Déclaration d'intervention de l'Italie

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182-20220912-WRI-02-00-EN
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Incidental Proceedings
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Note: Cette traduction a été établie par le Greffe à des fins internes et n’a aucun caractère officiel
COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
ALLÉGATIONS DE GÉNOCIDE AU TITRE DE LA CONVENTION POUR
LA PRÉVENTION ET LA RÉPRESSION DU CRIME DE GÉNOCIDE
(UKRAINE c. FÉDÉRATION DE RUSSIE)
DÉCLARATION D’INTERVENTION DÉPOSÉE PAR LE GOUVERNEMENT DE LA
RÉPUBLIQUE ITALIENNE EN VERTU DE L’ARTICLE 63 DU STATUT
DE LA COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
13 septembre 2022
[Traduction du Greffe]
A Monsieur le greffier de la Cour internationale de Justice, le soussigné, dûment autorisé par
le Gouvernement italien, déclare ce qui suit :
1. Au nom du Gouvernement italien, j’ai l’honneur de soumettre à la Cour une déclaration
d’intervention (ci-après la «déclaration») fondée sur le paragraphe 2 de l’article 63 de son Statut, en
l’affaire relative à des Allégations de génocide au titre de la convention pour la prévention et la
répression du crime de génocide (Ukraine c. Fédération de Russie).
2. Ce faisant, l’Italie agit en vertu du paragraphe 2 de l’article 63 du Statut de la Cour, ce qui
constitue l’exercice d’un droit, ainsi que la Cour l’a reconnu à maintes reprises1. L’Italie se réserve
le droit de compléter sa déclaration au cours des exposés oraux et écrits et par le dépôt d’une
nouvelle déclaration auprès de la Cour.
3. En exerçant son droit d’intervenir en vertu de l’article 63 du Statut, l’Italie a conscience
qu’elle doit se conformer à l’exigence énoncée au paragraphe 1de l’article 82 du Règlement de la
Cour, aux termes duquel la déclaration d’un Etat au titre de l’article 63 du Statut doit être déposée
«le plus tôt possible avant la date fixée pour l’ouverture de la procédure orale». L’Italie souhaite
donc préciser que la présente déclaration a été présentée dès que cela a été raisonnablement
possible, dans le délai imparti par ledit paragraphe 1 de l’article 82 du Règlement de la Cour.
4. Conformément au paragraphe 2 de ce même article, un Etat désirant se prévaloir du droit
d’intervention que lui confère l’article 63 du Statut doit préciser dans sa déclaration l’affaire et la
convention concernées et apporter les éléments suivants :
a) des renseignements spécifiant sur quelle base l’Etat déclarant se considère comme partie à la
convention ;
b) l’indication des dispositions de la convention dont il estime que l’interprétation est en cause ;
c) un exposé de l’interprétation qu’il donne de ces dispositions ; et
d) un bordereau des documents à l’appui, qui sont annexés.
5. A la suite des observations liminaires, qui présentent un résumé de la procédure en l’affaire
(première partie 􀁿􀁿 Observations liminaires), la présente déclaration traitera les éléments requis
au paragraphe 2 de l’article 82 du Règlement de la Cour, à savoir la base sur laquelle se fonde l’Italie
pour se considérer comme partie à la convention (deuxième partie 􀁿 Base sur laquelle l’Italie est
partie à la convention), l’indication des dispositions sur lesquelles elle souhaite intervenir
(troisième partie 􀁿 Dispositions de la convention qui sont en cause en l’espèce), un exposé de
l’interprétation des dispositions en question (quatrième partie 􀁿 Exposé de l’interprétation), et
1 Haya de la Torre (Colombie/Pérou), arrêt, C.I.J. Recueil 1951, p. 76 ; Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya
arabe libyenne), requête à fin d’intervention, arrêt, C.I.J. Recueil 1981, p. 13, par. 21 ; Chasse à la baleine dans
l’Antarctique (Australie c. Japon), déclaration d’intervention de la Nouvelle-Zélande, ordonnance du 6 février 2013,
C.I.J. Recueil 2013, p. 9, par. 18.
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un bordereau des documents à l’appui de l’intervention (cinquième partie 􀁿􀁿 Documents à l’appui
de la déclaration).
I. OBSERVATIONS LIMINAIRES
6. La déclaration tient compte de l’état d’avancement de la procédure en l’affaire à la date où
elle est déposée.
7. Le 26 février 2022, l’Ukraine a déposé au Greffe de la Cour une requête introductive
d’instance contre la Fédération de Russie au sujet d’un différend concernant l’interprétation,
l’application ou l’exécution de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide
(ci-après la «convention sur le génocide»)2.
8. L’Ukraine y faisait valoir entre autres que :
«L’obligation de prévenir et de punir le génocide consacrée à l’article premier de
la convention implique nécessairement d’être exécutée de bonne foi et de ne pas être
dévoyée, une partie contractante ne pouvant faire subir à une autre une action illicite,
notamment une attaque armée, surtout sous le prétexte parfaitement fallacieux de
prévenir et de punir un génocide.»3
9. En conséquence, «[i]l existe, entre l’Ukraine et la Fédération de Russie, un différend au sens
de l’article IX concernant l’interprétation, l’application ou l’exécution de la convention sur le
génocide»4.
10. Simultanément, l’Ukraine a déposé une demande en indication de mesures conservatoires
par laquelle elle priait la Cour d’indiquer les mesures conservatoires suivantes :
«a) La Fédération de Russie doit suspendre immédiatement les opérations militaires
commencées le 24 février 2022 ayant pour but et objectif déclarés la prévention et
la répression d’un prétendu génocide dans les oblasts ukrainiens de Louhansk et de
Donetsk.
b) La Fédération de Russie doit veiller immédiatement à ce qu’aucune des unités
militaires ou unités armées irrégulières qui pourraient agir sous sa direction ou
bénéficier de son appui, ni aucune organisation ou personne qui pourrait se trouver
sous son contrôle, sa direction ou son influence ne prenne de mesures tendant à la
poursuite des opérations militaires ayant pour but et objectif déclarés la prévention
et la répression d’un génocide que commettrait l’Ukraine.
c) La Fédération de Russie doit s’abstenir de tout acte susceptible d’aggraver ou
d’étendre le différend qui constitue l’objet de la requête, ou d’en rendre le règlement
plus difficile, et donner des assurances à cet égard.
2 Allégations de génocide au titre de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide
(Ukraine c. Fédération de Russie), requête introductive d’instance, 27 février 2022.
3 Ibid., par. 27.
4 Ibid., par. 7.
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d) La Fédération de Russie doit rendre compte à la Cour des mesures prises pour
exécuter l’ordonnance en indication de mesures conservatoires dans un délai d’une
semaine à compter de la date de celle-ci, puis à intervalles réguliers, dans les délais
qui seront fixés par la Cour.»5
11. La procédure orale s’est ouverte le 7 mars 2022, sans la participation de la Fédération de
Russie. Le 16 mars 2022, la Cour a confirmé qu’elle avait compétence prima facie et a jugé que les
droits invoqués par l’Ukraine ainsi que le risque d’un préjudice irréparable étaient plausibles. Ainsi,
dans son ordonnance relative aux mesures conservatoires, la Cour a prescrit ce qui suit :
«1) la Fédération de Russie doit suspendre immédiatement les opérations militaires
qu’elle a commencées le 24 février 2022 sur le territoire de l’Ukraine ;
2) la Fédération de Russie doit veiller à ce qu’aucune des unités militaires ou unités
armées irrégulières qui pourraient agir sous sa direction ou bénéficier de son appui,
ni aucune organisation ou personne qui pourrait se trouver sous son contrôle ou sa
direction, ne commette d’actes tendant à la poursuite des opérations militaires visées
au point 1) ci-dessus ;
3) les deux Parties doivent s’abstenir de tout acte qui risquerait d’aggraver ou d’étendre
le différend dont la Cour est saisie ou d’en rendre le règlement plus difficile.»6
12. A la date de la présente déclaration, la Fédération de Russie ne s’est pas conformée aux
prescriptions de l’ordonnance du 16 mars 2022 et a intensifié et étendu ses opérations militaires sur
le territoire de l’Ukraine.
13. Le 30 mars 2022, ainsi que le prévoit le paragraphe 1 de l’article 63 du Statut de la Cour,
le greffier a dûment informé le Gouvernement italien en sa qualité de partie à la convention sur le
génocide que l’Ukraine, dans sa requête, invoquait la convention «à la fois comme base de
compétence de la Cour et à l’appui de [ses] demandes au fond». Le greffier a également indiqué que :
«[L’Ukraine] entend fonder la compétence de la Cour sur la clause
compromissoire figurant à l’article IX de la convention, prie la Cour de déclarer qu’elle
ne commet pas de génocide, tel que défini aux articles II et III de la convention, et
soulève des questions sur la portée de l’obligation de prévenir et de punir le génocide
consacrée à l’article premier de la convention. Il semble, dès lors, que l’interprétation
de cette convention pourrait être en cause en l’affaire.»7
14. La présente espèce soulève d’importantes questions en ce qui concerne l’interprétation et
l’application de la convention sur le génocide. Cette dernière impose des obligations erga omnes qui
témoignent du caractère de jus cogens de la norme de droit international interdisant le crime de
génocide, comme la Cour l’a confirmé avec autorité8. En raison de leur caractère erga omnes, ces
5 Allégations de génocide au titre de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide
(Ukraine c. Fédération de Russie), demande en indication de mesures conservatoires, 27 février 2022, par. 20.
6 Ibid., mesures conservatoires, ordonnance du 16 mars 2022, par. 86.
7 Lettre en date du 30 mars 2022 adressée à l’ambassadeur d’Italie auprès du Royaume des Pays-Bas par le greffier
de la Cour internationale de Justice 􀁿 voir annexe A.
8Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine
c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 111, par. 161-162.
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obligations s’appliquent à toutes les parties à la convention9, qui ont donc toutes un intérêt à ce que
lesdites obligations soient interprétées, appliquées et respectées comme il se doit.
15. Depuis qu’elle est devenue partie à la convention sur le génocide en 1952, l’Italie n’a cessé
d’en promouvoir l’objet et le but, notamment en apportant son soutien au développement du droit
pénal international et de la justice pénale internationale, y compris à la création et au fonctionnement
des cours et tribunaux pénaux internationaux.
16. Dans le même esprit, et dans le droit fil de l’article 63 du Statut, l’intervention de l’Italie
vise à aider la Cour dans l’interprétation des dispositions de la convention qui sont en cause en
l’espèce, à la recherche d’un intérêt commun de l’ensemble des Parties et de chacune d’entre elles.
17. Bien que ne souhaitant pas devenir partie à la présente instance portée devant la Cour par
l’Ukraine contre la Fédération de Russie, l’Italie comprend et accepte que, lorsque la Cour se sera
prononcée sur la recevabilité de la déclaration qu’elle a déposée en vertu de l’article 63 du Statut,
l’interprétation de la convention que contiendra l’arrêt en l’espèce sera également obligatoire à son
égard.
II. BASE SUR LAQUELLE L’ITALIE EST PARTIE À LA CONVENTION
18. L’Italie est devenue partie à la convention et a déposé son instrument d’adhésion,
conformément au paragraphe 4 de l’article XI de la convention, le 4 juin 1952.
19. A ce jour, l’Italie n’a fait aucune réserve à la convention et y est toujours partie.
III. DISPOSITIONS DE LA CONVENTION QUI SONT EN CAUSE EN L’ESPÈCE
20. La présente espèce soulève des questions en ce qui concerne l’interprétation de plusieurs
dispositions de la convention sur le génocide.
21. Dans sa requête, l’Ukraine dit que sa demande se fonde juridiquement sur les articles I, II
et III de la convention10. La compétence de la Cour est clairement énoncée à l’article IX11.
22. En application du paragraphe 2 de l’article 53 de son Statut, la Cour «doit
s’assurer … qu’elle a compétence» et doit donc donner la juste interprétation de l’article IX, ce qui
serait directement pertinent pour l’interprétation et l’application de la convention en l’espèce.
9 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Gambie c. Myanmar),
mesures conservatoires, ordonnance du 23 janvier 2020, C.I.J. Recueil 2020, p. 3 avec davantage de références ;
Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Gambie c. Myanmar), arrêt du
22 juillet 2022, par. 107.
10 Allégations de génocide au titre de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide
(Ukraine c. Fédération de Russie), requête introductive d’instance, 27 février 2022, par. 26.
11 Ibid., par. 5-7.
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23. L’Italie fait observer que l’article 63 du Statut ne fait pas de distinction entre les
dispositions d’une convention portant sur des questions de compétence et celles relatives au fond12.
Par conséquent, les Etats intervenants peuvent proposer leur concours à la Cour dans l’interprétation
d’une convention donnée, y compris pour ce qui concerne les questions de compétence.
24. L’Italie traitera donc de l’article IX de la convention relatif à la compétence de la Cour
(quatrième partie (A)). Elle examinera ensuite les dispositions relatives au fond de la demande, et
tout particulièrement les articles I, II et III (quatrième partie (B)).
25. L’Italie présentera ainsi l’interprétation qu’elle fait des dispositions susmentionnées, en
suivant à cet égard les règles coutumières relatives à l’interprétation des traités telles que reflétées
aux articles 31-33 de la convention de Vienne sur le droit des traités13.
IV. EXPOSÉ DE L’INTERPRÉTATION
A. Dispositions en cause de la convention relatives à la compétence de la Cour
26. L’Ukraine fonde la compétence de la Cour sur le paragraphe 1 de l’article 36 du Statut et
sur l’article IX de la convention sur le génocide qui est ainsi libellé :
«Les différends entre les Parties contractantes relatifs à l’interprétation,
l’application ou l’exécution de la présente Convention, y compris ceux relatifs à la
responsabilité d’un Etat en matière de génocide ou de l’un quelconque des autres actes
énumérés à l’article III, seront soumis à la Cour internationale de Justice, à la requête
d’une partie au différend.»
27. Selon l’Ukraine, il existe avec la Fédération de Russie un différend relativement à
l’interprétation, l’application ou l’exécution de la convention sur le génocide. Ce différend concerne
«la question de savoir si, en conséquence de son affirmation unilatérale selon laquelle
un génocide serait en cours, la Fédération de Russie dispose d’une base juridique valable
pour entreprendre une action militaire en Ukraine et contre celle-ci afin de prévenir et
de punir un génocide en vertu de l’article premier de la convention sur le génocide»14.
28. Selon la jurisprudence constante de la Cour, un «différend» est «un désaccord sur un point
de droit ou de fait, une contradiction, une opposition de thèses juridiques ou d’intérêts entre deux
personnes»15. Pour qu’un différend existe, «[i]l faut démontrer que la réclamation de l’une des parties
12 Voir Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d’Amérique),
déclaration d’intervention, ordonnance du 4 octobre 1984, C.I.J. Recueil 1984, opinion dissidente de M. le juge Schwebel
(déclaration de la République d’El Salvador), p. 235-236.
13 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Gambie c. Myanmar),
arrêt du 22 juillet 2022, p. 31, par. 87 : «la Cour aura recours aux règles coutumières de droit international relatives à
l’interprétation des traités, telles que reflétées aux articles 31 à 33 de la convention de Vienne sur le droit des traités du
23 mai 1969» ; voir également Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de
discrimination raciale (Qatar c. Emirats arabes unis), exceptions préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 2021, p. 24, par. 75
avec davantage de références.
14 Allégations de génocide au titre de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide
(Ukraine c. Fédération de Russie), ordonnance du 16 mars 2022, par. 31.
15 Concessions Mavrommatis en Palestine, arrêt no 2, 1924, C.P.J.I. série A no 2, p. 11.
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se heurte à l’opposition manifeste de l’autre»16 et que «leurs points de vue quant à l’exécution ou à
la non-exécution de certaines obligations internationales sont nettement opposés»17. En outre, «dans
le cas où le défendeur s’est abstenu de répondre aux réclamations du demandeur, il est possible
d’inférer de ce silence, dans certaines circonstances, qu’il rejette celles-ci et que, par suite, un
différend existe»18. Il faut également relever qu’il n’est pas nécessaire qu’un Etat invoque un traité
particulier ou ses dispositions pour qu’un différend existe19.
29. La phrase «l’interprétation, l’application ou l’exécution de la présente convention» est
«unique si on la compare aux clauses compromissoires d’autres traités multilatéraux»20. En
comparaison des clauses juridictionnelles classiques, elle élargit le champ de compétence de la Cour
par «l’ajout du terme «exécution» dans la disposition prévoyant la compétence de la Cour à l’égard
des différends relatifs à «l’interprétation» et à «l’application» de la convention»21.
30. Ainsi que l’a dit la Cour, il est certain que l’article IX inclut la situation dans laquelle un
Etat allègue qu’un autre Etat a commis un génocide22. Les différends fondés sur les allégations d’un
Etat partie qui prétend qu’un autre Etat partie a commis des actes de génocide ou s’est abstenu de
prévenir ou de réprimer de tels actes constituent clairement des différends relatifs à «l’interprétation,
l’application ou l’exécution» de la convention sur le génocide et relèvent donc de son article IX.
Cependant, nombre de questions d’interprétation de la convention se posent également, et entrent
dans le champ d’application de l’article IX, lorsque le différend concerne un cas de non-violation. Il
en est ainsi lorsqu’un Etat partie accusé par un autre Etat partie d’avoir violé la convention sur le
génocide affirme qu’il n’a pas commis une telle violation.
31. L’Italie considère que des questions particulièrement importantes d’interprétation de la
convention se posent lorsqu’un Etat partie porte pareilles accusations contre un autre Etat partie en
se fondant sur une interprétation des articles I-IV que ce dernier juge en contradiction flagrante avec
le principe de bonne foi, tel que codifié aux articles 26 et 31 de la convention de Vienne de 1969 sur
le droit des traités.
32. Ainsi que l’a fait remarquer la Cour, le droit international général impose aux parties
contractantes «d’appliquer [un traité] de façon raisonnable et de telle sorte que son but puisse être
16 Sud-Ouest africain (Ethiopie c. Afrique du Sud ; Libéria c. Afrique du Sud), exceptions préliminaires, arrêt,
C.I.J. Recueil 1962, p. 328.
17 Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale
(Qatar c. Emirats arabes unis), mesures conservatoires, ordonnance du 23 juillet 2018, C.I.J. Recueil 2018 (II), p. 414,
par.18 ; Violations alléguées de droits souverains et d’espaces maritimes dans la mer des Caraïbes (Nicaragua
c. Colombie), exceptions préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 2016 (I), p. 26, par. 50, citant Interprétation des traités de paix
conclus avec la Bulgarie, la Hongrie et la Roumanie, première phase, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1950, p. 74.
18 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Gambie c. Myanmar),
arrêt du 22 juillet 2022, p. 27, par. 71.
19 Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d’Amérique),
compétence et recevabilité, arrêt, C.I.J. Recueil 1984, p. 428-429, par. 83 ; Application de la convention internationale sur
l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Géorgie c. Fédération de Russie), exceptions préliminaires,
arrêt, C.I.J. Recueil 2011 (I), p. 84-85, par. 30.
20 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine
c. Yougoslavie), exceptions préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 1996 (II), déclaration de M. le juge Oda, p. 627, par. 5.
21 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine
c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 114, par. 168.
22 Ibid., par. 169.
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atteint»23. Une interprétation et une application de bonne foi du droit international sont essentielles
pour l’établissement de «la confiance réciproque [qui] est une condition inhérente de la coopération
internationale»24 et constituent les garde-fous indispensables contre une interprétation dévoyée des
termes d’une convention.
33. La pertinence de la bonne foi en tant qu’outil de l’établissement de la confiance entre Etats
est d’autant plus importante dans l’interprétation et l’application d’un traité international tel que la
convention sur le génocide, dans laquelle les Etats parties «n’ont pas d’intérêts propres ; ils ont
seulement tous et chacun, un intérêt commun, celui de préserver les fins supérieures qui sont la raison
d’être de la convention»25.
34. L’Italie considère qu’interpréter de bonne foi une disposition particulière d’une convention
qui impose des droits et des obligations aux parties contractantes requiert de s’assurer qu’il existe
des éléments de preuve démontrant qu’il est au moins probable qu’une violation a été commise, avant
de pouvoir dire si un Etat partie a eu un comportement contraire à ladite disposition.
35. Par conséquent, l’Italie est d’avis qu’un désaccord entre deux Etats relativement à une
allégation non démontrée de génocide relève de la notion de «différend sur l’interprétation» de la
convention au sens de l’article IX.
36. A la lumière de ce qui précède, l’Italie considère qu’un Etat partie à la convention visé par
une allégation de génocide qui affirme que cette dernière est infondée peut légitimement saisir la
Cour et lui demander de dire qu’il a correctement appliqué la convention. Cela pourrait clairement
correspondre au sens ordinaire que donne l’article IX de la convention à la notion de «différend
concernant l’application» et donc relever de la compétence ratione materiae de la Cour.
37. Le fait que la Cour puisse statuer sur des différends dans lesquels est demandée une
déclaration de la conformité du comportement d’un Etat à un traité est également étayé par sa
jurisprudence. En l’affaire relative aux Droits des ressortissants des Etats-Unis d’Amérique au
Maroc (France c. Etats-Unis d’Amérique), le demandeur priait la Cour de dire que son
comportement était «conforme au régime économique applicable au Maroc selon les conventions qui
lient la France et les Etats-Unis»26. Ni la Cour ni le défendeur n’ont mis en doute que la demande
visait à faire constater une absence de violation27.
38. L’article IX prévoit expressément que la Cour peut être saisie «à la requête d’une partie
au différend» (les italiques sont de nous). Cette formulation implique qu’un Etat accusé de commettre
un génocide a le même droit de soumettre le différend à la Cour que l’Etat qui formule l’accusation,
dans les mêmes conditions.
23 Projet Gabčíkovo-Nagymaros (Hongrie/Slovaquie), arrêt, C.I.J. Recueil 1997, p. 79, par. 142.
24 Essais nucléaires (Australie c. France), arrêt, C.I.J. Recueil 1974, p. 268, par. 46.
25 Réserves à la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, avis consultatif,
C.I.J. Recueil 1951, p. 23.
26 Droits des ressortissants des Etats-Unis d’Amérique au Maroc (France c. Etats-Unis d’Amérique), arrêt,
C.I.J. Recueil 1952, p. 182.
27 Ibid., p. 182-184.
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39. Enfin, l’objet et le but de la convention viennent également à l’appui d’une interprétation
large de l’article IX. Dans son avis consultatif de 1951, la Cour a dit ceci :
«La Convention a été manifestement adoptée dans un but purement humain et
civilisateur. On ne peut même pas concevoir une convention qui offrirait à un plus haut
degré ce double caractère, puisqu’elle vise d’une part à sauvegarder l’existence même
de certains groupes humains, d’autre part à confirmer et à sanctionner les principes de
morale les plus élémentaires. Dans une telle convention, les Etats contractants n’ont pas
d’intérêts propres ; ils ont seulement, tous et chacun, un intérêt commun, celui de
préserver les fins supérieures qui sont la raison d’être de la convention. Il en résulte que
l’on ne saurait, pour une convention de ce type, parler d’avantages ou de désavantages
individuels des Etats, non plus que d’un exact équilibre contractuel à maintenir entre les
droits et les charges. La considération des fins supérieures de la convention est, en vertu
de la volonté commune des parties, le fondement et la mesure de toutes les dispositions
qu’elle renferme.»28
40. Toutes les conventions internationales, et tout particulièrement celles qui prévoient une
protection juridique de principes de morale fondamentaux, interdisent aux Etats parties d’interpréter
et d’invoquer leurs dispositions de manière abusive. L’autorité de la convention pour interdire le
crime le plus abject serait compromise si un Etat partie pouvait l’invoquer abusivement sans que la
victime d’un tel abus puisse se tourner vers la Cour. Le but même de la convention plaide avec force
en faveur d’une lecture de l’article IX englobant les différends relatifs à une allégation d’abus de
l’autorité de la convention par un Etat pour justifier une action contre un autre Etat partie à la
convention.
41. En conclusion, l’Italie affirme que le sens ordinaire de l’article IX de la convention, son
contexte ainsi que l’objet et le but de l’instrument dans son ensemble montrent qu’un différend relatif
à des actes qu’un Etat commet contre un autre Etat sur le fondement d’allégations de génocide que
ce dernier estime infondées relève de la notion de «différends entre les Parties contractantes relatifs
à l’interprétation, l’application ou l’exécution de la présente Convention». Selon elle, cela inclut les
différents relatifs à l’exécution de la convention au moyen du recours unilatéral à la force militaire
dans le but déclaré de prévenir et de punir un génocide allégué29.
B. Dispositions de la convention relatives au fond de l’espèce
42. Dans sa requête, l’Ukraine prie la Cour :
«a) de dire et juger que, contrairement à ce que prétend la Fédération de Russie, aucun
acte de génocide, tel que défini à l’article III de la convention sur le génocide, n’a
été commis dans les oblasts ukrainiens de Louhansk et de Donetsk ;
b) de dire et juger que la Fédération de Russie ne saurait licitement prendre, au titre de
la convention sur le génocide, quelque action que ce soit en Ukraine ou contre
celle-ci visant à prévenir ou à punir un prétendu génocide, sous le prétexte fallacieux
qu’un génocide aurait été perpétré dans les oblasts ukrainiens de Louhansk et de
Donetsk ;
28 Réserves à la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, avis consultatif,
C.I.J. Recueil 1951, p. 23.
29 Allégations de génocide au titre de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide
(Ukraine c. Fédération de Russie), ordonnance du 16 mars 2022, par. 45.
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c) de dire et juger que la reconnaissance, par la Fédération de Russie, de l’indépendance
des prétendues «République populaire de Donetsk» et «République populaire de
Louhansk» le 22 février 2022, est fondée sur une allégation mensongère de génocide
et ne trouve donc aucune justification dans la convention sur le génocide ;
d) de dire et juger que «l’opération militaire spéciale» annoncée et mise en oeuvre par
la Fédération de Russie à compter du 24 février 2022 est fondée sur une allégation
mensongère de génocide et ne trouve donc aucune justification dans la convention
sur le génocide ;
e) d’exiger de la Fédération de Russie qu’elle fournisse des assurances et garanties de
non-répétition en ce qui concerne la prise par elle-même de toute mesure illicite en
Ukraine et contre celle-ci, notamment l’emploi de la force, en se fondant sur son
allégation mensongère de génocide ;
f) d’ordonner la réparation intégrale de tout dommage causé par la Fédération de
Russie par suite de toute action fondée sur son allégation mensongère de génocide.»
43. Ces demandes concernent l’interprétation de l’article premier de la convention sur le
génocide, ainsi libellé : «Les Parties contractantes confirment que le génocide, qu’il soit commis en
temps de paix ou en temps de guerre, est un crime du droit des gens, qu’elles s’engagent à prévenir
et à punir.»
44. Selon cet article, tous les Etats parties sont tenus de prévenir et de punir le génocide.
L’Italie rappelle que la Cour a précédemment souligné que, lorsqu’elles exécutent leur obligation de
prévenir le génocide, les Parties contractantes doivent agir dans les limites de ce que leur permet la
légalité internationale30. En outre, «[l]es actes entrepris par les parties contractantes pour «prévenir
et punir» un génocide doivent être conformes à l’esprit et aux buts des Nations Unies, tels qu’énoncés
à l’article 1 de la Charte des Nations Unies»31.
45. Comme il a été dit plus haut, une interprétation de bonne foi des termes «s’engagent à
prévenir» exige que chaque Etat partie, avant de prendre des mesures en application de l’article
premier, apprécie si un génocide est en cours ou s’il existe un risque grave qu’un génocide soit
commis32. Cette condition découle du principe général de bonne foi selon lequel, sauf preuve du
contraire, tous les actes commis par un Etat «doivent être considérés comme licites. Omnia rite acta
praesumuntur»33. Toute allégation d’actes de génocide, ou de risque sérieux de commission de tels
actes, portée contre un Etat constituant une «accusation d’une exceptionnelle gravité»34,
l’appréciation d’une telle allégation est soumise à un niveau de preuve particulièrement strict qui
30 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine
c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 221, par. 430 ; Allégations de génocide au titre de la convention
pour la prévention et la répression du crime de génocide (Ukraine c. Fédération de Russie), ordonnance du 16 mars 2022,
par. 57.
31 Allégations de génocide au titre de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide
(Ukraine c. Fédération de Russie), ordonnance du 16 mars 2022, par. 58.
32Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine
c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 221-222, par. 430-431.
33 Valentiner Case (1903), Nations Unies, Recueil des sentences arbitrales, vol. X, p. 405.
34Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine
c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 129, par. 209 ; Application de la convention pour la prévention
et la répression du crime de génocide (Croatie c. Serbie), arrêt, C.I.J. Recueil 2015 (I), p. 74, par. 178.
- 10 -
exige que les éléments de preuve aient «pleine force probante»35, ou en tout cas qu’ils atteignent «un
degré élevé de certitude, à la mesure de [l]a gravité [de l’allégation]»36.
46. L’Italie considère donc qu’une interprétation de bonne foi de l’article premier impose à
une partie contractante qui envisage de prendre des mesures pour prévenir ou punir des actes de
génocide une obligation de diligence qui requiert de recueillir auprès de sources indépendantes des
éléments de preuve ayant pleine force probante, avant d’engager une action quelconque.
47. L’obligation d’interpréter et d’appliquer la convention de bonne foi signifie qu’un Etat ne
peut pas faire valoir qu’il «s’engag[e] à prévenir» un génocide en vertu de l’article premier pour
justifier son comportement s’il n’a pas procédé à une appréciation objective et documentée de la
commission d’un génocide ou du risque qu’il en soit commis un.
48. Pour ce qui concerne l’engagement de «punir» énoncé à l’article premier de la convention,
l’Italie considère que cette obligation se limite à des mesures punitives à caractère pénal prises contre
des individus, ainsi que viennent le confirmer les articles IV-VI de la convention. En d’autres termes,
un Etat devrait appliquer son droit pénal interne ou s’appuyer sur des enquêtes pénales internationales
pour réprimer un génocide commis par des individus («punition») et n’engager aucune autre mesure,
en particulier aucune mesure impliquant un recours à la force ou une action militaire, pour «punir»
un Etat ou un peuple.
49. L’article II de la convention sur le génocide est libellé comme suit :
«Dans la présente Convention, le génocide s’entend de l’un quelconque des actes
ci-après, commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national,
ethnique, racial ou religieux, comme tel :
a) meurtre de membres du groupe ;
b) atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe ;
c) soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner
sa destruction physique totale ou partielle ;
d) mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ;
e) transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe.»
50. Dans sa requête, l’Ukraine prie également la Cour d’interpréter l’article III de la
convention qui est libellé comme suit :
«Seront punis les actes suivants :
a) le génocide ;
35 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine
c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 129, par. 209.
36 Ibid., p. 130, par. 210.
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b) l’entente en vue de commettre le génocide ;
c) l’incitation directe et publique à commettre le génocide ;
d) la tentative de génocide ;
e) la complicité dans le génocide.»
51. Pour qualifier un acte de «génocide» au sens de l’article II, il faut établir qu’il y a à la fois
un «acte de génocide» et une «intention génocidaire»37. En revanche, l’existence de victimes civiles
dans un conflit armé ne prouve pas qu’il y ait acte de génocide ou intention génocidaire car ce fait
ne peut pas être considéré, per se, comme une forme extrême et la plus inhumaine qui soit d’une
persécution visant à détruire un groupe ou une partie d’un groupe.
52. La définition de la notion de génocide énoncée aux articles II et III de la convention indique
clairement qu’on ne saurait apprécier de manière subjective, sans critères juridiques précis, si des
actes de génocide ont effectivement été commis ou risquent sérieusement de l’être. C’est une raison
supplémentaire portant l’Italie à affirmer qu’une juste interprétation de ces dispositions exige que
cette appréciation soit fondée sur des éléments de preuve «ayant pleine force probante».
C. Résumé de l’interprétation des articles I, II, III et IX de
la convention que donne l’Italie
53. Pour les motifs détaillés plus haut, l’Italie est d’avis que :
a) Le libellé de l’article IX de la convention sur le génocide indique que cet article concerne les
questions de violation des dispositions de la convention ainsi que les demandes portant sur une
non-violation.
b) L’article premier de la convention, lu conjointement avec les articles II et III, exige que les Parties
contractantes étayent toute allégation de violation de la convention au moyen d’éléments de
preuve «ayant pleine force probante» avant d’adopter toute mesure visant à prévenir ou à réprimer
des actes de génocide.
V. DOCUMENTS À L’APPUI DE LA DÉCLARATION
54. Les documents suivants sont apportés à l’appui de la déclaration et annexés à celle-ci :
a) Lettre en date du 30 mars 2022 adressée à l’ambassadeur d’Italie auprès du Royaume des
Pays-Bas par le greffier de la Cour internationale de Justice.
b) Notification dépositaire du Secrétaire général confirmant l’adhésion du Gouvernement italien à
la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide.
37 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine
c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 121-122, par. 186-189.
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VI. CONCLUSION
55. Pour ces motifs, l’Italie prie respectueusement la Cour de dire que la présente déclaration
est recevable et que l’Italie exerce son droit d’intervenir en la présente instance au titre du
paragraphe 2 de l’article 63 du Statut de la Cour.
56. L’Italie se réserve le droit de compléter sa déclaration au cours des exposés oraux et écrits
et en déposant une nouvelle déclaration auprès de la Cour.
57. Le Gouvernement italien a désigné le soussigné en qualité d’agent aux fins de la présente
déclaration, et S. Exc. M. Giorgio Novello, ambassadeur d’Italie auprès du Royaume des Pays-Bas,
en qualité de coagent. Il est demandé que toutes les communications relatives à l’instance soient
adressées à l’ambassade d’Italie aux Pays-Bas :
Ambassade d’Italie
Parkstraat no 28,
2514 JK, La Haye
Pays-Bas
Veuillez agréer, etc.
L’agent du Gouvernement de l’Italie,
(Signé) Stefano ZANINI.
___________
ANNEXE A
LETTRE EN DATE DU 30 MARS 2022 ADRESSÉE À L’AMBASSADEUR D’ITALIE
AUPRÈS DU ROYAUME DES PAYS-BAS PAR LE GREFFIER DE LA COUR
COUR INTERNATIONALE
DE JUSTICE
INTERNATIONAL COURT
OF JUSTICE
156413 Le 30 mars 2022
J'ai l'honneur de me referer A ma lettre (n° 156253) en date du 2 mars 2022, par laquelle j'ai
porte A la connaissance de votre Gouvernement que l'Ukraine a, le 26 fevrier 2022, depose au Greffe
de la Cour internationale de Justice une requete introduisant une instance contre la Federation de
Russie en l'affaire relative A des Allegations de genocide au titre de la convention pour la prevention
et la repression du crime de genocide (Ukraine c. Federation de Russie). Une copie de la requete etait
jointe a cette lettre. Le texte de ladite requete est egalement disponible sur le site Internet de la Cour
(www.icj-cij.org).
Le paragraphe 1 de l'article 63 du Statut de la Cour dispose que
«[1]orsqu'il s'agit de 'Interpretation d'une convention A laquelle ont participe d'autres
Etats que les parties en litige, le Greffier les avertit sans delai».
Le paragraphe 1 de l'article 43 du Reglement de la Cour precise en outre que
«[1]orsque 'Interpretation d'une convention A laquelle ont participe d'autres Etats que
les parties en litige peut etre en cause au sens de l'article 63, paragraphe 1, du Statut, la
Cour examine quelles instructions donner au Greffier en la matiere».
Sur les instructions de la Cour, qui m'ont ete donnees conformement a cette derniere
disposition, j'ai l'honneur de notifier a votre Gouvernement ce qui suit.
Dans la requete susmentionnee, la convention de 1948 pour la prevention et la repression du
crime de genocide (ci-apres la «convention sur le genocide») est invoquee A la fois comme base de
competence de la Cour et a l'appui des demandes de l'Ukraine au fond. Plus precisement, celle-ci
entend fonder la competence de la Cour sur la clause compromissoire figurant A l'article IX de la
convention, prie la Cour de declarer qu'elle ne commet pas de genocide, tel que defini aux articles II
et III de la convention, et souleve des questions sur la portee de l'obligation de prevenir et de punir
le genocide consacree A Particle premier de la convention. Ii semble, des lors, que "'interpretation de
cette convention pourrait etre en cause en l'affaire.
./.
[Lettres aux Etats parties A la convention sur le genocide
(A l'exception de l'Ukraine et de la Federation de Russie)]
Palais de la Paix, Camegieplein 2
2517 KJ La Haye - Pays -Bas
Telephone: +31 (0) 70 302 23 23 - Facsimile : +31 (0) 70 364 99 28
Site Internet : www.icj-cij.org
Peace Palace, Carnegieplein 2
2517 KJ The Hague - Netherlands
Telephone: +31(0) 70 302 23 23 - Telefax: +31(0) 70 364 99 28
Website: www.icj-cij.org
COUR INTERNATIONALE INTERNATIONAL COURT
DE JUSTICE OF JUSTICE
Veuillez agreer, Excellence, les assurances de ma tres haute consideration.
Le Greffier de la Cour,
Philippe Gautier
- 2 -
ANNEXE B
NOTIFICATION DÉPOSITAIRE DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL CONFIRMANT L’ADHÉSION
DU GOUVERNEMENT ITALIEN À LA CONVENTION POUR LA PRÉVENTION
ET LA RÉPRESSION DU CRIME DE GÉNOCIDE
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Document file FR
Document Long Title

Déclaration d'intervention de l'Italie

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