Opinion dissidente de M. Wellington Koo, Vice-président (traduction)

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047-19660718-JUD-01-04-EN
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OPINION DISSIDENTE DE M. WELLINGTON KOO,
VICE-PRÉSIDENT

[Traduction]
Je regrette de ne pouvoir me rallierà l'arrêtde la Cour qui ((constate

que les demandeurs ne sauraient êtreconsidéréscomme ayant établi
l'existence à leur profit d'un droit ou intérêt juridique au regard de
l'objet des présentes demandes ». Je ne puis approuver non plus les
motifs sur lesquels se fonde cet arrêt.En application de l'article 57 du
Statut, je me propose d'exposer les raisons de mon désaccord.

On se souviendra que, dans la première phase des présentes affaires,
le Gouvernement sud-africain a soulevéquatre exceptions préliminaires
en réponse aux requêteset mémoires de 1'Ethiopie et du Libériaet con-
clu ((à ce que les Gouvernements de 1'Ethiopie et du Libéria n'ont pas

de locus standi dans la présente procédure contentieuse et à ce que la
Cour n'a pas compétence pour connaître des questions de droit et de
fait soulevéesdans les requêteset les mémoires ..))La troisième exception
telle qu'elle a été finalementformulée dans la procédure orale de 1962,
est ainsi conçue:
«le conflit ou désaccord que les Gouvernements de 1'Ethiopie
et du Libéria prétendent exister entre eux et le Gouvernement de

la République sud-africaine n'est pas, eu égard à sa nature et à
sa teneur, un ((différen))comme il est prévu à l'article 7 du Mandat
pour le Sud-Ouest africain, et cela plus particulièrement en tant
qu'aucun intérêt concretdes Gouvernements de 1'Ethiopie et/ou
du Libéria ou de leurs ressortissants n'est en cause ou n'est affecté
en l'espèce.»

Par arrêt du 21 juillet 1962, la Cour a rejeté les quatre exceptions,
énonçant dans chaque cas les motifs du rejet. En ce qui concerne la
troisième exception, elle a déclarénotamment:
«La portée et l'objet manifestes des dispositions de cet article
indiquent en effet qu'on entendait par là que les Membres de la

SociétédesNations eussent un droit ou un intérêtjuridique à ce que
le Mandataire observât sesobligations à la foià l'égard deshabitants
du territoire sous Mandat et à l'égard dela Société desNations
et de ses Membres. 1)(C.I.J. Recueil 1962, p. 343.)
Le dispositif de l'arrêt était lesuivant: ((La Cour, par huit voix contre
sept, dit qu'elle est compétente pour statuer sur le fond du différend. 1)

La principale question que doit trancher l'arrêt rendu aujourd'hui
està nouveau celle de savoir si les demandeurs dans les présentes affaires
214 SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS. WELLINGTON KOO) 217

ont un droit ou intérêt juridiqueau regard de l'objet de la demande.
L'arrêtconstate que les demandeurs n'ont pas de droit ou intérêtde
ce genre en ce qui concerne les dispositions'du Mandat pour le Sud-
Ouest africain relatives à la gestion. Il me semble que les principaux
arguments invoqués à l'appui de cette conclusion procèdent en grande
partie de la conception de la tutelle que l'on se fait en droit interne,

avec les restrictions que cela comporte quant à la notion de contrat,
de parties et d'intérêts.
Mais, s'il est vrai que le système des Mandats se rapproche de la
tutelle du droit privé, qui l'a probablement inspiré, la similitude ne
va pas très loin. A la différence de la notion de droit interne dont les
caractéristiques sont simples et la portéelimitée,le système des Mandats
a un caractère complexe qui lui est toutà fait propre; il est assorti d'une
série d'obligations générales et particulières que le Mandataire doit
remplir, d'un dispositif de contrôle et de surveillance multiple faisant
intervenir la Société desNations (Conseil, Assemblée, Etats Membres
et Commission permanente des Mandats) et il s'accompagne en dernier

ressort de la protection judiciaire de la Cour permanente. C'est une
institution internationale nouvelle. Rien de semblable n'avait existé
auparavant. C'est une institution sui generis.
Je pense qu'à ce stade il est utile de retracer brièvement l'historique
de la création du système des Mandats pour bien faire comprendre et
apprécier la nature, l'esprit et le but de cette institution. C'est comme
chacun sait, le président Wilson, auteur des Quatorze points, qui a fait
pour la première fois au Conseil des Dix de la conférence de la paix
de Versailles la proposition radicale tendant à ce que le principe tradi-
tionnel de l'annexion par voie de conquête soit en fait abandonné et
remplacépar un systèmenouveau, le systèmeinternational des Mandats,

qui serait mis en Œuvre par la Sociétédes Nations et serait fondé sur
la notion d'une mission sacrée de civilisation exclusivement conçue
dans l'intérêt dehsabitants des territoires devant êtreainsi placés sous
Mandat. Le président Wilson avait mêmeproposé d'abord que les
territoires enlevésaux Empires centraux fussent administrés directement
par la Société desNations. Il préconisait le système des Mandats si
énergiquement qu'il enfaisait en quelque sorte une condition sine qua
non de la conclusion de la paix. Mais certains de ses principaux alliés
du temps de guerre, notamment certains dominions britanniques, s'y
opposèrent au début avec tout autant de fermeté. Les partisans des
deux thèses s'affrontèrent si gravement que non seulement on aboutit

à une impasse mais qu'on put craindre pendant quelque temps l'éclate-
ment de la conférencedela paix. C'est en grande partie grâce aux efforts
de conciliation de M. Lloyd George que l'on put finalement se mettre
d'accord sur cette délicate question.
Le compromis qui en résulta fut ((d'incorporerdans le présent Pacte
[de la Société desNations] des garanties pour l'accomplissement de
cette mission ».Si les paragraphes 7 et 9 de l'article 22 du Pacte pré-
voient respectivement que le Mandataire doit envoyer au Conseil un
rapport annuel concernant les territoires dont il a la charge))et qu'une SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS. WELLINGTON KOO) 218

commission permanente sera chargée «de recevoir et d'examiner les
rapports annuels des Mandataires et de donner au Conseil son avis
sur toutes questions relatives à l'exécutiondes mandats », toutes les
garanties ne sont pas énoncéesdans ledit instrument. Au contraire, le
paragraphe 8 énonce: a Si le degré d'autorité, de contrôle ou d'ad-

ministration à exercer par le Mandataire n'a pas fait l'objet d'une
convention antérieure entre les Membres de la Sociétéi,l sera expressé-
ment statué surces points par le Conseil. Ainsi, par exemple, l'article 6
du Mandat pour le Sud-Ouest africain dispose que le Mandataire devra
envoyer des rapports annuels ((satisfaisant le Conseil»; l'article 7 du
mêmeMandat stipule en son premier alinéa:((L'autorisationdu Conseil
de la Sociétédes Nations est nécessairepour modifier les dispositions
du présentmandat »et en son deuxièmealinéa(clausejuridictionnelle):

((Le Mandataire accepte que tout différend,quel qu'il soit, qui
viendrait às'éleverentre lui et un autre Membre de la Société des
Nations relatifà l'interprétation ouà l'application des dispositions
du Mandat, et qui ne soit pas susceptibled'êtreréglépar des négo-

ciations, soit soumis la Cour permanente de Justiceinternationale,
prévuepar l'article 14 du Pacte de la Société des Nations. ))

Le systèmetout entier était inspirépar la volonté fondamentale de
protégerles populations desterritoires placéssous Mandat et d'accroître

leur bien-être; il étaittout entier orientéen ce sens. C'étaitune entreprise
internationale commune, dont le succès dépendait de la coopération
de tous les participants dans le cadre de la Sociétédes Nations - le
Conseil, la Commission permanente des Mandats, l'Assemblée, les
Etats Membres et les Mandataires. Pour assurer son succès, diverses
garanties étaient prévuestant dans l'article 22 du Pacte que dans les
divers actes de Mandat. Les fonctions normales de surveillance de la
Société desNations comprenaient, d'une part, l'examen et l'étude des
rapports annuels des Mandataires sur l'administration des territoires

sous Mandat auxquels le Conseil procédait avec l'aide et l'avis de la
Commission permanente des Mandats et, d'autre part, les discussions
et les débats que l'Assembléeconsacrait chaque année au chapitre du
rapport annuel du Conseil relatif à l'administration des Mandats; des
représentants des Puissances mandataires participaient aux travaux
du Conseilcomme àceux de l'Assemblée.La mise en Œuvreharmonieuse
et efficace des garanties instituées pour la protection des intérêts pri-
mordiaux des habitants des territoires sous Mandat dépendait évidem-
ment de la coopération sincère des Etats mandataires. Mais, vu le

paragraphe 5 de l'article 4 du Pacte, exigeant que tout Membre fût
représentéau Conseil lorsqu'une question qui l'intéressait particulière-
ment étaitportée devantce dernier, vu le paragraphe 6 du mêmearticle,
stipulant que chaque Membre ne disposait que d'une voix et, vu le
paragraphe 1 de l'article 5, exigeant ((l'unanimité des Membres de la
Société représentés à la réunion » pour qu'une décisionfût prise par

216 SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS . ELLINGTON KOO) 219

l'Assembléeou le Conseil, les auteurs du système des Mandats ne pou-
vaieilt pas ne pas savoir, conscients qu'ils étaientdes faiblesseshumaines,
qu'il serait peu réalistede leur part d'espérerou de croire que les Man-
dataires et le Conseil seraient toujours d'accord lorsqu'une question
donnéetouchant à un Mandat particulier se poserait ou que les Man-
dataires se montreraient toujours disposés à céder devant le Conseil
dans l'intérêt depsopulations des territoires sous Mandat. C'est parce
qu'ils désiraientfaire face une telle situation, pour rare qu'elle puisse

être,et parce qu'ils étaient également conscients du but premier du
système des Mandats que les auteurs des actes de Mandat, désignés
par les Principales Puissances alliéeset associéesen1919,ont introduit la
clause juridictionnelle d'abord dans les Mandats B puis dans les Man-
dats C et ont utiliséle même textepour les deux catégories de Man-
dat - leur but étant d'instituer un moyen de protection judiciaire des
intérêtsdes habitants grâce à l'exercice par les Etats Membres de la
Société desNations, à titre individuel, du droit ou intérêt juridique
qu'ils avaient à ce que les différents Mandataires observent, à leur
égard, les obligations imposées par les Mandats.
En d'autres termes, le droit ou intérêt juridiquedes Membres de la

Société desNations, considérés individuellement aussi bienque collec-
tivement par l'intermédiaire de l'Assemblée, à ce que les Mandataires
respectent les Mandats est néavec le système des Mandats et était in-
hérent à ce système, comme je l'ai démontréplus haut, et une clause
juridictionnelle a étéinscrite dans chaque Mandat non pas pour con-
férerce droit ou cet intérêt,qu'impliquaient déjà nécessairement l'arti-
cle22 du Pacte et l'accord deMandat, mais pour attester que les Membres
de la Société desNations le possédaient etpour leur permettre, en cas
de besoin, d'invoquer en dernier ressort la protection judiciaire de la
mission sacréede civilisation.
Que la conclusion ci-dessus selon laquelle les demandeurs possèdent

un droit ou intérêjturidique à l'exécution des obligationsdu Mandat
pour le Sud-Ouest africain soit exacte, c'est aussi ce que confirment
la teneur et le libellédu deuxième alinéa de l'article dont le texte est
cité plushaut.
Ce droit ou intérênt'est pas, comme l'affirme enréalitél'arrêt,limité
aux intérêtsconcrets ou nationaux des Etats Membres de la Société
des Nations, considérés individuellement, comme ceuxque vise l'article5
du Mandat pour le Sud-Ouest africain relatif à la libertépour les mis-
sionnaires «de pénétrer, de circuleret de résiderdans le territoire dans
le but d'exercer leur ministère».Le libellé large, clair et général dela

disposition implique que le droit ou intérêt juridiquedes Membres de
la Société desNations a un contenu et une portée qui correspondent aux
obligations incombant au Mandataire en vertu du Mandat; il ne concerne
pas uniquement ledit article5.
Si l'on devait interpréter le texte d'une manière aussi limitée, l'on
en donnerait une interprétation manifestement incompatible avec la
formule très générale((dispositionsdu Mandat ». Si les auteurs du
Mandat avaient voulu ainsi en restreindre le sens et la teneur, il aurait SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS. WELLINGTON KOO) 220

ététrès simple de remplacer par ((l'article5»l'expression ((dispositions
du Mandat » qui figure dans la clause compromissoire. Il existe un pro-
verbe chinois qui consiste en la question suivante: ((Pourquoitant
écriresur un sujet si mince?» Silestermes employésau deuxième alinéa

de l'article, comme ((tout différend» ou les«dispositions du Mandat »,
avaient bien le but et la portée limitésque l'on prétend leur attribuer
selon cette interprétation, le libelléde la clause compromissoire appa-
raîtrait sans aucun doute extravagant. Or il est de fait, nous le savons,
que les projets de Mandat B et C, qui tous deux contenaient une clause
compromissoire identique, ont été étudié psendant plusieurs mois par
divers organes de la conférencede la paix de Paris, dont des hommes
d'Etat éminents faisaientpartie -je songepar exemple à la Commission
Milner et au Conseil des chefs de délégations à Paris, puis au Conseil
de la Société desNations, tous organes qu'intéressaient vivementla

question des Mandats et le système des Mandats proposé. En fait, la
plupart des Principales Puissances mandataires, sinon toutes, étaient
représentéesau sein de ces organes.
En outre, avant d'être soumisau Conseil de la Société desNations,
les projets de Mandat B et C avaient été renvoyéasux juristes du comité
de rédactionde la conférence dela paix pour être dûmentmis en forme
juridique. Bien que ces experts n'aient pas été chargés d'examinelre
contenu des projets, on peut raisonnablement admettre que, s'il leur
avait sembléque la portéede la clause compromissoire était beaucoup
plus limitéeque le libelléeffectivement employédans les projets ne le

laissait supposer, ils auraient certainement suggéréune revision. Mais
ils n'ont fait aucune suggestion de ce genre et ont maintenu le libellé
large et général dela clause tel qu'il leur avait été soumis.

Qui plus est, l'origine de la clause compromissoire et la manièredont
on a abouti au contenu que lui donne son libellé actuelsont également
significativeset éclairent l'intentionde ses auteurs. Comme l'a signalé
M. Jessup dans son opinion individuelle jointe à l'arrêtde 1962, la
clause compromissoire a d'abord été proposéedans le second projet

de Mandat B présenté à la Commission Milner par les Etats-Unis. Les
représentants dela Grande-Bretagne et de la France «ont déclarétous
deux qu'ils ne faisaient aucune objection au principe du renvoi à la
Cour »,mais qu'ils s'opposaientà ce que l'on accorde à des particuliers
le droit de faire appelà la juridiction de la Cour en vue d'obtenir une
décisionsur des infractions aux droits que leur conféraient certaines
dispositions des projets de Mandats. Toutefois, après de nouvelles
discussions, on a décidéde supprimer toute référence aux articles visant
expressémentles droits des particuliers. Tout cela concernait le projet
de Mandat B qui, après revision, a étédûment approuvé par la Com-

mission. Peu après, la Commission a adopté un projet type pour les
Mandats C qui contenait un alinéa prévoyantle renvoi à la Cour
((identique au premier alinéadu projet américain »,lequel avait énoncé
le principe du renvoi à la Cour internationale et n'avait pas soulevé
d'objection de la part des représentants de la Grande-Bretagne et de SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS.WLLINGTON KOO) 221

la France (voir l'opinion individuelle de M. Jessup, C.I.J. Recueil 1962,
p. 388). Le rapporteur, vicomte Ishii, a expliqué pourquoi le Conseil
de la Société desNations avait substitué au membre de phrase ((En
cas de différend, quel qu'il soit, entre les Membres de la Société des
Nations ..1)le membre de phrase qui se trouve maintenant dans l'ar-
ticle 7,à savoir, ((tout différend,.quel qu'ilsoit, qui viendraàts'élever

entre [le Mandataire] et un autre Membre de la Société desNations ));
il a dit que l'on ne pouvait pas obliger les Membres de la Sociétéautres
que le Mandataire à soumettre leurs différends à la Cour permanente
sans leur approbation. Le Conseil a adoptécet amendement et l'ensemble
du Mandat pour le Sud-Ouest africain a été approuvé le17 décembre
1920.On voit donc que tous ceux qui ont participé de quelque manière
à la rédaction du texte initial ou à la revision du texte définitifde la
clause ont accepté comme allant de soi le principe implicite de la pro-
tection judiciaire pour ce qui est de l'exécutionpar les Puissances man-
dataires des obligations découlant des Mandats et n'ont soulevéaucune
espèced'objection.

11convient de faire remarquer en outre que la mêmeclausejuridiction-
nelle, au libellé large, général et peu près identique, figure dans tous
les Mandats B et C malgréla grande différencequ'il peut y avoir entre
le cas où sont en cause des intérêts nationauxou concrets très variés
(Mandat pour la Palestine) et le cas où les seuls intérêtsnationaux ou
individuels en jeu concernent les missionnaires et leur liberté d'exercer
leur ministère (Mandat pour le Sud-Ouest africain, article 5). Ce fait
semblerait corroborer l'opinion selon laquelle 12 deuxième alinéa de
l'article7 du Mandat pour le Sud-Ouest africain, comme les dispo-
sitions analogues des autres Mandats B et C, vise essentiellement a
donner aux Etats Membres de la Société desNations le moyen d'exercer
par la voie judiciaire leur droit ou intérêt juridique ce que le Manda-

taire exécutele Mandat tant à l'égard deshabitants des territoires sous
Mandat qu'à l'égarddela SociétédesNations - et seulementsubsidiaire-
ment à assurer la protection judiciaire de leurs intérêts nationaux ou
concrets.
11est encore un autre fait qui éclaire le point litigieux que nous exa-
minons. L'ordre dans lequel les diverses obligations du Mandataire
sont énoncéesdans l'acte de Mandat pour le Sud-Ouest africain n'est
pas sans signification. Ainsi, celles de ces obligations qui, sans conteste,
sont les plus importantes - les obligations ayant traià l'accroissement,
par tous les moyens au pouvoir du Mandataire, du bien-être matériel
et moral ainsi que du progrès social des habitants du territoire soumis

au Mandat - sont énoncées à l'article 2. Vient ensuite l'article 3 qui
est relatif l'interdiction de la traite des esclaves et du travail obligatoire,
au contrôle du trafic de l'armement et à l'interdiction de fournir des
spiritueux et des boissons alcooliques aux indigènes. L'article4 interdit
l'instruction militaire des indigènes, etc.; enfin, l'article garantit la
liberté de conscience et le libre exercice de tous les cultes dans le ter-
ritoire et reconnaît à tous les missionnaires, sujets ou citoyens de
tout Membre de la SociétédesNations, la facultéde pénétrer, de circuler SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS. WELLINGTON KOO) 222
et de résider dans ledit territoire dans le but d'exercer leur ministère.

Après l'énonciation de ces obligations de fond du Mandataire vient
l'article 6qui a trait ses obligations de procédure - envoi des rapports
annuels satisfaisant le Conseil, etc.la fin de l'acte de Mandat se trouve
l'article, dont lepremier alinéaindique à quelle condition lesdispositions
du Mandat peuvent êtremodifiéeset dont le deuxième alinéacontient la
clause compromissoire, libellée en termes larges et généraux, commeje
l'ai déjànoté. Il n'est donc pas déraisonnable de déduire de cette pré-
sentation l'importance que les auteurs du Mandat ont attachée aux
différentes catégories d'obligations s'imposant au Mandataire et de

conclure que, si la clause compromissoire avec son libellétrès général
vient en dernier, c'est parce qu'elle devait, dans l'intention des auteurs,
s'appliquer à toutes les obligations incombant au Mandataire et non
pas simplement aux obligations visées à l'article 5; cela confirme encore
la vaste portée et le but généraldu membre de phrase ((tout dzfférend,
quelqu'ilsoit ..relatifà l'interprétation oà l'application des dispositions
du Mandat ))qui figure au deuxième alinéa de l'article7.
On se souviendra également que la constatation faite par la Cour

dans l'arrêtde 1962 pour établir sa compétence et selon laquelle le
différend est de ceux auxquels s'applique l'article 7 repose sur le fait
que les demandeurs possèdent le droit ou intérêtjuridiquedont il s'agit.
Après avoir rappelé la règle d'interprétation fondée sur le sens naturel
et ordinaire d'une disposition et s'être référée àl'article 7 du Mandat,
qui mentionne (tout différend, quel qu'il soit1qui viendrait à s'élever
entre le Mandataire et un autre Membre de la Société desNations et
serait ((relatif l'interprétation ou à l'application des dispositions du
Mandat ))la Cour a déclaré :

((Lestermes employéssont larges, clairs et précis; ils ne donnent
lieu à aucune ambiguïté et n'autorisent aucune exception. Ils se
réfèrent à tout différend, quel qu'il soit, relatif non pasà une ou

plusieurs dispositions particulières mais ((aux dispositions » du
Mandat, entendant par là, de toute évidence, l'ensemble ou une
quelconque de ces dispositions, qu'elles aient trait aux obligations
de fond du Mandataire à l'égard deshabitants du territoire ou à
l'égard desautres Membres de la Société desNations ou encore
à l'obligation du Mandataire de se soumettre à la surveillance de la
Société desNations aux termes de l'article 6 ou à la protection
prévuepar l'article7 même. ))(C.I.J. Recueil 1962, p. 343.)

En réalité il estindubitable que l'avis consultatif de 1950,en soulignant
en mêmetemps «le caractère essentiellement international des fonctions
dont étaitchargée l'Union sud-africaine))et le fait quetout Etat Membre
dela Société des Nations pouvait, conformément à l'article 7 du Mandat,

porter devant la Cour permanente de Justice internationale tout diffé-
rend l'opposant au Gouvernement de l'Union relatif à l'interprétation
ou à l'application des dispositions du Mandat, reconnaissait déjà impli-
citement l'existence d'un droit ou intérêtjuridique des Membres de la
Société desNations à l'exécutiondu Mandat. Mêmeles deux juges qui,

220 SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS. WELLINGTON KOO) 223

seuls, se sont désolidarisésde l'avis de 1950 sur la question du transfert
des fonctions de surveillance de la Société desNations à l'Assemblée
générale desNations Unies ont affirméque les Etats Membres de la
SociétédesNations avaient un intérêtjuridiqueau respect des obligations

du Mandataire. Ainsi, sir Arnold McNair (aujourd'hui lord McNair)
a déclaré:
«Bien qu'il n'existe plus de Société desNations pour surveiller
l'exercice du Mandat, ce serait une erreur de croire que le Manda-
taire n'est soumis à aucun contrôle. Tous les Etats qui faisaient
partie de la Société desNations à l'époque desa dissolution ont

encore un intérêjturidique à ce que le Mandat soit exercécomme il
convient. Le Mandat prévoit, pour cette surveillance, deux sortes
de mécanismes, un mécanisme judiciaire, résultant du droit que
l'article 7 réservàtout Membre de la Société desNations de citer
obligatoirement le Mandataire devant la Cour permanente, et un
mécanisme administratif, comprenant des rapports annuels et I'exa-
men de ces derniers par la Commission permanente des Mandats
de la Société des Nations.»(C.I.J. Recueil 1950, p. 158.)

M. Read, dans son opinion individuellejointe au mêmeavis consul-
tatif de 1950, a insisté davantage encore sur la question des droits des
Membres de la Société des Nations.11a dit:

((A partir des considérations qui précèdent, il est possible de
résumer la situation qui a suivi la dissolution de la Société des
Nations en ce qui est du Statut international du Sud-Ouest africain
et des obligations internationales de l'union qui en découlent:

En premier lieu, le Mandat a subsisté avec l'ensemble des obli-
gations essentielles et positives deUnion.

En second lieu, les droits et intérêtsjuridiques des Membresde
la Société desNations en matière de Mandat ont subsisté
à une exception importante près - dans le cas des Membres
qui ne sont pas devenus parties au Statut de la Cour leur droit
d'intenter une action contre l'Union devant la Cour perma-
nente est devenu caduc. » (Les italiques sont de nous, ibid.,
p. 169.)

Il convient également de noter que la résolution de l'Assembléede
la Société desNations sur les Mandats adoptée le 18 avril 1946,lors de
la dernière session qui a précédéla dissolution, corrobore la conclusion
ci-dessus. On se souviendra que le dernier paragraphe de cette résolu-
tion est libellé comme suit:

((4.Note que les Membres de la Sociétéadministrant actuelle-
ment des territoires sous Mandat ont exprimé leur intention de
continuer à les administrer, en vue du bien-êtreet du développe-
ment des peuples intéressés, conformément aux obligations con-
tenues dans les divers Mandats, jusqu'à ce que de nouveaux SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS.WELLINGTON KOO) 224

arrangements soient pris entre les Nations Unies et les diverses
Puissances mandataires. 1)

Le membre de phrase cont exprimé leur intention ))évoque mani-
festement les déclarations officielles faites par les représentants des
diverses Puissances mandataires aux séances de l'Assembléequi ont
eu lieu du 9 au 13 avril 1946. Il n'est pas nécessaire de les reproduire
ici, car elles ont été citées intégralemetans le texte de l'arrêtde 1962.
Qu'il suffise de dire qu'elles se présentaient toutes comme des engage-
ments à continuer d'administrer les différentsterritoires sous Mandat
conformément aux obligations internationales des Mandataires et
dans l'esprit des Mandats.

Cette sessionde la SociétédesNations et la résolution qu'ellea adoptée
sur les Mandats ont un sens et une importance exceptionnels en ce qui
concerne la question qui nous occupe. En premier lieu, il faut noter
que le Conseil, qui normalement, comme c'était son rôle, aurait dû
s'occuper de la question des Mandats, n'a pas tenu de réunion à cette
fin; au lieu de cela«l'Assembléeavec l'assentiment de tous les membres
du Conseil représentés à la présente session» a décidéque ((pour autant
qu'il sera nécessaire, elle assumera, durant la présente session, toutes

les fonctions rentrant dans la compétencedu Conseil ».Cela semblerait
confirmer qu'il avait toujours été admisque l'Assembléepartageait le
droit de veillerà l'exécution des obligations des Mandats par les Puis-
sances mandataires. En second lieu, l'engagement des diverses Puis-
sances mandataires à continuer d'administrer leurs Mandats confor-
mément aux obligations stipulées dans lesdits Mandats dans toute la
mesure du possible a étépris moins àl'égard del'Assemblée entant qu'or-
gane qu'à l'égard desEtats Membres eux-mêmes.En effet, si ces der-
niers se réunissaient collectivement en tant qu'Assemblée, c'étaitla

dernière fois que cela se produisait. La dissolution de la Société des
Nations devait, selon sa propre résolution, prendre effet le lendemain
et, de ce fait, l'Assembléeaussi bien que le Conseil et la Commission
permanente des Mandats disparaissaient définitivement. Si les engage-
ments devaient permettre en quoi que ce soit d'assurer le respect des
Mandats par les Puissances mandataires, c'est qu'ils devaient avoir été
pris - ci qui est conforme à la réalit- surtout à l'égard desEtats
Membres à titre individuel, et cela confirme une fois encore que ces

derniers possédaient un droit ou intérêtjuridique à l'exécution des
Mandats dans tous les cas.
En ce qui concerne la question même de l'existence d'un intérêt
juridique chez chacun des Etats Membres de la Sociétédes Nations à
l'égard desMandats, l'analyse et la conclusion que M. Read a formu-
lées à propos de l'avis consultatif de 1950 et qui ont été évoquées plus
haut sont importantes et éclairent le problème. M. Read a classéen
trois catégories les obligations imposées dans les Mandats.

«Les premières et les plus importantes étaient les obligations
tendant à assurer et à défendre le bien-êtredes habitants. Elles
ne bénéficiaientpas aux Membres de la Société desNations, en- SUD-OUESTAFRICAIN (OP.DISS. WELLINGTONKOO) 225

core que chacun des Membres individuellement eût le droit d'en
exiger l'exécution.La plus importante, la pierre d'angle du système
des Mandats, étaitle principe selonlequel cle bien-être etle dévelop-
pement de ces peuples forment une mission sacréede civilisation »,
principe qui se trouvait posé au paragraphe 1 de l'article 22 du
Pacte.
Le second type d'obligations comprenait celles qui étaient dues

aux Membres de la Société desNations, et s'appliquaient à leur
bénéfice, à savoir les obligations relatives aux missionnaires et
aux ressortissants nationaux.
Le troisième type d'obligations comprenait les devoirs juridi-
ques relatifsà la surveillance et à l'application du premier et du
second. On y trouvait la juridiction obligatoire de la Cour per-
manente, établiepar l'article 7 de l'Accord de Mandat; on y trou-
vait aussi le régime derapports, de responsabilité, de surveillance
et de modification, issu des paragraphes 7, 8 et 9 de l'article 22

et des articles 6 et7 de l'Accord de Mandat ...
Ces obligations ont un point commun. Chacun des Membres
de la Société desNations est juridiquement intéressé,vis-à-vis de la
Puissance mandataire, aux questions crelatives à l'interprétation
ou à I'application des dispositions du Mandat ))et jouit du droit
d'affirmer son intérêt contre l'Union en invoquant la juridiction
obligatoire de la Cour permanente (article 7 de l'Accord deMandat).
De plus, chaque Membre jouit, en matière de Mandat, à l'époque

de la dissolution, de droits positifà l'encontre de l'Union. »(C.I.J.
Recueil 1950, p. 164-165.)
Un peu plus loin, M. Read a dit qu'il considérait commeimportante
((la survie des droits et intérêtsjuridiques des Membres de la Société
des Nations »; sur ce point, il a fait observer:

«les mêmesmotifs qui font de la conclusion suivant laquelle le
Mandat et les obligations de l'Union n'ont pas pris fin du fait de
la dissolution de la Société desNations amènent nécessairement
à conclure que les droits et intérêtsjuridiques que les Membres
tiennent du Mandat subsistent. Si les obligations de l'Union -

un des cMandataires au nom de la Société desNations 1)- con-
tinuent d'exister, les droits et intérêtsjuridiques des Membres
de la Société desNations, doivent, par analogie, avoir étémain-
tenus.))(Ihid., p. 166.)
Ainsi, l'exposé qui précèdesur l'origine du concept fondamental
qu'est le système des Mandats, les événements et les circonstances

qui ont marquésa création,l'historique de la rédaction et de l'insertion
de la clause juridictionnelle dans tous les Mandats B et C, le sens et
la portéede la résolutiondu 18 avril 1946adoptée à la dernière session
de l'Assembléede la Société desNations, aussi bien que le libellé large
et généraldu deuxième alinéa de l'article 7 du Mandat considéré -
comme d'ailleurs le libellé des articles analogues contenus dans les
autres Mandats -, tous ces élémentsindiquent l'existence chez les

223 SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS. WELLINGTON KOO) 226

auteurs du système des Mandats et les parties aux accords de Mandat
d'une intention commune de voir fonctionner le régime et d'assurer
sa bonne marche grâce à l'institution des garanties nécessair-s sur-
veillance et contrôle administratifs exercéspar le Conseil, protection

judiciaire dela Cour permanente au moyen de l'exercicepar les Membres
de la Société desNations de leur droit ou intérêt juridiqueau regard
de l'exécution desMandats.
On a soutenu que l'existence d'une telle intention commune était
tout à fait improbable vu l'étatde développementde la notion et de
l'institution de la juridiction obligatoire aux alentours de 1920et vu la
répugnanceque l'on éprouvaiten général à souscrireà une obligation
aussi étendueet aussi lourde. Mais il convient de noter qu'à cette époque
le systèmedes Mandats étaitune idée nouvelleet originale. Elle était
contemporaine de l'incorporation du principe de la protection inter-
nationale du travail dans la Constitution de l'organisation interna-

tionale du Travail et une série de conventions postérieuresqui ont re-
connu aux Etats Membres un intérêt juridiqueet leur ont conféréle
droit de ((déposerune plainte au Bureau international du Travail)con-
tre un autre Membre qui ((n'assurerait pas d'une manière satisfaisante
l'exécutiond'une convention que l'un et l'autre auraient ratifiée))(ar-
ticles 26, 411 et 423 de la Constitution de l'organisation internationale
du Travail). Les traitésde minorités concluspendant la même période
pour assurer la protection des populations minoritaires dans les Etats
nouvellement créés et lesterritoires nouvellement transférés reconnais-
saient l'intérêt juridiquedes Etats membres du Conseil de la Société
des Nations à ce que ces traitésfussent respectés et obligeaient1'Etat
responsable de la protection à accepter la juridiction obligatoire de la

Cour permanente de Justice internationale dans un différend porté
devant elle par l'autre partie intéressée(Hudson, InternationalLegisla-
tion, vol. 1,p. 312-319).
Au début, les Mandataires éventuels se sont violemment opposés
à la notion fondamentale que représentait le système des Mandats
mais les tenants du systèmeet plus particulièrement son promoteur, le
président Wilson, ont insisté avec une détermination égalepour qu'il
fût adopté.Mais, une fois le principe admis, toutes les parties ont semblé
sérieusement décidées à faire en sorte que le systèmefonctionne bien
grâce aux multiples rouages destinés à garantir l'exécution des obli-
gations prévuesdans le Mandat. Il serait incompatible avec le principe

de la bonne foi de supposer que les Puissances mandataires qui ont
volontairement acceptéle système, y compris le défendeur, n'avaient
pas l'intention de coopérer réellementpour assurer son plein succès
en respectant le principe de la protection judiciaire qu'il comportait.
Que la situation ait ététout l'opposé,c'est ce que démontre le fait que
ni les auteurs des projets de Mandat ni les Puissances mandataires,
lorsqu'elles ont approuvéles accords de Mandat, n'ont élevéd'objection
à l'encontre du libellé clairet généralde la clause juridictionnelle. Au
contraire, l'absence detoute critique de leur part quant au libelléde la
clause prouve à l'évidenceque tous ont acceptéle principe implicite SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS. WELLINGTON KOO) 227

comme allant de soi, qu'ils y ont vu une caractéristique inhérente au
système des Mandats lui-même.
Sur le problème de la recherche de l'intention commune des parties

à un instrument juridique, il convient de citer ce qu'a écritsir Hersch
Lauterpacht :
((11est incontestable que le traité est la loi des instances chargées
de juger. Mais en mêmetenps le traité est du droit; il fait partie

du droit international. En tant que tel, il est sans lacune. C'est
une règlefondamentale - la plus fondamentale - non seulement
du droit coutumier mais également du droit international con-
ventionnel que le droit forme un tout complet pour les tribunaux
qui doivent l'appliquer. Les parties peuvent n'adopter aucune règle.
Elles peuvent se défendre d'avoir eu l'intention de réglementer
une question particulière. Mais, si elles n'ont pas pris explicite-
ment la précaution de le dire, dèslors qu'elles ont donné à la ques-

tion la forme d'une règlejuridique et se sont trouvées dans une
situation telle que cette question relève légitimementde la com-
pétenced'un tribunal, celui-ci a l'obligation et le droit de supposer
une intention commune effective chez les parties et de trancher le
litige. Cette intention commune n'est pas une simple fiction. »

Après avoir citél'avis consultatif de la Cour permanente de Justice
internationale sur l'Interprétationde la Convention de 1919 concernant
le travail de nuit desfemmes et l'avis consultatif de la mêmeCour sur la
Compétence del'organisation internationale du Travailpour réglementer
accessoirement le travail personneldu patron, sir Hersch Lauterpacht
a poursuivi:

La Cour a admis que le traité en question ne contenait pas
de disposition conférant expressémentcompétence à l'organisation
dans un cas aussi particulier que le cas présent.Mais elle a répondu
affirmativement à la question qui lui était posée parce qu'elle

estimait qu'il était nécessaire que l'organisation internationale
du Travail ait cette compétence pour que le but de l'Organisation
tel qu'il est énoncédans la Constitution puisse êtreatteint.
Dans ces affaires comme dans des affaires analogues.2,'intention
commune doit êtredéduite de l'intention commune que l'on peut
dégager de l'ensemble du traité - de ses principes directeurs,
de son objet et de son esprit ..))(((RestrictiveInterpretation and
the Principle of Effectiveness in the Interpretation of Treaties)),

British Year Book of International Law, 1949, vol. XXVI, p. 79.)
Le principe énoncédans le passage ci-dessus s'applique à fortiori
au point litigieux qui nous occupe. Aucune disposition explicite ne fait
défaut. Au contraire, le deuxième alinéa del'article 7 du Mandat pour

le Sud-Ouest africain est là non seulement pour consacrer le droit des
demandeurs à se pourvoir devant la Cour, en tant que Membres de la
Sociétédes Nations, mais également pour attester que les parties à
l'accord de Mandat ont eu implicitement l'intention commune de re-
225 SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS.WELLINGTON KOO) 228

connaître aux Membres de la Société desNations un droit ou intérêt
juridique au regard de l'exécution du Mandat par le défendeur.
En outre, s'il peut être vrai qu'admettre la notion d'une mission
sacrée de civilisation n'implique pas nécessairement en soi autre chose
qu'une obligation morale ou humanitaire, on n'en doit pas moins tenir
pleinement compte de ce que cette notion est devenue la ((pierre angu-
laire1du système des Mandats et de ce qu'elle est mise en Œuvre dans
les instruments juridiques qu'elle a inspirés comme l'article 22 du Pacte
et le deuxième alinéade l'article 7 de l'accord de Mandat pour le Sud-

Ouest africain, lorsqu'on interprète les rapports juridiques, les droits
et les obligations des parties à ces instruments. Cela ne signifie pas et
ne saurait impliquer que le juge fasse ainsi Œuvre de législateur. Ce
n'est qu'une application légitime des règlesd'interprétation reconnues,
afin de donner pleinement effet, en ce qui concerne le Mandat, à ((ses
principes directeurs, [à] son objet et [à] son esprit 11.
A ce sujet, il convient de rappeler ce qu'a ditla Cour actuelleà propos
de la convention sur le génocide:

«Dans une telle convention, les Etats contractants n'ont pas
d'intérêtspropres; ils ont seulement, tous et chacun, un intérêt
commun, celui de préserver les finssupérieures qui sont la raison
d'être dela convention. Il en résulte au'on ne saurait. Dour une
, L
convention de ce type, parler d'avantages ou de désavantages
individuels des Etats, non plus que d'un exact équilibrecontractuel
à maintenir entre les droits et les charges. La considération des
fins supérieuresdela convention est, en vertu de la volontécommune
des Parties, le fondement et la mesure de toutes les dispositions
qu'elle renferme. » (C.I.J. Recueil 1951, p. 23.)

Le Mandat pour le Sud-Ouest africain, comme tous les autres Man-
dats, est fondésur les principes et les dispositions du système desMan-
dats tel qu'il a étéconçu par ses auteurs et tel qu'y ont souscrit tous les
Membres de la Société desNations, y compris le défendeur, en tant
que parties au Pacte - lequel est un traité multilatéral. Par leur volonté
commune, les fins supérieures dont procède l'article 22 de ce traité

constituent ((lefondement et la mesure de toutes les dispositions qu'[il]
renferme 1).
Le fait qu'une seule espèce, concernant une prétendue atteinte aux
intérêts concretsd'un ressortissant, ait étéporté.: devant la Cour per-
manente de Justice internationale par un Membre de la Société des
Nations pendant les vingt-cinq années de l'existence de la Sociétéen
vertu d'une clausejuridictionnelle analogue àl'article 7 du Mandat pour
le Sud-Ouest africain (article 26 du Mandat pour la Palestine) et le fait

que l'on n'ait jamais recouru à la Cour pour invoquer sa protection et
assurer la bonne exécution par une Puissance mandataire des obliga-
tions de fond que lui imposait un Mandat donné à l'égard deshabitants
du territoire sous Mandat ne prouvent pas nécessairement que les Etats
Membres de la Société desNations n'avaient à titre individuel aucun
droit ou intérêt juridique au respect de ces obligations. Voici ce que SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS. WELLINGTON KOO) 229
M. Read a déclarédans son opinion individuelle de 1950, à propos de

l'obligation de l'Union sud-africaine de se soumettre à la juridiction
obligatoire de la Cour en cas de différend relatif à l'interprétation ou
à l'application des dispositions du Mandat, en vertu de l'article 7 de
l'accord de Mandat et de l'article 37 du Statut, renforcépar l'article 94
de la Charte:

((L'importance de ces dispositions ne peut êtremesurée à la
fréquence de leur application. L'existence mêmed'un tribunal re-
vêtu d'unecompétence obligatoire suffit à assurer le respect des
obligations juridiques.))(C.I.J. Recueil 1950, p. 169.)

Le droit ou intérêt juridique des Membresde la Sociétédes Nations
à l'exécutiondu Mandat par le Mandataire a toujours existé bien qu'il
puisse sembler latent. Tant que la divergence de vues sur un sujet donné
entre le Conseil de la Société desNations et le Mandataire - que celui-
ci y siégeât spécialementou comme membre ordinaire - continuait de
faire l'objet de discussions et tant que la possibilitéd'aboutir finalement
à un accord demeurait, il n'y avait pas lieu pour un Etat Membre de
recourir à l'action judiciaire prévue par l'article 7, deuxième alinéa,
du Mandat. C'est ninsi que la Commission permanente des Mandats
a soulevéchaque annéeen 1926, 1927,1929et 1930une objection contre

la déclaration qui figurait dans le préambule d'un accord entre l'Union
sud-africaine et le Portugal concernant la frontière entre l'Angola por-
tugais et le territoire sous Mandat et selon laquelle «le Gouvernement
de l'Union sud-africaine, sous réserve des dispositions [du] Mandat,
possède lasouverainetésur le territoire du Sud-Ouest africain 1).Comme
le Conseil avait adopté des résolutions sur la base des rapports de la
Commission et que la Puissance mandataire n'avait pas signifiéson
acceptation, la Commission a continué à demander instamment une
réponse. Finalement, ((l'Union sud-africaine, par lettre du 16 avril 1930,
a signifié qu'elle acceptait la définition des pouvoirs du Mandataire

contenue dans les rapports du Conseil x(C.I.J. Mémoires,1950, p. 198).
Toutefois, si le Mandataire avait persistédans son opinion, alors même
que le Conseil aurait obtenu de la Cour un avis consultatif confirmant
que son interprétation était tout à fait conforme au Pacte et à l'accord
de Mandat, il n'aurait pas été impossible qu'un Etat Membre de la
Société desNations, invoquant son droit ou intérêt juridique à I'exé-
cution de ce Mandat, intentât une action devant la Cour permanente
pour obtenir une décision obligatoire sur la question juridique qu'im-
pliquait le différend avecle Mandataire. Que ce droit ou intérêtjuridique

n'ait étéexercéque très rarement ne prouve nullement qu'il n'ait pas
existé.
Il n'est pas non plus aisé d'apprécier le bien-fondé ou la pertinence
de l'argument selon lequel, s'il était nécessaire d'assurer la protection
judiciaire de la mission sacréede civilisation dans le système des Man-
dats, il serait également nécessairede le faire dans le régimede tutelle;
on dit en effet que si les résolutions de l'Assemblée généralees Nations
Unies peuvent êtreadoptéessans l'adhésionde l'autorité administrante, SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS.WELLINGTON KOO) 230
elles n'ont, dans ce cas, que le caractère de recommandations et sont
dépourvues de force obligatoire, ce qui n'empêcheque la clause juri-
dictionnelle consacrant le droit des Etats Membres d'intenter, à titre

individuel, une action devant la Cour est totalement absente de certains
accords de tutelle qui relèvent de la compétence de l'Assemblée
générale.
Il est évident que cet argument sous-estime l'importance des diffé-
rences entre le mécanismefondamental de surveillance et de contrôle
concernant l'application des accords de tutelle et le mécanismeprévu
dans le système desMandats. Il n'est pas nécessaired'énumérerici ces
différences;il suffit de rappeler brièvementque, en vertu de l'article
de la Charte des Nations Unies, les décisionsde l'Assemblée générale
sur les questions importantes sont prises simplement à la majorité des

deux tiers, alors qu'un vote unanime était requis au Conseil comme à
l'Assembléede la Société desNations et que, pour toute question
ayant trait à un Mandat, le vote favorable ou non défavorable de la
Puissances mandataire était nécessaire, en particulier au Conseil où
elle siégeaitsoit spécialementsoit comme membre ordinaire. Bien que
les résolutions de l'Assemblée généralc eoncernant les territoires sous
tutelle, comme d'ailleurs nombre d'autres domaines, se présententgéné-
ralement sous forme de recommandations, elles sont loin d'avoir sim-
plement le caractère de vŒux pieux ou de directives morales. En appli-
cation de l'article 88 de la Charte, le Conseil de tutelle établit un ques-
tionnaire portant sur les progrès deshabitants de chaque territoire sous
tutelle dans les domaines politique, économique et social et dans celui

de l'instruction et, pour reprendre les termes de cette disposition:
«l'autorité chargée de l'administration de chaque territoire sous
tutelle relevant de la compétencede l'Assembléegénérale adresse
à celle-ci un rapport annuel fondé sur le questionnaire précité)).

Dans les différentsaccords de tutelle, il est expressément stipulédans
certains cas, par exemple à l'article 16 de l'accord de tutelle pour le
territoire du Togo sous administration britannique en date du 13 dé-
cembre 1946:

((L'autorité chargée de l'administration présentera à 1'Assem-
blée générale deN s ations Unies un rapport annuel fondé sur un
questionnaire établi par le Conseil de tutelle, conformément à
l'article 88 de la Charte des Nations Unies. Ce rapport comportera
des donnéessur les mesures prises en vue de donner suite aux avis
et recommandationsprésentép sar l'Assembléegénérale et le Conseil
de tutelle.» (Les italiques sont de nous.)

Dans d'autres cas, il est implicitement prévu, comme à l'article 8 de
l'accord de tutelle pour le territoire de la Nouvelle-Guinéeen date du
13 décembre 1946:
((Dans l'exécution desobligations qui lui incombent aux termes
de l'article 3 du présentaccord, l'autorité chargée de l'administra-

tion s'engage[engagement à administrer le territoire conformément
228 SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS. WELLINGTON KOO) 231
aux dispositions de la Charte et de façon à réaliser, dans le terri-
toire, les fins essentielles du régime international de tutelle qui

sont énoncées à l'article 76 de la Charte]:
1.A coopéreravec le Conseil de tutelle dans l'exercice de toutes
les fonctions de ce Conseil prévues aux articles 87 et 88 de la
Charte;...»
En pratique, l'Assembléegénérale surveillede près chaque autorité
administrante et lui demande, par l'intermédiairedu Conseil de tutelle,
d'indiquer dans son rapport annuel quelles sont les mesures qu'elle a
adoptéespour mettre en Œuvreles suggestions et les recommandations
de l'Assembléegénéraleet du Conseil de tutelle. Par exemple, dans sa

résolution 323 (IV) du 15novembre 1949YAssembléegénérale a décidé:
(6. D'inviter le Conseil de tutelleà réserver, dans ses rapports
annuels à l'Assembléegénérale,une section spéciale à l'exécution,
par les autorités administrantes, desrecommandationsrelatives au
progrès social dans les territoires sous tutelle,à l'abolition des
châtiments corporels et, en particulier, aux mesures prises en appli-
cation de la recommandationfaite au paragraphe 5 [abolition de
toutes les dispositions et pratiques de caractère discriminatoire]»

Au paragraphe 7 de la résolution 324 (IV) du 15 novembre 1949, l'As-
sembléegénérale arecommandé égalementau Conseil de tutelle
((d'inclure dans ses rapports annuels à l'Assembléegénéraleune
sectionspécialeconcernant lafaçon dont les autorités administrantes
ont mis en application la résolution 36 (III) sur la diffusiond'in-
formationsrelatives àl1Organisation desNations Unies dans les terri-
toires sous tutelle, la résolution 83 (IV) sur l'intensification de I'ac-

tion des autorités administrantes dans le domaine de l'instruction,
la gratuité de l'enseignement primaire et la préparation des profes-
seursindigènes,ainsiquelarésolution 110 Or>surl'enseignementsupé-
rieur dans les territoires africains sous tutelle, etd'unefaçon générale
d'inclure des données sur l'application des recommandations du
Conseil dans le domaine de l'enseignement )).
Les quelques exemples donnésci-dessus suffisent à montrer que, pour
les questions relatives au respect de la Charte et des obligations imposées
par les accords de tutelle, les résolutions de l'Assembléegénérale,tout

en se présentant sous la forme de recommandations, constituent des
directives généralesque les autorités administrantes, chacune pour leur
part, sont censéesobserver et mettre en application. Le point de savoir
si l'on doit considérer que ces recommandations énoncent des obliga-
tions juridiques ou des obligations quasi juridiques, présente peu d'im-
portance pratique étant donnéle pouvoir et l'autoritédont l'Assemblée
généraleest investie, en vertu de la Charte en généralet du régime
de tutelle en particulier, pour exercer des fonctions de surveillance sur
l'administration des territoires sous tutelle autres que les territoires
placéssous la surveillance du Conseil de sécurité.De toute façon, on
escompte que ces recommandations seront suivies et appliquées par

les autorités administrantes intéressées. Si cesdernières ne mettaient SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS. WELLINGTON KOO) 232

pas en Œuvre une recommandation, elles devraient donner des raisons
satisfaisantes, faute de quoi l'Assembléegénéralecontinuerait à les in-
viterà mettre à exécution lesrecommandations en question. Il se peut
qu'une ou plusieurs autorités administrantes continuent à ne pas tenir
compte d'une recommandation donnée, mais le fait qu'elles ne respec-
tent pas l'engagement qu'elles ont pris de coopérer, et qu'exige l'ar-
ticle88 de la Charte ou la disposition pertinente del'accord detutelle con-
sidéré,ne prouve pas qu'une recommandation de l'Assembléegénérale

n'ait pas en soiforce obligatoire; cela démontreseulement la répugnance
des autorités administrantes, pour une raison ou pour une autre, à
s'acquitter du devoir de coopération qu'elles ont librement accepté.
Mêmeen ce qui concerne la question généralede la force obligatoire
des résolutions de l'Assembléegénérale,on a pu affirmer ceci en conclu-
sion d'une étude très approfondie: bien que la Charte ne contienne
aucune disposition comportant un engagement exprès d'accepter les
recommandations de l'Assemblée généralea ,nalogue à l'engagement
pris à l'article 25 d'accepter et d'appliquer les décisionsdu Conseil de
sécurité,((on ne saurait dire que la Charte nie expressément une telle

obligation, et l'on peut déduire peut-êtrede l'ensemble de la Charte
certaines obligations qu'il serait impossible de faire résulter d'un enga-
gement exprès ))(F. B. Sloan, ((TheBinding Force of a Recommendation
of the General Assembly of the United Nations »,Briti shar Book of
InternationalLaw, 1948,p. 14). Cela est vraià fortiori d'une recomman-
dation de l'Assemblée généralesur des questions liées au régime de
tutelle et aux accords de tutelle, en vertu desquels les autorités adminis-
trantes se sont expressément engagées à coopérer avec l'Assemblée
généraleet le Conseil de tutelle dans l'exercice de leurs fonctions de
surveillance et de contrôle.
En outre, constater que, vu les différencesdans la procédure de vote

aboutissant à l'adoption de décisions - qui tiennent à ce que, dans le
cas du système des Mandats, la règle de l'unanimité s'appliquait tant
au Conseil qu'à l'Assembléede la Sociétédes Nations - la protection
judiciaire de la mission sacrée confiée à l'autorité administrante est
inutile dans le régime de tutelle, ne contribue nullement à démontrer
qu'une telle protection ne correspond, comme on le prétend, à aucune
nécessitévitaledans le systèmedes Mandats. Les structures fondamen-
tales des deux systèmes sont différentes bienque les notions et les prin-
cipes qui les sous-tendent se correspondent.
Pour les motifs exposés ci-dessus, ilfaut conclure que les demandeurs,
en tant qu'Etats Membres de la Sociétédes Nations, possèdent, dans

le cadre du système des Mandats définidans l'article 22 du Pacte et
mis en Œuvre, en ce qui concerne le Sud-Ouest africain, par l'acte de
Mandat du 17 décembre 1920, un droit ou intérêt juridique à ce que
le défendeur observe toutes les obligations que lui impose ledit Mandat.

Ayant abouti à la conclusion qui précède, j'estime qu'il m'incombe
sinon d'examiner toutes les questions formulées dans les conclusions SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS. ~LLINGTON KOO) 233

finales desParties, du moins de réaffirmeret de préciserles deux principes
essentiels du système des Mandats, car ces principes constituent le
fondement généraldu Mandat pour le Sud-Ouest africain comme de
tous les autres Mandats. Ils sont les piliers de tout le système. On ne
saurait en exagérer l'importance et on doit en tenir pleinement compte
lorsque l'on cherche à déterminer les intentions des auteurs du Mandat
ou à interpréterl'une de sesdispositions. Il estd'autant plus indispensable,
à mon avis, de revenir sur ces deux principes dans la présente opinion

qu'au cours des quinze dernières annéesla question du Mandat pour le
Sud-Ouest africain a, sous un aspect ou sous un autre, été soulevée
au moins cinq fois devant la Cour. Les présentes affaires durent pour
leur part depuis cinq ans, puisque les requêtesont étédéposéesle 4 no-
vembre 1960.
L'un des deux principes est qu'aux termes de l'article, paragraphe 1,
du Pacte ale bien-être et le développement de ces peuples forment
une mission sacrée de civilisation».C'est manifestement en application
de ce principe fondamental que la première obligation du Mandataire
est définiecomme suit au deuxième alinéa de l'article 2 de l'accord de
Mandat :

«Le Mandataire accroîtra, par tous les moyens en son pouvoir,
le bien-être matériel t oral ainsi que le progrès socialdes habitants
du territoire soumis au présentMandat. ))

Quels qui soient les pouvoirs et l'autorité que le Mandat reconnaisse
au Mandataire, ces pouvoirs et cette autorité ne lui sont manifeste-
ment pas conféréspour qu'il les exerce à ses propres fins, dans son
propre intérêtou à son propre avantage, mais uniquement pour lui
permettre de s'acquitter de ses obligations. Quelle que soit la politique
qu'il adopte en vue d'administrer le territoire sous Mandat, elle est
soumise entre autres à cette obligation première. C'est ainsi que la
politique d'apartheid ou de développement séparé-je veux parler de

celle qui a été etcontinueà être pratiquée auSud-Ouest africain et non
de celle qui est appliquée en Afrique du Sud, sur laquelle la Cour n'est
pas invitée à se prononcer - doit êtreexaminée en fonction de cette
obligation primordiale. Les lois, règlements et actes de l'Union sud-
africaine (aujourd'hui République sud-africaine) n'intéressent les
présentes affaires que dans la mesure où, en vertu d'arrêtésofficiels,
ils ont été etsont appliqués ou sont rendus applicables au territoire
sous Mandat.
Des faits non contestés présentésdans les écritures et les plaidoiries
des Parties, ainsi que des dépositions et des réponses des témoins et
experts devant la Cour, il ressort que cette politique, telle qu'elle est

définie par les lois, règlements et actes appliqués ou applicables au
Sud-Ouest africain, procède d'un principe injustifiable de discrimination
en fonction de la race, de la couleur ou de l'origine ethnique qui régit
la répartition des droits et des devoirs des habitants du territoire. Ce
principe régit la vie, le travail, les déplacements et la résidence des
habitants non blancs ou indigènes du territoire. Il est appliqué à des SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS. WELLINGTON KOO) 234

matières telles que la propriétédes terres dans la zone dite de police,
les mines et les industries extractives, les conditions d'emploi dans les
chemins de fer et les ports, la formation professionnelle et l'enseigne-
ment.
Indépendamment de toutes considérationsrelatives à l'existenced'une
norme ou d'un ((standard » international de non-discrimination dans le

droit international généralcontemporain ou dans le cadre du régime
de tutelle des Nations Unies, la discrimination pratiquée par le Manda-
taire n'a cesséd'êtrecritiquée et désavouée,même à l'époque dela
Commission permanente des Mandats de la Sociétédes Nations.
Les conséquencesnéfastes et généralement préjudiciables de la poli-
tique d'apartheid ou de développement séparépour la grande majorité
des habitants du territoire (452 254non-blancscontre 73464blancs) sont
nombreuses et importantes. Elles ne sont ni superficielles ni minimes,
comme on leprétend, etelles nesauraient êtrejustifiéespar des considéra-

tions fondéessur un principe de protection, de réciprocité ou de com-
pensation. Il est bien évidentqu'un tout est composé de ses diverses
parties et que les parties forment le tout. Toute nation, communauté
ou sociétéest constituée par ses divers membres. Elle ne peut être
considérée commeheureuse, évoluéeet en voie de progrès que si l'en-
semble de ses membres atteint au bien-être,au développement et au
progrès sur la base de l'égalitédevant la loi. Le mécontentement des
particuliers et les préjudices qu'ils subissent du fait d'une législation
discriminatoire ont inévitablement des conséquences néfastes,si super-
ficiellessoient-elles, pour la collectivité.Etant donné la missionacrée))

de civilisation dont l'objet est de permettre aux peuples des territoires
sous Mandat cde se diriger eux-mêmesdans les conditions particulière-
ment difficiles du monde moderne » (Pacte, article 22) et l'obligation
formellefaite au Mandataire par l'article 2du Mandat pour le Sud-Ouest
africain de mettre tout en Œuvre pour atteindre l'objectif de l'auto-
détermination, il n'était pas déraisonnable d'espérer, après quarante
annéesd'administrationpar le Mandataire, que leshabitants du territoire
aient étéamenés à un degré appréciable d'évolution politique.Or, il
ressort du dossier que, sauf peut-êtreles Basters de Rehoboth (11257

personnes) qui bénéficientd'un semblant d'autonomie locale partielle
dans leur région,aucun desgroupes non blancs nejouit de droits civiques
notables. MêmelesOvambos (au nombre de 239 363au recensement de
1960), dont le groupe représente plus de quarante pour cent de la
population totale du territoire (526 004habitants), nejouissent d'aucune
autonomie locale appréciable. Comme la Commission d'enquête Oden-
daal nomméepar le gouvernement l'a signaléen janvier 1964 à propos
de sa recommandation d'adoucir le contrôle du commerce des boissons
alcooliques, (cils ont réalisé aujourd'hui de tels progrèssur la voie

du développementque la Commission a recommandé qu'on leur accorde
une certaine forme avancée d'autonomie; en second lieu, si la Commis-
sion ne tenait pas compte des vives protestations de tous les groupes,
non seulement ceux-ci seraient déçus,mais ils se sentiraient même lésés))
(rapport Odendaal, p. 487).
232 SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS. WELLINGTON KOO) 235

En revanche, depuis la promulgation du South WestAfrica Constitution
Act de 1925, le groupe blanc se gouverne lui-mêmepar l'intermédiaire
de l'Assembléelégislativedu Sud-Ouest africain, dont il élit périodique-
ment les membres. Cet organe législatif,auquel les groupes non blancs

n'ont pas le droit d'envoyer de représentants, a le pouvoir de légiférer
pour le territoire sur toutes les questions qui ne sont pas réservéespar
l'Act, comme c'est le cas pour les affaires indigènes, les chemins de fer,
les ports et certaines autres questions.
11ressort donc du dossier que pour les groupes non blancs la politique
d'apartheid ou de développement séparépratiquéeau Sud-Ouest africain
n'a été et n'est compatible ni avec le principe fondamental de lamission
sacréede civilisation)>,ni avec l'obligation qui incombe au défendeur
en vertu de l'article 2 du Mandat d'accroître, ([par tous les moyens en

son pouvoir, le bien-être matériel etmoral ainsi que le progrès social
des habitants du territoire soumis au présent Mandat )).
Le deuxièmeprincipe essentiel du systèmedes Mandats est l'obligation
pour le Mandataire de rendre compte sur le plan international de
I'accomplissement de sa mission sacrée de civilisation. Ce principe est
consacré d'une manière généralp ear les paragraphes 7,8 et 9 de l'article
22 du Pacte et de façon plus concrète par les dispositions des articles 6
et 7 de l'accord de Mandat. En vertu de l'article 6, qui invite le Manda-
taire à «envoyer au Conseil de la SociétédesNations un rapport annuel

satisfaisant le Conseil)) au sujet de son administration du territoire
sous Mandat, ainsi qu'en vertu de dispositions analogues des autres
Mandats, le Conseil a, par résolution du 31 janvier 1923, adopté une
série derèglestendant à ce que les Mandataires transmettent à la Com-
mission permanente des Mandats les pétitions émanant des habitants
des territoires sous Mandat. Bref, la responsabilité internationale du
Mandataire entraîne nécessairement les obligations fondamentales de
se prêter à la surveillance internationale et au contrôle de son adminis-
tration du territoire sous Mandat et d'accepter la juridiction obligatoire
de la Cour permanente dans tout différendl'opposant àun autre Membre

de la Société desNations au sujet de l'interprétation ou de l'application
des dispositions du Mandat.
Ces obligations constituent une caractéristique fondamentale du
système des Mandats. La dissolution de la Soci/é des Nations et la
disparition du Conseil et de la Cour permanente n'y ont pas mis fin.
En vertu de l'article 37 du Statut, la juridiction obligatoire dela Cour
permanente a été transférée à la Cour actuelle. Quant à l'obligation de
rendre compte sur le plan international établie par les dispositions
pertinentes du Pacte et du Mandat pour le Sud-Ouest africain, elle a,

en vertu du principe de divisibilité applicable en droit international,
survécud'une manière latente à la disparition du Conseil et de la Com-
mission permanente des Mandats. Il a suffi pour cela de l'arrangement
envisagédans la résolution relative aux Mandats que l'Assembléede la
Société desNations a adoptée à l'unanimité des votants, y compris le
défendeur,lors de sa dernière séance tenuele 18 avril 1946. SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS.WELLINGTON KOO) 236

On se rappellera que, dèsavril 1945, c'est-à-dire un an environ avant
la dissolution de la Société desNations, lors de la conférence de San
Francisco consacrée à la rédaction de la Charte des Nations Unies, le
défendeur, qui attachait apparemment autant d'importance, sinon plus,

à la future organisation internationale qu'à la Société desNations de
Genève, a annoncé son intention d'incorporer le Sud-Ouest africain à
l'Union sud-africaine. En 1946,au cours de la première session de l'As-
semblée générale deN s ations Unies, il a soumis aux fins d'approbation
une proposition formelle en ce sens. Cette proposition ayant étérejetée,
le défendeur, tout en exprimant ses regrets et sa déception, a annoncé
qtl'il continueraià présenter des rapports relatifsà son administration
du territoire sous Mandat du Sud-Ouest africain, comme il l'avait fait
auparavant dans le cadre de la Société desNations.
Quoiqu'en présentant ces rapports le défendeur ait précisé qu'il le
faisait de son plein gréet uniquement à titre d'information, comme le
prévoitl'article 73e) de la Charte des Nations Unies pour les territoires

non autonomes, l'incidence juridique de la déclaration et de l'acte par
lesquels il reconnaissait l'Assemblée généraleomme organe international
compétent à l'égarddu Mandat pour le Sud-Ouest africain ne saurait
de toute évidence,étant donnéson obligation de rendre compte sur le
plan international aux termes de l'article 6 du Mandat, être déterminée
par lui unilatéralement (article, premier alinéa),pas plus que la teneur
et la portée de ses obligations en vertu du Mandat ne sauraient être
régiespar sa propre interprétation du deuxième alinéa de l'article 7 de
cet instrument. De même,la question de la validitédela déclarationpar
laquelle il a, par la suite, annoncéson intention de ne plus adresserAs-
semblée générale de rapports sur son administration du territoire sous
Mandat ne saurait, étantdonnélescirconstances, êtretranchée par saseule

autorité au méprisde l'attitude et des décisionsde l'Assemblée générale.
En dépitdeseshésitationspremières(résolution XIV-1,paragraphe 3 C,
du 12février1946),l'Assemblée généraa lepour sapart résolumententrepris
d'exercer lespouvoirs et fonctions que lui conféraitla Charte et de s'oc-
cuper de la question du Mandat pour le Sud-Ouest africain, comme en
témoigne la résolution 65 (1) du 14 décembre 1946 par laquelle elle a
déclaréqu'elle «ne saurait admettre I'incorporation du territoire du
Sud-Ouest africain a l'Union sud-africaine 1)Dans sa résolution 141 (II)
du leTnovembre 1947, elle a pris note de la décisiondu défendeur de
ne pas procéder àl'incorporation du Sud-Ouest africain et de maintenir
le statu quo. En fait, la compétence que l'Assemblée générale avait

pour exercer une surveillance et recevoir et examiner des rapports sur
l'administration du Sud-Ouest africain en vertu du Mandat, ainsi que
sa détermination à le faire, ont éconfirméespar sesrésolutions227 (III)
du 26 novembre 1948et 337 (IV) du 6 décembre 1949.
II ressort clairement des textes qui précèdent, ainsi que des actes
officielsdu Mandataire et del'Assembléegénéraleq , u'il y a eu nécessaire-
ment un accord implicite entre les deux parties pour que l'une exerce
des fonctions de surveillance sur l'administration du territoire par
l'autre.

234 SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS. WELLINGTON KOO) 237

Au surplus, non seulement le défendeur a,comme Membre originaire
des Nations Unies, pris part à la rédaction de la Charte et acceptéses
principes fondamentaux - notamment pour ce qui concerne ses cha-
pitres XII et XIII consacrés au régimeinternational de tutelle et son

chapitre XI relatif aux territoires non autonomes - mais encore, en
participant au vote par lequel l'Assembléede la Sociétédes Nations a
adopté à l'unanimitésa résolutionfinale du 18avril 1946sur les Mandats,
il a accepté l'accord consignédans cette résolution. Aux termes des
paragraphes 3 et 4 de ladite résolution, l'Assemblée:
((3. Reconnaît que la dissolution de la Sociétédes Nations

mettra fin à ses fonctions en ce qui concerne les territoires sous
Mandat, mais note que les principes correspondant à ceux que
déclarel'article 22du Pacte sont incorporés dans les chapitres XI,
XII et XIII de la Charte des Nations Unies;
4. Note que les Membres de la Sociétéadministrant actuelle-
ment des territoires sous Mandat ont exprimé leur intention de
continuer à les administrer, en vue du bien-êtreet du développe-
ment des peuples intéressés,conformément aux obligations con-
tenues dans les divers Mandats, jusqu'à ce que de nouveaux ar-
rangements soient pris entre les Nations Unies et les diverses

Puissances mandataires. 11
Par le paragraphe 3 de la résolution ci-dessus, le défendeur a reconnu,
de mêmeque les autres Puissances mandataires et les autres Membres
de la Société desNations, que les principes du régime de tutelle corres-
pondaient à ceux du système desMandats et, par le paragraphe 4, il s'est
engagé à prendre par accord mutuel un arrangement avec les Nations
Unies au sujet du Mandat pour le Sud-Ouest africain.
Il est vrai que l'arrangement alors envisagé par le défendeur était

l'incorporation du territoire sous Mandat à l'Union sud-africaine.
Nous avons vu toutefois que le défendeur n'a pas réussi à faire ap-
prouver ce projet d'incorporation et que, reconnaissant le pouvoir
de surveillance de l'Assemb!éegénérale à l'égard du Mandat, il s'est
expressément engagé à continuer l'envoi de rapports annuels sur son
administration; car, comme il l'avait dit précédemment à l'Assemblée
de la Société desNations,

((Le Gouvernement de l'Union se fera, cependant, un devoir
de considérer que la disparition de la Sociétédes Nations ne di-
minue en rien les obligations qui découlentduMandat; il continuera
à s'en acquitter en pleine conscience et avec le juste sentiment de
ses responsabilités, jusqu'au moment où d'autres arrangements
auront étéconclus quant au statut futur de ce territoire.))

C'est donc de sa propre initiative que le défendeur a abouti à un ar-
rangement avec l'Assembléegénérale,comme nous l'avons vu ci-dessus
et comme l'envisageait le paragraphe 4 de la résolution de la Société
des Nations déjà citée. D'ailleurs, dans un mémorandum adressé au
Secrétaire généraldes Nations Unies par la légation d'Afrique du Sud
à Washington le 17 octobre 1946, il était dit, quoique à cette date la SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS. WELLINGTOKOO) 238
Sociétédes Nations eût déjàdisparu: ((Cette responsabilité du Gouver-
nement de l'Union en tant que Mandataire est évidemmentinaliénab»e.
De même,la déclaration que le représentant du Mandataire a faite

à l'Assembléede la Société desNations et que j'ai reproduite ci-dessus
a été répété par le premier ministre del'Union le 4 novembre 1946
dans un exposé à la Quatrième Commission de l'Assembléegénérale
des Nations Unies.
En raison des déclarations et de l'attitude du défendeurque je viens
de rappeler et qui constituent une reconnaissance expresse ou implicite
de la compétenceet du pouvoir de surveillance de l'Assembléegénérale
des Nations Unies à l'égarddu Mandat pour le Sud-Ouest africain,
le fait que le défendeurait cesséd'envoyer des rapports annuelsAs-
sembléegénéraleet qu'il refused'acceptersa surveillanceestincompatible
non seulement avec l'obligation fondamentale qui lui incombe en vertu
de l'article du Mandat et l'engagement qu'il a contracté envers l'As-

semblée dela Société desNations lors de sa dernière session, mais en-
core avec les obligations qui lui incombent en vertu de la Charte des
Nations Unies et avec l'engagement qu'ila priségard del'Assemblée
générale.

(Signé)V. K. WELLINGTO KNOO.

Bilingual Content

DISSENTING OPINION OF VICE-PRESIDENT

WELLINGTON KOO

1 regret to be unable to concur in the Judgment of the Court which
"finds that the Applicants cannot be considered to have established any
substantive right or legalinterest appertaining to them in the subject-
matter of the present claims". Nor am 1 able to agree with the reasons
upon which it is based. Pursuant to Article 57 of the Statute 1propose
to state the grounds for my dissent.

In the first phase of the instant cases, will be recalled, the Govern-
ment of South Africa, in response to the Applications and Memorials
of Ethiopia and Liberia, filed four preliminary objections, submitting
"that the Governments of Ethiopia and Liberia have no locus standi
in these contentious proceedings and that the honourable Court has
nojurisdiction to hear, or adjudicate upon, the questions of law and fact
raised in the Applications and Memorials ...". The third objection as
hally presented in the oral proceedings of 1962states that :

"the conflict or disagreement alleged by the Governments of
Ethiopia and Liberia to exist between them and the Government
of the Republic of South Africa, is by reason of its nature and
content not a 'dispute'as envisaged in Article 7 of the Mandate

for South West Africa, more particularlyin thatno material interests
of the Governments of Ethiopia andlor Liberia or of their nationals
are involved therein or affected thereby".

The Court by its Judgment of 21 July 1962rejected al1the four ob-
jections and stated separate reasons for each rejection. With reference
to the third objection, the Court stated,inter alia:
"For the manifest scope and purport of the provisions of this

Article indicate that the Members of the League were understood
to have a legal right ornterest in the observance by the Mandatory
of its obligations both toward the inhabitants of the Mandated
Territory, and toward the League of Nations and its Members."
(I.C.J. Reports 1962,p. 343.)
In its operative clause the Judgment states that "The Court, by eight
votes to seven, finds that it has jurisdiction to adjudicate upon the
merits of the dispute".
The principal question considered in the present Judgment is, again,
whether the Applicants in the instant cases have a legal right or interest

214 OPINION DISSIDENTE DE M. WELLINGTON KOO,
VICE-PRÉSIDENT

[Traduction]
Je regrette de ne pouvoir me rallierà l'arrêtde la Cour qui ((constate

que les demandeurs ne sauraient êtreconsidéréscomme ayant établi
l'existence à leur profit d'un droit ou intérêt juridique au regard de
l'objet des présentes demandes ». Je ne puis approuver non plus les
motifs sur lesquels se fonde cet arrêt.En application de l'article 57 du
Statut, je me propose d'exposer les raisons de mon désaccord.

On se souviendra que, dans la première phase des présentes affaires,
le Gouvernement sud-africain a soulevéquatre exceptions préliminaires
en réponse aux requêteset mémoires de 1'Ethiopie et du Libériaet con-
clu ((à ce que les Gouvernements de 1'Ethiopie et du Libéria n'ont pas

de locus standi dans la présente procédure contentieuse et à ce que la
Cour n'a pas compétence pour connaître des questions de droit et de
fait soulevéesdans les requêteset les mémoires ..))La troisième exception
telle qu'elle a été finalementformulée dans la procédure orale de 1962,
est ainsi conçue:
«le conflit ou désaccord que les Gouvernements de 1'Ethiopie
et du Libéria prétendent exister entre eux et le Gouvernement de

la République sud-africaine n'est pas, eu égard à sa nature et à
sa teneur, un ((différen))comme il est prévu à l'article 7 du Mandat
pour le Sud-Ouest africain, et cela plus particulièrement en tant
qu'aucun intérêt concretdes Gouvernements de 1'Ethiopie et/ou
du Libéria ou de leurs ressortissants n'est en cause ou n'est affecté
en l'espèce.»

Par arrêt du 21 juillet 1962, la Cour a rejeté les quatre exceptions,
énonçant dans chaque cas les motifs du rejet. En ce qui concerne la
troisième exception, elle a déclarénotamment:
«La portée et l'objet manifestes des dispositions de cet article
indiquent en effet qu'on entendait par là que les Membres de la

SociétédesNations eussent un droit ou un intérêtjuridique à ce que
le Mandataire observât sesobligations à la foià l'égard deshabitants
du territoire sous Mandat et à l'égard dela Société desNations
et de ses Membres. 1)(C.I.J. Recueil 1962, p. 343.)
Le dispositif de l'arrêt était lesuivant: ((La Cour, par huit voix contre
sept, dit qu'elle est compétente pour statuer sur le fond du différend. 1)

La principale question que doit trancher l'arrêt rendu aujourd'hui
està nouveau celle de savoir si les demandeurs dans les présentes affaires
214 in the subject-matter of their claims. The Judgment finds that the

Applicants have no such right or interest in the performance provisions
of the Mandate for South West Africa. It seémsto me that the main
arguments insupport of this findingare largelyderived from the concepts
of guardianship or tutelle in municipal law with its restricted notions of
contract, parties and interests.

But the mandates system, while it bears some resemblance to, and
was probably inspired by, the concept of guardianship or tutelle in
private law, the similarity is very limited. Unlike the municipal law
concept with its simple characteristics and limited scope, the mandates
system has a complex character al1 of its own, with a set of general
and particular obligations for the mandatory to observe or carry out,
and with a scheme of multiple control and supervision by the League
of Nations with its Council, Assembly,member States andthe Permanent
Mandates Commission and with judicial protection in the last resort
by the Permanent Court. It is a novel international institution. Nothing

of the kind had existed before. It is suigeneris.

At this juncture 1think a few words about the historical background
of the creation of the mandates system will be useful to enable a full
understanding and appreciation of its nature, spirit and purport. As
we al1know, it was President Wilson, author of the-Fourteen Points,
who first made the radicalproposal inthe Council ofTen ofthe Versailles
Peace Conference to renounce in fact the time-honoured zprinciple of
annexation by conquest and to set up in its stead a new international
mandates system to be operated by the League 6f Nations and based
upon the concept of a sacred trust entirely in theinterest of the inhabi-
tants of the territories to be thus placed under mandate. He had at
first even proposed direct administration by the League of Nations of
the territoriesaken from the Central Powers. He advocated the mandates
system so strongly as to make it practically a sine qua non in the peace
settlement. It was, however, opposed at first with equal firmness by
some of his principal allies in the war, notably some of the British
Dominions. The confrontation of the two opposing theses became so

serious as to constitute not only a deadlock but even to threaten for a
time the break-up of the Peace Conference. It was largely through the
conciliatory efforts of Lloyd George that an agreement was finally
reached on this difficult question.

The resulting compromise was that the "securities for the performance
of this trust should be embodied in this Covenant" of the League of
Nations. While paragraphs 7 and 9 of Article 22 of this instrument
provide respectively for the rendering to the Council of the League
an annual report by the mandatory "in reference to the territory com-

215 SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS. WELLINGTON KOO) 217

ont un droit ou intérêt juridiqueau regard de l'objet de la demande.
L'arrêtconstate que les demandeurs n'ont pas de droit ou intérêtde
ce genre en ce qui concerne les dispositions'du Mandat pour le Sud-
Ouest africain relatives à la gestion. Il me semble que les principaux
arguments invoqués à l'appui de cette conclusion procèdent en grande
partie de la conception de la tutelle que l'on se fait en droit interne,

avec les restrictions que cela comporte quant à la notion de contrat,
de parties et d'intérêts.
Mais, s'il est vrai que le système des Mandats se rapproche de la
tutelle du droit privé, qui l'a probablement inspiré, la similitude ne
va pas très loin. A la différence de la notion de droit interne dont les
caractéristiques sont simples et la portéelimitée,le système des Mandats
a un caractère complexe qui lui est toutà fait propre; il est assorti d'une
série d'obligations générales et particulières que le Mandataire doit
remplir, d'un dispositif de contrôle et de surveillance multiple faisant
intervenir la Société desNations (Conseil, Assemblée, Etats Membres
et Commission permanente des Mandats) et il s'accompagne en dernier

ressort de la protection judiciaire de la Cour permanente. C'est une
institution internationale nouvelle. Rien de semblable n'avait existé
auparavant. C'est une institution sui generis.
Je pense qu'à ce stade il est utile de retracer brièvement l'historique
de la création du système des Mandats pour bien faire comprendre et
apprécier la nature, l'esprit et le but de cette institution. C'est comme
chacun sait, le président Wilson, auteur des Quatorze points, qui a fait
pour la première fois au Conseil des Dix de la conférence de la paix
de Versailles la proposition radicale tendant à ce que le principe tradi-
tionnel de l'annexion par voie de conquête soit en fait abandonné et
remplacépar un systèmenouveau, le systèmeinternational des Mandats,

qui serait mis en Œuvre par la Sociétédes Nations et serait fondé sur
la notion d'une mission sacrée de civilisation exclusivement conçue
dans l'intérêt dehsabitants des territoires devant êtreainsi placés sous
Mandat. Le président Wilson avait mêmeproposé d'abord que les
territoires enlevésaux Empires centraux fussent administrés directement
par la Société desNations. Il préconisait le système des Mandats si
énergiquement qu'il enfaisait en quelque sorte une condition sine qua
non de la conclusion de la paix. Mais certains de ses principaux alliés
du temps de guerre, notamment certains dominions britanniques, s'y
opposèrent au début avec tout autant de fermeté. Les partisans des
deux thèses s'affrontèrent si gravement que non seulement on aboutit

à une impasse mais qu'on put craindre pendant quelque temps l'éclate-
ment de la conférencedela paix. C'est en grande partie grâce aux efforts
de conciliation de M. Lloyd George que l'on put finalement se mettre
d'accord sur cette délicate question.
Le compromis qui en résulta fut ((d'incorporerdans le présent Pacte
[de la Société desNations] des garanties pour l'accomplissement de
cette mission ».Si les paragraphes 7 et 9 de l'article 22 du Pacte pré-
voient respectivement que le Mandataire doit envoyer au Conseil un
rapport annuel concernant les territoires dont il a la charge))et qu'une mitted to its charge" andfor the constitution of a permanent commission
"to receive and examine the annual reports of the Mandatories and to
advise the Council on al1 matters relating to the observance of the

Mandates", not al1securities were spelled out in the same instrument.
On the contrary by paragraph 8 "the degree of authority, control or
administration to be exercised by the Mandatory shall, if not previously
agreed upon by the Members of the League, be expressly defined in
each case b3 the Council". Thus, for example, Article 6 of the Mandate
for South West Africa provides for the making of annual reports by
the Mandatory "to the satisfaction of the Council", and Article 7 of the
same Mandate provides in the first paragraph that "the consent of the
Council of the League of Nations is required for any modification
of the terms of the present Mandate" and in the second paragraph (the
adjudication clause) that-

"The Mandatory agrees that, if any dispute whatever should arise
between the Mandatory and another Member of the League of
Nations relating to the interpretation or the application of the
provisions of the Mandate, such dispute, if it cannot be settled by
negotiation, shall be sübmitted to the Permanent Court of Inter-
national Justice provided for by Article 14 of the Covenant of the
League of Nations."

The whole system was inspired by, and built upon, the cardinal
purpose of protecting and promoting the welfare of the peoples of the
territories placed under mandate. It constituted an international joint
enterprise, the success of which was predicated upon the CO-operation
of al1 the parts and parties to it under the League-the Council, the
Permanent Mandates Commission, the Assembly, the member States
and the mandatories. In order to ensure success various securities
were provided both in Article 22 of the Covenant and in the respective
mandate instruments. The examination and consideration of the man-
datories' annual reports on the administration of their respective terri-
tories under mandate by the Council with the assistance and advice
of the Permanent Commission and the discussion and debate in the
annual session of the Assembly on the chapter on mandate administra-
tions in the Council's own yearly report, in both cases with the partici-

pation of the representatives of the Mandatory Powers, constituted the
normal operation of the supervisoryfunctions of the League of Nations.
The harmonious and effectiveworking of the securities for the protection
of the overridinginterests of the inhabitants of the mandated territories
manifestly depended. upon the whole-hearted CO-operation of the
mandatory States. But, in view ofparagraph 5 of Article 4 of the Cove-
nant requiringrepresentation of a Member at any meeting of the Council
during the consideration of matters specially affecting the interests of
that Member of the League; paragraph 6 of the same provision con-
ferring the right to cast one vote, and paragraph 1 of Article 5 of
the same instrument requiring "the agreement of al1the Members ofthe
League represented at the meeting" for decisions at any meeting of the SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS. WELLINGTON KOO) 218

commission permanente sera chargée «de recevoir et d'examiner les
rapports annuels des Mandataires et de donner au Conseil son avis
sur toutes questions relatives à l'exécutiondes mandats », toutes les
garanties ne sont pas énoncéesdans ledit instrument. Au contraire, le
paragraphe 8 énonce: a Si le degré d'autorité, de contrôle ou d'ad-

ministration à exercer par le Mandataire n'a pas fait l'objet d'une
convention antérieure entre les Membres de la Sociétéi,l sera expressé-
ment statué surces points par le Conseil. Ainsi, par exemple, l'article 6
du Mandat pour le Sud-Ouest africain dispose que le Mandataire devra
envoyer des rapports annuels ((satisfaisant le Conseil»; l'article 7 du
mêmeMandat stipule en son premier alinéa:((L'autorisationdu Conseil
de la Sociétédes Nations est nécessairepour modifier les dispositions
du présentmandat »et en son deuxièmealinéa(clausejuridictionnelle):

((Le Mandataire accepte que tout différend,quel qu'il soit, qui
viendrait às'éleverentre lui et un autre Membre de la Société des
Nations relatifà l'interprétation ouà l'application des dispositions
du Mandat, et qui ne soit pas susceptibled'êtreréglépar des négo-

ciations, soit soumis la Cour permanente de Justiceinternationale,
prévuepar l'article 14 du Pacte de la Société des Nations. ))

Le systèmetout entier était inspirépar la volonté fondamentale de
protégerles populations desterritoires placéssous Mandat et d'accroître

leur bien-être; il étaittout entier orientéen ce sens. C'étaitune entreprise
internationale commune, dont le succès dépendait de la coopération
de tous les participants dans le cadre de la Sociétédes Nations - le
Conseil, la Commission permanente des Mandats, l'Assemblée, les
Etats Membres et les Mandataires. Pour assurer son succès, diverses
garanties étaient prévuestant dans l'article 22 du Pacte que dans les
divers actes de Mandat. Les fonctions normales de surveillance de la
Société desNations comprenaient, d'une part, l'examen et l'étude des
rapports annuels des Mandataires sur l'administration des territoires

sous Mandat auxquels le Conseil procédait avec l'aide et l'avis de la
Commission permanente des Mandats et, d'autre part, les discussions
et les débats que l'Assembléeconsacrait chaque année au chapitre du
rapport annuel du Conseil relatif à l'administration des Mandats; des
représentants des Puissances mandataires participaient aux travaux
du Conseilcomme àceux de l'Assemblée.La mise en Œuvreharmonieuse
et efficace des garanties instituées pour la protection des intérêts pri-
mordiaux des habitants des territoires sous Mandat dépendait évidem-
ment de la coopération sincère des Etats mandataires. Mais, vu le

paragraphe 5 de l'article 4 du Pacte, exigeant que tout Membre fût
représentéau Conseil lorsqu'une question qui l'intéressait particulière-
ment étaitportée devantce dernier, vu le paragraphe 6 du mêmearticle,
stipulant que chaque Membre ne disposait que d'une voix et, vu le
paragraphe 1 de l'article 5, exigeant ((l'unanimité des Membres de la
Société représentés à la réunion » pour qu'une décisionfût prise par

216Assembly or the Council, the authors of the mandates system could not

have been unaware of human frailties and therefore the unrealistic
nature of any hope and faith on their part that every mandatory could
always be relied upon to show an identity of views with the Council
on a given matter relating to the particular mandate, or to manifest
a never failing spirit of accommodation to yield to the views of the
Council in the interest of the peoples of the territories under mandate.
To meet such a contingency, however rare it might be, and equally
conscious of the primary purpose of the mandates system, the authors
of the mandate instruments, appointed by the Principal Allied and
Associated Powers in 1919, introduced the adjudication clause first in
'B'mandates and later in 'C'mandates, and used the same text for both
categories, in order to provide a means of judicial protection of the
interests of the said inhabitants through the exercise by individual
Members of the League of their substantive right or legal interest in
the observance of the mandate obligationstoward them by the respective
mandatories.

In other words the legal right or interest of the League Members
individually as well as collectivelythrough the Assembly of the League
in the observance of the mandates by the mandatories originated with
and inherent in the mandates system, as has been demonstrated above,
and an adjudication clause was inserted in each mandate not to confer
this right or interest, whichis already necessarily implied in Article 22
of the Covenant and in the mandate agreement, but to bear testimony
to its possession by the League Members and to enable them, if need
be, to invoke in the last resort, judicial protection of the sacred trust.

That the above finding of the Applicants' possession of a legal right
or interest in the performance of the Mandate for South West Africa is
correct is also borne out by the provision and language of Article 7 (2),
the text of which has already been cited earlier.

This right or interest is not, as affirmed in effect by the Judgment,
limited to the material or national interests of the individual League

Members as provided for in Article 5 of the Mandate for South West
Africa relating to freedom of missionaries "to enter into, travel and
reside in the territory for the purpose of prosecuting their calling".
The broad, plain and comprehensive language of the provision implies
that the content and scope of the legal right orinterest of the Members
of the League of Nations is CO-extensivewith the obligations of the
Mandatory under the Mandate; it is not restricted to the content of the
said Article 5.
If it were to be interpreted as so limited, such interpretation would
obviously be incompatible with the all-embracing term "the provisions
ofthe Mandate". If it had been intended by the authors of the instrument
to be so restricted in meaning and content, it would have been a simple

217 SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS . ELLINGTON KOO) 219

l'Assembléeou le Conseil, les auteurs du système des Mandats ne pou-
vaieilt pas ne pas savoir, conscients qu'ils étaientdes faiblesseshumaines,
qu'il serait peu réalistede leur part d'espérerou de croire que les Man-
dataires et le Conseil seraient toujours d'accord lorsqu'une question
donnéetouchant à un Mandat particulier se poserait ou que les Man-
dataires se montreraient toujours disposés à céder devant le Conseil
dans l'intérêt depsopulations des territoires sous Mandat. C'est parce
qu'ils désiraientfaire face une telle situation, pour rare qu'elle puisse

être,et parce qu'ils étaient également conscients du but premier du
système des Mandats que les auteurs des actes de Mandat, désignés
par les Principales Puissances alliéeset associéesen1919,ont introduit la
clause juridictionnelle d'abord dans les Mandats B puis dans les Man-
dats C et ont utiliséle même textepour les deux catégories de Man-
dat - leur but étant d'instituer un moyen de protection judiciaire des
intérêtsdes habitants grâce à l'exercice par les Etats Membres de la
Société desNations, à titre individuel, du droit ou intérêt juridique
qu'ils avaient à ce que les différents Mandataires observent, à leur
égard, les obligations imposées par les Mandats.
En d'autres termes, le droit ou intérêt juridiquedes Membres de la

Société desNations, considérés individuellement aussi bienque collec-
tivement par l'intermédiaire de l'Assemblée, à ce que les Mandataires
respectent les Mandats est néavec le système des Mandats et était in-
hérent à ce système, comme je l'ai démontréplus haut, et une clause
juridictionnelle a étéinscrite dans chaque Mandat non pas pour con-
férerce droit ou cet intérêt,qu'impliquaient déjà nécessairement l'arti-
cle22 du Pacte et l'accord deMandat, mais pour attester que les Membres
de la Société desNations le possédaient etpour leur permettre, en cas
de besoin, d'invoquer en dernier ressort la protection judiciaire de la
mission sacréede civilisation.
Que la conclusion ci-dessus selon laquelle les demandeurs possèdent

un droit ou intérêjturidique à l'exécution des obligationsdu Mandat
pour le Sud-Ouest africain soit exacte, c'est aussi ce que confirment
la teneur et le libellédu deuxième alinéa de l'article dont le texte est
cité plushaut.
Ce droit ou intérênt'est pas, comme l'affirme enréalitél'arrêt,limité
aux intérêtsconcrets ou nationaux des Etats Membres de la Société
des Nations, considérés individuellement, comme ceuxque vise l'article5
du Mandat pour le Sud-Ouest africain relatif à la libertépour les mis-
sionnaires «de pénétrer, de circuleret de résiderdans le territoire dans
le but d'exercer leur ministère».Le libellé large, clair et général dela

disposition implique que le droit ou intérêt juridiquedes Membres de
la Société desNations a un contenu et une portée qui correspondent aux
obligations incombant au Mandataire en vertu du Mandat; il ne concerne
pas uniquement ledit article5.
Si l'on devait interpréter le texte d'une manière aussi limitée, l'on
en donnerait une interprétation manifestement incompatible avec la
formule très générale((dispositionsdu Mandat ». Si les auteurs du
Mandat avaient voulu ainsi en restreindre le sens et la teneur, il aurait220 SOUTH WEST AFRICA (DISS . P. WELLINGTON KOO)

thing to mention "Article 5" instead of the actual term "the provisions
of the Mandatey'-as stated in the compromissory clause. There is a
Chinese proverb put in the form of a question: Why write a long and
big essay on such a small subject? The alleged limited purport and
scope of the terms employed in Article 7 (2), such as the term "any
dispute" or the "provisions of the Mandate", if the allegation werewell-
founded, would certainly make the actual language of thecompromissory
clause appear to be extravagant. And yet we know as a fact that the
draft 'B' and 'C' mandates, both containing a similarly worded com-
promissory clause, were considered by several bodies of the Paris Peace
Conference composed of eminent statesmen over a period of several
rnonths, such as the Milner Commission and the Council of Heads of

Delegations in Paris and later by the Council of the League of Nations-
al1 deeply concerned in the matter of the mandates and the proposed
mandates system. In fact, within the membership of these bodies, most,
if not all, of the principal mandatory Powers were represented.

Moreover, before the draft 'B' and 'C' mandates were sent to the
Council of the League of Nations, they had also been referred to the
legal experts of the Drafting Committee of the Peace Conference for
the purpose of putting them into the proper legal form. Though these
experts were not called upon to discuss the content of the drafts, it is
reasonable to assume that if the purport of the compromissory clause
had been understood by them to be something much more limited than
the actual language employed in the drafts, they would certainly have
suggested some revision. But they did not make any such suggestion and

left the broad, comprehensive language of the clause as it had been
presented to them.
Furthermore,the origin of the compromissory clauseand the evolution
of its present form of wording as to its content is also significant and
throwslight on the intention ofitsauthors. Asbrought outin the separate
opinion of Judge Jessup appended to the 1962Judgment, the compro-
missory clause was first proposed in the United States' alternative draft
for 'B'mandates submitted to the Milner Commission. The representa-
tives of Great Britain and France "both said that they had no objection
to the principle of recourse to the international Court" but they objected
to the grant of a right to individuals to invoke the jurisdiction of the
Court for decision relating to infractions of the rights conferred on
them by certain provisions of the draft mandates. However, further
discussion resulted in thedeletion of the references to the specificarticles

concerning rights of individuals. Al1 this related to the draft for 'B'
mandates, which was, after revision, duly approved by the Commission.
Shortly afterwards, a draft was adopted to serve as a pattern for 'C'
mandates with a paragraph concerning reference to the Court which
"was identical with the first paragraph of the United States' draft",
which had embodied the principle of recourse to the international
Court and to which the British and French representatives had said that
they had no objection. (See Judge Jessup's separate opinion, I.C.J.
218 SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS. WELLINGTON KOO) 220

ététrès simple de remplacer par ((l'article5»l'expression ((dispositions
du Mandat » qui figure dans la clause compromissoire. Il existe un pro-
verbe chinois qui consiste en la question suivante: ((Pourquoitant
écriresur un sujet si mince?» Silestermes employésau deuxième alinéa

de l'article, comme ((tout différend» ou les«dispositions du Mandat »,
avaient bien le but et la portée limitésque l'on prétend leur attribuer
selon cette interprétation, le libelléde la clause compromissoire appa-
raîtrait sans aucun doute extravagant. Or il est de fait, nous le savons,
que les projets de Mandat B et C, qui tous deux contenaient une clause
compromissoire identique, ont été étudié psendant plusieurs mois par
divers organes de la conférencede la paix de Paris, dont des hommes
d'Etat éminents faisaientpartie -je songepar exemple à la Commission
Milner et au Conseil des chefs de délégations à Paris, puis au Conseil
de la Société desNations, tous organes qu'intéressaient vivementla

question des Mandats et le système des Mandats proposé. En fait, la
plupart des Principales Puissances mandataires, sinon toutes, étaient
représentéesau sein de ces organes.
En outre, avant d'être soumisau Conseil de la Société desNations,
les projets de Mandat B et C avaient été renvoyéasux juristes du comité
de rédactionde la conférence dela paix pour être dûmentmis en forme
juridique. Bien que ces experts n'aient pas été chargés d'examinelre
contenu des projets, on peut raisonnablement admettre que, s'il leur
avait sembléque la portéede la clause compromissoire était beaucoup
plus limitéeque le libelléeffectivement employédans les projets ne le

laissait supposer, ils auraient certainement suggéréune revision. Mais
ils n'ont fait aucune suggestion de ce genre et ont maintenu le libellé
large et général dela clause tel qu'il leur avait été soumis.

Qui plus est, l'origine de la clause compromissoire et la manièredont
on a abouti au contenu que lui donne son libellé actuelsont également
significativeset éclairent l'intentionde ses auteurs. Comme l'a signalé
M. Jessup dans son opinion individuelle jointe à l'arrêtde 1962, la
clause compromissoire a d'abord été proposéedans le second projet

de Mandat B présenté à la Commission Milner par les Etats-Unis. Les
représentants dela Grande-Bretagne et de la France «ont déclarétous
deux qu'ils ne faisaient aucune objection au principe du renvoi à la
Cour »,mais qu'ils s'opposaientà ce que l'on accorde à des particuliers
le droit de faire appelà la juridiction de la Cour en vue d'obtenir une
décisionsur des infractions aux droits que leur conféraient certaines
dispositions des projets de Mandats. Toutefois, après de nouvelles
discussions, on a décidéde supprimer toute référence aux articles visant
expressémentles droits des particuliers. Tout cela concernait le projet
de Mandat B qui, après revision, a étédûment approuvé par la Com-

mission. Peu après, la Commission a adopté un projet type pour les
Mandats C qui contenait un alinéa prévoyantle renvoi à la Cour
((identique au premier alinéadu projet américain »,lequel avait énoncé
le principe du renvoi à la Cour internationale et n'avait pas soulevé
d'objection de la part des représentants de la Grande-Bretagne et de Reports 1962, p. 388.) The revision by the Council of the League of
Nations of the phrase "any dispute whatever between the members of
the League of Nations .. ." into the phrase now found in Article 7,
namely "if any dispute whatever between the Mandatory and another
Member of the League of Nations" was explained by Viscount Ishii,
the Rapporteur, on the ground that the members of the League other
than the Mandatory "could not be forced against their will to submit
their difficulties to the Permanent Court". This change was adopted
by the Council and the whole Mandate for South West Africa was
approved on 17 December 1920. It is thus seen that al1those who had
anything to do with the original drafting orthe finalevision of the clause
tookthe implicitprinciple ofjudicial protection relating to the observance
of the mandate obligations by the respective mandatory Powers as a
matter of course and raised no objections whatever.

It should be stated, in addition, that the same adjudication clause
with its broad, comprehensive language and a practically identical text,
is embodied in al1the 'B'and 'C'mandates, notwithstanding the marked
difference between the great variety of national or material interests
of the member States, as in the case of the Mandate for Palestine, and
the one single kind of national or individual interests relating tosion-
aries and their freedom to practise their calling, as in the case of the
Mandate for South West Africa (Article 5). This fact would seem to
support the view that Article 7 (2) of the latter Mandate, like similar
provisions in the other mandates of 'B'and 'C' categories, is intended
to provide a means primarily for the exercise by League Members of
their legal right or interest, through the judicial process, in the perfor-
mance of the mandate by the mandatory as to its obligations toward
the inhabitants of the mandated territory and toward the League of
Nations, and only secondarily for the judicial protection of the national
or material interests of the Members of the League of Nations.

There is indeed yet another fact which throws light on the point
of issueunder consideration. The order in which the various obligations
of the Mandatory are stipulated in the mandate instrument for South
West Africa is not without significance. Thus the unquestionably most
important of these obligations-those relating to the promotion to the
utmost of the material and moral well-being and the social progress
of the inhabitants of the territory subject to the present Mandate-are
provided for in Article 2. Then follows Article 3 providing for the
prohibition of slave-trade and forced labour and the control of the
arms trafic and the prohibition of the supply of intoxicating spirits and
beverages to the Natives. Article 4 prohibits the military training of
the Natives, etc., and finally Article 5 for ensuring in the Territory
freedom of conscience and the free exercise of al1 forms of worship
and the admission of al1missionaries, nationals of any States Members
of the League of Nations, to enter into, travel and reside in the territory

219 SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS.WLLINGTON KOO) 221

la France (voir l'opinion individuelle de M. Jessup, C.I.J. Recueil 1962,
p. 388). Le rapporteur, vicomte Ishii, a expliqué pourquoi le Conseil
de la Société desNations avait substitué au membre de phrase ((En
cas de différend, quel qu'il soit, entre les Membres de la Société des
Nations ..1)le membre de phrase qui se trouve maintenant dans l'ar-
ticle 7,à savoir, ((tout différend,.quel qu'ilsoit, qui viendraàts'élever

entre [le Mandataire] et un autre Membre de la Société desNations ));
il a dit que l'on ne pouvait pas obliger les Membres de la Sociétéautres
que le Mandataire à soumettre leurs différends à la Cour permanente
sans leur approbation. Le Conseil a adoptécet amendement et l'ensemble
du Mandat pour le Sud-Ouest africain a été approuvé le17 décembre
1920.On voit donc que tous ceux qui ont participé de quelque manière
à la rédaction du texte initial ou à la revision du texte définitifde la
clause ont accepté comme allant de soi le principe implicite de la pro-
tection judiciaire pour ce qui est de l'exécutionpar les Puissances man-
dataires des obligations découlant des Mandats et n'ont soulevéaucune
espèced'objection.

11convient de faire remarquer en outre que la mêmeclausejuridiction-
nelle, au libellé large, général et peu près identique, figure dans tous
les Mandats B et C malgréla grande différencequ'il peut y avoir entre
le cas où sont en cause des intérêts nationauxou concrets très variés
(Mandat pour la Palestine) et le cas où les seuls intérêtsnationaux ou
individuels en jeu concernent les missionnaires et leur liberté d'exercer
leur ministère (Mandat pour le Sud-Ouest africain, article 5). Ce fait
semblerait corroborer l'opinion selon laquelle 12 deuxième alinéa de
l'article7 du Mandat pour le Sud-Ouest africain, comme les dispo-
sitions analogues des autres Mandats B et C, vise essentiellement a
donner aux Etats Membres de la Société desNations le moyen d'exercer
par la voie judiciaire leur droit ou intérêt juridique ce que le Manda-

taire exécutele Mandat tant à l'égard deshabitants des territoires sous
Mandat qu'à l'égarddela SociétédesNations - et seulementsubsidiaire-
ment à assurer la protection judiciaire de leurs intérêts nationaux ou
concrets.
11est encore un autre fait qui éclaire le point litigieux que nous exa-
minons. L'ordre dans lequel les diverses obligations du Mandataire
sont énoncéesdans l'acte de Mandat pour le Sud-Ouest africain n'est
pas sans signification. Ainsi, celles de ces obligations qui, sans conteste,
sont les plus importantes - les obligations ayant traià l'accroissement,
par tous les moyens au pouvoir du Mandataire, du bien-être matériel
et moral ainsi que du progrès social des habitants du territoire soumis

au Mandat - sont énoncées à l'article 2. Vient ensuite l'article 3 qui
est relatif l'interdiction de la traite des esclaves et du travail obligatoire,
au contrôle du trafic de l'armement et à l'interdiction de fournir des
spiritueux et des boissons alcooliques aux indigènes. L'article4 interdit
l'instruction militaire des indigènes, etc.; enfin, l'article garantit la
liberté de conscience et le libre exercice de tous les cultes dans le ter-
ritoire et reconnaît à tous les missionnaires, sujets ou citoyens de
tout Membre de la SociétédesNations, la facultéde pénétrer, de circuler for the purpose of prosecuting their calling. After the stipulation of
these substantive obligations of the Mandatory followsArticle 6 relating
to its adjectival obligations of submitting annual reports to the satis-
faction of the Council of the League, etc. At the end of the mandate
instrument comesArticle 7, ofwhich paragraph 1stipulates the condition
for any modification of the terms of the Mandate and paragraph 2
provides the compromissory clause worded in broad comprehensive
terms as already noted above. It is therefore not unreasonable to infer
from this arrangement the varying degrees of importance which the
authors of the instrument attached in their minds to the different cate-
gories of obligations of the Mandatory and to conclude that the fact
that the compromissory provision with its all-embracing language
comes at the end, was intended to apply to al1obligations undertaken
by the Mandatory and not merely to those under Article 5, thus further
confirming the comprehensive scope and purport of Article 7, para-
graph 2, as to"any dispute whatever ... relating to the interpretation or

the application of the provisions of the Mandate".
Itwill also be recalled that the possession of this legal right or interest
by the Applicants is the basis of the Court's findingin the 1962Judgment
that the dispute is one envisaged within the purport of Article 7, to
establish its jurisdiction. After recalling thele of construction based
upon the natural and ordinary meaning of a provision and referring
to the provisions of Article 7 of the Mandate, which mentions "any
dispute whatever" arising between the Mandatory and another Member
of the League of Nations "relating to the interpretation or the application
of the provisions of the Mandate", the Court said:

"The language used is broad, clear and precise: it gives rise to
no ambiguity and it permits of no exception. It refers to any dispute
whatever relating not to any one particular provision or provisions,
but to 'the provisions7 of the Mandate, obviously meaning al1 or
any provisions, whether they relate to substantive obligations of
the Mandatory toward the inhabitants of the Territory or toward

the other Members of the League or to its obligation to submit to
supervision by the League under Article 6 or to protection under
Article 7 itself." (I.C.J. Reports 1962, p. 343.)

In fact earlier the Advisory Opinion of 1950 by emphasizing simul-
taneously "the essentially international character of the functions which
had been entrusted to the Union of South Africa" and the fact that
any Member of the League of Nations could, according to Article 7
of the Mandate, submit to the Permanent Court of International Justice
any dispute with the Union Government relating to the interpretation
or the application of the provisions of the Mandate, undoubtedly
implied the existence of a legal right ornterest of the League Members
in the performance of the Mandate. Even the two judges who alone

220 SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS. WELLINGTON KOO) 222
et de résider dans ledit territoire dans le but d'exercer leur ministère.

Après l'énonciation de ces obligations de fond du Mandataire vient
l'article 6qui a trait ses obligations de procédure - envoi des rapports
annuels satisfaisant le Conseil, etc.la fin de l'acte de Mandat se trouve
l'article, dont lepremier alinéaindique à quelle condition lesdispositions
du Mandat peuvent êtremodifiéeset dont le deuxième alinéacontient la
clause compromissoire, libellée en termes larges et généraux, commeje
l'ai déjànoté. Il n'est donc pas déraisonnable de déduire de cette pré-
sentation l'importance que les auteurs du Mandat ont attachée aux
différentes catégories d'obligations s'imposant au Mandataire et de

conclure que, si la clause compromissoire avec son libellétrès général
vient en dernier, c'est parce qu'elle devait, dans l'intention des auteurs,
s'appliquer à toutes les obligations incombant au Mandataire et non
pas simplement aux obligations visées à l'article 5; cela confirme encore
la vaste portée et le but généraldu membre de phrase ((tout dzfférend,
quelqu'ilsoit ..relatifà l'interprétation oà l'application des dispositions
du Mandat ))qui figure au deuxième alinéa de l'article7.
On se souviendra également que la constatation faite par la Cour

dans l'arrêtde 1962 pour établir sa compétence et selon laquelle le
différend est de ceux auxquels s'applique l'article 7 repose sur le fait
que les demandeurs possèdent le droit ou intérêtjuridiquedont il s'agit.
Après avoir rappelé la règle d'interprétation fondée sur le sens naturel
et ordinaire d'une disposition et s'être référée àl'article 7 du Mandat,
qui mentionne (tout différend, quel qu'il soit1qui viendrait à s'élever
entre le Mandataire et un autre Membre de la Société desNations et
serait ((relatif l'interprétation ou à l'application des dispositions du
Mandat ))la Cour a déclaré :

((Lestermes employéssont larges, clairs et précis; ils ne donnent
lieu à aucune ambiguïté et n'autorisent aucune exception. Ils se
réfèrent à tout différend, quel qu'il soit, relatif non pasà une ou

plusieurs dispositions particulières mais ((aux dispositions » du
Mandat, entendant par là, de toute évidence, l'ensemble ou une
quelconque de ces dispositions, qu'elles aient trait aux obligations
de fond du Mandataire à l'égard deshabitants du territoire ou à
l'égard desautres Membres de la Société desNations ou encore
à l'obligation du Mandataire de se soumettre à la surveillance de la
Société desNations aux termes de l'article 6 ou à la protection
prévuepar l'article7 même. ))(C.I.J. Recueil 1962, p. 343.)

En réalité il estindubitable que l'avis consultatif de 1950,en soulignant
en mêmetemps «le caractère essentiellement international des fonctions
dont étaitchargée l'Union sud-africaine))et le fait quetout Etat Membre
dela Société des Nations pouvait, conformément à l'article 7 du Mandat,

porter devant la Cour permanente de Justice internationale tout diffé-
rend l'opposant au Gouvernement de l'Union relatif à l'interprétation
ou à l'application des dispositions du Mandat, reconnaissait déjà impli-
citement l'existence d'un droit ou intérêtjuridique des Membres de la
Société desNations à l'exécutiondu Mandat. Mêmeles deux juges qui,

220dissented with the Opinion of 1950 on the question of transfer of the
League's supervisory functions to the General Assembly of the United
Nations, affirmed the possession of a legal interest by the members of
the League of Nations in the observance of the obligations of the
Mandatory. Thus Sir Arnold (now Lord) McNair stated:

"Although there is no longer any League to supervise the exercise
of the Mandate, it would be an error to think that there is no
control over the Mandatory. Every State which was a Member of
the League at the time of its dissolution still has a legal interest
in the proper exercise of the Mandate. The Mandate provides
two kinds of machinery for its supervision-judicial, by means of
the right of any Member of the League under Article 7 to bring
the Mandatory compulsorily before the Permanent Court, and
administrative, bymeans of annual reports and their examination
by the Permanent Mandates Commission of the League." (I.C.J.
Reports, 1950, p. 158.)

Judge Read, in his separate opinion appended to the same Advisory
Opinion of 1950, put the matter of the legal rights of the members of
the League even more strongly. He stated:
"As a result of the foregoing considerations, it is possible to
summarize the position, as regards the international status of

South-West Africa and the international obligations of the Union
arising therefrom, after the termination of the existence of the
League :
First: the Mandate survived, together with al1 of the essential
and substantive obligations of the Union.
Second: the legal rights and interests of the Members of the

League, in respect of the Mandate, survived with oneimportant
exception-in the case of Members that did not become parties
to the Statute of this Court, their right to implead the Union
before the Permanent Court lapsed." (Italics added.) (Ibid.,
p. 169.)

It is also to be noted that the resolution of the Assembly of the League
of Nations on mandates adopted on 18 April 1946 at its final session

before dissolution, corroborates the above finding. As it will be recalled,
the final paragraph of this resolution reads:

"4. Takes note of the expressed intentions of the Members of
the League now administering territories under mandate to continue
to administer them for the well-being and development of the
peoples concerned in accordance with the obligations contained
in the respective Mandates, until other arrangements have been

221 SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS. WELLINGTON KOO) 223

seuls, se sont désolidarisésde l'avis de 1950 sur la question du transfert
des fonctions de surveillance de la Société desNations à l'Assemblée
générale desNations Unies ont affirméque les Etats Membres de la
SociétédesNations avaient un intérêtjuridiqueau respect des obligations

du Mandataire. Ainsi, sir Arnold McNair (aujourd'hui lord McNair)
a déclaré:
«Bien qu'il n'existe plus de Société desNations pour surveiller
l'exercice du Mandat, ce serait une erreur de croire que le Manda-
taire n'est soumis à aucun contrôle. Tous les Etats qui faisaient
partie de la Société desNations à l'époque desa dissolution ont

encore un intérêjturidique à ce que le Mandat soit exercécomme il
convient. Le Mandat prévoit, pour cette surveillance, deux sortes
de mécanismes, un mécanisme judiciaire, résultant du droit que
l'article 7 réservàtout Membre de la Société desNations de citer
obligatoirement le Mandataire devant la Cour permanente, et un
mécanisme administratif, comprenant des rapports annuels et I'exa-
men de ces derniers par la Commission permanente des Mandats
de la Société des Nations.»(C.I.J. Recueil 1950, p. 158.)

M. Read, dans son opinion individuellejointe au mêmeavis consul-
tatif de 1950, a insisté davantage encore sur la question des droits des
Membres de la Société des Nations.11a dit:

((A partir des considérations qui précèdent, il est possible de
résumer la situation qui a suivi la dissolution de la Société des
Nations en ce qui est du Statut international du Sud-Ouest africain
et des obligations internationales de l'union qui en découlent:

En premier lieu, le Mandat a subsisté avec l'ensemble des obli-
gations essentielles et positives deUnion.

En second lieu, les droits et intérêtsjuridiques des Membresde
la Société desNations en matière de Mandat ont subsisté
à une exception importante près - dans le cas des Membres
qui ne sont pas devenus parties au Statut de la Cour leur droit
d'intenter une action contre l'Union devant la Cour perma-
nente est devenu caduc. » (Les italiques sont de nous, ibid.,
p. 169.)

Il convient également de noter que la résolution de l'Assembléede
la Société desNations sur les Mandats adoptée le 18 avril 1946,lors de
la dernière session qui a précédéla dissolution, corrobore la conclusion
ci-dessus. On se souviendra que le dernier paragraphe de cette résolu-
tion est libellé comme suit:

((4.Note que les Membres de la Sociétéadministrant actuelle-
ment des territoires sous Mandat ont exprimé leur intention de
continuer à les administrer, en vue du bien-êtreet du développe-
ment des peuples intéressés, conformément aux obligations con-
tenues dans les divers Mandats, jusqu'à ce que de nouveaux agreed between the United Nations and the respective mandatory
Powers."
The "expressed intentions" evidently refer to the officia1declarations
made by the representatives of the various mandatory Powers at the
meetings of the Assembly, 9-13April 1946.It is unnecessary to reproduce

them here, since they were fully cited in the text of the 1962Judgment.
Sufficeit to say that they were al1of the nature of a pledge to continue
to administer the respective mandated territories in accordance with
their international obligations and with the spirit of the respective
mandates.

This League session and the resolution it passed on the mandates
has more than ordinary meaning and significancewith reference to the
question now under consideration. In the first place the Council of
the League which normally would, as its proper function, deal with the
question of the mandates held no meeting for the purpose and instead
"with the concurrence of al1 the members of the Council which are
represented at its present session joined the Assembly" in deciding
"that, so far as required, it will, during the present session, assume
the functions falling within the competence of the Council". This
would seem to confirm that the right to ensure the performance of the
mandate obligations by the mandatory Powers had always been under-

stood to be shared by the Assembly. Secondly, the pledges of the various
mandatory Powers to continue to administer their respective mandates
in accordance with the obligations stipulated thereunder as far as
possible were in effect made not so much to the Assembly as a body as
to the member States. For while the latter were meeting collectively
as the Assembly, it was the last time they assumed this character. The
dissolution of the League of Nations was by its own resolution to
take effect the day following and with it the Assembly, as well as the
Council and the Permanent Mandates Commission, equally disappeared
for good. If the pledges were to serve any purpose at al1as to ensure
the observance of the Mandates by the mandatory Powers, they must
have been, and were in fact, intended to be addressed more effectively
to the individual member States, thereby confirming once more the
possession by the latter of a substantive right or legal interest in the
mandate performance in al1cases.

Indeed. on the whole question of the existence of a legal interest of

each Member of the League of Nations in the mandates the analysis
and conclusion of Judge Read in connection with the Court's Advisory
Opinion in 1950, to which some reference has just been made above,
are significant and illuminating. He divided the mandate obligations
into three classes.
"The first, and the most important, were obligations designed
to secure and protect the well-being of the inhabitants. They did
not enure to the benefit of the Members of the League, although SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS.WELLINGTON KOO) 224

arrangements soient pris entre les Nations Unies et les diverses
Puissances mandataires. 1)

Le membre de phrase cont exprimé leur intention ))évoque mani-
festement les déclarations officielles faites par les représentants des
diverses Puissances mandataires aux séances de l'Assembléequi ont
eu lieu du 9 au 13 avril 1946. Il n'est pas nécessaire de les reproduire
ici, car elles ont été citées intégralemetans le texte de l'arrêtde 1962.
Qu'il suffise de dire qu'elles se présentaient toutes comme des engage-
ments à continuer d'administrer les différentsterritoires sous Mandat
conformément aux obligations internationales des Mandataires et
dans l'esprit des Mandats.

Cette sessionde la SociétédesNations et la résolution qu'ellea adoptée
sur les Mandats ont un sens et une importance exceptionnels en ce qui
concerne la question qui nous occupe. En premier lieu, il faut noter
que le Conseil, qui normalement, comme c'était son rôle, aurait dû
s'occuper de la question des Mandats, n'a pas tenu de réunion à cette
fin; au lieu de cela«l'Assembléeavec l'assentiment de tous les membres
du Conseil représentés à la présente session» a décidéque ((pour autant
qu'il sera nécessaire, elle assumera, durant la présente session, toutes

les fonctions rentrant dans la compétencedu Conseil ».Cela semblerait
confirmer qu'il avait toujours été admisque l'Assembléepartageait le
droit de veillerà l'exécution des obligations des Mandats par les Puis-
sances mandataires. En second lieu, l'engagement des diverses Puis-
sances mandataires à continuer d'administrer leurs Mandats confor-
mément aux obligations stipulées dans lesdits Mandats dans toute la
mesure du possible a étépris moins àl'égard del'Assemblée entant qu'or-
gane qu'à l'égard desEtats Membres eux-mêmes.En effet, si ces der-
niers se réunissaient collectivement en tant qu'Assemblée, c'étaitla

dernière fois que cela se produisait. La dissolution de la Société des
Nations devait, selon sa propre résolution, prendre effet le lendemain
et, de ce fait, l'Assembléeaussi bien que le Conseil et la Commission
permanente des Mandats disparaissaient définitivement. Si les engage-
ments devaient permettre en quoi que ce soit d'assurer le respect des
Mandats par les Puissances mandataires, c'est qu'ils devaient avoir été
pris - ci qui est conforme à la réalit- surtout à l'égard desEtats
Membres à titre individuel, et cela confirme une fois encore que ces

derniers possédaient un droit ou intérêtjuridique à l'exécution des
Mandats dans tous les cas.
En ce qui concerne la question même de l'existence d'un intérêt
juridique chez chacun des Etats Membres de la Sociétédes Nations à
l'égard desMandats, l'analyse et la conclusion que M. Read a formu-
lées à propos de l'avis consultatif de 1950 et qui ont été évoquées plus
haut sont importantes et éclairent le problème. M. Read a classéen
trois catégories les obligations imposées dans les Mandats.

«Les premières et les plus importantes étaient les obligations
tendant à assurer et à défendre le bien-êtredes habitants. Elles
ne bénéficiaientpas aux Membres de la Société desNations, en- each and every Member had a legal right to insist upon their
discharge. The most important, the corner-stone of the mandates
system, was 'the principle that the well-being and development
of such peoples forms a sacred trust of civilization' a principle
which was established in paragraph 1 of Article 22 of the Covenant.

The second kind of obligation comprised those which were due
to, and enure to, the benefit of the Members of the League: e.g.,
in respect of missionaries and nationals.

The third kind of obligation comprised the legal duties which
were concerned with the supervision and enforcement of the first
and second. There was the compulsory jurisdiction of the Permanent
Court, established by Article 7 of the Mandate Agreement; and
there was the system of reports, accountability, supervision and
modification, under paragraphs 7, 8 and 9 of Article 22 and Arti-
cles 6 and 7 of the Mandate Agreement. ...
These obligations have one point in common. Each Member of
the League had a legal interest, vis-à-vis the Mandatory Power,

in matters 'relating to the interpretation or the application of
the provisions of the Mandate'; and had a legal right to assert
itsinterest against the Union by invoking thecompulsory jurisdiction
of the Permanent Court (Article 7 of the Mandate Agreement).
Further, each member, at the time of dissolution, had substantive
legal rights against the Union in respect of the Mandate." (I.C.J.
Reports 1950, pp. 164-165.)
A little further on hesaid that he regarded "as significant the survival
of the rights and legal interests of the Members of the League"; with
regard to this point, he observed:

".. .the same reasons whichjustify the conclusion that the Mandate
and the obligations of the Union were not brought to an end by
the dissolution of the League, lead inevitably to the conclusion
that the legal rights and interests of the Members, under the Man-
date, survived. If the obligations of thenion, one of the 'Manda-
tories on behalf of the Leagile', continued, the legal rights and
interests of the Members of the League must, by parity of reasoning,
have been maintained." (Ibid., p. 166.)

Thus from the foregoing account of the origin of the basic concept
of the mandates system, the background of events and circumstances
which contributed to its establishment, the history of the drafting and
incorporation of the adjudication clause in al1the 'B'and 'C'mandates
and the meaning and purport of the 18 April 1946 resolution of the

last session of the Assembly of the League of Nations as well as the
broad, comprehensive Ianguage of the provisions of Article 7 (2) of
the Mandate under consideration (and indeed of similar articles in
the other mandates) al1point to the existence of a common intention of
223 SUD-OUESTAFRICAIN (OP.DISS. WELLINGTONKOO) 225

core que chacun des Membres individuellement eût le droit d'en
exiger l'exécution.La plus importante, la pierre d'angle du système
des Mandats, étaitle principe selonlequel cle bien-être etle dévelop-
pement de ces peuples forment une mission sacréede civilisation »,
principe qui se trouvait posé au paragraphe 1 de l'article 22 du
Pacte.
Le second type d'obligations comprenait celles qui étaient dues

aux Membres de la Société desNations, et s'appliquaient à leur
bénéfice, à savoir les obligations relatives aux missionnaires et
aux ressortissants nationaux.
Le troisième type d'obligations comprenait les devoirs juridi-
ques relatifsà la surveillance et à l'application du premier et du
second. On y trouvait la juridiction obligatoire de la Cour per-
manente, établiepar l'article 7 de l'Accord de Mandat; on y trou-
vait aussi le régime derapports, de responsabilité, de surveillance
et de modification, issu des paragraphes 7, 8 et 9 de l'article 22

et des articles 6 et7 de l'Accord de Mandat ...
Ces obligations ont un point commun. Chacun des Membres
de la Société desNations est juridiquement intéressé,vis-à-vis de la
Puissance mandataire, aux questions crelatives à l'interprétation
ou à I'application des dispositions du Mandat ))et jouit du droit
d'affirmer son intérêt contre l'Union en invoquant la juridiction
obligatoire de la Cour permanente (article 7 de l'Accord deMandat).
De plus, chaque Membre jouit, en matière de Mandat, à l'époque

de la dissolution, de droits positifà l'encontre de l'Union. »(C.I.J.
Recueil 1950, p. 164-165.)
Un peu plus loin, M. Read a dit qu'il considérait commeimportante
((la survie des droits et intérêtsjuridiques des Membres de la Société
des Nations »; sur ce point, il a fait observer:

«les mêmesmotifs qui font de la conclusion suivant laquelle le
Mandat et les obligations de l'Union n'ont pas pris fin du fait de
la dissolution de la Société desNations amènent nécessairement
à conclure que les droits et intérêtsjuridiques que les Membres
tiennent du Mandat subsistent. Si les obligations de l'Union -

un des cMandataires au nom de la Société desNations 1)- con-
tinuent d'exister, les droits et intérêtsjuridiques des Membres
de la Société desNations, doivent, par analogie, avoir étémain-
tenus.))(Ihid., p. 166.)
Ainsi, l'exposé qui précèdesur l'origine du concept fondamental
qu'est le système des Mandats, les événements et les circonstances

qui ont marquésa création,l'historique de la rédaction et de l'insertion
de la clause juridictionnelle dans tous les Mandats B et C, le sens et
la portéede la résolutiondu 18 avril 1946adoptée à la dernière session
de l'Assembléede la Société desNations, aussi bien que le libellé large
et généraldu deuxième alinéa de l'article 7 du Mandat considéré -
comme d'ailleurs le libellé des articles analogues contenus dans les
autres Mandats -, tous ces élémentsindiquent l'existence chez les

223 the authors of the mandate system and the parties to the mandate
agreements to make it work and to ensure its effective working with
the necessary guarantees in the form of administrative supervision and
control by the Council of the League and judicial protection by the
Permanent Court through the exercise by Members of the League of
their legal right or interest in the performance of the mandates.

It has been maintained that the existence ofsuch a common intention
was most unlikely when account is taken of the state of development
of the concept and institution of compulsory jurisdiction in the period
of the early twenties and the general reluctance to assume such an
extensive and onerous obligation. But it should be noted that the

whole mandates system was at the time a new and novel idea. It was
contemporary with the incorporation of the principle of international
protection of labour in the Constitution of the International Labour
Organisation and a series of conventions which followed, recognizing
a legal interest of member States and conferring upon them "the right
to file a complaint with the International Labour Office" against any
other Member for "effective observance of any convention which both
have ratified". (Articles 26, 411 and 423 of the said Constitution of
the International Labour Organisation.) The minorities treaties con-
cluded during the same period for the protection of minority populations
in the newly created States and the newly transferred territories re-
cognized the legal interest of a Member of the Council of the League
of Nations in the observance of these treaties and obligated the State
responsible for the protection to accept compulsory jurisdiction of the
Permanent Court of International Justice in a dispute brought before
it by the other party thereto. (Hudson, International Legislation, Vol. 1,

pp. 312-319.)

The basis concept of the mandates system was strongly opposed by
the prospective mandatories at first but it was insisted upon with equal
determination more particularly by its primary author, President Wilson.
However, once the principle was agreed upon, al1 parties appeared
to be in earnest to make the operation of the system an assured success
with its multiple guarantees for the observance of the mandate obliga-
tions. It would be incompatible with the principle of good faith to
suppose that the mandatory Powers (including the Respondent) having
voluntarily accepted the system did not intend really to CO-operatefor
its complete success by respecting the principle of judicial protection
embodied in it. That the opposite was the situation is evidenced by the
fact that neither the authors of the draft mandates nor the mandatory
Powers in approving the respective mandate agreements raised any

objection to the plain, all-embracing language of the adjudication
clause. On the contrary, the fact of uniform absence of objection on
their part to this language of the clause only makes it clear beyond
doubtthat they al1accepted the implicit principle as a matter of course-
asan inherently requisite feature of the mandates system itself. SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS. WELLINGTON KOO) 226

auteurs du système des Mandats et les parties aux accords de Mandat
d'une intention commune de voir fonctionner le régime et d'assurer
sa bonne marche grâce à l'institution des garanties nécessair-s sur-
veillance et contrôle administratifs exercéspar le Conseil, protection

judiciaire dela Cour permanente au moyen de l'exercicepar les Membres
de la Société desNations de leur droit ou intérêt juridiqueau regard
de l'exécution desMandats.
On a soutenu que l'existence d'une telle intention commune était
tout à fait improbable vu l'étatde développementde la notion et de
l'institution de la juridiction obligatoire aux alentours de 1920et vu la
répugnanceque l'on éprouvaiten général à souscrireà une obligation
aussi étendueet aussi lourde. Mais il convient de noter qu'à cette époque
le systèmedes Mandats étaitune idée nouvelleet originale. Elle était
contemporaine de l'incorporation du principe de la protection inter-
nationale du travail dans la Constitution de l'organisation interna-

tionale du Travail et une série de conventions postérieuresqui ont re-
connu aux Etats Membres un intérêt juridiqueet leur ont conféréle
droit de ((déposerune plainte au Bureau international du Travail)con-
tre un autre Membre qui ((n'assurerait pas d'une manière satisfaisante
l'exécutiond'une convention que l'un et l'autre auraient ratifiée))(ar-
ticles 26, 411 et 423 de la Constitution de l'organisation internationale
du Travail). Les traitésde minorités concluspendant la même période
pour assurer la protection des populations minoritaires dans les Etats
nouvellement créés et lesterritoires nouvellement transférés reconnais-
saient l'intérêt juridiquedes Etats membres du Conseil de la Société
des Nations à ce que ces traitésfussent respectés et obligeaient1'Etat
responsable de la protection à accepter la juridiction obligatoire de la

Cour permanente de Justice internationale dans un différend porté
devant elle par l'autre partie intéressée(Hudson, InternationalLegisla-
tion, vol. 1,p. 312-319).
Au début, les Mandataires éventuels se sont violemment opposés
à la notion fondamentale que représentait le système des Mandats
mais les tenants du systèmeet plus particulièrement son promoteur, le
président Wilson, ont insisté avec une détermination égalepour qu'il
fût adopté.Mais, une fois le principe admis, toutes les parties ont semblé
sérieusement décidées à faire en sorte que le systèmefonctionne bien
grâce aux multiples rouages destinés à garantir l'exécution des obli-
gations prévuesdans le Mandat. Il serait incompatible avec le principe

de la bonne foi de supposer que les Puissances mandataires qui ont
volontairement acceptéle système, y compris le défendeur, n'avaient
pas l'intention de coopérer réellementpour assurer son plein succès
en respectant le principe de la protection judiciaire qu'il comportait.
Que la situation ait ététout l'opposé,c'est ce que démontre le fait que
ni les auteurs des projets de Mandat ni les Puissances mandataires,
lorsqu'elles ont approuvéles accords de Mandat, n'ont élevéd'objection
à l'encontre du libellé clairet généralde la clause juridictionnelle. Au
contraire, l'absence detoute critique de leur part quant au libelléde la
clause prouve à l'évidenceque tous ont acceptéle principe implicite On this point of ascertaining the common intention of the parties
to a legal instrument, itis pertinent to cite here what Judge Lauterpacht
wrote:
"Undoubtedly the treaty is the law of the adjudicating agencies.
But, at the same time, the treaty is law; it is part of international
law. As such it knows of no gaps. The completeness of the law
when administered by legal tribunals is a fundamental-the most
fundamental-rule not only of customary but also of conventional
international law. It is possible for the parties to adopt no regulation
at all. They may expressly disclaim any intention of regulating

the particular subject-matter. But, in the absence of such explicit
precaution, once they have clothed in the form of a legal rule and
once they have found themselves in a position in which that subject-
matter is legitimately within the competence of a legal tribunal, the
latteris bound andentitled to assume an effectivecommon intention
of the parties and to decide the issue. That common intention is
no mere fiction."

After citing the Advisory Opinion of the Permanent Court of Inter-
national Justice on the Interpretation of the Conventionof1919 concerning
Employment of Women during the Night and the Advisory Opinion

of the same Court on the Competenceoj-theInternationalLabour Organi-
sation to Regulate Incidentally the Persona1 Work of the Employer, he
continued :
"The Court admitted that the treaty in question did not contain
a provision expressly conferring upon the Organisation jurisdiction
in such a very special case as the present. But it gave an affirmative
answer to the question put to it for the reason thatsuch competence
of the International Labour Organisation was essential to the
accomplishment of the purpose of the Organisation as revealed in
the constitution.

In these and similar cases the common intention in relation
to the particular case must be derived from the common intention
of the Treaty as a whole-from its policy,its object and itsspirit.. ."
("Restrictive Interpretation and the Principle of Effectiveness in
the Interpretation of Treaties", in British Year Book ofInternational
Law, 1949,Vol. XXVI, pp. 48-85, at p. 79.)
The principle stressed in the above passage is a fortiori applicable
to the point of issue under consideration. There is no explicit provision
wanting. On the contrary, Article 7 (2) of the Mandate for South West

Africa stands out not only to sanction the right of action in the case
of the Applicants as Members of the League of Nations but also to
bear witness to the implicit existence of a common intention of the
parties to the mandate agreement to recognize a legal right or interest
225 SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS. WELLINGTON KOO) 227

comme allant de soi, qu'ils y ont vu une caractéristique inhérente au
système des Mandats lui-même.
Sur le problème de la recherche de l'intention commune des parties

à un instrument juridique, il convient de citer ce qu'a écritsir Hersch
Lauterpacht :
((11est incontestable que le traité est la loi des instances chargées
de juger. Mais en mêmetenps le traité est du droit; il fait partie

du droit international. En tant que tel, il est sans lacune. C'est
une règlefondamentale - la plus fondamentale - non seulement
du droit coutumier mais également du droit international con-
ventionnel que le droit forme un tout complet pour les tribunaux
qui doivent l'appliquer. Les parties peuvent n'adopter aucune règle.
Elles peuvent se défendre d'avoir eu l'intention de réglementer
une question particulière. Mais, si elles n'ont pas pris explicite-
ment la précaution de le dire, dèslors qu'elles ont donné à la ques-

tion la forme d'une règlejuridique et se sont trouvées dans une
situation telle que cette question relève légitimementde la com-
pétenced'un tribunal, celui-ci a l'obligation et le droit de supposer
une intention commune effective chez les parties et de trancher le
litige. Cette intention commune n'est pas une simple fiction. »

Après avoir citél'avis consultatif de la Cour permanente de Justice
internationale sur l'Interprétationde la Convention de 1919 concernant
le travail de nuit desfemmes et l'avis consultatif de la mêmeCour sur la
Compétence del'organisation internationale du Travailpour réglementer
accessoirement le travail personneldu patron, sir Hersch Lauterpacht
a poursuivi:

La Cour a admis que le traité en question ne contenait pas
de disposition conférant expressémentcompétence à l'organisation
dans un cas aussi particulier que le cas présent.Mais elle a répondu
affirmativement à la question qui lui était posée parce qu'elle

estimait qu'il était nécessaire que l'organisation internationale
du Travail ait cette compétence pour que le but de l'Organisation
tel qu'il est énoncédans la Constitution puisse êtreatteint.
Dans ces affaires comme dans des affaires analogues.2,'intention
commune doit êtredéduite de l'intention commune que l'on peut
dégager de l'ensemble du traité - de ses principes directeurs,
de son objet et de son esprit ..))(((RestrictiveInterpretation and
the Principle of Effectiveness in the Interpretation of Treaties)),

British Year Book of International Law, 1949, vol. XXVI, p. 79.)
Le principe énoncédans le passage ci-dessus s'applique à fortiori
au point litigieux qui nous occupe. Aucune disposition explicite ne fait
défaut. Au contraire, le deuxième alinéa del'article 7 du Mandat pour

le Sud-Ouest africain est là non seulement pour consacrer le droit des
demandeurs à se pourvoir devant la Cour, en tant que Membres de la
Sociétédes Nations, mais également pour attester que les parties à
l'accord de Mandat ont eu implicitement l'intention commune de re-
225of such Members in the observance of the mandate agreement by the
Respondent.
Moreover, while it may be true that acceptance of the concept of a
sacred trust of civilization in and of itself does not necessarily imply
more than a moral or humanitarian obligation to respect it, once this
concept is made the "corner-stone" of the mandates system and im-
plemented in the legal instruments based upon it such as Article 22
of the Covenant and Article 7 (2) of the Mandate Agreement for South
West Africa, full account must be taken of this fact in interpreting
the legal relations, the rights and obligations of the parties to these
instruments. Such a course does not mean, nor could be said to imply,
judicial legislation. It is only a legitimate application 'ofthe recognized
canons of interpretation, in order to give full effect, as regards the
Mandate, to "its policy, itsbject and its spirit".

In this connection it is also appropriate to recall what this Court

said of the Genocide Convention:
"In such a convention the contracting States do not have any
interests of their own; they merely have, one and all, a common
interest, namely the accomplishment of those high purposes which
are the raison d'êtreof the Convention. Consequently, in a con-
vention of this type one cannot speak of individual advantages
or disadvantages to States, or of the maintenance of a perfect

contractual balance between rights and duties. The high ideals
which inspired the Convention provide, by virtue of the common
will ofthe parties, thefoundation and measure of al1its provisions."
(I.C.J. Reports 1951, p. 23.)
The Mandate for South West Africa, like al1 other mandates, is
based upon the principles and provisions of the mandates system as
conceived by its authors and as subscribed to by al1 Members of the
League of Nations, including the Respondent, as parties to the Covenant,

which is a multilateral treaty. By their common will the high ideals
which inspired Article 22 of this treaty, provide "the foundation and
measure of al1its provisions".

The fact that only one case was brought to the Permanent Court of
International Justice by any Member of the League of Nations during
the 25 years of its existence under an adjudication clause similar to
Article 7 of the Mandate for South West Africa (Article 26 of the
Palestine Mandate) in respect of alleged injury to the material interests
of a national of the Applicant and that no recourse was ever made
to the Court to invoke its protection and ensure due observance by
the mandatory Power of its substantive obligations under a givenmandate
rowards the inhabitants of the mandated territory does not necessarily
prove that individual League Members had no legal right or interest
in such observance. As stated by Judge Read in his separate opinion

in 1950,when referring to the obligation of the Union of South Africa
226 SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS.WELLINGTON KOO) 228

connaître aux Membres de la Société desNations un droit ou intérêt
juridique au regard de l'exécution du Mandat par le défendeur.
En outre, s'il peut être vrai qu'admettre la notion d'une mission
sacrée de civilisation n'implique pas nécessairement en soi autre chose
qu'une obligation morale ou humanitaire, on n'en doit pas moins tenir
pleinement compte de ce que cette notion est devenue la ((pierre angu-
laire1du système des Mandats et de ce qu'elle est mise en Œuvre dans
les instruments juridiques qu'elle a inspirés comme l'article 22 du Pacte
et le deuxième alinéade l'article 7 de l'accord de Mandat pour le Sud-

Ouest africain, lorsqu'on interprète les rapports juridiques, les droits
et les obligations des parties à ces instruments. Cela ne signifie pas et
ne saurait impliquer que le juge fasse ainsi Œuvre de législateur. Ce
n'est qu'une application légitime des règlesd'interprétation reconnues,
afin de donner pleinement effet, en ce qui concerne le Mandat, à ((ses
principes directeurs, [à] son objet et [à] son esprit 11.
A ce sujet, il convient de rappeler ce qu'a ditla Cour actuelleà propos
de la convention sur le génocide:

«Dans une telle convention, les Etats contractants n'ont pas
d'intérêtspropres; ils ont seulement, tous et chacun, un intérêt
commun, celui de préserver les finssupérieures qui sont la raison
d'être dela convention. Il en résulte au'on ne saurait. Dour une
, L
convention de ce type, parler d'avantages ou de désavantages
individuels des Etats, non plus que d'un exact équilibrecontractuel
à maintenir entre les droits et les charges. La considération des
fins supérieuresdela convention est, en vertu de la volontécommune
des Parties, le fondement et la mesure de toutes les dispositions
qu'elle renferme. » (C.I.J. Recueil 1951, p. 23.)

Le Mandat pour le Sud-Ouest africain, comme tous les autres Man-
dats, est fondésur les principes et les dispositions du système desMan-
dats tel qu'il a étéconçu par ses auteurs et tel qu'y ont souscrit tous les
Membres de la Société desNations, y compris le défendeur, en tant
que parties au Pacte - lequel est un traité multilatéral. Par leur volonté
commune, les fins supérieures dont procède l'article 22 de ce traité

constituent ((lefondement et la mesure de toutes les dispositions qu'[il]
renferme 1).
Le fait qu'une seule espèce, concernant une prétendue atteinte aux
intérêts concretsd'un ressortissant, ait étéporté.: devant la Cour per-
manente de Justice internationale par un Membre de la Société des
Nations pendant les vingt-cinq années de l'existence de la Sociétéen
vertu d'une clausejuridictionnelle analogue àl'article 7 du Mandat pour
le Sud-Ouest africain (article 26 du Mandat pour la Palestine) et le fait

que l'on n'ait jamais recouru à la Cour pour invoquer sa protection et
assurer la bonne exécution par une Puissance mandataire des obliga-
tions de fond que lui imposait un Mandat donné à l'égard deshabitants
du territoire sous Mandat ne prouvent pas nécessairement que les Etats
Membres de la Société desNations n'avaient à titre individuel aucun
droit ou intérêt juridique au respect de ces obligations. Voici ce queto submit to the compulsory jurisdiction of this Court in the case of a
dispute relating to the interpretation or the application of the provisions
of the Mandate under the provisions of Article 7 of the mandate agree-
ment and Article 37 of the Statute, reinforced by Article 94 of the
charter:

"The importance of these provisions cannot be measured by
the frequency of their exercise. The very existence of a judicial
tribunal, clothed with compulsory jurisdiction, isenougli to ensure
respect for IegaI obligations." (I.C.J. Reports 1950, p. 169.)
The legal right or interest of the League Members in the performance
of the mandate obligations by the Mandatory has always existed though
it might appear to be latent. For so long as the conflict of views on
a given subject-matter betweeri the Council of the League of Nations

and the Mandatory, either as an ad hoc or as a regular member of it,
continued to be under discussion and the possibility of reaching an
eventual agreement remained, there was no occasion for any member
State to resort to judicial action under Article 7, paragraph 2, of tlie
Mandate. For example, the objection of the Mandates Commission to
the statement inthe preamble of a Frontier Agreement concluded between
the Union and Portugal relating to the boundary butween Portuguese
Angola and the inandated territory that "the Government of the Union
of South Africa, subject to theterms of theandate,possesses sovereignty
over the Territory of South West Africa" was raised at its meetings
every year in 1926, 1927, 1929 and 1930. After the Council adopted
resolutions on the basis of the Commission's reports acd no word of
acceptance came from the Mandatory Power, the Commission continued
to press for a reply. Finally, "the Union of South Africa, by a letter of
16 April 1930, stated its acceptance of the definition of the powers of
the Mandatory contained ir,the Reports ofthe Council". (I.C.J.Pleadings,
1950, p. 198.) However, if the Mandatory had persisted in its own view

on this question to the end even after the Council should have obtained
an advisory opinion of the Court confirrning the interpretation by the
Council as being in complete conformity with the Covenant and the
mandate agreement, there was no certainty that no member State of the
League of Nations, in the exercise of its substantive right or legal
interest in the performance of this Mandate, would have brought an
action in the Permanent Court to obtain a binding decision on the legal
question involved in the dispute with the Mandatory. The infrequency
of exercising this legal right ornterest does not in any sense prove its
non-existence.
Nor is it easy to appreciate the cogency or relevance of the argument
to the effect that if there werea necessity for judicial protection of the
sacred trust under the mandates system the same necessity must exist
under the trusteeship system, on the ground that the resolutions of the
United Nations General Assembly, although they can be adopted
without the concurrence of the administering authority are, when so SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS. WELLINGTON KOO) 229
M. Read a déclarédans son opinion individuelle de 1950, à propos de

l'obligation de l'Union sud-africaine de se soumettre à la juridiction
obligatoire de la Cour en cas de différend relatif à l'interprétation ou
à l'application des dispositions du Mandat, en vertu de l'article 7 de
l'accord de Mandat et de l'article 37 du Statut, renforcépar l'article 94
de la Charte:

((L'importance de ces dispositions ne peut êtremesurée à la
fréquence de leur application. L'existence mêmed'un tribunal re-
vêtu d'unecompétence obligatoire suffit à assurer le respect des
obligations juridiques.))(C.I.J. Recueil 1950, p. 169.)

Le droit ou intérêt juridique des Membresde la Sociétédes Nations
à l'exécutiondu Mandat par le Mandataire a toujours existé bien qu'il
puisse sembler latent. Tant que la divergence de vues sur un sujet donné
entre le Conseil de la Société desNations et le Mandataire - que celui-
ci y siégeât spécialementou comme membre ordinaire - continuait de
faire l'objet de discussions et tant que la possibilitéd'aboutir finalement
à un accord demeurait, il n'y avait pas lieu pour un Etat Membre de
recourir à l'action judiciaire prévue par l'article 7, deuxième alinéa,
du Mandat. C'est ninsi que la Commission permanente des Mandats
a soulevéchaque annéeen 1926, 1927,1929et 1930une objection contre

la déclaration qui figurait dans le préambule d'un accord entre l'Union
sud-africaine et le Portugal concernant la frontière entre l'Angola por-
tugais et le territoire sous Mandat et selon laquelle «le Gouvernement
de l'Union sud-africaine, sous réserve des dispositions [du] Mandat,
possède lasouverainetésur le territoire du Sud-Ouest africain 1).Comme
le Conseil avait adopté des résolutions sur la base des rapports de la
Commission et que la Puissance mandataire n'avait pas signifiéson
acceptation, la Commission a continué à demander instamment une
réponse. Finalement, ((l'Union sud-africaine, par lettre du 16 avril 1930,
a signifié qu'elle acceptait la définition des pouvoirs du Mandataire

contenue dans les rapports du Conseil x(C.I.J. Mémoires,1950, p. 198).
Toutefois, si le Mandataire avait persistédans son opinion, alors même
que le Conseil aurait obtenu de la Cour un avis consultatif confirmant
que son interprétation était tout à fait conforme au Pacte et à l'accord
de Mandat, il n'aurait pas été impossible qu'un Etat Membre de la
Société desNations, invoquant son droit ou intérêt juridique à I'exé-
cution de ce Mandat, intentât une action devant la Cour permanente
pour obtenir une décision obligatoire sur la question juridique qu'im-
pliquait le différend avecle Mandataire. Que ce droit ou intérêtjuridique

n'ait étéexercéque très rarement ne prouve nullement qu'il n'ait pas
existé.
Il n'est pas non plus aisé d'apprécier le bien-fondé ou la pertinence
de l'argument selon lequel, s'il était nécessaire d'assurer la protection
judiciaire de la mission sacréede civilisation dans le système des Man-
dats, il serait également nécessairede le faire dans le régimede tutelle;
on dit en effet que si les résolutions de l'Assemblée généralees Nations
Unies peuvent êtreadoptéessans l'adhésionde l'autorité administrante, adopted, only recommendatory in character and have no binding force
and yet the jurisdictional clause embodying the right of action of in-
dividual member States to invoke the Court is wholly absent from
certaintrusteeshipagreements falling within the functions of the General
Assembly.

Manifestly this argument underestimates the significance of the
differences in the basic scheme of supervision and control relating to
the implementation of the trusteeship agreements as compared with
that which was embodied in the mandates system. It is not necessary
to enumerate them here; it sufficesto note briefly that under Article 18
of the United Nations Charter decisions of the General Assembly on
important questions are made simply by a two-thirds majority in con-
trast with the requirement of a unanimous vote in the Council of the

League of Nations, as also in the Assembly, including, in any matter
relating to a Mandate, the affirmative or non-dissent vote of the manda-
tory Power, particularly, in the Council, either as a regular or ad hoc
member. Although it is true that the resolutions of the General Assembly
relating to trust territories as in many other matters are usually passed
in the form of recommendations, the latter are far from being only of
the character of a pious wish or moral persuasion. Pursuant to Article
88 of the Charter the Trusteeship Council formulates a questionnaire
on the political, economic, social and educational advancement of the
inhabitants of each trust territory and, in the language of this provision:

"the administering authority for each trust territory within the
competence of the General Assembly shall make an annual report
to the General Assembly upon the basis of such questionnaire".
In the individual trusteeship agreements it is either expressly stipulated,
as, for example, by Article 16 of the Trusteeship Agreement for the
Territory of Togoland under British Administration, of 13 December

1946,that :
"The Administering Authority shall make to the General As-
sembly of the United Nations, an annual report on the basis of a
questionnaire drawn up by the Trusteeship Council in accordance
with Article 88 of the United Nations Charter. Such reports shall
include information concerning the measures taken to give efect to
suggestions andrecommendations of tlze General Assembly and the
TrusteeshipCouncil. .." (Italics added.)

Or it is implicitlyprovided, as in Article 8 of the Trusteeship Agreement
for the Territory of New Guinea of 13 December 1946:

"The Administering Authority undertakes, in the discharge of

its obligations under Article 3 of this agreement [undertaking to
administer the Territory in accordance with the provisions of the
228 SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS.WELLINGTON KOO) 230
elles n'ont, dans ce cas, que le caractère de recommandations et sont
dépourvues de force obligatoire, ce qui n'empêcheque la clause juri-
dictionnelle consacrant le droit des Etats Membres d'intenter, à titre

individuel, une action devant la Cour est totalement absente de certains
accords de tutelle qui relèvent de la compétence de l'Assemblée
générale.
Il est évident que cet argument sous-estime l'importance des diffé-
rences entre le mécanismefondamental de surveillance et de contrôle
concernant l'application des accords de tutelle et le mécanismeprévu
dans le système desMandats. Il n'est pas nécessaired'énumérerici ces
différences;il suffit de rappeler brièvementque, en vertu de l'article
de la Charte des Nations Unies, les décisionsde l'Assemblée générale
sur les questions importantes sont prises simplement à la majorité des

deux tiers, alors qu'un vote unanime était requis au Conseil comme à
l'Assembléede la Société desNations et que, pour toute question
ayant trait à un Mandat, le vote favorable ou non défavorable de la
Puissances mandataire était nécessaire, en particulier au Conseil où
elle siégeaitsoit spécialementsoit comme membre ordinaire. Bien que
les résolutions de l'Assemblée généralc eoncernant les territoires sous
tutelle, comme d'ailleurs nombre d'autres domaines, se présententgéné-
ralement sous forme de recommandations, elles sont loin d'avoir sim-
plement le caractère de vŒux pieux ou de directives morales. En appli-
cation de l'article 88 de la Charte, le Conseil de tutelle établit un ques-
tionnaire portant sur les progrès deshabitants de chaque territoire sous
tutelle dans les domaines politique, économique et social et dans celui

de l'instruction et, pour reprendre les termes de cette disposition:
«l'autorité chargée de l'administration de chaque territoire sous
tutelle relevant de la compétencede l'Assembléegénérale adresse
à celle-ci un rapport annuel fondé sur le questionnaire précité)).

Dans les différentsaccords de tutelle, il est expressément stipulédans
certains cas, par exemple à l'article 16 de l'accord de tutelle pour le
territoire du Togo sous administration britannique en date du 13 dé-
cembre 1946:

((L'autorité chargée de l'administration présentera à 1'Assem-
blée générale deN s ations Unies un rapport annuel fondé sur un
questionnaire établi par le Conseil de tutelle, conformément à
l'article 88 de la Charte des Nations Unies. Ce rapport comportera
des donnéessur les mesures prises en vue de donner suite aux avis
et recommandationsprésentép sar l'Assembléegénérale et le Conseil
de tutelle.» (Les italiques sont de nous.)

Dans d'autres cas, il est implicitement prévu, comme à l'article 8 de
l'accord de tutelle pour le territoire de la Nouvelle-Guinéeen date du
13 décembre 1946:
((Dans l'exécution desobligations qui lui incombent aux termes
de l'article 3 du présentaccord, l'autorité chargée de l'administra-

tion s'engage[engagement à administrer le territoire conformément
228 Charter and in such a manner as to achieve, in the Territory, the
basic objectives of the International Trusteeship System which
are setforth in Article 76 of the Charter]:
1. To CO-operatewith the Trusteeship Council in the discharge
of al1the Council'sfunctions under Articles 87 and 88 of the Char-
ter;. .."
In vractice the General Assemblv also kee~s a-close watch and calls
upon each administering authority concerned through the Trusteeship
Council to indicate in its annual report what measures it has adopted
to implement the suggestions and recommendations of the General
Assembly and the Trusteeship Council. For example, resolution 323(IV)
of the General Assembly of 15November 1949resolves:

"6. To ask the Trusteeship Council to include in its annual
reports to the General Assembly a special section dealing with the
implementation by the administering authorities of its recommen-
dations concerning the improvement of social conditions in Trust
Territories, the abolition of corporal punishment and, in particular,
the action taken in pursuance of the recommendations contained
in paragraph 5 [abolition of al1discriminatory laws or practices]."
Again, paragraph 7 of General Assembly resolution 324 (IV) of 15
November 1949recommends to the Trusteeship Council-
"to include in its annual reports to the General Assembly a special

section on the manner in which the Administering Authorities
have implemented resolution 36(III) on the provision of information
concerning the United Nations to the peoples of the Trust Terri-
tories, resolution 83 (IV) on educational advancement in Trust
Territories, free primary education and the training of indigenous
teachers, and resolution 110 (V) on higher education in Trust
Territories in Africa and, generally, on the implementation of the
Council's recommendations in the field of education".

The few illustrations given above suffice to show that in matters
relating to the observance of the Charter and the obligations under
the trusteeship agreements the resolutions of the General Assembly,
though put in the form of recomrnendations, constitute general di-
rectives which the respective administering authorities are expected to
observe and implement in practice. Whether these recommendations
are to be considered as embodying legal obligations or quasi-legal
obligations,is of littlepractical importin viewofthe power and authority

of the General Assembly under the Charter in general and under the
trusteeship system in particular to exercise its supervisory functions
over the administration of the trust territories other than those placed
under the supervision of the Security Council. In al1 events, they are
expected to be observed and implemented by the administering au-
thorities concerned. Ifthe latter should fail to implement a recommen-
dation, they must give satisfactory reasons, failing which the General SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS. WELLINGTON KOO) 231
aux dispositions de la Charte et de façon à réaliser, dans le terri-
toire, les fins essentielles du régime international de tutelle qui

sont énoncées à l'article 76 de la Charte]:
1.A coopéreravec le Conseil de tutelle dans l'exercice de toutes
les fonctions de ce Conseil prévues aux articles 87 et 88 de la
Charte;...»
En pratique, l'Assembléegénérale surveillede près chaque autorité
administrante et lui demande, par l'intermédiairedu Conseil de tutelle,
d'indiquer dans son rapport annuel quelles sont les mesures qu'elle a
adoptéespour mettre en Œuvreles suggestions et les recommandations
de l'Assembléegénéraleet du Conseil de tutelle. Par exemple, dans sa

résolution 323 (IV) du 15novembre 1949YAssembléegénérale a décidé:
(6. D'inviter le Conseil de tutelleà réserver, dans ses rapports
annuels à l'Assembléegénérale,une section spéciale à l'exécution,
par les autorités administrantes, desrecommandationsrelatives au
progrès social dans les territoires sous tutelle,à l'abolition des
châtiments corporels et, en particulier, aux mesures prises en appli-
cation de la recommandationfaite au paragraphe 5 [abolition de
toutes les dispositions et pratiques de caractère discriminatoire]»

Au paragraphe 7 de la résolution 324 (IV) du 15 novembre 1949, l'As-
sembléegénérale arecommandé égalementau Conseil de tutelle
((d'inclure dans ses rapports annuels à l'Assembléegénéraleune
sectionspécialeconcernant lafaçon dont les autorités administrantes
ont mis en application la résolution 36 (III) sur la diffusiond'in-
formationsrelatives àl1Organisation desNations Unies dans les terri-
toires sous tutelle, la résolution 83 (IV) sur l'intensification de I'ac-

tion des autorités administrantes dans le domaine de l'instruction,
la gratuité de l'enseignement primaire et la préparation des profes-
seursindigènes,ainsiquelarésolution 110 Or>surl'enseignementsupé-
rieur dans les territoires africains sous tutelle, etd'unefaçon générale
d'inclure des données sur l'application des recommandations du
Conseil dans le domaine de l'enseignement )).
Les quelques exemples donnésci-dessus suffisent à montrer que, pour
les questions relatives au respect de la Charte et des obligations imposées
par les accords de tutelle, les résolutions de l'Assembléegénérale,tout

en se présentant sous la forme de recommandations, constituent des
directives généralesque les autorités administrantes, chacune pour leur
part, sont censéesobserver et mettre en application. Le point de savoir
si l'on doit considérer que ces recommandations énoncent des obliga-
tions juridiques ou des obligations quasi juridiques, présente peu d'im-
portance pratique étant donnéle pouvoir et l'autoritédont l'Assemblée
généraleest investie, en vertu de la Charte en généralet du régime
de tutelle en particulier, pour exercer des fonctions de surveillance sur
l'administration des territoires sous tutelle autres que les territoires
placéssous la surveillance du Conseil de sécurité.De toute façon, on
escompte que ces recommandations seront suivies et appliquées par

les autorités administrantes intéressées. Si cesdernières ne mettaient Assembly continues to cal1on them to implement the recommendation
or recommendations in question. There may be or are one or more
adrninistering authorities who continue to disregard a given recommen-
dation, but such failure to respect their own undertaking to CO-operate,
as iscalled for by Article 88 of the Charter or the relevant provision
of a given trusteeship agreement, do not constituteproof that a recom-
mendation of the General Assembly in and of itself has no binding
force;it only demonstratestheir unwillingnessfor one reason or another
to discharge their freelyaccepted duty of CO-operation.

Even on the general question of the binding force of the resolutions

of the General Assembly, it has been affirmedin conclusion on the basis
of a comprehensivestudy that although there is in the Charter no express
undertaking to accept recomrnendations of the General Assembly
similar to the agreement in Article 25 to accept and carry out decisions
of the Security Council, "it cannot be said that the Charter specifically
negates such an obligation, and it may be possible to deduce certain
obligations from the Charter as a whole which it would be impossible
to establish from an express undertaking". (''The Binding Force of a
Recommendation of the General Assembly of the United Nations" by
F. B. Sloan, in British Year Book of InternationalLaw, 1948,pp. 1-34,
at p. 14.) This is afortiori true in respect of a recommendation of the
General Assembly dealing with matters connected with the trusteeship
system and trusteeship agreements, under which the administering
authorities have expressly undertaken to CO-operatewith the General
Assembly and the Trusteeship Council in the exercise of their functions
of supervision and control.
Moreover, the fact that under the trusteeship system, because of the

differences in its voting procedure for taking decisions as compared
with the unanimity rule under the mandates system both in the Council
and the Assembly of the League of Nations, there is no necessity for
judicial protection of the sacred trust assigned to the administering
authority, does not assist in any way to demonstrate the claimed non-
existence of a vital need foruch protection under the mandates system.
The basic structures of the two systems are different though theirunder-
lying concepts and principles correspond to each other.
For the reasons statedabove, it is to be concluded that the Applicants
as member States of the League of Nations under the mandates system
as stipulated in Article 22 of the Covenant and implemented in respect
of South West Africa by the Mandate Instrument of 17December 1920,
possess a substantive right or legal interest in the observance by the
Respondent of al1its obligationsthereunder.

Having arrived at the foregoing conclusion, 1 deem it incumbent
upon me, if not to deal with al1the issues presented in the submissions
230 SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS. WELLINGTON KOO) 232

pas en Œuvre une recommandation, elles devraient donner des raisons
satisfaisantes, faute de quoi l'Assembléegénéralecontinuerait à les in-
viterà mettre à exécution lesrecommandations en question. Il se peut
qu'une ou plusieurs autorités administrantes continuent à ne pas tenir
compte d'une recommandation donnée, mais le fait qu'elles ne respec-
tent pas l'engagement qu'elles ont pris de coopérer, et qu'exige l'ar-
ticle88 de la Charte ou la disposition pertinente del'accord detutelle con-
sidéré,ne prouve pas qu'une recommandation de l'Assembléegénérale

n'ait pas en soiforce obligatoire; cela démontreseulement la répugnance
des autorités administrantes, pour une raison ou pour une autre, à
s'acquitter du devoir de coopération qu'elles ont librement accepté.
Mêmeen ce qui concerne la question généralede la force obligatoire
des résolutions de l'Assembléegénérale,on a pu affirmer ceci en conclu-
sion d'une étude très approfondie: bien que la Charte ne contienne
aucune disposition comportant un engagement exprès d'accepter les
recommandations de l'Assemblée généralea ,nalogue à l'engagement
pris à l'article 25 d'accepter et d'appliquer les décisionsdu Conseil de
sécurité,((on ne saurait dire que la Charte nie expressément une telle

obligation, et l'on peut déduire peut-êtrede l'ensemble de la Charte
certaines obligations qu'il serait impossible de faire résulter d'un enga-
gement exprès ))(F. B. Sloan, ((TheBinding Force of a Recommendation
of the General Assembly of the United Nations »,Briti shar Book of
InternationalLaw, 1948,p. 14). Cela est vraià fortiori d'une recomman-
dation de l'Assemblée généralesur des questions liées au régime de
tutelle et aux accords de tutelle, en vertu desquels les autorités adminis-
trantes se sont expressément engagées à coopérer avec l'Assemblée
généraleet le Conseil de tutelle dans l'exercice de leurs fonctions de
surveillance et de contrôle.
En outre, constater que, vu les différencesdans la procédure de vote

aboutissant à l'adoption de décisions - qui tiennent à ce que, dans le
cas du système des Mandats, la règle de l'unanimité s'appliquait tant
au Conseil qu'à l'Assembléede la Sociétédes Nations - la protection
judiciaire de la mission sacrée confiée à l'autorité administrante est
inutile dans le régime de tutelle, ne contribue nullement à démontrer
qu'une telle protection ne correspond, comme on le prétend, à aucune
nécessitévitaledans le systèmedes Mandats. Les structures fondamen-
tales des deux systèmes sont différentes bienque les notions et les prin-
cipes qui les sous-tendent se correspondent.
Pour les motifs exposés ci-dessus, ilfaut conclure que les demandeurs,
en tant qu'Etats Membres de la Sociétédes Nations, possèdent, dans

le cadre du système des Mandats définidans l'article 22 du Pacte et
mis en Œuvre, en ce qui concerne le Sud-Ouest africain, par l'acte de
Mandat du 17 décembre 1920, un droit ou intérêt juridique à ce que
le défendeur observe toutes les obligations que lui impose ledit Mandat.

Ayant abouti à la conclusion qui précède, j'estime qu'il m'incombe
sinon d'examiner toutes les questions formulées dans les conclusionsof the two Parties, at least to reiterate and further elucidate the two

cardinal principles of the mandates system, for they constitute the broad
basis of the Mandate for South West Africa, as it was also that of al1
the other mandates. They are the pillars of the whole system. Their
importance cannot be over-stressed: full account of them must be taken
in determining the intentions of its authors or in interpreting any of
its provisions. It is the more necessary, in my view, to emphasize them
here again because the question of this Mandate in one aspect or another
has been raised before the Court at least five times in the past15years.
The instant cases alone have lasted over fiveyears since the Applications
were first filed on 4 November 1960.

One of the two principles is, in the words of Article 22, paragraph 1,
of the Covenant, "the principle that the well-being and development of
such peoples form a sacred trust of civilization". Manifestly, it was
consideration of this basic principle which accounts for the fact that
the very first obligation of the Mandatory is stated in the second para-
graph of Article 2 of the mandate agreement as follows:

"The Mandatory shall promote to the utmost the material and
moral well-being and the social progress of the inhabitants of the
territory subject to the present Mandate."

Whatever power and authority the Mandatory possesses under the
Mandate are clearly not conferred to serve its own ends or to enure
to its own benefit or advantage, but solely for the purpose of enabling
it to fulfilits obligations. Any policy itadopts to administer the mandated
Territory is subject, among others, to this overriding obligation. Thus
the policy of apartheid or separate development (here 1 refer, not to
such policy as is in operation in South Africa, with which the Court is
not called upon to deal, but only to that which has been and is pursued
in South West Africa) should be examined in the light of this primary
obligation. The laws, regulations and measures of the Union (now
Republic) of South Africa are relevant to the instant cases only in so far
as they, by officia1proclamations, have beeii and are applied or made
applicable to the mandated Territory.

From the undisputed facts presented in the written and oral pleadings
of the Parties and in the testimony and cross-examination of the \vit-
nesses and experts before the Court, it appears that this policy, as
constituted by the said laws, regulations and measures applied or appli-
cable to South West Africa, consecrates an unjustifiable principle of
discrimination based on grounds of race, colour or ethnic origin in
establishing the rights and duties of the inhabitants of the Territory.
It is applied to the life, work, travel and residence of a non-White or
a Native in the Territory. It is enforced in matters relating, for example,

231 SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS. ~LLINGTON KOO) 233

finales desParties, du moins de réaffirmeret de préciserles deux principes
essentiels du système des Mandats, car ces principes constituent le
fondement généraldu Mandat pour le Sud-Ouest africain comme de
tous les autres Mandats. Ils sont les piliers de tout le système. On ne
saurait en exagérer l'importance et on doit en tenir pleinement compte
lorsque l'on cherche à déterminer les intentions des auteurs du Mandat
ou à interpréterl'une de sesdispositions. Il estd'autant plus indispensable,
à mon avis, de revenir sur ces deux principes dans la présente opinion

qu'au cours des quinze dernières annéesla question du Mandat pour le
Sud-Ouest africain a, sous un aspect ou sous un autre, été soulevée
au moins cinq fois devant la Cour. Les présentes affaires durent pour
leur part depuis cinq ans, puisque les requêtesont étédéposéesle 4 no-
vembre 1960.
L'un des deux principes est qu'aux termes de l'article, paragraphe 1,
du Pacte ale bien-être et le développement de ces peuples forment
une mission sacrée de civilisation».C'est manifestement en application
de ce principe fondamental que la première obligation du Mandataire
est définiecomme suit au deuxième alinéa de l'article 2 de l'accord de
Mandat :

«Le Mandataire accroîtra, par tous les moyens en son pouvoir,
le bien-être matériel t oral ainsi que le progrès socialdes habitants
du territoire soumis au présentMandat. ))

Quels qui soient les pouvoirs et l'autorité que le Mandat reconnaisse
au Mandataire, ces pouvoirs et cette autorité ne lui sont manifeste-
ment pas conféréspour qu'il les exerce à ses propres fins, dans son
propre intérêtou à son propre avantage, mais uniquement pour lui
permettre de s'acquitter de ses obligations. Quelle que soit la politique
qu'il adopte en vue d'administrer le territoire sous Mandat, elle est
soumise entre autres à cette obligation première. C'est ainsi que la
politique d'apartheid ou de développement séparé-je veux parler de

celle qui a été etcontinueà être pratiquée auSud-Ouest africain et non
de celle qui est appliquée en Afrique du Sud, sur laquelle la Cour n'est
pas invitée à se prononcer - doit êtreexaminée en fonction de cette
obligation primordiale. Les lois, règlements et actes de l'Union sud-
africaine (aujourd'hui République sud-africaine) n'intéressent les
présentes affaires que dans la mesure où, en vertu d'arrêtésofficiels,
ils ont été etsont appliqués ou sont rendus applicables au territoire
sous Mandat.
Des faits non contestés présentésdans les écritures et les plaidoiries
des Parties, ainsi que des dépositions et des réponses des témoins et
experts devant la Cour, il ressort que cette politique, telle qu'elle est

définie par les lois, règlements et actes appliqués ou applicables au
Sud-Ouest africain, procède d'un principe injustifiable de discrimination
en fonction de la race, de la couleur ou de l'origine ethnique qui régit
la répartition des droits et des devoirs des habitants du territoire. Ce
principe régit la vie, le travail, les déplacements et la résidence des
habitants non blancs ou indigènes du territoire. Il est appliqué à desto the ownership of land in the so-called Police Zone, mining and the
mining industry, employment in the Railways and Harbours Adminis-
tration, vocational training and education.

Quite apart from considerations of an international norm or standard
of non-discrimination in general international law of today or in the
particular sphere of the trusteeship system of the United Nations, such
discrimination as practised by the Mandatory was consistently criticized
and deprecated evenin the days of the Permanent Mandates Commission
of the League of Nations.
The il1effects and general detriment produced by the policy of apart-
heid or separate development upon the vast majority of the people
(452,254 non-Whites: 73,464 Whites) of the Territory are great and
far-reaching.They are neither marginal nor minimal,ashas been claimed.
Nor are theyjustified by argumentsbased upon theprinciple ofprotection,
the principle of reciprocity, or the principle of compensation. It is a
self-evident truth that a whole consists of its parts and the parts make
up the whole. Any nation, community or society is made up of its indi-

vidual members. It can be a contented, progressive and developed
nation or community or society only when the mass of its individual
members enjoy well-being and achieve progress and advancement on
the basis of equality before the law. The individuals' dissatisfaction and
detriment arising from their discriminatory treatment by law inevitably
produce adverse effects, however marginal, on the collectivity. In view
of the "sacred" mission to enable the peoples of the mandated territories
"to stand by themselves under the strenuous conditions of this modern
world" (Article 22 of the Covenant), and of the explicit obligations of
the Mandatory, stipulated in Article 2 of the Mandate for South West
Africa, to do its utmost to attain the objective of self-determination,
it is not unreasonable to expect that after 40 years of administration of
the Territory by the Mandatory, the people thereof would have attained
a substantial degree of political development. Yet it appears from the
record that with the possible exception of the Rehoboth Basters (11,257)
who have a semblance of limited local self-government in their district,
none of the non-White groups are granted any significant measure of
the franchise. Even the Ovambos (1960 census figures: 239,363), whose

group makes up more than 40 per cent. of the total population of the
Territory (526,004) do not enjoy any substantial measure of local self-
government. As the Odendaal Commission of Enquiry, a government-
appointed body, has reported (January 1964) in connection with its
recommendation to relax the control on the liquor traffic: "today they
have progressed so far on the road of development that the Commission
has recommended that they be granted an advanced form of self-govern-
ment; and, secondly, that if the Commission failed to comply with the
strong representation made by al1groups, the latter would not only be
bitterly disappointed but would even be aggrieved." (Odendaal Report,
p. 487.) SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS. WELLINGTON KOO) 234

matières telles que la propriétédes terres dans la zone dite de police,
les mines et les industries extractives, les conditions d'emploi dans les
chemins de fer et les ports, la formation professionnelle et l'enseigne-
ment.
Indépendamment de toutes considérationsrelatives à l'existenced'une
norme ou d'un ((standard » international de non-discrimination dans le

droit international généralcontemporain ou dans le cadre du régime
de tutelle des Nations Unies, la discrimination pratiquée par le Manda-
taire n'a cesséd'êtrecritiquée et désavouée,même à l'époque dela
Commission permanente des Mandats de la Sociétédes Nations.
Les conséquencesnéfastes et généralement préjudiciables de la poli-
tique d'apartheid ou de développement séparépour la grande majorité
des habitants du territoire (452 254non-blancscontre 73464blancs) sont
nombreuses et importantes. Elles ne sont ni superficielles ni minimes,
comme on leprétend, etelles nesauraient êtrejustifiéespar des considéra-

tions fondéessur un principe de protection, de réciprocité ou de com-
pensation. Il est bien évidentqu'un tout est composé de ses diverses
parties et que les parties forment le tout. Toute nation, communauté
ou sociétéest constituée par ses divers membres. Elle ne peut être
considérée commeheureuse, évoluéeet en voie de progrès que si l'en-
semble de ses membres atteint au bien-être,au développement et au
progrès sur la base de l'égalitédevant la loi. Le mécontentement des
particuliers et les préjudices qu'ils subissent du fait d'une législation
discriminatoire ont inévitablement des conséquences néfastes,si super-
ficiellessoient-elles, pour la collectivité.Etant donné la missionacrée))

de civilisation dont l'objet est de permettre aux peuples des territoires
sous Mandat cde se diriger eux-mêmesdans les conditions particulière-
ment difficiles du monde moderne » (Pacte, article 22) et l'obligation
formellefaite au Mandataire par l'article 2du Mandat pour le Sud-Ouest
africain de mettre tout en Œuvre pour atteindre l'objectif de l'auto-
détermination, il n'était pas déraisonnable d'espérer, après quarante
annéesd'administrationpar le Mandataire, que leshabitants du territoire
aient étéamenés à un degré appréciable d'évolution politique.Or, il
ressort du dossier que, sauf peut-êtreles Basters de Rehoboth (11257

personnes) qui bénéficientd'un semblant d'autonomie locale partielle
dans leur région,aucun desgroupes non blancs nejouit de droits civiques
notables. MêmelesOvambos (au nombre de 239 363au recensement de
1960), dont le groupe représente plus de quarante pour cent de la
population totale du territoire (526 004habitants), nejouissent d'aucune
autonomie locale appréciable. Comme la Commission d'enquête Oden-
daal nomméepar le gouvernement l'a signaléen janvier 1964 à propos
de sa recommandation d'adoucir le contrôle du commerce des boissons
alcooliques, (cils ont réalisé aujourd'hui de tels progrèssur la voie

du développementque la Commission a recommandé qu'on leur accorde
une certaine forme avancée d'autonomie; en second lieu, si la Commis-
sion ne tenait pas compte des vives protestations de tous les groupes,
non seulement ceux-ci seraient déçus,mais ils se sentiraient même lésés))
(rapport Odendaal, p. 487).
232 On the other hand the White group, since the enactment of the South
West Africa Constitution Act, 1925,has been exercising a right of self-
government through the Legislative Assembly of South West Africa

constituted by members they elect periodically. This legislative organ,
to which the non-White groups are not entitled to elect representatives,
is empowered to make laws for the Territory to cover al1matters except
those reserved in the said Act, including Native Affairs, railways and
harbours, and certain other matters.
The record thus shows that the policy of apartheid or separate de-
velopment, as pursued in South West Africa, as far as the non-White
groups are concerned, has not been and is not compatible with the basic
principle of the "sacred trust of civilization" or with the Respondent's
obligation under Article 2 of the Mandate "to promote to the utmost
the material and moral well-being and the social progress of the in-
habitants of the territory subject to the present Mandate".
The second cardinal principle of the mandates system is international
accountability for the performance of the sacred trust. It is broadly
sanctioned by paragraphs 7, 8 and 9 of Article 22 of the Covenant and
more concretely by the provisions of Articles 6 and 7 of the mandate
agreement. By virtue of the said Article 6 requiring the Mandatory to

"make to the Council of the League of Nations an annual report to
the satisfaction of the Council" on its administration of the mandated
territory and similar provisions in the other Mandates, tl-iisbody, by
its resolution of 31 January 1923, also adopted a set of rules calling
upon the Mandatories to transmit petitions from the inhabitants of
each mandated territory to the Permanent Mandates Commission. In
short, international accountability necessarily comprises the essential
obligations of submission to international supervision and control of
the mandatory's administration of the mandated territory and acceptance
of the compulsory jurisdiction of the Permanent Court in any dispute
between it and another Member of the League of Nations relating to
the interpretation or the application of the provisions of a givenmandate.

These obligations constitute a fundamental feature of the mandates
system. The dissolution of the League of Nations and the disappearance
of the Council and the Permanent Court did not terminate them. By
virtue of Article 37 of the Statute the compulsory jurisdiction of the

Permanent Court was transferred to the present Court. In regard to the
obligation of international accountability as embodied in the relevant
provisions of the Covenant and the Mandate for South West Africa,
it had, by virtue of the principle of severabilityder international law,
remained in existence, though latent after the disappearance of the
Council and the Permanent Mandates Commission of the League. It
only required an arrangement as envisagedin the resolution on mandates
unanimously adopted by the Assembly of the League of Nations at its
last meeting on 18 April 1946, including the concurrence of the Re-
spondent. SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS. WELLINGTON KOO) 235

En revanche, depuis la promulgation du South WestAfrica Constitution
Act de 1925, le groupe blanc se gouverne lui-mêmepar l'intermédiaire
de l'Assembléelégislativedu Sud-Ouest africain, dont il élit périodique-
ment les membres. Cet organe législatif,auquel les groupes non blancs

n'ont pas le droit d'envoyer de représentants, a le pouvoir de légiférer
pour le territoire sur toutes les questions qui ne sont pas réservéespar
l'Act, comme c'est le cas pour les affaires indigènes, les chemins de fer,
les ports et certaines autres questions.
11ressort donc du dossier que pour les groupes non blancs la politique
d'apartheid ou de développement séparépratiquéeau Sud-Ouest africain
n'a été et n'est compatible ni avec le principe fondamental de lamission
sacréede civilisation)>,ni avec l'obligation qui incombe au défendeur
en vertu de l'article 2 du Mandat d'accroître, ([par tous les moyens en

son pouvoir, le bien-être matériel etmoral ainsi que le progrès social
des habitants du territoire soumis au présent Mandat )).
Le deuxièmeprincipe essentiel du systèmedes Mandats est l'obligation
pour le Mandataire de rendre compte sur le plan international de
I'accomplissement de sa mission sacrée de civilisation. Ce principe est
consacré d'une manière généralp ear les paragraphes 7,8 et 9 de l'article
22 du Pacte et de façon plus concrète par les dispositions des articles 6
et 7 de l'accord de Mandat. En vertu de l'article 6, qui invite le Manda-
taire à «envoyer au Conseil de la SociétédesNations un rapport annuel

satisfaisant le Conseil)) au sujet de son administration du territoire
sous Mandat, ainsi qu'en vertu de dispositions analogues des autres
Mandats, le Conseil a, par résolution du 31 janvier 1923, adopté une
série derèglestendant à ce que les Mandataires transmettent à la Com-
mission permanente des Mandats les pétitions émanant des habitants
des territoires sous Mandat. Bref, la responsabilité internationale du
Mandataire entraîne nécessairement les obligations fondamentales de
se prêter à la surveillance internationale et au contrôle de son adminis-
tration du territoire sous Mandat et d'accepter la juridiction obligatoire
de la Cour permanente dans tout différendl'opposant àun autre Membre

de la Société desNations au sujet de l'interprétation ou de l'application
des dispositions du Mandat.
Ces obligations constituent une caractéristique fondamentale du
système des Mandats. La dissolution de la Soci/é des Nations et la
disparition du Conseil et de la Cour permanente n'y ont pas mis fin.
En vertu de l'article 37 du Statut, la juridiction obligatoire dela Cour
permanente a été transférée à la Cour actuelle. Quant à l'obligation de
rendre compte sur le plan international établie par les dispositions
pertinentes du Pacte et du Mandat pour le Sud-Ouest africain, elle a,

en vertu du principe de divisibilité applicable en droit international,
survécud'une manière latente à la disparition du Conseil et de la Com-
mission permanente des Mandats. Il a suffi pour cela de l'arrangement
envisagédans la résolution relative aux Mandats que l'Assembléede la
Société desNations a adoptée à l'unanimité des votants, y compris le
défendeur,lors de sa dernière séance tenuele 18 avril 1946. It will be recalled that as early as April 1945at San Francisco, about
a year before the dissolution of the League of Nations, when the Charter
of the United Nations was being drafted, the Respondent had apparently
considered the proposed new international organization to be of an
importance equal with, if not greater than, that of the League at Geneva,
and announced to the San Francisco Conference its intention to incor-
porate South West Africa as part of the Union of South Africa. In the
first General Assembly of the United Nations in 1946 it submitted a
forma1 proposa1 of incorporation for approval. When this proposa1
was rejected, it, while expressingregret and disappointment, announced
that it would continue to submit reports on its administration of the
mandated territory of South West Africa as it had done before vis-à-vis
the League of Nations.
Although the Respondent, in submitting the reports, stated that the
action was voluntary on its part and for information only such as pro-
vided for by Article 73 (e) ofthe Charter ofthe United Nations regarding
non-self-governingterritories, the legal effect of its declaration and act

acknowledging the General Assembly as the competent international
organ in the matter of the Mandate for South West Africa, in view of
its obligation of international accountability under Article 6 of the
Mandate, obviously cannot be determilied unilaterally by it alone
(Article 7 (l)), just as the content and scope of its obligations under
that instrument cannot be governed by its own interpretation of Article 7
(2) of the Mandate. Nor could the question of the validity of its subse-
quent declaration to discontinue further reports to the General Assembly
on its administration of the mandated territory, in the actual circum-
stances, be resolved solely by itself without regard to the attitude and
action of the General Assembly.

The General Assembly, on its part, notwithstanding its earlier hesi-
tation (resolution XIV-1, clause 3C, of 12 February 1946), definitely
undertook to exercise its powers and functions under the Charter and
to deal with the matter of the Mandate for South West Africa, as evi-
denced by resolution 65(1)of 14December 1946,declaring itself "unable

to accede to the incorporation of the territory of South West Africa in
the Union of South Africa". Byresolution 141(II) of 1November 1947,
it took note of the Respondent's decision not to proceed with the in-
corporation but to maintain the status quo. In fact the competence and
determination of the General Assembly to exercise supervision and to
receive and examine reports relating to the administration of South
West Africa under the Mandate were also confirmed by resolutions 227
(III) of 26 November 1948and 337 (IV) of 6 December 1949.

It appears clear from the foregoing statements and officia1acts of the
Mandatory as well as the General Assembly that there was, by necessary
implication, consent and agreement on the part of both parties in the
matter of exercise of supervisoryfunctions by the latter of the adminis-
tration of the Territory by the former.

234 SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS.WELLINGTON KOO) 236

On se rappellera que, dèsavril 1945, c'est-à-dire un an environ avant
la dissolution de la Société desNations, lors de la conférence de San
Francisco consacrée à la rédaction de la Charte des Nations Unies, le
défendeur, qui attachait apparemment autant d'importance, sinon plus,

à la future organisation internationale qu'à la Société desNations de
Genève, a annoncé son intention d'incorporer le Sud-Ouest africain à
l'Union sud-africaine. En 1946,au cours de la première session de l'As-
semblée générale deN s ations Unies, il a soumis aux fins d'approbation
une proposition formelle en ce sens. Cette proposition ayant étérejetée,
le défendeur, tout en exprimant ses regrets et sa déception, a annoncé
qtl'il continueraià présenter des rapports relatifsà son administration
du territoire sous Mandat du Sud-Ouest africain, comme il l'avait fait
auparavant dans le cadre de la Société desNations.
Quoiqu'en présentant ces rapports le défendeur ait précisé qu'il le
faisait de son plein gréet uniquement à titre d'information, comme le
prévoitl'article 73e) de la Charte des Nations Unies pour les territoires

non autonomes, l'incidence juridique de la déclaration et de l'acte par
lesquels il reconnaissait l'Assemblée généraleomme organe international
compétent à l'égarddu Mandat pour le Sud-Ouest africain ne saurait
de toute évidence,étant donnéson obligation de rendre compte sur le
plan international aux termes de l'article 6 du Mandat, être déterminée
par lui unilatéralement (article, premier alinéa),pas plus que la teneur
et la portée de ses obligations en vertu du Mandat ne sauraient être
régiespar sa propre interprétation du deuxième alinéa de l'article 7 de
cet instrument. De même,la question de la validitédela déclarationpar
laquelle il a, par la suite, annoncéson intention de ne plus adresserAs-
semblée générale de rapports sur son administration du territoire sous
Mandat ne saurait, étantdonnélescirconstances, êtretranchée par saseule

autorité au méprisde l'attitude et des décisionsde l'Assemblée générale.
En dépitdeseshésitationspremières(résolution XIV-1,paragraphe 3 C,
du 12février1946),l'Assemblée généraa lepour sapart résolumententrepris
d'exercer lespouvoirs et fonctions que lui conféraitla Charte et de s'oc-
cuper de la question du Mandat pour le Sud-Ouest africain, comme en
témoigne la résolution 65 (1) du 14 décembre 1946 par laquelle elle a
déclaréqu'elle «ne saurait admettre I'incorporation du territoire du
Sud-Ouest africain a l'Union sud-africaine 1)Dans sa résolution 141 (II)
du leTnovembre 1947, elle a pris note de la décisiondu défendeur de
ne pas procéder àl'incorporation du Sud-Ouest africain et de maintenir
le statu quo. En fait, la compétence que l'Assemblée générale avait

pour exercer une surveillance et recevoir et examiner des rapports sur
l'administration du Sud-Ouest africain en vertu du Mandat, ainsi que
sa détermination à le faire, ont éconfirméespar sesrésolutions227 (III)
du 26 novembre 1948et 337 (IV) du 6 décembre 1949.
II ressort clairement des textes qui précèdent, ainsi que des actes
officielsdu Mandataire et del'Assembléegénéraleq , u'il y a eu nécessaire-
ment un accord implicite entre les deux parties pour que l'une exerce
des fonctions de surveillance sur l'administration du territoire par
l'autre.

234 Moreover, as an original Member of the United Nations, the Respon-
dent had not only participated in the drafting of the Charter including
Chapters XII and XIII relating to the international trusteeship system
as well as Chapter XI regarding non-self-governing territories and
accepted the principlesunderlying it, but had, byining in the unanimous
vote of the Assembly of the League of Nations to adopt the final reso-
lution of 18 April 1946 on mandates also accepted the understanding
embodied in this act. Paragraphs 3 and 4 of this resolution read:

"3. Recognizes that on the termination of the League's existence,
its functions with respect to the mandated territories will come
to an end, but notes that Chapters XI, XII and XIII of the Charter
of the United Nations embody principles corresponding to those
declared in Article 22 of the Covenant of the League;
4. Takes note of the expressed intentions of the Members of the
League now administering territories under Mandate to continue to
administer them for the well-being and development of the peoples
concerned in accordance with the obligations contained in the
respective Mandates, until other arrangements have been agreed
between the United Nations andthe respective mandatory Powers."

For by paragraph 3 of the above-cited resolution, the Respondent, like
the other mandatory Powers and remaining Members of the League,
recognized the correspondence to eacli other of the principles of the
trusteeship system and the mandates system and by paragraph 4 it
undertook to make an arrangement with the United Nations by mutual
agreement, relating to the Mandate for South Wcst Africa.
It is true that the arrangement which the Respondent had envisaged
then was for incorporation of the mandated territory into the Union
of South Africa. But, as seen earlier, the Respondent, having failed to
obtain approval of the proposed incorporation, expressly undertook
to continue to send annual reports on its administration in recognition
of the Generâl Assembly's supervisorypower over the Mandate, because,
to quote its earlier words inthe Assembly of the League of Nations:

"The Union Government will nevertheless regard the dissolution
of the League as in no way diminishing its obligations under the
Mandate, which it will continue to discharge with the full and
proper appreciation of its responsibilities, until such time as other
arrangements are agreed upon concerning the future status of
the Territory."
By its own initiative the Respondent effected an arrangement with the
General Assembly as seen above and as envisaged in paragraph 4 of the
League resolution as cited earlier. Further, in a memorandum sent
by the South Africa Legation in Washington to the Secretary-General
of the United Nations on 17 October 1946,it was likewise stated, though

the League had at that time already disappeared: "This responsibility SUD-OUEST AFRICAIN (OP.DISS. WELLINGTON KOO) 237

Au surplus, non seulement le défendeur a,comme Membre originaire
des Nations Unies, pris part à la rédaction de la Charte et acceptéses
principes fondamentaux - notamment pour ce qui concerne ses cha-
pitres XII et XIII consacrés au régimeinternational de tutelle et son

chapitre XI relatif aux territoires non autonomes - mais encore, en
participant au vote par lequel l'Assembléede la Sociétédes Nations a
adopté à l'unanimitésa résolutionfinale du 18avril 1946sur les Mandats,
il a accepté l'accord consignédans cette résolution. Aux termes des
paragraphes 3 et 4 de ladite résolution, l'Assemblée:
((3. Reconnaît que la dissolution de la Sociétédes Nations

mettra fin à ses fonctions en ce qui concerne les territoires sous
Mandat, mais note que les principes correspondant à ceux que
déclarel'article 22du Pacte sont incorporés dans les chapitres XI,
XII et XIII de la Charte des Nations Unies;
4. Note que les Membres de la Sociétéadministrant actuelle-
ment des territoires sous Mandat ont exprimé leur intention de
continuer à les administrer, en vue du bien-êtreet du développe-
ment des peuples intéressés,conformément aux obligations con-
tenues dans les divers Mandats, jusqu'à ce que de nouveaux ar-
rangements soient pris entre les Nations Unies et les diverses

Puissances mandataires. 11
Par le paragraphe 3 de la résolution ci-dessus, le défendeur a reconnu,
de mêmeque les autres Puissances mandataires et les autres Membres
de la Société desNations, que les principes du régime de tutelle corres-
pondaient à ceux du système desMandats et, par le paragraphe 4, il s'est
engagé à prendre par accord mutuel un arrangement avec les Nations
Unies au sujet du Mandat pour le Sud-Ouest africain.
Il est vrai que l'arrangement alors envisagé par le défendeur était

l'incorporation du territoire sous Mandat à l'Union sud-africaine.
Nous avons vu toutefois que le défendeur n'a pas réussi à faire ap-
prouver ce projet d'incorporation et que, reconnaissant le pouvoir
de surveillance de l'Assemb!éegénérale à l'égard du Mandat, il s'est
expressément engagé à continuer l'envoi de rapports annuels sur son
administration; car, comme il l'avait dit précédemment à l'Assemblée
de la Société desNations,

((Le Gouvernement de l'Union se fera, cependant, un devoir
de considérer que la disparition de la Sociétédes Nations ne di-
minue en rien les obligations qui découlentduMandat; il continuera
à s'en acquitter en pleine conscience et avec le juste sentiment de
ses responsabilités, jusqu'au moment où d'autres arrangements
auront étéconclus quant au statut futur de ce territoire.))

C'est donc de sa propre initiative que le défendeur a abouti à un ar-
rangement avec l'Assembléegénérale,comme nous l'avons vu ci-dessus
et comme l'envisageait le paragraphe 4 de la résolution de la Société
des Nations déjà citée. D'ailleurs, dans un mémorandum adressé au
Secrétaire généraldes Nations Unies par la légation d'Afrique du Sud
à Washington le 17 octobre 1946, il était dit, quoique à cette date laof the Union Government as Mandatory is necessarily inalienable."

The declaration of the Mandatory's representative in the League
Assembly cited above was likewise repeated by the Prime Minister of
the Union in a statement to the Fourth Cornmittee of the General
Assembly of the United Nations on 4 November 1946.

In view of the foregoing account of the declarations and conduct
of the Respondent, expressly ormplicitly recognizing the competence
and the supervisory authority of the United Nations General Assembly
in thematter of the Mandate of South West Africa, its present failure
to continue tosubmit annual reports to it and to accept its supervision
is incompatible not only with its basic obligation Article 6 of the
Mandate and with its undertaking toward the League Assembly at its
ha1 session but also with its obligations under the United Nations
Charter and its undertaking toward the General Assembly.

(Signed V). K. WELLINGTO KNOO. SUD-OUEST AFRICAIN (OP. DISS. WELLINGTOKOO) 238
Sociétédes Nations eût déjàdisparu: ((Cette responsabilité du Gouver-
nement de l'Union en tant que Mandataire est évidemmentinaliénab»e.
De même,la déclaration que le représentant du Mandataire a faite

à l'Assembléede la Société desNations et que j'ai reproduite ci-dessus
a été répété par le premier ministre del'Union le 4 novembre 1946
dans un exposé à la Quatrième Commission de l'Assembléegénérale
des Nations Unies.
En raison des déclarations et de l'attitude du défendeurque je viens
de rappeler et qui constituent une reconnaissance expresse ou implicite
de la compétenceet du pouvoir de surveillance de l'Assembléegénérale
des Nations Unies à l'égarddu Mandat pour le Sud-Ouest africain,
le fait que le défendeurait cesséd'envoyer des rapports annuelsAs-
sembléegénéraleet qu'il refused'acceptersa surveillanceestincompatible
non seulement avec l'obligation fondamentale qui lui incombe en vertu
de l'article du Mandat et l'engagement qu'il a contracté envers l'As-

semblée dela Société desNations lors de sa dernière session, mais en-
core avec les obligations qui lui incombent en vertu de la Charte des
Nations Unies et avec l'engagement qu'ila priségard del'Assemblée
générale.

(Signé)V. K. WELLINGTO KNOO.

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Opinion dissidente de M. Wellington Koo, Vice-président (traduction)

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