Note: Cette traduction a été établie par le Greffe à des fins internes et n’a aucun caractère officiel
COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
APPLICATION DE LA CONVENTION INTERNATIONALE SUR L’ÉLIMINATION
DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION RACIALE
(AZERBAÏDJAN c. ARMÉNIE)
DEMANDE EN INDICATION DE MESURES CONSERVATOIRES
3 janvier 2023
[Traduction du Greffe]
TABLE DES MATIÈRES
Page
I. Introduction ..................................................................................................................................... 1
II. Compétence de la Cour .................................................................................................................. 4
III. Faits étayant la demande .............................................................................................................. 5
A. Nouveaux éléments de preuve attestant la pose, par l’Arménie, de mines terrestres dans
des zones où les civils azerbaïdjanais retourneront ................................................................. 5
B. De nouveaux éléments de preuve montrent que l’Arménie a piégé des habitations
situées dans des zones où les civils azerbaïdjanais retourneront ............................................. 8
C. Les conséquences des mines terrestres et des pièges pour les Azerbaïdjanais déplacés à
l’intérieur de leur pays ........................................................................................................... 12
IV. Droits que l’Azerbaïdjan cherche à protéger ............................................................................. 14
V. Caractère d’urgence et préjudice irréparable ............................................................................... 18
VI. Mesures demandées ................................................................................................................... 18
I. INTRODUCTION
1. J’ai l’honneur de me référer à la requête introductive d’instance présentée le 23 septembre
2021 (ci-après la «requête») au nom de la République d’Azerbaïdjan (ci-après l’«Azerbaïdjan»)
contre la République d’Arménie (ci-après l’«Arménie») sur le fondement de l’article 22 de la
convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (ci-après la
«CIEDR»), et à l’ordonnance en indication de mesures conservatoires rendue par la Cour le
7 décembre 2021 (ci-après l’«ordonnance du 7 décembre 2021») en l’affaire. Par la présente,
l’Azerbaïdjan soumet respectueusement une deuxième demande en indication de mesures
conservatoires en vertu de l’article 22 de la CIEDR, de l’article 41 du Statut de la Cour et des
articles 73, 74 et 75 de son Règlement, sur la base de faits nouveaux qui se sont fait jour depuis que
la Cour a rendu l’ordonnance du 7 décembre 2021.
2. Comme il sera expliqué ci-après, de nouvelles preuves montrent que l’Arménie,
contredisant les déclarations qu’elle a faites devant la Cour en 2021, a délibérément continué de poser
des mines terrestres cette même année ou après, dans des zones civiles où les Azerbaïdjanais1
déplacés prévoient de revenir. En octobre 2022, l’Azerbaïdjan a également découvert, dans des
habitations civiles, des pièges que les forces arméniennes avaient dressés ou contribué à dresser. Ces
nouvelles preuves démontrent incontestablement que la pose récente, par l’Arménie, de ces mines
terrestres et pièges a à la fois pour but et pour effet de compromettre, de façon discriminatoire, la
jouissance des droits fondamentaux des Azerbaïdjanais, notamment le droit à la vie, le droit à la
sécurité de sa personne et le droit de revenir chez soi. Il est urgent d’agir pour faire cesser
l’augmentation du nombre de victimes causées ces dernières semaines par les agissements de
l’Arménie.
3. Par la déclaration trilatérale signée par l’Azerbaïdjan, l’Arménie et la Fédération de Russie
le [9] novembre 2020, l’Arménie a accepté de mettre fin à toutes les hostilités2 et de restituer les
districts de Kәlbәcәr (Kalbajar) et Laçın (Latchine) à l’Azerbaïdjan en 20203. Cette déclaration
garantissait également l’utilisation d’un corridor (le «corridor de Latchine») pour le transport des
civils entre Xankәndi (Khankandi) et l’Arménie en passant par le district de Latchine, sous le contrôle
des forces russes de maintien de la paix, et prévoyait la mise en place d’une autre voie de circulation
suivant un nouvel itinéraire dans ce corridor4. En août 2022, après l’achèvement des travaux de
construction de cette nouvelle route, l’Azerbaïdjan a repris le contrôle de la ville de Latchine et des
villages de Zabux (Zaboukh) et Sous, qui se trouvaient sur l’ancienne route du corridor de Latchine.
La déclaration trilatérale prévoyait en outre que les personnes déplacées à l’intérieur de leur pays et
1 A moins que le contexte ne le permette pas, dans la présente demande, l’Azerbaïdjan emploie le terme
«Azerbaïdjanais» pour désigner les personnes d’origine ethnique ou nationale azerbaïdjanaise, sans rapport avec la
nationalité ou la citoyenneté.
2 Déclaration du président de la République d’Azerbaïdjan, du premier ministre de la République d’Arménie et du
président de la Fédération de Russie, [9] novembre 2020, annexe à la lettre datée du 10 novembre 2020 adressée à la
présidente du Conseil de sécurité par le représentant permanent de la Fédération de Russie auprès de l’Organisation des
Nations Unies, Nations Unies, doc. S/2020/1104 (ci-après la «déclaration trilatérale») par. 1 (où il est décrété «un cessez-lefeu
complet et la cessation de toutes les opérations militaires») (annexe 1).
3 Ibid., par. 6 (où la restitution des districts de Kalbajar et Latchine en 2020 est exigée).
4 Ibid., par. 6 («Le corridor de Latchine (large de cinq kilomètres), qui reliera le Haut-Karabakh à l’Arménie mais
sans passer par la ville de Choucha, reste sous le contrôle du contingent russe de maintien de la paix. … [U]n plan
d’élaboration d’un nouvel itinéraire de déplacement le long du corridor de Latchine visant à assurer la liaison entre le
Haut-Karabakh et l’Arménie sera établi, ce qui conduira ultérieurement le contingent russe de maintien de la paix à se
déplacer pour assurer la protection de cet itinéraire.»).
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les réfugiés reviendraient dans les zones dont l’Azerbaïdjan conservait le contrôle5 ; des préparatifs
sont donc en cours pour permettre le retour dans ces zones des Azerbaïdjanais déplacés.
4. Depuis le mois d’août 2022 et, plus récemment, il y a seulement quelques semaines,
l’Azerbaïdjan a découvert plus de 2700 nouvelles mines terrestres dans les districts de Kalbajar et
Latchine. D’après les inscriptions qui y figurent, ces mines ont toutes été produites en Arménie en
2021. Plus de la moitié de ces mines de fabrication récente ont été trouvées dans des zones
manifestement civiles, éloignées de la frontière entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie, près du village de
Bağlıpәyә (Baghlipaya) dans le district de Kalbajar et des villages d’İkinci İpәk (Ikinji Ipak) et
Birinci İpәk (Birinji Ipak) dans le district de Latchine. De plus, l’Azerbaïdjan a trouvé, dissimulés
dans des habitations civiles situées dans des zones de peuplement du district de Latchine, des pièges
explosifs confectionnés à l’aide de matériels militaires tels que des grenades et des mines terrestres
activées par un fil déclencheur.
5. Comme il sera exposé en détail ci-après, l’Arménie a posé ces mines terrestres et ces pièges
dans des zones civiles après s’être engagée, en novembre 2020, à maintenir la paix, à restituer les
territoires à l’Azerbaïdjan, et à permettre le retour des Azerbaïdjanais déplacés6. Contrairement à ce
qu’elle a affirmé devant la Cour, à savoir que toutes mines terrestres étaient des «armes défensives»
qu’elle avait posées pendant les hostilités actives7, aucun objectif militaire concevable ne peut
expliquer la pose de mines terrestres ou de pièges dans des zones manifestement civiles en 2021 ou
après. Les actes de l’Arménie ont pour seul objectif plausible, et pour effet inévitable, de cibler les
civils azerbaïdjanais en raison de leur origine ethnique ou nationale azerbaïdjanaise, afin de les
empêcher de regagner leurs foyers dans les zones antérieurement sous occupation militaire
arménienne.
6. Il y a trois semaines à peine, le 14 décembre 2022, dans le district de Kalbajar,
sept Azerbaïdjanais, dont quatre civils (des travailleurs), ont été blessés et un autre a été tué lors de
l’explosion d’une mine terrestre8. Cet incident porte à 276 le nombre d’Azerbaïdjanais tués ou
blessés par des mines terrestres arméniennes depuis la signature de la déclaration trilatérale en
novembre 20209. Les Azerbaïdjanais déplacés à l’intérieur de leur pays ont déjà commencé à revenir
dans les zones libérées de l’occupation arménienne ; Zәngilan (Zangilan) est le premier district
concerné par ces retours mais d’autres suivront bientôt. La présence continue de mines et de pièges
posés par l’Arménie est une menace imminente pour l’intégrité physique et la vie des déplacés, ainsi
que du personnel chargé des opérations de déminage, et représente une entrave au droit de ces
personnes de revenir chez elles.
5 Déclaration du président de la République d’Azerbaïdjan, du premier ministre de la République d’Arménie et du
président de la Fédération de Russie, [9] novembre 2020, annexe à la lettre datée du 10 novembre 2020 adressée à la
présidente du Conseil de sécurité par le représentant permanent de la Fédération de Russie auprès de l’Organisation des
Nations Unies, Nations Unies, doc. S/2020/1104 (ci-après la «déclaration trilatérale»), par. 7 («Les personnes déplacées et
les réfugiés retournent dans le Haut-Karabakh et ses districts adjacents sous le contrôle du Haut-Commissariat des Nations
Unies pour les réfugiés.») (annexe 1).
6 Ibid., par. 1, 6 et 7.
7 Voir CR 2021/25, p. 20-24, par. 4-9 (Murphy).
8 Letter dated 19 December 2022 from the Permanent Representative of Azerbaijan to the United Nations addressed
to the Secretary-General, doc. S/2022/979, p. 4 (annexe 2). Voir aussi ministère de la République d’Azerbaïdjan, Joint
Statement of the Azerbaijan Ministry of Defense and the Prosecutor General’s Office, 14 décembre 2022, accessible à
l’adresse suivante : https://mod.gov.az/en/news/joint-statement-of-the-azerbaijan-ministry-of-defense-and-the-prosecutorgeneral-
039-s-office-45683.html.
9 Ministère des affaires étrangères de la République d’Azerbaïdjan, No:596/22, Commentary of the Press Service
of the Ministry of Foreign Affairs of the UN Security Council on discussions regarding the situation on the Lachin road,
21 décembre 2022, accessible à l’adresse suivante : https://mfa.gov.az/en/news/no59622.
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7. La CIEDR interdit toute mesure ayant pour but ou pour effet de compromettre la jouissance
ou l’exercice, sur un pied d’égalité, des droits fondamentaux sur la base de l’origine nationale ou
ethnique10. Le fait que l’Arménie ait posé des mines terrestres et des pièges dans des zones civiles
antérieurement peuplées de personnes d’origine azerbaïdjanaise, dont elle savait qu’elles y
reviendraient prochainement, démontre amplement que son comportement est discriminatoire tant
par son but que par son effet. Or, pour que des mesures conservatoires soient indiquées, il suffit à
l’Azerbaïdjan d’établir qu’il est plausible que le comportement de l’Arménie soit discriminatoire par
son but ou par son effet.
8. L’Azerbaïdjan a soulevé cette question et tenté de la régler, à la fois par la voie diplomatique
et par échange de lettres avec la Cour11, en vain. A ce jour, l’Arménie refuse de partager les
informations dont elle dispose au sujet de l’emplacement des mines terrestres et des pièges posés
dans les zones dont l’Azerbaïdjan a récemment repris le contrôle. Elle a catégoriquement rejeté tout
échange avec l’Azerbaïdjan, se contentant de publier des démentis d’ordre général dans lesquels elle
nie avoir agi de la sorte, sans aborder la question des preuves tangibles présentées par l’Azerbaïdjan12.
9. Plus récemment, l’Arménie s’est, à la dernière minute, retirée des pourparlers de paix que
les Parties et la Fédération de Russie devaient tenir le 23 décembre 2022 pour discuter des problèmes
actuels, notamment l’«aggravation de la situation» dans le corridor de Latchine et les préoccupations
de l’Azerbaïdjan face au non-respect persistant, par l’Arménie, de la déclaration trilatérale13. C’est
par un communiqué de presse arménien que l’Azerbaïdjan et la Fédération de Russie ont appris que
10 Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (ci-après la «CIEDR»),
4 janvier 1969, Recueil des traités des Nations Unies (RTNU), vol. 660, p. 195, art. premier, 2 et 5.
11 Voir, par exemple, Letter of 15 September 2022 from Mr. Elnur Mammadov, Agent of Azerbaijan to
Mr. Yeghishe Kirakosyan, Agent of Armenia (annexe 3) ; Letter of 22 September 2022 from Mr. Elnur Mammadov, Agent
of Azerbaijan, to Mr. Philippe Gautier, Registrar of the International Court of Justice (annexe 4) ; Letters from Lieutenant
General Azer Aliyev, Head of the Investigation Department of the Ministry of Defense of the Republic of Azerbaijan, to
Major General Andrey Volkov Alexandrovich, Commander of the Russian Peacekeeping Forces (2022) (traduction
anglaise certifiée conforme) (annexe 5).
12 Letter dated 27 September 2022 from Mr. Yeghishe Kirakosyan, Agent of the Republic of Armenia, to Mr.
Philippe Gautier, Registrar of the International Court of Justice (annexe 6, p. 2).
13 Voir ministère des affaires étrangères de la Fédération de Russie, Foreign Minister Sergey Lavrov’s statement
and answers to media questions at a joint news conference with Foreign Minister of the Republic of Azerbaijan Jeyhun
Bayramov following talks, Moscow, 23 décembre 2022, accessible à l’adresse suivante : https://mid.ru/en/press_service/
minister_speeches/1845369/ (où le ministre dit qu’il avait été «convenu antérieurement» que serait organisée une réunion
«pour donner suite [aux] discussions sur le traité de paix entre ces deux pays», expliquant ce qui suit : «[m]alheureusement,
nos collègues arméniens nous ont fait faux bond. Ils nous ont avertis de leur absence au dernier moment. Nous en avons
pris note.») ; ibid. («Nous avons néanmoins décidé de tenir cette réunion, pour faire le point sur les problèmes actuels et
oeuvrer pour un règlement durable de ces problèmes à tous les égards.») ; ibid. («Nous estimons que chacun doit respecter
scrupuleusement les obligations énoncées dans la déclaration faite le 9 novembre 2020 par les dirigeants de la Russie, de
l’Azerbaïdjan et de l’Arménie en ce qui concerne les règles de circulation dans le corridor de Latchine. Je crois comprendre
que nos collègues azerbaïdjanais sont du même avis.») ; ministère des affaires étrangères de la République d’Azerbaïdjan,
No:606/22, Commentary of the Press Service Department of the Ministry of Foreign Affairs on the statement of the Foreign
Ministry of Armenia dated December 24, 2022, accessible à l’adresse suivante : https://www.mfa.gov.az/en/news/no60622
(où il est question de l’utilisation par l’Arménie du corridor de Latchine pour approvisionner ses forces armées et transporter
des mines terrestres, en violation du paragraphe 6 de la déclaration trilatérale). Voir aussi Conseil de sécurité de l’ONU,
9228e séance du 20 décembre 2022 consacrée à la lettre datée du 13 septembre 2022, adressée au président du Conseil de
sécurité par le représentant permanent de l’Arménie auprès de l’Organisation des Nations Unies, enregistrement vidéo, à
1:08:14-1:09:52 (déclaration du représentant permanent de l’Azerbaïdjan), accessible à l’adresse suivante :
https://media.un.org/en/asset/k1o/k1o8d80kaj (ci-après la «vidéo du Conseil de sécurité»).
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l’Arménie n’honorerait pas l’engagement qu’elle avait pris de participer à ces pourparlers14. Le
ministre russe des affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a critiqué l’Arménie pour s’être ainsi retirée
des négociations sans même en informer les autres parties par la voie diplomatique, faisant observer
que cette décision ne ferait que retarder le règlement des problèmes en suspens15.
10. A moins que l’Arménie ne donne des informations concernant l’emplacement des mines
et des pièges, il est inéluctable que de nouvelles pertes en vies humaines se produisent,
principalement parmi les civils, alors qu’elles pourraient être évitées. L’Azerbaïdjan prie donc la
Cour de demander à l’Arménie de faire tout le nécessaire, y compris communiquer les
renseignements dont elle dispose sur l’emplacement et les caractéristiques des mines terrestres et
autres engins explosifs qu’elle a posés dans les zones concernées, pour permettre un déminage
efficace de ces zones. Au regard du caractère fondamental des droits en cause notamment le droit
à la vie et le droit à la sécurité de sa personne et du grave risque de préjudice irréparable qui
continue de peser sur ces droits, l’Azerbaïdjan prie respectueusement la Cour d’examiner d’urgence
la présente demande.
II. COMPÉTENCE DE LA COUR
11. La Cour a compétence, en vertu de son Statut, de son Règlement et de l’article 22 de la
CIEDR, pour connaître du différend entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie concernant l’interprétation et
l’application de cet instrument16. Dans son ordonnance du 7 décembre 2021, elle a conclu que,
«prima facie, elle a[vait] compétence en vertu de l’article 22 de la CIEDR pour connaître de l’affaire
dans la mesure où le différend opposant les Parties concern[ait] «l’interprétation ou l’application» de
la convention»17. La présente demande concernant la violation continue, par l’Arménie, des droits
revendiqués par l’Azerbaïdjan au titre de la CIEDR, la compétence prima facie de la Cour s’y étend.
14 Voir ministère des affaires étrangères de la Fédération de Russie, Foreign Minister Sergey Lavrov’s statement
and answers to media questions at a joint news conference with Foreign Minister of the Republic of Azerbaijan Jeyhun
Bayramov following talks, Moscow, 23 décembre 2022, accessible à l’adresse suivante : https://mid.ru/en/press_service/
minister_speeches/1845369/ («J’ai déjà exprimé mon regret que la rencontre trilatérale que nous avions convenu de tenir à
Moscou n’ait pas eu lieu. Nos collègues arméniens ont refusé d’y participer. Comme vous, nous avons appris ce refus par
un communiqué du service de presse. Nous n’avons pas été informés par la voie diplomatique, comme il est d’usage dans
de telles situations. Mais c’est le choix qu’a fait l’Arménie.»).
15 Voir ibid. (où il est relevé que les incidents liés au conflit «se reproduiront et se multiplieront si une partie refuse
de participer aux pourparlers à leur sujet»).
16 Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale
(Azerbaïdjan c. Arménie), requête introductive d’instance (ci-après la «requête»), par. 1 et 21-23.
17 Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale
(Azerbaïdjan c. Arménie), mesures conservatoires, ordonnance, C.I.J. Recueil 2021 (ci-après l’«ordonnance du
7 décembre 2021»), p. 418, par. 40.
- 5 -
III. FAITS ÉTAYANT LA DEMANDE
A. Nouveaux éléments de preuve attestant la pose, par l’Arménie, de mines terrestres
dans des zones où les civils azerbaïdjanais retourneront
12. Depuis le mois d’août 2022, l’Azerbaïdjan a découvert plus de 2700 mines terrestres de
fabrication arménienne récente dans les districts de Latchine et Kalbajar18. Plus de 1000 de ces
mines19 ont été trouvées après que l’Azerbaïdjan eut écrit à la Cour le 22 septembre 2022.
13. Les forces azerbaïdjanaises ont retrouvé, à proximité de l’un des champs de mines, un
manuel d’utilisation arménien expliquant le fonctionnement de ces mines terrestres qui sont toutes,
d’après les inscriptions y apparaissant, des mines antipersonnel produites en Arménie en 202120. La
photographie à la figure 1 ci-dessous montre une des mines arméniennes découvertes dans le district
de Latchine, qui porte une inscription indiquant l’année de fabrication.
Figure 1 :
Mine terrestre trouvée dans le district de Latchine21.
18 Letter from Major General Anar Karimov, Head of the General Department of Engineering Troops, Ministry of
Defense of the Republic of Azerbaijan, to Mr. Elnur Mammadov, Deputy Foreign Minister of the Republic of Azerbaijan,
30 décembre 2022 (traduction anglaise certifiée conforme) (ci-après la «lettre du ministère de la défense en date du
30 décembre 2022») (annexe 7, p. 3). Voir aussi Letter from Mr. Jeyhun Bayramov, Minister of Foreign Affairs of the
Republic of Azerbaijan, to H.E. Mr. António Guterres, Secretary-General of the United Nations, 28 novembre 2022
(annexe 8, p. 1).
19 Lettre du ministère de la défense en date du 30 décembre (annexe 7, p. 3).
20 Letter from Azer Aliyev, Head of the Main Operations Department of the Ministry of Defense of the Republic
of Azerbaijan, to Mr. Elnur Mammadov, Deputy Foreign Minister of the Republic of Azerbaijan, regarding the Ministry of
Defense’s investigation and review of newly discovered landmines, 20 septembre 2022, avec pièces jointes (traduction
anglaise certifiée conforme) (ci-après la «lettre du ministère de la défense en date du 20 septembre 2022») (annexe 9, p. 2,
5, 6 et 20) (où l’on voit l’origine arménienne et l’année de production des mines) ; Letter dated 4 November 2022 from the
Permanent Representative of Azerbaijan to the United Nations addressed to the Secretary-General, doc. A/77/597,
18 novembre 2022 (annexe 10, p. 3 et 13) ; Letters from Lieutenant General Azer Aliyev, Head of the Investigation
Department of the Ministry of Defense of the Republic of Azerbaijan, to Major General Andrey Volkov Alexandrovich,
Commander of the Russian Peacekeeping Forces (2022) (traduction anglaise certifiée conforme) (annexe 5, p. 1) ; Letter
dated 24 August 2022 from the Chargé d’affaires ad interim of the Permanent Mission of Azerbaijan to the United Nations
addressed to the Secretary-General, doc. A/76/930-S/2022/642 (annexe 11).
21 Lettre du ministère de la défense en date du 20 septembre 2022, p. 2 et 20 (où l’on voit l’origine arménienne et
l’année de production des mines) (annexe 9).
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14. La déclaration trilatérale imposait à l’Arménie de retirer ses forces parallèlement au
déploiement des forces russes de maintien de la paix22. Les forces arméniennes ont néanmoins
poursuivi leurs opérations sur le territoire souverain de l’Azerbaïdjan, en violation de la déclaration,
comme l’a admis Armen Grigoryan, secrétaire du conseil de sécurité de l’Arménie23. L’Arménie a
manifestement utilisé le corridor de Latchine, après la signature de la déclaration, pour acheminer
ces mines terrestres, au moins dans le district de Latchine. Ce corridor est la seule voie d’accès à la
région pour l’Arménie, qui s’en sert pour transporter du matériel militaire et des armes de son
territoire vers celui de l’Azerbaïdjan24.
15. Plus de la moitié de ces mines terrestres de fabrication récente ont été découvertes dans
des zones civiles où les déplacés azerbaïdjanais sont censés revenir25. Le district de Latchine, par
exemple, était peuplé à 89,9 % de personnes d’origine azerbaïdjanaise (au nombre de 46 396) en
198926, et celui de Kalbajar en comptait 96,6 % la même année (42 548 personnes)27. En août 2022,
l’Azerbaïdjan a découvert 1259 mines terrestres tout près des villages d’Ikinji Ipak et Birinji Ipak,
dans le district de Latchine, villages qui sont éloignés de la frontière entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie
et dans lesquels vivaient, avant l’occupation arménienne, 50 civils d’origine azerbaïdjanaise28. Il a
également mis au jour des mines antipersonnel arméniennes près du village de Baghlipaya dans le
district de Kalbajar, qui est lui aussi éloigné de la frontière et où vivaient 282 personnes d’origine
azerbaïdjanaise avant l’occupation29. Plus récemment, en novembre 2022, il a trouvé, dans le village
22 Déclaration trilatérale, par. 4 (annexe 1).
23 “Armenian military returns from NK after wartime support deployment”, ArmenPress, 19 juillet 2022, accessible
à l’adresse suivante : https://armenpress.am/eng/news/1088539/. Voir aussi ministère des affaires étrangères de la
République d’Azerbaïdjan, No:356/22, Commentary of the Press Service Department of the Ministry of Foreign Affairs of
the Republic of Azerbaijan on the statement of the Ministry of Foreign Affairs of Armenia dated August 3, 2022, accessible
à l’adresse suivante : https://www.mfa.gov.az/en/news/no35622 ; ministère de la défense de la République d’Azerbaïdjan,
Azerbaijani Army positions were subjected to fire, 17 décembre 2022, accessible à l’adresse suivante :
https://mod.gov.az/en/news/azerbaijan-army-positions-were-subjected-to-fire-45724.html («[S]ur le territoire de
l’Azerbaïdjan, où les forces russes de maintien de la paix sont temporairement déployées, les membres d’un détachement
armé arménien illégal ont tiré à l’arme de petit calibre sur les positions de l’armée azerbaïdjanaise, qui stationnait vers la
zone de peuplement de Naghdali, dans la région de Latchine.»).
24 Voir vidéo du Conseil de sécurité à 1:08:14-1:09:52 ; Letters from Lieutenant General Azer Aliyev, Head of the
Investigation Department of the Ministry of Defense of the Republic of Azerbaijan, to Major General Andrey Volkov
Alexandrovich, Commander of the Russian Peacekeeping Forces (2022) (traduction anglaise certifiée conforme)
(annexe 5). Voir aussi CBC TV Azerbaijan, “Использовать Лачинский коридор для поставок оружия
недопустимо политолог Гусейнов”, YouTube, 7 novembre 2022, accessible à l’adresse suivante :
https://www.youtube.com/watch?v=BPRLB1NOljQ (traduction anglaise certifiée conforme) (annexe 12) ; Caucasus War
Report, Twitter, @Caucasuswar, 16 décembre 2022, 8 h 14, accessible à l’adresse suivante : https://twitter.com/
Caucasuswar/status/1603740341118681089.
25 Lettre du ministère de la défense en date du 30 décembre (annexe 7).
26 USSR State Committee for Statistics, Results of the 1989 All-Union Population Census, Population Structure by
Ethnicity, Native Language and Second Language of the USSR Peoples, Moscow 1989 (traduction anglaise certifiée
conforme) (annexe 4 de la requête, p. 9).
27 Ibid., p. 8.
28 Lettre du ministère de la défense en date du 20 septembre 2022 (annexe 9, p. 2 et 12) ; Letter from Fuad
Huseynov, Deputy Chairman of the State Committee for Affairs of Refugees and Internally Displaced Persons of the
Republic of Azerbaijan, to Mr. Elnur Mammadov, Deputy Foreign Minister of the Republic of Azerbaijan, regarding
population and demographic information of the Lachin District, 20 septembre 2022 (traduction anglaise certifiée conforme)
(annexe 13).
29 Letter from Fuad Huseynov, Deputy Chairman of the State Committee for Affairs of Refugees and Internally
Displaced Persons of the Republic of Azerbaijan, to Mr. Elnur Mammadov, Deputy Foreign Minister of the Republic of
Azerbaijan, regarding population and demographic information of the Baghlipaya village of the Kalbajar district,
29 décembre 2022 (traduction anglaise certifiée conforme) (annexe 14). Voir aussi lettre du ministère de la défense en date
du 20 septembre 2022 (annexe 9, p. 2 et 12) ; Letter from Fuad Huseynov, Deputy Chairman of the State Committee for
Affairs of Refugees and Internally Displaced Persons of the Republic of Azerbaijan, to Mr. Elnur Mammadov, Deputy
Foreign Minister of the Republic of Azerbaijan, regarding population and demographic information of the Lachin District,
20 septembre 2022 (traduction anglaise certifiée conforme) (annexe 13).
- 7 -
d’Ikinji Ipak du district de Latchine, un autre champ de mines dans lequel étaient enfouies 350 mines
fabriquées en Arménie en 202130.
Figure 2 :
Mines terrestres découvertes près des villages d’Ikinji Ipak et Birinji Ipak en août 202231.
16. Ces mines ont été posées tout près de villages où habitaient antérieurement les
Azerbaïdjanais déplacés à l’intérieur de leur pays32. Il a été confirmé que presque toutes 1609 sur
les 1614 mines découvertes33 avaient été produites en 2021 par l’Arménie, laquelle avait donc dû
les placer après s’être engagée, par la déclaration trilatérale, à mettre fin à toutes les hostilités, à
restituer les territoires à l’Azerbaïdjan, et à permettre le retour des Azerbaïdjanais déplacés34. Or
aucun objectif militaire plausible ne pouvait justifier que l’Arménie pose des mines terrestres dans
ces zones. La seule explication possible est qu’elle entendait ainsi empêcher les civils azerbaïdjanais,
sur la base de leur origine ethnique ou nationale, de regagner leurs foyers.
30 Lettre du ministère de la défense en date du 30 décembre (annexe 7, p. 4) ; Letter from Mr. Jeyhun Bayramov,
Minister of Foreign Affairs of the Republic of Azerbaijan, to H.E. Mr. António Guterres, Secretary-General of the United
Nations, 28 novembre 2022 (annexe 8, p. 1).
31 Letters from Lieutenant General Azer Aliyev, Head of the Investigation Department of the Ministry of Defense
of the Republic of Azerbaijan, to Major General Andrey Volkov Alexandrovich, Commander of the Russian Peacekeeping
Forces (2022) (traduction anglaise certifiée conforme) (annexe 5, p. 8) ; lettre du ministère de la défense en date du
20 septembre 2022 (annexe 9, p. 15).
32 Lettre du ministère de la défense en date du 30 décembre (annexe 7, p. 4) ; lettre du ministère de la défense en
date du 20 septembre 2022 (annexe 9, p. 2).
33 La date de fabrication de cinq mines trouvées à Baghlipaya est inconnue. Voir la lettre du ministère de la défense
en date du 30 décembre (annexe 7, p. 3-4).
34 Voir par. 3 ci-dessus. Voir aussi déclaration trilatérale (annexe 1, par. 1, 6 et 7).
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B. De nouveaux éléments de preuve montrent que l’Arménie a piégé des habitations
situées dans des zones où les civils azerbaïdjanais retourneront
17. Le 26 août 2022, l’Azerbaïdjan a achevé la construction de la nouvelle voie de circulation
prévue dans la déclaration trilatérale. Cette nouvelle route doit permettre à l’Azerbaïdjan de
reprendre le contrôle de la ville de Latchine et des villages de Zaboukh et Sous, situés sur l’ancienne
route du corridor de Latchine, et de les rebâtir, afin de faciliter le retour des Azerbaïdjanais déplacés.
A l’issue des travaux, les forces russes de maintien de la paix ont été redéployées le long de la
nouvelle voie, et l’Azerbaïdjan a repris le contrôle des zones de peuplement situées sur l’ancienne
route.
18. Après avoir repris le contrôle de Latchine, Zaboukh et Sous, l’Azerbaïdjan a trouvé des
pièges dans des habitations situées dans ces deux derniers villages, notamment sous le sol de
vestibules, derrière des portes et dans des cours. Il a fait cette découverte le 3 octobre 2022, alors
qu’il préparait le retour des Azerbaïdjanais dans ces villages35. Ces pièges étaient constitués de mines
terrestres antipersonnel sous lesquelles étaient placées des grenades à main activées par un fil
déclencheur36. Puisqu’ils étaient fabriqués avec du matériel militaire, ils avaient dû être dressés par
les forces armées arméniennes ou avec leur coopération37. Aucune opération militaire n’étant en
cours dans ces zones, ces pièges ne pouvaient pas avoir d’autre cible que des civils38.
19. Trois de ces engins explosifs sont montrés aux figures 3, 4 et 5 ci-après.
35 Letter dated 4 November 2022 from the Permanent Representative of Azerbaijan to the United Nations addressed
to the Secretary-General, doc. A/77/597, 18 novembre 2022 (annexe 10, p. 4) ; ministère des affaires étrangères de la
République d’Azerbaïdjan, No: 493/22, Press release on ongoing threats as a result of planting of landmines in the
territories of Azerbaijan by Armenia, 25 octobre 2022, accessible à l’adresse suivante : https://www.mfa.gov.az/
en/news/no49322 ; Letter from Mr. Jeyhun Bayramov, Minister of Foreign Affairs of the Republic of Azerbaijan, to
H.E. Mr. António Guterres, Secretary-General of the United Nations, 28 novembre 2022 (annexe 8, p. 1).
36 Letter dated 4 November 2022 from the Permanent Representative of Azerbaijan to the United Nations addressed
to the Secretary-General, doc. A/77/597, 18 novembre 2022 (annexe 10, p. 4).
37 Ibid., p. 4 ; lettre du ministère de la défense en date du 20 septembre 2022 (annexe 9, p. 5-6).
38 Letter dated 4 November 2022 from the Permanent Representative of Azerbaijan to the United Nations addressed
to the Secretary-General, doc. A/77/597, 18 novembre 2022 (annexe 10, p. 4).
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Figure 3 :
Engin explosif placé sous le seuil d’une habitation dans le district de Latchine39.
Figure 4 :
Grenade placée dans l’embrasure d’une porte dans le district de Latchine40.
39 Letter dated 4 November 2022 from the Permanent Representative of Azerbaijan to the United Nations addressed
to the Secretary-General, doc. A/77/597, 18 novembre 2022 (annexe 10, p. 18) («Engin explosif improvisé, de fabrication
artisanale, se déclenchant par application et non par relâchement de pression, placé sous le seuil à l’intérieur d’une maison
située aux coordonnées suivantes : 39° 37' 34.1" N 46° 30' 53.6" E, dans le village de Sous, district de Latchine … Le
plancher a été remplacé par une porte de placard de sorte que l’engin soit déclenché sans dépressurisation lorsque la porte
se soulève ou qu’on marche dessus des deux côtés.»).
40 Letter dated 4 November 2022 from the Permanent Representative of Azerbaijan to the United Nations addressed
to the Secretary-General, doc. A/77/597, 18 novembre 2022 (annexe 10, p. 16) («Grenade à main RQ-42 utilisée comme
piège explosif sur une porte donnant sur le toit d’une maison située aux coordonnées suivantes : 39° 37' 36.7" N
46° 30' 48.6" E, dans le village de Sous, district de Latchine. Le corps de la grenade est garni de clous pour augmenter
l’émission de projectiles et étendre la zone de danger. L’escalier dans la maison a été détruit pour inciter la victime
potentielle à emprunter cette entrée-là.»).
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Figure 5 :
Mine placée dans l’embrasure d’une porte dans le district de Latchine41.
20. Comme dans le cas des mines terrestres, le fait que ces pièges aient été posés dans des
habitations civiles, dans des zones abandonnées par les colons arméniens où les Azerbaïdjanais
déplacés à l’intérieur de leur pays devaient revenir, montre que ce sont bien ces derniers qui étaient
visés, le but étant de les empêcher, en raison de leur origine ethnique ou nationale, de revenir chez
eux.
21. Ce comportement consistant à cibler un groupe ethnique est conforme à l’objectif plus
général de l’Arménie qui, par son invasion et son occupation longue de près de 30 années, visait à
créer un «plus grand» Etat arménien mono-ethnique avec une partie du territoire de l’Azerbaïdjan42.
Avant l’occupation militaire arménienne, des centaines de milliers d’Azerbaïdjanais vivaient dans
les territoires aujourd’hui libérés43. Comme l’Azerbaïdjan l’a expliqué dans sa requête, l’Arménie a,
dans le cadre d’une campagne de nettoyage ethnique menée au début des années 1990, violemment
expulsé de chez eux des centaines de milliers d’Azerbaïdjanais habitant dans les territoires alors
occupés, ce qui a abouti au déplacement de plus de 700 000 Azerbaïdjanais44. Cette campagne
arménienne de nettoyage ethnique était fondée sur l’idéologie ethnonationaliste ouvertement
exprimée selon laquelle les Azerbaïdjanais ne peuvent coexister pacifiquement avec les Arméniens
41 Letter dated 4 November 2022 from the Permanent Representative of Azerbaijan to the United Nations addressed
to the Secretary-General, doc. A/77/597, 18 novembre 2022 (annexe 10, p. 15) («Mine POMZ 2 placée derrière la porte
d’une remise à l’étage inférieur d’une maison située aux coordonnées suivantes : 39º 35' 16.6" N 46º 32' 48.5" N, dans le
village de Zaboukh, district de Latchine. Le détonateur, de type MUV-2, fabriqué en Arménie, est renforcé par une bombe
de TNT de 75 g et une grenade à fusil OQ-7 de 40 mm.»).
42 Requête, par. 30.
43 Ibid., par. 10 et 35-39.
44 Ibid., par. 10 et 31-39.
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en raison d’une «incompatibilité ethnique»45 et doivent donc être séparés de ces derniers et chassés
des lieux proches de zones où vivent des personnes d’origine arménienne46.
22. Malgré la libération, par l’Azerbaïdjan, des territoires qu’elle a contrôlés pendant les 30 ans
qu’a duré son occupation, l’Arménie ne se départ pas de sa volonté d’exclure les personnes d’origine
azerbaïdjanaise de son projet de «Grande Arménie» élargie. Serge Sarkissian, ancien premier
ministre et ancien président, et actuel président du parti républicain d’Arménie, l’a clairement fait
savoir en déclarant ce qui suit, en mai 2000, à propos de la campagne de nettoyage ethnique que
menait son pays contre les Azerbaïdjanais : «Le plus important, ce n’est pas le territoire, c’est qu’il
n’y ait plus qu’un seul groupe ethnique en Arménie.»47 Conformément à cet objectif consistant à
établir une population ethniquement homogène dans une partie du territoire azerbaïdjanais,
l’Arménie continue de s’employer à expulser les Azerbaïdjanais, alors même que son occupation
militaire a pris fin.
23. Les considérations ethniques sous-tendant la pose d’explosifs dans des zones civiles
s’inscrivent dans le droit fil d’une campagne plus vaste visant à dissuader les Azerbaïdjanais déplacés
à l’intérieur de leur pays de revenir dans les territoires libérés. Comme l’ont constaté des observateurs
internationaux, des zones de peuplement rendues à l’Azerbaïdjan en vertu de la déclaration trilatérale
ont été détruites par des unités militaires arméniennes battant en retraite, avec le concours de
personnes d’origine arménienne quittant les territoires où elles avaient été installées de manière
45 “Council of Europe slams Armenian president’s ‘ethnic incompatibility’ remarks”, BBC, 31 janvier 2003
(annexe 5 de la requête) (citant Robert Kotcharian, alors président de l’Arménie : «Il s’agit ici d’incompatibilité ethnique.
C’est certes malheureux d’avoir à le dire, mais c’est un fait.»). Voir aussi, par exemple, T. de Waal, Black Garden: Armenia
and Azerbaijan through Peace and War (2013), p. 310 (citant Serge Sarkissian, qui était à l’époque directeur de cabinet du
président et ministre de la défense, et allait devenir premier ministre et président de l’Arménie : «Nos cultures ne sont pas
compatibles.»).
46 Le Gouvernement arménien a cherché à justifier cette campagne de nettoyage ethnique par le tsékhakronisme,
idéologie historiquement développée par Garegin Nzhdeh selon laquelle les Azerbaïdjanais sont une «race» inférieure
composée de «barbares» qui ne sont «pas des êtres humains». Voir G. Nzhdeh, Selected Works of Garegin Nzhdeh
(E. L. Danielyan, traduction et commentaire) (2011), p. 35 et 113 (où l’auteur adhère au désir tsékhakroniste d’être «un
peuple puissant et aryen», tout en dénigrant les «Turcs» qui ne sont que «des barbares, c’est-à-dire des ignorants lâches et
sans morale») ; G. Nzhdeh, Tribal Religion Movement, accessible à l’adresse suivante : http://www.hhk.am/files/
library_pdfs/24.pdf (traduction anglaise certifiée conforme) (annexe 3 de la requête, p. 5) («Etre tsékhakroniste exige de
vouer un culte au sang de la race … En bref, le tsékhakronisme est opposé aux mariages mixtes.») ; G. Nzhdeh,
Unpreachable Nation (traduction anglaise certifiée conforme) (annexe 15, p. 144) (où il est affirmé, à propos des «Turcs» :
«ce peuple, qui durant des siècles a eu plus de traits en commun avec le chien qu’avec l’être humain, n’appartient pas à
notre espèce») ; “David Babayan: ‘Non-Humans Are Fighting Against Artsakhis’”, Public Radio of Armenia, 15 octobre
2020, accessible à l’adresse suivante : https://ru.armradio.am/2020/10/15/давид-бабаян-против-арцахцев-воюют-н
(traduction anglaise certifiée conforme) (annexe 23 de la requête). Le terme «Turcs» désignait à la fois le peuple de
l’ancien Empire ottoman et les Azerbaïdjanais. Voir G. Nzhdeh, Selected Works of Garegin Nzhdeh (E. L. Danielyan,
traduction et commentaire) (2011), p. 7 (où il est question des «Turco-Tatars de la partie orientale du Caucase du Sud (qui
deviendront par la suite les Azerbaïdjanais)»). Aujourd’hui, le parti républicain d’Arménie, au pouvoir de 1999 à 2018,
continue d’affirmer sur son site Internet qu’il est le «successeur idéologique et politique du Nzhdeh Tseghakron Professios
and National United Party [dont] l’idéologie repose sur les enseignements de Garegin Nzhdeh». Republican Party of
Armenia, “History of the Party”, accessible à l’adresse suivante : http://www.hhk.am/en/history/. Voir aussi R. Panossian,
“The Past as Nation: Three Dimensions of Armenian Identity”, Geopolitics Journal, vol. 7, p. 121 (2002), p. 133-136.
47 T. de Waal, Black Garden: Armenia and Azerbaijan Through Peace and War (New York University Press, 2013),
p. 310.
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illicite par le Gouvernement arménien48. Au cours des derniers mois, des colons arméniens ont, au
moment de partir, mis le feu à des habitations et à des forêts, et profané des cimetières dans les
hameaux situés le long de l’ancienne route du corridor de Latchine, dont l’Azerbaïdjan avait
récemment repris le contrôle, et l’Arménie n’a rien fait pour empêcher ces agissements, enquêter à
leur sujet ou contraindre leurs auteurs à en répondre. De par leur nature, ces pillages et destructions
visent les personnes azerbaïdjanaises déplacées à l’intérieur de leur pays49, et cet objectif est attesté
par les propos tenus par les individus qui les ont perpétrés. Un colon arménien de Zaboukh a par
exemple affirmé avoir mis le feu à une maison pour empêcher les Azerbaïdjanais de revenir dans le
village, déclarant : «[l]es Turcs ne pourront pas profiter de cette maison».50
C. Les conséquences des mines terrestres et des pièges pour les Azerbaïdjanais
déplacés à l’intérieur de leur pays
24. Pendant des décennies, à cause des agissements de l’Arménie, le nombre de personnes
déplacées par habitant en Azerbaïdjan était «l’un des plus élevés au monde», selon le
Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés51. La grande majorité des plus de
700 000 Azerbaïdjanais déplacés à l’intérieur de leur pays attendent depuis longtemps de pouvoir
48 Par exemple, entre le 13 et le 14 novembre 2020, des soldats et des colons arméniens ont mis le feu à au moins
16 habitations dans le village de Çәrәkdar (Charakdar), dans le district de Kalbajar. Voir, par exemple, «Nagorno-
Karabakh: Villagers burn their homes ahead of peace deal», The Guardian, 14 novembre 2020,
https://www.theguardian.com/world/2020/nov/14/nagorno-karabakh-villagers-burn-their-homes-ahead-of-peace-deal ;
Caucasus War Report, Twitter, @Caucasuswar, 14 novembre 2020,
https://twitter.com/Caucasuswar/status/1327646682780151809?s=20&t=Fd0AykqaDWCIetNwxX-neQ ; «Scorched
Earth: Ethnic Armenians Destroy Homes, Infrastructure Before Fleeing Azerbaijani Regions», Radio Free Europe/Radio
Liberty, 16 novembre 2020, https://www.rferl.org/a/scorched-earth-as-ethnic-armenians-burn-homes-before-handover-ofterritory-
to-azerbaijancontrol/30952511.html. Voir aussi T. Kuzio, «Mines, Karabakh and Armenia’s crisis», New Eastern
Europe, 16 avril 2021, https://neweasterneurope.eu/2021/04/16/mines-karabakh-and-armenias-ccrisis/. Cela s’inscrit dans
le droit fil de la politique de la terre brûlée, menée de longue date par l’Arménie pendant les 30 années qu’a duré son
occupation, comme l’a rapporté le président alors en exercice de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe
(aujourd’hui l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) (CSCE). Voir Report by the Chairman of the
CSCE Council on her visit to the Transcaucasian participating States, CSCE Communication No. 301, Prague, 19 novembre
1993, p. 8 (annexe 15 de la requête de l’Azerbaïdjan).
49 Voir Letter of 22 September 2022 from Mr. Elnur Mammadov, Agent of Azerbaijan, to Mr. Philippe Gautier,
Registrar of the International Court of Justice, p. 7-9 (annexe 4). Voir aussi Telegram, @herbixeber, 18 août 2022,
https://t.me/herbixeber/17101, Telegram, @herbixeber, 18 août 2022, https://t.me/herbixeber/17108, Telegram,
@reartsakh, 26 août 2022, https://t.me/reartsakh/14414 (Personnes d’origine d’arménienne en train de détruire leurs
maisons à Zaboukh) (annexe 16) ; ministère de la défense de la République d’Azerbaïdjan, YouTube, «Laçın rayonunun
Sus kәndindәn videogörüntülәr», 1er septembre 2022, https://www.youtube.com/watch?v=eGD4e9GCZjg (traduction
anglaise certifiée conforme) (annexe 17).
50 Caliber.az English, Twitter, @CaliberEnglish, 14 août 2022,
https://twitter.com/CaliberEnglish/status/1558825016510353410?s=20&t=49wje8wIv7MveAYFPdV1SQ (traduction
anglaise certifiée conforme) (annexe 18). Le terme «Turc» est utilisé de manière péjorative pour parler des Azerbaïdjanais,
afin de leur contester toute identité ou tout héritage fondé sur une origine ethnique ou nationale distincte. De la même
manière, un soldat arménien a déclaré avoir mis le feu à une maison en novembre 2020 : «Les Azéris. Qu’ils aillent se faire
voir. Qu’ils essaient donc de vivre ici, s’ils le peuvent.» Voir aussi «Armenians set fire to homes before handing village
over to Azerbaijan», Reuters, 14 novembre 2020, https://www.reuters.com/article/us-armenia-azerbaijanvillage/
armenians-set-fire-to-homes-before-handing-village-over-to-azerbaijan-idUSKBN27U0FQ.
51 Nations Unies, Haut-Commissariat pour les réfugiés, Azerbaijan: Analysis of Gaps in the Protection of Internally
Displaced Persons (IDPs), octobre 2009, p. 7, accessible à l’adresse suivante : https://www.unhcr.org/4bd7edbd9.pdf.
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revenir chez eux52, comme ils en ont le droit ainsi que l’ont reconnu les signataires de la déclaration
trilatérale de novembre 2020 dont fait partie l’Arménie53. Permettre aux civils déplacés de
retourner dans les territoires libérés est l’une des priorités absolues de l’Azerbaïdjan54. Des
Azerbaïdjanais déplacés ont déjà commencé à regagner leurs foyers dans les territoires libérés ; un
premier groupe a pu regagner le district de Zangilan, et il en ira bientôt de même pour les autres
districts55.
25. La présence de mines terrestres et de pièges représente un danger réel et actuel, non
seulement pour les civils employés sur les chantiers de reconstruction et pour les forces
azerbaïdjanaises menant des opérations de déminage, mais aussi pour les civils azerbaïdjanais
déplacés qui sont en train d’exercer leur droit au retour56. Une Azerbaïdjanaise déplacée,
Ziba Dadashova, originaire du village de Sous, dans le district de Latchine, a fait part de
l’impossibilité pour sa famille de rentrer chez elle : «Ces endroits, c’était le paradis. C’est là que nous
vivions, et nous rêvons d’y retourner … [mais] nous avons tous peur que nos enfants, élevés à grandpeine,
y trouvent la mort dans une explosion de mine. C’est notre inquiétude.»57
26. Les huit Azerbaïdjanais tués ou grièvement blessés le 14 décembre 2022 ont été touchés
par l’explosion de mines de fabrication arménienne que l’Arménie avait posées dans le village de
Çıraq (Chirag), dans le district de Kalbajar. Parmi les victimes, il y avait notamment quatre civils,
52 Voir, par exemple, Nations Unies, Conseil des droits de l’homme, Report of the Representative of the Secretary-
General on the human rights of internally displaced persons, Walter Kalin: Mission to Azerbaijan, doc. A/HRC/8/6/Add.2,
15 avril 2008, par. 52 («Le représentant a constaté la volonté farouche de la plupart des personnes déplacées à l’intérieur
de leur pays qu’il a interrogées de retourner dans leurs foyers ou villages.») ; Nations Unies, Haut-Commissariat pour les
réfugiés, Azerbaijan: Analysis of Gaps in the Protection of Internally Displaced Persons (IDPs) (2009), p. 50, accessible
à l’adresse suivante : https://www.unhcr.org/4bd7edbd9.pdf («[T]ous les hommes, femmes et enfants déplacés interrogés
dans le cadre d’une évaluation participative en 2007 ont dit souhaiter ardemment que soit trouvée une solution pérenne,
affirmant que celle qui avait leur préférence était le retour dans leurs foyers d’origine.») ; YouTube, «Zabux kәnd sakini
Elburus Әsәdov 30 il әvvәl tәrk etdiyi doğma yurduna qayıtmağa hazırlaşır» (où l’on entend une personne azerbaïdjanaise
déplacée à l’intérieur de son pays, originaire de Zaboukh, exprimer le désir de rentrer chez elle et d’«embrasser le sol»)
(annexe 19). Voir aussi Nations Unies, Assemblée générale, résolution 62/243 (2008), par. 2 (réaffirmant «le droit
inaliénable de la population qui a été expulsée des territoires occupés de la République d’Azerbaïdjan de retourner chez
elle» et soulignant «qu’il est nécessaire de créer les conditions propices à son retour, notamment le relèvement global des
territoires touchés par le conflit»).
53 Déclaration trilatérale, par. 7 (où il est prévu que «[l]es personnes déplacées et les réfugiés retournent dans le
Haut-Karabakh et ses districts adjacents») (annexe 1).
54 Order of the President of the Republic of Azerbaijan, On approval of the ‘I State Program on the Great Return
to the liberated territories of the Republic of Azerbaijan’, 16 novembre 2022 (traduction anglaise certifiée conforme), p. 1
(annexe 20).
55 T. Turksoy, «Great Return: First Group of Azerbaijanis Once Expelled by Armenians Returns Back Home»,
Caspian News, 19 juillet 2022, accessible à l’adresse suivante : https://caspiannews.com/news-detail/great-return-firstgroup-
of-azerbaijanis-once-expelled-by-armenians-returns-back-home-2022-7-19-0/ ; «Azerbaijan Starts Return of People
to Recaptured Areas», VOA, 19 juillet 2022, accessible à l’adresse suivante : https://www.voanews.com/a/azerbaijan-startsreturn-
of-people-to-recaptured-areas-/6665547.html.
56 Order of the President of the Republic of Azerbaijan, On approval of the ‘I State Program on the Great Return
to the liberated territories of the Republic of Azerbaijan’, 16 novembre 2022 (traduction anglaise certifiée conforme), p. 2,
9, 12, 17 (où sont exposés les projets de l’Azerbaïdjan concernant l’enlèvement des mines, engins non explosés et autres
engins et débris explosifs afin de permettre le retour des civils déplacés chez eux) (annexe 20).
57 YouTube, «Boşaldılan Sus kәndi köçkünlәrinin qayğıları: kәnddә iş, salamat ev varmı?», Azadliq Radiosu,
29 août 2022, accessible à l’adresse suivante : https://www.youtube.com/watch?v=7MDtFQWNff0 (traduction anglaise
certifiée conforme) (annexe 21).
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des ouvriers qui effectuaient des travaux de réparation et de reconstruction en prévision du retour des
Azerbaïdjanais déplacés à l’intérieur de leur pays58.
27. L’Arménie a continué de poser des mines terrestres en territoire azerbaïdjanais après avoir
signé la déclaration trilatérale, et refuse de communiquer l’emplacement de ces mines et autres
explosifs. Il est donc nécessaire d’indiquer d’urgence de nouvelles mesures conservatoires enjoignant
à l’Arménie de communiquer les informations requises pour faciliter le déminage du territoire de
l’Azerbaïdjan et de mettre un terme à la pose d’autres mines ou explosifs sur ledit territoire, afin
d’éviter de nouvelles pertes en vies humaines et de protéger les droits que les Azerbaïdjanais tiennent
de la CIEDR.
IV. DROITS QUE L’AZERBAÏDJAN CHERCHE À PROTÉGER
28. En vertu de l’article 41 de son Statut, la Cour a «le pouvoir d’indiquer, si elle estime que
les circonstances l’exigent, quelles mesures conservatoires du droit de chacun doivent être prises à
titre provisoire». Pour indiquer des mesures conservatoires relativement aux droits en cause, la Cour
n’a pas à «établir l’existence de violations de la CIEDR»59 ni à «se prononcer définitivement sur le
point de savoir si les droits que l’Azerbaïdjan souhaite voir protégés existent ; il lui faut seulement
déterminer si les droits que celui-ci revendique au fond et dont il sollicite la protection sont
plausibles»60.
29. La présente demande vise à protéger les droits garantis par les articles 2 et 5 de la CIEDR.
L’alinéa a) du paragraphe 1 de l’article 2 impose aux Etats parties l’obligation générale de ne se
livrer à aucun «acte ou pratique de discrimination raciale contre des personnes, groupes de personnes
ou institutions», et notamment de faire en sorte qu’aucune autorité ou institution publique ne se livre
à pareilles pratiques. A l’alinéa b) du même paragraphe, les Etats parties s’engagent également à ne
pas «encourager, défendre ou appuyer la discrimination raciale pratiquée par une personne ou une
organisation quelconque». La «discrimination raciale» est définie à l’article premier comme toute
discrimination ayant pour but ou pour effet de discriminer sur la base de l’origine nationale ou
ethnique dans l’exercice des droits de l’homme et des libertés fondamentales :
«l’expression «discrimination raciale» vise toute distinction, exclusion, restriction ou
préférence fondée sur la race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou
ethnique, qui a pour but ou pour effet de détruire ou de compromettre la reconnaissance,
la jouissance ou l’exercice, dans des conditions d’égalité, des droits de l’homme et des
libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social et culturel ou
dans tout autre domaine de la vie publique».
58 Letter dated 19 December 2022 from the Permanent Representative to the United Nations addressed to the
Secretary-General, 19 décembre 2022, p. 4 (annexe 2). Voir aussi ministère de la défense de la République d’Azerbaïdjan,
Joint Statement of the Azerbaijan Ministry of Defense and the Prosecutor General’s Office, 14 décembre 2022, accessible
à l’adresse suivante : https://mod.gov.az/en/news/joint-statement-of-the-azerbaijan-ministry-of-defense-and-theprosecutor-
general-039-s-office-45683.html.
59 Application de la convention internationale pour la répression du financement du terrorisme et de la convention
internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Ukraine c. Fédération de Russie), mesures
conservatoires, ordonnance du 19 avril 2017, C.I.J. Recueil 2017, p. 136, par. 90.
60 Ordonnance du 7 décembre 2021, p. 419, par. 42. Voir aussi Application de la convention internationale pour la
répression du financement du terrorisme et de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de
discrimination raciale (Ukraine c. Fédération de Russie), mesures conservatoires, ordonnance du 19 avril 2017,
C.I.J. Recueil 2017, p. 126, par. 64.
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30. L’article 5, quant à lui, fournit une liste non exhaustive des droits de l’homme et libertés
fondamentales à protéger, notamment le «[d]roit à la sûreté de la personne et à la protection de l’Etat
contre les voies de fait ou les sévices» (alinéa b)), le «[d]roit de circuler librement et de choisir sa
résidence à l’intérieur d’un Etat» (point i) de l’alinéa d)), et le «[d]roit de quitter tout pays, y compris
le sien, et de revenir dans son pays» (point ii) de l’alinéa d)). Le comité de la CIEDR a appelé
l’attention sur l’importance particulière du droit des personnes déplacées, visé à l’article 5, «de
retourner librement dans leurs foyers d’origine en toute sécurité»61 après des conflits à caractère
ethnique62.
31. La Cour a également conclu, dans d’autres affaires récentes, que des allégations de
violations de droits protégés par la CIEDR étaient plausibles aux fins de l’indication de mesures
conservatoires «si les actes dont il [était] tir[é] grief sembl[ai]ent constituer des actes de
discrimination raciale au sens de l’article premier de la convention»63. S’agissant de la présente
instance, la Cour a déjà établi qu’«une politique consistant à éloigner des personnes sur la base de
leur origine nationale ou ethnique d’une région donnée, et à les empêcher d’y revenir, p[ouvait] faire
intervenir des droits garantis par la CIEDR»64.
32. Si la Cour s’est abstenue auparavant de dire que la CIEDR «impos[ait] de manière
plausible à l’Arménie une quelconque obligation de prendre des mesures pour permettre à
l’Azerbaïdjan de procéder au déminage, ou de cesser définitivement ses opérations de minage», c’est
parce qu’elle estimait que
«[l]’Azerbaïdjan n’a[vait] pas produit … d’éléments de preuve démontrant que le
comportement allégué de l’Arménie s’agissant des mines terrestres [eût] «pour but ou
pour effet de détruire ou de compromettre la reconnaissance, la jouissance ou l’exercice,
dans des conditions d’égalité», des droits des personnes d’origine nationale ou ethnique
azerbaïdjanaise»65.
Le paragraphe 3 de l’article 75 du Règlement de la Cour dispose ce qui suit : «Le rejet d’une demande
en indication de mesures conservatoires n’empêche pas la partie qui l’avait introduite de présenter
en la même affaire une nouvelle demande fondée sur des faits nouveaux.» Or des faits nouveaux, qui
ne s’étaient pas encore fait jour au moment de la précédente demande de l’Azerbaïdjan, montrent
que l’Arménie pose des mines terrestres et des pièges visant spécifiquement les civils
azerbaïdjanais66.
61 Comité de la CIEDR (CERD), Recommandation générale XXII concernant l’article 5 et les réfugiés et personnes
déplacées (1996), par. 2 a).
62 Comité de la CIEDR (CERD), Rapport du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, Assemblée
générale, documents officiels, cinquantième session, supplément n° 18 (A/50/18), p. 54, par. 219, conclusions du 16 mars
1995 (appelant au «renversement immédiat de la politique de nettoyage ethnique, ce qui doit commencer par le retour, de
leur plein gré, des personnes déplacées» dans le contexte de la situation en Bosnie-Herzégovine). Voir aussi Comité de la
CIEDR (CERD), décision du 17 août 1995 sur la situation en Bosnie-Herzégovine, p. 20, par. c). («demander … que la
possibilité soit donnée aux personnes de retourner en toute sécurité dans les régions où elles vivaient avant le début du
conflit et que leur protection soit garantie»).
63 Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale
(Qatar c. Emirats arabes unis), mesures conservatoires, ordonnance du 23 juillet 2018, C.I.J. Recueil 2018 (I), p. 426,
par. 52.
64 Ordonnance du 7 décembre 2021, p. 425, par. 53.
65 Ibid.
66 Voir plus haut, par. 12-16 et 18-20.
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33. L’Arménie a affirmé à la Cour, en octobre 2021, que les mines terrestres posées sur le
territoire de l’Azerbaïdjan étaient des «armes défensives» utilisées durant les hostilités actives67. La
découverte récente de mines terrestres et de pièges posés en masse par l’Arménie dans des zones
strictement civiles68 contredit catégoriquement cette affirmation. Le fait que l’Arménie pose des
mines terrestres dans des zones civiles auparavant exclusivement peuplées d’Azerbaïdjanais, alors
qu’elle a accepté de restituer ces zones à l’Azerbaïdjan, montre bien que son comportement est
discriminatoire69. De même, le fait de piéger des habitations dans les zones où doivent revenir les
Azerbaïdjanais70 ne peut être interprété que comme un acte de violence discriminatoire fondé sur des
considérations raciales. Ces pièges ont été placés exclusivement chez des particuliers, où ils étaient
supposés mutiler ou tuer des civils azerbaïdjanais, très loin de potentielles cibles militaires légitimes
ou des régions frontalières, et assurément dans le territoire strictement délimité où doivent revenir
des civils. Par conséquent, ces pièges ne servent aucun objectif militaire légitime et ne sauraient être
considérés comme ayant un caractère «défensif» ou «offensif». En revanche, par son comportement,
l’Arménie empêche les Azerbaïdjanais de jouir, dans des conditions d’égalité, de leurs droits
fondamentaux, en faisant peser, de manière délibérée et constante, une menace sur la vie ou l’intégrité
physique des civils azerbaïdjanais qui tenteraient de revenir chez eux à Latchine, Kalbajar ou dans
d’autres districts où pourraient se trouver des mines et des pièges.
34. Les considérations ethniques sous-tendant les actes de destruction et de sabotage perpétrés
par l’Arménie ressortent aussi clairement des déclarations faites par des colons arméniens au moment
de partir, qui n’ont pas caché qu’ils haïssaient les Azerbaïdjanais en tant que peuple, en raison de
leur origine ethnique et nationale71.
35. Il importe de souligner que la Cour n’a pas besoin, pour indiquer les mesures
conservatoires sollicitées, de déterminer si le but de l’Arménie, en posant des mines terrestres et des
pièges dans des zones civiles, était constitutif de discrimination raciale. Il suffit que le comportement
de l’Arménie ait pour effet ou conséquence de compromettre la jouissance par les Azerbaïdjanais,
dans des conditions d’égalité, de leurs droits fondamentaux, y compris leur droit de regagner leurs
foyers, leur droit de circuler librement et de choisir leur résidence, et leur droit d’être protégés contre
les voies de fait ou les sévices. Les observateurs internationaux ont déploré les «victimes civiles»,
«les incidents et les blessures atroces», et les «dangers persistants menaçant les civils … et nuisant
aux efforts de relèvement d’après-conflit» que cause la pose continue, par l’Arménie, de mines en
territoire azerbaïdjanais72. Ces conséquences dramatiques touchent les Azerbaïdjanais de manière
discriminatoire car l’Arménie a posé des mines dans des zones qui étaient totalement ou
majoritairement habitées73 par des Azerbaïdjanais avant l’occupation arménienne, ou à proximité de
67 Voir CR 2021/25, p. 20-24, par. 4-9 (Murphy).
68 Voir plus haut, par. 15 et 16.
69 Voir plus haut, par. 3, 5 et 16. Voir aussi déclaration trilatérale, par. 6 (où il est dit que l’Arménie restitue les
districts de Kalbajar et Latchine) (annexe 1).
70 Voir plus haut, par. 20 et 21.
71 Voir plus haut, par. 23.
72 Joshua Kucera, «Azerbaijan demands ‘mine maps’ from Armenia», Eurasianet, 11 juin 2021, accessible à
l’adresse suivante : https://eurasianet.org/azerbaijan-demands-mine-maps-from-armenia ; Twitter, @Giorgi_Gogia, 4 juin
2021, 10:08, accessible à l’adresse suivante : https://twitter.com/Giorgi_Gogia/status/1400816623158710275?
cxt=HHwWhsCyrYDT2fAmAAAA ; Twitter, @ExtSpoxEU, 4 juin 2021, 15:23, accessible à l’adresse suivante :
https://twitter.com/ExtSpoxEU/status/1400896078401183747?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ct
wterm%5E1400896078401183747%7Ctwgr%5Eada2e1486ed1ac1388a460648209f8ef42a207d3%7Ctwcon%5Es1_&ref
_url=https%3A%2F%2Feurasianet.org%2Fazerbaijan-demands-mine-maps-from-armenia.
73 Voir USSR State Committee for Statistics, Results of the 1989 All-Union Population Census, Population
Structure by Ethnicity, Native Language and Second Language of the USSR Peoples, Moscow 1989 (traduction anglaise
certifiée conforme), p. 8-9 (annexe 4 de la requête de l’Azerbaïdjan) ; requête, par. 10, 35-39. Voir aussi plus haut,
par. 15 et 16, 20 et 21.
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ces zones. Compte tenu des nouveaux éléments attestant que des mines terrestres et des pièges ont
été fabriqués et posés dans ces zones en 2021 ou après, l’effet du comportement de l’Arménie ne
pourrait pas être plus clair : celle-ci a accepté, par la déclaration trilatérale, la restitution de ces
territoires à l’Azerbaïdjan et le retour des Azerbaïdjanais qui en avaient été déplacés. Ce sont donc
les Azerbaïdjanais en particulier qui sont tués ou blessés, ou risquent d’être tués ou blessés, ou sont
contraints de rester en exil à cause des mines et des pièges posés par l’Arménie74. Comme l’a précisé
le comité de la CIEDR, des «cas graves, massifs, répétés ou persistants de discrimination raciale»
peuvent inclure des «actes d’extrême violence» tels que «l’emploi … de mines terrestres»75.
36. Au surplus, l’article 2 de la CIEDR oblige les Etats parties à poursuivre «par tous les
moyens appropriés» une politique tendant à éliminer «toute forme» de discrimination raciale.
Précisant cette obligation, l’alinéa b) du paragraphe 1 de l’article 2 impose aux Etats parties de «ne
pas encourager, défendre ou appuyer la discrimination raciale pratiquée par une personne ou une
organisation quelconque». Cette obligation inclut l’interdiction d’encourager la discrimination ou de
fournir un appui financier ou une assistance à cette fin76. De plus, l’alinéa d) du paragraphe 1 de
l’article 2 indique aussi clairement que l’obligation incombant aux Etats parties d’«interdire la
discrimination raciale … et [d’]y mettre fin» s’étend à la «discrimination … pratiquée par des
personnes, des groupes ou des organisations». Par conséquent, l’Arménie peut voir sa responsabilité
engagée tant pour la pose de mines et de pièges par elle-même que, si des colons de la région ou
d’autres y ont pris part, pour le soutien ou l’assistance qu’elle a pu leur apporter à cette fin et pour
avoir manqué de les en empêcher.
37. Au mépris de l’obligation que lui fait l’article 2 de la CIEDR de prendre des mesures
effectives pour éliminer la discrimination raciale, l’Arménie refuse de communiquer les informations
dont elle dispose concernant l’emplacement des mines et des pièges, et qui aideraient l’Azerbaïdjan
à procéder, de manière sûre et efficace, au déminage des zones civiles de son territoire où l’Arménie
a illicitement pris pour cible des civils azerbaïdjanais au motif de leur origine ethnique ou nationale77,
ce qui permettrait à ces derniers de regagner leurs foyers.
38. Comme nous l’avons vu plus haut, les droits, invoqués par l’Azerbaïdjan, à la protection
contre la discrimination raciale pratiquée par l’Arménie sont manifestement plausibles, et
l’Azerbaïdjan sollicite l’indication de mesures conservatoires pour se protéger du préjudice causé par
la violation continue de ces droits par l’Arménie. Celle-ci, pour sa part, ne verrait aucun de ses droits
ou intérêts légitimes compromis par l’indication des mesures conservatoires sollicitées.
74 Voir ministère des affaires étrangères de la République d’Azerbaïdjan, No:596/22, Commentary of the Press
Service of the Ministry of Foreign Affairs of the UN Security Council on discussions regarding the situation on the Lachin
road, 21 décembre 2022, accessible à l’adresse suivante : https://mfa.gov.az/en/news/no59622 (où il est indiqué que
276 citoyens azerbaïdjanais ont été tués ou blessés par des mines terrestres posées par l’Arménie depuis la signature de la
déclaration trilatérale) ; par. 24-26 (où il est expliqué que la pose récente de mines et de pièges par l’Arménie compromet
la possibilité, pour les personnes d’origine azerbaïdjanaise, de rentrer chez elles).
75 Comité de la CIEDR (CERD), Rapport du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale sur ses soixantedixième
et soixante et onzième sessions (2007), doc. A/62/18, annexe III, Directives applicables aux procédures d’alerte
rapide et d’intervention d’urgence, p. 122, par. 7. Voir aussi Comité de la CIEDR (CERD), Observations finales concernant
le rapport de Sri Lanka valant dixième à dix-septième rapports périodiques, doc. CERD/C/LKA/CO/10-17, 6 octobre 2016,
p. 6, par. 25 et 26 (où il est fait part des inquiétudes que suscite la lenteur du processus de déminage, qui empêche certains
groupes ethniques déplacés de regagner leurs foyers).
76 Voir Comité de la CIEDR (CERD), conclusions concernant la Fédération de Russie, doc. CERD/C/62/CO/7,
2 juin 2003, p. 3, par. 16. Voir aussi P. Thornberry, The International Convention on the Elimination of All Forms of Racial
Discrimination (Oxford, 2016), p. 185.
77 Voir plus haut, par. 12-16, 17-20.
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V. CARACTÈRE D’URGENCE ET PRÉJUDICE IRRÉPARABLE
39. La Cour a le pouvoir d’indiquer des mesures conservatoires «lorsqu’il existe un risque
qu’un préjudice irréparable soit causé aux droits en litige dans une procédure judiciaire ou lorsque la
méconnaissance alléguée de ces droits risque d’entraîner des conséquences irréparables»78. Elle
n’exercera toutefois ce pouvoir que «s’il y a urgence, c’est-à-dire s’il existe un risque réel et
imminent qu’un préjudice irréparable soit causé … avant que la Cour ne rende sa décision
définitive»79.
40. Dans la présente instance, la Cour a conclu que les droits énoncés à l’article 4 ainsi qu’aux
alinéas a), b), c), d) et e) de l’article 5 de la CIEDR «sont d’une nature telle que le préjudice qui leur
serait porté pourrait se révéler irréparable»80. Pour expliquer cette décision, la Cour a relevé que la
violation de droits découlant de la CIEDR était susceptible de causer un préjudice irréparable
lorsqu’elle pouvait avoir «de graves effets préjudiciables sur les personnes appartenant [à un] groupe
protégé», «notamment, mais pas seulement, le risque de sévices ou de souffrances et de détresse
psychologiques»81.
41. Le fait que l’Arménie utilise des mines terrestres de fabrication récente et des pièges sur
le territoire de l’Azerbaïdjan représente une menace immédiate pour les droits que les Azerbaïdjanais
tiennent de l’article 5 de la CIEDR, en faisant notamment peser un risque de préjudice irréparable
sur le droit à la vie, le droit à la sécurité de sa personne et à la protection contre les voies de fait ou
les sévices, le droit de circuler librement et de choisir sa résidence, et le droit de regagner son foyer
dans les territoires libérés.
42. L’Arménie dispose d’informations sur l’emplacement des mines qu’elle a posées en
territoire azerbaïdjanais82, y compris, à l’évidence, celles qu’elle a posées depuis la signature de la
déclaration trilatérale. Parce qu’elle refuse de révéler l’emplacement des mines et des pièges, il existe
un risque réel et continu que les civils azerbaïdjanais travaillant dans les districts de Latchine et
Kalbajar ou dans d’autres territoires libérés, ou qui essaient de regagner leurs foyers dans ces
territoires, soient grièvement blessés ou tués par l’explosion d’une mine, ou empêchés de revenir
chez eux en raison de la forte probabilité que cela leur arrive. Il existe un risque réel et imminent que
ces préjudices soient causés avant que la Cour ne rende sa décision définitive à ce sujet.
VI. MESURES DEMANDÉES
43. Sur la base des faits exposés ci-dessus et dans la requête, l’Azerbaïdjan, en son nom propre
et en qualité de parens patriae de ses ressortissants, prie respectueusement la Cour d’indiquer
78 Ordonnance du 7 décembre 2021, p. 426, par. 59.
79 Ibid., par. 60.
80 Ibid., p. 428, par. 66.
81 Ibid., p. 429, par. 66.
82 Letter dated 4 November 2022 from the Permanent Representative of Azerbaijan to the United Nations addressed
to the Secretary-General, doc. A/77/597, 18 novembre 2022, p. 4-5 («Sous la pression internationale, l’Arménie a publié
certains plans de repérage de champs de mines antérieurs à 2020 ... Toutefois, ces plans de repérage ne concernent que 5 %
des zones libérées et moins d’un tiers des zones confirmées comme étant à haut risque dans le rapport d’évaluation des
besoins de lutte antimines en Azerbaïdjan (décembre 2020) élaboré par le Service de la lutte antimines de l’ONU et le
Programme des Nations Unies pour le développement. … Le Premier Ministre de la République d’Arménie s’est
publiquement vanté de ce que les informations communiquées à l’Azerbaïdjan (au moment de la déclaration, l’Arménie
avait fait état d’environ 200 000 mines terrestres) ne représentaient qu’une «infime partie» des mines terrestres posées par
son pays.») (annexe 10).
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d’urgence les mesures conservatoires suivantes, qui sont directement liées aux droits constituant
l’objet du différend, en attendant que celui-ci soit tranché au fond :
a) L’Arménie doit immédiatement prendre toutes les mesures nécessaires pour permettre à
l’Azerbaïdjan d’entreprendre un déminage rapide, sûr et efficace des villes, villages et autres
lieux où les civils azerbaïdjanais reviendront dans les districts de Latchine et Kalbajar et d’autres
districts anciennement occupés de l’Azerbaïdjan, notamment en communiquant l’emplacement,
la quantité, le type et les caractéristiques des mines terrestres, pièges et tous autres engins
explosifs présents dans ces zones, de sorte que les Azerbaïdjanais déplacés dans leur propre pays
puissent regagner leurs foyers.
b) L’Arménie doit immédiatement cesser et s’abstenir à l’avenir de poser des mines terrestres et des
pièges, ou d’en encourager ou faciliter la pose, dans les zones du territoire de l’Azerbaïdjan où
les civils azerbaïdjanais retourneront, et notamment, mais pas seulement, renoncer à utiliser le
corridor de Latchine à cette fin.
L’Azerbaïdjan se réserve le droit, au cours de la présente procédure, de modifier la présente
demande et de solliciter, en tant que de besoin, de nouvelles mesures conservatoires afin d’éviter
qu’un préjudice irréparable ne soit causé aux droits en cause en l’espèce ou d’empêcher une nouvelle
aggravation du différend opposant les Parties.
L’agent de la République d’Azerbaïdjan,
(Signé) Elnur MAMMADOV.
___________
Demande en indication de mesures conservatoires