It seems to us ,that the conclusion, and the only conclusion,
that can be drawn from all this is the following. First, there is
absolutely no warrant for implying from anything that was said
or done at Geneva in April 1946, any undertaking, express or

implied, by the Mandatory, or any general agreement, in relation
to Article 7..The indications are quite to thecontrary. Article 7 and
its subject-matter was far removed from the minds of the Members

Doc. 1144 11/16 U.N.C.I.O. Vol. 8, at p. 127.

a Ib. at 224. We also quote more fully from the statement made by the represent-
ative of Australia to the Assembly of the League on April II, 1946, as follows
(italics ours:
"The Charter of the United Nations has now extended its basic paragraphs
in two directions. First, the Charter applies toy dependentterritory adminis-
tered by Members of the United Nations the principle that the primary object
of administration must be to promote the welfare and development of the
inhabitants of dependent territories,and that the administering authority
should render to an international authority an account of its administration.
This is laid down in Chapter XI of the Charter. Amongst other things, each
administering authority under that Chapter undertakes to supply to the
conditions in its dependent territories.g economic, social and educational

Secondly, the Charter provides in Chapters XII and XII1 for the estab-
lishment in relation to certain categories of dependent territories of an inter-
national trusteeship system. The basic objectives are the same as in Chapter XI
for dependent territories generally, but, under the International Trusteesliip
System, a further step is taken with power not merely to consider reports
made by administering authorities but to visit trust territorieand examine
at first hand the manner in which the administering authorities are discharging
their trust.These powers of inspection go beyond what the Covenant permitted
to the Permanent Mandate Commission. The trusteeship system, strictly so
called, will apply onlyto such territoriesas are voluntary brought within its
scope by individual trusteeship agreements."(L. of N. O.S. Special Supplement
No. 194, P. 47.) OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 544

A San Francisco, en 1945, le maréchal Smuts, président de la
Commission II, a mêmedit que le chapitre XI:

«...s'applique à tous les territoires non autonomes; il s'agit à la
fois des territoires qui sont sous Mandat, des territoires conquis
sur les pays vaincus et des actuelles colonies des Puissances. Il

s'agit maintenant de l'ensembledes peuples non autonomes vivant
dans des territoires non autonomes. )l

C'était l'opinion commune en 1g46/1947 et immédiatement après,
ainsi qu'il ressort de l'exposé écritprésenté à la Cour par les États-
Unis en 1950 (Mémoires,plnidoiries et documents, 1950, pp. 124

et ss.) ;de l'exposé écritdu Gouvernement des PhiIippines (pp. 249
et ss.); et de l'exposé présentéà la Cour au nom du Secrétaire
général des Nations Unies à la mêmeoccasion 2.

Il nous semble que la seule et unique conclusion que l'on puisse
en tirer est la suivante. Premièrement, absolument rien ne permet
de déduire de tout ce qui a été ditou fait à Genève en avril 1946
l'existence d'un engagement exprès ou tacite du Mandataire ou

d'un accord généralau sujet de l'article 7. Les indices sont en sens
contraire. L'article 7 et son objet étaient bien éloignésde la pensée
des Membres de la Sociétédes Nations (et des Nations Unies). Tout

Conférence des Nations Unies sur l'organisation internationale, document1144
I1!16, vol. VIII, p. 127. [Traduction du Greffe.]
Ibid., p.224. NOUScitons également un extrait plus développé dela déclaration
faite par le représentant de l'Australie à l'Assemblée générale de la Société des
Nations le II avril 1946 (les italiques sont de nou:)
«Il en a étéainsi du système des mandats. La Charte des Nations Unies a
développédans deux directions les principes qui étaient à la base de ce système.
En premier lieu, elle applique à tout territoire dépendant administré par les
Membres des Nations Unies le principe d'après lequel le but essentiel detoute
administration doit être d'accroître le bien-êtret de favoriser le développe-
ment de la population des territoiresdépendants, et l'autorité chargée de
l'administrationdoitrendre compte à une autorité internationalede sa gestion:
une dispositionà cet eifet est inscrite au chapitre XI de la Charte. L'autorité

chargée de l'administrations'engage notamment à communiquer aux Nations
Unies des renseignements relatifs aux conditions d'ordreéconomique, social et
éducatif existant dansles territoires dont elle est responsable.
En second lieu, la Charte prévoit, aux chapitres XII et XIII, un régime
internationalde tutelle pour certaines catégories de territoiresdépendants.
Les buts essentiels sont identiqueà ceux que le chapitre XI assigne pour les
territoires dépendants en général. Mais, sous le régime internationde tutelle,
on fait un pas de plus en établissant un Conseil de tutelle spécialisé, qui a le
pouvoir non seulement d'examiner les rapports des autorités chargées de
l'administration, mais encore de faire procéder à des visites dans les territoires
sous tutelle, pour se rendre compte sur place, dela façon dont lesdites autorités
s'acquittent de leur mission. Ces pouvoirs d'inspection vont au-delà de ceux
que le Pacte conféraità la Comnzission permanente des mandats. Le régime de
tutelle, au sens strict du terme, ne s'appliquera cependant qu'aux territoires
qui auront été volontairement placés sous ce régimeà la suite d'accords parti-
culiers de tutelle.,,(SociétB des Nations, Journal ~,fïciel, supplément spécial
no 194. P. 17.)
229 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
545
of the League (and of the United Nations). There was during the
course of the whole debate not one word about judicial supervision
or adjudication. An examiniation of the record of the debates
together with the text of the resolution of the Assembly makes it
clear that the subject matter to which alone they related was the
obligations of the Mandatory Powers to the indigenous peoples-

the substantive obligations, which are those to befound in ,4rticl22
of the Covenant and repeated in the different Mandates.
Secondly, it is clear that al1 concerned decided to rest content
with what they had done, namely with creating the trusteeship
system, into which Mandated territories could be brought (but
without any legal obligation to do so) ; with establishing the régime
of Chapter XI for non-self-governing territories, which included
Mandated territories not brought into trusteeship, but did not
include provision for compulsory adjudication; and with taking
note of the declarations of intention made by the Mandatories
to continue (pending other arrangements) to administer the terri-
tories in general accordance with the Mandates, for the well-being
of the peoples of the territories.

Beyond this, those concerned were not prepared to go and
did not go. In particular they neither made, nor intended to
make-except as just stated-any provision to meet the situation
resulting from the termination of the League and of Membership
of the League; or any provision to meet the situation which would
or rnight anse if, such termination having taken place, a Man-
dated territory was not brought into trusteeship.

The onus of proving the existence of an agreement entered in-
to by the Mandatory Powers in relation to Article 7 lies upon

the Applicants. In Our view this onus has not been discharged.

Conclusionon tlzeSecond Prelirninary Objection : in final conclusion
on this part of the case, we reverto that aspect of the matter which
must be relevant to al1arguments and counter arguments as to the
Respondent State's obligation under Article 7-and that is the
fundamental principle of consent, given generally or ad hoc, as
being the essentialfoundation of the jurisdiction of an international
tribunal. This principle is not any the less applicable to an obliga-
tion to have recourse to judicial settlement contained in an instru-
ment such as the Mandate, than it is in the case of a similar obliga-

tion arisingunder other instruments; indeed, there are two reasons,
230 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE
545
au long des débats, on n'a pas parlé une seule fois de surveillance ni
de règlement judiciaire. L'examen des comptesrendus des débatset
du texte de la résolution de l'Assembléemontre bien qu'ilsportaient
uniquement sur les obligations des Puissances mandataires envers
les populations indigènes - c'est-à-dire les obligations de fond que
l'on trouve à l'article22 du Pacte et qui sont répétéesdans les
différentsMandats.

Deuxièmement, il est clair que tous les intéressésavaient décidé
de se contenter de ce qu'ils avaient fait, c'est-à-dire d'avoir créé le
régimede tutelle dans le cadre duquel les territoires sous Mandat
pourraient êtreplacés (maissans qu'il yeût d'obligation juridique à
cet égard); d'avoir établi pour les territoires non autonomes le
régimedu chapitre XI, qui englobait les territoires sous Mandat non
placéssous tutelle, mais ne comprenait pas de clause de règlement
judiciaire obligatoire; et d'avoir pris note des déclarations d'inten-
tion selon lesquelles les Mandataires acceptaient (en attendant
d'autres arrangements) de continuer à administrer les territoires
pour le bien-êtredes populations de ces territoires, en se conformant
en généralaux termes des Mandats.
Les intéressésn'étaient pas disposés à dépasser ce point et ne
l'ont pas dépassé.En particulier - à l'exception de ce que nous
venons de mentionner -, ils n'ont pris aucune disposition, et n'a-
vaient pas l'intention d'en prendre, pour faire face à la situation

résultant de la dissolution de la SociétédesNations et dela cessation
de la qualité de Membre de la Société;ni pour faire face à la situa-
tion qui se présenterait ou pourrait se présenter si, après la dis-
parition de la Société des Nations, un territoire sous Mandat
n'était pas placé soustutelle.

C'est aux demandeurs qu'incombait la charge de prouver l'exis-
tence d'un accord auquel auraient participé les Puissances manda-
taires au sujet de l'article.A notre avis ils ne se sont pas acquittés
de cette tâche.
*
k *
Conclusion sur la deuxième exception péliminaire: pour conclure
sur cette partie de l'affaire, nous en revenons à l'un de ses aspects

qui concerne tous les arguments et contre-arguments relatifsà
l'obligation du défendeur aux termes de l'article 7 - c'est-à-dire au
principe fondamental du consentement, donné généralement ou
spécialement, comme fondement essentiel de la compétence d'un
tribunal international. Ce principe est tout aussi applicable au cas
d'une obligation de recours au règlement judiciaire figurant dans
un acte tel que le Mandat qu'à celui d'une obligation analogue
découlant d'autres instruments; nous avons mêmedéjà fait état dewhich we have already mentioned, why it applies with even
greater force; namely, first, that in the case of the Mandates, the
Mandatory alone undertook, and was obliged to submit to ad-
judication at the instance of other Members of the League, and
could not itself compel a similar submission; and secondly, the
different consequences of a judgment of the present Court, due to
the existence of Article 94 of the Charter. The unilateral character
which Article 7 possesses, obviously makes it al1the more necessary
to interpret it strictly when it is invoked against the Mandatory,

and not to extend its scope beyond what the Mandatory may fairly
be held to have agreed to.
Itwould seem that, in implying the consent of the Mandatory to
submit to compulsory adjudication at the instance of former Mem-
bers of the League, the argument based on hindsight is again being
used. It is almost conclusively demonstrable that the Mandatory,
in 1920, could not have been contemplating the eventual dissolu-
tion of the League, and that if it had done so, it would certainly
have refused to agree to any adjudicatory obligations continuing
after such an occurrence.
The scope of any consent given, must necessarily be assessed
in the light of the circumstances as known and existing at the time
when the consent was given. Equally, if that consent is to be re-
lated to future events, then it must be assessed in the light of
what could reasonably have been foreseen at the time, as to those
events. Even if there is any basis upon which a dissolution of the
League could have been predicted in 1920, that basis would neces-
sarily have been taken to be a break-up of world order-a situation
in which no State would be willing to undertake a perpetual obliga-
tion to submit to compulsory adjudication-in which indeed, the
whole processes of such adjudication might have foundered. Brief-
ly, therefore, if anything could have been foreseen, it would not

have been what actually occurred, but its exact opposite.

This is not a reasonable basisupon which consent can be predi-
cated in relation to something whichthe Mandatorycouldnever have
foreseen, and therefore clearly can not be held to have consented to.

For allthe above reasons, we hold that the Second Yreliminary
Objection must succeed, because the Applicant States, by their own
act in terrninating the class concerned, have ceased to belong to
the class of State entitled to invoke Article 7 of the Mandate, and
because no provision was made to substitute for this class (nor did
the Mandatory ever consent, or give an undertaking, nor was there
any agreement, to regard it asreplaced by) any other class to which
the Applicant States do belong.deux motifs nous permettant de dire que ce principe s'applique ici
avec encore plus de force: premièrement, dans le cas des Mandats,
seul le Mandataire s'était engagé à se soumettre au règlement
judiciaire, il était obligéde s'y soumettre sur l'instance d'autres

Membres de la Société des Nations et il ne pouvait, pour sa part,
imposer une obligation similaire; deztxièmement, un arrêt de la
présente Cour a des conséquencesdifférentes àraison de l'articl94
de la Charte. Le caractère unilatéral de l'article 7 constitue un
motif de plus de l'interpréter restrictivement lorsqu'il est invoqué
contre le Mandataire et de ne pas étendre sa portée au-delà de ce
que le Mandataire peut justement être tenu pour avoir accepté.
En inférant que le Mandataire aurait consenti à se soumettre au
règlement judiciaire obligatoire sur l'instance d'anciens Membres de
la Société des Nations, on semble de nouveau faire appel à l'argu-
ment fondé sur une vision des choses a posteriori.On pourrait
démontrer de façon presque concluante que le Mandataire ne peut
avoir envisagéen 1920la dissolutionde la SociétédesNationset que,
s'il l'avait fait, il aucertainement refusé d'accepter une obliga-
tion de règlement judiciaire persistantaprès cette dissolution.
La fiortéde tout consentement doit êtrenécessairement évaluée
à la lumière des circonstances telles qu'elles étaient connues et
telles qu'elles existaient au moment où le consentement a étédonné.
De même,si ce consentement avait trait à des événementsfuturs,
ildoit êtreévaluéenfonction dece que l'onpouvait raisonnablement
prévoir à l'époque.Mêmes'il y avait eu en 1920 un événementsur
la base duquel on eût pu prédire la dissolution de la Société des
Nations, cet événementaurait nécessairement été considéré comme
impliquant un écroulement de l'ordre mondiai - situation en vue
de laquelle aucun État n'aurait étédisposéà contracter une obli-
gation perpétuelle de se soumettre au règlement judiciaire obliga-

toire - situation dans laquelle tout le processus du règlement
judiciaire pouvait même s'écrouler.En résumé,si l'on avait pu
prévoir quoi que ce fût, cela n'eût pas étéce qui s'est réellement
produit, mais exactement le contraire.
Ce n'est pas là une base raisonnable pour présumer un consente-
nient se rapportant à quelque chose que le Mandataire n'a jamais pu
prévoir; c'est pourquoi il est évident qu'on ne saurait considérer
qu'il ait donnéson accord.

Pour toutes les raisons mentionnées ci-dessus, nous estimons que
la deuxième exception préliminaire doit êtreretenue, parce que les
États demandeurs, en y mettant fin de leur propre fait, ont cessé
d'appartenir à.la catégorie d'États habilitée à invoquer l'articl7
du Mandat, parce u'aucune dispositionn'a étéprise pour remplacer
cette catégorie d'8tats par une autre à laquelle appartiendraient
les États demandeurs (et parce que le Mandataire n'a jamais
consenti à pareille substitution, qu'il ne s'est jamais engagé à
l'admettre et qu'il n'y a pas eu d'accord en ce sens).

231 547 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE

THIRD PRELIMINARY OBJECTION

Under this head the Respondent State denies that there is any
dispute between itself and the Applicant States, substantively of
the kind to which Article 7of the Mandate was intended to relate,

and it accordingly claims that the condition that there should be
a "dispute" within the intention of Article 7% not fdfilled.
Before we consider this contention, we must deal with a related
point. Article7 requires not only that there should be a dispute,
but also that this dispute should be between the Mandatory and
"another Member of the League of Nations". For the purposes
of this Third Objection it has of course to be assumed that, contrary
to the conclusions we have come to on the First and Second Pre-
liminary Objections, the Applicants must be deemed to fulfil the
condition of League Membership, or alternatively that the Applic-
ants are entitled to invoke Articl7 despite the termination of their
League Membership.
The question still remains however, before weconsider the charac-
ter of the disputes Article 7 was intended to relate to, is there in
the present case any dispute ut dl, properly speaking, between the
Applicant and the Respondent States? Both on the language of
Article 7, and that of the Statute of the Court, and equally as a

matter of general principle, what is necessary is that the dispute
in respect of which the jurisdiction of the Court is invoked should
be a dispute between the actual parties to the proceedings before
the Court.
Clearly, a dispute is not created or constituted merely by bringing
proceedings, putting in an Application or invoking a compulsory
adjudication clause-for otherwise the requirement in the clause
(and there always is such a requirement) that there should be a
dispute would .be redundant. In the present case, is there in the
proper sense, any dispute between the Applicant States and the
Respondent, other than such as arises out of the mere fact that
proceedings have been instituted by the Applicants against the
Respondent ?
It seems to us that there is not. It is common knowledge that
the present case finds its whole fons et origoin, and springs directly
from, the activities of the United Nations Assembly relative to
the Mandated temtory and the Mandatory. No one who studies
the record of the proceedings in the Assembly, and of the various

Assembly Cornmittees and Sub-Committees which have been
concerned with the matter, and especially the Assembly Resolutions
on South West Africa which directly led up to the institution of
the present proceedings before the Court, can doubt for a moment
that the real dispute over South West Africa is between the Respond-
ent Stateand the United Nations Assembly, and that the Applicant OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 547

Sous ce chef, l'État défendeur nie qu'il existe entre les États
demandeurs et lui-mêmeun différend quelconque qui soit en subs-
tance du genre de ceux que prévoit l'article 7 du Mandat et il
prétend qu'en conséquence la condition touchant l'existence d'un
(différend »au sens prévu par l'article7 n'est pas remplie. .
Avant d'examiner cette prétention nous devons traiter d'un point
connexe. L'article7 n'exige pas seulement qu'il y ait différendmais
encore que ce différend sépare le Mandataire dJ«un autre Membre
de la Société des Nations ». Pour les besoins de cette troisième
exception,il fautadmettre évidemment, au contraire des conclusions
auxquelles nous sommes parvenus sur les première et deuxième
exceptionspréliminaires,que les demandeurs doivent êtreconsidérés
comme satisfaisant à la condition de l'appartenance à la Société

des Nations ou, subsidiairement, qu'ils ont le droit d'invoquer
l'article7 bien qu'ils ne fassent plus partie de la Société.
La question ne s'en pose pas moins, avant d'examiner le caractère
des différends que l'article 7 entendait viser, de savoir si dans les
présentes affaires il existe bien, à proprement parler, un diijérend
quelconqueentre les Etats demandeurs et 1'Etat défendeur. Aux
termes de l'article 7 comme aux termes du Statut de la Cour et
mêmeen vertu d'un principe plus général, il faut que le différend
à l'égard duquel on invoque la compétence de la Cour soit un
différendopposant les parties mêmes à la procédure engagéedevant
la Cour.
Il est évident qu'un différendn'est pas crééou constitué unique-
ment par l'introduction d'une instance, par la présentation d'une

requêteou par le fait d'invoquer la clause de règlement judiciaire
obligatoire - sinon l'obligation figurant (comme toujours) dans une
telle clause et imposant qu'il y ait différend serait superflue. En
l'espèce, existe-t-ià proprement parler entre les États demandeurs
et le défendeurun différendd'une autre nature que celui qui découle
du simple fait que les demandeurs ont introduit une instance contre
le défendeu1?
Il nous apparaît que non. On sait du reste que les présentes
affairestrouvent tout leur fons et origo dans les activités de l'As-
semblée des Nations Unies relatives au territoire sous Mandat et
au Mandataire et qu'elles en découlent directement. Quiconque
étudie le compte rendu des travaux de l'Assembléeou des divers
comités ou sous-comités de l'Assembléequi se sont occupés de la
question, et notamment les résolutions de l'Assembléetouchant le

Sud-Ouest africain qui ont directement entraîné l'ouverture de la
présente procédure devant la Cour, ne peut douter un instant que
le-vrai différend touchant le Sud-Ouest africain n'existe qu'entre
1'Etat défendeur et l'Assemblée desNations Unies et que les Etats
232Statesarein fact appearing in a representational capacity to bring
proceedings whiSh the Assembly cannot bring for itself because,

under Article 34ofthe Statute, only States can appearincontentious
proceedings before the Court.
On this ground alone therefore, we consider we would be justified
in holding that, there beingno real dispute between the Respondent
State and the Applicant States in their individual capacities, this
condition of Article7 is not fulfilled.
It is admitted that the Applicants have no direct material in-
terests involved in this case. Neither their own national interests
nor those of any of their nationals under the Mandate instrument
or in the Mandated territory are affected. They are appearing-
and this is admitted-solely for the purpose of defending or up-
holding the Mandate, in the interest not of themselves, but of the
inhabitants of the Mandated territory, and this they are doing ât
the instance of the Assembly, as clearly appears from the Assembly
Resolutions of ~361 (XIV) of November 1959, and 1565 (XV) of
December 1960.
It is not for us to comment on this process, except in so far as

we have to consider what the legal consequences are. We realise
that States, parties to a treaty or convention, or who have third-
State rights under it, may in certain types of cases be held to have
a legal interest in its due observance, even though the- alleged
breach of it has not, or not yet, affected them directly. But since
we do not regard the Mandate as being a treaty or convention, or
the Applicant States as being parties to it as such (if it were one)
and since we consider them to have lost the capacity under which
they might have been able to claim any rights on a third State
basis, we could not regard them as having any legal interest in the
matter by virtue of any direct participation in the Mandate.

Even if we should be wrong as to that, however, the plain fact
is that the real, present interest of the Applicant States in these

proceedings is as Members of the United Nations, as participators
in the activities of the United Nations Assembly relative to South
West Africa, and because of the interest which, on the basis of the
Opinion given by the Court in 1950, the Assembly considers itself
to have in the question of the conduct of the Mandate. It is well
established in international jurisprudence that it is the situation
as itstood immediately prior to the commencement of proceedings
to which regard must be had. Any "dispute" which the Applicant
States then had witli the Respondent State was in the United
Nations, in their capacity as Members of it, and was conducted
within the framework of the Assembly, again as Members of it. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 548

demandeurs n'agissent en réalitéqu'à titre représentatif dans une
procédure que l'Assembléenepeut introduire elle-même,puis qu'aux
termes de l'article 34 du Statut seuls les États ont qualité pour se
présenter au contentieux devant la Cour.
Pour ce seul motif, nous estimons donc que nous serions justifiés
à affirmerque cette condition de l'article 7 n'est pas remplie, puis-

qu'il n'existe aucun différend véritable entre l'État défendeur et
les États demandeurs à titre individuel.
Il est reconnu que les demandeurs n'ont en l'espèceaucun intérêt
matériel direct. Ne sont affectésni leurs propres intérêts nationaux,
ni ceux d'aucun de leurs ressortissants aux termes de l'acte du
Mandat ou dans le territoire sous Mandat. Ils ont engagé cette
procédure - le fait est reconnu - dans le seul dessein de défendre
ou de maintenir le Mandat, non dans leur propre intérêtmais dans
celui des habitants du territoire sous Mandat, et c'est sur l'instance
de l'Assemblée qu'ils le font, ainsi qu'il ressort clairement des

~ésolutionsde l'Assemblée 1361 (XIV) de novembre 1959 et 1565
(XV) de décembre 1960.
Il ne nous appartient pas de commenter cette façon d'agir, si ce
n'est dans la mesure où nous devons examiner quelles en sont les
conséquences juridiques. Nous nous rendons compte que l'on peut
fort bien admettre que des,Etats partiesà des traités ou conventions,
ou jouissant des droits d'Etats tiers découlant de traités ou conven-
tions, ont dans certains genres d'affaires un intérêtjuridique à ce
que ces instruments soient dûment observés, mêmesi l'infraction
alléguée neles a pas, ou ne les a pas encore, affectés directement.
Mais, puisque nous ne considérons pas le Mandat comme un traité

ou une convention, ni les Etats demandeurs comme des parties au
Mandat en tant que traité ou convention (à supposer qu'il le soit),
et puisque nous estimons que les demandeurs ont perdu la qqalité
en vertu de laquelle ils auraient pu faire valoir des droits d'Etats
tiers, nous ne saurions considérer qu'ils détiennent en l'espèceun
intérêtjuridique quel qu'il soit en vertu d'une participation directe
quelconque au Mandat.
Aurions-nous même-tort sur ce point, le fait est que l'intérêt
véritable actuel des Etats demandeurs en l'espèce tient à leur
qualité de Membres des Nations Unies, à leur participation aux
activités de l'Assemblée desNations Unies concernant le Sud-Ouest

africain et à l'intérêtque l'Assemblée,se fondant sur l'avis de la
Cour de 1950, estime avoir dans l'administration du Mandat. La
jurisprudence internationale établit en effet que c'est de la situation
telle qu'elle existait immédiatement avant l'introduction de l'ins-
tance qu'il convient de faire état. Tout adifférend ))qui pouvait
alors séparer les États demandeurs de 1'Etat défendeur était un
différend au sein des Nations Unies, en leur qualité de Membres
des Nations Unies, et dans le cadre de l'Assemblée, là encore en
leur qualité de Membres de l'Assemblée. 549 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE

Nor has what has taken place in the Assembly been strictly
in the nature of a dispute, properly so-called, so much as a po-
litical conflict of views. The Applicant States have not had, and
do not have any conflict of view with the Respondent State over
and above, or different from, that which a great many of the
other States represented in the Assembly have, equally as Members
of it; and their interest in the matter is equally no different from
or greater than that of many other Members. In particular, they
have no specific individual ground of dispute with the Respondent
State outside the Assembly, as is shown by their failure to open,
or attempt to conduct, any direct negotiations with the Respondent
State through the diplomatic channel.

Throughout, up to the time of bringing these proceedings,

the Applicants have acted in their capacity as Members of the
United Nations; and for aIl the difference it would have made to
the essential character of the present proceedings, these might just
as well have been brought by any other States corning within
the category of ex-Merribers of the former Leagne of Nations.
The pleadings could have 6eenidentical, apart from the name of the
plaintiffs.
We do not consider that a dispute which has been conducted by
a State (if "conducted" is the proper term at all) solely within the
framework of an international organization, in its capacity as a
member of the organization, and by simple participation in its
activities, without the dispute ever having been taken up directly
with the defendant State outside the organization, can constitute
a dispute between States of the kind envisaged by the normal
adjudication clause.
We must therefore conclude that prior to the bringing of the
present proceedings (which was not per se enough) there was not,

properly speaking, a dispute between the Respondent Stateandthe
Applicant States as such, within the normal intention of a juris-
dictional clause such as Article 7 of the Mandate, and that accor-
dingly the requirement that there should be a dispute between
the Mandatory and the Applicant States is not fulfilled.

The defect to which we have just drawn attention is in a certain
sense a technical one, though the technicality is far from being
unimportant. But it could be cured by time and appropriate action.
We have a more fundamental reason for holding that the dispute,
or rather ground of complaint involved in the present case, is not
one contemplated by Article 7.
The Mandate (andthis is still more so inthe caseofother categories
of Mandates) has two main classes of substantive provisions. The
first (which rnight be called the "conduct of the Mandate" class) OP. DISS. COMMUNE J'CTGESSPENDER ET FITZMAURICE 549

Ce qui s'est fait jour à l'Assembléen'est pas non plus, au sens
strict du terme, un différend à proprement parler mais bien plutôt
une opposition de vues politique. Les États demandeurs n'ont avec
l'État défendeur aucune opposition de vues passéeni présente qui
dépassecelles qui séparent le défendeurd'un grand nombre d'autres
États représentés à l'Assemblée,eux aussi à titre de Membres de
l'Assemblée,ou qui en diffère; l'intérêtdes demandeurs en la ma-

tière n'est pas non plus différent de celui de beaucoup d'autres
Membres, ni plus important. Ils n'ont, notamment, aucun sujet de
différendindividuel ni spécifiqueles séparant de l'État défendeur
en dehors de l'Assemblée,ainsi qu'il ressort du fait qu'ils n'on! ni
entamé ni tenté d'entamer de négociations directes avec 1'Etat
défendeur par les voies diplomatiques;
Jusqu'au moment où ils ont introduit les présentes instances, les
demandeurs ont toujours agi en leur qualité de Membres des Nations
Unies; et, quant à la différenceque cela aurait fait pour leur ca-
ractère essentiel, les présentes instances auraient fort bien pu être

introduites par tout autre Etat de la catégorie des ex-Membres de
l'ancienne SociétédesNations. Les écrituresetlesfilaidoiriesauraient
fiu étreidentiques, au nom près des demandeurs.

Nous estimons qu'un différend qui n'a étéconduit par un État
(si le mot ((conduit ))convient ici) que dans le seul cadre d'une
organisation internationale, en sa qualité de Membre de l'organi-
sation, et par simple participation à ses activités, sans que le diffé-
rend ait jamais étésoulevédirectement hors de l'organisation avec
l'État défendeur,ne saurait constituer un différendentre Etats, du
type de ceux qui sont prévus par la clause normale. de règlement
judiciaire.

Nous sommes ainsi portés à conclure que, avant l'institution de la
présente procédure(laquelle n'étaitpas en-soi suffisante), il n'y avait
pas àproprement parler différendentre 1'Etat défendeuret les Etats
demandeurs comme telsrépondant àl'intention normaled'une clause
juridictionnelle comme l'article 7 du Mandat, et que par consé-
quent la condition touchant l'existence réelled'un différendentre
le Mandataire et les États demandeurs n'est pas remplie.

La carence que nous venons de signaler est en un certain sens
d'ordre technique, encore que sa technicité soit loin d'êtresans
importance. Mais le temps et une action adéquate pourraient y
remédier. Nous avons une raison beaucoup plus fondamentale de
juger quele différend,ou plutôt le motif de plainte alléguéen l'espè-
ce, n'est pas ce que prévoit l'article7.
Les dispositions de fond du Mandat (et plus encore des autres
espèces de Mandats) appartiennent à deux catégories principales.
La première (qu'on pourrait appeler la catégorie touchant (l'ad-550 JOINT DISS.OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
comprises the provisions inserted for the benefit of the peoples of

the territory. The other (which mjght be called the "State rights
and interests" class) comprises those which were inserted for the
national benefit of the Members of the League and their nationals
{commercialrights,open door, freedom formissionaryactivities, etc.).

The question is whether Article 7 of the Mandate (this Ras a
common clause in al1 the Mandate), relates to both these clas-
ses of provision, or only to the latter. At first sight, on a literal
reading of Article 7, the answer might appear clear: it specifies
"any dispute whatever ...relating to the interpretationor the ap-
plication of the provisions of the Mandate". Since we be-
lieve in the principle of interpreting provisions according to their
natural and ordinary meaning in the context in which they occur,
and (in the absence of any ambiguities or contradictions) without
reference to travaztx préparatoires,we must state why we feel
unable to take the above passage at its face value, and why we

consider a reference to the travaux préparatoiresto be justified in
this case, quite apart from the fact that these have in any event
been so extensively relied upon in connection with the First and
Second Preliminary Objections, that it would hardly be possible
toexclude them from consideration of the third, which is definitely
related to the others.
The phrase we have just cited from Article 7 does not give the
full sense of the relevant passage, and to obtain this a fuller citation
is required, as follows: "any dispute whatever ...between the Man
datory and another Member of the League of Nations relating to
the interpretation or application of the provisions of the Mandate".
Having regard to the view we take as to the meaning of a "dispute",
and the necessity for a direct dispute between the parties to the
proceedings, in which they have an interest in their own capacity,
and not merely as Members of an international organization, the
above passage, in the context of this case, conceals an ambiguity.

The words could be read as meaning any dispute whatever hav-
ing the character just mentioned. In our view the Applicants had
not, at the critical date (that of the Applications), any interest in
the matter (even in the conduct of the Mandate) except in their
capacity as Members of the United Nations. On that ground
alone we should not regard the case as covered.

There is however another much more important ambiguity
which makes it necessary to enquire whether "any dispute what-
ever" means any dispute about the provisions of the Man-
date generally, or whether it must be regarded as being con-
fined to any dispute whatever about those provisions of the

235 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 550

ministration du Mandat ») comprend les dispositions inséréesau
bénéficedes populations du territoire. L'autre (qu'on pourrait
appeler la catégoriedes droits et intérêtsdes Etats) comprend celles
qui ont étéinséréesau profit des Membres de la Sociétéet de leurs
ressortissants (droits commerciaux, clause de la porte ouverte,
liberté pour les missionnaires d'exercer leurs activités, etc.).
La question est de savoir sil'article du Mandat (clause commune
à tous les Mandats) intéresse ces deux catégories de dispositions ou
seulement la dernière. Il peut sembler à première vue qu'au sens
littéral de l'article la réponse soit claire: cet article spécifiequ'il
s'agit de« tout différendquel qu'il soit ...relatif à l'interprétation
ou à l'application des dispositions du Mandat ».Convaincus de la
nécessitéd'interpréter les dispositions suivant leur sens naturel et
ordinaire dans le contexte et (en l'absence de toutes ambiguïtés ou

contradictions) sans référence aux travaux préparatoires, nous
devons indiquer pourquoi nous ne saurions donner au passage ci-
dessus le sens qu'il paraît avoir à première vue et pourquoi nous
estimons qu'en l'espècela référenceaux travaux préparatoires se
justifie, en dehors mêmedu fait qu'en tout état de cause on s'en est
si largement servi au sujet des première et deuxième exceptions
préliminaires qu'il ne serait guère possible de ne pas en tenir compte
dans l'examen de la troisième exception, incontestablement liéeaux
autres.
L'extrait de l'article7 que nous venons de citer n'indique pas
tout le sens du passage pertinent, qui est à rappeler en entier:
« Tout différendquel qu'il soit ..entre (le Mandataire) et un autre
Membre de la Société desNations relatif jil'interprétation ou à
l'application des dispositions du Mandat 1).Etant donnéle sens que

nous donnons au mot «différend » et étant donné qu'il est indispen-
sable qu'il existe entre les parties la procédure un différenddirect
opposant leurs intérêtsen leur propre qualité, et non pas seulement
à titre de Membres d'une organisation internationale, le passage
ci-dessus, dans le contexte de la présente affaire, recèle une ambi-
guïté. Les termes pourraient en êtreinterprétés comme signifiant
tout différendquel qu'il soit, ayant le caractère que nous venons de
mentionner. Nous tenons que les demandeurs n'avaient à la date
critique (celle des requêtes) aucun intérêten l'affaire (mêmedans
L'administration du Mandat), si ce n'est en leur qualité de Membres
des Nations Unies. Pour ce seul motif, nous ne pourrions considérer
le cas comme prévu.

Maisil existeune autre ambiguïté, bien plus grave, qui nous oblige
à rechercher si l'expression «tout différendquel qu'il soit » désigne
tout différend relatif aux dispositions du Mandat en généralou s'il
faut considérerque le texte ne porte que sur un différend,quel qu'il
soit, relatif aux dispositions du Mandat affectant les droits ou les 551 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
Mandate which affect State or national rights or interests.
This anses because of the immediately following requirement
that the dispute shall be one that "cannot be settled by negotia-

tion".
The implications of this phrase are, in our view, the key to the
whole question of what is covered by Article 7. "Negotiation",
we think, as contemplated by such a provision as Article 7, means
negotiation between the parties to the proceedings before the Court.
Under the head of the fourth preliminary objection we shall give
Our reasons for so thinking. For the moment we will assume,
what would certainly have been assumed by anyone dealing with
the matter at the time when the Mandate was drafted, namely
that negotiation means negotiation between, or directly for and
on behalf of the actual parties to the proceedings before the
Court.

Now a requirement that a dispute must be such as "cannot"
be settled by negotiation, necessarily implies that it be of a type
ca$ableof being so settled, and of being so settled by negotiation

between parties competent for that purpose. If a dispute
cozdd not be settled (i.e. is inherently incapable of settlement)
by any kind of negotiation at all between the parties before the
Court, then clearly a requirement that the dispute be one that
"cannot" be settled by negotiation would be meaningless.

By 'settlement', we understand final settlement, and a final
settlement to us means a settlement negotiated between parties
having competence to settle the particular dispute in a final
manner. The question therefore arises, could the Applicant and
Respondent States, by negotiation inter se, settle in any way what-
ever a dispute not relating to their own State or national rights
or interests, but belonging to the "conduct of the Mandate"
type-the sacred trust-could any settlement negotiated between
single States, such as the Applicant States and the Blandatory,
settle any question relating to the general conduct of the Mandate

itself? Could any such settlement, arrived at between the Appli-
cants and the Respondent alone, bind any other State conceiving
itself to have an interest in the conduct of the Mandate-or bind
the United Nations Assembly? Obviously not-such a settlement
might be wholly inacceptable to these other entities.

It is not, in Our view, a sufficient answer to Say that a settle-
ment between the Applicant and Respondent States would have
been a settlement, inasmuch as it would have precluded the
A$$licants from bringing any proceedings under Article 7. Such
a settlement would have settled nothing vis-à-vis any other OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 551

intérêtsdes États ou de leurs ressortissants. La question se pose en
raison de la condition qui suit immédiatement, à savoir qu'il s'agit
obligatoirement d'un différend ((qui ne soit pas susceptible d'être
réglépar des négociations ».
Les implications de cette phrase constituent, selon nous, la cléde
toute la question de la portée réellede l'article7. Le mot (cnégocia-
tion»,au sensprévupar unedispositiontelle quel'article 7,désigne,à
notre sens, desnégociations entre les parties aux instances introdui-
tes devant la Cour. Nous exposerons dans la partie consacréeà la
quatrième exception préliminaire les raisons que nous avons d'en
tenir pour cette fason de voir. Nous supposerons pour l'instant ce

qu'assurément quiconque traitant de la question au moment où le
Mandat a étérédigéaurait supposé, à savoir que ce mot de négocia-
tion désigneune négociation menéesoit entre les véritables parties
à la procédure soumise à la Cour, soit directement pour leur compte
et en leur nom.
Or, le fait qu'un différenddoit êtretel qu'il « ne soit pas suscep-
tible»d'êtreréglé par desnégociationsimpliquenécessairementqu'il
soit de ceux qui pozbrraientêtrerégléspar voie de négociation, et ce
entre les parties compétentes à cette fin. Si un différendn'étaitpas
suscefitibled'êtreréglé (c'est-à-dire, par définition,impossible àrégler)
par toute négociationquellequ'elle fût entre lespartiesdevant laCour,

ilest évident quelacondition posée,àsavoirque le différenddoit être
de ceux qui ne sont pas «susceptibles d'êtreréglés » par des négo-
ciations, serait absurde.
Par crèglement »,nous entendons règlement définitif et, selon
nous, un règlement définitifest un règlement négocié entre desparties
compétentes pour régler définitivement le différend dont il s'agit.
La question se pose dèslors :si les Etats demandeurs et 1'Etat défen-
deur pouvaient en négociantentreeux réglerd'une façon quelconque
un différendsans rapport avec leurs propres droits ou intérêtsétati-
ques ou nationaux, maisrelevant du genre de dispositionsrelatives à

1'«administration du Mandat » la mission sacrée -, un règlement
quelconque négociéentre des Etats individuels tels que les Etats
demandeurs et le Mandataire pourrait-il régler aucune question
relative à l'administration généraledu Mandat même? Un tel
règlement, négociéentre les demandeurs et le défendeur seul, pour-
rait-il lier tout autre Etat estimant avoir un intérêtdans l'adminis-
tration du Mandat - ou lier l'Assembléedes Nations Unies? Il est
évident que non - un règlement de ce genre pourrait êtreentière-
ment inacceptable pour ces autres entités.
Il ne suffit pas, selon nous, de répondre qu'un règlement entre les
États demandeurs et l'État défendeur eût été 2sn règlement en ce

sens qu'il aurait empêché lesdemandeurs d'engager une action
quelconque en vertu de l'article 7. Un règlement de ce genre n'aurait
rien réglédu tout à l'égard detout autre État qui s'en serait déclaré552 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
State dissatisfied with it, or in the United Nations Assemblyl,
and would not, from the point of view of the Respondent, have
genuinely settled anything.

It is common knowledge that the present proceedings have
been brought because the decision of the Court would be binding
on the Mandatory. Elementary principles of justice and good faith
therefore require that if the Mandatory should be able to achieve a
settlement of the dispute directly with the Applicant States (which
it has never yet been asked to do) such a settlement should be
final, and good erga omnes. But obviously any such settlement
could not have this effect.
Again, let it be assumed, since that contingency may not be
excluded, that, on the merits, the Court found in favour of the
Respondent. Such a decision would be res judicata only for the
Applicant States (Article 59 of the Statute). It would not bind

the United Nations Assembly, nor would it bind any States except
the Applicants. Any other State dissatisfied with it could, at some
future time, bnng fresh proceedings on exactly or substantially
the same grounds, with- results that might be the same, or again
might not. From the Mandatory's point of view there could be no
dînality. On the other hand a decision given against the Respondent
would be binding on it, and would enable Article 94 of the Charter
to be invoked if necessary by the other Party.
The evident disparity between these two situations is not easy
to reconcile with normal principles of justice, and we do not believe
that anything so lop-sided could have been in contemplation when
Article 7 was drafted. We consider that, as its wording clearly
implies, this provision was only intended to relate to disputes of a

kind which are capable of being settled by negotiation, and of which
therefore, in the given case, it can legitimately be held (if the facts
so warrant) that the dispute "cannot" be so settled; and we consider
further, that the only kind of dispute of that character, is one
involving the national rights or interests of the States concem-
ed. These they are competent to settle in a final manner by negotia-
tion. Disputes about the generalconduct of the Mandate, in relation
to the inhabitants of the territory, are disputes which, in principle,
are not capable of being so settled merely by a negotiation between
the Mandatory and another State. The obligations of the Man-
datory in relation to the "sacred trust" are of their nature not
negotiable as between the Mandatory and another State Member of
the League. The present dispute is of the latter kind, and therefore

we do not consider that it comes under Article 7.

1It is of courseno ansto Say that in practice the Applicants would not have
negotiated any settlement they did not know would be acceptable to the Assembly;
or if it is an answer, it is a revealing one which can only bear out Our view that the
dispute in this case is not really with the Applicants. OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 552

mécontent, ni à l'égard des Nations Unies l, et n'aurait rien réglé
véritablement pour le défendeur.

Chacun sait que, si les présentes instances ont été introduites,
c'est que la décisionde la Cour serait obligatoirepour le Mandataire.

Les principes élémentaires de justice et de bonne foi exigent donc,
si leMandataire peut parvenir àréglerdirectement le différendavec
les Etats demandeurs (ce qui ne lui a jamais encore étédemandé),
que ce règlement soit définitifet valable ergaomnes.Mais il va de soi
que cet effet ne saurait être obtenu par un tel règlement.

Supposons donc, puisque cette possibilité n'est peut-être pas
exclue, que, sur le fond, la Cour se prononce en faveur du défendeur.

Cette décisionne deviendrait resjudicata que pour les Etats deman-
deurs (article 59 du Statut). Elle ne lierait pas l'Assemblée des
Nations Unies et elle ne lierait aucun Etat à part les demandeurs.
Tout autre État qui en serait mécontent pourrait, un jour ou l'autre,
introduire une nouvelle instance pour des motifs soit exactement,
soit en substance identiques et les résultats pourraient en êtreou
non les mêmes.Pour le Mandataire, rien ne serait donc jamais
définitif. En revanche une décisionprise à l'encontre du défendeur

serait obligatoire pour lui et l'article 94 de la Charte pourrait être
invoqué, au besoin, par l'autre partie.
L'évidente disparitéentre ces deux situations ne se concilie pas
facilement avec des principes de justice normaux, et nous ne
pouvons croire qu'on ait eu à l'esprit une situation aussi mal équi-
librée lors de la rédaction de l'article 7. Nous estimons que cette
disposition, comme il ressort clairement de ses termes, ne devait
s'appliquer, dans l'esprit de ses rédacteurs, qu'à des différends du

genre de ceux qui peuvent êtrerégléspar voie de négociation et
dont, par conséquent, dans le cas présent, on peut légitimement
penser (siles faits le démontrent) que le différend (n'est pas suscep-
tible ))d'être ainsi réglén ;ous estimons en outre que le seul genre
de différend qui présente ce caractere est celui qui concerne les
droits ou les intérêts nationaux des Etats intéressés.Les Etats ont
compétence pour régler définitivement de tels différends par voie
de négociation. Mais les différendstouchant l'administration géné-

rale du Mandat, au point de vue des habitants du territoire, sont
de ceux qui, en principe, ne peuvent pas êtreréglés tout simplement
par négociations entre le Mandataire et un autre Etat. Les obliga-
tions du Mandataire à l'égardde la (mission sacrée » ne sauraient,
par leur natuye, faire l'objet de négociations entre le Mandataire
et un autre Etat Membre de la Société desNations. Le présent

Ce n'est pas répondre, évidemment, que de dire qu'en pratique les demandeurs
n'auraientnégociéaucun règlement dont ils n'auraient pasu que l'Assemblée
l'accepterait ou, si veut absolument y voir une réponse, elle est assez révélatrice
en ce qu'elle confirme ce que nous penàosavoir que le présent différend ne se
pose pas en fait entre le défendeur et les demandeurs.553 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE

We now wish to refer briefly to a further point that seems to
us of hardly less importance. We find it impossible to reconcile
the view that Article7 relates to disputesabout the general conduct
of the Mandate, with the supervisory functions given to the Council
of the League under Article 6 of the Mandate. The conjunction would
mean that although the League Council might have been perfectly

satisfied with the Mandatory's conduct of the Mandate, or might
even have made suggestions to the Mandatory about that, which
the latter was complying with and canying out, any Member
of the League not satisfied with the Mandatory's conduct, or not
agreeing with the Council's views, could have brought proceedings
before the Permanent Court under Article 7.

There would have been an evenmore extraordinary possibility. A
Member of the League might, on some point relative tothe conduct
of the Mandate, have obtained from the Permanent Court a decision
which was not in fact in the best interests of the peoples of the
mandated territory-due, Say, to lack of sufficient technical data
before the Court. Yet under Article59 of the Statute, the Mandatory
would have been bound by the decision, and obliged to apply it

visTà-visthe inhabitants, although the Council of the League might
have been wholly opposed to it and itself not bound by it.

We cannot believe it was ever intended that it should be possible
for such situations to anse, and in estimating this, one must, for
reasons we have given earlier in this Opinion, place oneself at the
point in time when these provisions, Articles 6 and 7,were being
drafted as designed portions of a coherent and integrated whole,
which the Mandate certainly would not have been if Article 7 had
had the meaning attributed to it by the Court.

The situations we have described as capable of arising if Articl7
is regarded as relating to disputes about the conduct of the Mandate
are in no way fanciful or hypothetical. One of them has actually
ansen in another case, with reference to a provision substantially

the same as Article 7 in a United Nations trusteeship agreement.

It is in Our opinion hardly conceivable that those who created
a system according to which the Mandates were to be exercized
"on behalf of the League", and the Mandatory was to be responsible,
and solely responsible, to the Council of the League, should have
been willing so far to dilute the Council's authority (especiallywhen
238 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 553
différendappartenant àcette catégorie,nousestimonsqu'il ne relève
pas de l'article 7.
*

Nous voudrions invoquer maintenant brièvement un autre point
qui ne nous paraît guèremoins important. Nous ne pouvonsconcilier
la thèse selon laquelle l'article7 concerne des différends touchant
l'administration généraledu Mandat avec les fonctions de surveil-
lance attribuées au Conseil de la Sociétépar l'article 6 du Mandat.
Cette conjonction signifierait que, si le Conseil de la Sociétédes
Nations s'étaitdéclaré parfaitement satisfait de l'administration du
Mandat telle que le Mandataire la pratiquait, ou mêmes'il avait
fait au Mandataire certaines suggestions à ce sujet, suggestions
auxquelles celui-ci se serait rangé et qu'il aurait appliquées, tout
Membre de la Sociétéqui n'eût pas été satisfaitde l'administration
du Mandataire ou n'eût pas partagé les vues du Conseil aurait pu
introduire une instance devant la Cour permanente en vertu de

l'article7.
Quelque chose de plus extraordinaire encore aurait pu se produire.
Un Membre de la Société desNations aurait pu, sur quelque point
touchant l'administration du Mandat, obtenir de la Cour perma-
nente une décisionqui n'eût pas, en fait, étéla plus favorable aux
intérêtsdes populations du territoire sous Mandat - en raison par
exemple de l'insuffisance de la documentation technique soumise à
la Cour. Pourtant, aux termes de l'article59 du Statut, le Manda-
taire aurait été liépar cette décisionet obligéde l'appliquer aux
habitants, alors que le Conseil de la Sociétéy aurait peut-être été
absolument opposéet n'aurait lui-mêmepas été liépar elle.
Nous ne saurions croire qu'on ait jamais souhaité que de telles
situations pussent se produire et, en en jugeant, il convient, pour

les raisons que nous avons indiquées ci-avant dans la présente
opinion, de se reporter à l'époque à laquelle ces dispositions -
l'article 6 et l'arti7l- ont étérédigéescomme parties intégrantes
d'un ensemble cohérent et complet, ce que le Mandat n'aurait cer-
tainement pas étési l'article 7 avait eu le sens que la Cour lui
attribue.
Les situations que nous venons de décrire comme pouvant se
produire si l'on estime que l'article porte sur des différendsrelatifs
à l'administration du Mandat ne sont aucunement d'ordre fantai-
siste ou hypothétique. L'une d'elles s'est produite effectivement
dans une autre affaire au sujet d'une disposition, semblable en
substance à l'article7, figurant dans un accord de tutelle des
Nations Unies.

Nous avons peine à imaginer que ceux qui ont crééle système
dans lequel les Mandats devaient êtreexercés (au nom de la Société
des Nations ))et dans lequel le Mandataire devait êtreresponsable
et seul responsable devant le Conseil de la Sociétéauraient accepté
de diluer l'autorité du Conseil (et notamment quand le Conseil
238554 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMRURICE
the Council could itself go to the Permanent Court for an Advisory
Opinion), as to give a wholly independent right of recourse to the
Court to Members of the League, not merely for the protection of
their own individual rights and interests, but in the very field
of the general conduct of the Mandate which was peculiarly the

Council's.

These various considerations lead us to hold that, despite
the apparently plain language of Article 7 of the Mandate, on a
literal interpretationof the words "any dispute whatever", analysis
shows its real meaning and intention to be different, and to exlude
disputes about the general conduct of the Mandate. If there is
any room for doubt, then this is a case in which reference to the
travaztx firéparatoiresis justified, in order to see whether they
confirm the foregoing interpretation, and to this we shall now
proceed.

Before the end of the Paris Peace Conference of 1919 a,Mandates
Commission was established to consider possible draft terms for
the various Mandates1. At its first meeting on June 28, 1919, a
draft "C" Mandate in the form of five suggestedarticles was submit-
ted for discussion. This d~aftcontainedno adjudication clause. Kor
did it contain any clause dealing with freedom of worship or the
provisions in relation to missionaries, nationals of any State Member
of the League, to enter and reside in the territory, etc., as was
subsequently to be set forth in Article5 of the "C" Mandate instru-
ments.
At its next meeting on July 8, the Commission had before it not
only the draft "C" Mandate, but also two draft "B" Mandates,
one proposed by the representative of France which was to form
the basis of discussion, and another presented by the United States.
The French "B" draft was brief, and contained eleven compa-

ratively short articles. It contained no adjudicatiov. clause. The
United States draft, on the other hand, contained apart from
certain clauses dealing the conduct of the Mandate in relation to
the peoples of the Mandated territory, a number of clauses which
provided in considerable detail for rights to be accorded to States
Members of the League, and their subjects or nationals, in respect
of a number of different matters. This United Statesdraft contained
an adjudication clause, and it is clear from the record-and this is
what we draw attention to-that the discussion on this adjudica-

Conférencede la Paix 1919-rgzo; Recueil des Actes de la Confér1'1,,Partie
Paris 1934atpage 327.

239 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 554

pouvait lui-mêmedemander àla Cour permanente un avis consul-
tatif) au point d'accorder aux Membres de la Sociétédes Nations
un droit de recours absolument indépendant, non seulement pour
protéger leurs propres droits et intérêtsindividuels mais encore
dans le domaine mêmede l'administration généraledu Mandat, qui
était spécialement du ressort du Conseil.

Ces diverses considérationsnous amènent à dire que, en dépit du
sens apparemment simple de l'article 7 du Mandat d'après l'inter-
prétation littérale de l'expressio«tout différend quel qu'il soi»,
une analyse plus attentive montre que le sens et l'intention véri-
tables sont autres et excluent les différendsrelatifsl'administra-
tion généraledu Mandat. Si quelque doute subsiste, c'est alors que
le recours aux travaux préparatoires se justifie, pour rechercher
s'ils confirment l'interprétation que nous venons de donner; c'est
ce que nous allons faireà présent.

Avant la fin de la conférence de la paix de Paris de 1919, une
Commission des Mandats avait étécréée envue de s'occuper de la
rédaction de divers modèles de mandats l.A sa première séance,
le 28 juin1919 ,n projet de mandat «C » composé de cinq articles
a étéproposé comme base de discussion. Ce firojet ne contenait
aucuneclaztsede règlementjudiciaire. Il ne contenait non plus aucune
clause concernant la liberté des cultes ni les dispositions assurant
aux missionnaires sujets ou citoyens de tout Membre de la Société
des Nations la faculté de pénétreret de résider dans le territoire,
etc. énoncéesplus tard à l'article5 des actes de Mandat «C ».

A sa séancesuivante, le 8 juillet, la Commission a examiné non
seulement le projet de Mandat «C » mais encore deux projets de
Mandat « B »,l'un proposépar le représentant de la France et qui
devait servir de base de discussion et l'autre présentépar les États-
Unis. Le projet «B » fran~ais était bref et comprenait onze articles
assez courts. Il ne contenait,pas de clause de règlemenjtudiciaire.
En revanche, le projet des Etats-Unis comportait, à côté de cer-
taines clauses relatives à l'administration du Mandat concernant les
peuplesdu territoire sous Mandat, un certain nombre de dispositions
très détailléestouchant les droitsà accorder aux États Membres
de la Sociétéet à leurs sujets ou citoyens sur un certain nombre

de sujets divers. Ce projet américain contenait une clause de règle-
ment judiciaire et il ressort très clairement des procès-verbau-
c'est sur quoi nous voulons insister- que la discussion de cette

Conférencede la paix 1919-1Recueil des actes de la cnnférence,Partie VI.
Paris. 193p. 327.

239555 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
tion clause, appearing in the United Statesdraft only, centred round
these detailed rights to be accorded to Members of the League and
their nationals under that draft. The adjudication clause read as
follows :

"If any dispute should arise between the Membersof the League
of Nationsregarding the interpretation or application of the present
Conventionand the dispute cannot be settled by negotiation, itwill
be referred to the Permanent Court of Justice..

The subjects or citizens of the States Members of the League
of Nations may also refer claims relating to breachof theirrights
confened upon themby Articles 5, 6, 7, 7a and 7b of the Mandate
to the Court for decision.The judgment given by the Court d' be
same effecteasan arbitralaward rendered pursuant to Artz'cle 13eof
the Covenant." (Italics ours.)

The articles of the United States "B" draft, as above indicated
provided for what may conveniently be described as an "open
door" to cany on trade and commerce, etc., accorded to subjects
and nationals of States Members of the League (Article 5) ;religious
freedom, and provision for missionaries (Article 6); equality of

opportunity for the commerce and navigation for all States, Mem-
bers of the League and provision against discrimination between
subjects and nationals of State Members of the League (Article7) ;
concessions in respect of railways, post offices, telegraphs, radio
stations and other public works or services without distinction,
etc., between subjects or nationals of States, Members of thè
League (Article 7 a); and a kind of most-favoured-nation provision
in favour of States, Members of the League (Article 7 b) and their
nationals.
These clauses thus provided for a series of rights to be conferred
both upon States, Members of the League, and upon their subjects
and citizens. The wording of the adjudication clause itself was
somewhat peculiar and not very good. The second paragraph ap-
peared to confer some kind of direct right of action on the nationals
of the Members States-an idea which did not last. Looking at the
clause as a whole, and at the words we have italicized in it, and

considering the context in which it was proposed and discussed, it
appears clear that the first paragraph of it was intended to relate to
the rights and interests of the Member States under the Mandate,
and the second to those of their nationals under certain specified
articles, some of which covered both rights of nationals as well as
State rights.

Briefly, the position appears to have been that no one thought
of having a provision for compulsory adjudication until the United
States made detailed proposals for commercial and other State
rights for Members of the League and their nationals, and it was

24" OP. DISS. COMDlUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 555

clause de règlement judiciaire, qui ne figurait que dans le projet
des Etats-Unis, s'est concentrée sur les droits détaillésà accorder
d'après ceprojet aux Membres de la Sociétéet àleurs ressortissants.
La clause de règlement judiciaire était la suivante:
«Si un différend s'élèveentre les Membres de la Sociétédes
Nations en ce qui concerne l'interprétation ou l'application de la
présente Convention et que ce différendne puisse êtreréglépar
les négociations,il sera porté devant la Cour permanente de Justice
internationale..
Les sujets ou citoyens des États membres de la Sociétédes
Nations peuvent égalemenp torter desréclamationsen cequi concerne
des infractions aux droits qui leur sont conférpar les article5, 6,
7, 7a, et 7b de ce Mandat devant ladite Cour pour décision. Le
jugement rendu par cette Cour sera sans appel dans les deux cas
précédents etaura le mêmeeffet qu'une sentence arbitrale rendue
en application de l'article13du Pacte » (lesitaliques sont de nous).

Les articles du projet «B » des États-unis mentionnés ci-dessus
visaient ce qu'on pourrait appeler la «porte ouverte »aux échanges
commerciaux, etc. en faveur des sujets ou citoyens des États Mem-
bres de la Société(article 5) ;la liberté des cultes et des dispositions
concernant les missionnaires(article 6);l'égalité detraitement pour
le commerce et la navigation de tous les Etats Membres de .la
Société des Nations, et certaines dispositions à-l'encontre de toute
discrimination entre les sujets ou citoyens des Etats Membres de la
Société(article 7) ;l'octrai des concessions de chemins de fer, postes,
télégraphes,stations radio-électriques et tous autrestravaux publics
sans distinction d'aucune sorte aux sujets ou citoyens des Etats

Membres de la Société(article 7 a); et, une sorte de clause de la
nation la plus favorisée en faveur des Etats Membres de la Société
des Nations (article 7 6) et de leurs ressortissants.
Ces clauses préoyaient donc une série de droits qui seraient
conféréstant aux Etats Membres de la Sociétéqu'à leurs sujets et
citoyens. Le texte de la clause de règlement judiciaire était assez
curieux et n'était pas très heureux. Le second alinéa semblait
ynférer quelque droit d'action directe aux ressortissants des
Etats Membres - idée qui n'a d'ailleurs pas étéretenue. Si l'on
considère cette clause dans son ensemble, ainsi que les mots que
nous avons soulignés, et si l'on examine le contexte dans lequel elle
a étéproposée et discutée, il apparaît nettement que le premier
alinéa devait concerner les droits et intérêtsdes Etats Membres en

vertu du Mandat et le second les droits et intérêtsdes ressortissants
des Etats Membres en vertu de certains articles particuliers, dont
un certain nombre portait à la fois sur les droits des ressortissants
et sur ceux des Etats.
En bref le fait est qu'il semble que personne n'ait pensé à intro-
duire une disposition touchant le règlement judiciaire obligatoire
avant que les Etats-Unis n'eussent fait des proposi~ions détaillées
touchant certainsdroits, commerciaux et autres, des Etats Membresin this context and in no other that the adjudication clause was
discussed. The matter progressed on this footing.

At its next meeting on 9 July, the Commission continued its

examination of both the French and United States draft "B"
Mandates; but the French draft was taken as the basis of discus-
sion, article by article. The hst four Articles dealt with the kind
of thing that appears in the first four Articles of the Mandate for
South West Africa and these were, with certain amendments,
provisionally adopted.
The Commission then took up Article 5 of the French 'B' draft.
The first paragraph, which was very short, provided for equal
rights for citizens of States Members of the League in relation to
residence, protection of their persons and property, the acquisition
of fixed and movable property and the exercise of their callings, al1
on the same basis as that accorded to nationals of the Mandatory
Power. This was accepted after amendment.

The remaining part of the French clause 5, which-again in

brief terms, and in principle only-dealt with equality of commercial
opportunity for nationals of State Members of the League, freedom
of navigation and transit, and protection against discriminatory
duties on merchandise, was examined in conjunction with Article 7
of the United States draft.
The Commission then proceeded to consider whether there would
be .any advantages in inserting, in this French clause 5, detailed
stipulations such as the United States 'B' draft provided. The
representative of the United States contended that they were
necessary in order to ensure satisfactory execution by the Manda-
tory. The record then reads :

was linked with the right of recourse to the International Court.
If the right of recourse were to be granted, it would be preferable
merely to lay down the principle of equality and leave it to the
Court to apply the principle to particular cases.He thought however
it would be desirable to replace the words 'commercial equality'
('égalitcommerciale')-which appeared in the French draft-by the
words 'commercialand industrial equality'. If on the other hand,
no right of recourse to the Court was to be given, it would be
necessary to elaborate stipulations in detail."

The morning session concluded with this observation. This discus-
sion, we think, shows very clearly that the purpose of the adjudica-
tion clause, and the sole context in which it was considered, was
the protection of the commercial and other rights of States Members
of the League, and those of their nationals, as intended to be confer-
red on them by the Mandate instruments.
It was in consequence of this discussion that the first matter
taken up by the Commission at its afternoon session on the same

241 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 556

de la Sociétéet de leurs ressortissants; c'est dans ce contexte, et
nul autre, que la clause de règlement judiciaire a étédiscutée. C'est
sur cette base que la question a ététraitée.
Au cours de la séance suivante, le g juillet, la Commission a
poursuivi son examen des deux projets de Mandat « B »,celui de la
France et celui des Etats-Unis; mais le projet français a été pris
comme base de discussion article par article. Les quatre premiers
articles, qui traitaientdu genre de questions faisant l'objet des quatre

premiers articles du Mandat pour le Sud-Ouest africain, ont été
provisoirement adoptés, avec certains amendements.
La Commission a abordé alors l'article 5 du projet français de
Mandat «B 1)Le premier alinéa, très court, établissait l'égalité des
droits entre les citoyens des Etats Membres de la Sociétéquant
à leur résidence,à la protection de leurs personnes et de leurs biens,
à l'acquisition de biens immobiliers et mobiliers et à l'exercice de
leurs professions, sur la mêmebase que les droits accordés aux
nationaux de la Puissance mandataire. Ces dispositions ont été
acceptées après amendement.
Le reste de l'article 5 du projet français qui - là encore, en

termes brefs, et seulement en principe - traitait de l'égalitécom-
merciale à accorder aux ressortissants des Etats Membres de la
Société,dela liberté de navigation et de transit et de la protection à
l'encontre de tout droit différentiel sur les marchandises, a été
examiné en mêmetemps que l'article 7 du projet des Etats-Unis.
La Commission a examiné ensuite s'il y avait avantage à insérer
dans cet article 5 du projet français des stipulations détaillées
comme celles du projet américain de Mandat cR ». Le représentant
des États-Unis a affirmé que celles-ci étaient indispensables pour
assurer la bonne exécution du Mandat par le Mandataire. On lit
ensuite dans le procès-verbal :

Lord Robert Cecil(Empire britannique)pense que cette question
est liéeau droit d'appel devant la Cour Internationale. Si cet appel
est autorisé,ilest préférablde poserseulement leprincipe d'égalité
et de laisserà la Cour le soin de l'appliquer aux cas particuliers.
Il pense néanmoins qu'il y aurait lieu de remplacer les mots:
((égalitécommerciale »[qui figurent dans le projet français] par:
((égalitécommercialeet industrielle1)Si, au contraire, aucun appel
devant la Cour Internationale n'est autorisé, il sera nécessaire
d'élaborerdes stipulations détaillées.

La séance du matin s'est terminée sur cette observation. Cette
discussion indique clairement, selon nous, que l'objectif de la clause

de règlement judiciaire, et le seul contexte dans lequel elle a été
examinée, était la protection des droits commerciaux et autres
qu'on avait l'intention de conférer dans les actes de Mandat aux
États hIembres de la Sociétéet à leurs ressortissants.
C'est à la suite de cette discussion que le premier point examiné
par la Commission à sa séance de l'après-midi du mêmejour a été 557 JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE

day was Article 15 of the United States draft, which contained the
adjudication clause above quoted. The Commission proposed to
continue its discussion of Articl5 of the French draft, but on the
suggestion of the Representative of the United States, agreed first
to examine this adjudication clause.
The Representative of France said that he had no objection in
principle to resort to an international Court, but he thought that if
that procedure were open to private individuals, any sort of
administration would become impossible. The President agreed.
Recourse to the Court should be the responsibility of a Government.

He thought there would certainly be some advantage in trans-
ferring from the political to the legal plane thesettlementof questions
such as those concerningproperty rights ("le règlement desquestions
comme celle du droit de propriété"),but asked whether Govern-
ments should not assume the responsibility for deciding whether a
claim should be referred to the Court (si la réclamationdoit être
portéedevant la Cour).
To meet this position, Lord Robert Cecil then proposed that the
second paragraph of the 'adjudication clause should read:

"The Members of the League of Nations willalsobe entitled on
behalf of their subjects or citizens to refer claims for breaches
oftheirrights".etc.

This met the various points of view. It was accepted by the Re-
presentative of the United States, and was adopted, apparently
without further discussion.
The next step was the omission of the last sentence of the United
States adjudication clause, namely that which provided that the
judgment of the Court in each case should be final and have the
same effect as an award under Article 13 of the Covenant. This
sentence became superfluous if all claims had to be referred
to the Court by Governments,whether in respect of their own rights
under the Mandates, or of those of their nationals.

The Commission then returned to the examination of the final
part of Article5 of the French 'B'draft, and since it was this draft
which was the basis of al1 further consideration, not the United

States draft with its detailed provisions for rights to be accorded
to States or their nationals, the reference to "Articles 5, 6,7, 7a
and 7 b" in the adjudication clause was omitted. Article 5 of the
French draft was then tentatively approved with some amend-
ments.
The Commission then took up a fresh draft of the "C" Mandates.
This draft now contained a new article, the final form of which
appears as Article 5 of the Mandate for South West Africa, guaran-
teeing freedom of worship in the mandated territory, and freedom
for missionary activities on the part of nationals of Members of
the League. In this same draft there appeared, equally for th.efirst

242 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 557

l'article 15du projet des gtats-unis,qui contenait la clause de règle-
ment judiciaire ci-dessus mentionnée. La Commission se proposait
de poursuivre la discussion de l'article 5,du projet français, mais,
sur la suggestion du représentant des Etats-Unis, elle a accepté
d'examiner d'abord la clause de règlement judiciaire.
Le représentant de la France a déclaréqu'il ne faisait aucune
objection au principe de l'appel devant une Cour internationale,
mais qu'il estimait que, si desparticuliers pouvaient avoirrecours à
cette procédure, toute administration deviendrait impossible. Le
président était de cet avis: la responsabilité du droit d'appel ne

devait appartenir qu'à un gouvernement. Il estimait qu'il y aurait
certainement avantage à faire passer de la sphère politiquedans la
sphère juridique le règlement deq suestionscommecelle du droitde
$ro;firiétm ais il demandait que le gouvernement qui déciderait si
la réclamation devait êtreportée devant la Cour en assumât la
responsabilité.

C'est pour répondre à ce souci que lord Robert Cecil a proposé
alors de rédiger comme suit le second alinéa de la clause d'appel:

«Les Membres de la Sociétédes Nations pourront également,
pour le compte de leurs sujets ou citoyens, porter des réclamations
pour infraction à leurs droitetc.N,
cela répondait aux divers points de vue. La formule a étéacceptée

par le représentant des États-Unis et adoptée, semble-t-il, sans
autre discussion.
Il a étéprocédéalors à la suppression de la dernière phrase de la
clause de règlement judiciaire du projet américain, à savoir celle qui
disposait que le jugement rendu par la Cour serait dans les deux cas
sans appel et aurait le mêmeeffet qu'une sentence arbitrale rendue
en application de l'article 13 du Pacte. Cette phrase devenait super-
flue si toutes les réclamations devaient êtreprésentéesà la Cour par
lesgouvernements, qu'il s'agît de leurs propres droits découlant des
Mandats ou de ceux de leurs ressortissants.
La Commission a repris ensuite l'examen de la dernière partie de
l'article5 du projet français; comme c'est ce projet qui devait
constituer la base des discussions ultérieures plutôt que le projet
américainet ses dispositionsdétailléestouchant les droits àaccorder

aux États et à leurs ressortissants, la référenceaux(article 5, 67,
7 a et 7 b » a étésupprimée de la clause de règlement judiciaire.
L'article5 du projet français a étéalors approuvé àtitre provisoire,
avec quelques amendements.
La Commission a abordé ensuite un nouveau projet de Mandat
« C ».Ce projet contenait à présent un nouvel article qui, sous sa
formedéfinitive,est devenu l'article 5 du Mandat pour le Sud-Ouest
africain, garantissant la liberté des cultes dans le territoire sous
Mandat et, pour les missionnairesressortissants des États Membres
de la Sociétédes Nations, la liberté d'exercer leur ministère. Danstime, an adjudication clause in broadly the same terms as were
eventually submitted to the Council of the League on December 14,
1920, and adopted by it after amendment in its resolution of
December 17, 1920, promulgating the Mandate.

It seems to us therefore that the record could hardly make it
plainer than itdoes that the drafting of what might for convenience
be called the national rights clauses of the Mandates, and the draft-
ing of the adjudication clause, went hand in hand, each reacting
on the other, and that the adjudication clause was never discussed
in the context of the obligations of the Mandatories relative to the

peoples of the mandated territories. To borrow the words of Lord
Finlay in one of the Mavrommatis cases (P.C.I. J. Series A, No. 2,
at p. 43) in relation to the Palestine Mandate: "Under these heads
[i.e. of the commercial, etc., rights of States and their nationals]
there are endless possibilities of dispute between the Mandatory
and other Members of the League of Nations, and it was highly
necessary that a Tribunal should be provided for the settlement

of such disputes".l Never at any time during the settlement of
the drafts was there the slightest suggestion that the adjudication
clause was intended to serve quite a different purpose, namely the
policing of the sacred trust.

It is evident that it had no relation to the trust obligations of
the Mandatory to the peoples of the territories. It was designed to
serve a less lofty purpose. It is quite inconceivable that if Article 7

was of the fundamentally essential character stated by the Court;
created as one of the securities for the performance of the Covenant,
providing the Court asthe final bulwark to secure the performance
of the sacred trust, that not one word is to be found in the records
which gives support to the Court's view 2.
To sum up, Our study of the record confirms the view which we
had antecedently and independently formed, on the basis of the

language of Article 7, and in the context of the Mandate as a
whole. This view is, first,that Article 7 must be understood as
referring to a dispute in the traditional sense of the term, as it
would have been understood in 1920, namely a dispute between

We cite Lord Finlay. We do not cite other juristic authoritybut we draw
attention to the exactly similar view tour own, expressed as representingthe
general opinionof internationalawyers, by Mr. Feinberg in his Hague Academy
course of 1937, quoted in full in the Dissenting Opiniof the Presidentof the
Court in the present case.
The degree of importance which the United States in 1920 placed upon the
equality of commercial and industrial opportunitin the mandated territorieis
to be seen in the correspondence which passed betweenit and the Council of the
League and the British Secretary of State for Foreign Affairs betwNovember
Council of League.1. Annexes 154 and 154a, b, and c, Minutes 12th Session OP.DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE 558
ce mémeprojet apparaît, pour la premièrefois aussi, une clause de

règlement judiciaire rédigée grossomododans les mêmestermes que
ceux qui devaient êtresoumis le 14 décembre1920 au'lonseil de la
Sociétédes Nations et que celui-ci devait adopter, après l'avoir
amendée, dans sa résolution du 17 décembre 1920 promulguant le
Mandat.
Il nous semble donc que les procès-verbaux ne pourraient indiquer

plus clairement que la rédaction de ce qu'on peut appeler pour
plus de simplicité les clauses des droits nationaux des Mandats et
la rédaction de la clause de règlement judiciaire allaient de pair,
chacune exerçant un effet sur l'autre, et que la clause de règlement
judiciaire n'a jamais étédiscutée dans le contexte des obligations
des Mandataires touchant les peuples des territoires sous Mandat.

Pour reprendre les propres termes de lord Finlay, parlant du Mandat
pour la Palestine, dans l'une des affaires Mavronzmatis (C,.P. J. I.,
série A no 2, p. 43) : ccToutes ces clauses [c'est-a-dire celles qui
concernent les droits commerciaux et autres des Etats et de leurs
ressortissants] offrent d'infinies possibilités de conflits entre le

Mandataire et d'autres Membres de la Sociétédes Nations, et il
était au plus haut point nécessaire qu'un tribunal fût prévu pour
régler ces conflits »l. A aucune époque durant la rédaction des
projets, personne n'a le moins du monde suggéréque la clause de
règlement judiciaire eût étéconçue dans un autre dessein, c'est-à-
dire pour réglementer l'accomplissement de la mission sacrée.

Il est évident qu'elle était sans rapport avec les devoirs fidu-
ciaires du Mandataire à l'égarddes peuples des territoires. Elle ne
visait pas si haut. Il est tout à fait inconcevable, si l'article 7 a eu
le caractère fondamental et essentiel que la Cour lui.attribue, s'il a
étéconçu comme l'une des garanties de l'application du Pacte et
pour faire de la Cour le suprêmegarant de l'accomplissement de la

mission sacrée, qu'il ne se puisse trouver dans les procès-verbaux
un seul mot à l'appui de l'opinion de la Cour 2.
En résumé,l'étude des procès-verbaux confirme l'opinion que
nous sommes faite antérieurement et indépendamment, en nous
fondant sur les termes de l'article 7etsur lecontextedu Mandat dans
son ensemble. Cette opinion, en premier lieu, que l'article 7 doit

êtreentendu comme désignant un difiérendau sens traditionnel du
mot, comme il aurait été compris en 1920, à savoir un différend

l Nous citons .lord Finlaynous ne citons aucune autre autoritjuridique,
mais nous signalons unopinion toutà fait semblablà la nôtre qu'en sa qualité
de représentant del'opinion des juristes internationauxeinberg a exprimée
à l'Académie de La Haye en 1937 et qui est citée intégralement dans l'opinion
dissidente duPrésident de la Cour en l'espèce.
L'importance que les États-Unisattachaienten 1920 aux clauses touchant
l'égalité commerciale et industriedans les territoiresous Mandat apparaît
dans la correçpondance échangée par les États-Unle Conseil de la Sociétéet le
secrétaire d'Etat britanniqaux Affaires étrangères entre le mois de novembre
Société desNations, annexe154 et 154a, b, c. de12me session du Conseil de la JOINT DISS. OPIN. JUDGES SPENDER AND FITZMAURICE
559
the actual parties before the Court about their own interests, in
which they appear as representing themselves and not some other
entity or interest; and secondly, that Article 7 in the general
context and scheme of the Mandate, was intended to enable the
Members of the League to protect their own rights and those of

their nationals, and not to enable them to intervene in matters
affecting solely the conduct of the Mandate in relation tothe peoples
of the mandated territory.
In this last connection we consider that the record completely
confirms the view we have taken in rejecting the argument that
Article7 was introduced, and was essential, in .order to compensate
for the fact that, by reason of Article 34 of the Statute of the Court
(which incidentally had not been drafted in1919when the Mandates
Commission held its deliberations), the Council of the League could
not appear in contentious proceedings, but could only request
advisory opinions, and could not therefore, in the last resort, obtain
any binding decision against the Mandatory. We have expressed the

view that it was foreign to the climate of opinion of 1919-20 to
insert an adjudication provision with such a purpose in mind, and
the record confirms this. It was not to enable Members of the League
to assist the Council in upholding the Mandate that Article 7 was
introduced, but to enable them to protect their own national rights
which the Council would have no special interest in doing.

A further point, confirming the same vl~w, is that the key provi-
sion as regards the interests of the peoples of the mandated terri-
tory, which appears in the "CH Mandates (Article 2)as an obliga-
tion for the Mandatory to promote to the utmost the peoples'
material and moral well-being and social progress, and in a some-
what different form in the "B" Mandates, does not figure in the

"A" Mandates at all. Yet an adjudication clause similar to Article 7
does figure there- evidently because the "A" Mandates contained
(as they did) provisions concerning the rights and interests of
Members of the League and their nationals in the mandated ter-
ritory and for no other reason.

There is only one further point we need deal with under this
head, namely the argument sought to be drawn from the existence
of what is known as the "Tanganyika Clause".
As has been seen, in the course of the drafting, the original

division of the adjudication clause into two parts (State rights;
rights of nationals) was eliminated,because once it had been agreed
that al1 proceedings of whatever character must be brought by
governments,whether on their own behalf or that of their nationals,
the raison d'êtrefor this division disappeared. In only one Mandate OP.DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZhlAURICE 559

entre les parties présentes devant la Cour concernant leurs propres
intérêts,dans lequel ces parties agissent en leur nom propre et non
pas pour le compte de quelque autre entité ou intérêt;et, en second
lieu, que l'articl7, dans le contexte et dans le schéma généraldu
Mandat, visait à permettre aux Membres de la Sociétéde protéger
leurs propres droits et ceux de leurs ressortissants, mais non pas
d'intervenir dans des questions intéressant uniquement l'adminis-

tration du Mandat à l'égarddes peuples du territoire sous Mandat.
Sur ce dernier point, nous estimons que les procès-verbaux confir-
ment absolument l'opinion que nous avons adoptée en rejetant
l'argument selon lequel l'article a été introduit, et était indispen-
sable, pour compenser le fait qu'en raison de l'article 34 du Statut
de la Cour (qui n'avait d'ailleurs pas encore étérédigé en1919,
lorsque la Commission des Mandats délibérait) le Conseil de la
Sociétén'étaitpas habilitéà participerà une procédurecontentieuse,

mais seulement àdemander des avis consultatifs et ne pouvait donc,
en dernier ressort, obtenir une décisionobligatoire contre le Man-
dataire. Nous avons exprimé l'opinion qu'en 1919-1920 l'ambiance
n'aurait pas été favorable à l'insertion d'une clause de règlement
judiciaire qui eût visécet objectif, et les procès-verbaux le confir-
ment. L'article 7 n'a pas étéintroduit pour permettre aux Membres
de la Sociétéd'aider le Conseil à faire exécuter le Mandat, mais
pour leur permettre de protéger leurs propres droits nationaux que
le Conseil, pour sa part, n'avait aucun intérêt spécial à protéger.

Un autre point, qui confirme cette même opinion, est que la
disposition essentielle touchant l'intérêt des peuples du territoire
sous Mandat qui, dans les Mandats ((C » (article z), imposait au
Mandataire l'obligation d'accroître par tous les moyens en son
pouvoir le bien-être matérielet moral ainsi que le progrès social des
habitants, se retrouvait sous une forme un peu différente dans les
Mandats ((B n, mais était totalement absente des Mandats ((A n.
Or, une clause de règlement judiciaire semblable à l'articl7 figurait

dans les Mandats (A » - évidemment parce qu'ils contenaient
(comme c'était le cas) certaines dispositions concernant les droits
et intérêtsdes Membres de la Sociétéet de leurs ressortissants dans
les territoires sous Mandat, et pour cette raison seulement.

Nous n'avons plus à traiter sous ce chef qu'un seul point, à

savoir l'argument que l'on essaie de tirer de l'existence de ce qu'on
appelle la « clause du Tanganyika ».
On a vu que, pendant les travaux de rédaction, la division primi-
tive de la clause de règlement judiciaire en deux parties (droit des
Etats; droit des ressortissants) a étééliminée; eneffet, du moment
où il a étéadmis quetoutes les instances, quel qu'en fût lecaractère,
devaient êtreprésentéespar des gouverr~ements,soit en leur nom
propre, soit pour le compte de leurs ressortissants, la raison d'êtrewas it unaccountably preserved, that for British East Africa, the
adjudication clause of which has a first paragraph in Article 7
terms, and a second providing that Members of the League could
alsobring before the Court complaints on behalf of their nationalsl.
From this it has been sought to draw the conclusion that the first
paragraph of the Tanganyika clause (and hence any provision
such as Article 7 having similar terms to this first paragraph)

must have related to disputes about the conduct of the Mandate.

Even as a matter of interpretation pure and simple, we regard
this as too slender a foundation on ~vhichto seek to erect such a
conclusion. The second part of the clause is quite redundant, as
the Mavrommatis case bears witness. Moreover the Belgian

Mandate for East Africa was on al1fours with that of the British
Mandate for Tanganyika. It would be quite absurd to suggest that
the second paragraph was designed to create a differencebetween the
one Mandate and the other. No reason has everbeen advanced why
this should have been so. In any case the record shows that all that
happened was that the Tanganyika clause simply retained the
original form of the adjudication clause introduced and discussed
in connection with the statal rights of Members of the League,

and rights reserved for their nationals, and that in this form the
first part was intended to cover the statal rights of the Members,
and the second the rights of their nationals. Al1 that happened
in the Tanganyika case was that these two parts were never merged,
as happened in al1the other cases; or rather that there was simply
a failure to drop the second part, as being superfluous. From this,
no useful information as to the meaning of the first part can be
derived. In the circumstances, therefore, no deduction contrary
to the view we hold can legitimately be drawn.

Conclusion : we consider that the third preliminary objection is
good and should be upheld.

FOURTH PRELIIVIINARY OBJECTION

Having regard to Ourview, stated under the preceding head, that
the matters involved by the present Application are not of a kind

The reason for the failure to draft the Tangaclause in the same form as
the others hasnot been established any certainty. It was one of those drafting
differences of view as to whether, if a clause is sit is better to itor,
ex abundanti cautela,letit remain. de cette division disparaissait. Elle n'a étémaintenue, et pour une
raison qu'on ignore, que dans l'un des Mandats, le Mandat britan-
nique sur l'Est africain, dont la clause de règlement judiciaire
contient un premier alinéa rédigédans les mêmestermes que l'arti-
cle 7, et un second alinéa disposant que les Etats Membres de la
Société desNations pourront également soumettre à la Cour toute
plainte émanant de leurs ressortissants I. On a voulu en conclure

que le premier alinéa de la clause du Tanganyika (et par conséquent
toute disposition comme l'article 7 dont les termes sont les mêmes
que ceux de ce premier alinéa) devait obligatoirement se rapporter
à des différendsrelatifs à l'administration du Mandat.
Ne serait-il mêmequestion que d'interprétation pure et simple,
nous estimons que c'est là une base trop fragile pour étayer sem-
blable conclusion. La seconde partie de la clause est tout à fait
superflue, comme en témoigne l'affaire Mavrommatis. Au surplus,

le Mandat belge sur l'Est africain est analogue au Mandat britan-
nique sur le Tanganyika. Ilserait tout à fait absurde de prétendre
que le second alinéa avait pour but d'établir une différenceentre
ces deux Mandats. On n'a jamais avancé aucune raison à l'appui
de cette vue. En tout cas les procès-verbaux montrent que ce qui
s'est passé, c'est tout simplement que la clause du Tanganyika a
conservé la forme primitive de la clause de règlement judiciaire
introduite et discutée en relation-avec les droits des Membres de la

Société desNations en tant quJEtats et les droits réservésà leurs
ressortissants et que, sous cette forme, la première partie devait
couvrir les droits des Membres en tant qu'États et la seconde les
droits de leurs ressortissants. Ce qui s'est passé dans le cas du
Tanganyika, c'est tout bonnement que les deux parties n'ont jamais
étéamalgaméescomme dans tous les autres textes; ou plutôt qu'on
a simplement négligéd'omettre la seconde partie, comme superflue.
On ne saurait en déduire aucune notion utile quant au sens de la

première partie. Dans ces conditions, on ne peut donc légitimement
en tirer aucune déduction contraire à l'opinion qui est la nôtre.

Conclztsion :nous estimons que la troisième exception prélimi-
naire est valable et doit êtreretenue.

Eu égard à l'opinion que nous venons d'exposer sous le chef
précédentet selon laquelle les problèmes posésdans les présentes

* La raison pour laquelle la clause du Tanganyin'a pas Btér6digée sous la
caprices rédactionnels qui se produisent constammlors des conférences inter-
nationalesil estné probablementdu fait que l'opinion était divisée sur le point
de savoir si, une clause étant superflue, il valait mieux l'oextabundanti
cautelala laisser subsister. that are capable of settlement on the basis ofa negotiation between
the Applicants and the Respondent State, since these parties lack
competence to settle such matters by a negotiation purely between
themselves, the question of whether the present dispute is one that
"cannot" be settled by negotiation hardly arises for us. We will
consider it nevertheless, because certain points of principle are
involved which seem to us important.

The Respondent has not denied that discussions have taken place
in the United Nations, but has confined itself to contending that
they did not take place in conditions that gave them any real
chance of success, so that it cannot be said that the dispute is one
that under 110circumstances could be settled by negotiation.

This contention involves questions of fact into which we do not
propose to go because, in Ouropinion, there has not, properly speak-
ing, been any negotiationut al1in this case of the kind contemplated

by Article 7.
Under Article 7, the dispute that cannot be settled by negotiation
must be the dispute between the Mandatory and the other Member
of the League concerned, i.e., the actual dispute between the Parties
to the proceedings before the Court, as such. This means that the
negotiation required by Article 7 must relate to that dispute and
no other. Now the Applications in this case were filed in November,
1960, and it is quite clear therefore that, up to that date, the
Assembly proceedings on which the Applicants rely (even if they
cari be called negotiation at all) had nothing whatever to do with

the actualdispute between the Applicant Statesandthe Respondent
State, since this disputedid not then exist as such lAl1that existed
up to that date was a disagreement between the Assembly (as an
entity) and one of its Members-the Respondent State; and al1
that had taken place up to that date were sundry proceedings in
the Assembly and its Committees, in which indeed the Applicants
participated, but simply as Members of the Assembly. To attribute
to these antecedent discussions the character of a negotiation
relative to the present dispute (which only arose in November 1960,
if even thenl)-a negotiation conducted by the Applicants in and
through the Assembly, or by the Assembly itself on behalf of the

Applicants, seems to us wholly unrealistic.

We would not wish to exaggerate the extent of negotiation that
may be required to establish that there has been the minimum

l Nor strictly does it exist now, since, as we pointed out under the preceding
head, it cannot habeen created merelyy the institutiof proceedings; and no
other interchangesoutside the Assembly, or directly between the parties as such,
have ever taken place.requêtes nesont pas de ceux qui puissent êtrerégléspar des négo-
ciations entre les demandeurs etl'État défendeur,ces Parties n'étant
pas compétentes pour régler des problèmes de ce genre pa-r une
négociation où elles seraient seules en jeu, la question de savoir si
le présent différend est ((susceptible ))ou non d'êtreréglépar des
négociations se pose à peine pour nous. Nous l'examinerons néan-

moins, parce qu'elle touche certains points de principe qui nous
paraissent importants.
Le défendeur n'a pas nié que des discussions aient eu lieu aux
Kations Unies, mais il s'est borné à affirmer qu'elles ne sont pas
tenues dans des conditions offrant de véritables chances de succès,
de sorte que l'on ne saurait dire que le différend soit de ceux qui
ne sont en aucune circonstance susceptibles d'êtrerégléspar des
négociations.
Cette thèse touche certaines questions de fait dans lesquellesnous

ne proposons pas d'entrer, puisque, selon nous, il n'y a eu, en l'es-
pèce, à proprement parler, aucune négociationdu genre prévu à
l'article7.
Aux termes de l'article 7, le différendqui ne soit pas susceptible
d'êtreréglépar des .négociationsdoit êtrele différendentre le Man-
dataire et l'autre Membre de la Sociétédes Nations intéressé.c'est-
à-dire le véritable différendentre les parties à la procédure soumise
à la Cour, comme telles. Cela signifie que les négociations requises

par l'article 7 doivent porter sur ce différend à l'exclusion de tout
autre. Or, en l'espèce, les requêtes ont étédéposéesen novembre
1960 et il est par conséquent tout à fait évident que, jusqu'à cette
date, lesdébatsde l'Assembléesur lesquels se fondent lesdemandeurs
(pût-on même les qualifierde négociations)n'ont rien eu à voir avec
le véritable différendentre les Etats demandeurs et 1'Etat défendeur,
puisque ce différendn'existait pas alors comnietel1. La seule chose
qui ait existé jusqu'à cette date est un désaccord entre l'Assemblée

(en tant que personne morale) et l'un de ses Membres - 1'Etat
défendeur; tout ce qui s'est passé jusque là a consisté en diverses
démarchesau sein de l'Assembléeet de ses commissions, auxquelles
lesdéfendeursont en effet participé, maissimplement àtitre de Mem-
bres de l'Assemblée. Attribuer à ces discussions antérieures le
caractère d'une négociation relative au présent digérend (qui n'a
surgi qu'en novembre 1960, et encore l),d'une négociation menée
par les demandeurs au sein de l'Assembléeet par l'intermédiaire de

l'Assemblée,oupar l'Assembléeelle-mêmeau nom des demandeurs,
nous paraît absolument arbitraire.
Nous ne voudrions pas exagérer le degréd'importance des négo-
ciations nécessairespour établir qu'un minimum a été fait,dans les

Il n'existe d'aillepas encoreà présent, au sens strict dmot, puisque,
ainsi que nous l'avons fait observer sous le chef précédent, il ne saurait avoir été
engendré uniquement par l'introductide l'instance; et qu'aucun autre échange
jamais eu lieu.s de l'Assemblée, ni directement entre les Parties comme telles, n'anecessary in the circumstances to make it clear that the parties
cannot settle their dispute. But some negotiation must, we think,
in fact have taken place between the actual Parties to the proceed-
ings before the Court, in their capacity as individual States.

Furthermore, the negotiation must relate to the dispute (and no
other) alleged to exist between the parties to the proceedings before
the Court, which dispute must have existed antecedently to those
proceedings. It is not sufficient for the negotiation (supposing it to
have been one) to have related to a dispute which, at the time when
this "negotiation" wastaking filace,did not exist specificallybetween
the Parties before the Court, but consisted merely in a general all-

round controversy pursued on the floorofan international Assembly.
We are not concerned to deny the propriety or utility of dis-
cussions in an international forum such as the Assembly of the
United Nations. We do not think that, normally, such discussions
can be regarded as an actual negotiation taking place between the
Parties before the Court, as we think Article 7 contemplated. Such
discussions are, and necessarily must be, of too general and diffused
a character to constitute a negotiation between the specific parties
who eventually come before the Court in relation to a specific
dispute between them as States.

Be that as it may, what is clearly apparent to us is that a "ne-
gotiation" confinedto the floor of an international Assembly, consist-
ing ofallegations ofMembers, resolutions ofthe Assembly andactions
taken by the assembly pursuant thereto, denial of allegations,

refusa1 to comply with resolutions or to respond to action taken
thereunder, cannot be enough to justify the Court in holding
that the dispute "cannot" be settled by negotiation, when no direct
diplomatic interchanges have ever taken place between the parties,
and therefore no attempt at settlement has been made at the statal
and diplomatic level. Since direct negotiations between the actual
Parties to a dispute constitutethe usual and normally indispensable
method of attempting a settlement, we do not see how the Court
can hold and adjudgethat the dispute (that any dispute) "cannot"
be settled, when no recourse at al1 has been had to this method.
We do not think it should be assumed or postidated that inter-
changes which have not succeeded in the Assembly or its subsidiary
organs, rnight not, in different conditions, and amongst arestricted
number of parties, stand some chance of success-at least a sufficient
chance to make it not reasonably possible to affirm the contrary
until this method has been attempted. Whether success would be

achieved, must be a matter of opinion, but that is not the point;
and to us, the failure to conduct, or even attempt, any direct ne-
gotiations between the parties to the present dispute in their
capacity as such, appears (having regard to the terms of Article 7)
to constitute a forma1 bar to the present proceedings.
247 OP. DISS. COMMUNE JUGES SPENDER ET FITZMAURICE
562
circonstances données,afin de prouver que les Parties n'ont pas pu
régler leur différend. Mais nous estimons indispensable que des
négociations aient effectivement eu lieu entre les véritables Parties
à l'instance introduite devant la Cour, en leur qualité d'États

individuels.
En outre, les négociations doivent avoir trait au différend (et à
nul autre) dont l'existence est alléguéeentre les Parties à l'instance
introduite devarit la Cour et qui doit être antérieurà l'introduction
de l'instance. Il ne suffit pas que la négociation (à supposer qu'elle
ait eu lieu) ait concernéun différendqui, à l'époqueoù cette (négo-
ciation1) n lieu, n'existait pas spécifiquement entre les Parties
devant la Cour et qui ne consistait qu'en une controverse générale
poursuivie dans l'enceinte d'une assembléeinternationale.

Nous ne prétendons pas nier la pertinence ni l'utilité des discus-
sions poursuivies dans une enceinte internationale telle que l'As-
semblée des Nations Unies. Mais nous ne pensons pas que des
discussions de ce genre puissent normalement êtreconsidéréescom-
me de véritables négociations entre les parties devant le Cour,
ni qu'elles répondent à ce que, selon nous, l'article 7 dispose.
Ces discussions sont, nécessairement, d'un caractère trop généralet
trop vague pour constituer des négociations entre les parties
mêmesqui se présentent ensuite devant 1%Cour, au sujet d'un
différenddéterminéles séparant en tant qu'Etats.

Quoi qu'il en soit, ce qui nous paraît évident c'est qu'une ((négo-
ciation ))qui se limite à l'enceinte d'une Assembléeinternationale,
et qui consiste en allégations formuléespar certains Membres, en
résolutions de l'Assemblée, en mesures prises par l'Assembléeen
vertu de ces résolutions, en dénégations répondant aux allégations
et en refus soit d'accepter les résolutions, soit de se conformer aux
mesures prises en vertu de ces résolutions, ne suffit pas à justifier
une décision de la Cour selon laquelle le différend ((n'est pas »
susceptible d'êtreréglé par des négociations,alors qu'aucun échange

de vues diplomatique n'a jamais eu lieu entre les parties et que par
conséquent aucun effort en vue d'un règlement n'a jamais étéfait
à l'échelongouvernemental et diplomatique. Les négociationsdirec-
tes entre les parties mêmes à un différendconstituant la méthode
usuelle et normalement indispensable pour tenter de parvenir à un
règlement, nous ne voyons pas comment la Cour peut dire et juger
que le différend (ouqu'un différendquelconque)((n'est pas suscep-
tible )d'êtrerégléa ,lorsqu'on n'a jamais eu recours àcette méthode.
Nous ne croyons pas que l'on doive présumer ou postuler que des

échangesde vues qui ont échouéau sein de I'Assembléeou de ses
organessubsidiaires ne puissent, repris dans des conditions différen-
tes et par des parties moins nombreuses, avoir quelque chance de
succès - assez du moins pour interdire d'affirmer raisonnablement
le contraire avant que cette méthode n'ait étéemployée. Évaluer
les chances de succès est affaire de jugement personnel, mais là
n'est pas la question; à nos yeux, le fait qu'aucune négociation

247563 JOINT DISS. OPIN.JUDGES SPENDER 4ND FITZMAURIcE

In Ouropinion the fourth preliminary objection must accordingly
be upheld.

*

We shall conclude by pointing out that requirements about
"disputes" and "negotiations" are not mere technicalities. They
appear in one form or another in virtually every adjudication
clause that has ever been drafted, and for good reason. They are
inserted purposely to protect the parties, so far as possible, from
international litigatiothat is unnecessary, premature,inadequately
motivated, or merely specious. \Vithout this measure of protection,
countries would not sign clauses providing for compulsory adjudica-
tion. This is an aspect of the matter to which we feel insufficient
attention has been given.

Our final conclusion on the whole case is that, for al1 of the
reasons stated, and in relation to each of the objections raised,
whether on the groundsactually advanced bythe Respondent State
or on other grounds, the Court is not competent in this case, and
should refuse to assume jurisdiction.

(Signed) Percy C. SPENDER.

(Signed) G. G. FITZMAURICE.directe n'ait étéengagée,ni mêmetentée, entre les Parties au présent
différend en leur qualité comme telles nous semble constituer. (eu
égard aux termes de l'article 7) un obstacle formel à la présente
procédure.
*

Il s'ensuit,à notre avis, que la quatrième exception préliminaire

doit êtreretenue.
*

Xous conclurons en faisant observer que les prescriptions tou-
chant les (différends ))et les (négociations »ne constituent pas de
simples questions d'ordre technique. Elles apparaissent sous une
forme ou sous une autre dans presque toutes les clauses de règle-
ment judiciaire qui aient jamais étérédigées,et pour une excellente
raison. Elles y sont inséréesà dessein pour protéger les parties, dans
toute la mesure du possible, contre des litiges internationaux inuti-
les, prématurés, insuffisamment motivés pu simplement spécieux.

Faute de cette mesure de protectioil, les Etats n'accepteraient pas
de signer de clauses de règlement judiciaire obligatoire. C'est là
un aspect de la question auquel il ne nous semble pas qu'on ait
accordéassez d'attention.

Xotre conclusion finale sur l'ensemble des présentes affaires est
que, pour toutes les raisons exposées et à l'égard de chacune des
exceptjons soulevées, soit pour les motifs présentés effectivement
par 1'Etat défendeur, soit pour d'autres motifs, la Cour n'est pas

compétente en l'espèce et devrait refuser d'exercer sa juridiction.

(Signé) Percy C. SPENDER.

(Signé)G. G. FITZ~~AVRICE.

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Opinion dissidente commune de Sir Percy Spender et Sir Gerald Fitzmaurice (traduction)

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