Non-Corrigé Traduction
Uncorrected Translation
CR 2011/7 (traduction)
CR 2011/7 (translation)
Mardi 22 mars 2011 à 15 heures
Tuesday 22 March 2011 at 3 p.m. - 2 -
12 Le PRESIDENT: Veuillez vous asseoir. L’audience est ouverte. Cet après-midi, la Cour
continuera d’entendre le premier tour de plaidoi ries de l’ex-République yougoslave de Macédoine.
M. Sands va poursuivre son exposé et je lui donne donc la parole.
M. SANDS :
II. La violation du paragraphe 1 de l’article 11 de l’accord intérimaire par le défendeur ne
saurait se justifier sur la base de l’exceptio
32. Je vous remercie, Monsieur le présiden t. Je voudrais maintenant répondre au deuxième
argument présenté par le défendeur, qui concerne le prétendu rôle de l’ exceptio non adimpleti
contractus. Cet argument a lui aussi surgi du néant en janvier 2010 dans les premières écritures du
défendeur. On pourrait dire que c’ est le rugissement de la souris 1. Le défendeur le décrit comme
2
une «exception d’inexécution» découlant d’un «principe … général de réciprocité» . Cet argument
pose un certain nombre de problèmes: première difficulté mineure, l’ exceptio n’a jamais été
invoquée par la Cour aux fins recherchées par le défendeur; deuxième petite difficulté, la
Commission du droit international n’a pas suivi le raisonnement préconisé par le défendeur;
troisième difficulté, le recours à l’exceptio demandé par le défendeur entraînerait la réécriture totale
du droit des traités et du droit de la responsabilité des Etats, ce qui n’est pas sans importance ; enfin
et surtout, il y a la réalité observable, à savoir le fait que lorsque l’exceptio apparaît dans les écrits
des principaux commentateurs ⎯dont certains sont ici aujourd’hui ⎯ c’est uniquement parce
qu’elle est reflétée et applicable exclusivement da ns le droit des traités, plus précisément dans
l’article60 de la convention de Vienne sur le droit des traités 3. Dans la mesure où il existe, ce
principe ne peut avoir cours qu’à certaines cond itions bien précises énoncées dans le droit des
traités et peut-être aussi le droit de la res ponsabilité des Etats, comme l’indique l’opinion de
l’ancien rapporteur spécial de la Commission du dr oit international, à laquelle je me suis référé
4
hier . Pourtant, il est clair pour tous ceux qui s ont ici que le comportement du défendeur n’a
1 Contre-mémoire du défendeur, par.8.1-8.62; répli que du demandeur, par.5.46- 5.83; duplique du défendeur,
par. 8.6-8.23.
2
Contre-mémoire, par. 8.3.
3 e
Voir, par exemple P. Daillier, M. Forteau et A. Pellet, Droit international public, 8 éd., 2009, p. 339-341.
4 CR 2011/5 (Sands), notamment par. 26. Voir également le dossier des juges, onglet 2, projection 6. - 3 -
respecté ni le droit des traités, ni le droit de la responsabilité des Etats : voilà pourquoi celui-ci en
13
est réduit à avoir recours à un principe général qui est nouveau, que la pratique n’étaye pas, que la
Commission du droit international ne soutient pas et qui porte profondément atteinte aux règles
bien établies du droit international.
33. Comme dans le cas de l’argument relatif à l’article22, le défendeur a soulevé
«l’exception d’inexécution» pour la première fois près de deux ans après avoir élevé des objections
à l’admission du demandeur à l’OTAN. Il y a donc là aussi justification ex post facto d’une
violation de l’article 11, fabriquée de toutes pièces par les conseils, ou peut-être par certains d’entre
eux seulement, puisqu’il nous paraît clair que ce moyen de défense ne fait pas l’unanimité.
34. Le défendeur invoque l’ exceptio de la manière suivante: il affirme que «tant que [le
demandeur] ne se conformera pas aux obligations que lui impose l’accord de 1995, [le défendeur] a
5
le droit de ne pas s’acquitter de celles que lui impose cet instrument» . Ce principe, il faut bien le
dire, offre au défendeur un certain nombre d’avan tages bien commodes. Premièrement, selon lui,
«le moyen de défense de l’ exceptio peut être invoqué à tout moment» 6 ; deuxièmement, toujours
7
selon lui, il n’existe pas «de conditions de nature procédurale» à remplir pour l’invoquer et,
troisièmement, il n’y a pas non plus lieu de le notifier ⎯ ce que le défendeur n’a effectivement pas
fait ⎯; enfin, quatrièmement, il peut être appli qué unilatéralement sans qu’il soit nécessaire de
satisfaire à des critères objectifs. Cette nouvelle règle de droit international est véritablement
formidable et l’on peut se demander pourquoi il a fallu si longtemps ⎯ jusqu’en 2010 ⎯ pour la
découvrir? Elle a des conséquences merveilleuses . Si un Etat n’aime pas la manière dont une
autre partie à un traité se comporte, il lui suffit d’ alléguer quelque inexécution et le tour est joué :
toutes les garanties soigneusement mises en place par les Etats dans le droit des traités et dans le
droit de la responsabilité des Etats disparaissent purement et simplement.
35. Le défendeur ne peut pas se fonder sur le droit des traités, et il le sait, et nous disons qu’il
ne peut pas se fonder sur le droit de la responsab ilité des Etats. Il n’a jamais fait valoir cette
interprétation particulière de l’ exceptio auprès du demandeur et, manifestement, aucun de ses
5 Contre-mémoire du défendeur, par. 8.3.
6
Ibid.
7 Ibid., par. 8.26. - 4 -
conseils n’a pensé à informer le ministre des affaires étrangères, ou le premier ministre, ou
l’ambassadeur auprès de l’Organi sation des NationsUnies de son existence et de son rôle.
14 L’exceptio a été invoqué à un stade tardif pour permettre au défendeur de contrer une accusation de
violation de l’article 11. Afin d’obtenir gain de cause, même sur la base de ses propres arguments,
celui-ci doit prouver deux choses: premièrement que «l’exception d’inexécution» est un principe
reconnu de droit international général; et, deuxièm ement, que le demandeur ne s’est pas acquitté
d’une obligation qui lui incombait au titre de l’ accord. Même dans ces conditions, le défendeur
échoue manifestement dans les deux cas.
36. Monsieur le président, l’ exceptio n’est pas un principe de droit international applicable
aux relations conventionnelles entre Etats comme cela a été dit. Il n’apparaît pas dans la
convention de Vienne sur le droit des traités —du moins pas sous la forme que le défendeur
voudrait lui voir prendre — et brille par son absence dans les articles élaborés par la Commission
8
du droit international sur la responsabilité des Etats . Selon le défendeur, il s’agit d’un de ces
«principes généraux de droit reconnus par les nati ons civilisées» que la Cour doit appliquer en
vertu de l’article 38 1) c) de son Statut 9.
37. Cette affirmation est dénuée tout de fondement. Le défendeur cherche à s’appuyer sur un
principe qui n’a jamais été reconnu par une cour ou un tribunal international à l’époque moderne.
Sur quelle jurisprudence repose-t-il? Le défende ur a réussi à trouver les opinions dissidentes de
deux juges dans une seule affaire de la Cour permanente de Justice internationale qui remonte
10
à 1937 , bien avant l’adoption de la convention de Vi enne qui fait autorité. Il a également trouvé
un petit nombre d’articles spécialisés, mais une lecture attentive montre que ceux-ci n’appuient pas
la thèse qu’ils sont censés reprendre, ainsi qu’une seule sentence arbitrale de 1983 prononcée par le
Centre international pour le règlement des di fférends relatifs aux investissements —qu’il n’a
apparemment pas lue de très près car cette sentence appliquait l’ exceptio en tant que principe du
8
Responsabilité de l’Etat pour fait internationalement illicite, Annuaire de la Commission du droit international,
2001, vol. II, deuxième partie.
9
Contre-mémoire du défendeur, par. 8.9.
10 Prises d’eau à la Meuse, arrêt, 1937, C.P.J.I. série A/B n 70 ; ibid. ; réplique du défendeur, par. 8.7. - 5 -
droit interne, du droit français en l’occurrence, et de toute manière, comme nous le savons tous, elle
a été annulée par la suite 11. Rien, absolument rien, ne vient confirmer la thèse du défendeur qui
présente l’exceptio comme un principe de droit international général.
15 38. Le défendeur a eu recours à une fiction juridique parce que sa thèse ne peut satisfaire aux
exigences de la convention de Vienne sur le droit des traités. Il n’a même pas essayé de justifier
ses actes au titre de la convention de 1969, et en particulier de l’article 60 de cet instrument 12.
39. L’article 60 est manifestement pertinent puisque le défendeur affirme maintenant, un peu
tard, que le demandeur a commis «des violations substantielles» de l’accord intérimaire 13 ; comme
nous le savons, il s’agit là d’une autre affirmat ion qui n’a vu le jour qu’après avril2008.
L’article60 énonce une série entière de règles relatives aux moyens opposables à une violation
substantielle commise par une partie à un traité ; il dispose qu’une «vio lation substantielle d’un
traité bilatéral par l’une des parties autorise l’autre partie à invoquer la violation comme motif pour
mettre fin au traité ou suspendre son application en totalité ou en partie ». Cependant, comme la
Cour le sait, cette règle est soumise à des oblig ations procédurales strict es, et pour d’excellentes
raisons. Ces obligations sont énoncées dans les articles 65 à 68 de la convention. A aucun moment
avant avril2008, après qu’il eut violé ses obligations au titre de l’article11, le défendeur n’a
affirmé formellement par écrit que le demandeur avait commis une violation substantielle de
l’accord intérimaire, comme la convention l’exige. Il n’a pas officiellement invoqué l’article60
pour rendre inopérante l’obligation de ne pas élever d’objection énoncée à l’article 11, comme il est
tenu de le faire au titre des articles 65 et 67 de la convention de Vienne sur le droit des traités.
40. Le défendeur se retrouve donc avec ce que l’on pourrait appeler la version athénienne de
l’exceptio parce qu’il n’a pas respecté les obligations énoncées à l’article 60. Aussi affirme-t-il que
l’exception d’inexécution est «ancrée dans le droit de la responsabilité de l’Etat et non dans le droit
14
des traités» . Le meilleur moyen de décrire cet argument est peut-être de le qualifier d’esseulé
puisque rien ne vient l’étayer. C’est avec grand r espect que je le dis à mes collègues car un certain
11
Klöckner c.Cameroun, sentence du 21 octobre 1983, ILR, vol. 114, p. 211.
12
Voir, par exemple, contre-mémoire du défendeur, par.8.12: «La Grèce ne réclame pas la suspension de
l’accord.»
13Voir contre-mémoire du défendeur, par. 4.44 ; 4.73 ; 4.82 ; 8.27 f) ; 8.29 ; 8.32 ; 8.41 ; 8.43 ; 8.51 ; 8.59 ; 8.61 ;
9.3 ; 9.6 et duplique du défendeur, par. 1.22 ; 6.32 ; 7.4 ; 7.16 ; 7.81 ; 8.3 ; 9.1 et 9.6.
14Contre-mémoire du défendeur, par. 8.13. - 6 -
nombre d’entre-eux de l’autre coté de cette salle d’audience et devant moi ont une petite idée du
droit de la responsabilité des Etats! Pourtant rien dans les travaux de la Commission du droit
international, dans les années1990 en particulier, n’appuie en quoi que ce soit la thèse selon
laquelle la version athénienne de l’exceptio est un principe général de droit international, applicable
de la manière indiquée par le défendeur. Le rapporteur spécial de la commission sur la
16 responsabilité des Etats est revenu sur cette noti on en2001 dans un article spécialisé. A quelle
conclusion est-il parvenu? Asonavis, «l’incer titude demeure quant au statut de l’exception
d’inexécution en droit international». Cette opinion semble ouvrir une porte. Mais le rapporteur
ajoute, peut-être pour faire bonne mesure : «elle ne s’est pas fait une place indépendante en tant que
15
règle ou principe de droit international» . Enfin, de peur que nous n’ayons pas bien compris, il
déclare sans ménagement que l’ exceptio ne peut être considérée comme un principe de droit
16
international «au sens de l’article 38 1) c) du Statut de la Cour internationale de Justice» .
41. Il est vrai qu’au moment de l’élaborati on des projets d’articles sur la responsabilité des
Etats, certains membres de cet éminent organe se sont effectivement penchés sur une définition
plus étroite de l’exception d’inexécution. Ils se sont demandé, par exemple, si cette définition
étroite pouvait empêcher des faits illicites découlant de la non-exécution d’une obligation
conventionnelle dans le cas où «l’Etat n’a pu s’acquitter de l’obligation en question du fait de la
violation antérieure de ladite obligation ou d’une obligation internationa le connexe par un autre
17
Etat» . Il est parfaitement clair que cette version contestée ne vient pas en aide au défendeur.
Pourquoi? Non parce qu’il n’a pas pu s’acquitter de l’obligation de non-objection du fait d’une
violation antérieure de l’accord par le demandeur , mais parce que, la réalité, comme les éléments
de preuve le montrent très clairement, il a choisi de ne pas s’acquitter de son obligation. Son
ministre des affaires étrangères, MmeBakoyanni s, l’a dit sans la moindre ambigüité dans
l’interview d’octobre2007. Quoi qu’il en soit, même cette versi on n’aidera pas le défendeur.
15
J. Crawford and S. Olleson, «The Exception of Non-Performance : Links between the Law of Treaties and the
Law of State Responsibility», 21 Australian Yearbook of International Law, 2001, p. 56 et 73.
16
Ibid., p. 73.
17Commission du droit international, deuxième rapport sur la responsabilité des Etats, M.JamesCrawford,
rapporteur spécial, A/CN.4/498/Add. 2, art. 30, p. 52 ; les italiques sont de nous. - 7 -
Pourquoi? Parce qu’elle a été rejetée par la Commission du droit international et ne figure pas
dans le texte final. Cette exception ou ce pr incipe est comme le perroquet dont j’ai parlé
précédemment : il ne se repose pas, ne dort pas, n’est pas groggy ni même comateux. Il est mort.
L’2. exceptio à laquelle le défendeur cherche mainte nant à avoir recours pour justifier sa
violation de l’article11 est plus générale et plus vaste que la version limitée rejetée par la
Commission. Le défendeur invoque la notion de réciprocité 1. Il affirme que c’est seulement parce
que le demandeur a accepté de «mettre un terme à so n comportement hostile et irrédentiste, d’être
17 appelé ERYM au sein des organisations internationales et de négocier de bonne foi, que la Grèce a
19
promis «de ne pas élever d’objection»» . M. Murphy a déjà traité de la question aujourd’hui.
43. Mais cet argument est intéressé et indéfendable en droit et en fait. Premièrement, le
défendeur interprète de façon err onée l’article 11 de l’accord intérimaire. Celui-ci ne crée pas une
obligation autonome incombant au demandeur d’être appelé «ex-Républi que yougoslave de
Macédoine» au sein des organisations internationales ; ce qu’il crée, c’est une condition qui, si elle
n’est pas remplie, permet d’élever une objecti on. Deuxièmement, les deux autres obligations
auxquelles le défendeur se réfère à cet égard sont énumérées l’une à l’article 5 de l’accord, à savoir
l’obligation de poursuivre les négociations de bonne foi sur la divergence au sujet du nom du
demandeur, et l’autre à l’article 7, à savoir celle de s’abstenir d’activités hostiles. Contrairement à
l’article11, ces obligations s’appliquent aux deux Parties et ne peuvent de par leur nature même
engager le demandeur en échange d’une obligation qui incomberait uniquement au défendeur.
44. Le défendeur affirme maintenant que le demandeur a, d’une manière ou d’une autre,
violé les articles5 et7 de l’accord intérimaire ⎯bien qu’il n’ait pas formulé de grief; il n’a pas
déposé de demande reconventionnelle à cet effet ⎯, ainsi que l’article 6 2) du même accord. Bien
évidemment, vous allez beaucoup entendre parler jeudi et vendredi de notre comportement
déplorable ⎯ beaucoup plus, à mon avis, pendant un jour et demi que pendant les treize ans qui se
sont écoulés entre 1995 et 2008, lorsque le défendeur ne semblait pas avoir vraiment conscience de
cette notion. Mais dans nos écritures, nous avon s expliqué pourquoi les allégations factuelles
18
Contre-mémoire du défendeur, par. 8.19.
19
Ibid., par. 8.20. - 8 -
étaient tout simplement dénuées de fondement et n’avaient pas du tout pour but de justifier le fait
d’objecter : nous ne voyons pas comment elles peuve nt aujourd’hui permettre au défendeur d’avoir
recours à l’exception d’inexécution.
45. Car en présentant ce moyen de défense, le défendeur part du principe que si une partie à
un traité en a violé une ou plusieurs obligations, la partie lésée pourra surseoir à l’exécution de ses
propres obligations, «qui font pendant (sont synallagmatiques ) à celles non exécutées par l’autre
20
partie» . Je mets l’accent sur le mot synallagmatiques car il est au cŒur de la thèse du défendeur.
18 46. J’insiste sur ce mot parce que les obligations énoncées dans les articles5, 6 et7 de
l’accord intérimaire ne sont pas, contrairemen t à ce que dit le défendeur, liées de manière
synallagmatique à l’article11: ce dernier n’a présenté aucun argument ni élément de preuve
confirmant que, comme il l’affirme, l’obligation énoncée à l’article 11 doit être exécutée sur la base
du quid pro quo. Les obligations énoncées dans l’accord intérimaire n’ont pas de relation causale.
Même si le demandeur avait violé l’une quelconque des obligations auxquelles le défendeur se
réfère — ce qu’il n’a pas fait et ce qui n’est pas le cas — cela n’entrerait pas en ligne de compte en
l’espèce étant donné que la violation d’une ou plusie urs dispositions de l’accord intérimaire par le
demandeur ne peut justifier la violation de l’article11 par le défendeur. C’est la raison pour
laquelle les Etats ont négocié et adopté l’article60 de la convention de Vienne sur le droit des
traités : celui-ci énonce la procédure à suivre en cas de violation substantielle d’un traité.
47. La présente affaire ne porte pas sur des viol ations substantielles des articles 5, 6 et 7 car
si tel était le cas, le défendeur en aurait saisi la Cour, ce qu’il n’a pas fait. Ce pourrait être aussi le
cas si le défendeur avait déposé une demande reconventionnelle, ce qu’il n’a pas fait non plus.
Dans son contre-mémoire, il a bel et bien conf irmé qu’il n’avait pas l’ intention d’obtenir la
suspension ou l’extinction d’une quelconque disp osition de l’accord intérimaire du fait d’une
21
violation substantielle . Le défendeur n’a, à aucun moment, suivi les procédures énoncées à
l’article 60 et chercher aujourd’hui à utiliser pareil moyen de défense serait totalement inapproprié.
20
Contre-mémoire du défendeur, par. 8.15.
21
Ibid., par. 8.2. - 9 -
En revanche, il invente un principe sans précédent que rien ne vient confirmer et qui a été rejeté par
nos distingués collègues et amis de l’autre côté de la salle d’audience lo rsqu’ils siégeaient à la
Commission du droit international.
48. Quoi qu’il en soit, et pour dissiper tout doute, il n’existe pas d’éléments crédibles
prouvant l’existence de violations substantielles commises par le demandeur. Nous avons traité de
cette question par le menu dans nos écritures et nous n’entendons pas nous répéter à ce stade. Je
22
vous renverrai simplement aux paragraphes 5.12 à 5. 20 du mémoire et 5.84 à 5.99 de la réplique .
Plus précisément, l’affirmation selon laquelle le de mandeur a, d’une manière ou d’une autre, violé
son obligation de poursuivre les négociations de bonne foi sur la divergence suscitée par son nom,
19 obligation énoncée à l’article5 ⎯ ne saurait manifestement être invoquée ⎯ ni même
envisagée — alors que l’envoyé spécial des Nations Unies, M. Matthew Nimetz, a salué les efforts
des deux Parties. Dans sa dernière déclaration, le 9 février 2011, il y juste un mois, a-t-il critiqué le
défendeur? Non. A-t-il critiqué le demandeur? Non. Il a félicité les deux Parties de «leur
attitude positive sur la question [du nom]» 23.
49. Monsieur le président, si nous sommes da ns une cour de justice, et nous le sommes
assurément, et si cette Cour a pour mission de prom ouvoir le droit des traités, ce moyen de défense
doit faire long feu. Il cherche à remplacer un système conçu pour assurer la stabilité des relations
conventionnelles par des modalités permettant à un Etat partie à un traité de se dérober à ses
obligations quand bon lui semble, sans notification, sans être tenu de satisfaire à des obligations de
procédure et sans s’en référer à des normes pouvant être appliquées objectivement. Nous avons
formulé tous ces arguments dans notre réplique en réponse au nouveau moyen de défense présenté
dans le contre-mémoire du dé fendeur. Dans sa duplique, celui-c i n’a répondu à aucune de ces
questions, ce qui indique clairement à notre av is qu’il a conscience de la vacuité de son
raisonnement. Nous ne doutons pas que la Cour rejettera ce grief avec la plus grande fermeté.
22
Mémoire du demandeur, par. 5.12-5.20 ; réplique du demandeur, par. 5.84-5.99.
23
«Nimetz — Pas de proposition nouvelle», VOA News, 9 février 2011. - 10 -
III. La violation du paragraphe 1 de l’article 11 de l’accord intérimaire par le défendeur ne
saurait se justifier sur la base de contre-mesures
50. Je vais à présent aborder, pour finir, la troisième excuse du défendeur, qu’il a décrite
comme un «moyen de défense», même si, avec tout le respect que je vous dois, il est plutôt exagéré
de la qualifier de tel: sa thèse consiste à dire qu’il était en droit de prendre des contre-mesures
24
licites . Eh bien c’est très étrange. Dans son contre -mémoire, le défendeur indique qu’«il ne fait
25
pas valoir» de contre-mesures . Mais ensuite, dans sa réplique ⎯confronté sans doute à la
consternante réalité des perspectives réduit es de ses arguments sur l’article 22 et sur l’ exceptio ⎯,
l’argument sur les contre-mesures ressuscite avec toute sa vigueur ⎯enfin, cette expression est
probablement un peu excessive, dire qu’il refait ti midement son apparition serait plus exact. Par
ailleurs, disons le, en venant à la Cour ce matin en compagnie de mon collègue SeanMurphy,
celui-ci m’a fait remarquer, tandis que je réfléchissais et préparais mon exposé, qu’il s’agissait au
moins d’un argument juridique.
26
20 51. Nous avons préempté cet argument dans notre mémoire . Le régime juridique qui
gouverne les contre-mesures en vertu du droit de la responsabilité des Etats est bien établi. Le
projet d’articles de la Commission institue, en ses articles49 à54, un régime complet qui
réglemente le recours aux contre-mesures en droit international. Ces règles sont l’expression du
27
droit international général .
52. Trois conditions doivent être réunies pour qu’un Etat puisse exercer des contre-mesures
licites. Premièrement, les mesures ne peuvent être prises qu’en réponse à un fait illicite commis
précédemment. Deuxièmement, les contre-mesures ne peuvent être prises qu’ après que l’Etat lésé
eut averti l’Etat responsable de l’acte allégué co mme illicite et l’eut appelé à cesser la conduite
illicite en question. Et troisièmement, les contre-mesures doivent être proportionnées. Le
défendeur a manqué d’établir que l’une quelconque de ces trois conditions avait été remplie.
24
Mémoire du demandeur, par.5.41-5. 54; contre-mémoire du défendeur, par.8.29; réplique du demandeur,
par. 5.3 ; duplique du défendeur, par. 8.24-8.40.
25Contre-mémoire du défendeur, par. 8.3 ; voir également par. 8.1.
26Mémoire du demandeur, par. 5.41-5.54.
27
Bodansky and Crook, «Symposium : the ILC’s State Responsibility Artilces», AJIL, vol. 96, p. 786 : «Dans ses
articles 49 à 54, la CDI cherche une solution intermédiaire : elle reconnait la licéité des contre-mesures, mais les soumet à
d’importantes conditions de fond et de procédure qui semblent reproduire largement le droit coutumier existant.»
[Traduction du Greffe.] - 11 -
53. En ce qui concerne la première condition, il n’existait pas, de la part du demandeur, de
violation préalable de l’accord intérimaire. Les nouvelles prétentions du défendeur portant sur une
violation substantielle font partie de sa stratégie d’ensemble pour détourner l’attention de sa propre
violation de l’article 11 ; encore une autre tentative ex post facto pour justifier une conduite illicite.
Cela ressort de toute évidence du flux régulier de notes verbales diplomatiques adressées au
demandeur après le sommet de Bucarest. Il suffit de compter, dans les pièces de procédure du
défendeur, le nombre de notes verbales envoyées en tre 1995 et avril 2008 puis, celles qui l’ont été,
et qui ont atterri sur nos bureaux — il est très triste de le dire — après cette date d’avril 2008. Si
vous examinez les dates des notes verbales soumises da ns les annexes de ces écritures, il apparaît
aisément qu’il existe un lien entre l’introduction de la présente instance, en novembre2008, et
l’effet catalyseur que cela semble avoir eu sur la nécessité de créer une véritable piste de
documents qui justifierait les allégations de viola tion substantielle. Le fa it est que le défendeur a
un véritable problème en ce qui concerne les éléments de preuve : nous savons que certains juristes
internationaux n’aiment pas examiner les éléments de preuve, mais c’est là que se trouve la preuve.
La Cour doit analyser les faits. Le défendeur n’a pas été capable d’identifier un seul cas, pas un
seul, qui soit antérieur à son objection, en avril 2008, lorsqu’il s’est opposé au demandeur au motif
que celui-ci avait commis une violation substan tielle, une violation subs tantielle de l’accord
intérimaire.
21 54. La première note verbale contenant cette allégation est datée du 15 mai 2008, plus d’un
mois après que le défendeur se fut opposé à l’accession du demandeur à l’OTAN, au cours du
sommet de Bucarest. Or, et c’est là le point crucial, elle ne nous avait été envoyée que pour
répondre à une note verbale que nous lui avions fait parvenir et dans laquelle nous évoquions la
conduite du défendeur comme étant une violation de l’accord intérimaire; et ce, car il s’était
opposé à la candidature du demandeur à l’OTAN su r la base d’un motif que le paragraphe1 de
l’article11 n’autorisait pas. Dans sa note verb ale, le défendeur accu se le demandeur d’être
28
responsable d’une «violation substantielle de l’accord intérimaire depuis sa conclusion » —son
allégation porte sur diverses dispositions de l’accord. Où est la preuve que des allégations de
28
Contre-mémoire du défendeur, par. 8.32 ; les italiques sont de nous. - 12 -
violations substantielles antérieures à avril2008 ai ent été portées à l’attention du demandeur? Il
n’en existe aucune. Ces allé gations du défendeur, comme toutes celles qui suivront après le
15mai2008, ne sont fondées sur aucun fait et s ont incapables —je dis bien incapables— de
correspondre à un «fait internationalement illicite» au sens de l’article49 des articles de la
Commission du droit international. Plus précisément, les allégations sont, pour une grande partie
d’entre elles, postérieures au sommet de Bucarest, il est donc véritablement difficile de comprendre
comment elles pourraient être invoquées par le défe ndeur pour justifier son opposition antérieure.
Aucune des allégations du défendeur ne correspond à des violations de l’accord intérimaire et le
défendeur n’est en aucune manière un «Etat lésé» en droit de prendre des contre-mesures licites.
55. En outre, comme c’est le cas en ce qui con cerne l’article 60 de la convention de Vienne,
le défendeur n’a réuni aucune des conditions procédurales nécessaires pour justifier les
contre-mesures. Le paragraphe 1 de l’article 52 des articles de la commission du droit international
prévoit que «avant de prendre des contre-mesures, l’Etat lésé doit…demander à l’Etat
responsable … de s’acquitter des obligations qui lui incombent en vertu de la deuxième partie» et
«notifier à l’Etat responsable toute décision de prendre des contre-mesures et offrir de négocier
avec cet Etat». Aucun élément de preuve, abso lument aucun, n’a été soumis à la Cour qui
démontre que le défendeur ait, à un moment quelconque avant d’adopter la conduite qui correspond
à une violation de l’article 11, notifié au demandeur sa décision de prendre des contre-mesures. Et
il n’y a pas non plus d’élément de preuve qui démontre que le défendeur ait offert au demandeur de
négocier à propos de sa décision de s’opposer à l’accession du demandeur à l’OTAN. Le
demandeur a soulevé tous ces points dans le mémoir e, mais, encore une fois, le défendeur n’en a
pas dit un mot dans ses écritures en réponse.
22 56. Le défendeur prétend ensuite qu’il «rempli[t] les conditions associées à la prise de
29
contre-mesures» . Il n’est cependant en mesure de le faire que parce qu’il estime que les
conditions ne s’appliquent pas véritablement en l’espèce 30. Le défendeur cite cet extrait tiré du
commentaire sur le paragraphe 1 de l’article 52 de la CDI :
29
Duplique du défendeur, par. 8.29.
30
Ibid., par. 8.38. - 13 -
«Dans la pratique toutefois, un di fférend fait généralement l’objet de
négociations assez longues et détaillées avant que des contre-mesures soient
envisagées. Dans de tels cas, l’Etat lésé aura déjà notifié à l’Etat responsable sa
demande conformément à l’article43, et il n’aura pas à le faire à nouveau pour se
31
conformer aux dispositions de l’alinéa a) du paragraphe 1.»
De cet extrait, le défendeur conclut que: «En l’[e]spèce, les Parties étant engagées dans un
processus de négociation depuis la signature de l’acco rd intérimaire, aucune condition formelle de
sommation ne s’applique.» 32
57. Cette conclusion est tout à fait fausse. Premièrement, le commentaire indique qu’il n’est
pas nécessaire de notifier à nouveau l’autre Etat si la notification a été préalablement donnée au
cours de négociations. Le défendeur n’a jamais notifié au demandeur son intention de recourir à
des contre-mesures. Puis, on ne saurait omettre la passage qui précède immédiatement celui cité
par le défendeur— que dit-il ? — voici ce qu’il indique : «Le principe qui sous-tend l’obligation de
notification est que, compte tenu du caractère ex ceptionnel et des conséquences potentiellement
graves des contre-mesures, un Etat ne devrait pas y recourir avant d’avoir notifié à l’autre Etat sa
demande et de lui avoir donné la possibilité d’y répondre.» 33 Le second point est que, même si des
négociations entre le défendeur et le demandeur su r la question du nom étaient en cours depuis la
signature de l’accord intérimaire, le processus de négociations requis par l’article 52 doit porter sur
les contre-mesures. Le défendeur n’a jamais o ffert au demandeur de négocier au sujet de sa
candidature à l’OTAN ou en ce qui concerne des contre-mesures.
58. Le défendeur n’est également pas parvenu —il faut le dire— à remplir la troisième
condition pour des contre-mesures licites, à savoir essentiellement, la proportionnalité. L’article 51
du projet d’articles de la CDI exige qu’une contre-mesure soit «proportionnelle[] au préjudice subi,
23 compte tenu de la gravité du fait in ternationalement illicite et des dr oits en cause». Ce principe a
bien évidemment été traité par la Cour dans l’affaire du Projet Gabčíkovo-Nagymaros, lorsqu’elle a
souligné que «les effets d’une contre-mesure d[evaie]ent être proportionnés aux dommages subis
compte tenu des droits en cause» ( Projet Gab číkovo-Nagymaros (Hongrie/Slovaquie), arrêt,
31
Duplique du défendeur, par.8.38. (CDI, Projet d’articles sur la responsabilité de l’Etat pour fait
internationalement illicite et commentaires y relatifs, Annuaire de la Commission du droit international , 2001, vol.II,
deuxième partie, p. 146, par. 4 des commentaires à l’article 52).
32
Ibid.
33Rapport de la Commission à l’Assemblée générale sur les travaux de sa cinquante-troisième session, Annuaire
de la Commission du droit international, vol. II, deuxième partie, 2001, p. 136 ; les italiques sont de nous. - 14 -
C.I.J. Recueil 1997, p.56, par.85 et 87, citant l’affaire de la Juridiction territoriale de la
o o
Commission internationale de l’Oder, arrêt n 16, 1929, C.P.J.I. sérieA n 23, p. 27 ; voir
CR 2011/6, note de bas de page 130). On rappellera que, dans cette affaire, la Cour a conclu que
l’appropriation unilatérale, par la Tchécoslovaquie, du contrôle sur une ressource partagée qui avait
privé la Hongrie de son droit à une part équ itable et raisonnable des ressources naturelles du
Danube n’avait pas respecté la proportionnalité qu’exigeait le droit international. Dans ce contexte,
l’acte du défendeur consistant à s’opposer à la candidature du demandeur à l’OTAN peut-il être
raisonnablement considéré comme proportionné au fait illicite allégué que le défendeur attribue au
demandeur? Nous ne voyons absolument pas co mment il est possible d’affirmer cela, même à
supposer que ces faits aient été établis et qu’ils soient, d’une manière ou d’une autre, contraires aux
exigences de l’accord intérimaire, ce qu’ils ne sont pas et ce que nous nions avec vigueur. La Cour
peut simplement se faire son opinion ; nous vous invitons à examiner le dossier tel qu’il est issu des
pièces de procédures, et notamment les notes verb ales et autres communications qui figurent dans
les propres écritures du défendeur. Vous noterez en core une fois, premièrement, que jamais avant
avril 2008 le défendeur n’a reproc hé de violation substantielle au demandeur. Et, ensuite, vous ne
sauriez manquer le caractère extraordinairement insignifiant des allégations: par exemple,
l’aéroport international de Skopje rebapti sé Alexandre le Grand ou une autoroute ⎯ le corridor
paneuropéen ⎯ auquel on a également donné le nom d’Alexandre le Grand. Comment donc
peut-on sérieusement faire valoir que ces actes s ont incompatibles avec l’accord intérimaire ou
avec toute autre règle de droit international? Co mment peut-on, de façon plausible, faire valoir
que de tels actes ont causé un préjudice au défe ndeur, quel que soit le sens raisonnable que l’on
pourrait donner à ce terme? Il en va de même de la publication sur le site Internet du
gouvernement d’une photographie montrant une foul e de spectateurs qui assistaient à un match de
basket-ball, photographie sur laquelle on peut vaguement distinguer un spectateur agitant un
drapeau interdit: comment cela peut-il contribuer à justifier une opposition à la candidature du
demandeur à l’OTAN 34? Revenons sur terre. Comment peut-on sérieusement faire valoir qu’un
24 incident au cours duquel un groupe d’ écoliers a lancé huitcailloux sur la résidence de
34Voir la note verbale en date du 15 avril 2009 adressée au ministère des affaires étrangères du demandeur par le
bureau de liaison du défendeur à Skopje, n1.1/49/AS 489 ; mémoire du demandeur, annexe 60. - 15 -
l’ambassadeur du défendeur à Skopje est de nature à justifier une opposition relativement à
l’accession du demandeur à l’OTAN ⎯huitcailloux qui n’ont causé aucun préjudice physique,
35
aucun dommage, et un incident sur lequel la police locale du demandeur a rapidement enquêté ?
Tels sont les faits que le dé fendeur invoque à l’appui d’une argumentation visant à justifier des
contre-mesures. Une opposition à la candidature du demandeur à l’OTAN sur la base de cette sorte
d’allégations ⎯même si elles étaient parfaitement fondées, ce qu’elles ne sont pas ⎯ ne peut
raisonnablement être considérée comme proportionnée.
59. Monsieur le président, le défendeur sa it qu’il ne remplit pas les conditions de la
proportionnalité de même qu’auc une des conditions pour des contre-mesures licites. Dans son
36
contre-mémoire, il a indiqué qu’il ne ferait pas valoir cet argument . La raison pour laquelle il a
tout d’abord adopté cette sage position apparaît aisément. On pourrait à présent se demander
pourquoi il a cherché à ressusciter cet argument au c ours de la procédure. La seule explication
possible au fait qu’il ait abandonné sa précédente position est une reconnaissance de la faiblesse
dominante des deux autres arguments sur lesquels il s’appuie. C’est un acte de désespoir pur et
simple.
IV. Conclusion
60. Pour conclure, aucun des trois arguments invoqués par le défendeur pour justifier son
infraction ne parvient ne serait-ce qu’à s’approcher d’un caractère plausible. L’article22 ne
l’emporte pas sur l’obligation de ne pas s’opposer qui est énoncée à l’article11. La violation ne
saurait être justifiée sur la base d’une exceptio athénienne. L’objection ne saurait être excusée en
tant que contre-mesure licite au jet de cailloux. Nous attendons avec impatience d’entendre ce que
le défendeur évoquera jeudi et vendredi; lequel de ces arguments soutiendra-t-il encore ou, une
fois de plus, va-t-il en quelque sorte faire a pparaître de nouveaux argum ents ou de nouvelles
35Note verbale en date du 1 ejuin2009 du bureau de liaison de la République hellénique à Skopje
noF. 010.GS/23/AS 720 et la note verbale n 93-1741/4 en date du 10 juillet 2009 du mi nistère des affaires étrangères de
l’ERYM en réponse, réplique du demandeur, annexe 73.
36Contre-mémoire du défendeur, par. 8.3 ; voir également par. 8.1. - 16 -
variantes d’arguments anciens? Nous attendons avec un intérêt particulier de voir lequel des
éminents conseils du défendeur se sentira capabld’être associé à l’un quelconque de ces trois
arguments.
25 61. Monsieur le président, avec votre perm ission, ma collègue MmeBastidBurdeau va
aborder à présent la question des remèdes que vise le demandeur et achèvera notre premier tour de
plaidoirie. Je vous remercie, Monsieur le préside nt, Mesdames et Messieurs de la Cour, de votre
aimable attention.
Le PRESIDENT: Je remercie M.PhilippeSands pour sa présentation. J’invite à présent
MmeGenevièveBastidBurdeau à venir à la barre. Il semble que l’ex-R épublique yougoslave de
Macédoine conclura son premier tour de plaidoirie avec cet exposé. Madame, vous avez la parole.
MAr.TID-BURDEAU:
T HE SUBMISSIONS PRESENTED BY THE A PPLICANT ARE WELL FOUNDED
AND FALL WITHIN THE C OURT ’S JUDICIAL FUNCTION
Introduction
1. Mr. President, Members of the Court, it is a great honour to appear before you for the first
time and to represent the Applicant in the present case.
2. The purpose of my statement will be to set out and clarify tubmissions presented by
the Applicant. To get the measure of what is at stake, it is worth recalling that the main object of
the Interim Accord of 13September1995 was to put an end to the relationship of distrust and
hostility between the two neighbouring States bynormalizing their relations, and to allow the
Applicant to play a full part in international re lations, as every sovereign State is entitled to aspire
to do, in particular through its participation in international organizations and institutions.
3. Security Council resolution 817 represented a first step towards that, making possible the
Applicant’s admission into the organizations of the United Nations system, and paving the way for
a whole raft of recognitions, hitherto few and far between. As part of this trend finally enabling the
Applicant to play a proper part in the internati onal community, Article11 of the Interim Accord - 17 -
was once and for all to open the door making it possible for the Applicant, subject only to the
26 reservation set forth in that same Article, to jo in and fully participate in any international
organization of its choosing, in accordance with that organization’s rules.
4. It is in this legal context that the Applicant’s submissions should be placed. In its first
submission, the Applicant requests the Court “to adjudge and declare that the Respondent, through
its State organs and agents, has violated its obligations under Article 11, paragraph 1, of the Interim
Accord” 3. Its second submission is aimed at making the Respondent comply with Article11,
paragraph1, by henceforth refraining from objection to the Applicant’s membership of
international organizations, if the condition set forth in that provision is respected 38. Finally, the
Applicant reserved the right to modify and exte nd the terms of its Application, as well as the
grounds involved. Since no new claim has been made on that account, that reservation is now
without object. The Respondent did not insist on that point in its Rejoinder. So there is no reason
to dwell on it further.
5. The Respondent disputed the object, releva nce and usefulness of the two main claims.
This statement will attempt to demonstrate that those submissions are both appropriate to resolving
the dispute between the Parties and that they fall within the Court’s judicial function.
6. The arguments concerning the Application’ s admissibility and its compatibility with the
Court’s judicial function were set out this morning by ProfessorKlein. He demonstrated to you
that the Court does indeed have jurisdiction to en tertain the Application, and that the claims are
admissible. So I will not go over those questions again. As for the Respondent’s objections to the
two claims formulated by the Applicant on the merits, I propose to examine these now with regard
to each of those submissions.
37AM, p. 123.
38Ibid.: The Applicant requests the Court:
“to order that the Respondent immediately take all necessary steps to comply with its obligations under
Article 11, paragraph 1 of the Interim Accord, and to cease and desist from objecting in any way, whether
directly or indirectly, to the Appl icant’s membership of the North Atla ntic Treaty Organisation and/or of
any other ‘international, multilateral and regional organizations and institutions’ of which the Respondent
is a member, in circumstances where the Applicant is to be referred to in such organization or institution
by the designation provided for in paragr aph of United Nations Security Council
resolution 817 (1993)”. - 18 -
27 A. The first submission on the merits
7. In its first submission, the Applicant requ ests the Court to adjudge and declare that the
39
Respondent has violated its obligation under Article 11, paragraph 1, of the Interim Accord .
8. As has been amply demonstrated to you, si nce 1995, the significance of that provision for
the Applicant has been considerable: it put an end to a situation of impasse and isolation at
international level and restored a normal situati on for a sovereign State in which that State can
legitimately hope to become a member of intern ational organizations and institutions, provided it
meets the conditions of admission. Furthermore, the constant practice followed by both States in
applying that provision from 1995 until 3April2008, i.e., for almost 13years, led to the
establishment of hitherto lacking legal security in relations between the Parties. Besides the
flagrant violation of its rights, the disruption of that situation of predictability and the return to
uncertainty have also had an adverse effect on the Applicant.
9. By asking the Court to find that the Respondent has violated its obligation under
Article11, paragraph1, the Applicant is seeking confirmation of its own interpretation of that
provision and that the Respondent’s conduct is in br each of its terms. Through such a declaration
of responsibility, the Applicant is also seeking to obtain reparation in the form of a measure of
satisfaction. There is nothing very extravagant in that. Satisfaction is a normal means of
reparation. As Article37 of the Internationa l Law Commission’s Articles on Responsibility of
States for Internationally Wrongful Acts states: “The State responsible for an internationally
wrongful act is under an obligation to give satisfaction for the injury caused by that act insofar as it
cannot be made good by restitution or compensa tion.” That Article also provides that
“[s]atisfaction may consist in an acknowledgement of the breach”. That is what the Applicant is
seeking in this case, and it is hard to see why the Court would not be in a position to accede to such
a claim.
10. The Respondent also puts forward another t ype of argument to dispute that claim. It
asserts that, were the Court to rule solely on the Applicant’s claim that the violation be
acknowledged, without also taking account of th e latter’s conduct, its decision, if one’s
39
AM, p. 116, para. 6.12 et seq. - 19 -
40
28 understanding of it is correct, would be incomplete and “unjust” . This argument is surprising. If
the Respondent was expecting the Court to rule on the Applicant’s responsibility for possible
violations of the Interim Accord, it should have formally raised that responsibility before the Court.
It could have done so in two ways: by filing an application on the basis of Article 21 of the Interim
Accord, or by making one or more counter-claims. It did neither, knowing full well that such
actions were bound to fail. The Respondent has, of course, sought to excuse the violation of
Article11, paragraph1, of the Accord, for wh ich it has rendered itself responsible, by citing
alleged violations of the Accord by the Applicant. To that end, as we have just seen, it has relied
on both the principle of exceptio non adimpleti contractus and on the theory of countermeasures.
My colleague, Professor Philippe Sands, has, howev er, amply demonstrated to you a few moments
ago that the conditions for invoking those two institu tions have not been met in the present case.
So it is impossible to see how the Court’s judicial function would be affected were it to make a
declaration on the principal object of the Application, namely, the existence of a violation by the
Respondent of its obligation under Article 11, paragraph 1.
11. Mr.President, Members of the Court, the declaration of responsibility sought by the
Applicant is anything but purely symbolic. On the contrary, it is extremely important to restoring
the equilibrium established by th e 1995Accord. By acknowledging the violation of Article11,
paragraph 1, the Court will clarify which interpre tation of that provision should be upheld, thereby
putting an end to the period of uncertainty an d legal insecurity initiated by the Respondent’s
decision to block the Applicant’s membership of NATO. In so doing, the Court will fulfil its
judicial function which, according to Article36 of its Statute, is to exercise its jurisdiction “in all
legal disputes concerning: (a) the interpretation of a treaty . . . (c) the existence of any fact which,
if established, would constitute a breach of an international obligation”.
12. For its part, the measure of satisfaction ca lled for by the Applicant will constitute a form
of reparation for the prejudice sustained by it as a result of the injury to its dignity as a sovereign
29 State and the public discrimination it suffered in comparison with other candidate States seeking
NATO membership at the same time. The acknow ledgment sought from the Court in the first
40
RCM, p. 198, para. 9.6 and AR, p. 185, para. 6.9. - 20 -
submission will thus have three important legal effect s: the interpretation of a key provision of the
Interim Accord; establishing the Respondent’s resp onsibility for violating that provision; and a
declaration of the resultant reparation measure. Mr.President, I now come to the second
submission on the merits.
B. The second submission on the merits
13. When it filed its Memorial 41, the Applicant asked the Court not only to rule on the past,
but also to take steps for the future. Indeed, in the second submission, the Court is requested to
adjudge that the Respondent must return to complia nce with Article 11, paragraph 1, by henceforth
refraining from any objection to the Applicant’s requ ests to join the international organizations of
which the Respondent is a member, if the conditions of that provision are respected.
14. The decision sought from the Court is, therefore, twofold, and responds to the dual nature
of the Respondent’s conduct. On the one hand, the Respondent’s decision to object to the
Applicant’s membership of NATO during the April 2008 summit can be considered as an isolated
violation of an international obligation. Accord ingly, the Court is asked to order the Respondent
not to repeat its actions, be this at a futureNATO summit at which the Applicant’s membership
would once again be discussed, or during any other admission procedure for any other international
organization or institution of which the Respondent is a member. Thus, the Court is requested to
order the Respondent to immediately take all necessary steps to comply with its obligations under
Article 11, paragraph 1, of the Interim Accord.
15. However, the Respondent’s conduct can also be considered a continuing violation of its
obligation under that provision. Indeed, the Applicant is still seeking NATO membership and it
has been established that, in the eyes of most of th e member States, it meets all of the conditions of
30 membership provided for in that organization’s constitutive charter. The persistent objection by the
Respondent, of which the latter makes no secret, including in recent declarations by its official
41
AM, para. 6.18 et seq. - 21 -
authorities , is all that is dissuading the App licant from resubmitting its candidacy for
membership. By constantly persisting in blocki ng this, the Respondent renders itself responsible
for a continuing violation of its obligation under Article 11, paragraph 1, of the Interim Accord.
16. Confronted with this double violation, one isolated, one continuing, the Applicant
respectfully requests the Court to order both a non-repetition of the violation and its cessation. The
claim in respect of non-repetition of the wrongf ul act concerns the conduct which should be
observed by the Respondent when decisions are being made on the Applicant’s candidacies for
membership of certain international organizations, including the European Union, or during further
consideration of its candidacy organized in conn ection with a NATO summit. In this respect, the
43
argument developed by the Respondent in its Counter-Memorial and Rejoinder , according to
which an injunction of non-repetition by the Court would interfere with consideration of the
conditions of membership set forth in the constitutiv e charters of the international organizations, is
completely unfounded. They are two clearly distin ct matters. It is clear that by applying for
membership of an international organization or institution, the Applicant is well aware that, like
any other candidate State, it must meet the c onditions laid down in the constitutive act of the
organization in question. It has never contended that Article 11 of the Interim Accord could grant
it preferential treatment in that respect. By asking the Court to order non-repetition, the Applicant
is simply seeking a return to the situation which existed in this respect in relations between the
Parties before 2008.
17. Turning now to the claim for cessation of the continuing violation, there are clearly
special circumstances in this case which justify this express mention. Although the Respondent
states in its Rejoinder that “[t]he obligation to observe the Interim Accord is obvious, and Greece
does not contest it”, that affirmation, however, is by no means a guarantee that the Respondent will
31 comply in future with the provisions of Article 11, paragraph 1, considering its conduct since
44
April 2008 . The Court pointed out in the Dispute regarding Navigational and Related Rights in
4AR, Vol. I, Ann. 164.
43
RR, para. 9.12.
4See para. 9.15, final sentence. - 22 -
2009 45 that “the obligation incumbent on the Stat e concerned to cease such conduct derives by
operation of law from the very fact that the Court establishes the existence of a violation of a
continuing character”. Nevertheless, the Court has also admitted that in special circumstances, it
might be appropriate for a judgment to expressly mention the obligation to cease the violation.
18. While it did not appear that such circ umstances had been met in the above-mentioned
case concerning navigational and fishing rights, whic h had not previously given rise to a dispute
between the parties, the situation is completely different in the present case. Here, by contrast, the
past relations between the Parties, since the Applicant’s emergence into statehood in 1991,
demonstrate the multiple obstacles raised by the Respondent to the normal exercise by the
Applicant of a number of its fundamental rights as a sovereign State. They also illustrate the
considerable efforts made to permit the normal ex ercise of those rights. Such are the special
circumstances which require the Court to ma ke express mention in its Judgment of the
Respondent’s obligation to cease the violation of Article 11, paragraph 1. Taking account of all the
difficulties encountered by the Applicant prior to the 1995 Accord and which have resurfaced with
a vengeance over the past three years as a result of the Respondent’s violation of its obligation
under Article 11, paragraph 1, not only is a reminder by the Court of the obligation incumbent upon
the Respondent under that provision not superfluous; it is indispensable to the conclusion of this
dispute.
19. It is wrong to contend, as the Respondent does, that the Court is thus being asked to
46
adopt “a remedy entirely dependent on NATO” . It falls naturally to the Respondent to execute
that obligation of cessation, which can inform the North Atlantic Treaty Organization and its
members of the lifting of its objection. By no means is this a way of prejudging the decision which
32 might be taken by that organization. The obliga tion in Article11, paragraph1, of the Interim
Accord is certainly quite unusual in internati onal law. It is not common and perhaps even
unprecedented for a State to agree to limit its di scretionary power to give an opinion on the
admission of a new State into an international organization to which it belongs. However, as
45
Case concerning the Dispute regarding Navigational and Related Rights (CostaRica v. Nicaragua), Judgment
of 13 July 2009, para. 148.
46
GR, para. 9.15. - 23 -
ProfessorSeanMurphy has shown you this morn ing, this is a treaty commitment completely
distinct and detachable from the rules of the in ternational organization in question, and like any
other international commitment, it must be respected by the party having entered into it.
20. In a similar vein, it will be noted that th is is not the first time in international litigation
that an authority charged with settling a dispute orders a State not to oppose a certain stand taken
within an international organization of which it is a member. For example, when mediating in the
Rainbow Warrior case in 1986, the United Nations Secretar y-General decided, at New Zealand’s
request, that France should not dispute the Eur opean Economic Community’s decision concerning
imports of New Zealand butter into the United Kingdom 47. No one claimed interference with the
rules of the international organization in that connection.
21. The Applicant therefore respectfully requests the Court to decide in favour of the two
submissions it has presented. Both of these claims are wholly justified, considering the objection
made by the Respondent at the NATO summit of April2008, in breach of its obligation under
Article 11, paragraph 1, of the Interim Accord. They are equally well founded given the intention,
publicly demonstrated by the Respondent’s authorities, not to abandon its blocking stance until the
dispute over the Applicant’s name has been resolved. These claims are nothing out of the ordinary
and fall fully within the judicial function as defined and exercised on numerous occasions by the
Court.
33 22. This presentation concludes the first round of oral argument on behalf of the Applicant.
Mr. President, Members of the Court, thank you for your attention.
Le PRESIDENT : Je remercie Madame Gene viève Bastid-Burdeau pour sa présentation des
conclusions de l’Etat demandeur. Voilà qui met fin au premier tour de plaidoiries de
l’ex-République yougoslave de Macédoine. La Gr èce entamera son premier tour de plaidoiries le
jeudi 24 mars entre 15 heures et 18 heures. L’audience est levée.
L’audience est levée à 16 h 5.
___________
47
Case concerning the differences between New Zealand and France arising from th e Rainbow Warrior affair ,
Ruling of 6July1986 by the Secretary-General of the United NationsReports of International Arbitral Awards ,
Vol. XIX, pp. 199-221, especially pp. 203 and 214.
Traduction