Opinion dissidente de M. Schwebel (traduction)

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076-19890720-JUD-01-02-EN
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OPINION DISSIDENTE DE M. SCHWEBEL

[Traduction]

L'arrêtde la Chambre me paraît judicieux sous deux aspects primor-
diaux qui ontd'importantes conséquencespour lavitalitéetledéveloppe-
ment du droit international dans lesdomaines auxquels il serapporte.
En premier lieu, l'arrêtapplique une règlede raison lorsqu'il indique
l'extensionde ce qui est requis en matière d'épuisement desvoies de re-
cours internes.Il dit, non pas qu'il faut avoir épuisé tousles recours in-
ternes, mais que lorsqu'en substance les recours internes ont été épuisés
celasuffitpour répondre auxexigencesdelarègle,mêms e'ilsepeut qu'en
l'espècetelle ou telle voie de recours n'a pas en fait étéutilisée.Depuis
longtemps,bien entendu, l'un des aspects essentiels de la règle estqu'on
ne peut exigerl'épuisement des recours internes lorsqu'iln'existepas de

recours effectifà épuiser.On pourrait dire que la Chambre n'a fait que
réaffirmercet aspect établide la règle. Ellel'aréaffirmé en effet,maisde
telle sorteque l'arrêtontribue à éluciderlarègledesrecours internes en
indiquant que, lorsque les éléments d'une affaireont éténettement exa-
minésau fond par les tribunaux d'un Etat,la règlen'exigepas que ces
élémentsaient aussi fait l'objetd'un débatjudiciaire comportant la pré-
sentation detout argumentjuridique pertinent sur lequel telle outelleju-
ridiction interne aurait étéhabilitéestatuer,aussifaiblequ'ait pu êtreen
pratique la possibilitéd'aboutir à un résultat différent.Les Etats-Unis
d'Amériqueont soutenu que leur demande était recevablepuisque «tous
lesrecoursinternes raisonnables »avaient étéépuisép s; ur l'essentiel,la
Chambre apartagécepoint devue,et àjuste titre. Ellea ainsiramenéàde
sages limites certaines interprétations antérieuresde l'extension de la
règlede l'épuisement des recours internes.

En secondlieu, dansune largemesure, l'arrêt interprètleetraité d'ami-
tié,de commerce et de navigation entre les Etats-Unis et l'Italie d'une
façon qui lesoutient au lieudelerestreindre entant qu'instrumentpour la
protection desdroits desressortissants,sociétéset associationsdes Etats-
Unis en Italie et des droits des ressortissants, sociétéset associations de
l'Italie aux Etats-Unis. Des arguments ont été présentés avec insistance
qui, s'ilsavaient été retenus, auraient privle traité d'unebonne partie
de sa valeur. En particulier, on a soutenu que letraité éta, our l'essen-
tiel, sans rapport avec les réclamations des Etats-Unis enl'espèce,parce
que les mesures prises par l'Italie (notamment la réquisitionde l'usine
de l'ELSI et de son équipement) affectaient directement non pas des
ressortissants ou des sociétésdes Etats-Unis,mais une société italienne,
17ELSI,dont les actions se trouvaient appartenir à des sociétés amé-
ricaines dont les droits en tant qu'actionnaires étaient,dans une large

mesure,hors du champ de la protection assuréepar letraité.La Chambren'a pas retenu cet argument. Elle n'a pas accepténon plus la thèse selon
laquelle ledroit de constituer,contrôler etgérerune sociéselimitaità la
créationde l'entreprise età l'électionde ses administrateurs et qu'il ne
s'appliquait pasà sa gestion courante; la Chambre n'apas considéré non
plus que la réquisitionde l'usinede cetteentreprise et deson équipement
était sanseffet sur le droit de la contrôler et de la gérer.Elle n'a pas non
plus jugénécessairede se prononcer sur la thèse suivant laquelle les

termes du traité devaient être interprétés restrictivemend t,e façon à
englober une expropriation et non un taking,préférant direque «cette
question ..[ne]doit [pas]être résolue en l'espèce)). Cette interprétation,
comme la plupart des autres interprétations restrictivesdu traité,a été
laisséede côtépar la Chambre.
En outre,l'arrêtde la Chambre ne portepas atteinte au principe «de la
protection et de la sécurité lesplus constantespour [les]personnes et [les]
biens»,qui esténoncé dans letraité,non plusqu'aux dispositionsquipré-
voient «lepaiement rapide d'une indemnitéréelle etéquitable»pour les
étrangers privésde leurs biens. Le sens donnéaux termes ((indemnité
réelle etéquitablepar lesEtats-Unisn'a pas étécontesté L.esEtats-Unis
ont soutenu que, lorsqu'un Etat prive un ressortissant étrangerde droits
sur lesbiens d'une entreprise commerciale,«l'indemnisation devraitêtre
fondée surla valeur totale de l'entreprise». Les Etats-Unis ont souligné

que, normalement, pour déterminerla valeur d'une entreprise, on tient
compte de ses gains potentiels mais, en l'occurrence, ils n'ont pas pré-
sentédedemande concernant desbénéficesfuturs,puisqueI'ELSIne fai-
saitpasde bénéfices.Etantdonnéquelaréquisitionremonte à 1968etque
lesEtats-Unissoutiennent qu'elle a empêchélaliquidation régulièd rela
sociétéi,ls ont proposé que,pour mesurerla valeur de I'ELSI,on prenne
sa valeur comptable à ce moment-là,sans omettre de soulignerqu'en gé-
néralles Etats-Unis ne considèrent pas la valeur comptable comme une
juste mesure delavaleur d'une entreprise enactivitéetqu'en faitlavaleur
comptable est largement écartée parcequ'elle nedonne pas une mesure
suffisante de la valeur d'une entreprise. Ces principes n'ont pas été
contestés, mais l'Italie a soutenu non seulement que I'ELSI n'avait été
privée d'aucun des droitsque lui accordait le traitéet qu'en toute hypo-
thèse,étant donnésa situation, sa valeur réelleétaittrès inférieureà sa

valeur comptable.
En somme,lesdispositions pertinentes du traitéont été dansune large
mesure interprétéesde manière à leur donner effet plutôt qu'à lespriver
d'effet. Il n'a pas été fait droit aux revendications des Etats-Unisdans
cette affaire, mais ce n'est pas parce que la Chambre s'est prononcée
contre les Etats-Unis en ce qui concerne le droit découlantdu traité;elle
s'estprononcée contrelesEtats-Unis à l'égarddela significationpratique
etjuridique qu'ilfaut attribuer aux faits de la cause.
Je ne partage pas entièrement l'opinion de la Chambre, en particulier
sur deuxpoints importants. La Chambre a raison, àmon sens,d'indiquer
quede prime abord la réquisitionde l'usinede I'ELSIsembleavoirprivé
Raytheon et Machlett du droitque leur conférait l'articleIII du traitéde((contrôler et gérer» E EL S mI,is je ne suispas d'accord avecla conclu-
sion de la Chambre selonlaquellel'article III n'aurait néanmoins pas été
violé,pour la raison qu'au moment de la réquisitionlesdroits de contrôle
et de gestion de Raytheon et Machlett n'existaient plus, soit parce que la
possibilitématérielle,pour I'ELSI,de procéder àl'époque à la liquidation
régulièredes actifs de la société n'apas été suffisamment établie, soit
parce qu'à ce stade I'ELSI était insolvable et aurait dû par conséquent
demander àêtremise enfaillite. Jenepartage pas non plusl'opinion de la
Chambre lorsqu'elle conclut que la réquisition n'était pas un acte arbi-
traire quiviolait la disposition de l'article premier de l'accord complétant
letraité aux termesde laquelle lesressortissants et les sociétésdesparties
contractantes «ne seront pas soumis ...à des mesures arbitraires)). La
Chambre aretenu la conceptionclassique de cequi constitueun actearbi-

traire en droit international et cette conception me convient, maisje suis
en désaccord avecla manière dont la Chambre apprécie l'ordonnance de
réquisitionetinterprètelesdéclarationsfort sévèresdu préfetetde lacour
d'appel de Palerme.
Avant d'expliquer pourquoi je considère que ces conclusions de la
Chambre sont erronées,il ne sera peut-être pas inutilede présenter quel-
ques considérations plus générales surles fins et la portée du traitéde
1948,auxquellesla Chambre n'a pas, àmon avis, prêté assez d'attention.

~INTÉGRATION DE L'ACCORD COMPLÉMENTAIRE DANS LE TRAITÉ

Aux termes de l'article 2 de la convention de Vienne sur le droit des
traités, un traité peut être consig«dans un instrument unique ou dans
deux ou plusieurs instruments connexes)). Le traité d'amitié,de com-
merce et de navigation entre les Etats-Unis et l'Italie se compose d'un
traité, d'un protocole, d'un protocole additionnel et d'échangesde notes
signésle 2février1948,qui, dans lecasdesprotocoles,disposentexpressé-

ment qu'ils «seront considérés comme faisant partie intégrante du
traité»,ainsi que d'un accord complétant le traité d'amitié,de commerce
et de navigation entre lesEtats-Unis etl'Italie signéleseptembre 1951,
lequel dispose également qu'il «constituera ...partie intégrante du
traité.»
Etant donné le contenu du droit coutumier relatif aux traités reflété
dans la disposition précitéede la convention de Vienne, étantdonnéles
dispositions expressesdes instruments précités et étant donnéle sens de
l'expression «partie intégrante»,qui se réfèreà un tout, il est clairque le
traitéde 1948et l'accord qui le complète doivent être considéréscomme
formant l'un et l'autre le tout intégréqu'ils sont censés former. La
Chambre accepte cette conclusion (bien que le conseil du défendeur ait
affirméque l'Italie ne l'acceptait pas). La Chambre pouvait difficilement
faire autrement, puisqu'elle est elle-mêmenéed'un traité,le Statut de la
Cour, dont il est dit dans la Charte des Nations Unies, qu'il «fait partie
intégrante» de la Charte. On voit mal, dans ces conditions, comment onpourrait soutenir que le Statut et la Charte ne doiventpas être interprétés
ensemble commeun instrument unique formant un tout intégrée,t il est
plus difficile encore d'imaginer que la Cour puisse accepter un tel argu-
ment.

LE TRAITÉ ET L'ACCORD COMPLÉMENTAIRE : LES ClRCONSTANCES
ET LES INTENTIONS

Dans sesexposés,l'Italies'estfondéesur les règlesd'interprétation des

traités énoncées a l'article 31de la convention de Vienne sur le droit des
traités comme reflétant le droit international coutumier,position qui n'a
pasétécontestép ear lesEtats-Unis.L'article31dispose qu'«un traitédoit
êtreinterprétédebonne foisuivant lesensordinaire aattribuer auxtermes
du traité dans leur contexte eà la lumièrede son objet et de son but».Le
mêmearticle précise qu'«aux fins de l'interprétation d'un traité,le
contexte comprend, outre le texte, [le]préambule ..» Il ajoute qu'il sera
tenu compte, en mêmetemps que du contexte, «de tout accord ultérieur
intervenu entre les parties au sujet de l'interprétation du traité ou de
l'application de ses dispositions.Et l'article 32dispose que :

«Il peut être faitappelà des moyens complémentairesd'interpré-
tation, et notamment aux travaux préparatoires et aux circonstances
dans lesquelles letraitéa étéconclu,envue, soit de confirmer lesens
résultantde l'application de l'article31, soit de déterminer le sens
lorsque l'interprétation donnéeconformément a l'article :1

a) laisse le sensambiguou obscur; ou
b) conduit a un résultat quiest manifestement absurde ou déraison-
nable.»

Dans la présente affaire, les Parties ont interprétéde manière radicale-
ment différente les dispositions du traitéet de l'accord complémentaire
qui les opposent. Il est indéniable que, lorsqu'on confronte leurs argu-
ments, le sens de certaines dispositions du traité apparaît ambigu ou
obscur; chacunedesParties amêmesoutenu que l'interprétation opposée
à la sienneconduisait a desrésultats qui étaient,sinon manifestement ab-
surdes,du moinsdéraisonnables. Dèslors,selon la convention de Vienne
susmentionnée,ils'agitd'une affaireoù ilesttout à fait indiquéderecou-
rir auxtravaux préparatoires et auxcirconstancesdans lesquelles letraité

a étéconclu.
Quelles étaient les circonstances dans lesquelles a été conclu l'accord
complémentaire qui fait partie intégrantedu traitélui-même?Quel est,
d'aprèsles travaux préparatoires et les procéduresde ratification, le but,
ou un but essentiel,du traité et en quoi cesprocédures éclairent-ellesl'in-
terprétationqu'il faut donner àsesdispositions?

D'aprèslestravauxparlementairesitalienspertinents qui ont été portésà laconnaissance delaChambre - travaux etprocédures quicontiennent
le témoignage authentique de ce qu'étaient les intentions des Parties
quand elles ont conclu le traité et l'accord complémentaire -, l'Italie a
proposé la conclusion de l'accord complémentaireafin derépondre à ce
que l'onsavaitêtrelesconditionsauxquellesdesinvestisseursaméricains
seraientprêts à investirenItalie. Apropos d'unprojet deloi portant ratifi-
cation et exécutionde l'accord complémentaire,lejournal officielitalien
indique que le but de l'accord est d'encourager «les investissements
privésétrangers en Italieet de «créerune situation où lesinvestissements
étrangers soient en sécurité...)) (contre-mémoirede l'Italie, annexes,
doc. 9,p. 1et 2).Letexte poursuit:

«Et comme aujourd'hui «investissements étrangers » signifie en
premier lieu investissementsdesEtats-Unis,nous avons jugésouhai-
table d'éliminertouslesobstacles àl'affluxde capitauxprivésaméri-
cains en concluant ..un accord spécial ...[Ces contacts] ..nous ont
permis denousfaire une bien meilleureidéedeceque recherchent les
investisseursaméricains et de nous rendre compte qu'un traité spé-
cial étaitnécessaire...))(Ibid.,p..)
Le rapport cite ensuiteparmi les besoins desinvestisseursaméricains :

((protection des droits des entreprises américaines ...dans les
sociétés oùelles investissent; possibilité de rapatrier les capitaux
investis ...garanties contre la discrimination; garanties contre les
risques politiques; ..»(ibid.,p. 4).

«Il s'agissait donc de garantir dans notre pays aux investisseurs
américains,danstoute lamesure du possible, cellesde cesconditions
quinel'étaientpas déjà,tout enpréservantlesintérêtsitalienss,'agis-
sant surtout ...d'obtenir des investissementsdirectsproductifs - et
non spéculatifs -, età longterme. » (Ibid.)
L'accord complémentaire avait aussi pour but ((d'assurer aux investis-
seurs la plus grande libertéde choix en ce qui concerne les entreprises ...
dans lesquelles ils ont une participation financière...»(ibid.,p. 6).
Lors du débat à la Chambre des députéssur la ratification de l'accord
complémentaire,le porte-parole du gouvernement a déclaré que lapre-

mièrepartie de l'accordétait «à coupsûr laplus importante »encequ'elle
faitnotamment référence à«la liberté accordéeaux personnes physiques
et morales de transférer librementleurscapitaux ..et de gérerlessociétés
qu'elles auront crééesou acquises » (ibid., doc. 11,p. 20-21). L'une des
formes d'investissement américain que l'accord avait pour but de favo-
riser était la((créationen Italie d'établissementsindustriels directement
contrôléspar les entreprises américaines ..»(ibid.,p. 24).
Lerapport au Sénatitalienrésumaitlecontenu del'accord complémen-
taire dans lestermessuivants :
«L'exclusiondetout traitementdiscriminatoireet detoutemesure
arbitraire au préjudicedesressortissants,personnesmoralesou asso- ELETTRONICA SICULA (OP. DISS. SCHWEBEL) 99

ciations de l'Italie oudesEtats-Unisquiexercentleursactivités sur le
territoire de l'autre Etat, la possibilitéde contrôler librement des
entreprises, l'application du traitement le plus libéral possible au
transfert des capitaux et l'octroi d'avantages fiscaux constituent des
principes qui, complétant utilement ceux qui figurent dans le traité

d'amitié ...aident l'économie italienneen particulier dans la mesure
où ils ontpour but de favoriser lesinvestissements de capitaux amé-
ricains en Italie.»(Mémoiredes Etats-Unis,annexe 89,p. 4.)
De même,dans le rapport du secrétaired'Etat des Etats-Unisqui a été
transmis au Sénatpourdemander l'avisetleconsentement de celui-ciaux
fins de laratification de I'accordcomplémentaire,ilétaitditque lesdispo-
sitions de l'accord ((élargissentle champ d'application » du traitéet que,
«en complétantles dispositions très étendues régissantles relations éco-
nomiques générales établiespar ce traité,il encouragera davantage les
investissementsprivés »(ibid.,annexe 88,p. 2).

Le caractère vraiment complémentaire de l'accord - le fait qu'il était
destiné à encourager «davantage »lesinvestissementsprivésque letraité,
tel qu'ilavait étéconcluen 1948,avaitnotamment pour but d'encourager
- a été mis en lumièrelors de la ratification de cetraité.Ainsi, lerapport
delacommissiondesaffairesétrangères etdescolonies du Sénatitalienen
date du 28mai 1949,favorable à la ratification età l'exécutiondu traité,
indiquait qu'il était tenu compte des intérêtsde l'économie italienne,
«qui a besoin d'urgence d'investissements étrangers» (contre-mémoire
de l'Italie, annexes,doc. 7, p. 10).Le rapport déclare que, par les dispo-
sitions de ce traité,les Etats-Unis ont:
((avant tout, voulu se protéger ...des possibilitésde discrimination

contreleursintérêtsainsique d'éventuellesexclusionsoulimitations
d'activitéssur le marché italien »(ibid.,p. 14).
Résumantles premiersarticles - lesplus importants - du traité,le rap-
port indique qu'ils garantissent ((pleinement le droit ...de constituer, de
diriger, de contrôler des sociétés ...ainsi que la protection contre toute
ingérence abusive ..» (ibid., p. 7).Parmi les principes fondamentaux du
traité,le rapport mentionne le ((franc jeu dans tous les cas » (ibid., p. 4).
L'arrêtde la Chambre cite les articles du traitéet de l'accord complé-
mentaire sur lesquels les Parties sont divisées.On pourrait ajouter que le
préambulede l'accord complémentaireparle non seulement du désir des

parties ((d'encourager davantage lesinvestissements de chacun desdeux
pays dans l'autre pays », mais mentionne aussi «l'intérêt que peut pré-
senter àcettefin l'extensiondesprincipes detraitementéquitableénoncés
dans le traité..» De plus, «en ce qui concerne le transfert des capitaux
investis par ...des sociétés ...de l'une des Hautes Parties contractantes
dans lesterritoires de l'autre..»,l'article III de l'accord complémentaire
prescrit «le traitement lepluslibéralpossible».Et l'articleVdispose que :

«s'appliqueront aux investissements faits en Italie les règlements ELETTRONICA SICULA (OP. DISS.SCHWEBEL) 100

relatifs aux avantages spéciaux prévus en matière d'imposition, de
douane et de tarifs de transport pour l'industrialisation de l'Italie
méridionale ..»

Il convient denoterque, dans l'ensembledesdébatsrelatifs à laratifica-
tion du traitéet de l'accord complémentaire,qui furent longs, détailléset
réitérésen Italie et apparemment aisés aux Etats-Unis, on ne trouve
aucune trace d'un soutienquelconque à l'interprétation selonlaquelleles
multiplesdroitsainsigarantisauxinvestisseursaméricainsenItalie etaux
investisseursitaliensaux Etats-Unis auraient pour condition que l'inves-

tissement soit fait dans une sociétéayant la nationalité de l'investisseur.
Aucontraire, il a étéadmis et indiquéque l'investisseur étrangerjouirait
des avantages offerts par le traitéet par l'accord complémentaire, qu'il
investisse dans une sociétéayant sa nationalitéou celle de l'autre partie.
L'accord complémentaire avait donc pour but de garantir la protection
«des droits des entreprisesaméricaines ...dans les sociétéoù ellesinves-
tissent»; il était destiàéoffrir aux investisseurs «la plus grande liberté
de choix en ce qui concerne les entreprises ..dans lesquelles ils ont une
participation financière» ;il avait pour objet dedonner aux investisseurs

«la liberté ..de gérerles sociétés qu'ilsauront crééesou acquises», et
l'une desformesquedevaient prendre lesinvestissementsaméricainsétait
la ((créationen Italie d'établissements industriels directement contrôlés
par les entreprises américaines..»
Des termes du traitéet de l'accord complémentaire,et àla lumièredes
intentions des parties telles qu'elles apparaissent dans les textes précités
relatifsàla ratification de ces instruments, il ressort qu'en faisant des in-
vestissements aussi importants dans I'ELSI,la société Raytheon agissait
dans le cadrede relations conventionnelles quil'autorisaient penser que :

- elle (et I'ELSI) bénéficieraient des((principesde traitement équitable
énoncés dans letraité»(((francjeu danstous lescas »);
- elle(etladirection de I'ELSI)auraient ((pleinement ledroit »de consti-
tuer, diriger et contrôler I'ELSI; c'est-à-dire qu'ellesjouiraient dea
libertéde gérer»I'ELSI,de la facultéde la ((contrôler librement »et de

«laplus grande libertéde choix» à l'égarddeI'ELSI;
- elle bénéficieraitdu ((traitement le plus libéralpossible»pour le rapa-
triementdescapitauxqu'elleaurait investis ;
- elle(etI'ELSI)seraient ((garanties contre lesrisquespolitiques »;
- I'ELSI bénéficieraitde l'application des règlementsrelatifs aux avan-
tagesspéciauxprévusenmatièred'imposition,de douane etdetarifs de
transportspour leMezzogiorno.

LA VIOLATION DU DROIT DE RAYTHEO NE CONTRÔLER

ET DE GÉRER L'ELSI

La conclusion de la Chambre selon laquelle l'Italie n'a pas violél'ar-
ticle III du traitéa pour pivot l'idée qu'au moment où l'ordonnance de
réquisitiona été prisele droit de contrôler et de gérerI'ELSI n'était plusentre les mains des administrateurs ou des actionnaires de I'ELSI mais
qu'ilaurait étéentre lesmainsd'un syndicde faillite.La Chambre araison
de dire que le «griefprincipal »des Etats-Unis est que la réquisition était
contraire au droit de Raytheon et Machlett de contrôler et de gérerI'ELSI
et - complément fondamental de ce droit - au droit de liquider ses
biens. La Chambre a-t-elle égalementraisonde conclure que, àcausedes
réalitésde la situation financière de I'ELSIet des aspectsjuridiques de la
pratique italienne enmatièrede faillite, Raytheon etMachlett n'étaientde

toute façonplus enmesure, àladate delaréquisition, d'exercerlecontrôle
et la gestion de 1'ELSIet que, par conséquent, elles n'ont été privées
d'aucun droit par un actequi, par ailleurs, apparaissait comme une viola-
tion de l'article IIIdu traité?
A mon avis, cette conclusion décisivede l'arrêtde la Chambre est
erronéepour les raisons suivantes :

Premièrement,ilestclair, et la Chambre l'admet, qu'àtous lesmoments
pertinents I'ELSI a étéinformée avecprécision à la fois de sa situation
financièrede plus enplusprécaireetdesconséquencesjuridiques de cette
situation. Loin de négligerles avis qui leur étaientdonnés sur le plan
comptable etjuridique, I'ELSI et sesactionnaires s'ysont conformés.La
direction et les actionnaires de I'ELSI n'ontpas étéavisés,avant que la
réquisitionn'ait lieu,que l'entreprise était,au point de vue financier ou

juridique, en étatd'insolvabilité et qu'elle étaiptar conséquent tenue de
demander sa mise en faillite ou d'abandonner de quelque autre manière
le contrôle et la gestion de1'ELSI.Au contraire, ils ont été informéq sue
I'ELSI, compte tenu de sa situation financière et des exigences du droit
italien, pouvait, en mars 1968,entreprendre la liquidation de ses biens,
dans lecadred'une procéduregérée par I'ELSI elle-mêmeC . ette considé-
ration n'est assurémentpas décisive, mais elle estimportante.
Deuxièmement,c'estun fait qu'au jourde laréquisition,le leravril 1968,
aucune mesurejuridique ou pratique n'avait été prise pour ôter aux admi-
nistrateurs ou auxactionnaires de I'ELSI ledroit decontrôler etdegérerla
sociétéetpour confierce droit àquelqu'un d'autre. Non seulement I'ELSI
n'étaitapparemmentpasendéfaut depaiement, non seulement elles'était
abstenue tout à fait délibérémend te demander sa mise en faillite, mais
aucun créancier,aucune autorité publique n'avait fait la moindre dé-

marche pour la contraindre à la faillite.
Troisièmement, au cours des mois, des semaines et des jours qui ont
précédé la réquisition, des négociationsen vue d'éviterou de retarder la
fermeture de l'usine de I'ELSI etle licenciement de son personnel ont eu
lieu entre les dirigeants et les actionnaires de17ELSId'une part et des
représentants du Gouvernement italien et de la région sicilienned'autre
part.Il ne s'agissaitpas de négociations occasionnelleset ordinaires mais
bien de négociationsintensives qui ont eu lieu avec la participation non
seulement de fonctionnaires du Gouvernement italien,mais aussi de per-
sonnalitésde premier plan telles que le président de la régionsicilienne,
des ministres du gouvernement central et le premier ministre italien lui-même.Le Gouvernement italien a été informé de la façon la plus nette
et la plus explicite de la situation financière de I'ELSIet de la décision
qu'avaient prise sesactionnaires de ne plus investirde capitaux dans ses
opérations.Lesfaitssontrésumésauxparagraphes26 à 28de l'arrêdte la
Chambre; il y est dit que, le 29mars 1968encore, les autorités italiennes
ont cependant continué àpresser 1'ELSIde ne pas fermerl'usine et de ne
pas licencierla main-d'Œuvre. L'ELSIa été officiellemena tviséeque, si

l'usine était ferméee,lleserait réquisitionné. êmeaprès la réquisition,
l'Italiea exercéofficiellementune pression extrêmementfortesur YELSI
pour l'amener àrouvrir l'usine, leprésidentde la régionsicilienneallant
jusqu'à prédire,ou menacer, dans un mémorandum écrit,que la liqui-
dation de I'ELSI serait ((absolument impossible» aussi longtemps que
((l'usinesera[it]fermée».Loin d'affirmer queI'ELSIétaitdans I'obliga-
tion, en raison de sa situation financièreet des exigencesdu droit italien,
de demander sa mise en faillite avant le le'avril 1968,date de la réqui-
sition, le présidentde la régionsicilienne a demandéavec insistance à
l'ELSI,le 19avril 1968encore,précisémend te ne pas entamer une procé-
dure de faillite. Non seulement,a-t-ilaverti,une faillitenuiraà la répu-

tation de Raytheon en Italie et en Europe »,non seulement Raytheon ne
retireraitrien ((maintenant»de 17«actif»et Raytheondevra ((rembourser
toutes les dettes)), mais en fin de compte les banques italiennes force-
raient Raytheon àrembourser les dettes bancaires de I'ELSIet, en atten-
dant, bloqueraient toute autorisationd'achat de devisespour letransfert
à Raytheon de redevances émanant de Selenia, autre société italienne
dont Raytheon possède des actions (mémoiredes Etats-Unis, annexe37,
p. 2 et 3; annexe 38, p. 1 et 2). Par contre, si I'ELSI rouvrait l'usine,
et si Raytheon coopéraitavecune société de gestionprovisoire qui serait
constituéepar l'IR1et la région sicilienne,ilsseraient

((prêtsà aider entre temps Raytheon à liquider 1'ELSIgrâce à une
venteréaliséedans debonnes conditions etleplustôtpossible ..dans
la perspective d'une liquidation, qui reste, aprèstout, l'objectiffon-
damental de Raytheon ».

On peut présumer - et il faut d'ailleurs certainement le présume-
que le premier ministre italien, le président de la région sicilienneet
lesditsministresitaliensont agiconformémentaudroititalien. Ils connais-
saient les importantes dettes de I'ELSIenversdesbanques italiennes; ils
avaient été informéq sue I'ELSIétait àcourt d'argent et,par conséquent,
qu'elle étaitsurlepoint defermer,ou avaitfermé,l'usine.Loind'indiquer
que I'ELSIétait tenuede demander sa mise en faillite ou d'abandonner
de quelque autre manièrele contrôle et la gestion,loin d'indiquer que le
temps de la liquidation était passé, loin d'agir conformémentà une telle

conception desfaitsou dudroit italien,ilsontpresséladirection delaisser
l'usine ouverte,d'employerlepersonnel ou deleréembaucheretdemain-
tenir ou de reprendre la production. Autrementdit, que ce soientlesspé-
cialistes du droit italien présentésparItalie dans la présente affaire qui
aient raison au sujet des exigencesdu droit italien ou que ce soient ceux ELETTRONICA SICULA (OP.DISS.SCHWEBEL) 103

qu'ont présentésles Etats-Unis, il est clairque le ((droit positif »qui avait
coursen Italie au moment de la réquisitionestincompatible aveclathèse
soutenue par l'Italie dans la présente affaireet avecl'acceptation de cette
thèsepar laChambre.Faudrait-il admettrequ'en 1989l'Italie soutienne le
contraire de ce que lesplus hauts représentants de son gouvernement ont
soutenu en 1968?La Chambre est-elle bien fondée àfaire reposer son

arrêt surun terrain aussimouvant?
Quatrièmement, non seulement la conclusion essentielle de la
Chambre est en conflit avec l'interprétation du droit italien par les plus
hauts représentants de l'Italie au moment critique,mais elle n'estpas en-
tièrementcompatibleaveclaconclusion delacourd'appel de Palerme sur
laquellelaChambre sebase. Lacourd'appel, comme lefaitlaChambre, a
concluquelafaillite de I'ELSIaété causéenonpar laréquisition,maispar
l'étatd'insolvabilité oùla sociétése trouvait auparavant, déclarant que
((l'état d'insolvabilitéde la sociétéa été la cause déterminanteet suffi-
sante de sa faillite(articlede la loi sur la faillite)».Maisla cour d'appel
de Palerme en a-t-elleconclu, mêmeimplicitement, que I'ELSIou sesac-

tionnaires nejouissaient pas du droit de contrôler et de gérerI'ELSI, ou
d'autres droits de propriété,cause de l'insolvabilitéde celle-ciimmédia-
tement avant l'intervention du maire et que, par conséquent,ils n'avaient
pas été privésde tels droits par la réquisition? Nullement. Au contraire,
non seulement la cour d'appel a reconnu qu'il était ((probableque la so-
ciété elle-même ad itemandéla faillitedans l'intention desortirde la très
grave situation d'indisponibilité crééepar la réquisition. Elle a estimé
(donnanttort à cet égardà lajuridiction inférieure) que l'appel

«est justifié ence qui concerne les dommagesdécoulant de l'impos-
sibilitéd'utiliserl'usine, sesinstallations et son équipement qui ont
faitl'objet de l'ordonnance de réquisition,lasuite de l'exécutionde
cette ordonnance D.

La cour a par conséquent accordé des dommages et intérêts pour cette
conséquence d'une réquisition qu'elle a à plusieurs reprises qualifiée
d'«illicite ».Onpeut assurémentse demander si cesdommagesetintérêts
étaient suffisants,mais ce qui compte ici, c'est que le raisonnement et la
conclusion delacour d'appel de Palerme à cetégardnesemblentpascom-
patibles avec l'essentiel du raisonnement et de la conclusion de la
Chambre. Certes, ce n'étaitpas la question de la perte par1'ELSIou ses
actionnaires de leur droit de contrôler et de gérer la société qui était en
litige devantla courd'appel.Il s'agissaitplutôt de fixer les((dommages et

intérêts»dus àI'ELSI ou àson représentant (le syndic de faillite- et il
està noter que la cour a précisémentemployél'expression ((dommageset
intérêts»(((danni)))- par suite de laréquisition,quiavait étjugéeillégi-
time, de sonusine etde sonéquipement.La courd'appel a déclaréquedes
((dommages et intérêts » étaientdus pour la période pendant laquelle
l'usine et son équipement n'étaientpas à la disposition de I'ELSI ou de
son représentant et ne pouvaient êtreutilisés cause de la réquisition.La
décision de la cour d'appel implique donc que I'ELSI ou son repré-sentant continuaient, à la date de la réquisitionet par la suità,avoir un

droit de possession sur l'usine et l'équipementde l'ELSI,dont ils avaient
été privéspar la réquisition, bienque la Cour jugeât que YELSIavait été
insolvable avant que la réquisition n'intervienne. Si la cour d'appel
considéraitque 1'ELSIn'avait été privéd e'aucun droit par la réquisition
- l'insolvabilitéde la sociétéet ses effets en droit italien lui ayant fait
perdre ses droits -, comment a-t-ellepu accorder ce qu'elle appelle des
K dommageset intérêt s)au titre de la réquisition?
Cinquièmement, non seulement il y a divergence entre les analyses
financières des experts citéspar les Parties et les conclusionsauxquelles
ilsparviennent sur le planjuridique, mais mêmeles experts de l'Italie ne

sont pas d'accord entre eux. L'insolvabilitéde I'ELSI étaitsi incertaine
àla date de la réquisitionque l'expert en comptabilitéqui a déposépour
l'Italie a maintenu que I'ELSI était«au bord de l'insolvabilité»mais
n'étaitpas insolvable (du moins en pratique). Il ne s'agissait pas d'un
lapsus. Dans l'exposépréparé à l'avance qu'il a fait devant la Chambre,
cet expert a déclaré queI'ELSI ((allait être en état d'insolvabilité bien
avant la réquisitionde l'usine, lele'avril 1968)).La Chambre lui a posé
des questions précisessur ce point. Il a maintenu que, au 31mars, «la
société allait être en état d'insolvabilit. Le présidentde la Chambre a

insisté:«Mais je crois que tout est là: était-elleou non insolvable? En
effet, êtresur le point d'être insolvableet être insolvable,ce n'est pas la
même chose. »L'expert entendu à la demande de l'Italie a répondu:

((L'insolvency - en français, cessation de paiements »- c'estla
situation dans laquelle une société nepeut pas payer ses dettes à
l'échéance. Mais il se peut qu'un fournisseur n'insiste pas pour être
payé,cequipermet àlasociété de s'acquitterd'abord enversd'autres
fournisseurs, si bien que l'état d'insolvabilité peutse prolonger
- quoique la société soit techniquement insolvable - aux fins des
affaires courantes de la société.l peut y avoir6étatde cessation de
paiements »mais,tant qu'on ne s'estpas adressé àun tribunal et que
la société n'apas été effectivement déclarée insolvablee,lle peut
poursuivre sesaffaires.Je pense que c'estcequi est arrivédans lecas

de I'ELSI. »
Unenouvelle piècedéposée par l'Italieestunelettreécritele9mai 1968

(c'est-à-direaprèsque 1'ELSIeut demandésamiseen faillite)par lemaire
de Palerme au directeur généraldubureau de gestiondes systèmesHawk
de l'OTAN à Paris. Il y est question de la valeur «irremplaçable» de
I'ELSIpour la vieéconomiquede la Sicile à cause de cequ'ellereprésente
en fait d'«équipement,installations, main-d'Œuvre hautement qualifiée,
personnel de gestion et relations commerciales nationales et étran-
gères..»,et lemairepréciseque lesdécisionsprisespar Raytheon-Elsi de
fermer l'usineet de licencier le personnel semblent

((procéderdavantage d'une dernièretentative de pression sur les or-
ganes du gouvernement central et du gouvernement régional pour obtenir la participation sollicitéeque d'un besoin absolu découlant
d'une quelconque situation irréversiblede la société

- déclaration qui cadre mal non seulement avec le peu de cas que le

conseil de l'Italie a fait de la valeur des actifs de I'ELSI, maisaussi, par
conséquent,aveclaconclusionque I'ELSIétaitinsolvableen mars 1968et
que sa failliteétait inévitable.
Sixièmement,et c'est là ce qui compte le plus, la question de savoir si
I'ELSIétait insolvableau le'avril 1968dépendaiten dernière analysede
laligne de conduiteadoptéepar son principal actionnaire, Raytheon. Les
ressources de cettesociétéétaiene tt demeurent très importantes par rap-
port àcellesqui étaient enjeu dans YELSI.Raytheon aurait certainement
pu remboursertoutes lesdettes deI'ELSIetréglertous sesproblèmesd'in-
solvabilité.On ne peut pas prétendreque la politique arrêtéepar Ray-
theon étaitde rembourser toutes les dettes de I'ELSI. Si Raytheon avait

été disposée àcontinuer à apporter des capitaux àI'ELSI,la question de
sa liquidation ne seseraitpas posée. Lesdifficultésfinancièresde I'ELSI
ont atteint un seuilcritiquelorsqueRaytheonl'a informéequ'ellen'enten-
dait plusy investir de nouveaux capitaux. Il est clair, en particulier, que
Raytheon n'était pas disposée à rembourser le capital des emprunts
consentis àI'ELSIsans la caution de Raytheon, alors qu'elle était prêtà
rembourser intégralement - et ellel'afai- les emprunts qui étaient as-
sortisd'une tellecaution. Maiscela neveutpas dire du tout que Raytheon
n'ait pas étéprête avancer lessommessupplémentairesnécessairespour
rendre possible une liquidation régulièredesbiens de I'ELSI etdésireuse
de les avancer.

Les Etats-Unis ont démontré,et la Chambre l'a admis, que Raytheon
avait transféré en Italiede nouveaux fonds pour désintéresserles petits
créanciers.Ils ont démontrée,t la Chambre l'aadmis, que Raytheon était
disposée à acheter à 100pour cent de leur valeur les effetsà recouvrer
détenuspar I'ELSI, ce qui aurait apporté des liquidités considérables
dans les coffres pratiquement vides de I'ELSI. Les Etats-Unis ont aussi
fournides moyensdepreuve,qui nesemblentpasavoirétécontestésp,our
établir qu'enmars 1968l'usinefonctionnait (pourautant que lesgrèvesle
permettaient), que 17ELSIexécutait des commandes et que, après la fin
de mars, I'ELSIétaitprêtem , êmeavecsonpersonnel réduit, à achever les
travaux en cours et à honorer les commandes repes, ce qui lui aurait
permisd'encaisserdespaiementsimportants. MaislesEtats-Unisont sur-

tout affirmé avec force que Raytheon était prête à avancer à I'ELSI de
quoi disposer de liquiditéssuffisantespour pouvoir procéder àune liqui-
dation régulière;et la Chambre a admis cettethèse décisive.

Leconseil de l'Italie s'estefforcéde mettre en doute cetteattitude déli-
béréede Raytheon et il a soutenu que le conseil du demandeur n'avait
présenté cettethèsequ'à une phase avancéedelaprocédureorale,qu'il ne
l'avaitpas présentéeau débutdecelle-ci,ni dans sesécritureset qu'à for-
tiori ce moyen décisif n'avaitpas été présenté plust, comme il n'auraitsans doute pas manqué del'être s'ilétait réellementfondé. Cet argument

de l'Italie ne tientp:non seulement leconseildesEtats-Unis a soutenu
cettethèseversledébutde laprocédure orale,mais lesyndicde faillitel'a
défendueunequinzaine d'annéesplus tôt, comme le montre l'arrêtde la
cour d'appel de Palerme. La cour a notéque :
«selon cettethèse[del'appelant],lesactionnaires de Raytheon-Elsi,

après avoir compensé les pertes des années précédentes, seraient
également intervenuspour procéder à une liquidation régulièreet
favorable de la societé,évitant ainsi la faillite que l'ordonnancede
réquisition du mairea au contraire rendue nécessaire)) (mémoire
des Etats-Unis,annexe 81,p. 15).

Il était manifestementdans l'intérêdte Raytheon d'adopter et d'appli-
quer une politique consistantà fournirà I'ELSI lesliquidités nécessaires
pour que laliquidation régulièresoitpossible.Tout d'abord, l'importante
sociétéinternationale qu'était Raytheoandû souhaiteréviter - pas àtout
prix certes,maissans doute auprix de quelques sacrifices - le spectacle
d'unede sesfilialesréduite àla faillite.En outre, sila liquidation avait été
rendue possible et avait réussigrâce àl'apport de liquidités suffisantes,
Raytheon non seulementaurait récupéré sa nouvelle misede fonds, mais
ellen'aurait pas euà rembourser une partie, voirelatotalité, desgrosem-
prunts contractéspar I'ELSI et cautionnéspar elle. Comme toute poli-
tique raisonnable devait amener Raytheon àfournir des liquidités suffi-
santes et comme la présomption du comportement raisonnable devrait

s'appliquer aux entreprises autant qu'aux individus, pourquoi I'ELSI
n'aurait-elle pas été mêmede différer la failliteet peut-êtrede l'éviter
tout àfait grâce aux liquiditésfourniespar Raytheon et au prix payépar
ellepour l'achat d'effets recouvreret autrestitres?

L'arrêtde la Chambre accepte l'argument décisifsuivant lequel Ray-
theon aurait été prêt eavancer des liquidités,mais conclut malgrétout
qu'au moment de la réquisition 1'ELSIétait insolvable ou, du moins,
s'acheminait à grands pas vers la faillite.Pourquoi?
A mon avis, cette conclusion peu cohérente provient de ce qu'on a
mélangé la chronologie et lesfaits.
Il estde fait que I'ELSI,aprèsla réquisition,ademandésa miseen fail-

lite en invoquant la réquisition comme cause. Cela ne suffit guère à
prouver que la réquisition étaitbien la causede la faillite; sur cepoint, la
Chambre a manifestement raison. Dans une affaire comme celle-ci, les
relations de causeà effet sont fort complexes et la réquisitionn'apu être
tout au plus que l'une descausesde lafaillite deI'ELSI(encorequ'elle ait
très bien pu l'avoir directement déclenchée).Mais avant la réquisition,
1'ELSInon seulement ne seconsidéraitpas commeinsolvable,non seule-
ment ellen'était pas considérée outraitée commeinsolvabp lar lesauto-
rités italiennes avec lesquelleselle était en pourparlers très actifs, non
seulement elle semble n'avoirjamais manqué ases obligations, mais elle
préparait activementla ventede ses avoirs.Certains élémentsde preuveont étéapportés ausujet de l'intérêt manifestéar des acquéreurs étran-
gers éventuels.Si la réquisitionn'avait pas eu lieu et si Raytheon avait
effectivement subvenu aux besoins immédiats de liquiditésde l'ELSI,
ce qui aurait permis de gagner du temps pour vendre, pourrait-on vrai-
ment affirmer que I'ELSI aurait été réduite à la faillite, du moins au

momentoù elle l'aété?Il est sûr,ou du moins probable, qu'en l'absence
de réquisition,I'ELSIaurait pu vendre certains de ses avoirs, ou passer
des contrats en vue de leur vente (sans parler de tous ses efàrecou-
vrer,de l'en-courset desstocks); et si elleavaitprofitéde cettepossibilité
I'ELSI aurait eu des rentrées importantes. Ces rentrées ne luiauraient
peut-être pas permisde s'acquitter de toutes ses obligations au fur et
mesure qu'ellesvenaient àéchéance.Mais même si ellesn'avaient pasété
suffisantes et que'ELSI, àun moment ou àun autre,ait jugénécessaire
de déposer son bilan ouait étéforcéede le déposer,les pertes effective-
ment subies par elle et par ses créanciersauraientésensiblementinfé-
rieures à ce qu'elles ont été,de mêmeque les sommes que Raytheon
aurait eu à rembourser aux créanciers de I'ELSI pour les emprunts
cautionnés par elle auraient été nettement moinsélevées qu'elles ne

l'ont été. Cen'est pas seulement que la faillite se serait produite plus
tard sila réquisitionn'avaitpas eu pour effetde la déclencher,mais,sans
cette réquisition, le syndic qui aurait dirigé la faillite aurait eu accès
l'usine et aurait pu liquider les actifs de I'ELSIplusieurs mois avant la
date àlaquellele syndic y a eu effectivementaccès,l'usineayant étéinac-
cessiblependant lessix moisqu'aduréla réquisition.
En outre, si la réquisitionn'avait pas eu lieu et s'ilavait été pàrmis
Raytheon de fournir des liquidités suffisantes, les banques, pendant le
temps ainsi gagné,auraient été incitéesrechercher un compromis avec
I'ELSI. En l'absence de compromis, le droit italien aurait obligé les
banques, en cas de faillite,mbourser au syndictout cequ'ellesavaient
reçu de I'ELSIdepuis un an. Qui plus est, il aurait dans l'intérêdtes
banques desecontenter de40ou 50pour centdeleurscréancesplutôtque
de n'obtenir finalement que moins de 1pour cent dans une procédure

précipitéede faillite.On peut soutenir que les banques estimaient qu'en
engageant des poursuites judiciaires elles récupéreraient la totaldeé
leurs créances,pour autant qu'il soit jugéque Raytheon répondait des
dettes de I'ELSI dont elle ne s'étaitpas portée caution. Mais, selon le
droit italien de l'époque,un tel procès ne pouvait être gque s'ilétait
démontréque Raytheon était le seul actionnaire de I'ELSI, ce qui
n'avait jamais étéle cas. Jusqu'à 1967,une part importante du capital
étaitdétenuepard'autres sociétésitalienneest,en 1967,quand Raytheon
a racheté leurs actions,on a veillé ce qu'une fraction du capital soit
détenue nonpar Raytheon maispar une société,Machlett,quaippartenait
elle-mêmeà Raytheon. Dès lors l'issuedes procèsne pouvait qu'appa-
raître problématique et,en fait, les banques n'ont pas réussiobtenir
que lestribunaux italiensdéclarentque Raytheon répondaitdesdettes de

I'ELSI.
L'arrêtde la Chambre conclut que «la réalisation» d'une liquidationrégulièrepar I'ELSI«est de l'ordre'des pures spéculations».Jereconnais
qu'une liquidationrégulièreaurait étépleined'incertitudem s,ais celles-ci
portaient moins sur le point de savoirsi I'ELSIpouvait en fait et en droit
liquider sesavoirsquesur la possibilitéde calculer lespréjudices quiont
pu résulterdu fait que la réquisition imposéeà SELSI l'en a empêchée.

La Chambre n'est pas convaincante, selon moi, quand elle déclare
qu'en faitI'ELSIaurait fait faillitetôt ou tard et que, par conséquent, la
réquisitionimportaitpeu. C'estlà qu'à monavisla Chambre confond ce
qu'elle considère comme des faitsavec des élémentstemporels.Au mo-
ment où elle a eu lieu, la réquisitionimportait; elle a eu les effetsécono-

miques - ou certains des effets économiques - qui viennent d'êtreex-
posés;au moment où elle a eu lieu, elle a privé Raytheon et Machlettde
leur droit de contrôler et gérerI'ELSIet,par suite,de liquider la société;
ellea aussiprivé I'ELSIde sondroit d'être liquidép ear une direction res-
ponsable devant Raytheonet Machlett. Laréquisition,a donc faitviolera
l'Italie l'obligation que lui imposait l'article III du traitéde permeàtre
Raytheon et Machlett de ((contrôler etgérer»I'ELSI.
Cette conclusion s'impose d'autant plus si l'on considère le sensdu
traitéàla lumièredes dispositionset desprocéduresde ratification men-
tionnéesdans la présente opinion. Peut-on direque la réquisition,vu le
moment où ellea étéimposée,permettait a Raytheon et Machlett d'avoir
((pleinement le droit..de constituer, de diriger et de contrôler)) I'ELSI,
qu'elle était compatible avecla facultde «contrôler librement»l'entre-
prise et qu'elle assurait«la plus grande libertéde choix))? Etait-elle
conformeaux ((principesde traitement équitable »qui,commeleditI'ac-

cord complémentaire, sonténoncés dans letraité?La réquisition était-
elle en harmonie avecl'engagement d'assurer à Raytheon «le traitement
leplus libéral possible*pour le rapatriement des capitaux investis? Res-
pectait-elle«la garantie contre les risques politiques » que le traité dans
son ensembleavait pour objet d'assurer?A mon avis,non.

La mesure de réquisitionimposée à I'ELSIpar l'ordonnance du maire
de Palerme était-elle((arbitraire))au sens où ce terme est employé à
l'article premierde l'accord complétantletraité?
La Chambre conclut àjuste titre que, mêmesi la réquisition n'a pas
empêchéRaytheonetMachlett «de dirigeretdegérereffectivement»une

entreprise (I'ELSI) qu'ellesavaientétéautoriséesàacquérirenItalie (voir
la clause a) de l'article premier, citéeau paragraphe 120de l'arrêt)et
même siellen'apasportépréjudice«auxautresdroits etintérêtq su'[elles]
ont légitimementacquis )dans I'ELSI(clauseb)),laquestion demeure: la
réquisition était-ellearbitraire? mon avis, pour les raisons énoncées
dans lessectionsprécédentesde la présente opinion, la réquisitiona réel-
lementempêchéRaytheon etMachlettdedirigeretdegérereffectivementI'ELSI etelle a réellementportépréjudice aux droits et intérêts que ces
sociétés avaient légitimement acquisdans I'ELSI. Mais j'estime que,
mêmesila question du respect par l'Italie des obligations que lui impose
l'articlepremier estformuléecommesuitpour lesbesoins de l'argumenta-
tion :«la mesure de réquisitionimposéepar l'ordonnance du maire était-
elle arbitraire?»,la Chambreya répondude façon peu convaincante.
LaChambre relèveque lepréfetde Palerme a déclarélaréquisitionirré-
gulièrementmotivéeet que la courd'appel de Palerme ajugéqu'elle était
«illégitime »et qu'elle constituait même«un castypique d'excèsde pou-
voir». La Chambre conclut pourtant que, dans ces procédures adminis-

tratives etjudiciaires italiennes, la réquisitionn'a pas étéjugéearbitraire
du point de vue de la formeou du fond. Elle estime en outre que, même si
la réquisition avait étéjugéearbitraire dans le cadre de ces procédures
internes, ce ne serait pas déterminant en droit international :il n'y aurait
là qu'aune indication utile ».Continuantde se fondersur son interpréta-
tion desdécisionsadministratives etjudiciairesitaliennes,laChambredé-
clareque la réquisitionn'était pasarbitraireau sensdu droit international,
parce qu'il s'agitd'un acte qui s'oppose à une règlede droit et non au
«règnede la loi ».Elle dit que l'arbitraire estla méconnaissancedélibérée
desprocédures régulières etque la réquisitionn'étaitni déraisonnable ni
capricieuse, pour conclureque,puisque l'ordonnance du maire a été prise
dans le cadre d'un systèmede droit et de recours qui fonctionnait, elle
n'estpas arbitraire.

Le raisonnement de la Chambre s'appuie donc sur trois propositions
qui sont toutes mal fondées à mon avis :premièrement, que le préfetde
Palerme et la cour d'appel de Palerme n'ont pas jugéque la réquisition
étaitarbitraire; deuxièmement, que la réquisition, en droit international,
n'était ni déraisonnable nicapricieuse; troisièmement,qu'en tout étatde
cause les voies de recours et de réparation qui sont prévuespar le droit
italien et auxquellesl'ordonnance de réquisitiona été soumiseontgaranti
que l'ordonnance n'était pas arbitraire. J'examinerai ces propositions
l'une après l'autre.

i) Les décisions dupréfetet de la courd'appel

La Chambre cite un passage de la décisiondu préfetdont elle dit qu'il
est «le passage de la décision ..qui présentele plus d'importance ».Ce
passage est ainsilibellé:

((11n'yapas dedoute que, même sil'onpeut considérer,de façon
toute théorique,que lesconditions degravenécessité publique, d'im-
prévisibilitéet d'urgence qui ont déterminé l'adoptionde cette me-
sure étaient réuniesen l'espèce, l'objectifvisépar la réquisition ne
pouvait être réaliséen pratiquepar cette ordonnance,tant il est vrai
qu'à lasuitede laréquisitionl'activitéde l'entreprise n'apasrepris et
n'aurait pas pu reprendre. D'une manière générale,il manque par
conséquentdans l'ordonnance la causejuridique pouvant lajustifier
et la rendre opérante. »La Chambre sembleconclure de cetexte et d'autres passagesde la déci-
sion du préfetque cedernier ajugéque l'ordonnance de réquisitionrele-
vait des pouvoirs du maire. Or, ce que le préfetajugé,c'estque le maire
s'étaitfondésurdesdispositions légalesqui,dans desconditions degrave
nécessitépublique, d'imprévisibilitéet d'urgence, autorisaienlte maire à
prendre une ordonnance de réquisitionde biens privés; mais enI'occur-

rence le préfeta constatéque ces conditions étaient réunies«de façon
toute théorique », conclusion qui semble vouloir dire qu'elles n'étaient
pas réellementréunies.
LaChambre parvient àlaconclusion inverse ;citant lepassagesusmen-
tionnédela décisiondu préfet,elle estimeque cedernier «n'a pas décidé
que ces conditions n'étaientpas réunies».A mon avis, la difficulté sou-
levéepar la conclusion de la Chambre estque, sion poursuit la lecture de
la décisiondu préfet, on constateque les conditions de grave nécessité
publique, d'imprévisibilitéetd'urgence ont enfaitétéconsidéréescomme
n'étantpas réunies.Le préfeta écrit:«Une fois la compétencedu maire
établie,il est nécessairede déterminer si,dans la situation en question, il

existaitdes motifspour l'exercicedupouvoir. »(MémoiredesEtats-Unis,
annexe 76,p. 10.)Cettephrase estimmédiatementsuiviedu passage de la
décisiondu préfet reproduite ci-dessus.Le préfet poursuit alors ences
termes :

«Enfait, lemairecroyaitêtreenmesurede faireface àla situation
qui existait dans l'usineaytheon-Elsi au moyen d'une ordonnance
de réquisition, manifestement rendue sansque soit pris en considé-
ration lefait que la situation de la soci-tpour desraisons écono-
miques liéesau fonctionnement et à la commercialisation - était
tellequ'ellenepermettaitpas depoursuivrel'activité, àmoinsd'inter-

ventionsdes organesresponsables envue de résoudrelesproblèmes
financiers et industriels de la société.
La réquisitionn'a rien changé à la situation de la sociét;ela res-
sort du fait que l'activité arrêténe'a pas repris, non plus que des
conditions plus favorablesn'ont été créép esur la sociétéà la suite
de l'ordonnance. Au contraire, la situation d'insolvabilitéa entraîné
la déclarationde faillite de la sociét,e qui a eu pour conséquence
que la disposition de l'usine a étésoustraiteà l'administration pu-
blique.
Il est important aussi de souligner que l'usine, au moment de la
déclarationde faillite, ne fonctionnait pas et que les employéss'y

maintenaient pour protestercontre ledéfautdereprise del'activité et
lelicenciement de tout lepersonnel.
En cequiconcerne ledanger de ((troublesimprévisiblesdel'ordre
public»,quelemairesouhaitait éviterau moyende laréquisition,les
événementsqui ontsuivila réquisitionont clairementmontrél'inef-
ficacitédecettemesure;cela estprouvépar lefaitquelesdéfiléseltes
manifestations de protestations se suivaient,créant aussi une situa-
tion de natureà troubler l'ordre public,jusqu'au moment où lesor- ganes responsables de 1'Etat ont fait face à la situation et l'ont
orientéevers une solution, avec les retards malheureusement inévi-
tables.» (Mémoiredes Etats-Unis,annexe 76,p. 11 -12).

Autrement dit, après avoirjugéque «l'on peut considérer,de façontoute
théorique,que les conditions de grave nécessitépublique, d'imprévisibi-
litéet d'urgence qui ont déterminé l'adoptionde cettemesureétaientréu-
nies en l'espèce», le préfet examine ce qu'était la«vraie» situation et
conclut: a) que l'ordonnance de réquisition ne pouvait pas remettre en
marche l'usinedeI'ELSI, qu'ellenepouvaitrésoudrelesproblèmesfinan-
ciers et industriels de la société;qu'en fait l'ordonnance de réquisition

n'a pas eupour effet que les activitésde la sociétéont repris et qu'ellen'a
pas autrement aidéI'ELSI; c)que l'usineestrestéeferméeeta étéoccupée
par ses anciens ouvriers et d) que l'ordre public était de toute façon
troublé,indépendammentde laréquisition.Enrésuméi,lconclut que l'or-
donnance de réquisitions'estrévéléie njustiée àtous égards.En quoi ces
conclusionsétayent-ellesla conclusion de la Chambre suivantlaquelle le
préfetn'apas décidéque lesconditions de gravenécessitépublique, d'im-
prévisibilitéet d'urgence «n'étaientpas réunies» ?
Qui plus est, ce qui est essentiel dans lepassage de la décisiondu préfet
citépar la Chambre et reproduit audébutdela présente section,c'estque
la réquisition ne pouvait réaliser l'objectif qu'elle visait et qu'elle était

donc dépourvuede cause juridique lajustifiant. Le préfeta donc décidé
que,puisque I'ordonnance de réquisitionnepouvait pas réaliserI'objectif
qu'elle était censée atteindre, il y manquait la motivation juridique
pouvant la justifier et la rendre opérante, ce qui revient presque à dire
expressément que la réquisition étaitmal motivée et par conséquent
déraisonnable,voire capricieuse.
Le préfet a poursuivi comme suit (d'après la traduction ci-contre
fournie par les Etats-Unis) :

«On ne peut passersoussilence lefait que l'ordonnance a été prise
aussi - ainsi qu'ilressort de sontexte mêmeetque l'afaitobserver le
recourant - sousl'influence de la pressioncrééepar la presselocale
et des remarques qu'elle a formulées,si bien qu'il faut en conclure
que lemaire,désireuxausside setirer de cettesituation et de montrer

l'intention de l'administration d'intervenir d'une manière ou d'une
autre, a pris I'ordonnance de réquisition comme mesure destinée
principalement à faireressortirsonintention d'affronter leproblème
de quelque manière. B

Lederniermembre dephrase de ladécisiondu préfet,tel qu'ilestcitédans
l'arrêtde la cour d'appel de Palerme, est rendu différemmentdans la tra-
duction de l'arrêt fourniepar lesEtats-Unis :«Lemaire ..a eurecours àla
réquisitionessentiellementpour démontrer sonintention detraiter lepro-
blèmetout de même. »Dans ce passage, le préfetse référait auxlignes de
l'ordonnance du maire qui sont ainsilibellées : ELETTRONICA SICULA (OP.DISS.SCHWEBEL) 112

«Considérantaussi que la presse locale s'intéressevivement à la
situation et qu'elle est très critique'égarddes autorités qu'elleac-
cuse d'indifférence face à ce problème grave pour la collectivité..»

A propos de ces lignes, la question suivante a été posée à l'Italie au
cours de la procédure orale :

«Cette déclaration du préfet semble signifier que le maire a pris
l'ordonnance non pas pour des raisonsjuridiques défendables mais
commemoyen de montrer à lapopulation qu'ilfaisaitquelquechose,
que ce quelque chose fût légal etraisonnable ou non: il a pris son
ordonnance pour ((montrer l'intention de l'administration d'inter-
venir d'une manière ou d'une autre»; l'ordonnance a été prise
commemesure destinée «principalement » à «faire ressortir son in-
tention » d'affronter le problème «de quelque manière ». Voici ma
question :une mesure prise par une autoritépublique en vue «d'in-
tervenir d'une manière ou d'une autre », non pas pour résoudre un
problème - le préfeta déclaré que l'ordonnancene pouvait pas ré-

soudre le problème - mais pour apaiser la presse et faire taire les
critiques de la population ou pour s'en attirer la sympathie, est-elle
«de quelque manière »une mesure arbitraire? »
L'Italie a notamment réponduen cestermes :

«La réponseest que, si la mesure a été prise seulementpour «in-
tervenir d'une manière ou d'une autre ...non pas pour résoudreun
problème ..maispour apaiserlapresse etfairetaire lescritiques dela
population ou pour s'en attirer la sympathie » «de quelque ma-
nière»,alors elle était probablement arbitraire.

Mais si, outre apaiser l'opinion publique, elle avait d'autres moti-
vations sincères et importantes, à savoir ((protégerI'intérêp tublic
général ..et l'ordre public)), elle n'est en aucune manière arbi-
traire.
Cette réponse soulèvela question de savoir siun acte unique et indivi-

siblede l'administration, qui contientà la fois des élémentsarbitraireset
des élémentsquine le sontpas, est arbitraire, ou siun acteofficielqui est
partiellement arbitraire dans sa motivation (sans parler de son applica-
tion, ce que je vais faire)peut être qualifié d'arbitraire.
Quels étaient donc les motivations de l'ordonnance de réquisition?
Etaient-elles, comme le soutient l'Italie, de protéger l'intérêt publicé-
néralet l'ordre public? Comme je viens de l'indiquer, le préfetn'a appa-
remment pas ajouté foi àces dires.Outre qu'il a déclaré queces facteurs
étaientréunis «de façontoutethéorique »,ilaconclu que l'ordonnance de
réquisitionn'a àvrai dire ni favoriséI'intérêptublic ni favoriséla protec-
tion de l'ordre public, ce qui n'étaye pasces motifs.
Il n'est pas douteux qu'un des buts essentiels de la réquisition était

d'empêcherI'ELSIde disperser et de liquider ses avoirs. Cela ressorttrèsclairement des déclarationsdu présidentde la régionsicilienne citéesci-
dessus(voiraussilesparagraphes 28et34del'arrêd telaChambre)et dela
lettre du maire du 9 mai 1968dans laquelle il est explicitement question
des dangers de «démembrement» et de ((démantèlement» de I'ELSI.Il
se peut aussi que l'ordonnance de réquisition ait été destinàedonner à
l'opinion publique, dont l'inquiétude etles critiques sont compréhen-
sibles, l'impression que le maire tentaitde faire quelque chose», ou,
comme le préfetl'a dit, ((d'intervenir d'une manièreou d'une autre » de
façon à montrer l'intention du maire ((d'affronter le problème», de

prendre «une mesuredestinéeprincipalementàfaire ressortir son inten-
tion detraiter leproblèmetoutdemême ».Mais cene sontguèredesjusti-
fications qui montrent que l'acte était raisonnableet non déraisonnable,
judicieux et non capricieux. EmpêcherI'ELSIde vendre - et probable-
ment de disperser ses avoirs en dehors de Palerme - peut avoir semblé
justifiéau maire qui, en prenant sa décision,n'a nullement montréqu'il
était conscientde l'existencede droits dont1'ELSIjouissait en vertu du
traitéde 1948.Maiscefaisantlemaire neprenait pasune mesurequipou-
vait permettre de rouvrir l'usine,d'assurer la reprise de l'ensemblede la
production et de réembaucherles anciens ouvriers de l'ELSI, pas plus
qu'ilnemettaitcommecondition préalablequela Sicilecontinue,comme
ellel'afait, payer leurssalaires (commel'Italiel'aexpressémentadmis).
Dans lecadre~articulierdesdroits etex~ectativesdécoulantdu traité. tels

qu'ilssontexposésdans laprésente opinion,une mesuredestinée à empê-
cher1'ELSIdevendre sesavoirset derapatrier leproduit delaventepeut-
elleêtreconsidéré commeautre chosequ'arbitraire? La Chambre estime
à juste titre que la

((questionde savoir si certains actes pourraient ou non constituer
une violation du droit conventionnel d'êtreautoriséà contrôler età
gérerestune question quidoitêtreexaminéd eanschaque cascompte
tenu du sens et du but du traitéde 1948.

Ce qui est ((arbitraireau sens du traiténe doit-il pas être égalementexa-
minédans chaque cascompte tenu du sens et du but du traité?
Il est révélateque la cour d'appel de Palerme ait attachéde l'impor-
tance au fait que le préfet avait considéréque l'ordonnance du maire
répondait aux critiquesde la presse et qu'elle était((principalement »
destinée àmontrersondésird'intervenir d'une manière ou d'uneautre».
La cour d'appel, quia qualifié cetteconstatationde ((sévèr»et a dit que
le préfet avait constaté«un cas typique d'excèsde pouvoir))de la part
du maire «qui ..constitue un vice de légitimitde l'acte administratif»,
a déclaré:

((l'arrêtdu préfetprend effetex tuncetnon exnuncetprive doncla
réquisitiondesavoirsdelasociété appelante effectuéepar l'adminis-
tration detoutejustification, raison pour laquellesepose en tout cas
le problème desdommagesque la sociétépeut avoirsubisdu fait de
cettemesure ..ilestbien évidentque - lorsque lepréfet affirmeque ELETTRONICA SICULA (OP.DISS.SCHWEBEL) 114

lebut ultimedelaréquisitionn'aurait pu êtreatteinetnpratique par
le biais de cette ordonnance)) et que ((d'une manière généralei,l

manque par conséquentdans l'ordonnance la causejuridique pou-
vantlajustifier ou larendre opérante »,commecelaa ensuite été am-
plement démontré,pour conclure par cette constatation sévèreque
lemaire ..aeu recoursàlaréquisitionessentiellementpour démon-
trer savolonté d'essayerde résoudreleproblème» - il décrit mani-
festementun castypique d'excèsde pouvoir, excèsqui, commeon le
sait, constitue un vice de légitimitéde l'acte administratif.» (mé-
moire des Etats-Unis,annexe 81,p. 13-14).

Siun castypique d'excèsdepouvoir» n'estpasun casclassiqued'acte
arbitraire, qu'est-ce qui enest un?
La conclusion de la cour d'appel est aussiinstructiveà un autre égard.
L'ordonnance du maire setermine ainsi : Un décretultérieur fixeral'in-
demnité àverser àladitesociété autitre delaréquisition.»Coinmelacour
d'appel le relève,aucun décret ultérieurn'a été pris par lemaire; aucune

indemnisation n'aétéofferteou versée àI'ELSIpour laréquisitionopérée
par l'administration italienne.La cour d'appel a déclaré que :

Or, en dehors du fait que l'absence de fixation de cette indem-

nité (aucuneautoritén'ajamais procédé àcette détermination bien
qu'on eût dû le faire avant que la réquisitionne prenne fin) aurait
suffià démontrerl'illégitimitéde la réquisition..on ne saurait man-
quer desoulignerl'illogisme qu'ilya à refuserà lasociété - quiafait
l'objetde cette réquisitionillégitime- un dédommagement qui lui
aurait certainement été accordé si l'administration avait pris cette
mêmemesurelégitimement. ))(Zbid.,p. 19.)

La cour d'appel a sans doute raison de considérerque lefait que lemaire
n'a pas verséd'indemnisation pour la réquisitiona aggravél'illégitimité
de cettedernière.Maislefait que lemairen'apas respectésapropre déci-
sion ne fait-ilpas penser qu'ilya eu quelque chose de capricieux dans la
procédurederéquisition?Ilestdifficiledeconsidérercefaitcommecom-

patible avec une procédure régulière,laquelle estl'antithèsede ce qui est
arbitraire.

ii) Lecaractèredéraisonnableetcapricieuxdela réquisition

Jepense avoirdémontréd , ans lasectionquiprécède,que l'ordonnance
de réquisitionavaitun caractèredéraisonnableetcapricieux,tout à lafois
parce que :

- les bases légalessur lesquelles l'ordonnance du maire se fondait
n'étaientjustifiéesqu'etnhéorie;
- l'ordonnance étaitincapable de réaliserles buts qu'elle prétendait at-
teindre; ELETTRONICA SICULA (OP.DISS. SCHWEBEL) 115

- l'ordonnance n'apas réalisé lesbuts qu'elleprétendaitatteindre;
- l'ordonnance, qui avait été prise, selon ses propres termes, «aussi»
parce que la presselocales'intéressevivement à la situation et qu'elle

esttrèscritique àl'égard desautoritésqu'elleaccused'indifférenceface
à ce problème grave pour la collectivité», étaiten partie destinéeà
donner l'impression que le mairetentait de traiter le problème ((d'une
manièreoud'une autre »etnon qu'ilprenait une mesuresusceptible de
résoudreleproblème ;
- en conséquence, l'ordonnance n'était pas seulement illégitime mais
constituait un castypique d'excèsdepouvoir D ;
- l'un desbuts essentiels de laréquisition étaitd'empêcher la liquidation
par I'ELSI de ses avoirs,but qui faisait fi des obligations convention-

nelles qui s'yopposaient (l'Italie a soutenu que les obligations décou-
lant du traitéde 1948non seulementla liaient sur le plan externemais
qu'ellesétaientd'application directedansl'ordre interne);
- lemaire a contrevenuauxtermes de sonordonnance en ne prenant pas
de décretpour fixerl'indemnitéau titre de la réquisitionet enn'offrant
pasouenneversantpascetteindemnité.

De par sanature, la notion de cequi estdéraisonnable ou capricieux se
prête à toute une série d'appréciationsdans un cas donné: ce sont des
termes qui, quoique ayant un sensen droit international coutumier,n'ont
pas une significationordinaire etinvariable et quinepeuvent s'appliquer
que dans le contexte particulier des faits d'une affaire. Etant donnéles

faits de la présente affaire,je conclus, pour les raisons que j'ai données,
quel'ordonnance de réquisition,telle qu'ellea étémotivée,prise et appli-
quéeavait un caractère déraisonnable et capricieux et qu'elle étaitdonc
arbitraire.

iii)L'exercicedesvoiesderecoursnerendpasnécessairemenn tonarbitraire
unemesurequiétaitarbitraire

Le plus important motif avancépar la Chambre pour conclure que la
réquisition n'était pas arbitraireest peut-être quecelle-ci a fait l'objet de
recours administratifs etjudiciaires.Il y a tout lieu de présumerque l'exa-
men de ces recours a étéobjectif, non seulement - voire principale-
ment - parce qu'il s'agissait de l'application du droit italien par des
organesadministratifs etjudiciaires italiens, mais aussi parce que,en fait,

ces organes ont fait preuve d'objectivité en se prononçant en principe en
faveurdesintérêts de l'ELSI,mêmesienpratique 1'ELSIou sescréanciers
n'en n'ont que peu bénéficié surle plan financier. Il est certain que la
décisiondu préfetestintervenue avecun retard important etinjustifiable,
et ceretard a matériellementportéatteinteauxintérêtsde 17ELSIet de ses
créanciers. Il n'en demeure pas moins qu'en l'occurrence les procédures
administratives etjudiciaires italiennes ont fonctionné. Un argument est
séduisant: celui selon lequel, puisque I'ELSI ou son représentant (le

syndic de faillite) ont eu accès à la justice et puisque les procédures et
l'issue des recours ne peuvent être considérées comme équivalant à un ELETTRONICA SICULA (OP.DISS.SCHWEBEL) 116

dénidejustice, laquestion estainsiréglée;à quoi ilestajoutéque,mêmesi
l'ordonnance de réquisition étaitarbitraireet engageait donc initialement
la responsabilitéde l'Italie en vertu du traité, cette responsabilitén'aja-
maisété encourue puisque, endéfinitive,lacause de 1'ELSIaété entendue
par les juridictions internes italiennes. A vrai dire, la conclusion selon
laquelle la cause de1'ELSIa étéentendue est essentielle pour permettre
à la Chambre de conclure en l'espèceque l'exigencede l'épuisementdes
recours internes a été satisfaite.

Quel que puisse êtrelepoids de cesconsidérations,je ne lestrouve pas
convaincantes, pour des raisons dont leprojet de codification du droit de
la responsabilité des Etats rédigépar la Commission du droit interna-
tional fournitla meilleure explication.
Les articles 20 et 21 du projet d'articles sur la responsabilité des Etats
adoptépar la Commission disposent ce qui suit:

((Article20.- Violationd'uneobligationinternationalreequérant
d'adopteruncomportement spécgiquemend téterminé
Ilya violation par un Etat d'une obligationinternationale lerequé-
rant d'adopter un comportement spécifiquement déterminé lorsque
le comportement de cet Etat n'estpas conforme à celuirequis de lui
par cetteobligation.

Article21. - Violationd'uneobligationinternationar equérant
d'assurerunrésultat déterminé
1. Il y a violation par un Etat d'une obligation internationale le

requérant d'assurer, par un moyen de son choix, un résultat déter-
miné si,par le comportement adopté, 1'Etatn'assure pas le résultat
requis de lui par cette obligation.
2. Lorsqu'un comportement de 1'Etata crééune situation non
conforme au résultat requisde lui par une obligation internationale,
maisqu'il ressort del'obligation que cerésultat ouun résultat équiva-
lent peut néanmoins être acquispar un comportement ultérieurde
l'Etat, iln'ya violation de l'obligation que si1'Etatmanque aussi par
son cornoortement ultérieur à assurer le résultatreauis de lui Dar
cette obligation. »(Annuairede la Commissiondudroit international,
1977,vol. II, deuxièmepartie, p. 12.)

Il estexpliqué,dans lecommentaire relatifàcesarticles, que l'article 20
vise des obligations internationalesqui s'adressenà 1'Etatpour requérir
de lui qu'il exerce une activité spécifiquement déterminée ou qu'il s'en
abstienne; ces obligations, est-il précisé,sont parfois qualifiées d'obli-

gations «de comportement » ou «de moyens». Elles doivent être dis-
tinguées des obligations dites «de résultat» viséesà l'article 21. Ce qui
distingue le premier type d'obligations du second, ce n'est pas que les
obligations «de comportement » ou «de moyens » ne visent pas un but
ou un résultatdonné,mais qu'un tel but ou résultat doive être atteintpar
des activités,comportements ou moyens ((spécifiquement déterminés »
par l'obligation internationale elle-même,ce quin'est pas le cas pour les ELETTRONICA SICULA (OP.DISS.SCHWEBEL) 117

obligationsdites «de résultat»(Annuairedela Commissiondu droitinter-
national, 1977,vol. II, deuxième partie, p. 15). Siun Etat n'exerce pas
une activitéspécifiquementdéterminéeosu 'il s'enabstient, cecomporte-

ment suffitsansaucun doute àfairenaître laresponsabilitéinternationale
de cet Etat.
L'obligation, assuméepar chacune des parties àl'accord complémen-
taire, de ne pas soumettre sur son territoire lessociése l'autrepartieà
des ((mesures arbitraires ou discriminatoires » «ayant notamment pour
effet» - mais non exclusivement - les résultats détaillés énoncés aux
clauses a) et b)de l'article premier est-elle une obligation de comporte-
ment ou une obligation de résultat?
Les objectifs particuliers de l'obligation de ne pas soumettre ces so-
ciétésà desmesuresarbitraires ou discriminatoiressonténoncésdefaçon

très précise. Mais lesmoyens particuliers d'atteindre ces objectifs ne le
sontpas. D'aprèslecommentaire dela Commission,l'obligation imposée
par l'article premier semble êtreune obligation non de moyens mais de
résultat,commelesontnormalement lesobligationsconventionnelles in-
ternationales relativeà la protection des étrangerset de leurs intérêt.1
n'en découlecependant pas qu'en l'espècel'Italie ne répondpas de la
façon arbitraire dont ellea traitéI'ELSIet lesintérêtse sesactionnaires
dans 1'ELSIen raison des procédures administrativeset judiciaires qui
ont suivi laréquisition.

Telle est ma conclusion puisque, pour reprendre les termes du projet
d'articlesde la Commission :
«Il y a violation par un Etat d'une obligationinternationale le re-
quérantd'assurer, parun moyen de son choix,un résultat déterminé
si,par le comportement adopté, 1'Etatn'assurepas le résultat requis

de lui par cetteobligation.
Enl'espèce,l'Italien'apas assurélerésultatdéterminé à,savoirsoustraire
I'ELSI aux effets de la mesure arbitraire de réquisition.Elle n'a pas as-
suréce résultat,ni de façon généralenidu point de vue des objectifstrès

précis énoncés aux clausea s) et b)de l'article premier.
Le projet d'articles de la Commission indique qu'il ne suffit pas que
l'action dommageablede 1'Etatsoitsoumiseauxjuridictions administra-
tives etjudiciaires. Il faut y remédier entièremen: «le résultat requi))
doit être«assuré». Peut-on dire que les recours administratifs et judi-
ciairesitaliensont entièrementremédié àla réquisitionimposée àI'ELSI,
quel'objectif,quiétaitdenepas soumettreI'ELSI àune tellemesurearbi-
traire et qui n'apas été atteint initialementl,'apar la suite?
Lepréfetaannulél'ordonnance de réquisition,maisprèsde seizemois

aprèsqu'elleeutétéprise. L'Italie a bien soutenu qu'il estnormal que des
dossiersd'un préfet restenten souffrance pendant seizemois,que 1'ELSI
n'avaitpasapposéletimbre «urgent »sursonrecours et qu'ilexistaitune
procédure,que I'ELSI n'apas employée,pour fairepression sur un préfet
inactif, mais j'estime comme la Chambre que ces arguments ne sont pas
convaincants. Il n'apas été démontrd ée façon convaincante qu'une telleinertie étaitnormale; on a produit la preuve que des ordonnances de ré-
quisitionavaientété rapportéesdansundélaidequelquesjours, et non de
quelques mois.De par sanature, lerecoursintroduit par I'ELSIportait la
marque de l'urgence; la situation de I'ELSI,qui préoccupaitvivementla
population et la presse locales,devait être connuedu préfetde Palerme.
Au moment où le préfetaurait pu être légalemenm t is en demeure de se
prononcer, I'ELSIavait fait faillite et ne pouvait plus invoquer cette pro-
cédure.
Pour les motifs exposésdans l'arrêd te la Chambre et dans la présente
opinion, la décisiondu préfet était importante.Mais,tardive comme elle
était,elle ne pouvait avoir et elle n'a pas eu le résultatque l'obligation

assuméepar l'Italiede ne pas soumettre I'ELSI à des mesures arbitraires
était destinéeàavoir. Seize moiss'étaient écoulés eItELSIavait depuis
longtemps été mise dans l'impossibilitématériellede percevoir l'intégra-
litéde ses effetà recouvrer, de recevoir de Raytheon un appui en liqui-
dités, d'acheverles fabrications en cours et de vendre ces fabrications et
les stocks; elle n'avaitpu ni mettre en vente, ni faire visiter etvendre son
usine etl'équipement,ellequiétaitbienplacée pour savoirenquoiconsis-
taient ses avoirs et quel intérêitls présentaientpour des acheteurs, ce
qu'un syndicde faillite n'était pascensé savoir.Pour que la réquisition
soit levéeavant que I'ELSIne soit acculée àla faillite, il aurait fallu que
le préfetagisse presque immédiatement,comme il a étédémontréque
d'autres préfets l'ont faitpour d'autres réquisitions. Maisle préfet ne
l'apas fait et, comptetenu des prédictionsdu présidentde la région sici-

lienneou desesmenacescontre I'ELSIetRaytheon(voirleparagraphe 34
de l'arrêtde la Chambre), il se peut que I'ELSIn'ait guère eude raisons
de penser qu'ille ferait.
Dans son commentaire. la Commission du droit international cite un
casdans lequel ila étéugk que «le résultat requispourrait êtreconsidéré
commemanqué dèsl'adoptionde laloiautorisant l'expropriation »étant
donnéqu'à la suitede «l'adoption de cetteloi,lavaleur commerciale des
biensdel'étrangersetrouveraitgravementtouchée »(loc. citp.27).Au vu
des effets de la réquisitionsur la situation de I'ELSI,qui viennent d'être
exposés,ne pourrait-onpas conclure de mêmeque le résultat requisde
l'obligation d'épargner à I'ELSI des mesures arbitraires pourrait être
considérécommedéfinitivementmanqué dè qse l'ordonnance de réqui-
sitionlui a étéappliquée ,tantdonnéqu'à la suitede son application «la
valeur commerciale»des intérêtd se Raytheon dans I'ELSIa été «grave-

menttouchée»?Ilressort clairement dudit commentaireque, pour qu'un
Etat ne répondepas d'une violation d'une obligation internationale de
résultat, oud'une violation qui a débuté oun'a seulement étéqu'ébau-
chée,ilfaut quelerésultatexigénesoitpasdevenu «enfaitdéfinitivement
irréalisableà la suite de l'action ou de l'omission mentionnée)) qui
constitue provisoirement une violation (ibid.,p. 30). Pour les raisons qui
viennent d'être exposées,on peud touter qu'ilait étématériellementpos-
sibled'assurer réparationà 1'ELSIet d'éliminer entièremenltes effets de
la réquisition. Pour que l'obligationde résultatsoitexécutéeen l'espèce, ilaurait fallu
que les recours administratifs oujudiciaires aient, selon les termes de la
Commission,((réalisépleinement,par un nouveau comportement, le ré-
sultat[quel'Etat]esttenu d'atteindre, enéliminantentièrementetabinitio
la situation incompatiblecrééepar lecomportement précédent»(loc.cit.,
p. 30),cet Etat pouvant aussi obtenir un résultat équival, ar exemple
en assurant «pleine etentièreréparation»à la suite de laviolation (ibid.).
Ilresteàvoir silesdécisionsdutribunal de Palermeou dela cour d'appel

de Palermeont assurépleineet entièreréparation.
Dans l'instanceintroduite devant le tribunal de Palerme,le syndic de
failliteasoutenu que1'ELSIavaitétéobligédee demander samiseenfail-
lite en raison de la situation crpar l'ordonnance de réquisition;que
même aprèsquelafailliteeutétédéclaréle e,syndicn'avaitpaspu prendre
possessiondel'usineetdel'équipementenraison de l'ordonnance qui est
restéeen vigueurjusqu'au 30septembre 1968,causant «un tort inimagi-
nable àla sociétéen failliet,par voiede conséquence,aux créanciers » ;
que l'ordonnance deréquisitionavaitétédéclaré illeégalepar lepréfet;et
que le ministère de l'intérieur et le maire de Palerme devaient être
condamnés àverser des dommages et intérêt s la masse de la faillite de
I'ELSIen raison de l'occupation illégalede l'établissement.Il a été sou-

tenu que ces dommages et intérêts étaient constitué psr la diminution
considérablede la valeur de l'usineet de son équipement, diminutionré-
sultant de la différenceentre la valeur comptabàela date de la faillite et
l'évaluationde l'usine etde l'équipement faitepar lecommissairepriseur
dutribunal immédiatementaprèsl'expirationdelapériodedesixmoisde
réquisition,soitun montant de 2395 561600lires,augmenté desintérêts.
Le tribunal de Palerme, aprèsavoir examinéles preuves relatives àla
situation financière de 1'ELSà la veille de la réquisitionet avoir relevé
qu'à cettedate l'usine de 1'ELSIn'était pratiquement plus enservice,a
conclu qu'on n'était pasfondé à établir un lien entre la faillitede la so-
ciété elta réquisition.l a rejeté l'argument selon lequelles dommages
seraient prouvéspar la différence entreles valeurs attribuées ouqu'ils
résultaientdu fait que l'usine n'était pas accessiblependant la période
de la réquisition,la failliteayant des causesbien différenteset beaucoup

plus importantes; il a ajoutéque les estimations figurant à l'actif du
bilan étaient ((relatives qu'iln'avait pas étéprouvéque lesdommages
subis étaientattribuablessoit au faitque lesyndicn'avaitpas pu accéderà
l'usine soià l'occupation de l'usine par les travailleurs àuun défaut
de surveillance de l'usine. Ce qui veut dire que le tribunal de Palerme
n'a accordéaucune indemnisation pour la réquisition, ayant concluque
celle-cin'avaitcauséaucun dommage à I'ELSI.
L'important arrêtde la cour d'appel de Palerme a étéanalyséde façon
approfondie dansl'arrêdt elaChambre etdans laprésente opinion. Surla
question des dommages etintérêts,la cour d'appea ljugéque:

«en ce qui concerne les dommages consistant dans le fait que l'or-

donnance a provoqué la faillitede la sociétél,a conclusion négative ELETTRONICA SICULA (OP.DISS.SCHWEBEL) 120

àlaquelle estparvenu le tribunal [dePalerme]est amplement motivée
de façon convaincante ..en tout cas..il n'ya aucune preuve que de
tels dommagesaient été subis àcet égard».

La cour d'appel a attribué un effet déterminantà ce qu'elle a considéré

comme l'état d'insolvabilitéantérieur de I'ELSI et elle a jugéqu'«il est
donc certain »qu'on ne saurait considérerqu'ilpuisse y avoirdes «dom-
mages et intérêts puisqueles dommages sont liés à la faillite)). Rien ne
prouvait la fiabilité des chiffresfigurant au bilan, ni que la dépréciation
invoquéepar lesyndicavaitétécausée par laréquisition.Aucunexpert ne
pouvait, en 1974,établirla valeurréellede l'usine et de l'équipementla
datede l'ordonnance de réquisition.
Comme je l'ai relevéplus haut, la cour d'appel a néanmoinsjugéque
l'appel étaitjustifién ce quiconcerne lesdommagesdécoulant de l'im-
possibilité d'utiliser l'usine,les installations et l'équipement quiont fait

l'objet de l'ordonnance de réquisition.» Elle a jugé qu'ilétait incontes-
table que, sil'ordonnance de réquisitionavaitétlégale, elleaurait néces-
sitéle versementd'une indemnité et qu'il étaitd'autant plus illogique de
ne pas verser une indemnitépour une réquisitionillégale.La privation de
lajouissance d'un bien constitueun sacrificeéconomiquequiimplique le
versement d'une indemnisation si elle est effectuée légalement,et une
compensation des dommages est requise lorsqu'elle est illégale. L'auto-
ritéayantopérélaréquisitios nedevait au moins de payerlavaleurécono-
mique de la possessionqu'elle avaitdesbiensréquisitionnés.De surcroît,
«le fait que le syndic a pris possession tardivement a retardé toutes les
opérations de liquidation et, partant, la réalisation des biens réquisi-

tionnés,cequi a entraînéun dommageévident »pour la masse descréan-
ciers. La cour d'appel,«en l'absence de preuves de dommages plus im-
portants »,a assimiléle dommage àun intérêtde 5pour cent par ansur la
valeur de la propriétéréquisitionnée,telle que cettevaleur avaitété fixée
par l'expert nommépar le syndic, soit une somme qui s'est élevée à
114014711lires,plus lesintérêt scompter de ladate àlaquellelaréquisi-
tion a pris fin.
Le montant de l'indemnité accordéepar la cour d'appel de Palerme et
sa mesurepeuvent-ilsêtre considéréscommeassurantune «pleine et en-
tière réparation,aboutissant au mêmerésultat quesi I'ELSI n'avaitja-
mais étéréquisitionnée? Sûrementpas.Que laréquisition aitété ou non à
l'originedela faillite deI'ELS- etmêmeenadmettant qu'elle n'enapas

été«la»cause - la réquisitiona faitsubià I'ELSIet à ses créanciersun
préjudice non réparé, quicomprend: a) le fait que 1'ELSIn'a pas étéà
mêmede céderses créances à recouvrer à 100pour cent de leur valeur
nominale; b)le fait que 17ELSIn'a pas étà mêmed'achever les fabrica-
tionsencours etdelesvendre,ainsiqueses stocks, àleurvaleur(enfait, les
fabrications en cours ont évendues àun prix sensiblementinférieur àla
valeur àlaquelle ellesavaientétéestimées)e;t c)le fait que I'ELSI n'apas
été àmêmede prendre des dispositions pour faire visiter et vendre son
usine, seslignes de production et son équipement etle fait qu'ellen'apas ELETTRONICA SICULA (OP.DISS. SCHWEBEL) 121

pu, elle qui savait en quoi consistaient ses biens et connaissait cette
branche d'activité,tirerlemaximum delavente de cesavoirs (etdes avoirs
incorporels). Onnepeut imaginer que leproduit delaventedes biens dela
sociétédans une procédure de faillite puisse avoir atteintla valeur totale

du patrimoine de I'ELSI. Cela aurait été improbables'agissant d'une
vente organiséedans lecadre d'une faillite;etilestencoremoins probable
que cela ait pu êtrelecas dans les circonstances dans lesquelles la vente a
finalement eu lieu. Pour les raisons queje viens d'exposer, lemontant ac-
cordépar lacour d'appel de Palermenepeut avoircomblélagrande diffé-
rence entre leproduit de la vente organiséedanslaprocédure de faillite et
la valeur des avoirs de I'ELSI.
On peut certes soutenir que, mêmeen l'absence de réquisition,I'ELSI
aurait fait faillite. Telle est d'ailleurs la conclusion essentielle desjuridic-
tions italiennes et de la Chambre. Mais cette conclusion ne tient pas
compte du fait - j'espèreavoir démontré dans laprésenteopinion que

c'estun fait- que, sila réquisitionn'avaitpas étimposéeau moment où
elle l'a ét,'ELSI aurait été àmême d'obtenirune somme sensiblement
plus élevéede ses avoirs que ce qui a en fait étéobtenu, mêmesi, à un
moment donné,I'ELSIaurait pu être acculée à la faillite.
Il s'ensuitque I'ELSI n'apas étéplacéedans lasituation qui aurait étéla
sienne s'iln'y avait pas eu de réquisition.Le résultat équivalent n'apas
été assuré par les procédures administratives et judiciaires italiennes, si
dignes d'estime soient-elles,si bien qu'à mon avisl'Italie reste coupable
d'avoir commisun actearbitraire au sens de l'accord complétant letraité.

(Signé)Stephen M. SCHWEBEL.

Bilingual Content

DISSENTING OPINION OF JUDGE SCHWEBEL

The Judgment of the Chamber in my view issound in two paramount
respectswhich haveimportant implicationsforthe vitalityand growth of
international lawin the areas of its concern.
First,the Judgment applies a rule of reason in its interpretation of the
reach ofthe requirement ofthe exhaustion of local remedies. It holds not
that every possible local remedy must havebeen exhausted to satisfythe
localremedies rule but that, wherein substancelocalremedies have been
exhausted, that sufficesto meetthe requirements ofthe rule evenifit may
be that avariation on the pursuit of local remediesin the particular case
was not in factplayed out. It has of courselongbeen ofthe essenceofthe
rule of exhaustion of local remedies that local remedies need not be
exhausted wherethere are no effective remediesto exhaust.It maybe said
that the Chamber has done no more than to reaffirmthis established ele-
ment ofthe mle. In fact it has reaffirmed it,but in doing sotheJudgment
makesa contribution to the elucidation ofthe localremediesrulebyindi-
cating that, where the substance of the issues of a case has been defini-

tivelylitigatedin the courts of a State,the rule does not require that those
issues also have been litigated by the presentation of everyrelevant legal
argument whichanymunicipal forummighthavebeen able to pass upon,
however unlikely in practice the possibilities of reaching another result
were. The United States of America submitted that the claims brought
by it were admissible since "al1 reasonable" local remedies had been
exhausted; in substance, the Chamber agreed, and rightly so. Its hold-
ing thus confines certain prior constructions of the reach of the rule of
exhaustion of localremediesto a sensible limit.
Second,the Judgment largelyconstruesthe TreatyofFriendship, Com-
merceand Navigation betweenthe United Statesand Italyin wayswhich
sustain rather than constrain it as an instrument for the protection of the
rights ofthe nationals, corporations and associations ofthe United States
in Italy andthe rights of nationals, corporations and associations of Italy
in the United States.Arguments were pressed onthe Chamber which, if
accepted,would havedeprivedtheTreaty ofmuch ofitsvalue.In particu-
lar, it was maintained that the Treaty was essentially irrelevant to the
claims ofthe United Statesin this case, sincethe measures taken by Italy

(notably,the requisition ofELSI'splant and equipment)directlyaffected
not nationals or corporations ofthe United Statesbut an Italian corpora-
tion, ELSI,whoseshares happened tobeownedbyUnited Statescorpora-
tions whose rights as shareholders were largely outside the scope of the
protection afforded bythe Treaty.The Chamber did not acceptthis argu-
ment. Nor did it accept the contention that the right to organize,control OPINION DISSIDENTE DE M. SCHWEBEL

[Traduction]

L'arrêtde la Chambre me paraît judicieux sous deux aspects primor-
diaux qui ontd'importantes conséquencespour lavitalitéetledéveloppe-
ment du droit international dans lesdomaines auxquels il serapporte.
En premier lieu, l'arrêtapplique une règlede raison lorsqu'il indique
l'extensionde ce qui est requis en matière d'épuisement desvoies de re-
cours internes.Il dit, non pas qu'il faut avoir épuisé tousles recours in-
ternes, mais que lorsqu'en substance les recours internes ont été épuisés
celasuffitpour répondre auxexigencesdelarègle,mêms e'ilsepeut qu'en
l'espècetelle ou telle voie de recours n'a pas en fait étéutilisée.Depuis
longtemps,bien entendu, l'un des aspects essentiels de la règle estqu'on
ne peut exigerl'épuisement des recours internes lorsqu'iln'existepas de

recours effectifà épuiser.On pourrait dire que la Chambre n'a fait que
réaffirmercet aspect établide la règle. Ellel'aréaffirmé en effet,maisde
telle sorteque l'arrêtontribue à éluciderlarègledesrecours internes en
indiquant que, lorsque les éléments d'une affaireont éténettement exa-
minésau fond par les tribunaux d'un Etat,la règlen'exigepas que ces
élémentsaient aussi fait l'objetd'un débatjudiciaire comportant la pré-
sentation detout argumentjuridique pertinent sur lequel telle outelleju-
ridiction interne aurait étéhabilitéestatuer,aussifaiblequ'ait pu êtreen
pratique la possibilitéd'aboutir à un résultat différent.Les Etats-Unis
d'Amériqueont soutenu que leur demande était recevablepuisque «tous
lesrecoursinternes raisonnables »avaient étéépuisép s; ur l'essentiel,la
Chambre apartagécepoint devue,et àjuste titre. Ellea ainsiramenéàde
sages limites certaines interprétations antérieuresde l'extension de la
règlede l'épuisement des recours internes.

En secondlieu, dansune largemesure, l'arrêt interprètleetraité d'ami-
tié,de commerce et de navigation entre les Etats-Unis et l'Italie d'une
façon qui lesoutient au lieudelerestreindre entant qu'instrumentpour la
protection desdroits desressortissants,sociétéset associationsdes Etats-
Unis en Italie et des droits des ressortissants, sociétéset associations de
l'Italie aux Etats-Unis. Des arguments ont été présentés avec insistance
qui, s'ilsavaient été retenus, auraient privle traité d'unebonne partie
de sa valeur. En particulier, on a soutenu que letraité éta, our l'essen-
tiel, sans rapport avec les réclamations des Etats-Unis enl'espèce,parce
que les mesures prises par l'Italie (notamment la réquisitionde l'usine
de l'ELSI et de son équipement) affectaient directement non pas des
ressortissants ou des sociétésdes Etats-Unis,mais une société italienne,
17ELSI,dont les actions se trouvaient appartenir à des sociétés amé-
ricaines dont les droits en tant qu'actionnaires étaient,dans une large

mesure,hors du champ de la protection assuréepar letraité.La Chambreand manage a corporation waslimitedtothe founding of a Companyand
the election of its directors and did not include its continuing manage-
ment; nor that the right to control and manage was unaffected by the
requisition of that corporation's plant and equipment. Nor did the
Chamber find it necessaryto take aposition on the claimthatthe terms of
the Treatymust be narrowly construed to embrace an expropriation but
not a taking (it rather holds that "this question" does not "have to be
resolved in the present case"). These and other preclusive constructions
ofthe Treaty forthe most part wereput aside bythe Chamber.

Moreover, the Chamber's Judgment does not impair the principle of
"the most constant protection and security for. ..persons and property"
which the Treaty prescribes, and the Treaty'sprovisions for "the prompt
payment of just and effective compensation" for the taking of foreign
property areleftintact.Themeaning of"justand effectivecompensation"

put forth by the United States was not questioned. The United States
maintained that, when a State deprives a foreign national of property
rights in a business enterprise, "compensation should be based on the
full value of the business". Norrnally,the United Statespointed out, the
value of a business takes into account its future earnings potential, but,
inthis case,the United Statesmade no claimforfuture profits sinceELSI
was not profit-making. Given the fact of ELSI'srequisition as long ago
as 1968,and the contention of the United States that that requisition
prevented ELSI's orderly liquidation, the United States proposed the
book value of ELSI as of that time as the measure of its value, while
taking care to emphasize that the United States does not in general view
book value as a fair measure of the value of an ongoing enterprise, that,
indeed, book value is widely rejected as a sufficient measure of the
value of a businessenterprise. Whilethese principles wentunchallenged,
Italy maintained not only that ELSI was deprived of no rights under the
Treatybut that in any event it was,in viewof its condition, worth far less
than book value.

In short,the pertinent provisions ofthe Treatyhavebeen largelyinter-
preted to givethem effectrather than to deprivethem ofeffect.Theclaims
of the United States in this case have not been sustained, but that is not
because the Chamber has found against the United States on the law of
the Treaty;ithasfound againstthe United Statesonthepractical andlegal
significanceto be attached to the facts ofthe case.

1do not share al1ofthe Chamber's findings,particularly in two salient
respects.While agreeingwith the Chamber's indicationthat,prima facie,
the requisition of ELSI's plant appears to have deprived Raytheon and
Machlett of their entitlement under Article III of the Treaty to "controln'a pas retenu cet argument. Elle n'a pas accepténon plus la thèse selon
laquelle ledroit de constituer,contrôler etgérerune sociéselimitaità la
créationde l'entreprise età l'électionde ses administrateurs et qu'il ne
s'appliquait pasà sa gestion courante; la Chambre n'apas considéré non
plus que la réquisitionde l'usinede cetteentreprise et deson équipement
était sanseffet sur le droit de la contrôler et de la gérer.Elle n'a pas non
plus jugénécessairede se prononcer sur la thèse suivant laquelle les

termes du traité devaient être interprétés restrictivemend t,e façon à
englober une expropriation et non un taking,préférant direque «cette
question ..[ne]doit [pas]être résolue en l'espèce)). Cette interprétation,
comme la plupart des autres interprétations restrictivesdu traité,a été
laisséede côtépar la Chambre.
En outre,l'arrêtde la Chambre ne portepas atteinte au principe «de la
protection et de la sécurité lesplus constantespour [les]personnes et [les]
biens»,qui esténoncé dans letraité,non plusqu'aux dispositionsquipré-
voient «lepaiement rapide d'une indemnitéréelle etéquitable»pour les
étrangers privésde leurs biens. Le sens donnéaux termes ((indemnité
réelle etéquitablepar lesEtats-Unisn'a pas étécontesté L.esEtats-Unis
ont soutenu que, lorsqu'un Etat prive un ressortissant étrangerde droits
sur lesbiens d'une entreprise commerciale,«l'indemnisation devraitêtre
fondée surla valeur totale de l'entreprise». Les Etats-Unis ont souligné

que, normalement, pour déterminerla valeur d'une entreprise, on tient
compte de ses gains potentiels mais, en l'occurrence, ils n'ont pas pré-
sentédedemande concernant desbénéficesfuturs,puisqueI'ELSIne fai-
saitpasde bénéfices.Etantdonnéquelaréquisitionremonte à 1968etque
lesEtats-Unissoutiennent qu'elle a empêchélaliquidation régulièd rela
sociétéi,ls ont proposé que,pour mesurerla valeur de I'ELSI,on prenne
sa valeur comptable à ce moment-là,sans omettre de soulignerqu'en gé-
néralles Etats-Unis ne considèrent pas la valeur comptable comme une
juste mesure delavaleur d'une entreprise enactivitéetqu'en faitlavaleur
comptable est largement écartée parcequ'elle nedonne pas une mesure
suffisante de la valeur d'une entreprise. Ces principes n'ont pas été
contestés, mais l'Italie a soutenu non seulement que I'ELSI n'avait été
privée d'aucun des droitsque lui accordait le traitéet qu'en toute hypo-
thèse,étant donnésa situation, sa valeur réelleétaittrès inférieureà sa

valeur comptable.
En somme,lesdispositions pertinentes du traitéont été dansune large
mesure interprétéesde manière à leur donner effet plutôt qu'à lespriver
d'effet. Il n'a pas été fait droit aux revendications des Etats-Unisdans
cette affaire, mais ce n'est pas parce que la Chambre s'est prononcée
contre les Etats-Unis en ce qui concerne le droit découlantdu traité;elle
s'estprononcée contrelesEtats-Unis à l'égarddela significationpratique
etjuridique qu'ilfaut attribuer aux faits de la cause.
Je ne partage pas entièrement l'opinion de la Chambre, en particulier
sur deuxpoints importants. La Chambre a raison, àmon sens,d'indiquer
quede prime abord la réquisitionde l'usinede I'ELSIsembleavoirprivé
Raytheon et Machlett du droitque leur conférait l'articleIII du traitédeand manage" ELSI, 1do not agree with the Chamber's conclusion that
neverthelessArticle III wasnotviolated because,bythe timeofthe requi-
sition, its rights of control and management no longer existed either
because the feasibilityof an orderly liquidation of ELSI'sassetsby ELSI
at that time has not been sufficientlyestablished or because ELSI'sstate

of insolvencyby then entailed an obligation on ELSI to have petitioned
foritsbankruptcy. Furthermore, 1do not sharethe Chamber's conclusion
that the requisition was not an arbitrary act which violated the provision
of Article 1of the Treaty'sSupplementary Agreement providing that the
nationals and corporations of the parties "shall not be subjected to arbi-
trary ...measures". 1concur in the Chamber's classicconcept of what is
an arbitrary act in international law, but 1disagree with its appraisal of
the order of requisition and withitsinterpretation ofthe pointed holdings
ofthe Prefect and the Palermo Court of Appeal.

Beforeexplainingwhy1believetheseconclusionsofthe Chamber to be
in error, it may be useful to set out certain broader considerations of the
purposes and purport ofthe FCN Treatyto whichthe Chamber has in my
opinion paid insufficientattention.

Atreaty,in the wordsofArticle 2ofthe ViennaConvention on the Law
of Treaties, may be embodied "in a single instrument or in two or more
related instruments". The Treaty of Friendship, Commerce and Naviga-
tion between the United States and Italy consists of a treaty, protocol,
additional protocol, and exchanges of notes signed on 2 February 1948,
which, in the case of the protocols, expresslyprovide that they "shall be

considered as integralparts ofsaid Treaty", aswellas an AgreementSup-
plementingthe TreatyofFriendship, Commerce and Navigationbetween
the United States and Italy signed on 26 September 1951,which equally
provides that it shall "constitute an integral part of the said Treat...".

Becauseof the content of the customary law oftreaties reflected in the
quoted provision ofthe ViennaConvention, because ofthe expressprovi-
sionsofthe treatyinstrumentsjust quoted, and because ofthe meaning of
the term "integral",i.e.,composed of constituent parts making a whole,it
is clear that the FCN Treaty and its Supplementary Agreement must be
read together as the integral whole whichthey are proclaimed to be. The
Chamber recognizesthis conclusion(though counsel forthe Respondent
maintained that Italydid not).TheChamber couldhardly do otherwise.It
itself isa creature ofa treaty,itsatute,which,the United Nations Char-
ter provides, "forms an integral part ofthe present Charter". It would be
hard to conceiveofan argument that neverthelessthe Statuteand Charter((contrôler et gérer» E EL S mI,is je ne suispas d'accord avecla conclu-
sion de la Chambre selonlaquellel'article III n'aurait néanmoins pas été
violé,pour la raison qu'au moment de la réquisitionlesdroits de contrôle
et de gestion de Raytheon et Machlett n'existaient plus, soit parce que la
possibilitématérielle,pour I'ELSI,de procéder àl'époque à la liquidation
régulièredes actifs de la société n'apas été suffisamment établie, soit
parce qu'à ce stade I'ELSI était insolvable et aurait dû par conséquent
demander àêtremise enfaillite. Jenepartage pas non plusl'opinion de la
Chambre lorsqu'elle conclut que la réquisition n'était pas un acte arbi-
traire quiviolait la disposition de l'article premier de l'accord complétant
letraité aux termesde laquelle lesressortissants et les sociétésdesparties
contractantes «ne seront pas soumis ...à des mesures arbitraires)). La
Chambre aretenu la conceptionclassique de cequi constitueun actearbi-

traire en droit international et cette conception me convient, maisje suis
en désaccord avecla manière dont la Chambre apprécie l'ordonnance de
réquisitionetinterprètelesdéclarationsfort sévèresdu préfetetde lacour
d'appel de Palerme.
Avant d'expliquer pourquoi je considère que ces conclusions de la
Chambre sont erronées,il ne sera peut-être pas inutilede présenter quel-
ques considérations plus générales surles fins et la portée du traitéde
1948,auxquellesla Chambre n'a pas, àmon avis, prêté assez d'attention.

~INTÉGRATION DE L'ACCORD COMPLÉMENTAIRE DANS LE TRAITÉ

Aux termes de l'article 2 de la convention de Vienne sur le droit des
traités, un traité peut être consig«dans un instrument unique ou dans
deux ou plusieurs instruments connexes)). Le traité d'amitié,de com-
merce et de navigation entre les Etats-Unis et l'Italie se compose d'un
traité, d'un protocole, d'un protocole additionnel et d'échangesde notes
signésle 2février1948,qui, dans lecasdesprotocoles,disposentexpressé-

ment qu'ils «seront considérés comme faisant partie intégrante du
traité»,ainsi que d'un accord complétant le traité d'amitié,de commerce
et de navigation entre lesEtats-Unis etl'Italie signéleseptembre 1951,
lequel dispose également qu'il «constituera ...partie intégrante du
traité.»
Etant donné le contenu du droit coutumier relatif aux traités reflété
dans la disposition précitéede la convention de Vienne, étantdonnéles
dispositions expressesdes instruments précités et étant donnéle sens de
l'expression «partie intégrante»,qui se réfèreà un tout, il est clairque le
traitéde 1948et l'accord qui le complète doivent être considéréscomme
formant l'un et l'autre le tout intégréqu'ils sont censés former. La
Chambre accepte cette conclusion (bien que le conseil du défendeur ait
affirméque l'Italie ne l'acceptait pas). La Chambre pouvait difficilement
faire autrement, puisqu'elle est elle-mêmenéed'un traité,le Statut de la
Cour, dont il est dit dans la Charte des Nations Unies, qu'il «fait partie
intégrante» de la Charte. On voit mal, dans ces conditions, comment on97 ELETTRONICA SICULA (DISS .P.SCHWEBEL)

are not to be interpreted together, as a single instrument forming an
integral whole, and harder still to imagine that the Court could accept
such an argument.

In its pleadings, Italy relied upon the rules of treaty interpretation set
forth in Article 31 of the Vienna Convention on the Law of Treaties as
reflective of customaryinternational law, a position which was not ques-
tioned by the United States. Article 31 provides that, "A treaty shall be
interpreted in good faith in accordance with the ordinary meaning to be
giventothe terms ofthe treaty intheir context and in the light of itsbject
and purpose." It provides that "The context forthe purpose of the inter-
pretation of a treaty shall comprise, in addition to the text, ...its pre-
amble ..." It specifies that there shall be taken into account, together

with the context, "any subsequent agreementbetween the parties regard-
ing the interpretation of the treaty or the application of its provisions".
And it provides in Article 32that :
"Recourse may be had to supplementary means of interpretation,
including the preparatory work ofthetreaty and the circumstances of
its conclusion, in order to confirm the meaning resulting from the
application of article31,orto determine the meaning when the inter-

pretation according to article 31:
(a) leavesthemeaningambiguous or obscure; or
(b) leadsto aresult which ismanifestly absurd orunreasonable."

In the current case,the Partiesattached radicallydifferentinterpretations
to the provisions of the Treaty and its Supplementary Agreement which
were at issue between them. It is undeniable that, when their conflicting
arguments are matchedtogether, the meaning ofsome ofthe Treaty'spro-
visions are ambiguous or obscure; indeed, each ofthe Partiesmaintained
that the opposing interpretation led to results which, if not manifestly
absurd, were unreasonable. Thus, according to the Vienna Convention,
this isa casein which recourse to the preparatory work and circumstances
of the Treaty's conclusion was eminentlyin order.

What were the circumstances of the conclusion of the Supplementary

Agreement which forms an integral part of the Treaty itself? And what
does the Treaty's preparatory work and processes of ratification demon-
strate its purpose, or a paramount purpose of the Treaty,to be and what
light do those processes shed on the interpretation to be attached to its
provisions ?
According to the content ofthe relevantItalian parliamentary proceed-pourrait soutenir que le Statut et la Charte ne doiventpas être interprétés
ensemble commeun instrument unique formant un tout intégrée,t il est
plus difficile encore d'imaginer que la Cour puisse accepter un tel argu-
ment.

LE TRAITÉ ET L'ACCORD COMPLÉMENTAIRE : LES ClRCONSTANCES
ET LES INTENTIONS

Dans sesexposés,l'Italies'estfondéesur les règlesd'interprétation des

traités énoncées a l'article 31de la convention de Vienne sur le droit des
traités comme reflétant le droit international coutumier,position qui n'a
pasétécontestép ear lesEtats-Unis.L'article31dispose qu'«un traitédoit
êtreinterprétédebonne foisuivant lesensordinaire aattribuer auxtermes
du traité dans leur contexte eà la lumièrede son objet et de son but».Le
mêmearticle précise qu'«aux fins de l'interprétation d'un traité,le
contexte comprend, outre le texte, [le]préambule ..» Il ajoute qu'il sera
tenu compte, en mêmetemps que du contexte, «de tout accord ultérieur
intervenu entre les parties au sujet de l'interprétation du traité ou de
l'application de ses dispositions.Et l'article 32dispose que :

«Il peut être faitappelà des moyens complémentairesd'interpré-
tation, et notamment aux travaux préparatoires et aux circonstances
dans lesquelles letraitéa étéconclu,envue, soit de confirmer lesens
résultantde l'application de l'article31, soit de déterminer le sens
lorsque l'interprétation donnéeconformément a l'article :1

a) laisse le sensambiguou obscur; ou
b) conduit a un résultat quiest manifestement absurde ou déraison-
nable.»

Dans la présente affaire, les Parties ont interprétéde manière radicale-
ment différente les dispositions du traitéet de l'accord complémentaire
qui les opposent. Il est indéniable que, lorsqu'on confronte leurs argu-
ments, le sens de certaines dispositions du traité apparaît ambigu ou
obscur; chacunedesParties amêmesoutenu que l'interprétation opposée
à la sienneconduisait a desrésultats qui étaient,sinon manifestement ab-
surdes,du moinsdéraisonnables. Dèslors,selon la convention de Vienne
susmentionnée,ils'agitd'une affaireoù ilesttout à fait indiquéderecou-
rir auxtravaux préparatoires et auxcirconstancesdans lesquelles letraité

a étéconclu.
Quelles étaient les circonstances dans lesquelles a été conclu l'accord
complémentaire qui fait partie intégrantedu traitélui-même?Quel est,
d'aprèsles travaux préparatoires et les procéduresde ratification, le but,
ou un but essentiel,du traité et en quoi cesprocédures éclairent-ellesl'in-
terprétationqu'il faut donner àsesdispositions?

D'aprèslestravauxparlementairesitalienspertinents qui ont été portésings placed before the Chamber - proceedings which contain authentic
evidence of the intentions of the Parties in concluding the Treaty and its
Supplementary Agreement - Italy proposed conclusion of the Sup-
plementary Agreement in order to meet the ascertained requirements of
American investors for capital investment in Italy. The Italian Officia1
Gazette reports, in respect of a Bill for the Ratification and Implemen-
tation of the Supplementary Agreement, that the purpose of the Agree-
ment was to encourage "inflows of private capital investment into Italy"
and "to create a situation in which foreign investment is secure ..."
(Counter-Memorial of Italy, Annexes, Doc. 9, pp. 1,2.) It continues:

"And since 'foreign investment' today means, above all, invest-
ment fromthe United States, we deemed it advisable to remove any
obstacle to the inflow of private American capital by concluding a
special agreement ... we now have a much clearer idea of what
American investors are lookingfor, and realizethe need for a special
treaty ..."(Ibid.,p. 3.)

Thereport continues that the needs of American investors include :
"protection of the rights of the American companies ... in the
companies in which they invest; possibility of repatriating invested
capital ... guarantees against discrimination; guarantees against
political risks;..."(ibid.,p. 4).

"What was therefore required was to guarantee the American
investors of any of the aforementioned conditions not already guar-
anteed, as far as possible, while at the same time protecting Italian
interests,above al1by ...obtaining direct, long-term as opposed to
speculative,productive investment." (Ibid.)
TheSupplementary Agreement furthermore wasintended "to offer inves-
tors the maximum freedom of choice in respect of the companies ... in
which they have a financial holding ..." (ibid.,p. 6).
In the debate in the Chamber of Deputies on ratification of the Sup-

plementary Agreement, the spokesman of the Government observed
that the first part of that Agreement "is certainly the most important" in
referring inter alia to investors' "free transfer of capital ... and their
freedom to manage the companies which these natural or legal persons
establish or procure" (ibid., Doc. Il, pp. 20-21). One of the forms of
American investment which the Agreement was designed to foster is
"setting up an industrial plant in Italy under the direct control of the
American parent companies ..." (ibid.,p. 24).
The Report to the Senate of Italy summarized the Supplementary
Agreement as having the following content:
"The ruling out of any discriminatory treatment or arbitrary
measures to the prejudice of citizens, juridical persons, or asso-à laconnaissance delaChambre - travaux etprocédures quicontiennent
le témoignage authentique de ce qu'étaient les intentions des Parties
quand elles ont conclu le traité et l'accord complémentaire -, l'Italie a
proposé la conclusion de l'accord complémentaireafin derépondre à ce
que l'onsavaitêtrelesconditionsauxquellesdesinvestisseursaméricains
seraientprêts à investirenItalie. Apropos d'unprojet deloi portant ratifi-
cation et exécutionde l'accord complémentaire,lejournal officielitalien
indique que le but de l'accord est d'encourager «les investissements
privésétrangers en Italieet de «créerune situation où lesinvestissements
étrangers soient en sécurité...)) (contre-mémoirede l'Italie, annexes,
doc. 9,p. 1et 2).Letexte poursuit:

«Et comme aujourd'hui «investissements étrangers » signifie en
premier lieu investissementsdesEtats-Unis,nous avons jugésouhai-
table d'éliminertouslesobstacles àl'affluxde capitauxprivésaméri-
cains en concluant ..un accord spécial ...[Ces contacts] ..nous ont
permis denousfaire une bien meilleureidéedeceque recherchent les
investisseursaméricains et de nous rendre compte qu'un traité spé-
cial étaitnécessaire...))(Ibid.,p..)
Le rapport cite ensuiteparmi les besoins desinvestisseursaméricains :

((protection des droits des entreprises américaines ...dans les
sociétés oùelles investissent; possibilité de rapatrier les capitaux
investis ...garanties contre la discrimination; garanties contre les
risques politiques; ..»(ibid.,p. 4).

«Il s'agissait donc de garantir dans notre pays aux investisseurs
américains,danstoute lamesure du possible, cellesde cesconditions
quinel'étaientpas déjà,tout enpréservantlesintérêtsitalienss,'agis-
sant surtout ...d'obtenir des investissementsdirectsproductifs - et
non spéculatifs -, età longterme. » (Ibid.)
L'accord complémentaire avait aussi pour but ((d'assurer aux investis-
seurs la plus grande libertéde choix en ce qui concerne les entreprises ...
dans lesquelles ils ont une participation financière...»(ibid.,p. 6).
Lors du débat à la Chambre des députéssur la ratification de l'accord
complémentaire,le porte-parole du gouvernement a déclaré que lapre-

mièrepartie de l'accordétait «à coupsûr laplus importante »encequ'elle
faitnotamment référence à«la liberté accordéeaux personnes physiques
et morales de transférer librementleurscapitaux ..et de gérerlessociétés
qu'elles auront crééesou acquises » (ibid., doc. 11,p. 20-21). L'une des
formes d'investissement américain que l'accord avait pour but de favo-
riser était la((créationen Italie d'établissementsindustriels directement
contrôléspar les entreprises américaines ..»(ibid.,p. 24).
Lerapport au Sénatitalienrésumaitlecontenu del'accord complémen-
taire dans lestermessuivants :
«L'exclusiondetout traitementdiscriminatoireet detoutemesure
arbitraire au préjudicedesressortissants,personnesmoralesou asso-99 ELETTRONICASICULA(DISS. OP. SCHWEBEL)

ciations of Italy or of the United States which operate within the
territory of theother State, the possibility of unobstructed control of
enterprises, the most liberal possible treatment assured forthe trans-
ferability of capital, [and] the fiscal concessions are al1principles
which, suitably supplementing those contained in the Treaty of
Friendship ... aid the Italian economy [in particular], insofar as
they are aimed at favoring the investment of U.S. capital in Italy."
(Memorial of the United States, Annex 89,p. 4.)

The Report of the Secretary of State of the United States which was
transmitted to the United States Senate in connection with its advice
and consent to ratification of the Supplementary Agreement similarly
described the Agreement as containing "amplifications" of the Treaty
which, "by rounding out the comprehensive rules governing general
economic relations established by that treaty, further encourage private
capital investments" (ibid.,Annex 88,p. 2).
The truly complementary character of the Supplementary Agreement
- the fact that it was designed to "further" encourage investment of
private capital which the Treaty as concluded in 1948was (among other
purposes) designed to encourage - was made clear in the process of rati-
fication of that Treaty. Thus the Report of the Committee on Foreign
Affairs and Colonies of the Senate of Italy of 28 May 1949 states, in

favouring ratification and implementation of the Treaty, that it took
account of the Italian economy's "urgent need of foreign capital invest-
ment" (Counter-Memorial of Italy, Annexes, Doc. 7, p. 10).The Report
observes that, by its terms, the United States have
"above al1attempted to protect themselves ... against the possible
onset of discrimination against their interests and possible exclu-
sions or limitations of activity in the Italian market" (ibid.,p. 14).

TheReport summarizes the most important initialarticles ofthe Treaty as
granting "Full rights...to organize, direct, and controlcompanies ...and
to enjoy protection from undue interference .. .(Zbid p.7,.) Arnong the
Treaty'sunderlyingprinciples, theReport states,is"in any casefair play"
(ibid.,p. 4).
The Chamber's Judgment quotes the articles of the Treaty and the
Supplementary Agreement at issue between the Parties. It may be added
that the Preamble to the Supplementary Agreement speaks not only
of the parties'desire to give "added encouragement to investments of the
one country in the other country", but also speaks of "the contribution
which may be made toward this end by amplification of the principles
of equitable treatment set forth in the Treaty...".Article III of the Sup-
plementary Agreement further prescribes, "Regarding the transferability
of capital invested by ... corporations of either High Contracting Party
in the territories of the other.. the most liberal treatment practicable."
And Article Vprovides that :

"there shall be applied to the investments made in Italy the regula- ELETTRONICA SICULA (OP. DISS. SCHWEBEL) 99

ciations de l'Italie oudesEtats-Unisquiexercentleursactivités sur le
territoire de l'autre Etat, la possibilitéde contrôler librement des
entreprises, l'application du traitement le plus libéral possible au
transfert des capitaux et l'octroi d'avantages fiscaux constituent des
principes qui, complétant utilement ceux qui figurent dans le traité

d'amitié ...aident l'économie italienneen particulier dans la mesure
où ils ontpour but de favoriser lesinvestissements de capitaux amé-
ricains en Italie.»(Mémoiredes Etats-Unis,annexe 89,p. 4.)
De même,dans le rapport du secrétaired'Etat des Etats-Unisqui a été
transmis au Sénatpourdemander l'avisetleconsentement de celui-ciaux
fins de laratification de I'accordcomplémentaire,ilétaitditque lesdispo-
sitions de l'accord ((élargissentle champ d'application » du traitéet que,
«en complétantles dispositions très étendues régissantles relations éco-
nomiques générales établiespar ce traité,il encouragera davantage les
investissementsprivés »(ibid.,annexe 88,p. 2).

Le caractère vraiment complémentaire de l'accord - le fait qu'il était
destiné à encourager «davantage »lesinvestissementsprivésque letraité,
tel qu'ilavait étéconcluen 1948,avaitnotamment pour but d'encourager
- a été mis en lumièrelors de la ratification de cetraité.Ainsi, lerapport
delacommissiondesaffairesétrangères etdescolonies du Sénatitalienen
date du 28mai 1949,favorable à la ratification età l'exécutiondu traité,
indiquait qu'il était tenu compte des intérêtsde l'économie italienne,
«qui a besoin d'urgence d'investissements étrangers» (contre-mémoire
de l'Italie, annexes,doc. 7, p. 10).Le rapport déclare que, par les dispo-
sitions de ce traité,les Etats-Unis ont:
((avant tout, voulu se protéger ...des possibilitésde discrimination

contreleursintérêtsainsique d'éventuellesexclusionsoulimitations
d'activitéssur le marché italien »(ibid.,p. 14).
Résumantles premiersarticles - lesplus importants - du traité,le rap-
port indique qu'ils garantissent ((pleinement le droit ...de constituer, de
diriger, de contrôler des sociétés ...ainsi que la protection contre toute
ingérence abusive ..» (ibid., p. 7).Parmi les principes fondamentaux du
traité,le rapport mentionne le ((franc jeu dans tous les cas » (ibid., p. 4).
L'arrêtde la Chambre cite les articles du traitéet de l'accord complé-
mentaire sur lesquels les Parties sont divisées.On pourrait ajouter que le
préambulede l'accord complémentaireparle non seulement du désir des

parties ((d'encourager davantage lesinvestissements de chacun desdeux
pays dans l'autre pays », mais mentionne aussi «l'intérêt que peut pré-
senter àcettefin l'extensiondesprincipes detraitementéquitableénoncés
dans le traité..» De plus, «en ce qui concerne le transfert des capitaux
investis par ...des sociétés ...de l'une des Hautes Parties contractantes
dans lesterritoires de l'autre..»,l'article III de l'accord complémentaire
prescrit «le traitement lepluslibéralpossible».Et l'articleVdispose que :

«s'appliqueront aux investissements faits en Italie les règlements1O0 ELETTRONICA SICULA (DISS .P. SCHWEBEL)

tions covering the special advantages set forth in the fields of taxa-
tion, customs and transportation rates, for the industrialization of
Southern Italy .. .".

It shouldbenoted that,in the entire,lengthy,detailed and repeated con-
sideration of the ratification of the Treaty and its Supplementary Agree-
ment by Italy, and its apparently effortless consideration by the United
States, no trace of support may be found for the interpretation that the
manifoldrights so assuredto an Americaninvestorin Italy andan Italian
investor in the United States were conditioned upon investment being
made ina corporation ofthe investor'snationality.On the contrary,itwas
assumed and indicated thatthe foreigninvestorshallenjoy the benefits of

the Treaty and its Supplement,whether he investsin a corporation of his
or the other party's nationality.Thus the Supplementary Agreement was
meant to guaranty the protection "of the rights of American companies
... in the companiesin whichtheyinvest"; it was intended to offerinves-
tors "the maximumfreedom of choice in respect of the companies .. .in
whichtheyhavea financialholding"; itwasdesignedto provide forinves-
tors' "freedom to manage the companies" which they "establish or pro-
cure", and one ofthe forms of American investmentwas to be "setting up
an industrial plant inItaly under the directcontrol ofthe Americanparent
companies .. .".

Fromthe terms ofthe Treaty and its Supplementary Agreement,and in
the lightof the intent of those terms as that intent is shown by the quoted
excerpts from the processes of the ratification of those instruments, it
follows that Raytheon, in investing so heavily in ELSI, did so within a

treaty frameworkwhichentitled it to expect that :
- it (and ELSI) would enjoy "the principles of equitable treatment set
forth intheTreaty" ("inanycasefairplay"):
- it (and ELSI'smanagement) would enjoy "full rights" to organize, to
direct,and tocontrol ELSI; i.e.,theywouldenjoy"freedomtomanage"
ELSI and "unobstructed control" ofELSI and "the maximumfreedom
ofchoice"inrespectof ELSI ;

- it wouldenjoy"the mostliberaltreatmentpracticable" inrespect ofthe
repatriation ofitsinvestedcapital ;
- it(and ELSI)wouldbe"guaranteed againstpolitical risks" ;and
- ELSI would have the benefit of the application to it of the regulations
implementing the specialadvantagesrespectingtaxation, customs and
transportation ratesforthe Mezzogiorno.

The pivot ofthe Chamber's conclusionthat Italy does not stand invio-
lation of Article III ofthe Treaty is that, at the time of thessuance of the
order of requisition,the right to control and manage ELSI was no longer ELETTRONICA SICULA (OP. DISS.SCHWEBEL) 100

relatifs aux avantages spéciaux prévus en matière d'imposition, de
douane et de tarifs de transport pour l'industrialisation de l'Italie
méridionale ..»

Il convient denoterque, dans l'ensembledesdébatsrelatifs à laratifica-
tion du traitéet de l'accord complémentaire,qui furent longs, détailléset
réitérésen Italie et apparemment aisés aux Etats-Unis, on ne trouve
aucune trace d'un soutienquelconque à l'interprétation selonlaquelleles
multiplesdroitsainsigarantisauxinvestisseursaméricainsenItalie etaux
investisseursitaliensaux Etats-Unis auraient pour condition que l'inves-

tissement soit fait dans une sociétéayant la nationalité de l'investisseur.
Aucontraire, il a étéadmis et indiquéque l'investisseur étrangerjouirait
des avantages offerts par le traitéet par l'accord complémentaire, qu'il
investisse dans une sociétéayant sa nationalitéou celle de l'autre partie.
L'accord complémentaire avait donc pour but de garantir la protection
«des droits des entreprisesaméricaines ...dans les sociétéoù ellesinves-
tissent»; il était destiàéoffrir aux investisseurs «la plus grande liberté
de choix en ce qui concerne les entreprises ..dans lesquelles ils ont une
participation financière» ;il avait pour objet dedonner aux investisseurs

«la liberté ..de gérerles sociétés qu'ilsauront crééesou acquises», et
l'une desformesquedevaient prendre lesinvestissementsaméricainsétait
la ((créationen Italie d'établissements industriels directement contrôlés
par les entreprises américaines..»
Des termes du traitéet de l'accord complémentaire,et àla lumièredes
intentions des parties telles qu'elles apparaissent dans les textes précités
relatifsàla ratification de ces instruments, il ressort qu'en faisant des in-
vestissements aussi importants dans I'ELSI,la société Raytheon agissait
dans le cadrede relations conventionnelles quil'autorisaient penser que :

- elle (et I'ELSI) bénéficieraient des((principesde traitement équitable
énoncés dans letraité»(((francjeu danstous lescas »);
- elle(etladirection de I'ELSI)auraient ((pleinement ledroit »de consti-
tuer, diriger et contrôler I'ELSI; c'est-à-dire qu'ellesjouiraient dea
libertéde gérer»I'ELSI,de la facultéde la ((contrôler librement »et de

«laplus grande libertéde choix» à l'égarddeI'ELSI;
- elle bénéficieraitdu ((traitement le plus libéralpossible»pour le rapa-
triementdescapitauxqu'elleaurait investis ;
- elle(etI'ELSI)seraient ((garanties contre lesrisquespolitiques »;
- I'ELSI bénéficieraitde l'application des règlementsrelatifs aux avan-
tagesspéciauxprévusenmatièred'imposition,de douane etdetarifs de
transportspour leMezzogiorno.

LA VIOLATION DU DROIT DE RAYTHEO NE CONTRÔLER

ET DE GÉRER L'ELSI

La conclusion de la Chambre selon laquelle l'Italie n'a pas violél'ar-
ticle III du traitéa pour pivot l'idée qu'au moment où l'ordonnance de
réquisitiona été prisele droit de contrôler et de gérerI'ELSI n'était plusin the hands of ELSI'sdirectors or shareholders but should have been in

the hands of a trustee in bankruptcy. The Chamber is correct in saying
thatthe "core claim"advanced bythe United States isthat the requisition
of ELSI was in breach of the right of Raytheon and Machlett to control
and manage ELSI and, as a fundamental incident of such control and
management, to liquidate its assets. 1sthe Chamber equally correct in
concluding, because of the practicalities of ELSI's financial situation
and the legalities of Italian bankruptcy practice, that Raytheon and
Machlettinany eventwereno longerable,asofthedate ofthe requisition,
to exercisecontrol and management of ELSI and thus were deprived of
no right by an act that othenvise appears to be in breach of Article III of
the Treaty?
1believe that this cardinal conclusion of the Chamber's Judgment is
incorrect, forthe followingreasons :

First, it is clear, and accepted by the Chamber, that ELSI was closely

advisedat al1relevanttimesboth asto itsincreasinglyprecarious financial
situation and the legal consequences of that situation. It and its share-
holders acted not in disregard of accounting and legal advice but in
accordance with it. Themanagement and shareholders of ELSI werenot
advised,before the requisitiontook place, that ELSI was in a financial or
legal state of insolvency and that it was therefore required to petition in
bankruptcy or otherwise surrender control and management of ELSI.
On the contrary, they wereadvised that ELSI, havingregard to its finan-
cial situation and the requirements of Italian law, was entitled, as of
March 1968,to engage in a liquidation of its assets, in a process to be
managed by ELSI itself. This is of course not a decisive consideration,
but it is a relevant consideration.

Second,inpoint offact,asofthe dayofthe requisition, 1Aprill968, no
legalorpractical stepshadbeen takento withdrawthe right ofcontroland

management from ELSI'sdirectors or shareholders and place it in other
hands. Not only was ELSI apparently not in default; not only had ELSI
most deliberately not petitioned for bankruptcy; no creditor or public
authority took any step to force it into bankruptcy.

Third, in the months, weeks and days before the requisition, negotia-
tionstoprevent orforestallthe closingofELSI'splant andthe dismissalof
its workforcetook place between the officers and shareholders of ELSI,
on theonehand, and officials ofthe Government of Italy and of Sicilyon
the other. Those negotiations were not casual and routine. On the con-
trary,intensivenegotiations involvednotonlylesserofficials oftheItalian
Govemment but very senior officials, including the President of Sicily,
Ministersofthe centralGovernment, and the PrimeMinister ofItalyhim-

self.TheGovernment of Italywasemphaticallyand graphicallyinformed
of thefinancial condition of ELSI and of the decision ofits shareholdersentre les mains des administrateurs ou des actionnaires de I'ELSI mais
qu'ilaurait étéentre lesmainsd'un syndicde faillite.La Chambre araison
de dire que le «griefprincipal »des Etats-Unis est que la réquisition était
contraire au droit de Raytheon et Machlett de contrôler et de gérerI'ELSI
et - complément fondamental de ce droit - au droit de liquider ses
biens. La Chambre a-t-elle égalementraisonde conclure que, àcausedes
réalitésde la situation financière de I'ELSIet des aspectsjuridiques de la
pratique italienne enmatièrede faillite, Raytheon etMachlett n'étaientde

toute façonplus enmesure, àladate delaréquisition, d'exercerlecontrôle
et la gestion de 1'ELSIet que, par conséquent, elles n'ont été privées
d'aucun droit par un actequi, par ailleurs, apparaissait comme une viola-
tion de l'article IIIdu traité?
A mon avis, cette conclusion décisivede l'arrêtde la Chambre est
erronéepour les raisons suivantes :

Premièrement,ilestclair, et la Chambre l'admet, qu'àtous lesmoments
pertinents I'ELSI a étéinformée avecprécision à la fois de sa situation
financièrede plus enplusprécaireetdesconséquencesjuridiques de cette
situation. Loin de négligerles avis qui leur étaientdonnés sur le plan
comptable etjuridique, I'ELSI et sesactionnaires s'ysont conformés.La
direction et les actionnaires de I'ELSI n'ontpas étéavisés,avant que la
réquisitionn'ait lieu,que l'entreprise était,au point de vue financier ou

juridique, en étatd'insolvabilité et qu'elle étaiptar conséquent tenue de
demander sa mise en faillite ou d'abandonner de quelque autre manière
le contrôle et la gestion de1'ELSI.Au contraire, ils ont été informéq sue
I'ELSI, compte tenu de sa situation financière et des exigences du droit
italien, pouvait, en mars 1968,entreprendre la liquidation de ses biens,
dans lecadred'une procéduregérée par I'ELSI elle-mêmeC . ette considé-
ration n'est assurémentpas décisive, mais elle estimportante.
Deuxièmement,c'estun fait qu'au jourde laréquisition,le leravril 1968,
aucune mesurejuridique ou pratique n'avait été prise pour ôter aux admi-
nistrateurs ou auxactionnaires de I'ELSI ledroit decontrôler etdegérerla
sociétéetpour confierce droit àquelqu'un d'autre. Non seulement I'ELSI
n'étaitapparemmentpasendéfaut depaiement, non seulement elles'était
abstenue tout à fait délibérémend te demander sa mise en faillite, mais
aucun créancier,aucune autorité publique n'avait fait la moindre dé-

marche pour la contraindre à la faillite.
Troisièmement, au cours des mois, des semaines et des jours qui ont
précédé la réquisition, des négociationsen vue d'éviterou de retarder la
fermeture de l'usine de I'ELSI etle licenciement de son personnel ont eu
lieu entre les dirigeants et les actionnaires de17ELSId'une part et des
représentants du Gouvernement italien et de la région sicilienned'autre
part.Il ne s'agissaitpas de négociations occasionnelleset ordinaires mais
bien de négociationsintensives qui ont eu lieu avec la participation non
seulement de fonctionnaires du Gouvernement italien,mais aussi de per-
sonnalitésde premier plan telles que le président de la régionsicilienne,
des ministres du gouvernement central et le premier ministre italien lui-not toinvest further capitalinitsoperations.Thefactsin these regards are
summarized in paragraphs 26to 28of the Judgment of the Chamber; as
the Judgment recounts,Italian authorities neverthelesscontinued to press
ELSI not to close the plant and not to dismiss the workforce as late as
29 March 1968. ELSI was officiallywarned that, if the plant were to be
closed, it would be requisitioned. Even after the requisition of the plant,
Italy officially exerted extreme pressure upon ELSI to re-open it, the
President of Sicily going so far in a written memorandum as to predict
or threaten that liquidation ofELSI would be "absolutely impossible"as
long as "the plant is closed". Far fromtaking the position that ELSI was
obligated, by reason of itsfinancial position and the requirements ofItal-
ian law, to have petitioned in bankruptcy before the date of the requisi-
tion, 1April 1968,the President of Sicilyas late as 19April 1968pressed
ELSI precisely not to go into bankruptcy. Not only, he warned, would
bankruptcy "morally blacken Raytheon's name in Italy and in Europe";
not onlywouldbankruptcy "now" produce for Raytheon"nothing for the
assets" and require Raytheon "to pay al1the debts"; the Italian banks

would force Raytheon eventually to pay ELSI's bank debt and in the
meantime would block any foreign exchange permits for transfer of
royalties to Raytheon earned by another Italian company in which it
had shares, Selenia (Memorial of the United States, Annex 37, pp. 2,
3; Annex 38, pp. 1,2). On the other hand, if ELSI were to re-open the
plant, and if Raytheon wereto CO-operatewith aprovisionalmanagement
company to be organized by IR1and the Region of Sicily,they would be

"ready to help Raytheoninthemeantime to liquidate ELSIthrough a
useful sale in theshortest possible time ... taking into account the
fundamental objective of Raytheon which remainsafter al1the Iiqui-
dation".
The Prime Minister of Italy, the President of Sicily,and the Ministers

concerned ofthe Government of Italy,presumablyacted, and surely must
be presumed to haveacted,inaccordance withthe law of Italy. Theywere
aware of ELSI'slargedebts to Italian banks; they had been informed that
ELSI had run out of money and consequently was about to close, or had
closed, the plant. Far fromindicating thatELSI was obligedto petition in
bankruptcy or otherwise surrender control and management, far from
indicating that the time for liquidation had passed, far from acting in
accordance with such an understanding of the facts or of the law of Italy,
they pressed its management to keep the plant open, to employ or re-
employ the workforce, to maintain or resume production. That is to Say,
whether the experts on Italian law presented by Italyinthis case are right
asto the requirements of Italian law, or whether the experts onItalian law
presented by the United States in this case are right as tothose require-même.Le Gouvernement italien a été informé de la façon la plus nette
et la plus explicite de la situation financière de I'ELSIet de la décision
qu'avaient prise sesactionnaires de ne plus investirde capitaux dans ses
opérations.Lesfaitssontrésumésauxparagraphes26 à 28de l'arrêdte la
Chambre; il y est dit que, le 29mars 1968encore, les autorités italiennes
ont cependant continué àpresser 1'ELSIde ne pas fermerl'usine et de ne
pas licencierla main-d'Œuvre. L'ELSIa été officiellemena tviséeque, si

l'usine était ferméee,lleserait réquisitionné. êmeaprès la réquisition,
l'Italiea exercéofficiellementune pression extrêmementfortesur YELSI
pour l'amener àrouvrir l'usine, leprésidentde la régionsicilienneallant
jusqu'à prédire,ou menacer, dans un mémorandum écrit,que la liqui-
dation de I'ELSI serait ((absolument impossible» aussi longtemps que
((l'usinesera[it]fermée».Loin d'affirmer queI'ELSIétaitdans I'obliga-
tion, en raison de sa situation financièreet des exigencesdu droit italien,
de demander sa mise en faillite avant le le'avril 1968,date de la réqui-
sition, le présidentde la régionsicilienne a demandéavec insistance à
l'ELSI,le 19avril 1968encore,précisémend te ne pas entamer une procé-
dure de faillite. Non seulement,a-t-ilaverti,une faillitenuiraà la répu-

tation de Raytheon en Italie et en Europe »,non seulement Raytheon ne
retireraitrien ((maintenant»de 17«actif»et Raytheondevra ((rembourser
toutes les dettes)), mais en fin de compte les banques italiennes force-
raient Raytheon àrembourser les dettes bancaires de I'ELSIet, en atten-
dant, bloqueraient toute autorisationd'achat de devisespour letransfert
à Raytheon de redevances émanant de Selenia, autre société italienne
dont Raytheon possède des actions (mémoiredes Etats-Unis, annexe37,
p. 2 et 3; annexe 38, p. 1 et 2). Par contre, si I'ELSI rouvrait l'usine,
et si Raytheon coopéraitavecune société de gestionprovisoire qui serait
constituéepar l'IR1et la région sicilienne,ilsseraient

((prêtsà aider entre temps Raytheon à liquider 1'ELSIgrâce à une
venteréaliséedans debonnes conditions etleplustôtpossible ..dans
la perspective d'une liquidation, qui reste, aprèstout, l'objectiffon-
damental de Raytheon ».

On peut présumer - et il faut d'ailleurs certainement le présume-
que le premier ministre italien, le président de la région sicilienneet
lesditsministresitaliensont agiconformémentaudroititalien. Ils connais-
saient les importantes dettes de I'ELSIenversdesbanques italiennes; ils
avaient été informéq sue I'ELSIétait àcourt d'argent et,par conséquent,
qu'elle étaitsurlepoint defermer,ou avaitfermé,l'usine.Loind'indiquer
que I'ELSIétait tenuede demander sa mise en faillite ou d'abandonner
de quelque autre manièrele contrôle et la gestion,loin d'indiquer que le
temps de la liquidation était passé, loin d'agir conformémentà une telle

conception desfaitsou dudroit italien,ilsontpresséladirection delaisser
l'usine ouverte,d'employerlepersonnel ou deleréembaucheretdemain-
tenir ou de reprendre la production. Autrementdit, que ce soientlesspé-
cialistes du droit italien présentésparItalie dans la présente affaire qui
aient raison au sujet des exigencesdu droit italien ou que ce soient ceuxments, itis clear that the "living law" of Italy as ofthe time of the requisi-
tion was inconsistent with the pleading of Italy in the current case and
with the acceptance of that plea by the Chamber. Should Italy in 1989be
heard to maintain theopposite of what the highest officials of its Govern-
mentmaintained in 1968 ?1sthe Chamber on sound groundin pivoting its
Judgment on such tremulous terrain?

Fourth, not only does the Chamber's cardinal conclusion conflict with
the construction of Italian lawby Italy'smostsenior officials atthe critical
time, it is not fully consistent with the holding of the Court of Appeal of
Palermo on which the Chamber relies. ThatCourt, as does the Chamber,
concluded that ELSI's bankruptcy was caused not by the requisition but

byitsprior state ofinsolvency, findingthat "the Company's state ofinsol-
vency was decisive and sufficient cause for its failure(Art. 5,Bankruptcy
Law)". But didthe Court of Appeal of Palermoconsequently conclude or
imply that ELSI or its shareholdersdid not enjoy the right to control and
manage ELSI or enjoy other rights of ownership by reason of its insol-
vency immediately prior to the Mayor's intervention and hence were
deprived of no such rights by the requisition? Not at all. On the contrary,
not only did the Court of Appeal accept that it was "probable that the
bankruptcy was requested by the Company itself with the intention of
getting out of the very serious situation of operational unavailability
created by the requisition". It held (overturning the lower court in this

regard) the appeal :

"to be justified as regards the damages derivable from the opera-
tional unavailability of the installation, plant and equipment which
are the subject ofthe requisition order, as a result ofthe execution of

that order".
It accordingly awarded damages forthisincident ofthe requisition,a req-
uisition which it repeatedly characterized as "unlawful". There is ample
room to questionwhether those damages wereadequate, but that isbeside
the immediate point, namely, that the reasoning and conclusion of the

Court of Appeal of Palermo in this regard appear tobe inconsistent with
the Chamber's centralreasoning and conclusion.Tobe sure, the question
of depriving ELSI or its shareholders oftheirright to control and manage
ELSI was notthe question at issue before the Court of Appeal. The ques-
tion rather was, what "damages" - and it is significant that the Court
employed the very term "damages" (''danniJ 7 were due to ELSI or its
representative (thetrustee in bankruptcy) by reason of a requisition of its
plant and equipment which had been found to be unlawful?The Court of
Appeal held that "damages" were due for the period in which the plant
and its equipment were not available to ELSI or its representative but
were operationally unavailable by reason of the requisition. Thus the

Court of Appealimportedthat ELSI or its representativecontinued as of
the date of the requisition and thereafter to have possessory rights in ELETTRONICA SICULA (OP.DISS.SCHWEBEL) 103

qu'ont présentésles Etats-Unis, il est clairque le ((droit positif »qui avait
coursen Italie au moment de la réquisitionestincompatible aveclathèse
soutenue par l'Italie dans la présente affaireet avecl'acceptation de cette
thèsepar laChambre.Faudrait-il admettrequ'en 1989l'Italie soutienne le
contraire de ce que lesplus hauts représentants de son gouvernement ont
soutenu en 1968?La Chambre est-elle bien fondée àfaire reposer son

arrêt surun terrain aussimouvant?
Quatrièmement, non seulement la conclusion essentielle de la
Chambre est en conflit avec l'interprétation du droit italien par les plus
hauts représentants de l'Italie au moment critique,mais elle n'estpas en-
tièrementcompatibleaveclaconclusion delacourd'appel de Palerme sur
laquellelaChambre sebase. Lacourd'appel, comme lefaitlaChambre, a
concluquelafaillite de I'ELSIaété causéenonpar laréquisition,maispar
l'étatd'insolvabilité oùla sociétése trouvait auparavant, déclarant que
((l'état d'insolvabilitéde la sociétéa été la cause déterminanteet suffi-
sante de sa faillite(articlede la loi sur la faillite)».Maisla cour d'appel
de Palerme en a-t-elleconclu, mêmeimplicitement, que I'ELSIou sesac-

tionnaires nejouissaient pas du droit de contrôler et de gérerI'ELSI, ou
d'autres droits de propriété,cause de l'insolvabilitéde celle-ciimmédia-
tement avant l'intervention du maire et que, par conséquent,ils n'avaient
pas été privésde tels droits par la réquisition? Nullement. Au contraire,
non seulement la cour d'appel a reconnu qu'il était ((probableque la so-
ciété elle-même ad itemandéla faillitedans l'intention desortirde la très
grave situation d'indisponibilité crééepar la réquisition. Elle a estimé
(donnanttort à cet égardà lajuridiction inférieure) que l'appel

«est justifié ence qui concerne les dommagesdécoulant de l'impos-
sibilitéd'utiliserl'usine, sesinstallations et son équipement qui ont
faitl'objet de l'ordonnance de réquisition,lasuite de l'exécutionde
cette ordonnance D.

La cour a par conséquent accordé des dommages et intérêts pour cette
conséquence d'une réquisition qu'elle a à plusieurs reprises qualifiée
d'«illicite ».Onpeut assurémentse demander si cesdommagesetintérêts
étaient suffisants,mais ce qui compte ici, c'est que le raisonnement et la
conclusion delacour d'appel de Palerme à cetégardnesemblentpascom-
patibles avec l'essentiel du raisonnement et de la conclusion de la
Chambre. Certes, ce n'étaitpas la question de la perte par1'ELSIou ses
actionnaires de leur droit de contrôler et de gérer la société qui était en
litige devantla courd'appel.Il s'agissaitplutôt de fixer les((dommages et

intérêts»dus àI'ELSI ou àson représentant (le syndic de faillite- et il
està noter que la cour a précisémentemployél'expression ((dommageset
intérêts»(((danni)))- par suite de laréquisition,quiavait étjugéeillégi-
time, de sonusine etde sonéquipement.La courd'appel a déclaréquedes
((dommages et intérêts » étaientdus pour la période pendant laquelle
l'usine et son équipement n'étaientpas à la disposition de I'ELSI ou de
son représentant et ne pouvaient êtreutilisés cause de la réquisition.La
décision de la cour d'appel implique donc que I'ELSI ou son repré-ELSI's plant and equipment of which they had been deprived by the
requisition despite its finding of ELSI having been insolvent before the
requisition took place. If the Court of Appeal saw ELSI as deprived of
no right by the requisition because such right had been dissolved by the

prior fact of insolvency and its effects in Italian law, how could it have
awarded what is described as "damages" deriving from the requisition?

Fifth,not only didthe experts called bythe Partiesdiffer in theirfinan-
cial analyses and legal conclusions: the experts of Italy differed between
themselves. Souncertain was the insolvency of ELSI as of the date of the
requisition that the expert on accountancy who testified for Italy main-
tained that ELSI was then "on the verge of insolvency" - but not insol-
vent (at least, in practical terms). This was no slip of the tongue. In his
prepared statement to the Chamber of the Court,that expert stated that
ELSI "was on the verge of insolvency well before the requisition of the
plant on 1April 1968".He was closely questioned on this statement by

the Chamber. He maintained that "the company, at 31 March, was on
the verge of insolvency". The President of the Chamber persisted:
"But 1think that the point is this: was it insolvent, or not? Because it
is one position to be on the verge of insolvency, and another to be insol-
vent." Italy'sexpert replied :

"Insolvency is a situation - in French it is 'cessationde paie-
ments'- wherethe company cannot pay itsliabilitiesasthey fa11due.
Now, it can be that a supplier does not press for payment, enabling
the company to pay off other suppliers earlier and, therefore, the
insolvency situation, while technically the company is insolvent,
may be prolonged because of the business life of the company.
'Unétat decessationdepaiements'can exist, but until one has gone
to thecourtand actually declared that thecompany is insolvent, the
company can still continue business - which 1think was the case
of ELSI."

Italy further introducedinto evidence a letter of 9 May 1968(Le.,after
ELSI had filed for bankruptcy) written by the Mayor of Palermo to the
Director General of the Nato Hawk Management Office in Paris. In
speaking of the "irreplaceable" value of ELSI to Sicily'seconomic life

because of its "equipment, facilities,highly skilled labour, a management
staff,domestic and foreign commercial relationships ...",the Mayor
described Raytheon-Elsi's decisions to close the plant and dismiss the
workforce as

"more like an extreme effort to exert pressure on the central and
regional government organs to get the partnership requested rathersentant continuaient, à la date de la réquisitionet par la suità,avoir un

droit de possession sur l'usine et l'équipementde l'ELSI,dont ils avaient
été privéspar la réquisition, bienque la Cour jugeât que YELSIavait été
insolvable avant que la réquisition n'intervienne. Si la cour d'appel
considéraitque 1'ELSIn'avait été privéd e'aucun droit par la réquisition
- l'insolvabilitéde la sociétéet ses effets en droit italien lui ayant fait
perdre ses droits -, comment a-t-ellepu accorder ce qu'elle appelle des
K dommageset intérêt s)au titre de la réquisition?
Cinquièmement, non seulement il y a divergence entre les analyses
financières des experts citéspar les Parties et les conclusionsauxquelles
ilsparviennent sur le planjuridique, mais mêmeles experts de l'Italie ne

sont pas d'accord entre eux. L'insolvabilitéde I'ELSI étaitsi incertaine
àla date de la réquisitionque l'expert en comptabilitéqui a déposépour
l'Italie a maintenu que I'ELSI était«au bord de l'insolvabilité»mais
n'étaitpas insolvable (du moins en pratique). Il ne s'agissait pas d'un
lapsus. Dans l'exposépréparé à l'avance qu'il a fait devant la Chambre,
cet expert a déclaré queI'ELSI ((allait être en état d'insolvabilité bien
avant la réquisitionde l'usine, lele'avril 1968)).La Chambre lui a posé
des questions précisessur ce point. Il a maintenu que, au 31mars, «la
société allait être en état d'insolvabilit. Le présidentde la Chambre a

insisté:«Mais je crois que tout est là: était-elleou non insolvable? En
effet, êtresur le point d'être insolvableet être insolvable,ce n'est pas la
même chose. »L'expert entendu à la demande de l'Italie a répondu:

((L'insolvency - en français, cessation de paiements »- c'estla
situation dans laquelle une société nepeut pas payer ses dettes à
l'échéance. Mais il se peut qu'un fournisseur n'insiste pas pour être
payé,cequipermet àlasociété de s'acquitterd'abord enversd'autres
fournisseurs, si bien que l'état d'insolvabilité peutse prolonger
- quoique la société soit techniquement insolvable - aux fins des
affaires courantes de la société.l peut y avoir6étatde cessation de
paiements »mais,tant qu'on ne s'estpas adressé àun tribunal et que
la société n'apas été effectivement déclarée insolvablee,lle peut
poursuivre sesaffaires.Je pense que c'estcequi est arrivédans lecas

de I'ELSI. »
Unenouvelle piècedéposée par l'Italieestunelettreécritele9mai 1968

(c'est-à-direaprèsque 1'ELSIeut demandésamiseen faillite)par lemaire
de Palerme au directeur généraldubureau de gestiondes systèmesHawk
de l'OTAN à Paris. Il y est question de la valeur «irremplaçable» de
I'ELSIpour la vieéconomiquede la Sicile à cause de cequ'ellereprésente
en fait d'«équipement,installations, main-d'Œuvre hautement qualifiée,
personnel de gestion et relations commerciales nationales et étran-
gères..»,et lemairepréciseque lesdécisionsprisespar Raytheon-Elsi de
fermer l'usineet de licencier le personnel semblent

((procéderdavantage d'une dernièretentative de pression sur les or-
ganes du gouvernement central et du gouvernement régional pour105 ELETTRONICA SICULA (DISSO. P.SCHWEBEL)

than like an absolute need arising from an irreversible corporate

situation"

- a statement which is inconsonant not only with Italian counsels' de-
preciation of ELSI's assets but inferentially with the conclusion that
ELSI wasinsolventin March 1968and that itsbankruptcy wasinevitable.

Sixth,and most important, the question ofwhether ELSIwasinsolvent
as of 1 April 1968in the last analysis depended upon the policy of its
principal shareholder, Raytheon. Raytheon had and has very ample
resourcesrelativeto those atstakein ELSI.Itcertainlycouldhave paid al1
of ELSI'sdebts and resolvedanyquestion of ELSI's insolvency.Itcannot
be maintained that Raytheon's policy was to pay al1of ELSI's debts. If
Raytheon had been prepared to continue to pour capital into ELSI, the
question of its liquidation would not have arisen. ELSI'sfinancial diffi-

culties came to a head when Raytheon informed it that it was no longer
prepared to investcapital inELSI. It isclear,inparticular, that Raytheon
was not prepared to pay off the principal on loans which had been
extended to ELSI which Raytheon had not guaranteed, though it was
prepared, and proved to be punctilious in paying in full, the loans to
ELSI which it had guaranteed. Butthat is not at al1to saythat Raytheon
was not ready and willing to advance such further sums as might be
required to permit an orderly liquidation of ELSI's assets.

The United States submitted evidence, which the Chamber accepted,
showing that Raytheon had transferred to Italy fresh capital in order to
pay off the claims of small creditors. It submitted evidence, which the

Chamber has accepted, that Raytheon was prepared to purchase the out-
standing accounts receivable of ELSI for 100per cent of their value; a
purchase whichwould haveinfused alargesum ofcashinto ELSI's virtu-
ally empty coffers. It further submitted evidence, which does not appear
to have been challenged, that, in March 1968,the plant was operating (in
so far as strikespermitted) and ELSI was fillingorders and that, after the
end of March, ELSI was prepared, even with its skeleton workforce, to
complete work-in-progress and outstanding orders and to realize a con-
siderablesumthereby.Most important ofall,the United Stateshas vigor-
ouslymaintained that Raytheon wasprepared to advancetheresourcesto
ELSI required to maintain a sufficientcash flowsothat ELSI would have
been enabled to implement an orderlyliquidation; and the Chamber has
accepted this critical contention.

Italy'scounsel endeavoured to raise doubt about the existenceof this
lastpolicy decision of Raytheon, and argued that the Applicant's counsel
had presentedthiscontention onlyata latestageoftheoralproceedingsin
this case,but not at the outset ofthem or in itswritten pleadings, and still
lesshad this critical contention been earlier advanced, as surely itshould obtenir la participation sollicitéeque d'un besoin absolu découlant
d'une quelconque situation irréversiblede la société

- déclaration qui cadre mal non seulement avec le peu de cas que le

conseil de l'Italie a fait de la valeur des actifs de I'ELSI, maisaussi, par
conséquent,aveclaconclusionque I'ELSIétaitinsolvableen mars 1968et
que sa failliteétait inévitable.
Sixièmement,et c'est là ce qui compte le plus, la question de savoir si
I'ELSIétait insolvableau le'avril 1968dépendaiten dernière analysede
laligne de conduiteadoptéepar son principal actionnaire, Raytheon. Les
ressources de cettesociétéétaiene tt demeurent très importantes par rap-
port àcellesqui étaient enjeu dans YELSI.Raytheon aurait certainement
pu remboursertoutes lesdettes deI'ELSIetréglertous sesproblèmesd'in-
solvabilité.On ne peut pas prétendreque la politique arrêtéepar Ray-
theon étaitde rembourser toutes les dettes de I'ELSI. Si Raytheon avait

été disposée àcontinuer à apporter des capitaux àI'ELSI,la question de
sa liquidation ne seseraitpas posée. Lesdifficultésfinancièresde I'ELSI
ont atteint un seuilcritiquelorsqueRaytheonl'a informéequ'ellen'enten-
dait plusy investir de nouveaux capitaux. Il est clair, en particulier, que
Raytheon n'était pas disposée à rembourser le capital des emprunts
consentis àI'ELSIsans la caution de Raytheon, alors qu'elle était prêtà
rembourser intégralement - et ellel'afai- les emprunts qui étaient as-
sortisd'une tellecaution. Maiscela neveutpas dire du tout que Raytheon
n'ait pas étéprête avancer lessommessupplémentairesnécessairespour
rendre possible une liquidation régulièredesbiens de I'ELSI etdésireuse
de les avancer.

Les Etats-Unis ont démontré,et la Chambre l'a admis, que Raytheon
avait transféré en Italiede nouveaux fonds pour désintéresserles petits
créanciers.Ils ont démontrée,t la Chambre l'aadmis, que Raytheon était
disposée à acheter à 100pour cent de leur valeur les effetsà recouvrer
détenuspar I'ELSI, ce qui aurait apporté des liquidités considérables
dans les coffres pratiquement vides de I'ELSI. Les Etats-Unis ont aussi
fournides moyensdepreuve,qui nesemblentpasavoirétécontestésp,our
établir qu'enmars 1968l'usinefonctionnait (pourautant que lesgrèvesle
permettaient), que 17ELSIexécutait des commandes et que, après la fin
de mars, I'ELSIétaitprêtem , êmeavecsonpersonnel réduit, à achever les
travaux en cours et à honorer les commandes repes, ce qui lui aurait
permisd'encaisserdespaiementsimportants. MaislesEtats-Unisont sur-

tout affirmé avec force que Raytheon était prête à avancer à I'ELSI de
quoi disposer de liquiditéssuffisantespour pouvoir procéder àune liqui-
dation régulière;et la Chambre a admis cettethèse décisive.

Leconseil de l'Italie s'estefforcéde mettre en doute cetteattitude déli-
béréede Raytheon et il a soutenu que le conseil du demandeur n'avait
présenté cettethèsequ'à une phase avancéedelaprocédureorale,qu'il ne
l'avaitpas présentéeau débutdecelle-ci,ni dans sesécritureset qu'à for-
tiori ce moyen décisif n'avaitpas été présenté plust, comme il n'auraithave been if it were in fact justified. This argument of Italy was un-
founded,fornot only had counselfor the United Statesmadethis conten-

tion early in oral argument but the trustee in bankruptcy had made it
some fifteen years before, as is shown by the judgment of the Court of
Appeal of Palermo. That Court observed that :
"theappellant's line ofargument is ...the stockholders of Raytheon-
Elsi, havingmade good for the losses of prior years would also take
action to bring about an orderly and favorable liquidation of the
Company, thus forestallingbankruptcy, which instead had become
necessary as a result of the requisitionrder by the Mayor" (Memo-
rial of the United States, Annex 81,p. 15).

It is clear that Raytheon's self-interest called for the adoption and
implementation ofa policy ofproviding ELSI withthe cash flow required
to make an orderlyliquidation practicable. For one thing, the spectacle of
a Raytheon-owned Companygoingintobankruptcy wasone which alead-
ing international corporation of the standing of Raytheon must have
wished to avoid - not at al1costs clearly, but surelyat some cost. More-
over, if the liquidation had been enabled to proceed and succeed by

reason of injection of sufficient cash-flow funds, Raytheon not only
would have been repaid its fresh advances but would haveavoided being
called upon to pay at least some and conceivably al1ofthe largeloans to
ELSI which it had guaranteed. Since rational corporate policy dictated
Raytheon's provision of sufficient cash flow, and since the presumption
ofthereasonablecorporation shouldapplyno less than that ofthe reason-
able man, why does itnot followthat, bythe provision of cash-flow funds,
together with the funds to be realized from Raytheon's purchase of
accounts receivable and otherwise, ELSI would have been in a position
to forestallbankruptcy and perhaps to have avoided it altogether?
TheChamber's Judgment accepts the critical contention that Raytheon
would have been prepared to advance cash-flow funds while it neverthe-
lessconcludesthat, asofthetime ofthe requisition, ELSI wasinsolventor,
if not, was in any event fast slippinginto bankruptcy.Why ?
In my view, it reaches this inconsistent conclusion because it muddles
time factors and facts.
It isthe fact thatSI, after the requisition,petitioned for bankruptcy,
citingtherequisitionasitscause. That ofitselfhardlyshows thatthe requi-

sition wasthe cause ofthe bankruptcy ;the Chamber's conclusionsin this
regard are clearly correct. Causation in a case such as this is a complex
matter, and the requisition can at most only have been one of a number of
causes of ELSI's bankruptcy (though it may well have been the immedi-
ately precipitating factor). But before the requisition, ELSI had not only
not regarded itself asinsolvent; not only was ELSI not seen ortreated by
al1the authorities of Italy with which it was intensively dealing as being
insolvent;not only had ELSI apparently not defaulted in meeting itsobli-
gations; but ELSI wasactivelyplanningforthesale ofitsassets.There was
some evidence introduced of interest on the part of prospective foreignsans doute pas manqué del'être s'ilétait réellementfondé. Cet argument

de l'Italie ne tientp:non seulement leconseildesEtats-Unis a soutenu
cettethèseversledébutde laprocédure orale,mais lesyndicde faillitel'a
défendueunequinzaine d'annéesplus tôt, comme le montre l'arrêtde la
cour d'appel de Palerme. La cour a notéque :
«selon cettethèse[del'appelant],lesactionnaires de Raytheon-Elsi,

après avoir compensé les pertes des années précédentes, seraient
également intervenuspour procéder à une liquidation régulièreet
favorable de la societé,évitant ainsi la faillite que l'ordonnancede
réquisition du mairea au contraire rendue nécessaire)) (mémoire
des Etats-Unis,annexe 81,p. 15).

Il était manifestementdans l'intérêdte Raytheon d'adopter et d'appli-
quer une politique consistantà fournirà I'ELSI lesliquidités nécessaires
pour que laliquidation régulièresoitpossible.Tout d'abord, l'importante
sociétéinternationale qu'était Raytheoandû souhaiteréviter - pas àtout
prix certes,maissans doute auprix de quelques sacrifices - le spectacle
d'unede sesfilialesréduite àla faillite.En outre, sila liquidation avait été
rendue possible et avait réussigrâce àl'apport de liquidités suffisantes,
Raytheon non seulementaurait récupéré sa nouvelle misede fonds, mais
ellen'aurait pas euà rembourser une partie, voirelatotalité, desgrosem-
prunts contractéspar I'ELSI et cautionnéspar elle. Comme toute poli-
tique raisonnable devait amener Raytheon àfournir des liquidités suffi-
santes et comme la présomption du comportement raisonnable devrait

s'appliquer aux entreprises autant qu'aux individus, pourquoi I'ELSI
n'aurait-elle pas été mêmede différer la failliteet peut-êtrede l'éviter
tout àfait grâce aux liquiditésfourniespar Raytheon et au prix payépar
ellepour l'achat d'effets recouvreret autrestitres?

L'arrêtde la Chambre accepte l'argument décisifsuivant lequel Ray-
theon aurait été prêt eavancer des liquidités,mais conclut malgrétout
qu'au moment de la réquisition 1'ELSIétait insolvable ou, du moins,
s'acheminait à grands pas vers la faillite.Pourquoi?
A mon avis, cette conclusion peu cohérente provient de ce qu'on a
mélangé la chronologie et lesfaits.
Il estde fait que I'ELSI,aprèsla réquisition,ademandésa miseen fail-

lite en invoquant la réquisition comme cause. Cela ne suffit guère à
prouver que la réquisition étaitbien la causede la faillite; sur cepoint, la
Chambre a manifestement raison. Dans une affaire comme celle-ci, les
relations de causeà effet sont fort complexes et la réquisitionn'apu être
tout au plus que l'une descausesde lafaillite deI'ELSI(encorequ'elle ait
très bien pu l'avoir directement déclenchée).Mais avant la réquisition,
1'ELSInon seulement ne seconsidéraitpas commeinsolvable,non seule-
ment ellen'était pas considérée outraitée commeinsolvabp lar lesauto-
rités italiennes avec lesquelleselle était en pourparlers très actifs, non
seulement elle semble n'avoirjamais manqué ases obligations, mais elle
préparait activementla ventede ses avoirs.Certains élémentsde preuvepurchasers. Ifthe requisition had notintervened, and if ELSI'simmediate

cash-flowrequirements actually had been met by Raytheon, thus buying
timein order to sell,can itreallybeheld that ELSI wouldhavebeenforced
into bankruptcy, at anyrate whenitwasforced into bankruptcy ?Surely,or
ifnot surely,then probably, absent the requisition, ELSI wouldhavebeen
able to sell, or contract to sell, some of its assets (in addition to al1its
accounts receivable, and work-in-progress and inventory); and if it had
realized on this ability,ELSI would have received returns which were
considerable. Those returns might not have been sufficient to permit
ELSI to discharge al1of its liabilities as they accrued. But if they turned
out not to have been sufficient, and if ELSI at some point had found it
necessary to go into bankruptcy, or had been forced into bankruptcy,
the losses actually suffered by ELSI and its creditors would have been
materially less than they proved to be, and the sums which Raytheon
was obliged to pay to ELSI's creditors to whom Raytheon had extended
guarantees would have been materially less than they proved to be.
This is so not only because such a bankruptcy would have come later
than it actually did, absent the triggering factor of the requisition; with-

out the requisition, a trustee in bankruptcy would have had access to
the plant and been in a position to sell off itsassets months before the
actual trustee was able to have such access because of the requisition
which blocked access forthe six months that it was in force.

Moreover, if the requisition had not intervened and if Raytheon had
been permitted to proceed with supplying sufficient cash flow, there
would have been incentive for the banks in the time so bought to have
reached a settlement with ELSI. For one thing, failure to reach a settle-
ment, if bankruptcy ensued, would, under Italian law,have required the
banks to pay back to the trustee in bankruptcy al1that ELSI had paid to
the banks in the prior year. More than that, it would have made sense for
the banks to settle for 40 or 50 per cent of what was dueto them than to
have precipitated bankruptcy proceedings which eventually produced
lessthan 1per cent. Arguablythe banks believed that, through litigation,

they would recover 100per cent by having Raytheon held responsible for
debts of ELSI which Raytheon had not guaranteed. Butunder Italian law
as itthen was, such a suitcould succeed only if Raytheon could be shown
to be ELSI's sole stockholder. Raytheon had never been ELSI's sole
stockholder. Until 1967,substantial equity was held by other Italian cor-
porations and, in 1967,when Raytheon bought out that equity, care was
taken to ensure that a fraction of the stock was held not by Raytheon but
by a Company,Machlett, which in turn was owned by Raytheon. Thus the
outcome oflitigationmust have appeared problematical and, inthe event,
the banks did not succeedin Italian courts in holding Raytheon liable for
ELSI's debts.

The Chamber's Judgment concludes that "the possibility" of an orderlyont étéapportés ausujet de l'intérêt manifestéar des acquéreurs étran-
gers éventuels.Si la réquisitionn'avait pas eu lieu et si Raytheon avait
effectivement subvenu aux besoins immédiats de liquiditésde l'ELSI,
ce qui aurait permis de gagner du temps pour vendre, pourrait-on vrai-
ment affirmer que I'ELSI aurait été réduite à la faillite, du moins au

momentoù elle l'aété?Il est sûr,ou du moins probable, qu'en l'absence
de réquisition,I'ELSIaurait pu vendre certains de ses avoirs, ou passer
des contrats en vue de leur vente (sans parler de tous ses efàrecou-
vrer,de l'en-courset desstocks); et si elleavaitprofitéde cettepossibilité
I'ELSI aurait eu des rentrées importantes. Ces rentrées ne luiauraient
peut-être pas permisde s'acquitter de toutes ses obligations au fur et
mesure qu'ellesvenaient àéchéance.Mais même si ellesn'avaient pasété
suffisantes et que'ELSI, àun moment ou àun autre,ait jugénécessaire
de déposer son bilan ouait étéforcéede le déposer,les pertes effective-
ment subies par elle et par ses créanciersauraientésensiblementinfé-
rieures à ce qu'elles ont été,de mêmeque les sommes que Raytheon
aurait eu à rembourser aux créanciers de I'ELSI pour les emprunts
cautionnés par elle auraient été nettement moinsélevées qu'elles ne

l'ont été. Cen'est pas seulement que la faillite se serait produite plus
tard sila réquisitionn'avaitpas eu pour effetde la déclencher,mais,sans
cette réquisition, le syndic qui aurait dirigé la faillite aurait eu accès
l'usine et aurait pu liquider les actifs de I'ELSIplusieurs mois avant la
date àlaquellele syndic y a eu effectivementaccès,l'usineayant étéinac-
cessiblependant lessix moisqu'aduréla réquisition.
En outre, si la réquisitionn'avait pas eu lieu et s'ilavait été pàrmis
Raytheon de fournir des liquidités suffisantes, les banques, pendant le
temps ainsi gagné,auraient été incitéesrechercher un compromis avec
I'ELSI. En l'absence de compromis, le droit italien aurait obligé les
banques, en cas de faillite,mbourser au syndictout cequ'ellesavaient
reçu de I'ELSIdepuis un an. Qui plus est, il aurait dans l'intérêdtes
banques desecontenter de40ou 50pour centdeleurscréancesplutôtque
de n'obtenir finalement que moins de 1pour cent dans une procédure

précipitéede faillite.On peut soutenir que les banques estimaient qu'en
engageant des poursuites judiciaires elles récupéreraient la totaldeé
leurs créances,pour autant qu'il soit jugéque Raytheon répondait des
dettes de I'ELSI dont elle ne s'étaitpas portée caution. Mais, selon le
droit italien de l'époque,un tel procès ne pouvait être gque s'ilétait
démontréque Raytheon était le seul actionnaire de I'ELSI, ce qui
n'avait jamais étéle cas. Jusqu'à 1967,une part importante du capital
étaitdétenuepard'autres sociétésitalienneest,en 1967,quand Raytheon
a racheté leurs actions,on a veillé ce qu'une fraction du capital soit
détenue nonpar Raytheon maispar une société,Machlett,quaippartenait
elle-mêmeà Raytheon. Dès lors l'issuedes procèsne pouvait qu'appa-
raître problématique et,en fait, les banques n'ont pas réussiobtenir
que lestribunaux italiensdéclarentque Raytheon répondaitdesdettes de

I'ELSI.
L'arrêtde la Chambre conclut que «la réalisation» d'une liquidationliquidation by ELSI "is purely a matter of speculation". 1agree that an
orderly liquidation would have been beset with uncertainties, but those
uncertainties gonot somuch to ELSI'sability and entitlement to liquidate
itsassetsastothe calculability ofthe damages which maybe foundto flow
from the denial ofthat ability and entitlement by the requisition imposed
upon ELSI.
In my view, it is unpersuasive for the Chamber to Say,in effect, that
ELSI would have gone into bankruptcy later if not sooner, and accord-
inglythatthe requisition did not matter. It is in this respect that 1believe
that the Chamber muddles what it findsto be the facts with time factors.
At the time the requisition took place, it did matter, it did have the eco-
nomic effects, or some of the economic effects,just described; and at the
time ittook place, itdeprived Raytheon and Machlett oftheir right to con-
trol and manage and hence liquidate ELSI and it deprived ELSI of its
right to be liquidated by a management responsible to Raytheon and

Machlett. Accordingly the requisition placed Italy in violation of its obli-
gation under Article III ofthe Treaty to permit Raytheon and Machlett to
"control and manage" ELSI.
This conclusion isthe more compelling when the meaning ofthe Treaty
is interpreted in the light of the provisions and ratification processes set
out in this opinion. Can it be said that the requisition, imposed as it was
when it was, comported with the "full rights" of Raytheon and Machlett
to "organize, direct and control" ELSI, that it comported with their
"unobstructed control" and "maximum freedom of choice"? Was itcon-
sistent with "the principles of equitable treatment" which the Preamble
to the Supplementary Agreement describes the Treaty as containing?
Was the requisition consonant with assuring to Raytheon "the most
liberal treatment practicable" in respect of therepatriation of itsinvested
capital? Did it respect "the guaranty against political risks" which the
Treaty as a whole was designed to provide? Not in my view.

Was the measure of requisition imposed by the order of the Mayor of
Palermo upon ELSI "arbitrary" as that term is found in Article 1of the
Treaty's Supplementary Agreement?
The Chamber rightly concludes that, even ifthe requisition did not pre-
vent Raytheon and Machlett from exercising "their effective control and
management" of an enterprise, ELSI, which they had been permitted to
acquire in Italy (seeproviso (a)of Art. 1,quoted in para. 120of the Judg-
ment), and even if the requisition did not impair "their other legally
acquired rights and interests" inELSI (proviso (b)),the question remains :
was the requisition arbitrary? In my view, for the reasons stated in the
previous sections of this opinion, the requisition did prevent Raytheon
and Machlett from exercising effectivecontrol and management of ELSI,régulièrepar I'ELSI«est de l'ordre'des pures spéculations».Jereconnais
qu'une liquidationrégulièreaurait étépleined'incertitudem s,ais celles-ci
portaient moins sur le point de savoirsi I'ELSIpouvait en fait et en droit
liquider sesavoirsquesur la possibilitéde calculer lespréjudices quiont
pu résulterdu fait que la réquisition imposéeà SELSI l'en a empêchée.

La Chambre n'est pas convaincante, selon moi, quand elle déclare
qu'en faitI'ELSIaurait fait faillitetôt ou tard et que, par conséquent, la
réquisitionimportaitpeu. C'estlà qu'à monavisla Chambre confond ce
qu'elle considère comme des faitsavec des élémentstemporels.Au mo-
ment où elle a eu lieu, la réquisitionimportait; elle a eu les effetsécono-

miques - ou certains des effets économiques - qui viennent d'êtreex-
posés;au moment où elle a eu lieu, elle a privé Raytheon et Machlettde
leur droit de contrôler et gérerI'ELSIet,par suite,de liquider la société;
ellea aussiprivé I'ELSIde sondroit d'être liquidép ear une direction res-
ponsable devant Raytheonet Machlett. Laréquisition,a donc faitviolera
l'Italie l'obligation que lui imposait l'article III du traitéde permeàtre
Raytheon et Machlett de ((contrôler etgérer»I'ELSI.
Cette conclusion s'impose d'autant plus si l'on considère le sensdu
traitéàla lumièredes dispositionset desprocéduresde ratification men-
tionnéesdans la présente opinion. Peut-on direque la réquisition,vu le
moment où ellea étéimposée,permettait a Raytheon et Machlett d'avoir
((pleinement le droit..de constituer, de diriger et de contrôler)) I'ELSI,
qu'elle était compatible avecla facultde «contrôler librement»l'entre-
prise et qu'elle assurait«la plus grande libertéde choix))? Etait-elle
conformeaux ((principesde traitement équitable »qui,commeleditI'ac-

cord complémentaire, sonténoncés dans letraité?La réquisition était-
elle en harmonie avecl'engagement d'assurer à Raytheon «le traitement
leplus libéral possible*pour le rapatriement des capitaux investis? Res-
pectait-elle«la garantie contre les risques politiques » que le traité dans
son ensembleavait pour objet d'assurer?A mon avis,non.

La mesure de réquisitionimposée à I'ELSIpar l'ordonnance du maire
de Palerme était-elle((arbitraire))au sens où ce terme est employé à
l'article premierde l'accord complétantletraité?
La Chambre conclut àjuste titre que, mêmesi la réquisition n'a pas
empêchéRaytheonetMachlett «de dirigeretdegérereffectivement»une

entreprise (I'ELSI) qu'ellesavaientétéautoriséesàacquérirenItalie (voir
la clause a) de l'article premier, citéeau paragraphe 120de l'arrêt)et
même siellen'apasportépréjudice«auxautresdroits etintérêtq su'[elles]
ont légitimementacquis )dans I'ELSI(clauseb)),laquestion demeure: la
réquisition était-ellearbitraire? mon avis, pour les raisons énoncées
dans lessectionsprécédentesde la présente opinion, la réquisitiona réel-
lementempêchéRaytheon etMachlettdedirigeretdegérereffectivement109 ELETTRONICA SICULA (DISS O.P.SCHWEBEL)

and itdidimpairthe legallyacquired rights and interests of Raytheon and
Machlett in ELSI. But even if, arguendo,the question of observance by
Italy of its obligationsunder Article 1 is framed: "Was the measure of

requisitionimposed bythe Mayor'sorder arbitrary?", that question is,itis
believed, unpersuasively answered by the Chamber.

The Chamber acknowledges that the requisition was found to be im-
properlymotivated bythe Prefectof Palermo, and unlawful and indeed "a
typical case ofexcessofpower" bythe Palermo Court ofAppeal. It never-
theless concludes that, in these Italian administrative and judicial
proceedings, the requisition was not held to be arbitrary, in terms or in
substance. It further holds that, even if the requisition had been found
in these municipal proceedings to have been arbitrary, that would not
be determinative in international law: it would be no more than "a
valuable indication". Still relying on its interpretation of what was held
in Italian administrative and judicial proceedings, the Chamber holds

that the requisition was not arbitrary in the international legal sense,
because it was an act opposed to a rule of law rather than to the rule of
law. Itdefines as arbitrariness a wilful disregard of due process of law;
holds that the requisition was neither unreasonable nor capricious; and
concludes that, since the Mayor's order was made in a context of an
operating system of law and of remedies, it was not arbitrary.

The Chamber's reasoning thus turns on three propositions, al1of which
are in my view unfounded: first, that the Prefect and Palermo Court of
Appeal didnotfindthe requisition to be arbitrary ;second,thatthe requi-
sition, in international law, was neitherunreasonable nor capricious; and
third, that inany eventthe Italian processes ofappeal and redress towhich
the order of requisition was subject ensured that the order was not

arbitrary.These propositions willbe considered in turn.

(i) TherulingsofthePrefectandtheCourtofAppeal
The Chamber quotes from the Prefect's decision what it characterizes

as "the principal passage which is relevant" in the following terms :

"There is no doubt that, even though, fromthe purely theoretical
standpoint, the conditions of grave public necessity and of unfore-
seen urgency warranting adoption ofthemeasure may beconsidered
to exist in the case in point, the intendedurpose of the requisition

could notin practice be achieved bythe order itself,sinceinfactthere
was no resumption of the company's activity followingthe requisi-
tion, nor could there havebeen such resumption. The order therefore
lacks,generically, thejuridical cause which mightjustify itand make
it operative."I'ELSI etelle a réellementportépréjudice aux droits et intérêts que ces
sociétés avaient légitimement acquisdans I'ELSI. Mais j'estime que,
mêmesila question du respect par l'Italie des obligations que lui impose
l'articlepremier estformuléecommesuitpour lesbesoins de l'argumenta-
tion :«la mesure de réquisitionimposéepar l'ordonnance du maire était-
elle arbitraire?»,la Chambreya répondude façon peu convaincante.
LaChambre relèveque lepréfetde Palerme a déclarélaréquisitionirré-
gulièrementmotivéeet que la courd'appel de Palerme ajugéqu'elle était
«illégitime »et qu'elle constituait même«un castypique d'excèsde pou-
voir». La Chambre conclut pourtant que, dans ces procédures adminis-

tratives etjudiciaires italiennes, la réquisitionn'a pas étéjugéearbitraire
du point de vue de la formeou du fond. Elle estime en outre que, même si
la réquisition avait étéjugéearbitraire dans le cadre de ces procédures
internes, ce ne serait pas déterminant en droit international :il n'y aurait
là qu'aune indication utile ».Continuantde se fondersur son interpréta-
tion desdécisionsadministratives etjudiciairesitaliennes,laChambredé-
clareque la réquisitionn'était pasarbitraireau sensdu droit international,
parce qu'il s'agitd'un acte qui s'oppose à une règlede droit et non au
«règnede la loi ».Elle dit que l'arbitraire estla méconnaissancedélibérée
desprocédures régulières etque la réquisitionn'étaitni déraisonnable ni
capricieuse, pour conclureque,puisque l'ordonnance du maire a été prise
dans le cadre d'un systèmede droit et de recours qui fonctionnait, elle
n'estpas arbitraire.

Le raisonnement de la Chambre s'appuie donc sur trois propositions
qui sont toutes mal fondées à mon avis :premièrement, que le préfetde
Palerme et la cour d'appel de Palerme n'ont pas jugéque la réquisition
étaitarbitraire; deuxièmement, que la réquisition, en droit international,
n'était ni déraisonnable nicapricieuse; troisièmement,qu'en tout étatde
cause les voies de recours et de réparation qui sont prévuespar le droit
italien et auxquellesl'ordonnance de réquisitiona été soumiseontgaranti
que l'ordonnance n'était pas arbitraire. J'examinerai ces propositions
l'une après l'autre.

i) Les décisions dupréfetet de la courd'appel

La Chambre cite un passage de la décisiondu préfetdont elle dit qu'il
est «le passage de la décision ..qui présentele plus d'importance ».Ce
passage est ainsilibellé:

((11n'yapas dedoute que, même sil'onpeut considérer,de façon
toute théorique,que lesconditions degravenécessité publique, d'im-
prévisibilitéet d'urgence qui ont déterminé l'adoptionde cette me-
sure étaient réuniesen l'espèce, l'objectifvisépar la réquisition ne
pouvait être réaliséen pratiquepar cette ordonnance,tant il est vrai
qu'à lasuitede laréquisitionl'activitéde l'entreprise n'apasrepris et
n'aurait pas pu reprendre. D'une manière générale,il manque par
conséquentdans l'ordonnance la causejuridique pouvant lajustifier
et la rendre opérante. »It appears to conclude from this and other passages ofthe Prefect'sdeci-
sionthat the Mayor'sorder ofrequisition was held bythe Prefectto have

been intravires.Whatthe Prefectheld,however,wasthatthe Mayorrelied
on provisions of lawwhich, in conditions of grave public necessity and
unforeseen urgency, entitle the Mayor to issue an order of requisition of
private property; but in this case, the Prefect found, these conditions
were present from "the purely theoretical standpoint", a finding which
appears to mean that they werenot actuallypresent.

The Chamber reaches the opposite conclusion; quoting the foregoing
passageofthe Prefect'sdecision,itholdsthat the Prefect"did not findthat
those conditions were absent". In my opinion, the difficulty with the
Chamber's conclusion is that - if one reads on - it emerges from the
Prefect's decision that the conditions of grave public necessity and un-
foreseenurgencywereindeed seento beabsent.The Prefectwrote:"Once
the cornpetenceofthe Mayorhasbeenascertained, itisnecessaryto ascer-

tain whetherinthe situationthere werethegrounds for the exerciseofthe
power." (Memorial ofthe United States,Annex76,p. 10.)That statement
is immediately followed by the quotation from the Prefect's decision
which has just been reproduced. The Prefect'sdecision then continues :

"In fact,the Mayorbelievedto beabletofacethe situationexisting
in Raytheon-Elsi'splant by means of an order of requisition, clearly
without taking into consideration the fact that the situation of the
company - for functioning-economical reason and for reason of
market - was such as not to permit the continuation of the activity,
unless by means of interventions by the responsible organs directed
to solvethefinancial and industrial problems ofthe company.

The requisition did not change anything in the situation of the
company; this is proved by the fact that neither the stopped activity
wasresumed,nor,as aconsequence ofthe order,morefavorablecon-
ditions werecreatedinthecompany.On the contras., thesituation of
insolvency determined the declaration of bankruptcy of the com-
pany, with the consequence that the plant was taken away from the
disposability of the PublicAdministration.
It is also important to emphasize that the plant, at the time of the
declaration of bankruptcy, was not working and that the employees
were staying therein to protest for the nonresumption ofthe activity
and for dismissalofthe wholepersonnel.
As far as the danger of 'unforeseeable actsof perturbation of the
public order',thatthe Mayorwanted to avoid by means ofthe requi-

sition, are concerned, the events subsequent to the requisition have
clearlydemonstrated the inefficacyofthe measure; this isproved by
the factthatthe parades and demonstrations of protest followed one
another, creatingalso a situation ofperturbation ofthe public order,La Chambre sembleconclure de cetexte et d'autres passagesde la déci-
sion du préfetque cedernier ajugéque l'ordonnance de réquisitionrele-
vait des pouvoirs du maire. Or, ce que le préfetajugé,c'estque le maire
s'étaitfondésurdesdispositions légalesqui,dans desconditions degrave
nécessitépublique, d'imprévisibilitéet d'urgence, autorisaienlte maire à
prendre une ordonnance de réquisitionde biens privés; mais enI'occur-

rence le préfeta constatéque ces conditions étaient réunies«de façon
toute théorique », conclusion qui semble vouloir dire qu'elles n'étaient
pas réellementréunies.
LaChambre parvient àlaconclusion inverse ;citant lepassagesusmen-
tionnédela décisiondu préfet,elle estimeque cedernier «n'a pas décidé
que ces conditions n'étaientpas réunies».A mon avis, la difficulté sou-
levéepar la conclusion de la Chambre estque, sion poursuit la lecture de
la décisiondu préfet, on constateque les conditions de grave nécessité
publique, d'imprévisibilitéetd'urgence ont enfaitétéconsidéréescomme
n'étantpas réunies.Le préfeta écrit:«Une fois la compétencedu maire
établie,il est nécessairede déterminer si,dans la situation en question, il

existaitdes motifspour l'exercicedupouvoir. »(MémoiredesEtats-Unis,
annexe 76,p. 10.)Cettephrase estimmédiatementsuiviedu passage de la
décisiondu préfet reproduite ci-dessus.Le préfet poursuit alors ences
termes :

«Enfait, lemairecroyaitêtreenmesurede faireface àla situation
qui existait dans l'usineaytheon-Elsi au moyen d'une ordonnance
de réquisition, manifestement rendue sansque soit pris en considé-
ration lefait que la situation de la soci-tpour desraisons écono-
miques liéesau fonctionnement et à la commercialisation - était
tellequ'ellenepermettaitpas depoursuivrel'activité, àmoinsd'inter-

ventionsdes organesresponsables envue de résoudrelesproblèmes
financiers et industriels de la société.
La réquisitionn'a rien changé à la situation de la sociét;ela res-
sort du fait que l'activité arrêténe'a pas repris, non plus que des
conditions plus favorablesn'ont été créép esur la sociétéà la suite
de l'ordonnance. Au contraire, la situation d'insolvabilitéa entraîné
la déclarationde faillite de la sociét,e qui a eu pour conséquence
que la disposition de l'usine a étésoustraiteà l'administration pu-
blique.
Il est important aussi de souligner que l'usine, au moment de la
déclarationde faillite, ne fonctionnait pas et que les employéss'y

maintenaient pour protestercontre ledéfautdereprise del'activité et
lelicenciement de tout lepersonnel.
En cequiconcerne ledanger de ((troublesimprévisiblesdel'ordre
public»,quelemairesouhaitait éviterau moyende laréquisition,les
événementsqui ontsuivila réquisitionont clairementmontrél'inef-
ficacitédecettemesure;cela estprouvépar lefaitquelesdéfiléseltes
manifestations de protestations se suivaient,créant aussi une situa-
tion de natureà troubler l'ordre public,jusqu'au moment où lesor- 111 ELETTRONICA SICULA (DISS .P. SCHWEBEL)

until the situation was faced by responsible organs of the Govern-
ment and, even though with the delays which are unfortunately
inevitable, was drawn toward a solution." (Memorial of the United
States, Annex 76,pp. 11 -12.)

That is to Say,after havingheld that, "from the purely theoretical stand-
point, the conditions ofgravepublic necessityand of unforeseen urgency
warranting adoption" of the order of requisition "may be considered to
existinthe caseinpoint", the Prefect goesonto examine whatwasthe case
"in fact" and concludes (a)that the order of requisition could not restore
ELSI'splant to operation, that it could not solvethe financial and indus-
trial problems of the company; (b)the requisition order did not in fact
causethe activitiesofthe company whichhadbeen stopped to resume nor
did it otherwise aid ELSI; (c)the plant remained closed and occupied by
the former employees; and (d)public order was in any event disturbed,

despite the requisition: in short, that the requisition order proved un-
justified on al1counts. What support do such holdings provide for the
Chamber's conclusion that the conditions of grave public necessity
and unforeseen urgency were not found by the Prefect to have been
"absent"?
More than this,the essentialpoint of the passage of the Prefect'shold-
ing which the Chamber quotes, and which is reproduced at the outset of
this section of this opinion, is that the requisition could not achieve its
intended purposes and therefore lacked justifyingjuridical cause.That is
to Say,the Prefect held that, since the order of requisition could not, was
incapableof, achievingwhat itpurported to achieve,itlackedthejuridical

motivation which might justify it and make it operative. That is not far
from stating expressly that the requisition was ill-motivated and hence
unreasonable or even capricious.
The Prefect's decision continues, in one translation provided by the
United States :

"We cannot refrain from stating that the order was issued - as it
appears from the same order and as it has been observed by the ap-
pellant - also under the influence ofthe pressure created by, and of
the remarks made by the local press; therefore we have to hold that
the Mayor,also in order to getout ofthe above and to showthe intent
of the Public Administration to intervene in one way or another,
issued the order of requisition as a measure mainly directed to
emphasize his intent to facethe problem in some way."

The lastphrase of the Prefect'sdecision,asquoted in the judgment of the
Court of Appeal of Palermo, is othenvise rendered in the translation of

that judgment supplied by the United States: "the Mayor. .. resorted to
requisition as a step aimed more than anything else at bringing out his
intention to tackle the problem just thesame". The Prefectreferredinthis
passage to the provision of the Mayor's order which read : ganes responsables de 1'Etat ont fait face à la situation et l'ont
orientéevers une solution, avec les retards malheureusement inévi-
tables.» (Mémoiredes Etats-Unis,annexe 76,p. 11 -12).

Autrement dit, après avoirjugéque «l'on peut considérer,de façontoute
théorique,que les conditions de grave nécessitépublique, d'imprévisibi-
litéet d'urgence qui ont déterminé l'adoptionde cettemesureétaientréu-
nies en l'espèce», le préfet examine ce qu'était la«vraie» situation et
conclut: a) que l'ordonnance de réquisition ne pouvait pas remettre en
marche l'usinedeI'ELSI, qu'ellenepouvaitrésoudrelesproblèmesfinan-
ciers et industriels de la société;qu'en fait l'ordonnance de réquisition

n'a pas eupour effet que les activitésde la sociétéont repris et qu'ellen'a
pas autrement aidéI'ELSI; c)que l'usineestrestéeferméeeta étéoccupée
par ses anciens ouvriers et d) que l'ordre public était de toute façon
troublé,indépendammentde laréquisition.Enrésuméi,lconclut que l'or-
donnance de réquisitions'estrévéléie njustiée àtous égards.En quoi ces
conclusionsétayent-ellesla conclusion de la Chambre suivantlaquelle le
préfetn'apas décidéque lesconditions de gravenécessitépublique, d'im-
prévisibilitéet d'urgence «n'étaientpas réunies» ?
Qui plus est, ce qui est essentiel dans lepassage de la décisiondu préfet
citépar la Chambre et reproduit audébutdela présente section,c'estque
la réquisition ne pouvait réaliser l'objectif qu'elle visait et qu'elle était

donc dépourvuede cause juridique lajustifiant. Le préfeta donc décidé
que,puisque I'ordonnance de réquisitionnepouvait pas réaliserI'objectif
qu'elle était censée atteindre, il y manquait la motivation juridique
pouvant la justifier et la rendre opérante, ce qui revient presque à dire
expressément que la réquisition étaitmal motivée et par conséquent
déraisonnable,voire capricieuse.
Le préfet a poursuivi comme suit (d'après la traduction ci-contre
fournie par les Etats-Unis) :

«On ne peut passersoussilence lefait que l'ordonnance a été prise
aussi - ainsi qu'ilressort de sontexte mêmeetque l'afaitobserver le
recourant - sousl'influence de la pressioncrééepar la presselocale
et des remarques qu'elle a formulées,si bien qu'il faut en conclure
que lemaire,désireuxausside setirer de cettesituation et de montrer

l'intention de l'administration d'intervenir d'une manière ou d'une
autre, a pris I'ordonnance de réquisition comme mesure destinée
principalement à faireressortirsonintention d'affronter leproblème
de quelque manière. B

Lederniermembre dephrase de ladécisiondu préfet,tel qu'ilestcitédans
l'arrêtde la cour d'appel de Palerme, est rendu différemmentdans la tra-
duction de l'arrêt fourniepar lesEtats-Unis :«Lemaire ..a eurecours àla
réquisitionessentiellementpour démontrer sonintention detraiter lepro-
blèmetout de même. »Dans ce passage, le préfetse référait auxlignes de
l'ordonnance du maire qui sont ainsilibellées : "Consideringalso that the local press is taking a great interest in
the situation and that the press is being very critical toward the
authorities and is accusingthem of indifference to this serious civic
problem .. ."

In respect of the foregoingpassage, the followingquestion was put to
Italy in the course of the oral proceedings :

"This holding ofthe Prefect appears to mean thatthe Mayorissued
the order notfor defensiblejuridical reasonsbut as away ofshowing
the public that he was doingsomething,whether that something was
lawful or sensibleor not :heissued the order 'toshowthe intent ofthe
PublicAdministrationto intervene in one way or another'; the order
wasissuedas a measure 'mainly'directedto 'emphasize his intent' to
face the problem 'inany way'.Now my question isthis, isa measure
taken by apublic authority 'tointenene in one wayoranother' with a
viewnot towards resolving aproblem - and the Prefectheld that the
order could not resolve the problem - but in order to appease press
and public criticism or win public favour 'in any way' an arbitrary
measure?"

Italy in part replied :

"The answer is,that if the measure was taken solely "'to intenene
in one way or another" . ..with a viewnot towards resolving a prob-
lem .. .but in order to appease press and public criticism or to win
public favour "in any way"', then it probably would have been an
arbitrary measure.
But,ifthere wereother substantial and sinceremotivationsbehind
the measure in addition to that of appeasing public opinion, i.e. 'to
protect generalpublic interest. ..and public order' it would then by
no means have been an arbitrary measure."
Thisreply raisesthequestion ofwhether asingle,unseverablepublicact

which in part has arbitrary elements and in part has not, is arbitrary, of
whether an officia1act which is partially arbitrary in motivation (not to
speak of implementation, as 1shall),qualifies as arbitrary.

Butwhatwere the motivations ofthe order ofrequisition? Werethey,as
Italy claims, to protect the general public interest and public order? As
just indicated, those claims apparently were not upheld by the Prefect.
Apart from finding such factors to bepresent from"the purelytheoretical
standpoint", his holding that the requisition order in fact neither pro-
moted the public interest nor promoted the preservation of public order
does not support the substantiality of these motivations.
Itcannot be doubted that an essential purpose ofthe requisition was to
prevent ELSI from dispersing and liquidating its assets.This was made ELETTRONICA SICULA (OP.DISS.SCHWEBEL) 112

«Considérantaussi que la presse locale s'intéressevivement à la
situation et qu'elle est très critique'égarddes autorités qu'elleac-
cuse d'indifférence face à ce problème grave pour la collectivité..»

A propos de ces lignes, la question suivante a été posée à l'Italie au
cours de la procédure orale :

«Cette déclaration du préfet semble signifier que le maire a pris
l'ordonnance non pas pour des raisonsjuridiques défendables mais
commemoyen de montrer à lapopulation qu'ilfaisaitquelquechose,
que ce quelque chose fût légal etraisonnable ou non: il a pris son
ordonnance pour ((montrer l'intention de l'administration d'inter-
venir d'une manière ou d'une autre»; l'ordonnance a été prise
commemesure destinée «principalement » à «faire ressortir son in-
tention » d'affronter le problème «de quelque manière ». Voici ma
question :une mesure prise par une autoritépublique en vue «d'in-
tervenir d'une manière ou d'une autre », non pas pour résoudre un
problème - le préfeta déclaré que l'ordonnancene pouvait pas ré-

soudre le problème - mais pour apaiser la presse et faire taire les
critiques de la population ou pour s'en attirer la sympathie, est-elle
«de quelque manière »une mesure arbitraire? »
L'Italie a notamment réponduen cestermes :

«La réponseest que, si la mesure a été prise seulementpour «in-
tervenir d'une manière ou d'une autre ...non pas pour résoudreun
problème ..maispour apaiserlapresse etfairetaire lescritiques dela
population ou pour s'en attirer la sympathie » «de quelque ma-
nière»,alors elle était probablement arbitraire.

Mais si, outre apaiser l'opinion publique, elle avait d'autres moti-
vations sincères et importantes, à savoir ((protégerI'intérêp tublic
général ..et l'ordre public)), elle n'est en aucune manière arbi-
traire.
Cette réponse soulèvela question de savoir siun acte unique et indivi-

siblede l'administration, qui contientà la fois des élémentsarbitraireset
des élémentsquine le sontpas, est arbitraire, ou siun acteofficielqui est
partiellement arbitraire dans sa motivation (sans parler de son applica-
tion, ce que je vais faire)peut être qualifié d'arbitraire.
Quels étaient donc les motivations de l'ordonnance de réquisition?
Etaient-elles, comme le soutient l'Italie, de protéger l'intérêt publicé-
néralet l'ordre public? Comme je viens de l'indiquer, le préfetn'a appa-
remment pas ajouté foi àces dires.Outre qu'il a déclaré queces facteurs
étaientréunis «de façontoutethéorique »,ilaconclu que l'ordonnance de
réquisitionn'a àvrai dire ni favoriséI'intérêptublic ni favoriséla protec-
tion de l'ordre public, ce qui n'étaye pasces motifs.
Il n'est pas douteux qu'un des buts essentiels de la réquisition était

d'empêcherI'ELSIde disperser et de liquider ses avoirs. Cela ressorttrèsperfectly plain bythe statements ofthe President of Sicilycited above (and
see paras. 28 and 34 of the Chamber's Judgment) as well as the Mayor's
letter of 9 May 1968which is explicit in referring to the dangers of the
"dismemberment" and "dismantlement" of ELSI. The requisition order
may well also have been designed to give an understandably concerned
and critical public opinionthe impression that the Mayor was attempting
"to do something", or, as the Prefect put it, "to intervene in one way or
another" so asto showthe Mayor's intent "to facethe problem", totake "a
step aimed more than anything else at bringing out his intention to tackle
the problem just the same". Butthose are hardlyjustifications which show
that the act was reasonable rather than unreasonable, judicious rather
than capricious. Toprevent ELSI from selling - and probably dispersing
in places other than Palermo - its assets may have seemedjustifiable to

the Mayor,who, in taking thisdecision, gave no signofbeing aware ofthe
existence of any rights which ELSI enjoyed under the FCN Treaty. It was
not, however, a measure which could re-open the plant, re-start full
production, and put ELSI's former workforce back to work, nor was it a
precondition of Sicily'scontinuing, as it did, to pay their salaries (as
Italy expressly conceded). Particularly in the context of the Treaty rights
and expectations set out in this opinion, can action designed to
prevent ELSI from selling its assets and repatriating any resultant capital
be seen asother than arbitrary? The Chamber rightly holds thatthe

"question of whether or not certain acts could constitute a breach of
the treaty right to be permitted to control and manage, is one which
must be appreciated in each case having regard to the meaning and
purpose of the FCN Treaty".

Shall not what is "arbitrary" under the Treaty equally be considered in
each case having regard to the meaning and purpose of the Treaty ?
It is significant that the Court of Appeal of Palermo attached import-

ance to the holding of the Prefect which appraised the Mayor's order as
one which was responsive to press criticism and "mainly" intended to
show his willingnessto intervene "in one wayor another". In characteriz-
ing that holding as "severe", and as "showing a typical case of excess of
power" on thepart ofthe Mayor "which .. .isadefect oflegitimacyonthe
part of the administrative act", theCourt of Appeal held :

"the Prefect's decree works ex tunc and not ex nunc and hence de-
prives the requisition ofthe assetsofthe appealingCompany, asper-
formed by the administration, of any justification, which is why, in
any case, there arises the problem of the damages that theCompany
may have suffered as a result ...it is quite evident tha- when theclairement des déclarationsdu présidentde la régionsicilienne citéesci-
dessus(voiraussilesparagraphes 28et34del'arrêd telaChambre)et dela
lettre du maire du 9 mai 1968dans laquelle il est explicitement question
des dangers de «démembrement» et de ((démantèlement» de I'ELSI.Il
se peut aussi que l'ordonnance de réquisition ait été destinàedonner à
l'opinion publique, dont l'inquiétude etles critiques sont compréhen-
sibles, l'impression que le maire tentaitde faire quelque chose», ou,
comme le préfetl'a dit, ((d'intervenir d'une manièreou d'une autre » de
façon à montrer l'intention du maire ((d'affronter le problème», de

prendre «une mesuredestinéeprincipalementàfaire ressortir son inten-
tion detraiter leproblèmetoutdemême ».Mais cene sontguèredesjusti-
fications qui montrent que l'acte était raisonnableet non déraisonnable,
judicieux et non capricieux. EmpêcherI'ELSIde vendre - et probable-
ment de disperser ses avoirs en dehors de Palerme - peut avoir semblé
justifiéau maire qui, en prenant sa décision,n'a nullement montréqu'il
était conscientde l'existencede droits dont1'ELSIjouissait en vertu du
traitéde 1948.Maiscefaisantlemaire neprenait pasune mesurequipou-
vait permettre de rouvrir l'usine,d'assurer la reprise de l'ensemblede la
production et de réembaucherles anciens ouvriers de l'ELSI, pas plus
qu'ilnemettaitcommecondition préalablequela Sicilecontinue,comme
ellel'afait, payer leurssalaires (commel'Italiel'aexpressémentadmis).
Dans lecadre~articulierdesdroits etex~ectativesdécoulantdu traité. tels

qu'ilssontexposésdans laprésente opinion,une mesuredestinée à empê-
cher1'ELSIdevendre sesavoirset derapatrier leproduit delaventepeut-
elleêtreconsidéré commeautre chosequ'arbitraire? La Chambre estime
à juste titre que la

((questionde savoir si certains actes pourraient ou non constituer
une violation du droit conventionnel d'êtreautoriséà contrôler età
gérerestune question quidoitêtreexaminéd eanschaque cascompte
tenu du sens et du but du traitéde 1948.

Ce qui est ((arbitraireau sens du traiténe doit-il pas être égalementexa-
minédans chaque cascompte tenu du sens et du but du traité?
Il est révélateque la cour d'appel de Palerme ait attachéde l'impor-
tance au fait que le préfet avait considéréque l'ordonnance du maire
répondait aux critiquesde la presse et qu'elle était((principalement »
destinée àmontrersondésird'intervenir d'une manière ou d'uneautre».
La cour d'appel, quia qualifié cetteconstatationde ((sévèr»et a dit que
le préfet avait constaté«un cas typique d'excèsde pouvoir))de la part
du maire «qui ..constitue un vice de légitimitde l'acte administratif»,
a déclaré:

((l'arrêtdu préfetprend effetex tuncetnon exnuncetprive doncla
réquisitiondesavoirsdelasociété appelante effectuéepar l'adminis-
tration detoutejustification, raison pour laquellesepose en tout cas
le problème desdommagesque la sociétépeut avoirsubisdu fait de
cettemesure ..ilestbien évidentque - lorsque lepréfet affirmeque Prefect pointed out that '. ..the ultimategoal ofthe requisitioncould

not have been attained in practice through the order itself and that
'... the order generically lacksthejuridical causethat couldjustify it
orrender it operative' as was then amply demonstrated, concluding
withthe severe findingthat '...the Mayor. .. resorted to requisition
as a step aimed more than anything elseat bringing out his intention
to tackle the problem just the same' - he is obviously showing a
typical case of excess of power which, as we know, is a defect of
legitimacy on the part of the administrative act ..." (Memorial of
the United States, Annex 81,pp. 13-14).

If a "typical case of excessof power" does not connote a classic case of
an arbitrary act,what does?
Theholding ofthe Court of Appeal isinstructive in a further respect as
well.The order of the Mayor concluded :"With a subsequent decree, the
indemnification to be paid to said Company for the requisition will be
established." As the Court of Appeal points out, such a subsequent
decree never was issued by the Mayor; no compensation was offered to
or paid over to ELSI for the requisition by the Italian administration.
The Court of Appeal held that :

"Now, apart from the consideration that the failure to determine
this indemnity (no authority has ever proceeded to do that although
this should have been done before the requisitioncame to an end), by
itself would have been enough to recognize the unlawfulness of the
requisition ...one cannot fail to stress the incongruency of denying
the Company - which had been subjected to this unlawful requisi-
tion - an indemnity which most certainly it would have been
awarded if this same action had been taken lawfully by the adminis-
tration." (Zbid.,p. 19.)

The Court is doubtless correct in holding that the Mayor's failure to pay
compensation forthe requisition compounded itsunlawfulness. But does
not the Mayor'sfailure to abide by his own decree suggestcapriciousness
in the process of requisition? It can hardly be seen as consistent with the
due process which isthe antithesis of what is arbitrary.

(ii) île unreasonable and capriciousnature of therequisition

It has, it is believed, been shown in the foregoing section that the
measure of requisition was unreasonable and capricious since, cumula-
tively:

- the legal bases on which the Mayor's order relied werejustified only in
theory ;
- the order wasincapable ofachievingitspurported purposes; ELETTRONICA SICULA (OP.DISS.SCHWEBEL) 114

lebut ultimedelaréquisitionn'aurait pu êtreatteinetnpratique par
le biais de cette ordonnance)) et que ((d'une manière généralei,l

manque par conséquentdans l'ordonnance la causejuridique pou-
vantlajustifier ou larendre opérante »,commecelaa ensuite été am-
plement démontré,pour conclure par cette constatation sévèreque
lemaire ..aeu recoursàlaréquisitionessentiellementpour démon-
trer savolonté d'essayerde résoudreleproblème» - il décrit mani-
festementun castypique d'excèsde pouvoir, excèsqui, commeon le
sait, constitue un vice de légitimitéde l'acte administratif.» (mé-
moire des Etats-Unis,annexe 81,p. 13-14).

Siun castypique d'excèsdepouvoir» n'estpasun casclassiqued'acte
arbitraire, qu'est-ce qui enest un?
La conclusion de la cour d'appel est aussiinstructiveà un autre égard.
L'ordonnance du maire setermine ainsi : Un décretultérieur fixeral'in-
demnité àverser àladitesociété autitre delaréquisition.»Coinmelacour
d'appel le relève,aucun décret ultérieurn'a été pris par lemaire; aucune

indemnisation n'aétéofferteou versée àI'ELSIpour laréquisitionopérée
par l'administration italienne.La cour d'appel a déclaré que :

Or, en dehors du fait que l'absence de fixation de cette indem-

nité (aucuneautoritén'ajamais procédé àcette détermination bien
qu'on eût dû le faire avant que la réquisitionne prenne fin) aurait
suffià démontrerl'illégitimitéde la réquisition..on ne saurait man-
quer desoulignerl'illogisme qu'ilya à refuserà lasociété - quiafait
l'objetde cette réquisitionillégitime- un dédommagement qui lui
aurait certainement été accordé si l'administration avait pris cette
mêmemesurelégitimement. ))(Zbid.,p. 19.)

La cour d'appel a sans doute raison de considérerque lefait que lemaire
n'a pas verséd'indemnisation pour la réquisitiona aggravél'illégitimité
de cettedernière.Maislefait que lemairen'apas respectésapropre déci-
sion ne fait-ilpas penser qu'ilya eu quelque chose de capricieux dans la
procédurederéquisition?Ilestdifficiledeconsidérercefaitcommecom-

patible avec une procédure régulière,laquelle estl'antithèsede ce qui est
arbitraire.

ii) Lecaractèredéraisonnableetcapricieuxdela réquisition

Jepense avoirdémontréd , ans lasectionquiprécède,que l'ordonnance
de réquisitionavaitun caractèredéraisonnableetcapricieux,tout à lafois
parce que :

- les bases légalessur lesquelles l'ordonnance du maire se fondait
n'étaientjustifiéesqu'etnhéorie;
- l'ordonnance étaitincapable de réaliserles buts qu'elle prétendait at-
teindre;- the order did notachieve itspurportedpurposes;
- the order, issued,as itspecified, "also" because "thelocalpress istaking
a verygreat interest in the situation and ... the press isbeing very criti-
cal toward the authorities and is accusingthem of indifference to this
serious civic problem", was in part designed to give an impression of
the Mayor confronting the problem "in one way or another", rather
than prescribing a measure which could have been responsive to the

problem ;
- the order accordingly was not simply unlawful but "a typical case of
excessofpower" ;
- a paramount purpose of the requisition was to prevent the liquidation
of ELSI's assets by ELSI, a purpose pursued without regard to treaty
obligations of contrary tenor (andthe Treaty'sobligations,Italy main-
tains,bound itnot onlyexternallybut wereself-executinginternally);

- the Mayortransgressed the terms of his own order by failing to issue a
decreefor indemnification forthe requisition and by failingto offer or

paythat indemnification.
By its nature, what is unreasonable or capricious is subject in a given
instanceto a range of appreciation; these are terms which, while having a
sense in customary international law, have no invariable, plain meaning
but which are capable of application onlyin the particular context of the

facts of a case. Given the facts ofthis case, itisconcluded, forthe reasons
stated, thatthe order of requisitionasmotivated,issued and implemented
was unreasonable and capricious and hence arbitrary.

(iii) ne processof appealdoes not necessarilyrendera measure otherwise
arbitrarynon-arbitrary

The weightiest reason advanced by the Chamber in support of its con-
clusion that the requisition was not arbitrary may be that it was reviewed
administratively and judicially. Those review processesin this case must
enjoy every presumption of being objective,not only, if principally, be-
cause they were processes of the application of the law of Italy through
Italian administrative and judicial procedures, but because, in the event,
they manifested objectivity, ruling in favour of ELSI's interests in prin-
ciple, even if in practice ELSI or its creditorsgained littlefinancial satis-

faction from them. To be sure, the Prefect's decision was seriously and
unjustifiably delayed, and that delay was materially prejudicial to the
interests of ELSI and itscreditors.Nevertheless itremains the factthat, in
this case, Italian administrative and judicial processesfunctioned. There
is attraction in the argument that, since-ELSI or its representative (the
trustee in bankruptcy) had access to processes of justice, and since the
procedures and results of that process cannot be seen as tantamount to
a denial of justice, that is the end of the matter, that, even if the order of ELETTRONICA SICULA (OP.DISS. SCHWEBEL) 115

- l'ordonnance n'apas réalisé lesbuts qu'elleprétendaitatteindre;
- l'ordonnance, qui avait été prise, selon ses propres termes, «aussi»
parce que la presselocales'intéressevivement à la situation et qu'elle

esttrèscritique àl'égard desautoritésqu'elleaccused'indifférenceface
à ce problème grave pour la collectivité», étaiten partie destinéeà
donner l'impression que le mairetentait de traiter le problème ((d'une
manièreoud'une autre »etnon qu'ilprenait une mesuresusceptible de
résoudreleproblème ;
- en conséquence, l'ordonnance n'était pas seulement illégitime mais
constituait un castypique d'excèsdepouvoir D ;
- l'un desbuts essentiels de laréquisition étaitd'empêcher la liquidation
par I'ELSI de ses avoirs,but qui faisait fi des obligations convention-

nelles qui s'yopposaient (l'Italie a soutenu que les obligations décou-
lant du traitéde 1948non seulementla liaient sur le plan externemais
qu'ellesétaientd'application directedansl'ordre interne);
- lemaire a contrevenuauxtermes de sonordonnance en ne prenant pas
de décretpour fixerl'indemnitéau titre de la réquisitionet enn'offrant
pasouenneversantpascetteindemnité.

De par sanature, la notion de cequi estdéraisonnable ou capricieux se
prête à toute une série d'appréciationsdans un cas donné: ce sont des
termes qui, quoique ayant un sensen droit international coutumier,n'ont
pas une significationordinaire etinvariable et quinepeuvent s'appliquer
que dans le contexte particulier des faits d'une affaire. Etant donnéles

faits de la présente affaire,je conclus, pour les raisons que j'ai données,
quel'ordonnance de réquisition,telle qu'ellea étémotivée,prise et appli-
quéeavait un caractère déraisonnable et capricieux et qu'elle étaitdonc
arbitraire.

iii)L'exercicedesvoiesderecoursnerendpasnécessairemenn tonarbitraire
unemesurequiétaitarbitraire

Le plus important motif avancépar la Chambre pour conclure que la
réquisition n'était pas arbitraireest peut-être quecelle-ci a fait l'objet de
recours administratifs etjudiciaires.Il y a tout lieu de présumerque l'exa-
men de ces recours a étéobjectif, non seulement - voire principale-
ment - parce qu'il s'agissait de l'application du droit italien par des
organesadministratifs etjudiciaires italiens, mais aussi parce que,en fait,

ces organes ont fait preuve d'objectivité en se prononçant en principe en
faveurdesintérêts de l'ELSI,mêmesienpratique 1'ELSIou sescréanciers
n'en n'ont que peu bénéficié surle plan financier. Il est certain que la
décisiondu préfetestintervenue avecun retard important etinjustifiable,
et ceretard a matériellementportéatteinteauxintérêtsde 17ELSIet de ses
créanciers. Il n'en demeure pas moins qu'en l'occurrence les procédures
administratives etjudiciaires italiennes ont fonctionné. Un argument est
séduisant: celui selon lequel, puisque I'ELSI ou son représentant (le

syndic de faillite) ont eu accès à la justice et puisque les procédures et
l'issue des recours ne peuvent être considérées comme équivalant à unrequisition was arbitrary and henceinitiallyengaged Italy'sresponsibility
under the Treaty, that responsibility was never consummated by reason
of the fact that, in the end,LSI's case was dealt with by Italy's interna1
processes. Indeed, the conclusion that ELSI's case was dealt with is

critical to the Chamber's conclusion in this case that the requirement of
the exhaustion of localremedies was fulfilled.

Substantial as these considerations may be, 1 do not find them con-
vincing, for reasons which are best explained in the light of the Inter-
national Law Commission'sproposals for codification ofthe law of State
responsibility.
Articles20and 21ofthe Commission'sDraftArticles on State Respon-
sibilityprovide as follows :

"Article20. Breachofaninternationalobligation requiringthe
adoption ofaparticularcourseofconduct
Thereis abreach by aStateofaninternational obligationrequiring
it to adopt a particular course of conduct when the conduct of that
State is not in conformity with that required of it by that obligation.

Article21. Breach of aninternationalobligationrequiringthe
achievementofaspecifiedresult
1. There is a breach by a State of an international obligation re-
quiring itto achieve, by means ofits own choice, a specifiedresultif,
bythe conduct adopted,the State does notachieve the resultrequired
of it by that obligation.
2. When theconduct oftheStatehascreated asituationnot incon-
formity with the result required of it by an international obligation,
but the obligation allows that this or an equivalentresult may never-

theless be achieved by subsequent conduct of the State, there is a
breach of the obligation only if the Statealso fails by its subsequent
conduct to achievethe resultrequired of itby that obligation." (Year-
book oftheInternational Law Commission1 ,977,Vol. II, Part Two,
p. 11.)
The Commentary to these articles explains that Article 20concernsin-
ternational obligations which require the State to perform or to refrain
from a specifically determined action; these obligations are sometimes

called obligations "of conduct" or obligations "of means". Such obliga-
tions are tobe contrasted withthe obligations "of result" described in Ar-
ticle21.What distinguishes the firsttype of obligationfrom the second is
not that obligations "of conduct" or "of means" do not have a particular
object or result, but that their object or result must be achieved through
action, conduct or means "specificallydetermined" by the international
obligation itself, which is not true of obligations "of result" (ibid.,
pp. 13-14).If a State fails to perform or to refrain from a specifically ELETTRONICA SICULA (OP.DISS.SCHWEBEL) 116

dénidejustice, laquestion estainsiréglée;à quoi ilestajoutéque,mêmesi
l'ordonnance de réquisition étaitarbitraireet engageait donc initialement
la responsabilitéde l'Italie en vertu du traité, cette responsabilitén'aja-
maisété encourue puisque, endéfinitive,lacause de 1'ELSIaété entendue
par les juridictions internes italiennes. A vrai dire, la conclusion selon
laquelle la cause de1'ELSIa étéentendue est essentielle pour permettre
à la Chambre de conclure en l'espèceque l'exigencede l'épuisementdes
recours internes a été satisfaite.

Quel que puisse êtrelepoids de cesconsidérations,je ne lestrouve pas
convaincantes, pour des raisons dont leprojet de codification du droit de
la responsabilité des Etats rédigépar la Commission du droit interna-
tional fournitla meilleure explication.
Les articles 20 et 21 du projet d'articles sur la responsabilité des Etats
adoptépar la Commission disposent ce qui suit:

((Article20.- Violationd'uneobligationinternationalreequérant
d'adopteruncomportement spécgiquemend téterminé
Ilya violation par un Etat d'une obligationinternationale lerequé-
rant d'adopter un comportement spécifiquement déterminé lorsque
le comportement de cet Etat n'estpas conforme à celuirequis de lui
par cetteobligation.

Article21. - Violationd'uneobligationinternationar equérant
d'assurerunrésultat déterminé
1. Il y a violation par un Etat d'une obligation internationale le

requérant d'assurer, par un moyen de son choix, un résultat déter-
miné si,par le comportement adopté, 1'Etatn'assure pas le résultat
requis de lui par cette obligation.
2. Lorsqu'un comportement de 1'Etata crééune situation non
conforme au résultat requisde lui par une obligation internationale,
maisqu'il ressort del'obligation que cerésultat ouun résultat équiva-
lent peut néanmoins être acquispar un comportement ultérieurde
l'Etat, iln'ya violation de l'obligation que si1'Etatmanque aussi par
son cornoortement ultérieur à assurer le résultatreauis de lui Dar
cette obligation. »(Annuairede la Commissiondudroit international,
1977,vol. II, deuxièmepartie, p. 12.)

Il estexpliqué,dans lecommentaire relatifàcesarticles, que l'article 20
vise des obligations internationalesqui s'adressenà 1'Etatpour requérir
de lui qu'il exerce une activité spécifiquement déterminée ou qu'il s'en
abstienne; ces obligations, est-il précisé,sont parfois qualifiées d'obli-

gations «de comportement » ou «de moyens». Elles doivent être dis-
tinguées des obligations dites «de résultat» viséesà l'article 21. Ce qui
distingue le premier type d'obligations du second, ce n'est pas que les
obligations «de comportement » ou «de moyens » ne visent pas un but
ou un résultatdonné,mais qu'un tel but ou résultat doive être atteintpar
des activités,comportements ou moyens ((spécifiquement déterminés »
par l'obligation internationale elle-même,ce quin'est pas le cas pour lesdetermined action, that course of conduct of itself definitively gives rise
to its international responsibility.

1sthe obligation undertaken by the parties to the SupplementaryAgree-
ment not to subject corporations of either partyto "arbitrary or discrimi-
natory measures" within the territories of the other "resulting particularly
in" - but not exclusively in - the detailed results set out in subpara-
graphs (a)and (b)of Article 1an obligation of conduct oran obligation of
result?
Theparticular objects ofthe obligation not to subject such corporations
to arbitrary or discriminatory measures are very specificallyset out. But
theparticular means of achieving these objects are not. Thus, in terms of

the analysis ofthe Commission, the obligation of Article 1would seemto
be an obligationnot of means but of result, asinternational treaty obliga-
tions concerning the protection of aliens and their interests normally are.
Nevertheless, it does not followinthe currentcase that Italy isabsolved of
its arbitrary treatment of ELSI and the interests of its shareholders
in ELSI by reason of the administrative and judicial proceedings which
followed the requisition.

1so conclude because, to pursue the terminology of the Draft Articles
of the Commission :

"There isabreach by a State of an international obligation requir-
ing it to achieve, by means of its own choice, a specified result, if,by
the conductadopted, the State does not achievethe result required of
it by that obligation."

In the current case, Italy did not achieve the specified result, namely,
relieving ELSI of the effects of the arbitrary measure of requisition. It
did not achievethe specified result ingeneral, orin respect ofthe verypar-
ticular objectsset outin subparagraphs (a)and (b)of Article 1.
The Commission's Draft Articles indicate that it is not enough forthe
offendingaction of a State to be reviewed administratively andjudicially.
That action must be fully corrected, "the result required" must "be
achieved". Can itbe maintained that the measure of requisition imposed
upon ELSI was fully corrected by Italian administrative and judicial
proceedings, that the object of not subjecting ELSI to such an arbitrary
measure was subsequently though not initially achieved?
The Prefect annulled the order ofrequisition. Butthe Prefectdidnot do
so for some 16months after its imposition. Italy in effect has maintained

that it isormal for a Prefect not to open his "in" box for 16months, that
ELSI didnot stamp itsappeal "urgent", and that there isa process to acti-
vate an inactive Prefectwhich ELSI didnot pursue. 1sharethe Chamber's
view that these arguments are unpersuasive. There was no convincing
demonstrationthat such lassitude wasthenorm; evidence oforders ofreq- ELETTRONICA SICULA (OP.DISS.SCHWEBEL) 117

obligationsdites «de résultat»(Annuairedela Commissiondu droitinter-
national, 1977,vol. II, deuxième partie, p. 15). Siun Etat n'exerce pas
une activitéspécifiquementdéterminéeosu 'il s'enabstient, cecomporte-

ment suffitsansaucun doute àfairenaître laresponsabilitéinternationale
de cet Etat.
L'obligation, assuméepar chacune des parties àl'accord complémen-
taire, de ne pas soumettre sur son territoire lessociése l'autrepartieà
des ((mesures arbitraires ou discriminatoires » «ayant notamment pour
effet» - mais non exclusivement - les résultats détaillés énoncés aux
clauses a) et b)de l'article premier est-elle une obligation de comporte-
ment ou une obligation de résultat?
Les objectifs particuliers de l'obligation de ne pas soumettre ces so-
ciétésà desmesuresarbitraires ou discriminatoiressonténoncésdefaçon

très précise. Mais lesmoyens particuliers d'atteindre ces objectifs ne le
sontpas. D'aprèslecommentaire dela Commission,l'obligation imposée
par l'article premier semble êtreune obligation non de moyens mais de
résultat,commelesontnormalement lesobligationsconventionnelles in-
ternationales relativeà la protection des étrangerset de leurs intérêt.1
n'en découlecependant pas qu'en l'espècel'Italie ne répondpas de la
façon arbitraire dont ellea traitéI'ELSIet lesintérêtse sesactionnaires
dans 1'ELSIen raison des procédures administrativeset judiciaires qui
ont suivi laréquisition.

Telle est ma conclusion puisque, pour reprendre les termes du projet
d'articlesde la Commission :
«Il y a violation par un Etat d'une obligationinternationale le re-
quérantd'assurer, parun moyen de son choix,un résultat déterminé
si,par le comportement adopté, 1'Etatn'assurepas le résultat requis

de lui par cetteobligation.
Enl'espèce,l'Italien'apas assurélerésultatdéterminé à,savoirsoustraire
I'ELSI aux effets de la mesure arbitraire de réquisition.Elle n'a pas as-
suréce résultat,ni de façon généralenidu point de vue des objectifstrès

précis énoncés aux clausea s) et b)de l'article premier.
Le projet d'articles de la Commission indique qu'il ne suffit pas que
l'action dommageablede 1'Etatsoitsoumiseauxjuridictions administra-
tives etjudiciaires. Il faut y remédier entièremen: «le résultat requi))
doit être«assuré». Peut-on dire que les recours administratifs et judi-
ciairesitaliensont entièrementremédié àla réquisitionimposée àI'ELSI,
quel'objectif,quiétaitdenepas soumettreI'ELSI àune tellemesurearbi-
traire et qui n'apas été atteint initialementl,'apar la suite?
Lepréfetaannulél'ordonnance de réquisition,maisprèsde seizemois

aprèsqu'elleeutétéprise. L'Italie a bien soutenu qu'il estnormal que des
dossiersd'un préfet restenten souffrance pendant seizemois,que 1'ELSI
n'avaitpasapposéletimbre «urgent »sursonrecours et qu'ilexistaitune
procédure,que I'ELSI n'apas employée,pour fairepression sur un préfet
inactif, mais j'estime comme la Chambre que ces arguments ne sont pas
convaincants. Il n'apas été démontrd ée façon convaincante qu'une telleuisition being overturned in days, not months, was introduced. ELSI's
appeal was instinct with urgency, by its nature; and ELSI's situation
and position, a principal pre-occupation of the local public and press,
must have been known tothe Prefect of Palermo. Bythe statutory time at
which the Prefect could have been activated, ELSI was in bankruptcy
and no longer ableto invoke that procedure.

The Prefect's decision was important for the reasons which appear in
the Chamber's Judgment and this opinion. But coming as late as it did, it
could not and did not provide the result which Italy's obligation not to
subject ELSI to arbitrary measures was designed to achieve. Bythe time
16months had elapsed, ELSI had long since been effectivelybarred from

collecting 100percent ofitsaccounts receivable, receivingcash-flow sup-
port from Raytheon, completing work-in-progress and selling that work
and inventory, and soliciting the sale of and showing and selling off its
plant and equipment with aprofessional knowledge of its assets and their
attraction to buyers which a trustee in bankruptcy could notbe expected
to possess. The Prefect would have had to have acted almostimmediately
- as other Prefects in some other requisition cases had been shown to
have acted - if the requisition was to have been lifted before ELSI was
forcedintobankruptcy. But he did not, and, inthe light ofthe predictions
or threats made to ELSI and Raytheon by the President of Sicily (see
para. 34ofthe Chamber's Judgment), ELSI may have had scantreason to
be confidentthat he would.

The Commentary of the International Law Commission cites a case in
which ithas been held that "the required result could be regarded as frus-
trated as soon as the law authorizing expropriation was enacted" be-
cause "the enactment of the law seriously reduced the commercial value
of the foreigner's property" (loc. cit., p. 26). In the light of the effects
just recounted of the requisition on ELSI's situation, may it not similarly
be concluded that the required result of holding ELSI free of arbitrary
measures could be regarded as definitively frustrated assoon asthe order
of requisition was appliedto itbecause itsapplication "seriously reduced
the commercial value" of Raytheon's interests inELSI ?TheCommentary
makesclear that, in order for a Stateto beabsolved ofabreach ofan inter-
national obligation of result, of a breach which has begun or only been
adumbrated,the required result must not have become "finally unattain-

ablein fact by reason ofthat action or omission" which isprovisionally in
breach (ibid.,p.28).For the reasonsjust setout, itmaybe doubted whether
the result ofmaking ELSI whole, offullyremovingthe effectsofthe requi-
sition, was in fact feasible.inertie étaitnormale; on a produit la preuve que des ordonnances de ré-
quisitionavaientété rapportéesdansundélaidequelquesjours, et non de
quelques mois.De par sanature, lerecoursintroduit par I'ELSIportait la
marque de l'urgence; la situation de I'ELSI,qui préoccupaitvivementla
population et la presse locales,devait être connuedu préfetde Palerme.
Au moment où le préfetaurait pu être légalemenm t is en demeure de se
prononcer, I'ELSIavait fait faillite et ne pouvait plus invoquer cette pro-
cédure.
Pour les motifs exposésdans l'arrêd te la Chambre et dans la présente
opinion, la décisiondu préfet était importante.Mais,tardive comme elle
était,elle ne pouvait avoir et elle n'a pas eu le résultatque l'obligation

assuméepar l'Italiede ne pas soumettre I'ELSI à des mesures arbitraires
était destinéeàavoir. Seize moiss'étaient écoulés eItELSIavait depuis
longtemps été mise dans l'impossibilitématériellede percevoir l'intégra-
litéde ses effetà recouvrer, de recevoir de Raytheon un appui en liqui-
dités, d'acheverles fabrications en cours et de vendre ces fabrications et
les stocks; elle n'avaitpu ni mettre en vente, ni faire visiter etvendre son
usine etl'équipement,ellequiétaitbienplacée pour savoirenquoiconsis-
taient ses avoirs et quel intérêitls présentaientpour des acheteurs, ce
qu'un syndicde faillite n'était pascensé savoir.Pour que la réquisition
soit levéeavant que I'ELSIne soit acculée àla faillite, il aurait fallu que
le préfetagisse presque immédiatement,comme il a étédémontréque
d'autres préfets l'ont faitpour d'autres réquisitions. Maisle préfet ne
l'apas fait et, comptetenu des prédictionsdu présidentde la région sici-

lienneou desesmenacescontre I'ELSIetRaytheon(voirleparagraphe 34
de l'arrêtde la Chambre), il se peut que I'ELSIn'ait guère eude raisons
de penser qu'ille ferait.
Dans son commentaire. la Commission du droit international cite un
casdans lequel ila étéugk que «le résultat requispourrait êtreconsidéré
commemanqué dèsl'adoptionde laloiautorisant l'expropriation »étant
donnéqu'à la suitede «l'adoption de cetteloi,lavaleur commerciale des
biensdel'étrangersetrouveraitgravementtouchée »(loc. citp.27).Au vu
des effets de la réquisitionsur la situation de I'ELSI,qui viennent d'être
exposés,ne pourrait-onpas conclure de mêmeque le résultat requisde
l'obligation d'épargner à I'ELSI des mesures arbitraires pourrait être
considérécommedéfinitivementmanqué dè qse l'ordonnance de réqui-
sitionlui a étéappliquée ,tantdonnéqu'à la suitede son application «la
valeur commerciale»des intérêtd se Raytheon dans I'ELSIa été «grave-

menttouchée»?Ilressort clairement dudit commentaireque, pour qu'un
Etat ne répondepas d'une violation d'une obligation internationale de
résultat, oud'une violation qui a débuté oun'a seulement étéqu'ébau-
chée,ilfaut quelerésultatexigénesoitpasdevenu «enfaitdéfinitivement
irréalisableà la suite de l'action ou de l'omission mentionnée)) qui
constitue provisoirement une violation (ibid.,p. 30). Pour les raisons qui
viennent d'être exposées,on peud touter qu'ilait étématériellementpos-
sibled'assurer réparationà 1'ELSIet d'éliminer entièremenltes effets de
la réquisition. In order for the obligation of result tobe metin the current case, Italian
administrative or judicial recourse would, in the Commission's words,
have had "fully to achievethe required result bynew conduct which elimi-
nates entirely and ab initithe incompatible situation created by its previ-
ous conduct" (loc.citp ..,28).Alternatively, it could furnish an equivalent
result, as by rendering "full and complete compensation" forthe breach
(ibid., p. 29). It remains to be considered whether the judgments of the
Court of Palermo or the Court of Appeal of Palermo provided full and
complete compensation.
In the proceedings before the Court of Palermo, the trustee in bank-
ruptcy maintained that ELSI had been obliged to file for bankruptcy by
reason ofthe situation created by the order of requisition;that, even after
bankruptcy had been declared, the trusteecould nottake possession ofthe
plant and equipment due to the order which remained in effect until

30 September 1968,which caused "unimaginable damages forthe bank-
rupt Companyand, therefore, for the creditors"; that the order of requisi-
tion had been declared illegal by the Prefect; and that the Ministry of In-
terior and the Mayor of Palermo should be condemned to pay damages
to the bankrupt estate of ELSI due to the illegal occupation of the plant.
Such damages were claimed to be the considerable decrease in the value
ofthe plant and itsequipment which resulted from the differencebetween
bookvalue as ofthe date ofthe bankruptcy andthe evaluation ofthe plant
and equipment made by the court appraiser immediately after the
six-month period of requisition had elapsed, Le.,2,395,561,600lire plus
interest.

The Court of Palermo,afterexamining evidence ofthe financialcondi-
tion of ELSI on the eveof the requisition, and observing that bythat date

ELSI's plant was for al1practical purposes no longer in operation, con-
cluded that the connection between the company's bankruptcy and the
requisition was unfounded. It rejected the claim that damage was evi-
denced by the difference in evaluations described, or arose from the lack
of access to the plant for the period of the requisition, since the bank-
ruptcy was due to other, much more relevant causes;the evaluations on
the creditside of the balance sheet were "relative"; and it was not proved
that any damage flowed from lack of access to the plant by the trustee or
from theoccupation of the plant by workers or from negligent custody of
the plant.That isto Say,the Court of Palermoprovided no compensation
whatever for the requisition, because of its finding that it caused no
damage whatever to ELSI.

The substantialjudgment of the Court of Appeal of Palermo has been

largely dealt withby the Chamber's Judgment and inthis opinion. On the
question of damages, the Court held that:

"as regards the damages consisting inthe factthat the order triggered
the Company's bankruptcy, the negative conclusion arrived atbythe Pour que l'obligationde résultatsoitexécutéeen l'espèce, ilaurait fallu
que les recours administratifs oujudiciaires aient, selon les termes de la
Commission,((réalisépleinement,par un nouveau comportement, le ré-
sultat[quel'Etat]esttenu d'atteindre, enéliminantentièrementetabinitio
la situation incompatiblecrééepar lecomportement précédent»(loc.cit.,
p. 30),cet Etat pouvant aussi obtenir un résultat équival, ar exemple
en assurant «pleine etentièreréparation»à la suite de laviolation (ibid.).
Ilresteàvoir silesdécisionsdutribunal de Palermeou dela cour d'appel

de Palermeont assurépleineet entièreréparation.
Dans l'instanceintroduite devant le tribunal de Palerme,le syndic de
failliteasoutenu que1'ELSIavaitétéobligédee demander samiseenfail-
lite en raison de la situation crpar l'ordonnance de réquisition;que
même aprèsquelafailliteeutétédéclaréle e,syndicn'avaitpaspu prendre
possessiondel'usineetdel'équipementenraison de l'ordonnance qui est
restéeen vigueurjusqu'au 30septembre 1968,causant «un tort inimagi-
nable àla sociétéen failliet,par voiede conséquence,aux créanciers » ;
que l'ordonnance deréquisitionavaitétédéclaré illeégalepar lepréfet;et
que le ministère de l'intérieur et le maire de Palerme devaient être
condamnés àverser des dommages et intérêt s la masse de la faillite de
I'ELSIen raison de l'occupation illégalede l'établissement.Il a été sou-

tenu que ces dommages et intérêts étaient constitué psr la diminution
considérablede la valeur de l'usineet de son équipement, diminutionré-
sultant de la différenceentre la valeur comptabàela date de la faillite et
l'évaluationde l'usine etde l'équipement faitepar lecommissairepriseur
dutribunal immédiatementaprèsl'expirationdelapériodedesixmoisde
réquisition,soitun montant de 2395 561600lires,augmenté desintérêts.
Le tribunal de Palerme, aprèsavoir examinéles preuves relatives àla
situation financière de 1'ELSà la veille de la réquisitionet avoir relevé
qu'à cettedate l'usine de 1'ELSIn'était pratiquement plus enservice,a
conclu qu'on n'était pasfondé à établir un lien entre la faillitede la so-
ciété elta réquisition.l a rejeté l'argument selon lequelles dommages
seraient prouvéspar la différence entreles valeurs attribuées ouqu'ils
résultaientdu fait que l'usine n'était pas accessiblependant la période
de la réquisition,la failliteayant des causesbien différenteset beaucoup

plus importantes; il a ajoutéque les estimations figurant à l'actif du
bilan étaient ((relatives qu'iln'avait pas étéprouvéque lesdommages
subis étaientattribuablessoit au faitque lesyndicn'avaitpas pu accéderà
l'usine soià l'occupation de l'usine par les travailleurs àuun défaut
de surveillance de l'usine. Ce qui veut dire que le tribunal de Palerme
n'a accordéaucune indemnisation pour la réquisition, ayant concluque
celle-cin'avaitcauséaucun dommage à I'ELSI.
L'important arrêtde la cour d'appel de Palerme a étéanalyséde façon
approfondie dansl'arrêdt elaChambre etdans laprésente opinion. Surla
question des dommages etintérêts,la cour d'appea ljugéque:

«en ce qui concerne les dommages consistant dans le fait que l'or-

donnance a provoqué la faillitede la sociétél,a conclusion négative 120 ELETTRONICA SICULA (DISS O.P.SCHWEBEL)

Court [of Palermo] is amply and convincinglymotivated ...in any

case. ..there isno proof whatsoeverasto the damages incurred from
that viewpoint".

The Court of Appeal attributed decisive effect to what it found to be the
prior insolvency of ELSI and held that "it is then certain that the dam-
ages" claimed, since "they are connected to the bankruptcy", could not
be considered to exist.There was no proof of the reliability of the figures
shown in the balance sheet, nor proof that the reduction invalueclaimed
by the trustee was caused by the requisition. No expert could, in 1974,
establish the actual value of the plant and equipment on the date of the
order of requisition.
Nevertheless, as noted above, the Court of Appeal foundtheappeal to
be justified "as regards the damages derivable from the operational un-
availability ofthe installation,plant, and equipmentwhichare the subject
of the requisition order ...". It held that it was indisputable that, if the
order of requisitionhad been lawful, it would have required the payment
of an indemnity ;it wasthe moreincongruousnot to pay an indemnityfor
an unlawfultakeover.Deprivation ofthe enjoyment of an asset isan eco-

nomicsacrifice which entails indemnification if lawfully carried out, and
restitution ofdamage is required when it is unlawful.The requisitioning
authority was responsible at least forthe payment of the economic value
ofitspossession oftherequisitionedproperty. Moreover,"the delayin the
process of taking possession by the receivers delayed the liquidation
operationsand hence the realization ofthe value oftherequisitioned prop-
erty to the evident damage" of the bankruptcy assets. The Court, "in
the absence of proof as to any greater damage", equated damage to the
amount of the interest at the rate of 5 per cent per year on the value of
the requisitioned property, as that value had been determined by the
evaluator appointed by the trustee, a sum which cameto 114,014,711lire,
- plus interest to run fromthe date on which the requisition expired.

May the measure and amount of compensation awarded by the Court
of Appeal of Palermo be viewed as "full and complete compensation"
which provides an equivalentresult to ELSI's never havingbeen requisi-
tioned? Surelynot.Whether or nottherequisition wasthe cause of ELSI's

bankruptcy - indeed,accepting that itwasnot "the" cause - the requisi-
tion inflicted uncompensated damage upon ELSI and its creditors,
including (a) ELSI's practical inability to sell its accounts receivable for
100per cent of their face value; (6)ELSI's actual inability to complete
itswork-in-progress and sellthat work and itsinventory for their value (in
the event,work-in-progresswassold for materially less than its appraised
value); and (c)ELSI's actual inability to arrange the showing and sale
of its plant, product lines and equipment and its inability to bring to
bear its knowledge of its assets and of the industry so as to raise the
maximum return fromthe sale of those assets (includingintangible assets). ELETTRONICA SICULA (OP.DISS.SCHWEBEL) 120

àlaquelle estparvenu le tribunal [dePalerme]est amplement motivée
de façon convaincante ..en tout cas..il n'ya aucune preuve que de
tels dommagesaient été subis àcet égard».

La cour d'appel a attribué un effet déterminantà ce qu'elle a considéré

comme l'état d'insolvabilitéantérieur de I'ELSI et elle a jugéqu'«il est
donc certain »qu'on ne saurait considérerqu'ilpuisse y avoirdes «dom-
mages et intérêts puisqueles dommages sont liés à la faillite)). Rien ne
prouvait la fiabilité des chiffresfigurant au bilan, ni que la dépréciation
invoquéepar lesyndicavaitétécausée par laréquisition.Aucunexpert ne
pouvait, en 1974,établirla valeurréellede l'usine et de l'équipementla
datede l'ordonnance de réquisition.
Comme je l'ai relevéplus haut, la cour d'appel a néanmoinsjugéque
l'appel étaitjustifién ce quiconcerne lesdommagesdécoulant de l'im-
possibilité d'utiliser l'usine,les installations et l'équipement quiont fait

l'objet de l'ordonnance de réquisition.» Elle a jugé qu'ilétait incontes-
table que, sil'ordonnance de réquisitionavaitétlégale, elleaurait néces-
sitéle versementd'une indemnité et qu'il étaitd'autant plus illogique de
ne pas verser une indemnitépour une réquisitionillégale.La privation de
lajouissance d'un bien constitueun sacrificeéconomiquequiimplique le
versement d'une indemnisation si elle est effectuée légalement,et une
compensation des dommages est requise lorsqu'elle est illégale. L'auto-
ritéayantopérélaréquisitios nedevait au moins de payerlavaleurécono-
mique de la possessionqu'elle avaitdesbiensréquisitionnés.De surcroît,
«le fait que le syndic a pris possession tardivement a retardé toutes les
opérations de liquidation et, partant, la réalisation des biens réquisi-

tionnés,cequi a entraînéun dommageévident »pour la masse descréan-
ciers. La cour d'appel,«en l'absence de preuves de dommages plus im-
portants »,a assimiléle dommage àun intérêtde 5pour cent par ansur la
valeur de la propriétéréquisitionnée,telle que cettevaleur avaitété fixée
par l'expert nommépar le syndic, soit une somme qui s'est élevée à
114014711lires,plus lesintérêt scompter de ladate àlaquellelaréquisi-
tion a pris fin.
Le montant de l'indemnité accordéepar la cour d'appel de Palerme et
sa mesurepeuvent-ilsêtre considéréscommeassurantune «pleine et en-
tière réparation,aboutissant au mêmerésultat quesi I'ELSI n'avaitja-
mais étéréquisitionnée? Sûrementpas.Que laréquisition aitété ou non à
l'originedela faillite deI'ELS- etmêmeenadmettant qu'elle n'enapas

été«la»cause - la réquisitiona faitsubià I'ELSIet à ses créanciersun
préjudice non réparé, quicomprend: a) le fait que 1'ELSIn'a pas étéà
mêmede céderses créances à recouvrer à 100pour cent de leur valeur
nominale; b)le fait que 17ELSIn'a pas étà mêmed'achever les fabrica-
tionsencours etdelesvendre,ainsiqueses stocks, àleurvaleur(enfait, les
fabrications en cours ont évendues àun prix sensiblementinférieur àla
valeur àlaquelle ellesavaientétéestimées)e;t c)le fait que I'ELSI n'apas
été àmêmede prendre des dispositions pour faire visiter et vendre son
usine, seslignes de production et son équipement etle fait qu'ellen'apasItcannot be supposed that the sale ofthe company'sassetsin bankruptcy
proceedings could have realized the full value of ELSI's assets. That
would have been unlikely in any bankruptcy sale; it is the less likelyto
have been the case in the circumstances of the sale as it eventuallytook
place. For the reasons just stated, theamount awarded by the Court of
Appeal of Palermo cannot have filled the large gap between the amount
realizedin the bankruptcy proceedings and the value of ELSI'sassets.

It may ofcoursebe maintained that, evenin the absence ofthe requisi-
tion, ELSI would havegonebankrupt. Thatindeed isthe essentialconclu-
sion of the Italian courts and of thishamber. But this conclusion does

nottake account ofthe fact - or ofwhat isbelievedto havebeenshownin
this opinion to be the fact that, ifthe requisition had not been imposed
when itwasimposed, ELSI would havebeenenabledto realizematerially
morefrom its assetsthan infact wasrealized, evenif,at somepoint, ELSI
mighthavebeen obliged to go into bankruptcy.
It accordingly followsthatELSI wasnot placed in the position itwould
have been in had therebeen no requisition.The equivalentresult was not
attained by Italian administrative and judicial processes, however esti-
mablethey were. Thus, in my view,those processes do not absolve Italy
of having committed an arbitrary act within the meaning of the Treaty's
Supplementary Agreement.

(Signed Stephen M. SCHWEBEL. ELETTRONICA SICULA (OP.DISS. SCHWEBEL) 121

pu, elle qui savait en quoi consistaient ses biens et connaissait cette
branche d'activité,tirerlemaximum delavente de cesavoirs (etdes avoirs
incorporels). Onnepeut imaginer que leproduit delaventedes biens dela
sociétédans une procédure de faillite puisse avoir atteintla valeur totale

du patrimoine de I'ELSI. Cela aurait été improbables'agissant d'une
vente organiséedans lecadre d'une faillite;etilestencoremoins probable
que cela ait pu êtrelecas dans les circonstances dans lesquelles la vente a
finalement eu lieu. Pour les raisons queje viens d'exposer, lemontant ac-
cordépar lacour d'appel de Palermenepeut avoircomblélagrande diffé-
rence entre leproduit de la vente organiséedanslaprocédure de faillite et
la valeur des avoirs de I'ELSI.
On peut certes soutenir que, mêmeen l'absence de réquisition,I'ELSI
aurait fait faillite. Telle est d'ailleurs la conclusion essentielle desjuridic-
tions italiennes et de la Chambre. Mais cette conclusion ne tient pas
compte du fait - j'espèreavoir démontré dans laprésenteopinion que

c'estun fait- que, sila réquisitionn'avaitpas étimposéeau moment où
elle l'a ét,'ELSI aurait été àmême d'obtenirune somme sensiblement
plus élevéede ses avoirs que ce qui a en fait étéobtenu, mêmesi, à un
moment donné,I'ELSIaurait pu être acculée à la faillite.
Il s'ensuitque I'ELSI n'apas étéplacéedans lasituation qui aurait étéla
sienne s'iln'y avait pas eu de réquisition.Le résultat équivalent n'apas
été assuré par les procédures administratives et judiciaires italiennes, si
dignes d'estime soient-elles,si bien qu'à mon avisl'Italie reste coupable
d'avoir commisun actearbitraire au sens de l'accord complétant letraité.

(Signé)Stephen M. SCHWEBEL.

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Opinion dissidente de M. Schwebel (traduction)

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