Mémoire de la Belgique

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16717
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COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

COMPETENCE JUDICIAIRE ET EXECUTION DES DECISIONS EN MATIERE

CIVILE ET COMMERCIALE

(Belgique c. Suisse)

MÉMOIRE

DU ROYAUME DE BELGIQUE

Livre Ier
23 novembre 2010 TABLE DES MATIERES

Partie I : INTRODUCTION

PARTIE II : EXPOSE DES FAITS ET OBJET DU DIFFEREND

1. ExposØ des faits

a. Les parties au litige qui est à l’origine dendiffØr

b. Les procØdures en Belgique

c. Les procØdures en Suisse

2. Le cadre juridique

3. L’objet du diffØrend

PARTIE III : COMPETENCE ET RECEVABILITE

1. CompØtence

a. Fondement de la compØtence de la Cour

b. Absence de clause de rŁglement des diffØrends dansla convention de Lugano

c. IncompØtence de la Cour de justice de l’Union euØenne

2. RecevabilitØ de la requŒte

a. Le prØjudice propre subi par la Belgique

b. Tentatives prØalables de rŁglement du diffØrend

PARTIE IV : INTERPRETATION DE LA CONVENTION DE LUGANO

1. Le Protocole n° 2 sur l’interprØtation uniforme dela convention de Lugano

2. L’objet et le but de la convention de Lugano

3. L’interprØtation autonome des dispositions de lnvention de LuganoPARTIE V : DISPOSITIONS DE LA CONVENTION ET REGLES DU DROIT

INTERNATIONAL GENERAL VIOLEES PAR LA SUISSE

1. Non reconnaissance de la dØcision belge à intervenr i en violation des articles 1 ,
er er
alinØa 2, 2°, 16 (5), 26, alinØa 1 et 28, alinØa 1 de la convention de Lugano

a. La dØcision du Tribunal fØdØral

b. Les dØcisions belges à reconnaître sont ØtrangŁres la matiŁre de la faillite et
ne peuvent Œtre considØrØes comme exclues du cham d’application de l’article
26 par l’article 1 , alinØa 2, 2° de la convention de Lugano

c. Les dØcisions à intervenir dans la procØdure belgen’enfreignent en rien la
compØtence exclusive de la Suisse en matiŁre d’exØuction des dØcisions

d. Le rØgime de reconnaissance de la Convention s’appi lque Øgalement aux
pronostics de reconnaissance

2. Refus de surseoir à statuer en application du droit interne suisse en violation du droit

international gØnØral

a. Le principe du raisonnable que chaque Etat doit respecter dans l’exercice de

toute compØtence, notamment en matiŁre judiciaire

b. Violation par la Suisse de cette obligation : le refus de surseoir au motif que la
dØcision belge ne sera pas reconnue

c. A titre surabondant : le refus de surseoir au motif que la sursØance serait
incompatible avec l’obtention d’un jugement dans un dØlai appropriØ

PARTIE VI : CONSEQUENCES DE LA VIOLATION PAR LA SUISSE DE SES
OBLIGATIONS INTERNATIONALES ET REMEDES DEMANDES PAR LA

BELGIQUE

PARTIE VII : CONCLUSIONS ET DEMANDES

1. Conclusions

2. Demandes

3I. PARTIE I : INTRODUCTION

1. Par sa requŒte introductive d’instance du 21 dØcemrb e 2009 et par le prØsent mØmoire, le

Royaume de Belgique (« la Belgique ») demande à la Cour Internationale de Justice (« la

Cour ») de trancher un diffØrend qui l’oppose à laConfØdØration suisse (« la Suisse ») relatif à

l’interprØtation et à l’application de la conventio n de Lugano concernant la compØtence
1
judiciaire et l’exØcution des dØcisions en matiŁrceivile et commerciale du 16 septembre 1988

(« la convention de Lugano » ou « la Convention ») ainsi que relatif à l’application des rŁgles

du droit international gØnØral rØgissant l’exercicd ees compØtences Øtatiques, notamment en

matiŁre judiciaire.

2. Par ordonnance du 4 fØvrier 2010, la Cour a fixØ au23 aoßt 2010 et au 25 avril 2011,

respectivement, les dates d’expiration des dØlais p our le dØpôt du mØmoire de la Belgique et

du contre-mØmoire de la Suisse. Par ordonnance du 1 0 aoßt 2010, le PrØsident de la Cour a

fixØ au 23 novembre 2010 la date d’expiration pourle dØpôt du mØmoire de la Belgique, et au

24 octobre 2011 la date d’expiration pour le dØpôtdu contre-mØmoire de la Suisse.

3. Le prØsent diffØrend trouve son origine dans un li t e en matiŁre de responsabilitØ civile

opposant l’Etat belge et des sociØtØs de droit bele gdont l’Etat belge Øtait le seul ou principal
actionnaire, d’une part, à des sociØtØs du groupe w Sissair, d’autre part. Ce litige a ØtØ portØ

d’abord devant les tribunaux belges et ensuite devant les tribunaux suisses.

4. Le diffØrend soumis à la Cour se rapporte aux dØciis ons que les juridictions suisses ont

prises dans le cadre de ce litige, sous un double aspect :

• D’une part, la dØcision des juridictions suisses dene pas reconnaître la dØcision à

rendre par les juridictions belges sur la responsabilitØ civile des sociØtØs suisses.

1
Convention concernant la compØtence judiciairlexØcution des dØcisions en matiŁre civile et cialee
conclue à Lugano le 16 septembre 1988 (Annexe I.1)

4 • D’autre part, la dØcision des juridictions suissesde ne pas suspendre une procØdure

entamØe postØrieurement en Suisse concernant le mŒemlitige dans l’attente de la
dØcision à rendre par les juridictions belges.

5. La Belgique ne peut manquer de souligner que le diffØrend qui l’oppose ainsi à la Suisse

s’inscrit dans le cadre de relations singuliŁrementØtroites et amicales entre les deux pays. Ce

diffØrend n’aurait pas existØ sans le souhait commn u des deux Etats d’une coopØration

judiciaire en matiŁre civile et commerciale, concrØ tisØ par la convention de Lugano, ni sans

les Øtroites relations Øconomiques qui existent en rte eux. C’est dans le but de consolider ses

relations amicales avec la Suisse que la Belgique s’est pourvue devant la Cour.

6. Le prØsent mØmoire est divisØ en sept Parties :

L’Introduction (Partie I) est suivie d’un ExposØ de s Faits relatif aux procØdures en

Belgique et en Suisse ainsi que d’une identification de l’objet du diffØrend devant la

Cour (Partie II).

La Partie III traite des questions de compØtence dela Cour et de la recevabilitØ de la

demande de la Belgique. Elle conclut à la compØtenc e de la Cour sur la base de

l’article 36§2 du Statut en vertu duquel tant la Belgique que la Suisse ont dØclarØ
reconnaître la juridiction obligatoire de la Cour. Elle montre Øgalement qu’il n’existe

aucune circonstance qui pourrait rendre la demande de la Belgique irrecevable.

La Partie IV exposera certaines rŁgles et principes dØterminant l’interprØtation de la

convention de Lugano, notamment le protocole n°2 relatif à l’interprØtation uniforme

de la convention de Lugano, l’objet et le but de la Convention ainsi que le principe

d‘interprØtation autonome.

5La Partie V traite en dØtail des violations du drot i international commises par la
er er
Suisse. Il s’agit de la violation des articles 1 , alinØa 2, 2°, 16 (5), 26, alinØa 1 et 28,
er
ainsi que l’article 1 du Protocole n° 2 sur l’interprØtation uniforme dela convention

de Lugano et de la rŁgle du droit international gØn Øral suivant laquelle toute

compØtence Øtatique, notamment en matiŁre judiciae i, doit Œtre exercØe de maniŁre

raisonnable.

La Partie VI du mØmoire expose que ces violations d u droit international impliquent la

responsabilitØ de la Suisse vis-à-vis de la Belgiqu e et entraînent les consØquences

lØgales propres à de tels actes internationalementillicites. Elle expose Øgalement les

demandes formulØes par la Belgique pour remØdier ax u actes internationalement
illicites de la Suisse.

La Partie VII contient les conclusions et les demandes faites par la Belgique à la Cour.

67. En consØquence, la Belgique dØveloppera dans le prs ent mØmoire deux des trois griefs

formulØs dans sa requŒte :

- Celui relatif aux dispositions de la convention de Lugano concernant la
reconnaissance des jugements Øtrangers ;

- Celui relatif aux obligations en vertu du droit international gØnØral concernant

l’exercice de toute compØtence Øtatique, notammenetn matiŁre judiciaire.

La Belgique ne dØveloppera plus dans le prØsent mØo mire le grief qu’elle avait exposØ dans sa
requŒte quant aux articles 17, 21 et 22 de la coetion de Lugano.

8. ConformØment aux instructions de procØdure de la Cu or, la Belgique ne produit en

annexes au prØsent mØmoire que les piŁces essentil els à son argumentation. La Belgique a

dŁs lors opØrØ une sØlection parmi les piŁces que i rapportent aux diffØrentes Øtapes des

procØdures judiciaires intentØes devant les juridions belges et suisses. Il se peut nØanmoins

que la Belgique soit amenØe, pour la bonne comprØhn esion de la Cour, à se rØfØrer à certaines

Øtapes des procØdures judiciaires quand bien mŒme esl piŁces y affØrentes ne figurent pas

parmi les piŁces annexØes. La Belgique suppose toue tfois que celles-ci ne seront pas
contestØes.

9. Des traductions ont ØtØ jointes aux annexes rØdigØ s en une langue ØtrangŁre. L’agent de

la Belgique certifie que ces traductions sont exactes et que les copies sont conformes aux

originaux.

7II. PARTIE II : EXPOSE DES FAITS ET OBJET DU DIFFEREND

1. ExposØ des faits

10. La Cour n’est aucunement appelØe à se prononcer surle fond du litige qui est à l’origine

de l’actuel diffØrend entre la Belgique et la Sue. NØanmoins, pour la bonne comprØhension

de ce dernier, il est utile de procØder à un breØsumØ des faits sous-jacents aux procØdures
intentØes devant les tribunaux belges et suisses. Cet exposØ des faits constitue, à la meilleure

connaissance de la Belgique, un compte rendu objectif des dØveloppements de ces procØdures.

a. Les parties au litige qui est à l’origine du diendr

11. A l’origine du diffØrend se trouve un litige entreactionnaires de la Sabena, l’ancienne

compagnie aØrienne nationale belge, aujourd’hui enfaillite.

12. Lorsque ce litige est nØ en 2001, Øtaient actionries de la Sabena, d’une part, l’Etat belge

et trois sociØtØs de droit belge dont l’Etat belgedØtenait directement ou indirectement la

totalitØ ou la majoritØ des actions (en outre, destravailleurs de Sabena dØtenaient quelques

actions). Ces sociØtØs de droit belge sont :

• La SociØtØ fØdØrale de Participations (« S.F.P. »q ),ui Øtait une sociØtØ anonyme de

droit public dont l’Etat belge Øtait seul actionnre et qui avait notamment pour objet

de prendre et gØrer des participations dans des soiØtØs en qualitØ de holding d’intØrŒt

public ;

• La SociØtØ fØdØrale d’Investissement (« S.F.I. »q ),ui Øtait une sociØtØ anonyme de

droit public belge dont l’Etat belge et la S.F.P. taient les principaux puis les seuls

actionnaires et qui a pour objet de favoriser l’initiative Øconomique publique. Elle

exerce ses missions pour compte propre ou pour compte de l’Etat (missions

dØlØguØes) ;

• Zephyr-Fin, qui est une sociØtØ anonyme de droit pir vØ dont la S.F.P. et la S.F.I.

Øtaient les seuls actionnaires et qui a pour objetde prendre et gØrer des participations

dans la Sabena.

8Par une loi du 26 aoßt 2006, la S.F.P. et la S.F.I. ont fusionnØ pour devenir la sociØtØ anonyme

de droit public SociØtØ fØdØrale de participatiet d’investissement (« S.F.P.I. »), qui exerce

Øgalement sa mission pour compte propre ou pour com pte de l’Etat.

L’Etat belge et ces sociØtØs de droit belge sont dn ØommØs ci-aprŁs « les Actionnaires

belges ».

13. En 1995, la sociØtØ de droit suisse Swissair SwissAir Transport Company Limited (ci-

aprŁs, « Swissair ») est Øgalement devenue actionni are de la Sabena, aux côtØs des

Actionnaires belges. En 1997, Swissair a changØ dedØnomination pour devenir SAirGroup.

Au cours de la mŒme annØe a ØtØ crØØe SAirLinesqu ealitØ de holding intermØdiaire pour

dØtenir des participations dans les compagnies aeinnes du groupe.

14. Dans le litige qui est à l’origine du prØsent difrend, les Actionnaires belges se sont
opposØs principalement à ces deux sociØtØs de droitsuisse, SAirGroup et SAirLines,

aujourd’hui en liquidation concordataire. Ces sociØtØs sont Øgalement dØnommØes ci-aprŁs

« les sociØtØs suisses » ou « les Actionnaires suisses ».

15. Devant les tribunaux belges, les Actionnaires belges ont agi en outre contre la sociØtØ de

droit du Guernesey, Swissair International Finance III Limited (ci-aprŁs « SIF III »), une

filiale de SAirGroup à laquelle avait ØtØ cØdØe unc erØance originellement dØtenue par

Swissair.

9 b. Les procØdures en Belgique

16. En 1995, Swissair est devenue actionnaire de la Sabena en remplacement d’Air France.
Parmi les conventions signØes à cette Øpoque figuriat un contrat de prŒt par Swissair de 4

milliards de francs belges (environ 100 millions EUR) à la S.F.I. pour lui permettre de

racheter les actions Sabena dØtenues par une filil d’Air France (contrat conclu le 24 juillet

1995) ainsi qu’une option d’achat en faveur de Swissair pour lui permettre d’augmenter sa

participation dans Sabena. Lorsqu’un traitØ de tran sport aØrien entre la CommunautØ

europØenne et la Suisse le permettrait, Swissair ercerait son option d’achat sur les actions

Sabena dØtenues par la S.F.I. et deviendrait ainsil’actionnaire majoritaire de la Sabena. Le
prix des actions ainsi achetØes par Swissair serait compensØ avec la crØance de

remboursement du prŒt. La crØance de prŒt fut uliteurrement cØdØe à la filiale de SAirGroup

SIF III.

17. Au fil des annØes, Swissair a acquis un pouvoir dedØcision considØrable au sein de

Sabena et la maîtrise de la gestion opØrationnellede celle-ci, notamment grâce à son droit de

nommer ou de proposer la nomination des principaux directeurs de la Sabena (notamment le

CEO et le CFO).

18. Le 25 janvier 2001, des conventions furent conclues qui prØvoyaient notamment un

refinancement de Sabena par le groupe Swissair.

19. Cependant, au cours des quelques semaines et mois suivants, SAirGroup et SAirLines

n’ont, de l’avis des Actionnaires belges, pas rempli leurs engagements.

20. Le 3 juillet 2001, considØrant que les Actionnaires suisses avaient manquØ à leurs

engagements contractuels et avaient commis des fautes extracontractuelles leur causant

prØjudice, les Actionnaires belges ont assignØ SAirroup et SAirLines devant le tribunal de

commerce de Bruxelles, afin d’obtenir la condamnation de SAirGroup à l’exØcution des

10conventions de janvier 2001 (« la procØdure belge » ). L’objet de cette premiŁre action ainsi

introduite Øtait libellØ comme suit :

« La prØsente action tend à faire condamner SAirGroupà exØcuter les obligations qui

rØsultent des conventions qu’elle a conclues le 25janvier 2001 avec les Actionnaires
belges et, notamment, à mettre à la disposition de la S.A. Sabena, bØnØficiaire d’une
stipulation pour autrui, les sommes nØcessaires pou r couvrir ses besoins financiers, et
à indemniser les Actionnaires belges du prØjudice q ue leur cause l’inexØcution par
2
SAirGroup de ses obligations » .

21. Dans ce cadre, les Actionnaires belges rØclamaient,notamment, l’octroi de dommages-

intØrŒts pour compenser, entre autres, la perte des investissements consentis sur la base des

reprØsentations faites par les Actionnaires suisseset les frais que les Actionnaires belges

avaient exposØs en pure perte à la suite de la dØfiallance des sociØtØs suisses.

22. Avant l’audience d’introduction, les parties ont nØ gociØ une solution transactionnelle, à

savoir l’accord du 17 juillet 2001 dit « de l’hôtel Astoria », formalisØ par une convention du 2

aoßt 2001. Les Actionnaires belges ne se sont cependant pas dØsistØs de l’action qu’ils avaient
introduite devant les tribunaux belges.

23. SAirGroup et SAirLines n’ont pas exØcutØ la conven it n du 2 aoßt 2001.

24. Le 4 octobre 2001, SAirGroup et SAirLines ont dØpos Ø une requŒte en concordat devant le

tribunal d’arrondissement de Zurich (v. infra, §30). Cette procØdure a pour objectif leur

liquidation concordataire.

25. Sabena a elle-mŒme dß demander un concordat judicii are le 3 octobre 2001 et a fait aveu

de faillite le 7 novembre 2001.

26. Le 2 novembre 2001, les Actionnaires belges ont à nouveau assignØ SAirGroup et
SAirLines ainsi que SIF III (la filiale financiŁredu groupe Swissair incorporØe à Guernesey

dans les livres de laquelle se trouvait la crØancerØsultant du prŒt accordØ à la S.F.I. en 1995)

2
Citation du 3 juillet 2001, p.1 (Annexe II.1)

11devant le tribunal de commerce de Bruxelles pour tenir compte de ces nouveaux

dØveloppements. Cette deuxiŁme demande qui complŁtela premiŁre, a ultØrieurement ØtØ

jointe à celle du 3 juillet 2001. L’objet de cette demande Øtait libellØ comme suit :

« La prØsente action tend à faire condamner solidaire ment SAirGroup et SAirLines

1) à payer aux demandeurs la somme provisionnelle de 370.657.443,38 EUR à titre de

dommages-intØrŒts en raison du prØjudice causØ pla ar violation par SAirGroup et
SAirLines de la convention du 2 aoßt 2001, et, en particulier de leur engagement à
souscrire des titres à concurrence de 258 millions EUR à l’assemblØe gØnØrale de
Sabena du 3 octobre 2001 et de libØrer ces titres m i mØdiatement à concurrence de

51,16%,

2) à entendre dire pour droit que le prŒt de 4 mililard de BEF consenti initialement

par Swissair Swiss Air Transport Company Ltd devenue SAirGroup à la S.F.I. est
Øteint ou, à tout le moins, repris par SAirGroup etSAirLines,

3) à entendre condamner SAirGroup à reprendre les commandes de neuf Airbus A319

en vertu de la convention d’achat conclue le 12 mars 1998 3ntre Airbus Industrie, GIE
et Sabena conformØment à la convention du 2 aoßt 20 01 » .

27. AprŁs leur sursis concordataire, les sociØtØs suies ont ØtØ reprØsentØes dans la procØdure

belge par les organes compØtents en vertu du droitsuisse du concordat, qui sont aujourd’hui

leurs liquidateurs.

28. Le 20 novembre 2003, le tribunal de commerce de Bruxelles s’est dØclarØ compØtent pour

connaître des actions en matiŁre contractuelle et non contractuelle sur la base des articles 17 et

5 (3) de la convention de Lugano, qui prØvoient res pectivement la compØtence exclusive des

juridictions choisies par les parties dans leur contrat en matiŁre contractuelle, et la

compØtence des juridictions du lieu du fait dommage able en matiŁre de responsabilitØ non

contractuelle. Sur le fond, le tribunal, appliquant le droit belge, a constatØ l’existence de

diverses fautes dans le chef des Actionnaires suisses, sans toutefois condamner ces derniers

aux dommages-intØrŒts demandØs par les Actionnaireb selges. Tant les Actionnaires belges

que les Actionnaires suisses et SIF III ont interjetØ appel de cette dØcision auprŁs de la cour

d’appel de Bruxelles.

3
Citation du 2 novembre 2001, p. 1 (Annexe II.2)

1229. Par un arrŒt partiel du 19 mai 2005, la cour d’appl ede Bruxelles a confirmØ la compØtence
des juridictions belges pour connaître du litige sur la base de la convention de Lugano . La4

procØdure au fond est actuellement pendante devant cette cour. Douze audiences de

plaidoiries ont ØtØ tenues en septembre et octobre2010. L’affaire a ØtØ prise en dØlibØrØ à

l’issue des derniŁres plaidoiries le 13 octobre 2010, et la cour d’appel de Bruxelles a annoncØ

qu’elle rendrait son arrŒt pour le 27 janvier 2011au plus tard.

c. Les procØdures en Suisse

30. Le 4 octobre 2001, aprŁs la premiŁre citation signf iiØe par les Actionnaires belges devant

les juridictions belges, les sociØtØs suisses ont Ø dposØ une requŒte en sursis concordataire

devant le Tribunal d’arrondissement de Zürich, aboutissant à leur mise en liquidation.

31. Le 30 janvier 2002, les Actionnaires belges ont, dans le cadre des procØdures suisses du

concordat, dØclarØ leurs crØances envers les sociØ Øst suisses. Ils demandaient ainsi, comme les

autres crØanciers des sociØtØs suisses, que leurs rØ c ances soient inscrites à l’Øtat de

collocation, c’est-à-dire sur la liste, dressØe par les liquidateurs, des personnes qui

participeront à la rØpartition du produit de la liquidation. Les crØances que les Actionnaires

belges ont ainsi dØclarØes sont celles qui trouventleur fondement dans la responsabilitØ

contractuelle et extracontractuelle des Actionnaires suisses au sujet de laquelle les

Actionnaires belges avaient antØrieurement introdut i une action devant les juridictions belges

(v. supra, §20 et s.). Le 30 mai 2003, les Actionnaires belges ont actualisØ leurs dØclarations
de crØances aux concordats de SAirGroup et SAirLine s.

32. Par ordonnances des 18 juillet 2006 (concernant SAirLines) 5 et 10 octobre 2006

(concernant SAirGroup), les liquidateurs des sociØØ t s suisses, sans attendre la fin de la

procØdure belge, ont rejetØ toutes les crØances pd ruites par les Actionnaires belges de la

Sabena.

4
5ArrŒt de la cour d’appel de Bruxelles, 19 mai 2005(Annexe II. 3)
Ordonnance de rejet des liquidateurs de SAirLines du 18 juillet 2006 (Annexe III.1)

1333. Les Actionnaires belges ont alors engagØ en Suisse deux procØdures distinctes pour

protØger leurs droits, c’est-à-dire, pour s’assurerque les crØances qu’ils avaient dØclarØes au

concordat des sociØtØs suisses soient prises en com pte pour la rØpartition de l’actif des

sociØtØs suisses.

34. PremiŁrement, le 31 juillet 2006, les Actionnaires belges ont introduit devant le tribunal

d’arrondissement de Zurich statuant en tant qu’autoritØ de surveillance en matiŁre de

poursuites (Bezirksgericht Zürich, 6. Abteilung als unterkantonale Aufsichtsbehörde in

Schuldbetreibungs- und Konkurssachen) une « plainte » administrative contre les liquidateurs

suisses de SAirLines, en demandant notamment la suspension de la procØdure en Suisse dans

l’attente de l’issue de la procØdure belge, sur labase de l’article 21 de la convention de

Lugano, qui prØvoit que lorsque des demandes ayantle mŒme objet et la mŒme cause sont

formØes entre les mŒmes parties devant les juridii ctns de deux Etats, le tribunal saisi en

second lieu se dessaisit en faveur du premier saisi lorsque celui-ci s’est reconnu compØtent.

Cette demande a ØtØ rejetØe par le tribunal d’arro dissement de Zurich (dØcision du 9 aoßt

2006), puis par la cour d’appel de Zurich (dØcision du 16 novembre 2006), puis par le

Tribunal fØdØral suisse (dØcision du 23 avril 2007) 7.

8
35. DeuxiŁmement, le 8 aoßt 2006, les Actionnaires belges ont introduit devant le Tribunal

d’arrondissement de Zürich une action en contestation de l’Øtat de collocation de SAirLines,

en demandant que leurs crØances soient inscrites àl’Øtat de collocation. Dans ce cadre, ils ont

demandØ à nouveau, à titre prØalable, qu’en applicta ion de l’article 21 de la convention de

Lugano, susmentionnØ, la procØdure suisse sur l’adm ission de ces crØances à l’Øtat de

collocation soit suspendue jusqu’à la fin de la procØdure belge relative à la responsabilitØ

contractuelle et extracontractuelle des Actionnaires suisses.

6Plainte administrative des Actionnaires belges du 31 juillet 2006 (Annexe III.2)
7ArrŒt du Tribunal fØdØral suisse du 23 avril Annexe III.3)
8RequŒte des Actionnaires belges en contestation del’Øtat de collocation du 8 aoßt 2006 (Annexe III.4)

1436. Les moyens de fond invoquØs par les Actionnaires be lges à l’appui de leur action en

contestation de l’Øtat de collocation relevaient un iquement du droit belge de la responsabilitØ

civile, et non du droit de la faillite. Sur le plan procØdural, les Actionnaires belges avaient
exposØ, pour justifier la suspension de la procØduer, que l’action en contestation de l’Øtat de

collocation revŒt un double aspect :

- Pour partie, une telle action relŁve du droit de lafaillite, plus particuliŁrement de la

procØdure d’exØcution forcØe liØe à la situation n coordataire du dØbiteur. Elle

constitue, en effet, un recours dirigØ contre une d Øcision de l’administration de la

faillite qui tend à obtenir la rØvision de l’Øtat e d collocation. Il s’agit de la

composante procØdurale de l’action en contestationde l’Øtat de collocation et qui

s’inscrit, à ce titre, Øtroitement dans le cadre dela procØdure de faillite.

- Pour partie, l’action relŁve du droit matØriel dŁslors qu’elle porte, à titre

prØjudiciel, sur l’existence matØrielle ou non d’uencrØance. Elle implique, sous cet

angle, un examen du fondement de la crØance contesØ t e, examen qui nØcessite un

procŁs de droit civil oø des ØlØments de fait et dderoit sont discutØs et qui aboutit à

une dØcision judiciaire statuant sur l’existence ounon d’une crØance dans le chef

d’un crØancier à l’encontre du dØbiteur failli.

9
37. Par un jugement du 29 septembre 2006 , le Tribunal d’arrondissement de Zürich, statuant
en premiŁre instance, a confirmØ que l’action en co ntestation de l’Øtat de collocation est

formØe de deux composantes. L’une concerne la dØtem r ination de l’existence des crØances des

Actionnaires belges, pour laquelle s’appliquent les rŁgles de compØtence classiques de la

Convention (notamment les articles 17 et 5 (3), susmentionnØs). L’autre relŁve à proprement

parler du droit de l’exØcution, et donne lieu à l’pplication de l’article 16 (5), de la convention

de Lugano, qui prØvoit qu’en matiŁre d’exØcution d se dØcisions, sont exclusivement

compØtentes les juridictions du lieu de l’exØcutio.nLe Tribunal a conclu que les demandes

portØes en Belgique et en Suisse Øtaient connexesu a sens de l’article 22 de la convention de

Lugano, en vertu duquel il convenait de surseoir à statuer dans l’attente de la fin de la
procØdure belge. Ainsi, comme le soutenaient les Ac tionnaires belges, les juridictions belges

9Jugement du tribunal d’arrondissement de Zurich du 29 septembre 2006 (Annexe III.5)

15pourraient dØterminer si les Actionnaires belges so nt, ou non, titulaires d’une crØance à

l’Øgard des Actionnaires suisses. Le cas ØchØant,es l juridictions suisses reconnaîtraient cette

dØcision (qui Øquivaut à la composante matØrielleedl’action en contestation de l’Øtat de

collocation) et statueraient sur l’autre volet, propre au droit de l’exØcution forcØe, de cette

action.

38. Le 12 octobre 2006, le liquidateur de SAirLines a introduit un recours contre cette
10
dØcision devant le tribunal supØrieur de Zürich. Pra arrŒt du 2 mars 2007 , le Tribunal

supØrieur de Zürich a rejetØ ce recours. Contrairem ent au premier juge, le Tribunal supØrieur a

jugØ que la convention de Lugano n’Øtait pas applia cble, au motif que l’action en contestation

de l’Øtat de collocation relevait de la matiŁre des« faillites, concordats et autres procØdures
analogues » exclue du champ d’application de la Convention par son article 1 , alinØa 2, 2°.

Il a cependant maintenu le sursis à statuer sur la base d’une disposition du droit interne suisse.

39. Le 10 avril 2007, le liquidateur de SAirLines a introduit un recours en nullitØ contre cette

dØcision devant la Cour de cassation de Zürich. Parun arrŒt du 15 novembre 2007, la Cour de

cassation de Zürich a rejetØ ce recours . La Cour a notamment jugØ que :

« ConcrŁtement, selon le Tribunal supØrieur, plaideen faveur d’une suspension du
procŁs de collocation, le fait qu’en droit internele rØel procŁs de collocation ne peut
de mŒme Œtre conduit que quand le procŁs civil dØ pàndant est terminØ, l’article 63

OAOF [Ordonnance du Tribunal fØdØral du 13 juillet 1911sur l’administration des
offices de faillite] prØvoyant cette solution de maniŁre impØrative. Labase de
l’application du droit matØriel de la faillite ains i que de l’action paulienne serait

toujours l’existence d’une crØance matØrielle. En c acord avec les dØfendeurs, il faut
admettre que le juge de la collocation doit statuer sur le fondement des crØances en
droit matØriel, ce qui compliquerait significativem ent la procØdure en raison du droit
applicable (droit belge) et de la proximitØ de la p reuve. Il faudrait en outre accepter

que la procØdure belge devrait se clôturer plus vie t que la procØdure suisse, et que
(sous rØserve de la possibilitØ de reconnaissance)elle devrait Œtre à la base de la
procØdure de collocation suisse qui ne serait pas e ncore exØcutoire. Concernant la

possibilitØ de reconnaissance, on ne pourrait, dans l’Øtat actuel de la procØdure,
qu’avancer un pronostic, mais il faut supposer que les jugements tombant sous la
Convention de Lugano sont en principe susceptibles de reconnaissance.

10
11Jugement du Tribunal supØrieur du canton de Zurichdu 2 mars 2007, (Annexe III.6)
ArrŒt de la Cour de cassation de Zurich du 15mbre 2007 (Annexe III.7)

16 (…) Il n’apparaît cependant pas clairement pour quelle raison une dØcision
ØtrangŁre, exØcutoire et susceptible de reconnaissn ace, au sujet d’une crØance en
concours, ne serait pas aussi obligatoire pour le juge de la collocation que la dØcision

d’un juge civil suisse».

40. Le 7 janvier 2008, les liquidateurs de SAirLines ont introduit auprŁs du Tribunal fØdØral

suisse un recours civil fondØ sur diverses disposii tons du droit fØdØral suisse. Par un arrŒt du
12
30 septembre 2008 , le Tribunal fØdØral, statuant en dernier ressort,a annulØ l’arrŒt du

Tribunal supØrieur de Zürich et l’arrŒt de la Courde cassation de Zürich, et a levØ la

suspension de la procØdure de collocation.

41. Pour des motifs qui seront examinØs en dØtail dansla partie V du prØsent mØmoire, le

Tribunal fØdØral a pris acte du jugement du TribunlasupØrieur de Zürich et de la Cour de
cassation de Zürich dØcidant que la procØdure de clo location ne relevait pas du champ

d’application de la convention de Lugano. Le Tribunal fØdØral a ensuite examinØ s’il y avait

lieu de surseoir à statuer en application du droit interne suisse. Dans ce cadre, le Tribunal

fØdØral a examinØ si le jugement belge pourrait Œ e reconnu en Suisse en vertu de la

convention de Lugano, ce qui aurait justifiØ le sursis en application du droit interne suisse. Il a

dØcidØ que tel n’Øtait pas le cas dŁs lors que, eØ ugard à la convention de Lugano, il rØsulte du

principe de territorialitØ que le juge suisse estxclusivement compØtent en raison de la nature

procØdurale ou d’exØcution forcØe de la contestatn i.

42. A la suite de cet arrŒt du Tribunal fØdØral, les A ticnnaires belges, tout en rØservant leurs

droits en vertu de la convention de Lugano, sont contraints de plaider devant le tribunal

d’arrondissement de Zürich, au regard du droit belge, les mŒmes questions de responsabilitØ

contractuelle et extracontractuelle que celles qui font l’objet de la procØdure pendante en

Belgique. Les conclusions des Actionnaires belges devant les tribunaux suisses comptent
plusieurs centaines de pages, une partie substantielle Øtant consacrØe au droit belge applicable

aux questions de responsabilitØ contractuelle et ex tracontractuelle. Une partie du dossier de

piŁces extrŒmement volumineux doit Œtre traduite e lnngue allemande.

12
ArrŒt du Tribunal fØdØral suisse du 30 septem28 (Annexe III.8)

1743. Des Øtapes similaires ont ØtØ suivies pour les crØ ncaes des Actionnaires belges contre

l’autre sociØtØ suisse, SAirGroup.

44. Les Actionnaires belges ont ainsi introduit une plainte administrative le 23 octobre 2006.

Ils ont ensuite introduit, le 31 octobre 2006, une action en contestation de l’Øtat de collocation

de SAirGroup. Le 2 novembre 2006, le tribunal d’arrondissement de Zürich a ordonnØ la
suspension dans l’attente de la dØcision dans l’aaire SAirLines. A la suite de la dØcision du

Tribunal fØdØral du 23 avril 2007 concernant SAirL nies, les Actionnaires belges ont donc

retirØ leur plainte concernant SAirGroup Øtant donØ n que leur demande à l’encontre de

SAirGroup Øtait similaire à celle introduite contreSAirLines et Øtait devenue sans objet suite

à la dØcision du Tribunal fØdØral.

45. Dans le cadre de l’action en contestation de l’Øtatde collocation de SAirGroup, le 14

novembre 2006, le tribunal d’arrondissement de Zürich a ordonnØ la suspension dans l’attente
de la dØcision dans l’affaire SAirLines. A la suite de l’arrŒt du Tribunal fØdØral du 30

septembre 2008 et de la dØcision du tribunal de pre miŁre instance de Zurich du 12 janvier

2009, la procØdure a repris devant ce tribunal. Con formØment aux dØlais impartis par le

tribunal, les Actionnaires belges ont dØposØ le 16avril 2009 deux mØmoires, l’un dans

l’affaire SAirGroup et l’autre dans l’affaire SAirLines, en demandant la jonction des causes.

Le 11 mai 2009, le tribunal a rendu une ordonnance joignant les deux procØdures. Les

liquidateurs de SAirGroup et de SAirLines ont dØpos Ø leur mØmoire en rØponse le 24
septembre 2009. Les Actionnaires belges y ont rØpon du dans leur rØplique du 16 avril 2010.

Les liquidateurs se sont vus accorder un dØlai exiant le 11 novembre 2010 pour dØposer leur

mØmoire en duplique.

2. Le cadre juridique

46. La convention de Lugano concernant la compØtence ju diciaire et l’exØcution des dØcisions

en matiŁre civile et commerciale a ØtØ conclue à Lguano le 16 septembre 1988. Sont parties à

18cette Convention, des Etats membres de l’Union europØenne et de l’Association europØenne

de libre Øchange (AELE), dont la Belgique et la Sus ise. La liste des Etats parties à la

Convention telle qu’elle figure sur le site Internet du Gouvernement suisse, dØpositaire de la
13
Convention, est annexØe au prØsent mØmoire.

47. Il ressort du prØambule de la convention de Luganoque cette derniŁre a pour principal

objectif de faciliter la reconnaissance et l’exØcuiton des jugements rendus dans ces diffØrents

Etats, afin de renforcer la coopØration Øconomiqueentre les Etats de l’AELE et de l’Union

europØenne. L’objectif est donc de favoriser la lib re circulation des jugements rendus par les

juridictions des diffØrents Etats contractants (v.infra, §105 et 106).

48. C’est ainsi que les principaux chapitres de la Convention traitent de la compØtence

gØnØrale et spØciale des juridictions des Etats co tnactants (titre II, sections 1 à 7), de la

litispendance et de la connexitØ (titre II section8), et de la reconnaissance et de l’exØcution

des jugements rendus par les juridictions des Etats contractants (titre III).

49. En 1998 des nØgociations visant à remplacer la conv ention de 1988 par une « nouvelle

convention de Lugano » ont ØtØ engagØes entre les tE ats contractants. Une nouvelle
14
convention a ØtØ conclue en 2007. Pour des raisons tenant à l’Øvolution du droit del’Union

europØenne (v. infra, §50), cette nouvelle convento i n a ØtØ conclue, non plus par des Etats

membres de l’Union europØenne, mais par l’Union eur opØenne d’une part et les pays de

l’AELE d’autre part. Les Etats membres de l’Union europØenne se voient accorder le statut
er
d’ « Etat liØ par la convention». L’article 1 , §3, de la nouvelle convention dispose à cet

Øgard que «on entend par ‘Etat liØ par la prØsente conventio’ n, tout Etat qui est partie

contractante à la prØsente convention ou tout Etatmembre de la CommunautØ europØenne. Le

terme peut Øgalement dØsigner la CommunautØ europØ nnee ».

1http://www.bj.admin.ch/etc/medialib/data/wirtschaft/ipr.Par.0016.File.t…(Annexef

147).
Annexe 1.10.

19La nouvelle convention de Lugano est entrØe en vigu eur entre l’Union europØenne, la
er 15
NorvŁge, et le Danemark le 1 janvier 2010 . En vertu d’une dØcision du Conseil fØdØral de
er
la Suisse du 31 mars 2010, elle sera ratifiØe par al Suisse avec effet au 1 janvier 2011.

Le rØgime transitoire entre la convention de Luganode 1988 et la nouvelle convention de

Lugano de 2007 est rØgi par l’article 63 de la nouv elle Convention, qui dispose ce qui suit :

« 1. Les dispositions de la prØsente convention ne so nt applicables qu’aux
actions judiciaires intentØes et aux actes authenti ques reçus postØrieurement à
son entrØe en vigueur dans l’Etat d’origine et, sl’is’agit d’une requŒte en
reconnaissance ou en exØcution d’une dØcision ou d un acte authentique, dans

l’Etat requis.
2. Toutefois, si l’action dans l’Etat d’origine a ØtØ intentØe avant la date d’entrØe

en vigueur de la prØsente convention, les dØcisionsrendues aprŁs cette date
sont reconnues et exØcutØes conformØment aux dispo itions du titre III:

a) dŁs lors que l’action dans l’Etat d’origine a Ø Øt intentØe aprŁs l’entrØe en
vigueur de la convention de Lugano du 16 septembre 1988, à la fois dans l’Etat
d’origine et dans l’Etat requis;

b) dans tous les autres cas, dŁs lors que les rŁgles de compØtence appliquØes
sont conformes à celles prØvues soit par le titre I I, soit par une convention qui
Øtait en vigueur entre l’Etat d’origine et l’Etaterquis au moment oø l’action a

ØtØ intentØe ».

Cette disposition dØtermine laquelle des deux conve ntions de Lugano sera applicable à la

reconnaissance de l’arrŒt que la cour d’appel de Bu rxelles va rendre, au plus tard le 27 janvier

2011, dans l’affaire opposant les Actionnaires belges aux sociØtØs suisses.

A cet Øgard, l’article 63, §2, a) de la nouvelle co nvention envisage l’hypothŁse oø l’action

dans l’Etat d’origine (en l’espŁce, la Belgique) aØtØ intentØe avant la date d’entrØe en vigueur

de la nouvelle Convention, mais aprŁs l’entrØe en v igueur de la Convention de 1988 dans

l’Etat d’origine et dans l’Etat requis (en l’espŁce, la Belgique et la Suisse). Dans cette

hypothŁse, l’article 63, §2, dispose que la reconnaissance des dØcisions rendues aprŁs l’entrØe

en vigueur de la nouvelle Convention (entre l’Etat d’origine et l’Etat requis) sera rØgie par la

nouvelle Convention (titre III).

15
Journal officiel de l’Union europØenne 8/6/2010, L140/1 : « La convention sur la compØtence judiciaire, la
reconnaissance et l’exØcution des dØcisions en tire civile et commerciale, signØe à Lugano le 3tobre
2007, est entrØe en vigueur entre l’Union europØenen, la NorvŁge et le Danemark, le 1er janvier 2010,
conformØment à l’article 69, paragraphes 4 et 5, deladite convention ».

20Ce rØgime trouvera à s’appliquer à la reconnaissanc e de l’arrŒt de la cour d’appel de

Bruxelles, dŁs lors que l’action en Belgique a ØtØ engagØe avant l’entrØe en vigueur de la

nouvelle Convention mais aprŁs l’entrØe en vigueurde la Convention de 1988 entre la
Belgique et la Suisse.

Il rØsulte donc de l’article 63, §2, a), de la nouv elle Convention que, si l’arrŒt de la cour

d’appel de Bruxelles devait Œtre rendu aprŁs le 31dØcembre 2010, sa reconnaissance en

Suisse serait rØgie par la nouvelle Convention.A contrario, si l’arrŒt de la cour d’appel de
er
Bruxelles Øtait rendu avant le 1 janvier 2011, sa reconnaissance en Suisse resterait rØgie par

la convention de Lugano de 1988.

Il est cependant Øvident que la question de savoirsi la Suisse a, par l’arrŒt du Tribunal fØdØral
du 30 septembre 2008, mØconnu ses obligations inter nationales à l’Øgard de la Belgique, doit

Œtre apprØciØe au regard de la convention de Lugand oe 1988 et non au regard de la nouvelle

Convention de 2007, non encore en vigueur à la date de l’arrŒt du Tribunal fØdØral.

C’est au regard de la convention de Lugano de 1988, à laquelle le Tribunal fØdØral s’est

d’ailleurs rØfØrØ dans son arrŒt du 30 septembre02 80, que la Cour aura à juger si la Suisse a

mØconnu ses obligations internationales à l’Øgard e dla Belgique en dØcidant que la dØcision à

rendre par les juridictions belges ne sera pas reconnue pour les besoins de la procØdure de

collocation suisse et en refusant, pour ce motif, de surseoir à statuer en application du droit

interne suisse.

50. La matiŁre couverte par la convention de Lugano de1988 fait Øgalement l’objet de rŁgles

du droit de l’Union europØenne. Plus spØcifiquemen:t

- Dans les relations entre les Etats membres de l’Union europØenne, la convention de

Bruxelles du 27 septembre 1968, concernant la compØ tence judiciaire et l’exØcution

des dØcisions en matiŁre civile et commerciale, tri atait dØjà de la mŒme matiŁre.

21 er
Depuis le 1 mars 2002, la convention de Bruxelles a ØtØ remplc aØe par le rŁglement

n°44/2001 du Conseil du 22 dØcembre 2000, dit rŁglm e ent Bruxelles I.

La compØtence de l’Union europØenne dans cette maŁ tire dØcoule de l’actuel article

81§2 du TraitØ sur le Fonctionnement de l’Union eur opØenne (TFUE), anciennement
article 65 du TraitØ instituant la CommunautØ euroØ penne, selon lequel le Parlement

europØen et le Conseil adoptent des mesures visant à assurer notamment la

reconnaissance mutuelle entre les Etats membres des dØcisions judiciaires et

extrajudiciaires et leur exØcution.

La convention de Lugano de 1988 a d’ailleurs ØtØ cp oiØe de la convention de

Bruxelles et son prØambule indique que la conventio n de Lugano vise à « l’extension

des principes de [la] Convention [de Bruxelles] aux Etats parties » à la convention de

Lugano de 1988.

- Comme il a dØjà ØtØ indiquØ ci-dessus, dans les a tilons entre l’Union europØenne et

des Etats tiers, la nouvelle convention de Lugano du 30 octobre 2007, visant à
remplacer la convention de 1988, a ØtØ conclue enter l’Union europØenne d’une part,

et les pays de l’Association europØenne de libre Øcange d’autre part.

La compØtence de l’Union pour conclure cette nouvel le convention a ØtØ consacrØe par

l’avis 1/03 du 7 fØvrier 2006 de la Cour de Justicede l’Union europØenne. Par cet avis,

la Cour de Justice a considØrØ que « la nouvelle convention de Lugano affecterait

l’application uniforme et cohØrente des rŁgles comm unautaires en ce qui concerne

tant la compØtence judiciaire que la reconnaissanceet l’exØcution des dØcisions et le

bon fonctionnement du systŁme global instituØ par c es rŁgles … la CommunautØ a une
16
compØtence exclusive pour conclure la nouvelle conv ention de Lugano » .

Aujourd’hui, l’article 3§2 du TFUE stipule que l’Union europØenne dispose d’une
compØtence exclusive pour la conclusion d’un accordinternational dans la mesure oø

cet accord est susceptible d’affecter des rŁgles communes ou d’en altØrer la portØe.

16
Cour de Justice de l’Union europØenne, Avis 1/03 du 7 fØvrier 2006, points 172-173.

2251. Ces rŁgles du droit de l’Union europØenne ne font pas l’objet du prØsent diffØrend soumis
à la Cour internationale de justice. Leur coexistence avec la convention de Lugano de 1988

appelle nØanmoins des considØrations de deux ordre.s

52. PremiŁrement, en vertu de l’article 4§3 du TraitØ sr l’Union europØenne (TUE), les Etats

parties à l’Union ont une obligation de coopØrationloyale selon laquelle l’Union et les Etats

membres se respectent et s’assistent mutuellement dans l’accomplissement des missions

dØcoulant des traitØs, les Etats membres facilitet’accomplissement par l’Union de sa mission

et s’abstiennent de toute mesure susceptible de mettre en pØril la rØalisation des objectifs de
l’Union.

ConformØment à l’article 17§1 TUE, la Commission eu ropØenne promeut l’intØrŒt gØnØral de

l’Union, et veille à l’application des traitØs ainisque des mesures adoptØes par les institutions
en vertu de ceux-ci.

Au regard de ces diffØrentes dispositions, d’une pa rt, et du parallØlisme existant entre la

convention de Lugano de 1988 et les instruments susmentionnØs du droit de l’Union

europØenne, d’autre part, la Belgique a rØdigØ lerØp sent mØmoire en Øtroite concertation avec

la Commission europØenne, de façon à ce que les dro its et intØrŒts de la Belgique dans le

prØsent diffØrend soient dØfendus dans le plein rpeect des compØtences et intØrŒts de l’Union

europØenne.

53. DeuxiŁmement, en vertu de l’article 267 du TFUE, la Cour de justice de l’Union

europØenne est compØtente pour statuer, à titre prjØudiciel: a) sur l’interprØtation des traitØs

[constitutifs de l’Union], et b) sur la validitØ et l’interprØtation des actes pris par les

institutions, organes ou organismes de l’Union, parmi lesquels notamment le rŁglement

Bruxelles 1 susmentionnØ.

S’agissant de la nouvelle convention de Lugano de 2007, le protocole n°2 sur l’interprØtation

uniforme de la convention et sur le ComitØ permanen t indique en son prØambule que la Cour

23de Justice de l’Union europØenne est dØsormais comØ ptente pour statuer sur l’interprØtation de

ses dispositions quant à leur application par les tribunaux des Etats membres de l’Union

europØenne . En vertu de l’article 2 dudit Protocole, tout Etat liØ par la nouvelle convention

qui n’est pas un Etat membre de l’Union europØennea le droit de dØposer, devant la Cour de

Justice de l’Union, des mØmoires ou des observation s Øcrites, lorsqu’unejuridiction d’un Etat

membre de l’Union demande à la Cour de justice de statuer à titre prØjudiciel sur une question

portant sur l’interprØtation de la convention ou ds e instruments visØs à son article 64,

paragraphe 1.

Ces mØcanismes juridictionnels sont inapplicables d ans le cas d’espŁce. La Cour de Justice de

l’Union europØenne a au demeurant rappelØ dans sonavis 1/03 susmentionnØ qu’elle n’Øtait
17
pas compØtente pour interprØter la convention de Lg uano de 1988 . En outre, le prØsent

diffØrend porte sur l’application de cette convento i n par les tribunaux de la Suisse, Etat non

membre de l’Union europØenne.

ConformØment à son devoir de loyautØ, et dans toute la mesure oø le prØsent diffØrend met en

cause les intØrŒts de l’Union europØenne en mŒmm e tes que ceux de la Belgique, la Belgique

a rØdigØ le prØsent mØmoire en concertation avecC laommission europØenne.

3. L’objet du diffØrend

54. Il ressort des faits relatØs ci-dessus que la Suie a refusØ de faire droit à la demande de la

Belgique et des autres Actionnaires belges de surseoir à statuer dans l’attente de la fin de la

procØdure belge portant sur la dØtermination de la responsabilitØ contractuelle et

extracontractuelle des Actionnaires suisses à l’Øga rd des Actionnaires belges et a dØcidØ que

la dØcision à rendre dans la procØdure intentØe de ant les tribunaux belges ne serait pas

reconnue. Le Tribunal fØdØral, statuant en dernier ressort par arrŒt du 30 septembre 2008 , a8

notamment considØrØ :

17
18Cour de Justice de l’Union europØenne, Avis 1/03,p, point 19.
ArrŒt du Tribunal fØdØral suisse du 30 septe28 (Annexe III.8)

24 - premiŁrement, qu’en vertu de la convention de Lugano les dØcisions des

juridictions belges ne peuvent Œtre reconnues en Su isse pour les besoins de la
procØdure de collocation ;

- deuxiŁmement, que dŁs lors notamment que les dØcis oins belges à intervenir ne

seraient pas reconnues en Suisse, il n’y avait pas lieu de surseoir à statuer, en

application du droit interne suisse, sur la question de la responsabilitØ civile des
Actionnaires suisses dans l’attente de la dØcisionbelge à intervenir ;

- troisiŁmement, que les dispositions de la convention de Lugano destinØes à

prØvenir les procØdures parallŁles et la contrariØ Øt de dØcisions ne sont pas

applicables en l’espŁce, au motif que l’action en contestation de l’Øtat de
collocation portØe devant les juridictions suisses ne relŁve pas du champ

d’application de cette Convention.

55. Dans sa requŒte, la Belgique a contestØ chacun deec s points :

- En premier lieu, la Belgique considŁre que c’est à tort que la Suisse refuse de

reconnaître les dØcisions belges à intervenir sur a l responsabilitØ civile des

Actionnaires suisses. Ce refus est contraire à la convention de Lugano.

- En deuxiŁme lieu, la Belgique considŁre que c’est àtort que la Suisse refuse de

surseoir à statuer dans l’attente de l’issue de la procØdure belge.

i. D’une part, le refus de surseoir à statuer en application du droit interne

suisse au motif que la dØcision belge à intervenirne serait pas reconnue en

Suisse, alors que la Suisse doit permettre la reconnaissance de cette

dØcision en application de la convention de Lugano, est contraire aux

rŁgles du droit international gØnØral rØgissant lx ’ercice par les Etats de

leurs compØtences, notamment en matiŁre judiciaire,et suivant lesquelles

toute compØtence Øtatique doit Œtre exercØe de mŁ ari raisonnable.

ii. D’autre part, la Belgique avait fait valoir dans sa requŒte que ledit refus est

Øgalement contraire à la convention de Lugano qui m i posait à la Suisse de

surseoir à statuer dans les circonstances de l’espŁce. Comme il a ØtØ

indiquØ ci-avant, la Belgique n’insiste plus dans e l prØsent mØmoire sur la

25 violation des dispositions pertinentes de la convention de Lugano (à savoir,

les articles 17, 21 et 22).

56. Le 29 juin 2009, l’Ambassadeur de Belgique auprŁs de la ConfØdØration suisse a informØ

le Ministre suisse des Affaires ØtrangŁres de l’ine tntion de la Belgique de saisir la Cour

internationale de Justice d’un diffØrend relatif à l’interprØtation et à l’application de la

convention de Lugano. Le 26 novembre 2009, l’Ambassadeur de Belgique a remis au
MinistŁre suisse des Affaires ØtrangŁres une notee vrbale qui se lit notamment comme suit :

« La Belgique estime que c’est à tort que le Tribunal fØdØral a, par son arrŒt du 30
septembre 2008, dit pour droit que les dØcisions de s tribunaux belges à intervenir au
sujet de la responsabilitØ civile des sociØtØs SAG irroup et SAirLines à l’Øgard,

notamment, de l’Etat belge, de la SFPI et de Zephyr-Fin ne seront pas reconnues en
Suisse dans le cadre de la procØdure de collocationdesdites sociØtØs suisses, et que
c’est à tort aussi que la juridiction suisse a refusØ de faire droit à la demande de la

Belgique de surseoir à statuer dans l’attente des dØcisions susmentionnØes des
tribunaux belges.

La Belgique conteste l’interprØtation et l’applicaiton qui ont ØtØ ainsi faites de la
convention de Lugano concernant la compØtence judic iaire et l’exØcution des
dØcisions en matiŁre civile et commerciale du 16 se ptembre 1988. La Belgique

considŁre aussi que, en refusant de surseoir à statuer sur la base du droit interne
suisse au motif que la dØcision des tribunaux belge s sur la responsabilitØ civile de
SAirLines et SAirGroup ne sera pas reconnue dans le cadre de la procØdure de
collocation suisse, la Suisse manque à ses obligations internationales à l’Øgard de la

Belgique.
La Belgique entend donc saisir la Cour internationale de Justice par requŒte, du

diffØrend qui l’oppose ainsi à la Suisse.

Pour que ce diffØrend soit, dans l’intØrŒt commun esddeux pays, tranchØ dans les
meilleurs dØlais, la Belgique envisage de demanderà la Cour la constitution d’une
Chambre pour connaître de cette affaire.

L’Ambassade du Royaume de Belgique serait heureuse de connaître la position des
AutoritØs suisses sur cette approche, inspirØe par le souci de la juste prise en compte

de tous les intØrŒts lØgitimes des parties dans ctetaffaire.
L’Ambassade du Royaume de Belgique saisit cette occasion pour rØitØrer la plus

grande estime de la Belgique pour les Institutions de la ConfØdØration suisse, et son
souhait d’inscrire cette dØmarche dans la perspectv ie du renforcement de la
coopØration judiciaire entre nos deux pays» 1.

19
Note verbale de l’Ambassadeur de Belgique auprŁs de la ConfØdØration suisse au MinistŁreAfaires des f
ØtrangŁres (Annexe VI)3

2657. Par une note verbale du 9 dØcembre 2009, le DØpartm e ent fØdØral des affaires ØtrangŁres

de la Suisse a rØpondu comme suit :

« Le DØpartement a pris note des considØrations con etnues dans la note

susmentionnØe et de l’intention de la Belgique de s aisir la Cour internationale de
Justice par une requŒte relative au diffØrend l’op osant selon elle à la Suisse. Le
DØpartement a Øgalement pris note du fait que la Ble gique envisage de demander à la

Cour la constitution d’une Chambre pour connaître de cette affaire. La Suisse se
prononcera à ce sujet aprŁs avoir pris connaissance du contenu de la requŒte que la
Belgique a l’intention de dØposer.» 20

58. Par cette note verbale, la Suisse n’a pas contestØl’existence d’un diffØrend avec la

Belgique mais a nØanmoins, en usant des termes «diffØrend l’opposant selon elle [la
Belgique] à la Suisse », rØservØ sa position quant à l’existence d’un tlediffØrend.

Or, quelle que soit la position du Gouvernement suisse en la matiŁre, le Tribunal fØdØral a, par

sa dØcision du 30 septembre 2008 rendue en dernierressort, dit pour droit, notamment, que la

dØcision à rendre par les tribunaux belges ne serat i pas reconnue en application de la

convention de Lugano, et qu’il n’y avait dŁs lors pas matiŁre pour les tribunaux suisses de la

collocation à surseoir à statuer en application du droit interne suisse.

ConformØment à la jurisprudence constante de la Cou r, l’existence, ou non, d’un diffØrend

doit Œtre apprØciØe objectivement.

En l’espŁce, la dØcision du Tribunal fØdØral suis,se se prononçant en dernier ressort sur les

points susmentionnØs, et la contestation de cette d Øcision par la Belgique, fondent la

conclusion qu’il existe entre la Belgique et la Suisse un diffØrend au sens du Statut de la Cour

et de la jurisprudence de la Cour en la matiŁre.

20
Note verbale du MinistŁre suisse des Affaires ØagŁres à l’Ambassade de Belgique auprŁs de la
ConfØdØration suisse (Annexe VI.4)

2759. Il existe donc un diffØrend entre la Suisse et la B elgique portant sur l’interprØtation et

l’application de la convention de Lugano ainsi que des rŁgles du droit international gØnØral
rØgissant l’exercice par les Etats de leurs compØteces, notamment en matiŁre judiciaire.

28III. PARTIE III : COMPETENCE ET RECEVABILITE

60. Bien que, dans cette phase de la procØdure, la Belgique ne soit pas obligØe d’anticiper les

exceptions Øventuelles que la Suisse pourrait soulever à l’Øgard de la compØtence de la Cour

ou de la recevabilitØ de la demande, la Belgique traitera nØanmoins briŁvement des ØlØments

de compØtence et de recevabilitØ dans ce mØmoi.re

1. CompØtence

a. Fondement de la compØtence de la Cour

61. La Belgique et la Suisse sont toutes les deux membres des Nations Unies et, en tant que

tel, la Belgique est partie au Statut de la Cour depuis le 27 dØcembre 1945. La Suisse quant à

elle est partie au Statut de la Cour depuis le 28 juillet 1948, soit avant son adhØsion aux

Nations Unies.

62. En application de l’article 36, § 2 du Statut de la Cour Internationale de Justice, la
Belgique a dØclarØ reconnaître la juridiction oblgtoire de la Cour le 3 avril 1958 :

« Au nom du Gouvernement belge, je dØclare reconnat îre comme obligatoire de plein
droit et sans convention spØciale vis-à-vis de tout autre Etat acceptant la mŒme
obligation, la juridiction de la Cour internationale de Justice, conformØment à

l’article 36, paragraphe 2, du Statut de la Cour, sur tous les diffØrends d’ordre
juridique nØs aprŁs le 13 juillet 1948 au sujet desituations ou de faits postØrieurs à
cette date, sauf le cas oø les parties auraient convenu ou conviendraient d’avoir
recours à un autre mode de rŁglement pacifique.

La prØsente dØclaration est faite sous rØserve deartification. Elle entrera en vigueur
le jour du dØpôt de l’instrument de ratification, p our une pØriode de cinq ans. A

l’expiration de cette pØriode, elle restera en vigu eur jusqu’à notification de son
abrogation ».

L’instrument de ratification a ØtØ dØposØ le 17 njui958.

2963. La Suisse a, quant à elle, dØclarØ reconnaître laujridiction obligatoire de la Cour le 6

juillet 1948. Cette dØclaration porte effet à daterdu 28 juillet 1948. Elle est libellØe comme
suit :

« Le Conseil fØdØral suisse, dßment autorisØ à ce etffet par un arrŒtØ fØdØral pris le 12
mars 1948 par l’AssemblØe fØdØrale de la ConfØdØ irntsuisse et entrØ en vigueur le

17 juin 1948,
DØclare par les prØsentes que la ConfØdØration su sisreconnaît comme obligatoire de

plein droit et sans convention spØciale, à l’Øgardde tout autre Etat acceptant la mŒme
obligation, la juridiction de la Cour internationale de Justice sur tous les diffØrends
d’ordre juridique ayant pour objet

a. L’interprØtation d’un traitØ ;

b. Tout point de droit international ;

c. La rØalitØ de tout fait qui, s’il Øtait Øtli,nstituerait la violation d’un engagement
international ;

d. la nature ou l’Øtendue de la rØparation due pourla rupture d’un engagement
international.

Cette dØclaration, qui est fondØe sur l’article 3du Statut de la Cour internationale de
Justice, portera effet dŁs la date à laquelle la ConfØdØration suisse sera devenue
partie à ce Statut et aussi longtemps qu’elle n’aura pas ØtØ abrogØe moyennant un
prØavis d’un an».

64. Aucune de ces deux dØclarations n’a à ce jour ØtØØ dnoncØe.

65. Il n’est pas douteux que le prØsent diffØrend est e d nature juridique au sens des

dØclarations belge et suisse, ni que le diffØrend s et nØ postØrieurement à ces dØclarations et

qu’il porte sur des situations ou faits postØrieursà ces dates.

66. Outre les dØclarations susmentionnØes en vertu de’larticle 36, §2, du Statut de la Cour, la

compØtence de la Cour trouve encore son fondement d ans la Convention europØenne pour le

rŁglement pacifique des diffØrends, faite à Strasbourg le 29 avril 1957.

L’article 1er de cette Convention dispose ce qui suit :

30 “Les Hautes Parties contractantes soumettront pour jugement à la Cour
internationale de Justice tous les diffØrends juriques relevant du droit international
qui s’ØlŁveraient entre elles et notamment ceux aynat pour objet:

a. l’interprØtation d’un traitØ;
b. tout point de droit international;
c. la rØalitØ de tout fait qui, s’il Øtait Øtablttuerait la violation d’une
obligation internationale;

d. la nature ou l’Øtendue de la rØparation due pour rputure d’une obligation
internationale.”

Tant la Belgique que la Suisse sont parties à cette Convention, la Belgique depuis le 20 avril

1970 et la Suisse depuis le 29 novembre 1965. Aucun des deux Etats parties au prØsent

diffØrend n’a Ømis une dØclaration ou rØserve pen rtinte pour le cas d’espŁce. La Belgique a

uniquement fait une dØclaration, comme l’y autorisel’article 34.1 de la Convention, selon

laquelle elle n’acceptait pas les dispositions de la Convention en matiŁre d’arbitrage. La

Suisse n’a quant à elle fait aucune rØserve ni dØalration.

67. L’ensemble des conditions posØes par la ConventionprØcitØe à la saisine de la Cour sont
remplies en l’espŁce :

- ConformØment à l’article 27 (a), les dispositions d e la Convention “ne
s’appliquent pas aux diffØrends concernant des fais t ou situations antØrieurs à
l’entrØe en vigueur de la .. Convention entre les p arties au diffØrend ”. La
Convention est entrØe en vigueur pour la Suisse le29 novembre 1965 et pour la

Belgique le 20 avril 1970, de sorte que cette condition n’est manifestement pas
susceptible de faire obstacle à la compØtence de laCour.

- ConformØment à l’article 27 (b), les dispositions d e la Convention “ne

s’appliquent pas aux diffØrends portant sur des que stions que le droit
international laisse à la compØtence exclusive des Etats”. Cette condition est
remplie en l’espŁce, la Belgique se prØvalant devan t la Cour de la convention de
Lugano ainsi que du droit international gØnØral.

- ConformØment à l’article 28.1, les dispositions dela Convention “ne s’appliquent
pas aux diffØrends que les parties seraient convenu es ou conviendraient de
soumettre à une autre procØdure de rŁglement pacifq iue. Toutefois, en ce qui
er
concerne les diffØrends visØs à l’article 1 , les Hautes Parties contractantes
renoncent à se prØvaloir entre elles des accords qu i ne prØvoient pas de
procØdure aboutissant à une dØcision obligatoir” e. Il sera montrØ ci-aprŁs
qu’aucun mode de rŁglement autre que celui de la saisine de la Cour n’a ØtØ

convenu en l’espŁce.

31 - L’article 29.1 dispose que “s’il s’agit d’un diffØrend dont l’objet, d’aprŁs ld eroit

interne de l’une des parties, relŁve de la compØtec ne des autoritØs judiciaires ou
administratives, cette partie pourra s’opposer à ce que ce diffØrend soit soumis
aux diverses procØdures prØvues par la .. Conventin o avant qu’une dØcision
dØfinitive ait ØtØ rendue, dans des dØlais raisonb nes, par l’autoritØ compØtente”.

Cette condition est remplie, l’arrŒt du Tribunal fd ØØral suisse du 30 septembre
2008 ayant ØtØ rendu en dernier ressort.

- L’article 29.2 dispose enfin que “si une dØcision est intervenue dans l’ordre
interne, il ne pourra plus Œtre recouru aux procØd res prØvues par la prØsente
Convention aprŁs l’expiration d’un dØlai de 5 ans àpartir de ladite dØcision ”.

Cette condition est Øgalement remplie en l’espŁce,dŁs lors que le prØsent
diffØrend est nØ de l’arrŒt du Tribunal fØdØral 3 d0u septembre 2008 et que la
Belgique a saisi la Cour par requŒte du 21 dØcembr2 e009.

68. Pour la pleine information de la Cour, la Belgique montrera ci-aprŁs de maniŁre plus

dØtaillØe que les parties n’ont pas convenu d’avoir recours à un autre moyen de rŁglement de

leur diffØrend.

b. Absence de clause de rŁglement des diffØrends dansla convention de Lugano

69. La convention de Lugano ne contient pas de clause de rŁglement des diffØrends. Le

diffØrend survenu entre la Belgique et la Suisse re lativement à l’interprØtation et à

l’application de la convention de Lugano ne peut donc pas Œtre tranchØ par un organe instituØ

par la convention de Lugano elle-mŒme.

21
70. Le Protocole n°2 de la convention de Lugano , intitulØ «InterprØtation uniforme de la
Convention » institue, en son article 3, un ComitØ permanentdont la mission est de mettre en

œuvre le systŁme d’Øchange d’informations concernan t les dØcisions rendues en application

de la convention de Lugano de 1988 et les dØcisionspertinentes rendues en application de la

convention de Bruxelles. Ce systŁme d’Øchange d’ino frmations est dØfini à l’article 2 du

Protocole n°2 qui dispose ce qui suit :

21
Protocole n°2 de la convention de Lugano sur l’interprØtation uniforme de la Convention (Annexe I.2)

32 « Les parties contractantes conviennent de mettre en place un systŁme d’Øchange
d’informations concernant les dØcisions rendues en application de la prØsente
convention ainsi que les dØcisions pertinentes renues en application de la Convention
de Bruxelles. Ce systŁme comprend:

- la transmission à un organisme central par les autoritØs compØten ets des dØcisions
rendues par des tribunaux de derniŁre instance et par la Cour de justice des
CommunautØs europØennes ainsi que d’autres dØcisio sn particuliŁrement

importantes passØes en force de chose jugØe et renu des en application de la
prØsente convention ou de la Convention de Bruxelle s;
- la classification de ces dØcisions par l’organisme central, y comprs i, dans la
mesure nØcessaire, l’Øtablissement et la publicatinode traductions et de rØsumØs;

- la communication par l’organisme central du matØriel documentaire a ux autoritØs
nationales compØtentes de tous les Etats signataire s et adhØrents à la prØsente
convention ainsi qu’à la Commission des CommunautØs europØennes» (la
Belgique souligne).

71. En outre, au dernier alinØa de son prØambule, le portocole n°2 de la convention de Lugano

de 1988 dispose que les Hautes Parties contractantes sont « soucieuses, dans le plein respect

de l’indØpendance des tribunaux , d’empŒcher des interprØtations divergentes et dp earvenir à

une interprØtation aussi uniforme que possible …» (la Belgique souligne). Le ComitØ

permanent ne dispose donc d’aucune compØtence pour rØformer, directement ou

indirectement, les dØcisions rendues par les tribuaux des Etats parties.

72. Le ComitØ permanent n’a donc aucune compØtence en m atiŁre de rŁglement des

diffØrends qui conditionnerait ou exclurait le reco urs à la Cour internationale de Justice. Il

s’agit d’un mØcanisme d’Øchange d’informations dontl’objectif est de favoriser une

interprØtation uniforme de la Convention mais dont le rôle ne peut s’Øtendre à celui de

trancher les diffØrends survenus entre Etats partie s au sujet d’une dØcision rendue par les

tribunaux de l’un de ces Etats parties.

73. A titre de comparaison, on relŁvera que le Protocole n°2 de la nouvelle convention de

Lugano, qui entrera en vigueur pour la Suisse au 1 janvier 2011, dispose toujours en son

prØambule que les Parties sont soucieuses d’empŒch redes interprØtations divergentes «dans

le plein respect de l’indØpendance des tribunaux» et dispose en son article 5, §3, que tout

33problŁme liØ au fonctionnement de la convention peu t Œtre soumis au ComitØ permanent en

vue d’y remØdier.

74. Fin juillet 2010, le Service Public FØdØral Justic,ec’est-à-dire le ministŁre belge de la
Justice, a reçu le projet d’ordre du jour de la nion du ComitØ permanent prØvue pour les 13

et 14 septembre 2010. Ce projet d’ordre du jour, Øatbli par la Suisse, incluait un point intitulØ

« Rôle et fonction du ComitØ permanent : la requŒteedla Belgique auprŁs de la CIJ» . 22

Ignorant la portØe exacte de cette sollicitation duComitØ permanent, la Belgique a alors

sollicitØ de la Cour une prorogation du dØlai prØvp uour le dØpôt de son mØmoire, de façon à

pouvoir finaliser la rØdaction de son mØmoire aprŁs la rØunion du ComitØ, et aprŁs avoir

obtenu le procŁs-verbal de ladite rØunion et avoirØtudiØ celui-ci. La Cour a alors, par

ordonnance de son PrØsident du 10 aoßt 2010, prorog Ø le dØlai pour le dØpôt du mØmoire et du

contre-mØmoire.

75. A la rØunion du ComitØ permanent, le reprØsentant edla Suisse a, sous le point

susmentionnØ de l’ordre du jour, dØclarØ ce qui stu:i

« La Suisse tient à informer ce ComitØ permanent d’un e procØdure que la Belgique a

introduite à son encontre devant la Cour internationale de Justice. Dans sa requŒte
introductive d’instance du 21 dØcembre 2009, la Beg l ique fait Øtat d’un diffØrend
portant principalement sur l’interprØtation et l’ap plication de la convention de
Lugano. Plus prØcisØment, la Belgique s’estime lØe sØpar deux arrŒts du Tribunal

fØdØral suisse. Ces arrŒts ont ØtØ rendus dans d afsaires opposant d’une part la
Belgique elle-mŒme et deux autres demandeurs belge,s et d’autre part la sociØtØ
SAirLines en liquidation concordataire, anciennement Swissair.

e
Le premier arrŒt a figurØ dans le 10rapport sur la jurisprudence nationale sans
qu’une discussion ne soit demandØe ni par la Belgiq ue ni par un autre Etat partie. Il
s’inscrit dans le cadre d’une procØdure de liquidai ton concordataire en Suisse et

concerne le problŁme particulier de la collocation des crØances qui font dØjà l’objet
d’une procØdure pendante. La question devant le TFØtait la suivante : l’obligation
pour l’administrateur de la faillite de mentionner une crØance ‘pour mØmoire’ a l’Øtat
de collocation existe-t-elle lorsque la procØdure ur le fond est pendante à l’Øtranger,

en particulier dans un Etat contractant de la CL (en l’occurrence : en Belgique). Etant
donnØ que le juge Øtranger n’est pas soumis à la lg Øislation suisse sur la faillite, le
Tribunal fØdØral y a rØpondu par la nØgative. Dan ce contexte, le TF a Øgalement

22
Projet d’ordre du jour de la rØunion du Comr anent de la convention de Lugano des 13 et 14 septembre
2010, Øtabli par le Gouvernement suisse, Annexe I.8

34 jugØ que la procØdure de collocation en Suisse nee rlŁve pas du champ d’application
de la CL.

Le second arrŒt du Tribunal fØdØral concerne, enb sutance, la question de savoir si la
procØdure collective de collocation en Suisse doitŒtre suspendue dans l’attente de
jugements à intervenir en Belgique. Ce que le Tribunal fØdØral a Øgalement niØ

En Suisse, la procØdure de collocation est toujourspendante en premiŁre instance
alors qu’en Belgique, l’affaire est devant la Cour d’appel aprŁs avoir ØtØ rejetØe en
premiŁre instance. DŁs lors, à l’heure actuelle, aucune des procØdures, belge et suisse

ne sont closes. Les craintes de la Belgique que la dØcision future belge ne serait
reconnue en Suisse s’avŁrent donc purement hypothØitques.

La Suisse est d’avis que toute divergence relative à l’application de23a CL doit Œtre
discutØe au ComitØ permanent comme le prØvoit le P otocole n°2 ».

76. La dØlØgation belge a ensuite fait une dØclaration dont la version authentique, en langue
anglaise, figure dans les annexes au prØsent mØmoier. La Belgique reproduit ci-aprŁs la

traduction en français figurant dans le procŁs-verbal de la rØunion du ComitØ :

« Je tiens à remercier la dØlØgation suisse pour avio r soulevØ cette question à l’ordre
du jour et de porter l’affaire à la connaissance de l’assemblØe annuelle de cette annØe
du ComitØ permanent.

Je souhaiterais simplement dire que le gouvernement belge ne souhaite pas s’engager

dans toute forme de discussion qui pourrait avoir trait au litige entre la Belgique et la
Suisse qui est actuellement pendant devant la Cour internationale de Justice.
Toutefois, le fait que nous gardions le silence sur cette question ne signifie pas que le
gouvernement belge tolŁre quelconque point de vue ou dØclaration qui pourrait

survenir lors d’un tel dØbat au sein de ce ComitØ e prmanent.
Je souhaiterai (sic) aussi que cette dØclaration soit dßment consignØe dans le procŁs-

verbal de cette rØunion.»

77. Aucune autre dØlØgation n’a fait une quelconque dØ lcration sous ce point de l’ordre du

jour.

23
ProcŁs-verbal de la rØunion du ComitØ permanent dlea convention de Lugano des 13 et 14 septembre 2010, p.
7-8 (Annexe I.9).

35 c. IncompØtence de la Cour de justice de l’Union europ Øenne

78. ConformØment à l’article 259 du TraitØ sur le fontc ionnement de l’Union europØenne

(ancien article 227 du traitØ instituant la Communa utØ europØenne), «chacun des Etats

membres peut saisir la Cour de justice de l’Union europØenne s’il estime qu’un autre Etat

membre a manquØ à une des obligations qui lui incombent e n vertu des traitØs» (la Belgique

souligne). Le TraitØ ne contient aucun systŁme de Ł rglement des diffØrends entre un Etat

membre et un Etat non membre. La Suisse n’Øtant pas un Etat membre de l’Union

europØenne, ceci suffit à conclure que la Cour de uj stice de l’Union europØenne ne peut pas
Œtre saisie du diffØrend survenu entre la Belgique et la Suisse relativement à l’application et

l’interprØtation de la convention de Lugano.

2. RecevabilitØ de la requŒte

a. Le prØjudice propre subi par la Belgique

79. Le prØsent litige trouve son origine dans des dØciisons des juridictions suisses, rendues

dans des procØdures auxquelles Øtaient parties l’E att belge et les sociØtØs S.F.P. et S.F.I.

(aujourd’hui S.F.P.I.) et Zephyr-Fin, dØtenues majo ritairement puis uniquement par l’Etat

belge.

80. Se pose dŁs lors, à premiŁre vue, la question de sa voir si la procØdure devant la Cour

relŁve de l’exercice de la protection diplomatiqueavec les exigences qui lui sont propres. Tel

n’est aucunement le cas en l’espŁce.

81. La Belgique fait en effet valoir des droits qui lui sont propres, notamment celui de voir les

dØcisions de ses juridictions reconnues en Suisse et de voir les juridictions suisses surseoir à

statuer dans l’attente des dØcisions belges à invenir.

3682. Dans la dØcision finale du 30 septembre 2008, le Tr ibunal fØdØral suisse a considØrØ, pour

les motifs qui seront exposØsinfra (§122 et s.), qu’il n’y avait pas lieu de surseoir à statuer en
application de la convention de Lugano et que, en application de cette mŒme Convention, les

dØcisions à rendre par les juridictions belges au s ujet de la responsabilitØ civile des

Actionnaires suisses ne seraient pas reconnues en Suisse. Ce faisant, la juridiction suisse

ignore la valeur des procØdures pendantes et des dØ cisions d’un des Etats parties à la

Convention, en l’espŁce, la Belgique. Etant donnØ q ue la convention de Lugano met en place

un systŁme de coopØration entre les juridictions ds e Etats parties, la violation de ce systŁme

par la Suisse affecte les droits de la Belgique elle-mŒme, directement.

83. Il en va d’autant plus ainsi qu’en l’espŁce, Øtaiet parties aux procØdures en Suisse qui ont

donnØ lieu au prØsent litige, l’Etat belge, la S.I.., la S.F.P. (ces deux sociØtØs ayant fusionnØ

pour devenir l’actuelle S.F.P.I.) et Zephyr-Fin, soit des sociØtØs dont l’Etat est directement ou

indirectement l’actionnaire majoritaire ou unique et dØtient le contrôle exclusif. A cet Øgard

aussi, la Belgique agit dans la prØsente espŁce enprotection de ses droits propres et non en

protection diplomatique de ses ressortissants.

84. Par ailleurs, le droit d’un Etat de voir les juridictions ØtrangŁres surseoir à statuer au

bØnØfice de ses propres juridictions, et celui de ovir les dØcisions de ses tribunaux reconnues

par un autre Etat partie, ne peuvent Œtre mis en cu ase qu’au travers de la violation des droits

d’une partie à un litige en matiŁre civile ou commerciale qui a ØtØ privØe du bØnØfice de la

sursØance à statuer et de celui de la reconnaissanc e. Les droits propres des Etats et les droits

des particuliers en vertu de conventions de coopØra tion judiciaire sont ainsi interdØpendants.

85. Ce constat exclut toute discussion quant à l’application des conditions de la protection
diplomatique. En effet, dans son arrŒt du 31 mars 2 004 dans l’affaire Avena, la Cour a

considØrØ qu’en raison de l’interdØpendance des di rs de l’Etat (ceux du Mexique en vertu de

la convention de Vienne sur les relations consulaires) et des droits individuels (ceux des

ressortissants mexicains n’ayant pas bØnØficiØ dealprotection consulaire), le Mexique

pouvait inviter la Cour à statuer en son nom propre, en raison de la violation des droits dont il

37soutenait avoir ØtØ victime directement, et que l’pØuisement des voies de recours internes ne

s’appliquait pas à une telle demande. La Cour a ainsi observØ que :

« toute violation des droits que l’individu tient de l’article 36 risque d’entraîner une
violation des droits de 1’Etat d’envoi et que touteviolation des droits de ce dernier
risque de conduire à une violation des droits de l’individu. Dans ces circonstances
toutes particuliŁres d’interdØpendance des droits ed 1’Etat et des droits individuels, le

Mexique peut, en soumettant une demande en son nom propre, inviter la Cour à
statuer sur la violation des droits dont il soutient avoir ØtØ victime à la fois
directement et à travers la violation des droits individuels confØrØs à ses ressortissants

par I’alinØa b) du paragraphe 1 de l’article 36.
L’obligation d’Øpuiser les voies de recours interns e ne s’applique pas à une telle
demande. Au demeurant, pour les motifs qui viennent d’Œtre exposØs, la Cour n’estime
pas nØcessaire de traiter des demandes mexicaines c oncernant lesdites violations sous
24
l’angle distinct de la protection diplomatique» .

86. Les droits de la Belgique et des particuliers en vertu de la convention de Lugano sont

interdØpendants au mŒme titre que les droits des E ats et des particuliers en vertu de la

Convention de Vienne sur les relations consulaires. Pour ce motif Øgalement, la Belgique est

fondØe à agir en raison de son prØjudice propre sas n que trouve à s’appliquer l’obligation

d’Øpuiser les voies de recours internes.

87. Au demeurant, les Actionnaires belges ont effectivement ØpuisØ les voies de recours

internes disponibles en Suisse avant de saisir la Cour. En effet, les Actionnaires belges ont fait

valoir systØmatiquement, aux diffØrents niveaux dela procØdure devant les juridictions

suisses, que ces derniers devaient surseoir à statuer. Le Tribunal fØdØral, juridiction de dernier

ressort dans la hiØrarchie judiciaire suisse, a uite conclu à l’inapplicabilitØ de la convention

de Lugano et refusØ la suspension de la procØdure.Quant à la question de la reconnaissance

des dØcisions à rendre par les tribunaux belges enapplication de la convention de Lugano, les
Actionnaires belges ont toujours soutenu que la dØc ision belge à intervenir devrait Œtre

reconnue en Suisse, ce qui a ØtØ admis par toutesels juridictions suisses à l’exception du

Tribunal fØdØral, statuant en dernier ressort parsn arrŒt du 30 septembre 2008.

24
Avena et autres ressortissants mexicains (Mexique c. Etats-Unis d’AmØrique), arrŒt, C.I.J. Recueil 2004,p.12,
§40

3888. Dans ces circonstances, il est manifeste que l’action de la Belgique devant la Cour ne

relŁve pas de la protection diplomatique et n’est dŁs lors pas soumise aux conditions de la

protection diplomatique.

b. Tentatives prØalables de rŁglement du diffØrend

89. La saisine de la Cour n’est pas conditionnØe par laconduite de nØgociations prØalables

entre les Etats parties au litige .

90. La saisine de la Cour ne saurait donc Œtre conditio nnØe par la saisine d’aucune instance,

notamment pas la saisine du ComitØ permanent instiu t Ø par le Protocole n°2 à la convention

de Lugano, dont la fonction, comme il a ØtØ montrØ supra (§70 et 71), consiste à favoriser

l’interprØtation uniforme de la Convention par le b iais d’un mØcanisme d’Øchange

d’informations et non à rØgler les Øventuels diffØ erds survenus dans le cadre de la

Convention entre ses Etats parties.

25
Plates-formes pØtroliŁres (RØpublique islamiq’Ian c. Etats-Unis d’AmØrique), arrŒt, C.I.J. Reculei2003,
p. 161, 210 § 107

39IV. PARTIE IV : INTERPRETATION DE LA CONVENTION DE LUGANO

91. La quatriŁme partie du mØmoire de la Belgique portesur certains aspects spØcifiques

concernant l’interprØtation de la convention de Lug ano. La Belgique exposera tout d’abord

les principes d’interprØtation uniforme de la Conve ntion contenus dans le Protocole n°2 de

cette derniŁre. La Belgique exposera ensuite l’objet et le but de la convention de Lugano.

Enfin, la Belgique rappellera le principe de l’interprØtation autonome ou internationale, qui

revŒt une importance particuliŁre s’agissant de tria tØs qui, à l’instar de la convention de

Lugano, visent à instaurer des rŁgles uniformes rØgissant le fonctionnement de leurs tribunaux
internes.

1. Le Protocole n°2 sur l’interprØtation uniforme dea l convention de Lugano

92. Il a dØjà ØtØ indiquØ ci-dessus que la convention edLugano vise à Øtendre à ses parties

contractantes le systŁme de coopØration judiciairede la convention de Bruxelles, conclue

entre Etats membres de l’Union europØenne. Aux quar tiŁme, cinquiŁme et sixiŁme

paragraphes du prØambule de la convention de Lugano , les parties contractantes disent

s’engager par la convention :

« Prenant en considØration la convention de Bruxelles , du 27 septembre 1968,

concernant la compØtence judiciaire et l’exØcution des dØcisions en matiŁres civile et
commerciale, telle qu’adaptØe par les conventions d ’adhØsion lors des Ølargissements
successifs des CommunautØs europØennes,

PersuadØes que l’extension des principes de cette c onvention aux Etats parties au
prØsent instrument renforcera la coopØration judic aiire et Øconomique en Europe,

26
DØsireuses d’assurer une interprØtation aussi unifrme que possible de celui-ci » .

93. Le lien ainsi Øtabli entre la convention de Bruxelels, dont l’interprØtation relevait de la

Cour de Justice de l’Union europØenne, et la conven tion de Lugano a ØtØ prØcisØ dans le

Protocole n°2 sur l’interprØtation uniforme de la onvention.

26
Convention concernant la compØtence judiciaire etl’exØcution des dØcisions en matiŁre ercialeet comm
conclue à Lugano le 16 septembre 1988 (Annexe I.1)

4094. Le prØambule du Protocole n°2 dispose que :

« Les Hautes Parties contractantes,

Vu l’art. 65 de la prØsente convention [selon lequel les protocoles font partie
intØgrante de la Convention],

ConsidØrant le lien substantiel qui existe entre ce tte convention et la convention de
Bruxelles,

ConsidØrant que la Cour de justice des CommunautØseuropØennes a ØtØ reconnue
compØtente par le protocole du 3 juin 1971 pour sta tuer sur l’interprØtation des
dispositions de la Convention de Bruxelles,

En pleine connaissance des dØcisions rendues par la Cour de justice des
CommunautØs europØennes sur l’interprØtation de laConvention de Bruxelles

jusqu’au moment de la signature de la prØsente conv ention,

ConsidØrant que les nØgociations qui ont conduit àla conclusion de cette convention
ont ØtØ fondØes sur la Convention de Bruxelles à lla umiŁre de ces dØcision,s

Soucieuses, dans le plein respect de l’indØpendancedes tribunaux, d’empŒcher des
interprØtations divergentes et de parvenir à une in terprØtation aussi uniforme que

possible, d’une part, des dispositions de la prØsete convention ainsi que, d’autre part,
de ces dispositions et de celles de la convention de Bruxelles qui sont reproduites en
substance dans cette convention.

27
Sont convenues de ce qui suit : (…)» (la Belgique souligne).

er
95. L’article 1 du Protocole n°2 dispose ensuite que les tribunaux de chaque Etat contractant

doivent tenir dßment compte, lors de l’interprØtato i n et l’application de la convention de

Lugano, des dØcisions rendues par les tribunaux desautres Etats contractants au sujet de la
convention de Lugano :

« Les tribunaux de chaque Etat contractant tiennent dßment compte, lors de
l’application et de l’interprØtation des dispositin os de la prØsente convention, des
principes dØfinis par toute dØcision pertinente red nue par des tribunaux des autres

Etats contractants concernant des dispositions de ladite convention » (la Belgique
souligne).

27
Protocole n°2 de la convention de Lugano sur l’interprØtation uniforme de la Convention (Annexe I.2)

4196. L’article 2 du Protocole n°2 instaure un systŁme d’Øchange d’informations concernant

les dØcisions rendues en application des convention s de Lugano et de Bruxelles (v. supra, §

69 et s.), tandis que les articles 3 et 4 instituent le ComitØ permanent et en dØfinissent les

fonctions.

97. En outre, lors de la signature de la convention de Lugano, les reprØsentants des Etats

signataires membres de l’Association europØenne delibre-Øchange ont fait une dØclaration
relative à l’interprØtation de la convention de Luano qui se lit comme suit :

« (...) dØclarent qu’ils considŁrent appropriØ que le rs tribunaux, en interprØtant la
convention de Lugano, tiennent dßment compte des principes contenus dans la
jurisprudence de la Cour de justice des CommunautØseuropØennes et des tribunaux

des Etats membres des CommunautØs europØennes rela ite aux dispositions de la
convention de Bruxelles qui sont reproduites en substance dans la convention de
Lugano. » 28

98. Il rØsulte de ce qui prØcŁde qu’est instaurØe uneifd fØrenciation dans la valeur des

dØcisions judiciaires, en fonction de l’instance jdiciaire dont elles Ømanent et en fonction de

la date à laquelle elles ont ØtØ rendues.

er
99. PremiŁrement, l’article 1 du Protocole n°2 oblige les tribunaux de chaque Etat
contractant à tenir dßment compte des dØcisions ren dues par les tribunaux d’autres Etats

contractants concernant la convention de Lugano. Cette obligation porte sur les dØcisions

judiciaires relatives à la convention de Lugano. Elle s’impose aux tribunaux de tous les Etats

contractants sans distinction, qu’ils soient ou non parties à la convention de Bruxelles.

100. DeuxiŁmement, la dØclaration faite par les Etats sg inataires membres de l’Association

europØenne de libre-Øchange considŁre a «ppropriØ» que les tribunaux de ces Etats « tiennent

dßment compte » des principes contenus « dans la jurisprudence de la Cour de Justice des

28
DØclaration des reprØsentants des gouvernements dse Etats signataires qui sont membres de l’Association
europØenne de libre-Øchange relative à l’interprØttiaon de la convention de Lugano (Annexe I.3)

42CommunautØs europØennes et des tribunaux des Etatsmembres » relative à la convention de

Bruxelles. Cette dØclaration porte donc sur les dØic sions relatives à la convention de

Bruxelles. Elle ne contient aucune restriction quant à la date à laquelle ces dØcisions ont ØtØ

rendues. Elle vise par ailleurs les dØcisions des tibunaux des Etats membres autant que celles

de la Cour de Justice de la CommunautØ europØennea(ujourd’hui l’Union europØenne).

101. Il ressort du rapport Jenard-Möller que cette dØcla ration avait ØtØ adoptØe, en sus du

Protocole n°2, parce que les Etats membres de la CommunautØ europØenne ne pouvaient pas

engager la Cour de Justice, qui est une institution distincte, de tenir compte de la

jurisprudence des tribunaux des Etats membres de l’AELE. Dans ces circonstances, les Etats

membres de l’AELE considØraient qu’il ne serait pastout à fait Øquitable d’insØrer, dans le

Protocole, une disposition prØvoyant expressØment u qe les tribunaux de ces Etats devaient
29
tenir compte Øgalement de la jurisprudence de la Co ur de Justice . C’est la raison pour
er
laquelle, comme le relŁve le rapport Jenard-Möller,l’article 1 du Protocole n°2 « ne vise pas

expressØmentles dØcisions relatives à l’application et à l’ine trprØtation de la convention de
30
Bruxelles qui sont reproduites en substance dans la convention de Lugano » (italiques

d’origine).

102. Le Protocole n°2 rØserve en outre une place particu liŁre aux dØcisions de laCour de

Justice de l’Union europØenne (alors la Cour de Justice de s CommunautØs europØennes)

portant sur la convention de Bruxelles et qui ont ØtØ rendues jusqu’au moment de la signature

de la convention de Lugano. C’est ce qui ressort du prØambule du Protocole n° 2 :

« En pleine connaissance des dØcisions rendues par la Cour de justice des
CommunautØs europØennes sur l’interprØtation de laConvention de Bruxelles

jusqu’au moment de la signature de la prØsente conv ention,

ConsidØrant que les nØgociations qui ont conduit àla conclusion de cette convention

ont ØtØ fondØes sur la Convention de Bruxelles à la lumiŁre de ces dØcision,s» (la
Belgique souligne).

29Rapport Jenard et Möller sur la convention de Lugano concernant la compØtence judiciaire etin descuo

30cisions en matiŁre civile et commerciale (AnnexeI.64-116.
Loc. cit., §114, premier alinØa.

43Il en rØsulte que les dØcisions de la Cour de Jusctie des CommunautØs europØennes relatives à

la convention de Bruxelles et qui ont ØtØ renduesujsqu’au moment de la signature de la

convention de Lugano (soit le 16 septembre 1988) dØ terminent, aux termes du Protocole,

l’interprØtation de la convention de Lugano. Le Pro fesseur Gaudemet-Tallon a ainsi pu Øcrire

qu’il ressort du Protocole n° 2 que « les interprØtations de la Convention de Bruxelles

donnØes par la Cour de Luxembourg avant le 16 septe mbre 1988 s’imposent dans

l’interprØtation de la convention de Lugano, et ceaussi bien devant les tribunaux des Etats de
31
l’AELE que devant ceux de l’Union europØenne » .

103. La Belgique relŁve enfin que le Tribunal fØdØral siu sse a, par le passØ, frØquemment

tenu compte de la jurisprudence de la Cour de Justice. Ainsi, dans un arrŒt du 20 aoßt 1998, le

Tribunal fØdØral a-t-il citØ la dØclaration des E ttasignataires membres de l’Association

europØenne de libre-Øchange, pour ensuite se rØfØ re la jurisprudence de la Cour de Justice

des CommunautØs europØennes et considØrer qu’il n’a yvait « aucune raison de ne pas suivre

cette ligne d’interprØtation aux fins de l’applicai ton, par le tribunal de cØans, de la
32
convention de Lugano » . Dans la ligne de cette approche, la Belgique montrera ci-aprŁs,

pour autant que de besoin, que dans le litige qui a donnØ lieu au prØsent diffØrend, les

juridictions suisses n’ont ØnoncØ aucune raison dene pas suivre l’interprØtation de la

convention de Lugano qui se dØgage notamment de lajurisprudence de la Cour de Justice de

l’Union europØenne.

2. L’objet et le but de la convention de Lugano

104. Le but de la convention de Lugano peut Œtre dØterm niØ tout d’abord au regard de son

prØambule qui dispose ce qui suit :

« Les Hautes Parties contractantes à la prØsente c onvention,

soucieuses de renforcer sur leurs territoires la protection juridique des personnes qui

y sont Øtablies,

31Voy. H. Gaudemet-Tallon, CompØtence et effet des jugements en Europe, 4 Ød., n° 489 et 490. La Belgique

32uligne.
ArrŒt du Tribunal fØdØral suisse du 20 aoßt 1BE 124 III 382 S. 383 (Annexe IV.1)

44 estimant qu’il importe à cette fin de dØterminer lacompØtence de leurs juridictions
dans l’ordre international, de faciliter la reconnaissance et d’instaurer une procØdure
rapide afin d’assurer l’exØcution des dØcision ,sdes actes authentiques et des

transactions judiciaires,

Conscientes des liens qui existent entre elles et qui ont ØtØ consacrØs dans le domaine

Øconomique par les accords de libre-Øchange conclusentre la CommunautØ
Øconomique europØenne et les Etats membres de l’As osciation europØenne de libre-
Øchange,

Prenant en considØration la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968
concernant la compØtence judiciaire et l’exØcutiondes dØcisions en matiŁre civile et
commerciale, telle qu’adaptØe par les conventions d ’adhØsion lors des Ølargissements

successifs des CommunautØs europØennes,

PersuadØes que l’extension des principes de cette c onvention aux Etats parties au
prØsent instrument renforcera la coopØration judic aiire et Øconomique en Europe,

DØsireuses d’assurer une interprØtation aussi unifr ome que possible de celui-ci,

Ont dØcidØ dans cet esprit de conclure la prØsentc eonvention et sont convenues des
dispositions qui suivent » (la Belgique souligne).

105. Il ressort de ce prØambule que la convention de Lug ano a pour but de renforcer la

protection juridique des particuliers. A cette fin, la convention vise, d’une part, à dØterminer

la compØtence des juridictions des Etats parties, t d’autre part, à faciliter la reconnaissance et

l’exØcution des jugements rendus dans les Etats par ties, c’est-à-dire, à favoriser la libre

circulation des jugements rendus par les juridictions des diffØrents Etats parties.

106. Le rapport sur la convention de Lugano prØparØ parMessieurs Jenard et Möller 33

indique dans le mŒme sens que les objectifs fondamn etaux de la convention de Lugano sont

l’attribution de garanties à un dØfendeur domiciliØ sur le territoire d’un Etat partie ainsi que la

libre circulation des dØcisions.

33
Rapport Jenard et Möller sur la convention concernant la compØtence judiciaire et l’exiscions ens dØ
matiŁre civile et commerciale faite à Lugano le 16septembre 1988, JOCE, 1990, C189/57 (Annexe I.6)

45Le rapport Jenard-Möller est un rapport explicatif Øtabli par Messieurs Jenard et Möller à

propos de la convention de Lugano. Il tient compte des observations prØsentØes par certains

gouvernements lors de la confØrence diplomatique aucours de laquelle la Convention fut

adoptØe, ainsi que des modifications apportØes au r pojet de convention au cours de cette

confØrence. Il se prØsente comme un commentaire dela convention signØe à Lugano le 16
septembre 1988.

107. Au-delà du but du traitØ en gØnØral, il y a lieu assi d’avoir Øgard au but spØcifique de

chacune de ses dispositions qu’il contient. C’est ainsi que dans l’affaire de la Barcelona

Traction, la Cour avait rejetØ une interprØtation d’une dip sosition conventionnelle au motif

notamment qu’« elle irait à l’encontre de l’intention du but de l’article » .

108. Ce principe d’interprØtation revŒt une importance ap rticuliŁre s’agissant de la

convention de Lugano qui traite de questions aussi diverses que la compØtence gØnØrale et

spØciale des juridictions des Etats contractants (ttre II, sections 1 à 7), de la litispendance et

de la connexitØ (titre II section 8), et de la recnnaissance et de l’exØcution des jugements

rendus par les juridictions des Etats contractants (titre III). Si elles relŁvent toutes de la

coopØration judiciaire, ces diffØrentes dispositios n de la convention de Lugano traitent de

questions distinctes du fonctionnement de la procØd ure en matiŁre civile et commerciale. Les

dispositions relatives à la litispendance et à la connexitØ mettent ainsi en jeu le but
fondamental d’Øviter des procØdures parallŁles etes l contrariØtØs de dØcisions qui pourraient

en rØsulter, alors que ce but spØcifique est Øtran egr aux matiŁres de la compØtence et de la

reconnaissance.

109. ConformØment à ce principe d’interprØtation, la Be glique aura Øgalement Øgard, dans

la suite du prØsent mØmoire, à l’objet et au but spcifiques des dispositions applicables dans le

cas d’espŁce.

34
Barcelona Traction, Light and Power Company, Limited, arrŒt, C.I.J. Recueil 197,0p.3, p. 34

46 3. L’interprØtation autonome des dispositions de la co nvention de Lugano

110. Il est un principe de l’interprØtation des traitØsque, s’il convient tout d’abord de

rechercher le sens ordinaire et naturel des termes utilisØ par les parties, ce sens ordinaire est

un sens international, et non un sens national des termes. Les dispositions d’un traitØ

international seront donc interprØtØes de maniŁreuatonome, soit indØpendamment des rŁgles
35
de droit interne du juge qui doit procØder à cetteinterprØtation .

111. Cette interprØtation internationale, indØpendante e ds rŁgles et concepts du droit interne

du juge qui procŁde à l’interprØtation, est le pend ant, en matiŁre de principes d’interprØtation,

du principe gØnØral de droit international selon lq euel un Etat ne peut se prØvaloir de son droit

interne pour justifier d’une violation du droit international. Ce principe est notamment

consacrØ par l’article 27 de la convention de Vienn e sur le droit des traitØs, selon lequel «Une

partie ne peut invoquer les dispositions de son droit interne comme justifiant la non-exØcution

d’un traitØ (…) » , article qui a par ailleurs ØtØ reconnu par la Corucomme Øtant le reflet d’une

rŁgle coutumiŁre , ainsi que par l’article 32 des articles sur la responsabilitØ des Etats pour

fait internationalement illicite adoptØs par la Com mission de droit international lors de sa

53 Łme session en 2001 , suivant lequel «l’Etat responsable ne peut pas se prØvaloir des

dispositions de son droit interne pour justifier un manquement aux obligations qui lui

incombent en vertu de la prØsente partie».

112. Pareille interprØtation autonome est particuliŁremn et importante en ce qui concerne

l’interprØtation de la convention de Lugano Øtant o dnnØ que cette derniŁre vise

essentiellement à unifier, au sein des Etats parties, les rŁgles de reconnaissance et d’exØcution

des jugements Øtrangers. Cette unification requiertque les diffØrents Etats parties s’entendent

sur l’interprØtation à donner aux termes utilisØs a pr la Convention. Cette interprØtation doit

donc nØcessairement Œtre internationale et autonomd ees Øventuelles interprØtations nationales

propres à chaque Etat. Afin d’« (…) d’assurer une interprØtation aussi uniforme que pos sible

35Voy. p. ex. R. Kolb, InterprØtation et crØation du droit internationa,lBruylant, 2006, p 425.
36Certaines questions concernant l’entraide judiciaire en matiŁre pØnale (Djibouti c. France), a, .I.J.
Recueil 2008, p. 177, §124.
37Projet d’articles sur la responsabilitØ de l’Etatpour fait internationalement illicite adoptØ par laCommission du
droit international à sa session en 2001.

47de [la Convention] (…) », ce qui constitue un des objectifs essentiels de la Convention et qui

figure dans son prØambule (v. supra, §104), il impo rte qu’aucun des Etats ne puisse prØtendre

lier les autres parties à un sens particulier qui dØcoulerait de l’utilisation d’un terme dans son

systŁme national. Ce n’est que de cette façon que la Convention se verra appliquØe de maniŁre

uniforme au sein des Etats parties.

113. En application de ce principe, il est admis que les notions utilisØes dans la convention

de Lugano doivent recevoir une interprØtation auton ome, au sens de la Convention, et non pas

fondØe sur le droit interne des Etats contractants.

114. C’est d’ailleurs ce qu’a confirmØ la Cour de justic e de l’Union europØenne dans son

arrŒtGourdain du 22 fØvrier 1979. La Cour de justice de l’UnioneuropØenne a jugØ dans cette

affaire « qu’il y a donc lieu de considØrer les notions utils iØes à l’article 1 comme des

notions autonomes qu’il faut interprØter en se rØfr Øant, d’une part aux objectifs et au systŁme

de la Convention, et d’autre part, aux principes gØ nØraux qui se dØgagent de l’ensemble des

systŁmes de droit nationaux» . L’importance particuliŁre de cet arrŒt ressort du prØambule

du Protocole n°2 de la Convention en vertu duquel, comme il a dØjà ØtØ indiqus Øupra (§101),

les dØcisions antØrieures à la conclusion de la Cov nention font partie intØgrante de cette

derniŁre pour les besoins de son interprØtation.

115. Cette interprØtation autonome de la convention de L ugano est rØguliŁrement rappelØe

par les juridictions des diffØrents Etats membres d e l’Union europØenne . La Cour de

cassation de Belgique considŁre de maniŁre gØnØralq eue

« l’interprØtation d’une convention internationale qu i a pour but l’unification du droit

ne peut se faire par rØfØrence au droit national de l’un des Etats contractants ; que si
le texte appelle une interprØtation, celle-ci doitse faire sur la base d’ØlØments propres
à la convention, notamment son objet, son but et son contexte, ainsi que ses travaux

38CJCE, Gourdain, arrŒt du 22 fØvrier 1979, aff. 1,ec. 1979, p. 733, point 3 (Annexe V.1)
39ArrŒt de la Cour fØdØrale allemaB(ndesgerichtshof) du 11 dØcembre 1996
(http://curia.europa.eu/common/recdoc/convention/fr/psystemat/0101.htm) ; ArrŒt de la Cour suprŒme
autrichienne (Oberster Gerichtshof) du 27 janvier 1998, n°18 et ArrŒt de r me autrichienn( berster
Gerichtshof) du 10 mars 1998, n° 23, tous les deux citØs dansle deuxiŁme rapport sur la jurisprudence des

tribunaux nationaux relative à la Convention de Lugano (Annexe IV.4

48 prØparatoires et sa genŁse ; qu’il serait vain d’Ø alborer une convention destinØe à

former une lØgislation internationale, si les jurid40tions de chaque Etat
l’interprØtaient suivant des notions propres à leur s droits » .

116. De mŒme, dans son arrŒt du 20 aoßt 1998, le Tribu al fØdØral suisse a considØrØ ce

qui suit :

« De la jurisprudence de la CJCE, il ressort que la notion de « matiŁre civile et
commerciale » de l’art. 1 al. 1 de la Convention de Bruxelles – disposition identique

à celle de la convention de Lugano – doit Œtre conisdØrØe comme une notion autonome
qu’il faut interprØter en se rØfØrant, d’une parta ,ux objectifs et au systŁme de la
Convention et, d’autre part, aux principes gØnØraux qui se dØgagent de l’ensemble des

systŁmes de droits nationaux (voir en particulier CJCE, arrŒt du 14 octobre 1976 LTU
c. Eurocontrol, aff. 29/76, Rec. 1976, p. 1541 ss, §3, p. 1550/51 et point 1 du
dispositif, p. 1552 ; CJCE, arrŒt Bavaria-Germanair du 14 juillet 1977, aff. 9 et 10/77,

Rec. 1977, p. 1517 ss, p.1525, §4 ; CJCE arrŒt Goud rain du 22 fØvrier 1979, aff.
173/78, Rec. 1979, p. 733 ss, p. 743, §3 ; CJCE, arrŒt Etat nØerlandais c. Rüffer du 16
dØcembre 1980, aff. 814/79, Rec. 1980, p. 3819, §7)(…). Il n’y a aucune raison de ne

pas suivre cette ligne d’interprØtation aux fins del’application, par le tribunal de
cØans, de la convention de Lugano. Le principal ava ntage de toute interprØtation
« autonome » d’un traitØ est d’Øviter l’insØcuritØ juridique consØcutive au simple
renvoi aux droits nationaux des parties contractantes (…). L’imprØvisibilitØ de

l’interprØtation qui en rØsulterait ruinerait la vlo ontØ manifestØe par les parties
contractantes d’assurer une interprØtation aussi un iforme que possible des deux
instruments » (la Belgique souligne). 41

42
Ces principes ont ØtØ rappelØs par le Tribunal fØrd al suisse dans des arrŒts postØrieurs.

117. Dans le litige qui a donnØ lieu au prØsent diffØre dn, cette exigence avait d’ailleurs ØtØ

reconnue par le Tribunal d’arrondissement de Zurich, dans son jugement du 29 septembre

2006 :

« Les notions de ‘faillites, concordats et autres procØdures analogues’ doivent
ici aussi Œtre interprØtØes de façon autonome. DŁ lsrs que la finalitØ de la
convention de Lugano consiste à Ølaborer une rØglem entation uniforme en

40Cour de cassation belge, 27 janvier 1977, Pas. 1977, I, p. 574 (Annexe IV.1)
41ArrŒt du Tribunal fØdØral suisse du 20 aoßt8,ol.124 III p.382-400 (Annexe IV.5). Voy. Aussi ArrŒt du
tribunal fØdØral suisse du 13 aoßt 1996, cie premier rapport sur la jurisprudence des tribunaux nationaux
relative à la Convention de Lugano (Annexe IV.3
42ArrŒt du Tribunal fØdØral suisse du 6 juin 2AF 129 III 683, citØ dans le septiŁme rapport sural
jurisprudence des tribunaux nationaux relative à la Convention de Lugano (Annexe IV.6 du Tribunal

fØdØral suisse du 15 dØcembre 2004, BGE 131 III,point 3.1 (Annexe IV.7)

49 matiŁre civile et commerciale, les dispositions dØo rgatoires doivent faire
l’objet d’une interprØtation rigoureuse» .43

118. En conclusion, il ressort de ce qui prØcŁde que l’n iterprØtation de la convention de

Lugano conformØment aux principes d’interprØtationdu droit des traitØs requiert qu’il soit

notamment tenu compte des principes d’interprØtatio n suivants :

- ConformØment au Protocole n°2 de la convention de L ugano, les dØcisions rendues
par la Cour de Justice des CommunautØs europØennes au sujet de la convention de

Bruxelles jusqu’à la date de signature de la convention de Lugano, dØterminent

l’interprØtation de la convention de Lugano. Confor mØment à ce mŒme Protocole,

les tribunaux des Etats parties doivent tenir dßment compte de la jurisprudence de

la Cour de Justice et des tribunaux des autres Etats parties concernant les

conventions de Bruxelles et de Lugano ;

- En interprØtant la convention de Lugano, il y a lieu d’avoir Øgard, non seulement à
l’objet et au but du traitØ dans son ensemble, mais aussi à l’objet et au but

spØcifique des dispositions ou de l’ensemble des ds ipositions qu’il comprend sur

des questions dØterminØes telles que la compØtence,la litispendance et la

connexitØ, ou la reconnaissance.

- Enfin, les dispositions de la convention de Lugano doivent faire l’objet d’une

interprØtation autonome, c’est-à-dire, indØpendante des rŁgles et concepts du droit

interne du juge procØdant à l’interprØtation.

119. La Belgique fera application de ces diffØrents prin cipes d’interprØtation dans la suite
du prØsent mØmoire.

43
Jugement du tribunal d’arrondissement de Zurich du 29 septembre 2006 (Annexe III.5), point III, D., 3., b, 3

50V. PARTIE V : DISPOSITIONS DE LA CONVENTION ET REGLES DU DROIT

INTERNATIONAL GENERAL VIOLEES PAR LA SUISSE

120. Comme il a dØjà ØtØ indiquØ, la Belgique a fait v oil dans sa requŒte que les violations

par la Suisse de ses obligations internationales envers la Belgique Øtaient de trois ordres :

- le refus de la Suisse de reconnaître les dØcisionsà rendre par les juridictions belges au
sujet de la responsabilitØ civile des Actionnairessuisses ;

- la dØcision de la Suisse de ne pas surseoir à staer en application de son droit interne,

au motif que la dØcision à rendre par les juridicti ns belges ne peut pas Œtre reconnue
en vertu de la convention de Lugano ;

- la dØcision de la Suisse de ne pas surseoir à stater en application de la convention de
Lugano.

Comme il a dØjà ØtØ indiquØ, la Belgique n’insistp elus dans le prØsent mØmoire sur ce

troisiŁme grief. Ce sont donc les deux premiers griefs qui seront analysØs successivement

dans la prØsente partie.

1. Non-reconnaissance de la dØcision belge à intervenr i en mØconnaissance des
articles 1 , alinØa 2, 2°, 16 (5), 26, alinØa 1 et 28, alinØa 1 de la convention de

Lugano

121. AprŁs avoir rappelØ les motifs de l’arrŒt du Tribu al fØdØral du 30 septembre 2008

fondant le refus de reconnaissance (a), la Belgique montrera ci-aprŁs qu’en matiŁre de

reconnaissance, est seule pertinente la nature des dØcisions belges dont la reconnaissance est

demandØe et non la nature de la procØdure suisse de contestation de l’Øtat de collocation (b).

La Belgique montrera ensuite que la reconnaissance ne peut Œtre refusØe sur la base de la

compØtence exclusive de la Suisse en matiŁre d’exØ uction (c) et enfin que le rØgime de

reconnaissance de la Convention s’applique Øgalemen t aux pronostics de reconnaissance (d).

La Belgique conclura que par la dØcision de ses trb i unaux, selon laquelle la dØcision à rendre
par les juridictions belges ne sera pas reconnue en application de la convention de Lugano, la

Suisse a mØconnu ladite Convention.

51 a. La dØcision du Tribunal fØdØral

122. Dans son arrŒt du 30 septembre 2008 , le Tribunal fØdØral a apprØhendØ la question de

la reconnaissance sous l’angle de la comparaison entre la situation purement interne et la

situation internationale. Le Tribunal relŁve que dans un cadre purement interne, « une

procØdure pendante au moment de la dØclaration deafillite, concernant des demandes de

collocation devient, au cas oø le procŁs est continuØ (art. 63 par. 3 OAOF ), une procØdure

de collocation conformØment à l’article 250 LP, eten consØquence, le juge civil devient juge

de collocation et le jugement un jugement de collocation » . Or, selon le Tribunal fØdØral,

lorsque le juge civil saisi du litige est Øtranger,« la reconnaissance [du] jugement Øtranger en
47
tant que jugement de collocation doit Œtre rejetØ» e . La solution s’explique, selon le

Tribunal fØdØral, par le motif que,« eu Øgard à la convention de Lugano, il rØsulte du

principe de territorialitØ, que le juge en Suisse e st obligatoirement compØtent sur le plan

international pour la plainte de collocation – en raison de la nature de la procØdure ou du
48
droit en matiŁre d’exØcution du diffØrend ».

123. Ce motif pris du principe de territorialitØ avait d Øjà ØtØ abordØ dans l’arrŒt du 23 avril

2007. Dans cet arrŒt, le Tribunal fØdØral avait cs oidØrØ que seules les juridictions suisses

Øtaient compØtentes pour la plainte de collocationintroduite par les Actionnaires belges car

soit cette plainte Øtait exclue du champ d’applicai ton de la convention de Lugano en vertu de

son article 1 , alinØa 2, 2°, soit les juridictions suisses Øtain et exclusivement compØtentes en

vertu de l’article 16 (5) de la convention en vertu duquel sont seuls compØtents pour connaitre

de l’exØcution d’une dØcision, les tribunaux du liu ede l’exØcution de cette dØcision.

« 4.3.1. Aux termes de l’art. 1, § 2, al. 2 CL, les « faillites, concordats et procØdures
similaires » sont exclus du champ d’application de la Convention [le Tribunal se
rØfŁre à la jurisprudence de la Cour de Justice desCommunautØs europØennes] (...)

44
45ArrŒt du Tribunal fØdØral du 30 septembre 2008 (nnxe III.8)
Ordonnance du Tribunal fØdØral du 13 juillet 19sur l’administration des offices de faillite
46Annexe III.8, point 3.3.1
47Annexe III.8, point 3.3.3
48Annexe III.8, point 3.3.3

52 4.3.2 (…) Dans la doctrine, l’art. 16 al. 5 CL est parfois considØrØ comme exception à
l’art. 1, § 2, al. 2 CL, qui permet de conclure que la compØtence des tribunaux suisses

en matiŁre d’actions en contestation de l’Øtat de c ollocation dans le droit de la faillite
dØcoule quoi qu’il en soit de l’art. 16 al. 5 CL. ...)

4.3.3 (…) Il est dØcisif que, dans tous les cas, il rØsulte e d la nature procØdurale du

litige que le principe de territorialitØ s’applique et que la Suisse est
internationalement compØtente dans le cadre de la p rocØdure de collocation (...). La
Convention de Lugano n’offre aucune base conventionnelle permettant de limiter la

compØtence souveraine de l’administration suisse dela faillite (art. 245 LP) et de
soustraire l’ordonnance de collocation de celle-ci à un recours devant le juge suisse
de collocation (…) » .9

124. Dans son arrŒt du 30 septembre 2008, le Tribunal fd ØØral conclut ainsi à l’Øgard de la

question de la reconnaissance de la dØcision belge: « le jugement rendu en Belgique ne revŒt

pas en consØquence, à dØfaut d’une base lØgale, eu Øgard aux crØances de faillite, de

caractŁre obligatoire sur le plan matØriel pour lejuge de collocation suisse. Dans cette
50
mesure il ne peut pas Œtre dØterminant pour la sus ension de la procØdure de collocation» .

125. Ce faisant, la Suisse mØconnait la convention de Lu gano d’un double point de vue.

b. Les dØcisions belges à reconnaître sont ØtrangŁreà s la matiŁre de la faillite et
ne peuvent Œtre considØrØes comme exclues du cham d’application de l’article
26 par l’article 1 , alinØa 2, 2° de la convention de Lugano

126. Tout d’abord, les dispositions de la convention de Lugano relatives à la

reconnaissance des jugements Øtrangers ne peuvent Œ tre ØcartØes au motif que la procØdure

suisse de contestation de l’Øtat de collocation relŁveratide la matiŁre de la faillite au sens de

l’article 1, alinØa 2, 2° de cette Convention.

127. La nature d’une procØdure pendante dans l’Etat requ is, en l’espŁce la Suisse, est sans

incidence sur l’application des dispositions de la convention de Lugano relatives à la

reconnaissance des jugements Øtrangers. Seule compe t la nature des dØcisions dont la

49
50ArrŒt du Tribunal fØdØral suisse du 23 avrilAnnexe III.3)
Annexe III.8, point 3.3.4

53reconnaissance est demandØe, à savoir en l’espŁcee ls dØcisions belges. Cette nature doit Œtre

apprØciØe au regard d’une interprØtation autonomeedla convention de Lugano et non selon

les particularitØs du droit procØdural de l’Etat rqeuis.

128. En effet, selon l’article 26, alinØa 1 , de la Convention, « les dØcisions rendues dans

un Etat sont reconnues dans les autres Etats contractants, sans qu’il soit nØcessaire de

recourir à aucune procØdure » . L’alinØa 3 de la mŒme disposition prØvoit qu« e si la

reconnaissance est invoquØe de façon incidente deva nt une juridiction d’un Etat contractant,

celle-ci est compØtente pour en connaître » .

129. L’article 26, alinØa 1 , en ce qu’il dispose que les dØcisions sont reconn ues « sans

qu’il soit nØcessaire de recourir à aucune procØdue r», implique que la reconnaissance, au

sens de la Convention, est le fait pour un Etat « d’accepter d’insØrer dans son ordre juridique

la norme dont la dØcision est en quelque sorte pore tuse » . Il ne s’agit donc pas seulement de

donner effet à la dØcision ØtrangŁre dans le cadre d’une procØdure particuliŁre. Il s’agit de lui

donner effet, plus gØnØralement,dans l’ensemble de l’ordre juridique du for. La notion de

reconnaissance est donc plus large que celle d’autoritØ de chose jugØe. C’est ce qu’Ønonce

d’ailleurs le rapport Jenard :

« la reconnaissance doit avoir pour effet d’attribuer aux dØcisions l’autoritØ et 52
l’efficacitØ dont elles jouissent dans l’Etat danslequel elles ont ØtØ rendues » .

130. Ce rØgime de reconnaissance s’oppose à ce qu’une mŒ me dØcision rendue dans un Etat

contractant puisse Œtre reconnue dans un autre Etatcontractant dans le cadre d’une procØdure

donnØe (celle qui relŁve de la Convention), tout enn’Øtant pas reconnue dans le cadre d’une

autre procØdure, dans le mŒme Etat contractant.

51P. Gothot et D. Holleaux, La Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, ed. Jupiter, 1985, n° 247.
52Rapport Jenard sur la convention de Bruxelles concernant la compØtence judiciaire et l’exØdØcisionss

en matiŁre civile et commerciale,JOCE, 1979, C59/1, p. 43 (Annexe I.5)

54131. Pour l’application de l’article 26, alinØa 3, ilt dŁs lors sans pertinence que l’instance

au cours de laquelle la reconnaissance est invoquØe , relŁve ou non du champ d’application de

la Convention. Seule compte la nature de la dØcisio n dont la reconnaissance est demandØe. En

d’autres termes, mŒme si le juge est saisi d’une po rcØdure qui tombe en dehors du champ

d’application de la convention de Lugano, la question de reconnaissance d’un jugement

Øtranger qui, lui, relŁve de cette Convention, serasoumise à cette derniŁre.

132. Ainsi, dans son ouvrage de rØfØrence de 1997 sur laconvention de Lugano, Yves

Donzallaz, Ølu en 2008 juge au Tribunal fØdØral ss usie, Øcrivait-il dØjà que pour l’application

de l’article 26, alinØa 3,

« il est indiffØrent que l’instance au cours de laquelle la reconnaissance du jugement
Øtranger est invoquØe relŁve du champ d’application de la (Convention) » .53

Le Professeur Gaudemet-Tallon indique de mŒme que e l mØcanisme simplifiØ de

reconnaissance « joue lorsque le juge Øtranger a statuØ à titre pric nipal sur une question

relevant du domaine d’application des textes communautaires [convention de Bruxelles,

convention de Lugano et RŁglement Bruxelles I], mŒme s’il a alors dß prØalablement

trancher une question incidente qui Øchappait à leu r domaine, ou tenir compte d’un jugement
54
rØglant cette question» .

133. Pour les besoins de l’application des rŁgles relatives à la reconnaissance des jugements

Øtrangers, la restriction quant au champ d’applicai ton rationae materiae de la Convention
er
(article 1 ) suppose donc seulement que la dØcision ØtrangŁredont la reconnaissance est

demandØe relŁve du champ d’application de la Conven tion.

134. En outre, pour se prononcer sur l’applicabilitØ durØgime de reconnaissance organisØ

par la Convention, la dØcision ØtrangŁre doit Œta rpprØhendØe isolØment, sans avoir Øgard à

53Y. Donzallaz, La Convention de Lugano du 16 septembre 1988 concernant la compØtence judiciaire et

54exØcution des dØcisions en matiŁre civile erciale, Stämpfli, Bern, 1997, t. II, n° 2732.
En ce sens, voy. H. Gaudemet-Tallon, op. cit., n° 362.

55l’effet que pourrait avoir une procØdure subsØquen et d’insolvabilitØ. Entre ici en jeu, la

distinction entre la reconnaissance et la force exØ cutoire, d’une part, et l’exØcution

proprement dite, d’autre part. Seule cette derniŁre, dont relŁve la question de l’effet de la

procØdure d’insolvabilitØ, est soustraite au champ d’application de la Convention.

135. La doctrine la plus autorisØe confirme l’importancede cette distinction. Il y a, tout

d’abord, la question de la reconnaissance du jugement Øtranger, qui, comme il a ØtØ indiquØ,

implique « d’insØrer dans (l’) ordre juridique (d’un Etat) a l norme dont la dØcision est en

quelque sorte porteuse » , et celle de l’exØcution, qui consiste à lui donne r « force

exØcutoire »dans cet Etat . Ces questions relŁvent exclusivement du rØgime co nventionnel.

Et puis, il y a la question « d’exØcution proprement dite »de la dØcision sur le territoire de

l’Etat en question, question qui peut Œtre affectØp ear des rŁgles de droit national concernant le

paiement de la dette, l’interruption du droit de poursuite dans le cadre d’une mise en

liquidation, etc. .

136. Cette distinction cardinale se trouve au demeurant confirmØe par la jurisprudence de la

Cour de Justice de l’Union europØenne à laquelle leTribunal fØdØral devait avoir Øgard (v.
58
supra, §97 et 100). Dans son arrŒtCoursier du 29 avril 1999 , la Cour de Justice de l’Union

europØenne devait se prononcer sur le point de savo ir si une dØcision française de

condamnation pouvait encore Œtre exØcutØe au Luxem oubrg selon le rØgime de la convention

de Bruxelles malgrØ le fait que l’exØcution en Frac ne de cette dØcision Øtait paralysØe par la

mise en liquidation judiciaire du dØfendeur en Fran ce. Nonobstant cette mise en liquidation,

qui affectait le caractŁre exØcutoire de la condamn ation en France, la Cour de justice a jugØ

que la dØcision de condamnation relevait du champ d ’application de la convention de

Bruxelles et Øtait,« en tant que telle, susceptible de bØnØficier duØ rgime de reconnaissance et
59
d’exØcution » de la Convention . La Cour Øtablit une distinction entre le rØgime e d

reconnaissance et d’exØcution de la dØcision, qui s et soumis exclusivement au rØgime de la

convention de Bruxelles, et la question de « l’exØcution proprement dite » , qui reste soumise

55P. Gothot et D. Holleaux, op. cit., n° 247
56Voy. H. Gaudemet-Tallon, op. cit., n° 374.
5Idem, n° 443
58CJCE, Coursier, arrŒt du 29 avril 1999, Aff. C-267/97,Rec. 1999, p. I-02543 (Annexe V.3)
59ArrŒtCoursier, points 14 et 22

56au droit national du lieu d’exØcution, lequel peutle cas ØchØant prØvoir que la dØcision ne peut
60
plus Œtre exØcutØ «een raison du paiement de la dette ou d’un autre motif » , telle la mise en

liquidation du dØbiteur.

La Belgique relŁve qu’il ne ressort pas de la dØciison du Tribunal fØdØral que celui-ci ait eu

Øgard à cet arrŒt de la Cour de Justice. Plus spØ fiiuement, le Tribunal fØdØral n’a relevØ

aucune raison de s’Øcarter de cette dØcision de laCour de Justice dans le cas d’espŁce alors

qu’il se devait, conformØment aux principes d’inter prØtation sus-ØnoncØs, d’en tenir dßment

compte (v. supra, §97 et 100).

137. Ainsi, en l’espŁce, la circonstance qu’une procØdue r de concordat se dØroule en Suisse

peut affecter « l’exØcution proprement dite» en Suisse, pour des motifs liØs au droit interne

suisse de la faillite ou du concordat. Cependant, la convention de Lugano est applicable à la

question de la reconnaissance en Suisse de la dØcis ion à rendre par les tribunaux belges. Cette
dØcision se prononcera sur la responsabilitØ civiledes Actionnaires suisses à l’Øgard des

Actionnaires belges. Cette matiŁre relŁve indubitab lement du champ d’application de la

convention de Lugano dØfini de maniŁre gØnØrale à ’alrticle 1 , selon lequel « la convention

s’applique en matiŁre civile et commerciale et quelle que soit la nature de la juridiction ».

138. En d’autres termes, dŁs lors que, par hypothŁse, le juge belge reconnaîtrait la

responsabilitØ des Actionnaires suisses et les cond amnerait au paiement de dommages-

intØrŒts, cette dØcision devrait Œtre reconnue da lnsrdre juridique suisse.

139. En conclusion, les dØcisions belges ne peuvent donc pas Œtre considØrØes comme

exclues du champ d’application de l’article 26 par l’article 1 , alinØa 2, 2° de la Convention.

60
ArrŒtCoursier, points 24 et 28

57 c. Les dØcisions à intervenir dans la procØdure belgen’enfreignent en rien la
compØtence exclusive suisse en matiŁre d’exØcution des dØcisions

140. Selon le Tribunal fØdØral, « la reconnaissabilitØ d’un jugement Øtranger en tantque

jugement de collocation doit en effet Œtre rejetØ( e…). Eu Øgard à la convention de Lugano, il

rØsulte du principe de territorialitØ, que le jugen Suisse est obligatoirement compØtent sur le

plan international pour la plainte de collocation – en raison de la nature de la procØdure ou
61
du droit en matiŁre d’exØcution du diffØrend » .

141. Cette dØcision appelle des considØrations de deux r odres. La premiŁre se rapporte à ce

que le Tribunal fØdØral qualifie de « nature de la procØdure ou du droit en matiŁre
d’exØcution». La seconde a trait à la reconnaissance du jugement Øtranger «en tant que

jugement de collocation ».

142. PremiŁrement, la rØfØrence faite par le Tribunal f dØral à la «nature de la procØdure

ou du droit en matiŁre d’exØcution» fait Øcho à l’article 16 (5) de la convention deLugano

qui dispose ce qui suit :

« Sont seuls compØtents, sans considØration de domic li: (…)
5) en matiŁre d’exØcution des dØcisions, les tribuanux de l’Etat contractant du lieu de

l’exØcution».

143. Il ne rØsulte cependant aucunement de l’article 16(5) que la Suisse puisse refuser de
reconnaître les dØcisions à rendre par les juridicitons belges. Certes, l’article 16 (5) dispose

qu’en matiŁre d’exØcution des dØcisions, les tribuan ux de l’Etat contractant du lieu de

l’exØcution sont seuls compØtents, sans considØra oti de domicile. L’article 28, alinØa 1 , de

la Convention permet, quant à lui, la non-reconnaissance des jugements Øtrangers rendus en

violation, notamment, de la compØtence exclusive co nsacrØe par l’article 16 (5).

144. Cette disposition autorise donc le tribunal d’un Etat partie à refuser de reconnaître le

jugement d’un tribunal d’un autre Etat partie lorsque ce dernier jugement a ØtØ rendu en

61
Annexe III.8, point 3.3.3

58violation de la compØtence exclusive du premier Eta t partie en matiŁre d’exØcution. Ainsi, par

exemple, la mesure ordonnØe par un juge belge qui m ettrait en œuvre la saisie d’actifs en
Suisse ne pourrait pas Œtre reconnue en Suisse.

145. Or en l’espŁce, la procØdure en cours devant les ju ridictions belges ne porte pas sur la

matiŁre de l’exØcution des jugements. Elle porte sur le fond du litige entre parties, à savoir sur

la responsabilitØ contractuelle et extracontractuele des Actionnaires suisses qui relŁve de la

compØtence des juridictions belges en vertu des ari tcles 17 et 5 (3), de la Convention. Les

dØcisions à intervenir dans la procØdure belge n’ef nreignent donc en rien la compØtence

exclusive suisse en matiŁre d’exØcution des dØcisin os. Les juridictions suisses se devaient par
consØquent de reconnaître la dØcision belge à render à l’Øgard de la responsabilitØ des

Actionnaires suisses.

146. DeuxiŁmement, ce qui prØcŁde n’est pas affectØ palr a considØration par le Tribunal

fØdØral que la dØcision belge ne peut pas Œtre re ncnue « en tant que jugement de

collocation ».

147. Cette considØration semble signifier, ou pourrait signifier, que la dØcision du Tribunal

fØdØral s’expliquerait, non pas par un refus de reocnnaissance de la dØcision belge en Suisse,
mais par le refus, par le droit interne suisse, d’admettre que le juge belge puisse agir en qualitØ

de juge de collocation, comme cela se fait dans un cadre purement interne suisse oø, comme

le relŁve le Tribunal fØdØral, le juge civil devietnjuge de collocation et le jugement un

jugement de collocation (v. supra, §122).

148. Or sous cet angle Øgalement, la dØcision du Tribunla fØdØral est contraire à la

convention de Lugano.

149. En premier lieu, ce raisonnement dØtermine la portØ e de la Convention au regard du
droit interne suisse. Le Tribunal fØdØral considŁreen effet que, dans le contexte interne suisse,

59le juge saisi d’une demande quant au fond se transforme, le cas ØchØant, en juge de la

collocation. Il considŁre ensuite qu’une telle transformation est exclue s’agissant d’un juge
Øtranger. Et c’est sur la base de ces considØratiosn, entiŁrement axØes sur les spØcificitØs du

droit interne suisse, que le Tribunal fØdØral conc ult ensuite à la non-reconnaissance du

jugement belge à intervenir. Une telle interprØtato i n va manifestement à l’encontre de

l’exigence d’une interprØtation autonome de la Conv ention (v. supra, §110 et s.).

150. En second lieu, cette approche implique, en substance, que dŁs qu’une procØdure de

faillite s’ouvre en Suisse, toute dØcision ØtrangŁ erqui consacre les droits d’un crØancier

contre l’entreprise en faillite (par exemple, un jugement de condamnation) serait
automatiquement et entiŁrement privØe de tout effeten Suisse, mŒme dans ses aspects

purement civils de constatation de la crØance. Cetet approche est en opposition radicale avec

le principe sus-ØnoncØ que, pour les besoins de lareconnaissance, seule compte la nature de la

dØcision dont la reconnaissance est demandØe et nonla nature de la procØdure dans le cadre

de laquelle cette dØcision doit Œtre reconnue (vs.upra, §127).

151. A cet Øgard, le raisonnement du Tribunal fØdØral ne tient pas compte de l’arrŒt

Coursier prØcitØ de la Cour de Justice de l’Union europØen e, qui dØcide qu’une dØcision de
condamnation est, en tant que telle, susceptible de bØnØficier du rØgime de reconnaissance et

d’exØcution nonobstant la mise en faillite du dØbi etur (v. supra, §136). Le Tribunal fØdØral ne

respecte donc pas l’engagement pris par la Suisse de tenir dßment compte des arrŒts rendus

par la Cour de justice à l’Øgard de la convention d e Bruxelles. Contrairement encore aux

principes d’interprØtation applicables, le raisonnement du Tribunal fØdØral ne tient pas non

plus dßment compte de la jurisprudence d’autres Etats parties à la convention de Lugano (v.

supra, §97 et 100). Par exemple, dans un arrŒt du 13 avril1992, la Cour de cassation de

France avait ØtØ saisie d’un pourvoi contre un arrtŒqui avait admis la reconnaissance selon la
Convention de Bruxelles d’une dØcision de la Cour d ’appel d’Anvers condamnant une sociØtØ

française dØclarØe en faillite en France. Le pourvioinvoquait la violation de l’article 1 de la

Convention de Bruxelles ainsi que la compØtence exc lusive du tribunal français de la faillite

pour connaître des dettes d’une sociØtØ en liquida it n de biens. La Cour de cassation a rejetØ

le pourvoi au motif que « si l’article 1er de la convention de Bruxelles du27 septembre 1968

60exclut du champ d’application de celle-ci les faillites, concordats et autres procØdures

analogues, cette exclusion ne concerne que les actions qui dØrivent directement de la faillite

et s’insŁrent Øtroitement dans le cadre de la procd Øure collective ; tel n’est pas le cas de

l’action en paiement de fournitures ayant abouti, en l’espŁce, à la dØcision dont l’exequatur a
62
ØtØ accordØ, à juste titre, sur le fondement de lCaonvention prØcitØe ».

152. Ainsi, en refusant de reconnaître la dØcision belge « en tant que jugement de
63
collocation » , le Tribunal fØdØral mØconnait les principes rØg sint la reconnaissance des

dØcisions conformØment à la convention de Lugano etl’interprØtation autonome et

internationale de celle-ci. La question n’est pas de savoir si le juge belge peut devenir le juge

de la collocation suisse, à l’instar du juge suisse saisi d’une question de responsabilitØ civile

relative à une sociØtØ en liquidation. Au regard de la convention de Lugano, la question est de

savoir si la dØcision belge relative à la responsab ilitØ civile de SAirLines et SAirGroup doit

Œtre reconnue par les juridictions suisses qui rese tnt, par ailleurs, les seuls juges de la

collocation. Il s’agit donc de dØterminer si, commele Tribunal fØdØral l’Ønonce d’ailleurs au

paragraphe 3.3.4 de son arrŒt, «le jugement rendu en Belgique (…) revŒt (…)[un] caractŁre
obligatoire sur le plan matØriel pour le juge de collocation suisse » .

153. La dØcision du Tribunal fØdØral a d’ailleurs dØjà tØcritiquØe sous cet angle par la

doctrine suisse. Dans sa chronique de jurisprudence publiØe à la revue suisse de droit

international et europØen, le Professeur Ivo Schwan der considŁre ainsi que :

« 3. (..) Le jugement belge est un jugement sur le fond de la demande et qui, en tant
que tel, est bien Øvidemment et fondamentalement re connaissable et exØcutoire en
Suisse sur la base de la convention de Lugano. Cependant, ce jugement ne peut pas –

malgrØ la reconnaissance et le caractŁre exØcutoire en Suisse – Øgalement avoir pour
effet de donner automatiquement lieu à la collocation de la crØance. Cet effet, qui
relŁve fondamentalement du droit de l’exØcution, nepeut Œtre reconnu à la dØcision
belge au regard de sa propre portØe, c’est-à-dire u sivant le droit belge, et la dØcision

belge ne peut pas non plus produire en Suisse plus, ou d’autres, effets que ceux qu’elle
a suivant le droit belge. Face à ce constat, l’argumentation de grande puissance au
paragraphe 3.3.2 suivant laquelle l’action pendante à l’Øtranger ne pourrait pas

62Cour de cassation française, 13 avril 1992 (Annexe IV.2)
63
64Annexe III.8, point 3.3.3
Annexe III.8, point 3.3.4

61 affecter la compØtence souveraine du juge suisse dela collocation, ni soustraire la
collocation à la procØdure contradictoire devant les tribunaux suisses, dans la mesure
oø le juge belge n’a pas sursis à statuer et ne se soumet pas - comme on pouvait s’y

attendre - au droit suisse de la collocation, est dØpourvu de pertinence. Le juge belge
ne se prononce que sur la demande contre SAirlines en liquidation et ne prØtend pas
exercer de compØtence en matiŁre de collocation nidØcider d’une action paulienne.

Bien plus, c’est la masse faillie suisse et le tribunal fØdØral qui, en violation des traitØs
internationaux, nie la compØtence de la justice beg l e (…). La dØcision sur la
collocation, et plus spØcifiquement sur le moyen dedØfense tirØ de l’action paulienne,
revient indubitablement au juge suisse de la collocation. Cela n’empŒche qu’une

grande partie du litige est identique dans les deux procØdures, de sorte que le juge
suisse de la collocation est bel et bien obligØ, ds lors que la demande en rØparation
serait jugØe fondØe, de reconnaître à titre prØala lb la dØcision belge pour ce qui

concerne le fond de la demande (article 26 paragraphe 1 à 3 de la convention de
Lugano ; en admettant qu’il n’y ait pas de motif d’ordre public justifiant la non-
reconnaissance).

4. (…) La Suisse est, sur la base de la convention de Lugano, obligØe de reconnaître
les dØcisions belges et de les dØclarer exØcutoir.es Suite à la collocation, l’exØcution
forcØe a lieu en Suisse et le droit et la procØdurede collocation trouvent à
s’appliquer. Cela ne change cependant rien à la reconnaissabilitØ, à titre prØalable,

du jugement sur le fond de la demande dans le cadre de la procØdure de collocation (à
dØfaut de motif de droit public justifiant la non-r econnaissance) exØcutoire (…) En
refusant la sursØance, le tribunal fØdØral porte taetinte au systŁme fondamental voulu

par la convention de Lugano.

5. On ne peut pas cacher sa surprise de voir invoquØs, de façon peu convaincante, des
arguments de souverainetØ dans le seul but d’Øcartr epar avance un jugement sur le

fond qui doit Œtre reconnu en Suisse en applicationde la convention de Lugano. En
matiŁre de faillite, il semble se manifester une tendance dans laquelle le lobby des
curateurs suisses et des avocats suisses spØcialisØs en matiŁre de collocation veulent

voir consacrØes les compØtences suisses de façon etx ensives et exclusives mŒme alors
que cela va à l’encontre d’une coopØration internai tonale souhaitØe d’urgence. (…)»
65

154. En conclusion, le refus de reconnaître les dØcision s à rendre par les juridictions belges

dans le cadre de la procØdure de collocation suisseest contraire à la convention de Lugano.

65
Ivo Schwander, « Chronik - Rechtsprechung zum internationalen Sachen-, Schuld-, Gesellschafts- und
Zwangvollstreckungsrecht », R.S.D.I.E., 2009/3, p. 426-428 (Annexe VI.1).

62 d. Le rØgime de reconnaissance de la Convention s’appi lque Øgalement aux
pronostics de reconnaissance

155. Enfin, pour l’applicabilitØ de la convention de Lugano, il est sans pertinence que la

dØcision belge n’ait pas encore ØtØ rendue au mome toø le Tribunal fØdØral s’est prononcØ.

156. Certes, la reconnaissance ne peut bØnØficier qu’àue dØcision rendue. L’article 25 de

la Convention dispose à cet Øgard qu’ «on entend par dØcision, au sens de la prØsente

convention, toute dØcision rendue par une juridici n d’un Etat contractant quelle que soit la

dØnomination qui lui est donnØe, telle qu’arrŒt,gument, ordonnance ou mandat d’exØcution,

ainsi que la fixation par le greffier du montant des frais du procŁs ». La convention de

Lugano ne prØvoit pas, et ne pourrait pas prØvoir,qu’une dØcision qui n’a pas encore ØtØ

rendue puisse nØanmoins Œtre reconnue. Un tel mØciasnme serait en effet incompatible avec la
rŁgle que, selon le rØgime de la convention de Lugao, la reconnaissance peut Œtre refusØe au

regard de certaines donnØes intrinsŁques à la dØcisn. Ainsi, par exemple, l’article 27, §4, de

la Convention dispose-t-il que les dØcisions ne sot pas reconnues « si le tribunal de l’Etat

d’origine, pour rendre sa dØcision, a, en tranchantune question relative à l’Øtat ou à la

capacitØ des personnes physiques, aux rØgimes matr ioniaux, aux testaments et aux

successions, mØconnu une rŁgle de droit international privØ de l’Etat requis, à moins que sa

dØcision n’aboutisse au mŒme rØsultat que s’il av tafiait application des rŁgles du droit
international privØ de l’Etat requis». Ce motif de non-reconnaissance ne peut trouver à

s’appliquer qu’au regard des motifs de la dØcision concernØe, ce qui exclut d’emblØe la

reconnaissance de dØcisions non encore rendues.

157. Cela n’empŒche toutefois aucunement que le rØgimeedreconnaissance conventionnel

s’applique Øgalement aupronostic de reconnaissance auquel les tribunaux des Etats parties à

la Convention peuvent procØder comme facteur d’appr Øciation d’un sursis à statuer pour

connexitØ.

63158. Il ne s’agit pas alors de reconnaître une dØcisionnon encore rendue, mais de dire si

une dØcision,lorsqu’elle aura ØtØ rendu,esera, au regard des donnØes disponibles, susceptbi le
d’Œtre reconnue.

159. Dans un tel cas, les tribunaux des Etats parties sont dans l’obligation de procØder à ce

pronostic au regard de la Convention et de respecter les dispositions de celle-ci en matiŁre de

reconnaissance. Il s’agit aussi d’assurer ainsi l’effet utile de la Convention au moment oø la

reconnaissance du jugement Øtranger à intervenir sera effectivement sollicitØe.

160. Cette conclusion s’impose d’autant plus au regard du but de la convention de Lugano

qui consiste à favoriser la libre circulation des dØcisions de justice et à renforcer la protection
juridique des particuliers (v. supra, §105 et 106). Si les pronostics de reconnaissance rendus

par les tribunaux des Etats parties Øtaient sousits à la convention de Lugano, il en rØsulterait

une insØcuritØ juridique incompatible avec le but e d la Convention. Cette insØcuritØ serait

d’autant plus grande que le pronostic de reconnaissance nØgatif serait fort susceptible de

dØcourager les particuliers concernØs à demander u l rieurement la reconnaissance de la

dØcision rendue par le tribunal d’un autre Etat ptie.

161. L’article 26, alinØa 3, prØcitØ, de la Conventionrp voit d’ailleurs de maniŁre gØnØrale
que le juge est compØtent pour connaître de la dema nde de reconnaissance lorsque « la

reconnaissance est invoquØe de façon incidente » , sans restreindre les circonstances dans

lesquelles la question de reconnaissance se pose.

162. Or c’est à un pronostic de reconnaissance au regard de la convention de Lugano que le

Tribunal fØdØral a procØdØ en l’espŁce. Le Tribunfa ØldØral ne s’est nullement fondØ sur la

circonstance que la dØcision n’avait pas encore ØtØ rendue pour exclure l’applicabilitØ de la

convention de Lugano. Au contraire, le Tribunal fØd Øral a tenu son raisonnement comme si le
jugement belge avait dØjà ØtØ rendu, et que sa rec nnaissance Øtait d’ores et dØjà refusØe.

C’est ainsi que le Tribunal fØdØral a jugØ qu«ele jugement rendu en Belgique ne revŒt pas en

64consØquence, à dØfaut d’une base lØgale, eu Øgardux a crØances de faillite, de caractŁre

obligatoire sur le plan matØriel pour le juge de co llocation suisse ».

163. Au demeurant, mŒme si la dØcision de la Suisse need vait pas constituer une violation

de la convention de Lugano, cela n’affecterait pas le droit de la Belgique de soumettre à la

Cour la conformitØ de l’interprØtation du Tribunaf lØdØral à la convention de Lugano. La Cour

peut Œtre saisie, tant de diffØrends relatifs à l’paplication d’une convention, que de diffØrends
relatifs à son interprØtation. Un tel diffØrend petuexister en l’absence de toute violation du

traitØ. Le prononcØ du Tribunal fØdØral sur la no re-onnaissance des dØcisions belges à

intervenir peut donc, en tout Øtat de cause, fairel’objet d’un diffØrend devant la Cour relatif à

l’interprØtation de la convention de Lugano.

164. En conclusion, en dØcidant que la dØcision à rendre en Belgique ne sera pas reconnue
er
pour les besoins de la procØdure suisse, la Suissea mØconnu l’article 1 , alinØa 2, 2°, l’article
er er
16 (5), l’article 26, alinØa 1 et l’article 28, alinØa 1 de la convention de Lugano.

65 2. Refus de surseoir à statuer en application du droit interne suisse en violation du

droit international gØnØral

165. AprŁs avoir dans un premier point (a) rappelØ la ju risprudence de la Cour rappelant

l’obligation du droit international gØnØral d’un ee xrcice raisonnable de toute compØtence

Øtatique, notamment en matiŁre judiciaire, la Belgq iue montrera dans un deuxiŁme point (b)

que cette obligation du droit international gØnØraal ØtØ violØe par la Suisse, Øtant donnØ que le

Tribunal fØdØral a dØcidØ de ne pas surseoir à su tetr en application des rŁgles du droit interne

suisse en la matiŁre au regard du fait que la dØciison belge ne serait pas reconnue en Suisse.

Dans un troisiŁme point (c) la Belgique montrera, àtitre surabondant, que les considØrations

par lesquelles le Tribunal fØdØral a motivØ plus a ant son refus de surseoir à statuer au regard

de la nØcessitØ d’obtenir un jugement dans un dØlaaippropriØ, sont Øgalement incompatibles

avec l’exigence d’un exercice raisonnable de toute compØtence Øtatique.

a. Le principe du raisonnable que chaque Etat doit respecter dans l’exercice de

toute compØtence, notamment en matiŁre judiciaire

166. Le principe du raisonnable est consacrØ par la jurs iprudence internationale dans les

domaines les plus divers, et notamment dans l’exercice par un Etat de ses compØtences, en ce
compris sa compØtence judiciaire.

167. Dans l’affaire de la Barcelona Traction, la Cour avait dit que :

« (…) dans le domaine de la protection diplomatique comme dans tous le66autres
domaines, le droit international exige une application raisonnable » .

168. Dans son opinion individuelle jointe à cette mŒme f afaire, Sir Gerald Fitzmaurice

Ønonça plus spØcifiquement le principe du raisonnalb e dans l’exercice par un Etat de ses

compØtences judiciaires :

« Il est vrai qu’à l’heure actuelle le droit international n’impose aux Etats aucune

rŁgle rigide dØlimitant le domaine de leur compØtec ne nationale en pareilles matiŁres

66
Barcelona Traction, Light and Power Company,Limited, arrŒt, C.I.J. Recueil 197,0p.3, p. 48, par 93

66 [compØtences des institutions judiciaires nationale s dans le domaine des faillites de

sociØtØ](…), mais il leur laisse à cet Øgard une grande lai ttude. NØanmoins a) il
postule l’existence de limites, mŒme si dans tout a cs d’espŁce c’est au tribunal qu’il
incombe Øventuellement de les dØfinir aux fins de’laffaire dont il s’agit, et b) il impose

à tout Etat l’obligation de faire preuve de modØrai ton et de mesure quant à l’Øtendue
de la compØtence que s’attribuent ses juridictionsdans les affaires qui comportent un
ØlØment Øtranger et d’Øviter d’empiØter indßmentrslu a compØtence d’un autre Etat

quand celle-ci est m67ux fondØe ou peut Œtre exerc eØde façon plus appropriØe» (la
Belgique souligne) .

169. Dans l’affaire de l’interprØtation de l’accord entre l’OMS et l’Egype t, la Cour a

considØrØ que :

« ce qui est raiso68able et Øquitable dans un cas don nØ dØpend nØcessairement des
circonstances. ».

170. Dans l’affaire des ActivitØs militaires et paramilitaires au Nicaraguaet contre celui-ci

(Nicaragua c. Etats-Unis d’AmØrique,) se posait la question de la validitØ de la soudan i e

dØnonciation de la compØtence obligatoire de la Cor upar les Etats-Unis d’AmØrique. La Cour

a rappelØ à cette occasion « (…)la nØcessitØ de respecter, dans les relations inten rationales,
69
les rŁgles de la bonne foi et de la confiance(…) » et a jugØ que :

« (…) le droit de mettre fin immØdiatement à des dØ clarations de durØe indØfinie est
loin d’Œtre Øtabli. L’exigence de bonne foi paraîitmposer de leur appliquer par
analogie le traitement prØvu par le droit des traiØ t s, qui prescrit un dØlai raisonnable

pour le retrait ou la dØnonciation de traitØs ne rn efermant aucune clause de durØe»
70.

171. Dans l’affaire du filetage à l’intØrieur du Golfe de Saint-Lauren,t le tribunal arbitral a

tirØ enseignement de cette jurisprudence de la Cour:

« Le Tribunal relŁvera enfin que, à l’instar de l’exe rcice de toute compØtence
quelconque, l’exercice d’une compØtence de rØglementation esttoujours liØ par la

rŁgle du raisonnable, invoquØe par la Cour internaitonale de Justice dans l’affaire de

6Barcelona Traction, Light and Power Company,Limited, arrŒt, C.I.J. Recueil 197,0p.3, Opinion individuelle
de Sir Gerald Fitzmaurice, p. 105, par.70
6InterprØtation de l’accord entre l’OMS et l’Egypte,avis consultatif, C.I.J. Recueil 1980, p.73, p.96, par. 49
69ActivitØs militaires et paramilitaires au Nicaraguaet contre celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d’AmØirque),
compØtence et recevabilitØ, arrŒt, C. I.J. Rl 84, p. 392, §60
70
Idem, §63.

67 la Barcelona Traction lorsqu’elle a dØclarØ : "Lao cur estime que, dans le domaine de

la protection diplomatique comme dans tous les autres domaines, le droit
international exige une application raisonnable" (C.I.J., Recueil 1970, p. 48, par. 93).
Cette rŁgle commande à l’Etat de proportionner soncomportement au but lØgalement

poursu71i et en tenant dßment compte des droits et libertØs concØdØs à un autre
Etat » (la Belgique souligne).

172. Dans son avis du 8 juillet 1996 sur la licØitØ de la menace ou de l’emploi d’armes

nuclØaires , la Cour a constatØ l’absence de rŁgle autorisantou prohibant clairement la menace
72
ou l’emploi de l’arme nuclØaire sans en dØduire quecela Øtait dŁs lors autorisØ. La Cour a

jugØ notamment dans son dispositif qu’ «au vu de l’Øtat du droit international, ainsi que d es

ØlØments de fait dont elle dispose, la Cour ne peuc tependant conclure de façon dØfinitive que

la menace ou l’emploi d’armes nuclØaires serait lic ite ou illicite dans une circonstance

extrŒme de lØgitime dØfense dans laquelle la survd i’un Etat serait en cause ». De l’avis de la

Belgique, la Cour confirmait ainsi que la licØitØ ’ dune action, non autorisØe ni prohibØe en

termes gØnØraux par une rŁgle du droit internation lapublic, est susceptible de dØpendre des

donnØes concrŁtes de chaque cas individuel, jugØeà s l’aune du principe du raisonnable.

173. Dans leur opinion individuelle commune jointe à l’affaire du Mandat d’arrŒt du 11

avril 2000, les juges Higgins, Kooijmans et Buergenthal ont, selon la Belgique, fait

application du principe du raisonnable en considØra nt ce qui suit :

«Si, comme nous le pensons, un Etat peut choisir d’exercer une compØtence pØnale

universelle par dØfaut, il doit aussi veiller à ceque certaines garanties soient en place.
Celles-ci sont absolument essentielles pour prØvenr i les abus et faire en sorte que le
rejet de l’impunitØ ne compromette pas la stabilitØdes relations entre les Etats. (…)

Un Etat envisageant d’exercer l’action pØnale sur a l base de la compØtence
universelle doit d’abord donner à l’Etat de nationalitØ de la personne qui pourra Œtre
accusØe la possibilitØ de donner suite aux accusat oins en cause » .

71Affaire du Filetage à l’intØrieur du Golfe de Saint-Laurent, sentence arbitrale du 17 juillet 1986, R.S.A., vol.
XIX, p. 259, par. 54.
72LicØitØ de la menace ou de l’emploi d’armes nuaeis, avis consultatif, C.I.J., Recueil 1996, p. 226
73Mandat d’arrŒt du 11 avril 2000 (RØpublique dØmocaue du Congo c. Belgique), arrŒt, C. I. J. Recueli

2002, p.3, opinion individuelle des Juges Higgins, Kooijmans et Buergenthal, par. 59

68174. Cette exigence du droit international gØnØral est u a demeurant reconnue tant par la

Belgique que par la Suisse. Dans l’affaire du mandat d’arrŒt du 11 avril 2000,la Belgique a

ainsi dØclarØ :

« La Belgique ne prØtend pas que les Etats sont fondØ s à Ødicter n’importe
quelle lØgislation. Toute loi doit Œtre conforme a xurŁgles du droit international
qui lient l’Etat qui l’adopte, et dans le cas plus particulier d’une loi à caractŁre
74
extra-territorial, cette derniŁre doit Œtre raisonnble (..) »

175. La direction du droit international public du MinistŁre suisse des Affaires

ØtrangŁres estime Øgalement que

« (...) mŒme le droit international renferme un principe gn ØØral de la
proportionnalitØ» .75

176. Comme il est montrØ ci-aprŁs, la dØcision du Tribuan l fØdØral viole cette exigence du

droit international gØnØral.

b. Violation par la Suisse de cette obligation : le refus de surseoir à statuer au

motif que la dØcision belge ne sera pas reconnue

177. AprŁs avoir ØcartØ l’application des dispositionsedla convention de Lugano rØgissant

les procØdures parallŁles, le Tribunal fØdØral a a ex inØ s’il y avait lieu de surseoir à statuer,

dans l’attente de l’issue de la procØdure belge, enapplication du droit interne suisse. A cet

Øgard, le recours des sociØtØs suisses devant le T irunal fØdØral faisait valoir que la

suspension jusqu’à la fin de la procØdure belge, or donnØe par le tribunal supØrieur et

confirmØe par la Cour de cassation, engendrait un r etard injustifiØ de la procØdure de

collocation, alors que celle-ci doit en principe, selon le droit suisse, faire l’objet d’un
76
traitement accØlØrØ.

74 Contre-mØmoire du Royaume de Belgique dans l’affarie relative au mandat d’arrŒt du 11 avril 2000
(RØpublique dØmocratique du Congo c. Belgique) w.icj-cij.org/cijwww/cdecisions.htm.
75Note de la DDIP du 4 juillet 1996 citØe Lucilisch, « La pratique suisse en matiŁre de droit international
public 1996 », Revue suisse de droit europØen et international, p. 665
76
Annexe III.8, point 3.2 et point 3.4

69178. Dans ce contexte, le Tribunal fØdØral a considØrØue q le jugement belge n’Øtait pas

susceptible d’Œtre reconnu en Suisse et que, dans e ctte mesure, il ne pouvait pas Œtre

dØterminant pour la suspension de la procØdure deo cllocation :

« le jugement rendu en Belgique ne revŒt pas en consq Øuence, à dØfaut d’une base
lØgale, eu Øgard aux crØances de faillite, de cara tcre obligatoire sur le plan matØriel

pour le juge de collocation suisse. Dans cette mesure il ne peut pas Œtre dØterminant
pour la suspension de la procØdure de collocation» .77

Il ressort de ce considØrant que si le Tribunal fØdral avait estimØ que le jugement belge Øtait

susceptible d’Œtre reconnu, il aurait nØcessairemetnprocØdØ à la suspension de la procØdure.

C’est d’ailleurs en ce sens qu’avaient dØcidØ le Tibunal supØrieur et la Cour de cassation du

canton de Zürich.

179. Or, il a ØtØ montrØ ci-avant qu’en vertu de la con ention de Lugano, la Suisse doit

permettre la reconnaissance de la dØcision belge à intervenir (v. supra §126 à 164). Le

Tribunal fØdØral, pour parvenir à sa conclusion, se’st donc fondØ sur une considØration

contraire à la convention de Lugano.

180. Il n’est pas douteux qu’est contraire au principe du raisonnable et ainsi au droit

international gØnØral rØgissant l’exercice de touteompØtence Øtatique, notamment en matiŁre

judiciaire, l’exercice par un Etat d’une compØtencetrouvant son fondement dans son droit
interne, sur la base d’une considØration incompatible avec les engagements dudit Etat en vertu

d’une convention internationale.

181. En conclusion, en refusant pour le motif sus-ØnoncØ de sursoir à statuer en application

de son droit interne, la Suisse a violØ le principedu raisonnable que chaque Etat doit respecter

dans l’exercice de ses compØtences, notamment en ma tiŁre judiciaire.

77
Annexe III.8, point 3.3.4

70 c. A titre surabondant : le refus de surseoir à statuer au motif que la sursØance
serait incompatible avec l’obtention d’un jugement dans un dØlai appropriØ

182. Le Tribunal fØdØral, aprŁs avoir refusØ de surseoià r statuer au motif prØcitØ, a

considØrØ à titre surabondant que la pesØe des inrtŒ Øts en prØsence ne justifiait pas non plus

qu’il soit sursis à statuer. Plus spØcifiquement, a prŁs avoir prØcisØ que la suspension

demeurait dans ce cas de figure « limitØe aux exceptions les plus rares» , le Tribunal fØdØral

a jugØ que la demande de la sociØtØ suisse d’obter niun jugement dans un « dØlai appropriØ »

n’Øtait pas «compatible avec une suspension de la procØdure de c ollocation pendant de

nombreux mois voire des annØes» . Il a dŁs lors à nouveau conclu à la non suspension de la

procØdure.

183. Ce faisant, la Suisse a à nouveau mØconnu les exige nces du raisonnable en s’Øcartant

de son obligation d’exercer sa compØtence judiciair e de maniŁre notamment circonstancielle,

modØrØe et ØquilibrØe. Force est en effet de cont str que les motifs fondant la dØcision du

Tribunal fØdØral ne rØsistent pas à l’analyse.

184. PremiŁrement, le Tribunal fØdØral a refusØ de suro sier à statuer au regard du critŁre du

stade atteint dans la premiŁre procØdure. Le Tribun al a soulignØ à cet Øgard que « la

supposition que la procØdure belge sera probablemen t terminØe avant la procØdure de

collocation en Suisse ne change rien au fait qu’en Belgique, jusqu’à l’exØcution de la

procØdure principale, le prononcØ du jugement et le’xpØdition de celui-ci, de nombreux mois,

voire des annØes, s’Øcouleront probablement en par itulier si l’on devait en arriver à une
80
procØdure d’appel devant la Cour suprŒme belg» e .

185. Or, cette considØration est sans aucune pertinenceau regard des considØrations qui

doivent prØsider à tout jugement sur la sursØancen e matiŁre civile et commerciale, que ce soit

l’objectif d’Øconomie procØdurale ou celui d’Øvited res dØcisions contradictoires. Au regard

de chacun de ces objectifs, est seule pertinente la probabilitØ que, au vu du stade atteint dans

78Annexe III.8, point 3.4
79
80Annexe III.8, point 3.4.2
Annexe III.8, point 3.4.2

71la procØdure belge, le juge belge premier saisi seprononcera vraisemblablement avant le juge

suisse second saisi. DŁs lors que tel est le cas, la considØration retenue par le Tribunal fØdØral,

à savoir que de nombreux mois voire des annØes s’Øo culeront avant l’exØcution de la dØcision

belge, est dØpourvue de toute pertinence.

186. Il en va d’autant plus ainsi que la situation prØse nte une connexion beaucoup moins

Øtroite avec la Suisse qu’avec la Belgique dŁs lorsque le droit belge est applicable et que les
questions à trancher se rapportent au financement et à la gestion commune d’une sociØtØ

belge. Ces questions relŁvent d’ailleurs d’une extrŒme complexitØ comme en tØmoignent les

592 pages des derniŁres conclusions dØposØes devant la cour d’appel de Bruxelles et les

quelques 427 annexes que ces derniŁres contenaient.

187. DeuxiŁmement, pour justifier le refus de surseoir à statuer, le Tribunal fØdØral s’est

encore fondØ sur la circonstance que les procØduresd’exØcution forcØe et de faillite doivent

Œtre traitØes de maniŁre accØlØrØel: a procØdure de collocation doit Œtre instruite en la

forme accØlØrØe (art. 250 par. 3 LP). L’article 2a 5linØa 1 LP fixe le cadre des dispositions

cantonales en matiŁre de procØdure, en vertu de laq uelle les parties doivent Œtre assignØes à
81
bref dØlai» . Les seules dispositions de droit suisse applicables à ce type de procØdure sont

une disposition imposant au juge saisi dans une telle matiŁre, un devoir renforcØ d’accØlØrer la

procØdure ainsi qu’une disposition exemptant ce tir te de procØdure de l’obligation de tentative
de conciliation. Aucune autre disposition lØgale ne traite explicitement de ce type de

procØdure et leurs particularitØs dØpendent donc dle a jurisprudence et de la pratique des cours

et tribunaux. En raison de l’exigence de cØlØritØ u,ne sursØance à statuer ne devrait en principe

Œtre prononcØe que dans des cas exceptionnels et arp Łs que le juge a mis en balance, d’une

part, les raisons motivant un tel sursis et, d’autre part, le droit des parties à Œtre fixØes quant à

leurs droits dans un dØlai raisonnable.

188. Or, en l’espŁce, cette mise en balance ne justifiait pas raisonnablement le refus de

surseoir à statuer pour les raisons suivantes :

81
Annexe III.8, point 3.2

72 - PremiŁrement, toutes les questions soulevØes danse l cadre de la procØdure en faillite

ne sont pas traitØes de maniŁre accØlØrØe, notamm tenelles introduites par la masse

concordataire de SAirGroup mettant en cause la responsabilitØ des administrateurs de

la sociØtØ. Dans l’attente des dØcisions dans cesro pcØdures, aucun rŁglement dØfinitif

ne peut intervenir.

- DeuxiŁmement, le sursis à statuer dans le cadre d’une action en contestation de l’Øtat

de collocation ne suspend pas toute la procØdure decollocation ni mŒme la procØdure

de liquidation dans son ensemble. A l’Øgard des crØ anciers ne s’Øtant pas opposØs à

l’Øtat de collocation, le liquidateur peut, discrØ it nnairement, effectuer des

distributions partielles.

189. Dans son Øtude prØcitØe, le professeur Ivo Schwand res’est prononcØ dans le mŒme

sens :

« 4. (…) La Suisse est, sur la base de la convention de Lugano, obligØe de reconnaître

les dØcisions belges et de les dØclarer exØcutoir.es Suite à la collocation, l’exØcution
forcØe a lieu en Suisse et le droit et la procØdurede collocation trouvent à
s’appliquer. Cela ne change cependant rien à la reconnaissabilitØ, à titre prØalable,
du jugement sur le fond de la demande dans le cadre de la procØdure de collocation (à

dØfaut de motif de droit public justifiant la noneconnaissance) exØcutoire…

6. Si vraiment la levØe de la sursØance à statuer ’ na trait qu’à des considØrations
d’Øconomie procØdurale, la façon de procØder suiva ns’imposerait : au regard de la

dØcision belge sur le fond qui sera reconnaissableen Suisse, la procØdure suisse se
limite provisoirement aux autres questions en particulier l’action paulienne ; ensuite
viendra l’apprØciation de la reconnaissance prØalalb e de la dØcision belge.

De façon intØressante, le Tribunal fØdØral envisag ,eà la fin du considØrant 3.4.2,
comme seule hypothŁse que l’application des dispositions matØrielles du droit de la
collocation par le juge de la collocation pourrait mener à un rejet total ou partiel de

la demande de collocation ; il n’envisage pas que le juge belge pourrait rejeter la
demande sur le fond de sorte que la reconnaissance du jugement belge par le juge
suisse de la collocation pourrait le dispenser de se prononcer à l’issue d’une longue
procØdure.» 82

82Ivo Schwander, op. cit., p. 427-428 (Annexe VI.1)

73190. La Belgique conclut ainsi, à titre surabondant, que la Suisse a Øgalement mØconnu le

principe selon lequel toute compØtence Øtatique do tiŒtre exercØe de maniŁre raisonnable en
refusant de surseoir à statuer au regard de la mise en balance des intØrŒts en prØsence

contenue dans l’arrŒt du Tribunal fØdØral du 30 stembre 2008.

74PARTIE VI : CONSEQUENCES DE LA VIOLATION PAR LA SUISSE DE SES

OBLIGATIONS INTERNATIONALES ET REMEDES DEMANDES PAR LA
BELGIQUE

191. Les dØcisions des tribunaux suisses et plus spØcif qiuement l’arrŒt du Tribunal fØdØral

du 30 septembre 2008 sont imputables à la Suisse. Dans les parties prØcØdentes, la Belgique a

montrØ que, par cette dØcision, la Suisse a violØteviole ses obligations internationales

dØcoulant de la convention de Lugano et des rŁglesdu droit international gØnØral, applicables

au prØsent diffØrend.

192. ConformØment aux principes de responsabilitØ intera ntionale des Etats, aujourd’hui

codifiØs par les articles sur la responsabilitØ desEtats pour fait internationalement illicite

adoptØs par la Commission de droit international lo rs de sa 53Łme session en 2001 , tout fait

internationalement illicite, commis par un Etat, engage la responsabilitØ de cet Etat.

193. L’article 29 des Articles sur la responsabilitØ itrnationale de l’Etat dispose que :

« Les consØquences juridiques d’un fait internationae lment illicite prØvues dans la
prØsente partie n’affectent pas le maintien du devo ir de l’Etat responsable d’exØcuter

l’obligation violØe».

Le commentaire de la Commission du droit international relatif à cet article indique que :

« L’article 29 Ønonce le principe gØnØral selon lequ leles consØquences juridiques d’un
fait internationalement illicite n’affectent pas le maintien du devoir de l’Etat responsable

d’exØcuter l’obligation qu’il a violØe. Par suite u d fait internationalement illicite, un
nouvel ensemble de relations juridiques est Øtablientre l’Etat responsable et l’Etat ou les
Etats auxquels l’obligation internationale est due. Cela ne signifie pas que la relation

juridique prØexistante Øtablie par l’obligation pr miaire disparaît. MŒme si l’Etat
responsable respecte l’obligation prØvue dans la de uxiŁme partie de mettre fin au
comportement illicite et de rØparer intØgralementelprØjudice causØ, il n’est pas dispensØ
84
de ce fait de son devoir d’exØcuter l’obligation qu’il a violØe» .

83Projet d’articles sur la responsabilitØ de l’Etatpour fait internationalement illicite adoptØ par laCommission du
droit international à sa session en 2001.
84Rapport de la Commission du droit international sur les travaux de ssession, 23 avril – 1 juin et 2
juillet – 10 aoßt 2001, doc. A/56/10, p. 231

75194. Par consØquent, les obligations qui sont en jeu dan s le prØsent diffØrend n’ont pas

disparu à la suite de leur violation par la Suisse. La Suisse reste tenue par ses obligations qui
dØcoulent de la convention de Lugano et des princip es de droit international gØnØral, en ce

compris dans le litige pendant devant ses tribunaux qui est à l’origine du prØsent diffØrend.

195. IndØpendamment de ce qui prØcŁde, peut se poser lq auestion de savoir si le refus de la

Suisse de surseoir à statuer et de permettre la reconnaissance de la dØcision des juridictions

belges sur la responsabilitØ civile des Actionnaires suisses, constitue un fait instantanØ ou un

fait continu.

196. A cet Øgard, l’article 14 des Articles sur la respo nsabilitØ internationale des Etats
distingue ce qui suit :

« 1. La violation d’une obligation internationale par le fait de l’Etat n’ayant pas un
caractŁre continu a lieu au moment oø le fait se produit, mŒme si ses effets perdurent.
2. La violation d’une obligation internationale par le fait de l’Etat ayant un caractŁre

continu s’Øtend sur toute la pØriode durant laquee ll le fait continue et reste non
conforme à l’obligation internationale ».

197. La qualification de fait continu dØtermine l’applic abilitØ de l’obligation de cessation
du fait illicite. L’article 30 de ces mŒmes Artice Ønonce à cet Øgard :

« L’Etat responsable du fait internationalement illicite a l’obligation :

a. d’y mettre fin si ce fait continue
b. d’offrir des assurances et des garanties de non-rØp Øtition appropriØes si les

circonstances l’exigent. »

198. En l’espŁce, la Belgique est d’avis que les faits illicites reprochØs à la Suisse dans le

prØsent diffØrend constituent des faits continus.

199. Il en va tout d’abord ainsi du refus de la Suisse de surseoir à statuer dans l’attente de la

dØcision à rendre par les tribunaux belges. Suite àla dØcision du Tribunal fØdØral du 30

septembre 2008, la question de la responsabilitØ cv i ile des Actionnaires suisses est
actuellement dØbattue devant les juridictions suiss es. Les juridictions suisses ne sursoient

76donc pas à statuer sur cette question dans l’attente de la dØcision à rendre par les juridictions

belges. Ceci constitue un fait continu, alors mŒmequ’il trouve son origine dans la dØcision du
Tribunal fØdØral du 30 septembre 2008.

200. Il en va de mŒme, ensuite, du refus de la Suisse depermettre la reconnaissance de la

dØcision à rendre par les juridictions belges sur a l responsabilitØ civile des Actionnaires

suisses. Comme il a ØtØ relevØ ci-dessus, ce refursØsulte de la dØcision du Tribunal fØdØral du

30 septembre 2008, rendue dans le cadre d’un pronostic de reconnaissance. Le Tribunal

fØdØral a ainsi dØcidØ que la dØcision belge, qu eellue soit la date à laquelle elle sera rendue,

ne sera pas reconnue. Ce refus de reconnaître la future dØcision belge est de nature continue.

201. Ceci Øtant, la question de savoir si les faits illiites de la Suisse constituent des faits

continus ou instantanØs est, dans la prØsente espŁ e, sans incidence pratique.

202. A supposer que ces faits soient instantanØs plutôtque continus, il n’en demeurerait pas

moins que les procØdures devant les juridictions su isses dans le cadre desquelles interviennent

les violations du droit international par la Suisse, sont toujours en cours à la date du dØpôt du

prØsent mØmoire. Dans cette mesure, il pourrait eno cre utilement Œtre sursis à statuer, et la

Suisse pourrait encore permettre la reconnaissance de la dØcision à rendre par les juridictions
belges.

203. Par consØquent, si par hypothŁse l’obligation de laSuisse de surseoir à statuer et de

permettre la reconnaissance de la dØcision à rendrepar les juridictions belges ne devait pas

trouver son fondement dans l’obligation de cessation, cette mŒme obligation trouverait son

fondement dans la rØparation en nature, conformØmetnau principe consacrØ par la Cour

permanente dans l’affaire de l’Usine de Chorzów :

« la rØparation doit, autant que possible, effacer to utes les consØquences de l’acte
illicite et rØtablir l’Øtat qui aurait vraisemblelment existØ si ledit acte n’avait pas ØtØ

77 commis. Restitution en nature, ou, si elle n’est pas possible, paiement d’une somme
correspondant à la valeur qu’aurait la restitution en nature » .

204. Sur ces bases, la Belgique est donc en droit de rØc lamer – que ce soit au titre de la

cessation ou au titre de la rØparation en nature –que la Suisse permette la reconnaissance de la

dØcision à rendre par les juridictions belges sur a l responsabilitØ civile des Actionnaires

suisses, et que les tribunaux suisses sursoient à statuer dans l’attente de cette dØcision des

juridictions belges.

205. Sans prØjudice de l’obligation de la Suisse d’assur er le respect de ses obligations

internationales par tout moyen appropriØ, la Belgiq ue relŁve que la voie la plus idoine

d’assurer ledit respect consiste en l’espŁce dans l’action des juridictions suisses.

206. Afin de faciliter cette mise en conformitØ des fais t de la Suisse à ses obligations

internationales, mais sans prØjudice de l’obligation de la Suisse d’assurer ledit respect par tout

moyen appropriØ, la Belgique envisagera en temps op portun d’introduire une demande de

reconnaissance devant les tribunaux suisses.

207. A cet Øgard, il a dØjà ØtØ relev supra (§49) qu’il rØsulte des dispositions transitoires

de l’article 63 de la nouvelle convention de Lugano que si l’arrŒt de la cour d’appel de

Bruxelles devait Œtre rendu aprŁs le 31 dØcembre 2 10, sa reconnaissance en Suisse serait

rØgie par la nouvelle Convention.A contrario, si l’arrŒt de la cour d’appel de Bruxelles Øtait

rendu avant le 1 janvier 2011, sa reconnaissance en Suisse resterait rØgie par la convention

de Lugano de 1988.

Il peut Œtre relevØ que la nouvelle convention deu Lgano contient des dispositions identiques

ou analogues à celles de la Convention de 1988 que la Suisse a mØconnues par l’arrŒt du

Tribunal fØdØral du 30 septembre 2008. Ainsi :

85
Usine de Chorzów, fond, C.P.J.I., sØrie A, n°17 (1928), p. 47.

78 - L’article 1 , §2, b) de la nouvelle Convention exclut de son champ d’application

les « faillites, concordats et autres procØdures analogue s », dans les mŒmes
er
termes que l’article 1 , §2, 2° de la Convention de 1988 ;

- L’article 22, §5, de la nouvelle Convention dispose que « sont seuls compØtents,

sans considØration de domicile: en matiŁre d’exØcu itn des dØcisions, les

tribunaux de l’Etat liØ par la prØsente conventiondu lieu de l’exØcution». Mis à

part l’utilisation des termes « Etat liØ par la prØsente convention » au lieu d’ « Etat

contractant », cette disposition est identique à l’article 16, §5, de la Convention de

1988 ;

er
- L’article 33, §1 , de la nouvelle Convention dispose que « les dØcisions rendues

dans un Etat liØ par la prØsente convention sont rc eonnues dans les autres Etats

liØs par la prØsente convention, sans qu’il soit ncØ essaire de recourir à aucune

procØdure » . A nouveau, exception faite de l’utilisation des termes « Etat liØ par la

prØsente convention» au lieu d’ « Etat contractant », cette disposition est
identique à l’article 26, alinØa 1 , de la Convention de 1988 ;

er
- L’article 35, §1 , de la nouvelle Convention dispose que « .. les dØcisions ne sont

pas reconnues si les dispositions des sections 3, 4 et 6 du titre II ont ØtØ

mØconnues, ainsi que dans le cas prØvu à l’article68 ». La section 6 du titre II

comprend l’article 22, §5, prØcitØ, qui est le pena dnt de l’article 16, §5, de la
er
Convention de 1988. L’article 35, §1 , de la nouvelle Convention a ainsi la mŒme
portØe que l’article 28, alinØa 1, de la Convention de 1988.

Le cas ØchØant, il appartiendra à la Suisse, confom r Øment à son obligation de prendre toute

mesure appropriØe de maniŁre à mettre fin à son com portement illicite ou d’accorder

rØparation à la Belgique, de faire application des dispositions pertinentes de la nouvelle

convention de Lugano.

Ceci n’empŒche, comme il a dØjà ØtØ indiquØ prØm cØmdent, que la Cour est appelØe à juger

du prØsent diffØrend au regard de la Convention de 1988 ainsi que des obligations de la Suisse

79en vertu du droit international gØnØral, mØconnuepsar la dØcision du Tribunal fØdØral du 30

septembre 2008.

80VI. PARTIE VII : CONCLUSIONS ET DEMANDES

1. Conclusions

208. Compte tenu de ce qui prØcŁde, la Belgique Ømet lec sonclusions suivantes :

1. Etant donnØ que le prØsent diffØrend intervient da snle cadre de l’interprØtation et de

l’application de la convention de Lugano concernant la compØtence judiciaire et

l’exØcution des dØcisions en matiŁre civile et comm erciale du 16 septembre 1988, qui

ne contient pas de clause de rŁglement des diffØren ds, la compØtence de la Cour est

Øtablie sur la base de l’article 36§2 du Statut dela Cour en application duquel tant la

Belgique que la Suisse ont dØclarØ reconnaître laujridiction obligatoire de la Cour,

ainsi que sur la base de la Convention europØenne p our le rŁglement pacifique des

diffØrends, faite à Strasbourg le 29 avril 1957

2. La requŒte de la Belgique ne vise en aucun cas à so umettre à la Cour le litige qui
oppose les Actionnaires belges aux Actionnaires suisses et qui est à l’origine de

l’actuel diffØrend entre la Belgique et la Suisse.La Belgique demande à la Cour de

juger le comportement des juridictions suisses dans le contexte de ce litige et la

conformitØ de ce comportement avec les obligationsinternationales de la Suisse telles

que celles-ci dØcoulent de la convention de Lugano et des principes de droit

international gØnØral.

3. En dØcidant que la dØcision belge à intervenir dansla procØdure introduite par les

Actionnaires belges en Belgique ne sera pas reconnue dans le cadre de la procØdure de
er
collocation suisse, le Tribunal fØdØral a mØconnues l articles 1 , alinØa 2, 2°, 16 (5),
26, alinØa 1 et 28 de la convention de Lugano.

814. En refusant de surseoir à statuer en application du droit interne suisse au motif que la

dØcision belge ne serait pas reconnue en Suisse, leTribunal fØdØral a violØ l’exigence
qui incombe à chaque Etat d’exercer ses compØtences Øtatiques de maniŁre

raisonnable, y compris en matiŁre judiciaire. En effet, est contraire au principe du

raisonnable et ainsi au droit international gØnØralrØgissant l’exercice de toute

compØtence Øtatique, notamment en matiŁre judiciae i, l’exercice par la Suisse d’une

compØtence trouvant son fondement dans son droit in terne, sur la base d’une

considØration incompatible avec ses engagements en vertu de la convention de

Lugano.

5. Le Tribunal fØdØral a Øgalement violØ l’obligatiod ne chaque Etat d’exercer ses

compØtences Øtatiques de maniŁre raisonnable, y com pris en matiŁre judiciaire, en

refusant de surseoir à statuer en application du droit interne suisse au motif qu’une

suspension de la procØdure n’Øtait pas compatibleaec la demande de la sociØtØ suisse

d’obtenir un jugement dans un dØlai appropriØ dŁsolrs que, selon le Tribunal fØdØral,

« la supposition que la procØdure belge sera probab lement terminØe avant la

procØdure de collocation en Suisse ne change rien a u fait qu’en Belgique, jusqu’à

l’exØcution de la procØdure principale, le prononcØ du jugement et l’expØdition de
celui-ci, de nombreux mois, voire des annØes, s’Øcu oleront probablement en

particulier si l’on devait en arriver à une procØre d’appel devant la Cour suprŒme

belge ». En effet, d’une part, la circonstance que la procdure en Belgique puisse

encore durer de nombreuses annØes est dØpourvue depertinence, la question Øtant de

savoir si elle se terminera vraisemblablement avant la procØdure suisse. D’autre part,

la Suisse ne saurait raisonnablement faire primer les exigences d’une procØdure

accØlØrØe sur les objectifs d’Øconomie procØdurae lt d’Øvitement de dØcisions
contradictoires, et ce pour deux motifs. PremiŁrement, toutes les questions soulevØes

dans le cadre de la procØdure en faillite ne sont pas traitØes de maniŁre accØlØrØe,

notamment celles introduites par la masse concordataire de SAirGroup mettant en

cause la responsabilitØ des administrateurs de laociØtØ. Dans l’attente des dØcisions

dans ces procØdures, aucun rŁglement dØfinitif neep ut intervenir. DeuxiŁmement, le

sursis à statuer dans le cadre d’une action en contestation de l’Øtat de collocation ne

suspend pas toute la procØdure de collocation ni mŒ me la procØdure de liquidation

82 dans son ensemble. A l’Øgard des crØanciers ne s’Ø antt pas opposØs à l’Øtat de

collocation, le liquidateur peut, discrØtionnaireme nt, effectuer des distributions
partielles.

6. La dØcision du Tribunal fØdØral est imputable à lS auisse. La Suisse a donc violØ ses

obligations internationales qui dØcoulent de la convention de Lugano et des principes

de droit international gØnØral. La responsabilitntiernationale de la Suisse est engagØe.

7. La Suisse doit mettre fin à cette situation illicite en prenant toutes les mesures

appropriØes afin d’assurer que la dØcision belge vio t ses pleins et entiers effets

reconnus sur le territoire suisse et que la procØdre en Suisse, quant à la demande en
responsabilitØ civile des Actionnaires suisses, sot i suspendue dans l’attente de la

dØcision belge. Ce n’est que par de telles mesuresque les droits de la Belgique seront

garantis et que les objectifs essentiels de la convention de Lugano seront respectØs, à

savoir, la libre circulation des jugements et la sØ curitØ juridique de tous les

justiciables.

83 2. Demandes

209. Pour les motifs ci-dessus, ainsi que pour les motifs prØsentØs par sa RequŒte
introductive d’instance du 21 dØcembre 2009, la Beg l ique, tout en se rØservant le droit de

complØter ou modifier le prØsent mØmoire et de fon urr à la Cour de nouvelles preuves et de

nouveaux arguments juridiques pertinents dans le cadre du prØsent diffØrend, prie

respectueusement la Cour de dire et juger que :

1. la Cour est compØtente pour connaître du diffØrendqui oppose le Royaume de

Belgique et la ConfØdØration suisse en ce qui concrene l’interprØtation et l’application

de la Convention de Lugano concernant la compØtencejudiciaire et l’exØcution des

dØcisions en matiŁre civile et commerciale du 16 sp etembre 1988 ainsi que des rŁgles

du droit international gØnØral rØgissant l’exercicpear les Etats de leurs compØtences,
notamment en matiŁre judiciaire;

2. la demande de la Belgique est recevable ;

3. pour l’application des dispositions de la convention de Lugano relatives à la

reconnaissance des jugements Øtrangers, il est indf ifØrent que la procØdure pendante

dans l’Etat requis relŁve ou non du champ d’application de la convention de Lugano.

L’Etat requis doit permettre la reconnaissance des jugements Øtrangers dŁs lors que

ceux-ci relŁvent du champ d’application de la convention de Lugano ;

4. la Suisse, par la dØcision de ses tribunaux de dire pour droit que la dØcision à

intervenir en Belgique sur la responsabilitØ contra ctuelle et extracontractuelle des
sociØtØs SAirGroup et SAirLines à l’Øgard de l’Eta btelge et des sociØtØs Zephyr-Fin,

S.F.P. et S.F.I. (fusionnØes depuis lors pour devenir la SFPI) ne sera pas reconnue en

Suisse dans le cadre des procØdures de collocation des sociØtØs SAirGroup et

SAirLines, mØconnaît la Convention de Lugano et, no tamment, ses articles 1 , alinØa

2, 2°, 16 (5), 26, alinØa 1t 28 ;

84 5. la Suisse, en refusant de surseoir à statuer en application de son droit interne dans les

litiges opposant l’Etat belge et les sociØtØs Zephry-Fin, S.F.P. et S.F.I. (fusionnØes

depuis lors pour devenir la SFPI) aux masses des sociØtØs en liquidation concordataire

SAirGroup et SAirLines, au motif notamment que la dØcision à intervenir en Belgique

sur la responsabilitØ contractuelle et extracontrac tuelle des sociØtØs SAirGroup et
SAirLines à l’Øgard de l’Etat belge et des sociØtØs Zephyr-Fin, S.F.P. et S.F.I.

(fusionnØes depuis lors pour devenir la SFPI) ne se ra pas reconnue en Suisse dans le

cadre des procØdures de collocation des sociØtØs SiA rGroup et SAirLines, viole la

rŁgle du droit international gØnØral suivant laqul el toute compØtence Øtatique,

notamment en matiŁre judiciaire, doit Œtre exercØd ee maniŁre raisonnable ;

6. la responsabilitØ internationale de la Suisse esngagØe ;

7. la Suisse doit prendre toute mesure appropriØe de m aniŁre à permettre que la dØcision
des tribunaux belges sur la responsabilitØ contracu t elle et extracontractuelle des

sociØtØs SAirGroup et SAirLines à l’Øgard de l’Eta btelge et des sociØtØs Zephyr-Fin,

S.F.P. et S.F.I. (fusionnØes depuis lors pour devenir la SFPI) soit reconnue en Suisse

pour les besoins de la procØdure de collocation dessociØtØs SAirLines et SAirGroup ;

8. la Suisse doit prendre toute mesure appropriØe de m aniŁre à ce que les tribunaux

suisses sursoient à statuer dans les litiges opposant l’Etat belge et les sociØtØs Zephyr-

Fin, S.F.P. et S.F.I. (fusionnØes depuis lors pourdevenir la SFPI) aux masses des
sociØtØs en liquidation concordataire SAirGroup etSAirLines, dans l’attente de la fin

de la procØdure pendante devant les tribunaux belge s sur la responsabilitØ

contractuelle et extracontractuelle des sociØtØs SAirGroup et SAirLines à l’Øgard des

premiŁres parties citØes.

210. La Belgique se rØserve le droit de faire valoir tou t moyen de droit et argument

supplØmentaire à l’occasion des plaidoiries orales.

85211. ConformØment à l’article 41 du Statut et à l’articl 73 du RŁglement, la Belgique se

rØserve le droit de demander à la Cour d’indiquer d es mesures conservatoires, suivant

l’Øvolution des procØdures actuellement pendantesn eSuisse et en Belgique.

Le 23 novembre 2010,

Paul RIETJENS

Agent du Gouvernement du Royaume de Belgique,

Directeur gØnØral des Affaires juridiques
Service public fØdØral Affaires ØtrangŁres,
Commerce extØrieur et CoopØration au DØveloppement

86 Liste des annexes

I. Textes conventionnels, protocoles, dØclarations etrapports explicatifs

1. Convention concernant la compØtence judiciaire et ’ lexØcution des dØcisions en
matiŁre civile et commerciale conclue à Lugano le 16 septembre 1988

2. Protocole n°2 de la convention de Lugano sur l’interprØtation uniforme de la
Convention

3. DØclaration des reprØsentants des gouvernements des Etats signataires de la
convention de Lugano qui sont membres de l’Association europØenne de libre-
Øchange relative à l’interprØtation de la convenode Lugano

4. DØclaration des reprØsentants des gouvernements des Etats signataires de la
convention de Lugano membres des CommunautØs europØ ennes

5. Rapport Jenard sur la convention de Bruxelles concernant la compØtence judiciaire et

l’exØcution des dØcisions en matiŁre civile et comerciale

6. Rapport Jenard et Möller sur la convention de Lugano concernant la compØtence
judiciaire et l’exØcution des dØcisions en matiŁeivile et commerciale

7. Liste des Etats parties à la Convention de Lugano figurant sur le site du Gouvernement
suisse, dØpositaire de la Convention

8. Projet d’ordre du jour de la rØunion du ComitØ perm anent de la convention de Lugano
des 13 et 14 septembre 2010, Øtabli par le Gouvernment suisse

9. ProcŁs-verbal de la rØunion du ComitØ permanent de la convention de Lugano des 13

et 14 septembre 2010 (version originale en anglais et traduction vers le français)

10. Convention concernant la compØtence judiciaire et ’ lexØcution des dØcisions en
matiŁre civile et commerciale, conclue à Lugano le30 octobre 2007

II. ProcØdure interne belge

1. Citation du 3 juillet 2001

2. Citation du 2 novembre 2001

3. ArrŒt de la cour d’appel de Bruxelles, 19 mai 2005

87III. ProcØdure interne suisse

1. Ordonnance de rejet des liquidateurs de SAirLines du 18 juillet 2006 et traduction vers
le français

2. Plainte administrative des Actionnaires belges du 31 juillet 2006 et traduction vers le
français

3. ArrŒt du Tribunal fØdØral suisse du 23 avril 2007 t teraduction vers le français

4. RequŒte en contestation de l’Øtat de collocation du 8 aoßt 2006 et traduction vers le
français

5. Jugement du tribunal d’arrondissement de Zurich du 29 septembre 2006 et traduction
vers le français

6. Jugement du tribunal supØrieur du canton de Zurichdu 2 mars 2007 et traduction vers
le français

7. ArrŒt de la Cour de cassation de Zurich du 15 novem bre 2007 et traduction vers le

français

8. ArrŒt du Tribunal fØdØral du 30 septembre 2008 ertatduction vers le français

IV. Jurisprudence des Etats membres

1. ArrŒt de la Cour de cassation belge du 27 janvier 1 977

2. ArrŒt de la Cour de cassation française du 13 avril1992

3. ArrŒt du tribunal fØdØral suisse du 13 aoßt 1996,itØ c dans le premier rapport sur la

jurisprudence des tribunaux nationaux relative à la Convention de Lugano

4. ArrŒt de la Cour suprŒme autrichienne du 27 janvie 1r998 et ArrŒt de la Cour suprŒme
autrichienne du 10 mars 1998, n° 23, tous les deux citØs dans le deuxiŁme rapport sur
la jurisprudence des tribunaux nationaux relative à la Convention de Lugano

5. ArrŒt du Tribunal fØdØral suisse du 20 aoßt 1998

6. ArrŒt du Tribunal fØdØral suisse du 6 juin 2003,tØ ci dans le septiŁme rapport sur la

jurisprudence des tribunaux nationaux relative à la Convention de Lugano

7. ArrŒt du Tribunal fØdØral suisse du 15 dØcembre 2 400

88V. Jurisprudence de la Cour de justice des communautØseuropØennes

1. ArrŒt de la Cour de justice de l’Union europØenne a( lors Cour de justice des

CommunautØs europØennes) du 22 fØvrier 1979, arrŒ Gturdain

2. Conclusions de l’avocat gØnØral Reischl dans l’afre Gourdain

3. ArrŒt de la Cour de justice de l’Union europØenne a( lors Cour de justice des
CommunautØs europØennes) du 29 avril 1999, arrŒ Ctoursier

VI. Divers

1. Extraits de l’article du professeur Ivo Schwander et traduction vers le français

Łme
2. ProcŁs verbal de la sØance du ComitØ permanent, 16 sØance, Fribourg, 7 et 8
septembre 2009

3. Note verbale de l’Ambassadeur de Belgique auprŁs de la ConfØdØration suisse au

MinistŁre suisse des Affaires ØtrangŁres

4. Note verbale du MinistŁre suisse des Affaires ØtrgŁres à l’Ambassade de Belgique

auprŁs de la ConfØdØration suisse

89

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Mémoire de la Belgique

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