EXPOSE ECRIT DU R OYAUME -U NI DEG RANDE -B RETAGNE
ET D’IRLANDE DU N ORD
[Traduction]
T ABLE DES MATIERES
Pages
I. I NTRODUCTION ........................................................................................................................... 1
II. L ORIGINE DE LA DEMANDE D AVIS CONSULTATIF .................................................................... 3
A. LcearactŁeiscrØtionnaire du pouvoir de la Cour prØvu à larticle 65 1) de son Statut...... 7
B. La prØsente espŁce est un cas oø la Cour devrait refuser de donner un avis....................... 12
1. Un avis naiderait pas lAssemblØe gØnØ rale à sacquitter de ses fonctions et
serait probablement prØjudiciable à laction de lONU dans son ensemble ....................12
2. La prØsente affaire porte sur un diffØrend bilatØral..........................................................15
3. Rendre un avis en lespŁce obligerait à Øtablir certains faits dune façon qui est
impossible pour la Cour au vu des informations dont elle dispose..................................16
IV. C ONCLUSIONS ........................................................................................................................... 18
I. NTRODUCTION
1.1. Aux termes de son ordonnance du 19dØcembre2003, la Cour a invitØ les Etats à lui
soumettre des exposØs Øcrits relatifs à la dema nde davis consultatif sur la question des
Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le Territoire palestinien occupé.
1.2. Le Royaume-Uni a expri1Ø à plusieur s reprises sa position sur la lØgalitØ de la
construction de ce mur par Israºl . Il a votØ en faveur de larØsolutionES-10/13 de lAssemblØe
gØnØrale, dØposØe par les membres de lUnion europØenne, adoptØe le 21 octobre 2003 par 144 voix
contre 4 avec 17abstentions, et oø il Øtait diau paragraphe1 que l AssemblØe gØnØrale « Exige
quIsraºl arrŒte la construction dumur dans le territoire palestinie n et autour et revienne sur un
projet qui sØcarte de la ligne darmistice de1949et qui est contraire aux dispositions pertinentes
du droit international.»
Le Royaume-Uni sest prononcØ dans ce sens à la tribune des Nations Unies, et a jouØ son rôle dans
plusieurs dØclarations de lUnion europØenne allant dans le mŒme sens. Les membres du
Gouvernement britannique se sont plusieurs fois pr ononcØs dans le mŒme sens devant le Parlement
de leur pays.
1Le Royaume-Uni utilisera dans le prØsent exterme «mur» tel quil est utilisØ dans la demande darrŒt
consultatif, sans que cela signifie quil es t plus propre ou plus exact que «barriŁre de sØcuritØ», «barriŁre de sØparation»
ou tout autre terme pouvant Œtre employØ. - 2 -
1.3. Si cependant le Royaume-Uni a dØci dØ de prØsenter les observations ci-dessous ― qui
ne traitent que de la question de savoir si la C our doit refuser de rØpondre à cette question en vertu
des pouvoirs qui sont les siens, et nullement sur le fond de la question ―, cela est dß à la grande
importance que donne le Royaume-Uni à ce que la Cour rØaffirme et applique les principes Øtablis
dans sa jurisprudence. Dimportantes questions rele vant de lopportunitØ judiciaire et des droits
fondamentaux des parties se posent ici.
1.4. La demande faite par lAssembl Øe gØnØrale des NationU s nies dans sa
rØsolutionES-10/14, adoptØe le 8dØcembre 2003, à la reprise de sa dixiŁme session spØciale
durgence, sexprime comme suit :
«LAssemb glØØneØrale,
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Décide , en vertu de larticle 96 de la Charte des Nations Unies, de demander à la
Cour internationale de Justice, conformØment aux dispositions de larticle 65 du Statut
de la Cour, de rendre durgence un avis consultatif sur la question suivante :
«Quelles sont en droit les consØque nces de lØdification du mur quIsraºl,
puissance occupante, est en train de construire dans le Territoire palestinien occupØ, y
compris à lintØrieur et sur le pourtour de JØrusalem-Est, selon ce qui est exposØ dans
le rapport du SecrØtaire gØnØral, compte tenu des rŁgles et des principes du droit
international, notamment la quatriŁme convention de GenŁve de1949 et les
rØsolutions consacrØes à la question par le Conseil de sØcuritØ et lAssemblØe
gØnØrale ?»»
1.5. Le Royaume-Uni considŁre que la Cour devrait en lespŁce exercer le pouvoir que lui
donne larticle65, paragraphe1, de son Statut de refuser de rØpondre à la question posØe dans la
rØsolutionES-10/14. Il estime que la principale prioritØ au Moyen-Orient est de parvenir à un
rŁglement nØgociØ fondØ sur la feuille de route (Nations Unies, doc. S/2003/529) conçue par le
Quatuor composØ par les NationsUnies, lUnio n europØenne, la FØdØration de Russie et les
Etats-Unis dAmØrique, et que le Conseil de sØcuritØ a approuvØe dans sa rØsolution1515/2003,
adoptØe à lunanimitØ le 19novembre 2003, en dØclarant y voir «la vision dune rØgion dans
laquelle deux Etats, Israºl et la Palestine, vivent côte à côte, à lintØrieur de frontiŁres sßres et
reconnues».
1.6. Le Royaume-Uni et les autres Etats membres du Quatuor ont prØcisØ que tout avis donnØ
à ce sujet par la Cour serait de na ture à faire obstacle au processus de paix au lieu dy contribuer.
En outre, la demande davis c onsultatif qui a ØtØ faite porte essen tiellement sur un diffØrend entre
deux parties dont lune na manifestement pas acceptØ la compØtence de la Cour. De plus, la Cour
ne saurait sacquitter de ses fonctions judiciaires en lespŁce sans se prononcer sur des questions de
fait de caractŁre complexe et sur lesquelles elle ne disposerait pas de linformation nØcessaire.
Enfin, on ne peut dire que son opinion soit nØcessaire pour aider lAssemblØe gØnØrale à sacquitter
de ses fonctions.
1.7. Le prØsent exposØ ne traitera de rien dautre que de ces questions dopportunitØ
judiciaire. Il sera divisØ en quatre parties. La deuxiŁme rappellera briŁvement les conditions dans
lesquelles a ØtØ faite la demande davis consultatif . La troisiŁme exposera les raisons qui, selon le
Royaume-Uni, font que la Cour devrait refuser de rØpondre à la question qui lui a ØtØ posØe. Et la
quatriŁme rØsumera briŁvement les conclusions du Royaume-Uni. - 3 -
II. L’ORIGINE DE LA DEMANDE D ’AVIS CONSULTATIF
2.1. Les lignes qui suivent seront consacrØes aux circonstances dans lesquelles a ØtØ adoptØe
la rØsolution ES-10/14 de lAssemblØe gØnØrale, qui contient la demande davis consultatif adressØe
à la Cour.
2.2. La recherche de la paix au Moyen-Or ient, qui fait partie depuis de nombreuses annØes
des prØoccupations du Conseil de sØcuritØ, a donnØ lieu à ladoption de plusieurs rØsolutions,
notamment limportante rØsolution242 (1967), qu i soulignait le caractŁre inadmissible des
acquisitions de territoires par la guerre et affirmait les principes de base à respecter dans tout
rŁglement pacifique, ainsi que la rØsolution 338 (1973), oø le Conseil demandait à toutes les parties
de mettre en uvre toutes les dispositions de la rØsolution 242 (1967).
2.3. Le Conseil de sØcuritØ a Øgalem ent rØagi en adoptant plus rØcemment les
rØsolutions1397 (2002), 1402 (2002), 1403 (2002), 1405 (2002), 1435 (2002) et1515 (2003) qui
portent sur plusieurs aspects de la situation au Moyen-Orient, mais qui ont pour point commun
dapprouver les efforts du Quatuor (NationsUnies, Union europØenne, FØdØration de Russie et
Etats-Unis dAmØrique) visant à parvenir à un acco rd nØgociØ fondØ sur lexistence de deux Etats
vivant lun à côtØ de lautre dans une paix fondØe sur des frontiŁres sßres et reconnues comme
telles. La feuille de route, que le Quatuor des Na tions Unies a prØsentØe le 30 avril 2003 à Israºl et
à lAutoritØ palestinienne, est un plan concret pour atteindre progressivement cet objectif.
2.4. Le ReprØsentant permanent de la Syrie auprŁs des Nations Unies, agissant en sa capacitØ
de prØsident du groupe arabe et au nom des pays membres de la Ligue des Etats arabes, a Øcrit le
9octobre2003 au prØsident du Conseil de sØcur itØ pour lui demander de convoquer une rØunion
publique du Conseil qui serait chargØe dØtudier et dadopter les mesures nØcessaires relatives aux
violations du droit international reprochØes à Isr aºl à propos de la construction du mur. A cette
lettre Øtait joint un projet de rØsolution du Conseil.
2.5. Le principal paragraphe c ontenu dans le dispositif de ce pr ojet de rØsolution Øtait rØdigØ
comme suit :
[Le Conseil]
« Décide que la construction par Israºl, puissan ce occupante, dun mur dans les
territoires occupØs qui sØcarte de la ligne darmistice de1949 est illØgale au regard
des dispositions pertinentes du droit international, quelle doit Œtre interrompue et quil
faut inverser le processus.»
Le projet de rØsolution ne faisait pas allusion à une demande davis consultatif de la Cour.
2.6. Mis aux voix le 14 octobre 2003 aprŁs une pØriode de consultations officieuses, ce projet
de rØsolution a reçu 10 voix pour, 1 contre (Eta ts-Unis dAmØrique) et 4 abstentions (dont le
Royaume-Uni) et na donc pas ØtØ adoptØ en ra ison du vote nØgatif dun des membres permanents
du Conseil. A aucun moment du dØbat il na ØtØ question de lutilitØ de demander un avis
consultatif à la Cour. - 4 -
2.7. La suite de laction sest passØe au sei n de lAssemblØe gØnØrale, dont le prØsident a
annoncØ le 16 octobre 2003 la reprise de la dixiŁme session extraordinaire durgence, laquelle avait
ØtØ convoquØe en vertu de la rØsolution «union pour la paix» du 24 avril 1997, adoptØe à la suite du
veto opposØ à un projet de rØsolution du Conseil de sØcuritØ qui visait la crØation de nouvelles
implantations israØliennes dans les territoires occupØ s. La session a repris le 20 octobre 2003, à la
demande de la Syrie (parlant au nom des pays me mbres de la Ligue des Etats arabes) et de la
Malaisie (au nom du mouvement des pays non alignØs), et deux projets de rØsolution ont ØtØ
prØsentØs: lun, rØpØtant les termes du projet dont le Conseil de sØcuritØ Øtait dØjà saisi; lautre,
prØvoyant une demande davis consultatif à la Cour.
2.8. La question de la demande davis consultatif a ØtØ à peine ØvoquØe à la sØance du
20 octobre 2003, et seuls la Palestine, la Malaisie (sexprimant au nom du mouvement des pays non
alignØs) et, plus briŁvement, lIran et Cuba y on t fait allusion. Aucun des orateurs na Ømis de
doute sur lillØgalitØ du mur (selon eux, dire que le mur Øtait illØgal ne faisait que constater
lØvidence), et aucun na avancØ de raison pour quun avis de la Cour soit utile aux travaux de
lAssemblØe gØnØrale. Israºl et les Etats-Unis dAmØrique se sont proposØs contre la demande
davis consultatif, et les autres orateurs ny ont pas mŒme fait allusion.
2.9. Le 21octobre2003, aprŁs des consulta tions prolongØes, les Etats membres de lUnion
europØenne ont prØsentØ un texte de compromis qui a ØtØ adoptØ et qui est devenu la
rØsolution ES-10/13. Il ny Øtait nulle part question de demander un avis consultatif.
2.10. La rØsolutionES-10/13 a ØtØ adoptØe par 144 voix contre 4, avec 12abstentions. Le
SecrØtaire gØnØral y Øtait priØ dy donner suite da ns un dØlai dun mois. DistribuØ en consØquence
le 24 novembre 2003, le rapport du SecrØtaire conc luait quIsraºl navait pas rØpondu à la demande
de lAssemblØe «dinterrompre la construction du mur et de revenir sur ce projet». Mais il ny Øtait
pas question de demander un avis consultatif à la Cour, et lon ny trouvait pas non plus
dobservation relative au mur qui pßt faire croire à lutilitØ de demander cette opinion.
2.11. Le 30 novembre 2003, un n ouveau projet de rØsolution a ØtØ prØsentØ à la reprise de la
dixiŁme session extraordinaire durgence de lAsse mblØe gØnØrale. Le texte de cette rØsolution
contenait la question dont la Cour est à prØsent saisi e. Le dØbat qui a eu lieu le 8 dØcembre suivant
a confirmØ que nul ne voyait de difficultØ à appliquer la loi à la question du mur : il nexprimait que
la dØception ressentie par les membres de lAssemb lØe gØnØrale en constatant quil navait pas
encore ØtØ trouvØ de solution politique à cette ques tion. Aucun des Etats favorables au projet de
rØsolution na dØclarØ que lAssemblØe avait besoin de la Cour pour prØciser la situation juridique
et ainsi permettre à lAssemblØe de sacquitter de ses fonctions.
2.12. Le dØbat et les rØsultats du vote montrent que lAssemblØe gØnØrale sest profondØment
divisØe sur la question de la demande davis consultatif. La rØsolution sur ce sujet a ØtØ adoptØe par
90voix contre 8, avec 74 abstentions. Aussi la Cour est-elle invitØe à donner toute lattention
voulue à limportance du nombre des Etats ayant vot Ø contre ou sØtant abstenus. Parmi les Etats
ayant fait un vote nØgatif, se trouvent lAustralie et lEthiopie, ainsi quIsraºl et les Etats-Unis
dAmØrique. Parmi les Etats sØtant abstenus, les 15 membres du groupe de lUnion europØenne et
autres Etats europØens, de nombreux pays des Caraïbes, plusieurs Etats de lAmØrique centrale et
de lAmØrique du Sud, de lAsie centrale et du Pacifique, ainsi que le Cameroun, le Canada, le
Japon, la Nouvelle-ZØlande, les Philippines, la RØpublique de CorØe, la Russie, Singapour, la - 5 -
Thaïlande et lOuganda. Les dØclarations faites par lUnion europØenne, la Russie, lOuganda et
les Etats-Unis au cours du dØbat, et celles faites par le Royaume-Uni, le Canada, la Suisse et
Singapour en explication de vote, montrent quune grande partie du Cons eil de sØcuritØ Øtait
opposØe à cette demande davis ou refusait de la soutenir.
2.13. AprŁs le vote, oø le Royaume-Uni sest abstenu, son reprØsentant sest exprimØ comme
suit :
«Nous considØrons que le fait de demander un avis cons ultatif à la Cour sans
lassentiment des deux parties est inappropriØ. Il est en outre improbable que cet avis
soit susceptible de rØgler le problŁme sur le terrain. LAssemblØe gØnØrale na pas
vØritablement besoin dun avis consu ltatif dans ce cas pour sacquitter de ses
fonctions. Elle a dØjà dØclarØ que ce mur Øtait illØgal. Le Royaume-Uni a dailleurs
votØ en faveur de cette rØsolution
Le fa it de demander un avis consultatif naidera
en aucun cas les deux parties à relancer le dialogue politique si nØcessaire, et la mise
en uvre de la feuille de route devrait constituer une prioritØ.»
2.14. Le reprØsentant de lItalie, parlant au nom de lUnion europØenne, des dix Etats qui
doivent y entrer en mai2004 et de neuf autres Etats europØens, a dØclarØ que la demande davis
consultatif nØtait pas judicieuse et naiderait p as les efforts des deux parties pour relancer un
dialogue politique.
2.15. Dautres Etats membres du Quatuor se sont exprimØs dans le mŒme sens. Le
reprØsentant de la FØdØration de Russie a affirm Ø que laction politique avait plus dimportance
quun avis juridique :
«Nous croyons comprendre que les auteurs du projet de rØsolution ont cherchØ à
Øtudier les retombØes juridiques de la cons truction du mur. Mais, politiquement, une
telle approche marque lacceptation de la situation actuelle par la communautØ
internationale. Nous sommes convaincus quà lØtape actuelle, tous les efforts doivent
exclusivement viser à stopper la construction du mur et à le dØtruire. Cest ce
quexigent la rØsolution1515 (2003) du C onseil de sØcuritØ et la rØsolutionES-10/13
de lAssemblØe gØnØrale. Et telle est la position fermement dØ fendue par tous les
membres du Quatuor des mØdiateurs internationaux.»
2.16. Le reprØsentant des Etats-Unis dAmØrique sest prononcØ comme suit :
«La communautØ internationale est depuis longtemps consciente que le
rŁglement du conflit passe par une solution nØgociØe, ainsi que le demandent les
rØsolutions242 (1967) et338 (1973) du C onseil de sØcuritØ. Cela a ØtØ indiquØ
clairement aux parties dans les principes arrŒ tØs par la confØrence de paix de Madrid
de1991. Faire intervenir la Cour intern ationale de Justice dans ce conflit est
incompatible avec cette approche et pourrait, en fait, retarder la solution des deux
Etats et avoir une influence nØgative sur la mi se en uvre de la feuille de route. En
outre, saisir la Cour internationale de Jus tice de cette question risque dentraîner une
politisation de cet organe. Cela ne ferait pas progresser la capacitØ de la Cour de
contribuer à la sØcuritØ mondiale, ni les perspectives de paix.»
2.17. Le Royaume-Uni a remarquØ les dØclara tions faites par les reprØsentants de lOuganda
et de Singapour, Etats membres du mouvement des pa ys non alignØs, qui Øtaient prŒts à renoncer à
voter comme les autres membres de ce mouvement par Øgard pour les travaux de la Cour. Le
reprØsentant de lOuganda a notamment dØclarØ : - 6 -
«La solution rØside dans un rŁglement nØgociØ entre les deux parties. Cest
pourquoi nous pensons que porter laffaire devant la Cour in ternationale de Justice ne
servira guŁre la cause de la paix. Nous de vons Øviter de politiser la Cour, afin de ne
pas entacher son impartialitØ et sa crØdib ilitØ. De plus, sen remettre à la Cour
internationale de Justice reviendrait à rechercher le forum le plus favorable, alors quil
existe dØjà un mØcanisme dans le cadre de la feuille de route, conduite par le Quatuor,
pour traiter cette question.»
Et le reprØsentant de Singapour, expliquant labstention de cet Etat, sest exprimØ comme
suit :
«Nous nappuyons pas les mesures prises par Israºl dans lØdification de ce mur.
Nous avons cependant quelques rØserves à propos de lidØe de demander un avis
consultatif de la Cour internationale de Ju stice en ce qui concerne le mur israØlien car
cela risque davoir des rØpercussions qui nous prØoccupent. En tant que petit Etat,
nous nous en remettons à lintØgritØ du droit international, dont la Cour internationale
de Justice est lun des piliers les plus importants. Nous nestimons pas quil soit
appropriØ dassocier ainsi la Cour internati onale de Justice au diffØrend. Ce dernier
porte sur des dØlimitations territoriales. Il doit Œtre rØglØ par la voie de nØgociations
entre les parties concernØes ou à la suite dune dØcision contraignante prise par un
tribunal international appropriØ, comme la C our internationale de Justice
Si lon
cherche à obtenir un avis consultatif de la C our internationale de Justice, cela doit Œtre
pour faciliter les travaux de lAssemblØe gØnØrale.»
2.18. Enfin, le reprØsentant de la Suisse a dit en expliquant labstention de son pays :
«Concernant le projet de rØsoluti on visant à soumettre la question des
consØquences lØgales du mur à la Cour internationale de Justice, la Suisse sest
abstenue malgrØ son attachement au droit in ternational
elle ne juge en effet pas
opportun, dans les circonstances actuelles, de recourir à une instance juridique pour
aborder un thŁme oø prØdominent des implications hautement politiques.» - 7 -
III. LA C OUR DEVRAIT REFUSER DE REPONDRE A LA QUESTION POSEE
A. L E CARACTERE DISCRETIONNAIRE DU POUVOIR DE LA C OUR PREVU
A L ’ARTICLE 65 1) DE SON S TATUT
3.1. Cest de larticle 65, paragraphe 1, de son Statut que la Cour tient le pouvoir de rendre
des avis consultatifs, et cette disposition fait de ce pouvoir une fonction de caractŁre facultatif et
non pas obligatoire. Face aux demandes davis consu ltatif, la Cour a affirmØ à plusieurs reprises
quil lui appartient dy rØpondre ou non. Dans laffaire de l Interprétation des traités de paix , par
exemple, elle sest exprimØe ainsi: «Larticle65 du Statut est permissif. Il donne à la Cour le
pouvoir dapprØcier si les circonsta nces de lespŁce sont telles que lles doivent la dØterminer à ne
pas rØpondre à une demande davis
La Cour possŁde à cet Øgard un large pouvoir
2
dapprØciation.»
3.2. De mŒme, dans laffaire du Sahara occidental, la Cour a dØclarØ à propos du pouvoir
discrØtionnaire quelle tient de larticle 65 :
«Dans lexercice de ce pouvoir discrØtionnaire, la Cour internationale de Justice,
de mŒme que la Cour permanente de Justice internationale, a toujours suivi le principe
selon lequel, en tant que corps judiciaire, elle doit rester fidŁle aux exigences de son
caractŁre judiciaire, mŒme lorsquelle rend d es avis consultatifs. Sil lui est posØ une
question juridique à laquelle elle a incont establement compØtence pour rØpondre, elle
peut nØanmoins refuser de le faire. Comme la Cour la dØclarØ dans des avis
consultatifs antØrieurs, le caractŁre permissif de larticle 65, paragraphe 1, lui donne le
pouvoir dapprØcier si les circonstances de lespŁce sont telles quelles doivent la
dØterminer à ne pas rØpondre à une demande davis.» 3
Et la Cour a adoptØ la mŒme position dans dautr es affaires davis consultatif (voir par exemple
Jugements du Tribunal administratif de l’OIT sur requêtes contre l’UNESCO , Fasla , Mortished , 5 6
7 8
Mazilu et Cumaraswamy ).
3.3. Cest dans le cadre de ce pouvoir discrØtionnaire que se pose la question de lopportunitØ
de la fonction judiciaire. Et la Cour a dØclarØ à plusieurs reprises quil y a des limites inhØrentes à
9
cette fonction , et que ces limites apparaissent plus par ticuliŁrement lorsquil sagit de questions
2
Avis consultatif du 30mars1951, C.I.J. Recueil 1950, p.72. Voir aussi les avis consultatifs Réserves à la convention
pour la prévention et la répression du crime de génocide , C.I.J. Recueil 1951, p.19, eCertaines dépenses des
Nations Unies, C.I.J. Recueil 1962, p. 155.
3
C.I.J. Recueil 1975, p. 21.
4
«La Cour est un corps judiciaire et, dans lexercice de sa fonction consultative, elle doit re ster fidŁle aux exigences de
son caractŁre judiciaire. Cela est-il possible dans le cas prØsent ?» C.I.J. Recueil 1956, p. 84.
5
«Il faut noter toutefois que larticle65 du Stde la Cour est permissif et que, en vertu de ce
texte, le pouvoir que la Cour possŁde de donner un avis consultatif a un caractŁre discrØtionnaire. Dans
lexercice de ce pouvoir discrØtionnaire, la Cour atoujours suivi le principselon lequel, en tant
quorgane judiciaire, elle doit rester fidŁle aux exigences de son caractŁre judiciaire, mŒme lorsquelle
donne des avis consultatifs.» C.I.J. Recueil 1973, p. 175, par. 24.
6C.I.J. Recueil 1982, p. 34 et suiv.
7
C.I.J. Recueil 1989, p. 190 et suiv.
8
C.I.J. Recueil 1999, p. 78.
9 o
Voir, entre autoes, les affaires Zones franches, C.P.J.I. série A/B n 46, 1932, p.161; Statut de la Carélie orientale ,
C.P.J.I.série B n5, 1923, p.29; Essais nucléaires, C.I.J. Recueil 1974, p.271 et476-477, et Cameroun septentrional,
C.I.J. Recueil 1963, p. 30. - 8 -
qui pourraient faire douter du caractŁre judiciaire du rôle jouØ par la Cour. Entrent dans cette
catØgorie, par exemple, les dØcisions qui seraient «dØpourvues dobjet ou de but» 10, ou «ØloignØes
11 12
de la rØalitØ» , ou effectivement inapplicables . Comme la dit la Cour dans laffaire du
Cameroun septentrional : «Si la Cour devait poursuivre laffaire et dØclarer toutes les allØgations
du demandeur justifiØes au fond, elle nen sera it pas moins dans limpossi bilitØ de rendre un arrŒt
13
effectivement applicable.»
Bien que la derniŁre de ces affaires fßt de caract Łre contentieux, la Cour a soulignØ que toutes ces
considØrations relatives au pouvoir judiciaire sa ppliquaient Øgalement à lexercice de la fonction
consultative .14
3.4. Bien entendu, la Cour a prØcisØ que, Øtant le principal organe judiciaire des
Nations Unies, elle devait normalement donner son avis sur une qu estion dordre juridique lorsque
cela lui Øtait demandØ par un organe compØtent (ou une institution spØcialisØe) des Nations Unies.
Dans laffaire de l Interprétation des traités de paix , par exemple, la Cour sest exprimØe comme
suit : «la rØponse constitue une participation de la Cour, elle-mŒme «organe des Nations Unies», à
laction de lOrganisation et, en principe, elle ne devrait pas Œtre refusØe» . 15
Et plus rØcemment encore, dans son avis facultatif sur la Licéité de la menace ou de l’emploi
d’armes nucléaires , la Cour, citant ses prises de position dans plusieurs affaires antØrieures, a
affirmØ que seules des «raisons contraignantes» pou vaient lamener à refuser de donner16n avis
lorsque cela lui Øtait demandØ par un organe ou une institution compØtente . Parmi les vingt-trois
demandes davis consultatif sur lesquelles la Cour a eu à se pencher jusquà aujourdhui, il ny en a
aucune oø elle ait trouvØ des rais ons de ce genre (alo rs que la Cour perm anente de Justice
internationale avait refusØ de rØpondre à la ques tion qui lui Øtait posØe dans laffaire de la Carélie
orientale).
3.5. La question est donc de savoir ce que pe uvent Œtre des «raisons contraignantes». Et,
selon le Royaume-Uni, la rØponse à cette question se trouve dans trois ØlØments de la jurisprudence
Øtroitement liØs entre eux.
3.6. PremiŁrement, la Cour a toujours affirmØ que sa fonction consultative a pour but de faire
en sorte que les autres organes des Nations Unies (et leurs institutions spØcialisØes) puissent
recevoir de la Cour les prØcisions dordre juridique qui leur sont nØcessaires pour mener à bien
leurs activitØs. Dans laffaire des Réserves, par exemple, la Cour a dØclarØ : «Lobjet de la prØsente
17
demande davis est dØclairer les Nati onsUnies dans leur action propre.» . De mŒme, dans
laffaire de la Namibie :
10
Sahara occidental, C.I.J. Recueil 1975, p. 37.
11Cameroun septentrional, C.I.J. Recueil 1963, p. 33.
12Cameroun septentrional, C.I.J. Recueil 1963, p. 33.
13
Cameroun septentrional, C.I.J. Recueil 1963, p. 33.
14
Cameroun septentrional, C.I.J. Recueil 1963, p. 30.
15C.I.J. Recueil 1950, p. 71.
16C.I.J. Recueil 1996, p. 235, par. 14.
17C.I.J. Recueil 1951, p. 19. - 9 -
«Il sagit dune requŒte prØsentØe par un organe des Nations Unies, à propos de
ses propres dØcisions, en vue dobtenir de la Cour un avis juridique sur les
consØquences et les incidences de ces dØcisions. Cest cet objectif que souligne le
prØambule de la rØsolution sollicitant lavis , oø le Conseil de sØcuritØ indique «quun
avis consultatif de la Cour internationale de Justice serait utile au Conseil de sØcuritØ
pour continuer à examiner la question de Na mibie et pour la rØalisation des objectifs
recherchØs par le Conseil». Il convient de rappeler que, dans son avis consultatif sur
les Réserves à la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide,
la Cour a dit.» 18
Et, dans laffaire du Sahara occidental : «lavis consultatif que rendra la Cour en lespŁce fournira
à lAssemblØe gØnØrale des ØlØments de caractŁre juridique qui lui seront utiles quand elle traitera à
19
nouveau de la dØcolonisation du Sahara occidental» .
3.7. Tous ces cas, ainsi que les autres avis consultatifs rendus à cette date, ont quelque chose
en commun: cest que la Cour considØrait que so n avis Øtait de nature à faire une contribution
positive au travail de lorgane demandeur et de lOrganisation des NationsUnies dans son
ensemble. Mais le contraire nest pas moins vrai : si la Cour estime que son avis aurait peu de
chances daider lorgane demandeur, et plus encore si elle considŁre quil aurait un effet nØgatif sur
laction des Nations Unies dans leur ensemble, el le doit exercer son pouvoir discrØtionnaire de ne
pas donner davis.
3.8. Il est vrai que, dans le cas particulier de laffaire de la Licéité de la menace ou de
l’emploi d’armes nucléaires, la Cour a ØvitØ de se pencher sur la raison pour laquelle son avis Øtait
demandØ, au motif que cØtait à lorgane demandeur de dØcider sil avait ou non besoin dun avis
consultatif . Cependant, la question de savoir sil exis te des raisons contraignantes pour que la
Cour ne donne pas davis quand cela lui est dema ndØ est forcØment une question à laquelle seule la
Cour elle-mŒme peut rØpondre. Si donc il y a da ns tel ou tel cas de bonn es raisons pour que la
Cour estime que son avis serait sans utilitØ, voire dommageable à laction des NationsUnies, ce
sont là des considØrations dont la Cour doit tenir compte pour dØcider si elle doit exercer le pouvoir
discrØtionnaire que lui donne lartic le65, paragraphe1, de son St atut mŒme si ce nest quen de
rares occasions que la Cour conclura quil y a su ffisamment de raisons pour quelle dØcide de ne
pas donner suite à la demande qui lui a ØtØ faite.
3.9. DeuxiŁmement, la Cour a bien prØcisØ que sa fonction consultative ne doit pas servir à
contourner lobligation du consentement des par ties à tout diffØrend rØpondant aux caractŁres
essentiels de sa compØtence en matiŁre contentieuse ―en dautres termes, que sa fonction
consultative ne doit pas Œtre un moyen dØtournØ de lui faire exercer sa compØtence obligatoire dans
les questions qui portent sur des diffØrends de fond entre deux parties. Cest la Cour permanente de
Justice internationale qui a la premiŁre formulØ ce principe dans laffaire de la Carélie orientale . 21
MŒme si, dans ce cas, la dØcision de ne pas donner un avis tenait compte du fait que la Russie, qui
Øtait lune des parties au diffØrend, nØtait pas alor s membre de la SociØtØ des Nations, et la Cour a
par la suite soulignØ toute limportance de ce principe dans son sens le plus large.
18C.I.J. Recueil 1971, p. 24, par. 32.
19
C.I.J. Recueil 1975, p. 37, par. 72.
20
C.I.J. Recueil 1996, p. 237, par. 16.
21C.P.J.I. série B n 5. - 10 -
3.10. Dans laffaire de l Interprétation des traités de paix , par exemple, la Cour sest
exprimØe ainsi à propos de laffaire de la Carélie occidentale :
«[la Cour permanente] a dØclarØ quil lui Øtait impossible dexprimer un avis,
estimant que la question qui lui avait ØtØ posØe, dune part, concernait directement le
point essentiel dun diffØrend actuellement nØ entre deux Etats de sorte quy rØpondre
Øquivaudrait en substance à trancher un diffØ rend entre les parties, et, dautre part22
soulevait des points de fait qui ne pouvaient Œtre Øclaircis que contradictoirement».
La Cour a rØaffirmØ ce principe dans laffaire du Sahara occidental, oø, aprŁs avoir citØ laffaire
des Traités de paix, elle sexprimait dans ces termes :
«La Cour a ainsi reconnu que le dØfaut de consentement pourrait lamener à ne
pas Ømettre davis si, dans les circonsta nces dune espŁce donnØe, des considØrations
tenant à son caractŁre judiciaire impo saient un refus de rØpondre. Bref, le
consentement dun Etat intØressØ conserve son importance non pas du point de vue de
la compØtence de la Cour mais pour a pprØcier sil est opportun de rendre un avis
consultatif.
Ainsi le dØfaut de consentement dun Etat intØressØ peut, dans certaines
circonstances, rendre le prononcØ dun avis cons ultatif incompatible avec le caractŁre
judiciaire de la Cour. Tel serait le cas si les faits montraient quaccepter de rØpondre
aurait pour effet de tourner le principe selon lequel un Etat nest pas tenu de soumettre
un diffØrend au rŁglement judiciaire sil nest pas consentant. Si une telle situation
devait se produire, le pouvoir discrØtionnaire que la Cour tient de larticle65,
paragraphe1, du Statut fournirait des moyens juridiques suffisants pour assurer le
23
respect du principe fondamental du consentement à la juridiction.»
Il en va de mŒme dans laffaire Mazilu, oø la Cour sest ainsi exprimØe: «Toutefois, mŒme si le
dØfaut de consentement de la Roumanie à la prØs ente procØdure ne peut avoir aucun effet sur la
compØtence de la Cour, cest là une question qui doit Œtre examinØe pour dØterminer sil est
opportun que la Cour donne un avis.» 24
3.11. La Cour a affirmØ à plusieurs repri ses que «lun des principes fondamentaux de son
Statut est quelle ne peut se prononcer sur un diffØrend opposant des Etats que si ceux-ci consentent
25
à lexercice de sa compØtence» . Le fait de recourir à sa compØtence consultative pour contourner
ce principe serait donc parfaitement contraire aux considØrations dopportunitØ judiciaire exprimØes
par la Cour dans laffaire du Sahara occidental. Il est mŒme plus important aujourdhui quà
lØpoque de la Cour permanente de Justice de vØ rifier si tel nest pas le but rØel dune demande
davis consultatif, car, à cette Øpoque, la pratique de lunanim itØ au sein du Conseil Øtait un
obstacle qui nexiste pas dans le cas des Nations Unies, oø i26suffit dobtenir une majoritØ à
lAssemblØe gØnØrale pour quune demande soit faite à la Cour .
22
C.I.J. Recueil 1950, p. 72.
23C.I.J. Recueil 1975, p.25, par.32-33. Voir aussi lavide la Cour dans laffaire de Namibie, C.I.J. Recueil 1971,
p. 24, par. 33-34.
24C.I.J. Recueil 1989, p. 190-191, par. 37. Lallusion au prØcØdent de la Carélie orientale qui est faite dans lavis de la
Cour sur la Licéité de la menace ou de l’ emploi des armes nucléaires, C.I.J. Recueil 1996, p.235, par.14, ne porte que
sur le fait que la Russie nØtait pas à l Øpoque membre de la SociØt Ø des Nations. Quant à la question du principe plus
gØnØral formulØ dans les affaires des Traités de paix, du Sahara occidental et Mazilu, elle ne se posait pas en lespŁce, et
la Cour ne la pas abordØe.
25Timor oriental, C.I.J. Recueil 1995, p. 101, par. 26.
26Voir S. Rosenne, The Law and Practice of the International Court, 1920-1996 (1997), vol. I, p. 293-5. - 11 -
3.12. Il est vrai que, par la suite, la Cour a dØcidØ, dans laffaire du Sahara occidental, de ne
pas refuser de rØpondre à la question que lui posai t lAssemblØe gØnØrale bien quil y eßt un
diffØrend entre le Maroc et lEspagne. Mais elle a bien prØcisØ quelle nentendait pas abandonner
ou affaiblir le principe gØnØral qui veut que sa compØtence en matiŁre consultative ne puisse servir
de moyen de lentraîner dans ce qui serait en fait un diffØrend entre deux ou plus de deux parties
sans que celles-ci aient acceptØ la compØtence de la Cour. Au contraire, elle a rØaffirmØ le principe
gØnØral (voir plus haut, par.3.10) en expliqua nt comme suit pourquoi il ne sappliquait pas en
lespŁce: «Il existe dans la prØsente affaire une controverse juridique, mais cest une controverse
qui a surgi lors des dØbats de lA ssemblØe gØnØrale et au sujet de problŁmes traitØs par elle. Il ne
sagit pas dune controverse nØe indØpendamment, dans le cadre de relations bilatØrales.» 27
Quant à lexception du Sahara occidental au principe de caractŁre gØnØral, elle na quun caractŁre
limitØ, et qui sexplique facilement par la faç on dont le problŁme de la dØcolonisation et de
lautodØtermination du Sahara occidental sØtait posØ à lAssemblØe gØnØrale entre les annØes 1958
et 1974. Elle ne signifie pas quun diffØrend opposant deux parties puisse devenir le sujet dun avis
consultatif pour la seule ques tion quelle soulŁve des problŁmes qui ont ØtØ examinØs (fßt-ce en
dØtail) par lAssemblØe gØnØrale.
3.13. TroisiŁmement, la Cour a soulignØ la difficultØ que pouvait poser une affaire de
juridiction consultative oø se poseraient de diffic iles questions de fait. Comme la dit la Cour
permanente dans laffaire de la Carélie orientale :
«La Cour ne saurait aller jusquà dire qu en rŁgle gØnØrale une requŒte pour avis
consultatif ne puisse impliquer une vØrificati on de faits; mais, dans des circonstances
ordinaires, il serait certainement utile que les faits sur lesquels lavis de la Cour est
demandØ fussent constants: le soin de les dØterminer ne devrait pas Œtre laissØ à la
Cour elle-mŒme.
La Cour se rend compte quelle nest pas invitØe à trancher un diffØrend, mais à
donner un avis consultatif. Cependant , cette circonstance ne modifie pas
essentiellement les considØrations ci-dessus. La question posØe à la Cour nest pas de
droit abstrait, mais concerne directement le point essentiel du conflit entre la Finlande
et la Russie, et il ne peut y Œtre rØpondu qu à la suite dune enquŒte sur les faits qui
sont à la base de laffaire. RØpondre à la question Øquivaudrait en substance à trancher
un diffØrend entre les parties. La Cour, Øtant une Cour de Justice, ne peut pas dØpartir
des rŁgles essentielles qui dirigent son activitØ de tribunal, mŒme lorsquelle donne des
avis consultatifs.» 28
3.14. Il serait contraire à toute notion de sag esse judiciaire que la Cour entreprenne de
donner un avis consultatif sur lapplication des pr incipes juridiques à des situations de fait sur
lesquelles il ny a pas daccord entre les parties et qui ne peuvent Œtre apprØciØes dans les
conditions quexige lexercice de la justice. Comme elle la dit dans laffaire du Sahara
occidental : «Il sagit donc de savoir si la Cour dispose de renseignements et dØlØments de preuve
suffisants pour Œtre à mŒme de porter un jugement sur toute question de fait contestØe et quil lui
faudrait Øtablir pour se prononcer dune maniŁre conforme à son caractŁre judiciaire.» 29
27C.I.J. Recueil 1975, p. 25, par. 34.
28 o
C.P.I.J. série B n 5, p. 28-29.
29C.I.J. Recueil 1975, p. 28-9, par. 46. - 12 -
B. L A PRESENTE ESPECE EST UN CAS OU LA C OUR DEVRAIT REFUSER DE DONNER UN AVIS
3.15. Il rØsulte de lanalyse faite ci-dessus qu il existe des raisons majeures pour que la Cour
refuse de donner un avis dans les cas suivants :
i) si lavis demandØ ne sera pas une explicita tion pouvant Œtre utile à lorgane demandeur, et
plus encore si lavis demandØ risque dŒtre nuisible à laction des Nations Unies;
ii) si la question sur laquelle un avis est de mandØ est une question qui constitue le fond dun
diffØrend entre deux parties et que lune de ce lles-ci naccepte pas que la Cour exerce sa
compØtence;
iii) si la question ne peut avoir de rØponse san s certaines recherches sur les faits et que les
ØlØments prØsentØs à la Cour ne sont pas de nature à lui permettre de parvenir à une
conclusion satisfaisante sur ces faits.
3.16. Le Royaume-Uni considŁre que la prØsente affaire relŁve de ces trois catØgories.
1. Un avis n’aiderait pas l’Assemblée généra le à s’acquitter de ses fonctions et serait
probablement préjudiciable à l’action de l’ONU dans son ensemble
3.17. Il Øtait fait allusion plus haut à la pos ition prise par la Cour dans laffaire de la Licéité
de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires en dØclarant quelle ne contesterait pas
normalement la position de lorgane demandeur sur la question de savoir si lavis de la Cour Øtait
nØcessaire pour lactivitØ de cet organe 3. Cependant la prØsente affaire a ceci de particulier,
quelle concerne directement dautres organes princi paux des Nations Unies. Alors en effet que la
demande provient dune session extraordinaire d urgence de lAssemblØe gØnØrale convoquØe en
vertu de la rØsolution «union pour la paix» 31, la situation au Moyen-Orient, dont fait partie la
question palestinienne, relŁve es sentiellement des responsabilitØs du Conseil de sØcuritØ dans le
domaine du maintien de la paix internationale et de la sØcuritØ.
3.18. Lorsque la Cour, en sa qualitØ dorgane principal des Nations Unies, sacquitte de ses
fonctions de juridiction consultative, sa responsabilitØ nest pas limitØe à lorgane qui lui en a fait la
demande, mais sØtend à lensemble des Nations Unies. Il sensuit donc que la Cour, en se
demandant si un avis de sa part aurait des c onsØquences positives ou nØgatives, ne devrait pas en
lespŁce se contenter de songer aux effets possibl es que cet avis pourrait avoir sur lAssemblØe
gØnØrale, mais envisager le ffet plus gØnØral quil pourrait a voir sur laction gØnØrale des
NationsUnies, et plus particuliŁrement sur cel le de lorgane particu liŁrement responsable du
maintien de la paix internationale et de la sØcuritØ, cest-à-dire du Conseil de sØcuritØ.
3.19. Or, le Conseil de sØcuritØ est loin dŒtre restØ inactif ces derniers temps sur la question
du Moyen-Orient. Comme il Øtait indiquØ aux paragraphes 2.2 à 2.6 ci-dessus, et mŒme sil est vrai
quun projet de rØsolution sur le mur israØlien sest heurtØ à un veto le 14 octobre 2003, le Conseil
a nØanmoins adoptØ plusieurs rØsolutions sur ce suje t, et tout rØcemment encore la rØsolution 1515
(2003) du 19novembre2003, qui, adoptØe à lunanimitØ , fait suite aux manifestations de soutien
que le Conseil de sØcuritØ a plusieurs fois donnØes (notamment par sa rØsolution 1435 (2002)) aux
efforts du Quatuor pour obtenir laccord dIsraºl et de lAutoritØ palestinienne à un plan de paix
30
Voir plus haut, par. 3.8.
31
Voir plus haut, par. 2.7 à 2.12. - 13 -
pratique et à sa mise en uvre. Dans cette rØsolution1515 (2003), le Conseil a donnØ son
approbation à la feuille de route (cest-à-dire au plan de paix proposØ par le Quatuor au dØbut de la
mŒme annØe) et appelØ Israºl et lAutoritØ palestinienne à sacquitter des obligations qui en
dØcoulent pour lun et lautre.
3.20. La feuille de route prØvoit un certain nombre de mesures pratiques à prendre
progressivement par Israºl et par lAutoritØ palestinienne. Parmi ces mesures, figurent des mesures
à prendre immØdiatement en matiŁre de sØcuritØ, pa r lesquelles lAutoritØ palestinienne dØclarerait
sa volontØ sans Øquivoque de mettre fin à la violen ce et aux attaques terrori stes visant Israºl et
prendrait des efforts visibles pour sopposer aux au teurs et aux organisateurs des attaques contre
Israºl et les IsraØliens. Israºl, de son côtØ, se ngagerait à ne rien faire pour nuire à la confiance des
parties et entreprendrait un retrait progressif des zones placØes jusque-là sous le contrôle de
lAutoritØ palestinienne. Des efforts ultØrieurs aboutiraient enfin à un Øtat de choses permanent et
acceptØ par les deux parties qui 32rmettrait de rØsoudre les problŁmes tels que celui de JØrusalem et
celui des colonies israØliennes .
3.21. Manifestement, le Conseil de sØcuritØ est davis que la feuille de route, par son
caractŁre ØquilibrØ et limportance qui y est don nØe aux nØgociations, offre la meilleure chance de
parvenir à une solution pacifique de la situation au Moyen-Orient. Cela na pas ØtØ contestØ par
lAssemblØe gØnØrale. Du reste, et quel que soit le rôle assumØ par lAssemblØe lors de la reprise
de la dixiŁme session extraordinaire durgence, elle nest manifestement pas en position de
sopposer aux dØcisions du Conseil de sØcuritØ. Pour dØcider si la Cour doi t ou non rØpondre à la
demande que lui adresse lAssemblØe gØnØrale, le cr itŁre à appliquer est donc de savoir si un avis
de la Cour aurait un effet positif ou nØgatif sur les espoirs de paix quoffrent ladoption et la mise
en uvre de la feuille de route.
3.22. La Cour, dans son avis sur laffaire de la Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes
nucléaires, a fait Øtat de ses scrupules devant toute conc lusion sur les effets que son avis pourrait
avoir sur les perspectives de nØgociation : «Des opinions contraires ont ØtØ exposØes devant la Cour
et il nest pas de critŁre Øvident qui permettrai t à celle-ci de donner la prØfØrence à une position
plutôt quà une autre.» 33
3.23. Or, dans la prØsente espŁce, les participants les plus actifs aux efforts de paix au
Moyen-Orient montrent une remarquable unitØ de pensØe sur le fait quun avis de la Cour serait
sans effet et probablement inutile. Comme il Øtait dØjà dit plus haut, tous les Etats membres du
34
Quatuor ont adoptØ cette position . Tous ces Etats se sont dailleurs abstenus ou ont votØ contre la
dØcision de demander un avis à la Cour, de mŒme que la NorvŁge, qui avait jouØ un rôle actif dans
des conversations antØrieures sur la paix, et la Suisse, qui avait servi dhôte pour de nombreuses
rencontres du processus de paix.
3.24. Par contre, aucun des Etats qui se sont prononcØs en faveur du projet de rØsolution sur
la demande davis consultatif na exprimØ lespoir que celui-ci viendr ait en aide à lapplication de
la feuille de route ou rØpondra it aux prØoccupations exprimØes à cet Øgard par les membres du
Quatuor.
32Nations Unies, doc. S/2003/529.
33
C.I.J. Recueil 1996, p. 327, par. 17.
34Voir plus haut, par. 1.6 et 2.13-2.16. - 14 -
3.25. Le Royaume-Uni considŁre que ces prØoccupations sont parfaitement comprØhensibles.
La feuille de route prØvoit un processus dØlicat de concessions mutuelles oø les actes dune partie
ne sont jamais considØrØs de façon isolØe, mais toujours par rapport aux actes de lautre partie, et
oø les possibilitØs daccord et de confiance mutuelle doivent se concrØtiser grâce à une sØrie
defforts successifs, certaines questions devant Œtre abordØes sans dØlai, dautres remises à un stade
ultØrieur, et laccent Øtant mis sur les efforts futurs et non pas sur les responsabilitØs liØes au passØ.
3.26. Au contraire, la demande faite à la Cour a pour but dobtenir son avis sur les actes
dune des parties seulement, Israºl, et sur une seu le question, le mur. Le fait de ne vouloir
connaître que des consØquences juridiques de la c onstruction du mur par Israºl, à lexclusion de
toutes ces autres questions, est exactement contraire à la mØthode adoptØe par la feuille de route. Et
lon voit difficilement comment un avis juridique sur cette seule question pourrait avoir un effet
positif sur les efforts des NationsUnies pour se rapp rocher de la paix grâce à la feuille de route
(aucun Etat na dailleurs exprimØ un tel espoir), al ors quil y a toutes les raisons de craindre quun
avis de la Cour, mŒme rØdigØ dans les termes les plus prudents, aurait un effet nØgatif sur le
processus de paix.
3.27. La Cour a parfaitement raison de vouloir j ouer son rôle de principal organe judiciaire
des NationsUnies en rØpondant aux demandes qui lui viennent des autres secteurs de
lOrganisation, mais le Royaume-Uni considŁre que cest prØcisØment parce quelle est un des
organes principaux des NationsUnies quelle doit Œtre consciente du risque quil y a à ce quun
avis portØ sur un aspect dune situation aussi dØlicate que celle du processus de paix au
Moyen-Orient nuise aux efforts de lensemble de lOrganisation sur ce terrain. Sil y a, comme ici,
des raisons de croire que ce serait le cas, il y a aussi une raison majeure pour que la Cour ne donne
pas suite à la demande qui lui est faite.
3.28. Le Royaume-Uni fera remarquer en outre que, mŒme si la Cour ne se souciait que de
leffet que son avis pourrait avoir sur la tâche de lAssemblØe gØnØrale, la conclusion serait la
mŒme. Comme il a dØjà ØtØ dit, aucun des Et ats qui se sont prononcØs en faveur de la
rØsolutionES-10/14 na Ømis lidØe quun avis de la Cour serait u tile pour le travail à venir de
lAssemblØe. Et aucun dentre eux ne sest montrØ davis quil y avait des questions dordre
juridique à Øclaircir. Au contraire, la plupart des Etats semblent avoir considØrØ que laspect
juridique de la question ne posait aucune difficultØ. LAssemblØe avait dores et dØjà dØclarØ que la
construction du mur sur le Territoire palestinien o ccupØ entraînait certaines violations du droit
international, et rien, dans le compte rendu des dØbats du 8 dØcembre 2003, nindique que les Etats
qui ont votØ la rØsolution eussent des doutes sur ce point, ni quil y eßt aucun doute ou aucun
dØsaccord sur les consØquences juridiques de la construction du mur.
3.29. En fait, la raison avancØe pour demande r un avis Øtait que cela Øtait rendu nØcessaire
par le fait quIsraºl navait pas donnØ suite aux demandes que lAssemblØe lui avait prØcØdemment
faites au sujet du mur. Comme la dit le reprØsentant de la Palestine :
«Israºl na pas respectØ la rØsolution [ES-10/13] et de nouvelles mesures doivent
donc Œtre prises. Chacun est conscient du fait que nous estimons que la possibilitØ de
ladoption de nouvelles mesures à ce stade c onsiste à demander un avis consultatif de
la Cour internationale de Justice à propos des consØquences juridiques de lØdification
du mur quIsraºl, puissance occupante, est en train de construire, au mØpris des
dispositions pertinentes du droit international et des rØsolutions du Conseil de sØcuritØ
et de lAssemblØe gØnØrale relatives à la question. - 15 -
En labsence dautres mesures spØcifiques concrŁtes pour obliger Israºl à arrŒter
de construire le mur et à en dØmanteler les parties existantes, nous devons au
minimum chercher à affirmer les aspects juridiques de la question, comme le caractŁre
illØgal du mur et la nØcessitØ pour les Etats et le systŁme des Nations Unies de ne pas
reconnaître le mur et ses implications. N ous espØrons Øgalement que cela mettra une
pression accrue sur Israºl, la puissance occupante, afin quil respecte la volontØ35e la
communautØ internationale et adhŁre aux dispositions du droit international.»
3.30. Il importe de rappeler que la juridi ction consultative est un moyen permettant à un
organe qui a besoin de certaines prØcisions juridiques pour son action future dobtenir linformation
nØcessaire sur ce point. Ce nest pas un moyen de faire appliquer la loi contre un Etat, aussi
rØcalcitrant que celui-ci puisse Œtre devant celle-là. Or, la dØclaration citØe dans le paragraphe
prØcØdent semble bien indiquer que lavis recherch Ø ne lØtait pas dans le but auquel rØpond une
juridiction consultative. De plus, le fait dessay er dutiliser une juridiction consultative comme
dune sorte de pouvoir judiciaire est contraire au principe qui veut que les Etats ne puissent Œtre
tenus de soumettre leurs diffØrends ou leur comportement à un tr ibunal international que sils y
consentent, comme on le verra ci-dessous.
2. La présente affaire porte sur un différend bilatéral
3.31. Le Royaume-Uni considŁre en outre que la prØsente affaire relŁve du principe fort bien
formulØ dans laffaire du Sahara occidental ―et que le Royaume-Uni invite la Cour à
confirmer ― qui veut que la Cour refuse de rØpondr e à une question qui lui est posØe si cela
reviendrait à prendre une dØcision sur un diffØrend b ilatØral au mØpris du principe de la nØcessitØ
du consentement en matiŁre contentieuse. La jurisprudence mŒme de la Cour prouve que
limportance de ce principe ne fait pas de doute. Cest particuliŁrement le cas ici.
3.32. En lespŁce, en effet, la constructi on du mur a indiscutablement donnØ naissance à un
diffØrend bilatØral entre Israºl et la Palestine (l a Palestine pouvant ici Œtre assimilØe à un Etat aux
fins de lapplication de ce principe). Que ce soit devant lAssemblØe gØnØrale ou au sein du
Conseil de sØcuritØ, les orateurs ont tous dØcl arØ que ce nØtait pas la construction du mur qui
constituait en soi une violation du droit international, mais le fa it que cette construction avait lieu
sur un territoire occupØ. Les consØquences possibl es en matiŁre de propriØtØ territoriale ont ØtØ
ØvoquØes comme un des principaux su jets dinquiØtude en la matiŁ re. Ainsi, les questions à
lexamen font manifestement partie dun diffØrend bilatØral entre Israºl et la Palestine, et le
principe confirmØ dans laffaire du Sahara occidental est donc applicable. De plus, il est manifeste
quIsraºl naccepte pas la compØtence de la C our. La seule question est donc de savoir si
lexception de laffaire du Sahara occidental peut sappliquer ici.
3.33. Selon le Royaume-Uni, ce nest pas le cas, et la prØsente espŁce sØcarte de laffaire du
Sahara occidental sur deux points importants. PremiŁrement, il ne sagit pas ici dun cas oø, pour
reprendre les termes de lavis rendu dans laffaire du Sahara occidental, la controverse «a surgi
lors des dØbats de lAssemblØ e gØnØrale» et «indØpendamment, dans le cadre de relations
36
bilatØrales» . Dans laffaire du Sahara occidental, les questions posØes par lAssemblØe gØnØrale
avaient trait à des situations qui rØsultaient unique ment de la façon dont se dØroulait dans ce cas le
processus de dØcolonisation qui avait commencØ au sein de lAssemblØe gØnØrale. Le diffØrend sur
le mur, au contraire, est nØ dune relation bilatØrale entre Israºl et la Palestine et de leurs
rØcriminations mutuelles sur les problŁmes de sØcuritØ.
35
A/ES-10/PV.23, p. 3.
36
C.I.J. Recueil 1975, p. 25, par. 34. - 16 -
3.34. DeuxiŁmement, la nature des questions posØes dans laffaire du Sahara occidental
indiquait que la rØponse de la Cour nØtait pas censØe dØfinir la situation juridique au moment de la
demande qui lui Øtait faite, mais portait sur les droits historiques concernant le Sahara occidental à
lØpoque de sa colonisation par lEspagne; et, comme la Cour la prØcisØ, les rØponses donnØes aux
questions qui lui avaient ØtØ adressØes ne pouvaient affecter les droits territoriaux de lEspagne :
«Le rŁglement de ce problŁme sera sans effet sur les droits que lEspagne
possŁde actuellement en tant que puissance administrante, mais il aidera lAssemblØe
gØnØrale à se prononcer sur la politique à suivre pour accØlØrer le processus de
dØcolonisation du territoire. Il en rØsulte que la position juridique de lEtat qui a
refusØ son consentement à la prØsente instance ne saurait à aucun degrØ Œtre
compromise par les rØponses que la Cour po urrait faire aux questions qui lui sont
posØes.» (Interprétation des traités de paix conclus avec la Bulgarie, la Hongrie et la
37
Roumanie, première phase, C.I.J. Recueil 1950, p. 72.)
3.35. La prØsente affaire diffŁre Øgalement de laffaire de la Namibie, bien que la question
posØe soit apparemment inspirØe de celle qui la ØtØ dans ce cas. Laffaire de la Namibie portait sur
les consØquences juridiques qui dØcoulaient pour le s Etats dune rØsolution du Conseil de sØcuritØ
et du maintien de la prØsence sud-africaine en Na mibie malgrØ cette rØsolution. La question posØe
dans la prØsente espŁce porte elle aussi sur les consØquences juridiques de laction dIsraºl en
cause, mais le droit applicable se compose de laccord darmistice de 1949, des dispositions lØgales
en matiŁre de conflit armØ et doccupation milita ire, et de divers autres principes du droit
international gØnØral. MŒme si la question posØe dans la rØsolutionES-10/14 vise aussi les
«rØsolutions pertinentes du Conseil de sØcuritØ et de lAssemblØe gØnØrale», aucun de ces
instruments ne constitue une dØcision occupant une position centrale comparable à celle
quoccupait la dØcision du Conseil de sØcuritØ dans laffaire de la Namibie. Plus particuliŁrement,
et de façon tout à fait contraire au cas de laffaire de la Namibie, ni la lØgalitØ ou lillØgalitØ des
actes en question, ni les consØquences juridiqu es qui dØcoulent de cette lØgalitØ ou de cette
illØgalitØ ne dØpendent en aucune façon dune dØcision de lorgane qui a demandØ lavis de la Cour,
cest-à-dire de lAssemblØe gØnØrale.
3. Rendre un avis en l’espèce obligerait à établir certains faits d’une façon qui est impossible
pour la Cour au vu des informations dont elle dispose
3.36. Enfin, le Royaume-Uni considŁre que, au cas oø la Cour dØciderait de rØpondre à la
question qui lui est posØe, il faudrait pour cela qu elle prenne position sur un certain nombre de
faits. La Cour a en effet affirmØ que le caractŁ re juridictionnel de son action a pour consØquence
que toute constatation de fait en matiŁre consultative doit se faire avec le mŒme soin et Œtre
appuyØe sur les mŒmes ØlØments de preuve que dans une affaire contentieuse. Autrement dit, la
Cour ne peut pas aborder les questions de fait comme peuvent le faire un organe politique ou les
Etats agissant dans le cadre de leurs relations po litiques. En lespŁce, le Royaume-Uni se permet
de douter que la Cour puisse faire les constata tions de fait nØcessaires selon les mØthodes quexige
sa jurisprudence.
3.37. On ne peut pas prØvoir toutes les questi ons de fait sur lesquelles la Cour pourrait avoir
à se prononcer, mais il est difficile de voir comment elle pourrait se prononcer sur les consØquences
juridiques de la construction dun mur sans sinterro ger sur la nature et la gravitØ de la menace à
laquelle ce mur est censØ rØpondre et sur la ques tion de savoir si le mur est, compte tenu
notamment de son tracØ, une rØponse adaptØe à cette menace. Sur le premier point, il faudrait que
la Cour Øtudie les attaques qui ont frappØ des cibl es israØliennes au cours des derniŁres annØes,
37
C.I.J. Recueil 1975, p. 27, par. 42. - 17 -
ainsi que le degrØ de probabilitØ dattaques futures; sur le deuxiŁme, quelle Øvalue leffet probable
du mur face à ces attaques, comparØ avec ses con sØquences pour la population palestinienne. Et il
faudrait pour cela que cet effort dinformation porte sur diffØrents ØlØments du mur, puisque cest le
tracØ de celui-ci, et le fait que certains de ses ØlØments se trouvent en territoire occupØ, qui se
trouvent au cur de la thŁse de lillØgalitØ de laction israØlienne.
3.38. La difficultØ apparaît plus clairement si lon envisage la situation juridique en vertu de
deux des traitØs expressØment invoquØs dans la rØ solutionES-10/14: la quatriŁme convention de
GenŁve, de 1949, et les rŁgles anne xØes à la quatriŁme convention de La Haye relative aux lois et
coutumes de la guerre sur te rre, de1907 qui abordent la question des cas oø une puissance
occupante peut rØquisitionner ou dØtruire des biens. Larticle 23 du rŁglement de La Haye dispose
à ce sujet que :
«il est notamment interdit :
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
g)de dØtruire ou de saisir des propriØtØs ennemies, sauf les cas oø ces
destructions ou ces saisies seraient impØrieusement commandØes par les nØcessitØs de
la guerre.»
Et larticle52 traite des rØquisitions de biens privØs «pour les besoins de larmØe doccupation».
De mŒme, larticle53 de la qua triŁme convention de GenŁve in terdit la destruction des biens
mobiliser ou immobiliers «sauf dans les cas oø ces destructions serai ent rendues absolument
nØcessaires par les opØrations militaires», et lartic le147 fait de «la destruction et lappropriation
de biens» des infractions graves pouvant entraîner des poursuites pØnales si elles sont «non
justifiØes par des nØcessitØs militaires et exØcutØes sur une grande Øchelle de façon illicite et
arbitraire».
3.39. On voit mal comment la Cour, compte tenu de sa nature juridictionnelle, pourrait
appliquer ces dispositions sans se livrer dabord à une complexe apprØciation des faits relatifs à
limportance, à la nature et à lemplacement gØographique des menaces visant Israºl, puisque cette
apprØciation serait indispensable pour appliquer les dispositions voulues en matiŁre militaire.
3.40. Une telle apprØciation des faits, difficile dans toute affaire, serait rendue encore plus
difficile en lespŁce par le fait que seul Israºl dis pose dune grande partie de cette information.
Enfin, le caractŁre dune procØdure consultative pe rmet difficilement da pprØcier la valeur des
ØlØments de preuve à la lumiŁre du dialogue en tre les parties, qui relŁve de la procØdure
contentieuse, ou, sil le faut, par lexamen ou le contre-examen des tØmoins.
3.41. Toutes ces considØrations amŁnent à conclure que la prØsente affaire est exactement du
type auquel doit sappliquer la dØcision prise pa r la Cour permanente dans laffaire de la Carélie
orientale quant à lobligation de refuser dexercer la compØtence consultative lorsque se posent des
questions de fait impossibles à rØsoudre. - 18 -
IV. C ONCLUSIONS
4.1. Pour les raisons exposØes ci-dessus, le Royaume-Uni prie respectueusement la Cour de
rØaffirmer les principes qui la conduisent à ex ercer le pouvoir discrØtionnaire quelle tient de
larticle65, paragraphe1, du Statut et de re fuser de rØpondre à la question posØe en lespŁce par
lAssemblØe gØnØrale.
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Exposé écrit du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord [traduction]