Résumé de l'arrêt du 3 juin 1985

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6417
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Number (Press Release, Order, etc)
1985/1
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Résumés des arrêts, avis conDocument non officielces de la Cour
internationale de Justice

AFFAIREDUPLATEAUCONTIlUENTAL (JAMAHIRIYAARABELIBYENNEIMALTE)

Airrê dtu3 juiin1985

Dans son arrêtdans l'affaire du plateau coritinental Procédure et conclusions des parties (paragraphes 1
entre la Jamahiriya arabe :libyenneet Malte,].aCour, à 13)
par 14voix contre 3, a indiquéles principes t:t règles La cour par récapitulerles phases de la
de droit international applicableàla délimitationdu procédureet par indiquer les dispositions du cornpro-
plateau continental entre les deiix Etats ainsi que lesmisconclu entre la ~~~~hi~ia~ rabe libyenne et ~~l~~
circonstances et facteursB prendre en considération vue de soumettre à la cour le différendqui les
pour parvenir à une délimitationéquitable.Elle a dit sur la délimitationdu plateau continental entre
qu'urirésultat équitablepouvait êtreobtenu eritraçant
d'abord entre le méridien13"50'et le méridien15"10'
une lignemédianedont chamqup eoint soitéquidi,stantde AUXtermes de l'article 1du compromis, la Cour est
la laisse de basse mer de ilacôte pertinente d.eMalte priéede trancher la question suivante :
d'une part et de la côte pertinente de la Libyred'au- "Quels sont les principes et les règles de droit
trepiirt puis en faisant subàcette ligne une transla- international qui sont applicablàsla délimitationde
tion vers le nord de 18'de latitude de manièrequ'elle la zone du plateau continental relevant de la Répu-
vienne couper le méridien 15" 10' E à une latitude blique de Malte et de la zone du plateau continental
d'environ 34"30' N. relevant de la Républiquearabe libyenne, et com-
* ment, dans la pratique, ces principes et règles peu-
* * d'espèce afin qu'elles puissent délimiterces zones

Les voix se sont réparties comme suit : voit l'article I?" voie d'un accord, comme le pré-
POUR :M. Elias, président; M. Sette-Camara, vice-
président; MM. Lachs, h4orozov, Nagendrsr Singh, Selon l'article III
Ruda, Ago, El-Khani, sir Robert Jennings, MM. de "Une fois que la Cour internationale de Justice
Lacharrière, Mbaye, Bedjaoui, juges; MM. \ralticos. aura rendu son arrêt,le Gouvernement de la Répu-
Jiméiiezde Aréchaga,juges ad hoc; bliquede Malteet leGouvernement de laRépublique
CONTRE : MM. Mosler, Oda et Schwebel, juges. arabe libyenne entameront des négociationsen vue
de déterminer les zones respectives de leur plateau
La composition de la Cour pour l'affaire étaitla sui- continental et de conclure un accordàcette fincon-
vante: :M. Elias, président; M. Sette-Camara, vice- formément à l'arrêtde la Cour."
président; MM. Lachs, h4orozov, Nagendra Singh,
Ruda, Mosler, Oda, Ago, El-Khani, Schwebel,sir Ro- *
bert Jennings, MM. de Lacharrière, Mbaye, Bedjaoui, * *
ad hoc.MM. Valticos et Jiménez de Aréchaga,juges Après avoiresquisséle cadre géographique (par. 14
à 17)dans lequel doit s'effectuer globalement la déli-
* mitation du plateau continental, objet du procès, la
* * Ci~urpréciselamanièredont elle conçoit la tâche qu'il
lui appartient d'accomplir (par. 1à 23).
M. El-Khani, juge, joint une déclaratioà l'arrêt.
M. Sette-Camara, vice-président, joint 2.l'arrêt Silespartiessontd'accord sur latâche de la Couren
l'exposé de son opinion individuelle; MM. .Ruda et qui concerne la définitiondes principes et règlesde
Bedjiioui, juges, et M. Jiiménezde Aréchaw, juge dBsaccordsur la manièredont la Cour pourra indiquerten
ad haoc,y joignent celui de leur opinion ccinjointe, dans la pratique leur en oeuvre. Malte est d'avis
M. Mba~e, jw, et M. Valticos, juge ad Iloc, les que 1,s principes et règlesapplicables doivent se tram
exposés de leur opinion individuelle. diiire concrètementpar le tracé d'unelignedéterminée
MM. Momsler, Oda et Schwebel, juges, joignent à (enl'occurrence une ligne médiane)alors que la Libye
l'arret les exposés de leur opinion dissidente. affirmeque latâche de la Cour ne va pasjusqu'à tracer
effectivement la ligne de délimitation.Après avoir re-
* cherchél'intention desPartiesau compromis,dont elle
* * tient sa compétence, la Cour ne considère pas que les
termes du compromis lui interdisent d'indiquer une
Les juges intéressés ontdéfiniet expliquédans ces lil:nede délimitation.
opinions la position qu'ils ont prise sur certains points
traités dans l'arrêt. Pour ce qui est de la portéede l'arrêt,la Coursou-
* lignequeladélimitationenvisagéeparle compromis ne
* * concerne que des zones de plateau continental "re-
levant" des parties,à l'exclusion de zones qui pour-
187 raient "relever" d'un Etat tiers. Bien que les parties juge le soinde luidonner un contenuprécis.Elle relève
l'aientenfaitinvitée nepaslimitersonarrêt àlarégion aussi que les deux Parties conviennent que, quel que
où elles sontseulesenprésence, ellene pense pas avoir soif.le statut de l'article 83de la conventionde 1982,la
une telle liberté d'action, vu l'intérêtmanifesté à délimitationdoitsefaire conformément à des principes
l'égardde l'instance par l'Italie dont on sait qu'elle aéquitablesentenantcompte de toutes lescirconstances
introduit en 1984une requête à fin d'intervention en pertinentes.
vertu de l'Article 62du Statut, requête quela Courn'a Sur le fondement du titre au plateau continental, en
pas cru pouvoir admettre. Commela Courl'avait laissé revanche, lespositionsdes Parties sont inconciliables.
prévoir dans son arrêtdu 21 mars 1984,la présente Pour la Libye, le prolongement naturel du territoire
décisiondoit êtred'une portéegéographiquelimitéeet terrestre d'un Etat dans la mer reste la base essentielle
ne doit porter que sur la zone où, selon les indicationsdu nitrejuridique sur des zones de plateau continental.
donnéespar l'Italie, cet Etat n'émet pasde prétentions Polir Malte les droits sur le plateau continental ne sont
sur le plateau continental. La Cour accorde ainsi à plu:$définisen fonction de critères physiques et sont
l'Italiela protectionqu'elle recherchaiten intervenant. régiispar la notion de distanceà partir de la côte.
La localisation deces prétentionsI'amene,du côtéest,
à limiter la zone à l'intérieurde laquelle elle va sta- ï.)e l'avis de la Cour, il n'est pas possible de faire
tuer auméridien15"10'E, ycomprisau sudduparallèle abstraction, dans la présente affaire qui porte sur la
34"30' N, et du côtéouest, à adopter pour limite le délimitationdu plateau continental, des principes et
méridien13"50'E. Les parties ne sauraientse plaindre règles sur lesquels repose le régimede la zone éco-
car, selonla Cour, en émettant un avisdéfavorable à la nomique exclusive. Les deux institutions sont liées
demanded'intervention italienne,ellesontmarquéleur dans le droit international moderne et I'une des cir-
préférence pourune portée géographique limitéede constances pertinentes à prendre en compte pour la
l'arrêt quela Cour serait appelée à rendre. délimitationdu plateau continentald'un Etat estl'éten-
due légalementautoriséede lazone économiqueexclu-
sive relevant de ce mêmeEtat. La pratique des Etats
démontre que l'institution de la zone économique
La Cour fait observer qu'aucune considérationtirée exclusive. où il est de règleque le titre soit déterminé
de l'historiquedu différend,des mesures législativeset par la distance, s'est intégréeau droit coutumieret s'il
des activités de prospection se rapportant au plateau est vrai que les institutions du plateau continental et de
continental nejoue en l'espèceun rôle décisif(par. 24 lazone économiqueexclusivene seconfondentpas,les
et 25).La Cour n'ya trouvéniacquiescementpar I'une droits qu'une zone exclusive comporte sur les fonds
des Parties àune revendication de l'autre ni indication marins de cette zone sont définispar renvoi au régime
utile des vues de l'une des Parties sur une solution prévupour le plateau continental. S'ilpeut y avoir un
équitablequisoitdifférentedesthèsesavancéespar elle plateau continentalsans zone économiqueexclusive, il
devant la Cour. Elle doit en conséquence statuer en ne saurait exister de zone économiqueexclusive sans
appliquant aux conclusions qui lui sont soumises les plateau continentalcorrespondant. Par suite, pour des
principes et règlesgénérauxdu droit international. raisons tantjuridiques que pratiques, le critèrede dis-
tance doit dorénavant s'appliquer au plateau continen-
tal comme àla zone économique exclusive, indépen-
damment de la disposition relative à la distance que
l'on trouve à l'article 76de la convention. A moins de
Les principes et règles de droit international applicn- 200millesde la côte, le prolongement naturelse définit
bles (paragraphes 26 à 35) en partie par la distance du rivage. Les notions de
Les deux parties reconnaissentque le différend doit prolongement naturel et de distance ne sont pas des
êtrerégiparle droitinternationalcoutumier.Eneffet, si notions opposéesmaiscomplémentairesquidemeurent
Malte est partieà la convention de Genèvede 1958sur l'une et l'autredes élémentsessentielsdelaconception
le plateau continental, la Libye ne l'est pas et si tous juridique du plateau continental. La Cour ne peut donc
deux ont signé laconvention de 1982sur le droit de faire sienne la thèse libyenne suivant laquelle la dis-
la mer, cet instrument n'est pas encore entré en vi- tance de la côte ne serait pas un élémentpertinent aux
gueur. Les parties s'accordent cependantpour estimer fins de la décision en l'espèce.
que certaines de ses dispositions expriment le droit
coutumier, tout en ayant des avis divergents sur les L'argument libyen relatifri lazone d'effondrement(pa-
dispositions qui présentent ce caractère. Vu l'impor- ragraphes 36 à 41)
tance majeure decette convention quiaété adoptéepar La Cour examine ensuite l'argument libyen tiréde
l'écrasante majoritédes Etats, il incombe à la Cour l'existence d'une "zone d'effondrement" dans la ré-
d'examiner jusqu'à quel point l'une oii l'autre de ses giorià délimiter. La Libye soutenant que le prolon-
dispositions peut lier les Parties en tant que règlede gementnaturel, au sensphysique, duterritoire terrestre
droit coutumier. dans la mer demeure la base essentielle du titre au
plateau continental, ilen résulterait que, s'ilexiste une
Dans ce contexte, les parties se sont attachées à discontinuité fondamentale entre la zone de plateau
distinguer entre le droit applicable au fondement dzc adjacente à une Partie et celle qui est adjacenàel'au-
titre sur des zones de plateau continental et le droit tre, la limite doit se situer sur la ligne généralede
gouvernant la délimitation des étendues de plateau cette discontinuitéfondamentale.Or, d'aprèsla Libye,
entre Etats voisins. Sur le deuxième point, régipar on se trouve en l'espèce en présencede deuxplateaux
l'article83de laconvention de 1982,la Cour relèveque continentauxdistincts diviséspar ce qu'elle appelle la
la conventionfixe le butà atteindre,à savoir "aboutir "zone d'effondrement", "à l'intérieur etselonladirec-
à une solutionéquitable" mais reste muette sur la mé- tion générale"de laquelle la délimitationdevrait être
thode à suivrepour yparvenir,laissantaux Etats ou au effectuée. I,a Cour est d'avis que, du moment que l'évolution C'est ainsi qu'elle écarte comme sans fondement
du droit permet à un Etat de prétendre à iin plateau dans la pratique des Etats, lajurisprudence ou les tra-
coritinentaljusqu'à200 niillesde ses côtes, quelles que vaux de latroisièmeConférencedesNations Unies sur
soient les caractéristiques géologiquesdu sol et du le droit de la mer l'argument libyen d'après lequel la
sous-sol correspondant, il n'existe aucune raison de masse terrestre fournirait la justificationjuridique du
fairejouer un rôle auxfacteurs géologiquesca gtophy- titreà des droits sur le plateau continental, de sorte
siquesjusqu'à cette distance. En l'occurren-ce comme. qu'un Etat doté d'une masse terrestre plus grande
la distance entre les côtes des Parties n'a.tteint pas aurait un prolongement naturel plus marqué. Contrai-
400 milles, de sorte qu'aucune particularité géophy- rement à l'argumentation que Malte a fait valoir, elle
sique ne peut se trouveriiplus de200 millesde chaque ne pense pas non plus qu'une délimitationdoive être
côte, la "zone d'effondrement" ne constituiepas une influencée par la situation économique relative des
discontinuité fondamentille interrompant, comme une deux Etats en cause. Pour ce qui est de la sécuritéou
sortede frontièrenaturelle,l'extension du phteau con- desintérêts de dtfense desdeuxParties, laCourrelève
tinental maltais vers le sud et celle du plateauconti- que la limite qui résultera du présentarrêtne sera pas
nerital libyen vers le nord. Au demeurant la nécessitt assez proche de la côte de l'une ou l'autre Partie pour
d'interpréterles preuves avancées pour et contre l'ar- que ces questions entrent en ligne de compte. S'agis:
gurnent libyen obligerait:la Cour à trancher d'abord sant dutraitement des îlesen matièrededélimitationdu
un désaccord entre des hommes de science réputés plateau continental, Malte a fait une distinction entre
surl'interprétationplus ou moinsplausible de données celles qui formentdes entités étatiques souveraines et
scientifiquesapparemment incomplètes, ce qu'elle ne celles qui sont politiquement rattachées un Etat con-
sau.raitaccepter. Elle rejette donc l'argumentation li- tinental. A cet tgard la Cour note simplement que,
byenne relative à la "zone d'effondrement". Malte étantindépendante,la relation entre sescôtes et
celles de ses voisins n'est pas la mêmeque si elle fai-
L'argument maltaisrelatif à laprimautéde l'équidis- sait partie du territoire de l'un d'entre eux. Cet aspect
tance (paragraphes 42 à 44) de la auestion lui ~araît liéaussàla situation des îles
IdaCour ne peut davantage accepter lYarl:umentde maltakes dans le cadre géographiqued'ensemble sur
Malteselonlequell'importance nouvellement accordée laquelle elle reviendra.
à 1;inotion de distance de la côte a eu pour effet de
conférerlaprimauté à lamtthode del'équidistanceaux La Cour écarteun autre argument de Malte tiréde
fins de la délimitationdu plateau continental, au moins l'égalitésouverainedes Etats et d'aprèslequel les pro-
entreEtats se faisant face, ce qui est le casde Malte et ,jectionsmaritimes engendrtes par la souverainetédes
deIlaLibye. Malteconsidèrequeleprincipe d.edistance Etats doivent êtred'une valeurjuridique égale,quelle
exige, au départde l'opérationde délimitation,qu'une quesoit lalongueur descôtes. La Courconsidèreque si
ligne d'équidistance soie envisagée, quitte à vérifier les Etats côtiers ont un titre égalojure et ab itlitào
ensuite sicettedtlimitation primaire aboutià un résul- l'égardde leur plateau continental,cela n'impliquepas.
tat équitable.La Cour ne saurait admettre que, même l'tgalitéde l'étenduede ce plateau et il n'est donc pas
cornme étapepréliminairedu tracé d'uneligne de dé- possible d'exclure à priori la prise en compte de la
limitation, la méthodede l'équidistance dcliveforcé- longueur des côtes comme considtration pertinente.
ment êtreutilisée.Ce n'est ni la seule méthodeappro-
pri15eni le seul point de tltpart possible. Au surplusla La proportionnalité(paragraphes 55 à 59)
Cour considère que la pratique des Etats dans ce do- La Cour examine ensuite la place à attribuerà la
maine ne suffit pas à prouver l'existence d'une règle proportionnalité en l'espèce, la Libye ayant attaché
prescrivant le recoursà l'équidistanceou à toute autre une grandeimportance à ce facteur. Elle rappelle que,
mCthodetenue pour obligatoire. d'aprèslajurisprudence, laproportionnalitéest un fac-
teur éventuellementpertinent parmi d'autres à prendre
Les principes de l'équiti:(paragraphes 45 à 47) enconsidérationsansêtre jamais mentionnéparmi "les
Idesparties admettent que la délimitationdu plateau principes et les règlesde droitinternationalapplicables
continentaldoits'effectuerparapplication deprincipes à la dClimitationMni "comme un principe général qui
tquitables entenant com:ptede toutes lescirc.onstances constituerait une sourceindépendantede droitssurdes
pertinentes afin d'aboutirà un résultat équitable.La étenduesde plateau continental". L'argumentation li-
Cour énumère certains de ces principes : le principe byenne va cependant plus loin. Dès lors que la con-
qu'ilne saurait êtrequestion derefairecomplètementla clusionrelativeà lazoned'effondrement aété rejetée,il
géographie;le principe d1.non-empiétement d'une par- ne reste rien d'autre danslesconclusionslibyennes qui
tie sur les ttendues relevant de l'autre; le principe du puisse fournir un principeindépendantet une méthode
respect dû à toutes les circonstances pertinentes; le de tracé dela ligne,àmoins de considérercommetelle
principe suivant lequel l'"équitén'implique pasnéces- la mention des longueurs de côte. La Cour estime que
sairement l'égalité"et qu'ilne saurait êtrequestion de retenir le rapport entre ces longueurs comme détermi-
justice distributive. nantenlui-même laprojection en meret lasuperficiedu
plateau continental qui relève de chaque Etat, c'est
Les circonstancespertinentes (paragraphes 48 à 54) aller bien au-delà d'un recours à la proportionnalité
IdaCourdoitencoreapprécier lepoids qu':ilconvient pour vtrifier 1'Cquidurtsultat, ainsiqu'ellel'avaitfait
d'accorder aux circonstancespertinentesaux finsde la dans l'affaire du Plateau continental (TunisielJama-
délimitation.Bienqu'iln'yaitpas deliste limitativedes hiriya arabe libyenne). Cette utilisation ne trouve
considérations aux quelle:^le juge peut faire:appel, la aucun appui dans la pratique des Etats, leurs prises de
Cour souligneque seulespourront intervenir cellesqui position publiques non plus que lajurisprudence.
se ]:apportentàl'institution du plateau contirientaltelle
qu'eile s'est constituée en droit età l'application de
priincipeséquitables àsa.délimitation.Processus de délimitationet tracéd'une ligned'équi- Malte. Les côtes se faisant face et la ligne d'équidis-
distance provisoire (paragraphes 60 à64) tance entre elles étantorientéed'ouest enest, cetjus-
Pour appliquer les principes équitables a dé- tement peut se faired'une façon simpleet satisfaisante
gagésen tenant compte des circonstancespertinentes, en sa vers le nord.
la Cour procèdepar étapes :elle effectue d'abord une La Cour détermine alors quelle doit êtrela limite
délimitationprovisoire puis la confronte avec les exi- extrême decette translation. Son raisonnement est le
gentes découlantd'autres critères pouvant imposer la Suivant :àSupposerque lesIlesmaltaises fassent partie
correction de ce premier résultat. du territoire italien et qu'un problèmede délimitation
Constatant que le droit applicable au présentlitigese du plateau se pose entre la Libye et l'Italie, la limite
fonde sur le critèrede la distance Par rapporà la côte serait tracéeen fonction des côtes de la Libye au sudet
(principed'adjacence mesuréeparladistance)et notant de 1,sicile au nord. 11faudrait tenir compte
que l'équitéde la méthodede l'équidistanceest par- des îles maltaises si bien que cette délimitationserait
ticulièrementprononcéedans lescas où la délimitation situéequelque peu au sud de la médianeentre la sicile
intéresse desEtats dont les côtes se font face, la Cour et la Libye. Malte pas unepartie de mais
considère que le tracé d'uneligne médianeentre les un Etat indépendant ne être,du fait de son
côtes de Malte et de la Libye, à titre d'élémentPro- in,jépendance,dans une situation moins favorable en
visCliredans un processus devant se poursuivre par qui concerne les droits sur le plateau continental.
d'autres opérations,correspond àla démarchela plus 11est donc raisonnable de supposer qu'une limiteéqui-
judicieuse en vue de parvenir finalement à un résultat talJle entre la Libye et Malte doit se trouver au sud
équitable. La méthodede l'équidistance n'est pasla d9,inemédianehypothétiqueentre la Libye et la sicile.
seule possible et il doit êtredémontré qu'elle aboutit Ce:lle-cicoupe le méridien150 à une latitude de
34036' environ. La ligne médianeentre f al^^ et la
bien, dans le cas considéré, à un résultat équitable I,ibye (tracéeen excluant l'îlot de ~ilfl~)coupe le mé-
- c'est ce dont on peut s'assurer en confrontant le ridlien150lo' à unelatitude 34012t Une
principes équitables aux circonstances pertinentes. Aes trarnslationde 24sde latitude de cette médianef al^^-
Libyeversle nord serait doncla limiteextrêmed'untel
ce stade, la Cour croit utile de préciser qu'ellejuge ajiistement.
équitablede ne pas tenir compte de l'îlot maltais inha- Dela des diverses circonstances enpré-
visoire entre Malte et lasLibye,opare la médd,eliminer sence indiquéesprkcédemment,la Courconclutqu'un
l'effet exagéré qu'il pourrait avoir surle tracéde cette laplacemédianedeuxtiersenviret la ligneance à24,plus
ligne.
au nord donne un résultat équitable et quela ligne de
Ajustement de la ligne d'équidistancecompte tenu en délimitationsera obtenue en imprimant à la ligne me-
particulier de la longueur des côtes respectives des diane une translationvers lenord de 18'delatitude. Elle
parties (paragraphes 65 à73) coupera le méridien15"10'E à 34"30' N environ. Il
La Cour recherche si, dansl'appréciationdel'équité, appartiendra aux Parties et à leurs experts de déter-
certaines circonstances pertinentes peuvent êtred'un miner la position exacte.
poids tel que leurprise en compte sejustifie et impose Le critèrede proportionnalité(paragraphes 74 et 75)
un ajustement de la ligne médiane provisoirement Tout en estimant qu'aucune raison de principe ne
tracée. l'empêche d'employer,pour apprécier l'équité du ré-
sultat, un test de proportionnalitéfondésur le rapport
longueur des côtes pertinentes des parties. Enncel'oc- entre leslongueurs des côtespertinentes et lessurfaces
de plateau attribuées,la Courdit quecertaines difficul-
currence. la Cour compared'une part la côtede Malte tés pratiques peuvent fort bien rendre ce test inappro-
et d'autre part la côte libyenne entre Ras Adjir(fron- prit. Elles sont particulièrement manifestes en la pré-
tièreaveclaTunisie)et RasZarrouk (15"10'environ)et sente espèce du fait notamment que la zone à laquelle
constate qu'ilexiste entre la longueur deces côtes une l'arrêts'appliquera est limitéepar l'existence des re-
disparitéconsidérablepuisquelacôte maltaisea24 mil- vendications dlEtats tiers et qu'il serait illusoire de
les et la côte libyenne 192milles.l y a là une circons-
tance pertinente qui appelle un ajustement de la ligne n'appliquer la proportionnalité qu'aux surfaces com-
médiane,afin d'attribuer à la Libye une plus grande prisesdansces limites. Il luisemblecependantpossible
étenduede plateau. Reste cependant à déterminer cet de sefaire une idéeapproximativede l'équité du résul-
ajustement. tat sans essayer de l'exprimer en chiffres. Elle conclut
une autre géographiquedoit êtreprise qu'il n'ya certainement pas de disproportionévidente
en circonstance pertinente; il entre les surfaces de plateau attribuéeà chacune des
s'agitde la position méridionaledes côtes des îles mal-. PaltieS, au point que l'on pourrait dire que les exken-
taises àl'intérieurdu cadre géographiqued'ensemble ces du critèrede proportionnalitéen tant qu'aspect de
dans lequel la délimitation doits'opérer.La Cour indi- l'é'luitne sont pas
queune autre raison de nepas accepter lalignemédiane IdaCour présenteun résumé des conclusions(par. 76
sans ajustement comme limite équitable, à savoir que à 78) et rend la décision dont on trouvera le texte
cette ligne est pratiquement commandéedans sa tota- complet ci-après(par. 79).
litéde part et d'autre par un petit nombre de points
saillants se trouvant sur un court segment de littoral Dispositif de l'arrêtde la Cour
(deuxpointsdistants de 11millespour Malte; quelques La Cour,
points concentrés immédiatement à l'est de Ras Tad-
joura pour la Libye). Far 10voix contre 3,
La Courestimedonc nécessaired'ajuster la lignede Dit que, en ce qui concerne les zones de plateau
delimitation de manière à la rapporter des côtes de continentalcomprises entre lescôtes des Parties à l'in-

190térieurdes limites définiesdansle présentan-êt, à sa- C'pinion individuelle de M. Serte-Camara, vice-
voir le méridien13"50' E et le méridien15"IO'E : président
A. Les principes et regles du droit intei:national M. Sette-Camara, vice-président, tout en votant en
applicables à ladélimitation,qui devra êtreréaliséepar faveur de l'arrêt, a déposé une opinion individuelle
voie d'accord en exécutiondu présentarrêt,des zones pour les motifs suivants :
de plateau continental relevant respectivemt:nt de la 1. La théorie du prolongement naturel formulée
Jamrihiriyaarabe libyenne populaire et socialiste et de dansl'arrêt de 1969sur lePlateau continentalde lamer
laR15publiquede Malte, sont les suivants : duNord resteàlabase delanotion deplateau continen-
tal. Bien que la notion initial- une "espèce de so-
1) La délimitation doit s'opérer conformiément à cle" - ait étéremplacéepar une définitionde plus en
des principes équitablese:tcompte tenu de toutes les plusjuridique du plateau continental, le prolongement
circonstances pertinentes, de manière à abo.utirà un naturel reste l'élémenftondamental de cette définition.
résultat équitable;
2) Du fait que la zone de plateau continental qui se L'article76, paragraphe 1, de la convention de Mon-
trouvera relever de chaque Partie ne s'étendpas à plus tego Bay de 1982confirme encorel'importance du pro-
de 200milles de la côte de la Partie concernée, aucun longement naturel.
critère de délimitationdes zones de plateau n.esaurait 2. M. Sette-Camara ne voit pas la nécessitéde re-
êtretirédu principe du prolongement naturel au sens courir au "principe de distance", définidans la par-
P~Y'qilue. ti.efinale de l'article 76 de la convention de Montego
B. Les circonstances et facteurs àprendr~:en con- EIayde 1982,pour motiver l'arrêt.La distance entre
sidérationpourparvenir à unedélimitationéqiiitable en les côtes de Malte et de la Libye étant seulement de
la présente espèce sont les suivants : 180milles, la situation géographiqueparticulière que
vise cet article de la convention ne se trouve pas réali-
1) La configuration généraledes côtes dei;Parties, séeenl'espèce.Même sil'on voitlàl'expression d'une
le fait qu'elles se font fact: et leur situationréciproquerèglede droitinternationalcoutumier - la convention
dan:; le cadre géographiquegénéral; de Montego Bay n'étantpas en vigueur - cette règle
2) La disparitédes longueursdes côtes pertinentes est sans rapport avec les circonstances de l'affaire.
des Parties et la distance qui les sépare; 3. Etant donnéqu'aucune desparties n'a proclamé
de zone économique exclusive, les considérationsde
3) La nécessité d'éviter dans ladélimitationtoute. 1"arrêstur ce point sont dépourvues de nécessité.
disproportion excessive entre l'étenduede lerzone de
plateau continental relevant de I'Etat côtier et la lon- 4. Tout en s'associant à la méthodequi consiste à
gueiir de la partie pertinente de son littoral, mesurée tracer unelignemédianeentre lescôtes deMalteetde la
suivant la direction généralede la côte. Libye, puis à la corriger en lui imprimant une transla-
C. En conséquence, un résultatéquitablepeut être tion de 18'vers le nord, M. Sette-Camara ne souscrit
obtenu en traçant, dans une première étapeclela déli- pas àladémarchesuiviedansl'arrêt pourfixerune ligne
mita.tion, une ligne médiane dont chaque point soit extrême versle nord en vue de cette opération. Il re-
équidistantde la laisse de basse mer de la o9te perti- grettel'opérationparlaquellelaCourinvoque une ligne
nente de Malte (àl'exclusion de l'îlotde Filfla)et de la nnédiane"hypothétique" entre les côtes de la Sicileet
laisse de basse mer de la côte pertinente de la Libye, celles de Malte, où il voit une refonte artificielle de la
ladite ligne initiale étantensuite ajustée eu 6:gardaux g:éographie.M. Sette-Camara estime qu'il aurait été
circonstances et facteurs susmentionnés. tleaucoup plus simple d'attribuer un effet partiel aux
D. L'ajustement de la ligne médiane visésous C côtes de Malte, en l'équilibrantavec un autre effet
s'opérera enfaisantsubir ;àcelle-ciune translationvers riartiel, attribàéla disproportion entre les longueurs
le nord de 18' de latitude (de manière qu'elle vienne dlecôte pertinentes, de façon à aboutir à un résultat
Cowperle méridien15"ICIE ' à une latitude d'environ équitable.
34"30'N), laligneainsi dé:placéc eonstituant lalignede
délimitationentre les zones de plateau contiriental qui Opinionconjointe deMM. Ruda etBedjaoui,juges, et
relèvent respectivement de la Jamahiriya arabe li- de M. Jiménezde Aréchaga,juge ad hoc
byenne populaire et socialiste et de la Républiquede Les auteurs de l'opinion souscrivent à nombre des
Malte. constatationsetconclusions delaCourmaisfontobser-
ver quel'arrêtne se prononcepas sur la revendication
P,OUR :M. Elias, président;M. Sette-Camara, vice- cleMalte relative au trapèze qu'ils considèrentcomme
président; MM. Lachs, Morozov, Nagendia Singh, excessive et contraireà la pratique des Etats dans les
Rucla, Ago, El-Khani, sir Robert Jennings, MM. de rners ferméesou semi-fermées.
Lacharrière, Mbaye, Bedjaoui,juges; et MM. Valticos
et Jiménez de Aréchaga,juges ad hoc; Ilscroient égalementqu'ilauraitété pluséquitablede
CONTRE :MM. Mosler, Oda et Schwebel,juges. corriger la ligne médianevers le nord de 28', ce qui
aurait donné à Malte trois quarts d'effet, aboutià un
rapport de proportionnalité de 1 à 334 et divisé éga-
Aperçu de la déclarationet des opinions lement la zone litigieuse.
jointes à l'arrêtde la Cour Opinion individuelle de M. Mbaye, juge

L)éclarationde M. El-Khani,juge M. Mbayeavotéenfaveurdel'arrêt car ilpartage les
Ni. El-Khania voté pour l'arrêtmais estinie qu'une conclusionsauxquelles la Cour est arrivée et accepte
ligne située plus au nord que la ligne suggéréeaurait d'unefaçongénéralelesmotifsquileurservent debase.
davantage satisfaità la proportionnalitéet rependu à Sonopinion porte sur deuxpoints :ce qu'il aappel6
l'équité. les "deux sens de la notion de prolongement continu"et la circonstance de la "grande distance qui sépareles ciairement établis.De plus, l'arrêt se sertde la pro-
côtes des deux Etats". porlionnalitt pour vérifierl'équitéde la délimitation
Surle premier point, M. Mbaye, tout en déclarantne P'OPOS~~ d'une paradoxale, en ce qu'il corn-
pas êtreen désaccordavec la cour, notamment sur la mence par affirmerla nécessitéde définirlazone perti-
selon laquelle le naturel au nente et les côtes pertinentes, puis abandonne cette
sens physique ne peut, dans la présenleespèce, avoir recherche au motif qu'unetelle opérationseraitimpos-
aucun effet sur la délimitationdes zones de plateau sible. M. Oda considère comme dépourvude fonde-
continental relevant respectivement de chaque Partie, mentl'ajustement, oulatranslation, delalignemédiane
regrette que la Cour, qui selon luia fortjudicieusement entre la Libye et Malte, qui doit la déplacerde 18'vers
analysé19évolut~od nu droit international coutumier re- le nord sur chaque méridien.Bien que l'arrêtaffirme
latifauplateau continental enfaisant ladistinction entre retenir àtitre initial ou provisoire la médianeentre la
le naturel "principe juridiqueV et le pro- Libye et Malte, la ligne qu'ilpropose fidement après
longement naturel sens n'ait pas saisi la translation de 18'ne présente aucun des caractères
170ccasionpour faire mieux apparaître cette idde fan- qui se rattachent à la notion d'équidistance,de sorte
damentale qui marque un tournant dans l-évolutionde quelaligne résultantene saurait êtreconsidéréecomme
ce droit tel qu'il résultede la Convention des Nations une médianeajustée. En réalitt, la méthodeadoptée
Unies sur le droit de la mer du 10 dtcembre 1982. dans l'arrêt consisteàfairedu territoireentier de l'une
des Parties une circonstance spéciale influant sur une
Sur le deuxième point, M. Mbaye conteste à la délimitation(SicileILibye) que la Cour n'avait pas à
"grande" dimension de la distance qui séparelescôtes effectuer etquiexclut cette Partie. Dansces conditions,
des deux Etats la qualitéde "circonstance pertinente" lYeflFeptartiel qui peut parfois êtreattribuéaux îles est
susceptibledejustifier dequelquemanièrequeCeSoitla interprététout autrement que dans l'Arbitrage franco-
translation delalignemédianeinitialementtracéepar la britannique de 1977.La notion de "demi-effetu n'était
Cour, vers le nord. Selon M. Mbaye la raison détermi- pas mieux interprétéedans l'arrêtde 1982en l'affaire
nante decette translation c'estladifférencede longueur Tunisie/Libye,nidans l'arrêtde la Chambre de 1984en
et la géographiede la région.tiongénéraledecescôtes l'affairedu GolfeduMaine. pour précisersescritiques,
M. Oda analyse certains passages de ces arrêts, ainsi
Opinion iridividuellede M. Valticos, juge ad hoc l'originedans les affaires du Plateau continental de la

Tout en souscrivant à l'arrêt dansson ensemble, mer du Nord.
M. Valticos souligne que, en limitant la zone sur M. oda continue à penser que larègle-dquidistance-
laquelle porte sa décisionà une étendue restreinte en circonstances spéciales'v,indiquéedans la
vue de ne Pas affecter les intérêtde l'Italie, la Cour a sur le plateau continental de 1958,reste un principe de
préciséque Malte et la Libye gardent la possibilité droit international, et qu'en outre les circonstances
d'examiner avec l'Italie la question de la délimitation, sptciales n'autorisent pasà remplacer la ligne d'équi-
entre cestroispays, des zonesextérieures à cette éten- distance par une autre ligne, mais doivent à en
due restreinte. 11exprime son plein accord quant au rectifierles bases pour évitertout effetde déformation.
défautde pertinence des tltments gCologiqueset Danslaprtsente affaire, ilestime quel'îlotdeFiIfladoit
morphologiques, mais estime, Par ailleurs, que la dé- êtrelaisséde côtédans le tracéd'une ligne d9équidis-
limitation aurait dû coïncider avec la ligne médiane tance entre la ~ib~~et ~~l~~L.~ ligne ainsi obtenue
entre Malte et la Libye,pour une sCriederaisons, dont constituerait une délimitation Y recourir,
laposition des deux pays qui sefont face, les nouvelles dans les circonstances de l'espèce, n'aurait eu aucune
tendances du droit international, la pratique des Etats incidence juridique sur les prétentionsdes E~~~~tiers,
et la mission de la Cour qui est de préciserla règlede cette solution aurait signifiéque ni la ~ib~~ni
droit international. Il considère que le facteur de la ~~l~~n'étaientfondées 5seréclamer à l'autre un
différencede longueur entre les côtes n'aurait pas dû esp;,ce situéau-delà.
êtrepris en considdration et n'appelait pas de "correc-
tion" àlalignemédiane.Ilestimeaussi qu'ilaurait fallu Opinio,l dissidente de M. Schwebel,juge
tenircomptedesfacteurs tconomiques encause et des M. Schwebel esten désaccordavec l'arrêtdelaCour
besoins de sécurité, circonstancesquijustifiaient'au- surdeuxpoints. A son avis, la lignede délimitationqui
tant plus la solution de la ligne médiane. est indiquéeest abusivement tronquée dans le but de
Opinion dissidente de M. Mosler, juge ménagerles prétentions de l'Italie; et cette ligne n'est
pas Uneligne médianeentre les côtes opposéesde la
M.~~~l~~est d'avis que lalignemédianeentre Malte
et la Libye constitue une solution tquitable dans les qui¶en tant quete, main'est pas correcte.corrigCeY'
circonstances de l'espèce.Il critique la translation glo-
bale de 18'vers le nord qui a Ctéimprimée à la ligne D'aprèsM. Schwebel, bien que la Cour ait rejeté la
médiane ainsique la mtthode utiliséepar la Courpour demanded'intervention italienne dans l'affaireentre la
parvenir à ce résultat. Libye et Malte, l'arrêtd'aujourd'hui accorde à l'Italie
tout ce que cet Etat cherchait à obtenir par cette de-
Opinion dissidente de M. Oda, juge mande. La Cour, dit-il, justifie cette conclusion peu
Del'avisde M. Oda,laCour n'apastenu pleinement convaincante en soutenant que le compromis entre
comptedetoutel'évolutionrécentedudroitdelameret Malte et la Libye ne lui donnait compétence que pour
elle risque de confondre leprincipede l'équitéavec ce statuer sur la délimitationdu plateau continental "re-
qu'elle estime subjectivement tquitable en une affaire levant" de Malte ou de la Libye, et non d'un quelcon-
donnée. L'arrêt construitde façon erronée la zone à que Etat tiers. Mais le compromis ne parle pas de zo-
laquelleilest censés'appliquer,dufait qu'ilinsistetrop nes relevant exclusivement des Parties. De plus, la
sur les intérêtsdYEtatstiers qui n'ont pas étéjudi- jurisprudence de la Courdansles différendsfrontaliers

192moritre que la Coura pour obligation de ne pas statuer l'esdeuxcontinents. Maisellene démontrepaslecarac-
dansl'absolu. La Courauraitdonc pu, dans ledifférend tère probant de ces circonstances, ni mêmeleur perti-
entre Malte et la Libye, statuer surles zonesùl'Italie rience. Elle n'explique pas pourquoi il est fait abstrac-
avait elle aussi fait connaître ses prétentions, tout en tiondelatotalitédesîlesdeMalte - quiconstituent un
réservant les droits de ce pays. Le fait quee.llesoit la Etat indépendant - comme s'il s'agissait d'une ano-
meilleureinterprétationdi1compromis est corifirmépar malie dépendant d'un Etat continental. Le contexte
l'adhésionque lui ont doiinéeMalte et la Libye. Or la géographiquegénéral - que d'ailleurs la Courrétrécit
Cour, contrairement aux. règles d'interprétation des c:onsidérablementpour ménagerles revendications de
traités, n'a pas tenu cornpte de l'interprétation que l'Itali- nejouait pas plus contre Malte quecontre la
donnaient ainsi les Parties du compromis .signépar Libye. Pour ce qui est du fait queles cates de la Libye
elles.L'arrêt inspirà M. Schwebeldesréserves, parce siontplus longues, ila toujours ététenu pour évident
qu'il semble abandonner à une tierce partie la pos- que la base d'un triangle est plus longue que sonsom-
sibillidefixerl'étendue clelacompétencequi:lesdeux rnet, et que par conséquent la surface adjacente à sa
Etaitsparties àl'instance avaient conférée àla Cour. base (Libye)est plus étenduequelasurfaceadjacente à
En ce qui concerne le .tracéde la ligne de délimita- son sommet (Malte). Mais la Cour va plus loin, et
tion, M. Schwebelconvientquela lignemédianeest un accorde à laLibyeune primeau motifqueses cates sont
poirit de départ correct clans le cas de côte!; en pure proportionnalité,mais elle n'invoque aucun autre mo-
relation d'opposition, mais il n'est pas d'accord avec tif. Elle sembleplutôtfonderson arrêtsurune intuition
la décisionde la Cour d'opérer un déplacernent sub- quilapousse à accorder uneprime àlaLibyeparce que
stantiel de cette ligne vers le nord, attribuant parà siescôtes sont beaucoup plus longues que celles de
à la Libye une étendue tie plateau continental beau- Malte. Deplus, laCour nefait étatd'aucun lienobjectif
coup plus importante qui: ne l'eût fait une ligne mé- et vérifiableentre les circonstances qu'elle juge perti-
diane. La Cours'appuie e:ssentiellementsur le fait que tientes et lechoix de la lignequ'ellejugeéquitable.Elle
celles de Malte et que, dans le contexte géoi:raphique ri'essaiemêmepas de démontrercomment cescircons-
géncsraelncause, lesîlesnialtaises apparaisseiît comme tances dictent l'ampleur de l'ajustement auquel elle
un petit accident situéau sud de la lignemédianeentre procède.

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Résumé de l'arrêt du 3 juin 1985

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