Observations écrites de la Norvège (traduction fournie par cet État)

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Traduction non officielle

Cour internationale de Justice

Conformité au droit international de la déclaration
unilatérale d'indépendance des institutions

provisoires d'administration autonome du Kosovo
(Requête pour avis consultatif)
L

OBSERVATIONSECRITESDUROYAUMEDENORVEGE

6 juillet 2009 Introduction

1. En vertu de l'ordonnance du 17 octobre 2008 de la Cour, le Royaume de
Norvège présente les observations écrites suivantes à propos des exposés écrits

déposés par d'autres Etats à la Cour concernant la requête d'avis consultatif sur la
question de la « Conformité au droit international de la déclaration unilatérale

d'indépendance des institutions provisoires d'administration autonome du Kosovo».
Par l'ordonnance susmentionnée, la Cour a :fixéau 17juillet 2009 la date d'expiration
du délai dans lequel les Etats et organisations peuvent présenter ces observations

conformément au paragraphe 4 de l'article 66 du Statut

Observations générales

2. Plusieurs Etats ont exposé de manière approfondie leurs points de vue sur des

questions relatives aux principes d'intégrité territoriale et de droit à
l'autodétermination.

3. A cet égard, la Norvège est généralement d'accord avec tous les Etats qui ont
souligné l'importance de ces deux principes, y compris avec l'Egypte. Par 1
conséquent, en vertu du droit international, la Norvège ne peut accepter la

proposition faite par la République islamique d'Iran,qui-semble en fait soutenir que
le principe de souveraineté territoriale est le seul fondement de la Charte des
Nations Unies et qu'il prévaut à tous égards sur tout autre principe du droit

intemational.2

4. La N01.~ège souligne que les principes de souveraineté, d'intégrité territoriale

et de droit à l'auto-détermination sont des principes qui doivent être considérés en
parallèle, comme l'a affirméjustement le Secrétaire général des Nations Unies,
M. Boutros-Ghali, dans son rapport Agenda pour la paix de 1992. 3 La Norvège

rappelle dans ce contexte ses observations préliminaires :figurantaux paragraphes 4
à8 de son exposé écrit du 16avril2009.

5. La Norvège partage l'opinion extrêmement restrictive exprimée dans de
nombreux exposés écrits présentés àla Cour au sujet de l'existence d'un quelconque ·
droit de sécession en droit international.4

,
1Exposé écrit de l'Egypte, 16avril 2009,p. 13,paragraphe 51,et p. 19,paragà74.es 72
2Exposé écrit de la République islamique d'Iran, 17avril 2009,voir en particulier p. 3, paragraphe 2.1,et
pp.6-7paragraphe 4.1.
3A/47 /277-S/2411117 juin1992Agenda pourlapaix-Diplomatiepréventive,rétablissemendtelaaix,

maintiendelapaix, rapport présenté par le Secrétaire général en application de la déclaration adoptée
par la Réunion au sommet du Conseil de sécurité le 31janvier 1992,paragrà19.s 17
4Cette position est notamment confirmée dans l'exposé écrit de la Fédération de Russie, 16 avril 2009,pp.
31-32,paragraphes 87 et 88.

2 6. La Norvège ne voit donc pas de raison de faire de commentaires ou de

manifester son désaccord à propos de plusieurs déclarations faites, entre autres, par
laRépublique de Chypre et l'Espagne qui présentent peut-être un intérêt particulier
dans d'autres contextes.

7. La Norvège relève cependant qu'aucune des questions ci-dessus, ni les

questions sur la reconnaissance, n'ont été soulevées par l'Assemblée générale des
Nations Unies dans sa requête d'avis consultatifadressée à laCour. Commel'énonce
le paragraphe 9 de l'exposé écrit du 16avril2009de laNorvège, la question précise

posée par l'Assemblée générale concerne le fait de savoir si la proclamation de la
déclaration d'indépendance du Kosovo le 17 février 2008 est en contradiction avec
une quelconque règle applicable du droit international.

8. La Norvège observe également, dans ce contexte, qu'aucune discussion
générale du principe d'autodétermination ne semble nécessaire pour répondre à la
question. La résolution 1244(1999)du Conseilde sécurité stipule dans son article 1 :

« Décide que la solution politique de la crise au Kosovo reposera sur les

principes généraux énoncés à J'annexe 1 et les principes et conditions plus
détaillésfigurant àl'annexe 2 ;.»
L
Les deux annexes mentionnées font référence à la néc~ssitéde tenir «pleinement

compte des Accords de Rambouillet», comme le fait également l'article 11 de la
résolution. Les Accords de Rambouillet avaient explicitement identifié la « volonté
du peuple » du Kosovo comme étant l'un des facteurs clés faisant partie du
fondement de l'examen d'un règlement définitifpour le Kosovo :

«Trois ans après l'entrée en vigueur du présent Accord, une réunion
internationale sera convoquée en vue de définir un mécanisme pour un
règlement définitifpour le Kosovo,sur la base de la volonté du peuple, del'avis

des autorités compétentes, des efforts accomplispar chacune des Parties dans
la mise en Œuvre du présent Accord, et de l'Acte final de Helsinki, ainsi que
pour réaliser une évaluation d'ensemble de la mise en Œuvre du présent Accord

et d'examiner les propositions de mesures complémentaires formulées par les
Parties. »

Il ne fait donc pas ou peu de doute que cette référence explicite à la «volonté du
peuple» du Kosovo confirmait l'existence d'un large éventail d'options. Celles-ci

devaient en l'occurrence être examinées par le mécanisme compétent établi
conformément à la résolution 1244 du Conseil de sécurité en vue de diriger le
processus politique-de détermination du statut futur du Kosovo, en ayant à l'esprit

son importance fondamentale pour la paix et la sécurité internationales. Dans ce

5
6Résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité, Annexe 1,point six, et Annexe 2, article 8.
Accord intérimaire pourla paix et l'autonomie au Kosovo, Rambouillet, 23 février 1999,chapitre 8,
article I alinéa 3 (Document ONU S/1999/6juin1999,p. 85~.

3 contexte, la Norvège se permet d'observer que ceci non seulement confirme que les
considérations générales concernant le principe d'autodétermination n'entraient pas

dans le cadre de la question posée à la Cour, mais permet aussi de souligner plus
encore les circonstances et le contexte particuliers régnant au Kosovo.

Considérations relatives aux circonstances particulières régnant au Kosovo

9. La Norvège rappelle qu'elle ne considère pas que la déclaration d'indépendance
du 17 février 2008 ait été proclamée par l'Assemblée du Kosovo agissant à titre
organique en qualité d'institution provisoire d'administration autonome. Ce point

était expliqué aux paragraphes 13 à 15 de l'exposé écrit de la Norvège du 16 avril
2009, où il était fait référence à la formé, au contenu, aux circonstances et au
contexte énoncé de l'adoption de la déclaration. La déclaration a plutôt été

interprétée par la Norvège comme une déclaration proclamée par des dirigeants
politiques dont l'objet explicite était d'exprimer la volonté de leur peuple.

10. Dans ce contexte, la Norvège a pris bonne note de l'exposé écrit de la Serbie.

En référence à l'adoption de la déclaration unilatérale d'indépendance, la Serbie a
déclaré que :

«Les 'auteurs' de la déclaration unilatérale d'indépendance sont des membres

de l'Assemblée du Kosovo qui ont adopté le document le 17février 200 8.

Cette référence aux «membres de l'Assemblée »,c'est-à-dire un nombre indéterminé

d'individus, est une reconnaissance factuelle de ce qui précède. La déclaration n'a
pas été proclamée, en tant que telle, par l'Assemblée agissant en une quelconque
qualité organique. Incidemment, il convient de noter que la déclaration a également

été signée par d'autres individus de premier plan, à savoir le président et le premier
ministre.

11. La Norvège souhaite d'autre part évoquer la contribution écrite du Kosovo, qui
8
contient une reproduction photographique du document original. Avec les
traductions fournies, celle-ci confirme sans ambigüité que ni les auteurs ni le
document ne prétendaient consacrer les pouvoirs organiques des institutions

provisoires d'administration autonome du Kosovo, telles que mentionnées dans la
résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité et le Cadre constitutionnel de 2001.Au
contraire, la déclaration présente plusieurs caractéristiques communément associées

avec, par exemple, des déclarations politiques extraordinaires émanant d:assemblées
constituantes.

12. La Norvège rappelle en outre que la résolution 1244 du Conseil de sécurité ne

prend pas position sur le problème du statut final du Kosovo. Cette question a été

7Exposé écrit du Gouvernement de la République serbe, 15avril 2009, p. 25, paragraphe 17.
8Contribution écrite de la République du Kosovo, 17avril 2009,Annexe 1, pp. 207à209.

4 confiée au processus politique destiné à déterminer le statut futur du Kosovo. Il
convient à cet égard de se reporter aux constats dressés dans le rapport de !'Envoyé

spécial du Secrétaire général, qui ont été analysés dans l'exposé écrit dela Norvège.9
Bien que la République slovaque ait laissé entendre qu'à son avis,la résolution 1244
« semble présenter le cadre d'une autodétermination qui n'inclut pas
l'indépendance», elle reconnaît cependant que la « (r)ésolution 1244n'interdit pas
10
explicitement la sécession ni n'interdit aux Etats de reconnaître la sécession ». La
résolution 1244n'aborde pas non plus le problème de savoir si des représentants
démocratiquement élus peuvent faire une déclaration exprimant leur volonté quant
au statut finaldu Kosovo.n

13. A titre accessoire, il ya lieu également de se demander, indépendamment des
considérations ci-dessus, si la résolution 1244 aurait réellement pu imposer des
obligationsjuridiques internationales de cette nature à ces acteurs non étatiques, en
vertu des articles 25 et103 de la Charte des Nations Unies. Les Etats demeurent les

principaux sujets de droit international et ont les obligations juridiques évoquées
dans lesdites dispositions de la Charte. Bien que des individus puissent être tenus
responsables de violations du droit humanitaire international, et que certaines autres
règles juridiques internationales énonçant des obligations et des responsabilités

puissent s'appliquer directement aux individus, l'imposition de telles obligations et
responsabilités juridiquesllirectes en vertu du droit international à des acteurs non
étatiques est rigoureusement limitée. Ces obligations et ·responsabilités ne peuvent

être assumées sans fondement juridique clair.

Observations finales

14. Compte tenu du contexte ci-dessus et des interventions émanant d'un nombre
considérable d'Etats qui ont utilement présenté de manière plus approfondie les j
sources historiques et juridiques concernant les événements factuels en rapport avec
la situation examinée, la Norvège réaffirme les observations qu'elle avaitprésentées

dans son exposé écrit du 16avril 2009.

15. La Norvège compte sur la Cour pour faire preuve de toute la prudence
nécessaire lors de son examen des questions concernées. Un an et demi s'est écoulé
depuis la proclamation de la déclaration d'indépendance. La situation dans la région

évolue d'une manière qui laisse augurer un avenir de prospérité et de paix pour
toutes les populations de la région.

16. Cette région a longtemps été marquée par une impasse qui menaçait la paix et
la sécurité internationales. Des efforts considérables sont déployés par la

communauté internationale afin de maintenir la paix et la sécurité et de promouvoir

9Exposé écrit de la Norvège, 16 avril 2009,pp. 7-8,paragràp27, et Annexes 1et 2.
10Exposé écrit de la République slovaque, 16avril 2009,paragraphe 27.
11Exposé écrit de la Norvège, 16 avril 2009,p. 6, paragraphes 16 et 17.

5 le développement et le respect des droits de l'homme pour tous. Commel'énonce le
Décret royal du 28 mars 2008 qui est joint à l'exposé écrit de la Norvège, les
préoccupations fondamentales de la Norvège et sa démarche sont exclusivement

dictées par la nécessité de contribueà lapaix et la stabilité internationales dans la
région, ainsi qu'à la protection des droits de l'homme et autres garanties,
conformément au droitinternational.

Conclusion

17. Pour les raisons présentées dans le présent exposé, la Norvège se permet de
confirmer qu'elle prie la Cour de conclure que la déclaration d'indépendance
proclamée le 17février 2008n'est pas contraire àune quelconquerègle applicabledu

droit international.

Oslo,le 6juillet 2009 RolfEinar Fife
Directeur général
Département des affairesjuridiques
Ministère desAffairesétrangères

(Représentant du Royaumede
Norvège)

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