Opinion individuelle de M. Wellington Koo (traduction)

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048-19631202-JUD-01-04-EN
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048-19631202-JUD-01-00-EN
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OPINION INDIVIDUELLE DE M. WELLINGTON KOO
[Traduction]

Je m'associe à la conclusion finale à laquelle la majorité des
Membres de la Cour est parvenue en l'espèce, à savoir que tout
arrêtau fond que pourrait rendrela Cour seraitsans objet et incom-
patible avec la fonction judiciaire de la Cour. Mais j'y suis arrivé
par un raisonnement différentdans l'ensemble. A mon avis,il aurait
fallu s'attacher davantage aux conclusions les plus pertinentes des
Partiesde façon à étayerla décisionsur desmotifs supplémentaires,

ce qui aurait permis d'élargir et de renforcer la base de l'arrêt.
C'est pourquoi je me propose d'exposer mon avis dans une opinion
individuelle.
I. La requête qui a introduit la présente instance a étédéposée
par l'agent du Gouvernement de la République du Cameroun le
30 mai 1961 et le mémoire qui l'a suivie est daté du 12 décembre
1961. Les conclusions présentéesdans les deux cas sont identiques;
elles demandent à la Cour de dire et juger que le Royaume-Uni,

dans l'application de l'accord de tutelle du 13 décembre 1946, n'a
pas respecté certaines obligations qui en découlent directement et
indirectement sur divers points relevésdans lesdits documents.
2. Le contre-mémoire du Royaume-Uni contient deux parties.
La première partie consacréeà la ((Compétencede la Cour )affirme
que lesgriefs du Cameroun ne relèvent pas del'article 19 de l'accord
de tutelle et que la requête et le mémoire ne satisfont pas aux

prescriptions du Règlement de la Cour. Pour ces raisons et pour
d'autres motifs qu'il énonce, le Royaume-Uni conclut à ce que la
Cour (n'a pas compétenceen la présente affaire et doit refuser d'en
connaitre ».
3. Dans ses observations, le demandeur présente trois conclu-
sions. La première prie la Cour de rejeter l'exception préliminaire
du Royaume-Uni tendant àce que la Cour se déclareincompétente

et la deuxième demande le rejet de l'exception préliminaire tirée
de l'inobservation des dispositions de l'article32, paragraphe 2,du
Règlement de la Cour. La troisième conclusion est identique à celle
que formulent la requêteet le mémoire.
4. A la fin de la première partie de ses plaidoiries, le conseil du
Royaume-Uni a conclu à ce qu'il plaise à la Cour dire et juger
qu'elle n'est pas compétente pour connaître de l'affaire et il a
confirmé la première conclusion énoncéeau paragraphe 112 du

contre-mémoire du Royaume-Uni. Les conclusions finales du défen-
deur ont étéprésentéespar son agent à la fin de ses plaidoiries;
elles semblent comporter une modification par rapport aux con-
clusions précédenteset sont ainsi conçues :
30 (1) à aucun moment, il n'y a eu un différend,comme l'allèguela
requêtedéposée en l'affaire;
2)il n'y avait pas eu ou il n'y avait pàsla date du 30 mai 1961,
comme l'allèguela requête, un différendrelevant de l'article 19
de l'accordde tutelle pour le territoire du Cameroun sousadministra-
tion du Royaume-Uni;
3) en toute hypothèse, la Cour n'est pas saisie d'un différend
qu'elle soit fondéeà trancher.»

En conséquence, il est officiellement demandé à la Cour d'«ad-
mettre les exceptions préliminaires du Royaume-Uni et dire que
la Cour n'a pas compétence en la présente affaire et ne procédera
pas à un examen au fond ».
5. De son côté, le demandeur a présenté trois conclusions for-
melles à la fin de la première partie de ses plaidoiries et seulement
deux à la fin de la dernière partie. La différence réside dans la

suppression de la conclusion relative à l'exception préliminaire du
Royaume-Uni fondéesur l'inobservation des dispositions de l'arti-
cle32, paragraphe 2, du Règlement de la Cour; à part cela, les deux
sériesde conclusions sont identiques entre elles, comme elles sont
identiques aux deux conclusions formelles énoncéesdans les observa-
tions du Gouvernement de la République fédéraledu Cameroun.

1

6. L'exposé que je viens de faire des conclusions successives des
Parties à l'instance fait clairement apparaître que la seule question
qui se pose à la Cour dans la phase actuelle de la procédure est celle
de savoir si la Cour est compétente pour statuer au fond.

7. Avant d'aborder l'examen du problème de la compétence, il
importe de traiter d'abord de la question préalable suivante: la
requête introductive d'instance s'est-elle conformée aux pres-
criptions de l'article 32, paragraphe 2, du Règlement de la Cour?
En effet, si on estime qu'elle est irrégulière, on doit la considérer
comme irrecevable et la Cour ne peut l'examiner plus avant. Cette
détermination est indépendante de la question de savoir si le défen-
deur a ou non insisté sur l'exception, et indépendante aussi du fait
que le demandeur n'a pas mentionné ce point dans ses conclusions

finales.
8. Aux termes de l'article 32 invoqué par le défendeur, la requête
doit contenir :

((en outre, autant que possible ... l'indication précisede l'objet
de la demande; un exposé succinct des faits et des motifs par
lesquels la demande est prétendue justifiée,sous réserve des déve-
loppements à fournir dans le mémoireet des preuves qui y seront
annexées ».
Le défendeur a soutenu dans son contre-mémoire que ni la requête
ni le mémoire de la République du Cameroun ne se conforment

31 ARRÊT 2 XII 63 (OP.INDIV. M. WELLINGTON KOO) 43

à cette disposition en ce sens qu'aucun des deux documents ne
spécifiequelles sont les «certaines obligations » découlant de l'ac-
cord de tutelle que le Royaume-Uni n'aurait pas respectées.
9. Si l'on se réfèreàla requête,on voit que les griefs sont énoncés

à la page 19 et qu'en outre lesconclusions indiquent que le Royaume-
Uni ((n'a pas respecté certaines obligations ...sur les divers points
relevés ci-dessus 1).Ces griefs sont de nouveau précisésau para-
graphe 3 du mémoire (p. 5). De plus, l'article 32 ne prévoit la
mention de ces indications qu'«autant que possible n.La critique
du défendeur à cet égard ne peut donc êtreconsidérée commebien
fondée.
IO. En ce qui concerne la principale question de compétence en

l'espèce, il ressort clairement des écritures et des plaidoiries des
deux Parties que les arguments les plus importants tant en faveur
qu'à l'encontre de la compétencede la Cour sont axéssur l'article 19
de l'accord de tutelle pour le territoire du Cameroun conclu le
13 décembre 1946 entre lesNations Unies, d'une part, et leRoyaume-
Uni, en tant qu'autorité administrante, de l'autre. Cette disposition
est la suivante :

cTout différend, quelqu'il soit, qui viendrait à s'éleverentre
l'Autorité chargée de l'administration et un autre Membre des
Nations Unies relativement à l'interprétation ou à l'application
des dispositions du présent Accord,sera, s'il ne peut êtreréglé
par négociationsou un autre moyen, soumis à la Courinternationale
de Justice, prévueau ChapitreXIV dela Charte desNations Unies. »
Je passe maintenant à l'examen des arguments opposés des deux
Parties pour en apprécier la valeur.

II. En premier lieu, le défendeur affirme qu'il n'y a jamais eu de
différend entre le Royaume-Uni et la République du Cameroun au
sen où ce mot est employédans l'article 19 de l'accord de tutelle.
Il a dit: «Si l'existence d'un différend pris en ce sens n'est pas
établie, il n'y a aucun doute que la tentative de se prévaloir de
l'article19 s'effondre d'emblée. 1)Le demandeur soutient de son
côtéqu'un différend s'est élevéet continue d'exister. Entre autres
déclarations et communications, il cite comme preuves de son

existence: une brochure distribuée à tous les Membres des Nations
Unies à la fin de mars 1961 et intitulée La position dela Réfiublique
du CafnerounIila suite du plébiscite de sI et 12 février1961 dans la
fiarfie septentrionaledl4te~yitoireda Cameroun SOZ~Sadministration
du Royaume-Uni de Grande-Bretagneet d'Irlande dz4Nord; la lettre
adressée le IO avril 1961 par le représentant du Royaume-Uni à
la Quatrième Commission de l'Assembléegénéraleau président de
celle-ci, en réponse à ce cclivre blanc »du Cameroun; et l'échange
entre les deux Parties des notes des I~~et 26 mai 1961 citées en

annexe au mémoiredu Cameroun. 12. La Cour permanente et la Cour actuelle ont définià plusieurs
reprises ce qui constitue un différend en droit international. En
bref, c'est «un désaccord sur un point de droit ou de fait, une
contradiction, une opposition de thèses juridiques ou d'intérêts
entre deux personnes ))(affaire Mavrommatis, C.P. J. I.,série A
no 2, p. II).Dans son avis consultatif sur l'lnterprélatio~dzes traités

de paix, la Cour a constaté que ((des différends internationaux se
sont produits » lorsque cles points de vue des deux parties,
quant à l'exécution ou à la non-exécution de certaines obligations
découlant des-traités, sont nettement opposés » (C.I. J. Recueil
1950, p. 74). Etant donné ces définitions, il ne fait pas de doute
qu'au moins de prime abord un différend s'est produit entre les
Parties à la présente affaire.

13. Il est vrai qu'un différend international, tout comme un
motif d'action en droit interne, doit, pour relever d'un organe

judiciaire, comporter ou impliquer l'existence d'un droit ou d'un
intérêtjuridique controversé. Bien que les deux Parties voient
dans cet élémentl'une des conditions essentielles de l'existence d'un
différend et qu'il n'y ait pas de désaccord entre elles sur ce point,
le défendeur soutient que ledit élémentfait défaut en l'espèce, car
à son avis l'article 19 de l'accord de tutelle, sur lequel la requête
s'appuie pour établir la compétence de la Cour, ne confère au
demandeur, tierce partie à l'accord, ni intérêtni droit à faire res-
pecter les obligations générales de l'autorité administrante; ce
droit ou cet intérêt appartiendrait exclusivement, d'après lui, aux
Nations Unies qui sont l'autre partie à l'accord. Selon cette thèse,

un autre Membre des Nations Unies n'est fondé à invoquer l'ar-
ticle19 contre l'autorité administrante d'un territoire sous tutelle
donnéque si ladite autorité a,par action ou omission, porté atteinte
à des droits qui ont été,conféréà s titre individuel à cet Etat OU à
des ressortissants de cet Etat par l'accord detutelle; or le demandeur
ne se plaint d'aucun préjudice de cette nature. A l'appui de cette
opinion, le conseil du défendeur cite l'arrêt de la Cour dans les
affaires du Sud-Ouest africain (C. I. J. Recueil 1962, p. 319) et
soutient que, étant donné la différence fondamentale de nature,
de structure et de fonctionnement entre le régime de tutelle et le
système des Mandats de la Société desNations, la protection judi-
ciaire des intérêtsgénéraux des populations des territoires sous

tutelle n'est plus essentielle.
14. Le demandeur, pour sa part, fait valoir que la rédaction de
l'article19 ne justifie en rien une interprétation restrictive de
ce genre; le fait mêmeque cet article se réfère expressémenten
termes généraux à « l'interprétation ou l'application des dispositions
de l'accord » lui paraît démontrer clairement que tout différend

33relatif à une ou plusieurs de ces dispositions relève dudit article
et peut &tretranché par la Cour.
15. Tout en paraissant plausible à raison des grandes différences
entre le régime de tutelle établi par la Charte et le système des
Mandats établi par le Pacte, la thèse du défendeur ne saurait être
considérée commeexactede façon générale.Le fait que l'expression
«Tout différend, quel qu'il soit ...relativement à l'interprétation
ou à l'application des dispositions du présent Accord )a manifeste-
ment une portée générale,ne comporte pas de réserves et n'est

sujette qu'aux conditions expressément énoncéesdans l'article,
justifie qu'on l'examine attentivement avant de tirer des conclu-
sions générales fondées sur l'interprétation.
16.Selon la Charte, la protection des intérêtsdes habitants des
territoires sous tutelle fait normalement partie des fonctions de
l'Assemblée générale, assistée à cet effet par le Conseil de tutelle,
et, pour ce qui est des zones stratégiques, relève de l'autorité du
Conseil de sécurité.Mais l'intérêtgénéralqu'ont les Membres des
Nations Unies à ce que l'autorité administrante s'acquitte dûment
des engagements pris dans l'accord de tutelle en question subsiste.
L'article 19 ne fait pas obstacle à une protection judiciaire de ces
intérêts. Encore que l'on n'ait peut-être pas souvent l'occasion
d'invoquer cette protection, elle n'en existe pas moins parallèlement

avec la surveillance administrative qui est assurée,selon le cas, par
l'Assemblée générale et le Conseil de tutelle ou par le Conseil de
sécurité.Il est des circonstances, peut-être rares ou exceptionnelles,
où un autre Membre des Nations Unies serait justifié à invoquer la
compétencede la Cour en vue d'assurer la protection des intérêtsde
la population du territoire sous tutelle. Si par exemple, à propos
d'une question juridique donnée ayant trait à la conformité ou
non-conformité du comportement de l'autorité administrante avec
l'accord de tutelle et mettant en jeu l'interprétation ou l'appli-
cation de ses dispositions, les débats du Conseil de tutelle ou de
l'Assembléegénéraletraînent en longueur et deviennent confus, sans
perspective de règlement rapide, en raison de l'impossibilitéd'obte-
nir le vote majoritaire requis pour l'approbation d'une résolution
demandant à la Cour un avis consultatif sur ladite question juri-
dique, rien dans les termes de l'artic19 n'empêcheun autre Mem-
bre de porter la question devant la Cour sous la forme d'un différend
avec l'autorité administrante, afin que soit tranché judiciairement

le point de droit en cause.n outre, étant donnéles fins essentielles
du régime de tutelle énoncéesà l'article 76, ce genre de recours
ferait plus que relever simplement d'une clause juridictionnelle telle
que l'article19 de l'accord de tutelle; il s'imposerait si l'on voulait
accélérerun règlement par l'Assembléegénérale oule Conseil de
tutelle dans l'intérêtdu territoire sous tutelle ou de ses habitants. 17. Il n'est ni exact ni justifiable de don'nerdes termes larges de
l'article19 une interprétation aussi absolue que celle du défendeur,
laquelle exclurait la possibilité pour un autre Membre des Nations
Unies de soumettre à la Cour un différendavec l'autorité adminis-
trante ayant trait aux intérêtsdu territoire sous tutelle ou de ses
habitants. Le régimede tutelle étant, par sa nature, par sa portée,
par sa structure et par son fonctionnement, différent du système
des Mandats et la surveillance de l'administration des territoires
sous tutelle étant en conséquence beaucoup plus large et effective
que ne le fut celle des territoires sous Mandat, cela peut rendre
moins nécessaire le recours à la protection judiciaire, mais, comme
je l'ai déjàindiqué,le droit d'un autre Membre àl'invoquer subsiste
lorsqu'il s'agit de protéger les intérêtsde la population du territoire
sous tutelle et de faire ainsi progresser la réalisation des fins essen-

tielles du régimede tutelle définiespar la Charte.
18. En ce qui concerne la question de l'existence d'un intérêt
juridique commebase indispensable d'un différendsusceptible d'être
réglépar la voie judiciaire, le demandeur souligne qu'il possède,
outre son intérêten tant que simple Membre des Nations Unies, un
intérêt auquelil attribue un caractère spécialet individuel, différent
de celui des autres Membres des Nations Unies. On peut aisément
se rendre compte que c'est là, pour le demandeur, un intérêtréelet
important. Mais, en tant que tel, cet intérêtnerelève manifestement
pas de l'article19.Si on l'analyse, on constate qu'avant les IIet 12
février 1961 il s'agissait d'un intérêtéventueldont la concrétisation
dépendait du résultat du plébiscite qui s'est dérouléau Cameroun
septentrional ces deux jours-là. Si cette consultation avait été
favorable à la solution de l'indépendance par la voie de l'union
avec la République du Cameroun indépendante, cet intérêt aurait

été satisfait et aurait donc cesséd'exister. Il a pris un caractère
définiuniquement parce que l'on a officiellement proclaméque ledit
plébisciteavait étéfavorable àl'union avecla Fédération de Nigéria
indépendante. Mais à ce moment-là la population du Cameroun
septentrional avait réaliséla fin essentielle de l'articl76 b) de la
Charte et accédé à l'indépendance. Ce résultat a étéconfirmé le
moment venu par la résolution 1608 (XV) de l'Assemblée générale
en date du 21 avril 1961 qui a également décidé de mettre fin, à des
dates spécifiées,à l'accord de tutelle du 13 décembre 1946 pour le
Cameroun sous administration britannique. L'intérêt dont la Répu-
blique du Cameroun se réclamemaintenant ne peut avoir un carac-
tère juridique; ce n'est qu'un intérêtpolitique propre, qui ne relève
pas de l'article19.

III

19. Pour rejeter la compétence de la Cour le défendeur a égale-
ment soulevéune exception fondéesur ce que « La République du
Cameroun n'a jamais été partie à l'accord de tutelle et ne jouit des

35avantages accordés aux Membres des Nations Unies que depuis le
20 septembre 1960 »,et que

c(Si la République du Cameroun ...avait le droit, à dater du
20 septembre 1960, d'invoquer l'article 19 de l'accord, elle n'a
pas ... le droit de faire état de questions survenues pendant la
durée de l'accord avant le 20 septembre 1960 en vue d'établir
l'existence d'un différend avec le Royaume-Uni antérieur à cette
date, pour donner compétence à la Cour. ...dans le cas d'un différend
suffisant pour remplir les conditions de l'article 19 survenant après
le20 septembre 1960,la Républiquedu Cameroun n'a pas davantage
le droit de demander à la Cour de se prononcer sur des questions
qui se sont poséesavant cette date. 1)

20. Il s'agit là manifestement d'un argument fondésur le principe
ratione temporis. Mais la date d'admission comme Membre des
Nations Unies n'est pas une date critique, sauf dans la mesure où
c'est seulement à partir du 20 septembre 1960 que la République
du Cameroun a eu tous les droits et toutes les obligations d'un
État Membre. En d'autres termes, elle a acquis ce jour-là le
statut ou la capacité voulus pour pouvoir être considérée comme
((un autre Membre )aux termes de l'article 19. Une fois cette Capa-

cité acquise, la date d'admission aux Nations Unies est sans perti-
nence pour ce quiest des différends avec l'autorité administrante en-
visagés à l'article 19. En ce qui concerne l'objet d'un tel différend,
cette date ne restreint Das le droit d'un Membre des Nations Unies
à le soulever. Aussitôt iu'un État acquiert le statut de Membre, il
doit avoir les mêmes droits et obligations en vertu de la Charte
que tous les autres Membres et les mêmes droits et obligations en
vertu de l'accord de tutelle que tous les Membres autres que l'auto-
rité administrante. Aucune différenciation ni distinction entre les
Membres d'après leur date d'admission n'est prévue dans la Charte ;

aucune n'est justifiable en principe ni en pratique.

21. Le défendeur conteste également l'appiicabilité de l'article 19
en s'appuyant sur l'argument suivant :
((Tous les griefs formulés ont trait à l'intention de fausser le
plébiscite dans le Cameroun septentrional. L'accord de tutelle,
toutefois, ne prévoit pas sa propre extinction, et moins encore
un quelconque plébiscite qui la préparerait. Les questions relatives
à la validité du plébiscitene sont donc aucunement liées à l'appli-
cation, ni à l'interprétation des dispositions de l'accord de tutelle
et ne peuvent donc êtresoumises à la Cour en vertu de l'article 19
de cet accord. 1)

La lecture du texte de la requête, avec l'énumération précise des
sept griefs a) à g) qui sont confirmés dans le mémoire, montre ce-
pendant que, si d)et fl ont trait à la question de l'observation de la
résolution 1473 (XIV) de l'Assemblée généraleet si g) a trait aux ARRÊT 2 XII 63 (OP. INDIV. M. WELLINGTON KOO) 48
((pratiques, actions ou inactions des autorités locales de tutelle ...

précédant le plébiscite et durant les opérations électorales D,les
trois premiers griefs a), b) et c) visent tous des dispositions spéci-
fiques de l'accord de tutelle et indiquent que les articles 5 et 6 de
cet accord n'auraient pas été respectés par l'autorité administrante.

22. Certes, aucun article del'accord de tutelle ne prévoit sa propre

extinction. Mais celle-ci y est nécessairement implicite; en effet,
l'article3 de l'accord dispose que (<L'Autorité chargée de l'adminis-
tration s'engage à administrer le Territoire de manière à réaliser les
fins essentielles du Régime international de tutelle énoncées à
l'Article 76 de la Charte des Nations Unies ...»; l'article 5 b) ne
confère certains pouvoirs à l'autorité chargée de l'administration
du territoire sous tutelle que (quand ces mesures seront compatibles

avec les fins essentielles du Régime international de tutelle ...1);
et l'article 6 enjoint à l'autorité chargée de l'administration de
favoriser (le développement d'institutions politiques libres conve-
nant au Territoire 1)et ((A cette fin » de prendre toutes mesures
appropriées (cen vue d'assurer l'évolution politique des habitants
du Territoire conformément à l'Article 76 b de la Charte des Nations
Unies 1).Si nous nous référons à ce paragraphe nous constatons
qu'il est ainsi conçu :

(b) favoriser le progrèspolitique, économiqueet socialdespopu-
lations des territoires sous tutelle ainsi que le développement
de leur instruction; favoriser également leur évolution progres-
sive vers la capacité à s'administrer eux-mêmesou l'indépen-
dance, compte tenu des conditions particulières à chaque terri-
toire et à ses populations, des aspirations librement exprimées
des populations intéressées...1).

23. Pour s'assurer des aspirations des habitants d'un territoire
sous tutelle et les mettre à mêmede s'exprimer librement, on con-

sidère généralement que le plébiscite - qui permet un vote libre
et secret - est le procédéle plus approprié; s'ils votent pour l'indé-
pendance et s'ils le font à la majorité requise, cela signifienécessaire-
ment en fait qu'ils se prononcent pour l'extinction deleur statut de
population sous tutelle et par conséquent pour l'expiration del'accord
de tutelle. C'est ce qu'ont fait les populations du Cameroun septen-
trional au cours du second plébiscite qui a eu lieu les II et 12 février

1961. En pratique, l'accession à l'indépendance ou à l'autonomie
en vertu de la Charte et la réalisation de cet objectif conformément
à l'accord de tutelle étaient synonymes de l'expiration dudit accord,
sous la seule réserve de l'approbation formelle de l'Assemblée géné-
rale, qui dans le cas présent a été dûment donnée dansla résolution
1608 (XV). Il semble donc raisonnable de conclure que, si à stricte-
ment parler la question de la validité du plébiscite et celle de l'ex-

piration de l'accord de tutelle n'ont pas trait à l'interprétation de
cet accord, elles en concernent en tout cas l'application. C'est ARRÊT 2 XII63 (or. INDIV. M. WELLINGTON KOO)
49
pourquoi on doit considérer comme mal fondéel'exception d'incom-
pétencetirée de l'argument d'après lequel l'article 19 de l'accord de
tutelle ne prévoit ni sa propre expiration ni un plébiscite.

24. Un autre argument du défendeur en vue de contester la
compétence en l'espèce est qu'«au sens de l'article 19 les seuls
différendssusceptibles d'êtresoumis à la Cour ou examinés par elle
sont des différends qui ne peuvent êtrerégléspar négociations ou
un autre moyen D,que cependant ((aucune tentative véritable n'a
été faiteavant le 30 mai 1961 pour régler le différend(si différend
il y a) par voie de négociations » et qu'c(une proposition visant à

porter le différend devant la Cour, telle que celle qui figure dans la
note du Cameroun du I~~ mai 1961, ne saurait constituer une
négociation mais plutôt tout le contraire 1).
25. Pour l'examen de cette exception,il convient de rappeler que,
d'après la Cour permanente comme d'aprèsla Cour actuelle,lorsque
les parties à un différend ont toutes deux définileur attitude et

clairement indiqué qu'elles la maintiennent sans aucune possibilité
de modification ni de compromis et que l'on est ainsi parvenu à
une impasse, on peut raisonnablement en conclure que le différend
ne peut êtreréglépar négociations. Aucune forme ou procédure
particulière n'est requise pour les négociations et il n'y a pas non
plus d'importance à attacher à leur durée. (Affairedes Concessions
Mavrommatis en Palestine, C. P. J. I., sérieA no2, p. 13 ; affaires du

Sud-Ouest africain, C. I. J. Recueil 1962, p. 345.)
26. En l'espèce, le conflit d'opinions aigu entre les deux Parties
est nettement apparu au début de 1961 et des efforts ont étéfaits
pour leréglerdans le cadre des Nations Unies. A lasuite del'annonce
des résultats du plébiscite des II et 12 février 1961, le Gouverne-
ment camerounais a distribué aux Membres de l'Assemblée générale,

fin mars 1961, la brochure (déjàcitée)dite clivreblanc » qui conte-
nait un exposé détaillédes thèses du Cameroun et des motifs
juridiques sur lesquels elles se fondent. Les griefs qui y étaient
formuléscontre le Royaume-Uni, autorité administrante, reposaient
essentiellement sur le manque de c(respect pour la personnalité
camerounaise ))et sur la non-exécution de la résolution 1473(XIV)
du 12 décembre 1959 qui recommandait de prendre des mesures

((en vue d'une plus ample décentralisation des pouvoirs administra-
tifs et de la démocratisation effective du système d'administration
locale dans la partie septentrionale du Territoire sous tutelle ))
ainsi que «pour effectuer la séparationadministrative du Cameroun
septentrional et de la Nigéria )),cette séparation devant être
((achevée le ler octobre 1960 ». D'autres griefs concernaient des
((irrégularités »et 1'«absence de garanties ))((dans la préparation du

36plébiscite », cpendant la campagne du plébiscite » et «dans le
déroulement du plébiscite 1).Le Gouvernement du Royaume-Uni,
dans une lettre adresséele IO avril 1961au président de la Quatrième
Commission de l'Assembléegénéraleet également citée ci-dessus,
a défini sa position en réponse à ces griefs. Les thèses opposées
des Parties ont étéde nouveau énoncéesau cours des discussions
et débats aux Nations Unies. Dans une déclaration faite à la

Quatrième Commission, le ministre des Affaires étrangères du
Cameroun s'est longuement plaint de l'inobservation par le Roy-
aume-Uni, en tant qu'autorité administrante, de certaines dispo-
sitions de l'accord de tutelleet il a cité expressément les articles 3,
5, 6, 7 et IO de cet accord, ainsi que l'article76 de la Charte et
certaines résolutions de l'Assemblée générale.La négociation par
cette méthode reconnue, dite de la diplomatie parlementaire, n'a
pu régler le différendentre les Parties, ce qui a menéà une impasse.

- z7.-~n outre, des notes diplomatique; sur l'objet du différend
ont étééchangées les I~~ et 26 mai 1961, juste avant l'expiration
de l'accord de tutelle intervenue en ce qui concerne le Cameroun
septentrional le I~~ juin 1961, conformément à ce qu'avait décidé
la résolution 160s (XV). Il importe peu que l'on doive considérer
cet échange de notes comme un autre élémentde négociation ou
estimer simplement qu'il se rattache à la proposition tendant à
porter le différenddevant la Cour aux fins d'un règlement judiciaire.
Ce qui est certain, c'est qu'il confirme la nette opposition de vues
entre les deux Parties et le fait que l'on était déjà dansune impasse.
Rien ne peut êtreplus clair que l'impossibilitéde régler le différend

par d'autres négociations dans laquelle on s'est ensuite trouvé,
surtout si l'on tient compte de l'adoption antérieure de la résolution
1608 (XV) par l'Assemblée générale.

2s. Cette résolution de l'Assemblée généraleest un facteur
déterminant en l'espèce.Elle a étéadoptée à la majorité requise à
la 99gmeséance plénière,avec l'assentiment de l'autorité adminis-
trante et la République du Cameroun votant négativement, sur
un rapport de la Quatrième Commission dans lequel étaient
longuement discutées les questions concernant l'application des
résultats des plébiscites orgariisés dans les parties septentrionale
et méridionale du Cameroun sous administration britannique et
l'expiration de l'accord de tutelle du13 décembre 1946. Dans cette
résolution, après avoir rappelé dans un préambule les résolutions

pertinentes qu'elle avait adoptées antérieurement et après avoir
déclaré qu'elleavait examinéle rapport du commissaire des Nations
Unies aux plébiscites sur les deux plébiscites organisés au Came-
roun septentrional et au Cameroun méridional en février 1961,
ainsi que le rapport du Conseil de tutelle à ce sujet, l'Assemblée
s'exprimait ainsi:

39 ((Prend acte des résultats des plébiscites selonlesquels:
a) La population du Cameroun septentrional a décidé, à une
majorité importante, d'accéder à l'indépendanceen s'unissant à la
Fédérationde Nigériaindépendante;

b) La population du Cameroun méridional a égalementdécidé
d'accéder à l'indépendance en s'unissant à la République du
Cameroun indépendante ;
3. Estime que, les populations des deux parties du Territoire
sous tutelle ayant librement exprimé, au cours d'un scrutin secret,
leurs aspirations au sujet de leur avenir respectif conformément
aux résolutions 1352 (XIV) et 1473 (XIV) de l'Assembléegénérale,
les décisions qu'elles ont prises par des moyens démocratiques,
sous la surveillance de l'organisation des Nations Unies, doivent
immédiatement êtremises en Œuvre;
4. Décid qeue, les plébiscites ayant eu lieu séparémentavec des
résultats différents, l'Accordde tutelle du13 décembre1946 relatif
au Cameroun sous administration du Royaume-Uni prendra fin,
conformément à l'alinéab de l'Article 76 de la Charte des Nations
Unies et en accord avecl'Autorité administrante, dans les conditions
suivantes:
a) En ce qui concerne le Cameroiln septentrional, le lerjuin 1961,
au moment où le Cameroun septentrional s'unira à la Fédération
de Nigéria entant que province séparée dela Régiondu IVordde la
Nigéria;
b) En ce qui concerne le Cameroun méridional,le I~~octobre 1961,
au moment où le Cameroun méridionals'unira à la République du
Cameroun. ))

La résoliition se terminait eninvitant :

«l'Autoritéadministrante, le Gouvernement du Cameroun méridio-
nal et la République du Cameroun à entamer d'urgence des pour-
parlers afin de prendre, avant le I~~ octobre 1961, les dispositions
nécessairespour que soient mises en Œuvre les politiques concertées
et déclarées desparties intéressées)).
29. Les dispositions ainsi prescrites ont été prises et les décisions
de l'Assemblée générale contenues dans ladite résolution ont été
dûment appliquées, de sorte que le Cameroun septentrional fait
aujourd'hui partie de la Fédération de Nigéria souveraine et

indépendante et que le Cameroun méridional fait de son côté partie
dela République fédéraledu Cameroun souveraine et indépendante.
30. Il semble doncnet que toutela question de la tutelle du Came-
roun autrefois sous administration britannique a étédéfinitivement
et complètement régléeet que l'accord de tutelle pour ce territoire
a irrévocablement pris fin le I~~ juin 1961 en ce qui concerne le
Cameroun septentrional, comme il a déjà étédit, et le ler octobre

1961 en ce quirconcerne le Cameroiin méridional.
31. Or, en réglant l'ensemble de la question de la tutelle sur le
Cameroun, cette résolution 1608 (XV) a, par voie d'implication et
de conséquence nécessaires, tranché également le différend entre les

40Parties. Ce règlement tombe donc sous le coup de la limitation
apportée à l'application de l'article 19 par les mots (réglépar ...

un autre moyen ». Il est à noter que ces mots constituent une
addition importante à l'article 19 dont le texte est, à part cela,
identique en substance à celui de l'article 12 de l'ancien Mandat
conféréà S. M. britannique sur le Cameroun. La situation qui en
résulte est la suivante: les négociations entre les Parties n'ont pu
résoudre le différend, mais il a en fait ététranché par la résolution
1608 (XV); de même, les griefs du demandeur quant aux irré-

gularités qui auraient affecté le plébiscite des 11-12 février 1961
ont été régléspar cette résolution qui a, tout au contraire, pris
formellement acte des résultats du plébiscite.
32. On a soutenu cependant que l'expression ((réglépar ..un
autre moyen ))à l'article 19 ne peut s'entendre d'un règlement
par un organe des Nations Unies; on a dit que, comme le terme

((négociations », elle doit s'entendre d'autres moyens de règlement
direct entre les parties à un différend donné tels que l'enquête,
la médiation, la conciliation, l'arbitrage, le règlement judiciaire,
etc., lesquels sont énumérés à l'article 33 de la Charte, dans le
chapitre VI sur le règlement pacifique des différends. Mais quand
on lit cette disposition, on voit que la liste comprend aussi le (re-
cours aux organismes ou accords régionaux 1)ou (d'autres moyens

pacifiques de leur choix 1).Il est manifeste qu'ici l'accent est mis
sur le caractère ((pacifique ))du moyen que les parties doivent
choisir pour régler leur différend; aucun moyen de cette nature
n'est exclu avant le renvoi du différend devant les Nations Unies.
En d'autres termes, 1e.règlement par l'Assembléegénéraleest l'un
des moyens implicitement reconnus. Les débats confirment cette
opinion.

33. Une sous-commission spéciale de la Quatrième Commission
de l'Assemblée générale a discuté, en décembre 1946, une propo-
sition chinoise tendant à modifier la clause juridictionnelle (art.
XVI) que comportait le projet d'accord de tutelle pour le Samoa
occidental présenté pour approbation par la Nouvelle-Zélande et
à modifier un article similaire figurant dans les sept autres projets
d'accord de tutelle présentéspar le Royaume-Uni, en ce qui con-

cerne le Cameroun, ou par d'autres Etats, en ce qui concerne
d'autres territoires; le but de cet amendement était de rendre obli-
gatoirele renvoi au Conseil de tutelle, aux fins de règlement, de tous
les différends visés par cette disposition et d'autoriser le Conseil
de tutelle (si besoin est » à ((renvoyer l'affaire à la Cour interna-
tionale de Justice pour avis consultatif ))Cette proposition a été
retirée après que les autres orateurseurent préciséque le règlement

d'un différend avec l'autorité administrante par le Conseil de
tutelle n'était pas exclu dans le cadre de la clause juridictionnelle
proposéeet qu'il s'effectuerait ((en vertu de la procédure normale du
Régime de tutelle plutôt qu'en vertu d'une clause telle que lapropose le représentant chinois )) (Nations Unies, Documents
officiels de la seconde partie de la première session de l'Assemblée
générale, Quatrième Commission, Tutelle, Deuxième partie -
Procès-verbaux des séancesde la Sous-Commission I- pp. 85 à 88).

Ceci montre nettement que l'expression (par négociations ou par
un autre moyen analogue 1)devait, de l'avis de tous, s'entendre
aussi d'un règlement par le Conseil de tutelle et donc également par
l'Assemblée générale. Lemembre de phrase ((par négociations ou
un autre moyen ))qui figure à l'article 19 de l'accord de tutelle
pour le Cameroun sous administration britannique semble se
référer à une gamme encore plus large de moyens de règlement,
si cela est possible.

34. On a également dit que tout moyen autre que les négociations
dont il est question à l'article 19 doit résulter du choix volontaire
des parties et qu'en l'espèce le simple fait que 1'Etat demandeur
prie la Cour de trancher le différend indique qu'il ne consent pas,
quant à lui, à ce mode de règlement. Mais on se rappellera que le
Gouvernement de la République du Cameroun ne s'est pas borné à
distribuer aux Membres de l'Assemblée généraleson livre blanc
concernant les griefs camerounais contre le Royaume-Uni en tant

qu'autorité administrante du Cameroun septentrional; ses représen-
tants, notamment le ministre des Affaires étrangères,ont librement
et de leur plein gré participéaux débats de la Quatrième Commis-
sion et de l'Assemblée générale sur les questions quifont maintenant
l'objet du différend avec le défendeur; ils ont pris part au vote
final sur la résolution 1608 (XV). Le Cameroun avait visiblement
escompté un règlement favorable à ses vues, selon lesquelles les
Nations Unies, tenant compte des irrégularités alléguéespar lui,
ne devaient pas prendre acte des résultats du plébiscite au Came-

roun septentrional. Certes le vote qui a eu lieu à l'Assemblée
générale a déçu le Cameroun, mais il ne fait aucun doute qu'au
départ le choix de ce mode de règlement était entièrement volon-
taire. Le fait que le demandeur ait plus d'une fois déclaré -
comme on le verra ultérieurement - qu'il acceptait le règlement
résultant de la résolution 1608 (XV) est une confirmation de plus
qu'il considère une décision de l'Assemblée générale commeun
moyen de règlement.

35. On a soutenu aussi que la résolution 1608 (XV)n'a régléque
la question de la mise en euvre des résultats des plébiscites et
cellede l'expiration de l'accord de tutelle,sans apporter de réponseau
grief formulé contre le Royaume-Uni, dans la requêteprésentement
soumise à la Cour, de n'avoir pas respecté les obligations incombant
à l'autorité administrante en vertu de l'accord de tutelle. Pour
reprendre ses propres termes, le conseil du demandeur a affirméque :

((lesdébats qui ont conduit à la résolution1608n'ont absolument
pas porté surla question préciseaujourd'hui soumise à la Cour, à savoir celle dedire si l'autorité administrantea correctement inter-
prétéet appliqué certainesdispositionsde l'accord detutell».

36. Mais il faut noter que la requêtepuis le mémoireont essen-
tiellement repris les griefs articulésdans le livre blanc qui avait été
diffusé versla fin de mars 1961 parmi les représentants des Membres
des Nations Unies à l'Assembléegénéraleet aux allégationsduquel
le représentant du Royaume-Uni avait répondu par une lettre de
réfutation adressée le IO avril 1961 au président de la Quatrième
Commission et distribuée aux Membres de l'Assemblée générale.
Comme je l'ai déjàdit, les questions soulevéesdans ces deux docu-
ments ont étéd . iscutéesà la Quatrième Commission, aux séances
de laquelle les mêmes griefs ont étérépétéspar le ministre des
Affaires étrangèresde la République du Cameroun. Les débats ont
étérésumésdans le rapport du Conseil de tutelle à l'Assemblée
générale,rapport dont il a étépleinement tenu compte par 1'Assem-

bléelors de l'adoption de la résolution1608(XV). La seuledifférence
que comportent les observations du demandeur tient à l'addition
des articles 3 et7 de l'accord de tutelle à la liste des dispositions
que l'autorité administrante est accuséed'avoir violées.Toutefois
cette addition ne modifie par l'attitude générale desdeux Parties
devant la Cour et n'affecte en rien la principale question actuelle-
ment à l'examen, celle de la compétence.

37. En résumé,la thèse du demandeur consiste essentiellement
à dire que l'on ne peut considérer la résolution 1608 (XV) comme

ayant réglé le différendentre le Cameroun et le Royaume-Uni.
On affirme que cette résolution se borne à prononcer la levée
de la tutelle et n'a, dans aucune de ses dispositions, réle différend
dont la Cour est maintenant saisie.
38. Bien sîlr, on peut dire que le différend enquestion n'a pas été
réglépar cette résqlution puisqu'il met en jeu non pas les Nations
Unies, mais deux Etats à titre individuel. Ce ne serait là pourtant
qu'une attitude superficielle et formaliste. Certes les Parties au
différend sont distinctes de l'Assemblée générale ou de l'ensemble

des autres Membres des Nations Unies, mais le facteur déterminant
reste que l'objet du différend s'identifieen partie ce sur quoi porte
globalement la question de la tutelle du Cameroun, définitivement
régléepar le résolution 1608 (XV). L'autorisation accordée par
l'Assembléegénéraled'organiser les plébiscites, l'approbation des
résultats des plébiscites et la décisionde mettre fin à l'accord de
tutelle pour le Cameroun sous administration britannique règlent
la question de la tutelle dans son ensemble. Toute cette séried'actes
consacrésdans ladite résolutionétaitmanifestement fondéesur cette
prémisse que l'autorité administrante avait rempli les obligations
qu'elle avait assuméesà l'égarddu territoire sous tutelle et de ses

43habitants comme à l'égard des Nations Unies. C'est un truisme de
dire que, une fois régléetoute la question de la conformité ou de la
non-conformité du comportement de l'autorité administrante avec
les dispositions de l'accord de tutelle, aucune question ne peut plus
se poser quant à la conformité ou à la non-conformité de ce com-
portement avec certaines dispositions dudit accord. Le tout com-
prend nécessairement la partie.

39. La situation serait différentesi le demandeur se plaignait de
la violation de certains droits conférés enpropre à lui-même ou à
ses ressortissants par l'accord de tutelle. Une telle question aurait
pu en effet ne pas être nécessairement résolue dans le cadre d'un
règlement de l'ensemble des problèmes concernant le point de
savoir si l'autorité administrante a agi dans l'intérêtgénéraldu
territoire sous tutelle et de ses habitants conformément aux obli-
gations que l'accord lui imposait. Mais en l'espèce le demandeur
se borne à accuser le Royaume-Uni de n'avoir pas respecté ses

obligations envers le territoire du Cameroun septentrional et ses
habitants. L'intérêt dont le demandeur cherche la protection
judiciaire est un intérêtcommun qui n'appartient pas seulement au
premier chef aux Nations Unies ou à 1'Etat demandeur mais qui
appartient à tous les autres Membres de l'Organisation. Une fois
tranchées et régléestoutes les questions concernant cet intérêt
commun - d'où la réalisation de la fin essentielle de la tutelle au
Cameroun sous administration britannique conformément à l'arti-
cle 76b) de la Charte, d'où aussi l'expiration de l'accord de tutelle
du 13 décembre 1946 -, il en résulte nécessairement que l'objet
du présent différenda en fait été tranchéet réglédu mêmecoup.

40. Les raisons en sont évidentes et n'appellent pas un long
développement. Lorsque l'Assembléegénérale adécidéd'adopter
la résolution 1608 (XV), elle n'a pu manquer de tenir compte de
toutes les questions et de tous les problèmes en cause. Le texte de
cette résolution aété préparépar le Conseil de tutelle, puis revisé,
après discussion, par la Quatrième Commission. Comme je l'ai
déjà dit, lorsqu'il a étérecommandé sous sa forme définitive à
l'Assemblée générale pour adoption, il était accompagné d'un
rapport de la Quatrième Commission qui résumait les débats et les

différents points de vue des délégués nonseulement sur le projet
proposé mais aussi sur les questions controversées, y compris les
vues du représentant de la République du Cameroun. Le fait que la
résolution 1608 (XV) elle-mêmen'a cité aucun des griefs du Gouver-
nement camerounais contre l'autorité administrante ne signifie
nullement qu'en adoptant ce texte l'Assembléegénéralen'ait pas
étéau courant des griefs du demandeur ou de son opinion sur la
manière dont le Royaume-Vni avait administré le territoire du
Cameroun anciennement sous tutelle. 41. Au surplus, il faut rappeler, sans pour cela aborder l'examen
de questions de fond, que l'une des fins essentielles du régime de
tutelle expressément définies à l'article76 b) de la Charte est de
favoriser le progrès des populations des territoires sous tutelle,
ainsi que

rleur évolution progressive vers la capacité à s'administrer eux-
mêmesou l'indépendance,compte tenu des conditions particulières
à chaque territoire eàsespopulations [et]des aspirationslibrement
expriméesdes populations intéressées )).
En prenant les mesures nécessaires pour mettre en Œuvre les résul-
tats des plébiscites en tant qu'ils représentaient les aspirations
librement exprimées des populations du territoire sous tutelle du
Cameroun, l'Assemblée générale s'acquittait de l'une de ses obliga-

tions les plus solennelles, de même qu'elleexerçait l'une de ses plus
importantes fonctions aux termes de l'article 85 de la Charte. Cet
article lui donnait le droit de subordonner à la réalisation rapide de
la fin essentielle indiquée comme le but premier du régimedetutelle
le règlement de tous les autres problèmes relatifs à l'administration
d'un territoire sous tutelle. Il serait illogique de supposer, de même
qu'il aurait été contradictoire pour l'Assemblée généraled'estimer,
que l'autorité administrante n'a pas respecté l'engagement pris
dans l'accord de tutelle de favoriser l'évolution des populations du
territoire vers la capacité de s'administrer elles-mêmesou l'indé-
pendance, alors que l'on était en train de décider que la fin essen-
tielle de la tutelle avait étéatteinte et que, par conséquent, l'on
pouvait et devait mettre fin à l'accord de tutelle.

42. Le demandeur a soutenu en outre que la résolution 1608(XV)
a étéadoptée par l'Assemblée généralepour réglerla questionde la
tutelle du Cameroun sur le plan politique, en fonction de considé-
rations inspirées par l'opportunité et le réalisme politiques et non
sur le plan du droit; et que, par conséquent, toutes les questions
juridiques, comme celles que soulèveprésentement la République du
Cameroun, restent à régler judiciairement par la Cour en vertu de
l'article19 de l'accord de tutelle.

43. Cette thèse est, à mon avis, contraire à l'intention, au but, à
la structure et au fonctionnement de tout le régime de tutelle tel
qu'il est prévu dans les chapitres XII et XII1 de la Charte. Les
Nations Unies ont la responsabilité de l'administration et de la
surveillancede tous les territoires sous tutelle. L'Assembléegénérale,
avec la coopération et l'assistance du Conseil de tutelle, exerce, en
vertu de l'article 85, toutes les fonctions des Nations Unies en ce
qui concerne les accords de tutelle relatifsà toutes les zones qui ne
sont pas désignées comme stratégiques. L'article 85 prévoyant

45expressément que ces fonctions comprennent l'approbation des
termes des accords de tutelle et de leur modification ou amende-
ment, il va sans dire qu'elles englobent aussi la fonction consistant
à mettre fin aux accords avec le concours des autorités adminis-
trantes intéressées; car la cessation des accords de tutelle résulte

implicitement de la réalisation de la fin essentielle que constitue
l'autonomie ou l'indépendance de chacun desterritoires soustutelle.
On ne saurait prétendre que la Charte ne donne pas à l'Assemblée
généralele droit de mettre fin à un accord de tutelle pour un terri-
toire non stratégique de façon définitive et en dernier ressort, en
réglant notamment toutes les questions juridiques qui peuvent
avoir étésoulevées au sujet de l'expiration de l'accord: cela revien-
drait en effet à dire qu'en dépit de la disposition expresse de
l'article 85, l'Assemblée générale n'est pas habilitée à régler une
fois pour toutes l'ensemble des questions relatives à un territoire
sous tutelle ou à ses populations; cela équivaudrait à affirmer que

tout règlement effectuépar l'Assembléedans l'exercice des fonctions
que lui confère la Charte doit êtreconsidérécomme provisoire et
sujet à revision par la Cour en ce qui concerne les questions juri-
diques qu'il comporte. Une telle interprétation introduirait un
élémenttrès grave d'incertitude dans tous les actes de l'Assemblée
généraledestinés à mettre fin à un accord de tutelle et tendrait à
miner le but premier et les principes essentiels du régime de tutelle.
44. Il ressort de l'explication supplémentaire suivante que le
conseil du demandeur s'est rendu compte du caractère insoutenable

de la demande formulée à l'origine:
(Le Cameroun ne demande pas à la Cour de critiquer les Nations
Unies; il ne lui demande pas de dire que les Nations Unies ont eu
tort de mettre finà la tutelle; il ne lui demande pas de prononcer
l'annulation de la résolution 1608. Cela, bien entendu, la Cour
ne serait pas compétente pour le iaire, pas plus qu'elle ne le serait
pour rouvrir la tutelle ou pour forger un nouvel accord de tutelle.
La situation est, somme toute, très simple. La décisionde 1'Assem-
bléegénérale est définitive, (conclusive »,dans sa sphère propre ..))

Il est dit plus loin, dans le même passage:
((LeRoyaume-Uni raisonne et formule ses objections comme si le
différendportait sur la question de savoir si l'Assembléegénérale
avait le droit de mettre fin à la tutelle ou a bien fait de mettre
finà la tutelle en 1961. Mais tel n'est pas l'objet du différend, car
nul ne conteste qu'il appartenaità l'Assembléegénérale,en accord
avec l'autorité administrante, de mettre finà la tutelle, comme elle
a décidéd'approuver l'accord de tutelle en 1946. Le Royaume-Uni
raisonne et formule ses objections comme si nous demandions à la
Cour de rouvrir le débat clôturéaux Nations Unies le 21avril 1961.
Si nous lui demandions cela, elle devrait, bien entendu, se déclarer
incompétente, car il n'appartient à l'organe judiciaire ni de décider
de mettre un territoire sous tutelle ni de déciderde mettre fiàune
tutelle ni de rouvrir un régimede tutelle.»

46 45. Cette déclaration clarifie l'attitude du demandeur sur la
question examinée. Il est certain qu'il reconnaît comme définitive,
(<conclusi »,la résolution 1608 (XV) qui a donné effet aux plébis-
cites des populations du Cameroun septentrional et méridional et
mis fin à l'accord de tutelle du 13décembre 1946. Quelle est donc la
véritable nature de la demande? Quelle est la question précise que
le demandeur prie la Cour de trancher? La réponse est fournie par
l'explication suivante donnée par le conseil du demandeur:

(...mais rien ne fait obstacle à ce que dans le cadre de ses attri-
butions à elle, qui sont des attributions judiciaires, la Cour se
prononce sur le différendqui séparele Cameroun et le Royaume-Uni
sur la question de savoir si, depuis le début jusqu'à la fin de la
tutelle, le Royaume-Uni en tant qu'autorité administrante a correc-
tement interprétéet appliquéles dispositions de l'accord de tutelle,
car ce différend-là,l'Assembléegénéralene l'a, en aucune manière,
réglé».
46. Mais, mêmeainsi posée,la question ne relève pas de la com-
pétence de la Cour. En effet, indépendamment du fait que le règle-

ment général del'ensemble de la tutelle du Cameroun par la résolu-
tion 1608 (XV) implique nécessairement le règlement du différend
juridiqueen cause -fait que j'ai établiplus haut -, on doit prendre
en considération les procès-verbaux des débats du Conseil de tutelle
et de l'Assemblée généraleau sujet du territoire sous tutelle du
Cameroun qui contiennent les rapports annuels de l'autorité admi-
nistrante, les questionnaires, les pétitions des habitants du territoire,
les rapports des missions de visite des Nations Unies et du Comité
chargé des unions administratives et les résolutions du Conseil de
tutelle et de l'Assemblée généraleprenant note desdits rapports ou
recommandant à l'autorité administrante certaines mesures pour
la mise en Œuvre des dispositions de l'accord de tutelle eu égard

aux fins essentielles du régime de tutelle. Chaque année, au sein
du Conseil de tutelle et de l'Assemblée générale,l'examen du rapport
annuel de l'autorité administrante donnait lieuà des débats sur le
point de savoir si, et dans quelle mesure, l'administration du
territoire sous tutelle s'était conformée aux obligations particulières
contenues dans l'accord de tutelle et l'on adoptait des recomman-
dations tendant à améliorer cette administration.

47. Il faut également observer que, lorsque l'Assemblée générale
et le Conseil de tutelle examinaient la question de savoir si l'auto-
rité administrante avait ou n'avait pas respecté les obligations
énoncéesdans I'acc~rd de tutelle, ils ne limitaient pas leur attention
47aux dispositions de la Charte et de l'accord de tutelle mais tenaient
également compte des recommandations que des résolutions anté-
rieures avaient invité l'autorité administrante à appliquer. Ces
recommandations n'étaient pas toujours uniquement fondées sur
des dispositions expresses de l'accord de tutelle; il leur arrivait
souvent d'interpréter, modifier ou compléter les termes de l'accord
de tutelle. L'Assemblée généraleétait autorisée par l'article 85 de
la Charte à le faire et elle le faisait en vue de réaliser et de réaliser
aussitôt que possible le but primordial, la fin essentielle de la tutelle,
qui était et qui est l'accession à l'autonomie ou à l'indépendance
de chacun des territoires sous tutelle et de ses habitants. Ainsi,

la résolution 226 (III) du 18 novembre 1948 recommandait aux
autorités administrantes (cDe prendre toutes les dispositions
possibles en vue de hâter l'évolution progressive des Territoires
sous tutelle qu'elles administrent vers la capacité à s'administrer
eux-mêmes ou l'indépendance 1)La résolution 320 (IV) du 15 no-
vembre 1949 approuvait pleinement le Conseil de tutelle de recom-
mander aux autorités administrantes l'adoption de mesures en vue
de hâter l'évolution des territoires sous tutelle vers la capacité à
s'administrer eux-mêmes ou l'indépendance conformément aux
fins énoncées à l'alinéa b) dc l'articl76 de la Charte. La résolution
558 (VI) du 18 janvier 1952 demandait des renseignements sur les
mesures prises ou envisagées pour conduire les territoires à l'auto-
nomie ou à l'indépendance et notamment sur le délaijugé nécessaire
pour mener à bien lesdites mesures et atteindre l'objectif fina- ce

qui fut répétédans la résolution 858 (IX) du 15 décembre 1955.
Le but de tous ces actes était fondamentalement que l'autorité
administrante de chaque territoire sous tutelle s'acquittât fidèle-
ment des obligations imposées par l'accord de tutelle, et cela en
conformité avec les résolutions adoptées spécialement par le Conseil
de tutelle et l'Assembléegénérale. l

48. Considérons aussi, par exemple, la question des unions ad-
ministratives affectant les territoiressous tutelle, qui constitue,
en l'espèce, l'un des griefs du demandeur eu égard à l'article5,
alinéa b), de l'accord de tutelle. La résolution 224 (III) du 18 no-
vembre 1948 a (fait sienne ))l'observation du Conseil de tutelle
qu'une union administrative doit se limiter strictement, à la
fois en nature et en degré, au domaine administratif, et que sa mise
en vigueur ne peut avoir pour effet de créer de conditions qui en-
traveraient dans les domaines politique, économique et social et
dans le domaine de l'instriiction Ie progrès du Territoire en tant
que tel )).Cette résolution recommandait également, entre autres
mesures, que le Conseil de tutelle:

« c) Demande à la Cour internationale de Justice, chaque fois
qu'il y aura lieii, un avis consultatif sur le point de savoir si ces
unions entrent dans le cadre tracé par les stipulations de la Charte et les dispositions des Accords de tutelle tels que ceux-ci ont été
approuvés par l'Assembléegénéraleet sont compatibles avec ces
stipulations et ces dispositions;
d) Invite les Autorités chargées de l'administration à fournir
au Conseil les renseignements relatifs aux unions administratives
qui faciliteront l'enquête du Conseil mentionnée ci-dessus;
e) Adresse un rapport spécial à la prochaine session ordinaire
de l'Assembléegénéralesur les résultats de l'enquêtedu Conseil et
sur les mesures qu'il a prise))

La résolution 326 (IV) du 15 novembre 1949
aRecommande au Conseil de tutelle de terminer son enquête,en
s'inspirant tout particulièrement de ce qui suit:

b) Il est souhaitable que, si la communication sous la forme d'un
rapport distinct de renseignements clairs et précisd'ordre financier,
statistique ou autres, relatifà un Territoire sous tutelle devenait
impossible par suite de la constitution d'une union administrative,
l'Autorité administrante compétente accepte, de la part du Conseil
de tutelle, la surveillance que le Conseiljugerait nécessaired'exercer
sur l'administration -unifiéeafin de s'acquitter, comme il convient,
des hautes responsabilités que lui confèrela Charte ..))

La même résolution recommandait au Conseil de tutelle
((de terminer l'enquête à laquelle il procède conformément aux
dispositions de la résolution 224 (III) de l'Assembléegénéraleet
de la présente résolution, de soumettre à l'Assembléegénérale,
lors de sa prochaine session ordinaire, un rapport spécialsur les
résultats de cette enquête, ainsi que sur les mesures qu'il aura
prises et tout particulièrement sur toutes garanties qu'il estimerait
nécessaire de requérir desAutorités administranies intéressées,de
continuer de même à observer l'évolution de ces unions et de
présenter un rapport à l'Assemblée généralleors de chacune de ses
sessions ordinaires)).

49. Les résolutions de l'Assemblée généralequi viennent d'être
citées ont été complétées au cours des années par d'autres résolu-
tions sur le même sujet des unions administratives affectant des
territoires sous tutelle; citons ainsi la résolution 648 (VII) du
20 décembre 1952, qui est l'un des actes de l'Assemblée générale
dontla portée est la plus grande. Elle énumère les «Facteurs dont
il convient detenir compte pour décider si un territoire est, ou n'est
pas, un territoire dont les populations ne s'administrent pas encore
complètement elles-mêmes » et contient en annexe une liste des
((Facteurs permettant de conclure qu'une population a accédé à

l'indépendance ou à toute autre forme d'autonomie séparée ».
Pour sa part, la résolution 1473 (XIV) du 12 décembre 1959 a
spécialement trait à la partie septentrionale du territoire sous tu-
telle du Cameroun sous administration britannique. Elle dispose
entre autres que l'Assemblée générale: (6. Recommande que les mesures voulues soient prises sans retard
en vue d'une plus ample décentralisationdes pouvoirs administratifs
et de la démocratisationeffective du systèmed'administration locale
dans la partie septentrionale du Territoire sous tutelle;
7. Recommande que l'Autorité administrante prenne sans retard
desmesures pour effectuerla séparation administrative du Cameroun
septentrional et de la Nigéria,et que cette séparation soit achevée
lexe* octobre 1960;
8. Prie l'Autorité administrante de faire rapport au Conseil de
tutelle, lors de sa vingt-sixième session,au sujet de ladite séparation,
et prie le Conseil de soumettre à l'Assembléegénérale,lors de sa
quinzième session, un rapport sur cette question. »
50. La résolution 1608 (XV) du 21 avril 1961 par laquelle l'As-
semblée générale apris acte des résultats des plébiscites dans les
parties septentrionale et méridionale du territoire sous tutelle du
Cameroun sous administration britannique n'a été que le point
culminant d'une série d'autres résolutions traitant de diverses
questions d'ordre juridique aussi bien que d'ordre politique et
administratif et dont le but était la prompte réalisation de I'objec-

tif essentiel de la tutelle et la levée rapide de ce régime.
51. Par conséquent, lorsque l'objectif final d'une tutelle est
atteint et que l'accord de tutelle a pris fin, toutes les questioris
relatives au respect par l'autorité administrante des obligations
qui lui incombaient en vertu de cet accord sont manifestement
considéréescomme ayant aussi étéréglées.Tels étaient certaine-
ment l'intention et le but de la résolution 1608 (XV) qui est un acte
juridiquement valable de l'organe compétent.

52. Ce que le requérant demande en fait à la Coiir, c'est d'éclair-
cir certains points de droit relatifs à l'administration de l'ancien
territoire sous tutelle du Cameroun administré par le Royaume-LTni,
de les dissocier du règlement d'ensemble de la question générale
de la tutelle, y compris l'expiration de l'accord de tutelle, et de
dire et juger que, dans son administration passée du territoire

sous tutelle, le Royaume-Cni n'a pas respecté certaines des obliga-
tions découlant pour lui de l'accord. En d'autres termes, il est
demandé à la Cour de rendre un jugement déclaratoire tranchant
des points de droit que l'on prétend relatifs à l'interprétation ou
à l'application de l'accord de tutelle mais qui ont été en réalité
examinés en substance par l'Assemblée généraleannée après an-
néedans le passé et ont fait l'objet d'une séried'actions de sa part
au moyen de recommandations ou de décisions. En outre, l'accord
de tutelle sur lequel se fondent les griefs du demandeur a valable-
ment pris fin et le territoire sous tutelle a étéproclamé indépendant
conformément aux aspirations librement exprimées de ses popula-
tions. 53. Les précédents citéspar le conseil du demandeur à l'appui
de sa demande de jugement déclaratoire n'étayent pas sa thèse.
Il suffit d'examiner les plus importants d'entre eux pour constater
tout de suite que les arrêts ou avis consultatifs rendus en ces di-

verses occurrences par la Cour - qu'ils aient eu ou non un caractère
déclaratoire - concernaient tous des controverses ou différends
relatifs à des droits ou intérêtsjuridiques concrets et ont eu un
effet direct et décisifsur la situation juridique des parties en cause.
54. Ainsi, dans l'affaire relative à Certains intérêts allemandsen
Haufe-Silésie polonaise (C. P. J.I., sérieA no 6), la Cour a passé
outre à ((l'objection tirée du caractère abstrait de la question »
et elle a dit que ((Des stipulations nombreuses prévoient la juri-
diction obligatoire de la Cour pour les questions d'interprétation

et d'application d'un traité, et ces clauses, parmi lesquelles se
trouve l'article 23 de la Conventionde Genève, semblent viser aussi
des interprétations indépendantes d'applications concrètes »; mais
l'arrêtde la Cour, quoique se présentant comme un énoncédu droit
applicable, visait directement et entendait régler les différends
entre les parties au sujet de la situation juridique des biens, des
droits et des intérêtsallemands en Haute-Silésie. La Cour n'aurait
pu être saisie, quant à l'interprétation des dispositions pertinentes
d'un traité, d'une demande portant sur un cas plus concret.

55. Cela est en substance également vrai de l'arrêtrendu dans
l'affaire de l'Usine de Clzorz6w(compétence) (C. P. J. I., sérieA
no g),qui a énoncé:
((C'estun principe de droit international que la violation d'un
engagemententraîne l'obligationderéparer dansune formeadéquate.
La réparation est donc le complémentindispensable d'un manque-
ment à l'application d'une convention, sans qu'ilsoit nécessaireque
cela soit inscrit dans la convention même. »

Cette déclaration peut sembler abstraite dans sa forme mais elle
a donnéd'une convention internationale alors encore en vigueurune
interprétation juridique immédiatement applicable à un cas con-
cret - le droit de propriétésur l'usine de Chorzow -, qui avait
été tranché en faveur du demandeur en mêmetemps que les autres
demandes dans l'affaire relative à Certains intérêts allemandsen
Haute-Silésie polonaise.
56. La décision rendue par la Cour permanente dans l'affaire

de l'Interprétation du statut du territoire de Memel se rapportait à
un différendexistant, et même à l'état aigu, entre le Royaume-Uni,
la France, l'Italie et le Japon, d'une part, et la République de Li-
thuanie, de l'autre, (touchant la conformité de certains actes de
ce dernier Gouvernement avec le Statut du Territoire de Memel,
annexé à la Convention du 8 mai 1924 relative à Memel ».Certes,
après avoir souligné ((l'inconvénient ))provenant de ce que cer-
tains points étaient énoncéspurement in abstracto, sans aucune
référenceaux circonstances dans lesquelles le litige s'est produit »,

51 la Cour s'est néanmoins reconnue compétente et a tranché les six
questions soumises par les demandeurs. Mais elle l'a fait non seule-
ment en vue d'apporter une solution à la situation confuse et in-
quiétante qui régnait dans le territoire, mais aussi pour répondre à

cl'intention [.. des Quatre Puissances ...]d'obtenir une inter-
prétation du Statut [du Territoire de Memel]qui puisse à l'avenir
servir de guide» (C.P. J. I., sérieA/B no49, p. 337).

En d'autres termes, bien que la Cour ait considéréque certaines
des questions poséeslui avaient étésoumises sous une forme abs-
traite, elle ne s'est pas refusée à se prononcer sur elles parce
qu'elles étaient destinées à servir à des fins très pratiques dans
une situation concrète.

57. Le demandeur ne saurait non plus invoquer à l'appui de
sa thèse l'affaire duétroitde Corfou, sur laquelle il insiste beaucoup
pour étayer sa demande tendant à ce que la Cour constate l'inob-
servation par le défendeur de certaines obligations qui lui incom-
baient en tant qu'autorité administrante aux termes de l'accord
detutelle du 13décembre1946.Lorsqu'elle a dit : «Le Royaume-Uni
a violé la souveraineté de la République populaire d'Albanie,
cetteconstatation par la Cour constituant en elle-mêmeune satisfac-
tion appropriée »(C.I. J. Recueil 1945, p. 36), la Cour s'est acquit-
téede sa fonction jildiciaire, qui est de réglerun différendconcret
relatifà une situation grave et non résolueen fait comme en droit.

58. Cela est également vrai de l'affaire des Pêcheries(C. 1. J.
Recueil 1951) et de l'affaireHaya de la Torre. Dans cette dernière
affaire, après s'êtreréférée 3 l'arrêt qu'elle avait rendu dans l'af-
faire du Droif d'asile et où elle avait dit:(Ll'octroi de l'asile par le
Gouvernement de la Colombie à T'ictor Rad Haya de la Torre n'a
pas été fait en conformité de l'article 2, paragraphe 2 ... de la
...convention » de la Havane, la Cour a ajouté:

«La Cour rappelle que ledit arrêt s'estborné à définir... les
rapports de droit que la Convention de La Havane avait établis
entre les Parties. Il ne comporte aucune injonction aux Parties
et n'entraîne pour celles-ci que l'obligation de s'y conformer. 11
(AffaireHaya de laTorre,C.I. J. Recueil1951, pp. 78-79.)

Bien que cet arrêt ait revêtula forme d'une déclaration définissant
les rapports juridiques entre les parties en vertu de la convention
de la Havane, il visait nettement à résoudre le différend entre le

Pérouet la Colombie en instance devant la Cour. Certes, il ne com-
portait aucune injonction quant à la façon dont on pourrait mettre
fin à l'asile mais il ne saurait faire de doute que, de l'avis de la
Cour, on devait et on pouvait y mettre fin. Le mêmearrêt indi-
quait au reste clairement qu'il n'appartenait pas à la Cour d'.opé-
rer un choix ((entre les diverses voies par lesquelles l'asile peut
prendre fin »,étant donné que

52 ((cesvoies sont conditionnéespar des élémentsde fait et par des
possibilitésque, dans une très large mesure, les Parties sont seules
en situation d'apprécier. Un choix entre elles ne pourrait être
fondé sur des considérations juridiques, mais seulement sur des
considérations de nature pratique ou d'opportunité poIitique;
il ne rentre pas dans la fonction judiciaire de la Cour d'effectuer
ce choix.» (Ibid.)

Il est donc incontestable que, si un jugement déclaratoire a été
rendu en cette espèce, c'est qu'il répondait à un but ou à une né-
cessitépratique, celle de mettre finà l'asile en précisant les rapports
juridiques créésentre les parties par la convention de la Havane
et en laissant aux parties le choix des moyens d'exécution. Les

questions qui ont fait l'objet de l'arrêt étaient loin d'avoir un ca-
ractère abstrait ou académique.
59. Bien que ni le droit international ni son propre Statut n'em-
pêchentla Cour de prononcer un jugenient déclaratoire, la présente
affaire ne relève pas de sa fonction judiciaire. Il se peut que la
possibilité d'application ou d'effet pratique soit une question qui
n'intervient pas dans un jugement déclaratoire, mais cette règle,
si c'en est une, ne signifie certainement pas que la Cour soit tenue

de rendre un jugement déclaratoire mêmes'il ne peut s'agir que
d'une déclaration de portée académique ou d'une décision sans
objet (moot). Il n'y a pas lieu de rendre un jugement déclaratoire
lorsque, comme dans la présente affaire, la requête ne le demande
qu'à l'égard d'un ou plusieurs points de droit déjà réglés ou ne
concernant que des faits ou situations qui ne peuvent plus engen-
drer de différend à l'avenir dans une situation juridique analogue.
En d'autres ter~nes, la Cour doit tenir compte de ce que la situa-
tion actuelle concernant l'ancienne tutelle du Cameroun sous ad-
ministration britannique et l'accord du 13 décembre 1946 main-

tenant expiré comporte des élémentsqui rendent impossible que
la Cour rende un arrêt l.

60. Pour les raisons que j'ai exposées, j'ai conclu qu'en I'es-
pèce la Cour devait refuser de se déclarer compétente au fond.

1 Voir opinion dissidende M. Winiarski dans l'affaire de l'Interprétation des
traitésde paix (C.I.J. Recueil p.92).

53

Bilingual Content

SEPARATE OPINION OF JUDGE WELLINGTON KOO

1 concur in the final conclusion reached by the majority of the
Court in the case, namely that any judgment the Court might pro-
nounce on the merits would be without object and incompatible
with the Court's judicial function. But1 have arrived at it generally
by a different line of reasoning. In my view it isalso important that
fuller consideration should have been given to the nore pertinent
submissions of the Parties so as to deduce additional reasons in
support of the conclusion, thereby broadening and strengthening the
basis of the Judgment. Accordingly, 1 propose to make a separate
statement of my opinion.

I. In this case the Application was filed by the Agent for the
Government of the Republic of Cameroon on 30 May 1961 and
followed by its Memorial dated 12 December 1961. The submissions
in both instruments are identical, asking the Court to adjudge and
declare that the United Kingdom has, in the application of the
Trusteeship Agreement of 13 December 1946, failed to respect
certain obligations directly or indirectly flowing therefrom on the
various points set out in the respective documents.

2. The Counter-Memorial of the United Kingdom contains two
parts. Part 1 on "The Jurisdiction of the Court" maintains that the
Cameroon complaints do not fa11within Article 19 of the Trustee-
ship Agreement and that the Application and the Memorial do
not meet the requirements of the Rules of Court. For these
and other reasons stated therein, the United Kingdom makes the
submission that the Court is "without jurisdiction in the case and
should refuse to hear it".
3. The Applicant in its Observations makes three submiçsions.
The first asks the Court to dismiss the preliminary objection of the
United Kingdom contending that the Court has no jurisdiction and

the second asks for dismissal of the preliminary objection based
on failure to observe the provisions of Article 32, paragraph 2, of
the Rules of Court. The third submission is identical with that
formulated in the Application and the Memorial.
4. At the end of the first part of the oral pleading Counsel for the
United Kingdom submitted that the Court should hold and declare
that it had no jurisdiction in this case and that he sustained the
first conclusion in paragraph112 of the United Kingdom Memorial.
The Respondent's final submissions were presented by its Agent
at the end of the oral pleading, which appear to have modified

its earlier submissions and which are in the following terms: OPINION INDIVIDUELLE DE M. WELLINGTON KOO
[Traduction]

Je m'associe à la conclusion finale à laquelle la majorité des
Membres de la Cour est parvenue en l'espèce, à savoir que tout
arrêtau fond que pourrait rendrela Cour seraitsans objet et incom-
patible avec la fonction judiciaire de la Cour. Mais j'y suis arrivé
par un raisonnement différentdans l'ensemble. A mon avis,il aurait
fallu s'attacher davantage aux conclusions les plus pertinentes des
Partiesde façon à étayerla décisionsur desmotifs supplémentaires,

ce qui aurait permis d'élargir et de renforcer la base de l'arrêt.
C'est pourquoi je me propose d'exposer mon avis dans une opinion
individuelle.
I. La requête qui a introduit la présente instance a étédéposée
par l'agent du Gouvernement de la République du Cameroun le
30 mai 1961 et le mémoire qui l'a suivie est daté du 12 décembre
1961. Les conclusions présentéesdans les deux cas sont identiques;
elles demandent à la Cour de dire et juger que le Royaume-Uni,

dans l'application de l'accord de tutelle du 13 décembre 1946, n'a
pas respecté certaines obligations qui en découlent directement et
indirectement sur divers points relevésdans lesdits documents.
2. Le contre-mémoire du Royaume-Uni contient deux parties.
La première partie consacréeà la ((Compétencede la Cour )affirme
que lesgriefs du Cameroun ne relèvent pas del'article 19 de l'accord
de tutelle et que la requête et le mémoire ne satisfont pas aux

prescriptions du Règlement de la Cour. Pour ces raisons et pour
d'autres motifs qu'il énonce, le Royaume-Uni conclut à ce que la
Cour (n'a pas compétenceen la présente affaire et doit refuser d'en
connaitre ».
3. Dans ses observations, le demandeur présente trois conclu-
sions. La première prie la Cour de rejeter l'exception préliminaire
du Royaume-Uni tendant àce que la Cour se déclareincompétente

et la deuxième demande le rejet de l'exception préliminaire tirée
de l'inobservation des dispositions de l'article32, paragraphe 2,du
Règlement de la Cour. La troisième conclusion est identique à celle
que formulent la requêteet le mémoire.
4. A la fin de la première partie de ses plaidoiries, le conseil du
Royaume-Uni a conclu à ce qu'il plaise à la Cour dire et juger
qu'elle n'est pas compétente pour connaître de l'affaire et il a
confirmé la première conclusion énoncéeau paragraphe 112 du

contre-mémoire du Royaume-Uni. Les conclusions finales du défen-
deur ont étéprésentéespar son agent à la fin de ses plaidoiries;
elles semblent comporter une modification par rapport aux con-
clusions précédenteset sont ainsi conçues :
3042 JUDG. 2 XII 63 (SEP. OPIN. JUDGE WELLINGTON KOO)

"(1) that there has not, at any time, been a dispute as alleged
in the Application in this case;
(2) that there has not been or was not on the 30th May 1961,
as alleged in the Application, a dispute falling within Article 19
of the Trusteeship Agreement for the Territory of the Cameroons
under United Kingdom Administration;
(3) that, in any event, there is no dispute before the Court upon
which the Court is entitled to adjudicate."
Accordingly, the forma1 request to the Court is "to uphold the
preliminary objections of the United Kingdom and to declare that
the Court is without jurisdiction in the present case and that the

Court will not proceed to examine the merits".
5. On the otherhand, the Applicant presented three forma1 sub-
missions at the end of the first part of the oral pleading and only
two forma1 submissions at the end of the last part. The difference
consists in the deletion of the submission relating to the preliminary
objection of the United Kingdom based on failure to observe the
provisions of Article 32, paragraph 2, of the Rules of Court; other-
wise the two sets of submissions are identical not only between

them but also with the two forma1 submissions in the Observations
of the Government of the Federal Republic of Cameroon.

6. From the foregoing account of the successive submissions of
the Parties in the case it appears clear that the single issue before
the Court in the present phase of the proceedings is the question

whether the Court has jurisdiction to hear and adjudicate on the
merits.
7. Before commencing consideration of the issue of jurisdiction,
it is, however, important to deal first with the preliminary question
whether the requirements of Article 32, paragraph 2,of the Rules of
Court have been met by the Application instituting proceedings in
the present case. For if it is found to be irregular, it must be deemed
as inadmissible and the Court cannot give further consideration to
it. This determination is independent of the question whether the

Respondent has failed to insist upon the objection and of the fact
that the Applicant has omitted this point in its final submissions.

8. The provision of said Rule 32 relied on by the Respondent
requiies that the Application-

"must also, asfar as possible..state the precise nature of the claim
and give a succinct statement of the facts and grounds on which
the claim is based, these facts and grounds being developed in
the Memorial, to which evidence will be annexed".

It has been contended by the Respondent in its Counter-Memorial
that neither the Application nor the Memorial of the Republic (1) à aucun moment, il n'y a eu un différend,comme l'allèguela
requêtedéposée en l'affaire;
2)il n'y avait pas eu ou il n'y avait pàsla date du 30 mai 1961,
comme l'allèguela requête, un différendrelevant de l'article 19
de l'accordde tutelle pour le territoire du Cameroun sousadministra-
tion du Royaume-Uni;
3) en toute hypothèse, la Cour n'est pas saisie d'un différend
qu'elle soit fondéeà trancher.»

En conséquence, il est officiellement demandé à la Cour d'«ad-
mettre les exceptions préliminaires du Royaume-Uni et dire que
la Cour n'a pas compétence en la présente affaire et ne procédera
pas à un examen au fond ».
5. De son côté, le demandeur a présenté trois conclusions for-
melles à la fin de la première partie de ses plaidoiries et seulement
deux à la fin de la dernière partie. La différence réside dans la

suppression de la conclusion relative à l'exception préliminaire du
Royaume-Uni fondéesur l'inobservation des dispositions de l'arti-
cle32, paragraphe 2, du Règlement de la Cour; à part cela, les deux
sériesde conclusions sont identiques entre elles, comme elles sont
identiques aux deux conclusions formelles énoncéesdans les observa-
tions du Gouvernement de la République fédéraledu Cameroun.

1

6. L'exposé que je viens de faire des conclusions successives des
Parties à l'instance fait clairement apparaître que la seule question
qui se pose à la Cour dans la phase actuelle de la procédure est celle
de savoir si la Cour est compétente pour statuer au fond.

7. Avant d'aborder l'examen du problème de la compétence, il
importe de traiter d'abord de la question préalable suivante: la
requête introductive d'instance s'est-elle conformée aux pres-
criptions de l'article 32, paragraphe 2, du Règlement de la Cour?
En effet, si on estime qu'elle est irrégulière, on doit la considérer
comme irrecevable et la Cour ne peut l'examiner plus avant. Cette
détermination est indépendante de la question de savoir si le défen-
deur a ou non insisté sur l'exception, et indépendante aussi du fait
que le demandeur n'a pas mentionné ce point dans ses conclusions

finales.
8. Aux termes de l'article 32 invoqué par le défendeur, la requête
doit contenir :

((en outre, autant que possible ... l'indication précisede l'objet
de la demande; un exposé succinct des faits et des motifs par
lesquels la demande est prétendue justifiée,sous réserve des déve-
loppements à fournir dans le mémoireet des preuves qui y seront
annexées ».
Le défendeur a soutenu dans son contre-mémoire que ni la requête
ni le mémoire de la République du Cameroun ne se conforment

31of Cameroon complies with this Rule inasmuch as neither specifies
the "certain obligations" flowing from the Trusteeship Agreement
which the United Kingdom is alleged to have failed to fulfil.
g. On reference to the Application, however, it is seen that the
complaints are enumerated on page 19 and in the submissions
thereof it isagain stated that the United Kingdom "failed to respect
certain obligations ..on the various points set out above". These
complaints are again specified in paragraph 3, page 5, of the
Memorial. Moreover, Rule 32 only calls for these indications "as
far as possible". The criticism of the Respondent on this point

therefore cannot be considered as well founded.
IO. As regards the principal issue of jurisdiction in the case, it
appears clear from the writtcn and oral pleadings of the two Parties
that the main arguments respectively in support and denial of the
jurisdiction of the Court centre on Article 19 of the Trusteeship
Agreement of 13 December 1946 for the Territory of the Cameroons
between the United Nations on the one part and the United King-
dom as Administering Authority on the other. This provision reads:

"If any dispute whatever should anse between the Administering
to the interpretation or application of the provisions of this Agree-
ment, such dispute, if it cannot be settled by negotiation or other
means, shall be submitted to the International Court of Justice,
provided for in ChapterXIV of the United Nations Charter."

1 will now examine the opposing arguments of the two Parties and
assess their respective values.
II. ln the first place it is the contention of the Respondent that
there never has been a dispute between the United Kingdom and
the Republic of Cameroon in the sense in which the word was used
in Article 19 of the Trusteeship Agreement. It was said: "If the

existence of a disputein that sense is not proved, there is no question
biit that the attempt to invoke Article 19 fails in linzine." The
Applicant maintains, on the other hand, that a dispute has arisen
and continues to exist. It refers as evidence of its existence, among
other statements and communications, to a pamphlet distributed
to al1Members of the General Assembly at the end of March 1961and
entitled "Position of the Republic of the Cameroon following the
plebiscite of 11th and 12th February 1961 in the Northern portion
of the Territory of the Cameroon under the administration of the
United Kingdom of Great Britain and Northem Ireland"; to the
letter dated IO April 1961 addressed by the representative of the
United Kingdom on the Fourth Committee of the General Assembly
lo its Chairman and circulated to its Members in reply to this
Cameroon "White Book", and to the exchange of Notes between
the tu70 Parties of I and 26 May 1961 annexed to the Carneroon
Memorial. ARRÊT 2 XII 63 (OP.INDIV. M. WELLINGTON KOO) 43

à cette disposition en ce sens qu'aucun des deux documents ne
spécifiequelles sont les «certaines obligations » découlant de l'ac-
cord de tutelle que le Royaume-Uni n'aurait pas respectées.
9. Si l'on se réfèreàla requête,on voit que les griefs sont énoncés

à la page 19 et qu'en outre lesconclusions indiquent que le Royaume-
Uni ((n'a pas respecté certaines obligations ...sur les divers points
relevés ci-dessus 1).Ces griefs sont de nouveau précisésau para-
graphe 3 du mémoire (p. 5). De plus, l'article 32 ne prévoit la
mention de ces indications qu'«autant que possible n.La critique
du défendeur à cet égard ne peut donc êtreconsidérée commebien
fondée.
IO. En ce qui concerne la principale question de compétence en

l'espèce, il ressort clairement des écritures et des plaidoiries des
deux Parties que les arguments les plus importants tant en faveur
qu'à l'encontre de la compétencede la Cour sont axéssur l'article 19
de l'accord de tutelle pour le territoire du Cameroun conclu le
13 décembre 1946 entre lesNations Unies, d'une part, et leRoyaume-
Uni, en tant qu'autorité administrante, de l'autre. Cette disposition
est la suivante :

cTout différend, quelqu'il soit, qui viendrait à s'éleverentre
l'Autorité chargée de l'administration et un autre Membre des
Nations Unies relativement à l'interprétation ou à l'application
des dispositions du présent Accord,sera, s'il ne peut êtreréglé
par négociationsou un autre moyen, soumis à la Courinternationale
de Justice, prévueau ChapitreXIV dela Charte desNations Unies. »
Je passe maintenant à l'examen des arguments opposés des deux
Parties pour en apprécier la valeur.

II. En premier lieu, le défendeur affirme qu'il n'y a jamais eu de
différend entre le Royaume-Uni et la République du Cameroun au
sen où ce mot est employédans l'article 19 de l'accord de tutelle.
Il a dit: «Si l'existence d'un différend pris en ce sens n'est pas
établie, il n'y a aucun doute que la tentative de se prévaloir de
l'article19 s'effondre d'emblée. 1)Le demandeur soutient de son
côtéqu'un différend s'est élevéet continue d'exister. Entre autres
déclarations et communications, il cite comme preuves de son

existence: une brochure distribuée à tous les Membres des Nations
Unies à la fin de mars 1961 et intitulée La position dela Réfiublique
du CafnerounIila suite du plébiscite de sI et 12 février1961 dans la
fiarfie septentrionaledl4te~yitoireda Cameroun SOZ~Sadministration
du Royaume-Uni de Grande-Bretagneet d'Irlande dz4Nord; la lettre
adressée le IO avril 1961 par le représentant du Royaume-Uni à
la Quatrième Commission de l'Assembléegénéraleau président de
celle-ci, en réponse à ce cclivre blanc »du Cameroun; et l'échange
entre les deux Parties des notes des I~~et 26 mai 1961 citées en

annexe au mémoiredu Cameroun. 12. What constitutes a dispute under international law has been
indicated on several occasions by both the Permanent Court and
this Court. Rriefly it is "a disagreement on a point of law or fact,
a conflict of legal views or interests between two persons" (Mavrom-
matis case, P.C.I.J.,Series A, No. 2, p. II).In its Advisory Opinion
in the Inte~pretationof Peace Treaties this Court finds that "inter-
national disputes have arisen" where "the two sides hold clearly
opposite views concerning the question of the performance or
non-performance of certain treaty obligations" (I.C.J. Reports1950,
p. 71).In the light of these definitions, there can be no doubt that
at leastprima facie a dispute has arisen between the Parties in the
instant case.

13.It is true that an international dispute, just as a cause cf
action in municipal law, must embody or imply the existence of a
legal right or interest at issue in order to be justiciable. Although the
two Parties recogriize this factor as one of the essential conditions
of its existence and consider it as common ground between them,
the Respondent contends that it is lacking in the present dispute,
because Article 19 of the Trusteeship Agreement, on which the
Applicatiori relies to uphold the jurisdiction of the Court to adjudi-
cate the case, does not confer a right or interest on the Applicant
as a third party to the Agreement to enforce the general obligations
of the Administering Authority but that this right or interest
appertains to the United Nations alone as the other party to the
said instrument. According to this contention, another Member of
the United Nations is entitled to invoke Article 19 against the
Administering Authority of a given trust territory only when its
individual rights or those of its nationals conferred by the Trustee-
ship Agreement were prejudiced by the action or non-action of

said authority, but no such prejudice has been claimed by the
Applicant. In support oi this view, Counsel for the Respondent
cites the Judgment of this Court in the Soutlz Wesf Af~icn cases
(I.C.J. Reports1962, p. 319) and maintains that because the nature,
structure and working of the Trusteeship System is basically differ-
ent from the Mandates System under the League of Nations,
judicial protection of the general interests of the inhabitants of
the trust territories is no longer essential.

14. On the part of the Applicant, it is argued that there is
nothing in the wording of Article 19 to justify sucli a restrictive
interpretation and that the very fact that its broad language ex-
pressly refers to "the interpretation or application of the provisions
of the Agreement" demonstrates clearly that any dispute relating

33 12. La Cour permanente et la Cour actuelle ont définià plusieurs
reprises ce qui constitue un différend en droit international. En
bref, c'est «un désaccord sur un point de droit ou de fait, une
contradiction, une opposition de thèses juridiques ou d'intérêts
entre deux personnes ))(affaire Mavrommatis, C.P. J. I.,série A
no 2, p. II).Dans son avis consultatif sur l'lnterprélatio~dzes traités

de paix, la Cour a constaté que ((des différends internationaux se
sont produits » lorsque cles points de vue des deux parties,
quant à l'exécution ou à la non-exécution de certaines obligations
découlant des-traités, sont nettement opposés » (C.I. J. Recueil
1950, p. 74). Etant donné ces définitions, il ne fait pas de doute
qu'au moins de prime abord un différend s'est produit entre les
Parties à la présente affaire.

13. Il est vrai qu'un différend international, tout comme un
motif d'action en droit interne, doit, pour relever d'un organe

judiciaire, comporter ou impliquer l'existence d'un droit ou d'un
intérêtjuridique controversé. Bien que les deux Parties voient
dans cet élémentl'une des conditions essentielles de l'existence d'un
différend et qu'il n'y ait pas de désaccord entre elles sur ce point,
le défendeur soutient que ledit élémentfait défaut en l'espèce, car
à son avis l'article 19 de l'accord de tutelle, sur lequel la requête
s'appuie pour établir la compétence de la Cour, ne confère au
demandeur, tierce partie à l'accord, ni intérêtni droit à faire res-
pecter les obligations générales de l'autorité administrante; ce
droit ou cet intérêt appartiendrait exclusivement, d'après lui, aux
Nations Unies qui sont l'autre partie à l'accord. Selon cette thèse,

un autre Membre des Nations Unies n'est fondé à invoquer l'ar-
ticle19 contre l'autorité administrante d'un territoire sous tutelle
donnéque si ladite autorité a,par action ou omission, porté atteinte
à des droits qui ont été,conféréà s titre individuel à cet Etat OU à
des ressortissants de cet Etat par l'accord detutelle; or le demandeur
ne se plaint d'aucun préjudice de cette nature. A l'appui de cette
opinion, le conseil du défendeur cite l'arrêt de la Cour dans les
affaires du Sud-Ouest africain (C. I. J. Recueil 1962, p. 319) et
soutient que, étant donné la différence fondamentale de nature,
de structure et de fonctionnement entre le régime de tutelle et le
système des Mandats de la Société desNations, la protection judi-
ciaire des intérêtsgénéraux des populations des territoires sous

tutelle n'est plus essentielle.
14. Le demandeur, pour sa part, fait valoir que la rédaction de
l'article19 ne justifie en rien une interprétation restrictive de
ce genre; le fait mêmeque cet article se réfère expressémenten
termes généraux à « l'interprétation ou l'application des dispositions
de l'accord » lui paraît démontrer clairement que tout différend

33 JUDG. 2 XII 63 (SEP. OPIN. JUDGE WELLINGTON KOO)
45
to one or more of the said provisions falls within its purview for
adjudication by the Court.
15. While the contention of the Respondent appears plausible
because of the great differences between the Trusteeship System

under the Charter and the Mandates System under the Covenant,
it cannot be accepted as generally correct. The fact that the phrase
"any dispute whatever ...relating to the interpretation or appli-
cation of the provisions of the Agreement" is obviously comprehen-
sive and unqualified and is subject only to the conditions expressly
stated in the Article, warrants careful consideration in drawing any
general conclusion on the ground of interpretation.

16. Normally protection of the interests of the inhabitants of
trust territoriesunder the Charter is part of the functions of the
General Assembly with the Trusteeship Council to assist it in the
exercise thereof and, in respect of the strategic areas thereof, comes
under theauthority of the Security Council. But the general interest
of the United Nations Members in due performance by the Ad-
ministering Aiithority of its undertakings in the relevant Trustee-

ship Agreement subsists at the same time. Judicial protection of
these interests is not precluded under Article 19.Though the occa-
sions for invoking it may be infrequent, it nevertheless exists side
by side with administrative supervision by the General Assembly
and the Trusteeship Council and by the Secunty Council as the
case may be. For there may u-el1be circumstances, perhaps rare
and exceptional, which would justify another Member of the Lnited
Nations to invoke the Court's jurisdiction for the purpose of assuring
protection of the interests of the inhabitants of the trust territory.
For example, when the debate in the Trusteeship Council or the
General Assembly on a particular legal point relating to the question
of conformity or non-conformity of the action of the Administering
Authoiity with the particular trusteeship agreement and involving
the interpretation or application of its provisions, becomes pro-
tracted and confused with noprospect of an earlysettlement because
of the impossibility of obtaining a requisite majorityvote to approve
a resolution requesting the Court for an advisory opinion on the

legal question, there is nothing in the language of Article 19 to
preclude another Member from bringing the question before the
Court in the form of a dispute with the Adn~inistering Authority
for judicial determination of the legal question at issue. Moreover,
in view of the basic objectives of the Trusteeship System as stated
in Article 76,such recourse would not only fall within the purview
of an adjudication clause such as Article19of the Trusteeship Agree-
ment under consideration but also would be necessary in order to
expedite a settlement by the General Assembly or the Trusteeship
Council in the interests of the particular trust territory or its
inhabitants.relatif à une ou plusieurs de ces dispositions relève dudit article
et peut &tretranché par la Cour.
15. Tout en paraissant plausible à raison des grandes différences
entre le régime de tutelle établi par la Charte et le système des
Mandats établi par le Pacte, la thèse du défendeur ne saurait être
considérée commeexactede façon générale.Le fait que l'expression
«Tout différend, quel qu'il soit ...relativement à l'interprétation
ou à l'application des dispositions du présent Accord )a manifeste-
ment une portée générale,ne comporte pas de réserves et n'est

sujette qu'aux conditions expressément énoncéesdans l'article,
justifie qu'on l'examine attentivement avant de tirer des conclu-
sions générales fondées sur l'interprétation.
16.Selon la Charte, la protection des intérêtsdes habitants des
territoires sous tutelle fait normalement partie des fonctions de
l'Assemblée générale, assistée à cet effet par le Conseil de tutelle,
et, pour ce qui est des zones stratégiques, relève de l'autorité du
Conseil de sécurité.Mais l'intérêtgénéralqu'ont les Membres des
Nations Unies à ce que l'autorité administrante s'acquitte dûment
des engagements pris dans l'accord de tutelle en question subsiste.
L'article 19 ne fait pas obstacle à une protection judiciaire de ces
intérêts. Encore que l'on n'ait peut-être pas souvent l'occasion
d'invoquer cette protection, elle n'en existe pas moins parallèlement

avec la surveillance administrative qui est assurée,selon le cas, par
l'Assemblée générale et le Conseil de tutelle ou par le Conseil de
sécurité.Il est des circonstances, peut-être rares ou exceptionnelles,
où un autre Membre des Nations Unies serait justifié à invoquer la
compétencede la Cour en vue d'assurer la protection des intérêtsde
la population du territoire sous tutelle. Si par exemple, à propos
d'une question juridique donnée ayant trait à la conformité ou
non-conformité du comportement de l'autorité administrante avec
l'accord de tutelle et mettant en jeu l'interprétation ou l'appli-
cation de ses dispositions, les débats du Conseil de tutelle ou de
l'Assembléegénéraletraînent en longueur et deviennent confus, sans
perspective de règlement rapide, en raison de l'impossibilitéd'obte-
nir le vote majoritaire requis pour l'approbation d'une résolution
demandant à la Cour un avis consultatif sur ladite question juri-
dique, rien dans les termes de l'artic19 n'empêcheun autre Mem-
bre de porter la question devant la Cour sous la forme d'un différend
avec l'autorité administrante, afin que soit tranché judiciairement

le point de droit en cause.n outre, étant donnéles fins essentielles
du régime de tutelle énoncéesà l'article 76, ce genre de recours
ferait plus que relever simplement d'une clause juridictionnelle telle
que l'article19 de l'accord de tutelle; il s'imposerait si l'on voulait
accélérerun règlement par l'Assembléegénérale oule Conseil de
tutelle dans l'intérêtdu territoire sous tutelle ou de ses habitants. 17. It is not correct or justifiable to give such a sweeping inter-
pretation, as claimed by the Respondent, of the broad terms of
Article 19 as would exclude the possibility of another Aiember of
the United Nations invoking the Court against the Admillistering
Authority in a dispute relating to the interests of the trust territory
or its inhabitants. The character, purport, structure and working
of the Trusteeship System, being different frorn those of the Man-
dates System and resulting in a much broader and more effective
supervision of the administration of the trust territorieshan in the
case of the Mandates, may render recourse to judicial protection
less necessary but the right of another Member to invoke it, as
shown above, subsists for the intended purpose of protecting the

interests of the people of the trust territory and thereby advancing
the basic objectives of the Trusteeship System prescribed in the
Charter.
18. In connection with the question of a legal interest as the
indispensable basis of a justiciable dispute, the Applicant lays
emphasis on its possession of an interest said to be special and
individual in character and different from that of the other Members
of the United Nations in addition toits interest simply as a Member
of the United Nations. That this is a genuine and important interest
of the Applicant can be easily appreciated. But, as such, it is
clearly not an interest within the purview of Article 19. On analysis
it is found to have been a contingent interest before 11-12 February
1961 and dependent for its materialization upon the outcome of the
plebiscite held in the Northern Cameroons on these two days. If the

result of the consultation had been in favour of the alternative
"achieving independence by joining the independent Republic of
Cameroon", this interest would have been satisfied and therefore
would have ceased to exist. It has become a definite interest only
since the result of the said plebiscite was officially proclaimed to
have been in favour of joining the independent Federation of
Nigeria. But by that time the people of the Northern Cameroons
had achieved the basic objective of Article 76 b of the Charter and
attained independence. This result was confirmed in due course
by resolution 1608 (XV) of the General Assembly of 21 April 1961,
which also decided to terminate on the specified dates the Trustee-
ship Agreement of 13 December 1946 concerning the Cameroons
under Cnited Kingdom administration. The interest which the
Republic of Cameroon now claims to have cannot be of a legal
character; it is only a political interest of its own, falling outside
the scope of -4rticle 19.

III
19. On denying the jurisdiction of the Court the Respondent
has also raised an objection based on the contention that "The
Republic of Cameroon was never a party to the Trusteeship Agree-

35 17. Il n'est ni exact ni justifiable de don'nerdes termes larges de
l'article19 une interprétation aussi absolue que celle du défendeur,
laquelle exclurait la possibilité pour un autre Membre des Nations
Unies de soumettre à la Cour un différendavec l'autorité adminis-
trante ayant trait aux intérêtsdu territoire sous tutelle ou de ses
habitants. Le régimede tutelle étant, par sa nature, par sa portée,
par sa structure et par son fonctionnement, différent du système
des Mandats et la surveillance de l'administration des territoires
sous tutelle étant en conséquence beaucoup plus large et effective
que ne le fut celle des territoires sous Mandat, cela peut rendre
moins nécessaire le recours à la protection judiciaire, mais, comme
je l'ai déjàindiqué,le droit d'un autre Membre àl'invoquer subsiste
lorsqu'il s'agit de protéger les intérêtsde la population du territoire
sous tutelle et de faire ainsi progresser la réalisation des fins essen-

tielles du régimede tutelle définiespar la Charte.
18. En ce qui concerne la question de l'existence d'un intérêt
juridique commebase indispensable d'un différendsusceptible d'être
réglépar la voie judiciaire, le demandeur souligne qu'il possède,
outre son intérêten tant que simple Membre des Nations Unies, un
intérêt auquelil attribue un caractère spécialet individuel, différent
de celui des autres Membres des Nations Unies. On peut aisément
se rendre compte que c'est là, pour le demandeur, un intérêtréelet
important. Mais, en tant que tel, cet intérêtnerelève manifestement
pas de l'article19.Si on l'analyse, on constate qu'avant les IIet 12
février 1961 il s'agissait d'un intérêtéventueldont la concrétisation
dépendait du résultat du plébiscite qui s'est dérouléau Cameroun
septentrional ces deux jours-là. Si cette consultation avait été
favorable à la solution de l'indépendance par la voie de l'union
avec la République du Cameroun indépendante, cet intérêt aurait

été satisfait et aurait donc cesséd'exister. Il a pris un caractère
définiuniquement parce que l'on a officiellement proclaméque ledit
plébisciteavait étéfavorable àl'union avecla Fédération de Nigéria
indépendante. Mais à ce moment-là la population du Cameroun
septentrional avait réaliséla fin essentielle de l'articl76 b) de la
Charte et accédé à l'indépendance. Ce résultat a étéconfirmé le
moment venu par la résolution 1608 (XV) de l'Assemblée générale
en date du 21 avril 1961 qui a également décidé de mettre fin, à des
dates spécifiées,à l'accord de tutelle du 13 décembre 1946 pour le
Cameroun sous administration britannique. L'intérêt dont la Répu-
blique du Cameroun se réclamemaintenant ne peut avoir un carac-
tère juridique; ce n'est qu'un intérêtpolitique propre, qui ne relève
pas de l'article19.

III

19. Pour rejeter la compétence de la Cour le défendeur a égale-
ment soulevéune exception fondéesur ce que « La République du
Cameroun n'a jamais été partie à l'accord de tutelle et ne jouit des

35 ment and only enjoyed the benefits of Membership of the United
Nations from 20 September 1g60", and that-

"If ...the Republic of Cameroun on and after 20 September, 1960
was entitled to rely on Article 19 of the Agreement, it is not ...
entitled to rely on matters occurring during the currency of the
Agreement prior to 20 September, 1960 to establish a dispute be-
fore that date with the United Kingdom for the purpose of giving
the Court jurisdiction. Nor ...in the event of a dispute sufficient
to comply with the requirement of Article 19 arising after 20 Sep-
tember, 1960is the Republic of Cameroun entitled to ask the Court
to pronounce upon matters which occurred before that date."

20. Manifestly this is an argument based on the principle of
rationetemporis. But the date of admission to Membership is not a
crucial date except that only on and from 20 September 1960 the

Republic of Cameroon is vested with al1the rights and obligations
of Membership. In other words, on that day it acquired the status
or capacity of Membership to qualify under Article 19 as "another
Member". Once this capacity is acquired, it is irrelevant as regards
any dispute which it raises with the Administering Authority under
the said Article. As to the subject-matter of a dispute, the right
of a Member to raise it is not limited by the date of its admission
to the United Nations. As soon as a State acquires the status of
Membership, its rights and obligations under the Charter must be
the same as all the other Members, and under the Trusteeship
Agreement the same as al1 Members other than the Administering

Authority. No differentiation or distinction among Members on the
basis of their respective dates of admission is provided for in the
Charter or justifiable in principle and practice.

21. The Respondent also contests the applicability of Article 19
in question and advances the following argument:
"Al1 the complaints made are related to the purpose of falsi-
fying the plebiscite in the Northern Cameroons. The Trusteeship
Agreement did not, however, provide for its own termination far
less for the holding of any plebiscite preparatory to termination.
Questions about the validity of the plebiscite are not, therefore,
related at al1 either to the application or to the interpretation of
the provisions in the Trusteeship Agreement and therefore cannot
be submitted to this Court under Article 19 of that Agreement."

A reading of thetext of the Application, with the clear enumeration
of seven complaints (a) to(g) which are confirmed inthe Memorial,
however, shows that while (d) and (f) relate to the question of
observance of General Assembly resolution 1473, and (g) relates to

36avantages accordés aux Membres des Nations Unies que depuis le
20 septembre 1960 »,et que

c(Si la République du Cameroun ...avait le droit, à dater du
20 septembre 1960, d'invoquer l'article 19 de l'accord, elle n'a
pas ... le droit de faire état de questions survenues pendant la
durée de l'accord avant le 20 septembre 1960 en vue d'établir
l'existence d'un différend avec le Royaume-Uni antérieur à cette
date, pour donner compétence à la Cour. ...dans le cas d'un différend
suffisant pour remplir les conditions de l'article 19 survenant après
le20 septembre 1960,la Républiquedu Cameroun n'a pas davantage
le droit de demander à la Cour de se prononcer sur des questions
qui se sont poséesavant cette date. 1)

20. Il s'agit là manifestement d'un argument fondésur le principe
ratione temporis. Mais la date d'admission comme Membre des
Nations Unies n'est pas une date critique, sauf dans la mesure où
c'est seulement à partir du 20 septembre 1960 que la République
du Cameroun a eu tous les droits et toutes les obligations d'un
État Membre. En d'autres termes, elle a acquis ce jour-là le
statut ou la capacité voulus pour pouvoir être considérée comme
((un autre Membre )aux termes de l'article 19. Une fois cette Capa-

cité acquise, la date d'admission aux Nations Unies est sans perti-
nence pour ce quiest des différends avec l'autorité administrante en-
visagés à l'article 19. En ce qui concerne l'objet d'un tel différend,
cette date ne restreint Das le droit d'un Membre des Nations Unies
à le soulever. Aussitôt iu'un État acquiert le statut de Membre, il
doit avoir les mêmes droits et obligations en vertu de la Charte
que tous les autres Membres et les mêmes droits et obligations en
vertu de l'accord de tutelle que tous les Membres autres que l'auto-
rité administrante. Aucune différenciation ni distinction entre les
Membres d'après leur date d'admission n'est prévue dans la Charte ;

aucune n'est justifiable en principe ni en pratique.

21. Le défendeur conteste également l'appiicabilité de l'article 19
en s'appuyant sur l'argument suivant :
((Tous les griefs formulés ont trait à l'intention de fausser le
plébiscite dans le Cameroun septentrional. L'accord de tutelle,
toutefois, ne prévoit pas sa propre extinction, et moins encore
un quelconque plébiscite qui la préparerait. Les questions relatives
à la validité du plébiscitene sont donc aucunement liées à l'appli-
cation, ni à l'interprétation des dispositions de l'accord de tutelle
et ne peuvent donc êtresoumises à la Cour en vertu de l'article 19
de cet accord. 1)

La lecture du texte de la requête, avec l'énumération précise des
sept griefs a) à g) qui sont confirmés dans le mémoire, montre ce-
pendant que, si d)et fl ont trait à la question de l'observation de la
résolution 1473 (XIV) de l'Assemblée généraleet si g) a trait aux "Practices, acts or omissions of the local trusteeship authorities
...preceding the plebiscite and during the elections themselves",
the first three complaints (a), (b) and (c) al1 relate to specific
provisions of the Trusteeship Agreement, citing Articles 5 and 6
of the Trusteeship Agreement as not having been observed by the
Administering Authority.

22. It is true that no single article of the Trusteeship Agreement
provides for its own termination. But this is necessarily implied,
for under Article 3 of the Agreement "the Administering Authority
undertakes to administer the Territory in such a manner as to
achieve the basic objectives of the International TrusteeshipSystem
laid down in Article 76 of the United Nations Charter"; Article 5 (b)
canfers certain powers on the Administering Authority in ad-
ministering the trust territory only "where such measures are not
inconsistent with the basic objectives of the International Trustee-
ship System ...";and Article 6 enjoins the Administering Authority
"to promote the development of free political institutions suited
to the Territory" and "to this end" to take al1 appropriate measures
"with a view to the political advancement of the inhabitants of the
Territory in accordance with Article 76 ('b)of the United Nations
Charter". VC7hen we refer back to this paragraph, we find it reads

as follows :
"(b) to promote the political, economic, social and educational
advancement of the inhabitants of the trust territories, and their
progressive development towards self-governmentor independence
as may be appropriate to the particular circumstances of each
territory and its peoples and the freely expressed wishes of the
peoplesconcerned.. ".

23. To ascertain the wishes of the people of a trust territory and
enable them to express them freely, a plebiscite is generally recog-
nized as the most appropriate mode of procedure to provide for free
and secret voting; and when they vote for independence, their vote,
if it is the vote of a requisitemajority, necessarily means in effect
also a vote for the extinction of their status as the inhabitants
of a trust territory and therefore for the termination of the parti-
cular trusteeship agreement.This is what the people of the Northern
Cameroons did when the second plebiscite was held for them
to vote on 11-12 February 1961. In practical effect the attainment
of independence or self-government under the Charter and the
achievement of this objective under the Trusteeship Agreement

were synonymous with the termination of the said Agreement,
subject only to the forma1 endorsement of the General Assembly,
which was, in the present case, duly given by resolution 1608 (XV).
It seerns reasonable, therefore, to conclude that the question of the
validity of the plebiscite and that of the termination of the Trustee-
ship Agreement relate, if strictly speaking not to the interpretation, ARRÊT 2 XII 63 (OP. INDIV. M. WELLINGTON KOO) 48
((pratiques, actions ou inactions des autorités locales de tutelle ...

précédant le plébiscite et durant les opérations électorales D,les
trois premiers griefs a), b) et c) visent tous des dispositions spéci-
fiques de l'accord de tutelle et indiquent que les articles 5 et 6 de
cet accord n'auraient pas été respectés par l'autorité administrante.

22. Certes, aucun article del'accord de tutelle ne prévoit sa propre

extinction. Mais celle-ci y est nécessairement implicite; en effet,
l'article3 de l'accord dispose que (<L'Autorité chargée de l'adminis-
tration s'engage à administrer le Territoire de manière à réaliser les
fins essentielles du Régime international de tutelle énoncées à
l'Article 76 de la Charte des Nations Unies ...»; l'article 5 b) ne
confère certains pouvoirs à l'autorité chargée de l'administration
du territoire sous tutelle que (quand ces mesures seront compatibles

avec les fins essentielles du Régime international de tutelle ...1);
et l'article 6 enjoint à l'autorité chargée de l'administration de
favoriser (le développement d'institutions politiques libres conve-
nant au Territoire 1)et ((A cette fin » de prendre toutes mesures
appropriées (cen vue d'assurer l'évolution politique des habitants
du Territoire conformément à l'Article 76 b de la Charte des Nations
Unies 1).Si nous nous référons à ce paragraphe nous constatons
qu'il est ainsi conçu :

(b) favoriser le progrèspolitique, économiqueet socialdespopu-
lations des territoires sous tutelle ainsi que le développement
de leur instruction; favoriser également leur évolution progres-
sive vers la capacité à s'administrer eux-mêmesou l'indépen-
dance, compte tenu des conditions particulières à chaque terri-
toire et à ses populations, des aspirations librement exprimées
des populations intéressées...1).

23. Pour s'assurer des aspirations des habitants d'un territoire
sous tutelle et les mettre à mêmede s'exprimer librement, on con-

sidère généralement que le plébiscite - qui permet un vote libre
et secret - est le procédéle plus approprié; s'ils votent pour l'indé-
pendance et s'ils le font à la majorité requise, cela signifienécessaire-
ment en fait qu'ils se prononcent pour l'extinction deleur statut de
population sous tutelle et par conséquent pour l'expiration del'accord
de tutelle. C'est ce qu'ont fait les populations du Cameroun septen-
trional au cours du second plébiscite qui a eu lieu les II et 12 février

1961. En pratique, l'accession à l'indépendance ou à l'autonomie
en vertu de la Charte et la réalisation de cet objectif conformément
à l'accord de tutelle étaient synonymes de l'expiration dudit accord,
sous la seule réserve de l'approbation formelle de l'Assemblée géné-
rale, qui dans le cas présent a été dûment donnée dansla résolution
1608 (XV). Il semble donc raisonnable de conclure que, si à stricte-
ment parler la question de la validité du plébiscite et celle de l'ex-

piration de l'accord de tutelle n'ont pas trait à l'interprétation de
cet accord, elles en concernent en tout cas l'application. C'estcertainly to the application of the said Agreement. Accordingly, the
objection to the jurisdiction of the Court, based on the contention
that Article 19 of the Trusteeship Agreement does not provide for
its own termination nor for a plebiscite, is not well founded.

24. Another contention of the Respondent to deny jurisdiction
in the case is that "under Article 19 the only disputes which can
be submitted to or considered by this Court are disputes which
cannot be settled by negotiations or other means", and yet "no
real attempt was made before 30 May 1961 to settle the dispute
(assuming it to have existed) by negotiation"; and that "a proposa1
to submit the dispute to the Court, like that contained in the
Cameroon Note of I May 1961, cannot amount to negotiation;

rather the opposite".

25. In considering this objection, it is to be recalled that both the
Permanent Court and this Court have stated to the same effect that
when the parties to a dispute have both defined their position and
have both clearly indicated that they insist upon their respective
views with no possibility of any modification or compromise, and
when a deadlock is thus reached, it can be reasonably concluded
that the disputecannot be settledby negotiation. No particular form
or procedure of negotiation is required, nor is any importance to

be attached to the duration of such negotiation (Case of Mazlrom-
matis Palestine Concessions, P.C.I. J., Series A, No. 2, p. 13; South
West Africa cases, I.C. J. Rrports 1962, p. 345).
26. In the present case the sharp conflict of views of the two
Parties clearly appeared early in 1961 and efforts were madetore-
solve it through the United Nations. The Government of Cameroon,
following the announcement of the results of the plebiscite of
11-12 February 1961, circulated to the Members of the General
Assembly, at the end of March 1961, the so-called "White Book"
already referred to above, and containing "a detailed exposition

of the Cameroonian contentions and of the legal grounds in support
thereof". In essence the complaints set out therein against the
United Kingdom as Administering Authority consisted in alleging
want of "respect for the personality of the Cameroons" and failure
to carry out the recommendations of resolution 1473 (XIV) of
12 December 1959 to take steps "to secure a wider decentralization
of administrative powers and an effective democratization of the
local administrationin the northern portion of the Trust Territory"
and "for the administrative separation of Northern Cameroon and
Nigeria, such separation to take effect from I October 1960".
Besides, there were complaints against "irregularities and absence
of guarantees in the preparation of the plebiscite", "during the

38 ARRÊT 2 XII63 (or. INDIV. M. WELLINGTON KOO)
49
pourquoi on doit considérer comme mal fondéel'exception d'incom-
pétencetirée de l'argument d'après lequel l'article 19 de l'accord de
tutelle ne prévoit ni sa propre expiration ni un plébiscite.

24. Un autre argument du défendeur en vue de contester la
compétence en l'espèce est qu'«au sens de l'article 19 les seuls
différendssusceptibles d'êtresoumis à la Cour ou examinés par elle
sont des différends qui ne peuvent êtrerégléspar négociations ou
un autre moyen D,que cependant ((aucune tentative véritable n'a
été faiteavant le 30 mai 1961 pour régler le différend(si différend
il y a) par voie de négociations » et qu'c(une proposition visant à

porter le différend devant la Cour, telle que celle qui figure dans la
note du Cameroun du I~~ mai 1961, ne saurait constituer une
négociation mais plutôt tout le contraire 1).
25. Pour l'examen de cette exception,il convient de rappeler que,
d'après la Cour permanente comme d'aprèsla Cour actuelle,lorsque
les parties à un différend ont toutes deux définileur attitude et

clairement indiqué qu'elles la maintiennent sans aucune possibilité
de modification ni de compromis et que l'on est ainsi parvenu à
une impasse, on peut raisonnablement en conclure que le différend
ne peut êtreréglépar négociations. Aucune forme ou procédure
particulière n'est requise pour les négociations et il n'y a pas non
plus d'importance à attacher à leur durée. (Affairedes Concessions
Mavrommatis en Palestine, C. P. J. I., sérieA no2, p. 13 ; affaires du

Sud-Ouest africain, C. I. J. Recueil 1962, p. 345.)
26. En l'espèce, le conflit d'opinions aigu entre les deux Parties
est nettement apparu au début de 1961 et des efforts ont étéfaits
pour leréglerdans le cadre des Nations Unies. A lasuite del'annonce
des résultats du plébiscite des II et 12 février 1961, le Gouverne-
ment camerounais a distribué aux Membres de l'Assemblée générale,

fin mars 1961, la brochure (déjàcitée)dite clivreblanc » qui conte-
nait un exposé détaillédes thèses du Cameroun et des motifs
juridiques sur lesquels elles se fondent. Les griefs qui y étaient
formuléscontre le Royaume-Uni, autorité administrante, reposaient
essentiellement sur le manque de c(respect pour la personnalité
camerounaise ))et sur la non-exécution de la résolution 1473(XIV)
du 12 décembre 1959 qui recommandait de prendre des mesures

((en vue d'une plus ample décentralisation des pouvoirs administra-
tifs et de la démocratisation effective du système d'administration
locale dans la partie septentrionale du Territoire sous tutelle ))
ainsi que «pour effectuer la séparationadministrative du Cameroun
septentrional et de la Nigéria )),cette séparation devant être
((achevée le ler octobre 1960 ». D'autres griefs concernaient des
((irrégularités »et 1'«absence de garanties ))((dans la préparation du

36 JUDG. 2 XII63 (SEP.OPIN. JUDGE WELLINGTON KOO)
50
plebiscite campaign" and "in the conduct of the plebiscite". The
United Kingdom Government,in a letter addressed to the Chairman
of the Fourth Committee of the General Assembly on IO April 1961,
also mentioned earlier, statedits views in answer tothese complaints.

The opposing contentions of the Parties were again set forth in the
discussion and debates in the United Nations. In a statement in the
said Committee, the Minister of Foreign Affairs of Cameroon
complained in detail of the failure of the United Kingdom as
Administering Authority to observe certain provisions of the
Trusteeship Agreement, referring expressly to Articles 3, 5, 6, 7
and IO therein, Article 76 of the Charter and certain resolutions
of the General Assembly. Negotiation by this recognized method
of parliamentary diplomacy failed to resolve the dispute between

the Parties and a deadlock was reached.

27. There was, moreover, an exchange of diplomatic notes on the
subject-matter of the dispute which took place on 1-26 May 1961
just before the termination of the Trusteeship Agreement on I Jiine
1961,in respect of the Northern Cameroons, as decided by resolution
1608. Whether this exchange can properly be considered as another
step of negotiation or merely as relating to the proposa1 to refer the

dispute to this Court for adjudication is immaterial. In any event it
constitutes a confirmation of the sharp contrast of the views of the
two Parties and the deadlock already reached. Nothing could be
clearer than the resultant impossibility of settling the dispute by
further negotiation, the more especially in view of the earlier
adoption by the General Assembly of resolution 1608 (XV).

VI
28. The said resolution of the General Assembly is a determinant
factor in the present case. It was adopted by a requisite majority
at the 995th Plenary Meeting with the concurrence of the Adminis-

tering Authority andthe negativevote of the Republic of Cameroon,
on a report from the Fourth Committee in which the questions of
the implementation of the results of the plebiscites held in the
northern and southern portions of the Cameroons under United
Kingdom administration and the termination of the Trusteeship
Agreement of 13 December 1946 had been extensively debated.
This resolution, after recalling in its preamble the relevant resolu-
tions it had previously approved and declaring to have examined
the report of the United Nations Plebiscite Commissioner concernjng

the two plebiscites held earlier in the Northern and Southern
Cameroons and the report of the Trusteeship Council thereon,plébiscite », cpendant la campagne du plébiscite » et «dans le
déroulement du plébiscite 1).Le Gouvernement du Royaume-Uni,
dans une lettre adresséele IO avril 1961au président de la Quatrième
Commission de l'Assembléegénéraleet également citée ci-dessus,
a défini sa position en réponse à ces griefs. Les thèses opposées
des Parties ont étéde nouveau énoncéesau cours des discussions
et débats aux Nations Unies. Dans une déclaration faite à la

Quatrième Commission, le ministre des Affaires étrangères du
Cameroun s'est longuement plaint de l'inobservation par le Roy-
aume-Uni, en tant qu'autorité administrante, de certaines dispo-
sitions de l'accord de tutelleet il a cité expressément les articles 3,
5, 6, 7 et IO de cet accord, ainsi que l'article76 de la Charte et
certaines résolutions de l'Assemblée générale.La négociation par
cette méthode reconnue, dite de la diplomatie parlementaire, n'a
pu régler le différendentre les Parties, ce qui a menéà une impasse.

- z7.-~n outre, des notes diplomatique; sur l'objet du différend
ont étééchangées les I~~ et 26 mai 1961, juste avant l'expiration
de l'accord de tutelle intervenue en ce qui concerne le Cameroun
septentrional le I~~ juin 1961, conformément à ce qu'avait décidé
la résolution 160s (XV). Il importe peu que l'on doive considérer
cet échange de notes comme un autre élémentde négociation ou
estimer simplement qu'il se rattache à la proposition tendant à
porter le différenddevant la Cour aux fins d'un règlement judiciaire.
Ce qui est certain, c'est qu'il confirme la nette opposition de vues
entre les deux Parties et le fait que l'on était déjà dansune impasse.
Rien ne peut êtreplus clair que l'impossibilitéde régler le différend

par d'autres négociations dans laquelle on s'est ensuite trouvé,
surtout si l'on tient compte de l'adoption antérieure de la résolution
1608 (XV) par l'Assemblée générale.

2s. Cette résolution de l'Assemblée généraleest un facteur
déterminant en l'espèce.Elle a étéadoptée à la majorité requise à
la 99gmeséance plénière,avec l'assentiment de l'autorité adminis-
trante et la République du Cameroun votant négativement, sur
un rapport de la Quatrième Commission dans lequel étaient
longuement discutées les questions concernant l'application des
résultats des plébiscites orgariisés dans les parties septentrionale
et méridionale du Cameroun sous administration britannique et
l'expiration de l'accord de tutelle du13 décembre 1946. Dans cette
résolution, après avoir rappelé dans un préambule les résolutions

pertinentes qu'elle avait adoptées antérieurement et après avoir
déclaré qu'elleavait examinéle rapport du commissaire des Nations
Unies aux plébiscites sur les deux plébiscites organisés au Came-
roun septentrional et au Cameroun méridional en février 1961,
ainsi que le rapport du Conseil de tutelle à ce sujet, l'Assemblée
s'exprimait ainsi:

39 "Endorses the results of the plebiscites that:
(a) The people of the Northern Cameroons have, by a substan-
tial majority, decided to achieve independence by joining the in-
dependent Federation of Nigeria;
(b) The people of the Southern Cameroons have similarly
decided to achieve independence by joining the independent
Republic of Cameroon.
3. Coqzsidersthatthe people of the two parts of the Trust Ter-
ritory having freely and secretly expressed their wishes with re-
gard to their respective futures in accordance with General As-
sembly resolutions1352 (XIV) and 1473 (XIV),the decisions made
by them through democratic processes under the supervision of
the United Nations should be immediately implemented;

4. Decides that, the plebiscites having been taken separately
with differing results, the Trusteeship Agreement of 13th Decem-
ber 1946, concerning the Cameroons under United Kingdom ad-
ministration shall be terminated, in accordance with Article 76
of the Charter of the United Nations and in agreement with the
Administering Authority in the following manner:
(a) With respect to the Northern Cameroons, on 1st June 1961,
upon itsjoining the Federation of Nigeria as a separate province
of the Northern Region of Nigeria;

(b) With respect to the Southern Cameroons, on 1st October
1961, upon its joining the Republic of Cameroon."

The resolution ends by inviting:

"the Administering Authority, the Government of the Southern
Cameroons and the Republic of Cameroon to initiate urgent dis-
cussions with a.view to finalizing, before 1st October 1961, the
parties concerned will be implemented".clared policies of the

29. The arrangements thus prescribed were completed and the
decisions of the General Assembly embodied in the said resolution
were duly implemented so that the Northern Cameroons today
forms a part of the sovereign and independent Federation of
Nigeria, just asthe Southern Cameroons now constitutes a part of
the sovereign and independent Federal Republic of Cameroon.

30. It appears clear that the whole matter of the Trusteeship of
the Cameroons formerly under Cnited Kingdom administration
has been definitively and completely settled and the Trusteeship
Agreement relating thereto irrevocably terminated on I June 1961
with respect to the Northern Cameroons, as already mentioned,
and on I October 1961 with respect to the Southern Cameroons.
31. Now the same resolution 1608 (XV) in settling the whole
matter of the Trusteeship of the Cameroons, by necessary implica-
tion and effect, has also settled the dispute between the present

40 ((Prend acte des résultats des plébiscites selonlesquels:
a) La population du Cameroun septentrional a décidé, à une
majorité importante, d'accéder à l'indépendanceen s'unissant à la
Fédérationde Nigériaindépendante;

b) La population du Cameroun méridional a égalementdécidé
d'accéder à l'indépendance en s'unissant à la République du
Cameroun indépendante ;
3. Estime que, les populations des deux parties du Territoire
sous tutelle ayant librement exprimé, au cours d'un scrutin secret,
leurs aspirations au sujet de leur avenir respectif conformément
aux résolutions 1352 (XIV) et 1473 (XIV) de l'Assembléegénérale,
les décisions qu'elles ont prises par des moyens démocratiques,
sous la surveillance de l'organisation des Nations Unies, doivent
immédiatement êtremises en Œuvre;
4. Décid qeue, les plébiscites ayant eu lieu séparémentavec des
résultats différents, l'Accordde tutelle du13 décembre1946 relatif
au Cameroun sous administration du Royaume-Uni prendra fin,
conformément à l'alinéab de l'Article 76 de la Charte des Nations
Unies et en accord avecl'Autorité administrante, dans les conditions
suivantes:
a) En ce qui concerne le Cameroiln septentrional, le lerjuin 1961,
au moment où le Cameroun septentrional s'unira à la Fédération
de Nigéria entant que province séparée dela Régiondu IVordde la
Nigéria;
b) En ce qui concerne le Cameroun méridional,le I~~octobre 1961,
au moment où le Cameroun méridionals'unira à la République du
Cameroun. ))

La résoliition se terminait eninvitant :

«l'Autoritéadministrante, le Gouvernement du Cameroun méridio-
nal et la République du Cameroun à entamer d'urgence des pour-
parlers afin de prendre, avant le I~~ octobre 1961, les dispositions
nécessairespour que soient mises en Œuvre les politiques concertées
et déclarées desparties intéressées)).
29. Les dispositions ainsi prescrites ont été prises et les décisions
de l'Assemblée générale contenues dans ladite résolution ont été
dûment appliquées, de sorte que le Cameroun septentrional fait
aujourd'hui partie de la Fédération de Nigéria souveraine et

indépendante et que le Cameroun méridional fait de son côté partie
dela République fédéraledu Cameroun souveraine et indépendante.
30. Il semble doncnet que toutela question de la tutelle du Came-
roun autrefois sous administration britannique a étédéfinitivement
et complètement régléeet que l'accord de tutelle pour ce territoire
a irrévocablement pris fin le I~~ juin 1961 en ce qui concerne le
Cameroun septentrional, comme il a déjà étédit, et le ler octobre

1961 en ce quirconcerne le Cameroiin méridional.
31. Or, en réglant l'ensemble de la question de la tutelle sur le
Cameroun, cette résolution 1608 (XV) a, par voie d'implication et
de conséquence nécessaires, tranché également le différend entre les

4052 JUDG. 2 XII 63 (SEP. OPIN. JUDGE WELLINGTON KOO)

Parties. This settlement thus fulfils the condition of exclusion from
the scope of Article 19 prescribed by the term "settled by ...
other means". These words, it will be noted are a significant
addition in Article 19 which is othenvise substantially identical in
wording with the text of Article 12 of the former Mandate conferred
on His Britannic Majesty in respect of the Cameroons. The resulting
situation is that although negotiation between the Parties failed

to settle their dispute,the same was in effect settled by resolution
1608 (XV) just as the Applicant's complaints relating to the
alleged irregularities of the plebiscite of 11-12 February 1961 were
resolved by it in that it instead formally endorsecl the result of
the plebiscite.
32. It has been contended, however, that the term "settled by
..other means" in Article 19 does not embrace a settlement by an
organ of the United Nations: that, like negotiation, it denotes
such other means of direct settlement between the parties to a
given dispute as enquiry, mediation, conciliation, arbitration,

judicial settlement, etc., enumerated in Article 33 of the Charter
under Chapter VI on Pacific Settlement of Disputes. But on referring
to this provision it is seen that the various means listed include
"resort to regional agencies or arrangements or other peaceful
means of their own choice". The emphasis here is obviously on the
"peaceful" character of the means to be chosen by the parties for a
settlement of their dispute; and no means of settlement which
fulfils this qualification is precluded before bringing the dispute
to the Gnited Nations. In other words settlement by the General
Assembly is one of the implicitly recognized means. This view is
borne out by the record.

33. A debate in a special sub-committee of the Fourth Committee
of the General Assembly took place in December 1946, on a Chinese
proposa1 to amend the adjudication provision, Article XVI, of the
proposed trusteeship agreement for Western Samoa from New
Zealand for approval and a similar Article in the seven other pro-
posed trusteeship agreements from the United Kingdom for the
Cameroons and from other States for other territories so as to
make it obligatory to bring al1 disputes under the said provision
to the Trusteeship Council for settlement, and to authorize the
Trusteeship Council to, "if necessary, refer the matter to the
International Court of Justice for an advisory opinion". The

proposa1 was withdrawn after it was made clear by the other
speakers that settlement of a dispute with the Administering
Authority by the Trusteeship Council was not excluded under the
proposed Article for adjudication, but only that "this would occur
through the normal processes of the Trusteeship System rather
than through a clause such as the one proposed by the Chinese
representative" (G.A.O.R., 2nd Pt., 1st Session, Fourth Committee.Parties. Ce règlement tombe donc sous le coup de la limitation
apportée à l'application de l'article 19 par les mots (réglépar ...

un autre moyen ». Il est à noter que ces mots constituent une
addition importante à l'article 19 dont le texte est, à part cela,
identique en substance à celui de l'article 12 de l'ancien Mandat
conféréà S. M. britannique sur le Cameroun. La situation qui en
résulte est la suivante: les négociations entre les Parties n'ont pu
résoudre le différend, mais il a en fait ététranché par la résolution
1608 (XV); de même, les griefs du demandeur quant aux irré-

gularités qui auraient affecté le plébiscite des 11-12 février 1961
ont été régléspar cette résolution qui a, tout au contraire, pris
formellement acte des résultats du plébiscite.
32. On a soutenu cependant que l'expression ((réglépar ..un
autre moyen ))à l'article 19 ne peut s'entendre d'un règlement
par un organe des Nations Unies; on a dit que, comme le terme

((négociations », elle doit s'entendre d'autres moyens de règlement
direct entre les parties à un différend donné tels que l'enquête,
la médiation, la conciliation, l'arbitrage, le règlement judiciaire,
etc., lesquels sont énumérés à l'article 33 de la Charte, dans le
chapitre VI sur le règlement pacifique des différends. Mais quand
on lit cette disposition, on voit que la liste comprend aussi le (re-
cours aux organismes ou accords régionaux 1)ou (d'autres moyens

pacifiques de leur choix 1).Il est manifeste qu'ici l'accent est mis
sur le caractère ((pacifique ))du moyen que les parties doivent
choisir pour régler leur différend; aucun moyen de cette nature
n'est exclu avant le renvoi du différend devant les Nations Unies.
En d'autres termes, 1e.règlement par l'Assembléegénéraleest l'un
des moyens implicitement reconnus. Les débats confirment cette
opinion.

33. Une sous-commission spéciale de la Quatrième Commission
de l'Assemblée générale a discuté, en décembre 1946, une propo-
sition chinoise tendant à modifier la clause juridictionnelle (art.
XVI) que comportait le projet d'accord de tutelle pour le Samoa
occidental présenté pour approbation par la Nouvelle-Zélande et
à modifier un article similaire figurant dans les sept autres projets
d'accord de tutelle présentéspar le Royaume-Uni, en ce qui con-

cerne le Cameroun, ou par d'autres Etats, en ce qui concerne
d'autres territoires; le but de cet amendement était de rendre obli-
gatoirele renvoi au Conseil de tutelle, aux fins de règlement, de tous
les différends visés par cette disposition et d'autoriser le Conseil
de tutelle (si besoin est » à ((renvoyer l'affaire à la Cour interna-
tionale de Justice pour avis consultatif ))Cette proposition a été
retirée après que les autres orateurseurent préciséque le règlement

d'un différend avec l'autorité administrante par le Conseil de
tutelle n'était pas exclu dans le cadre de la clause juridictionnelle
proposéeet qu'il s'effectuerait ((en vertu de la procédure normale du
Régime de tutelle plutôt qu'en vertu d'une clause telle que laTrusteeship, Part II, Summary Records of Sub. Com. 1, pp. 85-88).
This shows clearly that the term "by negotiation or similar means"
was understood by al1 to include settlement by the Trusteeship
Council, consequently also by the General Assembly. The phrase
"by negotiation or other means" actually embodied in Article 19
of the Trusteeship Agreement for the Cameroons under United
Kingdom Administration would seem to indicate even a wider
range of means for settlement, if that be possible.

34. The assertion has also been made that any other means of

settlement than negotiation prescribed in Article 19 must be of
voluntary choice by the parties and that the Applicant Statein this
case by its very act of invoking the Court to adjudicate on the
dispute indicates the absence of such consent on its part to this
means of settlement. But it will be recalled that not only the
Government of the Republic of Cameroon circulated the "White
Book" among the Members of the General Assembly relating to its
complaints against the United Kingdom as Administering Authority
of the Northern Cameroons but also its representatives, including
its Minister for Foreign Affairs, freely and of its own accord parti-
cipated in the debates of the Fourth Committee and the General
Assembly on the very questions which are now described as the
subject-matter of the dispute with the Respondent, and took part
in the final vote on resolution 1608. It had obviously expected a
settlement favourable toits own view that the result ofthe plebiscite
in Northern Cameroons because of the "irregularities" it had
alleged should not be endorsed bythe United Nations. Although the
actual outcome of the vote in the General Assembly was a disap-
pointment toit, there can be no doubt that its choiceof this means
of sett1emen.twas at the outset entirely voluntary on its part. The
fact that the Applicant has more than once declared its acceptance
of this settiement by resolution 1608, as will be seen later in

this statement, further confirms its recognition of decision by the
General Assembly as one of the means of settlement .
35. It has also been contended that resolution 1608 (XV) settled
only the question of implementing the results of the plebiscites and
that of terminating the Trusteeship Agreement but that it did not
deal with the complaint now presented to the Court in the Appli-
cation of breaches by the United Kingdom of obligations of the
Administering Authority undertaken in the said Agreement. It is
claimed, to quote the language of the Applicant's Counsel that--

"the discussions which led up to resolution 160s did not
bear at al1on the precise question that is submitted to the Courtpropose le représentant chinois )) (Nations Unies, Documents
officiels de la seconde partie de la première session de l'Assemblée
générale, Quatrième Commission, Tutelle, Deuxième partie -
Procès-verbaux des séancesde la Sous-Commission I- pp. 85 à 88).

Ceci montre nettement que l'expression (par négociations ou par
un autre moyen analogue 1)devait, de l'avis de tous, s'entendre
aussi d'un règlement par le Conseil de tutelle et donc également par
l'Assemblée générale. Lemembre de phrase ((par négociations ou
un autre moyen ))qui figure à l'article 19 de l'accord de tutelle
pour le Cameroun sous administration britannique semble se
référer à une gamme encore plus large de moyens de règlement,
si cela est possible.

34. On a également dit que tout moyen autre que les négociations
dont il est question à l'article 19 doit résulter du choix volontaire
des parties et qu'en l'espèce le simple fait que 1'Etat demandeur
prie la Cour de trancher le différend indique qu'il ne consent pas,
quant à lui, à ce mode de règlement. Mais on se rappellera que le
Gouvernement de la République du Cameroun ne s'est pas borné à
distribuer aux Membres de l'Assemblée généraleson livre blanc
concernant les griefs camerounais contre le Royaume-Uni en tant

qu'autorité administrante du Cameroun septentrional; ses représen-
tants, notamment le ministre des Affaires étrangères,ont librement
et de leur plein gré participéaux débats de la Quatrième Commis-
sion et de l'Assemblée générale sur les questions quifont maintenant
l'objet du différend avec le défendeur; ils ont pris part au vote
final sur la résolution 1608 (XV). Le Cameroun avait visiblement
escompté un règlement favorable à ses vues, selon lesquelles les
Nations Unies, tenant compte des irrégularités alléguéespar lui,
ne devaient pas prendre acte des résultats du plébiscite au Came-

roun septentrional. Certes le vote qui a eu lieu à l'Assemblée
générale a déçu le Cameroun, mais il ne fait aucun doute qu'au
départ le choix de ce mode de règlement était entièrement volon-
taire. Le fait que le demandeur ait plus d'une fois déclaré -
comme on le verra ultérieurement - qu'il acceptait le règlement
résultant de la résolution 1608 (XV) est une confirmation de plus
qu'il considère une décision de l'Assemblée générale commeun
moyen de règlement.

35. On a soutenu aussi que la résolution 1608 (XV)n'a régléque
la question de la mise en euvre des résultats des plébiscites et
cellede l'expiration de l'accord de tutelle,sans apporter de réponseau
grief formulé contre le Royaume-Uni, dans la requêteprésentement
soumise à la Cour, de n'avoir pas respecté les obligations incombant
à l'autorité administrante en vertu de l'accord de tutelle. Pour
reprendre ses propres termes, le conseil du demandeur a affirméque :

((lesdébats qui ont conduit à la résolution1608n'ont absolument
pas porté surla question préciseaujourd'hui soumise à la Cour, à today, namely, the question whether the Administering Authority
correctly interpreted and applied certain provisionsfthe Trustee-
ship Agreement."
36. It should be noted, however, that the various complaints
stated in the Application and repeated in the Memorial are sub-

stantially the same as those enumerated in the "White Book",
which was circulated to the representatives of the Members of the
United Nations in the General Assembly towards the end of March
1961, and which was answered by a letter in rebuttal of the alle-
gations addressed by the United Kingdom representative to the
Chairman of the Fourth Committee on 10 April 1961 and circulated
among the Members of the General Assembly. As has been pointed
out earlier, the issues raised inhese two documents were debated
in theFourth Committee when the same complaints were reiterated
by the Minister for Foreign Affairs of the Republic of Cameroon
in the meetings of the said Committee. These debates were sum-
marized in the report of the Trusteeship Council to the General
Assembly which, in adopting resolution 1608 (XV), took full note of
its contents. The only difference consisted in the addition in the
Observations of the Applicant of Articles 3 and 7 of the Trusteeship
Agreement to the list of provisions alleged to have been violated by
the Administering Authority. This addition, however, does not

alter the general positions taken respectively by the Parties before
the Court nor in any way affect the main issue of jurisdiction now
under consideration.
37. In a word, the essence of the Applicant's contention is that
resolution 1608 (XV) cannot be considered as having settled the
dispute between Cameroon and the United Kingdom. ft is asserted
that this resolution only decides the termination of the Trusteeship
and does not contain any provision settling the dispute now before
the Court.

38. Of course it may be said that the dispute in question was not
settled by the said resolution, because it is not one with the United
Nations but between two individual States. But this could only be a
superficial and formalistic view. While the parties to the disputeare
distinct from the General Assembly or the body of other Members
of the United Nations, the determinant fact isthat the subject-matter
of the dispute is identicalwith part of the subject-matter of the whole
question of the Trusteeship of the Cameroons finally settled by
resolution 1608 (XV). The authorization by the General Assembly to
hold the plebiscites, the endorsement of their results and the
decision to terminate the Trusteeship Agreement of the Cameroons
under United Kingdom Administration constitute a settlement of
the whole matter of the said Trusteeship. This complete series of
acts embodied in the said resolutior~ M-asmanifestly based on the
premise that the Administering Authority had fulfilled 'its obliga-

tions it had undertaken toward the trust territory and its in-
43 savoir celle dedire si l'autorité administrantea correctement inter-
prétéet appliqué certainesdispositionsde l'accord detutell».

36. Mais il faut noter que la requêtepuis le mémoireont essen-
tiellement repris les griefs articulésdans le livre blanc qui avait été
diffusé versla fin de mars 1961 parmi les représentants des Membres
des Nations Unies à l'Assembléegénéraleet aux allégationsduquel
le représentant du Royaume-Uni avait répondu par une lettre de
réfutation adressée le IO avril 1961 au président de la Quatrième
Commission et distribuée aux Membres de l'Assemblée générale.
Comme je l'ai déjàdit, les questions soulevéesdans ces deux docu-
ments ont étéd . iscutéesà la Quatrième Commission, aux séances
de laquelle les mêmes griefs ont étérépétéspar le ministre des
Affaires étrangèresde la République du Cameroun. Les débats ont
étérésumésdans le rapport du Conseil de tutelle à l'Assemblée
générale,rapport dont il a étépleinement tenu compte par 1'Assem-

bléelors de l'adoption de la résolution1608(XV). La seuledifférence
que comportent les observations du demandeur tient à l'addition
des articles 3 et7 de l'accord de tutelle à la liste des dispositions
que l'autorité administrante est accuséed'avoir violées.Toutefois
cette addition ne modifie par l'attitude générale desdeux Parties
devant la Cour et n'affecte en rien la principale question actuelle-
ment à l'examen, celle de la compétence.

37. En résumé,la thèse du demandeur consiste essentiellement
à dire que l'on ne peut considérer la résolution 1608 (XV) comme

ayant réglé le différendentre le Cameroun et le Royaume-Uni.
On affirme que cette résolution se borne à prononcer la levée
de la tutelle et n'a, dans aucune de ses dispositions, réle différend
dont la Cour est maintenant saisie.
38. Bien sîlr, on peut dire que le différend enquestion n'a pas été
réglépar cette résqlution puisqu'il met en jeu non pas les Nations
Unies, mais deux Etats à titre individuel. Ce ne serait là pourtant
qu'une attitude superficielle et formaliste. Certes les Parties au
différend sont distinctes de l'Assemblée générale ou de l'ensemble

des autres Membres des Nations Unies, mais le facteur déterminant
reste que l'objet du différend s'identifieen partie ce sur quoi porte
globalement la question de la tutelle du Cameroun, définitivement
régléepar le résolution 1608 (XV). L'autorisation accordée par
l'Assembléegénéraled'organiser les plébiscites, l'approbation des
résultats des plébiscites et la décisionde mettre fin à l'accord de
tutelle pour le Cameroun sous administration britannique règlent
la question de la tutelle dans son ensemble. Toute cette séried'actes
consacrésdans ladite résolutionétaitmanifestement fondéesur cette
prémisse que l'autorité administrante avait rempli les obligations
qu'elle avait assuméesà l'égarddu territoire sous tutelle et de ses

43habitants, as well as toward the United Nations. Itis commonplace
to Say that when the whole qiiestion of conformity or non-con-
formity of the conduct of the Administering Authority with the
provisions of the Trusteeship Agreement has been settled,there can
no longer be any question of conformity or non-conformity with
certain provisions under the same Agreement. The whole must
necessanly include the part.

39. Itwould be a different matter if the Applicant were com-
plaining of violations of certain of its individualrights or those of its
nationals under the Trusteeship Agreement. For such a question
might not have been necessarily included in a settlement of al1the
questions relating to the promotion of the general interests of the
trust territory or its inhabitants by the Administering Authority in
conformity with its obligations under the Agreement. But the
complaints of the Applicant in the present case are confined to the
alleged failure of the UnitedKingdom to fulfilits obligations toward
the territory andinhabitants ofthe Northern Cameroons. The interest
of which the Applicant is seeking judicial protection is a common
interest, possessed not only by the United Nations primarily, nor
by the Applicant State alone, but also by every other Member there-
of. When al1questions relating to this sarne common interest have
been disposed of and settled resulting in the achievement of the basic
objective of the Trusteeship of the Cameroons under United King-
dom administration in accordance with Article 76 (b) of the Charter
and the termination of the Trusteeship Agreement of 13 December

1946, it necessarily means that the subject-matter of the present
dispute lias in fact been disposed of and settled at the same time.
40. The reasons for this view are patent and do not cal1for much
elaboration. When the General Assembly acted to adopt resolution
1608 (XV) it could not have failed to take account of al1the ques-
tions and issues involved. The text of this resolution was originally
prepared by the Trusteeship Council and it was revised in the
Fourth Committee as the result of the discussions therein. As has
already been referred to, it was recommended in its final form tothe
General Assembly for adoption and accompanied by a report from
the said Committee summarizing the discussions and the different
viewpoints of the delegates bearing not only on the text of the

recommended resolution but also on the questions debated including
the views of the representative of the Republic of Canieroon. The
fact that resolution 1608 (XV) did not itself refer to any of the
complaints made by the Government of Cameroon against the
Administering Authority does not mean that in adopting the said
resolution the General Assembly was unaware of either the
complai~its of the Applicant or its views relating to the conduct of
the United Kingdom in administering the former trust territory of
the Cameroons.habitants comme à l'égard des Nations Unies. C'est un truisme de
dire que, une fois régléetoute la question de la conformité ou de la
non-conformité du comportement de l'autorité administrante avec
les dispositions de l'accord de tutelle, aucune question ne peut plus
se poser quant à la conformité ou à la non-conformité de ce com-
portement avec certaines dispositions dudit accord. Le tout com-
prend nécessairement la partie.

39. La situation serait différentesi le demandeur se plaignait de
la violation de certains droits conférés enpropre à lui-même ou à
ses ressortissants par l'accord de tutelle. Une telle question aurait
pu en effet ne pas être nécessairement résolue dans le cadre d'un
règlement de l'ensemble des problèmes concernant le point de
savoir si l'autorité administrante a agi dans l'intérêtgénéraldu
territoire sous tutelle et de ses habitants conformément aux obli-
gations que l'accord lui imposait. Mais en l'espèce le demandeur
se borne à accuser le Royaume-Uni de n'avoir pas respecté ses

obligations envers le territoire du Cameroun septentrional et ses
habitants. L'intérêt dont le demandeur cherche la protection
judiciaire est un intérêtcommun qui n'appartient pas seulement au
premier chef aux Nations Unies ou à 1'Etat demandeur mais qui
appartient à tous les autres Membres de l'Organisation. Une fois
tranchées et régléestoutes les questions concernant cet intérêt
commun - d'où la réalisation de la fin essentielle de la tutelle au
Cameroun sous administration britannique conformément à l'arti-
cle 76b) de la Charte, d'où aussi l'expiration de l'accord de tutelle
du 13 décembre 1946 -, il en résulte nécessairement que l'objet
du présent différenda en fait été tranchéet réglédu mêmecoup.

40. Les raisons en sont évidentes et n'appellent pas un long
développement. Lorsque l'Assembléegénérale adécidéd'adopter
la résolution 1608 (XV), elle n'a pu manquer de tenir compte de
toutes les questions et de tous les problèmes en cause. Le texte de
cette résolution aété préparépar le Conseil de tutelle, puis revisé,
après discussion, par la Quatrième Commission. Comme je l'ai
déjà dit, lorsqu'il a étérecommandé sous sa forme définitive à
l'Assemblée générale pour adoption, il était accompagné d'un
rapport de la Quatrième Commission qui résumait les débats et les

différents points de vue des délégués nonseulement sur le projet
proposé mais aussi sur les questions controversées, y compris les
vues du représentant de la République du Cameroun. Le fait que la
résolution 1608 (XV) elle-mêmen'a cité aucun des griefs du Gouver-
nement camerounais contre l'autorité administrante ne signifie
nullement qu'en adoptant ce texte l'Assembléegénéralen'ait pas
étéau courant des griefs du demandeur ou de son opinion sur la
manière dont le Royaume-Vni avait administré le territoire du
Cameroun anciennement sous tutelle. 41. Moroever, without entering into a discussion of points which
belong to the merits, it should be pointed out that one of the basic
objectives of the Trusteeship System, as expressly provided in
Article 76 (h) of the Charter, is, ashas already been noted above, to
promote the advancement of the inhabitants of the trust territories
and-
"their progressive development towards self-government or in-
dependence as may be appropriate to the particular circumstances
of each territory and its peoples and the freely expressed wishes
of the peoples concerned".

In acting to implement the results of the plebiscites as the freely
expressed wishes of the people of the trust territory of the Camer-
oons, the General Assembly was discharging one of its most solemn
obligations as it was also exercising one of its most important func-
tions under Article 85 of the Charter. It was entitled under this
provision to settle al1 other matters relating to the administration
of a trust territory in subordination to the early achievement of the
stated basic objective, which is the primarypurpose of the Trustee-
ship System. It would be illogical to assume, as it would have been
self-contradictory for the General Assembly to consider, that the
Administering Authority had failed to observe the obligations
undertaken in the Trusteeship Agreement to promote the develop-
ment of the inhabitants of the trust territory towards self-govern-
ment or independence, when it was deciding that the basic objective
of the Trusteeship had been achieved by the Administering Au-
thority and that therefore the Trusteeship Agreement could and
should be terminated.

42. The Applicant has further contended that resolution 1608
(XV) was adopted by the General Assembly to settle the question
of the Trusteeship of the Cameroons on the political plane, based
upon considerations of political expediency and realism, and not
on the legal plane; and that therefore all the legal issues, such as
those raised by the Republic of Cameroon here, have remained to be
settled judicially by this Court under Article 19 of the Trusteeship
Agreement.
43. This contention, in my view, runs counter to the intent,
purpose, structure and operation of the whole TrusteeshipSystem as
provided for in Chapters XII and XII1 of the Charter. The adminis-

tration and supervision of al1trust territories are placed under the
United Nations. The General Assembly with the co-operation and
assistance of the Trusteeship Council exercises, under Article 85,
al1the functions of the United Nations with regard to trusteeship
agreements for al1areas not designated as strategic. Since it is there-
in expressly provided that these functions include the approval of
45 41. Au surplus, il faut rappeler, sans pour cela aborder l'examen
de questions de fond, que l'une des fins essentielles du régime de
tutelle expressément définies à l'article76 b) de la Charte est de
favoriser le progrès des populations des territoires sous tutelle,
ainsi que

rleur évolution progressive vers la capacité à s'administrer eux-
mêmesou l'indépendance,compte tenu des conditions particulières
à chaque territoire eàsespopulations [et]des aspirationslibrement
expriméesdes populations intéressées )).
En prenant les mesures nécessaires pour mettre en Œuvre les résul-
tats des plébiscites en tant qu'ils représentaient les aspirations
librement exprimées des populations du territoire sous tutelle du
Cameroun, l'Assemblée générale s'acquittait de l'une de ses obliga-

tions les plus solennelles, de même qu'elleexerçait l'une de ses plus
importantes fonctions aux termes de l'article 85 de la Charte. Cet
article lui donnait le droit de subordonner à la réalisation rapide de
la fin essentielle indiquée comme le but premier du régimedetutelle
le règlement de tous les autres problèmes relatifs à l'administration
d'un territoire sous tutelle. Il serait illogique de supposer, de même
qu'il aurait été contradictoire pour l'Assemblée généraled'estimer,
que l'autorité administrante n'a pas respecté l'engagement pris
dans l'accord de tutelle de favoriser l'évolution des populations du
territoire vers la capacité de s'administrer elles-mêmesou l'indé-
pendance, alors que l'on était en train de décider que la fin essen-
tielle de la tutelle avait étéatteinte et que, par conséquent, l'on
pouvait et devait mettre fin à l'accord de tutelle.

42. Le demandeur a soutenu en outre que la résolution 1608(XV)
a étéadoptée par l'Assemblée généralepour réglerla questionde la
tutelle du Cameroun sur le plan politique, en fonction de considé-
rations inspirées par l'opportunité et le réalisme politiques et non
sur le plan du droit; et que, par conséquent, toutes les questions
juridiques, comme celles que soulèveprésentement la République du
Cameroun, restent à régler judiciairement par la Cour en vertu de
l'article19 de l'accord de tutelle.

43. Cette thèse est, à mon avis, contraire à l'intention, au but, à
la structure et au fonctionnement de tout le régime de tutelle tel
qu'il est prévu dans les chapitres XII et XII1 de la Charte. Les
Nations Unies ont la responsabilité de l'administration et de la
surveillancede tous les territoires sous tutelle. L'Assembléegénérale,
avec la coopération et l'assistance du Conseil de tutelle, exerce, en
vertu de l'article 85, toutes les fonctions des Nations Unies en ce
qui concerne les accords de tutelle relatifsà toutes les zones qui ne
sont pas désignées comme stratégiques. L'article 85 prévoyant

45the terms of the trusteeship agreements and of their alteration or
amendment, it goes without saying that they also include the
function of terminating such agreementswith the concurrence of the
respective administering authorities, because termination of such
trusteeship agreementsis necessarily implied in the achievement of
the basic objective of self-government or independence of every
trust territory. To claim that the General Assembly is not entitled,
under the Charter, to terminate any trusteeship agreement of a

non-strategic territory definitively and finally, including al1 legal
questions which may have been raised in connection with the
problems of termination, would in effect mean that the General
Assembly had no power, notwithstanding the express provision of
Article 85, to settle, once and for all, al1 matters related to the
trust territory or its inhabitants and that any settlement made by
it must be regarded as provisional and subject to review by this
Court in respect of the legal issues involved in the settlement made
by the General Assembly in exercise of its authorized functions
under the Charter. Such a construction would import a very serious
elernent of uncertainty into every act of the General Assenibly in
terminating a trusteeship agreement and tend to undermine the
primary purpose and the basic principles of the Trusteeship System.

44. That Counsel for the Applicant sees the untenability of the
claim as originally submitted is evidenced by a supplementary
explanation in the following terms:
"Cameroon is not asking the Court to criticize the United Na-
tions; Cameroori is not asking the Court to Say that the United
Nations was wrong in terminating the Trusteeship; Cameroon is
not asking the Court to pronounce the annulment of resolution
1608. The Court, of course, would not be competent to do that,
any more than the Court would be competent to reinstitute the
Trusteeship or to hammer out a new Trusteeship Agreement. The
situation is, after all, quite simple. The General Assembly's de-
cision is final, conclusive, in its own sphere."

Later, in the same explanation, it is added
"The United Kingdom argues and puts forward its objections
as if the dispute related to the question whether the General Assem-
bly was entitled to terminate the Trusteeship, or whether it did
wellto terminate the Trusteeship, in 1961.But that isnot the subject
of the dispute for no one denies that it was within the power of the
General Assembly, in agreement with the Administering Authority,
to terminate the Trusteeship, just as it decided to approve the
Trusteeship Agreement in 1946. The United Kingdom argues and
puts fonvard its objections as if we were asking tlie Court to re-
open the discussion that was closed in the United Nations on 21
,4pnl1961. If wewere asking the Court to do that it would be bound,
of course, to find that it had no jurisdiction, for it does not corneexpressément que ces fonctions comprennent l'approbation des
termes des accords de tutelle et de leur modification ou amende-
ment, il va sans dire qu'elles englobent aussi la fonction consistant
à mettre fin aux accords avec le concours des autorités adminis-
trantes intéressées; car la cessation des accords de tutelle résulte

implicitement de la réalisation de la fin essentielle que constitue
l'autonomie ou l'indépendance de chacun desterritoires soustutelle.
On ne saurait prétendre que la Charte ne donne pas à l'Assemblée
généralele droit de mettre fin à un accord de tutelle pour un terri-
toire non stratégique de façon définitive et en dernier ressort, en
réglant notamment toutes les questions juridiques qui peuvent
avoir étésoulevées au sujet de l'expiration de l'accord: cela revien-
drait en effet à dire qu'en dépit de la disposition expresse de
l'article 85, l'Assemblée générale n'est pas habilitée à régler une
fois pour toutes l'ensemble des questions relatives à un territoire
sous tutelle ou à ses populations; cela équivaudrait à affirmer que

tout règlement effectuépar l'Assembléedans l'exercice des fonctions
que lui confère la Charte doit êtreconsidérécomme provisoire et
sujet à revision par la Cour en ce qui concerne les questions juri-
diques qu'il comporte. Une telle interprétation introduirait un
élémenttrès grave d'incertitude dans tous les actes de l'Assemblée
généraledestinés à mettre fin à un accord de tutelle et tendrait à
miner le but premier et les principes essentiels du régime de tutelle.
44. Il ressort de l'explication supplémentaire suivante que le
conseil du demandeur s'est rendu compte du caractère insoutenable

de la demande formulée à l'origine:
(Le Cameroun ne demande pas à la Cour de critiquer les Nations
Unies; il ne lui demande pas de dire que les Nations Unies ont eu
tort de mettre finà la tutelle; il ne lui demande pas de prononcer
l'annulation de la résolution 1608. Cela, bien entendu, la Cour
ne serait pas compétente pour le iaire, pas plus qu'elle ne le serait
pour rouvrir la tutelle ou pour forger un nouvel accord de tutelle.
La situation est, somme toute, très simple. La décisionde 1'Assem-
bléegénérale est définitive, (conclusive »,dans sa sphère propre ..))

Il est dit plus loin, dans le même passage:
((LeRoyaume-Uni raisonne et formule ses objections comme si le
différendportait sur la question de savoir si l'Assembléegénérale
avait le droit de mettre fin à la tutelle ou a bien fait de mettre
finà la tutelle en 1961. Mais tel n'est pas l'objet du différend, car
nul ne conteste qu'il appartenaità l'Assembléegénérale,en accord
avec l'autorité administrante, de mettre finà la tutelle, comme elle
a décidéd'approuver l'accord de tutelle en 1946. Le Royaume-Uni
raisonne et formule ses objections comme si nous demandions à la
Cour de rouvrir le débat clôturéaux Nations Unies le 21avril 1961.
Si nous lui demandions cela, elle devrait, bien entendu, se déclarer
incompétente, car il n'appartient à l'organe judiciaire ni de décider
de mettre un territoire sous tutelle ni de déciderde mettre fiàune
tutelle ni de rouvrir un régimede tutelle.»

46 within the powers of the judicial organ either to decide to place
a territory under Trusteeship or to decide to terminate a Trustee-
ship, nor yet again to reinstitute a Trusteeship régime."

45. This statement clarifies the position of the Applicant on the
question under discussion. There is no doubt that it accepts reso-
lution 1608 (XV) implementing the results of plebiscites of the
peoples of the Northern and Southern Cameroons and terminating
the Trusteeship Agreement of 13 December 1946 as final and con-
clusive. What, then, is the true nature of the claim? What is the
precise question which the Applicant asks the Court to decide?
The answer is given in the following proposition formulated by
the Applicant's Counsel :
"...there is notl-iing to prevent the Court, within the framework
of its own attributions, which are judicial attributions, from pro-
nouncing upon the dispute between Cameroon and the United
Kingdom on the question whetl-ier,from the beginning to the end
of the Trusteeship, the United Kingdom in its capacity as Admin-
istering Authority, correctly interpreted and applied the pro-
visions of the Trusteeship Agreement, for that isa dispute which
tlie General Assembly did not settle in any way".

46. But even thus framed, the question does not justify the Court
to assume jurisdiction. For apart from what has already been shown
above that the settlement of the present legal dispute must have,
by necessary implication, been included in the over-al1 settlement
of the whole Trusteeship of the Cameroons by resolution 1608 (XV),
there are the published proceedings of the Trusteeship Council and
the General Assembly relating to the Trust Territory of the Cam-
eroons, which contain the annual reports of the Administering
Authority, the questionnaires, the petitions from the inhabitants of
the territory, the reports of United Nations visiting missions, those
by the Committee on Administrative Unions, and the resolutions
of the Trusteeship Council and the General Assembly taking note
of their contents or recommending particular measures to the
Administering Authority for further implementation of the pro-

visions of the Trusteeship Agreement with due regard to the basic
objectives of the Trusteeship System. Whether and to what extent
the Administering Authority had, in administering the trust terri-
tory, observed its obligations on a particular question under the
Trusteeship Agreement was considered and debated each year
by the Trusteeship Council and the General Assembly when ex-
amining the Annual Report from the Administering Authority,
and appropriate recommendations were duly made for improve-
ment in the administration.
47. It is also to be noted that in considering the question whether
the Administering Authority did or did not observe its obligations
under the Trusteeship Agreement, the General Assembly and the
Trusteeship Council did not confine their attention to the provisions 45. Cette déclaration clarifie l'attitude du demandeur sur la
question examinée. Il est certain qu'il reconnaît comme définitive,
(<conclusi »,la résolution 1608 (XV) qui a donné effet aux plébis-
cites des populations du Cameroun septentrional et méridional et
mis fin à l'accord de tutelle du 13décembre 1946. Quelle est donc la
véritable nature de la demande? Quelle est la question précise que
le demandeur prie la Cour de trancher? La réponse est fournie par
l'explication suivante donnée par le conseil du demandeur:

(...mais rien ne fait obstacle à ce que dans le cadre de ses attri-
butions à elle, qui sont des attributions judiciaires, la Cour se
prononce sur le différendqui séparele Cameroun et le Royaume-Uni
sur la question de savoir si, depuis le début jusqu'à la fin de la
tutelle, le Royaume-Uni en tant qu'autorité administrante a correc-
tement interprétéet appliquéles dispositions de l'accord de tutelle,
car ce différend-là,l'Assembléegénéralene l'a, en aucune manière,
réglé».
46. Mais, mêmeainsi posée,la question ne relève pas de la com-
pétence de la Cour. En effet, indépendamment du fait que le règle-

ment général del'ensemble de la tutelle du Cameroun par la résolu-
tion 1608 (XV) implique nécessairement le règlement du différend
juridiqueen cause -fait que j'ai établiplus haut -, on doit prendre
en considération les procès-verbaux des débats du Conseil de tutelle
et de l'Assemblée généraleau sujet du territoire sous tutelle du
Cameroun qui contiennent les rapports annuels de l'autorité admi-
nistrante, les questionnaires, les pétitions des habitants du territoire,
les rapports des missions de visite des Nations Unies et du Comité
chargé des unions administratives et les résolutions du Conseil de
tutelle et de l'Assemblée généraleprenant note desdits rapports ou
recommandant à l'autorité administrante certaines mesures pour
la mise en Œuvre des dispositions de l'accord de tutelle eu égard

aux fins essentielles du régime de tutelle. Chaque année, au sein
du Conseil de tutelle et de l'Assemblée générale,l'examen du rapport
annuel de l'autorité administrante donnait lieuà des débats sur le
point de savoir si, et dans quelle mesure, l'administration du
territoire sous tutelle s'était conformée aux obligations particulières
contenues dans l'accord de tutelle et l'on adoptait des recomman-
dations tendant à améliorer cette administration.

47. Il faut également observer que, lorsque l'Assemblée générale
et le Conseil de tutelle examinaient la question de savoir si l'auto-
rité administrante avait ou n'avait pas respecté les obligations
énoncéesdans I'acc~rd de tutelle, ils ne limitaient pas leur attention
47of the Charter and the Trusteeship Agreement, but also took into
account the recommendations of the successive resolutions pre-
viously adopted for the Administering Authorityto carryoutThese
recommendations were not always based merely on specific pro-
visions of the Trusteeship Agreement; they often partook of the
character of interpreting, modifying or supplementing the terms of
the Trusteeship Agreement. This the General Assembly was en-
titled to do under Articl85 of the Charter, and did it al1 for the
purpose of achieving, and achieving as early as possible, the over-
riding aim, the basic objective of the Trust, which was and is the
achievement of self-government or independence for each particular
trust territory and its inhabitantsThus resolution 226 (III) of
18 Novemenber 1948 recommended that the Administering Authori-
ty "take al1possible steps to accelerate the progressive development
towards self-government or independence of the Trust Territories
they administer". Resolution 320 (IV) of 15 Kovember 1949 ex-
pressed its full support of the Council's recommendations to ad-
ministering authoritiefor the adoption by the latter of measures

which would hasten the advancement of the trust territoriestowards
self-government or independence in accordance with the objectives
laid down in Article76 (b) of the Charter. Resolution558 (VI) of
18 January 1952 called for information concerning measures taken
or contemplated towards self-government or independence, and,
inter alia, the estimated period of time required for such measures
and fortheattainment of the ultimate objective.This wasreaffirmed
by resolution858(IX) of15 December 1955 T.he underlyingpurpose
of al1these acts was that the administering authority of each trust
territory should faithfully discharges obligations under the par-
ticular trusteeshipagreement and in conformity with the special
resolutions adopted by the Trusteeship Council and the General
Assembly.

48. Also take, for example, the question of administrative unions
affecting trust territories, which forms one of the complaints of the
Applicant inthe present case, relating to Article of the Trustee-
ship Agreement. General Assembly resolution 224 (III) of 18 NO-
vember 1948 "endorsed" the observation of the Trusteeship Council
that an administrative union "must remain strictly administrative
in its nature and its scope, and that its operation must not have
the effect of creating any conditions which will obstruct the separate
development of the Trust Territory, in the fields of political, eco-
nomic, social and educational advancement, as a distinct entity".
This resolution also recommended, among other measures:

"(c) Request, whenever appropriate, an advisory opinion of the
International Court of Justice ashether such unions are within
the scopeof and compatible with, the stipulations of the Charteraux dispositions de la Charte et de l'accord de tutelle mais tenaient
également compte des recommandations que des résolutions anté-
rieures avaient invité l'autorité administrante à appliquer. Ces
recommandations n'étaient pas toujours uniquement fondées sur
des dispositions expresses de l'accord de tutelle; il leur arrivait
souvent d'interpréter, modifier ou compléter les termes de l'accord
de tutelle. L'Assemblée généraleétait autorisée par l'article 85 de
la Charte à le faire et elle le faisait en vue de réaliser et de réaliser
aussitôt que possible le but primordial, la fin essentielle de la tutelle,
qui était et qui est l'accession à l'autonomie ou à l'indépendance
de chacun des territoires sous tutelle et de ses habitants. Ainsi,

la résolution 226 (III) du 18 novembre 1948 recommandait aux
autorités administrantes (cDe prendre toutes les dispositions
possibles en vue de hâter l'évolution progressive des Territoires
sous tutelle qu'elles administrent vers la capacité à s'administrer
eux-mêmes ou l'indépendance 1)La résolution 320 (IV) du 15 no-
vembre 1949 approuvait pleinement le Conseil de tutelle de recom-
mander aux autorités administrantes l'adoption de mesures en vue
de hâter l'évolution des territoires sous tutelle vers la capacité à
s'administrer eux-mêmes ou l'indépendance conformément aux
fins énoncées à l'alinéa b) dc l'articl76 de la Charte. La résolution
558 (VI) du 18 janvier 1952 demandait des renseignements sur les
mesures prises ou envisagées pour conduire les territoires à l'auto-
nomie ou à l'indépendance et notamment sur le délaijugé nécessaire
pour mener à bien lesdites mesures et atteindre l'objectif fina- ce

qui fut répétédans la résolution 858 (IX) du 15 décembre 1955.
Le but de tous ces actes était fondamentalement que l'autorité
administrante de chaque territoire sous tutelle s'acquittât fidèle-
ment des obligations imposées par l'accord de tutelle, et cela en
conformité avec les résolutions adoptées spécialement par le Conseil
de tutelle et l'Assembléegénérale. l

48. Considérons aussi, par exemple, la question des unions ad-
ministratives affectant les territoiressous tutelle, qui constitue,
en l'espèce, l'un des griefs du demandeur eu égard à l'article5,
alinéa b), de l'accord de tutelle. La résolution 224 (III) du 18 no-
vembre 1948 a (fait sienne ))l'observation du Conseil de tutelle
qu'une union administrative doit se limiter strictement, à la
fois en nature et en degré, au domaine administratif, et que sa mise
en vigueur ne peut avoir pour effet de créer de conditions qui en-
traveraient dans les domaines politique, économique et social et
dans le domaine de l'instriiction Ie progrès du Territoire en tant
que tel )).Cette résolution recommandait également, entre autres
mesures, que le Conseil de tutelle:

« c) Demande à la Cour internationale de Justice, chaque fois
qu'il y aura lieii, un avis consultatif sur le point de savoir si ces
unions entrent dans le cadre tracé par les stipulations de la Charte60 JUDG. 2 XII 63 (SEP. OPIN. JUDGE WELLINGTON KOO)

and the terms of the Trusteeship Agreements as approved by the
General Assembly ;

"(d) Invite the Administering Authorities to make available to
the Council such information relating to administrative unions as
will facilitate the investigation by the Council referred to above;
"(e) Report specifically to the next regular session of the General
Assembly on the results of the Council's investigations and the
action taken by it."

Resolution 326 (IV) of 15 November 1949-
"Recommends to the Trusteeship Council to complete the in-
vestigations, paying particular attention to the following:

(b) The desirability, should it be impossible as a consequence
of the establishment of an administrative union to furnish clear
and precise separate financial, statistical and otherdata relating
to a Trust Territory, of the Administering Authority concerned
accepting such supervision by the Tmsteeship Council over the
unified administration as the Council may consider necessary for
the effective discharge of its high responsibilities under the Char-
ter..."

The same resolution recommended the Trusteeship Council-
"to complete its investigation, in accordance with the terms of
General Assembly resolution 224 (III) and of the present resolu-
tion, and present a special report to the next session of the General
Assembly on the results of its investigation and the action taken
by it, with particular reference to any safeguards which the Coun-
cil may consider it necessary to request of the Administenng Au-
thorities concerned, and that the Council continue likewise to ob-
serve the development of such unions and to report to the General
Assembly at its regular sessions".

49. The above-mentioned resolutions of the General Assembly
were followed by other resolutions in succeeding years on the same
subject of administrative unions affecting trust territories such as
resolution 648 (VII) of 20 December 1952, which is one of the most
comprehensive acts of the General Assembly and which lists "Fac-
tors which should be taken into account in deciding whether a
Territory is or is not a Territory whose people have yet attained
a full measure of self-government" with an annex of "Factors
indicative of the attainment of independence or of other separate
systems of self-government". Resolution 1473 (XIV) of 12 December
1959 dealt specially with the Trust Territory of the Cameroons
under United Kingdom Administration in respect of the Northern
part of the Territory. Among other provisions, it : et les dispositions des Accords de tutelle tels que ceux-ci ont été
approuvés par l'Assembléegénéraleet sont compatibles avec ces
stipulations et ces dispositions;
d) Invite les Autorités chargées de l'administration à fournir
au Conseil les renseignements relatifs aux unions administratives
qui faciliteront l'enquête du Conseil mentionnée ci-dessus;
e) Adresse un rapport spécial à la prochaine session ordinaire
de l'Assembléegénéralesur les résultats de l'enquêtedu Conseil et
sur les mesures qu'il a prise))

La résolution 326 (IV) du 15 novembre 1949
aRecommande au Conseil de tutelle de terminer son enquête,en
s'inspirant tout particulièrement de ce qui suit:

b) Il est souhaitable que, si la communication sous la forme d'un
rapport distinct de renseignements clairs et précisd'ordre financier,
statistique ou autres, relatifà un Territoire sous tutelle devenait
impossible par suite de la constitution d'une union administrative,
l'Autorité administrante compétente accepte, de la part du Conseil
de tutelle, la surveillance que le Conseiljugerait nécessaired'exercer
sur l'administration -unifiéeafin de s'acquitter, comme il convient,
des hautes responsabilités que lui confèrela Charte ..))

La même résolution recommandait au Conseil de tutelle
((de terminer l'enquête à laquelle il procède conformément aux
dispositions de la résolution 224 (III) de l'Assembléegénéraleet
de la présente résolution, de soumettre à l'Assembléegénérale,
lors de sa prochaine session ordinaire, un rapport spécialsur les
résultats de cette enquête, ainsi que sur les mesures qu'il aura
prises et tout particulièrement sur toutes garanties qu'il estimerait
nécessaire de requérir desAutorités administranies intéressées,de
continuer de même à observer l'évolution de ces unions et de
présenter un rapport à l'Assemblée généralleors de chacune de ses
sessions ordinaires)).

49. Les résolutions de l'Assemblée généralequi viennent d'être
citées ont été complétées au cours des années par d'autres résolu-
tions sur le même sujet des unions administratives affectant des
territoires sous tutelle; citons ainsi la résolution 648 (VII) du
20 décembre 1952, qui est l'un des actes de l'Assemblée générale
dontla portée est la plus grande. Elle énumère les «Facteurs dont
il convient detenir compte pour décider si un territoire est, ou n'est
pas, un territoire dont les populations ne s'administrent pas encore
complètement elles-mêmes » et contient en annexe une liste des
((Facteurs permettant de conclure qu'une population a accédé à

l'indépendance ou à toute autre forme d'autonomie séparée ».
Pour sa part, la résolution 1473 (XIV) du 12 décembre 1959 a
spécialement trait à la partie septentrionale du territoire sous tu-
telle du Cameroun sous administration britannique. Elle dispose
entre autres que l'Assemblée générale: "6. Recommends that the necessary measures should be taken
without delay for the further decentralization of governmental
functions and the effective democratization of the system of local
government in the northern part of the Trust Territory.
7. Recommends that the Administering Authority should ini-
tiate without delay the separation of the administration of the
Northern Cameroons from that of Nigeria and that this process
should be completed by 1st October, 1960.
cess of separation to the Trusteeship Council at its twenty-sixth
session, and requests the Councilto submit a report on this matter
to the General Assembly at its fifteenth session."

50. Resolution 1608 (XV) of the General Assembly of 21 April
1961 endorsing the results of the plebiscites for the Northern and
Southern portions of the Trust Territory of the Cameroons under
United Kingdom Administration was only the culminating act of
a series of other resolutions dealing with various questions of legal
as well as political and administrative character, always with a
view to the speedyachievement of the basic objective of the Trustee-
ship and its early termination.

51. Therefore, when the ultimate objective of a Trust is attained,
and the particular Trusteeship Agreement is terminated, al1 ques-
tions relating to the Administering Authority's observance of the
obligations thereunder are obviously intended to have been settled
also. Doubtless this was the intention and purpose of resolution
1608 (XV), which is a legally valid act of the conlpetent body.

52. What the Applicant asks the Court to do is, in fact, to sort
out certain legal points relating to the administration of the former
Trust Territory of the Cameroons under United Kingdom Ad-
ministration, dissociate them from the over-al1 settlement of the
whole question of the Trusteeship including the termination of the
Trusteeship Agreement, and to adjudge and declare that formerly
in administering the trust territory, the United Kingdom failed to
observe certain obligations it had undertaken in the said Agreement.
In other words, the Court is asked to render a declaratory judgment
pronouncing on legal issues which, though alleged to be relating
to the interpretation or application of the Trusteeship -Agreement,
had in fact been considered in substance by the General Assembly
from year to year in the past, and had formed the subject-matter
of action taken by it in the form of recommendations or decisions.
Moreover, the said Trusteeship Agreement on which the complaints

of the Applicant are based, had been validly terminated, and the
trust territory concerned had been declared to have attained inde-
pendence in accordance with the freely expressed wishes of its
inhabitants. (6. Recommande que les mesures voulues soient prises sans retard
en vue d'une plus ample décentralisationdes pouvoirs administratifs
et de la démocratisationeffective du systèmed'administration locale
dans la partie septentrionale du Territoire sous tutelle;
7. Recommande que l'Autorité administrante prenne sans retard
desmesures pour effectuerla séparation administrative du Cameroun
septentrional et de la Nigéria,et que cette séparation soit achevée
lexe* octobre 1960;
8. Prie l'Autorité administrante de faire rapport au Conseil de
tutelle, lors de sa vingt-sixième session,au sujet de ladite séparation,
et prie le Conseil de soumettre à l'Assembléegénérale,lors de sa
quinzième session, un rapport sur cette question. »
50. La résolution 1608 (XV) du 21 avril 1961 par laquelle l'As-
semblée générale apris acte des résultats des plébiscites dans les
parties septentrionale et méridionale du territoire sous tutelle du
Cameroun sous administration britannique n'a été que le point
culminant d'une série d'autres résolutions traitant de diverses
questions d'ordre juridique aussi bien que d'ordre politique et
administratif et dont le but était la prompte réalisation de I'objec-

tif essentiel de la tutelle et la levée rapide de ce régime.
51. Par conséquent, lorsque l'objectif final d'une tutelle est
atteint et que l'accord de tutelle a pris fin, toutes les questioris
relatives au respect par l'autorité administrante des obligations
qui lui incombaient en vertu de cet accord sont manifestement
considéréescomme ayant aussi étéréglées.Tels étaient certaine-
ment l'intention et le but de la résolution 1608 (XV) qui est un acte
juridiquement valable de l'organe compétent.

52. Ce que le requérant demande en fait à la Coiir, c'est d'éclair-
cir certains points de droit relatifs à l'administration de l'ancien
territoire sous tutelle du Cameroun administré par le Royaume-LTni,
de les dissocier du règlement d'ensemble de la question générale
de la tutelle, y compris l'expiration de l'accord de tutelle, et de
dire et juger que, dans son administration passée du territoire

sous tutelle, le Royaume-Cni n'a pas respecté certaines des obliga-
tions découlant pour lui de l'accord. En d'autres termes, il est
demandé à la Cour de rendre un jugement déclaratoire tranchant
des points de droit que l'on prétend relatifs à l'interprétation ou
à l'application de l'accord de tutelle mais qui ont été en réalité
examinés en substance par l'Assemblée généraleannée après an-
néedans le passé et ont fait l'objet d'une séried'actions de sa part
au moyen de recommandations ou de décisions. En outre, l'accord
de tutelle sur lequel se fondent les griefs du demandeur a valable-
ment pris fin et le territoire sous tutelle a étéproclamé indépendant
conformément aux aspirations librement exprimées de ses popula-
tions. 53. The cases cited by Counsel of the Applicant in support of the
plea for a declaratory judgment do not in fact support it. Just
consider the more important of these cases and it will at once be
seen that the judgments or advisory opinions respectively given
by the Court therein, while they may be or are declaratory in
character, al1relate to a controversy or dispute involving an existing
legal right or interest and bear a direct and determining effect on
the legal position of the parties at issue.
54. Thus asregards the caseconcerning CertainGermanInterests in
Polish UPperSilesia(P.C.I. J.,SeriesA, NO.^),although thecourt over-
ruled "the objectionbased on the abstract character of the question"
and referred to "numerous clauses giving the Court compulsory
jurisdiction in questions of the interpretation and application of
a treaty, and these clauses, among which is included Article 23
of the Geneva Convention, appear also to cover interpretations
unconnected with concrete cases of application", the Judgrnent
actually given by the Court in the case, though in the form of a

declaration of the law involved, bore directly on, and was meant to
settle, the disputes between the parties concerning the legal position
of German property, rights and interests in Upper Silesia. The
interpretation of the relevant provisions of a treaty asked of the
Court could not have had more concrete cases for application.
55. This fact, in essence, is equally true of the Judgment in the
case of Chorz6zeF , actory (Jurisdiction) (P.C.I.J.,Series A, No. g),
which stated:
"It is a principle of international law tliat the breach of an
engagement involves an obligation to make reparation in an ade-
quate form. Reparation is the indispensable complement of a
failure to apply a convention and there is no necessity for this to
be stated in tlie Convention itself."

The foregoing declaration may appear to be in abstract form but it
gives a legal construction of an international convention then still
in force, to be applied forthwith to a concrete case, concerning the
right of ownership of Chorzow Factory, which had been settled along
with the other claims in favour of the Applicant in the case of
Certain German Interests in Polish Upper Silesia.

56. The decision of the Permanent Court in the case of the Inter-
pretation of theStatute of th.eMemel Territory related to a live, even
acute, dispute between the United Kingdom, France, Italy and
Japan on the one part and the Lithuanian Republic on the other
"as to whether certain acts of the latter Government are in con-
formity with the Statute of the Memel Territory annexed to the
Convention of May 8, 1924, concerning Memel". It is true that
although the Court drew attention "to the inconvenience" resulting

from the fact that certain questions "are formulated as questions
purely in abstracto,without any reference to the facts of the dispute 53. Les précédents citéspar le conseil du demandeur à l'appui
de sa demande de jugement déclaratoire n'étayent pas sa thèse.
Il suffit d'examiner les plus importants d'entre eux pour constater
tout de suite que les arrêts ou avis consultatifs rendus en ces di-

verses occurrences par la Cour - qu'ils aient eu ou non un caractère
déclaratoire - concernaient tous des controverses ou différends
relatifs à des droits ou intérêtsjuridiques concrets et ont eu un
effet direct et décisifsur la situation juridique des parties en cause.
54. Ainsi, dans l'affaire relative à Certains intérêts allemandsen
Haufe-Silésie polonaise (C. P. J.I., sérieA no 6), la Cour a passé
outre à ((l'objection tirée du caractère abstrait de la question »
et elle a dit que ((Des stipulations nombreuses prévoient la juri-
diction obligatoire de la Cour pour les questions d'interprétation

et d'application d'un traité, et ces clauses, parmi lesquelles se
trouve l'article 23 de la Conventionde Genève, semblent viser aussi
des interprétations indépendantes d'applications concrètes »; mais
l'arrêtde la Cour, quoique se présentant comme un énoncédu droit
applicable, visait directement et entendait régler les différends
entre les parties au sujet de la situation juridique des biens, des
droits et des intérêtsallemands en Haute-Silésie. La Cour n'aurait
pu être saisie, quant à l'interprétation des dispositions pertinentes
d'un traité, d'une demande portant sur un cas plus concret.

55. Cela est en substance également vrai de l'arrêtrendu dans
l'affaire de l'Usine de Clzorz6w(compétence) (C. P. J. I., sérieA
no g),qui a énoncé:
((C'estun principe de droit international que la violation d'un
engagemententraîne l'obligationderéparer dansune formeadéquate.
La réparation est donc le complémentindispensable d'un manque-
ment à l'application d'une convention, sans qu'ilsoit nécessaireque
cela soit inscrit dans la convention même. »

Cette déclaration peut sembler abstraite dans sa forme mais elle
a donnéd'une convention internationale alors encore en vigueurune
interprétation juridique immédiatement applicable à un cas con-
cret - le droit de propriétésur l'usine de Chorzow -, qui avait
été tranché en faveur du demandeur en mêmetemps que les autres
demandes dans l'affaire relative à Certains intérêts allemandsen
Haute-Silésie polonaise.
56. La décision rendue par la Cour permanente dans l'affaire

de l'Interprétation du statut du territoire de Memel se rapportait à
un différendexistant, et même à l'état aigu, entre le Royaume-Uni,
la France, l'Italie et le Japon, d'une part, et la République de Li-
thuanie, de l'autre, (touchant la conformité de certains actes de
ce dernier Gouvernement avec le Statut du Territoire de Memel,
annexé à la Convention du 8 mai 1924 relative à Memel ».Certes,
après avoir souligné ((l'inconvénient ))provenant de ce que cer-
tains points étaient énoncéspurement in abstracto, sans aucune
référenceaux circonstances dans lesquelles le litige s'est produit »,

51 which has arisen", it nevertheless assumed jurisdiction and adjudi-
cated on al1the six questions submitted by the Applicants. But this
was done not only to resolve a confused and disturbing situation in
the terdory but also to meet-

"the intention of the Four Powers ..to obtain an interpretation
of the Statute [of the Memel Territory] which would serve as a
guide for the future". (P.C.I.J.,Series A/B, No. 49, p. 337.)
In other words, though the Court considered certain questions

submitted to it were put in abstract form it did not refrain from
passing on thern judicially, because they were intended to serve
very practical purposes in the concrete situation.

57. Likewise, the Corfu Channei case upon which the Applicant
places much reliance to uphold its submission for a declaration of
non-observance by the Respondent of certain obligations it had
assumed as Adrninistering Authority under the Trusteeship Agree-
ment of 13 December 1946, does not lend support toits claim. The
Court in giving "judgment that ...the United Kingdom violated
the sovereignty of the People's Republic of Albania, and that
this declaration by the Court constitutes in itself appropriate
satisfaction" (I.C.J. Refiorts 1949, p. 36) discharged its judicial
function to settle a concrete disputerelating to a serious, unresolved

situation both of fact and law.
58. This is equally true of the Fisheriescase (I.C.J. Reports 1951)
and the Haya de LaTorre case. In the latter case, after referring to
its Judgment in the Asylum case with the finding that "the grant
of asylum by the Colombian Government to Victor Rahl de la
Torre was not made in conformity with Article z, paragraph 2,
...of [the Havana] Convention",

"the Court observesthat the Judgment confined itself ...to defining
the legal relations which the Havana Convention had established
between the Parties. It did not give any directions to the Parties
and entails for them only the obligation of compliance therewith"
(Haya de la Torre,I.C.J. Reflorts1951, p. 79).

This Judgment, though it took the form of a declaration defining
the legal relations of the parties under the Havana Convention,
was clearly intended to resolve the pending dispute before the Court
between Peru and Colombia. True, it did not give any directions
as to how the asylurn might be terminated but there can be no doubt
that inthe Court's view it should and could be terminated. For
the same Judgment made clear that it was not for the Court to
make a choice "amongst the various courses by which the aslum
may be terminated", since- la Cour s'est néanmoins reconnue compétente et a tranché les six
questions soumises par les demandeurs. Mais elle l'a fait non seule-
ment en vue d'apporter une solution à la situation confuse et in-
quiétante qui régnait dans le territoire, mais aussi pour répondre à

cl'intention [.. des Quatre Puissances ...]d'obtenir une inter-
prétation du Statut [du Territoire de Memel]qui puisse à l'avenir
servir de guide» (C.P. J. I., sérieA/B no49, p. 337).

En d'autres termes, bien que la Cour ait considéréque certaines
des questions poséeslui avaient étésoumises sous une forme abs-
traite, elle ne s'est pas refusée à se prononcer sur elles parce
qu'elles étaient destinées à servir à des fins très pratiques dans
une situation concrète.

57. Le demandeur ne saurait non plus invoquer à l'appui de
sa thèse l'affaire duétroitde Corfou, sur laquelle il insiste beaucoup
pour étayer sa demande tendant à ce que la Cour constate l'inob-
servation par le défendeur de certaines obligations qui lui incom-
baient en tant qu'autorité administrante aux termes de l'accord
detutelle du 13décembre1946.Lorsqu'elle a dit : «Le Royaume-Uni
a violé la souveraineté de la République populaire d'Albanie,
cetteconstatation par la Cour constituant en elle-mêmeune satisfac-
tion appropriée »(C.I. J. Recueil 1945, p. 36), la Cour s'est acquit-
téede sa fonction jildiciaire, qui est de réglerun différendconcret
relatifà une situation grave et non résolueen fait comme en droit.

58. Cela est également vrai de l'affaire des Pêcheries(C. 1. J.
Recueil 1951) et de l'affaireHaya de la Torre. Dans cette dernière
affaire, après s'êtreréférée 3 l'arrêt qu'elle avait rendu dans l'af-
faire du Droif d'asile et où elle avait dit:(Ll'octroi de l'asile par le
Gouvernement de la Colombie à T'ictor Rad Haya de la Torre n'a
pas été fait en conformité de l'article 2, paragraphe 2 ... de la
...convention » de la Havane, la Cour a ajouté:

«La Cour rappelle que ledit arrêt s'estborné à définir... les
rapports de droit que la Convention de La Havane avait établis
entre les Parties. Il ne comporte aucune injonction aux Parties
et n'entraîne pour celles-ci que l'obligation de s'y conformer. 11
(AffaireHaya de laTorre,C.I. J. Recueil1951, pp. 78-79.)

Bien que cet arrêt ait revêtula forme d'une déclaration définissant
les rapports juridiques entre les parties en vertu de la convention
de la Havane, il visait nettement à résoudre le différend entre le

Pérouet la Colombie en instance devant la Cour. Certes, il ne com-
portait aucune injonction quant à la façon dont on pourrait mettre
fin à l'asile mais il ne saurait faire de doute que, de l'avis de la
Cour, on devait et on pouvait y mettre fin. Le mêmearrêt indi-
quait au reste clairement qu'il n'appartenait pas à la Cour d'.opé-
rer un choix ((entre les diverses voies par lesquelles l'asile peut
prendre fin »,étant donné que

52 "these courses are conditioned by facts and possibilities which, to
a very large extent,the Parties alone are in a position to appreciate.
A choice amongst them could not be based on legal considerations,
but only on considerations of practicability or political expediency;
it is no part of the Court's judicial function." (Ibid.)

Thus there can be no question but that the declaratory judgment
was made in the case because it was intended to serve the practical

purpose or need of putting an end to the asylum by clarifying the
legal relations of the parties under the Havana Convention and
leaving the choice of the means of cornpliance to the parties.
The issues leading to the Judgment were far from abstract or
academic in character.
59. Although this Court is not precluded either under interna-
tional lawor under its own Statute from pronouncing a declaratory
judgment, the present case is not one which falls within its judicial
function. While it may be true that a declaratory judgment is not
concerned with the question of possibility of implementation or

any practical effect, this rule, if it be a rule, certainly does not
mean that the Court is bound to render a declaratory judgment
even though it could only be one of the nature of an academic
pronouncement or a moot decision. No declaratory judgment is
called for where an Application asks for it, as in the present case,
only with reference to a legal issue or issues which have already
been settled or which relate only to facts or situations which have
ceased to be capable of giving rise to a dispute in future in a similar
state of legal relations. In other words, repect is due from the
Court to the situation which now obtains in regard to the former
Trusteeship of the Cameroons under United Kingdom Adminis-
tration and the terminated Agreement of 13 December 1946, in-
volving, as it does, facts which make it impossible for the Court

to render judgment l.
60. For the reasons 1 have stated, 1 conclude that the Court
should decline to assume jurisdiction to hear the merits of the
instant case.
(Signed) WELLINGTOK NOO.

1 See Judge Winiarski's Dissenting Opiin the case of Interpretation of Peace
Treaties, I.C.J. Reports 1992. p.
53 ((cesvoies sont conditionnéespar des élémentsde fait et par des
possibilitésque, dans une très large mesure, les Parties sont seules
en situation d'apprécier. Un choix entre elles ne pourrait être
fondé sur des considérations juridiques, mais seulement sur des
considérations de nature pratique ou d'opportunité poIitique;
il ne rentre pas dans la fonction judiciaire de la Cour d'effectuer
ce choix.» (Ibid.)

Il est donc incontestable que, si un jugement déclaratoire a été
rendu en cette espèce, c'est qu'il répondait à un but ou à une né-
cessitépratique, celle de mettre finà l'asile en précisant les rapports
juridiques créésentre les parties par la convention de la Havane
et en laissant aux parties le choix des moyens d'exécution. Les

questions qui ont fait l'objet de l'arrêt étaient loin d'avoir un ca-
ractère abstrait ou académique.
59. Bien que ni le droit international ni son propre Statut n'em-
pêchentla Cour de prononcer un jugenient déclaratoire, la présente
affaire ne relève pas de sa fonction judiciaire. Il se peut que la
possibilité d'application ou d'effet pratique soit une question qui
n'intervient pas dans un jugement déclaratoire, mais cette règle,
si c'en est une, ne signifie certainement pas que la Cour soit tenue

de rendre un jugement déclaratoire mêmes'il ne peut s'agir que
d'une déclaration de portée académique ou d'une décision sans
objet (moot). Il n'y a pas lieu de rendre un jugement déclaratoire
lorsque, comme dans la présente affaire, la requête ne le demande
qu'à l'égard d'un ou plusieurs points de droit déjà réglés ou ne
concernant que des faits ou situations qui ne peuvent plus engen-
drer de différend à l'avenir dans une situation juridique analogue.
En d'autres ter~nes, la Cour doit tenir compte de ce que la situa-
tion actuelle concernant l'ancienne tutelle du Cameroun sous ad-
ministration britannique et l'accord du 13 décembre 1946 main-

tenant expiré comporte des élémentsqui rendent impossible que
la Cour rende un arrêt l.

60. Pour les raisons que j'ai exposées, j'ai conclu qu'en I'es-
pèce la Cour devait refuser de se déclarer compétente au fond.

1 Voir opinion dissidende M. Winiarski dans l'affaire de l'Interprétation des
traitésde paix (C.I.J. Recueil p.92).

53

Document file FR
Document Long Title

Opinion individuelle de M. Wellington Koo (traduction)

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