Déclaration de M. le juge ad-hoc Gaja

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124-20110504-JUD-02-06-EN
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124-20110504-JUD-02-00-EN
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417

dÉCLARATION dE m. LE JUgE AD HOC gAJA

[Traduction]

1. En rejetant la requête du Costa Rica à fin d’intervention en tant que
non-partie à l’instance, la majorité de la Cour a estimé que l’arrêt au fond
protégerait en tout état de cause « l’intérêt d’ordre juridique » susceptible,
selon cet Etat, d’être affecté — une protection étant « accordée à tout Etat
tiers, qu’il intervienne ou non à l’instance » (par. 86). Or, même si telle est
clairement l’intention de la Cour, il n’est pas certain que toutess les infor -

mations nécessaires pour protéger effectivement l’intérêts d’un Etat tiers
lui soient accessibles. Aussi un Etat tiers peut-il souhaiter intervenir dans
une instance afin de contribuer à déterminer la nature et la porstée de l’in -
térêt juridique pour lui en cause.
2. Le seul mécanisme prévu à cet effet par le Statut de la Cour ets le

Règlement est le dépôt d’une requête à fin d’intesrvention en vertu de l’ar -
ticle 62 du Statut. dans sa plus récente décision sur une demande soumise
en ce sens dans une affaire de délimitation maritime, la Cour avait, sà
l’unanimité, autorisé la guinée équatoriale à intervenir (Frontière ter ‑
restre et maritime entre le Cameroun et le Nigéria (Cameroun c. Nigéria),

requête à fin d’intervention, ordonnance du 21 octobre 1999, C.I.J. Recueil
1999 (II), p. 1034-1035, par. 13-16). Les parties à cette instance ne
s’étaient, il est vrai, pas opposées à la demande de la guinée, mais la
Cour, tout en prenant acte de ce fait, n’en avait pas tiré argumenst pour
justifier sa décision.
3. Je peine à comprendre en quoi la requête du Costa Rica en l’es -

pèce se distingue de celle de la guinée équatoriale dans l’affaire précitée.
Je ne discerne pas davantage de raisons impérieuses qui pourraient amse -
ner la Cour à revenir à sa jurisprudence antérieure, plus restrsictive, en
matière d’admission des requêtes à fin d’intervention dsans les affaires de
délimitation maritime (Plateau continental (Jamahiriya arabe libyenne/

Malte), requête à fin d’intervention, arrêt, C.I.J. Recueil 1984, p. 18-27,
par. 28-43).
4. Si, en se prononçant sur le fond, la Cour peut certes prendre note
(par. 51) des informations que lui a fournies une partie dont elle a rejetés
la demande d’intervention, il semble toutefois paradoxal que, dans unse

affaire de délimitation maritime, la seule façon pour un Etat tierss de
l’éclairer quant à l’intérêt d’ordre juridique suscseptible selon lui d’être
affecté consiste à adresser à la Cour une requête à fin d’intervention à
laquelle celle-ci estimera ne pas pouvoir faire droit — situation rendue
d’autant plus paradoxale par la lourdeur de la procédure prévues à l’ar -
ticle 84 du Règlement en cas d’objection à une telle requête.

5. Au vu de l’approche adoptée par la majorité dans le présent sarrêt, la
Cour serait peut-être bien avisée d’instituer un nouveau mécanisme pro -

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cédural qui permettrait aux Etats tiers, sans aller jusqu’à l’sintervention,
de fournir les informations qu’ils considéreraient utiles afin de protéger

leurs intérêts d’ordre juridique.

(Signé) giorgio gaja.

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417

dECLARATION OF JUdgE AD HOC gAJA

1. When rejecting Costa Rica’s Application for permission to intervene
as a non-party, the majority of the Court considered that the Judgment
on the merits would at any event protect the Applicant’s “interests of a
legal nature” that might be affected. protection would be “accorded to
any third party, whether intervening or not” (para. 86). While the Court’s
intention to do this is clear, one cannot be certain that all the necesssary

information would be available for effectively protecting a third State’ss
interest. Thus, a third State may wish to intervene in the proceedings isn
order to contribute to the determination of the nature and scope of its
legal interest at stake.
2. The only mechanism offered for that purpose by the Statute and the

Rules of Court to the third State is to request permission to intervene s
under Article 62 of the Statute. In its most recent decision concerning
intervention in a case relating to maritime delimitation, the Court had s
unanimously granted Equatorial guinea permission to intervene (Land
and Maritime Boundary between Cameroon and Nigeria (Cameroon v.

Nigeria), Application for Permission to Intervene, Order of 21 Octo ‑
ber 1999, I.C.J. Reports 1999 (II), pp. 1034-1035, paras. 13-16). The par -
ties to that case had not objected to the request, but the Court, while s
noting this fact, did not rely on it as a justification for granting permis -
sion.
3. I fail to see how one could distinguish Equatorial guinea’s request

in that case from Costa Rica’s Application in the present case. moreover,
I cannot find compelling reasons for the Court to revert to its earliesr and
more restrictive jurisprudence on the admissibility of intervention in csases
of maritime delimitation (Continental Shelf (Libyan Arab Jamahiriya/
Malta), Application for Permission to Intervene, Judgment, I.C.J. Repor▯ts

1984, pp. 18-27, paras. 28-43).

4. It is true that, when deciding the merits, the Court may take into
account (para. 51) the information provided by a party that has unsuc -
cessfully sought permission to intervene. However, it seems paradoxical

that, in a case of maritime delimitation, the only way for a third States to
submit information about its interest of a legal nature which may be
affected by a decision of the Court would be to make an application thats
the Court considers inadmissible. This the more so given the cumbersome s
procedure provided by Article 84 of the Rules when an objection to an
application for permission to intervene is filed.

5. If one accepts the approach taken by the majority of the Court in
the present Judgment, it would seem that the Court should establish a

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dÉCLARATION dE m. LE JUgE AD HOC gAJA

[Traduction]

1. En rejetant la requête du Costa Rica à fin d’intervention en tant que
non-partie à l’instance, la majorité de la Cour a estimé que l’arrêt au fond
protégerait en tout état de cause « l’intérêt d’ordre juridique » susceptible,
selon cet Etat, d’être affecté — une protection étant « accordée à tout Etat
tiers, qu’il intervienne ou non à l’instance » (par. 86). Or, même si telle est
clairement l’intention de la Cour, il n’est pas certain que toutess les infor -

mations nécessaires pour protéger effectivement l’intérêts d’un Etat tiers
lui soient accessibles. Aussi un Etat tiers peut-il souhaiter intervenir dans
une instance afin de contribuer à déterminer la nature et la porstée de l’in -
térêt juridique pour lui en cause.
2. Le seul mécanisme prévu à cet effet par le Statut de la Cour ets le

Règlement est le dépôt d’une requête à fin d’intesrvention en vertu de l’ar -
ticle 62 du Statut. dans sa plus récente décision sur une demande soumise
en ce sens dans une affaire de délimitation maritime, la Cour avait, sà
l’unanimité, autorisé la guinée équatoriale à intervenir (Frontière ter ‑
restre et maritime entre le Cameroun et le Nigéria (Cameroun c. Nigéria),

requête à fin d’intervention, ordonnance du 21 octobre 1999, C.I.J. Recueil
1999 (II), p. 1034-1035, par. 13-16). Les parties à cette instance ne
s’étaient, il est vrai, pas opposées à la demande de la guinée, mais la
Cour, tout en prenant acte de ce fait, n’en avait pas tiré argumenst pour
justifier sa décision.
3. Je peine à comprendre en quoi la requête du Costa Rica en l’es -

pèce se distingue de celle de la guinée équatoriale dans l’affaire précitée.
Je ne discerne pas davantage de raisons impérieuses qui pourraient amse -
ner la Cour à revenir à sa jurisprudence antérieure, plus restrsictive, en
matière d’admission des requêtes à fin d’intervention dsans les affaires de
délimitation maritime (Plateau continental (Jamahiriya arabe libyenne/

Malte), requête à fin d’intervention, arrêt, C.I.J. Recueil 1984, p. 18-27,
par. 28-43).
4. Si, en se prononçant sur le fond, la Cour peut certes prendre note
(par. 51) des informations que lui a fournies une partie dont elle a rejetés
la demande d’intervention, il semble toutefois paradoxal que, dans unse

affaire de délimitation maritime, la seule façon pour un Etat tierss de
l’éclairer quant à l’intérêt d’ordre juridique suscseptible selon lui d’être
affecté consiste à adresser à la Cour une requête à fin d’intervention à
laquelle celle-ci estimera ne pas pouvoir faire droit — situation rendue
d’autant plus paradoxale par la lourdeur de la procédure prévues à l’ar -
ticle 84 du Règlement en cas d’objection à une telle requête.

5. Au vu de l’approche adoptée par la majorité dans le présent sarrêt, la
Cour serait peut-être bien avisée d’instituer un nouveau mécanisme pro -

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new procedural mechanism short of intervention that would allow third
States to submit information which they consider useful in order to pro -

tect their interests of a legal nature.

(Signed) giorgio gaja.

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cédural qui permettrait aux Etats tiers, sans aller jusqu’à l’sintervention,
de fournir les informations qu’ils considéreraient utiles afin de protéger

leurs intérêts d’ordre juridique.

(Signé) giorgio gaja.

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7 CIJ1019.indb 145 13/06/13 16:02

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Déclaration de M. le juge ad-hoc Gaja

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