Requête introductive d'instance

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7197
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o
Rôle général n . 96

COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

REQUÊTE

INTRODUCTIVE D'INSTANCE

enregistrée au Greffe de la Cour
le 28 mars 1995

COMPÉTENCE EN
MATIÈRE DE PÊCHERIES

(ESPAGNE c. CANADA)

__________

I. L'AMBASSADEUR D'ESPAGNE AUX

PAYS-BAS AU GREFFIER DE
LA COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

La Haye, le 28 mars 1995.

J'ai été chargé par le ministre des affaires étrangères du Royaume d'Espagne de porter à votre
connaissance, conformément à l'article 40, paragraphe 2, du Règlement de la Cour, que M.
José Antonio Pastor Ridruejo, directeur du service juridique international du ministère des
affaires étrangères, a été désigné comme agent dans l'instance dont la Cour vient d'être saisie
par l'Espagne, introduite contre le Canada, par voie de requête écrite, en vertu des articles 40,
paragraphe 1, du Statut et 38, paragraphe 1, du Règlement de la Cour.

Je certifie que la signature apposée sur la requête est la signature de M. José Antonio Pastor
Ridruejo.

Conformément à l'article 38, paragraphe 2, du Règlement, je porte aussi à votre connaissance
que, pour l'envoi de toutes communications relatives à l'affaire, I'adresse de l'agent est
l'ambassade d'Espagne à La Haye. (Signé) Rafael PASTOR

ambassadeur d'Espagne au

__________

II. REQUETE INTRODUCTIVE D'INSTANCE

Conformément aux articles 40, paragraphe 1, du Statut de la Cour internationale de Justice et
38, paragraphes 1, 2 et 3, de son Règlement, et suivant les instructions du ministre des affaires
étrangères, je dépose, en ma condition d'agent du Royaume d'Espagne, une requête

introductive d'instance contre le Canada.

1. LES FAITS

A. Le 12 mai 1994, le Canada a adopté une loi amendant le Coastal Fisheries Protection Act.

a) Conformément à la loi amendée, on a voulu imposer à toutes les personnes à
bord de navires étrangers une large interdiction de pêcher dans la zone de
réglementation de l'OPAN, c'est-à-dire, en haute mer, en dehors de la zone
économique exclusive du Canada, les stocks chevauchant ces zones,
contrairement aux mesures de protection prises dans le cadre de la convention

sur la coopération multilatérale aux pêcheries de l'Atlantique Nord-Ouest, de
1978. Ladite loi laisse à la discrétion des autorités canadiennes le soin
d'adopter la réglementation d'application avec la liste des stocks de poissons à
protéger, les mesures de protection pertinentes et les catégories de navires
étrangers auxquelles ces mesures s'appliquent et de préciser les pouvoirs
pouvant être utilisés pour les faire respecter. La loi elle-même autorise les
fonctionnaires canadiens à monter à bord, à inspecter et à arraisonner les
navires étrangers soupçonnés d'infraction.

En outre, ladite loi permet expressément (art. 8) I'usage de la force contre les
bateaux de pêche étrangers, dans les zones que l'article 2.1 qualifie, sans
détour, comme «haute mer». Cette même prévision se répète au paragraphe 25
(4) du code criminel, amendé par la même loi, en permettant à l'« agent de la
paix» I'utilisation, dans des conditions déterminées, «d'une force qui est, soit
susceptible de causer la mort [de la personne à arrêter] ou des lésions
corporelles graves, soit employée dans l'intention de les causer», dans des cas
tels que ceux qui concernent les bateaux de pêche étrangers qui se livrent à des

activités dans les eaux de la haute mer affectées par la législation canadienne.

b) Le 25 mai 1994, le Gouvernement canadien a adopté la réglementation
d'application correspondante, réglementation qui stipule, en particulier, l'usage de la force par les garde-pêche contre les bateaux de pêche étrangers visés par
elle — en particulier les navires sans pavillon ou sous pavillon de
complaisance — qui enfreignent leurs mandats dans la zone de haute mer
couverte par son champ d'application.

Le 3 mars 1995, le Gouvernement canadien a adopté une nouvelle réglementation

d'application moyennant laquelle on permet expressément lesdits comportements à l'égard des
navires espagnols et portugais en haute mer.

B. Suite aux mesures prises sur la base de cette législation, le 9 mars 1995, à 4 heures 52
minutes p.m. (heure d'Ottawa) le bateau Estai battant pavillon espagnol, et avec un équipage
espagnol, a été arrêté et arraisonné en haute mer, dans la région des Grands Bancs, aux
coordonnées 48° 03' N, 46° 26' O, à 245 milles de la côte approximativement, par le
patrouilleur canadien Cape Roger, aidé par le patrouilleur Leonard J. Cowley et le garde-côte

Sir Wilfred Grenfell, également canadiens, après des tentatives successives d'abordage par des
vedettes rapides avec des individus munis d'armes automatiques et d'intimidation avec des tirs
d'avertissement produits par un canon de 50 millimètres par le patrouilleur Leonard J.
Cowley, après avoir obtenu, selon la note canadienne du 10 mars 1995, «les autorisations
nécessaires».

Le bateau et son équipage, dont la sécurité et l'intégrité avaient été mises en danger grave à

cause de l'action coercitive de la flottille canadienne, ont été conduits de force et mis au
secret, au port canadien de Saint John's (Terre-Neuve), où le capitaine du bateau fut
emprisonné et soumis à une procédure criminelle pour avoir exercé une activité de pêche en
haute mer au-delà de la zone économique exclusive canadienne, et, pour résistance à
l'autorité, les papiers du bateau et une partie des captures se trouvant à bord de celui-ci furent
confisqués. Pour obtenir sa liberté et la libre disposition du bateau, l'armateur, tout en
alléguant la non-reconnaissance de la juridiction du Canada, a déposé une caution de 8000 et
500 000 dollars canadiens respectivement, fixée par un juge de la Provincial Court of

Newfoundland (Terre-Neuve) Judicial Centre of St. John's. Une nouvelle audience est prévue
le 20 avril prochain.

Des incidents comme celui de l'Estai peuvent se reproduire dans la mesure où la législation
canadienne alimente un fait illicite international continu. Les autorités du Canada ont exprimé
publiquement, et de façon notoire, leur intention de continuer à appliquer, dans tous ses
points, ladite législation dans les zones de haute mer contre d'autres navires espagnols
présents dans le même secteur.

2. LE DROIT

A. Le Royaume d'Espagne considère que, indépendamment de l'infraction aux dispositions de
la convention sur la coopération multilatérale aux pêcheries de l'Atlantique Nord-Ouest, de
1978, en particulier les articles XI, paragraphe 7, XII, XVII et XVIII, les actes du Canada
constituent une violation grave et flagrante d'au moins les principes et normes internationaux
suivants, que l'Espagne invoque pour soutenir sa requête:

a) le principe de droit international général qui proclame la juridiction exclusive de
l'Etat du pavillon sur les navires en haute mer, principe codifié par la convention deGenève sur la haute mer, de 1958, article 6, paragraphe 1, et par la convention des
Nations Unies sur le droit de la mer, de 1982, articles 92 et concordants;

b) le principe du droit international général qui proclame la liberté de navigation en
haute mer, principe codifié par la convention de Genève sur la haute mer, de 1958,

article 2, et par la convention des Nations Unies sur le droit de la mer, de 1982,
articles 87, 90 et concordants;

c) le principe de droit international général qui proclame la liberté de la pêche en haute
mer, codifié par les conventions de Genève sur la haute mer, de 1958, article 2, et par
la convention des Nations Unies sur le droit de la mer, de 1982, articles 87, 116 et
concordants;

d) le principe de droit international général qui exclut tout acte de soumission d'une
partie quelconque de la haute mer à la souveraineté d'un Etat, codifié par la convention
de Genève sur la haute mer, de 1958, article 2, et par la convention des Nations Unies
sur le droit de la mer, de 1982, article 89:

e) la norme de droit international général qui rejette le droit de poursuite en haute mer,
en dehors de la zone économique exclusive, norme déclarée par la convention des
Nations Unies sur le droit de la mer, de 1982, article 111;

f) la norme de droit international général qui interdit, sauf accord entre les Etats
intéressés, les peines privatives de liberté et les châtiments corporels pour sanctionner
les infractions aux lois et règlements de pêche;

g) le principe de droit international général de coopération des Etats dans la
conservation des ressources vivantes de la haute mer, déclaré par la convention des
Nations Unies sur le droit de la mer, de 1982, articles 63 et 117, 118 et 119;

h) le principe de droit international général qui interdit la menace ou l'usage de la
force armée dans les relations internationales, codifié par la Charte des Nations Unies,

article 2, paragraphe 4;

i) le principe de droit international général qui oblige au règlement des différends
internationaux par des moyens pacifiques de façon à ne pas mettre en danger la paix,
la sécurité et la justice, codifié par la Charte des Nations Unies, article 2, paragraphe
3;

j) le principe de droit international général conformément auquel les Etats ne peuvent
pas invoquer les dispositions de leur droit interne comme justification du non-respect
des normes internationales en vigeur qui les contraignent, codifié par l'article 27 de la
convention de Vienne sur le droit des traités, de 1969, en relation avec les normes
conventionnelles;

k) le principe de droit international général de la bonne foi dans le respect des
obligations contractées, codifié par la Charte des Nations Unies, article 2, paragraphe
2; principe qui, dans le champ d'application des traités internationaux se traduit en: 1)
1'obligation de respecter ceux agréés: pacta sunt servanda (convention de Vienne sur
le droit des traités, de 1969, art. 26);2) 1'obligation de ne pas entraver 1'objet et la fin, avant leur entrée en vigueur, des traités
adoptés et authentifiés moyennant signature par un Etat, tant qu'il n'a pas manifesté son
intention de ne pas en être partie, et des traités multilatéraux déjà agréés par ledit Etat, à
condition que l'entrée en vigueur ne soit pas retardée de façon indue (ibid, art. 18); et 3)
1'obligation de s'abstenir, tant que l'on négocie, de la réalisation d'actes ayant pour but de

mettre en danger la bonne marche des négociations.

B. Suite à la violation desdits principes et normes de droit international par le Canada, on peut
appliquer les principes de droit international général régissant la responsabilité internationale
des Etats, dont la précision sera formulée par le Royaume d'Espagne en temps opportun. Il
faut souligner à ce propos que le comportement du Canada, bien que comportant des
préjudices à des intérêts privés espagnols, lèse aussi directement, et en tout premier lieu, des

droits de l'Espagne, et des autres pays, notamment le droit à l'exercice de la juridiction
exclusive en haute mer sur des navires battant son pavillon ainsi que le droit à voir respectées
en eux les libertés de la haute mer.

3. LE DIFFÉREND

Les notes verbales de protestation n 24 et 25, présentées par 1'ambassade d'Espagne à

Ottawa, le 9 mars 1995, près le ministère des affaires étrangères et du commerce international
du Canada, et la note verbale du ministère espagnol des affaires étrangères, présentée le 10
mars 1995 près 1'ambassade du Canada à Madrid, ainsi que la note verbale du ministère des
affaires étrangères et du commerce international du Canada, de la même date, au même
ministère, soulignent l'existence d'un différend juridique entre les deux Etats. Les textes de
ces notes figurent en annexe.

o
Le Royaume d'Espagne considère que les faits relatés au n 1 constituent une violation
grossière, flagrante et très grave, de la part du Canada, des normes fondamentales,
coutumières et conventionnelles, du droit international, relatives principalement aux libertés
de la haute mer et à l'exercice exclusif de la juridiction sur les navires par l'Etat sous le
pavillon duquel ils se trouvent. Dans ce sens, la note verbale de protestation espagnole, du 10
mars 1995, affirmait, inter alia, qu'en effectuant l'arraisonnement de l'Estai

«les autorités canadiennes ont violé la norme universellement acceptée de droit international
coutumier, codifiée aux articles 92 et concordants de la convention de 1982 sur le droit de la
mer, conformément à laquelle l'Etat du pavillon possède une juridiction exclusive sur les
navires en haute mer ..., une infraction grave ... qui ne correspond pas au comportement usuel
d'un Etat responsable, effectuée sous le couvert d'une législation unilatérale non opposable
aux autres Etats.»

L'Espagne, par conséquent, a exigé la libération immédiate de l'équipage et du bateau, en se
réservant tous ses droits pour prendre les mesures opportunes, y compris l'exigence des
indemnisations, pertinentes.

La note du ministère des affaires étrangères et du commerce international du Canada, du 10
mars 1995, en se référant à la note espagnole du même jour, révèle l'obstination canadienne

pour défendre le recours à des mesures coercitives en haute mer sur des navires battant
pavillon étranger, malgré son illégalité internationale manifeste, et sa disposition d'y avoir ànouveau recours dans le futur pour rendre effective une politique de pêche unilatérale dans un
espace qui ne se trouve pas sous sa juridiction.

Il est donc établi qu'il existe un différend entre le Royaume d'Espagne et le Canada, qui,
dépassant le cadre de la pêche, affecte gravement l'intégrité même du mare liberum de la
haute mer et de ses libertés comme concept et catégorie de base de l'ordre international depuis

des siècles, et implique, en outre, une atteinte très grave contre les droits souverains de
l'Espagne, un précédent inquiétant de recours à la force dans les relations inter-Etats qui, s'il
n'est pas sanctionné par l'autorité propre d'une décision de la Cour, risque de conduire à une
escalade de tension et de violence que le Royaume d'Espagne veut éviter par le biais de sa
requête, pour reconduire le débat dans le cadre du droit international, dont le Canada s'est
délibérément éloigné; en effet, récemment encore, le Gouvernement canadien reconnaissait
que :

«A ce stade, le droit international ne permet pas a un Etat côtier de prendre des mesures
unilatérales de gestion au-delà de la zone des 200 milles» (Pêches et océans, 7 mai 1990, p.
7).

Le Gouvernement espagnol n'a pas connaissance que le droit international ait changé depuis
la date où cette déclaration officielle du Gouvernement du Canada a été faite.

Le recours au juge international, et non la coercition unilatérale pour imposer à tout prix ses
propres objectifs, constitue pour l'Espagne — et nous pensons qu'il devrait en être de même
pour le Canada, pays allié ayant toujours respecté le droit international et la juridiction de la
Cour — la mesure nécessaire de règlement pacifique des différends entre Etats qui se
respectent et se conduisent de façon adéquate dans leurs relations mutuelles et avec les autres
Etats.

4. LA COMPÉTENCE DE LA COUR

Le Royaume d'Espagne fonde la compétence de la Cour sur l'article 36, paragraphe 2, du
Statut. En effet, tant l'Espagne que le Canada ont fait, conformément à ladite disposition, la
déclaration en acceptation de la compétence de la Cour. Les deux Etats ont donc la condition
d'Etats déclarants aux fins de l'article 36, paragraphe 2, du Statut.

L'exclusion de la juridiction de la Cour en ce qui concerne les différends auxquels pourraient
donner lieu les mesures de gestion et de conservation adoptées par le Canada pour les navires

pêchant dans la zone de réglementation de l'OPAN et l'exécution de telles mesures
(déclaration du Canada, point 2, lettre d), introduite seulement le 10 mai 1994, deux jours
avant 1'amendement du Coastal Fisheries Protection Act), n'affecte même pas partiellement
le présent différend. En effet, la requête du Royaume d'Espagne ne se réfère pas exactement
aux différends concernant ces mesures, sinon à leur origine, à la législation canadienne qui est
leur cadre de référence. La requête espagnole attaque directement le titre allégué pour justifier
les mesures canadiennes et leurs actes d'exécution, une législation qui, allant beaucoup plus
loin que la simple gestion et conservation des ressources de pêche, est en soi un fait illicite

international du Canada, car elle est contraire aux principes et normes fondamentales du droit
international; une législation, qui ne relève donc pas non plus exclusivement de la juridiction
du Canada, selon sa propre déclaration (point 2, lettre c), de la déclaration); une législation, enoutre, qu'uniquement à partir du 3 mars 1995 on a voulu élargir de façon discriminatoire aux
navires battant pavillon espagnol et portugais, ce qui a produit les graves infractions au droit
des gens ci-dessus exposées. La question n'est pas la conservation et la gestion des ressources

de pêche sinon le titre pour exercer une juridiction sur des espaces de la haute mer et leur
opposabilité à l'Espagne.

5. LA RÉCLAMATION

Quant à la nature précise de la réclamation, le Royaume d'Espagne demande:

A) que la Cour déclare que la législation canadienne, dans la mesure où elle
prétend exercer une juridiction sur les navires battant pavillon étranger en
haute mer, au-delà de la zone économique exclusive du Canada, est
inopposable au Royaume d'Espagne;

B) que la Cour dise et juge que le Canada doit s'abstenir de réitérer les actes
dénoncés, ainsi qu'offrir au Royaume d'Espagne la réparation due, concrétisée
en une indemnisation dont le montant doit couvrir tous les dommages et
préjudices occasionnés;

C) que, en conséquence, la Cour déclare aussi que l'arraisonnement en haute
mer, le 9 mars 1995, du navire sous pavillon espagnol Estai et les mesures de

coercition et l'exercice de la juridiction sur celui-ci et sur son capitaine
constituent une violation concrète des principes et normes de droit
international ci-dessus indiqués.

6. JUGE AD HOC

Aux effets de ce qui est prévu à l'article 31 du Statut de la Cour internationale de Justice et de
l'article 35, paragraphe 1, de son Règlement, le Royaume d'Espagne déclare dès à present son
intention d'exercer la faculté de désigner un juge ad hoc.

7. RÉSERVE DES DROITS

Le Royaume d'Espagne se réserve le droit de modifier et d'élargir les termes de cette requête,
ainsi que les fondements invoqués.

8. MESURES CONSERVATOIRESLe Royaume d'Espagne se réserve également le droit de solliciter les mesures conservatoires
adéquates, conformément aux dispositions des articles 41 du Statut de la Cour et 73 et
suivants de son Règlement.

La Haye, le 28 mars 1995.

(Signé) José Antonio PASTOR

L'agent du Royaum

__________

ANNEXES

[Certifiées conformes à l'original par l'agent du Royaume d'Espagne. [Note du Greffe]]

Annexe 1

NOTE VERBALE N° 24/95, DU 9 MARS 1995,
DE L'AMBASSADE D'ESPAGNE AU CANADA
AU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
ET DU COMMERCE INTERNATIONAL DU CANADA

EMBAJADA DE ESPANA
N° 24/95

NOTE VERBALE

L'ambassade d'Espagne présente ses compliments au ministère des affaires étrangères et du
commerce international et se réfère au message transmis il y a quelques minutes par le
directeur général du bureau des relations avec l'Europe de l'Ouest, M. Paul Dubois, au

ministre-conseiller de cette ambassade, M. Ramón Sáenz de Heredia dans les termes suivants
:

l. Le Canada est prêt à prendre tous les moyens pour faire cesser la surpêche,
mentionnant, cette fois en anglais: «disabling force on vessels». 2. Que l'on passe le message à la flotte de ne pas résister à l'application du droit
canadien.

3. La responsabilité pour tout dommage qui pourrait résulter de résister est de
l'Espagne.

L'ambassade d'Espagne demande au ministère des affaires étrangères et du commerce
international de bien vouloir confirmer la teneur de ce message par écrit.

Ottawa, le 9 mars 1995.

Ministère des affaires étrangères

et du commerce international

Bureau des relations avec l'Europe de l'ouest (RWD)
Ottawa

(Sceau de l'ambassade d'Espagne.)

__________

Annexe 2

NOTE VERBALE N 25, DU 9 MARS 1995,

DE L'AMBASSADE D'ESPAGNE AU CANADA
AU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
ET DU COMMERCE INTERNATIONAL DU CANADA

EMBAJADA DE ESPAÑA
o
N 25

NOTE VERBALE

L'ambassade d'Espagne présente ses compliments au ministère des affaires étrangères et du
commerce international et a l'honneur de lui transmettre le communiqué que vient d'émettre le

Gouvernement espagnol:

«Le Gouvernement espagnol condamne catégoriquement la poursuite et le harcèlement d'un
vaisseau espagnol par des vaisseaux de la marine canadienne, en flagrante violation du droit
international en vigueur, puisque ces faits ont lieu au-delà des 200 milles.

Le Gouvernement espagnol a formulé sa protestation la plus énergique au Gouvernement

canadien exigeant la cessation immédiate de la persécution.Le Gouvernement espagnol a rapporté ce lamentable fait aux Etats membres de l'Union
européenne et à la Commission, tout en rappelant que le 6 mars dernier le Conseil de l'Union
européenne s'est prononcé de façon catégorique contre les menaces que les autorités
canadiennes formulaient.»

L'ambassade d'Espagne saisit cette occasion pour réitérer au ministère des affaires étrangères
et du commerce international les assurances de sa haute considération.

Ottawa, le 9 mars 1995.

Ministère des affaires étrangères
et du commerce international bureau du Vice-Ministre adjoint (RGB)

Ottawa

(Sceau de l'ambassade d'Espagne. )

__________

Annexe 3

o
NOTE VERBALE N 10
DU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES D'ESPAGNE
À L'AMBASSADE DU CANADA EN ESPAGNE

A
TEXTE ORIGINAL ESPAGNOL

Ministerio de Asuntos Exteriores

Nota Verbal No. 10

El Ministerio de Asuntos Exeriores de España saluda atentamente a la Embajada de Canadá
en Madrid, y en relación con el apresamiento del buque de pesca con pabellón español Estai
realizado por las autoridades canadienses el dia 9 de Marzo de 1995 en aguas internacionales

manifesta lo siguiente:

Que al efectuar el referido apresamiento, las autoridades canadienses han violado la norma
universalmente aceptada de derecho internacional consuetudinario, codificada en los artículos
92 y concordantes de la Convención de 1982 sobre derecho del mar, según la cual el Estado
del pabellón posee jurisdicción exclusiva sobre los buques en alta mar. Ante este grave

acontecimiento, que ha causado daños importantes a ciudadanos españoles, España presenta
su más enérgica protesta, al tiempo que exige la inmediata liberación de la tripulación y el
buque y se reserva el derecho a exigir las indemnizaciones pertinentes.El Gobierno español considera que el acto ilícito cometido por buques de la Armada
canadiense no puede de ninguna manera ampararse en supuestas preocupaciones de
conservación de las pesquerías de la zona, al violar lo establecido por la Convención NAFO
de la que Canadá es parte.

La detención del barco es una infracción grave del derecho internacional, que no corresponde
al comportamiento usual de un Estado responsable, efectuada al amparo de una legislación
unilateral no oponible a otros Estados. El Gobierno español exige en consecuencia la
anulación de la legislación mencionada.

El Gobierno español se ve forzado, a la luz de estos acontecimientos, a reconsiderar sus
relaciones con Canadá, reservándose los derechos para tomar aquellas acciones que estime
oportunas.

El Ministerio de Asuntos Exteriores aprovecha la oportunidad para reiterar a la Embajada de
Canadá en España su alta consideración.

Madrid, 10 de Marzo de 1995.

A la Embajada de Canadá en España

__________

B

TRADUCTION EN LANGE FRANÇAISE
[Certifiée exacte par l'agent du Royaume d'Espagne. [Note du Greffe.]

Ministère des affaires étrangères
(Traduction officieuse)

NOTE VERBALE N o10

Le ministère des affaires étrangères d'Espagne salue l'ambassade du Canada à Madrid, et
concernant l'arraisonnement du bateau de pêche sous pavillon espagnol Estai réalisé par les
autorités canadiennes le 9 mars 1995 dans les eaux internationales déclare ce qui suit:

En effectuant ledit arraisonnement, les autorités canadiennes ont violé la norme
universellement acceptée de droit international coutumier, codifiée aux articles 92 et

concordants de la convention de 1982 sur le droit de la mer, conformément à laquelle l'Etat du
pavillon possède une juridiction exclusive sur les navires en haute mer. Vu ce grave incident,
qui a causé des dommages importants à des ressortissants espagnols, l'Espagne présente sa
protestation la plus énergique, et simultanément elle exige la libération immédiate de
l'équipage et du navire et se réserve le droit de réclamer les indemnisations pertinentes.Le Gouvernement espagnol considère que l'acte illicite commis par des navires de la marine
canadienne ne peut en aucune manière être justifié par de présumées préoccupations de
conservation des pêcheries de la zone, car elle viole ce qui est établi dans la convention
NAFO dont le Canada est partie.

L'arraisonnement du navire est une infraction grave au droit international, qui ne correspond
pas au comportement usuel d'un Etat responsable, effectuée sous le couvert d'une législation
unilatérale non opposable aux autres Etats. Le Gouvernement espagnol exige, en
conséquence, l'annulation de la législation en question.

Le Gouvernement espagnol se voit forcé, à la lumière de ces événements, à reconsidérer ses
relations avec le Canada, en se réservant le droit de prendre les mesures qu'il estime
pertinentes.

Le ministère des affaires étrangères profite de l'occasion pour réitérer, à l'ambassade du
Canada en Espagne, l'expression de sa haute considération.

Madrid, le 10 mars 1995

À L'AMBASSADE DU CANADA EN ESPAGNE

(Sceau du ministère des affaires étrangères—Secrétariat d'Etat aux Communautés

européennes )

__________

Annexe 4

NOTE VERBALE DU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU

COMMERCE INTERNATIONAL DU CANADA
À L'AMBASSADE D'ESPAGNE AU CANADA

N° JLO 0247

Le ministère des affaires étrangères et du commerce interostional présente ses coosliments à
l'ambassade d'Espagne et, se référant à ses notes verbales n 24 et 25 du 9 mars et n 28 et 29
du 10 mars, a 1'honneur de confirmer que le Canada a dû procéder à l'arrestation d'un
chalutier espagnol, I'Estai, le 9 mars vers 16 h 50.

L'Estai a résisté aux tentatives d'arraisonnement que les inspecteurs canadiens ont effectuées

conformément à la pratique internationale. L'équipage de l'Estai a rejeté à la mer les échelles
d'abordage, puis a sectionné son chalut pour fuir les lieux. L'Estai a continué de s'éloigner
malgré les appels répétés du patrouilleur canadien qui l'enjoignait de s'arrêter. D'autres navires
espagnols ont entouré les trois navires canadiens qui poursuivaient l'Estai et ont tenté de faire
obstacle à l'arraisonnement. Le patrouilleur canadien a donc dû recourir, après avoir obtenu
les autorisations nécessaires, au tir de quatre coups de semonce. Le capitaine de l'Estai a alors

mis un terme à sa tentative de fuite et l'arraisonnement a pu se dérouler normalement et sans
utilisation de la force. Le capitaine a été arrêté et l'Estai saisi parce qu'il y avait des raisons decroire qu'ils avaient commis une ou plusieurs infractions en vertu de la loi et des règlements
sur la protection des pêcheries côtières.

L'Estai est en ce moment en route pour Saint John's où il est attendu entre 20 h 30 samedi le
11 mars et 8 h 30 dimanche le 12 mars. Une fois arrivés à Saint John's, les membres de

l'équipage seront libres de rentrer en Espagne. Les procureurs de la Couronne examinent
actuellement quelles accusations seront portées contre le navire et son capitaine en vertu de la
loi et du règlement susmentionnés.

Le ministère tient à assurer l'ambassade que toutes les mesures seront prises afin d'assurer le
respect de la dignité et le bien-être du capitaine et de son équipage.

Le ministère rappelle que l'arrestation de l'Estai a été rendue nécessaire pour mettre fin à la
surpêche du flétan du Groenland pratiquée par les pêcheurs espagnols. Le communiqué ci-
joint [Non déposé. [Note du greffe.]] du 9 mars exprime la déception de 1'honorable André
Ouellet, ministre des affaires étrangères, quant à la position de l'Union européenne qui a forcé
le Canada à prendre des mesures coercitives à cette fin.

Le ministère rappelle également que le premier ministre du Canada a proposé au président de
la Commission européenne un moratoire de soixante jours sur la pêche au flétan du Groenland
au-delà de la zone de 200 milles du Canada, afin de permettre la recherche d'une solution
négociée. En signe de bonne foi, l'honorable Brian Tobin, ministre des pêches et des océans, a
annoncé le 9 mars que le Canada ne permettrait pas à ses propres pêcheurs de pêcher le flétan
du Groenland pendant soixante jours, et ce tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de la zone de 200
milles. A l'heure actuelle, le ministère croit comprendre qu'aucun bateau espagnol ne pêche le

flétan du Groenland sur le Nez et la Queue des Grands Bancs. Le ministère sollicite la
coopération de l'ambassade pour que cette situation soit maintenue afin de permettre la reprise
des négociations.

Le ministère des affaires étrangères et du commerce international saisit cette occasion pour
renouveler à l'ambassade d'Espagne les assurances de sa très haute considération.

Ottawa, le 10 mars 1995.

__________

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