Traduction

Document Number
105-20040422-ORA-01-01-BI
Parent Document Number
105-20040422-ORA-01-00-BI
Bilingual Document File
Bilingual Content

Non- Corrigé Traduction
Uncorrected Translation

YUGONBE

CR2004115 (traduction)

CR200411 5 (translation)

Jeudi 22avril 2à010heures

Thursday22 April2004 at 10a.m.6 Le PRESIDENT :Veuillez vous asseoir. L'audience est ouverte.

La Cour se réunitce matin pour entendre le second tour de plaidoiries de la Belgique, des

Pays-Bas, du Canada et du Portugal.

Je donne maintenant la parolea M. Devadder, agent du Royaume de Belgique.

Mr. DEVADDER: Thank you, Mr. President. Members of the Court, 1am going to ask if 1

may give the floor straight to Mr. Bethlehem for the introduction. Then, with your permission

Mr. President,1shall present the submissions. Thank you.

Le PRESIDENT : Merci. Jc donne maintenant la parole aM. Bethlehem.

M. BETHLEHEM :

1.Monsieur le président, Madame et Messieurs de la Cour, ma réponse auxconclusions

présentéeshier par la Serbie et Monténégro sera trèsbrève. Mêmesi la Serbie et Monténégroa

ajouté quelques élémentsnouveaux à son argumentation, sur lesquels je reviendrai dans un

moment, nous n'avons rien entendu jusqu'à présent qui nous conduise à renoncer à l'une

quelconque de nos conclusions ou à considérer comme urgent de les préciserdavantage. En

particulier, Monsieur le président. je ne compte pas débattre avecla Serbie et Monténégde deux

élémentsde son argumentation concernant les exceptions de la Belgique sur la recevabilité

- celles qui ont trait a l'application en l'espèce du principe énoncédans l'affaire de l'Or

tnonéraireet a l'allégation de mauvaise foi. Ces exceptions sont présentéesaux chapitres neuf

et dix des écrituresde la Belgique et il n'est pas nécessairede les développerplus avant. De même,

il est inutile que je relève les allégations formuléespar RFY dans son mémoireà propos des

évènementspostérieursau 10 juin 1999. A entendre les conclusions formuléeshier parla Serbie et

Monténégro,il semble qu'elles aient étéabandonnées. La Belgique traite de cet aspect au

chapitre deux de ses écritures. Sauf une remarque, je ne dirai rien non plus des objections qu'a

opposéesla Belgique a la recevabilité en raison de l'absence d'allégationsprécises,de la part de la

RFY, la visant spécifiquement. La Belgique a fait valoir ce moyen au chapitre huit de ses pièces

écrites, ainsi qu'au chapitre six en ce qui concerne la convention sur le génocide. Je ferai

seulement remarquer à ce stade qu'en l'absence d'allégations spécifiques concernant les comportements de la Belgique censésavoir contrevenu à la convention sur le génocide,il s'agit

d'un aspect sur lequel l'argumentation de la RFY est particiilièrement faible. Un élément essentiel,

7 pour prouver àla fois l'actus rem et le mensrea du génocitie,serait d'alléguerun comportementet

une intention propres au défendeur. Cela,la Partie demantieresse ne l'a pas fait.Je n'en dirai pas

plus a présent surce point. Nlonsieur le président, pour éviter qu'il ne subsiste un quelconque

doute a ce sujet, j'indiquerai encore une fois que la Belgique maintient toutes ses conclusions

écrites, mêms eije n'y reviens plus ici.

2. Monsieur le présideni:,Madame et Messieurs de la Cour, avant de présenter quelques

brèves observations sur le contenu des plaidoiries de la Partie demanderesse, je dois marquer

formellement l'irritation causéeà la Belgique par ce que nous avons entendu hier. La réponsedu

demandeur sur le contenu des exceptions préliminaires de la Belgique aurait dû figurer dans

l'exposéécritviséau paragraphe 5 de l'article79 du Règlement de la Cour. Tout ce que nous

avons entendu hier pouvait - 1stdevait- êtreexposé dans un document écrit. Cela aurait permis

aux Parties d'en débattre convenablement à ce stade de la procédure. La démarchesuivie par la

Serbie et Monténégron'est pas, selon nous, compatible avec une saine pratique ni avec les

procéduresétablies dela Cour. Sur plusieurs points essentiels, nous avons entendu hier une théorie

entièrement nouvelle. Sur unipoint -celui du moment auquel ((le différend))est censé s'être

cristallisé, le conseil de la Serbie et Monténégroa expressément désavouéle mémoire'. On

nous informe maintenant qu'((auxfins de la déclarationet du Statut de la Cour, la date du différend

étaitcelle du dépôtde la requête, à savoir le 29 avril1909~~. Monsieur le président,Madame et

Messieurs de la Cour, on nous sert là une troisième ou quatrième variation - il est difficile d'être

précis - sur le même thème.La requête introductived'instance était rédigée en termes généraux,

disant que la Belgique avait recouru ({à l'emploi de la force contre la Républiquefédéralede

Yougoslavie en prenant part au bombardement de cibles dans la République fédéralede

~ou~oslavie»~. La demande en indication de mesure:< conservatoires qui l'accompagnait, en

revanche, faisait référence au ((débutdes bombardements contre la République fédéralede

'Conclusions deM. lan Brommlie,Q.C., CR 2004114,21 avril 2004, p. 43, par. 59.
'Conclusions de M. lan Brownlie,Q.C.,CR20041121 avril 2004p.40, par. 50.

'Requête, «Faits surlesquel:;lesdemandessont fondées». Yougoslavie», c'est-à-dire à la date du 24mars 1999. De même, dansson mémoire,la façon de

procéder dela RFY a consisté à établirune chronologie jour par jourà compter du 24 mars 1999.

Cette date est antérieurede cinq semaines à celle où l'on nous dità présentque le différends'est

cristallisé.

8 3. La demande en indication de mesures conservatoires déposée parla RFY était datée

du 28 avril 1999 - c'est-à-direde lveilledujour où, selon la date dont la Partie demanderesse, le

différend estmaintenant censé s'être cristallisé. Daln es conclusions orales qu'elle a présentées

pendant la phase des mesures conservatoires,la RFY a avancé des théories sur les faits illicites

instantanéset lesévènementscontinus. A présent, àla dernière minute,aprèsune réponseécriteen

quatre alinéasaux écritures dela Belgique,en date du 18décembre2002, on vient nous présenter

derechef une théorie entièremenntouvellesur l'affaire. On nous dit maintenant que ledifférend s'est

cristallisé lorsdu dépôtde la requête introductivde'instance.

4. Monsieur le président,Madameet Messieurs de la Cour, abstraction faite de l'incidence

de cette nouvelle théoriesur le contenu de la requête du demandeur-dont je parlerai tout à

l'heure-, ce n'est vraiment pas là une manière de procéder acceptable. Pareillefaçon d'agir

rappelle l'invocation que la RFY, en pleine phase des mesures conservatoires, a faite de la

convention de 1930pour fonder lacompétence enl'espèce. Rappelons à nouveau ce qu'a répondu

la Cour à cette occasion :«une démarcheaussi tardive, lorsqu'elle n'est pas acceptéepar l'autre

partie, met gravement enpérilleprincipedu contradictoire etla bonne administrationde la justice):.

Selon nous, la Serbieet Monténégrn oe doitpas être autoriséeinvoquerde nouveaux moyens et de

nouvelles théoriesà ce stade de la procédure,alors que tout ce que nous avons eude sa part depuis

quatre ans se résume à une réponse écriteen quatre alinéasoù, pour l'essentiel, elle fait sienne la

principale exception d'irrecevabilité dleaBelgique.

5. Il en va de mêmepourles développementsentièiementnouveaux qu'on nous a présentés à

l'appui des thèsesde la Serbie et Monténégro sulra convention sur legénocide. On nous a servi

hier un inventaire de la jurisprudence des tribunaux pénauxpour l'ex-Yougoslavie et pour le

Rwanda sur le sens du terme génocide.On nous a exposé les décisionsrendues dans les affaires

Affaire relativela Licéitéde I'ernploi de la force (Yorcgc.Belgique), mesures conservatoires.
ordonnance du 2juin 1999, par.44. Akayesu etRutaganda, ainsi que l'idéenouvelle selonlaquelle la présencede l'élémenm t oral et de

l'élément matériel dg uénocide:pourrait se déduirede menaces de contrainte visant àentraîner un

changement de politique gouvernementale. Que sontdevenues l'obligation d'apporter la preuve

d'actes ((commis dans l'intention de détruire))et, aux fins de la compétence, la nécessitéde

démontrerque les violations alléguées, telleqsu'elles ont6té plaidées, entrent dans les prévisions

de la convention sur le génocid~ralioilc nzateriae?

6.Là encore, je reviendrai sur cette analyselorsque je dirai un ou deux mots des arguments

de la Partie demanderesse relatifs à la convention sur le génocide. Pour l'instant, je relèverai

9 simplement que ces questions auraient dû être traitésans les observations écrites par lesquellesle

demandeur a réponduaux exceptions préliminairesde la Belgique. En fait, elles auraient dû être

entièrementdiscutéesdans son1mémoire.Celan'a pas été le cas. Pour des raisons quej'indiquerai

tout à l'heure, l'analyse faite hier par le demandeur nt: lève pas, selon nous, l'obstacle à la

juridiction. Mais ce que je veux simplementdire ici, c'est que la RFY aurait dû présenter ces

arguments dans ses pièces de:procédure. Le demandeur avait l'obligation de préciser,dans sa

requêteintroductive d'instance, la nature exactede sa demande, avec une déclaration succinctedes

faits et des moyens sur lesquels il fondait celle-ci. Il nt: l'a pas fait. Son mémoiren'étaitpas

suffisamment détaillé. On ne trouve rien dans ses observations écrites sur les exceptions

préliminaires de la Belgique. Et pourtant, on vient maintenant nous présenter des élémentsde

jurisprudence sur le sens clu mot génocide, comme fondant la proposition selon laquelle

l'obligation d'apporter la preiuved'actes ((commisdans l'intention de détruire)),aux termes de

l'article II de la convention sur le génocide, seraitd'une façon ou d'une autre satisfaite par

l'allégation,àpeine développée, que certains actes on étteaccomplis dans le but de contraindre le

Gouvernement yougoslave ou d'intimider le peuple de ~ougoslavie~. Monsieur le président,

Madame et Messieurs de la Cour, les présentesaudiences portent sur la compétence mais,sans

aborder le fond, je dois dire, afin que cela soit consignédans les comptesrendus, que la Belgique

-

CR 2004/14, 21avril2004, p.31,paretp.34, par.23. conteste tant cette prétention que le fait que ce nouvel argument soit présenaussitardivement.

Selon nous, cette façon de faire est incompatible avec l'équitéprocéduraleet la bonne

administrationde lajustice.

7. Monsieur le président,je laisse maintenant de côtécette question pourformulerquelques

brèvesremarques de fond sur ce qui a étédit hier. Je relèverai d'abordun certainnombredepoints

dans les conclusions qu'a présentéesavec éloquence M. Varady, l'agent de la Serbie et

Monténégro.Il a commencé par contester la proposition de la Belgique, qui a dit qu'il yavait

accord entre les Parties sur une question de compétencedéterminanteen I'espèce. La Belgique,

rappelons-le, voulaitessentiellement signifier par que,vu cet accord entre les Parties,iln'existait

plus de différend surlequel la Cour aià se pencher. Aux paragraphes 37 et 38 deses conclusions,

M. Varady a ensuitedéclaré :

«llEtat demandeur veut que la Cour poursuive l'affaire et se prononce sur sa

compétence - et se prononce aussi sur le fond, si elle a compétence.

Je tiensà ajouter, Monsieur le président, quenous avons conscience qu'ily a
des questions relativesà la compétence autres que celles mentionnéesdans notre
exposédu 18décembre 2002 qui font l'objet d'un différend entre lesParties. Les
défendeurs ont aussi soulevé des exceptions portant sur la compétence

10 ratione materiae et ratione ternporis, et nous entendons exposer clairementnotre
position sur ces questions,en répondantaux allégationsdes défendeurs.))

8.L'impression créée par cettedéclaration estqu'il existebien en l'espèceundifférendentre

les Parties, contrairement aux conclusions que j'ai présentéeslundi.Les termes employésdans

cette déclaration,cependant, sontà la fois intéressants etrévélateurs.IIn'y est pas demandàla

Cour -non plus qu'ailleurs dans les conclusions orales du demandeur- de se déclarer

compétente. Il ne lui est pas demandé de faire droit à la prétentionde la Serbieet Monténégro

affirmant la compétence. L'agent de la Serbie et Monténégro n'a pas priéla Courde rejeter la

principale exception d'incompétence formuléepar la Belgique sur la base dela non-appartenance

de la Serbie et Monténégro à l'organisation des Nations Unies à la date critique. Sur cedernier

point, les Parties sont toujours d'accord.Et, comme je l'ai dit lundi dans mes conclusions en

ouverture, cette appréciation commune, s'agissant de cet aspect liminaire dela compétence,est

déterminantedans l'affaire soumise à la Cour. 9. Monsieur le président, Madameet Messieurs de la Cour,je ne veux pas tourner autour du

pot, et dirai très clairementqiielle est la position de la Belgique. Eu égard aux conclusions

présentées hiep rar la Serbie etlonténégro il,y a manifestement des questions sur lesquelles nous

ne sommespas d'accordet qui, dans d'autres circonstances,constitueraient un différend surlequel

la Cour pourrait sepencher. Il importe toutefois d'aborder ces questions dans l'ordre. La question

initial- la question originell-: est de savoir si la Cour étaitouverteà la RFY, a quelque titre

que ce soit, lorsqu'ellea dépossa requête introductived'instance. Sur cette question, la Belgique

dit que la Cour ne lui était pasouverte au titre de l'article5 du Statut puisqu'elle n'était pas

membre à cette date de llOrgariisationdes Nations Unies etn'était doncpas partie au Statut. La

RFYn'a pas invoquépar ailleursd'autre base dejuridiction. La Serbie et Monténégro estd'accord

avec la Belgique sur ce point. C'est ce qui ressort de ses observations écrites du

18décembre2002. C'est la thkse centrale des conclusions qu'a présentéeshier M. Varady. C'est

la question liminaire qui est poséeà la Cour. Les Parties sont d'accord sur la réponse. Cette

dernière estdéterminante dans:l'affaire. Quelsque soient les désaccordsou différendssubsidiaires

- au cas où nous irions au-delàde cette question liminaire critique - peuvent ou non subsister

entre les Parties, ilsne sontpas pertinents. Il n'existe pas de différendentre les Parties sur ce point.

10.Monsieur le président,Madame et Messieurs de la Cour, il y a évidemmentun différend

qui projette son ombre sur cetteaffaire et qui inspire l'argumentation dudemandeur. Mêmesi l'on

n'en parle pas, il est omnipréisent.Mais ce n'est pas un différendavec la Belgique. C'est un

11 différend avecla Bosnie-Herzégovine. Cette affaire-ci. notre affaire, est en fait devenue la

cinquième manchedu tournoi :surla compétence en l'affaire deApplication de la convention pour

lapréventionet la répressiondu crime degénocide,qui remonte à 1993. Certes, la Belgique n'est

pas insensible aux tentatives faites par M. Varady pour démêlelr'imbroglio héritédes procédures

auxquelles ont donnélieu les itvénementsdes annéesquatre-vingt-dix, mais la présente affairene

saurait êtreutilisée pour obtenir parune voie détournéeun avis favorable dans une procédure

totalement distincte. Dansla,présente espèce, surla question liminaire de la compétence, les

Parties sontd'accord. Celadevrait clore le sujet. 11. J'en viens à une deuxième observation. Lundi, j'ai soutenu que la compétencede la

Cour devait s'apprécier au moment où l'acte introductif d'instance a été dépo.à encore, cette

thèse,si elle étaitacceptée,décideraitde tout le différend.C'estn principe axiomatique dansla

jurisprudence de la Cour. NiM. Varady, ni M. Brownlie n'ont rien dit hier à ce sujet. Ce point de

vue n'a pas été contesté.Au contraire.M. DjeriC,coagent de la Serbie et Monténégro, l'a repàis

son compte dans sa démonstrationh. Ce que je veux dire ici est simple. Dans la présenteaffaire,

personne n'a prétendu, ou ne prétcndaujourd'hui, que lorsque lRFY a déposésa requêtela Cour

lui était ouverte à quelque autre titre que la qualité de Membre de l'Organisation des

Nations Unies. Or, il est désormais admis que la RFY n'étaitpas membre de l'Organisation a

l'époquepertinente. La Serbie ct Monténégron'a pas tentéde se prévaloir d'une quelconque

exception au principe fondamental. Là encore, cela devrait clore le sujet. A la date du

29 avril 1999où elle est censéeavoir déposésa requête introductivd'instance, laFY ne pouvait

pas accéder àla Cour en tant que demandeur au titre de l'article 35 duStatut. Elle ne pouvait donc

prétendre fonder la compétence ni sur le paragraphe 1 de l'articl36 du Statut, ni sur des

déclarations censément faites au titre du paragraphe 2 dudit article, ni sur des traités visàs

l'article 37 du Statut.

12. Monsieur le président, Madame et Messieurs de la Cour, je ferai une troisième

observation de caractère général,très brève. Nous ne savonstoujours pas, après les conclusions

présentées hier par le demandeur, comment interpréter ses observations écrites du

18décembre 2002. Le texte de ce trèsbref exposé écrite recèlecertainement plus aucun secret

pour la Cour. Je tiens simplement a rappeler qu'il traite de chacune des bases de compétence

invoquéespar la RFY à l'encontre de la Belgique en l'espècy,compris la convention bilatérale

12 de 1930,et qu'il y est dit que <Républiquefédérale de Yougoslavin e'étaitpas et ne pouvait pas

êtrepartie au Statut de la Cour en qualité de Membre de l'organisation des Nations Unies».

Aucune autre base de compétence n'estproposée dans ces observations.Or, le demandeur soutient

maintenant que la Cour était alors ouverte à la RFY a un autre titre. Monsieur le président,

Madame et Messieurs de la Cour, ces observations constituent bel et bien une renonciation, de la

CR 2004114, 2avri2004,p.61,par.60.part de la Serbie et Monténégro, à la pièce maîtresse de l'allégation de compétence qu'elle a

développée dans som n émoire. Dansla troisième partiede celui-ci, àla page 329, la RFY examine

la question de la compétenceclela Cour. Le titre qui figure en têtede cette partie se lit comme

suit: «La Républiquefédéralede Yougoslavie est un Etat Membre des Nations Unies.» Au

paragraphe 3.1.18 du mémoire, ilest dit:«La RF de Yougoslavie est partie au Statut de la Cour

internationale de Justice.)) Voilàla thèse qui était au centrede l'allégationde compétenceformulée

par le demandeur dans son mémoire.Le demandeur ne maintient plus cette allégation. Nous ne

voyons pas comment,dans ces conditions, il peut poursuivre l'affaire. Ses observations écrites ne

constituent sans doute pas ilne notification formelle de désistement, mais elles soulèvent

assurémentla question -cornme l'a dit l'agent du Canada lundi - de savoir pourquoi nous

sommes ici. Ehbien, nous le isavons. Il subsiste un différend avecla Bosnie. Mais, ainsi que je

l'ai déjà fait observer,la préseriteaffaire ne saurait êtreutilisée pourobtenir un avis favorable dans

uneprocédure totalement distiricte.

13.Monsieur le président,Madame et Messieurs de la Cour, pour le cas où vous décideriez

que la Cour était malgré tout ouverteàla RFY le 29 avril 1999,je ferai maintenant une ou deux

courtes remarques concernant lesarguments avancés parle demandeur à propos de chacun des

chefs de compétence particuliersinvoqués contre la Belgique et maintenus par la Serbie et

Monténégro. Je prendrai toud t'abord les observations de M. DjeriC sur la convention de 1930.

Pour commencer,jeconstate simplement que M. Djerii:a présenté sousun faux jour la position de

la Belgique à l'égardde la convention de Vienne sur la succession d'Etats en matière de traités.

Les passages pertinents sont les paragraphes 428 et suivants des exceptions préliminaires de la

Belgique. La conventionde Vienne sur la succession enmatière de traitésne s'applique pas en tant

que traité dans lesrelations entre la Belgique et la SerbieMonténégro.Nous ne prétendonspas

non plus que la convention puisse d'une manière généraleêtre considérée comme reflétant des

principes du droit internationalcoutumier. Dans nos observations écrites, nous nous sommes

référés pour notra enalyse à plusieurs principes de droit reconnus qui sont pertinents dans les

circonstances particulières del'affaire.Ces principes sont exposés dans nos écritures et j'en ai

traitéassez simplement lundi sous laforme d'une proposition.13 14.Quant aux questions précisessoulevéespar l'affaire,les conclusionsdeM.DjeriCont été

centréesuniquement sur la lettre du ministre belge des affairesétrangèresdu 29avril 1996, à

laquelle la Serbie et Monténégroa répondu le 25mars 2002. Dans d'autres parties de sa

démonstration,le demandeur s'est évertué à invoquer le contexteplus général de tels ou tels

documentsparticuliers aux fins de leur interprétation. Mais sur cepoint précis, s'agissantd'une

lettre laquelle la Serbie et Monténégro n'amême pas répondu pendantsix ans etqui faisaitpartie

d'un échangebilatéral en cours, le contexte, apparemment,n'est plus considérécommepertinent.

M.DjeriC.soutient que la lettre constituait de la part du ministre belgedes affairesétrangèresun

engagement de caractère obligatoire, selon lequel tous les traitésconclus entre la Belgique et

quelque ancienne incarnation de I'ex-Etat yougoslave devaient resteren vigueur jusqu'à ce qu'ils

aient étésoit confirmés soit renégociéspar les deux parties. Dansses observationsorales, il a

soulignéque cette lettre visait tous les tra-téje reviendrai sur cepoint dansuninstant. Mais ce

n'est pas ceque dit la lettre, ni ce qui ressort deson contexte. Lecontexteest celuide négociations

bilatéralessur la succession, menées surla base d'un échange delistes de traités entreles Parties.

La convention de 1930 ne figurait sur aucune de ces listes. Les négociations en question

progressaient lentement. Pour éviterun vide juridique, le ministèredes affaires étrangères de la

Belgiqueaproposéque les accords bilatéraux liant,d'unepart, leRoyaumedeBelgiqueet, d'autre

part, la République fédérativesocialiste de Yougoslavie -c'est-à-dire, spécifiquementc,eux qui

les liaient- continuent à produire leurs effets jusqu'à ce qu'ils aient étsoit confirmés soit

renégociés.Quant aupoint de savoir quels étaient les traitésui liaient,ou non, les deuxParties,la

conception qu'elles s'en faisaient ressortait des listes qu'elles avaient échangéesu cours des

négociationsprécédentes.

15. La Serbie et Monténégroallègueque la lettre du ministrebelge des affairesétrangères

équivautà un engagement de caractèreobligatoire. Il faut doncl'interpréter debonnefoi, selonle

sens ordinaire de ses termes, considérésdans leur contexteeà la lumièrede l'objet et du but de la

lettre. Les circonstances dans lesquelles la lettreaprésentée sonétgalementpertinentes, comme

l'est aussi le comportement de la Partie demanderesse en l'espèce. La convention de 1930 ne

figurait sur aucune des listes de traités que celle-ci -la RFY - avait établiesen vue des

négociationssur la succession. La RFY n'a répondu à la lettre du ministre belge des affaires étrangèresqu'aubout de six an,set encore ne l'a-t-elle fait qu'en des termes généraux et quelque

trois annéesaprèsle débutde la présente procédure.La RFY n'a pas inscrit la convention de 1930

sur la liste, qu'elle arnuni~quée à la Belgique deux ans après le début de la procédure, des

traités qu'elle proposaitd'inclure dans les nouvelles négociations sur la succession. La première

14 fois que nousavons entendu pai-lcrde succession à la convention de 1930, c'est dans une lettre du

26 décembre2003. Cela ne rend guère convaincante laposltion du demandeur.

16. Sur la question de la désuétude, DjeriC dit s~mplement que la Belgique n'a produit

aucune preuve du consentement implicite des Parties à l'abandon du traité. Les six pages

d'argumentation figurant dans nos écritures, sans compter les douze annexes, ainsi que les

conclusionssupplémentaires que nous avons formuléeslundi sur ce point se trouvent ainsi balayées

en deux phrases, centréesexclcisivement sur les moyensubsidiaires invoqués contre la Belgique.

La Belgiquese fonde non seulement sur le régimede la convention de 1930 et des considérations

connexes mais,surtout, sur l'appréciation commune qu'ont manifestée tous ceux dont on pourrait

dire qu'ils avaientun intérêt danconvention de 1930. La question dont il s'agit ici est de savoir

si uneconventionbilatéraleconclue en 1930entre la Belgique et l'ancien Royaume de Yougoslavie

a survécu pours'appliquer aux Etats successeurs de l'ex-République fédérativesocialiste de

Yougoslavie. La pratique des Etats successeurs (autres que laRFY) et l'appréciation qu'ils ont

faite de cette question ne saurait êtresimplement écartéecomme étantres inter alios actaElles

témoignentd'une appréciationobjective et, qui plus est, d'une appréciation objective renforcéepar

le comportementde la RFY ellc-même.

17. Monsieur le président, Madame et Messieurs dc la Cour, s'agissant de l'argumentation

développéehier parle demandeur au sujet de la convention surle génocide,. Brownlie a invoqué

des passages de l'avisconsult.atif sur Licéité dela menace ou de l'emploi d'armes nucléaires

pour étayerl'argument selon l~equell'intention de détruire:un groupe national, ethnique, racial ou

religieux particulier pourrait si:déduire de l'emploide certaines armes. En fait, la Cour s'est bien

gardée, comme les passages cités par M. Brownlie l'attestent, d'énoncer des prescriptions

générales, soulignantqu'il fallait apprécier l'élémentd'intentionnalité requis pour qu'il y ait

génocide«après avoir pris dûment en considération les circonstances propres à chaque cas

d'espèce». 18. La réalité,dans le cas présent, c'estque le demandeur n'a avancéaucun commencement

de preuve à l'appui de ce qu'il prétend. CommejeI'ai notélundi, la question est traitéeen moins

de deux pages dans le mémoirede la RFY. M. Brownlie, hier, lui a consacré nettement plus

d'attention. A la lumière de ses conclusions, nous pouvons nous poser la question suivante :les

allégations de génocide présentées hier par le demandeur dans sa plaidoirie, si on les accepte

simplement telles quelles, apportent-elles suffisamment d'élémentspour permettre de penser

qu'elles entrent dans les prévisions de la convention sur le génocide ratione materiae (c'est la

formulation qui a été employéedans l'affaire desPlates-formespétrolières) ? Subsidiairement, ces

allégations sont-elles suffisamment plausibles ou a-t-il étédémontré qu'elles ont un lien

15 raisonnable avec la convention sur le génocide? La Belgique ne voit pas comment on pourrait

répondre à ces questions autrement que par la négative. Même siI'on admet l'argumentation du

demandeur telle qu'elle a étédéveloppéeau maximum et dans toute sa force - c'est-à-dire les

conclusions présentéeshier par M. Brownlie - et que I'on opte pour le critère de compétence le

plus souple- à savoir la plausibilitédes allégationsdu demandeu-, les preuves produites par ce

dernier ne sont toujours pas suffisantes pour relier ses allégationsa convention sur le génocide.

La proposition selon laquelle il faudrait, dans le cas présent, joindre ces allégations au fond au

motif que les exceptions n'ont pas un caractère exclusivementpréliminaireest simplement destinée

à faire passer inaperçues les lacunes flagrantes de l'argumentation dudemandeur. Dans les cas de

ce genre, la jurisprudence de la Cour établitune fin de non-recevoir, destinée à exclure les

allégations fallacieuses n'ayant que des liens ténus avec le traitéinvoqué pour fonder la

compétence. On se trouve ici en présence de l'un deces cas. Etant donné l'importance

exceptionnelle de la convention sur le génocide,l importeparticulièrement en l'espècequelaCour

ne se laisse pas entraîneràjoindre les exceptions au fond. J'ai déjàtraitéde ce point dans mes

conclusions lundi.

19. Monsieur le président, Madame et Messieurs de la Cour, je formulerai pour finir une

brève observation sur le moyen avancépar le demandeur concernant la compétence ratione

temporis qui résulteraitdes déclarations des Partiesau titre de la clause facultative. Comme je I'ai

fait remarquer au débutde cette plaidoirie, nous avons entendu hier une nouvelle théorie, selon

laquelle le différend, dans la présente affaire,se serait cristallisé lors du dépôt de la requête introductive d'instance, le 24 avril 1999. Cette théoriesoulève toutefois deux petits problèmes.

Premièrement, elle ne cadre pas avec les faits alléguéspar le demandeur. Tout ce que le

demandeur a dit jusqu'ici tend à faire remonter le différendau débutde l'action de l'OTAN. Le

différendsur cet élément,tel qu'il existe ou existait,a mêmeprobablement des antécédents dans la

période qui précède, commela Belgique l'a montrédans son exposé écrit,aux paragraphes 274

à 277. La théorie en question ne cadre pas non plus avec le fait que la demande de mesures

conservatoires soumise dans la présente affaire étaitt:n réalité datéedu 28 avril 1999, date

antérieure acelle àlaquelle on nous dit maintenantque leprésent différends'est cristallisé.

20. Deuxièmement, quelque analyse qu'onfasse de la formule de double exclusion utilisée

dans la déclaration de la RFY et qu'on la considère ou non comme cumulative -et nous

prétendons qu'elle l'est -, elle fait obstaclà la présentedemande. M. Brownlie a invoquéla

proposition, tirée de la jurisprudence de la Cour, selonlaquelle la déclaration doit s'interprparr

référence à I'intention qui était celledu déclaranàla date où il a fait cette déclaration. Fort bien,

mais quelle étaiten l'espèceI'intention du demandeur ? Iln'est pas trèsconvaincant de s'entendre

dire maintenant que, selon le demandeur, le différendqu'il voulait porter devant la Cour ne s'est

16 cristalliséqu'au moment du dépôtde la requête. C'est la ld aernière endate de toute une sériede

théories successives. L'intention du déclarant,si on l'interprète a la date du dépôtde sa

déclaration, paraît avoir étéassez différente. La Belgique a traitéde ce point de façon assez

détailléeaux paragraphes 25;!a261 de ses conclusionsécrites.

21. Comme la Cour l'a rappelé dansson arrêten l'affaire de l'Incident aérien du

IO aoiît1999 entre le Pakistan et I'inde, une déclaration «doitêtreinterprétéetelle qu'elle se

présente,en tenant compte des mots effectivementemployés»7.Eh bien, les mots effectivement

employés dans la déclarationde la RFY du 25avril 1999 sont clairs. La RFY y reconnaît la

juridiction de la Cour «sur tous les différendsquipourraientsurgiraprèsla signature de la présente

déclarationconcernant des situations ou des faitsultérieursàladite signature)). Selon la Belgique

- en admettant arguendo que la déclarationsoit valable, ce que bien sûr elle conteste-, quelle

que soit l'interprétation qu'on donne de cette déclarationl,a limitation temporelle qu'elle établitest

opéranteen l'espèce.

Incident aéridu 10 août 1999 (Pakisc.Inde)arrêtu 1juin 2000, pa42 22. Monsieur le président,Madame et Messieurs de la Cour, j'en ai ainsi terminéavec mes

conclusions. Monsieur le président,puis-je vous prier de donner la parolà l'agentdelaBelgique,

qui présenteralesconclusions formelles de la Belgique.

Le PRESIDENT :Merci, Monsieur Bethlehem. Je donne à présentla paroleà M.Devadder,

agent de la Belgique.

Mr. DEVADDER:

1. Mr. President, Members of the Court, it only remains for me to present the final

submissions of Belgium and to bring to a close my Government's oral submissionsat this stage in

the proceedings.

The formal submissions of Belgium in this case are as follows:

Inthe case concerning the Legality of theUse of Force (SerbiaandMontenegro v.Belgium),

for the reasons set out in the Preliminary Objections of Belgium dated 5 July 2000,andalso forthe

reasons stateduring the oral submissions on 19 and 22 April2004, BelgiumrequeststheCourtto:

(a)remove the case brought by Serbia and Montenegro against Belgium fromthe List;

17 (b)in the alternative, to rule that the Court lacks jurisdiction in the case brought by Serbia and

Montenegro against Belgium andlor that the case brought by Serbia and Montenegroagainst

Belgium is inadmissible.

A signed copy of the conclusions will be handed to the Registrar of the Court.

2. This closes the oral submissions of Belgium at this stage in the proceeding1thank the

Court for its attention. Thank you, Mr. President.

Le PRESIDENT :Merci, Monsieur Devadder. La Cour prend acte des conclusionsfinales

dont vous venez de donner lecture au nom du Royaume de Belgique. Cela met un termeau second

tour de plaidoiries du Royaume de Belgique.

L'audience est levée à 10 h 40.

Document Long Title

Traduction

Links