Opinion individuelle de M. le juge Skotnikov

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133-20090713-JUD-01-02-EN
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133-20090713-JUD-01-00-EN
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OPINION INDIVIDUELLE DE M. LE JUGE SKOTNIKOV

[Traduction]

1. J’ai voté en faveur de la plupart des paragraphes du dispositif.
Cependant, je ne souscris pas au raisonnement de la Cour en ce qui
concerne plusieurs points importants et suis en désaccord avec elle sur
certaines des conclusions auxquelles elle est parvenue.

INTERPRÉTATION DU TERME «COMERCIO »

2. Je conviens que le droit de libre navigation que le Costa Rica tient

du traité de limites de 1858 ne devrait pas être automatiquement inter-
prété de manière restrictive au motif qu’il constitue une limite à la
souveraineté dont le Nicaragua a joui sur le San Juan en vertu de cet
instrument. En effet,

«[s’]il est bien exact que les limites à la souveraineté d’un Etat sur
son territoire ne se présument pas, il n’en résulte pas pour autant que
des dispositions conventionnelles instituant de telles limites, telles

que celles qui sont en cause dans la présente espèce, devraient rece-
voir pour cette raison une interprétation étroite a priori» (arrêt,
par. 48).

3. Néanmoins, ainsi que l’a établi la Cour permanente de Justice
internationale dans l’affaire du Vapeur Wimbledon, une interprétation
restrictive s’impose en cas de doute:

«il n’en résulte pas moins pour l’Etat allemand une limitation impor-
tante de l’exercice du droit de souveraineté que nul ne lui conteste
sur le Canal de Kiel; et cela suffit pour que la clause qui consacre

une telle limitation doive, en cas de doute, être interprétée restricti-
vement. Toutefois, la Cour ne saurait aller, sous couleur d’interpré-
tation restrictive, jusqu’à refuser à l’article 380 le sens qui est com-
mandé par ses termes formels. Ce serait une singulière interprétation
que de faire dire à un traité exactement le contraire de ce qu’il dit.»
o
(Vapeur Wimbledon, arrêts, 1923, C.P.J.I. série A n 1, p. 24-25.)
Il est manifeste que, dans la présente affaire, une interprétation restric-

tive ne serait pas contraire aux termes formels de l’article VI du traité de
1858 et ne retirerait pas ce qui a été clairement accordé. Le problème qui
se pose à la Cour tient précisément à un manque de clarté quant à l’inter-
prétation qu’il conviendrait de donner au terme «comercio».

4. Dans ces conditions, la Cour aurait dû considérer les intentions des
Parties à l’époque de la conclusion du traité, en tenant dûment compte du

74principe bien établi selon lequel les limites à la souveraineté d’un Etat ne
se présument pas.

5. Les Parties n’ont présenté aucun élément de preuve démontrant que
le Nicaragua et le Costa Rica auraient eu, à l’époque de la conclusion du
traité, l’intention de conférer au terme «commerce» un sens évolutif. Dès
lors, la Cour aurait dû partir du principe qu’il était improbable que le
Nicaragua ait agi contre ses propres intérêts en conférant au Costa Rica

des droits de navigation qui ne correspondaient pas au sens que le terme
«comercio» revêtait à l’époque et qui allaient, tout comme le terme lui-
même, évoluer et couvrir avec le temps un champ plus large.
6. La conclusion de la Cour selon laquelle il convient d’interpréter le

terme «commerce» conformément à son sens actuel est sans rapport avec
l’interprétation du traité proprement dite. Ni le caractère générique du
terme «commerce», ni la durée illimitée du traité et la pérennité du
régime juridique établi par celui-ci (arrêt, par. 67), n’excluent la possibi-
lité que les Parties aient eu l’intention d’accorder au Costa Rica des droits

de navigation définis conformément à ce que recouvrait la notion de
«commerce» à l’époque de la conclusion du traité. La solution de la
Cour repose exclusivement sur l’application mécanique de la jurispru-
dence qui, dans un cas particulier, favorise la prise en considération du
sens évolutif (voir affaire du Plateau continental de la mer Egée (Grèce

c. Turquie), arrêt, C.I.J. Recueil 1978 , p. 3). Elle passe sous silence la
jurisprudence qui, dans d’autres affaires, favorise l’interprétation fondée
sur le sens qu’avait à l’époque pertinente le terme considéré (voir Droit
des ressortissants des Etats-Unis d’Amérique au Maroc (France c. Etats-
Unis d’Amérique), arrêt, C.I.J. Recueil 1952 , p. 176; Ile de Kasikili/

Sedudu (Botswana/Namibie), arrêt, C.I.J. Recueil 1999 (II) , p. 1045).
La question de la spécificité de la présente affaire n’est pas abordée. La
Cour ne tient pas compte du dictum de l’affaire du Vapeur Wimbledon
(voir paragraphe 3 ci-dessus) et de la jurisprudence connexe. En consé-
quence, sa conclusion contrarie le principe selon lequel les limites à la

souveraineté ne se présument pas.
7. En 1858, et pendant des dizaines d’années encore, le commerce se
limitait aux échanges de biens. L’édition de 1852 du dictionnaire de
l’Académie royale espagnole donne pour principale définition de «comer-
cio»: «activité et trafic qui s’effectuent par l’achat, la vente ou l’échange

de choses contre d’autres». Même encore en 1897, la sentence Alexander
confirme que le traité de 1858 avait donné au Costa Rica le droit de libre
navigation «con objetos de comercio» afin qu’il «ait sur l’Atlantique un
débouché pour l’importation et l’exportation de biens». Il apparaît que
d’autres traités commerciaux conclus à l’époque concernaient exclusive-

ment le commerce de biens (voir, par exemple, le traité commercial Volio-
Zelaya (Costa Rica-Nicaragua) de 1868). Il y a tout lieu de supposer que
pour les Parties, en 1858, le sens du mot «comercio» se limitait aux
échanges de biens.

8. Cette conclusion aurait cependant laissé sans réponse la question de
savoir si, à l’heure actuelle, le transport des passagers et des touristes est

75couvert par l’article VI du traité de 1858. En vue de répondre à cette
question, la Cour aurait dû examiner la pratique des Parties ultérieure-

ment à la conclusion du traité. Ainsi qu’elle l’a rappelé dans l’affaire de
l’Ile de Kasikili/Sedudu, «la Cour elle-même, par le passé, lorsqu’elle a
été amenée à interpréter les dispositions d’un traité, a fréquemment exa-
miné la pratique ultérieurement suivie par les parties dans l’application
de ce traité» (Ile de Kasikili/Sedudu (Botswana/Namibie), arrêt, C.I.J.

Recueil 1999 (II), p. 1076, par. 50).
9. Le Nicaragua présente des éléments qui montrent qu’à l’époque de
la conclusion du traité de limites, puis pendant plus d’un siècle, lui seul se
chargeait du transport commercial de passagers. Quoi qu’il en soit, il est

manifeste que les activités touristiques du Costa Rica sur le San Juan
existent depuis au moins dix ans et qu’elles sont considérables. Le Nica-
ragua n’a jamais protesté. Il n’en va pas de même de l’accueil qu’il réserve
aux bateaux de la police, qui, a-t-il affirmé à de nombreuses reprises,
n’ont aucun droit de naviguer sur le San Juan. Non seulement le Nica-

ragua a systématiquement autorisé la navigation touristique prise en
charge par des exploitants costa-riciens, mais il l’a aussi soumise à sa
réglementation. Cela peut être interprété comme la reconnaissance par le
Nicaragua de ce que le Costa Rica agissait de plein droit. La position
commune des Parties à cet égard peut être inférée du mémorandum

d’accord entre les ministres du tourisme des deux pays sur l’activité tou-
ristique dans la zone frontalière du fleuve San Juan, signé le 5 juin 1994.
10. A mon avis, la pratique ultérieure de l’application du traité indique
que les Parties sont parvenues à un accord en ce qui concerne son inter-
prétation: le Costa Rica détient, en vertu du traité de 1858, le droit de

transporter des touristes — c’est-à-dire des passagers qui paient un prix
en contrepartie du service rendu. Ce droit du Costa Rica s’étend néces-
sairement au transport de tous les autres passagers qui effectuent un paie-
ment aux transporteurs.

Q UESTIONS LIÉES À LA LIBERTÉ DE NAVIGATION

11. Selon l’arrêt, il faut présumer que les Parties avaient entendu
maintenir au profit des riverains costa-riciens du San Juan un droit mini-

mal de navigation afin qu’ils puissent subvenir à leurs besoins essentiels.
Ce droit peut donc se déduire des dispositions du traité dans son
ensemble (arrêt, par. 79). De surcroît, pour les mêmes raisons, on peut
déduire du traité que le Costa Rica a le droit d’emprunter le San Juan
avec des bateaux officiels (y compris des bateaux de la police) en vue de

fournir aux riverains ce dont ils ont besoin pour faire face aux nécessités
de la vie courante (ibid., par. 84).
12. Je ne suis pas du tout convaincu que le traité de 1858 ait établi
aucun autre droit de navigation que celui qui figure à son article VI

— c’est-à-dire le seul article qui traite de la question de la navigation.
13. Bien que je ne souscrive pas au point de vue de la majorité de la

76Cour selon lequel les riverains costa-riciens jouissent, en vertu du traité,
du droit de naviguer sur le San Juan, je considère que cet instrument n’a

eu aucune incidence sur la pratique de ceux-ci consistant à emprunter le
fleuve pour faire face aux nécessités de leur vie courante. Cette pratique
doit pouvoir se poursuivre et être respectée par le Nicaragua.
Etant donné le contexte historique de la conclusion du traité et le
libellé de celui-ci, il est très peu probable qu’en 1858 l’une ou l’autre des

Parties aient pris en considération la population autochtone clairsemée
de cette rive. Le comportement ultérieur du Nicaragua corrobore cette
thèse. Le fait que le Nicaragua n’a pas étendu ses dispositions régle-
mentaires, comme par exemple celle du visa obligatoire, à la navigation

quotidienne des habitants de la rive costa-ricienne du San Juan montre
qu’il considérait que le régime du traité de 1858 ne concernait pas cette
pratique.
14. Rien ne justifie la conclusion de la Cour selon laquelle le Costa
Rica jouit du droit, même limité, d’emprunter le fleuve avec des bateaux

officiels afin d’assurer des services aux communautés riveraines.
Même si l’on présume comme le fait la Cour que les Parties, lorsqu’elles
signèrent le traité, avaient l’intention de préserver un droit minimal de
navigation pour les riverains mais décidèrent de ne pas l’inscrire dans le
texte, il reste difficile de comprendre comment ce raisonnement pourrait

conduire à la conclusion qui a été tirée en ce qui concerne les bateaux offi-
ciels. L’utilisation de bateaux officiels aux fins d’assurer des services aux
communautés riveraines n’était pas pratiquée à l’époque de la conclusion
du traité. Il est très difficilement concevable que les Parties aient eu l’inten-
tion de préserver un droit ne découlant pas d’une pratique préexistante.

Il est clair que le Costa Rica a certains besoins qui, pour être couverts,
supposent que des bateaux officiels empruntent le San Juan à des fins non
commerciales. Ces besoins ne se traduisent toutefois pas en droits. Les
Parties devraient elles-mêmes conclure un accord à cet égard. La Cour
n’a pas à le faire pour elles. Comme elle a eu l’occasion de le relever dans

le passé, «[l]a Cour est appelée à interpréter les traités, non à les reviser»
(Interprétation des traités de paix conclus avec la Bulgarie, la Hongrie et
la Roumanie, deuxième phase, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1950 ,
p. 229).

Q UESTIONS RELATIVES AUX POUVOIRS DE RÉGLEMENTATION

15. Je suis entièrement d’accord avec la Cour pour dire que le titulaire
du droit de libre navigation est le Costa Rica. Je ne peux cependant pas

la suivre lorsqu’elle range les propriétaires et les exploitants de bateaux
costa-riciens avec les passagers de ces bateaux, y compris les non-Costa-
Riciens, dans une catégorie unique de personnes bénéficiant de ce droit
(arrêt, par. 114). Je ne peux certainement pas convenir que ce soient les

bateaux eux-mêmes qui exercent le droit de libre navigation (ibid.,
par. 113, 117, 120).

77 A mon avis, le droit de libre navigation accordé au Costa Rica est
exercé par des personnes, à savoir les propriétaires et les exploitants des

bateaux qui naviguent sur le San Juan. C’est le transporteur qui exerce le
droit de libre navigation.
Les vendeurs et les acheteurs de biens peuvent profiter des possibilités
offertes par le droit de libre navigation du Costa Rica, mais ils n’exercent
pas ce droit. Les touristes et les passagers ne font quant à eux qu’acheter

un service. On ne peut interpréter le traité de 1858 comme conférant le
droit perpétuel de libre navigation à des fins commerciales à ces per-
sonnes, qui peuvent être des Costa-Riciens, des ressortissants de pays
tiers ou, éventuellement, des Nicaraguayens. On ne peut davantage l’inter-

préter comme leur conférant d’autres droits, comme celui de se soustraire
au régime des visas du Nicaragua, au nom du droit de libre navigation du
Costa Rica sur le fleuve San Juan.
16. L’obligation faite aux touristes et passagers voyageant sur le San
Juan à bord de bateaux costa-riciens d’être munis d’un visa entre dans le

champ des droits de réglementation que le Nicaragua tient du traité de
1858. Elle découle de ce que le Nicaragua a «le dominium et l’imperium
exclusifs sur les eaux du fleuve San Juan» (arrêt, par. 44). Ce pouvoir de
réglementation est distinct de ceux que détient le Nicaragua en matière de
navigation sur le San Juan. Comme le fait observer la Cour, «la faculté

qu’a chaque Etat de délivrer ou de refuser des visas est une expression
concrète des prérogatives dont il jouit afin de contrôler l’entrée des non-
nationaux sur son territoire» (ibid., par. 113). Comme l’a établi la Cour
dans l’affaire du Droit de passage, cela vaut même dans des cas où il y a
liberté de transit:

«En raison de la tension existant alors dans le territoire indien
intermédiaire, la Cour ne saurait considérer que le refus de passage

opposé par l’Inde à la délégation proposée, ni le refus de visas aux
ressortissants portugais d’origine européenne et aux Portugais d’ori-
gine indienne au service du Gouvernement portugais aient été
contraires à l’obligation qu’imposait à l’Inde le droit de passage du
Portugal. La demande portugaise de droit de passage est subordon-

née à la pleine reconnaissance et à l’exercice de la souveraineté de
l’Inde sur le territoire intermédiaire, sans aucune immunité en faveur
du Portugal. La Cour estime que le refus de passage opposé dans ces
cas par l’Inde relevait en l’espèce de son pouvoir de réglementation
et de contrôle du droit de passage du Portugal.» (Droit de passage

sur territoire indien (Portugal c. Inde), fond, arrêt, C.I.J. Recueil
1960, p. 45.)

17. La disposition concernant les visas peut toucher les intérêts écono-
miques des personnes dont l’activité est d’assurer le transport des tou-
ristes et des passagers. Elle peut gêner certains touristes. Mais elle n’est
pas incompatible avec le droit de libre navigation à des fins de commerce

que détient le Costa Rica. L’exercice de ce droit par le Costa Rica serait cer-
tainement entravé si le Nicaragua refusait systématiquement de délivrer

78des visas aux bateliers ou à toute une catégorie de passagers, comme par
exemple les touristes. Cela constituerait un abus manifeste de la disposi-

tion considérée. Tout droit peut donner lieu à des abus. Ce n’est cepen-
dant pas une raison pour le mettre en question, encore moins pour le
nier. La Cour elle-même reconnaît que l’obligation imposée par le Nica-
ragua en matière de visas n’a pas entravé l’expansion du transport des
passagers par le Costa Rica sur le San Juan (arrêt, par. 116).

18. Selon le raisonnement de la Cour, le caractère discrétionnaire de la
faculté qu’a chaque Etat de délivrer ou de refuser des visas est décisif
pour établir que le Nicaragua ne saurait imposer l’obligation d’être muni
d’un visa aux personnes qui peuvent bénéficier du droit de libre naviga-

tion détenu par le Costa Rica. «Si ce bénéfice leur était refusé, la liberté
de navigation serait entravée.» (Ibid., par. 115.) Or, la Cour admet au
paragraphe 118 que le Nicaragua peut refuser l’entrée sur son territoire
(c’est-à-dire, suivant la logique du raisonnement qu’elle adopte, lui refu-
ser le bénéfice du droit de libre navigation détenu par le Costa Rica) à

une personne pour des raisons valables au regard de l’objectif poursuivi,
comme par exemple le maintien de l’ordre ou la protection de l’environ-
nement. Le Nicaragua «peut agir ainsi lorsque l’intéressé fait connaître
son identité» (ibid., par. 118). Il n’y aurait pas dans ce cas de violation du
droit de libre navigation. En d’autres termes, la Cour considère qu’un

refus dûment motivé d’autoriser une personne à entrer sur le territoire
serait une violation du droit de libre navigation détenu par le Costa Rica
s’il se manifeste par le jeu du mécanisme des visas alors qu’il n’en serait
pas une s’il est signifié à l’intéressé à son arrivée. A mon avis, dans un cas
comme dans l’autre, il n’y aurait aucune violation du droit du Costa

Rica, étant donné que c’est le même pouvoir qui est exercé et que le
caractère discrétionnaire de ce pouvoir est le même.
Enfin, s’il était vrai que le visa obligatoire entrave la liberté de naviga-
tion du Costa Rica, alors il s’ensuivrait que le Nicaragua viole sa propre
liberté de navigation en appliquant cette disposition aux passagers des

bateaux nicaraguayens. La disposition réglementaire nicaraguayenne
concernant les visas s’applique à tout non-Nicaraguayen, quelle que soilta
nationalité du transporteur. Cette seule raison aurait à mon avis dû suf-
fire pour que la Cour fasse droit au Nicaragua sur la question des visas.
19. La Cour admet que la disposition réglementaire imposant aux

bateaux costa-riciens de battre pavillon nicaraguayen n’entrave pas la
liberté de navigation. Cependant, la nature juridique de cette disposition
demeure incertaine. Le Nicaragua a proposé à la Cour une vaste gamme
de choix à cet égard. Il a présenté la disposition en question comme un
attribut de sa souveraineté et comme relevant de la pratique et de la cou-

tume internationales. Aucune preuve d’une pratique étatique n’a été pré-
sentée à l’appui des affirmations du Nicaragua. La Cour se borne à dire
que le Nicaragua peut appliquer cette mesure réglementaire «dans l’exer-
cice de ses pouvoirs souverains» (ibid., par. 132). La question est cepen-

dant de savoir si cette disposition concernant le pavillon répond aux
autres critères énoncés par la Cour en ce qui concerne les pouvoirs de

79réglementation du Nicaragua (arrêt, par. 87). Je ne pense pas que le Nica-

ragua soit parvenu à indiquer quel but légitime il cherche à poursuivre
par ce moyen. Il y aurait clairement un but légitime si le Nicaragua
exigeait des bateaux costa-riciens qu’ils battent pavillon costa-ricien,
étant donné que cela permettrait de les identifier. Les autorités nicara-
guayennes pourraient en effet vouloir distinguer les bateaux costa-

riciens des leurs. En revanche, il semble que l’obligation faite aux
bateaux costa-riciens d’arborer le pavillon nicaraguayen ait pour seul
but de réaffirmer la souveraineté du Nicaragua sur le San Juan. Aux
dires du Nicaragua, «battre pavillon nicaraguayen est un signe de

respect pour la souveraineté de l’Etat hôte» (duplique du Nicaragua,
p. 215, par. 4.93). Etant donné que la souveraineté du Nicaragua sur le
San Juan est incontestable, la disposition visée ne me semble servir
aucun objectif pratique. J’estime toutefois que le Costa Rica aurait pu

accéder à la demande du Nicaragua par courtoisie.

PÊCHE DE SUBSISTANCE

20. A mon avis, de même que le traité de 1858 ne concernait pas les
déplacements effectués par les riverains sur le fleuve afin de faire face aux
nécessités de la vie courante (voir paragraphe 13 ci-dessus), il n’a eu

aucune incidence sur la pêche pratiquée à des fins de subsistance par les
riverains depuis la rive costa-ricienne du San Juan. Je ne suis pas
convaincu que le Nicaragua ait le droit de réglementer cette pratique en
tant que telle. Néanmoins, les Parties devraient coopérer pour s’assurer
qu’elle ne franchit pas le seuil à partir duquel elle deviendrait une activité

commerciale.

(Signé) Leonid S KOTNIKOV .

80

Bilingual Content

SEPARATE OPINION OF JUDGE SKOTNIKOV

1. I voted in favour of most of the operative paragraphs of the Judg-
ment. However, I do not share the Court’s reasoning on a number of key
points and disagree with some of its conclusions.

INTERPRETATION OF THE TERM “C OMERCIO ”

2. I agree that Costa Rica’s right of free navigation under the

1858 Treaty of Limits should not automatically be interpreted restric-
tively on the grounds that it represents a derogation from or limitation of
the sovereignty over the San Juan River conferred by that Treaty on
Nicaragua. Indeed,

“[w]hile it is certainly true that limitations of the sovereignty of a
State over its territory are not to be presumed, this does not mean
that treaty provisions establishing such limitations, such as those

that are in issue in the present case, should for this reason be inter-
preted a priori in a restrictive way” (Judgment, para. 48.).

3. However, as was established by the P.C.I.J. in theS.S. “Wimbledon”
case, the restrictive interpretation is in order in case of doubt:

“the fact remains that Germany has to submit to an important limi-
tation of the exercise of the sovereign rights which no one disputes
that she possesses over the Kiel Canal. This fact constitutes a suffi-

cient reason for the restrictive interpretation, in case of doubt, of the
clause which produces such a limitation. But the Court feels obliged
to stop at the point where the so-called restrictive interpretation
would be contrary to the plain terms of the article and would
destroy what has been clearly granted.” (S.S. “Wimbledon”, Judg-

ments, 1923, P.C.I.J., Series A, No. 1 , pp. 24-25.)
It is obvious that the restrictive interpretation in the present case would

not be contrary to the plain terms of Article VI of the 1858 Treaty and
would not destroy what has been clearly granted. The problem before the
Court is precisely the lack of clarity as to how the term “comercio”
should be interpreted.

4. In these circumstances, the Court should have examined the inten-
tions of the Parties at the time of the conclusion of the Treaty, taking full

74 OPINION INDIVIDUELLE DE M. LE JUGE SKOTNIKOV

[Traduction]

1. J’ai voté en faveur de la plupart des paragraphes du dispositif.
Cependant, je ne souscris pas au raisonnement de la Cour en ce qui
concerne plusieurs points importants et suis en désaccord avec elle sur
certaines des conclusions auxquelles elle est parvenue.

INTERPRÉTATION DU TERME «COMERCIO »

2. Je conviens que le droit de libre navigation que le Costa Rica tient

du traité de limites de 1858 ne devrait pas être automatiquement inter-
prété de manière restrictive au motif qu’il constitue une limite à la
souveraineté dont le Nicaragua a joui sur le San Juan en vertu de cet
instrument. En effet,

«[s’]il est bien exact que les limites à la souveraineté d’un Etat sur
son territoire ne se présument pas, il n’en résulte pas pour autant que
des dispositions conventionnelles instituant de telles limites, telles

que celles qui sont en cause dans la présente espèce, devraient rece-
voir pour cette raison une interprétation étroite a priori» (arrêt,
par. 48).

3. Néanmoins, ainsi que l’a établi la Cour permanente de Justice
internationale dans l’affaire du Vapeur Wimbledon, une interprétation
restrictive s’impose en cas de doute:

«il n’en résulte pas moins pour l’Etat allemand une limitation impor-
tante de l’exercice du droit de souveraineté que nul ne lui conteste
sur le Canal de Kiel; et cela suffit pour que la clause qui consacre

une telle limitation doive, en cas de doute, être interprétée restricti-
vement. Toutefois, la Cour ne saurait aller, sous couleur d’interpré-
tation restrictive, jusqu’à refuser à l’article 380 le sens qui est com-
mandé par ses termes formels. Ce serait une singulière interprétation
que de faire dire à un traité exactement le contraire de ce qu’il dit.»
o
(Vapeur Wimbledon, arrêts, 1923, C.P.J.I. série A n 1, p. 24-25.)
Il est manifeste que, dans la présente affaire, une interprétation restric-

tive ne serait pas contraire aux termes formels de l’article VI du traité de
1858 et ne retirerait pas ce qui a été clairement accordé. Le problème qui
se pose à la Cour tient précisément à un manque de clarté quant à l’inter-
prétation qu’il conviendrait de donner au terme «comercio».

4. Dans ces conditions, la Cour aurait dû considérer les intentions des
Parties à l’époque de la conclusion du traité, en tenant dûment compte du

74account of the well-established principle that limitations on the sover-
eignty of a State are not to be presumed.

5. No evidence submitted by the Parties showed that Nicaragua and
Costa Rica intended at the time the Treaty was concluded to give an
evolving meaning to the word “commerce”. Accordingly, the Court’s pre-
sumption should have been that Nicaragua, when concluding the
1858 Treaty, was unlikely to have intended to act against its own interest

by granting Costa Rica navigational rights which were not in line with
the contemporaneous meaning of the term “comercio” and which would
evolve and expand over time along with the meaning of that term.
6. The Court’s finding that the term “commerce” should be inter-

preted in accordance with its present-day meaning is extraneous to inter-
pretation of the Treaty per se. Neither the generic nature of the term
“commerce” nor the unlimited duration of the Treaty and the perpetuity
of the legal régime established by it (see Judgment, paragraph 67) excludes
the possibility that the Parties’ intention was to grant Costa Rica navi-

gational rights determined by the content of the notion “commerce” as it
existed when the Treaty was concluded. The Court’s solution is based
solely on the mechanical application of the jurisprudence which in a par-
ticular case favours the evolutive approach (see Aegean Sea Continental
Shelf (Greece v. Turkey), Judgment, I.C.J. Reports 1978 , p. 3). It dis-

regards the jurisprudence which in other cases favours interpretation
based on the contemporaneous meaning of the term in question (see
Rights of Nationals of the United States of America in Morocco (France v.
United States of America), Judgment, I.C.J. Reports 1952 , p. 176;
Kasikili/Sedudu Island (Botswana/Namibia), Judgment, I.C.J. Reports

1999 (II), p. 1045). The specificity of the present case is not being
addressed. The Court ignores the S.S. “Wimbledon” dictum (see para-
graph 3 above) and related jurisprudence. Consequently, its conclusion
runs counter to the principle that limitations on sovereignty are not to be
presumed.

7. In 1858, and for decades to come, the commerce was confined to
trade in goods. The principal definition in the 1852 edition of the Dic-
tionary of the Spanish Royal Academy defines “comercio” as “[b]usiness
and trafficking that is done by buying, selling or exchanging some things

for others”. As late as 1897, the Alexander Award confirmed that the
1858 Treaty gave Costa Rica the right of free navigation “con objetos de
comercio” so that it “would have an Atlantic outlet for the import and
export of goods”. Other commercial treaties entered into at the time
reveal themselves to be exclusively concerned with trade in goods (see, for

example, the Volio-Zelaya Treaty of Commerce (Costa Rica-Nicaragua)
of 1868). There is very good reason to assume that in 1858 the Parties
understood the meaning of the word “comercio” as being limited to trade
in goods.

8. However, this conclusion would have left open the question as to
whether, at the present time, the transport of passengers and tourists is

75principe bien établi selon lequel les limites à la souveraineté d’un Etat ne
se présument pas.

5. Les Parties n’ont présenté aucun élément de preuve démontrant que
le Nicaragua et le Costa Rica auraient eu, à l’époque de la conclusion du
traité, l’intention de conférer au terme «commerce» un sens évolutif. Dès
lors, la Cour aurait dû partir du principe qu’il était improbable que le
Nicaragua ait agi contre ses propres intérêts en conférant au Costa Rica

des droits de navigation qui ne correspondaient pas au sens que le terme
«comercio» revêtait à l’époque et qui allaient, tout comme le terme lui-
même, évoluer et couvrir avec le temps un champ plus large.
6. La conclusion de la Cour selon laquelle il convient d’interpréter le

terme «commerce» conformément à son sens actuel est sans rapport avec
l’interprétation du traité proprement dite. Ni le caractère générique du
terme «commerce», ni la durée illimitée du traité et la pérennité du
régime juridique établi par celui-ci (arrêt, par. 67), n’excluent la possibi-
lité que les Parties aient eu l’intention d’accorder au Costa Rica des droits

de navigation définis conformément à ce que recouvrait la notion de
«commerce» à l’époque de la conclusion du traité. La solution de la
Cour repose exclusivement sur l’application mécanique de la jurispru-
dence qui, dans un cas particulier, favorise la prise en considération du
sens évolutif (voir affaire du Plateau continental de la mer Egée (Grèce

c. Turquie), arrêt, C.I.J. Recueil 1978 , p. 3). Elle passe sous silence la
jurisprudence qui, dans d’autres affaires, favorise l’interprétation fondée
sur le sens qu’avait à l’époque pertinente le terme considéré (voir Droit
des ressortissants des Etats-Unis d’Amérique au Maroc (France c. Etats-
Unis d’Amérique), arrêt, C.I.J. Recueil 1952 , p. 176; Ile de Kasikili/

Sedudu (Botswana/Namibie), arrêt, C.I.J. Recueil 1999 (II) , p. 1045).
La question de la spécificité de la présente affaire n’est pas abordée. La
Cour ne tient pas compte du dictum de l’affaire du Vapeur Wimbledon
(voir paragraphe 3 ci-dessus) et de la jurisprudence connexe. En consé-
quence, sa conclusion contrarie le principe selon lequel les limites à la

souveraineté ne se présument pas.
7. En 1858, et pendant des dizaines d’années encore, le commerce se
limitait aux échanges de biens. L’édition de 1852 du dictionnaire de
l’Académie royale espagnole donne pour principale définition de «comer-
cio»: «activité et trafic qui s’effectuent par l’achat, la vente ou l’échange

de choses contre d’autres». Même encore en 1897, la sentence Alexander
confirme que le traité de 1858 avait donné au Costa Rica le droit de libre
navigation «con objetos de comercio» afin qu’il «ait sur l’Atlantique un
débouché pour l’importation et l’exportation de biens». Il apparaît que
d’autres traités commerciaux conclus à l’époque concernaient exclusive-

ment le commerce de biens (voir, par exemple, le traité commercial Volio-
Zelaya (Costa Rica-Nicaragua) de 1868). Il y a tout lieu de supposer que
pour les Parties, en 1858, le sens du mot «comercio» se limitait aux
échanges de biens.

8. Cette conclusion aurait cependant laissé sans réponse la question de
savoir si, à l’heure actuelle, le transport des passagers et des touristes est

75covered by Article VI of the 1858 Treaty. To answer this question, the

Court should have examined the practice of the Parties subsequent to the
conclusion of the Treaty. As was recalled in the Kasikili/Sedudu Island
case, “when called upon to interpret the provisions of a treaty, the Court
has itself frequently examined the subsequent practice of the parties in
the application of that treaty” (Kasikili/Sedudu Island (Botswana/

Namibia), Judgment, I.C.J. Reports 1999 (II) , p. 1076, para. 50).

9. Nicaragua submits evidence that at the time the Treaty of Limits
was concluded and for more than 100 years thereafter, it alone controlled

the commercial transport of passengers. Be that as it may, it is clear that
Costa Rican-operated tourism on the San Juan River has been present
for at least a decade, and to a substantial degree. Nicaragua has never
protested. This is in contrast to Nicaragua’s treatment of police vessels,

which it has repeatedly asserted have no right whatsoever to travel on the
San Juan. Nicaragua has not only engaged in a consistent practice of
allowing tourist navigation by Costa Rican operators, but has also sub-
jected it to its regulations. This can be seen as recognition by Nicaragua

that Costa Rica acted as of right. The common view of the Parties to that
effect can be inferred from the Agreement of Understanding on the Tour-
ist Activity in the Border Zone of the San Juan River between the Min-
isters of Tourism of the two countries, signed on 5 June 1994.

10. In my view, the subsequent practice in the application of the
Treaty suggests that the Parties have established an agreement regarding
its interpretation: Costa Rica has a right under the 1858 Treaty to trans-
port tourists — that is, passengers who pay a price for the service pro-

vided. This right of Costa Rica necessarily extends to the transport of all
other passengers who pay a price to the carriers.

ISSUES R ELATED TO FREEDOM OF N AVIGATION

11. According to the Judgment, the Parties must be presumed to have

intended to preserve for riparians living on the Costa Rican bank of the
San Juan River a minimal right of navigation to meet their essential
requirements. Therefore such a right can be inferred from the provisions
of the Treaty as a whole (Judgment, para. 79). Furthermore, for the same

reasons, it can be inferred from the Treaty that Costa Rica has the right
of navigation on the San Juan with official vessels (including police ves-
sels) that provide the population with what it needs in order to meet the
necessities of daily life (ibid., para. 84).
12. I am not at all convinced that any navigational rights have been

established by the 1858 Treaty other than in its Article VI — the only
article dealing with the issue of navigation.
13. Although I disagree with the majority that the riparians on the

76couvert par l’article VI du traité de 1858. En vue de répondre à cette
question, la Cour aurait dû examiner la pratique des Parties ultérieure-

ment à la conclusion du traité. Ainsi qu’elle l’a rappelé dans l’affaire de
l’Ile de Kasikili/Sedudu, «la Cour elle-même, par le passé, lorsqu’elle a
été amenée à interpréter les dispositions d’un traité, a fréquemment exa-
miné la pratique ultérieurement suivie par les parties dans l’application
de ce traité» (Ile de Kasikili/Sedudu (Botswana/Namibie), arrêt, C.I.J.

Recueil 1999 (II), p. 1076, par. 50).
9. Le Nicaragua présente des éléments qui montrent qu’à l’époque de
la conclusion du traité de limites, puis pendant plus d’un siècle, lui seul se
chargeait du transport commercial de passagers. Quoi qu’il en soit, il est

manifeste que les activités touristiques du Costa Rica sur le San Juan
existent depuis au moins dix ans et qu’elles sont considérables. Le Nica-
ragua n’a jamais protesté. Il n’en va pas de même de l’accueil qu’il réserve
aux bateaux de la police, qui, a-t-il affirmé à de nombreuses reprises,
n’ont aucun droit de naviguer sur le San Juan. Non seulement le Nica-

ragua a systématiquement autorisé la navigation touristique prise en
charge par des exploitants costa-riciens, mais il l’a aussi soumise à sa
réglementation. Cela peut être interprété comme la reconnaissance par le
Nicaragua de ce que le Costa Rica agissait de plein droit. La position
commune des Parties à cet égard peut être inférée du mémorandum

d’accord entre les ministres du tourisme des deux pays sur l’activité tou-
ristique dans la zone frontalière du fleuve San Juan, signé le 5 juin 1994.
10. A mon avis, la pratique ultérieure de l’application du traité indique
que les Parties sont parvenues à un accord en ce qui concerne son inter-
prétation: le Costa Rica détient, en vertu du traité de 1858, le droit de

transporter des touristes — c’est-à-dire des passagers qui paient un prix
en contrepartie du service rendu. Ce droit du Costa Rica s’étend néces-
sairement au transport de tous les autres passagers qui effectuent un paie-
ment aux transporteurs.

Q UESTIONS LIÉES À LA LIBERTÉ DE NAVIGATION

11. Selon l’arrêt, il faut présumer que les Parties avaient entendu
maintenir au profit des riverains costa-riciens du San Juan un droit mini-

mal de navigation afin qu’ils puissent subvenir à leurs besoins essentiels.
Ce droit peut donc se déduire des dispositions du traité dans son
ensemble (arrêt, par. 79). De surcroît, pour les mêmes raisons, on peut
déduire du traité que le Costa Rica a le droit d’emprunter le San Juan
avec des bateaux officiels (y compris des bateaux de la police) en vue de

fournir aux riverains ce dont ils ont besoin pour faire face aux nécessités
de la vie courante (ibid., par. 84).
12. Je ne suis pas du tout convaincu que le traité de 1858 ait établi
aucun autre droit de navigation que celui qui figure à son article VI

— c’est-à-dire le seul article qui traite de la question de la navigation.
13. Bien que je ne souscrive pas au point de vue de la majorité de la

76Costa Rican bank have a right under the Treaty to navigate on the San

Juan River, I do think that the Treaty left unaffected the practice of
riparians to travel on the river to meet the requirements of their daily life.
This is to be continued and respected by Nicaragua.

Given the historical background to the conclusion of the Treaty and its

actual terms, it is very unlikely that in 1858 either Party had in mind the
sparse indigenous population of that bank. The subsequent conduct by
Nicaragua supports this conclusion. It shows that Nicaragua has never
been concerned about the practice in question. The fact that Nicaragua

did not extend its regulations, such as the visa requirement, to daily rou-
tine navigation by inhabitants of Costa Rica’s bank of the San Juan is
indicative of this practice being treated by Nicaragua as extraneous to the
1858 Treaty régime.

14. I see no justification for the Court’s finding that Costa Rica has
the right, albeit limited, to navigate with official vessels to provide serv-
ices for the riparian communities.
Even if one accepts the Court’s presumption that the Parties, when

concluding the Treaty, intended to preserve a minimal right of navigation
for riparians, but decided not to spell this out in the text, it is still difficult
to see how this line of reasoning could lead to the conclusion that the
Court reaches in respect of official vessels. No practice of using official

vessels for the purpose of providing services for riparian communities
existed at the time the Treaty was concluded. It is very difficult to
imagine the Parties intending to preserve a right which is not derived
from pre-existing practice.
It is clear that Costa Rica has certain needs calling for use of the San

Juan River for non-commercial purposes by public vessels, including pro-
viding medical and other services to riparians. However, these needs do
not translate into rights. The Parties should reach an arrangement on the
subject on their own terms. It is not for the Court to do so on their

behalf. As the Court has had occasion to note in the past, “[i]t is the duty
of the Court to interpret the Treaties, not to revise them” (Interpretation
of Peace Treaties with Bulgaria, Hungary and Romania, Second Phase,
Advisory Opinion, I.C.J. Reports 1950 , p. 229).

ISSUES R ELATED TO REGULATORY P OWERS

15. I fully agree that the titleholder of the right of free navigation is
Costa Rica. However, I cannot concur with the Court when it puts the
owners and operators of Costa Rican vessels together with the passengers
on those vessels, including non-Costa Ricans, in a single category of per-
sons who benefit from that right (Judgment, para. 114). I certainly can-

not accept that it is vessels themselves which are exercising the freedom
of navigation (ibid., paras. 113, 117, 120).

77Cour selon lequel les riverains costa-riciens jouissent, en vertu du traité,
du droit de naviguer sur le San Juan, je considère que cet instrument n’a

eu aucune incidence sur la pratique de ceux-ci consistant à emprunter le
fleuve pour faire face aux nécessités de leur vie courante. Cette pratique
doit pouvoir se poursuivre et être respectée par le Nicaragua.
Etant donné le contexte historique de la conclusion du traité et le
libellé de celui-ci, il est très peu probable qu’en 1858 l’une ou l’autre des

Parties aient pris en considération la population autochtone clairsemée
de cette rive. Le comportement ultérieur du Nicaragua corrobore cette
thèse. Le fait que le Nicaragua n’a pas étendu ses dispositions régle-
mentaires, comme par exemple celle du visa obligatoire, à la navigation

quotidienne des habitants de la rive costa-ricienne du San Juan montre
qu’il considérait que le régime du traité de 1858 ne concernait pas cette
pratique.
14. Rien ne justifie la conclusion de la Cour selon laquelle le Costa
Rica jouit du droit, même limité, d’emprunter le fleuve avec des bateaux

officiels afin d’assurer des services aux communautés riveraines.
Même si l’on présume comme le fait la Cour que les Parties, lorsqu’elles
signèrent le traité, avaient l’intention de préserver un droit minimal de
navigation pour les riverains mais décidèrent de ne pas l’inscrire dans le
texte, il reste difficile de comprendre comment ce raisonnement pourrait

conduire à la conclusion qui a été tirée en ce qui concerne les bateaux offi-
ciels. L’utilisation de bateaux officiels aux fins d’assurer des services aux
communautés riveraines n’était pas pratiquée à l’époque de la conclusion
du traité. Il est très difficilement concevable que les Parties aient eu l’inten-
tion de préserver un droit ne découlant pas d’une pratique préexistante.

Il est clair que le Costa Rica a certains besoins qui, pour être couverts,
supposent que des bateaux officiels empruntent le San Juan à des fins non
commerciales. Ces besoins ne se traduisent toutefois pas en droits. Les
Parties devraient elles-mêmes conclure un accord à cet égard. La Cour
n’a pas à le faire pour elles. Comme elle a eu l’occasion de le relever dans

le passé, «[l]a Cour est appelée à interpréter les traités, non à les reviser»
(Interprétation des traités de paix conclus avec la Bulgarie, la Hongrie et
la Roumanie, deuxième phase, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1950 ,
p. 229).

Q UESTIONS RELATIVES AUX POUVOIRS DE RÉGLEMENTATION

15. Je suis entièrement d’accord avec la Cour pour dire que le titulaire
du droit de libre navigation est le Costa Rica. Je ne peux cependant pas

la suivre lorsqu’elle range les propriétaires et les exploitants de bateaux
costa-riciens avec les passagers de ces bateaux, y compris les non-Costa-
Riciens, dans une catégorie unique de personnes bénéficiant de ce droit
(arrêt, par. 114). Je ne peux certainement pas convenir que ce soient les

bateaux eux-mêmes qui exercent le droit de libre navigation (ibid.,
par. 113, 117, 120).

77 In my view, the right to freedom of navigation afforded to Costa Rica
is exercised by persons — owners and operators of vessels navigating the

San Juan River. It is the carrier that exercises the freedom to navigate.

Sellers or buyers of goods may benefit from the possibilities which are
offered by Costa Rica’s right to free navigation; they do not, however,
exercise that right. Tourists and passengers are merely purchasing a serv-

ice. The 1858 Treaty cannot be read as affording the perpetual right of
free navigation for commercial purposes to those persons, who may be
Costa Ricans, nationals of third countries or, conceivably, Nicaraguan
citizens. Nor can it be interpreted as affording to them any other rights,

such as exemption from Nicaragua’s visa régime, by virtue of Costa
Rica’s right to freely navigate the San Juan River.

16. Imposing a visa requirement on tourists or passengers travelling
on Costa Rican vessels is within Nicaragua’s regulatory rights under the

1858 Treaty. It derives from Nicaragua’s “exclusive dominium and imper-
ium over the waters of the San Juan River” (Judgment, para. 44). This
regulatory power is distinct from Nicaragua’s powers to regulate naviga-
tion on the San Juan River. As the Court states, “the power of a State to
issue or refuse visas is a practical expression of the prerogative which

each State has to control entry by non-nationals into its territory” (ibid.,
para. 113). This remains true, as was established in the Right of Passage
case, even in cases where freedom of transit exists:

“In view of the tension then prevailing in intervening Indian ter-
ritory, the Court is unable to hold that India’s refusal of passage to

the proposed delegation and its refusal of visas to Portuguese nation-
als of European origin and to native Indian Portuguese in the
employ of the Portuguese Government was action contrary to its
obligation resulting from Portugal’s right of passage. Portugal’s
claim of a right of passage is subject to full recognition and exercise

of Indian sovereignty over the intervening territory and without any
immunity in favour of Portugal. The Court is of the view that
India’s refusal of passage in those cases was, in the circumstances,
covered by its power of regulation and control of the right of pas-
sage of Portugal.” (Right of Passage over Indian Territory (Portu-

gal v. India), Merits, Judgment, I.C.J. Reports 1960 , p. 45.)

17. The visa requirement may affect the business interests of persons
or entities engaged in the commercial activity of providing tourist or pas-
senger transport. It may inconvenience individual tourists. But it is not
inconsistent with Costa Rica’s right to free navigation for commercial

purposes. The exercise by Costa Rica of this right would certainly be
impeded by Nicaragua’s systematic refusal to issue visas to boatmen or

78 A mon avis, le droit de libre navigation accordé au Costa Rica est
exercé par des personnes, à savoir les propriétaires et les exploitants des

bateaux qui naviguent sur le San Juan. C’est le transporteur qui exerce le
droit de libre navigation.
Les vendeurs et les acheteurs de biens peuvent profiter des possibilités
offertes par le droit de libre navigation du Costa Rica, mais ils n’exercent
pas ce droit. Les touristes et les passagers ne font quant à eux qu’acheter

un service. On ne peut interpréter le traité de 1858 comme conférant le
droit perpétuel de libre navigation à des fins commerciales à ces per-
sonnes, qui peuvent être des Costa-Riciens, des ressortissants de pays
tiers ou, éventuellement, des Nicaraguayens. On ne peut davantage l’inter-

préter comme leur conférant d’autres droits, comme celui de se soustraire
au régime des visas du Nicaragua, au nom du droit de libre navigation du
Costa Rica sur le fleuve San Juan.
16. L’obligation faite aux touristes et passagers voyageant sur le San
Juan à bord de bateaux costa-riciens d’être munis d’un visa entre dans le

champ des droits de réglementation que le Nicaragua tient du traité de
1858. Elle découle de ce que le Nicaragua a «le dominium et l’imperium
exclusifs sur les eaux du fleuve San Juan» (arrêt, par. 44). Ce pouvoir de
réglementation est distinct de ceux que détient le Nicaragua en matière de
navigation sur le San Juan. Comme le fait observer la Cour, «la faculté

qu’a chaque Etat de délivrer ou de refuser des visas est une expression
concrète des prérogatives dont il jouit afin de contrôler l’entrée des non-
nationaux sur son territoire» (ibid., par. 113). Comme l’a établi la Cour
dans l’affaire du Droit de passage, cela vaut même dans des cas où il y a
liberté de transit:

«En raison de la tension existant alors dans le territoire indien
intermédiaire, la Cour ne saurait considérer que le refus de passage

opposé par l’Inde à la délégation proposée, ni le refus de visas aux
ressortissants portugais d’origine européenne et aux Portugais d’ori-
gine indienne au service du Gouvernement portugais aient été
contraires à l’obligation qu’imposait à l’Inde le droit de passage du
Portugal. La demande portugaise de droit de passage est subordon-

née à la pleine reconnaissance et à l’exercice de la souveraineté de
l’Inde sur le territoire intermédiaire, sans aucune immunité en faveur
du Portugal. La Cour estime que le refus de passage opposé dans ces
cas par l’Inde relevait en l’espèce de son pouvoir de réglementation
et de contrôle du droit de passage du Portugal.» (Droit de passage

sur territoire indien (Portugal c. Inde), fond, arrêt, C.I.J. Recueil
1960, p. 45.)

17. La disposition concernant les visas peut toucher les intérêts écono-
miques des personnes dont l’activité est d’assurer le transport des tou-
ristes et des passagers. Elle peut gêner certains touristes. Mais elle n’est
pas incompatible avec le droit de libre navigation à des fins de commerce

que détient le Costa Rica. L’exercice de ce droit par le Costa Rica serait cer-
tainement entravé si le Nicaragua refusait systématiquement de délivrer

78by its refusal to grant visas to a whole category of passengers, for exam-
ple tourists. This, however, would have constituted a manifest abuse of

the visa requirement. Any right can be abused. It is not a reason, how-
ever, to question a right, let alone to deny it. The Court itself acknowl-
edges that the visa requirement imposed by Nicaragua has not impeded
growth of Costa Rica’s passenger transport on the San Juan River (Judg-
ment, para. 116).

18. Following the Court’s approach, the fact that the power of a State
to issue or refuse a visa entails discretion is decisive in determining that
Nicaragua may not impose a visa requirement on those persons who may
benefit from Costa Rica’s right of free navigation. “If that benefit is

denied, the freedom of navigation would be hindered.” (Ibid., para. 115.)
However, the Court accepts in paragraph 118 that Nicaragua can refuse
entry (i.e., according to the Court’s logic, deny the benefit of Costa Rica’s
right from free navigation) to a particular person if such action is justified
in terms of relevant purpose, for example, law enforcement or environ-

mental protection. Nicaragua “can do that at the point that the person
identifies him or herself” (ibid., para. 118). No breach of the freedom of
navigation would be involved in that case. In other words, a denial of
entry, for good reason, through application of the visa mechanism would,
in the Court’s view, constitute a breach of Costa Rica’s Treaty right to

free navigation, whereas a denial of entry on the spot for the very same
reason would not. In my view, Costa Rica’s right would not be breached
in either case, since it is the same power which is being exercised and the
nature of discretion it entails in both instances is the same.

Finally, should it be true that Costa Rica’s freedom of navigation is
hindered by the visa requirement, then it would follow that Nicaragua is
breaching its own freedom of navigation by maintaining this requirement

in respect of passengers on Nicaraguan boats. The Nicaraguan visa regu-
lation applies to non-Nicaraguans irrespective of the nationality of the
carrier. This alone, in my view, should have been reason enough for the
Court to uphold Nicaragua’s position on the subject.
19. The Court acknowledges that Nicaragua’s regulation requiring

Costa Rica’s vessels to fly the Nicaraguan flag does not impede the free-
dom of navigation. However, the legal nature of this regulation remains
unclear. Nicaragua suggested a wide variety of choices for the Court. It
was referred to as being an attribute of Nicaragua’s sovereignty and a
matter of international custom and practice. No evidence of State prac-

tice was produced supporting Nicaragua’s contentions. The Court finds
that Nicaragua may impose this regulation simply “in the exercise of its
sovereign powers” (ibid., para. 132). The question is, however, whether
the flag requirement meets other criteria set forth by the Court in respect

of Nicaragua’s regulatory powers (ibid., para. 87). I do not think that
Nicaragua succeeded in presenting a legitimate purpose that it is seeking

79des visas aux bateliers ou à toute une catégorie de passagers, comme par
exemple les touristes. Cela constituerait un abus manifeste de la disposi-

tion considérée. Tout droit peut donner lieu à des abus. Ce n’est cepen-
dant pas une raison pour le mettre en question, encore moins pour le
nier. La Cour elle-même reconnaît que l’obligation imposée par le Nica-
ragua en matière de visas n’a pas entravé l’expansion du transport des
passagers par le Costa Rica sur le San Juan (arrêt, par. 116).

18. Selon le raisonnement de la Cour, le caractère discrétionnaire de la
faculté qu’a chaque Etat de délivrer ou de refuser des visas est décisif
pour établir que le Nicaragua ne saurait imposer l’obligation d’être muni
d’un visa aux personnes qui peuvent bénéficier du droit de libre naviga-

tion détenu par le Costa Rica. «Si ce bénéfice leur était refusé, la liberté
de navigation serait entravée.» (Ibid., par. 115.) Or, la Cour admet au
paragraphe 118 que le Nicaragua peut refuser l’entrée sur son territoire
(c’est-à-dire, suivant la logique du raisonnement qu’elle adopte, lui refu-
ser le bénéfice du droit de libre navigation détenu par le Costa Rica) à

une personne pour des raisons valables au regard de l’objectif poursuivi,
comme par exemple le maintien de l’ordre ou la protection de l’environ-
nement. Le Nicaragua «peut agir ainsi lorsque l’intéressé fait connaître
son identité» (ibid., par. 118). Il n’y aurait pas dans ce cas de violation du
droit de libre navigation. En d’autres termes, la Cour considère qu’un

refus dûment motivé d’autoriser une personne à entrer sur le territoire
serait une violation du droit de libre navigation détenu par le Costa Rica
s’il se manifeste par le jeu du mécanisme des visas alors qu’il n’en serait
pas une s’il est signifié à l’intéressé à son arrivée. A mon avis, dans un cas
comme dans l’autre, il n’y aurait aucune violation du droit du Costa

Rica, étant donné que c’est le même pouvoir qui est exercé et que le
caractère discrétionnaire de ce pouvoir est le même.
Enfin, s’il était vrai que le visa obligatoire entrave la liberté de naviga-
tion du Costa Rica, alors il s’ensuivrait que le Nicaragua viole sa propre
liberté de navigation en appliquant cette disposition aux passagers des

bateaux nicaraguayens. La disposition réglementaire nicaraguayenne
concernant les visas s’applique à tout non-Nicaraguayen, quelle que soilta
nationalité du transporteur. Cette seule raison aurait à mon avis dû suf-
fire pour que la Cour fasse droit au Nicaragua sur la question des visas.
19. La Cour admet que la disposition réglementaire imposant aux

bateaux costa-riciens de battre pavillon nicaraguayen n’entrave pas la
liberté de navigation. Cependant, la nature juridique de cette disposition
demeure incertaine. Le Nicaragua a proposé à la Cour une vaste gamme
de choix à cet égard. Il a présenté la disposition en question comme un
attribut de sa souveraineté et comme relevant de la pratique et de la cou-

tume internationales. Aucune preuve d’une pratique étatique n’a été pré-
sentée à l’appui des affirmations du Nicaragua. La Cour se borne à dire
que le Nicaragua peut appliquer cette mesure réglementaire «dans l’exer-
cice de ses pouvoirs souverains» (ibid., par. 132). La question est cepen-

dant de savoir si cette disposition concernant le pavillon répond aux
autres critères énoncés par la Cour en ce qui concerne les pouvoirs de

79to pursue in imposing this requirement. Such a purpose would be evident

should Nicaragua require Costa Rican vessels to fly the Costa Rican flag,
since it shows the identity of the vessel. The Nicaraguan authorities may
indeed be interested in distinguishing between its own and Costa Rican
boats. By contrast, it seems that the sole purpose of requiring Costa

Rican boats to fly the Nicaraguan flag is to reassert Nicaragua’s sover-
eignty over the San Juan River. As Nicaragua puts it: “Flying the latter
is a gesture of respect for the sovereignty of the host State.” (Rejoinder of
Nicaragua, p. 215, para. 4.93.) Given the fact that Nicaragua’s sover-

eignty over the San Juan River is beyond doubt, I do not think that any
practical purpose is achieved by imposing the requirement in question.
However, I do believe that Costa Rica could have accepted Nicaragua’s
request as a matter of courtesy.

S UBSISTENCE FISHING

20. In my view, the 1858 Treaty, as in the case of the practice of ripar-
ians travelling on the river to meet the requirements of their daily life (see

paragraph 13 above), left unaffected the practice of subsistence fishing by
riparians from the Costa Rican bank of the San Juan River. I am not
convinced that Nicaragua has a right to regulate this practice as such.
However, the Parties should co-operate in making sure that this practice

does not cross the threshold of fishing for commercial purposes.

(Signed) Leonid S KOTNIKOV .

80réglementation du Nicaragua (arrêt, par. 87). Je ne pense pas que le Nica-

ragua soit parvenu à indiquer quel but légitime il cherche à poursuivre
par ce moyen. Il y aurait clairement un but légitime si le Nicaragua
exigeait des bateaux costa-riciens qu’ils battent pavillon costa-ricien,
étant donné que cela permettrait de les identifier. Les autorités nicara-
guayennes pourraient en effet vouloir distinguer les bateaux costa-

riciens des leurs. En revanche, il semble que l’obligation faite aux
bateaux costa-riciens d’arborer le pavillon nicaraguayen ait pour seul
but de réaffirmer la souveraineté du Nicaragua sur le San Juan. Aux
dires du Nicaragua, «battre pavillon nicaraguayen est un signe de

respect pour la souveraineté de l’Etat hôte» (duplique du Nicaragua,
p. 215, par. 4.93). Etant donné que la souveraineté du Nicaragua sur le
San Juan est incontestable, la disposition visée ne me semble servir
aucun objectif pratique. J’estime toutefois que le Costa Rica aurait pu

accéder à la demande du Nicaragua par courtoisie.

PÊCHE DE SUBSISTANCE

20. A mon avis, de même que le traité de 1858 ne concernait pas les
déplacements effectués par les riverains sur le fleuve afin de faire face aux
nécessités de la vie courante (voir paragraphe 13 ci-dessus), il n’a eu

aucune incidence sur la pêche pratiquée à des fins de subsistance par les
riverains depuis la rive costa-ricienne du San Juan. Je ne suis pas
convaincu que le Nicaragua ait le droit de réglementer cette pratique en
tant que telle. Néanmoins, les Parties devraient coopérer pour s’assurer
qu’elle ne franchit pas le seuil à partir duquel elle deviendrait une activité

commerciale.

(Signé) Leonid S KOTNIKOV .

80

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Document Long Title

Opinion individuelle de M. le juge Skotnikov

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