Traduction

Document Number
083-19930702-ORA-01-01-BI
Parent Document Number
083-19930702-ORA-01-00-BI
Bilingual Document File
Bilingual Content

NOR-Corrigé Traduction
Uncorrected Translation
I

CR93/26 (translation)

Vendredi 2 juillet 1993
Friday 2 July 1993 Le PRESIDENT :Veuillez vous asseoir, apr èsoije donneraila

parole à Mme Higgins.

Mme HIGGINS :

Les réactionsdu Tchaden présencede l'occupation libyenne

1. Monsieurle Présidentet Messieurs de la Cour je vous parlerai *

ce matinde la question desréactionsdu Tchadà l'ingérence et à

l'occupation libyennes .. Cahiervous adit qu'ilrésultedes

événements et faitsde la périodequi s'estécouléedepuis 1966 soit que

le Tchada reconnu que la banded'Aouzouappartient à la Libye depuilse
w
début, soit qu'ila vite abandonné toutelses idéeserronéesqu'ilaurait

pu avoirau sujetde sesdroits(CR 93/18,p. 48). Bien sûr, la Libye

est censée établir devant l Cour qu'iln'existe aucunefrontièreet non

pas que le Tchad savait ql ue frontièrese trouvaitau sudde la bande

dqAouzou, mais peu importe. Tout celane sert qu'à détourner l'attention

de cette simple considération que, dl anstraitéde 1955,la Libyea

confirméavec la France la lignede 1899 comme étant la frontière commune

avec le Tchad.

2. De toutemanière,l'argument n'estpas défendable quandon

commence à examinerles faits, tous les faitset non pas certains

d'entreeux,soigneusement choisis. Quels sont les faits? La Libye,

après avoir conclu l traitéde 1955, a connuun changement de

gouvernement en 196 et s'estensuite engagéd eans une nouvelle

politique. Elle a commencéà donner une assistance financie ère

matérielle à des élémentsrebelles. Dansun premiertemps,elle aagi

silencieusemente ,n s'infiltrant dans lbanded'Aouzouet en

distribuant,à partirde 1971, des carteq sui représentaient la ligne

de 1935. En 1973,la Libyes'était installée à Aouzouet invoquait

publiquementla lignefrontière de 1935 devantl'organisatiodnes

NationsUnies. En 1978, la Libye était engagéedansde violentscombats

loin à l'intérieurdu Tchad.

0151R/CR/26/Trad. 3.M. Cahiera dit à la Cour que le Tchande devrait pas faire

mentionde l'invasion par la Libye,car celane servirait qu'à faire

pénétrerune atmosphère défavorableà l'intérieurde la Cour(CR 93/18,

p. 49). 11 fautpourtant dire la vérite é, cette questioest

directement pertinenetne l'espèce, car elle explique ce que la Libye

tentede présenter commuen acquiescementde la part du Tchad.

4. Tout du long, laLibyea pensése servird'une tactique utile
-. devantla Cour en présentantle conflitjuridique comms e'il opposait une

France colonialeet puissanteà une Libye dépourvudee préparation.La

réalitéest fort différenteL .a réalité,c'estun différend entru ene

Libyepuissante, avec touts ess ressources matérielleest, un Tchad

faibleet désespérémentpauvre. L'occupation militaire l debande

d9Aouzoupar la Libyeet ses actions militaires passées effectuées même

au-delàillustrent, tels qu'ils sont, les rapports c entdeeux

adversairesinégaux.

5. Au fil des ans, leTchada eu pourpolitique général de traiter

de tousles problèmes, si cel ae pouvait,par la négociationet

l'accommodement.Cette politiqua e étéconsidérée comme aussi nécessaire

que prudente, cal re Tchada dû, pendanttoutes ces années difficiles,

affronter un problème surdeux fronts: la rébellion interne qui

présentait parfois le caractd èreneguerre civile,et l'agression

internationald ee la partde la Libye. Cette agression internationale

elle-mêmecomportait deux aspects :l'appui donné aux rebellesafinde

déstabiliser le Tcha et les opérations militaires da lesBETainsi que

l'occupation de la banded'Aouzou. Le Tchada dû aussi faire facà eun

autre problème de proportions inimaginables une pauvretéextrême.

6. Commençons donpcar les traités auxquelMs.Cahiers'est référé.

Monsieurle Présidentet Messieursde la Cour,le Tchada déjàmontré

dans son contre-mémoireet lors deses plaidoiriesque, loind'étayerla thèse libyennede l'inexistencde toutefrontière, les dispositio des

fondde ces traitésprésupposent et admettent précisémenqu'ilexiste

Je me référeraiici plutôtà ce qu'ilconvientde déduire
une frontière.

du faitmême que ces traités on été conclusentre1971et 1992.

M.Cahiera dit à la Cour qu'elle doi en conclure que, mêmsei le Tchad

pensaità l'origineavoirdes droits dans la band d'Aouzou,il y a

renoncéet a reconnu que la Libyéetait "chez soid"ans la bande'Aouzou

(voirCR 93/18,p. 59).

7. Monsieurle Présidentet Messieursde la Cour,c'estautre chose
012
queje doisvous dire. Depuisplusde vingt ans, en effet le Tchad vit
1
dans l'ombremenaçantede son puissant voisin.Le Tchad faitde son

mieux,jour après jour, dans le sirconstancesles plusdifficiles.

Quotidiennement,il doit affronter la réali deésa pauvretéextrême.

Quotidiennement il doichoisir :soitessayerde satisfaire son voisin

pour limiter la menacextérieureet l'instabilitéinterne, soit

protester avecénergie contrlees actesillicitesde la Libye, quitteà

perdre plusde son territoire encorau profitde l'occupationlibyenne.

La Libyea revendiqué,nous l'apprenonsmaintenanttardivement, des

espaces beaucoup plus vast ese ceux oùelle est déjà venues'établir.

Si elle avait le "droit"de venirs'installer dans la bande9Aouzou,

pourquoi pas sur toute ladistance jusqu'au 15 parallèle

8. Un traitéa été conclu entrele Tchadet la Libyeen 1966. A

cette époque,le Tchad n'avait aucune raisdonpenserque la Libye

renieraitles engagements qu'ell avait assumés en vert du traité .

de 1955 avec laFrance. Quanaux traitésde 1972, 1974, 1980 et 1981,

les conséquences juridiques quc 'ilvientd'en tirerseront plusfaciles

à comprendre sinous les situons dansla perspective desévénementsde

1 époque. Les premières réactiondu Tchad devantle changementde politiquede la
Libye

9.Comme le Tchadl'a expliquédans son mémoire(p. 22, par. 77)le

gouvernement central dTchad,alors dirigépar François Tombalbaye,

perditle contrôled'une partimportante du BET. Une révoltedes gardes

nomadesd9Aouzouse produisit en mar1s968 et, en septembre, l'armée

nationaledut évacuerce posteavancé. Aouzou tomba d'abordsous le

contrôledu mouvement armé Frolinat, dirigé par AbSidiq,puis des

forces arméesdu nord,dirigéespar HissèneHabré et GoukouniOueddeï.

10. Dès 1969,le Tchadpensaitque laLibyeaidait probablement les

mouvementsrebelles. En 1971,les preuves devinrent manifesteL s.

Tchad protesta officiellemenptortantl'affaire devantl'Assemblée

O1 3 généraleà l'automne(NationsUnies, Documents officiels de 18Assemblée

générale, vingt-cinquième sessio1955 séance) et rompant les

relationsdiplomatiques. M. Franck développera cpoint. Non seulement

le Tchad formula-t-ides objections contre l'ingérendceela Libye dans

ses affaires intérieures, maeiscore ilprofita de l'occasion offerte

par la séance del'Assembléegénéralepour protester contrea

publicationpar la Libye d'une carteù desparties appréciable du

territoire tchadiefiguraient commseituéesà l'intérieurdes frontières

libyennes. Ce fut en cetteoccasion bien connue qule représentande

la Libyedit à l'Assembléegénéraleque la carteétaitincorrecte et que

la Libyene nourrissait aucun dessein sur le territd oiTchad. La

Libyese considérait-ellceomme surson propreterritoire? Si nous

devons le croire, pourquloi carte- qui représentait la bandd'Aouzou

comme libyenn- fut-elle aussdiésavouée?

11. Après avoir formulsa protestationet entendu cette réponsele
014
gouvernement affaibldu Tchad eut pourpolitiquede traiterde son mieux

avec son voisindu nord au moyen de négociationLes négociations diplomatiques furent donc rétabl einsvril 1972 et le président

Tombalbaye fiu tne visiteà Tripoliplus tardla mêmeannée.

Manifestement, cette politin queconstituait pas une acceptatp ionle

Tchaddes revendicationd se la Libyerelatives à la lignede 1935et à la a

banded'Aouzou. De toute manière, l Libyeavait récemmenn tié, devant

l'ONU,qu'elleeût à formulerune tellerevendication. Aprèsla visite

de Tombalbaye, le Tchad espérait qule traitéd'amitié,de coopération

et d'assistancm eutuelle conclu en cette occas( ionmoiredu Tchad,

vol. II, annexe16) conduirait àune amélioration.L'espoirde recevoir

une aide financière dela Libyeétaitaussiun facteur à prendreen
'Cr'

considération. Monsieur Président, il ressort clairemd enstdonnées

de fait etde la chronologie qu ee viensde citer qu'aucune question

d'acquiescemend te la part du Tchadne se posa.

12. Le traitéde 1972parlaitde coopération entrl ees peuplesdu

Tchad et de la Libye. Les parties devaient développer la coopération

dans lesdomaines économique, financier, commercial, technique, culturel,

social,éducatifet scientifique.Une commission mixte devaê itre

instituée à cettefin.

13. Un communiquéconjointfut publié après la conclusionde ce
I
traité(réplique du Tchad,vol. III,annexe158). Monsieurle Président,

la déclaration quMe. Lamana,ministre de l'économe ie 1972,a déposée

comme témoin devant la Courà propos de la"lettrede Tombalbaye"

(déclarationsde témoins déposéea su Greffede la Cour,9 février1993)

nous apprend quedes commissions mixtes furent effectivement .

constituées. Il déclare que pendant les réunid onla commission,ni

l'existencede la lettre de Tombalbaye ni les questionssur lesquelles

portaient prétendument cette lett nee,urentjamaisdiscutées.

01 5 14. Bien quetrois commissions techniques ai ététcréées, leurs
- .
travauxne progressèrent guèr àecausede l'occupation libyenn qeui

suivit peuaprès. Il ressort clairemen du communiqué conjoint que l'objectifprincipaldu présidentKhadafiétaitde s'assurer que le Tchad

mettraitfin à ses relations diplomatiques avI ecraël. Le Tchad

espéraitqu'en satisfaisant à l'exigencede la Libye il s'assurerait deux

avantagestangibles. Nous apprenons de la presse officielle tchadienne

(répliquedu Tchad,vol. III, annexe160) que M. Lamana,le chef des

expertsqui accompagnaient lp erésidentTombalbaye,

"présentait pour sa part aux experts libyens tous les projets
économiques et sociauxdu Tchad susceptibled s'êtrefinancés
par le République arabelibyenne".

Le même documentcontemporain indique aussi qu 'àépoquele Tchad

demandait aussi une assistance financièr au Zaïre.

15. Le second avantage rechercho é, la contrepartiede la rupture

des relations avec Israël é,taitl'arrêtde l'aide apportée pal ra Libye

aux rebelles dans la banded'Aouzou. Cet objectifest mentionnélui

aussidans la pressede l'époque :

"Au coursdes entretiens au sommet tchado-libyen, la
délégation libyenna e faitsavoir à la délégation tchadienne
que la Libye était prêteà remettre au Tchad tous ceux q sei
réclamentdu 'FROLINAT' et qui se trouveraient sur son
territoire.'' (Ibid.,annexes 159et 160.)

Le Tchad avait quelque espoir de succès car, dans le communiqué conjoint,

le président Khadafi exprimaitsa satisfaction de "la courageuse décision

prise parle présidentFrançois Tombalbaye" de rompl res relations avec

Israël.

16. Pourtant, l'infiltration contin etala banded'Aouzoufut

militairement occupée pa la Libye en 1973. Ce futpour le Tchad une

périodedes plus difficiles.Les relations avec la Franceauraientpu

êtremeilleures. Tombalbayavaitaccusé le secrétaira eux affaires

africainesd'alors,Jacques Foccart, d'encouragl ers tendances

sécessionistes dans le nord (AfricaContemporary Record,1974-75,

B567). Le Tchad se préoccupait avant tou de la rébellion interneet du

rôle qu'y jouait laLibye. Telleétaitla question qu'il fallaitconsidérer commp erioritaire.Comme le relatal'ÀfricaContemporary

Record, 1974-75, "lesrelations furent poursuivi ens1974 sansgrand

enthousiasme". Expliquant pourquo on entretenait des relationsà cette

époqueet concluait même des accords techniques, le président Tombalbaye

réponditen mars 1974 : "Etantdonnénotresituation géographiqun e,us

sommes condamnés à développerdes relations aven cos voisinsà l'est et

au nord." Voilà dans quelles circonstans cesituele traité
(Ibid.)

de 1974,conclu plus tardla même année, auque la venuedu président

Khadafi à N'Djamenaservitde prélude. De plus,dans ce traité, le Tchad

obtintune mentiondu faitque les origines colonial desla frontière

communedes deux partiesne devaient pas faire obstac àlleurs bonnes

relations à l'avenir. Ni les circonstance ni les termesdu traiténe

sauraient d'aucune manièê rere interprétés commun acquiescement.Bien

au contraire.

17. Le traité de1974parlait dela coopération "entr les deux

peuples"du Tchadet de la Libye malgré la frontière coloniale

(article 2). Le Tchad commenç a penser qu'une zon de coopération

- pas une zone tampon :une zone de coopératio -npourraitpeut-être

constituer désormai lse meilleur moyende réglerle problèmede

l'occupation libyenne. Une commission mixtL eibye-Tchaddevaitêtre

établie pour s'occuper de
la question des déplacemen des habitants dans

la région(article 4). Dans la déposition quj e'ai évoquée ily a

quelques instants,M. Lamanadéclare que le président Tombalbay lui

avait dit, aprèsson voyage à Tripolien novembre1974,qu'onse

proposaitd'établir :

"unezonede solidarité et de développement comprena une
frangede territoire au Tchad incluant la bandedlAouzouet la
même frangeen territoire libyen. Les raisonsde cette
proposition, soutenal it président Tombalbaye, étaient que:
en acceptantla créationde cette zone dans laforme suggérée

les Libyensreconnaîtraient implicitement qulea zonecontestée
de la bandedlAouzouappartiendrait a Tchad." 18. Les difficultésne cessèrentpas pour le Tchad pendant cette

période. Des archéologues allemane ds français avaient obtenu la

permission d'allerà Bardaï, à un momentoù levillage semblait

tranquille et où une trêveétaiten vigueur. Ils furent attaquép sar des

rebelles armés sous les ordreslHissène Habré. La femmedu savant

allemand fut tuée le docteur Staeweent sa collègue française

Françoise Claustre furent pr enotages. Pendantles deuxmois

suivants,le Gouvernement du Tchadfut aussi absorbé par ce problème

humain : préparer d'éventuelles actions militaires, faira euxace

exigences d'HissèneHabréà ce propos, réglel res tensionsqui en

résultèrent dans les relations bilatérales avec l'All etmagne la

France. De fait,les relations diplomatiques av lacpremière furent

rompues.

19. Simultanément, l'occupation libye nneneouvaitse poursuivreet

ne se poursuivit passans contestation.En août 1974 M. Bruno Bohiadi,

ministredes affaires étrangère du Tchad,et M. MahamatYakouma,

ministrede l'intérieur, se rendirentà Tripoli,où ils soulevèrent la

question de l'occupationdu Tibestipar la Libye. La réponsede la Libye

fut qu'ellen'avait que des forces de policeàAouzou pour assure la

sécuritéde la population des dep uxys. Les représentants du Tchad

dirent avec insistance qu'ils savaient q yu'ialitun détachement

militaireà Aouzouet que, detoutemanière,"laLibyene saurait assurer

unilatéralemendtes opérations de maintien l deordredans cettepartie

du territoiretchadien" (S/15649,21 mars 1983, lettre adress par le

Tchadau présidentdu Conseil de sécurité, av uecrappeldes événements

de 1973 à 1983).

20. Au coursdes plaidoiries, la Libyaetenté d'établir qu'en 1974,

le Tchad était content d la voir occuperla banded'Aouzou,qu'il

n'élevapas de protestationset même qu'il poursuivi des relations amicalesavec elle à l'époque. La réalitéest fort différente.Des

protestationsfurentfaites, à Tripoliet devant l'organisatio des

NationsUnies.

21. En juilletet août 1974, le Gouvernement frança aivait

unilatéralement décid d'intervenirauprèsdes rebelles. Toutefois, une

foisde plus,un Françaisfut détenupar les rebelles à Zoui le4 août.

Ce geste fut suivi d'exigenc deslivraisonsd'armes. Bientôt, la

situationse détérioraencoreplus. Après avoir faitsavoir, le

2 avril 1975,que lecommandant Galopin détenu serait exécu siéles

armesn'étaientpas livrées, Habré donna l'ord drecommettrecet

assassinat le 4 avril1975.
. .
22. A peine une semainse'était-elleécouléeque le
019
. . présidentTombalbayefut assassinélui aussi (R. Buijtenhuijs,Le

Frolinat et les guerrescivilesdu Tchad,1977-1984, Paris,éditions

Karitela, 1987p,. 102). Ses pouvoirs furenatssuméspar le

général Malloumq,ui dut désormais,à son tour,se préoccuper de la

guerre civile dans l banded'Aouzou. Il me fautindiquerclairement à

la Cour qu'ilne s'agissait pas d'uneguerrede sécession. Chaque

faction voulaitle pouvoir. Aucuneactionne voulaitse trouver soumise

à l'autorité libyenne. Des protestations internationao lefsicielles w

contrel'occupation de la Libyerevêtaient à ce moment-làune moindre

priorité.

23. De plus, lesrelations franco-tchadiens nesituaient alors

tout à fait aupremier plan : estimant queles événementsavaientété

précipitéspar le contact établdie façon unilatéral par les Français

avec les rebelles,le généralMalloumdonna l'ordre de fermer labase

militaire françaiseà N'Djamena. Cettelarge opératioe nut lieuen

octobre 1975(Buijtenhuijsp ,. 297).
Ce ne fut qu'enmars 1976 que les

relations entre les dep uxys s'améliorèren assezpour que l'onpûtsignerde nouveauxaccords. Dans l'intervalle,le Tchad avaitdû subir

les effets économiques, direc etsdu pointde vuede l'aide,de

l'expulsion.

24. Entre-temps, la situation intérieure res critique. Des

grenades furent lancées lo dr'undéfilé militaireà N'Djamenaen

avril1976. Le Tchad déploya tousles efforts militaires possibles dans

la bande d'Aouzoupour en déloger laLibye. Commele relata à l'époque

la publication impartialeAfrican Contemporary Recor(1976-1977,B76) :

"la frontière avecle Tchadprometde devenirune sourcede
difficultés majeures.Se fondantsur un accordde 1935 entre
les puissances coloniales, la Frae ncl'Italie, Kadhafi
revendiqueune vaste zone lelongde la frontière nord du
Tchad, quis'étend à traversle Tibesti,le Borkouet
l1Ennedi...Le Gouvernement du Tchad n'exerce passon pouvoir
dans cette zoneet les groupes rebelledsu Frolinat,quiy
poursuivent leurs opération ns,peuventforcerà partir les
soldats libyens estiméà 4 000,bien qu'ilsen aient tué10 et
fait17 prisonniers lors d'un accroche ag1976."

Ces faits font partidee l'ensembledes événementsdans laperspective

desquels il convien de situer lestraités.

25. Faceà cette réalitée,t doublement préoccupé par l'occupation

libyenneet l'appuifourni aux rebelles, le Tchad sui uvnetpolitique

variable, faite tantôt de dénonciations, tantôt d'efforts militaires

voués à l'écheccontredes forces supérieures, tant dettentativesde

négociations. Ceut la politiquedu désespoiret non de

l'acquiescement. Au milieu de 1976, une mission tchadienne di rigée

le colonel Ngakinarv,ice-présidendtu conseil militaire suprêm ee,

rendit à Tripoli. Selonson rapport,quandla Libyemontral'atlas

d'Oxfordde 1956 représentant la ligne Laval-Mussol dieni935,

"la délégation tchadiensneétonnealors dela remiseen cause
de cette frontière aprèvingtans d'indépendanc deu Tchad,et
ce, en violation flagrante dla déclarationdu Sommetde l'OUA
du Cairede juillet1964..."(mémoiredu Tchad,vol. IVB,
annexe283).La créationde nouvelles commissions mixt fut proposée.Toutefois,

plus tardla même année, le Tchad ferma sa frontière avL ecbyla

(AfricaConternporarRecord 1976-1977, 875). Cet automne-là,il

démentit aussi avec énergie devant l'Assemblée gél nérrumeursqui

couraientau sujetd'unecession deterritoire.Au débutde 1977, la

négociation semblait constituer la politip queférée. Toutefois,le

20 juin 1977, le Frolinat lançuane offensive contrlee poste

dlOunianga Kebir,puis le 22 juin la garnisonde Bardaïfut encerclée.

Le 23 juin, la commission mixte techniq seeréunità N'Djamena. Le

procès-verbal conjoint indique l qudélégation du Tchad souleva la

questionde

"l'occupation illégaled'Aouzoupar la Jamahiriya arabe
libyenne... Cette présence libyene ne territoire tchadien
empêche toute coopération, quels que so saenttureet son
objet." (Mémoiredu Tchad,vol. IV, annexe 284.)

Le 4 juillet,au bout de deux semainesde siège,le postede Bardaïdut

se rendre. Il fallut évacuer Zouarqui avait aussiété attaqué.

L'arméetchadienne avaitperdu trois cent sommes,et les rebelles

avaient pris le Tibesti (Buijtenhuis,. 281).

26. Le Gouvernementdu Tchad dénonça furieuseme latLibye,tant

pour son occupation dela bandedVAouzouque pour l'appuiqu'elle

fournissait aux rebelles. Le gouvernementa publié également plusieurs

décrets visantà contrôler les mouvemene ts les ressources financières

des Libyensvivant au Tchad (AfricaConternporarRecord 1976-7B , 78).

Quelsqu'aientété les problèmes internes, ou les soucisde la guerre

contreles rebelles,ou les relations avec la Franco eu, lanécessité

d'uneaide, il étaittemps de porter de nouvel auquestion à l'attention

de l'organisatiodnes Nations Unieset de l'organisatiodne l'unité

africaine. 27. C'estce quefit le Tchad à la vingt-deuxièmesessionde

l'Assembléegénérale,lorsqu'ilse plaignit énergiquemed nts agissements

de la Libyeet de ses prétentions sur la bandedtAouzou. En même temps,

il saisitl'OUAde la question, déposand tes plaintes tout aussi

énergiques contrl ees prétentionset les actesde la Libye. Tout celaa

été rapporté danl se mémoiredu Tchad (p. 38-41)et dans son

contre-mémoire (p. 455-456)et sera analysé parM. Franck.

28. L'annéesuivante,le Tchad avait décidd ée poursuivreses

protestations auprè du Conseilde sécurité. La protestation du Tchad

contrel'agression libyenne,et la position juridiqu sur laquelleelle

reposait,sont exposées dans le mémoiredu Tchad (p. 325-330),de même

que la réponsede la Libye. Le Conseilde sécurité décida de différer

l'examende la questionétantdonnéque, grâceaux effortsde médiation

déployés par le Présidentdu Gabonet le Présidentdu Soudan, il

paraissait alora su Tchadqu'unesolution africaine pourrait être

trouvée. Le Tchadne pouvaitpas savoir que, pendan dix ans encore, la

Libyerefuserait de coopérer aux efforts déployépsar l'OUApour résoudre

le différend. Mais la déclaration détaillée faite l parreprésentantdu

Tchadau Conseilde sécuritéle 17 février 1978 montre parfaitement que

le Tchads'en tenait à sa position juridique au suj detla bande

dtAouzou,soutenant que la souveraine duéTchad était opposabl àela

Libyeet que la Libyes'appropriait le territoire du Tchadpar la force

(NationsUnies, Documents officielsdu Conseilde sécurité,

trente-troisième année 2060 séance,et mémoiredu Tchad,p. 326).

29. De plus,tant le gouvernement que les rebelles reconnaissaient

qu'ilfallait mettre fin à l'agressionlibyenne. En octobre 1978, if lut

convenu que ces parties, oeuvrp ant l'intermédiairde'un gouvernement

provisoired'uniténationale, établiraient " unan de travailen vue de

libérerles territoires tchadiens occupé (documentS/12888du 9 octobre1978,annexeP199). Même pour ceuxqui dépendaientle plus de

l'appuifinancier de lL aibye,la bande dlAouzoun'appartenait pa s la

Libye.

30. Au coursde la période 1979-1981 ,e Tchadn'a pas persisté dans a

ses objections concernant la ban dtAouzou. La guerre civilefaisait

rage. Les autorités tchadienneétaientpréoccupées et de fait,une

importante force libyenne qualifié" eforcede paix''se trouvait,

d'aprèsune déclaration fait par le représentantdu Tchaden 1981,dans

ce pays "à notredemande"(Nations Unies, Documentosfficielsde

l'Assembléegénérale, trente-sixième sessi séancesplénières,

3oe séance,7 octobre1981,par. 120-121;mémoiredu Tchad,p. 330).

Au coursde cette brève période marqu par un rapprochement apparenit,

futmême question d'une unio entrele Tchadet la Libye. Ceprojetse

heurtaà une forte oppositiod ne la partde plusieurspays africains

devantle Conseilde sécuritéet à l'opposition unanim des douze chefs

dlEtatde l'OUA,qui voyaient la Libye consolid son expansion devanutn

régime tchadien excessiveme complaisant.Les propositions d'union

n'eurentpas d'aboutissement.

31. C'estdurant cette période qf uet conclule traitéTchad-Libye

de juin 1980. Il y est question dela défense mutuelle contre
053
l'agressionextérieure et de la lutte contre le colonialissous toutes

ses formesen Afrique :dispositions frappante esque l'onpourrait

trouver ironiques. M. Cahiera demandési un tel traitén'était pas la

preuved'un acquiescement(CR 93/18,p. 48). Non, cen'estpas la preuve

d'un acquiescement. Monsieur Président, Messieurdse la Cour,le

Tchad était occupé militairement lorc squaccord fut concleut il en

va de même du traité de1981. 32. Il est particulièrement déplaisant qu'un Etat puiq ssant

occupe militairemen une partiedu territoirede sonvoisin fasse

craindrequ'ilen occupera une plusgrande partie encor et dise alors

que l'incapacitdée protester deson voisin impuissant équiva entfaità

un acquiescement.

33. Le cri de protestatiofut lancéune nouvelle fois, aprè le

retraitdes troupes libyennes vers f lan de 1981,au Conseilde sécurité

et à l'OUA. Dès le changementde gouvernementà N'Djamena,en 1982,le

Tchad renouvelsaes protestations contre les prétentions territoriales de

la Libyedevant l'Assembléegénéraleen octobre1982 (mémoiredu Tchad,

p. 326). Mais en 1983, lLaibyerevinten poussantses incursions

militaires plulsoin à l'intérieurdu Tchad. Et ce dernierse plaignant

au Conseilde sécurité decetteagression, en profit pour réitérersa

positionau sujetde la bande d'Aouzou. HissèneHabré,maintenant

Président,demandainstamment au Conseil de sécurité d'invil terLibyeà

mettrefin à l'occupation illégale de la partie d noTchad (S/15644,

17 mars 1983,annexe,p. 205). Commenous l'avons montré dansnotre

mémoire(mémoiredu Tchad,p. 335), la cause juridiqudu Tchad fut

largement appuyéeen Afrique.

34. En réalité,bienque le Tchad continudee s'efforcer

d'entretenirde bonnes relations avec ses voisins, a iplpris, même face

à des problèmes constantsà,fairevaloir régulièremen sa souveraineté

sur l'ensembledu Tchad,y compris sur toutlea partie nordet la bande

d'Aouzou.

Conclusionsà tirer
024
a)Absenced'acquiescement

35. Monsieurle Président, Messieurs de la Cour, quellesls eosnt

conclusionsà tirer? M. Cahier vousa demandéde tirerdes conclusions

d'unecertaineséried'événements qu'il vous a décrits.Nous vous demandonsde tirer desconclusions différentes d'une série d'événements

moins sélective.

36. Pour obtenirun titre,il fautcertaineseffectivités.

L'exercicedes attributs dla souveraineté nécessaiàel'obtentiond'un

titre peut être soumis des interruptionetà des intervalles, comle

montrentl'affairede l'Xlede Palmas(RGDIP,1935,p. 156) et

l'affairede 1'Ilede Clipperton(26 AJIL, 1932p. 390). Et la

manifestationde souveraineté requise dépendeala naturedu

territoire.Nous avons montrtéoutcelaen ce qui concerne

l'acquisition,en 1913, dutitredu Tchadjusqu'àla ligne de1899. Une -

foisle titre définitivement établdes manifestations appropriées

raisonnablesd'autoritésont pertinentes une autrefin- celle de

montrerl'intentionde continueràposséder. Comme l'a dit la Chambre

dans l'affairedu Différend frontali(C.I.J.Recueil1986,

p. 586-587),lorsqu'ily aun titre,"1"effectivité'n'intervienten
réalitéque pour confirmer l'exerciduedroitné d'un titrejuridique".

C'estprécisément cet exercice d'effectipvitéle Tchad depui1960

que M.Sorel vousa démontréhier.

37. En droit internationun Etatperd son titresur unepartie de

son territoirdu faitnon pas d'une insuffisandees effectivité(bien w

qu'ellesaienten faitété nombreusesm)ais d'une cessionu du retrait

de toutesles manifestations de sa souverainparé1'Etaten question,

jointà une intention d'abandonnern titre.

38.Assurément, lorsque la possessd'un territoireest

interrompue,par exemplpar l'agressiod'un autre Etat,le titresur ce

territoiren'estpas perdudu faitde l'incapacité temporaire d'exercer

tousles attributsde la souverainetéM. Crawfordl'a expressément
0 2 5
concédé(CR 93/19du 21 juin,p. 54-55).Il ne seraperdu quepar

derelictio, par l'abandon deanimusoccupandi.Tel n'amanifestement jamai été le casdu Tchad. Etil est un autre point, lié

à celui-ci, qui revêt une grandiemportance.On ne suraitprésumer àla

légère que des frontières reconnuepar traité ont été abandonné par de

prétendus actes d'acquiescement d'une pa d'unecôté dela frontière.

En toutétatde cause, l'acquiescemen nt saurait priver d'effu et

traiténi suffire à transférer le titrede 1'Etatsituéd'un côtéde la

frontière à 1'Etatsitué de l'autrc eôté. Si un acquiescement était

intervenu(ce qui n'estpas le cas),la Libyeaurait encore eu besoin

d'établir un titre valablequi luisoit propre en remplacementdu

traité. Il n'estpas difficile de voir qs ueun traitéde frontière

peut être rendu inopéran et,si le titresur un territoirepeut être

transférésur la foi de simples revendicationsn qumontrent pas

d'opposition énergique,on courtà l'anarchie juridique.

39. Quoi qu'ilen soit,Monsieurle Président, le Tchadn'a jamais

acceptéles revendicationd se la Libyesur la bandedtAouzou. Il a

constamment élev des objectionscontrel'infiltratiod ne la Libyedans

la bande d'Aouzou,puis contreson occupation de cteerritoire. A

certains moments de la période 1972-1 98T9,hada dû, sous lapression

des événements internes placerses espoirs danlsa diplomatie plutôt que

dansune protestation publiquedevant l'ONUou l'OUA. Le fruit récolté

est amer. M. Cahiera affirmé que les principes relat ifs

l'acquiescement énoncés da l'affairedu Templede préah~ihéar

signifient quele Tchad auraitdû éviterde concluredes traitésou

auraitdû formuler une réserve dans chacun da 'eusxujetde son titre

sur labanded'Aouzou. J'ai essayéde montrer trois chose :s

premièrement, que la teneur md êmsedispositionsde fonddes traités

n'indiqueni derelictio, ni acceptationdu titrede la Libye.

Deuxièmement, qulees circonstanceesxpliquentclairement pourquoi ces

traités ont étcéonclus. Et troisièmement, que le dossier montre clairement qu'à chacud nes phases,pour chaque traité,auf aucoursdes

années 1980-1981l,a question dela frontièreet de la banded'Aouzoua
O26
bien été soulevée anuiveaubilatéralpar le Tchad auprès de lLaibye.

Même l'idéed'uneunionavec laLibyebrièvement évoqué en 1980-1981, .

n'a pas équivalupour le Tchadà reconnaîtrequlAouzouétait déjà libyen,

même si l'onallait unir ensuite les souverainetés.

40. Le Tchada connula pauvreté, l'agressioent les luttes

intestines. Il importeau plushaut pointque la Cour comprenne bien que

les objectifsdes rebelles n'étaienpas les objectifsde la Libye.

Les diverses factions rebelles voulaient pre ledreuvoirau Tchad. A -

aucunmoment - et c'est frappan t aucundes mouvements rebellen'a

proclamé quele BET ou la banded'Aouzouappartenaità la Libye,ni n'a
suggéré que la frontiès retrouvaitailleurs que là où elle était

tracée,le longde la lignede 1919 comme on enétaitconvenu encore en

1955, pas plusqu'iln'a prétendu vouloir faire sécessp ionr se joindre

à une plus grande Libye.

41. Monsieurle Président, Messieurs de la Colurs,pays qui

convoitentle territoire de leurs voisi invoquentfréquemmentla

persécutionde minoritésethniques ou religieuss esr ce territoiret la

revendicationà l'autodéterminatiode ces minorité s c'est-à-direau v

droitde faire sécessioent de se joindreà 1'Etatvoisin d'unemême

religionou d'une mêmeethnie. Aucun de ces aspect ne s'appliqueau

différend entre le Tcheatd la Libye. Ceuxqui combattaienle

gouvernement centradlu Tchad n'ont jamais invoqdeémotif religieux.

S'ilsétaient Musulmans, la plupart des memd bregouvernements qusie

sont succédéà la têtedu Tchad l'étaienatussi. Et ilsn'ontni réclamé

l'unionavec la Libye,ni proclamé quele territoiresur lequel ils

combattaient déjà appartenait la Libye. La véritéest que l'aide

fournie parla Libye auxrebelles convenait simpleme aux deuxParties. 42. Il y a, Monsieur le Présidenut, autre pointsur lequelon

pourraits'étendre trèl songuement, maijse ne l'aborderaque très

brièvement.Le principeex injuriajus nonoritur,tel qu'ilse

reflèteaujourd'hui à l'article2, paragraphe4, de la Charte,de même

que dans les résolutiondse l'Assemblée générale concernant la définition

de l'agressionet les relations amicales entlres Etats(résolution 3314

(XXIX)et résolution 2625 (XXV)respectivement)e,st bien établi.

43. Si la présence de la Libye dans la bandeAouzouest illicite,

ce principe revê une pertinencemanifeste. Mais la Libyeaffirme que,

dès lorsque l'onadmet que le traité de 19 ne5veut riendire,sa

présencedans la bandedtAouzouest licite. Et la Cour déterminera quel

doit maintenant être le tracéla defrontière.

45. Je me contenterai de faire deux brèves observations.

premièrement, le principe cardina de la stabilitédes frontières

exige plusqu'unesimple affirmation d'un tit sur un territoirepour

justifierune occupationmilitaire. Malgréla sympathie considérable que

l'organisatiodnes Nations Uniesa réservée aux revendications juridiques

de l'Argentinseur les Malvinas/Falklandsle Conseilde sécuritén'a pas

été disposéà tolérer l'action militaire entrepp risel'Argentine pour

faire valoirsa revendication. Ebien sûr,plus récemment,

l'organisatiodnes Nations Uniesa refusé d'admettre l'affirmatd ion

l'Iraqà l'effetqu'ilenvahissait le Koweïtpour faire valoirun titre

juridique (résoluti6 on2 (1990)du Conseilde sécurité).

46. Le Tchad ayant retiré sa plainte dev lentonseilde sécurité

dans l'espoir d'une solution africai inn'y a pas de résolution

contenantune condamnationcomparable.Mais les débats qui ont eu lieu

au Conseilde sécurité montrent que l'action de Lilbyea suscitéà la

fois alarmeet désapprobation(mémoiredu Tchad,p. 301-303). Un Etat

qui a réellementune revendication suun territoire détenpuar un autre Etat devrait faire valos irn droitpar le biaisde l'unquelconque des

mécanismes qui s'offrep ntur le règlement pacifiqdues différendset

Si l'onpouvait faire valoir toute revendication
non par une occupation.

par une action militairaefind'altérerle statu quo des frontières

héritées,il s'ensuivraiu tne instabilitétotale.

47. La deuxième question'estpas tantde savoirsi l'occupation

illicitede la Libyepeut, après une assez longue période, commenceà

êtreune "réalité nouvelleq "ui doiveêtrereconnueet qui puisse fonder

un titre. C'estmanifestementpar la négative qu'il faut répondrà

cettequestion.

48. La présomption penchen faveurde la continuitédu titre.

Commela Chambrede la Cour l'anoté dans l'affairedu ~ifférnd

frontalier(Burkina~aso/~é~ubliqu du Mali),lorsqu'une partie détient

un titreen vertudu droit international coutumil er,ccupationdu

territoire parune autre partiene se substitue pas au titre:comme elle

l'a dit, "11 fautpréférer le titre"et nous ajouterions,à fortiori,

"lorsquele titreest détenuen vertud'un traité"

(C.I.J. Recueil1986, p. 554).

49. Et il est frappant, maipas surprenant,de constater que
029
w
l'organisatiodnes Nations Unies n'paas décidéde légitimer l'occupation

de longuedate de certains territoires, qu' s'agissedes Hauteursdu

Golan,ou d'autres territoires occup par Israël,ou du nord de Chypre

ou du Timororiental. Au contraire, dan ses résolutions,l'ONUa

réaffirmél'indamissibilit de l'acquisition de territoireslp aar

conquête militaire.

50. L'importantest plutôtque l'occupationmilitaire empêche que

des actesultérieurs soient considérés co deseeffectivités, lesquelles

peuvent,d'unepart, déplaceu rn titre existant et, d'autre part, ê lare

preuvede l'exercice d'unesouveraineté permettal ntacquisitiond'un

nouveautitre. 51. En réalité,ce dont il s'agit,c'estde datescritiques.Dès

son accession à l'indépendancee,n 1951,date à laquelle ellea

tacitement accepté les frontières d elleavait hérité, et certainement

à compterde 1955,date à laquelle elle leas expressément acceptées,

aucun actede la Libyedans la bande dlAouzoune peut constitueu rne

effectivité.Même si le Tchadn'avaitpas.fait-tout ce qui étaiten son

pouvoir pour protester, mê siele Tchadn'avaitpas exercé les attributs

normauxde la souveraineté aussilongtempsqu'ill'a pu, les conditions

juridiques préalables deva êtrerempliespourqu'ilpuissey avoirdes

effectivités libyennes dansba laded'Aouzoun'ontpas été réunies. Il

y a eu une occupation libyenniellicite. Il n'y a pas eu d'effectivités

libyennes contre lesquelles le Tc eûtden fait l'obligatio ne

protester. Les protestations voulue ont néanmoins étéformulées.

52. Ne perdonspas de vue,Monsieur le Président,que la

revendication dont la Co urt saisie concerne une ligne qui devr êtrte

tracéede novole longdu lse parallèleet que nos contradicteurn se

prétendent même pa qu'ily ait des effectivités libyennesjusqu'àcette

ligne.

Voilà, Monsieur le Présideq nt, achèvemon exposé,et je vous

saurais gréde bienvouloir maintenant donner la paroleà M. Pelletpour

qu'il puisse voupsarlerde ce qu'ilest convenu d'appeler l "lettre

Tombalbaye".

Le PRESIDENT: Je remercie beaucoup Mme Higgi etsje donnela

paroleà M. Pellet. Mr. PELLET: Mr. President, Membero sf the Court.

1. We felt thatwe couldnot leave without a reply the allusions,

always embarrassed but increasingly freqa ueOur deliberations

proceed, that thL eibyanPartyhas been makingto a letterwrittenby

President Tombalbayt eo Colonel Qaddafion 28 November1972.

This "Tombalbayeletter" - and 1 shallput this termin quotation

marks throughout my statement- is surroundedby an aura of mysteries(in

the plural)of which the attitude adoptb ed Libyaduringthe current

proceedings isnot the least.

2. The LibyanMemorial containsno mention whatsoeveo rf this

document,which is not annexed, althoughLibyadid not hesitateto

produceit in 1987 before the lega lub-comrnitteof the OAU. Indeed,it

is the copy supplieadt the time by the Libyanrepresentatives that Chad

has reproduced asAnnex 343 to its own Memorial,and not anothercopy -

which, ofcourse,does not exist,contraryto what maybe impliedby

certain wording used i the Libyandocuments(seeRL, footnote,p. 272,

para. 11.19),as is clearly explaineo dn page 23 of the ChadianMemorial.

1 would add that Chadhas not "chosen"(seeRL, p. 271, para. 11.15)

to annex this documentto its Memorial. It has producedit simply

becauseit believesit to be the duty of the Partiesto submitto the

Court al1 the documentsrelatingto the case theyhave brought before it,

and finds it somewhat surprisintghatLibya holdsa differentview, even

though the scrupleist now affects hadnot prevented it from brandishing

the "Tombalbayeletter"before OAU bodies or from referring to this

mysteriousletteron many occasions duringthe current proceedings, with

r31 increasing insistenc as Libya'sconfidencein the strength of its

argument seemsto decline, as thougi ht regards this documenats a kind

of shameful"joker". For while it was Chad which producedit for

documentary purposesi,t is indeedthe LibyanPartywhich is tryingto

use it as an argument. 3. 1note,however,that although counsel for Libyahave spokenat

lengthabout the"Tombalbaye letter"(seeCR 93/14,pp. 44-64 and

CR 93/18,pp. 34-40),theyhave concentrated mainlyon discrediting the

evidencethat Chad submitted tothe Courton 9 February thisyear with

the agreementof the LibyanParty. We thankLibya for this agreement,

even if it now seemsto regrethavinggiven its consentand we are to

believewhat Mr. Maghursaid in this connectionon 14 June (CR 93/14,

pp. 46-47).

1 should liketo take this opportunitof explainingone point: we

in no way allegethat this evidence,takenunderoath by an adviserto

the AppealsCourtof N'Djamena,decisivelyestablishes that th Aozou

strip belongsto Chad. It is simplythat, in the face of a document

disinterredby Libya in obscure circumstancoes whichit has toldus

nothing- and it continuesto be silentabout this-, it seemed usefulto

ask peoplestill aliveand to be foundin Chadwho shouldor couldhave
heard of this "letter"becauseof the functions they exercisaed the

time, whethertheyhad any knowledgeof it and, if not, whether,in view

of what they knew of the context, texistenceof such a document seemed

to them tobe "likely". Membersof the Court,you are awareof their

reply.

4. 1 can see two complementary explanatioofsthe strange attitude

adoptedby Libya withregard to the "Tombalbayeetter"duringthe

proceedings beforehe Court:

0 3 2 -the first relatetso theactual substanco ef the documentwhich is at

variancewith Libya'sargument,at leastin that it clearly

circumscribes the debateand showsthat it is indeedthe "Aozou strip"

(an anachronism athe time)which wasand still is the subjectof the

dispute;

- the secondcertainly relates to td heubtswhichmay be entertained

with regard to the authentici ofythe document. 5. A numberof disturbingand concordant factori sndeedserve to

give rise to thegravest doubts concerning the authentic oftyhis

"letter",which theLibyanPartyhas producedbefore OAU bodies and a

copy of which,1 would remindyou, Chadhas confineditselfto annexing

to its Memorial: why should therheave beena secretletterwhen a

treaty seemedto be indicated? Why this secrecyw ,hen the very daythe

letterwas sent and in the weeksthat followedmany occasions arost eo

notify it,as was done later,in the United Nationsi ,n the OAUand at a

numberof multilateraland bilateral meetings?Why did this document, so

essential accordintgo Libya,remain unanswered?Why thesestrange

expressions("inmy capacity of legal Presidentof Chad")and terms

which were not used at the time ("Aozouband")? Why this faulty typing,

this unusual presentation, this wrongerialnumber - we have found

earlier letters from the President's office bearing higher numbers? Why

this questionable signature How could adocumentso importantin the

view of the LibyanParty havebeen lost? Why, contraryto established

usage, did its addressee, Colonel Qaddafn i,t acknowledgeits receipt?

Was the reply also lost? Andwhy did Libya, whichhas refrainedfrom

annexingit to its pleadings, neverthelessproduceit beforethe OAU?

That makes a large numberof questions, sureltyoo many for this

documentto serveas evidence before the highest judicialbody in the

world.

6. Moreover, the reason advanc edLibya to justifythe cautionit

had originally shown in not producing the documentis also somewhat

surprising ... It invokesthe non-existenceof the original and explains

it as follows: "newly-emergeAntrican Stateshave commonlyexperienced

the difficultyof recordsbeing lost and destroyedw (CML, p. 302,

para. 5.120). But whereasChadhas longbeen tornby civilwars which

has indeed ledto the dispersion and loss of its archives, thLibyan régimehas been remarkablystablesince1969,and it is in any case

surprising - even thougheverythingis possible - that adocumentto

which Libyaattaches such importance coulh dave been lost; in any event,

this is less usualthan the Libyancounsel would have usbelieve ...

(CR 93/14,p. 47): Moreover,1 would remindyou that thesecircumstances

did not preventLibya fromusing it beforeOAU bodies.

The OAU was cautiousin its reaction,and in its reportof

13-14April 1988 the ad hoc Ministerial Committe of the OAU "decided

not to considerthe legal validito yf that letter,in the absenceof the

presentation byLibya of the originalof that document and averification
us4
. - of its authenticity" (MC Ann. 292, para.20). It was only laterthat

Libya seemedto have noticedthat it couldnot find the original.

Incidentally,Libya, whichdraws attention to the poor qualityof

the copywe had submitted(seeCR 93/14,p. 45), did not offerto provide

a better one, although 1,must repeat,it was Libyathat submitted the

documentto theOAU. Since it was a photocopy,it must have been copied

from something; as photocopiesare photocopied, it is not surprising

that texts becomes lesasnd less legible. Chad couldonly reproduce

somethingthat it had, but it was Libya thathad held the originals.

7. Be that as it may, Mr. President,the Courtwill undoubtedly,

like the OAU bodies,wish to disregardso uncertaina document. Chad is

not unaware,of course,that therulesconcerningthe production of

evidenceare less strict and less formalisticin international

proceedingsthan they generallyare undernationallaw -where,by the

way, theyVary considerably fro omne country to another.Nevertheless,

the factremainsthat a party may not proceedon the basisof a document

whose authenticity canno be established andis, as 1 have demonstrated,

subjectto great caution in the case in point. Moreover,as Sandifer tells us on the basis of existing case-law,

the originalsof itemsof evidence mustbe produced unless there is

convincingproof of theirdestruction (Evidence before International

Tribunals,U.P. of Virginia,1975,pp. 205-218); but Libya presents the

disappearanceof the Tombalbaye letteras a factwithout givingthe

slightest satisfactoreyxplanation.

035 Indeed,rulingsto this effecthave been madeby the Court itself;
-.
in the Corfu Channeland Ambatielos cases, foerxample,the Court

asked the partiesto producethe originalsof certain documents whose

authenticityhad beendisputed(seeI.C.J.Pleadings, Oral Arguments,

Documents, 1949,Vol. III, pp. 175 and 544-545,and 1953, p. 547; see

also the case concernintghe ArbitralAward Made by the King of Spain

(ibid.,1960,Vol. II, p. 164)).

Besides, even ifan original had been produced, examinati bynan

expert would obviouslhyave been requiredin view of the great doubts

that weigh upon the authenticity of thidocument. But thqeuestiondoes

not arise,since,precisely,the original seemsto have vanishedinto

thin air.

8.In any event,and even assumingthat it really exists, which 1
w'
concedeonly for demonstrativp eurposes- the leastthat can be said is

that we know nothing about i- the "Tombalbayeletter"would clearly

have no value as evidence.

Libya recognizesthat this mysterious document i nsot a treaty. It

regardsit as a unilateralact (see CML, p. 303, para. 5.123; RL,

pp. 271-272, para. 11.17, andCR 93/14,p. 48 or CR 93/18,pp. 35-36),

one of those acts concerningwhich theCourt recognized in the Nuclear

Tests cases that they"mayhave theeffectof creating legal

obligations"(see I.C.J.Reports 1974, p. 267). Assuredly,such may be the case. For it tobe so, certain

conditions must be fulfilled and among those conditions there is one of

particularimportance: thdeclarationinvokedmust have been made

publicly. The Court insisted upon this in its Judgmentof

20 December1974 inconnection withthe undertakings of the French

Governmentwith which itwas concerned:

- "An undertakingof this kind, if given publicly,and
036 with an intentto be bound ... is binding." (Ibid.,p. 267,
para. 43.)

- "Theunilateral statemento sf the French authorities
were made ...publicly ..." (Ibid.,p. 269, para. 50.)

- "The Court finds furthetrhat the FrenchGovernmenthas
undertakenan obligation the precise natur and limitsof which
must be understood in accordance wit the actual termsin which
they havebeen publiclyexpressed." (Ibid.,p. 270,
para. 51.)

In the Eastern Greenland casew,hich Libya also mentions (RL,

pp. 271-272,para. 1.17), the PermanentCourt attached great importance

to certain factswhich testifiedto the publicitygiven to the famous

Ihlen declaration, whetherit be the overall framework of diplomatic

negotiationswithinwhich the declaration was made (see

P.C.I.J.,Series A/B, No. 53, pp. 37 and 55-60)or the subsequent

reiteration of the undertakin (ibid., p. 73).

The "Tombalbayeletter",if it was ever written,was keptsecret,

both by itsauthorand by its addressee, and that for 15 years. This

fact alonewould, by virtueof the very case-law invoked bL yibya,

disableit from producing any legal effectwhatsoever,and this

consideration compels recognitiw onth particular forcewhen the pointat

issueis 114,000square kilometres of Chadian territory,the stake of a

long-standingand completelypublicdiplomatic debate.

9. And theproblem is more far-reachingthan that. We are at the

end of the 20th century. Following President Wilson's speech of 8 January1908,the Covenant of the Leagueof Nationsand the Charteof

the United Nations have proscribedn ,oisecret diplomacya,t least

confidentiallaw, thus contributing, if may putit thus,towardsthe

moralization- an altogether relativmoralization- of international

relations.

037 It wouldbe inconceivable that the destoinyimmense territories

should depend,as wasunfortunately once the cason,secret

correspondencwehich, inOur case, moreover, is extremehypothetical.

Mr. Presidentcan one imagineMr. Mitterand recognizi"as [legal]

Presidentof the FrenchRepublic",that the Duchof Normandy,not to -

speak ofthe Duchyof Aquitaine,"wasandwill,without any doubt, b aen

integralpart of theUnited Kingdom?" Can one without laughing imagine

theUnitedKingdomGovernment relyingon this20 yearslaterbeforeyour

Court? Thiswouldbe neither more nor less incongruoushanwhat Libya
is tryingto establishby exhumingthismysteriousmissive. Libya's

representativehsavecorneto this Courto affirm,hand on heart,that

they are convinceof the "authenticity"f the letter(CR 93/14,pp.24

and 46) or that its existenis "likely"(CR 93/18,p. 37) or, at least,

is "farfrom implausible"(CR 93/18,p. 36).

Let us go further:can one seriouslconsiderthat aresponsible

Head of Statewould havethe ideaof writingsucha letter? The reply is

of coursein the negative. Buthenwhy should suchan intentionbe

imputed toTombalbaye? Becausehe was thehead ofan African Statep,oor

and disadvantaged?Becausehe is dead? 1 cannot believethat the

authoritiesof a neighbourinStatewould believein such a story,and if

they believedit,you, Membersof the Court,couldnot believeit!

10. The Republic ofhadconsidersthatLibyais not servingthe

Courtby askingit totakesuch a document intoconsideration.If your

Court decidedthat aclaimof the importanceof the one beforeou could be,1 do notSay decided,but merelyinfluenced by the suspectcopyof a

secretletterkept ina drawerfor 15 years,thatwouldbe openingthe

path to manoeuvresand conjuringtricksof al1 kinds.

Mr. President,Membersof the Court,the Republicof Chad

respectfully request you to takeno accountof thisletter.

Mr. President,if you permit, ProfessoFrranck willnow presentto

the Courtthe discussions that tookplacein the OAU and in the

United Nations whichconfirmed thweidespread acknowledgment bothth by

AfricanStatesand by the international communia ty a wholeof Chadian

sovereignty ovet rheregionclaimedby Libya. If you wish to take a

break this mighb te the righttime.

Thankyou verymuch,Mr. President.

Le PRESIDENT :Je vous remercie, MonsieP urllet. C'esten effet le

bon momentpourune courtepause.

The Court adjourned from 11.10 a.m. to 11.20 a.m.

Le PRESIDENT :Veuillez vousasseoir. Je donnela parole à
C39
M. Franck.

M. FRANCK :Lors de nos deuxprécédents exposés devant vous,

Monsieurle Présidentet Messieursde la Cour, j'ai fait valoir qulee

créditqu'ilfaut attribuer à la revendicatiodne la Libye,tellequ'elle

se présenteaujourd'hui, doit Gtre apréciédans lecontextede ses

silences à l'organisatiodnes NationsUniesen 1951-1952, et à nouveau

pendantla périodequi a précédé l'indépendand ce Tchad,en 1960.

Les effectivités concernal nt frontièreaprèsl'accession
de la Libyeà l'indépendancee ,n 1952,et les débats
à l'organisatiodnes Nations Unieset à
l'Organisatiodne l'unitéafricaine

1. Dans cette partiede laplaidoirie du Tchad,Monsieurle

Président, nousallons à nouveautirer lesconséquences qui s'impose dutsilencede la Libye. Parfoisl,e silenceest extrêmementéloquent. Des

exemplesnous viennent immédiatement à l'esprit.Voyantson chapeau

volé, lavictime crie : "A l'aide: Il a volémon chapeau",et se

défend. Les badaudss'attroupent.Une altercation éclate. D'abord, une

fois appréhendél,e voleurnie avoir prisle chapeau. Ce n'est que bien

plus tard, traduit deval ntjuge,que celuiqui apris le chapeau

affirme qu'il appartenait àson grand-père. Le juge doit-iltirer des

conclusions du fait que, lorsqu'ila pris le chapeau,l'accusén'a rien

dit ? Le juge est-ilfondé à tirerdes déductions du faitque l'accusé a

eu recours à la violencesansmême essayer, sansparler même de faire

toutson possible à cette fin, de convaincre pacifiques mennt

adversaire ? Le juge est-ilen droitde déduire quoi que c soitde la

conduitede l'accusé ? Pourrait-ilraisonnablement conclure que

quelqu'un qui aurait vraiment eu des dr surtlechapeau n'auraip tas

nié l'avoir pris et n'aurait pasessayéde se l'approprier de façonsi

violentesansmême dire que ses actes avaient, semble-t-il,une base en

droit ? Un jugene pourrait-il pas en conclure que, lorsqua 'ilolé le

chapeau,l'accuséne pensaitpas vraiment avoir une revendication

valable ?

2. La Libyeest l'hommequi avolé le chapead uu Tchad: par la

violenceet sans invoqueraucun des motifs juridiques détail qu'elle

avance maintenant. Comme l'on pous vaitattendre, l'invasion libyenne

du BET en 1973a suscitédes protestations extrêmement énergiques de la

part du Tchad;après que les négociations bilatérales entamées avec

Tripoliet les appels lancés à cette dernière s'avérèrent vail ns,Tchad

portason affaire devant le Conseilde sécuritéet l'Assemblée générale

des NationsUniesainsi que devant l'organisatd iol'unitéafricaine.

Le Tchadne se contentad'ailleurs pas de protester: il essayade

Il défendit
défendreson bien par ses paroleset parses actes. fréquemment et publiquement, de façon détailll ée,droitqu'il

invoquait, sur la bas de la successiond'Etatset de traités,sur les

territoires situés a sud de la frontière décrite dans le traité

franco-libyen de 1955. Il défenditson territoire et ildéfenditson

titre juridique, justifias notn accusation d'agressioen fait et en

droit.

3. Dès 1971,le Tchadn'a cessé de saisid re son affaireles organes

internationaux compétents juridiquement habilités connaîtredes

plainteset des différends entrE etats.

4. La Libye, enrevanche,s'estabstenue, pendant prè de quinze ans

après avoir envahl ie BET, de répondreaux plaintes formulée sar le

Tchad devant les organes compétent se l'ONU. Elle s'est fondéesur la

raisondu plus fort, sur une politique de la"chaisevide", et,

épisodiquement, sul ra carte discréditée de Mussoli etisur une

interprétation manifestement fau dssla résolution 392 (V)de

l'Assembléegénérale.

5.Le Tchad a déjà montrc éommentle "silence"observépar les

dirigeants libyensà l'ONUen 1952et 1960,qui sont les deux périodes

critiques pendant lesquellesLl ibye,puis le Tchad,ont accédé à

l'indépendanceo,nt équivalu à un acquiescement de la Lib àyela ligne

décrite dans letraitébilatéralde 1955. Le Tchad s'emploiera

maintenantà démontrer qu'il y e au un autre silence prolonget tout

aussi éloquent de la Libyp e,ndantla période durant laquell le Tchad,

àmaintes reprises, a accusé le Gouvernement libyen d'agression devant

les institutions internationae lerégionales habilitées précisémentà

connaître de telle sccusations.
. .
6. Pour le Tchad,il est clair quele silence observé par la Libye

faceaux accusations formelle du Tchadet aux déclarations publiques

détaillées, faiteasu sujetdu droit applicable en matièrede frontières a des incidencesjuridiques. Nous ne soutenons pas qu'il est interdit à

la Libye,forclose, de formulea rujourd'huide nouvelles revendications

juridiquespour justifierson occupation d'Aouzouen 1973. En revanche,

nous pensons qu'enne les invoquant pas à l'époque,ni d'ailleurs au

cours de la période de près de vingt ansqui a suivi l'occupation

d'Aouzou,la Libyea jeté un doute sur sa probité. Nous pensons qu'un

principe de prescription comme celui ba ssur l'inaction,qui est reconnu

dans tous les systèmes juridiques du monde (le principeet son

universalité sont discuté sar l'arbitreRalston dans l'affaire

Italie (Gentini) c. Venezuela, comité mixtd ees réclamations, 1903, 1

Ralston, Venezuela Arbitration of 1903, 720,724-730 (1904);W. Bishop,

InternationalLaw, 3 e ed., p. 42-46),joue tout au moins un rôle de

présomption dans la présente affaire, et doit sinon interdireà la Libye

de formulerdes revendications fondées su un titre historique et des

considérations ethniques ,u moins aider laCour à déterminer quel est le

poids qu'il faut leur attribuer à un stade aussi tardif(mémoiredu

Tchad, p. 235-238,par. 105-114; contre-mémoir du Tchad, p. 81 et 82,

par. 2.96-2.98et p. 85-90,par. 2.109-2.118;répliquedu Tchad,

p. 11-18,par. 1.05-1.20).

7. En outre, le Tchadest convaincu que les silence se la Libye

doivent être pesés auregarddu droit et de la pratique appliquép sar

l'ONU en matièrede décolonisation ainsi que des normesdu régionalisme

africain.

8. Le Tchad a longtempsfait valoir devant les organes

internationauxet régionaux compétentse ,t fait aujourd'hui valoir devant

la Cour internationale de Justice, que l'agression libya enneolé non

seulementle territoire tchadien mais auss des règles extrêmement

fondamentales de la pratiqueet du droit internationaux constituant le

coeur même de l'ordrp eost-colonial. En pareilles circonstancesl ,a Libyeavaitle devoirde parler, l'obligatio d'expliquer, de divulguer

pleinement les éléments, quels qu'ils soi qent,uraient pu fairl ea

lumièresur son comportement violen tu en atténuer lagravité.

9.Le Tchad demande instammeà ntla Courd'accordertout le poids

qu'elle mériteà la nécessité de préserver les règles qu'il ac lause

Libyed'avoirviolées, particulièrement, l'article2, paragraphe4, de la

Chartedes NationsUniesainsique la déclaration du Caire relative aux

frontièrespost-colonialedse l'Afrique.Le Tchad n'ignore paq sue, dans

ses écritures, lLaibyea officiellement souscrità la fois aux règles

systémiquesqui interdisent le recours unilatéral la forceet à celles

qui garantissentla permanencedes frontières coloniales. Toutefois,

l'importanceque revêtent ces deux séries de règl uns,impleaccordde

principene suffitpas. Si quelqu'unprendquelque chose qui

m'appartient,il ne suffitpas que l'intéresssée dise d'accord avelces

dispositions qui interdisenle vol tout en affirmant que cqeu'ila

pris, en fait,lui appartenaitjadis. Le droit n'interdit pas seulement

le vol,il interdit aussi le recoursà la force. Il n'excuse pas le

recours illiciteà la forcepour s'approprier quelque chose simplement

parce que celuiqui veuts'approprier l'obje prétendde façonillusoire

avoirun titrevalable.

10. De plus, lorsque la société mias enplacedes moyens pacifiques

grâce auxquelsl'intéresséaurait pu faire valoi le droitqu'il

revendique mais qucee dernier,aussilongtemps qu'il le peut, refusede

dialoguer au moyen d'arguments juridiqp ures,érantdialoguerpar les

armes,cet élément auss doit pournous avoir quelque importanp ceur ce

qui est d'apprécier lbonne foi avec laquelle l'intéressé défe sad

revendication juridique lorsque 'ilenfin confronté à un juge.

11. Pendant toutela période durant laquelle elle ade eunombreuses
. -043
occasions d'établi lra crédibilité dsa revendicationsur le BET - et a même été miseau défi de le fair e la Libyea continué, devanlt'ONU,

devantl'OUA,d'invoquer la carte fantôme de Mussolini. Pendatnt

cette période, lLaibyea opposéce bouclier de papiea rux arguments

invoqués parle Tchad sur la basedu traitéde 1955,de la déclaration du

Caire et de l'articl2, paragraphe4, de la Charte.

12. Devantl'ONUet l'OUA,dans tousles cas où la Libyea pris la

peinede répondreaux accusations détaillée du Tchad, sesreprésentants

se sontbornés à faire sortirla "carte fictived"e Mussolini. Mais

c'était quand lLaibyeparlait à la tribunedes Nations Unies.

Aujourd'hui, parlant devant la Cour la Libyen'invoque plus cette carte 'iir

pour nous montreroù ellepensait que la frontière devraiste situer.

Maintenant, chose incroyable, cette ce arttutiliséepar le conseilde

la Libyepournous montreroù il n'y a jamaiseu de ligne :c'estune

ligne qui doit démontrer l'absed ncligne. Cependant, depuilse début

de cette instance, tout la gamme des moyens de défense juridiques

invoqués par lL aibyes'estaussiélargie à tel pointqu'onne la

reconnaît plus, s'étendant maintenanà une défense extrêmement complexe

basée, entre autres chose sur les liens ethniques, les routes des

caravaneset un titre historique (répliquede la Libye,p. 5-6,

par. 1.17; voir égalemenMt. Bowett,CR 93/20,p. 75). En outre,la

Libyeaccuse maintenanl te Tchadd'avoirhéritédu fruit empoisonné de la

cupidité coloniald ee la France,manifestéepar la conquête(réplique de

la Libye,p. 3,par. 1.07). Mes collègues ont réfut ées nouveaux

argumentsde la Libye. Pour ma parjt, démontrerai que, pendan toute

la période critique durant laquel llLibyeétaitaccusée d'agression

devant l'ONUet l'OUA, de tels moyen de défense juridiques ont

totalement fait défaut. Ces instancesn'étaientpas, commele suggère la

Libye, le lieude simples palabrepsolitiques. Le Conseil de sécurit et

l'Assembléegénérale sont les mécanismes compéten enematièrede règlementde conflits internationa(uvxoircontre-mémoirdeu Tchad,

p. 164-165,par. 4.78-4.79r;épliquedu Tchad,p. 10-18,

par. 1.01-1.20).En fait, l'OUAa crééun sous-comité d'experts juristes

pour examiner les revendications rivd alepartiesau différend.Un

sous-comitéd'expertsjuristes. L'impossibilité pou la Libye
C44
-. d'établirune revendication juridique explis qupréférence

compréhensiblpeour le recours la force, toutau moinsjusqu'àce que

la force ait cessé'atteindreson but.

13. D'ailleurs,à l'époquede son agression dans la banddeAouzou,

la Libyen'était pas étrangèreau typede différends portés devantl'ONU

dans lesquelsla revendicatiodn'un titre juridiqueest au coeurdu

problème. En 1974,au moment même où elle envahissait Aouzolu, Libye

s'esttrès activement employéeà condamnerles revendications formulées

par le Marocsur le Sahara occidental sl urbase d'un titre historique.

A l'époque, la Libyea mis enrelief ce queson représentantà l'ONUa

appeléla prééminence "du principede la décolonisatiodnu territoireet

du droitde sonpeuple à l'autodétermination(contre-mémoirdeu Tchad,

p. 139,par. 4.26, aveccitations).Le Gouvernement libye ne pensait

apparemment pas,à l'époque, qu'il s'agissa làtd'un argumenttrop

juridique pourl'ONU. En fait, elle a parfaitement compriles aspects

juridiques de lqauestion.

14. Si, en 1974,lorsque la questiodu Sahara occidentaéltait à

l'examen,la Libyepensaitqu'ilétait tout à fait appropriéde soulever

des questions de droit devant'Assembléegénérale, pourquo nous

dit-ellemaintenant qu'ellene pouvait pas le faire deva latmême

instanceen 1971, ou en 1973 ou encoreen 1977, lorsque le Tchad

l'accusait d'agression? Pourquoipouvait-elle opposerle droit auMaroc

touten faisanttout pouréviter de recouri au droitpour sa propre

défense ? En 1971,la Libye s'est borné àetourneren ridiculela

plaintedu Tchad,niant avoir un dessein quelconqu eur leBET. 15. Au coursdes quatre annéesqui ont suivil'invasionlibyenne,le

Tchad a essayé de faire face cette agressionet à l'appui quela Libye

apportait à la rébellion dans le BEen cherchantà apaiser Tripoli dans

l'espoird'une issue pacifique. Ma consoeur,Mme Higgins,a expliqué

cette stratégie de négociations bilatérales, cette stratégie

d'apaisement, quel'on peut qualifier dne'importequoi sauf

d'acquiescement. Pendant toute cette périlodeGouvernement libye n
, 0 4 5
continué d'insistesrur le fait qu'ilnenourrissait aucune ambition

territoriale dansle BET (contre-mémoirdeu Tchad,p. 401, par.9.118),

la Libyene collectionnant pas le déserts. Quatre ans plus tard,

toutefois, ilétaitclair que la stratégi de négociations bilatérales

avait échoué,et le Tchad a recommencéà avoir activement recouràs

l'Assembléegénérale, devant laquell il a de nouveau protestéontre

l'occupation militairedqAouzoupar la Libye(contre-mémoirdeu Tchad,

p. 400, par. 9.117, avec citations; mémoidre Tchad,p. 324-325,

par. 128-130).

16.Après quele Tchad eut exposéson cas devant l'Assemblée,

en 1977, lereprésentant dela Libye a répondu. Sa réponsea consistéà

nier quela Libye eût de quelconques"ambitionsau Tchad", maisil a

invité les délégationsàse reporter àla carte fantômdee Mussolini,

jointe enannexe au rapport publi en 1950par le Commissairedes

NationsUnies en Libye (mémoir eu Tchad,p. 324-325,par. 129-130,avec

citations). La Libye a affirmé que cette carte déterminalat

frontière. Voicice qu'a déclaréle représentant dla Libye :

"J'ai ici la cartedes NationsUnies jointeau rapport
établipar Adrien Pelten 1952"- il veut parlerdu Commissaire
des NationsUnies en Libyeet de 1950- "lorsque,avec
l'approbationde l'Assemblée générale,a Libyeest devenue
indépendante.Toutedélégation souhaitant consulter ce

documentpeut se le procurer auprèsdu Secrétariat. Il reflète
la situation réelle dans laJamahiriya." (Documents officiels
de l'Assembléegénérale, trente-deuxième sessio séances
plénières,2Se séance,p. 484.) Voilàà quoi se ramenait, en 1977, l'intégrali deéla thèse libyenne :à

cettecarte. De la lettrede Tombalbaye de 1972,par exemple, pasun mot

- jamais.

17. L'année suivantel ,e Tchada exposé, avec force devan le

Conseilde sécurité les bases juridiques détaill surslesquellesétait

fondéesa plainte contre l'occupationpar la Libyede la banded'Aouzou.

Lorsquele même dossier a étéprésentéà l'Assemblée générale,le

représentantde la Libyea répondu avec mépris, comj me viens de le

citer,que son pays "ne collectionnait palses déserts"(contre-mémoire

du Tchad,p. 401, par. 9.118). Peut-êtrepas au début. Mais, Monsieur

le Président, "l'appétit viee ntmangeant".

18. Pendant la périod1e979-1982,le Tchad s'est, dans la pratique,
046
- - trouvéSOUS l'emprised'une "force de lapaix" libyenne et, en 1981,a

failli être annexéà la Libye. Si la protestation élevée devant le

Conseilde sécuritépar les chefs d'Etatreprésentés au comitépermanent

del'OUAsur leTchad n'était pas venu epoint,le Tchad aurait pu ne

pas se trouverici aujourd'hui(mémoiredu Tchad,p. 331-332,

par. 153-155,avec citations).

19. En 1982,cependant, le Tchaa d pu reprendreses protestations

devant l'ONU et l'OUAet, depuis lors,n'a jamais cessé de proclamerson

bon droit devant les organes internatioc naupxétents. En 1983, le

Conseil de sécurité s'est convoquéà deux reprises sur la demandde

Tchad. Lors de ces réunions, le Tcha adétabliavec grandsoinun

mémorandum très détaillé développe antoreplus les arguments qu'il

avait déjà présentée sn 1978. Le Tchada mis enrelief le manque de

validitédu traitéLaval-Mussolini de 1935,la signification réell de la

résolution392 (V)et la validitéet l'applicabilitd éu traité

franco-libyen de 1955,et il a exposéen détailles violationspar la

Libye de l'articleIII de la Chartede l'OUA,de la résolution adoptéa eu Caire par les chefsd'Etatde cette organisatioanu sujet de

l'inviolabilitédes anciennes frontières coloniales dans l'Afrique

post-coloniale, ainsi qudee l'article2, paragraphe4, de la Charte des

NationsUnies (mémoiredu Tchad,p. 332-337,par. 156-172).

20. En réponse, laLibye a attaquéla légitimitédu Gouvernement

tchadienet a proféré quelques propos confaus sujet d'un traité de

"1936"qui, pensait-elleapparemment, devrait être déterminant ainsi que

d'un traitéde "1956"qui ne devrait pasl'être. Le représentantde la

Libye a égalementfait de vagues références la carte fantôme, laquelle,

a-t-ildit, était "jointeaux documents relatifsà l'indépendance de la

Libye", ce qui n'était évidemment pl as cas (mémoiredu Tchad,

p.333-334,par. 160-161). Nombredes orateurs africains qui one tnsuite

pris la parole,dont les représentantdsu Sénégal, dela Côte d'Ivoire,

de lVEgypte,du Gabon,du Soudan,du Cameroun,de la Guinéeet du Zaïre,
0 4 7
ont appuyéla position exposéepar le Tchad(mémoiredu Tchad, p. 337,

par. 164-165, avec citations; voir égaleme Documentsofficielsdu

e
Conseilde sécurité, trente-huitièm année,2428 séance(S/PV.2428,

provisoire),31 mars 1983,p. 32-36 et 46-48).

21. A la sessionde 1984 de l'Assemblée générale, tout ce qlue

représentantde la Libye a réponduaux explications que le Tchaadvait

soigneusement répétées éaté ceci :

"Je voudrais souligner quee que l'on appelle le district
d'Aouzoufait partie intégrantedu territoire libyen héritdéu
coloniaslisme italien comme le montlre carte utilisée lors de
l'octroide l'indépendance àla Libye. Aouzou est un
territoire libyenet le resteratoujours." (Mémoiredu Tchad,
p. 337, par. 171, avec citations.)

Fin de l'intervention. Pas un mot d'un titre historiquedu pacte

Briand-Kellog,des Senoussiou de la "pauvreLibye" victime de

négociations frauduleuse sn 1955. 22. La Libye a plutôt choiside recourir à la force comme principal

argument. En 1984, elle n'a pas hésité à dire au Conseil de sécurité,

qui examinait alors une foid se plus une plaintedu Tchad, qu'elle avait

le droit d'intervenir militairementau nom des insurgés tchadiens car

elle considérait ces derniers comme représent antgouvernement légitime

du Tchad (mémoiredu Tchad,p. 337-338,par. 173, avec citations). Ce

type de discoursn'a pas manquéde susciterune réprimandede la part du

Présidentdu Conseil de sécurité, appuyé parun avis du bureaudes

affaires juridiques de l'ONU,lequela fait observer que

"la plainteque nous examinons émane bien du Gouvernement
internationalement reconn du Tchad et sa légitimiténe saurait
être contestée devant le Consed il sécurité"(mémoiredu
Tchad, p. 339-340,par. 181-182).

23. En 1985, le dossier juridiqud eu Tchad et l'appel lancépar ce

dernier pour que des mesures soient prises contre l'agression libyenne

ont de nouveau été portés devant le Conseil de sécurité.La réponsedu

représentantde la Libye a consisté à proposeraux délégations de

consulterson exemplaire de"la carte jointeau rapportdu Commissaire

des NationsUnies en Libye,sur labase de laquellela décision

établissantl'indépendance de la Libye fut prise" (mémoiredu Tchad,

p. 339, par. 180, avec citations). Voilà à quoi se ramenait la thèse de

la Libye à cette époquecritique : à cela et à son occupation militaire

de la bande d'Aouzou. Cela, et rien de plus,était la carte, l'atout de

la Libye, joué séance après séance, année après année, dans la d salle

Conseil de sécurité et à la tribune del'Assemblée générale.Je regrette

d'abuserde la patience dela Cour à une heure tardive d'un vendredi

matin, maissi j'ose le faire, c'estparce qu'il est frappant de voir que

c'est à ceci seulement quese ramenait l'intégralitd ée la réponse enfin

apportéepar la Libye à l'argumentation juridique soigneusement

développéepar le Tchad. Comme l'a déclaré le représentant de la Libye devantle Conseil de sécurit en 1983,"Cen'estpas une questionqui

peut être discutépar quique ce soit;et nous nousy opposons

respectueusement mais formelleme (nmémoiredu Tchad,p. 334-335,

par. 163). La même attitudea prévalu jusqu'aux plaintes port parsle

* 0 4 9 Tchad devantle Conseilde sécuritéen 1986 (mémoiredu Tchad,
.-
183-186,avec citations)et devantl'Assembléegénérale
p. 340-341,par.

en 1987 (mémoiredu Tchad,p. 341,par. 187).

24. A ces périodes critiques, auc des autres motifs maintenant

avancés pour étayele titre revendiqué pa la Libyen'avaitencore été

conçu. Pendant toute cette période, lorsque les organes poli deiques I

l'ONUont été appeléspar le Tchadà user de leurs pouvoirs incontestés

pourmobiliser la communauté internationale pour la dd éfedroits

clairement affirmépar le Tchad,la Libyes'estaccrochée àune carte

erronée,à une résolutionmal interprétéedes NationsUnies età un

traiténon ratifié. Celane doit-ilpas nous dire quelque chos quant

aux arguments qu'elle présente maintenant la Cour,vingt ans plus tard,

pourjustifierson agression ?

25. Le long silence observpar la Libyeà l'ONUa eu son pendantà

l'organisatiod ne l'unitéafricaine.Cette organisation régionale s'est

employée très activementà essayer de résoudrle différend entre la w

Libyeet le Tchadsur labase du droitet, finalement, à amener les

Parties devantla Cour international de Justice,et le Tchadlui sait

gré du rôlequ'ellea ainsijoué.

26. Ces larges efforts sont expoe sédétail dans les écritur es

Tchadet leursannexes. Je ne parleraiici que d'un seulde ces efforts,

dont ilest question à l'annexe293 du mémoiredu Tchad,car il revêt une

signification nouvelleà la lumièredes plaidoiriesde la Libye.

27. Dans son rapport datdes 13 et14 avril1988, le comité

ministérielad hoc de l'OUAsur le différend frontaliT erhad/Libyeamontré à quelpointle système continental africain fonction biaen.

Le comitéa considéré à juste titre qu" elesarguments juridiques à"la

base du différendétaient "notammen fondéssur" cinqéléments :

- la notion desdroits historiques,

- le traitéde 1935,

- le traité de1955,

- le principede l'intangibilitd ées frontières,

- les actes juridiques passés ent leeTchadet la Libye.

Cettepagedu rapport dans leque le comitéa énuméré ces différents

élémentsest reproduite danl se dossier remisaujourd'huiaux membres de

la Cour.

28. Monsieurle Présidentet Messieurs de la Cour, vo avsez sans

aucun doute observé que c cinqaspects fondamentau du différend,tels

que définis par l'OUA,correspondent précisémea ntx questions quele

Tchadn'a cessé de soulever, que ce soit devantl'ONU,devantl'OUAou

maintenant devant l Cour. Dans le cas de laLibye,cependant, la seule

question abordéejusqu'à1991a étécelledu traité de1935,et encorede

façon indirecte seulement,ie nvoquantla version de la "carte fantôme"

figurantdans lerapport présente én 1950par le Commissairedes

Nations Unies. En 1988, le comitd ée l'OUAest parvenuà la conclusion,

commele ferait d'ailleurt soutobservateur attentif, ql uedossier

défendu par la Libyejusqu'alors était bas sur le traitéde 1935. Comme

il l'a dit dansson rapport : "Lanouvelle frontière qu ein résulte

rattachela bande d'Aouzou à la zoneitalienne."(Annexe293 au mémoire

du Tchad,p. 3.) Celaest significatif pourplusieursraisons. Pour

l'OUA,en 1988,la Libye revendiquai un titrenon pas sur la moitiédu

Tchad, mais sur lbaande d'Aouzou. Telles quele comitéde l'OUAvoyait

les choses, la revendication dlea Libye était fermement fond sur la

validitédu traité de1935. Et, selon l'OUA,quel était l'effe du traité? Ou qu'aurait-ellfeaitsi letraité avait été valab le Tel

que l'OUAconcevaitle différend,ce traité - et je citeà nouveau le

rapport del'OUA- "redéfinit la frontière commune entre les territoires

françaisdu Tchadet italiende Libyedansun sensplus favorable aux

C51 revendicationsitaliennes"(ibid.). A l'évidence,le seul objet du

traitéde 1935 étaitde déplacerles frontièresvers le sud. Cela,

chacunle savait. Aucun ministre,à l'OUA,ne considérait qulee traité

de 1935 ait été autre chose qu'une ces deionrritoirede la Franceà

l'Italie. En 1988,le comité ministériel n'était pas habiliàétrancher

entrela Libyeet le Tchad,mais il comprenaitbien les problèmesqui se
1
posaient. Il comprenaitbien que la revendication de Llibye,pour

autant qu'elleeût une baseconventionnelle, reposasitr la validité de

l'accordLaval-Mussolini. Au milieu de1988,aprèsdes années d'étude,

le comité ministériede l'OUAn'avait même jamais soupçonné l quLibye

allait prétendrequ'elle n'avait pas defrontière avec l echad,que le

traitéde 1935 étaitdépourvu de validité mais prouvait néanmoins

l'absencede toute frontière et que ce traité avait représenté une

cessionde territoire de l'Italieà la France. A l'OUA,les ministres,

qui, après tout, avaient suil vidifférend d'assez près pendd ant

w
années, n'avaient pas la moindre idée des arguments que ledc eonseil

Libyea avancés devant lC aour. Ces argumentnse représentaient

certainement padses vues quele Gouvernement libye eût jamais exprimées

devantl'Afriqueou devantle monde.

29. Evidemment,jusqu'àune date toute récente la Libyea, pour

l'essentiel, fait fide l'OUAet des efforts déployépsar cette

organisation. Celest peut-être compréhensible L'OUAn'est

certainement pausne instance réputée pousa sympathieà l'égardde

revendications comme celles avanc parsla Libye. Cette organisatioan

élaboré ses propres règl eesa apportésa propre contribution normative au nouveau droitde la décolonisation. Essentiellemenles chefsd'Etat

et de gouvernement africains, réunis dans cette veill1e964,ont adopté

la déclarationdu Caire,qui a faitdate, confirmant l'application

l'Afriquedu principede l'intangibilitdées frontières coloniales telles

qu'elles existaient lors ldeindépendance (contre-mémoi dueTchad,

p. 164-165,par. 4.179-4.80;voir aussip. 137-138,par. 4.24). Dans la

Ci déclarationdu Caire,la conférencedes chefsd'Etatet de gouvernement

africainsa déclaré''solennellemenque tousles EtatsMembres s'engagent

àrespecterles frontières existana tu momentoù ils ont accédà

l'indépendance"(contre-mémoirdeu Tchad,p. 137-138,par. 4.24,avec

citations). Autrementdit, elle aréaffirmél'applicabilité du principe

de l'intégritéterritorialeet de l'utipossidetisà l'Afrique.

30. La Libye a voté pour cette déclarationu Caire avec presque

tous les Etatsafricains. L'aurait-elle fa si,à l'époque, elle avait

euà formulerune revendication territoriale sl urTchad ? Les deux

pays d'Afrique qui, en fait, avaiendes revendications territoriales

faire valoir- le Maroc et la Somali- se sont bruyamment opposéàsla

déclaration. L'assemblée nationale de Some aliallée jusqu'àdéclarer

que la déclarationne liaitpas ce pays (contre-mémoid re Tchad,

p. 164-165,par. 4.79-4.80). Ni le Maroc,ni la Somalie, n'ont avancé

les mauvaises excuses qu'invoque mainten latibye à l'effetque la

déclaration n'étaiptas censées'appliquer aux frontière es litige ou

aux frontières quel'on considérait comme "nodéterminées". Il était

entendu pourle Maroc et la Somalie quela déclaration avaitrécisément

pour but de "geler"toutes les revendications, but que 'il facile de

déduiredes discours qu'ont prononcé au Cairedes dirigeants africains

commeJomo Kenyatta, Hailé Sélassié, Albert Margai, Philibert Tsiranana

et Lampolo Konede la Haute-Volta.A la différencedes dirigeants de la
053
Somalieet du Maroc,le prince héritier d Libye, HassanEl Reda,n'a fait absolument aucune allusion, l derlsa réuniondu Caire,à de

quelconques revendicatio territoriales. Il a simplement appuyléa

déclaration (cesdiscours ont faitl'objetd'unelarge publicite ét leurs

textes sont réunis dauns volume : Assemblée des chefs d'Etat et de

Gouvernement de l'OUA,servicede presse, discours prononcés devant

l'Assemblée,le Caire,17-21juillet1964,département de l'information,

Le Caire, République arau beie).

31. Lorsquela Libyea décidéde s'approprier le BET et lorsquele

Tchada porté plainte devant l'OUA,le Gouvernement libyen dos itêtre

renducomptequ'ilétaitappelé à comparaître devanutne instancequi

n'avait pas fait tabula rasa àce sujet: il étaitcité devant une

institutionqui étaitloinde se désintéresser du différend entre la

Libyeet le Tchadcar,pour les pays d'Afrique le droiténoncédans la

déclaration du Caire représentaiutn enjeu crucial,et ces pays

considéraient indubitablement l qudroit défini au Caire s'appliquait

au différend frontalie Libye-Tchad.

32. Pointn'est cependant besoi de conjecturer quantà la position

de l'OUA. En 1986,la conférence des chefsdlEtatet de gouvernement

africainsa adopté une résolution dans laquelle a e"réaffirmé

l'intégrité territoriad leTchadet l'inviolabilité ds ees frontières

nationales conformémentà la résolutioAnHG/Res.16.1de l'OUAw

(contre-mémoird eu Tchad,p. 59, par. 2.33;annexe 288au mémoiredu

Tchad),c'est-à-dire à la déclarationdu Caire. La résolution adoptée

en 1986 par l'OUAdémontre assurément ql ues participantsà la

conférence étaient convaincus l quTchad avait une série complète de

frontières. Cette résolution exprime leur conviction que ces frontières

avaient été rendues inviolabp lesle droit modernede la

décolonisation, tel qu'il avé atitrécapitulé spécifiqueme ntur

l'Afrique dansla déclarationdu Caire. Le faitque les chefs d'Etat africains considéraient que l'inviolabi dlestérontièredu Tchad

devaitêtreréaffirmée en l'occurrence sugg touetau moins la

possibilité qu'ils étaienptarvenusà la conclusion que lesdites

frontières étaient compromio serisquaient d'être compromip ses

quelqu'un.

33. L'attachementde l'OUAau nouveau droitde la décolonisatioan

transformé cette organisati ennune instance devant laquel lae

prétention de la Libyeà recourirà la forcepourmodifierles

configurations colonial ess nouveaux Etatse risquait guère d'être

accueillie favorablement.Voilàsansaucundoutepourquoi la Libyea

suivi ce que le Tchada appeléla politiquede la "chaisevide". Le

présidentde la commissionad hoc de l'OUAsur le différend

Tchad-Libye, le président Omar Bongoa,relevé avec mécontentement plus

d'une occasionla politique libyenne de non-participae tide

non-coopérationaux effortsde médiation del'OUA(contre-mémoird eu

Tchad,p. 403-404,par. 9.122,aveccitations).La Libye,cependant,

représentéepar ici par M.Cahier,a une explication différen pour

justifierson refus de coopérer: "Il est évidentque l'absencede

coopération n'est que la conséquence de la situation intérieure

tchadienne." (CR93/18,p. 50.) Je m'empressede laisserà la Cour le

soinde décidersi la guerre civila eu Tchadest une explication

plausiblede l'absence persistant de coopérationde la Libyeaux efforts

de médiationde l'OUA.

34. 11 n'estpas nécessaire de rappel ici l'historique détaillé de

la politique dela "chaise vide", qu est pleinement documentée danos

écritures(mémoiredu Tchad,p. 38-41,par. 96-113). A la différence de

la Libye, leTchada toujoursfaitpleinement confiance à l'OUA.

Dès 1977,à l'Assembléegénérale,le représentant du Tchada déclaré que

son pays faisait "pleinement confianàela sagessedes chefsd'Etatet de gouvernement africains", ajoutant qlueTchad exprimait la ferme

convictionqu'ils "sauronttrouverune solution urgente au différendqui

oppose le Tchadà la Libye"(mémoiredu Tchad, p. 325, par. 130).

35. Cette confiancen'a pas étédéçue. En1977, l'OUA a

immédiatementréagi. Ala réunionqu'ellea tenuedu 2 au 5 juillet 1977

à Libreville,la quatorzième conférencdees chefsdlEtat et de

gouvernementa établiune commission ad hoc de médiationet

d'établissementdes faits composéede six pays. La même année, cette

commissiona créé un sous-comitéd'experts chargé d'étudier la question

de la frontièresous tous ses aspects(contre-mémoiredu Tchad, p. 56-57,
O5 5 w
. - par. 2.25, avec citations). Par référenceenversces efforts,le Tchad a

retirésa plainte devant l'ONU. D'emblée, toutefoisl,a Libyerefusa de

coopérer(contre-mémoire du Tchad,p. 325-326,par. 131-134, avec

citations).

36. En 1983, des efforts furent faitsour relancerle comité

ad hoc. La Libye refusa ànouveaude coopérer. En juillet 1987,le

sous-comité d'expertdse l'OUA fut reconstitué comme sous-comité spécial

d'expertsjuristeset de cartographes, lequell,a même année, publia le

rapport dontje parlais àl'instant,mais encoreune fois sans avoir pu
W
comptersur aucune coopération de la LibyeL.e sous-comité jugea

nécessairede signaler au comitéad hoc dont il relevait"l'inexistence

de tout mémorandum libyen" exposanla position juridiquede ce pays

(contre-mémoiredu Tchad,p. 61, par. 2.36). Ce n'estqu'en

septembre1987, après que la chaisefut restée vide pendandix ans,

aprèsune autre guerreet aprèsun rétrécissement draconien de la gamme

d'options militaires quis'offraient à la Libye que ce pays envoya

finalementun observateuret commençaà participeraux travaux du comité

ad hoc de l'OUA (mémoiredu Tchad,p. 40, par. 106). Cette décisiona

déboucha finalementsur la comparutiondes Parties devant la Cour

internationalede Justice. 37. Pour le Tchad, il est clair quela politiquede la chaise vide

appliquée par lLaibyen'était pas due à un malentendu. Au contraire,la

Libyene savait que tropbien que l'OUAétaitrésolue à préserver le

nouveaudroit de la décolonisati etnles principesde l'uti

possidetis, de l'intégrité territore iade l'inviolabilit des

frontières qui existaientsur le terrain au moment critique lade

décolonisatiod ne la Libyeet du Tchad. Même la Libyea admisqu'à ces

trois époques critiquee s,1952,en 1955et en 1960,la banded0Aouzou

et le restedu BET se trouvaient sous lajuridiction franco-tchadienn et

non sous lajuridiction libyenne. La Libyesavait assurément que les

arguments qu'elle aurait pu avancer-et qu'elle avance aujourd'hui

devantla Cour - auraientété rejetéspar l'OUA. Ces arguments sont en

effetinconciliables avec ces principes absolument fondam duntaux

nouveaudroit de la décolonisation. Ils sont inconciliables avec les

principes énoncés au Caire, lesquels, dans l'ensemble, ont

remarquablement réussià épargnerà l'Afriqueles pires ravages d la

guerreet du chaos. S'en rendantcompte, la Libyea préféré avoir

recours à des arméesplutôtqu'au dialogue , la force plutôt qu'au

droit. L'OUAn'aurait pas bien accueilli les prétentions juridiques que

la Libyeavance aujourd'hui, pas plus l queConseilde sécuritéou

l'Assemblée générale. Le Tchadprie et, selontoute probabilité,

l'Afriqueprie aveclui pourque l'ivraie de la thèse libye nentrouve

pas devantla Courun terrain plus fertile. Je vous remercie, Monsieur

le Président.

Le PRESIDENT: Je remercieM. Franck deson exposéet je donne la

parole à M.Pellet. Mr. PELLET: Mr. President, Members otfhe Court,

1. It now remains for meto "bringup the rear".

Sincewe have a littletime left - and 1 hastento assureyou that 1

will not use it all!- we thoughtit rnightbe useful,afterso many hours

of pleading- too rnany,in Chad'sopinion - to sum up the essential

pointsof Our arguments. Certain digressions necessitat bydour wish to <I

respondto al1 the points raiseb dy Libya, however artificiatheyrnight

be, have perhaps obscuredthosearguments.

2.The oral presentations have demonstraa tedhenornenonhichmight
of the Parties,perhapsnot withthe
foreshadow the written pleadings

same clarity: theyhave submittedto you theseswhich are certainly

different- sinceotherwisewe would notbe here - but which are parallel

rather than opposedto each other; like parallelines,thesestatements

never converge, however far threyayextend.

057 Two characteristics of the Libyanargumenthave now becomeevident:

Primo, the Libyanargument "stops in midstream",as it were.

LibyaStatesin its Counter-Mernoria that adistinction should be made

between twoclaims: "(i) titleto the territory,and (ii) the

evidenceof a precise boundary"(LCM,pp. 369-370, para. 8.17). But in

fact the LibyanParty is concentratingal1 its attentionon the firstof w

thesepropositions and is showing complete indifferen toethe second,to

whichit pays lip serviceat thevery end of thepleading.

Secundo,evenwith regardto the question of titleto the

territory,Libya does not take its argumentto the logicalconclusion.

For the sake ofconvenience,1 shall refer onceagainto
, [ 58
Professor Bowett'slatestpleading, but al1 the statementsby the counsel

for Libya are very strikingn this connection: theibyanParty dwells

at lengthon firstthe Ottomanand then the Italianclaim. The word

"clairnappears38 timesin Mr. Bowett's statement to us on 22 June; andto thiswe may add the term "negotiatip ngsition",whichmy opponent

used severaltimes. But the cumulation of38 claimshas never resulted

in the establishmen tf a territorial title oto thedefinition of a

frontier. If title results fro the effective exercis ef State

functions, only the exerci ofethesesame functions by another Statecan

extinquish it. If the boundary lin(eor the territorial-titleresults

froman agreement betweet nwo States, only another agreemcentcluded by

the samePartiescanmodifyit.

3. Libyasharplycriticizes theboundary line of whichChadbelieves

it has establishedthe existenceand permanence, buhtas been

surprisingly reticent concerning the w hiceh isthe subjectof its

submissionsand whichfollowsthe 15thnorthernparallel.

In reading its pleadingand listeningto its counsel,you must

certainlyhave receivedthe same impressionas the Chamberin the

El Salvador/Hondurascase, namely,that for theLibyanParty "the

locationof boundaries seemed...to be incidentalto some"claim",or

"title",or "grant"... It is ratheras if the disputed boundarimsust

be constructed likae jigsawpuzzlefrom certain already-cutpiecesso

that the extentand location ofthe resultinbgoundarydependupon the

size and shapeof the fittingpiece" (I.C.J.Reports 1992,p. 388).

In this place,a few Turkishsoldiersspent three years: Libya

announcesits territorial titl end declaresthat thefrontier runs

towardsthe south; here is another littlpeieceof the puzzle. Over

there, the Senouss established azawiyafor severalyears,and the

treatmentwill be thesame. Elsewhere, therh eas not beena traceof a

Frenchpresence betweensuchand sucha date: Libyaannexes another

piecefor itself...the puzzle withwhich Libyaendsup is reallyquite

surprising.Let us take, forexample, map No. 20 appearingin the big

greenbook as submittedas a pleading bythe Libyan Party, whichpurports to show Senoussi control over indigenous tribes, c1 irca,and letus

compare it with mapno. 105 of the LibyanMemorial,which showsLibya's

claims: it will be seen thatAbéchéand Bir-Alaliwhich are inChad,and

also Bilmaand Zinder(in Niger)and Kano (in Nigeria)appearon the

firstmap but not on the second. And the converse phenomenon also

sometimesoccurs.

It is possible,that the two Chamberswhich dealtwith theFrontier

Disputespointed out"wherethe legal title is not capableof not

showing exactly the territorialxpanseto which itrelates[the]

effectivitéscan ... play an essential rolin showinghow the titleis w

interpretedin practice" (I.C.J. Reports1986,pp. 586-587,para. 63,

and I.C.J.Reports 1992,p. 398, para. 61).

4. It is in that context thaCthadhas presented its "thirdthesis",

but it did so in a subsidiarymanner,in ordernot to evade the debateon

the territorial titl eo which ithad been challengedby Libya.

Therecan be no doubt concerning the effective exerc isethe civiland

military administratioof Franceand then of Chad itself: the oneand

then the other exercised State functions continuously, peace andlly

exclusively throughouttheregionclaimed byLibya.

050 The administrationwas continuousbecauseafter 1913 France'swas
- -
the only presencein the region. Of course,its soldiersdid not patrol

everysquare metreof this vast desertterritory, but iafn incident

occurred or therweere signsof a rezzou,theywould put everythingin

order. The very scarcityof the French troops serveass a proofof the

peaceful nature of the colonialadministration:therewas no need for an

impressiveshow of force,sincethe authority of Francewas not

contested. Andif any"lapses"did occur, ifa few Italiansoldiersor

Libyan censusofficialsventured into the region,they were,in the name

of exclusive territorial competence, politely but firmly cont duthed

frontier - without being offere dmeal, it is true! 1 deliberatelysaid "to the frontier"s,incealthougha few

incidents mayhave occurred,they can be countedon the fingers of one

hand over the60-year periow dith whichwe are concernedand which

extendsfrom1913to 1973 - theyprove onethingonly: the protagonists'

acute awarenesn sot only of the existence, but ao lsthe location of

the frontier.

Thus,althoughit is convenient for the sake ofclarityto single

out three potentiall self-sufficientlinesof argument,thesestrengthen

each other and interrelateto leadto a singleconclusion: arontier

exists,and itfollowsthe line described in the Chadian submissions.

This conviction isnot due onlyto the effective manifestation in

the territoryof the sovereignty of Frana ced thenof Chad - until Libya

dislodgedit by force,in contraventioo nf the cardinalprinciplelaid

down in Article2, paragraph4, of theUnited Nations Charter. It can

alsobe deduced from the public attitb udeh ofthe protagonista snd of

the States.

The claimsof the Ottoman Empireand Italyto which Libyaattaches

so much importance mostlpyresentchallenges to theexistingsituation

and hence,a contrario,admissionsof the existenceof the title or

frontiercriticized.

Similarly,the anxietyof the United Nationt so preserve the

territorial integrio ty Libyaat a timewhen thatcountrywas acceding

to independence,the acceptanceby theGeneral Assemblo yf the

explanationsthengivenby Franceand the silencekept both by Italyand

by the representative of the Libyan peoplwho were present alsobear

witnessto a well-established conviction.

And again,later,the indignation arousi end the OAU and in the

United Nationbsy Libya's invasioo nf the Aozoutripand its

embarrassmentt,o say the least, serveto strengthenthe legal position then defendedby Chad,which is the very positiowhich itcontinuesto

defendbeforeyou, as Professor Thomas Franchas just shown.

6. In any case, as Libyaadmittedin its writtenpleadingsand then

again in its oral presentation,it is clearthat if the Courtdoes find

the existencof ... a conventional boundary, the Court whille
I
resolved the dispute.." (RL,p. 34, para. 3.66; see also p. 30,

para. 3.55 or CML, p. 28, para. 2.04p. 31, paras. 2.1and 2.12, or

p. 36, para. 2.24). The Parties are agreedn this pointat least: if

one ormore treaties containproofof the boundary line, the debao te

0 62 this line is closed,as is the perfectïy cïear questiof the

territorialtitle: north ofthis line,it belongsto Libya,and southof

the line,to Chad.

The dispute submittedo the Courtis quiteparadoxical; it is

probablyone ofthe "toughestwfrontier disputes in al1 of Africa, one of

thosewhichhave cost mosthuman lives,and yet the frontier conteste by

06 3 Libya is certainly oneof the best establisheof all. Indeed,it does

not result only from the effective exerci isthe territoryof sovereign

authorityby Franceand thenby Chad: it also results frotmhe many and

concordant treatiewshich constitute "frontieritles"in the double

senseof the term, both as bases for the rightsof the two Statto

exercise their territorial sovereigo nteach side of the lineand

sourcesand documentary proofosf the line.

Chad'sfirstand secondthesesare basedon the existence of such

treaties.

7. The Africanregionconcernedis inhospitableand far distant from

the coasts. For a long time it evaded thcolonial partition, whicdid

not beginto effectit until 1898.

The followingyear, the boundaryof the French spherof influence

was fixedby Article3 of the Franco-British Declaratioon 21 March 1899.That is the boundary which subsequently constit thteed

frontier betweenChadand Libya, after France had effectively occupied

the area allocate do it. That wasthe situation fro1m913.

Such is the essential basi sf whatwe cal1our "secondthesis".

Chad is certainly awaroef the factthat the boundary linefixed"in

principle"by the 1899 Agreementis ambiguousif one refersto the text

of this instrumenatlone. Yet a studyof the travaux préparatoires

establishes without any possible do thatthe linerunning"in a

southeasterly direction" from the Tropic of C wascnota mathematical

line,and this is confirmedby the practice subsequentfloyllowedin the

applicationof the treaty:

-althoughit had not beenannexedto the Agreement, th eivre jaune

map drawnup by the French inthe days followingthe signatureof the
064
.-
Agreementwas at once cornmunicateto the BritishParty,whichdid not

raiseany objection whatsoever and

- the line appearinogn thatmap was formally confirmb ed the

Franco-British Convention8oS feptember 1919w,hich constitutet she

authentic interpretati onthe Declaration.

8. Chad in no way conteststhat theFrench sphereof influence

recognizedby this Declaratioenntailedno legal obligation fothird

States. The boundary allocate to France nevertheless became the

frontierof Chadwhen it acquiredthe legal statusof a French colonial

possession as a resultof the effectiveand exclusive occupatioof the

regionby France: whereas the bounda ofya sphereof influencehas no

objective characte in internationallaw,the samedoesnot applyto a

frontier, whichmust be recognize by everyone,in orderto avoidthe

constant destabilizatio onterritorial situations.

But thereis more: it so happens that,in the case beforues, this

frontier compelled Italy's recognin tiononlybecauseFrancewas thereand Italywas not, althoughthatwouldbe reasonenough. The fact of the

matter is that,as earlyas 1900,Italy recognized the spheo re

influence setaside for Franceby the1899 Declaration subjectto the

reservation that it must not exceedthe limitof the Vilayetof Tripoli;

and, two years later,the two Statesagreedin admitting that "the limit

*
to Frenchexpansionin North Africa ... is to be takenas corresponding

to the frontier of Tripolitaniaas shownon the map annexedto the

Declarationof 21 March 1899". The boundary appearino gn thatmap, which

the two Parties agree is theLivre jaune map, is moreoverthe one that

is foundon al1 the maps of the period and thaw tas- 1 confine myself to
v'
reproducing the exactterms usedby Libya - "comrnonlryegardedat the

time to be the Tripolitaniabnorder" (CML, p. 237, para. 4.254). At the

same time, the boundary's western secw tor also definedthereby.

From then on, Italycouldnot disputethe legitimacyof France's

presence beyond that frontier unlessa new treaty betweenthe twoparties

modified that undertakingN .ow the undertaking notonlywas notmodified

but was formally reiteratei dn 1912. Andwhile,by the Treatyof London

of 1915, Francehad without any douba tssumedan undertakingto grant to

Italy "someequitable[colonial] compensation",that undertaking was

extinguished in 1947 whenRome renounced "al1 rightand titleto the

Italian territorial possessio insAfrica". Besides, Chad failsto see

how it could be requiretdo honoura French promise, a promiseof a

general charactea rnd one that,by its essence,can rest onlywith a

colonialPower -which Chad assuredlyis not!

Thus from 1899-1919 thefrontierwas defined. It has not changed

since.

9. In 1955,then,the two parties confirmet dhat their frontier

followedthe line described by the Agreements1 have just mentioned,

thoseof 1899, 1902and 1919. Contraryto what Our Libyanadversariesaffectto believe, there was inal1 this neither surpris nor chance. It

was quitesimply the reflection o afsituationlong stabilizedon the

groundand endorsed by international instrument tsat the twoParties

agreed torecognizeas being in forceon the dateof the independenco ef

the United Kingdomof Libya.

But this historical continui wtas coupledwith a real legal

novation in the sensethat expertsin civillaw attachto that term.

The legal obligation relativ to the courseof the frontier linweas

renewed, it was foundedupon a renewedexpression of will emanating

clearlyand directly from tht ewo sovereign States concerned, Fran and

independent Libya. Any doubtthatmighthave existedas to the validity

or opposability of the instrumentsreferredto was dispelledby the clear

affirmation of their applicability fothe purposeof definingthe

boundaryline.

The LibyanParty recognizesthat the1955 Treaty admito sf no

discussion,at least so far as its principleis concerned. It doesnot

invoke against it lack of consent or non-opposabilitty eitherof the

Parties. It therebylimitsthe disputeto a problemof interpretation of

the Treatyof 10 August 1955, ando ,n thatpoint,it is right.

But the interpretatio of treaties restsupon a set ofrules,

well-establishedand unanimously accepted which the LibyanParty avoids

applying. Fowere it to proceedsystematically, it would inevitably

exposethe weaknesses of its own arguments. Andso our adversaries

preferto proceed byimpressionistic touches goingstraightto the

travaux préparatoires,imaginingvery hypothetical scenarios, seeking

to make thepresurnewdishesof one party - one party- prevail over a

cleartext.

As youknow,we have proceeded differently. Starting from the

cardinal principlweith regardto treaties determinina g frontier,that of the stabilityand securityof the boundarylines,we examined

Article 3 of the Treatyof 10 August 1955as well as its Annex 1. We

elucidatedthoseprovisionsby takinginto consideratiot nhe objectand

purposeof the Treaty. We restoredthem to their context and took into

account subsequent agreemene tstered intoby the Partiesthat couldshed

lightupon their meaning.

Recourseto the general methoo df interpretation enable us to bring

out the meaning thac touldreasonably be givento the provisions, without

any need to go further.

In a secondstage,we nevertheless noted that examinato ionthe

travaux préparatoires- whichwe do not read in the samemanneras Our

adversaries(butdo they readthem?) - and of the circumstances

surrounding the conclusion t ofe Treaty confirmed the meania ngrivedat

by analysisof the text.

Meanwhile,we heard the hypotheses constructe by theLibyanParty,

which are founded upon nothingand are invalidated by the documents

relatingto the Tripoli negotiation osf July-August1955, which the

Libyan Party,incidentally, only communicat todthe Courtwith a rather

bad grace.

The interpretation we propose makesit possibleto determine "a

precise, completa end definitive boundary"t ,o borrow the expressioused

by the Permanent Couri tn theInterpretation of the Treaty of Lausanne

case (P.C.I.J., Series B, No.12, p. 20). On the otherhand, that

proposedby the LibyanParty voids Article 3 and Annex 1 of the Treatyof

10 August 1955 not only of al1 usefuleffect butalso of al1 meaning,al1

normative significance.

Accordingly, Mr. President, the convictio of the Republicof Chad

is that the Treaty of 10 August 1955 furnishes, decided blyyitself

alone, the answer to the questionwhich theFramework Agreemena tnd the Parties' instrument of notification raisedbeforeyou. That answeris

simple,too simplein the eyesof Our adversaries. Buto us it seems

inevitable,inescapable.

10. To recapitulate, the Republo icChad is morethan ever

convinced that its boundarywith its northern neighbou has been firmly

and clearlyfixed:

- it startsfrom the intersection of the 24thmeridianeast of Greenwich

and the 1g030'parallel - this results from the Declaratioo nf 1899 and

the authentic interpretatig onvenof itby theLivre jaune map and

the Conventionof 8 September 1919;

- it then runs towards the intersectio on the Tropicof Cancerand the

16th degreeeast of Greenwich - here again,the Anglo-French Agreements

of 1899 and 1919 are definite; what is more,by theexchangeof

lettersdated 1 November1902, Italyformally acceptet dhe

Tripolitania-Cyrenaica boundary featuo ritghe 1899 mapwhich passes

throughthis point;

- the boundarythenbends south-westward, in the directionof Toummo,as

attestedby the line on this samemap, acceptedby Italyin 1902 as

formingthe Tripolitania-Cyrenaica boundary;

- the boundary stopsat the intersectioo nf this linewith the 15th

degreeeast of Greenwich sincebeyond that lies Niger,as follows from

the decreeof the Governor-Genera olf French Equatorial Afric of

10 February1930. To describethat boundary line as1 have just done,

only three Agreementa sre necessaryand sufficient:

- the Anglo-FrencD heclaration of 21 March 1899,

- the Additional Conventionof 8 September1919,and

- the Franco-Italiae nxchangeof lettersof 1 November1902. They are applicable in themselves. But theyare also thoselisted

in Annex1 to theFranco-Libyan Treaty o 10 August1955. There is no

need to go any furtherafieldfor the answerto the question put to you.

Our oral arguments, finalla y,d this strikesme very forcibly,

bringus back very closeto the starting-point, for whiL lebyahas seen

fit to presentto you a Memorialin whichlaw occupiesa modest place,

Chad set forthits legal reasoning from to hetset,as it had done on

many previous occasion in otherforums. We have been able, on

particular points of detail,to adjustour presentation but, for the

essential,we have remained steadfasi tn our legal convictions.
*
Despitethe repetitive effectyou must have felt,you have hadthe

patienceto hear us out. On behalfof the Agent and of the entireteam

of Chad, 1 extendto you our sincere thanka snd 1 should liketo do

likewisevis-à-visthe representativeo sf the LibyanParty. Our

exchanges are keen sincethe outcomeis vital - for Chad in any case-

but thisdoes not, 1 think, impingeupon our mutual esteemor mar the

excellenceof our persona1 relations which is mostgratifying.

Thankyou very much,Mr. President.

Le PRESIDENT : Je remercie beaucouMp. Pellet. Avande lever

l'audience, M. Guillaume souhaiterait poser une quest auxn

représentants de la Libye. Il vaut mieuxle faire maintenant car les

représentants de la Libye voudrontsans doutey répondre la semaine

prochaine lors de leur deuxiè toeur de plaidoiries.Je donne laparole

à M. Guillaume.

Judge GUILLAUME: Thankyou, Mr. President. 1have the following

questionto put to therepresentativeo sf the Governmentof the Libyan

Arab Jamahiriya: Accordingto Libya, "[ilnthe sector between Toumm and

the Sudanesefrontier" the variousconventions invoked byChad have not. O 7 C) fixedany "trueboundaryline" (CR 93/15,p. 75). FurtherWest, "the

courseof the boundary betweenpoint 1010 and Toummo wasnot resolved"

(CR 93/15,p. 52; see also mapNo. 14 of the folderprovidedto the

Court at the hearings). Furthermore,"Libyacan cite numerousadmissions

in documents preparedby Frenchofficialssubsequentto 1955 to the fact

that the boundary between Ghaand Toummo remainedto bedelimited"

(CR 93/15,p. 52). In thesevariousareas,the territoryof Libya

borders,in particular,on that of Niger. Has a delimitation between

these two States,especiallyto the eastof Toummo, beeneffectedor are
the questionsmentioned byLibya, in the opinionof Libya,still

outstanding?

Le PRESIDENT: Je remercieM. Guillaume. Le texte écrit de cette

questionsera, cela va de soi, mis immédiatemenà la disposition des

deux Parties. Nous allons maintenantus séparerjusqu'au 6 juillet,

pour le deuxièmetour de plaidoirieset nous commencerons alors,à

10 heures,par entendrela Libye. Je vous remerciebeaucoup.

TheCourt rose at 12.30p.m.

Document Long Title

Traduction

Links