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CR 2011/12 (traduction)

CR 2011/12 (translation)

Mercredi 30 mars 2011 à 15 heures

Wednesday 30 March 2011 at 3 p.m. - 2 -

12 Le PRESIDENT: Veuillez vous asseoir. L’audience est ouverte. La Cour se réunit

aujourd’hui pour entendre le second tour de plaidoi ries de la Grèce. D’après les informations dont

je dispose, le premier orateur à prendre la paro le est MmeMariaTelalian, conseiller juridique.

Est-ce bien cela ? J’appelle à la barre Mme Telalian, agent de la Grèce.

Mme TELALIAN :

INTRODUCTION

1. Monsieur le président, Mesdames et Messieu rs de la Cour, pour présenter la réponse de la

Grèce, je ferai quelques observations préliminaires puis indiquerai l’ordre de nos exposés.

2. Monsieur le président, au cours des plaidoiries, le demandeur a déclaré à plusieurs reprises

que si la Grèce avait considéré que son comporte ment constituait une violation substantielle de

l’accord intérimaire, elle aurait déclaré cet instrume nt nul ou en aurait suspendu l’application. Or

c’est exactement le type d’acte que la Grèce a voul u éviter pendant toutes ces années, en raison de

l’importance qu’elle attache à l’accord intérimaire et au rôle de celui-ci dans la stabilité régionale

et, par-dessus tout, à la procédure stipulée dans l’ accord pour le règlement du différend relatif au

nom. Ce dernier point est déterminant: comme cela a été expliqué, l’accord intérimaire vise non

seulement à normaliser les relations entre les deux pays en réglementant un large éventail de

questions dans un certain nombre de domaines, principalement en faveur du demandeur, mais aussi

à établir un cadre solide pour le règlement du diff érend relatif au nom grâce à des négociations

politiques menées sous les auspices de l’Organisatio n des NationsUnies. Surtout, la Grèce s’est

efforcée, et s’efforce encore, d’entretenir des relations authentiques et amicales avec le demandeur

en posant, par le jeu des méca nismes prévus dans l’accord in térimaire, les fondements d’une

solution mutuellement acceptable de la diverg ence concernant le nom du demandeur. C’est

pourquoi nous affirmons que cet instrument important est encore en vigueur ⎯ et doit le rester ⎯

pour autant que les obligations réciproques qui y sont énoncées soient dûment exécutées, de bonne

foi, par les deux Parties.

3. Monsieur le président, Mesdames et Messi eurs de la Cour, comme nous l’avons indiqué

vendredi dernier, les violations de l’accord intérimaire commises par le demandeur sont - 3 -

nombreuses et variées. Un certain type de comportement de sa part a été régulièrement constaté

avant le sommet de l’OTAN à Bucarest en 2008. Les éléments de preuve fournis par la Grèce ne

sont pas exhaustifs mais ils suffisent à donner une id ée de l’incidence de ce comportement sur le

maintien de relations de bon voisinage et la stabilité de la région dans son ensemble.

13 4. S’efforçant de minimiser la portée juridique de ce comportement, le conseil du demandeur

a demandé si la simple construction d’une stat ue ou bien le nom donné à un aéroport ou à une

section d’autoroute pouvait constituer un préjudice in ternational en pareilles circonstances. La

réponse, Monsieur le président, se trouve dans l’accord intérimaire. La réponse est oui. Les

obligations contractées par le demandeur dans l’accord sont concrètes et précises et la Grèce a

protesté publiquement à maintes reprises contre le comportement illicite qui allait à l’encontre de

ces obligations, comme M. Pellet va le montrer une fois de plus.

5. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, dans sa déclaration liminaire,

la Grèce a exprimé son profond attachement à l’égard de la Cour. Malheureusement, nous

considérons que le principal objectif de la re quête du demandeur est de créer un fait accompli

défavorable à la Grèce, en essayant d’obtenir par un arrêt ce qu’il n’a pu retirer des procédures

prescrites par le Conseil de sécurité et stipulées da ns l’accord intérimaire. De toute évidence, le

demandeur nourrit l’espoir que la Cour examinera la présente affaire sans prendre en considération

le différend relatif au nom et le régime imposé par la résolution 817 (1993) du Conseil de sécurité.

Le demandeur nourrit également l’espoir de persua der la Cour de se déclarer compétente alors

même que la compétence de la Cour en l’espèce est expressément exclue par le paragraphe2 de

l’article21 de l’accord intérimaire. Concrètement , par cette requête, il est demandé à la Cour de

contourner les procédures prévues dans l’accord intérimaire, de faire fi des droits substantiels qui y

sont énoncés et d’ignorer l’engagement réciproque qui y est assumé de négocier un règlement de la

question du nom. Plutôt que de négocier, comme il s’y est engagé dans l’accord intérimaire, le

demandeur cherche à obtenir par la voie judiciaire l’autorisation d’utiliser précisément le nom que

la résolution 817 du Conseil de sécurité vise à exclur e dans toutes les organisations internationales

dont la Grèce est membre. Le demandeur voudra it également que la Cour ordonne à la Grèce

d’accéder à ses demandes, au mépris des obligatio ns conventionnelles spécifiques de la Grèce à

l’égard des organisations en question. Le demande ur souhaiterait enfin que la Cour prive la Grèce - 4 -

de son droit d’élever une objection en vertu du para graphe 1 de l’article 11 de l’accord intérimaire.

En résumé, Monsieur le président, vous vous tr ouvez face à une stratégi e soigneusement mise au

point en vue de vider de leur substance l’accord intérimaire et la résolution du Conseil de sécurité.

6. Monsieur le président, dans ses c onclusions, l’agent du demandeur a fait certaines

observations qui, à mon sens, ne sauraient être igno rées. Premièrement, il a été dit que, «[à] cause

de l’opposition [de la Grèce] … [le demandeur avait] subi des retards et des revers dans [sa] quête

pour la reconnaissance et la légitimité internationales, souvent au détriment des aspirations à la

stabilité dans la région». Monsieur le président, cette observation est inexacte. De plus, le
14

demandeur contredit ici ses propres déclarations précédentes, reconnaissant que sa requête ne porte

pas simplement sur une violation alléguée de l’article 11 de l’accord intérimaire, mais s’inscrit dans

le cadre d’efforts entrepris de longue date en vue de régler le différend d’une manière qui va à

l’encontre des engagements qu’il avait contractés dans l’accord intérimaire. Ce qui est encore plus

révélateur, c’est que le demande ur reconnaît avoir déjà abandonné son engagement de négocier et

être en train de s’attribuer un nom qui représente une violation de l’accord intérimaire et qui va à

l’encontre de la résolution du Conseil de sécurité. C’est précisément ce comportement illicite du

demandeur, et non le comportement allégué de la Grèce au sein de l’OTAN, qui compromet la

stabilité de la région. La décision de l’OTAN ne faisait que refléter la préoccupation de l’Alliance

au sujet des manquements au principe des relations de bon voisinage avec la Grèce, et elle a été

réaffirmée à chacune des réunions qui ont eu lieu après le sommet de Bucarest.

7. Deuxièmement, en prétendant qu’il ne cherche pas à monopoliser le nom contesté, le

demandeur banalise une question qui représente véritablement un motif de vive préoccupation pour

mon pays. Le demandeur tente ici d’induire en erreur la communauté internationale au sujet de ses

réelles intentions à cet égard, lesquelles sont loin d’être innocentes. Pour connaître ces intentions,

il suffit de consulter des manuels scolaires, des cart es, des encyclopédies, des déclarations d’agents

de l’Etat, qui font tous état d’une injustice hi storique et où il est prétendu, comme la Grèce l’a

indiqué dans ses écritures, que les «frontières géographiques et ethniques» de l’Etat demandeur

s’étendent au-delà de ses frontières actuelles et couvrent des territoires sous «administration»

«grecque» ou «bulgare». C’est cela, Monsieur le président, qui constitue une véritable menace

pour la paix et la stabilité dans la région. - 5 -

8. Monsieur le président, Mesdames et Messieu rs de la Cour, la réponse de la Grèce se

composera des exposés suivants. Je vais bientôt vous prier, Monsieur le président, de donner la

parole à M.Reisman, qui traitera des questions de compétence et de recevabilité. M.Crawford

parlera ensuite des articles 11 et 22. M. Pellet évoquera les violations, les moyens de défense et les

remèdes. M.Abi-Saab achèvera l’argumentation juridique et M.Savvaides présentera nos

conclusions.

Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, je vous remercie de votre

attention.

Le PRESIDENT: Je remercie MadameMari aTelalian pour sa déclaration. J’invite

maintenant M. Michael Reisman à la barre.

15 M. REISMAN :

C OMPÉTENCE ET RECEVABILITÉ

La clause juridictionnelle

1. Monsieur le président, Mesdames et Messieu rs de la Cour, la clause juridictionnelle de

l’accord intérimaire vous est à présent si familière qu’il est inutile d’en donner lecture à haute voix.

o
[Projection n °2 — non lue.]

« A l’exception de la divergence visé e au paragraphe1 de l’article5, l’une ou
l’autre des Parties peut saisir la Cour intern ationale de Justice de toute divergence ou
de tout différend qui s’élèvent entre ell es en ce qui concerne l’interprétation ou
l’exécution du présent accord intérimaire.»

o
[Pro.jention °3.] Qu’est-ce qui déclenche l’applic ation des termes «à l’exception de» et

exclut la compétence de la Cour ? La semaine dern ière, la Grèce a attiré l’attention de la Cour sur

le fait que, dans sa requête [projectionn o4], le demandeur avait fait valoir —présentant cet

argument comme le critère à respecter — que l’objet du différend «ne se rapport[ait] ni directement

ni indirectement à la divergence visée par le paragraphe 1 de l’article 5». [Projeté mais non lu.]

«Avec le dépôt de la présente requê te, toutes les questions qui opposent les
Parties en ce qui concerne l’interprétation ou l’application de l’ article11 de l’accord

intérimaire do1995 relèvent clairement de la compétence obligatoire de la Cour.
[Projection n5.] L’objet du présent litige ne se rapporte ni directement ni
indirectement à la divergence visée par le paragr aphe1 de l’article5 de l’accord - 6 -

intérimaire ; par conséquent, l’exception prévue par le paragraphe 2 de l’article 21 de

l’accord intérimaire quant à la compétence de la Cour ne trouve pas à s’appliquer.»

5. Lundi, lorsque nous avons fait référence à sa position, M. Klein nous a accusés de vouloir

«tirer avantage du fait que la ligne d’argumentation de l’Etat requérant sur ce point aurait évolué» 1.

Monsieur le président, le français est une langue don t j’admire depuis longtemps la subtilité et le

raffinement, et je conçois qu’elle perde un je ne sais quoi lorsqu’elle est traduite dans une langue

démotique telle que l’anglais amér icain que je parle. Or, pour l’ interlocuteur anglophone moyen,

les termes «aurait évolué», tels qu’employés dans cette phrase, signifient «Ouille ! Nous voilà mal

partis avec cet argument ; il vaut mieux y renoncer et en produire un autre.»

6. Cela dit, loin de moi l’idée de dire que le demandeur n’est pas en droit de renoncer à un

argument pour en produire un autre. Déjà à l’époque de l’affaire Socobelge, la Cour permanente

déclara que les Parties pouvaient revoir leur argumen tation au cours de la procédure orale; en ce

16 qui me concerne, le demandeur pe ut affirmer tout ce qu’il veut. Mais le demandeur ne saurait

exclure cet argument des éléments versés au dossier simplement en s’en démarquant, surtout après

que la Grèce a reconnu à point nommé qu’il s’agis sait là de la condition à remplir pour que le

membre de phrase commençant par les termes «à l’exception de» puisse fonctionner. Pourtant,

M.Klein, après avoir dit que la question centrale est de savoir si «le critère retenu…pour

l’interprétation … est le bon» 2, est passé rapidement à l’argument subsidiaire présenté par le

demandeur, qui suppose une interpolation de mots à l’article21, une tactique sur laquelle je

reviendrai. M.Klein n’a jamais réussi à exp liquer pourquoi la première théorie relative à la

compétence serait fausse et pourquoi nos amis ont dû «régresser» —en dehors du fait qu’elle

réduise à néant les arguments présentés par le demandeur à l’appui de la compétence.

o
[Projection n °6.]

7. On pourrait supposer, Monsieur le président, que la bonne méthode pour entamer une telle

enquête en droit international sera it de revenir au texte même de l’ article21. Or, le débat porte

o
essentiellement sur l’expression «à l’exception de», [projectionn °7] mais celle-ci ne saurait

davantage être dissociée du reste de l’article da ns lequel elle se trouve que ne le saurait le

paragraphe1 de l’article11 du reste de l’accord intérimaire. Selon la clause principale de

1
CR 2011/11, p. 37, par. 3.
2CR 2011/11, p. 38, par. 4. - 7 -

l’article21, la Cour a compétence pour connaître de «toute divergence ou…tout différend qui

s’élèvent…en ce qui concerne l’interprétation ou l’exécution» de l’accord intérimaire, et

l’expression «à l’exception de» doit, semble-t-il, aussi être interprétée à la lumière de ces mots,

dans le sens de «à l’exception de» l’interprétation ou de la gestion de la divergence visée au

paragraphe1 de l’article5. Etant donné l’interprétation que le texte impose au lecteur on reste

d’autant plus perplexe devant ce qu’affirme M. Klein, à savoir — je cite ma propre traduction («the

compromissory clause excludes «the difference referred to in Article5, paragraph1» and not, for

example, «the differences relative to the application of Article 5, paragra ph 1» which would be an

entirely different matter») —que «la clause compromissoire exclut «la divergence visée au

paragraphe1 de l’article5» et non, par exemple, «les différends relatifs à l’application du

paragraphe 1 de l’article 5», ce qui serait une tout autre chose» . Pourquoi serait-ce «une tout autre

chose»? Le texte de l’article21 se prête lui- même à «l’interprétation ou la gestion» de la

divergence, tant pour l’interprétation de la cl ause principale que pour celle du membre de phrase

o
commençant par les termes «à l’exception de». [Projection n 8.]

8. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, la divergence au sujet du nom

était la principale question pendante au sujet de l’accord intérimaire. Elle devait être réglée à

travers des négociations menées de bonne foi et ne devait pas être soumise à la Cour. Compte tenu

de la structure de l’accord intérimaire qui forme un tout cohérent, po urrait-on raisonnablement

supposer que, si les termes «règlement de» figuraient effectivement dans le membre de phrase

commençant par les termes «à l’exception de» de manière à empêcher un règlement direct par la

17 Cour de la divergence au sujet du nom, ces mêmes Parties voudraient que cette même clause

permette à la Cour de trancher des litiges se rapportant indirectement à la question du nom et

pouvant avoir une incidence sur celle-ci, ou pouvant même, effectivement, la régler ? Et, comme je

vais l’expliquer dans un moment, si l’on cédait aux prières du demandeur sur ce point, l’objectif

qu’il poursuivi — le règlement du problème du nom en sa faveur — serait effectivement atteint.

9. Si les Parties avaient voulu restreindre la portée du membre de phrase commençant par les

termes «à l’exception de» pour lui donner le sens de «à l’exception du règlement de la question du

3
Ibid., p. 38, par. 6. - 8 -

nom», elles auraient ajouté les termes «règ lement de la question du nom». C’est en ces termes-là

que les juristes du demandeur auraient rédigé la demande initiale, au lieu d’employer la formule

«ne se rapporte ni directement ni indirectement» . Pourtant, une requête doit s’appuyer sur une

clause juridictionnelle libellée d’une manière qui ne laisse pas de place à l’interprétation; c’est

donc à ce stade-là que les conseils du demandeur ont adopté le critère à respecter. Le demandeur

vous a saisis de la présente affaire, vous assurant que «[l]’objet du présent litige ne se rapport[ait]

ni directement ni indirectement à la divergence visée par le paragr aphe1 de l’article5». Il a

ensuite bien énoncé le critère juridique applicable , présentant effectivement la seule interprétation

qui soit conforme au texte, au contexte et aux buts et fins de l’accord intérimaire.

10. Mais la demande du demande ur se rapporte-t-elle «ni directement ni indirectement» à la

divergence visée à l’article5? Comme le demandeur rejette à présent la théorie juridictionnelle

qu’il avait fait valoir initialeme nt, il ne daigne pas répondre à cette question, même si la question

n’aurait pas pu occuper de place plus importante au cours de notre premier tour de plaidoiries.

Monsieur le président, si le silence ne vaut pas acquiescement, il atteste pour le moins l’absence de

réponse. Y aurait-il le moindre doute sérieux quant à la réponse à cette question ? Après plus de

deux semaines de plaidoiries, n’est-il pas clair que la présente affaire se rapporte directement — et

indirectement, certes— à la question du nom? Et qu’elle concerne donc effectivement le

règlement de cette question ?

11. M. Thomas Reed Powell, un vieux professeur de la Harvard Law School, qui était connu

pour ses sarcasmes, n’était pas particulièrement respectueux envers les juristes. Il avait l’habitude

de dire à ses étudiants «si vous pouvez penser à une chose qui est liée à une autre, sans penser à

celle qui y est liée…, vous raisonnez en juriste». Monsieur le président, c’est précisément ce à

quoi le demandeur invite la Cour, de manière à faire rentrer sa demande dans l’espace

juridictionnel clairement délimité par l’article 21. Le demandeur vous invite à examiner une chose

qui est liée à une autre, sans tenir compte de celle qui y est liée. Et, de prétendre, en même temps,

que cette chose ne se rapporte ni «directement» ni «indirectement» à cette autre chose. La Grèce

18 affirme qu’il n’y a aucun moyen rati onnel de dire que les questions soulevées par le demandeur en

la présente espèce ne se rapportent pas «directeme nt», et certainement pas «indirectement», au

différend mentionné dans la résolution 817. - 9 -

12. Cela étant, la condition définie par les termes «se rapporte ni directement ni

indirectement» excède-t-elle ou exclut-elle toute compétence ? Les Parties s’accordent à dire que

l’article21 confère à la Cour un rôle judiciai re central, mais leurs vues divergent quant aux

dispositions spécifiques qui sont exclues de ce rôle par les termes «à l’exception de». La Grèce a

eu quelque difficulté à comprendre les «évoluti ons» qu’à connues la position du demandeur sur

cette question, mais M.Klein nous a bien éclairé s. Le demandeur a initialement fait valoir que

l’interprétation de la Grèce — c’est-à-dire l’interprétation initia le du demandeur ou celle qui a

4
précédé ces évolutions —excluait toute disposition de l’accord intérimaire . Cet argument a

ensuite «évolué» pour couvrir «un nomb re considérable de dispositions» 5 de l’accord intérimaire,

et ce uniquement pour ensuite régresser, à en croire la plaidoirie présentée par M.Klein cette

semaine, et exclure toute disposition, en vertu de la thèse selon laquelle la Grèce pourrait toujours

faire le lien entre un différend d écoulant de n’importe quel article de l’accord intérimaire et la

6
divergence visée à l’article5 . Mais nous tombons dans la caric ature. La question ne se limite

jamais à l’argument que fait valoir l’une des Parties en matière de compétence. D’aucuns tenteront

toujours d’imposer leur point de vue, et nous pensons que c’est ce que le demandeur essaie

manifestement de faire. De là le mérite d’une décision prise par une tierce partie grâce à laquelle

l’argument que fait valoir n’importe quel demandeur en matière de compétence ne repose jamais

sur son ipse dixit ; la question sera finalement tranchée pa r la Cour sur la base d’une interprétation

raisonnable du texte par rapport à son contexte.

13. La question centrale en l’espèce n’est naturellement pas de savoir quelles autres

dispositions de l’accord intérimaire pourraient être soustraites à votre compétence par le membre

de phrase commençant par les termes «à l’exception de » contenu à l’article 21. La question est de

savoir si une demande soulevée en vertu du paragraphe 1 de l’article 11 doit être soustraite à votre

compétence. Cela dit, la semaine dernière, M. Kl ein et moi-même avons relevé le caractère allusif

de l’expression «à l’exception de». A l’artic le 21 est mentionnée une «divergence … visée à

l’article5» qui lui-même renvoie aux résolutions 817 et845 du Conseil de sécurité. Or, si vous

4Réplique, par. 3.15.
5
CR 2011/5, p. 58, par. 5 (Klein)
6CR 2011/11, p. 37, par. 3 (Klein) - 10 -

remontez à la source de cette série d’allusions, il est clair que la divergence visée et exclue par le

membre de phrase commençant par «à l’exception de » doit être mentionnée dans la résolution 817

du Conseil de sécurité.

14. Outre la clause juridictionnelle proprement d ite, il n’y a, dans les vingt-trois articles que

compte l’accord intérimaire, que deux dispos itions mentionnant expressément ou citant la

résolution817: ce sont l’article5 et le paragra phe1 de l’article11. Ce sont les deux seules
19

dispositions. Par conséquent, à supposer que le membre de phrase commençant par les termes «à

l’exception de» pourrait, au regard des faits de l’espèce, se rapporter indirectement à des différends

découlant d’autres dispositions, les différends découlant des articles 5 et 11 seront indiscutablement

soumis au régime de ce membre de phrase.

7
15. M. Klein qualifie cela de «lecture particulièrement créative» . Si l’adjectif «créative» ne

revêt pour nous, à NewHaven, aucun sens péjoratif , mes collègues et étudiants ne qualifieraient

guère de «créative» une lecture simple et rigoureuse du texte de l’accord intérimaire.

16. Ce modeste échantillon de «créativité» semble avoir eu un effet étourdissant sur

M. Klein qui a ensuite qualifié cette lecture de «fan taisiste». Puis, véritablement emporté dans son

élan, il a conclu que «[n]ulle par ailleurs — nulle part — ne retrouve-t-on dans le texte de l’accord

la moindre mention d’un différend à l’égard duquel la Cour ne pourrait exercer sa compétence» 8.

Aussi, Monsieur le président, la position du demandeur a-t-elle fini par évoluer au point d’affirmer

que le membre de phrase commençant par les termes «à l’exception de» qui figure à l’article 21 ne

s’applique à aucune partie de l’accord intérimaire. Dans l’univers normatif du demandeur, ce

membre de phrase est devenu, comme le cŒur de la résolution817, complètement exsangue. Et

cela, Monsieur le président, démontre l’extrême absurdité du principal argument que fait valoir le

demandeur en matière de compétence.

17. Mais l’argument que fait valoir le demande ur au sujet de la compétence recouvre encore

une autre idée. Il y a une semaine, à un stade antérieur de l’évolution, auquel le demandeur

affirmait encore que le membre de phrase commençant par les termes «à l’exception de» signifiait

quelque chose, il vous a dit qu’il ne vous demandait pas de régler le différend au sujet du nom, ni

7
CR 2011/11, p. 38, par. 7.
8
Ibid., p. 39, par. 7. - 11 -

d’ailleurs d’«exprime[r] un quelconque avis sur la question». De ce côté-ci de la barre, nous avons

supposé que cela signifiait que, si le demandeur demandait effectivement cela à la Cour, l’affaire

serait annulée pour défaut de compétence. Et c’est précisément ce qui se produit ici. Même en

acceptant cette invention du demandeur et en interpolant des mots qui ne figurent pas à l’article 21

de façon à ce que le membre de phrase commençant par les termes «à l’exception de» puisse être

20 compris comme reflétant l’intention des Parties de limiter la compétence aux seules actions qui

pourraient régler la question du nom, la requê te ne relèverait toujours pas de la compétence de la

Cour.

18. Pourquoi? Parce que, si la Cour se d éclarait compétente et accédait à la requête du

demandeur, elle déciderait ipso facto de la question du nom, enleva nt ainsi au demandeur toute

raison de négocier le règlement de la divergence demandé dans l’accord intérimaire et par le

Conseil de sécurité. Si la Cour se déclarait co mpétente conformément à la thèse du demandeur, sa

décision déterminerait l’issue de la question du fo nd, résolvant par là même la divergence sur le

nom en faveur du demandeur.

19. Monsieur le président, compte tenu de tous ces éléphants que les c onseils de la partie

adverse disent avoir vu traverser d’un pas lour d la grande salle de justice, pourquoi, nous

demandons-nous, n’ont-ils jamais mentionné le pl us imposant de tous ces pachydermes, celui qui

domine tous les autres, et qui n’est autre que le ur propre président, M. Crvenkovski ? La semaine

dernière, mes collègues et moi-même lui avons fait occuper le devant de la scène et, pour ne pas

sortir ses propos de leur contexte , nous vous avons projeté un long extrait du discours qu’il a tenu

devant le parlement. Le prési dent Crvenkovski a lui-même révélé que la stratégie du demandeur

sur la question du nom, longtemps tenue secrète, co nsistait à éviter les négociations de bonne foi

o
requises par la résolutionn 817; persuader un nombre d’Etats aussi important que possible

d’appuyer sa campagne en faveur du nom qui a sa préférence; ne faire usage du nom provisoire

demandé par le Conseil de sécurité et l’accord intérimaire que pour se faire admettre dans les

organisations internationales ; et ensuite utiliser, à toutes autres fins utiles, le nom dont l’usage est

interdit par l’accord intérimaire et la résolution817. La présente affaire est une extension de la

stratégie déployée par le demandeur pour contourne r l’arrangement provisoire et obtenir par fait

accompli le règlement de la divergence sur le nom de la manière voulue par le demandeur. - 12 -

20. La mauvaise foi est l’élément essentiel de ce qui se produit ici, mais au lieu de le

reconnaître, ou, à défaut, expliquer, à la lumière de l’aveu du président Crvenkovski, comment

quinze années de négociations ont pu rester st ériles, le demandeur invoque les assurances

habituelles données par le médiateur. Parmi les éminents juristes internationaux qui se trouvent sur

le siège, beaucoup, j’en suis convaincu, ont déjà exercé les fonctions de médiateur international, et

savent que le médiateur qui déclarerait que l’une des Parties fait preuve de mauvaise foi cesserait

immédiatement d’exercer ses fonctions. Les formules stéréotypées de M. Nimetz ne sont d’aucune

utilité lorsque le plus haut responsable du demandeur avoue l’existence d’une stratégie secrète.

21 21. L’artifice juridique utilisé dans la phase judiciaire de cette stratégie, c’est la manière

radicale dont le demandeur réinterprète le paragraphe 2 du dispositif de la résolution 817.
o
[Projection n 9 — projetée mais non lue.]

« Recommande à l’Assemblée générale d’ad mettre à l’Organisation des
Nations Unies l’Etat dont la demande est formulée dans le document S/25147, cet Etat
devant être désigné provisoirement, à toutes fins utiles à l’Organisation, sous le nom
d’«ex-République yougoslave de Macédoi ne» en attendant que soit réglée la

divergence qui a surgi au sujet de son nom.»

22. Le demandeur a été admis à l’Organisa tion des NationsUnies à la condition d’«être

désigné provisoirement, à toutes fins utiles à l’Organisation , sous le nom d’«ex-République

yougoslave de Macédoine»» (les ita liques sont de nous). Cette désignation devait être conservée

«en attendant que soit réglée la divergence qui a surgi au sujet de son nom». [Projection n o 10.]

23. En 2005, le demandeur s’est dit convain cu que la résolution817 était «contraire à la

Charte». Suivant la même logique que dans son o ffensive, il évite de se concentrer sur le texte,

s’appuyant sur des «souvenirs» de tierces partie s sans rapport avec le contexte, continuant à

défendre la méthode inacceptable suivie lundi et dévoilant inconsciemment le manque de sincérité

avec lequel il prétendait défendre la stabilité des ac cords en critiquant les arguments avancés par la

Grèce au sujet de l’exceptio.

24. A travers les déclarations publiques du demandeur, son comportement et ce qu’il a

affirmé lundi, la Cour sait comment celui-ci dit comprendre la résolution 817 ⎯ sa conception de

la résolution817 signifie réellement que l’Etat, dont la demande est formulée dans le document - 13 -

S/25147, doit être «adm[is] à l’Organisation des NationsUnies l’Eta…t sous le nom

d’«ex-République yougoslave de Macédoine» et, par la suite, … désign[é] à toutes fins utiles par le

o
nom de «République de Macédoine»» [projection n 13].

25. Puisque la bonne foi n’est plus de mise, que reste-t-il à négocier à la lumière de cette

interprétation de la résolution817? La pla que nominative du demandeur à l’ONU? Et même

cette question, survivra-t-elle à la double formul e du demandeur? Face à cette violation de la

résolution 817, la clause de sauvegarde figurant au paragraphe 1 de l’article 11 est le seul moyen de

défense restant à la Grèce. Et cette clause est naturellement la cible du demandeur en la présente

espèce: s’il parvient à l’atteindre, il aura obtenu tout ce qu’il aura voulu, manquant totalement à

son obligation de négocier le règlement de la question du nom. Si nous nous soumettions à votre

compétence et continuions dans cette voie, le demandeur aura obtenu tout ce qu’il n’est pas en droit

d’obtenir en vertu de l’accord intérimaire. Ai nsi, dans la mesure où le demandeur lui-même

reconnaît que l’article 21 ne confère pas compétence aux fins du règlement de la question du nom,

la présente affaire ne relève pas de votre compétence.

Questions relatives à la recevabilité: l’absence de consentement de tierces parties dont la
présence est indispensable

26. Monsieur le président, da ns le temps qu’il me reste, je vais examiner certaines des
22

raisons qui font obstacle à la recevabilité. Ainsi qu e l’a dit M. Pellet la semaine dernière, ce qui se

trouve au cŒur du grief du demandeur, c’est une décision collective et unanime, prise par les

membres de l’OTAN, de reporter l’invitation du de mandeur à rejoindre l’Alliance en attendant que

soit réglée la divergence au sujet du nom. Je mets l’accent sur les mots collective et unanime. La

Grèce a indiscutablement été partie prenante à ce processus. [Projection n o14 ⎯ projetée mais non

lue.]

«Le présent accord intérimaire n’est dirigé contre aucun autre Etat ou entité et il

ne porte pas atteinte aux droits et aux devoirs découlant d’accords bilatéraux et
multilatéraux déjà en vigueur que les Pa rties ont conclus avec d’autres Etats ou
organisations internationales.» - 14 -

27. Aux termes de l’article22 de l’accord, elle était en droit d’exercer ses droits et devoirs

découlant de traités antérieurs et, si pareil exercice portait atteinte aux obligations lui incombant en

vertu de l’accord intérimaire, les droits et devoirs découlant du traité antérieur, en l’occurrence, le

Traité de l’Atlantique Nord, prévaudraient. [Projection n o 15.]

28. Le fait que cette décision, qui est un él ément central de l’argumentation du demandeur,

était collective, car prise par un grand nombre d’autres Etats, dont aucun ne reconnaissait la

compétence de la Cour en l’espèce, empêche celle-ci d’exercer une compétence qu’elle pourrait

sinon exercer. C’est là une règle juridictionnelle vénérable, que la Cour a appliquée aussi bien dans

l’affaire de l’Or monétaire que dans celle du Timor Oriental, et qui, à notre avis, ne subira pas en la

présente espèce les effets des conclusions auxquelles vous êtes parvenus dans les affaires Nauru ou

Congo c. Ouganda, dont les faits diffèrent sensiblement de ceux de l’affaire qui est plaidée.

29. La base factuelle avancée par le demandeur dans le mémoire et dans la réplique, c’est

«[l]’objection du défendeur [qui] a empêché le dema ndeur d’être invité à poursuivre les formalités

9
requises pour devenir membre de l’OTAN» . Pour se soustraire au principe de l’ Or monétaire, le

demandeur, dans sa réplique, fait également observer que «le demandeur n’invite pas la Cour à

s’exprimer sur la licéité ou sur le bien-fondé de la décision prise au sommet de l’OTAN à

Bucarest» 10. Par la suite, le demandeur a déclaré «n’a[voir] jamais laissé entendre que l’OTAN ait

11
pu manquer à une quelconque obligation» . Lundi, M.Murphy a aussi tenté de dissocier la

demande du demandeur, d’une part, et l’OTAN, d’autre part.

23 «La décision adoptée par l’OTAN à Bucar est n’est simplement pas en cause
devant la Cour. La présente affaire concer ne exclusivement la licéité de la conduite

adoptée par le défendeur de2007 à 2008 au re gard de l’accord intérimaire; cette
conduite n’est ni licite ni illicite, indépe ndamment des positions adoptées par d’autres
Etats.» 12

30. Mais la question n’est pas de savoir si le demandeur n’invite pas la Cour à s’exprimer sur

la décision de l’OTAN. La question est de savoi r comment la Cour pourrait l’apprécier sans se

prononcer sur l’OTAN, ses procédures d’adhésion et les actions de ses membres qui ont participé à

9Mémoire, par. 1.1.
10
Réplique, par. 3.31.
11
Ibid., par. 3.32.
12CR 2011/11, p. 32, par. 36. - 15 -

la décision consensuelle? Dans une phrase fort ré vélatrice de sa réplique, le demandeur déclare

o
[projection n 16] : «ne … pas [prier] la Cour de s’exprimer sur la licéité d’actes de l’OTAN ou de

l’un quelconque de ses [autres] membres au regard des critères définis dans l’accord

13
intérimaire» .

Le demandeur présente ici de manière erronée le casse-tête que doit résoudre la Cour. Le cas

épineux qui se posait dans l’affaire de l’ Or monétaire ne signifie pas que la Cour, au cas où elle

devrait se déclarer compétente pour connaître de la présente espèce, devrait se prononcer sur

l’OTAN et ses membres au regard des critères définis dans l’accord intérimaire . Au contraire, si

la Cour devait se déclarer compétente, elle ne pourrait pas éviter de se prononcer sur l’OTAN et

o
ses membres au regard des critères mêmes de l’OTAN. [Projection n 17.]

31. La Cour ne peut pas, avec l’autorité que lu i confère l’article 22, statuer sur la licéité, au

regard de l’accord intérimaire, des actes imputés à la Grèce avant d’avoir statué sur la licéité ou

l’illicéité des décisions de l’OTAN. En effet, la détermination de la licéité, du point de vue de

l’article22, de l’acte imputé à la Grèce dépend inextricablement de la licéité de la décision

collectivement prise par l’OTAN à Bucarest. En out re, elle prend nécessairement en considération

d’autres décisions collectives de l’OTAN. En tant que membre de l’OTAN, la Grèce a participé à

la prise de ces décisions, qui allaient dans le même sens.

32. Si la déclaration faite à Bucarest par l’OTAN, de reporter la demande d’adhésion du

demandeur, constituait une décision licite et prise intra vires, il s’ensuit que tout acte posé par la

Grèce en qualité de membre de l’OTAN serait conforme aux paramètres énoncés dans l’article 22

de l’accord intérimaire, c’est-à-dire «aux droits et aux devoirs découlant

d’accords…multilatéraux»; ainsi considéré, l’acte posé par la Grèce ne contreviendrait pas à

l’accord intérimaire. De surcroît, comme la teneur de la déclaration de Bucarest a été réitérée sans

qu’il soit reproché à la Grèce d’en être à l’origine ⎯ce qu’avait allégué le demandeur dans le

contexte de Bucarest ⎯, si la Cour connaissait de la prétention selon laquelle les actes que la Grèce

aurait posés à Bucarest contrevenaient à l’accord intérimaire et n’étaient pas couverts par

13Réplique, par. 3.31. - 16 -

24 l’article22 de celui-ci, elle serait par la force des choses obligée de statuer sur la licéité et le

caractère intra vires des décisions de l’OTAN et les actions de tous les autres membres de l’OTAN

qui ont participé au consensus. Cette question irait toutefois au-delà de sa compétence.

33. Inversement, si les actes prétendument posés par la Grèce à Bucarest n’étaient pas

conformes aux droits et devoirs lui incombant vis-à-vis de l’OTAN, ils ne seraient pas non plus

couverts par l’article22 de l’accord intérimaire. Il n’y a aucun moyen d’éluder le fait que la

décision de Bucarest a été prise collectivement et qu’elle ne résultait pas des actes de la Grèce

seulement 14. Partant, si la Cour venait conclure que les actes de la Grèce n’étaient pas couverts par

l’article 22, elle statuerait nécessairement sur la licéité des actes d’autres membres de l’OTAN et de

cette organisation elle-même. Une telle décision serait nécessairement prise, non pas sur la base de

l’accord intérimaire, mais sur la base des critèr es juridiques de l’OTAN. Là encore, la question

irait au-delà de la compétence de la Cour.

34. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les membres de la Cour, je vous remercie

de votre attention. Avec votre permission, mon collègue M. Crawford, prendra à présent la parole.

Le PRESIDENT : Je remercie MR. eisman de son exposé et j’invite à présent

M. James Crawford à prendre la parole.

Le PRESIDENT : Je remercie M. Michael Re isman pour son exposé et je donne à présent la

parole à M. James Crawford.

M. CRAWFORD :

Articles 11 et 22 de l’accord intérimaire

La structure du paragraphe 1 de l’article 11

1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, dans un accord de statu quo, un

règlement provisoire, l’Etat A, promet à l’Etat B de ne pas faire «x», mais se réserve le droit de le

faire si et dans la mesure où une situation provis oire, que j’appellerai «y» cesse d’exister. «Y» est

une situation que l’EtatB a le pouvoir de main tenir ou pas. Qualifions ce concours de

14
Réplique, par. 6.10. - 17 -

circonstances, symboliquement, «d’absence de «x» si et dans la mesure où «y»». La promesse de

ne pas faire «x» importe beaucoup à l’EtatB, alors que le maintien de la situation importe

beaucoup à l’EtatA. Cela soulève plusieurs questions d’ordre juridique. Dans ces circonstances

25 l’EtatB a-t-il l’obligation de ne pas provoquer l’effondrement de la situation intérimaire, «y»?

Cette situation intérimaire traduit et représente l’obj et et le but de l’accord, qui est de maintenir le

statu quo en attendant un règlement du problème sous-jacent, règlement que les deux Etats se sont

engagés à négocier. L’EtatB ⎯je le répète ⎯ a-t-il l’obligation de ne pas provoquer

l’effondrement de la situation proviso ire, «y» ? Pas aux termes de l’accord, l’absence de «x» si et

dans la mesure où «y» n’oblige pas expressément l’EtatB à garantir «y». C’est simplement que

l’Etat B ne pourra se prévaloir de la promesse que si la situation «y» persiste. Il se peut qu’en vertu

du droit qui régit cet accord il existe une obligati on implicite de ne pas priver cet accord de son

15
objet et de son but, comme vous l’avez dit dans l’affaire Nicaragua . Le cas échéant, cette

obligation peut être considérée comme existant en vertu droit et non en vertu de l’accord. On

pourrait également rappeler à cet égard la conclusi on faite dans la sentence arbitrale rendue dans

l’affaire des Iles Samoa, concernant l’obligation de mainte nir un statuquo dans la période qui

précède un règlement final. L’arbitre avait déclaré :

«En attendant des instructions des trois puissances partie au traité…Ces

puissances étaient tenues, en vertu des prin cipes de la bonne foi internationale, de
maintenir la situation ainsi créée jusqu’à ce que d’un commun accord elles en aient
décidé autrement.» 16

2. Monsieur le président, Mesdames et Messieu rs de la Cour, je voudrais relever certaines

caractéristiques de la situation. Dans une certa ine mesure, cette situation est automatique, à savoir

pour ce qui concerne l’incidence des obligations juridi ques. Si «y» n’existe pas, l’Etat A n’est pas

tenu de ne pas faire «x». Il n’a aucune obligation de notifier. L’accord reste en vigueur. Il n’y a

aucune obligation de motiver. Nous avons simplement atteint les limites de l’obligation imposée à

l’Etat A. Dans une autre mesure, la situation n’est pas automatique, à savoir pour ce qui est de la

15
Activités militaires et param ilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c.Etats-Unis d’Amérique),
compétence et recevabilité, arrêt, C.I.J. Recueil 1986, p. 170-172, par. 135-136.
16Décision rendue par S.M.OscarII, roi de Norv ège, en qualité d’arbitre, le 14octobre1902, Samoan Claims
(Allemagne, Grande-Bretagne, Etats-Unis), Reports of International Arbitral Awards, Vol. IX, p. 25. - 18 -

conséquence de l’arrêt de la situation «y». L’Etat A est en droit de faire «x», mais n’est pas tenu de

le faire ou de ne pas le faire. En l’absence d’une renonciation clairement implicite, un droit ne se

perd pas simplement parce que l’on ne s’en sert pas à une ou plusieurs occasions.

3. J’en viens maintenant au problème d’interprétation. Dans cette situation, dans laquelle les

intérêts des deux Etats doivent se voir accorder un poids égal, comment faut-il interpréter les

termes «x» et «y», tels qu’énoncés dans l’accord ? Il n’existe en droit international aucune

présomption d’interprétation restrictive des traités; tout dépend du contexte et des considérations

mentionnées dans la convention de Vienne. Mais ce qui est clair, c’est que rien ne justifie

26 d’interpréter «x» de façon large de manière à lier c onsidérablement l’EtatA, tout en interprétant

«y» de manière étroite, de sorte que l’Etat B est libre de détourner la situation intérimaire. C’est ce

que fait le demandeur ici. Il veut que vous a doptiez une interprétation large et souple de la

situation «x», et une interprétation étroite et très formaliste de la situation «y». Rien ne justifie

qu’il faille favoriser une partie à l’accord intérima ire au détriment de l’autre de cette manière.

Toutes autres choses étant égales par ailleurs, cette interprétation de l’accord intérimaire doit

maintenir le compromis intérimaire. Ce n’est pas ce que fait l’interprétation du demandeur.

4. Comment le demandeur tente-t-il d’éviter ce tte incohérence dans son interprétation? Il

fait valoir que la situation intérimaire préservée par l’accord intérimaire relève exclusivement de

l’organisation internationale concernée. Tout ce qu’il faut, c’est que l’organisation désigne le

demandeur sous le nom d’ex-Ré publique yougoslave de Macédoine ; le demandeur peut se donner

le nom qu’il veut tout comme peut le faire toute autre personne.

5. Cette interprétation soulève cinq problèmes au moins. Je les ai mentionnées vendredi et

m’attendais à ce que nos contradict eurs y répondent. Or, M. Murphy, à qui cette tâche incombait,

ne s’y est pour l’essentiel pas intéressé. Je reviendrai brièvement sur ce qu’il a dit, mais rappellerai

tout d’abord ⎯ tout aussi brièvement ⎯ les problèmes posés.

6. Le premier est ce que j’appellerai, par co mmodité, l’interprétation «institutionnelle» de la

clause de sauvegarde, laquelle ne tient aucun compte des termes mêmes de cette clause, en

particulier de l’expression «dans la mesure où». Cette interprétation est contraire à l’idée selon

laquelle les conditions nécessaires à l’application de la clause de sauvegarde sont remplies une fois

pour toutes au moment de l’admission à l’organisation concernée. - 19 -

7. Le deuxième est l’emploi de l’expression «doit être doté» au paragraphe 1 de l’article 11,

qui suggère que la condition n’est pas limitée à la date d’adhésion, et qu’elle va au-delà.

8. Le troisième est l’emploi de la forme passiv e et de l’expression «à toutes fins utiles» ; s’il

n’avait été fait référence qu’à l’adhésion, il aurait été facile de le dire.

9. Le quatrième problème concer ne les travaux préparatoires de l’article 11, dont je vous ai

parlé l’autre jour.

10. Le cinquième est le fait que l’interprétation préconisée par le demandeur n’offre aucune

protection au défendeur et ce, alors même qu’il est clairement indiqué dans l’accord intérimaire que

le défendeur sera largement protégé.

27 11. Pour les cinqraisons susmentionnées, l’ interprétation de la clause de sauvegarde

préconisée par le demandeur devrait être rejetée. La logique de l’obligation conditionnelle qui est

au cŒur du paragraphe 1 de l’article 11 ⎯ et de l’accord intérimaire dans son ensemble — devrait

l’emporter.

Les arguments présentés en réponse par le demandeur

12. Dans le cadre de leur second tour de pl aidoiries, lundi, les conseils du demandeur, menés

par M.Murphy, ont ⎯tout en ignorant la majeure partie de ce que j’ai dit la semaine dernière, y

compris les cinq points susmentionnés ⎯ présenté des arguments additionnels. Il m’a semblé en

dénombrer cinq.

13. Premièrement, M.Murphy a dit que la Grèce n’avait jamais invoqué la clause de

sauvegarde et que, en réalité, ce qui nous posait problème, c’était l’absence de règlement du

différend relatif au nom. C’est ce qu’il a dit, au paragraphe24 de son exposé. Je ne lirai pas le

passage en question, la Cour s’en souviendra 1. La première remarque qui s’impose en ce qui

concerne ce premier argument est qu’il y a confusion entre le fondement juridique d’un acte et les

motifs qui peuvent inciter un Etat à agir ou non de cette façon. Si le fondement juridique existe,

alors le motif perd généralement toute pertinen ce: la responsabilité est normalement établie de

manière objective tout comme, sauf abus de droit, l’absence de responsabilité. En ce qui concerne

le paragraphe1 de l’article11, le fondement juridique permettant d’élever une objection est

17
CR 2011/11, p. 27, par. 24 (Murphy) ; citations non-reproduites. - 20 -

simplement qu’il ait été satisfait à la condition é noncée. La question n’est pas de savoir sur quoi

était «fondée» l’objection putative du défendeur, mais si la condition était remplie au moment où le

défendeur a prétendument élevé son objection.

14. Nous ferons par ailleurs observer que l’argument susmentionné est subsidiaire à

l’interprétation restrictive que fa it le demandeur de la portée de la clause de sauvegarde. Si

l’interprétation «institutionnelle» est la bonne, il s’ ensuit qu’un seul élément de fait est pertinent

pour savoir si la clause de sauvegarde peut être invoquée ⎯à savoir, la pratique de

l’organisation ⎯ et que toute autre considération ⎯par exemple l’attitu de du demandeur par

rapport aux négociations— est dépourvue de pertinence. Le pr emier argument soulevé par

M. Murphy est également subsidiaire à l’allégation selon laquelle le défe ndeur pouvait invoquer la

clause de sauvegarde si et seulement si il avait à ce moment-là fait une déclaration, dans laquelle il

28 aurait mentionné les raisons pour lesquelles il invoq uait cette clause : il estime que l’invocation de

la clause de sauvegarde n’est possible qu’à la condition d’avoir déclaré qu’elle allait être invoquée ;

ce n’est pourtant pas ce que dit le paragraphe 1 de l’article 11. Nous n’avons pas à faire à un cas

d’extinction d’un traité, nous n’avons pas à fair e à un cas de suspension d’un traité, nous avons à

faire à un acte effectué conformément aux dispositions d’un traité.

15. Deuxièmement, M. Murphy a abondamment fait fond sur ce qu’il estime être le sens de

la résolution 817. Aux termes de cette résolution, a- t-il insisté, le demandeur est libre d’utiliser le

nom de son choix. Selon lui, si le demandeur est libre de s’auto-désigner comme bon lui semble en

vertu de cette résolution, il doit en aller de même en vertu du paragraphe1 de l’article11 de

l’accord intérimaire qui est, pour l’essentiel, libellé de la même manière. C’est ce qu’il a dit au

18
paragraphe 25 de son exposé . Le demandeur s’entête à nier que la résolution817 stipule une

appellation par laquelle il doit être désigné à toutes fins utiles. Il rappelle un certain nombre de ses

anciens arguments et en ajoute un ou deux nouveaux. Ayant déjà examiné les anciens arguments,

j’éviterai de me répéter 19. En ce qui concerne les nouveaux arguments, on nous dit que pour que le

Conseil de sécurité impose une ob ligation à un Etat, il doit indiquer expressément que cet Etat est

le [débiteur] de l’obligation en question. C’est en tout cas ce que le demandeur semblait vouloir

18
CR 2011/11, p. 27-28, par. 25 (Murphy).
19
Ibid., p. 14-15, par. 4 (Sands) ; p. 30, par. 33 (Murphy). - 21 -

dire lorsqu’il s’est référé à l’avis consultatif sur le Kosovo . En l’espèce, la Cour n’était cependant

21
pas appelée à se prononcer sur la question de savoir si la résolution 1244 (1999) était adressée à

un Etat ou à plusieurs Etats —elle l’était à l’évidence— mais si elle était adressée aux auteurs

d’une déclaration d’indépendance, alors même que, par définition, ceux-ci ne constituaient

pas ⎯ou ne constituaient pas encore— un Etat. L’analyse de la résolution1244 et donc

totalement dépourvue de pertinence en ce qui concer ne les obligations incombant au demandeur en

vertu de la résolution817(1993), résolutio n dont le demandeur est non seulement l’un des

destinataires, mais le destinat aire principal. Le fait que le demandeur se fonde sur de telles

analogies —aussi tirées par les cheveux— suggère un certain désespoir de sa part en ce qui

concerne sa défense de l’interprétation restrictive de la résolution817, défense fondée sur des

éléments divers mais jamais sur le texte même de la résolution, qui prévoyait que l’appellation

provisoire serait employée «à toutes fins utiles».

29 16. Monsieur le président, Mesdames et Messieu rs de la Cour, même si l’interprétation que

fait le demandeur de la résolution 817 était la bonne, cela ne serait pas nécessairement déterminant

aux fins de l’interprétation du pa ragraphe1 de l’article11, qui est la disposition de l’accord

intérimaire aujourd’hui en question. Il convient de relever que, dans le cadre du paragraphe1 de

l’article11, la référence à la résolution817 du Conseil de sécurité sert à préciser quelle est

l’appellation provisoire ⎯une incorporation par référence de la référence, pourrait-on dire. Le

paragraphe 1 de l’article 11 impose une obligation qui lui est propre, et qui ne fait pas partie de la

résolution 817 ⎯elle existe de manière autonome, a une portée différente, s’applique à des

organisations différentes. Les travaux préparatoires en sont différents, il a été adopté à une époque

différente, par des parties différentes et s’adressait à un public différent. Sa portée ne peut pas être

simplement considérée comme étant la même que celle de la résolution 817.

17. Le demandeur a présenté, comme élémen t de preuve de l’interprétation de la

résolution817 (1993) du Conseil de sécurité, une déclaration du Maroc, qui indiquait

notamment ⎯en ce qui concerne le dixième projet de résolution— qu’il «ne s’agi[ssait] pas là

20
Ibid., p.28, par.26 (Murphy), citantConformité au droit international de la déclaration unilatérale
d’indépendance relative au Kosovo, avis consultatif, C.I.J. Recueil 2010, par. 114-118.
21Résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité, 10 juin 1999. - 22 -

d’imposer au nouvel Etat un nom…mais seulement de la manière dont il sera désigné» 22. La

déclaration du Maroc est, en ce sens, exacte. Il est vrai que le Conseil de sécurité n’a pas imposé

un nom au demandeur. Il a au contraire indi qué une appellation ou, si vous préférez, une

désignation provisoire. Le terme «provisoire» a un sens. Il signifie que cette appellation n’est pas

permanente. Elle doit être remplacée à terme ⎯rapidement, était-il espéré. Le paragraphe1 de

l’article5 de l’accord intérimaire précise la ma nière dont cette appellation doit être remplacée.

L’appellation provisoire doit être remplacée par le s Parties au terme de négociations menées de

bonne foi. Il est absolument essentiel d’être clair sur ce point. Le demandeur a librement souscrit à

cette obligation. Elle était sa principale conces sion dans le cadre d’un marché dont il était très

largement bénéficiaire.

18. Troisièmement, étant parvenu à son interprétation de la portée de la clause de sauvegarde

en transposant au paragraphe1 de l’article11 celle qu’il a faite de la portée de la résolution817,

M.Murphy a campé sur sa position selon laquelle le demandeur n’était nulle ment tenu par ladite

clause de ne pas utiliser le nom qui a sa préfér ence; je vous renvoie au paragraphe45 de son

23
exposé . La question n’est cependant pas de savoir si la clause de sauvegarde impose ou non une

obligation au demandeur. Cette clause énonce en effet une condition limitant la portée de

l’obligation de la Grèce de «ne pas s’opposer». Point n’est besoin qu’une quelconque violation ait

30 été commise pour qu’il soit satisfait à cette condition. La violation d’une des obligations

incombant au demandeur au titre de l’accord intéri maire pourrait certes être pertinente aux fins de

savoir s’il a été satisfait à la condition en question, mais celle-ci est remplie — ou ne l’est pas —

indépendamment d’une telle violation. M. Murphy s’est longuement penché sur la pratique suivie

dans le cadre de la résolution8 17 du Conseil de sécurité et ce, afin de tenter de démontrer que le

demandeur n’était pas tenu de se désigner lui-même par la dénomination provisoire. Or, la pratique

en question est dépourvue de pertinence en ce qui concerne la condition énoncée dans la clause de

sauvegarde. En effet, quand bien même le dema ndeur aurait raison de dire qu’il n’est pas tenu

d’utiliser la désignation du Conseil de sécurité, cette clause est opérante par ses propres termes:

«ifand to the extent that» [«si et dans la mesure où», traduit par «si» dans la version française].

22
CR 2011/11, p. 29, par. 30 (Murphy) ; citant la réplique du demandeur, par. 4.42 et annexe 12.
23
CR 2011/6, p. 34, par. 45 (Murphy). - 23 -

J’ai déjà précisé ce point vendredi, ajoutant que «nos contradicteurs [avaient] eu beaucoup de mal à

comprendre en quoi consiste une condition» 24. Je crains fort qu’ils n’aient guère progressé dans la

compréhension de ce terme pendant le week-end, week-end qu’ils semblent avoir consacré aux

travaux de Shakespeare et aux comédies musicales de Broadway.

19. Cela leur a certainement permis d’approfondir leur culture, mais ne leur a pas pour autant

éclairci les idées. C’est qu’en effet, dès lundi, ils ont recommencé à affirmer ⎯ erronément ⎯ que

l’interprétation et l’application que fait la Grèce de la clause de sauvegarde repose sur l’idée que

cette clause engendre pour le demandeur et/ou l es Etats tiers de nouvelles obligations juridiques.

Mardi dernier, M.Murphy a déclaré: «[c]ette e xpression relativement simple n’en dit pas autant

[que ne le soutient la Grèce], particulièrement si l’on s’en tient au principe juridique fondamental

qui veut que les accords internationaux ne créen t [pas d’]obligation…pour des tiers sans leur

consentement» 25. Et lundi, il a de nouveau commis la même erreur en soutenant longuement que la

26
résolution817 n’imposait nullement au dema ndeur d’utiliser la désignation provisoire . Le

défendeur maintient sa position sur ce point, tout en réaffirmant qu’il n’est pas nécessaire, pour que

la clause de sauvegarde puisse être valablemen t appliquée, qu’une quelconque obligation incombe

au demandeur. Aussi, lorsque M. Murphy a dit que «[l]e Conseil de sécurité n’a[vait] pas renvoyé

les lettres [du demandeur] au secrétaire général, le réprimandant de les lui avoir transmises», il

s’est totalement fourvoyé. En réponse à notre pos ition concernant la clause de sauvegarde, le

demandeur a employé les termes: «pratique illicite et non-conforme». Or, rien d’«illicite» ou de

«non-conforme» n’est requis pour qu’il soit satisfa it à la condition énoncée par cette clause, aux

termes de laquelle la Grèce n’est plus tenue de «ne pas s’opposer». L’existence d’un

comportement illicite peut avoir une valeur probante, mais cela n’est pas nécessaire.

31 20. Quatrièmement, M.Murphy s’est fondé sur la pratique de l’Organisation des

NationsUnies et d’autres organisations internati onales en tant qu’elle c onstituerait la «pratique

institutionnelle» de la clause de sauvegarde ; il l’a fait au paragr aphe34 de son exposé 2. Cela

24CR 2011/9, p. 21, par. 4 (Crawford), faisant référence au CR 2011/6, p. 35, par. 46 (Murphy).
25
CR 2011/6, p. 35, par. 46 (Murphy) (référence omise).
26
CR 2011/11, p. 27-32, par. 25-34 (Murphy).
27CR 2011/11, p. 31-32, par. 34 (Murphy). - 24 -

démontre une fois encore qu’il n’a pas compris que la clause de sauvegarde énonçait une condition.

Cela revient aussi à ignorer que la campagne mise en Œuvre par le demandeur en vue de faire

valider le nom qui a sa préférence a eu des effets directs sur l’application de la clause de

sauvegarde. En effet, l’utilisation de plus en plus répandue de ce nom risque immanquablement de

conduire à ce que celui-ci soit également utilisé, à toutes
fins utiles, dans les organisations

internationales. Or, la clause de sauvegarde a précisément pour but de permettre à la Grèce de

prendre des mesures en pareille situation.

21. Cinquièmement, M. Sands a déclaré que le demandeur continuait d’agir de bonne foi, et

je le cite : «le demandeur n’a manifestement pas violé l’article 5 et []il a constamment négocié de

28
bonne foi avec le défendeur» . La référence faite aux propos de M.Nimetz pour étayer cette

affirmation a d’ores et déjà été examinée par M. Reisman. M.Pellet, qui prendra ma suite,

reviendra sur cette question plus en détail.

22. Tout en cherchant à se raccrocher à d es éléments de preuve émanant de tiers pour

démontrer qu’il a agi de bonne foi dans le cadre des négociations sur la question du nom, le

demandeur reste quasiment muet au sujet de sa stratégie avouée c onsistant à se contenter de se

payer de mots dans ces négociations. A cet égard, j’ai rappelé la semaine dernière la déclaration

politique que le président du demandeur avait faite en 2008, et dans laquelle il indiquait que, depuis

environ2004, le demandeur ava it décidé de n’accepter aucun autre nom que celui qu’il avait

lui-même choisi, son plan consistant à continuer de participer aux négociations tout en les privant

de portée. Le demandeur a presque totalement passé sous silence cette déclaration de son

président. M. Sands s’est ainsi contenté de fair e mention d’«une déclaration publique du président

du demandeur» 2, ajoutant qu’elle avait été faite trop tard pour pouvoir être considérée comme

30
pertinente . Et pourtant, le président y reconnaissa it que le demandeur avait mis son plan à

exécution quelques années plus tôt, et que celui-ci produisait des résultat
s ⎯ résultats auxquels la

Grèce a pu réagir au sommet de Bucarest, puisque la validation insidieuse du nom qui a la

28Ibid., p. 17-18, par. 9 (Sands).
29
Ibid., p. 50, par. 10 (Sands).
30Ibid., p. 50-51, par. 10 (Sands). - 25 -

préférence du demandeur ainsi que l’intransigeance dont celui-ci fait preuve à la table des

négociations étaient déjà manifestes bien avant le mois d’avril 2008.

32 23. M.Murphy prétend que cette déclaration ainsi que l’argument que nous en avons tiré

sont le fruit de notre imagination. Selon lui, le défendeur a «sort[i] de son chapeau un changement

qui se serait produit au milieu des années2000 ⎯ou plutôt un complot sournois qui aurait été

31
ourdi à cette époque» . Mais la Grèce n’a nullement «sor ti ce changement de son chapeau».

D’ailleurs, lundi dernier, M.Murphy lui-même avait clairement indiqué qu’un changement était

intervenu au milieu des années 2000 32 ! Il a toutefois laissé à la Grèce le soin de relever que cela

correspondait précisément à la «stratégie [du président] qui, pour des raisons aisées à comprendre,

n’a[vait] jamais été publiquement annoncée» 33 mais qui, depuis plusieurs années, était

«couronné[e] de succès» 34, tant sur le plan bilatéral que multila téral. Il s’agit là d’un rejet éhonté

de l’obligation librement consentie par le demandeur de parvenir à une solution négociée de la

divergence sur le nom. La Grèce a versé ladite déclaration au dossier en tant qu’annexe 104 de son

35
contre-mémoire, en a reproduit de larges extraits dans sa duplique , et en a souligné l’importance

36
lors du premier tour de plaidoiries . Eh bien, après avoir présenté un mémoire, une réplique ainsi

que ses propres exposés oraux pendant ces deux dernièr es semaines, le demandeur n’a toujours pas

daigné se prononcer sur cette question. Celle-ci est restée sans réponse.

24. L’élément essentiel de l’article 5 est que, par cette disposition, le demandeur a accepté de

ne pas exercer sa prérogative consistant à choisir lui-même son nom. Soit dit en passant, quand

bien même la Cour se serait vu conférer compéten ce pour choisir le nom en question, on voit mal

comment elle aurait pu le faire. En effet, l’unique règle du droit international en la matière est que

c’est à chaque Etat qu’il appartient de choisir son propre nom, tout comme il lui appartient de

choisir son drapeau ou son hymne national. A titre d’exemple, le chant national polonais

31
CR 2011/11, p. 20, par. 2 (Murphy).
32
CR 2011/5, p. 43, par. 20.
33Compte rendu sténographique de la 7 séance de la vingt-septième sessi on du Parlement de la République de

Macédoine, tenue le 3 novembre 2008 (les italiques sont de nous), p. 27-7/10 et 27-7/11 ; contre-mémoire du défendeur,
annexe 104.
34Ibid.

35Duplique du défendeur, par. 7.62.

36Voir, par exemple, CR 2011/9, p. 54-57, par. 22-29 (Crawford). - 26 -

commence par les mots «Lituanie, ô ma patrie», et personne ne s’en est jamais plaint! La Cour

n’est pas plus capable de choisir le nom d’un Etat que son drapeau ou son hymne national. En

matière de nom ou de drapeau, il n’ est guère possible que de statuer ex aequo et bono , et il

convient, selon moi, d’appliquer la maxime: de gustibus non est disputandum . C’est aussi pour

cette raison que l’exclusion de compétence énoncée au paragraphe 2 de l’article 21 ne saurait être

limitée à la question de savoir quel est le nom, puisque, en tout état de cause, la Cour ne peut se

prononcer au fond sur cette question. Ce nonobstant , même si la question du nom, du drapeau, ou

33 de l’hymne d’un Etat relève, en principe, de son domaine réservé ⎯tout comme la nationalité,

ainsi que cela a été indiqué dans l’avis sur les Décrets de nationalité 37 ⎯, tel n’est plus le cas à

partir du moment où cette question fait l’objet d’un engagement conventionnel. Ainsi, la règle

applicable au nom du demandeur est désormais celle qui est énoncée à l’article5 de l’accord

intérimaire, règle à laquelle les parties ont libre ment consenti. Et c’est cette règle que le

demandeur cherche à vider de sa substance.

25. Le demandeur prétend que, selon la Grèc e, «la seule dénomination acceptable que le

demandeur ou qui que ce soit d’autre pourrait u tiliser serait «ex-République yougoslave de

38
Macédoine»» ; là encore, il fait une interprétation erron ée de la position de la Grèce, tout comme

il fait une interprétation erronée de la situation qui résulte de l’accord intérimaire. La désignation

provisoire est la seule désignation acceptable jusqu’à ce que les deux Etats soient parvenus à une

solution négociée de la divergence sur le nom, la négociation étant le moyen prescrit pour parvenir

à cette solution. La manière dont le de mandeur présente la désignation provisoire ⎯ à savoir

comme un fardeau involontaire imposé par la Grèce ⎯ est révélatrice. Cela démontre une fois

encore que le demandeur n’accepte pas le proces sus de négociation, processus auquel il a pourtant

souscrit dans l’accord intérimaire. Quant à la Grèce, elle a, aux termes du paragraphe1 de

l’article11, pris un engagement, engagement qui n’était cependant pas censé se prolonger

indéfiniment et quelle que soit la manière dont le demandeur chercherait à établir son nom définitif.

37 o
Décrets de nationalité promulgués en Tunisie et au Maroc, avis consultatif, 1923, C.P.J.I. série B n 4, p. 24.
38CR 2011/11, p. 19, par. 10 (Sands). - 27 -

Documents de l’OTAN prouvant l’existence d’objections : l’impossible quête du demandeur

26. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, du second élément de

l’article11, la clause de sauvegarde, j’en viens maintenant au premier ⎯l’obligation de ne pas

élever d’objections. Il est incontestable que la Grèce, en application des critères et prescriptions de

l’OTAN, n’était pas en mesure d’appuyer la de mande d’adhésion du requérant à l’OTAN en 2008.

La Grèce a fait connaître ses vues. Mais, fait notable , le demandeur n’est toujours pas à même de

produire le moindre document de l’OTAN rendant compte de l’acte qui, selon ses dires, établirait

l’engagement de la responsabilité internationale de la Grèce au regard du premier volet de

l’article 11 ⎯ à savoir le prétendu acte d’opposition dont le refus d’inviter le demandeur exprimé à

Bucarest aurait été la conséquence. Le fait d’exposer ses vues ⎯fussent-elles très tranchées ⎯

dans les couloirs ne saurait constituer un tel acte. M. Murphy s’est référé à votre arrêt sur le fond

dans l’affaire Nicaragua, dans lequel la Cour a considéré plusieurs déclarations de hauts

représentants de l’exécutif américain comme des preuves à l’appui de la thèse du Nicaragua 39.
34

M.Murphy estime suffisant que ces déclarations aient été faites dans le cadre d’un «organe

politique national», et affirme que la Grèce a tort de soutenir qu’une déclaration formulée dans un

40
tel cadre ne suffit pas à établir l’existence d’une violation . Mais le Nicaragua mettait en cause

une intention d’user de contrainte. L’affaire portait sur l’emploi de la force. M. Murphy a dit : «La

Cour n’a jamais exigé, pour pouvoir conclure à la violation d’une règle internationale, que les

éléments attestant les agissements coupables d’ un Etat soient consignés dans des documents

41
revêtant une forme particulière.» Certes. Mais la Cour n’a jamais non plus été invitée à conclure

que l’acte formel de participation au processu s décisionnel d’une organisation internationale

constituait une violation d’un traité bilatéral. C’est parce que des Etats ont recours à la force, ou

menacent d’y avoir recours, en dehors du cadre des autorisations formelles accordées par une

organisation internationale que des demandes comme celles formulées alors par le Nicaragua

peuvent voir le jour. Le requé rant, en revanche, soutient que la Grèce a objecté à sa demande

d’adhésion à l’OTAN, acte qui aurait en lui-même eu pour conséquence de différer son

39
CR 2011/11, p.25, par. 16, note 35, citant, entr e autre l’affaire des Activités militaires et paramilitaires au
Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c.Etats-Unis d’Amérique), fond, arrêt, C.I.J.Recueil1986, p. 21 et 92, par. 20
et 170.
40
Ibid., citant le CR 2011/9, p. 49-50, par. 10 (Crawford).
41Ibid., par. 17 (Murphy). - 28 -

42
admission . Pour l’avenir, en outre, il se préoccupe de ce que la position du défendeur puisse

avoir «des conséquences pour l’entrée du de mandeur à l’OTAN et également à l’Union

43
européenne» . La demande du requérant concerne un acte intervenu dans un cadre institutionnel ;

elle ne peut se comprendre s’il est fait abstrac tion des conditions, règles et procédures en vigueur

dans ce cadre.

27. En outre, pour le demandeur, son incapacité à produire le moindre document de l’OTAN

attestant la violation alléguée serait sans importance parce que «le paragraphe1 de l’article11

44
traite de l’«opposition» du défendeur, et non de celle de l’OTAN» . Mais c’est là confondre la

question de l’attribution et celle du contenu de l’obligation sous-jacente qui aurait été violée.

L’absence de preuves documentaires produites par le demandeur ne dit rien de l’attribution ⎯ de la

question de savoir si, comme le soutient la Gr èce, l’OTAN porte seule la responsabilité de la

décision de différer l’invitation, ou si la Grèce, d’une façon ou d’une autre, la partage avec

l’Alliance. Dans les deux cas de figure, le dema ndeur allègue à l’évidence la violation d’une

obligation spécifique. Il doit produire des élém ents de nature à prouve r cette violation, que

35
l’OTAN partage ou non cette responsabilité avec la Grèce. Or, selon cette dernière, le seul élément

de preuve qui eût été à même d’établir l’existe nce d’une objection au sens du paragraphe1 de

l’article 11 n’a pas été soumis dans le cadre de la présente instance.

28. M. Murphy affirme que le demandeur «vous a présenté à titre d’exemples plusieurs des

45
très nombreux éléments de preuve attestant [l’]opposition» du défendeur . Notez bien le choix du

terme qu’il a utilisé en anglais: opposition, et non objection. Dans sa plaidoirie, M.Murphy

46
consacre dix paragraphes à la question de l’«opposition» à l’adhésion . C’est là un autre exemple

de la propension du demandeur à reformuler l’accord intérimaire pour les besoins de sa cause.

42Requête du 13 novembre 2008, p. 9, par. 20 : «Le présent différend concerne les actes du défendeur visant, en
violation flagrante des obligations que lui impose l’accord intérimaire, à empêcher le demandeur d’être invité à adhérer à
l’OTAN.»

43CR 2011/1, p. 34, par. 41 (Murphy).
44
Ibid., p. 25, par. 17 (Murphy) ; les italiques sont dans l’original.
45CR 2011/11, p. 23, par. 11 (Murphy).

46Ibid., p. 23-26, par. 11-20 (Murphy). - 29 -

Mais lorsqu’il s’agit d’établir un lien entre les él éments attestant l’opposition alléguée de la Grèce

et son obligation de ne pas élever d’objections («not to object»), le demandeur se contente

d’affirmer, sans la moindre analyse à l’appui de son assertion, que le défendeur a «délibérément et

47
clairement violé» l’article 11 .

29. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, le défendeur n’était pas censé

appuyer la candidature du demandeur, et ce, conformément aux critères et prescriptions de

l’OTAN. La question qui se pose, toutefois, n’est pas celle de son degré d’enthousiasme, ou de son

manque d’enthousiasme, mais de savoir si le défendeur a élevé des objections au sens du

paragraphe1 de l’article11, et au sens spécifié par le demandeur lorsqu’il a introduit la présente

instance. Le principal exemple auquel s’est référé M. Murphy lundi dernier était un point de presse

tenu le 3avril2008 par le porte-parole de l’OT AN. M.Murphy en a isolé deux lignes, qu’il a

48
présentées comme des preuves décisives de l’existence d’objections . Or, qu’a dit le

porte-parole ? «[C]omme la délégation grecque l’a fait savoir en des termes très clairs, tant que la

49
question du nom ne sera pas réglée⎯ et elle ne l’a pas encore été —, cela ne sera pas possible» et

«[l]e Gouvernement grec a été très clair, y compris au cours des discussions qui se sont déroulées

ce soir. Tant que la question du nom ne sera pas réglée et à moins qu’elle ne le soit, on ne saurait

s’attendre à ce qu’il y ait un consensus quant à la décision d’adresser à l’ex-République yougoslave

de Macédoine une invitation à en tamer des pourparlers d’adhésion.» 50 MaisM.Murphyn’apas

cité les propos qui précèdent et suivent immédiatement ces extraits. Car il ne s’agit pas ici d’une

décision de l’OTAN. Le porte-parole de l’OTAN, en introduction à son intervention, l’a

36 clairement indiqué. Au sortir d’un dîner avec les participants au sommet de l’OTAN, il a déclaré

51
aux journalistes: «Les décisions finales…auront lieu demain.» ⎯c’était donc la veille de la

décision finale ⎯ et, d’emblée, a tenu à «[p]récis[er]…qu’il s’agissait d’une réunion

informelle» 52. Et après les propos dont M. Murphy affirment qu’ils établissent de manière décisive

47Ibid., p. 26, par. 21 (Murphy).
48
Ibid., par. 19.
49
Ibid., p. 25, par. 18 (Murphy), citant le contre-mémoire, annexe 30, p. 22.
50Ibid., citant le contre-mémoire, annexe 30, p. 3.

51Contre-mémoire, annexe 30, p. 1.

52Ibid. - 30 -

que «le défendeur [était] no mmément désigné par l’OTAN» 53, il a conclu en ces termes: «c’est

54
donc là que nous en sommes en ce qui concerne le nom» . Pas «là où la Grèce se trouve». Pas «la

Grèce a opposé son veto». Pas «la Grèce a fait objection». Mais bien «là que nous» ⎯ autrement

dit l’Alliance ⎯ «en sommes».

30. A cet égard, je ne peux m’empêcher de relever la tendance qu’ont nos contradicteurs à

taxer la Grèce de malhonnêteté, de lâcheté et autres défauts de caractère. Nos amis, lundi dernier,

étaient pleins «de bruit et de fureur». Mais cessons-là les références à Shakespeare. Le fait est que

la Grèce a fait montre d’ouverture, dans le point de vue qu’elle a adopté quant à la position de

l’Etat demandeur avant Bucarest, tout comme elle s’est montrée ouverte après. La question de

savoir si sa position constituait une objection au sens du paragraphe1 de l’article11 est bien sûr

une question qu’il vous revient de trancher, et une question de droit.

L’article 22

31. J’en viens à ma troisième remarque, qui concerne l’article 22. Lundi dernier, le conseil

du demandeur s’est à nouveau penché sur celui-ci 55. Il conteste l’interprétation que nous en

56 57
donnons , et affirme avoir, en tout état de cause, satisfait aux critères d’admission à l’OTAN , de

sorte que l’article22, quelle que soit l’interprétation que l’on en retienne, ne trouverait pas à

s’appliquer: «l’article ne vient aucunement étayer la thèse du défendeur», c’est ainsi que l’a

58
formulé M. Sands .

53
CR 2011/11, p. 26, par. 20 (Murphy).
54
Contre-mémoire, annexe 30, p. 2 ; les italiques sont de nous.
55 CR 2011/11, p. 45-51, par. 2-11 (Sands).

56 Ibid.

57 CR 2011/11, p. 20, p. 32-33, par. 4 et 37 (Murphy) ; p. 58, par. 7 (Dimitrov).
58
Ibid., p. 51, par. 11 (Sands). - 31 -

32. Commençons par l’argument du demandeur con cernant l’interprétation : si l’article 22 a

59
le sens que nous lui prêtons, la première clause du paragraphe 1 de l’article 11 serait sans effet et,

par exemple, les clauses relatives à l’Union européenne figurant dans l’accord seraient

60
37 superfétatoires . Le défendeur a déjà exposé les bases sur lesquelles repose son interprétation de

61
l’article22, et je ne les répèterai pas ici . Je reviendrai simplement sur ce qui a été dit lundi

dernier.

33. Tout d’abord, j’observerai que l’article 22 étant l’une des clauses finales, il s’applique à

l’ensemble de l’accord intérimaire. Le rapproche ment qu’il convient d’opérer entre l’article 11 et

l’article 22, sur lequel a insisté M. Reisman, déc oule du fait que l’article 22 s’applique de manière

générale à tout l’accord ⎯il est la conséquence logique de la nature ⎯de clause finale ⎯ de

l’article 2262. En d’autres termes, le paragraphe1 de l’article11 doit être lu à la lumière de

l’article22, comme doit l’être toute autre disposition auquel ce dernier pourrait s’appliquer. Le

demandeur, s’il a affirmé qu’«[i]l existe des dispos itions similaires à celles de l’article 22 dans de

nombreux autres accords internationaux» 63, n’en a analysé aucune; et il n’a rien dit de l’article8

du traité de l’Atlantique Nord, en dépit de l’ évidente pertinence de cette disposition en ce qui

64
concerne l’article 22 .

34. S’agissant des clauses relatives à l’Union européenne, le conseil du demandeur soutient

que les articles15, 16 et17 concernent égalemen t des thématiques qui relèvent de l’Union sans

65
que, pour autant, les rédacteurs aient jugé bon d’y insérer de telles clauses . Prenant pour exemple

l’article15, M.Sands affirme qu’«il est diffi cile de penser à un dom aine où la Communauté

économique européenne disposait de compétences plus exclusives que celui-ci; or, cet article ne

66
contient aucune clause restrictive» . Mais il omet de mentionner la conséquence directe de ce

59Ibid., p. 49-51, par. 8-11 (Sands).

60Ibid., p. 48-49, par. 7 (Sands).
61
CR2011/9, p.39-46, par.1-21 (Reisman); duplique, p. 78-88, par. 5.4-5.18 ; contre-mémoire, p.134-145,
par. 7.26-7.56.
62
CR 2011/11, p. 49, par. 8 (Sands).
63
Ibid., p. 47, par. 3 (Sands).
64CR 2011/9, p. 41-42, par. 11 (Reisman).

65CR 2011/11, p. 49, par. 7 (Sands).
66
Ibid. - 32 -

raisonnement: l’article15 ne contenant pas de clause faisant spécifi quement référence aux

obligations liées à la qualité de membre de l’Uni on européenne, il serait susceptible d’«empiéter

sur les compétences exclusives attribuées à la Commission européenne dans ces domaines» 67. Ce

n’est bien sûr pas ce que la Grèce avait accepté. C’est la raison pour laquelle l’accord intérimaire

fait figurer l’article 22 sous l’intitulé «clauses finales», le rendant d’application générale à chaque

disposition qui le précède. A nier qu’il soit d’ap plication générale, on achoppe sur des problèmes

que les propres exemples du demandeur mettent en évidence.

35. Le demandeur opte ensuite pour une autre tactique: agiter le spectre de l’effet de

l’article 11. M. Sands a mentionné l’absurdité d’une situation dans laquelle «le défendeur a le droit
38

d’élever des objections dans toutes les organisations internationales où celles-ci pourraient être

suivies d’effet» et commenté que «l’effet de son argument est dévastateur pour l’accord intérimaire
68
et la stabilité que ce dernier visait à créer» .

Mais il n’y a là aucun problème de stabilité. Le paragraphe 1 de l’article 11 remplit toujours

la fonction qu’il était censé remplir, et il le fait en imposant à la Grèce une obligation spécifique.

La Grèce est tenue de ne pas «élever d’objections», sous réserve des critères d’adhésion de chaque

organisation.

36. Le demandeur fait constamment fi de ces critères, ou en nie l’existence, lorsque les

conséquences n’en sont pas à son goût. C’est ce qui l’amène à méconnaître la relation entre

l’article22 et le paragraphe1 de l’article11. Le défendeur a ef fectivement «le droit d’élever des

objections dans toutes les organisations internationales où celles-ci pourraient être suivies d’effet

⎯ les organisations fermées» ⎯ mais seulement si les règles et les critères de ces organisations lui

imposent, compte tenu des circonstances de la de mande d’adhésion, l’obligation d’objecter. Dans

son avis consultatif sur les Conditions de l’admission, la Cour a clairement indiqué qu’un Etat ne

pouvait ajouter des critères non spécifiés dans le cadre du règlement ou de la pratique de

69
l’organisation . Si la Grèce objecte parce qu’elle est parvenue à la conclusion, au regard du

règlement applicable, qu’une objection s’im posait, alors cette objection est valide ⎯ tant du point

67
Ibid., citant CR 2011/9, p. 41, par. 10 (Reisman).
68
CR2011/11, p. 50, par. 9-10 (Sands).
69 Conditions de l’admission d’un Etat comme Membre des NationsUnies (article4 de la Charte), avis
consultatif, 1948, C.I.J. Recueil 1947-1948, p. 57, p. 63. - 33 -

de vue du règlement de l’organisati on que de celui du paragraphe1 de l’article11, tel que lu à la

lumière de l’article22. En revanche, si la Grèce objecte en violation du règlement de

l’organisation, elle aura enfreint ses obligations non seulement vis-à-vis des autres Etats membres

et de l’organisation elle-même mais également, par le jeu de l’article11, vis-à-vis du demandeur.

39 Interprété sous l’éclairage de l’ article22, le paragraphe1 de l’ article11 protège le demandeur en

faisant de l’obligation incombant à la Grèce d’appliquer les règles relatives à l’acquisition de la

qualité de membre d’organisations une obligatio n non seulement à l’égard de ces organisations,

mais également à l’égard du demandeur.

37. Le demandeur affirme que «[ l’]article22 ne visait pas à rétablir la situation qui existait

avant cette concession. L’article11 limite ou ne limite pas ce droit; il s’agissait ou non d’une

concession majeure.» 70. Nous en convenons: la situation, après l’adoption du paragraphe1 de

l’article11, est effectivement différente de la s ituation qui prévalait aupa ravant. Le demandeur,

tierce partie, a désormais un intérêt juridique à ce que nous appliquions comme il se doit les règles

d’acquisition de la qualité de membre en vigueur dans les organisations multilatérales fermées. Par

le jeu de l’article22, ces règles demeurent in changées; mais par le jeu du paragraphe1 de

l’article 11, la responsabilité potentielle de la Grèce en cas de violation s’est élargie. La marge de

manŒuvre de la Grèce à l’égard des demandes d’ adhésion du requérant a donc été limitée, mais

elle n’a pas été abolie.

38. J’ai déjà dit que le demandeur ne faisait aucun cas des critères d’adhésion des

organisations internationales en tant qu’élé ment nécessaire à la bonne interprétation du

paragraphe 1 de l’article 11 et de l’article 22, ou qu’il niait l’existence de ces critères. Il importe de

bien préciser les critères que l’OTAN a énoncés en ce qui concerne la candidature du demandeur.

Nous les avons énumérés à maintes reprises, en nous appuyant sur les documents de l’OTAN qui

font autorité ; mais puisque le demandeur en nie l’existence, je me vois malheureusement contraint,

Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, de m’y référer une fois de plus.

39. Le demandeur affirme catégoriquement que, en avril 2008, le report de sa candidature ne

s’imposait au regard d’aucun des critères de l’OTAN. Ainsi s’exprime M. Murphy :

70
CR 2011/11, p. 51, par. 11 (Sands). - 34 -

«[I]l n’y a absolument rien dans le dossier ⎯pas la moindre preuve ⎯
indiquant que l’OTAN aurait posé comme critère d’admission le règlement préalable

de la divergence au sujet du nom ou que la condition relative à l’entretien de
«relations de bon voisinage» signifiait que la divergence au sujet du nom devait
d’abord être réglée; aucun élément versé au dossier ne vient à l’appui de cette
71
affirmation.»

40. Pourtant, dès le début de ses relations avec le demandeur, l’OTAN a précisé que le

règlement des divergences constituait une condition à l’adhésion de celui-ci. Cette condition ne

s’applique pas uniquement au demandeur, mais à tous les Etats. Ainsi, en1997, le secrétaire

général de l’OTAN a déclaré que «[l]a possibilité de devenir membre de l’OTAN a[vait] incité de

nombreuses nations d’Europe centrale et orientale à mettre un terme à de vieilles querelles, à des

72
différends frontaliers ou à des problèmes de sécurité jusque là restés sans solution» . En

janvier 2008, le secrétaire général de l’OTAN a établi un lien direct entre la question du nom et les

relations de bon voisinage, déclarant que «[b] ien évidemment, l’intégration euro-atlantique

demand[ait] et exige[ait] également des relations de bon voisinage et [qu’] il [était] manifeste que

les appels à trouver une solution à la question du no m [avaient] été nombreux autour de la table,

73
question qui n’[était] pas l’affaire de l’OTAN» . Sauf à considérer que le secrétaire général s’est

exprimé au mépris de toute logique, le lien entr e les relations de bon voisi nage et les «appels à

trouver une solution à la question du nom» était bien «manifeste». La déclaration du sommet de

Riga du 29novembre2006 exigeait notamment «des relations de bon voisinage ainsi que la

recherche de solutions mutuellement acceptables pour les questions en suspens» 74, la déclaration de
40

Bruxelles du 2décembre2007 en appelait à des «solutions mutuellement acceptables intervenant

75
en temps opportun pour les questions en suspens» , et je vous épargnerai la liste des déclarations

ultérieures de l’OTAN confirmant qu’«une solution mutuellement acceptable…à la question du

76
nom» constituait une condition à l’admission du demandeur .

71CR 2011/11, p. 32, par. 37.
72
Duplique, annexe 52, citée dans la duplique, p. 108-109, par. 6.4.
73
Contre-mémoire, annexe 26, citée dans la duplique, p. 110, par. 6.8.
74Contre-mémoire, annexe 23, citée dans la duplique, p. 112, par. 6.9.

75Ibid., annexe 25, citée dans la duplique, p. 112, par. 6.9.
76
Communiqué final, Bruxelle s, 3 décembre 2008, par. 17 : contre-mémoire, annexe32, cité e dans la duplique,
p.113, par.6.10. Voir également la déclaration de Strasbourg-Kehl du 4avri l2009; contre-mémoire, annexe35, citée
dans la duplique, p. 113, par. 6.10. - 35 -

41. Monsieur le président, Mesdames et Messieursles juges, le demandeur a accusé le

défendeur de traiter les éléments de preuve avec «désinvolture» 77. Dans de nombreuses affaires,

les éléments de preuve versés au dossier sont si nombreux qu’une telle attitude serait excusable.

Mais en l’espèce ils ne le sont pas et nous ne sommes pas «désinvoltes» à leur égard. Le défendeur

a reconnu les faits - et ceux qui, je suppose, concer nent le plus le demandeur, à savoir ceux relatifs

à la position de la Grèce à l’égard de la dema nde d’admission du demandeur à l’OTAN, la Grèce

les a reconnus ouvertement. Elle a déjà dit que les faits qui comptent sont ceux qui se rapportent au

processus d’élargissement de l’OTAN. A l’issue de la procédure écrite et de plusieurs tours de

plaidoiries, le demandeur continue de le nier.

42. Au lieu d’accorder crédit aux déclarati ons de l’Alliance quant à ses propres critères

d’adhésion, le conseil du demandeur prétend que ce qui s’est vraiment passé, c’est que «les

membres de l’OTAN ont à l’époque plaidé pour que le défendeur s’en tie nne aux obligations qui

78
lui incomb[aient] en vertu de l’accord intérimaire» . Mais le seul «plaidoyer» que l’on trouve

dans les déclarations de l’OTAN est l’«appel» à régler la question du nom avant que le demandeur

puisse être invité à adhérer à l’organisation 79. Non seulement les allégations du demandeur ne

reposent sur aucun élément de preuve, mais elles sont contredites par ceux qui ont effectivement

été versés au dossier. Lorsqu’ il s’agit de déterminer quelles étai ent les conditions d’élargissement

de l’OTAN, ce sont les déclarations de cette organisation qui comptent.

43. Le conseil du demandeur voudrait faire croire à la Cour qu’il faut «un sens consommé de

la divination» ⎯un sens consommé de la pa rt du défendeur, s’entend ⎯ et entrevoir «toutes

41 sortes de sens cachés et d’insinuations inopinées» 80 pour comprendre que l’OTAN considérait le

règlement de la question du nom comme un facteur décisif. Compte tenu des éléments de preuve

que constituent les nombreuses déclarations de l’ OTAN, une telle assertion est choquante, et elle

l’est d’autant plus lorsque le demandeur insinue, sans en apporter la moindre preuve sérieuse, que,

77CR 2011/11, p. 14, par. 4 (Sands).
78
Ibid., p. 33, par. 37 (Murphy).
79
Contre-mémoire, annexe 26, citée dans la duplique, p. 110, par. 6.8.
80CR 2011/11, p. 33, par. 37 (Murphy). - 36 -

avant le sommet de Bucarest, l’OTAN avait mis la Grèce en garde à propos de son interprétation de

l’accord intérimaire. Il existait un différend régional en suspens ; il n’était pas réglé en avril 2008.

Il s’agissait de la question du nom et l’OTAN av ait indiqué clairement que cela constituait une

difficulté pour la candidature du demandeur.

44. Le demandeur invite la Cour à conclure que le règlement de la divergence relative au

nom n’était pas une condition imposée par l’OTAN, mais qu’elle a été imposée unilatéralement par

la Grèce. Il s’appuie sur un aide-mémoire du défendeur pour soutenir que «[l]a conclusion

satisfaisante des … négociations» n’était pas un critère de l’OTAN ni, d’ailleurs, une considération

qui puisse valablement être prise en compte 8. Malheureusement, la manière dont il traite le texte

appelle la prudence. Le conse il du demandeur a cité un extrait de l’aide-mémoire. Il a soutenu

qu’il y était écrit ce qui suit : [projection à l’écran]

«outre les critères d’adhésion…[l]a conclusion satisfaisante desdites négociations

[sur la question du nom était] une condition impérative 82ur que la Grèce continue de
soutenir les aspirations euro-atlantiques de Skopje» .

Mais la phrase «outre les critères d’adhésion» n’était même pas dans le même paragraphe que celle

qui suit les points de suspension. A quoi l’expressi on «outre les critères d’ adhésion» faisait-elle

référence dans le texte d’origine ? Elle faisait référence au fait qu’«il [était] d’importance capitale

que tous les niveaux de sécurité, militaires et politiques, soient correctement utilisés par les

processus d’élargissement». Mais servir l’objec tif global de sécurité de l’Alliance a toujours

constitué une condition dans le cadre du processus d’élargissement. L’aide-mémoire n’ajoutait

absolument aucun critère d’adhésion supplémenta ire. Quant à «[l]a conclusion satisfaisante

des…négociations» sur la question du nom, l’OTAN en avait déjà fait une condition. Que la

Grèce convienne que cela était important ne modifiait en rien la condition. La Grèce n’a jamais dit

que «[l]a conclusion satisfaisante des…négocia tions» sur la question du nom était sa propre

invention ou qu’elle avait ajouté cette condition aux critères d’adhésion établis par l’OTAN.

45. Le conseil du demandeur pr étend que, début2008, celui-ci touchait à l’étape finale du

processus d’adhésion à l’OTAN 83. En fait, il soutient que le demandeur satisfaisait pleinement aux

81CR 2011/11, p. 24, par. 14 (Murphy).
82
Ibid., citant le mémoire, annexe 129, p. 3.
83CR 2011/5, p. 18, par. 7 (Miloshoski). - 37 -

84
42 critères d’adhésion de l’OTAN . Mais c’est aux membres de l’OTAN qu’il appartient de trancher

cette question. Elle est bien au-delà de la compétence interprétative de la Cour. Mais quoi qu’il en

soit, j’aimerais vous rappeler les termes empl oyés par le premier ministre du demandeur,

M.Gruevski: «la question à régler [il parlait de l’OTAN] [est] celle du différend avec la Grèce

85
relativement au nom» .

Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les juges, merci pour l’attention que vous

avez bien voulu porter à cette intervention très dense. Monsieur le président, je vous saurais gré de

bien vouloir appeler M. Alain Pellet à la barre, non sans avoir peut-être au préalable pris un peu de

caféine.

Le PRESIDENT : Je remercie M. Crawford pour son exposé. Je vais inviter M. Alain Pellet

à prendre la parole, mais il est convient peut-être de faire une brève pause-café auparavant. La

Cour va faire une pause de dix minutes, jusqu’à 16 h 40.

L’audience est suspendue de 16 heures à 16 h 45.

Le PRESIDENT: Veuillez vous asseoir. La Cour reprend sa séance et j’invite maintenant

M. Pellet à prendre la parole.

M. PELLET : Merci, Monsieur le président. Je n’avais certainement pas besoin de café.

THE A PPLICANT ’S VIOLATIONS OF THE ACCORD
G REECE ’S DEFENCES
REMEDIES

1. Mr.President, Members of the Court, th e Court lacks jurisdiction to pronounce on the

Application submitted to it by the former Yugosla v Republic of Macedonia. And, in the unlikely

event of you taking a different view, you would be bound to conclude that Greece cannot be held

responsible for a breach of Article11 of the In terim Accord. “Game over”, as ProfessorMurphy

86
declared perhaps a little too triumphantly(moreover, unlike his sons, mine tell me that the phrase

84
CR 2011/5, p. 54, par. 56 (Murphy).
85Point de presse conjoint du secrétaire général de l’OTAN, M. Jaap de Hoop Scheffer, et du premier ministre de

l’ERYM, M. Nikola Gruevski, 23 janvier 2008 : contre-mémoire, annexe 26.
86CR 2011/11, p. 26, para. 19 (Murphy). - 38 -

43 “game over” shows up when you have lost . . .) ⎯ but in any event, a case before the Court is not

an electronic game, even on a Nintendo console... (and I say that, Mr.President, without

implying any criticism whatever of that undoubted triumph of Japanese technology!). In any event,

we need to press “resume”, because ⎯ as Mr. Murphy’s son will explain to him ⎯ a game is only

finished when all the levels have been completed (an English phrase which has passed into French).

The next level (if the FYROM were to reach it without the Court declaring “game over”) would be

that of ascertaining whether, outside the closed system within which the Applicant is conducting its

argument, there are not other reasons for su spending Greece’s obligations under the Interim

Accord.

2. My task this afternoon is once again to say a few words on the obligations deriving from

that Accord which have been violated by the FYROM(I) and the consequences resulting from

those breaches(II), before commenting very briefl y on the “remedies” sought by the applicant

State (III).

I. HE VIOLATIONS OF THE INTERIM ACCORD ATTRIBUTABLE
TO THE A PPLICANT

3. Mr. President, the applicant State wishes to be seen as the victim of a vindictive neighbour

which has amassed a number of hair-splitting and “trivial” accusations ⎯ it has persisted with that

87
adjective to the end ⎯ so as to prevent it, without due cau se, from entering NATO. This is a

strange accusation, coming from a Party which assiduously presents the case it has brought before

88
the Court as “a simple and narrow case of pacta sunt servanda” . While there is no doubt that the

Interim Accord is a treaty which is in force and binding on the Parties, it binds both of them, and

the breaching of it by the Applicant must have th e resulting consequences in terms both of the law

of treaties and the law of responsibility. But let us deal first with the internationally wrongful acts.

4. So, Mr.President, the vi olations of which we are accusing the FYROM are said to be

“trivial”. As trivial as

87
See CR 2011/7, pp. 23-24, para. 58 (Sands); see also CR 2011/11, p. 54, para. 18 (Sands).
8CR 2011/5, p. 21, para. 14 (Miloshoski); see also ibid., p. 28, para. 12 (Sands) and CR 2011/11, p. 55, para. 20
(Sands). - 39 -

⎯ the throwing of “pebbles”, about which Professo r Sands was so ironical. The origin of the

incident was an anti-Hellenic march by 10,0 00people against the Greek Liaison Office in

Skopje, and it nonetheless resulted in nine poli cemen being injured (a n inadequate number

44 having been sent out), one of them seriously , according to the Macedonian information

agency 89; and even if these incidents were to be played down, their recurrence is still

extremely worrying; our Counter-Memorial cont ains some 20 examples of Notes Verbales in

which the Greek Liaison Office in Skopje compla ins about the repeated attacks on its premises

90
and the weakness of the protection being afforded to it ;

⎯ and is it really such a trivial matter that the applicant State is funding parties and associations

which openly promote irredentist policies 91, and that its Prime Minister sanctions by his

presence and his silence comments which are clearly aimed at prejudicing the territorial

integrity of Greece 92?

5. Is it sufficient for the Applicant’s obligati ons to negotiate which we are invoking to be

qualified as “trivial” in order for them to be . . . disqualified? Oh, I know very well how, in its first

round of pleadings last Monday 93, the Applicant relied on the certificate of good conduct

94
supposedly awarded to it by Ambassador Nimetz . But that is its only argument, and with all due

respect to my honourable opponents, it is not a very serious one, as Professor Reisman has pointed

out: unless he wants to torpedo the mediation for which he is responsible, it is hard to see the

Special Representative of the Secretary-General viol ently criticizing the Parties. I would also note

that, while the statement in question was indeed made on 9 February 2011, a point which has been

laboured by the Applicant’s counsel, this assessment ⎯ for which the Applicant has given us a

reference which only exists in Slavomacedonian (and I make the point in passing that the

inhabitants of the FYROM do not speak a language inherited from that of Philip and Alexander of

Macedon, but a Slavic language) ⎯ this assessment, as I was saying, referred to the meeting of the

8MIA, Skopje, 28Feb.2001, “Nine poli cemen injured in incidents after peaeful protest at ‘Pela’ square”,
accessible at: www.mia.com.mk/default.aspx?vId=37185105&lId=2; see Counter-Memorial, Ann. 47.

9Counter-Memorial, Anns. 41-53, 55-61 and 65.
91
See ibid., pp. 41-42, paras. 4.23-4.24, or CR 2011/10, p. 14, para. 7 (Telalian).
92
See Counter-Memorial, Ann. 124.
9CR 2011/5, p. 20, para. 11 (Miloshoski); CR 2011/7, p. 19, para. 48 (Sands).

9CR 2011/11, p. 18, para. 9 (Sands) and ibid., p. 57, para. 5 (Dimitrov). - 40 -

two prime ministers more than a year before: “There is a positive attitude for solving the problem,

said Nimetz, assessing last year’s meetings of Greek and Macedonian PrimeMinistersGruevski

95
45 and Papandreou as progress in the effort to reach a solution.” And even if Mr. Nimetz had put on

rose-tinted spectacles, or been led astray by th e FYROM’s protestations of good faith, his belated

pat on the back (which applies to both Parties, moreover) should not allow us to forget that for

16years now, the FYROM has been doing its best to scupper the negotiations, as I demonstrated

96
last Friday , without since being contradicted:

97
⎯ apart from the sham of March 2008 , the Applicant has never made the slightest move towards

a compromise of any kind;

⎯ by seeking to impose a fait accompli by means of its recognition under a name which is the

subject of the negotiation it has committed itself to, it is knowingly and deliberately

endeavouring to prevent that negotiation from “reaching an agreement on the difference” over

its name, in disregard of the provisions of Article 5 of the Interim Accord; and

⎯ by clinging to the “dual formula”, it is excl uding from the scope of the negotiations what

constitutes their very subject: seeking a compre hensive solution to “the difference that has

arisen over the name of the State”.

[Slide 1 ⎯ Add in turn each of the citations corresponding to an indent]

6. It must be seen that Greece’s accu sation on this point is far from trivial: not once – not

even once, Mr.President ⎯ has the Applicant addressed the question, which it completely

sidestepped in its written pleadings and on which it has said not a single word during the ten hours

or so of its oral argument. It is a more than eloquent silence ⎯ it is one that speaks loudly, indeed

trumpets, since our friends and opponents like to refer to elephants! I can therefore only say it

again 98: the sine qua non decision to keep to the dual form ula inevitably means stalemate in the

95
Balkan Insight, “No Breakthrough After Greece, Macedonia Name Talks”, 10Feb. 2011; emphasis added
(judges’ folder, tab 3).
96CR 2011/9, pp. 64-68, paras. 19-26 (Pellet).

97Ibid., pp. 65-66, para. 22 (Pellet).

98See Counter-Memorial, pp.30-31, para. 3.47, pp.34-35, para s. 4.8-4.9, or pp.183-104, para.8.39; Rejoinder,
pp.15-16, para.1.10, pp.27-38, para. 3.5, pp.74-75, paras. 4.25-4.26, pp. 167-173,paras.7.54-7.63; CR 2011/8,
pp. 15-16, paras. 15-16 (Pellet), p. 54, para. 28 (Reisman); CR 2011/9, pp. 64-65, paras. 20-23 (Pellet). - 41 -

negotiations ⎯ in spite of the commitment to negotiate in good faith on its name which is borne by

the FYROM under Article 5. And here are some quotations to back this up:

⎯ “we consider that the appellation Republika Makedonija-Skopje may serve only as a basis for

constructive talks aimed at finding a formula for bilateral communication between the Republic

46 of Macedonia and the Hellenic Republic ” (FYROM’s Minister for Foreign Affairs,

April 2005) 99;

⎯ “we cannot discuss” the point in the document of the mediator “that says that the Republic of

Macedonia should accept a name different from it s constitutional one for international use”

(FYROM’s Prime Minister in November 2007) 100;

⎯ “There is a red line we cannot cross” said Ambassador Dimitrov, present in this Hall of Justice,

in March2008 by stressing that Skopje woul d use “its constitutional name ‘Republic of

Macedonia’ on the international stage and agreed to adopt a mutually acceptable name strictly

for relations with Greece” 101;

⎯ since the signature of the Interim Accord of 1995 the FYROM politicians “continually repeated

that the maximum Macedonia must concede is that it will use the dual formula, which means

the use of one name in its relations with Gr eece and the use of its constitutional name

internationally, and that in no circumstances we cross that red line” (FYROM’s

Prime Minister, November 2008) 10.

So what is there to negotiate on if it is impossible to discuss the Applicant’s name (the name of the

State), the only subject of the negotiations provided for by Article5 of the Interim Accord?

Refusing to negotiate on the agreed subject is a manifest violation ⎯ and certainly not a trivial

one ⎯ of the Interim Accord.

[End of slide 1.]

9Statement of the Minister for Foreign Affairs, Note Verbale No.63/2005 of the Permanent Mission of the
FYROM to the United Nations, addressed to all Permanent Mi ssions, dated 15 Apr. 2005, Rejoinder, Ann. 21; emphasis
added; see also Rejoinder, pp. 170-172, paras. 7.60-7.62.

10Prime Minister Gruevski’s statement on Nimetz’s draft-framework of understanding, Macedonian Information
Agency, datedN 2v0.07, available at: http://www.mia.com.mk/default.aspx?vId+29113595&lId=2,
Counter-Memorial, Ann. 128.

10NATO Urges Macedonia Solution, BalkanInsight.com (3 March 2008), Reply, Ann. 98; emphasis added.

10Statement of the Prime Minister, Mr.Gruevski, Stenography notes from the 7th sequel of the 27th session of
the Parliament of the Republic of Macedonia, held on 3 Nov. 2008, pp. 1, 10-17, Counter-Memorial, Ann. 104; emphasis
added; see also Counter-Memorial, pp. 34-35, paras. 4.8-4.9. - 42 -

7. The fact is, Mr.President, that none of th ese breaches is trivial, whether we are talking

about the persistent irredentist threats ⎯ and, in any case, the indulgent inertia of the FYROM’s

authorities regarding such claims ⎯ or the refusal to negotiate in good faith, as reflected in the

47 Applicant’s systematic desire to drag out the negotiations indefinitely, or its determination to empty

them of all substance. And it is these prevarications, which are ultimately intolerable, that have led

NATO to defer inviting the Applicant to join it ⎯ because it is indeed the lack of a result from the

negotiations on the name issue that lies behind the decision taken at the Bucharest Summit.

[Slide 2 ⎯ Paragraph 1 of Article 11 and paragraph 2 of resolution 817 (1993)]

8. As for the violations relating to the commi tment contained in Article 11, paragraph 1, and

in paragraph 2 of Security Council resolu tion 817 (1993), these are also not trivial ⎯ and they are

continuing: since 1993, despite the references to the latter instrument made in Articles 5 and 11 of

the Interim Accord, the Applicant has persisted in calling itself by the very name which it has

undertaken not to be referred to by in the organi zations to which it is admitted without objection

from Greece (“in such organization” and “for all purposes”). Mr. President, since I am following

on from Professor Crawford, who correctly explained, I believe, that the first clause of Article11

did not impose an obligation on the Applicant but set a condition on its admission to certain

international organizations, you might think that I am contradicting him in stating that the FYROM

has violated that provision and the one in resolution 817. Honi soit qui mal y pense, but that is not

the case at all. Mr. Crawford was arguing upstream, before such admission, whereas I am doing so

downstream, when admission has been secured. Th e condition is in the past, but the failure to

comply with the condition to which that admission was subject is a violation. It is true,

Mr.President, that the Applicant has unearthed some pieces of evidence which absolve it from

complying with that obligation and a few preparatory documents whose text may, not without some

sleight of hand, be interpreted as neutralizing this objection ⎯ however, as far as I am aware, “the”

general rule for the interpretation of treaties is that they must be interpreted in good faith following

the ordinary meaning to be attributed to their term s, in their context and in the light of their object

and purpose. And the text of this provision is perfectly clear ⎯ you surely know it by heart,

Members of the Court, so I shall not read it out again. I would merely add that this provision

would be emptied of all substance ⎯ one might say these provisions ⎯ if the Applicant’s - 43 -

interpretation were to be adopted: the Interi m Accord can impose no obligation on anyone other

than the Parties; since it is unlikely that Greece would have wished to oblige itself to refer to the

48 Applicant only by its provisional name and that su ch would have been the wish of the FYROM, it

must be understood that the obligation applies to the latter and that it is the latter which is required,

legally and by treaty, not to give itself a different name; otherwise, the second part of Article 11,

paragraph 1, would be a hollow shell, binding on no one.

9. And the fact that the FYROM has not complied with this commitment for 13years, as it

boasts of doing, in no way exonerates it from its vi olation but is on the contrary an aggravating

circumstance: it recognizes that, for all these year s, it has failed to comply with the obligation

which it accepted by concluding the Interim Acco rd and which is imposed on it (and it alone) by

the first paragraph of Article11 of that instrume nt. And that brings me to two other comments

which concern all of the violations.

[End of slide 2.]

10. The first concerns the time factor. While it is not unusual that, in the years preceding and

immediately after the adoption of the Interim Accord, there should have been a little toing and

froing, more than 15 years later, these recantations appear for what they are: continuous, material

breaches which it is hard to see how time could wipe out. Firstly, it is not certain that international

law recognizes the notion of extinctive prescription 103; and then, if it does so, the amount of time

which has passed since the signature of the Interi m Accord would surely not be long enough for it

to be applied; lastly and above all, the Res pondent’s strong and numerous protests would in any

case prevent time from coming into play.

11. I therefore believe, for example, that it is better to leave in peace the opinion of the

Badinter Commission from 1992 or the initial conduct of the Parties when the FYROM entered the

United Nations or other international organizations: these date back to a period before the treaty

commitments accepted by the Applicant in the Inte rim Accord, and can therefore neither violate

them nor assist in their interpretation. And Greece, which for its part has fulfilled its obligations

under the Accord, had no reason to doubt at that poi nt in time that the FYROM would do likewise:

103
Kasikili/Sedudu Island (Botswana/Namibia), Judgment, I.C.J. Reports 1999 (II), pp. 1101-1103, paras. 90-94. - 44 -

49 the instrument, negotiated step by step, word by word, established a satisfactory balance between

the sacrifices made on both sides and the advantages obtained reciprocally by each Party.

12. Furthermore, Mr.President, ⎯ and this is my second general comment ⎯ despite the

staggering assurance with which our opponents declar e otherwise, Greece has protested constantly

and vigorously against these repeated violations.

13. My admiration ⎯ well, that is not quite the word... my astonishment ⎯ at the

self-assurance of our opponents reached its peak when I consulted the somewhat meaningless table

which ProfessorSands included at tab13 (no doubt thinking it would be a lucky number) of the

judges’ folder provided by the Applicant. This is a collection of nine Notes Verbales ⎯ taken from

a series of 20 ⎯ which demonstrate the hostile, anti-Greek climate which has continued to prevail

in Skopje following the conclusion of the Interi m Accord and both before and after the Bucharest

Summit; the purpose of these annexes to the Count er-Memorial was to describe a situation of

tension, and there was no particular reason for these documents to mention one article or another of

the Accord and certainly not those concerning the name of the “Party of the Second Part”, its

obligation to negotiate or what it is known as in in ternational organizations. On the other hand, the

Applicant makes no reference at all to the very many protests made by Greece regarding the

violation of these obligations.

14. We have drawn up a ⎯ probably not exhaustive ⎯ list of no fewer than 23protests

made by Greece against the Applicant’s use of the name which it persists in giving itself, in spite of

the provisions of the Interim Accord and in spite of the decisions admitting it to the various

international organizations in question. All th ese documents come from official authorities which

are entitled to speak on behalf of Greece and bear witness to their vigila nce, which has become

increasingly acute as time has passed and the viola tions have become ever more flagrant. The

documents which I am going to cite are reproduced at tab 2 of your folder, alongside others.

15. I would note, for example, that as early as December1993, so after the FYROM’s

admission to the United Nations but before the signa ture of the Interim Accord, the Legal Adviser

at the Greek Foreign Ministry protested in the Sixth Committee of the General Assembly - 45 -

50 “against the use of the name Republic of Macedonia by the representative of the
former Yugoslav Republic of Macedonia, as it was a blatant violation of both Security
Council and General Assembly resolutions on the question, under which the Republic

of Skopje had been provisionally admitted into the United Nations under the name of
the former Yugoslav Republic of Macedonia, which should be used in the United
Nations without any exception, limitation, reserve or nuance pending settlement of the
dispute between Greece and the Republic of Skopje, which was precisely a dispute
104
over the name of that Republic” .

A little later ⎯ and this time after the conclusion of the Interim Accord ⎯ the Permanent

Representative of Greece to the United Nations also protested, by two letters dated 24November

and 1 December 1995, against similar violations of resolution 817 (1993) and added:

“Furthermore, article 5 of the Interim A ccord . . . stipulates that the two parties
‘recognize the difference between them with respect to the name’ and ‘agree to
continue negotiations under the auspices of the Secretary-General of the United

Nations pursuant to Security Council resolution845(1993) with a view to reaching
agreement on the difference described in that resolution and in Security Council
resolution 817 (1993)’.” 105

I shall jump forward some ten years (but they are we ll covered in our table) in order to cite a third

characteristic protest ⎯ this time at the Council of Europe, where Greece’s Permanent

Representative protested vigorously to the Secretary-General of that organization, by a letter of

23 December 2004, against a note from the FYROM concerning an attempt “to forcefully prejudice

the final outcome of negotiations on the matter and thus render the Interim Accord of the

106
13th September, 1995 (Article 5), which our two countries signed, null and void in practice” .

16. The list ⎯ illustrated by the tables at tab 1 of th e judges’ folder (I think I was mistaken

in telling you that the documents were included in the judges’ folder, in fact they are annexed to the

Rejoinder) ⎯ the list illustrated by the tables at tab1 is a long one, but these examples speak for

themselves and are quite sufficient: without bluffi ng, it is simply impossible to claim that Greece

51 has not protested against the Applicant’s repeated breaches of its treaty commitments, whether they

concern the use of its name in international orga nizations and the obligation to negotiate (this is

established by the second table at tab 1) or the viola tions of Articles 6 and 7 (as shown by the first

104
UN, Official Records of the General Assembly, Forty-eighth Session, Sixth Committee, Summary Record of the
22nd Meeting, doc. A/C.6/48/SR.22, dated 7 Dec. 1993, p. 12, Rejoinder, Ann. 2.
105
Letter dated 1 Dec. 1995 from the Permanent Representativ e of Greece to the United Nations, addressed to the
Secretary-General, doc. S/1995/1005, p. 3, Rejoinder, Ann. 10.
10Letter of the Permanent Representative of Greec e to the Council of Europe, addressed to the
Secretary-General, Ref. F.6705B/169/AS1148, dated 23 Dec. 2004, Rejoinder, Ann. 46. - 46 -

table in particular). Mr.President, it is so metimes said that “impossible n’est pas français”

(“nothing is impossible for a Frenchman”); in any event, nothing is impossible for Philippe Sands.

And indeed, my spirited adversary does not hesitate to claim that that there has been no protest ⎯

perhaps he has forgotten the sound advice he gave us and which I would recall:

“It is apparent that in these cases we have to know the whole dossier, we have
to read everything ⎯ every document ⎯ precisely to avoid making statements that get
us into difficulty” 10; ProfessorSands’s remarks do cause me “to enquire how
108
familiar counsel might actually be with the evidence before the Court . . .” .

17. In conclusion, Mr.President: the Applicant has violated ⎯ seriously, massively and

systematically ⎯ the treaty obligations incumbent on it under the terms of the Interim Accord ⎯

obligations, I would recall, which are the counterpart of those accepted by the Respondent pursuant

to that same Accord; and the Respondent, for its part, has protested against those violations

continuously and in the strongest terms.

II. GREECE ’S DEFENCES

18. Mr. President, Members of the Court, these breaches have consequences in respect of the

law of responsibility and the law of treaties: the FYROM’s responsibility has been engaged and

Greece would have been entitled to take action to denounce or suspend the 1995 Accord. It did not

109
do so ⎯ for reasons which are not at all mysterious, which we have already set out and which

Ms Telalian repeated once again a short while a go: the Respondent would like to see a definitive

solution found to the nagging dispute over the name and to see the two Parties finally be able “to

develop their mutual relations and to lay firm f oundations for a climate of peaceful relations and

understanding”, in keeping with the objective laid down in the preamble to the Interim Accord.

But, had Greece freed itself, and by the same token the Applicant, from the balanced régime of

mutual rights and obligations created by the Accord , it would have been quitting certainty for hope

52 and would have left the way open for irredentist passions and the cementing of the fait accompli

the Applicant sought to establish.

10CR 2011/11, p. 54, para. 18 (Sands).
108
Ibid.
10Counter-Memorial, p. 163, para. 8.2; Rejoinder, p. 187, para. 8.3; CR 2011/10, p. 33, para. 26 (Pellet). - 47 -

19. And that, Mr. President, is where this exceptio ⎯ on the subject of which

ProfessorSands (much in error) unleashes the ta lented eloquence for which he is recognized ⎯

comes into play. Contrary to what he would appear to think, we are not asserting the exceptio non

adimpleti contractus as a sort of “super circumstance precluding wrongfulness” or as an alternative

ground for suspending a particular obligation under the treaty. We are simply saying that, under

this general principle, whenever certain circum stances obtain, a State suffering breaches of treaty

commitments by another State may respond by uni laterally suspending (or terminating) its own

corresponding obligations without thereby withdraw ing from the treaty. The requisite conditions

for this are met in the present case. To demonstrate this, I shall posit ⎯ without conceding ⎯ that

Greece actually violated its oblig ations under the Interim Accord ⎯ quod non, as my friend

James Crawford has shown.

20. Mr. President, my age is exactly that about which the Beatles sang in praise or dread in

their fantastic “When I’m64”. But Professor Sa nds would have me singing “When I’m minus 9”

110
to him ⎯ the age I was when the Diversion of Water from the Meuse Judgment and the personal

opinions of Dionisio Anzilotti and Manley Hudson appeared. Rest assured, Mr. President, I am not

going to perform the ditty. But the fact remains th at there are songs that never go out of style, as

there are principles that never wear out, and that is the case of the principle ⎯ “so just, so

equitable, so universally recognized” ( Diversion of Water from the Meuse, Judgment, 1937 ,

dissenting opinion of M.Anzilotti, P.C.I.J., SeriesA/B, No.70 , p.50) ⎯ that “where two parties

have assumed an identical or a reciprocal obligation, one party which is e ngaged in a continuing

non-performance of that obligation should not be permitted to take advantage of a similar

non-performance of that obligation by the other party” ( Diversion of Water from the Meuse,

Judgment, 1937, individual opinion by Mr. Hudson, P.C.I.J., Series A/B, No. 70, p. 77).

53 21. This principle must be applied here: the counterpart to the obligation assumed by Greece

not to object to the FYROM’s admission to interna tional organizations which Greece belongs to is

the Applicant’s obligation to be called by its provisional name pending resolution of the issue of its

name through negotiations in which it has undertaken to participate in good faith. It complied with

110
See CR 2011/11, p. 51, para. 13. - 48 -

neither of these obligations ⎯ nor others either. But that did not keep it from seising this Court of

one ⎯ single ⎯ violation of which it accuses Greece. This is where the exceptio comes into play:

notwithstanding the Respondent’s repeated protest s against the FYROM’s multiple violations of

111
the Accord , notwithstanding the Respondent’s warning to the Applicant of the potential

consequences if it continued its wrongful course 11, the FYROM decided to “force its way” and to

attempt to get the Court to give it what NATO ha d refused. And Greece’s entitlement to rely on

the exceptio before the Court is even stronger since, as I showed on Friday 11, there is not even any

need to decide the question of whether the exceptio can be used to temper the conditions governing

reliance on Article 60 of the Vienna Convention on the Law of Treaties or on the rules applicable

to countermeasures: in any event these conditions are met in the present case, and, basically,

114
counsel for the Applicant did not seriously dispute this . Just for the sake of recalling:

22. When looked at from the angle of countermeasures, the facts are that:

⎯ the FYROM’s violations of the Interim Accord are serious;

⎯ as a reaction, the attitude which the Applicant ascribes to Greece is more than proportionate;

⎯ the alleged measure is confined to the tempor ary non-performance of Greece’s obligation not

to object to the FYROM’s admission to NAT O and clearly allows for resumption of

compliance with the obligation in question;

⎯ it does not breach any peremptory norm of general international law;

⎯ the Applicant was informed repeatedly of Greece’s positions; and

54 ⎯ anyhow, if NATO had not adopted the contested decision, the Respondent could have objected

to the invitation to the FYROM to join the Allian ce: this was the sole possibility open to it to

preserve its rights, since, once membership had been granted, the Respondent would have lost

115
all means to ensure respect for them .

111
See paras. 14-16 above.
112
Statement of Foreign Minister of Greece, MsDoraBakoyannis, regarding statements made by FYROM
President Mr. Crvenkovski, 13 Sep. 2007, Counter-Memorial, Ann. 127 (judges’ folder, tab 2).
113
CR 2011/10, pp. 25-29, paras. 7-16 (Pellet).
114CR 2011/11, pp. 53-55, paras. 18-19.

115See Articles 49 to 53 of the ILC’s Articles on Responsibility of States for Internationally Wrongful Acts. - 49 -

23. And if we look at it from the angle of the law of treaties, we find the same. The principle

laid down in Article 60 of the Vi enna Convention is fully applicab le – and I would say in passing

that the treatise cited so insistently by Professor Sands 116(who certainly has an excellent choice of

reading matter) expressly relates this provision to the exceptio and refers to the Anzilotti opinion

from when I was minus 9 117:

⎯ the FYROM’s violations of the Accord are mate rial when taken individually and even more

clearly so when considered together;

⎯ they justify Greece’s partial suspension of th e Accord (as they would have justified its

termination);

⎯ the notification referred to in the first paragr aph of Article 65 did not need to be given ex ante,

since, in line with the exceptio and in accordance with the principle set out in paragraph5 of

that article, a State is not prevented “from maki ng such notification in answer to another party

claiming performance of the treaty or alleging its violation”.

[Slide 3 ⎯ Vienna Convention of 1969, Arts. 65, para. 5, and 45 (F and E).]

24. This last point is the only one that Professor Sands deigned to address with even a

rudimentary legal discussion. According to him, it follows from the reference in Article 65 (5) to

Article 45 (Vienna Convention) that the latter provision “prevents a State from invoking a ground

for suspending the operation of a treaty under Article 60 if, after becoming aware of the facts, it has

118
‘expressly agreed that the treaty is valid or remains in force or continues in operation’” . I have a

55 bit of trouble following my opponent, Mr. President . Article 45 states that, “after becoming aware

of the facts”, a State may not suspend the operation of a treaty if “
(b)it must by reason of its

conduct be considered as having acquiesced . . . in its maintenance in force or in operation”. In the

present case Greece has not acquiesced.

[End of slide 3.]

116
CR 2011/11, pp. 51-52, para. 13 (Sands).
117
Patrick Daillier, Mathias Forteau and Alain Pellet, Droit international public (Nguyen Quoc Dinh), 8th edition,
Paris, 2009, pp. 339-340, para. 199.1.
118CR 2011/11, p. 53, para. 14 (Sands). - 50 -

25. Mr. President, I do not know whether I will add a long discussion of the exceptio

inadimpleti contractus to the next edition of our treatise; that will depend first of all on your

Judgment, because it is you who set the tone fo r the productive dialogue between the jurisprudence

and the legal writers. But what I do know is that it was in reflecting on this case that I came to

understand at least the “explanatory” merits of this ge neral principle with a rich future: it prevents

the perpetuation of unjust situations and meets obvious practical needs ⎯ of the virtue “of

119
navigating the worlds of academia and professional practice” : they enrich each other and

thereby lead to greater understanding of the legal mechanisms. Yet there is no need to labour the

point: in the present case it is through the exceptio that the more specific legal institutions of the

rules on countermeasures and the rules on treaty su spension can be justified. But it is hardly

worthwhile in the present case to consider whethe r it can also produce specific effects: the

conditions for the operation of each of these two bodies of rules are satisfied and it is not essential

120
to ponder whether the principle laid down by the Court in Gabčíkovo-Nagymaros might be open

to adjustment in certain special cases.

III. BRIEF REMARKS ON “REMEDIES ”

26. Members of the Court, as the Court lacks jurisdiction, as no breach of Article 11 can be

attributed to Greece and as any such breach (if there were one) would be “excused” under the

56 principle non inadimpleti contractus strictly construed, there is no reason to look at the remedies

question. And, in so far as the Applicant has confined itself to the submissions in its written

pleadings, may we ask you to refer to what we said on the subject in our Counter-Memorial 121and

122
Rejoinder .

27. I would however like to add a few very brief words on a last-minute comment made by

one of the Applicant’s counsel and echoed by its Agent just before he read out the FYROM’s

submissions: “Yet our request extends beyond just NATO; by its conduct, the Respondent has

11CR 2011/11, p. 52, para. 13.
120
See ibid., p. 16, para. 7 (Sands), quotinGabčíkovo-Nagymaros Project (Hungary/Slovakia), Judgment,
I.C.J. Reports 1997, pp. 62-63, para. 100.
121
Chap. 9: Remedies, pp. 196-201.
12Ibid., pp. 205-215. - 51 -

demonstrated a conviction about Article 11 (1) that implicates the Applicant’s position with respect

123
to other international organizations, includi ng most crucially the European Union.” Even if this

did not lead the Applicant formally to amend its submissions, it does amount to resurrecting the

124
“reservation of rights” which, we were told during the first round, was no longer in effect .

28. While intending to be very brief on this point, I would like to approach it through a

personal remark and I would ask you to accept my a pologies for that. In paragraph6.26 of its

Reply the FYROM asserts: “Reservations of rights form an ordinary and usual part of submissions

to the International Court of Justice, and their inclusion in memorials and applications to the Court

is now routine.” Alas, that is correct, but I consider this to be most unfortunate and, in all honesty,

quite exasperating: it is increasingly the case that States announce that they have “rights”, whose

outlines they vaguely sketch and which they threat en to assert at some unspecified point in the

pleadings ⎯ written or oral ⎯ in the hope, no doubt, that the Court will accept the resulting

conflation with the matter forming the subject of the application.

29. In the present case, I observe that the “rights” the Applicant claims to be “reserving”, and

which it basically reaffirms in its oral statements, bear no relation to the subject of the Application

(which concerns Greece’s alleged opposition to the FYROM’s admission to NATO); and

consequently that if the Court were to rule on th e merits of the case the Applicant has submitted to

57 it ⎯ what I mean is the “real” case, all of it, in cluding those aspects which the Applicant attempts

to obscure ⎯ not a hypothetical future case possibly or iginating in the FYROM’s failure to be

admitted to the European Union, which in any event raises other issues and would call for careful

examination of the circumstances in which such a situation might come to pass . . .

30. As for the rest, I think it enough to repeat the point that, since no internationally

wrongful act can be attributed to the Respondent, the question does not arise. Accordingly, the

Court should not accede to the request for a declaratory judgment ⎯ which would constitute

appropriate satisfaction ⎯ formulated in the Applicant’s s ubmission(ii). The same applies

a fortiori to the requests for cessation and a guarantee of non-repetition reflected in

submission (iii). No responsibility, no reparation. Furthermore, in so far as these requests concern

123
CR 2011/11, p. 33, para. 38 (Murphy); see also p. 59, para. 11 (Dimitrov).
124
See CR 2011/6, p. 12, para. 1 (Klein) and CR 2011/7, p. 26, para. 4 (Bastid-Burdeau). - 52 -

the FYROM’s admission to NATO, that organization is governed by its own rules ⎯ by which

Greece is bound and which Article 22 of the Interim Accord preserves ⎯ and the invitation to the

Applicant to join was expressly conditioned by the Bucharest Summit on settlement of the

difference over the name. Aside from it being doubtful that the Court has an injunctive power, as

the other Party would appear to believe, any “order”, “ordre”, it might issue to Greece on this

subject would be ineffective.

31. That said, Members of the Court, we do not think that you will have to consider these

questions: you do not have jurisdiction to rule on these requests and, were you to undertake to

exercise your . . . (lack of) jurisdiction, you would have no choice but to reject the Application on

the merits.

I thank you most sincerely for your close attention. And I ask you, Mr. President, to give the

floor to Professor Abi-Saab, who will recapitulate ve ry briefly the central themes of our argument

before the Agent reads out the submissions.

Le PRESIDENT: Je remercie M.Alain Pellet pour sa présentation. J’invite à présent

M. Georges Abi-Saab à prendre la parole.

58 Mr. ABI-SAAB: Thank you Mr. President.

Significant aspects of the case

1. Mr.President, Members of the Court, my colleagues’ presentations have covered the

different aspects of the dispute. It now falls to me to recapitulate some central themes which

underlie our various arguments, or the points raised repeatedly by our opponents.

2. I will start with one of the latter, whichconcerns the question of evidence, practice, and

the uses and interpretation thereof.

From his magical world of myths, fairy tales and elephants in Indi an file, ProfessorSands

repeatedly accuses us of failing to provide eviden ce in support of our arguments. By way of - 53 -

example, ProfessorPellet has just shown that what Mr.Sands meant, when he said that the list of

seven or nine Notes Verbales of protest provided at tab13 of the judges’ folder contained “no

allegation”, was that those Notes do not specify wh ich Article of the Interim Accord had allegedly

been violated.

3. Mr. President, as an economist in a previous life, I was warned about what was known in

statistics as “data fishing” — fabricating the sample to suit you, while disregarding the full data set.

As Professor Pellet has shown very clearly, those Notes Verbales are taken from the

Annexes to Greece’s Counter-Memorial, and there were probably more pressing reasons for them

than pointing out the violation of the Interim Ac cord. However, had Mr.Sands cast his eye over

the Annexes to the Reply, he would have found in abundance what he was searching for in vain

elsewhere.

Was that a lack of attention, or disregard for something which might be awkward?

4. Similarly, we are told that many of th e Greek protest Notes were not addressed to the

Applicant, but to the United Nations or to other international organizations and bodies. There too,

however, it is forgotten that these were essentially protests against violations of either Security

Council resolution817 or Article11, paragraph 1, concerning the non-use of the name or the

59 provisional designation within those very international organizations. Therefore, it was quite

natural to draw such a violation to the attention of the organization and, in so doing, to the attention

of all its members, including the Applicant.

5. More gravely still, ProfessorSands accuses Greece of having what he calls a

“semi-detached relationship to evidence”. He quotes from a statement made by

Ambassador Nimetz in 1995: “there is no requirement for [the Applicant] to use a name that they

don’t accept” (CR 2011/11, p. 15, para. 5). If we look at Nimetz’s original statement, however, we

find a somewhat different text: “the people from that country, when they talk about themselves,

use their constitutional name... there is no require ment for them to use a name that they don’t

accept” (Reply, Ann.87). Professor Sands has subs tituted “the Applicant” for “the people from

that country”. In English, this is known as “doc toring documents”. Indeed, there is a wealth of

difference between “the people from that country”, i.e., the people in the streets of Skopje and

elsewhere, who of course cannot be made to use a particular name, and “the Applicant”, i.e., the - 54 -

Government of the country which has been admitted into the United Nations on the condition that it

is referred to (and the use of the passive voice implies by everyone) exclusively and “for all

purposes” by the provisional name within that organization. Is this not a good example of having a

“semi-detached relationship to evidence”?

6. Lastly, the other example given by my colleague, ProfessorPellet, concerns the

Applicant’s practice of using its preferred name in international organizations. ProfessorSands

states:

“let me simply note that in the period between 1995 and April 2008 the Respondent
never — not once — asserted that such practice by the Applicant was wrongful so as
to justify an objection by the Respondent un der the Interim Accord as a violation of
the Treaty” (CR 2011/5, p. 35, para. 25).

That is grossly wide of the mark, or, to use one of Professor Sands’s favoured terms, a “gross

misrepresentation”: there are numerous Notes Verbales protesting against this usage, and

ProfessorPellet has indicated where they can be found. Throughout that period, there are Notes

protesting against precisely this practice.

8. To conclude this first section on issues ra ised by the Applicant, I would like to comment

briefly on a remark made on Monday by my friend Professor Klein. In his attempts to separate the

dispute before you from the dispute over the name, he quotes from my presentation of

60 Thursday24March, during which I classified th e provisions of the Interim Accord into three

categories, the first of which consists of provi sions concerning the obligation to settle the name

dispute and the procedures for that settlement, of which there are two: Article 5, paragraph 1, and

the part of Article21, paragraph2, which refers back to it. He concludes that there is “no

mention ⎯ and with good reason ⎯ of Article 11” (CR 2011/11, p. 39, para. 7).

I would have expected Professor Klein to r ead the paragraph from which he quotes through

to the end. He would have better grasped the thinking behind this classification, which is to

highlight the exclusive character of the method or procedure for settling the name dispute provided

for in Article5, paragraph1, “excluding even its judicial settlement by this august Court—

whether directly or indirectly;— and a fortiori by unilateral acts or conduct, in order to create a

fait accompli, pre-empting the outcome of any meaningful negotiations” (CR2011/8, p.35,

para. 15). - 55 -

And this is precisely Greece’s argument, as Professors Reisman and Pellet have shown,

namely, that a decision by the Court in favour of the claim would be bound to prejudge, in a

significant way, the settlement of the name dispute.

Furthermore, as my colleagues have shown, Greece maintains that, behind the screen of

Article 11, paragraph 1, the Applicant is pursuing a unilateral policy of fait accompli, in violation

of its obligations and of the object and purpose of the Interim Accord, with a view to rendering

devoid of substance its obligation under Article 5, paragraph 1.

9. Mr.President, Members of the Court, the desperate attempts of Professor Klein and his

colleagues to “detach” the present case from the name dispute brings me to the second part of my

brief remarks, highlighting some key points in Greece’s legal position.

10. The first of those points is this: wh atever our opponents say, and whichever way you

look at it, this case centres on the problem of th e name. One only needs to count the number of

times this problem is referred to by each Party in its written and oral pleadings.

And is it even possible to mention Article 11, paragraph1, and the provisional name it

provides for, without being reminded that everyt hing revolves around the name— or rather the

stop-gap measure, the substitute, the temporary d esignation, pending the definitive resolution of

this dispute through meaningful good-faith ne gotiations— or being reminded that how that

61 provisional name is used, or abused, is bound to have an effect on the course and eventual outcome

of those negotiations? Is it possible to consider any aspect of this case without quickly coming up

against the problem of the name, or to rule on an y such aspect while simply leaving aside the name

dispute?

In the words of my friend Philippe Sands’s mu ch-loved Shakespeare, to do so would be like

“playing Hamlet without the Prince”. And yet, the name dispute falls outside the Court’s

jurisdiction.

11. The second point I would like to make is that we completely agree with our opponents in

one respect, which is that this case rests on the pacta sunt servanda principle (a pacta sunt

servanda case), as they have contended. After all, that principle is the epitome of all treaty law.

Yes, commitments must be honoured and agreements must be kept, including the Interim Accord.

However, that principle must apply to and serve as the basis for the whole structure of the treaty; it - 56 -

cannot be applied selectively, as if looking at the edifice of the treaty through a keyhole and seeing

just a small part of it.

And all the more so when we are dealing with the implementation of a synallagmatic

agreement, which imposes reciprocal and indissociable obligations on the Parties.

12. I do not intend to go over what I had the pleasure and honour of presenting to you last

week, except to recall briefly the three functions that the Interim Accord is meant to fulfil

simultaneously, and which also constitute the object a nd purpose of the treaty: these are, first, the

modus vivendi function, through the device of the provisi onal name, which allows for the relations

between the Parties to be normalized as far as possi ble while the dispute over the name persists.

And that is to provide the necessary time, mean while, for the operation and successful conclusion

of the second function , that of settling the dispute in question exclusively by meaningful

negotiations carried out in good faith.

These two functions cannot be fulfilled simulta neously and in a co-ordinated way without

the third, that of a measure or arrangement of interim protection for the Parties’ legal positions,

preserving the subject-matter of the dispute and the Parties’ positions “intact”, i.e., as they were,

throughout the interim period— in other words, from the moment the Accord enters into force

until the definitive resolution of the dispute. And in such a way that the application of the Accord

62 itself does not prejudice the position of one Party by favouring that of the other, or allow the same

to happen through one Party acting to the detriment of the other.

13. These three functions are mutually dependent and indissociable, in particular the final

one, the measure of interim protection, which is a sine qua non condition and ensures that the

delicate balance between the other two functions is maintained throughout the interim period.

The function of modus vivendi , allowing for the normalization of relations, is what the

Applicant wanted. It is the price that Greece agreed to pay in return for the second function, that of

settling the dispute over the name exclusively through meaningful good-faith negotiations, with the

guarantee of the third protective function in respect of the Parties’ rights and positions, pending the

successful conclusion of the negotiations.

Such is the exchange of considerations, the quid pro quo , which makes up the legal

transaction that is the Interim Accord. - 57 -

14. Mr.President, Members of the Court, in such a legal transaction, the commitments and

obligations in each bundle of exchanged consider ations are linked, by a community of legal

destiny, to the commitments and obligations contained in the other exchanged bundle.

It is not possible to carve out or sanctuarize any individual commitment or obligation, so as

to protect it completely from the vagaries experi enced by the rest of the treaty and from the

consequences of the violation of the obligations w ithin the bundle that was agreed to in exchange

by the other Party.

15. The point of looking at the Interim Accord in this way, and at the place of Article11,

paragraph1, within it, is not to unduly “comp licate” the case, as the Applicant would have you

believe, but simply to show its true scope and to allow the Court to assess its full significance.

Because what have we seen from the Appli cant since 1995? A deliberate policy of direct

violations, by insisting on using its preferred name within the international organizations, in breach

63 of the condition placed on its admission into those organizations; and an indirect strategy of

violation, which has been described in the clearest terms by the President of the Republic before its

Parliament.

That statement by the President also reveals a complete unwillingness to engage in

meaningful negotiations, all the while maintain ing a pretence of doing so, until this indirect

strategy of eroding the Respondent’s position ends up, over time, vindicating its own.

16. Indeed, time, Mr. President, is an essential factor to take into consideration.

It is no longer 1993 or 1995. To begin w ith, as Professor Pellet pointed out, Greece had

confidence in the commitment of the other Party. But with the passing of time, the growing

number of violations and the other Party’s recalc itrant attitude to negotiations, it has been obliged

to face the facts and take firmer steps in order to protect its rights. Nevertheless, it has always

hoped that it could persuade the other Party to co mply with its commitments once again and return

to the negotiating table, preferring that to appearing before you and further polarizing our positions.

Can it be criticized for choosing this course of ac tion? And similarly, can it be criticized for

using all the legal defences available to it, once summoned to appear before your Court?

Thank you, Mr.President, and Members of the Court. I now ask you to give the floor to

Ambassador Savvaides, the Agent of the Hellenic Republic. - 58 -

Le PRESIDENT: Je remercie M. Abi-Saab, pour son exposé. J’invite maintenant

S. Exc. M. l’ambassadeur Georges Savvadies à présenter les observations et conclusions finales de

la Grèce.

M. SAVVAIDES :

Conclusion et conclusions finales

1. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, il m’incombe de présenter les

conclusions du second tour de plaidoiries de la Grèce. Permettez-moi de résumer ce que nous

avons dit :

2. A l’audience, la Grèce a démontré, prem ièrement, que la demande présentée par le

demandeur n’entrait pas dans le champ de la comp étence de la Cour telle qu’établie en vertu du

paragraphe2 de l’article21 de l’accord intérimaire, que celui-ci soit interprété ⎯ ainsi que l’a

initialement suggéré le demandeur ⎯comme excluant toute affaire concernant «directement ou
64

indirectement» la question du nom, ou ⎯ainsi qu’il le suggère à titre subsidiaire ⎯ comme

excluant de la compétence de la Cour toute affaire qui règlerait le différe nd relatif au nom. La

Grèce a démontré que la demande tendant à ce que la Cour se prononce sur la licéité des actes de

l’OTAN et de ses membres à titre collectif, est irrece vable. La Grèce a également démontré que la

demande présentée par le demandeur n’entrait pas dans le champ de la compétence inhérente de la

Cour en ce qu’elle visait à obtenir un remède qui ne peut être octroyé en vertu d’un arrêt.

3. Deuxièmement, la Grèce a démontré que, interprétés comme il se doit, les actes que le

demandeur lui attribue ne sont pas constitutifs d’ une objection. Tel n’est pas le cas parce que la

Grèce aurait été censée appuyer l’adhésion du demandeur à l’OTAN en2008; pour les raisons

indiquées à l’époque et en vertu des critères et règles bien connus de l’OTAN en matière

d’adhésion, elle n’était pas censée le faire. Il n’y a pas eu objection parce que le processus

d’admission à l’OTAN est fondé sur le consensus et la consultati on, et ne comprend ni vote ni

possibilité de veto. Je ferai remarquer que, ni la semaine dernière ni lundi, les conseils de nos

contradicteurs n’ont prononcé le mot «consultatio n», pas une seule fois. La décision prise à

Bucarest l’a été de manière collective. La Grèce a pris part au processus de consultation, et elle a

exprimé ses vues. Cela ne revient pas à élever une objection. En tout état de cause, l’accord - 59 -

intérimaire n’imposait pas à la Grèce d’appuyer la candidature du pays concerné à l’OTAN, mais

cela ne semble pas être ici le point de désaccord. En outre, c’est au demandeur qu’il incombe

d’établir l’existence d’une violation conventionnelle; le demandeur n’a pas prouvé que la Grèce

avait élevé une objection.

4. Je souhaiterais insister, à cet égard, sur la seule déclarati on officielle faite par l’OTAN à

Bucarest le 3 avril 2008. Cette déclaration, inc ontestée, qui lie à la fois l’Alliance et ses membres

collectivement, est la déclaration du sommet de Bucarest, laquelle énonce ⎯ en son

paragraphe 20 ⎯ clairement et sans ambiguïté les modalités et conditions de l’adhésion future du

demandeur à l’Alliance. Cette déclaration a en suite été reprise, mot pour mot, dans chaque

déclaration et communiqué relatifs aux sommets de l’OTAN. Il s’agit de la décision prise à

Bucarest et elle n’a, bien sûr, pas été dictée par la Grèce. Nous n’aurions bien évidemment pas été

en mesure d’imposer pareil diktat.

5. Troisièmement, même si la Grèce avait élevé une objection, compte tenu de la stratégie

qui a constamment été celle du demandeur — co mme l’a reconnu le président Crvenkovski en

2008 — et qui consistait à compromettre la situation provisoire créée par l’ac cord intérimaire et à

ne pas négocier de bonne foi en vue d’un règlement de la divergence sur le nom, et compte tenu

d’autres violations de l’accord intérimaire, la Gr èce aurait été en droit d’«élever une objection» ,

que ce soit en vertu :

a) de la clause de sauvegarde contenue au paragraphe 1 de l’article 11 ; et
65

b) du droit des traités ; ou

c) du droit des contre-mesures ;

les deux derniers reflétant le principe de l’exceptio.

6. Les prétentions du demandeur ont placé la Cour dans une situation délicate. L’accord

intérimaire et la résolution du Conseil de sécurité disposent tous deux que la divergence relative au

nom qui trouble la paix dans la région doit être résolue par voie de négociation sous les auspices du

Secrétaire général. En portant la présente affair e devant la Cour, le demandeur poursuit la mise en

Œuvre d’une politique qui consiste à essayer de contourner la procédure prévue dans l’accord

intérimaire pour obtenir un règlement de facto du différend concernant le nom. C’est pourquoi la

Cour devrait rejeter les prétentions du demandeur à la fois pour défaut de compétence et au fond. - 60 -

7. Monsieur le président, Mesdames et Messieu rs de la Cour, si vous prenez l’une ou l’autre

de ces décisions, la question des remèdes ne se pose pas. Par mesure de précaution, je tiens

toutefois à souligner que les remèdes demandés à présent vont bien au-delà de ce que la Cour

pourrait accorder et qu’ils équivalent à une tenta tive de préemption. En effet, le demandeur

voudrait désormais qu’il soit déclaré qu’il remplit les conditions requises pour adhérer, non

seulement à l’OTAN, mais aussi à l’Union européen ne. Bien évidemment, il n’appartient pas à la

Cour ⎯ avec tout le respect que nous lui devons ⎯ de se prononcer sur ces questions. Il s’agit de

décisions éminemment politiques, qui ne peuvent être prises que dans le cadre de chaque

organisation et au moment opportun. L’incide nce de la clause de sauvegarde contenue dans

l’article 11 dépend également de la situation qui prévaut au moment où une demande d’admission

doit être tranchée.

8. Monsieur le président, Mesdames et Messi eurs de la Cour, permettez-moi à présent de

formuler succinctement quelques observations d’ordre plus général.

9. C’est regrettable, mais le fait est que, malgré son caractère provisoire et sa vocation à être

strictement temporaire, l’accord intérimaire demeur e aujourd’hui, seize ans après sa conclusion,

l’unique cadre réglementaire tangible de nos re lations bilatérales. Cependant, comme vous le

savez, le principal problème n’est toujours pas résolu.

66 10. En d’autres termes, le processus qui a co mmencé en 1995 sur la base des résolutions 817

et 845 du Conseil de sécurité demeure inachevé. Mais voici que le demandeur a saisi la Cour, en

quête d’une solution de raccourci, naïvement convaincu que tout le reste va être résolu de manière

presque automatique.

11. Ce raisonnement à court terme n’est pas adapté à une question qui revêt une importance

vitale pour mon pays. Il pourrait avoir de graves conséquences pour l’avenir. C’est avec le plus

grand respect que je demande à la Cour d’éviter t oute approche partielle qui ne ferait qu’amoindrir

les possibilités de règlement du problème politi que général auquel la présente affaire est

inextricablement liée.

12. En 1995 la Grèce s’est trouvée face à un choix stratégique. Elle a fait ce choix et s’y est

tenue. La Grèce s’est engagée à un règlement négocié de la question du nom conformément aux

résolutions 817 et 845 (1993) du Conseil de sécurité. Depuis lors, elle n’a ménagé aucun effort ni - 61 -

aucune concession, allant jusqu’à accepter en 2007, comme base pour une solution de compromis,

un nom composé comprenant le mot «Macédoine » comme qualificatif géographique. Cette

solution a été rejetée par le demandeur. Au cours des dernières années, en insistant pour utiliser le

nom contesté, comme la Cour elle-même a pu le c onstater dans les déclarations de l’agent, le

demandeur a conduit les négociations à l’impasse. L’agent a dit que ce n’était pas un choix. Mais

c’est bien un choix, le choix de manquer à des e ngagements juridiques internationaux et de tenter

d’utiliser la Cour pour enfreindre l’accord intérima ire. Un tel comportement n’est pas seulement

incompatible avec l’article 5 de l’accord intérimair e ; il compromet également la sécurité régionale

et la poursuite de relations de bon voisinage entr e les deux pays et la région dans son ensemble.

C’est pourquoi nous espérons que dans votre sagess e, vous nous conduirez à un règlement au lieu

d’y faire obstacle et aiderez les Parties à s’aider elles-mêmes d’une manière toute autre que celle

proposée par les membres de l’équipe du demandeur lundi dernier.

13. Monsieur le président, Mesdames et Messi eurs de la Cour, avant de donner lecture des

conclusions, qu’il me soit permis d’exprimer m es remerciements et ceux de mon gouvernement au

greffier et au personnel du Greffe, ainsi qu’aux in terprètes, de remercier tous nos conseils et

collègues et de vous dire, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs de la Cour, combien nous

sommes sensibles à l’attention et au soin que vous avez accordés à la présente affaire.

14. Je vais à présent donner lecture des conclusions de la Grèce :

Sur la base des éléments de preuve et des arguments juridiques exposés dans ses écritures et

plaidoiries, la République hellénique, défendeur en l’affaire, prie la Cour de dire et juger :

67 i) que l’instance introduite par le demandeu r ne relève pas de sa compétence et que ses

demandes sont irrecevables ;

ii) dans l’hypothèse où elle conclurait à sa compétence et à la recevabilité des demandes du

demandeur, que ces dernières sont dépourvues de fondement.

Le PRESIDENT: Je remercie S.Exc.M.l’ ambassadeur Georges Savvaides, l’agent de la

Grèce, pour sa présentation des conclusions de la Grèce. La Cour prend acte des conclusions

finales dont l’ambassadeur vient de donner lecture au nom de la Grèce, comm e elle l’a fait, lundi

28mars, de celles de l’ex-Répub lique yougoslave de Macédoine. Je donne à présent la parole au - 62 -

juge Bennouna, qui a une question à poser à la Gr èce. Monsieur le juge Bennouna, vous avez la

parole.

M.le juge BENNOUNA: Je vous remercie, M onsieur le président. Ma question, comme

vous venez de le rappeler, s’adresse à la Grèce et elle se lit comme suit :

Dans la période qui a précédé le sommet de l’OTAN tenu à Bucarest du 2 au 4 avril 2008 et

au cours de celui-ci, quelle a été la position exprimée par la
Grèce lors de ses contacts avec les

autres membres de cette organisation en ce qui concerne l’admission à celle-ci de l’ex-République

yougoslave de Macédoine ?

Monsieur le président, permettez-moi de présenter aussi cette question en anglais.

In English my question addressed to Greece reads as follows:

In the period preceding and during the NAT O Summit in Bucharest from 2-4April2008,

what was the position expressed by Greece in its contacts with the other members of the

organization as regards the admission of the former Yugoslav Republic of Macedonia?

Je vous remercie Monsieur le président.

Le PRESIDENT : Je vous remercie Monsieur le juge Bennouna. Le te xte de cette question

sera communiqué à la Grèce dès que possible. La Grèce est invit
ée à fournir sa réponse par écrit le

jeudi 7 avril 2011 au plus tard. J’ajouterai que, bien entendu, copie du texte de cette question sera

adressée pour information à la Partie adverse, à savoir l’ex-République yougoslave de Macédoine.

68 Toute observation que l’ex-République yougoslave de Macédoine souhaiterait faire, conformément

à l’article72 du Règlement de la Cour, sur la réponse de la Grèce devra être présentée le

jeudi14avril2011 au plus tard. Voilà qui nous mè ne à la fin des audience s en l’affaire. Je

voudrais remercier les agents, conseils et avocats pour leurs exposés.

Conformément à la pratique, je prierai les deux agents de rester à la disposition de la Cour

pour tous renseignements complémentaires dont celle -ci pourrait avoir besoin. Sous cette réserve,

je déclare maintenant close la procédure orale en l’affaire relative à l’affaire de l’Application de

l’accord intérimaire du 13septembre1995 (ex-Ré publique yougoslave de Macédoine c. Grèce) . - 63 -

La Cour va à présent se retirer pour délibérer. Les agents des Parties seront avisés en temps utile

de la date à laquelle la Cour rendra son arrêt. La Cour n’étant saisie d’aucune autre question

aujourd’hui, la séance est levée.

L’audience est levée à 18 h 5.

___________

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