Déclaration de M. le juge ad hoc Guillaume

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150-20130418-ORD-01-01-EN
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DÉCLARATION DE M. LE JUGE AD HOC GUILLAUME

Demandes reconventionnelles — Connexité directe en fait et en droit avec les
demandes principales — Recevabilité.

1. La Cour, après avoir statué sur la recevabilité de la premièfre
demande reconventionnelle du Nicaragua, a déclaré irrecevables lesf

deuxième et troisième demandes reconventionnelles. Je n’ai pas fcru devoir
m’opposer à cette solution. Celle-ci ne m’en paraît pas moinfs marquer
une évolution de la jurisprudence qui me semble discutable pour les
motifs exposés dans la présente déclaration.
2. Selon l’article 80 du Règlement de la Cour, cette dernière « ne peut

connaître d’une demande reconventionnelle que si celle-ci relèvfe de sa
compétence et est en connexité directe avec l’objet de la demanfde de la
partie adverse». En l’espèce, la Cour a déclaré la deuxième et la trfoisième
demande reconventionnelle du Nicaragua irrecevables en l’absence de lfien
de connexité directe, sur les plans factuel et juridique, entre ces dfemandes

et les demandes principales du Costa Rica. Cette décision me paraît diffi -
cile à concilier avec la jurisprudence développée par la Cour dfans le passé.
3. La Cour a précisé à plusieurs reprises que son Règlement préfvoit la
possibilité de présenter des demandes reconventionnelles en cours fd’ins -

tance essentiellement afin « de réaliser une économie de procès tout
en permettant au juge d’avoir une vue d’ensemble des prétentions rfespec-
tives des parties et de statuer de façon plus cohérente » (Application
de la convention pour la prévention et la répression du crime de géno▯cide
(Bosnie-Herzégovine c. Yougoslavie), demandes reconventionnelles, ordon -

nance du 17 décembre 1997, C.I.J. Recueil 1997, p. 257, par. 30). Par
voie de conséquence, la recevabilité des demandes reconventionnelles esft
«fonction des buts ainsi poursuivis et sujette à des conditions propres
à prévenir les abus » (ibid.).
4. Dans cette perspective, la Cour, en vue d’assurer « une meilleure

administration de la justice » (ibid.), a recherché, dans plusieurs affaires,
si « le lien qui doit rattacher la demande reconventionnelle à la demande
principale est suffisant » (ibid., p. 258, par. 33). Elle a précisé qu’« en règle
générale le degré de connexité entre ces demandes doit êtfre évalué aussi
bien en fait qu’en droit » (ibid.). Dans la plupart des cas qui lui ont été

soumis, elle a jusqu’à présent estimé que cette connexitéf était établie.
5. Dans l’affaire concernant l’Application de la convention pour la pré -
vention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégov▯ine c. You -
goslavie), la Cour était saisie d’une requête de la Bosnie-Herzégovinfe
tendant à la condamnation de la Yougoslavie pour violation de la convfen -

tion des Nations Unies sur le génocide. La Yougoslavie saisit la Cour de

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6 CIJ 1045.indb 38 5/06/14 09:42 218 certaines activitésf; construction d’une rfoute (décl. guillaume)

conclusions reconventionnelles reposant sur « des faits de même nature »
et s’inscrivant «dans le cadre d’un même ensemble factuel complexe … sur

le territoire de la Bosnie-Herzégovine et au cours de la même péfriode »
(C.I.J. Recueil 1997, p. 258, par. 34). Ces conclusions poursuivaient le
même but juridique que la demande principale, « à savoir l’établissement
d’une responsabilité juridique en raison de la violation de la confvention
sur le génocide » (ibid.). La Cour les a par suite estimées recevables.

6. Dans l’affaire des Plates-formes pétrolières ((République islamique
d’Iran c. Etats-Unis d’Amérique), demande reconventionnelle, ordonnance
du 10 mars 1998, C.I.J. Recueil 1998, p. 190), l’Iran se plaignait de la des -
truction par les Etats-Unis d’installations de production pétrolière
offshore, comme méconnaissant les dispositions du traité d’amfitié conclu
en 1955 entre les deux pays et d’autres dispositions du droit internaftional.

Les Etats-Unis saisirent la Cour d’une demande reconventionnelle ten -
dant à la condamnation de l’Iran pour attaques de navires et mouilflage de
mines dans le Golfe. La Cour a relevé qu’il s’agissait là def «faits de même
nature … s’inscriv[ant] dans le cadre d’un même ensemble factuel com -
plexe » (ibid., p. 205, par. 38). Elle a ajouté que les Parties poursuivaient

un même but juridique, « à savoir l’établissement d’une responsabilité
juridique en raison de violations du traité de 1955 » (ibid.). Elle a par
suite déclaré la demande reconventionnelle recevable.
7. Dans l’affaire de la Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun
et le Nigéria ((Cameroun c. Nigéria), ordonnance du 30 juin 1999,

C.I.J. Recueil 1999 (II), p. 983), le Cameroun avait cité dans son mémoire
des incidents divers survenus le long de la frontière, qui, pour certfains
d’entre eux, soulevaient, disait-il, la question de la responsabilitéf interna -
tionale du Nigéria. Le Nigéria présenta une demande reconventiofnnelle
tendant à ce que le Cameroun soit condamné à réparer les confséquences
dommageables de tous les incidents rapportés au dossier le long de laf

frontière. La Cour estima que cette demande reposait sur des faits def
même nature que ceux évoqués dans le mémoire camerounais et fpoursui -
vait un même but juridique : l’établissement d’une responsabilité. Elle l’a
par suite déclarée recevable.
8. Dans l’affaire des Activités armées sur le territoire du Congo ((Répu -

blique démocratique du Congo c. Ouganda), demandes reconventionnelles,
ordonnance du 29 novembre 2001, C.I.J. Recueil 2001, p. 660), la Cour
était saisie d’une requête du Congo se plaignant d’actes d’agression, d’ex -
ploitation illégale de ressources naturelles et d’exactions de l’Ouganda sur
le territoire congolais contraires au droit international. L’Ouganda favait

présenté trois demandes reconventionnelles. La première concernfait des
actes d’agression attribués au Congo. A cet égard, la Cour a esftimé que
les demandes des Parties reposaient «sur des faits de même nature» (ibid.,
p. 679, par. 38). Elle a relevé que la demande reconventionnelle « port[ait]
sur une période plus étendue que la demande principale » (ibid.), mais
qu’elle avait trait à un « conflit existant entre les deux Etats voisins sous

des formes diverses et avec une intensité variable depuis 1994 » (ibid.),
c’est-à-dire depuis plus de quatre ans avant les événements févoqués par le

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6 CIJ 1045.indb 40 5/06/14 09:42 219 certaines activitésf; construction d’une rfoute (décl. guillaume)

Congo. Elle en a conclu qu’il s’agissait d’un même ensemble ffactuel et a
ajouté que les Parties fondaient leurs demandes sur les mêmes prinfcipes

de droit international et qu’elles poursuivaient donc les mêmes bufts juri -
diques. Elle a par suite déclaré ces premières conclusions recofnvention -
nelles recevables.
La Cour en a jugé de même en ce qui concerne des « attaques visant les
locaux et le personnel diplomatique ougandais à Kinshasa» (C.I.J. Recueil

2001, p. 679, par. 40). Ces exactions s’étaient produites immédiatement
après l’invasion alléguée par le Congo, mais étaient survfenues à des mil -
liers de kilomètres du lieu des combats. La Cour n’en a pas moins estimé
que les demandes des Parties s’inscrivaient dans le cadre du même f
ensemble factuel complexe. Elle a en outre jugé que les Parties poursfui -
vaient un même but juridique : établir la responsabilité de l’autre Partie,

et ce bien que les règles de droit international invoquées à ceft effet ne
fussent pas identiques. Elle a de ce fait conclu, là encore, à la frecevabilité
de la demande reconventionnelle.
En revanche, la Cour a estimé non recevable la troisième demande
reconventionnelle, qui concernait les tentatives de solution du conflift

engagées plusieurs années après le conflit et ayant mené àf la conclusion
d’accords que l’Ouganda estimait avoir été violés par le fCongo.
9. En l’espèce, le Costa Rica présente à la Cour deux séries de conclu -
sions. Il prie en premier lieu la Cour de juger que, par son comportemenft,
le Nicaragua a violé la souveraineté et l’intégrité terriftoriale du Costa Rica

dans la partie septentrionale d’Isla Portillos, à l’embouchure du San Juan.
Il demande en outre à la Cour de juger que le Nicaragua a violé «fl’obliga -
tion de ne pas mener d’opérations de dragage du San Juan, ou d’opérations
ayant pour effet d’en dévier ou d’en modifier le cours, ni faucune autre opé -
ration dommageable pour le territoire costa-ricien (y compris le fleufve
Colorado), son environnement ou les droits du Costa Rica, conformément

à la sentence Cleveland » de 1888, interprétant le traité de limites territo -
riales entre le Costa Rica et le Nicaragua de 1858 (ordonnance, par. 14).
10. Dans sa deuxième demande reconventionnelle, le Nicaragua
demande à la Cour de juger qu’il est « devenu l’unique souverain dans la
zone jadis occupée par la baie de San Juan del Norte » (ibid., par. 15) à

l’embouchure du fleuve. Dans sa troisième demande, il sollicite fde la Cour
une déclaration selon laquelle il « jouit d’un droit de libre navigation sur
le Colorado, un affluent du fleuve San Juan de Nicaragua, tant que n’au -
ront pas été rétablies les conditions de navigabilité qui exfistaient à
l’époque de la conclusion du traité de 1858 » (ibid.).

11. Il apparaît ainsi que les demandes principales du Costa Rica et les
demandes reconventionnelles du Nicaragua portent toutes deux « sur un
réseau fluvial commun» (ibid., par. 36) posant divers problèmes d’alluvion -
nement, de dragage, de navigabilité et de protection de l’environnfement.
12. La deuxième demande reconventionnelle concerne la souveraineté
à l’embouchure du fleuve sur la baie de San Juan del Norte, qui, selon le

Nicaragua, aurait disparu du fait que le fleuve aurait à son emboucfhure
déplacé son lit. De même, la première demande principale du fCosta Rica

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6 CIJ 1045.indb 42 5/06/14 09:42 220 certaines activitésf; construction d’une rfoute (décl. guillaume)

concerne la souveraineté sur une partie d’Isla Portillos, qui, selon le

Costa Rica, a été séparée du reste de l’île par un canal crefusé illégalement
par le Nicaragua, alors que celui-ci soutient avoir seulement dragué fun
chenal naturel obstrué au fil des ans. Ainsi, la deuxième demandfe recon -
ventionnelle du Nicaragua concerne la même région que la premièfre série
de conclusions du Costa Rica, à savoir l’embouchure du San Juan, et sou -

lève des problèmes analogues liés à l’alluvionnement et afux divagations
du fleuve. La Cour a cependant relevé que les demandes des Parties f« ne
se rapportent pas au même endroit » (ordonnance, par 34). Elle a ajouté
que « [l]a demande reconventionnelle du Nicaragua concerne des modifi -
cations physiques de la baie de San Juan del Norte qui remonteraient au
e
XIX siècle, tandis que les demandes du Costa Rica ont trait au compor -
tement qu’il attribue au Nicaragua en 2010 » (ibid.). Elle a souligné
qu’ainsi le lien temporel entre les demandes faisait défaut. On pefut se
demander si, au regard de la jurisprudence de la Cour, ces circonstancesf
étaient à elles seules de nature à permettre de conclure à l’absence de

connexité directe en fait entre la deuxième demande reconventionneflle et
la première série de conclusions principales du Costa Rica.
13. Par ailleurs, les Parties dans les deux cas se prévalent à l’apfpui de
leurs conclusions du traité de limites de1858. Dans les deux cas, il s’agit de
dispositions du traité ayant fait l’objet des sentences interpréftatives du pré -

sident Cleveland et de M. Alexander. Il est exact que, comme le relève la
Cour, le Costa Rica se prévaut en outre de diverses conventions internatio -
nales relatives à la protection de l’environnement. Mais il le faift moins à
l’appui de ses revendications de souveraineté qu’à l’appufi de ses conclu -
sions concernant le dragage du San Juan par le Nicaragua. Dès lors, on

peut se demander si les Parties ne poursuivaient pas un même but juri -
dique: établir une souveraineté territoriale sur la base du traité dfe 1858.
14. Dans sa troisième demande reconventionnelle, le Nicaragua
«allègue en particulier que le Costa Rica cherche à l’empêcher de prendre
les mesures nécessaires — les opérations de dragage dont le Costa Rica

tire grief — pour rendre de nouveau navigable le fleuve San Juan » (ibid.,
par. 29). Il soutient que, « tant que n’auront pas été rétablies les condi -
tions de navigabilité qui existaient à l’époque de la conclufsion du traité
de 1858 », il « jouit d’un droit de libre navigation sur le Colorado, un
affluent du fleuve San Juan de Nicaragua », en vertu de l’article V du

même traité (ibid., par. 15).
15. S’agissant de la connexité de fait entre la troisième demande rfecon -
ventionnelle du Nicaragua et la deuxième demande principale du
Costa Rica, la Cour a noté à juste titre que ces deux demandes étaienft
relatives à des activités de dragage sur un réseau fluvial cofmmun. Elle a

également constaté que les prétentions du Nicaragua concernant fses
droits à naviguer sur le fleuve Colorado trouvaient leur origine dafns les
efforts que selon lui le Costa Rica déploierait en vue d’empêcher le Nica -
ragua de draguer le San Juan pour en améliorer la navigabilité. Elle n’en
a pas moins estimé qu’il n’existait pas de connexité directef en fait entre

ces demandes, en relevant que le Costa Rica se plaignait essentiellement

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6 CIJ 1045.indb 44 5/06/14 09:42 221 certaines activitésf; construction d’une rfoute (décl. guillaume)

de violation de sa souveraineté et de dommages causés à l’environnement.

Mais on peut s’interroger sur la validité de ce raisonnement, dèfs lors qu’il
existe un lien de connexité directe entre les opérations de dragage et la
navigabilité tant sur le San Juan que sur le Colorado dont se préoccupent
les deux Parties.
16. La même observation vaut en ce qui concerne la connexité juri -

dique entre la troisième demande reconventionnelle et la demande prinfci-
pale concernant le dragage du fleuve. Il est exact, comme le relèvef la
Cour, que le Costa Rica se plaint à titre principal des dommages environ -
nementaux que le dragage pourrait causer à son territoire. Mais il exfprime
également des craintes pour ce qui est des conséquences de ce dragfage sur

la navigabilité du San Juan et du Colorado. Il se prévaut à cet égard du
traité de 1858, comme le fait le Nicaragua. Les Parties poursuivent àf cet
égard un même but juridique.
17. Au total, la Cour semble, dans la présente affaire, avoir voulu faifre
évoluer sa jurisprudence dans un sens restrictif. Je crains qu’ellfe n’ait été

trop loin dans cette direction. Un bassin fluvial constitue une unitéf, et la
Cour aurait pu aborder avec profit dans une même instance les problèmes
soulevés en ce qui concerne ce bassin.

(Signé) Gilbert Guillaume.

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6 CIJ 1045.indb 46 5/06/14 09:42

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DÉCLARATION DE M. LE JUGE AD HOC GUILLAUME

Demandes reconventionnelles — Connexité directe en fait et en droit avec les
demandes principales — Recevabilité.

1. La Cour, après avoir statué sur la recevabilité de la premièfre
demande reconventionnelle du Nicaragua, a déclaré irrecevables lesf

deuxième et troisième demandes reconventionnelles. Je n’ai pas fcru devoir
m’opposer à cette solution. Celle-ci ne m’en paraît pas moinfs marquer
une évolution de la jurisprudence qui me semble discutable pour les
motifs exposés dans la présente déclaration.
2. Selon l’article 80 du Règlement de la Cour, cette dernière « ne peut

connaître d’une demande reconventionnelle que si celle-ci relèvfe de sa
compétence et est en connexité directe avec l’objet de la demanfde de la
partie adverse». En l’espèce, la Cour a déclaré la deuxième et la trfoisième
demande reconventionnelle du Nicaragua irrecevables en l’absence de lfien
de connexité directe, sur les plans factuel et juridique, entre ces dfemandes

et les demandes principales du Costa Rica. Cette décision me paraît diffi -
cile à concilier avec la jurisprudence développée par la Cour dfans le passé.
3. La Cour a précisé à plusieurs reprises que son Règlement préfvoit la
possibilité de présenter des demandes reconventionnelles en cours fd’ins -

tance essentiellement afin « de réaliser une économie de procès tout
en permettant au juge d’avoir une vue d’ensemble des prétentions rfespec-
tives des parties et de statuer de façon plus cohérente » (Application
de la convention pour la prévention et la répression du crime de géno▯cide
(Bosnie-Herzégovine c. Yougoslavie), demandes reconventionnelles, ordon -

nance du 17 décembre 1997, C.I.J. Recueil 1997, p. 257, par. 30). Par
voie de conséquence, la recevabilité des demandes reconventionnelles esft
«fonction des buts ainsi poursuivis et sujette à des conditions propres
à prévenir les abus » (ibid.).
4. Dans cette perspective, la Cour, en vue d’assurer « une meilleure

administration de la justice » (ibid.), a recherché, dans plusieurs affaires,
si « le lien qui doit rattacher la demande reconventionnelle à la demande
principale est suffisant » (ibid., p. 258, par. 33). Elle a précisé qu’« en règle
générale le degré de connexité entre ces demandes doit êtfre évalué aussi
bien en fait qu’en droit » (ibid.). Dans la plupart des cas qui lui ont été

soumis, elle a jusqu’à présent estimé que cette connexitéf était établie.
5. Dans l’affaire concernant l’Application de la convention pour la pré -
vention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégov▯ine c. You -
goslavie), la Cour était saisie d’une requête de la Bosnie-Herzégovinfe
tendant à la condamnation de la Yougoslavie pour violation de la convfen -

tion des Nations Unies sur le génocide. La Yougoslavie saisit la Cour de

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6 CIJ 1045.indb 38 5/06/14 09:42 217

DECLARATION OF JUDGE AD HOC GUILLAUME

[Translation]

Counter-claims — Direct connection, in fact and in law, with the principal
claims — Admissibility.

1. After ruling on the admissibility of Nicaragua’s first counter-claim,
the Court declared the second and third counter-claims inadmissible. I

did not feel compelled to oppose that solution ; nevertheless, it represents,
to my mind, a questionable development in the case law of the Court, for
the reasons set out in this declaration.

2. Under Article 80 of the Rules of Court, the latter “may entertain a

counter-claim only if it comes within the jurisdiction of the Court and is
directly connected with the subject-matter of the claim of the other party”.
In the present case, the Court declared Nicaragua’s second and third
counter-claims inadmissible in the absence of “a direct connection, either
in fact or in law”, between those claims and the principal claims of fCosta

Rica. It seems to me that this decision is difficult to reconcile with fthe
Court’s previous case law.
3. The Court has stated on several occasions that its Rules provide for
the possibility of submitting counter-claims in the course of proceedings

in order, essentially, “to achieve a procedural economy whilst enablifng
the Court to have an overview of the respective claims of the parties anfd
to decide them more consistently” (Application of the Convention on the
Prevention and Punishment of the Crime of Genocide (Bosnia and Herze -
govina v. Yugoslavia), Counter-Claims, Order of 17 December 1997,

I.C.J. Reports 1997, p. 257, para. 30). Consequently, the admissibility of
counter-claims must “relate to the aims thus pursued and be subject to
conditions designed to prevent abuse” (ibid.).

4. With that in mind, the Court, with a view to ensuring “better admin-

istration of justice” (ibid.), has, in several cases, examined whether “the
counter-claim is sufficiently connected to the principal claim” (ibid.,
p. 258, para. 33). It has stated that, “as a general rule, the degree of con -
nection between the claims must be assessed both in fact and in law” f
(ibid.). In the majority of the cases brought before it to date, the Court

has considered that that connection exists.
5. In the case concerning the Application of the Convention on the Pre -
vention and Punishment of the Crime of Genocide (Bosnia and Herze-
govina v. Yugoslavia), the Court was seised of an Application by Bosnia
and Herzegovina seeking a ruling against Yugoslavia for violation

of the United Nations Genocide Convention. Yugoslavia presented

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6 CIJ 1045.indb 39 5/06/14 09:42 218 certaines activitésf; construction d’une rfoute (décl. guillaume)

conclusions reconventionnelles reposant sur « des faits de même nature »
et s’inscrivant «dans le cadre d’un même ensemble factuel complexe … sur

le territoire de la Bosnie-Herzégovine et au cours de la même péfriode »
(C.I.J. Recueil 1997, p. 258, par. 34). Ces conclusions poursuivaient le
même but juridique que la demande principale, « à savoir l’établissement
d’une responsabilité juridique en raison de la violation de la confvention
sur le génocide » (ibid.). La Cour les a par suite estimées recevables.

6. Dans l’affaire des Plates-formes pétrolières ((République islamique
d’Iran c. Etats-Unis d’Amérique), demande reconventionnelle, ordonnance
du 10 mars 1998, C.I.J. Recueil 1998, p. 190), l’Iran se plaignait de la des -
truction par les Etats-Unis d’installations de production pétrolière
offshore, comme méconnaissant les dispositions du traité d’amfitié conclu
en 1955 entre les deux pays et d’autres dispositions du droit internaftional.

Les Etats-Unis saisirent la Cour d’une demande reconventionnelle ten -
dant à la condamnation de l’Iran pour attaques de navires et mouilflage de
mines dans le Golfe. La Cour a relevé qu’il s’agissait là def «faits de même
nature … s’inscriv[ant] dans le cadre d’un même ensemble factuel com -
plexe » (ibid., p. 205, par. 38). Elle a ajouté que les Parties poursuivaient

un même but juridique, « à savoir l’établissement d’une responsabilité
juridique en raison de violations du traité de 1955 » (ibid.). Elle a par
suite déclaré la demande reconventionnelle recevable.
7. Dans l’affaire de la Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun
et le Nigéria ((Cameroun c. Nigéria), ordonnance du 30 juin 1999,

C.I.J. Recueil 1999 (II), p. 983), le Cameroun avait cité dans son mémoire
des incidents divers survenus le long de la frontière, qui, pour certfains
d’entre eux, soulevaient, disait-il, la question de la responsabilitéf interna -
tionale du Nigéria. Le Nigéria présenta une demande reconventiofnnelle
tendant à ce que le Cameroun soit condamné à réparer les confséquences
dommageables de tous les incidents rapportés au dossier le long de laf

frontière. La Cour estima que cette demande reposait sur des faits def
même nature que ceux évoqués dans le mémoire camerounais et fpoursui -
vait un même but juridique : l’établissement d’une responsabilité. Elle l’a
par suite déclarée recevable.
8. Dans l’affaire des Activités armées sur le territoire du Congo ((Répu -

blique démocratique du Congo c. Ouganda), demandes reconventionnelles,
ordonnance du 29 novembre 2001, C.I.J. Recueil 2001, p. 660), la Cour
était saisie d’une requête du Congo se plaignant d’actes d’agression, d’ex -
ploitation illégale de ressources naturelles et d’exactions de l’Ouganda sur
le territoire congolais contraires au droit international. L’Ouganda favait

présenté trois demandes reconventionnelles. La première concernfait des
actes d’agression attribués au Congo. A cet égard, la Cour a esftimé que
les demandes des Parties reposaient «sur des faits de même nature» (ibid.,
p. 679, par. 38). Elle a relevé que la demande reconventionnelle « port[ait]
sur une période plus étendue que la demande principale » (ibid.), mais
qu’elle avait trait à un « conflit existant entre les deux Etats voisins sous

des formes diverses et avec une intensité variable depuis 1994 » (ibid.),
c’est-à-dire depuis plus de quatre ans avant les événements févoqués par le

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6 CIJ 1045.indb 40 5/06/14 09:42 certain activities; construction of a roafd (decl. guillaume) 218

counter-submissions to the Court that rested on “facts of the same
nature” and “form[ed] part of the same factual complex . . . on the terri -

tory of Bosnia and Herzegovina and during the same period” (I.C.J.
Reports 1997, p. 258, para. 34). Those submissions pursued the same legal
aim, “namely the establishment of legal responsibility for violationsf of the
Genocide Convention” (ibid.). Consequently, the Court considered them
to be admissible.

6. In the case concerning Oil Platforms ((Islamic Republic of Iran v.
United States of America), Counter-Claim, Order of 10 March 1998, I.C.J.
Reports 1998, p. 190), Iran complained of the destruction by the United
States of offshore oil production complexes, asserting that this infrifnged
provisions of the Treaty of Amity concluded by the two countries in 1955,
as well as other provisions of international law. The United States sub -

mitted a counter-claim to the Court, seeking a ruling against Iran for
attacks on vessels and mine laying in the Gulf. The Court observed that
the claims concerned “facts of the same nature” and “form[ed] pfart of the
same factual complex” (ibid., p. 205, para. 38). It added that the Parties
were pursuing the same legal aim, “namely the establishment of legal f

responsibility for violations of the 1955 Treaty” (ibid.). Consequently, it
declared the counter-claim admissible.

7. In the case concerning the Land and Maritime Boundary between
Cameroon and Nigeria ((Cameroon v. Nigeria), Order of 30 June 1999,

I.C.J. Reports 1999 (II), p. 983), Cameroon cited, in its Memorial, vari -
ous incidents along the border, some of which raised, in its view, the
question of Nigeria’s international responsibility. Nigeria submitted a
counter-claim, seeking to have Cameroon ordered to make good the
damage resulting from all of the border incidents reported in the filef. The
Court considered that this claim rested on facts that were of the same

nature as those referred to in the Memorial of Cameroon and pursued the f
same legal aim : the establishment of responsibility. Consequently, the
Court declared it admissible.

8. In the case concerning Armed Activities on the Territory of the Congo

((Democratic Republic of the Congo v. Uganda), Counter-Claims, Order
of 29 November 2001, I.C.J. Reports 2001, p. 660), the Congo submitted
an Application to the Court complaining of acts of aggression, the illegfal
exploitation of natural resources and acts of oppression committed by
Uganda in Congolese territory in violation of international law. Uganda f

submitted three counter-claims. The first concerned acts of aggression
attributed to the Congo. In this regard, the Court considered that the
claims of the Parties rested on “facts of the same nature” (ibid., p. 679,
para. 38). It noted that the counter-claim “range[d] over a longer period
than that covered by the . . . principal claim” (ibid.), but concerned “a
conflict in existence between the two neighbouring States, in various

forms and of variable intensity, since 1994” (ibid.) — i.e., more than
four years before the events cited by the Congo. The Court concluded

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6 CIJ 1045.indb 41 5/06/14 09:42 219 certaines activitésf; construction d’une rfoute (décl. guillaume)

Congo. Elle en a conclu qu’il s’agissait d’un même ensemble ffactuel et a
ajouté que les Parties fondaient leurs demandes sur les mêmes prinfcipes

de droit international et qu’elles poursuivaient donc les mêmes bufts juri -
diques. Elle a par suite déclaré ces premières conclusions recofnvention -
nelles recevables.
La Cour en a jugé de même en ce qui concerne des « attaques visant les
locaux et le personnel diplomatique ougandais à Kinshasa» (C.I.J. Recueil

2001, p. 679, par. 40). Ces exactions s’étaient produites immédiatement
après l’invasion alléguée par le Congo, mais étaient survfenues à des mil -
liers de kilomètres du lieu des combats. La Cour n’en a pas moins estimé
que les demandes des Parties s’inscrivaient dans le cadre du même f
ensemble factuel complexe. Elle a en outre jugé que les Parties poursfui -
vaient un même but juridique : établir la responsabilité de l’autre Partie,

et ce bien que les règles de droit international invoquées à ceft effet ne
fussent pas identiques. Elle a de ce fait conclu, là encore, à la frecevabilité
de la demande reconventionnelle.
En revanche, la Cour a estimé non recevable la troisième demande
reconventionnelle, qui concernait les tentatives de solution du conflift

engagées plusieurs années après le conflit et ayant mené àf la conclusion
d’accords que l’Ouganda estimait avoir été violés par le fCongo.
9. En l’espèce, le Costa Rica présente à la Cour deux séries de conclu -
sions. Il prie en premier lieu la Cour de juger que, par son comportemenft,
le Nicaragua a violé la souveraineté et l’intégrité terriftoriale du Costa Rica

dans la partie septentrionale d’Isla Portillos, à l’embouchure du San Juan.
Il demande en outre à la Cour de juger que le Nicaragua a violé «fl’obliga -
tion de ne pas mener d’opérations de dragage du San Juan, ou d’opérations
ayant pour effet d’en dévier ou d’en modifier le cours, ni faucune autre opé -
ration dommageable pour le territoire costa-ricien (y compris le fleufve
Colorado), son environnement ou les droits du Costa Rica, conformément

à la sentence Cleveland » de 1888, interprétant le traité de limites territo -
riales entre le Costa Rica et le Nicaragua de 1858 (ordonnance, par. 14).
10. Dans sa deuxième demande reconventionnelle, le Nicaragua
demande à la Cour de juger qu’il est « devenu l’unique souverain dans la
zone jadis occupée par la baie de San Juan del Norte » (ibid., par. 15) à

l’embouchure du fleuve. Dans sa troisième demande, il sollicite fde la Cour
une déclaration selon laquelle il « jouit d’un droit de libre navigation sur
le Colorado, un affluent du fleuve San Juan de Nicaragua, tant que n’au -
ront pas été rétablies les conditions de navigabilité qui exfistaient à
l’époque de la conclusion du traité de 1858 » (ibid.).

11. Il apparaît ainsi que les demandes principales du Costa Rica et les
demandes reconventionnelles du Nicaragua portent toutes deux « sur un
réseau fluvial commun» (ibid., par. 36) posant divers problèmes d’alluvion -
nement, de dragage, de navigabilité et de protection de l’environnfement.
12. La deuxième demande reconventionnelle concerne la souveraineté
à l’embouchure du fleuve sur la baie de San Juan del Norte, qui, selon le

Nicaragua, aurait disparu du fait que le fleuve aurait à son emboucfhure
déplacé son lit. De même, la première demande principale du fCosta Rica

23

6 CIJ 1045.indb 42 5/06/14 09:42 certain activities; construction of a roafd (decl. guillaume) 219

that it related to the same factual complex, adding that the Parties werfe
basing their claims on the same principles of international law and weref

therefore pursuing the same legal aims. Consequently, it declared those f
first counter-submissions admissible.

The Court ruled in the same way as regards the “attacks on Ugandan
diplomatic premises and personnel in Kinshasa” (I.C.J. Reports 2001,

p. 679, para. 40). Those acts of oppression had occurred immediately
after the invasion alleged by the Congo, but had taken place thousands off
kilometres from the location of the fighting. Nevertheless, the Court f
considered that the Parties’ claims formed part of the same factual cfom -
plex. It also ruled that the Parties were pursuing the same legal aim (fi.e.,
seeking to establish the responsibility of the other Party), despite thfe fact

that the rules of international law relied on to that end were not identfical.
Again, the Court concluded, therefore, that the counter-claim was admis -
sible.
In contrast, the Court considered that the third counter-claim — which
concerned attempts to reach a settlement made several years after the

conflict and which led to the conclusion of agreements that Uganda
accused the Congo of violating — was inadmissible.
9. In the present case, Costa Rica makes two sets of submissions to the
Court. It first requests the Court to declare that, by its conduct, Nifcara -
gua has violated Costa Rica’s sovereignty and territorial integrity in the

northern part of Isla Portillos, at the mouth of the San Juan River. It also
asks the Court to declare that Nicaragua has breached “the obligationf
not to dredge, divert or alter the course of the San Juan, or conduct anfy
other works on the San Juan, if this causes damage to Costa Rican terri -
tory (including the Colorado River), its environment, or to Costa Ricafn
rights in accordance with the Cleveland Award” of 1888 interpreting tfhe

Treaty of Territorial Limits between Costa Rica and Nicaragua of 1858
(Order, para. 14).
10. In its second counter-claim, Nicaragua asks the Court to declare
that it “has become the sole sovereign over the area formerly occupiefd by
the Bay of San Juan del Norte” (ibid., para. 15) at the mouth of the river.

In its third claim, Nicaragua requests the Court to declare that it “has a
right to free navigation on the Colorado Branch of the San Juan de Nica -
ragua River until the conditions of navigability existing at the time thfe
1858 Treaty was concluded are re-established” (ibid.).

11. Thus, it would appear that Costa Rica’s principal claims and Nica-
ragua’s counter-claims both “relate to a common river system” (ibid.,
para. 36) posing various problems regarding alluviation, dredging, navi -
gability and protection of the environment.
12. The second counter-claim concerns sovereignty over the Bay of
San Juan del Norte at the mouth of the river, which Nicaragua claims hasf

disappeared on account of the riverbed having shifted at the mouth of thfe
river. Likewise, Costa Rica’s first principal claim concerns sovereignty

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6 CIJ 1045.indb 43 5/06/14 09:42 220 certaines activitésf; construction d’une rfoute (décl. guillaume)

concerne la souveraineté sur une partie d’Isla Portillos, qui, selon le

Costa Rica, a été séparée du reste de l’île par un canal crefusé illégalement
par le Nicaragua, alors que celui-ci soutient avoir seulement dragué fun
chenal naturel obstrué au fil des ans. Ainsi, la deuxième demandfe recon -
ventionnelle du Nicaragua concerne la même région que la premièfre série
de conclusions du Costa Rica, à savoir l’embouchure du San Juan, et sou -

lève des problèmes analogues liés à l’alluvionnement et afux divagations
du fleuve. La Cour a cependant relevé que les demandes des Parties f« ne
se rapportent pas au même endroit » (ordonnance, par 34). Elle a ajouté
que « [l]a demande reconventionnelle du Nicaragua concerne des modifi -
cations physiques de la baie de San Juan del Norte qui remonteraient au
e
XIX siècle, tandis que les demandes du Costa Rica ont trait au compor -
tement qu’il attribue au Nicaragua en 2010 » (ibid.). Elle a souligné
qu’ainsi le lien temporel entre les demandes faisait défaut. On pefut se
demander si, au regard de la jurisprudence de la Cour, ces circonstancesf
étaient à elles seules de nature à permettre de conclure à l’absence de

connexité directe en fait entre la deuxième demande reconventionneflle et
la première série de conclusions principales du Costa Rica.
13. Par ailleurs, les Parties dans les deux cas se prévalent à l’apfpui de
leurs conclusions du traité de limites de1858. Dans les deux cas, il s’agit de
dispositions du traité ayant fait l’objet des sentences interpréftatives du pré -

sident Cleveland et de M. Alexander. Il est exact que, comme le relève la
Cour, le Costa Rica se prévaut en outre de diverses conventions internatio -
nales relatives à la protection de l’environnement. Mais il le faift moins à
l’appui de ses revendications de souveraineté qu’à l’appufi de ses conclu -
sions concernant le dragage du San Juan par le Nicaragua. Dès lors, on

peut se demander si les Parties ne poursuivaient pas un même but juri -
dique: établir une souveraineté territoriale sur la base du traité dfe 1858.
14. Dans sa troisième demande reconventionnelle, le Nicaragua
«allègue en particulier que le Costa Rica cherche à l’empêcher de prendre
les mesures nécessaires — les opérations de dragage dont le Costa Rica

tire grief — pour rendre de nouveau navigable le fleuve San Juan » (ibid.,
par. 29). Il soutient que, « tant que n’auront pas été rétablies les condi -
tions de navigabilité qui existaient à l’époque de la conclufsion du traité
de 1858 », il « jouit d’un droit de libre navigation sur le Colorado, un
affluent du fleuve San Juan de Nicaragua », en vertu de l’article V du

même traité (ibid., par. 15).
15. S’agissant de la connexité de fait entre la troisième demande rfecon -
ventionnelle du Nicaragua et la deuxième demande principale du
Costa Rica, la Cour a noté à juste titre que ces deux demandes étaienft
relatives à des activités de dragage sur un réseau fluvial cofmmun. Elle a

également constaté que les prétentions du Nicaragua concernant fses
droits à naviguer sur le fleuve Colorado trouvaient leur origine dafns les
efforts que selon lui le Costa Rica déploierait en vue d’empêcher le Nica -
ragua de draguer le San Juan pour en améliorer la navigabilité. Elle n’en
a pas moins estimé qu’il n’existait pas de connexité directef en fait entre

ces demandes, en relevant que le Costa Rica se plaignait essentiellement

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6 CIJ 1045.indb 44 5/06/14 09:42 certain activities; construction of a roafd (decl. guillaume) 220

over part of Isla Portillos, which Costa Rica claims has been separated
from the remainder of the island by a canal dug illegally by Nicaragua ;

Nicaragua, on the other hand, maintains that it simply dredged a naturalf
channel that had become obstructed over the years. Thus, Nicaragua’s f
second counter-claim concerns the same region as the first set of submis -
sions made by Costa Rica, namely the mouth of the San Juan River, and
raises similar issues relating to the alluviation of the river and changfes in

its course. Nevertheless, the Court observed that the claims of the Partfies
“do not relate to the same area” (Order, para. 34). It added : “Nicara -
gua’s counter-claim refers to physical changes to the Bay of San Juan del
Norte that apparently date to the nineteenth century. By contrast, Costa
Rica’s claims relate to alleged Nicaraguan conduct dating to 2010.”f
(Ibid.) The Court stated that there was therefore a lack of temporal con -

nection between the claims. It may be asked whether, in view of the
Court’s case law, those circumstances were, in themselves, such as tof sup -
port the conclusion that there was no direct connection in fact between f
the second counter-claim and Costa Rica’s first set of principal submis -
sions.

13. Moreover, in both instances the Parties are relying, in support of
their submissions, on the 1858 Treaty of Limits. In both cases, this
involves provisions of the Treaty that were the subject of interpretativfe
awards by President Cleveland and Mr. Alexander. It is true that, as the
Court notes, Costa Rica also relies on various international conventionsf

on the protection of the environment. However, it does so more in sup -
port of its submissions concerning Nicaragua’s dredging of the San Jufan
than in support of its claims to sovereignty. Accordingly, it may be askfed,
whether the Parties were not pursuing the same legal aim : the establish -
ment of territorial sovereignty on the basis of the 1858 Treaty.
14. In its third counter-claim, Nicaragua “asserts that Costa Rica is

attempting to prevent Nicaragua from taking the measures needed —
that is, the dredging works of which Costa Rica complains — to restore
the navigability of the San Juan River” (ibid., para. 29). It maintains that,
“until the conditions of navigability existing at the time the 1858 Treaty
was concluded are re-established”, it “has a right to free navigation on

the Colorado Branch of the San Juan de Nicaragua River” under Arti -
cle V of the Treaty (ibid., para. 15).

15. As regards the connection in fact between Nicaragua’s third
counter-claim and Costa Rica’s second principal claim, the Court rightly

noted that those two claims related to dredging activities in a common
river system. It also observed that the claims made by Nicaragua concernfing
its navigational rights on the Colorado River stemmed from the steps allfeg -
edly taken by Costa Rica with a view to preventing Nicaragua from
dredging the San Juan to improve its navigability. Nevertheless, the Coufrt
considered that there was no direct connection in fact between those

claims, noting that the essence of Costa Rica’s complaint was about tfhe
violation of its sovereignty and damage to the environment. However,

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6 CIJ 1045.indb 45 5/06/14 09:42 221 certaines activitésf; construction d’une rfoute (décl. guillaume)

de violation de sa souveraineté et de dommages causés à l’environnement.

Mais on peut s’interroger sur la validité de ce raisonnement, dèfs lors qu’il
existe un lien de connexité directe entre les opérations de dragage et la
navigabilité tant sur le San Juan que sur le Colorado dont se préoccupent
les deux Parties.
16. La même observation vaut en ce qui concerne la connexité juri -

dique entre la troisième demande reconventionnelle et la demande prinfci-
pale concernant le dragage du fleuve. Il est exact, comme le relèvef la
Cour, que le Costa Rica se plaint à titre principal des dommages environ -
nementaux que le dragage pourrait causer à son territoire. Mais il exfprime
également des craintes pour ce qui est des conséquences de ce dragfage sur

la navigabilité du San Juan et du Colorado. Il se prévaut à cet égard du
traité de 1858, comme le fait le Nicaragua. Les Parties poursuivent àf cet
égard un même but juridique.
17. Au total, la Cour semble, dans la présente affaire, avoir voulu faifre
évoluer sa jurisprudence dans un sens restrictif. Je crains qu’ellfe n’ait été

trop loin dans cette direction. Un bassin fluvial constitue une unitéf, et la
Cour aurait pu aborder avec profit dans une même instance les problèmes
soulevés en ce qui concerne ce bassin.

(Signé) Gilbert Guillaume.

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6 CIJ 1045.indb 46 5/06/14 09:42 certain activities; construction of a roafd (decl. guillaume) 221

one might wonder about the validity of that reasoning, given that there fis

a direct connection between the dredging operations and the issue of navf -
igability, both on the San Juan and on the Colorado, which is of concernf
to both Parties.

16. The same can be said for the connection in law between the

third counter-claim and the principal claim concerning the dredging of
the river. It is true, as the Court notes, that Costa Rica complains prifnci -
pally about the environmental damage that the dredging could cause in
its territory. However, it also expresses concerns regarding the impact fof
that dredging on the navigability of the San Juan and the Colorado. It

relies, in that regard, on the 1858 Treaty, as does Nicaragua. In that
respect, the Parties pursue the same legal aim.

17. All in all, the Court seems, in the present case, to have wanted to
move its case law in a restrictive direction. I fear it has gone too farf. A

fluvial basin constitutes a single entity, and the Court could have usfefully
addressed all of the issues raised in respect of that basin in a single fset of
proceedings.

(Signed) Gilbert Guillaume.

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6 CIJ 1045.indb 47 5/06/14 09:42

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Déclaration de M. le juge ad hoc Guillaume

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