Exposé écrit de l'Egypte (traduction du Greffe)

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Note adressée à la Cour internationale de Justice par l’ambassade de
la République d’Egypte à La Haye, le 16 avril 2009

[Traduction]

L’ambassade de la République arabe d’Egypte à La Haye présente ses compliments à la
Cour internationale de Justice et, suite à la note de celle-ci no133310, en date du 20 octobre 2008,
relative à la requête de l’Assembl ée générale pour un avis juridique sur la conformité avec le droit

international de la déclarati on d’indépendance des institutions provisoires d’administration
autonome du Kosovo, et vu que la Cour internationa le de Justice a jugé les NationsUnies et ses
Etats Membres susceptibles de fournir des renseignements sur la question, fixant à cet effet un délai
expirant le 17avril2009, a l’honneur de transm ettre sous ce pli l’exposé écrit de la République

arabe d’Egypte sur la dite question.

L’ambassade de la République arabe d’Egypte à La Haye saisit cette occasion pour

renouveler à la Cour internationale de Justice les assurances de sa très haute considération.

Veuillez agréer, etc.

___________ EXPOSÉ ÉCRIT DU G OUVERNEMENT DE LA RÉPUBLIQUE ARABE D ’EGYPTE

[Traduction]
T ABLE DES MATIÈRES

pages

Première partie. Introduction...........................................
.................................................................. 2

A. Aperçu général........................................................................
................................................. 2

B. Portée de la demande........................................................................
........................................ 2

C. Intérêts de la République arabe d’Egypte dans la requête présentée à la Cour........................ 3

D. Structure, plan et bases du présent exposé écrit....................................................................... 3

Deuxième partie. Compétence et recevabilité........................................................................
........... 3

A. L’Assemblée générale est compétente pour demander un avis consultatif sur la
question posée........................................................................
.................................................. 3

B. La Cour est compétente pour donner un avis juridique sur la question posée ......................... 4

C. Conclusion........................................................................
........................................................ 5

Troisième partie. Le principe de l’intégrité territoriale des états ...................................................... 6

A. Aperçu général........................................................................
................................................. 6

B. Chartes des autres organisations internationales...................................................................... 7

C. Résolutions et autres documents pertinents de l’Assemblée générale...................................... 8

D. Mesures adoptées par le Conseil de sécurité........................................................................
.... 9

E. Conclusion........................................................................
...................................................... 10

Quatrième partie. Le droit à l’autodétermination........................................................................
.... 11

A. Aperçu général........................................................................
............................................... 11

B. Résolutions et documents pertinents a doptés à l’intérieur du système des Nations
Unies........................................................................
.............................................................. 13

C. Les tribunaux et le droit à l’autodétermination ...................................................................... 14

D. Conclusion ........................................................................
..................................................... 15

Cinquième partie. Résumé et conclusions........................................................................
............... 16

A. Résumé........................................................................
........................................................... 16

B. Conclusions........................................................................
.................................................... 16 - 2 -

P REMIÈRE PARTIE

INTRODUCTION

A. Aperçu général

1. Par sa résolution63/3, du 8octobre2008, l’Assemblée générale des NationsUnies a

demandé à la Cour internationale de Justice un avis consultatif sur la légalité au regard du droit
international de la déclara tion unilatérale d’indépendance des institutions provisoires
d’administration autonome du Kosovo.

2. Le greffier de la Cour internationale de Justice a notifié à la République arabe d’Egypte

(ci-après «l’Egypte») l’ordonnance de la Cour du 17octobre2008 relative à la requête de
l’Assemblée générale pour avis consultatif, en l’informant que la Cour avait décidé que
l’Organisation des NationsUnies et ses Etats Me mbres étaient jugés susceptibles de fournir des

renseignements sur la question soumise à la Cour . La Cour a fixé au 17avril2009 la date
d’expiration pour la présentation d’exposés écrits et au 17juillet suivant le délai pour la
présentation d’observations écrites sur les exposés écrit
s d’autres Etats.

3. Le présent exposé est soumis conformément à l’ordonnance de la Cour.

B. Portée de la demande

4. La requête de l’Assembl ée générale vise à ce que la Cour détermine, par un avis
consultatif, la mesure dans laquelle la déclaration unilatérale d’indépendance est conforme au droit
international.

5. Par sa résolution 63/3, l’Assemblée générale a décidé, conformément à l’article96 de la

Charte des NationsUnies (ci-après «la Charte d es Nations Unies») de demander à la Cour, en
application de l’article 65 de son Statut, de donner un avis consultatif sur la question suivante : «La
déclaration unilatérale d’indépendance des institu tions provisoires d’administration autonome du
1
Kosovo est-elle conforme au droit international ?»

6. L’Assemblée générale a agi en «[t]enant compte des buts et principes des Nations Unies» 2

et en se déclarant «consciente que cet acte» avait «suscité des réactions diverses de la part des
Membres de l’Organisation des Nations Unies…» . 3

7. Dès lors la requête pour avis consultatif est limitée aux questions juridiques relatives à la
légalité de la déclaration unilatéra le au regard des règles et princi pes applicables en vertu du droit

international. Dans le passé la Cour a indiqué qu’elle «doit déterminer les principes et règles
existants, les interpréter et les appliquer…a pportant ainsi à la question une réponse fondée en
droit» .

1Voir la résolution A/RES/63/3 de l’Assemblée générale des Nations Unies.
2
Ibid.
3
Ibid.
4Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, C.I.J. Recueil 1996, p. 234. - 3 -

C. Intérêts de la République arabe d’Egypte dans la requête présentée à la Cour

8. L’Egypte est un Membre originaire des Na tionsUnies, de la Ligue des Etats arabes
(ci-après «la Ligue arabe»), de l’Organisation de l’unité africaine (ci-après «l’OUA»), à laquelle a
succédé en2000 l’Union africaine (ci-après «l’U A») et de l’Organisation de la conférence
islamique (ci-après «l’OCI»). L’Egypte prend une part active aux processus de paix et aux

règlements politiques, aux niveaux aussi bien régionaux qu’internationaux.

9. En raison de la particularité des faits spécifiques afférents à la matière sur laquelle porte la

présente requête pour avis consultatif, ainsi que de l’application du principe de l’intégrité
territoriale à la lumière du droit à l’autodétermination, l’Egypte attribue la plus haute valeur à la
détermination par la Cour de la portée et des limites de l’application de ces principes aux
problèmes issus de la spécificité des circonstances qui entourent la question de la légalité de la

déclaration unilatérale d’indépendance du Kosovo.

D. Structure, plan et bases du présent exposé écrit

10. Le présent exposé écrit est soumis en réponse à des communications reçues du greffier
de la Cour conformément au paragraphe 1 de l’article 66 du Statut de la Cour.

11. Pour la préparation du présent exposé on a tenu dûment compte des dispositions du
paragraphe 1 de l’article 8 du Statut de la Cour.

12. En plus de son introduction, l’exposé écrit est divisé en quatre parties. Dans la deuxième
partie de l’exposé il est démontré qu’aussi bien l’Assemblée générale que la Cour sont compétentes
en l’espèce et que la requête est recevable. Dans la troisième partie il est démontré que le respect
de l’intégrité territoriale est prescrit par une normde droit international, affirmé dans plusieurs

traités internationaux, y compris la Charte des Nations Unies. La troisième partie traite aussi de
certains principes fondamentaux relatifs à cette norme , à la lumière de pratiques sur lesquelles la
communauté internationale a fréquemment mis l’accent. La quatrième partie est consacrée au droit
à l’autodétermination, qu’elle aborde sous ses divers aspects. La cinquième partie résume ce qui

précède et présente les conclusions de l’Egypte.

D EUXIÈME PARTIE

COMPÉTENCE ET RECEVABILITÉ

A. L’Assemblée générale est compétente pour demander un avis consultatif

sur la question posée

13. Aux termes du paragraphe1 de l’article 96 de la Charte des Nations Unies,
«[l]’Assemblée générale ou le Conseil de sécurité peut demander à la Cour internationale de Justice
un avis consultatif sur toute question juridique». Conformément à cet article, l’Assemblée générale

a demandé à la Cour un avis consultatif sur une question juridique.

14. Comme il ressort de son libellé, l’avis juridique demandé a pour objet la conformité au

droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance, ce qui est, par définition, une
question juridique. - 4 -

5
15. Dès lors la demande de l’Asse mblée générale est valable, tant ratione personae que
ratione materiae , en conformité avec le paragraphe 1 de l’article 6 de la Charte des Nations Unies.

16. Il s’ensuit que l’Assemblée générale possède la compétence n écessaire pour demander

l’avis consultatif en question et a donc agi dans les limites de ses attributions.

B. La Cour est compétente pour donner un avis juridique sur la question posée

17. Aux termes du paragraphe 1 de l’article 65 de son Statut : «La Cour peut donner un avis

consultatif sur toute question juridique, à la dema nde de tout organe ou institution qui aura été
autorisé par la Charte des Nations Unies ou conformément à ses dispositions à demander cet avis.»

18. A cet égard, la Cour a établi des critères et fait observer, plus d’une fois, que :

«pour que la Cour ait compétence, il faut que l’avis consultatif soit demandé par un
organe dûment habilité à cet effet conformé ment à la Charte, qu’il porte sur une

question juridique et, sauf dans le cas de l’Assemblée générale ou du Conseil de 7
sécurité, cette question se pose dans le cadre de l’activité de cet organe» .

19. Dans certains cas on a pu prétendre que la question posée n’était pas tout à fait claire.
Mais à cet égard la Cour a déclaré que: «le manque de clarté dans le libellé d’une question ne

saurait priver la Cour de sa compétence. Tout au plus, du fait de ces incertitudes, la Cour
devra-t-elle préciser l’interprétation à donner à la question, ce qu’elle a souvent fait.» 8

20. La Cour a pouvoir discrétionnaire pour donner des avis consultatifs sur des questions
juridiques que lui soumettent des organes dûmen t «autorisés» des NationsUnies ou d’autres

organisations internationales. En l’espèce, les conditions applicables, à savoir l’existence d’«une
question juridique» et d’un «organe autorisé», sont réunies.

21. Toutefois la Cour a résumé sa pratique relative à l’exercice du pouvoir en question de la

manière suivante : «La Cour a déclaré à maint es occasions qu’une réponse à une requête pour avis
consultatif ne devrait pas, en principe, être re fusée et que seules des raisons décisives pourraient
motiver un refus.» 9

22. Le fait que la question posée pourrait mettre en jeu des considérations politiques ne doit

pas empêcher la Cour de donner son avis consultatif. La Cour a affirmé que :

5 L’Assemblée générale est habilitée à demander un avis consultatif.

6 La requête de l’Assemblée générale a pour objet une question juridique.

7 Demande de réformation du jugement n 273 du Tribunal administratif des Nations Unies, C.I.J. Recueil 1982,
p. 33 et suiv.

8 Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire paestinien occupé, C.I.J.Recueil2004 ,
p. 153 et suiv.
9 o
Demande de réformation du jugement n 158 du Tribunal administratif des Nations Unies, C.I.J. Recueil 1973,
p. 183 et suiv. - 5 -

«En fait, lorsque des considérations pol itiques jouent un rôle marquant il peut
être particulièrement nécessaire à une orga nisation internationale d’obtenir un avis
consultatif de la Cour sur les principes juridiques applicables à la matière en
10
discussion…»

Par ailleurs la Cour a déclaré que :

«On a fait valoir que la question posée à la Cour touche à des questions d’ordre
politique et que, pour ce motif, la Cour doit se refuser à donner un avis. Certes la
plupart des interprétations de la Charte des NationsUnies présentent une importance

politique plus ou moins grande. Par la na ture des choses, il ne saurait en être
autrement. Mais la Cour ne saurait attr ibuer un caractère politique à une requête qui
l’invite à s’acquitter d’une tâche essentiellement juridique.» 11

23. L’avis juridique que l’on demande à la Cour de donner en l’espèce sera de grande valeur,

car il facilitera la compréhension des principes de droit international relatifs à des concepts qui
pourraient sembler s’y opposer, particulièrement à la lumière de la matière dont il s’agit. De plus
l’avis juridique aurait pour résultat de réduire les controverses sur des problèmes en rapport avec la

question posée. La Cour a observé que :

«La fonction de la Cour est de donner un avis fondé en droit, dès lors qu’elle a

abouti à la conclusion que les questions qui lui sont posées sont pertinentes, qu’elles
ont un effet pratique à l’heure actuelle et par conséquent elles ne sont pas dépourvues
d’objet ou de but.» 12

24. Conformément à ce dictum , la Cour doit faire droit à la requête de l’Assemblée générale

pour un avis juridique, car la question que pose la résolution 63/3 n’est pas seulement pertinente :
elle aura un effet pratique à l’heure actuelle.

C. Conclusion

25. Eu égard au jeu conjoint du paragraphe 1 de l’article 96 et de l’article 65 de la Charte des

Nations Unies et du Statut de la Cour, respectivement, et pour les raisons qui ont été indiquées dans
cette partie de l’exposé écrit, on doit conclure que l’Assemblée générale possède la compétence
nécessaire pour demander à la Cour un avis juridique sur l’objet de la requête dont il s’agit et que la

Cour possède la compétence nécessaire pour donner un avis juridique sur la question qui lui est
posée.

10
Interprétation de l’accord du 25 mars 1951 entre l’OMS et l’Egypte, C.I.J Recueil 1980, p. 87.
11 Certaines dépenses des NationsUn ies, avis consultatif (articl17, paragraphe2 de la Charte),

C.I.J Recueil 1962, p. 155.
12Sahara occidental, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1975, p. 37. - 6 -

T ROISIÈME PARTIE

L E PRINCIPE DE L ’INTÉGRITÉ TERRITORIALE DES ÉTATS

A. Aperçu général

13
26. On s’accorde à considérer que le territoire est un des critères de l’Etat . Sa
détermination n’est pas, pour autant, chose aisée 14. A cet égard, le territoire constitue, sans

préjudice des deux autres éléments de l’Etat, un élément intégral qui détermine les sphères
d’influence à l’intérieur desquelles les Etats exercent leur juridiction exclusive . 15

27. La Cour internationale de Justice a déjà eu à se pencher sur des questions concernant des

territoires, et ce de manière à mettre directement en cause l’intégrité territoriale. Il est à noter que
des territoires sur lesquels l’Etat exerce une juridiction exclusive ont été l’objet d’un certain

nombre d’arrêts de la Cour. La Cour a fait observer que «[l]e fait qu’un Etat ne peut prouver
l’exercice de sa souveraineté sur une telle partie de son territoire ne saurait être interprété comme
démontrant l’inexistence de cette souveraineté» 16. En outre, il n’y a pas d’homogénéité au regard

des circonstances dans tous les cas et les situations, qui puisse se traduire par des normes unifiées
dans cette mesure , et, comme l’a fait observer la Cour, «l e droit international admet des degrés

variables de manifestation de l’autorité ét atique, selon les circonstances propres à chaque
espèce» .18

28. Il s’ensuit que le principe de l’intégrité territoriale des Etats a été retenu comme principe

fondamental du droit international coutumier. Et avec l’adoption de la Char te des Nations Unies,
tous les Etats Membres des Nations Unies ont été assujettis à l’obligation de le respecter 19. Dès
20
lors ce principe est une pierre angulaire des relations internationales .

29. C’est ainsi que la communauté internati onale a constamment affirmé, par le biais
d’instruments juridiques, de résolutions et de pra tiques, son engagement au maintien et au respect

de la souveraineté, de l’intégrité territoriale, de l’unité nationale et de l’indépendance des Etats.

30. Il faut noter aussi, toutefois, qu’il es t des circonstances exceptionnelles dans lesquelles
l’intervention de la part de la communauté internationale serait autorisée, à savoir quand il s’agit de

matières rentrant dans la compétence du Conseil de sécurité, auquel a été conférée la responsabilité 21
principale du maintien et du rétablissement de la paix et la sécurité internationales . Dans

13Voir l’article premier de la convention de Montevideo sur les droits et les devoirs des Etats, 26 décembre 1933,

Société des Nations, Recueil des traités, vol. CLXV, p. 9.
14Voir, d’une manière générale, J. Crawford, The Creation of States in International Law, 2 éd., 2006.

15Voir, d’une manière générale, R. Y. Jennings et A. D. Watts, dir. publ., Oppenheim’s International Law, 9 éd.,
(1992).

16Affaire relative à la Souveraineté sur Pedra Branca/Pulau Batu Puteh, Middle Rocks et South Ledge (Malaisie

c. Singapour), arrêt du 23 mai 2008, par. 67, disponible à l’adresse : http://www.icj-cij.org/docket/files/130/14491.pdf.
17Ibid.

18Ibid.

19Voir l’article 53 de la convention de Vienne sur le droit des traités, 1969.
20
Voir D. W. Bowett, Self-Defence in International Law, p. 29 et suiv, 1958.
21
Voir la note 35 et le texte s’y rapportant, infra. - 7 -

l’exercice de ses pouvoirs, au titre des chapitres VI, VII ou VIII de la Charte des Nations Unies, le
Conseil de sécurité ne peut pas agir en dép assant ses compétences, violant ainsi des principes
intrinsèques établis par la Charte des Nations Unies. Dès lors aucune mesure ne peut ipso jure

avoir des conséquences ex post autres que celles en vue desquelles elle a été, ex ante, prévue.
Autrement dit, tout mandat comportant la réalisa tion d’opérations ne doit p as, sur le terrain, aller
au-delà de la portée et des limites fixées.

B. Chartes des autres organisations internationales

31. Depuis l’ère de la Société des Nations, le principe en question a trouvé sa place dans les
traités par lesquels des organisations internationales ont été créées. Le Pacte de la Société des

Nations a tenu compte des principes de l’intégrité te rritoriale et de l’indépendance. C’est ainsi que
l’article10 du Pacte disposait: «Les membres de la Société s’engagent à respecter et à maintenir
contre toute agression extérieure l’intégrité territo riale et l’indépendance politique présente de tous

les membres de la Société.»

32. Il convient de noter que la Charte des Na tions Unies consacre «le principe de l’égalité
souveraine de tous ses Membres» et leur fait ob ligation de s’abstenir «dans leurs relations
internationales, de recourir à la menace ou à l’emploi de la force … contre l’intégrité territoriale et
22
l’indépendance politique de tout Etat…» , ce qui constitue un principe fondamental de
l’Organisation.

33. Avant même la création des NationsUnies, l’article5 du pacte de la Ligue arabe
disposait : «Il est interdit de recourir à la force pour le règlement des conflits pouvant surgir entre

des Etats-membres de la Ligue…[s]’il s’élève entre eux un différend ne touchant pas à
l’indépendance, à la souveraineté ou à l’intégrité territoriale…» 23 Il est donc clair que, ayant à
l’esprit le caractère incontestable de ces princip es, les Etats Membres se sont obligés à respecter

pleinement l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale.

34. Les chartes d’organisations régionales con tiennent également des articles qui de manière
explicite rendent obligatoire le respect de l’intégrité territoriale. Parmi elles on peut citer la charte
de l’OUA , à laquelle a succédé l’UA en 2000, et la charte de la OCI . 25

22
Voir le paragraphe 4 de l’article 2 de la Charte des Nations Unies.
23
Nations Unies, Recueil des traités, vol. 70, p. 237.
24 L’article III de la charte de l’OUA disposait que :

«Les Etats Membres, pour atteindre les objectifs énoncés à l’articleIaffirment solennellement
les principes suivants :

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3. Respect de la souveraineté et de l’intégrité terrriale de chaque Etat et de son droit inaliénable à
existence indépendante.»

25 Voir les articles 1 et 2 de la charte de l’organisation. - 8 -

C. Résolutions et autres documents pertinents de l’Assemblée générale

35. En s’occupant du processus de décolonisation, les NationsUnies ont tenu compte de
26
l’importance du respect de l’intégrité territoriale des Etats . A cet effet, la déclaration sur l’octroi
de l’indépendance aux pays et aux peuples coloni aux a disposé avec clarté que : «[t]oute tentative

visant à détruire partiellement ou totalement l’unité nationale et l’in tégrité territor27le d’un pays est
incompatible avec les buts et les principes de la Charte des Nations Unies» .

36. Dans sa résolution2625 (XXV), l’Assemblée générale a mis en relief le respect de

l’intégrité territoriale en déclarant que : «[tout] Et at doit s’abstenir de toute action visant à rompre 28
partiellement ou totalement l’unité nationale et l’intégrité d’un autre Etat ou d’un autre pays» .

37. S’agissant du droit au développement, l’ Assemblée générale a adopté une résolution

contenant une disposition comparable: «Les Etats prennent des mesures décisives p29r
éliminer…les menaces contre la souveraineté nationale et l’intégrité territoriale…» .

38. Dans la résolution qu’elle a adoptée rela tivement au cadre d’action pour la décennie

internationale de la prévention des catastrophes natu relles, l’Assemblée générale a disposé, d’une
manière parfaitement claire, que: «la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’unité nationale des
Etats doivent être pleinement respectées en conformité avec la Charte des Nations Unies…» . 30

39. La31onférence mondiale sur les droits de l’homme tenue à Vienne a adopté une
déclaration contenant des principes fondamentaux de dro it international. Le but visé était la
promotion des droits de l’homme; mais il fut clairement disposé qu’à cet effet il fallait procéder
32
«conformément aux buts et principes de la Charte des Nations Unies et au droit international» .

40. Dans la déclaration du millénaire, les chef s d’Etat et de gouvernement ont réaffirmé leur
«volonté de tout faire pour assurer l’égalité souvera ine de tous les Etats [et] le respect de leur
33
intégrité territoriale et de leur indépendance politique» . Le résultat du sommet2005 va dans le
même sens . 34

26Voir, par exemple, la déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux,
résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale (ci-après «déclaration sur la décolonisation»), et la déclaration relative aux
principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les Etats conformément à la Charte

des Nations Unies, résolution 2625 (XXV) de l’Assemblée générale (ci-après «déclaration sur les relations amicales»).
27Ibid.

28Voir la déclaration sur les relations amicales.

29Voir la déclaration sur le droit au développement, résolution 41/128 de l’Assemblée générale, article 5.

30Voir Renforcement de la coordination de l’aide hum anitaire d’urgence de l’Organisation des NationsUnies,
résolution 46/182 de l’Assemblée générale (les italiques sont de nous).

31Déclaration et programme d’action de Vienne, Nations Unies, doc. A/C ONF.157/23 (ci-après «déclaration de
Vienne»).

32Voir ibid, par. 7.
33
Voir la déclaration du millénaire, résolution 55/2 de l’Assemblée générale, par. 4.
34
Voir document final du sommet mondial de 2005 (résolution 60/1 de l’Assemblée générale), par. 5. - 9 -

41. C’est ainsi que dans ses documents et pratiques pertinents l’Assemblée générale a
affirmé le respect de l’intégrité territoriale des Etats.

D. Mesures adoptées par le Conseil de sécurité

42. La Charte des Nations Unies attribue explicitement au Conseil de sécurité un rôle majeur
en ce qui concerne le maintien de la paix et la sécurité internationales: «Afin d’assurer l’action
rapide et efficace de l’Organisation, ses Membres confèrent au Conseil de sécurité la responsabilité
35
principale du maintien de la paix et de la sécurité internationale…»

43. Dans l’accomplissement de ses devoirs, le Conseil peut juger nécessaire d’adopter des
résolutions impliquant une intervention dans la compétence nationale d’un Etat ou d’une région,
comme le prévoient les principes énoncés au paragraphe7 de l’article2 de la Charte, aux termes

duquel :

«Aucune disposition de la présente Charte n’autorise les NationsUnies à

intervenir dans des affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale
d’un Etat ni n’oblige les Membres à soumettre des affaires de ce genre à une
procédure de règlement aux termes de la pr ésente Charte; toutefois ce principe ne

porte en rien a36einte à l’application des mesures de coercition prévues au
chapitre VII» .

37
44. Néanmoins toute intervention par laquelle le Conseil ne dépasse pas ses pouvoirs doit
être en conformité avec la Charte et le droit international.

45. En exerçant ses fonctions dans le domaine du maintien et du rétablissement de la paix et

de la sécurité, le Conseil a toujours témoigné de son attachement au respect de l’intégrité
territoriale des Etats. On a fait noter, dans le même ordre d’idées, qu’aucune disposition de la
Charte, particulièrement une lex specialis, ne peut conduire à des résultats différents. C’est ainsi

que l’on s’accorde à reconnaître que les missions autorisées par les organes des Nations Unies, y 38
compris le Conseil de sécurité, sont des organismes qui agissent de bonne foi et avec neutralité .

46. La situation au Darfour, en tant que partie du territoire du Soudan, a donné lieu à de
longs débats et a fait l’objet de plusieurs résolutions, chacune desquelles contient des références au

respect de l’intégrité territoriale. Tel est le cas, en particulier, de la résolution 1556 (2004), soit la
résolution par laquelle, entre autres choses, a été approuvé le déploiement d’observateurs
internationaux. De même, dans la plupart des r ésolutions du Conseil relatives à la situation au

Darfour, on trouve l’expression d’un ferme attachem ent au respect de l’intégrité territoriale du
Soudan, ainsi que de la détermin ation de collaborer avec son gouvernement en plein respect de sa
souveraineté .39

35Article 24 de la Charte des Nations Unies.
36
Voir le paragraphe 7 de l’article 2 de la Charte des Nations Unies.
37
Voir les articles 41 et 42 de la Charte des Nations Unies.
38Voir la résolution du Conseil de sécurité 1134 (1997).

39Voir, par exemple, les résolutions du Conseil de sécurité 1590 (2005), 1769 (2007), 1828 (2008) et 1841
(2008). - 10 -

47. Pour ce qui est de la situation dans la République démocratique du Congo (ci-après la

«RDC») et dans la région des Grands Lacs, le C onseil a réaffirmé dans plusieurs de ses résolutions
correspondantes «son attachement au respect de la souveraineté, l’inté grité territoriale et
40
l’indépendance politique» de la RDC et de tous les autres Etats de la région . Les résolutions du
Conseil relatives au déploiement de la Mission des Nations Unies à la RDC (MONUC) contiennent
de même l’expression claire d’un attachement au respect de ces principes . 41

48. Les résolutions du Conseil relatives à l’Iraq ont également mis en exergue l’importance
du respect de l’intégrité de cet Etat . 42

49. En ce qui concerne les questions concer nant l’Afghanistan, le Conseil s’est déclaré

«résolument attaché à la souveraineté, l’indépendanc e, l’intégrité territoriale, et l’unité nationale»
du pays , et cela même dans les cas où il a autorisé une présence internationale . 44

50. Dans ses résolutions sur le Liban, le Conseil de sécurité a réitéré son «ferme
45
attachement…à l’intégrité territoriale, à la souveraineté et à l’indépendance politique» du pays
«à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues
…» 46

E. Conclusion

51. Le respect de l’intégrité territoriale est incontestablement un principe inviolable du droit

international. Il est, de plus, indissociable de la souveraineté et l’indépendance de l’Etat. Toutefois
la reconnaissance des territoires de l’Etat doit fair e l’objet d’un examen soigneux. A cet égard il

faut noter que, comme la Cour internationale de Justice l’a fait observer dans un certain nombres 47
d’affaires, «[c]haque cas particulier doit être apprécié à la lumière des circonstances de l’espèce» .

40Voir, par exemple, les résolutions du Conseil de sécurité 1756 (2007) et 1771 (2007); voir aussi les
résolutions du Conseil de sécurité 1316 (2000), 1493 (2003), 1565 (2004) et 1711 (2006).

41Voir, par exemple, la résolution du Conseil de sécurité 1804 (2008).

42Voir les résolutions du Conseil de sécurité 1500 (2003), 1546 (2004), 1557 (2004), 1619 (2005), 1700 (2006),
1770 (2007), 1790 (2007) et 1830 (2008).

43Voir la résolution du Conseil de sécurité 1267 (1999).
44
Voir, par exemple, les résolutions du Conseil de sécurité 1386 (2001), 1510 (2003), 1707 (2006), 1746 (2007)
et 1776 (2007).
45
Voir, par exemple, la résolution du Conseil de sécurité 1701 (2006).
46
Ibid. (les italiques sont de nous).
47
Voir les notes 16-18 et le texte s’y rapportant, supra. - 11 -

Q UATRIÈME PARTIE

L E DROIT À L AUTODÉTERMINATION

A. Aperçu général

52. Le droit à l’autodétermination a pris racine dans les instruments internationaux conclus
dans le sillage immédiat de la première guerre mondiale. L’ adoption du traité de Versailles
48
pourrait être considérée comme le premier pas su r la voie vers la codification de ce principe ,
réalisant ainsi les aspirations à l’autodétermination des peuples du monde.

53. Les différences de vues qui existaient sur la manière de concevoir le principe donnèrent

lieu à des désaccords sur la manière de le réaliser, ainsi que sur sa portée.

54. Avec l’adoption de la Charte des Nations Un ies, le droit à l’autodétermination devint un
des grands principes sur lesquels furent fondées les Nations Unies. C’est ainsi que la Charte reflète
clairement le caractère obligatoire du principe en énumérant parmi les buts de l’Organisation celui

de «[d]évelopper entre les nations des relations amicales fondées sur le r49pect du principe de
l’égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes …» . De même le respect
du principe s’avéra essentiel dans le courant de la coopération économique et sociale à l’intérieur

du système des Nations Unies, à l’égard de laquelle la Charte des Nations Unies dispose que : «[e]n
vue de créer les conditions de stabilité et de bien-être nécessaires pour assurer entre les nations des
relations pacifiques et amicales fondées sur le respect du principe de l’égalité des droits des
50
peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes…» .

55. La Charte des Nations Unies fournit également une base pour la protection des droits des
populations des territoires ne s’administrant pas encore complètement eux-mêmes; elle permet

d’asseoir la protection des droits fonda51ntaux des habitants de ces territoires, tant
individuellement que collectivement .

56. Selon le préambule de la déclaration universelle des droits de l’homme :

«les Etats Membres se sont e ngagés à assurer, en coopération avec l’Organisation des

Nations Unies, le respect universel et effectif des droits de l’homme et des libertés
fondamentales…une conception commune de ces droits et libertés est de la plus
52
haute importance pour remplir pleinement cet engagement» .

48
L’article 22 du Traité de Versailles constituaitversion primitive de ce qui allait évoluer de manière à
constituer, à un stade ultérieur, le droit intégral à l’autodétermination.
49
Voir le paragraphe 2 de l’article 1 de la Charte des Nations Unies (les italiques sont de nous).
50Voir l’article 55 de la Charte des Nations Unies (les italiques sont de nous).

51Voir l’article 73 de la Charte des Nations Unies.
52
Voir la déclaration universelle des droits de l’ho mme, résolution 217 A (III) de l’A ssemblée générale. On y
indique, clairement, que ces droits et libertés doivere observés tant parmi lespopulations des Etats Membres
eux-mêmes que parmi celles des territoires placés sous leur juridiction. - 12 -

57. Dans le domaine du droit international, le principe du droit à l’autodétermination a certes
53
évolué, au point d’ailleurs de parven ir au statut de droit coutumier . Toutefois il n’a pas été libre
de limitations et conditions. Le pacte international relatif aux droits civils et politiques (ci-après le

«PIDCP») contient, en tant qu’un des instruments qui codifient le droit international coutumier, des 54
dispositions qui protègent les droits des peuples ou des minorités dans des domaines divers . A
cet égard le droit à l’autodétermination se chevauch e avec d’autres droits, tant au niveau des droits
55
de l’homme individuels , qu’à celui, plus large, de la société dans son ensemble, englobant ainsi
les droits d’un «peuple» 56. Par conséquent le droit à l’au todétermination est actuellement un
57
«principe d’inclusion» à l’intérieur de la société; il est le droit de participer à la société, aussi
bien dans le domaine politique que dans d’autres . 58

58. L’acte final de la conférence sur la sécur ité et la coopération en Europe a également mis

en relief le besoin d’observer le principe de l’autodétermination. Il a ainsi déclaré que :

«Les Etats participants resp ectent l’égalité de droits des peuples et leur droit à
disposer d’eux-mêmes, en agissant à tout moment conformément aux buts et aux

principes de la Charte des Nations Uni es et aux normes pertinentes du droit 59
international, y compris celles qui ont trait à l’intégrité territoriale des Etats.»

59. Le droit à l’autodétermination est «imprescriptible et inaliénable» 60. Et il est accepté
61
comme tel par la communauté internationale . Mais l’exercice de ce droit est dynamique. Il
englobe d’assez nombreuses options diverses qui pre nnent en considération d’autres principes de
droit international coutumier, auxquels elles apportent leur appui.

60. Au niveau international on a reconnu que le droit à l’autodétermination ne permet pas
d’interpréter le principe comme garantissant automatiquement de droits d’accès au statut d’Etat ; il
62
tend vers une interprétation plus large qui englobe les droits des peuples et des Etats .

53Conséquences juridiques pour les Etats de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest

africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité, C.I.J Recueil 1971 , p. 276 (opinion individuelle de
M. Ammoun, vice-président).
54
Voir l’article 27 du PIDCP.
55
Ibid.
56Le paragraphe 3 de ’article 1 du PIDCP est identique au paragraphe 3 de l’article 1 du pacte international relatif

aux droits économiques, sociaux et culturels.
57T. M. Franck, «The Emerging Ri ght to Democratic Governance», American Journal of International Law ,

vol. 86, 1992, p. 59.
58Ibid.

59Voir la déclaration sur les principe s régissant les relations mutuelles des Etats participants, acte final de la

conférence sur la sécurité et la coopération en Europe, Helsinki, 1975.
60Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, article 20.

61Voir la note 53, supra.

62Voir, d’une manière générale, la note26, supra ; voir aussi la déclaration sur les droits des personnes
appartenant à des minorités na tionales ou ethniques, re ligieuses et linguistiques, résolution 47/135 de l’Assemblée
générale (ci après «déclaration sur le s minorités»); observation générale no23 du Comité des droits de l’homme: les

droits des minorités (art. 27), Nations Unies, doc. CCPR/C/21/Rev.1/Add. 5. - 13 -

B. Résolutions et documents pertinents adoptés à l’intérieur du système
des Nations Unies

61. Plusieurs résolutions de l’Assemblée gé nérale ont souligné l’importance du droit à
l’autodétermination.

62. Aux termes de la déclaration relative à la décolonisation : «Tous les peuples ont le droit

de libre détermination; en vertu de ce droit ils déterminent librement leur statut politique et
poursuivent librement leur développeme nt économique, social et culturel.» 63 La déclaration
souligne toutefois que l’exercice de ce droit doit être en conformité avec les buts et les principes de
64
la Charte des Nations Unies .

63. De manière similaire, la déclaration sur les relations ami cales met en relief et développe
le droit à l’autodétermination. Elle indique avec clarté que tout Etat a le devoir de promouvoir la
65
réalisation de ce droit, ainsi que de respecter les droits de l’homme et les libertés fondamentales .
La déclaration stipule clairement, toutefois, que :

« Rien…ne sera interprété comme autorisant ou encourageant une action,
quelle qu’elle soit, qui démembrerait ou menacerait, totalement ou partiellement,

l’intégrité territoriale ou l’unité politique de tout Etat souverain et indépendant se
conduisant conformément au principe de l’é galité des droits et du droit des peuples à
disposer d’eux-mêmes énoncé ci-dessus et doté ainsi d’un gouvernement représentant

l’ensemble du peuple appartenant au territoire sans distinction de race, de croyance ou
de couleur.» 66

64. Lorsqu’elles traitent, en rapport avec les responsabilités des Etats, de questions relatives
aux droits des minorités, les résolutions pertin entes de l’Assemblée générale maintiennent un

équilibre entre le droit à l’autodétermination et l’ intégrité territoriale en conformité avec la Charte
des Nations Unies, et les principes du droit international 67. A cet égard l’Assemblée générale

prévoit aussi l’exercice du droit d’autodéterminati on sur le plan interne, au moyen d’arrangements
de nature législative, éducationnelle et religieuse, lesquels doivent être compatibles avec la
législation nationale .68

63Déclaration sur la décolonisation.
64
Voir les notes 26-27 et le texte s’y rapportant, supra.
65
Voir la note 28 et le texte s’y rapportant, supra (les italiques sont de nous).
66Ibid.

67Voir la déclaration sur les minorités, leparagraphe 4 de l’article 8 de l’annexe.

68Ibid., paragraphe 3 de l’article 2 de l’annexe. - 14 -

65. Le développement de ce tte approche équilibrée a contribué sensiblement à l’acceptation
69
par les Etats du droit à l’autodétermination , du fait que les interprétations flexibles ouvrent une
gamme plus large d’options 70.

66. Selon la déclaration de Vienne, l’exercice effectif et intégral des droits de l’homme par

les membres de minorités contribue, tout en la protégeant, à la stabilité politique et sociale des Etats
dans lesquels ils habitent 71. Dans ce cas particulier, le dro it à l’autodétermination, conçu comme
72
l’exercice intégral et effectif des droits de l’homme , est utilisé comme instrument pour renforcer
l’intégrité territoriale, l’unité nationale et l’indépendance politique d’un Etat, en resserrant, plutôt
qu’en affaiblissant, les liens sociétaux; ceci est vrai indépendamment de ce que les éléments

constitutifs d’une société incluent des minorités ou non. Pareille approche serait considérée comme
un exercice constructif et bénéfique des droits fondamentaux de l’homme.

67. Il convient, finalement, de rappeler que le Comité des droits de l’homme a examiné de

près la distinction entre le droit à l’autodétermin ation et les droits protégés par l’article27 du
PIDCP, en tenant dûment compte du fait que ce s droits sont exercés spécifiquement par des
individus plutôt que par des peuples . Dans le contexte d’une communauté, ce droit est, de par sa

nature même, exercé à une plus grande échelle, de sorte que, en protégeant l’exercice des droits
prévus à l’article 27, l’Etat fait un pas appréciable vers la protection du droit à l’autodétermination

d’un peuple. Dès lors l’article 27, lu conjointement avec le paragraphe 3 de l’article 1 du PIDCP,
la déclaration sur la décolonisation et la déclaration sur les relations amicales, permettrait une
approche ample qui protège l’exercice des droits de l’homme tout en sauvegardant le principe de

l’intégrité territoriale.

C. Les tribunaux et le droit à l’autodétermination

68. Des questions relatives au droit à l’auto détermination ont également surgi devant des
tribunaux nationaux. Cela a été le cas au Canada , où en 1996 la Cour suprême (ci-après «la Cour
suprême») a été saisie par le gouverneur en conse il de questions relatives à la légalité de la
74
«sécession du Québec» .

69Par exemple, en s’occupant de droits de l’homme, l’A ssemblée générale et d’autres organes des Nations Unies
ont également porté leur attention sur des questions relatives au droit à l’autodétermination. Voir, d’une manière
générale, les documents cités à la note26 supra; voir aussi, Récapitulation des observations générales et des

recommandations générales adoptéeo par les organes créés en vertu d’instruments in ternationaux relatifs aux droits de
l’homme, observation générale n 23: article27 (droits des minorités), Nati onsUnies doc. HRI/GEN/1/Rev.9 (vol.I),
p. 244 et suiv.
70
En témoignent les diverses méthode s auxquelles, pour réaliser l’autodéterm ination, on peut recourir dans le
cadre du processus démocratique d’un Etat; voir, également, Récapitulation des observations générales et des
recommandations générales adoptées par les organes créés en vertu d’instruments in ternationaux relatifs aux droits de
l’homme, observation générale n 1:2article premier (droit à l’autodétermination), Natsnies,
doc. HRI/GEN/1/Rev. 9 (vol. 1), p. 213 et suiv.

71Voir la note 31 supra, par. 19.
72
L’autodétermination dans le contexte du droit international en matière de s droits de l’homme a été codifiée,
initialement, au paragraphe 3 de l’article 1 du PIDCP.
73
Récapitulation des observations générales et des recommandations généra les adoptées par les organes créés en
vertu d’instruments internationaux relatifs au x droits de l’homme, observation générale n o23: article27 (droits des
minorités), Nations Unies, doc. HRI/GEN/1/Rev. 9 (vol. 1) (2008), p. 244 et suiv.
74
Texte français disponible sur http ://scc.lexum.umontreal.ca/fr/1998/1998rcs2-217/1998rcs2-217.html. - 15 -

69. Dans son avis correspondant, la Cour s uprême a examiné des questions concernant le
droit à l’autodétermination. Dans ce contexte la portée de ce droit a été définie en précisant que

l’autodétermination doit être interne ou externe. Au sujet de la première m odalité la Cour suprême
a observé que :

«[l]es sources reconnues du droit internati onal établissent que le droit d’un peuple à
disposer de lui-même est normalement réalisé par voie d’autodétermination

interne ⎯à savoir la poursuite par ce peupl e de son dévelop75ment politique,
économique, social et culturel dans le cadre d’un Etat existant» .

La Cour suprême ajouta :

«[Les divers documents internationaux qui étayent] l’existence du droit d’un

peuple à l’autodétermination renferment ég alement des déclarations au soutien du
principe selon lequel l’exercice d’un tel droit doit être suffisamment limité pour
prévenir les menaces contre l’intégrité territoriale d’un Etat existant…» 76

En outre la Cour suprême a souligné que le droit à l’autodétermination et le maintien de l’intégrité

territoriale ne sont pas nécessairement incompatibles tant que le gouver77ment d’un Etat représente
l’ensemble de son peuple ou de ses peuples sans discrimination .

70. Pour ce qui est de l’autodétermination ex terne, la Cour suprêm e a reconnu qu’elle peut
être exercée «dans certains contextes définis» 78. En dehors du cas de la domination coloniale,

pareils contextes sont exclusivement ceux où les circonstances sont telles qu’«un peuple est soumis
à la subjugation, à la domination ou à l’exploitation…» 79

71. Finalement, la Cour suprême ne considéra pas nécessaire de décider si, conformément au
droit international, la dénégation du droit à l’ autodétermination interne suffit pour justifier
80
l’exercice du même droit sur le plan externe .

D. Conclusion

72. Le droit à l’autodétermination dans le contexte de la domination coloniale est reconnu
par le droit international.

73. On pourrait, de même, faire valoir, en conf ormité avec la législation nationale, le droit à
l’autodétermination interne dans des circonstan ces correspondant aux normes en matière de droits

de l’homme.

74. Dans son état actuel, le droit interna tional ne contient aucune norme qu’on puisse sans
conteste invoquer à l’appui d’arguments selon lesquels le droit à l’autodétermination ne peut être
exercé que sur le plan externe, s’il existe des sa uvegardes adéquates contre la discrimination. De

75Ibid., par. 126.
76
Ibid., par. 127.
77
Ibid., par. 130.
78Ibid., par. 131.

79Ibid., par. 133.

80Ibid., par. 134-135. - 16 -

plus, l’adoption de critères généralisés serait préjudiciable et poserait des menaces réelles à la paix
et la sécurité internationales, ce qui serait un résultat indésirable au regard de la Charte des Nations

Unies.

CINQUIÈME PARTIE

R ÉSUMÉ ET CONCLUSIONS

A. Résumé

75. Il semble incontestable que le respect du pr incipe de l’intégrité territoriale des Etats est
inviolable. Tous les acteurs qui d’une manière ou d’une autre ont un rapport avec la prise de
mesures contribuant à la réalisation des buts de la Charte des Nations Unies, y compris les organes

des Nations Unies, sont tenus d’observer strictement ce principe.

76. Par voie de conséquence, le droit à l’autodé termination, après avoir évolué dans le cadre

du droit international coutumier, es t devenu, par suite de son inclus ion dans la Charte des Nations
Unies, une norme faisant partie du droit conventionnel. Son application ne doit pas, toutefois,
mener à des situations qui posent des dangers à la paix et à la sécurité internationales.

B. Conclusions

77. En ce qui concerne les questions de la compétence et de la recevabilité, il est conclu que :

i) l’Assemblée générale est compétente pour demander un avis consultatif sur la question qui
est l’objet de la présente requête ; et

ii) la Cour est compétente pour donner un avis consultatif sur la question qui lui est posée.

___________

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Exposé écrit de l'Egypte (traduction du Greffe)

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