Déclaration d'intervention des États-unis d'Amérique

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182-20220907-WRI-01-00-EN
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Incidental Proceedings
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Note: Cette traduction a été établie par le Greffe à des fins internes et n’a aucun caractère officiel
COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
ALLÉGATIONS DE GÉNOCIDE AU TITRE DE LA CONVENTION POUR
LA PRÉVENTION ET LA RÉPRESSION DU CRIME DE GÉNOCIDE
(UKRAINE c. FÉDÉRATION DE RUSSIE)
DÉCLARATION D’INTERVENTION DÉPOSÉE PAR LE GOUVERNEMENT DES
ÉTATS-UNIS D’AMÉRIQUE EN VERTU DE L’ARTICLE 63 DU STATUT
DE LA COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
6 septembre 2022
[Traduction du Greffe]
A Monsieur le greffier de la Cour internationale de Justice, le soussigné, dûment autorisé par
le Gouvernement des Etats-Unis, déclare ce qui suit :
1. Au nom du Gouvernement des Etats-Unis, j’ai l’honneur de soumettre à la Cour, en vertu
du droit établi au paragraphe 2 de l’article 63 de son Statut, une déclaration d’intervention en l’affaire
relative à des Allégations de génocide au titre de la convention pour la prévention et la répression
du crime de génocide (Ukraine c. Fédération de Russie).
2. Selon le paragraphe 2 de l’article 82 du Règlement de la Cour, un Etat qui désire se prévaloir
du droit d’intervention que lui confère l’article 63 du Statut doit déposer une déclaration qui précise
l’affaire et la convention qu’elle concerne et qui contient :
a) des renseignements spécifiant sur quelle base l’Etat déclarant se considère comme partie à la
convention ;
b) l’indication des dispositions de la convention dont il estime que l’interprétation est en cause ;
c) un exposé de l’interprétation qu’il donne de ces dispositions ;
d) un bordereau des documents à l’appui, qui sont annexés.
3. Ces éléments seront traités tour à tour après quelques observations liminaires.
Observations liminaires
4. Le 2[6] février 2022, le Gouvernement de l’Ukraine a introduit une instance contre la
Fédération de Russie au sujet d’«un différend … concernant l’interprétation, l’application et
l’exécution» de la convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide
(dénommée ci-après la «convention sur le génocide» ou la «convention»)1.
5. Dans sa requête introductive d’instance, l’Ukraine avance que
«la Fédération de Russie a soutenu de façon mensongère que des actes de génocide
avaient été commis dans les oblasts ukrainiens de Louhansk et de Donetsk, a usé de ce
prétexte pour reconnaître les prétendues «République populaire de Donetsk» et
«République populaire de Louhansk», puis a annoncé et lancé une «opération militaire
spéciale» contre l’Ukraine, avec pour objectif affiché de prévenir et de punir de
prétendus actes de génocide dénués de tout fondement factuel. Sur la base de cette
allégation mensongère, la Russie mène à présent une invasion militaire de l’Ukraine
engendrant des violations graves et généralisées des droits de l’homme de la population
ukrainienne.»2
6. En particulier, l’Ukraine affirme, comme suit, que les actes de la Fédération de Russie sont
incompatibles avec les obligations découlant pour celle-ci de la convention :
1 Requête introductive d’instance (ci-après la «requête»), par. 2.
2 Ibid.
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«l’annonce et la mise en oeuvre, par la Fédération de Russie, de mesures à son encontre
et sur son territoire sous la forme d’une «opération militaire spéciale» lancée le
24 février 2022 sur le fondement d’un prétendu génocide, ainsi que la reconnaissance
qui a précédé cette opération, sont incompatibles avec la convention et violent le droit
de l’Ukraine de ne pas subir des actions illicites, notamment une attaque militaire, sous
le prétexte parfaitement fallacieux de prévenir et de punir un génocide»3.
7. Ainsi qu’il est prévu au paragraphe 1 de l’article 63 du Statut de la Cour, le greffier, par
lettre en date du 30 mars 2022, a dûment notifié au Gouvernement des Etats-Unis, en sa qualité de
partie à la convention, qu’en l’affaire relative à des Allégations de génocide au titre de la convention
pour la prévention et la répression du crime de génocide (Ukraine c. Fédération de Russie),
«la convention … [était] invoquée à la fois comme base de compétence de la Cour et à
l’appui des demandes de l’Ukraine au fond. Plus précisément, celle-ci entend[ait] fonder
la compétence de la Cour sur la clause compromissoire figurant à l’article IX de la
convention, pri[ait] la Cour de déclarer qu’elle ne commet[tait] pas de génocide, tel que
défini aux articles II et III de la convention, et soul[evait] des questions sur la portée de
l’obligation de prévenir et de punir le génocide consacrée à l’article premier de la
convention. Il sembl[ait], dès lors, que l’interprétation de cette convention pourrait être
en cause en l’affaire.»
8. En soumettant la présente déclaration, les Etats-Unis se prévalent du droit d’intervention
que leur confère le paragraphe 2 de l’article 63 du Statut de la Cour. Celle-ci a reconnu que
l’intervention fondée sur l’article 63 du Statut est une procédure incidente qui constitue l’exercice
d’un droit4. Le droit des Etats-Unis d’intervenir en la présente affaire découle de leur qualité de partie
à la convention sur le génocide.
9. La Cour a reconnu que la juste interprétation de la convention sur le génocide est une
préoccupation de la plus haute importance pour l’ensemble des Etats parties. Ainsi qu’elle l’a
précédemment observé, les Etats parties ont adopté la convention «dans un but purement humain et
civilisateur», reconnaissant que l’instrument «vise d’une part à sauvegarder l’existence même de
certains groupes humains, d’autre part à confirmer et à sanctionner les principes de morale les plus
élémentaires»5. En ce sens, les Etats parties à la convention sur le génocide «n’ont pas d’intérêts
propres ; ils ont seulement tous et chacun un intérêt commun, celui de préserver les fins supérieures
qui sont la raison d’être de la convention»6. Un tel intérêt commun, du point de vue de la Cour,
indique que les dispositions de la convention sont des obligations erga omnes partes7. En outre,
3 Ibid., par. 26.
4 Chasse à la baleine dans l’Antarctique (Australie c. Japon), déclaration d’intervention de la Nouvelle-Zélande,
ordonnance du 6 février 2013, C.I.J. Recueil 2013, p. 5, par. 7 ; Différend territorial et maritime (Nicaragua c. Colombie),
requête du Honduras à fin d’intervention, arrêt, C.I.J. Recueil 2011 (II), p. 434, par. 36 ; Plateau continental
(Tunisie/Jamahiriya arabe libyenne), requête à fin d’intervention, arrêt, C.I.J. Recueil 1981, p. 15, par. 26 ; Haya de la
Torre (Colombie/Pérou), arrêt, C.I.J. Recueil 1951, p. 76 ; Vapeur Wimbledon, arrêts, 1923, C.P.J.I. série A no 1, p. 12.
5 Réserves à la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, avis consultatif,
C.I.J. Recueil 1951, p. 23.
6 Ibid.
7 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Gambie c. Myanmar),
exceptions préliminaires, arrêt du 22 juillet 2022 ; Application de la convention pour la prévention et la répression du
crime de génocide (Croatie c. Serbie), arrêt, C.I.J. Recueil 2015 (I), p. 46-47, par. 87 ; Activités armées sur le territoire du
Congo (nouvelle requête : 2002) (République démocratique du Congo c. Rwanda), compétence et recevabilité, arrêt,
C.I.J. Recueil 2006, p. 31-32, par. 64.
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l’interdiction du génocide est une norme impérative du droit international (jus cogens)8. A cet égard,
tous les Etats parties ont un intérêt majeur à veiller à ce que la convention sur le génocide soit
correctement interprétée, appliquée et exécutée.
10. Les vues des Etats-Unis sur les questions en cause dans la présente affaire sont également
éclairées par le soutien que ceux-ci apportent de longue date à la prévention et la répression du
génocide. Pendant et après la seconde guerre mondiale, les Etats-Unis jouèrent ainsi un rôle
déterminant dans la création du tribunal militaire international à Nuremberg et la poursuite, devant
ce tribunal puis devant des tribunaux militaires aux Etats-Unis, de responsables de crimes
internationaux graves commis durant le génocide nazi. Les procès de Nuremberg firent, à bien des
égards, office de catalyseur pour la négociation par des Etats d’une convention traitant de la
prévention et de la répression du génocide. La délégation des Etats-Unis participa activement à ces
négociations et contribua à forger la version finale du texte de la convention sur le génocide9. Les
Etats-Unis ont ratifié cette convention en 1988 et, dans les années qui suivirent, ont soutenu la
création de tribunaux pénaux internationaux et hybrides compétents à l’égard du crime de génocide
et d’autres crimes internationaux graves. Ils sont l’une des seules parties à la convention à avoir
invoqué publiquement l’article VIII pour appeler l’Organisation des Nations Unies à prendre des
mesures face au génocide se déroulant sur le territoire d’une autre partie contractante10. En
conséquence, ils ont jugé nécessaire d’intervenir en l’espèce afin d’exposer devant la Cour leur
opinion concernant l’interprétation des dispositions pertinentes de la convention.
11. Conformément à l’article 63 du Statut, les Etats-Unis, en tant que non-partie dans la
présente affaire, entendent présenter à la Cour leurs vues sur les questions d’interprétation de la
convention pertinentes pour trancher l’affaire, notamment l’interprétation de la clause
compromissoire figurant à l’article IX. Ils reconnaissent que, puisqu’ils se prévalent du droit
d’intervenir prévu à l’article 63 du Statut, l’interprétation de la convention sur le génocide que
contiendra l’arrêt qui sera rendu en l’espèce sera également obligatoire à leur égard.
12. Outre les éléments exposés ci-dessus, le paragraphe 1 de l’article 82 du Règlement de la
Cour prévoit que toute déclaration d’un Etat souhaitant se prévaloir du droit d’intervention que lui
confère l’article 63 du Statut doit être déposée «le plus tôt possible avant la date fixée pour
l’ouverture de la procédure orale». Conformément à cette exigence, les Etats-Unis ont déposé la
présente déclaration dès qu’ils ont raisonnablement pu le faire.
8 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine
c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 110-111, par. 161 ; Activités armées sur le territoire du Congo
(nouvelle requête : 2002) (République démocratique du Congo c. Rwanda), compétence et recevabilité, arrêt,
C.I.J. Recueil 2006, p. 31-32, par. 64.
9 Les Etats-Unis ont, entre autres, présidé le comité spécial que le Conseil économique et social des Nations Unies
a créé au début de l’année 1948 et chargé d’élaborer un projet de convention sur le crime de génocide et, après l’examen
de ce projet par la Sixième Commission de l’Assemblée générale à l’automne 1948, ils ont siégé au comité de rédaction de
la Sixième Commission.
10 Voir «The Crisis in Darfur», Secretary Colin L. Powell, Testimony Before the Senate Foreign Relations
Committee, Washington, DC, 9 septembre 2004 (dernière consultation le 8 août 2022), accessible à l’adresse suivante :
https://2001-2009.state.gov/secretary/former/powell/remarks/36042.htm («Sur le fondement de cette obligation prévue par
l’article VIII de la convention, et du fait que les Etats-Unis sont l’une des parties contractantes, nous appelons aujourd’hui
l’Organisation des Nations Unies à procéder à une enquête complète sur les atrocités commises au Darfour.»).
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Affaire en laquelle est déposée la déclaration et convention concernée
13. La présente déclaration concerne l’affaire relative à des Allégations de génocide au titre
de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Ukraine c. Fédération de
Russie) que l’Ukraine a introduite contre la Fédération de Russie le 2[6] février 2022. Cette affaire
porte sur l’interprétation de la convention sur le génocide.
Base sur laquelle les Etats-Unis se considèrent comme partie
à la convention sur le génocide
14. Les Etats-Unis ont déposé leur instrument de ratification de la convention le 25 novembre
1988, conformément à l’article XI de l’instrument11. Ils sont toujours partie à la convention.
Dispositions de la convention dont les Etats-Unis estiment
que l’interprétation est en cause
15. La Cour est appelée à se prononcer sur des questions de compétence et d’autres questions
juridiques relatives à l’interprétation de la convention sur le génocide dans le différend opposant
l’Ukraine et la Russie. Dans sa requête,
«[l]’Ukraine soutient que l’annonce et la mise en oeuvre, par la Fédération de Russie, de
mesures à son encontre et sur son territoire sous la forme d’une «opération militaire
spéciale» lancée le 24 février 2022 sur le fondement d’un prétendu génocide, ainsi que
la reconnaissance qui a précédé cette opération, sont incompatibles avec la convention
et violent le droit de l’Ukraine de ne pas subir des actions illicites, notamment une
attaque militaire, sous le prétexte parfaitement fallacieux de prévenir et de punir un
génocide»12.
16. La requête de l’Ukraine soulève la question de savoir si la Cour peut avoir compétence au
titre de l’article IX de la convention sur le génocide lorsqu’une partie contractante commet une
agression contre une autre partie contractante sous le prétexte de prévenir ou de punir un génocide.
De même, une question de fond se pose quant au point de savoir si l’obligation énoncée à
l’article premier de prévenir et punir le génocide tel qu’il est défini à l’article II, ou celle énoncée à
l’article IV de punir les personnes ayant commis un génocide ou l’un quelconque des autres actes
énumérés à l’article III, autorise une partie contractante à commettre une agression contre une autre
partie contractante en prétendant prévenir ou punir un génocide.
11 Les Etats-Unis ont notamment assorti leur ratification de la convention sur le génocide d’une réserve indiquant
qu’en ce qui concerne l’article IX de la convention, pour qu’un différend auquel ils sont partie puisse être soumis à la
juridiction de la Cour internationale de Justice en vertu de cet article, leur consentement exprès est nécessaire dans chaque
cas. En outre, ils ont ratifié la convention sur la base des déclarations interprétatives suivantes, entre autres : l’expression
«dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux comme tel», qui figure
à l’article II, désigne l’intention expresse de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux,
comme tel, par des actes spécifiés à l’article II ; l’expression «atteinte … à l’intégrité … mentale», qui figure à
l’article II b), désigne une détérioration permanente des facultés intellectuelles par le recours à des drogues, à la torture ou
à des techniques analogues ; les actes commis au cours de conflits armés sans l’intention expresse énoncée à l’article II ne
sont pas suffisants pour constituer un génocide au sens de la convention. La réserve des Etats-Unis relative à l’article IX
ne fait pas obstacle à leur droit d’intervenir en vertu de l’article 63 au sujet de l’interprétation correcte de la convention sur
le génocide, notamment des articles premier, II, III, IV, VIII et IX. Voir Vapeur Wimbledon, arrêts, 1923, C.P.J.I.
série A no 1 (question de l’intervention de la Pologne), p. 12-13 (notant que l’intervention en vertu de l’article 62 «a pour
fondement l’intérêt d’ordre juridique allégué par l’intervenant» alors que «lorsque le litige à résoudre a pour objet
l’interprétation d’une convention internationale, tout Etat ayant participé à cette convention puise dans l’article 63 du Statut
le droit d’intervenir au procès dont d’autres ont pris l’initiative»).
12 Requête, par. 26.
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17. L’intervention des Etats-Unis a donc trait aux questions d’interprétation des
articles premier, II, III, IV, VIII et IX de la convention qui se posent en l’affaire et sont directement
pertinentes aux fins du règlement du différend porté devant la Cour par la requête de l’Ukraine13.
«Article premier :
Les Parties contractantes confirment que le génocide, qu’il soit commis en temps
de paix ou en temps de guerre, est un crime du droit des gens, qu’elles s’engagent à
prévenir et à punir.
Article II :
Dans la présente Convention, le génocide s’entend de l’un quelconque des actes
ci-après, commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national,
ethnique, racial ou religieux, comme tel :
a) Meurtre de membres du groupe ;
b) Atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe ;
c) Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner
sa destruction physique totale ou partielle ;
d) Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ;
e) Transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe.
Article III :
Seront punis les actes suivants :
a) Le génocide ;
b) L’entente en vue de commettre le génocide ;
c) L’incitation directe et publique à commettre le génocide ;
d) La tentative de génocide ;
e) La complicité dans le génocide.
Article IV :
Les personnes ayant commis le génocide ou l’un quelconque des autres actes
énumérés à l’article III seront punies, qu’elles soient des gouvernants, des
fonctionnaires ou des particuliers.
13 Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (ouverte à la signature le 9 décembre 1948
et entrée en vigueur le 12 janvier 1951) (ci-après la «convention sur le génocide»), United States Statutes at Large, vol. 102,
p. 3035, 3045 ; Nations Unies, RTNU, vol. 78, p. 277, art. I, II, III, IV, VIII et IX.
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Article VIII :
Toute Partie contractante peut saisir les organes compétents de l’Organisation des
Nations Unies afin que ceux-ci prennent, conformément à la Charte des Nations Unies,
les mesures qu’ils jugent appropriées pour la prévention et la répression des actes de
génocide ou de l’un quelconque des autres actes énumérés à l’article III.
Article IX :
Les différends entre les Parties contractantes relatifs à l’interprétation,
l’application ou l’exécution de la présente Convention, y compris ceux relatifs à la
responsabilité d’un Etat en matière de génocide ou de l’un quelconque des autres actes
énumérés à l’article III, seront soumis à la Cour internationale de Justice, à la requête
d’une partie au différend.»
Interprétation donnée par les Etats-Unis des dispositions en cause
18. L’interprétation que font les Etats-Unis de la convention sur le génocide se fonde sur le
droit international coutumier relatif à l’interprétation des traités, tel qu’il est reflété dans les
dispositions de la convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités14.
19. L’article 31 de la convention de Vienne dispose ce qui suit :
«1. Un traité doit être interprété de bonne foi suivant le sens ordinaire à attribuer
aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son objet et de son but.
2. Aux fins de l’interprétation d’un traité, le contexte comprend, outre le texte,
préambule et annexes inclus :
a) Tout accord ayant rapport au traité et qui est intervenu entre toutes les parties à
l’occasion de la conclusion du traité ;
b) Tout instrument établi par une ou plusieurs parties à l’occasion de la conclusion du
traité et accepté par les autres parties en tant qu’instrument ayant rapport au traité.
3. Il sera tenu compte, en même temps que du contexte :
a) De tout accord ultérieur intervenu entre les parties au sujet de l’interprétation du
traité ou de l’application de ses dispositions ;
b) De toute pratique ultérieurement suivie dans l’application du traité par laquelle est
établi l’accord des parties à l’égard de l’interprétation du traité ;
c) De toute règle pertinente de droit international applicable dans les relations entre les
parties.
14 Si les Etats-Unis ne sont pas partie à la convention de Vienne sur le droit des traités, ils reconnaissent néanmoins
qu’un certain nombre de ses dispositions, notamment celles énoncées aux articles 31 et 32, reflètent le droit international
coutumier.
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4. Un terme sera entendu dans un sens particulier s’il est établi que telle était
l’intention des parties.»15
20. L’interprétation peut aussi être confirmée par des moyens complémentaires
d’interprétation, notamment les travaux préparatoires de la convention sur le génocide. L’article 32
de la convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités est libellé comme suit :
«Il peut être fait appel à des moyens complémentaires d’interprétation, et
notamment aux travaux préparatoires et aux circonstances dans lesquelles le traité a été
conclu, en vue, soit de confirmer le sens résultant de l’application de l’article 31, soit
de déterminer le sens lorsque l’interprétation donnée conformément à l’article 31 :
a) Laisse le sens ambigu ou obscur ; ou
b) Conduit à un résultat qui est manifestement absurde ou déraisonnable.»16
La convention sur le génocide énonce la définition du génocide et les obligations des parties
contractantes à l’égard de la prévention et de la répression du génocide
21. La convention sur le génocide, dans son article premier, confirme que «le génocide, qu’il
soit commis en temps de paix ou en temps de guerre, est un crime du droit des gens, qu[e les parties
contractantes] s’engagent à prévenir et à punir»17. Ainsi que l’a Cour l’a exposé par le passé,
«[l]es origines de la Convention révèlent l’intention des Nations Unies de condamner et
de réprimer le génocide comme «un crime de droit des gens» impliquant le refus du
droit à l’existence de groupes humains entiers, refus qui bouleverse la conscience
humaine, inflige de grandes pertes à l’humanité, et qui est contraire à la fois à la loi
morale et à l’esprit et aux fins des Nations Unies. … Cette conception entraîne une
première conséquence : les principes qui sont à la base de la Convention sont des
principes reconnus par les nations civilisées comme obligeant les États même en dehors
de tout lien conventionnel. Une deuxième conséquence est le caractère universel à la
fois de la condamnation du génocide et de la coopération nécessaire «pour libérer
l’humanité d’un fléau aussi odieux»»18.
22. Les Etats-Unis font observer que, selon l’interprétation de la Cour, l’article premier, en
particulier l’engagement de prévenir le génocide qui y est formulé, crée des obligations distinctes de
celles énoncées dans les articles suivants de la convention, lesquels traitent principalement de la
répression des actes de génocide commis par des individus19. Selon la Cour, cela inclut une
obligation, pour les parties contractantes, de «mettre en oeuvre tous les moyens qui sont
raisonnablement à leur disposition en vue d’empêcher, dans la mesure du possible, le génocide», et
une reconnaissance du fait qu’une partie contractante «ne peut déployer son action que dans les
15 Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités (ouverte à la signature le 23 mai 1969 et entrée en vigueur
le 27 janvier 1980), Nations Unies, RTNU, vol. 1155, p. 340, art. 31.
16 Ibid., art. 32.
17 Convention sur le génocide, art. premier.
18 Réserves à la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, avis consultatif,
C.I.J. Recueil 1951, p. 23.
19 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine
c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 111, par. 162.
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limites de ce que lui permet la légalité internationale»20. A cet égard, la Cour a estimé que «la notion
de «due diligence», qui appelle une appréciation in concreto, revêt une importance cruciale»21 et
souligné que «l’obligation de prévention et le devoir d’agir qui en est le corollaire prennent naissance,
pour un Etat, au moment où celui-ci a connaissance, ou devrait normalement avoir connaissance, de
l’existence d’un risque sérieux de commission d’un génocide» (les italiques sont de nous)22.
23. Selon la définition énoncée à l’article II, le crime de génocide s’entend de l’un quelconque
des cinq actes «commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique,
racial ou religieux, comme tel»23. Les Etats-Unis ont ratifié la convention étant entendu, notamment,
que l’expression «l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou
religieux comme tel» désigne «l’intention expresse de détruire, en tout ou en [grande] partie, un
groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel, par des actes spécifiés à l’article II» et que
les «actes commis au cours de conflits armés sans l’intention expresse énoncée à l’article II ne sont
pas suffisants pour constituer un génocide au sens de» la convention (les italiques sont de nous).
24. Les déclarations interprétatives faites par les Etats-Unis sont compatibles avec
l’interprétation de la Cour, selon qui «l’intention de détruire» est un «dolus specialis … qui s’ajoute
à [l’intention] propre à chacun des actes incriminés»24 et avec son interprétation du terme «en partie»
comme désignant une «partie substantielle du groupe en question»25. Dans la législation qui met en
oeuvre les obligations contractées par les Etats-Unis au titre de la convention, le terme «partie
substantielle» est défini comme désignant une partie d’un groupe protégé suffisamment importante
en nombre pour que sa destruction ou sa perte cause la destruction du groupe en tant qu’entité viable
au sein de la nation dont il fait partie26. Cependant, les Etats-Unis admettent que la Cour a tenu
compte, pour décider si la partie prétendument visée d’un groupe protégé est substantielle par rapport
à l’ensemble du groupe, tant de l’aspect quantitatif que des éléments de preuve relatifs à la
localisation géographique et à la place occupée par cette partie au sein du groupe27. Enfin, comme la
Cour, les Etats-Unis comprennent le terme «détruire» figurant à l’article II comme signifiant la
destruction physique ou biologique, plutôt que culturelle, d’un groupe national, ethnique, racial ou
religieux28.
20 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine
c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 221, par. 430.
21 Ibid.
22 Ibid., p. 222, par. 431.
23 Convention sur le génocide, art. 2.
24 [Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Croatie c. Serbie), arrêt,
C.I.J. Recueil 2015 (I),] p. 62, par. 132.
25 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine
c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 126, par. 198.
26 Voir titre 18 du code des Etats-Unis, art. 1093 8).
27 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Croatie c. Serbie), arrêt,
C.I.J. Recueil 2015 (I), p. 65, par. 142 (citant Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de
génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 126, par. 198-199 et Le
Procureur c. Krstić, IT-98-33-A, arrêt (TPIY, 19 avril 2004)).
28 [Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Croatie c. Serbie), arrêt,
C.I.J. Recueil 2015 (I),] p. 63, par. 136. Pendant la rédaction de la convention sur le génocide, les Etats-Unis s’étaient dits
opposés à l’inclusion d’un projet de disposition élargissant la définition du génocide pour englober les actes ciblant
l’identité culturelle d’un groupe protégé, dans les termes suivants :
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25. L’article III énumère le génocide et les actes connexes que réprime la convention et
l’article IV prescrit que soient punies les personnes reconnues coupables de génocide ou de l’un
quelconque des autres actes énumérés à l’article III29. Pris ensemble, ces deux articles exposent la
portée générale de l’objet de la convention sur le génocide.
La convention sur le génocide n’autorise pas une partie contractante à commettre une
agression contre une autre partie contractante sous le prétexte de prévenir ou punir un
génocide
26. Si son économie et l’historique de sa négociation font clairement apparaître que la
convention concerne principalement la responsabilité pénale individuelle en cas de génocide ou de
l’un des autres actes énumérés à l’article III, la Cour a fait observer que cet instrument interdit
également aux parties contractantes de commettre de tels actes par l’intermédiaire de leurs organes
ou de personnes ou groupes de personnes dont le comportement leur est attribuable. A cet égard, la
Cour a estimé que la convention reflétait une dualité en matière de responsabilité et qu’elle prévoyait
la possibilité que la responsabilité de l’Etat soit engagée pour génocide et pour les autres actes
énumérés à l’article III30. Compte tenu de la gravité exceptionnelle des allégations qu’une partie
contractante est responsable de génocide ou d’autres actes énumérés à l’article III, la Cour a fait
observer qu’elle doit être «pleinement convaincue» que de telles allégations «ont été clairement
avérées»31. «En dehors de l’existence d’un plan de l’Etat exprimant l’intention de commettre un
génocide», la Cour a noté que, pour déduire l’existence d’une telle intention d’un ensemble d’actes
entrant dans le champ de l’article II de la convention, «il faut et il suffit que cette conclusion soit la
seule qui puisse raisonnablement se déduire des actes en cause»32. La Cour a, de la même façon, fixé
un seuil élevé pour établir qu’une partie contractante a manqué à ses obligations de prévenir ou de
punir un génocide, exigeant «qu[e l’allégation] soit prouvée avec un degré élevé de certitude, à la
mesure de sa gravité»33.
27. La convention sur le génocide prévoit expressément un recours pour les parties
contractantes qui pensent qu’une autre partie contractante est responsable de génocide ou de l’un
quelconque des autres actes énumérés à l’article III de la convention, ou n’a pas empêché ou réprimé
«En premier lieu, la notion nouvelle et vaste de génocide culturel, c’est-à-dire la destruction d’une
culture, n’a aucun lien avec la notion, plus connue, de génocide par la destruction physique des membres
d’un groupe humain. Il ne suffit pas, pour inclure le génocide culturel dans la convention sur le génocide,
d’invoquer le fait que les actes énumérés dans l’article III heurtent la conscience de l’humanité.
En second lieu, l’article III, sous sa forme actuelle ou sous toute autre forme amendée, ne répondra
pas au but recherché par les partisans du maintien de cet article. En effet, il y a lieu de se demander ce qu’il
est le plus important de protéger : est-ce le droit pour un groupe d’exprimer ses opinions dans une langue
de son choix, ou n’est-ce pas plutôt le droit pour lui d’exprimer librement ses pensées, quelle que soit la
langue qu’il utilise ? Si le but recherché est le maintien de la culture d’un groupe, ce qu’il faut protéger est
avant tout la liberté de pensée et d’expression des membres de ce groupe. Or, cette protection relève du
domaine des droits de l’homme. M. Gross fait remarquer, à ce propos, que si l’on protège le droit
fondamental d’un individu à employer sa langue, à pratiquer sa religion ou à fréquenter l’école de son choix,
on protège par là même le groupe dont cet individu fait partie.» (Nations Unies, Documents officiels de
l’Assemblée générale, première partie, troisième session, Sixième Commission, comptes rendus analytiques
de la 83e séance, doc. A/C.6/SR.83, p. 203).
29 Convention sur le génocide, art. III et IV.
30 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine
c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 118-119, par. 179.
31 Ibid., p. 129, par. 209.
32 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Croatie c. Serbie), arrêt,
C.I.J. Recueil 2015 (I), p. 66-67, par. 145-148.
33 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine
c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 130, par. 210.
- 10 -
de tels actes. Ainsi, selon son article VIII, les parties contractantes «peu[vent] saisir les organes
compétents de l’Organisation des Nations Unies afin que ceux-ci prennent, conformément à la Charte
des Nations Unies, les mesures qu’ils jugent appropriées pour la prévention et la répression des actes
de génocide ou de l’un quelconque des autres actes énumérés à l’article III» de la convention34.
Comme la Cour l’a déjà relevé, l’article VIII est la seule disposition, hormis l’article premier, qui
traite expressément de la prévention du génocide35.
28. L’article IX dispose en outre que
«[l]es différends entre les Parties contractantes relatifs à l’interprétation, l’application
ou l’exécution de la présente Convention, y compris ceux relatifs à la responsabilité
d’un Etat en matière de génocide ou de l’un quelconque des autres actes énumérés à
l’article III»
seront soumis à la Cour, à la requête d’une partie au différend36.
29. Aucune disposition de la convention sur le génocide, interprétée correctement et de bonne
foi, n’autorise explicitement ou implicitement une partie contractante, agissant sous le prétexte de
prévenir ou punir un génocide, à commettre une agression, ce qui inclut toute acquisition territoriale
obtenue par une telle agression37.
La convention sur le génocide confère compétence à la Cour pour connaître de différends entre
les parties contractantes relatifs à l’interprétation, l’application ou l’exécution de la
convention, y compris ceux relatifs à la responsabilité d’un Etat en matière de génocide
30. L’article IX de la convention sur le génocide dispose que la Cour a compétence à l’égard
«[d]es différends entre les Parties contractantes relatifs à l’interprétation, l’application ou l’exécution
de la présente Convention», qui peuvent être soumis à la Cour «à la requête d’une partie au
différend»38. Sont notamment visés les différends «relatifs à la responsabilité d’un Etat en matière
de génocide ou de l’un quelconque des autres actes énumérés à l’article III» de la convention39. La
Cour a précédemment considéré que des allégations d’une partie contractante qui prétendait qu’une
autre partie contractante était responsable de génocide ou d’autres actes énumérés à l’article III
34 Convention sur le génocide, art. VIII.
35 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine
c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 219, par. 426.
36 Convention sur le génocide, art. IX.
37 Voir Nations Unies, Assemblée générale, doc. A/ES-11/L.1, 1er mars 2022 («Réaffirmant que nulle acquisition
territoriale obtenue par la menace ou l’emploi de la force ne sera reconnue comme légale») ; voir aussi Nations Unies,
Assemblée générale, résolution 3314 du 14 décembre 1974, doc. A/9631 («Aucune acquisition territoriale ni aucun
avantage spécial résultant d’une agression ne sont licites ni ne seront reconnus comme tels.»). Plus généralement,
l’interdiction de l’agression est une norme impérative du droit international (jus cogens) à laquelle aucune dérogation n’est
permise.
38 Convention sur le génocide, art. IX.
39 Ibid.
- 11 -
constituaient un différend au sens de l’article IX40. L’emploi dans ce dernier article du terme
«exécution», adjoint aux termes «interprétation» et «application» qui figurent plus communément
dans les clauses compromissoires, suggère également que la volonté des parties contractantes était
que la portée de cette clause compromissoire soit comprise au sens large, de sorte à inclure l’exercice
par la Cour de sa compétence lorsqu’une partie contractante lui demande de dire qu’elle n’a pas
commis de violation de la convention alors qu’une autre partie contractante met en cause son respect
de l’instrument41.
31. Lorsqu’une partie contractante commet une agression contre une autre partie contractante
sous le prétexte de prévenir ou punir un génocide, et que la partie contractante qui subit l’agression
nie être responsable d’un génocide, il est évident que les parties sont en désaccord quant à
l’interprétation, l’application ou l’exécution de la convention sur le génocide, y compris pour ce qui
concerne la responsabilité d’un Etat en matière de génocide ou des autres actes énumérés à
l’article III, au sens de l’article IX.
Documents fournis à l’appui de la déclaration
32. Liste des documents fournis à l’appui de la déclaration et annexés à la présente :
a) lettre du greffier aux Etats parties à la convention sur le génocide en date du 30 mars 2022
(annexe A) ;
b) instrument de ratification de la convention sur le génocide déposé par le Gouvernement des
Etats-Unis le 25 novembre 1988 (annexe B).
Conclusion
33. Au vu de ces éléments, les Etats-Unis entendent se prévaloir de leur droit d’intervention
en vertu du paragraphe 2 de l’article 63 du Statut, en tant que non-partie à l’affaire portée devant la
Cour par l’Ukraine contre la Fédération de Russie.
34. Les Etats-Unis se réservent le droit de compléter ou de modifier la présente déclaration
s’ils le jugent nécessaire.
L’agent des Etats-Unis d’Amérique,
(Signé) Richard C. VISEK.
___________
40 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Croatie c. Serbie), arrêt,
C.I.J. Recueil 2015 (I) ; Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide
(Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I). Voir aussi Allégations de génocide au titre
de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Ukraine c. Fédération de Russie), mesures
conservatoires, ordonnance du 16 mars 2022, opinion individuelle de M. le juge Robinson («rien dans la doctrine ou la
pratique judiciaire n’empêche la Cour de conclure qu’une partie demanderesse n’a pas commis de violation d’un instrument
donné, dès lors que celle-ci lui présente une requête à cet effet»).
41 Voir Nations Unies, Documents officiels de la troisième session de l’Assemblée générale, première partie,
Sixième Commission, comptes rendus analytiques des séances, 21 septembre – 10 décembre 1948, doc. A/C.6/SR.61-140,
p. 437 (où le représentant de l’Inde explique que, si le terme «application» comprend l’examen des conditions dans
lesquelles la convention doit ou non s’appliquer, le terme «exécution» répond à la question de savoir si une partie satisfait
ou non aux dispositions de la convention). Voir, par exemple, Paula L. Gaeta (dir. publ.), The UN Genocide Convention:
A Commentary (Oxford University Press 2009), p. 413, 420 et 452 ; Lawrence J. Leblanc, The United States And The
Genocide Convention (Duke University Press 1991), p. 204.
- 12 -
CERTIFICATION
Je certifie par la présente que les annexes jointes à la présente déclaration sont des copies
conformes des documents originaux.
L’agent des Etats-Unis d’Amérique,
(Signé) Richard C. VISEK.
___________
ANNEXE A
LETTRE EN DATE DU 30 MARS 2022 ADRESSÉE AUX ETATS PARTIES
À LA CONVENTION SUR LE GÉNOCIDE PAR LE GREFFIER
COUR INTERNATIONALE
DE JUSTICE
INTERNATIONAL COURT
OF JUSTICE
156413 Le 30 mars 2022
J'ai l'honneur de me referer A ma lettre (n° 156253) en date du 2 mars 2022, par laquelle j'ai
porte A la connaissance de votre Gouvernement que l'Ukraine a, le 26 fevrier 2022, depose au Greffe
de la Cour internationale de Justice une requete introduisant une instance contre la Federation de
Russie en l'affaire relative A des Allegations de genocide au titre de la convention pour la prevention
et la repression du crime de genocide (Ukraine c. Federation de Russie). Une copie de la requete etait
jointe a cette lettre. Le texte de ladite requete est egalement disponible sur le site Internet de la Cour
(www.icj-cij.org).
Le paragraphe 1 de l'article 63 du Statut de la Cour dispose que
«[1]orsqu'il s'agit de 'Interpretation d'une convention A laquelle ont participe d'autres
Etats que les parties en litige, le Greffier les avertit sans delai».
Le paragraphe 1 de l'article 43 du Reglement de la Cour precise en outre que
«[1]orsque 'Interpretation d'une convention A laquelle ont participe d'autres Etats que
les parties en litige peut etre en cause au sens de l'article 63, paragraphe 1, du Statut, la
Cour examine quelles instructions donner au Greffier en la matiere».
Sur les instructions de la Cour, qui m'ont ete donnees conformement a cette derniere
disposition, j'ai l'honneur de notifier a votre Gouvernement ce qui suit.
Dans la requete susmentionnee, la convention de 1948 pour la prevention et la repression du
crime de genocide (ci-apres la «convention sur le genocide») est invoquee A la fois comme base de
competence de la Cour et a l'appui des demandes de l'Ukraine au fond. Plus precisement, celle-ci
entend fonder la competence de la Cour sur la clause compromissoire figurant A l'article IX de la
convention, prie la Cour de declarer qu'elle ne commet pas de genocide, tel que defini aux articles II
et III de la convention, et souleve des questions sur la portee de l'obligation de prevenir et de punir
le genocide consacree A Particle premier de la convention. Ii semble, des lors, que "'interpretation de
cette convention pourrait etre en cause en l'affaire.
./.
[Lettres aux Etats parties A la convention sur le genocide
(A l'exception de l'Ukraine et de la Federation de Russie)]
Palais de la Paix, Camegieplein 2
2517 KJ La Haye - Pays -Bas
Telephone: +31 (0) 70 302 23 23 - Facsimile : +31 (0) 70 364 99 28
Site Internet : www.icj-cij.org
Peace Palace, Carnegieplein 2
2517 KJ The Hague - Netherlands
Telephone: +31(0) 70 302 23 23 - Telefax: +31(0) 70 364 99 28
Website: www.icj-cij.org
COUR INTERNATIONALE INTERNATIONAL COURT
DE JUSTICE OF JUSTICE
Votre pays figure sur la liste des parties A la convention sur le genocide. Aussi la presente lettre
doit-elle etre regardee comme constituant la notification prevue au paragraphe 1 de l'article 63 du
Statut. J'ajoute que cette notification ne prejuge aucune question concernant l' application eventuelle
du paragraphe 2 de Particle 63 du Statut sur laquelle la Cour pourrait par la suite etre appelee A se
prononcer en l'espece.
Veuillez agreer, Excellence, les assurances de ma tres haute consideration.
Le Greffier de la Cour,
Philippe Gautier
- 2 -
ANNEXE B
INSTRUMENT DE RATIFICATION DE LA CONVENTION SUR LE GÉNOCIDE DÉPOSÉ
PAR LE GOUVERNEMENT DES ETATS-UNIS LE 25 NOVEMBRE 1988
(IV.1)
UNITED NATIONS Wjm NATIONS U N I E S
M^d?-^
S. N . V . 1OO17
flCFCBCNCK.
C.N.281.1988.TREATIES-2 (Notification depositaire)
CONVENTION POUR LA PREVENTION ET LA REPRESSION DU CRIME DE GENOCIDE
ADOPTEE PAR L1ASSEMBLES GENERALS DBS NATIONS UNIES LE 9 DECEMBRE 1948
RATIFICATION DBS ETATS-UNIS D'AMERIQUE
Le Secretaire general de 1'Organisation des Nations Unies,
agissant en sa gualite de depositaire, communique :
Le 25 novembre 1988, 1'instrument de ratification par le
Gouvernement des Etats-Unis d'Amerique de la Convention susmentionnee a
ete depose aupres du Secretaire general.
L1instrument de ratification contient les reserves et les
declarations interpretatives suivantes :
Reserves
(Traduction) (Original : anglais)
1) En ce qui concerns 1'article IX de la Convention, pour qu'un
differend auquel les Etats-Unis sont parties puisse etre sounds a
la juridiction de la Cour internationale de Justice en vertu de
cet article, le consentement expres des Etats-Unis est necessaire
dans chaque cas.
2} Aucune disposition de la Convention n'exige ou ne justifie
1'adoption par les Etats-Unis de mesures legislatives ou autres
interdites par la Constitution des Etats-Unis, telle qu'elle est
interpreted par les Etats-Unis.
Declarations interpretatives
(Traduction) (Original : anglais)
1) L'expression "dans 1'intention de detruire, en tout ou en
partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comma
tel", qui figure a 1'article II, designe 1'intention expresse de
detruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique,
racial ou religieux, comme tel, par des actes specifies a
1'article II.
A 1'attention des services des traites des ministeres des affaires
etrangeres et des organisations internationales interessees
UNITED NATIONS ^g NATIONS U N I E S
-2-
2) L* expression "atteinte a 1'integrate mentale", gui figure a^
1'article II b), designe une deterioration permanente des facultes
intellectuelles par le recours a des drogues, a la torture ou a
des techniques analogues.
3) L'engagement d'accorder 1'extradition conformement a la
legislation nationale et aux traites en vigueur, qui figure a
1'article VII, porte uniquement sur des actes qui sont qualifies
de criminels aux termes de la legislation tant de 1'Etat requerant
que de 1'Etat reguis, et aucune disposition de 1'article VI ne
porte atteinte au droit de tout Etat de traduire devant ses
propres tribunaux 1'un quelconque de ses nationaux du chef d'actes
commis a 1'exterieur de 1'Etat considere.
4) Les actes commis au cours de conflits armes sans 1'intention
expresse enoncee a 1'article II ne sont pas suffisants pour
constituer un genocide au sens de la presente Convention.
5) En ce qui concerne la mention d'une cour criminelle
internationale a 1'article VI de la Convention, les Etats-Unis
d'Amerique declarent qu'ils se reservent le droit de ne participer
a un tel tribunal qu'en vertu d'un traite conclu expressement a
cette fin, avec 1'avis et le consentement du Senat.
Conformement au paragraphe 3 de 1'article XIII, la Convention
entrera en vigueur pour les Etats-Unis d'Amerigue le 23 fevrier 1989,
soit le quatre-vingt-dixieme jour qui suivra le depot de son instrument.
Le 29 decembre 1988
fl.P_M
CORRESPONDENCE UNIT MARCH 1988
39 MEMBER STATES plus 5 NON-MEMBERS
FRENCH AND SPANISH
ALBANIA
ALGERIA
ARGENTINA
BELGIUM
BENIN
BURKINA FASO
BURUNDI
CAMEROON
CAPE VERDE
CENTRAL AFRICAN REPUBLIC
CHAD
COMOROS
CONGO
COTE D'lVOIRE
DEMOCRATIC KAMPUCHEA
DJIBOUTI
EQUATORIAL GUINEA
FRANCE
GABON
GUINEA
GUINEA-BISSAU
HAITI
ITALY
LAO PEOPLE'S DEMOCRATIC REPUBLIC
LEBANON
LUXEMBOURG
MADAGASCAR
MALI
MAURITANIA
MOROCCO
NIGER
PARAGUAY
ROMANIA
RWANDA
SAO TOME AND PRINCIPE
SENEGAL
TOGO
TUNISIA
ZAIRE
NON-MEMBER STATES
HOLY SEE
LIECHTENSTEIN
MONACO
SAN MARINO
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Déclaration d'intervention des États-unis d'Amérique

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