Réponse écrite du Chili à la question posée par M. le juge Owada à l'audience publique tenue le 8 mai 2015 dans l'après-midi

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18662
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Lettre en date du 12 mai 2015 adressée au greffier

par l’agent du Chili

[Traduction]

Me référant à l’affaire relative à l’Obligation de négocier un accès à l’océan Pacifique
(Bolivie c. Chili), j’ai l’honneur de vous communiquer la réponse de la République du Chili à la
question posée par M. le juge Owada au terme des audiences consacrées à l’exception préliminaire
soulevée par le Chili. Cette question se lisait comme suit :

«Au cours des présentes audiences, comme dans leurs écritures, les deux Parties
ont employé l’expression «accès souverain à la mer». Bien qu’elles l’aient fait l’une
et l’autre aux fins d’exposer leur propre position ou de décrire celle de la Partie
adverse, il ne s’agit pas d’une formule consacrée en droit international général. Je
saurais donc gré aux deux Parties de bien vouloir indiquer quel est, selon elles, le sens
de cette expression, et préciser quels sont les différents éléments que celle-ci recouvre
lorsqu’elles l’emploient pour définir leur position concernant la compétence de la

Cour.»

Pour répondre à cette question, il convient de partir de la décision sollicitée par la Bolivie,
dont les passages pertinents figurent aux points a) et c) du paragraphe 32 de sa requête et aux
points a) et c) du paragraphe 500 de son mémoire. La Bolivie y utilise l’expression
«accès pleinement souverain à l’océan Pacifique». L’expression «pleinement souverain» est
également employée aux paragraphes 1, 4, 13 et 30 de la requête.

Dans son mémoire, la Bolivie a indiqué de manière très précise ce qu’elle entendait par
«accès souverain à la mer». Au paragraphe 410, elle s’est ainsi référée à l’«accès souverain de la
Bolivie à la mer, lequel devait être mis en œuvre par voie de cession territoriale du Chili à la
Bolivie» et, au paragraphe suivant, à un «accès souverain à la mer en faveur de la Bolivie par la
cession d’une zone de territoire en [l]a possession [du Chili]».

Au paragraphe 361 de son mémoire, la Bolivie a mentionné les «engagements pris

antérieurement par le Chili de céder un territoire à la Bolivie afin de lui assurer un accès souverain
à la mer». Le paragraphe 445 est on ne peut plus clair : «Selon [le Chili], des négociations entre les
deux Etats ne pouvaient être envisagées que si elles n’aboutissaient pas à une cession territoriale ;
autrement dit, si elles n’avaient pas pour objet l’octroi d’un accès souverain à la mer.»

Lorsqu’elle explique pourquoi elle revendique un droit à un «accès souverain à
l’océan Pacifique», la Bolivie se réfère également, dans son mémoire, à «la cession à la Bolivie

d’une côte maritime souveraine» (paragraphe 483), à une «cession de territoire» (paragraphe 484)
et à une «modification du statut territorial entre les deux pays» (paragraphe 486).

Le Chili emploie, dans l’exception d’incompétence qu’il a soulevée, l’expression «accès
souverain à la mer» dans le même sens que la Bolivie dans sa requête et son mémoire. Il considère
que, lorsqu’elle demande à la Cour de dire qu’il est tenu de lui «assur[er] un accès pleinement
souverain à l’océan Pacifique» (décision sollicitée : requête, point c) du paragraphe 32 et mémoire,
point c) du paragraphe 500), la Bolivie affirme qu’il est tenu de lui céder la souveraineté sur le

territoire côtier bordant l’océan Pacifique. - 2 -

Ce qui importe aux fins de l’exception d’incompétence du Chili, c’est que, à l’article II du
traité de paix de 1904, les deux Etats ont réglé la question de l’attribution de leur souveraineté

territoriale respective et, à l’article VI de ce même instrument, prévu que le Chili accorderait «à la
Bolivie, à titre perpétuel, un droit de transit commercial absolu et inconditionnel sur son territoire
et dans ses ports situés sur le Pacifique». A la date du 30 avril 1948, la question était donc réglée et
régie par le traité de paix de 1904  et c’est d’ailleurs toujours le cas aujourd’hui , au sens où
l’accès à l’océan Pacifique auquel la Bolivie avait droit n’était pas un accès souverain. Par la
décision qu’elle sollicite, la Bolivie prie la Cour de prescrire au Chili de consentir à lui assurer un

accès souverain à l’océan Pacifique ; cela remettrait immanquablement en cause ce qui a été réglé
et est régi par le traité de paix de 1904 et, partant, ne relève pas de la compétence de la Cour en
vertu de l’article VI du pacte de Bogotá.

Veuillez agréer, etc.

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Réponse écrite du Chili à la question posée par M. le juge Owada à l'audience publique tenue le 8 mai 2015 dans l'après-midi

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