Non-Corrigé Traduction
Uncorrected Translation
l
CR 200114(traduction)
CR2001/4(translation)
Vendredi29uin 200à10heures
Friday 29 June 2001at 10a.m. Le PRESIDENT : Veuillez vous asseoir. LaCour est réunie cematin pour entendre le
second tour de plaidoiries de l'Indonésieet de la Malaisie et je donnerai d'abordla parole au
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représentantdel'Indonésie età M. RodmanBundy.
I
M. BUNDY : Merci, Monsieur le président. Monsieurle président,Madame et Messieurs
de la Cour, il m'incombece matin de traiter deux aspects de l'argumentationqu'ont présentée hier
les Philippines: premièrement,j'examinerai si la requêtea étédéposéeen temps opportun;
deuxièmement,je m'efforcerai de dissiperun certain nombre de malentendus que les Philippines
semblent vouloir entretenir en ce qui concerne l'effet pratique de la requêtepour ce qui est de
l'examenau fond del'affaire.
Premièrement,la questiondu délai de présentatiodne larequête.
1. La question du déladie présentation de la requête
Hier, j7ai écouté avecintérêt l'éminea ngtent des Philippines lorsqu7ila affirméque son
gouvernementavait agi de façonprudente et délibéréeen déposantsa requête(CR 200113,p. 31).
Néanmoins, après avoir écoutéhi er .Reisman,s'agissantde la question du délai de présentation
de larequête, l'Indonésiceontinue de penser quele dépôtde celle-ci n'estconformenia la lettreni
à l'espritdu Règlementde la Couret qu'ilneva pas non plus dans le sens de la nette tendance que
suit la Cour depuisquelquetemps,qui consiste àencouragerdes procédures plus rapides.
M. Reisman a fait valoir qu'il importait de lier cette requêteà la précédente demandees
Philippines, déposéeenapplicationde l'article53 du Règlementet visant àavoir accès auxpièces
de la procédure écrite (CR 200113,p. 17). ((Quand l'Indonésieestime-t-elle qu'il aurait fallu
déposerla demande au titre de l'article53?», s'est interrogé M. Reisman,((Avantque les Parties
n'aientdéposé leursécritures?» (Ibid.)
I
Non, Monsieur le président,pas avant le dépôtpar les Parties de leurs écritures. Maisau
moins suffisamment à l'avance pour quela Cour ait eu le temps de rendre une décisionen la
*
matière bien avant le dépôtdes dernières piècesécritesen l'espèce,à savoir les répliques. Cela
auraitétéconformeau Règlementet aurait permisaux Philippinesde déposerleurrequête en temps
opportun. En fait, il suffit pour réponàrla question de M. Reisman d'examiner la pratique que les
parties ontobservée dans desaffairesoù l'intervention a été demandée.
Par exemple, dans l'affaireunisie/Libye,Malte a demandé àavoir accès aux pièces écrites
cinq moiset demi avantla dateprévuepour le dépôtdes contre-mémoiresdes Parties.Parce quela
Cour devaittout d'abordrecueillirle point de vue des Parties, elle n'apu répondrete demande
que deuxmois plus tard. Néanmoins, celaa donné àMalte tout le temps de déposersa requêten
temps opportun.
Dans l'affaireibye/Malte,l'Italiea demandéà avoir accès aux écrituresquatmoiset demi
avant la dateà laquelle les Parties devaient déposer leurs contre-mémoires. Elle aussi atne
mesurede déposersa requête à find'interventionentemps opportun.
Les demandes d'accèsaux pièces écrites, formuléepsar Malte et par l'Italie, onttoutes
les deux rejetées et c'estpourquoi j'ai du mal à comprendre pourquoi M.Reisman soutient
maintenant que laprésente instancest sans précédent parce qules Philippinesse sont vu refuser
l'accèsauxpièces écrites.Ce n'est pasuneaffaire sansprécéden(tCR 200113, p.17,par. 20).
Dans l'affaire El Salvador/Honduras, le Nicaragua a demandé à avoir accès auxpièces
écrites près de deux ans avanla date prévue pourle dépôt des dernièrpiècesécrites. Il n'a eu
aucun problème à respecter les délais fixpar l'article81. Pas davantage que n'en aeu plus
récemment la Guinée équatoriale.
Or, les Philippinesont présenté leur demandehujioturs seulementavantla date prévuepour
le dépôt des répliquespar les Parties. Etant donnê"qe la Cour devait tout d'abord recueillir le
point de vue des Parties avant de décider s'ily avait lieud'aàccette demande,la présentation
de celle-ci, huit jours avant la date prévue pour le dépôt des répliques,faisait qu'il était
pratiquement impossiblequelesPhilippines sachentsi elles auraient accès aux écrituavant que
les Partiesdéposent leursdernièresiècesécrites.
Hier, M. Reisman et l'agent des Philippines se sont tous deux référé s l'article85 du
Règlementde la Cour, plus spécifiquement aux dispositionsdu paragraphe 1 de cet article, qui
prévoient qu'un Etat autorisé intervenir a accèsà partir de ce moment,à des exemplairesdes
pièces de procéduredéposéesen l'affaire. Il me semble, Monsieur le président,que cette dispositionà elle seule, suffisaitpour faire comprendreaux Philippines qu'ellesne pouvaientpas
présumer avoiraccès auxpiècesécritesdesPartiesavantle dépôt de leurrequête.Ainsila question
demeure :pourquoi lesPhilippinesn'ont-ellespas agi plustô? 1
Est-iljuste que l'Indonésieet la Malaisie se retrouvent dans la position quiest la leur parce
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que les Philippinesont tardéàdéposer leurrequête ? Après tout,la tendance récente,telle qu'elle
ressort des différentsamendements apportésau Règlementde la Cour, est d'améliorer l'efficacité
des procéduresdevant la Cour. Je me suis référé mardi dernier à l'amendement de 1978 au
Règlementde la Cour par lequel des délaisplus brefs ont été fixés poulre dépôtde requêtesà fin
d'intervention. Jepourrais également mentionner l'amendement récemmea ntportépar la Courà
l'article79 de son Règlement, en ce quiconcerne les délaisprévus pourle dépôtd'exceptions
préliminaires.Ces deux amendements vontdans le sens d'une tendancede la Cour à accéléresres
procédures. Pourl'Indonésie,le dépôttardif de la requêtedes Philippinesest un facteuràprendre
en compte lorsqu'il s'agirapour laCourde déciders'ily a lieud'accéderà larequête.
2. Les Philippinesprésentent de façon erronée les conséquencesde leur requête
surle fonddel'affaire
Mon deuxième point, Monsieurle président, concernelamanière dontles Philippinesse sont
efforcées d'utiliser les remarquesquej'ai faites mardi dernier au sujet des conséquencequ'aurait
leurrequêtesur le fond de l'affaire.
Je traiterai en particulier deux pointssoulevésparMagallona.
Premièrement, M. Magallonaa soutenu que, tout en feignant de se désintéresserdu
bien-fondé de la revendicationdes Philippinessur leNord-Bornéo,l'Indonésie l'aen fait invoqué
dansl'affairequi l'opposeà la Malaisie. Pour reprendrelestermes du conseil:
«Ainsi l'Indonésie reconnaît-elle lesélémentsde fond positifs de la
revendication des Philippines sur le Nord-Bornéo qui découlent de la requêdte es
Philippines et de la réaction de la Malaisie à celle-ci, ((qui ont une injluence
fondamentale sur la question de la souverainetésur Sipadan et Ligitan))opposant
l'Indonésieet la Malaisie.))(CR200 1/3,p. 19.)
*
J'expliquerai maintenant pourquoi cet argumentrepose sur des prémisses erronées.Mais
permettez-moide relevertout d'abordque le conseila ensuite affmé que l'Indonésiedisait en fait
que,pour déterminerla souveraineté surSipadanet Ligitan,il fallaitnécessairement tenir compte ((1)d'un certainnombrede questionscentralesde larevendication des Philippinessur
le Nord-Bornéoet 2) de l'argumentdes Philippinesselon lequel lestatutjuridique du
Nord-Bornéo ne peuq t u'être affecpar ladécisionqui sera rendue sur laquestion de
la souverainetédans l'affaire qui oppose l'Indonésieet la Malaisie)) (CR200113,
p. 19-20).
J'ai le regret de dire que les Philippines semblentne pas avoir compris du tout, -c'est
peut-être dema faute -, le sens de mes arguments. Premièrement,il n'a jamais été questioque
l'Indonésie reconnaisseles éléments de fond positifde la revendication des Philippinessur le
1 3 Nord-Bornéo)). L'Indonésie n'apas jugébon de prendre position sur le bien-fondé de cette
revendication. Telle qu'ellese présente,cetterevendicationdoitêttraitée entreles Philippineset
laMalaisie. L'Indonésien'esten rien concernée.
Deuxièmement, la détennination de la souverainetséurSipadan et Ligitan entre l'Indonésie
et la Malaisieesttoutàfait indépendantedelarevendicationdes PhilippinessurleNord-Bornéo.
Lorsqueje parlais mardi dernier des conséquencesde la requête des Philippinesur le fond
de l'affaire,je ne me référaipas à la revendication desPhilippines sur le Nord-Bornéo. Mon
argumentétaittrèssimple. 11revenaitàdire, commela Courl'a déjà entendu àde maintesreprises,
que les Philippines avaient expressémentrenoncé à tout titre ou à toute revendication de
souverainetésur Sipadan ou Ligitan. Cette absence de toute prétention philippine sur lesîles a,
commeje l'ai expliqué,desconséquencessur le fondde l'affaire. Mais cela n'arienà voir avec la
questiondu statutjuridique duNord-Bornéo.
C'est précisémenptarce que les Philippinesne font valoir aucune revendicationsur les îles
de Sipadan et de Ligitan qu'elles ne sauraient être considércomme ayant un intérêt d'ordre
juridique susceptibled'êtrtouchépar unedécisionen l'instance. La décision de la Courrlativeà
la question de la souverainetésur les îles sera sans conséquence sur la revendication des
Philippines sur le Nord-Bornéo. Sipadan et Ligitan ne font tout simplement pas partie des
revendicationsphilippines.
Cela m'amène à mon deuxièmepoint. En effet, dans leur note verbale et lors du premier
tour de parole, les Philippinesont expliqué avec la plus grande clarté quse s'intéressaienà
aucune des deux îles, mais c'est avecappréhensionque j'ai perçudans l'intervention d'hier de
M. Magallona unepointe d'hésitationàce sujet. Permettez-moide rappeler sespropos: ((Puisque,commel'affirmentles Philippines,le sultande Sulua exercéde façon
continue, ininterrompueet internationalementreconnue, une souverainetédejure sur
leNord-Bornéotout au longde la périodecompriseentre 1878et 1962,il s'ensuitque
les deux îles en question ont été acquisar le Royaume-Unien 1930pour le compte
du sultande Suluet au nom de celui-ci.)) (CR 200113,p. 22,par. 11.)
Il a égalementajouté
«S'il existed'autres territoiresqui, relevantdu Sultanat,n'auraienttoutefois pas
été couvertspar le contrat de bail Sulu-Overbeckde 1878, les Philippines, en tant
qu'agent et représentantdu Sultanat, ont réservéleur position à l'égarddesdits
territoires.)) (Ibid.,par. 12.)
Monsieur le président,j7avaispromis àmon collègueet ami, M. Pellet, qu'en temps utileje
1 4 m'efforcerai de dévoilerpour lui les mystèresde la doctrine de l'estoppel, mais cela n'est sans
doute pasle meilleur momentpour lefaire. Néanmoins, quel'onparle d'estoppel,de bonnefoi,ou
de l'interdictionqui est faiteun Etat de souffleà la fois le chaud et le froid, la situationest la
même.
Il est établique lesPhilippinesont expressémentrenoncéà tout intérêdt'ordre territorialsur
Sipadan ou Ligitan. Si la fameuse note verbale ne suffit pas, que l'on se remémore les motsde
M. Reisman, lundi dernier :«Les Philippines ne revendiquent pas ces îles» (CR2001/1, p. 27,
par. 28).Il a égalementajouté:«L'Indonésiefaitremarquer àjuste titre que les Philippinesnesont
pas intéresséesar l'issuedu différend portantsurLigitan etipadan.))(CR2001/1,p. 30,par. 43.)
M. Magallona s'efforce-t-il maintenant de revenir sulra note diplomatiquede son gouvernementou
surlesaffirmationsque M. Reismana faites lundidernier ?
En dernière analyse, Monsieur le président,la situation est claire. L'instance entre
l'Indonésie et laMalaisieconcernela souverainetésur Sipadanet Ligitan. Les Philippines nefont
valoir aucune revendication enla matière. Elless'intéressentau statut du Nord-Bornéo.Maistel
n'est pasl'objet du différendportédevant la Cour. Le statutjuridique duNord-Bornéo nedépend
pas davantage de la question de la souveraineté surles îles ni n'est affectépar le défaut d'intérêt
desPhilippinessur l'une ou l'autre dîles.
Monsieur le président, ainsis'achèventmesbrèvesremarquesetje vous serais reconnaissant
de bien vouloir donnermaintenant la paroleà M.Pellet, qui poursuivra la présentationdes thèses
de l'Indonésie. The PRESIDENT: Thank you very much, Mr.Bundy. And 1 shall now cal1Professor
Alain Pelletto the Bar.
Mr. PELLET: Thankyou very much,Mr. President.
Mr. President, Members of the Court, the Agent of the Republic of the Philippinesat the
very end of his statement yesterday morning drew the Court's attention "to the fact that the
Philippine Application for permission to intervenearises out of the broad setting of unsettled
territorial issues inur region which are a dim legacy of Western imperial and colonial rule"
(CR2001/3,28 June 2001,p. 31,para.4).
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That is absolutelytme. But it pointedlyraisesthe questionwhether such an objectcan be a
legitimate one for an interventionnder Article 62 of your Statute. Indonesia believes that the
questionmustbe answeredwith a fm "no"
Itgoes without saying that the Court, in fulfilling its function, which is "to decide in
accordancewith international lawsuchdisputes as are submittedto it", does its part in preventing
certain disputes from festering and certainly preventsothers from arising. 1 am referring, for
instance,toSirRobert Jennings's remarkable speech during the colloquium celebratingthe Court's
fiftieth anniversary. In that speechhe expressedhis convictionthat:
"Properly understood, the adjudicative processcan serve, not only to resolve
classical legal disputes, but it can also serve as an important tool of preventive
diplomacyin more complexsituations." ("Contributionof the Court to theResolution
of International Tensions" in Connie Peck and Roy S. Lee, eds., Increasing the
EfSectivenessof theInternationalCourt ofJustice, Nijhoff/UNITAR,1997,p. 79.)
But the former President of the Court immediately added that this must be understood in
relation to the specific dispute submitted to it, with respect to which the Court effects "the
reduction,or refinement,or compression" (p.80). In responseto a question, Sir Robert stated: "1
would besomewhatfrightened oflitigantscomingand expecting somethingdifferent thanthe strict
applicationofthe law" (p. 93).
The fact is, and 1 quote from the Judgrnent delivered in the case concerningNorthern
Cameroons, "[tlhe functionof the Court is to state the law,but it maypronouncejudgrnentonly in
connection with concrete cases where there exists at the time of the adjudication an actual
controversy involving a conflict of legal interests between the parties"(I.C.J. Reports 1963, pp. 33-34; see also the Judgmentsof 20 December1974in the Nuclear Testscases,I.C.J.Reports
1974, p. 270, para. 55, and p. 476, para. 58). Andit is only in fulfilling this,judicial, function in
the specific cases referred to it that the Courtn play the preventive role which the Philippines
would like to see it accept as arimary function. Yes, Mr. President,the Court will, by means of
its judgrnent, settle the dispute between Indonesiaand Malaysia and prevent it from festering-
therebyhelpingto soothetensionsinthe region. Butthat cannotjustiîy the Court's consideration at
the same time of another dispute, one whose sole connection with the case which the Special
Agreementof 1997requestsyouto decideisthat ittoo isan element ofthe colonial legacy.
16 Especially- and Indonesiais at painsto reiteratethis with insisten-e sincethat dispute,
if there is one,oes not concem Indonesia at all. Hearing the oral statementsby the Philippines
representativesyesterday morningmadeus feellike RosencrantzandGuildenstem- asyou know,
Mr. President,these are two very minor charactersin Hamlet aroundwhom Tom Stoppardwrote a
play, Rosencrantz and Guildenstern Are Dead. In it the two-bit players take centre stage and
observe the King, Queen and Hamlet struggling in the midst of terrible difficulties which they
knownothing about and which have nothingto do with them. And it was indeedover Ourheads,
likethose of Guildenstem and Rosencrantz,that Indonesia's[sic] advocatesaddressed themselves
yesterday directly and exclusively to our colleagues from Malaysia in airing their contentions
concemingsovereigntyover Sabah.
Mr. President, as Indonesia has already said and would now repeat: it has no intention of
taking any position on the substance of the quarrel between its two neighbours; itdoes not even
intendto take sides on the question whetherthere exists a dispute betweenthem in the legal sense
of the term, giventhat the Philippines apparently claimsthat there does, whereas Malaysiadenies
it. Onthe other hand, Indonesia is firmly convincedthat, ifsuch a dispute does exist, it is in any
event completely separate- by virtue of the parties to it, its subject-matterand the contentions
advanced- from the dispute which is the subject of the case referred to you by the Special
Agreementof 1997. It is not atal1impossiblethat theconstructionof certain instrumentsinvokedby Indonesiaor
Malaysia, or both, may be relevant to that dispute - or non-dispute,it makes no difference. But
that is not enough to establish an interest of a legalnature which the Philippines could rely on to
justifi its intervention.
Mr. President, Prof. Reisman said something quite extraordinary in this connection. He
asserted: "Wefind nothing in the precedentsabout thepermissible scope of an interventionbeing
determined by the language of the submission, but rather by the possible consequence of the
Court'sdecision." (CR 200113,28 June 2001, p. 15,para. 10.) 1fear that Prof. Reisman failedto
look veryhard.
True,the interestof a legalnature invokedby the State seekingto intervenemust be capable
of being affectedby the Court'sdecision("may be afected by the decision in the case", as statedin
the English text of Article 62). Butthis interestmustalso be "inissue" ('Tpourlui en cause'l). And
as 1pointed out on Tuesday (CR 200112,26 June 2001,p. 20), the Court'sjurisprudence carefully
looksto bothversions ofthe Statuteandtakes accountof bothrequirements.
To determine whether an interest of the State submitting an application for permissionto
intervenemay truly be in issue, that applicationshouldbe comparedwith the claims madeby the
parties in the main proceedings. The Court made the point most clearly when it denied Italy
permissionto interveneinthe LibydMalta case: "Normally,the scopeof a decisionof the Court is
defmed by the claims or submissions of the parties before it .. .".And it is in relation to those
claims, possibly as "isolated"by the Court (see the Judgrnentsof 20 December 1974 in the cases
concerning Nuclear Tests, I.C.J. Reports 1974, p. 262, para.29, and p. 466, para.30), that the
Court assessesthe scope of the interventiontaking account of al1the circumstances, as well as-
and this is what interests us most particularly here - "the nature of the subject-matter of the
proceedings instituted" by the Parties in the main case (Judgment of 21 March 1984 in the case
concerning the Continental Shelf (Libyan Arab JamahiriydMalta), Application by Italy for
PermissiontoIntervene, 1.C.J.Reports 1984,p. 19,para. 29).
Now, the Philippines formally assuredIndonesiain the Note of 5 April last annexedto the
Republic of Indonesia's written observationsthat ithadno claimto assertover Ligitan and Sipadan
and it reaffirmed that in its oral statements (see CR 200113, 28 June 2001, p. 10, para.2(Mr.Reisman)). ln so doing,it acknowledgesthat itsApplicationfor permissionto intemenebears
no connectionwhatsoeverwiththe subject-matterof the case pending beforethe Court. Yet, and 1
repeat, that is one of the two mandatory requirements which an application for permission to
intemenemustsatise before it can be granted.
That said, we cannot but observe that the other condition imposed by Article62 of the
Statute on the granting of an application to intervene, whichwas the only one addressed by Our
Philippine fiiends,is not satisfied either: the Court's decision, whatever itmay beycannotbe such
asto affect a legalinterestofthe Republic ofthe Philippines.
Accordingto the Philippines,the interpretationof the treaties and agreements on which the
Parties rely (ormight rely) in proving their rights to Ligitan andSipadan "will certainly affect the
Philippine interest"(CR 2001/3, 28 June 2001, p. 14,para. 8 (Reisman)). Nothing, Mr. President,
couldbe less sure!
What have Profs.Reisman and Magallonatold us to convinceyou of that? Essentially that
the Philippine claims to northern Bomeo might depend on the interpretation of certain treaties
relied on by Indonesia and Malaysia. This is quite possible but it is certainly not sufficient to
justifi an intervention.
First,ecause it isfar from surethatan interpretationcan of itself giverise to an interestof a
legal nature within the meaning of Article 62. Mr.Reisman laidstress in this connection on the
difference saidto exist between,on the one hand, "a concernabout rules and general principles of
law", which he conceded "does not constitute a suRcient interest under Article 62" (CR200113,
28June 2001, p. 12, para. 9, and, on the other, the phkppines concerns regarding the applicable
treatiesand agreements. 1 havegreat troublefollowingmy friend MichaelReisman onthis ground:
- contrary to what he suggests (ibid.), the difference cannot stem from the fact that those
instrumentshave erga omnes effect,because the implementation ofthe rules and principlesof
.
delimitationleadsto exactlythe sameresult, which isalsobindingerga omnes;
)I
- nor does it stem fiom the fact that the Philippines claims are- it is allege- more specific
than those of, for example, Malta in TunisidLibya or Nicaragua in El Salvador/Honduras,
because, as my opponent rightly points out (p. 16,para. 13),an application for permissionto
intemenemust be examinedin concreto; and in boththose cases the Court acknowledged that the interests asserted by the countries seeking to intervene were specific (see I.C.J. Reports
1981, p. 17, para. 30, and 1990,p. 124, para.76), but the Court found in each of those cases
that they were notsuch as to serveas the basis for an intervention.(I.C.J. Reports 1981,p. 19,
para. 33,and 1990, ibidand p. 126,para. 82)
Second and more importantly, it is inconceivablethat the interpretations which the Court
may be requiredto make of the treatiesin questioncould have anyeffect at al1on the interestof a
legalnaturewhichthe Philippinesclairnsto have. Thoseinterpretationswill bemade solelyfor the
purposes of the dispute between Indonesia and Malaysia, which- need we be reminded? -
1 9
relates uniquelyto sovereigntyoverLigitan andSipadan,and the PhilippinesexpresslyStatesthat it
is not concemedbythat issue.
Let ustake the crucial exampleof the 1891Agreement betweenBritain and the Netherlands.
Prof. Magallona spoke about it at some length on Monday (see CR 2001/1, 25 June2001,
pp. 44-48).
It is clear,Mx-.President, that the Philippines interpretation, whatever its strengths (or
weaknesses), has no connection with the subject-matterof the dispute: the Philippinesdoes not
claim that this Agreement,which playsa key rolein the case betweenthe Parties, is notvalid, nor
does it challenge its effects in relationto Ligitanand Sipadan. It simply holds that the Agreement
was entered into by the United Kingdom in its capacity as the "protector" of the State of North
Bomeo and not in its own right (CR2001/1, pp. 44-45(Mr.Magallona)). Thismay or maynot be
so. It may be important in the context of the dispute between the Philippines and Malaysia
concemingNorth Bomeo; it is of no moment whatsoeverin the context of the disputebefore the
Court. 1have not had time individuallyto scrutinizethe other instrumentscitedby Mr. Magallona
and Mt-.Reisman, but al1their analyses cal1forth the same remarks: they have no bearing on
sovereigntyover Ourtwo islands.
What emerges from al1of this learned analysis? That, in al1cases, the Philippines has its
own establishedviewsasto the capacityin whichthe partiesto those instruments enteredintothem
and, consequently, as to their effectsconceming sovereigntyoverNorth Borneo- but inno case
as to sovereigntyover Ligitanand Sipadan. Clearly,Membersofthe Court,the Philippinesinterestin the relevant treaties and agreements on the one hand andthe actual subject-matterof the case
before you onthe other do not coincide, and thefindingsreached by you inyour judgment cannot
in any wayaffectthe rightsor interestsofthe Philippines.
The Court's firmposition in its concluding remarksin the 1981Judgment concerning the
Applicationby Maltafor permissionto interveneinthe TunisidLi cbysais even moreappositein
thepresent proceedings:
"The findings at which it [the Court] arrives and the reasoning by which it
reaches those findings in the case between Tunisia and Libya [transpose: 'between
Indonesia and Malaysia'] will therefore inevitably be directed exclusively to the
matters submitted to the Court in the Special Agreement concluded betweenthose
States and on which its jurisdiction in the present case is based. It follows that no
conclusions or inferences may legitimately be drawn fiom those findings or that
reasoning with respect to rights or claims of other States not parties to the case."
(I.C.J.Reports1981,p. 20,para. 35.)
SpeakingthroughProf. Reisman,the Philippines challengesthe Parties: why, itasks, ifthere
is no link between the Application and the case beforethe Court, are you so loath to allow us to
consult the documents which would assuage Our concems? (CR 200113,28 June2001, p. 13,
para.6). Precisely because, Mr. President, the Philippines has not established that it has any
interest which may be affected by the decision of the Court! And only were it to establish the
existence of such an interest would it have the right to receive copies of the written pleadings
pursuantto Article 85of the Rules of Court.
It must be said that, the further the proceedings advance,the more the Philippinesrestricts
the object of its intervention. At the outset it affmed that it sought,in general terms, "to preserve
and safeguardthe historical and legal rights" that it claimsto possess overNorth Bomeo- this
was the first object of the intervention,as set forth in paragraph5 of the Application. OnMonday,
this ambitiousobjectivewas largely supersededby the far morelimited oneof informingthe Court
of its interpretationof treaties and agreementswhich mightbe relevant. Yesterday,the Philippines
curbed its ambition yet again, and it would seem that its intervention now has but a single
objective: to obtaincommunicationof the written pleadingsinthe principalcase:
- "we have not receivedthe documents and do not know their contents. As petitioners for the
right to intervene, that is one thing that we aresking for", said Mr. Reisman (CR2001/3,
28 June 2001,p. 11,para. 3); or again:- in his final submissions, Ambassador Bello himself, restating the remedies which his
Governmentrequests from the Court in this intervention, confined himself to settingout two
requests, both of them based on Article 85 of the Rules of Court, the first being the
communicationofthe pleadingsand documents(ibid.,p. 31).
Mr. President,1cannot helpthinkingof poker, a gamewhich1do not play myselfbutwhere,
1 believe, one "paysto see". Counsel for the Philippinessaid yesterdaythat there was a highprice
to pay for an intervention (CR200113,28 June2001, p. 13, para. 6 (Mr. Reisman)). The State
seeking to intervene has been unable to establish the existenceof an interest in the case; it then
turns the equation on its head and declares that it is willing to pay that high price in order to
determine whether, on the basis of the documents communicatedto it, such an interest might
eventually emerge, eventhough it mightthen ultimatelydecidenot to intervene.
Thiscuriousapproachcalls forthtwo observations:
Firstly, the new description of the Philippines objectivein seeking to intervene does not
seem credibleto me. It is contradictedby the chronology of the steps taken by the Philippine
Government :
- it submittedits request for communicationof the pleadingsand documents on 22 Februaryof
thisyear;
- without waitingfor the Court's decision,it lodged an Application for permissionto intervene
on 13March; and
- it was only on 15March, thus afterthe Application,that the Court notified the Philippinesof
itsdecisionnotto grant its requestfor communicationofthe pleadings.
In other words, it is readily apparent that the link- presented ever more insistently-
between the non-communicationofthe pleadingsand the Applicationfor permissionto interveneis
an artificialone, constructedexpost facto in order, one might almost Say,to appealto the Court's
charity.
My secondpoint is that, althoughthe Philippines deniesthis (see CR 200113,28 June 2001,
p. 13, para.7), it has indeed progressivelytransfonned its Applicationfor permissionto intemene
into an appeal against the decision not to allow it to have access to the pleadings. On Monday,
Mr. Reismanspokeof a "denialofjustice" (CR200111, p.22, para. 16and p. 23, paras. 17and 18); yesterday,he complainedof a "caricatureof law"(CR 2001/3,28 June2001, p. 14,para. 7). These
are indeedargumentsof appeal- and couched inthe strongestterms.
Yet it doesnot appearto methat the Courtdeservessuchreproaches. The Courtdidno more
than apply its Statute and Rules, which requirethat a State mustjlrst establishthat it satisfiesthe
C
conditions laid down in Article 62 and then has the option of availing itself of its rightsunder
Article 85 of theRulesof Court. Dura lex,perhaps,sed lex.
1would add one thing: contraryto whatthe Philippinesappears to believe, Article62 is not
intendedto be a kind of "joker" which may be used by third parties to strengthen their hand in a
disputewith one or both of the partiesto a case. Moreover, ifthat were indeed so,the questionsof
a "link ofjurisdiction" and of the possibilityof interventionby a "non-party"would then become
particularlyacute.
2 2
1said on Tuesdaythat Indonesiadidnotdisputethat informingthe Courtmight constitutethe
legitimate object of an intervention, and Prof. Reisman was good enough to thank me for it
(CR200113,26 June 2001, p. 16,para. 13). However, such an interventionmust correspondto a
genuine need, one that is solidly rooted in the principal proceeding. Not so in this case: the
objective of the Philippines is not to inform your distinguished Court of its interests in the case
before you, but to draw the Court'sattention to another dispute, speculating that this might,
perhaps,be of interest. At best,the Philippinesmightappearas amicuscuriae - butthe Courthas
neverpermitted this, evenin advisorycases. To permitittoday would,1fear, openthe floodgates.
Everything would become partof everything else. By a process of contagion, other neighbouring
intervene,since this or that treaty might welltum out to be of
States would request permissionto
some importance in the settlement of this or that dispute relating to another island or another
archipelago- and let us not forget that the seas around Indonesia, Malaysiaand the Philippines
arerich in potential situations of this sort. 1prefer not to give examples, so asnot to give ideasto
other neighbouringStates!
Mr. President,with yourpermission, 1should like to concludewith a brief review of the key
points of Indonesia's legalposition. We considerthat the Philippinerequestfor permissionto interveneis untimely inthe literal
sense of the word- it does not come at the appropriate time -, and that it respects neitherthe
letternor,mostassuredly,the spiritofArticle 81ofthe Rules.
More seriously,it doesnot satisQ the conditionslaiddowninArticle 62 ofthe Statute:
(1) the interest invokedby the Philippines is not one which may be affected by a decision in the
case betweenIndonesiaand Malaysia;
(2) ifthere is an interest, itis in a differentdispute-one thatthe Philippinesclaimsto havewith
Malaysia alone, althoughthe latter denies this and Indonesiatakes no position on the point,
nor, afortiori, onthe substanceofthatdispute;
(3) to allow the intervention would arnountto grafting ont0 the principal proceeding this other
disputeto which indonesia is in no way a party, but on which it would then have to state its
views, which it does not wish to do - with the paradoxicalresult that it would be bound by
the ensuingjudgrnentwhilst the Philippineswouldnot be;
(4) moreover, that judgment can have no effect whatever on the interests which the Philippines
claimsthat it is seekingto safeguard;
(5) the informationthat the Philippines is seeking, by this means, to give to the Court therefore
does not constitute, in the circumstances of the case, a legitimate object of the intervention
requested;
(6) this equally applies a fortiori to the avowed aim of the Philippines of thus securing
communication of the pleadings and document'Prefusedby the Court'sdecision of 15March
last;
(7) more generally, intervention by the Philippines would create a dangerous and unwelcome
precedent, which wouldseriouslyjeopardize the confidentialityof proceedings which States
appearingbeforethe Court arelegitimatelyentitledto expect- and indeedthe verysystemof
intervention.
Finally and in any event, Mr. President, Indonesia considers that the holding of these
hearings in itself providesthe Philippineswith more than ample satisfaction. The Philippineshas
had the opportunityto expose at willto the Court (and, further,to public opinion)its point of viewregarding the treaties or agreements which it considersrelevant as support for its position on its
dispute concerning sovereignty overNorth Borneo-instruments with which, ex hypothesi, itis
farniliar,sincethey constitutethebasisof its claim.
It seems to Indonesia that, forthe future, the debatemust be refocused on the case whichit
d
submittedtoyou byjoint agreementwithMalaysia: sovereigntyover Ligitanand Sipadan.
It remains for me, Members of the Court,to thank you for your patience- andto ask you,
Mr. President, kindly to permit the Agentof Indonesia to present a few very short concluding
remarks. Thankyou very much.
The PRESIDENT: Thank you, Professor. 1 now give the floor to His Excellency
M.. Hassan Wirajuda,Agentfor Indonesia.
M. WIRAJUDA :Monsieur le président,Madameet Messieurs de la Cour,je voudrais vous
remercier de m'avoir donné la possibilité de prendre en dernier la parole devant vous sur la
questionde la requêtedesPhilippineset de conclure laplaidoirieorale de l'Indonésie.
Commenos conseils l'ont expliqué, l'affaire entre l'Indonésieet la Malaisie qui porte sur la
souveraineté sur lesîles de Ligitan et de Sipadan est entièrement distincte dela question de la
revendicationdes Philippinessur certainespartiesdu Sabah. Enportant leur différend devant vous
par voie de compromis, Monsieurle président, l'Indonésie et aussi la Malaisie,je pense,voulaient
que la Cour tranche la question de la souveraineté surles deux îles, et cette question seulement.
C'est là le seul objet ducompromis,etrien d'autre.
L'Indonésie a déclarp érécédemmente ,t elle réitère aujourd'huisa position, qu'elle estime
qu'il n'y a pas lieupour elle d'exprimer lamoindre opinionau sujet de la revendicationhistorique
des Philippines, étant donné que nous ne nous occuponspas du fond de celle-ci. Il s'agit d'une
question qui tout simplement ne concerne pas l'Indonésieet qui ne sera pas affectée ou
compromise par la décision queprendra la Cour en ce qui concerne la question de savoir à qui
appartient Ligitan etSipadan. En tout état de cause,l'Indonésiese voit dans l'obligationde bien a
précisersa position queles Philippinesont qualifiéde ((judicieusementadoptée)). Nos collèguesdes Philippinesont fait référence à, plusieurs reprises, dans leursplaidoiràes
l'accord de Manille de 1963, signépar l'Indonésie,la Malaisie et les Philippines. Laissez-moi
simplementrappelerquecet accord n'apréjugé en aucune manièredu fond de larevendication des
Philippines. Sivous me permettezde citer le passage cléde l'accordde 1963, on peut lire ce qui
suit :
«Lesministres ontprisacte de la revendicationdes Philippineset du droitde ce
pays de continuer à la faire valoir conformémentau droit international et au principe
du règlementpacifique desdifférends. Ils sont convenusque l'inclusion du Bornéo
septentrional dans la nouvelle ((Fédérationde Malaisie)) ne préjugerait ni la
revendicationni aucundroiten découlant.))
Or,dans un contextedifférent,mais lié à notre affaire, l'Indonésie et la Malaisie onrteconnu
dans leur accord de 1966 que la population du Sabah et du Sarawak aurait la possibilitéde
confirmer,de manièrecomplète et démocratiquel,a décision qu'elle avait prise antérieuremen en
ce quiconcernele statutqui lui est dévoluau sein de laMalaisie. Cetteposition a été confortpear
la pratiquediplomatiquepostérieurede l'Indonésie.
L'instance actuelleentrel'Indonésieet laMalaisie n'est pas l'endroit indiquépoutrraiterces
questions ou pour donner l'occasion aux Philippines de faire valoir leurs revendications à
l'encontrede la Malaisie. Selonmon interprétationdes précédents de la Cour sur la question de
l'intervention,une requêteà fin d'interventionn'a jamais eu pour but de sauvegarder les intérêts
juridiques de 1'Etatqui la déposeseulement vis-à-visde l'une des parties à l'instanceprincipale.
Pourtant,c'est la situationlaquellenous sommesconfrontésen l'espèce.
Quoi qu'il en soit, mon gouvernement ne comprend pas pourquoi l'instance actuelle,
purement bilatérale, entre l'Indonésie et la Malaisie, devrait s'étendre à l'examen d'une
revendication qui porte sur des questions qui concernent les Philippineset la Malaisie, et non
l'Indonésie.
Pour cette raison, ainsi qu'au vu des moyens juridiques présentéspar nos conseils, la
Républiqued'Indonésie conclu rtspectueusementque laRépubliquedes Philippinesne devrait pas
se voir accorder le droitd'intervenir, car cela auraitpour effet d'ajouterinstance unenouvelleaffaire qui neconcerneni l'Indonésieni le différend spécifiqueporté conjointemntvantla Cour
par voie de compromis. Cela dit, conformémentau paragraphe 2 de l'article 62 du Statut de la
4
Cour, l'Indonésie reconnaîtien évidemmentque c'est à la Courde se prononcer sur la requêdes
Philippines.
Il me reste, Monsieur le président, à remercier la Cour pour l'attention qu'elle a eu
l'obligeance deme prêter àmoi et aux membresde la délégation indonésienneJ.e voudraisaussi
exprimerma gratitudeaux agents de laMalaisieet des Philippines,ainsi qu'à leursconseils,pour la
courtoisie dont ils ont faitpreuve lorsde cetteaudience.
Enfin, Monsieur le président,je voudrais remercier le greffier, son personnel et les
interprètespour l'aide qu'ilsnous ontapportéeaucours de cette instance.
Ceci conclutmesremarques,Monsieurleprésident. Mercibeaucoup.
LePRESIDENT :Merci beaucoup, MonsieurWirajuda. That concludesthesecond roundof
Indonesia's oral argument. The Courttakes note of the final submissionswhichyou have read on
behalf of the Republic of Indonesia. And 1 give now the floor to Professor JamesCrawford to
present Malaysia'ssecond roundof oral argument. M. Crawford,vous avez laparole.
M. CRAWFORD : Merci, Monsieur le président. Monsieur le président, Madameet
Messieursde la Cour, c'est avecun grand plaisirqueje prends nouveaula parole devant vous. Je
ferai une remarque préliminaire:la Malaisie n'abordera pas la question, liàecette requête,du
retard intervenusur le plan de la procédure.Cepoint a en effettraité de façon trcomplètepar
l'Indonésie. Nous approuvons les arguments avancéspar celle-ci; nous ne voyons simplement
aucune raison d'y ajouter d'autres considérations.Nous espérons seulement que sila Cour décide
de rejeter cette requêteen invoquant le retardintervenu sur le plan procédural,cela ne serapas
considéré, pour reprendre les mots employés palr e présidentdans une affaire récente,comme
susceptiblede faire l'objet d'une interprétationtrario.
-
1. La Cour aura noté quela requête déposé par les Philippines le 13 mars 2001 manque
totalementde préciser dans quellemesureun intérêdt'ordre juridique decet Etat pourraitêtreicien
cause en cette affaire. La requête mentionnla revendication sur le Sabah,mais n'apporte aucune
autre précision. La Malaisiene peut que supposerque la prétention des Philippinesreprend cellequi a été avancée lord ses discussions menées dans les années soixante.A cette occasion, les
Philippines avaient simplement faitétatde leurs prétentions sur le Sabah. Ellesrevendiquaient,
sinon la totalité duSabah, du moins une très large portion de celui-ci, et en tout étatde cause la
totalité desa côte orientale. Il n'avait jamais suggéré par le passé que,par exemple, Tawau,
Cowie Bay ou encore l'intégralité de la péninsule de Sempompaussent échapper à cette
revendication.
2. Or, si cette revendication était cohérente, labaie de Tawau, Cowie Bay ainsi que
l'intégralitde la péninsulede Semporna auraient dû en faire partie. C'est en tant que successeur,
non pas des Etats-Unis, ni de l'Espagne, mais précisémen dtu sultan de Sulu, que lesPhilippines
émettentleur revendication. Vous avez entendu M.Magallona s'exprimer à cet égard(CR200113,
p. 25). L'Espagne et les Etats-Unis étaient obligésde respecter les frontières qu'ils avaient
reconnuesrespectivementen 1885et 1930,alors quetel n'étaitpas le casdu sultan,dans lamesure
où celui-cicontinuaitàdisposerd'uneautorité souveraine à l'égardde Bornéo,quandbien même il
l'avait perdueàl'égard de Sulu. Telleest la thèsees Philippines.
La concession initialement octroyéepar le sultan en 1878 couvrait l'ensemble de la côte
orientale, jusqu'à la rivière Sibuko. La carte, si je puis l'appeler ainsi, estcelle qui porte le
numéro 1dans votre dossier. Le territoire revendiqué descendat peu prèsjusqu'àla ligne rouge.
Les Philippines ontmontrécela sur l'unede leurscartes lundi, que nous revoyons aujourd'huisur
l'écran- et je suis reconnaissantà mes confrèresdes Philippines de nous l'avoir prêtée. La
concessioncorrespond à la lignerougesur la côteorientale;vous pouvezvoirjusqu'où elles'étend.
En outre, la confirmationdonnéepar le sultan en 1903entendait couvrir lesîles situéeslargedes
côtes au-delàde la limite de 9 milles marins,y compris plusieurs îles, désignsommément,que
les Philippines ne revendiquent pas aujourd'hui.Il était logique de penser quesi les Philippines
étaient1'Etatsuccesseur du Sultanatde Sulu, alors leurs droits devaient être lmêmesque ceux
dontavait disposé lesultan.
3. Ce n'est qu'à la lecturede l'exposé écrit de l'Indonésie que nous avons découvertqleuse
Philippinesne revendiquaient pas les deux îles,c'est-à-dire lorsque nous avonspris connaissance
de la lettre des Philippinesdu avril2001. Lundidernier,nous avonspu mesurerpour la première
fois la portéeexacte de la revendication des Philippines, qui apparaît maintenant en jaune surl'écran.Voici peut êtrela première revendicationtemtoriale en forme d'Œuf del'histoiredu droit
international, mais il s'agit apparemmentd'une affairesans précéden( tCR 200111, p.18). Vous
pouvezdonc voir sur l'écranla revendicationtelle qu'ellea été formuléearM. Magallona,et vous *
pouvez constater qu'elle ne se superpose pas au temtoire concernépar la concession de Sulu. i
C'est précisémenlta zone insulairequifait défaut. Voilàquitombe bien !
4. M. Pellet a insistémardi sur le fait que l'affirmation des Philippines selon laquelle
celles-ci n'émettaientaucune revendication sur les deux îles est, pour cet Etat, une source
d'obligationsqui lient cet Etat(CR200112,p. 25).M. Pelletaraison. Je m'interrompraiseulement
pour noter qu'il a raison,mais pourun mauvaismotif. Le motif n'est pas l'estoppel. C'est qu'il
s'agit là d'un acte unilatéral contraignantsuivant le principe affmé à l'occasion desaffaires
Groenland orienta1et Essais nucléaires.Il n'y a paslieude parler icid'estoppel,car laMalaisiene
s'est nullement appuyéesur la déclaration des Philippines. D'ailleurs, comment l'aurions-nous
Nous
pu ? Nous en ignorions tout jusqu'à ce que l'Indonésiela remette à la Cour le 2 mai.
apprécions la candeurde l'Indonésie à cet égard;il n'est pas certain que cette déclaration devait
êtrerendue publique.
5. Mais, à présent,la déclarationpar laquelle les Philippines affirment n'avoir aucune
revendication sur les deuxîles modifie la situation existante,sin considère l'interventionsur le
fondementde l'article 62. Sielles avaientrevendiquécesîles, les Philippinesauraientpu s'estimer
habilitéesà intervenirdans la mesure où ellesauraient ainsi fait valoir un intt'ordrejuridique
au regard de l'objet du différend. Tel est le fondement sur lequel le Nicaragua et la Guinée
équatorialeont été autoriséà intervenir- ilsrevendiquaient l'unet l'autre une partiedu territoire
qui faisait l'objet du différend, respectivementle golfe de Fonseca et les alentours du champ
pétrolierdeZafiro.
6. Inversement, les Etats qui n'ont pas revendiquéde territoire particulier n'ont pas été w
autorisésà intervenir, quand bien mêmeils soutenaient qu'une décisionde la Cour concernantle
territoire en question pourrait avoir des conséquencespour eux. Tel a étéle cas du Nicaragua
vis-à-vis des îles du golfe- il ne les revendiquaitpas et n'a doncpas été autorisà intervenià
leurégard. 7. Monsieurle président, aussi longtempsque nous pensions- et cela étaittout à fait
raisonnable- que les Philippines revendiquaient la côte orientale et toutes les îles s'y rattachant
jusqu'à la rivièreSibuko,nous opposer à leur interventionnous posaitun problème. Il nous fallait
montrer que cette prétention ne tenaitabsolument pas. Cela ne présente pas dedifficulté,dans la
mesure où la revendicationdépend - parmi de nombreusesautres choses- de l'hypothèse selon
laquelle les héritiers,du point de vue du droit privé,du dernier sultanont conservésa souveraineté
sur des territoires qu'il leur étaitpossible decéder aux Philippinespar un acte de droit privé. Ils
transportaient ainsi leur souverainetéavec eux, sans doute dans les poches -collectives - de
leurs vêtements.Eh bien, c'est là un argumenttotalementindéfendable,etje puis comprendreque
la Cour n'ait nulle intention de l'examiner. Après tout,ce n'est pas la question qui vous a été
soumise.
8.Mais la Course trouve àprésentdansunepositiondifférente. Ellen'a pas à entrer dans la
problématique d'unerequête à fin d'intervention fondée surla prétentiond'un Etatà l'égardde
territoires contestés,qui s'avèrequasiment impossible à soutenir. Il n'existe aucun différendà
l'égardde ces deuxîles entre la Malaisieet lesPhilippines. Il n'existe aucun différàleur égard
entre l'Indonésie etles Philippines. Le seul différendest celui qui oppose la Malaisie et
l'Indonésie,et c'estce différendqu'ilvous a étdemandédetrancher,et non un autre.
9. Dès lors,comment les Philippines argumentent-elles leur allégationselon laquelle un
intérêdt'ordre juridique seraitpour elles en cause, c'est-à-dire, poursuivre l'articledans sa
version anglaise,un intérêt d'ordrejuridique qupiourraitêtreaffectépar une décisionde laCour ?
Un Etat ne peut intervenir quesi un intérêtjuridique estour lui directementen cause- àsavoir,
en l'espèce,la souverainetésurlesdeux îles. Un intérêt pour l'évolution ddroitne suff~tpas. La
volontéde rechercherun règlementglobal du différendne suffitpas. Apporter à la Courdavantage
d'informationsne suffit pas- celle-ci peutestimer àjuste titre qu'elle disposede suffisamment
d'informations concernantces deuxîles !
10.Un Etat ne saurait en particulier intervenir surle fondementde l'article62 au seul motif
qu'il a l'impressionou qu'il craintque,l'occasion de l'examend'uneaffaire, la Courne dise quoi
que ce soit qui pourrait avoirune incidence sur sa propre revendication. L'article62 n'a pas été
conçu en vue de ce genre de situation. Si tel avait étaitle cas, il nous faudrait agrandircette salle d'audience, étantdonné que,dans la presque totalitédes différends frontaliers,d'autres Etats se
présenteraient, craignant qu'unde leurs intérêts soit en caue, mpte tenu du ((critèredu lien de
cause à effet))de M. Reisman(CR 200113,p. 15). Il y aurait pléthoredYEtatssouhaitantintervenir.
Loin de faciliter le règlementdes différends, celale compliquerait.
11.Les Philippinestentent icide contournercette difficultéde deuxfaçons.
12. Tout d'abord, elles affirment que l'affaire des îles Sipadan et Ligitan implique
l'interprétation de traités et d'accords sur lesquels les Philippines fondent leur
revendication-distincte - à l'égardd'une partie du Sabah (voir par exemple le CR200111,
p. 17,28). Mais elles omettent totalementd'expliciterles argumentsqu'ellestuent des traitésque
la Courpourrait devoir examiner afin de se prononcerdans cette affaire. Elles se plaignentas
moins de trente-trois fois1 que la Cour ne leur ait pas donnéaccès auxpiècesde la procédure
écrite,de telle sorte qu'ellesignorentlateneur de l'argumentation dela Malaisie. Je croisbien que
nous avons là la proportion la plus élevée, dasute l'histoirede la Cour, de doléances formulées
au sujet du temps écoulém , ais il est vrai qu'il s'agit d'une affaire sansprécédent. J'indiquerai
incidemment que les Philippines ne nous ont jamais écrit pour nous demander de leur
* communiquerdirectementles piècesde procédureécrite,ou un résumé de notre argumentation,ce
qui auraitéténormalement la première chose à faire.
13.Mais les Philippines connaissentle contenu destraitéset des accords. Elles auraientpu
préciser, au regard de ces traités, quelles propositions, quelles dispositions, quels éléments
d'interprétationprésentaientun caractère détermin'htpour leur revendication. Elles ne l'ont
jamais fait. Si elles étaientintervenues sur leondem&t de l'article63, la question de l'intérêt
d'ordre juridique ne se serait même pasposée. Maisil n'en aurait pas moins incombéaux
Philippines, dans ce cas comme dans l'autre, de préciser quelétaitle point du traitédont elles
contestaient l'interprétation.Bien évidemment, conformément àcet article63, elles auraientalors
4
étéliéespar l'interprétationdonnéepar la Courà cet égard. Bienqu'elles s'endéfendent,êtreliées
par votre décision estbien la dernière choseque souhaitent les Philippines. Elles préfèrent
' CR200111,par.6,7 (M.Bello);par.2, 3, 12, 13, 14,15, 16, 17, 18, 19, 21, 27, 33, 36, 38, 42, 44, 46, 47
(M. Reisman);CR200113par.2,3,6,7, 12, 13,16,17,18,20 (M. Reisman);par.2,3 (M.Bello). intervenir en élément incontrôlable danu sn différendterritoriaà l'égardduquel elles affinnent
n'avoir strictementaucunintérêd tirect, afin de protéger les intédtstincts qu'ellesaff~rmentêtre
les leursàl'égard d'autretserritoires. Tellen'estpas la finalitéde l'article 62.
14. La prétentiondes Philippinessur le Sabahne repose de toute manièresur aucun traité.
Elle ne s'appuie ni sur le protocole de 1885,ni sur la convention de 1930.Elle se fonde sur une
cession de droit privéréaliséeen 1962par les héritiers, auregard du droit privé,des sultans de
Sulu. M. Magallona a été tout à fait clairà cet égard(voir par exemple, CR200111, p. 36;
CR200113,p. 22,25).
15.La secondefaçonpar laquelleles Philippinesessaientd'aborder cette questionconsiste à
soutenir que les motifs avancéspar la Cour affecteront, ou risquent d'affecter, la prétention
distincte forméepar les Philippinessur certainesparties du Sabah. M. Reismanl'a trèsclairement
fait savoirpar sespropos,queje cite:
«si sa thèse[celle de la Malaisie] en l'affaire implique une chaîne du titre qui est en
contradictionavec celle que les Philippines invoquentpour revendiquer des territoires
dans le nord de Bornéo, l'interprétation retenaura des conséquencessurdes intérêts
d'ordrejuridique))(CR200113,p. 15).
Mais là encore, M. Reisman réécrilt'article62 du Statut. Lundi, il a quasiment paraphrasé
cet article 62, en usantdestermes suivants
«si l'appréciation subjectivd'un Etat tiers est qu'il y a pour lui dans une affaire un
intérêten cause, il doit être autorisé à intervenir et à prendre connaissance des
plaidoiries, quittà nous faire savoir ultérieurement s'souhaite porter l'affaire plus
avant))(CR200111,p. 27-28,32).
Je pense que l'expression «en cause))utilisée estparticulièrement parlante. Maistel n'est si
manifestement pas ce que dit l'article62 que M. Reisman fait une nouvelle tentative. Voici son
interprétationdonnée lorsdu secondtourde plaidoiries :
«Si l'argumentation développéepa urnepartie dans une affaire teàds'appuyer
sur des interprétationsqui pourraientalleàl'encontrede l'argumentation avancée par
un Etat tiers à l'appui d'une revendication territoriale, alors, mêmesi ladite
revendicationconcerneun territoire distinct, cetEtat tiers doit pouvoir intervenirpour
protéger sapropre argumentation.))(CR200111, p.15.)
O En fait, il s'agit un peu ici de la mêmechose que du mythique chapitreVI et demi de la Charte :
Celui-ci tourne tout entier autour des
nous pourrions l'appeler l'article62 et demi du Statut.
notions d'argumentation, d'interprétation, d'éléments contingents, de subjectivité etd'interdépendance. Il n'a pas de relation avec ce qui est écrit,et cette Cour nous a récemment
rappelél'importance de la significationvéritabledes mots d'un traité (affaireGrand,arrêtdu
27juin 2001, par. 77). Le termeessentielde l'article62 estcelui dedecision)).
16.Mais supposons,aux fins de notre argumentation,que le critèredu lien de causeà effet,
I
évoqué pa r .Reisman,se résolvede façonpositive et qu'ily ait pour 1'Etatintervenantdans une
affaire un intérêt d'ordre juridique cause, dès lorsque la façon dont une partie aborde cette
affaire risque d'entrer en opposition avec celle de l'intervenantdans une autre affaire. Selon ce
critère,il existe un intérêt d'ojeridique commun à deuxprétentions distinctes,lorsque queles
arguments invoqués à l'égardde l'une sont ou risquent d'entrer en conflit avec les arguments
invoqués à l'égard del'autre. Eh bien, acceptons cettehypothèseà la seule fin de la mettre à
l'épreuve.Même dans cecas, ildemeurenécessaire depréciseroùse trouvece conflit. Quels sont
les fondements de l'argumentation,invoquéepar les Philippines à l'appui de sa prétentionsur le
Sabah, surlesquels la Cour pourraitavoià seprononcerdans la présente affaire? Les Philippines
doivent êtreen mesure de les expliciter, quels que soientles arguments avancés parles Parties.
Ellesdoivent, supposons-nous,avoir connaissance du fondementjuridique sur lequels'appuiecette
prétendumentancienne revendication. Alors, où se trouve la contradiction potentiell? Les
Philippines n'ont pas pris lapeinede le direaCour.
17.Permettez-moitout de même de tenter d'identifier, dansl'exposéde M. Magallona,les
points avancésparles Philippinesqui constituentla thèsede leur revendicationet de me demander
s'il enest question dans la présenteaffaire. Je vais en examinercinq. A propos de chacun d'eux,
lorsquej'utilise l'expression((partiesdu Nord-Bornéo))j,e désignela revendication portant surle
territoireen forme d'Œuf quevousvoyez àl'écran,qui exclutles deux îles en questionet les autres
îles du groupe de Ligitan et de la baie de Cowie, ainsi que lapartie septentrionale de l'île de
Sebatik. Partant de là,examinonsles argumentsde M. Magallona :
ArgumentnoI :le principal argument desPhilippinesest que les héritiers,en droit privé,du
sultan de Suluont conservéen 1962la souveraineté sur desparties du Nord-Bornéo, souveraineté *
qu'ils pouvaient, indépendammentdes obligations conventionnelles des Philippines, céderaux
Philippines(CR 2001/1,p. 36-37). La Cour n'apas à tranchercette question. Riende ce qui s'estpassé à Manille en 1962 n'est pertinent au regard de la question de savoir si Sipadan et Ligitan
appartiennent à l'Indonésieou à la Malaisie. La prétendue cession de1962 n'a doncaucune
incidencesur cette affaire.
Argument no2 : les Philippines avancent que la concession faite par le sultan de Sulu
en 1878 était valable(CR200111, p.22, 39-40). La thèse de la Malaisiene dépendpas de la
validitéou de la non-validitéde cette concession; cen'est pas là un point en discussion entre la
Malaisie et l'Indonésie. L'Espagne et le Royaume-Uniont expressément laissé ce point de côté
lors de la conclusiondu protocole de 1885,ce qui expliquela phrase :«territoires du continentde
Bornéo quiappartiennent, ou qui ont appartenu dans le passé,au sultan de Sulu», à l'articleIII
(MM, vol. 2, annexe 15,p. 65; p. 43 de laversion française). CesEtats ne s'entendaientpas sur ce
pointet n'ont pas euàrésoudrece désaccord.La Courn'a pas nonplus à lefaire.
Argument no3 : les Philippines avancent ensuite que le protocole de 1885 n'a pas eu
d'incidence à l'égard des droitsdu sultan sur des parties du Nord-Bornéo(CR200111, p.41-42).
Cette questionne se pose pas dans l'affaire. Le titrede la Malaisie sur les îles ne dépend pasdu
protocolede 1885qui ne concernait que les îles setrouvant au largede la côte au-delà de la limite
de 9 milles. Le protocolen'a eu aucun effetsur ce titre.
Argumentno 4 :les Philippines soutiennent ensuite quela convention de 1930 n'a pas eu
d'incidence à l'égard des droitsdu sultan sur des parties du Nord-Bornéo(CR2001/1, p. 46;
CR 200113, p.21-22). Cette question ne se pose pas davantage dans l'affaire. La Cour aura
peut-êtrequelque chose à dire en ce quiconcerne le champ territorial de la convention de 193à
l'égarddes deux îles, bien que cela soit un élément subsidiaire. Maisle champ territorial de la
convention,ence qui concerne la zonerevendiquéepar les Philippines, est parfaitement clairet ne
constitue pas une question qui se pose en l'affaire. En tout étatde cause, la revendication des
Philippines sur certaines parties du Sabahne dépendpas du champ territorial de la convention
de 1930. Ni laMalaisie,ni l'Indonésie n'ont diqtuoique ce soit dans leurs pièces écritau sujet
de l'effet de la convention de 1930 à l'égarddu sultan de Sulu. A nouveau, ce n'est tout
simplementpas un point en discussionen l'affaire. Argumentno5 :les Philippinessoutiennentensuite que la proclamationde 1946,par laquelle
le Nord-Bornéo fut déclaré coloniebritannique,étaitun acte illicite envers le sultan de Suluet ne
pouvaitaffecter sesdroits (CR200111,p. 48-49). Il ne s'agitpas nonplus d'unequestionen cause
dans cette affaire. Si Sipadanet Ligitan ne faisaientpas partie duNord-Bornéoen 1945,l'actepar
lequel leNord-Bornéo fut proclamé colonie britanniqun ee changeait rienà cette situation. Cette
proclamationne modifiait pas les données territoriales.Aucunequestionportantsur la licéitde la
proclamation de 1946 envers les Philippinesne pourrait d'aucune façon être pertinente en ce qui
concernelesdeuxîles.
18. Monsieur le président,Madame et Messieurs de la Cour,voilà cinq argumentsqui font
partie de la thèsedeM. Magallona en l'affaire. Il présente d'autresarguments,mais ceux-ci sont
les principaux. Pas unseul d'entre eux n'esten cause en 1'afaire. Les Parties n'ont ni l'une ni
l'autreporté devantla Cour des moyens relatifs à l'un quelconquede ces arguments. Si la Cour
statuaitsur eux, elle agirait alorstrapetita. J'imagine qu'il est possible que la Couravance,en
passant,une considérationou une autre, quipourraientrenvoyerindirectement à l'un ou l'autrede
ces arguments, bien que la Cour fasse généralemenp treuve d'unetrès grande prudence dansses
énoncés.En tout état decause,un Etat ne peut intervenir dansle cadre de l'article 62par crainte
d'éventuels obiter dicta. Je suis d'ailleurs convaincu qu'après cette semaind'argumentations,la
Courveillera à s'en teniràcequi est nécessaireen l'affaire.
19. Monsieur le président, Madame et Messieurs de laCour, l'intervention est, comme
M. Reisman le dit, une arme nécessairedans l'arsenal procéduralde la Cour. Elle fait partie des
éléments qui distinguent cettCe our d'un tribunal arbitrald hoc. Mais la fonctionde la Courest
tout de même de trancher,sur la base du respect du droit international,tel qu'ilexiste, des affaires
que deux Etats consentants portent devant elle. Sa fonction n'est pas de s'engagerdans une
discussion libresur les différendsque connaîtla région. Un Etat qui demande à intervenirdans le
cadre de l'article 62 doit se plier ses exigences. Les Philippines,ayant soumis une requêteen
application de l'article 62, doivent'abord identifierprécisémenlteurs propres intérêtjsuridiques
pour dire ensuiteen quoi ils sonten cause. Sansaccèsaux piècesécrites,je supposequ'ilpeutêtre
légèrement plus difficile de remplir cette deuxièmecondition. Mais les Philippinesauraient sans
aucundoute pu respecter lapremière et, de toute façon,il n'existepas de mystère particulierautour de ces deux îles, dont il a étéquestion, de manièredétaillée, dans des ouvrages publiés. Les
Philippines ne se sont en rien pliées l'une ou l'autre de cesdeux exigences : en premier lieu,
identifieravecprécisionleur propreintérêt d'ordre juridiquaeu regarddu différend, puisqu'ellesne
revendiquent pas les îles; en second lieu, clarifier en quoi ces intérêts d'ordre juridiqueont
susceptiblesd'être affectpsar ladécisionen l'affaire. Dansces circonstances,leur requêtpeut et
doit êtrerejetée, sansque cela ne porte préjudiceau rôle précieux que peut jouerà titre incident
l'article62dansdes circonstancesquis'yprêtent. Comme le montrlearevendicationportant surle
territoireen forme d'Œufqui figureà l'écran,ilne s'agitpasen l'espèced'uneaffairede ce type.
Monsieur le président,Madameet Messieursde la Cour,je vousremercie de votreattention.
Puis-je vousdemander,Monsieur, d'appeler àlabarre sirElihuLauterpacht.
Le PRESIDENT :Merci beaucoup,Monsieur le professeur. 1now cal1Professor sir Elihu
Lauterpacht.
SirElihuLAUTERPACHT :
1.Monsieur le président,Madameet Messieurs de la Cour,je serai relativementbref. Je ne
m'attarderai pas à répondre à certaines remarques qui ont été formulées le 26 juinau nom de
l'Indonésie,en ce quiconcerne lapositionde laMalaisie à l'égardde larevendicationindonésienne
sur Pulau Ligitan et Pulau Sipadan(CR 200112,p. 12). Cette questionrelève exclusivementde la
procéduresur le fond de l'affaire etpeut attendre d'icià. Il en est de mêmedes déductionsque
l'Indonésie a essayé de tirer de la lettre que les Philippines lui ont adressée,par laquelle ces
dernières renoncent à tout intérêt territorial danlses deux îles (CR 200112,p. 37-38). Sur ces
points,je réserve simplementlapositionde laMalaisie.
2. J'en viens directement aupoint essentiel examiner. La Cour se souviendra que, mardi,
j'ai analyséla préoccupation des Philippinesquetraduit l'énoncédu premier et du deuxièmeobjet
de leur requête, qui concernentla préservationde ce qu'elles ont appelé leurs ((droitsd'ordre
historique et juridique)), découlantde la revendication de possession et de souverainetésur le
Nord-Bornéo. J'ai fait valoir que ces«droits» invoquésétaientsi peu fondés qu'ilsne pouvaient
pas êtresérieusement considérép sar la Cour comme justifiant valablement la requête à fin
d'intervention. 3. J'ai notammentcité certainsactes consacrant la reconnaissancepar les Philippines de la
souveraineté britanniquesur le Nord-Bornéoainsi que leur acquiescement à celle-ci (CR 200112,
9
p. 56-57). Commej'avais mentionné quatretraités signésar les Philippineset la Grande-Bretagne
concernantleNord-Bornéobritannique, l'éminentconseildes Philippes,M. Magallona,a réagi, en
O
donnant l'uniqueréponsesuivante :
«Les Philippines ne voient pas comment des accords bilatérauxspécialisés
relatifs aux liaisons aériennesou à l'emploi de maind'Œuvre, ou une proposition
relative à l'entretien d'un phare, ... pourraient leur êtreopposés en ce qu'ils
constitueraient deleur part une reconnaissance du titrebritanniquesur leNord-Bornéo
ou un acquiescement àcelui-ci.))(CR200113,p. 24, par. 16.)
L'explication estrelativementsimple :lorsqu'untraitésignépar deux Etats porte surun territoire
donné appartenant à l'un d'eux, l'autre ne peut pas par la suite prétendrenier cette réalité. C'est
une forme de reconnaissanceou un estoppo eulune forclusion. Cependant,peu importe le nom
donnéau processusjuridique (il dépendraen fait dans une certaine mesure des circonstances),
l'effetjuridique est indéniable.Il aurait seulementpu être évisi,les Philippines avaient formulé
une réserveexpresse. A ma connaissance,ellesne l'ontjamais fait.
4. De même,le conseil des Philippines a complètement éludé lee sxemples cités de
3 4 l'acquiescementdesPhilippines autitre britanniquesur leNord-Bornéo.La Cour serappelleraque
M. Magallona lui-mêmefut le premier à évoquer leconseil donnéen 1947 au présidentdes
Philippines de l'époque parle gouverneur Harrison. Ce dernier qualifia l'ordonnance portant
cession du Nord-Bornéobritannique d'acte d'«agressionpolitique» et conseilla au président dele
dénoncer. M. Magallona a affirméque l'acteavait étédénoncé (CR 200111,p.49, par. 42). J'ai
réponduque je n'avais trouvéaucune trace de cette dénonciationet j'ai donné à entendre que
M. Magallonapourrait fournir des informations complémentaires, lorsqu'ip lrendraitànouveau la
parole. Mais lorsqu'il s'est exprimé hier,il a omis de donner suite à ma suggestion. Il a
uniquement précisé à ce sujet queles faits avaienteu lieu avant 1962(CR200113,p. 25,par. 18). ,
5. Pourquoi cette année est-elle importante ? Parce qu'actuellement, les Philippines la
présententavecdéterminationcomme la date à laquelleellesont acquis letitre sur leNord-Bornéo. *
CommeM.Magallonal'explique : «le titre des Philippines sur le Nord-Bornéo se fondesur la cession de certains
territoires au Nord-Bornéo effectuéear le Sultanatde Suluen faveur des Philippines.
Du point de vue juridique et logique, les Philippinesne pouvaient remettre en cause
les prétentions britanniquesrelativeà la souverainetésur le Nord-Bornéoqu'après
cette cession, effectuée en1962.))
Dans letexte de l'exposéde M. Magallona, le mot«après»dans la phrase ((aprèscette cession))est
en italiques(CR 200113, p.24-25'par. 16).
6. Monsieur le président,Madame et Messieurs de la Cour, avant d'entrer dans cettesalle
d'audience au débudt e cette semaine,il nefaisait aucundoute queje ne comprenaispas clairement
la nature de la revendication des Philippines sur le Nord-Bornéo. Je m'étaisbasé sur deux
documentsdes Philippinesrelatifsà l'affaire.
7. Le premier était la requête à fin d'intervention adresséepar les Philippines dans la
présenteinstance. Les phrases précisantla revendication des Philippines étaientles suivantes.
Premièrement :«LaRépublique des Philippinesarevendiquétant dans sa Constitution que danssa
législationla possessiondu Bornéo septentrional)).Aucunedate se rapportantàla Constitutionou
à la législation n'était mentionnéeD. euxièmement, ilétaitfait référence aux((droitsd'ordre
historique et juridique du Gouvernement de la République des Philippines)). Aucun de ces
élémentn se me porte à croire que la revendicationest relativement ancienne. On ne trouve nulle
part tracede ce que les Philippines appellentrésentl'élément déterminan àt,savoir la prétendue
cessionpar le sultande Suludatant de 1962seulement.
8. L'autre documentqui m'a guidéest celui quej'ai ici mêmeen main. Il s'agit d'un
exemplaire d'une publication officielledu Gouvernement des Philippines. Il est intitu:«La
revendicationdes Philippinesconcernantle Nord-Bornéo, volume1». Cet ouvrage a été imprimé à
Manille en 1963 par l'Imprimerie nationale. La Malaisie leciteà la page2 de ses observations
dans une note de bas de page portant le numéro2. Il fut remis à la Cour, lorsque lesdites
observationsfurent déposéesle 2 mai decetteannée.
9. Le premier document de cet ouvrage est un extrait du discours sur l'étatde la nation
prononcé le28janvier 1963devantle Parlementphilippinpar le président Macapagal.Il se trouve
dansvotre dossierbleu, sousla cote tab 3.l commencepar lesmots suivants «En matièrede politique étrangère, la décision la plus importanq tui ait été
prise l'année dernière est celle qui a conduit, le 22 juin, 1962, à soumettre
officiellement au Royaume-Uni la revendication philippine de souveraineté, de
juridiction et de patrimonialitésur le Nord-Bornéo,en qualitéde successeur du sultan
de Sulu.))
10. Cependant, comme le discours du président l'explique clairement plus loin, la t
revendication ne repose pas réellementsur la cession opérée en1962 par les héritiersdu sultan
de Sulu. Le président Macapagalpoursuit(etce passagea sonimportance)
((Contrairement auxallégationsde certains politiciens, cette initiative n'a pas
été précipitée. J'airsonnellement étudiéce dossier durant des années. En 1946, à
l'époqueoù j'étais enposte au ministèredes affaires étrangères,l'examen de ce
dossier- à l'occasionde lanégociationquinous a permisd'obtenir le rétablissement
de nos droitssur l'île desTortues-m'a conduità préconiserqu'il soit officiellement
fait étatde cetterevendication.))
Je contestecette affmation, cela s'estpassé seizeans avant que la cessionopérée pales héritiers
du sultan de Sulu ne soit invoquéecomme le fondement de la revendicationdes Philippines. Le
discoursdu présidentcontinuecommesuit :
«En 1948,alors quej'étais à l'ambassade des Philippinesà Washington,D.C.,
j'ai examiné cetterevendication avec un expert américain en droit anglo-saxonde
l'universitéGeorge Washington,qui l'aestimée fondée.))
C'étaiten 1948.
«En 1950, en qualitéde membre du Parlement philippin, j'ai présenté une
motion, qui a étévotée,tendant à ce que cette revendication soit officiellement
soumise. DevenuprésidentdesPhilippines, convaincu quecette revendicationest non
seulement légitime, maisaussi conforme à l'intérêdte la nation, je ne saurais me
soustraireàmon devoir d'appliquerla résolutionadoptéesurune base bipartisanepar
la Chambre des représentantsle 24 avril 1962 tendantà ce que le Nord-Bornéo soit
revendiquéimmédiatement ou ne le soitjamais.))
J'insistesur lestermes«ne le soitjamais)). Lamotionsusviséevotéeen 1950estjointe sous la cote
tab 13dans le dossierdes Philippinesremis le25juinà la Cour.
11. Excusez-moi, Monsieurle président,d'avoir utilisé cediscours ainsi que les documents
qui y sont annexésdans le volumeofficiel des Philippinespour démontrerla ferme conviction des
Philippines,àune date antérieureà la prétenduecession de 1962,qu'elles avaientun droit surle
Nord-Bornéo.Qui plus est, en dépitde toute l'importanceque les Philippinesdonnent aujourd'hui ?
3 6 à la prétendue cessionde 1962, nousn'avons en notre possessionaucun exemplaire du document
correspondant. Il n'a pas étjoint aux nombreux documentsofficiels annexés à la publication des
Philippines. 12.Monsieurle président, sije vousdois des excusespour avoir évoqué cette fois encoreun
élémenltiéau bien-fondéde la revendicationdes Philippines à ce stade avancédes plaidoiries, je
vous les présenteavec tout le respectqu'ilconvient. Cependant, la Cour comprendraparfaitement
les raisons qui me poussentà le fair:je cherche àétayer autantque possible ma thèse, à savoir
que la revendication des Philippines n'est manifestement pas défendableet qu'elle est pleine
d'incohérence. Je me permettrais de faire observer que la Cour doit faire preuve d'une grande
prudence dans l'appréciation des((prétendusdroits historiques et juridiques)) des Philippines.
Sinon,onpourraitluireprocher d'accepter commeobjet valable de la requête présentp éar cetEtat
lapréservationdesditsdroits quià toutesfinspratiques, nesontpas clairement fondés.
13. Cette analyse a d'autant plus depoids car, si l'onécarte l'allégation selon laqueslle
Philippines n'auraientpas eu consciencede leur droit avant 1962, iln'en reste pas moinsqu'entre
1946et 1962,elles auraientpu présenterleur position la Cour, maisqu'ellesne l'ont pasfait. Le
conseil des Philippines n'a pas abordécet aspect de la question. De même, ajouterai-je
incidemment,la grande incertitudequi porte surla date laquelle est apparuela revendicationdes
Philippinesne constitue pas le seul exemple de la grave incohérencequi entache l'approche dela
question du Nord-Bornéopar les Philippines. Le 4 août 1977, le présidentdes Philippines de
l'époque,lors d'une réuniondes chefs d7Etatde I'ANASE, a solennellementaffmé avec toute
l'autorité attachéesa charge éminente,que les Philippinesprendraient des mesures formellespour
renoncer à leur revendication sur le Sabah. Permettez-moide lire le passage pertinent suivant,
extraitdu discoursfigurantdans le dossierdesjuges sousla coteub4 :
((Permettez-moid'ajouter,en guise de remarque finaleet pour clore la liste des
vŒuxque je forme, qu'il est peut-êtretemps de rappeler la nécessité, ainsi que dans
tout effort de coopération, de consentir des sacrificespour permetàrI'ANASEde
progresser et de se renforcer et l'obligationpour toutes les nations sans exception de
contribuerà ces efforts communspour assurer la réussite deI'ANASE. Avant que
cette associationpuisse attendredu monde extérieurun comportementéquitable,juste
et impartial, nousdevons faire régnerl'ordre, lajustice et l'éqentre nous. C'est
pourquoi pour contribuer sincèrementà l'avenir de I'ANASE,je tiens àfaire savoir
que le Gouvernement de la République desPhilippines prend actuellement des
mesures formelles pour faire disparaîtreun des fardeaux de 17ANASE, à savoir la
revendication de la Républiquedes Philippines sur le Sabah. Nous espérons ainsi
favoriserà titre permanent l'unité,la force et la prospérité deI'ANASE dans son
ensemble.)) 14.Il faut donc déplorerque cette promessedu 4 août 1977n'ait apparemmentpasété tenue,
puisqu'elleest contreditedans les faits par la requêtequi fut déposée le13mars 2001. Je ne puis
conclure sans mentionner la désinvolture avec laquelleles Philippines ont essayé d'éludelre fait
importantque le rattachement du Nord-Bornéo à la Fédérationde Malaisie n'a étéque l'exercice
par la population de ce territoire de son droit spécifique et délibàrl'autodétermination. La
confirmationpar le Secrétairegénéral desNationsUnies de l'acte d'autodéterminatione peutêtre
écartée(comme les Philippinesessaientde le faire), en la qualifiantde simple ((confirmationparla
communauté internationalede l'identité politique dela Malaisie)).Il s'agissait de l'approbation
internationalede la solution apportéeau problème spécifiqudu futu rouvernementdu peupledu
Nord-Bornéo.Elle excluait la souverainetéde tout autre pays. Elle ne pouvaitpas être considérée
comme un argument «non pertinent)). L'autodéterminationest un fait qui détermine la
souveraineté,que le souverain original le veuille ou non. La nouvelle souverainetéen découleet
même feu mon père (que M.Magallona a eul'amabilitéde citer)n'en auraitpas disconvenu. Il est
inconcevabled'attacherde l'importance aux ambitionsdeshéritiersabsents d'un ancien souverain,
qui sont en contradictionavec la volonté clairementexprimée,établie delonguedate et reconnue,
de la population.
15. Commej'en arrive à ma conclusion,je me dois de poser la question suivante:quelles
sont les limites de l'intervention,si la Cour admet la présenterequêtedes Philippinesl existe
réellementun danger que, si la Cour accepte la thèse des Philippines,laportéede l'article62 aura
fait l'objet d'une interprétationtellement large que ledit article pourra s'appliquer mêmeaux
questionsqui relèventde l'article3 et que le recourà ce dernier article deviendra inutile. Pour
autant que des traitésprétendument pertinentssoient concernés,n Etat pourrait faire valoir son
point devue aux termes de l'article 62, sans qu'il ne doive devenirpartie. Pourquoi, dansce cas,
devrait-il invoquerl'articleet êtreliépar l'arrtui seraitrendu sur le fo?d
16. De façon généralel,a condition fondamentale du consentement sur laquelle se fonde
l'exercice dela juridiction de la Cour en serait fortement affaiblie. Les paàtun compromis
craindraientque la descriptionprécisede laquestion qui les opposeainsi que leurvolontéderégler
entre elles cette question, et non une autre, ne soient mises en échecparterventioninattendue
d'un autre Etat, motivéepar une question marginale et éventuellement inopportune. Dans l'appréhensiond'un tel risque, les Etats seraient obligésd'examiner soigneusement s'ilest
davantage dans leur intérêt des'adresserà la Cour, qui applique une interprétation large dela
possibilitéd'intervention,ou de recourirn arbitragead hocsansrisque d'intervention.
3 8 17.Après avoirexposébrièvement laquestion queje me pose avec inquiétudej,'en arrive à
la fin de mon intervention. Monsieur le président,je vous serais reconnaissant de bien vouloir
donner la parole à S. Exc. M. Tan Sri Abdul Kadir Mohamad, agent du Gouvernement de la
Malaisie,pour présenter succinctementlesconclusionsde l'argumentation de la Malaisie.
Le PRESIDENT :Je vous remercie, Monsieurle professeur. Je donne maintenantlaparolà
Son Excellence Tan SriAbdulKadir Mohamad,agent de laMalaisie.
M. MOHAMAD :Monsieurleprésident, MadameetMessieurs les Membresde la Cour,
1. Dans mes observations préliminairesdu mardi 26 juin 2001, j'ai respectueusement
demandé à cette Cour de rejeter la requàtfin d'interventiondes Philippinesafin d'examiner,le
moment venu,le fond du différend bilatéraqlui oppose la Malaisieet l'Indonésie,sans qu'un tiers
faisant valoir une revendication distincteet indépendantede la question de la souveraineté sur
Ligitanet Sipadanpuisse l'enécarter.
2. Les plaidoiries de l'agent et des conseils des Philippinesque nous avons tous entendues
cette semainen'étaientpour la plupartque des tentatives mal déguiséde détournerl'attention de
la Cour duvéritableobjetde la présenteaffaire. Si laura invitéles Partieàcomparaîtredevant
elle durant cette semaine d'audiences, c'est pouPleur permettre d'exposer leurs arguments
favorables ou contraires la requêteà fin d7interventio;ides Philippines en l'affaire reàalave
Souverainetésur Pulau Ligitan etPulau Sipadan (Indonésie/Malaisie) et non pour y entendre
l'exposéde la revendicationdes Philippinessur le Sabah.
3. Si nous pouvonsnous fier aux interventionsde la délégatides Philippinestout au long
de cette semaine,je me risquea prédirequ'elles serontréitéréàsl'identique dansl'hypothèseoù
la Cour autoriseraitles Philippinesntervenirau stade de l'examenau fond du différend opposant
laMalaisieet l'Indonésie. C'est, crois, ce que la Cour souhaiteraéviter. 4. C'est pourquoije demande respectueusement à cette Cour de priver les Philippinesdu
privilègequ'elles ne méritentpas de participertoute étape ultérieuree la présente procédureet
de rejeter leur requête fin d'intervention. Tout bien considéré,t comme elles le reconnaissent
elles-mêmesl,es Philippinesn'ont aucunintérêt d'ordre territorislr lesîles de Ligitanetpadan
qui constituentleseul objetde cette affaire.
5. Avant d'en terminer, permettez-moi Monsieur le présidentde vous signaler très
brièvement uneerreur fort fâcheusequi s'estglissée dans une citation extrde ma déclaration de
mardi dernier. En effet,se référantlaMalaisie,M.Reisman aaccusésonagent d'avoir ((annoncé
3 9 en audience publiqueque saproprepositionn'étaitpasnégociable)( )CR200113,p. 12,par.4) alors
que j'ai déclaré au nom de la Malaisie que : ((L'avenir du peuple du Sabah [n'était]pas
négociable»,commel'indique d'ailleurslecompte-rendu(CR200112,page44, par. 20).
6. Monsieurle président,Madameet MessieurslesMembresde la Cour,notre délégation est
très satisfaite d'avoir étéinvitéecomparaîtredevant la Cour pour y exposer la position de la
Malaisie sur la requêteà fin d'interventiondes Philippines enl'affaire relatàvla Souveraineté
sur Pulau Ligitan et Pulau Sipadan (Indonésie/Malaisie).Je voudrais remercierla Cour de nous
avoir si patiemment écouté en nop slaidoiries.J'en termine en réitérantformellement notre
demandetendant au rejetde larequête desPhilippines. Mercibeaucoup.
The PRESIDENT: Thankyou very much. Thank you, Mr. Kadir. That concludes the
second round of Malaysia's oral argument.The Courttakes note of the final submissionswhich
you have read on behalf of Malaysia,as it did this moming forthe final submissionspresentedby
Mr. Wirajuda, Agent of Indonesia, and yesterday for those of the Philippines presented by
AmbassadorBello.
This brings us to the end of thisriesof hearings devotedto the Application forpermission
to intervene submitted bythe Republic ofthe Philippinesin the case conceming Sovereigny over 1
Pulau Ligitan and PulauSipadan (Indonesia/Malaysia). 1should liketo thank the Agents, counsel
?
and advocatesfor theirkindassistancetothe Courtandfor the spirit of courtesyand mutualrespect
displayed by them throughout these hearings. In accordancewith practice,1will askthe Agentsto remainavailableto the Court in case it
should require any further information. With this proviso, 1 now declare closed the oral
proceedings on the Application by the Philippines for permission to intervene in the case
concerningSovereigns,overPulauLigitanandPulauSipadan(IndonesidMalaysia).
The Courtwill nowretireto deliberate. The Agentsof the Partiesand ofthe Philippineswill
be notifiedin duecourseofthe dateon whichthe Courtwill renderits decision.
As the Courthas no otherbusinessbeforeit today,the hearingis closed.
TheCourtroseut 11.35a.m.
Traduction